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i%ry»^'-^'^
SEMAINE
D'ETHNOLOGIE RELIGIEUSE
Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation !
réservés pour tous pays. [
SEMAINE
D'ETHXOLOGIE RELKiIEl SE
COMPTE RENDU ANALYTIQUE
DE LA
IIP SESSION
tenue à TILBOURG, (6»14 Sept. 1922)
MAISON St AUGUSTIN
7. Rue des Augustins, ENGHIEN
belgique
MISSIONSHAUSStGABRIEU
MOEDLING BEI WIEN
OESTERREICH
1923
F
Lettre de Son Eminence le Cardinal MERCIER
au Secrétaire adjoint
Archevêché de Malines
Le 20 février 1923.
Mon Révérend Père,
Ainsi que j'ai déjà eu U plaisir de vous l'écrire, je vous accorde 1res
volontiers le « Nihil obstat » et « l'Imprimatur » pour la publication
des travaux d' ethnologie religieuse présentés à la Semaine de Tilbowg.
Cette publication fera honneur à l'association scientifique dont le
R. P. Schmidt et vous-même êtes l'âme ; elle servira, je n'en doute
point, les intérêts de l'Eglise et de l'apostolat des missions.
Agréez, je vous prie, mon Révérend Père, avec l' expression renouvelée
de mes vœux les meilleurs, l' assurance de mes sentiments tout dévoués.
t D. ]. Card. MERCIER,
Arch. de Malines.
AVANT-PROPOS
Après une iiil<'i'iu|»l km de neuf années, occasionnée par la
grande guei'i'e d par ses suites, la Semaine cl Ethnologie Reli-
giexise a tenu sa HT session, du 6 au l 'i septembre 1922, à
'l'ilbourg l'Hollande) .
J^e lecteur sera heureux de trouver ici quelques détails sur
raccueil quelle a reçu dans cette ville, une vue d'ensemble
sur ses travaux, quelques mois d'explication sur la rédaction
du compte rendu.
I. Le Comité iniei'national n'eût pas choisi l'un des ftays de
l'Europe où le change est le plus élefvé, si des offres excep-
tionnelles ne lui avaient été faites. Or, dès 1919, des rensei-
gnements sûrs lui faisaient espérer, avec des subsides suffl-
sants pour couvrir les frais généraux, la gratuité complète
du séjour pour les Semainiers non-hollandais. En 1921, les
conférenciers étant déjà engagés et les invitations sur le point
d'être lancées, des grèves et la gêne extrême du commerce
local engagèrent à différer d'une année. En 1922, les circons-
tances semblèrent plus favorables. Les dispositions générales
furent arrêtées, d'accord avec son Eminence le Cardinal
.Mercier. Au début de juillet — un peu tard en somme —
la session fut otïiciellement annoncée. Avec un admirable
dévoûment, le H. P. Gbkrts, M. S. C., secrétaire régional, M. le
Pasteur Sa.nders, curé du Sacré-Oœur, M. .J. K. Mergx, président
de la société 0ns Brahant, et les autres membres du comité
local se chargèrent de- tous les préparatifs. Les Tilbourgeois,
fout en s'excusant de ne pas fêter leurs hôtes comme ils
Teussent fait en des Iimi)|)s plus ju'ospères. dépassèrent toutes
les espérances.
Plus de cent cinquante éfran.gers, de tous pays, se présen-
tèrent dans les jiremiers jours de septeml^re. Riches ou
pauvres, tous les habitants qui furent priés de les héberger
leur ouviirent leurs demeures et les admirent à leur table
8 AVANT-imOF'OS
avec une cordialité exquise, nuancée d'un respect touchant,
quand se présentaient chez eux des prêtres, des religieux, des
missionnaires.
De généreuses subventions affluèrent.
Le 10 septembre, M. le bourgmestre, Mr. Vonk de Both.
assisté des conseillers municipaux, recevait offlciellement les
Semainiers à la maison de ville, Stadhuis, et les conduisait
ensuite en excursion à Oisterwijk : trente-sept autos de luxe.
se suivant à cinquante mètres, défilèrent au grand ébahisse-
ment des gamins.
Plusieurs co!'[)orations de la ville tinrent à manifester leur
sympathie. Ce même jour, 10 septembre, les deux sociétés
musicales de Dongen et de Tilbourg offrirent un concert fort
goûté. Le il au soir, cent vingt choristes des Vereenigdp
Zangers, sous la direction magistrale de M. Jean Van Leelwkn.
remplacèrent opi»ortunément un conférencier malade. Le 13,
M. Van Puye.nbroek. président de l'administration du Sportpark,
et M. le Rév. Dr. Smits, adviseur, réunissaient les Congres-
sistes pour un splendide banquet.
On devine qu'en ces circonstances les orateurs de la Semaine
ont dû plus d'une fois exprimer la reconnaissance de tous et
qu'ils ont pu donner carrière à leur éloquence, sans risquer de
dépasser la vérité : il semble difticile de porter plus loin que
la noble cité la charité chrétienne et la pratique de l'hospi-
talité.
n. Les conférences de la Semaine, qu'on trouvera plus loin
groupées dans un tableau d'ensemble, comprenaient deux
séries distinctes, celles du soii- destinées au grand public,
celles du jour, d'un caractère plus technique, i-éservées aux
Semainiers.
Les trois premieis jours ont été consacrés, comme par le
passé, aux questions générales d'introduction ; les cinq autres
à deux questions spéciales : le sacrifice chez les différents
I)euples, les rites d'initiation. Il a paru utile, pour ce dernier
sujet, de rapprocher des mystères de l'antiquité classique,
selon la méthode inaugurée par le P. Lapitau, les cérémonies
usitées chez les non-civilisés dans leurs initiations tribales ou
AVANT-PROPOS 9
dans leurs sociétés secrètes. Pour éviter les redites et pour
assurer une étude plus objective, on a tenu à examiner les
mj'stères de Tantiquité classique chacun à part, en eux-mêmes,
et à n"abordpr qu'en dernier lieu, dans une conférence plus
synthétique, la question de leurs rapports avec le Christia-
nisme.
La Semaine n'a pas à apprécier plle-m<Mne la valeur scien-
titique de ses travaux ; mais elle est heureuse de consigner ici
le témoignage d'encouragement qui lui est arrivé du Vatican.
Le 6 septembre, elle adressait à son Eminence le Cardinal
Gasparri, secrétaire d'Etat, le télégramme suivant :
Evéqiu de Bois-le-Duc, Coiuitc international, conférenciers, auditeurs
Semaine Ethnologie Religieu.se i)rie,it resiiectueusement Votre Eminence offrir
!<aint Père homrnuf/e piété filialr et entièrr ohéissancf. Imytlorcnt bénédiction
apostolique.
Sa Sainteté a daigné répondre par la même voie :
Saint Père très sensible filial hommage Semaine Ethnologie Religieuse,
Tilburg, forme vœux pour que travaux contribuent efficacement, pur diffusion
et plus parfaite connaissance religion catholique, au progrès et triomphe
vérité et comme gage fm-eurs dii-ines accorde de tout cœur bénédiction
opostoliqiic implorée.
III. Le présent volume offre au public une analyse assez
ample des conférences techniques, dans Tordre où elles furent
données, avec une bibliographie sommaire.
Pour des raisons d'économie et bien à regret, on s'est résolu
à omettre les sommaires des conférences du soir. On a fait
toutefois exception pour celle du R. P. Sch.midt, sur « les
formes sociales des cycles culturels o, que le programme
primitif prévoyait pour la première après-midi, et pour celle
de M, l'abbé J. Bouyssonie, sur « la technique des fouilles »,
en raison de l'intérêt pratique qu'elle présente. On trouvera
la première à sa place normale, sous le numéro 2b, la seconde
sous le numéro 13.
On n'a pas cru devoir résumer, vu leur caractère plus
intime, les trois séances de délibération, c< sur les travaux
scientifiques et les expéditions à entreprendre ». Il suffit
qu'elles aient fourni au groupe laborieux des Semainiers de
très, utiles suggestions.
10
SIOLES
Des comptes rendus assez détaillés ont paru, durant la session, dans
De Tijd, De Muashorl.e, de plus sommaires dans Bet Nieuwsblad (avec por-
traits des principaux conférenciers), TiJburgsche Post, la Croix de Paris,
Cech de Piague, etc.
Nombre de journaux et revues ont consacré un i)eu plus tard à la Semaine
des articles plus ou moins étendus. Signalons spécialement — en 1922 :
America, t. XXVII, p. 597-598 ; Anthropos, t. XVI-XVII, p. 481-486 : Ûiviltà
rattolica, t. IV, p. 188-190 ; El dehate de Madrid, 28 octobre : Deutsche
ZrAtiing d'Olmlitz, 16 septembre ; Egyhdzi Ss&mle de Tlmisoara (Rovmianie)?
1). 153-154 ; Etudes, t. CLXXIII, p. 29-41 ; KathoHschr Kirchen-cAtunçi de
.Salzbourg-, v. 294-297 ; K. I. P. A. de Fribourg, 25 septembre ; Nasinci-
d'Olmtitz, 15 septembre : Nouvelle revue théoloyique, t. XL,TX, p. 4 9 6-506 ;
Revue catholique deS idées et des faits, n" 25, p. 12 .sq. ; n» 28, p. 14 sq. ;
Revue des jeunes, t. Xil, p, 4V-61 : Volk de Jaegerndorf (Silésie), 20 septem-
bie : Revue apologétique, t. XXXV, p. 153-173 ; — en 1923 : Casopis Kato-
lického Duchovenstva, t. LXIV, p. 28-35 : Riizôn y Fe, t. XI^V, p. 137-157 ;
Jai Scuola cattoUca, février, p. 169-176...
l^es Secrétaires remercient MM. les Rédacteins de leur bienveillance envers
la Semaine et de Toblig-eance (lu'ils ont eue de tiansmettre leurs articles.
Sigles employés
AL
Anthr
AO
APs
ARW
BZ
CRSER
DAGR
DAFC
DTC
ERE
Ausfuhrliches Lexicon de
ROSCHER
Anthropos
Der dite Orient
Arctiives de psychologie
Archiv fiir Religionswis-
senschaft
Biblische Zeitschrift
Compte rendu de la Se-
maine d'Ethnologie re-
lig., le session. 1913 ;
Ile sess., 1914.
Dictionn. des antiquités
grecques et romaines de
Daremberq et Saqlio
Dictionn. apologétique de
la foi catholique de A.
d'ALÈS
Dictionn. de théol. catho-
lique de Vacant-Manoenot
Encyclopœdia of Religion
and Ethics de Hastings
OLZ Orientalistische Literatur-
zeitung
RB Revue biblique
RECAW Real-Encyclopddie der
classischen Altertums-
wiss. ■ de Pauly-Wissowa
RFA Revue pratique d'apologé-
tique(Rev. apologétique,
depuis 1921)
REPT Realencyclopddic fur pro-
testant. Théologie ' de
Herzoq-H.^cck
RHR Revue de V histoire des reli-
gions
RSR Recherches de science reli-
gieuse
RSPT Revue des sciences philo-
sophiques et théologi-
ques
DOCUMENTS
I. — Organisation et But
de la Semaine d'Ethnologie Religieuse
I. lUT. I.a Semaine d'Ethnolugi'' lieligieuse est fondée,
avant lout, {loiir introduire à l'tUude technique et objective
des religions non-chrétiennes.
iSecondairenient et parce que cette utilité suif de la pre-
mière, elle pourra aussi assumer toute tâche scientifique
regardant l'organisation ou ramélioration de l'étude des reli-
gions chez les catholiques.
Enfin, elle sera un nioj^en lout naturel poui' les savants
catholiques soccupant de ces questions d'échanger leurs vues
et de lier des relations.
Elle ne prendra cependant jias la l'orme d'un congrès.
II. TiTHE. — Elle gardera le titre qui lui a été donné à la
première heure : " Semaine d'Ethnologie Religieuse ». Mais ce
titre, conservé pour plus de brièveté sur les documents
oiTiciels.- pourra être complété et expliqué par le sous-titre :
« Cours d'introduction à l'étudi^ des religions ».
III. l'esprit de la Semaine est nettement catholique. Per-
suadés que la st-ience, loin d'èti'e par elle-même l'ennemie de
la foi, ne peut (juc servir sa cause, les organisateurs de la
Semaine visent à faire progresser l'étude des religions non-
chrétiennes pai' un emploi loyal et consciencieux des méthodes
critiques.
L'orienlation (les travaux est d restera r'f'solumenf scien-
tifique.
IV. LES AUDITEURS, Conformément au but visé, seront :
\" les missionnaires de lout ordre, congrégation, société ;
2" les membres du clergé séculier et régulier désireux de
12 STATUTS DK LA SEMAINE
s'initier aux mêmes études, dans un liut scientifique ou
apologétique :
3" les laïques ayant achevé leurs études générales et pou-
vant trouver une utilité certaine à ces cours.
Y. LES coMFÉRENf'.iERS Seront choisis, par les secrétaires et
le Comité International, parmi les savants et spécialistes
catholiques qui voudront bien accepter ce rôle et faire profiter
ces étudiants délite de leur savoir et de leur expérience
technique.
Ils seront indiqués et présentés par le Comité International
et seront définitivement arrêtés par les Secrétaires.
VI. LA FORME sous laquelle se donnera cet enseignement sera
celle qui est usitée pour les « Cours de vacances » en divers pays.
MI. LE CENTRE cheisi, lœuA-re étant internationale, pourra être
une quelconque des grandes villes d'Europe. Cependant, pour
ses débuts, et parce qu'elle y a trouvé, à sa naissance, une
bienveillante et cordiale hospitalité, elle se tiendra de préfé-
rence et plus souvent à Louvain, ville universitaire et de facile
accès, rendez-vous de nombreux missionnaires étudiants. Quel
que soit d'ailleurs le lieu où elle se tienne, la Semaine garde
toujours vis-là-vis des organisations locales sa pleine auto-
nomie. Il lui suffit de trouver favorables les autorités ecclé-
siastiques du lieu où elle tient ses réunions.
VIII. Il ny a pas de langue officielle de la Semaine. On
pourra y faire des conférences en allemand, en anglais, ou en
français. On invitera cependant les conférenciers, dans un but
tout pratique, à parler de préférence celle de ces trois langues
qui sera la plus répandue dans le centre choisi. Le choix de
cette langue privilégiée peut donc varier à chaque session.
IX. LA DIRECTION de Tceuvre est assurée par un comité d'une
quinzaine de membres. Ce comité doit être autant que possible
représentatif des différents pays et des principales institutions
qui ont intérêt au bon fonctionnement de la Semaine. Dans
l'intervalle des réunions, la direction est remise à un ou deux
secrétaires généraux, assistés d'un secrétaire régional et d'un
trésorier. La présidence d'honneur du Comité International est
remise à S. E. le Cardinal Mercier, qui a bien voulu prendre
l'œuvre sous sa protection.
COMITÉ 1 3
IL - — Comité International
Président d'honneur : Son Eiiiiip'nce lo Caidinal Mercier.
Secrétaire général : Schmiut (Le R. P. W'.), S. V. D., directeur
de la revue Anthropos. Môdling. près Vienne, Autriche.
Secrétaire adjoint : Pin.vrd de la Boullaye (Le R. P. H.), S. J.,
prof, de théologie au Scohisticat d'Enghien, Belgique.
Trésorier : Wyels (M. le Chevalier de . 23 boulevard de Tirle-
mont, Louvain.
Membres du Comité :
Casartelli (S, (j. Mgr. L.), évêque de Salford, Angleterre.
Le Roy (S. G. Mgr. A.), (H'êque de Carie, suj)érieur général de
la Congrégation du St-Esprit, 30 rue Lhomond, Paris (IT).
Ladeuzb (Mgr. P.), recteur magnifique de lUniv. de Louvain.
Bros (M. le Chan. A. , super, de TEcole Saint-Aspais, Melun.
Ehrlich (M. le Dr. L.), prof, à lUniv. de Ljubljana, Yougo-
slavie.
Gannon (Le R. P. J.i, S. J.. prof, de théologie, Miltown Park,
Dublin.
Geerts (Le R. P. G.), M. S. G., .'supérieur du Scolasticat,
Missiehuis, Stein. Hollande.
Gemelli (Le R. P. A.), O. F. M., recteur magnifique de l'Uni-
versité du Sacré-Cœur. Milan.
Grandmaisgn (Le R. P. L. de), S. J., ancien directeur des Etudes.
directeur des Recherches de science religieuse. Paris.
JoNGHE (M. E. de), prof, d'ethnologie à IT'niv. de Louvain.
JuNKER (M. le Dr. H.), prof, à l'Université de Vienne.
Lemonnyer (Le R. P. A.), O. P., régent des études au Collège
théologique du Saulchoir, Kain-lez-Tournai. Belgique.
Mortier (Le R. P. F.), vice-supérieur général des Mission-
naires de Scheut.
SCHRI.JNEN (iM, le Dr. J,), prof, de linguistique et d'archéologie
chrétienne à l'Université dTTtrecht.
Van Crombrucjohe (M. le Chanoine C), prof, de dogmatique
générale et d'histoire des religions à l'Univ. de Louvain.
'WuNDERLE (M. le Dr. G.), prof, à lUniv. de Wurzbourg.
Tableau synoptique
Partie Générale
Méthode, Linguistique, Sociologie. Psychologie, Préhistoire
Mercredi 6 Sept.
Jeudi 7 Sept.
Vendredi 8 Sept.
Le Sacrifice
des peuples incultes
Samedi 9 Sept.
8 h. Messe du Saint-
Esprit
Discours d'ouverture
P.SchmidtS.V.D.
P. Pinard S. J.
6)
Culture et religion des
Indo-Européens
Prof. Ca/nop.
10)
Méthodes de la psy-
chologie religieuse
P. Pinard S. ].
14)
Notions génér sur le
sacrifice dans les
cycles culturels.
P.SchmidtS.V.D.
2a) j 7a)
Tâches anciennes et
nouvelles de la Se-
maine
La méthode de l'Ecole
Sociologique
11)
Etudes psychologi-
ques sur la prière
15)
Die Psychologie
des Opfers
P. Schmidt S. V.D. Chanoine Bros.
P. CemelliO.F.M. ;, Prof. Wunderle.
1
3)
La méthode hlsto-
rlco-culturelle
8)
La religion des an-
ciens Basques
Délibération sur les
travaux scientifiques
à entreprendre.
P. Pinard S. J. Prof. de Batandiaran
Continuation de la
délibération sur les
travaux et les ex-
péditions à entre-
prendre
4)
Wirtschaftsformen
und ethnologlsche
KuUurkreise
P.KoppersS.V.D.
9)
Afrika, Vorderasien
und die frUheste
Vorgeschichte
Dr. A. Drexel.
12)
Pràhistorische Ar-
chàologie und
kulturhistorlsche
Méthode
Prof. Menghin.
16)
Das Opfer und sein
Formen in Afrika
P. Scheheila S. V. D
5)
La méthode philo-
logique
P. Pinard S. J.
7b)
La religion d'après
l'École Sociologique
Délibération sur les
recherches et les
expéditions à faire
Ch
anoine Bros
17)
Le sacrifice dans
l'Inde et chez les
Indo-Européens
Prof. Carno^.
I
Ce que les mission-
naires ont fait pour
l'histoire des reli-
gions
P. Brou S. J.
Gezlnsleven en
Chrlstendom
Prof. Schrijnen.
13)
Les fouilles préhisto
riques et leur tech- 1
nique
4bbé J. Bow^ssonie
Met offer op de K(
eilanden iNed.IndI
P. Viesen M.S.i
Les numéros inscrits à gauche des cadres indiquent Tordre des conférences dans le Compte Rent
2b et 7b suivant 2a et 7a.
Les conférences du soir, destinées au grand public, ne sont pas publiées, à l'exception de 2b et 13.
des conférences de la IIP session
Far tie Spéciale
Le Sacrifice
des peuples antiques
Initiation, Sociétés
secrètes des peuples
incultes
Mystères des peuples
antiques
Lundi 11 Sept.
Mardi 12 Sept. Mercredi 13 Sept
Jeudi 14 Sept.
-
18)
Das Opfer in der
Religion der Su-
mero-AI<l<ader
Prof. Hehn.
23)
Initiation tribale et
sociétés secrètes ;
notions générales
P.SchimdlS.V.D.
28)
Mystères astrono ■
mico - relig. dans
l'Amérique Centr.
P. Kreichgauer
S. V. D.
33)
Les mystères païens
et le mystère chré-
tien
P. de Crandmai-
son S. J.
1
19)
Le sacrifice chez les
Hébreux
Prof. Sanda.
24)
Les sociétés secrètes
en Afrique
Prof, de Jonghe.
29)
Die Mysterien des
Osiris
Prof. Juniper.
34)
Discours d'adieu
P.SchmidtS.V.D.
P. Pinard S. J.
20)
Das Opfer bel den
Arabern
Prof. Klameth.
25)
Tribal Initiation and
Secret Societies in
Australla
Prof. Ehrltch.
•
30)
Mystères de Mithra
Prof Van Crombrugghe
*
Salut solennel
de
clôture
3
•
21)
Opferriten der grle
chischen und rô-
mischen Kulte
Dr. Andres.
26)
Die Inglet-Mysterien
auf Ncupommern
(Stidsee)
P Winlhuh M.S.C.
31)
Mystères d'Eleusis
Prof. .De Caluwe.
r
22)
La religion et l'Etre
suprême chez les
Yagans (Amérique
mérid.)
P.KoppcrsS.V.D.
27)
Sociétés secrètes des
Marlnd (Nouv. Qui
née Néerlandaise)
P. Vkgtn M.S.C.
32)
Mystères d'Adonis
et d'Attls
P. Duhr S. J.
\
4
0
D)
E)
Initiation tribale et
société secrète chez
les Fuéglens
P.KoppersS.y.D.
2b)
Die sozialen Formen
der einzelnen Kul-
turkreise
P.SchmidtS.V.D.
F)
La vie du mission-
naire à l'Alaska
P. Bernard S. J.
Les conférences 13, E. F étaient illustrées de projections. — D, omise en raison de l'indisposition du
iférencier, tut remplacée par une audition musicale. ^
16 SKMAIMERS
IV. Noms et adresses des Semainiers
Une pensée de reconnaissMnce a suggéré de joindre an nom des Semainiers
le nom et l'adresse des habitants de Tilbourg- qui leur ont accordé une si
grénéreuse hospitalité. Ils sont indiqués ici entre [ ].
Ahais iLe R. P. Dr. H.), Supérieur des missionn. de Mill Hill,
St. Jozef-iStudiehuis. Tongerl. Hoefslraat 175. Tilbourg.
Altemoeller (Le R. P. Mathias), S. Y. D., St. Gabriel-Modling.
près Vienne, Autriche.[M' Veuve Arnold, Willem-II-straat] .
Andres (M. le Dr. P'riedrich) , Privatdocent à lUniv., Kônig-
strasse 72, Bonn .M. C. Van Wezbl, Bredascheweg] .
AxTONOwicz (M. le Dr. Ignatiu-s;, Salesianum, Oswiecim, Po-
logne [M. J. Pruimboom, -Korvelscheweg 2011.
Arts (Le R. P. Guillaume), M. S. C. Missiehuis, Velperweg 96,
Arnhem -Missiehuis, Bredascheweg 2041.
AuzMENDi (Le R. P. Leandro), O. S. B., Couvent de Lazcano,
Espagne ^M. J. Hamers, Heuvelstraat 105].
Barac (:M. le Dr.) François}, prof, à lUniv. de Zagreb. Yougo-
slavie yi' Veuve Dr. Eigenraam, Zwijsenstraat 24].
Barandiarax (Don J. Miguel de). Seminario Conciliai-. Vitoria
[Dr. G. E. P. Van Hegk, curé de St. Denis, Zwijsenstraat .3].
Bartholomels (Le R. P."». O. M. C. Langeweg, Hollande [Capu-
cijnenklooster, Korvelscheweg] .
Bauten (Le R. P.), S. Y. D.. Missiehuis, Helvoirt, Hollande.
Bayer Le R. P. Aegydius), can. reg. S. Aug., Prof. Stift
Kloslerneuburg, Autriche iM. L. BERiiMANS-MARSÉ. Lange-
straat 57].
Becker (Le R. P. Robert), O. M. L. Bonifatiusklooster. Hûnt'eld
bei Fulda FFranciscanessenklooster. Zwijsenstraat 201.
Bernard (Le R. P. Joseph), S. J., 35 rue Voltaire, Lille. France
[M. Th. Schots-Schoenmakers, Wilhelminapark 12].
Bordes (Le R. P.), S. Y. D., Missiehuis. Helvoirt, Hollande.
Bouwman (Le R. P. Jucundus), O. F. M., professeur. Heerlen.
Hollande.
BouYSSONiE (M. l'abbé Jean), prof, à lEcole Bossuet, Lacabane
ADRESSES DES SEMAINIERS 17
près Cublao, Corrèze, Fiance [M. Fr. Mutsaers-Kerstexs.
Poststraat 31].
Brandt (Le R. P. Joseph de), C. SS. R., 03 rue de Tirleinont.
Louvain [Moederhuis, Ouden Dijk].
BrelhvER (M. Alexandre), prof, au lycée cathol., Tilbouj-g.
Broering (Le R. P. Th-J'odore), S. V. D., Missiehuis, Steyl,
Hollande ]M. Yan Vechel. \\'ilhelni-II-straat 03].
Bros (M. le Chanoine A.), Super, de l'Ecole St.-Aspais, 30 rue
St. -Barthélémy, Melun, France ]-AI. \V. Goyarts-Jaxssen's.
Spoorlaan] .
Brou (Le R. P. Ale.xandre), S. J., Hale's Place, Canlcrhiuy.
England [Moederhuis, Ouden Dijkj.
Brouwer (Le R. P. Corn. P. dej, miss, de Scheut, Scheut |irè.s
Bruxplles [Bredascheweg 292].
Broiwer (Le R. P. Dr. P. C. de), prof, au lycée cathol., Bie-
dascheweg 292, Tilbourg.
Brouwer tLe R. P. Dr. H. de), prof, au lycée cathol.. Bre-
dascheweg 292, Tilbourg.
Brunner (Le R. P. Augustin), S. J., Ignatiuskolleg, Valkenburg.
Hollande [F'ratershuis, Gasthuisstraat 68].
Calewaert (M. l'abbé Charles), Collège du St-Esprit, Louvain
'Cenakel, Koningshoeven] .
Capart (>L Jean), prof, à TUniv. de Liège, conservateur des
Musées Royaux, 8 Avenue R. Van den Driesscli.e, Bruxelles.
Carnoy (M. Albert), prof, à lUniv., Sperrenhof, Corbeek-Loo,
Louvain [M"* J. Pollkt, Noordstraat 36].
Cerfaux (M. le Chanoine Louis i. prof, au Grand Séminaire de
Tournai [M. J. A. Van Iersel, Hoefstraat] .
COPPEXS (M. Tabbé Joseph), Collège du St-Esprit. Louvain
[M. B. de Brouwer, Tuinstraat 58].
CoRXELissEX (M. labbé Fr. J. J.), (Toirkestraat, Tilbourg.
De C.aluwe (M. Tabbé Joseph), prof, au Séminaire Saint-
Nicolas. Waes, Belgique [Cenakel, Koningshoeven].
Del.vlle (M. le Dr. Johann), Vicaire de la cathédrale de Spa-
lato, Yougoslavie [M. J. C. Claesen, Hoefstraat 196].
Delmutte (M. l'abbé L.), Collège N.-D. de la Tombe, Kain-lez-
Tournai [M. J. M. Van Osterhout, Poststraat 12].
1
18 ADRESSES DES SEMAINIERS
Dbscamps I m. )p liaron), prof, à l'Univ. de Louvain. 159 Avpnue
Louise. Bruxelles M. Fr. .Mitsaerts, Spoorlaan i:î8].
DiTTRiCH (M. le Di'. Adalberi;, Religionsprof., Kriehnborggasse.
12-10. Wien V M. J. Van Ol'denhoven. Koverplein 20].
DouTRELiGNE (M. 1 abbé Denis), des Miss. Etrangères, rue du
Bac. Paris M. J. C. Schellens, Bredascheweg 47].
Drexel .m. le Dr. Albert), Batschuns-Post Sulz. Vorarlberg.
Autriche [M. H. Van Den Iîiîekki.. Piussiraai hook Hemol-
straat] .
Duhr (De R. P. Joseph), S. J.. 7 rue des Augustins. Rnghien.
Belgicpie [M. le Recteur J. D. Klijn, Zwijsenstraat 17].
Dunne [Le R. P. Pierre), S. J.. Iniv. of Santa Clara, Santa
Clara, California. U. S. A. SI. .Jnzef-Studiehuis, Tongerl.
Hoefstraat 175].
Dupont (Le R. P. François), S. J., 7, rue des Augustins. En-
ghien. Belgique Fratershuis. Gapucijnenstraat, 70].
ECKERT (M. Paul), Alexanderstrasse 36, Bie.slau [M" Veuve
WiLLEKENs, St. Jozefstraat 123].
Ehri.ich m. le Dr. Lambert), proL à lUniv. de Ljubijana.
Yougoslavie [M. le Dr. K. Deelen, Stationsstraat 22].
Engert (M. le Dr. .Joseph), prof., (labelsbergstrasse 1. Dii-
lingen, Bavière [M. L. Kerssemaekers, Langestiaat 26].
Eras (Mgr. Bernard), de la Commises, de la Propag. de la Foi.
Rome [M'. L. de Beer-Eras, Wilhelminapark].
Eymieu (Le R. P. Antonin), S. J., 41 rue Marengo, Marseille.
France M. \V. Broens. Willem-IT-straat 8].
Fallhabei\ :M. le Dr. Ludwig) , privatdocent. Wûrzbui'g TM. F.
Van Nunen-Van Eyck. Pleinstraat 4].
Feltci.'VNUS (Le R. P. . O. M. C, Capucijnenklnoster, Korvel.
Tilbourg.
Fischer (Le R. P. , O. S. B.. St. Ottilien. Bavière ^m.. J. Ci.aes-
SEN. Hoefstraat 190].
FiSH ' Rev. Thomas), St. Edmund's Houso. Cambiidae si.
Jozef-Studiehuis. Tongerl. Hoefstraat 175].
FOLTIN ij,e Rév. , (iymnasialdirector i. R.. Ilotn. Xiedei-
Oesterreicli [M. J. Passier, Koestraat 45].
ADRESSES DES SEMAINIERS 19
Fontaine (,M. l'abbé Charles), préfet de lEcole St-Aspais.
Melun. France ^M. J. Dijkmaxs, Spoorlaan 90].
Frank (Le R. P. Richard), M. S. C, Missionshaus, Oevontroit,
Ainsberg i. W. i Missiehuis. Bredascheweg 204].
Gahs (.m. le Dr. Alexander , Zagreb, Yougoslavie [M. J. Ver-
^ ooRT, Heuvelsiraat 5].
Geeraerts (Le R. P. Xavier), M. A., Séminaire de Bouchout-
lez-Anvers. Belgique [M. F. Teurlings, Herstalschestraat 2].
(iRERTH (Le R. P. Dr. Guillaume), :\I. S. C, Supérieur du Sco-
lasticat de Stein, Liml)ourg, Hollande [Missiehuis, Bre-
dascheweg 204].
(iEMELLi (Le R. P. Agostino), O. F. M., Recleur magnifique
de rUniv. du Sacré-Cœur, Via S. Agnese 4. Milan [M. Blom-
jous-Kolkman, Heuvel 14].
Gkmmel (Le R. P. Jacob), S. J., Jesuitenplatz 4. Coblenz a. Rh.
[M. A. de Visser, Diepenstraat 2].
Gervasius (Le R. P.), O. M. C, prof. d'Ecriture Sainte, Bois-
le-Duc, Hollande : Capucijnenklooster, Korvelscheweg] .
GoFFOEL (M. labbé Maurice), 134 rue Verte, Bruxelles [M. H.
SiTEUR, Telefoonstraat 4].
GoLDSCHMiDT M. .Johannes). Praeses des CoUegium Thomeum,
Kempen a. Rh. ]M. L. Van D. Schoot, Tuinstraat 78].
GoossENs (M. le Dr. 'l'h.), Rector R. K. Leergangen, Tilbourg.
GousiE (Le R. P. Eugène), S. J., Coll. de Tlmm. Conception,
Montréal. Canada ;St. .Jozef-iStudiehuis, Tongerl. Hoef-
straat 175].
Grandmaison (Le R. P. Léonce de), S. J., 5 place du Président-
Mithouard, Paris. VIP 'M. .T. Sanders, curé du Sacré-Cœur,
Noordhoeck].
Gysen (Le R. P.), C. S. Sp., Orphelinat de 'Weelde, Belgique.
Habeht (M. l'abbé Onésime), prof, de philos, à lEcole Saint-
Aspais, 36 rue St. -Barthélémy. Melun. France [M. A.
Raaijmakers-Willemh. Vincentiusstraat 2].
Habes (Le R. P. Joseph), S. J., Institut Pontif. SS. Cyrille et
Méthode, Velehrad, l'chécoslovaquie ■ Fratershuis. Anlonius-
straat 3].
H.\DLER (Le R. P. Hermann), O. S. B.. prof.. Admont (Stiff».
Steiermark, Oesterreich [M. J. de Low. Markt 23].
20 ADP.ESSES DK8 SEMAINIKOS
Hakckel ^Le R. P.).. O. r<. B.. St. 0!tilipn, Bavière ^M. .T. Clvk-
SKN. Hoefstraat 196J.
Ha.nus ,Mgr. Dr. Joseph). Uradcaiiy, Prague IV-58, Tchéco-
.'^lovaquie .M. le Dr. Th. Verhoeven, Xionwlandstraat 34].
H.wRRS M. le Dr. WilliPlm), ])i'of. à ITniver.s... Bisniai-ck-
.strai^.se 14. Wiirzburg.
Hbhn (M. 1p Dr. .Joseph), piTif. à l'Univers., Sanderring 22.
Wûrzburg [W Veuve W. Van Arendoxk, Goirlescheweg 19].
Hendrikcs I Le R. P. .Toseph . S. V. D., ^lissiphuis, Helvoirt.
Hollande.
Hendhiks (Le R. P. Auguste), M. S. C. Missifhuis. Vclperweg
96. Arnhem. Hollande ]Missiehuis. Bredasoheweg 204].
Hetényi m. le Dr. Julius . prof.. Egér, Ungarn 'M. Th.
Kerstens-Swagemakeks. Heuvel 95»].
HocEDEz 'Le R. P. Edgai', , S. .L, 11 rue des Réeollets. Louvain
..M. .J. Kehstexs, SL Jozefsiraat 124].
Hoss uM. le Dr. Joseph), prof, à Veszpi'éni, Ungarn .M. Llij-
TEN-KuiPERS, Willem-II-straat 78].
Irero {l,e R. P. .José), S.- J., Ona, Burgos, Espagne .M. P.
ZERREos-^'A^ OosTERHOiT. BredaschewBg 241].
Iiu.NYï M. et M" Uugen von'. Vienne [M. E. Van Dooren-
H ERMANs. Korvel] .
Irsiegler (M. le Dr.), prof., Wiener Xeustadt, Autriche [M. N.
Aelen-Claes.sexs, Noordstraat 80].
Jansen Le R. P.), O. P., Huisscn. ])rès Arnhem, Hollande
)Genakel. Koningshoeven] .
Janssbx (Le R. P. Hermann). O. M. !.. BonifaI iusklosler, Hun-
feld bei Fulda )Fi'anciscanessenklooster, Zwijsenstraat 20].
Janssen (M. J. . Lazariste, Missiehuis, Helden-Panningen.
Linihouig. Hollande.
Jo-NGHE M. Kd. de),^J0f. à l'Univ. de Louvain, 28 Avenuo
Long(hanij)S. Ucele, Bruxelles.
Ju.NKER M. le Dr. Hermann), prof, à l'Université de Vienne
[^I. A. Aelex-Raaymakers, Noordstraat 151.
Kammels (Le R. P. :\rallhias:, S. V. D.. .Missiphnis, Totorinuon,
Hollando.
" ADRIÎHHES DES SEMAINIERS 21
KappEiNBEHg (Le a. P. Dr. Aloys). 8. V. D., St. Gabi-iel-.Modling.
bei Wien [M. J. Bua.nds-Koenders, Koestraat 143].
KiRGHEU (Le 11. P. Aemilius), S. J., Ignatiuskolleg, ValkenbuPK.
Hollande l-'iatershuis, Cia.sthuisstraat 08].
Kl.var iLe H. P. Conrad), S. V. D.. Priises Maria Hilf, Steinhau-
seiuZug), Suisse [M. H. Boelaers-Rottier, Zomersiraal 42].
Klameth m. le Dr. Gustav), prof, à IL niv., Henderg^asse 2,
OlniiUz, 'rcliéeoslovaquie M. Bouwmbster. Wilhelmina-
])ark 35].
KoELMAN (M"'' -Maryaret), Baan 3% Haarlem. Hollande,
Kuppers (Le R. P. Willielm),, S. V. D.. St. Gabriel-.Môdling. bei
Wien [M' Veuve Pessehs-Verbunt. Williolminapark 11].
KuwALSKi (Le R. P. Seweryn , Prof, (iymnasium, Skarbowa 5,
Poznan, Pologne ]^r. Schyns. Wilhelniinapark 3 'i ] .
Ko\v.\NUA (Le Rév. Wilhelm . Koitiieratoi'. Heldeuplatz. Wien
iM"'" ZE(iEUs. «St. Jozefslraat 37].
Kraus Le R. P. J.-B.;, S. J., IgnatiuskoUeg, Valkenburg, Hol-
land M. Aerheyen, Lange Nieuwstraat 03].
KnEiCHdAUER ^Le R. p. D., . S. V. D.. St. Midiael. Steyj, Hid lande
[M. Th. V.\N Kerkoerlb, Vincentiusstraat 10].
KujAM AL le Dr. Franz), i)rof. de théologie, Kalocsa, Ungarii
[M. J. Van Der Valk, 'l^iinstraat 112].
Kubsters (Le R. P.\. 0. S. B.. St. Ottilien, Bâyern TM. J. Glae-
SEN, Hoefstraat 190].
Lallem\nd (Le R. P. Albert), S. J., H rue des Récollets, Lou-
\ain Fratershuis, Bosseheweg] .
Lamot m. l'abbé Benoît). 9 'i rue d'Anvers, Boom, Belgique
[M. Haans. Industrie.^traat 112],
Le Blanc (M. le Di', J. P.), curé 't Goii'ke. (ioirkestraat 72,
Tilbourg.
Lenz (M. h' D]\ Johann), prof.. Priesterseniinar, Triei- [^M. Van
Heeswuk, Laarstraat 7].
Leys (Le R, P. Edouard), M. A.. Supérieur du Séminaire de
Bouchout-lez-Anvers. Belgique ^M. Knegtel Van Loon, Heu-
velstraat 84].
Li'Tz (Le R. P. Guillaume), S. J.. 7 rue des Augustins, Enghii'ii.
Belgique ]jM. Teelwen-Waiienniakers, Heuvelstiaat 79..
22 ADRESSES DES SEMAINIERS
IMabesoone (M. l'abbé Pierre), Collège du Pape. Louvain
[M. Haa.ns, Industriestraal 112].
Mahalx (Le H. P. Georgesj, G. S. Sp.. Ecole apostolique. Gen-
tinnes, Belgique [M. P. Teelingen, -lan Aarstenstraat 2j.
Max (Le H. P.), S. C. J. [M. G. Eras. Goirkestraat ] .
Menghin (M. le Dr. Oswald), prof, à TUniv., Gersthoferstrasse
108, Wien 18 [M. L. Sevink, iStationsstraat 18].
Mercx (M. J. K.), ir., Noordstraat 99. Tilbourg.
Messina (Le R. P. Joseph), S. J., Rettoria Casa Professa, Pa-
lermo, Sicilia [M. L. Verheyen. Lange Nieuwstraat 63 j.
Mester (M. le Dr. Johann), Hoehschulprofessor. VI Ist\ân-ût
91-93, Budapest [M. Hornix. Rozenstraat 13].
Meuwese (M. le Dr. AWons), prof, au Grand Séminaire. Haaren,
Hollande.
Michels (M. le Di-. L.). prof, aux Cours cath. supérieurs. Til-
bourg.
MiscoNi (M. le Di'. Doniinique), VIII Muzeuni lUca 3. III. 7.,
Budapest M. J. C. Sohellens, Bredaseheweg i7].
Monxens (Le R. P. Théodore), S. J., 11 rue des RécoUets. Lou-
vain [M. Smarius. Kurvelscheweg 34].
MoRAGUEz (Le R. P. .loachim), S. J., Caspe 23, Barcelone
[Eerw. Zusters van O. L. Vrouw van Barmhartigheid, Kor-
vel].
MoRLiON (Le R. P. Urbain), M. A., prof, au Séminaire de
Bouc bout -lez-Anvers, Belgique.
Mortier (Le R. P. Florent), C. M. L, 476 Chaussée de Ninove,
Scheut-lez-Bruxelles, Belgique.
MosoNGi (M. le Di-. Léopold . prof, de théologie, Esztergom
(Gran) Hongrie [M. A. Leyten-Yan Roessbl. Hasseltstraat
232].
Molterde (Le R. P. Paul), S. J., Ore Place, Hastings, England
[M. J. B. Smans, Gasthuisstraat 19].
Paas (Le R. P. Johann . M. A., Trier [M. C. F. Bogaers. Gapu-
cijnenstraat 64].
Padtberg (Le R. P. August), S. J., Stimmen der Zeit. Veteri-
nàrstrasse 9. Miinchen [Franciscanessenklooster, Wilhelmi-
napark 114].
ADRESSES DES SEMAINIERS 23
PAEERATH Lo K. P. Il I a l'ci sius ; . O. F. M.. Patierborn i. \V.
:M. a. Boïnk. Noordstraat 3il.
J^EEiFFEH Mgr. Dr. Nicolas, Hlavna - ulica 34, Gassovie,
'l'rliécoslovaquie M. B. Pessers. Gaslhuisstraat 37].
Pinard de la Bolllayb [he R. P. Henry^ . S. J., 7 rue des
Augiistins, Enghien, Belgique ^M. le Dr. Schroeder. Zavï,]-
senstraat 9].
Prad.vs Le H. P. Deinetrio . S. J.. Sarria. Barcelom' [M" Veuve
Dr. Bloemen, Gastliuisstraat 24].
J-'HLEMM Le R, P. Garl), S. J., Ignatiuskolleg, Valkciiburg.
Hollande Fj-atershuis. (iasthuisstraat 681.
Rbmv ,M. U' Chanoine), prof, à lUniversité, 22 rue de Ligne,
Héverlé-Louvain.
RoGACS (M. le Dr. Franz . Szombathély, Ungarn M. A. P. G.
Van Eyndhoven, Antoniusstraat 22].
RuscHE (M. le Dr. Franz), Vicaire, Ruthen [M. Pessers-M.vn-
N.^ERTs. \\'jlli('lminai)ark] .
Sanda .m. le Di-. Adalbert), prof, à lUniv. de Prague [M" Veuve
Pressers-Verbunt. Wilhelminapark 11].
Sanders :.Z. Eerw. Heer), curé du Sacré-Gœui-, Xoordhoeck,
Tilbourg.
Sassen J.e R. P. Dr. J.;, O. P., prof. d'Ecrit. Sainte, Domi-
nikanei'klooster, ZwoUe, Hollande [M. Eni. Janssens, Koe-
slraat 116].
ScHEBESTA Le R. P. Paul), S. V. D., St. (jabriel-Môdling. bei
Wien [M. J. Van De Mortel-Houben, St. Jozefstraat 21].
ScHMiDT (Le R. P. Wilhem), S. V. D., St. Gabriel-Môdling, l>ei
Wien [M. J. Van De .Mortel-Houben, St. Jozefstraat 21].
Soumit M. labbé Léon), j)rof. au Grand Séminaire, Metz
]M. L. Van Eyck-Petit, Fabriekstraat 18].
ScHRiJNBN (M. le Dr. Joseph), prof, à lUniv., Willemsplant-
soen 7. Utrecht.
ScHVRGENs (M. l'abbé Joseph). 126 Avenue des gloires natio-
nales. Bruxelles [M. W. R. Van Boxtel. Korvelscheweg 40].
Sempels (M. l'abbé Victor,', prof, au Grand Séminaire. Matines
[M, S, B. D.A.ME8, Heuvelstraat 77].
24 ADRESSKS DES SEMAINIERS
Si:nn (M. le Dr. Alfred), directeur du Gymnase cath. de Kowno,
Litlnianie [M. J. Paymans, Goirkestraal 126].
Sloet (Mgr. D]'. D.). Abcoude, Hollande.
Synave (Le R. P. Paul), O. P., prof. d'Ecrit. Sainte, Couvent
du Saulchoir, Kain, Belgique [Dr. J. P. Le Blanc, curé
't Goirke, Goirkestraat 72].
SzENDY (AI. rabhé l^a.szlo), prof, de tliéologie, Szoml)atht'l.v,
Ungarn [M. W. Bergmans-Neesen. l^angestraRt 55].
Tchad (Le H. P. Franç-Xav.y, S. J., Hicn-Hien, Tcheuly-sud-
esi, Chine [Moederhuis, Ouden Dijk].
Teeuwen (M. St. W. J.), Villa End, Tegelen, Hollande.
Theininger (Le H. P. Karl), O. S. B., Stifl Admont, Steiermark,
Autriche [M* Veuve Van Castbren, Korvelschcweg 78].
Thoonen (Le R. P. Jean), miss. Mill Hill, Missiehuis, Roosen-
daal, Hollande [St. Jozef-Sîudiehuii*. Tongerl. Ho(*-fst,raai
175].
ToLL (M. le Dr. Johann Mich.), Doc. Oriental. Seniinar der
Univ.. Berlin [M'' Veuve Bruening, Bredascheweg 37].
ToTH (M. le Dr. Koloman), prof, de théologie, Esztergom,
Tingain [M. Th. Van Mierlo, Lange Nieuwstiaat 185].
TuMMERS (Le R. P. . S. J., pi'of. de théologie. Tongersche-
straat 53, Maastricht, Hollande [Retraitenhuis « Loyola » te
Vught].
TuRCQ (M. labbé Joseph), directeur au Grand Séminaire, 2 rue
Jean-Levasseur, Lille [Dr. J. P. Le Blanc, Goirkestraat 72].
Unkkl (Le R. P. Johann), S. V. D., Missiehuis, Teteringen.
Hollande.
Ttsch (Le R. P. August), S. J., T,gnatiuskolleg, Valkenburg.
Hollande Institut Nazareth, Nazarethstraat 70^].
Van CitOMBHrc.ijHi': (M. le Chanoine M. C), prof, à lUniv. de
Lou\ 'in [Cenakel, K'oningshoeven] .
Van Der Birot (Le R. P. . M. A., Procure des Pères Blancs,
Boxiel, Hollande Z. K. H. I^ras, curé de Ste. Anne, Capu-
cijnenstrrat. 271 .
Van Den Deyssel Le R. P. A.), miss. Mill Hill, Rector Mis-
ADRESSKH DES SKMAINIKKS 25
sieluii.s, Roijscndaal, Hollande St. J<i/.ef-81udiehuis, Tongorl.
Hoefslraat 175].
Van Deïs Oudkxryn (Le H. P. Marc. Ant.j, O. V., i)rof. au Coll.
Angelico, Rome [M. L. Bf::H(;MANS-MAHsÉ, Langestraat 57].
Van Der Meehsch (M. le Chanoine Joseph . Secret, de l'Evêché.
86 rue des Pieri'cs, Bruges, Belgique.
Van Der Veldt (Le R. P.), O. F. M., CouMMit de Wychen. Hol-
lande.
Van Grinhven (M. l'al)bé P. ,, (Trand Séminaire, Haaren, Hol-
lande.
Van Gils (M. labbé Dr.), Inspect. de renseignement cath. à
Roermond. Hollande.
Van Kessel (Le R. P. Conrad), SS. CC, Couvent de Valkenburg,
Hollande [M. le Recteur Dr. Goossens, Booschewegl.
Van Lamsweerde (M. Henri, baron), Rédacteur au Tijd, Gein-
tuurbaan 266 II, Amstei'dan).
Van Lith (Le R. P)., S. .J.. Suniafiastraat, Katwijk, Hollande.
Van Munster (M.). Prieslerseuiinar, Munster i. W. [M"" Th.
et E. Straeter, Zomerstraat 36].
^'AN Oppenraay (M. le l^r.>, prof, de théol. au Grand Sémi-
naire, Rijsenburg, Driebergen, Hollande.
Van Spaendongk (M. André), prof, au Lycée. Tilbourg.
Van Steenberghe (M. l'abbé Edmond), 2 rue -Jean-Levasseur,
Lille [Dr. L. P. Le Blanc, Goirkestraat 72].
Van Wely (Le R. P.), O. P.. prof.. Zwolle, Hollande [^1. A.
Heerkens. Nieuwiandstraat .57].
ViEGEN (Le R. P. Joseph), M. S. C, Missiehuis, Bredascheweg
204, Tilbourg.
Voort (M. Joseph de ; . Spoorlan 3. Tilbourg.
Walsh (Le R. P. (ierald G.), S. -i ., Campioii Hall. Oxford [Fra-
tershuis, Capucijnenstraat 76].
Wanger (M. Tabbé Willibald), Gaimersheim bei Tngolstadf.
Bayern [M. Th. J. de Nus, Heuvelstraat 79].
Wasilkowski (M. le Dr. L.), Priesterseminai". Wloclawek. Po-
logne [M. F. MoMMERS de RooY, Wilhelminapark 110].
Waters (Le R. P. L.), S. J., prof, de théologie, Maastricht,
Hollande [Retraitenhuis « Loyola », le Vught].
26 ADRESSES DBS SEMAINIERS
Wbber m. le Dr. Ant.), prof, au lycée de Dillingen, Bayern
:;M. m. N. Van Blerk, Smidspad 52].
WiEOEKHEHR (M. le Dr. Joseph), Seminardireetor. Kalocsa,
liigarn [M. C. Janssens-Minderop, Stationsstiaat 17].
WiENANDs (Le R. P. Gérard), M. S. G., Oeventrop, We.stplialie
' Mi.ssiehuis. Bredascheweg 204].
WiLLiNG (Le R. P. Joseph), M. S. C. Boppard a. Rh., Rheinland
^Missiehuis, Bredascheweg 204].
WiNTHUis (Le R. P. Joseph), M. S. C. Tûrkenstrasso 15. Mun-
chen [Missiehuis. Bredascheweg 204].
\\'rM)f<:nLi': M. le Dr. (ieorg.), j)rof. à TUniv.. Heidingsfeldef-
.stras.^o 32, Wurzhurg [M. J. .\. M. Stbinhoff. HpuvoI-
.straat 64].
Zempleni (Le R. P. Dr. ïheodor), O. S. B., pruf.. Gyor. Ungarn
[M. Van Oorsghot, Ringbaan 25].
SOMMAIRE DES CONFÉRENCES
[1] Séance d'ouverture
Après la iiipsse du Saint-Esprit, célébrée dans régiisf du
Sacré-Cœur par Sa Grandeur .Monseigneur révêque de Bois-le-
Duc, les Semainiers se rendent à la Bourse du coniniei-ce.
Koopwonsbeurs. gi'acieusement mise à leur disposition par la
municipalité ci 1res lunireusement aménagée |)ar le Comité
local.
Sur Testrade {»rennent place Mgr. UiiiPEN, M. le Pasteur
Sandbrs, le R. P. Geerts et les deux Secrétaires de la Semaine.
Le R. P. ScHMiDT, Secrétaire général, prend la parole.
Après avoir exprimé à Mgr. Diepen, protecteur très zélé des
missions, la reconnaissance de tous, poui' l'honneur qu'il leur
fait en présidant cette pi-emière réunion, et avoué l'émotion
qu'il éprouve à ouvrir, après de si formidables épreuves, la
irp Session, l'orateur en précise en ces termes le but et
l'esprit :
« Nous sommes réunis ici conune collègues dans les mêmes
études et comme enfants de la même Mère, la sainte Eglise
catholique. Ce double cmlte de la Science et de l'Eglise établit
enti'e nous des liens bien puissants. Les princi[)es du droit et
de la morale évangélique, que nous professons tous, le zèle de
la gloire de Dieu, qui nous anime et (|ui rcmjjorte dans nos
cœurs — n'est-il ftas vrai. .Messieurs — sur tout autre intérêt
personnel ou national, d'un mot notre commun amour pour
le Sauveur, nous permet de nous estimer et de nous aimer.
Persuadés que nous avons tous à apprendre les uns des autres,
que l'action des savants catholiques sefa d'autant plus efficace,
qu'elle sera moins dispersée, plus coordonnée, nous nous
efforcerons - et je suis persuadé, Messieurs, que ce sera
chose facile, quand je vois les i-eprésentants que chaque pays
nous a délégués - — de développer cette sympathie, d'affermir
cette union, au plus grand avantage de la Science et de notre
Foi. Charitas Christi urget nos.
28 séan(;e d ouverture
Ses reniercîmenls s'adressent ensuite à M. le Bourgmestre,
aux meiiittres du Comité local et loul spécialement au R. P.
(.4EE)rrs. qui en fut l'àme. TI ])oursuit :
« Ndulilions i)as les moi'ts. Il en est un surtout dont nous
senlii'ons douloureusement labsenc^e, le R. P. Frédéric Bou-
^•IER. S. .1., secrétaire adjoint. La mort qu'il trouva le 17 sep-
tembre li)iG, au champ d"lionneur de la Somme, près de Vei'-
mandovillers, comme auu]ônier-'brancardier, a causé une très
grave perte à la Semaine. Il fut un de ses fondateurs. Si j'en
eus moi-même la i)remière idée, que je lui comuiuni(iuai. il la
saisit avec tout l'élan de sa race et travailla à sa réalisation
avec un dévoûment sans liornes et la ténacité illuminée d'un
saint..
<< Je crois devoir vous lire ici les passages suivants de la
dernière lettre que j'eus la consolation de recevoir de lui, pen-
ilant la guerre, [tar l'intermédiaire d'un pays neutre, en date
du 19 février 1915. Seul le cher défunt aura le droit de pai'ler
de CCS temps-là. Nous autres, nous nous en tairons et nous
écouterons avec émotion sa \oix, (pii nous témoignera d'un
fait consolant : inter arma siluerunt Musae. sed non siluit Cha-
ritas.
Mon Révérend et bien cher Père,
Fax Ghristi !
Il faiU hivti tout de même que jv vous domw siy>ie de vie. Voi'ts pouvcs
croire que l'inimitié des nations fait oublier les anciennes amitiés et taire lu
charité. Oh non .' On peut aimer sa patrie, trotiver sa cause juste, se dévouer
pour elle, comme on le peut, espérer fermement dans son succès final — : ce
que je fais — et garder pur dans son cœur le cuite de l'amitié...
Quand le Bon Dieu aura-t-il pitié de la pauvre Europe, qu'il châtie et qu'il
éprotive ? Tous les peuples, à mon sens, avaient besoin de cette double leçon
— châtiment, épreuve — et ce serait orfjueil ou imprudence de vouloir doser
le mal, appelant le châtiment, on le bien, appelant l'épreuve, en chaque
nation...
Déjà vinçjt-deux jésuites français tombés dans cette yucrrc ! En verrai-je
la fin f A lu garde du Bon Dieu ! S'il hii faut encore des vies offertes volon-
tiers, qu'il prenne la mienne'; quand j'aurai fait dans mon régiment le bien
qu'il me desti/nait à faire.
Je vous reste bien cordialement ttni in Corde Jesu.
F. Bouvier, S. J.
<' Dans ces lignes se numifcste toute la noblesse, toute la
rectitude de sa nature et tout son esprit de sacrifice. La Semaine
d'Ethnologie Religieuse conservera toujours la plus vive mé-
SÉANCE D■OL■^'ERTURE 29
moire de tout ce (|u'il a fait pour sa fondation et son déve-
loppement. »
Après quelques mots de reconnaissant-e à l'adresse du
H. P. Pinard de la Roullaye, que le Comité international, à
l'unanimité, choisit pour succéder au R. P. Boi^vier, le Secré-
taire général ajoute :
« En terminant, Messieurs, Je (lt'\sire excuser votre nouveau
Secrétaire et m'excuser moi-même.
« Vous aurez remarqué peut-être, en consultant notre pro-
gramme, qu'on n'y trouve cette fois le nom d'aucun béné-
dictin, d'aucun dominicain, d'aucun Père du Saint-Esprit...
Je liens à vous assurer que nous sommes les premiers à le
regretter et que nous n'avons rien négligé pour qu'il en fût
autrement — et cela i)Our deux rtiisons : une raison de fait
d'abord, je veux dire parce que ces Congrégations comptent
des savants distingués dont la colkiboration nous aurait été
fort utile ; pour une raison de principe surtout, parce que nous
souhaitons vivement que la Semaine soit vraiment, non pas
l'œuvre d'une ou de plusieurs Congrégations, mais l'œuvre
commune de tous les bons serviteurs de l'Eglise et de la
Science. En réalité, seules des nécessités accidentelles ont
empêché les érudits de ces divers Ordres d'accepter nos invi-
tations. Laissez-moi citer Sa Grandeur Mgr. Le Roy, qui fut
un de nos premiers protecteurs, le R. P. 'Iruxes, son colla-
borateur, Dom OGunAUD, bénédictin de Farnborough. le R. P.
Mainage, dominicain, professeur à l'Institut catholique de
Paris, le R. P. Lagrange et le R. P. Dhorme, professeurs à
l'Ecole biblique de Jérusalem, le R. P. Lemonnyer, professeur
au couvent des Pères dominicains de Kain, à qui nous devons
l'édition si soignée des conférences de 1913... Plusieurs
d'entre eux, après nous avoir promis leur concours, ont dû se
dédire au dernier moment. Tous nous ont exprimé, avec leurs
regrets, l'espoir d'être des nôtres en des circonstances plus
favorables.
« Appuyé sur ces sympathies et sur les vôtres. Messieurs,
encouragé par les appréciations flatteuses dont vous avez pu
trouver (pielques exemples en appendice de notre dernier
Coniptp rr}ulv onahitique, confiant surtout dans le Sacré-Cœur,
à qui notre œuvre est consacrée, je déclare ouverte la IIP Ses-
sion de la Scniriinc. »
30 SÉANCE DOUVERTURE
Le H. p. Pinard de la Boullaye est invité à prendre la
parole.
« Au discours que vous venez d'entendre, Messieurs, je ne
vois, dit-il, vraiment nen à ajouter.
o Je remeirie vivement le H. P. Schmidt davoii' si bien
exprimé les sentiments de tous, j'entends surtout notre ardent
désir de travailler dans une charité parfaite au progrès de
la \ raie Science et à la défense de notre commune Foi.
« Permettez-moi seulement de rectifier dans cette allocutitm
deux petits détails : une exagération et un oubli. L'exagération
porte sur les éloges que le R. P. Schmidt m'a adressés ; l'oubli,
vous lavez deviné, concerne sa propre personne.
« Pour réparer cet oubli, je ne veux pas faire soulïrii' sa
modestie. Aussi bien na-t-il pas besoin de mes recomman-
dations. (>omme il suffît de le connaître pour laimer, il suflll
d'avoir lu ses ouvrages pour apprécier leur haute valeur
scientifique. Je serai heureux toutefois d'apprendre à quel-
ques-uns d'entre vous que son remarquable tiavail. Die Glie-
derung der aiistr alise lien Sprachen. a reçu de VInstitut de France,
en 1921, le prix Volney. Tous se réjouiront d'une distinction
si méritée.
<( Quant à celui {|ui succède au R. P. Bouvier, dont on vient
de louer si opportunément la mémoire, croyez. Messieurs, qu'il
n'a daulre désir que dimiter son prédécesseur, en se dévouant
à votre service avec toute son obligeance et la plus grande
cordialité. >>
Lorateur adresse ensuite, au nom de la Semaine, un hom-
mage de respect et de gratitude à Sa Majesté la Reine de
Hollande et à son gouvernement, les facilités accordées pour
la délivrance des passeports ayant été très appréciées.
« Et maintenant, conclut-il, mettons-nous à lœuvre. unis,
j'échaufïés, illuminés par ce foyer de lumière et damour qu'est
le Sacré-Cœur de Notre-iSeigneur Jésus-Christ ».
En quelques paroles chaleureuses. Mgr. Diepen souhaite la
bienvenue aux congressistes. Il leur exprime son entière
confiance dans tout travail scientifique conduit avec prudence
et réglé par les principes de la saine critique ; puis il bénit
l'assemblée.
Avant la première conférence, à laquelle Sa Grandeur tient
à assister, la séance est suspendue quelques instants.
TACHES DR LA SEMAINE 31
[2^] Tâches anciennes et tâches nouvelles
de la « Semaine d'ethnologie religieuse »,
par le R. P. W. ScHMiDT, S. V. D.
Si. avpc l'aide de Dieu, nous avons réussi à reprendre les
sessions de la Seniainc d'Ethnologie Religieuse, après un inter-
valle de presque une dizaine d'années, il semble bien ojjportun
d'instituer un examen l'étrospectif de nos premières sessions,
pour Ij'ouvei' les points où il faut renouer les fils, et surtout
poui' discerner mieux quelles tâches nouvelles il convient
d'ajouter à nos tâches antérieures. •
I. SITUATION PRÉCICDANT LA FONDATION DE LA SEMAINE
\. L'ancien évolutionnisme et l'opposition d'Andreir Long. —
JjCs hommes de pure science oublient quelquefois que le succès
d'une doctrine ne dépend pas seulement de sa vérité et de sa
valeur internes, mais à un assez haut degré de la situation
générale de l'évolution scientifique. Pour ce motif, toute doc-
trine qui plaçait la connaissance d'un Dieu unique, bon et
grand, au commencement de l'histoire humaine, demeura pen-
dant quelques dizaines d'années dans une situation très défa-
vorable. Presque tous les représentants de la nouvelle science
comparée des religions étaient totalement dominés par un
évolutionnisme plus ou moins illimité, qui ne reconnaissait de
<• grands dieux » qu'à la fin d'une longue évolution. Si les
théories succédèrent aux théories, si le naturisme fut remplacé
pai' le tnànisme et celui-ci par Vanimisme, auquel succéda le
magisme. en toutes le principe évolutionniste restait prédo-
minant.
Ce fut donc un acte de bravoure, une hardiesse considi'rable,
lorsque, en 1898. Andrew Lano s'opposa tout seul à cette
jrhaîange et l'arrêta par son livre célèbre, The Making of Reli-
gion. Comme il s'était ac(juis {)ar ses travaux précédents une
autorité incontestable, on ne pouvait le passer sous silence.
Il fut donc combattu, et vraiment de tous côtés. Il ne trouva
presque pas de partisans. Pourtant, parce que son autorité
restait inébranlable et parce que sa défense était plutôt une
attaque continuelle, il léussit à frayer le chemin : dès lors,
on put défendre des thèses anti-évolutionnistes sans perdre
32 W. SCHMIDT
aux yeux des hommes de science ses droits civiques. Sans
parler de quelques auteurs de moindre importance, ce fut le
célèbre indologue Léopold von Schroeder, de l'Université de
Vienne, qui élargit ce chemin par ses recherchés sur la reli-
gion des peuples indo-européens, couronnées par son gi-and
ouvrage, Die arische Religion. Deux volumes seulement sont
publiés, le regretté auteur étant décédé prématurément.
La situation s"était donc* considérablement améliorée, lors-
que, en 1906, ïAnthropos commença à paraître. Le terrain était
aplani. Nous pouvions cj-itiquer de plus en plus lévolution-
nisme régnant. Nos braves missionnaires nous fournissaient
des matériaux plus exacts et de nieilleur aloi, qui ne man-
quaient pas de seconder nos attaques et dapporter les fonde-
ments des nouvelles théories que nous essayions de construire.
Vous demanderez quelle fut lissue des combats acharnés
qui suivirent. - — Il faut distinguer. Les controverses se sont
produites sur deux terrains ; les résultats ne sont pas, jusqu'à
présent, égaux dans tous les deux.
2. Changement dans la sociologie. — Il y a d'abord le terrain
de la sociologie. Sur celui-ci, on ])eut dire, actuellement, que
la victoire est gagnée pour nous, la bataille perdue pour les
autres ; l'ennemi en désordre bat en retraite ou prend ouver-
tement la fuite. La théorie évolutionniste, préparée par Bagho-
FEN, perfectionnée par Morgan, continuée par Me Lennan et
d'autres, qui faisait commencer la société humaine par la
pi'omiscuité, à laquelle aurait succédé le mariage par groupe,
le matriarcat et la polygamie, théorie qui ne re(*onnaît la
famille individuelle monogame que comme la dernière phase
d'une longue sci-ic évolutive, est ébranlée dans ses fondements.
Quoiqu "admise si longtemps par la plupart des ethnologues
et des sociologues, elle comuience maintenant à être aban-
tionnée par les savants les plus réputés de ces deux sciences.
Ceux-ci, en effet, reconnaissent la famille individuelle mono-
game comme le point de départ de l'histoire sociale de l'huma-
nité.
Je pailerai plus en détail de cette modification étonnante
de la situation dans la conférence suivante ; mais il convenait
de relever ce fait dès à présent. L'évolution culturelle de
l'humanité est, en elTet, douée d'une unité organique. Il est
TÂCHES DE LA SEMAINE 33
vrai, il n"y a pas égalité, moins encore identité entre toutes les
phases de l'évolution dans toutes les branches de la culture ;
mais il y a de nombreux points de contact et de larges analo-
gies. Si donc il pst établi que, sur le terrain sociologique,
l'évolutionnisme pur est éJaranlé, il ne peut rester intact dans
la science des religions. Et si l'allure, la direction de la véri-
table évolution sociale est tout à fait le contraire de ce qu'af-
firmaient les anciens évolutionnistes, il est difficile de croire
que, dans l'histoire des religions, l'ancien principe puisse être
conservé intact. En tout cas, lopposition contre cet évolu-
tionnisme n'est plus seulement tolérée ; elle est formellement
admise ; on y fait attention ; on ne rejette plus a priori ses
assertions et, de plus en plus, elle gagne du terrain dans la
science des religions elle-même.
3. Changement dans la science des religions. — Il est vrai que
les théories évolutionnistes ont duré quelque temps. A la fin
du premier volume de mon Ursprung der Gottesidee, il me
fallait encore écrire : « A vrai dire, on éprouve une impression
étrange à comparer la diffusion dont la théorie magique peut
se vanter avec celle que la théorie d'Andrew Lang a obtenue
presque dans le même espace de temps. Il faut reconnaître
qu'à la première on a fait une réception beaucoup plus facile
et plus chaude qu'à la seconde )> (t. I, p. 488). J'ai décrit, dans
le même ouvrage (p. 105 ss.), la « défiance » avec laquelle
on accueillit la thèse d'Andrew Lang sur l'existence des
(( High Gods » même chez les peuples les plus primitifs. Mais,
dès 1906, un des américanistes et des mythologues allemands
les plus en vue, P. Ehrenreigh, dans son étude, Gôtter und
Heilbringer et plus encore dans son ouvrage Die allgemeinr
Mythologie und ihre allgemeinen Gn^undlagen (Leipzig. 19i2\
s'attacha ouvertement à l'opinion de Lang.
L'année même où parut l'édition allemande de mon Origine
de Vidée de Dieu (1912), James H. Leuba, le psychologue amé-
ri(^ain bien connu, publia son ouvrage, A Psychological Study of
Religion ; its origin, function and future (New York) . Dans ce
livre, il me fait le plaisir de m'appeler « a well informed
person, who is evidently before ail else a priest of the Roman
Gatholic Church and an apologist of the traditional Christian
System » (c. I, p. 10, 102), ce qui ne l'empêche pas de recon-
3
34 w. scHMint
naître tout droit « that Iherc exists among the most primitive
peuples now living the action of a Great God high above ail
others, to whom is usually assigned the function of creator »
(p. 103 ss.) ; seulement, il rejette le terme « monothéisme » et
donne de cet être une explication psychologique spéciale.
Deux ans plus tard, j'eus le plaisir de voir qu'un des auteurs
que j'avais critiqués dans mon Ursprung der Gottesidee
(p. 440 ss.), K. Th. PREU8S, quoique maintenant en grande
partie ses anciennes théories magistes, faisait cette impor-
tante concession, qu'il est impossible de nier que les grandes
divinités préanimistes défendues par Andrew Lano et moi se
trouvent déjà chez les peuples les plus primitifs. L'explica-
tion qu'il donne ensuite de ces Etres Suprêmes est, il est vrai,
loin d'être satisfaisante. On trouve tout cela dans son ouvrage,
Die gcistige Kultur der Naturvôlker (Leipzig-Berlin, p. 59 ss).
Deux années plus tard, l'ancien professeur de Leipzig, ac-
tuellement archevêque (protestant) d'Upsal, le Dr. Nathan
SôDERBLOM, publia son ouvrage, Bas Werden des Gottesglaubens
(Leipzig, 1916). J'en ai fait une critique détaillée dans VAn-
thropos (1915-16, t. X-XI, p. 668-680), où j'ai montré en
combien de points importants il laisse à désirer, quant k sa
manières de caractériser les Etres Suprêmes, auxquels il donne
le nom d' « Urheber « (auteurs). Mais il est intéressant de
noter à quelles concessions il se voit forcé : « Les mission-
naires, dit-il, ont obtenu raison, et pourtant pas raison tout
à fait. Ainsi va le monde. Ils n'ont jamais cessé de parler de
la haute divinité des peuples primitifs. La science croyait
savoir mieux. On ne pouvait concéder aux « sauvages » quel-
que chose d'élevé. On croyait que l'évolution devait procéder
du plus bas au plus haut » {l. c, p. 376). « Seulement celui
qui s'est fait esclave de théories au point de s'imaginer, même
à l'égard de la réalité, qu'il connaît mieux toutes choses, n'a
pas besoin, même maintenant, de prêter attention à Bayami
et autres divinités de ce genre. Tout comme on ne peut sou-
tenir que celles-ci soient des objets de la nature, des âmes
ou des esprits, ainsi l'animisme, même dans la limitation que
j'appelle animatisme, ne peut davantage suffire comme expli-
cation totale. La révision est chose désagréable. Mais si la
science ne soumet pas continuellement les théories existantes
TÂCHES DE LA SEMAINE 35
à de nouvelles révisions, on ne saurait plus longtemps lui
reconnaître le nom de science » {l. c, p. 378). La révision
est « désagréable » : c'est en effet la vraie explication psycho-
logique de ce fait, que les Etres Suprêmes des peuples pri-
mitifs durent attendre si longtemps, avant d"ètre reconnus par
les représentants de la science des religions.
Dans ces derniers temps cependant, les cas commencent à
se multiplier où, même dans ces cercles, on s'incline devant
la force des faits. J'en énumère ici quelques-uns outre les
plus importants.
Un des psychologues allemands les plus réputés, le Dr. K.
Oesterreich, professeur à l'université de Tubingue, dans son
ouvrage, KinfiïJirung in die Religionspsychologie (Berlin, 1917)
et un peu aussi dans un autre ouvrage, Das Weltbild dçr Gegen-
wai't (Berlin, 1920), accepte résolument l'existence des Etres
Suprêmes dans les premières phases de l'évolution religieuse.
Ainsi il dit, à propos des Pygmées, dans le premier ou-
vrage : (i En face de l'état rudimentaire de leur culture, ce
fut une grande surprise pour tous les chercheurs qui s'occu-
paient plus intimement des Pygmées, de constater que, sous
le rapport éthique et religieux, ils se trouvent à un niveau
beaucoup plus élevé que les races avoisinantes de haute sta-
ture » {l. c, p. 104). « Il est surprenant, écrit-il ailleurs, qu'ils
paraissent s'en tenir à un point de vue presque monothéiste.
Sur ce terrain, il est vrai, bien des choses sont encore obscu-
res, mais, dans rensem'ble, on ne peut se soustraire à l'im-
pression que la vérité est située dans la direction cherchée par
le P.^W. ScHNHDT dans sa monographie méritoire, Die Stellung
der Pygmàenvôlker in der Entwickhingsgeschichte des Menschen
(Stuttgart, 1910). Oesterreich reconnaît aussi la grande dif-
fusion de l'existence d'Etres Suprêmes de caractère éthique,
chez les autres peuples primitifs en général (p. 124 ss.). Il dit,
visant la théorie de la dégénérescence : « Si la cote ethnolo-
gique de la théorie de la dégénérescence est aujourd'hui assez
basse, aucun savant cherchant la vérité objective ne doit
repousser cette théorie a limine. L'examen de fait du problème
de la dégénérescence des peuples primitifs est encore à insti-
tuer. Cette question fait partie d'un problème plus général que
voici : quelle est la mesure des changements auxquels les
3 G W. SCHMIDT
jieuples primitifs peuvent être soumis au cours des temps ?
La foneeption traditionnelle de la stabilité totale des cultures
pi'imitives vient de commencer à chanceler » {l. c. p. 126).
Dans mon article. Die kvlturhistorische Méthode und die
nordamerikanische Ethnologie {Anthropos. 1919-20. t. XIV-XV.
].. 5 47 ss.), j'ai attiré Tattention sur rimj)ortante Retiriim
Addres.s. « Some Anthropological Misconceptions », dans la-
quelle l'ancien jjrésident de V Anthropological Society o(
Washington (mai 1917), M. Swanton, attaquait avec la plus
grande verve Tévolutionnisme dans l'ethnologie et surtout
dans la sociologie et l'histoire des religions. Il rejette les
théories de Spencer, Tylor et Frazer, comme s'appuyant trop
sur des phénomènes particuliers ; les différents éléments que
ces auteurs préconisent dans Itmrs théories existent, selon
SwANTON, Vun à côté de l'autre, et non Vun après Vautre. Il
ajoute : « Même pour ce qui regarde notre monothéisme ré-
gnant, la question l'este ouverte de savoir s'il n'est pas en
connexion avec une croyance à un dieu des cieux (skygod)
qui remonte jusqu'aux plus anciens jours de la religion parmi
les hommes, de telle sorte que le seul changement qu'il aurait
subi sérail l'imjjortance relativement plus grande et la spiri-
lualisation plus profonde de cette idée dans les temps plus
récents ». [American Anthropologis t, 1917, t. XIX, p. 466).
Avant lui, un autre américaniste célèbre, le Dr. A. L. Kroe-
BER, professeur à 1 Université de Californie, avait lui-même
insisté avec grande force sur l'existence d'un Dieu Suprême,
vrai Créateur, chez les tribus de la Californie Centrale, tribus
qu'avec tous les autres américanistes, il compte parmi les
plus primitives de toute l'Amérique Septentrionale. Il écrit :
« Dans la Californie Centrale, il y a toujours une vraie créa-
tion du monde, de l'humanité et de ses institutions. L'idée
du créateur est souvent tout à fait auguste {lofty) et en gé-
néral, on ne raconte de lui ni aventures, ni défauts ridicules.
Souvent il y a une antithèse entre ce créateur bienfaisant et
vi'aiment divin et un autre pei'sonnage, ordinairement le
Coyote, qui d'une part collabore avec le Créateur, mais par
ailleurs lui est contraire et esl responsable de la mort de
l'homme et des auti-es imperfections qui existent dans le
monde. » The Religions of the Indians of Califomia : University
TÀCHKS DE LA SEMAINE 37
of Galifornia Publications of American Arclieology and Ethno-
logy, 1906-1907, t. IV, p. 343).
Pour une tribu spéciale de cette contrée, les Maidu, un troi-
sième célèbre américaniste, le Dr. R. Dixon. déci-it ces Etres
Suprêmes dans les termes suivants : « Un des traits les plus
caractéristiques des mythes est le contraste tranché et stable
des caractères du Créateur et du Coyote. Dans toute la série,
le Créateur est uniformément digne et bienveillant. Jamais il
n"est en relation avec les choses ridicules. Toujours il s'efforce
de rendre la vie facile pour Thomme, immortelle et heureuse.
De l'autre "-ôté. Coyote lui est toujours opposé ; il s'entête à
rendre la vie dure et à vouloir que l'homme souiïre 5t meure. «
Bulletin nf tke American Muséum of Natuml Historif. t. XVII.
p. 336). Avec quelle rigueur logique l'idée de la création est
conçue chez ces tribus, M. Dixon l'expose ainsi : « Le problème
de l'origine des choses i»araît avoir grandement préoccupé
l'imagination des Maidu. Ils n'ont pu se contenter d'accepter
un monde <léjà créé et prêt à être habité, lorsque les ancêtres
de l'humanité y arrivèrent après un séjour en d'auti'es lieux,
comme c'est le cas dans les mythes du Sud-Est de la Cali-
fornie. De même, la création chez eux n'est pas seulement un
épisode, une re-création api'ès un déluge amené par une cause
ou par une autre, comme c'est le cas dans quelques autres
mythobigies. Chez eux. la création est un réel commencement ;
ilerrière, beyond, il n'y a plus rien. Au commencement, il y
avait uniquement la grande mer tranquille et illimitée, vers
laquelle du clair ciel le Ci-éateur descendit, ou sur laquelle lui
et Cniiott' étaient flottant dans un canot » ; [l. c, p. 325 ss.) .
Cette jiortion de la religion de ces tribus de la Californie
Centrale, question de la plus haute importance, je l'ai traitée
plus en détail dans un article, Die Altstàmmf Nord-Amerikas.
qui pai-aîtra sous peu dans la Festschrift zum 70. Geburtstag
E. Seler.s. le célèbre mexicaniste.
Tout récemment un autre américaniste, A. A. Goldenweiser.
dans son ouvrage important. Early Civilization : An Introduction
to Anthropology (New York, 1922), consacre un chapitre spé-
cial à r <' AU Father ». 11 ne distingue pas assez les formes
secondaires et mixtes des formes primaires, attestées chez les
peuples les plus anciens. En conséquence, sa notion de l'Etre
38 W. SCHMIDT
Suprême ii"est. pas judicieusement délimitée. Mais, quant à la
question de fait, il conclut : « Le contact de tribus primitives
avec la civilisation a été partout assez fréquent ou probable,
pour ne pas rendre tolérable TinterpriMation de 1" « AU Father »
comme un emprunt. Mais la grande diffusion géographique de
ces croyances fait pourtant hésiter à accepter cette interpré-
tation. Après tout, psychologiquement, il n'est pas impossible
qu'une idée plus ou moins vague d'un Etre Supérieur se soit
dtn^eloppée parmi des tribus primitives à la même époque à
peu près que l'animisme, la magie et d'autres formes de
croyance primitive. Le problème appelle des investigations
ultérieures » {l. c, p. 214).
Au dernier moment, un grand ouvrage vient de paraître qui
s'occupe uniquement de l'origine de l'Etre Suprême. C'est
l'ouvrage de R. Pettazzoni, Dio, Formazione e sviluppo del
Monoteismo nella storia délie religioni (Rome, 1922), en trois
volumes. Le premier traite des Etres Suprêmes des peuples
primitifs, le deuxième du Dieu Suprême des peuples poly-
théistes, le troisième du Dieu Unique des religions mono-
théistes. C'est la collection la plus vaste des faits relatifs à
toute cette question. On y trouve la reconnaissance très ré-
solue de l'existence de l'Etre Suprême chez tous les peuples
primitifs. L'auteur rejette l'origine animistique et magique de
cet Etre ; il le fait procéder de cette façon de penser mythique
qui. d'après lui, préside à toutes les formes de la religiosité
des primitifs. Ce serait du ciel, et de tout l'ensemble des
phénomènes célestes, que serait dérivé, par l'effet de la per-
sonnification mythologique, l'Etre Suprême ; il aurait dès lors
toutes les qualités nécessaires pour devenir dieu suprême,
dieu unique, créateur de l'univers et régulateur éthique de
toutes choses. La faiblesse de cette synthèse, d'ailleurs gran-
diose, provient de ce fait que l'auteur a complètement négligé
de déterminer l'âge respectif des différentes formes d'Etres
Suprêmes. Il lui est donc absolument impossible de déterminer
quelles sont les formes les plus anciennes. Et pourtant, c'est
uniquement par ces formes plus anciennes que peut s'éclairer
la véritable origine de l'Etre Suprême, les formes postérieures
ne constituant que des variations secondaires. De cette façon,
l'auteur ne parvient pas à apprécier de manière correcte l'acti-
TÂCHES DE LA SEMAINE 39
vite logique dft Tesprit iiuniain, qui se manifeste dans la recon-
naissance d'un Etre Suprême comme créateur et donc comme
cause de tous les êtres. Le livre mérite toutefois d'être étudié
de près ; je donnerai un compte fendu détaillé dans ÏAnthropos
(1921-22, t. XVI-XVII).
^'ous pouvons encore être très satisfaits de ce que, juste
dans ce pays qui offre à notre Semaine sa généreuse hospita-
lité, un savant de renom, avantageusement connu comme voya-
geur et comme théoricien, le professeur A. \V. Xieu-wbnhuis.
dans lo discours solennel qu'il prononça comme Hector magni-
fîcus de l'Université de Leyde, le 9 février 1920, a ouvertement
proclamé son assentiment aux choses que nous avions établies.
.\ndrew Lang dans son Making of Religion et moi-même dans
mon Urspning der Gottesidee. Ses recherches personnelles de
grande valeur l'ont amené aux mêmes résultats que nous. Il
les a formulés dans les termes suivants : « Nous sommes
d'avis que le Grand Esprit (Allgeist) est la première phase
d'une idée de Dieu qui s'est réalisée par l'impression que 1-e
monde comme totalité faisait aux origines sur lesprit de
l'homme, dès qu'il commença à se rendre compte de ce qui
existait hors de lui. Avec cette origine de l'idée du Grand
Esprit s'accoi'de ce fait, que la personnification des Seigneurs
du Jour et de la Nuit, le Soleil et la Lune, et de quelques-unes
des plus importantes étoiles comme divinités, sans interven-
tion aucune de l'idée des esprits, ne se réalisa que plus tard,
mais déjà chez les peuples les plus primitifs. A une époque
ultérieure, se développèrent les idées d'esprit, par suite des
impressions les plus fortes, exercées par les objets secon-
daires sur les penseurs parmi les peuples primitifs. Par ce
processus s'explique encore le phénomène curieux que l'idée
du Grand Esprit et surtout son culte s'évanouirent de plus en
plus, dans la mesure où augmentait le nombre de ces esprits
présidant aux départements de la nature qui pour la masse
du peuple sont d'une importance plus immédiate dans la vie
quotidienne. » (A. W. Nieuwenhuis, De Menach in de Werkelijk-
keit ; Zijne Kenleer in den heidenschen Godsdienst, Leiden, 1920,
p. 30-31 ) . J'ai fait un compte rendu détaillé de cette étude, ainsi
que d'autres ouvrages du savant :iuteur, dans Anthropos,
1919-20, t. XrV-XV, p. 1151-1158.
-40 W. SCHMIDT
A quelles concessions sont déjà parvenus les représentants
de l'ancien évolutionnisme, on peut en juger par ce qu'écrit
sur les Etres Suprêmes des primitifs, dans ïlllustrierte Vôlker-
kunde du Dr. Buschax (2* édition récemment parue, Stuttgart.
1922), l'auteur de lintroduction générale, R. Lasch. Il ne voit
de refuge que dans le mystère de l'inconnu : « Les cas de
monothéisme primitifs... dit-il, appartiennent, avec la langue et
la formation de la famille, à ces énigmes des commencements
de la culture humaine qu'il sera probablement à jamais impos-
sible de résoudre » (l. c, p. 40). Les rôles paraissent donc
complètement changés : ce n'est pas nous ; c'est l'évolution-
nisme. qui invoque le mystère de l'insondable, pour échapper
aux conséquences que l'on pourrait déduire d'un monothéisme
primitif !
4. Origine et développement de V école historique. — Mais à
mon avis, un fait plus important que tous ces cas, nombreux
mais dispersés, de reconnaissance plus ou moins nette d'Etres
Suprêmes au commencement de l'histoire de la Religion, est
l'invention d'une méthode sûre et ferme par laquelle il est
possible d'ébranler Tévolutionnisme à sa base même et de
poser les fondements d'une nouvelle science des religions.
C'est là ce qui constitue, parmi les améliorations de la situa-
tion générale qui se sont produites au cours de ces dernières
années, la troisième et la plus importante. Dans son ouvrage
Histoire des Religions et Méthode Comparative (Paris. 1912).
M. FoucART avait insisté sur le fait que l'ethnologie n'avait à
sa disposition aucun moyen certain pour établir l'âge histo-
rique d'une phase, d'un élément. Il continuait triomphalement :
« Le plus piquant serait si, quelque jour, c'était la méthode
historique qui. en reprenant pour son compte les données four-
nips par lenquête ethnologique, et en l'ajustant aux cadres
de ce qu"ont laissé les « civilisés », arrivait à présenter les
choses en bon ordre » (l. c, p. cvii) . A quoi j'ai fait remarquer
qu'il y avait une chose encore plus piquante : à savoir que,
depuis plusieurs années, une école ethnologique était déjà à
l'œuvre pour employer la méthode historique, et que M. Fou-
CART ne s'en était pas aperçu (Anthropos. 1913, t. VIIT, p. 90;.
En effet, les défauts de l'ancien évolutionnisme, qui à vrai
dire ne possédait aucune méthode proprement dite et se
TÂCHES DE LA SEMAINE 41
contentait d'établir des séries évolutives d'après des jugements
subjectifs de valeni', ces défauts, dis-je, se faisaient sentir de
plus en plus. Ils ont amené, par réaction, la création de la
« kulturhistorischr Méthode >> par Ratzel, Frobenius, Graebner,
Ankermann et moi-même.
'lYès tôt, jai relevé dans VAnthropos l'importance capitale
de ces tendances et je crois que, de toutes les revues ethnolo-
giques, ('"est surtout VAnthropos qui a le plus efTicaceinent
contribué à la diffusion croissante de ce mouvement. Dès 1911,
dans mon article Die kultvrhistorische Méthode in der Ethnologie
[Anthropos, t. VI, ]i. 1010-1036 , j'ai pu appeler l'attention sui'
des mouvements semblables en Angleterre et en Amérique.
Dans un article tout lécent. Die kulturhistorische Méthode und
die nordamerikanische Ethnologie Anthropos, 1919-20. t. XIV-XV.
p. 546-563), j'ai pu constater que ce mouvement a gagné du
terrain, et de façon très notable, surtout dans l'Américanisti-
que. Dans le prochain numéro de VAnthropos, je suis à même
de compléter encore ces inriications, en signalant à l'attention
des ethnologues deux importants ouvrages de célèbres améri-
canistes : Primitive Society par R. H. Lowie (New York, 1920)
et Die Kultur der kalif omise hen Indianer par Fr. Krause (Leipzig,
1921), et en faisant connaître un troisième ouvrage qu'on peut
appeler le pendant américain à l'ouvrage bien connu de
Graebner, Die Méthode der Ethnologie (Heidelberg, 1911). C'est
le livre Time Perspective in AboriginnI American Cultnre, a Study
in Method. par E. Sapir.
Quand on considère ces faits, qui sont du domaine public,
et (luand on sait, par voie de relations personnelles, qu'un
nombre toujours croissant de chercheurs plus jeunes se sont
ralliés à l'école historico-culturelle, il n'est pas trop audacieux
de dire que sur ce terrain aussi la défaite de l'ancien évolution-
nisme est dès à présent assurée, et que sous peu la méthode
historique dominera dans toute l'ethnologie.
'Dans ces circonstances, Messieurs, vous comprendrez à
présent d'autant plus vite la grande importance que j'ai tou-
jours attachée à cette méthode dans notre Semaine.
II. TACHES ANCIENNES DE LA SEMAINE d'ETHNOLOGIE
Dès nos premières sessions, j(^ me suis fait un devoir d'ini-
tier ses auditeurs aux règles de cette méthode et de leur faire
42 NV. SGHMIDT
connaître les résultats obtenus par les ouvrages qui les appli-
quent. Les programmes des deux premières semaines en
témoignent suffisamment. Peut-être ne comprit-on pas partout
pourquoi j'attribuais une si grande importance à ces études.
Aujourd'hui, je crois que tous m'ont compris. Si la longue
interruption de nos sessions, de 1913 à 1922, a eu certainement
assez de conséquences nuisibles, elle a eu aussi un avantage
considéi-able : elle nous a procuré assez de temps pour laisser
mûrir tranquillement les gi-aines que nous avions semées. Il
me semble qu'elles commencent 'à porter une excellente et
abondante récolte.
Je crois que nous comprenons tous à présent combien, en
l'absence d'une vraie méthode, l'ethnologie a souffert, a même
été maltraitée et que, pour elle comme pour toute vraie science,
son existence même et ses vrais progrès dépendent de ce point :
si oui ou non elle a trouvé sa juste méthode. Or. dans l'Ecole
historico-culturelle, il faut distinguer deux choses : la méthode
historique, qu'elle proclame, et les résultats, surtout la déter-
mination des cycles culturels qu'elle a établis à l'aide de celte
méthode. Il ne peut plus être douteux que la méthode histo-
rique soit la vraie et seule méthode de l'ethnologie et que sans
elle ni la psychologie, ni aucune autre science ne peut faire
œuvre utile sur son terrain. Naturellement, cette méthode en
est à ses débuts et doit être encore élaborée, complétée, cor-
rigée dans le détail. Cela est encore plus vrai pour les cycles
culturels établis par cette école. Non seulement il n'est pas
illicite, mais il est même très nécessaire de les soumettre à
une critique rigoureuse, de les corriger, de les compléter en
beaucoup de détails. J'ai fait usage moi-même de ce droit et
j'ai rempli mon devoir scientifique, en critiquant les autres.
Je suis, naturellement, pleinement consentant et même très
reconnaissant, si les autres exercent le môme droit et remplis-
sent le même devoir vis-ià-vis de mes propres travaux. Ce n'est
que par une critique impartiale et portant sur tous les points
que nous parviendrons à découvrir nos défauts, pour les éli-
miner et faire alors des progrès solides.
Les progrès considérables que nous avons faits se mani-
festeront, j'en suis sûr, dans notre troisième Semaine. Ils se
manifestent aussi en deux publications nouvelles. La première
TÂCHES DE LA SEMAINE 43
est l'ouvrage en deux tomes de notre Secrétaire adjoint, le
H. P. Pj^ARD, sur Jhisto.ire des études^ comparatives et sur les
diverses méthodes qui leur conviennent (1) ; la seconde est
l'étude do notre estimé confrère, M. le^chanoine Bros (2\ sur
rhistoire et les règles de la méthode historico-culturelle en
général. Si je vous dis qu'au cours de cette année, également,
paraîtra la première partie de l'ouvrage publié par moi et mon
confrère, le IL^^Koppers, Vôlker und Kulturen {S- . qui com-
prend l'histoire et la méthode de l'ethnologie, la sociologie, la
vie économique et l'ergologie, vous verrez alors que nous
serons sous peu en possession de trois ouvrages qui seront
pour nous d'importants instruments de travail et des sources
de multiples informations.
J'estime surtout favorable que les deux premiers ouvrages
soient écrits en français, parce que de la sorte ils répondent
davantage aux besoins des pays à langues romanes. Nous
aurions besoin encore d'une ouvrage de ce genre en langue
anglaise. La traduction anglaise, qui paraîtra sous peu en
Amérique, du livre bien connu du R. P. Koppers, Die Anfàng^i
des menschlichen Gemeinschaftslebens im Spiegel der neueren
Vôlkerkunde (M. Gladbach. 1921), pourra remplir provisoire-
ment cette lacune.
iSi nous apprécions dans leur ensemble ces importantes amé-
liorations de la situation générale, et si nous y ajoutons les
progrès non moins considérables que nous-mêmes avons pu
faire quant à nos connaissances, nos aptitudes diverses et
notre équipement scientifique, il me semble en conséquence
que de nouveaux devoirs s'imposent à nous, que de nouvelles
tâches commencent à se préciser.
Jusqu'ici, nous nous sommes bornés pour une large part à
taire la ci'itique de nos adversaires, à prendre note de l'état
actuel de l'ethnologie et de la science des religions et à le
faire connaître. C'est œuvre plutôt négative et réceptive. Or.
il est certain qu'en se bornant à ce genre de travail, on ne
(1) L'étude comparée des religions, 2 in-8°, Paris, Beauche.sne, t. 1, son
histoire, 1922 ; t. II, ses méthodes (sous presse).
(2) L'ethnologie religieuse : ïntrod. à l'étude comparée des relig. primitives,
in-8°, Paris, Bloud, 1923.
(3) Formant le t. III de la série Der Mensch aller Zeiten, ln-4", Regensburg.
Habbel.
44 W. SCHMIDT
parvipnt pas à obtenii' une vraie autorité et à gagner une
influence etlicace ^^ur le ilpvoloppement scientitique. Encore
moins jirend-on une part active aux efforts des chercheurs
poui' découvrir des trésors nouveaux et pour dégager, par un
travail consciencieux et assidu, les précieux fruits de ces
recherches. Or, ce nest que par cette tidèle collaboration à
dautres vrais savants qu'on obtient le droit de porter un
jugement sur les ouvrages parus et sur les travaux en voie
d'exécution. D'un autre l'ôté, on n'apprend pas une méthode
})Our elle-même, mais pour l'employer pratiquement dans les
recherches, les analyses, les synthèses à faire. C'est un instru-
ment de travail scientifique, l'instrument indispensable pour
obtenir des résultats sûrs, mais aussi un instrument dont il
est indispensable de faire usage si, par ailleurs, il est raison-
nable de s'intéresser à lui et de vouloir en quelque sorte
l'acquérir. .
III. TACHES NOUVELLES DE LA SEMAINE d' ETHNOLOGIE
Tout cela, me semble-t-il. crée |M)ur uoti-c Semainr une
situation nouvelle, situation qui ne jiourra manquer d'avoir
son influence sur la nature et la formation de ses programmes.
Elle doit rester et elle restera toujours un moyen d'apprendre ;
mais elle déviait devenir, et plus qu'elle ne le pouvait par le
passé, un instrument pour stimuler, poui- faciliter, peut-être
aussi pour organiser notre activité sur le terrain de cette
science. Elle devrait suggérer les sujets les plus actuels, les
plus pressants à traiter, les plus importants à éclairer par des
recherches. Elle devrait donnei' (\o^ conseils, non seulement de
méthode générale, mais de nature plus spécifique et plus
concrète sur la manière d'entreprendre (;es travaux. Elle de-
vrait, selon la mesure de son pouvoii'. seconder ces travaux,
en procurer les moyens, assurer ou faciliter les' relations
nécessaires. Elle pourrait peut-être aussi organiser des tra-
vaux d'ensemble.
Voilà un premier aspect de la situation nouvelle qui se
découvre à nos yeux. L'autre résulte des multiples occasions
qui sont à notre disposition d'obtenir des matériaux jdus am-
ples, plus détaillés et plus sûrs chez les peuples civilisés ou
demi-civilisés. Ici, nous avons des collaborateurs sans pareil.
TÂCHES DE LA SEMAINE 45
hors de pair, clans nos chers missionnaires. Ils ont toujours
rempli leur devoir dans ce genre de travail, et depuis l'appa-
rition de V Antkropos — qui a été fondé avant tout pour faciliter
et diriger cette précieuse activité — leur zèle et leur dévoue-
ment ont pris un dévelopiiement encore plus grand : c'est sur-
tout au nombre et à la richesse des documents originaux pu-
bliés par eux qu'il l'auL ath'ibuer la grande autorité acquise
par celte revue dans les cercles scientifiques.
Cette activité toutefois s'exerçait partout un peu au hasard.
Elle dépendait de la bonne volonté, du zèle et de l'Tiabileté
occasionnels de tels ou tels missionnaires, dispersés ça et là
dans le vaste champ des missions. J'ai acquis naturellement
une certaine expérience, en (iirigeant VAnthropos. Elle ma
donné la conviction que ces hasards continueront toujours à
exercer une intluonce considérable. Mais cette expérience me
permet également de croire que cet état de choses peut être
modifié pour une large part. Et il me paraîtrait qu'une œuvre
comme notre Semaine, fondée et soutenue par les représen-
tants de tous les Ordres et Congrégations qui exercent l'acti-
vité missionnaire, serait l'organe le plus apte et qui aurait le
plus d'autorité pour remplir la tâche que vous entrevoyez ici.
Cette nouvelle tâche ne jiouvait être définie avec la clarté et
l'exactitude suffisantes qu'à présent, où, grâce aux travaux de
la méthode historique, nous sommes à même de discerner de
manière plus sûre quels sont les peuples les plus anciens et
pour autant les plus importants, à même aussi de reconnaître
les éléments culturels qui présentent le plus d'intérêt pour
les problèmes à résoudre.
Cette nouvelle tâche consisterait donc à désigner plus en
détail et au concret telle tribu, tel élément, tel problème qui
appelle des recherches plus urgentes ou spécialement utiles, à
se mettre en relation avec l'Ordre, la Congrégation qui aurait
des missions chez les tribus en question, en vue d'obtenir
parmi ses missionnaires quelqu'un qui, pour un certain temps,
serait destiné spécialement à entreprendre ces travaux, et à
former ces travailleurs de manière plus appropriée. En d'au-
tres cas, on pourrait examiner s'il ne serait pas possible
d'envoyer d'i(;i, de l'Europe, ou de l'Amérique, un spécialiste
muni d'une foimalion technique, (jui, en parfaite harmonie
46 W. 8CHMIDT
avec les missionnaires en activité, aidé par eux et les aidant,
pourrait entreprendre ou diriger ces recherches.
Il n y a personne qui ne voie combien par de telles mesures,
par une telle organisât ion, notre activité dans le champ des
recherches ethnographiques deviendrait, elle aussi, plus mé-
thodique, s'étendrait en largeur et gagnerait en profondeur.
Mais si l'ethnologie a fait des progrès considérables, grâce
aux travaux de l'école historique, ce sont aussi ces mêmes
progrès qui exigent amélioration et perfectionnement dans la
manière de réunir les matériaux ethnographiques. Les temps
du dilettantisme superficiel sont à présent passés en ethno-
logie, dans la mesure même où elle est devenue une vraie
science. Il ne suffît plus de lire quelques récits de voyages et
quelques manuels évolutionnistes pour être ethnologue et pour
écrire des ouvrages ethnologiques : cette science, maintenant
en possession d'une méthode, d'instruments de travail, d'une
abondante littérature, demande une formation spécifique, une
préparation technique, compréhensive et pénétrante. Si donc
nous ne voulons pas rester en arrière sur un terrain où, jus-
qu'ici, nous pouvions marcher au premier rang, à la tête, il
faut nous conformer et nous adapter aux exigences plus sé-
vères de cette situation nouvelle, si favorable pour nous à
tant d'égards. Vraiment, nous ne pouvons mieux faire que de
collaborer de toutes nos forces à maintenir ces avantages et à
les développer.
Voilà, Messieurs, quelques aperçus sur les nouvelles tâches
qui, à mon modeste avis, s'imposent à notre Semaine. Le temps
nous a manqué pour donner à ces idées, dès à présent, une
réalisation complète dans le programme q^ue vous avez sous
les yeux. Aussi bien n'aurait-il pas été prudent d'essayer de le
faire pour le moment, parce qu'il faut d'abord discuter ces
idées, pour voir dans quelle proportion elles, seront à retenir
ou à modifier et de quelle façon elles peuvent être réalisées
pour répondre mieux au but général que nous poursuivons.'
J'ai cru pourtant qu'il n'était pas nécessaire de rester plus
longtemps sur le terrain purement théorique, et qu'il serait au
contraire plutôt utile de réserver dès maintenant, le vendredi 8
et le samedi 9 septembre, trois séances entières pour discuter
ces idées. Peut-être trouverons-nous d'autres loisirs encore,
TÂCHES DE LA SEMAINE 47
au cours de la Semaine, pour continuer et compléter ces dis-
cussions.
Dans la première de ces séances de délibération, nous discu-
terons les tâches et sujets sur lesquels doit s'exercer l'activité
scientifique en Europe ; dans la seconde, nous étudierons les
tâches et sujets qui se rapportent aux missions et en général
aux territoires situés hors de l'Europe. Seraient spécialement
invités à ces discussions MM. les Conférenciers, les Mission-
naires travaillant dans les missions, puis tous ceux qui exer-
cent eux-mêmes une activité scientifique. Il s'agira toujours
non pas des besoins apologétiques ou d'autres besoins prati-
ques, mais des tâches et des exigences de la science des peu-
ples et des religions proprement dite. Un court résumé des
points à éclaircir précédera, pour régler et délimiter un peu
les débats. On procéderait ensuite à un échange de vues (1).
En terminant, nous essayerons de découvrir la meilleure
manière de réaliser les idées proposées et de les insérer dans
le cadre de nos futures Semaines. Je ne doute pas que nous ne
parvenions à trouver quelque chose de juste et d'utile, et
qu'ainsi la troisième Session de la Semaine d'Ethnologie Reli-
gieuse ne marque dans son histoire : d'une part, elle aura eu
le mérite de renouveler son activité antérieure, après une lon-
gue et dangereuse interruption ; d'autre part, elle nous aura
ouvert de nouveaux horizons.
(1) Ces trois séances générales (voir le tableau .synopticiue, p. 14, 15), non
plus que les délibéiation.s par groupes i e.sti€int.«, orf-ani.sée.s au cours de la
session, ne sont pas résumées dans le présent compte lendu.
I. PARTIE GÉNÉRALE
Introduction à l'étude ethnologique,
psychologique et sociologique des religions
[2^] Die sozialen Formen der einzelnen Kulturkreise,
von Hochw. P. SCHMIDT, S. V. D.
Als im Jahre 1912 die Grûndung unserer Semaine d'Ethnologie
Religieuse stattfand, stand der alte Evolutionismus auf dem
Gebiete der Soziologie nichL mehr ganz unangefochten. in
ungestôrter, allgemeiner Herrschaft da. Es war bereits der
Widerstand gegen ihn aulgetreten und batte sich auch weiter
ausgebreitet. A'ber kaum einer von uns wûrde damais gewagt
haben zii glauben, dass wir bereits nach kaum zehn Jahren
vor dem vôlligen Zusammenbruch der Herrschaft des Evolu-
tionismus auf diesem Gebiete stehen wûrden. Die Entwicklung
bat sich in der Tat so schnell und kraftvoll vollzogen : wir
kônnen wirklich sagen, dass wir bereits jetzt vor einer voll-
kommenen Niederlage des Evolutionismus gerade auf dem
Gebiet der Soziologie stehen, die ihm von den hervorragend-
sten Forschern verschiedener Lànder bereitet worden ist, so
dass die wirkliehe Wissenschaft sich von ihm abwendef.
)Das wird freilich nicht hindern, dass dièse Lehre in weiten
Kreisen des arbeitenden Volkes, in welche sie durch die Agi-
tation der Sozialdemokratie verbreitet worden ist und noch
slândig verbreitet wird, blindlings noch eine geraume Zeit
weitergeghiubt wird. iViber ich weiss, dass man sie auch von
manchon Universitâtskathedern herab noch eine Zeitlang zu
hôren bekommen wird ; denn manche ihrer Inhaber, so radikal
sie sonst auch gewesen sind, in der Behandlung ihrer ver-
gilbten Kollegienheifte sind sie oft merkwùrdig konservativ.
Dass aber der Rûckzug des alten Evolutionismus auf der
DIE SOZIALEN FORMBN DER KCLTURKREISE 49
ganzen Linie allgemein werde und sich bis zur vôlligen Fliu'ht
steigere, dazu werden wir bodputend ii iiwirken, wenn wii' den
wirkliehen Stand der Wissenscliaft in dieser Frage guî kennen
und immer weiter verbreiten.
Diesen gegenwàrtigen Stand der Wissenschaft werdf icli in
Folgendem kurz daiiegen. Aleine Daiiegungen gliedern sich in'
zwei Hauptteile, pinon negativen und einen positiven. Der
négative Teil befasst sich mit dem Zusammenbruch des Evolu-
tionismus ; der positive h^gt dar, wie nun jetzt das Bild der
gesellschaftlichen Entwicklung der Menschheit sich gestaltet.
1. DER ZUSAMMENBRUCH DES SOZIOLOGISCHEN EVOLUTIONISMUS
Fur aile àlteren Soziologen war die zumeist auch als mono-
g'cUVi angenommene Individualfamilie der Ausgangspunkt der
ganzen sozialen Entwicklung ; so noch Rousseau, Gondorget.
Herder. Gaspari und selbst Comte. Der erste Anstoss zu einer
radikalen Aenderung hierin ging aus von J. Bachgfen's Werk,
Das Mutterrecht (1861), in welchem die Théorie aufgestellt
wurde, dass dem Patriarchat das Matriarchat vorausgegangen
sei, dass aber dièses erst aus der vôlligen Regellosigkeit der
geschlechtlichen Beziehungen, der sogenannten Promiskuitat,-
sich entwickelt habe. Zur vollen Geltung und Ausgestaltung
aber wurde dièse Théorie erst gebracht mit Hil'fe der Ethnolo-
gie durch die Werke des amerikanischen Ethnologen L. H. Mor-
gan, Systems of Consanguinity and Affinity of the Human Family
(1871) und Ancient Society (London, 1877). In diesem letzteren
(S. 384 f., 498 f.) stellte er folgende Entwicklungsreihe der
menschlichen Famille auf : 1. schrankenlose Promiskuitàt ^-
2. consanguine Famille (nur Ehen zwischen Eltern und Kin-
dern verboten) . — 3. Punalua-Familie (Verbot der Ehe auch
zwisflien Geschwistern ; freier Zutritt aller Mânner einer
Stammesbàlfte zu allen Frauen der anderen Halfte und um-
gekehrt (Gruppenehe) — 4. mutterrechtliche syndasmische
Famille, Anfànge der Individualehe ; Polygamie, Unsicherhcit
des Vaters — 5. patriarchale polygame Familip — 6. mono-
game Individualehe.
Trotz des teilweisen Widerspruches von J. Mg. Lennan,
breitete sich dièse Théorie derartig allgemein unter Ethno-
logen und Soziologen aus, dass, .wie H. Schurtz bemerkte. « es
4
50 W. SCHMUÏt
eine Zeitlang schien, als oh sic auf allgemeine Anerkeanimg
reehnen dùrfe ». Mehr PZrfolg mit ihrer Kritik hatten C. V.
Stargke {Die primitive FaniHie. 1888) und Westbrmahck {The
History of Human Marriage, 1891) ; auch E. I'ylor schloss sich
ihr nicht an, ebensowenig in Deutschland die Leipziger Schule
(Peschel. Ratzel, Schurtz)(1).
Unter der Einwirkung dieser Kritiken war es sclion ini Jahre
1907 dahin gekommen, dass W. H. R. Rivers, in deni Dedika-
tionsband zum 70. Geburtstag des Altmeisters der englischen
Ethnologie E. B. TYLOR,schreibein konnle : « Man darf wohl
sagen, dass die herrschende Richtung in der Ethnologie sich
aiigenblicklich gegen jedes Schéma richtet, welches die
menschliche Gesellschaft ableiten môchte von einem Zustand
der Promiskiiitàt, sei es voUendefer, sei es gemâssigter, die man
gewôhnlich mit dem Ausdruck Gruppenehe bezeiehnet » (2).
Dass dièse « herrschende Richtung » damil aber nooli langsL
nicht diejenigc des Morgan"s Evolutionsschemas aus dem Felde
verdràngt batte, kann man aus den Worten sehen, die W.
WuNDT noch 1917 in seiner Vôlkerpsychologie niederschrieb :
« Dièse (Morgan's) Théorie kann bei den Anthropologen und
Ethnologen gegenwartig beinahe als die herrschende gel-
ten ). (3).
Nachdem ich schon in meinem Pygmâenbuche gegen dièse
Théorie Stellung genommen und mit Hinweis auf die bei den
Pygmaen vmd Pygmoiden vorliegenden Tatsachen dargetan
hatte, dass gerade umgekehrt die monogame klar und fest
ausgebildete Individualfamilie nicht das Ende, sondern den
Anfang der gesellschaft lichen Entwicklung des Menschen
bilde (4), erhalte ich die Genugtuung, dass jetzt W. Wundt
sich meiner Auffassung vôllig anschliesst und ebenfalls gegen
Moroan's Théorie auiftritt, wovon folgende Sâtze aus seiner
Vôlkerpsychologie geniigend Zeugnis ablegen : « Es gibt kaum
eine Entdeckung im Gebiet der menschlichen Entwicklungsge-
schichte, die so ûberraschend und so ûberzeugend /Aigleicb
(1) Vgl. iiuch w. ScHMiDT, Ursprunp der Gottesldee, S. 181 ff.
(2) Anthropological Essays presented to E. B. Tylor, Oxfoi'd. 1907. S. 309.
(31 W. Wundt, Vôlkerpsychologie, Bd. VIT, Leipzig, 1917, S. 103.
(4) W. ScHMiDT, Die Stelhinci der PygmAenv&lker, Stuttgart. 1910, S. 162 ft"..
268 t.
DIE 80ZIALEN FORMEN DER KULTURKREISÊ 51
bisher weit verbreitete Meinungen zerstôrt hat, wie die Fest-
stellung der Monogamie des primitiven Mensehen » (1).
a Die Existenz der' (wirklich) Primitiven auf der houtigen
Erde ist in ein neues Stadium durch eine Entdeckung getreten,
die an Wichtigkeit den Entdeekungen der pràhistorischen An-
thropologie niclit nachsteht. und ftir die Vôlkerpsychologie
jedenfalls eine entsclicidende Bedeutung besitzt (2).
« Es darf nicht verkannt werden, dass Schmidt hier eine
speziell fiir die Entwicklungsgeschiohte der menschlichen Ge-
sellschaft sehr wichlige Tatsache zur Geltung gebracht hat :
das ist die durch die neuere ethnologische Forschung bei
verschiedenen Pygmaen aufgefundene monogamistische Ehe,
die in der Tat die Monogamie als ursprûngliche Form der Ehe
beim Mensehen immerhin wahrscheinlich macht » (3j.
« Wichtig ist nur, dass nicht die Kultur die Monogamie
erzengt, sondern dass dièse eine der iirsprunglichen Bedingung-
en der Kultur gewesen ist « (4).
« So bleibt denn keine andere Wahl als in ihr (der mono-
gamen Individualehe) tatsàchlich eine primàre Sitte zu sehen,
mit weleher der Mensch aus der Natur in den Kulturzustand
hiniibergetreten ist » (5).
Unterdessen ist aber auch W. H. Hivers, sicherlich einer
der fiihrenden englischen Soziologen (6), zu noch entschie-
denerer Gegnerschaift gegen die MoRGAN'schen Theorien ge-
langt als frûher. In einer Auseinandersetzung, in weleher er die
Verdienste Morgan's um die Entdeckung und erste Darlegung
des klassiflkatorischen Verwandtschaftssystems voll anci'-
kennt, lehnt er doch mit aller Entschiedenheit' dessen Theorif
von der Promiskuitàt und der Gruppenehe als notwendigei-
Anfangs-und Durchgangsstufe der gesellschaftlichen Entwick-
lung ab. Er schreibt : « Unsere jetzt vorhandene Kenntnis.
oh abgeleitet aus Spuren des klassiflkatorischen Verwandt-
(1) w. Vi^UNDT, a. a. O.. S. 203 f.
(2) A. a. O., S. 164 ff.
(3) A. a. O., S. 169.
(4) A. a. O., S. 208.
(5) A. a. O., S. 192 f. Vgl. zu dem Ganzen meinen Voitrag- W. Wundt's
Vôlkerpsychologie VII. und VIII. Band : die Gesellschaft, abgediuckt in
den Mitteihinffen der Anthropol. Oes. in Wien, 1921, Bd. LI, S. 4-24.
(6) Lelder i.st er im Lauf dea .Jahres 1922, zu frUh ftir die Wissenschaft
gestorben.
52 W. SGHMIDT
sehaftssystems (ider von andoren sozialpn Tatsachen, liofort uns
auch nichf einen Fetzen {one shred) eines Beweises zugunsten
einps solchen Zustandes, wie er von Morgan als der frûheste
Zustand dor nienschlichon Gesellschafl hingpstellt warde, nocli
gibt es irgondeinen Beweis, dass eine solehe Proniiskuital
irgendwann einmal das herrschende Prinzip bei einem Volko
in irgendeiner spateren Phase der Geschichte der Mensehheit
gewesen sei » (1).
Und betreft's der Gruppenehe : « Es gibt gewisse Ziige gerade
in dem Ivlassifikatorischen Venvandtschaiftssystem selibst, wel-
cho es nahelegen, dass, wenn dièses System auch in einem
sexuellen Kommunismus begrûndet war, dieser Kommunisnius
nicht primiliv war, sondern aus einem Zustand hervorging, in
welchem nur solehe Verwandtschaftsbeziehungen anerkannt
wurden, wie sie resuit ieren aus der sozialen Einrichtung dei'
(Einzel-) Familie » (2).
Die stàrkste Ablehnung der MoROANschen Théorie kommt
aber von dem Lande, aus dem sie hervorgangen ist, aus Nord-
amerlka.
Schon 1917 halte der verdienst voile Prasldent der Anthro-
pological Society of Washington, W. H. Swanton in seiner schonen
Retiring Address Some Anthropological Misconceptions (3), sich
mit grôsstem Naohdruck gegen den Evolutionismus gewendet.
Von seinen soziologisohen Theorien urteilte er folgendermas-
sen : « Wenn die Grundtatsachen, auf denen sie ruhen, kritisch
geprûft wurden, enthûllte sich ein anderes Kartenhaus. Es
mussie zugegeben werden, dass die Stufe einer sehrankenlosen
Promiskuitât heute nirgendwo existiert und eine reine Hypo-
thèse bleiben miisse, dass der Falle von sog. Gruppenehe lâ-
(1) w. H. B.i\ ERS, Kinship and Social Organisation, London, 1914, S. 85-86, 96.
Dièses Btichlein enthalt eine bel aller KUrze doch vortrefïliche lichtvolle
Elnflihrung- in die Kompliziertheiten des klassiflkatoiischen Verwandtschafts-
systems und der damit zusammenhang'enden Fragen und kann auch aus
diesem Grunde nur angelegentlich empfohlen werden. Vergleiche nieine Be-
sprechung desselben, Anthr., 1914, Bd. IX, S. 684.
(2) A. a. O., S. 87.
(3) American Anthropologist, N. S., 1917, Bd. IX, S. 459-470. — Vgl. auch
îlhnliche Urteile tiber den Evolutionismus von anderen hervorragenden Ame-
rikanisten : A. Kroeber (A. a. O., 1920, Bd. XXII, S. 59 i. ; Fr. Boas (A. a. O..
S. 314-318). — Vgl. dazu W. Schmidt, Die kulturhistorische Méthode und die
norda^ncrikamsche Ethnologie, Anthr., 1919-20, Bd. XIV-XV, S. 548-563.
DIK SOZIALEN FOllMEN DER KLLTURKRÉISE 53
cherlich wonige waren, uni die (.Trundlage fiir eine solche
KonstrukLion /.u bilden, und dass Polyandrie und Polygamie,
Seite an Seite mit Monogamie existierend. reichlich aus wirt-
schaftlichen und sozîalen Grûnden erklart werden mussten
und nicht als aller dargetan werden kônnten als die Monogamie,
die jene Foi-men begleitete. Endlich war es beobachtet worden.
dass Monogamie (sogar) schon in der animalischen Reibe
erreicht war, und dass etwas ganz Aelmlirhes bei unseren
naohsten anthropoideii Verwandten zu finden ist. Es war damit
die Schlussfolgerung gegeben, dass Monogamie wahrscbeinlicb
immer die normale Form der menschlieben Elie war, und dass
andere Formen nur Abirrungen von diescr Norm darstellen ».
(A. a. O., S. 46 i 1.)
Eine womoglich noeb starkere und umiassende Ablebnung
des Evolutionismus fmdet sich bei einem der Lucbtigsten jiin-
geren dortigen Soziologen, R. H. Low-ie, der in seinem Buobe
Primitive Society (1) die weitestgehende Abkelir von Morgan
vollzieht und eine fôrmlicbe restitutio in integrum der àlteren
Auffassung vornimmt.
So urteilt er liber die « Gruppenehe » : « Wenn wir die
âussersl geringe Zabi aller der von Gruppenehe angefùhrten
P'àlle betrachten und die Ergebnisse unserer Analyse des
sexuellen Kommunismus, der sich bei den Dieri und Tscbukl-
schen fmden soll, so haben wir das Recht zu schliessen, dass
l»is jetzt noeb kem Beweis erbracbt worden ist, der zeigen
wùrde, dass irgendein Yolk in der Welt sexuellen Kommu-
nismus in einer Weise geiilU liât te, die die Individualfamilie
zerstorle » (2).
« Sexueller Kommunismus als ein Zustand. der an Stelle
der Individualfamilie tràte, existiert nirgendwo in der Ge-
genwart ; und die Beweise fiir sein friiheres Vorkomnien miis-
sen als ungeniigend abgewiesen werden » (3).
Das Vorbandensein der Individualfamilie nicbt erst auf den
U'Izten Stufen der Entwicklung. sondern aucb auf den friihe-
ston spi'icbt er in folgender Zusammenfassung einei- làngereii
(1) New York 1920. Auch der Titel scheint schon Beziig- auf MoroanV
Ancicnt Society zu nehnien.
(2) Ix)wiE, a. a. O., S. 55,
(3) A, a. O., S. 62.
54 W. SCHMIDT
tJntersuchung aus : « Kurz, die bilatf^rale (aus Mann unci Weib
nnd ihren Kindern bestehende) Famille Ist elne absolut nniver-
salo Einheit der menschliclien Gesellschaft » (1).
Hinsichflich der Thèse Morgan's von der Priorilàt der Sippe
und des Stammes gegenûber der Einzelifamilie kommt Lowie
nach einer um)fassenden Untersuchung zu dem Schlusse :
« Kurz, mit der einen bemerkenswerten Ausnahme der Aus-
tralier, entbehren die einfachsten KuHursiufen der Sippe und
besitzen die Famille, und auch in Australien ist kein Beweis
vorhanden, dass die Sippe aller ist als ilir unverànderlicher
Begleiter (die Famille) » (2).
« Das Gegenteil der traditlonellen [MoRGANschenj Reihen-
folge [zuerst Sippe, dann Famille] ist eine der siehersfen
Folgerungen der modernen Ethnologie » (3).
Wenn Morgan die Vaterfolge ûberall erst aus einer frûheren
Mutterfolge hervorgehen lasst, so stellt Lowie fest : « Es gibt
keine feststehende Aufeinanderfolge von Mutter- und Vater-
folge ; sippenlose Stâmme kônnen unmittelbar zur Mutterfolge
wie zur Vatei^folge ûbergehen. Wenn die hôehsten Zivilisationen
mehr die vaterliehe Seite der Famille betonen, so tun das auch
mnnrhe der niedrigsten ; und die sozlale Geschichte eines
einzelnen Volkes kann nicht aus einem allgemein gûltigen
Entwicklungsschema rekonstruiert werden, sondern einzig im
Liehte seiner bekannten oder wahraolieinlichen kulturollen
Beziehungen zu benachbarten Vôlkern « (4).
Eine kaum minder nachdrûckliche Ablehnung des Evolutio-
nismus flnden wir auch in Alex. A. Goldenweisers. Early Civili-
zation (Npm' York. 1922). Dort heisst es :
« Was ist nun das Verdikt der modernen Ethnologie ûber
dièse Verallgemeinerung ? — Die Schlussfolgerungen die von
kritischeren Untersuchungen abgeleitet werden, sind die fol-
genden : Es scheint keinen Beweis zu geben, dass ein Zustand
von Promiskuitat ûberhaupt jemals existierte. Ebenso scheint
der Zustand von Gruppen-Ehe. weit entfernt davon, ein allge-
meiner Vorzustand der Tndividualehe zu sein, in den seltenen
(1) A. a. O., S. 78.
(2) A a. O., S. 152. Vgl. 156.
(3) A. a. O., S. 157
(4) A. a. O., S. 185.
DIE SOZIALBN FORMEN DER KILTURKREISE 55
Fàllen, wo er sich findet, oinen Auswuclis oines vorhergehenden
Zustandps von Individualehe darziistellen. Dio Famille und die
Ort.sgrup]je sind universale Formen der sozialon Organisation,
die sich bis an den Anfang selbst hin erstrecken. In einigen
Stammen entwickelt sich die Clan (Mutterrecht) -Organisation
iiberhaupt nienials. In anderen folgt sie erst auf die Organi-
sation des Familiendorifes. In noch anderen folgt die Gens
(die vaterrechtliche Organisation) unmittelbar auf dièse frûhe
Stufe. Die Entwicklung der Gens aus dem Clan ist anscheinend
niir in wenigen Fàllen ei'folgt. Es muss ùberdies beachtet
werden, dass die Familien-Dorf-Gruppierung durch aile ande-
ren Formen der Organisation hindureh fortdauert. » (S. 24 f.)-
Von so liervorragenden wissenschaftlichen Autoritâten
Deutschlands, Englands und Amerikas fallengelassen und
bekâmpft, wird die MoRGAN'sche Théorie sich nic-ht mehr
aufrecht erhalten lassen ; ihr Schicksal erseheint damit besie-
gelt. Wer aber die Geschichte der Wissenschaift kennt, weiss,
dass nicht nur in sogenannten weiteren, sondern auch in
eigentlich wissenschaftlichen Kreisen es einer gewissen Zeit
bedarf, um die innere Erledigung aoich ausserlich ûberall zur
Geltung zu bringen.
Wenn eine Théorie, die bis vor kurzem noch in so allge-
meiner Geltung stand, jetzt so rettungslos zusammengebro-
chen ist. so ist das eine sehr lohrreiche Mahnung fiir uns,
durch kcine noch so weitgehende Anerkennung irgend einer
Théorie selbst in wissenschaftlichen Kreisen ohne weiteres
uns blenden zu lassen. den Widerstand gegen sie fur vergeblich
zu erklàren oder wejiigstens zu allerlei Konzessionen gegen sie
ims herbeizulassen. Sondern mutig und entschieden miissen
wir den Kampf aufnehmen gegen das. was wir aus irgend
einem Grunde als unrichfig erkannt haben und zàh und
bchiirriich ihn fortfûhren, selbst bei anifànglicher Enfolglosig-
keit ; die Wahrheit wird schon zum Siège gelangen, wenn wir
sie nicht àngstlich im Stiche lassen.
Mûssen wir also nach diesem Zusammenbruch des Evolufio-
nismus auf dem Gebiet der Soziologie einfachhin wieder zu
den âlteren Auffassungen zurûckkehrcn ? Das nun doch" nicht
so allgemeinhin. Die ungeheure Menge neuer Tatsachen, die
die Vôlkerkunde und gerade auch die Mitarbeit der Missionare
56' W. SCHMIDT
beigebracht bat, zeigt, dass die gesellschaftliche Entwiekkmg
der Menschbeii bedpulpnd reieber und mannigfaeber und. wii*
b:Hignen es durchaus nicht, in manoben Stûcken frenulartiger
sich gestaltet bat, als wir frûber sie uns voi'zustellen geneigt
waren. Aber daraul' kommt es an, wobin dièse frenidartigen
und nii'dej'en Fornion gestellt werden n ûssen. Mit seiner
Behauptung, dass sie aile an den Anfang geborten und dass
erst aus diespn niederen Anfângen sicb bôhere Fornien ent-
wipkolt bâilen, ist. der Evolutionisnuis zusammengebrorben.
Aber mit diesem bloss negativen Résultat kônnen wir uns nicht
zufriedengeben, wie es mancbe apologetiscben Kreise tun ; wir
mùssen doch das lebbaf teste Intéresse haben und sind durcb
die .starksten Griinde aucb des praktischen Lebens dazu ge-
drangi. den tatsâchliehen Verlauf der gesellscbaftlicben Ent-
wieklung der Menscbbeit aucb positiv kennen zu lernen.
Diesem Bediirfnis verma,g die neuere kulturbistorische Rich-
tung der Ethnologie sebon in hedeulendem Unifang entgo-
genzukommen. Ich will die Ergehnisse ihrer Arbeiten hier
vorfûhren. wie ich t^ie in dem soziologischen Teil von Sghmidt-
KoppERS Vôlker vncl Kulturen (1) dargelegt babe. Natûrlicb
kann das hier, bei dem beschrànktem Umfang der Zeit, die uns
zu Gebote stebt, nur in ganz grossen Zûgen geschehen. Aber
aucb se wird dièse Darstellung im Grossen unser Interesse
wobl fesseln konnen : sie bat ja aucb wieder ibre eigenen
Yorzûge.
IL — DIE KULTURHISTORISCHE NEUORIENTIERUNG DER SOZIOLOGIE
Es làsst sich niebt leugnen, dass die gesamte gesellsehaftli-
cbe Eniwicklung in bobern Grade mitbedingt ist durcb die
wirtschaflliche Lage. Aber nicht in dem ausschliesslicben oder
wenigstens ausscblaggebenden Masse, wie der Marxismus es
will ; sondern es là&st sicb eher sagen, dass vielmebr imnier
dor.t, wo die wirtscbaftlicben Faktoren einen tiberwiegpnden
Einfluss auf die gesellscbaiftlicbe Entwicklung genommen, eben
anormale, ungiinstige gesellscbaftlicbe Formen sich herausbil-
(1) B-d. III. des Werkes Dei- Mensch aller Zeiten, jetzt bei J. Habbel,
Regensburg. Eine kurzere Darlegung bei Koppers, Die A))/aȣ/e des vien-
scliHchen Getneinschaftslehens im Rniegel der neueren Volkerknnde. M.-Glad-
bach, A'ôlksvereinsverlaff, 1921.
DIE SOZIALEN FOHMEN DEK KLLTURKREISE 57
deten. Bei tien eigeiitlicli nornialen Formen dag-egen sind .es\
die gesel.lscharilichen Faktoren seelischer Natnr. die an ihrerj
Gestaltting massgebenden Einfluss haben. - J
Wir haben nùn drei grosse Phasen der gesellschaftliehen
Entwieklung zu unterseheiden : die Urkn.lturkreise, in welchen
der Mensch die Natur noch nii-lit Itearbeitete, sondern ans ihr
entgegennahm, was sie freiwillig ihm bot, wo der Mann durch
die Jagd die Fleischnahrung. die Fraii durch Suchen und Sam-
meln die Pflanzennahrung besorgte, beide also gleichârtig zum
Unterhalt der Familie beitrugen — die Primàrkulturkreise. in
welchen der Mensch auf drei ganz versohiedenen, von einander
unabhàngigen Wegen, in Viehzuchf. hôherem Jàgertum und
Ackerbau, dazu ùbergeht, die Natur zu bearbeiten und ihren
Ertrag zu steigern ; drei verschiedene Balinen der gesell-
schaftlichen Entwieklung tun sich hier auf — die Sekundàr-
knlturkreùe, in welchen die bisher parallel neben einander
vorlaufenden Entwicklungsbahnen der einzelnen Kulturkreise
durch gegenseitige Wanderungen mit einander in Beriihrung
kommen und in der Mischung ihrer gesellschaftlichen Formen
einzelne derselben ausmerzen, afidere zu ganz neuen Gestal-
tungen fùhren.
1. Die Urkulturen. — Wenden wir uns zunàchst den Urkul-
turkreisen zu, so haben wir es hier mit drei Kulturkreisen zu
tun, dem der Pygmaen-(und Pygmoiden-'^ Yolker,dem der altau-
stralischen und dem der Bumerangkultur, von denen letzterer
der jûngste ist und schon eine stàrkere Ueberleitung zu den
folgenden Kulturkreisen bildet. Es sind viberall nur kleine,
zurûckgedràngte Volkerreste, die uns hier entgegentreten, aber
soziologisch sind sie uns von hôchstem Werte. Denn gerade auf
dieser Urstufe sind die eigentlich"en seelischen KrJifte der
Sympathie am stàrksten tàtig geblieben. So finden wir glelch
hier die monogame Einzelfamilie als Regel in voiler, starker
Dauer, Treue. Freiheit und gpgenseiliger Neigung beider Nuptu-
lienten bei der Heirat, gleichreclit iicher Stellung von Mann und
Frau. Respekf ierung der Eltern und Liebe, Fûrsorge zu den
Kindern, Abwesenheit von Kindesmord und âhnl. Verbrechen.
Der Stamm iind Staat ist demgegenûber nur schwach êntwik-
kelt ; die Macht liegt niclil bei dem Hâuptling, dessen Stellung
zumeist nicht erblieh ist, sondern bei der Gesamtheit der
58 W. SGHMIDT
Familienhaupler. E? gibt keineiiei Beschràniamgen der Frei-
heit, keine soziale oder wirtschaftliche Ungleichheit, keine
Hôrigkeit und Sklaverei, keine Menschenfresserei oder àhnlichc
Grauel ; der Krie,g ist eine Ausnahme. Aber die korperliehe und
geistige Leistungsfahigkeit der Mensehen wird auf dieser Stufe
nicht genûgend zur Geltung gebracht, der Arbeitspflicht nicht
genùgt ; infolge dessen wirtschaftlicher Stillstand.
Wir nehmen von hier aber die Erkenntnis der wichtigen
Tatsaehe mit, dass nicht der Staat, sondern die Familie am
Anfang der gesellschaftliehen Entwieklung stand, dass nicht
der Staat, sondern die Familie die àlteren Rechte liât, dass der
Staal damais gar nur eine Funktion der Familie war. So ergibt
sicli aus der Geschichte der menschlichen Gesellschaft der
zwingende Schluss, dass der Staat nicht ûber der Familie steht.
ihre Rechte nicht antasten, sie selbst nicht vergewaltigen darf.
Was fiir verderbliche Folgen aus dem Gegenteil hervoi-gehen.
wird sich gerade bei der Betrachtung der folgenden Kultur-
kreise zeigen.
2. Die Primârkulturen. — Gehen wir jetzt zu den Priniàr-
kulturen ûber, so erhalten hier die wirtschaftlichen Faktoren
eine weit grôssere Macht. Wir haben es hier mit drei Kultur-
kreisen zu tun. Die BeischafTung der Fleischnahruug durcli
den Mann in der Urzeit entwickelt sich hier einerseits zu der
Viehzucht in dem Kulturkreis der vaterrechtlichen Nomaden,
andrerseits zum totemistischen Tierkult in dem Kulturkreis
der gleicMalls vaterrechtlichen hôheren Jàgei*. wharend die
Tâtigkeit des Pflanzensammelns der Frau in der Urzeit hier zur
Pflanzenzuc-ht iibergeht in dem Kulturkreis der mutterrechtli-
chen Ackerbauer oder besser Gartenbauer. Dièse drei Kultur-
kreise diirfen nicht in einer geradlinigen Reihe auseinander
entwickelt werden, <ondern sind selbststândig an ganz ver-
schiedenen Teilen der Erde entstanden, haben sich so getrennt
von einander in langen Zeitrâumen eigenartig entwnckelt und
so auch jeder seine eigene Gesellschaftsform hervorgebracht.
Von dem grossfamilial-vaterrechtlichen Kulturkreis der Vieh-
ziichternomaden kennen wir am besten die Entstehungsgegend.
Es ist das sûdôstliche Sibirien, wo sie wahrend des ganzen
Palàolithikums dureh die Vergletscherung des Sûdens und
Westens von der iibrigen Menschheit getrennt gehalten wur-
DIE SOZIALEN FORMBN DER KULTUBKBEISE 59
den. Zii ihnen gelioren in orster Linie du» uralaltaischen
Vôlker, in zweiter die indoeuropàisclien und in dritter Linie die
liamitosemitisehen Vôlker. Bei ihnen verstârkte sieh die Fami-
lie zur Grossffamilie, d. h. dit' heiratenden Sôhne bli(»bpii unter
der Gewalt des Vaters und in wirtsc-haftlicher Abhângigkeit
von ihm : es entwickelt sieh das Patriarohat, in deni die
Freiheil der Kinder, ^o auch' bei Abseliluss der HiMrat, be-
sfhrânkt oder auch ganz aufgeho'ben wird ; aueh die Stellung
der Frau geht zuriick. Der Erslgeborne erhâlt besondere Vor-
reehte im Erben und in der sozialen Stellung. Die Monogamie ist
nofh herrschend, geht aber zu gemâssigter Polygamie uber.
weil reicher Kindersegen stark gewûnseht wird. Gegeniiber
dieser starken Familie tritt der Slaat zurûck, wenn er auch
jiusserlieh sieh erweitert duich Zusammenfassung von Haupt-
lingsschaften unter Oberhàuptlingen.
In der Zunahme oft ungeheuren Herdenbesitzes und der dabei
sieh einstellenden wirtseliaftlichen Ungleichheit geht auch die
soziale Ungleichheit der Individuen wie der Stàmme vielfach
verloren und es t.rplen liMchtere Formen der Hôrigkeit auf. Ein
grosser Mangel ist die hochgradige Scheu und Geringschâtzung
der kôrperlichen Arbeit seitens der Mànner.
Geradezu entge,gengesetzt gestaltet sieh die Stellung von
Familie und Stamm-Staat im vaterrechtlich-exogamen Kultvr-
krels des totcntistischen hôheren Jâgertums : der Stamm-Staat
tritt in den Vordergrund, die Familie in den Hintergrund. Es
tritt hier der Totemismus ein, der also keine Erscheinung der
Urzeit ist. jene eigentiimliche Anschauoing. auf deren Wesen
und Ursprung wir hier nicht nâher pingehen kônnen, kraft derer
eine bestimmJe Menschengruppe irgendwie sieh verwandt
glaubt zunàchst mit piner Tierari, spâter auch mit Pflanzen
und andercn Dingen. Schon dadui'cb wird die Aufmerksamkeit
von der natûrliehen Einzpjfamilie auf grôssere Gruppen abgp-
lenkt. was durch einc reiche Ausbildung von Abzeichen, Bema-
!ungen, Tàtowierung nocji stai-k unterstûtzt wird. Auch wird
dip Familie zerrissen dui'ch die verschiedenen Altersklassen-
verbânde. die den ganzen Stamm umfassen. Die Stellung des
Hâuptlings ist bedeutend gefestigf. dadurch dass er zumeisi
auch Zauberer ist. Die Stellung der Frau geht zuriick, weil die
Bedeutung der mànnlichen Génération in der Stammesweihe
0^0 W. SCHMIDT
lîait der Beschneidung wie im ganzon Denken des Stammes
stark betont wird, auch in rituellen geschlecht.lichen Zûgello-
sigkèiten. Aber auch wirtschal'tlich hebt sich hier die Stellung
des? Mannes ; infolge des grôsseren Wildreichtums erhalf er
mehr Musse ; es entsteht Handwerk und Kunst und Handei, die
Anfànge einer Art stadtisehen Kultur. Aber aur-h der kriege-
rische Sinn scheint sich zu steigern.
Wenn der totemistisch-vaterrechtliche Kullurkreis die Stel-
lung des Mannes betont und hebt, so stellt der mutterrechtiirhf
Kulturkreis die Frau in den Vordergrund. Sie geht nàmlich hier
dazu liber, das Pflanzensammeln der Urzeit zur Pflanzenzucht
zu entwickeln und erhâlt dadurch ein wirtschaftliches Ueber-
gewicht ûber den Mann. Denn ihr gehôren die Ertràgnisse des
Pflanzenbaues und sie wird die erste individuelle Bodeneigen-
tûmerin ; infolgedessen muss in vielen Stàmmen bci der Heirat
nicht mehr die Frau zum Manne, sondern der Mann zur Frau
hiniiberziehen, so dass er im Stamm dann ein Fremder ist. Es
entwiekelt sich hier vielfach ein direktes Matriarchat, eine
Gynakokratie. wie sie u. a. P. Lafitau von den Huronen
geschildert hat. Die Familie wird durch dièse Verhaltnisse
oft verzerrt und verschoben ; die Kinder treten zum eige- '
nen Vater nicht in ein so enges Verhaltnis wie zum Brudei-
ihrer .Mutter, der deren mannlicher Sachverwalter ist ; die
Kinder erben nach der Mutter, nicht nach dem Vater ; *die
Frau hàngt mehr an ihren Eltern und Verwandten als an ihrem
Manne. Auif spàteren Entwicklungsstufen verdient der Mann
sich die Frau durch langjàhrige Arbeit ; auf noch spàteren
Stufen wird die Arbeit durch Kaul' abgelost. Damit aber geràf
die Frau in eine verhàngsnisvollc Stellung ; sie wird leicht als
eine kàufliche Sache beiraclitel, und je reicher der Mann ist.
um so mehr Frauen erwirbt er, die ihm billige Arbeitskràfte
sind. So geht hier auf spâten Stufen das Mutterrecht und das
Matriarchat der Frau in Arbeitssklaverei, exzessive Polygamie
und andere Erniedrigungen ûber. Gegen die wirtschaftliche
umj soziale Bevorrechtung der Frau wâhrend des Matriarchats
hatten aber die Manner sich ein anderes Schutzmittel geschaf-
fen in den Geheimgesellschaften, die sie begriindeten, von
denen Frauen mit strengsten Strafen ausgeschlossen wurden
und durch die sie mit allerlei Mitteln der Maskerade und des
DU-: SOZIALEN FORMEN DEH KULTIIRKREISE 61
Terrors die Frauen in Unterwûrtigkeit und ziir Ablieferung
reiohlieher Pflanzennahrung zu bringen suchten. Da sie in
dem betreffenden Stamm nieht heimisch waren, son<Jern ans
verschiedenen Stammon herkamen. so waren in diesen Geheim-
gesellsehaften Organisationen gesehaffen, in denen die Stam-
mesgrenzen din'chbrochen waren und zum ersten Mal eine
iôrmliehe Internationalitàt hergestellt wurde. In der Tat
Iraten die Geheimgesellschaften den Ifï^alen Stammesaiiktori-
tiiten vielfarh entgegen oder notigten sie, mit ihnen zu paktie-
ren. Auch suchten sie in intensiver Propaganda sich ùber die
Stammesgrcnzen hinaus zu verbreiten, so dass ihre Interna-
tionalitàt zu imnier stàrkerer Auswirkung gelangte.
Es sind also drei vollig eigenartlge Formen der Gesell-
schaft, die sich in dieser Phase der Kultur gebildet haben. und
sie bedurften, uni sich in dieser Eigenart entwickeln zu kon-
nen, sicherlich- langerer Zeitrâume, wo die drei Gruppen
getrennt von einander wohnten. Dièses Getrenntsein musste
aber im Laufe der Zeit ein Ende nehmen schon dureh das
innere Anwachsen dei' Stâmme, ferner durch âussere klima-
tische Eingriffe, endlich durch die Wanderlust einzelner Grup-
pen, und andere Faktoren.
3. Die sekundàren Kulturen. — Schon bald scheint die Ver-
mischung des totemistisch-vaterrechtlichen mit dem agrikul-
turell-mutterrechtlichen Kulturkreis eingesetzt zu haben, aus
der eine Verbindung wie von Stadt und Land hervorging.
Soziologisch ergab sich daraus eine Aufteilung der zahlreichen
Totemclans in die zwei Hoiratsklassen der mutferrechtliehen
Kultur, die Bildung von Vier- und Achtklassensystemen. sowie
die Verbindung des Totemismus mit Mutterfolge, die von denj
àlteren Soziologen als das Urspriingliche angesehen wurde,
wàhrend sie in Wirjclichkeit nur das spàte Produkt einer Ver-
bindung zweier ganz heterogener Kulturen ist.
Viel weitgehender waren die Folgen, die aus der Verbin-
dung der grossfamilial-vaterrechtlichen Kultur der Viehzûch-
ter-Nomaden mit den beiden ûbrigen Kulturen sich ergab.
Dièse Verbindung (rat zu Beginn des Neolithikums ein, als die
Gletscher schwanden, welche die Nomadenvôlker \on den iibri-
gen Vôlkern getrennt hielten. Da brachen sie hervor, und auf
ihren Reittieren und mit ihren Zug- und Lasttieren die Entfer-
62 W. 8CHMIDT
nungen von Raum und Zeit viel schneller ûberwindend als die
Vôlker der beiden anderen mehr an die Scholle gebundenen
Kulturen, auf das wandelnde Kapital ihrer Grossherden sich
stûtzenden, kriegerisclier und kraftiger als sie wurden sie bald
zu Herren der ûbrigen Vôlker. Sie zwangen <lie bis dahin
bestehenden kleinen Stadt- und Dorfstaaten zusammen zu
Grossstaaten. die die genûgenden Grtindlagen darboten zu der
jelzt anhebenden Hoebkultur. Indem dièse erobernden Noma-
denvôlker sich ilber die besieglen Stadt- und Dorfbewohner
stelUen, fûhrten sie ein neues Prinzip, das der verlikalen
hierarchischen Stàndegliederung in die gesellschaftliche Ent-
wicklung ein : sie selbst wui'den die Aristokratien. aus denen
dann auch die herrschenden Dynastien hervorgingen.
Dièse ganze Vermisebung iibte in vieler Hinsicbt auf die
soziale Ordnung der Unterworfenen einen zersetzenden Ein-
fluss aus. Sie liess Totemismus und Mutterrecht mit ail ihren
Begleiterscheinungen entweder ganz verschwinden oder nur in
kummerlichen Resten besteben, und das ist der Grund, wes-
halb dièse Seltsamkeiten in den jetzt beginnenden Hochkul-
turen immer mehr verschwinden ; am starksten blieben sie
erhalten in Aegypten, in Vorderindien und in Peru. Die natûr-
liche Familie wurde wieder mehr zur Tragerin der Gesellschafts-
ordnung und die Vaterfolge wurde ihr zurûckgegeben. die
vaterliche Gewalt allerdings auch vielfaeh bis zur rûcksichts-
losen Gewalt uber Leben und Tod von Frau und Kind gestaltet.
Die den Nomadenvôlkern eigene Monogamie geht aber in der
anhebenden Sittenlosigkeit und Rûcksichtslosigkeit zu einer
vielfaeh zûgellosen Polygamie und dem Haremwesen der herr-
schenden Klassen ûber ; es ist nicht die wachsende Kultui',
welche im Abendland die Monogamie zur Herrschaft brachte.
wie WESTEFtMAUCK meinl. sondern die ûbergeschichtliche Tat-
saclip des Eintretens des Christentums brachfp die Monogamie
gegen die verschiedenartigsten Widerstânde teilweise erst
in hartem Kampfe zur Geltung. \Vo Vôlker mit Vaterfolge und
Erstgebornenvorrecht zoisammentrafen mit Vôlkern mit aus-
gesprochenem Matriarcbat. wie das besonders in Indien beim
Zusammentreften von Ariern und Dravida-Munda der Fall war.
da entstand aus wirtschaftlichen Griinden die Polyandrie, zuerst
als Bruderpolyandrie, die also keine primitive Erscheinung,
DIB 80/.IALEN FORMEN DER KULTURKREISË 63
sondern ein sehr spàtes Mischungsprodukt ist. So sind es einer-
seits wirtschaftliche, andrerseits sittliche oder vi^lmehr un-
sittliehe Faktoren, welche in dieser beginnenden Hoohkultur die
Famille aufs Tiefste schâdigen und damit eine ihrer wichtigsten
Grundlagen verhàn,gnisvoll schwàchen.
Eine andere schlimme Schàdigung vollzog sieh in der hie-
rarchischen Gliederung der Stànde, die jetzt einsetzte. Das
Bedenkliche dabei war, dass sie zum grossen Teil hervorging
aus der Geringschatzung der Besifgten und ans der Scheu und
Verachtung der Arbeit, besonders der kôrperlichen, seitens der
Siéger. Die Arbeit wurde den anderen Stànden ûberwiesen und
damit innerlich entwûrdigt. Die daraui sich erhebende Rang-
ordnung wurde verewigt und damit noch um so drûckender
gemaf'ht durch das Prinzip des Blutes, indem die Abstammung
auch ùber Rang und Stand entschied. Indem dann statt der
frûheren Exogamie jetzt fur jeden Stand die Endogamie obliga-
toriseh wurde, sollte der Vermischung der Rassen, die zugleich
Stande w'aren, entgegengetrefen werden ; der Mangel an sittli-
cher Kraft durchbrach aber dièse Sehranken und die Vermi-
schung trat im Laufé der Zeit trotzdem ein, auf illegalen und
deshalb vielfach verderblichen Wegen.
Die stàrkste Ausweitung der hierarchischen Stândeordnung
vollzog sich nach unten hin darin, dass, als die Arbeit einerseits
immer verhasster und andrerseffs in immer grôsseren Massen
notwendig wurde, schliesslich Menschen ihrer persônlichen
Rechte gewaltsam entkleidet und zu sachlichen Arbeitsmaschi-
nen degradiert wurden in den stàrkeren Formen der Hôrigkeit
und schliesslich der vollen Sklaverei, die also erst ein Produkt
dieser spàten Zeit ist. Wurde hier die Reihe der menschlichen
Rangstufen bis selbst in untermenschliche Tiefen hinabgesenkt,
so wurde sie andrerseits nach oben hin bis in ùbermenschliche
Hôhen hineingehoben durch die Schaffung des absoluten Kô-
ntgtums. das in einer seiner Entwieklungen selbst bis zur
vdlligen Vergottung des Konigs fortschreitot. Das letztere ist
der Fall bei jener Art des KÔnigtums, wie es Frazer in seinem
Golden Bough geschildert hat, wo, eine Nachwirkung aus dem
totemistischen Kulturkreise, der Kônig die Repràsentation der
allesbelebenden Sonne ist ; eben deshalb aber muss er, sobald er
selbst krank und schwaoh und ait wird, weil das fur den ganzen
(54 \V. SCHMIDT
Staat. ja fur die Xatiir von unheilvollen Folgen wârp, eines
gewaltsamen sei es fremilligen sei es anfreiwilligen Todes
sterben. Andrerseits aber haben wir auch ein Kônigtum. das
Frazer gar nicht zu kennen scheint, wo der Kônig nicht Gott
ist. sondern der Gottheit, dem Himmelsgott, am nàchsten stehl.
aber auch durch sein eigenes sittliclies Verhalten verantwortlich
bleibt fur Wohl und Wehe seines Yolkes ; dièses Kônigtum ist
nicht s anderes als die erhohende Fortsetzung des patriarcha-
lischen Familienhauptes der Grossifamilie der Hirtenvôlker.
In diesen beiden àussersten Ausweitungen der hierarchi-
schen Rangordnung, der untermensclHichen Erniedrigungen
in Hôrigkeit und Sklaverei und der ùbermenschlichen Erhôhung
zu absolutem und vergottetem Kônigtum, ist fast das Un-
môgliche vvirklich gemacht und die hierarchische Gliederung
der Gesellsthaft in Weiten ausgespannt worden, die kaum
noch Zusammenhànge mit einander zu haben scheinen und
keine organische Gliederung melir bewirken, sondern ein
Auseinanderreissen und Entfremden der (îlieder zur Folge
haben miissen. Es war auch liier wieder ein rûcksichtsloses
Voranstellen der wirtschafts- technischen und der egoistisch-
persônlichen Gesichtspunkte, die im Uebermass tâtig waren bei
der neuen Ordnung der Dinge. Ein glànzendes Gebàude war es,
das sich da zu erheben begann ; aber die Beiseitelassung und
selrbst Niedertretung der charakterlich-ethischen und gemiit-
lich-sozialen Interessen schwàchte in bedenklichem Masse die
Grundlagen, auf denen es ruhen musste.
Gewiss, der Zusammentritt aller l)isherigen EinzelkuKuren.
der Viehzucht. der Handfertigkeit, des Ackerbaues, wie er sich
hier vollzog, zu einem Kulturkreise lieferte die matérielle
Grundlage und Môglichkeit der Ernâhrung, Kleidung. Wohnung
gewaltiger Menschenmasspn. der ersten Vorbedingung hôheren
Kulturaufstieges. Die bis in die hôchsten Hôhen hinauf ge-
fiihrle stàndische (gliederung der Massen hob eine Anzahl
Menschen aus den gewôhnlichen Niederiingen des Lebens
empor und gab ihnen die Schwungkraft und don Mut, ihre
Blicke auch auf feinere und hôhere Ziele zu richten. Bei den
ùbrigen ^lenschen mussten sowohl die durch die Masse ge-
sicherten Absatzmôglichkeiten wie die Festlegung der Berufe,
dif: sozialen formen der kui.tirkreise 65
die Rentabiltàt der Aiboit und die Spezialisierung derselben
fortwàhrend steigern und damit zu einer stets fortschreiten-
den Vervollkoniîiinung der einzelnen Arbeitszweige fûhren, fur
die in den npu sich erôffnenden Leben&bedûrfnissen, in dem
gesteigerten Lnxus. insbesondere der oberen Klassen, eine
immer mannigfaltigere Vei-wendung sich auftat. Aber die Klufl
zwischen den einzelnen Bevôikerungsschiehten wa-r gleich zu
Beginn zu tief gerissen worden, schon dureh das Prinzip der
Geburt, dann aber dureh den ùbermiichtigen Kapitalismus der
herdenreic'hen Hirtenvolker, der dureh die Okkupation von
Grand und Boden unheilvoll verstàrkt wurde und in automa-
tisehem Wege zu ihrer immer stàrkeren Bereicherung und zu
rûcksichtsloser Ausbeutung der ùbrigen Schichten fûhrte. In
der vôlligen Entrechtung dureh Leibeigensehaft und Sklaverei
aber wurden dann Hunderltausende und Millionen menschli-
cher Entwicklungsmoglichkeiten mit gewaltsamer Hand in den
niedersten Regionen festgehalten oder ganz erstickt und in
blutigen Greueln oft ganze Stàmme mit besonderen nationalen
Kultureigentûmlichkeiten vernichtet und àus der menschli-
chen Gesamtentwicklung ausgeschaltet. Mit brutaler Offenheit
legen uns àgyptische und assyro-babylonische Gemâlde und
Skulpturen mit ihrer trostlosen Mannigfaltigkeit des Sklaven-
lebens dar, in weh-her Weise hier die Felder bebaut, die
Kanàle und Diimme zustande kamen, die Tempel, Pyramiden
und Obelisken aufgerichtet wurden, und die feinsten Dichter-
und Denkerwerke griechischer und rômischer Hochkultur ver-
môgen nieht das gràssliche Sklavenelend zu verdecken, aus
dem dièse Kultur emporwuchs und ohne welches sie trotz alb^s
ihres Glanzes nicht bestehen konnte.
Sicherlich, die Zyklopenquadern des gewaltigen Baues waren
zu lose und gewaltsam aneinandergefûgt, und in der Vergotlung
auf der einen und der Entmenschung auf der anderen Seite
waren die Tragbôgen z'u rûcksichtslos viberspannt : das wai'
kein Bau fur die Ewigkeit.
4. Die sozinle EnUcicklung und dir Religion. — - So etwa war.
in grossen Ziigen gezeiehnet, der Stand der gesellsehaftlichen
Entwicklung, mit welchem die Kultur in die sog. geschichtliclien
Zeiten d. h. in die Zeiten beginnenden Schrifttums eintrat und
der natûrlich die weitere Entwicklung derselben aufs Tiefgrei-
66 W. SCHMIDT
fendste beeinflusste und vielfach vôllig bestimrnte. Was fur
den weiteren Verlauf derselhen aiisserdem noch an Gestal-
tungskràflen in Betracht kommt, geht vor allem von den
grossen Geschichts-Religionen ans.
Am wenigsten wurde durch dieselben in der rein inneren
Entwieklung in China geàndert ; Taoismus und Konfuzianis-
mus sind beide in ihrer Art nur Herausliebungen und Befesti-
gungen eigenkultureller chinesischer Kràfte. In Indien bedeu-
tel der Brahmanismus mit seinem schroffen Kastensystem
nichts anderes als die religiôse Besiegelung der durch ein
Eroberervolk herbeigefûhrten vertikalen Gesellschaftsgliede-
rung. Der Buddhismus stellt zunàchst eine mûde Flucht vor
diesem System dar ; er ist auch eine Reaktion der unterwor-
fenen mutterrechtlichen Kuliur und auch nur auf ihrem Boden
gelangt er zu dauernder Herrsehaft und kann die Auflôsung
der Kasten und eine leichte Besserung der Lage der Frau
aufreeht halten. Beim Muhamedanismus lie,gt es offen zutage,
dass er nichts anderes ist als die Religion des angreifenden
Nomadismus und die religiôse Rechtfertigung seiner Erobe-
rungszùge und seiner Alleinherrschaft,
Nur das Christentum ist es, das nicht nur keine blosse
Bekràftigung irgendwelcher schon bestehender einseitig ge-
richteter gesellschaftlicher Kràfte ist, noch auch eine blosse
mûde Négation derselben darstellt, sondern das wie von einem
ausserhalb der Strômungen stehenden festen Punkte aus mit
neuen starken Kràften in die Kulturentwicklung eingreift,
nicht mit àusserer Gewalt, sondern mit Ideen und Impulsen,
mit Offenbarungen und Gnaden.
Dièse Einflûsse sind es, und nicht irgendwelche eigene innere
Hôherstrebungen, welche das Bild der abendlàndischen Kultur
in manchen Ziigen anders gestaltet haben, als man es nach
den blossen Fortentwicklungen der ethnologisch festgestellten
Gesellschaftszustànde der beginnenden Hochkultureri erwarten
konnte. Dièse Einwirkungen richteten sich in tiefster Erfassung
des Kernproblems vor allem auf die Famille. Die Monogamie,
die Unauflôslichkeit der Ehe, die Brandmarkung des Ehebru-
ches nicht nur der Frau, sondern auch des Mannes, die Freiheit
der Eheschliessung fur beide Telle, die Wiederherstellung der
Wûrde der Frau wie des Kindes : das ailes sind Errungen-
MÉTHODE HISTORIGO-CULTURELLE 67
schaften des ChrisienLums und gehen unmittelbar auf seinen
Slifter selbst zuiûek. Wenn dieser auch, in den Worten :
« Gebet, dem Kaiser, was des Kaisers ist », die hierarchisehe
Ein- imd Unterordnung ajjprobierte, so trat er nieht bloss in
dem g'ieieh daraiiffolgenden « Gebet Gott, was Gottes ist » der
Vergoltung des Herrschers und Staates entgegen, sondern in
seinem Ausspruch vor Pilalus, Konig in einem Reiehe der Wahr-
heit zu sein, stellte er ein Reich des Geistes iiber die Reiehe
der Materie und der àusseren Gewalt. Indem er aber weiter
die Gleichheit aller Menschen vor Gott, ihre Kindschaft zn
Gott und damit ihre Brûderschaift untereinander proklamierte,
gab er Krâfte in die gesellschaftliche Entwicklung hinein, die
in ihrer fortschreitenden Entfaltung und Auswirkung auch die
Ueberschreilungendes hierarehischen Prinzips bis zur Hôrigkeit
und Sklaverei hinunter von innen heraus korrigierten. und was
an ihm haltbar war, ebenfalls auf das familiale Prinzip zurûck-
fûhrten und begrundeten.
[3] La méthode historico-culturelle
par le R. P. PiNARD de la BoULLAYE, S. J.
/Si je ne me trompe, MM., rien n'est plus étranger, plus
antipathique même aux conférenciers qui auront l'honneur de
vous entretenir durant ces huit jours, que la pensée de se lier
à un système, de céder à quelque courant de la mode, de vou-
loir fonder une école, au sens étroit du mot. Cependant, sans
s'être concertés, plusieurs d'entre eux se sont trouvés d'accord
pour accepter, dans une mesure d'ailleurs variable, les pro-
cédés de démonstration dont l'ensemble constitue la « méthode
historico-culturelle » et certains au moins des résultats aux-
quels ils ont conduit. Un bon nombre de nos séances seraient-
donc à peu près inintelligibles et bien des assertions semble-
raient absolument gratuites, si, dès l'abord, on ne vous expo-
sait (ou l'on ne vous rappelait) en quoi consiste cette méthode
et quelles conclusions elle semble autoriser.
Tel est l'objet de la présente conférence.
68 H. PINARD DE LA BOULLAYE
Vous savez, MM., par quels procédés l'école évolutionniste
.s'efforce de justifier ses théories : elle apprécie d'ordinaire le
développement intellectuel, religieux et moral des sociétés
humaines par leur civilisation dans Tordre matériel ; elle
considère comme une preuve de développement ou dévolution
uniforme luniversalité ou la fréquence de certains phéno-
mènes, comme la magie, lanimisme, le culte des morts, le
totémisme, sans se soucier d'examiner si conceptions et. rites
sont nés partout sur le sol où on les observe aujourd'hui, ou
se sont au contraire répandus par voie de migration ou d'em-
prunt ; elle prt'dend établir Tordre chronologique selon lequel
idées et pratiques sont apparues, en les classant, des plus
basses aux plus élevées, d'après un ordre logique et des pos-
sibilités psychologiques fort i-ontestables.
C'est pour réagir contre ces abus qu'a été élaborée la méthode
dont nous allons ])arler.
Préparée par les travaux de Hatzel et de Frobenius, qui
ont fourni la preuve de migrations et d'emprunts, perfection-
née par Graebner et Ankermann, surtout depuis 1904, elle a
été formulée de façon plus systématique par Graebner, en 191 1.
Depuis 1908, le R. P. Schmidt sest appliqué à la faire connaître
et à la perfectionner en plusieurs points. En 1921, en modifiant
quelques détails, j'en ai donné moi-même un exposé (1), qui
a reçu la Idenveillante approbation du Dr. Graebner et du
R. P. Schmidt.
Je le soumets ici, avec quelques explications nouvelles, à
vos j'éiflexions et à vos critiques.
1" Nous verrons d'abord les caractéristiques essentielles de
la méthode ;
2° nous étudierons ensuite ses procédés :
T nous essaierons enfin de préciser les limites de sa compé-
tence.
I. CARACTÉRISTIQUES DE LA MÉTHODE
1° Comme première caractéristique nous pourrons indiquer
V exclusion de tout a priori.
La méthode ne présuppose ni aucun des postulats de Tévo-
lutionnisme, ni aucune thèse historique, philosophique ou théo-
(1) La méthode hiatorico-culturcllc, dans RUR, 1921, t. XI, p. 273-305
MÉTHODE HISTORICO-CULTURELLE 0!»
iogiquc : elle veut apprendi'o uniquement des documents et
fies faits ce qui a été.
Avec une loyauté parfaite, le R. P. Schnudt écrivait, il y a
quelcpu'S années : « Le [)Ostulal unique de l'école historique...
est celui d'une origine et d'une souche uniques du genre
humain. Cotte oiigine, à ce qu'il semble, devrait être cherchée
en Asie » ( i) .
Il ne me contredira pas, je pense, si je note que cet « unique
postulat » ou plutôt ce double postulat n'est nullement néces-
saire et qu'il sufïit pleinement d'utiliser ces deux idées, d'abord
à titre de jtures hypothèses, pour orienter provisoirement la
recherche, puis, dans la mesure où elles sont appuyées par les
sciences connexes, à titre d'indices convergents.
2° Exigeant des arguments positifs, a posteriori, la méthode
historico-culturelle les trouve, non dans les traits généraux
communs à toutes les civilisations ou du moins à plusieurs
d'entre elles, mais dans la correspondance de conceptions ou
de pratiques très particularisées, que n'explique aucune cause
ou nécessité générale. En pareil cas, en effet, on est en droit
d'afïirmer une connexion historique entre les régions où ces
accords s'observent : une telle parité est indice de parenté.
Cette parenté acquiert d'ailleurs une certitude de plus en plus
fei-mc. à mesure que les con-espondances de même genre se
révèlent plus nombreuses : t-'est la preuve par convergence
(ou, comme on dit plutôt en Allemagne, par accord ou concor-
dance. Vebcreinstimmuiig) des probabilités.
Qu'on veuille bien le noter : ces modes de raisonnement
appuyés sur la répétition de détails topiques sont d'un usage
constant en linguistique, où ils permettent de démonti'er la
parenté des langues — en critique textuelle, où ils aident à
déterminer la généalogie des manuscrits — en critique Htté-
l'aire. où ils servent à identifier les sources utilisées, à dénon-
cer les plagiats, à découvrir les auteurs de productions ano-
nymes — en histoire, où ils constituent les seules voies pos-
sibles de démonstration... Dans toutes ces sciences, ils ont
conduit à des découvertes importantes : ils ont fait leurs
preuves.
(1) RSPT, 1913, t. VII, p. 2.S7 ; cf, 1311, t. V. )>. 60.
70 H. PINARD DE LA BOULLAYE
La méthode historien-culturelle, peut-on dire, n'est rien
d'autre en somme que l'application des mêmes procédés au
domaine de l'ethnologie.
Le Dr. Graebner nomme critère de forme l'-argument ou
l'indice isolé que fournit la répétition exacte d'une particula-
rité culturelle en des régions distinctes, par exemple la forme
très spéciale et constante de l'arc, du canot, dos masques etc..
Il nomme critère de quantité le supplément d'évidence qu'ap-
porte le nombre plus ou moins considérable des co'incidences
semblables, soit dans le même objet, soit dans des objets
diiïérents ou en des parties diverses des civilisations consi-
dérées. Si la forme de l'arc ou celle de la hutte, ou celle du
canot commandait celle des masques, des boucliers, des pote-
ries, la répétition des mêmes formes constituerait, il est vrai,
en tout et pour tout, un indice unique de parenté ; il resterait
même de valeur peu probante, s'il s'agissait d'une vague har-
monie des lignes, comme il arrive d'ordinaire dans un style
bien défini d'architecture ou d'ornementation ; mais si l'on
entend par forme des détails très précis de la technique em-
ployée, si la quantité des accords est relevée en des éléments
manifestement indépendants (pratiques rituelles, conceptions
mythologiques, organisation sociale), les deux critères de
forme et de quantité peuvent fournir une démonstration
convaincante : où l'accord est constant, la parenté des civili-
sations est certaine.
Comme on distingue dans l'étude des questions littéraires ou
historiques une critique interne (celle qui considère ce que les
textes disent d'eux-mêmes sur eux-mêmes) et une critique
externe (celle qui considère ce que disent, sur la valeur de
ces textes, des témoins ou des documents différents), on peut
de même, en matière d'ethnologie, distinguer une critique
interne, à savoir l'étude des éléments culturels en eux-mêmes
(les rapports de forme ou qualité et de quantité) et une cntique
externe, à savoir l'étude des témoignages fournis par des disci-
plines connexes sur les relations des peuples considérés.
L'anthropologie pourra dire, par exemple, si elle les estime de
même race — la linguistique si leurs idiomes sont identiques
ou dérivés d'une môme souche — la mythologie comparée s'ils
ont quelques traditions communes sur leurs relations anfé-
MÉTHODE HISTORICO-CULTURCLLE 71
rieures, sur des migrations qui expliquent leur répartition
actuelle — la géographie si elle peut indiquer les voies de
communication qu'ils ont suivies...
Critique interne et externe se contrôlent l'une l'autre. Si
les critères de forme et de quantité sont suffisamment clairs et
abondants, il est bien impossible que les sciences que nous
ven ns d énamérer viennent contredire leur témoignage ; elles
peuvent c'u moins, dans certains cas où elle serait peu déci-
sive, renforcer la preuve fournie par le nombre des coïnci-
den es et la rendre péremptoire.
Pour résumer ces premières observations, nous pouvons dé-
gager les caractéristiques essentielles de la méthode historico-
culturelle :
a. elle est positive, parce qu'elle exclut les a priori, renonce à
raisonner sur de pures possibilités logiques ou psychologiques,
exige enfln comme point de départ des indices concrets, ayant
au mo'ns la valeur de probabilités ;
h. elle est comparative, parce que c'est par la comparaison
minutieuse des éléments culturels qu'elle découvre les coïn-
cii'ences c'e détail inexplicables par de pures rencontres ;
c. elle est historique, parce qu'elle s'appuie sur des faits
historiques dûment constatés, à savoir, selon les cas, emprunts
plus ou moins nombreux d'un peuple à un autre, influence plus
ou moins étendue de telle civilisation sur telle autre, enfin, si
l'accord se maintient dans toutes les parties des civilisations
ou du moins dans leurs éléments les plus essentiels et les plus
stables, origine commune des peuples ou tout au moins union
archaïque dans une unité sociale plus ou moins stricte.
II. PROCÉDÉS DE LA MÉTHODE HISTORICO-CULTURELLE
Nous pouvons maintenant examiner avec plus de détails les
procédés de la méthode historico-culturelle, en d'autres termes
la série des opérations par lesquelles elle se propose de déter-
miner l'histoire des civilisations et celle des religions qui en
font partie.
Ces opérations comprennent trois étapes :
1. distinguer tout d'abord les différents types de civilisation
{Kiilturkomplexe) et déterminer leur répartition dans l'espace
{Kulturkreise) ;
7^ H. PINARD DE LA BOULLAYE
■2. préciser ensuite la marche de révolution culturelle ou la
succession des civilisations dans le temps ;
3. discerner enfin les causes ou les lois qui président à la
formation et à la transformation des civilisations.
1" Les types de civilisation et leur répurtitiou géographique. —
Chaque fois que l'on veut procéder avec rigueur dans les
sciences positives, la première tâche qui s'impose est d'établir
des statistiques, des fables ou des cartes les plus exactes pos-
sible. Ainsi dresse-t-on des atlas géologiques, où les couches
isomorphes sont repérées avec soin et distinguées par des
teintes difl'érentes — des atlas linguistiques, en commençant
par tracer les lignes d'isoglosses ou isoglossématiques. qui dé-
limitent les territoires où se manifestent des particularités
identiques, puis des provinces linguistiques cori'es{)ondant aux
dialectes, enfin des circonscriptions plus étendues, correspon-
dant les unes aux langues distinctes, les auîres aux Langues
apparentées ou fainilles linguistiques. Tout de même con-
vient-il, en matière ethnologique ou éthique (au sens large du
mot f,Hoi : pratique, coutume), de commencer par tracer des
lignes iséthiques, qui réunissent les régions où sobserve une
même particularité culturelle. Ces lignes ne coïncident pas
comme des cercles égaux ou sensiblement concentriques. Elles
ne peuvent même coïncider de cette façon, parce que les élé-
ments eultui'els nont pas tous la même stabilité et parce qu"ont
dû se produire, outre des transplantations en bloc ou des
migrations de telles ou telles civilisations, nombre demprunts
partiels. Parfois cependant, elles se recouvrent sensiblement,
les mêmes coïncidences se répétant exactement en des régions
très distinctes, pour tous les éléments (Constitutifs d'une civili-
sation : l'éginie familial ou social, régime économique, reli-
gion, arts industriels, commerce, etc. C'est un fait. En de
pareilles circonstances, on se trouve en présence d'un type de
civilisation [Kulturkomple.r) et d'un cercle culture] Kulfvr-
kreis) à distinguer par une teinte uniforme dans l'atlas etlmu-
logique.
Un type de civilisation ou type culturel est donc un ensemlde
d'usages et de conceptions caractérisé par des particularités
qui se montrent associées de façon stable et qui présente, avant
même qu'on ait pu préciser les causes d'une telle association.
MÉTHODK HISTORICO-UILTUHELLE 73
ce caractère de répondre à sa manière à tous les besoins de In
vie humaine : ('"est pour autant un système éthique, encore inex-
pliqué, mais donné, comme un système linguistique se cons-
tate, avant dêtre expliqué.
Un cercle culturel (1) est faire géographique continue ou
discontinue où ce système est constaté.
Lorsque les lignes iséthiques qui caractérisent un type
culturel se recouvrent exa(,*tement, sans se laisser pénétrer
par celles d'un autre type, le type est pur, d^ans le cercle consi-
déré ; il est mixte, dans le cas contraire : la carte révèle des
emprunts plus ou moins nets, des influences itlus ou moins
profoniies.
Quand la même carte numifesle en une région la presque
totalité des particularités i)ro])res à un type, on peut avec une
probabilité plus ou moins forte, parfois avec une certitude
absolue, affirmer que cette région a possédé, au moins autre-
fois, le reste des éléments du même type et Ton peut la ratta-
cher au même cercle culturel. On se trouve autorisé à le faire
surtout, quand Taccord constaté jusque là porte sur les élé-
ments culturels les plus stables. De telles suppléances se dis-
tinguent nettement de celles que pratique fécole évolution-
niste : celles-ci sont la coTiséquence d'un a priori : elles
j)résupposent l'uniformité de l'évolution par toute la terre :
celles dont nous pailons reposent sur une induction : ainsi
peut -on reconstituer avec certitude les parties manquante.^
d'un squelette, quand on est sûr (|u'il appartient à une espèce
dont on possède déj-à des (''chantillons comi)lets.
2° Détermination de la succession des types culturels dans le
temps. — La répartition géographique des types culturels une
fois établie, il reste à rechercher dans quel ordre chronolo-
giiiue èes civilisations ont fait leur apparition.
A. Le cas est relativement simple, s'il s'agit d<' leur appa-
rition dans une région donnée. Supposons que, sur la carte, une
civilisation en coupe une autre en divers tronçons, tels que
ces parties soient à regarder, non comme des colonies tardi-
(1) Le mot français cycle, comme le mot type, a plutôt un sens forni"!
(on parle d'un cycle d'idées, etc.) : le mot cercle un sens territorial, comme
le terme allemand Krcis. Il est donc préférable de traduire Kultnrkrei.'^ par
cercle culturel, plutôt que par cycle culturel.
74 H. PINARD DE LA BOULLAYB
vement fondées, mais comme le résultat d'un sectionnement
plus ou moins violent. Il est clair que la civilisation coupante
est plus récente dans son territoire que la civilisation qu'elle
coupe. — Supposons que la carte montre des civilisations éche-
lonnées le long d'une grande vallée ou d'une voie naturelle de
pénétration. Il est à penser que les civilisations les plus an-
ciennes, refoulées par des migrations successives, sont les plus
éloignées de la porte d'accès ou du centre probable de diffu-
sion ; on pourra tenir cette hypothèse comme justifiée, si l'on
découvre, le long de ces grandes routes, quelques sites abrup-
tes, par exemple, où s'observe la même civilisation que dans
les territoires extrêmes : il est en effet certain que ces enclaves
sont à interpréter, non comme des postes d'avant-garde, mais
au contraire comme des postes d'arrière-garde, protégés par
des conditions géographiques exceptionnelles contre le flot des
migrations.
B. S'il s'agit de fixer, non plus l'ordre d'apparition dans une
région déterminée, mais l'ordre ^apparition sur terre, tout
simplement, la solution est encore aisée pour les civilisations
composites : elles sont manifestement postérieures à celles
dont elles dérivent ; les caractères des modifications introduites
dans les éléments qu'elles utilisent peuvent même permettre
de reporter leur formation à une période plus ou moins reculée.
Plus difficile à tous égards est le cas des types purs. Aucun
indice isolé ne permet de le trancher ; la seule convergence
d'indices multiples, internes, c'est-à-dire empruntés aux ca-
ractères des éléments culturels eux-mêmes, et externes, c'est-
à-dire empruntés aux sciences connexes, peut y autoriser.
Parmi les indices internes peuvent être considérés comme
manifestant une moindre antiquité les signes suivants : dans
une certaine mesure, la complexité des us et coutumes (comme
sont l'existence de castes sociales multiples, de classes nom-
breuses et d'empêchements raffinés pour le mariage, d'un droit
coutumier très compliqué pour l'élection des chefs, let contrats
de vente, etc.) — après une critique sévère, les traditions
mythologiques sur l'origine relativement récente du peuple et
de ses institutions — l'abstraction dans le langage et dans les
mythes — le caractère analytique plus accusé des langues
appartenant au même type culturel — la perfection relative des
MÉTHODE HISTORICO-CULTUllELLE 75
arts industriels, etc. — Des signes contraires suggéreraient
des conclusions opposées.
L'ensemble de ces indices peut déjà conduire, selon leur
clarté et leur convergence plus ou moins sûre, soit à des
probabilités sérieuses, soit à la certitude.
Leur témoignage peut être renforcé par celui des indices
externes : tels par exemple ceux que fournirait la mythologie
comparée, si elle permettait d'établir l'aibre généalogique des
traditions et légendes — ceux que donnerait l'anthropologie
comparée sur l'âge respectif des races dominantes — ceux
que l'on déduirait de considérations géographiques : serait à
classer, par exemple, comme le plus ancien absolument, le type
culturel qui apparaîtrait comme le plus i nciennement établi
dans toutes les régions extrêmes où viennent aboutir les
diverses voies de migration.
Ici donc pourraient être utilisées, à titre d'indices subsidiai-
res, les opinions les plus accréditées qui reportent en Asie le
berceau des races humaines.
A titre strictement documentaire, je mets sous vos yeux un
tableau (1) dressé d'après les publications du R. P. Kop.^ers
et du R. P. ScHMiDT et révisé par ce dernier avec son obligeance
ordinaire. En vous donnant une idée précise des résultats aux-
quels aboutissent les principaux représentants de l'école histo-
rico-culturelle, il éclairera toute la suite de nos conférences.
Veuillez toutefois ne pas oublier qu'il s'agit pour l'instant
des principes critiques utilisés par ces savanfs et non de l'appli-
cation qu'ils en font.
Poursuivons l'examen des principes,
3° Détermination des causes et des lois de révolution. — La
répartition des cycles et leur succession une fois établies, il
reste à expliquer les causes qui ont déterminé la formation
des types de civilisation, celles qui ont pré?-'/ii à leurs combi-
naisons et à leurs transformations, enfin, s'il est possible-,
celles qui ont régi l'évolution générale de Thumcniié.
Sans prétendre épuiser le sujet, nous pouvons noter quel-
ques principes sûrs.
(1) Voir au verso. — Dans notre livre, L'étudi comparée des religions, t. I,
appendice, p. 502-503, avec renvois aux explications données dan.', le texte.
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J
MÉTHODE HISTOHICO-GULTURELLE 77
a. El (labord, chaque élément culturel, conception ou coutume,
est à expliquer dans son milieu, cest-à-dire dans lensemble des
idées et des usages auquel il se rattache et par les particula-
rités géographiques, climatériques, économiques e1 autres du
territoire où cet ensemble a pris naissance.
Ainsi la circoncision ne peut-elle être conçue comme un
sacrifice des prémices de la vie sexuelle, dans une civilisation
qui ignore le sacrifice de prémices.
Ainsi lïdée d'un Maître suprême ne peut-elle être dérivée du
culte des morts, là où ce culte est inexistant, ni d'une influence
sociale, où manque toute organisation hiérarchique bien carac-
térisée.
b. Pour fixer le sens originel d'une institution, chaque fois qu'il
s'agit d'une civilisation dérivée, il faudra remonter jusqu'à la
civilisation dont elle procède, par conséquent reconstituer au
préalable la civilisation-souche et préciser son lieu d'origine.
Rappelons en passant que cette forme primitive ne peut être
obtenue, ni en prenant comnif son représentant fidèle la plus
ancienne des civilisations dérivées, parce que celle-ci a pu évoluer
à part — ni en éliminant les divergences propres aux divers
membres de la même famille, pour retenir les seuls traits
communs, parce que le type primitif devait avoir ses caracté-
ristiques individuelles et parce que ce qui reste de commun,
loin d'être primitif, peut être le résultat d'une évolution paral-
lèle ou convergente — ni en prenant la moyenne de tous les
traits tant communs que divergents, parce que cette moyenne
est un produit de calcul, sans correspondant réel... Ici, comme
en mythologie comparée, en linguistique comparée' en critique
textuelle ou historique, la forme primitive ne peut être obtenue,
qu'en recherchant les particularités que devait avoir la forme-
souche pour que l'évolution pût se produire telle qu'on l'ob-
serve, en chaque membre dérivé, dans les conditions qui lui
étaient propres.
c. On ne peut enfin présenter comme éléments d'une évolution
organique ou normal^ que des éléments issus en réalité lun de
Vautre.
Ainsi le patriarcat ne peut-il être présenté comme dérivé du
matriarcat, si le matriarcat n'appartient pas au même type
fulturel ■ — ni le mariage monogame comme procédant d'une
78 H. PINARD DE LA BOULLAYE
promiscuité primitive, si la promiscuité est ignorée ou du
moins n'a pas de place légale, ofTicielle, dans la même civili-
sation.
Lorsque toutes ces opérations auront été bien conduites,
alors seulement on pourra essayer de dégager les lois géné-
rales de révolution morale, religif^use et sociale. Le mot « loi »
est au moins commode pour désigner les constatations géné-
rales auxquelles on pourra aboutir. Nous le retenons à ce
titre. Quelles seront ces lois, Tavenir se chargera de le dire.
Qu'il ne faille pas sattendre à les trouver aussi rigides que
dans l'ordre physique, un peu de réflexion et quelque connais-
sance de l'histoire suffît à en prévenir.
III. COMPÉTENCE RESTREINTE DE LA MÉTHODE
Avant de conclure, il nous reste à examiner la portée de la
nouvelle méthode, c'est-à-dire à quels résultats elle peut
atteindre par elle-même, en vertu des procédés qui lui sont
propres.
Cette question purement théorique ne semble pas très dif-
ficile à résoudre.
On concédera sans peine qu'elle peut (en nombre de cas à
tout le moins et pourvu qu'au cours des siècles certaines civi-
lisations originellement différentes ne se soient pas absolu-
ment confondues) distinguer des civilisations primitives (au
sens de plus anciennes) et des civilisations dérivées soit par
évolution autonome, soit par fusion d'éléments empruntés.
C'est déjà un résultat de. portée considérable. Voici par
contre dauln-es problèmes qu'elle est inapte à trancher.
a. La. méthode aboutit bien à déterminer certaines étapes dans
l'histoire des civilisations et des religions, comme la géologie,
en distinguant les couches de l'écorce terrestre, arrive à fixer
certaines périodes dans l'histoire de la terre ; mais elle ne
fournit en aucune manière une histoire continue soit de la civi-
lisation en général, soit de telle ou telle civilisation en parti-
culier.
Précisons :
b. La rhéthode, par ses seules ressources, peut bien établir
certains faits de grande importance (migrations, colonisations,
conquêtes) ; mais elle ne peut certes déterminer de quels indi-
MÉTHODE HISTORICO-CULTURELLE 79
vidus relèvent les initiatives décisives dans l'expansion politi-
que ou dans les transformations culturelles ou religieuses. D3
plus, pour aucun fait, elle ne peut fixer de date précise, parce
qu'elle n'a aucun moyen d'apprécier le temps requis pour la
transformation d'une institution ou d'une croyance, par exem-
ple pour le passage de la propriété indivise à la propriété
individuelle ou vice versa, pour le passage de l'animisme ou du
polythéisme au monothéisme ou vice versa.
c. Elle ne peut davantage, à elle seule, découvrir les formes
rigoureusement originelles de la civilisation et de la religion.
Il serait bien arbitraire dy prétendre, si Ion se bornait à
interroger les seuls non-civilisés actuels, puisque ce serait
supposer gratuitement qu'on peut trouver chez eux des élé-
ments d'information suffisants.
La prétention n'est pas moins insoutenable, même si l'on
interroge conjointement les documents archéologiques qui
concernent les peuples parvenus à la civilisation (ancêtres des
Indo-européens, des Sémito-hamites, etc.) et les documents de
la préhistoire. Supposons en effet, pour mettre les choses au
mieux, qu'au moyen de cette méthode, on arrive quelque jour
à dresser un arbre généalogique de tous les types culturels
connus et à montrer leur dépendance d'une souche unique.
En pareil cas, il resterait encore possible que des souches
contemporaines de celles-là aient disparu sans laisser de tra-
ces. En conséquence, l'ethnologue, comme le linguiste et pour
les mêmes raisons, pourrait seulement déclarer qu'il ne peut
remonter plus haut.
Allons plus loin. Supposons qu'il soit possible d'exclure
cette hypothèse de souches disparues et d'affirmer qu'on pos-
sède des documents de la première époque où la vie fût possible
sur terre. Ces documents fussent-ils assez nombreux et assez
explicites, faute de pouvoir évaluer quelle fut la longueur de
cette période primitive et à quel moment de sa durée ces
témoins appartiennent, l'ethnologue ne pourrait encore décider
si la civilisation qui lui apparaît comme la plus ancienne n'est
pas l'aboutissement d'une longue évolution et par conséquent
quel fut au juste son premier état.
Le pourrait-il enfin, qu'il ne pourrait déterminer quelle est
sa source de fait, c'est-à-dire si elle est due aux seules ini-
80 H. PINARD DE LA ROULLAYE
tialives de lliomme ou à quelque intervention surnaturelle.
Cette dernière conrlusion s'imposerait, à vrai dire, si la civi-
lisation ainsi l'pstituée se révélait si ])arfaite qu'elle ne pût
s'expliquer par des causes purement naturelles ; mais pareille
hypothèsf est loin d'être suggérée soil par la science, soit par
la Bible. Au surplus. rai)préciat ion du nattirel el ilu ]»r'(''l(M'-
naturel relève de la philosophie.
d. A plus forte raison, la méthode historico-culturelle, comme
loute autre méthode positive, n'a-1-elle, en tant que telle,
aucune (Compétence pour se prononcer sur la valeur respective
des civilisations ou sur la vérité des croyances qu'elles englo-
hent : c'est aux philosophes d'en juger.
Ces limitations, si je ne me trompe, ne sont pas contestées
par les partisans de la nouvelle méthode. Ils ne songent pas
plus à résoudre seuls tous les problèmes qui concernent la
philosophie des religions, qu'ils ne prétendent résoudre sans
ie secours des méthodes philologique, psychologique et histo-
rique ceux qui ont trait à la seule histoire des religions. Il leur
suffît de remplacer par des procédés vraiment critiques ce qu'il
y avait de contestable dans les procédés de l'ancienne école
anthropologique, trop manifestement influencée par « le dogme
Iransformisie » et par la philosophie évolutionniste.
Au terme de cette étude, une double distinction s'impose :
fout d'abord, entre la méthode et ses applications actuelles, dont
plusieurs peuvent paraître contestables — ensuite, entre ses
principes essentiels et les perfectionnements de détail, que ses
initiateurs sont unanimes à déclarer «{lossibles et désirables.
Sous bénéfice de ces réserves, n'est -il pas permis de dire que
la méthode historico-culturelle se recommande par son objec-
tivité — qu'elle marque un progrès considéi'able — que, dans
la limite de sa compétence, l'avenir lui appartient ?
Certains esprits, il est vrai, peuvent se demander i»ourquoi
elle est encore l'objet d'objections assez vives et de suspicions
assez graves. Mais les raisons suivantes ne peuvent-elles ex-
pliquer ce fait ? — Elle est encore fort mal connue, même par
ceux qui l'attaquent, comme M. Van Gbnnep, dont les méprises
sont vraiment étranges et la partialité d'ailleurs mal dissi-
mulée — elle étonne par les connexions qu'elle établit entre les
WIRTSCHAFTSPORMEX UND KULTURKREISE 81
civilisations et Ton recule devant le labeur (labeur immense,
il est vrai) exigé par le contrôle des preuves de détail qu'elle
fournit - — de plus, elle s'oppose nettement aux procédés de
l'école évolutionniste ; elle a déjà ruiné plusieurs de ses thèses
majeures ; ne serait-ce pas vraiment la première fois dans
rhistoire qu'une question de science serait traitée par des
raisons de science pure ? — Enfin, là où les objections portent.
on oublie de faire les distinctions importantes que' nous signa-
lions tout à l'heure.
Qu'on l'étudié, fût-ce pour la réfuter. Il n'est guère douteux
que l'on ne soit amené à adopter son orientation et ses prin-
cipes. Si on les « met au point » par des précisions nouvelles,
avant tous autres, ses plus chauds partisi.ns en seront fort
reconnaissants.
BIBL. — Fr. Graebner, Méthode dcr Ethnologie, in-8«. Heidelberg. Winter,
1911 — W. ScHMiDT, Die kulturhistorische Méthode in der Ethnoh, da.ns
Anthr., 1911, t. VI, p. 1010-1036 ; cf. 1912, t. VII, p. 1060-1062 ; Neue Wege
in der vergl. Rel'gions- iind Gesellschaftsivissenschaft, clans Die Kultur, 1911.
p. 1-25 ; en trad. française, dans ESPT, 1511, t. V, 4 6-75 ; Kulturkreisc und
Kulturschichten in [Amerika], dans Zeitschr. fiir Ethnol., 1913, t. XLV,
p. 1014-1124 ; cf. p. 1124-1130 ; cf. Anthr., 1917-iyi8, t. XII-XIII, p. 1120-
1127 ; 1919-1920, t. XIV-XV, p. 546-563 ; 1921-1922, t. XVI-XVII, p. 487-519 ;
La nouvelle méthode ethnologique, dans CRSER, 1913, p. 43-57 (sommaire)
et dans RSPT, 1913, t. VII, p. 218-245 (in extenso) ; cfr. CRSER, 1914,
p. 49-65. — A consulter spécialement W. Schmidt et W. Koppers, Vôlker
und Kulturen, in-4», Regensburg, Habbel, 1915 sq., p. 63 sq.
H. Pin.jvrd de la Boullate, La méthode historico-cult., dans RSR, 1921,
t. XI, p. 273-305 ; L'étude comparée des relig., 2 in-8", Paris, Beauchcono,
1922-1923 ; histoire de la méthode, t. I, c. VIII ; discussion critique, t. II.
c. V ; cf. Essai sur la convergence des probabilités, dans Revue néo-scolas-
tique, 1914-1919, t. XXI, p. 394-418; 1920, t. XXII, p. 5-36.
[4] Wirtschafts- und ergologische Formen
und die ethnologischen Kulturkreise,
von Hochw. P. "W. KOPPERS, s. V. D.
Das Tliema nieines gegenwàrtigen Vortrages lautet : « Wirt-
schafts- und ergologische Formen und die ethnologischen
Kulturkreise. » Der eigentlichen Behandlung des Themas sind
einige begriffliche und historische Erorterungen vorauszu-
schicken.
82 W. KOPPERS
I. BEGRIFFLICHES UND HISTORISCHES ZUR ETHNOLOGISCHEN
WIRTSCHAFTSFORSCHUNG.
Sehon in meiner hiî^torisch-kritischen Studie zur ethnolo-
gischen Wirtschal'tsforsohung, verôffentlieht im Anthropos
(1915-1(3, Bd. X-XI), deflnierte ich ini AnsclUuss an Heinrich
SCHLRTz, die Wirtscliaft als dv' mit ziveckbewussten Mitteln plan-
màssig geiibtc Fûrsorge von seiten des Menschen im Interesse
seines kôperlichen Dascins. Damit isl einerseits gesagt, dass
die wirtschaftliche Arbeit zunachst auf Erlialtung des korper-
lichen Lebens (Nahrung, Kleidung, Wohnung; binzielt. wie
anderseits, dass dièses Arbeiten beini Menschen ein von seinen
geistigen Fàhigkeiien dirigiertes ist. Naeh dieser Définition
stellt also das Wirtschaiten ein Spezifikum des Menschen dar.
■Das Wirtschaften als ein solches hinzustellen, dazu hielt
ich mich berechtigt, ja verpfiiehtet, weil nach dem gegen-
wartigen Stande der Forschung weder Pràhistorik noch Vôlker-
kunde irgendwo oder irgendwann von kultur- und wirtschafts-
losen Menschen zu berichten wissen. Mit anderen Worten :
der Mensch tritt immer und ûberall als wirtschaftendes, wie
ûbenhaupt als kulturbesitzendes Wesen auf ; das Tier aber
wirtschaftet nicht, was bel demselben vor allem deutlich wiid
aus dem Mangel an zwecklbewussten Wirtschaftsmitteln. Im
besonderen : Das Tier verfertigt sich solche nicht.
Nach dem Gesagten ist es klar, dass es nicht gebilligt
werden kann, wenn in neuerer Zeit oft von einem Wirt-
scha/ften im Tierreiche geredet und geschrieben wird. Ebenso-
wenig ist es statthaft, den primitivsten Menschenkindern.
denen, die, etwa nur mit Pfeil und Bogen ausgerûstet. den
Urwald nahrungsuchend durchstreifen, die Wirtschaft abzu-
sprechen. Nein, auch sie wirtschaften, ùben eine spezifisch-
menschliche Lebensfûrsorge, darum, weil sie mit zweckbe-
wussten Mitteln in diesem Interesse tàtig sind.
Es ist nûtzlioh, unter Umstânden sogar notwendig, bei
wirtschaftsgeschichtlichen Untersuchungen zu unterscheiden
zwischen Produktion und Ergologie. Wahrerid Produktion die
Art der Lebensfûrsorge (Jagd, Ackerbau, Viehzucht, usw.)
bezeichnet, fallen unter Ergologie die in diesem Sinne ge-
brauchten Werkzeuge, Gerâte und Walïen. Produktion und
WIRTSCHAFTSPORMEN UND KULTURKREISE 83
Ergologie stehen also einergeits hier einander gegenûber, ma-
chen aber anderseits zusamimen die Wirtschaft im weiteren
Sinne aus.
Wir reden von Wirtschaftsfonnen und Wirtschaftsstufen. Die
Wirtschaftsform wird bestimmt : 1. dureh das, wo-5 der
Mensoh an pflanzliihen und tierischen Produkten von der Natur
entgegennimmt ; 2. durch die Art und Weise wie er das tut.
Ich erlàutere das Gesagte an einem Beispiel. Sowohl die Stufe
des Jâgertums als diejenige des viehzûchterischen Nomadismus
nahrt sich im allgemeinen vorwiegend von tierischen Produk-
ten. In bezug auf das, was hier die Menschen von der Natur
an Produkten im Interesse des Lebensunterhaltes entge-
gennehmen, herrscht also wesentliche Uebereinstimmung. Aber
dennoch sind die entsprechenden Wirtschaftsformen kei-
neswegs miteinander identisch, und" zwar deshalb nicht, weil
in bezug auf die Art und. Weise, wie die tierischen Produkte
von der Natur entgegengenommen werden, ein grosser Unter-
schied besteht : in deon einen Falle (auf der Stufe des Jâger-
tums) erjagt man die wild lebenden Tiere ; in dem anderen
Falle (auf der Stufe des viehzûchterischen Nomadismus) zieht
man die Tiere zu besagtem Zwecke auf, man zûchtet sie.
Die Bezeichnung « Wirtschaftsform » ist eine neutrale, d. h.
sie bringt nur ein blosses Nebeneinander verschiedener Wirt-
schaftseinheiten zum Ausdruck. Die Bezeichnung «Wirtschafts-
stufen » kehrt dazu auch ein Hôher und Nieder der Wirl-
schaftsformen, ein sfîi/'enmâssiges Verhâltnis derselben hervor.
Oie beiden Termini, « Wirtschaftsstufen » und « Kulturstu-
fen », werden hàufig promiscue gebraucht. Natûrlich ist eine
solche Identifizierung nienials genau. Denn selbst bei den Pri-
mitivsten reicht die Kulturform stets bedeutend weiter als die
blosse Wirtschaftsform.
Die ethnologische Wirtschaftsforschung war in der Vergan-
genheit wesentlich Wirtschaftsstufenforschung. Bis zum Ins-
daseintreten der historischen Ethnologie kônnen wir fûglii-h
drpi Perioden in ihrer Geschichte unterscheiden.
1. Die Wirtschaftsstufenforschung in der Zeit des Altertinns bis
zur Mitte des 19. Jahrhunderts. — Die Wirtschaftsstufenforschung
dieser Période ist charakterisiert durch die sogenannte Drei-
stufenlehre : Jâgertum (Paradies), Hirtentum und Ackerbau.
84 W. KOPPBRS
Die alten Griechen kannten drei Wirtschaftsformen : den
hoheren Ackerbau, das Hirtentum und das Jagertiim. Daraus
wiude dio Dreistiifenlehre. Also ans dem Nebeneinander wurdp
kurzprhand ein Nach- und. Ausoinander konstruiert. Dièse
Dreistufenlehre blieb vorherrschend bis naeb der Mitte des
19. Jahrhunderts. Besonders das evolutionistiscb orientierte
Denken versohnte sich sehr leicht mit der Dreistufenlehre.
Denn dièse Lehi'e bedurfte ja nur ein wenig evolutionistis(?her
Aufmachung, und ohne weiteres si élite sie sich in Reih und
Glied mit jenen wohlbekannten evolutionistischen Entwick-
lungsreihen, deren Konstruktion als hochstes Forschungsziel
so allgeniein den Anthropologen und Ethnologen der letztver-
gangenen Jahrze'hnte vor Augen sehwebte. In weiten Kreisen
herrschte die Dreistufenlehre bis in das 20. Jahrhundert hinein.
2. Die Wirtschaftsstufenforschung von der Mittc des 19. Jahr-
hunderts bis E. Grosse (1896). — Wie bekannt ist, erhielt die
bald nach 1850 neu aufblûhende Vôlkerkunde ein durch und
durch evolutionistisehes Geprâge. Intéressant und lehrreich ist
es, dass die Unmôglichkeit, auf kultupgeschichtlichem Gebiete
an dem extremen Evolutionsprinzip festzuhalten, zuerst auf
den konkreten Forschungsgebieten der Produktion und der
Ergologie zulage trat. Auf dem Gebiete der Wirtschaftsstufen-
forschung kommt es infolgedessen zu "Koinpromissbildungen
zwischen der extremen Fassung des Prinzips und den neuerlich
bekannt gewordenen wirtschaftsgeschicht lichen Tatsachen.
Von ganz besonderer Bedeutung ist in dieser Hinsicht L. H.
AIORGANS (1877) fûnifstufiges Schéma geworden. Morgan unter-
scheidet zwei Stufen der Wildheit und drei Stufen der Barbarei.
Die letzte Stufe der Barbarei geht, wie Morgan meint, iiber in
das Zeitalter der Zivilisation. Wahrend Morgan fur die ersten
beiden Stufen, fur die Stufen der Wildheit, an einer streng
evolutiven materiell-wirtschaft lichen Entwicklung festhàlt, tut
er das hinsichtiich der folgenden nicht mehr. Auf der untersten
Stuife der Barbarei ist es, wo er Sonderentwicklungen eintretçn
làsst, welch letztere er dann auf die verschiedenen lokalen
natûrlichen Bedingumgen zurûckfûhrt. So habe sich um dièse
Zeit auf der westlichen Hemisphâre, also in Amerika, ein
Ackerbau ohne Viehzucht ausgelbildet, wahrend auf der ôstli-
WIRTSCHAFTSFORMEN LND KULTURKREI8E 85
chen, in Asien, vorwiogcnd eine viehzûcliterisc-lie Kultiu'
entstand.
Ein Dreifaches ist wohl zu dem MoROAN'schen Versueh be-
sonders zu sagen : a. Auf dem Gebiete der Wirtsehaftsent-
wicklung- das extrem evolutionistische Prinzip festzuhalten.
scheiterte scbon damais an den bezûglichen Tatsachen. h. Da
das Prinzip damit natiirlich ûberhaupt durchbrochen ist, zeugt
es von dem ûbermàssig starken konstruktiven Drang des
MoRGAN'scben Geistes — freilich sind ihm darin niir zu viele
gesinnungsverwandt — , wenn er trotzdem versucht, dasselbe
fur die untersten Stufen wenigstens zu retten. c. Soll hier der
Hinweis nicht unterbleiben, dass Morgans :\Iassnahme nichts
andcres wiederspiegelt als Bastians Lehre vom Volkergedan-
ken, und zwar vom Vôlkergedanken in seiner Verbindung mit
dem Evolutionsprinzip. genau so, wie auch Bastian selber das
eine mit dem anderen verbunden wissen wollte. Es dûrfte sich
somit ergeben, dass auch Bastians Vôlkergedanke schliesslich
aus dem Widerstreit geboren wurde, der vor seinem Geiste
zwisclien diesem Prinzip und den ihm nicht konvenienten
Tatsachen sich erhob,
Bemprkt sei in diesem Zusammenhang, dass Morgans wirt-
schaftsgeschichtliches Schéma, ebenso wie das soziologische.
vun Fr. Engfls in sein bpkanntes Elaborât Urspriing des Pri-
vateigentum.s. d^r Familie und dfs Staates (1884) ohne wesentli-
che Abanderung ûbernommen und so dem sozialistischen Glau-
bensliekt-nntnis oinverleibt wurde. Das Gleiche tat A. Bebel
m seinem an Auflagen so reichen Bûche Die Frau. Es ist dahei-
kaum eine Ueberfreibung darin zu sehen. wenn E. Grosse im
Jahrc 1896 scbon von ^Iorgan als dem « Kirchenvater » des
Sozialismus redet,
Relativ gute Ansâtze zur historischeyi Behandlung des wirt-
schaftsgeschichtlicben Problems fmden sich besonders bei dem
bekannten deutschen Nationalôkonom W. Roscher (bald nach
1850. bei der Englânderin Miss A. W. Buckland (1878). bei
dem Englandor H. L. Roth (1887) und besonders bei dem
deutschen Wirtschaftsgeographen E. Hahn (1890 ff.) . E. Hahn
hat seil je vor allem gegen die Dreistufenlehre gekâmpft. Nach
ihm folgt das Hirtentum dem Ackerbau. und nicht umgekehrt.
Hahns Theorienkomplex geht ganz mit tien bekannten Lehrcn
86 W. KOPPERS
des Panbabylonismus. Mit diesen teilt er eineni absoluteri
Evolutionismus gegenùber zwar gewisse Vorteile, anderseits
aber auch aile dessen (des Panbabylonismus) Einseitigkeiten,
Unvullstandigkeiten und Sehwàchen.
(P'ehlte es somii im ganzen nicht ;in Versuclien zii histo-
rischer Behandlung des Problems, so gelangte man ethnolo-
gischerseits doch erst um die Mitte der neunziger Jahre des
vorigen Jahrhunderts zu einer bewussten Ablehnung der evo-
lut ionistiscb orieni ierten Wirtschaftsstufenforschung.
E. (trosse und sein epochemachendes Buch Die Formen der
Familic und die Formen der Wirtschaft (1896) sind hier zu
nennen. Grosse erkennt im Evolutionismus den schlimmsten
Feind der Ethnologie. Die evolutionistischen Konstruktionen
« à la Morgan » lehnt er mit aller Bntschiedenheit ab. Er
leugnet dann iiberhaupt die derzeitige Môgliehkeit, eine wir-
klieh entwieklungsgeschichtliche Folge der soziologischen.und
wirtschaftlichen Stufen wiederzuge'ben. Nur der Bequemlichkeit
und Uebersiehtliehkeit halber geschieht es, wenn er die Menseh-
heit aufteilt in « Niedere Jàger », « Hohere Jàger >k « Vieh-
zûchter », « Niedere Ackerbauer » und « Hohere Ackerbauer ».
Er warnl dann ausdriicklich davor, die Reihenfol^e dieser fùnf
Stufen etwa historisch-chronologisch verstehen zu wollen. So
bleibt also Grosse bewusst — es gereieht das seinem gesunden
Forschersinn gewiss zur grôssten Ehre — vor der Kern- und
Wesensfrage, vor der Frage nach der historischen Folge dei'
Stufen und ihrem kausalen Verhàltnis zueinander, stehen. Uns
kann das im ùbrigen weiterhin nicht verwunderlich erscheinen ;
denn die Losung dieser Frage ist endgûltig nur moglich auf
Grund der Historisierung der gesamten Ethnologie.
^^"ir gehen nunmehr dazu ûîber, nâher ins Auge zu fassen,
welches Schieksal die Wirtschaftsstufenforschung, wie die
gesamte ethnolo'gische Wirtschaft sforschung, auf dem Boden
der historischen Ethnologie bereits erlebt hat und welche
weitei'en Perspektiven wir ihr da stellen konnen.
II. WIRTSCH^FTS- UND ERGOLOGISCHE FORSCHUNG
AUF DEM BODEN DER HISTORISCHEN ETHNOLOGIE.
Win im allgemeinen in den letztverflossenen Jahrzehnten die
Historisierung der ethnologischen Wissenschaft «ich vollzog,
WIRTSGHAFTSPORMEN UND KULTURKREISE 87
kann idi als bokannf voraussetzen. Ich crinnere hier nur daran,
■dass der Ausdruck « Historisierung der Ethnologie » nichts
anderes beinhaltet, a.ls die konsequente Anwendung des histo-
rischen Prinzips auf ihr Gebiet. Das « Um » und « Auf » der
vergleichenden ethnologischen Forschun'gsarbeit besteht dem-
nach darin, den historischen oder verwandtschaftlichen Be-
ziehungen im einzelnen nachzugehen. Das ist die theoretische
Forderung, iilber weh'he zuerst Fr. Ratzbl sich klar wurde.
Einen praklischen Versuch mauhte er hekaiintlich mit zwei
ergologischen Oljjekten, mit Bogen und Stàbchenpanzer. Wir
haben somit die ebenso intéressante als bedeutsame Tatsache
zu registrieren, dass vom ethnologischen Zweiggebiet der
Ergologie ans die Bahn erôfïnet wurde zur Historisierung des
gesamten ethnologischen Forschungsgebietes.
ilm Gegensatz zur Gesehichtsforschung im landlâuligen Sinne
hal die Ethnologie es fast ausschliesslich nur mit sogenannten
« unmittelbaren Zeugnissen » zu tun. Die Historisierung des
Gebietes hat daher ihre besonderen Schwierigkeiten. Das Krite-
rium, das in dieser Hinsicht grundlegende und ausschlagge-
bende Bedeutung besitzt, ist das soigenannte Formkriterium.
Ratzel zuerst brachte es in Anwendung bei der schon erwàhn-
len Erforschung von historisch-genetischen Bezieliungen be-
stimmter Bogen-und Stâbchenpanzerformen. So steht also nicht
nur fest. dass die Erforschung der Verwandtschaftsverhàltnisse
bestimmter ergologischer Objekte die Historisierung der Eth-
nologie einleitete, sondern auch, dass im Bereich desselben
Zweiggebietes der Ethnologie das Formkriterium seine erste
bewusste Anwendung und Ausbildung erlebte, das dann natur-
gemàss eine nicht geringere Bedeutung fur die historische Er-
forschung der gesamten ûbrigen Kulturerscheinungen ethnolo-
gischer Vôlker gewinnen musste.
iRatzel's Formkriterium lautet, kurz gefasst, wie folgt : bei
gleichen oder âhnlichen Erscheinungen, die jetzt getrennt von-
einander sicli vorfinden, ist auf historischen Zusammenhang zu
S(.'hliessen, wenn Gleichheit oder Aehnlichkeit weder avis der
Natur des zugrundeliegenden Materials, noch aus dem Zwecke,
dem der Gegenstand dient, ertliessen. Zur lUustrierung des
Gesagten beziehe ich mich auf den westafrikanischen und
melanesischen Bogen, von denen Ratzel selber ja auch ausging.
88 W. KOPPERS
Hatzkl fand, dass beiderorts der Bogeustab nach aussen flach,
nach innen atoer konvex sei. Als Bogensehne herrschte hûben
iind drûben die Rotangsehne vor. Um das Hinaufrutschen der
Sehne zu verliùten, waren die Enden des Bogenstabes mit
eineiii aiisgesohnitzten odei- einem aufgeflocbtenen Wulst
verseben. Ratzel sagte sirh : Weder das Material, aus welcheni
der Bogen bergesteltt ist, noch der Zweck des Bogens als sol-
clier, erfcrdern gerade dièse Eigentùmlirbkeiten. Die Ueberein-
stiminung in der Forni des Bogens beiderorts niuss also einen
Ijcslimmten ausseren Grund haben. Denn da es praktisch aus-
geschlossen ist, dass wir es hier mit einem blossen Spiel des
Zufalls zu lim haben, so bleiibt nichts anderes iibrig, als die
Uebereinstimniung auf kulturgeschichtliche Verwandtschaft
zurùckzufùhren.
Es leuelitet hier schon ohne weiteres ein, von welcher Be-
deutung auf dem Boden der hisforischon Ethnologie das Ma-
terialsaninieln, die exakte Kleinarbeit im Felde ist. Denn, will
ich mit Hilfe des Formkriferiums Sicheres und Zuverlàssiges
erarbeiten, so bildet eine genaue Kenntnis der Formen, also
der Objekte, wie sie in rerum natura sich vorfinden, die uner-
lassliche Voraussetznng. So bedeutet es denn keinerlei Ueber-
ti'eibung. wenn man sagt : Die historische ethnologische For-
schung lebt und stirbt mit dem zuverlàssigen Material. speziell
natûrlich aueh mit dem ergologischen Material.
Hi»^r ist die Bemerkung wohî schon am Platze, dass einzelne
Missionare niclit glauben môgen, es sei eine minder wichtige
und daher weniger ehi-envolle Sache, die Ergologie eines be-
stimmten Gebietes genauestens festzulegen. Fur die Historisie-
rung der Ethnologie ist die exakte Beschreibung der ergolo-
gischen Objekte schliesslich von derselben Bedeutung wie die-
jenige des geistig-religifksen Lebens. Dass das Tetztgenannte
Gebiet inhaltlich hôher steht und fur den Theologen besonders
grossere Anziehungskraft besitzt, soll damit keineswegs in
Abrede gestellt werden. Aber es kann nicht zweifelhaft sein,
dass zunâchst als notwendiges Mittel zum Zweck das eine
eiienso wahrzunehmen ist, wie das andere, und, dass die Ver-
nachlàssigung des einen immer auch eine Schâdigung des
ahderen bedeuten wiirde.
Dass das Arbeiten mit dem Formkriterium allgemein und
WIRTSCHAFTSFORMBN UND KULTURKHEISE 89
speziell auch auf ergologischeni Gehiet im gegebenen Fall vor
subjekliven Felilgi-iffen niclit vollstàndig zii bewahren verniag,
liegt in der Natur der Sache begrùndet. Notwendig ist hier das
unablâssige Bomiihen, kein ^Mittei unbeniitzt zu lassen, da^^
zur Aufstellung der voUen W'alirheit verhelfen kann. Der
Gefahr des Iri-ens wird man weitmôglichst begegnen, wenn
man ailes das, was Fr. Graebner gerade aneh zii dicsem Punkte
jn seiner Méthode der Etlinçlogie zusammengestellt bal. î-echt
beherzigt und stândig sich vor Augen hait.
So hat also das Studium einzelner ergologiscber Objektc die
Historisierungsarbeit der Ethnologie erôffnet und speziell auch
zur AulTmdung und Anwendung des Formkriteriums gefûhrt.
Aber damit sind die Yerdienste keineswegs erschopfl. welchc
dem Ge'biete der Ergologie im Sinne der Umgestaltung der
Ethnologie in eine Geschichtswissenschaft zukommen. Es war
wesentlich auch das ergologische Forschungsgebiet, von dem
aus zuerst die schliesslich nicdit minder wiclitige Entdeckung
von geschlossenen ethnologischen KultxLrkreisen gemacht
wurde.
Dass der erste diesbezûgliche Yersucb auf L. Frobënius
zurûckgeht. ist bekannt. Ein genaueres Studium der ^Éthnogra-
phie Westal'rikas und bestimmter Gebiete der Siidsee offen-
barte ihm nicht nur die verwandtchaftliche Beziehung in Bezug
auf das eine oder andere Objekt, sondern liess ihm eine solche
auch hinsichtlich eines ganzen Komplexes von Objekten deut-
lich werden. Die Objekte, welclie Frobënius ins Auge fasste,
waren vornehmlich Objekte des ergologischen Gebietes. Auf
Grund dieser seiner Arbeit wurde Frobënius zum Schopfer des
sogenannten QuanlUdtskrileriums und der Kulturkreislehrc.
Wie ohne weiteres ersichtlich, fusst das Quantitatskrilerium
nach Wert und Wesen ganz auf dem Formkriterium. Wie der
Name es schoh anzeigt, slellt es nichts anderes dar. aïs eine
quantitative Erweiterung, eine wiederholte Anwendung des
Formkriteriums. Die gegehenen Tatsachen waren es, die dazu
zwangen. das Formkriterium bei verschiedenen Objekten
zweierlei Komplexe immer wieder von neuem in Anwendung zu
bringen. Und das eben fûhrte zur Erkenntnis, dass nicht nur
einzelne Objekte der Komplexe, sondern die ganzen Komplexe
als solche miteinander historisch-genetisch verwandt sein
90 W. KOPPERS
mûsstpn. So also erweiterte sieh von selbst das Formkriteriuni
zum Quantitâtskriterium, und ps trat die Kulturkreislehre, dio
Lehre von ursprùnglich geschlossenen, historisch-genetisch
zLisanimengehorigen Kulturkomplexen, ins Leben.
Die Aufdeckung und Lehre von den Kulturkreisen bedeutete
nun, wie nian ohne weiteres sieht, fur den Historisierungs-
prozess der Ethnologie eine neue Epoche. Auf dièse Weise
bekam nian, wenn ich midi so ausdj'ûcken soll. festeren Boden
unter die Fiisse, konnte ûberhaupt zielbewusster ans Werk
gehen. Und zielbewusst gingen dann besonders, wie weiterhin
lângst bekannt ist, Fr. Graebner, B. Ankermann, W. Foy und
P. W. SCHMiDT und neuei'dings speziell auf pràhistorischem
Gebiet Prof. Menghin an die Arbeit.
Man hat nun gegen dièse Vertreter einer historischen Ethno-
logie unter anderem mehrfach auch den Vorwurf erhoben, dass
sie bei ihrer Kulturkreisforschung zu einseitig auf das ergo-
logisehe Material sieh stûtzten. Hieraus geht fiir uns jedenfalls
schon hervor, dass dièses Zweiggebiet dei- Ethnologie bei
ihrem Historisierungsprozess seine grosse Rolle aurh weiterhin
ges})iplt hat. Das ist in der Tat so der Fall gewesen. Und ich
bemerke gleich, dass die Herren dabei von einem ganz guten
Geiste gefiihrt worden sind. Und zwar das aus mehrfachen
Grûnden.
Zunâchst, weiss doch jeder ethnologische Faohniann, dass
wir von \ielen Primitiven der Erde derzeit kaum mehr kennen
als ihre ergologischen Kulturprodukfe. Will man also in solcho
Vôlkerkomplexo uberhaui)t schon irgendeine Ordnung bringen.
so bleibt keine andere Wahl als das Studium dièses Gebietes.
Dazu kommt. dass unsere ethnologischen Minseen vorzûglich
mit ergologischen Objekten angefûllt sind ; man kann es nur
billigen, wenn die Forschungsmittel, welche so zur bequemen
Benutzung bereit stehen, auch wirklich ausgenutzt werden.
Aber es sind gewiss nicht allein dièse âusseren Grûnde dafûr
massgebend gewesen, dass in den ersten Kulturkreisarbeiten
das ergologische Gebiet eine so vorherrschende Rolle spielte.
Unbewusst. zum Teil auch bewusst, sind hier auch Grûnde
mehr innerer Natur wirksam gewesen. Darauf hat jedenfalls
P. W. ScHMiDT in seiner Arbeit Kulturkreise und Kulturschichten
in Sûdamerika schon mit folgenden treffenden Worten hinge-
WIRTSCHAFTSFORMEN UND KULTURKREISE 91
wiesen : « An den Gegenstanden der materiellcn Kiiltur ist der
Zweck in hôherem Grade festliegend, und festlipgender in
gleich enlsprechendejn Grade ein scharf umrissener Teil der
âusseren Gestalt dièses Kulturgegenstandes. Ebenso scharf
zeichnet sich ein anderer Teil der Form dièses Gegenstandes
ab durch die Natiir des Materials, aus dem er verfertigt ist.
Es ist klar, dass durch dièse beiden Abgrenzungen wie von
selbst dann auch derjenige Teil sich leichter herausstellt, der
von jenem inneren Willen des Verfertigers selbst. bedingt ist.
der auch der eigentliche Verursacher und Trâger des histo-
rischen Lebens ist. Damit sieht man leicht, wie gerade die
Gegenstande der materiellen Kultur geeignet sind, die ersten
Zugànge in das unentwirrbar scheinende Dickicht der Kul-
turentwicklung zu ôffnen. »
,Sie sehen, wie P. W. Schmidt hier der Ansicht ist, dass
Ratzels Formkriterium sich zunàchst am zuverlassigsten an-
wenden und ausbilden lâsst auf ergologischem Gebiete, und
dass daher schon aus rein taktischen Grûnden von hier aus
der Historisierungsprozess der Ethnologie zu beginnen habe.
Mit diesem Grundsatz kann ieh wenigstens mich nur ganz
einverstanden erklàren.
Aber abgesehen hiervon, lasst sich gerade bei den hervor-
ragendsten Vertretern der historischen Ethnologie (Graebner
und Schmidt) die Reobachtung machen, dass sie bald schon
auch den ubrigen Gebieten des kulturellen Lebens ihre ein»-
gehendste Aufmerksamkeit schenken. Wer die bezuglichen
Arbeiten wirklich kennt, d. h. sie gelesen und studiert hat.
weiss, wie daselbst die Gebiete der Soziologie, der Mythologie,
der Religion, der Sprache, der physischen Anthropologie, usw..
also Zweiggebiete der Ethnologie oder doch Hilfswissenschaf-
ten der-selben, ihre inimer weitergehende Verwertung finden.
Indes hat uns hier dieser Punkt nicht weiter zu beschàftigen.
Unsere nàchste Aufgabe haben wir vielmehr darin zu sehen,
herauszustellen, wie es denn dem besonderen Schwestergebiet
der Ergologie, dem Forschungszweig der Produktion auf dem
Boden der historischen Ethnologie ergangen ist.
Unter Produktion bzw. Produktionsform versteht man, wie
ich im ersten Teil meines "Vortrages ja schon sagte, die Art
der Lebensmittelgewinnung, so wie sie von irgendeiner Men-
92 W. K0PPER8
schengruppe in ausschliesslicher oder doch vorherrschender
Weise geûht wird. Solange die Menschen Menschen sind, d. h.
als geistig-sinnliche Wesen iiber die Erde wandeln, bediirfen
sie doi- Nahrung aus dem Pflanzen-und Tierreiche zur Erhal-
tung ilires irdischen Daseins. Es liegt soniit in der Natur der
Sache begrûndet, dass den einzelnen ethnologischen Kultiir-
kreisen neben anderen Eigentumlichkeiten von Haus aus auch
eine eigentûmliche Produktionsforin zukommt. Das gehôri ja
zur Idée des geschlossenen Kulturkreises, und damit stimmen
die Tatsachen auch vollkommen ûberein.
iSchon L. FiiOBEMUS batte nun der Erforschung der Produk-
tionsfoi-men im kulturhistorischen Sinne einige Aufmerksam-
keit gesrhenkf. Aber eine grûndlichere Behandlung liessen
derselben erst Graebner und Schmidt angedeihen. Fur mehrere
Kulturkreise arbeitete schon Graebner die eigentunilichen Pro-
duktionsformen mehr oder minder klar heraus. Wie die ge-
samte Kulturkreisforschung, so hat auch dieser ihr Zweig
besondere Forderung dann durch W. Schmidt erfahren. Die
hierhergehorigen Untersuchungen sind wesentlich in der neuen
Volkerkundo niedergelegt, die unter dem Titel Yôlker und
Kvlturen im Erscheinen begrifïen ist. In dem speziellen \v4rt-
scbaftsgeschichtlicben Teile, den das VVerk gleich iin ersten
Halbbande bringen wird, denke icb dann selber auch mehrere
der hier in Rede stehenden Fragen weiterer Klârung zugefûhrt
zu haben. Erinnern darf ich hier vielleicht auch an meine
historisch-kritische Studie Die ethnologische Wirtschaftsfor-
schumj {Anthropos. 1915-16, Bd. X-XI) .
Ich gebe zunàchst in kurzer Zusammenfassung einige der
Hau]ilergebnisse wieder, welche aile dièse wirtschaftsge-
schichtlichen Untersuchungen auf dem Boden der historisehen
Ethnologie gezeifigt haben.
iMit neuer Klarheit trat ans Licht, dass auch das gesanilf
Wirts<haften des Mensclien im Kerne ein historisches Ge-
schehen darstellt. Daraus erfliesst ohne weiteres die Forderung.
dass auch die elhnologische Wirtschaftsforschung, soll sie
gedeihen, zur historisehen Disziplin erhoben werden muss. Der
enge Verband ferner. in welchem in jedem Kulturkreise die
Wirtschaftsform und das ûbrige Kulturleben naturgemàss
stehen, làsst eine VoUentwicklung der ethnologischen Wirt-
WIRTSCHAFTSFORMEN UND KILTURKREISE 93
schaftsforschung nur erhoffen. wenn letztere orfolgt im engsten
Zusammenhang mit gesamtethnologischen Untersuchungen.
Die Rpziprozitàt indes, welche hier vorwaltet, wird uns weiter
noeh nàhcr zu besehàftigen haben.
Von methodologischem Werte sind noch folgende gewonne-
nen Gesichtspunkte. Eine Vôlkergruppe, mit einer bestimmten
Wirtschaftsform ausgeriistet. wird bei freiwilligen oder not-
wendigeîi Wanderungen, im allgemeinen darnach streben, ein
Erdgebiet wiederzufinden, wo die alte Wirtschaftsform beibe-
halten werden kann. Kommt eine Menschengruppe dauernd in
ein Erdgebiet hinein. wo die alte Produktionsform nicht weiter
zu bestehen vermag, so werden fur gewôhnlich doch die ergo-
logischen Formen grôssere Konstanz behaupten ; dièses aus
dem einfachen Grunde, weil eine bestimmte Produktionsform
an ganz bestimmte ôrtliche Verhàltnisse gebunden ist. wàhrend
die Ergologie naturgomâss einer grôsseren Anpassungs-
fàhigkeit sich erfreut.
Hiermit ist, in einige methodologische Regeln gefasst, das
Schicksal angedeutet, das Produktions- und ergologische For-
men auf Grund der ôrtlich-,geographischen Verhàltnisse zu
erleben pflegen. Das Schicksal, das dieselben Formen erfahren
auf Grund mannigfacher kulturhistoriseher Ereignisse, auf
Grund namentlich der Verbindungen von Vôlker- und Kultur-
komplexen, muss selbst'redend aus der Einzeluntersuchung
gewonnen werden. Diesen Einzelergçbnissen weiter nachzu-
gehen, kann nicht die Aufgabe des gegenwàrtigen Vortrages
sein. Wir wenden uns vielmehr der Behandlung einer wei-
teren methodologischen Frage zu, der Frage namlich : Was
bedeutet das E. Grosse "sche Prinzip « Erhellung der Gesell-
schaftsform durch die Wirtschaftsform » im Bereiche der
historischen Vôlkerkunde ?
Das fur aile historische Arbeit grundlegende Prinzip : « Her-
ausstellung der ganzen Tatsachen ! » besitzt natiirlich voile Gel-
tung auch fur das Gebiet der ethnologischen \\'irtschafts-
forschung. Und so ist gar nichts dagegen zu sagen, wenn die
Verireter der Kulturkreisforschung erst einmal mit allen
Mitteln darnach strebten, die den einzelnen Kulturkreisen
eigentûrnlichen Produktionsformen als solche môglichst klar
ans Licht zu stellen. Ein Gliick aber auch, dass der Menschon-
94 W. KOPPERS
geist sicli auf (We Dauer nicht gerne dabei bernhigt, bestimmte
Tatsaehen im blossen Nel)eneinander vorzuflnden, sondern,
dass er stets wieder darnac-h stiebt, in den Kausalzusam-
menhang derselben einzudringen. kurz, eine Antwort zu erhal-
len auf die Frago : Warum gerade so und nieht anders ?
In der Xeuzeit bat die Erkenntnis stets weitere Kreise
gezogen, dass in jedweder menschliehen Gesellschaft die Pro-
diiktionslorm fur das gesamte iibrige Kulturleben von grundle-
gender Bedeutung isl. Die Ethnologen speziell haben einsehen
gelornt. dass dieser Einfluss ein besonders grosser sein muss
in allen primitiveren Kultuien, aus deni einfachen Grunde
nainlii'h, weil die priinitivere Produktionsform ihre Leute nicht
nur allgemeiner, sondern aueb intensiver in den Dienst der
Lebensmittelgewinnung stellt. Kein Wunder also, dass bei
einem so engen und dauernden Abhàngigkeitsverhàltnis des
gesamten Kulturgebaudes von der Produkrionsform. dièse in
tiefgebender Weise das ûbrige Kulturleben bestimmt.
In der konsequenten Verfolgung dièses Gedankens liegt das
Gebeimnis des Erfolges des Bûches von E. Grosse, Die Formen
der Familie uiul die Formen der Wirtschaft U896), das ich in
den einlpitenden Darlegungen meines Vortrages schon als
oine oporhemachende Arbeit bezeicbnete. Die Anwendung des
Prinzips « Erhellung der Gesellschaftsform durcli die Wirt-
schaftsform » liess Grosse schon wahrhaft herrliche Resultate
gewinnen. Ein voiler Erfolg freilich konnte ibm noch nicht
bescbieden sein, weil damais eine Historisierung der Ethnologie
noch in \\eitem Felde lag. Nacbdem dièse seitdem in weitge-
hendem :\Iasse vollzogen werden konnte, bat nun P. W. SCH^^DT
nicht versaunit, das Grosse 'sche Prinzip abermals zur An-
wendung zvi bringen, und das bedeutet, wie ich glauhe, wiede-
rum eine neue Epoche, eine neue Epoche ebenso fur die histo-
riscb-etbnologiscbe Forschung im allgemeinen. wie fur die
W'irtschaftsforscliung im besonderen.
Zunàchst sei mir hier gestattet, eine metbodologische not-
wendige Ergànzung zum GR0ssE"schen Prinzip wieder in
Erinnerung zu bringen, wie ich sie frûher schon einmal
niedergeschrieben habe {Die efhnvlogische Wirtschaftforschnng.
p. 1069} : « Wir halten dafûr, dass das letztere Prinzip in
zweifacher Hinsicht eine hôchst fruchtbringende Erweiterung
WIRTSCHAPTSPORMEN UND KULTURKREISE 95
erfahren muss. Einerseits beleuehtet die Wirtschaft&form nicht
nur die Form der Gesellschaft (und der Familie), sondern
auch die der ganzen Kultiir (Religion, Wissenschaft, Kunst
usw. mitinbegriffen) . Anderseits gilt das Prinzip auch in umge-
kelirter Fassung : Kultur- nnd Oesellschaftsform werfen aucli
ihr Licht zurûck aiif die Wirtschaftsform. Von welchem Werte
derartige natûiiich mit entsprechender Vorsiclit genuiehten
Rt"u'kschlu8se fiir die historische Wirtschaftsforschung sein
kônnen, liegt auf der Hand. »
Wie und mit welfh iiberrasrhenden Ergebnissen nun in
diesem Sinne besonders P. W. Sghmidt schon gearbeitet bat,
das darzulegen, dafûr geniigt ein kurzer Vortrag nicht. Ich
muss hier abermals auf die schon genannte umfassende Pu-
blikation Vôlker und Kulturen verweisen, wo ailes Hierher-
gehôrige sich zusammenge&tellt flndet. Der Illustrierung halber
indes sei das eine oder andere Beispiel herausgegriffen und in
aller Kiirze vorgefûhrt.
Dass die im Bereich der Naturvôlker so weit verbreitete
Einrichtung der geheimen Mànnerbûnde eine Eigentûmlichkeit
mutterrechtlicher Ackerbaukultur sei, war schon von Fr.
Graebner erkannt worden. P. W. Sghmidt versuchte darauf eine
tiefere Durchdringung des Materials und er stellte sich im
besonderen die Frage : Warum gerade in mutterrechtlicher
Ackerbaukultur dièse geheimen Mànnerbûnde ? Das scharfere
Insaugefassen der Produktionsform dièses Kulturkreises
brachte Licht ins Dunkel. Der hier von der Frau gepflegte
Ackerbau(Hackbau)nâmlich schafift dem weiblichen Geschlecht
eine derartige soziale Vormachtstellung, dass die Mànner-
welt beginnt dagegen Front zu machen durch den Zusam-
menschluss in geheimen Bûnden. Dièse Bûnde schliessen das
Frauengeschlecht nicht nur grundsàtzlich aus, sondern sind
direkt gegen dasselbe gerichtet. Ihr Ziel erreichen dièse Bûnde
meist nur allzugrûndlich. Tendiert die mutterrechtliche Acker-
baukultur von Haus aus zu einer Weiberherrschaft. so macht
die Tyrannei der Mànnerbûnde sie hier gerade oft zu Sklaven.
Es sind jetzt 10 Jahre her, vvo P. Sghmidt dièse Erklàrung fur
die geheimen Mànnerbûnde aufstellte. Die Fortschritte, welche
unsere Wissenschaft seitdem machte, haben manche neue Be-
stâtigungen fur seine Ansicht beigebracht.
96 W. KOPPERS
Ein anderes Beispiel. Sie wissen, welch ein intrikatos vôlker-
kundliches Problem die Erscheinung des Totemismus darstellt.
Aber anch hier sind wir, auf Grund der genaueren Erforschung
der wirtschaftlichen Yerhàltnisse in ursprùnglich totemisti-
schen Komplexeii. bereits auf bestem Wege des Ràtsels Lôsung
zu finden. Intéressant und lehrreich musste dem aufmerksamen
Beobachter schon langer die Tatsache sein, dass so hervorra-
gende Etlinologen und Totemismusforscher wie Haddon, Reu-
TERSKiôLD. Graebner. Ankermann, W. Schmidt, immer mehr
schon dazu neigten, den Ursprung des Totemismus im Sozial-
Wirtschaftlichen zu suehen. Untersuchungen. die ich im
vorigen Jahre selber speziell vom allgemein wirtschaftsge-
schicht lichen Standpunkte derselben Sache widmen konnte.
haben, wie ich glaube, neue Beweise in diesem Sinne zu tage
gefordert.
Die Produktionsform jenei' Kultui', in welcher der Totemis-
mus erstmalig entstand, war ohne Frage ein hôheres Jàgertum.
Die kompliziertere Wirtschaftsform erlaubte da bereits ein
Zusammenwohnen von grôsseren Menschengruppen, als wie
das niedere Jàgertum der Urkulturen das gestattet. Die « hohe-
ren Jâger » nun, bzw. die einzelnen Gruppen eines solchen
Stammes, begannen, bestimmte Jagdprodukte (Tiere) mitei-
nander auszutauschen. Das am Ort besonders hàufige Jagdtier
kam als Austauschobjekt in erster Linie in Betracht. Das Motiv
fur den Tauschprozess bildete im Anfang, wie es sich schon
mit grosser Wahrscheinlichkeit dartun làsst, das Verlangen
nach einer Abwechslung ins Menu. Begreiflich. dass das Tier,
welches gewissermassen das Tauschmittel bildete, sich gros-
ser Wertschàtzung erlreute. Aber vom Boden des rein Natiir-
lich-Sozialen ist est allmâhlich in das Reich des Mysterios-
Mystischen hinaufgeriickt, zum « Schutzgeist » des Stammes
bzw. Clans erhoben worden.
Damit ist ganz kurz der wahrscheinliche Entstehungsprozess
des Gruppen- oder Glan-Totemismus geschildert worden. Fiir
ailes Nàhere muss natûrlich auf die angegebenen Publikationen
verwiesen werden.
Es wûrde zu weit fùhren, wollte ich im einzelnen auch
noch zeigen, was die vergleichende Religiônswissenschaft von
einer intensiven ethnologischen Wirtschaftsforschung zu er-
WIRTSCHAFTSFORMEN UND KULTURKREISE 97
warten hat. Ich erwàhne- beispielshalber nur, dass das Auf-
treten von weiblichen Gottheiten in mutterreclitlieher Ackor-
baukultur seine entsprechendste Erklàrung natûrlich in den
Produktionsverhâltnissen dièses Kulturkreises fmdet. Auf die
Tatsache ferner, dass die Urvôlker einen Urmonotheismus r(>-
lativ am reinsten bewahrten, fâllt von der Erforschung urzeit-
liclier Wirtschaft her das vortrefflicliste Licht.
Dièse wenigen Beispiele mûssen hier genûgen. Ich denke sie
zeigen Ihnen, dass es keine Uebertreibung in sich schlîesst,
wenn ifh sagte, dass die Verpflanzung des Grosse 'schen Prin-
zips^ auf den Boden dgr historischen Vôlker- und Religions-
kunde eine neue Aéra fur dièse Wissenschaften bedeutet. Und
nicht niôchte ich es unterlassen, an dieser Stelle darauf hinzu-
weisen, (( dass die so erzielten Resultate natûrlich von einer
neuen Seite her die faktische und prinzipielle Richtigkeit der
Lehre von den ethnologischen Kultureinheiten (Kulturkreisenj
dartun. Denn wie kônnte das eine Elément das andere so tref-
flich beleuchten und erklàren, wenn sie einzeln nicht Teilo
eines und desselben Kulturganzen (Kulturkreises) gebildet
hàtten ? Abgesehen davon, dass sie vielerorts — es ist das ja
die tatsàchliche Basis, von der die Kulturkreislehre ausgeht
und ausgehen muss ^- noch gegenwàrtig in vollerer otier
geringerer Reinheit eine Einheit bilden » {Ethnoingisrhc Wirl-
scfiaftsforschung, p. 1069-70).
Bevor ich schliesse, noch eine Bemerkung. Wie es in den
letzten Jahrzehnten auch in Nordamerika und zwar unabhàngig
von der entsprechenden Bewegung innerhalb des deutschen
Sprachgebietes, zur Entwicklung einer historischen Ethnologie
gekommen ist, kann ich als bekannt voraussetzen. Besonders
intéressant und lehrreich aber ist uns hier die Tatsache, dass
auch dort wirtschaftsgeschichtliche Studien in gleichem Masse
an Schàtzung und praktischer Pflege gewannen. 'Zu nennen sind
unter dieser Rùcksicht besonders Forscher wie C. W'isslkr.
SwANTON, LowiE und Kroeber.
Diesen Vortrag môchte ich ausklingen lassen in die Bitlo.
dass die Herren Missionàre kùnftig . hàufiger und eingehender
noch, wie bisher, sich ergologischen und Produktionsstudien
widmen. Mir scheint, dort, wo in dieser Hinsicht noch nichts
Grûndliches vorliegt, sollte man zunàchst mit diesen Gebieten
98 H. PINARD DE LA BOULLAYE
Jjeginnen. Das hal ohne Frage nicht nur sachliche, sondern
HUfh personliche Yorteile. So erziehl die Beschaftigung mit,
diesen konkreten und ihrer Natur nach objektiveren Gebieten
zu.ii methodischen und nûchternen Arbeiten. Wie manche iiif-
ligr Thoorien auf den Forschungsgebieten der Soziologie und
der Religionswissenschaft speziell wâren nicht in die Welt
geselzt, wenn die Herren Forscher den Ochs stalt beim Schwanz
hei den Hôrnern gefasst hàtten ! Dass ieh es nicht verkenne,
wie es im Einzelfalle eine Ueberwindung kosten mag. sich nich!
gleich auf die Enforschung des geistig-religiôsen Lebens stûr-
zen zu konnen, sagte ich ja schon. Abet eine solche Ueberwin-
dung hat gewiss. wie jede andere, auch ihren hesonderen Segen
zu gewartigen : oin wenig spàter wird sic sich ûberreichlich
lohnen.
BIBI^. — Graebner, Méthode der Ethnologie, in-S", Heidelberg, Winter,
1911. — SCHMIDT-KOPPERS, Volker und Knlturen, in-4", Berlin-Regensburg,
Habbel, 1922 — Koppers W., Die ethnologiache Wirtschaftsforschung ; eine
histoi-isch-kriiische Studie, im Anthr., 1915-16 (Sonderausgabe, Lex. in-S»,
Wien, Mechitharisten-Buchdruckerei, 1917) : ders.. Die Anfange des inensch-
Hchen Gemeinschaftslehens iin Hpiegcl drr ncveren Vôlkerkwide. in-16",
M. Gladbach, Volksvereins-Verlag, 1921.
[5] La méthode philologique,
par le R. P. PiNARD de la BoULLAYE, S. J.
Vous avez entendu parler des fouilles de Troade, dAssyro-
babylonie, de la Susiane. Poussées en quelques endroits jusqu'à
plus de I rente mètres de profondeur, elles ont ramené au jour
les décombies* de six ou sept villes superposées et des docu-
ments datant de plusieurs milliers d'années. Or, sans sortir
de cette salle, il est possible de trouver certains débris de civi-
lisations plus anciennes encore. Dans les langues diverses dont
nous nous servons, formées qu'elles sont par les modifica-
tions successives de celles qu'employaient nos lointains aïeux,
chaque mot esi en efïet comme une pièce de monnaie, usée
par les siècles, mais qui révèle au connaisseur quelques traces
MÉTHODE PHILOLOGIQUE 99
infiniment précieuses des figures ou des inscriptions qu'elle
portait autrefois. Interpréter ces documents et éclairer par
leur moyen les périodes archaïques de l'histoire, c'est l'objet
de la paléontologie Ungmstiquf .
On pourrait lui trouver des précurseurs chez les étymolo-
gistes de l'Antiquité, chez les philologues de la Renaissance.
En fait, sa méthode n'a pris un caractère scientifique qu'après
la découverte des rapports du sanscrit avec le- grec et le latin,
par le jésuite Coelrdoux, en 1767, puis par William Jones et
])ai' la Société Asiatique de Calcutta, découverte qui aboutit, en
1816, à l'admirable Grammaire comparée des langues indo-euro-
péennes de Bopp et à la constitution de la linguistique comparée.
l^es ressources qu'offrait cette science furent surtout exploi-
tées en Allemagne, par Adalberf Kihn. en Angleterre, par un
autie Allemand, Max Mueller, en Suisse, par Adolphe Pictet,
dans ses Origines indo-européennes ou les Ai'yas Primitifs
(1659-63). On crut, à cette époque, avoir trouvé « la clef qui
devait ouvrir toutes les serrures ». Il fallut bientôt revenir de
ces illusions. Les insuffisances du procédé étymologique appa-
rurent en effet manifestes, quand on vit notamment les mem-
bres les plus accrédités de la nouvelle école interpréter de
manière très divergente la mythologie des textes sanscrits. Où
Max Mueller, William Gox et Michel Bréal voyaient, avant
tout, la description de phénomènes solnires, Adalbert Kuhn
et Cari Muellenhopf croyaient reconnaître des phénomènes
météorologiques (orages, tempêtes, tonnerres), Charles Ploix
les divers aspects du ciel lumineux, Forchhammer des phéno-
mènes aquatiques...
La réaction qui suivit, comme il arrive d'ordinaire, fut quel-
que peu excessive.
.aujourd'hui, un revirement se dessine, notamment chez
O. ScHRADBR, H. HmT, A. Meillet, linguistes éminents et criti-
ques beaucoup plus sévères.
En m'appuyant constamment sur les travaux de ces maîtres,
j'essaierai, durant cette brève conférence.
1° de piéciser les raractéristiques de la méthodr' philolo-
gique,
2° d'indiquer les services qu'elle peut rendre,
3" de signaler les dangers qu'elle présente.
iOO H. PINARD DE LA BOULLAYE
I. CARACTÉRISTIQUES DE LA MÉTHODE PHILOLOGIQUE
En résumé, la méthode philologique (1) étudie les concepls,
les rites et les divei'ses particularités des civilisations et des
i-eligions archaïques, en utilisant les traces qu'ils ont laissées
dans les langues des différents peuples. Elle emploie à cet
effet deux procédés intimement unis, Vanalyse étymologiqup et
la comparaison des idiomes ; subsidiairement mais nécessaire-
ment, elle tait appel à tous les documents de l'archéologie.
a. L'étymologie. — De manière générale. Texamen des mots
employés par un peuple permet de dresser en quelque sorte
linventaire des idées profanes et religieuses qui avaient cours
chez lui. L'étymologie, qui dissèque ces mots, en procure une
intelligence plus profonde ; mais les difïicultt's que présente
cette opération sont extrêmes.
Prenons par exemple le terme composé re-ligio. On Ta dérivé
de re-ligo : la religion serait ce qui nous re-lie au monde divin.
Psychologiquement, Texplication est acceptable ; étymologi-
quement, elle est inadmissible, le thème du verbe ligo. ligare
pouvant bien donner ligatio, mais non ligio. Plus satisfai-
.sante, entre plusieurs autres, l'opinion qui dérive le mot de
re-lego : la religion serait ce qui nous porte à traiter {re-passer,
re-specter) avec un soin spécial certaines catégories de devoirs.
Dans cette explication, les lois de dérivation sont satisfaites,
mais notre curiosité psychologique lest beaucoup moins...
Les mots simples sont en général d'une interprétation plus
délicate encore. Celui qui signifie dieu chez les Iroquois, niio
est simplement inintelligible tlans leur langue. L'énigme se
résout, quand on apprend qu'il est la transcription, accommodée
au génie de leur idiome, du français dieu, dérivé lui-même du
latin deum. Le mot grec de même signification, Beoî, est aussi
obscur. Nombre d'auteurs anciens le dérivaient de la même
racine que Osoj, courir (les a&tres-dieux parcourent les es-
paces) ; d'autres de la même racine que -.'■M,\}.u H<Jii (les
dieux étant les auteurs des dispositions qui apparaissent dans
l'univers). Aujourd'hui, on hésite entre la même racine 6e
(1) Bien qu'on distingue nettement aujourd'liui entre jJ^Jologie et linguis-
tique, la qualification de méthode « philologique » semble devoir être main-
tenue, précisément parce que la lingiiistique comparée n'est ici qu'un moyen
d'arriver à la connaissance de la civilisation et de son histoire.
MÉTHODK PHILOLOGIQUE 101
-t'Ot,;/'., établir, placer) et la l'acine Oî: i 0£7jïT0a'., prier) :
vin (lieu .serait ou celui qui établit les choses, ou cchii qu'on
prie... Notre science, devenue plus exigeante, élimine bien des
inlerpi'étations erronées ; mais elle aboutit souvent à des solu-
tions j)lau8ibles plutôt qu'indiscutables.
Les difficultés qui Tarrétent s'expliquent par le long usage
ou plutôt jiar l'usure des siècles : les racines plus ou moins
modifiées sont devenues telles qu'en bien des cas on ne sait
plus au juste à quelle série précise de dérivés — c'est par les
dérivés en etïet que leur sens s'éclaire — il convient de les
rattacher. Ainsi les pierres des formes les plus diverses, rou-
lées sur les grèves pendant des siècles, arrivent-elles à se
ressembler de telle sorte qu'il devient imj)ossible de déter-
miner quelle était leur forme première.
Si donc, comme chez les auteurs anciens, elb? appuie ses
interprétations sur de simples assonances, sur des similitudes
de son plus ou moins précises, on comprend que l'étymologie
ne puisse être qu'une combinaison d'è-peu-près, insipide ou
ingénieuse, selon le talent des écrivains. Si, négligeant les
particularités orthographiques qui distinguent encore les mots,
soit au sein d'une même langue, soit en des langues différentes,
elle réclame le droit de faire permuter les lettres les unes avec
les autres, elle justifiera pleinement la définition qu'en donnait
VoLTAmE : « une science où les voyelles ne sont rien et les
consonnes fort peu de chose » ; rien n'empêchera de soutenir,
comme le disait plaisamment le même Voltaire, que Tempe-
rr'ur de Chine Ki est le roi Atoës, puisqu'il suffît pour le prouver
de changer K en A et / en toës.
Mais il y a moyen d'éviter pareil .arbitraire : c'est d'étudier
de près les lois de la dérivation, dans le corps même d'une
langue, et les lois des correspondances phonétiques, entre les
langues apparentées. La linguistique a progressé du jour et
dans la mesure où elle est entrée dans cette voie.
Qu'elles soient dues en etïet h une cause climatérique, qui
porte par exemple à ouvrir plus ou moins la bouche, ou à une
conformation spéciale des organes, ou à telle mode devenue
prédominante, ou à une certaine logique instinctive, les parti-
cularités de langage propres à une région portent de manière
uniforme sur les séries entières de voyelles ou de consonnes :
(02 H. PINARD DE LA BOULLAYE
les mêmes lettres sont modifiées dans le même sens, partoiil
où elles se rencontrent. Nous pouvons l'observer encore de nos
jours, dans les patois ou dans les dialectes modernes, et chez
les étrangers qui emploient notre piopre langue, mis à part
les rares individus qui arrivent à la parler « sans accent ».
Pour n'être plus trompé par, de vagues analogies dans la
prononciation ou dans l'écriture, la méthode étymologique doit
donc se faire comparative.
h. La fomporaison des langues. — C'est dire qu'il convient,
avant tout, de d"égager de la comparaison des langues appa-
rentées les lois phonétiques qui président à leurs modifica-
tions respectives, en d'autres termes de dresser des tables
très précises des correspondances entre leurs diverses conson-
nes et leurs diverses voyelles. Lois et tables acquièrent une
certitude absolue, quand elles sont aj)i)uyées sur des centaioés
nu des milliers de cas. Telles notamment les tables que Grimm
a publiées pour l'étude des langues indo-européennes.
A l'aide de ces tables, on peut voir clairement quelle forme
devait avoir un même mot. aux divers stades de ses transfor-
mations — quelle forme il devrait avoir dans telle langue-
souche, si réellement il en dérivait, ou dans telle langue-s(eur,
s'il avait avec elle quelque lien de parenté. La parenté une fois
établie, on peut remonter à la racine commune.
Pour revenir à l'exemple choisi, on reconnaîtra que l'italien
dio. l'espagnol dios, le français dieu ont pour ancêtre le latin
deus.
Remontant plus haut, on constatera l'équivalence du latin
deus, du sanscrit devdh. du zend daêvô. du vieux prussien
deiivan. du vieil islandais ^îuar (les dieux), du gaulois dëvo.
du vieil irlandais dla etc.
iDe la mênie racine est dérivé un adjectif divydh. en sanscrit.
oTo:, en grec, dius, en latin, dëa, en islandais... « Or ce mol
signifie brillant et ne saurait être .séparé du nom du jour, du
ciel lumineux, très souvent divinisé : sanscrit dyauh, ciel. jour.
grec Zîk. AiFo;, latin, Juppiter » (1).
Arrivé là, on est sûr de posséder, non pas « le concept
archaïque du divin », propre au groupe ethnique d'où sont
(1) A. Meillet, Introd. à l'étude compar. des langues indo-européennes^^
vin, p. 388.
MlirilODB l'HILOLOGIQUE 103
dérivées les langues nommées plus haut, mais un l'enseigne-
ment qui permet d'en saisir quelque, chose.
Ce n'est pas le lieu d'exposer toutes les règles qui concer-
nent ce sujet. Toutefois ce genre d'études est si séduisant et
nos chers missionnaires y consument si souvent un temps
précieux, en pure perte, quil semble opportun de consigner au
moins ici deux principes élémentaires.
Le premier ])eut se formuler ainsi : loin de regarder comme
décisives les ressemblances actuelles plus fi'appantes, il faut
au contraire tenir pour assuré que, phis les mots se ressemblent
au jnvrd'h'xi. moins il est probable qu'ils dérivent d'une môme
souche. Tout de même peut-on affirmer avec certitude, si deux
individus déjà avancés <'n âge se ressemblent actuellement
« comme deux gouttes d'eau », que ce ne sont pas des jumeaux.
La raison commune de cette double assertion, c'est que des
types originairement identiques, hommes, choses ou vocables,
soumis à des influences variées, soit quant à leur nature, soit
quant à leur seule intensité, en arrivent forcément à se diffé-
rencier de plus en plus. Où les différences sont nulles, il n'y a
donc pas lieu de supposer une parenté, mais une rencontre
fortuite.. Ainsi langlais bad et le persan bad, le latin loeus
et le sanscrit lokas, l'anglais lohole et le grec ôXo,-, le français
fi'u et l'allemand Feuer, malgré la similitude de leur forme et
l'identité de leur sens, ne sont-ils pas de même origine. Au
contraire, ètiV/.o'ko;, évèque, vescovo. obispo, bishop et Bischof
sont rigoureusement le même mot. Enfin voici un exemple plus
typique : l'anglais /, le français je. le gothique ik. l'allemand
ich, le grec îyo'j. le sansi-rit nhàni. le zend azam, le vieux
perse adam sont le même pronom de la première personne. On
n'en doute plus ; mais c'est précisément, peut-on dire, parce
que pendant des siècles on ne s'en est pas douté : les diver-
gences qui rendent la parenté méconnaissable aux yeux du
vulgaire sont telles qu'a dû les produire l'action du temps.
Et voici le second principe : la preuve péremptoire de parenlé
entre les langues n'est pas à chercher dans les correspondances de
leur vocabulaire, mais dans leur système de dérivation, de décli-
naison et de flexion. On peut en effet, sans limite aucune.
emprunter des mots à une langue voisine ; mais la dernière
chose que l'on emprunte, c'est la manière d'utilis(y ces mots,
104 H. PINARD DE LA BOULLAYE
de les modifier par voie d'affîxes, de suffixes ou daltéralion
phonétique, de les construire avec d'autres pour en former des
phrases, bref ce sont les habitudes invétérées de pensée qui
caractérisent le système grammatical de la langue maternelle (1 , .
Revenons à la méthode philologique.
c. Rrcours subsidiaire aux documents archéologiques et histori-
ques. — Les observations que nous avons dû faire plus haut
auront déj'à })ermis d'entrevoir que Tétymologie, même appuyée
sur la comi^araison des langues, demeure un instrument de
recherche insuffisant.
En efi'et, elle fournil seulement une des caractéristiques des
objets désignés, mais elle n"en donne pas une description com-
plète. Combien vagues demeurent par exemple nos représenta-
tions du javelot, de ràrne, des dieux, quand nous savons unique-
ment que la racine de ('es mots exprime respectivement Tidée
de jet, de vent ou de souffle, de lumineux ou de brillant ?
En second lieu, elle indique uniquement le sens originel des
racines, nullement le sons pris par les mots à l'époque (tardive
peut-être) où ils ont été formés ou confisqués pour un usage
spécial, encore moins les nuances successives qui ont pu modi-
fier ce sens jusqu'à le faire passer du blanc au noir. Ainsi le
grec rjyJ-iJxow. génie, et le zend dâevô, dieu, en sont-ils arrivés à
signifier « démon »...
Enfin l'étymologie, à elle seule, ne renseigne pas sur l'impor-
tance relative des idées, des usages, des choses dont elle amène
à constater l'existence. L'examen du vocabulaire entier peut, il
est vrai, y suppléer dans une certaine mesure, à la manière d'un
inventaire ; mais cet inventaire, pour autoriser des conclusions
de quelque valeur, devrait être complet et il ne peut l'être, cha-
que fois qu'il repose sur le dépouillement d'un petit nombre de
textes ; de plus, il devrait être dressé par époques, et il ne peut
l'être, à moins qu'on ne dispose de documents littéraires assez
abondants et datés.
Pour toutes ces raisons, il est indispensable de contrôler et
de compléter les indications que l'étymologie peut procurer par
(1) Pour une raison analogue, les correspondances lexicolog-iques qui por-
tent sur les termes les plus nécessaires à la vie (homme, femme, partie du
corps, mangrer, boire, dormir, agir), sont plus probantes. C'est un fonds de
roulement que possède toute langue même rudimentaire. L'emprunt en ce
domaine est donc moins probable.
MÉTHODE PHILOLOGIQUE 105
l'étude des mythes, des hymnes, des légendes, des dictons popu-
laires, du mobilier cultuel, des ex-voto, des inscriptions funé-
raires, bref par tous les documents historiques dont on peut
disposer. Les auteurs récents en conviennent.
Ayant ainsi caractérisé la méthode comme étymologique,
comparative et historique, essayons d'indi([uer avec j)lus de dé-
tails les services qu'elle peut rendre.
II. SERVICES QUE PEUT RENDRE LA MÉTHODE PHILOLOGIQUE
Nous nous bornerons à en signaler trois (1) : elle permet de
déterminer les relations de parenté entre les religions — elle
éclaire la préhistoire des religions-souches — elle renseigne sur
révolution respective de celles qui en dérivent.
a. Détermination des relations de parenté. -'- Nous avons vu que
la méthode philologique s'appuie sur les conclusions de la lin-
guistique comparée.
La parenté entre les langues, établie par cette science, prouve
par elle-même, non Vuiiité de race, chez les peuples qui em-
ploient le même idiome, mais, en un sens assez large, leur
groupement en une unité sociale ou ethnique distincte et l'unité
de leur civilisation : Seuls en effet peuvent conserver une même
langue les peuples réunis par une autorité assez forte ou par
des intérêts communs assez puissants.
A ce titre, la parenté des langues fait prévoir celle des reli-
gions, comme partie intégrante de la civilisation commune,
voire même comme partie principale, car, dans l'antiquité sur-
tout et de nos jours encore chez les non-civilisés, la religion
pénètre et commande pour une large part les relations fami-
liales, sociales, commerciales. Certains auteurs exagèrent ce
rapport des langues, des civilisations et des religions ; ils ne
tiennent pas assez compte de ce fait, que la religion est souvent
le dernier des domaines que laisse violer une nation vaincue,
même lorsqu'elle est obligée d'accepter la civilisation du vain-
queur ; mais, de toutes manières, la constatation de Vunité
(1) D'un point de vue plus général, on ne saurait trop insister sur l'utilité
que présente l'étude de la linguistique comparée. Aucune autre science ne
permet d'apprendre, par des exemples aussi clairs et aussi sûrs, les règles
générales de la méthode comparative, les précautions minutieuses qu'elle exige
et les réserves qu'elle impose. Voir notamment les ouvrages cités à la fin de
cette conférence.
106 H. PINARD DE LA BOUl-LAYE
ethnique est de grande importance. La linguistique comparée,
au XIX'" siècle, en apprenant à traiter les religions par groupes
apparentés, en a transfoimé Tétude. Par l'emploi de la méthode
comparative, elle a permis de retrouver les homologues i, dieux,
notions, rites), de comprendre bien des cas obscurs dans lune
ou lauti-e des religions-sœurs, de suppléer pour une ftart au
silence des do<-uments... Ses recherches ont porté surtout sui'
les langues indo-européennes et les langues sémitiques, mais
voici que les découvertes du R. P. Schmjdt sur les relations
des langues australiennes et sur celles des langues austriennes
(aïK-icn groupe malayo-polynésien) , découvertes comi)lét(''es
par celle de Conrady sur la parenté des langues austrieiuies
avec les langues indo-chinoises i tibéto-birmaniennes) ouvrent
à ces rech(M'ches de nouvelles persj)eetives.
b. Aperçus sur la préhistoire. — Le rapprochement des lan-
gues ai)parentées fournit en outre le moyen de découvrir, par
la c()iiipiirais(m de leur vocabulaire, les concepts et les usages
religieux que les peuples possédaient en commun au temps de
leur indivision, i^es mots de leur vocabulaire en gardent la
trace. Lélymologie les dissèque. Nous avons noté plus haut
ses insutïisances. Elles peuvent s'atténuer toutefois, si l'on
inteii'oge les concepts ou les usages solidaires, pour les éclai-
rer les uns pai" les autres, bref si l'on a recours à la démons-
tration par convergence (1;. Pour être décisive, cette pieuvc
lioit être fournie en partie double, directe, pai- accumulation
des indices (pii liahissent l'existence d'une idée ou d'une [ira-
tique, indirerte, par l'absence constatée des termes qui exjiri-
meraient des idées ou des institutions contraires.
Ainsi a-t-on pu soutenir la thèse d'un dieu suprême pri-
mitif, commun aux Indo-européens, Dyàus pita. /.sJ; T.i-zr^r,.
Jupiter (2)... celle d'un dieu suprême commun aux Sémites.
El en phénicien et en hébreu. Il ou Ihi en babylonien (3).
(1) Voir CRSER, 1914, p. 115, et pour plus de détaUs notre étude citée
p. 81.
(2) Dar.mesteteRj Essais orientaux, in-8", Paris, L.évy, 1883, p. 10.5-133 ;
A. Meillet, Introduction^ p. 387-389 : Linguistique historique, p. 323 sq. :
Van Ginnbken, CRSER, 1913, p. 87-89.
(3) LagrangEj Etudes sur les religions sémitiques-, in-8", Paris, Lecof-
fre, 1905, p. 70 sq. ; la thèse est contestée par le Dr. Heiin^, Die biblische und
die habylonische Gottesidee, in-S", Leipzig, Hinrichs, 1913, p. 150-200.
MÉTHODE PHILOLOGIQUE 107
Ainsi encore, en étudiant les termes qui indiquent la parenté
chez les Indo-européens et chez les Sémites, a-t-on \m démon-
trer l'inanité des thèses dun matriarcat originel, du moins eu
ce qui les concerne : leur vocabulaire atteste la détermination
de la parenté par la ligne palcjuelle (1 .
On peut éclairer, par la même voie, les institutions qui con-
cernaient le mariage, les concepts de propreté et de pureté,
que certains auteurs prétendent originellement identiques, ceux
de sacré et de profane etc.
En reconnaissant les services que cette méthode peut rendre,
il importe toutefois d'éviter certaines exagérations.
*Notons-le tout d"abord : elle peut bien fournir certains ren-
seignements sur l'époque où les nations qui parlent des lan-
gues apparentées étaient encore plus ou moins associées ; mais
il serait illusoire d'imaginer quelle puisse arriver à reconsti-
tuer intégralement leur civilisation. La linguistique comparée
a dès longtemps abandonné la prétention de <■ reconstituer »
leur langue commune : sauf un petit nombre de cas, elle vise
seulement à déterminer, avec une probabilité croissante, la
physionomie que devaient avoir les éléments du vocabulaire
commun, pour que l'évolution de chaque langue pût être telle
qu'elle l'observe. La science comparée des religions est tenue à
une modestie semblable.
Pour retrouver en effet le patrimoine religieux des peuples
avi nt leur séparation, elle est obligée, elle aussi, de retenir
seulement ce qui est commun à tous les groupes ou du moins
ce qui est attesté chez des membres assez divers de la même
famille pour exiger la préexistence du concept ou de lusage.
au temps de Tindivision, sous une forme ou sous une autre.
Pareille imprécision ne laisse plus de place aux détails les
plus vivants, supprime presque tout relief, et donne, en fin de
compte, des esquisses squelettiques...
Encore n'est-on pas sûr de pouvoir jamais retrouver toutes
les pièces du squelette. Des institutions ou des notions ont
pu en effet s'oblitérer dans toutes les branches de la famille,
ou subsister seulement dans l'une ou l'autre, les termes qui
les désignent disparaissant en même temps. Dès lors, l'attri-
(1) A. Meillet, Introduction^, p. 377 sq. ; Lagrange, Relig. sémitiques -^ ^
p. 114.
108 H. PINAHD DE LA BOULLAYE
but ion de ces usages ou de ces concepts à la i^digion-souche.
bien que nécessaire en droit, peut devenir en fait impossible,
faute do preuves critiques suffisantes...
A pln.s forte raison, la méthode philolugiqup ne peut-elb'
trancher les questions dorigine, cest-à-dire déterminer, non
seulement les formes archaïques des religions-souches, mais
les formes absolument primitives de la religion ou des reli-
gions. Pour résoudr-e de tels problèmes, dans la mesure res-
treinte que les observations faites plus haut permettent d'en-
trevoir, il faudrait en effet pouvoir affirmer ou bien que les
familles de langues sont irréductibles à une souche unique
ou quelles sont réductibles. Or, actuellement, on ne peut se
prononcer ni dans un sens ni dans l'autre. Si les réductions
déjà opérées autorisent quelques espoirs, il convient d'ajouter
qu'on ne sait si Ton pourra jamais progresser dans cette voie,
parce qu'on ignore si quelques langues très anciennes, néces-
saires pour établir certains liens de parenté, n'ont pas totale-
ment disparu. Dans lune ou l'autre hypothèse d'ailleurs, on
ne pourrait déterminer si les vocables religieux attestés dans
« la langue primitive >. ou dans « les premières langues »
remontent au i»remier âge de cjiaque unité ethnique ou snnl
apparus bien plus tard.
Quant au jugement à porter sur la vérité et sur la valeur
de ees formes religieuses originelles, il relève évidoinment d(^
là philosophie.
Ces questions mises à part, il demeure légitime de chercher
à préciser l'évolution plus réi-ente des civilisations et des
l'eligions.
c. Aperçu'i sur dévolution respective des religions apparentées.
La première constatation, en ce domaine, est celle de l'indé-
pendance qui s'affirme, chez les divers membres d'un même
groupe ethnique, vis-à-vis des traditions communes, ou. si l'on
préfère, celle de l'originalité qui s'accuse, chez chacun d'eux,
dans la solution du problème religieux. En aucune autre partie
de la civilisation, les traits communs n'apparaissent moins
nombreux. Evidemment, n'est pas forcément propre à une na-
tion et, en ce sens, original tout ce qui n'est pas également
attesté chez tous ou chez plusieurs membres de la famille :
certains éléments ont pu disparaître ici ou là ; d'autres ont
MÉTHODE PHILOLOGIQUK 100
pu ètro empruntés à d'autres souches. De toute façon, cette
constatation ne laisse pas cependant dètre gênante pour les
théories d'un évolutionnisme rigide.
Les inventaires dressés par la méthode philologique lui per-
mettent en outre de découvrir certaines transformations inté-
ressantes, comme le déclassement des dieux communs : ainsi
voit -elle Odin supplanter Tyr, dans la mythologie Scandinave,
Mardouk détrôner El en Babylonie.,.
Elle est de plus qualifiée pour découvrir les confusions de
mots et les fausses étymologies, qui si souvent ont amené la
création ou la transformation des mythes...
En sappuyant sur des documents de différents âges, elle
peut aussi suivre les variations des vocables religieux, leur
passage du sens laudatif ou purement descriptif au sens péjo-
ratif, comme dans le français dévot, leurs spécialisations,
comme dans le terme religieux, la dégradation progressive des
jurons, remploi respectueux ou superstitieux de certains eu-
phémismes, comme bénir Dieu, pour viaudire Dieu, en hébreu etc.
De ces contributions diverses la psychologie religieuse, notam-
ment, peut tirer profit...
III. DANGERS DE LA MÉTHODE PHILOLOGIQUE
Signaluns. en terminant, quelques-uns des dangers auxquels
expose l'emploi des procédés que nous avons décrits.
a. Et dabord, Varbitraire des étymologies. — Les initiateurs
de la méthode philologique n'y ont que trop cédé. « C'était, dit
ironiquement Oldenberg, l'âge héroïque de la linguistique indo-
européenne ». Aujourd'hui, ceux qui ont suivi des cours régu-
liers ou qui du moins ont pris soin de consulter les ouvrages
i'écents sont efficacement prémunis contre ces erreurs ; mais
la bonne volonté et le travail le plus acharné ne peuvent en
préserver des missionnaires qui se sont formés seuls, avec des
manuels arriérés...
b. Les meilleuis linguistes ont d'ailleurs à se tenir en garde
contre l'obus de rallégorisme. Appliquée au nom des personnages
mythologiques et des dieux, Tétymologie y conduit presque
fatalement. A dessein nous avons rappelé, au début de cette
conférence, à quelles interprétations divergentes avaient abouti
A. Ki'HN, Max MuELLER, Ch. Ploix et leurs émules. Lo même
110 H. PINARD DE LA BOULLAYE
procédé, appliqué aux noms des personnages les mieux connus
de l'histoire grecque, observait Boeckh, en ferait des êtres allé-
goriques « et l'on serait bien embarrassé de dire comment les
Grecs auraient dû nommer leurs enfants, pour les soustraire
au danger de se voir réduits à l'état de mytbes »...
c. A ce péril s'ajoute celui de nombreux atMckronismes, si Ion
maintient leur sens originel ou étymologique à des termes qui
ont été adoptés pour désigner certains objets ou (;ertaines
fonctions, alors quils avaient été détournés de leur significa-
tion {)rimitive ou spécialisés après un long usage. Quel joli
roman ne construirait -on pas, par exemple, à propos des ori-
gines chrétiennes, si Ton se contentait d'observer que les
pontifes sont étymologiquement des pontonniers {pontifices) , les
prêtres des vieillards [r.pziS'Jzspoi), les diacres des courriers
ou fourriers (oiâxovoij... que les temples sont des espaces
terrestres co'i'respondant aux espaces célestes déterminés ou
découpés (--Éixva)) par le bàlon augurai, les églises des assem-
blées populaires (èy-xÂTi^'at, el les basiliques des palais royaux...
L'abus ne serait pas moins criant, s'il portait sur d'autres
reliigions et sur des époques plus reculées ; il serait seule-
ment plus dilïicile à éviter...
d. Il faut signaler enfin le péril du minimisme, c'est-à-dire
celui de réduire les concepts moraux et religieux aux carac-
téristiques physiques au moyen desquelles on les exprime. Ainsi
se trouve-t-on presque naturellement invité à confondre avec
la notion d'innocence ou de pureté morale celle de l'état physi-
que qui sert à la désigner : la propreté — avec la notion de
désordre moral, la caractéristique plus extérieure ou plus maté-
rielle qui la traduit : punissable, dangereux, interdit... Identifier
ces notions, pour de seules raisons d'étymologie, c'est oublier
la loi essentielle du langage humain, qui oblige à exprimer le
spirituel par analogie avec le sensible. Si elle se fait sentir
même aux époques tardives de la spéculation philosophique,
combien plus vivement aux premiers âges de l'humanité !
Ces explications, si sommaires qu'elles soient, auront du
moins permis d'entrevoir les services que l'étude étymologique
des vocabulaires, appuyée sur les enseignements de la linguis-
tique comparée, contrôlée avec soin par les documents archéo-
logiques et littéraires, peut rendre à la science des religions.
MÉTHODE PHILOLOGIQUE 1 1 I
Ainsi comprise, la méthode philologique n'est qu'une appli-
cation spéciale de la méthode comparative à ces vestiges véné-
rables des temps les plus reculés que conservent les langues.
Son avantage le plus précieux est d'assurer, dans une me-
sure, il est vrai, bien modeste, quelques renseignements sur
la mentalité religieuse des groupes ethniques, avant leur sépa-
ration en nations distinctes.
Nous souhaiterions avoir suscité un vif intérêt pour ce
genre d'études... Mais, qu'on nous permette d'ajouter, avec une
t'i'anchise toute fraternelle, surtout à l'adresse de nos chers
missionnaires : « Et maintenant, Messieurs, n'y touchez pas !
Dresser des lexiques soignés, avec une notation précise des
particularités phonétiques, rédiger des grammaires, voilà votre
tâche ! Peut-être, telle langue sauvage jusqu'ici négligée per-
mettra-t-elle d'établir des connexions nouvelles et d'avancer
d'un grand pas dans la réduction des familles lingiiisliques.
Mais ces comparaisons, ces réductions, les reconsli-uctions des
temps archaïques doivent être réservées aux gens du métier.
Se contenter de faire ce qu'on peut bien faire, c'est la condition
essentielle pour être utile ».
BIBL. — Pour l'hiatoirc de la méthode philologique, voir notre ouvrage,
L'étude comparée des religioiis, 2 in-S", Paris, Beauchesne, t. I. 1922, c. VIII.
p. 340-356.
Pour la dincussion des principes, A. Meillet, Introd. à l'étude comparative
des langues indo-eiiropéennes3 in-8", Paris, Hachette, 1912 (bibllogr. cri-
tique, p. 474 sq.) ; traduction allemande i a,r W. Printz, Einfilhrnng in die
vergl. Gramm. der indo-gcrm. Sprachen, Leipzig, Teubner : Linguistique
historique et linguistique générale, in-8", Paris, Champion, 1921 — F. de
Saussurk, Cours de linguistique générale- in-S", Paris, Payot, 1922 —
W. D. Whitney, Languuge and its Studyi, in-8", Londre.'^. Trûbner, 1880
— notre ouvi-age. Etude comparée des relig., t. II, c. iv.
Pour son application à la civilisation indo-européenne, voir plii.< loin la
bibliogr. de la conférence n" 6, p. 125.
Pour la classification générale des langues, J. Vinson. .ut. Linguistique.
dans la Grande Encyclopédie de Lamirault, t. XXII, p. 291-296 — à réformer
par FiNCK, Die 8î)rach'ita.m)nc des E, dkrvises- in-S", Leipzig, Teubnei-, 1915
— à corriger lui-même, dans le sens indiqué plus haut, p. 106, i ar A\'. Schiiidt,
Die Mon-Khmer VôU^cr, in-8", Braunschweig, Vie-\veg, 1906 : traduct. par
M* Marouzeau, dans Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient, 1907.
p. 213-263 ; 1908, p. 1-35 : à part. Les peuples Mon-Khmêr, gr. Jn-8", Hanoï,
1908 — ■ du même. Die Gliederung der anstralischcn Sprachen, in-4", Vlenn»'.
Imprimerie des Méchltharistes, 1919 (en articles dans Anthr., 1912 .«;q.) —
A. Conrady, dans Aw/.sât^e zur Kultur- und Sprachforschung E. Kuhn gewidmt t,
in-4", Breslau, 1916 ; sur ce dei-nier ti'avall, W. Schaiidt, dans Anthr.. 1917-18.
t. XII-XIII, p. 702-706.
H 2 A. CARNOY
[6] Culture et religion des Indo-Européens,
par M. le Professeur A. CarNOY.
Parenté dr.s langues' indo-européennes. — - Dans le domaine
matériel, oe qui a fait le XIX" siècle, oesl l'invention de la ma-
chine h vapeur. D'autre part, le mouvement des idées et les
sciences morales durant cette période ont été profondément
influencés par la découverte de la parenté existant entre les
divers idiomes de l'Europe et la langue sacrée des Hindous, le
sanscrit. C'est elle, en effet, qui a permis de constituer une his-
toire des langues et des races de notre continent, d'étudier la
nature des phénomènes psychologiques et artistiques qui sont
en relation avec le langage et l'ethnographie, ainsi que d'explo-
rer la préhistoire des civilisations et des croyances.
(C'est au Jésuite Coeurdoux et, après lui, à l'anglais W. Jones
et à l'illustre Frédéric Schlegel que nous devons d'avoir eu
Tattention attirée sur la ressemblance frappante existant entre
les termes du sanscrit et ceux de nos langues :
dadâmi, je donne : otôojij.t, do.
ti-shtâmi, je suis debout : sto, ang. to stand,
asmi, je suis : z\<j.\, sum, I am.
La forme sanscrite permet souvent de mieux apercevoir le
rapport entre les mots des langues de l'Europe :
(rater, Bruder, bhrâtar.
O'jyâxT/p, Tochter, duhitar.
quinque, ttév-e, fûnf, pauca.
Les premiers philologues, enthousiasmés par cette décou-
verte, ont noté toutes ces ressemblances, sans pouvoir établir
de lois fixes pour ces correspondances. Grimm, le premier, a
reconnu l'existence d'une loi de ce genre présidant aux rapports
entre le germanique et les langues de l'Inde et de la Méditer-
ranée : la fameuse Lautverschiebung.
Après lui, d'innombrables et patients chercheurs ont établi
le canon des transformations infligées par chacune des lan-
gues-filles à l'idiome dont elles sont sorties.
De manière rigoureusement scientifique, on a pu montrer
que tous ces dialectes se répartissent en quelques grandes
subdivisions, se rapportant à des groupes ethniques, formant
^CULTURE ET RELIGION DES INDO-EUROPÉENS 113
tous ensemble la grande famille indo -européenne (on dit aussi,
moins proprement : « aryenne » ou « indo-germanique »^.
iD'après la manière dont sont traitées les consonnes guttu-
rales, on divise la famille tout entière en deux portions : les
langues de centum. et celles de satem.
La première comprend :
le groupe celtique : cêf.
» italique : centum.
» germanique : hund-ert,
» hellénique : ïv.'x-M.
'C'est la njoins conservatrice quant à l'accent et quant aux
formes de déclinaison.
A la seconde appartiennent :
les groupes indo-iranien {çatam-satem) ,
» slave-lithuanien (russ. sto. lith. szimtas),
» thraco-arménien-albanais. ,
Extension des populations indo-européennes et leur berceau. - •'
Si l'on examine sur une carte Tespace occupé aujourd'hui par
les populations appartenant à ces grandes unités ethniques, on
constatera que toute l'Europe en est recouverte, sauf un petit
coin des Pyrénées où habitent les Basques, la Finlande où sont,
les Finnois, la Hongrie et la Turquie où Ion parle des idiomes
touraniens.
En Asie, depuis la sémitisation de la Syrie et de la Mésopo-
tamie, les Indo-Européens qui s'étendent entre le Tigre et -le
Brahmapoutre sont séparés de leurs frères d'Europe par une
bande de territoire.
Une carte du même genre tracée du temps de Platon eût donné
un tout autre paysage.
De larges portions de l'Europe étaient encore occupées par
des non-Aryens : la majeure partie de l'Espagne, TEtrurie. une
partie importante de l'Asie mineure. En remontant plus haut
encore, grâce à toutes les données dont nous disposons, on pouf
même établir que les autres Indo-Européens de l'Europe méri-
dionale et occidentale ont pénétré dans ces régions à une époque
pas trop éloignée des temps historiques.
En Asie, les Iraniens ont recouvert les pays occupés pai' les
Elamites, les Assyriens, les Cassites et d'autres populations
alarodiques, caucasiques ou sémitiques.
114 A. CARNOY
C'est par le Nord-Ouest qu'ils ont pénétré dans l'Inde.
L'indo-européanisation du monde est donc un phénomène
plutôt récent et encore en plein progrès de développement, de
nos jours.
Il ne faut pas faire appel à notre imagination et nous figurer
l'arrivée en masse d'étrangers massacrant tout sur leur passage
et occupant l'Europe.
Il s'est agi dans la plupart des cas d'un envahissement gra-
duel. Partis de leur centre de dispersion, les Indo-Européens
ont essaimé en diverses directions. Ils ont fourni de nouveaux
centres d'expansion et ont recouvert partout des populations
antérieures, avec lesquelles ils se sont fondus. La civilisation
de celles-ci, ils se la sont, en bien des cas, assimilée (Grèce,
Italie, Asie mineure etc.). En revanche, ils ont formé une aristo-
cratie militaire et politique, qui a imposé sa langue (Perse,
Italie, Grgce. Espagne) et beaucoup de ses croyances et usages.
Le crvtrr dr dispersion, lui-même, est mal connu, en dépit
des grands efforts faits depuis cent ans pour le découvrir. On
a cru d'abord à une origine asiatique, à cause du respect dont
on entourait le sanscrit, qu'on considérait comme la langue-
mère, alors qu'il n'est .qu'une forme très ancienne d'une des
langues-ifilles. On parlait du Pamir, le fameux « Toit du
Monde », comme du Haut Plateau duquel les races indo-euro-
péennes auraient dévalé, comme autant de torrents recouvrani
les vallées et les plaines et venant s'épancher jusque sur les
bords de l'Océan Atlantique, On a découvert, ensuite, que le
vocalisme ancien, ainsi que les gutturales, étaient mieux con-
servés en Europe et l'on vint à se demander si, après tout, ce
ne seraient pas les gens de chez nous qui seraient allés en
Asie. L'archéologie du nord de l'Europe n'a pas révélé de
grands changements de civilisation et de race et l'on en a
conclu que les Indo-Européens devaient être considérés comme
les aborigènes de Scandinavie, Germanie, Lithuanie.
Depuis une vingtaine d'années, ces idées sont à leur tour
battues en brèche. M. Feist, par exemple, a apporté une série
d'arguments, tendant à démontrer que les Germains avaient
dû être indo-européanisés à une certaine époque, ce qui ren-
versait l'axiome de l'identité entre la race nordique et celle
des Indo-Européens. En réunissant une quantité considérable
CULTURE ET RELIGION DEH INDO-EUROPÉKXS 115
d'indices tirés de l'archéologie, de Tanthropologie, de l'ethno-
graphie et de la linguistique, M. Sghrader a cra pouvoir indi-
quer les régions du nord de la Mer Noire comme le berceau
de la famille. Dans le petit volume publié l'an passé. Fauteur
de cette communication a remis le problème à l'étude, i»i)ur ar-
river à des conclusions assez semblables.
L'on peut, en tout cas, sans risquer de se tromper, affirmer
que la vieille patrie se trouvait entre le Danube et la région
Caspienne et cette précision est suffisante à notre point de vue.
Rappelons-nous, en outre, que l'on ne peut com})iètement
identifier les Indo-Européens avec aucune race physique, m;iis
que tout indique qu'ils étaient en majorité brachycéphales, sur-
tout dans leurs plus vieilles couches et dans celles de l'est, qui
ont si bien conservé la langue avec sa musique (Lithuanie.
Russie etc.) .
Aucune des civilisatit^ms préhistoriques, énuniérées par nos
archéologues, ne paraît pas non plus pouvoir être attribuée à
des couches linguistiques déterminées.
La civilisation existant au Dnieper, vers 2500 avant J.-C.
correspondait toutefois en plus d'un point avec ce que nous
savons des usages des Indo-Européens, quant .aux sépultures
et aux maisons. Ces peuples ont, notamment, été les propaga-
teurs de la crémation et de la maison carrée en torchis, avec
portique. Ils se trouvaient à l'époque de transition entre l'âge
de la pierre et celui du bronze. Le miel jouait- un rôle impor-
tant dans leur alimentation comme chez les peuplades de la
Russie méridionale.
La paléontologie linguistique et la civilisation des Indo-Euro-
péens. — Pour en savoir davantage sur l'état de civilisation des
Indo-Européens et sur l'aspect de leur mère-patrie, il faut
s'adresser à une autre science que l'archéologie et l'anthropo-
logie, c'est-à-dire à la paléontologie linguistique pour employer
le terme forgé par A. Pictet, en 1859.
Elle consiste à reconstituer le vocabulaire indo-européen piir
une comparaison entre les langues filles et à conclure des mois
aux choses.
iGomme par exemple, les Indo-Européens ont un mot pour \r
printemps signifiant : « l'humide » et n'en ont point pour
l'automne, il est assez probable qu'ils habitaient une l'égion
H G A. CARNOY
OÙ le printemps était caractérisé par la pluie et où Tarrière-
saison n'était guère distinguable soit de rété, soit de l'hiver.
Tous les groupes linguistiques ont le même nom pour le
castor, le loup, la loutre, la grue, l'oie ; donc ces termes re-
montent à la langue-mère et donc, aussi, ces animaux étaient
connus des ancêtres communs.
On fait de même pour les végétaux et, ce qui est plus impor-
tant au point de vue culturel, pour les animaux domestiques et
les plantes cultivées, pour les villages, les Iiabitations, les vê-
tements, les ustensiles, les armes, les éléments de la famille,
les moeurs et les croyances.
Cette méthode offre certains dangers que Pictet et ceux qui
Tont suivi n'ont pu suffisamment conjurer. Il faut se défier des
étymologies douteuses, des termes à valeur variable, des mots
voyageurs. Heureusement, dans l'état actuel de notre connais-
sance de la linguistique, il est, dans un grand nombre de cas,
possible de s'assurer que ces causes troublantes n'ont pas pu
agir.
On peut donc dire que les mots nous ont laissé la trace des
choses, de la même manière que les plantes et les animaux des
âges géologiques ont fixé leur empreinte sur les roches ; mais
il est bien évident que cette façon de procéder ne donne que
des indices qu'il faut toujours vérifier, au moyen de ceux
fournis par l'archéologie, l'ethnographie, l'histoire etc.
Nous apprenons ainsi que le peuple qui nous a transmis la
langue que nous parlons pratiquait l'élevage du mouton, du
bœuf, du cheval et du chien. Ces gens cultivaient principalement
Vorgp. dont ils faisaient un pain grossier. Ils habitaient des
villages occupés par une « gens » ou famille, au sens large du
mot. Ils avaient des sortes de refuges entourés de palissades
pour se protéger en cas de guerre. .
Leurs maisons étaient très simples. Elles consistaient en un
enfoncement dans le sol, au-dessus duquel on élevait un toit de
chaume soutenu par des poteaux et des murs en treillis. Le
toit haut et incliné, dépassait la hutte de torchis et formait
une sorte de portique.
Les hommes étaient vêtus d'une ceinture et d'un manteau
de peau de bête tombant sur les épaules. Ils pratiquaient déjà
le tissage. Ils avaient de lourds chariots pour voyager et des
CULTURE ET RET.IGION DES INDO-EUROPÉENS 117
chars légers pour le L'ombat. Ils étaient monogames. La femme
occupait un rang bien inférieur à celui de son mari, mais,
jouissait dune réelle autorité sur la domesticité.
La naissance des fils était ardemment désirée, afin de consti-
tuer des défenseurs pour la tribu et des sacrificateurs aux âmes
des ancêtres. Les enfants recevaient des noms à sens pompeux
et de bon augure, rappelant souvent de quelque façon celui des
parents et constitués par la composition de deux noms : Sigu-
fried, Brun-hilde, Hlol-wig, en Germanie — Theo-dôros, Mene-
laos, Dio-klês, Hippo-kratês, en Grèce — Devadatta, Zarath-
ushtra, Arta-farna, dans l'Inde et Tlran — Boduo-gnatos, Cin-
geto-rix, chez les Gaulois.
Les amis et parents s'adressaient, toutefois, à eux en se ser-
vant du diminutif de ces appellatifs solennels : Zeuxippos :
Zeuxis — Bahlirin : Baldo Niképhoros : Nikias — Godfried :
Golo.
Le jeune homme était soumis à diverses cérémonies et ini-
tiations, avant d'être admis dans le groupe des hommes.
Les familles étaient réunies en clans (ou gens) et en tribus
ou nations. Ces dernières étaient sous l'autorité assez mitigée
d'un rex, qui était le Her-zog en temps de guerre. Il y avait un
conseil d'anciens ou notables, gardiens des coutumes. Une des
lois les plus essentielles était Vobligation de venger le meurtre
d'un membre de la tribu. Celle-ci créait l'état (Miostilité {Fehde^
entre les clans. On en sortait par Tacquittement de la (jf-tihi'i.
De cet usage sortit graduellement l'ordre juridique tandis que
la sécurité du voyageur était assurée par le droit d'hospitalité.
Ce tableau très résumé ne donne qu'uw idée imparfaite des
résultats très remarquables auxquels on est arrivé par la com-
paraison des langues. La lecture des ouvrages de MM. Schra-
DER, HmT, Feist et des autres ouvrages déjà mentionnés, per-
mel trait de pénétrer plus à fond dans la vie de ceux que nous
pouvons à bien des points de vue appeler nos ancêtres, bien
que nos populations européennes soient le produit d'un croi-
sement entre ces peuples et ceux qui les ont précédés.
La religion. — Généralités. — Si la paléontologie linguistique
est si utile dans tous les domaines, on se demande pourquoi
elle serait impuissante à nous renseigner sur les croyances deè
Indo-Européens. Son efficacité sous ce rapport a pourtant été
118 A. CARNOY
mise sth'ieusciiient en doute depuis une trentaine d'années.
Vers 1850, au contraire, sous rinfluenee de Max Mueller, la
luytliologie et Thiérologie comparées étaient devenues des
brnnchcM ext reniement importantes de la grammaire comparée.
On considéi'ait, en effet, celle-ci comme la source essentielle
de celle-là. Max Mllller attribuait Torigine de la mythologie
à une maladie du langage consistant à accorder une réalité per-
sonneLlt' à toutes m.étaphores (pierre coupante, dent broyeuse,
vrille perçante etc.). Le Rig Veda avec sa poésie imagée fut
regardé comme l'exemple le plus parfait de la psychologie du
primitif. On crut y trouver Vétymologie de tous les noms des
dieux grecs ou germaniques. Malheureusement, le progrès des
études philologiques fit écrouler la plu{)art de ces construc-
tions en même temps que le prestige de llnde s'atténuait.
Dans l'entre-temps, les recherches des folk-loristes. des eth-
nologues, des archéologues etc., avaient augmenté notre con-
naissance des croyances et des usages magiques ou religieux
du peujde en Europe et en dehors du domaine indo-européen.
Ce fui le commencement de la période « anthropologique ». On
se n}it à étudier les religions des populations indo-européen-
nes, non j)lus à la lumière des croyances des nations de
même langue, mais en saidant de comparaisons empruntées
aux peui)les les j)lus divers et surtout aux sauvages. On montra
l'origine psychologique de la plupart des rites, la survivance de
conceptions à travers les générations et les i/.vasions. On crut
donc à la polygénésie des mythes et à Vorigine pré-aryenne des
rituels et des conceptions.
Il ne peut être question de nier que cette réaction ait été
salutaire. L'école précédente avait été trop superficielle et s'ap-
puyait trop spécialement sur les données littéraires. On a bien
fait aussi de montrer la complication du problème. C'était du
vrai simplisme de sMmaginer que les religions des Grecs, des
Romains, des Germains etc.. pouvaient s'expliquer comme des
dérivés de celle de l'Inde ancienne. Toutefois, on a fini par
aller trop loin dans cette critique négative.
Quelque importants que soient l'apport pré-aryen, les
influences extra-aryennes et les créations sj)ontanées des
diverse? tribus, il serait absurde de se refuser à rechercher
l'élément commun que l'origine indo-européenne a apporté à
CULTURE ET RELIGION DES INDO-EUROPÉENS 119
tous les peuples de la famille, alors que la paléontologie lin-
guiste a montré l'importance considérable de cet élément dans
tous les autres domaines culturels. C'est d'autant moins admis-
sible que les faits sont là, pour montrer que, si l'on s'en tient
aux mythes principaux, aux types divins les plus marquants, à
certains usages religieux essentiels, on est frappé des res-
semblances existant entre les croyances des peuples qui nous
occupent, 11 faut, naturellement, renoncer à partir comme
jadis, d'un type mythologique et religieux exubéramment déve-
loppé pour en chercher les « débris » dans les diverses bran-
ches de la famille. C'est le contraire qui est vrai. Un noyau
assez simple de conceptions et d'usages s'est précisé, complété,
compliqué de façons diverses chez les différents peuples.
Les noms des dieux, bien qu'on les retrouve parfois tels
quels dans plusieurs groupes, sont le plus souvent sujets à des
variations, par substitution d'épithètes, syncrétisme, person-
nification des aspects etc. ; les mythes se croisent, se répètent
sous des formes légèrement différentes, se combinent à nou-
veau etc.
En tenant compte de ces circonstances, l'on peut tracer des
croyances indo-européennes le tableau que voici.
Il y avait trois types de conceptions, selon qu'il s'agissait
1" du dieu suprêmr, 2" des divinités principales, colles des gran-
des forces de la nature, 3° des dieux et des esprits inférieurs ou
occasionnels ; le culte des âmes des défunts se rattache à cette
dernière catégorie, car il s'opérait de continuels échanges entre
les mânes et les autres esprits.
/.'■ dieu suprême. — Bien que la l'eligion indo-européenne soit
essentiellement polythéistique, on ne peut nier qu'elle ne ren-
ferme un réel monothéisme de tendance, par suite de la situation
très spéciale occupée par le Dieu du Ciel, cest-à-dire de Dyéus
parmi les deiwôs, « dieux de la nature '>. Son nom se retrouve
un peu partout : Dydus Pitar. dans l'Inde — - Zsj; TraTT^p, chez
les Grecs — > AtoTra-rupo?, en Illyrie — Juppiter, en Italie.
Il enveloppe le monde de son manteau et cela spécialement la iiuit
(Ouranos, Varuna). De ses mille yeux, il voit tout et, comme
tel, il est le gardien de la moralité, surtout dans la personne de
Varuna et de Mazdâh «■ dieu sage ». Il protège donc ceux qui
n'ont pas d'autre protection. (ZcMS est le défenseur du voyageur,
120 A. CARNOY
du mendiant etc.). Il conduit les justes et les pi'ivilégiés dans
l'empire céleste, où il l'ègne <-omme maître et seigneur {asura.
kshairhja) de Tordre physique et de l'ordre moral {rta) . Il est
le « Père » par excellence. On l'invoqvc sous la voûte céleste.
spécialement sur le sommet des montagnes. Comme il ne perd
pas son caractère plus spécifique de dieu du ciel, c'est lui qui
envoie la pluie et la foudre, en même temps que toutes les béné-
dictions {Bhaga-Bogu . On l'adore aus.-i dans le chêne que la
foudre a frappé. Il a donc beaucoup d'aspects et reçoit beau-
coup de noms : le Couvreur, le Brillant, celui du ciel, celui du
chêne, celui qui tonne, le seigneur, le maître de la tribu, le très
élevé etc. Beaucoup de ces noms deviennent ceux de divinités :
Mitra j)rotecteur de la foi jurée), Aryaman « l'ami », Bhaga « le
distributeur ». Dans l'Inde ces divers aspects sont encore
réunis en un groupe d'Âdilyos •• très saints ». Dans l'Iran,
Ahura Mazda, << Seigneur-Science », est de même entouré
d'hypostases : Justice. Prudence. Bonne Disposition, Royaume,
Prospérité, Immortalité etc. Chez bien des peuples, le dieu de
l'orage, celui de la guerre «te, sont des divinités spéciales
(Thôr).
Les grands dieux d'- la Nature. — Dyêus préside leur gioupe.
Ils représentent les autres éléments essentiels de la Nature.
Ils sont comme V aristocratie du monde des dieux, en dessous
de Dyêus et au-dessus des dieux et génies en général.
Le culte du soleil, f'e la lune, de l'aurore, de l'orage, du
vent, du feu, de la terre etc., se retrouve chez tous les Indo-
Eurojiéens. mais souvent le même élément est représenté plus
d'uiit' fois dans le panthéon. Cela est dû, tout d'abord, à ce que
des aspects ou simplement des épithètes ont été personnifiés
(Savitar « viviflcateur », Vishyni « actif », Pushan a qui fait
prospérer », Vivasvat « étalant la lumière », aspects de Sûryâ
« Soleil », dans l'Inde) . Ensuite, il arrive constamment qu'une
divinité de la Nature ayant acquis une personnalité plus com-
plète sô détache de l'astre ou du phénomène pour former un
dieu indépendant {Apollon, Athênâ, Hermès . Comme dieu de
l'élément en question, il est donc remplacé par un nouveau
dieu, représentant plus directement celui-ci {Aiolos, Hêlios,
Selenê) .
Il faut, du reste, noter que si liés que soient les deiwôs avec
CULTURE ET RELIGION DES INDO-EUROPÉENS 121
les phénomènes de la Nature, ils en sont cependant distincts.
Ceux-ci sont leur vêtement, leur manifestation. Les dieux sont
des activités indépendantes, présidant aux phénomènes.
Après le Ciel, la divinité la plus en vue est le Soleil {Swei) .
L'imagination féconde a créé maintes métaphores pour le re-
présenter. Il est un œil, un bouclier ou un chaudron d"or. une
roue de feu, un bateau voguant sur la mer céleste (Argô), un
bélier (Grecs, Slaves), un cerf aux cornes brillantes (paysans
russes). Surtout, il est une cavale blanche ou un char tiré par
des chevaux ailés. Il est la pomme dor du jardin de l'occident
ou celle didun, qui rend la jeunesse. Souvent, il est une déesse
[Sûryâ (Inde), Sunnô (Germains), Saule (Lithuaniens * ; plus
souvent encore, un dieu {Uélios Akamas, Sol invictvs. Tsar
Solntse) . Il est le dieu des saisons, le gardien des voyageurs
et des grandroutes, qu'il parcourt chaque jour, le guide des
morts vers le séjour de repos, où il se retire chaque soir. Il est
aussi, tel surtout le Sulis Belenos des Celtes, un dieu de la
fécondité, qui anime de sa chaleur la terre, la végétation et les
sources vives.
L'Aurore {Ausôs) est la figure la plus gracieuse. Elle charme
la nature à son réveil et sourit aux hommes. Elle danse à son
arrivée et traverse ensuite le ciel sur son char brillant. On la
salue sur une cime et Ton danse en son honneur. Beaucoup de
ces usages se sont conservés dans les fêtes du printemps que
l'on célèbre encore sous diverses formes en Europe, le tout
mêlé évidemment aux usages locaux de tous genres. On y célè-
bre encore parfois le mariage sacré de la fille du Ciel (lith.
deicô duktele — le soleil). A côté de la Fille du Ciel, il y a les
Fils du Ciel (diwos nepôtes) , deux cavaliers jumeaux, qui suivent
le char du soleil et courtisent la fille du Ciel. Ce sont les Aiô;
xoûpot grecs, compagnons d'Hélène. Messagers de bonheur.
dieux protecteurs et sauveurs, on les vénérait surtout dans
l'Inde sous le nom d'Açvins (cavaliers). Ils pai'aissent être
les dieux de Vétoile du matin et du soii'.
La lune {Mens) était un vase, un graal, rempli de la bois-
son de fécondité et d'immortalité. Elle répandait partout la
fertilité, idée qui n'est pas encore déracinée de nos supersti-
tions.
Le dieu de Vorage paraît, comme dieu indépendant, avoir pris
122 A. CARNOY
de rimportanre surtout après la dispersion. Chez certains
peuples, ce n'est qu'un aspect de Dyêus Zsj; -cpTrixÉpa'jvor.
En général, pourtant, il a sa personnalité. C'est le dieu qui
frappe le chêne [Perqunos). C'est le grand Perun des Slaves,
,1e Thôr marteleur des Germains, le Parjanya des Hindous. Il
est le dieu de la force, de la victoire par la violence, le patron,
par exoellence, des guerriers. Il est le héros du mythe de l'orage
que Ton trouve répandu partout et qui représente les eaux pri-
sonnières (run dragon mais délivrées par le dieu de V orage, lequel
frappe le monstre de sa f(»udre (massue, lance etc.) . Les eaux
sont souvent comparées à des vaches. Le monstre est un chien
à trois tètes. Divers exploits d'Hercule, dune part, la naissance
d'Athenà, de l'autre, sont des variantes grecques de ce mythe.
Il y a une déesse des Eaux et un petit vieillard très malin qui
vit dans le fond des mers et que les dieux maltraitent de diver-
ses manières pour obtenir sa sagesse {Trita Àptya (Inde^i. Miini
(Germanie), Halios Gerôn (Grèce).
Bien plus important était le dieu du Feu \.\gnis. Lukos' . Le
feu était, en effet, encore plus vénéré que les eaux. Son pouvoir
et son origine étaient entourés de mystère. On l'appelait « fils
des eaux » (sans. Apdm Napât), parce qu'il sortait de la nvéc
comme l'éclair ; mais il est aussi << fils du bois », parce qu'il
est obtenu par le frottement énergique d'un pivot dans un
tronc et <> embryon des jtlantes », parce qu'il est supposé être
la force de vie qui anime le végétal.
Un mythe répandu partout l'aconte qu'il fut « superbement
volé » aux dieux, soit par les héros du premier âge {Mâtariçvan.
Prowètheus) , soit par le dieu du feu lui-même, l'astucieux Loki
des Germains, qui trompe la surveillance des dieux et s'em-
pare du feu du ciel sous la forme de la chevelure d'or de Sif,
des pommes d'or d'Idun et du brillant collier de Freya.
Le feu a trois formes : feu du ciel (éclair, soleil), feu des
eaux (éclair), feu de la terre (foyer). Celui-ci est le plus
vénéré. Il est 1' « ami », le « premier hôte » de ceux qui fondent
un foyer. Chez les Hindous, il est aussi le messager qui trans-
met les offrandes aux dieux.
Le Vent {Wâton) jouait un rôle beaucoup plus considérable
qu'on ne pourrait le croire. On pensait qu'il apportait la fécon-
dité aux champs, qu'il inspirait les hommes et qu'il emportait
CULTURE ET RELIGION DES INDO-EUROPÉENS 123
les âmes. Mais le vent est essentiellement capricieux. Comme
l'Esprit, il souftle où il lui plaît. Ce caractère, si frappant chez
Apollon et Hekatê, permet de deviner dans ce dieu si anthropo-
morphisé. un ancien dieu du vent, tour à tour bienfaisant ou
meurtrier. Il est musicien, comme le vent et inspirateur comme
lui. Wodan, chez les Germains, paraît avoir la même origine.
C'est un dieu essentiellement voyageur et conducteur d'âmes,
terrible et bienfaisant, inspirateur et donnant la victoire à qtii
il lui plaît.
(La Teire {Prthivi (Inde), Semelê (Thrace), est la Grande
Mère, comme dans la croyance de beaucoup d'autres peuples.
De son union avt'C le Ciel Père est sorti Ir monde. Elle est la
déesse des fruits de la terre, la protectrice des mères etc.
Les dieux inférieurs. — Il y avait, tout d'abord, les dieux
spéciaux, espèces de forces personnifiées présidant à des actes
et des occasions très spécialisées (lat. indigetes, ail. Sondergôt-
ter) . On trouve un développement très particulier de ces numina
chez les Italiotes et chez les anciens Prussiens. Ils sont un pro-
duit de la disposition d'aspect général chez les primitifs, les
portant à interpréter tous les êtres qui nous entourent comme
animés par des esprits semblables aux âmes qui meuvent les
corps des hommes.
'Il y avait des génies de la .Nature et de la Moisson [Faunus,
Pales, Flora), les Lares, qui protégeaient les fermes, les Pé-
nates, qui gardaient les mobiliers c! les instruments, Janus
qui tenait la porte. Les bois et les champs étaient habités d'es-
prits des arbres, d'elfes et de koboldes. Il y avait les génies
présidant au sort des hommes {fata, fravashi, fylgja' . Les Grecs,
les Germains, les Slaves parlent de fileuses {Parcae, Norne,
Rozenicy) , dont le fll décidait de la vie et de la mort de chacun.
Les âmes des morts restaient en communication avec les
vivants, par exemple en songe (gallo-rom. dusii, iran drug,
germ. alp) . Pour apaiser le mort, il y avait des observances à
respecter et notamment un rite funéraire à suivre, comportant
des complaintes, des ablutions, un repas funèbre, des immo-
lations au mort, des objets à déposer dans la tombe.
Les âmes parcouraient l'espace en cortège (a. fr. maisnie
d'Hellekin) , sous la direction des dieux du Vent. Elles s'incar-
naient dans des animaux (corbeaux, serpents, loups-garous) .
124 A. CARNOY
Le séjour des morts était généralpment regardé comme un lien
radié {fid) p{ invisible {Hadès), protégé par un ileuvc (Styx).
où l"on nieniiit, une existence morne. Quelques privilégiés, ce-
pendant, étaient admis à une vie meilleure que celle-ci. dans
un grand pré où les « liéros » se repaissent d"amhroisie ou des
offrandes (sans, svadhà i pi'ésentées par les vivants. Us festoient
là avec le dieu des m.orts IWodan. dans la WidhaUa ; Yaiiut.
dans Tarbre des pitaras indiens) près de Varbre cosmique, dans
le monde mystérieux de l'Occident où le soleil se couche.
Conclusion. — La fortunp des iudo-Européens a été prodi-
gieuse et ne fait que s'étendre par l'expansion des Européens
sur les nouveaux continents. Malgré le mélange aviM- les popu-
lations pré-aryennes, les peuples du groupe ont tous un air d^
famille, grâce aux institutions et aux croyances qui se ressem-
blent quant au fond, malgré des variations de formes.
La puissance d'assimilation des Indo-Européens réside dans
If'ur grande souplesse d'esprit et la richesse de leur nature. Us
ont de la fraîcheur de vision, une romarfiuablc spontanéité de
j'éaction psychiquo, qui donne de la sincérité et de la vigueur à
leur art. Leur intelligence est concrète et saine, quoique uioins
dégagée des sentiments que ce ne semble être le cas clipz 1rs
jieuples plus positifs de TExtrème-Orient et de TAsio anté-
rieure. Ils ont luoins de force de concentration el de profon-
deui' que les Sémites : mais ils sont plus qu'eux capubies d'en-
thousiasme. Plus que toute autfe l'ace, ils ont le sentimeni
de Vhotnifur et du loyalisme mèl('> ;"i l'aversion contre le despo-
tisme.
Au [((dnl de vue physique, c tM;iient des hc)n)iiie> forts, sains,
très prolifiques, quoique probaldenent moins enduranls (]ue
certairis autres peuples de l'Asie.
Cette richesse de nature a fait des Indo-Euroi)épns. en quel-
que sorte, la « race d'élection » poui' la propagation de la civi-
lisation et du Christianisme dans le monde. La victoire de la
religion du Christ a été favorisée par deux « causes secondes d :
sa naissance dans un milieu oriental, à l'adoration spontanée,
à la pensée profonde, à la contemplation intense, à la volonté
tenace et, d'autre part, l'acceptation presque immédiate de sa
doctrine par des peuples indo-européens ou aryariisés qui,
avec leur grande richesse de conception, leur indépendance de
MÉTHODE DE L'ÉGOLE SOCIOLOGIQUE 125
pensée, (Haient tout désignés pour donner à la doctrine ses
formes philoso}>hiques et, son aspect pratique. En outre, leur
propension à l'enthousiasme, au loyalisme, à la sentimentalité,
autant que leur mentalité opposée au particularisme et leur
habileté à organiser, les préparaient à fournir à la nouvelle
foi des apôtrps intrépides nt infatigables : G'\<ita Doi per Aryas !
BIKI^. — A. Carnoy, Les Indo-Européens, in-16°, Bruxelles, Vroniant,
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[7'^] La méthode de l'Ecole sociologique et ses postulats,
par M. le Chanoine Bros
On sait la place qua prise la sociologie au XIX*" siècle. Depuis
Auguste Comte surtout, elle a pénétré dans tous les domaines
scientifiques. Il n'est pas étonnant que la religion ait été parti-
culièrement envisagée sous cet aspect. La religion est en effet
une source de vie collective : elle inspire les grands idéaux
qui soutiennent et dirigent les sociétés. Elle est en outre un
lait éminemment social. Elle n'est pas que cela certes ; mais
tout un côté de ses manifestations est proprement social.
Dogmatique, culte, oltservances morales et religieuses sont en
fonction d'une hiéi'archie et d'une société ; et si la religion
comporte des valeurs d'ordre intellectuel, moral, surnaturel,
qui relèvent de l'ànie individuelle, de -Dieu, de la liberté
humaine, il est certain cependant qu'il n'est pas de i-eligion
à proprement parler individuelle. D'ailleurs cette tendance
naturelle à nos contemporains d'envisager la religion sous son
aspect social, les n'vélaiions (jue l'histoire appoi'taif venaient
126 A. BR08
la renforcer. Dans les différentes études historiques sur les ori-
gines du droit, de la morale, des constitutions des états entre-
prises en ces derniers temps, la religion apparaissait comme
créatrice de toutes ces formes sociales. L'histoire des religions
primitives enveloppait, pour ainsi dire, l'histoire des origines
des sciences, des arts et des sociétés humaines.
Cest sous l'influence de ces préoccupations contemporaines
que TEcole sociologique est apparue avec ses prétentions
exclusives et ses méthodes. La place qu'elle tient dans le
domaine des sciences religieuses, en France, paraît considé-
rable, si on s'en rapporte aux chaires qui ont été attribuées
aux adeptes de cette méthode è la Sorbonne et si on lit les
nombreux travaux qu'elle inspire. "L'Ecole des Hautes Etudes
Religieuses est entre ses mains et divers cours de philosophie
(je pense là ceux de MM. Fauconnet, Lévy-Bruhl et Bouolé) en
encouragent et en propagent les doctrines. Les cours de licence
eux-mêmes font appel è la sociologie et n'est-ce pas un signe
de la nécessité dans laquelle on se sent de lutter contre cette
influence que le Cours de sociologie que vient de créer .Mgr.
Baudrillart à la faculté de philosophie de son Université ?...
Des ouvrages nombreux paraissent sous l'inspiration de cette
doctrine : ils concernent tantôt les religions proprement dites,
ou l'une ou l'autre de ses manifestations, chez les Grecs, les
Primitifs ; tantôt les valeurs morales. Vous connaissez les
ouvrages de Lévy-Bruhl sur La morale et la science des mœurs.
sur Les fonctions mentales dans les sociétés primitives, sur La
mentalité pnmitive ; ceux de M. Bouglé sur Les valeurs morales,
de M. Gernet sur Les institutions juridiques chez les Grecs, ceux
de M. Fauconnet sur La responsabilité, ceux de Czarnow^ski
sur Le culte des héros, etc.. Cette école s'est donnée à une véri-
table entreprise de reconstitution des autorités sociales, mo-
rales, en dehors de la religion, par la sociologie ; elle sem-
ble bien adaptée à une certaine conception de laïcisme auto-
ritaire et mystique. Et de fait des livres de morale primaire
s'inspirent déjà de leur idéal. « Un penseur ardent et convaincu,
à la pensée impérieuse et forte, Emile Durkheim, a été l'âme
de ce mouvement ; autour de lui toute une équipe de travail-
leurs, de disciples, recueillant les moindres indications du
maître et cherchant dans les voies qu'il leur ouvrait, se sont
MÉTHODE DE LÉCOLE SOCIOLOGIQUE 127
attachés à une œuvre commune ■). Ils t-onstituent une école.
Un important recueil, ï Année sociologique, qui a déjà publié
12 volumes, représente, avec les ouvrages originaux que je
signalais tout à Iheure, les résultats de ce grand effort, sous
l'inspiration et lintransigeance doctrinale du fondateur.
Au fond, ridée centrale de Técole peut se résumer ainsi : il
est des impératifs catégoriques ; ils constituent les obligations
morales, les nécessités religieuses, les normes de la raison
et les exigences de la vie sociale. Ces impératifs sont des faits ;
ni l'Empirisme, ni la Révélation, ni la .Raison ne les produit.
Ils sont la manifestation de la conscience sociale, qui se crée
ainsi une échelle de valeurs correspondant aux besoins de
chaque époque déterminée.
Parmi ces impératifs, les obligations religieuses sont du plus
haut intérêt, car elles représentent les éléments les plus
complets de la vie sociale primitive. La religion à l'état natif,
c'est la société, créant ses impératifs sociaux les plus simples.
Aussi l'école sociologique se préoccupe-t-elle d'étudier la Reli-
gion et surtout les religions primitives avec grand soin. C'est
sur ce terrain qu'elle porte tout d'abord son enquête.
Afin de mieux comprendre et discuter le système, dans une
première conférence, nous examinerons la méthode de l'école
sociologique ; dans une deuxième conférence, nous étudierons
certaines applications de cette méthode à l'histoii-p des reli-
gions.
I. — LA MÉTHODE DE l'ÉCOLE SOCIOLOGIQUE
L'Ecole sociologique se présente avec une méthode. Durkheim
en a lui-même codifié les procédés dans son travail Les règles
de la méthode sociologique et ses disciples Fauconnet et Mauss
les ont commentés dans l'article Sociologie de la Grande Ency-
clopédie.
Il semble que l'Ecole sociologique se garde tout d'abord de
réduire le fait social à la biologie pure. On sait que c'était là
ridée de Comte, qui n'y voyait qu'une différence de complexité.
Pour DiRKHEiM, ce n'est pas dans une science antécédente qu'il
faut rechercher l'explication du fait social. Il s'écarte dos
positivistes en cela. D'autres philosophes ne voient dans les
faits sociaux qu'une application des lois de psychologie indi\1-
128 A. BROS
duelle. Ils ramènent la psychologie des foules, les lois sociales,
à des impulsions, à des imitations dont Torigine et Texplica-
tion sont dans lindividu. Délibérément Durkheim écarte cette
manière de concevoir le fait sociologique. La sociologie est
quelque chose de particulier, une science spéciale.
1" Quest-ce donc qu'un fait sociologique ? C'est un fait spéci-
fiquement distinct de tout autre, quelque chose de sui generis.
Sans doute, il s'insère en des âmes individuelles, mais il n'en
révèle ni les besoins individuels, ni les sentiments personnels.
Ce n'est pas l'addition, ni le renforcement par imitation et
sympathie de ces derniers. Et rien ne permet de conjecturer
a priori dans les individus ce qu'une société peut désirer et
]'éaliser... Il y a, du fait de l'existence sociale, comme un être
nouveau qui est créé, avec ses lois, ses exigences et ses mani-
festations extérieures. Seule l'observation directe nous les
révèle.
Il ne faut donc pas pour les expliquer chercher en dehors
d'eux. « Une science, dit Durkheim, ne doit jamais faire dispa-
raître son objet, sous prétexte de l'expliquer ». Ce serait le
détruire que de rechercher en dehors du fait social (psycho-
logie individuelle, biologie) sa raison d'être.
iGes faits sont apparents par eux-mêmes ; mythes, objets de
croyance, tendances, règles sociales, disciplines morales, ils
ont des manifestations extérieures, des monuments écrits ou
figurés, rites, codes, formules, lois, des temples et des édifices,
des sculptures diverses. C'est cela qu'il faut étudier d'abord.
Sans doute, ces faits n'ont pas une raison d'être surnaturelle
et .mystique dans une entéléchie sociale ; mais ils sont produits
par la collectivité en tant que telle et par la société seule.
C'est en elle que l'on trouve leur explication.
Telle est l'idée que Durkheim se fait du social. C'est donc
un fait spécifiquement distinct de tout autre. Et la sociologie
qui l'étudié revendique une complète autonomie.
2° Il se présente au reste avec un caractère propre, nettement
marqué, qui le fait discerner de tout autre. Le fait social, quel
qu'il soit (coutume, loi, rite) est conçu par l'individu comme
obligatoire. Il domine l'individu dans le temps et dans l'espace ;
il le contraint, lui préexiste et lui survit. « L'obligation est la
preuve que les manières d'agir et de penser ne sont pas l'œuvre
MÉTHODE DE L'ÉCOLE SOCIOLOeTlQUE 129
de rinclividu. Tout ce qui est obligatoire a sa source en dehors
de lindividu ». {Règles de la méth.. p. 129). « Un fait social se
reconnaît au pouvoir de coercition externe qu'il exerce ou est
susce])ti.ble d"exercer sur des individus ; et la présence de ce
pouvoir se reconnaît à son tour, et avant tout, à Texisteni-e de
quelques sanctions déterminées » (p. 15). « Cette sanction,
de quelque ordre qu'elle soit, matérielle, juridique ou morale,
exerce une pression du dehors sur les consciences indivi-
duelles. C'est donc qu'elles n'en dérivent pas et que par suite
la sociologie n'est pas un corollaire de la psychologie » vp. 125, .
3° Le fait social établi, puis discerné, il reste à l'étudier. On
traite souvent le fait social avec une méthode défectueuse. On
étudie l'essence du droit, son fondement logique, les raisons
qui fondent la leligion, le besoin auquel elle correspond, l'ori-
gine des coutumes et leur bien fondé utilitaire. C'est là une
méthode idéologique, contre laquelle Durkhbim se réclame de
la science positive. 11 faut regarder les faits sociaux positivement,
non comme des idées, mais comme des choses. La religion ne
sera pas étudiée dans son essence, mais dans les faits qui la
manifestent, croyances, dogmes, culte, hiérarchie ; la morale,
non dans ses obligations et son fondement, mais dans ses
manifestations, les mœurs et les institutions qui les régissent ;
la famille, non dans l'idée qui la compose et le besoin auquel
elle correspond, mais dans ses variations historiques. « Nous
ne saurions pas du tout ce qu'est en réalité la propriété ou la
famille, si nous en ignorions les origines ou la formation his-
torique ». Il faut donc se dégager de tout a priori utilitaire,
de toute prénotion, étudier les faits sociaux comme un phéno-
mène biidoyique ou physique dont la nature nous est totale-
ment inconnue, les décrii'e dans leur constitution externe,
rechercher les conceptions qu'on en a eues, les croyances qui
les ont accompagnées ou soutenues dans les sociétés diverses
où elles ont été intégrées, faire en un mot une étude positive
du fait social. On s'apercevra ainsi que les faits sociaux n'ont
pas toujours loiigine ciue nous leur croyons. Certaines cou-
tumes collectives survivent aux raisons qui les ont créées e!
prolongent pour des raisons diverses leur existence bien long-
temps après la disj)arition ties causes qui les ont inspirées.
C'est ainsi par exemple que la prohil)ilion de l'inceste An. Soc.
9
130 A. BROS
1896-97) ne se rattacherait ni à une émotion sentimentale, ni à
une délicatesse morale, ni à une raison d'hygiène, comme on
le croit communément dans notre monde moderne, mais serait à
l'origine une institution religieuse, analogue aux tabous que l'on
trouve chez les Australiens, tabou que nous ignorons et qui ce-
pendant se survit ])ar des institutions dans notre monde contem-
porain, non sans s'être donné une nouvelle métaphysique expli-
cative. Il en est de même pour les institutions familiales et
surtout pour la religion, qui est le fait social par excellence. Les
institutions et les rites qu'elle provoque dans notre civilisation
présente ont des raisons et des explications courantes idéologi-
ques. C'est la métaphysique actuelle des religions. A la vérité,
lorigine des diiïérents faits qui la caractérisent est toute autre
et les cérémonies du totémisme, Vintichiuma, qui paraissent si
éloignées des sacrifices et de la ju'ière, n'en sont pas moins la
cause historique de ces grandes formes du sentiment religieux.
Pour étudier positivement un fait social, l'interpréter, il est
dès lors évident qu'il ne faut pas rechercher les idées ou les
opinions ou les raisons qu'on en a. Il sera préférable à tous
égards, pour les rapprocher des vrais faits positifs, de les obser-
ver comme des faits externes dans leurs effets visibles et régu-
liers. L'art de l'expérimentateur est de tout noter en mesure de
quantité. Le sociologue s'efforcera de saisir dans les faits ex-
ternes les causes sociales qui les produisent. C'est ainsi que les
variations du droit répressif et du droit contractuel lui révéle-
ront le passage d'une formule de solidarité à une autre ; il
déflnira le crime par la peine, ou le degré de bien être et de
malaise social par le nombre des suicides...
Cette observation positive révélera des faits normaux et des
faits anormaux. La différence entre les uns et les autres réside
seulement dans la plus grande généralité des premiers, IJn
fait ne peut être qualifié de pathologique qu'en regard d'une
espèce sociale donnée. Le normal ne se confond nullement avec
la notion d'utilité directe et réelle. Une foule de pratiques sont
normales, durent et se généralisent et même deviennent les
caractéristiques d'une société donnée, tout simplement parce
qu'elles existent. Elles finissent même par devenir vraiment
utiles indirectement, comme éléments de l'idée d'un groupe...
Il ne faut donc pas, pour discerner les faits, faire intervenir la
MÉTHODE DE l/ÉCOLE SOCIOLOGIQUE 131
finalité. « Il ne faut jamais se demander à quoi servent les
institutions sociales, mais d'où elles viennent ». « Les causes
qui font être un fait social sont indéiiendantcs des fins aux-
quelles il sert » (p. 113).
Mais dès lors, si le normal et l'anormal ne se distinguent
que par le critère de quantité, l'anormal, la désobéissance aux
lois est le crime. Socrate était donc sociologiquement parlant
un criminel. Durkheim accepte cette manière de voir. Au reste.
lanorinal est lui-même en quelque sorte normal : le crime a
sa fonction sociale. Il indique dans la société la possibilité
dun changement ; il marque que l'initiative peut avoir raison
des cadres fixes : il révèle une aptitude dans la société à inno-
ver, à se renouveler, et c'est parfois à cette aptitude que cer-
taines sociétés doivent leur salut. « Pour que l'originalité de
l'idéaliste, qui rêve de dépasser son siècle, puisse se manifester,
il faut que celle du criminel, qui est au-dessous de son temps,
soit possible » (p. 88).
4° Les faits sociaux objectivement observés, il faut se re-
connaître dans la multiplicité des données qu'ils révèlent. Il
faut opérer une oeuvre de classification et de définition. Dans sa
phase actuelle, la sociologie doit surtout faire œuvre histori-
que, essayer de déterminer les grandes formes sociales et les
expliquer ensuite. C'est Là qu'intervient la méthode compara-
tive, qui met en regard les diverses sociétés. Elle rend deux
services au sociologue : d'abord, elle permet de classer les
faits par ordre de complexité croissante et de suivre les formes
sociales dans les progrès de leur évolution ; ensuite elle sert à
comprendre certains détails inintelligibles des sociétés actuel-
lement vivantes. Il est à remarquer que pour Durkheim le type
social le plus simple, la horde, le clan, parce qu'il semble
écarter toute apparence de spécialisation, est regardé comme
le plus primitif et que, d'autre part, les autres types sont tenus
par lui pour des com;binaisons plus ou moins variables de ce
type, qu'il s'agit de débrouiller.
Sans doute, Durkheim se défend d'établir une histoire unili-
néaire de l'esprit humain ; les faits sociaux sont hétérogènes
à tous les autres ; les sociétés le sont les unes aux autres ;
« elles naissent, se développent, meurent, indépendamment les
unes des autres ». « Le progrès de l'humanité n'existe pas •>.
{Règles, p. 24).
132 A. BROS
Il faut noter iri la place que Durkheim fait à l'histoire,
science auxiliaire de la sociologie. Elle vient apporter ses
faits ; elle aide à on donner l'explication, par la détermination
des lois et des causes ; mais il en faut écarter l'élément pure-
ment anecdotique, qui est sans utilité ; elle est témoin du fait
social qui seul iniiîorte. (C'est par exemple une question inutile
poui' la sociologie que celle de la date de composition du Rig-
Veda etc. ; la sociologie i-etient les faits, pour juger des en-
sembles) .
5" Le fait social défini et classé, il reste à Vexpliqiier. à en
établir l'origine et la cause. Ces causes doivent « toujours être
recherchées dans dautres faits eux-mêmes sociaux ». Et en
effet, qui dit fait social dit contrainte, obligation, et ce qui est
obliiiatoire n'a pas sa source dans l'individu, mais au-dessus
de lui, 1 uisque celle obligation le domine et lui survit et le
précède ». « Toutes les fois qu'un fait social, dit Durkheim,
est directement expliqué par un phénomène psychique, on peut
être assuré que l'explication est fausse » (p. 128). Les expli-
cations psychologiques sont donc à écarter. 11 faut écarter
également les explications par les races, le milieu, le climat.
« En somme, écrit-il, quand on rapporte avec cette rapidité à
des facultés ethniques cong-énitales le caractère artistique de
la civilisation athénienne, on procède à peu près comme faisait
le moyen âge, lorsqu'il expliquait le feu par la phlogistique et
les effets de l'opium par sa vertu dormitive... On n'a pas même
essayé si une explication sociologique des mêmes phénomènes
n'était pas possible et nous sommes convaincus qu'elle pour-
rait être tentée avec succès » (p. 133). « L'origine première
de tout processus social de quelque importance doit donc être
recherchée dans les constructions du milieu social interne ».
« Il faut explique]' les phénomènes qui se produisent dans le
tout par les propriétés caractéristiques du tout, le complexe
par le comjilexe, les faits sociaux par la société » {Rep. ind.,
p. 298).
Cette détermination de la cause des faits sociaux dans la so-
ciété même est l'ultime terme de la méthode. Dans notre seconde
conférence, nous en marquerons quelques applications. Si nous
en résumons les divers aspects, nous dirons que Durkheim,
après avoir isolé le fait social et la sociologie qui l'étudié, après
MÉTHODE DE LÉGOLE SOCIOLOGIQUE 133
avoir donné à cfitte dernière son autonomie, grâce à l'observa-
tion des faits soeiaux contemporains et historiques, établit des
types divers, différents par leur complexité, les défmit, puis en
détermine l'origine et la cause dans la société même. Cette
méthode sociologique est-elle sans reproche ? O^iRls postulats
suppose-t-elle ? Et n'est-il pas possible de prévoir à l'avance
les aventures retentissantes qu'elle prépare à ses adeptes ?
C'est ce qu'il nous reste à examiner.
II. POSTULATS ERRONÉS DE CETTE MÉTHODE
On peut sofcuper de sociologie, croire à son domaine et à
ses lois particulières, sans professer les théories et la méthode
de DuRKHEiM. Certes, il y a beaucoup à profiter dans l'étude des
faits sociaux en tant que tels, et il faut se défier des explica-
tions psychologiques et biologiques rudimentaires. Durkheim
par conséquent, en attirant l'attention des historiens sur cet
aspect de l'étude des formes sociales (religion, morale etc.)
aurait pu être utile. Son intlucnce doctrinale était forte, à la
veille de la guerre. « Vers lui se tournaient un grand nombre
d'étudiants en philosophie. Ils trouvaient de ce côté une pensée
ferme, impérieuse, sûre d'elle-même, et surtout un programme
de travail { ositif, ou\rant aux recherches futures de larges
horizons, et encore une méthode rigoureuse d'aspeci, propre
à fournir l'assurance d'une œuvre à la fois neuve et vraiment
scientifique à entreprendre, en même temps que les plus
larges synthèses ne lui étaient pas non plus interdites, pourvu
qu'elles pussent s'appuyer sur une base nettement sociologi-
que » (p. 150j. Malheureusement cette influence, dont la cita-
tion de M. Parodi marque les causes, était viciée dans son orien-
tation métaphys;ique. et quelles que fussent les phrases respec-
tueuses dont il enveloppait les forces essentielles de la vie
sociale de rhum.mité, Duhkheim détruisait les idées qui font
vivre les hommes et sapait les fondements historiques et intel-
ligibles de la religion et de la société. Il n'y avait pas à s'y
tromper ; l'œuvre entreprise de légitimer les impératifs des
sociétés ne tendait à rien moins qu'à donner une raison so-
ciale non-individuelle, pour renforcer' laïquement les autorités
civiles et justifier leurs exigences quelles qu'elles fussent,
comme étant l'émanation impérieuse des collectivités. Elle
134 A. BROS
substitue au fond au droit individuel et social, qui relève de
la raison et des traditions, un droit social, qui a son fondement
dans la force, non dans la force physique certes, mais dans la
force du nombre. Et c'est une autre manière de tyrannie. Nous,
catholiques, nous ne saurions trop nous défier de cette entre-
prise, dont les tendances nous sont hostiles. Il nous faut exa-
miner quels sont les vices de méthode qui se cachent sous cette
doctrine sociologique.
1". Et tout iFabord, ce qui frappe dans une telle méthode,
c'est sa défiance ^uvers l'intelligence. Au fond, la doctrine so-
ciologique est, à sa base, instinctiviste, anti-intellectualiste.
Cette défiance de l'intelligence apparaît premièrement dans
le souci qu'a Durkheim d'étudier le fait brut comme tel (je
parle des grands phénomènes religieux : croyance en Dieu,
sacrifice etc.) Qu'ils soient économiques, moraux ou religieux,
(i'est extérieurement, dans leurs représentations et dans leurs
institutions, qu'il convient exclusivement d'observer les faits.
G"est aussi en les reliant les uns aux autres qu'on en rend
compte.
Il en est des faits sociaux comme des faits physiques ou
chimiques : on les explique en les rattachant à d'autres faits
sociaux. « Prenons par exemple les institutions du mariage
et de la famille, écrit M. Mauss {Grande Encyclop.. art. Social.,
p. 169). Si i-e sont les phénomènes sociaux qu'il s'agit d'ex-
pliquer, des problèmes précis se posent : comment se sont
formés les différents systèmes matrimoniaux et domesti-
ques ? peut-on les rattacher les uns aux autres, distinguer
des formes postérieures et des formes antérieures, les pre-
mières apparaissant comme le produit de la transformation
des secondes ? Si cela est possible, comment s'expliquer ces
transformations, quelles en sont les conditions ? Comment
les formations de l'organisation familiale affectent-elles les
organisations politiques et économiques? D'autre part, tel
régime domestique une fois constitué, comment fonctionne-
t-il ? )) A ces questions, que répondre ? Les psychologues
parlent de tendances de l'âme humaine ; l'histoire nous donne
des lions chronologiques, accidentels et arbitraires. « La so-
ciologie va d'un ])hénomène social à un autre. Elle n'établit
de rapports (ju "entre phénomènes sociaux. Ainsi elle nous
MÉTHODE DE LÉCOLE SOCIOLOGIQUE 135
montrera comment les institutions s'engendi'ent les unes les
autres, par exemple comment le culte des ancêtres s'est déve-
loppé sur le fond des rites funéraires etc. Les faits sociaux
sont des causes, parce qu'ils sont des représentations ou agis-
sent sur les représentations. Le fond intime de la vie sociale
est un ensemble de représentations » (l. c, p. 171).
Qu'est-ce à dire, sinon que tous ces faits s'expliquent,
quand on en a rompris le mécanisme intérieur et la dépen-
dance dans laquelle ils se trouvent de la représentation collec-
tive qui les interprète ou les maintient ; mais ces représenta-
tions ou ces institutions, qui sont une forme d'iutrUigible qu'il
n'est pas permis de ramener à de l'intelligible de conscience
individuelle ou de raison particulière, ne constituent-ils pas
une sorte tVintelligible social ? Tout irait bien, si cet intel-
ligible était homogène à l'intelligence de l'individu ; mais il
n'en est rien. Les faits sociaux ne sont pas justiciables de
cette intelligence. « La conscience est un mauvais juge de ce
qui se passe au fund de l'être, parce qu'elle n'y pénètre pas ».
Voilà donc une sorte d'inconscient, dont tout procède : est-ce
un instinct vital, dont émergent les faits sociaux ? De toute
manière, ce mysticisme social n'a pas ce que nous appelons un
appui rationnel. C'est vraiment une sorte d'impulsion, dont il
est interdit de rechercher la raison.
Telle est la première attitude anti-intellectualiste que ce
système impose à la religion. Il en est une autre. Les faits
groupés et indépendants les uns des autres sont en connexion
avec une société déterminée, dont ils expriment les nécessités
temporelles ; ils n'ont en eux-mêmes aucune valeur intellec-
tuelle durable. La raison seule exprime le permanent et le
^ble ; dès lors que nous l'abandonnons, nous tombons dans
le relatif. Le biologiste faisait la pensée fonction du cerveau
et la rendait relative et dépendante de son organisation et de
ses dimensions. Le sociologue fait des représentations et des
institutions sociales quelque chose de dépendant d'un état
social donné et par conséquent accepte qu'elles varient avec cet
état social. Or cela est particulièrement grave, car il ne s'agit
pas de faits puérils ou de coutumes de peu d'importance ; il ne
?'agit rien moins que de la religion et de la morale, qui se
136 A. BROS
rrclaiiicnt de l'absolu, s'imposent comme catégoriques et
n'existent vraiment que si elles sont tenues pour telles. Ce rela-
tivisme foncier détruit l'objet même de la science sociale, bien
plus que l'explication jisycliologique nu idéologique dont se
détlait avec tant de soin Durkheim.
Le sociologue, il est vrai, s'efforce d'échapper à cette diffi-
culté. Ce sont des phénomènes psychiques d'un genre nouveau,
pense-t-il ; ils expriment l'état même de la société. « Mais
la société est quelque chose de naturel et les représentations
qui l'expriment expiiment la nature ». « Le règne social est
un règne naturel, qui ne diffère des autres que par sa com-
plexité plus grande ». Ils expriment donc des relations fon-
damentales qui existent entre les choses et vue de ce biais, on
peut comi rendre comment <( chaque religion peut avoir sa
vérité intrinsèque ».
Mais le mot vérité ici ne doit point prêter à confusion. Si
la religion et la morale résultent comme des effets naturels
et nécessaires des représentations de la vie collective, elles en
dépendent avec une rigoureuse nécessité ; ces dernières sont
les causes naturelles qui les produisent. Les religions ne sont
pas vraies jjour autant, car il n'est point sûr ni prouvé qu'elles
représentent exactement la nature des choses permanente et
duiTible. M. P.vRODi le remarque justement. Dans le premier
cas. on explique la production des rites ; ceux-ci sont néces-
saires : rien de plus ; ils ne sont pas vrais pour cela. L'effet
n'est pas nécessairement, n'est pas du tout l'expression ou la
représentation fidèle de sa cause (p. 153).
Il en résulte que la morale ne s'impose pas à nous avec un
caractère d'ol)ligation rationnelle. On lui doit obéissance, j'tarce
qu'elle est la règle et qu'il faut obéir à la règle, parce qu'elle
est le produit d'influences collectives. Mais qui justifiera aux
yeux (h- notre ronscience, dont tout relève, que cela est juste.
Et d'ailleurs ces conditions sociales qui ont créé la loi morale
se ir.oilifient peut-être au moment où nous l'observons... Elle
n'est plus dès Iru^s obligatoire pour nous...
En religion, même relativisme destructeur. On ramène les
dieux au totem primitif et à la notion de sacré qui en est le
tond et on voudrait ne pas ébranler la foi du. croyant qui
s'adresse à l'absolu divin et l'invoque, en ramenant le Dieu
METHODE DE LÉGOLE SOCIOLOCHQUE 137
auquel il croit à une expression de la vie du clan primitif.
Ni la morale ni la religion (ni la pensée humaine), qui
dominent IhoiDme isolé et contraignent ses égoïsmes indivi-
duels, n"auront de valeur véritable pour nous, si notre raison
n'en justifie le fondement, llomment pourrions-nous leur
donner notre adhésion et notre respect, tout en sachant qu'elles
n'ont aucune vraie valeur en soi. Pour les sociologues « la
découverte d'une illusion ne la détruit pas ». C'est que pour
eux les idées n'ont pas d'importance ; la vérité intelligible cède
le pas à l'instinct social et à ses forces de contrainte. Cette
défiance propre de la raison, ce relativisme introduit en morale
et en religion, font de ces dogmatistes à prétentions rationa-
listes et la'icistes des manières de pragmatistes sociaux. Le
premier postulat, le premier vice du système est la défiance
à l'égard de la raison.
2°. Au fond, les sociologistes sont dupes d'une faussr concep-
tiof} de la science sociale. Frappés de la rigueur des sciences
physiques, ils veulent introduire la même méthode dans l'ex-
plication des faits sociaux.
a. Cette tendance avouée se manifeste d'abord dans les
procédés de la méthode expérimentale appliqués sans discerne-
ment aux sciences sociales. Ce sont les différents moments
des méthodes physico-chimiques pour déterminer la cause
cherchée qui sont marqués par Fauconnet et Mauss dans l'ar-
ticle Sociologie dont j'ai parlé plus haut. Cette assimilation leur
fait parler d'observation, de définition, d'hypothèse, de systé-
matisation des faits, de recherches causales, tout comme s'il
s'agissait d'un phénomène d'ordre physique. Et sans doute les
procédés de l'esprit, quel que soit l'objet qu'il étudie, sont
uniformes et, dans l'analyse et la synthèse, la similitude de ses
démarches pour connaître apparaît nettement. Encore est-il
que l'orientation erronée dans les procédés de détail peut ame-
ner à des erreurs de fond.
b. De même la conception de la cause sociale et sa recherche
dans le fait social sont empruntées à la conception positiviste
des sciences {tliysiques. Pour le positiviste comme aussi pour
le phénoméniste qui nie toute substance, une seule succession
constante, une interdépendance, telle est la causalité. Expli-
quer un fait du point de vue de la cause efficiente, c'est au
138 A. BROS
fond le placer dans un système d'interdépendance de faits.
Les causes finales, les intelligibles sont naturellement écartés ;
il ne reste que des liens de successions nécessaires. N'est-ce
pas là exactement la prétention du sociologiste ? Sortir du fait
sociologique, entrer dans un autre domaine, c'est au fond pour
lui réintégrer le flnalisme et la substance.
c. Assimilation encore des siciences sociologiques aux scien-
ces positives que cette recherche des faits sociaux susceptibles
d'être constatés du dehors. Durkheim en vient à croire que le
reste n'est plus que vaines apparences ; le côté vivant, intel-
ligible, réel au fond du phénomène social se trouve ainsi pai'
lui écarté de la sociologie.
d. Ai-je besoin d'ajouter qu'une telle manière de traiter
scientifiquement les faits sociaux leur donne une apparence de
certitude dont ils ne sont point capables. Il faut, dans le
domaine social, faire place aux grandes initiatives, à la si)on-
tanéité des individus, qui parfois modifient les représentations
et les institutions d'une époque ou du moins les marquent
d'une forte empreinte personnelle. Cette spontanéité, la liberté
individuelle qui en est le fondement et le signe, sont exorcisées,
comme le miracle, de cette science nouvelle. Pas de place pour
Dieu, pour les mutations soudaines, i)nur les grands hommes
dans un tel système scientifique. Cette science sociale mutile le
donné social. Elle s'est gardée de le réduire, comme les positi-
vistes, à de simples phénomènes biologiques ; mais en lui
appliquant la méthode rigoureuse des sciences expérimentales
physico-chimiques, elle s'est précipitée dans une erreur ana-
logue et non moins redoutable dans ses conséquences.
r. Au reste, une grande hypothèse, l'hypothèse évolution-
niste qui, elle, exerce surtout son influence sur les sciences
biologiques, a également fortement imprégné de ses tendances
réformatrices les théories de Durkheim.
Pour expliquer un fait, c'est avant tout à ce qu'il appelle
le fait rudivientaire qu'il a recours. Dans les divers types so-
ciaux, il établit une classification et la norme de cette classi-
fication est d'aller du simple au composé, comme s'il s'agissait
de données de chimie. Trouver le fait social simple dans lequel
on verra surgir les causes à l'état natif, puis en suivre les
complications diverses jusqu'en nos sociétés contemporaines,
telle est la démarche des sociologistes.
MÉTHODE DE L'ÉCOLE SOCIOLOGIQUE ' 139
C'est pour être fidèle à cette méthode qu'ils se sont attachés
à l'étude du totémisme, comme au fait élémentaire dans lequel
on" retrouve la religion à l'état natif et par lequel on peut plus
aisément l'expliquer dans ses données plus complexes. Sans
doute, on se défend de construire un évolutionnisme progressif
et unilinéaire dans Tordre du temps ; on se contente d'établir
cette évolution dans l'ordre logique. Mais cette distinction est
trompeuse : le premier dans l'ordre logique — étant donné
qu'aucune histoire ne vient ni confirmer ni écarter cette affir-
mation — est facilement conçu comme le premier dans l'ordre
temporel. Et de fait, c'est bien l'origine réelle, scientifique des
divers faits sociologiques, que l'on prétend tr<tuver dans ces
faits prétendus simples ou élémentaires.
f. Enfin, dernière conséquence de cette confusion du phy-
sique et du spirituel, les ohligations morales que Von vent
expliquer et même appuyer sont abolies. C'est le caractère des
lois physiques de nous apparaître comme des nécessités de
fait que nous constatons, mais qui n'obligent pas notre
conscience morale. Les faits sociaux et les lois qui les régis-
sent, s'ils ne sont qu'une donnée scientifique, n'intéresspnt pas
nos consciences. Le conformisme social est une loi ; nous pou-
vons nous y prêter ; nous ne nous y sentons pas obligés en
conscience, à moins de nous en être formé une justification
intelligible. Toutes les affirmations morales et religieuses ne
sont pour nous vraiment impératives, que quand elles ne sont
plus une simple nécessité légale, mais qu'elles représentent
à nos yeux des valeurs intelligibles. En voulant réduire à un
simple conformisme social la notion d'ordre essentiel de la vie
morale, en ramenant à une discipline sociale les plus hautes
réalités de l'ordre intellectuel, social et moral, le devoir, le
droit, la religion, la raison, on en détruit l'essence même. Et
cela démontre une fois de plus que la méthode employée à
cette étude est défectueuse.
Telle est la nature de la méthode utilisée par l'Ecole socio-
logique. Par une curieuse antinomie, ces doctrinaires ratio-
nalistes sont des pragmatistes mystiques inconscients ; ces
sociologues, en réaction violente contre l'assimilation des faits
sociaux aux faits biologiques, appliquent aux données de leur
science la méthode des sciences biologiques. Ces tenants de
140 ■ A. BROS
Tordre, de la stahilité, des inipt-i-atifs ralionnel.s, moraux e!
collectifs en font évaporer la valeur et robligation. On ne
saurait évidemment être plus malheureux. Concluons : la mé-
thode des sciences suciales doit tenir conijite de son ohj<;t : les
laits sociaux sont des faits humains ; il faut les traiter comme
tels et ajipliquer Fesprit humain tout entier avec ses procédés
iiabituels de leeherche, à l'étude de l'homme vivant en société.
[7^] Les affîrmations de l'Ecole sociologique
sur la Religion,
par M. le Chanoine Bros
iLes alïirmations de l'Ecole sociologique sont nombreuses.
Elle prétend apporter un système d'explication générale de la
vie humaine, l'cndre compte de toutes ses valeui'S. intellec-
tuelles, religieusi^s, morales, métaphysiques, expliquer tous les
transcendentaux ; c'est là une vaste entrepi-ise. Nous pour-
rions entrer dans le détail de chacune de ces aftirmations. mais
cela nous entraînerait loin. Dans une S^-mainp consacrée à l'His-
toire des Religions, nous nous occuperons plus ])articulière-
inent de cette dernière et de ce qui s'y rattache directement.
Nous examinerons donc les conclusions auxquelles paivient
cette école, en ce qui concei-ne la religion.
1. EXPOSÉ. LA, RELIGION d'aPRÈS DURKHEIM.
La place faite à la l'eligion par l'Ecole sociologique est de
premier plan. « P^lle apparaît comme la forme capitale de la
vie socialo, don' toutes les autres ne sont que des dérivations
tardives ». Elle exprime l'essence même de la société et de
Ihumanité. Les Economistes étaient préoccupés d'une toute
autre ccinception de la société, quand ils voyaient dans les
valeurs, la richesse, l'essentiel du social. Pour Durkheum. la
société est d'origine essentiellement religieuse. Il importe donc
de se bien rendre compte de ce qu'est la religion.
Tout d'abord, il faut, pense-t-il, écarter de la définition d'une
religion la notion du surnaturel. La définition de Max Mueller
LA RELIGION DAPRÈS LÉCOLli SOCIOI OOIQIE 141
— « la religion est un effort pour concevoir l'inconcevable,
pour exjirimer rinexi)riniable, une aspiration vers l'infini » —
lui paraît devoir être rejetée, soit parce qu'elle ne serait pas
originelle, soit parce qu'elle est donnée en fonction du mystère,
qui « ne tient qu'une petite place dans un petit nombre de
religions avancées ».
Il faut écarter aussi de la définition de la religion la notion
de divinité. Il y aurait, d'après Durkheim, des religions qui
n'honoreraient aucun dieu ; au reste, toute une partie de la
religion — les interdits et les rites — seraient conçus en
dehors de toute idée d'une personnalité religieuse. Aussi re-
jette-t-il, comme de fausses interprétations de la religion,
les systèmes animistes et naturistes, qui se sont disputé les
théoriciens de l'ethnographie.
« Les phénomènes religieux, pense Dl'rkheim, se rangent
naturellement en deux catégories fondamentales : les croyan-
ces et les rites. Les premières sont des états de l'opinion :
elles consistent en représentations ; les secondes sont des
modes d'action déterminés. Entre ces deux classes de faits il y
a toute la différence qui sépare la pensée du mouvement »
(p. 50).
« Toutes les croyances religieuses... présentent, dit-il, un
même caractère commun : elles supposent une classification
des choses réelles ou idéales que se représentent les hommes
en deux classes, en deux genres opposés, désignés générale-
ment par deux termes distincts, que traduisent assez bien les
mots : profane, sacré >> {ibid.) Les interdits et les rites protè-
gent et isolent les choses sacrées ou leur sont ordonnés. Les
croyances sont toujours communes à une collectivité déter-
minée, qui fait profession d'y adhérer et de pratiquer les rites
qui en sont solidaires. Il en résulte que l'on peut donner cette
définition de la religion : « Un système solidaire de croyances
et de pratiques relatives à des choses sacrées, c'est-à-dire sépa-
rées, interdites, croyances et pratiques qui unissent en une
même communauté morale appelée Eglise tous ceux qui y
adhèrent » (p. 65) .
Or, pour bien comprendre la religion, il ne faut pas la consi-
dérer dans cet aspect complexe qu'elle revèl dans les grandes
systématisations religieuses, mais remonter aux formes élé-
142 A. BR08
mentaires de la vie religieuse où nous la trouvons à l'état pur.
Et justement Durkheim pense avoir trouvé la religion tout à
fait primitive dans le totémisme australien. Le totémisme est
un système de coutumes, de pratiques et de croyances liées
intimement au totem. Le totem pour le croyant australien
(d'après le sociologiste) est un nom collectif, un symbole du
groupe ou de la tribu, et enfin le blason même de ce groupe
et de cette tribu. « Le blason est l'occasion d'un certain nombre
de cérémonies ; tout ce qui exprime sous une forme ou sous
une autre lïdée de la tribu est l'objet de la pensée et surtout
du sentiment religieux de cette tribu » (Bélot, ibid., p. 117).
L'objet de la pensée religieuse totémiste, c'est ici la tribu
même : la religion est donc le sentiment de la communauté,
de l'unité de la vie collective. Pour Durkheim en effet tout se
rapporte dans la tribu au totémisme.
Généralisant cette explication religieuse, Durkheim affirme,
non seulement que la religion est sociale — nous n'en doutons
pas — mais que la société est le sujet de la pensée religieuse
ou plutôt de la fon(;tion religieuse. « Elle est comme l'instinct
vital du groupe social... elle n'est pas en nous par nous ; elle
est en nous par la collectivité » (Bélot, p. 119). La religion
est également l'objet de la société. Ce que le fidèle vénère et
redoute dans ses dieux, c'est la société énoncée, formulée, sym-
bolisée. Ces objets, qu'ils soient réels ou imaginaires, ne sont
jamais que la manière de transporter à l'extérieur, de rendre
en quelque sorte visible ou pensable la société. Evidemment,
nous sommes près de la théorie d'A. Comte sur la religion de
l'Humanité.
Telle est l'idée que l'école sociologique se fait de la reli-
gion. Durkheim n'hésite pas à rentrer dans le détail de la
phénoménologie religieuse et à en expliquer les divers organes
ou les diverses forces d'après cette conception sociologique.
L'âme, d'une manière générale, n'est pas autre chose que
le principe totém.ique incarné dans chaque individu. C'est une
appropriation individuelle du mana, du sacré, de la force toté-
mique. Le principe, d'abord immanent dans chacun des mem-
bres du clan, se différencie en pénétrant dans les consciences
individuelles, tout en conservant son caractère transcendant.
L'âme humaine, c'est une parcelle de la divinité totémique.
LA RELIGION D'APRÈS L'ÉCOLE SOCIOLOGIQUE 143
Les dieux sont des esprits aneestraux, des entités forgées à
l'image des âmes individuelles, de la genèse desquelles ils sont
destinés à rendre compte. L'idée d'âme joue dans leur création
un rôle important. C'est par elle que Tidée de personnalité a
été introduite dans le domaine religieux ; mais elle n'est elle-
même qu'un mode du mana, du principe totémique. La création
des personnalités mythiques n'est qu'une autre façon de penser
les forces sociales essentielles. Et le grand Dieu, le Dieu
suprême, c'est le sentiment tribal.
Si des représentations religieuses nous passons au domaine
des rites et du culte, nous nous trouvons faire les mêmes cons-
tatations. Dans toutes les religions, on retrouve le système
des interdits ; certains actes, certains objets sont tenus pour
prohibés. Il est des jours fastes et néfastes, des tabous qui
concernent certains objets. D'après Durkheim, il ne faut pas
ramener ces pratiques à une association d'idées, à une erreur
de causalité, au sophisme post hoc, crgo propter hoc, comme le
pensent bien des ethnographes. L^s choses, les objets pren-
nent une valeur religieuse, qui ne leur est pas inhérente, mais
leur est conférée du dehors. Ce qui constitue le caractère sacré
de l'objet, « ce sont les impressions de réconfort et de dépen-
dance que l'action de la société provoque dans les conscien-
ces » (p. 462), à l'occasion de leur perception.
A côté des interdits, une religion comporte un culte positif :
rites mimétiques, rites représentatifs et commémoratifs, rites
piaculaires. Entre tous les rites essentiels, deux semblent plus
significatifs : la prière et le sacrifice.
La prière est éminemment un phénomène social. « Une prière
n'est pas seulement l'effusion d'une âme, le cri d'un sentiment.
C'est le fragment d'une religion. On y entend retentir l'écho
de toute une immense suite de formules ; c'est un morceau
d'une littérature ; c'est le produit de l'effort accumulé des
hommes et des générations » (Mauss, p. 31). Le contenu de la
prière est donc social ; sa forme l'est également. « Elle n'existe
pas en dehors du rituel. Or le rite, quels qu'en soient la forme
et le but, est essentiellement « un acte traditionnel, efficace,
qui porte sur les choses sacrées », c'est-à-dire un ensemble
de procédés pour atteindre le mana. La prière est donc un rite
religieux oral, portant directement sur les choses sacrées, une
144 A. BROS
manière d'atteindre le sacré par la parole. Et voilà justement,
pour en donner une description claire dans un fait élémentaire,
un échantillon du type originel de la prière : les formules de
Vitilichiuma de la vie tribale. La prière chrétienne elleimème,
d'après M. Mauss, s'y devrait ramener.
Le sacrifice est un rite des plus complexes et qui a fait
l'objet d'une étude toute particulière de l'Ecole sociologique
\^Année sociol., 1897-98). Ecartons d'ah(»i'd les explications
habituelles : dons et offrandes faites aux dieux ; celle aussi de
Robertson Smith, qui y voit une alliance par le sang. Selon
l'Ecole sociologique, « le sacrifice est un acte religieux qui,
l^ar la consécration d'une victime, modifie l'état de la personne
morale qui l'accomplit ou de certains objets auxquels elle
s'intéresse » (p. 41). Sous la diversité des rites, un même
mécanisme social se trouve supposé. Le schéma du sacrifice
comporte une « entrée dans le sacrifice », qui a pour but d'in-
troduire dans le sacré, plus ou moins profondément suivant
leur rôle, les divers participants du sacrifice. Le sacrifiant
d'abord, qui se purifie et se prépare religieusement. « Il passe
du monde des hommes dans le monde des dieux ». Le sacrifica-
teur, qui est l'intermédiaire habituel entre la divinité et
l'homme et qui déjà appartient au monde sacré, mais qui ac-
complit encore diverses cérémonies purificatoires, afin de se
préparer à sa fonction. Le lieu, les instruments, sont égale-
ment sanctifiés. La victime enfin est introduite dans le monde
sacré ; on la baigne ; on lui fait diverses libations ; on invoque
les dieux sur elle ; on la place dans une position et une orien-
tation spéciales. Puis vient l'immolation, l'acte essentiel du
sacrifice. <( Par cette destruction de la victime, l'acte essentiel
du sacrifice est accompli. La victime est séparée définitivement
du monde profane ; elle est consacrée, sacrifiée dans le sens
étymologique du mot et les diverses langues appellent sancti-
fication l'acte qui la met dans cet état. Elle change de nature
comme Démophus, comme Achille, comme le fils du roi de
Byblos, quand Dém.éter, Thétis et Isis consument dans le feu
leur humanité... Sa mort était celle du phénix ; elle renaissait
sacrée. Mais le phénomène qui se passait à ce moment avait
une autre face. Si d'une part l'esprit était dégagé, s'il était
passé complètement « derrière le voile », dans le monde des
LA RELIGION D'aPRÈS L'ÉCOLE SOCIÛLOGIQUE 145
dieux, d'un autre côté, le corps de la bête restait visible et
tangible ; et lui aussi, par le fait de la consécration, était
rempli d'une force sacrée, qui Texcluait du monde profane...
Aussi ses restes étaient-ils entourés d"un religieux respect :
on lui rendait des honneurs... Ce qui survivait de Taniinal l'tail
ou attribué tout entier au monde sacré, ou attribué tout entier
au monde profane, ou partagé entre l'un et Tautre » ibid..
p. 71). Au fond, « la victime est l'intermédiaire par lequel le
courant s'établit. Grâce à elle, tous les êtres qui se rencontreni
au sacrifice s'y unissent. Toutes les forces qui y concourent
se confondent » (p. 83). Et en définitive, sous la diversité des
formes qu'il revêt, le sacrifice est toujours constitué d'un
même procédé. « Ce procédé consiste à établir une communi-
cation entre le monde sacré et le monde profane par Tinter-
inédiaire d'une victime, c'est-à-dire d'une chose détruite au
cours de la cérémonie » (p. 33). Or c'est ta une fonction émi-
nemment sociale. « D'une part, ce renoncement personnel des
individus ou des groupes à leurs propriétés alimente les forces
sociales. Non sans doute que la société ait besoin des choses
qui sont la matière du sacrifice ; tout se passe ici dans \o
monde des idées et c'est d'énergies mentales et morales qu'il
est question... D'autre part, les individus trouvent à ce même
acte leur avantage. Ils se confèrent .à eux et aux choses qui
leur tiennent de près la force sociale tout entière. Ils revêtent
d'une autorité sociale leurs vœux, leurs serments, leurs ma-
riages. Ils entourent, comme d'un culte de sainteté qui les
protège, les champs qu'ils ont labourés, les maisons qu'ils ont
construites. En même temps, ils trouvent dans le sacrifice le
moyen de rétablir les équilibres troublés : par l'expiation, ils
se rachètent de la malédiction sociale, conséquence de la faute
et rentrent dans la communauté ; par le prélèvement qu'ils font
sur les choses dont la société a réservé l'usage, ils acquièrent
le droit d'en jouir. La norme sociale est donc maintenue sans
danger pour eux, sans diminution pour le groupe. Ainsi la
fonction sociale du sacrifice est remplie tant pour les individus
que pour la collectivité. Et comme la société est faite non seu-
lement d'hommes, mais de choses et d'événements, on entrevoit
comment le sacrifice peut suivre et reproduire à la fois le
rythme de la vie humaine et celui de la nature ; comment i! a
146 A. BR08
jui devenir périodique à l'image des ])hénomènes naturel?, occa-
sionnel comme le.s ])esoins momentanés des hommes, se j)lier
enfin à mille fonctions » (p. 37).
Telle est la religion jionr l'Ecole sociologique : conception
de forces imaginaires qui aident la société à prendre conscience
d'elle-même, pratiques également sans objet autre (pie la
toniflcation de la vie sociale, tout cela produit i)ar la vie
en collectivité, jiarlicipant à son relativisme intellectuel et
moral. Les forces religieuses ont la réalité des constructions
sociales auxquelles elles sont liées, mais les symb(iles dans
lesquels elles sont j)ensées et les figurations rituelles (prelles
revêtent sont imparfaites et peuvent être vidées de tout objet
autre que le social même, et partant laïcisées. C'est au fond la
légitimation d'une certaine religion séculai-isée et athée...
Voici naître l'explication sociologique des saints. C'est
M. CzARNOw^SKi qui, dans son ouvi'age Le culte des héros el ses
conditions sociales, a tenté cette entreprise. S'attachant à saint
Patrick, il le définit un héros. Qu'est-ce qu'un héros pour
l'Ecole sociologique ? Le héros est l'incarnation d'une valeur,
c'est-à-dire d'espoirs et d'idéaux collectifs... Le héros est un
témoin et un champion de l'ordre d'êtres ou de choses dont il
incarne la valeur par définition. Cette valeur est une valeur
sociale : il est le représentant d'un groupe et d'une chose
sociale. Aussi l'héroïsation et la canonisation sont des actes
publics, analogues à l'institution d'un régime ou à la nomina-
tion d'un magistrat. Le héros incarne un idéal social, liont il
est issu ; généralement ce héros est un homme et n'est déclaré
tel qu'après sa mort par une sorte de divinisation, dont son
corps garde une part. Or les saints sont une catégorie spéciale
de héros, « ce sont des héros dont la notion de sainteté est
subordonnée à un idéal moral et religieux, fixé par la théo-
logie... La notion de sainteté est ainsi propre aux sociétés qui
sont constituées en églises ou en sectes, puisque ce sont les
conditions essentielles dans lesquelles une théologie peut s'éla-
borer » (p. 28) .
Partant de cette définition le sociologue, après avoir inven-
torié les textes, met en rapport la légende de saint Patrick avec
la mythologie irlandaise des fêtes, puis avec les représenta-
tions irlandaises de la mort et des morts. Il en conclut que
LA RELIGION D'APRÈS L'ÉCOLE SOCIOLOGIQUE 147
saint Patrick est un héros du môme type que les héros irlan-
dais. Ce héros et le culte qui l'entoure a été produit par la
constitution sociale de Tlrlande et le christianisme et les
druides ont collaboré à créer sa légende.
Tels sont brièvement marqués les différents essais de l'Ecole
sociologique dans le domaine religieux ; on peut voir qu'elle
pense bien ne laisser aucun des phénoiiiènes religieux sans
Texplication sociologique qu'il comporte. Après avoir résumé
les principales positions de ce système explicatif de nos croyan-
ces, il reste à examiner les preuves par lesquelles il se justifie
et 1^ valeur qu'elles peuvent avoir.
II. CRITIQUE.
En résumant le système qui est l'application de la méthode
que nous avons exposée dans notre première conférence, nous
nous sentions portés à chaque instant à accuser le sophisme
fondamental ou les confusions sur lesquelles il est étayé. Nous
avons préféré en présenter la critique d'ensemble, afin de ne
pas nuire à l'exposé du système.
1°. Les options philosophiques du système. — a. Le positivisme.
— Il semble bien que, par derrière les arguments, il faut voir
d'abord et au fond, chez Durkheim et son Ecole, l'option philo-
sophique primitive déjà signalée. La vie religieuse lui paraît
« avoir pour objet d'élever l'homme au-dessus de lui-même et
de, lui faire vivre une vie supérieure à celle qu'il mènerait, s'il
obéissait uniquement à ses spontanéités individuelles »
(p. 592) ; la morale a un but analogue. Il ne se peut, pense-t-il.
que de tels impératifs proviennent soit de l'expérience soit de la
raison individuelle, puisqu'ils la dépassent ; il reste qu'ils
soient produits par la société. Les jugements de valeur, les
catégories sont donc pour lui a priori d'origine sociale. Il
défend cette position fondamentale, en marquant contre les "
empiristes la distance qui sépare le droit du fait, le nécessaire \
du contingent; les catégories ne "peuvent dériver de l'expé- )
rience ; elles lui sont hétérogènes. Soit ! Mais il ajoute, ce
qui est intéressant : elles ne peuvent dériver de la raison
a priori, car il reste à justifier le primat de la raison sur l'ex- ^
périence. Or, on ne le peut qu'en admettant une sorte de partiel- \
pation mystique de la raison à la Raison divine, ce qui est
148 A. BROS
transposer le problème dans linconnaissahle... Si on admet an
contraire Torigine sociale des catégories, une nouvelle attitude
devient possible, qui permet d'échapper à ces difticultés. La
société s'impose aux individus ; elle leur donne des nécessités
qui sont nécessaires à la vie collective... Et ces nécessités font
partie de la nature. Le règne social est un règne naturel ».
/ Le primat sociologique est atîirmé ici d'abord sans doutt^
îdans Texplication des principes mêmes de la connaissance, qui
/ordonnent les grandes valeurs morales- et religieuses. Mais
surtout on écarte la valeur \le la raison, 1* parce qu'elle paraît
"trop fixe jiour rendre compte du sol m'ouvant des faits^ et
d'autre part, parce que 2°, en imi)liquant Dieu, elle rejet-
terait loin le rationalisme négateur des causes invisibles. Aii
point de départ de cette explication des religions, on trouve
donc la négation de Dieu et de la raison raisonnante. C'est
bien raflîrmation a priori de la doctrine positiviste. Pour étu-
dier la religion, c'est un point de départ qui évidemment man-
(|ue d'impartialité que de lui dénier a priori toute valeur
vraie. Et on ne s'étonnera pas des conclusions qu'apportera
une telle disposition d'esprit. Car sous les formules de bien-
veillance, c'est le doctrinaire anti-religieux qu'il faut savoir
reconnaître. » 11 y a dans la religion quelque chose d'éternel
qui est destiné à survivre h tous les symboles... Un jour viendra
où nos sociétés connaîtront à nouveau des heures d'efferves-
cence créatrice, au cours desquelles de nouveaux idéaux sur-
•
giront, de nouvelles formules se dégageront qui seivironl pen-
dant un temps de guide à l'humanité... Déjà nous avons vu
comment la Révolution institua tout un cycle de fêtes, poip-
tenir dans un état de perpétuelle jeunesse les principes don!
elle s'inspirait. Si l'institution périclita vite, c'est que la foi
révolutionnaire ne dura qu'un temps ; c'est que les déceptions
et le découragement succédèrent rapidement au premier mo-
ment d'enthousiasme. Mais quoique l'œuvre ait avorté, elle
nous permet de nous représenter ce qu'elle aurait ])U êli'c dans
d'autres conditions et tout fait penser qu'elle sera tôt ou tard
reprise. Il n'y a pas d'évangiles qui soient immortels et il n'y a
pas de rason de croire que l'humanité soit désormais incapable
d'en concevoir de nouveaux » (p. 611). — Tel est le positi-
visme relativisfe, destructeur de toute foi stable, religieuse ou
LA RELKilOX D'APRÈS LÉCOLE SOCIOLOGIQUK li',1
moralp, dont s'inspire cet le école aux apparences doclrinaires
et absolues.
b. Le primat sociologiqui\ — A cette négation poHitiviste
«"ajoute le parti pris de ne voir dans la religion que le social.
« De toutes les forces qui environnent Thonime, la force sociale
serait la seule qui l'ait impressionné et qui ait suscité dans /
son esprit des sentiments et des hypothèses diverses. Pourquoi,
dit M. BÉLOT, imaginer que la fonction esthétique, que la fonc-
tion intellectuelle, le besoin de comprendre les choses, que
même les besoins physiques, la nécessité de l'adaptation an
milieu cosmique, que tout cela n'a pas contribué à la forma-
tion des religions ? Je n'en sais pas de raisons » (Le s<'nl. rcl..
p. 121). Pour nous qui savons mieux que Durkhkim et M. Bélot
ce qu'est une religion, nous ne pouvons méconnaître ce qui lui
donne poids, autorité : l'élément intellectuel. Une religion qui
n'est point vraie pour le fidèle a cessé d'être. « Quel est Thomnie
qui continuerait à prier, dans l'hypothèse où il saurait per-
tinemment qu'il ne prie personne et qu'il s'adresse vaguement
à une collectivité qui ne l'éc-oute pas. Quel est l'homme qui
continuerait à communier, s'il croyait (jue la communion est
un simple symbole et qu'il n'y a rien de réel là-dessous ? »
(BÉLOT, ibid.) . On le voit ; la fonction intellectuelle, indivi-
duelle doit être intégrée dans la religion. Elle est essentielle-
ment un organisme de salut et ce salut est pensé, senti, re-
cherché socialement, parce (in'il l'est tout d'abord individuel-
lement.
Ce parti pris de ne voir dans la religion que le social yic/c
au reste toutes les démarches analytiques qui doivent suivre. Gom-
ment est-elle définie cette religion ? Des aperçus d'ensemble
des religions humaines se dégage, d'après Durkheim. une défi-
nition préalable de la religion. Cette définition nous présentp/|
la religion comme reposant sur l'opposition du sacré et (\n ;
profane et l'étude des formes élémentaires de la religion nous ^
révélerait seulement le sens de cette opposition et la véritable
signification du sacré... La notion du sacré est religieuse
certes ; mais en quoi est-elle exclusivement sociale ? en quoi
surtout est-elle dégagée de tout intellectualisme qui la sup-
porte ? La notion du sucré est secondaire pour l'àme reli-
gieuse ; celles ûb vérité, de bien, de justice lui sont, anté-
150 A. BROS
rieures et c'est par elles au fond que le croyant justifie sa foi
et se donne des raisons d'y adhérer. Cette définition positiviste
de la religion vue par Textérieur, par le côté social, écarte
donc fl priori des religions dont on prétend rendre compte les
éléments essentiels qui les soutiennent et dont les croyants se
réclament. Tant il est vrai que, pour comprendre une religion,
rien ne vaut d'y adhérer, d"être un homme religieux. Mais au
fait n'oublions pas que l'Ecole sociologique n'a point pour but
de comprendre seuleinent la religion, mais de lui substituer
un organisme social disciplinaire, qui la vidant de tout contenu
doctrinal sera la forme laïque de la discipline morale et sociale
nécessaire à lère positiviste.
2°. Les notions religieuses n'ont pas une origine sociale. ■ —
a. Cette notion du sacré, fondement de la vie religieuse, com-
ment M. DuRKHEiM en établit-il la vérité et l'origine sociale ?
l Tout d'abord par une affirmation. « D'une manière générale, il
j n'est ijas douteux qu'une société a tout ce qu'il faut pour
] éveiller dans les esprits par la seule action qu'elle exerce sur
1 eux la sensation du divin ; car elle est à ses membres ce qu'un
Vdieu est à ses fidèles » {Formes élém., p. 295). Le Dieu en effet
est supérieur à l'homme et le tient dans sa dépendance. La
société elle aussi entretient en nous la sensation d'une certaine
dépendance. Nous la révérons comme le Dieu, parce qu'elle
est investie d-'une autorité morale ; elle suscite des actes ou
'les inhibe, abstraction faite de toute considération relative aux
effets utiles ou nuisibles des uns ou des autres. Justement
parce qu'ils sont élaborés en commun ces sentiments revêtent
ces caractères particuliers. Mais il y a là une vraie confusion
verbale. La vie collective peut fort bien amplifier, grandir,
élever les sentiments humains ; mais ces sentiments les idéaux
qui les supportent leur préexistent au moins logiquement. Elle
ne se trouve nullement en respect devant un impératif dont
elle ne peut justifier l'origine. C'est une force qui l'écrase ;
elle ne le respecte que quand elle le reconnaît comme une puis-
sance d'ordre moral et quelle voit en lui quelque reflet de la
divinité. L'inconscient social, pour impératif qu'il soit, ne vaut
pas pour nos esprits le dieu qui sauve et commande.
b. Le dieu, ajoute Durkheim, est une autorité ; il est aussi
une force sur laquelle nous nous appuyons. Et cette force est
LA RELIGION D'APRÈS L'eCOLE SOCIOLOGIQUE 151
sociale. « II y a, écrit Durkheim, de ces circdnstances où cette
action réconfortante et vivifiante de la société est particuliè-
rement manifeste. Au sein d'une assemblée qu'échauffe une
passion commune, nous devenons suscejitibles de sentiments
et d'actes dont nous sommes incapables, quand nous sommes
réduits à nos seules forces... L'histoire abonde en exemples
de ce genre. Il suffit de penser à la nuit du 4 août, où une
assemblée fut tout à coup portée à un acte de sacrifice ei
d'abnégation auquel chacun de ses membres se refusait la
veille et dont tous furent surpi'is le lendemain... Voilà ce qui
explique l'attitude si particulière de l'homme qui parle à une
toule, si du moins il est parvenu à entrer en communication
avec elle. Son langage a une sorte de grandiloquence qui serait
ridicule dans les circonstances ordinaires ; ses gestes ont quel-
que chose de dominateur ; sa |)ensée même est impatiente de
mesure et se laisse facilement aller à toute sorte d'outrances.
C'est qu'il sent en lui une pléthore anormale de forces qui le
débordent et qui tendent à se répandre hors de lui ; il a même
parfois l'impression qu'il est dominé par une puissance mo-
rale qui le dépasse et dont il n'est que l'interprète... » (p. 301).
Et au reste, dans la vie commune, tout afflux d'énergie nous
vient du dehors. L'homme qui fait son devoir est en harmonie
morale avec ses contemporains et est soutenu par la sympathie
qui lui donne un tonus moral.
iG'est encore la même confusion entre l'idéal et la société.
Il n'est pas douteux que la collectivité exerce une action pro-
fonde sur les idéaux des hommes : olle les grandit ; elle dé-
cuple nos émotions ; elle leur donne une stabilité et une puis-
sance incomparables ; mais ces idéaux sont d'abord des idées,
des représentations conçues, recherchées, aimées. Les croi-
sades ont été populaires, parce que la foi et les idées chré-
tiennes émouvaient la foule. La Révolution a entraîné les
masses à raison d'un idéal pseudo-évangélique de bonheur so-
cial et de vertu, qui sollicitait les esprits. Il ne faut pas rétré-
cir, en en faisant des liouleversements inconscients et collec-
tifs, ces grands mouvements de peuples inspirés par des idées.
Et qu'est-ce que ce délire en commun a de religieux ? N'est-il
pas plutôt un fait pathologique ?
c. Enfin ilei'uière preuve de l'origine sociale des religions :
152 A. BROS
la société créerait de toutes pièces des choses sacrées, « Qu'elle
vienne à s'éprendre d"un homme, qu'elle croie découvrir en lui
les principales aspirations qui la travaillent, ainsi que les
moyens d'y donner satisfaction et cet homme sera mis hors
pair et comme divinisé ». « Tout aussi bien que des hommes,
la société consacre des choses, notamment des idées. Qu'unf
croyance soit unanimement partagée par un peuple et pour
des raisons que nous avons exposées, il est interdit d'y tou-
cher, c'est-à-dire de la nier, de la contester ». Ici encore nous
ne nions pas le rôle de la société, mais nous n'oublierons pas
de marquer que cette sorte de respect dont elle entoure les
choses et les homnîes vient avant tout de l'idée et que rien ne
le prouve mieux que les essais pour fonder la religion laïque
et la vénération des fondateurs de République, qui n'aboutit à
aucune révérence, parce que l'idée religieuse n'est pas à la
base. Le culte du soldat mort pour la patrie nous émeut reli-
gieusement, parce qu'il participe à des idées de Patrie, de
sacrifice, qui sont en effet religieuses.
Et ici je pense, avec M. Bélot, qu'il y a un véritable abus de
langage. La définition de la religion et du sacré, si elle vient à
englober tant de choses ne me paraît plus convenir à la reli-
gion en tant que telle. La religion du beau, la religion socia-
liste, la religion des droits de l'homme, la religion de la Révo-
lution et jusqu'à la religion de l'honnête homme qui n'en pro-
fesse aucune, n'est-ce pas là pur verbiage et vaine rhétorique ?
Ou bien ne prétend-on pas nous duper et faire évanouir le
concept spécifique de la religion pour le fondre dans le social,
après quoi on prouvera facilement qu'il en dérive. Toutes ces
expériences de la création de forces religieuses contemporaines
ou historiques sont donc douteuses et arbitraires ; il faut nous
réfugier dans une autre preuve : c'est celle de la religion
élémentaire.
3°. L argument de la religion élémentaire. — Le vrai argument
en forme de l'origine sociologique de la religion est un argu-
ment de fait. Or les' faits contemporains, nous l'avons prouvé,
sont contestables. Durkheim a recours à un fait qui lui paraît
probant entre tous. La religion élémentaire est sociologique.
On sait qu'il entend par religion élémentaire la forme primitive
de la religion, celle qui est la plus simple, la plus rudimentaire
LA RELIGION D'APRÈS L'BCOLE SOCIOLOGIQUE l'53
et dont toutes les autres sont des amplifications. Or quelle est
cette religion élémentaire ? C'est le totémisme et Durkheim dp
décrire la religion totémiste telle que nous l'avons indiquée
plus haut, religion du sacré, mais dans laquelle on ne trouve
ni idée de Dieu, ni idée d"àme, originairement du moins. Et
afin de montrer comment le totem est créé par le clan, il peint
les milieux sociaux efTervesçents de l'Australie, tels que Spen-
cer, GiLLEN, Strehlow les ont mentionnés, à l'époque des as-
semblées. Alors les forces du clan sont pensées sous forme de
totem, qui sert d'emblème et de drapeau, qui est le corps visible
du clan. Alors les hommes se sentent transposés dans un monde
spécial, sacré et les objets animaux ou végétaux auxquels ils
se trouvent mêlés sont imprégnés du mana qui les anime.
On ne saurait dissimuler les nombreux postulats d'un tel
argument, postulat d'abord de l'évolutionnisme, qui fait sortir
du rudiment, par seule voie de différenciation, tout le complexe
des sociétés civilisées. Il n'y a pas de différence de nature mais
de degré entre les religions, et toutes les religions, y compris
celle de Jésus-Christ, sont ramenées au mystère des churingas
observés chez les Aruntas et les Kamilaroi ; le sacrifice et la
prière — celle du Pater sans doute — est fonction des for-
mules de Vintichiuma ; l'obscure conscience morale prélogique,
dirait M. Léwy-Bruhl, des sauvages totémisants est la mesure
et l'explication de la morale et de la Religion de Jésus-Chrisl.
Cette manière de concevoir le développement religieux sous
forme de biologie évolutionniste, en partant d'une cellule pri-
mitive, est d'une simplicité déconcertante ; elle transforme le
réel observé. De fait, pour opérer cette réduction, Durkheim
nous apporte des raisonnements sur un petit nombre de faits ;
ils sont « un effort énergique et persévérant pour encadrer les
faits dans la série des notions qui sont tirées du postulat ini-
tial » (LoiSY, Rev. cVhist. et de littér. relig.. 1913, p. 85).
Mais c'est en, vain. D'abord qui pourrait dans la cellule pri-
mitive d'un être vivant percevoir les virtualités qui! contient ?
C'est la vie seule qui les révèle. Ce n'est qu'a posteriori qu'on
les peut découvrir. Dans les sciences sociales, c'est bien plus
compliqué encore. Un fait social n'est pas un organisme sim^
pie, qui se développe spontanément ; c'est chose fort complexe,
sur quoi diverses influences s'exercent, dont il est difficile de
154 A. BROS
déterminer l'essence et les virtualités. On ne peut dire en pré-
sence dune religion donnée qu'elle a la même oi-igine qu'une
autre et que dans une religion élémentaire on voit en simple
ce qui se trouve dans toutes les religions même les plus éle-
vées. Il est seulement possible de remarquer la similitude des
divers organes religieux, parce qu'ils satisfont à des besoins
semblables.
Le totémisme, religion élémentaire, ne peut donc nous pa-
- raître contenir virtuellement les religions actuellement exis-
1 tantes qu'autant qu'on nous aura prouvé 1°) que historique-
^ ment elles en dérivent, 2°) qu'aucune influence étrangère n'es!
venue modifier le développement spontané du germe primitif.
( Or cette démonstration est une fâche manifestement au-dessus
des forces humaines.
4°. Les arguments ethnographiques de l'Ecole sociologique. —
DuRKHEiM a pensé étayer son système sur des faits observés
en Australie. Mais ici nous lui ferons bien des critiques, au
nom de l'ethnographie. Tout d'abord, est-ce bien la religion
élémentaire, la première forme de civilisation que nous décrit
E. DuRKHEiM sous la désignation de totémisme. La religion des
Australiens lui paraît dépasser en simplicité toutes celles qu'il
connaît et lui paraît pouvoir s'expliquer sans qu'il soit néces-
saire de se référer à une religion antécédente. La primitivité
ainsi conçue n'est-elle pas purement conceptuelle ? Il ne s'agit
pas de la primitivité positive et historique, mais de l'élément
logique qui lui paraît inclure dans sa définition l'essence même
des institutions 'à venir.
Une telle façon de concevoir le développement de l'humanité
ressemble un peu è un système philosophique bien construit et
groupé sous un fait ou une hypothèse dont la vérification n'a
point été faite, mais est supposée et admise a priori.
Le mot élémentaire (essentiel), lorsqu'il s'agit de religion,
se ramène en effet pour E. Durkheim à ce qu'il conçoit lui-
même comme essentiel dans une religion. Or il en exclut les
dieux, y intègre la magie, la conception du sacré et l'impératif
social. Le totémisme, sans idée d'âme ni de Dieu, lui paraît
ainsi assez bien convenir à des choses sacrées. « Mais si, par
exemple, on y introduisait les dieux — ce qui paraît essentiel
à tout ethnographe — le totémisme du même coup ne serait
plus pour Durkheim la religion élémentaire.
LA RELIGION D'APRÈS l'ÉCOLE SOCIOLOGIQUE 155
Or il arrive que le totémi^ine étudié par les divers ethnogra- }
phes n'apparaît nullement comme une des premières formes
de religion ni de société. Il n'est primitif ni logiquement, ni
de fait. Frazer, van Gennep sont d'accord au fond sur ce point
avec le P. Schmidt. « Le totémisme n'est pas lié par ses en-
trailles à la Religion, a écrit le si regretté P. Bouvier. Il peut
se passer de la Religion et la Religion de son côté peut se
passer de lui. Elle a plutôt à souffrir de son contact. Le toté-
misme est avant tout une forme spécifiée d'organisation so-
ciale, où la Religion peut se développer bien qu'avec beaucoup
plus de peine qu'en d'autres types de société, où la magie au
contraire semble beaucoup plus à l'aise » {Semaine d'ethnol..
1913). Enfin le totémisme n'est pas universel. Les investiga-
tions ethnographiques de Durkheim se sont bornées à l'Aus-
tralie, qui est le terrain de prédilection de cette institution. On
a trouvé des traces de totémisme dans les deux Amériques, en
Afrique, chez les Fangs, en Polynésie. C'est une forme sociale
répandue ; mais beaucoup de non-civilisés n'en conservent au-
cune survivance ; il est donc vain de vouloir en faire dériver
toute forme religieuse, puisque ces formes religieuses exis-
tent sans cet appui. On le voit : le fait élémentaire est mal
choisi ou plutôt il a été choisi tout exprès pour se passer des
esprits et des dieux et de toute métaphysique religieuse.
Nous n'avons pas le temps de suivre une à une les diverses
institutions morales et religieuses dont l'Ecole sociologique
entreprend l'explication et dp montrer par le détail le carac-
tère artificiel de sa construction. L'âme, ni les dieux, la mo-
rale, ni la responsabilité, le sacrifice, ni la prière, les saints
enfin ne sont pas sortis de pied on cap de la société en tant
que telle ; leur origine est plus simple et une étude objective
la révèle aisément. Sur l'origine de ces grandes notions reli-
gieuses et des impératifs moraux la solution catholique si
simple, si conforme aux données du réel s'impose à nous. La
raison humaine et la foi révélée concourent avec les besoins
de la nature humaine et de la vie sociale à les établir. L'indi-
vidu préexiste à la société qu'il constitue. En dehors de l'étude
directe des consciences, on ne peut attendre en matière sociale
d'explication véritable.
Concluons. Le sociologisme moral n'a pas un fondement plus
156 J. M. DE BARANDIARAN
solide que le sociologisme religieux. Et si l'on compte, poui'
donner là l'Etat futur une autorite morale et religieuse, tout
en la laïcisant, sur cette sorte d'impératifs collectifs, qui ne
voit que, sous prétexte de nous libérer de ce qu'ils appellent
nos vieux préjugés religieux, les doctrinaires laïcs vont nous
faire les esclaves d'un étatisme non justifié ni justifiable et
dont les arrêts seront infaillibles a priori ?
Le croyant accepte dogme et autorité religieuse et Se soumet
à l'un et à l'autre par raison et par foi religieuse ; l'adepte de
la méthode sociologique, tout en pensant que les concepts et
les doctrines qu'il professe sont transitoires et sans valeur
intellectuelle, devra les aimer et les servir aveuglément. Ce sera
vraiment le credo quia ahsiirdum.
BIBLi. — 1. — Exyosé du système. — E. Durkheim, Les règles de la
méthode sociologique, in-18", Paris, Alcan, 1895 (5« édit. 1910) ; Les formes
élémentaires de la vie religieuse, in-S", iMd.j 1912 — M. Mauss et P. Fau-
CONNET, art. Sociologie, dans la Grande Encyclopédie de Berthelot, t. XXX,
p. 165-176 — LÉvy-Bruhl, La morale et la science des mœurs, Paris, Alcan,
1903 ; Les fonctions inentales dans les sociétés inférieures, in-8", ibid., 1910 :
La mentalité ijrimitive, in-8°, ibid.j 1922 — P. F'auconnet, La resi)misabi-
lité, Paris, 1920 — M. Mauss, La prière (cours non publié) — S. Czarnowski,
Le culte des héros et ses conditions sociales. Saint Patrick, Paris, 1919.
II. — Critique du système. — Mgr. Deploige, Les conflits de la morale et
de la sociologie i^in-S", Paris, Alcan, 1912 — G. Michelet, Diett et l'agnos-
tici-stne contemporain, in-8°, Paris, Lecoffre, 1912 — D. Parodi, La philoso-
phie contemporaine en France, Paris, 1919 — G. BÉlot, La concrption socialr
de la religion, dans Le sentiment religieux à l'heure actuelle, Paris, 1919 —
D. Parodi, Le problème m.oral et la pensée contemporaine — A. Bros, L'ethno-
logie religieuse, in-S", Paris, Bloud, 1923.
[8] La religion des anciens Basques,
par Don J. M. de Barandiaran
L'origine du peuple basque est tellement entourée de brouil-
lards et l'obscurité, que nous pouvons assurer qu'elle sera en-
core pendant longtemps une constante torture pour les anthro-
pologues et les ethnologues.
On a supposé les Basques apparentés avec les Phéniciens
(Berthelon). Eg^'ptiens. Chaldéens, les Peaux-Rouges (Yoot
et Charencey) , avec divers éléments asiatiques (Prunner.
Bey, Retzius, Charencey), avec les anciens Etrusques (Retzius,
RELIGION DES ANCIENS BASQUES 157
Willimii Bethamj, ou même avec les habitants de l'Atlantide
(Bery de Saint-.Vincent) . Dans les derniers temps a été en
vogue l'opinion de ceux qui soutenaient que les Basques se-
raient de la même origine que les Berbères. Mais aucune de
ces théories n'a apporté de résultats qui puissent dissiper les
obscurités qui entourent ce problème si important.
La même divergencr existe entre les savants, pour déter-
minei' les conditions psychologiques des anciens Basques, leur
organisation sociale etc.
On u"a fait encore que jjeu de recherches sur leur religion,
surtout sur celle des Basques des époques antérieures au
Christianisme ; c'est pour cela qu'on n"a encore que peu de
données et celles-ci douteuses et très restreintes.
Pour ces raisons, on comprendra qu'il y ait eu sur les an-
ciens Basques deux opinions absolument opposées, l'une sou-
tenant l'absence de toute i-royance religieuse chez ce peuple,
Tautre défendant l'existence du monothéisme le plus absolu.
Je ne prétends pas ajouter une nouvelle théorie à celles que
nous avons déjà mentionnées. On peut cependant recueillir el
noter les documents, évidemment très peu nombreux, des écri-
vains grecs et romains et d'auteurs plus récents, qui se sont
occupés des Basques. A ces documents on doit ajouter les
monuments et les inscriptions anciennes. Enfin les données
folkloiiques, soigneusement recueillies et étudiées, nous met-
tront au courant du génie des générations d'autrefois.
'Tous ces moyens jetteront quelque peu de lumière sur les
problèmes se japportant aux anciens Basques, entre autres
sur le problème religieux lui-même.
I. LA PRÉHISTOIRE.
Il n'est guère besoin d'examiner les matériaux que les ré-
cfmtes recherches préhistoriques effectuées dans le pays bas-
que nous ont révélés. Ils nous disent sur leurs croyances à peu
près ce que nous savons sur les autres pays à ce sujet.
L'étude de la préhistoire basque nous révèle un fait remar-
quablp. C'est que le peuple qui, à ces âges, habitait le pays
basque, avait des relations culturelles avec ses voisins, rela-
tions qui ont été continuées dans les temps postérieurs. La
m^mo technique, la même école artistique qui s'est développée
158 J. M. DE BARANDIARAN
au sud-ouest de la France et à Santander (Espagne) taillait les
silex et sculptait les os à Landerbaso (Guipuzcoa), gravait et
peignait les parois des cavernes de Santimamine (Biscaye) et à
Isturiz à l'époque magdalénienne. Voilà pour la période paléo-
lithique.
Pendant la période néolithique et l'âgp du bronze, on remar-
que la même chose. Les monuments appartenant à ces périodes
abondent au pays basque. Moi-même j'ai découvert, dans la
région du versant méridional des Pyrénées occidentales, plus
de quatre-vingts dolmens de la première étape de l'âge des mé-
taux. Dans presque tous ces monuments, la dalle d'entrée oc-
cupe le côté oriental. Cette dalle est, en général, moins haute
que celles qui composent le dolmen ; ce qui fait qu'entre elle
et la pierre de couverture, il y a un trou, qui peut-être corres-
pond aux trous ou orifices de beaucoup de monuments sem-
blables qu'on trouve ailleurs.
La plupart des monuments préhistoriques étudiés au pays
basque sont des sépultures à inhumation ; mais il y en a d'au-
tres où Ton trouve des traces de crémation complète des cada-
vres (par exemple, la nécropole néolithique de Salbatierrabide,
à Vitoria) et de crémation incomplète, comme cela arrive à
Okina et Aiies (Alaba) .
Dans les deux cas, on déposait, à côté des restes humains,
des armes et amulettes ; on leur offrait des comestibles et on
allumait du feu devant les sépultures. Il est à remarquer que
beaucoup de ces amulettes trouvées dans les dolmens sont en-
core aujourd'hui en usage, tels que le Zmginarri (verre ou
pierre de forme polyédrique), dents d'animaux, jais, aizkora
(hache) etc..
Il semble que certains ermitages chrétiens ont quelques
rapports avec ces monuments. En effet, très souvent on les
trouve dans les environs des stations préhistoriques ; quelque-
lois même, ils sont construits sur un dolmen ou tumulus du
premier âge des métaux. Il est donc probable que par ces cons-
tructions dans de tels endroits on a voulu effacer les traces
d'anciens cultes païens.
Il y a d'autres vestiges qui, d'après beaucoup d'archéolo-
gues, se rapportent au culte des morts et des fontaines ; ce
sont les pierres qui portent des signes hémisphériques. On en
RELIGION DES ANCIENS BASQUES 159
trouve plusieurs dans le pays basque ; telles sont celles de
Jentilarri, à Aralar, celle de Terrano (Navarre), celle d'Elosua,
celle de la fontaine de la Vierge, à ^izkorri. Ces pierres res-
semblent à d'autres qui cimservent certaines traces faites,
d'après ce qu'on dit, par le passage des saints et des person-
nages légendaires. C'est ainsi qu'on montre, à côté du sanc-
tuaire de St. Antoine (Ermua, près de Llodio). une pierre qui
porte une trace attribuée au pied de ce saint. Il en est de même
du rocher qui se trouve à côté de la chapelle de St. Victor, à
Gauna (Alaba), ayant la marque du fer du cheval de ce saint,
et celui de St. Roman de Kanpezo, où l'on voit des vestiges
attribués à St. Jacques et à son chien. On ajoute que la pluie
qui tombe sur ces dernières inarques ne sèche pas pendant
toute l'année suivante.
Ces vestiges sont généralement l'objet de pratiques supersti-
tieuses. C'est ce qui arrive à ceux de St. Michel à Erenusarre
(Biscaye), de St. Pierre à Ibarrangelua, de la Vierge à Lekei-
tio. à Oyardo, Plazentzia, Irâtza (Aralar), de St. Jean à Bermeo.
de St. Formerio, près de Arminon (Alaba), de St. Fauste, à
Bujanda, d'un jcntil (sorte d'homme légendaire) à Urdiain
et Motriko, de Roland, à Aralar et Leiza etc..
Une étude même sommaire de ces légendes et des monu-
ments mentionnés ci-dessus nous montrerait ce que nous
avons déjà noté, c'est-à-dire que le Basque a eu constamment
des relations culturelles avec les peuples voisins, sans pour
cela perdre sa personnalité. Par conséquent, il serait vain de
prétendre trouver chez les anciens Basques une religion com-
plètement différente de celles des autres peuples. Il doit y avoir
nécessairement une grande communauté de croyances avec
celles de ses voisins.
II. PROTOHISTOIRE.
On croit que Strabon fait allusion aux Basques, quand il
écrit : « Celtiberos aiitem et qui ad Scptemtrionen sunt eorum
vicinos, innominatum qvemdam Deum, noctu i7i plenilunio ante
portas cum totis familiis choreas ducendo, totamque noctem festani
agcndo, venerari » ; (Lib. III, c. IV. 26 .
iSur ce texte se fondèrent peut-être les partisans du mono-
théisme des Basques, opinion qu'ils essayèrent de corroborer
160 J. M. DE BARANDIARAN
par des divagations linguistiques sur le mot Jaungoiko, dont
les érudits basques (moins souvent le peuple) se servent pour
nommei' Dieu. Comme si cleus anonymus ou innominahis signi-
fiait de^is uiiicus !
Cependant, il me semble que, dans le texte de Strabon, on
entrevoit le culte de la lune qui, de même que le culte du soleil,
dut être très répandu dans l'antiquité.
En nous restreignant au pays basque et à ses voisins, de
nombreux monuments ornés de figures de la lune et du soleil
nous imposent la même conclusion. Ces monuments sont des
autels et des plaques lapidaires, tels que ceux de Carcastillo,
Vlaranon, Pampelune et autres. Ils appartiennent à l'époque de
l'Empire romain, dont la culture se fit sentir sur les deux ver-
sants des Pyrénées occidentales.
'Les symboles astronomiques ont continué, même à l'époque
chrétienne, à être représentés sur les monuments les plus di-
vers. C'est ainsi qu'en parlant des vieilles tombes disco'idales
basques, M. L. Colas a dit, dans la revue Gure Herria (mars
1922), que sur beaucoup d'entre elles se rencontrent des sym-
boles astraux : soleils, lunes entières ou en quartier, étoiles,
planètes. « Je crois même, ajoute-t-il, avoir trouvé une re-
j)résentation de l'arc-en-ciel ».
D'autres documents mentionnent aussi l'ancien polythéisme
des Basques.
Le poète calagurritain Prudence, auteur du IV siècle, parle
dans son hymne des SS. Emeterio et Celedonio, des sacrifices
humains que les Basques offraient aux fausses divinités.
D'après une lettre de lévêque de Saragosse, Tajon, à celui
de Barcelone, Quirice, les Basiques qui suivirent Froya dans
sa révolte contre Recesvinte montrèrent une haine féroce pour
les chrétiens, particulièrement pour les ecclésiastiques, les
temples et les objets sacrés.
Dans la Basconie du versant septentrional des Pyrénées, on
pratiquait la sorcellerie et on adorait les idoles, au VIP siècle,
d'après ce que dit Baudemunde, biographe de St. Amand {Espana
Sagr., t. XXXIII, p. 418 ; La Vascoiiia, par le P. Risco, App.).
Selon HucBALDE, presque tous les compatriotes de la sainte
basque Rictrudis étaient vautrés dans l'adoration du démon
[Espana Sagr., t. XXXII, p. 279). Il est clair qu'avant cette
RELIGION 1)I':S ANCIENS BASQUES 161
époque le Christianisme avait été introduit dans le pays bas-
que, car déjà au commencement du IV' siècle, à Pampelune et
à Galahorra, villes basques, les églises étaient constituées, et
déjà vers la moitié du IIP siècle, l'Evangile était prêché dans
la région des anciens TarbcUi d'Aquitaine. Mais la conversion
complète fut l'œuvre des temps postérieurs. C'est pour cela
que nous voyons les anciens cultes subsister en quelques en-
droits jusque bien avant dans le moyen âge.
Ces documents nous apportent peu de chose sur la nature
de la religion des anciens Basques. Il existe cependant toute
une série de monuments qui confirment ce polythéisme et
renseignent quelque peu sur la nature de ses dieux.
Il y a beaucoup de plaques et d"autels dédiés à des divinités
locales, dont les noms ont une teinte basque très marquée.
Tels sont : Ai-balnr, Ar)Xf\ Andarte, Alardessis, ou Alandestus,
Aherbelste. Aebrlteso, Abelioni, Ageioii. Asto Iliuinu, Arthc, Alar,
Baelisto, Bassei. Baigoriso ou Baicorrixo, Baesserte. Baioso, Beisi-
risse, Daho, Ele, Erge, Erditse, Edelati, Garri, Ilubrrrixo, Ilumbero.
hcitto. Idiatte. Lelhunno. Leheren. Lahe. Larrasoni. Stelatese, Ste-
latise. Saiulac \'ini...mburu. Tullonio. Urnia, Usei. Uvarna etc..
Nous avons donc une bonne série de dieux auxquels les an-
ciens Basques rendaient un culte, dieux indigènes, d'après
toutes les apparences. .Mais les inscriptions des plaques et
même celles des sculptures qui nous restent nous cachent, en
général, leurs attributs. Ainsi la statuette de bronze trouvée à
Larumlto, près de Pampelune, quoiqu'elle semble représenter
un dieu jiréromain, ne jette presque aucune lumière sur le
problème (lui nous occupe. Nous voudrions savoir davantage ;
nous voudrions connaître la mentalité du peuple basque à cet
égard. D'abord, il n'est pas probable que le culte de ces dieux
soit-d"importation romaine. Au contraire, on voit que la culture
romaine prétend s'approprier tel ou tel ; c'est ainsi qu'on assi-
milait le dieu Lehrrren au dieu Mars [deo Marti L'^herren) , de
même que Arixo, Ergo ou Erce, Lelhxinno et Daho. A la ville
d'Ausci {civitas Ausciorum , on adorait Andosso. qui était assi-
milé à Hercule [EercuU Tôle Andosso Invicto) .■
La déesse Lahe était invoquée contre les maladies {Lahe pro
sahUc dominorurn) .
Dans la chapelle de Ste. Madeleine d'Aranhe, située sur le
II
162 J. M. DE BARANDIARAX
somivief dune montagne près île Tardets. fut trouvée une pla-
que dédiée à loracle {fana Hercniscorrtselie. Le nom de la divi-
nité, dit le P. FiTA, fut prohablenient le même que celui de la
niontag-ne. Le culte chrétien de la Madeleine a remplacé le culte
])aïen yVHprmisrofitsehe qui est, iieut-être. une divinité fémi-
nine (1).
En plus lies dieux anllii-opomorphiques. les Basques ado-
i-aient aussi les montagnes, les fontaines, les arbres, le feu.
les pierres, les vents etc.
Une plaque porte rette insi-ription : « Vi'ontibv.s Afjirioni ».
Ageion était une divinité adorée dans plusieurs localités des
Pyrénées i-enti'ales. Une autre plaque est dédiée aux Fontaines.
Il y a, à Casteliiiague. une in.-cription : c Se.v Arhoribvs » et
une autre « Se.r Arbori deo ».
Une femme dédie une plaque aux vents : c< Inycnua ventis
V. s. 1. III. »
Certains, qui ont dédié des autels et des plaques à ces dieux,
inscrivent leur nom indigène : d'autres, qui portent des noms
romains, montrent leur caractère d'indigènes, quand ils men-
tionnent Ipurs parents avec leurs noms basques.
On adorait i-es dieux à ciel ouvert, peut-être aussi dans les
grottes, dans les enceintes sacrées ou dans de petites chapelles,
à l'intérieur des maisons, comme il arrive généralement chez
les peui)les primitifs. Xi en Crète, ni à Mycènes. ni chez les
anciens Romains, on ne connaît de temples proprement dits.
C'est seulement dans quelques villes très romanisées qu'on a
trouvé des traces de temples.
Peu à i)eu, les dieux romains s'introduisent au pays basque.
A leur Contact, les dieux indigènes se nindifient ; on prétend
même les identifier à des divinités du Panthéon romain. La cvil-
fure latine sillonne l'Aquitaine et les Yascones péninsulaires.
Nous avons des preuves de ce phénomène, non seulement dans
les monuments de l'Aquitaine, de la Navarre et de l'Alaba. ré-
ginns où abondent ces vestiges, mais aussi dans les plaques de
jiierre et dans les autels quVm a trouvés à Morga et à Forua
(Bisi-aye) et à Oyartzun (Guipuzcoa}. Cela ne veut pas dire que
les Romains parvinient à soumettre le peuple basque, mais que
(1) Boletin de la Real Academia de la Hi3torUi, Madrid, 1893, t. XXII.
p. 540.
RELIGION DKS ANCIENS BASQUES 163
rinfluence de leur culture se fit sentir dans toute l'étendue de
leur pays.
III. FOLK-LORE.
Divinités et croyances. — Vestiges de culte naturiste. — Que
les Basques antérieurs au Christianisme aient professé une
religion et quils aient eu des dieux auxquels ils rendaient un
culte, ce sont là des faits hors de doute. Il y a chez eux des
vestiges de paganisme, comme partout ailleurs, bien que peut-
être moins aiiondants ; mais ils suffisent pour affirmer que le
Basque s'harmonisait" bien avec la civilisation occidentale,
quoiquen imprimant à ses éléments des traits caractéristi-
ques, qui ne sont pas toujours faciles à découvrir dans les
données prises séparément. De là vient que certains basqui-
sants ne trouvent d'original chez le Basque que sa langue.
Actuellement, le Basque donne à Dieu le nom de Jainko,
Yinko. qui dans les documents littéraires apparaît, en général,
sous la forme de Jaungoikoa (Seigneur d'en haut ou Seigneur
de là lune), qui peut-être n'est qu'une interprétation des éru-
dits des temps relativement modernes.
A cet égard, le P. Echalar fait dériver le composant Yin du
mot basque des indo-européens Ze-Di-Yu-Dia-Diu, ce qui peut-
être est un peu hasardé.
D'après le Codex Compost elanus d'Aymeric Picaud, le Basque
se servait, au XIP siècle, du mot Urci pour nommer Dieu. Ce
mot semble le même que l'actuel orz (nuage de tempête),
orzantz, orzia ou orizia (tonnerre.de la Basse Navarre). Il entre
comme composant dans plusieurs noms, avec la signification
de firmament. Ce sont : orzadar, ostilik, ostarku (arc-en-ciel).
ostgarbi, oskarbi (ciel limpide), ostebi (pluie douce et abon-
dante du printemps), oskia (l'horizon), orzegun, ostegun (jeudi,
jour du ciel), orziral, ostiral (vendredi', urzintz (éternuement) .
Tout cela fait penser que les anciens Basques professaient
une religion naturiste. Ils avaient le même mot pour nommer
Dieu et le ciel, ce qu'on observe aussi chez beaucoup de peu-
ples de l'antiquité. C'est la conception primitive indo-euro-
péenne de la divinité, parce que l'indo-européen Dyàus-pitar
était le ciel personnifié, conception qui se rattache aux quali-
ficatifs par lesquels les peuples désignent généralement le dieu
164 J. -M. Dl:: BAUANDIARAN
su|U't'me, même les peuples les nmins rappi'ochés de nous : les
Bantous. par exemple (1).
Culte des astres. — La tradition basque conserve quelques
données qui. sans doute, nous rap{)ellent l'ancien culte sidéral,
le Soleil et la Lune étant à cet égard les asti-es les plus re-
nommés.
Le Soleil. — Le Soleil reçoit dans les pays basques les noms
do Ekhi i^en Salazar) , Iguzki (Irun;, luzki lOyartzun). Egvzki
(Tolosa. Korfezubii. Euzki (Elduayeu;, Eguski (Llodio; etc...
D'après une croyance de Berastegi. le Soleil est l'œil de Dieu.
A Ataun. on appelle aizki la lumière du Soleil ou du jour, et
Eiizkibegi (œil de la lumière du jour) le Soleil lui-même.
On doit ]'emarqucr que cette dernière conception de l'astre
du Jour est semblable, sinon identique, à celle des anciens
Egyi)tiens. qui ap]. étaient le Soleil l'œil du soleil, l'œil de Râ.
l'a'il (\'Hi>nis (2). Les indigènes des Xou\ elles-Hébrides l'ap-
pellent aussi « ceil ou source du jour » \3'j .
Dans quelques villages basques, on appliquait au Soleil le
surnom d'nmandra (grand'mère ou Madame Mère). C'est ainsi
(lue les camiiagnards d'Elosua et de Plazent/ia, quand le Soleil
va se coucher, récitent, même de nos jours, les vers suivants :
Euzki anumclria La grand'mère Soleil
Badoya amiiugami. S'en va vers la mère.
Biov etorriko du. Elle reviendra demain,
Denpora ona brûla. S'il fait beau temps.
En plus de ces formulettes, dont nous trouvons les échos
dans plusieurs pays, en dehors du terintoire basque, des lé-
gendes solaires y existent, semblables à celles que M. Luzix
a recueillies dans la Basse-Bretagne (4).
La Lune. — La Lune, dans le pays ba.sque, est appelée Ilazki
(à Salazar), Illargi (à Ataun), Iratagi (à Elorrio . Iretagi (à
Llodio). Idetargi (à Rigoitia), Goiko (à Roncai: etc.
A la Lune, de même qu'au Soleil, on attribue le sexe féminin,
dans j)lusieurs villages où elle est appelée nmondra (grand-
Ci) A. Carnoy. La religion des Perses, dans Huby, Christus, p. 293.
(2) J. Capart, La niythol. astrale des anciens Egyptiens, dans CR8ER,
1914, p. 366.
(3> Mgr. V. DouCERÉ, Notes sur les populations indigène.'^ des Nouvelles-
Hébrides, dans Revue d'Ethnographie, Paris. 1922, p. 215.
(4) Contes de Basse-Bretagne, t. I, p. 3.
RhXIGIOX DES ANCIENS BASQUES 165
mère), sauf lo cas d'un cnnte ]iulilit' \)ixr .M. Vinson (1). dans
lequel la T.une aiiiiuraît du sexe masculin. C"est ce qu"on voit
dans les fdinuiles ([ue les enfants d'Ataun et d'Ormaizteg'i
adressent à la Lune.
■ — Iflargi (iin'indrfii. — Lune, grand'mère,
Zeruan zc b'-rri V O'i y a-t-il)de nouveau au ciel?
— Zeruan berri mutl; — Au ciel, bonnps nrum'llps,
Oran eta bf'fi. .Maintenant et toujours.
Ces foimules sont ti'ès fépandues, même en dehois du jiays
basque. Cependant il faut obsei-ver que les Basques les em-
ploient aussi en s'adressant à la coccinelle, qui dans ce seul
cas est appelée Iratargi nmandre cnia. Lune bonne grand'mère.
Nous retrouvons ces mêmes \eis cbristianisés. dans une chan-
son d'Ondarroa dédiée à Stf. Glaire.
La coccinelle, préside, ilit-on, ;i la dentition, la pluie eti'...
Cette croyance, répandue partout, fait voii' chez le peuple bas-
que le sentiment d"un ancien goùl pour l'art d"auKurer. L'écj-i-
vain roman LAMPRmiLS en témoigne aussi, lorscpi'il écrit, dans
la vie d'ALEXANDRE SÉVÈRE, que i-et empereui' surpassa les
Basques dans Tart d'augui'er : « Vt rt \a!<ronfs Hispaninruin rt
Pannonioruni vicrrif ».
Mari. — On ti'ouve aussi d'autres vestiges d'ancien paga-
nisme iux [lays l)asque. Ce sont les survivances des croyances
et cultes qui ont subsi'i^té ibms les légendes et divei'ses prati-
ques.
C'est ainsi que vit encore dans la pensée populaire, surtout
liarnii les cami)agnards. uu étrange personnage féminin, la
maîtresse de la Foudre, du tonnerre, de la pluie et de la séche-
resse, qui est en même temps considérée comme un oracle.
comme maîtresse des sorcières etc.. (2)
Il semble qu'on reconnaisse dans cet être extraordinaire une
divinité' de l'ancienne relif^iou des Basques. Il tant néanmoins
se tenir sur la l'éserve.
Ses noms sont divers, selon la diversité des mojitagnes où on
croit qu'il habite. Voici (pielques noms : André Mari Mvnoki»
(dame Mari de Muno . Mdri Mvrtikn (Mari de Muru). ytarijn
(1) Le Fol'k-Lui( du Pays hasquc, Pai'is, 1883, p. ôô-ôG.
Ci) l>.MîAXDi.\RAN. Contiibuciàn al estudio de la ttiitoloçtia i-ii.ira ; Mari o cl
gviiio (Il las tormenta.s (sous presse).
i66 J. M. DE BARANDIARAN
Kobako (Mari de la caverne), Puyako Maya (Maya de Puy ou do
Puya), Anbotoko Damie (Dame de Anboto), Gaiztoa (la maligne),
Sugàrra. Yona Gorri etc.. Le nom do Mari paraît jusqu'au-
jourd'hui le plus répandu.
De nombreuses localités sont signalées comme habitation de
ce personnage. Ce sont les montagnes d'Anboto, Aizkorri, Muru
etc.,
Quand Mari se transporte d"une montagne à une autre, elle
emprunte la forme d'une faucille ignée ou celle d'un globe de
feu, comme disent d'autres. Mais ceux qui, selon la légende,
ont visité ses demeures, assurent qu'ils ont vu Mari en costume
de femme ou même (peu souvent") sous forme de squelette
humain.
La légende ajoute que Mari fut la fille d'une famille de labou-
reurs de Zegama. Elle désobéit une fois h sa mère. Alors sn
mère la maudit. Aussitôt, la tille fut enlevée par la foudre.
Depuis lors elle vit dans la caverne d'Aketegi, au sommet
d'Aizkorri.
Les versions de cette légende sont très nombreuses.
Dans sa demeure, dit la légende, la dame Mari s'occupe à
filer et à dévider le fil, à cuire le pain, faire la lessive etc..
Quand elle dévide le fil, elle emploie un dévidoir spécial : un
bélier. Dans ses cornes elle arrange l'écheveau. Quelquefois,
on la voit filer devant la caverne où elle vit. Son mari s'appelle
Maju. Quand Mari rejoint son époux, une furieuse tempête se
déchaîne. Elle a une fille, qui ne se laisse voir que le matin do
la St. Jean.
iMari se nourrit de la négation, du noti. Si vous avez recueilli
trente fanègues de blé, et si, conversant avec vos amis, vous
déclarez que vous n'en avez recueilli que vingt, les dix autres,
que vous n'avez pas avouées, vous seront enlevées par Mari ou
par ses servantes.
Mari est, de plus, ennemie de la religion chrétienne. Une
fois, un curé d'Elosua vit Mari assise sur une pierre nommée
Trukarri, qui était dans un endroit d'Elosua appelé Iturriberri.
Le curé tendit sa main vers la Dame, pour qu'elle la baisât
selon l'habitude d'alors. Mais la Dame, loin de la baiser, le
menaça d'une terrible tempête. Aussitôt dit, aussitôt fait ; elle
déchaîna un horrible orage.
RKLIGIOX DES ANCIENS BASQUES 167
Pendant Ifvs leniixHes on la \oit, d"aprè.s une (îroyance très
]'épandue. remonter sur les nuages et diriger les vents. Quel-
quefois, elle vole sur un char tiré par quatre chevaux ; d'autres
fois, elle traverse i"air sous la figure liune femme qui jette le
feu de toul son corps. La légende ajoute que le curé d'isasondo
et les religieux dArantzazu montaient autrefois aux montagnes
de Muru et Alona lespectivement, pour conjurei- Mari : si la
conjuration la surprenait dans sa caverne, la région était déli-
vrée de la gj'èle pour sept ans consécutifs ; vents et nuages de
tempête étaient retenus au dedans. Pour ce motif, les bergers
et les laboureurs avaient coutume de faire une procession à la
caverne dAnboto.
Quand Mari, irritée contre les villages, déchaîne les orages
et s'etforce de r'avager les champs et les moissons, reste le
recours à de nouvelles conjurations nuigiques. Ce n'est pas
suffisant dans tous les cas. Mai'i exige parfois, avant de se re-
tirei'. qu'on lui donne un hijou en gage, le soulier du magicien,
par exemple.
Mai'i cofinaît l'axenir et le manifeste j)ar ses oi'acles.
Le peuple rappelle, de nos jours encore, certaines légendes
sur les anciens campagnards qui gravissaient autrefois les
montagnes de Mari, pour la consulter sur divers points et dif-
ticultés ; on ajoute que la Dame a prononcé toujoui-s des oracles
infaillibles.
11 faut entrer dans le séjour de Mari avec certaines pré-
i-auiions. La Dame ne permettrait januiis l'omission de for-
n)ules et rites ad hoc, cjue doivent savoir pratiquer tous ceux
qui la visitent. Rap])elons seulement les plus curieux de ces
rites. Ceux qui veulent la consulter doivent entrer et sortir de
son séjour de la même façon : celui qui entre de front, doit
sortir à reculons. Qui aurait manqué à cette règle serait retenu
en ca[)tivité.
Ceux qui osent voler quelque chose à Mari reçoivent aussitôt
leur châtiment : la Dame les emporte à sa demeure.
Une fois Mari s'empara d'une fillette sur la montagne d'Igoz-
mendi (Biscaye . Quand elle eut grandi. .Mari lui donna, en
récompense de ses services, une poignée de charbon, et la mil
en liberté. Quand la jeune tille sortit de la caverne de Maii. elle
observa que le cliai'lion s'était converti en or.
168 J- M. DE BARANDIARAN
Il serait trop long d'exposer toutes les légendes qui ont ti-ait
à Mari. Ce que nous avons déjà dit sera sufllsant pour se former
une idée de ce personnage, vestige peut-être de quelque divi-
nité païenne. Qui sait si elle ne fut pas autrefois la déesse des
montagnes douée des caractères ou projjriétés d'une ilivinité
atmosphérique ou astrale ?
Autres vestiges. — D'autres personnages mythologiques ont
aussi une grande renommée, tels que Erensuge ou le serpent à
sept tètes, dont les souvenirs sont encore assez vivants dans
l'imagination des campagnards ; Olentzero. un être étrange,
dont l'image est portée sur des brancards, la nuit de Noël ;
Ireltxo, génie railleur, qui apparaît souvent aux voyageurs :
Prakagori'i, on génie des sorciers ; Gaucko, un être nocturne,
peut-être un démon, qui jaunit ceux qui travaillent au clair de
lune.
Il faut encore rappeler les démons di's maladies > Gaizkinak)
et tous ces esprits étranges et terribles, rangés autour de
Gaueko. Ce sont Basajaun. Basoko Mari, Tartalo, Lamifiak et les
fantômes tels que Ipi.vtiku. Amalauzanko, Ebro etc..
Nous avons vu, à grands traits, ce que nous disent l'histoire,
l'archéologie et le folk-Iore basque sur notre sujet. J'aurais
voulu exposer lirièvement l'état actuel du problème qui con-
cerne la religion des Basques avant le Christianisme : je ne
sais si j'ai réussi.
Il faut avouer que d'épais brouillards couvrent encore la
civilisation primitive des Basques ; mais il faut espérer que
les méthodes modernes et surtout l'esprit de recherche, qui se
développe de façon surprenante parmi les fils de ca peuple si
ancien, découvriront de nouveaux horizons et arriveront h
dissiper les obscurités qui s'étendent encore sur son passé.
BIBL. — Barandiaran, Discurso de prehistoria vasca, Vitoria, 1917 ; du
même, Eusko-Mitologia, Bilbao, 1922 — HttebneRj Monumciita linguae Ihericae.
Berlin, 1893 — J. Sacaze^ Inscriptions antiques des Pyrénées, Toulouse, 1892
— E. UrroZj La religion de los nascos antes de la introdn<;ciôn del Criatia-
nismoj Bilbao, 1918.
A. DRBXEL 169
[9] Afrika, Vorderasien und die friiheste Vorgeschichie,
von Dr. Albert Drexel, Innsbruck (1).
Reimsch. dor bedeutsanip Hamitojoge. hattH' in iler Blûtezeil
seiner Forscherarbeit den Versuch geinacht, den « einheitlichen
Ursprung der Spracben der alten Welt » nachzuweisen. Dièse
Arheit ist ein Versuch geblieben. oder nidit einmal als Versuch
zu einem fca-mellen Abschlusse gebi-acht worden. Eiiic Aeusse-
rung des verdienstvollen Forsehers, die er in dem gemeinten
fragmentarischen Werke getan hat. nmss uns aber interessic-
ren : « Die Menschenrassen der alten Welt (von Europa. Asien
und Afrika) sind Spezies einer einzigen Arl, sind Abkômmlinge
einer einzigen Famille, welehe ihre ursprûngliehen Stamnisitze
an den àquatorialen Seen von Afrika inné hatte, von wo aus die
Nachkeimnien dieser. anfànglich dem Laufe der Flùsse folgend.
sich nach den verschiedenen Richtimgen des afrikanischen Fest-
landes und zuletzt nach Europa und Asien verbreitet hahen» (2 .
Worauf es hier ankommt und was sich durch die fortschrei-
tende Forschung naiiientlich die linguistische) mehr und
mehr als wabr heraustellen wird, ist der von Reinisch ange-
nomniene und behauptete Zusammenhang eigentlich afrikani-
scher und vorderasiatischer Vôlker und Menschen. Was hei
Reinisch irrtûmlich gewesen sein mag, ist sein Ausgehen von
Afrika. Wenigstens gibt es mehrere starke Indizien, die wir in
den folgenden Ausfûhrungen noch einzeln, und z. T. ausfûhr-
lich, berûhren werden und die dartun kônnen, dass fur grosse
afrikanische Vôlkerkomplexe Asien. und zwar nàherhin Vorder-
asien, als unmittelhares und relatives Quellgebiet in Betrachl
komnit. Geographisch kann dem in Ergànzung beigefiigt wer-
den, dass Vorderasien den Treffpunkt der Telle der sogenannten
alten Welt bildet. Gesehichtlieh muss zugesfanden werden.
dass in Vorderasien âlteste Kulturvolker gesessen haben, ■ —
wir erinnern an Elam und Sumer — die nicht etwa prst aus
den Aegyptern zu verstàndigen sind.
(1) Wegen nicht zeitigen Eintreffens der benôtigten Drucktypen, war es
nicht môglich in den Wortbeispielen uberall die phonetisohe Schreibweise
durchzufUhren. — So bedeutet ng den grutturalen, /7 den palatalen Nasal.
(2) Der einheitliche Ursprung der Sprachen der alten Welt, Bd. I, s. x.
170 A. DREXEL
Nicht aile (iehiete unserer bewuhnten Erde sind von der
nànilichen Einfaehheit oder Kompliziertheit. Yorderasien bietet
hinsichtiich seiner Vôlker ein unverhâltnismàssig verworrenes
Bild : nicht bloss die Sprachen zeigen das. sondern ebensosehi-
die unkiare, vielleicht mehr vprsi-hlungene kulturgoschichtlichf
Konstitution der vorderasiatischen Vôlker. Die Struktur der
geschichtlichen Vôlker (im traditionellen Sinn des Wortes)
und ihrer Beriihrungen moc-hte eine gewisse Bestâtigung hie-
liir abgeben. Lediglich in sprachlicher Rûcksicht darf erwâhnt
werden, dass Sumerer und Semiten, Kaukasier iind Hottiter.
Indogermanen und Elamiten in strenger Scheidung und wieder
m unklarer Wûrfelung nebeneinander angetroffen werden.
Dabei muss beachtet werden, dass Semitisch. Sumerisch,
Hettitisch Termini sind, die nocb in neuester Zeit durch ihreii
slark isolierenden Charakter der Sprachvergleichung bedenk-
liche Hindernisse entgegenstellten.
Man war bislang gewohnt, die vorderasiatischen Spi-achen
und vrdker mehr aus sicli selber zu verstàndigen ; oder we-
nigstens griflf man doch nur auf geographiscli nàher gelegene
Vôlkei'bestânde und Spracherscheinungen zur vergleichenden
Feslstellung von Beziehungen und Verwandtschaften. So aller-
dings vermochte man nicht zu einem befriedigenden Ergebnisse
zu gelangen. Erst die Erkenntnis von der Herkunft und der
Anwanderung der mit den vorderasiatischen Sprachvôlkern
zusammenhàngenden Sprachen und Vôlker kann ûber die frû-
heste Vorgesi-hichte Vorderasiens helleres Licht bringen. Dièse
Einsicht hat uns selber bewogen. den vorderasiatischen Bezie-
hungen afrikanischer Sprachmenschen nachzugehen. Einige
wichtigste Ergebnisse dieser Untersuchungen anzugeben. ist
Zweck unserer folgenden Darlegungen. Wenn wir dabei das
eine oder andere Mal weiter nach Asien hinûbergreifen. dann
geschieht das auch nur, weil in Afrika selber Spuren zu jpnon
weiten Gebieten des Ostens sichtbar geblieben sind.
Zur Erledigung unseres Themas werden wir nun gerade liie
Problème angreifen und herausheben. die bislang noch unge-
lost sind und ûbrigens mit zu den schwierigsten allei- verglei-
chenden Sprachforschung gerechnet werden miissen : wir inei-
nen das sunierische, das hettitisclie und das semitische
Problem.
AFRIKA, VORDERASIEN UND VORGESCHIOHTE 171
I. DAS SUMERISCHE PROBLEM
Wohl kaum eine Fiage in der Linguistik hat in den letztpn
Jahrzehnten sovipI Aufselien erregt imd soviel Voimutungen
wachgeriifen wie die sumerischc. Dip absolutp Gegensàtzlich-
keit des Sunierisc"hen ziim Semitfschpn. im engeren Sinno na-
nientlicli zum Assyro-Babylonischen. mit deni ps durch das
aussere Zeichen des gleichen Schriftgebrauches verbimden
war, ergab sich als die einzige Erkenntnis, die man nach ail
den Studien und Meinungen gpwonnen zu liaben und behalten
zu kônnen glaubte.
Unsere Erforschung des bantuisehen Sprachmaterials batte
auf aufîallende Aehnliohkeiten mit der uns damais st-lion nàher
vertraut gewordenen suniprischen Spracherscheinung auf-
merksam gemacht. Indpss hatten wir immpr der Ueberzeugung
nachgehangen, es mocbten sich innerhalb des afrikasprachli-
chen Gebietes etwa doch nocb engere Parallelen mit dem Su-
merisehpn aufflnden lassen. Unsere hierauf basierenden Unter-
suchungen endigten zunàchst mit der Thèse vom bornu-siime-
rischen Zusammenhange, wie er în der im vorigen Jahre
erschienenen Arbeit Bomii und Sunier klargelegt werden konnte.
Wir haben an dieser Stalle jener Thèse nichts beizusetzen ;
wohl aber miissen wir auf die in dem Zusammenhange weiter
errungenen Einsichten umsomphi' hinweisen. als so das sume-
rische Problem allein .sehon. aueh fur das Gesamtthema der
kultur-historischen Sehule. zu einp.m pinschneidendsten der
umfassendsten Yolkerkunde wird.
Dièse Einsichten sind vornehmlich drei : 1. die Verwandt-
schaft des Rong (Leptcha) im Gebiete des mittleren Subhima-
laya ; 2. die engere Verwandtheit des Rong mit dem Sume-
rischen ; 3. endlich die sumerische Verwandtschaftsrichtung
des Baskischen. Wir werden dièse drei Hypothesen durch je
ein Beweismoment zu verdeutlichen suchen.
1. Was das Rong vor allem kennzeichnet. ist sein Wortbau :
Konsohant + Vokal, — der aus dem Sumer und Bantu gelàu-
flgen Silbenformpl entsprpchend. Eine andere lautliche Eigen-
tûmlichkeit des Rong ist der konsonantische Wortschluss
l'zumal durch Li(iuida und Nasale). Das Sumerische kennt die
nâmlichen Finalen. wàlirend die Bantu-iSprachen unter dem
Einflusse ganz anders gearteter Sprachen, teils aueh aus gram-
172 A. DREXEL
matiscli-funktionalen Grunden. rpgelmâssig einen Vf)kal angp-
nonimen. bzw. — bei einer unigpkehrten Auffa>-sung ries Ver-
hâltnisses — die ursprûnglichen Vukale nicht vtMioi'on haben.
Eirif di-itte und sehr markante Eigentùmlichkeit des Rong be-
steht in déni snbstantivierenden Yortsat/.-Vokal. dci- ^Irh, in
genauer plionetischer und logisoher Entsprechung, im Sume-
rischen wiederflndet. Das Bantu hat hier allerdings. liei seiner
systematisc-lien und syntakfisch-konkordalen Anshiidung der
nominalen Klassenprafixe. die ursprûngiich jeilfMifalls wirksam
gewesene Vorsatz-Ynkale — nian denki' an die bezuglichen Bil-
dungen der Bantoiden und der e^vhe-v(M•^^ andten Manfu-)
Spraclien — eingebûssf bzw. dai'angegeben.
Wichtiger als dièse phonetischen Monienle sind fiii' uns al)er
die (nominalen) Pràfixe. Hiei- stellen wir gegeneinander :
banl. mu (-//-: Person rong. mv nq^
uni Pflan/e inn
li ^ Konkreta là
ru Flûsse (rd) , ru jig]
bu Absirakta buing)
hv Konkreta : Absirakia ku 'ng)
lu. a (Kollekliv) ta
Eine ahnlich wertvolle Parallèle wird vermutlicli nirgend-
woher zum Bantu kon.>?truier{ bzw. aulgelumlen wcrden kon-
nen. Der haupt^àchliche Unter.scliied fiingt erst bei der Plural-
bildung an, indeni das Rong eben fur den Plural niclit bei m
System der Klassenprafixe steiien geblieben ist. somlern. ilurrli
keine Konkordanz nocb dazu gezwungen, die gewrthniiclie Sufti-
gierung seiner Pluralzeichen wablte. Dièse Pluralzeichcn sind
pa{ng) fur Saclien und sa[ng) fui- Personen, wobei zu bearhten
kommt, das pa{ng auch als 3a ])l.i)ron. pers. fungiert.
2. An grammatisehpn Parallelen des Rong und Sumer setzpn
wir her :
gen. rong. -ha suni.
dat.
loc.
plur.
rong.
-Im
-nuing)
-la. [-ra)
-sa
-ka
-poing)
-sa'jig)
-kn.
-w
ni
bant.
ra
bant. ,6;
-la
Su,
-es
-ka
-bi.
i-ba)
es
AFRIKA, VORDKP.ASIEN UND VORrilTSCHICHTE 173
nuin. ord.
-ka
Art {m/n)
adverb.
-ra (
-la)
-va
lidhort.
-hu
-go. -{ngn
neg.
11(1. III
• : /(^7///
na. nu ; nmn
nu m. card.
1 ///.
a Hein,
mu-
tu, eins, einzi
.'/"'
-c ftrsth,
gë
beginning- »
2 m ni-in
3 sa -m eà
4 H lim-nia/v ( 1 )
5 Hi/o H in u-min, (5 + 2=) 7.
Dièse Andeutungen mOgen genûgen, uni einen ursprùngli-
chen Zusammenhang des Rong mit dem- Sumer b/w. mit dem
Bantu zu erweisen. Der Beweis ans dem Pronomen. zumal aus
dem Personalpronomen. wûrdo uns zii weit fûhren. so instruk-
tiv er ja sonst aneh wàre. Es ist nàmlich durcbaus moglieli.
dass jene &praebvolker, die mit dem Rong zusammenzustellen
sind, nicht ganz iind nicht aile den Weg nach Afiika ûber das
heutige bzw. fiir uns historische Sumergebiet genommen haben.
Die Vergleichung der personalpronominalen Formen des Rong,
des Sumer und des Bantu scheinen sogar fiir dièse Annahme
einigp Mehrwahrscheinlichkeit zu ergeben. Die lexikogra-
phische Zusammengehorigkeit des Rong mit dem Sumer ist
allerdings ûber allen Zweifel erhaben und sogar relativ nabe.
wobei noch ins Gewiebt fâllt, dass die Parallelen ofters und
nanientlich bei wichtigsten Verglpichungswortprn im Bornvi
ihre Engànzung und Bestàtigung haben.
3. Zur Erweisung einer basko-sumeriscben Vi'rwandlschall
nennen wir an der Stelle lediglich ein paar Wortpinallelen :
sum. ad, Vatei' bask. oila, Vatei'
es. Haus cce, Haus
or [ur) , Hund ur {or), Hund
ama. Mutter ama, Mutter
gis-{om), Mann giz-on. Mann
kar. we-gtragen e-kar-ri. holen, tragcn
vr. vorne : Anfang huru. Kopf
(iga. aha. Rùokseite bnge. gabr. Hûekseitt'
(1) Zu bemerken ist, dass aueh in tib. binn. Idiomen der ZutsaUs mu (ma)
belegt iat.
174 A. DREXBL
kes, Stirne i-kus-i, sehen
dini, machen c-din, konnen
gim, tun « -gin, tun
fur. kommen. eintreten c-tor. kommen
(ig, tun >'qik, tun
mer, GurteT
bai\ Umschliessung marra, parm, Umgrenzung
pI. hell. rein, weiss rlur. Schnee
aib,!. Wasser ; (Fluss) i-ba-i, Wasser
a-ri, Samentropfen ri. zeugen ; ari, Kind, Junges
bar. ofïnen i-bar, Tal
yil. vernichten Iiil, verderben
sar. auftreten, in die sar, eintreten,
Erscheinung treten geschehen
igi, Auge begi. Auge
geirif. Weib, Magd
enie. Mutterleib {ema-) kxmw-a, Weib
dû. idug), halten e-duk-i. » to hold »
nir. Mann. Herr ner-{h)abe. Bursche
gid. Scham des Weibes ncs-kato, Màd'Chen
i-d. gehen. kommen bide. Weg
uru. Stadt uri. Stadt
.sal, Scham. Blôsse d. Weib e-zal, Haut, (Nacktes)
gir. laufen e-gar-o, to ascend, to pass
gar, yar, einfassen: Ort(l > radix gar. einfassen, Ort
yar. Ort. Vergl. noch kfiiri. Ort.
II. DAS HETTITISCHE PROBLEM
Robert Bleichsteinbr. ein neuerer Erforscher der nach ihrer
Entwieklung und Zusammengehririgkeit noch dunklen kauka-
sischen Sprachen. àussert sich zum hettitischen Problème fol-
gendermassen : » Ein weiteres dei' grossen Staaten bildenden
kaukasischen V(")lker des Altertums sind die Hettiter. die Hatti
der Assurer und Aegypter. die Hittitim der Bibel. Der Kern
ihrer Macht liegt im ("tstlichen Kleinasien. wo Hugo Winckler
bei dem Dorfe Boghaz-Koj seit dem Jahre 1906 die Trûmmei'
der alten Hauptstadt Hattu aiifdeekte und unter anderen wirti-
(1) Ob i/aran. Strasse, hiehor zu beziehen ist, oder (wohl eher) zu gir,
laufen ?
AFRIKA, VORDERASIEN UND VORGBSGHICHTE 175
tigen Funden aueh eine grosse Zahl von Schriftdenkmâlern in
assyrisoher Keilsohrift und hettitisoher Sprache ausgrub. Ueber
die Zugehorigkeit der hettitischen Sprache wird noch gestrit-
ten ; in der letzten Zeit wurde sie fur arisch erklart (Hrozny)-
eine Behauptung. die sowohl von indogermanistischer (Bartho-
LOMÀ) , als aueh von kaukasistischer Seite (Bork in der
Orientalist. Lif<'miurzeit.ung. 1916: mit Recht auf das Entschie-
denste zurùekgewiesen wurde. Es ist liber allen Zwcifel erha-
ben, dass das Volk, dessen Typus uns auf den Bildwerken der
Hettiter entgegentritf. ein kaukasisches war B>nchte des
Forsch-Inst. f. Ost. u. Or.. ;i918], Bd. II, S. 69). Derselben
Ansicht ist G. Hi'esing, der im Zusammenbange mit der Er-
forschung des Elamitischen avith an das kaukasisohe Sprachen-
problem gerûhrt bat.
Wir sind durrb die eigene Duicbarbeitung der liislang ge-
sicherten Hef titer-Texte zu einer Losung aueh dièses Problè-
mes gelangt, abermals von Afrika aus. Wir nennen zuerst die
Tatsachen, um dann in einem Schluss-Urteile die Bedeutung
unserer neuen hierbezûglichen Gesamterkenntnisse zusammen-
zufassen. Dièse Tatsacben sind : 1. die Nâchstverwandtbeit des
Hettitischen mit dem Nubischen : 2. die Verwandtbeit des
Hettito-Nubischen mit dem Indogermanischen ; 3. die nord-
westafrikanischen Auslàufer der bel tito-spracblichen Bezie-
bungen.
1. Lautlich hestebt zwiscben dem Hettitischen und Nubischen
durchaus Uebereinstimmung. Der im Hettitischen nicht belegte
Laut / ist aucb im Sumerischen bislang nicht angenommen.
Vgl. iibrigens biezu dennoch unsere bezûglichen Ausfiihi'ungen
in Bornu und Suiinrr. Im Nubischen selher is( das / dialektisch
und partial. Rehiliv arm ist das f aueh in den mit der Bornu-
Nuba-Linie genetiscb zusammenweisenden Bantu-^^prachen.
Der dem Heftilisclien stark eigenfiimlicbe /(-Laut isl in seiner
feineren Nuance liberhaupt nicht fest/ustellen, weil wir fiii-
das Hettitisciie auf die phonetisch immer ungenauen Keil-
schrifttexte angewiesen sind. Doch sclieint es wohi kaum zwei-
felbaft zu sein. dass es sich um den sumerisclien y-Laut handelt.
den man im Sumerischen bisweilen mit g bezeichnet hat. Der
autïallende Ynkalwechsel in nàmlichen Wortern ist im Nuba
ebenso wie im Hettitischen, oder noch mehr in Anwendung.
176 A. DHEXEL
Grammatisch verweisen wir vor allem auf die suhstanti-
vischen Woribildnei' ; wir gCNvinnen da an Paiallolpn :
hett. - // nuli. - il
- iiuw - ar
- an (na) - an
- ta, ti - atfi, itti : ti, (ta)
- ki - ki. {qi) , k -
- in - i)i. i; .
Aus der Kasuslehre erwàlmen wir li. n. ace. y\aj. h. n. dat.
y-, (r) und loc. h. n. n-, -n, -n-) . Ein genetivisches mi des
Hettitisehen vermiiten wii diirrhaus : ein hett. nu-. « von » ist
belegt. Das Yerbum /.eigt wolil die meisten Parallelen. Wir
nennen : 1) prâs. /•, 2) aor. s, 3) pass. ta, 4) hilfsverb. ke[n).
5} plur. (in, 6) Stammerweiterung j/v./ . 7 die dem Hetti-
tisehen wie dem Nubischen gleich eigentûmlichen nd-Fovmen.
Das Prononien kennt im Hett. wie iiii Nvib. ein 7- des Personal-
prononiens, ebenso einen /-Stanini der 3a sing. und plur. Tm
Demonstrativ finden wir :
hett. rad. gr/i dies- nub. rad. kr/i
ani,n .jen- nni.i).
Dem nuli. Relalivpronomen la entspiielit die . relativisclie
Ergànzungspartikel d<' des Hettitisehen.
Von hett. Zahlwort ist sehr wenig bekannt. In hrri-ira-as
(« erster ») erkennen wir sofort den nub. Stamm fiir « eins »
= ber, {wrr) . In hett. tapai [tabali liegt ein Stamm fur <> zwei »
— vgl. indog. rad. dpi — und wohl pal {bal) = sum. pal, born.
fal vor.
Der hett. Advei'bialbildung auf Au entspricht die bergnul».
auf ko.
2. Die nubo-hettitisehen Verwandiheilen bzw. Beziehungen
des Indo-germanischen darzulegen, ûbergehen wir deshalb.
weil wir sie an anderer Stelle ausfiihrlicher und in Bâlde wer-
den behandeln konnen.
3. AUe unter i gebracliten Vergleichungen • las^en keinen
Zweifel darûber bestehen, dass Hettiter-Verwandte nach Afrika
abgezweigt sind. Dièse Abzweigung muss vor der voHen Aus-
bildung der liettitischen Sprache, wie sie historisch vor uns
liegt, stattgehabt haben. Es kann sich also keinesfaHs etwa
um eine dureh die Aegypter veranlasste grossere Verpflanzung
AFRIKA, VORDERASIEN UND VORGESCHICHTE 177
von Hettitern in die historisch bekannten afrikanischen Nuba-
Gebiete handeln. Eine solehe Annahme wiirde iibrigens noch
von anderer Seito widerlegt. Unleugbare hettilische Verwandt-
heiten fmden wir nàmlich z. B. auch in den erst spater hami-
tiseh ûberlagerten Berber-Gebieten. Xur ein interessanter
Beleg hiefiir. Wir treCfen im Berberischen die Wortwurzel
jaugu{s) « année » ; ihr entspricht im Hettitischen ta-jaugus
(« zweijâhrig ». Nebenbei zii erwàhnen wâre, dass also
Hrozxy's Spekulation auf lat jugum — vgl. « Joch Oclisen » —
zunâchst jedenfalls als ûberflûssig erscheint. Nâhere Ausfûh-
r'.ingen ûber die berberischen Beziehungen des Hettitischen
bringen \vir in unserem grundlegenden Werke Gliederung
der afrikanischen Sprachen.
Die nun angel'iihrten Tatsaehen lassen sich zusammen mit
anderen, mehr weniger wahrseheinlichen Yermutnngen unge-
fàhr in der folgenden Weise ausdrûcken : das Hettilische
gehort dem Teile eines gev/anderten Yolkes an, das in drei-
facher Gabelung nach Afrika, Europa und asiatisch nordwàrts
sich ergossen hat. Das jedenfalls, nach den uns erhalten ge-
bliebenen Texten Vorderasiens selber zu schliessen. wichtigste
Ergebnis unserer Forschungen ist wohl : die hettitische Spra-
che fùhrt uns in die Zeit und an den Ort. in denen die asia-
tischen Anfânge der indogermanischen Spracheinheit sich ty-
pisch zu gestalten begannen.
Die kaukasische Sprachforschung aber mag auf folgende
drei Erkenntnisse achthaben : 1) der slavische Zweig des Indo-
germanischen ist nach seinem Sondercharakter vornehmlich
kaukasisch zu verstândigen ; 2) die kaukasisehen Sprachen
gehoren nach ihrem iiberwiegenden Wesensbestande jener
frûhen vorderasiatischen Sprachbildungsschicht an, aus der
das Hettitische unmittelbar sich indogermanisierend abhebt,
als deren sûdwestlicher Auslâufer ein bedeutsani gebliebenes
Ferment der sonst hamitiscli gebliebenen Sprachen der Berber-
Vôlker aufscheint ; 3^ im Kaukasisehen ist die durch das Su-
merische gekennzeichnete Volker- bzw. Sprachsc-hii-hf als Ein-
fluss-Sphàre in deutlichen Grenzen wirksam geblieben. d. h. im
Kaukasisehen sind, in Absehung vom uralaltaischen Vermi-
schungsprobleme, jedenfalls zwei sprachgenetische und darum
auch morphologisch gesonderte Glieder nachweisbar.
178 A. DREXEL
III. DAS SEMITISCHE PROBLEM
W. D. Whitney hat in ^einem W'ei'ke Thr liff and gvuivth uf
language (Lond., 1875 ; Uobei's v. Aug. I.kskikn. Leipzig, 1876.
S. 272) sich ùber das semitische Probleni also gfàussert :
(( Wir braïK.'hen die Mnglichkeit nicht zu lougnen, da.ss doch
einmal eine Verwandtscliaft zwischen Semitisch und Hamitisch
nachweisbai' sein konne, wie wir dièse Moglichkeit auch zwi-
schen Semitisch iind Indngermanisch nicht .^eleugnet haben :
hier haben wir nur zu beacliten. dass l)is jetzt kein genvigender
Beweis dafùr erbracht ist und wahrscheinlicher Weise auch
nicht gelieiei't wii'd, ehe das Ràtsel des semitischen Sprach-
baues gelôst ist ». Der so gekennzeichnete Stand der semito-
sprachlichen Frage ist bis heute derselbe gehlieben. wenn man
vielleicht davon absieht, dass Aegyptologen wie SnrrHE. .Junkeh
und Erm.\.\' der semitischen Aenliclikeit des àgyptischen Ver-
bums eine spraehges(^hichtliche Bedeutuug beiuiessen.
Die Beschàftigung mit den afrikanischen und innerafrika-
uischen Sprachen hat uns auch Licht viber das Râtsel der
seniito-sprachlichen Isrdierung gebrachf. Und zwar ist es eine
Sprache. die nicht einmal in genûgendem Sinne eine hamitische
genannt werden kann : das Haussa. Wir wollen hier lediglich.
unter Einbeziehung des Aegyptischen, zwei Parallelen, aus den»
Substantivum und aus dem Verbum. spret-hen lassen.
1. Drei akkrescive Elemente sind es in den semitischen und
hamitischen Sprachen vorzûglich, die in weitem Fmfange no-
minalbildend gewirkt haben : ein pràflgierendes m. ein sufli-
giertes t und ein suiTigiertes wia). Schon dièse Nominalbildner
zeigen. zum Teile wenigstens, wie der sogenannte Triradikalis-
mus des Semitischen nach seinei' Entstehung. Durchbildung
und Erlialtung aufzufassen ist. Beispielhalher fûhren wii' an :
ass. epehi, tun - rpistu, Tat
daku, tôten - rfîA-fw. getotete Schar
àg. mdn\ reden -mât {mdwt) , Angelegenheif
mr. krank sein - mrf. Krankheit
hauss. fdwa. schlachlen -fauta, Schlâchterei
su, fischen - sunta, Fischerei.
ass. sakanu, stellen, legen - maikanii, Stàtte
asu. hinausgehen - tnusu. Ausgang, Abfluss
AFRIKA, VORDERASIEN UND VORGESCHICHTE
171)
âg. hnk. darbringen, spenden
s(l)', iiegen, schlafen
hauss. fora, anfangen
V'iya. ( verj pflegen
âg. dr. begrenzt sein
irhm, erzàhlen
hauss. tara, versammeln
ba[i', geben
2. Deiitlicher zeigen uns die Verba des Semitischen die fur
das Semitische freilich typische Entwicklung des Triradika-
lismus. Da wir dièses ganze Problem, zumal aus dem Verbuni,
in einer separaten und weitergreifenden Abhandlung einiger-
massen zu erledigen gedenken, so lassen wir an dieser Stelle
ein paar blosse Beispiele folgen :
ass. tui-kasv. abschlagen hauss. - hase, abhauen
- mhnk, Beschenkter
- msdr, (Schlafej , Ohr
- mafari. Anfang
- maraya. (der) Weise
- drw. Grenze.
- K'hnnr, hôh. Beamter i. d.
Unigebung dos Konigs
- (nrawa, Versammlung
- baiu'a. Gabe.
na-garu. zimmern
7ia->>nxu, herausreissen,
entfernen
(i-qnmv. truben, betrùbt
(aufgeregt) sein
■i-bfxii. einsehliossen,
umhûllen
Iaku. liku, nehmen
madii, viel sein od.
werden
rt), roAc), irgenwohin laul'en
- gagera, sàgen
- saka, freigeben
- saka-ta. herausholen
- gdm-tsi, wûste Unterhal-
tung (bes. Sexuelles belr.)
- békt, sc'hwarz (bose)
- Jake, (unter d.Arm) nehmen
- mddda, Ungenùgsamkeit,
Habsucht
- l'ftse {...ga), aî)gehen. ab-
seits gehen (vom Weg) .
Die blosse Registrierung dieser Parallelen wûrde jedem lie-
ziigliehen Linguisten den Weg zum Verstàndnisse des semi-
tischen Triradikalismus eindeutig weisen konnen. Wir woUen
jedoch, bei der weiten Interessenssphàre unseres Problèmes,
selber ein paar auf den Sinn des semitischen Triradikalismus
gerichtete Bemerkungen machen.
Die erste Bemerkung betrifft die Tatsache von dem sekun-
dâren Entstehungswerte der schwachen dreiradikaligen Verba
des Semitischen. Durch das Haussa werden wït auf eine
Sprachstufe gefiihrt, auf der viele Verba zweisilbig waren und
die Gestalt Konsonant + Vokal, Konsonant + Vokal hatten ; das
IJ^O A. DREXEL
ist aber jene Gestalt, wie sie z. B. aucli (Joui Vci'lnim df's gan/eii
bantnischon Sprachenkompipxps eignel.
Als eine zweile Folgei'ung ans unsercin BeweisinalfM'ial
ergibt sich der goringo Bchari'ungSNVPi-t der semitischen
« sehwachen Konsonanzen » lizxv. jenei' Lautungen verbalpn
Ijautiingszusàtze K dip das urspilingiich /.woisilhige Verbiini
nunmehr als dreiiadikalig prscheinen lassen. Wir gewahren
nâmlich einen regelmàssigen Ausfall (Schwvmd) der akzpsso-
risohen dritten Radikale. sobald dni-di <-in starkes vprbales
Bildungselement. die Dreiradikaligkeit des .semitischen Verbums
feststeht bzw. bewirkt wird. So steht eineni bvl dip Form sbt
gegpniiber. Dassplbp besagt (ias Zurûfktreten dpr so entslan-
denen « drilteii » Radikale oV) dièse nun an erster, zweiter
oder dritfer Stelle steht) in der verbalen Flexion, z. B. der
Wegfall des primae /(. Ivndlicb stimmt ilamit auch ûberein,
dass dièse sekiuidâren Radikale in der Aussprache ofters als
gewôhnliche Vokallautungen auftreten ; so sagt man z. B. niebf
kowama, kuicama. kuwuma o. a., sonders kvm.
Dem geringen Beharrungswerte der semitischen Hilfsi;idi-
kale — wir nennen sie sekundàr gegenùbpr den eigenl lichen
und wesentlichen d. i. tirspriingliehen S^tanimradikalen des
Verbums — entspncbt die logisehe Wertgpringheit derselben ;
sic sind cnlwedci" logisch ûberhaupt \Aertb)S wie z. B. das v
médium, oder sic sind lediglich in der grammatologischen
Funktion eines allgemeinsten verbalen Determinativs zu ver-
stehen. Dièse letzicrwàhntp Tatsachfe findet ihre genaue Bestà-
ligung aus dem Haussa nocb auf einem anderen Wege. Es
finden sich nàmlich im Haussa allgemeinp verbale Hilfssilben
mit den Konsonanzen ((", y, n. So werden manche einsilbige
Verba biswcilen auch mit diesen Nebenlautungen gebrancht.
ohne dass hiedurch der logische oder funkfionale Werl des
Grundverbums nach irgendwelchcr Richtung alferiei-t wûrde.
Es seién etliche solche Beispiele genannt :
I. .st/=.v(/vrrt, flschcn II. ha— baya, geben lU. f/u—yana. sehen
1//— (//jra, machen so=sayH. trinkcn t§e=tsana, sagen
zo=zuwa, kommen ma=^maya. besitzen .sa^^sano. setzen.
Wir kommen zum Schlusse unserer fragmentarischen Aus-
lùhrungen. Welches ist das Résultat, durch das sich dièse
Ausfûhrungen und unser Thcma ûberhaupt in das Ganze der
AFRIKA, VORDEKASIEN UND X'ORGBSCHIGHTE 181
« Ethnologischeii W(»clie » harnioniscli und nûtzlich einlugen ?
Dièses Résultat ist vornehinlich ein dreifachcs : li Wnrdeii
wir zur V^i'hindung grosser ru'tlicher und zeitlicher Volkpi'-
entfei'nungen gefûhrt, was die voile Bedeutsamkeil im fumla-
Rientalen Problème von der Einheil des Mensehengesclilechtes
lindet ; 2) zeigte sich die Si)i-achenkunde als ein niâchtiger
und gerade duri-h soinen empirischen und exakten Charakter
uuabweisliclier Beweisfaktor der kulturhistoriseh oi-ientierten
Ethnologie, brauclien wir ja nur an die niutlerreclillicbe Dureb-
setztheit der Bantu und an das Mutlerrecbt der Rongvulker. der
Sumerer und der Basken zu denken ; 3' vcrmoebten wir du'
Erkenntnis zu gewinnen. dass das Land der Bibel als ein mâdi-
tigstes geni't}s<-h'\s Frkl yon Spi'aeben. Yolkern und Mcnsebt'U
gelten kann.
-Das sind ein paar Bausteine. GiMkssei'e Arbeit, die uns in
diesen Fragen einen relativen Abschluss bringen konnte,
wird nur dann niuglich. wenn mebrere Fachleute siidi in ein-
heil licliem und organischem Sinne uni die Bewàltigung der
Aufgabe beinûhen. die sieb ein Friedi'ieh Max Mueller vor
tûnfzig Jahren in seiner flir seine Zeit genialen AUgenieinen
Sprachwisi<cnschajl gestellt bâtie. Tnd dièse Arbeit luusïf sieb
in den Bahnen bewegen, denen ich als Sehûler von Wilbelni
ScHMiDT bis heran zu folgen suchte, die Alex, von Hi^mbolot in
seinen Ansiclitm der Sntur'^ (I. 215") gelegentlic-h eines spi'ach-
wissenschal't lichen Exkurses so angegeben bat : « Bisher ken-
nen wir die amerikanisehen Sprachen zu wenig. als dass man
bei ihrei' grossen Mannigfaltigkeit die Hoffnung schon aufgeben
konnte. einst ein Idioni zu entdecken. das mit gewissen Modifi-
kationen im Innern von Slidaïuerika und im Innern Asiens
zugleich gesproeben wiirde, oder wenigstens eine alte Vei--
wandts(diaft ahnen liesse. Eine solehe Entdeckung wai-e gewiss
eine der glànzendsten.die man in der Geschichte der Mensciiheil
erwarten dûi-fte. Spi'achanalogien verdienen aber erst dann
Vei'trauen. wenn sie nieht bei Klangahnlicbkeiten der Wurzeln
verweilen. sondern in den organischen Bau und in den graju-
matisohen Formenreicbtiun. in das eindringen, was in den Spra-
chen sich als Produkt der geisligen Kraft des Menseben ofïen-
bart ».
182 H. PINARD DE LA BOULLAYE
BIBLi. — Christaller .1. G., Bemerhungcn zii R. Lepsiiis' Einleitung ilber
die V6lker und Sprachen Afrtkas, in Zeitschr. f. afr. Spr., 1887-1888 —
Drexel a., Boryiu und Sunier, im Antlir., 1919-20, Bd. XIV-XV, S. 215-294 :
ders., GUederung der afrikanischcn Sprachen, ebd., 1921-22, Bd. XVI-XVII ff.
— Meinhof C, Die moderne Rprachforschung in AfriTca, Berlin, 1910 —
Reinisch L., Der einheitliche Ursprung der Sprachen der alten Welt, Wien,
1873 — RiNN L., Les origines berbères, Alger, 1889 — Sergi A., Ursprung
und Verbreitung des mittell'àndischen Stammes, Ubersetzt von A. Byhan.
Leipzig. 1897 — Westermann D., Die Sudansprachen, Hamburg, 1911.
[10] Les méthodes de la psychologie religieuse,
par le R. P. H. PiNARD de la BouLLAYE. S. J.
•Nous essaierons, dans les pages qui vont suivre — de montrer
brièvement la nécessité des recherches psychologiques — d'en
déterminer les conditions sul)jectives — d'exposer les méthodes
dont elles disposent — de préciser "nfln les conditions du
travail critique.
Bien que la psychoiogir empirique ne puiss.e évidemment pro-
noncer le dernier mot en ce domaine, faute de temps, nous
laisserons presque entièrement de côté ce qui concerne la
psychologie rationnelle.
I. NÉCESSITÉ DES RECHERCHES PSYCHOLOGIQUES
Quant au premier point, rappelons trois raisons :
1" La première se tire de la nuture cle^ actes religieux. — Que
ces actes soient ou ne soient pas exclusivement propres à
l'homme, qu'ils soient ou ne soient point un produit exclusif
de, l'âme humaine, il est certain qu'ils diffèrent avant tout des
autres phénomènes psychiques par l'intention ou par l'idée
qui les anime. Formules et gestes extérieurs no prennent en
effet un sens religieux que par les idées ou les sentiments qui
les règlent ou les accompagnent : or ces idées et ces senti-
ments relèvent de la psychologie.
2* L'attention de cette science se trouve d'ailleurs excitée
au plus haut point par une série de faits qui posent devant
elle autant de problèmes ou d'énigmes étranges : c'est, dans la
magie, la prétention d'exercer une contrainte sur des êtres
surnaturels ou divins ; ce sont, dans certaines liturgies, des
MÉTHODKK DE LA P8YCHOJ.OG1E RELIGIEUSE 1^3
actes, comme les pro.sfitutions sacrées, les j)hallo})hories, qui
répugnent au sens moral ; diins certaines niythologies. des
obscénités attribuées aux immortels ; dans certaines philoso-
phies religieuses, comme le panthéisme, lexistence de senti-
ments religieux élevés, bien que Ton y afiirme lidentité entre
Tobjet du culte et son sujet, en d'autres termes malgré la
logique abstraite qui semble rendre ces sentiments impossi-
bles ; c'est, de manière plus générale, en toutes les religions,
l'amour des biens invisibles poussé jusqu'au sacrifice plus ou
moins entier des biens Aisibles, l'affirmation du surnaturel,
malgré la science qui tend à l'exclui'e... On peut invocjuer, pour
résoudre ces énigmes, l'enfance de l'humanité. l'obscuiantismo
des âges de foi, la force des traditions, la contagion religieuse
etc.. Mais il suffit de se rappeler les noms de Platon, d'Aais-
TOTK, de Pascal et tie Bossuet par exemple, pour comprendre
que ces formules, appliquées à l'universalité des ras, dissi-
mulent de grosses confusions, beaucoup de paresse ou de sim-
plisme et vraisemblablement beaucoup de paiMi pris.
3" Enfin, pour nous catholiques, ces études présentent, en
I)lus d'un intérêt scientifique évident, un intérêt apologétique
et un intérêt apostolique non moindres. Les thèses de nos doc-
teui's, qui dès longtemps se sont appliqués à ('es recliercîhes
dans une mesure insoupçonnée du grand nombre, nous ont
préparés à reconnaître des analogies très profondes dans les
manifestations de la vie religieuse au sein de toutes les sectes ;
elles nous ont habitués aussi à distinguer entre « le surnaturel
et ses contrefaçons ». La distinction traditionnelle des mer-
veilleux (naturel, diabolique et divin') attend d'un examen plus
méthodique des faits une confii-mation et des précisions fort
utiles. De ces progrès, nos méthodes de direction ascétique et
mystique profîterimt tout naturellement. Sur ce terrain, comme
sur tous les auti-es. nous n'avons point de meilleure amie que
la Science. Elle nous servira d'ailleurs d'autant plus efficace-
ment, que nous serons moins p)'es.sés de la fnire servir à nos
desseins...
II. CONDITIONS SUBJECTIVES DES RECHERCHES PSYCHOLOGIQUES
Ces recherches sjx'ciales exigent du ti-availleur des disposi-
tions spéciales.
184 H. PINARD DE LA BOULLAYE
1° La première est une certaine sympathie, e'est-à-dire une
disposition générale à interpréter en bonne part, chaque fois
qu'on y sera invité par des raisons convenables. Cette disposi-
tion est nécessaire, ici comme partout, pour con:ibattre Tin-
fluence des préventions conscientes ou inconscientes. Elle l'est
plus encore, quand on doit interroger des témoins vivants, parce
qu'aucune ârne ne s'ouvre sans réserve, à moins de se sentir
invitée à une entière confiance.
2° La seconde condition est Vexpérience personnelle. Il est
surprenant que ce point ait été parfois contesté. Eh quoi ! on
n'admet pas qu'un homme puisse être bon critique en matière
de musique, s'il n'a jamais goûté les charmes de la musique
— en matière de peinture, s'il n"a jamais éprouvé aucune émo-
tion esthétique — en matière de romans, s'il n'a quelque con-
naissance des choses de l'amour etc. 'De quel droit, pourrait-on
prétendre que la critique religieuse soit le seul domaine où
l'on puisse réussir sans initiation et sans aptitudes analogues ?
Pour être apte à étudier la folie, objectent tels psychologues,
il n'est pas nécessaire d'être fou ! — D'être fou, c'est sûr ;
mais avoir souffert de troubles psychiques et en être bien guéri
assurerait certainement là un médecin aliéniste ou à un psy-
chiatre d'incontestables avantages, au grand bénéfice de ses
clients et de la science.
iPratiquement d'ailleurs, l'absence complète de religiosité ou
de préoccupations morales se confond avec Tirréligiosité et
l'immoralité. Pour juger d'une tournure d'esprit, ne posséder
que la tournure d'esprit toute contraire, cela ne saurait vrai-
ment constituer un idéal.
L'observation avertit de plus que certains sentiments de
l'âme vous introduisent comme dans un monde nouveau :
telles sont les nuances qui séparent l'amour chaste de la vo-
lupté banale ; celles qui distinguent Vaurea mediocritas de l'hé-
roïsme dans le dévoûment ou dans l'accomplissement du devoir.
Les satisfactions goûtées par les spécialistes de la vertu sont
un fait, puisqu'ils en vivent et s'en contentent. L'inaptitude
des non-spécialistes à les comprendre en est un autre.
La psychologie rationnelle enfin peut rendre raison de ces
difTérences. Elle explique que, plus l'âme se dégage des sens,
plus elle devient capable d'expériences plus spirituelles et que
MÉTHODES DE LA PSYCHOLOGIE RELIGIEUSE 185
ces expériences ne se déveloj:>})ant pkis, comme les impressions
matérielles, en s' intensifiant, mais en n'épurant, naffectant plus,
si l'on peut ainsi f)arler. les parties sensibles ou sensuelles de
l'âme, mais ses parties ou facultés les plus immatérielles, doi-
vent paraître comme d'un autre ordre à <:'eux qui en bénéficient...
Ces constatations et ces réflexions obligent à accentuer une
troisième condition.
3° C'est la défiance du facteur personnel, cest-à-dire l'atten-
tion diligente là tenir compte des limites de ses propres facultés
et 'à se mettre en garde contre les tendances instinctives qui
leur sont d'ordinaire associées.
Il est habituel aux alcooliques de nier les jouissances des
gourmets, aux « viveurs » ou libertins de nier les charmes de
la vie familiale, aux égoïstes et aux « bons vivants » de nier les
satisfactions que procurent la charité et le dévoûment... Tout
de même, selon le degré de religiosité ou de piété auquel on est
soi-même parvenu, il est à redouter que l'on ne conteste la
réalité d'attitudes et d'expériences différentes, qu'on ne les in-
terprète comme des exagérations ou des illusions... Il est à
craindre aussi que croyants et incroyants, faute de comprendre
d'autres mentalités que la leur, ne ^se contentent de poser des
assertions, d'exposer des évidences personnelles, là où con-
viendraient des analyses méthodiques et des démonstrations...
Enfin, parce que sur la question religieuse, pour le oui comme
pour le non, les uns et les autres jouent leur tout, les uns et les
autres ont à veiller à ce que les intérêts confessionnels ou anti-
confessionnels n'empêchent pas l'examen impartial et l'équi-
table appréciation de tous les faits. En aucun autre cas,- le vrai
travail scientifique n'exige autant de prudence, de loyauté, de
vraie vertu.
m. PROCÉDÉS DES RECHERCHES EXPÉRIMENTALES
Dans les conditions que nous venons d'exposer, le psycho-
logue trouve à sa disposition, pour mener à bien ses recher-
ches, divers procédés. On peut les ramener à trois : lobservation
interne ou introspection, par laquelle il étudie les phénomènes
religieux dans sa propre conscience — l'observation externe ou
extro.spection. par laquelle il les étudie dans la conscience
d'autrui — V expérimentation, par laquelle il tente de varier à
son gré leurs conditions-
lH(i H. PINARD DE LA BOULLAYE
1°. L'observation interne a poui' objet tous les phénomènes
intellectuels, aflfeetifs ou émotionnels qui se rattachent à la
vie i-eligieuse par un lien plus ou moins étroit : amour rie
ridéal, impression du sublime, du surnaturel ou du divin, be-
soin d'une explication ultime des choses, angoisse de l'au-delà,
fluctuations de la volonté en faveur ou en défaveur de la reli-
gion, crises de conversion, prière, impression de réconfort ou
d'abandon, ferveur ou tiédeur, remords, scrupules, doutes...
L'introspection ne consiste pas exclusivement dan.»^ la
conscience directe que Ion peut avoir de ce qui se passe en
soi ; elle comprend aussi et surtout le retour réfléchi sur ses
états de conscience, pour les analyser et les mieux comprendre.
Certaines personnes sont particulièrement douées pour cet
ordre de recherches : elles savent lire en elles-mêmes. En tous
cas. ce don. même embryonnaire, peut se développpr par Texer-
cice. Il est à peine besoin de dire de quel profit peuvent être à
cet égard la pratique fréquente de Texamen de consciente tel
que l'exige la vie chrétienne et l'haltitude de la direction
spirituelle...
2". L'observation externe s'applique à scruter lame des autres.
Indispensable, parce que la conscience individuelle est un
champ trop étroit, elle peut être ou directe ou indirecte.
A. Directe, elle examine les états d'âme en eux-mêmes, leurs
caractéristiques, leur origine, leur évolution.
Elle a, comme procédés principaux, l'utilisation des statis-
tiques, celle des questionnaires oraux ou écrits, celle des auto-
biographies et celle des traités ascétiques ou mystiques.
Poup simples qu'ils paraissent, à première vue, ils sont en
réalité d'un maniement peu aisé.
a) La remarque s'applique tout spécialement au procédé
qu'on serait tenté de regarder précisément comme le plus
objectif, le plus scientifique : Vappel aux statistiques, préconisé
surtout par E. D. Starbuck (1). Après examen d'un nombre de
cas plus ou moins considérable, exprimer en chitTres des rap-
ports comme conversion et puberté, religiosité et sénilité, irré-
ligion et culture ou tous autres de même genre, c'est s'exposer
à traiter par le calcul des problèmes qui relèvent de l'analyse
(1) The Psychology of ReUaion, an euipirical sti'dy^, in-S", Lonrlret;. Scott,
1901. — Il y a heureusement dans le livre plus que des calculs.
MÉTHODES DE LA PSYCHOLOGIE RELIGIEUSE 187
psychologique et de la critique la f)lus ardue, et s'exposer à
croire la solution donnée ou sérieusement amorcée, quand la
question est seulement posée, en termes d'ailleurs discutables.
Aucune statistique en effet n'a de valeur, à moins que le total
des cas obser\'és ne contienne, dans la même proportion que
l'ensemble étudié (soit telle rég-ion, soit l'humanité entière^,
des spécimens de tous les types et de toutes leurs variétés.
Chacun des cas enregistrés, lorsqu'il s'agit de phénomènes
intimes, comme la conversion et les diverses formes de l'expé-
rience religieuse, ne jieut dailleurs être classé, qu'après dis-
cussion très soignée du témoignage qui les concerne : l'emploi
des statistiques, par là même, présente' les mêmes difficultés
que l'emploi des deux ordres de documents dont nous allons
parler immédiatement.
6. c.) En ce qui concerne les questionnaires (oraux ou écrits'
et les autobiographies, il importe tout d'abord que les questions
soient posées et les biographies empruntées à des types assez
variés ; ou plutôt il est nécessaire que tous les types religieux
soient représentés. C'est donc une erreur de s'attacher exclusi-
vement ou presque exclusivement, comme nombre d'évolution-
nistes, aux types les plus rudimentaires — comme nombre de
médecins, aux types morbides — comme nombre d'agnosti-
ques, dont W. James lui-même, aux types émotionnels ou
affectifs...
Il importe de plus, quand on use de questionnaires, que les
questions soient posées de telle sorte qu'elles n'influencent pas
la réponse...
Enfin, réponses et récits autobiographiques sont d'une inter-
prétation très délicate, parce que les âmes les plus portées à
communiquer au public leurs confidences ne sont pas toujours
les plus « intérieures » ni les plus profondes, mais souvent
les plus suspectes de vantardise — parce que la loyauté la
plus entière peut encore s'allier à des illusions inconscientes,
surtout lorsque les témoins connaissent par leurs entretiens
ou par leurs lectures certaines expériences qu'ils estiment
honorables et souhaitables — parce que. pour comprendre la
vraie nature de certains états psychologiques, il faut souvent
pouvoir « suivre le sujet i pendant un temps notable — enfin,
parce que, pour juger correctement ces phénomènes si com-
188 H. PINARD DE LA BOULLAYK
plexes, depuis leurs formes les plus rudimentaires ou les plus
dépravées jusqu'aux manifestations les plus hautes des « myf!-
tici majores », comme parle M. Delacroix, il faudrait au psycho-
logue une compétence si spéciale qu'elle doit forcément être
bien rarement atteinte.
cl] Les traités de théologie ascétique on taystique et les ou-
vrages similaires constituent une autre source d'information,
d'ordinaire plus négligée, mais en fait plus précieuse, surtout
quand ils ont joui d'un grand crédit. Ils ont au moins le mérite
de condenseï" en des foi'inules plus précises les idées d'un
milieu, de définir plus nettement, pour leur cercle et pour leur-
temps, le but de la vij3 religieuse, ses expériences principales
et les moyens estimés plus propres à les assurer.
Les difficultés (critiques que nous indiquions fout à l'heure
et dont jilusieurs sont communes à ce genre d'écrits auront
fait entrevoir la nécessité d'avoir recours à d'autres procédés,
qui permettent do contrôler et de compléter ceux de l'observa-
tion directe.
B. L'observation indirecte peut y aider. A la différence de la
précédente, elle ne porte plus sur les états d'âme et sur leurs
caractéristiques, mais sur leurs résultats et sur leurs consé-
quences ; elle s'applique à élucider la nature des expériences
religieuses par voie de déduction, comme on éclaire la nature
des causes par celle de leurs effets.
Les elYets de la vie religieuse peuvent se ramener à cinq
classes : physiologiques, comme l'excitation nerveuse, l'étiole-
ment organique ou leurs contraires — affectifs, comme le déve-
loppement du sentimentalisme, la pa(îification de l'âme ou sa
perturbation — moraux, comme raffinement ou l'émoussement
du sens moral — intellectuels, comme l'élargissement ou l'ap-
pauvrissement de l'intelligence - — sociaux, comme la stérilité
ou la fécondité dans les œuvres philanthropiques etc.
L'observation indirecte, on le comprend, présente un double
avantage : tout d'abord les efTets dont nous venons de parler,
étant extérieurs ou du uîoins liés à des manifestations exté-
rieures, sont plus fa •iles à constater ; distincts des idées, des
sentiments et des expériences religieuses, avec lesquels ils
sont pourtant en connexion plus ou moins intime, ils donnent
le moyen d'apprécier leur orientation véritable, leur dynamisme
MÉTHODES DE LA PSYCHOLOGIE HBLIOIELISE 189
réel, et par conséquent de vérifier les assertions des témoins
sur la paix dont ils jouissent, la charité, le zèle qui les animent,
lénergie qu'ils disent avoir recouvrée etc. Moyennant certaines
précautions, les statistiques (sur la criminalité respective des
sectes, par exemple, sur leur activité dans la propagande reli-
gieuse, dans la bienfaisance, dans les études scientifiques),
peuvent procurer ici des renseignements fort utiles...
3°. L' expérwientation en fournit d'autres.
Elle peut être strictement empirique ; elle peut aussi avouer
(ou dissimuler) des visées métaphysiques. Dans lo premier cas,
elle cherche seulement à connaître les caractéristiques des
phénomènes religieux, leur genèse, leur évolution dans les indi-
vidus ; dans le second, elle essaie de contrôler les théories
philosophiques ou théologiques formulées à leur sujet.
De graves réserves s'imposent ici au nom de la religion et
de la morale. Il est clair en effet que Ton ne peut tenter une
expérience qui porterait atteinte aux droits dun tiers, élever
par exemple des enfants sans leur enseigner leurs devoirs en-
vers leurs parents ou en les trompant sur leur compte, sous
prétexte d'étudier la piété filiale, l'instinct congénital ou « la
voix du sang ;>. Tout de même, quiconque admet l'existence
de Dieu comme certaine, voire comme probable, ne peut différer
l'instructiun religieuse, ni la modifier à sa guise, pour observer
les conséquences de ces variations. Quiconque, sans être déiste
ou théiste, est au moins spiritualiste, reculera encore devant
l'inconvenance qu'il y a à opérer sur des âmes humaines comme
on le fait in anima vili. Mais, à vrai dire, ces expériences ont
été instituées par d'autres ou se sont trouvées accidentelle-
ment réaliséps. par exemple chez des personnes aveugles, sour-
des et muettes, comme Laura Bridgman et Hélène Keller. Il
suffira donc très souvent d'interroger l'histoire...
Pour des raisons identiques, le psychologue expéi'imentant
sur lui-même ne peut ni suspendre toute vie religieuse, ni
commettre le sacrilège, pour étudier le remords...
Ces abus exclus, on peut distinguer trois formes d'expéri-
mentation strictement empirique, à savoir une expérimenta-
tion indirecte ou improprement dite, une expérimentation conco-
mitante à la pratique religieuse, enfin une expérimentation pure.
A. Dans le premier cas, sans prétendre poser à ce moment,
190 II. PINARD DE LA BOULLAYE
un acte religieux, le ijsychologue s'applique à susciter ou à
iaire revivre en lui l'attitude fi'àme ou l'état émotionnel dont
s'accompagne tel ou tel acte religieux ; puis il rapproche les
résultats ainsi obtenus des actes qu'il pose en pleine convic-
tion et pour de bon...
B. Dans le second cas, il se contente de rester psychologue,
tandis qu'il pose des actes religieux : il n'agit pas pour s'étu-
dier ; mais il s'étudie tout en agissant. Il pourrait même (mais
une telle intention suj)pose évidemment qu'il a déjà résolu pour
son compte le problème religieux) ordonner cette étude à un
liut i»]'Oprement religieux : varier par exemple le temps, la
durée, le mode de ses prières ou de certaines pratiques ascéti-
ques, pour voir ce qui profite davantage à sa piété et pour
régler sa conduite en conséquence. Bien des maîtres de la vie
spirituelle suggèrent avec raison de tels essais. Un directeur
d'âmes peut aussi modifier ses méthodes de j)]'édication, d'orai-
son et d'ascèse, pour trouver les plus efficaces et régler les
adaptations qu'elles doivent recevoir, selon la diversité des
tempéraments. Il va sans dire d'ailleurs que la charité et la
justice l'obligent, comme le médecin, à se former d'abord par
la consultation des experts et des livres.
C. Dans le dernier cas, l'expérimentateur poursuit propre-
ment un but scientifique : il agit « pour voir ». Mais alors, la
moindre réflexion suffit à l'avertir que l'attitude adoptée fausse
essentiellement les conditions du phénomène qu'il prétend étu-
dier. La chose est évidente, s'il s'agit de pratiques confession-
nelles comme la Gène luthérienne ou calviniste et l'Eucharistie
catholique, parce que l'usage normal de ces rites présuppose
des convictions, une préparation morale et des intentions qu'on
ne peut adopter « à l'essai )). L'attitude d'âme étant différente
chez le fidèle et chez l'expérimentateur, les réactions intellec-
tuelles et émotionnelles que les rites peuvent provoquer ou
produire, comme tous autres, de par leur nature, doivent être
différentes elles aussi et si, d'une manière ou d'une autre, quel-
que vertu surnaturelle leur est associée, on ne peut s'attendre
ù la voir opérer de même façon.
Il en faut dire autant de l'expérimentation qui porterait sur
l'adoption provisoire de la » religion naturelle » nu de la seule
« morale nciturelle •>, c'est-à-dire des ])ratiques religieuses et
MÉTHODES DE LA PSYCHOLOOIE RBLIGIKL'SE 191
morales que Ton iirésente comme exigées par la seule raison.
De tels essais pourront toujours apprendre quelque chose, mais
non ce qu'il y a de plus caractéristique ou de plus intime, parce
que la résolution teTiiporaire de pratiquer la continence à
lessai, par exemple, contient un moment les appétits inférieurs
sans transformer le fond de l'âme - parce que celle de servir
Dieu à l'essai n'ordonne pas l'âme à Dieu de manière totale et
absolue. De quelque façon que l'on conçoive la religion, la
psychologie commune avertit en effet suffisamment qu'où les
dispositions intimes sont autres, autres doivent être les expé-
riences. Si on estime, comme certaines sectes des premiers
siècles, que la religion est essentiellement une science des
choses divines, une gnose, ou comme certains romantiques,
qu'elle consiste essentiellement dans une certaine manière de
sentir le divin, il manque en tout cas 'h l'expérimentateur la
conviction. Si on juge quelle est avant tout une relation, un
hommage d'inférieur à supérieur dont la forme conséquente et
parfaite est l'amour, partant le don de soi total et irrévocable
au moins dans l'intention, il manque encore à l'expérimenta-
teur cette disposition primordiale : aimer pour un temps et
pour voir ce qui s'ensuivra, dans la vie religieuse comme dans
la vie profane, c'est proprement « s'amuser »...
Mais, de manière générale, les expérimentations que préco-
nisent les partisans de la « nouvelle psychologie » portent sur
des phénomènes plus élémentaires. Elles visent à déterminer
comment les sujets sont impressionnés par les différents objets
ou motifs religieux, comment ils réagissent par manière d'élec-
tion, d'exécution, d'expression à l'excitation qu'ils en reçoi-
vent (1).
De tels essais, aisément réalisables et profitables quand il
s'agit de psychologie firofane, ne peuvent être utilisés, quand
il s'agit de psychologie religieuse. Avertir des individus qu'on
va leur proposer de pures hypothèses et leur demander ensuite
comment ils sont affectés par l'idée d'un dieu débonnaire ou
sévère, d'un enfer terrible ou bénin ou par des conceptions
similaires ne sert presque de rien, parce que l'émotion reli-
gieuse n'est pas encore la vie religieuse : cette vie suppose la
(1) Voir lin bon sonunalre de ces méthodes chez Ed. Claparède, Classifi-
cation et plan des méthodes paychologiqves, duni APs, 1908, t. VII, p. 321-364.
192 H. PINARD DE I.A BOULLAYE
conviftion personnelle et le sérieux, éléments qui font défaut
l'un et l'autre en pareil cas.
M. GiRGENSOHN a SU remédier à ces inconvénients, en propo-
sant à des sujets des textes religieux (fragments de sermons,
prières, chants liturgiques, biographies pieuses etc.) et en leur
demandant d'exprimer comment ils les appréciaient et pour
quelles raisons (1) .
Ce genre d'épreuve exige encore bien des précautions, qu'on
devine ; il aboutit à des témoignages beaucoup plus complexes,
qu'il reste 'à analyser : mais en somme il offre de tout autres
garanties. Ajoutons qu'il a conduit l'expérimentateur à des
résultats assez neufs, si on les compare à ceux d'autres empi-
ristes.
Quant à l'expérimentation à visées inétaphysi(iues, bornons-
nous à cette brève remarque : prise au sens rigoureux du mot
« expérimentation «, elle n'est pas admissible en ce domaine,
pour cette raison que l'expérimentation scientifique suppose le
déterminisme des effets et des causes et que les hypothèses
métaphysiques qu'il s'agirait de contrôler supposent de leur
côté un être ou des êtres transcendants, libres de leurs actes
et réglant leurs interventions par des considérations qui peu-
vent dépasser nos courtes vues.
En définitive, introspection, extrospection. expérimentation
peuvent toutes fournir d'utiles renseignements. Les méthodes
qui passeraient aisément pour les plus rigoureuses (méthode
des statistiques et ancienne méthode des tests) sont en réalité
les moins heureuses, parce qu'elles emploient des procédés de
calcul et de mensuration que ce genre d'études ne comporte
pas. Les plus sûres sont celles qui respectent la complexité de
la vie religieuse,' et les documents somme toute les plus pré-
cieux restent les autobiographies et les traités théoriques,
parce que leurs exposés sont plus étendus et plus riches et
parce qu'ils sont rédigés en pleine conviction ; à condition de
discuter les assertions et de les contrôler par des renseigne-
ments sur la vie des témoins, la critique est en "mesure d'éta-
blir de manière plus sûre leur sincérité et leur valeur.
(1) Der seelische Aufhau -des relig. Erlcbens, in-8", Leipzig, Hirzel, 1921.
— C'est la méthode exposée plus loin, p. 200 sq., par le R. P. Gemelli, qtil
se réclame lui aussi d'O. Kuklpe et de l'école de AVurzbourg-.
METHODES DE LA PSYCHOLOGIE RELIGIEUSE 193
IV. CONDITIONS GÉNÉRALES DU TRAVAIL CRITIQUE
Chacun des cas étudiés par les dilTérents procédés que nous
venons do passer en revue vient aboutir à la rédaction d"une
fiche documentaire. Il nous reste à examiner à quelles condi-
tions ces fiches^ pourront préparer un emploi judicieux de la
inélhodc compai'ative et conduire à des conclusions scientifi-
quement acceptables.
On peut dire, ce nous semble, qu'elles doivent être localisées,
rrpréscntut ive.s. loniplrtes. cotnparéf's ottrp plies sons tous rapports,
interpréléi's par une psyhologie vraiment hinnaiiip.
t. En demandant qu'elles soient localisées, nous voulons dire
que chaque l'tat d'àme (toit être replacé de manière aussi exacte
que possible dans son milieu d'origine, en d'autres termes qu'il
convient de noter, en plus des particularités émotionnelles,
affectives, intellectuelles. qu(Hlc est la complexion pliysique du
témoin, son caractère, sa condition sociale, sa nationalité,
quelles intluences il a subies, notamment du fait de ses lec-
tures, quel a été le cours ult ('rieur de sa vie...
2. 11 importe plus encoi'c de vérifiei' dans quelle mesure le
témoin est représenlatif de la religion ou de la secte à laquelle
on le rattaclie ou dont i! se réclame. La psyctiologie expéri-
mentale en effet, en tant que telle, ignore si la religion est
fondée en raison, quelle est sa notion exacte, bref sa définition
philosophique. Elle doit donc renoncer à présenter une psycho-
logie de la religion et se contenter d'essayer une psychologie
comparée des religions. Or que vaudrait, a pari, une psychologie
des nations, fût -elle appuyée sur des milliers de témoignages,
si l'on s'abstenait de vérifier la nationalité des témoins ?
3. Pour la même raison, la série des témoins étudiés doit être
complète, c'est-à-dire assurer, selon l'étendue des comparai-
sons que l'on a en vue, des représentant-s authentiques — ou
de tous les types psychologiques relevant d'une même école de
spiritualité (affectifs, volontaires, intellectuels...) — ou de
toutes les écoles acceptées par une même religion — ou de
toutes les religions d'une même famille (indo-européenne, sé-
mitique etc.) — ou de toutes les religions d(.' l'humanité.
4. 11 est plus indispensable qu'elles soient comparées sous tous
rapports, que les dissemblances et les contrastes par conséquent
13
194 H. PINARD UE LA BOULLAYE
aient été notés et soient discutés avec autani de soin que les
ressemblances. A plus d'un égard, contrastes et dissemblances
appellent même une attention plus marquée, parce que, légi-
time ou non, ridée générale des religions (relation avec un
monde idéal ou surnaturel) sulfit à commander de nombreuses
analogies et parce que les seules divergences peuvent permettre
de discerner ce qui serait ou manifestement morbide, ou sim-
plement illusoire, ou d'ordre psychologique normal, ou de ca-
ractère exceptionnel, empiriquement inexplicable. En dehors do
cette considération générale, un fait d'une gravité exception-
nelle rend cette élude indispensable : c"est que l'Eglise romaine
possède presque seule aujourd'hui des « règles pour le discer-
nement des esprits » et une théorie des « illusions » ordinaires
dans la vie asc-étique et mystique, qui lui font rejeter comme
frelatées, non pas certes toutes les expériences des croyants
séparés d'elle, mais les trois quarts de celles sur lesquelles se
fdudent nota.mnicnt les initiateurs de sectes nouvelles. Gela
pose au moins un problème, et la solution ne peut en être
trouvée, du point de vue expérimental, que moyennant un
examen plus consciencieux des divergences et des nuances.
5. Enfin — qu'on nous passe cette assertion si banale, puis-
que des abus trop criants la rendent indispensable — il est né-
cessaire que chacune des fiches documentaires soit interprétée
en fonction d'une psychologie vraiment humaine. Ne Test pas,
assurément, celle qui considère exclusivement dans la vie reli-
gieuse l'élément émotionnel, sans tenir compte des exigences
intellectuelles et du jeu de toutes les passions qui gravitent
autour de l'amour-propre...
De développer ces dernières réflexions il ne saurait être ici
question ; mais les ex]»rimer, c'est déjà faire entrevoir à quelles
difhi-ultés vient se heurter une psychologie purement empiri-
que. Réservant par principe tout problème transcendant (1),
ignorant par conséquent si la religion est fondée en raison.
si Ihomme a de fait un supérieur et de quelle nature il est.
elle peut l)ien cf)nstater ce qui est plus général et sain (au
moins en tant quassocié à des états sains) ; mais, logique-
ment, elle ne peut ni définir ce qui est essentiel ou accessoire
(1) Sur <e i)iincipe de la « psychologie nouvelle y., voir Th. Flournot,
APs. 1903, t. II, p. 38.
MÉTHODES DE LA PSYCHOLOGIE RELIGIEUSE 195
à la vie religieuse, ce qui contribue à sa perfection ou à sa
déformation ; elle ne peut davantage apprécier exactement le
rôle de l'humilité, de l'orgueil et des autres vertus ou vices
dans l'enquête religieuse et dans l'évolution de la vie reli-
gieuse. Isolée de traite philosophie, elle ne peut même avoir
des vertus et des vices aucune notion précise, puisque vertus
ou vices se définissent par rapport à ce qui doit être et que de
cet ordre normal la science empirique, en tant que telle, ne
sait rien...
On dira qu'en pratique ces distinctions spéculatives impor-
tent peu, tout psychologue étant plus ou moins philosophe et
sachant à quoi s'en tenir. — Elles importent au contraire d'au-
tant plus qu'en pratique, malgré l'exclusion donnée en théorie
aux questions transcendantes (de vérité et de valeur), la plu-
part des psychologues, parce que philosophes, introduisent
subrepticement dans leurs explications nombre de solutions
hâtives et discutables...
Concluons ce bref examen.
Quelque idée sublime qu'on puisse se faire de la religion,
d'un point de vue philosophique ou théologique, on ne peut
contester le haut intérêt que présentent les recherches de
psychologie expérimentale. Les thèses traditionnelles de la
théologie catholique sur la grâce (qui élève la nature et utilise
son jeu normal), sur l'action de Dieu dans toutes les âmes,
sur les illusions fréquentes qui s'introduisent non seulement
dans le commun des fidèles et chez les faux mystiques, mais
chez les mystiques les plus authentiques, toutes ces thèses nous
invitent à les favoriser. Si nous devons protester contre telles
ou telles théories modernes, c'est au nom de l'histoire, parce
qu'elles négligent des phénomènes psychiques dûment attestés,
et au nom de la saine critique, dont elles oublient les règles.
Ces règles, nous n'avons pas à les forger pour les besoins
de notre cause. Ce sont celles qui s'imposent notamment dans
toutes les <( sciences comparées » et que le conflit des systèmes
contribue à dégager de plus en plus nettement. Entre les plus
importantes, qu'il suffise de signaler les suivantes : avant tout,
observation scrupuleuse des faits — soin constant de distin-
guer ce qui relève de l'expérience (observation et explication
J96 H. PINARD DK LA BOIJLLAYE
f.mpiriqiiei el f-e qui n'iève de la spéculai i(in philosophique
— attention diligente à lenir compte des divergences et des
cunti'astcs. I>"agnosticisnie moderne et lindifférentisme reli-
gieux, entre autres causes I), ont entraîné n(unbre d'esprils.
même distingués, à nobsi^rver fpie les seules analogies : les
(puvres de psychologie (/énérallsatrici^ abondent : lune des tâches
b'S plus urgentes esl de constiluer. (tans le sens des travaux
inaugurés pai' Stern, la psycholof/ir (Ufféroitirlle (2) .
BIBL. — Outre les travaux cités ilan.s le texte, voir spécialement :
1". })our l'exposé et la discussion des principes et des méthodes de la
« notivelU psychologie » : Th. Flournot, Les principes de la psychologie
religieuse, dans APs, 1903, t. II, p. 33-57 — H. Hoffdixg, Problèmes et
méthode de la psychol. de la rclig., dans VI' Congrès de psychol., publié par
Ed. Claparkpe, in-8", (lenO-ve. Kundig, 1910, p. 106-117 — J. L.EUBA, Psychol.
des phénomtnes rclig., ibid., p. 118-137 — O. Kuelpe, Znr Psychol. der
Gefiihle, ibid., p. 183-196, avec la discussion résumée p. 137-182 — J. Mark-
OHAL, S. J., Science cmpiriqne et psychologie relig.. dans RSR, 1912, t. II,
p. 1-62.
2". conime iutroditctions générales : H. Faber, ])(i'i Wesen der Religions-
psychologie, in-8", Tubingue, Mohi-, 1913, pp. xiii-164 — G. Wunderle,
Aiifgaben und Methoden der modernen Religionspsychnlogie, in-8", Bichstatt.
Verlag der « Christlichen Schule », 1913, pp. 102 ; Einfiihrnng i»- die moderne
Religionspsychol., pet. in-S", Kempten, Kosel, 1923, pp. 140 — .J. Froebes,
S. J., Lehrbnch d;r experimentellen Psychologie, 2 in-8", Fribourg-en-Br.,
Herder. 1915-1920, t. 11, p. 476-509 — de Grand.maison, GR8ER, 1914,
p. 189-200 • — de Munntnck, O. P., ibid., p. 201-214 (sommaire) et RSPT,
1914, t. VIII, p. 5-50 an extenso) — .J. Maréchal, S. J., CRSER^ 1914,
p 2l5-21 — R. H. Thouless, An Introd. to the Psychol. of Relig., in-8",
Cambridge, Univ. l'i-ess, 1923 — H. P:narb, L'étude comparée des relig.,
t I, c. IX, histoire des théories : t. II, c. vi, étude des méthodes.
3°. pour une bibliographie pins complète : H. I-'aber, op. cit., p. vii-xii —
Li. H. Jordan, Com,pa.rative Religion : its udjuncts and allies, in-8", Londres,
Milford, 1915, p. 136-162 — G. Berguer, Psychologit religieuse, dans .APs,
1914, t. XIV, p. 1-91 : à part, in-S", Genève, Kundig, 1914 — H. Pinard,
à la suite de l'article Expérience relig., dans DTC, 1912, t. X, col. 1864-1868
— pour la littératui-e récente, les Archives de psychol., Genève, 1902 sq.,
VArchiv fiir Religionspsychologie, Tubingue, 1914 sq., l.i Revue d'ascétique et
d( mystique, Paris, 1920 sq.
(1) Voir sur ce point, E. Doumergue, Les étapes du fidéisme, pet. in-8",
Paris, Fischbacher, [1906], et notre étude, La théorie de l'expérience relig.
de Luther à W. James, dans Revue d'hist. e.cclés., 1921, t. XVII, p. 63-83,
306-348, 547-574.
(2) Die différentielle Psychol., in-8". Leipzig, Barth, 1911 : sui- les mé-
thodes, p. 1, p. 30-148.
LA PRIÈRE 107
[11] La Psychologie de la Prière M).
par le R. P. GemELLI, O. F. M.
T. - J^a psyrlidliigie religieuse a ('in]tloyé. jusque dans ces
dernières années, des méthodes qui en ont faussé les résultats.
Le dessein de diriger les recherches de psychologie religieuse
en usant d"une luétiiode objective, a déterminé à étudier le fait
psychidogique en le considérant exclusivement d'après ses coef-
licients et ses éléments extérieui's (physiques, physiologiques,
historico-sociaux; . Nous avons vu se produire, en conséquence,
les interprétations suivantes :
1. itilcrpréfatioii biologu/iic (LiiUBA), qui réduit le fait reli-
gieux à ses facteurs historiques dans révolution humaine ;
2. inlerprrfiifinv p.syc li o - ph ys i ologique (Guimaraens. Murisier) .
(]ui rt'duit le fait religieux à ses ('oelficients })liysiologiques ;
3. (lodrinr pnl liofogique, qui explique le fait religieux en fonc-
tion i\e^ cas itathologiques (doctrine de la névrose' de Janet)
ou la j'éduit à la t l'ansformation ou sublimation de l'instinct
sexuel (Freud) ;
4. dnctrinr de V cxpéricnçi' religii'use. qui intei'pi'ète le phénci-
mène religieux, titut en reconnaissant son irréductibilité,
comme une fonction de la volonté (doctrine volontariste de
James), ou bien qui l'intcrpiète. eu donnant une importance
exclusive à son contenu émotif (Wundt, Flournoy) ;
5. doctrine historigve. qui a interprété le phénomène religieux,
en se servant s^^ulemenf des données offertes par la biographie
ou par les conversions mêmes (Heiner), reconstruisant ainsi
ai'titb-iellement le développement de la conscience religieuse ;
G. doctrine sociologique, qui a interprété le fait religieux, en
se servant de l'étude comparative des manifestations extérieu-
]'es. surtout chez les primitifs (Lévy-Bruhl. Durkheim). ou
bien en ti-nuvant. dans lexamen comparatif des documents
ridigieux, l'histoire {\\\ di-veloppement Au mythe (Wundt) ;
(1) Ces pages sont un résuiné très bref de la communication faite à la
^'(■mainc de Tilbourg. I^'étude complète du sujet est encore en préparation,
car il est nécessaire de faire d'autres recherches expérimentales, pour illustrer
fiuelques points secondaires. Elle sera publiée, dans le coui'ant de l'année,
dans les Puhhlicazioni lUW Vniveisità cattolUd dtl Sacro Cuore, série terza,
Psicologia. — L'étude a été faite en collaboration avec le Docteur A. Canesi.
198 A. GEMELLI
7. doctrine de la subconscience, qui interprète le fait religieux
comme un exposant de la subconsoience (Delacroix, Second) .
Dans toutes ces interprétations, nous avons l'influence d'un
des préjugés suivants :
a. positiviste, d'après lequel, en voulant interpréter tous les
phénomènes par la science, le fait religieux lui-même a été
réduit à ses coefficients historiques (méthode sociologique) ou
physiques (méthode psycho-physiologique et méthode physio-
logique etc.) ;
b. idéaliste, qui, en développant la dialectique de la vie spiri-
tuelle et en englobant cette dialectique dans la conscience
religieuse, enlève à la "vie religieuse toute son importance et
la réduit à l'étude du développement de la pensée humaine, en
niant, par cela même, la possibilité d'une psychologie du fait
religieux.
Ainsi les interprétations psychologiques erronées du fait re-
ligieux, au lieu de nous donner une psychologie des faits reli-
gieux, nous ont-elles apporté des systèmes de philosophie de
la religion.
n. — Devant ces insuccès, nous pensons devoir reprendre
les recherches d'un point de vue purement psychologique, c'est-
à-dire en faisant abstraction de toute préoccupation philoso-
phique ou religieuse.
Un mouvement remarquable dans ce sens s'est déjà dessiné
dans les dernières années. Il nous a donné de bonnes études de
Staehlin, Kofka, 'WuNDERi.E, GiRGENSCHN etc. Nos rechcTches se
rattachent à celles qui ont été faites par ces psychologues.
'La méthode que nous avons suivie présente les caractères
suivants :
1. Méthode objective, c'est-à-dire que nous faisons abstrac-
tion de tout jugement de valeur sur le fait religieux, objet de
notre étude. — Deux précautions s'imposent toutefois :
a. Nous prenons le fait religieux dans sa totalité, tel qu'il se
présente à nous. — Si une âme affirme l'origine surnaturelle
de sa vie religieuse, nous considérons cette assertion comme un
fait — d'une part sans l'exclure, parce qu'elle fait appel au
surnaturel, d'autre part sans prononcer un jugement de vérité.
Cette intégralité d'observation du fait religieux nous permet
d'être réellement objectifs.
PSYCHOLOGIE DE LA PRIÈRE 199
h. Nous nous niellons sur le terrain exact des faits, ce qui
ne veut pas dire que nous voulions barrer la route à toute
conclusion d'ordre philosophique. Cela serait injusfo et impos-
sible, car il n'est pas possible de séparer nettement la science
de la philosophie, et encore moins la philosophie de la psycho-
logie, qui par rapport à la philosophie se trouve dans une
position particulière, à cause de la nature de son objet.
2. Méthode introspective. — Nous pensons que Tétude du fait
religieux ne peut être faite que par l'introspection, qui est la
seule méthode pour étudier le fait psychique directement. Ce-
pendant, ici encore, nous prenons quelques précautions :
a. Nous reconnaissons que la recherche historique ne peut
pas nous donner un matériel sûr, des documents incontestables
de la vie intérieure ; c'est à la faiblesse de la méthode histo-
rique qu'il faut attribuer bien des constructions artificielles.
]>9.v exemple sur la conversion ; Heixer, Mainage) ; toutefois
nous pensons que. par quelques éléments et dans certains cas,
elle peut servir de contrôle.
h. Nous reconnaissons aussi que la biographie et l'autobio-
graphie peuvent êti'e d'un grand secours, surtout comme con-
ti'ôle des données tirées de l'introspection. Dans ce sens, on
jieut utiliser d'autres éléments comme la prière, les soliloques,
les confessions etc... Mais nous estimons que ces éléments
doivent être interprétés avec beaucoup de précaution.
c. Nous reconnaissons même la valeur des questionnaires.
S'ils sont bien dressés et si les questions sont bien posées, ils
peuvent servir de complément utile ; mais nous doutons un peu
de la sincérité de ces documents.
d. Les déviations pathologiques peuvent présenter à l'étaf
exagéré quelques élt'mcnts de la vie psychique normale ; pour
ce motif, la méthode pathologique peut être employée utile-
ment, pour interpréter quelques données obscures. Dans ce
sens, on peut utiliser aussi la psycho-analyse (Freud).
e. Enfin on peut tirer des données utiles, pour l'interprétation
de la vie psychique, même de ses corrélatifs psycho-physiologi-
ques : mais ces éléments sont toujours corrélatifs et non pas
essentiels.
3. Méthod'' expériiv'ntale. — - L'introspection purement occa-
sionnelle, même faite par des personnes habiles, peut amener
200 A. GEMELLI
à attribuer de riruportanee à des éléments qui sont au contraire
secondaires. Un exeniple nous est donné par Jawbs qui. malgré
ses aperçus pénétrants, a parfois attribué une valeur essen-
tielle à des éléments secondaires.
L'introspection doit être systématique, méthodique, c'est-à-
dire ap})liquée d'après les principes et les méthodes formulés
par récol*^ de Wur/.Iiourg (Kuelpe) .
III. — Une autre cause d'insuccès doit êti'e cherchée dans
1 imprécision de l'objet de ces études.
La grande variété de la vie religieuse nous donne une physio-
nomie différente i)our chacune de ses manifestations. De là
vient qu'on a pu voir certains auteurs présenter comme des
caractères communs de la vie religieuse tels états vagues et
confus comme ceux de la religiosité, dans le sens strict du
mot. c'est-à-dire des manifestations, des états jiropres aux re-
ligions primitives.
a. Nous pensons qu'il est nécessaire de limiter le champ des
observations et de préciser l'objet de la recherciie ; il sera pos-
sible de [tasser ainsi à une étude couiparative. Nous avons
choisi pour h- moment l'étude expérimentale (c'est-à-dire par
l'introspection provoquée) de la prière, dans des sujets qu'
pratiqupui la religion catiioli(iue. Nous nous proposons toute-
fois d'étendre plus tard le champ de nos recherches.
b. Nous excluons aussi l'étude de la prière dans des condi-
tions singulières, ccst-à-dire dans les états mystiques, car
dans ce cas nous nous trouvons vis-à-vis d'expériences qui
méritent d'être étudiées à part.
IV. — Plan de nos recherches. — On choisit et on dressa des
sujets capables de faire des introspections. A ces personnes on
présenta différents textes de prières, d'invocations, de frag-
ments religieux, en leur demandant de les lire, de s'appliquer
à en comprendre le sens, pour se mettre dans l'état d'âme
inspiré par le fragment proposé, de manière à obtenir qu'elles
s'adressent à Dieu par la prière. Ce résultat une fois atteint, le
sujet était invité, d'après les méthodes et avec les précautions
indiquées par l'école de Kuelpe, à rapporter très exactement
toutes les expériences [Erlehnis) qu'il avait eues. On rédigeait
ensuite un compte rendu (protocole) très Adèle.
Pour compléter cette recherche, on a étudié soigneusement
PSYCHOLOGIE DE LA PRIÈRE 201
la vie religieuse des différents sujets et on a cherché, par des
questions habiles, à mettre en lumière le type de vie religieuse
de chacun d'eux. Six sujets furent ainsi insti-uits et utilisés.
On rédigea de plus un questionnaire, qui fut envoyé à plusieurs
personnes. L'examen diligenl des réponses permit d'éclaircir et
de contrôler quelques points encore obscurs.
V. Résultats obtenus. — a. Etats ou phasps de la prièrr.
1. Etat de recueUlcuicut. caractérisé surtout par des éléments
affectifs, dérivé^ de la comparaison établie par le sujet entre
lui et la personnali !('■ di\ine sentiments dindigniti'. de pau-
M'eté, d'insuffisance t^iv. .
2. Etat d'aspiratidfi. caractérisé i)ar la considération intel-
lectuelle de la pei'sonnalité divine. Le sujet cependant a tou-
jours présente, comme dans un second plan, sa propre person-
nalité. Dans cet état percent déjà, de façon plus ou moins nette,
certaines tentatives de formuler une prière avec ses pensées.
3. Réalisation de la prière Cette phase est atteinte seulement
quand le sujet réussit à se rendre la divinité présentr. Cette pré-
sentation n'est pas cependant isolée, mais en relation avec son
moi. Les modes de ces j'apports sont tout à fait différents selon
les sujets et caraclérisent les types de la prière.
4. Réalisation de la formation de la prière. Cet état peut
même manquei' ou mieux encore il peut être inclus dans le
précédent. Dans cet état nous avons entre la divinité et le sujet
un échange de prières, d'afïections, dont le résultat est que le
sujet transforme sa persttnnalité et vit en lui-même des élé-
ment < qu'il a reçus de la divinité.
Cet état peut avoir différentes formes : soliloque - colloque
— ahamlon ; leur différence n'est pas foncière, mais senlemenf
aci-identelle : c'est toujouj's Dieu présent dans le sujet.
b. Elém^'uts psychiques qui enfi'ent dans la prière.
Xous notons les suivants :
1. Eléments affectifs qui se révèlent surtout dans la conscienc(>
de la nullité, imlignité. infériorité vis-à-vis de la majesté île
Dieu, avec accompagnement de plaisir ou de peine (Lust und
Vnlust . selon le contenu de la prière même.
De toute façon, il est possible d'exclure d'une manière abso-
lue que. comme fondement de la vie religieuse et de la prière,
il y ait un état affectif unique, fondamental. Ainsi ces expé-
202 A. GEMELLI
riences viennent -elles démentir la théorie émotionnaliste du
fait religieux. Les états affectifs ont une valeur seulement
comme éléments corrélatifs ; il;? colorent les différents conte-
nus de conscience, en rendant leur jeu plus vif et plus intense,
mais sans avoir aucune fonction plus importante.
2. Représentations. — D'ordinaire, le jeu des images est très
vif. Mais, tandis (juc la doctrine associationniste expliquait
toute la vie psychique par les représentations, leurs liens et
leurs répétitions, nous avons remarqué, même dans l'état de la
prière, que le jeu des représentations ne sert pas à expliquer
la vie j)sychique. Celle-ci ne présente pas seulement des conte-
nus, mais des fonctions, c'est-à-dire non seulement des images,
mais surtout une activité (|ui, comme nous le verrons plus loin,
est celle du moi. De toute façon, le jeu des représentations na
pas d'importance : il est toujours guidé par des pensées, qui
peuvent transform"r aussi la valeui' de cette mèiiH^ représen-
tation, en lui donnant une valeur symholique.
3. Processus volitifs. — Ceux-ci n'ont pas une activité domi-
nante dans la vie religieuse. Ils sont |ilutôt le produit et les
conséquences dernières que des éléments déterminants. Nous
pouvons donc, sur la base des faits, mettre de côté les thèses
volontaristes : les processus volitifs ont une importance secon-
daire pour expliquer la vie religieuse. Au contraire, la vie reli-
gieuse a une large influence sur les motifs (valeurs' des déter-
minations volontaires.
4. Les éléments intellectuels on! au contraire une importance
remar(iuahle et générale : ils sont l'élément fondamental de la
prière. Ce sont des pensées qui la dirigent et qui coordonnent
les éléments psychiques qui lui appartiennent. Nous nous trou-
vons en présence d'une véritable actuation de pensée productive
et créatrice, qui aboutit à mettre l'individu en face de la divi-
nité, lui fait reconnaître sa dépendance et par là donne à la
personnalité une plus grande activité, une plus sûre précision
de caractère. Nous constatons donc une véritable fonction du
moi, qui se met en communication avec la divinité. Nous avons
vu plus haut les différentes modalités de t-e rapport. Il nous
suffît ici de relever que l'élément central de la prière, au point
de vue de la psychologie, est la ti'ansformation et l'activité de
la personnalité de celui qui prie.
PRÀHIST. ARCHÀOLOGIB UND KLLTURHIST. METHODE 203
^'I. Les conclusions auxquelles nous sommes arrivé par notre
élude, sont les suivantes.
La prière n"est pas le produit dim état émotif (théorie émo-
tionnelle). Il ne faut même pas la reléguer exclusivement dans
le domaine de la volonté (théorie volontariste). L'élément que
nous avons relevé comme le jilus important, c'est la pensée.
Dans la prière chrétienne, la personnalité acquiert une plus
grande décision et précision, une activité plus vigoureuse, qui
est affirmée en face de Dieu.
Ce fait n'est qu'une condition de la prière : c'est-à-dire qu'il
est l'état psychique qui en permet la réalisation.
La prière se produit, quand il y a, entre la personnalité de
celui qui prie et celle à laquelle il s'adresse, un échange de
pensées et d'affections, dont la conséquence est que la person-
nalité de celui qui prie est renforcée et rendue plus active, et
réalise, dans sa première élévation, la présence de Dieu dans
l'individu même. Il n'est pas nécessaire d'insister pour montrer
comment ces données, démontrées expérimentalement, contre-
disent d'une part les interprétations sentimentalistes et volon-
taristes du fait religieux et comment elles viennent d'autre pari
confirmer cette doctrine scolastique de la prière qui semblait
être le fruit de l'abstraction et qui est le fruit d'une psychologie
mûre et élaborée, bien que ceux qui l'ont proposée n'aient pas
employé cette rigueur de langage que la psychologie moderne
a adoptée.
[12] Prâhistorische Archàologie
und kulturhistorische Méthode,
von Dr. Oswald Menghin, o. 6. Professor fiir Urgeschichte
des Menschen an der Universitât Wien.
Auf dem (Tcbipte der Pràhistoi'isclien Archàologie wird der
Kultui-kreisgedanke schon làngst liorûcksichtigt und steht in
neupstcr Zeit geradezu im [Nlittelpunktc des Intéresses. Die
Verbindung zwischen den ethnographischen und den àltoi'en
archàologischen Kulturkreisen ist hingegen von Seitc der
Pràhistoiiker nuch so gut wie gar nicht versucht worden. Ihr
sind die folgenden Ausfûhrungen gewidmet. Sic konnen in dem
zugewiesenen Raume nur einen knappen Auszug des Vortrages
204 O. MENGHIN
bieten. Auf die Beweisfûhrung hinsichtlich vieler Ei'nzelheiten
mus.s hier verzichtet wei'den. Man wird sie in einem lângeren
Aufsal/.e im Anthropox iiaclilesen kùnnen.
I. DAS ALTPALAOLITHIKUM.
Dus AltpaldnliUiikuni kann nacli den neuesLen Foi'selmngs-
ei'gehnissen Obermaibrs auf deni JBoden Europas in zwei Kul-
tiirkreise goschieden wei'den.
1. Drr ivrsteuropâific/it' Kultiirkn-is ih-s Altyaldolithilxintis al-
tère FaustkeilkuHur, Pradielléen bis Altacheuléen.^ — Chai'akle-
iMsIisches Werkzeiig ist der zweiseitig bearheitete Faustkeil.
l)ie l\leinindu.<li'ie ist alypisch. Knochenartefakte fehlen. Der
G]'o:?.st('il dei' (TPi'ate hesland olî'enbar ans Holz. Die Wohnung
l:ig wahi'cnd dei' warnicn Cbt'dleszeit ini Freien, wàhrend der
vii'l kaltcreti Acheuli.eriode id'l aiu-h in Hohlen. Der Gesamt-
kulliirsland ist ein niede7:e]' Jàgernomadismus. Vei-breitet ist
die rclile altiialaolifhisehe Faustkeilkiiltiir in Westeuropa
l'Fi'anki'i'icli. Spanien, l-:ngland. Italien}, in .Mitteleuropa —
ddcli liier nu r insular iind arlieiilzeitlich — , in Nordafrika und
in Asien. wolier sie wohl iiberAfrika nach Europa eindrang.
Die Piiysis der Faiistkeilinenschen ist unhi'kannt. da aile
Neandertalskelette dem nâchsfen Knltui-kreise angehoren.
2. Drr o.stmropdischf Kulliirltreis (1rs Altpalàolifhiku tus Hand-
spitzeiikultur'. Pi-iiiiioustérien liis AIuusl érien) . • — Faustkeil und
zweiseitige Bearbeitung felilen ganzlidi. Leittorinen sind Hand-
spitze, Sehaber. Klinge aus Stein : im Pi'ânioustérien sinil sie
kaum ausgebildet. D^jis Vorkoninien vnn Knoohenartefakten
steht ausser Frage. Als Wobnung dienf schon in ôcv Warmzeif
Holile und Abri. Dass in Krapina Kannibalisnuis hei'rschte. ist
niehl gesiehert. Es dai'f wenigstens die Vennutung geàussert
werdcn. dass es sicli in Kraj)ina uni eine Brandbestattung
gehandelt bat. Skelettbestattungen in HTihlen sind aus dem
klassisr-hen Moustérien (altère Klingenkultur zur Genûge
bekannt. Aurh dièse Kultur darf als niederer Jàgernomadismus
bezeichnet werden. Das Pràmoustérien ist in Deutschiand, in
der Schweiz, sowie in den Lândern dei' ehemaligen oesterrei-
ebisch-ungarischen Monarchie verbreitet. Es ist gleichzeitig
mit dem Chelléen und Aeheuléen in Westeuropa. Das Mousté-
rien flndet sieh von Ungarn bis Frankreich ; in Spanien und
PRÂHÏST. ARGHAOLOfJIF: IND KULTLRHIST. METHODE 205
Enghuid ist es unUPulhcli. Anssereuropâische Fiinde kônnen
nicht siflifr zugfiwiosen werdon. Dei' Mensch dièses Kulturkrei-
ses ist dor Homo primigmius (Neandertalrasse; . Der osteuro-
pàisehe Kulturkreis hat denigemàss in Deutschland und Frank-
roieh den westeuropàischen tiberdeckt und /.uni Voi'schwinden
geitraelit. Jungacheuléen, Levallois. La Micoque und Altmous-
Lérien sind ais Misclikulturen der Ijeiden Kreise anzusehen.
Xon den durcli W. Schmidt aufgestellten IJrkultui'en der re-
zenten Primitiven deekt sich dei' <^.ro{/am-f/esfhlechtstolf'niistiscfif^
{lasmanisr/ic Kulturkreis zipmlieh auffallig mit unserem ost-
euro[)aisclien. Das lithische Inventar ist identisch. (Dio Beliaup-
tung, dass unter den tasmanischen Steingeràten Faustkeile
viu'komnien. ist l'alschj . Da die Tasnianier Leichenvi'rbrennung
kennen, wàre der Paiallelnacliweis fur Kra])ina vun grossier
Wichligkeit. Widersprechend*» Zûge finden sieli keine. Der
cxogaui-ylcirlirprlitlic/ii' Kulturkreis {Bumcrangkultur ist niogli-
clierweise mit dern westeuropàischen zu identifizieren. Dass der
Faustkeil ihm angehôrt, wird von den Ethnographen zwar nicht
Iterichtet ; aber von archàologischer Seite lâsst sich dartun,
dass der liumcrang in Ivulturkomplexcn auttritt, die in irgend
einem Zusammenhange mit Faustkeilkulluren stehen (Gampi-
gnien. altàgyptische und altsumerische Kultur). Der alithische
exogani - m onogaui isi i se lie Ku It urkreis {Pygmàenkultu r. HolzkUl-
lur), der nach Schmidt vielleitdif am Beginne dei' gesamten
Kultureniwicklung steht und sich durch den Besitz des Bogens
auszeichnel. ist na(di deni gegcnwaidigen Stande der archâolo-
gisclien Forschung unmittelbar nicht nachzuweisen. Auf afri-
kanischcm Hodcn schcint cr allerdings aus einer jungpalâoli-
thischen Scliichl prs(dilipssbar zu sein. Darûbei' spàter.
II. DAS JUNGPALAOLITHIKUM.
Im .Juugpalâolithikuo) kann man bereits eine ganze Anzahl von
Kulturkreisen unterscdieidcn, da nichi nur mehr oder weniger
geradiinige En.twicklungen aus den l'rkulturen, sondci-n aucti
Mischungen verschiedenster' Art in Frage kommen.
1. Der ivesteuropaiscJie Kulturkreis des Jungpalàolithikuius
(mittlere Klingenkiiitur, Aui'ignacien) . ■ — Die lithische Technik
ist durch ausnaiimshis einseitige Bearbeitung und durcli die
206 O. MENGHIN
Steilrptusche gekennzeichnpt. Genetischer Zusammenhang mit
dem Moustérien wird ziemlich allgemein angenommen. An For-
men erscheinen Klingen, Spitzen, Bohrer, Schaber, Kratzer,
Mikrolithen, die zur Fell-imd Knoehenbearbeitung, aïs Messer,
Sâgen, Dolche, Lanzen nnd dergleichen gedient haben. Die
Knocheiiindnstrip erzeugt Spitzen, Messer. Schaber. Zwingen
nnd dergl. Aile Keulen nnd keilartigen Instrumente fehlen. Pfeil
und Bogen waren aller Wahrseheinliehkeit nach unbekannt. Die
Kunst des Aurignaeienmensehen war eine derbnaturalistische
Schnitzplastik in Elfenbein nnd Knochen, seltener in Stein und
Ton. Gegenstand der Darstellung waren vnr allem nackte
Frauen, aber auch Mànner nnd Tiere. Die « Ephebenfignr »
von Laussel ist mit einem Giirtel bekleidet ; eine Frauengestalt
trâgt ein Trinkhorn. Die franco-fantabrische Parietalkunst des
Altamirastiles gehort zu einem guten Teile bereits ins Aurigna-
cien. Ihr nur einen geringen Bruchteil des westeuropàischen
Kulturkreises nmfassendes Verbreitungsgebiet macht es so gnt
wie sicher, dass sie ihre Entstehung Anregungen ans dem be-
nachbarten inediterranen Kulturkreise verdankt.^ Dem Aurigna-
cien gehi'iren auch Abbildungen verstiimmelter Hànde an. Die
Ornamentik ist gering entwickelt und geradlinig. Die Wohnung
des Aurignaeienmensehen war die Hohle, das Felsdach und das
otTene Land. Herdlocher sind nachgewiesen, primitive Hùtton
wahrscheinlich. Erdbostattungen in und ausser Hohlen sind
gesichert ; Zweistufigkeit der Beisotzung und Roibemalung dei
Skelette wurde oft behauptet, steht aber nicht fest. Die rituelle
Beigabe von Ocker, Rotel, Musehelschmuck und anderen Dingen
kann hingege-n nicht bestritten werden. Das Aurignacien ist
von Nordspanien bis Bulgarien nachgewiesen und flndet sich
auch wieder in Syrien. Dièse Kultur ist wahrscheinlich iiber den
Balkan eingewandert und muss als hoherer Jâgernomadismus
bezeichnet werden.
2. Der osfeumpàische Kulturkreis des Jnngpalâolithikums
(mittlere Faustkeilkultur, Protosolutréen). - Dieser Kulturkreis
ist leider nur am Ostrande des erforschten Gebietes greifbar
und erscheint weiter westlich nur in Mischungen mit der wesl-
europàischen Kultur. Das in ungarischen Hohlen nachgewiesene,
dem Jungaurignacien ungefàhr gleichzeitige Protosolutréen
enthâlt als wichtigste Leitform beiderseitig bearbeitete Keil-
PRAHIST. ARCHAOLOGIE LND KULTURHIST. METHODE 207
chpn aus Silex, deren Zusammenhang mit der Faustkeilkultur,
insbesondere mit dem ?ogenannten Ostacheiiléen Obermaiers
évident isf. Aus ihnen hat sich durch Einfluss der Aurignac-
kultur die Frûh- und Hochsolutréenlorbeerblattspitze ent-
wiekelt. Das Protosolutréen .stammt wahrscheinlirh aus den
russisch-sibirisehen Steppen. wo die Forsehung beinahe vôllig
versagt. Immertiin treten schon in den sogenannten Aurigna-
cienstationen der T'kraina Eigenheiten an den ïag, die nicht
allzuschwer mit dem Einflusse des osteuropaischen Kultur-
kreises in Verbindung gesetzt werden kônnen. Hierher gehôrt
vor allem die schematisehe Figuralkunst und die hochent-
wickelte Ornamentik dieser Fundplâtze (Kiew, Mezine). Sie
leiten zum Geometrismus einiger Frûhsolutréenarbeiten binû-
ber. Die iibrigen Elemente dièses Kulturkreises mûssen aus den
spateren Miscbkulturen abgeleitet werden. Klar wird aber aus
diesen Yerhàltnissen, dass die in Frankreicb gewonnene Chro-
nologie des Jungpalâolithikunis fur Osteuropa ebenso wenig
gilt wie fur das Mediterrangebiet. weil es sieh hier zum Telle
um andere Kulturen dreht.
3. Der ostciiropàische Mischkulfiirkreis des Jiingpalàolithikums
(Lorbeerblattkultur, Solutréen).- Seine auffallendste Form sind
lorbeer-. auch weidenblattfôrmige Feuersteinlamellen von vor-
zûglicher beiderseitiger Arbeit. Sie entwiekeln sich aus einer
ungleieh roheren Friihsolutréenform. die sieh unmittelbar an
den Protosolutréenkeil anschliesst. Es ist hezeichnend, dass
der letztere gegen Westen nicht ûber Ungarn, der erstere nicht
ûber Wurttemberg hinausgeht. wogegen das klassische Hochso-
lutréenblatt von Nordspanien bis Ungarn sich findet. Es war
wohl sicher ein Dolch. Die dicken Frûhsolutréenblàtter hinge-
gen durften, wenigstens zum Teil. wohl noch anders verwendet
worden sein, vielleicht in Zweigschlinge gesehàftet als Schlag-
wafTen. Dièse ganze Wandlung zeigt deutlich den Einfluss des
dolch- und lanzenreichen Aiungnacien auf eine andere Kultur.
der dièse Dinge, wenigstens aus Stein gefertigt. unbekannt
waren. Das Frùhsolutréen ist aber auch durch eigentliche Keu-
len aus Stein und Knochen (Briinn, Predmost) ausgezeichnet ;
man darf sie wohl unbedenklich auf den Kulturstrom des Pro-
tosolutréen zurûckfûhren. Desgleichen gewisse seltene Typen
und technische Fortsehritte des mâhrischen Frùhsolutréen, die
208 O. MENGHIN
Hacken. Gaheln und lirillpnfoi'nngen Beingeràte, das Durch-
bohren und Glafton des Steins. Das Silpxgerat tiagt dagegen
hauptsàchlich AurignacienrharaklPi'.
In der Kunst dos Frûlisolutrôen lindeu sich naturalistisrlie
und geometrischo Arlieiten. gorad- und kruiiiinlinige Verzio-
rungen — unter dieson besonders konzonlrisclu' Kreise — ne-
lieneinander, also dio Stile beider Kulturgruppen. Von beson-
dereni Interesse sind kb^'ine Hockei'figuren aus Knocben, dit
wohi mit Unrecht als scbwangere Frauen angescben werden.
Es sind ganz schematische Arbeiten.
Der Solutréeninenscb leblo in einer selu- kalten Zeit und be-
vorzugte daber HrdibMiwolinungen. Es fobb'n aber auch nicht
Freilandstationen. Grosse Anbiiufungen von Mahlzeitresten be-
weisen eine ge\Nisse Sessbafligkeil Prcdinost, Solutn'' . Grâber
oes Solutréen kennt man nur aus Màhron : eine Hot-kerbestat-
lung (Brùnn und ein Massengrab (Predniost'. Schmuck- und
Fleischbeigabon steben fur beide t'est. Das Friibsolutn'en felilL
in Westouropa ganz. das Hochsolutréen ist zwar dort voidian-
den, iiberspi'ingt aber gewisse Gebiete, so Nordfrankreicli und
die Pyreniien. Dass sich dio Solutréeniriis(dikultur von Oston
nacb Westen verbreitet liât, liogt nacb ail dem Gesagton auf
der Hand.
l. Der westcui'opai.sc/if' Misrhl.iill iirkrei.s des Jungpalàolithilni ms
(JLingere Klingenkultur. Magdalénien). - Die engen Beziebungen
in der Silexindustrio und in dei' Kunst. die das Magdalénien mit
dem Aurignacien vei'binden, macben es klar, dass es Gebiete
gegeben haben -muss. in denen sich dièse Entwicklung, von
Solutréeneintlûssen im grossen und ganzen unbehelligt.
vollzogen liaben kann. Doiiei Môglichkeiten bat die allzu
schematische Chronologie bisher zu wenig beacbtet, so dass
ihr selbst auf dem Boden Frankreichs nicht allgemeine
Berechtigung zukommt. Es miissen gewisse Ubergangsphasen
vom Aurignacien zum Magdalénien mit dem franzôsischen
Solutréen gleichzeitig sein. Beweise dafiir bat denn auch
neuestens Battaglia orbracht. Die Feuersteinindustrie des
Magdalénien stehf tief unter doni Niveau des Solutréen und ist
auch dem Aurignacien gegeniiber degeneriert. Nur wo es sich
um Werkzeuge fur die Knochenbearbeitung drebt. sind neue
und feinore Typen zu bemerken. also vor allern unter don Bobr-
PRAHIST. ARGHAOLOGIE UND KULTURHIST. METHODE 209
und Schabinstrnmentpn. Auf ausserordentlich hoher Stufe
steht dag-egen die Knorhen- und Hornindustrie. die mannig-
fache Typen hervorbringt. Hieher gehoren unter anderem ein-
iind zweireihige Harpunen, Lanzenspitzen mit abgesohrâgter
und gespaltener Basis. Speersehieudern und Sehaftstrecker,
Dolche, geôhrte und ungeôhrte Nadeln, Nadelbûchschen, Kom-
mando- oder Zauberstàbe, Knochenpfeifchen. Schàdelbecher. Es
ist ausgesf'hlossen, dass aile dièse Formen im Magdalénien neu
erfunden worden sind, obwohl nur wenige von ihnen Vorfahren
in àlteren Stufen besitzen. ^lan darf unbedenklich annehmen,
dass die meisten von ihnen schon friiher da waren, aber aus
Holz angefertigt wurden. Dass der Grossteil von ihnen aus dem
Aurignacien stammt, ist bei der sonstigen Beschaffenheit des
Magdalénien von vorneherein wahrscheinlich. Es fràgt sich nur
ob man sie von jenen, die gegebenenfalls aus dem Solutréen
herstammen, trennen kann. Nachdem wir das Aurignacien als
eine ausgesprochene Kiingen- und Spitzen-, das Protosolutréen
aber als eine Keulenkultur erkannt haben, dùrfte wohl kaum ein
Zweifel darûber bestehen, dass ailes was mit Lanze, Dolch und
Nadel zusammenhângt, dem erstgenannten Kuiturkreise zuzu-
weisen ist. Daraus ergibt sich aber nicht, dass die ûbrigblei-
benden Typen dem zweiten Kreise zugehoren. Das lâsst sich
lediglich fur den Schàdelbecher vermuten, da fur diesen natiir-
lich Holzvorbilder nicht in Betracht kommen. Sie mûssten dem-
gemàss eigentlich schon im Aurignacien erscheinen, wenn es
sie gegeben batte. Dass wir sie auch aus den beiden osteuro-
pâischen Kulturkreisen des Jungpalàolithikums nicht haben,
kann durch unsere mangelhafte Kenntnis dieser Kulturen er-
klârt werden. Pfeil und Bogen war dem Magdalénienmenschen
wahrscheinlich bekannt, aber wohl nur im sùdwestlichen Telle
des Kulturgebietes als Gabe des Mediterranenkreises, der dièse
Waflfe vom Anfange an besass. Fiir den dem Magdalénien zu-
fallenden Teil der Alperakunst gilt, was oben fûrs Aurignacien
gesagt wurde. Auch die plastisc-he und zeichnerische Kleinkunst
dieser iStufe zeigt Einflûsse vom Mediterrangebiete her. Unter
den Sujets sind die Darstellungen von Menschen mit Tiermas-
kon am interessantesten. Sie beweisen die Existenz von kul-
tischen Tànzen. Die Ornamentik der Magdalénienkunst ist zum
Telle krummlinig und hat somit wohl Solutréeneintlusse abbe-
210 0. MEXGHIN
kommen. Die Konntiiis dcv Vifliziiclil làsst sir-h fiirs Magdalé-
nien nicht erweisen. Dagegen liât man lien Ahrenbildern zu
wenig Beachtung gcschpnkt. In Vorhindvmg mit den Getreide-
kurnern vim .Mas d'Azil, die siidi niclU sd oline weiteres abtun
lassen und wohl kaum von Mâiisen eingeschleppt sein kônnen,
maciien sic primitivon Getreidebau fiirs Magdalénien durchaus
glaubhaft. Ev muss natûrliçh in anderer Umwelt entstanden
sein. Und da liegt es wieder sehr nahe. dièses Elément aufs
Piotosolutréen zuri'u'kzufùhren. da die àltesten Ackerbaukul-
turen, die wir kennen, das Gampignien, die altàgyptisebe und
altsumeriscbe Kultur, gleidi wie dièses mit der Faustkeilreihe
zusammenhàngen. Der Magdalénienmenseb wohnie aller Wahr-
scheinlichkeit nach oft in Hûlten, liebte aber auch die Hôhlen.
Wenigstens fur gewisse franzosische Liandstriche darf man mit
einer Art Sesshaftigkeit rechnen. Die Bestattiingen. meist
Hoe'ker, àlineln jeiien i\i'> Aurignacien. Die Verbreitung des
Magdalénien ej-streckt sieb in stark abnehmender Dichtigkeil
von Nordspanien bis Ungarn ; die jûngeren Stufen feblen im
Osten. Seine Heimat ist zweifellos Frankreich.
Nach ail dem Gesagten ist es nicht mehi- angàngig, das ge-
samte Jungpalâolithikum als hoheres Jagernomadentum zu
bezeichnen. Es dreht sich bei den drei letztbehandelten Kulturen
vielmehr walirscheinlich uin hackbautreihende Halbnomaden.
5. Drr nipditerraur Kullurkrpis d^s Jinigpaldolithiknms (Caj)-
sien. — Dieser Kulturkreis ist noch \v(mig bekannt, da sein
HaupLgebiet in Nordafrika liegt. und in Europa ihm nur der
grussere 'i'eil der iberischen Halbinsel und vermutlich auch
Italiens angehort. Die drei Stufen Alt-. Jung- und Endcapsien
siellen gewiss nur scheinbar eine innere Evolution dar ; in
Wirklichkeit dreht es sich zweifellos auch hier um die Ergeb-
nisse komplizierter Mischungsvorgànge, die umso sohwieriger
zu enthùllen sind. als ibre Komponenten vermutlich zum Telle
aus den uns archâologisch unbekannten Gebieten Afrikas und
Asiens herstammen. Demgemass wird dieser Kulturkreis spàter
in mehrere zu zerlegen sein. Fest stehl bislang so viel, dass
das Alteapsien dem Aurignaoien sehr nahe steht und im
gi'ossen und ganzen als ein Ableger desselben anzusehen ist. Da
sich aber zvvischen den beiden Kulturen dooh deutliche Unter-
schiede bemerkbar zuni machen seheinen. kann die Entstehung
PRAHIST. ARCHAOLOGIE UND KULTl'RHIST. METHODE 21 1
des Altcapsien vorderhand wohl nur so erklàrt werden, dass
sich in seinem Umkreise das Aurignacien liber eine fremdar-
tige Unterlage ergossen hat, durch die es von Anfang an
wesentlich modifizierl wiirde, iim sich im Jung- und Endcapsien
zn einer Mischkultur ganz selbstàndigen (îeprages auszu-
waehsen. Dièse Bntwicklung ist durch dpn allmàhligen Uber-
gang zu einer ausgesprochenen Mikrolithik charakterisiert.
Arbeiten aus Strausseneisi-hale (Perlen, Gefasse) sind hàuflg.
Ein wesentliches Merknial des Capsienkulturkreises ist fer-
ner die N'drliebe fur Felszeichnungen und Felsmalereien. wie
wir sie am besten aus Ostspanien kennen. Dièse machen den
Weg von einem primitiven expressionistischen Naturalismus
zu eineni extremen Schematismus, der etwa fûrs Endcapsien
angesetzt werden darf. Aus den âlteren Wandbildern, die Tânze,
Kàmpfe und Jagden darstellen, konnen wir die wichtige Tatsa-
che entnehmen, dass den Gapsienleuten Pfeil und Bogen, aber
keine Schilde und wohl auch keine Koclier bekannt waren. Die
Mànner gingen nackt, jedoch nicht ohne Schmuck, die Frauen
Irugen bei Tânzen kurze Rfjckchen. Die Beziehungen zur re-
zenten Buschniannkultur sind auiïallend und es kann ein ge-
netischer Zusamnienhang kaum bezweifelt werden. Vielleicht.
darf man sich die Sache so vorstellen, dass sich das Aurigna-
cien irgendwo in Afrika mit einer den Bogen fûhrenden Jàger-
kultur altpalàolithischen Gepràges gekreuzt hat. deren Trâger
Pygmoide waren, und dass von dieser Mischung einerseits die
Buschmannkultur. andererseits das Capsien abzuleiten ist. Das
Capsien. das. wie es scheint, gross- und kleinwùchsige Rassen-
elemente in sich vereinigte, ist als huherer Jâgernomadisnius
zu bezeichnen. Ob der Einmarsch des Aurignacien nach Afrika
ûbcr Spanien oder ûber Suez erfolgte. lâsst sich heute noch
nicht cnfscheiden ; walirscheinlicher ist das erstere. Dagegen
steht es ausser Zweifel, dass das Endcapsien. das vielleicht den
Haushund kannte. plutzlich uber die alte Kulturgrenze in Spa-
nien hiniiber nach Frankreich. England und Deutschland ein-
brach, wo es als Tardenoisien (auch Tourassien) bezeichnet
wird. Dadurch entstanden neue Mischkulturen.
G. Der u'esti'uropàischf Mischkulturkrris des Endpalàolithikums
(Azilien). — Dièse Kultur ist nichts anderes als die Mischung
eines degenerierten Magdaléniens mit dem Tardenoisien. Dem-
212 O. MENGHIN
gemàss sind in ihin Elomente aller drei Hauplknllnrkreise des
Jungpalàolithikums zu erwarten. Voni Endcapsien l'ûhren die
geometrischen Silices, die Mikrolithlk nnd. wie Obermaier
nachgewiesen hat. die schematischen ZeiclKni auf den Azilien-
kieseln her ; ans der Reihe Aurignacien- Magdalénien stammen
die Harpimen wné manche Feuersteinformen ; aus der Solu-
tréenahnenschaft der durch Kornerfunde \vahrseheinlich ge-
marlîte Pflanzenbau und wohl auch die iSr-hadelsepulturen. Das
GerôUbeil ist in der Azilienausprâgung gewiss ein Produkt
dièses Kulturkreises ; seine entfernlere HerkunfL steht vor-
dei'hand dahin. Die Verbreitung des Azilien ist eine be-
schrànkte und uinfasst Nordspanien, Frankreieh. England.
SùddeutS'Chland und ilie Sehweiz. Entstanden ist es zweifellos
iiu Sûdwesten dièses Gebietes. Wie ja auch die anderen Misch-
kulturkreise braucht es in seiner Zusammensetzung nicht ganz
lioniogen gewesen zu sein.
7. Dpi' nordeuropàiscke Kultnrkrris ilrs Endpalnolithikiims
(Maglemosekultur).- Dièse Kultur ist deutlich eine Vermengung
eines spezialisierten Spâtmagdalénien mit Tardenoisien. Arte-
faktformen und Kunst erweisen es mil aller Deutlichkeit.
Bezeichnend ist auch das Auftreten des Haushundes in diesem
Kulturkreise, der ausserdem von den crslen Vorlàufern des
nordischen Friihneolithikums (Campignienj erreicht wird.
Seine Verbreitung ist zwar noch nicht im entferntesten bekannt,
doch umfasste er wahrscheinlich in ziemlich dichter Besie-
delung ganz Norddeutschland. Danemark und die Insein.
Es liegt auf der Hand, dass die jungpalâolithischen Kultur-
kreise den Tiefkulturen W. Sghmidts entsprechen. Von diesen
decki sich der crogam-vatcrrechtliche (fotemistischc'} Kulturkreis
in besonders auffallender Weise mit unserer Aurignackultur.
Sie haben — um nur Gesichertes anzufuhren — gemein : das
l'ehlen der Schlagwaflfen, das Herrsche'n der Dolche umi Speere,
den Mànnergûrtel, die Schnitzplastik, die geradlinige Orna-
mentik ; von den erst im Magdalénien auftretenden Typen : die
Harpune. die Speerschleuder. Widersprechendes findet sicli
eigentlioh nichts. VS'ir konnen also ruhig behaupten, dass der
westeui'opàische Kulturkreis des Jungpalàolithikums mit dem
totemistischen der Ethnographie zu identifizieren ist. Demge-
PRÀHIST. ARGHAOLOGIB LND KULTCRHIST. METHODE 213
miiss kunnen wii- ihni audi dessen ûbrigen Eleniente vindizie-
ren : den Mangel an Schilden, Plattformbostattnng. Circum-
cisio und Ineisio. vor allem den Toteniismus selbst. - — In enge-
rpn Zusammenhang muss der totemistische Kultuikreis auch
mil dor Alicapsienkultur gebi'acht werden, nur tlass er hier
in Mis(;hung mit einer Urkultur, wohl oinem Ableger der
ScHMiDT'seben PygmàenkuUur voiiiegt. Dieser Mischkultnrkreis
erscheint im 'ScHMioTsclien Système nicht. Wenn man bedenkt,
dass ziemlich bald nach Ablauf des Jungpalanljthikums gcrade
in Nordafrika jene ^■olker greifbar werden. die \\\v mit dem
Nanien Hamiten zusammenzufassen pflegen. und dass diesen
neben anderen Elementen zahlreiche wesentlicbe Ziige der to-
Lemistischen Kultur eignen, dann kann kaum ein Zweilel darii-
ber obwalten, dass wir die Gapsienkultur im grossen und
ganzen als protohamitiscb bczeichaien dûrfen.
Dqt f^xogam - m uitfrrcchtUch r Kiiltv l'kre is ( Zwei kl a s s enku 1 tu r )
weist zablr'ciclie Zûge auf, die es niebt allzu gewagt erscbeinen
lassen, ihn mit dem osteuropàisehen Kulturkreise des Jungpa-
liiolitliikums, wie wir ihn aus dem Protosolutréen und den
Mischkulturen erfassen kTtnnen, zu identitiziei'en. Solehc Kul-
turolemente sind : das Fehlen von Stichwaffen, wotur Hieb- und
Schlagwafîen eintrelen, das Maanderornament. krummlinige
Ornamente, konzentrische Kreise, Hackbau und Gartenbau.
Schâdelkult und die damit zusammenbàngenden Hockerfiguren.
Maskentanze. Das SolutréeTi ist demnach als eine INIischung der
Zw'eikiassenkultur mit der totemistiscben unter Yorwiegon der
ersteren, das Magdab'uien eine analoge Misehung unter Yor-
wiegen der letzteren aufzufassen. Beide Kulturen haben gieich
wie die noch komplizierter zusammengesetzten endpalàoli-
tliischen (Azilien und Maglemosekultur) nur rein europâisehe
Bedeutung. Ausserhalb unseres Kontinentes sind nur analoge,
nicht identisrhe Mischungen zu erwarten. Hingewiesen werden
muss aber noeh auf die Tatsache, dass das von ethnogra-
phiseher Seite supponierte Yerwandtschaftsverhâlinis zwischen
tasmaniscliem und totemistischem Kulturkreise einerseits,
Bumorangkultur un<l Zweikiassenkultur andererseits durch die
ganz unabhângig davdu auffindbaren genetischen Beziehungen
zwiselu^n den Fauslkeilkulturen (Chelléen, Acheuléen, Proto-
214 O. MENGHIN
solutréen) einerseits. den Klingenkulturen (Pi'àmoustërien,
Moustérien, Aurignaeien) andererseits vollkoiuinen paralleli-
siert wird.
III. DAS FRUHNEOLITHIKUM.
Das FriikneoUthikum. ist eine verhaltnismàssig noch selir
dunkle Kulturperiode. Immerhin gestattet das Material einige
Gruppen zu unterscheiden.
i. Der nordisch-mediternmc Kulturkri'is des Friilineolithikums
(jiingere Faustkeilkultur. 'Campignien) . - •Gemeinsam ist dieser
Kiiltur die Kenntnis deutlich axtformiger mid ûberhaupl grus-
ser zweiseitig bearheiteler Silexgerâte, insbesundere aucli des
Faustkeiles, ferner des Bogens iind Pfeiles, der Keramik, des
Ackerbaues und einer viel hoheren Sesshaftigkeit als sie irgend
einer jungpalàolithischen Gruppe eignete. Sie tritt in mehreren
Varianten auf, von denen eine mcditerrane und zwei nordische
Bedeutung besitzen. Von der niediterranen, dem Siidcompignien
ist reifhes Feuersteinmaterial, aber sonst nur sehr wenig
bekannt. Vor allem ihr Verliàltnis zur altàgyptischen Kultur ist
noch reeht dunkel, obwohl kaum ein'Zweifel darùber bestehen
kann, dass sie eine Komponente derselben bildete. Ihre Verbrei-
tung ist fur Syrien, das ostlichc Nordafrika und Italien gesi-
chert. Es ist sehr gut moglich, sogar wahrscheinlich, dass sie
in Vorderasien hoheres Alter besitzt als die verwandten Kultu-
ren in Europa und Afrika. Von den nordischen Gruppen ist das
eigentliche Campignien oder Westcanipignien durch zahlreiche
Fu'nde belegt, aber im einzelnen wenig gut studiert. Seine Kera-
mik steht auf ni(;ht unbedeutender Entwicklungsstufe und
sogar die Bekanntschaft mit dem Hausrinde wird ihm zu-
geschrieben. Doch wissen wir noch nicht, ob es sich da nicht
um chronologische Difïerenzen handelt und hinter der uns
bekannten wohlentwickelten eine altère primitivere Fazies steht.
Die Verbreitung des Westi-ampignien liai ihre Zentren in
Belgien und im mittleren Frankreich. Ihm ist wohl das nord-
spanische Asturien, das besonders rohe Steinartefakte aufweist
und in den alteren Schichten der Keramik entbehrt, als ein
verkommener Sprossling anzugliedern. Auch auf britischem
Boden fehlt dem Campignien zumeist die Keramik, obwohl die
Steinformen annàhernd die gleichen bleiben. Hier maclit sich
PRÂHIST. ARCHAOLO(^.lK IND KULTURHIST. METHODE 215
hezt>iehnond('r\veise aurli cin starkfi' Tardenoisioncinschlag
geltend, der sonst dem Westr-ampignien boinahe ganz fehlt.
Weitaus am besten erforsoht isf das yordcainpignirn. gewolm-
lit'h Kôkkpnnioddinger- oder Ertebollekultur genannt. Aus ihr
kennen wir domgemâss am meisten Einzeltypen. HierluM' gebort
zum Beispiel dpr Kaiiuii. die quei'sclineidige Plpi!s})itze, dpr
Bunierang. Die Fuini niamher binnenlândischer Abfallshaufen
spricbt selir dafûr. dass das .Nordcanipignien die Pfahl-
baiisiedlungswei.se — aucb den Festlandspfahlbau - — kannte.
Die genannten Kuliuifornien erscheinen nun aber auch iin
vor- und fi ûbgesebicbtlichen Aeg^'pten ; man darf sie daher
zienilich uubedenklicb dem ganzen nordischmediterranen Kul-
turkreise des Fi'ùhneolitbikums zusehreiben.
Nui' Jene Dinge. ilit mit der einseitigen Entwicklung
(\ç:V Ertebollekultur zusummenliàngen. wird man als Sonder-
erseheinungen (Jicser l'ntergruppe zu werten haben. wie z. B.
den Muschelabfallhaufen selbst. der untei' gegebenen Bedin-
gungen in Jfder Kultur entsteben kann. Das Nordeampignien
ist am reiilisten in Danemark und Sûdschweden entfaltet, aber
auch in Norddeutschland vei'treten. Wahrseheinlicli sind ihm
auch die frubneolitbischen Binnenlandfunde in Deutschland
zuzuzâhlen.' Im ferneren Skandinavien erscbeinen Sondèrent -
wicklungen dieser Kultur (Nôstvetkultur, Lihultkultur) . Zum
mindesten die erstere làsst sich am besten dureb Eintluss vom
arktischen Kulturkreis lier erklâren. Frûbneolithische Dinge
sind auch aus d(^n liait iscben Gebieten Russlands bekannt.
Wabrscheinlicb stellen sie als Ostcanipignien eine dem Nord-
campignien nâher verwandte (iruppe dar. Gemeinsam ist ihnen
anf aile Fàlle der Hund. Ans dem ferneren Osten Russlands
kennen \vir zwar vie! Silexgeràt. aber nichts sicher Frûhneo-
lithisches ; das beweist in diesen so schlecbt erforschten Làn-
flern aber wenig. Ebenso mangelt hisher aus dem eigentliehen
Mitteleuropa. insbesondere aus dem Dunaugebiete aind vom
Balkan der Nachweis frûhneolithisciier Besiedlung, Aber wie
einzelnc ungarische Faustkeilfunde. die als nachpalâolithisch
angesehen werden. zu lieweisen scbeinen. daj i' man aucb hier
noch auf neue Entdcckungen liofïen. Da nun aucb Spanien. vom
âussersten Nordeu abgesehen, bishei- gai- keine Spuren campi-
gnienartiger \>'er-kzeuge ergeben bal. ist die Fi'age, wo die
216 O. MENGHIN
Verbindungen zwit^chen dein nordischen und deni meditei-ranen
Zweige dieser Kultur liegen, sehr schwer zu beantworten. Die
Wahrscheinlichkeit spricht fiir das Donaugebiet. Evident ist
dagegen der genetisclie Zusammenhang dièses Kulturkreises
mit den palàolitbischen Faustkeilkulturon.
2. Der osteuropàische Kulturkreis des Frûhneolitkikunis . - Dieser
kann nur hypothetisch angesetzt werden. Im spàteren Verlaufe
des Neolithikums gehoren nàmlich das nordliche Skandinavien,
Finnland, Ostbaltikum, Russiand bis tief in die sûdlichen Step-
pen und Westsibirien offenbar dem gewaltigen sogcnannten
kammkeramischen Kulturkreise an, der, wo er uns rein oiit-
gegentritt, ûberall von einem Jâger- und Fischervolke getra-
gen scheint. Gut bekannt ist davon nur jene Untergnippe,
die man als die arktiscbe Sohieferkultur bezeichnet. Sie umfasst
im Wesentlichen das nordliche Skandinavien und Finnland. Es
ist aber auch fur dièse Kulturgruppe noch umstritten, ob ihre
Anfange bis in die Kokkenmôddingerzeit hinaufreichen. Ein-
zelne Funde, insbesondere aber Erscheinungen wie die Nostvet-
kultur machen das allerdings wahrseheinlich. Aber wenn dies
nun auch gesichert wâre, so steht es doch wieder nicht fest,
ob dièse protoarktische Kultur schon in genetischem Zusam-
menhange mit dem kammkeramischen Kulturkreise stand, wie
es mir selbst wahrseheinlich vorkommt, oder ob sie erst spàter
in dessen Entwicklung hineingerissen wurde, wie wohl jene
annehmen mûssen, die die arktiscbe Schieferkultur von der
Maglemosekultur ableiten. Auf aile Fâlle steht fest, dass sich
wàhrend des Neolithikums eine reine Fischer- und Jàgerkultur
jungsteinzeitlichen Gepràges liber die Ebenen Russlands aus-
gebreitet bat, deren Wurzeln wohl im nordlichen Asien zu
suchen sind. Sie kann mit keiner der ûbrigen europàischen
Kulturen in unmittelbare genetische Verbindung gesetzt wer-
den und berechligt uns dadurch wenigstens, einen osteuro-
pàischen Kulturkreis des Neolithikums aufzustellen. von dem
immerhin vermutet werden darf, dass er schon im Frûhneoli-
thikum beginnt. Was seine Ahnenreihe anlangt, so lâsst er sich
mit den Faustkeilkulturen ganz geUiss nicht in Verbindung
bringen, eher mit den Klingenkulturen ; es ist aber auch mo-
glich, dass er einem uns noch unbekannten rein asiatisehen
Zweige des Palâolithikums entstammt.
PRÂHIST. ARCHAOLOGIE U-ND KILTURHIST. METHODE L' 1 7
3. Der westeiiropaische Kulturkreis des Friihneolithikvms (epi-
palàolithische Kultur).- So wenig von ihm bekannt ist, so sicher
kann nian ihn ansetzen. Auf der iberischen Halbinsel vor alleni,
aber auch in gewissen Strieben Frankreicbs und in England
hat das Palâolithikum und zwar bauptsàchlich ein ziemlich
reines Endcapsien (Tardenoisien; , ein niebr odér weniger
ungestortes Fortleben gefunden, das er.st im Vollneolithikum
unterbrochen worden ist. Auf dièse Art sind Erscbeinnngen wie
das Asturien und das englische Ganipignien zu erkiàren : es
sind in fremdes Gebiet geratene, zunàchst isoliert gebliebene
Splitter einer neu eindringenden Kulturwelle, die naturgeiiiass
verarmen und degenerieren uiussten.
Von den auf ethnographiscber Seite gewunncnen Kuituren
ist. der /rrimutterrecktlichr Kulturkreis (Bogenkultur) mit un-
serem nordiscli-mediferranen unschwer in Bezicbung zu seLzen.
Von den Elementen des ei'stercn konnten wii- im Campignien
gewisse Kenntnisse dos Ai-kerbaues und der Viehzufbt. den
Kamm, den Bogcn, die Tupferei sicher, den Pfalilbau mit
WahrsL'heiiilichkeit nacbweisen. Zweifellos wird genauero Un-
tersuchung nocb manebes andere ei'geben. Widersprecbendes
erscheint ûberbaupt nirbt. Dagegen ergibt sich aucli hiei" wic-
der die Parallèle in der Deszendenz : die EtIinogra]jben erk^nnen
eine engere Verwandtscbaft zwiscben Zweiklassen- und Bogen-
kultur. wie zwiscben mittlerer und jûngerer Faustkeilkultur.
Ein Gegonstùck fur den osteui'dpàisrben Kulturkreis ist von
den Ethnograpben nocb nicbt entsprecbend lierausgearbeitet
worden, wie denn das nordliebe Asien in dieser Hinsicbt iiber-
baupt nocb wenig Beacbtung gefunden hat. Immerbin entsprâ-
clie er, wenn man gewisse speziftsch neolitbist-be Errungen-
scbaften (Keraniik. Steinschlifï) abziebt, ungefâbr jener Kul-
tur, von der V^'. Schmidt^ viehzûchtcrischcr Nomadismus seinen
Ausgang genommen baben mûsste.
Aus dem ganzen er-gibl sich Folgendes. 1. Die Arcbâologic
kann nui' bestatigen, ja iiberbaupt in keiner Weise bezwcifeln.
dass sich die Kulturcntwicklung der Menschbeit tatsàchlich in
der For-m von Kulturkreisen abgespielt hat. 2. Die von etb-
nographischer Seite aufgestellten Kulturkreise lassen sich obne
bes(jndere Scbwierigkeit mit den durcb die pràbistorische Ar-
cbàologie aufïindbaren zui- Deckung bringen. 3. Es weiden da-
218 J. BOUYSSONIE
dui'ch auch die von dcn Kullurkreisetlinologen angewendeten
Metiiuden und die damit ei'ziellpn Ergebnisso iin gro.'rsen und
ganzen als richtig erwiesen.
BIBL. — R. Battaglia, Studi sul paleolitico superiore, Riv. di antropologia,
1919, Bd. XXIII — H. Breuil, Les subdivisions d?t paléolithique supérieur et
leur signification, Congr. Intern. d'Anthrop. et d'Archéol. préhist., Genève,
1912. — B. HiLLEBRAND, Das Palaeolithikum in Ungarn, Wiener Praehistorische
Zeitschrift, 1919, Bd. VI — H. Obermaier, Los derroteros del paleolitico anti-
guo en Enropa, Boletin de la Real Acad. de la Historia, 1920, Bd. LXXVI ;
ders., Das Palaf'OlitMknm und Epipalnrolithikuni Spaniens, im Anthr., 1919-20.
[13] Les fouilles préhistoriques et leur technique,
par M. l'abbé J. BoUYSSONIE, correspondant du Muséum.
Llioniine étant e.s.senlielicmeni un organisjiie vivant, muni
d"un(' ànir intelligente et religieuse, laissera derrière lui des
manifestations jdus ou moins tangililes et durables de ces di-
verses qualités. Les touilles préhistoriques ont pour but de
faire jaillir du sol les spécimens les plus anciens de ces mani-
festations. Il en est qui tfont tellement vieux qu'ils sont fossi-
lisés ; d'autres sont moins vénérables ; et la préhistture s'ar-
rête quand réci'itui'e apparaît.
En quoi consistent ces spécimens ? 'l'out d'abord ce sont des
ossements. Ceux-ci se conservent mal dans les sols siliceux ;
ils durent pour ainsi dire indéfiniment dans un terrain argilo-
calcaire. Les plus importants sont évidemment les restes des
squelettes humains eux-mêmes : très rares sont les plus an-
ciens, mais combien précieux et suggestifs. A côté d'eux pour-
ront apparaître des débris osseux d'êtres insolites, à physio-
momie simienne ; celui qui a foi en la vérité et en Dieu ne
craindra pas de les exhumer, pour les livrer à une étude sé-
rieuse et pondérée. Ces créatures ont leur raison d'être, même
si celle-ci ne nous apparaît pas clairement.
D'autres os proviendront des restes de repas : ce sei'a une
indication intéressante de la faune ccuiiestible qui vivait à
répoque. La plupart de ces os sont brisés. L'intelligence indus-
trieuse de l'homme a su employer ces fragments d'os, ainsi que
FOUILLES PRÉHISTORIQUES 219
l'ivoire du niaininouth, la ramure du renne ou du cerf : de cette
matière il a fait des outils et des armes ; mieux encore, une
autre faculté s"est exercée : ces objets jiortent des dessins,
parfois fort artistiques.
Les restes les plus abondants, parce que les plus inaltérables,
sont les pierres : silex et roches dures, taillés ou polis, ont
été utilisés sous de multiples formes, dont la description se
trouve dans les manuels. Il y a lieu de remarquer que parfois
des agents naturels ont pu produire des effets analogues à ceux
d'un être intelligent. La pierre, mais plutôt alors le calcaire,
a servi aussi de support à des gravures, sculptures, peintures.
Plus tard les métaux apparurent : Tor et le cuivre se conser-
vent ; mais le fer s"oxyde et tombe vite en poussière. En re-
vanche, les poteries subsistent comme la pierre elle-même.
Plus exceptionnellement se retrouvent (dans la tourbe ou la
vase des lacs, i)ar exemple) le bois, la corne, les graines des
^)lantes, voire les tissus.
Tous ces objets nont pas seulement un intérêt de curiosité :
il serait désastreux de les recueillir pour faire une simple col-
lection d'amateur. Il faut les interpréter ; faire revivre le corps
et surtout l'âme de ceux qui les laissèrent.
Il est important aussi de les dater, d'établir une chronologie
au moins relative.
Comment déterminer cette chronologie ? Un terrain a sa place
dans les cadres établis par la géologie. Cette date géologique
sera surtout fixée par les fossiles, faune ou flore ; ceux-ci peu-
vent être terrestres, ou d'eau douce ou d'eau salée, ce qui indi-
quera l'origine })hysique du terrain ; ils peuvent, d'autre part,
permettre de connaître le climat qui régnait au cours de sa
formation, glacial, tempéré ou chaud.
'Dans ce terrain on peut trouver plusieurs industries : pour
déterminer leur ordre d'ancienneté, on aura recours à la mé-
thode stratigraphique ; et l'on comparera les résultats fournis
par les divers gisements.
Il est évident que, si rien n'a dérangé les couches de terrains
sédimentaires superposés, quelle que soit leur origine, les
objets trouvi's le plus bas sont plus anciennement déposés que
ceux que Vnn trouve en haut.
220
J. BOUYSSOME
Les choses sont bien en placo, si Ion ne voit pas trace de
remaniement, de bouleversement, soit par les eaux courantes,
soit par les animaux fouisseurs, soit par riiomme lui-même.
Ce dernier cas a lieu, quand l'homme a creusé une fosse pour
inhumei- un de ses semblables. C'est pourquoi on ne saurait
s'entourer de trop de précautions pour déterminer l'âge et les
conditions de dépôt d'un squelette préhistorique. Il est bon, si
cela est possible, de faire appel à des savants compétents. En
tout cas il faut observer la coupe du terrain autour de ce pré-
cieux reste : est-il là comme abandonné sur place ou entraîné
par les eaux, au même titre que les sédiments où il se trouve,
ou bien a-t-il été protégé et inhumé dans une fosse plus ou
moins pi-ofonde, creusée dans un sol plus ancien ? Dans ce
dernier ras, le squelette sera au moins aussi récent que les
objets les plus récents trouvés à son voisinage, et qui provien-
nent du remblayage de la fosse. Il est arrivé aussi que les
hommes ont enterré un des leurs sous leurs propres pieds,
continuant à habiter, à allumer du feu sur place : notre sque-
lette sera au moins aussi ancien que le foyer.
FiG. 1. — Coupe de la grotte des Enfants
d'après l'ouvragt' Les Grottes âc GnmnJdi, Monaco.
(Epaisseur totale des
dépôts 10 ni. environ).
IjCS traits noirs sont
les lignes de foyers :
de A à I, aitrigna-
ciens (faune du renne^ ;
on K et Ij, plutôt
moustérinns (rhinocé-
ros de Merck, hyène).
L.es X indiquent les
points de sépultuie :
en J, les squelettes
négi'oïdes. dans une
fosse :
en H et B. ceux de
la race de Cro-magnon.
TjBS enfants (de la
même race) trouvés
par Rivière provien-
nent du niveau C.
On voit les restes
d'im plafond tombé sur
le toyer F.
Les gisements des grottes et abris sous roche sont en gé-
néral simples et assez faciles à comprendre. Des familles ve-
naient se mettre là à l'abri, y accumulaient leurs débris de
FOUILLES PRÉHISTORIQUBS
221
cuisine et dp mohilifr. en couches plus nu moins épaisses ; puis
ils partaient, chassés souvent par la chute du plafond, ou pour
queilqu'autre cause inconnue de nous ; des éboulis stériles re-
couvraient ce premier dépôt et povir ainsi dire le scellaient.
(Pig. 1). Mais les mêmes besoins se faisant sentir à tous les
âges, il est arrivé souvent qu'un, même abri a servi à des
peuplades successives : on aura ainsi des niveaux de plus en
plus récents.
Les formations alluviales sont beaucoup plus complexes et
délicates à interpréter. On peut en distinguer deux sortes. Les
unes sont en superposition, forniées généralement de couches de
graviers et de limons, déposés, les premiers quand le courant
était rapide, les seconds quand il était lent. Il faut remarquer
par ailleurs que d'autres limons ont pu venir de ruissellement
sur les pentes, que des amas de silex ont pu se former sur place
par dissolution de la craie etc. La coupe de ces dépôts est mise
au jour dans les grandes ballastières (Fig. 2) et Ion s y rend
compte que des remaniements complexes s'y sont produits
souvent.
FiQ. 2. — Coupe schématique
des alluvions de Saint- Acheul,
A. Terre végétale (7iéolithique et mo-
derne).
B. Terre à brique (solutréo-magdalénien ) .
C. Ergeron ou limon récent (à la partie
supéi'ieure, aurignacien — dans les lits
de callloutis moyen et inférieur, mous-
térien — Le renne existe en B et C,
disparaît au-dessous).
D. E. Limon rouge et gris (acheuléen su-
périeur : limandes).
F. Sables meubles et sable.s bruns {achev-
léen inférieur) : de D à F, faune ;i
mammouth et éléphant antique.
G. Graviers inférieiu's (cheUéen : faune à
hippopotame). — ■ H. Craie.
Epai.-^sc'ur totale : 8 m. envijon.
En particulier, des crues ont pu enlever un premier dépôt,
au moins partiellement, .se creuser un lit plus profond entre
des berges surélevées : ainsi apparaît une seconde catégorie
d'alluvions, celles qui sont disposées en terrasses juxtaposées,
particulièrement nettes dans les formations glaciaires (Fig. 3),
2 2 2 .T. BOUYSSONIE
Dans ce ras, la loi de la stratigraphie est inversée : ce sont les
terrasses les plus élevées qui sont les plus anciennes.
FiG. 3. — Coupe très schématisée de la vallée de la Qaronne»
en amont de Toulouse, et de ses terrasses glaciaires à gi'avieis et galets,
d'après les travaux de MM. Obermaier, Boule et Breuil.
En A, plateau de Lannemezan. — B, 1'''' terrasse d'Obermaier (glaciation
de Gunz). — C, 2« terr. (glaciation de Mindel). — D, S"" terr. recouverte du
lœss (glac. de Riss). — E, 4'' terr. (g-lac. de Wiirm). — F, vallée actuelle. —
G, la Garonne. ■ — M. Boule ne distingue pas B et C.
Lies quai-tzites taillés se trouvent en surface de B et de C ; on en trouve
aussi de roulés dans les graviers E.
Al B
oauui.\^oi3<aaaou
Si des silex sont ramassés en surface d'une couche d'allu-
vioAS ou d'une terrasse, on conclura qu'ils sont postérieurs à
sa formation ou tout au plus contemporains. Quand ils sont
recueillis en pleine couche, par exemple au sein d'un gravier
homogène, deux cas extrêmes sont possibles. Ou bien leurs
arêtes sont restées vives : ils dateront alors de la formation du
gravier et celui-ci n'aura jjas été remanié. Ou bien les arêtes
sont émoussées et usées : c'est qu'ils ont été roulés par les
eaux, donc entraînés de plus haut, venus peut-être de la ter-
rasse supérieure.
Mais on ne saurait trouver, même dans les gisements les plus
riches, les plus complets, toutes les industries humaines super-
posées. On comparera ce qui est trouvé en différents points,
soit dans les grottes, soit dans les alluvions ; il arrive que l'on
trouve un niveau identique tant comme mobilier que comme
faune. On a ainsi des points de repère ; on peut combler les
lacunes et établir une succession parfois remarquablement
complète et détaillée des industries préhistoriques, avec leurs
rapports évolutifs, leurs transformations etc. On a obtenu des
résultats de ce genre pour l'Europe occidentale. Mais l'on ne
saurait être trop prudent, si on veut les généraliser et les
étendre à d'autres contrées. Pour ne prendre qu'un exemple, des
outillages quasi identiques de pierre peuvent très bien n'être
FOUILLES PRÉHlSTORIorioS 223
pas synchi'ôniques, s'ils sont trouvés en Europe ou en Afrique,
ou, à plus forte raison, en Océanie.
Si donc les études et les fouilles de détail sont relativement
aisées, souvent fructueuses et attachantes, si elles donnent des
résultats tangibles et certains, les comparaisons sur une grande
échelle, les vues d"ensemhle. les synthèses s'étendant à tout un
continent, à plus forte raison à toute la terre, soni d'un ordre
très hypothétique ; c'est une voie où il ne faut s'engager
qu'avec réserve, si l'on ne veut pas faire du roman.
Quand de nombreux missionnaires en des pays divers auront
aidé à soulever chacun quelques pages du passé, et ce sera
pour eux un nouveau titre de gloire, un esprit puissant pourra
peut-être ici-bas reconstituer le livre de l'humanité primitive,
du moins dans ses grandes lignes.
Mais où fouiller et comvirul fouiUrr ? Pour trouver, le simple
bon sens le dit, il faut chercher : il faut avoir l'espi-it attentif,
l'œil vif et ouvert aux moindres indices. Nombreux sont les cas
où le hasard — disons mieux la Providence — a servi à souhait
et d'une façon inopinée un esprit chercheur. Il y a cependant
un principe tout indiqué : c'est de porter ses investigations aux
points où l'homme a pu ou dû habiter, où il a été enseveli.
Si le climat est chaud, comme dans une période intergla-
ciaire, l'homme vivra de cueillette et de chasse, le long des
fleuves : il pourra même séjourner sur certains points et y
accumuler des débris de cuisine, comme dans les escargotières
d'Algérie. Si le climat se refroidit, l'homme se réfugie dans des
abris naturels, comme les cavernes. Plus tard, avec un climat
tempéré viendra une nouvelle civilisation plutôt agricole et
industrielle, qui saura se conslruire des habitations dans les
contrées fertiles, élever des tombeaux etc.
Parlons d'abord plus spécialement des recherches sur
l'hcmme paléolithique.
Etes-vous dans un pays de plaines, comme les Flandres, ou
de plateaux plus vallonnés, comme en Picardie, ou bien dans
une vallée de fleuve comn\e la haute Garonne, sur les flancs
de laquelle se devinent des terrasses horizontales, en larges
marches d'escalier, il est tout naturel de chercher en surface.
Piomenez-vous après la pluie dans les champs labourés : si la
chaiTue a mis au jour des silex taillés, leurs facettes laA'ées de
224 J. BOUYSSONIE
frais miroitent au soleil. Que si, sur un faible espace, vous
en ramassiez un grand nombre, vous avez toute chance d'être
sur un point qui a été habité ; un sondage indiquera si le gise-
ment se continue au-dessous de la terre aj-ahle ou s"il est
simplement superficiel : dans ce dernier cas, il est à craindre
qu'il y ait eu mélange d'industries.
Pour les gisements de profondeur, on profitera de toutes les
occasions qui peuvent les déceler : exploitation industrielle
des graviers, sables ou limons, tranchées ouvertes pour les
chemins de fer, les routes, les canaux. On peut obtenir ainsi
à peu de frais des coupes de terrain bien nettes. D'autre part
les ouvriers se prêtent en général volontiers à la récolte des
pièces, voire à leur vente ; mais dans ce dernier cas il faut être
très prudent, pour ne pas dire méfiant.
Au lieu d'un pays plat, vous vous trouvez dans une région
Cfilcaire comme la province de Namur, le Périgord ou les Pyré-
nées, dans un pays de grès comme au sud de Brive, où les eaux
ont creusé des vallées avec surplombs rocheux ou même des
cavités souterraines plus ou moins profondes. Voici un abri
sous roche qui se devine dans la verdure, bien exposé au soleil,
placé à proximité d"une source, facile d'accès et aussi de dé-
fense ; au pied de Téboulis qui couvre le sol, dans un coin
raviné par les eaux courantes, dans un chemin creux, furetez,
au besoin donnez un coup de pioche pénétrant sous la terre
végétale. Si vous voyez des débris d'os ou des silex taillés, sur-
tout dans une région qui n'en contient pas à l'état naturel, vous
y êtes, c'est une station préhistorique !
Un sondage approfondi, si possible poussé jusqu'au sol ro-
cheux, vous indiquera Timportance du gisement ; mais désor-
mais allez méthodiquement et prudemment. Tant que l'on est
dans la couche stérile, on peut déblayer à la pelle et à la pioche.
Mais nous voilà à un niveau, de couleur noirâtre ou rougeâtre.
indice de terre b-rûlée, de foyer ; apparaissent en place des silex,
des os etc., g'^néralement les plus belles pièces disposées autour
du foyer : c"est une couche archéologique. Mettons-nous au
large autant que possible, avec un front de fouille bien tranché
et maintenu aussi net et aussi dégagé que les circonstances le
permettront ; puis entamons sans trop de hâte. On se sert à
cet effet d'une pioche légère, ou mieux, quand les os fragiles
FOUILLES PRÉHISTORIQUES 225
abondenf, d'un simplp rroi-het fait d'un fort fil d"acier recourbé
et appointi, avecTeqiiel on peut dégager délicatement les objets,
dès qiron les entrevoit. Malgré toutes les précautions, on peut
casser un harpon, ou une aiguille ; l'essentiel est d'en retrouver
tous les fragments. Si la nature du sol s'y prête, il sera bon
pour cela, et pour recueillir jusqu'aux moindres débris, de ta-
miser la terre avant de la jeter aux déblais.
Rien ne doit être négligé ; il faut tenir un journal de fouilles
détailh'. noter toutes les particularités que sait reconnaître
un œil observateur, prendre des croquis, relever les plans et
les coupes avec leurs dimensions. S'il y a plusieurs niveaux, il
faut classer à part ce qui vient de i-hacun d'eux.
N'hésitons pas à ramasser dans une première récolte tout
ce qui paraît avoir un intérêt même minime : objets travaillés
au utilisés, pierres gravées, débris de faune reconnaissable (en
particulier les dents), quitte à faire ensuite un choix plus
sévère, pour procéder enfin à un classement méthodique ; les
comparaisons sont rendues très faciles, si les pièces sont mises
en séries.
Ce n'est piis tout d'observer ainsi les couches et leur contenu;
il faul examinei" si le remplissage ne cachait pas, en les proté-
geant, des gravures ou même des hauts-reliefs inscrits sur le
rocher. S'ouvre-t-il dans le voisinage des couloirs profonds :
ne ci'aignez pas d'y pénétrer, en rampant si c'est nécessaire.
Nos ancêtres n'avaient pour s'éclairer que de misérables lam-
pions de suif portés dans un godet et sur une pierre plate et
longue ; nous avons des lampes à acétylène, tout au moins des
bougies ; les risques sont minimes, en prenant quelques pré-
cautions ; et si le chemin est parfois rude, on a des chances
d'être récompensé par la découverte d'une merveille, cachée
systématiquement par un sorcier antique.
Tout en avançant, observer le sol, qui peut encore porter
des empreintes ou receler des objets, et regarder les parois.
Les traces d'une peinture, comme celle-ci est presque toujours
rouge ou noire, se remarquent vite. Les gravures au trait
apparaissent, si on éclaire le rocher qui les porte, en lumière
frisante, d'un seul côté. Si la ligne gravée fait des contours,
il est nécessaire pour la suivre de promener la lumière le long
du trait, et l'on peut saisir l'ensemble de la figure. Mais parfois
15
22() •'• BOIYSSONIE
ces dessins prc'liisf oriques ont été tracés les uns sur les au-
li'es : jMUir les lire, même paitiellement. il faut une attentinn
et une patience extraordinaires.
T/abbé Breuil s'est fait une sjx'cialité de relever ces gravures
et peintures, en Europe occidentale, et cela avec une sincérité,
une babileté et parf(us une énergie au-dessus de tout éloge.
AJdutons qu'il a décal(|ué aussi beaucoup de dessins et de pein-
tui'cs consei'vt''S sur des rochers en plein aii', en diverses régions
de TEspagne. el qui. en grande partie du moins, sont préhisto-
riques. Mais heauc<n,ip sont simplement piotohisl oriques.
Et ceci nous amène sui' le terrain des néoJithiquPs. La vie, le
mobilier, les relations de l'homme de cette époque sont bien
moins simples que ceux de ses prédécesseurs paléolithiques :
les fduilles et recherches le concernant seront également moins
simples, comme aussi les résultats plus complexes, les lignes
de son histoire plus confuses.
Le climat s'est réchauft'é ; les nouvelles i)oi)ulations qui utili-
sent encore le silex taillé, mais bientôt savent le polir, quittent
les grottes naluielles : ils sauront se construire des cabanes
solides en pierres sèches ou en torchis. Ils choisissent souvent
})0ur s'établir, un plateau aux bords escarpés, ou un éperon
plus ou moins enfermé dans la boucle d'une rivière et qu'ils
défemleni du côté de la terre ferme par un retranchement :
c'est leui- lieu de refuge, et pour ainsi dire leur habitat mili-
taire. La fouille de ces camps se fait d'une façon un peu aléa-
toii-e, en creusant des tranchées au voisinage du l'etranche-
meut, ou près des sources, s'il y en a.
Ils avaient aussi des habitations simplement civiles ou agri-
coles, élevées sur un tertre artificiel, dans' les plaines fertiles :
naturellement de pareils établissements ont toutes chances
d'avoii' disparu, nivelés par la culture. On l'encontre cependant
parfois des fonds de cabanes qui livrent des oltjets très inté-
i-essants. Ailleurs, se retrouvent encore des amas ])lus ou
moins importants de << débris de cuisine », généralement le long
des l'ivages de la mer. celle-ci fournissant le manger.
Enfui le néolitliiqur a été aussi industriel : il avait ses puit>
de mine ; il allait cliei-clier au sein de la terre le silex de bonne
qualité et facile à travailler, ayant encore son eau de carrière ;
ailleurs, il extraira des blocs d'autres roches dures, pour faire
FOl'ILI.ES PRÉHISTORIQUES 227
ses haches polies. Un peu |j1us fard, il exploitera des filons
de cuivre, d'étain, enfin de fer. On a retrouvé des galeries avec
les oui ils en bois de cerf, parfois avec l'ouvrier lui-même pris
sous un éboulement.
D'autres populations choisirent des procédés divers pour se
mettre en sûreté : certains étendaient sur un marécage un
solidi^ plancher de clayonnage sur lequel ils dressaient leurs
huttes ; plusieurs faisaient reposer ce plancher sur la tête de
pilotis enfoncés dans les eaux d'un lac peu profond. Que, à
notre époque, le niveau du lac baisse notablement, et voilà nos
archéologues en joie, car la tourbe et la vase recèlent des
trésors.
On rencontre aussi dès cette date les premiers silos : cham-
bres souterraines artificielles, qui ont pu abriter des récoltes,
mais dont l'âge reste le plus souvent incertain, faute de restes
caractéristiques.
Remarquons que ces silos et aussi les camps retranchés dont
nous parlions plus haut ont pu être utilisés à des époques ulté-
rieures. De nouvelles levées de terre ont pu être édifiées au
détriment des habitations plus anciennes : on observera donc
dans une fouille si celles-ci n'ont pas été entamées, et, dans
laftirmative. ses objets mobiliers pourront se trouver dans les
remblais du retranchement. Au reste, même les grottes ont pu
être vidées et leur contenu préhistorique jeté devant l'ouverture.
On sait que les paléolithiques enterraient leurs morts ; mais
jusqu'ici, avec les néolithiques seulement, apparaissent les mo-
numents funéraires : ce sont les tumulus, dolmens etc. Les
tumulus. amas de terre mélangées de pierres, de dimensions
variables, se reconnaissent à un bombement régulier du sol.
souvent léger, et qui a subsisté généralement dans des coins où
la terre a été peu cultivée. Tantôt ils avaient au centre une
seule chambre limitée par des pierres plates dressées, avec ou
sans couvercle ; tantôt ils contiennent des sépultures multiples
et dispersées. Le fouilleur creusera des tranchées en croix, qu'il
élargira, si cela lui paraît utile ; il notera la position et l'orien-
tation des cadavres, et si les os sont dans leur ordre naturel :
car il arrivera par exemple qu'un fémur droit se trouve du côté
gauche du bassin ; cela peut indiquer une sépulture faite après
décharnement ; ou, plus simplement, cest que les os dérangés
228 •!• BOIYSSONIE
au cours d uno sépultuip nouvelle furent remis en place par un
fossoyeur do lépoquo qui ne se préoccupait guère de la dispo-
silidu anatomiquf. Il y a lieu naturellement, de recueillir les
objets qui accompagnent le corps : parures diverses, oci'es.
ar-nies. outils, vases et leur contenu, s"il en reste, en notant la
disposition de ce mobilier.
Les dolmens et allées couvertes, souvent placés au moins
primitivement sous un tumulus, servaient généralement de lieu
do sépultures succossivos ot devenaient en somme des ossuai-
res. On relèvera leur orientation, la dimension des dalles ; on
prendra des photographies ; on observera si les dalles portent
des dessins, des cupules, des perforations. A côté des dolmens,
contentons-nous de nommer les cistes qui leur sont fort ana-
logues.
Les squelettes trouvés dans ces différentes sépultures n'ont
en général qu'un faible intérêt, on comparaison des squelettes
fossiles les plus anciens. Toutefois on notera leur forme, leur
indice céphalique ; les spécialistes pourront eflfectuer des men-
surations plus complètes et étudier les cas pathologiques : on
sait que les exemples de trépanation ne sont pas rares.
Pour en revenir aux monuments mégalithiques, rappelons
qu'il ne faut pas négliger les menhirs ou pierres placées debout,
soit isolées, sftit alignées, les stèles avec figurations humaines
ou autres ; leur rôle reste encore obscur ; des recherches nou-
velles pourraient jeter des lumières à leur- sujet.
Citons enfin les srrottes funéraires artificielles, creusées dans
les roches tendres, grès ou craie, comprenant une ou plusieurs
chambres. Sur leurs parois ont été fréquemment figurés des
signes cultuels, la hache, la silhouette féminine etc.
Mais nous marchons à grands pas vers les civilisations qui
nous toucliont de |)tus près : à l'âge du fer, ce ne seront plus
seulement des tumulus isolés, mais des cimetières, de vérita-
bles nécropolos, voisines de véritables villes : nous sommes au
seuil (\p ]'ar-ch(''ologie classique. Et ceci c'est une autre histoire.
BIBL. — DÉCHELETTE, Manuel d'Archéologie préhistorique et protohisto-
rique, 4 vol. in-8", Paris, Aug. Picard, 1910-1914 — H. Breuil, A. et J.
BOUYSSONIE, LHommi- préhistorique, dans DAFC, 1911, t. II, col. 462-492 —
KxTEENs, La Préhistoire à la portée de t07is, in-8", Bruxelles, 1913 — Pey-
RONY, Eléments de Préhistoire, in-S", Ussel, Kyboulet, 1914 ■ — Boule, Les
Hommes fossiles, in-8", Paris, Masson, 1921.
II. PARTIE SPÉCIALE
1'' Section : Le sacrifice chez les peuples incultes
et chez les peuples antiques
[14] Notions générales sur le sacrifice
dans les cycles culturels,
par le R. P. G. ScHMIDT, S. V. D.
I. INTRODUCTION. HISTOIRE DU PROBLKME.
Il uy a peut-être pas de matière puur laquelle rutîlité,
voire la nécessité de la méthode historique soit plus immé-
diatement évidente que le saeriflee. 11 n"en est })as non i)lus
au sujet de laquelle révolutionnismo ait (•diislruit lant de
théories arhitraires et aventureuses.
La moins aventureuse relativement est encrire celle de E. B.
Tylor il). Pour lui, le sacrifice n'est autre chose qu"un don
intéressé de l'homme à la divinité, en vue d'obtenir de celle-ci
d'autres dons. C'est donc la théorie du do ut des. Plus tard
seulement, le sacrifice aurait pris le caractère d'un hommage
cl plu,- fard encore celui <le l'abnégation. Poui' faire parvenir
le don à la divinité, l'animisme entrait en jeu : par la destruc-
tion, l'incinération etc. de la \ictime. son âme, croyait-on, tMait
lihér-ée et pouvait dès lors être transmise à la divinité.
Des idées presque identiques sont préconisées par G. A.
W'n.KEN '2) ; seulement il insiste spécialement sur la con-
nexion étroite du saci'iflce avec les repas de noui'i'itui c otïerts
aux morts.
Robertsitn Snuth, pour explit|uer l'nriyine du sacritice, ex-
(1) Pnmitivr Ctiltitir. London, 1891, vol. Il, p. 340-871.
(2) Eene nieuxce thfotif: ovcr den oompiong dcr offcrs, Indische (Jid.s.
Nr. 9, 1891, p. 1-99 ; léimprimé dans G. A. Wilkbn, Versin-eidr (rrachiiftiii .
s'GravenhaKO, lftl2, Decl IV, p. ir^'-^îtô. ■
230 W. SCHMIDT
ploite le totémisme. Dans le repas rituel, l'animal totémitiue,
tué et mangé par les membres du clan totémique, aurait re-
nouvelé Tunité du sang entre eux et le dieu-totem. De cette
« communion » totémique le sacrifice se serait formé, quand
les dieux-animaux se seraient développés en dieux-personnels
et après que les animaux, par l'élevage du bétail, seraient
devenus la propriété de l'homme ; par le sacrifice, celui-ci les
offrait à la divinité (1).
Avec certaines variations, cette théorie fut défendue encore
par F. B. Jkvons (2), Salomon Reinach (3),, E. Durkheim (4).
Ce dernier n'ose cependant pas affirmer que toutes les espèces
du sacrifice soient dérivées du repas communiel totémique.
J. G. Frazer, lui, s'oppose radicalement à cette théorie ; il fait
remarquer que sa base est beaucoup trop chancelante et trop
étroite, puisque, dans toute la vaste littérature totémique, on
ne saurait trouver que trois ou quatre cas d'une espèce de
communion totémique.
Dans leur Essai sur la nature et la fonction du sacrifice (5),
H. Hubert et M. Mauss se déclarent amenés, à reconnaître que
le sacrifice est un mécanisme trop compliqué pour être un rite
primitif. A les entendre, il n'aurait pu se développer qu'après
le don rituel et tout le système des lustrations et purifica-
tions. Cette prétendue « découverte » s'explique par cette
double raison que les deux auteurs ont fait porter surtout
leurs recherches sur les sacrifices réellement évolués des
Indiens et des Hébreux et qu'ils ne reconnaissent comme
sacrifice que le sacrifice par destruction.
Une théorie longue et compliquée a été élaborée par
W. Wi"NDT (6). Elle est en intime connexion avec sa théorie
(1) Article Sacrifice, clans Encyclopaedia Britannica et Lectures on the
Religion of the Sémites, London, 1" éd. 1889 ; 2^ éd. 1894.
(2) Introduction to the History of Religion, London, l''« éd. 1896 : 2'" éd.
1904 ; Conf. W. Schmidt, Ursprung der Gottesidee, t. I, p. 25 ss.
(3) Cxbltes, Mythes et Religions, 3 vol., Paris, 1905-1906 ; cf. Schmidt,
?. c, p. 35 ss.
(4) Les formes élémentaires de la vie religieuse, in-8°, Paris, Alcan, 1912,
p. 486-500.
(5) L'Année Sociologique, t. II, 1898, p. 29-138 ; réimprimé dans Mélanges
d'Histoire des Religions, Paris, 1909, p. i-xxvii, 1-130.
(6) Volkerpsychologie, vol. II, « Mythus und Religion », 3 parties, Leipzig,
1905-1906-1909. Voir surtout P. II, p. 341 ss. ; P. III, p. 465 ss.
LE SACRIFICE DANS LKS CYCLES CULTURELS 231
générale sur rurigine de la religion (1), qu"il serait trop long
de discuter ici. D'après cet auteur, le sacrifice ne se serait
formé que dans le troisième stade de la religion, celui des
dieux personnels : il serait di'i'ivé des repas offerts aux morts,
puis des idées du tahou et des lusli'ations : sacrifice expia-
toire ; enfin du culte des végétaux : « Bitt- und Dankopfer » ;
ridée fondamentale du sacrifice serait toujours celle de la
magie. Toute cette théoi-ie, dans presque tous ses détails, est
renversée et détruite de fond en comble par les résultats des
recherches historiques.
ÎL'ouvrage d"A. l.oisY a bien la prétention de s"appuyer sur
l'histoire, puisqu'il s'intitule Essai historique sur le sacri-
fice (2), mais en véi'ité, il ne contient que le plus pur évolu-
tionnisme : ap])réciations subjectives par des jugements de
valeur sur la « primitivité .> et la « bassesse » des formes,
formation de séries logiques qui, de suite, se changent en
séries historiques, reliées par une causalité réelle. La. docu-
mentation ethnographique étant le plus souvent de seconde
main et la connaissance de l'ethnologie générale fort modi-
que, la valeur de cet ouvrage est assez modique (3~ .
D'après Loisv, le sacrifice dérive de l'union de rites magi-
ques avec le don rituel tel qu'il se présente dans les offrandes
faites aux morts. Ce qui caractérise cette publication, c'est un
effort excessif, partout sensible, pour mettre en relation avec
les rites magiques tous les détails, toutes les rubriques, toutes
les oi'aisons du sacrifice et de la communion catholiques, que
l'auteu!' a pu si bien connaître dans un passé meilleur. Par
là. comme par tes appréciations extrêmement tendaïioieuses
qui apparaissent en toutes ses parties, on voit clairement que
lifs impulsions non-scientifiques ont grandement contribué à
la rédaction de cet ouvrage. Ce fut une hardiesse remarquable
de la ]»art de M. Loisy d'aboi-der avec si peu de formation
ethnologique un sujet si ditficile : il a eu le malheur d'ignorer
totalement les j)rogrès obtenus par la vraie méthode histori-
que dans les dix dernières années : « Ecce pedes corum qui
ftppelirruni viruin tuuin ad ostium. et efferent le. » (Act., v, 9).
(1) Conf. SCHMIDT, /. C, p. 4 4 .s.S.
(2) In-8", Paris, Nourry. 1920.
(3) .J'(?n !ii donné un<> ti-ittque plu.< détaillôe dans la Hiviic dis Sciriui.s
philOKophUiur.s et thi'oUiaiiiHcs. U' Saulclmir, Kain, 1922,
232 W. SCHMIDT
II. LES CYCLES CULTURELS PRIMITIFS.
Si maintenant, de ces constructions « en l'air n nous pas-
sons à la réalité, il est avant tout important d'établir, par des
moyens sûrs et objectifs, l'âge respectif des faits ethnolo-
giques, tâche que la grande majorité des anciens théoriciens
ont complètement omise. L'école historique, au contraire, s'y
est spécialement appliquée. Laissant de côté ces faciles éva-
luations subjectives sur le degré de primitivité de tel ou tel
élément pris isolément ou de tel peuple particulier, elle prend
en considération soigneuse la totalité d'une culture dans tous
ses éléments et par un procédé sûr, pas h pas, elle parvient
enfin à découvrir de grands cycles culturels qui embrassent la
totalité d'une culture déterminée, indépendante. D'après les
mêmes procédés, maintenant appliqués en plus grand style,
elle s'est trouvée à même de préciser l'ordre chronologique
suivant lequel ces grands cycles se sont succédé.
Pour connaître maintenant l'âge ethnologique d'une espèce
de sacrifice, on ne se borne plus à évaluer ses caractères in-
ternes — évaluation fortement exposée au péril de subjecti-
visme — ; mais on cherche à préciser de quel cycle culturel
cette forme fait partie intégrante. Si le cycle culturel auquel
elle appartient exclusivement est lui-même relativement ré-
cent, non primaire, mais secondaire, il est clair qu'également
cette forme de sacrifice ne peut être primitive, ni d'une haute
antiquité ethnologique.
Or, il est de la plus grande importance, pour déterminer la
vraie nature et la dernière origine du sacrifice, d'avoir égard
à la division des cycles culturels en deux grands groupes :
le groupe dit de VUrkultur ou culture archaïque et le groupe dit
cultures primaires. Les Urkulturen ou civilisations archaïques,
primitives au moins en ce sens qu'on ne leur connaît pas de
devancières, sont celles où l'homme n'exerce pas de travail
sur la nature, pour augmenter sa production, mais se con-
tente de ce qu'elle lui offre spontanément : par la chasse il
se procure la nourriture carnée ; par la cueillette des plantes,
des racines, des fruits, la femme procure la nourriture végé-
tale. Les cultures primaires, au sens où primaire est distingué
de primitif, Urkulturen, comme nous venons de l'expliquer.
LE SACRIFICE DANS LES CYCLES CULTURELS 233
sont ccliles OÙ, par Télevage du bétail, par \e perfectionnemeni
de la chasse ou par ragrioulture primitive, rhomme et la
femme se procurent une noui'i'iture animale et végétale plus
alxmdante et plus stal)le.
Considérons d'abord la nature sjjécitique des sacrifices dans
les Urkulturen ou civilisations archaïques.
1. Notons tout de suite ce point : dans les plus anciennes
cultures, il y a de vrais sacrifices. 11 ne faut donc pas attendre
les phases f)lus récentes de l'histoire pour en rencontrer. Or,
ces civilisations archaïques sont précisément celles chez les-
quelles il n'y a pas encore de culte religieux des morts ; il est
donc clair que le sacrifice n'a pas pris son origine dans les
rppas olïerts aux défunts. De même, dans ces civilisations, la
magie n'occupe pas une place prépondérante ; il est donc
évident aussi que ce n'est pas elle tiui a produit le sacrifice,
surtout si celui-ci n'a rien de magique en soi et accuse plutôt
des caractères opposés. Ce sont enfin des cultures où il n'y a
absolument pas trace de totémismie : d'où il apparaît encore
nettement que, môme si les communions totémistes étaient
plus fréquentes qu'elles ne le sont, elles ne pourraient être
regardées comme la source du vrai sacrifice.
2. Ces premières conclusions se trouvent encore confii'mées
par le caractère spécial du sacrifice à ce stade de civilisation.
Dans tout le cycle exogamo-monogame des Pygmées. on ne
rencontre pour tout sacrifice que celui des prémices.. On le
trouve chez toutes les tribus des Pygmées pour lesquelles nous
avons des renseignements suffisants. Dans une tribu seule-
ment, celle des Semangs, dans l'île de Malacca. nous ne ren-
controns pas le sacrifice des prémices, irais le sacrifice ex-
piatoire : dans une tempête, pour se conciliei' *Xa/'/. leur Eti'c
suprême, ils se font une blessure au genou, en tirent un peu
de sang, qu'ils mêlent avec de l'eau, pour jeter alors le tout
vers le ciel. Chez les Andamanais, il y a un sacrifice des pré-
mices négatif : il y est distendu de niianger les premiers fruits
des Yams et d'autres jilantes dans la })remièi'e moitié de la
saison des pluies ; ils restent réservés à l'Etre suprènu^ (1).
3. Toutes les part icularitt's du sacrifice des |)i'(''mices
montrent qu'il est avant tout un hommage à l'Etre suprême,
(1) Pour le détail, Schmidt, Die titelluny dcr Py(/in'àcnvôlker in dcr
Entwicklungsgeschichte, in-8», Stuttgart, Strecker, 1910, p. 145, 198 ss., 230,
232 ss., 264 ss ; cfr. Anthr., 1921-22, t. XVI-XVII. p. 978-1005.
234 W. SCHMIDT
pour reconnaître ?a suprême domination et expi'imer la jjrati-
tuile envers celui qui a donné la vie et procure des vivres pour
lentretenir. Qu'il soif vj'aiment conçu comme un acte d'hom-
mage spirituel envers lElre suprême et non un moyen d'ob-
tenir ses faveui's, en lui fournissant des vivres (pi'il emploie-
rait pour, lui-même, cela se manifeste dans ce fait que la
quantité des vivres offerts est toujours si peu considérable
qu'elle ne peut évidemment rassassier la faim de qui que ce
soit. En outre, dans ce cycle culturel, on professe ouverte-
ment qu'il est superflu de vouloir nourrir l'Etre suprême,
parce qu'il est le propriétaire souverain de tous les animaux
et de toutes les plantes. Chez les Andamanais, il est vrai, la
totalité des premiers fi'uits reste réservée à l'Etre suprême.
On pourrait donc croii-e que. chez eux. ces fruits sont destinés
à sa subsistance, d'autant i)lus que, d'après tel de leurs
mythes, Puluga est censé descendre des cieux dans ce temps,
pour sapproprier ces fruits. Mais l'authenticité de ce mythe
est douteuse. Du reste, même dans ce cas. par l'observation
fidèle de cette loi. i)ar le renoncemvnt volontaire à une telle
quantité de vivres, on témoigne qu'on reconnaît un Etre su-
prême, et cela de manière d'autant plus expressive que la
(inantitc sacritlée est si considérable.
4. Si j'ai dit que, dans le cycle culturel desPygmées, nous
ne trouvions' que le sacrifice des prémices (et un sacrifice
expiatoire), je ne voudrais plus l'afïirmer aussi catégorique-
ment pour d'autres cycles appartenant au même stade de
civilisation. Les Pygmées ne se trouvant que dans la moitié
méridionale de notre globe, il est impossible qu'ils soient les
ancêtres de peuples d'une constitution physique toute diffé-
rente qui habitent l'hémisphère septentrional. A ces peuples
primaires (Urvôlker) appartiennent les Ainos du Japon et les
riilyaks de Sakhaline, puis d'autres peuples paléo-asiatiques,
comme les Tchuktches, les Koryaks (et les Itàlmes). Tous
croient en un Etre suprême, auquel ils offrent des sacrifices :
il est sûr que ce ne sont pas exclusivement des sacrifices de
\)rémices (1).
(1) J. B.\TCHELOït, The Ainu and their Folk-Lorc. London, 19ol. p. 576-
585, 100, 116 ; M. A. Czaplicka, Aboriginals of Sibii-ia, Oxford, 1914, p. 271,
257, 291, 261 ss., 294, 269 .<*. : D. Ki.ement.s, ERE, 1913, t. VI, p. 225-226 ;
P. Radin, ibid., 1912, t. V, p. 394.
LE SACRIFICE DANS LES CYCLES CULTURELS 235
5. Par contre, f"osl un lait étrange mais certain : jusqu'ici,
nous n'avons pas de l'enseignements sur l'existence du sacri-
fice dans lAusti-alie entière. Peut-être pouvons-nous donner
de ce phénomène une explication au moins partielle. Dans
presque toute l'Australie, le cercle culturel dit du bouinerang,
là même où se superposent des couches culturelles plus jeu-
nes, continue à exercer pourtant une grande influence. Or. dans
ce cycle culturel, l'Etre suprême commence à se confondre
avec l'ancêtre primaire de la tribu ou plutôt de l'humanité,
el le sacrifice à l'Etre supi'ôme cesse totalement ou devient
tj'ès rare. Nous avons des preuves directes de cet état de
choses dans les l'égions africaines qui apjnirtiennent à ce
cycle culturel ; par exemple, chez les Hottentots, les Oafres et
les Bétchouanes (1), les Schilluk et les Dinka (2) et d'autres
peuplades hamito'ides et nilotiques (3).
Mais même si le sacrifice faisait complètement défaut dans
le cycle culturel du boumerang. ■ — ce qui n'est pas, car il
devient seulement plus rare — ce n'est pas ce cycle culturel
qui est le plus ancien, mais celirt des Pygmées et là, nous
l'avons vu, l'f'xistonce du sacrifice est j)arfaitement et large-
ment assurée, sous la forme du sacrifice des prémices. Nous
avons pu reconnaître sa nature relativement très élevée et
spirituelle, l^ar ce fait important, toutes les théories évolu-
tionnistes sur l'origine du sacrifice se trouvent déjà l'éfutées
el ruinées par la base.
Cependant une grave objection se dresse contre nous. Les
offrandes de prémices dans ces cycles culturels plus anciens
constituent-elles de vrais sacrifices ? Ne sont-elles pas de
pures oblations, de telle sorte qu'il leur manquerait le trait
essentiel du sacrifice, la destruction ?
En j'épondant à cette objection, nous louchei-ons à la plus
(1) W. Schneider, Div Religion dir afrikanischen Naturvolkvv. Mlinster
i. W., A.schendorff, 1891, p. .53-88 : Th. Hahn, Tsnni-Goam, Thr fSupremr
Being of the Khoi-Khoi, London, 1861 ; G. Fritsch, Die Eingeborenen
Siidafrikas, Breslau, 1872, p. 336-342, 352-357 ; H. A. Junod, The Life of a
f^outh Afrivan Trihe, Neuchatel, 1913, t. II, p. 346-411.
(2) W. HoFWAYER, Anthr., 1911. t. VI, p. 120, 122 : D. Westermann. The
fihilluk People, Philadelphia-Berlln, 1912, p. 171 ; Seligman, ERE. t. IV,
1). 707-708.
(3) Voir la littératui-c chez Schmidt, Ethnolofiiselu Remrrkunfjen zn thro-
logischen Opfertheorien, MOdling, 1922, p. 23.
236 W. SCHMIDT
profonde différence qui sépare dans ce sujet les plus anciens
cycles culturels, ceux de la cueillette, des plus récents, les
cycles primaires, dans lesquels l'homme augmente la produc-
tion de la nature par l'élevage du bétail et par l'agriculture ;
nous nous trouvons en même tcm])S amenés à la question de
lessence m'ème du sacrifice.
Est-ce cpie la destruction aj){iartient réellement à cette es-
sence ? La grande majorité des théologiens répond affirmati-
vement. Les ethnologues et les hiérologues, les théoriciens de
la science comparée des religions, outre M. Mauss et H. Hubert,
qui seront sans doute étonnés de se voir en société pres^que
exclusivement théologique, ne le nient ni ne l'affirment, et par
cela ils le nient. En effet, Tylor, Wilkbn, "Wundt et d'autres
n'hésitent pas à énumérer aussi l'ohlation parmi les différentes
espèces du sacrifice.
Pour ce qui regarde les théologiens, il leur importe de voir
netteîuent le dilemme devant lequel ils se trouvent placés : ou
ils affirment que la destruction est de l'essence même du sacri-
fice, et alors ils ne peuvent plus soutenir «l'universalité du
sacrifice dans toutes les religions du monde (car dans tous les
cycles culturels les plus anciens, ceux de la cueillette, il n'y a
pas de destruction) — ou ils admettent qu'il peut y avoir un
vrai sacrifice sans destruction, et alors l'universalité du sacri-
fice dans les religions de tous les temps et, en général, de tous
les pays est sauvée. Pour saisir la justesse de ces observa-
tions et comprendre toute leur portée, il nous faut étudier d'un
j;^-u plus près d'abord le sacrifice des Urkulturen. puis celui des
cycles primaires.
'Dans les sacrifices des cycles de la cueillette, sont toujours
oflTei'ts les premiers produits de la nature nés spontanément.
Dans les sacrifices d'animaux, considérons avant tout la ma-
nière de sacrifier. C'est un fait capital, ici : l'acte de tuer l'ani-
mal, la « destruction >>, n'appartient absi dûment pas au sacri-
fice comme tel. L'action de tuer est un acte totalement profane.
Un homme à la chasse l'accomplit dans l'intention tout à fait
profane et prosaïque de se procurer de la nourriture. Cette
action de tuer correspond tout simplement à l'action exercée
par la femme qui cueille des fruits ou déterre des racines pour
se procurer la nourriture végétale. Le sacrifice proprement dit
LE SACRIFICE DANS LES CYCLES CULTURELS 237
ne conimenrera que par l'oblation de certaines parties de l'ani-
mal tué à la chasse ou de certaines plantes obtenues par la
cueillette. Si Ton veuf absolument parler encore ici de des-
truction, la destruction ne peut être trouvée qu'en ceci : telle
partie de la nourriture est soustraite à l'usage humain et
parfois jetée, abandonnée. Si. quelquefois. Toblation est brûlée,
il semble que cela doive être attribué à une influence posté-
rieure de Tanimisnie, qui porte à affranchir 1" « àme » de Tobjet
sacrifié, pour la faire pcirvenir à la divinité (1).
De même que lacté de tuer précédant Toblation est purement
profane et ne fait pas partie du sacrifice lui-même, de
même le repas qui suit le sacritice nest nécessairement ni
une partie du sacrifice, ni davantage un repas communiel
auquel participent le dieu à qui on a sacrifié et le sacrifiant
lui-même. Car ce repas est, ici également, un acte purement
profane ; on consom'mè la nouiriture qu'on s"est i)rocurée à
la chasse ou par la cueillette des plantes. En sacrifiant
d"abord une j^artie minime de cette nourriture à l'Etre su-
prême, on a l'intention de reconnaître qu'il est le maître et le
créateur de tout, sans estimer le moins du monde qu'il ait
lui-miême besoin de cette nourriture.
in. LE SACRIFICE DANS LES CULTURES PRIMAIRES.
•La situation change profondément dans les cycles cultu-
rels où l'homme commence à travailler la nature, pour accroî-
tre et assurer l'abondance de ses produits. La grande diffé-
retijce qui s'est effectuée se voit le plus clairement dans le
sacrifice du bétail.
En pareil cas. il n'est pas l)esoin de tuer l'animal pour s'en
emparer, comme cela était nécessaire à la chasse, dans les
anciens cycles culturels. L'animal, fruit de l'élevage, se trouve
déjià dans la possession de l'homme. Mais il faut bien tuer
l'animal pour pouvoir le manger. Par là même, ici encore,
l'action de tuer pouvait demeurer purement profane, sans
appartenir proj>remenl au sacrifice. La chose est |)articuliè-
rement claire dans le cas d'un animal unique dont une partie
seulement devait être offerte en sacrifice. Mais s'il s'agissait
de plusieurs victimes parmi lesquelles un animal entier devait
(1) Voir plus haut, p. 229.
238 W. SCHMIDT
être sacrifié, et surtout si eel animal se trouvait d'avance
désigné pour le sacrifice, comme il arrivait par exemple pour
l'animal premier-né, alors la croyance pouvait naître et se
développer que, dans ce cas, Faction de tuer elle-même appar-
tenait déjià au sacrifice. Pareille conception se présentait
d'autant plus facilement, si Ton croyait que l'Etre suprême
n'avait pas besoin de nourriture ; car alors on pouvait s-e
demander dans quel luit on sacrifiait à Dieu. Il pouvait aussi
venir à l'esprit que la fin propi'e et l'élément le plus intime
du sacrifice était de reconnaître le domaine suprême de
Dieu sur la vie et la mort, en faisant passer un être vivant
de la vie à la mort. Que de telles idées soient absolument
étrangères au saciifice des temps les plus anciens, cela ré-
sulte clairement de tout ce que nous avons dit de sa forme
extérieure et de sa nature interne.
Mais si nous nions que la destruction de la vie appartienne
à Tessence du sacrifice, nous sommes probablement les pre-
miers à relever ce fait, qu'il y a une relation intime et ]>ro-
fonde, positive, du sacrifice à l'idée de la vie. Jusqu'ici, on
n"a pas sulïisamment considéré, ce nous semble, que tout vrai
sacrifice, et surtout que les sacriifices les plus anciens por-
tent uniquement sur des vivres, ce qui veut dire des nxoijcns
de vivre, des moyens propres à assurer la vie. Et puisque, dans
les mêmes cycles (mlturels, il est reconnu que l'Etre suprême
a créé l'homme et lui a donné j)our la première fois la vie.
l'idée du sacrifice des prémices et des vivres en général re-
vient à celle-ci : <. Seigneur, vous m'avez donné la vie pour la
première fois ; par le sacrifice que je vous offre à présent, je
reconnais solennellement que c'est de nouveau vous, et vous
seul, qui me donnez les vivres, les moyens de continuer cette
vie que je tiens de vous. » C'est donc par un noble geste
positif que l'idée de la vie est liée ici avec celle du sacrifice,
ou plutôt la reconnaissance solennelle de Dieu comme maître
suprême de la vie est l'idée centrale du sacrifice, déjà et sur-
tout dans les plus anciens cycles culturels.
Si dans les Urkulturen on n'offrait que des vivres, un corol-
laire important s'en déduira facilement : il ne pouvait y
avoir de sacrifices humains sous aucune forme, parce que sous
aucuni' forme la chair humaine ne constituait alors une nour-
LE SACIUFK.K HANS LhS CYCI.KS nCLTURELS " 239
riture ; dans cos oycles les plus anoiens, il n"y avait pas
d'anthropophagie.
Avpc les cycles culturels qui travaillent la nature, tout
change sous de multiples rapports, que nous pouvons seule-
ment brièvement indiquer ici.
Le moins favorable au développement du sacrifice est le
cyclf cultvvcJ totémiste. car il est pénétré par la magie. Tandis
que le sacrifice est offert à la persomuiliié la plus haute, dans
un esprit de déférence, d"hommage, de révérence et de sup-
plication, la magie accuse des tendances toutes opposées. Elle
s'adresse aux choses, pour connaître et capter leurs forces
mystérieuses, et refuse de sMncliner devant l'Etre suprême.
Au contraire, par ses formules et ses passes, elle s'efforce de
contraindre la divinité elle-même. L'hommage plus ou moins
explicite exprimé par le sacrifice se change ici en violence,
que l'on cherche à exercer par l'intermédiaire de rites magi-
ques précis.
Dans le cycle >natt'iarcal, c'est le sacrifice aux morts qui
obtient une i)lace prépondérante. Et parce qu'on offre aussi
aux morts leurs armes et ustensiles, c'est par cette voie en-
core que d'autres choses que des vivres se sont introduites
dans les sacrifices offerts aux dieux.
Lorsque plus tard, après le mélange du cycle culturel des
nomades avec les autres, l'esclavage eût commencé, on sa-
crifia aussi les esclaves et les femmes du défunt, afin qui,ls
raccompagnent dans l'autre monde. Ce fut encore une des
causes qui donnèrent occasion aux sacrifices humains. Une
autre cause se rencontra dans le cycle matriarcal lui-même.
à savoir l'anthropophagie, qui se développa surtout dans ce
cycle, à tel point que la chair humaine devint, dans quelques
tribus, une noui-riture habituelle. Cette chair pouvait donc
aussi être offerte aux dieux et aux esprits : on leur ménageait
ainsi l'aliment le plus précieux. Une troisième cause enfin fut
1p mélange intei'vcnu entre le cycle totémiste-magique avec
le cycle matriarcal agriculturel : comme on employait les
hommes pour représenter les dieux de la fécondité animale
et de la ffMMilité végétale, on les tua aussi, pour se procurer
leur' chair et leur sang, dans le but de féconder les hommes.
les animaux et les champs.
240 W. SCHMIDT
Les sacrifices humains, ayant pris naissance de ces diverses
manières, se développèrent dans une direction particulière
dans le cycle culturel des nomades ou plutôt dans les cycles
fortement pénétrés pai' la civilisation des nomades. Chez ceux-
ci. l'enfant premier-né était privilégié quant à l'héritage et
quant à sa position sociale. Or, il semhle que, des prémices
des animaux qu'on sacrifiait chez eux. on commença, à une
certaine période, à tirer par analogie des conclusions rela-
tives aux premiers-nés des hommes et à les sacrifier égale-
ment. Mais cette espèce de sacrifice n'était pas propre au
génie des nomades, puisque chez eux. il n'y avait pas d'anthro-
pophagie. L'immolation des victimes humaines, et donc celle
des premiers-nés, ne pouvait se développer chez eux que sous
l'influence de cycles culturels étrangers.
IV. LE SACRIFICE EXPIATOIRE.
Nous nous sommes appliqué jusqu'ici à éclairer l'origine
et la nature de toute une série de sacrifices. Il en reste encore
une espèce spécialement intéressante, mais aussi assez dif-
ficile à traiter du point de vue ethnologique". C'est le sacrifice
expiatoire.
Nous nous rappelons que, selon Wlndt, le sacrifice expia-
toire aurait été la plus ancienne espèce de sacrifice ; elle se
serait développée selon lui des rites lustratoires magiques.
Or, il est certain que les lustrations magiques n'étaient aucu-
nement nécessaires pour rendre possihle l'origine du sacrifice
expiatoire. En un lion nomhre de cas, au contraire, un sacri-
fice expiatoire, par influence de la magie du cycle culturel
totémiste, a pu se transformer en rite lustratoire auquel on
attribuait une force contraignante.
D'un autre côté, nous trouvons du moins un cas de sacrifice
expiatoire, dès le plus ancien cycle culturel, celui des Pyg-
mées. C'est chez les iSemangs (1). Il est certainement remar-
quable que, dans l'unique sacrifice expiatoire de ce cycle cul-
turel que nous connaissions, il y ait effusion du sang et du
sang humain, quoique dans le sacrifice de cette période en
général, comme nous l'avons vu, l'acte de tuer et l'effusion
du sang n'appartiennent pas à l'essence même du sacrifice.
(1) Voir plus haut, p. 233.
LE SACRIFICE DANS LES CYCLES CULTURELS , 241
Un autre cas de sacriflec expiatoire, avec intercession de
raneètre divinisé, se trouve chez les 'Schilluk.
Plus nombi'eux sont 'les cas de ces sacrifices chez les peu-
ples noniade.s. Ainsi chez les Galla (1), les Baria \2) , les
Batutsi (3). Mais en général, il faut Tavouer, le sacrifice
oxi)ial(iire est de léaucoup moins fréquent chez les peuples
non-civilisés que les autres espèces de sacrifice. Il serait bien
désirable que les missionnaires fissent des recherches spé-
ciales sui' ce point ; il serait surtout important d'examiner si
l'offense pour laquelle le sacrifice est offert est vraiment une
faute morale ou seulement une faute rituelle.
Dans les religions des peuples civilisés, les sacrifices ex-
piatoires deviennent plus nombreux. On en trouve la biblio-
graphie étendue dans Hastings {ERE, art. Expiation and Atone-
ment. vol. V, p. 625-671). Un fait caractéristique se manifeste
ici : il y a deux religions dans lesquelles l'idée du sacrifice
expiatoire n'a pas pris racine ou n'a obtenu aucun dévelop-
pement considérable : la religion égyptienne, parce que c'est
un panthéisme magique solaire, et le bouddhisme, parce que
c'est, au moins dans ses formes pures, un athéisme.
^^i la question du sacrifice expiatoire en général a ses dif-
ficultés, cplles-ci deviennent encore plus grandes, quand il
s'agit du sacrifice ex])iatoire par substitution isteUvertr étende s
Sïihnopfpr) . Dans le vol. VI de son Golden Bougl'.. auquel il a
donné le titre spécial JAc Srapeyoat. Fr.\zer a voulu faire
dériver cette espèce de saci'itice, et surtout le sacrifice expia-
toire de notre Sauveur sur la croix, des formes grossières et
basses du rite du srape-goat [râper e^nis.sai'iu^. bouc émissaire).
C'est un rite pai- lequel les péchés d'une communauté sont
transférés sur un animal (ou un homme), qui, chargé alors
de CCS péchés, est expulsé hors de la communauté, ou \w\ si
c'est un homme. Getle théorie évolutionniste se fonde sur ce
firincipe, éi'igé en thèse par Frazer : « The idca of sin is nul
primitive ». ^lalheureusement. il l'a laissi' coniplèfeinent sans
preuves, bien qu'il lui soit facile et si tainilicr d T'ciiic de gros
vnlumcs en ib'd'ense de ses opinions.
(1) Salviac, Vu pcnph (intiqur au pays de MrnrUk ; les Galla, )). 12S.
(2) A. PoLLERA, / BarUt r i Kunavui, ji. 90-91.
(3) P. LOUPIAS, Anthropos, 1908, C IH, p. 2-6.
242 ^v. si;nMiDT
Si nous examinons cette théorie d'un ])eu plus de près, nous
li'ouvons d'abord que rexpulsiou de Tanimal est précédée
d'une énuniération «u récitation des péclu's, par laquelle ils
sont transférés sur lui. Mais ici un problème se pose :
ces péchés sont-ils confessés, énumérés en quelque sorte
mali-riciltunenl sur le dos de cet animal; afin qu'il en soit
comme chargé, ou bien cette confession des péchés est-elle
dirigée en premier lieu vei-s un flieu, vers l'Etre suprême, et
seulement en second lieu vei's l'iniinial ? Il y a certainement
des cas qui appariieunent à celte dernière catégorie, par
exemi)le chez les Athkan, les Badaga el puis les Hébreux (1).
Mais il y a un cas spécialement intéressant chez les Wakuhve
(Afrique orientale) (2) . Il se fait d'abord une confession dé-
taillée des péchés ; quand on arrive aux dernières paroles,
ci^iui qui s'accuse jette d'un \an. qu'il tient à la main, des
débris de bois et de paille en l'aii', en ajoutant : « Tous mes
péchés s'en sont allés avec le vent. » On voit que cette céré-
monie n'est autre chose qu'un rite symbolique, accompagnant
la cfuifession ; celle-ci est le principal, le réel, la cérémonie
est l'ajoute, le symbole. Cette conclusion ressort avec évidence
de ce que, dans certains cas, par exemple avant de fi'anchii"
une rivière, il y a confession, ])arce que l'usage l'exige, mais
le rite du van est omis. Pareillement, dirons-nous donc, l'ex-
pulsion du liouc émissaire n'est autre chose qu'une cérémonie
solennelle, accompagnant la confession des péchés.
En outre — et déjà Westermarck l'avait noté dans sa cri-
tique de Frazer (3) — le caprr eniissarius n'est jamais la
victime expiatoire elle-même ; c'est un autre animal qui est
saci-iflé comme tel. Nous le constatons aussi chez les Hébreux.
.Mais si le cnprr emissarivs, ou l'animal qui en fait f(^ncfion,
après avoir été expulsé, est de plus mis à mort j)lus tard,
c'est uniquement pour symboliser d'autant plus fortement
l'élimination des péchés : en jiareil cas, les fautes sont trans-
portées de ce monde terrestre dans l'au-delà.
Il serait trop long de nous occuper ici encore des sacrifices
expiatoires de substitution, dans lesquels un homme est chargé
(1) V. Has^tings, EEE, t. III, pp. 829 ss.
(2) Anthropos, 1900. t. IV, p. 307-312.
(3) Westermarck, Thf Origin and Develop. of Moral Ideas"-. t. I, p. 61 ss.
LE SACRIFICE DANS I.E-S i;YCLES CULTURELS 243
des péchés de toute une communauté quïl représente ; il suf-
fira de constater que c'est là certainement une forme assez
tardive.
Par ce court résumé de la position et du développement du
sacrifice chez les différents peuples et dans les différents
cycles culturels, vous avez eu l'occasion de voir déjà quel rôle
important le sacrifice joue dans l'histoire des religions.
Dans son ouvrage Bas Gebet (1), Fr. Heiler fait les deux
remarques suivantes : « La prière est une des racines du
sacrifice ; elle est sans doute plus ancienne que ce dernier...
A l'origine, le sacrifice était tout au service de la prière ».
Et ailleurs : « Où le sacriffce domine, un abaissement du
niveau de la religion est inévitable », C'est son inclination vers
le protestantisme qui a conduit l'auteur à ces jugements (2).
Il résulte de notre enquête que la première de ces proposi-
tions n'est pas exacte : le sacrifice se trouve déjà dans les plus
anciennes couches de l'histoire des religions, et il n'y a pas
de raison pour dire que la prière soit plus ancienne, encore
moins- que la prière soit une des racines du sacrifice. Prière
et sacrifice sont des formes indépendantes et sui generis du
culte ; tous deux ont leur valeur propre ; tous deux sont indis-
pensables pour une religion vraie et vive. On voit par là
combien erroné est aussi le deuxième jugement de Heiler, que
la prédominance du sacrifice entraîne avec elle un abaisse-
ment du niveau religieux. S'il fallait donner une courte carac-
téristique de ces deux éléments, je serais tenté de dire que la
prière représente plutôt l'élément passif et réceptif, tandis
que le sacrifice satisfait au besoin actif et donatif de l'homme.
Mais précisément, dans la première forme de sacrifice que
nous connaissions, dans le sacrifice des prémices, l'homme
professe solennellement que. même ce qu'il donne à Dieu en
sacrifice, il l'a reçu de sa providence.
Dans les conférences qui suivront, de savants spécialistes,
en vous introduisant dans les détails des sacrifices de peuples
déterminés, mettront encore en meilleure lumière la grande
importance de ce rite. Mais ils vous donneront aussi l'occa-
sion de constater combien de recherches restent à faire pour
(1) In-S», MUnchen, Reinhardt, 1918, p. 59.
(2) Voir ma critique détaillée, Anthr., 1917-193 8, t. XII-XIII, p. 723 m.
24 4 G. WUNDKULE
i''luci(l('f tani ilo jioiiils (tlisriiTs. J'csp^ro (luc ces (-(jn lYTences
ndus a (Tccl i((nn(M'nnl plus i-ncdrc que par le ])assr' à \ini' (pu^s-
1i(»7i (pii |i!'(''s('iilc poui' nniis. catlioliinics. un inlfu'èl toul
jia ri iculicr, cl (pic des sa\anls cal li()li(pics appdri crunt non
sculcincnl assez i\o (|(''\iiuciricnl pouj' en! ii'pi'oudrç les Ifavaux
iK'ccs.saires. mais aussi tnulcs les cpialil(''s l'cquises pour p«''-
ut'li'cr la nalurc inliiiic cl i''luciilcr Diisloirc coinplcx(i i\o ces
r i I c s .
[15] Zur Psychologie des Opfers,
von Professor Dr. Geoig WuNDERLE in Wiii'zburg.
I. ZUR METHODE.
Es gclKU'l /wcifclids zu lien grossleu und scliwicrigslen
Tliemen dci' iniMlerncn Religionsgescliiclil c, die EnUvicklung
des Opl'cj's in dcr Religion der Menschlicil darzustellen. Einzelne
Vei'suche dazu sind bcreils geniacld woi'ilcu, alter das .ganze
ÎMatenal naeli seineni ideengescliiclitli(dicn und tatsacliengc-
scliichl licluMi Zusammcnhange vorzuriiiiren. isl. Itis heiite noeli
ni(dil gelungcn. \'i(dlciclit licgi ilas niclit zuhdzi auch daran,
dass einc psycliologische Dui'chdi'ingung des gewalligenSloffes
niidit einsllicl) in Angrilï genoinmen worden isi. -Sie miissfe im
(iiuudc ddcli die ricliligc Deulung, Eiu- und ZusainTnt'n(U'dniing
dvv unzaliligen Oi)l'ertatsae]ien ermoglichen. Nun ist die Psy-
(dujlogie des Opfers fur sich genommen eine sclion melhodiseh
ausserordcnt I icli dnmcnvidle Aulgalie. l>e| laclilcl man sie
nanilieh genau Vdiii ciii])irischcn Standpunkte aus, so ersclicint
es als vollkoninien undurciifuhrljar, Jene Handlungen, die etwa
iu irgcndcinci' Hidigion als bcsiiniiule, konkrele Einzelopfor
gesetzl wei'dcn. je in ilii'cr ])syeliisclien Bestimnil heii zu unter-
suchen. Der Untefsuchungsgegensland wài-e heispifdswcise hier
noeli viel weillàufiger und umfassendei' als bei der (ein]>i-
risehen) Psychologie des Gebeles. Und doch kann keine Psy-
chologie davon altsiehen. bestimmte EinzelvoT'gânge^des (reli-
gi(")sen;) Lebcns zu erforschen. weil sie doch 'J'aisachenwissen-
sehafl und nieht i)hantastisehe Kdnsli'uklion sein will. Die
cinj)irisciio (irundlage darf also auch hier in keinem Falle
ZLK psy(;holO(_;ie di:s opfeiîs 245
f'nlin'liii w t'i'ilcii. S(i sicliff fl;is ist, so sclnvicrigor wii'd ilic
Lr)suiig (Ici' psycliologisclien Aufgalie in iinsereiii Falie, \\pA\
wii' in (l('i' .ycgf'nwai'figon (iostalf nnscics religiriscn l->rl('lH'ns
kcinc U[)C('rtat saclii' nidir lialn'u. dir doin Opfei' ini luM'l^rmini-
liclion Siiuii'. (I. 11. (Ii'in riliidl licsl imniten Opft'r licr Yorzeit
vullig /u vorglcirlicn wiiie. Xiclil einnial das Mcssujjt'cr ini
katlinlis(dii'n Clll•i^l cntiini kann dalici (dîne wcilorcs in r>(dra(diL
koninion ; (dnciscils wogrn dm' heule noidi iinnicr UTnkanipltcu
Frage. wnrin i\onu ilcr oigentliche OjilVndiai'akl cr dcssidlicu
lioge. anderseils wfil l's JiMlcnfalis Ix'i'fdls su ins Geisligo
gt'liolit'n ist. dass dir X'cridndnng yon Uprci'gcdankc und Opl'er-
aiisfûlnaing ni(dit ganz Itdidit iind si(diei' verstândlicdi ist. Mit
cincni W'oi'li'. fiir dii' ( ipl'i'i'psyidKdùgif l'idill nns iiis zu einoni
gcwisscn (îiadr das rigrnc suhjckt iv(3 Erlcbcn. von dcni ans und
dur(di das wir ini Stande sind. die vergangenen, von diM' RpH-
gii;insgos(dii(ddi' li('fi(d)toton OpTcrtat sarlien in voiler Einfuh-
lung zu deuten.
Bringt also s(dion der notwcndige ^'(M•zi(dlt aul' die psyclio-
logisidie I)niclifors(dning de.-^ ganzen ges(dii(dili(dien iMaterial.s
eine wiclitige J'jnsidu'iinkung. so ist der Mangel personlichen
l']i!(d)ens no(di eine enipnndIi(dH'T'e Heniniung. Wir kônnrn uns
iiictlnidisih tiirhl lunlrrs Inlfi'ii nl.s diuhti'rli, dass icir typisrli vcr-
scli if'drxr Tdl '<<iflifn und Ttits'icln'nkoni pb'.rc^ die (ils « (Jpfrr »
(/'■mi'iiil und (ds sidr/n' (inrrluinnl sind. ziini Stndinni aiisnu'Uih'u.
und mil d'-n MilIrJn drr rinf i'i lilfnd>'n H''<>lHii-htun<j und Drufung
dos liriuHiszu findrii stridicn. wus si'' ycradc als « Opfcr » chanik-
Irrisicrl und ron ((ndrrm rrliç/idscn Hnndlungen. etiva vont Geb(H
unfrrsc/iridrt , Dadundi ^•e|■nl(■■|gen \vir dann ein psychologiscli
ziiIretVfnides, d. li. aus wii'kliiduMi I.clienslatsachen gewonnenes
Bild der spczilisi lien 0|iiVridei' und der speziflsi'hen Opfer-
ni(ili\c zu ge^vinnen.
Alli'nlings ist dainil ]ii(dit rein eni])ii'isidi(> Arlieit g-eleistot.
lalls iiian diese nui' als gciuiuc i'iinzidfiu'sidiung gelten là.ssl.
^lan inag vicdliMclit auf dir eben besidirieheiie .Méthode den
Ausiliandc « ]di;inonienolog is(dii' Psvidiologie » an\\(nide,n.
Ktwas Hiidiligi's und nieincs iM-aidit l'iis aiudi niM-e(dil igtes ist
daiaii. weii n,L;li'i(di hier die ^ Inluilioii .>. dii^ .1 W'eseiissidiau »
bel lier l'jrmilllung des psy(diidogis(dien CharakI erisi ikuins
aller (_)])rurhandlungen ni(diL idnliudiiiin in der liedeutung ef.wa
246 G. WUNDEBLE
der HussERL'schen Phànomenologie. verstanden werden darf.
Ich mochte nicht verfehlen, bei der psychologischen Unter-
suchung des Opfermaterials der Religionsgeschichte die zer-
gliedernde Analyse sowie die zusammenstellende Vergleichung
der seelischen (irundakte und Grundeinstellungen, die hier
mitspielen, zu betonen. l'nd beide sind nicht Sache der
unmittelbaren « Schauung » : sie sind das Ergebnis vermittel-
ten Erkennens. Dass natùrlich auch solche diirch aile môgii-
chen Stadien hindurchfortschreitende Forschungstâtigkeit
iliren Ausgangspunkt von élément ai'en Einsichten und Ein-
fiihlungen unmittelbarer Art - — mag man sie nun « Intui-
tionen » heissen oder nichf — nehmen miiss, bedarf keinor
Hervorhobung. Die neum-e phànomenologische Psychologie isi
damit allerdings nicht zufrieden.
Es ist mm klar, dass eine so zu verstehende Psychologie
immerhin noch am erspriessliehsien sein muss, wenn die
Tatsachen, an denen sie geûbt wird, aus einfacher naiv-kind-
licher Gesinnung entspringen und in ihrem Ausdruck noch
wenig verwickelt sind, so dass ihre Bedeutui)g — wenigstens
dem Kerne nach — ofîe.n zutage liegt. Man wird infolgedessen
wohl nicht mit der Bearbeitung der Opfer bei den rituell reich
entwickeUen Religionen anfangen, sondern darnach trachten
miisson, moglichst prin)itives Material zn erhalten. Glûckli-
cherweise bat uns die moderne Ethnologie in den Stand gc-
setzt, eine Reihe von wichtigen Tatsachen zu untersuchen, die
eine wertvolle psychologische Ausbeute liefern. Der inhaUs-
reiche Vorlrag, den P. Wilhelm Schmidt S. V. D. uns soeben
iiber das Opfer in den verschiedenen Kulturkreisen.. namentlich
bei den primitivsten Volkern gehaltcn bat, war doshalb fur die
Psychologie nicbi bloss intéressant, sondern geradezu grund-
legend, da das hierin gebotene Material wie kaum ein anderes
zur psychologischen Durchforschung geeignet ist. Die seelische
Grundeinstellung des Opfernde.n, also seine Gesinnung und
seine Motive beim Opfer sind wenn irgendwo so hier mit hoher
Wahrscheinlichkeit zu erfassen.
II. DIE SEELISCHEN ELEMENTE ALLER OPFERGESINNUNG.
Die Frage, ob das Opfer sich auf der ersten Stufe mcnsch-
licher Kultur mit Recht vermuten lâsst, nachdem geschichtliche
ZL'R PSYCHOLOGIE DES OPFERS 247
Bekniidiingen im gewi'ilmlichen Siniii^ dafui' nicht v(>rlipgon.
diJrftt' mit Hûcksicht aiif die (Muwandfreifn Zeugnisse der
Ethnologie wohl enlscliieden sfin. Die Ethnologie weisi bei den
primitivslen Vrdkern Handlungen und Gebràuche nach. dorcn
Charakter als Opfer ausser allem Zweifei steht. Icli Itrauehe
nur an die Primitialopfer bei den Pygmâen zu erinnein. von
denen uns P. Schmidt voidiin beriditet hat. Diesen FestsIeUun-
gen gegenùber spielt es eine unwesenlliche RoUe, oh nebeu
deni Opfer noch andere religiose Riten auf der Urstufe ge-
brâuchlich waren, ob insbesondere das Gebet in ritueller Form
bereits iiblich war. in welchem zeitliehen Verhàltnis iiberhaupt
das (iebet zum Opfer stand. Friedrich Heiler tritt mit Eifer
dafiir ein, dass das Gebet nicht bloss der Mittelpunkt, sondern
avn-h lier Anfang ailes religiosen Ei'lebens gewesen sei. Mit
welchen Mitteln will man aber dièse Problème entscheiden ?
Sieht man sie rein psychologisch an — was doeli mangels
anderer Beweisart schliesslich auf jeden Fall geschehen muss
— se stôsst man auf die allgemeine Frage : Liegt der Sprach-
ausdruck der religiosen Gesinnung dem Menschen nâher als
der Handlungsausdruek ? Darauf wird wohl keine unbedingt
giltige Antwort moglieh sein. Dem stark aftektiv lebenden
Urmenschen diirfte die Gesamtauswirkung seines Inneren in
Geberde, Sprache und Handlung das natûrtichste gewesen sein,
so dass Gebet und Opfer, obzwar nicht dem gleichen seelischen
Motiv entsprungen, zusammen an den Anfang aller Religion
zu set zen wâren. Beide mûssen tatsàchlich als Grundausdrucks-
weisen der elementarsten religiosen Gesinnung gelten. Und
zweifellos ist unter diesem Gesichtspunkte betrachtet das
Opfer die vollkommenere Weise, weil es nicht bloss den ganzen
Menschen. d. h. sein Innenleben und sein âusseres Handeln in
Anspruch nimmt, sondern auch in der Darbringung der Opfer-
gabe die Naturgiiter religiôs wertet und verwendet. Die reli-
giose Meinung und Symbolisierung erstreekt sich demnach
beim Opferakt viel weiter und viel tiefer als beim Gebet. Frei-
lich ist dabei nui' jene Opferhandlung ins Auge gefasst, bei
welcher das âussero l'un als .\usdruck der inneren Absicht
bewusst und gewolll wii-d. Die blosse S^tznng der rituellen
âusseren Handlung olme die entsprechende innere Gesinnung
ist ehen leer(> Symiiolik, vergleichbar einein T.eichnam. der
248 Ct wtnderle
dem lebendigen Menschen eigentlit-li nur inelir âlinlich ist.
Solche Entseelung kann erst das Ergcbnis eines Niedergangps
sein, tier psychologisch gui begreiflicli ist ; der Beginn dof
Entwicklung indes iduss als Einheit von Gesinnung und
Ausdruck prscheinen.
Wclclies sind iiun die inirrlns.slicJu'u Br.siunclteilc drr charalxtcri-
stisckcn Opfenft'sininnui ? Koiikrel-psychologisch kf'mnen wii'
dièse Frage gleich so slcIlfMi : Was gehoi't zu jener seelischen
Verfassung, die sclion Imim oint'achen Primitialopfer etwa dei'
Pygmàen als wesentlicln' Opfergesinnung aus dem ganzen
Opfergebaliren zu erschliessen ist ? Die Aniwort daraut' liisst
sich aus ilen etlinologisohen Tatsachen ermitteln.
Das Kernhafte des Opferaktes (verstariden als Einheit von
Opfergesinnung und Opferhandiung) ist zweifelsohne in dem
Glauben an ein hôchsies Wesen zu findcn. Es ist von grôsstem
Belang, diesen Glauben auf ein einfaehes, kindliches Wissen
von eineni ûberragenden Horrn der IMensrhen und der Natur
gebaut zu sehen, der nicht selten narh Art eines kinderzeu-
genden und fiir die Kinder sorgenden Vaters vorgestellt wird.
In diesem Bilde bekundet sich ganz klar und anschaulicb, dass
sich der Primitive das Leben letztlicb nur als Wirkung eines
obersten, ailes « machenden » Lebendigen zu erklâren vermag.
dem naturgemàss die samtlichen Wesen untertan sein mûssen.
die von ihm stammen. Der Begriff des « Gehorens » ist in
solcher Uberzeugung ebenso scharf und deutlich ausgepràgt
wie bei unseren Kindern, wenn sie sagen, dass sie ihrem Vater,
ihrer Mutter « gehoren ». So erscheint tatsachlich der primi-
tive Vater- Gott als der hochste Eigentûmer und als der oberste
Herr der Menschen und der Welt. eben der Welt, die von dem
Kenntnis- und Macbtbereiche des Primitiven umgrenzt wird.
Das BcAvusstsein der Abhàngigkeit von dem ùber den Menschen
thronenden Herrscher bi-ingt der Naturmensch aucb allenthal-
ben zum Ausdruck. Er sieht in dem beherrschenden Gott frei-
lich nicht den Tyrannen, der nichts fur ibn tut und bloss von
ihm fordert. scndern eben den im (rrunde gùtigen Vater, dem
seine Kinder nie gleichgiltig werden. Daraus entstebt auf seiten
der sich als Kinder fuhlenden Menschen das Streben, mit dem
Vater-Gott die Familiengemeinschaft zu pflegen. Man mag
dièses Moment der religiôsen Urgesinnung vielleicht noch nicht
ZLii i>syi;h<)l(jgii: DES opfers 249
rjiit dein Nainen « J>ir'lip .> sclimùcken ; dpr Anlang ilazu ist es
geMiss. Es gibt aucli hciin Primitiven kpinon i-eligi<"ison Akt.
bel dem niclit irgcndwio dit- Abhàngigkeit von (W»tf iind das
Zusti'phen avil (u\\\ prlebt uiid ausgpdrûi-kt wûrdp. .Xalurlicb
konnen dièse iieidcn rpligiospii Elpiiipntai'prlebuisse dem Ir-
mensehen nie in solrb alistrakter Reinlifit bewusst sein ; eben-
sowpnitj sind lieidp m glpiclicj' Sl;lrkp cntwickplt. Je iincli rb-ni
Khu'IiPitsgradp und dcr Kraft dps cinzelnen .MxiMiciitt-:.-. winl sirh
in dpr Rpgel aindi dii' iiussprp Aiisdi'uck bpiiipsspii. so dass das
Symbolbal'lp dessellipii jiMlriilalls auf dpr nntprstpn SIhIp idiiip
Gpfabi' wpspuflirhpr .M i^sdi'iii nng zu dui'cdiscbauen isl.
Ini luiniilixpn Uplfrakt unil spiner Synibolik Irill nun als
i'berragendps hprMw das Bewusstsein dpi' Abbàngigkeit von
Gott (behalten wir dièse gelanfigste Bezeichnung des hoehsten
Wesens in Zukunft bei} und die damit verknûpfte Aner-kennung
der gôttliohen Herrseliaft ùber den Menschcn und dpsspii
samfliebe Gûter. Dei' ^^pns(•ll erscbeint mil albMn. was ibm zur
Verfûgung stebt. als (•n\\ [itlichtig. Das Rpchl (b's Herrscbers
verlangt Erfûllung in dpr Abgabe menschlirbcn IJpsitzPs au
den obersten Besilzei-. Dieser will und kann dip ir(]isrbpn (TÛter
nieht fiir sicb gebraucdien ; ('v bat sip ja tvir die Menschen,
seiup Kinder wa(dispn und gpdpiben hissen zur Erbaltung ibres
Lebens. Also kann die Hingabe derselben an (Tott, wpdei- den
Xicbtgebrauch noeli vipl weniger die Vprnirbtung in si(di
Sf'bliesspn. Die Hingabe ist nur als symbolisfdie Handliing ge-
nipint. durrli webdie die oliprstp Herrscbaft Gottes anerkannt
wpnjpu Mil!. Dip Ersflingp dps X'iebes und der Frûchte sind
glpicbsam dei- InlipgiifT und die Yertretiuig allps desspn. was
Lelten bekiumnl. uni s.'llist dpm Leben des Mpns(dien zu dipnpn.
Ob in dPi- ■' ()j)tpiung .. dprsplbpn bloss eine piufacdit^ Hingabp
als Ausdrui-k >]>']■ hlci^rx-iiafi sanprkpnnung zu prbii(d<pn ist, odei-
ob der fiefpre (ieiianke daiiei s( luui anklingt, dass mit den
Erstlingpn aile andpren (Uitpi' (iolt als dpm eigentlicdipn i>p-
sitzpi' von dpin dainil IipHpIipiipu .Mpusidipn wipdcr zuriu-kci--
stattet werdpu snllcn. làssl si(di auf (irund des etbnologiscdipn
Materials nicdit mil Si(diprbpil beslimmen. in den Opfprn der
sogenannien Kuitnri'pliyionpn kann dipse IiIpp da und durl
gefunden wprdpu ; dass sie als seelisclips Elempul berpits in
der Urreligion anzutrelTen sei, moge uiebt liebauptel sein. Ji'-
250 G. WLNDERLE
(.lent'alls ist die Ut'opfergc.simttnig in dcr Absichf brschlossen. Gotf
als d''nt H'-rri) allrs Lchnis mit d>'r Darbringung der L'^bnuerstlingr
zu huldigcn. Damit kann sich ganz wohl. wie spàtcr zu zeigen
isf, die Bitte vorbinden ; aber oline Huldigung (in irgendwelclier
Foi'iii) ist kein Opfer moglicb. Wo sie mit bewusster Aiis-
schliesslichkeit bekundét werden soll, mag man fûglich von
einein Huldigungs- oder Anbetungsopfer sprechen. Das Prinii-
lialopl'fr der Pygmâen srbeini diesem Idéal recht nahe zu
konirnon.
III. — ZUR PSYCHOL. ENTWICKLUNG DER OPFERGESINNUNG.
Darcli die i».sychologisehe Beti'aclitung der ethnologischen
Tatsat.dien fiiedigen sich von selbst jene Opfertheorien, die das
Opifer und damit die Opfergesinnung nicht fiir etwas Ursprûng-
liches lialton, sondern in ilim nur das Ergebnis einer Ent-
wickliing enfdeeken wollen, an deren Ausgangspunkt vollig
andeie Ideen zu set zen seien. Ist das Opfer als eine Huldigung
(und als eine Bitte) in den Religionen der Primitiven stdion
voi"handf'n. datm hat es eben keinerbM Sinn.und Berochtigung
melir. das Opter aus der Alinensjjeisung entstehen zu lassen,
oder es als den Versucli zu deuten, den der Menseli zur Stârkung
des manu'-i der Ootter und (ieister unternahm, oder gar naeh
Robert son Smith's Vorbild das tutemistische SpeisesakranienI
zur Quelle des Opfers zu machen. Die letztere Ansicht ist —
ganz abgesehen von gewiehtigen speziellen Einwànden — aus
dem allgemeinen Grunde unhaltbar, weil die Magie nie uud
nimrner der Mutterboden fur die Religion sein kann. Ein ina-
gisfher Ritus ist seinem Wesen nach anders gemeint als irgend
eine religiose Obung. Der Magie ist die innere Anerkennung
der schlechthinigen Ubermaelit des Oott lichen frenid ; sie sucht
im Gegenteil lias (iottliche in die (iewalt des Menschen zu
bringen, um es zu seinen selbstsûchtigen Zwecken auszubeuten.
In aller Magie wirft sich der Mensch mittelbar oder unmittelbai'
zum Herrscher iiber das Oôitliche avif. Magische Riten und
Handlungen also. die âusserlich wie Gebete oder Opfer sich
daistellen. sind in Wahrheit seelisch ganz anders beschaffen
als Gebete und Opfer im religiôsen Sinn, bei denen doch die
Grundeinstellung in dem Bewusstsein der Gottgehurigkeit und
Gottpflichtigkeit wurzelt. Der dièses Gefûhl verneinende Egois-
ZUR PSYCHOLOGIE DBS OPFERS 251
mus làsst koine wahre Religion aufkorninen. Die spatere Ent-
wicklung hat ja wohl die Magie in weitem Umfange gerade in
das Opferwesen eingefûhrt (als typische Beispiele seien nur
die indischen Bralimailas und das chinesische Liki genanni) ;
aber durch solche Vormischung und Entartung ist die ursprûng-
liche Opferidee und Opfergesinnung in verhangnisvoller Weise
verdunkelt worden. Vorsehub liât diesem Prozesse sicherlich
die Betonung des Âusseiiichen, Rituellen geleistet, wodurch
die Wichtigkeit und der Wert der seelischen Verfassung, die
zuni Opfer hâtte notwendig vorhanden sein mûssen, gesrhmà-
lert wurde. Das Àusserliche, Rituelle war als sichtbares Werk
das Eindrucksvollere. das schliesslich âuch in der Schàtzung
den Ausschlag gab. Es dràngte sich als die Hauptleistung beim
Opfer vor, und se wurde denn Gott die Gabe nicht mehr de-
mûlig dargebracht, sondern selbstbewusst vorgelegt, damit er
in entsprechendeiu Tauschhandel das von ihm Gewùnschte
dafûr spende, Aus deni rein magischen Versuch, durch Zwang
Gott zu iiberwàltigen, entwickelte sich das Streben. ihn durch
lockende Gaben zu einem dem Menschen vorteilhaften Ge-
schâfte zu bewegen. Auf der letzten Stufe konnte ailerdings das
Abhàngigkeitsbewusstsein und die Anerkennung der gôttlichen
Cbermaeht noch eine Stelle finden ; aber als das durchschla-
gende Motiv beim Opfer vermochte sie nimmer zu wirken. Sn
verstehen wir den von religiôsen Erneuerern in gar manchen
vorchristliehen Religionen erhobenen Ruf nach Vergeistigung
und Verinnerlichung des Opferwesens. Es ist als ob die Erin-
nerung aus der àltesten Zeit wieder lebendig wurde. uni den
ins Àusserliche verfallenen, mit der gôttlichen Macht frevelnden
Menschen an Kindesgesinnung und Ernst zugleich zu gemah-
nen. Erschûtternd tont dièse Predigt aus dem Munde der israe-
litischen Propheten ; den prâgnanten Ausdruck hat ihr der
Psalmist gegeben, wenn er erklârt {Psabn 50) : « Holocaustif;
non delectaberis : sacrificium Deo spiritus contribulatus ; cor con-
fritviit pt humiliatum. Deus, non despicies ».
In diesem Zusammenhange muss noch auf ein psychologisch
bedeutsames Moment aufmerksam gemacht werden. Es ist
unverkennbar, dass die Entwicklung des Ritus einerseits ailer-
dings die Gefahr der Verâusserlichung und Entseelung mit
sich brachte, vornehmlich durch die Vei'bindung mit der Magie,
2o2 O. WIXDERLE
das8 sie ah^r anderseits audi zur Differenzierung und Entfal-
tun^ dcr Ojjl'ergesinnung vii'l licitrug. Diesps Gegenspiel dor
Yei'aussei-lichungstendonz und des Differenziprungsmomentes
kiinni'ii wir ansdiaulicli l'Iwa m ilcr scIkui ei'w iihnten Opferent-
wirkluiig Jndii'iis hcoliacliti'ii. Die UpIVrtei-hnik liât sich dori
zur Zeit dci' Bialnnanas trirnilich zu (Miier Opferphilosophie
ausgestaltol. dir ;iu(di psydioldgiscli nianclies Intéressante
biptol. ^^'(Mt(M■lliIl diiiflc gcraili' ilir Bevorzugung des Ritualis-
inus. die in cincr- lloihc \(in ivulturreligionen auftritt, und ihr
gegcnuhcr die ebenfalls zu benu*rkende Zurûcksetzung des-
snllien nii-lit bloss die Verschiedenlieit lins geschichtliclifii
Enf\vi(d^hingsstandes zeigen. sondein aurli in rassen- und
v<dkerjisyrli(d()gi.s(dier Hinsi(dit auffailig sdn. Bel iler Be-
I rafdilung lier (gewiss niclif leiidit ûl)erscluiul)aren) Bpdingun-
gen zur ViM-geistigung des Ojjfers und der gesamten Religion
miissen dièse Umsfânde und aile von ihnen beeintlussten Ge-
sinnungs- und Vfandlungskomplexe s<diwer ins Gewieht fallon.
Wie die Rpligionspsychologie ùberhaupl. so wird dio Optci'-
psyciiologie ini lie.^ondpion (dne ergiehigc Quelle fur dip
Erkenntnis der spezitisidn-n sccjischen P>osi-]iafÏpnhi'il pin/.idnci'
^Ienscliengrup[)en sein.
IV. UBERBLICK. UBER DIE GESAMTE OPFERPSYCHOLOGIE.
Kelu-cn wir mm zu unsi-riM' psyiliiddgischen Hauptaurgalu;
zuriifk I Wir salicn (dn-n bci diT t.rliiuterung des Pi'imitial-
opfers der Pygmaen, dass das Wesentlidio und (iiundlegende
der (inneren und àusser.e.n) Opferliandlung die Huldigung ist.
Die Form derselben isl bei diesem ganz primitiven Opfer zudeni
sa vollkoninien. nian nnudite fast sagen so geistig. dass nian
anfangli(di darûlier befi-emdel ist. insbosondere wenn man die
Srlialen des Kvrdvitionisnuis nodi nidit ganz abgestreift bat.
Das ;\b'rk\\i"irdige daian ist die Tatsacbe, dass wenigstens bei
der Âusseiamg der Opfergesinnung, also beim siditbaiM'n
Oiifei'akt von einer Bitte niehts zu gewaliren ist. Immerhin ist
dainil der vidlige Mangel (M'npr solrbpn niidit ûbfM' jpden Z^veifpl
erlialien. Es kann wolil sein, dass zuglcicb mit dpr liuldigenden
Dailiringung der Erst linge unausgesproehen, mebr oder we-
nigei- unltpwusst die Bitle um das Gedeihen der fur das Lebon
7A:\\ PSVCirOLOGIE DES OPFRRS 253
nrifigon Fj'iirlitc nnd (iiilcr gpincini ist. IJas wûrde ein Egois-
mus sf>in. dcr \nn dcr Religion iiiclit ausgeschlossen ist und
auidi iiiclil aiisg('S(diI()ssen wordfMi will ; qv ist von ganz anderer
Art als i\<'r in dor .Magie vorwii'kliidit e. Psychologiscli imichte
es t'asi si-lu'inen. als ob der lia tiirlirhe, selhstverstiindliehe
Egdisiiius kaiini \(in dciii Eist lingsopfer geirennt werden
konnc : vielleiidit gewinnon wir ans nrilieren Beobachlungen
diT Missioiiare anch liitM'iihcr norli genauere Aufschliisse.
Iinnieiliiii liai dcr Ilinweis Tyi.ors etwas fiir sieh, dass die
Priniitivon opfV-rn. wie die Kinder gehen ; sie geben ohne Hin-
tei'gedanken. ans Freude ani (ieben. Ich wiirde indes nicht
wagen. diesen Salz zu vei-allgemeinern. Ist es wirklieh die
kindliidie EigiMiai't. briin -^rlieiikcn nui' sclienken zu wnllen ?
l)as eindringende Studium des kindlicben Lebens dûpfte dies
moines P^raiditens nicht \(dlaiif bestàtigen. Aber sei dem wie
iliiii \\(dlè. aucli die mil dci' Huldigung unmittelbar verbundene
Bitte vermindert und entwûrdigt den echten Opfereharakter der
pygmàischen Erst lingsopfer dureliaus nicht. Solange ijberhaupt
die Bille im strengen Sinnc als solche bestehen bleibt, wird
damit doch mit aller Deutlichkeit die Abliàngigkeit von Gott
und das Angewiesensein auf ihn ausgedrûckt. Das ist besan-
ders bei jenen (Uilern der Fall. deren Existenz V(in (4ottcs Macht
am sichlbarsten tiedingt ist, bei den Lebensmitteln. In der Bitte
licgt also stets eine Anerkennung dor gottlichen Herrschaft
und Gijie zugleii-li : und deswegen ist zweifellos das ausgespvo-
cheiir Biltopfcr fin icalircs Opfcr. wonn auch in der Opferge-
sinnung ni(dit aussschliesslich (iott als Ziel vors('h\vebt. Die
Richtung ficj' ()pfcial)sicht S(diweift eben nicht einfach von
Gott ab zum Mmsidien. sondern geht durch Gottes Gûte gleich-
sam hindurch zu i\f'\\ (liei'ocditigten Interessen des Opl'erers.
Sellisf der oi-lit mens(diliclio Beigeschmack. Golt wie oinen
rii'(is-(Mi der W'ell zuerst durch ein Geschenk zu ehren. um ihn
daduiMdi fur die l'.ittc giinstig zu slimmen. konnte die Opfer-
gesinnung uiclil ins .Mark hincin vei'gifien, weil die .Vnerken-
nuiig diM' gr.lt lichen l^'i'cihcil damit immei- nocli nicht erlolet
wiii'dc. \(tn dcm .\tibriicli. i\ry liici'durch der religiiison (und
sillli(dii'n Vcrdicnsllirbkeil L^escliiehl. sidl in unseriMii Zusam-
menhang nicht die Hede sein. Das Ausschlaggebende in der
Bourleilung bhjihl die Frage. ob die Opferabsicht und die
25 4 G. WUNDERLE
Opfersymbolisierung eindeutig und einseitig im magischen
Sinne bestimmt ist oder nicht. Durch ailes was hierin wie
Zwang odtT wio Veisiuli zuni Zwange hervortritt, wird der
Charakter einer Darbringung als Opfo.r gestôrl. Solange die
Bittp als Bitte irgendwie gpmoint und ausgedriickt ist, ist das
Wesentlichf des Bittopfers iinbestreitbar vorhanden. Die
selbstverstàndliche psyehologische Folgerung mag noch eigen.s
beigefûgl sein, dass das Bittopfer dem blossen Bittgebet ge-
geniiber natûrlich eine Betonung der Bitte und eine Stàrkung
des Vertrauens auf Er.hôrung bedeutet. Der « Einsaiz » ist eben
beim Opfer jederzeit grôsser als beim Gebet. Und dieser Einsatz
sihliesst einen Verzicht in sich, der nicht selten um so schmerz-
licher wirkt, je klarer das Bewusstsein darùber ist, dass er
immerhin von Gott zurûckgewiesen oder wenigstens anders
gewertet werden kann, als es in der Meinung des Opfernden
liegt. Empfindet demnach der Opfernde seinen Veriticht und
seine Hingabe wie eine nicht wertlose Tat seiner Freiheit. so
bleibt er sich doch gerade als Opfernder bewusst, dass Gottes
Freiheit in der Gewâhrung oder Nichtgewâhfung des Opferbitte
das Hôhere ist. Und doch fiihlt er sich nicht schlechthin
c< preisgegeben », sondern mitsanit seiner Opfergabe geborgen
in der Gnade dessen, dem er in der Opfergesinnung ailes
anheimgestellt bat.
Die tatsâchlich ertullte 0{)ferbitte, der Empfang des erflehten
gôttlichen Gnadenerweises spornt von selbst zum Danke an.
Auch der Primitive ist dieser echt menschlichen Regung nicht
bar, wie die Beobachtung hinlânglich bestâtigt bat. Nun ist
es natûrlich, dass er nicht die erhaltene Gabe selbst wieder
opfernd zurûckerstattet, sondern neben dem Dankgebet seine
Erkenntlichkeit durch Verzicht auf irgend einen anderen Werf
bekundet. Psychologisoh ist es freilich vornehmlich beim Dank-
opfer verstandlich, dass die dankbare Gesinnung schliesslich
vorschlàgt und don âusseren Ausdruck in ritueller Gabendar-
bringung zurùckdrângt. Dankbarkeit geht zudem am leichtesten
in Liebe ûber ; sie wird, wie der Mensch nun einmal tatsâchlich
ist, zu einem der dauerndsten Motive der Anhânglichkeit an
Gott. die im ganzen Beten und Leben, keinesfalls bloss im Opfer
Gestalt geW'innt. Es ist dabci nicht zuerst die Macht, sondern
die Gûte Gottes, die das Bewusstsein der Hingegebenheit und
ZUR PSYCHOLOGIE DES UPFERS 255
Aufgehohenheit erzeugt und dadurch sowohl die Stimmung als
den Ausdruck der Dankbarkeit schafft. Ich halte dafur, dass
gerade (iie aus dpr Dankbarkeit geborene Liebe einer der
kiirzeslen un4 sichersten Wege ist, auf deni der religiôse
Merîsch von einer Cherscliàtzung àusserer, durch den ûber-
lieferten Rit us gebimdener Fornien und Begehungen abkommt
und mil Gott allein. im Innersten seines Herzens verkehrt, uni
in der Dankbarkeit seinen Egoismus und Eigendûnkel zu
opfern. So wird das Rituelle beim Dankopfrr durch das Wachs-
tum der dankbaren Liebe sicherlich auf das richtige Mass
zurùekgefûhrt, ja naeh und nach vielleicht ûberhaupt als
nebensâchlich behandelt und schliesslich wohl ganz ausge-
schaltei. In allen Religionen, in denen die Liebe und die ihr
entspreehende Geistes- und Gemùtseinstellung betont wird.
schwindet von selbst die Hauflgkeit der sichtbaren Opferhand-
lungen. Das Ghristentum als Religion der Liebe schlechthin.
hat aile 0]>ferhandlungen in dem Messopfer zentralisiert.
Yor die grossten Schwierigkeiten ist sowohl geschiehtlieh
als aurh psychologisch die Erklàrung des Siihnopfers gestellt.
Es setzt auch in seiner primitivsten Art das Bewusstsein der
Sunde und der dadurch erwachsenen Sehuld voraus. Gegen das
Vorhandensein einer solchen seelisehen Verfassung wendet
sich die evolutionistischè Ethnologie mit grôsstem Eifer ; denn
damif wûrde eine Gottesvorstellung schon auf der Urstufe
anerkannt werden mûssen, und das wâre der gewaltigste
Verstoss gegen das evolutionistischè Grunddogma. Trofz aller
Ableugnung von dieser Seite her kann es fur den unvoreinge-
nommenen Forscher nicht mehr zweifelhaft sein, dass wenig-
slens bei einer Reihe von Primifiven das Sûnden- und Schuld-
bewusstsein sicher erwiesen ist. Und zwar ist es nicht bloss
die Erkenntnis der SchuldhafI igkeit gegen das gottgegebene
religiose Herkommen mit seinen versehiedenen festgelegten
I^iauchen, sondern auch die Einsicht der Vergehen gegen die
Gebote der sittlichen Lebensordnung. Gerade das Schuld-
bewusstsein in letzterer Beziehung erscheint manchmal mit
erstaunlicher Klarheit. Die sittliche Erkenntnis erstreckt sich
freilich nidif auf viele Einzelvorschriften ; dafur aber ist sie
hinsichtlicli der Grundauffassungen des individuellen und
kleingemeinschaftlichen Lebens umso packender. Bei Verfeh-
25G o. \vi:ndbhli3
liingen dagegcn wiid iialurgoitias.s des Schuldbewusstsein ini
(TOwiss(Mi Ipltcudig : nnd wimiii es sclion doni Kindc éigcu isl.
wpnigci' iiur don ( li'wissciisvdiwiii i' /.u aclih^n als naoh Sùhnp
fiir (las hcgangcnti riii-(M-lil /.u sti'cbiMi, uni don lieleidigte»
wiodcr y.u hosanill igcn. s(i wird dir Psy(dudogie aui'h in dnr
voi-sicht igsl t'i) Dcnlung des /.wr Zcit vofliegendon Materials su
wcil m'IifMi diu'rcii. zii sagcn. dass aucli der Primilivo — abge-
si'Immi \ on dcr Sliii'ko seines Gew isscnsvoi'wuid'es — in irgend
oiiit'i' \\"(Msi> h'achlel. dcn licleidigl en (u)\\ wiedoi' /.u ver-
sdlmen. I)a sowolil das JrJewussI sein dvv Altliangiglieil von der
gidlliclien .MiKdil als audi die Erfaliriuig der gottlichen GûI.p
in ilini wacli isl. wird lieue- und Sûhnemoliv jeweils verschie-
den hedingl seiii. Jedenfalls liite nian den Tatsaclien und ilirer
nal lirliclien i)sych(d()gis('lien Ausdeutuug Grewalt an. wenn nian
sie ausscliliesslicli ini Sinne iler Furclitreue verstehen wollte.
Dass schon das einfachsie und kindlichste Verlangen nach
(sûhnenderi Besànftigung des erzùi'nfen Gottes die Darbrin-
gung einer' Gabe bezielt und in dcm darin verwirklichten Ver-
ziidit irgendeine Bûhne oi'blitdvt. tlùrl'te kauni zu bezweifeln sein.
Ich glaube, dass inan (iiese allgenieine Einslellung auch doni
prinutivslen Sûbnopfer zusprecben muss. l-:twas anderes ist es
allei'dings. nun weiteidiin die Kragen zu entscheiden, ob schon
beiin Siihnopfei- des Priniitiven dei' \"ersuidi. sieh personlirh
durcli das Siilinopfei' isilMicb und l'eligiùsj zu reinigen und zu
rrlusiii si(di zeige ; ol) hei der iJai'liringung der Opfei'gnbe eine
moral isclio Abwertung von Sehuld und Sùhne beabsichtigt sei ;
oli das Bewusstsein dor Annabme des Siihnopfers dureh Goti
die Anerkennung der giUtlicIien Gnade deullich genug ein-
scliliesse ; ob die Notwendigkeit einer weileren Busse und Ge-
nugtuung enipt'unden werde. Es sind Problème, die von dor
Psyoindogio lipule sioher nioht endgiltig gol(')st werden kônnon.
Die Bemiihungon doi- Missionare, die dureh den nahen Yerkehr
mil den Primilivon dooh am tiefsten in deren Seele zu sohauen
verinfigon. niiisson darein erst mehr Lichl bringen. Besonders
sohwer wii'd es vor allom bozuglioh der beiden letzten Fragen
soin, zu ermitteln, inwiewoit die Magie schon eingewirkt und
das Bewussisoin des Sûhnewertes dor Opfergabe und dor
Opforhandlung ungebuhrlich gesteigert hat. Dass in jedeni
Sûhnopfer das Streben, die Gemeinschaft mit dem beleidigten
ZUR PSYCHOLOGIE DES 01>FERS 2o <
Gott wieder zu erwerben, irgendwie aiLklingen muss, liegt auf
der Hand ; wenn es wie in den Sûhnopfern der monotheistisfhen
Religionen zuni beherrschenden Motiv aufsteigt, dann hort man
daiau.s oft ergrfMfend klar den Riii der Liebe zu Goti, deni
absolut Reinen und Heiligen.
Kann man also das Schuldbewusstsein und daniit die Sûhn()[)-
feridee auf der primitiven KulturstU'fe in elementarster Form
psychologisch ganz wohl annehmen, so ist das stellvertretendp
Siihnopfer ganz gewiss spâteren Ursprungs. Die seelische Ver-
fassung isl hierbei wesentlich verwiekelter. Das Gharakteris-
tische ist nunmehr das Vorwiegen der Gerechtigkeit. Der Ge-
danke eines Ausgleichs zwisehen Schuld und Sûhne zur Abwen-
dung der girafe konnte nur entstehen, wenn durch deutliehere
Empfindung der ûbei'ragenden Macht Gottes die Schàtzung der
Schuidgrosse sich entwickelte und sozusagen genauer und
peinlicher wurde. Die Auflehnung gegen den gôttlichen Herrn
musste von rechtswegen das Leben des Obeltaters verwirken,
da er durch die Sûnde frevlerisich den Zusammenhang mit dem
obersten Lebensspender abgesohnitten batte. Der sûndige
Mensch war Gott im pràgnanten Sinne <.<. verfallen ». Als
stellvertretender Ersatz konnte — im Verfolg der Gerecbtig-
keitsidee — nur ein Mensch angeboten werden. Dièse Ober-
zeugung fùhrte zu der grausamen Stellvertretung von Mensch
durch Mensch beim Siihnopfer wohl schon vor dem Aufkommen
des Bewusstseins, dass fur Gott nur der Mensch das wûrdigste
Opferobjekt sei. Bei der letzteren Anschauung konnte an und
fur sich der Sûhnegedanke gânzlich ausgeschaltet sein. Men-
schenopfer sind demnach durchaus nicht ohne weiteres als
Sùhneopfer aufzufassen. Die Empfindung der Grausamkeit
diirfte es wohl vor anderen sittlichen Beweggriinden gewesen
sein, welche zur Abschafîung der Menschenopfer beitrug. Immer
aber blieb das Bewusstsein rege, dass in der Sûnde das Leben
verwirkt sei, und darum waren die nâchsten Stellvertreter des
Menschen die ihm âhnlichsten Lebewesen, die Tiere, deren Blut
sowohl als <( entspjechendes » (weil lebentragendes) Sûhne-
mittel wie auch als einzig » krâftiges » Reinigungsmittel galt.
Die Sehnsucht nach Erlôsung vom Bosen und das Verlangen
nach der heiligenden Gottverbindung schuf sich in den blutigen
Sûhnopfern oft einèn nierkw\ir<iig drastischen, uns heutige
Menschen nicht selten abslossenden Ausdruck.
17
258 P. SCHEBESTA
Dio unblutige Erneiierung des Kreuzopfprs Christi in der
lieiligen Messe liât Opfergesinuung und Opferhandlung aufs
hôcliste veredelt und damif allen religidsen Regungen eine
aottliehe Weilie verliehen.
[16] Das Opfer in Afrika,
von Hochvv. P. P. Paul ScHEBESTA, S. V. D.
Das niir zur Beliandlung (ibertragene Thenia laulel <> Die
Foi'men des Opfers und i^eïnc Verhreitung in Afrika ». Sie
diirfen aicht glaulien, dass ich llmen hier ein vollstàndiges
Bild dièses (iegenstandes werde entwerfen konnen. Das ist
nnnioglicli. Das Gebiet ist einmal zu weit und das Malerial nocli
zu lûckenhaft vorhanden. \\'enn auch die Religionen Afrikas in
den letzten zwei Jahrzelmten ziemlich viol behandelt wurden,
und nian sich nicht inimer daniit hegnùgte zu sagen, dass
« dièses ein religionsloses Volk », und jenes « ohne jede Reli-
gion sei », oder wie auch immer die lakonisèhen Bemerkungen
iiber den Gegenstand heissen mrigen, so ist dem Opfer lange
noch nicht die Beachtung geworden. wie es hàtte sein mùssen.
Man versleifle sich darauf, theoretisch-psynhologisch im evo-
luticnistischen Sinne, die Religionen der (MUzelnen Vôlker zu
ergrûnden un(i ûbersah nur zu oft, dass zumal aus deni Kultus
die Religion am liesten zu verstehen ist.
Im jetzigen Yortrage werde icii einen Ausschnitl aus dem
Thema vorfûhren, der jedoch gross und wichtig genug ist, dass
er als etwas Ganzes aufgefasst werde. Man kann das Opfer
betrachten unier der dreifachen Rûcksicht : l^Vni, Wos und
Wie es dargebracht wird. Ich spreche ûber das Opfer nur unter
der ersien Rûcksicht, nàmlicli icem geopfert wird, dem trrminvs
nd quem.
Afrika ist weder in linguistischer, nocli in ethnologisclier
Hinsicht ein so einheitlicher Kontinent, wie man bislang
gewohnt war es anzunehmen. Das zeigt auch die Verbreitung
des Opfers. Wenn ich hier vom Opfer spreche, so meine ich
das Opfer im weiteren Sinne und lege ihm durchaus nicht den
theologischen Begriff unter. Auch Afrika^orscher haben die
DAfi OPFER IK AFRIKA 259
Opfer dièses Kontinentes verschiedentlich beurteilt, je nach-
dem sie den einen oder andpren Bestandteil als zum Opfei-
gehôrig ansahen. Von diesen Ansirhten wollen wir absehen und
unhefangpii dip verschiedenen afrikanischpn Opfer betrachten.
I. DIE OPFERARTEN.
1. — Das manistischc Opfer. — Den ganzen Kontinent ûber-
lagert eine einheitlicbe Schicht, das manistische Opfer. Yom
Kap bis zur Sahara allûberall die eine Schicht. Davon ausge-
nommen sind die Buschniànner (Hottentotten) , vielleicht aucii
aile Pygmâenvolker und d'as Osthorn. Nur die Galla zeigen sicli
manistisch beeinflusst, doch konnte der P]infliiss vielleicht auch
nicht afrikanisch sein. Gerade bei den Hamiten ist die Grenze
eine seiir fliessende, was aber nur beweist, dass die Mischung
dort eine recht rege gewesen ist ; doch steht es iiber allem
Zweifel. dass die hamitische Religion von Haus aus keine rna-
nistischen Opfer kennt.
Das manistische Opfer, welches ich als Bantuopfer bezeichnen
môchte, besteht in der Darbringung von Naturprodukten an die
Verstorbenen. Das schlichte Bantuopfer, welches ich typisch in
Sûdostafrika vorfinde, besteht darin, dass man den Verstor-
benen Speise und Trank als da sind Mehl, Fleisch, Bier,
Palmwein und Tabak auf das Grab niederlegt oder an einen
bestimmten Ort, im Glauhen, dass sie davon geniessen.
Wenn bei manchen afrikanischen Vôlkern an Stelle dieser
Speiseopfer Schlachtopfer treten, indem Ziegen, Schafe oder
Rinder am Grabe geschlachtet werden, so mochte ich dies als
spâtere Einwirkung einer anderen Kultur ansehen. deren
Hau'ptnahrungsmittel das Fleisch der Haustiere gewesen ist.
Auch Scheinopfer an die Verstorbenen sind nicht selten. Sie
sollen wenigstens den guten Willen dessen bekunden, der nicht
in der Lage ist, Opfer darzubringen. Wenn ein ThongahàupUing
(iS. Ost Afrika) in grosse Not und Drangsal geràt, so dass er
von allem beraubt ist, so opfert er seinen Speichel. Er bekundet
sein Elend dadurch, dass er sein Haupt traui*ig auf die Seite
neigt. Er hoft't, dass die Geister, durch dièse Jammergestalt
bewogen, sich seiner erbarnien werden, auch wenn er gar nicht»
opfern kann.
Wenn der Moschi (Kilimandscharo) nichts hat, was er den
200 P. SC.HKBESTA
Seinen al.s (lalie uiifein krmnfp. so borgt or sich otwas Eleu-
sinokoin \un ilinon. d. i. Im'iIp. die pi- aufliebl mit don Worton :
(( Hi(M' ist Eleusinekoi'ii : es ist eucr Eigfnliim. das ii-li von
oucli Icihc. l>is icli anderes wirkliches erlange und cucli sponde.
Erluii'ct. oilKH'ct, () Wunderbare... Erhaltet mit' das Leben umi
sclienkt mir (ipsundlieit. Oder wie soll ich es denn machen, nach
curer Meiniing. HabI (Tedubi ; ich will (Iras sclineiden, bis icli
oine Ziege als Futterlolin eidialh'. dii^ werde ich eiich spenden.
Wenn ihi' mich so liedrangl. wcidel ihi' dann etwas ei'halten ?
Unjm(")giich. IIit' werdel von euresgb^iciien aiisg-elaelit werden.
So behiitet micli denn, dann vverdet ihi' das eurige erhalten » (1 i .
Der Bewpggrund des nianistischen Opfers ist in ersler Linie
die FurchI vor i\('n Verstoi'lienen, wpniger die Pielàt. Jeder
Traum, jede Krankheit, jeder Ungliicksfall ist ein Zeiehen
dafùr. (iass ein Cieist unzufrieden ist und ein Opfer erheischt.
D(M' Soebi-nglaube der Afrikaner ist l)is lieute noch nirht
geniigend aufgeklail. Immerhin stejit es t'est, dass viele Volker
jedem Dinge eine oder mehrere Seelen znschreiben. Auch
])eim Opfer miissen wir dièse Anschauung iin Auge behalten.
Der (ieist des Verstorbenen isst niclif das Sinnf'âllige des Opfers,
sondern niir die Seele desselhen. Darum kann das Opfer von
den l'mstehenden genossen werden. « Wir Lebenden geniessen
das ganze Fleisdi samt dem Blut. Was aber die Geister anbe-
trifft, so ist deren Teil das Leben dei' Ziege, das ein Sfhatien ist.
das gelangl /u ibnen liin und stellt die ilinen entsprechende
Ziege dar » [2j , sagt der Moschi von Kilimandscharo. In Kamerun
bei'rscht die gleiclie Anschauung. Die Gi'di lassen die Opfei'-
galien luir kurze Zeit am Gi'abe stelien ; dann aber kommen sic.
uni sic zu geniessen. So halten es auch andere Stâninie. Das
dlirfte jedoch nicht die urspriingliche Anscliauung sein, viel-
mehr winl die altère auch die des Sùd-Oslens sein. Hier gili
die Opfergabe als sacrosanct und darf von niemandem. in
wenigcn Fàllen nur vom Xjarumbi (Totengi'aber^ genossen
werden. der schon zn Eebzeiten mil dem Verstorbenen in ein
besonderes Verhàltnis gelreten wai'.
Dièse Schicht kennt auch die Menschenopfer niclit. Sie finden
(1) Raum, Die Reliffion drr Landschaft Mosc]ii ani KUimandschai-o, ini
Archiv fiir Religionstoissenschaftj 1911, s. 159.
(2) Kbenda.
DAS OPFER IN AFRIKA ' 261
sicli niclit im ganzen Gel)i(Me. Dor Siidoslon. >\eA' Osten bis
zuni Kdiigo ist t'ast ganz frei davon. Soweit sicli Menschon-
opfer vortinden, iiiiissen sie als Iiiipoi't, einer l'rcindcn Scliichtc
angeselien werden. iJié nianistische S<diichle kciint aainlidi
aucli die Sklavorei niciif. Als jodot-h jene Kultur sidi in Affika
aus'zubrfiten begann, web-he die Skhivei-ei mit sich i'ubi'tr.
und aucb .\lenschenoi»l>r in ihi'er Ai't iibte. sicli dann mit dem
Mani.smus vereinigie, da wurden die Mensi-benoplcr l)eim
Begràbnis und bei den Totenfeierlichkeiten geùlit. So ist es zii
erklâi'en. dass cin (ii'ossteil det' <iebiete mit manistisrben
Opfei'u l'i'ei isl \nn .Menscbenopfern, st)\veit namlicli als sie
frei biielion ^(ln (b-m J-Mnfliisse jener KuHur. \Vo sie abiM'
berrsciiend geworden ist, da niûssen die F]-aiien un<l Sklaven
ihrem Heri'n ins Jenseifs folgen, weil er drultcn ibi'cr gc-
brauciit. Sie werden darum entwe(ku' lei)eiulig mil ilim iicgra-
ben. oder an seineni Orabe gelidet. Das Cenirum diescr Mens-
chenopfer sebeint das >'igergel)iet zu sein. Aucb der Kongu ist
slark davon lieherrscht. Ausstrabhmgen gingen und gelien bis
zum Sambesi. wo im ait en Monantofapave'wh viele Mensebenopfer
dargebraebt wurden. Sie sind mil der Mcuki nmtiipaknMur beute
V(")llig versebwunden, ein weiterer Beleg dafiir, dass dièse
Kultur. welcbe das Mensebenopfer mitbracble, eben eine fremde
war und keine Wurzel gefasst batte.
Noeb ein weileres geht aus dem numisliscben Opfer berxor.
Es ist saltsam bekanni, dass die Hanlu irgcndeinen Begritî von
Oott baben. Dass dieser liott versebieden ist von den Mancn
wird dadureh deutlicher, dass ilmi, mag er Mulwigu, .\zoinbi
oilei' Li'Zd lieissen, niemals geopfert wird, wàbrend docb allen
anderen Geisiern reiebliche Opfer dargebraebt werden. Er isl
eben niebt wie die Geistei' auf die Menseben bose ; er schadet
nieniandem, denn er ist gut. Er kiimnierl sich aucili kaum je um
• die Well. Wai'um ibm dann opfern, er braucbt ja niebt be-
sr'hwiehtigt werden. Wo aber dem boebsten Wesen dennoc'.i
geopfert wii-d. da liabcp wir einen anderen G<itt als den Banlu-
gotf vor uns.
Beim manistischeu Opfer liegl keine Teiideiiz voi' die Ojifer-
gabe zu zersiru-en ; sie ist wesentlicb eine Speise, maiicbmal
aucb ein (lebraucbsgegenstand fur den Toten. Brandopfei' im
ciaentlichen Sinne komnien ini Suden und Osten kaum vor.
262 P. SCHEBESTA
Wohl werden gerôstete Speisen dargebracht und manehmal
wird aiich gesagt. dass der Opferduft den Geistern wohlgefàllig
sei.
Auch der Kanibalismus scheint mit diesem Opfer nichi
zusammenzuhàngen.
Nicht selten sind auch die Erstlingsopfer, welche den Ahnen
dargebracht werden, so toei den Baila, Sulu und Thonga im Sûden.
Die Ahnen, welche die ersten Besitzer der F&lder gewesen sind.
sollen auch zuerst von der Ernte geniessen.
iDie Opfer, welche privât und offentlich sein kônnen, werden
im Siiden und Osten vom Hausvater oder vom Hâuptling dar-
gebracht. In Westafrika tritt jedoch (wohl nicht ursprûnglich)
auch ein Priester an seine Stelle.
2. — Das animistischc Opfer. — Dièse Schichte bat ihr Ver-
breitungsgebiet in Westafrika. Sie ist nicht gemeinafrikanisch.
Der ganze Sûden, die grossten Telle des Ostens, das Osthorn,
sind frei von diesem Einfluss. Die westafrikanische Schichte
des Opfers, welche ich die animistischc nennen mochte, hat
scheinbar ihr Zentrum am Niger. Sie ist aber stârker vertreten
westlich davon als ostlich, wo sie am Kongo aber immerhin
noch die herrscihende ist ; Auslâufer des animistischen Opfers
reichen bis zum Viktoria Nyansa (Uganda) im Norden, und in
sudôstlicher Richtung bis zur Siidspitze des Nyassasees und
zum Sambesidelta.
Animistisch nenne ich dièses Opfer. weil es Geistern darge-
bracht wird und zwar im IJnterschiede von den vorhergehenden
nur Naturgeistern. Es sind freie Geister, welche in beliebigen
Gegenstânden ihren Aufenthalt aufschlagen kônnen. Es sind
Berg-, Baum-, Wald-, Wassergeister, welche im Meere. in den
Fliissen und in den Qnellen hausen. Sie ûben verschiedene
Funklionen dem Menschen gegenûber aus. Der eine ist Herr
iiber Tod und Leben ; der andere schickt die Krankheiten ; ein
dritter ist der Erntegeist, Kriegsgeist u. s. w. Mit dem Manismus
geht der Animismus die Verbindung ein. dass die Ahnenseelen
Geister zweiter Ordnung werden.
Meistenteils. ich mochte sagen gewôhnlich, ist die An-
schauung verbreitet, dass ûber den Geistern ein Geist herrscht.
von dem sie abhângen, nâmlich Gott, der gut ist. der sicb aber
um die Welt nicht kûmmert. Also die gleiche Anschauung wio
DAS OPPER IN AFRIKA 263
im .Maiiisiniis. Wolil und Wehe der Menschen liegt allein in ilen
Hànden der (ieister. Da sie jedoch dem Mensclien fcindlieli
gegenûhpr stelien, so sieht sicli der Eingeboi'ene genotigt,
ihnen zu 0])rern. uni sie gûnstig zu stinunen. sie zu versôhnen.
Das gelit oft so weit. dass er sein Hab und Gut fur dièse AngQ-
legenlipil iiergibt. Nieht Verehrung und Dankbarkeit ist der
Bcweggrund dazu, sondern Scheu und Furcbt und die Suchf
sie sich genehni zu stimnien. Dabei werden ol't die holieren
gegen die niederen Geister ausgespieli.
Ein Priestertum reguliert die Opfei- dieser Gruppe, die soge-
nannlen Fetiselipriester. Sie geben an, was l'iir ein 0[)fer der
ninzelne (ieist verlangt, wann und wo es dargebraclit werden
soll.
Die Blutopfer und zumal die Menselienopfer sind bier gerade
zuhausp. Dabei sebeint ein besonderes Gewicbt darauf gelegl
zu wpi'den. dass das Opler grausam gequàlt und zu Tode gemar-
tert werde. In besonderer Gefabr bringen die Aschantl der
Schutzgoftbeit der Stadt ein neugeborenes Kind zuni Opfer.
indem ibiu Glied t'iir Glied abgerissen und versireut wii'd.
Die r.sr/u'vfdker bringen Menschenopfer den Flussgeistern
dar. Ein Mann und eine Frau werden ani Ufer enfhauptet und
das Fleiscb den gebeiligten Krokodilen zum Frasse binge-
woi'fen.
Zur Zeit grosser Dùrre wird ein .Mann dem Regengotte und
zui' Zeit ûhermàssiigen Regens dem Sonnengotte eine Frau
geopf ert.
Dio Opfer werden gewiilinlieb derartig vollfiilirt, dass man
das Elut ûbor den Gotzen, oder was aucb immer Sitz des Geistes
ist, fliessen lâsst. Oft werden Sclmitte hinein gemacbt, wie
z. B. in einen Baum, damit er das Blut besser aufsaugen kimne.
Yiélfach wird das Blut ûber ibn geschmiert. Die Speise wird
ibm in den geotïneten Miind gestopft cxler auch vorgesetzt.
Es sind recht blutdiirstige (reister. Blut ist eben der Sitz und
Tràger der Seele. Die Geister geniessen nàmlich nicbt das
Matérielle, das Siditbare, sondern nur die Seele, welche im
Blute wohnl ; daruni muss soviel Blut tliessen. (Wir haben
bereit.s erwâhnt, dass dièse Anschauung auch in einzelne Ge-
biete des manistis<'hen Opfers eingedrungen ist). Es ist eine
zu beachtende Tatsaehe, dass Speiseopfer in dieser Schiohte
264 P. SCHEBESTA
stark ziirùcktrelen. Sie koninien wohl vor. Aueh Tieropfer sind
recht zahlreich, aber am meislen geschàtzt sind dio Monschen-
opfer. Wie sich ein Gewâhrsmann àussert, stfllen dio ver-
schiedenen Arten vorschiedene Abstufungen dar. Je nach dor
Wichtig-keit der Sache muss auch das Opfer beschaffen sein.
Dem von uns so vprabsoheuten Menseiienopfer liegt hier eine
hohe Idée unter, nàmlich die, dass der Gottheit das Hnehste
geopt'ert wird, was es gibt, der Mensch. In besonders wichtigen
Angelegenheiten opfert, der Hàuptling sein eigenes Kind.
nianchmal wird er auch selber geopfert.
Die Entstehung des Mensohenopfers legen wir begrûndeter
Weise in die Schiclite des Animismus und nicht des Manismus.
Der Animismus mag vielleicht ûber das Sûhnopfer, welehes in
dieser Sehichte vorkommt, zum Menschenopfer gekommen sein.
Bestimmte Vergehen werden mit dem Tode gesiihnt. Der
Sehuldige muss selber den Tod erleiden nder er muss fur
einen Ersatz sorgen, zumeist einen Sklaven ; in gewissen Fàllnn
geniigt jedoch auch ein Tier.
Hier ist der Ort, uni etwas ûber den Fetisehismus zu sagen.
Seine Verhreitung deckt sich wesentlich mit dem animistischen
Opfer. Der eigentlirhe Fetisehismus geht der Kùste entlang
vom Sénégal an. Er bedeckt das Nigerdelta und breitet sieh
zwischen Kongo, Kwango und Kassai aus. Er verflûchtigt sich
dann immermehr zumal nach dem Siidosten. wo er sozusagen
fast verschwindet, obwohl wir dort anim'istische Opfer noch
antretïen. Das Gebiet des letzteren ist darum weiter als das des
Fetisehismus. Darum zumal mochte ich die beiden. obwohl sie
zumeist ineinander verwachsen auftreten. als zwei getrennte
ErscheiniTngen betrachten.
Welchfes Opfer dem Fetisehismus zukommt, (es scheinen
vprschiedene Zauberopfer ihm eigen zu sein, zumal jene. welche
in den Geheimgesellschaften gevibt werden), kann ich heute
nicht ausmachen. Bisher wurden in den Publikationen der
Animismus und der Fetisehismus nicht geniigend auseinander-
gehalten, sondern meistens als eines aufgefassf. Doch giaube
ich den Unterschied betonen zu mussen. Auch der Einge-
borne hait sie auseinander. Der Fetisehismus ist iiberhaupt
keinc Religion, da die Verehrung eines persônlichen Wesens
fehlt. Vielmehr. und das ist fur die Aufassung des Fetisehismus
DAS OPFER IN AFRIKA ' 265
von Bedeutung, wird einpm beliebigrn Grgenstandp urul Wesen
durck hestirninte SpriUhe und Formeln Zaubprkraft eingeimpft .
Somit ist das Fetischopler, soweit es vorkoninil, kein Opfpr.
sondern ein Zauberritus.
3. — Das Gottesopfer. — Ein vollig anderes (jtepràge tragt das
afrikanische Gottfsopfer. Im Gegensatz zu den animistisohen
und auch manistiischen wird os nicht aus Furcht geboren. Es
ist kein Abwehropfer, sondern Bitt- und Dankopfer aus fMUPr
Ai't Pifliciht- oder Verbindlichkeitsgefiihl berausgewarhsen. Wii-
mûssen mehrere Gruppen unterscheiden.
Das Ahncv -Gottesopfer. — Ici» seize dièses Opfer an dit»
erste Stelle, weil es eine Verwandtschaft mit dem mandstischpn
Opfer aufwfisf. Dem Uhrabnen, welpher aile Zn^e der Bantu-
gottheit tràgt. werden Opfer dargebracht. Dies Opfer haben im
Sûden die Kaffernstàmnie, zumal die Sulv mil ihrem Unkulu-
kulu. und im Nilgebiet die Dhika und Schilluksiamme. Von da
aus taucht es weiter im Sûden am Viktoria Nyanza, z. B. bei
den Wagamla auf, aber verrankt mit anderen Opfererschei-
nungen. Dièse Gottlieiten oder gottliche Ahnen sind die Urvâter
der Kônige, des Stammes ûberhaupt. Bei manchen Stammen,
z. B. den Dinka, ist ûber diesem Uralmen nocb eine Gottbeit zu
beobachteri, welche aber nicht verehrt wird.
Das Hamitev-Gottesopfer. — Ein reeht typisches Gottesopfer
fur Aifrika ist jenes der Hamitenvôlker und Hamitoiden. wie
es bei den Galla. Turkana. Siik. Massai u. a. anzutreffen ist.
Auch sûdlich gelegene Stamme, wie die Baila und Hottentotten
scheinen es zu kennen. Andere Stamme des Sûdens stehen unter
dem Eintluss des Hamitenopifers.
Zur Charakteristik dièses Opfers sei folgendes bemerkf. Der
Hamite opfert von seinen Frûohten und seinen Herden. indem
er Mehl ausstreut, Honig, Bier und Blut ausgiesst. Fleisch in
aile Richtungen verstreut. Wenn ein Vogel ein solches Fleisoh-
slùck in die Lûfte wegfûhrt, glauben z. B. die Galla. dass er
hinfliege. uni es Gott zu zeigen.
iDie Brandopfer sind hier /.ahlreifh. Honig, Fleischstûcke
und Fett werdnn auf glûhenden Kohlen verbrannt, damit ihr
Duft zum Himimel emporsteige und Gottes Aufmerksamkeit auf
die Opfernden lenke. Er sehaut dann herab auf sie und wenn
der Raueh gut war, (d. h. die Opfer gross genug), so ma<'iil
er deren Leiden ein Ende {Elgeyo) .
266 P. SCHEBRSTA
Die Wandorobbo-Fri\uen bitten derart um Kinder, dass sie sich
um ein Feuer herumhocken, in welches sie Reste von Honigbier
hineinwerfen, die zumeist aus Wachsteilen bestehen, damit der
Duft zu Gott emporsteige.
Die Akikuiu legen das Opifertier an den Fuss eines hohen
Baumes nieder. Man glaubt, dass sich Gott wie ein Affe von
oben herablàsst, um das Opfer zu geniessen. Ein aller Mann,
der als Priester fungiert, horcht am Stamme, ob er nicht im
Rauschen des Baumes Gottes Stimme vernehme.
Um nicht zu ermiiden, nur noch einen kurzen Beleg von den
Baila oder Mashukulumbe. Wenn in Familienmitglied erkrankt,
so betet der Hausvater zu Leza, er môchte das Kind vprscho-
nen : (( Leavc Thy ihild. that he must trust Thee. Etenial Onr !
We pray to Tfire : Thou art the grcat Chief ! » Dann fui 11 fM-
seinen Mund mit Wasser und spritzt es als Opfi^i- auf deti
Boden (1).
Die ErsMingsopfer sind dieser Schichte eigen. Die Ma.ssai-
frau opfert bei jedem Gebet ein wenig Milch, die Galla die
Erstlinge von den Feldfrûchten und Herden. Der //omann blàst
die orsten Rauchwolken seiner Pfeife in die Luft als Optci-
an Gott, zum Danke fur verliehene Gesundheit, indem er zu-
gleich flelit : « Gib mir viel Gluok dies-en Tag ».
Opfer an die Sonne. — {Wakindiga und benachbartp Stâmmo
im Ahtlusslosen Gebiete). Der Sonnengottheit wird nach Erlo-
gung eines Wildes geopfert. « Nach Altpr und Geschlecht in
Gruppen geteilt, hocken die Mânner, die Jûnglinge, Weiber
und Màdclien um das erbeutete Wild herum. Der Kampâlteste
zerlegt das Tier, schneidet alsdann fingerdicke, etwa zehn bis
zwanzig Zentimeter lange SIreifen vom besten Fleische ab,
wendet sich gegen Osten und spricht ein lângeres Dankgebct :
« Ishoie ! Jeden Morgen kommst Du von dort her zu uns. Deinen
M^akindiga. Du behiitest und beschiitzest uns vor grossen Ge-
fahren und hast uns heute viel, viel Fleisch bescheert. Nimin
vom Besten eine Probe und bewahre uns deine Huld auch fiir
die Zukunft ». Nach diesen Worten wirft pr einige dei' Streifen
Fleisch nach Osten in den Busch, Nvendet sich dann nach
West^en, spricht ein ahnliches Gebet, und wirft auch hier die
(1) Munay Dale. Thr Ila-St>fakin(i Proplis of Northrru Rhodr.^ia. London,
1920.
DAS OPFER IN AFRIKA 267
Dankgaben fiir Ishoip liin. Nach piner kurzen Pause ergreift
er ahenmals das Wort. uni auch die Stammesmutter aller
Wakindiga, die Hibaako. uin tatkràftigen Schutz und Hiilfp
anzurufen. Aut-h ihr wird eine. Hand voll Fleiscli dargebracht (1 ) .
Das Gottesopffr in Westafrika. — Im Westen finden wir eine
weitere Gruppe von Gottesopfern an de]- Guineakûste entlang
bis zum Kongo hinab. Im inneren Kongogebiet scheint es sich
nicht mehr vorzuflnden, vielmehr ist liier das manistische
hochste Wesen heimisch. Wàhrend nun im Osten das Hamiten-
gottesopfer derart in den Vnrdergrund tritt, dass es das
herrschende wird, su tritt das Gottesopfer an der Westkûste
gegen die anderen stark zurûck, dass es vielen Beobachtern
entgeht. Es besteht in Libationen. Speise- und Blutopfern.
Menschenopfer scheinen vollkommen zu feblen. [n Togo heissf
das hochste Wesen Mavn. Nicht jedermann opfert ihm. sondern
nur der 3/aDMpriester. Ehe er isst oder trinkt, gibt er zuvor Goft
seine Gabe.
Das Pygmâcnopfer. — Als die letzte Scihiclite der afrikanischon
Gottesopfer mûssen wir noch jene der Zwergvolker streifen.
Die Pygmàen ziehen sich in Gruppen quer durch Afrika. Sie
bewohnen den vegetationsreichen 'ït'U. Sie betinden sich
zurûckgedrangt auf das Seengebiet und die undurchdringlichen
Urwàlder des Kongo. Die Buscbmanner der Kalahari zahlen
wir zu ihnen.
Uber das Opfer der letzteren ist leider nichts zuveriâssiges
bekannt.
Das Pygmaenopfer ist ein Gottesopfer. Viele Autoren betonen
es geradezu, dass bei ihnen von Animismus oder Manismus
keinp Spur zu finden sei. Eine zweifache Art dps Opferns ist
den Pygmàen eigen. Entweder werden die Opfergegenslàndo an
einem Orte unter einem Baume liegen gelassen. odei' sie wcrdpii
vcrbrannt.
Ein Boiig-Vygmae erzâhlte : « Wpnn ich einen Buffel pi'lego.
so Ipge ich ein Stùck Fleis(^h aufs ï'euer. Ein Teil verbrennf.
der ist fiir WakaiGoit^, den anderen esse ich selbst » (Le Roy) .
Ich glaube nicht, dass die d>'strurtio rci in diesem Falle inten-
diert sei ; vielmehr liegt wohl der Gedanke nahe, dass der
Opferrauch zu Gott emporsteigen soll.
(1) Rechk, Xki- Ethnographie dru Abflusslosen Gebietrs, Hamburg, 1914.
268 P. SGHBBESTA
Powell CoTTON erzàhll \un einem Pygmàenst anime, dass er
heiii) \\'et'hseln eines Jagdgiunde.s Speisen tûr den hôchsten
Geist hinterlassen habe, indern ein jeder ein solches Packchen
niederlegte. damit er ilinen aiieh auf dem anderen Grundc
Gliick verleihen nuk-hte.
Somit stellf .sich uns dat^ Pyginapiiopl'er dar als die Darbrin-
gung von lion Erti àgnissen. voni Sammeln der Fleisch- und
Pflanzpnnahrung. Oft liiingt nian die Hrstlinge Gott dar.
Da.s Siifinopfcf. — Wenn ich es nun unternehnie das Siihn-
opfei' in Afrika zu skizzieren, so geschieht es, weil gerade ihni
eine besonders wichtige Stellung zukommt.
Es ist mir wohl bekannt. dass nian die verseliie<l('nen Opfer-
arten als da sind, Bilt-. Dank- und Bûlinopfer fur Afrika niehl
gelteii lassen will. Der Neger bit tel nur, dass das Unheil vun
ihni abgowendet weide, sagt nian. Dennoch entspricht dièse
Anschauung nicht den Tatsachen. Gewiss steht das Bittopfer
im Vordpigiunde. Ziimal das aninnstich-manistische ist ein
soh'lies. vielleicbt wiirde es liezeichnender Preventivopfer ge-
nannt. « Daniil Du mir niidits antuesl. iipfere ich Dir dies uml
je nés ».
Trot.zdeni ist auch das Dankopfer gut belegt. Naeh der Jagd,
nach einer gewonnenen Sohlactit werden Dankopfer darge-
Jiracht. .Vui-h die zahlieic-lien Erstlingsopfer Iragen Dankes-
fharakter. Das Sûlinopfer ist gbMchfalls belegt und zwar am
meisten ini Nigerdelta und westlicli davon. Hier tritt es oft in
dor .\il des Sûndenbockes auf. In Togo wird z. 1^. ein Bockchen
mil Erde l)eschmiert, zum Sinnbild, dass ihm die .Sûnden auf-
geladen werden. Es wird nicht getotet, sondern bleibt sicli
selbst iiberlassen. .Ahnliche Opfer haben die Wagmida, die
Makalalia sùdlich \ om Sambesi, die Uaussu uml die VOlker arii
Scharifluss im Norden.
Yom Opferkult der .lA/vmpger wird geradezu gesagt, dass
ihm vornehmiich die Idée zugrunde liège, dass durch das Opfer,
mag es blutig oder unblutig st^in, ein Siihncakt vollzogen
werden soll. wodurch (Mnerseits Unrecht und Siinde gesûhnt und
andereiseits der daraufruhende Fluch mit seinem Unheil und
Yerderben weggewischt werden sollen. In schwercn Fàllen wird
jedoch Blut als Suhne gefordert. Die Yoruba bringen von Zeit
zu Zpii Mensehenopfer fur das ganze Volk dar. Vor dem
Hinschlachten werden solchen aile Annelimlichkeiten gewàhrt.
DAS OPFER IN AFRIKA 269
Zum Opfprplatz werden sie im Triumph durch die Strassen
gpfûhrt. Beim Vnrheigphen trot en die Menschen ans den Hûtlen,
legen ilire Hande auf das Haupt des Opfers, « thaï they may
ti'ansf''r tu hini theiv sin. (fuHl. troiibir ami dmth > (l). (Stell-
vert retendes Sùhnopfer) .
Âhnlich werden Inic-h Tiere als Siilinopfcr dargehrarhl. Bei
den Bavili nordlich des Kongo herrscht die Sitte, d'ass wenn
jt^mand pin todeswùrdiges Verbrechen begangen hat, er sterben
inLi>s. ^ur wpnn jemand gegen dessen Tôtung protesiiert, so
kann an seiner Statt eine Zipgp geopfert werden.
Ein typisf'hes Sùhnopfer wii-d von den Baila berichtet. Bei
Gelegenheit eines Mordes werden von den als Busse zu zahlen-
dpn Rindern einzelne dem Skimvnenga (Almherrn i geopfert,
da der .Mord gegen ihn gerichtet war. Sliimunenga wiederum
bringt die Sehattenseele des Opfers Lrza dar als Sûhne, denn
Shimurifyign ist irgendwie bei Lcza fur seine Leute verant-
wortlicl).
Dei- Massai opfert an der Stelle, wn er eine schwangere Frau
geft'tfet liait e. ein schwarzes tràchtiges Schaf, indem er vorher
spini' Siindc liekennt und um Vei-gehung bittet. Das Opfei-tier
làssi er an Ort und Stelle liegen.
Bisfhoif Hennemann ])ezei('hnet die Jùnglingsweihe in Ka-
niprun als den Kern einer Sûhnezeremonie (5o-Rifus). Dieser
Ritus wird von jenen Hàuptlingen veranstaltet, bei welchen die
meisten Ungliicksfàlle iin Jahre vorgefallen sind, die man als
Strafp fur bewusste und unbewusste Gesetzesûbertretungon
ansieht. Die Jûnglingsvvpihe bildef den Mittelpunkt. Die Jung-
linge werden dem Tode geweiht, jedoeh wird an ihrer Stelle
eine Ziege geopfprt, die man S(^ (eine Antilopenart j nennt (2).
Aus dieser sporadischen Verbreitung des Sùhnopfers mag
riigliciii (\ev SpIiIuss gezogen wei'den, dass es weiter verbreitpl
ist ; doch die Quellen schweigen davon.
Die Manisten sdieinen das Siihnopfer gar nirlit zu kennen.
Auct) bpi den Pyginâen ist es in keiner Weise belegt. Aus den
wenigen Xacbriphten. die ûber das Siihnitpfpr reden, gehorte
es der liamitisciien und der westafrikanisclu^n Schichte an und
zwar soweit das (3rotteso])fer reioht.
(1) Deknet, At the hack of thc hlack Man's mi>id, Liondon. 1906, p. 263.
(2) Hknne.mann, Die religioaen VorstcUmigen der heidnischen Bewohner
aUd-Kameruns, Frelburg-, 1920.
270 P- SCHEBESTA
Es will mir scheinen.. und die meisten Zeugnisse deuten es
an, dass es sich in diesen Pallen nur um die Sûhne irgend eines
sozialen Vergehens handelt.
II. DAS ALTER DER OPFER.
Wenn \vir nach dem Alter der versohiedpnen Opferschichten
fragen, so werden wir am ehesten durch das Kartenbild dariiber
belehrt: wir brauehen nur die Kriterien anzuwenden, welche uns
die kulturhistorische Méthode in der Ethnologie an die Hand
gibt (1).
Von den drei Opferarten, welche die grossten Gebiete in
Afrika einnehmen, muss die manistis-che die àlteste sein, nicht
etwa deswegen, weil sie die grossie Verbreiitung aufweist,
sondern weil sie sowohl im Osten von der Hamitenschichte und
zLirnal im Westen von der animistischen teilweise ùberlagert
resp. verdunkelt, verdràngt wird. Das Oberlagerte ist aber
iinmer àlter als das ûberlagernde.
Ob weiterhin das animistische, oder das Hamitenopfer aller
ist làsst .<ich ans unserer Sludie nicht erschlieàsen, weil beide
zwei gelrennte Gebiete bedecken : doch will mir scheinen, als
ob das Hamitenopfer sich friiher in einem Làngsslreifen den
Seen entlang nach Sûdweslen verbreitet bal und ersl spâter
dureh das animistische, von N. Westen kommende. durchbro-
chen wurde.
Als aller aber als die drei eben genannten grossen Schichten
mûssen wii' die sonst noch besprochenen Opfer ansehen. Sie
bilden Enklaven, oft und oft durchbrocben, zuruckgedràngt
und ver.><treuf. Welches jedoch von ihnen das àlteste ist, muss
dahingestellt bleiben. Das eine geht jedoch mit ziemlicher
Deutlichkeit hervor. dass das Opfer an den Urahnen eine woite
Verbrcitung in Afrika batte.
Zusammenfassend glaube ich als Résultat der Studie sagen
zu konnen, dass das Pygmâen-Gottesopfer, das Opfer an die
Sonnengottheit, jenes an den Urahnen, der die Zûge der Gottheit
(1) Der Voiti-agr ist an der Hand einer dafûr ausgearbeiteten Karte
gehalten worden, welche die Verteilung der verschiedenen Opfer durch entspre-
chende Schattierungen zuni Ausdruck brachte. Die Kattenskizzen, sowohl
wie die nôtigen Belege, konnten dem Vortrage hier niclit beigegeben werden.
DAS OPPER IN AFRIKA 271
angenommen hat, die âltesten sind. Das jûngste Opfer in Afrika
ist jedoch das von Mpnsclienhlut triefende animistische der
Westkiiste.
Die Frage nach denr Sinnp des afrikanischen Opfers. dem
Ursprunge desselben, kann voni afrikanischen Standpunkte
allein sicherlieh nielit heantwortet werden. Zu diesem Zwecke
Tiiùsste der Vergleich des Opfers aller Priimitiven herangezogen
werden. Imniprliin ist die Frage nach dem Sinne der afrika-
nischen Opfer herechtigi.
Die Beantwortung der Frage ist uns dadurch wesentlich
erleichterl, dass wir auf historischeni Wege das àlteste afrika-
nische Opfer erschiossen haben. Die ersten Opfer kônnen nur
allein in Frage kommen.
Als echt afrikaniseh sehe ich das manistische Opfer an,
wenn auch noch vor ihni anderc Opfer liegen, die wir aber nur
als kleine Enklavcn kennen.
Der Grundgedanke des afrikanischen Opfers ist das Darbrin-
gen einer Gabe von seiner eigenen Habe an ein ûbermenschli-
ches (aussermenS'Chliches) Wesen, ans den verschiedensten
Motivcn. Bei den Pygmâen scheint es die Anerkennung der
OlterhoheiL des hOchsten Wesens zu sein, vielleichf besser die
Zahlung der Nutznùtzungsgebùlir fur Frûchte und Wild. Dièses
kommt im Erstlingsopfer zweifellos zum Ausdruck. Demselben
Gedanken begegnen wir bei den Manisten in dem einen Falle,
da Erstlinge der Felder den ersten Besitzern derselben, auch
wenn sie stammfremd waren, dargebracht werden.
Sonst aber ist das Motiv des manistischen Opfers die Furcht.
Die Verstorbenen wachen dariiber, dass die Uberlebenden ihre
Bediirfnisse im Jenseits befriedigen. Sie drohen mit ihrer
Rache, wenn es nicht geschieht ; und einer solchen Rache geht
der Eingeborene aus dem Wege, indem er den Manen Opfer
darbringt (1).
(1) Die Idée des afiikaniscJien Opfers wiid jedoch eiist (lann kluTca-
hervortreten, wenn das Opfer in seiner Gesamtheit (auch das Was und Wic
des Opfers) erforscht vor uns liegt.
272 A.-J. GARNOY
[17] Le sacrifice dans l'Inde et les Indo-Européens,
par M. A.-J. Carnoy, professeur à l'Université de Louvain.
Lf sacrifirr indo-i'uropéen . — Le monunipnt littéraire le plus
ancien des peuples de noti-e famille linguistique est le Rig-Veda,
celte admirable collection de plus de mille hymnes que le
Biahmanisme nous a transmise comme son livre sacré.
.\u moment de faire une enquête sur les usages et les idées
aes Indo-Européens. par rapport au sacrifice, il serait bien
naturel (jue nous nous adressions dès l'abord à ce document
imposant tant par son âge (plus de trois mille ans) que par
son étendue. Cela s'indiquerait d'autant mieux, que beaucoup
de ces poèmes étaient destinés à être chantés pendant les
sacrifices et qu'ils font de nombreuses allusions à ces céré-
monies.
Toutefois, Timportam^e même jouée par les rites de l'of-
frande dans l'Inde a contribué à en compliquer le rituel et à
l'éloigner de la simplicité primitive. Force nous est donc de
consulter d'abord des sources moins anciennes, mais reprodui-
sant des si.Luations moins complexes. Le texte le plus intéres-
sant est celui dans lequel Hérodote décrit le sacrifice des
Perses (I, 132). « Quand quelqu'un veut offrir un sacrifice,
dit-il, il conduit l'animal à un lieu exempt d'impuretés, invoque
la divinité, ayant sur la tête une tiare et des branches de
myrte. Après avoir coupé la victime en morceaux et cuit la
viande, il étend une jonchée d'herbe tendre, généralement du
trèfle. Il dépose sur elle la viande. Dès que tout est prêt, un
mage se présente et entonne une « théogonie » (comme ils
disent pour un texte magique'. Sans mag^e, Ton ne peut faire
l'offrande. Quelque temps après, le sacrifiant reprend la viande
et s'en sert à discrétion ». On a des raisons de croire (1) que
les Scythes procédaient de même façon.
Les Germains sacrifiaient également sans feu sacrificiel. Le
sang de la victime était recueilli dans un chaudron. On en
aspergeait les idoles et les parois du temple. Ensuite, on cuisait
la viande et on la consommait en commun (2) en priant le
(1) HÉRODOTE, IV, 60.
(2) MoGK, Germ. Myth., p. 165 — RcaUex., III, 307.
LE SACRIFICE ET LES INDO- EUROPÉENS 273
dieu d'accorder ce qui était en son pouvoir : la victoire s'il
s"agissait de Wodan. la paix et la fécondité, si Ton s'adressait
à Njoerdh ou à Frry. Parfois, cette cérémonie s'accompagnait
de danses.
Tacite rapporte que les Germains pendaient à des arbres la
chair ou. tout au moins, la tète des animaux immolés (1).
'Les Russes agissaient plus ou moins de même façon. Ils
passaient un licou à la victime et la suspendaient à un arbre
jusqu'à ce qu'elle cessât de respirer (2).
Les Slaves et les Lithuaniens, une fois la victime abattue ou
étranglée, étalaient aussi les chairs cuites sur un tapis de foin
ou les plaçaient dans tous les coins de la maison, en invitant
le dieu à en profiter.
iCertains termes se rapportant à ces rites se retrouvent dans
des langues assez éloignées. L'allemand weihen, par exemple,
est de la miême racine que le latin victima. Celle du grec
à'Yio;, « sacré » se rattache à celle du sanscrit yajna, zend,
yasna, « sacrifice ». Le zend spenta, « sacré, saint », se retrouve
avec le même sens que le lithuanien szventas. La racine qui
exprime l'acte d'invoquer (3) désigne, d'une part, le prêtre
des Hindous {hotar) et des Iraniens {zaotar) et, de l'autre, la
divinité à qui on s'adresse (anglais God) .
Ces co'incidences nous permettent de croire que tous les
traits essentiels du sacrifice étaient déjà bien fixés, avant la
dispersion.
La liturgie était visiblement assez élémentaire, mais elle
comprenait tous les traits essentiels de l'offrande chez les
divers peuples. Le désir de présenter aux dieux un repas était
clairement exprimé. On se servait de préférence de viande. Il
n'est point nécessaire d'expliquer ce fait par des considéra-
tions quelque peu totémistiques.
La viande du cheval ou du bœuf constituait, en effet, la
nourriture essentielle de l'Indo-Européen, à une date ancienne.
Si on cuisait celle-ci, cela signifiait, semble-t-il, tout simple-
ment qu'on devait la préparer pour la divinité, aussi bien qu'on
l'aurait fait pour un repas normal. Pour celui-ci, en effet, on
(1) Annales, I, 101.
(2) SciiRADER, Renllcxtkon, s. v. Opfcr.
(3) Sanscrit juhoti, « il crie, il invoque ».
27 'l A.-J. GARXOY
rôtissait de grands morceaux de viande, à la broche, au-dessus
d'un feu vif. L'emploi de formules, prières ou hymnes, pour
inviter le dieu à profiter do Toffrande, à l'agréer, à se montrer
généreux en retour, date, également, de cette époque lointaine.
On voit, aussi, que la victime devenait sacrée par Topération,
ce qui signifie dans un sens favorable que son contact était
bienfaisant ; de là l'aspersion des murs chez les Germains.
D'autre part, on peut se demander si cela n'impliquait pas
égalen ent le désir de faire disparaître celle-ci après la céré-
monie. Le repas en commun répondait à ces deux besoins et
réalisait également une certaine fraternisation avec le dieu,
quelle que soif, du reste, la forme que cette conception ou
cet... instintt prenait dans la conscience de ces gens.
La boisson cnivraiitr dans le sacrifice. — Il est certain que les
Indo-Européens connaissaient déjià d'autres sacrifices que celui
que nous venons de décrire. En effet, il n'y avait pas de repas
complet pour eux sans la boisson enivrante, Khydromel, dont
se repaisspint les héros ici-bas, en attendant de le faire soit
dans le Walhalla, attablés avec Wodan, soit dans l'arbre de
Yama. La boisson jouait, donc, (certainement un rôle dans l'of-
frande, d'autant plus que l'on savait les dieux célestes très
friands du breuvage d'immortalité (à,a3po7i.'a) contenu dans le
merveilleux graal du ciel : la lune qu'ils vidaient tous les mois,
mais qui se remplissait toujours à nouveau.
iLes Grecs racontaient encore que Kronos s'était enivré d'hy-
dromel. Toutefois, ce liquide fut remplacé chez les divers peuples
par leur lioisson favorite : le vin en Italie et en Grèce (celui-ci
continuant du reste à s'appeler ijàH-j — ail. Met, « hydromel »),
la bière en Germanie ; « eos sacrificium profanum litare velle,
vasque magnum quod v'ulgo cupam vacant, quod viginti et sex
modios aiiiplius minusve capiebat, cerevisia plénum in medio
habebant posituiii. Ad quod vir Dei accessit et sciscitatur quid de
illo fieri vellml ? Illi aitinl : deo suo Wodano, quem, Mercurium
vacant alii, se velle litare » (1).
Les Perses et les Hindous emploient le soyna (= zend :
haoma), dont l'identité botanique est inconnue, car aujourd'hui
l'on se sert sous ce nom de plantes diverses (le nom signifie
simplement : « jus distillé »), mais que dans les plus vieux
(1) COLUMBANUS, citê par Grimm, Mythol., t. I (S*^ éd.), p. 49.
LE SACRIFICE ET LES INDO-ëUROPÉENS 275
textes on appelle encore parfois madhu, « hydromel » (1), bien
que le terme de madliu, chez les Hindous, s'applique plus pro-
prement à la boisson même tirée du miel, qui continua long-
temps à jouer ce rôle dans le culte populaire, à l'époque où le
sacrifice officiel et principal des Brahmanes et des riches pré-
férait le soma. Le Rig-Veda parle en tous cas d'une offrande de
madhu aux Açvins, divinités correspondant aux Dioscures.
Le so7na paraît avoir été souvent extrait d'une plante des
montagnes appelée par les botanistes sarcostemma acidum.
Le rôle du feu. — On se rappelle que Tabsence de feu sacri-
ficiel était le trait le plus remarquable de l'antique rituel des
Indo-iEuropéens, si on le compare à celui, non seulement des
peuples méditerranéens, mais des Hindous. Le feu, en effet,
avons-nous vu, ne jouait d'autre rôle dans l'oblation que de
préparer le repas des dieux, comme on eût procédé pour celui
des hommes.
Il y avait toutefois des circonstances où la combustion avait
une signification plus directement religieuse. Dès les temps les
plus anciens, semble-t-il, on faisait des offrandes au feu lui-
même.
On sait que le feu était l'objet d'une vénération spéciale, et,
en particulier, celui du foyer, VHestia des Grecs, que les Li-
thuaniens appellent Vgnis Sventd. Ces derniers y voyaient la
« maîtresse du logis ». Ce terme est également employé par
les Indiens (grliapati) , qui s'adressent à leur agiii (= lith.
ugnis — lat. ignis) comme à 1' « ami » {atithi) , le « protecteur
do la maison », 1' « ancêtre ». 11 est comme la vie de la famille,
qui se continue sans interruption à travers les générations. Il
est une des plus mervei'lleuses manifestations do la vie ou force
divine qui anime le monde.
Dans toutes les occasions mémorables de Texistence, on
invoquait cet « ami », notamment lors d'un mariage. Les grains
d'orge que l'époux mettait dans les mains de sa femme avaient
d'abord passé au feu, ce qui assurait une union plus complète
des jeunes mariés. Le dixième jour après la naissance d'un
enfant, on sacrifiait à Agni. On répandait sur lui du beurre pour
(1^ Sciiî'.ADEn, L('xikon_ s. v. Opj r r. 602.
270 A.-.I. CAR.XOY
le faire crépiter en disant : « Comme un père protège son tils,
garde, ô Agni, cet enfant » (1).
Agni, comme source de vie, devait faire prospérer le bétail et
les cultures.
De même que les Hindous, les Germains nourrissaient le
feu, notamment le jour de Noël (2). On jetait dans le foyer
une portion de tout ce que l'on mangeait, en criant : « Vois,
feu, tu as mangé avec nous ; sois-nous fidèle durant Tannée ! >>
En Bohême, les miettes des repas appartiennent au feu et
il est impie de cracher sur celui-ci. Dans le Telemarken. on
jette un peu de cr-ème de lait dans le feu en criant : « Loki ! » (3).
De même qu'il y avait des foyers de famille, il y en avait
pour les villages et les tribus, entourés d'une vénération et,
probablement déjà chez les Indo-Européens, d'une attention
spéciale. Ce que les Vestales de Rome devaient garder, c'était
en somme le foyer de la ville.
Il semble que les Indo-Iraniens aient encore donné plus
d'importance à ce culte du feu. On sait notamment que les
Mazidéens ont reçu le nom d" « adorateurs du feu », à cause
de la grande importance que ce culte occupait parmi eux. Il
était l'élément par excellence, la plus belle manifestation
d'Ahiira. D'après les aspects qu'il revêtait, on le nommait
successivement : « l'ami » qui entretient la chaleur du corps,
<c l'admirable » qui fait vivre les plantes et s'échappe d'elles
sous forme de flamme par friction, u l'excellent », c'est-à-dire
réclair qui purifie le ciel, le « très saint », qui brille en pré-
sence d'Ahura Mazda.
Or, dans l'Iran et dans l'Inde, les Atharvan ou « prêtres du
feu » deviennent les prêtres par excellence. Ce sont eux qui,
à l'époque védique, apparaissent comme les officiants normaux
du sacrifice.
Cette seule circonstance pourrait suffire à expliquer qu'une
combinaison se soit produite entre le sacrifice carné et celui
du feu. C;^lle-ci avait, du reste, d'autant plus de chance de se
réaliser que le feu intervenait déjià :
1° comme moyen de préparer le repas divin,
(1) Oldenberg, Die Religion des Veda, p. 131.
(2) Von' ScHROEDER, Arische Religion, t. II, p. 577.
(3) lUd., t. II, p. 549.
LE SACRIFICE ET LES INDO-EUROPÉENS 277
2° comme deslraicfeur des aliments devenus sacrés par la
cérémonie,
3" comme conjurateur des forces mauvaises qui eussent pu
empêcher l'efficacité de l'opération. De tout temps le feu a été
employé comme un moyen d'éloigner les bêtes sauvages et
tous les ennemis.
Li's sarrificps indiens. — Le sacrifice indien, tel qu'il nous
apparaît, déjà fort complexe >k Tépoque védique et, bien plus
encore, dans la période suivante, est donc né d'une combinaison
des rites très simples du sacrifice sanglant des Indo-Européens
avec ceux qui se rapportaient au culte du breuvage de vie et
à celui du feu, d'autre part. Les Indiens connaissaient, toute-
fois, un grand nomltre d'espèces de sacrifices, parmi lesquels
celui du soma jouait le rôle principal.
On distinguait des sacrifices privés, qui se faisaient sur le
feu du foyer, et des sacrifices publics. Les premiers compre-
naient les partages de nourriture du type ancien, déjà décrit,
et des offrandes aux mânes des ancêtres {çrâddlia') . Les sacri-
fices publics étaient beaucoup plus solennels. Ils nécessitaient
généralement la présence de trois feux. L'un s'appelait gàrha-
patya. « feu du maître de la maison », et représentait l'ancien
feu du foyer : le second, le âhavaniya, était plus proprement
celui des offrandes, celui des dieux, par lequel ces derniers
recevaient l'offrande ; le troisième, le anvâhâryapacana. était
pour les mânes. Il devait conlenffM- i-e^i derniers et éloigner les
mauvais esprits.
On distinguait pai'mi c&s gi'ands sacrifices : le liaviryajnn.
qui consistait en une oblation de lait et de beurre, le sacrifice
du cheval et celui du soma.
Du premier type était notamment la cérémonie qui se célé-
brait à la pleine lune et à la nouvelle lune (darsha-pûrnamâsa) .
On s'y préparait \\i\v le jeûne et la continence.
A l'aurore du jour choisi, on s'acquittait comme de coutume
du agnihotra ou petite offrande de beurre, présentée matin et
soir au feu. On préparait un gâteau de ri/, et d'orge ; on élevait
1 autel {vf'di) ; on consacrait le bois ; on allumait le bûcher et
l'ftn priait. Suivaient cinq offrandes de beurre et la présenta-
tion de deux gâteaux. Le brouet formé de ces éléments était
cuit dans le feu igih'liapalya) et partagé entre les divers prêtres
278 A.-J. GARNOY
et les sacrificateurs. On récitait encore des litanies ; on faisait
des pas devant le feu et la cérémonie se terminait.
Le « sacrifice du cheval » était le principal des sacrifu-es
sanglants. Il avait conservé un caractère bien populaire ; le
roi y prenait part avec tout le peuple. On suppliait les dieux
de rendre le prince victorieux. Avec le temps cette cérémonie
prit des proportions considérables et s'accompagna de réjouis-
sances populaires et de récitations épiques, vm peu comme dans
les centres de pèlerinage du moyen âge.
L'offravdr du sonia. — Le sacrifice par excellence, pourtant.
celui que voulaient s'accorder, pour se régénérer, ceux qui pou-
vaient se permettre ce luxe, c'était celui du soma. Les frais
qu"il occasionnait ne permettaient pas au peuple d'y participer
autrement que comme témoin ; mais il constituait la res-
source principale des prêtres, qui tenaient à on répandre
l'usage parmi les gens opulents.
La pratique d'extraire le suc de quelques branches de la
plante sacrée, en les pilant dans un mortier, de l'offrir aux
divinités du ciel, d'en prendre une partie. et de verser le reste
sur l'autel du feu, remonte, avons-nous vu, à l'époque indo-
iranienne, car les peuples de l'ancienne Perse agissaient de Iti
sorte. Touteifois, dans ce dernier pays, le sacrifice du haoma,
que ZoROASTRE essaya du reste de bannir, ne devint jamais le
rite essentiel du culte. Au contraire, dans l'Inde, dès l'époque
védique, et plus encore dans celle qui la suivit, il se développa
au point de constituer sous le nom d'agnistoma, une liturgie
compliquée, dans laquelle lieaucoup de pratiques, d'origines
diverses, furent absorbées.
MM. Caland et Henry en ont donné une description très
complète qui peut se résumer comme suit.
Après quatre journées préparatoires, le sacrifice s'accom-
plissait en un jour, une fois l'an, vers le printemps. Outre le
sacrifiant et sa femme, opéraient seize à dix-huit prêtres,
parmi lesquels se trouvaient le brahmane, présidant la céré-
monie et veillant è ce que rites 'et formules ne fussent pas
rendus inefficaces par quelque erreur.
Tl réparait immédiatement toute faute commise. Le hofar
récitait les hymnes ; Yudgàtar dirigeait les choeurs ; Vadhvaryu
était l'ofïiciant le plus actif. On choisissait le terrain et Ton éle-
LE SACRIFICE ET LES 1ND0-EI"R0PÉENS 279
vait une çaki.« hutte )>(!), aver une ouverture aux quatre points
cardinaux. On apportait le nécessaire : peau et corne d'antilope
n')ire, beurre frais, bâton de figuier, gobelet, pot etc. A son
ari'ivt'e au lieu de TotTrande, le sacrifiant était consacré par la
cérémonie de la dilisha. On lui coupait les ongles et on le bai-
gnait. Ensuite,- on oignait son corps et ses yeux avec des
parfums destinés à conjurer les puissances mauvaises.
Le sacrifiant se revêtait ensuite de la peau d"antilope noire
el prenait en main le bâton de figuier. Son épouse recevait
écralement les attributs qui lui revenaient. Le prêtre leur faisait
ali'rs à tous les deux les recommandations nécessaires à la
bonne réussite des rites.
L'adhvaryu aspergeait ensuite la joue droite du sacrifiant en
criant : « Que les eaux, arrosent pour la vie. la longue vie. la
santé ». On enfonçait dans sa barbe des fétus de darhha (.plante
servant à faire la litière destinée à recevoir les dieux qui ve-
naient au sacrifice) ; puis Thomme était rasé.
A la suite de ce traitement, le sacrifiant était consacré, mais
devait prendre des précautions extraordinaires, pour ne pas
redevenir impur. Il devait même réduire sa nourriture au
minimum.
On attendait ainsi le jour du sacrifice. Les prêtres prépa-
raient celui-ci par l'achat de nombreux accessoires et d'une
vache destinée à être échangée contre la plante merveilleuse.
Quand on s'était procuré le soma, on débarrassait celui-ci
des briniilles étrangères qui s'attachaient à ses feuilles.
On le chargeait sur un chariot attelé de deux bœufs, en pro-
nonçant ces paroles : « Levé avec la vie, la bonne vie, levé
avec le suc des plantes, levé avec la vigueur de Parjanya (dieu
de l'orage et de la pluie), je me suis levé à. la suite des immor-
tels ».
'A l'endroit du sacrifice, on faisait gonfler le soma en l'as-
pergeant d'eau chaude. On convoquait ensuite tous les dieux et
déesses à la cérémonie du |)ressurage et on achevait la consé-
cration du sacrifiant qui, le cinquième jour', complètement pu-
rifié, pouvait s'acquitter des rites sacrés.
Ceux-ci commençaient le cinquième jour.
Les tiges de souki. arrosées d'eau lustrale, étaient frappées
(1) Le mot est étymologiciuemcnt le nu'me que l'anglais haU.
280 A.-J. CARNOY
avec des pierres, tant qu'il en sortait du suc. La liqueur obtenue
de la sorte était filtrée, avec accompagnement de prières et
d'hymnes. Ceux-ci étaient pleins des louanges du soma ou des
divinités auxquelles on adressait le sacrifice. Les gouttes de
soma tombant sous le coup des pierres étaient comparées aux
eaux du ciel et aux grandes forces de la nature.
On sait, en effet, que le soma de la terre n'était qu'une incar-
nation de celui du ciel, et que le sacrifice notamment avait
pour but d'assurer la prospérité du sacrifiant, laquelle dans
l'Jnde dépend toujours grandement de la pluie.
Les trois feux, les ornements des prêtres, les nombreiix
ustensiles, l'autel, l'extraction du suc du soma, les prières et
les chœurs contribuaient à donner à tout ce cérémonial un
caractère assez grandiose.
But pt inspiration du sacrifice indien. — Quant à l'efTicacité et
au but du sacrifice, il ne semble pas, en dépit des théories cou-
rantes, que les Indiens de l'époque ancienne aient donné une
valeur magique à leur offrande.
L'intention le plus souvent et le plus neitement marquée
était de régaler les dieux, en leur offrant nourriture, boisson,
parfum et un bon siège. Les paroles qui accompagnaient les
rites étaient des invitations et des louanges. Ce qu'on cherchait,
c'était la faveur du dieu ; c'était son amitié.
Mais de même qu'on ne fête et flatte les puissants de la
terre que par espoir d'être aussi bien traité par eux. ainsi
également, tout en engageant les dieux à profiter de l'aubaine.
on leur disait clairement qu'on espérait la réciprocité : « dehi
me; dadâmi te; donne-moi comme je te donne ». « Bois, fortifie-
toi ; ce soma que l'on presse est pour toi, Indra, maintenant et
toujours. De même que tu as bu l'antique snma, ô Indra, bois
aussi le nouveau, toi que nous louons... Mais, allons ! personne
ne t'empêchera ! Nous te connaissons, toi le maîti'e des trésors,
Indra, accorde-nous ton bienfait le plus grand, Seigneur, des
cavales fauves » (1). Plus clair et plus bref encore est cet
appel : « Goûte donc ce soma ; apaise ton désir et ensuite que
ce soit ton bon plaisir de répandre tes trésors « (2).
(1) RV, III. 36, 39. (Oldenberg, o. c, p. 309).
(2) RV, J, 54, 9.
LE SACRIFICE ET LES INUO-EUROPBENS 281
A côté lie cette recherche de biens matériels, on trouve fré-
quemment aussi l'espoir de donner satisfaction pour une faute
(sacrifice d"expiation).
Peu à peu, on voit prévaloir une conception plus mécanique,
plus magique de l'action du sacrifice. Un prêtre, par exemple,
dit à Iticira : « Qu'un autre ne s'empare pas de toi comme un
oiseleur d'un oiseau ! » (1).
Ces textes sont toutefois assez rares dans le Vedn. où l'on voit
pourtant s'ébaucher la conception qui fait du sacrifice un mo-
teur des dieux et du monde et le centre même de toute religion.
Les [>lus anciens hj-mnes sont encore souvent adressés à
Varuna, à Mitra ou à d'autres divinités, jouant un rôle plus im-
portant dans les croyances que dans le rituel; mais on s'aperçoit
que, de plus en plus, les prières s'adressent au soma person-
nifié, à Agiii, « le feu », qui apparaît dès lors avant tout comme
le « Messager », à l'slias, « l'Aurore », dans sa fonction de
donneuse du signal pour le sacrifice.
Indra, le dieu fort et guerrier, qui l'emporte au ciel dans la
lutte contre les dragons, retenant les eaux prisonnières et qui
accorde sur terre la victoire à ses fidèles, est le dieu par excel-
lence de cette nouvelle période et celui auquel on offre le plus
grand nombre de sacrifices, parce que c'est le favori de la
classe des princes, qui faisaient les frais des grandes cérémo-
nies que nous avons décrites. Indra, du reste, c'est le grand
buveur de soma. Il s'est abreuvé pour augmenter sa force.
Quand il est ivre, il tue les démons par milliers. Le sacrifice
du soma, c'est donc, bien souvent et bien naturellement, celui
d'Indra. Le védisme est donc une sorte de polythéisme ritua-
liste. Dans les Brdhmanas, cela devient du ritualisme cosmique.
En effet, on se représente désormais le sacrifice comme néces-
saire aux dieux, pour qu'ils puissent remplir les fonctions que
cette opération les oblige, d'autre part, fatalement à exécuter.
Qui otlicie selon toutes les règles lie le dieu. Mais si les dieux
ne sont plus que les agents d'une activité dépendant du sacri-
fice, ils deviennent superflus : l'acte rituel peut tout. On le
considère comme mettant le monde entier en mouvement,
comme le pivot de l'univers.
(1) Jbid, 45, 1.
282 A.-J. CARNOY
Le sarrificc à l'époque brahmanique. — Les exagérations du
rituel I osl-védique et son caractère trop nettement aristocra-
tique amenèrent sa décadence et sa disparition. Il ne fut toute-
fois jamais aboli ; le Veda continue encore, en théorie, à être
la règle, le livre sacré. En conséquence, l'excellence du sacri-
fice des trois feux et du sorna est toujours proclamée, de nos
jours comme à la grande époque ; mais, en pratique, seuls
quelques enthousiastes ont de temps à autre essayé de ressusci-
ter ces rites.
Naturelle'iient. cette disparition fut graduelle. Il est assez
curieux qu'elle ait été favorisée par l'augmentation même du
pouvcML' des prêtres. En effet, ceux-ci, qui d'abord n'él:u''Ut
indispensables que pour les grands sacrifices, imposèrent leur
présence à toutes les cérémonies dir culte domestique. Ce dernier
leur assura donc également des revenus, qui leur permirent de
renoncer peu à peu aux pratiques par trop coûteuses du grand
sacrifice. Dans la littérature post-védique apparaissent les
gr . hya sùlras, où Ton donne les règles et les formules pour
douze cérémonies remontant à des usage-s fort anciens et que
l'on n(jmme ■■saniskûras. Ils tiennent dans la vie de l'Indien.
mutatis mutandis, plus ou moins, la place de nos sacrements.
'Ge sont des cérémonies et des offrandes que Ton fait à la
naissî.nce, à l'imposition du nom, à la puberté, au début de
l'initiation aux doctrines religieuses, au mariage etc. Il faut y
joindre les rites funéraires et les sacrifices aux ancêtres.
Chaque caste est astreinte, dans des proportions et sous des
f(UMues différentes, à accomplir ces rites, qui constituent la
condition sine qua non de l'appartenance à ces classes à la fois
religieuses et sociales.
'Ce formalisme est aussi rigoureux que la pensée et la dévo-
tion même sont libres, car il n"est pas rare que, tout en restant
dans sa caste, en en pratiquant les ol)ligations, on soit spirituel-
lement l'adhérent d'une secte hindouiste. Le caractère pan-
théiste et avatârique du brahmanisme se prête en effet à bien
des combinaisons.
Ce qui importe, pour rester orthodoxe, c'est de recourir pour
le culte à l'office des Brahmanes, de reconnaître leur supré-
matie sociale et d'admettre en principe que le Veda est suprême.
C'est parce qu'ils refusent expressément de s'incliner devanl
LE SACRIFICE ET LES INDO-EUROPÉENS 283
ces dcxgnies essentieLs que les bouiddhistes et les jaïnisLes ^sont
hérétiques, tandis que les çivaïtes et les vishnouïsles sont
orthodoxes.
Ces deux dernières sectes comptent aujourcriiui un très
grand nnnil)re d'adhérents parmi les fidèles. du brahmanisme.
Ils admettent du reste les conceptions essentielles de la reli-
gion de rinde, avec son pessimisme, sa foi dans la métempsy-
cose et le karma, l'aspiration vers le détachement des désirs et
de Texistence personnelle ; mais leur culte est simplifié et
s'adresse de préférence à une divinité déterminée Çiva ou
Viskriu, dans laquelle actuellement les Brahmes voient une
incarnation de la divinité panthéistique.
La rite des offrandes est, dans ce culte, réduit à très peu de
chose : on dépose des fleurs, des mets ou d'autres présents
devant les images des dieux. On se contente même souvent de
simulacres d'animaux (comme nous faisons pour les cx-votn) .
Rôle du sacerdoce dans Vlndr et VIran. — Dans cette histoire
du sacrifice chez les Hindous, on est i)articulièrement frappé
de l'importance jouée par le sacerdoce ; celle-ci atteint son
maximum à l'époque post-védique, quand les princes eurent
chacun leur 'pui'oliita ou chapelain, qui exerçait une influence
considérable sur le gouvernement.
iCe résultat fut l'aboutissement d'une évolution qu'on voit se
dessiner dans le Yeda. Au fur et à mesure que les hymnes à
Agni, Indra et Soma augmentent en nombre, on voit les préten-
tions des brahmanes s'affirmer. Ils revendiquent une origine
divine et leur présence aux sacrifices devient d'autant plus
nécessaire que ceux-ci deviennent plus traditionnels et com-
pliqués. Gomme le sacrifice est suprême, eux aussi sont tout
puissants, dit le Yeda (1), mais en termes voilés. « Je te de-
mande où sont les extrémités de la terre, où est son centre, où
est la semence de Tétalon? Je te demande où est le ciel suprême
de la parole ? », ce qui signifie : « Cet autel est l'extrémité
du inonde ; ce sacrifice est le centre de l'univers ; ce soma est
la semence de l'étalon ; ce Brahmane (qui ollicie) est le cîel
sujjrême. »
Si le rôle des | rêtres n'a cessé d'augmenl(M' en importance
(1) RV, I, 164, 34, 35.
284 A.-J. CARNOY
à réi)oque post-védique, les origines de leur pouvoir sont non
seulement védiques, mais pré-védiques, car la présence de
Vafharvan (prêtre du feu) au sacrifice est, avons-nous vu,
signalée aussi loin que nous pouvons remonter dans l'histoire
à la fuis de riraij et de l'Inde. Hérodotk ne nous dit-il pas
qu'ils doivent lire une « théogonie », pour que la cérémonie
soit eflicaoe ? Il s'agissait sans doute d'un yasht. c'est-à-dire
d'un hymne adressé à quelque divinité, ou plutôt de quelque
récit se l'apportant aux sacrificateurs mythiques : Yima ou
Thraêtaona. Le rôlf^ du pr-ètre est dcmc avant tout de pro-
noncer dos mantras. Le sens de ce, mot oscille sans cesse entre
celui de « prière » et de « formule magique ». Si le R'm-
Vr'da est surtout un recueil de prières, VAtkarva-Veda est on
grande partie une collection de textes à vertu magique et ces
deux aspects de l'attitude de l'homme envers le surnaturel ou
le préternaturel ne cessent d'exister côte à côte.
Chez les Iraniens, le prêtre en général s'appelle « prêtre du
feu », comme dans l'Inde {atharvan) , ce qui s'explique par
l'importance si considérahle jouée par le culte du feu dans ces
deux religions. Mais on dit aussi « brahmane » dans l'Inde et
« mage » dans l'Iran. Le sens primitif du premiier de ces termes
peut se deviner par la comparaison avec l'irlandais bricht et
le Scandinave brag, qui désignent l'art de composer des vers à
force mystérieuse, des énigmes, des prières efficaces. Wodan
par exemple, comne dieu du vent, est dit être le premier de
tous les chantres et inventer sans cesse de nouveaux brags tout-
puissants. Nous savons, depuis des découvertes récentes, que
k's prêtres (ie la Sogdiane s'appelaient aussi « réciteurs de
brags » {balysa). tout comme ceux de l'Inde brahman. c'est-à-
dire ceux qui prononcent le brahman. « prière, formule ».
L'étymologie du mot mogu, « mage », est moins claire. Il y
a quelques années, l'auteur de cette communication s'est efforcé
de démontrer que ce nom était parent de celui du médecin
mythique grec Ma/iwv et du mot :j.T,/avT, « procédé ».
Il est en tout i-as de fait que les anciens décrivent le mage
comme pratiquant sur une grande échelle la magie autant que
le culte.
Sacerdoce indo-eiiropiéeii. — Si nous consultons la termino-
logie des autres peuples, nous constatons que le prêtre y appa-
LE SACRIFICE ET LES INDO-El'ROPÉENS 285
raît avant tout comme celui qui a une science spéciale. De
même que l'Inde a son Vrda et l'Iran son Avpsta, mots dérivés
de la racine de néeii. weten, ail. wissen, les magiciens de l'an-
cienne Prusse étaient des Waidler. les sorciers russes étaient des
vedunu, les prêtres des Celtes étaient des dru-wida. « druides »,
c'est-ià-dire des gens d'un grand savoir. Ceci nous fait re-
monter, au moins en imagination, à une époque où les Indo-
Européens avaient, comme les autres peuples de l'Asie cen-
trale, des sortes de chamanes, détenteurs d'un savoir tradition-
nel et professionnel d'un caractère magico-religieux. Une
correspondance assez frappante entre le rythme des vers du
Veda, celui des formules de la Sogdiane et, dans son "principe
au moins, la versification grecque permet de croire que cette
« science » se composait de formules versifiées, se transmettant
oralement du maître au disciple, comme l'art de bien sacrifier.
Les anciens nous disent que les prêtres gètes professaient une
doctrine sur l'immortalité, et que leur enseignement rappelait,
comme celui des druideç, les idées de Pythagore. Les mages
de l'Iran mettaient l'idée de résurrection fort en évidence et
s'occupaient de la formation du monde. La correspondance
entre ces divers enseignements sacrés et mystérieux ne doit
pas nous entraîner toutefois à croire à la transmission depuis
l'époque indo-européenne d'idées élevées, par un sacerdoce bien
constitué.
D'autre part, il ne faut pas non plus négliger complètement
cet indice. Il est de fait que, dès l'an 2000 av. J.-G. environ, les
Indo-Iraniens avaient déjà des familles de prêtres transmettant
un enseignement, et parmi lesquelles se sont recrutés non seu-
lement les brahmanes, mais les divers réformateurs de l'Inde
et notamment Zoroastre. Sans doute, les anciens chamanes
de la tribu indo-européenne formaient-ils déjà, avant la dis-
persion, une profession héréditaire, se transmettant une science
mystérieuse mais très élémentaire sur ce que deviennent les
morts et sur la manière de s'assurer la faveur ou la puissance
des dieux ou des esprits, ainsi que des remèdes et des incan-
tations. Le culte proprement dit était indépendant de ces « hom-
mes de science ». C'était le père de famille, le chef de la tribu
qui faisait le sacrifice et les prières. Le culte grec et romain,
par exemple, est resté plus indépendant du sacerdoce profes-
286 A.-J. CARNOY
sionnel, bien qu'il connût également des collèges cVArvales et
de Salii, à Rome, des servants de certains cultes déterminés,
en Grèce, tels que les Sellai de Dodone et les Euniolpùlai d'Eleu-
sis, semblables aux Gode des Germains et aux Gutuatri des
Celtes. Dans d'autres régions, au contraire, au fur et à mesure
que le culte devenait moins simple et moins spontané, on
recourait, comme dans l'Inde et en Perse, aux services des
professionnels.
Ici encore, nous voyons que le caractère réellement religieux,
sincère, spontané du culte et de la prière peut dégénérer dans
le sens de la magie, non seulement par suite de l'état d'esprit
animiste, mais par le formalisme qui guette tout culte qui a
une histoire.
En dépit des différences de civilisation, l'àmo humaine reste
toujours trop semblable à elle-même pour que les diverses
attitudes avec lesquelles elle se tourne vers la divinité ne
coexistent point en quelque manière et ne puissent reprendre
le dessus d'après les circonstances et les milieux, dans des
p] oportions et des formes différentes. Le pire polythéiste, pé-
n;'tré d'animisme, sous le coup de certaines émotions, s'adres-
sera à un dieu suprême comme nous pourrions le faire, tandis
que beaucoup de nos frères et contemporains ont par moments
de la religion une conception, sinon magique, du moins méca-
nique et formaliste qui aboutit à des gestes et des actes fort
semblables à ceux des primitifs. Ce qui caractérise les périodes
de pensée religieuse, c'est la prévalence relative, mais seule-
ment relative de certaines attitudes. Les étages de ce qu'on
appelle l'évolution religieuse se trouvent, en réalité, dans la
psyché de chacun d'entre nous.
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[18] Das Opfer bel den Sumero-Akkadern,
von Professer Dr. Johannes Hehn in Wurzburg.
Wenn ich das gesumte keilinscliriftliche Malerial und aile
sich daran anschliessenden Fragen hier erùrtern woilte, so
wûrden niehrere Stunden rrforderlich sein. Denn das Opfer
sleht, wie in anderen Religionen, so auch bei den Sumerern
und Akkadern. von den àltesten Zeiten an im Mitteipunkt des
religiosen Lebens und beherrscht den gesamten Kult dieser
VûlkerJ^ine Définition des sumerisch-akkadischen Opferbegrif-
fes ist kaum zu geben. Ueber das Wesen des Opfers gaben sich
jene Vulker selbst kaum Rechenschaft. Opfer, Priester und
Tempel gehùren von den àltesten Zeiten an zusammen. Und
wenn ich mit einem Satze aussprechen sollte, was jene Leute
mit dem Opfer erstrebten, so wûrde ieh schwerlifh alien Bezie-
hungen gerecht w-erden, die das Opfer in sich schliesst, denn
ûberall, wo man in Yerkehr mit den Clotlern triti, seien es freu-
dige oder traurige.ôflfent'liche oder private Anlâsse,werden Opfer
dargebracht. So weit wir in die Jahrtausende der Geschichte
des Zweistromlandes zurûckblicken kônnen, immer und ûberall
bestanden bei jenen Volkern Tempel, Priester und Opfer. Was
nûlzt dem Gotte ein sehones Haus, wenn er nicht verehrt wird
und wenn er nichts zu essen bat ! Das Opfer bedarf so wenig
'einer Begrûndung wie das Gebet. Wie es selbstverstàndlich
i.'^t, dass man einen Gott verehrt und anbetet, so ist es auch
selbstverstàndlich, dass man einen so màchtigen Herrn um
seine Hilfe antleht und dass man ihn durch entsprechend»
Geschenke in guter Stimmung erhàlt oder ihm fur seine Hilfo
dankt. Dass auch in dor persischen Zeit das Opferwesen in
Babel noch blûhte, wussten wir schon vor der Entzifferung dei-
Keilschrift aus dem Bûche Daniel, das erzâhlt, dass dem baby-
lonischen Gotte Bel tàglich zwulf Malter Weizenmehl, vierzig
Schafe und sechs Krùge Wein dargebracht wurden {Daniel, XW,
2). Wir ersehen aus jenem Berichte, dass das Opfer als Speise
288 J. HEHN
fi'ir die Gottlieit dienen sollte und das stimmi zu den Nachrich-
Icn, die wir aus den verschiedenen Zeiten der sumerisehen
Llnd habyloniseli-assyrisc'hen Gesehichte haben. « Akalsu akul,
nigasu muhunna ; iss seine Speise ; ni^mm doch an sein Opfer »,
betet der Priester am Bette des Kranken (IV R 17, 54-55).
Schon in den altesten Zeiten war man darauf bedacht, der
Gottheit wurdige Opfer darzubringen, durch rrichliche und
kosfhare Gaben sie freundlich zu slimmen; dagegen waren Theo-
rien und Système jenen Men&chen fremd. Wenn wir die Fûlle
der Gaben lesen, die Gudba, der Fiirst von Lagas am Neujahrs-
tage als Vermàhlungsgesiohenke fur die Gôtt-in Bau dar-
brachte, so will er sich seines religiôsen Eifers rûhmen, aber
eine Opferlheorie ist daraus nicht abzuleiten. Um Sie mitten
in die Gedankenwelt der Sumerer bineinzufùhren, will ich Ibnen
hier die Gaben anfûhren deren Darbringung Gudea der bewun-
dernden Nachwelt bericlitet. Im alten Tempel waren die Ver-
màlilungsgeschenke : 1 fetter Ochse, 1 gemàsteter Hammel,
3 fette Hammel, 6 mànnliche Schafe, 2 Làmmer, 7 Kôrbe
Datteln, 7 Tôpfe Butter, 7 Palmmarke, 7 ...Feigen, 7 (Frucht)-
Kuehen, 1 ...Gans, 7 Enten, 15 Hûhner, 60 ^urteltauben (verteilt
in) 15..., 60... suhur -F ini-he, (verteilt inj 30..., 30 Talente...,
7 Talente..., 60 Talente e/'u-HoIz, das waren die Vermàhlungs-
geschenke der Bau im alten Tempel frûher (1). Gudea be-
riclitet nun genau, wie er dièse Gaben vermehrt hat. Statt
clncs fetten Ochsen spendet er zwei ; statt eines gemàsteten
Hammels zwei u. s. w. Es sind dieselben Gaben, nur in grôsserer
Menge, ein Beweis dafûr, dass man sehon in der sumerisehen
Zeit glaubte, durch môglichst reiclie Opfer die Gottheit zu
verherrlichen und sich ihr Wohlgeifallen zu erwerben.
Die babylonischen und assyrischen Konige fûhren unter ihren
Friedenswerken vor allem ihre Tempel- und Palastbauten auf
und werden nicht miide hervorzuheben, wie herrlich sie die
Tempel ausgeschmûckt haben. In diesem Zusammenhang ver-
gessen sic nicht, zu erzâhlen, dass sie die Opfer fur die Gôtter
mit koniglicher Freigebigkeit dargebracht oder gegen friiher
vermehrt haben. So sagt z. B. Nabuchodonossor auf einem in
Babylon gefundenen Tonzylinder : « Seine [iMarduks] fetten,
(1) Gudea Statue G. 3, 8-4, 20, vg-1. Thureau-Dangin, Die sumerisehen und
akkadisc]t.en Konigsinschriften (Vorderasiatische Bibliothek, I, 1), S. 84 f.
DAS OPFER BEI DEN SUMERO-AKKADERN 289
beslàndigen 0})fer, seine reinen Brotopfer (1) steigerte ich
noch gegen friiher : fur jeden Tag einen fetten Grosstier, ein
feh'leiiosps Rind, reine Opfertiere enlsprechend den Gôttern von
Esagila und den G(")ttern von Babel, Fische, Geflûgel, rote (?)
Zwiebeln (?), den Schmuck des Rohrdiclîichts, Honig, Sahne,
iVIilch, feinstes ÔI, Sesaniwein, sûssen Rahm, Rauschtrank der
Berge, fiinkelnden Wein, Wein von Tzalla, Tu'immu, Simmini.
Hilbunim, Aranabanim. SuJuim, Bitkubatim und Bifatim, gleich
dem Wasser des Flusses ohne Zahl auf der Tafel Marduks und
Sarpanits, meiner Herrn, liess ich strotzen » (2). An einer
anderen Stelle desselben Zylinders (3) zâhlt er fast mit den
gleichen Worten die Gaben fiir Nebo und Nanâ auf, die mit
denen fur Marduk und Sarpanit erwàhnten in der Hauptsache
identisch sind. Er fûgt dann bei, dass er fur die Todesgôtter
Nergal und Lâz pro Tag 8 Schafe als teste Abgabe bestimmt
und die festen Abgaben fur die grossen Gotter gegen friiher
erhôht habe (4). Auch sonst riihmt sich Nabuchodonossor
ebenso wie andere babylonisclie Kunige gern seiner Frômmig-
keit und tlirht zum Nachweis dafiir ausfuhrliche Aufzàhlungen
der Opifergaben in die Berichte ùber seine Kriegs- und Friedens-
taten ein (5). Besonders ausfuhrlieh erwahnt er die Wiederein-
richtung der Frschopfer (6). Kultufgeschichtlieh sind dièse
Opferlisten insofern wertvoll, als sie uns in die Lebenshaltung
der Priester Einblic'k gewâhren.
Die Stimmung eines babylonisçhen Opferfestes gibt uns der
Hymnus IV R 20 kund, der die Zurûckfûhrung Marduks aus
Elam nach Babel feiert. Naeh der Schilderung des Etends und
der Trauer, die herrsehte, als der Gott durch die feindliche
Macht fortgefûhrt war und im Feindesland weilte, wird daran
erinnert, dass der Konig unaufhorlich und inbrùnstig flehte,
dass der Gott wiederkehren môge. Marduk erhort seine seuf-
zervollen, Tag fiir Tag fortgesetzten Bitten ; sein Herz fasste
Erbarmen und er wandfe seinen Nar-ken der heiligen Stadt
(1) Zu dieser Uebersetzung von nidbu, vgl. Jensen, KetlinschriftHche Bi-
bliothek, VI, I, S. 380.
(2) I R 65, I, 13-28, vgl. Vordrrasidtischc Bibliothvk, 4. Stuck, S. 90 f.
(3) Col. II, 26-35.
(4) II, 36-39.
(5) Inschrift von Wadi-Brisa, iv, 23 — v, 18.
(6) "VVadi-Brisa, iv, .58— v, 18.
19
290
.T. HEHN
(Babel) wieder zii. Unier Juhpl iind Jauchzen wird er zurûck-
gefiihrt. Nun heisst es woitlich weiter : « Es gewahrten die
LpliIp lies Landes sein liohes Bild, den wiirdigen Herrseher ;
sie strahlten, frohlockten ; sie aile sehauten auf ihn. Er hielt
seinen Einzug, sehlug auf seine friedliche Wohnung. Das Tor
dor Herrliclikeit, die Wohnkammer seiner Herrsehaft erglânzte,
wai' voM von Frohlocken. Die Hinimel bringen i.hren Ueberfluss,
dii' i'ii'de ihre Fûlle, das Meer seine Gebiihr, das Gebirge seinen
Ertrag, ihre 'Spenden ohne Gleiehen, so viel nur Zungen meldon
ki'mnen, ihre schwere Last bi'ingen sie dar dem Herrn der
HorTon. W'ild wird in Menge geschlachtet, massenhaft worden
Grdsstieie dargehracht, die Opfer werden riesig gemacht. auf-
gefiilll wii-d das Rauchwerk. Wolilgeriiche gehen ans, Di'iftc
i. FteLsck
3. Opfer
A. KMskopf
5. G-dtpeide.
dufti'n. Sfi'otzend'e (?) Opfer o])fei'f nian, voll ists von Jiibel...
ein Festniahl wird veranstaltet... Himnîel imd Erde schauen
geseiimiickt den Helden Mardiik. » Tn der Fiille der Opfergaben
flndet die freudige Begeisierung der Verehrer Marduks ihren
Ausdruck. Wir sehen auch hier, dass hinsichîlich der Gaben
keine Einschrànkung bestehi : das Beste, was der Himmel, die
Erde und fias Meer spenden, legt nian in Freude und Dank-
bai'koil dem GoHe zu Fûssen.
Trotzdem miissen von Amfang an fiir das eigentliehe Opifer
gewisse Gaben bevoi'zugt worden sein. Weiche es waren. kon-
nen wir wohl noch ans dem Schriftzeirhen fur « Opfer »
erseliliessen. Das Keilsehriftzeichen fiir « Opfer » sieht so aus
(siebe oben Nr. 1). Das Zeichen bedeutet : « Opfer » allgemein
und speziell « Opferlamm ». In den àltesten archaischen Texten
3-iOOO Jahre v. Ghr. bat das Zeichen folgende Form (Nr. 3).
t»AS OPFER BEI DEN SUMERO-AKKADERX 29 1
Dièses Zeichen hesteht ans z^ei Bestandteilon : die àussere
Umrahmung (Nr. 4) stellt urspriingilifli einen 'Kalbskopf vor
iind hedeutet junger Sfier oder junges Rind, die acht ein-
geschriehenen \\'inkeiliacken aher (Nr. 5) stellen ursprûnglich
eine Aehre dar und sind das Schrift.zeifhen fiir « Getreide » (1)
d. h. um den Gedanken des Opfrrs grapliisch darzustellen
zéichnelen die Smnerer einen Kalbskopf und fûgten dazii das
Zeielien fiir Getreide. Daraus ersehen wir ganz klar, welches
ûie Hauptgegenstànde des Opfers waren : junge Tiere, speziell
Rinder und Getreide. Aber dasselbe Zeichen bedeutet auoh
« Opferlamm ». Neben dem jungen Sliere und dem Getreide
gehort denigemàss das Lamm urspriinglicli und in erster Linie
zum Opfer. Also schon in dem àltesten Schriftzeiehen fiir Opfer
ist der Gedanke an das blutige und unblutige Opfer vereinigt,
ebenso wie nach der aittestament lichen Erzàhlung der Hirle
und der Aeker})auer mit ihren Opfergaben sich das Wohl-
gefallen Gottes siehern wollten. Im Babylonisch-assyrischen
bedeutet das oben angegebene Zeichen fiir Opfer auch niqû,
das etymologisch das Trankopfer. die Libation bezeichnet (von
7iaqû ausgiessen, libieren), dann aber fiir Opifer iiberhaupt und
(mit Vorsetzung des Determinativs fur Lamm) speziell fiir das
Opff'i'lamm gebraucht wurde. Das Lamm war eben das haupt-
sâchlichste Opfertier der Sumero-Akkader. Beachtenswert ist,
dass dasselbe Zeichen fiir 0})fer doppelt geschrieben karàbu
« widilgeneigt sein >>, « Huld erweisen », « segnen » bedeutet,
wenn es vom Hoheren gegeniiber dem Niedereren, dagegen
« huldigen », wenn es vom Niedereren gegeniiber dem Hoheren
.geliraucht wird. Das Opfer ist eine Hiildigung, die der Mensch
der (iottheit darbringt. 'Das nÈimliche Wort karâbu bedeutet
auch « beten ». Die Huldigung schliesst zugleich eine Bitte in
sich. Das Zeichen fiir Opfer wird von den Sumero-Akkadern
auch erklart als : tëmîqu, lênitiu, suppû. teslltum. lauter Aus-
driicke fiir « Gebet », « Flehen ». « inbriinstiges Gebet » ; das
gleiche Zeichen fiir Opfer bedeutet ferner miltliu « beruhigen ».
<( vers('dinen » (2'i. Opfer und Geliet habcn nach sunierisch-
(1) Vgl. A. DeimeLj Liste der archaischen KeUschriftzcichcn von Fara
(40. WissenschaftHche Veroeffentlichung der deutschen OHentgesellschaft)
Leipzig-, 1922, Nr. 267 und 268.
(2) Vgl. Friedr. Delitzsch, Suinerisches Glossar, unter ziir, S. 227. und
sifiisse, S. 243 ; fiir die Bedeutung von karahu finùet .sich das Nahrre in
Delitzschs Assyiischem Handwoerterliuch, s. v. karahu, S. 350 ff.
202 •'• HKHN
akkaiiisciicr Auffassimg dipselhe Grundidee. Karâbu bedeutet
auch « darbringen », der (inltbeit ftwas weihen, davon dann
kurbannu oder kurbâmi. « Darhiingung », « Gabp ». das an das
hebràische qorbân PiiniiPil. abcr etymologiscb von ihm wolil
zu h'f'nnen ist. ])im' Mensrb ei'fabrt die Hiild der Gottbeit, die
ibiii lias (Tpti-pide, das Vieil. i\i'n Wein, das Oel n. s. n\-. spendet
uriii liibll sich darum verplliditpt ib-n (Tuftei'n duiT-h Darbrin-
gung der Ojilprgalipn seine Huldigiing und seinen Dank zu
bezeigen und nui wpitere (iunst zu liillen. Das Opfer weist
darum aul' pin noiinales, frpundlicln's Verhàltnis zur Gottbeit
bin. Isl die «Gottbeit piv.ûint. wip /.. B. ain sipbenten Tage, der
ein bdser Tag ist, so darf der Kunig eine Opferspende nicbt
ausgiessen. Die Ausgiessung der Opferspende wàre eine Ein-
ladung an die Gottbeit zur Teilnahme am Mable und dessen
Fi'eutbm, sie wâre der Ausdruck des gliicklicben Vprbàltnisses
des Menschen zu Gott, seiner froben, dankbarpn Stimnumg
beim Genusse der gottlichen (iaben und passt desbalb nicbt
zum finsteren Cliarakter des siehenten Tagps, an (b'in die
Gottbeit zûrnt (1) .
Hâufig werden die R()Stbrote odpr Brotnpl'pi- (2) erwiihnl. die
der Gottin lètar als Spenderin des (ietreides dargebraclit wur-
den. In einem Hymnus an Istar als Gottin der Pflanzenfrucht-
barkeit (Gusêa) beisst es : « Obne dicb wird kpin Einkonimpn,
kein Anteil. kein Opfer und keine Brolsppn.le gesebenkt » (3).
Das erinnert an die bekannte Stplle beim Propbeten Jpre-
mias \ii, 17 il"., \vo Jaliwe darûber entriistet ist, dass nian in
Juda und Jérusalem der HimmelskTinigin Kueben backt und
frpmden GTittern Trankopfer spendet. und an Jer. xliv, 15 fï.,
wo die lipidniscb gpsinnten Weilipr dpi' Judàer es ablebnen auf
den Pro])liPten zu bTiren mit der Begriindung, sie bâtten da-
mais, als sie der HimmelskTinigin ràucberten und ilir Trank-
opfer spendeten. Brot genug geliald und sicb wobl befunden.
seitdem sie aber aufgebr)rt batten, der Himmplskonigin zu
raucbern und ibr Trankopfer zu spenden, bâtten sie Mangel
(1) Vgl. J. Hehn, SiPbcnzahl und Sabbat bei dm Babyloniern und im Alten
Testament, S. 107.
(2) Nmdubû, gewôhnlich ûbersetzt « fieiw 11 liges Opfer » ; vgl. dazn oben,
S. 289, Anm. 1 ; sumerisch suku im)-nin7iige, « Brot der Istar ».
(3) K 2001 Vs. I, 18.
DAS OPFER BEI DEX SUMERO-AKKAUERN 293
an allpm und wûrden durch das Schwert und den Hunger auf-
^ericbon. Niclit bloss in Babylonien, sondern in ganz Vorder-
asien oijferte nian der Islar oder Astai'te Kuchen und Brote,
um sie als Spenderin des Gelreides zu verehren. Sie ist ja als
Muttergottin die Schûtzerin der aniinalischen und vegetabi-
lischen Fniclitbarkeil.
Die Begrûndung der Tempel und Opfer wird von den Baby-
loniern verschiedenen Gottheiten zugesehrieben ; so heisst z. B.
der Mondgot.t Sin gelegentlich « Einsetzer der Brotopfer » (1).
Dass bei der grossen Zabi der Gotter, Tempel und Priesfer
auch das Opfer sehr niannigfaltige Ausgestaltung bei den Ba-
byloniern fand. wird uns niclil ûberraschen. Es gibt eine selir
ausgebreitete Terminologie, uni dii' verschiedenen Opferarten
zu kennzeichnen. Teilweise wurden die Namen schon genannt.
7Abu i?t ili" aUgemeinste Benennung des « Opfers », noeh
allgemeiner ist eigentlicb akàlu, « Essen », Speise im Sinne von
Opfersjjeise. ebenso sagi l<urbanini oder kurbânu, « Gabe, Dar-
bringung », nicbts Spezifisches iiber das Opfer aus ; )iindabû
wurde bereits erwàbnl ; kiirmatu oder kiirumatu ist Brot, Back-
werk, dann aucb Speise, Kost. ,surkîitu Giess- oder Scbûttopfr'r.
Au(di die nicht zu erschopfende Fûlle der Opfergaben ist uns
bereits begegnet. Im Opferrifual werden besonders aufgefûhrt :
Honiig, Butter, Milch. Oel. FtMnid [sannni tâbu). Datteln, Salz(2).
Auch d'as Weinopfer und Rausclitrankopfer [sikani) sollen
nicht vergessen werden.
Auf der sog. Knltustafel von Sippar \'à', wird die W'ieder-
herstellung des Kultus des Sonnongottes von Sippai' durch den
bal)yl<)nischen Kônig Nabupaliddin (885-852) berichtet. Infolge
einer Beriràngnis durch die Feinde und einei- Hungersnot hatten
die Opfer aufgehr)rl. Es wird ausfiihi'lich dargelegf, wie der
K(Vnig die Stiftung fiir den Gott erneuerte und was an Speise,
Wein und Fleisch an die Priester verabreicht wurde. Auch ein
Baumgarten wird deni Gott geschenkt. Die regelmàssigen oder
(1) IV R i), 33. Bei den Aegyptern war Thot-Hermes tler Begiiinder dei'
Tempel und Opfer, vgi. P. Boylan, Thot, thr Hermès of Efnipt, 1922. S. 88 ff.
(2) Vgl. H. ZiMMERNj Beitraege zur Kenntnis dry babylonischen Religion
(BBR), S. 95.
(3) Veroffentlicht V R 60 f. Vebersetzt und erklâi't von Johannes Jere.mias,
Dissertation, Leipzig, 1889. Auch erschienen in Beitracuf zur Assyriologie,
Bd, I, jedoch ohne den Anhang liber das Opfer bei den Babyloniern, S. 25-32.
294 J. HEHN
Sfiftungsopfer {safvkkii) und die Gerechtsame des Gottes
[ginû] werden genau festgeselzt. Bei der Einweihung des
Bildes des Sonnengottes opt'erte der Konig « gewaltige Gross-
tiere, fette, reine, grosse Làmnier und liess die Tûrverschliïssp
Yon Honig, Wein und Feinmehl st rot zen ». Im Folgenden
werden die von den Priestern ans der Stiftung bezogenen Ein-
kûnfte bis ins Emzelne bestimmt. Xaheres Eingehen rlarauf
wih'de zu weit fûliren. Aueh liier sprieht wieder ans der
ganzen Stiftung des Kunigs, dass man bei den Geschenken an
die Gottheit nicht kleinlich sein darf, sondern nur nacb jedor
Richtung bin tadelloses Material in reieber Fûlle spenden muss,
daniit sicb die Gottbeit der Hubiigung aueh wirklieh freuen
kann und sicb entsprecbend gnâdig erweist.
Die erzùrnten Gotter sollten durch das Opfer versôhnt wer-
den. Beim Beten machte man dem Gotte, an den sicb das
Gebet riobtete, Versprecben und Gelûbde, um seine Hilfe zu
erlangen. So bit t et z. B. der Bescliwiirungspriester fur einon
kranken Siinder (1) :
« Xinini enfgegen sein Gesclienk. nimm an seine Gabe,
an dei" Stàtte des Heils mnge er vor dir wandeln !
Mit Reichtum und Ueberfluss fûlle er dein Heiligtuni an.
in deinem Hause sei seine Fulle bestàndig !
Mit Oel lasse er deine Verschliisse wie mit Wasser ûber-
mit Oel in Fûlle lasse er deine Scbwellen triefen. [giessen,
Er lege bin fur dich... von Zedern.
vorziigliehe Woblgerûche.... von Weizen ! «
Das Opfer reinigt den Menschen : « Durch ein Opfer der
Gnade, des Heils moge der Besessene wie glânzende Bronze
(Kupfer ?) glanzend gemacht werden. Diesen Mensrben moge
Srhamas gesund macben ; Marduk. erstgeborener Sobn der
Wassertiefe. Erleuohtung und Reinbeit ist bei dir » (2).
Der Besf'hworungs- und Sûbnepriester beisst bei den Baby-
loniern âsipu. Seine Tâtigkeit war sebr ausgebreitet, da man
eine Fûlle magiscber Riten anwendete, um von Tod und
Krankbeit befreit zu werden (3). Dabei mûssen regelmàssig
(1) IV R 54 Xr 1, 47 ff. — H. Zi.m.merx, Bahylonische Hymnen und
Gehete in Ausivahl (AO. VII, 3), S. 27.
(2) II R 18 b, 53 ft. : Delitzscii, Assy7ische Lesestilcke, 3 Aufl., S. 133.
(3) Naheres Uber den asipu s. bei H. Zimmern, BBR, 91 ff.
DAS OPFf:R BEI DEX SUMERO-AKKADERX 295
auch gewisse Opfer vollzogen werden. Neuerdings haben die
Untersuchungen von ïhureau-Dangin (1) auch Licht iiber die
P\inlvtionen des K^a/ii-Priesters verbreitet. Er batte die Aufgabe
durch (Tpsang und Scblagen einer Pauke das Herz der (iotter
zu versidinen. Die l^aiit, die zur Herstellung der Pauke ver-
wendet wurde, durfte nur von eineni Rinde genommen werden.
das scinvarz wie Erdha4:z. vollkomnien tleckenlos. von einem
besoniJeren Kenner gppriift und nirht von einer Peitsidie oder
Rute beriilirt wordcn war. l'nter versehieilenen Opfern und
Zeremonien wurde das 'Fier in das bU-mumniu, « das Weis.heifs-
haus » gefiihrt, \vo ilun eine Beschworung mittels einer Pfeife
aus wohlriecliendem Rolir in das recbte und eine andere in
das linke Ohr g'emurmelt wurden. Es folgtc die Besprengung
mit Zedernessenz, Reinigung mit Ràucherungen. lieiliger Ge-
sang und zum Scliluss die Opferung. Die Pauke wird als Gott
Lilix.su den Guttern der Magie und Weissagung hinzugefùgt.
p]in sebr betràchtlicher Teil der bahylonisch-assyrischen
Literatiir lipfasst sicb mit der Erforschung der Zukunft. Man
suciite die Ratschlûsse der Gr)tter aus den Sternen zu lesen,
weslu^lli die Astrologie in Baliel zu hochster Blute gelangte.
Bei der Besehw(»rung der Dânionen und der Voraussagung der
Zukunft wurden regelmàssig auch Opfer gebracht. Auch hier
zeigt die Sprache einen merkwiirdigen Zusammenhang an :
Dasselbe Scbi-iftzpichen (siehe ohen S. 290 Nr. 2} und dasselbe
Wort (Hni) bedeutet « Fleisch » und « Orakel », « Vorzei-
chen », « Omen », gottliche UnterweLsung mittels « Yorzei-
cbens ». Das erklàrt sicli daiaus, dass die Vorzeichen haupt-
sàclilich aus dem Fleische der Opfertiere mittels Ôpfer.schau
gewonnen wurden. Darum setzte man vor das Wort fur Vor-
zeichen (tërtu) das Deutewort sîru, « Fleisfh ». Mit dem Opfer
verbindet sicb die Opferschau, die Deutung der Zukunft aus
der Beschatïenheit des Opferfleisches. Die sumero-akkadische
Ominaliteratur ist so umfassend, weil die Bewohner des
Zweistromlandes aile moglichen Naturerscheinungen ausdeu-
teten, um die Zukunft vorauszubestimmen. Bei der Darbringung
des Opfers glaubte man sich der Gottlieit besonders nahe und
(1) Revue d'Assyriolofjic, XVI, n" 2, p. 53 ss. — Ich beiichte hier nach dem
Referate von P. Dhorme in der Revue Biblique, 1921, t. XXX, p. 62.') s., da mil-
der betreffende Jahrgang der Revue d'Assyriologie nicht zugangiich ist.
296 J. HEHN
hielt sie fur gnàdig gestimml und gcneigt. Weisungen fùv dip
Zukunft zLi geben. Man hatte die Deutnng'swisseiischaft sehr
sorfaltig ausgpbildet, um aus jeder auiïâlligen Erscheinimg ani
Opfertier die richtige Voraussage ahzulesen. Besonders wurden
die Eingeweide und unter diesen wiederum die Leher genau
untersut'ht. Die Leber galt als Sitz des Lebens, der Seele ;
darum ghiuhte man aus ihr den Willen der Gottheit, der sie
dureh das Opifer geweiht war, am ersten erseben zu konnen.
Ein Eingehen auf die Leberschau oder Hepatoskopie, tlie die
Assyriologen eingehend erforscbt haben (1), wurde uns bier
zu weit fûbren ; nur das Eine nioehte ieb bemerken, dass
auch bier das in der Magie berrsehende Gesetz der Entspre-
chung Anwendung fand in dem Sinne, dass die Leber als ein
Mikrokosmos galt, in dem sich der Makrokosmos wiederspie-
gelt, sodass man aus dem Mikrokosmos die Yorgânge im Makro-
kosmos wie aus einem Spiegel ablesen zu konnen glaubte. Es
sind uns zahlreiche Leberscbau-Omina ûberliefert und selbst
mehrere aus Ton gebildete Modelle von Lebern erhallen. bei
denen die Leber in verschiedene Abteilungen zerlegt ist. Auf
jedem Teil ist eingetragen, was er bedeutet. Die Terminologie
lâsst die Leber als ein geheimnissvolles Wabrsagebuch er-
seheinen. Die Leberschau als Wahrsagemittel der Babylonier
ist auch beim Propheten Ezechiel xxi, 26 erwâhnt.
Die babylonischen Priester verfûgten ûber Rituale, in denen
bis ins Kleinste der Vollzug der Opfer geregelt war. Auch solclie
sind bereits veroflfentlicht und ûbersetzt (2). Die wiohtigsten
Gegenstànde, die zu einer Opferzuriistung gehoren, sind das
Râucherbecken, auf dem das Râucherwerk verbrannt wurde.
der Opfertisch oder die Opferschûssel, d. h. ein Tisch mit darin
beflndlicber Schûssel, auf den die Speiseopfer gelegt wurden,
Und das Waschbecken, eine Art Urne auf hobem Gestell, in
der sich das geweibte Wasser fur die Waschungen und Be-
sprengungen befand (3).
Zum Opfer gehort notwendig das Feuer. Der Rauch steigt
(1) Vgl. die ausfûhrliche Behandlung des Gegenstandes bei M. Jastrow,
Religion Babyloniens und Assyriens, II, i, S. 213 ff. ; Ernst G. Klauber,
Politisch religiocse Texte ans der Sargonidenzeit, Leipzig, 1913, S. XXXII ff.
(2) ZIMMERN, BBR, S. 81 ff.
(3) ZiMMERN, BBR, S. 94.
DA3 OPFER BEI DEN SUMERO-AKKAUERN 297
als Wohlgeruch zii dcn Gottern empor. Girru-Nuskii, der Feuer-
gott, der selbst die Personifikation des Feiiers ist, entfaltet
desfialb beim Opfer oine bedeutsame Wirksamkeit und erscheint
als der Vermittler zwischen den Mensehen und den Gottern.
Er wird genannt « dor Spender des Schuttopfers, der die Brot-
opfci' r(i!?tet [fiir aile Gôtter] » (1). Yon ihm heisst es, dass
oj' « den Gottern die Opfer s-pendet » (2) ; er ist « der Hutej'
der Opfer aller Igig. Begriinder der Stàdte, Erneuerer der Hei-
ligtûmer » (3) ; « olme dich, heisst es, wird kein Festmahl ini
Tenipel bereitet, olme dich riechen die Gotter keinen Opfer-
dnft » (i). Oder die heilige Feuertlamme wird angeredet (5) :
(( Du bist gut, die du ani reinen Orte geboren bist,
fiir die Gastniahle der grossen Gôtter hat dich Ellil bestimmt ;
Ohne dich wird keine Mahlzeit im Tempel gehalten,
Olme dich geniesst kein (iott, Konig,Herr oder Fûrst Oi)ferdufl.))
Beim Opferduft denken wir an die oft zitierte Stelle der
bahylonischen Sinttlutei'zalilung, wo der Sinttlutheld Ut-napis-
tim sein Opfer folgenderniassen beschreibt : « Ich brachte ein
Lanimopfer dar. bercitete ein Schûttopifer auf dem hôchsten
Gipfel des Borges, sieben und sieben Adagur-Gefàsse stellte
ich hin, sohûttete unter ihnen Kalmusrohr, Zedernholz und
Myrte hin. Die G()tter roclien den Duft, die G(Jtter rochen don
lieiblichen Duft, die G/Utei' sammelten sich wie Fliegen um den
Opferer » (6). In dem iSchamas-Hymnus IV R 19 Nr. 2, 55 fî.)
wird aïs Wirkung des Sonnenlichtes gepriesen. dass nun die
Gotter Opferduft zu riechen und reine Opferspeise zu genies-
sen bekonimen, die die ûber das Licht des Sonnengottes freudig
gestiinmten Mensehen darbringen : « Es blicken auf dich und
freuen sich die zahlreichen Mensehen ; die grossen Gotter
riechen das Ràueherwerk, reine Himmelsspeise. funkelnden
Sesamwein [...], den eine Hand nicht beriihrt hat [...], essen
sie. »
Voni Blut des Opfertieres wird fast nie gesprochen, obwohl
man erwarten sollte, dass ihm eine besondere sûiinende Kraft
(1)K 9143, Vs. 6 [James A. Craig, Religions Tcxts, 1, p. 35].
(2) Maqlu 2. 126.
(3) Maqlu 2, 2 f.
(4) Maqlu 2, 9-11.
(5) Maqlu 6, 93-96.
(6) Gilgamcs Epos, Taf. XI, 156-162.
298 J. HEHN
zugescliriebpn worden wàre. An einer Stelle des babylonischen
Sùhnerituals srheint gesagt zu sein, dass der Sûhnepriester,
« am Tore des Palastes ein Opferlamm darbringen und mit
dem Blute dièses Lammes die Oberschwellen... und die Pfosten
i^eebts und links vom Tore des Palastes... » bes})rengen soll (1).
Leider ist die Stelle nicht vollstàndig erhalten. Wie aus dem im
Folgenden angefûhrten Falle zu erselien ist, wird auch das
Blut des stellvertretenden Schweines (und Lammes ?) an die
Seite des Bettes des Kranken geistriehen oder gesprengt.
Obwohl die Idée der Stellvertretung der babylonischen Reli-
gion sebr gelàufig war. so tritt sie doeh beim Opfer auffallend
zurûck. Das Bild vertiitt die Person (2). Desbalb fertigt die
Hexe oder der Hexenmeister ein Bild der Person, an der der
Zauber volll'iilii't werden soll. Ailes was man nun dem Bilde
antut. das isl ilrr dargestellten Person angetan. Umgekehrt.
wenn man sicli das Bild der Hexe oder des Hexenmeisters
verschafft, kann man diesen ailes antun, was man ihnen
wûnsr-lit. Man kann sie verbrennen, zertreten oder sonstwie
misshandeln und vernichten. Aueh vmi den Kranken, die nach
babylonischei' Anscliauung von den Dàmonen besessen sind.
fertigte man Bilder, mit der Absiebt. den bosen Dàmon auf das
Bild zu lenken, wàhrend der Kranke verscliont bleiben sollte.
Man zeichnetc aucii ein Bild des Kranken von Mehl. auf das
sich die bosen Dàmonen stûrzen sollten. In den Briefen aus
der Sargonidenzeil wïvd verschieileutlicb von einem sarru pfihi.
einem Bild- oder Ersatzkonig gesprochen, der einige Zeit die
kr)niglichen Insignien trâgt, dann aber dem Tode ûberantwortet
wird. Ebenso macbt man einen Ei'satzmensclu'n {aniêl pù/ii .
der fiir den Kronprinzen Asurbanipal der Unterweltsgôttin
Ereskigal geopfert wird. Oder man nirnmt ein Rohr. genau von
der Grosse des Kranken. ^ollziebt daran gewisse Zeremonien
und zerbricht es dann : es wird ausdriicklich bemerkt, das Rohr
sei Ersatz oder Substitut des Menschen (3) . Es nimmt gewisser-
massen die Kranklieit des Menschen auf sich, wird vei'nichtct
und damit is't die Krankheit auch aus der Weit geschatTt.
(1) ZiMMERN, BBR, N". 26, III, 19-21 ; vgl. S. 92.
(2) Vgl. hierzu meinen Beitrag zur Festschrift fiir Eduartl Sach.\u (Berlin,
1915) : Zum Terminus Bild Gottes, S. 46 f.
(3) Der Text GT XVII, 15, 20 ff. ; vgl. C. Frank, Bahyloni.schc Bvsvhwov-
rungsreliefs, S. 69 ; P. Dhorme, La religion assyro-habylo)iicnnr, p. 273.
DAS OPFER BEI DEX SUMERU-AKKADEHN 299
Aurh ilin Stellvertretung des Mensohen diirrh ein Tier isl
der suuiciisch-akkadischen Rpligion nicht unbpkannt. Ein
Beschwôriingsritual (1) schreibt vor, ein Schwein zu toten. das
Herz herauszureissen, ■ sein Blut an die Seite des Bettes des
Ki'anken zu [streichen ?] . Das Schwein ist dann zu zerlegen
und die einzelnen Teile sind ûber dem Krankon auszubreiten.
Darauf wird er mit geweihteni Wasser besprengt und gereinigt,
ein Kohlenbecken und eine Fackel sind neben ihn zu stellen.
Vor der verschlossenen Tiire sind zweimal sieben gesàuerte
Brote niederzulegen. Nun wird dazu erklàrt : « Das Schwein
als seinen (des Menscheni'Stellverfreter gib hin. Fleisch anstatt
seines Fleisehes, Blut anstatt seines Blutes gib hin : dièses
sollen sie (die Dâmonen) nehmen. Das Herz, das du an das
Kopifende des Bettes gelegt hast, anstatt seines Herzens gib
hin : das sollen sie (die Dâmonen^ nehmen ». Es handelt sidi
hier eigentlieh nicht um ein Opfer im Sinne einer Gabe, einer
Darbringung, sondern um einpn magischen Ritus. Die bôsen
Dànionen haben sieh auf einen ^lenschen gestiirzt und quàlen
ihn : um sie abzulenken und zu befriedigen, bietet man ihnen
ein Schwein als Ersatz fiir den Menschen an, damit sie ihre
Gier daran sàttigen und der Mensch befreit wird.
Aehnliche Zeremonien werden mit einem Lamme vorge-
nommen, dessen Hauptteile fiir die entsprechenden Kôrperteile
des Menschen hingegeben werden. Dazu wird bemerkt (2) :
« Das Lamm ist Ersatz fiir don Menschen ; das La mm soll er
fur sein Lelien hingeben ; den Kopf des Lammes soll er fur
den Kopf des Menschen hingeben ; den Hais des Lammes
soll er fiir den Hais des Menschen hingeben ; die Brust des
Lammes soll er fur die Brust des Menschen hingeben. »
Ein besonderer Fall ist. dass auch zur Bekràftigung des
Eides beim Abschluss des Vertrags zwischen dem Assyrerkônig
Asurnirâri und dem Fûrsten Mati'ilu von Arpad ein Bock
gesclihiclifct wird. dessen einzelne Teile als Stellvertreter des
Mati"ilu bezeichnni wei'dcn, wcnn er den YoTirag In'icht. Dor
Bock ist also Symbol iIps ^lalTilu : « Dieser Kopf isl nichl
(1) CT XVII, 5, 44 ff. ; vgl. C. P'rank, a. a. O. S. 58 ff. ; P. Dhok.me,
a. a. O. p. 273.
(2) CT XVII, 37, Tabl. Z. Col. B. ; Frank, a. a. O., S. 60 f. ; Diior.me,
a. a. O., p. 274.
300 J. HCHN
der Kopf des Schafhockes..., der Kopf dos ;\Iati"ilu ist es. der
Kopf seiner Sohne, seiner Grossen, der Leute seines Landes.
Wenn Mati'ilu dièse Vertrâge [bricht], gleichwie der Kopf
dièses Bockes abgeschiagen ist,... so wird der Kopf des -Mati"ilu
abgeschlagpn... » Ebenso wird die Rechte des BoL-kes abge-
schnitten als Symbol der Rei-hten des Mati"ihi, seiner Sohne.
seiner Grossen, der Leute seines Landes. Dem Kontrahenten
wird demgemàss sehr deutlich seine Strafe ini Faite eines Ver-
tragsbriudies vor Augen gefûhrt.
Menschenopfer scheint die siimerisch-akkadische Retigion
nieht zu kennen. Es werden zwar Faite erwàhnt, dass nian einen
Sohn. eine Tochter, einen Sklaven einem Gotte darbringt. Dabei
ist aber nieht an eine Hinschtachtung gedacht, sondern die
befreflFende Person wird dem Dienste des Gottes geweitit.
Die Bewolmer der babytonischen Tiefebene glaubten, wip oben
dargelegt wurde, durch die Menge imd ausgezeichnete Besi-haf-
fenheit ihrer Gaben die Gotter zu erfreuen und giinslig zu
stimmen. Aber wir vernehmen doch auch eine Stimme, die das
Opfer in Verbindung mit der sitf lichen Gesinnnng uni! Hand-
lungsweise hringt, also eine sitttiche Grundtage dafur fordert.
Wir erinnern uns dabei der Potemik der Propbeten gegen die
Opfer, Feste und d^n ganzen àusseren Kutt. durr-h den das Yotk
Israël seine Pflichten gegen seinen Gott erfiillt zu haben
glaubte. wâhrend die Prophet^n den Kutt fur werttos erktàren.
wenn die Rechtsrluiffenheit fplilt. In eineiii Lehrgedicht tînden
wir unter anderen fotgende Malinungen vl) :
« \'erleumde nietit, rede freumlticli,
Brtses sprieh nictit, sage Gutes !
Wer verleumdet, Bôses redet, [trarhten.
Zur Vergettung daiur wii'd Schamas itini nadi i'"rii Haujde
Tàglic-ti bring dar deinem Gotte
Opfer und Gebet, was an Ràucherwerk sieh geh(»rt ;
Zu deinem Gotte mogest du Herzenszuneigung liaben.
chis ist es, was der Gottheit zukommt.
Beten. Flehen und Xiederwpi'fpn aufs Antlitz
(1) ZijVimerNj Babylonische Hymnen und Geiete in Auswahl (AO, XIII, 1).
S. 27 ff. ; Ungnad bei Gressm.ann^ Altorientaïische Texte und BUder, S. 98 f.
DAS OPPER BEI DEN ARABEHN 301
sollsl (lu niorgons ilsm ilai'hi'ingr'n. dann wii'd ^r dir reiche
[FûUe gehen
und ini Ueberniasse wirst du mil (îott Gflingpn hahen.
Willst du vorsfàndig wpimIpr. so hlick aiif die Tafid :
[Gottes] fur(dit gebiert Huld,
Opfer macht das Leben libprlang,
und Gebet ]ns\ Sûndenscbuld. »
'Hier baut ein odler Geist seine Religion auf reinen ethischen
Grundsiitzen auf und macht sie so wert- und bedeutungsvoll
auch fur spàtere Zeiten.
[19] Le sacrifice chez les Hébreux,
par M. le Prof. Dr. Sanda.
Le conférencier n"a pu livrer à temps son manuscrit. — On
trouvera l'exposé de ses solutions personnelles dans le livre
(ju'il doit faire paraître prochainement, Moses und der Penta-
teuch.
[20] Das Opfer bei den Arabern,
von Prof. G. Klameth, Olmijtz (1 ).
In den naehfolgenden Ausfûhrungen kann ledigli(di das We-
sen des Opfers bei den allen vorislamischen nomadischen
Arabern (Beduinen) beleuchtet werden, das ja auch unser
besonderes Interesse verdient. Gehôrten doch die Vorfahren
der Hebrâer, als viehzùchterische Nomaden, demselben grossen
Kulturkreise an wie jene. Ausserdem lebten die Hebrâer selbst
noch eine Zcit lang als Nomaden und mitten unter solchen, uni
dann spàter als Nachbaren im Osten an dieselben anzugrenzen,
weshalb Zusammenhànge zwischen den kulturellen und kul-
tischen, also namenilich auch den Opfergepflogenheiten der
Hebrâer und Araber auf der Hand liegen. Leider ist man ûber
das Wesen des altarabischen Opfers selbst noch immer nicht
einig. Schon J. Wellhausen (2) betont beim altarabischen
(].) Wegen niclit lechtzeltigen F:inti'effens der benotigten Drucktypen war es
nicht mog-lich, in den arabischen Wortern die phonetisrhe Schreibweiso gcnau
durchzufijhren.
(2) Eeste arabischen Hcidrntiinis. in-8", Berlin, Ri-irncr, 1897, S. 124.
302 G. KLAMBTH
Opfer stark (las Opfermahl, ans welchem sich die Opfpridee dnr
Vej'brûderung oder der Bundesschliessung mit der Gottheit so
F^'ht ahhebe. Fiir R. Smith (1), der von der ganz verfehlten
Voraiissetzung des Tolemismus hei dpn Seniilen und oiner
vcdlig irrtûin lichen Auffassiing des bekannten Sarazenenopfcrs
bei NiLUS (2) ausgeht, besteht das Wesen des altarabischen
O^pfers lediglicb nurmehr im totemistisch gedachten Opfer-
mahle, der Konimunion der Opferteilnehmer und der Gottheit
dui'ch den Genuss des theandrischen Totenitleiscbes. Demge-
geniiber làsst S. I. Gurtiss (3), der das Wesen des sehieehthin
als arabisch bezeiehneten Opfers ans jenen Resten altsemi-
tischer Opfergepflogenheiten zu fekonstruieren sueht, die sieh
unter einer seliwaehen Obersebiehi von islamischen und christ-
lichen Vorstellungen bis zum heutigen Tage erhalten haben.
dasselbe in der Schlachtung und dem Hervortreten des Blutes
gipfeln. wâhrend er die Opferniahlzeit als Accessorium behan-
delt. Die richtige Ansehauung venficht da wohl P. Lagrange (4).
da er im Verlaufe seiner gegen Smith"s ûpfertheorie gerich-
teten Ausifûhrungen beides, die Sehlachtung nichi minder als
das Opfermahl, als wesentlich fur das altarabische Opfer
voraussetzt.
Fur dièse Ansiclit lasst sich nun ein zwar nur indirekter,
aber trolzdem schlagender Beweis erbringen aus den allerdings
unmiitelbar wohl nur auf das neuarabische -Opfer bezugneh-
menden, aber mittelbar auch fur das altarabische Opfer ver-
wertljaren Forschungsergebnissen A. Musils (5), aus Arabia
Petraea, und den noch ergiebigeren Opferstudien A. Jaus-
SENS (6), aus Moab. Beide Forscher bieten da als geschultc
Theologen und Philologen zugleich ein viel wertvolleres und
verlàsslicheres Yergleichsmaterial, als es Gurtiss zur Yerfû-
(1) Die Religion der Semiten. Deutsche Uebersetzung- von R. Stuebe, in-8",
Freiburg i. B., Mohr, 1899, S. 96 ff., 215 ff., 262 ff.
(2) MiGNE, PG, t. L.XXIX, col. 611 ff.
(3) Urseniitische Religion im Volskleben des heutigen Orients. Deutsche
Ausgabe von M^ TV'. Baudissin, in-8", L,eipzig:, Hinilchs, 1903, S. 252 ff.
(4) Et)tdes sur les Religions sémitiques ?, in-8", Paris, Lecoffi-e, 1905,
S. 252 ff.
(5) Arahia Petraea III. Ethnologischer Reisehericht, gr. in-8", Wien, Hôlfler,
1908. — Sigl. = AP.
(6) Coutumes des Arabes au p«i/s de Moah, gr. in-8", Paris, Lecoffre, 1908.
— Sigl. = AM.
DAS OPFER BEI DEX ARABEHN 303
giing stand, schalTen damit aber aucli l'ine gesichorte Basis,
von der ans man — die mitigé Einsicht vorausgesetzt — auf
das Wesen des altarabisclien Ofjfers zuriicksfhliessen kann,
fiir wolches ehen direkie Qnellen immer noch zii spàiiieh
fliessen. leh lasse ziiniichst eine gedrângte Zusammenstellung
der heutigen arabisciien Opfer in Moab bezw. Edom folgen,
web-lie sich bel don genannten (Tplehrten verzeichnet finden :
1. Erstlingsopfcr :
a. Opfer von den Tiererstlingen (Erstgel)urt der Ziegen und
Schafe) (1) ;
b. das Se)nàt-0\)ier (Primiziahipfcr von Milch und Buftei-,
Korn und Linsen) (2) ;
c. das Opfer bei der nienscblirben Erstgeburt (3 ;
cl. das Erstlingsopfer bei der Mahlzeit (4) ;
2. Alitienopfer (5"' :
a. an den Héros eponynios der einzelnen Stàmme (6) ;
b. an andere besonders gefeierte Almen (7) ;
c. die jàhrlichen Ahnenopfer (8).
3. Totenopfer :
a. die Opfer am Sterbetag (9) ; b. das Trostopfer am 8.
Tage (10) ; c. Gedenktagsopfer (H i ; d. das dahijje-Opîer (12).
4. Veliopfer :
o. dii'ekle an den Yeli (13) ; b. an dip lieiligen Baume (14) ;
c. das Opfer beim .Mazâr (15).
5. Ginnopfer :
a. das Opfer bei Aulstellung eines neuen Zeltes (16) ; b. bei
Yergrr)sserung des Zeltes [dliabihet cl wâset) (17) ; c. beim Auf-
spannen der neuen Zeltwand {dhabihet er-rûag) (18) ; d. das
Opfer bei Vollendung der MauerwTilbung (19) ; p. bei Einfiigung
der Oberselnvelle (20) ; /'. nach Vollendung des Hanses (21) ;
(j. beim Gerinnen der INIileh im '^vhVàuvhf^ [dhabihet rs saga) {22) ;
/(. fiii' die neu angekaufte Stufe (23) ; ('. fur das neu geworfene
(1) AM, 366 ; AP, 286. — (2) .4.1/, 864 ; .4/', 287. — (3) .4.1/, 367. —
(4) AM, 319. — (.5) AM, 316 ff. In AP unter dem Titel « Heiligenverehrung: »,
S. 329 s. — (6) AM, 317. — (7) AP, 329 fi. — (8) AP, 4.50 ff. — (9) AM, 352 ;
AP, 4.51-453. — (10) AM, 351 ff. — (11) AP, 451-53. — (12) AM, 371 ff. :
AP, 451 ff. — (13) AM, 296 ff. — (14) AM, 331 ff. — (15) AM, 358. — (16) AM,
339. — (17) AM, 340. — (18) AM, 340. — (19) A.M, 341. — (20) .4.1/, 342.
— (21) AM, 342 ff. — (22) AM, 353. — (23) AM, 354.
30 i G. KLAMETH
Stutenfi'illen (1) ; k. das Opfer im Heilbad (2) ; l. das Opfer
vor dem Erstdrusfhe (3) : m. das Erstraubopfer (4).
6. Sonstige Opfer :
a. die Opfer nadi der Geburt eines Kindes (5) ; b. fiir einen
verstorbenen Sàugling (6) ; r. bei der Beschneidung (7) ;
cl. das Opfer cs-sefdh zur Festigung des Verlobungskontrak-
tes (8i ; e. das Ojjfei' zur Sicherung der Verlobung mit einer
Minderjâhrigen (9; ; /'. das Hennaopîev (10;> ; g. das Hochzeits-
opfer (11) ; li. das Of)fer zur Aufhebung der Seheidung (12) ;
/. bei Aufnahnie in den Stamm (13) ; j. das Opfer fur den
Gast (14) ; k. an die « Mutter des Regens » (15) ; L gelobte
(versprochene) Opfer (16) ; m. Beuteopfer (17; ; n. Fedu' =
(Praeventiv) Opfer (18) ; o. das Opfer an den Fagîr (19) ;
p. Haaropfer (20) .
Es ist nun wohl selbstverstândlieh, dass nicbt allen diesen
Opfern dieselbe religiose Bedeutung zukommt und dass sie nicht
so ohne weiteres als getreuliches Spiegelbild der altarabischen
Opfer im Allgemeinen und noch weniger derjenigen der arabi-
schen Viehzûchternomaden im besonderen -betrachtet werden
dûrfen. Vor allem sind mehrere der angefiihrten Opfer z. B. das
Wôlbungs-, Oberschwellen- und Hausbauopfer ansgesproc-hene
Fellâhîn-. hzw. andere auch Halbfellâhînbràuche, die natûrlicli
weder jetzt noeh frûher dem nomadischen Araber eigen waren.
Dann springen zwei weitere Tatsachen in die Augen : die
Ueberwucherung des ursprûnglichen Himmelsgottglaubens der
viehzuchfcerischen Nomaden (21) durth eine Unmenge mani-
stischer und animistiseher niederer Religionsvorstellungen, die
ersteren auf das Niveau des Ahnen-, Toten- und Geisterglau-
bens herabdrûfkten, das durch die Aufnahme vereinzelter
christlicher und islamiseher Heiliger nicht besonders gehoben
wurde. Die zweite Tatsache ergibt sich als Folge der ersten :
(1) AM,, 355. — (2) AM, 359 ; AP, 416 ff. — (3) AM, 353 ; AP, 301. —
(4) AP, 396. — (5) AP, 215 ff. (sabû, tulû, mrûga, hdhûl-Opfer). — (6) AP,
219 (MusiLS agîga = Opfer). — (7) AM, 351 ; AP, 222. — (8) AM, 344 ff. —
(9) AM, 345. — (10) AM, 346. — (11) AM, 347 ; AP, 195. — (12) AM, 347 ff.
— (13) AM, 358. — (14) AM, 348 ff. — (15) AM, 326 ff. : AP, 8 f . — (16) .4.)/,
355 f. — (17) AM, 355 ; AP, 395. — (18) AM, 361 f. ; AP . 216. 396. —
(19) AM, 360. — (20) AP, 396.
(21) P. W. KoppERS, Die Anfaenge des nirnschlichen Gemeinschaftslehcns,
.in-16", Munchen-Gladbach, Volksvereins-Verlag, 1921, S. 178.
DAS OPFER BEI DEN ARABERN • 305
mit dem Eindringen des Ahnen-, Toten- und Geisterglaiibens
erwuchs die Notwendigkeit neben dem Himmelsgotte oder auch
an seiner Stella sich aile dièse hoheren Wesen durch irgend-
welche Geschenke oder Opfer geneigt, oder besser gosagt,
gefûgig zu maeben. Der eine alte Himmelsgott musstc sich in
die Opfer mit den neuen Gotterwesen teilen. Dadurch sank
aber das Opfer zum Geister bezwingenden Zauberritus herab.
welcher, da man Geistern auf Schritt und Tritt gegenûberstand.
immer unentbebrlicher wurde und darum auch an Zahl immer
mehr und mehr zunahm. Wann dièse Ueberwucherung des
Himmelsgottglaubens, die sich natiirlich an der Peripherie der
von viehzûchterischen Nomaden bewohnten Gebiete stârker
fûhlbar machte als gegen Innerarabien zu. einsetzte. làsst sich
nicht bestimmen. Jedenfalls war sie gegen Ende des Neolithi-
kums (2500-2000) bereits weit fortgeschritten, wie die riesen-
haften Dolmennekropolen Moabs als Zeugen eines imposanten
Totenkultes dartun.
Immerhin sind dièse neuarabischen Opfer von grosser reli-
gionswissenschaftlicher Bedeutung, da sie uns wichtige
Schlussfolgerungen auf das altarabische Opfer gestatten,
dossen Erforschung noch vieles zu wûnschen ûbrig lâsst. Aile
die angefuhrten Opfer, môge ihr Empifànger Allah, ein Ahne,
ein Veli oder Ginn sein, môgen sie — und dies ist besonders
bezeichnend — von bereits ansàssigen oder nomadischen Ara-
bern berichtet werden, weisen bei aller Verschiedenheit als
O'pfergabe schlechthin eine dhabihe ein Schlachttier aus der
Mitte der Herde und nur in wenigen Fâllen eine unblutige Gabe,
namlicb das Ertrâgnis dieser Tiere, Milch, Butter und als deren
Ersatz Oel oder wohl auch ein Scheinopfer (Butter mit Henna
gefârbt) auf. - — sie zeigen ferner sâmtlich denselben charakte-
ristischon Opferritus, die Schlachtung des Opfertieres (der
dhabihe) vermittels Durchbohrung der Kehle und das damit
verbundene Hervorstromenlassen des Blutes, sowie endlich den
Genuss des Opferfleisches, die Opfermahlzeit, so dass wir wohl
nichi fehlgehen, wenn wir dièse immer von neuem sich wieder-
holenden Eigentûmlichkeiten, die Schlachtung des Opfertieres
sowie die Opfermahlzeit, geradezu als wesenhaft fur das neu-
arabische Opfer betrachten. Dièses Konstante, Bleibende.
Unverànderliche in dem Rituale bei Opfern, diezeitlich und
20
SOC) G. KLAMETH
ortlich durch gewaltige Zwischenràunie getrenni sind, bei den
Beduinen und den Fellâhîn. dio làngst die Viehzueht mit dem
Ackerbau vertauschten, sclieint mir aber ein vollgiltiger Bewpis
dafûr, dass jene cbarakteristischen Zûge nur die organische
Fortsetzung der don Arabern ursprlinglich eigenen. altber-
gebrafhten primitiven Opferpraxis sind, und dass dariini das
altarabisclie Opfer seinem Wesen nach sicb mit dem neuara-
biscben decke, d. h. dass auch das altarabisohe Opfer als Opfer-
gabe ein Opfertier voraussetze sowie auch die Schlarhtung und
die Opfermahlzeit bedinge. Dièse Folgerung ist um su bereoli-
tigter, als eine ganze Anzahl neuarabischer Opfer augenschein-
lieh genaue Entsiireehungen altarabiseher Opfer sind, vor allem
die eigentlichen Tiererstlingsopfer und das Beufeopfer, denen
wir ja bereits in altarabiseher Zeit als fara- (1) und nagîa-
opfer (2) begegnen. Desgleichen ist naoh Wellhausen das an
Inatiationsbràuehe gemahnende aglgaopîcr vom Islam bereits
aus altarabiseher Zeit ûbernommen worden (3) ; wir finden es
wieder in dem Mrùgaopîer z. B. der Azdzme und der Saidijjîn (4) .
Ebenso gestatten die Ansâb (Opfersteine). um einzelne altara-
bisohe Heldengrâber (5) die Folgerung, dass wohl aueb man-
ches der oben erwâhnten Ahnenopfer in di ■ vurislamische Zeit
hineinrage, wie ja sogar das bekannfe Kamidoplfr des grossen
Dahijje- Totenfestes auf altarabische Kamelschlachtungeii am
Grab des Toten zurûckzufûhren ist (6), weshalb wir jedenfalls
berechtigl sind das Wesen des altara])ischen Opfers aus diesen
und àhnlichen neuarabischen Opferbrauchen herauszuschâlen.
Inwieweit lassen sich nun dièse indirekt gewonnenen Er-
(1) Wellhausen, Reste, S. 121 ; Smith, Rel. d. Sem., S. 172. Auch die
atdïr-Opfev des Monats ragab durften ursprunglich Primizialopfer gewesen
sein ; s. Smith, a. a. O.
(2) Wellhausen, Reste, S. 121 ; Smith, Rel. der Sem., S. 310.
(3) Wellhausen, Reste, S. 121, 174. Es flndet statt am 8. Tage nach der
Gebiirt eines Knaben. Mit dem Blute des Opfertieres wird der Scheitel des
Kindes bestrichen, dessen Haare zuvor abgeschnitten wurden.
(4) Das Datum schwankt allerdings bereits zwischen dem 8. und 4. Tage
nach der Geburt ; daftir wird die Blutstreichung am Scheitel des Knaben
von MusiL, AP, 216 ausdrûcklich bei den Su'îdijjîn bezeugt, wâlirend er vom
Abschneiden der Haupthaare schweigt. Dieser letztere Brauch mochte ja nach
Verlegung der agiga zum Geburtstag hin (s. Smith, Rel. der Sein., S. 252),
bald uberfliissig erscheinen. Der Ausdruck agîga existiert auch heute noch,
bezeichnet aber jetzt nach Musil, AP, S. 219 das Opfer fiir einen Saugling.
(ô) Wellhausen, Reste, S. 184. — "(6) Ehenda, S. 184 ff.
DAS OPFER BEI DEN ARABERX 307
kenntnisse ûher das Wesen des altarabisclien Opfers auch
talsàchlich konkref lif>legen ?
I. — DIE DHABÎHE
Yor allem war auch das Hauptopfer der altarabisclien Vieh-
ziichtornomaden pin Schlachtnpfer, eine dhahlhe. In der Auswahl
der Opfergaben ist ja von Vornherein ein grosser Unterschied
zwischen einst und jetzt niclit wahrscheinlich, da die Opfer-
moglichkeit der alten Araber so ziemlich auf dieselben Gaben
besehrànkt war, wie die ihrer heutigen Xaehkommen und
Namenstrager. Der Viehzùchternomade Arabiens konnte, bevor
er sieh sesshaft inachte, eben nur ein Tier seiner Herde
und ihr Etrâgnis als Opfergabe weihen, eine Tatsache, die
sieh plastiseh in der altsemitischen Erzahlung von Kain
und Abel abspiegelt, von denen der Viehzûchternomade Abel
die Erstlinge seiner Schafe (als dhabihe) (1) und ihrer Milch
(als semât) (2), der bereits ansâssig gewordene Fellah Kain
die Erstlinge der Feldfrûchte opfert. Jener Voraussetzung
entspricht auch die vorislamisehe Opferiiberlieferung. Ich ver-
weise zu diesem Zweeke auf die bereits angefuhrten altarabi-
sehen Opfer, die sàmtlich Schlachtopfer sind, also eine dhabihe
voraussetzen, ausserdem aber auch noch auf die Kamelopfer
der Sarazenen, von denen Nilus, und der Pharaniten, von denen
DiODORUs (III, 42 bis 43) (3) berichtet. Gazellen waren bloss
ein Notersatz fur Schafe (4). In schroffem Gegensatz zu den
genannten Steppen- und Wûstenopfern viehzûchterischer No-
maden steht die grosse Rolle, die das Rind bzw. der Stier als
Opfert ier vornehmlich in den fruchtbaren Kulturgebieten Sûd-
arabiens (5) und einzelnen Oasen (6) spielte. Die unblutigen
(1) Als Schlachtopfer, nicht als Brandopfer !
(2) Urspiung-llch jedenfalls arab. hardb, hebr. châlâb, Milch statt arab. chllb,
hebr. chêleb, Fetten. Dass dem gottwohlgefalligen Abel geiade das Tieropfer
zugeteilt wird, ist auch bezeichnend flir das Milieu, in welchem jene Erzah-
lung' iiberliefert wurde.
(3) S. dariiber B. MoritZj Der Sinai'kHlt in heidnischer Zcit, in-8", Berlin,
Weidmann, 1916, S. 35 ff.
(4) Wellhausen, Reste, S. 115.
(5) D. NiELSEN, Die altnrahischc Mondreligion und die mosaisehe Ueher-
Ueferung, in-S", Strassburg-, Tri'ibner, 1904, S. 110 ff. ; s. auch z. B. die himyar.
Inschriften im CIS, 80-82.
(6) Sicher bezeugt durch den Stierkopf auf der Stèle von Tcima ; IjAGRange,
Religions sé^niticjucs^, p. 502.
308 G. ia,AMETH
OpfiM' Iraten aiich im vorislamischen Opferritiial dpr vieh-
zùchterischen Arabernomadpn v('illig' in den Hintergrund. Die
Rauchopfer waren wie die Stieropfer spezifisch typische
Erscheinungen des sudarabischen Kultes. Dass bei dieser
Auswahl dei" altarabis(^hen Opfergaben der Primizialgedanke
von Aussfhlag geliender Bedeutung war, ergiht sieli daraus.
dass neben den Erstlingen der Herdentiere iind ibrer Produkie
friihe aucb die Erstlinge der Feblfriichte (l), der Beiite und
der Mablzeit tret.en (2).
II. SCHLACHTUNG UND BLUTSPENDE
Ebenso lasst sich der fur das neuarabisehe Opfer so eliarak-
teristische Ritus. die Seblacbtung und das Ausstrômenlassen
des Blutes (Blutsj)en(ie) al.s liereits dem altarabischen Opl'er
eigentumlich erweisen. Der beste Zeuge dafùr ist der Spracb-
gebrauch. Dhabaha, schlacbten, war dem Viehzuciiternoniaden
Arabiens schon in aller Zeit gleiebbedeutend mit opfern, wie
ja aucii der Ort der Opferung « madhbah » eigenllieb Scblacbt-
stàtte lieisst. Altàre kennt der vorislaniiscbe Beduin sowenig
wie der moderne. Zur Opferstâtte geniigt bis heute ein Fels-
stein oder ein Steinliaufen (3). auf den das Blnt heraus.strfunt,
oder neben bzw. unter welchem dassellie in einer (irube
gesammeît wird (4). Einen Beieg zum allarabiscben Opferritus
der Schlacbtung bietet selbst in seiner l^ntartung nocb das
Sarazenenopfer bei NiLUS ; auch an gelegentlichen Mitteilungen
iiber die Blulspende fehlt esnichi bei arabischen Autoren (5).
Von diesem altarabiseben Opferbraueh fàllt Licht auf die
SI elle I Sam., xiv, 32, woselbst Saul d'en Auftrag gibt, einen
Steinblock herbeizuwàlzen.darauf die Seblaebtung vorzunebmen
und so das Blut ausstrc'unen zu lassen. bevor die .Juden von dem
Opferfleisf'li geniessen.
Die TOtung des Opfertieres, seine vollige Destruktion ist
demnach, wie fiir die iibrigen semitischen Religionen aucb fur
das arabische Opferrifual charakteristisch.
(1) Vergleiche Sure VI, v. 137.
(2) Ueber das Opfer dev mensclilichen Erstgeburt bei den Viehzuchternoma-
den vgrl. P. W. Schmidt, Ethnologische Bemerknngen zu kathol. Opfertheorien,
im Jahrlfiich des Missionshauses S. Gabriel, 1922, Jahrg-. I, 19 ff.
(.3) Vg-1. Gcn., XXXI, 51-54.
(4) ^yELLHAUSEN^ Reste, S. 103.
(5) Ebenda : Smith, Rel. der Sem., S. 262 ff.
DAS OPFER BEI DEX ARABERN 309
Mit dieser Destruktion der Opfergabe bzw. der Schlachtung
der (Ihabihe ist beim neuarabischen Opfer als HOhepunkt der
Opferhandlung das Hervorbrechen des Blutes oder die Blut-
spende Nerbunden. Dass aucb das altarabische Opfer in dieser
Blutausgiessung gipfelte. bezeugt der alte Ausdruck nasaka,
ausgiessen, der geradeso wie die Bezeifhnung (Ihabaha zum kul-
tischen Terminus technicus fiir opfern [nv.skvyi = Opfer i gewor-
den ist. Wie die Opferhandliing in der Blutspende kulniinierte,
so knnzentrierte sich aueh die Idée der Destruktion — die
Zuriickstellung des Lebens an Gott. den Urbeber des Lebens, —
in diesem Ritus, da ja das ausstnuiiende Blut als Lebens- und
Seelentrager die Hingabe oder Rùckstellung des bochsten Gutes,
des Lebens. an den Herrn des Lebens und damit die Aner-
kennung seiner Souveranitàt glànzend versinnbildete. Der Tabu-
cliarakter des Blutes und das Verbot seines Genusses sind
selbsfversliindliebe Begleiterselieinungen. Leider wussten ani-
mistische Spekulationen dièse hehren Blutriten voUig umzu-
deuten. Man sah, wie das Blut vom Opferstein aufgesogen.
gleichsam entgegengenommen wurde, und zogerte nieht den
Schlachtstein mit der dûrstenden Gottheit zu vêrmengen und
der Vorstelhmg platzzugeben, man konnte durch Bestreichen
des Opfersteines mit dem Blute oder wenigstens durcb Be-
sprengung desselben das Opferblut der Gottheit selber applizie-
ren (i). Neben dieser Bestreichung des Gottessteines treten
dann die Bestreichung bzw. die Besprengung von Personen.
ïieren und Sa(dien mit dem Opferblute auf. Alter und Deutung
dieser Riten sind noch strittig. Jedenfalls sollten sie mit der
Zeit die Wirkung des Opfers sichern. Doch vermoehte der kom-
pliziertere Ritus den Niedergang der ursprûnglich so hohen
Opferidee nieht aufzuhalten. Ein indii-ektes Zeugnis fiir die
Entartung der altehi'wûrdigen Opfersehlacbtung und der Blut-
(1) Die Vorstelking eines Zeus Madbachos und Bomos sowie dei- verschicde-
nen arabischen Steinidole lâsst sich von hieraus gut begieifen, ebenso der
moderne, von Musil, AP, S. 286, fiir Kerak bezeugte Sprachgebrauch, die
Er.<;tgeburt des Kleinvielis « vor Cliuder oder Schêch Salâch hlnstellen
(vaQfjdfu) », d. h. die Erstlinge zu dem heiligen Opferstein in dem Veli hinbiin-
gen. Es zeigt sicli dièse Anschauung eng verwandt mit derjenigen, die ans der
Aufforderung des Lev., lY, 4 u. a. O. spi'icht, die Tieropfer « vor das .^ngesiclit
Jahves » zu bringen und dort im Tempel zu schlacliten. Mit der Phrase « voi-
dem Angesichte Jahves » opfern, ist zu vergleiclien z. B. die Aufforderung
zum Fcdu-Opter bei Jaussen, AM, 362 : « Lasst uns ein Frilu-Ovtev dar-
bringen, vor dem Angesichte Allahs ! »
310 G. KLAMETH
spende bietet Lev., xvii. 1-7. Selbst nach Sireichung aller lext-
kritisch beanstandeter Stellen, setzt der Text die Zeit des
Wûstenaufenthaltes voraus. Offenbar ist es ein Reformgesetz
gegen gotzendienerisehe Missbràuche, die sich wàlirend des
Wûstenaufenthaltes der Israeliten eingeschlielien hatten (1).
Ausdrûcklich fordert es kiinftighin aile Selilachtungen fur
Jahve an. Wer schlachtet, muss es am Eingang des heiligen
Zeltes tun. um Jahves Anteil, die Blutspende. sicherzustellen.
Wer anders handelt, soll des Todes sterhen. Dieser feierliche
Protest gegen Opferhinterziehungen zuni Schaden Jahves sowie
das wiederholt eingefûgte Verbot, das Blut, das als Lebens-
element der Gottheit heilig ist, zu geniessen, lâsst den Zusam-
menhang ahnen. Zweifellos hatte die Opferpraxis der sinai-
tischen Beduinen, unter denen die Israeliten wahrend ihres
Wûstenaufenthaltes lebten, Sehule gemacht. Die letzteren
hatten die Opferschlachtungen zu Ehren versehiedener Gotzen,
Totengeister und Ginnen, sowie aui-h den Genuss rohen, blu-
tigen Opferfleisehes, wie ihn das gleich naher zu behandelnde
Sarazenenopfer bei Nilus, 2000 Jahre spàter. bezeichnender
Weise als Brauch ebenderselben sinaitisehen Nonladen bezeugt,
kennengelernt, daran Gefallen gefunden und dann auch bald
selbst bei ihren privaten Sehlafhtungen nachgeahmt. Diesem
Missbrauch ^Yollte nun wohl Lev., xvu, 1 lï. einen Riegei vor-
sehieben : aile Sehlachtungen sollten Jahve-, nieht Dàmonen-
opfer, wie bei den Arabern, sein und das Blut sollte als
Blutspende fur Jahv(^ ausgegossen und nieht mit dem rohen
Fleische genossen werden.
III. DIE OPFERMAHLZEIT
Aber auch die Opfermahlzeit eignete als konstitutiver Be-
standteil bereits dem altarabischen Opfer. Allerdings gibt ge-
rade das Beispiel, auf welclies Smith seine Théorie vom alta-
rabischen Opfer als einem totemistisehen Opfermahle aufbaute,
ein vcVllig sehiefes Bild des arabischen Opfermaliles, sodass
wir hier in Ermangelung besserer vorislamischer Nachrichten
am meisten auf den Analogieschluss vom neuarabischen Opfer
aus angewùesen sind. Wenn sich die Sarazenen voU Blutgior
(1) "W. Engelkemper, Heiligtmn und Opferstnetten in den Oesetzen des
Pentateuch, in-S", Paderborn, Schoning-h, 1908, S. 103.
DAS OPFER BEI DEN ARABERN 311
auf <ias der heidnisclien Uzzà geweihte Beutekamel stûrzen, ihm
die Kehlc durehsclineiden iind das hervorquellpnde Bkit
schlurfen. um sich dann auf den nocli /.ui-konden Kadaver de?
ïieres zu werfen und das rohe, blutige FleLseh zu verselilingen,
so bietet jener Beiichl des Nilus keineswegs die alfeste Form
der altarahisehen 0[ifcrinahlzeit, wie Smith behaiiptcl (1), die
spâter, da man das Blut nieht mebr genoss, zum Ausgiessen
des Opferblutes auf dem Gottesstein verblasst sei. sondern nur
ein trnuriges Zerrltibl des arabiseben Opfernialiles. das den
Stemj)el religioser Yerrohung und sittlichen Verfalles augen-
scbeinlirb an sich tràgt und das an die bereits vor 2000 Jah-
ren auf Sinai heiniisclie und von Moses bekiimpfte Kniartung
der dortigen Opferbràuche, narnentlidi den Genuss rohen
Opferfleisches, erinnort (2). Immerliin lâssi der Nilusbericht
die Opfei-malilzeit als sob-be als stàndige Opfergepflogenheit
der vorisiamiscben Beduinen geniigcnd erkennen, wie dies ja
auch Lev., xvu, 1-7 deutlicb voraussetzt (3). F'iir den ecbt
ar'abiscben Cliarakter der Opferniablzeit spricbt wobl nicbt
zuletzt aucb der Umstand, dass wir sie genau so wie im prunk-
losen Kulle der viebzûchteriseben Beduinen in dem reicben
Opferrituale der Minàer, Sabàer und Nabatiier wiedertinden.
Dabin deutet die minàiscbe Bezeiehnung fur weiben, hassala,
eigentlicb Opferfleiscb kocben (vgl. Ez.. xlvi, 23), bzw. das
sabâisebe mahsaJ. den Ort, an dem das 0[tferfleiscb gekocbt
wird(4' ; iliren gewaltigsten Ausdruek und ihre grr)sste Entfal-
tung tind(^t die Idée des Opfermables in den mâcbtigen Trikli-
nien. Biklinien und Stibadien Peiraas.. die zur Aufnabme der Op-
ferteilnebmer und zur Feier des OpfermalUes dienfen(5) . Jeden-
falls mûsste derjpnige, weleher die Zugeborigkeit der Opfer-
mahlzeit zum altaraluschen Opfer leugnet, zuerst eine genû-
gende Erklàrung dafûr geben, wie sieli dann dieser Brauch
untei' dem opferfeindlicben Islam seine Bedeutung fur das
neuarabisc'he Oi>fer f>rringen konnte.
(1) Rcl. der Sem., S. 262, 266 ff.
(2) Wellhausen, Reste, S. 120, macht auch noch auf ein 2. Beispiel eines
solchen Kannibalismus aufmerksam.
(3) Auch Gen., xxxi, 54 u. Ex., xviii, 12 scheint dor Gedanke der Opfer-
mahlzeit zu Grunde zu lieg:en. An letzterer Stelle ist olà zu streichen.
(4) F. HoMMEL, Griindriss der Geschichtc und Gcographiv des alten Orients,
Bd. I, gi-. 8», Munchen, Beck, 1904, S. 144.
(5) G. Dalman, Petra, Leipzig, Ilinriclis, 1908, S. 89-92.
312 G. KLAMETH
Wenn Gurtiss (1) gegen die Opfpriuahlzeit als Wesens-
hestandteil des altarabischen Opfers die atàïr-Opîcr bei Mina
ins Feld fiihrt, die angeblich nicht genossen, sondern vergraben
oder den Beduinen und wilden Tieren ûberlassen wurden, so
irrt er. Das Fleisch dieser Opfer, die in islamischer Zeit als
Totenopfer gelten (2), darf eben nicht vom Opfernden allein
verzehrt werden, vielmehr geniessen, wie beim Dahijje-Toien-
opfer (3), davon sâmtliche Anwesenden ; zu diesen gehoren nun
auch jene bereits auf das Opferfleisch wartenden Beduinen.
Uebrigens ergibt sich ans der Sitte des Tasriq in Mina, das
geschlachiete Fleisoh, das man nieht geniessen konnte, in
Streifen zu sohneiden und es zu troci^nen, dass auch die
Opfernden selbst von dem Fleische assen (4). Die weitere
Ansicht, dass man jene Opfer Tieren ûberlassen habe. dûrfte
wohl darauf zuruckzufûhren sein, dass man gewisse Telle
wegwarf, wie z. B. beim DaJtijje-Opîer die Eingeweide und die
Fusse (5). Dass man schliesslich ganze Schafe in ein Loch
vergraben hâtte, beruht wohl auf einem Missverstândnis oder
einer Uebertreibung (6).
Darauf, dass das gesamte Fleisch nach der Blutspende. zum
mindesten in der Regel, genossen wurde, deutet ûbrigens auch
das auffallende Schweigen der arabischen Quéllen ûber Brand-
opfer und Brandopferaltàre ; daher ja auch Dalmans Zweifel
am Vorhandensein von Brandopferaltâren in Petra (7). Die
dhabihe wurde eben nach Darbringung der Blutspende verzehrt,
nicht verbrannt, die sûdarabischen Kulfe wahrscheinlich nicht
(1) Vrsem. Rclig.. S. 198, 256.
(2) Wellhausen, Reste, S. 183.
(.3) Jaussen, am, 372. Nach Seite 309 musste auch das Fleisch, das man
einem Veli opferte, den Armen oder Anwesenden Uberlassen werden. Es darf
nichts wegg-etragen werden. Vielleicht g-ibt dièses Verbot auch die Erklârung
zu der sonderbaren Notiz bei Sprengkr, Das Lehen Mohavivieds, m, 457, dass
gelegentlich das Fleisch von 100 Stieropfern den wilden Tieren tiberlassen
wurde.
(4) Wellhausen, Reste, S. 80, 119.
(.5) Jaussen, am, 382.
(6) Damit steht keineswegs die Môglichkeit im Widers; ruch, dass man
in bestimmten Fallen auf die Teilnahme an der Opfermahlzeit verzichtete ;
vgl. Wellhausen, Reste, S. 116 : Smith, Rel. der Sem., S. 171, mag- auch
Recht haben, wenn er besonders feierliche Siihnopfer von der allgemeinen
Regel des Opfei-mahles ausnimmt.
(7) Petra 56 (gegenUber Curtiss, Vrsem. Rel, S. 311 ff.).
DAS OPFBR BEI DEN ARABERN 313
ausgenommen. Der Titel des minaischen Obprpriesters sauivû.
làsst sich ja ebenso leicht in Beziehiing zu dpn zalillosen unblu-
tigen Feiier- oder Rauchproiifprn set zen, von denen uns die
sijdarabisclien Funde berichten (Ij, oder auch mit dem mabsal-
Feuer, in dem die Opferspeise zubereitet wurde. Ebensowenig
braucht sich ar. salla, beten, ans sala, kochfu. unter dei'
Einwirkungdes Tierbrandopfers als eines Kultaktes difïerenziert
zu haben(2) ; war doch aucli das Raueheropfer oder das Kochen
des Opferfleisches ein fromnier Kultakt. ein Gebet. Yielleieht
darf man aber dem hebràisehen selem-Opîer naeh zu urteilen.
dessen Namen Moses wohl aus dem minâischen Kult entlehnte.
und bei dem einzelne Teib^ der dliablhe verbrannt wurden. einen
àhnlifhen Yorgang bei den Minàern annehmen. Man wird da an
jene Teile zu denken haben, welche die Beduinen draussen in
der ^^'ûstp einfach wegwaifen (s. oben S. 312). wahrend sie in
dem hohpr entwickeltpn Kult der Minaer durch Feuer vernichtet
wurden.
Die Bedeutung der Oiifermahlzeit ist ersiehtlich. Wie die
Totennialilzeiten die Verbindung mit dem Toten aufrecht
erhalten sollten, so wollten die Opfermahlzeiten die Verbindung
zwisclien dem Opfernden und der Gottheit festigen. Wahrend
bei der Blutspende der Opfernde seine Gabe an die Gottlieit
heranbraehte. ist es bei der Opfermahlzeit der Empfànger der
Gabe, der die Annaherung vollzieht. Die Gottheit ûbernimmt
naeh echt afahisrher Sitte die Rolle des Gastgebers und der
Opfernde ist ihr Gast, der sich mit ihr verbrûdert und verbindet.
Tatsàfhlich besitzt also das altarabische Opfer die charak-
teristischen Ziige des neuarabischen : als Opfergabp die dhabilu',
die Schlachtung derselben und die Opfermahlzeit. Die Ein-
wirkung dièses Opfers auf das hebrâische zeharh- od?r srlem-
Opfer mit der nachfolgenden Opfermahlzeit liegt da wohl auf
der Hand. Sowohl in den Kultausdrûcken, als auch im Ritual
verrat sich unleugbar arabischer Einfluss.
Noch einige Worte ûber die einzelnen Arten tier Opfer. Die
bereits geausserfe Annahme, dass die Araber die Verbrennung
der Opfergaben nicht praktizierten, schliesst das Holocaustum
aus. Ausgenommen sind die Mensclieno]ifer, fur welche man
(1) NiELSEN, Altarab. Mondreligion, S. 103, 131.
(2) L.AGRANGE, Etudes, S. 262.
314 G. KLAMETH
die Verbrennung eingefûhrt batte, wie die Erzàhlung des Nilus
und die von Wellhausen (1), Smith (2) und Mader (3) zusam-
mengestellfen Nachrichten ûber das Mensebenopfer bei den
Arabern beweisen.
Was den Zweck des Opfers anhelangt, hebt sich bei den
Arabern die urspriingliche Bedeutung des Opfers aïs Huldigung,
Lobpreis und Dank klar in den Primizialopfern ab. Das Opfer
war in erster Linie uberall und i'iinicr eine Huldigungsgabe,
ddrli konnte es als Gal)e an die Gottbeit leicbt den Zweck
verfolgen, die beleidigte Gottbeit zu versôhnen, womit das
Sûhnopfer gegeben war, ohne dass das Opl'er von der Sûhnidee
batte seinen Ausgang nebmen mûssen i4), wie es namentlich
Smith (5) su sebr lietont. Aueb die Blutspende ist i)riiaitiv
keine Sûbne. sondern die symbolisebe Hingabe des Lebens an
Gott. kann aliei' natûrlich zur Siibne werden, wenn der Mensch
den beleidigten Gott mit sicli versôhnen will, ein Gedanke, den
Lev., XVII, 11, so sfbon zuni Ausdruck gebracbt liât mit den
Worten : o Das Leben des Fleisclies ist im Blut und ich habe
os eucli fiir den Altar gegeben zum Zweek der Sûhnung fur
eure Seelen, denn das Blut scbafft Sûbne durcb das Leben ».
Ein solclies Sûhnopfer ist wobl bei den heutigen Arabern das
dahijje-0\)fer in dem bestiinmien Falle, dass es nicbt als
Totenopfer, sondern zur Tilgung der Sûnde dargebracbt
wird (6). Bezeichnender Weise muss dann ailes, auch die Beine
und die Eingeweide, die docb wieder we'ggewoffen werden,
zuerst « dur(di das Feuor geben ». Aueb das Fedn- (7) und
das gelobte Opfer darf wobl in vielen Fàllen als wirkliches
Sûhnopfer bezeichnet werden, insow-eit die abzuwendende Strafe,
das gefûrchtete Verhângnis als Folge einer Sûnde oder mora-
lischen Verfeblung erscbeint. In diesen Fàllen wird man wobl
(1) Reste, S. 113.
(2) Rel. (fer Sem., S. 276 ff., 283 ff.
(3) E. M.\DER, Die Menschenopfer der alten Hehraeer und der bi nuchhartrn
Voelker ; in Bibl. Stud., XIV, 5-6 (Freiburg i. B. Herder, 1909), S. 64 ff.
(4) SCHMiDT, Ethnol. Bem., S. 48 ff.
(.5) ReJ. der Sem., S. 304 fï.
(6) Jaussen, AM, 372.
(7) S. MusiL, AP, 396, wo das Beuteopfer dargebracht wird mit den
Worten : « Dies ist das Slihnopfer flir tmser Heil (hôdhi fedn salâmetna) ':
mit aeinem Blute werden dann die RUcken der Schafe und Tiere bestrichen.
Aehniich heisst es beim sabû- oder tulû-Optev am 7. Tage nach der
Geburt : « Das ist das Loseopfer (/edi:,'" ^ur Gott (/« îtir/Zi allâh) ! » (S. 216').
OPFBRRITEN DER GRIECH. UMD ROM. KULTB 315
aiich den stellvertretenden Gharakter des blutigen Opfertieres
nic-lit gui leugnen dûrfen. Bezûglicli der Sûhnopfer bei den
ait en Arabern sind wir, soweit sie sieh nicht mit den obigen
decken, auf die bekannten vier sûdarabischen Reueurkunden
dei' Wiener Staats])ibliothek angewiesen (1). Die dort ange-
fùhrten und gesûhnten Vergehen : Geschlecbtsverkehr mit
ciner menstruierenden Frau und im Zustand der Unreinigkeit,
Verweilen in unreinen Kleidern, Berûhrung einer Menstruieren-
den, Befleckung der Klcider durch Samenerguss erinnern stark
an das levitische Sûndopfor fiir rein rituelle Verfeblungen.
Die alten Araber kannten auch Menschenopfer (2) ; doch sind
dieselben jedenfalls erst als eine Begleiterscheinung des spâ-
leren arabischen Heidentums einzuwerten (3), wozu die Er-
SL-heinung stimmt. dass die arabischen Menschenopfer vor-
nelimlieh an der Peripherie der Halbinsel, besonders im
Nordosten und Sûdwesten derselben grassierlen.
[21 ] Opferriten der griechischen und rômischen Kulte,
von Dr. Fr. Andres.
Zu anstrengende Beschàftigungen und auch schlechter
Gesundsheitszustand verhinderten den Verfasser sein Manus-
kript bei Zeiten einzusenden ; deswegen geben wir hier nur die
von ihm eingesandte Bibliographie an.
Er wii'd den Gegenstand in einer eigenen Schrift, Dir Frofj''
der Bupho}\ien. im Anthropos behandeln.
BIBL,. — P. Stengel, Die griech. Kidtii-raltertumer, In-S", Miinchen, Beck,
1020 ; ders., Opferhraeuche der Griechen, in-S", Leipzig, Teubnei-, 1910 —
L. R. Farnrll, The Cuits of the Greek States, -5 in-S", Oxford, Clarendon
Press, 1896-1909 ; ders.. Sacrifice (.Greek), ERE, 1920, Bd. XI, S. 12-18 :
ders., Greek Religion, ebd., 1913, Bd. VI, 392-425 — G. V\'Issowa, Reliff. und
KuUus der Roemer, in-8", Miinchen, BeclC; 1912 — S. Eitrem, Opferritus nnd
Voropfer der Griechen und Roemer, Kristonia, 191-5 — S. Wide, Griech. Reli-
gion ; Altroeni. Religion. Bearb. von M. P. Nilsson (Einlritnng in die Alter-
(1) M. Hart.m,\nn, Der islamischc Oiient, Bd. II, in-8", Leipzig', Aupt.
1909, S. 208 ff.
(2) S. oben, S. 314.
(3) ScHMiDT^ Ethnolog. Bcinerkungen, S. 34 f.
316 W. KOPPERS
tumsiviss. 3. hrsg. von A. Gercke und Ed. NordeNj in-8", Leipzig, Teubner,
1922, Bd. II, S. 215-316) — Fr. Andres, Daimon, bei RECAW, III, Supple-
mentheft, S. 267-322 ; speziell ApotroiHiisch-kathartischer Kultus, ebd.,
S. 278 ff. — Fr. Pfistbr^ Kultus, ebd., 1922, Bd. XI, S. 2106-92 — Tromp,
De Romanoruni piaculis ; dissert phil., Amsterdam, 1921 — E. AusT, Die
Relig. der Boemer, in-8». Munster i. W., Aschendorff, 1899 — J. Marquardt,
Roern. Staatsverwaltung, in-8", Leipzig, 1885, S. 121 ff., 169 ff. — W. "W.
FOWLER, Roman Religion, in ERE, 1918, Bd. X, S. 820-847.
[22] La Religion et l'Etre Suprême
chez les Yagans (Tribu Fuégienne) (1).
par le R. P. KopPERS. S. V. D.
Les Yagans, comme on sait, sont les hommes qui habitent
l'extrême pointe de l'Amérique du Sud et donc la partie la plus
méridionale de la terre. Ils peuplent la contrée du canal Beagle
et les îles situées au sud et au sud-ou&st de ce canal. Comptant
environ deux mille cintj cents âmes, il y a cinquante ans, la
tribu se trouve réduite aujourd'hui à soixante-dix membres de
race pure. Le contact avec la civilisation moderne a, comme
ailleurs, apporté la mort et la ruine à ce peuple primitif. Les
maladies contractées, rintluenza, la petite vérole et la rou-
geole, et aussi l'action de l'alcool, ont décimé le petit peuple
en quelques dizaines d'années.
C'est Darwin qui a introduit les Yagans dans la littérature
scientifique de l'ethnologie religieuse. Se basant sur un contact
de peu de durée qu'il eut avec eux pendant son tour du monde,
il y a quatre-vingt-dix ans. il les représenta comme des anthro-
pophages, ignorant toute divinité, toute religion.
Vers la moitié du siècle dernier, la mission anglaise protes-
tante commença à travailler parmi les Yagans. Le missionnaire
Th. Bridges s'est adonné à l'étude de leur langue et de leurs
mceurs. non sans résultat. Lui-même et ses compagnons ne
furent pas longs à reconnaître que la réputation de canniba-
lisme était fausse. Mais la question de la religion de cette tribu
restait un })roblème. Les missionnaires, d'accord avec Darwin
et d'autres explorateurs })Ostérieurs, rapportaient toujours
qu'ils n'avaient rencontré chez ce peuple aucune idée supé-
rieure, et le témoignage de gens qui travaillaient sur place
LA RE-LIGION CHEZ LES YAOANS 317
depuis des dizaines d'années avait naturellement beaucoup
plus de valeur que l'observation superficielle de Darw^in durant
son court passage. Néanmoins, le professionnel d'ethnographie
pouvait constater bien vite, dans les écrits des niissiormaires,
qu'ils n'avaient pas même réussi à réaliser des recherches
approfondies. Ils avaient appris, par exemple, que les Yagans
connaissaient l'inilialion secrète de la jeunesse ; mais ils sa-
vaient seulement que la chose existait, et en ignoraient tous
les détails, môme le nom indigène de la cérémonie.
'Ce sont ces constatations qui ont amené les trois expéditions,
organisées en 19i9, 1920 et 1922, en terre fuégienne, spécia-
lement chez les Yagans, par le R. P. M. Gusinde, S. V D., vice-
directeur du Musée rthnologique de Santiago (Chili). J'ai eu le
])onhenr d'être son compagnon dans le dernier voyage, géné-
reusement payé par Son Exe. Mgr l'archevêque de Santiago.
Nous croyons pouvoir dire sans exagération que la tribu des
Yagans a été cette fois explorée en conscience. Nous avions
entièrement gagné leur confiance, condition indispensable d'une
étude sérieuse. La preuve en sera fournie sans doute par le
fait que, tous les deux, nous avons reçu l'initiation et qu'ainsi,
nous avons été vraiment adoptés par la tribu. Désormais, nous
étions considérés comme des frères, pour qui il n'y a plus de
secrets.
L'on sait depuis bien longtemps que les Yaga^ns sont restés à
un étal de civilisatio,n matérielle très rudimentaire. Ils appar-
tiennent à la classe des chasseurs inférieurs, c'est-à-dire qu'ils
ne se livrent ni à l'agriculture, ni à l'élevage, mais à la chasse.
à la pêche et à la cueillette des fruits et des plantes. Les armes
dont ils se servent à la chasse sont de la première simplicité :
ce sont la lance, le harpon et la fronde. Déjè donc au point de
vue purement extérieur, les Yagans peuvent se ranger parmi
les peuples les plus anciens ; ils api)ar(iennent à l'humanité
primitive. Les recherches approfondies que nous avons pu faire
cnnjfirment cette opinion bien établie depuis longtemps. Mais,
de plus, grâce à la nouvelle école historico-culturelle, leur
position ethnologique est précisée avec une clarté beaucoup
plus grande.
Les Yagans apj)arfiennent donc, sans le moindre doute, au
groupe des peu|>les primitifs, c'est-à-dire aux peuples qui, dans
318 W. KOPPERS
ranoien monde ainsi que dans l'Amérique du Nord, sont re-
gardés commp prétoténiiques et prématriarraux. Mais ni leur
physique ni leur culture ne nous permettent de les identifier
avec le type « pygmée » des anciens continents. L'anthropologie
physique les classe plutôt jiarmi les pygmoïdes. On y rencontre
plus ou moins tous les élérnents des trois civilisations primi-
tives. Xous trouvons ainsi confirmée la remarque que mon
vénéré guide et maître, le R. P. (t. Schmidt. avait déjà faite, en
1913, dans son travail Ktdturkreise und Kulturschichten in
Sndamerika. Après avoir comparé les matériaux dont il pouvait
alors disposer, il concluait :
« Dans l'Amérique du Sud, il serait difficile de rencontrer les
« cultures primitives conservées dans leur pureté originelle.
<( Partout où elles existent, il y a mélange plus ou moins
« riche des trois premières civilisations ».
Toutefois, notre enquête méthodique chez les Yagans nous
monti-e que ce peuple fait certainement partie de la civilisa-
tion primitive. Aussi, tout ce qui est particulier à cette trihu
a-t-il une valeur historico-culturelle inappréciable. Dans cette
brève conférence, je me propose de vous communiquer les
résultats principaux de nos recherches, spécialement en ce qui
concerne l'idée de Dieu et la religion chez les Yagans.
En 1920, lors de sa seconde visite chez les Yagans, le
R. P. GusiNDE entendit parler d"une grande inondation qui, un
Jour, avait submergé la contrée tout entière. Il demanda aux
hiuiimes présents : « Qui vous a envoyé cette inondation ? »
Un des assistants de répondre: « Vafanineuva ! (1) — Mais qui
doinc est ce Vafauiveuva ? » Silence général. — Enfin, l'un d'eux
se lève et dit : « Vatauineuva est le même que le Dieu des chré-
tiens. » Le P. Gi'siNDE dut se contenter de cette réponse ; impos-
sible d"en savoir plus long cette fois-là.
Lorsque, vers la fin de janvier 1922, le P. Gusixde et moi-
même, nous demandions à des vieilles femmes yaganes de nous
dire quelques contes du pays, voilà que tout à coup le nom de
Vataui)iei(i:a fut de nouveau prononcé. Aussitôt nous interrom-
pons : « Qui est donc ce Vatauineuva ? » Même silence. A la fm,
(1) L'impi'imerie ne possédant pas tous les caractères de l'alphabet Anthro-
jjos, la transcription phonétique des mots indigènes, telle qu'on la trouvera ici,
n'est pas toujours rigoureusement exacte.
LA RE-LIGION CHEZ LES YAOANS 3 1 9
une femme s'enhardissant, dil : « Vatanineuva like God, like
Christian God ! » Nous insistoins, et Ton nous ai)prend qu'à la
mort d"un enfant, on dit commvmément : « Valaiiineuva punishrs
him )>, c'est-è-dire que la mort de cet enfant est considérée
comme une punition, envoyée aux parents par Vatanineuva.
Nous n'avons pu obtenir autre chose ce jour-là ; mais nous ne
cachions pas notre désir d"en apprendre davantage au sujet de
Vatanineuva ; é\idemment, ce nom recelait bien d'autres mys-
tères.
Deux ou trois jours s'écoulèrent, et deux femmes se présen-
tèrent en nous disant : « Eh bien, nous voulons toutes deux
vous raconter tout de Vofauitienva. Car il ne nous a pas punies ;
il n'a pas fait mourir nos enfants : nous ne sommes donc pas
confuses quand, en notre présence, on parle de lui. Aux autres
femmes, il a pris des enfants ou de proches parents ; voilà
pourquoi avant -hier, nous ne pouvions pas et ne voulions pas
parler de Vatanineuva en leur présence. Gela leur aurait fait
trop de peine et les aurait confondues. »
Très inti'igués, inutile de le dire, nous attendions les révé-
lations promises. Les deux femmes nous énumérèrent de suite
les noms principaux de l'Etre suprême chez les Yagans. On
nous communiqua, à plusieurs reprises évidemment, plus de
soixante prières et formules dont les Yagans se servent pour
invoquer cet Etre. Nous avons recueilli ces formules dans le
texte original accompagnées d'une traduction aussi fidèle que
possible. Avec une surprise toujours croissante, nous avons
constaté que les Yagans, réputés sans religion, professent un
monothéisme non seulement relativement pur, mais encore
vivant,
La signification extraordinaire de cette découverte nous fut
bientôt évidente, et nous nous sommes efforcés de tirer l'af-
faire complètement au clair. L'hypothèse d'une influence chré-
tienne se présentait tout naturellement à l'esprit. Mais la déné-
gation absolue de tous les indigènes âgés s'y opposait. Un autre
fait caractéristique, c'est qu'aucun des noms donnés à l'Etre
Suprême, aucune des formules (prières) notées, ne rappelle les
noms chrétiens. L'opinion du vieux missionnaire anglais pro-
testant J. Laurence, qui a vécu pendant cinquante-trois années
dans le pays des Yagans, est également dr-favorable à l'hypo-
320 W. KOPPERS
tlièsr» d'une infiltration chrétienne. Nous avons revu avec lui
mot à mot toutes nos notes au sujet de l'Etre Suprême. Le bon
vieillard regrettait fort, il est vrai, de ne pas s'être soucié
suftlsamment de ces choses autrefois et de ne pas les avoir
apprises ; mais, à son avis, leur véracité était incontestable. Il
s'enquit lui-même auprès des indigènes et nous félicita de nos
résultats en disant : « Je dois reconnaître que, quand bien même
je vivrais ici encore cinquante ou môme cent ans, jamais les
gens rie nraccorderaient la confiance qu'ils ont montrée à votre
égard. «
Nous n'avons pas manqué de demander aux anciens de la
tribu : « Comment est-il donc possible que les missionnaires
n'aient jamais rien appris de vos idées sur Vafnuineuva ? » Ce
furent toujours les mêmes réponses. « D'abord, les mission-
naires ne nous ont jamais rien demandé. Et puis, ils commen-
çaient toujours par dire : Ce ne sont que des mensonges que
vous avez Là ; il faut tout oublier pour accepter notre doc-
trine. » « Et cependant, ajoutaient ceux qui avaient eu plus de
relations avec la mission, nous nous sommes aperçus bien vite
qu'au fond, le Dieu des chrétiens est le même que notre Vataui-
neuva. »
Hélas ! les fautes commises en ce pays par ces missionnaires
n'ont pas été les premières, ni les seules de leur espèce, fautes
doublement regrettables au point de vue de la science et au
point de vue de la foi. Un des résultats de la Semnin>^ d'ethno-
logie religieuse doit être de supprimer pareils malentendus,
autant que faire se peut.
Les noms que les Yagans donnciut à l'Etre Suprême sont aussi
intéressants qu'instructifs. Vatauineuva signifie : VEternel, « le
très Vieux ». Un autre nom très usité est Hitapuxw, littéralement
<( mon Père ». On se sert dans le même sens, mais plus rare-
ment, du mot hauimun. Une autre appellation est monauanakin,
c'est-à-dire <« le Très Haut », puis obailakin « le Tout-Puis-
sant », enfin, kaJniexon, « le bon Vieux ». Vatauineuva-esakv
signifie : Yatniiineuva le cruel. Il est ainsi nommé, parce qu'il
fait mourir les hommes. Quand ils sont irrités, ils s'oublient
jusqu'à parler du iwlopatôx-sef, c'est-à-dire du « meurtrier
dans le ciel là-haut ».
Les discours et les prières adressés au Seigneur du ciel jouent
LA RELIGION CHEZ LES YAGAXS 321
un grand rôle dans la vie journalière des Yagans. En toutes
firconstances, on s'adresse à TEtre Suprême. Désire-t-on du
beau temps, un enfant est-il malade, est-on menacé de quelque
danger, on implore le secours du grand Vatauineuva. Pour ces
discours ei ces prières à l'Etre Suprême, on se sert de termes
choisis spontanément ou bien de vieilles formules stéréotypées,
transmises d'une génération à l'autre. Voici quelques exem-
ples.
i° Pour demander du beau temps, on dit : « Hitapudn niriui
Jiaia ivetvteki. Mon Père, de bon temps me fais voii'. »
iSi le temps a été vraiment beau, on remercie en ces termes :
c( Asar hitapvari. katuvtu.r iiirna. Merci, mon Père, tu as fait de
bon temps. »
2" Quand un Yagan prend congé des siens pour un certain
temps, il dit : << Halla yôlla. Je m'en vais maintenant pour long-
lemps. )) On lui répond : « Cla yôlla haindcpan Vatauimmvo katô-
lakana kiirvana hibikaia. Oui, ce sera le congé éternel, si dans
l'intervalle il plaît à Vatauineuva d'enlever quelqu'un de nous. »
3° Lorsqu'en pleine mer, le canot menace de faire naufrage,
ils prient : « Uxaia môtawaku hitapuan tôkamatu anen ! Je vous
en prie, ayez pitié, mon Père ; conduisez la barque à terre ! »
Ils n'oublient pas de rendre grâce, s'ils atteignent la terre
ferme : « Annu hibikaia komostekude hitapuan », etc., littérale-
ment : « Grâce à toi, mon Père, tu as été bon pour nous : tu as
conduit notre barque à terre ; nous sommes très contents de
toi ! »
A" Une mère dont l'enfant est mort adresse ce reproche au
ciel : « Kônjuicia haia via kupa vinanudc hitapuan ! Malheur à
moi, d'en haut il a furtivement repris mon enfant, lui, mon
Père ! »
Les propriétés de l'Etre Suprême chez les Yagans sont sur-
tout les suivantes : Vatauineuva est l'Eternel, celui qui a été
toujours. Il est le Tout-Puissant ; il peut guérir les maladies,
sauver des dangers ; il est avant tout le maître de la vie et de la
mort. Il est le propriétaire de toutes choses. L'expression Vataui-
veuvasir signifie la même chose que chez nous, don de Dieu.
Vatauineuva est Vesprit suprême et invisible. 11 a sa demeure
dans le ciel ; ainsi on dit : Vatauineuvasef. Vatauineuva au ciel.
Vataiiinevra, dans leur croyance, n'est pas marié. J'ai mis
21
322 W. KOPPERS
plus d'une fois là Téin'euve les gens en demandant d'un air
indifférent avec qui Vatauinruva était marié. Gomme réponse,
c'était toujours la même expression typique de surprise qui se
manifestait eliaque fois que nous posions une question bien
sotte là leurs yeux. Vataiiinrura marié, voilà une ctiose dont ils
entendaient parler pour la première fois de leur vie !
\atauineuva voit et sait tout. Cette vérité est inculquée avec
un soin particulier à la jeunesse. Nul ne doit croire qu'il peut
transgresser en secret certaines prescriptions de la tribu. Bien
que les borames ne voient pas les coupables, X'atauinruva les
voit toujours et les punira, le cas échéant. Vatauineuva de sa
nature est bo7i et généreux ; c'est pourquoi on lui demande
toutes sortes de bienfaits. Mais étant celui qui fait mourir les
hommes, il est aussi l'inexorable, « ,1e meurtrier du ciel ».
Un culte extérieur rendu à Vatauineuva est inconnu aux
Yagans. Nous n'avons pas constaté non plus chez eux de
sacrifice, pas même celui des prémices, caractéristique des
plus primitifs (les Pygmées). Ils n'ont que le sacrifice person-
nel (jeûnes, renonciation à certaines choses en faveur d'autrui).
Nous n'avons pas pu constater avec certitude si autrefois
le sacrifice des prémices a été en usage. Les Yagans connais-
sent une prescription ancienne, en vertu de laquelle celui qui
trouve un terrain où il y a des autaini mûrs (espèce de baies
ressemblant à nos myrtilles), ne peut j^as en manger avant
d'avoir fait connaître sa découverte aux autres. Il ne lui est
pas permis de profiter seul de sa trouvaille ; mais, par soli-
darité, il doit inviter les autres à y prendre part. Or, il y avait
une femme, dit un conte yagan, qui n'observa pas cette pres-
cripti(Ui ; elle prit d'abord des baies et n'en dit rien aux
autres. Comme plie retournait le lendemain, elle trouva le
terrain tout changé et, de baies, il n'y avait plus trace. C'est
Yatauineuva qui avait causé ce changement. Ceci rappelle beau-
coup l'oblation des prémices des Andamanais. De certains
fruits, les premiers qui mûrissent sont réservés à l'Etre Su-
prême. Malgré tous nos efforts, nous n'avons pu décider si,
à la base du conte en question, on trouve la même conception
ou une autre idée semblable. Notons encore que l'absence de
sacrifice, relevée chez les Yagans, se retrouve dans la masse
des indigènes sud-américains. Abstraction faite de l'influence
LA RELIGION CHEZ LES YAGANS 323
des civilisations plus avancées dans les Andes, aucune des
tribus indiennes de l'Amérique du iSud ne connaît le sacrifice.
Il est hors de doute que les Yagans admettent une certaine
itnmortalité pour l'âme humaine. Selon une opinion ancienne,
les âmes des morts s'en vont vers l'Orient et, de Là, elles re-
viennent souvent pendant la nuit au canal Beaigle. Il n'y a que
les médecins qui peuvent voir s'envoler les esprits. Mais quel
est le sort des âmes défuntes ? Sont-elles heureuses ou malheu-
reuses ? Sont-elles chez Vatauineuva ? Ont-elles des relations
entre elles et peuvent-elles se parler ? Ont-elles un sort diffé-
rent après la mort? Les unes sont-elles mieux partagées que les
autres. ?• Voilà des questions auxquelles le Yagan ne peut pas
donner une réponse décisive. >( C'est précisément, nous répé-
taient-ils à plusieurs reprises, parce que nous ne savons même
pas ce qui arrive après la mort, que nous sommes si tristes à la
mort d'un des nôtres. »
Quand nous demandions si les bons et les méchants avaient
le même sort, ils réj)ondaient de nouveau : « Nous n'en savons
rien. Mais ce qui est sûr, c'est qu'un méchant ne restera pas
impuni. Le méchant ne vivra pas dans une paix complète jusque
dans un âge avancé. Vatauineuva le punira certainement sur la
terre, surtout en lui envoyant une mort prématurée. »
Autrefois, chez les Yagans, la crémation des morts était
usitée. D'abord ils manquaient d'instruments pour creuser
suffisamment le sol ; puis il leur répugnait d'exposer un cadavre
humain à être mangé par des renards, des rats ou d'autres
animaux. En même temps que le mort, sa cabane et ses instru-
ments étaient livrés aux flammes. C'est que la vue et l'usage de
ces objets auraient rendu les parents trop tristes, en leur
rappelant toujours le mort chéri. Parfois cependant, nous
faisaient-ils remarquer, on négligeait de tout brûler. On échan-
geait alors ces objets (par exemple, harpons, lances etc.) contre
d'autres et l'on conservait ainsi les instruments en bon état.
Comme la^mort de ses parents aimés frappe profondément
le Y^agan, les manifestations de deuil sont nombreuses et variées ;
elles sont privées, et aussi puhliques.
Le deuil privé s'appelle le plus souvent talauvaia. Pour ex-
primer leur douleur, les gens «e peignent le visage d'une cer-
taine manière. A la mort des enfants, les parents se déchiraient
324 \\. KOPj>ERs
souvent la poitrine jusqu'à ce que le sang coulât à flot. En
signe (le deuil et de resiject, tous ceux qui pdi'tent le nom du
mort le changent en un autre. Ainsi quelques vieillards en sont
déjà à leui' troisième ou quatrième nom. Une manifestation
S|;éciale du deuil privé est le chant talaiivaia (chant funèbre).
Ce chant est monotone et simple. Tandis qu'un chanteur l'exé-
cute, un autre se lamente, jjleure et se plaint surtout de
Vataviurvva. qui a laissé mourir les êtres chéris et a mis la,
tristesse d^ns le c(('ur. Nous avons pu inscrire deux fois ce
chant sur le luuleau d'un phonographe. Une femme chantait,
tandis qu'une autre parlait en même temps dans l'appareil.
Voici quelques-unes de ces paroles :
« Oh ! comme nous sommes malheureux, parce que ces deux
(les RR. PP. GusiNDE et Koppers) nous forcent à chanter
lalauvaia (le chant funèbre). Eux, ils viennent d'un peuple très
nombreux et nous sommes en si petit nombre. Les survivants
sont comme quelques petits oiseaux échappés au chasseur. Et
Vatauineuva nous a enlevé les meilleurs... Il m'a jiris mes
enfants, toute ma famille. Et les deux enfants qui me restent,
ils devront s'en aller bientôt par le même chemin que les
autres. Ma cousine a perdu aussi beaucouji de ses parents ;
mais elle a encore un frère qui possède une tainille prospère.
Moi, cependant, je suis toute seule, et je n'ai qu'une parente
éloignée. Mais notre parenté remonte à bien loin. Hélas,
hélas ! num Père, tu me fais beaucoup souffrir ; tu m'as
sévèrement punie. O, que de gens y avait-il autrefois à l'ouest !
[La femme vient de ce côté-lià]. Maintenant, il n'en reste plus
que lieux ou trois tout au plus. A moi, il n'a laissé qu'une
parente, pour me l'arracher aussi ! »
NoTubreuses sont les vieilles formules, que les personnes en
deuil adi'essent en guise de plainte et de reproche à l'Etre Su-
prême. Ainsi une femme dont l'enfant est mort, s'écriera
continuellement ;
<( Kônjuicia hnia uln kupa nuitauwuxrnutakude hitapuan talau-
vaia ! » c'est-(à-dire littéralement : « Ah ! ah ! pour cela m'a
donné d'en haut, mon Père, ô deuil ! » ; ce qui doit signifier :
« Voilà, mon Père d'en haut m'a donné mon enfant, pour me
le reprendre, ô deuil ! »
LA IlELKilON CHEZ LES YAOANS 325
La nianife?^tation publique et générale du deuil s'appelle
Yamalasemôina. Elle esl surtout célébrée en souvenir d'une
mort violeuie. causée soit par homicide volontaire, soit par
accident. Ceux qui participent à cette cérémonie se peignent
d"abord le visage. Les hommes prennent ensuite une massue,
les femmes une de leurs rames. On forme deux groupes égaux,
chacun comprenant des hoimmes aussi bien que des femmes.
Alors s'engage entre les deux groupes un combat simulé. Tous
bondissent et brandissent leurs armes, comme s'ils voulaient
fi'apper de toutes leurs forces. En réalité, personne ne se
touche. Ils se rapj)ellent la mémoire des morts aimés et se
reprochent pour ainsi dire mutuellement leur malheur. Nous
étions vraiment impressionnés de voir de quelle manière
saisissante ces Sud-Américains les plus primitifs savent ma-
nifester leurs sentiments de douleur. Ici comme ailleurs, l'on
voit combien leur attachement à leurs morts est sincère ; toute
cette cérémonie était loin d'être une simple parade.
Si l'on considère que les Yagans sont au fond certainement
un peuple primitif, l'idée qu'ils ont de l'esprit e'st relativement
bien développée. Esprit se dit chez eux Kôspik. Pour expliquer
l'idée de l'esprit, ils partent de l'idée de venf. Les esprits sont
subtils, invisibles, et se meuvent aisément dans l'air. L'esprit
suprême est Vatauineuva. Il est, en tout cas, remarquable que
ces primitifs se représentent précisément l'Etre Suprême
comme un esprit. Les Yagans connaissent en outre de bons et
de mauvais esprits. Un bon esprit est par exemple la lexakipa,
un esprit lutéiaire féminin de la maison Kina. Kina est le
second degré de la fête de l'initiation de la jeunesse. Jeteite ou
Tanauva, c'est-à-dire le grand diable de la terre, est le plus
méchant des mauvais esprits.
Dans la Maison-Kina, déjà nommée, on organise systéma-
tiquement In culte des esprits. Cela s'explique simplement par
le fait que cette fête s"est trouvée faire partie des cérémonies
des sociétés secrètes, telles ([u'on les rencontre dans les cycles
cultuipjs matriarcaux. Ici comme \k, l'évocation des esprits
joue un giand lôlr. !;ei)endant, d'après les Yagans, tout le
monde ne peut pas indistinctement enlr(>r (mi commerce avec
cette espèce d'esprits. Ceux qui fréquentent librement l'empire
des esprits, ce sont les médecins ou docteurs, comme disent
326 W. KOPPERS ,
les Yagans. Et nous entrons ainsi sur le terrain de la sorcel-
lerie et des sorciers.
Nous avons été à même de nous renseigner à fond sur les
faits et gestes des médecins yagans. On avait jadis organisé
des cours du soir pour les futurs médecins, dont une Ecole
de viédecinc. l'n vétéran de la profession y présidait. Mais
voilà bientôt quinze ans que la dernière réunion a eu lieu. On
enseignait aux candidats (jeunes gens et jeunes hommes),
tout ce qui est censé relever de la compétence du médecin, par
exemple le traitement des maladies, les relations avec les
esprits, et les pratiques de la sorcellerie. Mais l'enseignement
seul ne fait pas le vrai médecin ; il y faut un appel intérieur.
Ainsi nous pouvons trouver aussi des femmes qui, sans avoir
jamais fréquenté l'école, sont regardées comme médecins vé-
ritables. Actuellement, il y a deux ou trois vieilles qui sont
dans ce cas.
Ce ne fut pas sans surprise que nous avons recueilli les
détails concernant la vocation médicale. Nous nous croyions
transportés ail temps des Prophètes.
La vocal i(in des médecins yagans se manifeste par des
appels subits, par des visions et des songes. Quelques-uns, ou
mieux quelques-unes en sont si fortement affectées que leur
vie est en danger. Dans cette exaltation religieuse, il leur faut
composer au moins un chant qui leur soit personnel. Nous
avons eu l'occasion de fixer plusieurs de ces chants s.ur le
rouleau du phonographe.
L'influence des médecins est d'ailleurs peu considérable dans
la vie quotidienne. Il faut remarquer, par exemple, qu'à la f'He
du premier degré de l'initiation, appelée Ciexaus. ils ne jouent
aucun rôle. Les anciens qui s'y entendent le mieux s'en cli;!!-
gent. Il n'est pas spécialement requis que le président de la
cérémonie soit un médecin. Ainsi dans l'institution la plus
importante de la vie de la tribu, le médecin n'a, en somme,
aucune fonction : il n'a rien à dire, rien à faire. La chose se
passe bien autrement, dès qu'il s'agit du Kina, le second degré
de l'initiation. Puisque les esprits sont ici de la partie, les
médecins ne pourraient rester absents. Mais comme, par ail-
leurs, il est évident que cette cérémonie est d'un caractère
secondaire et de moindre importance aux yeux des Yagans,
LA RELiniON CHEZ LES YAGAXS 327
rintluence du médecin est, par suite, peu considérable dans les
grandes questions qui intéressent la tribu.
L'attitude du médecin yagan vis-è-vis de l'Etre Suprême nous
permet de le comparer vraiment aux propbètes de l'Ancien
Testament. Ses idées religieuses, d'ailleurs, ne diffèrent pas de
celles des autres membres de la tribu. On ne l'a jamais vu
s'opposer en vertu de son rôle, d'aucune façon, à l'Etre Supiême.
Bien au contraire, quand il exerce son art auprès d'un ma-
lade, il ne manquera pas d'implorer le secours de Vafauineuva.
Si Vatmiinruva ne veut i)as venir au secours du malade, il le
supplie au moins de le faire en sa faveur, afin que sa réputation
de docteur soit sauvegardée.
Si les médecins croient pouvoir exercer une certaine influence
sur les esprits inférieurs par leurs chants ou certaines mani-
pulations, jamais, par ailleurs, on ne les voit s'arroger un
pouvoir quelconque sur l'Etre Suprême, sur Yatauineuva. Pour
autant que nous l'avons pu observer et constater, l'Etre Su-
prême était toujours étranger à leurs pratiques superstitieu-
ses. On invoque Yatauineuva, on demande son secours ; mais
jamais on ne se figure pouvoir lui arracher la i-éalisation d'une
prière par des pratiques spéciales.
Les Yagans ne seraient pas des hommes véritables, s'ils
échappaient entièrement aux superstitions. Mais ces mauvaises
herbes ne poussent pas aussi nombreuses chez eux que chez
les peuples de civilisation plus avancée. Une comparaison serait
tout à leur avantage. Ce fait, d'ailleurs, s'explique naturelle-
ment. Comme la croyance à un Etre Suprême est si claire et si
nette qu'en toutes circonstances on a recours à lui, le terrain
de la superstition est forcément très restreint.
Les idées et les coutumes superstitieuses se manifestent
surtout dans les deux événements capitaux de la vie : la nais-
sance et la mort.
Le père d'un nouveau-né se gardera bien de briser la patte
d'un oiseau qu'il aurait tué ; cela porterait malheur au petit.
Le cri de certains oiseaux, surtout celui du liibou. est un
présage d'assassinat ou de meurtre. Quand un enfant perd sa
pi'einière dent, il s'en va au bord de la mer, y jette la dent qui
vient de se détacher et supplie instamment un certain animal
marin de lui en procurer une autre plus solide. Les deux der-
328 W. KOPPERS
nières foixiies de superstition trouvent leurs équivalents dans
nos contrées... ,
Je n'ai pu que résumer brièvement les nombreux documents
recueillis sur place. Plaise à Dieu que, bientôt, nous puissions
publier tous les résultats de nos recherches.
Mais le peu qu'il m'a été i)0ssible d'en ilire suffira, sans
doute, pour nous convaincre combien c'est à tort que l'on a vu,
depuis Darwin, dans les Yaigans des gens sans Dieu et sans
religion.
Déjà les missionnaires les ont lavés de la tache d'anthropo-
phagie. Mais leur religion restait toujours un problème. Et
voici que déjà à demi descendus dans la tombe, il leur est provi-
dentiellement permis de proclamer devant l'univers leur foi au
Maître Suprême d'en haut !*
N'est-ce pas comme un dernier cri de martyrs : Morituri te
salutant ? Martyrs, c'est-à-dire témoins de Dieu, ils le sont ;
car à travers toutes leurs migrations, malgré leurs, conditions
de vie si pénibles, malgré toutes les civilisations corrompues
qui les ont envahis, malgré les préjugés et les accusations
injustes dont ils ont été victimes, ils ont conservé au fond de
leur cœur l'héritage de la foi que leurs ancêtTes leur avaient
transmise. Aussi vous trouverez toute naturelle notre affection
pour ces pauvres gens qui nous ont ouvert leur tribu. Et nous
sommes heureux d'avoir été choisis comme les interprètes
officiels de leurs sentiments les plus intimes et de leurs der-
nières volontés.
Pendant plus de trois mois, nous avons vécu parmi les
Indiens comme des Indiens. Cette vie comportait bien des sacri-
fices ; mais les résultats de notre travail nous rendaient tout
supportahle. Chaque fois que le Seigneur d'en haut exauce la
prière des Yagans, ils lui rendent grâce par ces mots : « Asar
hitapuan ! » « Je te remercie, mon Père ! » En face d'un succès
qui dépasse tout ce que nous aurions osé espérer, il ne nous
reste plus qu'un sentiment de reconnaissance envers la même
Providence divine, et, avec nos chers Yagans, nous nous écrie-
rons : « Asar hitapuan ! Je te remercie ! mon Père ! »
2^ Section : Initiations tribales et sociétés secrètes
chez les non-civilisés
Mystères des peuples antiques
[23] initiations tribales et sociétés secrètes.
Notions générales,
par le R. P. G. ScHMiDT, S. V. D.
La profonde distinction qui sépare initiation triliale et so-
ciété set-rèle n'a pas toujours été prise en considération par
les observateurs imiTiédiats. Dans certaines formes intermé-
diaires, il est vrai, il est difficile de saisir leur nature propre ;
mais cela n'empêche pas que, dans un assez grand nombre de
cas, la distinction ne soit pas trop difficile à établir, et qu'une
analyse })lus profonde ne puisse parvenir le {«lus souvent à
une séparation nette des deux formes.
Presque tous les théoriciens de l'ethnologie reconnaissent
aujourd'hui cette distinction. Us la déterminent à peu près
comme il suit :
1. L'initiation tribale est obligatoire pour tous les (jeunes''
membres d'une tribu ; la société secrète fait un choix parmi la
totalité. Mais cette distinction est quelquefois effacée si. d'un
côté, l'initiation tribale est en état de décadence et n'attire
plus tous les jeunes gens, et d'autre côté, si une société
secrète est tellement en vogue, que tous ou presque tous les
membres d'une tribu s'efforcent d'y entrer.
2. L'initiation tribale introduit le jeune homme dans la
totalité (limitée) des facultés et des droits des adultes, la
totalité de la vie tribale ; la société secrète introduit dans les
secrets magiques, religieux, sociaux d'une corporation orga-
330 W. SCHMIDT
nisée en dehors de la tribu, parfois même contre elle. Mais il
y a des cas où l'organisation de la société secrète a fait sa paix
avec les autorités de la tribu et s"est même confédérée avec
elles.
3. L'initiation tribale en général concerne seulement des
jeunes gens, ceux qui passent de l'enfance à l'âge plus mûr,
tandis que les candidats de la société secrète peuvent être
très divers, deiiuis les enfants les pins i)etits jusqu'aux hon)-
mes adultes. Cette différence elle aussi est souvent diminuée,
parce que l'initiation tribale ne se fait parfois qu'après une
série d'années ; en pareil cas, les candidats sont de différents
âges ; ce sont même quelquefois des gens mariés.
4. Dans les sociétés secrètes, il y a presque toujours des
déguisements, le plus souvent avec des masques. Ces usages
appartiennent à l'essence même de ces sociétés. Dans les ini-
tiations, on emploie quelquefois des déguisements pour cer-
taines personnes, mais très rarement des masques.
Si la difféi'ence entre initiation et société secrète en général
el en pj'incipe est reconnue par les ethnologues, même quand
ils n'ajqtarl iennent pas à l'école historique, ils ne sont pas
d'accord cependant sur l'âge respectif des différentes formes.
Tous (ou presque tous) reconnaissent bien que l'initiation
ti'ibale est plus ancienne que la société secrète, mais ils diffè-
rent d'avis, quant à la position des confraternités magico-
religieuses et des clubs. Tandis que Sghurtz, dans son ouvrage
Altersklaasen unil Mànnerhunde (p. 218-437), place ces confra-
ternités et clubs entre les initiations tribales et les sociétés
secrètes, Hutton Webster, dans son ouvrage Primitive Secret
Societi'fi (p. 7 4-190), les range apj'ès les sociétés secrètes.
C'est en etï'et leur vraie position. Presque tous les écrivains
(jui ont traité cette matière, donnent de la suite de ces insti-
tutions enti'c elles des explications plus ou moins évolution-
nistes : société secrète et confraternité magico-religieuse ne
sont pour eux que le produit d'une décomposition plus ou
moins avancée de l'initiation tribale. Ils alTirment donc une
évolution, variable, il est vrai, dans ses formes, mais au fond
rectiligne, comme le fait en général toute doctrine évolution-
niste.
L'opposition de l'école historique contre ces théories et le
INITIATIONS TRIBALES ET SOCIÉTÉS SECRÈTES 331
grand mérite qu'elle s'y est acquis, porte sur trois points
capitaux : 1. elle montre qu'il y a des différences essentielles
entre les diverses formes de l'initiation tribale et que ces
différences dépendent de la nature des cycles culturels aux-
quels ces rites appartiennent ; 2. elle fait voir les causes
concrètes qui, dans un cercle culturel déterminé, ont conduit
à cette décomposition de l'initiation tribale qui donne origine
aux sociétés secrètes ; 3. elle indique les différentes voies de
mélange entre certaines formes d'initiations et de sociétés
secrètes, par lesquelles se sont formées les confraternités
magico-religieuses, les clubs et les organisations semblables.
I. FORMES On'ERSES DES INITIATIONS TRIBALES
Puisque l'initiation tribale veut introduire le candidat dan?
la possession totale des droits et l'exercice toi al des obliga-
tions propres à la tribu, on 's'explique facilement qu'elle re-
flète en elle-même exactement la nature même du cycle
culturel auquel elle appartient.
Dans le plus ancien cycle culturel, celui des Pygméos, c'est
la famille, individuelle, monogame et fortement constituée, qui
domine, tandis que l'organisation de la tribu comme telle,
l'Etat naissant, ne joue pas encore un rôle important.
Mais précisém.ent dans l'initiation, la tribu se manifeste
]nibliquement. cai- l'initiation est faite toujours par tribu et
non par famille. Cependant l'initiation tribale même ne con-
siste en rien d'autre que dans l'admission aux droits et aux
devoirs de la famille. Cette forme d'initiation ne connaît pas
de secrets : les bommes prennent part aux initiations des
jeunes filles, et les femimes à celles des garçons. Tel est le
cas chez les Andamanais. Dans l'Australie du Sud-Est. HownTT
avait déjà vu que chez les Kurnai, tribu la plus ancienne, les
femmes prennent part à une partie considérable de l'initia-
tion tribale. Comme je l'ai montré dans un travail spécial. Dir
Qphpimf Jûnglinysiveihr eincs anstrnlischen Urstammrs (Pader-
born, 1923), le rôle que la famille et les femmes y jouent, est
encore plus im])ortant que Howitt ne l'a vu. Dernièrement,
mon confrère, le R. P. Koppers, a découvert cette même forme
d'initiation, où garçons et filles sont initiés dans la même
332 W. SCHMIDT
solennilé, chez la tribu la plus ancienne de l'Amérique, les
Yaniana, une des tribus des Fuégiens. Chez les Andamanais,
il n'y a presque pas de déguisements et de représentations
mystérieuses. Chez les Kurnai, on en trouve quelque rudiment :
le couple des ancêtres y est représenté par deux « bull roa-
rers » ; mais Tautorité suprême réside dans l'Etre Suprême
qui a institué l'initiation, et les candidats reçoivent une ins-
tr'uction qui porte sur la religion, rbisluire. les devoirs sociaux
de la tribu. Enfin, il n'y a pas de déformation corporelle comme
signe de l'initiation reçue.
Chez les Yuin. voisins des Kurnai, qui représentent dans
leur initiation le type du cycle culturel suivant, celui du
boumerang, un changement considérable s'est produit. Le dé-
guisement est plus complet ; des représentations mythiques
multiples et des danses rythmiques ont lieu. On ne trouve plus
le couple des ancêtres, mais seulement l'ancêtre masculin, le
premier mortel, représenté sous la forme mythique de la lune
décroissante et renaissante, avec laquelle aussi l'Etre suprême
s'est conjoint. En connexion intime avec ces rites d'initiation,
on rencontre la déformation corporelle, l'excision des dents.
Il est sévèrement interdit aux femmes de prendre part à
aucune partie des cérémonies, et l'on ne voit pas qu'il y ait
une initiation des jeunes filles. Ici la tribu commence à pré-
valoir sur la famille.
Telle est la condition de l'initiation dans les trois plus anciens
cycles rvltureh. qui répondent au régime économique de la
cueillette. En aucun de ces cycles il n'y a encore de société
secrète. Il faut cependant faire l'cmarquer que les formes
spécifiques de ces cycles, on tant qu'ils se trouvent dans
l'Africjue et l'Amérique, ne nous sont que peu connues jus-
qu'ici. En Aimérique du Nord, chez les Selish et les tribus du
Nord-Ouest de la Californie, oij le totémisme individuel esl
fortement développé, il paraît que l'initiation même des gar-
çons consiste dans la retraite individuelle du garçon (et de la
jeune fille) dans la solitude, pour obtenir, par le jeûne et par
les songes, son totem individuel.
Si nous passons maintenant aux cycles culturels où l'homme
travaille la nature pour augmenter sa production, la condition
INITIATIONS TRIBALES KT SOCIÉTÉS SECRÈTES 333
de rinitiation dans les uns et les autres est tout à fait diffé-
rente. Dans le cycle des nomcules, e'iile disparaît presque com-
plètement. Le fait s'explique parce que fimpoi'tance de la tribu
est ici encore plus affaildie, tandis que la famille a gagné
économiquement et socialement; elle s"ost en effet élargie
pour devenir, sous l'autorité des grands parents, la grande
famille, Gro.s.sfainilie. C'est seulement plus tard que, chez quel-
ques peuples de ce cycle, le jeune homme est initié, par une
cérémonie rudimentaire, à la tradition des armes.
Tout à fait contraire est la condition de l'initiation dans le
cycle culturel totémiste. Ici, la tribu, l'Etat joue un rôle tou-
jours croissant, tandis que la famille perd en importance.
L'initiation, qui donne la plénitude des droits tribaux, est donc
ici d'une importance capitale. EHe marque profondément dans
la vie de l'individu, et elle forme le noyau de toute une série
de classes d'âge qui la précèdent et la suivent. En elle-même,
cette initiation n'est faite que chez les garçons, et la maturité
sexuelle de l'homme en forme l'objet prépondérant. Gela se
manifeste surtout dans la circoncision, dont la signification
s'explique donc par sa relation à ce cycle culturel. Mais chez
plusieurs peuples nomades qui ont accepté la circoncision et
où elle est faite déjà aux petits en.fants, elle a pris plutôt le
caractère d"un sacrifice de prémices, qui est grandement en
vogue chez ces peuptes. En général, le thème fondamental de
l'initiation dans ce cycle est d'assimiler les garçons au jeune
soleil de matin, beau et vigoureux, qui est ici l'ancêtre et le
dieu principal ; cette assimilation se produit par l'épilation
du duvet capillaire et par la coloration du corps en rouge.
Après l'initiation, une période de licence sexuelle suit ordi-
nairement.
ToutCiS les cérémonies ont lieu sans aucune participation
des femmes, qui, i)ar les plus sévères défenses, en sont tenues
éloignées. Chez quelques tribus, soit par un reste d'influence
des cycles plus anciens avec initiation parallèle des deux
sexes, soit par suite de l'influence exercée par des tribus
matriarcales, une initial ion des jeunes filles a lieu, mais, le
plus souvent, séparée de celle des garçons. Chez plusieurs de
ces ti'ibus, une mutilation corpruvdlc, con-espondanf à la cir-
concision, est aloi's exercée sur les filles.
33 4 ^V. SCHMIDT
Une niodification toute différente s'esl produite dans le cycle
matriarcaJ. Là, par l'invention de l'agriculture, ou plutôt de
riiorticulture {Eackhau) , la femme est devenue la première et
seule propriétaire du sol ; elle s'est acquis sur l'homme une
prépondérance économique et sociale considérable ; un vrai
matriarcat s'est établi. En conséquence, la position de l'homme
a beaucoup perdu de sa signification ; aussi n'apparaît-il plus
important de célébrer, par des cérémonies déterminées, l'en-
trée du jeune homme dans la condition de l'adulte. C'est alors
Lin fait caractéristique que, dans les tribus matriarcales, l'ini-
tiation tribale des garçons glisse dans un état de décadence
ou disparaît même complètement. La prépondérance économi-
que et sociale de la femme, qui s'est établie ici, demanderait
qu'au contraire l'initiation de la jeune fille gagne en impor-
tance et soit marquée par une série de rites significatifs. Mais
il y a deux causes qui empêchent que ces rites deviennent,
dans la grande majorité des cas, des initiations tribales pro-
prement dites, c'est-à-dire collectives. C'est d'abord, comme
ScHURTZ l'a bien vu, la nature psychique de la femme, qui la
dispose moins pour la vie de la tribu et de l'Etat que pour
celle de la famille individuelle. C'est d'un autre côté la nature
physique de la femme, chez laquelle le début de la maturité
sexuelle est marquée plus distinctement, et par cela plus
individuellement, par la première menstruation. Ces deux
causes ensemble ont pour résultat que, dans la grande majo-
rité des cas, parmi les tribus matriarcales, l'initiation des
jeunes filles est bien célébrée par des rites déterminés, à
savoir par une réclusion loin de Vaspect du soleil, par certains
jeûnes, des lustrations, des fumigations — non pas par des
mutilations corporelles — ; mais tout cela se passe individuel-
lement pour chaque fille et dans le sein de sa propre famille ;
ainsi la cérémonie ne devient-elle pas une affaire de la tribu.
II. ORIGINE DES SOCIÉTÉS SECRETES
Outre la prépondérance économique de la femme, qui s'est
effectuée dans les tribus matriarcales, il y a encore un autre
facteur qui tend à diminuer la position de l'homme. Puisque
la femme, en un tel milieu, est devenue la propriétaire du sol,
c'est elle qui forme à présent l'élément stable, et l'exogamie
INITIATIONS TRIBALES ET SOCIÉTÉS SECRÈTES , 335
locale, qui demandait jusqu'ici que dans la conclusion du
mariage la femme quitte son habitat, ])our suivre Thomme
dans le sien, se tourne dans le sens inverse, pour demander
que riidinme adopte la résidence et j)asse dans la tribu de la
femme. Dans la première phase de l'évolution, l'homme ne le
fait pas encore ; mais de son côté la femme reste chez elle ;
dans ce cas, le mariage lonclu nentiaîne pas communauté
de logis entre les deux mariés ; il amène seulement des visites
j)lus ou moins longues de l'homme à sa femme dans la tribu
de cellc-fi. On voit que, dans une telle situation, l'homme est
plutôt un étranger, un hôte dans la tribu de sa femme. Dans
la deuxième phase, l'homme quitte, en effet, sa propre tribu et
prend son logement définitif dans l'habitation de sa femme.
Déraciné de sa propre tribu, il ne s'enracine pas non plus dans
celle de sa femme ; il y reste un étranger et continue à
occuper une position inférieure, relativement à la prépondé-
rance économique et sociale de sa femme. Le culte officiel
des esprits et divinités tutélaires de la tribu, divinités dont la
principale est ici de sexe féminin, la lune, regardée comme
ancêtre, est exercé par la femme ou par son frère aîné. Si
nous ajoutons que ces hommes étrangers à la vie tribale
proviennent de leur côté de différentes tribus, il s'ensuit éga-
lement qu'entre eux ils n'ont pas de lien commun, social,
organique.
Avec tout cela, nous avons réuni tous les facteurs qui con-
duisirent à la création des sociétés secrètes par les hommes.
Ce n'est donc que dans le cercle matriarcal qu'elle s'est pro-
duite. Elle n'est pas le résultat direct d'une décomposition de
l'initiation tribale des garçons ; elle résulte de l'opposition des
hommes contre la prépondérance des femmes, dans le cercle
matriarcal, et de la tendance des hommes à se créer, pour s'en
affranchir, une organisation propre, assez forte pour main-
tenir leur indépendance et pour réduire les femmes dans un
état de soumission.
Par là s'explique l'emploi du secret et de la terreur. Pour
assurci' la stabilité et le bon fonctionnement de cette institu-
tion, il devint nécessaire de soumettre les candidats à des
épreuves, souvent assez graves, par exemple par le meurtre
d'un proche parent, voire même de la propre mère (au Congo).
336 ^ W. SCHMIDT
Lorsque l'autorité de la société commença à s'étendre et que
1p nombre des candidats devint toujours plus grand, la néces-
sitié s'imposa de créer des grades différents, pour préserver
intacts les secrets plus importants.
Puisque les hommes mariés, dans une tribu matriarcale,
pouvaient appartenir à des tribus différentes, en formant leur
nouvelle société secrète, ils ne la mettaient pas en relation
avec la vie tribale oiïîcielle ; mais ils la tenaient hors de
celle-ci et assez souvent contre elle. Par là même, la société
secrète acquit aussi une tendance innée à se répandre au-delà
des frontières de la tribu où elle avait été fijndée et à créer
ainsi une vie intertribale, i)récurseur de la vie internationale,
nourrie souvent par une propagande directe très intense.
Le même fait de Torigine différente des hommes réunis en
société secrète entraîna des conséquences spéciales pour ce
qui concernait la vie religieuse. Puisqu'ils n'avaient pas d'an-
cêtre commun, puisque le culte de l'ancêtre tribale était exercé
par les femmes et s'adressait à un être féminin, les hommes
se mirent à honorer des ancêtres individuels masculins, et
peut-être plus tard les morts en général. Ainsi élaboraient-ils
l'idée de la vie et de la mort et de la vie après la mort, qui
avait déjà dominé l'initiation dans le cycle du boumerang.
Puisque le culte commença ainsi à s'adresser aux ancêtres
individuels, l'idée de la vie spirituelle, non-corporelle, des
âmes individuelles, séparées après la mort, s'y affirma et se
développa ; l'animisme trouva ici son plein épanouissement.
Dans les danses et cérémonies de ces sociétés secrètes, on
représentait le mort par le crâne du défunt. Plus tard, il fut
remplacé par un masque.
ni. DIFFÉRENTES FORMES DE MÉLANGE
Juisqu'ici nous avons décrit les différentes formes de l'ini-
tiation tribale, puis l'origine et la forme primitive de la société
secrète. Toutes ces institutions se développèrent indépendam-
ment l'une de l'autre, au cours d'un long espace de temps. Il
importe de connaître exactement ces éléments primaires et
■ leur nature intime, car autrement il est impossible de démêler
les coml)inaisons multiples qui, plus tard, commencèrent à se
produire, surtout par suite de la diffusion des sociétés secrètes
INITIATIONS TRIBALES ET SOCIÉTÉS SECRÈTES 337
d'une part, et de l'autre par suite de )"irruption des peuples
nomades dans les régions des peuples à civilisation totémiste
et matriarcale.
Ces produits de mélange ne sont pas seulement nombreux,
mais aussi extrêmement variés, de telle sorte qu'il est impos-
sible de fixer à leur suj.et des règles et lois générales. En efîet,
même lorsque les éléments constitutifs sont identiques, le
degré de force et d'intensité dans lequel ils se combinent est
sujet à des variations infinies. Il faut donc faire des recherches
de détail pour chaque cas concret, et c'est surtout ici que la
méthode historique est indispensable. Du reste, les temps
dans lesquels ces mélanges se produisirent, appartiennent
déjà, dans beaucoup de cas, à ces périodes que nous appelons
historiques, dans le sens plus étroit du' mot, c'est-à-dire à
celles 011 les documents écrits commencent à s'offrir. Dans
les conférences qui suivront selon le programme de notre
Semaine, notamment dans celles qui ont trait aux mystères
des peuples antiques, vous rencontrerez plusieurs types de
ces mélanges. Par suite, je puis me borner ici à indiquer seu-
lem^ent par quelques lignes générales les directions dans les-
quelles ces mélanges se sont effectués.
iGonsidérons d'abord le cas d'un mélange du cycle nomade,
éleveur de bétail, patriarcal, avec le cycle horticulturiste ma-
triarcal ; dans ce mélange, l'horticulture {Hackbau) de la
femme se change très souvent en agriculture des céréales, à
l'aide de la charrue tirée par le bétail. Ici, le culte, officiel,
matriarcal, d'une déesse lunaire, protégeant le travail du sol,
se change en culte de la Terra Mater, ArjorjTTjp, sous des formes
multiples. A cette Terra Mater le culte des nomades associe
très souvent celui du Ciel-Père, qui deviendra alors l'époux
de la Terre. Selon l'importance attribuée soit à l'élément mas-
culin, soit à l'élément féminin, c'est ou le Ciel-Père ou la
Terre-Mère qui domine plutôt dans ce culte. Ainsi en Chine,
dans l'Afrique occidentale et dans différents cultes méditer-
ranéens. Ces cultes sont d'abord officiels, publics pour toute
une tribu, une ville, un groupe de villages ; mais, par la pro-
pagande qu'ils exercent, ils se répandent et deviennent ailleurs
des cultes plus ou moins ésotériques.
Autre est le mélange du cycle totémiste patriarcal avec le
22
338 W. SGHMIDT
cycle hortii-ulturiste matriarcal. C'est plutôt le Soleil-Père du
cycle totémiste qui est associé ici à la Terre-Mère ; l'idée de
la génération humaine active, dérivée du premier cycle, s'y
affirme dans les rites phalliques agraires ; les cérémonies de
fertilisation des champs prennent là leur origine. Ainsi en
va-l-il dans les îles Moluques et dans l'Inde Occidentale. Si
à ce mélange se superpose encore le culte propre aux nomades,
il en résulte un vague flottement entre le Ciel-Père et le
Soleil-Père, tel qu'on peut l'observer dans la figure de
Zanahari, être suprême des Malgaches. Là encore, les cultes
ne sont pas en eux-mêmes secrets, mais plutôt officiels, pu-
blii's ; ils ne deviennent ésotériques que secondairement, là
où ils s'implantent par voie de propagande.
'Toute autre est la -situation, si le mélange a lieu soit entre
le cycle des ncmiades, soit entre le cycle totémiste d'une part,
et les sociétés S'Ccrètes du cycle matriarcal d'autre part. Con-
sidérons d'abord le cas d'un mélange du cycle des nomades
avec les sociétés secrètes du cycle matriarcal. A vrai dire, il
ne semble pas avoir été très fréquent. Le cycle des nomades,
en efîet. représente presque toujours dans le mélange culturel
l'élément régnant, aristocratique, voire même dynastique ; il
s'oppose par le au caractère plutôt démocratique et plouto-
cratique des sociétés secrètes. C'est un peu ce qui se présente.
à notre époque, dans Topposition instinctive entre les aristo-
craties et les dynasties d'un côté et les franc-maçonneries
d'autre côté : les partis se sentent rivaux, et s'il y a des
compromis, c'est presque partout la société secrète qui en tire
profit. De là vient aussi que les peuples qui se rattachent au
cycle des nomades, très souvent n'aiment pas à entrer dan?
les sociétés secrètes. C'est le cas des Watutsi, pasteurs aris-
tocrates, par rapport à la société secrète des Imandv^ra, chez
les Nègres Bantous, agriculteurs de l'Afrique Orientale. Mais
pourtant le mélange se produit, surtout à mesure que les so-
ciétés secrètes perdent leur caractère social et politique et se
transforment en iTinfraternités i)lus ou moins religieuses. Dans
ce cas, l'intelligence plus vaste et plus prompte des nomades
commence à idéaliser et à rationaliser ces cultes secrets. Alors
piennent naissance les mythologies systématiques et compli-
quées et plus tard les prenaiers germes des philosophies, plus
INITIATIONS TRIBALES ET SOCIÉTÉS SECRÈTES 339
OU moins ésotériques à leurs débuts, comme on le voit en
Chine, dans l'Inde, en Perse, en Grèce.
Beaucoup plus fréquents sont les cas de mélange du cycle
totémiste avec les sociétés secrètes du cycle matriarcal. L'es-
pèce de mystère dans lequel s'effectuent Tinitiation totémiste
et l'initiation à la société secrète donne déjà quelque chose
de ciimmun à ces deux formations sociales. En second lieu,
leur caractère forcément masculin établit entre elles une affi-
nité interne très notabie.
Il y a surtout deux choses importantes qui, dans le mélange
de ces deux formations, s'entrechangent et s'entrecroisent.
D'abord, le culte des ancêtres humains masculins des so-
ciétés secrètes s'unit au culte des ancêtres totémiques, plutôt
masculins dans la grande majorité des tribus ; aux crânes
humains et à d'autres parties du corps humain, employées
dans les cérémonies des sociétés secrètes, s'ajoutent des
crânes d"animaux et 'plus souvent d'autres parties, griffes, becs,
plumes des animaux employés dans les rites totémiques ; aux
masques et affublements représentant les ancêtres humains
dans les sociétés secrètes, à leurs danses et cérémonies expri-
mant l'apparition et la disparition de ces ancêtres s'ajoutent
les masques, affublements, danses et cérémonies représentant
dans les rites totémiques les animaux dans les formes mul-
tiples de leur vie. C'est ce qu'on observe dans l'Amérique du
Nord, chez les tribus du Nord-Ouest et autour des grands Lacs.
Deuxièmement, è l'animisme exubérant des sociétés secrètes
et du cycle matriarcal en général, s'associe la magie qui do-
mine le cycle totémiste dans une infinité de ses rites et céré-
monies. Ce sont alors les confraternités magico-religieuses
qui prennent leur origine surtout dans ce milieu, comme on
peut le constater en A^frique Occidentale, au Congo, au Mexi-
que. Si le cycle des nomades se superpose encore à ce mélange,
la complexité devient encore beaucoup plus grande ; mais ici
encore l'intelligence plus claire et plus pure des peuples no-
)nades réussit à systématiser ces conglomérats et, en nombre
de cas, à les idéaliser, à les purifier, pour parvenir ainsi à
d'autres philosophies, plus panthéistes et évolutionnistes que
dans les cas cités plus liauf, où l'on A'oit plutôt l'idée de dieux
personnels et créateui's occujter' une place lui'piuKh'ranle.
3iÛ E. DE JOXGHE
IV. CONCLUSION
Il sera bon de faire halte ici et de conclure. La multiplicité
et la complexité des formes qui se produisent à ce stade (soit
par propagation, soit par fusion tle sociétés anciennes, soit
pai' création de sociétés nouvelles, qui retiennent toujours au
moins quelques traits des types préexistants), deviennent
telles en effet qu'elles défient toute exposition générale. Il faut
entrer dans les détails pour rester vrai et juste. Par les brèves
explications qui précèdent, j'espère du moins avoir rendu bien
clairs deux points principaux.
1° Il n'y a pas d'espoir de démêler les phénomènes compli-
qués des mystères et des sociétés secrètes des peuples antiques
et d'autres peuples plus évolués, si l'on ne connaît pas exac-
tement les formes originelles des initiations et des sociétés
secrètes chez les peuples primitifs. De ces formes originelles
pro'viennent en effet les éléments fondamentaux qui entrent
en composition ; c'est donc par elles qu'il convient d'éclairer
les formes plus récentes ou actuelles et non vire versa.
2° Ce n"est pas en suivant les règles d'un vague évolution-
nisme, mais par la voie sobre et patiente do recherches histo-
riques, que nous parviendrons à débrouiller les mélanges
multiformes qui se sont produits en ce domaine et à discerner
aussi, le cas échéant, avec la rigueur scientifique qui convient,
des éléments hors de toute origine et évolution naturelles,
comme est dans son ensemble le phénomène du Christianisme,
avec ses idées, ses rites et ses sacrements.
[24] Les Sociétés secrètes en Afrique,
par M. Ed. De Jonche, prof, à l'Univ. de Louvain.
Les sociétés secrètes indigènes sont des sociétés fermées
plutôt que des sociétés vraiment secrètes. Les profanes con-
naissent les adeptes ; ils savent où et quand ceux-ci se réu-
nissent ; mais ils ignorent ce qui se dit et ce qui se fait dans
les réunions.
Ces sociétés se forment à l'intérieur de sociétés plus géné-
rales (peuplade, tribu, clan ou village) et groupent des individus
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES EN AFRIQUE 341
qui se sentont tenus par des liens de solidarité. Cette solidarité
résultant de leur initiation aux mêmes mystères, se manifeste
I»ar des fêtes, des réunions, des gestes, des mots de passe et
quelquefois par une langue spéciale.
iCertaines sociétés secrètes indigènes admettent des hom-
mes seulement ; d'autres des femm&s seulement ; dans quel-
ques-unes les sexes .sont mélangés.
Des ethnologues ont rattaché à Tétude des sociétés secrètes
les initiations qui, chez certaines peuplades, marquent le pas-
sage de Tenfance à l'adolescence. Quoique ces initiations soient
souvent secrètes, elles ne peuvent être confondues avec les
initiations aux sociétés secrètes. Elles ont pour hut de faire
participer les candidats, qui sont toujours des enfants, aux
droits politiques et religieux de leur groupe.
'L(à oîi les groupements secrets des hommes sont puissants, il
y a souvent de la part de ceux-ci une tendance à prendre la
direction des initiations de la puberté. Celles-ci peuvent de-
venir le premier stade de l'initiation à la société secrète.
Il existe donc un rapport assez étroit entre les deux institu-
tions, qu'il est quelquefois difficile de distinguer l'une de l'autre.
Nous examinerons successivement les rites de la puberté,
les sociétés secrètes et les théories qui ont été émises i)0ur
expliquer ces deux institutions.
I. — LES RITES DE LA PUBERTÉ.
Chez tiius les ])euples, c'est la mère qui s'occupe des enfants
en bas âge. Il arrive un moment où l'enfant est enlevé à la
tutelle de sa mère pour entrer dans la catégorie des hommes
et être mis dans les conditions requises pour fonder un nou-
veau foyer.
Les rites qui opèrent ce passage portent divers noms : ini-
tiations tribales, écoles de sauvages, bush schools, écoles de
féticlu'urs, Mannharkeitsfeste, fêtes ou cérémonies de la puberté.
Nous préférons l'expression rites de la puberté. C'est en effet
vers l'époque de la puberté que l'initiation se pratique. Le mot
« puberté » ne doit [las être ju'is ici dans le sens strictement
physiologique. Ce n'est pas au moment précis où le garçon
devient pubère, mais \ers l'époque de la [Miberlé, que ces rites
s'accomplissent. Que ces fêtes aient lieu une fois tous les ans
3 42 E. DE JO-NOHE
OU seulement tous les deux ou trois ans, elles groupent fatu-
Ipnient des enfants d"àge différent, mais jugés capables de subir
rinitiation.
]^os filles n'échappent pas à ces pratiques. Chez elles, la
])uberié se l'ecimnaît plus facilement. C'est généralement à
l'occasion de la première menstruation qu'elles sont isolées et
soumises à un régime spécial. Leur initiation a un caractère
sexuel bien marqué, d'intérêt plus individuel que social. Comme
elle intéresse beaucoup moins que celle des garçons l'organi-
sation des sociétés secrètes, nous ne l'examinerons pas ici.
L'étude des rites de la puberté chez les garçons révèle une
grande diversité de formes. De l'examen de celles-ci, nous dé-
gageons la tlescription schématique suivante.
liOrsqu'un certain nombre de jeunes gens sont en âge d'être
admis à l'initiation, on fixe le jour -de l'ouverture des cérémo-
nies. Les garçons, dont l'âge sera de 10 à 18 ans, sont réunis
et conduits dans un campement provisoire, construit en dehors
du village, sous la conduite d'un vieillard. Ils doivent y subir
virilement certaines épreuves, telles que fustigations, tatoua-
ges, circoncision, limage ou ablation des incisives. Ils vivent,
mangent, chantent, dansent, dorment à l'abri des regards des
profanes. Ils apprennent ce qui est permis ou défendu, pren-
nent connaissance des traditions et des intérêts de leur groupe
social et politique. Ils sont peints d'argile blanche ou rouge.
sont soumis à tout un système d'interdictions, reçoivent un
nouveau nom. Ils sont morts et devront ressusciter. Tout cela
dure quelques semaines, quelques mois, parfois deux ou trois
ans. Cette retraite se termine par des festivités : bains, pro-
cessions, cadeaux, danses, festins.
Parmi Iqs épreuves qui caractérisent chez un grand nombre
de non-civilisés le passage des enfants dans la classe des
hommes, la circoncision paraît la plus importante.
En vue d'établir les rapports qui existent entre la circonci-
sion et les rites de la puberté, nous avons groupé les peuplades
suivant qu'elles pratiquent la circoncision vers l'époque de la
puberté, ou dans le très bas âge, ou qu'elles ne pratiquent pas
cette opération. Nous avons constaté à cette occasion que notre
ctmnaissance des faits est encore très incomplète. La carte de
la dispersion de la circoncision en Afrique présente de grandes
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES:; EX AFRIQUE 34 3
lacunes. >'ous avons voulu compléter par des enquêtes per-
sonnelles les données de la carte dANKERMANN, notamment
pour ce qui rf^garde Tàge auquel se pratique la circoncision au
Congo belge. Cette enquête n'est pas tout à fait achevée.
>'ous résumons les principales constatations faites.
1. Parmi les peuf)lades non-circoncises, il s'en trouve qui
n'ont pas de rites de la puberté. Il y en a aussi chez lesquelles
ces rites existent sous une forme très rudimentaire. par exem-
ple le simjjle changement de nom du jfune homme (Bam-
bala} (1), l'obligation des jeunes gens de passer la nuit dans
des dortoirs communs (Tanganika occidental) (2). peinture
corporelle, à l'occasion de la première participation aux danses
du village (Kasai) {3), passage du jeune homme du village
paternel dans celui de son oncle maternel, chez certaines peu-
plades dites matriarcales etc.
2. Les mêmes phénomènes peuvent se présenter chez les
peuplades qui pratiquent la circoncision sur l'enfant en bas
âge, telles que Bateke, Kundu, Wangata, Bangala etc.
Chez les Ababua. quand pour quelque raison la circoncision
n'a pas été pratiquée en bas âge, le jeune homme se soumet à
l'opération plus tard ; celle-ci a lieu individuellement et sans
aucune initiation. Pendant la période de la cicatrisation, le
jeune Ababua porte un cerceau en jonc, suspendu aux épaules
par deux cordes, et auquel sont fixées des feuilles de bananier
effrangées.
Au Mayomlje. comme ciiez les Golah (4) de Sierra Leone, il
arrive aussi que des jeunes gens n'ont pu être circoncis en
bas âge ; ils le sont alors éventuellement, pendant la retraite
du type bush school dont nous parlerons plus loin.
Les Babali, au Nord de Stanleyville. ont une initiation géné-
rale de la puberté, caractérisée par des fustigations. Cette ini-
tiation, tout à fait indépendante de la circoncision, s'appelle
dans leur langue mouibcla : elle se complète par l'initiation dans
une société secrète. Le rite principal de celle-ci est l'opération
du tatouage de l'ibis, pendant laquelle on imite le cri de l'oi-
seau, à l'aide de la planchette sonore ou rhombe (5).
Les Herrero sont circoncis vers l'âge de cinq mois. Leurs
(1) L,es chiffres lenvoii'nt aux nnméios de la bibliogiaphie ; infro, p. 355.
344 E. DE JONGHE
rites de la pulierté, très développés, consistent à enlever les
incisives de la mâchoire inférieure et à limer en triangle les
bords internes des incisives médianes de la mâchoire supé-
rieure. L"opération a lieu entre 10 et 15 ans. quand les dents
permanentes sont complètement formées. Les garçons et les
filles sont réunis pour la subir au nombre de 20 à 40. Par
raison d'économie, ces opérations, accompagnées de cérémo-
nies religieuses et de fêtes, n'ont pas lieu tous les ans. Après
avoir subi ces déformations dentaires, les garçons jouissent
de tous les droits des hommes ; les filles peuvent se marier.
Chose curieuse, quand les Herrero font subir cette opéra-
tion à leurs prisonniers Hottentofs ou Bushmen (incirconcis),
ils pratiquent sur eux la circoncision, dix jours à un mois après
les déformations dentaires, c'est-à-dire après la guérison com-
plète des mâchoires (6).
Chez les Bakuba du Kasaï. qui pratiquent la circoncision vers
le premier mois après la naissan(.'e, l'initiation de la puberté
présente deux formes : le tuki mbula. qui a lieu quand le fils
du chef atteint l'âge de 8 à 10 ans, et dure 9 jours, et le nkanda,
qui a cessé d'exister, et qui visait à former la jeunesse à la
discipline par un code de morale pratique et par des épreuves.
Les initiations de la puberté ont ici un caractère essentielle-
ment social et politique : les chefs s'en servaient pour le recen-
sement de la population (7).
3. C'est dans la catégorie des peuplades qui pratiquent la
circoncision à l'époque de la puberté que nous trouvons les
formes d'initiation les plus compliquées.
La circoncision est une opération anodine, (luand elle est
pratiquée sur un petit enfant. Elle devient une opération dan-
gereuse, quand elle est faite avec des instruments primitifs
par des opérateurs inexpérimentés sur des adultes. Les acci-
dents graves ne sont pas rares. Aussi chez certaines peuplades,
tels que les Songo du Congo portugais, rend-on l'opérateur
responsable, en cas de suite funeste de l'opération (8).
On comprend aisément, que, dans ces conditions, les peu-
plades aient recours à un homme expérimenté, que les jeunes
gens soient réunis pour subir l'opération, que la période de
guérison. qui dure généralement près d'un mois, soit occupée
par des soins d'ordre médico-magique, que les jeunes circoncis
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES EN AFRIQUE 345
soient soumis à un régime sévère {rinterdictions, qu'ils soient
considérés comme impurs et placés sous la protection spéciale
de certains esprits, que des cérémonies de purification et des
festivités aient lieu, quand ils rentrent dans la vie normale.
Un examen des diverses formes montre que là où les céré-
monies de la puberté ne durent qu'un mois environ, celles-ci
sont réduites aux soins médicaux et aux rites magiques qui
tendent à favoriser la cicatrisation de la plaie. Ce cas se pré-
sente chez les Bayaka, les Baluba, les Baholoholo, les Bakumu.
les Bakele, les Topoke, les Barumbu, les Bangelima, les Warega
des environs de Stanle^-A'ille, les Mangbetu de TUele, les Mandja
du Nord de l'Ubangi etc. Pour favoriser la guérison, les jeunes
circoncis restent autant que possible immobiles et non vêtus.
Quand ils sortent, ils se protègent à l'aide d'un petit bouclier
(Baluba) (9). ou mettent le costume spécial dont nous avons
déjà parlé : un cerceau avec franges d'herbes flottantes (Aba-
bua, Bakumu, Fang etc.).
Partout la circoncision n'est pas entourée de mystère. Cer-
taines peuplades la pratiquent en public. C'est que le jeune
homme doit faire preuve de virilité, de sto'icisme. Ce caractère
d'épreuve à suliir en public se retrouve notamment chez les
Bakota du Congo français (10), les Basonge du Congo belge,
les Akikuyu (11), les Amwinde (12), Meru, Bageshu (13) de
l'Afrique orientale.
Chez ces peuplades, la circoncision acquiert une grande im-
portance politique et militaire. Le même phénomène peut s'ob-
server chez des peuplades qui entourent la circoncision d'un
certain mystère. Les jeunes gens cafres, basuto et betshuana
qui ont terminé leurs épreuves de la puberté forment une
sorte de régiment (Mopato) (14) . Les MaS'Sai, après leur cir-
concision, entrent de })lain pied tlans la classe des guer-
riers (15).
Dans tous les cas, les rites de la puberté ressemblent plus à
l'entrée dans une classe d'âge qu'à une véritable initiation à
la vie du clan ou de la tribu.
Dans beaucoup de cas, le jeune homme circoncis est soumis
à une longue retraite : il acquiert non seulement les droits
politiques et militaires, mais aussi et surtout les droits reli-
gieux du citoyen. Il est spécialement instruit des mystères reli-
gieux.
346 E. DE JONGHE
Cest le type de la « bush school ». que nous trouvons sous
des formes différentes dans l'Afrique du Sud et à la côte
occidentale.
Chez les Gafres Ama-Xosa (16) les jeunes gens sont cir-
concis au début de Técolage...
A la côte occidentale, le caractère magico-religieux et même
Tinféodation à quelque confrérie magico-religieuse s'accentue...
Contrairement à l'usage des Gafres, la circoncision ne se
pratique pas au commencement, mais vers la fin. Elle est une
épreuve accessoire et non essentielle.
A ce type se rattachent les Bakimba du Mayombe, qui ont
été magistralement étudiés par le R. P. Bittremieux (17). Ces
Bakimba représentent, à notre avis, une forme de transition :
les jeunes gens sont consacrés à Mbumba Loango, esprit de
l'arc-en-ciel, conçu sous la forme d'un serpent. 11 est repré-
senté pendant les cérémonies par deux figurines sculptées dos
à dos sur un bâton, le Thafu Maluungu ; Tune des figurines s'ap-
pelle Matundu, l'autre Malanda. Quant aux cérémonies, elles
combinent les rites de la puberté avec les rites d'initiation à
une fraternité religieuse, à une société secrète. Plus au Sud,
à Kionzo. près de Matadi, les Bakimba se rapprochent davan-
tage des rites de la puberté (18) : les femmes n'y sont pas
admises ; la circoncision s'y pratique plus souvent ; les adeptes
ne sont pas consacrés officiellement au gérlie de l'arc-en-ciel ;
mais l'institution a cependant un caractère religieux assez
prononcé. Dans le même groupe ethnique, chez les Bakongo
orientaux, nous trouvons dissocié ce qui est combiné chez les
Bakimba : le nzo longo est une véritable initiation de la puberté
à base de circoncision (19), et le kimpasi est une initiation à
une secte religieuse secrète (20).
Signalons aussi que, chez les Bambara du haut Xiger. les
rites de la puberté existent à peine sous la forme d'une initia-
tion générale : la circoncision opère le passage d'une classa
d'âge à une autre classe d'âge, suivi de l'initiation à une
confrérie religieuse secrète (21).
En résumé, nous constatons que le passage de l'enfance à
l'adolescence est marqué par certaines pratiques, tantôt sim-
ples, tantôt compliquées, aussi bien chez des peuplades non-
circoncises que chez des peuplades circoncises, tant chez celles
LES SOCIÉTÉS SEGRÈTBS EX AFRIQUE 347
qui pratiquent la circoncision sur le petit enfant, que chez
celles qui la pratiquent vers l'époque de la puberté.
La circoncision n'est donc pas l'élément essentiel et indis-
pensable des rites de la puberté.
D'autre part les rites de la puberté ne sont pas partout
l'initial ion à la vie tribale (-omme telle ; ils sont parfois l'ini-
tiation à la classe dos guerriers ou à une classe d'âge, ou
même l'initiation à des mystères religieux et le premier stade
du passage dans une société secrète.
iNous avons voulu rechercher aussi si les rites de la puberté
accompagnent toujours certaines formes d'organisation éco-
nomique ou sociale.
Notre enquête démontre que ces pratiques se rencontrent
aussi bien chez des peuplades pastorales, que chez des peu-
pladeis qui se livrent à la culture à la houe, aussi bien chez
les peuplades des savanes que chez celles de la forêt, aussi
bien chez les peuplades dont la famille est organisée d'après
la filiation utérine que chez celles oîi la filiation est masculine.
II. LES SOCIÉTÉS SECRÈTES.
Les sociétés secrètes sont tout aussi répandues en Afrique
que les rites de la puberté. Gomme ceux-ci, elles présentent
les formes les plus variées, et répondent aux buts les plus
divers.
Elles se trouvent si)oradiquement dans l'Afrique orientale
et dans l'Afrique du Sud. Mais elles pullulent dans certaines
régions du Congo et de l'Afrique occidentale.
Commençons par l'examen des formes les plus typiques des
sociétés secrètes du Congo belge.
Au Bas Congo, nous avons déjà signalé le kimposi. qui so
rapproche du ndevibo. et qui est une secte religieuse secrète.
L'initiation très longue rappelle par beaucoup de points les
rites de la puberté. On s'y consacre à certains esprits et on
s'y livre à des pratiques magiques.
Au Kasa'i, les mûri, décrits comme une société secrèle des
Bimbala par Torday, sont plutôt une caste, une aristocratie
qu'une vérital)le société secrète. Ce qui semble l'indiquer, c'est
qu'on acquiert la qualité de membre par héritage et non par
des rites d'initiation secrète (22).
348 E, DE JONGHE
*Les babende des Bakuba sont décrits comme une société se-
crète en pleine décadence. Autrefois, ils auraient surtout pra-
tiqué le cannibalisme. Aujourd'hui, ils ne se manifestent plus
que pai' des danses masquées et le tambour à friction {ngoy na
buli = léopard de village), qui tient la place de, la planchette
sonore ou rhombe, instrument de terrorisation des profanes.
L'initiation rappellerait celle de la nkanda (23).
Il faut arriver aux Baluba et aux abords du Tanganika pour
trouver des sociétés secrètes nombreuses et en pleine efflo-
rescence. Ici, il est rare qu"un habitant ne soit pas affilié à
quelque secte. Le désir de participer à des danses, de recevoir
une part des libations communes, la facilité de s'y livrer impu-
nément à l'immoralité sexuelle, et surtout l'assurance de se
voir initié à la confection de talismans et de remèdes et à
divers secrets que chaque secte prétend posséder, voilà, d'après
le P, Colle qui a décrit en détail l'organisation de ces socié-
tés (2 4), les principaux mobiles qui pousseraient les noirs à
en faire partie. Et, si quelqu'un montrait peu d'emipresse-
ment à se ^faire initier, il se trouverait des sorciers pour le
forcer, en le menaçant de la vengeance des génies.
Parmi ces sociétés secrètes, le bvlwa (25) est peut-être le
plus répandu. 11 se rencontre au Nyassa, au Bangwelo, au
Moero et au Tanganika. Le butwa du Bangwelo a été étudié
par le Rév. Dugald Campbell (26), dans une peuplade pygmée
de Batwa, qui aurait donné son nom à la secte. Des hommes
et des femmes sont admis comme membres. Contrairement à
la tendance de beaucoup de sociétés secrètes, le butwa n'ins-
pire ni crainte ni répulsion ; il ne terrorise pas par les malé-
fices. 11 établit au contraire entre les membres une solidarité
contre les maléfices et leur procure le plaisir sensuel. L'initia-
tion est à trois degrés, dont le premier rappelle l'initiation
générale à la puberté.
Les sociétés secrètes du Tanganika ont souvent un caractère
politique et social ; mais le caractère magique l'emporte : pra-
tiques de vampires, initiation à la magie, protection contre
les maléfices, hiérarchie, prosélytisme, immoralité, voilà les
traits qui dominent.
Au Nord du Tanganika, chez les Baniabungu, existe la so-
ciété secrète des Imandwa, fort répandue aussi dans le Ruanda.
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES RX AFRIQUE 349
Elle a un caractère religieux très prononcé. Le but est d'assurer
aux inifiés contre les Bazinm. ou mauvais esprits la protection
do Lyangombe. favori de l'Etre suprême et gvnie tutélaire de
la société. On entre dans la société par ordre du sorcier ou
par tradition de famille, pour s'enrii-liir, pour obtenir la fécon-
dité etc. Les rites qui sont intéressants au point de vue du
culte ont été minutieusement étudiés par le P. Arnoux. Le roi
de Ruanda est maître (le l'association ; c'est lui qui nomme
le grand pontife et qui lui donne ses pouvoirs (27).
Les Buami ont été décrits par Delhaise comme une société
secrète des Warega, è l'est de Stanleyville. Ils sont dirigés par
les chefs indigènes. Les riches seuls peuvent atteindi^e les
degrés les plus élevés de la hiérarchie. Cette société a un carac-
tère politique nettement prononcé (28).
La société secrète peut-être la plus puissante et la plus
dangereuse du Congo belge est le nebili (29), qui paraît origi-
naire du pays des Mayogo et qui étend aujourd'hui ses rami-
fications chez les Mangbetu, Bari, Mangbele, Abarambo, Makere,
Ababua. Elle a une tendance à se propager vers le Nord-Est,
chez les Azande, et vers l'Ouest, au pays des Bangala, et dans
rUbangi,
Les nebilistes ont, en plein cœur de la forêt, un temple qui
ressemble è. celui du butwa du Tanganika.
Il est de règle que l'initiation soit précédée d'une période
de retraite pendant laquelle le candidat ne peut communiquer
qu'avec le gaduma, sorcier du nebili. Pour lui faire oublier le
passé, le sorcier lui frappe souvent la tête avec sa flûte ma-
gique ifilili) . Avant d'être introduit dans la salle commune,
le candidat doit avaler une boisson répugnante. Dans le temple,
le chef sorcier le saisit par la nuque et l'incline au-dessus du
foyer. Lorsqu'il est à moitié suffoqué, on l'enduit de la méde-
cine de force {dawa) , composée de sperme humain, de ngula
et de nzuda. On annonce alors au candidat ses devoirs vis-à-vis
de ses confrères, les châtiments qui l'attendent en cas de trahi-
son. Les cérémonies se clôturent par des danses licencieuses.
Comme le bufwa, le nebili est une société secrète intertribale ;
on peut comparer les deux sociétés au point de vue de l'ini-
tialiiin générale qui précède l'initiation proprement dite, au
point de vue do leur temple, de la boisson magique que doit
350 E. DE JONOHE
avalfM^ le candidat et au point de vue de l'immoralité qui y
règne.
A côté de ces sociétés secrètes relativement anciennes, nous
rencontrons des sociétés secrètes de formation toute récente.
lu'indongo de TEquateur en est un exemple (30). Elle s'est ré-
pandue très rapidement, grâce à un moyen bien simple : tout
village qui s'affilie a Tobligation d'initier un nouveau village,
sinon l'esprit futolaire de la secte tuerait le,s enfants dans le
sein de leur mère. Les indongo sont répartis en cinq classes
d'âge. A l'intérieur de chaque classe règne le communisme
parfait, même celui des femmes. Pour entrer dans la société,
il faat se laisser frotter de la poudre rouge de ngiila. qui a été
déposée pendant quelque temps sur une tombe.
Des sociétés secrètes nouvelles peuvent se former, et se for-
ment presque fatalement, pour réagir contre l'intluence du
blanc. L'histoire de la colonisation montre qu'il suffit quel-
quefois d'une faute commise par le colonisateur ou même d'un
simple accident, pour faire surgir des sociétés secrètes. Et il
se trouve toujours quelque féticheur pour faire croire aux
populations mécontentes tju'il a découvert le moyen magique
pour protéger les adeptes contre les armes à feu du blanc.
Nous avons parlé l'e l'initiation à la société secrète du
)ii(>mbela chez les Babali. Cette société secrète est-elle en rap-
port avec les Aniota's, individus qui se travestissent en léo-
pards, pour tuer leurs ennemis ? L'état de notre documenta-
tion ne permet pas de résoudre cette question. Toutefois, il est
probable que les fomenteurs des sociétés secrètes exploitent
une croyance fort répandue en Afrique, d'après laquelle cer-
taines personnes, des sorciers notamment, peuvent prendre
possession momentanément d'un léopard et diriger son acti-
vité. Il est même vraisemblable que les chefs de sociétés se-
crètes'ont à leur solde des hommes-léopards chargés d'exécuter
leurs sentences (3ri.
Des sociétés secrètes de léopards sont signalées aussi en
beaucoup d'endroits de la côte occidentale d'Afrique (32).
Là, comme chez les Babali. il est souvent impossible de dire
si l'on se trouve en présence d'une association de sorciers
criminels, ou en présence de certains chefs de sociétés se-
crètes qui. exploitant la crédulité populaire, utilisent les ser-
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES EN AFRIQUE 351
vices d'hommps-léopards. C'est le cas, par exemple, pour la
société secrète du ,si>/, chez les Bambara. Les souba. dont parle
le P. Henry, pourraient bien être de simples sorciers ou des
exécuteurs de certains chefs sorciers.
Le cadre limité de ce travail ne nous permet pas d'examiner
la variété des innombrables sociétés secrètes qui existent à la
côte occidentale, depuis le Sénégal jusqu'au Congo.
(Le tj^pe prédominant semble être celui de la fraternité reli-
gieuse secrète avec, comme esprit éponyme et tutélaire, géné-
ralement un génie de la forêt, qui fait des apparitions dans
les villages à la grande terreur des profanes. Quand l'esprit
dort, il est précédé d'éclaireurs qui produisent des sons lugu-
bres, à l'aide d'un instrument primitif qu'ils brandissent comme
une fronde. C'est le bnll roarer, le Srhwirrholz. la planchette
sonore ou rhombe, dont nous avons déjà parlé.
Ce n'est évidemment pas par amour de la musique que les
adeptes brandissent cet instrument. Si la société secrète me-
nace d'amende ou de mort le profane qui ne se cache pas à
l'approche de l'homme masqué, c'est qu'elle veut pratiquer un
système de terrorisation ; elle veut dominer, tyranniser. Et
etïeetivement presque partout ces sectes sont parvenues à ac-
caparer le gouvernement. En beaucoup d'endroits, elles sont
devenues des rouages politiques importants, qui rendent la
justice, qui font la police des marchés, qui règlent même le
prix des marchandises et ne reculent pas devant le boycot-
tage, ni même devant les meurtres, pour faire observer leurs
règlements. L'homme masqué qui représente le génie éponyme.
comme l'homme travesti en léopard, y trouvent leur emploi.
En résumé, les sociétés secrètes se manifestent en Afrique
sous les formes les plus diverses et avec les tendances les
plus variées. Nous en avons vu qui ressemblent à des castes ;
nous en avons trouvé qui se consacrent au culte de certains
esprits ; il y en a qui se greffent sur l'initiation générale de
la puberté ; d'autres poursuivent des buts politiques et so-
ciaux ; un grand nombre sont franchement immorales : la plu-
part exploitent des croyances magico-religieuses, en vue de
dominer et de tyranniser. Ce n'est pas exagérer que de les
considérer comme une des grandes plaies de l'Afrique.
Pas plus que les rites de la puberté, les sociétés secrètes ne
352 Ë. DE JONCHE
nous apparaissent comme déterminées par certaines formes
d'organisation économique ou sociale. Nous les avons trouvées
chez des populations de types culturels bien différents. Quel-
ques-unes sont de date très ancienne. D'autres se forment sous
nos yeux.
III. CRITIQUE DES THÉORIES EXPLICATIVES.
La synthèse des rites de la puberté et des sociétés secrètes
émise par Sghurtz (33) a eu un succès énorme. Elle fut ac-
ceptée dans ses grandes lignes par Wundt, Lasgh, Ed. Meyer,
Mbtnhof, Weule, Passarge ; Webster l'a reprise en partie pour
son compte (34) .
Sghurtz est parti de deux types de groupements originels :
l'un, naturel, basé sur Tinstinct sexuel ; l'autre, artificiel, basé
sur l'instinct grégaire. Ce dernier produisit les classes d'âge ;
les rites de la puberté commencèrent par être le passage des
enfants dans la classe des hommes et donnèrent naissance,
par suite d'apports religieux, économiques et politiques, aux
sociétés secrètes.
iNous renvoyons à la critique que nous avons faite de ce
système en 1907 (35). Nous continuons à penser qu'il n'est
pas possible, sans les déformer, de faire entrer les faits dans
le cadre logique imaginé par Sghurtz. Les classes d'âge ne
sont pas précisément l'indice d'une très grande primitivité.
Les Massai, les Gafres, les Bakuba ont une organisation poli-
tique très développée. Et Vindongo de l'Equateur ne crée-t-elle
pas sous nos yeux et de toutes pièces des classes d'âge, en vue
de réglementer un communisme qu'elle met à la mode ? Enfin
Sghurtz exagère Tefficacité de l'instinct grégaire et l'opposi-
tion de celui-ci à l'instinct sexuel ; cet instinct grégaire ne
suffit pas à expliquer la diversité des formes des institutions
que nous envisageons.
A la place d'explications sociales, Frazer met des explica-
tions religieuses. Les rites de la puberté, et spécialement le
simulacre de mort et de résurrection, auraient pour but d'as-
similer complètement le jeune homme au totem de son clan.
'Cette explication ne serait plausible que pour les initiations
qui marquent rentrée dans un monde organisé d'après les
règles du totémisme. Or l'organisation en véritables clans
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES EN AFRIQUE 353
totémiques n'est pas aussi répandue que certains se plaisent
à le croire.
iC'est dans le mànisrne ou culte des ancêtres et accessoire-
ment dans un culte solaire que Frobenius (36) a cru trouver
Texplication des rites de puberté et des sociétés secrètes. L"in-
lluence du culte des ancêtres dans certaines de ces institutions
n"est pas contestée. Mais la thèse de Frobenius est trop abso-
lue. Il a tort de poursuivre cette influence dans les moindres
détails. Beaucoup de ses interprétations relèvent simplement
de rimagination.
Yap Gennep (37) a analysé avec une grande sagacité les
rites d'initiation et la séquence de ces rites. Il a mis bien en
relief l'idée de passage, et distingué à juste titre les rites
d'initiation suivant le groupe dans lequel ils introduisent le
candidat : groupe totémique, classe d'âge, fraternité magico-
religieuse ou société secrète. Sa classification, peut-être trop
subtile, des rites est un guide précieux pour les recherches.
Mais elle ne saurait fournir une explication réelle.
Les théories que nous venons de rappeler appartiennent aux
écoles anthropologique et sociologique. Les explications pro-
posées sont psychologiques ou simplement nominalistes.
La théorie de l'école historico-culturelle mérite un examen
plus approfondi, parce qu'elle peut se réclamer d'une méthode
plus objective et plus rigoureuse.
D'après cette école, les rites de la puberté, avec simulacre
de mort et de résurrection et brisement des dents, appartient
au cycle du houmerang. Ils s'expliquent par la mythologie lu-
naire de ce cycle. La dent brisée représente le jeune croissant
de la lune. — Les rites de la puberté avec circoncision se sont
développés dans le cycle totémique patriarcal. Ils s'expliquent
par la mythologie solaire. Les gens célèbrent par des rites
phalliques la fécondité humaine, qui est mise en rapport avec
la fécondation de la terre par le soleil. — Les sociétés secrètes,
avec leurs danses masquées et leur culte des morts, sont nées
dans le cycle matriarcal à deux classes matrimoniales. Elles
s'expliquent par la mythologie lunaire de ce cycle, dans lequel
elles sont le succédané de l'initiation tribale, si fortement enra-
cinée dans les civilisations patriarcales.
C'est une étude minutieuse des populations océaniennes qui
23
35 i K. DE .TOXfiHE
a pei'iilis crétablir ces eoinjjlexes de civilisation qu'on appelle
cycles culturels. Mais il est permis de craindre qu'à vouloir
retrouver ces cycles culturels dans toutes les parties du monde,
on ne pèche par excès de généralisation.
On concède qu'en Afrique les cycles culturels ne se trouvent
qu'à rétal de mélange. C'est assez dire que les critères ordi-
naires de forme et de quantité doivent être employés avec une
extrême prudence, si l'on veut cviter les illusions, l'arbitraire,
l'esprit de système. ]^a méthode strictement inductive conseille
d'analyser, sans idée préc(mçue, les civilisations des diverses
peuplades, de comparer entre eux les résultats de ces analyses,
de porter ceux-ci sur caries et de tracer, comme Graebner l'a
fait pour TOcéanie, des provinces ethnographiques caractéri-
sées par un ensemble de phénomènes culturels et de chercher
enfin à déterminer l'antiquité relative de ces ensembles cul-
turels.
A certain stade de ce travail délicat, qui est soumis aux règles
de la méthode historico-culturelle, il est utile de mettre à
profit les découvertes ethnologiques faites dans d'autres parties
du monde, mais il serait dangereux de substituer la déduction
à l'inducition. i.
L'extension au monde entier des cycles culturels océaniens
supposerait qu'il n'existe qu'un nombre très limité de types
culturels et que toutes les civilisations actuelles seraient dé-
rivées de ceux-ci par simple contact, mélange ou combinaison.
Cependant les types culturels isolés ne sont pas immuables.
A côté de l'emprunt et du contact, il y a place pour une certaine
évolution interne.
Notre enquête sur les sociétés secrètes en Afrique a montré
que ces institutions se sont développées dans les sociétés les
plus diverses. Le simple fait que certaines pratiques sont im-
posées aux enfants pour leur admission dans la société des
hommes n'a pas besoin d'être expliqué par l'emprunt ou le
contact avec un groupe culturel différent. Il nous apparaît
comme universellement humain et nullement caractéristique
de certains groupements culturels. Mais les formes que revê-
tent ces institutions doivent être étudiées dans le milieu oii
elles se présentent, et, pour les expliquer, il faudra souvent
recoui-ir à l'iiypothèse d'un emprunt ou d'un mélange.
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES EX AFRIQUE 355
Le but immédiat de l'ethnologie est moins de construire un
système d'histoire universelle des civilisations et de recons-
tituer les formes originelles de la société humaine, que de
comprendre et d'expliquer les complexes culturels que nous
trouvons à l'heure actuelle sur la terre.
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t. XXXXV, p. 412. — 2. Delhaise, La Belgique coloniale, 1905, t. XI, p. 105.
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5. Bernard, Le Mombela, dans Congo, t. III, octobre 1922. — 6. Virchow,
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— 7. Tordat et Joyce, Les Bushongo, dans Annales du Musée de Tervueren,
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9. Van der Meiren, La circoncision chez les Baluba-Hem'ba, dans Revue congo-
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dans Anthropos, 1911, t. VI, p. 616-627. — 12. Brown, Circumcision among the
Amwinde, dans Man, 1913, t. XIII, n" 79. — 13. Brown, Circumcision among
the Bageshu, dans Man, 1910, t. X, n" 60. ■ — 14. Passarge, Das Okaivango-
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A. HoLLis, The Masai, Oxford, 1905, p. 294-295. — 16. Schweiger, Der Ritus
der Beschneidung unter den Amaxosa und Amafingo in der Kaffraria, dans
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Gehcimbiinde Afrika's, Halle, 1898. — 37. A. van Gennep, Les rites de passage,
Paris, Nourry, 1909.
35G L. EHRLICH
[25] Tribal Initiation and Secret Societies in Australia,
by Dr. L. Ehrlich, prof, of Ljubljana University.
Australia is (lie L'iassical land of initiation cérémonies.
x\lthough the poor Australian natives liave no stone monu-
mpnts. no writings by whieh Ihey can hand down to future
générations their ideas on the problems of life, they possess
a living monument of the past which immortalizes, like an
unwritten saered book, their most cherished traditions and
enshrines llieir pliilosophy of morals, religion, and human
Society.
This monument is the initiation ceremony at the âge of
puhei'ty, practised by ail tribes known till now througliout
Australia.
In order io be able to fmd ont the principal features of
Australian religions and moral ideas. we shall consider some
characteristic types of Australian initiations and compare them
with one other. For this purpose I choose the initiations of
the 1. Kurnai, 2. Yuin, 3. Kamilaro'i-Euahlayi, 4. Queensland
tribes. 5. Arunta and neighbouring tribes in Gentral Australia.
I. DIFFERENT TYPES OF INITIATION
1. Dyerail. tli<' initiation of the Kurnai (Ij. — Dyerail means
(( bushy, of the bush ». It is the ceremony in the secrecy of
the bush. The chief of a local group sends a messenger with
a buUroarer to the neighbourijig groups and summons them
to the ceremony. Whem the différent groups are assembled,
the Tutnurring (novices) are brought td the cérémonial ground.
The first ceremony is an ofTering of the youth to the heavens,
viz : the guardians hoist them on to their shoulders, while the
boys must lift their hands skyward. Then they are laid to sleep
on the ground and during this night Ihey are not allowed to
utter a word. 'l'hey may manifest needs and wishes only by
gestures. Throughout the night the men and women sing of
the maie sex-tidem (the little emu wi-en).
At a given moment during the night the bullroarers are
(1) A: W. HowiTTj The Native Tribes of South East Australia, London, 1904,
p. 501 sq. ; W. Schmidt, Die geheinie Jiigendiveihe eincs austi-alischen Vrstam-
mes, Paderborn, 1921.
INITIATIO.X AND SECRET SOCIETIES IN ALSTRALIA 357
sounded ; (lie boys must rise to their feet and look toward the
sky, the old men saying to tliem the while : « Look there, look
tliere » and thon explaining to them the doctrine of the Su-
prême Being Mungangaua as follows :
« There lived in olden tinies a great being who taughf the
Kurnai the arts. His son is Tundun, the aneestor of the Kurnai.
Tundun's wife is called Rukut.
« The precepts of .Mungangaua are :
To listen to and obey the old men,
To share everything vvith one's friend,
To live peaeeably with ones friend,
Xot to molest girls or married women,
To nbey the food restrictions. »
The same day the secret of the bullroarer is revealed to them.
A larger bullroarer is shown to them with the words : « That
is Tundun, your grandfather. » A smaller one is supposed to
be Rukut, Tundun"s wife.
2. Kuiinyal. thr initiafion of thf Yuin (1). — Kuvingal means,
like Dyerail, « of tlie busli, the ceremony in the bush ». Tlic
chief of une local group sends the message to the other groups.
A inudthi (bullroarer) takes the place of the credential letters,
fur the niudthi « was given to our fathers by that great Biam-
ban (Lord, Master) », as Howitt was told by the natives.
When the tribes summoned bave arrived. the leader of the
ceremony goes round the différent camps ; halting at each
camp, he raises a boomerang to the sky with one hand, with
the other he points to the earth. Then the women know that
the great Biamban wiil initiale their boys.
In the meantime the cérémonial ground bas been prepared,
on which are eut out symbolic représentations of the rising
tu new' life : — a grave, a spiny ant-eater etc. There is
also a life-sized earthen image of Daramulun. the Suprême
Being of the Yuin.
The guardians bring the boys on their shoulders to a circle
in the midst of whicli a sacred fire is lit. First the boys are laid
for from ten to twelve minutes near the fire « to be roasted ».
Aftciwards thev are brought to a smaller circle to bave one
(1) Howitt, op. cit., p. 517 sq.
358 L. EHRLICH
upper ineisor knocked out ; but prior to this men surround tho
women and, pointing with tlieir boomerangs to the sky, bid
them leave the sacred place. They are supposed to be pointing
to Daramulun in heaven. Then the boys are led to the figure
of Daramulun and are instrueted in a very impressive way in
the secret traditions concerning Daramulun, as follows :
« Daramulun of old created the Murring (collective name for
the coastal tril)es) ; now he lives beyond the sky and looks
upon them. He is the great Biamban who can do anything and
go everyw'here and who gave the tribal laws to our fathers.
The Sound of the bullroarer is the thunder and as sueh tho
voice' of Daramulun ». Detailed moral instruction is also im-
part&d to the boys by the dramatic device of representing in
pantomime and commanding immoral actions and then uttering
an emphatic « No ! »
Tlie boys are invesled with the men's belt and tlieir com-
plète change is im])ressed upon their minds by a last and very
dramatic ceremony : a man, lying in a real grave, apparently
resuscilaied by the tune of an old song and the mysterious
influence of a medicine man who is chant ing an invocation to
Daramulun, rises before the eyes of the astonished youths.
The boys are then brought to the bush, where they pass
through a period of discipline and fnod restrictions under the
control of their tutors.
3. Bora, the initiation of Ihc Kaniilaroi-Euahlayi. — The
Kuringal type of initiation was practised by the tribes who
inhabited the eastern coast from Twofold-Bay to Port Macqa-
rie, which means practically the coast of New South Wales (1).
The inland tribes to the west practise initiations which are
more elaborate, — those of the further north being the more
complicated as a rule. As a typical example we shall consider*
the Born of the Kamilaroi and Euahlayi (2).
When the elders hâve decidcd to hold a Bora, messengers are
sent out to neighbouring tribes for hundre-ds of miles around
to summon them to take part in it.
(1) HowiTT, op. cit., p. 593.
(2) K. Lang-loh Parker, The Euahlayi Tribe, London, 1905, p. 62 sq. ;
H. Mathews, The Bora or Initiation Cérémonies of the Kamilaroi Trihe, Journal
of the Anthropogical Jnstitute, London, 1895, p. 411 s.
INITIATION A.XD SECRET SUCIETIES I.\ AUSTRALIA 359
- y
In the meantime the sacred grounds are prepared : two
Boracirclps are made, a larger and a snialler one with a path
l'unuing between theni, Along the path various designs are
eut out in the bark df trees or made of earth. Among some
forty designs of the Kamilaroi Bora let us note a huge figure
of Bayame, the Suprême Being, of his wife Gunanbeely, of
Boobardy and Numbardy, the pair of original hunian ances-
tors, a speared emu and an eaglehawk"s nest. The Bora ground
is supposed to represent Bayame's camp and tlie designs refer
to the events at tlie first Bora, which Bayame himself con-
dueted.
Every night the bullroarer is sounded, which is supposed
to be the voice of Daramulun of Gayandi, an evil «pirit who
rules the night. According to some native legends he was
ordered by Bayame to initiate the boys, but he devoured them
instead. Bayame transformed him into a porcupine and he
had to shape the buUroarers for the Bora himself. In the first
days of the Bora women take a certain part in the cérémonies.
They accompany the boys to the Bora ground, and assist at
several corrobborees. But at a given moment the men hoist
the boys on to their shoulders and carry them off, whilst the
women hâve to leave the Bora ground. A period of serions
discipline now begins for the boys. They are obliged to keep
the eyes downcast and are strictly forbidden to speak or to
laugh. Under thèse conditions they hâve to undergo several
trials to give proof of their manly spirit. One night they are
laid to sleep in order to rise as men : the Bora spirit is
supposed to corne over them and make them into men.
Amongst the Kamilaroi pantomimic représentations, ob-
scenities are shown to the boys for the purpose of teaching
them to abstain from the « abominations of the cities of the
Plain ». Some tribes practise at the Bora the custnm of
knocking out a front tooth ; others do not.
The boys are then brought to the camp to show themselves
to the women. On the way thither the bullroarer secret is reveal-
ed to them and they may take the bullroarers in their hands.
After the women -bave welcomed their boys with shrieks of
joy because they bave borne the tests, the boys retire for two
months with their tutors into the bush to be instructed. There
360 L. EHRLICH
are three points on which sava.ge moral instruction lays
spécial stress : the avoiding of murder, the abduction of wonien
within the forbidden degrees, and lying to the elders. After
their relurn to the main camp the boys are « smoked « several
times : green bushes are laid on the burning logs and the boys
hâve to lie for some minutes on this uncomfortable resting
place.
Bayame controls the conduct of the Bora and the medicine
men pray him at the initiation to grant long life to the blacks,
as they keep rigorously to the Bora.
4. Initiation in Northtvestern Queensland (1). — The initiation
is not any more one single comprehensive ceremony which
always follows the same program, but a séries of four diffé-
rent rites between which years may elapse : a man may become
greyheaded before he is admitted to the last degree. The
différent degrees bave their proper rights, dress and names.
Only the first two degrees, circumcision and subincision, are
compulsory on ail members of the tribe ; the higher degrees
of initiation are reserved to a limited number of tribesmen and
shrouded in mystery, so that Europeans are rarely allow-ed
to know anything about them. This clearly reminds us of secret
societies,
lAt the first sign of puberly the boys are seized by the men and
borne on their shoulders to the cérémonial ground. There is
no solemn summonin^g of the neighbouring tribes and the
boys are initiated one by one. The women assist at the intro-
ductory cérémonies and. in accord with ancient custom, before
they retire, they even take the weapons of the men and adorn
themselves as fighting amazons. as a symbolic protest against
the withdrawal of the boys from their control.
The Mitakoodi now lay their boys down to sleep. For a
whole night they are forbidden to move, to speak or even to
scratch themselves. Amongst the Pitta-Pitta the youth are laid
down on the earth and the men step over them, and cover them
with sprinkled blood from the cicatrix of their subincised
pénis, after which ceremony they are adorned with man's attire.
The men then lift the boys on their arms and swing them for a
while to and fro in the air.
(1) W. E. RoTH, Ethnographical Studies among the NortMoestern Central
Queensland Aborigines, London, 1897, p. 169 sq.
INITIATION AND SECRET SOCIETIES IN AUSTRALIA 361
The following day is devoted to the principal ceremony, the
ciroumcision. Half an hour before sunrise the boy must turn
his face towards the East and at the moment the sun begins
to show above the horizon he is circumcised. Two bullroarers,
a large and a small one, are sounded as a token that the opéra-
tion has been performed. A flre ceremony ends this stage of
initiation. The men bring the boys on their shoulders near the
flre, and stooping, hold them over it, as if they intended to place
them there in earnest.
The subincision takes place three or four months after the
circumcision. Of course the women must be absent, but after
the opération the women, at a given moment, are alloweil
to approach the sacred circle and to strike their men with a
fighting pôle in revenge for evil treatment.
Mulkali, a supernatural being, has introduced the opéra-
tions. He is supposed to be a good, beneficent person and
never kills anyone (1).
The knocking eut of the tooth is practised as a mère sport
indiscriminately by mon and women alike and has no connec-
tion with the initiation.
The third and fourth degrees are little known ; they are
symbolised by a particular pattern of a yellow design, a fore-
head net, and the exclusive use of a sign language.
5. Initiation in Central Australia (2). — The initiation céré-
monies, as practised l)y the triljes inhabiting the country from
Lake Eyre to Coburg Peninsula, reveal to us a mentality diffé-
rent from that found in East Australia. As a typical example
we take the Arunta initiation. It comprises four distinct degrees
which are gradually imparted to the boys at différent âges from
ten to thirty : Alkirakiivuna (throwing to the sky) - Lartna (cir-
cumcision) - Ariltha (subincision) - Engivurra (tire ceremony) .
At the first ceremony men toss the boy several times in the
air, while the women dance round the performers. Some years
later the same boy, having reached puberty, is seized by
men of his totemic group and brought to the Apiila (cérémonial
ground), where he is put behind a brake, whence he dare not
(1) RoTH, o. c, p. 153.
(2) B. Spencer, F. Gillen, The Native Tribcs of Central Australia, London,
1899, p. 212 sq.
362 L. EHRLICH
move. but bas to remain in perfect silence with eyes cast down.
His future motlier-in-law bands bim a burning firestick. telling
bini always to bold fast to bis own fire and not to interfère
with otber women. Tbere is furtber a symbolic flght between
men and wornen for tbe boys. Tbe women, r-arrying sbields.
dance around !be Apula and even earry tbe boys away : tbe men
must ff'trb tbem back again.
Now a séries of peculiar totemic cérémonies begins, wbicb
vary from clan to clan and wbicb women are never allowed
to walcb. Thèse cérémonies are a mimic présentation of tbe
heroic deeds of totemic ancestors, wliich tbe latter are believed
to bave performed in a far-off time, called Alcheringa. tbe
golden âge of tbe Arunta. At a certain day tbe wbizzing sound
of tbe bullroarer announces tbe rite of circumcision. After
tbe opération tbe secret of tbe bullroarer (called churinga) is
revealed to tbe novice. The men band tbe boy a bundle of thèse
cliuringas. telling him solemnly : « Thèse churinga you should
call Twanyirika » ( 1 "» . The boys of tbe Unmatiera tribe are told
after subincision : « That is tbe churinga wbicb your spirit
bad in tbe Alcheringa » (2). The novice is supposed to be tbe
reincarnation of a legendary mythical ancestor wbo gave tbe
totem to tbe clan.
Tbe subincision (opening of tbe urethra from below) takes
place five or six weeks after circumcision, and now tbe boy is
considered to be a man.
The girls are initiated in a similar manner ; their breasts
are rubbed with fat and red ocbre and subincision (opening of
tbe vagina) is performed on tbem.
Tbo Engu'urra (flre ceremony) is an intertribal ceremony, to
wbicb tbe neigbbouring tribes are summoned. The Engiourra is
concerned with a long séries of totemic presentments, referring
to tbe Alcheringa, and is supposed to make tbe boys « ertwa,
murra, oknirra » — good, great and strong. In thèse cérémonies
certain bead dresses are used which remind one of masks.
At the end tbe novices are placed at full length on a flre wbicb
(1) M. LiEONHARDi-C. Strehlow, Mytluti, Sagen und Maerchen des Aranda-
Stammes, Frankfurt, 1907, p. 102.
(2) B. Spencer-F. GilleNj The Northern Tribes of Central Australia, London,
1904, p. 340 sq.
INITIATION AND SECRET SOCIETIES IN AUSTRALIA 363
is covered with greon l)oughs and the same ceremony is repeated
in the women's camp.
The knoeking out of tlic fdoth is practised in Central Austra-
lia i)]-ivately, as a mattor of individual laste. for the iinpro-
vement of one's personal appearance.
II. COMPARISON OF THE DIFFERENT TYPES
WITH THE CULTURAL CYCLES
«
Tho historicd-cultural scliool proposes to reconstnict, by
distinguishing différent cullural cycles, a relative chronology
and history of the so called « aJustoric », or primitive peoples ;
hence the analysis of tlie initiation rites which embody the
cliief religions, moral and social ideas of the savage and are,
so to speak, his cnltural repository, must prove to be a most
valuable check npon its théories.
The ahove descrilied types of initiations represent a very
complex combination of disparate tides of culture which hâve
come into touch one with another and hâve either dispossessed
one another or becomc amalgamated into a new one.
1. Two main cultvral arras. — At the first survey, two main
divisions of initiations may be observed : — Central and Eas-
tern Australia. A line drawn from Encounter Bay-Adelaide to
Cape York indicates roughly the frontier between them (1). In
Central Australia the characteristic feature of the initiation is
the rite of circumoision with subséquent subincision ; in the
eastei-n région, another opération is practised, by numerous
tribes : the knoeking out of the tooth. Thèse two cérémonies are
so exclusive of each other that only on the margin between the
areas in question wc find tribes with both initiatory rites, viz.,
the Dieri and some of the Itchmundi tribes (Wilya and
Kongait) (2).
There are clear signs that the initiation with fhe tooth cere-
mony is older. and that in earlier periods it extended aller ovci-
Australia. In some régions of the circumcision-initiation tlic
breaking out of the tooth bas fallen into disuse and is practised
as a mère whim or embellishment, e.g., in noi'thwestern Queens-
land and in Central Austi'alia. On the olher liand ttie ceremony
(1) HowiTT, o. c, p. 642.
(2) HowiTT, o. c, p. 655-675.
364 L. EHRLICH
reappears at the initiation on fhe extrême western coast, viz.,
in the Kiniljerley district (1).
We may safely conclude that the cultural cycle with the tooth
ceremony was diviiied in Iwo parts by the later culture of
circumcision, and in some régions only obscured.
A second striking différence between the two main divisions
is the foliowing fact : in the East the initiations centre round a
Suprême Being, to whom generally the institution of the initia-,
tion cérémonies is ascribed and who watches carefully that the
initiation is conducted in due form (2).
On the other hand the cérémonies of the central area are
principally concerned with an entirely difTerent trend of ideas.
There is a new world of totemic ancestors with whom the
youth are hère made acquainted. They are told that they descend
from certain anthropomorphic beings who lived in the Alchc-
ringa, a legendary golden âge. and that they are the reincarna-
tion of them, whereas in the East the boys are told tluit Mun-
gangaua, Daramulun, Bayame created the first men.
The geographical stratification of the two cultures suggests
that the Suprême Being culture is prior to the Alcheringa cultxire,
since the latter extends over the territory from Garpentaria Gulf
to Lake Eyre, whereas the former seems to be pushed back to
the south east corner of the continent. There still survive some
few traces of Suprême Beings in the Alcheringa area which
attest the fact that at one time the Suprême Beings reigned' also
in Central Australia and were obscured by the Aic/ie?'m</a-ideas.
The Arunta (3) possess the « good and eternal Altjira », who is
called « iUinka », emu-legged, evidently identical with the emu-
legged Bayame of the Wiradjuri (4). The Atnatu of the Kaitish
reminds us somewhat of Bayame and Daramulun, since he
watches that the bullroarer is properly sounded at the initiation.
Two other considérations attest likewise the greater âge of
the eastern type.
a. The ceremony of lifting the boys skyward is spread under
(1) Hutton Webster, Primitive Stcret Societies, New- York, 1908, p. 85.
(2) HowiTT, o. c, p. 488 sq.
(3) Leonhardi-Strehlow, Mytlien, Sagen und Macrchcn des Arandastcnn-
mes, Frankfurt, 1907, p. 1 sq.
(4) W. ScHMiDT, Ursin'ung der Gottcsidee, p. 369.
INITIATION AND SEORET SOCIETIES IN AUSTRALIA 365
one or the other fnrm ail over Australia. The Kurnai raise their
boys to the sky and (he lalter must also lifL their hands upward.
In tho night the men point with the spearthrower to the sky
and (he boys niust raise their eyes. The Yuin point several
times with their boomerangs to the sky and carry their boys
on their shoulders to the Knringal. The same rite is observed
by the Euahlayi and the Queensland tribes. The central tribes
toss the boys skj^vard, and this rite is practised as far north
as Port Darwin and tho Melville-Bathurst Islands (1). The mis-
sionary F. Kristen reports that the MuUock-iMullock on the
Daly River start the initiation with the « Dalvagaitma » cere-
mony which means « throwing to the sky ». As this oeremony
seems to be spread over the whole continent, it was evi-
dently not brought to Australia by the Alcheringa culture (2).
On the other hand it is closely connected with the ideas
centering round the Suprême Being, and only in this setting
does it flnd a satisfactory explanation. The gesture itself
implies a connection between the initiation and the heavens.
HowiTT remarks explicitly that the Yuin point with their boome-
rangs to the great Biamban in the skies. Stil! more telling in
this respect is the solemn rite at the Kurnai initiation, where
the boys during the night must look toward the sky, while the
men say to them : « Look there, look there », and then explain
to them the doctrine of Mungangaua.
The central tribes bave evidently lost the original signifl-
cance of this ceremony, but it must hâve been so intimately
linked with the beginning of the ceremony that they preserved
it as an introductory formality.
b. Analogous is the case of the bullroarer. Whereas it is a
disparate and strange élément in the cérémonies of Queensland
and Central Australia, it flnds an adéquate explanation and fits
in logically with the culture of the Suprême Beings.
Ail over the continent the sound of the bullroarer is ascribed
to a supernatural being — to Tundun (Kurnai), Daramulun
(Wiradjuri), (layandi (Euahlayi), Tnmana (Kaitish) etc. — wlio
(1) B. Spencer, Native Tribes of the Northern Tcrritory of Australia, 191 1,
p. 93 sq.
(2) Unpublished manusciipt on the aboriginals of the Daly River, Innsbinrk,
1902.
366 L. EHRLIGH
is supposée! by the women. to initiale the boys. Still more
striking is the fact that two buUroarers are known ail over the
continent : in the South-East (Kulin, Kurnai, Wiradjuri, Ghe-
parra-Turnbal, Parnkalla, Tongaranka), in Queensland (Yar-
roinga, Underebekina, Pitta-Pitta), in Central Australia(Arunl a,
Worgaia), and on the western coast (Kariera) .
It fs tlie Kui'nai initiation that explains to us the meaning of
thèse two bullroarers. They represent Tundun and his wife
Rukut, the original ancestral pair of mankind, who were madc
by the Suprême Being and entrusted by him with the initiation
of their posterity. A réminiscence of this is still preserved
amongst the Wiradjuri, where Daramulun and his wife Muni-
bear are symbolised by two buMroarers (1) ; and amongst the
Kamilaroi where the images of an ancestral pair — Boobardy,
(( our father », and Numbardy, « our mother » — are eut out on
tlie cérémonial ground.
In Central Australia this bullroarer belief has been very
quaintly transformed. Like everything else, the bullroarer belief
also has been « totemised » and thus drawn into the Alchcringa
mythology. The bullroarer is called churinga, i. e. it is sacred on
account of its connection with the Alcheringa ancestors. The
bullroarer clniringa is handed to the boy after circumcision with
the following words : « Thèse churinga you should call Tivanyi-
rika ». A legend (2) tells that the bullroarers are the children
of Twanyirika. On the other hand thèse churingas are also the
boys themselves (3), having entered their mothers in the form
of child-germs.i
Thus Twanyirika is the Alchcringa ancestor of the Arunta
children. There exist also cliuringa bullroarers for the girls,
but the latter never see them. The bullroarer symbol, as
representing a pair of original ancestors, was therefore evi-
dently common to the whole of Australia, but in the Centre its
original meaning was obscured.
On the other hand this symbol is closely connected with the
Suprême Being. It is the voice of Daramulun ; it « was given by
(1) W. SCHMIDT, 0. c, p. 358.
(2) Leonhardi-Strehlow, o. c, p. 102.
(3) Spencer-Gillen, Nat. Trib. of the North. Tcrritory, p. 263.
INITIATION AND SR^HET i^OCIETIES IN AUSTRALIA 367
the great Biamban » (1) ; it represents Tundun, the « son » of
Mungangaiia ; it was mado hy Bayame (2).
Thus we may conelude that thèse éléments : iSupreme Being,
knocking out of the tôoth, lifting to the sky, and bullroarer
belong to and older eultural cycle than the Alcheringa-hehef
with the circumcision.
2. The différent character of the lu'o cultures. — The eastern
initiation is a solemn intertribal festivity, a kind of Australian
Olympia or Sinai, to which ail trihes of the nation are invited
and during which a Freuga Dei reigiis. This initiation is the
great renewal uf the Iribes. They perpetuate their covenant
with the Suprême Being who governs the tribes, hy con^^ecrat-
ing their youths to Iiim and hy impressing bis precepts on
their minds. Two moral ideas reecho throughout the céré-
monial grounds of ail Australia, however complicated and
manifold the rites may be : 1. not to interfère with otlier women
nor commit immoral actions aigainst nature ; 2. respect towards
the authority of the eliders ; in other words. the two fundamental
ideas of family and statr. Thèse two moral obligations are placed
under the sanction of the Suprême Being, This initiation was
obligatory for every member of the tribe and was the perma-
nent source from whidi the tribe derived its moral hackbone.
The more we approach Central and Northern Australia, the
more the initiation lose^s its grand style and its simple, compre-
hensive, international character. It dissolves into a séries of
incohérent stages of rites which become more and more myste-
rious and phantastic. Some higher degrees are reserved for an
inner circle of sélect men ; it is not any more a simple question
of « making boys into men », in which the whole tribe takes
a natural interest, but concerns an esoteric community with
spécial marks, e. g. in Queensland, This recalls secret societies.
iSome relies of the Arunta initiation still remind us of the
old style. If we take the flrst ceremony (tossing the boys
skyward) and the last, — the Engivurra — , to which ail the
tribes are summoned and whereby the boy is supposed to
become « good, great and strong », we flnd the analogy witli
the East. Between Ihese, there were interpolated two new
(1) HowiTT, 0. c, p. 517, 538.
(2) Langloh Parker, o. c, p. 67.
368 L. EHRLICH
strange rites., eircumcision and subincision, and many to-
femic rites which were evidently initiatory rites oî the clan.
One or two boys are seized and it is wholly the affair of the
élan to perform the opérations upon them, after which they
are initiated into the mysteries of the clan and the cérémonies
of ifs own totem. This initiation recalls to us a culture, whose
outlook is limited by the niaterial, without reaching out to a
Suprême Being. a culture which was concerned in the first place
with the quest of food and the sexual problem of life. It is the
provision of food which dominâtes the numberless Intichiuma
cérémonies (fertility cuits) (1) of Central Australia. It is the
purely sexual life to which eircumcision and subincision
initiate the youth. Observance of thèse cérémonies confers
tlie right to marriage, or at least they are a conditio sine qua non
for marriage. The parallel ceremony performed on girls in
Queensland and Central Australia {dilatatio vaginae) is meant
to facilitate copulation. The stepping over the boy by ail the
men and covering of him with the blood from his subincised
pénis (practised by the Queensland tribes) shows quite unmis-
takably the sexual import of the ensuing eircumcision.
Where this new, materialistic culture wâth its emphasis upon
//te sexual and totemic initiation within the clan has corne in
contact with the older forms of initiation, it has added its own
as second and third stages, so that initiation began to fall into
degrees or âge classes. Thèse degrees are traces of différent
cultures.
3. Différent cultural cycles in the région of the Suprême Being.
— If we compare the Kuringal of the Yuin with the Bora of the
Kamilaroi we observe a certain hostility between their respec-
tive Suprême Beings (2). Daramulun, who in the Kuringal « can
do everything and go everywhere », is degraded in the région
of Bayame to « one of Bayame"s people », even an « enemy of
Bayame ». Bayame charges himself to conduct the Bora, since
Daramulun is said to hâve devoured the boys. This hostility
also appears in the eaglehawk — and emu — myths of the
Bayame région. An image of the emu, the sacred bird of Bayame,
(1) L. Ehrlich, 07-igin of Aiistralian Belle f s, St. Gabriel, Anthropos-
Aclministration, 1922, p. 9.
(2) ^y. ScHMiDT, o. c, p. 357 sq.
INITIATION AND SECRET SOCIRTIES IX AUSTRALIA 369
appears at the Bora pierced by Daramulun's spear ; and the
eaglehawk, representing Daramulun, is persecuted and burned
by Bayame (1). This mythological contrast can be best explain-
ed by the collision and amalgamation, of two différent ciiltu-
i-es, the Bayame culture pressing from the North and dis-
possessing gradually the Daramulun culture. This assumption
is conflrmed by the tact tliat the tooth ceremony, which is so
characteristic of the Daramulun région, disappears towards the
North.
A third tide of the Suprême Being culture is represented by
the Kurnai initiation in the Soutli. On the one hand the tooth
ceremony of the Yuin is wanting ; on the other the idea of
a pair of anccsto7's, who are represented by two bullroarers, is
a cardinal one for tlie Kurnai, whereas tiie Yuin use only one
bullroarer. This idea is symbolised also by the sex-totem. The
maie sex-totem (emu-wren) is invoked for the boys ail night
as préparation for the révélation of the Tundun secret. Since
totemic animais represent ancestors, the double totem, one for
the maie, the other for the female sex, implies clearly an ances-
tral pair.
Tt seems to me, that the two bullroarers symbolise the bodies,
the sex-totems (birds), the spirits of the ancestors (2) . Although
two bullroarers. as mentioned above, are used by many tribes
throughout the continent and the sex-totem is known by ail the
tribes of Victoria and the neighbouring tribes of New South
Wales. the Kurnai only bave preserved a clear explanation of
both, viz : the Suprême Being created a pair of ancestors and
chariged them to initiate their descendents into bis comand-
ments. Mungangaua, moreover, appears superior to Daramulun
and Bayame in that he bas neither wife nor children, while
Daramulun has a wife or a mother Ngalabal (3), and Bayame
bas two wives and several sons.
4. Différent rultural cycles in the région of the clan initiation. —
In an analogous way we can distinguish three successive cul-
tural tides in the région of the totemic and sexual initiation of
the clan. First a purely totemic culture without opération which
has spread ail over Australia and affected also the initiations
(1) \V'. SCITMIDT, o. c, p. 365.
(2) SCHMIDT, O. C, p. 348, 359.
(3) HowiTT, o. c, p. 546, 560.
24
370 L- I-HRLHIFI
in llie Sui)reme Boing area. with the exreption of the Kurnai
initiation. A lotcr cvllure with the sexunJ i^iitiation by opération.
sinee it covers a far smalier area than the totemic, viz : Central
and West Australia, but did not reach tlie coast fringes, — a
clear sign of itis later coming ! Tlnis tlie trihes on soutli western
coasi from Cape Arid, (in the (Ireat Australian Biglit, to North
Wesl Cape (1), the Kariera Irihe on tlie western coast, the
ti'ibes in the far Noi'tli-Melville-Bathnrst Tslands and the
Kakadu trihes on the Alligatoi' Rivei'S (2) practise no opérations.
But sinee we haVe in the' Northern Territory a strip of land
on which is pratïsed only circumeision (Punuurlu. Warrai, Wul-
wullan. Djauan, NuUakun) and likewise in the South (Nar-
ranga, Bulaili, Wilya, Kongait), we must conclude that the
initiation with suhincision was the latest phase of Australian
culture.
One Ausiralian trilic, tlie Dieri, who inhahit the région of
Lake Eyre, where ail Australian cullures must hâve corne in
contact with each other, seems to hâve preserved in its initia-
-tion-'degrees the traces of ail of Ihem. The degrees are : intro-
ductory initiation with the septum piercpd, after some years
extraction of the tooth, then successively circumeision. secret
totemistie cérémonies, fmally suhincision (3).
5. First fruits offerings. — In most of the Australian initia-
tions a fire-ceremony t-akes place. The Yuin and Wotjobaluk
« roast » the boys ; the Kamilaroi « smoke » their boys ; the
trihes of Central Australia bave a spécial fire-ceremony. the
Engirurru. t'nquestionably the fire-ceremony is the symbolic
figure of burning the boys. May I venture to sug-gest an idea ?
If I compare the fire-ceremony with the otïering of the boys to
the sky and with the synxbolic burial of them, might it not be
that the fundamental idea, underlying the original Australian
initiation, was that of offering the boys to the Suprême Being ?
Perhaps atso the knocking (jut of the toolh might flnd its
explanation in this connection. The boys must offer a tooth, re-
presenting their soûl, as a substitute for themselves. Thus we
could explain the surj»rising fact that in Australia no other rite
(1) Hutton Webster, o. o., p. 191 sq.
(2) Spencer, Nat. Trib. of the North. Terr., p. 21, 89.
(3) Hi:tton Webster, o. c, p. 84.
INITIATION' AND SECRET SOCIETIES IN AUSTRALIA 371
of sacrifice can be found, since the novices io be initiated figur-
ed as a flrst fruits oft'ering.
CONCLUSION.
Our analysis of tlie initiation rites conflrms the théories of
the historico-cultural s( hool of (tRaebner and Schmidt, who
establish for Australia several cultiiral cycles, as the Tasma-
nian, boomerang, totemic and dual culture. We hâve detected
difïf'rent types of initiations, of which the Kurnai initiation
would fit in with the Tasmanian i-ulture, the Kuringal of the
Yuin with the boomerang, the Arunta initiation with the
totemic. But there is no initiation in Australia which would
be fypical of the matrilineal dual culture, as described by
Graebne{1' and SGH^nDT (Secret societies of men with the use
of masks, initiation of girls having dispossessed that of the
boys). Apparently the matrilineal culture could never develop
itself to ils full estent. There is .in many parts of the conti-
nent a certain compétition between men and women at the
cérémonies, but their importance in économie life is nol so
great as to dispossess the men.
On the whole, the study of Australian initiation rites proves
the scientific value of the historico-cultural method, although
it is possible to entertain more than one view in assigning
various détails to one or the other type of initiation.
BIBL. — A. W. HowiTT, The Native Trihes of South-East Australia, ln-8",
London, 1904 — Hutton Webster, Primitive Secret Societies, in-12», New-
York, 1908 — M. Leonhardi-C. Strehlow, Mythen, Sagen und Maerchen des
Aranda-Stammes, in-4», Frankfurt, 1907 — H. Mathews, The Bora or Initia-
tion cérémonies of the Kamilaroi Tribe, Journal of the Roy, Anthrop. Institute,
London, p. 411 — Lang-loh Parker, The Euahlayi Tribe, in-8°, Liondon. 1905 —
W. E. RoTH, Ethnographicul Studies among the North.-West.-Central-Queens-
land Aborigines, in-8", Brisbane-London, 1897 — B. Spencer and F. Gillen, TTie
Native Tribes of Central Australia, in-8°, London, 1899 : The Northern Tnbes
of Central Australia, in-8", London, 1904 — B. Spencer, Native Tribes of the
Northern Territory, in-8", London, 1914 — W. Schmidt, Der Vrsprung der
Gottesidee, in-8°, Miinster, Aschendorff, 1912 : Die geheime Jugcndioeihe eines
australischen Vrstavlmes, Paderborn, Schoningh, 1923.
372 'T- WINTHl'tS
[26] Die Ingiet-Mysterien auf Neupommern,
von Hochw. P. WiNTHUIS, M. S. C.
Kuiz vor meiner Ahreise nach der Sùdsee, im Jahre 1902,
ging die Kunde von einem Mord, den Sûdseeinsiilaner von der
Insel Xeupommern am Bismark-Archi])el an einer' deiitschen
Mut t or und ihrem Kinde verûbt hatten durch die deutsche
Presse. Auf dem Schauplalz der Tat in Neupommern selbst
angeknmmen, erfuhr ich, dass dieser Mord auf einer Zusam-
menkunft der Mitiglieder des Ingiet-Bundes beschlossen wor-
den war. Dieser Bund war damais mit noch so viel Geheim-
nisvollem umgeben, dass ich beschloss, so habj die Sprach-
kenntnisse es mir gestatteten, in dièse Geheimnisse einzu-
dringen. Es dauerte indess liald zwei Jahre, bis ich nàheres
dariiber erfahren konnte. Nur mit grosster Muhe gelang es
mir, einige Mitglieder des Bundes zu bewegen, mir die Geheim-
nisse ihrer tTesellschaft aufzuderken. Ich bereitete damais
eine Anzahl von sehwarzen Katechumenen auf den Empfang
der hil. Taufe vor. Da ich eingesehen hatte, dass ich die Preis-
gabe der zurzeit ganz unsittilichen Ingiet-Gebràuche von den
Mitgliedern des Ingiet-Bundes vor dem Empfang der hl. Taufe
unbedingt verlangen musste. es aber anderseits kein dureh-
greifendes Mitiel zur Erreichung dièses Zieles gab, als die
oflfentliehe Bekanntgabe dieser Geheimnisse, so deckte ich sie
im ôffentlichen Unterricht vor den Mânnern sowohl, als auch
vor d-en Frauen auf. Daraufliin beschlossen auf einer Ingiet-
versammlung vier Ingietmitglieder mich in der Nacht mit
Lanzen zu tJden zur Strafe dafûr. dass ich die Geheimnisse
dièses Bundes verraten hatte.
Als die Eingeborenen jedoch bald darauf ihren Mordplan
entdeckt sahen. willigten sie seilbst ein, die Dickichte, in denen
sie ihre unsittlichen Ingietyersammlungen abhielten. nieder-
zulegen und den Ingietgebràuehen zu entsagen. Nach dem nun
die Geheimnisse der Ingietbundes zum Teil bereits verraten
waren und selbst Schulkinder ûber dièse Gebrâuche spotteten.
eines Tages braehten mir zwei von ihnen sogar eine berûchtigte
weit und breit gefiirchtete Ingietfigur herbei, und nachdem gar
ein Tngipfnltmeister «ich nicht scheute auf meinen Wunsch hin
DIE INGIET-xMYSTERIEX AUF NELPOMMERN 373
Ingiettànze (jfïentlich z\i tanzen, ward es mir leicht, den
Schleier dor dièse Mysterien einhûllte vullig zu liiften. (Nàheres
hieriiher in meineni Buch : Heidniscfn' Greuel und christl. Liebn.
2. Kapitel : Warum die Wilden mieh toten wollten. — Ich ver-
gass dipse Scdirift bei der Ingiet-Literatur anzugeben).
Ydii diespn Mysterien miu-hte idi nun des Nàheren zu Ilmen
reden.
I. DEFINITION, URSPRUNG UND ZWECK DER INGIET-MYSTERIEN.
Was ist zûnàchst der Ingiet-Bund ? Es ist kurz gesagt eine
Geseliselicift von mânnliehen Personen, kleinen und grossen,
die sich mit allerlei Oeheimnisvollem umgeben, von gewissen
Fleischspeisen sieh enthaiten mûssen und zum Teil besonders
der Zauber- und Tanzkunst huldigen. Ich sage von mânnliehen
Personen ; es sollen auch ausnahmsweise Frauen von HâupU
lingen in den Bund aufgenommen worden sein.
Woher nun der Ingiet ?
Man geht wohl nicht fehl, wenn man sagt, dass der Ingiet-
Bund im Ahnenkult einerseits und anderseits im Geisterglau-
ben und in der Zauberkunst seinen Ursprung hat. Ich nenne
da als Gewàhrsmann vor alleni meinen Konfrater, den Hochv^^
P. Jus. Meier, m. s. g., mit dem ich hinge Jahre auf Neupommern
gemeinschaftlich spraclien- und vulkerkundliche Studienbetrieb
und der zur Zeit wohl der beste Kenner der Gebrâuche der
Eingeborenen des Nordoststammes der Gazelle-Halbinsel ist,
auf dessen gediegene Ingiet-Artikel im Anthropos (Jahrgang
1910, 1911 und 1913) und im Jahresbericht des Muséum fil^^
Lancier- und Yôlkerkurule (Stuttgart, 1911) die fo'lgenden Aus-
fùlirungen zu einem grossen Teil fussen.
Der Ingiet-Bund war urspriinglich — - so schreibt Pater Meier
- — ein Bund einiger kunstbeflissener Eingeborenen, die "zum
Andenken an ihre Verstorbenen Bilder aus Stein anfertigten.
Wie die Eingeborenen iiberhaupt das Andenken ihrer verstor-
benen Verwandten lebendig zu erhalten suchten durch ôfïent-
liche Trauer, Enthaltung von Friichten u. s. w., so suchten dièse
kunstbeflissenen Zunftgenossen dièses Andenken an ihre Ahnen
zu bewahi'pn dui-ch die Enthaltung von Schweine-Kànguruh- und
Kaliku-iSi'hlangenfleisch einerseits, und anderseits vor allem
durch die Anfertigung von Bildern der Verstorbenen, wie ja
374 J. WINTHUIS
ùberhaiipt aile urspi'ùngiirhon Ingiet-iSteinbildor nicliis anderes
darstellen, als verstorbene Ingietmânner. (Von diesen Ingiet-
Steinbildern wird nachher noeh die Rede sein). So fusst der
Ingiet auf dem Ahnenkult und dem Geisterglauben, er fusst
aber aueh auf der Zauberkunst. Niemand wurde und wird auch
heu'te noeh ohne Grund in den Ingiet-Bund aufgenommen.Dieser
Grund ist immer eine Krankheit und gewôhnlich eine schwere
Krankheit, da die sogenannte Ingiet-Zauberei gewôhnlich erst
dann angewandt wird, wenn die anderen Zaubereien versagt
haben.
Wenn irh die Eingeborenen fragte, welcher Oebrauch, ob
Zauberei oder Ingiet zu.erst aufgekommen sei. antworteten sie
mir : « A papait ma a ingiet ma a malira dital na tavua varu-
runq. Die pai^ait -Zauberkunst und der Ingiet und der ;\îalira
Liebeszauber sind zusamnipn aufgekommen. » « Di na vaki
avet me. Man bat uns damit geboren. » Drang ich in sie, mir
zu sagen, weleher Gebrauch von den dreien aber wohl der
erste gewesen sei, so zuckten sie mit den Achseln und sagten :
(( Pa ave nnnure. Wir wissen es nicht. » Sie wissen nur, dass
keiner in den Ingiet-Bund aufgenommen wurde. ûber den nicht
vorher die Varvamba-Zauberei - eine Ingietzauberei - gemacht
wurde. Weshalb mir ein Eingeborener sagte : « A ingiet ia
rangala na papait. Der Ingiet ist die grosse Zauberei. »
Aus diesen Ausfûhrungen geht hervbr, dass der Ingiet-Bund
sowohl im Ahnenkult und Geisterglauben, wie auch in der Zau-
bei'kunst seinen Ursprung bat. Wie ist das zu erklâren ? Ich
meine folgendermassen : Die anfangs wenigen kunstbeflissenen
Zunftbriider. die ihre Ahnen dadurch ehrten, dass sie durch die
Anfertigung von Steinbildern die Erinnerung an ihre Tôt en im
Gedâchtnis der Ueberlebenden lebendig zu erhalten suchten,
erregten durch das Geheimnisvolle, womit sie die Anfertigung
und Schaustellung dieser Bilder, in denen die Geister der Ver-
storbenen noeh leben sollten, umgaben, die Bewunderung ihrer
Zeitgenossen. Sie wurden als in enger Verbindung mit den
Geistern der Verstorbenen stehend angesehen, von denen sie
leicht Hilfe in allen ihren physischen und psycliischen Noten
erlangen konnten.
So wurden dièse Zunftbriider, denen ja die Geister der Ver-
::: ixoiet-mysterien alt neupommern 375
storbenen gleichsam ihre Krafte liehen, zu hoehangesehenen
Zauberern, wie es ja tatsâchlich auch hente kaum einen
erwachsenen Anhànger der Ingiet gibt. der niclif zugleicli Zau-
berer wâre. Wurde dann der Kranke durcb den Ingiel-Zauber-
meister geheilt, so wurden Freudenfeste gefeiert, die sich zu
den liputigen Ingietfestliehkeiten auswuchsen. So ist der Ingiet-
Geheimbund ans Ahnenkult, Geisterglaube und Zaubereikunst
entstanden. Dass der Ahnenkult dem Geisterglauben und der
Geisterglaube der Zaubi'rerkunst vorausging, wili'p deninacli
auch wohl zu denken.
Nat-hdem ich so im ersten Teil meines Yot rages Ursprung und
Ziel des Ingiet-Bundes gesrhildert habe.komnie ich zum II. Teil :
II. AUFNAHME IN DEN INGIET-BUND. VARVABA-ZAUBEREI. DAS
TUNTUAN. INGIETSTEINBILDER. E-MANGIT UND TUTANA-VURAKIT.
Wegen der kurz bemessenon Yortragsfrist kann ii'h das ailes
nur ganz kurz beriihren.
Wurde jemand schwer krank, sei es ein Kind oder ein
Erwachsener — auch Personen weiblirhen Geschlechles — und
vermutete man, dass die Krankheit von Ingietgeistprn herrûhre,
deren Zorn der Kranke durch Unchrprhietigkeit ihnen gegeniibor
hervorgerufen batte, sei es, dass er einen Ingietplatz betreten
oder iiberhaupt mit irgend etwas. was dem Ingipt gehort. und
wàre es auch nur ein Blatt oder Zweig, von einem im Ingiet-
platz siehenden Baume oder eine Feder von einem Ingiettânzer
oder etwas Ingietkalkstauti in Berûhrung gekommen war, so
wurde bpj^chlossen. den Kranken in einem geheinien Ingieti)latz
der im Dirkicht eines Waldes lag, hinabzutragen, damit der
Ingietzaubermeister ihn bezanbere und den prziirnfen Geist, der
dip Ki'aukheit verursacht batte, besrhwnre und wipder besânf-
tige. Von dem Hinabtragen des Kranken kommt der Name
« varvaba di Vaba ia. Man triigt ihn hinab. » — Der Eingeborene
sagt niclU in den Bu.'^i-h Iiineingehen, sondei-n binabgeben. —
Mit dieser f«/'t!a6«-Zaubprei ist fur den Krankpn mann'.ichen
Geschlei-htes immer die Aufnahme in den Ingiet-Bund verbun-
den, also auch der Verzirht auf den Genuss von Sclnveinefleisch.
Am festgeseizien Tage wird der Kranke von vei-wandten
Mànnprn und Frauen in den Ingietplatz hinabgetragen. Am
Saume des hl. Haines wi'.ii Hait gemacht. Upr Zaubermeister
376 J. WINTHUIS
dringt allein ins Dickicht vor, uni die darin hausenden Ingiet-
geister zu beschworen uriid aile Gefahren. die durch das Betre-
ten des hl. Haines entstehen kônnen, wegzuràumen. In der
linken Hand tragt er feinen Kalkstaub, den er also verhext :
« A kambang tcratcre (wird immer dreimal gesagt).
Vue ta pulung na iniet
A kambang teratere
Y lie ta puhing na vup » u. s. w.
« Das ist der Kalkstaiih ; er hannl jeden ûblen Einfluss von
dnm in den Lûften wirbelnden Ingietfarbstoff. »
« Das ist der Zauberkalk ; er banni jeden ûblcn Einfluss von
umhertliegenden Ingietflaunifedern. »
« Das ist der Zauberkalk ; er bannt jeden ûblen Einfluss von
den Spinnengeweben, die einer beim Gange zu den Ingiet-
plàtzen berûhren kann » (1) u. s. w.
©er Zaubermeister beschwôrt so adle Gegenstânde, mit denen
die in den Ingietplatz Eintretenden in Beriihrung kommen, und
von denen sie dadurch Schaden nehmen kônnten. Ist der Zau-
berspruch gesprorlien und sind die Ingietgeister und aile Ingiet-
gegenstànde beschworen, diirfen die draussen harrenden Kran-
kentràger mit dem Kranken eintreten, jedoch nur die mànnli-
chen ; den Frauen ist der Eintritt strengstens untersagt. Sobald
aile auf den Va/'vaba-Platz angekommen sind, beflehlt der Zau-
bermeister : « Breitet die notigen Blàtter aus, damit der Kranke
sich darauf seize. » Ist das geschelien, so befielili der Zauberer
einem seiner Gehilfen : « Bringe ein getrockneies Kokosblatt
herbei ; faite es und lege es dori hin. » Es geschieht. « Und nun
brèche ein Karogonblait - — ein schwarzes Lom-Blaii ab und
zwei Qualipa-Zu-eige ab und lege siie auf das Kokosblatt. »
Darauf nimmi der Zauberer die Zweige und bcwegt sie wie
beim Tanze hin und her, dabei die Elaeler-Zauberei spreehend
und Kalksiaub verhexend :
. « A kambang elaeler
Vue ta. va-tultuluva
A kambang elaeler
Vue ta pa-tultuluva » u. s. w.
(1) Slehe Pater Meier, Jahr ester icht fur Handelsgeographie, Stuttgart, 1911,
S. 43 ff.
DIK IXGIET-MYSTERIEN AUF XEUPOMMEHN 377
Zu deutsch : « Das ist der Kalkstaub fur die Elaeler-Zauberei;
or soll bannen jede Krankhedt, wo der Mensch daliegt, das
Gesicht vor Weh imd Schmerz an die Erde gedrûckt. »
« Das ist der Kalkstaub fiir die Elaeler-Zauberei. Er soll
l)annen jegliche Krankheit, die den Menschen zwingt, gebûckt
und gebrochen einher zu schleichen. »
« Das ist der Kalkstaub fur die Elaeler-Zauberei. Er soll
verhiiten jeden dunklen Schmutzifleoken am Korper des Kran-
ken » u. s. w.
Bei den letzten Zauberworten blâst der Zauberer den verhex-
ten Kalkstaub, den er bei Beginn der Formel zwischen Daumen
und Zeigefinger der rechten Hand genommen batte, auf die vor
ihm liegenden Zweige. Dann umkreist er zweimal den Kranken,
der auf Blàttern ausgestreckt vor ihm liegt. Dabei sc-huttelt er
die Zweige ûber den Kranken vom Kopfe ange;fangen bis hinunter
zu den Fûssen, das heisst, er bewegt se^hr schnell zu gleicher
Zeit seine Arme ûber dem Kranken vom Kopf bis zu den Fûssen
indem er dabei, wie beim Tanze, trippelt. Dann wirft er die
Zweige weg. Und nun blàst er den verhexten Kalk gegen den
Kranken und zieht mit diesem Kalk Striche ûber den ganzen
Korper des Kranken. Dann nimmt er das vor ihm liegende
Kokosblatt vom Boden auf, bezaubert und ûbergibt es seinem
Gehilfen mit den Worten : « Nimm eine brennende Holzkohle,
und zûnde das Kokosnussblatt damit an. » Schon brennt es. Er
befiehlt weiter : » Erwàrme jetzt den Kranken, seine Beine,
seine Huften, seinen Hais und sein Gesicht. » So gesrhiehts. Der
Gehilfe ràuehert den Kranken gleiehsam von allen Seiten ein
und wirft naeh vollendeter Prozedur auf das Geheiss des Zau-
bermeisters das Kokosblatt weg. Dieser nimmt das Karogon-
blatt, bezaubert es und iihergibt es seinem Gehilfen mit den
Worten : « Erwàrme es am Feuer und erwârme den Kranken
damit. » So geschiehts, und der Gehilfe wirft das Karongonblatt
weg in den Busch.
Der Kranke darf nun nicht vergessen dureh sein âusseres
Gebahren die vortrefflirhe Wirkung des Zaubers den Umstehen-
den zu bestâtigen. Er schlàgt die Augen auf und bewegt sich :
<( Ja tnua ann ik a papait go i laun fana u. s. w. Potztausend,
sagen die Umstohenden. was so eine Zauberei nicht ailes fertig
bringt ! Ganz kurz zuvor lag er daheim noch so elend da ; wir
378 J. WINTHUIS
mussten ihn halten imd stûtzen, wenn er sich nur ein bischcn
aufriehten wollte und hier auf dem Maravot-P\n[ze kann er sich
ganz allein, von selbst schon aufriehten. »
Die Vorwandten des Kranken beeilen sich nun den Zauber-
meister und seine Gehilfen mit Muschelgeld zu bezahlen. Ein
Stûckchen Muschelgeld - — a )iir''il palina ka. sechs Schàlchen
nur — hricht er von dem erhaltenen Klafter ah und wirft es in
den Busch fur die Tiirangini-iU'ï^tt'w d. h. fur die Seelen der
Verstortoenen. denen in ihrem Lelien d^i- \'aytY/6rt-Piatz gehoide.
Er sprieht dahei die Worte : « Hier ist etwas Muschelgehl fur
euch, TurcDKjan-Gei^ter. » Darauf l)eschliesst das iibliche Betel-
nusskauen den ganzen Zauberakt.
Nun heisst es den heiligen Hain wieder verlassen. Angst
erfûllt die Kanakenseelen. Sie befûrchten beim Verlassen des
Platzes mit irgend einern Gegenstand der Ingietgeister in Be-
riihrung zu kommen. Darum bitten sie den Zaubermeister um
verhexten Kalkstaub. Der Zaubermeister murmelt ûber den
Kalkstaub sein Spriichlein und reirlit ihn den Umstehenden.
Dièse greifen mit grosser Gier darnach : « O bitte, bitte mir
auch eiii wenig, mir auch, mir auch. » Alsdann bemalen sie sich
noch den Korper mit dem Kalk genau wie es der Zaubermeister
beim Kranken getan und rufen ein langgezogenes. grosses ff/;-/
Darauf spricht der Zaubermeister mit ungeheurer Schnelligkeit
einen Ingietzauberspruch, der a tata vnrakt (ununterbroehener
Redefluss) oder auch a vinaheo (Vogelruf) genannt wird.
Die wunderbare Zauberkraft des To Matikomkom wird jede
Gefalir beseitigen, die uns droht von Seiten aller bôsen Geister,
von den Turangan sowohl wie von den Ingiet u. s. w. u. s. \v.
Dann ruft die ganze Versammlung : « Aia uap I » Und nun
entfernen sich aile beruhigt und tragen den Kranken in sein
Gehoft zurùck. Dort bitten zurûckgebliebene Frauen. die wàh-
rend der Abwesenheit des Kranken in ihrem Gehoft verbliebon
sind. um seine Seele festzuhalten, den Zaubermeister ebenfalls
um etwas Kalk, womit sie sich dann die hauptsàchlichslen
und wichtigsten Zauberstellen des Kôrpers wie Ohren, Brust,
und Nabel bestreichen,
Damit ist die Vart'amèa-Zauberei zu Ende. Darauf folgt das
Tuntnon. ein weiteres Zauberheilverfahren, das unmittelbar nur
einige Stunden nach der Varyamôa-Zauberei an dem Kranken
DIE INGIBT-MYSTERIEN ALT NEUPOMMEUN 379
ausgeiiht wird. E.s geschipht dièse Cérémonie besonders aus dem
Grunde, um deni Kranken, der dureh die Varvamba-ZsLXiherei in
den Ingietbund aufgenonimen wurde, beizubringen, dass er nun
tûr immer auf den Genuss von Sehweinefleisch verziehten muss.
Er wird wie bei der Vort)a»(6a-Zauberei auf einen gebeimen
Ingietplatz getragen. Dort werden zunàchst dieselben Zaube-
reien wie beim Varvamba an ibni vorgenommen. Dann wird ihm
unter verschiedenen Paketen eines iiberreicht mit den Worten :
« 0 r'amii ik a borui go ! Hier hast du Schweinefleiseh. Zum
letzten mal darfst du es geniessen ; nie und nimmermehr wirst
du es verkosten ; mit dem Schweinefleisi-bessen ist es nun aus
fiir dich fur immer. »
Der Kranke greift begierig nach dem Bûndel und macht es
auf. Wie ist er enttauseht. Naehdem er die Hiille entfernt, hait
er nur einen abgenagfen Schweinekopf in den Hànden. Der
Zaubermeister tut dabei ganz entrûstet, ebenso bei den anderen
Paketen, die auch nur Ungeniessbares enthalten.Er weiss jedocli
ganz genau, dass das ailes nur Lug und Trug ist. Naehdem der
Kranke die Pakete aile aufgemacht und sich von dem Betrug
ûberzpugt hat, nimmt der Zaubermeister sie und wirft sie in
den Busch.
Dann spricht der Zaubermeister mit den anwesenden Ingiet-
miinnern ein Tata-vurakH, wie beim Varvcnnbo, und darauf wird
dem Kranken ein geheimnisvolles Ingietsteinbild gezeigt.
Dièse Ingietsteinbilder kumen urspriinglich aus Nakanai, wo
die Bewohnei' des Nordostteiles der Gazelle Halbinsel das
Muschelgeld herbolten. Sjtiiter wurden aus Parstava, Vairiki
und Tananaikiki Ingietsteinbilder hergestellt. Aber die Einge-
borenen lachten ûber dièse neueren Stw'ke, weil sie aus papapn
porôsem Sandstein liergestellt waren. Dièse Ingietsteinbilder
sfcllten zunàchst nur Verstorbene aus der Sippe der Zunft-
biûder dar. Da jedoch spâter beruchtigte Ingiet vorgaben, sie
konnten sic!) in E-tnangit in ausserordentliche Dinge verwandeln,
in Frauen, a Vavina-tabdhib aran, in Weibsteufel, und sie ver-
mochten ibre Seele im Sdilafe in Tiere wie in Kàngui'uh. Hunde,
S(-hweine, Raubvogcl u. s. w. hineinzuschicken ; so verfertigten
sie in der Folge auch Ingietsteinliilder die Frauen und Tiere
darstellend und in ail diesnn Ingiefsteinbildern sollten sich nach
ihrer Anschauung die Geister der Yerstorbenen Ingiet aufhalten.
380 J. WINTHUIS
Dann auch in den sog. Ingiet oder E-mangit-Tieren vermuten
sie die Eigcnschaftcn, die Maelit uml Gewalt persunlicher Geis-
ter. Sie sind ilinen dalier lieiliig nnd dalier verfertigen sie die
steinernen Tierfiguren und erweisen ihnen und den in ihnen
wolmenden (ieistern Hochachtung und Ehrfurcht.
Wenn schon die gewohnliclien Eingeborenen mit Sclirecken
vor den niàchtigen Ingietzaubererin erfùUt sind, so jagen ihnen
die berik'htigten B-?/io**^/f-Zauberer, die wohl einen zweiten
h()heren G]'ad im Ingietbunde darstellen, geradezu Grauscn und
Ent.setzen ein. Und mit Reclit, denn die E-mangit gehen mit
unerlifirter (T]■au^^amkeit gegen ihre Feinde vor. Wenn einer
plotzlich stirbt, heisst es gewr)hnli('h : « Das E-tnangit liât ihn
umgebraclit », d. h. ein Turangan-Geist. Es war aber der
schlaue £'-A/((//';//ï-Zauberer, der mit seinem Holiuspokus, seinem
aberglàubiscben Getue und seinen grosssprecheriselien Wor-
ten, dass er mit màehtigen Geistern in Verbindung stànde, auf
die Dummheit der Masse und ihre so leicht erregbare Phanta-
sie und ibr aberglaubisehes Geifûlil spekuliert und aile Mord-
taten den Turangan-Geistern zusehreibt, in Wirkliebkeit aber
selbsi mit Hûlfe von Helfershelfern seinem Feinde den Garaus
marbt, indem er tien Niehtsahnenden plotzlich hinterrûcks ûber-
fâllt, ihm von hinten einen spitzen Stock oder ein abgebrocbe-
nes Messer in den I.eib stosst, ihm den Hais umdreht und ihm
wuchtige iSchlàge auf die Gurgel versetzt, so dass er nicht
ni'dir si)rechen kann. Mit vieler ^Mûhe eiTeicht der so schwer
verwundele sein Gehoft, legt sicli dort auf seine Matte und
stirbl. Blut ist ihm aus Mund und Hais gequollen und die Leuto
sagen : « A E-maiigit i innbia. Das E-maiigit hat ihn umge-
bracht. »
Bevor ich den 2. Teil meines Vortrages beendige, muss ich
noch ein Wort iiber den Tutnna curakit sagen, der mich gleich
zum 3. und letzten Teil meines Vortrages, dem Varvanira fûhrt.
Ist die Vnrvamba- und ri//*fwo»-Ceremonie geschehen, so neh-
men die neuen Ingietkandidaten 6-8 Wochen Aufenthalt in
einer abseits gelegenen Hiïtte, \vo sie sich verbergen und im
ûbrigen nichts tuen. Niemand darf sie selien. Sieht sie jemand,
muss der Betreffende eine Muschelgeldstrafe zahlen. Nur die
alten Ingietleute dûrfen sich ihnen nâhern. Ja, es herrscht die
Sitte, dass die àlteren Ingietleute die jungen Kandidaten in
DTK IXGIET-MYSTERIEN AUF NEUPOMMËRN 381
ihrer Wartezeit vor den Ingietfesten manchmal des Nachts
ûberfallen und sie mit Frûchten, Steinen und Knûppeln hewer-
fen. Sohnell miissen sieh die so Bedrohten auf das im Ingiet-
platz errichtete Kletterhaus flûehten. Wehe dem, der diesen
Zufluchtsort nicht erreicht. Er wird zuni Tutana-vurakit, zum
wilden Waldmensclien, zum ewigen Juden. (S. Anthmpos. Y. Bd.,
1910, S. 109 ff.)
Ich komme zum dritten und letzten Teil, dem. sog. varvanira,
zn dr>n eigpntliclipn Ingietfeierlirlikpiten.
III. DIE INGIETFEIERLICHKEITEN. DAS VARVANIRA.
Fur dièse von Kanakon der nordôstl. Gazelle-Halbinsel Neu-
pommerns sehr liegehiien Festliehkeiten wurde immer die
schune Jahreszeit, d. h. die Zeit des Siidostmonsuns, die von
Mai bis Oktober-November dauert, ahgewartet. Mittlerweile
bemiihten sich auch die Verwandten der neuen Ingietkandidaten
grosse Pflanzimgen anzulegen, um dureh den Yerkauf und
Erlôs der Feldfrûchte das fur die Aufnahme ihrer Familien-
mitglieder nôtige Muschelgeld zu erwerben. Denn gar viele
Klafter Muschelgeld sind dazu von Noten.
War dann die schdne Jahreszeit herangeriiokt, wurde in
Erw artung der grossen Festliehkeiten der Jubel allgemein. Der
Kriegslàrm verstummte, die Feindseligkeiten zwischen den ein-
zelnen Dorfen und Stâmmen hôrten auf. wenn es auch vorkam,
dass plutzlich inmitten der grossen Festliehkeiten die wilden
alten Fehden wieder losbrachen und dabei oft eine Anzahl von
Menschen getotet wurden. Parkinson erzâhlt, in seinem Bûche
Drrissig Jahre in der Sûdsee, von solehen bei Ingietfeierlichkeiten
plôtzlich hervorgerufenen Mordszenen, wobei einmal ûber
100 Menschen erschlagen wurden (1).
Aber im allgemeinen ruhten die Wafïen. und woit und breit
bereiteten sich die Eingeborenen auf die so sehnlichst er-
wartefen Festliehkeiten vor. Besonders grossen Fleiss ver-
wendeten sie schon Monate vor ihrem Beginn Tag und Nacht
mit der Einûbung ihrer Tânze. Die Mana (Uneingeweihten) wid-
meten sich der Tanzkunst auf freien Plàtzen, auf denen jeder-
mann zuschauen konnte, wâhrend die Ingietmitglieder ihre
(1) Parkixson, Dreissig Jahrc in d(r Sudsrr^ S. 609. Auch P. .1. Meier
oiNvahnt einen soichen Vorfall, Anthr., Bd. VII. S. 839.
382 , .1. WINTHUIS
Tànze im Dickicht (1er Wàlder auf ihren geheimen Ingiptplaf zen
einûbten, zu denen Nichtmitglieder keinen Zutritt hatten.
Lange Tage vor den Festlichkeiten wurden grosse Mengen
von Esswaren, wie Kokosnùsse, Tare, Yam, Bananen vor allem
zu Bereitung ihres Nationalgericlites, des Pynvj)iir. in die
Geliôfte geschleppt. Borstentràger wurden eingefangen und am
Tag vor Beginn der Feierlichkeiten gesclilaehtet und mit Be-
malungen gesehmûekt.
War endlich der grosse Tag erschienen, dann st.romte ailes
in jenen Distrikt, der in deni Jahr zuni Scliauplatz der grossen
Ingietfeste auserselien war. Es fanden namlich dièse Feste
abwechselnd jedes Jalir in dem einen oder anderen Distrikte
statt. Was keine Sitte vermoehte, das brachte der Ingiet zu
Wege. Die sonst einander so feindlicli gesinnten Angehôrigen
der einzelnen Dôrfer und Sippen kamen zusammen, tausende
und abertausende. Der Ingiet war das einzige sie einigende
Band. Sie sehienen dann gleichsam zu erkennen, dass sie docb
Angehôrige eines Volkes seien, die Blutfeindsehaft ruhte und
die erbitterstein Feinde tanzten friedlieh nebeneinander, reich-
ten sich die Betelnuss und waren auf einmal Freunde geworden.
Ans dem bisber Gesagten ersieht man, dass an den eigent li-
chen Ingietfeierlichkeiten das ganze Volk teilnahm. Wir konnen
aber bei diesen Mysteriensehlussfeiern zwei Telle unterschei-
den, einen rjffpntliphen. an dem aueh die Nichtmitglieder, die
sog. mava, aucli Frauen und Kinder teilnahmen und einen gehei-
mem Teil, der aus den geheimen Ingietversammlungen, die auf
dem Maramoro- oder Maravot-Plàtzen im dunklen Dickiebi der
Wàlder unter Ausschluss jeglicher Zuschauer stattfanden,
bestand.
Auf einem dieser Geheimplàtze wurde die Einweihung der
Kandidaten durch Vorzeigen von Steinbildern u varvanira » vor-
genommen. Darauf erhielten sie einen neuen Namen, den sog.
Ingietnamen. Dadureh bekamen sie eine hohere Weibe un-d
Wûrde und wurden sie endgiiltig in dem Bund aufgenommen.
Nach der Einweihung machte der Zauberer eine Zauberei an
ihnen, indem er ihnen mit verhextem Kalkstaub den Bauch,
Ohr, Stirne, Ellenbogen und Kniegelenkbestrich und sie mit
einem weissen und roten von Sehulter zu Schulter ûber die
Briisl hinl;nif(>n bui Stricli bemalte. Dann verhexte er Ingwer-
ni.lî IMilET-MYSTERlEN AFF .\Erin)MMErvX 383
strâucher mit folgenden Worten : <( Ingwer, der vertreibt,
Ingwer, der vertreibt jeden bosen Einfluss des Ingietgeistes,
jeden bô^artigen Moderstaub, jeden Fieberschauer, jedes Zit-
tern, jeden Schûttelfrost. » Hierauf reichte der Iniataltmeister
den umstehenden Inielmànnern verhexte Ingwerknollclien, biess
sie sie kauen und damil die Kandidaten auf Brust. Kniescbeibe,
Sehulter and Rûcken anspeien...
Jetzt fàrbten sieb die Kandidaten ibr Haupthaar rot und
sfhmïK'kten sieb mit Federbuscb und zierlichen Bast- und
Muschelringen. Dann niarschierten sie im Gànsemarsch ans
dem Ingietbezirk fort, binant in die Gebôfle zu den Frauen und
Uneingeweibten. •
Dort erôffneten zwei aile Frauen von den beiden versebiede-
nen ;Stâmmen den Tanz. Dièse beiden Yertreterinnen des
Menschengesrblecbtes gaben die neuen Ingietmànner, die dureh
die Ingietweibe abgesondert worden waren. gleidisani ibrom
Yolke wieder zurûck. {Anthr., Bd. YI, S. 861 ff.)
An den folgenden Tagen, fûbrten die alten Ingietmànner
zusammen mit den Neuaufgenommenen in den geheimen Ingiet-
plâtzen ibre Ingiettanze, auch Varvagira-Ta.nze genannt, auf.
Dabei ist besonders bervorzubeben, dass hoch oben auf einem
Baume, auf einem Gerûst, das in Form eines Kabnes erbaut
war. einige der Ingielmitglieder tanzten. Parkinson, der auch
von einem solehen Tanze erzàblt {1. c, S. 607), wusste wohl
nicht, dass der Kahn das Bild ist, dessen die Eingeborenen des
Nordoststammes der Gazelle Halbinsel sich bedienen, um die
genitalia mulieris darzustellen. Im ubrigen bebt aucb Parkin-
SON hervor, dass bei Gelegenheit der Varvagira-Tanze die Ver-
sammlung der Ingiet in wilde Orgien ausarteten {l. c, S. 609).
Wenn der Tanz der Ingiet zu Ende und ibr Schreien und Toben
in Raserei aus,g,eartet war, sicbrie der Anfûbrer : « Mânner
sprecbt es aile : Blut eines Ermordeten ! » Wie die bescssenen
Teufel sprangen sie dann auf und nieder, dass die Erde
erdrohnte und sie sclu'ieen in wildem Cborus : « A gass na virua !
Blut eines Ermordeten ! »
Dann leitete der Anfûbrer durcli Worte und Geberden zu
unzûehtigen Dingen, Sodomiterei u. s. w. ùber.
Darauf kam der Schlussakt : Das Festessen. dessen Bestand-
teib-. wie tluhner, Taros, Bananen, Yams und Kokosnusse sie
384 -î. VIROEN
sich von den Mana, rien Uneingeweihten, dem Ingiethund nicht
angehiirenden ofi znsamniengoi'auht liatten. Dièse sind wie
hypnotisiert, wenn die Ingiet mit wildem Geschrei in ihre
GeliTjfte und Pllanzungen eindringen und dort rauben und pliin-
dorn was ihnen gefàllt. Niemals wiirde so ein Mann den Mut-
haben, gegen die mit allen Teufeln, — wie sie walinen —
verbiindeten, in der Zauberei erfahrenen Ingiet aufzutreten.
Aiich in dieser wûsten Raub- iind Plûnderkist zeigt sich, dass
der Ingiet die Hochburg des Kanal^entums, d. h. die Hochburg
des kanakischen Heidentums ist. Ueberhaupt offenbaren die
Ingietmysterien das ganze tSeelenleben der Eingeborenen, vor
allem wie ilire ûppige Plianta&'te sich in den bizarrsten Yorstel-
lungen ergeht, und wie besonders auch ihr an Wahnsinn gren-
zender iStolz, iiire Habsucht und ihre Sinnlichkeit auf ihre
Reohnung kommen.
[27] Les sociétés secrètes des Marind,
par le R. P. ViEGEN, M. S. C.
Le peuple marind est établi sur la côte sud de la Nouvelle
Guinée hollandaise, entre le tleuve Jower (Fly River des cartes
anglaises) et le Digoel.
Tout, dans ses usages, jusqu'aux moindres détails, a une
signification sacrée. L'explication en est tenue rigoureusement
cachée, les plus terribles vengeances des ancêtres étant à re-
douter dans le cas où elle serait divulguée. La crainte rend
donc les indigènes muets sur ces questions (1), et l'on doit peu
attendre des confidences personnelles. Mais ayant pu assister à
leurs cérémonies, répétées à des dates fixes, à l'intérieur d'un
cycle d'années bien déterminé, je suis arrivé è penser que
tout leur culte exprime l'origine et vise à assurer la conserva-
tion de leur tribu. Je découvris surtout la clef de leurs mys-
tères, quand je fus amené à reconnaître dans quelles relations
étroites ils se trouvent avec la configuration de leur pays. On
en conviendra, ce me semble, si l'on examine avec attention.
(1) Je vis un jour un vieillard se jeter dans mes bras et me supplier avec
larmes de ne pas révéler un secret que j'étais parvenu à saisir : les arbres, les
cocotiers et la nat rc cllemême, disait-il, seraient frappés de stérilité.
LES SOCIÉTÉS SE<]RÈTES DES MARIND
385
au terme de cet entretien, la carte que je mets ici sous les yeux
du lecteur.
Di^L
Afiaiti-
Bi'Pcek
VIendo
, Bahor
JroLU/êtIe 0Lilnée koll. ^^
Cote sud ,, ç,j^
Exposer comment le pays des Marind est l'image du mystère
marind, tel sera l'objet de la présente conférence.
Je diviserai mon sujet comme il suit :
1° If nom de Marind et sa signification ;
2° la vie sociale, familiale et religieuse des Marind ;
3° les quatre sociétés secrètes Sosom, Harapa, Imo et Majo.
Après avoir étudié ces divers points, je dégagerai les conclu-
sions.
I. LE NOM DE MARIND ; SA SIGNIFICATION.
Le Marind est un coupeur de têtes, c'est-à-dire qu'il fait la
chasse à son semblable pour lui couper la tête. Si vous lui
demandez pourquoi il se livre à cette besogne affreuse, il vous
dira, sans vergogne, que c'est pour avoir à donner des noms à
ses enfants. De fait, le dernier cri que lance leur victime sert
comme tel.
On ne connaissait d'abord d'autre nom de la population que
celui de Toegeri. Mais lui-même, le Marind, déclare ne connaître
d'autre dénomination que celle de Marind. Cependant, inter-
rogé de manière plus pressante, il finit par répondre, avec une
certaine hésitation : « Soit dit entre nous, Toegeri ou plutôt
Toeger est notre nom officieux, tandis que Marind est notre nom
ofiiciel ».
25
386 J. VIEGEN
Ainsi déjià, avec le nom. nous entrons dans le rèigno du mys-
térieux.
On dit aussi du pays qu'il est marind. Tout de suite les Marind
vous diront qu'eux forment le centre (în = milieu) , eux le rœur
{bëkai) du pays, que c'est eux qui en sont le noyau, l'intérieur
{korma) . Ils se croient donc autorisés à s'adjuger le nom de
marhui-ha, qui veut dire « vrai Marind ».
Quelle est maintenant la signification du mot Marind ?
tJne nuil j'étais lallé assister aux fêtes de la tribu. Dans les
lueurs rousses des feux, se trouvaient réunis 50 à 60 hommes,
qui représentaient des « Esiprits » et qui, en cette qualité, de-
vaient administrer aux jeunes candidats le baptême d'admission
dans la société des Majo's. Tandis que je passais la longue
ligne des Esprits, sans me doutei' de quoi que ce soit, voilà que
tout à coup un rassemblement se fit. Un petit groupe de femmes
s'en vint, toutes consternées et ahuries, se presser autour des
« Esprits », f^n criant : « I.e Somb-Anrm de Jêi (une tribu de
l'intérieur) et la Maro-sav sont-ils présents ? » Pas une d'elles
assurément ne doutait de la présence des personnes nommées ;
mais elles agissiaient ainsi parce que c'est honorer grandement
quelqu'un que de paraître s'intéresser à lui. L'incident m'apprit
quels « Esprits » remplissent le rôle principal dans ces réu-
nions : le vieillard ou Grand Seigneur de Jêi et la femme [sav :
femme mariée) nommée Maro. Ma première pensée fut celle-ci :
alors Marind ne peut signifier autre chose que « les descendants
de la concubine ». Je dirai plus tard, en parlant du mystère, de
quel droit je fais dériver Marixd du nom de « Maro », qui est
un mot mélanésien.
II. VIE SOCIALE, FAMILIALE ET RELIGIEUSE DES MARIND.
Si jamais l'adage <* Nomen est omni » a été vrai, c'est bien
dans le cas présent. Le Marind est le fameux coupeur de têtes et
descend de la prostituée ; sa vie sociale, familiale et religieuse
en porte clairement le cachet.
Les têtes qu'il a capturées dans ses chasses à l'homme, il
les suspend au faîte des maisons des hommes. Si les n>âchoires
s'en détachent et tombent à terre, il les enfile à une lance, qu'il
plante en terj'e dans l'enclos devant sa hutte. Les vieilles têtes
et crânes, il les suspend en grappes à l'arrière façade. Il les
consacre à l'Etre suprême ; elles sont donc tabou.
LRS SOCIÉTÉS SECRÈTES DES MARIND 387
Pour la même raison, il se glorifie de ce que la tribu, la
société, voire même la fainille ne reconnaissent pas de chef,
du moins offîciellement. Je dis : même la famille. Nulle part
en effet t)n ne rencontre ce maisons destinées à une seule
famille ; ce sont partout des habitations communes, soit aux
hommes, soit aux femmes ; jamais d'habitations mixtes.
Tant que les enfants sont jeunes, ils habitent les maisons
destinées aux femmes. Mais une fois arrivé à Tâge de dix ou
douze ans, le garçon doit se séquestrer avec les jeunes gens,
le jour dans les endos et plantations à eux destinés, hors du
village, la nuit dans la maison des hommes, où ceux-ci vont
dormir.
Quand le jeune homme a atteint l'âge nubile {miakîm) , il peut
non seulement participer à la vie ordinaire du village, mais il a
aussi droit de parole dans les délibérations publiques. Car chez
les Marind tout se décide dans 'le conseil municipal, où Ton ne
reconnaît pas de chef ou président.
Assez souvent l'homme marié [amwcDiggib) a la parole ; en
fait cependant, si Ton connaît quelque peu la langue et si l'on
observe de plus près, on s'aperçoit vite que ces jeunes gens ne
sont que les i)orte-voix, les aides parlementaires des anciens
de leurs familles.
Le Marind reconnaît le mariage, bien que la vie publique
semble le réduire à bien peu. Il reconnaît même un double ma-
riage, ique nous distinguons en mariage de droit privé et mariage
de droit public. Le mariage de droit privé est celui où l'on peut
se connaître mutuellement, mais sous la condition que le ma-
riage reste sans enfants. — iGe mariage est monogame et l'on
veille sévèrement à ce qu'il le soit réellement. Le mariage privé
devient de droit public, non pas lorsqu'il est offîciellement re-
connu comme tel, mais lorsque la femme, qui s'appellera dès
lors iiôh sav, c'est-à-dire Uduvellement mariée, devient comme
'le bien public des hommes, donc une prostituée, et le nouveau
marié, le nôh asav, le mari commun des femmes ; dans les deux
cas cependant certaines prescriptions fixes seront à observer.
Pour deux ou trois ans encore, il ne leur sera pas pei'mis
d'avoir d'enfants et ce ne sera que lorsque la femme aura été
incor])orée dans la société secrète de Sosom, que i;e droit lui
sera octroyé. C'est alors f]ue le Marind i)ai'li'ra de la fiUe-
enceinte, mes-iwage.
388 J. VIËGEK
Dans le mariage privé devenu de droit public, ce que l'on
honore, c'est 'la virilité de l'homme. Comme preuve de ce que
je dis, je pourrais citer le culte de l'esprit Kovci-Mit. Cet esprit
est mâle, mais censé en état de grossesse. A la partie extrême
de ses parties sexuelles on donne le nom de « tête renversée ».
— Tête renversée : voilé qui nous dit l'origine et l'objet du
mystère qui enveloppe la vie religieuse du Marind.
Essayons d'éclairer ce point.
1° Les origwcs. — Il y a bien longtemps, disent les Marind,
la vie en ce bas monde était bien autrement facile et agréable.
Malheureusement, tout fut bouleversé. Depuis, le bien, le beau,
le vrai furent comme submergés ; le mal, le laid, le mensonge
surnagèrent seuls. Un jour, une vieille amie me fit des plaintes
amères : « A cette révolution, me dit-elle, le règne de la Belle
Fille prit fin et cette révolution également exerça des effets
désastreux sur la tradition, les mœurs et la langue ».
C'est à la « Belle Fillf » (jue vont toujours leurs désirs les
plus intimes et quiconque entend leurs complaintes touchantes
craindrait de mettre en doute la sincérité de leur douleur, s'il
n'était mieux renseigné. Cette « Belle Fille » est pour nous
l'Antigone de 'la mère des Marind, qu'ils désignent du nom de
« co-épouse, concubine ».
La tradition subit, elle aussi, une transformation. Est-ce de
cette époque que date la distinction entre tradition et révélation
(les Marind possèdent en effet des mots différents pour dési-
gner ces deux idées) et que fut établie comme gardienne de la
révélation la caste brawa-anem ?
Autrefois, disent-ils encore, les mœurs étaient pures et notre
nation la plus noble et la plus charmante qui fut au monde.
Malheureusement, cet état paradisiaque n'a pas duré. Aujour-
d'hui, les coutumes sont dépravées.
La langue elle aussi aurait été transformée. Le vocabulaire
primitif, comme les Marind me l'ont assuré maintes fois, se
composait exclusivement de termes polis ; aujourd'hui il abonde
en injures grossières. Les nobles Gebsê seuls ont conservé quel-
que chose de cette distinction originelle du langage. Aussi leur
chef, nommé Sami, porte-t-il encore toujours le nom de « fils
de la belle fille ».
Le caractère du peuple est dissimulé. On aurait tort de se
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES DES MARLND 389
fier purement et simplement même aux paroles des Gebsê. Non
seulement ils s'expriment en métaphores, comme tous les au-
tres, ce qui prête à Téquivoqup, mais aussi ils disent souvent le
contraire de ce qu"ils pensent. Le langage des Gehsê d'ailleurs
est rauque et guttural, comme celui des autres tribus, et ne
révèle aucun trait plus primitif.
Pour donner une idée du secret des Marind, je n'ai présenté
jusqu'ici que quelques données, recueillies de leur propre bou-
che. Qu'il me soit permis d'ajouter une conjecture personnelle.
Où cette révolution a-t-elle commencé ? — Au Koembe. Si nous
passons cette rivière, surtout si nous poussons nos investiga-
tions jusqu' h Sangase, un fait nous frappe de prime abord : c'est
le nombre considérable de mots, inversions fidèles de l'idiome
qu'on parle de l'autre côté de la rivière. Une fois ce fait cons-
taté, je me demandai : cette confusion de langue n'aurait-elle
pas été provoquée à dessein, et alors la langue primitive ne
serait-elle pas devenue la langue sacrée* défendue ? Le fait
qu'un nombre considérable d'objets sacrés portent des noms
purement mélanésiens a amené cette supposition. M'appuyant
sur ce fait, je me crois en droit de donner une signification
mélanésienne au mot maroe, comme je vous ai dit en donnant
son étymologie.
§° Objet du mystère. — Le Marind n"est pas peu fier du grand
nombre des 'langues qu'on parle dans son pays. Un jour je de-
mandai à mon ami .Jangger la raison de cette grande diversité
de dialectes. « OvVk boivcw me en », répondit-il. Cela veut dire :
la langue est le totem, la part {boan) du membre viril, en d'au-
termes termes : seminare est loqui. Qu'on songe à ce que nous
avons dit plus liaut (p. 388) sur la tiête renver-sée.
Autre question : d'où vient l'idée de la tête renversée ? Nous
ne saurions mieux expli(iuer ceci, qu'en étudiant quelques dé-
tails des conceptions religieuses propres aux Marind.
Le Marind croit à un Etre suprême, unique comme le soleil,
subsistant par lui-même, immensément riche, créateur de tou-
tes choses et maître de l'univers. Le nom de cet Etre suprême
est : Gèbe. Nous dérivons ce mot du mélanésien : gaivai, gawe,
qui signifie « faire », et (jui est vraisemblablement analogue
au mot marind koivu, koive, oge. à signification identique. Le
Marind se présente Gèbe comme un être colossal, dont la tête
390 J. VIEGEN
s'élève iinmensurahlement au-dessus du soleil et dont les pieds
s'enfoncent à égale distance au-dessous de la terre, qui forme
son nombril. Un bras s"étend jusqu'à 'rextréme Sud, l'autre jus-
qu'à Textrênie Nord. Si le Marind prétend que Gèbe a deux
femmes, ces femmes sont ses deux bras.
Un jour Gèbe fut décapité. Des garçons s'amusaient aux
bords de la mer là chasser des poissons avec leurs flèches. Un
jour, quelques-uns manquaient à l'apipel et, comme il en dis-
paraissait une seconde et une troisième fois, on résolut de les
surveiller. Ainsi fut fait. On vit apparaître quelqu'un et on lui
donna la chasse. Il s'enfuit dans l'intérieur du pays et on Ty
poursuivit. On le saisit enfin... Koema. Nous demandons ce que
ce Koema signifie ici. La réponse est : « Koema, mais cela veut
dire Koema. » Nous voilà en présence d'un mot mystérieux,
qu'on retrouve à chaque pas dans la vie du Marind. Il signifie :
<( en, dans, intérieur, centre » et puis « caché, confldentiel,
secret », mais il désigne aussi les parties secrètes de la femme.
Nous traduisons ici le mot par : « fosse »,
A leur grande stupéfaction, les hommes découvrent qu'ils oiu
capturé Gèbe et ils hésitent à le tuer. Mais 'les femmes insistent,
en promettant d'apporter de l'eau dans des tuyaux de bambou ;
les hommes n'auront qu'à la verser dans la fosse. D'abord l'eau
ne voulait pas monter dans la fosse, bien qu'on en eût déjà
versé une quantité considérable ; enfin elle monta, au point de
remplir la fosse jusqu'aux bords. Mais Gèbe tenait toujours la
tête au-dessus de l'eau, de sorte que l'on ne parvenait pas à le
noyer. On résolut alors de lui couper la tète. La tête de Gèbe
fut préparée et ornée. On la plaça sur un échafaudage de bam-
bou, autour duquel on dansa toute la nuit. Mais à l'aube du
jour, chose merveilleuse, la tête se leva et accompagnée de deux
jeunes filles s'envola vers l'Orient. Elle s'envola loin, loin,
loin et... maintenant elle est le soleil dans le firmament.
Longtemps, la légende se termina ainsi pour moi. Mais un
jour de jeunes garçons s'oublièrent à ajouter : « On se partagea
ensuite le tronc et de ce tronc sont provenus les autres,
les autres et les autres Marind », c'est-à-dire les différentes
tribus qui composent le peuple marind.
L'image de Gèbe se retrouve dans la représentation que le
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES DES MARIND 391
IMarind se fait de son pays ; c'est l'image de Gèbe décapité (1).
J'ai nièiiie ])U constater que le partaige du corps de Gèbe,
et conséquemnient celui du pays des ;\larind, a été opéré d'après
un certain plan, un certain système.
Voici les règles qui ont présidé au partage :
On découpa d'abord dans le corj)s une pai'tio supérieure.
moyenne et inférieure, dont on destina la première, c'est-à-dire
la tête et le cou, aux ancêtres ; l'autre, à savoir la taille et le
bas-ventre, aux pères (habitants actuels), et enfin la dernière, à
savoir la cuisse et la partie inférieui (> de la jambe, aux descen-
dants. - — Dans chacune de ces trois imrties on distingua ensuite
une partie supérieure, qui fut attrilmée aux membres mascu-
lins'des trois catégories susdites, ei une partie inférieure, qui
forma la part des membres féminin- de ces mêmes classes. —
Aux ancêtres échut ainsi la tète {pa-ha), aux descendants les
pieds, qu'on désigne aussi sous le nom de « tête opposée »,
{akap pa) , aux pères actuels, l"s propagateurs du peuple, le
membre viril, dont Textrémité est désignée toujours par le nom
pa h'awa raivetok, la tête renversée. — Le Marind-ho — et il
insiste sur ce point — forme le centre, le nr)yau, le cœur du
Marind : il doit donc être rangé parmi les pères actuels, aux-
quels la propagation de l'espèce a été donnée en partage. A lui
appartient par conséquisnt le membre viril à la tête renversée.
Il importe beaucoui. ide voir comment le pays a été divisé
d'après l'image de Gèbe. Le territoire marind est Gebsé en effet.
Le pays de Marind n'a pas de chef, pour cette raison que
l'Ancêtre mâle ne peut faire valoir aucun droit 'sur un lopin
de terre. C'est le privilège exclusif de l'Ancêtre féminin, dont
le territoire s'étend de la pointe de l'Est, jusqu'à la rivière du
Jower.
C'est là que commence le territoire des pères actuels, qui ont
la partie moyenne en partage. Il s'étend jusqu'à la rivière
Notcare. Depuis cette rivière jusqu'à la frontière occidentale du
pays marind. s'étend le territoire des descendants. Pour les
subdivisions du pays marind. nous devons nous borner au ter-
(1) Cette idée se retrouve peut-être encore dans cet autre dicton : « makun,
)ii(ikun-rikr Gebse ». Cela veut dire : « la terre et tout ce qui est terrestre fait
partie de Gèbe » ou « est .semblable à Gcbe » ; les deux traductions me
semblent justifiables.
392 J. VIEGEN
ritoire des Marind-ha. Nous avons déjà observé, au commence-
ment, que le Marind-ha demeure entre le Digoel et le Jower.
Nous n'avons pas encore parlé du Digoel comme frontière. La
raison de ce silence est que cette rivière entre seulement en
ligne de compte dans la division de la partie moyenne en part
masculine et féminine. La partie orientale de la partie moyenne,
celle qui s'étend du Jower jusqu'au Digoel, appartient à l'habi-
tant actuel mâle et la partie occidentale du Jower, jusqu'au
Nowarep, appartient à la femme.
Notre Marind-ha représente donc Thahitant mâle et ce n'est
pas sans raison qu'il vénère le membre viril-
Voici l'assertion. Clierclions-en la preuve.
Le Marind-ha dit que le Jaba-anem, qui demeure près du
Diigoel et du détroit de Moeri, ne va que clopin-clopant. Ces gens
ne sont donc pas encore des hommes parfaits. Ils ne seront
parfaits que dans la mère-patrie avoisinante. J'ai dit à dessein
« mère-patrie ». Car, chose remarquable, dans l'intérieur de
cette contrée, aux bords d'un aftluent de la rivière Dikbuik, j'ai
découvert l'image (grandeur naturelle) à'Anoep-Anoem, la fille-
mère, qui porte dans son sein le semen virile.
Le territoire de la femme est désigné par le Marind sous le
nom de « part méridionale ». Nous ne comprenions pas d'abord
cette dénomination. A première vue, il semble qu'il faut dire
« pays occidental-oriental ». Mais on me fit observer que ce
n'était qu'une façon de parler et que la côte était un pays
féminin, tout à fait à part. Après un peu de réflexion, la lumière
se fit : Marind-ha est le bras de l'image de Gèbe. Du même coup,
nous comprîmes pourquoi on nous avait répété si souvent que
Marind-ha ne devait pas être considéré comme la côte, qu'on
se figure située dans le territoire des Jêi. Marind-ha est donc la
mer. disions-nous. — Mais non, répondait-on. — La terre
alors ? — Ni terre, ni mer ; le Marind-ha vit sur des vaisseaux.
Et en effet, nomment-ils vaisseaux [Jaivun) les planchers qu'ils
forment dans leurs jardins et qui sont entourés d'eau.
Ajoutons en confirmation le trait suivant : Sanggasé fut un
jour puni pour avoir fait la chasse à l'homme. Or, en fouillant
les cases, on trouva non seulement des têtes nouvellement cap-
turées, mais aussi un bras gauche. Si Marind-ha est le bras de
Gèbe, ce ne peut être que le bras gauche. Est-ce simple hasard
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES DES MARIND 393
encore, que le Marind-ha, qui se défendait d'abord d'être anthro-
pophage, m'avoua plus tard qu'il préférait le bras à tout autre
morceau ? — C"est ce Marind-ha, le bras gauche de Gèhe, qui
porte le nom de Tanger.
Passons maintenant à la division du pays des Toeger, d'après
la formule proposée.
Le pays des Toeger est divisé d'aboi'd en une partie septen-
trionale et une partie méridionale. La première s'étend vers
l'Est, la seconde vers l'Ouest. Elles sont séparées par le fleuve
Koembe. Chaque partie pnsuite est divisée en deux départe-
ments, à savoir la partie méridionale en un département de
l'Est et un département du Sud ; la partie septentrionale en un
département du Nord et un département de l'Ouest. Le dépar-
tement de l'Est va du Joivcr au Toerasi, le département du Sud
du Toerasi au Maro, le département du Nord du Koembe au
Bonlaha et enfin le département de l'Ouest du Boulaka au détroit
de Moeri.
Vous aurez remarqué, Messieurs, que je n'ai pas mentionné
la partie de la côte, qui se trouve entre le Maro et le Konnbe. Ce
n'est pas un oubli. Je suis simplement l'exemple de nos Marind,
qui prétendent l'ignorer, quoiqu'elle soit pour eux, les initiés,
de la plus haute importance. Et en effet ce département du
Centre, comme ils l'appellent, est pour eux le pays le Toeger ou
Marind-ha, ce que ce pays lui-même est pour tout Marind, à
savoir le centre, le noyau, le cœur. Vous saisirez mieux ma
pensée, une fois que j'aurai assigné à chacun des départements
les sociétés secrètes qui leur sont propres, avec les personnages
qui y sont vénérés.
III. LES QUATRE SOCIÉTÉS SECRÈTES.
Les sociétés secrètes des Marind sont au nombre de quatre, à
savoir la société de Sosom, celle des Harapa, des Imo et des
Majo-anem. Mentionnons seulement les points qu'il importe de
connaître pour le but que nous nous proposons.
1° La société secrète de Sosom. — La pépinière de ces sociétés
se trouve dans le département de l'Est et le personnage qu'on y
vénère est un jeune homme à l'âge nubile {miakem) , de pro-
portions gigantesques, appelé Sosom ou Tepo-anem. Sosom a sa
demeure dans les eaux souterraines de Mamhoedanam. Mam~
394 J. VIEGEN
bocdcuuun est un rocher qui se trouve sur la rive droite du
Wèrihoeë, à son embouchure. Il est immense et monte jusque
dans les nues. « Non, dit notre témoin, je me trompe, ce n'est
pas le rocher qui monte jusque dans les nues, mais une co-
lonne de fumée, qui s"élève de son centre massif. » Pour le dire
en passant, ni Tun ni l'autre n'est vrai. Le rocher peut mesurer
une centaine de mètres ; jamais fumée n'en est montée. Mais
écoutons de nouveau notre indigène. Chaque année, le jeune
homme quitte sa demeure humide et en triomphateur parcourt
le pays, portant la fécondité aux hommes et au sol. Les hommes
de son distrirt l'escortent jusqu'aux confins de leurs terres.
Là, les voisins l'accueillent et l'accompagnent à leur tour. C'est
ainsi (|ue So.soni atteint Hauiram, dans le département du centre,
d'où il regagne ses pénates, dans le département de l'Est, en
passant secrètement par l'intérieur du pays. C'est ce que d'au-
cuns disent ; mais d'autres prétendent que, secrètement, il fait
le tour du département du Nord, siège de la so.-iété secrète des
Imo, pour regagner de nouveau la côte et continuer sa marche
triomphale. Il ne s'arrête que peu de temps dans chaque dis-
trict. Cependant, s'il y a de nouveaux membres à admettre dans
la société, son séjour se prolonge jusqu'à cinq jours. Dans ce
but une grande maison est construite d'avance. Encore une
exagération — soit dit en passant — la fameuse maison n'étant
autre chose qu'un toit monté sur de hauts poteaux. Sosom est
censé s'y établir à son arrivée. Au jour convenu pour la récep-
tion, des centaines d'hommes du district et au moins autant
des districts avoisinants s'assemblent autour de cette maison,
oi^i les nouveaux adeptes ont déjà pris place. Ces derniers sont
admis — c'est ainsi qu'ils s'expriment — dans le sein de Sosom,
le géant. Un vieillard monte alors sur l'échaffaudage. Cet homme
est aflfublé comme Sosom : une couronne de longues plumes de
casuar lui couvre la tête, sa gauche tient, appuyé contre
l'épaule, un bâton en bois de palme et sa droite une énorme
dent en bois, tandis qu'un chapelet de têtes coupées lui pend
de l'épaule gauche. Une fois monté, cet homme resle accroupi,
jusqu'à ce que la lune Webc (Août), qui se trouve dans le
quartier Hei-ti-Webe, ait atteint une certaine hauteur. Alors, il
se lève et son ombre allongée tombe sur les hommes assemblés.
Cette ombre représente le géant Sosom, qui répand ses béné-
dictions sur la multitude.
LES SOCIÉTÉS SECRÈTES DBS MAUIND 395
Entre autres particularités intéressantes, il nous faut noter
quelles sont les personnes aptes à 'être admises dans la Société
de Sosom. — Au vu et su de tout le monde, ce sont seulement
les garçons, mais de fait les femmes sont admises également,
quand elles ont atteint l'âge oîi la coutume leur permet d'avoir
des enfants.
Une autre chose que je tiens à relever de nouveau, c'est que
dans sa marche triomphale par le pays, Sosojji n'atteint offî-
cielilement que le dernier quartier du département du Centre.
2° Passons à la Sociélé du Harapa. — Elle trouve son origine
à Kondo, dans le département voisin, à savoir le département du
Sud.
Tous les Marind-ha sont seesés originaires de Kondo ; c'est
le lieu saint par excellence, le siège de la caste sacerdotale
Brau'a-anein. Ils doivent donc être enfants de Ka)iis-iwage, la
Belle jeune fille, qui y est vénérée sous l'image d'un feu im-
mense, duquel s'élèvent sans cesse en tournoyant des pierres
énormes, pour retomber aussitôt avec un fracas de tonnerre.
L'approche de ce goulfre ardent n'est permis à personne, ex-
cepté aux Braiva-anem.
Harapa, le nom de la société, signifie feu.
De Kauis-iwage on conte encore qu'elle donna spontanément
le jour à un homme fait.
Les cérémonies des Harapa-anem. sont peu connues et je ne
puis pas dire non plus avec certitude quels sont les membres
de cette société. Au dire général, hommes et femmes indiffé-
remment peuvent y être admis. Comme on ajoute que la femme
est pour le Harapa ce que l'homme est pour l'/mo, il n'est pas
téméraire de conclure que la femme y occupe la première place.
3° Société secrète des Imo. — Descendant le long de la côte,
nous arrivons au département du Centre. Nous ne nous y arrê-
tons pas maintenant, car il n'a donné naissance à aucune
société secrète ; mais nous aurons tout lieu d'y revenir, après
avoir fait la connaissance des deux sociétés qui restent. Nous
continuons dune notre route dans le département du Nord. Ici
c'est Sangyasè spécialement qui nous intéresse, comme lieu
d'origine de la Société des Imo.
A propos de la Société de Sosom. j'ai fait remarquci' que les
hommes en font partie au vu et su de tout le monde, tandis que
la présence des femmes est tenue secrète.
396 J. VIEGEN
Je constate la même chose pour la Société des Imn, me basant
non sur mon expérience personnelle, mais sur le témoignage
indigène. Du reste ce point ne tire pas à conséquence pour la
question qui nous occupe actuellement : nous sommes inté-
ressés surtout au caractèi'e de la personne vénérée. Ce person-
nage est ici Anoep-aiioern, qu'on nous présente comme une fille-
mère, portant dans son sein ouvert le fruit du cocos, pinang et
du sagou. Anoep-anoem est donc enceinte.
Nous pouvons passer maintenant au département de l'Ouest,
lieu d'origine de la dernière société secrète.
i° Société des Majo-anrm. — Ici, nous approchons du point
cardinal de nos développements. Vous trouverez donc naturel
que je m'attarde davantage. -•
La Société des Majo-amnn compte officiellement parmi ses
membres des personnes des deux sexes. L'admission a ordi-
naiment lieu entre la dixième et la vingt-cinquième année.
Pourquoi cette grande difïérence d'âge ? Cela vient, Messieurs,
de ce que la cérémonie se fait à des époques fixes.
L'admission est précédée d'une espèce de noviciat, plus ou
moins long selon les districts. Dans l'un il durera six mois,
dans un autre neuf, dans un troisième un an entier ou plus
longtemps encore. Pendant tout ce temps, les novices vivent à
part et ne doivent pas communiquer avec le dehors. Le jour se
passe dans un enclos établi dans la forêt, et la nuit dans un
enclos semblable, préparé au rivage. Dans ces enclos se trouve
une cabane spacieuse, dont l'intérieur forme plusieurs cham-
bres, séparées par des cloisons. Garçons et filles, vivent à part,
chacun et chacune avec ceux de sa tribu, tout comme les indi-
gènes font dans leur village. Les membres accrédités de la
Société ont seuls accès dans l'enclos. Si quelque novice doit
s'en éloigner, il manifeste sa présence par le son de la flûte ou
de la conque marine, et il est de règle que le profane, s'il s'en
trouve dans les environs, s'éloigne au plus vite. Contrevenir à
cette loi serait risquer sa vie... Le jour où ils ont subi leur
dernière épreuve, les novices reçoivent l'ordre de se placer sur
une seule ligne. Soudain, un certain nombre d'individus se pré-
cipitent le long de la ligne, frappant le sol avec des tiges de la
feuille du cocotier, en criant : « Bientôt vous serez adoptés
comme enfants du cocotier », c'est-à-dire de Gèhe, l'être su-
LES SOCIÉTÉS SEnRÈTES DES MARIXD 397
prême à qui le cocotier est consacré. Puis on leur présente le
bout de la tige de feuille de cocotier avec ordre d'aller se cou-
cher et de se servir de ce bout de bois en guise d'oreiller. La
nuit est avancée déjà, quand le signe du réveil retentit. Aussitôt,
les novices se lèvent et frappent la terre de leur tige de feuille
de corotier. Ce bruit fait accourir les autres adeptes, qui, à
leur tour, font entendre le son particulier à leurs totems res-
pectifs. Tout ceci est fait, paraît-il, pour évoquer les esprits
des ancêtres, qui se trouvent au sein de la terre. Sur ces entre-
faites, un cortège se forme et l'on procèd'e d'un pas lent vers
Teau sacrée. Le soleil se lève, quand on arrive au terme. Quel-
ques dizaines d"hommes, couverts des insignes qu'on attribue
aux Esprits, se trouvent déjà dans l'eau et forment une ligne
unique. Un écuyer principal, représentant de Gèbe, c'est-à-dire
du père commun, occupe la place du milieu ; deux autres
écuyers sont placés chacun à un bout de la ligne. Cei)endant les
novices reçoivent Tordre de s'agenouiller au bord de l'eau.
Beaucoup hésitent ; ils craignent ces hommes, qu'ils tiennent
pour de véritables esprits. Leurs parents les encouragent et
bientôt tous sont à genoux. Les Esprits exécutont alors une
danse courte mais solennelle, durant laquelle ils frappent adroi-
tement la surface de l'eau avec leurs pieds, de façon que l'eau
rejaillisse sur les novices. Se tournant alors, en dansant tou-
jours, ils frappent l'eau avec les talons, et une nouvelle asper-
sion descend sur les novices. Un autre mouvement gracieux
remet les Esprits face à face avec les novices. Ceux-ci reçoi-
vent l'ordre de les saisir par la parure. Nouvelles craintes,
nouvelles hésitations, mais aussi nouveaux encouragements.
On les informe que ces esprits sont leurs ancêtres. Cette idée
les calme ; ils exécutent Tordre reçu et tous ensemble font le
plongeon. Le baptême est fini ; autant de nouveaux adeptes de
Majo ; autant de Mitôwar, comme ils disent, mot que je rendrais
volontiers par <- incorporé à la mère-ancêtre ».
En résumé, nous avons constaté :
1. qu'il existe quatre sociétés secrètes chez 1*^8 Marind,
2. que chaque société vénère un personnage spécial,
3. qu'un de ces personnages se déplace chaque année, tandis
qu'un autre ne le fait qu'après un nombre d'années fixe, mais
tous les deux vers le département du Contre.
398 J. VIEGËN
Donc trois données. A quoi nous mènent-elles ?
Voici. Sosom est un jeune homme nubile, qui chaque année
rend visite au département du Centre. Après cette visite,
le Marind observe le soleil et remarque qu'il se tient juste au
milieu ou, comme il dit, au centre, entre les deux solstices. Se
tenir au milieu ou au centre veut dire chez les Marind : ré-
pandre la bénédiction ou encore si'ininare. A vrai dire, Sosom
n'est, pas Gèbe, le soleil, mais il est son frère. Gomme ils
représentent le soleil, planant une fois sur le milieu de Thémis-
phère sud et une autre fois sur Thémisphère nord, ainsi ils se
représentent Sosom visitant et bénissant deux fois.
Je ne m'étonnerais pas. Messieurs, si vous voyiez une diffi-
culté dans la double visite. Voici ce qui peut vous aider. Le
Toeger admet, comme nous lavons dit auparavant, un double
mariage, l'un de droit privé ou mariage secret, pendant lequel
la femme ne doit pas avoir denfants, l'autre de droit public,
après l&quel seulement la maternité rentre dans ses droits.
Tournons-nous vers la société secrète des Majo, que nous avons
vue se rendre au département du Centre à des époques fixes. Je
répète la question déjà posée une fois : quelles sont ces épo-
ques ? Je vais essayer de lui trouver une réponse satisfaisante.
Le Marind du département du Centre a coutume d'évacuer ses
vieux cimetières à des temps fixes et d'en faire de nouveaux.
Sur les anciens cimetières, il construira plus tard sa cabane.
J'ai eu l'occasion de constater que ceci avait lieu l'année qui
précède celle où Vénus réapparaît pour la première fois dans
l'Est, durant la lune de Mai. L'observation était aisée, parce
que, l'année d'après, le cycle nouveau fut célébré par des fêtes
extraordinaires. Or nous savons que la réapparition de Vénus
dans l'Est à la lune de Mai a lieu tous les dix-neuf ans.
Le Marind pour sa part admet que le soleil se tient au milieu
de l'hémisphère deux fois par an.
Nous supposons la même chose pour Vénus et alors Majo
apparaîtra dans le département du Centre, tous les huit-neuf
ans, ce qui semble s'accorder avec la réalité.
Nous concluons donc ainsi : Majo est une personne du sexe
qui, tous les neuf ans, se rencontre avec l'homme dans le
département du Centre.
L'hypothèse est-elle exacte ? — Nous ne pouvons le dire avec
MYSTÈRES ASTROXOMIOUF.S DANS L'AMÉRIQUE CENTRALE 399
certituile. Nous Tavons construite sur des données recueillies
à roccasion. Mais voici encoi'e une légende qui peut la corro-
borer. Une vierge-mère alla un jour de Borem à Karawdè, por-
tant sur la tête une corbeille. Borem se trouve à l'Est du Maro,
Karawdè tout près de la rivière Koembe, dans le département
du Centre. A son arrivée, il faisait déj'à nuit. Elle suspendit
donc sa corbeille à un cocotier et se coucha au pied de l'arbre.
Durant la nuit, un serpent monta sur le cocotier et s'enroula
au4-our de la corbeille. Il en frappa le bord, mais rien n'en
sortit. Il en frappa le fimd ; rien n'en sortit. Il en frappa les
parois, et voilà qu'il en soi'tit un jpune homme fout effaré, qui
s'enfuit dans la cime de l'arbre. A l'aube du jour, le jeune
homme vit les jeunes filles de l'autre côté du Koembe s'en aller
à la pêche, deux à deux, avec leurs filets. Aussitôt, il descendit
de sa cachette, fondit sur elles et ravit la fille la plus grande et
la plus belle qu'il amena aussitôt par le bras chez sa mère à
Borem... << Amener par le bi'as » est un terme qui exprime
« mariage ». C'est le roman de Poeno ou Vénus-étoile du soir et
Maja ou Vénus-étoile du soir. L'union en mariage de droit privé
entre un jeune homme du Sud et une jeune fille du Nord, avec
allusion au développement de l'organe viril, voilà à notre avis
ce qUB nous trouvons comme fond des quatre sociétés secrètes
des Marind.
[28] IVlystères astronomico-religieux
dans l'Amérique Centrale,
par le R. P. Kreichgauer, s. V. D.
Les mystères se développent facilement parmi les peuples
qui sont divisés en différentes classes, ou bien là où les élé-
ments d'une tribu mêlée ne se sont pas encore tout à fait
fusionnés les uns avec les autres, enfin chez les peuples de
culture matriarcale. Toutes ces conditions se trouvent en Amé-
rique Centrale. La couche régnante était encore distinctement
séparée ; les « princes » et le bas peuple n'avaient ni les
mêmes droits, ni les mêmes habitudes et besoins scientifiques
et religieux. La dilTérence, — peu marquée, au seizième siècle.
400 D. KREICHGAUER
en quelques lieux, — était originairement considérable, car elle,
était fondée sur une différence de cycle culturel.
Ces circonstances nous invitent à faire au préalable quel-
ques remarques sur l'origine des tribus en question.
Toute la population de rAmérique est venue de TAsie. Des
arguments assez nombreux parlent pour cette origine, aucun
indice sérieux pour une autre.
Xous pouvons, dans la revue présente, considérer ces asiates
comme premiers habitants. A la culture de TAmérique Centrale
ils n'ont contribué pour rien de certain, quoiqu'ils aient été
pour la plus grande partie absorbés par des immigrants posté-
rieurs. Le reste fut repoussé dans des contrées inhospitalières.
Dans un temps très reculé, les premiers totémistes arrivè-
rent par le détroit de Bering, puis par la route terrestre. Peu à
peu, ils se dispersèrent presque sur toute l'Amérique Septen-
trionale et occupèrent également des parties considérables au
nord de l'Amérique du Sud. On ne saurait évaluer combien de
millénaires cette immigration dura. On ne peut davantage indi-
quer le temps de l'envahissement suivant, celui d'un peuple
appartenant au cycle culturel matriarcal. Selon toute appa-
rence, ce dernier vint de même par le détroit de Bering. Il
colonisa assez pacifiquement le territoire, faiblement habité, et
occupa les environs de la porte d'entrée, au nord-ouest du
continent, après avoir chassé ceux qui l'y avaient précédé. Nous
y trouvons ses restes encore aujourd'hui.
Les représentants de la culture matriarcale-libre (1) ont
pénétré les derniers en Amérique Centrale, et, conformément à
leurs capacités nautiques, de préférence par la voie de mer. De
même préférèrent-ils la voie fluviale ou maritime, pour se pro-
pager à l'intérieur du pays et vers le Midi. Ils n'ont laissé dans
le Canada aucune trace, tandis que leur présence plus au Midi
est facile à prouver. Ils s'érigèrent partout en maîtres sur les
masses du peuple antérieur ; mais on reconnaît souvent un
mélange progressif des civilisations.
Les colonies ainsi fondées étaient déjà inégales entre elles, à
cause des circonstances accidentelles de leur civilisation. Dans
le cours du temps, celles-ci fondèrent à leur tour des colonies
(1) Freimutterrechtlicher Kultiirkreis, cycle G du tableau ci-dessu.s, p.
cycle H de l'appendice ci-dessous.
MYSTÈRES ASTRONOMIQUES DANS l' AMÉRIQUE CENTRALE 401
secomiaires. et parfois elles réformèrent à fond les centres
culturels primaires de leurs maîtres.
Au commencement les colonisateurs, qui étaient mobiles et
actifs, visaient particulièrement les côtes. Par conséquent la
Vera-'Cruz, Tabasco et le Yukatan atteignirent une civilisation
plus considérable, car en ces endroits le progrès pouvait se
concentrer.
Les plus anciens porteurs de la civilisation dont on se sou-
vînt encore en Amérique Centrale, peut-être véritablement les
plus anciens, furent les Toltèques. Les écrits et les monuments
formés sous leur influence nous montrent distinctement l'ori-
gine matriarcale prédominante de leur culture. Elle se mani-
feste entre autres dans l'agriculture, dans la mythologie de la
lune, la. grande influence de la déesse de la terre, le culte du
dragon, des cavernes et des montagnes. Au temps de leur pros-
périté, la manière de vivre était déjà imprégnée de l'influence
totémistique. Des marques caractéristiques findiquent, comme
le culte croissant du soleil et de l'étoile du matin, les armes,
par exemple les lance-flèches et les poignards des anciens dieux
toltèques. l'administration des affaires publiques par les hom-
mes seuls, les divinités tutélaires des artisans etc.
Les Toltèques, si capables et énergiques pendant des siècles,
perdirent d'abord leur position prédominante sur le plateau du
Mexique. Les tribus Nahua, qui selon toute apparence s'avan-
çaient du Nord, recueillirent ici leur succession. Parmi eux, les
Aztèques se montrèrent les plus capables, au moins au quin-
zième siècle. A la suite de cette invasion et probablement en-
core pour d'autres raisons, survinrent, en d'autres parties de
l'Amérique Centrale, des mouvements de peuples, dont la plu-
part étaient plus ou moins dépendants de la culture toltèque.
Malgré la diversité foncière des civilisations originelles,
nous trouvons dans cette mosaïque de tribus un fait commun,
marqué et instructif, qui est indépendant de la culture matriar-
cale ou patriarcale, à savoir tous se vantaient de la même
patrie primitive, celle des Toltèques les plus anciens : « le pays
des sept cavernes » et Tamoanchan ou « lieu de naissance »,
tous les deux à l'Oiiesl. Nous allons voir que ces endroits sont
étroitemenl joints à la mythologie de la lune croissante, et en
conséquence au cycle matriarcal.
26
402 D. KREIOHOAUER
De cet accord remarquable dans le mythe d'origine, nous ne
saurions conclure autre chose que Taspiration des maîtres des
divers pays — disciples directs ou indirects des Toltèques —
à se faire passer pour les successeurs de ces hommes célèbres
entre tous. Ils profitaient de la tradition de la noblesse primi-
tive, pour se procurer plus d"autorité et d'influence. Avec cela,
ces éléments déjà fortement mêlés, ne reniaient pas entière-
ment leur propre tradition. La fraction fort totémistique des
Aztèques, par exemple, mettait snn histoire a.ussi bien en rela-
tion avec le soleil qu'avec la terre et la lune. La patrie de
Fastre diurne, s"il en a, est évidemment l'Orient. Mais la pré-
pondérance historique de l'Ouest devant être gardée, on faisait
naître le héros solaire Uitzilopochtli à l'Occident ; sa mère était
une déesse de la terre, qui est habituellement la patronne de la
lune croissante.
Nous avons ainsi sondé le sol sur lequel poussaient les
mystères. Il est apparemment favorable.
Les mystères étaient de deux espèces bien différentes, l'une
plus scientifique et l'autre plus religieuse. Les premiers com-
prenaient surtout des éléments astronomiques et calendriques.
Leur développement était dû presque exclusivement à cer-
taines classes de prêtres. Le second genre de mystères se rap-
portait à la miythologie et au culte des dieux. Ceux-ci étaient
radicalement différents auprès des sanctuaires des différentes
classes. Cependant les partis, qui vivaient la plupart du temps
en bonne intelligence, ne dédaignaient pas la participation aux
fêtes de dieux qui leur étaient au fond étrangers. On voit au-
jourd'hui le même phénomène en Chine.
Parlons tout d'abord de la science astronomique occulte. Tout
naturellement, elle fut cultivée surtout aux sanctuaires de
QuetzaI coati, le héros national des Toltèques, en second lieu
dans les temples de la déesse de la terre. La tâche scientifique
de leurs prêtres était partout combinée avec celle de la divi-
nation, une divination bien compliquée. Le sort de chaque indi-
vidu était lié surtout au calendrier, mais aussi aux astres. S'il
était défavorable, il pouvait être amélioré, comme presque par-
tout, par des sacrifices et des mortifications. On voit que l'étude
des corps célestes s'imposait aux prêtres, quand ils voulaient
grandir leur renom et leur influence. Regardons donc d'un peu
plus près cette partie importante de leur charge, leur science
MYSTÈRES ASTROXOMTQI-ES DANS L'AMÉRIQrE CENTRALE 403
astronomique. Elle fut aussi bien cultivée pendant le règne des
vrais Toltèques, qu"après leur décadence.
Les résultats des observations astronomiques notés dans les
livres des prêtres n'étaient {xiint connus du peuple. Aucun
étranger n'aurait même pu en pénétrer le secret, en examinant
ces livres. C'est que l'écriture fut si Inen chifïrée, au moyen
d"arlifices variés, et d'ailleurs cachés entre un grand nombre
de figures mythologiques, qu'après la conquête du Mexique,
pendatnt des siècles, l'astronomie de ces peuples ne fut pas
même soupçonnée. Il fallut la redécouvrir dans les livres sauvés,
malheureusement peu nombreux, au prix d'un travail pénible.
Bien que le peuple ne fût pas initié à cette science, il l'esti-
mait fort. On vantait certains prêtres qui ne se trompaient pa=5
d'un seul jour en annonçant la première apparition de l'étoile
du matin. Aujourd'hui, il nous est facile de constater, par les
livres en partie déchiffrés, combien cet éloge était mérité.
Le secret des connaissances astronomiques n'était pas gardé
partout avec le même soin. On a le plus parfaitement réussi,
là où il n'y avait que peu à cacher. C'était au territoire de la
plus jeune civilisation, qui était en plein développement, dans
la capitale de Mexico. Ici les livres divinatoires, fondés sur le
calendrier, suffisaient complètement pour noter en forme con-
cise tous les résultats astronomiques importants. Les notices
entremêlées ne se faisaient pas du tout remarquer, puisque
les livres ne semblaient contenir que des dates du calendrier
et leur interprétation divinatoire et mythologique. L'astronome
n'avait nul besoin de recourir, pour cacher sa science, à des
interprétations arbitraires et forcées, s'il était interrogé par
un collègue ou un élève sur le sens des dessins, parce que de
toutes les parties qui sautaient aux yeux il pouvait rendre
compte dune manière satisfaisante et convenable.
La notation secrète, dans les manuscrits du groupe du
codex « Borgia ». coniposés dans le territoire des Zapotèques,
était un pp'u plus diflicile, car les connaissances astronomiques
y étaient déjà plus copieuses. Pour ce motif, ces notions furent
séparées du Tomdamafl (c'est le calendrier fondamental) et de
ses accessoires, et transcrites dans des livres en apparence
purement mythologiques. Les signes calondriques et les chif-
fres, cachant les résultats astronomiques, n'y étaient pas pré-
404 D. KREICHOAUER
Gisement très frappants ; mais comme la jeunesse distinguée
élait partout initiée à la science calemlrique et fréquentait
les écoles bien dirigées, en montrant un livre à ces étudiants,
les astronomes s'exposaient facilement à des demandes d'in-
terprétation. Ils devaient alors donner des explications forcées,
et par cela diminuer les grandes idées des profanes sur la
valeur des livres.
Les indications astronomiques dans le troisième groupe de
manuscrits, celui du grand co(l''x de Vienne, étaient beaucoup
plus ricbes. Ces manuscrits provenaient du pays des Totona-
ques. Chez eux l'astronomie a été le but unique de certains
livi'cs. Peut-être l'illustration' du texte, souvent surabondante
et pou]- autant i)eu cohérente, était-elle devenue une espèce
de sport. Par là s'expliquent du moins les répétitions nom-
breuses et le remplissage insignifiant qui s'y intercale. Un
observateur même na'if aurai! pu s'apercevoir iiu'il ne lui était
pas permis de tout savoir. D'autre part, même l'élève d'une
école supérieure n'était pas en état de pénétrer la véritable
valeur de l'écriture sans initiation.
Il y avait encore une classe supérieure d'astronomes ; ceux-ci
appartenaient aux grands temples du territoire des Mayas. Leurs
connaissances extraordinaires ne nous sont conservées que
dans un seul des trois livres mayas, dans le mamiscrit de Drrsde.
Son contenu aussi est basé entièrement sur le fondement toltè-
que ; mais les prêtres ne se donnaient guère plus la peine de
cacher leurs résultats. "Sans doute, ils s'inquiétaient peu que
l'une ou l'autre des notices savantes fût comprise par des pro-
fanes, car la plupart des problèmes ne se comprenaient qu'au
prix d'une explication détaillée et par une étude sérieuse, d'au-
tant plus que l'arithmétique seule et la forme de l'écriture
étaient déjà un art peu commun.
On aura par là une idée toute générale de l'appareil secret
des astronomes ; le détail suivra à l'instant.
L'astronomie secrète des Toltèques était, comme toute
science en relation avec la vie publique, un facteur puissant
pour l'influence de ceux qui en étaient instruits. Ceux-ci se
recrutaient parmi les meilleurs élèves des écoles, dont la plu-
part appartenaient à la classe régnante. On peut discuter si
cette institution est un reste des sociétés secrètes du cycle
MYSTÈRES ASTRONOMIQUES DANS l"AMÉRIQUE CENTRALE 405
matriarcal, mais en tout cas elle a le même but : gagner de
l'influence par la possession de secrets utiles ou terribles.
Un exemple pris entre les dates astronumiqups du soniplueux
Codex Borbo))irus suffira pour faire connaître la manière la plus
primitive, mais aussi la plus imparfaite de la fixation chiffrée.
La première partie d'une page de ce manuscrit contient tou-
jours une des périodes de treize jours du calendrier fondamen-
tal, et à côté les dieux tutélaires correspondants, avec les
symboles employés pour la divination. A la marge de la page 18,
on voit le premier signe du calendrier, qui est le plus consi-
déré. Il peut servir de nom propi'e pour un dieu ou pour un
homme et de symbole divinatoire. C'est pourquoi il pouvait ne
pas attirer l'attention d'un spectateur profane, d'autant plus
qu'il n'est pas par lui-même un caractère astronomique. Aus-
sitôt ([u'on le met en combinaison avec le pi'emier jour de la
semaine (de treize jours) qui est représentée sur la même page,
il en résulte un intervalle de quarante jours. Ces jours n'ont
pas davantage une valeur astronomique. Ils désignent plutôt les
quarante années sacerdotales, si sduvenf notées dans les ma-
nuscrits. Pendant ce temps-là, la planète Mercure, soigneu«^e-
ment observée par les astronomes, passe devant le soleil cent
vingt-six fois, et la planète Vénus vingt-cinq fois. Le premier
intervalle est strictement exact, pour le deuxième il y a un
déficit de deux jours. Pour les désigner eux aussi, l'auteur ne
colorait pas le signe du deuxième jour sur cette page. Une
autre fois, où il note deux fois quarante années, il laisse en
conséquence le quatrième jour sans couleur et celui-ci seul. Un
manuscrit provenant du Sud-Est de l'empire a noté ces deux
jours manquants sur quarante années, en dessinant un arbre
chargé de fruits, dont deux sont tombés à terre. — En passant,
je tiens à faire observer la méthode excellente et vraiment
astronomique de réduire un nombre entier de révolutions d'une
planète à un nombre entier d'années. Celte méthode étai! toulo
usuelle en Amérique Centrale.
Il est probable que les deux intervalles de 40 ans moins deux
jours et de 80 ans moins quatre jours appartiennent aux plus
anciens résultats des Mexicains. Il faut même conclure du
système de leur clii'onologie que la planète ^'énus a été déjà
observée systénutliqucment au XXI'' siècle av. .J.-C. Il reste
406 D. KKEICHGAUER
incertain si de telles observai ions ont été faites en Amérique,
ou peut-être en Asie par les ancêtres des Toltèques.
Quant au nombre de 40 du Codex Burbonicus, l'auteur avait
eu soin que lui-même et ses confrères fussent obligés de lïn-
terpréter en années et non pas en jours. Il avait mis, à côté du
dit signe calendrique, le hiéroglyphe pour « année ».
iCei'te manière de voiler la notation ne se trouve que deux
fois dans le Coder Borbonirus ; autreir.ent elle n"aurait plus été
assez sûre. Dans d'autres cas, on n'inscrivait pas séparément
sur la page le signe du calendrier inditjuant le terme de l'inter-
valle, mais on Tembusquait dans un objet plus grand, par
exemple comme blason, comme nom d'une déité, comme partie
d'un vase etc. Mais toujours ces d(Uinées dérobées à Tattention
devaient être combinées, pour donner un résultat astronomi-
que, avec le premier jour de la semaine noté à la même page.
Moyennant ces calculs, jamais difficulté ne reste.
Sur quelques-unes des pages du Codex, il n'y a pas de don-
nées astronomiques. Pour indiquer au lecttmr les pages impor-
tantes, on y mettait une araigm^e ; par ce signe il était avisé
qu'il lui fallait chercher une note cachée.
€e mode de notation bien imparfait ne pouvait suffire aux
astronomes les plus fameux des Mayas. Le mamiscrif de Dresde
par exemple contient un exposé pour calculer les éclipses du
soleil et de la lune. L'astronome y avait mis plus de trois cents
nombres et signes du calendrier. Il est évident qu'il était
impossible de cacher tout cela entre des gravures et des sym-
boles. Tout examinateur quelque peu instruit devait s'aperce-
voir qu'il s'agissait là d'arithmétique et d'astronomie. Les neuf
gravures intercalées, de dimension modérée, ne pouvaient pas
détourner l'intérêt. Mies n'y étaient mises que pour se confor-
mer à l'habitude des auteurs.
Plus importants pour l'ethnologie que les secrets astronomi-
ques sont les mystères proprement dits, c'est-à-dire les idées
religieuses, exprimées par les mythes, les symboles ou les
fêtes. On ne peut pas, cela va sans dire, s'attendre à trouver
dans ces idées un système logique même médiocrement pro-
noncé ; une telle unité manque à toutes les religions natu-
relles ; elle fait défaut chez les peuples ou classiques ou
obscurs, Grecs, Babyloniens, Egyptiens ou Tsiganes. Dans les
MYSTÈRES ASTRONOMIQUES DANS L'AMÉRIQUE CENTRALE 407
environs de la capitale, les idées religieuses accusaient déjà
entre elles de telles différences, retenues avec une telle obsti-
nation, que leurs divers adhérents en venaient aux cheveux. En
un point seulement, tout le monde était d'accord : dans la sup-
position que les puissances de la terre, les plus fortes entre
toutes, devaient être réconciliées, pour rendre aux hommes le
soleil, la lune et les étoiles. Tous ces astres, pensait-on, ('talent
vaincus, emprisonnés même — en ce qui concerne la lune, mis en
pièces — au temps de leur coucher ou des éclipses. Les milliers
de sacrifices humains, pendant les fêtes, avaient pour but prin-
(?ipa'l la réconciliation. Ils devaient aider le soleil à passer la
porte, à se lever là l'Orient vers le ciel, et c'était par le moyen
de la magie dite « analogique ». Comme on nommait le soleil
« le cœur du jour ou du ciel », le rapport mystérieux entre le
cœur, tiré du fond de la poitrine de l'homme sacrifié et le cœur
du ciel, montant du sein de la terre, était à la portée de l'ima-
gination de chacun.
Les Mexicains visaient donc par ces sacrifices — si on peut
les nommer ainsi — - la délivrance des corps célestes mêmes,
celle de leur être naturel et matériel, et non pas le salut de
leurs protecteurs, de leurs habitants ou de leurs maîtres. Ces
astres ne causaient aux Aztèques, vu leur caractère prépondé-
rant de totémistes. qu'une imi)ression secondaire. Un dieu de
la lune n"êtait nullement vénéré par la masse du peuple. Dans
les mythes de certaines compagnies de prêtres qui s'estimaient
les successeurs de QwtzalcoatJ, la lune jouait bien un certain
rôle, mais même chez eux cette figure était celle d'une personne
prudente et avisée, plutôt que brave et puissante. Les Aztèques
vénéraient, — à côté du vrai et unique dieu, qu'ils invoquaient
dans leur détresse et en certaines occasions solennelles ■ — prin-
cipalement le dieu de la guerre. Uitzilopockfli. un prétendu an-
cien chef de tribu ; celui-ci possédait aussi, il est vrai, certains
traits d'un héros solaire.
Passons des sacrifices aux fêtes les plus caractéristiques.
Elles nous révèlent pour leur compte des idées semblables.
La plupart des fêtes vraiment religieuses avaient, au temps
historique, un but avant tout |)ratique, savoir : imi)loi'er des
(•(tnditions météorologiques favoi'ables pour le développement
du maïs. Mais toujours elles étaient remplies d'idées mytholo-
408 D. KHEICHGAUER
giques, et leurs cérémonies étaient fortement reliées au l'ôle
des portes imaginaires à l'Orient et à rOceirlent, surtout à
roccasion des fêtes de la déesse de la terre et de sa parenté.
CeLle-fi était bien la maîtresse des portes. De ces deux portes,
celle de l'Ouest jouait partout le rôle d'une force bienfaisante.
Elle donnait au ciel, après la nouvelle lune, le croissant occi-
denlal, les enfants, mais aussi la moisson et presque tous les
biens temporels ; même, les auteurs de la race provenaient de là.
L'extrême Occident n'était pas seulement la partie la plus
importante du domaine de la déesse terrestre, mais aussi son
pays d'origine. A cet endroit se rendaient, après la mort, les'
femmes valeureuses aztèques, pour recevoir la récompense de
leurs mérites. Et voilà pourquoi on nommait l'Occident com-
munément (( Ja région des femmes ». Le paradis des hommes
braves était situé à l'Orient, pays du soleil ; ce détail illustre
l'influence totémistique des successeurs des anciens Toltèques.
Dans les .livres toltèques, l'Orient était en premier lieu un
pays d'affliction et de deuil. Là se trouvaient les Symplégades
proprement dites, au sens des Grecs ou plutôt des Pela sges. Pour
la noblesse primordiale indienne avec sa mytliologie lunaii'c,
un drame lugubre se déroule à l'Orient. Sa favorite, la char-
mante lune dorée, est dans ce pays lointain, à l'approche de la
dernière phase décroissante, vaincue, mise en pièces et privée
de sa toison d'or. D'après certains mythes, elle y était encore
incinérée (par le feu du soleil ?) et elle ressuscitait seulement
après trois jours, à l'Ouest. En complète correspondance avec
cette foi, on caractérisait l'Orient, dans les manuscrits mytho-
logiques, par des cruches et des coupes cassées, par des usten-
siles mis en pièces, des membres humains séparés, par des
momies, par des ossements et des crânes sinistres.
Quand les totémistes, avec leur culte du soleil et de l'Orient,
en vinrent lentement à prendre rang dans la couche régnante.
on ajouta à ces symboles, consacrés par une tradition ancienn,'^
le soleil, l'or et le paradis des braves. Ainsi se comprend la
juxtaposition des deux sortes de symboles de l'Orient, si diffé-
rentes entre elles.
Une brève comparaison avec le mythe grec correspondant,
comparaison dont le détail ne peut trouver place dans ce bref
sommaire, permettrait de mettre ces idées dans une lumière
plus complète.
MYSTÈRES ASTRONOMIQUES DANS l"AMÉRIQUE CENTRALE 409
Nous revenons aux fêtes des Aztèques, pour analyser encore
une de leurs particularités frappantes. Pendant la fête de la
déesse de la terre, on célébrait, au cours du sacrifice, certaines
cérémonies dans lesquelles IXhnologue peut encore constater
une relation évidente avec le mythe lunaire ; de cette relation,
selon toute apparence, le peuple n'avait plus conscience. On
choisissait pour le sacrifice une femme richement parée. Elle
était traitée d'une manière inusitée à d'autres occasions. Elle
n'était pas étendue sur la pierre sacriflcatoire et le cœur n'était
pas retiré. On posait plutôt la femme sur le dos d'un officiant
subalterne, et dans cette position on lui coupait la tète. Celle-ci
était alors traitée d'après la coutume ordinaire ; elle était re-
gardée comme un trophée ; le sacrificateur la portait par les
cheveux pendant la danse. Cette dernière cérémonie est usuelle
chez certains ])eupTes du cyfle culturel matriarcal.
Un détail singulier intéressera les savants qui s'occupent du
sacrifice des Grecs : pendant une fête correspondant à la pré-
sente, on dépouillait la femme de sa peau. Par le sacrifice cette
peau était devenue chose sacrée ; elle possédait des vertus spé-
ciales pour la guérison de certaines maladies. Un fort gaillard
s'en habillait et attaquait les jeunes hommes.
La décapitation, le dépouillement et le démembrement en
général sont des usages pratiqués ou du moins connus dans
toutes les parties de la terre ; nos enfants civilisés eux-mêmes
les connaissent par les contes. Leur sens est clair pour tous
les mythologues modernes. Ils les rapportent à la décroissance
de la lune. Pour le Mexique, on peut confirmer ce rapport par
les manuscrits des Indiens et par les récits des premiers mis-
sionnaires. On y apprend que la déesse de la terre, à la première
guerre des dieux, avait été vaincue et décapitée.
Si ce mythe appartenait rigoureusement au cycle matriarcal.
on devrait sans doute remplacer la déesse de la terre par celle
de la lune. C'est d'autant plus permis, que bien souvent la
môme personne cumule des honneurs lunaires et terrestres. ■ —
Pour la lune décroissante nous voyons réellement disparaître
une partie après l'autre. Si l'on prend pour la tête la partie de
la lune qui regarde vers le haut, comme il est convenable,
alors c'est la tête que la lune perd d'abord. Cependant,
pour le Mexique, une autre interprétation se recommande
/jlO D. KREICHUAUER
davantage. Quaml un peuple — avec des mythes solaires par
exemple — assujettit un peuple matriarcal, il transforme faci-
lement sa propre victoire en celle de "son dieu solaire. C'est ce
qui est arrivé en Babylonie. Là le dieu solaire Mardouk tua la
déesse présémitique Tiamat et la coupa en deux. Une cir-
constance remarquable augmente la vraisemblance de la pa-
renté des deux mythes, à savoir qu'un dragon était le symbole
de Tiamat, comme de la déesse mexicaine de la terre. De même
Apollon vainquit et tua le dragon de Delphes, Typhon, et occupa
le sanctuaire après les épreuves qui lui furent imposées en
expiation de son meurtre.
De telles connexions se rencontrent si souvent, qu'il semble
oj)portun' d'intercaler ici quelques remarques générales sur les
mythes.
On diiit considérer comme les plus puissants représentants
de la poésie cosmique les éleveurs de bestiaux, les nomades
du centre de l'Asie. Il se peut que cela dépende de leur état de
pasteurs, qui les obligeait à rester pendant la nuit en plein air.
De cette manière, ils pouvaient acquérir sans peine une bonne
connaissance du ciel étoile. Leurs mythes ne sont plus connus
immédiatement ; mais ils se développaient chez les Indo-Euro-
péens, les Sémites et les Ohinois. Ce qui est semblable entro
ces trois groupes différemment mêlés peut être regardé comme
appartenant aux idées des nomades préhistoriques.
La voûte céleste impressionnait les nomades avant tout.
Mais ni le soleil, ni la lune ou les étoiles séparément ne pre-
naient par le mythe une importance religieuse. Même en Grèce,
le soleil n'était attribué à Apollon qu'accidentellement. Ce dieu
favori gardait surtout un caractère nomade : il était pasteur,
possesseur de troupeaux et protecteur contre les bêtes de proie.
En l'honneur d'Hélios, son alter ego, on entretenait des trou-
peaux sacrés. Tous les deux étaient en outre protecteurs de la
jeunesse, fonction qui convient au pasteur patriarcal, nulle-
ment au soleil.
Fort peu d'éléments du. cycle des nomades se propagèrent, et
encore indirectement, au Mexique. Ils étaient difficiles à cons-
tater, à cause de leur transformation. .11 n"y a pas longtemps que
Fr. RoEOK a exposé cette question dans YAnthropos.
Les totémistes n'avaient pas grand intérêt pour la poésie
MYSTÈRES ASTRONOMIQUES DANS L'AMÉRIQUE CENTRALE 411
cosmique." Leurs idées se dirigeaient plutôt vers la chasse et le
gibier ; leurs mythes, pour cette raison, n'exercèrent que peu
d'influence sur leur conception des dieux. Dans la masse du
peuple mexicain prédominait le caractère totémistique. Le soleil
et surtout l'étoile du matin et du soir obtenaient une certaine
importance. L'un et l'autre sont assez souvent représentés
comme chasseurs. L'étoile du matin, qui brille si gracieuse-
ment, pour certains peuples, était pour les Aztèques un tyran
cruel, terrible au tersips de son apparition, faisant la chasse,
no'n seulement aux hommes, mais aussi aux dieux et aux ani-
maux mythiques. Pour les Toltèques, elle était la lune ressusci-
tée après son incinération à l'Orient.
Une grande indépendance des figures astrales était com-
mune aux nomades et aux totémistes. Leurs dieux célestes pou-
vaient jouir de leurs forces surnaturelles, presque sans réserve,
au milieu de leurs collègues. Cela change radicalement et typi-
quement, lorsque nous entrons dans le cycle matriarcal. Pour
les peuples- appartenant à ce cycle, une seule puissance règne
en souveraine : c'est la déesse de la terre et sa parenté. Les
dieux célestes ne semblent exister que pour être vaincus. Le
soleil, la lune et les étoiles sont représentés comme voyageurs.
Seule la pérégrination près des portes de l'Orient et de l'Occi-
dent excite un haut intérêt, quand les astres voyageurs entrent
dans le domaine de la déesse de la terre. Ils sont alors empri-
sonnés, questionnés, raillés, mis à l'épreuve par des énigmes
impossibles à deviner, maltraités et même dévorés. Les céré-
monies usitées pendant l'initiation des jeunes gens rappellent
un peu ce traitement sévère.
Pour des raisons déjà indiquées, le plus triste sort était
réservé à la lune. Elle était dépecée et privée de sa toison d'or.
Le soleil même, qu'on dirait né maître, ne pouvait s'échapper
de sa prison par sa force supérieure, mais plutôt par sa cir-
conspection. Dès qu'on trouve ces traits saillants (hms une
mythologie encore mal connue, on doit aller à la recherche
d'autres indices du cyole matriarcal.
Pour permettre de mieux pénétrer sa vraii" natui'c. je ferai
ici voir quelques symboles religieux de la culture toltèque. Hs
nous conduisent sur un chemin qui mène dans le dom^iine reli-
412
D. KREICHGAUER
gieux préUislorique plus loin que toutes les autres voies, plus
loin du moins que ne l'ont fait jusqu'ici les voies directes.
I Mexique, il Asie Centrale, m Cliine, iv Alpes.
iSur les images des Toltèques, les articulations et les cavités
du corps de Thomme et des animaux (les jarrets, la bouche, les
yeux etc.) sont très fréquemment garnis de signes symboliques.
De ces mêmes signes symboliques sont parées chez eux des
cavernes sacrées, des portes et des barrières magiques. Le
soleil, la lune, Tétoile du matin par exemple, sortent d'une ca-
verne, ou, si vous voulez, d'une poi'te magique à l'horizon, ou
d'une cruche, toutes garnies de ces symboles. En outre leurs
coupes et leurs vases rituels portent ces mêmes signes.
J'insiste sur ce détail : le symbole de la pointe recourbée
et. d'autres symboles se trouvent aussi bien sur les cavernes
saintes à l'horizon, (jue sur les vases sacrés, sur les ouvertures
du corps, qui rappellent les cavernes, et sur les articulations.
qui font penser aux portes s'ouvrant et se fermant, c'est-à-dii'e
aux Symplégades fameuses à Kolchis. Nous devons en conclure
que, partout où se ti'ouvent ces signes, on a voulu faire allusion
au même mystère : à l'entrée et à la sortie des corps célestes
à l'horizon, au début ou au terme de leur course.
Pour les articu'lati(jns, la ressemlilance avec les cavernes à
riiorizon devient d'autant pilus marquée, que les membres soni
plus coudés. Ainsi dans leurs danses sacrées, les indigènes,
leurs héros et même leurs divinités, tiennent les jambes et les
bras plies, souvent autant qu'il leur est possible. Dans cette
attitude on danse, et sur la terre et dans le paradis.' La môme
idée se fait remarquer à la fête anniversaire des braves, tués à
l'ennemi. A cette occasion, les images montrent les guerriei'S
valeureux, accroupis {Hocker) . Aussi certaines divinités res-
semblent-elles tout à fait aux momies accroupies et emmail-
MYSTÈRES ASTRONOMIQUES DANS l'aMÉRIQUE CENTRALE 413
lottées des braves guerriers, quoiqu'elles soient assises sur des
trônes, dans l'attitude de la domination el de la vie.
De tous ces faits on ne peut tirer que cette unique déduc-
tion : la position accroupie avait quelque chose de sacré ; elle
faisait partie du culte religieux ; par elle on honorait les divi-
nités, surtout celle de la terre, car elle faisait se souvenir du
mystère principal de tous les peuples du cycle toltèque. Elle
faisait penser à l'entrée si redoutée dans le Tartare, mais aussi
à son lieureuse sortie ; elle rappelait la mort et la résurrec-
tion des dieux et des hommes.
La juxtaposition d'un passage caractéristiqup de la doctrine
du grand sage chinois Laotse nous laisse ici entrevoir un fait
intéressant. Selon lui le premier principe, quMl appelle Dao,
est la mère de toutes choses. Cependant il compare ce principe
à un portail, par lequel entrent tous les êtres qui reçoivent la
vie. Le dao est la po/•^■ de tous les mystères, la mère et le pre-'
mier père de tous les êtres (faisons attention à la position mère
d'abord et puis père). Mais il est aussi un abîme, un gouffre
sans fond, que tous les fleuves ne peuvent remplir. Voilà le
gouffre de la terre dans VEclda islandais, la gueule du loup Fenris,
dont une lèvre touche le ciel et l'autre la terre. N'avons-nous
pas ici un nouveau vestige de l'invasion très ancienne du cycle
matriarcad en Cliine, invasion admise par certains sinologues ?
Je reviens aux signes représentés sur les articulations. Le
principal d'entre eux est la « pointe courbée ». Elle se trouve en
Chine aussi bien qu'au Mexique. La dissémination de ce signe
symbolique s'étend jusqu'au lac Ba'ikal, jusque dans la Crète
pélasgique, jusqu'à HaMstadt, où les Celtes s'en sont servis
raille ans av. J.-C
Notons pour finir deux petits faits. Dans l'art populaire chi-
nois, on voit distinctement que les personnes représentées ont
les genoux un peu plies tout en marchant ; cependant la vraie
marche des Chinois ne se distingue pas de celle d'autres peu-
ples. Second fait : les Grecs, parlant des choses à venir, s'ex-
priment symboliquement : « Ces choses se trouvent dans les
genoux des dieux ». Il y a donc aussi pour les Grecs un mystère
dans les genoux. On entrevoit ici une influence pélasgique
peut-être, car les Romains n'emploient pas cette imago.
Dans l'histoire culturelle, nous avançons encore d'un derniei-
414 H. JUNKEH
grand pas vers le berceau de rhumanité. A l'époque paléolithi-
que, nous voyons un genre singulier d'enterrement. Il d"evint
plus tard usuel. C'est l'ensevelissement où les morts sont
accroupis : les jambes et les bras sont repliés sur le corps
{Hacker). Cet usage est en Europe plus antique que la culture
matriarcale ; il remonte aux vrais primiitifs du temps acheu-
léen ; pour cette cause il s"étend encore de nos jours sur tant
de cycles culturels.
Tirons la conclusion. Selon toute apparence, le plus impor-
lant des mystères au Mexique, à savoir le culte de toutes les
portes, surtout des portes aux confins de la terre, se trouve déjà
à peu près au commencement de la culture humaine. Mais
jusqu'à présent c'est uniquement au Mexique qu'il a été pos-
sible de montrer l'influence exercée par ce grand mystère sur
la conduite des vivants et sur les soins qu'on applique aux
morts.
L'ethnologue étudiant les Primitifs peut sans doute suivre
l'exemple du sage Laotse, qui savait combiner l'idée d'un lieu
sacré aux limites de la terre avec l'idée d'un règne du vrai Dieu.
BIBL. — E. Seler, Gesainmeïte Ahhandlungen sur amerikanischen Sprach-
itnrt Altertumskunde, 5 in-8", Berlin, 1902-1923 — D. Krbichgauer, Die
Klwpptore am Rande der Erde in der altmexikanischen Mythologie^ dans
Anthr., 1917-18, t. XII-XIII, p. 272-312 ; Studien sum aztekischen Codex Bor-
honicus, ibid., p. 497-512 — B. Fischer, Die Pelasger, dans Anthr., 1914,
t. IX, p. 774-780 — M. Neubert, Dorische Wanderung, Stuttgart, 1920.
[29] Die Mysterien des Osiris,
von Prof. Dr. Hermann JuNKER, Wien.
Die Mysterien, die einst in den meisten grosseren Heiligtû-
mern Aegyptens zu Ehren des Gottes Osiris gefeiert wurden,
liegen heute entschleiert vor uns ; ihr Geheimnis ist preis-
gegeben ; wir vermôchten sie, in den wesent-lichen Punkten ge-
treu, wieder aufzufiihren. Es sind vor allem die Tempel von
Dendera und Philâ, die uns aus den ehedem unzugânglichen
Osiriskammern ein reiches Material liefern ; ihre Darstellun-
gen und Sprûche, einst vor jedem Laien sorgsam be^hutet, stehen
nun allen Aeigyptologen zur "Verfûgung.
DIE MYSTERIEN RES OSIRIS 415
Wir sind da in einer unverg-leichlich besseren Lage als bei
den anderen Mj'sterienkiilten des Altertums, bei denen meist
nur eine ungefâhre Rekonstruktion aus gelegentiichen. oft
dunkeln Andeutungen und auf Grund wenig verratender sceni-
scher Darstellungen môglicb ist. Was sich in den Osirismys-
terien an Problemen flndet, bezieht sich zum geringeren Teil
auf den tatsàchlirhen Hergang ; nur die Fragen riach der Ent-
sfehung. den Elementen des Aufbaues, der historischen Enf-
wieklung und der tieferen Bedeutung mancher Vorgânge be-
dûrfen noch weiterer Klârung, ob zwar auch liier die wesen-
tlichen Richtlinien sclutn festliegen dûrften.
I. DIE NATUR DES GOTTES.
Fur die Auffassung der Mysterien ist es von grundlegender
Bedeutung zu wissen, was die eigentliche Natur des Gottes
ist, dem zu Ehren sie gefeiert werden.
Osiris ist nicht einfach der Gott der Toten, wie es die popu-
lâre Aufîassung wiltl ; er ist das erst geworden und zwar relativ
spàt und zum Teil auf Umwegen und unter Angleiehung an
eine andere Gottheit. Wir mûssen vielniehr bei ihm zwei Ele-
mente als wesentlich ansehen : er ist Naturgott und Kônigsgott,
1. Als ersterer erscheint er einmal als die fruchtbare Erde,
die in ewigem Wechsel stirbt und zu neuem Leben erblûht, die
in Aegypten alljâhrlich in den Fluten der Nilûberschwemmung
ertrinkt, aus ihnen aber inimer wieder verjûngt emportauchf,
die verdorrt, um von neuem zu griinen.
Oder es erscheint Osiris als Verkôrperung der ewig lebendi-
gen Kraft der Natur, die die Fruoht auf den Feldern spriessen
làsst, die welken Baume wieder grûnen raacht, den segenspen-
denden Nil zu seiner Zeit herheibringt, Endlich erkennt man in
ihm auch den Nil selbst, der sich ûber das Land ergiesst, es
befruchtet und dann versiecht ; den Baum selbst, der in der
Hitze dorrt und dann von neuem griiiit und blûht ; das Getreide,
das in die Erde gelegt, zu neuer reicher Frucht emporwâchst.
2. Viel bekannter ist Osiris als Kônigsgott, und es geniigt,
seine Schicksale kurz zu skizzieren. Er herrschte in grauer
Vorzpit als KTjnig Aegyptens, siegreich und ruhmvoll. Soin
Bruder Seth, der Kônigsgott Oberâgyptens, stellte ihm nadi und
ti'Uete ihn. Da zog seine treue Gemahlin Isis klagend dui'cli die
Gaue des Landes, iliron toten Gatten sucliond. Es gelang ihr,
416 H. JUNKER
aile Telle des zerfallenen oder vnn Seth in Stûeke gerissenen
Leichnains aufzufinden ; der Totengott Aniiltis fûgte sie zusani-
men imd balsaniierte sie. Es erwachte der Gott zu neuem Leben ;
Isis liess sich als Falkin auf ihn nifMler, empfing von ihni uni!
gebar ihm seinen Sohn Horus, der herangewachsen Seth im
Kampfo ûberwand und als Nachfolger seines Yaîers fur ewig
den Thron Aegyptens bestieg, wâhrend Osiris die Herrscdiaft
iTi) Reiche der Toten antrat.
3. Es fragt sich nun, wie wir dièse beiden Elemente in der
Xahir des Gottes zu vereinigrn haben. Liegt bloss eine Um-
setzung des Nàturgeschehens in Mensehenschicksale vor, oder
benutzte man es zum symbolischen Ausdrurk geschichtlicher
Ereignis.se? Ich stehe nirht an, das letztere als .gesirhert
anzunehmen.
Den besten Fingerzeig gibt uns hier eine ahnliehe Yerbindung
von Naturvorgângen und Geschichte im Mythus vom Auge des
Horus, der mit dem Osirismythus in Zusammenhang gebracht
wurde.
Das Schwinden und Wiederkehren des Mondes wird in ihm
also aufgefasst. Der Gott Seth raubt dem Himmelsgott Horus
dessen linkes Auge, den Mond, muss es aber besiegt und verur-
teilt, zurûckgeben. Hier ist der historische Hintergrund klar.
Yiele Jahrhunderte vor Menés (ca. 4200) kâmpften die Horus-
konige von Unteràgypten mit den Oheragyptern um die Hégé-
monie ; der Kamp endete mit dem Siège des Horus, der das
verlorene Auge wiedergewann, das entrissene Diadem wieder-
aufsetzte.
Noch viel weiter hinauf reichen andere Kàmpfe um das glei-
che Ziel. Damais fûhrte in Unteràgypten der Gau von Busiris,
dem Hauptkultorte des Osiris, und dehnte seine Herrschaft
nar-h Oberàgypten aus, um aber scihliess'lich dem Angriff des
Sùdens zu unterliegen. Doch Horus von Buto erkàmpfte die
Hégémonie des Nordens von neuem und machte Heliopolis zur
Métropole des geeinten Reiches ; Busiris freilich batte fur
immer seine politische Bedeutung verloren. Das ist der ge-
schichtliche Hintergrund der Osirislegende. Darauf weisen u. a.
folgende Erwâgungen hin. Der Osiriskult ist sicher im Delta
zuhause und von hier — gewiss unter politischem Einfluss —
nach Oberiigypten verpflanzt worden ; ebenso steht fest, dass die
DIE MYSTERIEN DES OSIRIS 417
Identifizierunjg des Gottes mit dem toten Konig Aegyptens das
Ursprûngliche ist und die anderen Yerstorbenen erst sekundâr
als Osiris erscheinen ; dann zeigen die Diadème des Gottes,
dass sein Mac-htbereich ursprûnglich Unteràgypten war — es
iàsst sich noch eine besondere Yerbindung mit den libysehen
Stàmmen im Westen erkennen — und dass dann die Konige unter
seiner Fûhrung die Krone des Sûdens ei'oberten ; lerner wird
nur so die enge Yerbindung des Mythus mit der Horuslegende
verstàndiich, und endlich erklàrt es sich jelzt warum der Osi-
riskult erst relativ spàt in der Religion des von Menés geeinten
Reiches zum Durchbrueh kommt : er ist unteràgyptisch. und
erst mit dem Wiedererstarken des heliopolitanischen Einflusses
in der âgyptischen Théologie besonders wâhrend der V. Dynastie
konnte er, indem die Siéger des Deltas weiterlebten, in einem
Reiche zur Geltung kommen, das von Oberâgypten aus geeint
und gefûhrt war.
Wenn nun auch in der historisehen Ausdeutung der einzelnen
Zûge im Mythus die grosste Yorsicht obwalten muss, so kann
an der Treue der wesentlichen Zûge wohl nicht gezweifelt wer-
den. Es war iibrigens ein bewundernswerter Gedanke, das
Gedâchtnis an die grossen Oeschioke des T,andes in dem Leben
der Natur zu verankern. Das Sterben und Erwachen der Yege-
tation, und das Sehwinden und \Yiederkehren des Mondes
erhielt die Erinnerung an die beiden grossen Epochen der
âgyptischen Urgeschichte besser lebendig, als Denkmâler und
Berichte es vermocht hâtten. Und darnit dièse Yerbindung
zwischen Naturgeschehen und Geschichte ihren stàndigen sicht-
baren Ausdruck flnde, feierte man die Mysterien des Osiris in
der nun zu beschreibenden Weise, wie man im selben Sinne zu
Heliopolis die geheimen Feiern des heiligen Mondauges beging.
II. DER VERLAUF DER MYSTERIEN.
1. Die ôffeiitlirhcn Spifle. — Wir scheiden bel der Bespre-
chung der Mysterien fùglich aile Feiern aus, die in der OefTent-
lichkeit und unter ^litwirkung zahlreicher Laien abgehalten
wurden. Es waren das prunkvoUe Aufzûge, Wasserfahrten,
Kampfspiele u. à., die meist in enger Yerbindung mit den Ge-
heimriten stattfanden, und sich zu diesen ebenso verhielten. wie
Prozessionen und Sidele sich um den inneren Temi)elkult ranken.
27
418 H. JUXKER
Es kommpn im Ralimen unseres Themas nur solche Riten in
Betraclit, die unter Ausschluss von Laien diirch oingeweihte
PriestPi' und Priesterinnen vollzogen wurden, resp. nur ihnon
bekannt und zugângilich waren und meist an Orten stattfanden,
die kein Unberufener betreten durfle.
2. Die eigentlicken Mysterien. — Wir unterscheiden dabei drei
Arten der Darstellung der Sc-hicksale des Gottes :
a. Einmal sind die Ràume, die denn Mysterienkult geweilit
waren mit zahlreichen Reliefs geschmiickt, welche die verschie-
cienen Phasen im Tode und Erstehen des Gottes darstellen.
'Da wird Osiris auf der Bahre liegend von Isis und Nephthys
beklagt ; Anubis kommt und balsamiert die Leiche ; Horus
reinigt sie ; seine vier Sohne tragen sie zum Grahe ; die mu-
mienfi'n-mige Gestalt wird mit Wasser besprengt. und Grûn
sprosst aus ihr hervor ; Isis làsst sich als Falkin auf den Gott
nieder. Dann wird er durch Horus oder die Fitticihe der Isis
emporgehoben ; der heilige Pfeiler wird aufgerichtet ; trium-
phierend erbebt sic-h der Gott im Grûn des Baumes ; die Schutz-
gôtter vernichlen seine Feinde ; Osiris besteigt den Thron und
die Gotter huldigen ihm ; Horus wird zum Herrscher der Le-
bendigen eingesetzt.
Wenn auch dièse Reliefs zum grossen Teil eine bildliche Wie-
dergabe der beiden unten zu besprechenden Arten der Myste-
rien sind, so dûrfen sie doch nicht einfach als eine entspre-
chende Wandverzierung angesprocben werden ; sie sind auch
nicht allein zur Untei^veisung oder gar zur Erbauung ange-
bracht ; sie haben vielmehr auch ein Leben fur sich : Osiris
und seine Begleitgotter kommen und beseelen die Bilder, sodass
in ihnen sich seine Schicksale wirklich wiederholen. Das ist
eine Auffassung der Reliefs, die sich hier wie in den anderen
Tempeldarstellungen der Spàtzeit klar ausgesprochen fmdet,
und die auf uralte Ideen zurûckgeht : sie findet sii'h entspre-
chend schon in den Grabreliefs des Alten Reiches.
b. An zweiter Stelle stehen die Figurenspiele : Das ganze
Draima vom Tode, Wiedererstehen und Triumphieren des Gottes
wurde mit kostbaren Rundplastiken aus Gold, Silber und Holz
dargestellt. Wir mûssen uns das wohl so vorstellen, dass die
einzelnen Gruppen an bestimmten Tagen unter Beobachtung
entsprechender Ceremonien zusammengestellt wurden. Yon den
DIE MYSTERIEN DES OSIRIS 419
zahlreichen Scenen sei eine kleine Auswahl angefûhrt :
Da ruht eine Figur des Sokaris-Osiris von 5 Spannen :^ Fin-
gern aiif der Bahre, danebeu ein Bild des Anubis mit Salbe und
Binden zum Einbalsamieren der Leiehe. — Ein Osiris von einer
Elle, einer Spanne und einem Fiiiger liegt da, die eine Hand
vor das Gesieht hait end, Isis zu Hàupten, Nephthys zu Fûssen.
— Eine Falkinnenfigur ans Gold làsst sich bel einer dritten
Gruppe auf die àVIumie des Gottes nieder. Dann das Erwachen :
Honis sLeht vor der Bahre seines Vaters und hait seine Hand
an dessen Haupt ; die Figur des Osiris, der sich von der Balire
zu erheben scheint, misst 1 Elle, 2 Spannen, 3 Finger und ist
aus Gold gefertigt ; ihre Augen sind eingelegt, Szepter und
Geissel aus Gold. -- In einer andei'en Grui)pe fâchelt eine.
goldene Isis.flgur von 1 Elle, 2 Spannen, der beinahe vôllig
aufgerichteten Osii'ismumie mit den Flûgeln Wind zu.
Grossere Figuren von 2 Ellen aus bemaltem Holz und mit
eingelegten Augen zeigen den Osiris-Konig von Horus voll aul'-
gerichtet ; Isis und Nephthys begriissen den Wiedererstande-
nen ; zur Seite steht aufgerichtet der heilige Pfoiler von Busiris.
iSo zieht die ganze GeschichLe des Osiris an uns vorûber, und
auch liier mùssen wir uns die Bildwerke als vom Gotte beseelt
vorsl ellen, ganz entsprechend wie die Kultbilder, die im Naos
des Tempels verehrt wurden.
c. Die dritte Art der Feiern ist die bekanntcre und verdient
erst den Namen Mysterien im eigentlichen Sinne. Aus be-
stimmten Elément en werden Figuren des Gottes zusammenge-
setzt, und an ihnen wird von Priestern und Priesterinnen ailes
vollzogen, was einst an Osiris selbst geschehen war. Wir un-
tersc'heiden dabei 2 Gruppen :
In der Mitte der einen steht eine Figur des « Osiris des
Fiirsten der Westlichen » d. i. der Toten, die auch durch eine
âhnliche Lokalgestalt des Gottes ersetzt oder neben dieser
geformt werden kann. Sie wird aus Sand und Frurhtkornern
gebildet, befeuchtet und dadurch zum grùnen gebracht. spâter
balsamiert und begraben.
Zunàchst wird dor Acker des Osiris bestellt : vorn mit Gerste
fijr die Osirisfigur, in der Mitte mit Flachs fur die Mumien-
binden, riickwârts mit Spelt fiir die Kefenu-Formen der Gottes-
glieder. Zwei schwarze Rinder wer'den an einen Pflug aus Taina-
420 H. JUNKER
riskenliolz gespannt, dessen Sc>har aus schwarzem Eisen
geschimiedet ist. Der Pflûger tràgt ein besonderos Gewand und
eine Binde um den Kopf ; die Saat wirft ein Kind aus.. im Pest-
gewand, mit der Jugendloelie an der Stirn, wâlirend der Vor-
lesepriester die Sprûche vom Bestellen des Feldes rezitiert. Die
feierliche Ernte der Gerste findet am sog.Schefbedet-Feste statt.
Am 12. Choiak beginnen die eigentlicihen Feierlichkeiten. In
der vierten Morgenstunde fiilirt man Isis zum Sitze des Erd-
hackens und tragt die Frachtkôrner vor ihr her. Man lassf die
Guttin sieh ohne Gewànder auf einem Ruhebett niederkauern
Lind seliûttet die Kurner auf ein Tuch vor ihr aus ; daneben
wird die Wage aufgestellt. Dann misst man 2 Mass ab und
teilt sie in vier gleiohe ïeile zu je 1/2 Mass. In gleicher Weise
nimmt man 2 Mi Mass vom Wasser des heiligen Sees, teilt, es
in 4 gleiehe Teile, und mischt je einen Teil Gerste und Wasser
in vier silbernen Behàltern und versieht dièse mit der Auf-
sclu'ift der vier unten zu liesprec'henden Hailbformen. Dann
bildet man 4 Teile aus 2 Mass gesiebteim Sand, tut je 1/2 Mass
Wasser liinzu, gibt sie in die genannten 4 silbernen Behâlter
und mischt in ihnen Korner und Sand durcheinander. Jetzt
werden die Formen herbeigebracht : die Form des Osiris des
« Fûrsten der Westliohen » ist aus Gold und misst eine Elle
in der Lange bei 2 Spannen Breite in der Mitte ; sie stellt den
Gott als Mumie mit Menschengesicht dar, die oberàgyptische
Krone. auf dem Haupte ; auf der Brust ist die Kônigstitulatur
des Gottes eingraviert. Die Ganzform besteht aus einer rechten
und linken Hàlfte; in die der Inhalt je eines der oben genannten
Behâlter gefûllt wird.
Die zwei ubriigen Gefâsse sind fiir die lieiden Halbformon
des OsiriS-Sepj bestimmt. Dièse P'orm misst 3 Spannen 3 Fin-
ger im Geviert und ist eine Spanne hoch. Sie besteht aus
scihwarzem Metall und bat 16 Abteilungen, den 16 Gliedern des
Gottes enfsprechend. Ihr Inhalt entspricht in Materie und Volu-
men genau dem der Osirisfigur, und als Aufschrift tràgt sie :
« Osiris, P'iirst der Westlichen ». Ilire Verwendung dûrfte norli
auf die àlteste Form der Naturmysterien des Osiris hinweisen.
Beides nun, die beiden Hâlften der Figur und des Behàlters
der Gottesglieder legt man in den sogenannten « Beet «-Behâl-
ter {Hf'sep) . Dieser missL 1 Elle 2 Spannen im Geviert und
DIE MYSTERIEX DES OSIRIS 421
3 Spannen i Finger in der Holie. Er ist ans Basait gelianen und
ruht aiif 4 Stûtzen ; in dpr Mitfp des Bodens ist ein I.och zum
Abfluss der Fliissigkeilen. die von einem daruntersteiienden
Bassin ans Granit.. 7 X 7 Spannen gross, aufgefangen werden.
Die Formen mit ihrem Inlialt l'uhon in dem Hcsep-Bfiha,]ier auf
Zweigpn und sind mit Zweigen bedeekt und werden tâglioh mit
Wasser begossen, 9 Tage lang.
Am 21 . Choiak nimmt man den festgewordenen Inhalt aus den
beiden Halbformen, legt die beiden Telle diolit nebeneinander,
schnûrt sie mit 4 Baststreifen zusammen, und legt die so
entstandene Osirisfigur in die Sonne. Ahnlich verbindet man die
beiden Hàlften des Osiris-Sepj und legt sie zu Haupten des
« Fûrsten der Westlir-lien ».
Am 22i. Choiak wird eine festliche Wasserfahrt unternommen,
wobei die Barken mit den Osirisfiguren von zahlreichen Gôt-
tprn begleitet werden ; 34 Srhiffe zahlt der Zug, auf denen
insgesamt 365 Liehter brennen. Darnach wird der Gott zur
« oberen Schetjt » gebracht, die aucb « obère Duat » (Toten-
reich) genannt wird, ein Steinbau, in dem er bis zum folgenden
Jahre ruht. — Parallel mit der Herstellung dieser Figuren geht
das Formen des OsH'is-Sokaris. Hier wird wiederum eine Form
aus Gold, eine Elle lang, benûtzt ; sie zeigt den Gott in Mumien.
form mit der « Gottesifrisur » ; die auf der Brust liegenden
Hànde tragen Szepter und Geissel. Die Form besteht diesmal
aus einer oberen und unteren Halbform. Die Zusammensetzung
des Inhalts ist eine wesentlich andere ; sie soll wohi an Osiris
als Erdgott erinnern. in dem aile Sehâtze, die der Boden
sehenkt, verborgen sind : Es sind 7 Tngredienzien, nâmlich
7 Mass Erde von der heiligen Stàtte, dazu 2/3 von 7 Mass
Fruchtkf'jrner. 1/3 trockene Myrrhen, 1/4 frisoher Weihrauch,
1/6 Pulver aus 12 Arten wohlriechender Kràuter. 1/42 Pulver
aus 24 Arten Edelgestein ; dazu kommt Wasser aus dem heili-
gen See. Das Material wird auf 14 kleine Behâlter verfeilt,
welche die Gestalt der 14 Glieder des Gottes haben und aus
Gold. Silhei- und schwarze.m Metall verfertigt sind. Sie haben
aile ihren bestimmten Tnhalt und ergeben zusammen das Volu-
men der Sokarisfigur. Die Masse wird durcheinandergeknetet,
in eine goldene Schale getan. und um dièse wesden Sykomo-
renzweige gelegt.
422 H. JUNKER
Ani 16. Clioiak in der dritten Morgenstunde bi'ingt man die
Giittin (( die die Gotter gebar » ; vor ilir sitzt auf einer Palm-
bastmalte der Feketij-Priester, das Pantherfell um die Schul-
tern, eine Locke von LaY)islazuli am Kopfe. Er nimmt die gol-
dene Schale in seine Hànde nnd sprieht zur Gôttin : « leli bin
Horus, der zu dir kommt ; ich bringe dièse Dinge meines
Vaters ». Mit diesen Worten legt er sie auf den Schoss der
Gôttin. Nun bringt man die beiden Halltformen, salbt sii^ und
fûllt sie mit der Masse ; die obère legt man auf eino Matto auf
die Erde ; die untere legt man darauif. Dann bringt man die
Form mit Inhalt auf eine goldene Bahre von 1 Elle, 2 Spannen,
deren Yorderteil nach Norden schaut ; sie steht in dem sog.
« Henket » (Gemach der Bahre o. à.), das aus Ebenholz gebaut
und mit Gold eingelegt ist ; es ist 3 EMen lang, 2 Ellen breit
und 2 V2 Ellen hoeh. Dies kleine Gemach wiederum steht in der
(( Festhalle », die aus Cedernholz konsfruiert ist : 14 Stangen,
am Fusse and an der Spitze mit Bronze beschlagen. werden in
die Erde gesteckt. Das Dach bildcn Matten aus Papyrus und
Henep-Pflanzen ; im Innern ist sie mit Tuch ausgeschlagen.
Hier ruht liie Mumie unter dem Schutze besonderer Gotter bis
zum 19. Choiak. — An diesem Tage nimmt man die Masse aus
den Halbformen und legt die nun gewonnene Sokarisfigur auf
einen goldenen T^ntersatz, làsst sie von der Sonne bescheinon
und saltbt sie tàglich bis zum 23. mit Myrrhe und Wasser.
Am 23. Choiak legt man den Gott auf einen Untersatz von
Granit und bemalt ihn ; so die Kinnbarken griin. die Haare blau,
Geissel und Scepter erhalten rlie Farbe verschiedener Bdelsteine.
Am 24. Choiok bringt man ihn zur oberen Schetjt, wo schon die
Figur des Ftirsten der Westlichen ruht. Mit dem Einzug der
beiden neuen Figuren in die obère Duat mussen die Figuren
des Vorjahres, die wàhrend der ganzen Zeit hier geruht hatten,
ihre Stâtte verlassen und man schreitet zu ihreni Begrâbnis.
So nimmt man den Fursten der Westlichen am 22. Ghoiak
heraus, salbt ihn und nimmt die Mumiflzierung am 24. in der
sog. Webet, der « reinen Halle » vor, wo auch die Totenwachen
abgehalten werden. Dann legt man die balsamierte Leiche auf
Sykomorenzweige aussen vor die « obère Schetjt » und lâsst sie
dort 7 Tage liegen zum Andenken an die 7 Monate. die Osiris
im Leibe seiner Mutter war.
DIB MYSTERIEN DES OSIRIS 423
Am letzten Ghoiak wird das Begrâhnis vnrgpnomiiicn. Auf
einpm 3 \'> Ellen langen Si-hiffo mit Traggostcll ruht rlfi- G ift
in einer Kajûto ans goldeingelegteni Hulz, 1 Elle 2 Spannen
lang, 3 Spaniiea 2 Finger breil. 3 Spannon tief. Auf deni Ober-
teil liegt die Schakalsgestalt des Anubis. In feierlicher Pro-
zpssion wird er so zur Begràbnisstàtte gefûlirt. Dort ist die
« Huhle iinter den Isrhpd-Wàwmen », die « untere Dval » an der
« Stâlte der (>*) /jp/z-Ptlanzen » errirhtet, ein Steinban von
16 X 12 Eli en, der 7 Tore wie die wirkliche Unterwelt besitzt ;
in seiner Mit te liegen 7 Ellen Sand im Geviert. Nun legt man
den Gott in einen Sarg ans Sykomorenbolz in Mumienform, auf
den die Titulatur des Gottes eingraviert ist. Man tritt dann
durch das westliehe Eingangstor ein, legt den Sarg auf den
Sand nieder und geht durch das ostliebe Tor liinaus. Zusam-
men mit dem « Fûrsten der Westlirhen » wii'd Osiris-Sepj in
eigener Kajûte zum Begràbnisplatz gefûhrt und neben ihm
bestattet. Aueh Osiris-iSokaris findet an diesem Tage, in der
neunten Stunde der Nacht, hier seine Ruhestalt.
Der Ort an dem der Gott ruhte war wâhrend des Jahres der
Schauplatz manigfacher Geremonien. Hier, im heiligen Hain,
den keines Laien Fuss betreten, dessen Stille kein Singen und
Musizieren storen durfte, in dessen Umkreis Jagd und Fisebfang
verboten war, wurden die Totenopfer dargebracht : unter den
Bàumen lagen 365 Altàre fiir die laglieben Spenden ; jede
Dekade fuhr Isis zu besonderem Opfer zu ihrem Gemabl : 'an
bestimmten Tagen bewegten sicb feiprliche Prozessionen
hierher. Hierbin brachte man aucb die Seele des Gottps. mit
Vogelleib und Menschenkopf. und setzte sie in die Zweige der
Baume, die das Grab, bescbat teten.
III. DIE BEDEUTUNG DER MYSTERIEN.
1. Dit' grscliichtUrlw Entwirklung. — - Die voraufgegangene
Scliilderung der Osirismysterien ist Texten und Darstellungpn
der Spiitzeit entnommen, und es ist keine Frage, dass sie in
dieser Form niclit scbon von Anifang an gefpipi'l wui'iIph. wpiin
aueh der Kern uralt ist. Manehe wesentlichpn Punkte lassen
sicli 2000 Jahre weiter hinauf bis in das Mil! 1ère Reieh verfoU
geii ; der crste Anfang diirfle norli einige Jalu'l ausende weiter
anzusetzen sein.
424 H. JUNKER
Wir werden als Ausgangspunkt wohl eine Fpier mit rein
naturmythologischem Hintergrund anzunehmen halien. die das
Welken und Wiedererblûhen der Erde ziim (xegenstande hatte.
Ein weiteres wesentliohes Moment kam tiinzn, als sich in Osiris
die Verbindung von Naturgott und Konigsgott vollzogen liatte.
und nun auch die Geschicke des Gottes als Herrsrher auf Erdon
zum Ausdruek gebracht werden sollten. Dabei \vurden manche
Elemente aus dem Konigskult ûbernommen. Osiris war daim
allmàhlich zum Gott der Toten geworden. und wie der Toten-
kult dureh ihn stark beeinflusst wurde, so wurde anderer-
seits vieles in seinem Kult und seinem Mysterien den Begràb-
nisriten entliehen.
Das dûrften im Wesentliehen die Komponenten des Myste-
rienkultes sein, wenn wir von bestimmten lokalen Zutaten
verschiedener Herkunft abseben ; bei diesen besondei'on Tradi-
tionen einzelner Heiligtûmer sind ausser Busiris. der Urkul.t-
statte. und Abydos, dem zweitwichtigsten Kultort, vor allem
Sais. Memphis, Letopolis, das nordlicbe Behedet und spâter
Philâ zu nennen.
2. Die GeheimliaJtvvg vnd ihre Bedrvtunçj. — Wenn wir nun
nach der Bedeulung der Mysterien suclu'n, drângt sich zunàchst
die Frage nach dem Grund der Geheimhaltung dieser Feiern
auf. Es war in Aegypten im allgemeinen auch der Tempelkult
der Gottheiten nicht offentlich ; man verwahrte das Kulfbild in
dunkler, unzugânglicher Cella ; nur Priester warteten es und
opferten ihm, und allein bei besonderen Festlichkeiten wurde
es vor der Menge entsehleiert. Es spricht daraus die Ehrfurcbt
vor der Gottbeit, die Scheu vor Profanierung des Kultes. Die-
selben Motive sind natiirlich auch im Osiriskult zu berûcksich-
{igen ; aber hier wird das Geheime in ganz aulïâlliger und
besonderer Weise betont. Die Mysterien werden die « Geheim-
nisse » genannt, « die Geheimnisise, die niemand kennt « ; bei
einer Zeremonie wird besonders betont : <( sie ist zweimal
geheim » ; ein andermal werden die Anweisungen eingeleitet
mit : « Verzeichnen der Geheimnisse. die man nicht sieht und
nicht hoi't, die der Vater seinem Sohn uberliefert » ; — die
Gôtterfigur der Mysterien wird in dem « geheimen Gemach »
gebildet ; die-Kajiite des Gottes heisst « der geheime Behàlter »;
die Statte, an der der Gott zur Ruhe gebracht wird, ist das
DIB MYSTERIEN DBS OSIRIS 425
<( Abaton », das zu betreten als schwere VfM'fphlung galt.
Es muss darum hier aiich ein ganz besonderer Grund fur den
so geheimen Gliarakter dieser Riten voiiiegen, nnd icb glaiibp,
dass er loicht festzustellen ist :
In den Osirismysterien wird einmal das geheimnisvolle We-
ben der Natnr dargesteilt ; hier werden die unsiehtbaren Krâfte
verehrt, die ans dem Tode immer wieder neues Leben schaffen.
Dazu kommt die Verbindung mit der anderen Natur des Gottes :
in den Riten wiederholt sich das dûstere Geschick des Osiris,
sein Tod, den man auch in den Insi-hriften zu erwâhnen sich
scheut ; — und dann wieder das Geheimnis seiner Wiederbe-
lebung kraft irnsicht-baren Zaubers ; — das Mysterium des
Lebens und Sterbens wurde hier gefeiert : das durfte sich nicht
vor der Menge vollziehen, sondern nur im Kreis der Gotter, die
eimst Zeugen und Mitwirkende des Urdramas waren und deren
Stella die Priester und Priesterinnen vertreten, in dercn Gewand
sie sich kleiden.
3. Der Si)ni der Feiern. — Im Uranfang. als die Feiern noch
Osiris dem Erd- und Vegetationsgott galten, lag ihnen gewiss
der Gedanke zugrunde, die Naturgewalt, die jahrlich dem Lande
Fruchtbarkeit und Segen spendete, gleichsam zu lokalisioren,
um ilir eine besondere rituelle Verehrung bezeugen zu konnen.
Dann wollte man wohl auch dureh dièse Fnrmeln, Riten und
Opfer auf die Krâfte der Natur einwirken, sie auf magische
Weise zwingen, Wachstum und Gedeihen beeinflusson.
Durch die Erkenntnis, dass mit den Geschicken des Naturgot-
tes historische Ereignisse verkniipft wurden, erhalten wir eine
neue, sekundàre Bedeutung der Mysterien, die nun auch allmâli-
lich âusserlicb sich umzugestalten begannen : sie wurden zu
7^>innerungsfeiern an die Kâmpfe, die Unterâgypten in der
Urzeit unter der Fiihrung des Osiris zu bestehen hafto, an diè
glorrcichen Siège, die zeitweilige Niederlage und den endgiltigcn
Triumph unter den Horuskonigen, den Nachfolgern des Osiris.
Aber auch jetzt behauptet sich die Urbedeutung mindestens
ebenso stark danebcn ; so einmal in den Riten : in der Art der
Zusammensetzung der Figuren, im Sprossen der Korner, im
Baum am Sargc, dem Ha in am Grabe usw. _ dann aber auch in
der Gesamtauffassung der Vorgange : die Mysterien. die sich
in den Wandreliefs und den szenischen Darstellungen mittels
426 H. JUNKER
Rundplasfiken aus Holz, Gold und Silber vollzogen, sind, wie
u-ir salien, so gedacht, dass die Gottlieit die Bilder beseelt,
ilass die Szenen gieichsam Leben und Wirkliehkeit annehmen.
Ein gleicbes mûssen wir analog auch fur unsere Mysterien
fordern. Wenn aber der Gott wirklich erblûht und welkt. ersteht
und wieder begraben wird, so kann es sich nicht um blosse
Erinnerungsfeiern handeln ; die Riten haben nur dann ihren
rechten Sinn, wenn auch hinter dem Kônig Osiris und den
Riten die nur diesem zu gelten scheinon, noch immer der alte
Naturgott stelit, an dem sich in Wirkliehkeit Jahr fur Jahr das
Mysterium des Sterbens und Erstehens wiedorholt. Die Ver-
scliiebung der politisi-hen Ver'hâlfnisse in Aegyi)ten batte ûbri-
gens bald eine Umdeutimg der urspriingliehen Parteien im
Kampfe mit sich gebracht und Hand in Hand damit ging das
Uebergreifen in das Gebiet des Ethischen. Osiris ist der guie
und gprechte Konig ; seine Gegner sind die Bosen geworden. die
den Unscliuldigen verfolgen und ttUen, die dann a'ber die ge-
rechte Strafe ernten. Damit erballen die Mysterien auch oinen
tiefercn Sinn : sie stellen gleichsam das Ringen zwischen Gut
und Bos dar, das zeitweilige Unterliegen der Unschuld und
iliren schliesslichen Triumph. Aber wir diirfen in dieser Ausdeu-
tung niclit zu weit gehen ; iiber die ersten Ansàtze einer solchen
Auffassung gehen die Mysterien gewiss nicht hinaus ; sie zei-
gon auch in der Spàtzeit im WesenI lichen nur die Verbindung
von Naturmythus mit historischer Erinnerung.
Vollends die Beziehung des Geschehens zum personlichen
Erleben vermissen wir ganz ; sie fmdet sich in keinem Ritus.
keinem Sjiruch oder Gebet. Auch erscheint Osiris hier nicht
als Vorbild des sterbenden und zum Leben im Jenseits erste-
henden Menschen, aïs das er uns im Totenkult entgegentritt,
viel weniger noch als ethisches Yorbild. Das darf nicht ver-
gessen werden, wenn wir seinen Kult mit den Mysterien andei'er
Volker vergleichen.
BIBL. — H. SCHAEFERj Die Osirismystcrien in Abydos, 1904 — A. Moret,
Mystères égyptiens, 1913 — H. Junker, Die Stundentvachen in den Osirisviyste-
rien, Wien, 1910 ; ders., Das Gôttcrdekrct ilber das Ahaton, Wien, 1913.
C. VAN CROMBRUGGHE 42"]^
[30] Les Mystères de Mithra,
par M. le Chan. Van Crombrugghe, prof, à l'Univ. de Louvain.
I. DIFFUSION DES MYSTÈRES DE MITHRA.
L'on a dit du .Mithriacisme qu'il a pu balancer la fortune
du Christianisme ; que, pour devenir la religion du monde ci-
vilisé, il lui manqua seulement la faveur du dieu Mars ; et que,
(( si le Ohristianisme eût été arrêté dans sa croissance par quel-
que maladie mortelle, le monde eût été mithriaste » (1).
Il faut le reconnaître, des événements d'ordre militaire ont
pu, au cours du IV* siècle de notre ère, affaiblir le paganisme
officiel qui, à certains moments, ne se distinguait guère du
Mitliriacisme el. par contre-coup, seconder la propagande chré-
tienne. Ce fut le cas, lorsqu'en 312, les légions de Constantin
défirent celles de Maxence ; ce fut le cas aussi, lorsqu'en 363,
Tempereur, qui aimait à se dire le flls et le lieutenant de Mithra,
entreprit, pour conquérir la patrie de son dieu, cette lointaine
expédition dont il ne devait pas revenir ; ce fut le cas, une troi-
sième fois, lorsque l'empereur Théodose vainquit le porte-
drapeau du paganisme, l'usurpateur Eugène.
Mais il reste à voir si ces événements ont fait autre chose que
de hâter un dénouement qui était devenu inévitable. Pour ré-
soudre cette question, demandons-nous : quelle était au IV siè-
cle rimportance du Mithriacisme ? tiuels ont été les facteurs
de la propagande mithriaque ?
Et d"abord, quelle était l'importance du Mithriacisme ?
Un simple coup d'œil jeté sur la carte de la diffusion des
Mystères de Mithra suggère les deux réflexions suivantes.
La première, c'est que Mithra n'a pu prendre pied dans les
pays de culture hellénistique : la Grèce, la Macédoine, la'
Thrace, la Bithynie. la Syrie, la Palestine et l'Egypte — à l'ex-
ception de quelques villes maritimes — sont restées imper-
méables à son influence. Le fait s'explique, pour une part. i)ar
la haine séculaire que les Grecs ont nourrie contre les Perses
et par le succès de la propagande chrétienne dans les pays en
question ; il n"en est pas moins significatif et M. Harn.ack a
raison de dire qu'il suffit à l'histoi'ien (h> le constater, pour
(1) Renan, Marc Aurcle 2, ln-8", Paris, C. Lévy, 1882, p. 579.
428
G. VAN CROMBRUGGHE
comprendre aussitôl, que le sort du Mithriacismo était de mou-
rir (1).
Lia seconde, c'est que le Mithriacisme ne s'est répandu que
très inégalement dans les diverses parties de l'Empire romain.
Com.me on l'a fait remarquer, la carte de la diffusion des Mys-
tères de Mithra présente « l'image d'une gigantesque araignée,
blottie dans Rome et agissant par ses fils aux extrémités » (2).
Les mithréums et autres monuments mithriaques se retrouvent
abondants dans la capitale de l'Empire et dans l'Italie ; ils se
rencontrent, nombreux aussi, tout le long d'une ligne qui re-
joindrait le Pont-Euxin à la région située au nord de Cologne,
en passant par la Mésie, la Dacie, la Pannomie, la Norique et
les contrées rhénanes ; ils existent, assez nombreux, dans les
vallées du Rhône, de la Saône et de la Moselle, c'est-à-dire près,
des voies de communication établies entre le Rhin et la Médi-
terranée ; il s'en trouve, enfin, en Angleterre, notamment à
Deva, à Eboracum et à Isca, oii des postes militaires se trou-
vaient établis. Par contre, l'Afrique — le littoral mis à part • — ,
l'Espagne méridionale, la Gaule occidentale, et de vastes con-
trées, assez rapprochées cependant de la capitale de l'Empire,
n'ont guère laissé de traces d'un culte rendu à Mithra.
•Ce simple relevé des centres de culte mithriaque montre que,
pour l'ensemble des provinces de l'Empire romain et abstrac-
tion faite de quelques milieux à population' cosmopolite, une
corrélation a existé entre la diffusion du Mithriacisme et l'occu-
pation militaire.
La conclusion est confirmée par l'examen de la condition
sociale des adeptes de la religion mithriaque. Les fidèles qui
ont, par des bas-reliefs, des ex-voto, des offrandes, attesté leur
jlévotion à Mithra, appartiennent pour la plupart soit à l'ar-
mée, soit au gouvernement et à l'administration de l'Empire.
Nous savons de plus que de nombreux mithréums ont été cons-
truits ou restaurés par la main d'œuvre militaire.
« Au contraire, comme l'observe M. Toutain, le rôle de la
bourgeoisie semble avoir été des plus effacés dans la diffusion
(1) Mission und Aushreitnno des Christentuvis 2. 2 In-S", Leipzig, Hinrichs,
1906, t. II, p. 271.
(2) D'Alès, art. Mithra, dans DAFC, 1918, t. III, col. 582.
MYSTÈRES DE MITHRA 429
du culte de Milhra. On ne connaît à l'heure actuelle qu'une
seule cité qui ait pris part, en tant qu"organe collectif, à lédi-
fication ou à rornementation dun temple. Encore nest-il point
certain qu'il sagisse.dans ce cas de Mithra » (1).
Quels ont été les facteurs de la propagande mithriaque ?
Sans compter le mutuel appui que se prêtèrent les religions f
païennes de l'Empire romain, ces facteurs furent au nombre '
de trois : l'armée, la faveur impériale, la Diaspora mithriaque.
La première place, on l'a déjà compris, revient à l'armée.
D'importants contingents des troupes auxiliaires de l'Empire
avaient été recrutés ou avaient séjourné en Asie et professaient
la religion de Mithra ; transportés sur les bords du Danube et
du Rhin, ils y gardèrent et y propagèrent leur culte.
Un deuxième facteur fut la protection impériale. Cette pro-
tection se manifesta franchement à partir du règne de Corn-
mode ; elle atteignit son point culminant dans l'espace de temps
qui sépare lavènernent de Dioclétien de Tédit de Milan, et sous
le règne de .Julien l'Apostat. Parmi les empereurs qui ont
favorisé le Mithriacisme, d'aucuns ne visaient qu'à se concilier
les sympathies de l'armée ; d'autres estimaient que le culte de
Mithra aurait pu se fusionner avec le culte solaire, dont ils
rêvaient de faire la religion de l'Etat, et rendre populaire le
culte de la divinité impériale ; d'autres, enfin, se laissaient
guider par la confiance que leur inspirait le dieu iranien.
Le troisième facteur fut la Diaspora mithriaque, qui com-
prenait des marchands et des esclaves, sans compter les sol-
dats. A partir de la fin du l" siècle de l'ère chrétienne, les
« Syriens » vinrent s'établir dans les ports de la Méditerranée ;
plus tard, ils se répandirent à l'intérieur des provinces de
l'Empire ; en Gaule notamment, de Lyon et de Bordeaux, ils
remontèrent jusqu'à Trêves, la capitale du Nord. En même
temps qu'ils fondaient des comptoirs de commerce, ils pre-
naient soin d'organiser leurs cultes nationaux. Or, un grand
nombre d'entre eux étaient des serviteurs de Mithra : ces misé-
rables restèrent, pour la plupart, fidèles à leur dieu, d'autant
plus volontiers que le Mithriacisme ne faisait [toint de dis-
tinction entre esclaves et hommes libres.
(1) Les cultes païens dans l'Empire romain, 3 irj-8". Paris. Leroux, 1917-
1920, t. II, p. 163 ss.
430 C. VAN CROMBRUGGHE
Telles sont les principales données dont dispose l'historien
pour évaluer l'importance que les Mystères de Mithra avaient
prise et pour supputer les chances de succès qu'ils ont pu
avoir. Ces données pourraient, d'ailleurs, être complétées.
Contentons-nous de rappeler que le Mithriacisme a été essen-
tiellement un culte de confrérie, céilébré par et pour les seuls
initiés ; que, si les sanctuaires affectés à ce culte ont été rela-
tivement nombreux, par contre, l'exiguité de leurs dimensions
est telle qu'ils n'ont pas dû, en moyenne, contenir plus de cent
personnes ; et que, après les défaites subies par les défenseurs
de Mithra, les missionnaires chrétiens n'ont pas, autant qu'on
en peut juger, trouvé devant eux des mithriasfes nombreux ou
difficiles à convertir.
Notre conclusion est que, dans l'ensemble des provinces de
l'Empire romain, le Mithriacisme a été un culte étranger, im-
porté par des Orientaux, et qu'il n'a pas rencontré, auprès des
populations occidentales, un succès considérable. A Rome et
dans l'Italie, l'exemple des empereurs et de leur cour a pu
valoir à Mithra un nombre d^adeptes assez considérable ; il n'a
pas réussi à faire du Mithriacisme un rival dangereux du
Christianisme.
II. ÉCONOMIE DES MYSTÈRES DE MITHRA.
Le Mithriacisme a été une religion à mystères : l'ensemble
de ses doctrines et plus spécialement le mythe du salut étaient
révélés aux adeptes de la secte comme une gnose, qu'ils de-
vaient s'engager par serment à ne pas divulguer ; l'ensemble
de ses rites comprenait, outre les cérémonies du culte divin,
des pratiques dinitiatjon, qui signifiaient et qui étaient censées
produire l'assimilation des mêmes adeptes à leur dieu sauveur.
1° La doctrine mithriaque. Le Mythe du salut.
A. Une imagerie religieuse se retrouve, sensiblement la môme,
dans de nombreux mithréums des diverses parties de l'Empire
romain. L'interprétation de cette imagerie, que peu de docu-
ments littéraires nous aident à comprendre, ne va pas sans
dilTicultés ; cependant, les historiens sont j)i'ès de s'accorder sur
les points suivants :
a. Les mithriastes se sont représenté l'origine des êtres per-
manents sous forme de théogonie. Le dieu souverain, c'est
MYSTÈRES DE MITHRA 431
Zervan Akarana. Il est figuré, dans les mithréums, sous les
traits (J"un personnage léontocéphale : un forps humain que
surmonte une tète de lion à gueule ouverte ; un serpent enlace,
des pieds à la tête, le mystérieux personnage ; celui-ci porte,
attachées aux épaules, des ailes, d'ordinaire au nombre de
quatre et dirigées en sens opposés ; ses attributs sont le
sceptre, le foudre et deux cl&fs. D'après Tinterprétation que
M. GuMONT a fait prévaloir (1), le personnage léontocéphale
représente le Temps infini et dévorant ; le serpent, qui de ses
replis enveloppe le Temps, symbolise le cours sinueux du soleil
sur récliptique ; les clefs, le foudre et le sceptre sont les
emblèmes du pouvoir suprême. — Du Temps infini lui-même,
ou du moins dépendamment de ce Temps, procède « la triade
mithriaque », qui comprend un couple familial, le Ciel et la
Terre, et l'enfant né de leur union, l'Océan. Puis, toute une
série de générations divines donne naissance aux dieux de
l'Olympe, aux quatre éléments, au soleil et à la lune, aux pla-
nètes, aux signes du zodiaque.
b. Les relations qui existent entre les diverses catégories
d'êtres, affectent, dans la doctrine mithriaque, le caractère d'un
antagonisme irréductible : le dualisme est une autre caractéris-
tique de cette doctrine. Au couple divin, du Ciel et de la Terre,
les mithriastes en opposent un autre, qui procède lui aussi du
Temps infini, Ahriman et son épouse Hécate, et ils subordonnent
à l'un ou à l'autre de ces deux couples, tous les êtres, d'après
qu'ils les considèrent comme bienfaisants ou comme malfai-
sants. S'agit-il de déterminer l'activité créatrice de la Divinité,
c'est encore sous la forme d'une lutte qu'ils se la représentent :
des bas-reliefs nous montrent le dieu du ciel cui se jette sur
les anti-dieux, égorge les monstres et foudroie les géants. Il
n'est pas jusqu'aux êtres divins eux-mêmes qui ne s'opposent
l'un à l'autre. Tel est, en particulier, le cas des éléments :
sur de nombreux bas-reliefs l'on voit un serpent, symbole de la
terre, et un lion, symbole du feu, se disputer la possession d'un
cratère rem])li du princii)e humide.
c. A ce dualisme s'ajoute et se superpose un déterminisme
astrologique : les événements du monde terrestre sont préfi-
(1) Textes et monumi nts figurés relatifs aux mpstf-res d<- Mithra, 2 in-4",
Bruxelles, Lamertin, 1896-1899, t. I, p. 76 ss.
432 C. VAN GROMBRUGGHE
gurés par les événements du monde astral et le monde astral
obéit à des lois inflexibles.
B. L'on comprend, dès lors, combien grands sont le malheur
et rimpuissance de Thomme, condamné à vivre parmi toutes ces
luttes qui mettent aux prises, les uns avec les autres, des êtres
surhumains, et exposé à devenir le jouet d'un aveugle destin ;
cambien intenses son besoin et son désir d'un dieu sauveur.
Ce dieu sauveur, c'est Mithra. Plus que les autres dieux,
Mithra est secourable à l'homme : dieu solaire, il est au sens
physique du mot, le médiateur, le « mésitês «, et l'auteur de la
vie ; guerrier invincible et ami Adèle, il entoure l«s siens de sa
toute-puissante protei-tion ; juge des morts et détenteur du
pouvoir des clefs, il assure à ses dévols une bienheureuse
immortalité.
C'est naturellement Mithra qui occupe la première place dans
la doctrine mithriaque et dans les mithréums : de nombreuses
représentations figurées prouvent que le dieu avait sa légende,
riche et compliquée, et que, malgré qu'il fût un dieu solaire, il
était devenu un dieu à biographie.
Trois épisodes de la carrière mythique de Mithra ont été,
plus souvent que d'autres, représentés et glorifiés : la nais-
sance du dieu ; sa rencontre et ses relations avec un autre dieu
solaire ; sa lutte avec le taureau primordial, lutte qui se ter-
mina par l'immolation du taureau.
Mithra naquit d'un rocher : dans les mithréums on vénérait
une pierre conique d'où émergeait un enfant nu et coiffé du
bonnet phrygien. Cette conception s'explique : à un groupe de
mithriastes le soleil apparaissait tous les matins sortant de la
montagne Hara herczaita ; le nom de cette montagne étant du
féminin, on en vint à parler de la « Pierre génératrice ». Après
sa naissance, l'enfant divin fut l'objet d'hommages religieux
de la part des bergers : ceux-ci lui apportèrent les prémices de
leur troupeau et de leur récolte. Telle est du moins la significa-
tion que la plupart des historiens attribuent à certains emblè-
mes sculptés. Ce thème, s'il est vraiment représenté, a de quoi
surprendre : il n'est pas en situation, puisque la naissance du
dieu précède la création de l'homme ; djailleurs, comme il n'est
que rarement figuré, il n'est probablement pas primitif ; dans
MYSTÈRES DR MITHRA 433
ces conditions, l'hypothèse d'un emprunt fait au Christianisme
doit être prise en considération.
La présence, sur les documents mithriaciues, d'un second
dieu solaire, est elle aussi assez énigmatique. Pour en rendre
compte, on pourrait songer à un dédoublement de personnalité,
répondant à une pluralité de fonctions. L'iiistoire des religions
connaît de nombreux exemples d'un semblable dédoublement ;
Ton en rencontre môme dans les mithréums. Ainsi, les deux
dadoi)hores, Gautès et Giautopatès, que l'on voit figurer d'ordi-
naii-e aux deux côtés de Mithra, portant l'un une torche droite
et l'autre une torche renversée, sont un dédoublement du dieu
solairf? : ils personnifient les vicissitudes de la lumière, le soleil
levant ou printanier, d'une part, et de l'autre, le soleil couchant
ou automnal ; aussi le pseudo-DENYS l'Aréopagite donne-t-il
le nom de « triple Mithra » au groupement hiératique composé
des trois personnages en question {Epist. vu).
Ici toutefois, la figuration d'un second dieu solaire se pré-
sente tout autrement. L'on voit les deux dieux s'attabler devant
une table servie et contracter entre eux une alliance ; l'on voit
Mithra qui pose une couronne radiée sur la tête de son collègue,
et ce dernier qui conduit le char solaire. Tout porte à croire
que le second dieu solaire des documents mithriaques est
Shamash-Sol ; que Mithra rencontra ce compétiteur en Babylo-
nie et dans l'Empire romain, et qu'il finit par conclure avec lui
un pacte d'alliance, aux termes duquel Shamash-Sol serait la
lumière matérielle du monde, pendant que lui-même, Mithra,
en serait la lumière morale.
La lutte de Mithra avec le taureau constitue l'objet du Mythe
du salut. Il existe de cette lutte deux représentations distinctes.
La première nous montre Mithra qui se met à la poursuite d'un
taurean sauvage ; le dieu finit par rejoindre l'anima'l et par
l'entraîner, à reculons, dans la caverne où il habite ; cet exploit
prend le nom de « Transitiis ». La seconde nous montre le
corbeau, l'oiseau messager du Soleil, qui apporte à Mithra
l'ordre de sacrifier le taureau ; le dieu plonge le couteau du
sacrifice aux flancs ou <lans le poitraii de l'animal ; du corps de
la vicliiiie naissent les plantes el les herbes, et de sa moelle
épinière, le blé ; les bêtes ahrimaniennes, notamment le scor-
pion, la fourmi et le serpent, s'éverluent en v.iin 'i ii-capaier à
28
434 f"- VAN CROMBRUGGHR
leur profit ou (rem}»oisonner coite source de vie. Qu'est-ce à
dire ?
Nous sommes en présence d'un syncrétisme assez compliqué.
La traditi|0n avestique attribuait au sacrifice du taureau pi'i-
moj-dial rorigine de la vie dans ie monde. Le taureau, créé par
Ormuzd, avait été immolé ; du corps de l'animal était sortie la
végélalion ; de sa semence, recueillie par la lune, toutes les
espèces d'animaux utiles à Thomme ; l'âme de l'animal, montée
au ciel el divinisée, était devenue le génie protecteur des
troupeaux. En réalité, le taureau primordial représentait le
principe de vie ou, si Ton veut, la Nature nourricière ; l'animal
devait être sacrifié, parce que le sacrifice assure la fertilité et
la fécondité de la Nature.
D'autj'o part, Mithra, dieu solaire et, à ce titre, principe de
fertilité et de fécondité, avait lui aussi rendu, dans le passé,
comme il continuait de remli'e, dans le présent, dans le même
ordre de choses, d'importants services : il convenait que son
nom fût associé à celui du taureau primordial.
C'est cet ensemble d'idées qu'exprime la lutte de Mithra avec
le taur'cau. Pendant l'hiver, la Nature, devenue sauvage, a cessé
de nourrir l'homme ; la tâche ardu'e de la forcer à reprendre
son service nouri'icier incombe au héros solaire, à Mithra ; le
dieu ramène le taureau, symbole de la Nature, dans sa caverne ;
que le taureau soit ramené dans la caverne de Mithra, cela
signifie, semble-t-il, que la Nature va être fertilisée et fécon-
dée par le soleil. Ainsi donc, dans la première représentation,
Mithra a gardé son caractère de principe naturiste. Dans la
seconde représentation, ce caractère s'efi'ace, et Mithra exerce
les fonctions de sacrificateur : il est devenu le dieu tauroctone.
Comme on voit, il s'agit de représenter, en langage de mys-
tères, l'origine de la vie et sa réapparition au printemps. Mais
tout porte à croire que, dans les Mystères de Mithra, le sens
religieux du mythe s'était notablement élargi et que l'exploit
du dieu tauroctone était considéré comme la source de tous les
biens qui sont nécessaires au bonheur de l'homme. «
Les mithriastes croyaient, d'ailleurs, que le sacrifice d'un
autre taureau merveilleux, à immoler par Mithra à la fin des
temps, devait inaugurer le régime de la vie éternelle des
MYSTÈRES DE MITHRA 435
bienheureux. Ils établissaient ainsi un rapport de conformité
entre le commencement et la fm des temps et faisaient reposer
SUT le sacrifice du taureau sacré toute l'économie du salut.
2° Le culte mithriaque. Les cérémonies de l'initiation.
Le sanctuaire où se réunissaient les adeptes de Mithra et
que nous appelons mithréum. était une grotte naturelle, ou un
cirque e.ntouré de rochers, ou encore, une cave précédée d'un
parvis. Il était régulièrement voûté : au témoignage de Por-
phyre, il symbolisait l'univers.
La partie centrale du mithréum était réservée aux officiants ;
les fidèles prenaient place, le long des murs latéraux, sur des
bancs de maçonnerie. Un feu perpétuel brûlait sur lautel des-
tiné aux offrandes ; sur ou devant l'autel, se trouvait placée une
image de Mithra tauroctone ; d'autres emblèmes hiératiques et
des symboles astronomiques encadraient la sainte image.
Il y a lieu de distinguer dans le culte de Mithra : 1° les rites
accoutumés des cultes païens en général, accomplis par les
membres du clergé ; 2° les rites spécifiquement mithriaques,
célébrés par les mystes ou avec leur participation active, et
dont l'ensemble porte le nom de « mystères ».
A la première catégorie appartiennent les sacrifices, les lus-
trations, un certain nombre de prières. A raison de leur utili-
sation en l'honneur d'un dieu particulier, ces pratiques avaient
pris une forme spéciale. Trois fois par jour, le clergé adressait
une prière à son dieu solaire ; en l'honneur de ce même dieu, il
sanctifiait le dimanche, cependant qu'il consacrait les six
autres jours de la semaine à autant de planètes ; il célébrait, à
la date du 25 décembre, la fête de la renaissance du soleil {dics
natalis Salis invicti) , et, vers l'équinoxe du printemps, une autre
fête, à l'occasion de laquelle se faisaient les initiations.
L'initiation mithriaque comportait sept degrés, que St. .Jé-
rôme énumère dans l'ordre suivant : le Conbeau {corax) , l'Oc-
culte {rnjphius) , le Soldat {miles), le Lion {leo) , le Perse {per-
ses), l'Héliodrome ou Courrier du Soleil {heliodromus) , le Père
ipater) . A l'orcasidn des principales solennités du culte, les
initiés s'affublaient des insignes appropriés à leur grade, et se
comportaient qui en corbeau, en croassant, qui en lion, en
rugissant, etc. — Tâchons de fournir- quelques précisions.
Au sujet des deux premiers grades, nous so. imes peu ren-
436 n. VAX CROMBRUGOHE
seignés. Les Corbeaux sont appelés des « auxiliaires », et le
grade de Corbeau paraît avoir été conféré à des enfants. Les
Occultes, sans doute parce qu'ils sont tels, ne paraissent pas
sur les monuments figurés ; la cérémonie qui concerne soit leur
entrée dans la classe qu'ils constituent, soit leur sortie de cette
classa, porte le nom de « ostpnsio >■> ou « traditio cryphionun ».
Le Soldat était un membre actif de la milice sainte. A son
initiation on lui présentait, sans doute en récompense de la
bravoure qu'il venait de manifester au cours d'une épreuve pré-
jiaratoire, une couronne sur une épée ; de la main tendue il
repoussait cette récompense en disani : « Mithra est ma cou-
ronne ! » On lui imprimait aussi la sphvagis : de même que,
dans l'armée romaine, les recrues, au moment de prononcer le
sacramentum ou serment de fidélité, étaient marquées du signe de
l'empereur régnant, ainsi le Soldat de Mithra, au moment d'être
incorporé dans l'armée du bien et de prendre l'engagement
solennel de ne point divulguer les saints mystères, était mar-
qué du signe de son dieu. C'est au front qu'on le marquait, et
des trois façons de marquer qui furent en usage dans l'anti-
quité, c'est-à-dire du tatouage, de la scarification et de la cau-
térisation, cette dernière seule paraît avoir été employée.
Au sujet des deux grades suivants, les grades de Lion et de
Perse, les sources d'information sont peu nombreuses. Le prin-
cipal renseignement qu'elles nous fournissent, concerne l'usage
du miel, dans l'initiation léontique et dans l'initiation persique.
Porphyre rai)porte qu'on répandait du miel sur les mains,
qu'on enduisait de miel la langue du candidat-Lion, et qu'on
présentait du miel au candidat-Perse. La pratique se ratta-
cherait à la double vertu qui est propre au miel, à sa vertu
purifiante et à sa vertu de con&ervation. Le miel purifiant, dit
en substance le philosophe néoplatonicien, convient à l'initia-
tion léontique : le lion, en effet, est le symbole du feu. qui est
l'élément pur par excellence ; c'est pourquoi, en même temps
qu'on invitait le candidat-Lion à mener une vie sans tache, on
le purifiait de ses fautes et, la purification ne pouvant se fain»
avec de l'eau, élément hostile au feu, on la faisait avec du miel.
Le miel, purifiant, ajoute-t-il, convient à l'initiation persique,
le Perse étant « gardien des fruits ».
En pressant un peu les termes employés par Porphyrk,
MYSTÈRES DE MITHRA 437
UsENER (1) a été amené à conclure qu'on donnait au Lion du
miel à goûler, et au Perse du miel à manger. Le inème savant
fait remarquer que, chez de nombreux peuples de ]"anf iquitt'.
les nouveau-nés, en goûtant du miel, acquéraient di'oit à la
vie, et que, de plus, le miel était considéré comme la nourriture
des bienheureux. D'a{)rès cela, l'initiation léontique aurait fait
du fidèle un myste, au sens strict du mot, c'est-è-dire un homme
appelé à prendre une part active à la célébration des mys-
tères ; et l"initiati(»n j)ersique aurait donné au myste, sous le
symbolp expressif d'une nourriture divine, une garantie de
bienheureuse immortalité.
L'Héliodrome était un membre de la confrérie, au service du
Soleil, ou même un associé du Soleil, et connaissait sans doute.
en cette qualité, le chemin qui mène au ciel.
Enfin, le Père était le lieutenant de Mithra luL-mème, en tout
ce qui concernait l'administration de la confrérie ; comme nous
l'apprend Tertullien, c'est à lui qu'il appartenait de préparer
les initiations ; c'est pourquoi on l'appelait aussi « Pater sacro-
ru m ». A la tête des Pères, q;ii dirigeaient les communautés
particulières, se trouvait le Père des Pères, pater pafrum, ou
patcr patratus, qui paraît avoir été le chef spirituel de toute la
communauté.
'Parmi les rites proprement dits, les textes signalent — à l'ôté
de la sphraçjis et de l'emploi du miel, dont il a été question —
un baptême et un repas sacré.
Le repas sacré des Mithriastes pose à l'historien d'impor-
tantes questions ; nous devons nous y arrêter un moment.
M. CuMONT a formulé, à ce sujet, les conclusions suivantes :
« Il existait, chez Mithra, un banquet mystique ou repas sacra-
mentel. Ce repas comportait une oblation de pain et d'eau, mêlée
sans doute de vin. fd sur laquelle un |)rètre prononçait les
formules sacrées. Il est probable que seuls les initiés qui
avaient atteint le grade de Lion y étaient admis et que c'est le
motif qui leur faisait donner le nom de Participants. Ces agapes
étaient évidemment la commémoration rituelle d'un festin que
Milhra avait célébré avec Sol avant son ascension. On attendait
de ce banquet mystique, surtout du vin consacré, des effets
surnaturels : la liqueur enivrante ne donnait pas seulement la
vigueur du corps et la {)rosi)éi'ité maft'rielle, mais la sagesse de
(1) Kleine Schriftcn, in-8", Leipzig, Teubner, 1913, p. 399 ss.
438 C. VAN CROMBRUGGHE
l'esprit ; elle communiquait au néophyte la force de combattre
les esprits malfaisants ; bien plus, elle lui conférait, comme à
son dieu, une immortalité bienheureuse » (1).
De son côté, M. Loisy i ose en thèse que Mithra était un
dieu souffrant, le sacrifice du taureau étant, en réalité, Timmo-
lation du dieu lui-même, et que la cène mitliriaque était un rite
de communion à la substance spirituelle du dieu immolé (2).
A l'appui de celte thèse, il invoque le témoignage de S. Justin
et de Tertullien. Afin de rendre compte de la ressemblance
qu'ils avaient remarquée entre la cène mithriaque et l'Eucha-
ristie chrétienne, les deux apologistes chrétiens, dit-il, n'ont
rien trouvé de plus expédient que d'imputer aux démons l'imi-
tation anticipée du sacrement chrétien en faveur de Mithra. ■ — -
Que faut-il penser de tout cela ?
Nous nous sommes arrêté aux conclusions suivantes.
1° Les documents archéologiques et littéraires prouvent
l'existence, dans les Mystères de Mithra, d'un repas sacré. Ainsi,
pour ne retenir que le témoignage de la seule archéologie, assez
régulièrement Vnn trouve dans les mitliréums deux bancs de
maçonnerie, s'étendant le long des murs latéraux, et dont la
surface, large d'environ 1 m. 50, est inclinée vers le mur.
Gomme Ta établi J.-B. de Rossi, ces bancs ont servi aux
mithriastes de lits triclinaires pour leur repas sacré.
2" Ce repas comportait du pain et de l'eau, sur lesquels on
prononçait une formule sacrée. Qu'il y ait eu aussi, comme
élément de ce repas, du vin, rien ne le prouve ; et que ce même
repas ait été la commémoration rituelle du festin que, avani
son ascension, IMithra avait célébré avec Sol, c'est une chose
possible ; ce n'est pas un fait établi. Il est bien vrai que des
bas-reliefs représentent Mithra et Sol, ou, à la place de ces
dieux, des mystes, assis devant une table qui porte des pains et
une corne à boire. Mais l'interprétation de ces scènes figurées
reste douteuse. Ainsi, il n'est pas probable que le fameux bas-
relief de Konjica représente la cène mithriaque. En effet, parmi
les convives masqués qui, d'après ce document, ont pris place
(1) Les Mystères de Mithra 3, In-S", Bruxelles, Lamertin, 1913, p. 163 ss.
(2) Revue d'histoire et de littérature religieuses, 1913, t. IV, p. 529 ss.
MYSTÈRES DE MITHRA 430
autour do la table, figurent aussi le Soldat ot le Corbeau. Or.
M. Clmont lui-même en convient, il est certain que le Corbeau
et il est probable que le Soldat n'appartenaient pas à la ca'é -
gorie des Participants, qui étaient admis à la communion
mithriaque. C'est pourquoi M. Lietzmann interprète le document
en question comme figurant le repas céleste des bienheureux (1)
et cette interprétation paraît assez plausible.
3° Il est invraisemblable que la cène mithriaque ait été prati-
quée comme un rite de communion à la substance spirituelle de
Mithra. Des trois afïîrmations que comporte la théorie de
M. LoiSY (à savoir : les éléments de la cène mithriaque étaient
censés contenir la substance spirituelle du taureau primordial ;
Mithra a été identifié à ce taureau ; la mort du taureau repré-
sente la passion salutaire du dieu), aucune ne trouve d'attesta-
tion formelle dans les documents de l'antiquité.
L'on pourrait avec un semblant de raison soutenir que le
pain, fait du blé qui était sorti du corps du taureau immolé,
contenait la substance spirituelle de ce dernier. Mais on ne voit
pas que la même chose puisse être dite de l'eau, qui était, elle
aussi, un élément de la cène mithriaque. D'ailleurs, si les
éléments de cette cène avaient été considérés comme contenant
la substance de l'animal divin, pour cette raison que, d'après
le mythe, toute la végétation était sortie de lui, il semble que
ces mêmes éléments auraient dû nécessairement et toujours
contenir cette substance et qu'on n'aurait pas eu à en changer
la nature par une formule sacramentelle. D'autre part, Mithra
et le taureau sont, autant qu'on peut en juger, des êtres dis-
tincts, et les deux scènes où on les voit rapprochés l'un de
l'autre s'expliquent complètement, nous l'avons dit. sans qu'il
, soit besoin de les identifier l'un à l'autre. Enfin, pour ce qui est
de la passion salutaire de ]\Iithra, on n'en trouve de trace nulle
part, à moins que. avec Wixdt (2\ on n'entende par Icà la
fatigue qu'a valup au dieu sa lutte avec le taureau ; mais mèmn
dans cette iiypothèse. il serait hors de propos de parler de la
passion du dieu mourant ou immolé.
Il reste, il est vrai, les déclarations de S. Justin et de Ter-
ci ) Cf. p. 'W'ENDLAND, Die hcllcnisti.sch-roemischr Kuliiir lu ihrer Bezirhungcn
zu Juch ntum und Christcntiivi i, m-S", Tlibingen, Mohr, 1912, p. 432 sa.
(2) Mythus und Religion^. in-S", Leipzig, Krôner, 1915, p. 243.
440 C. VAN GROMBRUGGHE
TULLiEN. Mais ne suflit-il pas, pour en rendre compte, d'ad-
mettre que la cène mithriaque ait été un repas sacramentel ?
Il ne faut pas oublier que les deux apologi'stes ont cru trouver
chez Mithra d'autres contrefaçons diaboliques du Christia-
nisme, Là où nous ne voyons qu'une vague ressemblance.
S. Justin considère comme un plagiat, commis au détriment du
Christianisme, que Mithra ait été honoré comme « le dieu né de
la pierre » et que les mithriastes aient pratiqué leurs initiations
dans une grotte. Tbrtullien de même, dénonce comme une
contrefaçon des rites chrétiens, que, dans les Mystères de
Mithra, le diable « apporte une image de la résurrection, et
sous le glaive rachète la couronne ».
4° Si cependant S. Justin avait voulu dire que les Mystères de
Mitihra ont ressemblé aux Mystères chrétiens en ceci également
qu'ils étaient censés contenir la substance du dieu, il y aurait
lieu de considérer la cène mithriaque comme une imitation de
l'Eucharistie chrétienne, et non pas comme une imitation anti-
cipée, inspirée des prophéties, mais comme une imitation de la
pratique existante. C'est bien ainsi, quoi qu'en pense M. Loisy,
que l'entendait S. Justin, qui parlait de la pratique eucharis-
tique de son temps, telle que, au rapport des Mémoires des
Apôtres ou Evangiles, le Christ l'avait instituée et qui compor-
tait, non seulement une offrande de pains, mais aussi une
formule de consécration, dont on chercherait vainement le type
dans l'Ancien Testament. En faveur de l'hypothèse de l'emprunl,
MM. RoBSK et Harnack font justement remarquer que. depui«
qu'il pénétra en Babylonie, le Mithriacisme n'a pas cessé de
prendre à d'autres religions les pratiques qui pouvaient
servir sa propagande, et, qu'an surplus, les repas théophagi-
ques sont étrangers à la tradition de l'Iran comme à celle de
la Chaldée (1).
BIBL. — F. CuMONT, Textes et Monuments figurés relatifs aux Mystères de
Mithra, 2 ln-4", Bruxelles, Lamertin, 1896-1899 ; Les Mystères de Mithra 3.
in-S", ihid, 1913 — A. Dieterich, Eine Mithraslitnrgie ? In-S", Leipzig^, Teub-
ner, 1910 ; Kleine Schriften, in-8», ibid., 1911, p. 252-271 — J. Grill, Das
persische Mysterienwesen im r'ômischen Reich, in-8°, Tiibingen, Mohr, 1903 —
J. TouTAiN, Les cultes païens dans l'Empire Romain, 3 in-8°, Paris, Leroux,
(1) Cfr. A. Harnack, l. c.
MYSTÈRES D" ELEUSIS 441
1907-20. t. II, p. 121-177 ; La légende de Mithra, dans RHR, 1902, t. LXVI,
p. 141 ss. — A. LoiST, Mithra, dans la Revue d'hist. et de littér. relig., 1913,
Nouv. Série, t. IV, p. 497-537 — C. Martindale, dans J. Hxjbt, Christus^^
in-16", Pazis, Beauchesne, 1921, p. 519-534 — Lr Patterson, Mithraism and
Christianity, in-S", Cambridge, University Press, 1921.
[31 ] Les Mystères d'Eleusis,
par M. l'Abbé De Caluwe.
C'est vers le VP siècle avant notre ère que les [Mystères
d'Eleusis ont acquis leur organisation à peu près définitive.
Celle-ci est en rapport avec un compromis survenu entre Athè-
nes et Eleusis, après de longues luttes entre les deux villes.
Déjà, avant ces luttes, Athènes avait fondé des Mystères chez
elle, en imitation et probahlement en concurrence avec ceux
d"Eleusis ; après avoir remporté la victoire, elle songea à les
enlever à son ancienne rivale. Mais, d"après la tradition, Dé-
méter, la grande Déesse de la végétation et de l'agriculture,
'avait établi les Mystères à Eleusis même et c'est probablement
pour ce motif d'ordre religieux que l'entreprise d'Athènes ne
put réussir. Il fut donc convenu que les Mystères seraient sou-
mis au contrôle de l'Etat athénien, mais qu'ils resteraient défi-
nitivement à Eleusis. On les appellera désormais les Grands
Mystères. D'autre part, les Mystères d'Athènes constitueront à
l'avenir, sous le nom de Petits Mystères, une sorte de prépara-
tion obligatoire à ceux d'Eleusis.
Ce compromis, tout en consacrant le caractère local des
Mystères, avait aussi comme conséquence de les rendre acces-
sibles aux étrangers : originairement réservés aux familles
éleusiniennes, ils étaient à présent ouverts à tous les habitants
de l'Attique. pour devenir bientôt des Mystères destinés à tous
les Grecs. Seuls les Barbares restaient exclus ; mais, à l'époque
Gréco-Romaine, cette dernière restriction tend à disparaîti-e.
Le succès des Mystères n'en devint que plus considérable.
Cbaque année Eleusis voit les foules afïluer vers son célèbre
sanctuaire ; les plus hauts personnages, des empereurs romains
eux-mêmes se font initier et les familles sacerdotales d'Eleusis
acquièrent des avantages de plus en plus importants. Si le
442 J. DE GALUWB
prestige qu'Athènes continua toujours à exercer était pour une
part dans ce succès, la raison principale en était ailleurs.
D'après les renseignements transmis par Homère, les Grecs
croyaient que l'immortalité bienheureuse était l'apanage exclu-
sif des dieux et que les morts se rendaient tous dans rHadès,
où ils continuaient à traîner une même existence vague et
triste. Bientôt cependant des conceptions plus élevées se font
jour, qui répondaient mieux à Tune des aspirations les plus
fondamentales du cœur humain. Sans doute, les dieux seuls
avaient droit au bonheur éterne'l. Mais n'était-il pas en leur
pouvoir souverain d'admettre les hommes à partager leur pri-
vilège, en étendant au-delà de la mort la protection bienveil-
lante qu'ils leur accordent ici-bas ? A cette question Eleusis
croyMit pouvoir donner une réponse affirmative. Les Mystères,
en effet, se présentaient comme voulus et établis par la divi-
nilé elle-même et soutenaient la prétention de sauver les hom-
mes de l'Hadès et de les faire entrer, après la mort, dans le
séjour des Immortels. Ce qui ne contribuait pas peu à en
rehausser l'attrait, c'est que les Mystères constituaient un
culte secret, auquel on accédait par un choix libre et personnel.
La loi menaçait des peines les plus rigoureuses la moindre
indiscriétion comme la moindre irrévérence et les procès reten-
tissants de l'orateur Andocide, d'EscHYLE et d'ALCiBL\DE, mon-
trent assez que c^ette menace n'était pas qu'un vain mot. Alors
même qu'à l'époque gréco-romaine, l'application des peines
temporelles était tombée en désuétude, la seule crainte d'of-
fenser la déesse offrait encore une garantie suffisante pour
faire réfléchir les imprudents et empêcher ce qui était consi-
déré comme la plus grave des impiétés. On pouvait, certes,
librement vanter les avantages que l'initiation procurait dans
ce monde et dans l'autre, mais sur les moyens employés pour
les réaliser, les rites et les cérémonies qui engageaient les
mystes aux deux déesses, là-dessus, dit M. Foucart, le silence
le plus complet était de rigueur. On comprend dès lors l'ex-
trême réserve que gardent les auteurs païens en parlant des
cérémonies secrèt'es des Mystères. Seuls les auteurs chrétiens,
qui n'avaient pas les mêmes scrupules de se taire, fournissent,
à l'occasion de leurs polémiques avec les païens, des rensei-
gnements plus détaillés, quoique pas toujours exempts d'er-
reur ni de partialité.
MYSTÈRES D'BLEUSIS 443
I. ÉCONOMIE DES MYSTERES
Le mythe de Déméter rt de Coré-Perséphonr. — Le mythe
forme le sujet de l'hymne homérique à Déméter. Cet hymne
n'est pas authentique. Il est toutefois antérieur à la réunion
d'Eleusis à Athènes et constitue le témoignage le plus ancien
qui se rapporte aux Mystères.
L'auteur raronte comment Perséphone, la fille de Déméter.
fut enlevée par Harlès, le roi des Enfers, au moment où elle
cueillait des fleurs dans la plaine sacrée de Nysa. Aux cris
poussés par sa fille. Démêler descend de l'Olympe et se met à
sa reclherche, en parcourant la terre. Dans sa douleur, elle
frappe la terre de stérilité et fait disparaître toute végétation.
La déesse courroucée demeure inéhranlable jusqu'à ce qu'enfin
Hadès, cédant aux instances de Zeus, consent à restituer la fille
à sa mère. La végétation renaît aussitôt. Mais Perséj)lione a
commis l'imprudence d'accepter une grenade que lui offrait
son ravisseur. Il en résulte que chaque année elle devra re-
tourner près de son éjioux, à l'approche de l'hiver, et demeurer
près de lui jusqu'à l'apparition du printemps. A cette légendo
qui a pour objet d'expliquer la disparition et le retour annuel
de la végétation, est rattaché le séjour de Déméter à Eleusis
et l'institution des Mystères. Pendant ses courses errantes, la
déesse s'était arrêtée non loin de la petite ville ; les filles du
roi Céléos la trouvent déguisée en vieille femme, assise sur la
« pierre triste », et l'invitent à les accompagner au palais de
leur père. Elle refuse d'abord, en signe de deuil, la nourriture
qu'on lui présente, mais rassérénée bientôt par les plaisante-
ries grossières de Jambe, la servante du roi, elle finit par
accei)ter du « cycéon », breuvage composé d'eau de farine et de
menthe sauvage. Surprise pendant qu'elle tenait le fils du roi
au-dpssus du feu, pnur le rendre immortel, la déesse se fait
enfin réconnaître. Mais avant de reprendre ses courses dou-
loureusps, elle révèle au roi et aux membres de son entourage
les Saints Mystères, promettant à tous ceux qui s'y feront
initier, sa protection pendant cette vie et le bonheur dans
l'autre.
Culte primitif de Déméter. — Toute cette légende n'est en
réalité qu'une explication, inspirée par la foi. des différents
444 J. DE CALUWE
rites qui constituent, les Mystères. Or la plupart de ces rites, si
non tous, étaient primitivement ordonnés en vue d'assurer aux
hahilants d'Eleusis, non pas un bonheur supraterrestre, mais
le bien des récoltes et la fécondité des animaux. Le culte de
Déméter était, à l'origtine, un culte exclusivement agraire et ce
doit être seulement vers le VIP siècle, avant la composition de
l'hymne homérique, qu'il a pris une signification eschatologi-
que. Ce culte était pratiqué, non seulement à Eleusis, mais en
beaucoup d'autres endroits de la Grèce, depuis les temps les
plus reculés. Hérodote nous apprend que les Doriens essayè-
ren( vainement de le proscrire dans le Péiloponèse. On peut
conjecturer que les tribus henéniques, dhassées par les en-
vahisseurs doriens, le transiportèrent en Attique et, plus tard,
le répandirent dans les Cydades et dans leurs colonies d'Asie-
Mineure, oïl on en a trouvé des traces assez nombreuses. Il se
caractérise par une série de fêtes, parmi lesquelles les plus
connues et, probablement, les plus anciennes, sont les Haloa
et les Thesmophoria. Celles-ci comprennent, outre des sacrifices,
un ensemble de cérémonies secrètes, spécialement réservées
aux femmes, et caractérisées par l'emploi d'emblèmes phalli-
ques et d'autres emblèmes de la fécondité. Il convient de remar-
quer que dans les Mystères d'Eleusis même on retrouve des
traces de cette ancienne suprématie féminine. En efîet, parmi
le personnel des Mystères se rencontre une prêtresse de Dé-
méter que plusieurs indices permettent de considérer comme
l'ancienne présidente du culte de la déesse, tel qu'il se prati-
quait à Eleusis, avant sa transformation en Mystères propre-
ment dits.
Principaux dignitaires des Mystères. — La haute direction des
Mystères appartient aux hommes et plus spécialement aux
membres des deux grandes familles sacerdotales : les Eumol-
pides et les Kéryces. Parmi les Eumolpides était choisi le chef
du culte apjielé « hiérophante », parce que sa fonction princi-
pale consistait à montrer aux initiés les hiéra ou objets sacrés.
Deux femmes, appelées « hiérophantides », l'assistaient dans
les cérémonies de l'initiation. Elles étaient, comme lui, choi-
sies dans la famille des Eumolpides. Le personnage principal
après l'hiérophante était le « dadouque » ou porteur de torche,
nommé à vie comme l'hiérophante, mais choisi dans la famille
MYSTÈRES d'kLEUSIS 445
des Kéryces. A la même famille appartenait le « hiérokéryx »
ou héraut sacré, auquel il appartenait de faire les proclama-
tions nécessaires et d'imposer l'obligation du secret.
■Les Eumolpides se faisaient descendre d'EuMOLPOS. Héros
éponyme et probablement Mgendaire, il est cité dans l'hymne
homérique comme un des chefs éleusiniens à qui Déméter
confia les Saints Mystères. Les Kéryces, peut-être par esprit
de rivalité, se prévalaient d'une origine bien plus glorieuse
encore. En réalité, les Kéryces sont d'origine athénienne et i'I
semble bien qu"ils aient été associés aux Mystères, lors de
l'annexion d'Eleusis à Athènes. A leur arrivée, ils trouvèrent
diéjià les Eumolpides en possession des Mystères. Pausanias rap-
porte une tradition suivant laquelle Eumolpos était un Thrace.
Venu à Eleusis, il aurait, d"après cette même tradition, dirigé
la guerre contre Athènes et conclu avec la capitale victorieuse
le pacte qui devait assurer le maintien définitif des Mystères à
Eleusis. La question de l'origine des Eumolpides n'est pas sans
présenter quelque intérêt, puisque plusieurs savants sont assez
tentés d'admettre que leur arrivée coïncide précisément avec
l'orientation nouvelle du culte éleusinien, si même ils n'en sont
pas les véritables auteurs. M. Folcart, qui d'ailleurs conclut
en faveur de l'origine éleusinienne des Eumolpides, met le mot
z'j[t.rjlT.o:: {Mit. celui qui cihante bien) en rapport avec le mol
égyptien mak- kroou — juste de voix. On sait qu'en Egypte les
formules à prononcer soit par les magiciens, soit par ceux qui
se rendaient aux champs de Jalou, étaient censées n'obtenir
leur plein effet qu'à la condition d'être dites avec une intona-
tion spéciale de la voix. Il en aurait été de même à Eleusis :
l'hiérophante, au cours de l'initiation, aurait eu à enseigner
aux candidats non seulement les formules secrètes qui de-
vaient les conduire après leur mort aux Champs-Elysées, mais
encore la manière exacte de les prononcer. C'est pourquoi il
devait être « juste de voix » ou eumolpide. De plus, parmi les
candidats exclus des Mystères, figurent ceux qui sont « de voix
inintelligible ». On entend communément cette expression des
Barbares ignorant le grec, mais, d'après M. Fougart, il s'agi-
rait de ceux qui sont incapables de donner à leur voix la mo(hi-
lation rituelle nécessaire. Cette interpi'(Malion, loule ingf'niensc
qu'elle est, ne s'impose nullement ; encore moins i)ourrail-clli'
440 J. DE CALUWE
être alléguée en faveur de l'origine égyptienne des Mystères,
d'autant plu.'^ que les exigences relatives à la justesse de la
voix se retrouvent encore ailleurs qu'en Egypte.
Conditions d'admission. — On ne connaît avec certitude que
deux catégories de i)ersonnes qui étaient exclues des Mystères :
celles qui étaient de voix inintelligible et celles dont les mains
étaient souillées de sang. Encore ces dernières pouvaient-elles
pi'obablen\ent se débarrasser de leurs souillures en se soumet-
tant à des purifications spiéciales. Tous les candidats, d'ail-
leurs, devaient, avant l'initiation, être convenablement instruits
et purifiés. Les instructions se rapportaient essentiellement
aux actes rituels auxquels les mystes étaient appelés à parti-
ciper et aux diverses obligations qu'ils avaient à accomplir
pendant la célébration des Mystères. Les purifications consis-
tent en ablutions, lustrations, fumigations et autres pratiques
spéciales, qu'on trouve souvent représentées sur des vases
peints. Elles ne se confondent nullement avec l'initiation, et la
pureté qu'elles confèrent est d'ordre purement rituel.
Cérémonies des Mystères. — Les petits Mystères se célébraient
à Agra, faubourg d'Athènes, le 20 et le 21 Anthestérion. De
même que les Grands, ils étaient précédés et suivis d'une trêve
de 55 jours, que des spondosphores allaient annoncer dans
toutes les cités helléniques et qui garantissait la sécurité de
tous ceux qui voulaient s'y rendre. Les Petits Mystères sont
très peu connus. On sait seulement qu'ils étaient dédiés à Gorè,
qu'ils comportaient une série d'instructions et une purification
générale dans l'Ilissos. L'initiation comprenait très probable-
ment une mise en action partielle de la légende de Dionysos.
Il fallait avoir passé par les Petits Mystères pour avoir accès
aux Grands ; mais pour éviter, à ceux qui venaient de loin, un
double voyage, on en renouvelait la célébration à proximité des
Grands Mystères. Ceux-ci avaient lieu du 20 au 23 Boedro-
mion ; mais déjà à partir du 13 commençait une série de fêtes
et de cérémonies préparatoires. C'est la partie publique des
Mystères. Le programme de ces fêtes est assez bien connu.
Le 13, les éphèbes athéniens se rendent à Eleusis, pour y
chercher les « hiéra », qui le lendemain sont transportés solen-
nellement à Athènes. C'est probablement pendant ce trajet que
se place un usage très curieux : arrivé près de la ville, au pont
MYSTÈRES d"eLEI:S1S 447
du Céphise, le cortège était accueilli par des injures obscènes,
appelées géphyinsmes. Cet usage rappelle el Taischrologie de%
Haioa et des Thesmophoria, et d'autres pratiques analogues
usitées dans nombre de cultes agraires.
Le 15, les luystes sont rassemblés (à-'opy.o'c) et les candidats
proclamés i7:poppT,cr'.;}.
Le 16 est le jour de la purification générale. Les candidats se
rendent à la mer, chacun traînant derrière soi un petit porc. Au
commandement : « "Aà^oe, 'j/j^-.t.'. '.'* ils se plongent tous dans les
flots, pour s'y purifier. On sait qu'en diverses circonstances les
Grecs immolaient des porcs, dans un but de purification, et
qu ils les brûlaient ensuite. Mais un texte d"ARisTOPHANE permet
de supposer que les petits porcs, au lieu d'être brûlés, étaient
rôtis et mangés rituellement. Cependant, il n'y a aucune raison
pour attribuer à ce repas la même signification mystique qu'on
a coutume d'attribuer à l'omophagie dionysiaque. Sans doute
le porc est l'animal favori de Déméter ; mais nulle part il n'ap-
paraît comme son incarnation vivante. Ajoutons qu'aux Thes-
mophories, les porcs ofTerts en sacrifice ne faisaient pas l'objet
d'un repas, mais étaient jetés dans des cavités sacrées, où ils
restaient pendant un an, jusqu'à ce que les débris corrompus
en fussent retirés pour être brûlés et que les cendres en fus-
sent mélangées aux semences, dont ils devaient assurer ainsi la
force germinative.
Le 17 et le 18. ont lieu les Epidauria. Ces fêtes furent intro-
duites à Athènes, à la suite d'une peste, pendant la seconde
moitié du V* siècle. Pendant ces jours avaient lieu des purifica-
tions supplémentaires, à l'intention de ceux qui étaient arrivés
en retard aux Mystères.
Le 19, avait lieu la grande procession qui ramenait les
« biéra » à Eleusis, par la "Voie Sacrée, longue de 20 kilomè-
tres. Cette procession, de mêmie que la journée entière, portait
le nom de "Itj/o^. Ce mot dérive du cri rituel « io ! in ! » (de là le
verbe lau/stv), qu'on poussait sous l'empire d'un enthousiasme
religieux. Le phénomène lui-même fut attribué à un être divin,
qui prit le même nom. Ce dernier se ti'ouva être tout natu-
rellement le dieu du vin, Dionysos.
A partir du 20, nous rencontrons l'initiation propinnent dite.
Elle forme la partie secrète des Mystères et comprend, au moins
à partir du V" siècle, deux degrés : l'initiation commune (jrJT^Tt;)
448 J. DE CALUWË
et l'initiation supérieure (£ro--£Îa). Toutes deux se célébraient
dans une même salle appelée télestérion. La première avait lieu
dans la nuit qui précède le 21 Boédromion.
fl est admis qu'à cette première initiation appartient la mise
en action de la légende de Déméter. Le rapt de Corè, les courses
douloureuses de sa mère et la réunion des deux déesses, telles
sont les scènes principales qu'on peut attribuer avec quelque
certitude à ce drame sacré., Tbutefois un texte d'IsocRATE, si-
gnalé par M. FoucART, semble insinuer qu'on y ajoutait la
représentation de l'arrivée de Déméter à Eleusis, ce qui, du
reste, n'a rien que de vraisemblable.
\G(LBMENT d'Alexandrie rapporte deux rites, qui ont dû faire
partie intégrante du drame sacré lui-même. Il place en effet
dans la bouche des initiés la célèbre formule que voici : « J'ai
jeûné ; j'ai bu le cycéon ; j'ai pris dans la ciste, et, après avoir
(( accompli », j'ai remis dans le calathos ; ensuite j'ai repris
dans le calathos et mis dans la ciste ». Le sens de la première
partie est clair : le myste jeûne comme Déméter, en signe de
deuil, et à son exemple il boit le cycéon. On discute beaucoup
sur le sens de la seconde. Il n'y a pas lieu, semble-t-il, d'aban-
donner la leçon du manuscrit, qui présente, en effet, un sens
très satisfaisant. D'après cette leçon, les mystes auraient voulu
signifier qu'ils avaient accompli le geste prescrit par le rituel,
au moyen de certains objets contenus dans la ciste. Il est à
présumer que ces objets comprenaient divers emblèmes phal-
liques, ce qui expliquerait pourquoi Clément se scandalise de
la formule, comme si elle contenait une obscénité.
Plusieurs auteurs, à la suite de M. Fougart, sont d'avis que
l'initiation du 1" degré comprenait en outre une cérémonie
essentiellement distincte, consistant dans ce qu'on a appelé
un cours de géographie infernale. Suivant cette théorie, on
aurait représenté dans le télestérion les Enfers et les Champs-
Elysées, de même que les routes qui y conduisent. Et en effet,
il semble bien qu'il faille voir une allusion à ce voyage au
Monde Infernal dans un texte célèbre de Plutarque, où cet
auteur compare l'état où se trouve l'âme au moment de la
mort avec l'état d'esprit des initiés. Ce même texte insinue
aussi que ces cérémonies se terminaient par l'exhibition solen-
nelle des « hiéra » faite par l'hiérophante. On ne possède sur
MYSTÈRES D'eLEUSIS 449
ces objets sacrés aucune indication précise ; mais on peut
admettre comme certain que parmi eux figuraient les images
sacrées des deux déesses.
La nuit suivante avait lieu l'époptie. Celle-ci n'était pas
nécessaire au salut et beaucoup s'en passaient. Il fallait d'ail-
leurs attendre une année, avant d'y être admis. On lit, dans les
Philusophoumena, qu'on montrait aux époptes « un épi mois-
sonné en silence ». C'est le seul rite attriliué explicitement à
l'époptie. Cependant il n'est pas douteux que cet épi servait à
symboliser l'enfant divin dont, d'après le m^ême passage des
Pliilusophoumena, l'hiérophante annonçait la naissance, en
s'écriaht : « La divine Brimo a enfanté Brimos ». D'autre part,
cette formule suppose qu'un mariage -venait de s'accomplir
et, de fait, plusieurs auteurs chrétiens parlent d'un mariage
sacré qui avait lieu aux Mystères d'Eleusis, entre l'hiéro-
phante et la prêtresse de Déméter, et qui, d'après un scoliaste
chrétien du Gorgias, mettait en action la légende de l'union de
Déméter avec Zeus. Ce mariage aurait donc fait partie de
l'époptie et se serait clôturé par la proclamation de la nais-
sance de l'enfant divin et la présentation de l'épi de blé.
Les Pkilosophoumena signalent une dernière formule rituelle
consistant dans ces deux petits mots : « us, x'k ». On peut
admettre, avec un grand nombre d'auteurs, qu'elle était pro-
noncée par les époptes, au moment où le mariage sacré s'ac-
complissait dans un réduit secret du télestérion.
Telle est, en résumé, la physionomie externe des rites de l'ini-
tiation éleusinienne. Il s'agit maintenant d'en définir la portée.
Interprétation des Mystères. — M. Fougart est d'avis que les
deux drames sacrés ne se rapportent qu'indirectement à l'ini-
tiation. Au «lieu de servir principalement aux mystes, ils étaient
avani tout destinés à agir sur les divinités dont ils repro-
duisaient les actions passées. Sans cette reproduction, ces ac-
tions auraient perdu leur vertu et leur eftîcacité primitive. Au
contraire, reproduire ces actes, dans les conditions minutieu-
sement réglées par le rituei, c'était au moment critique les
faire accomplir de nouveau dans le ciel, avec toutes leurs
conséquences favorables à la terre. Par l'effet des deux drames
mystiques, les divinités refont chaque année ce qu'elles
avaient fait aux temps mythologiques. Ainsi l'hiérogamie de-
29
450 .T. DE CALUWE
vieni un rite grâce auquel Zeus et Déméter renouvellent, dans
le ciel, leur action bienfaisante et accordent à la terre de TAt-
tique une nouvelle année d'abondance et de prospérité. D'autre
part, le drame de Corè a pour résultat de remettre en vigueui'
la fondation des Mystères et le pacte conclu avec Eleusis.
A rencontre de cette théorie, basée d'ailleurs sur l'origine
égyptienne des Mystères, nous pensons que l'initiation, par
quoi les mystes recevaient l'assurance de leur salut, se ratta-
che d'une façon très étroite aux deux drames dont il est ques-
tion. Ceux-ci en effet ne pouvaient avoir d'autre but que df^
réaliser et de signifier l'union, l'agrégation des mystes à
Déméter et à Corè, et c'est précisément dans cette agrégation
que l'initiation devait consister. La chose semble en tout cas
manifeste pour le mariage sacré. Et d'abord n'est-on pas en
droit de supposer que l'hiérophante, s'unissant avec Déméter
représentée par sa prêtresse, n'agissait pas seulement en son
propre nom, mais au nom de tous les mystes dont il était
devenu comme l'intermédiaire avec la divinité. ? On sait d'ail-
leurs que l'union la plus intinie entre l'homme et la divinité
est, dans un grand nombre de religions, symbolisée par un
simulacre d'union sexuelle, — d'où l'emploi fréquent de rites
phalliques dans les mêmes religions, — et dès lors, ne semble-
t-il pas rationnel de supposer à Eleusis, puisque mariage
sacré il y avait, que celui-ci était adapté au même but. Sans
doute, ce rite était originairement une partie essentielle du
culte primitif de Déméter, tel qu'il se pratiquait à Eleusis, el
servait alors exclusivement à assurer la fécondité de la terre,
des troupeaux et des hommes. Mais on comprend aisément
que, de nouvelles préoccupations s'étant fait jour, on ait été
amené à y trouver la valeur d'un symbole d'union intime avec
Déméter, union qui devenait la garantie suprême d'une parti-
cipation à sa bienheureuse immortalité. De même, l'épi de blé.
qui à l'origine était censé le fruit du mariage divin en vue
de la fécondité des champs, symbolisera, après le change-
ment de direction dans les Mystères, l'efficacité et la vertu
mystique des initiés. Ainsi l'initiation supérieure consistait
avant tout dans un simulacre d'union sexuelle, qui symbolisait
l'union spirituelle des mystes avec Déméter. Il en est de même,
dans un degré moindre, de l'initiation commune. Les objets
MYSTÈRES D'eLEUSIS 451
p}ialli(iues. au moyen desquels s'esquissait un geste d'union
sacrée sexuelle, ne pouvaient servir qu'à réaliser cette même
union au bénéfice de chaque initié. A ce rite se juxtaposait, entre
autres, l'absorption du cycéon, qui non seulement imitait le
geste de Déméter, mais introduisait le myste dans Tintimité et
comme dans la convivance de la (Grande déesse et comme
d'autre part, à ce qu'il semble, ces deux rites faisaient partie
intégrante du drame sacré, celui-ci prenait tout entier une
direction dans le sens de l'agrégation mystique à Déméter.
Quelques auteurs, qui n'ont pas vu ([u'aux anciens rites agrai-
res s'est suj)erposée une nouvelle intention dans le sens que
nous v.-nons d'indiquer, ont senti le besoin d"'ajouter aux deux
drames saci'és, des rites osiriens, destinés à introduire les
mystes dans la connaissance, ou plutôt dans la possession
anticipée du bonheur de l'au-delà. Nous ne songeons nulle-
ment à mettre en doute la présen'-e d'éléments égyptiens dans
les Mystères ; mais, abstraction faite de ces éléments, les
anciens rites garantissaient à sufTisance une survie bienheu-
reuse. On pourrait se demander de quelle utilité pouvait être
encore l'époptie dans l'interprétation proposée. La réponse est
facile : réj)optie n'était [)as nécessaire, nuiis elle pouvait don-
ner, dans un renouvellement de la communion avec Déméter.
un surcroît de garantie à ceux qui revenaient. Ceux-ci d'ail-
leurs n'étaient pas fort nombreux et beaucoup se contentaient
de la première initiation, par laquelle ils appartenaient doré-
navant pour toujours, dans cette vie et dans l'autre, aux divi-
nités protectrices des Mystères.
II. ORIGINE DES MYSTÈRES
1° Origine du culte agraire. — Trois tluNUMes sont en pré-
sence.
ai Origine égyptienne. — Elle est défendue par- M. Foi.'C.\ht.
qui la résume à peu près dans ces termes.
A une épo(iue contemporaine des Pharaons de la XVIII" dy-
nastie, des colons égyptiens s'établirent en Argolide. puis en
Attique. Ils apportèrent, avec la vigne et les céréales, h» culte
d'Isis et d'Osiris. Les Pélasges firent bon accueil aux dieux de
CCS étrangers, qui leur étaient supéi'ieurs |iar les rites et la
civilisation. Mais au lieu de les dt'signer jjai' leur nom ('gyplicii,
452 J. DE CALUWE
ils les nommèrent simplement « le Dieu ef la Déesse ». Plusieurs
inscriptions, découvertes à Eleusis, mentionnent en effet un
couple divin, appelé « le Dieu et la Déesse », couple à qui il faut
reconnaître — et M. Foucart le prouve abondamment ■ — une
existence distincte de celle des autres divinités honorées à
Eleusis. Or ces divinités sont anonymes et cet anonymat serait
à expliquer surtout par la raision tirée des idées égyptiennes,
attestées d'ailleurs dès la plus haute antiquité, sur le nom
secret des dieux et sur le danger qu'il y avait pour ceux-ci à
le laisser connaître au pi'ofane. Ce couple anonyme aurait
conservé ses honneurs jusqu'à l'époque impériale ; mais, de
bonne heure, il aurait été éclipsé et relégué dans l'ombre par
l'apparition de nouvelles divinités, qui remplissaient les
mêmes fonctions protectrices de l'agriculture. Ces nouvelles
divinités n'auraient été autres que Dionysos et Déméter dont,
en réalité, on constate déjà l'existence en Attique, avant l'épo-
que des invasions doriennes, au XI" siècle.
b) Origine babylonienne. — Tel est notamment l'avis de
.M. Jeremias. D'après ce savant, les Mystères de Déméter
étaient censés destinés, dès l'origine, non seulement à assurer
la réussite des récoltes, mais aussi à apporter aux individus
qui les célébraient le bonheur dans la vie d'outre-tombe et un
bien-être exceptionnel sur cette terre. On remarquera le rap-
prochement établi par M. Jiîrkmias entre le bonheur supra-
terrestre, symbolisé par l'or, et la vie d'outre-tombe. L'or, en
effet, a été pour l'Antiquité toute entière un élément rapproché
de l'Hadès. C'est l'élément même de l'Hadès. Cela étant, l'au-
teur croit pouvoir affirmer qu'on se trouve en présence d'un
ensemble d'idées spécifiquement orientales : le sacrifice du
porc offert à Corè, déesse des morts, serait à expliquer comme
une infiltration de rites accomplis en l'honneur de Tammouz-
Adonis et les relations établies entre Corè et Déméter trouve-
raient un parallèle et leur explication dans la légende d'Aphro-
dite et d'Adonis.
c) Origine autochtone. — Au lieu d'y voir une influence
étrangère, cette opinion considère les éléments essentiels du
culte agraire comme des institutions ayant appartenu à l'un
des groupes, si pas à tous, qui constituent la grande famille
Indo-Européenne.
MYSTÈRES D'BLEUSIS 453
A un moment donné de la pT'éhistoire de ces groupes, la vie
agricole s^e développe au point de devenir la condition indis-
pensable de leur existence. Dès lors, la végétation et la réus-
site des récoltes ne pouvaient manquer de devenir pour eux
une source de préoccupations. Tout naturellement, ils en ar-
rivèrent à personnifier la force germinative du hlé et à voir
dans la Terre la Mère Nourricière des hommes. C'est de la
personnification de ces deux choses que sont sorties les di-
verses conceptions et institutions qui ont abouti à la constitu-
tion du culte agraire en général. Grâce aux études de
Mannhardt. complétées par celles de Lang, de Dietrich et de
Frazer, un connaît à présent les j^rincipales lignes de ce
développement. L"esprit de la Végétation devint TEsprit du
Grain, que Ihomme s'attache à conserver, en le dégageant de
ce qui reste de la récolte précédente, pour en faire le principe
d'une récolte nouvelle, après l'avoir rajeuni et raffermi. On
commença le plus souvent par dédoubler le principe, vu le
besoin de distinguer la récolte qu'on finissait d'utiliser et la
nouvelle récolte dont on désirait s'assurer le bénéfice. Ce
dédoublement se concrétisa en ileux figures parallèles, conçues
l'une sous forme de Mère et l'autre sous forme de Fille ou
d'Enfant. Le même esprit, qui vivait dans la mère, renaissait
dans lenfant et pour assurer cette renaissance, divers pro-
cédés étaient utilisés. Ainsi, en admettant que l'esprit s'était
réfugié dans la dernière gerbe, on brûlait la gerbe pour en
mélanger les cendres aux semences ou pour les déverser dans
les sillons. Ainsi aussi, sous l'influence de cette croyance po-
pulaire qu'un esprit, mis en liberté, cherche à s'introduire
d.ins le premier corps vivant qu'il rpncontre, divers moyens
étaient employés pour le rajeunir et le raffermir dans l'habi-
tacle qu'il venait de se choisir. Un animal venait-il à passer
au moment oii la dernière gerbe se trouvait encore debout,
on l'immolait et, encore une fois, ses cendres étaient utilisées
à l'époque des semailles. Si, au contraire, l'esprit passait dans
le corps de la moissonneuse qui avait fauché les derniers
épis, il n'y avait plus qu'un simulacre d'immolation ; mais en
revanche cette dernière devait simuler les douleurs de l'en-
fantement qui aideraient l'effort de la Nature à produire la
nouvelle récolte. Souvent aussi un mariage est simulé où l'on
454 J. DE GALUWE
voit intervenir un enfant ci mime emblème d'union féconde. —
Par ailleurs, TEsprit de la Végétation tendit de plus en plus
à devenir un principe capable de subsister indépendamment
de la Nature où il était jusqu'à présent censé résider. Ce pro-
cédé de sublimisatipn, joint à d'autres causes, fit prendre à
ce principe forme et qualité d'être divin. Cet être divin ou
plutôt les deux êtres divins, la Mère et la Fille, iirendront
place parmi les autres divinités : celle qui pendant Tliiver est
censée résider dans le Monde souteri'ain deviendra la déesse
des Enfers ; l'autre au contraire se retirera au Ciel, d'où elle
veillera comme patronne de l'Agriculture et bienfaitrice des
hommes. Par le fait même, les rites agraires ne seront plus
simplement un moyen tendant à assurer la conservation et le
rajeunissement de rEs})rit de vie, mais deviendront une insti-
tution plus manifestement religieuse, dont l'efTicacité sera
attribuée à l'intervention rlun dieu personnel. ■ — Appliquée à
la Grèce préhistorique, cette théorie nous donne une expli-
cation acceptable et rationnelle du culte agraire de Déméter
et de Coi'è. Après cela, nous ne contesterons pas que d'autres
concejitions similaires, reprises soit à l'Egypte, soit à l'Orient,
aient pu exercer une influence et apporter certains traits
nouveaux. Nous ne voyons pas que les arguments dont font
état M. FOUCART et M. Jeremias prouvent autre chose.
2° Origine du culte esrhatnlogique . — Nous avons à nous de-
mander maintenant dans quelles conditions les rites agraires
ont pris à Eleusis une signification eschatologique. Y a-t-il
lieu d'admettre que ce passage s'est opéré naturellement, par
évolution interne, sous la pression de préoecupations escha-
tologiques, ayant pris corps che^z ceux qui n'avaient vu jus-
qu'à présent dans le culte de Déméter qu'un moyen d'assurer
la récolte ? Il ne semble pas. Sans doute, ces préoccupations
se font jour, nous le savons positivement, à une date très
ancienne, et naturellement on a songé à la déesse de la Végé-
tation comme à une divinité capable d'assurer à l'homme une
immortalité bienheureuse. Mais si ce rapprochement aurait pu
donner lieu à un culte de Déméter, considérée comme patronne
et protectrice des morts, l'on ne voit pas comment il aurait
pu engendrer les Mystères de Déméter, considérés dans la
forme concrète qu'ils ont au moment où ils émergent à l'his-
MYSTÈRES d'adonis ET D'ATTIS 455
t<)ir(\ A no(re avis, tout «"explique d'une façon satisfaisante,
si l'on admet que les Eumolpides ont introduit l'élément
esc'hatologique et qu'ainsi, sous leur influence, les rites
agraires se S(mt convertis en Mystères proprement dits. Une
tradition fait venir Eumoilpos de la Thraee et nous savons par
ailleurs que la Thraee avait organisé autour de Dionysos un
ensemble de rites qui étaient censés procurer aux individus
une immortalité bienlieureuse. Si les Eumolpides ont pu faire
admettre par Eleusis leur culte à eux, on comprend que l'an-
cien sacerdoce féminin ait cédé la place à ces nouveaux venus,
qui amenaient avec eux des idées et peut-être des pratiques
plus élevées. On comprend de même la place faite à Dionysos
flans les Mystères, primitivement organisés en dehors de lui :
l'élément thraee est celui qui regarde l'obtention du salut
d'outi'e-tombe ; on comprendra qu'il ait, j)ar contact, orienté
les rites agraires dans un sens escliatologique.
BIBLi. • — CtOBLET d^Aviella, Eleusinia, in-S", Paris, 1903 — - P. Foucart, Les
Mystères d'Eleusis, in-S", Paris, Picard, 1914 — A. Jeremias, Allgenieine
Religions g escMchte, ln-8", Munchen, Pipei-, 1918 — A. Loisy, Les Mystères
païens et le Mystère chrétien, in-8", Paris, Nourry, 1919 — M.-.T. Lagrange,
Le Mystère d'Eleusis et le Christianisme, Revue biblique, 1919 — M. Brillant,
Les Mystères d'Eleusis, in-12°, Paris, Renaissance du Livre, 1920 — E. Rhode,
Psyché ■ in-S", Tubingen, Mohi', 1921.
[32] Mystères d'Adonis et d'Attis,
par le R. P. DuHR, S. J.
Le ciini'éi'encier n'ayant pu livrer à temps son manuscrit,
nous donnons seulement la bibliographie qu'il avait indiquée.
BIBL. — 1". Sur Attis : H. Hepding, Attis. seinr Mythen und sein Kult,
in-8», Giessen, Ricker, 1903 — J. Toutain, Les cultes paiens dans l'Empire
romain, .3 in-8", Paris, Leroux, 1907-1920 — O. Gruppe, Griech. Mythologie,
in-S", Mtinclien, Beck, 1906, p. 1521-155.5 — Fr. Cumont, Les religions orien-
tales dans le paganisme romain 2, in-16", Paris, Leroux, 1909 (trad. allemande
par G. Gehrich, 2' édit, in-8", Leipzig, Teubner, 1914 — anglaise par
G. Showermann, in-12", Chicago, Open Court Publ. C", 1911 — italienne par
L. Salvatorelli, in-S'», Pari, Laterza, 1913) ; du même, art. Attis, dans
RECAW, 1896, t. II, col. 2247-2252 et Supplém., col. 225 — H. Graillot, Le
culte de Cyhèle, in-8", Paris, Fontemolng, 1912-1916 — Lagrange, O. P., Attis
et le Christianisme, dans RB, 1919, t. XVI, p. 419-180 — Voir en outre les
art. Adonis, Attis, Cybèle etc., dans DAGR, ERE...
2". Sur Adonis : W. von Baudissin, Adonis und Esmun, in-8", Leipzig,
Hinrichs, 1911 ; cf. REPT, 1907. t. XIX, p. 334-375 ; 1913. t. XXIV, p. 559...
456 L. DE GRANDMAISON
[33] Les Mystères païens et le Mystère chrétien,
par le R. P. de GRANDMA.iSON, S. J.
€"est là i^lutôt le titre d'un livre (1 , et il serait tout à fait
vain de prétendre traiter, dans les limites forcément étroites
d'une conférence, cette immense matière. L'effort d'at'tention ré-
clamé des auditeurs de la Semaine sera-t-il, pour autant, inu-
tile ? — C'est demander s'il est inutile de réunir en une carte
d'assemblage, simplifiée, schématisée, nécessairement som-
maire, les cartes détaillées des diverses provinces d'un grand
pays. Il n'est personne qui n'éprouve le besoin de synthétiser.
dans un rapport d'ensemble, les particularités éparses dans
des mémoires détachés. Il n'est personne qui n'aime à do-
miner, en vue cavalière et de haut, une région explorée d'abord
champ par champ, hameau par hameau.
Sous le bénéfice de cette observation, abordons sans tarder
notre sujet pour constater qu'il est, dans son énoncé même,
un peu vague, et, dans son tracé, assez mal défini.
Des deux termes de la comparaison, le second (le mystère
chrétien) nous est suffisamment connu. On entend sous ce
nom le christianisme primitif, et, en particulier, les croyances
et les rites où s'expriment les plus intimes, les plus profonds
des enseignements révélés : parenté et communion entre Dieu
et l'homme ; incorporation au Christ Jésus ouverte à tous
par l'initiation baptismale et la participation à la Cène eucha-
ristique : lions, témoignage et inhabilation de l'Esprit-Sainf.
bref, la substance même de la religion en esprit et en vérité.
>Si nous voulons préciser, par contre, le premier terme de la
comparaison, les mystères païens, nous nous trouvons en face
d'une sorte de nébuleuse, d'une matière diffuse, hétérogène,
indéfinie. Des historiens libéraux y ont fait rentrer peu à
peu, avec tout riiellénisme, les religions de l'Egypte, les reli-
gions orientales, depuis l'assyro-'babylonienne jusqu'aux cultes
orgiastiques de la Phrygie, et les religions de l'Iran. Tour à tour
ou tous ensemble, ces témoins si divers ont été sommés de
fournir des analogies, des précédents, des sources d'inspiration,
au mystère chrétien.
(1) C'est le titre même de Touvrage de M. A. Loist, in-8°, Paris, Nourry, 1919.
LES MYSTÈRES PAÏENS ET LE MYSTÈHB CHRÉTIEN 457
Un dos plus ardents chasseurs de similitudes, R. Reit-
ZENSTEiN, après avoir dénoncé longtemps, dans l'hermétisme
égyptien, le point de départ des plus importantes croyances
chrétiennes, a traversé tout l'hellénisme dans sa course fié-
vreuse. Il Fa déhordé^enfm, pour trouver le « Royaume de Dieu »
dans des textes iraniens de basse époque, déjè contaminés de
manichéisme (1).
D'auti'es érudits, procédant (à l'inverse, partent d'une notion
authentiquement chrétienne, et lui cherchent des équivalents ou
des répondants dans le syncrétisme hellénique. Naturellement,
ils les trouvent. C'est ainsi que, fldè.le à l'esprit de son maître,
le brillant et aventuj'eux auteur de Kyrios Christos, feu W. Bous-
set, le Suédois Gillis P. Wetter assigne comme prototype au
Fils de Dieu, tel que le décrit notre quatrième évangile, des
« fils de Dif'U. révélateurs, docteurs et rédempteurs », dont il
prétend discerner les traits épars dans les religions de la
Grèce (2). C'est le Saint-Esprit qui fournit la cellule-mère aux
hypothèses, un peu moins téméraires, de H. Leisegang (3'i.
Attendrons-nous longtemps 1p « comparatiste » qui partira du
Père céleste ?
Le caractère hâtif de ces recherches, les facilités excessives
que s'accordent certains savants par rapport à la terminologie.
à la chronologie, la façon surtout dont des analogies, arrachées
à des milieux différents, empruntées à des documents d'âge
douteux, séparées des contextes indispensables, sont groupées
dans une synthèse facile et artificielle : autant de mauvais
indices pour la vérité de l'explication proposée. Ce sont là
« jardins d'Adonis », qui fleurissent durant une saison critique,
pour s'ensevelir ensuite dans la nécropole des Bibliographirs et
des Jahrrsbrrichte.
Sans insister présentement sur ce côté du sujet, essayons de
préciser brièvement l'importance de la question en jeu, et la
façon dont. histori(iuement. elle a été amenée à se poser. Nous
snuligneriins ensuite quelques-unes des erreurs de méthode qui
(1) Dus irnnische Erloisungsmysterium, in-8", Bonn, Marcus, 1921.
(2) Der Sohn Gottes, Vandenhoeck, Gôttlngen, in-8", 1916. M. G. P. W'kttkr
a multiplié ses nnémoires sur des sujets analogues. Les dernier.'! ont trait aux
sources de l'ancienne litu!'gie chrétienne.
(3) Der heiligc Geist, t. I, p. 1, in-8", Leipzig, Teubner, 1919 : Pnenvia
hagion, ln-8", Leipzig, Hinrichs, 1922.
458 L. DE GRANDMAISON
ont vicié beaucoup ûe travaux consacrés à son étude, pour
énoncer finalement la solution qui ressort, dès à présent, quant
au fond du problème.
I. ■ LA QUESTION : SON IMPORTANCE ; SON HISTOIRE.
C'est bien roriginalité du christianisme, comme religion, qui
est mise en question par ces recherches. Les ressemblances et
dépendances signalées par les exégètes radicaux ne portent pas
seulement sur des détails de cérémonial, sur Tadoption de
certains types artistiques, sur des points librement discutables
entre fidèles. Ce sont les doctrines fondamentales de la Trinité.
de rincarnation, les faits dogmatiques les plus graves (mort
oxpiatrice et résurrection du Christ), les rites les plus indis-
pensables (baptême et eucharistie), dont l'origine païenne est
proclamée ou insinuée. Il y va de toute notre religion.
Ces imputations ne sont pas, d'ailleurs, nouvelles. Il y a cent
ans — pour ne pas remonter plus haut (H — que Gh.-Fr. Du-
puis, dans son livre aussi célèbre que peu lu : l'Origine de tous
l"s cultes (2), expliquait toute « la Fable », dans laquelle il
fîiisait rentrer le christianisme, par l'astrolâtrie. Ce radicalisme
ne compte plus que peu d'adhérents. L'opinion qui prévaut chez
nos adversaires présents peut se résumer, avec un peu de sim-
plification pédagogique, mais sans déformation essentielle, dans
les thèses suivantes :
Tout en conservant, de ses origines juives et de l'enseigne-
ment personnel de .Jésus de Nazareth, quelques traits distinc-
tifs, le christianisme aurait beaucoup emprunté, dès le temps
de saint Paul (second tiers du premier siècle), aux religions
parmi lesquelles il se frayait, laborieusement, sa voie. Em-
prunts souvent inaperçus, plutôt subis qu'acceptés. On peut
leur assigner, en gros, une double source : le syncrétisme d'ori-
gine babylonienne, persane, syrienne, égyptienne, hellénique,
déjà entré, et partiellement assimilé, dans le judaïsme contem-
porain : le sjTicrétisme encore tout cru et païen, rencontré par
la nouvelle religion au cours de sa première expansion. Dans
(1) On trouvera les précédents étudiés à fond dans le livre considérable de
H. PiXARD de là BouLLAYE, L'Etude comparée des religions, t. I, in-S», Paris,
Beauchesne, 1922, qui complète, et on peut presque dire annule, les travaux
antérieurs parus sur le sujet.
(2) Paris, an III (1795).
LES MYSTÈRES PAÏENS ET LE MYSTBFiE CHRÉTIEN 459
ce fleuve trovible, alimenté par des affluents très divers, on
signale, comme sources d'inspiration chrétienne, les religions
dites « à mystères », possédant des croyances ésotériques
ti'ansmises par voie- d'initiation : grands et petits mystères
grecs, cultes isiaque et oi'phique. cultes syriens et phrygiens
de la Grande Mère et de ses j)aràdj'es. culte syro-i)ersan de
Mithra. On fait également état des écrits herméti(iues égyptiens
et des spéculations helléniques, notamment des philosophies
stoïcienne et alesandrine (1).
L'idée même d'uno monarchie divine, n'excluant pas la plu-
ralité des sujets divins, mais transcendante j)ar rapport à tous,
et pouvant, par conséquent, mettre sur la voie dun culte unique
el universel, aurait eu, d'après les mêmes auteurs, et dès le
premier siècle, des préfigui-ations etlicaces. On- cherche celles-ci
dans les vues hénothéistes de certains philosophes grecs ; dans
le syncrétisme à Dieu principal de quelques mythographes ;
surtout dans le culte rendu par tout l'Empire au génie des
Césars et à la déesse Rome.
Depuis une trentaine d'années, sous des formes diverses et
à dose très inégale, ces vues sont acceptées par les érudits qui
cherchent, au fcfit chrétien, une explication intégralement natu-
relle. Dosage très inégal, puisqu'il va des affirmations massives
d'un P. Jensen, d'un Otto Pfleiderer, d'un T.-K. Gheyne, aux
synthèses plus nuancées d'un Edwin Hatch, d'un Paul Wend-
LAND, d'un Wilhelm Bousset, d'un Johann 'Weiss, en traversant
les travaux aventureux et érudits d'un Hermann Gunkel, d'un
Percy 'Gardner, d'un R. Reitzenstein, d'un Kirsopp Lake. d'un
Alfred Loisy, et de vingt autres moins notoires.
Ces vues sont, disons-nous, acceptées par ces historiens. Il
faut aller plus loin et dire qu'à Tes prendre en général, elles
s'imposent à eux. Elles sont, en effet, le postulat de la philoso-
pliie, exclusive de toute intervention divine particulière, dont
ils font profession. 'C'est ce que rappelait hier, avec une louable
franchise, l'un des plus qualifiés. « A cette religion des mystères
(1) On résume ici les conclusions des « comparatistes » les plus modérés,
d'après l'ouvrage de Johann Weiss sur « les tâches présentes de la science
néo-testamentaii-e », Gottingen, Vandenhoeck, 1908, conclusions reprises dans
le grand ouvrage, en partie posthume, du même auteur, Das VrchristentHin,
in-S", Oôttingen, Vandenhoeck, 1914-1917. Voir le mémoire très nourri de
K. Jacquier, Les Mystères pdiens et Saint Paul, dans DAFC, 1920, t. III,
col. 964-1014.
460 L. DE GRANDMAISON
obscurs — écrit M. Salomon Reinach — se rattache le chris-
tianisme ; alors même que nous n'aurions aucun indice pour
rendre cette hypothèse vraisemblable, il faudrait y recourir
pour établir, en dehors de toute intervention transcendante, la
continuité des faits religieux (1) ».
A la bonne heure ! Mais aux historiens libres de ces pos-
tulats, la question apjiaraît autrement. Elle peut se discuter sur
textes et en toute indépendance d'esprit. On aime à citer parmi
ces écrivains, avec ceux de nos maîtres catholiques qui ont
étudié récemment ces problèmes (un Lagrange. un Batiffol,
un Delehaye, un Lebreton, un Doelger) , des protestants comme
G. Anrich, Cari Clemex, .J. C. Machen, des anglicans tels que
A. A. Kennedy. Sir William Ramsay, Y. H. Stanton. Il ne serait
pas injuste de mentionner à côté de ces savants, des critiques
libéraux d'esprit plus rassis, comme Test souvent M. Franz
CuMONT, et. presque toujours, M. Jules Toutain.
II. ERREURS DE MÉTHODE CHEZ NOS ADVERSAIRES.
Avant daborder directement le fond du débat, il importe de
signaler chez beaucoup de « comparatistes », notamment chez
les plus intransigeants, de singulières erreurs de méthode,
qu'un parti pris explique seul chez des schniars aussi bien
formés.
C'est par exemple un grave défaut de fonder des rapproche-
ments, poussés jusqu'à la dépendance ou à l'emprunt, sur des
indices de simple présence, en négligeant pratiquement les
indices d'absence, ou de concomitance, qui déterminent les
premiers.
Or nous constatons trop souvent l'emploi de ce procédé som-
maire dans les ouvrages de maint critique libéral. Entraînés
par la richesse de leur érudition, séduits par l'ingéniosité de
leurs exégèses et victimes, on peut le dire, de leur virtuosité à
manier textes et faits, on les voit sans cesse rapprocher de
doctrines ou institutions chrétiennes des traits pa'iens vague-
ment analogues. Il peut y avoir là d'intéressantes suggestions,
et une invitation à pousser plus loin, mais avant de conclure
à une identité d'origine, ou à une imitation, il serait indis-
(1) Revue archéologique de juillet 1920, p. loû, citée dans la Revue biblique
de juillet 1922.
LES MYSTÈRES PAÏENS ET LE MYSTÈRE CHRÉTIEN 461
pensable de vérifier si le texte ou le trait allégué n'est pas
engagé dans un contexte cultuel ou doctrinal, qui ne permet pas
un rapprochement réel avec le mystère chrétien. Dans ce cas,
le caractère original, autoclitone, de ce dernier, resterait intact.
Cette précaution élémentaire semble échapper cependant à des
erudits" nombreux, et non pas seulement à des vulgarisateurs,
mais à des savants comme Ed. Meyer, J. G. Frazer ou A. Loisy.
Exemple : on fait souvent état, à propos de la mort et de la
résurrection du Christ, d'antécédents tirés des jeunes dieux
Osiris, Adonis, Attis, dieux morts, dit -on, et ressuscites. Jusque
dans des manuels destinés au grand public, et point dépourvus
de valeur objective, on nous parle couramment du « drame
sombre de la mort et de la résurrection dAttis », de « la passion
d'Osiris », de son « ascension vers les cieux », etc. (1). Je
n'ai pas à entrer ici dans le détail de ces analogies ; mais il
est un trait général, immédiatement visible, qui disqualitie
d'abord les comparaisons ainsi suggérées. C'est la présence,
dans tous ces mythes, dès l'abord, au-dessus du héros ou du
jeune dieu, d'une déesse, qui tient le rôle principal. Au vrai,
Osiris, Attis, Adonis ne sont que les partenaires, les parèdres
d'une grande déesse, dans le cycle religieux de laquelle leur
aventure forme épisode. Ce trait est fort naturel dans un culte
où les protagonistes sont au fond, les grandes Forces anonymes
et amorales de la nature vivante et féconde, présentées à l'état
pathétique, et aiithropomorphisées. Mais aussi négliger ce trait
— dont la mention ne permet, avec la mort et la résurrection
du Christ historique, qu'une analogie infiniment lointaine et
inopérante — modifie tout à fait l'atmosphère et le sens du
mythe.
Faute de se rappeler ceci, on en ai-rive à défigurer complè-
tement, par voie de sublimation, un des termes de la compa-
raison, c'est-à-dire l'ensemble des mystères pa'iens. On en
arrive, avec M. Alfred Loisy, à soutenir que « l'idée fonda-
nipntale des mystères » est « celle d'une mort ilont la vertu
salutaire s'étend à tous les hommes de tous les temps... » (2).
(1) Etudes sur Vorigine et le développement de la vie religieuse, par Richard
Kreglinger, t. II, la Religion chez les Grecs rf Ifi Roniniiis, in-S", Bruxelles,
Lamertin. 1920, p. 242, 243.
(2) Les Mystères païens et le Mystère chrétien, Paris, Xoiiny, 1919, p. 351.
462 L. DE GRANDMAISON
Description inexacte dans ce qu'elle affirme, plus inexacte dans
ce qu'elle exclut. Car pour les neuf dixièmes de la matière à
définir, elle ne s'applique manifestement pas, et pour le dernier
dixième, elle est, le Père Lagrange Ta parfaitement démon-
tré (1), très contestable. Lidée fondamentale des mystères
païens est bien autre ! Dans un fragment publié seulement cetf(>
année, mais de rédaction ancienne, le pénétrant philosophe que
fui Félix Ravaisson Ta résumée en ces termes :
« Le second caractère sous lequel la religion païenne devait envisager [les
choses] et les adorer, c'est celui qui constitue proprement la nature, c'est la
vie ; ce n'est plus simplement l'être considéré en lui-même, mais le principe
qui le reproduit, le conserve et le perpétue. Et la religion païenne adore
effectivement en toutes choses le secret de la génération et de la naissance.
C'est le fond des religions d'où elle était sortie, c'est celui des mystères, dépôt
de ses rites et de ses croyances les plus antiques et les plus vénérées. Le
culte de la puissance génératrice et du désir qui la provoque tenait le premier
rang, dans l'Inde, en Egypte, en Asie-Mineure ; il subsiste vénéré dans les
cérémonies symboliques de l'Ida, de Pessinunte, de Gnosse, de Samothrace,
d'Eleusis : il respire dans les fables des poètes... Ainsi donc, en toute chose
et partout, dans le monde païen sur lequel semble planer l'Esprit, la nature,
soit par la terreur, soit par le désir et la passion, enveloppe, enchaîne, opprime
l'intelligence et l'âme » (2).
On np saurait mieux dire, et après M. F. Gumont, M. Loisy 1p
reconnaît souvent, quand il sort de sa préoccupation conti'c-
apologétique pour étudier le détail des cultes à mystères.
tTne autre erreur de méthode consiste à chercher très loin,
très haut dans les âges antérieurs ou très bas dans des docu-
ments dont on se plaît à vieillir les sources, des antécédents
aux dogmes ou aux institutions du christianisme. Cependant, on
délaisse de parti pris des sources d'inspiration infiniment plus
proches, et des explications beaucoup plus vraisemblables.
Un exemple typique de cet abus, c'est la façon dont on s'in-
génie à trouver depuis peu (c'est Reitzenstein qui a ouvert la
voie) des répondants païens à la notion d'Esprit qui, très véri-
tablement, domine les origines chrétiennes. Cette conception,
telle qu'elle se développe magnifiquement dans la théologie
paulinienne et johannique, a ses racines authentiques dans la
révélation biblique. Presque tous les rôles de l'Esprit (et Dieu
(1) Revue bibliqiie, juillet 1920, p. 420-446.
(2) Hellénisme, Juda'isme et Christianisnir ; fragment rédigé en 1850 et
publié dans la Nouvelle Journée du 10 avril 1922, p. 250.
LES MYSTÈRES PAÏENS ET LE MYSTÈRE CHRÉTIEN 463
sait s'ils sont divers et nuancés) que la génération apostolique
a distingués, ont leurs antéeédenls et leur préfiguration dans
les Ecritures. Il est certain d'autre part que Paul, Jean et les
autres apôtres connaissaient ces textes el ces doctrines, qu"ils
citent et commentent à mainte reprise (1).
Au contraire, en dehors de la notion stoïcienne de -vî'j;j.a,
conception encore à demi physiologique et enserrée dans sa
gaine matérialiste, la notion d'Esprit et celles qui s'y appa-
rentent dans le Nouveau Testament se trouvent rarement dans
les textes religieux des païens. Reitzenstein en apporte avec
peine quelques exemples, puisés dans des papyrus magiques
d'époque incertaine (2).
Nonohstant ces indications claires, on s'efforcera, avec une
ingéniosité digne d'un meilleur emploi, de rapporter à l'hellé-
nisn.e, ou directement, ou indirectement, à travers la notion plii-
lonienne(3), les origines de la (•(inro])lion cliréliennc de l'Esprit.
A côté de ces graves fautes de méthode, celle qui consiste
dans l'ahus de la terminologie chrétienne peut paraître vénielle.
Et il est sûr que bien des auteurs n'y voient d'abord, selon
l'expression de M. Franz Cumont, qu' << un artifice de style pour
faire saillir un rapprochement et établir vivement et approxi-
mativement un parallèle. Un mot — ajoute ce savant — n'est
pas une démonstration, et il ne faut pas se hâter de conclure
d'une analogie à une influence » (4). Paroles exemplaires, à
graver en lettres d'or au fronton du temple consacré à l'étude
comparée des religions ! Mais combien d'autres « historiens »
passent des mots aux réalités qu'ils désignent et quelles vagues
similitudes leur suffisent pour se croire autorisés à désigner
d'un mot identique et à présenter comme dépendants rites
païens et rites chrétiens (5) !
(1) Voir là-dessus J. Lebreton, Les origines du dogme de la Trinité*.
in-8", Paris, Beauchesne, 1919, p. 74-98 ; 100-110 ; 141-147 ; 389-408 ; 484-49.') ;
et F. Prat, La théologie de saint Paul, t. II, in-8", ibid., 1912, p. 108 sqq.
(2) Ces exemples ont été discutés en détail par le regretté professeur
E. Mangenot, dans quelques-uns de ses derniers articles, parus en 1913 dans
la Revue du clergé français et la Revue pratique d'apologêtiquv. Voir, on
particulier, la Langue de saint Paul et celle des mystères païens, dans la Reviir
du clergé français, vol. LXXV, p. 129 sqq.
(3) C'est la thèse de H. Leisegang. — Voir i)lus liMut, p. 457, note 3.
(4) Les Religions orientales'^- in-16, Paris, Leroux, 1909, p. xiii.
(5) La Revue biblique (avril 1922, p. 309 sqq.) en signale \n exemple
piquant et tout à fait récent chez M. Loisy.
464 L. DE GRANDMAISON
III. AUTONOMIE DU CHRISTIANISME PRIMITIF.
Laissant, non faute de matière, mais faute de loisir, la ques-
tion de méthode, venons-en au fait lui-même.
Il ne s'agit pas — est-il besoin de le rappeler ? — • de niei'
foute ressemblance entre notre mystère chrétien et les mys-
tères païens, ou d'exclure toute influence de ceux-ci sur celui-là.
Les emprunts, certes, ne furent pas tous du même côté, et les
I)i'incij)aux ne sont pas le fait de l'Eglise chrétienne. Les seuls
qu"on puisse mettre sûrement à son compte portent sur l'adop-
tion de types artistiques, tels ceux de l'Hermès criophore, d'Or-
phée, de Psyché ; et de symboles, comme celui du poisson —
touchant lequel nous possédons à présent l'exhaustive mono-
graphie de F.-.J. DoELGER (1). Ajoutez des détails de rites, de
calendrier, de vocabulaire.
Ce n'est pas rien. Les analogies vont toutefois bien plus loin,
et plus profondément, que les emprunts.
Ici et là s'orientent dans le même sens les sentiments éter-
nels de l'âme religieuse, avide de purification, de lumière et de
certitude, ou criant sa misère, et cherchant des intercesseurs
auprès de la majesté de Dieu, trop haute, et de sa justice, trop
exacte. Que les apôtres du Christ aient « annoncé » ce que les
meilleurs des pa'iens « adoraient à leur insu » (2) ; qu'ils aient
montré présent à tout homme, et immanent en nous, Celui dont
beaucoup cherchaient, en tâtonnant, la présence sensible à
travers les rites des mystères, ou la connaissance sensible au
moyen de la méditation (3) ; qu'ils aient décrit, dressant sa
tente parmi les hommes, pour faire de ses fidèles, sans dis-
tinction d'origine, des fils de Dieu, le Verbe vivant dès le prin-
cipe au sein du Père (4), c'est ce que Paul et Jean disent
ouvertement. Qu'ils aient voulu, par là, montrer l'offre divine
répondant à la demande humaine, et le mystère chrétien com-
Itlant l'immense espérance qui, à leur époque — - le fait est
démontrable et accomplissait une prophétie — traversait la
terre, c'^st l'évidence même (5). Ceux qui, les premiers, sur le
(1) Ichthys, Dus Fischsymhol in frilchri^tlicher Zeit, t. II, Aschendorff,
Munster, in-S», 1922.
(2) Actes des apôtres, xvii, 23. — (3) Ihid., xvii, 27. — (4) Joa., 1, 2, 9-14.
(5) Voir A. d'ALKs, Lumen Vitae, l'Esjiérance du salut au début de l'ère
chrétienne, in-8", Paris, Beauciiesne, 1916. Les Pères anciens ont tous relevé
ces analogies fondamentales. Voir H. Pinard, l'Etude comparée des religions,
t. I, Paris, 1922, p. 43-98.
LES MYSTÈRES PAÏENS ET LE MYSTÈRE CHRÉTIEN 465
fondement de la personne et de l'enseignement du Christ, ont
jeté les bases du système sacramentel de l'Eglise, ont assuré-
ment connu les aspirations de leurs contemporains, et se sont
préoccupés de les satisfaire.
Mais il n"est pas moins certain pai- Thistoire que, dans Tac-
complissement de cette tâche, ils ont délibérément tenu en
suspicion — c'est trop peu dire : en abomination — les sources
impures des mystères des Gentils. Juifs d'origine, et. s"il s"agit
de Paul, Pharisien de l'espèce la plus intransigeante, ils ont
regardé ces cultes d'idolâtrie, non avec la liberté d"esprit qu'un
chrétien de nos jours peut avoir, maintenant que ces mystères
ne sont plus qu'un objet d'archéologie et d'étude sereine, mais
comme « les œuvres du diable que le Fils de Dieu est venu
détruire » (1), comme les « mystères des démons ». non de ces
génies, bons ou sans caractère moral accusé, auxquels les attri-
buait un Plutarque, mais de dénions malins, princes de ce
monde pervers, et ennemis de Dieu.
Qu'on relise, par exemple, cette page d(> la IP épître aux
Corinthiens, que nous rappelons ici en quelques mots :
« Ne formez pas avec les infidèles d'attelage disparate. Car quelle société
pourrait-il y avoii' de la justice avec l'iniquité ? Que peut bien avoir de
commun la lumière avec les ténèbres ? Quelle paît le fidèle peut-il avoir avec
l'infidèle ? »...
Passons, pour faire court, sur les textes parallèles : « Vous
ne pouvez boire le calice du Seigneur et le calice des démons.
Vous ne pouvez participer à la table du Seigneur et à la table
des démons » (2)... Il reste à montrer que ces emprunts, si les
dirigeants du christianisme antique n'ont pas voulu les faire",
ils ne les ont pas subis par une sorte d'infiltration semi-
C(jnsciente ou d'endosmose. Car, en dépit des ressemblance.-;
superficielles et des orientations générales, nécessaij'ernent
communes, une différence irréductible éclate à (|ui étudie 1(\^
deux groupes de mystères.
Sur les personnes que ces cultes mettent en scèno. nous avons
déjà noté qu'à l'exception de Mithra, dieu indo-iranien, tous
les personnages de religions païennes dites « à mystères ».
sont des couples, où la pai'tie fiMninine tient le lole primitif.
(1) I loa., ui, 8. _
(2) I Cor., X, 21.
30
466 L- DE GRANDMAISON
et principal. Mais, de plus, l'étoffe de ces personnages, y com-
pris cette fois Mithra, est d'espèce mythique, et par conséquent
légendaire, symbolique, variable, « taillable et corvéable à
merci ». Nul fait constant, nulle arête vive, nulle précision de
date historique. C'est à ce point qu'au quatrième siècle (c'est-
à-dire après une longue élaboration dans le sens unitaire, pro-
voquée en partie par l'expansion du christianisme), Firmicus
Maternl's, pour faire rentrer les protagonistes des mystères
dans ses cadres évehméristes, a dû concrétiser et simplifier une
foule de traits. Fallût-il mettre à l'origine de l'une ou l'autre de
ces légendes un homme véritable, un héros divinisé, il est bien
impossible de l'assigner à aucune époque vérifiable. Les mythes
sont dans un état constant de devenir, fixés par les rites beau-
coup plus que leur imposant leurs traits, malléables aux mains
des prêtres, dies philosophes, voire des politiques. Leurs ori-
gines naturistes, sous un voile plus ou moins léger, sont aisé-
ment reconnaissables ; les détails de cérémonial, qu'il s'agisse
de fêtes publiquement célébrées ou d'initiation plus ésotérique,
sont, par rapport au personnage dont on commémore l'aven-
ture, variables jusqu'à la contradiction.
Attis, dans les formes anciennes de sa légende, ne meurt
pas ; et Osiris n'est ressuscité (au sens propre du mot, si
étranger aux idées helléniques) que par les auteurs chrétiens
en quête d'analogies. Quant au héros des mystères orphiques,
Dionysos Zagreus, il faut n'avoir lu qu'un seul texte ancien sur
ses jouets, ses toupies, sa funeste aventure et le chevreau que
le jeune chasseur symbolise, ou tue, ou délivre, pour se flatter
d'en avoir une idée nette. Dès le second, on s'aperçoit que
chaque mythographe possède, à son sujet, des informations ou
des conjectures particulières, souvent inconciliables avec celles
des autres.
En face de cette matière fluente, en regard de ces figures
divines évanescentes, où chaque collège sacerdotal, chaque
confrérie, chaque commentateur ajoute, retranche, modifie,
interprète à sa guise, voici le fait chrétien. Entre 53 et 56,
c'est-'à-dire un quart de siècle après l'événement — le temps
qui nous sépare de la fin du pontificat de Léon XIII — Paul
de Tarse, écrivant aux chrétiens de Corinthe, leur « rappelle
ce qu'il a lui-même reçu par tradition », à savoir que Jésus de
LES MYSTÈRES PAÏENS ET LE MYSTÈRE CHRÉTIEN \61
Nazareth, homme de chair et d'os, ayant souffert sous Ponce
Pilate, est ressuscité le troisième jour et a été, dans cet état,
vu par Céphas, par Jacques, par les Douze, par plus de cinq
cents frères en une fois, et par lui-même. Les témoins, pour la
plupart, sont vivants ; on peut les interroger.
Il écrit aux mêmes Corinthiens que, « la nuit qu'il fut livré,
le Seigneur Jésus prit du pain, et après avoir rendu grâce, le
rompit en disant : Ceci est mon corps, livré pour vous. Faites
cela en mémoire de moi. »
Quarante ans plus tard, le dernier des témoins apostoliques
résumait son message en ces termes, non autour d'une notion,
d'une doctrine, mais autour d'un homme et d'un fait :
« Ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous
avons contemplé à loisii- et que nos mains ont touché du Verbe de vie, — car
la vie a été manifestée et nous l'aVons vue, et nous lui rendons témoignage... —
ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons » (I Joa., i, 1-3).
De bonne foi, se peut-il, entre deux ensembles religieux
contemporains, disparate plus criant ? Chaos magnum firmatum
est...
•Si des personnes nous passons aux rites, et abstraction faite
des grandes orientations, nécessairement identiques, de l'âme
religieuse, nous ne trouverons guère plus de ressemblances
réelles entre les mystères du paganisme et le mystère chrétien.
On le conteste pourtant. Les fureurs dionysiaques et l'omo-
phagie des Bacchanales, les tauroboles du culte de Cybèle et
d'Attis. — ces rites enfin dont Plutarque (1), païen modéré,
philosophe et initié d'Eleusis, déclare qu'à les prendre pour
des réalités, il faut redire le vers d'EscHYLE : « Crache dessus
et rince-toi la bouche ! » — ces rites sont couramment rap-
prochés par « les comparatistes » de la communion eucharis-
tique, des rites de l'initiation baptismale et des transports de
l'union mystique. Nous n'avons pas à souligner l'inconvenance
de ces rapprochements : nous parlons ici en historiens, et nous
savons qu'un sentiment religieux sincère peut se frayer sa voie
à travers une forêt de symboles impurs. Ce que nous nions,
comme historiens, c'est la parenté réelle qu'on s'efforce d'éta-
blir entre des cultes que leurs caractères spécifiques séparent,
(1) De Isidc et Osiride, u, 20.
/iC)8 L. DE (iRANDMAISON
OU même opposent. S'il sagit de rEucharislie, par exemple, la
fractio panis chrétienne s'écarte absolument, même dans sa
lettre, des scènes « d'abattoir et de mauvais lieu » — j'emprunte
ces expressions au R. P. Lagrange — qu'on évoque à son
propos. Mais combien plus ilans son esprit !
Dans les mystères de Dionysos Zagreus. on représentait le
triste épisode, au cours duquel le jeune dieu chasseur (image
peut-être du déchirement produit dans l'unité originelle par
l'émanation du multiple) était déchiré et dépecé. Ce qui suivait
dans le mystère, en particulier la manducation de la chair crue
du taureau, était un signe de la folie, et, pour ainsi dire, de la
possession divine qui s'emparait alors de l'initié, sous l'in-
fluence de Dionysos. Ce détail affreux n'était ni un rite d'initia-
tion ni un rite d'union des fidèles avec leur dieu ou entre eux.
Le taurobole des sectateurs de Cybèle est une cérémonie
expiatoire, un bain de sang, consacré le plus souvent à la
Grande Déesse. Atti.s y figure au second rang, avec le rite plus
modeste du criobole. Le taureau sacré ni ne représente ni
n'incarne le dieu. « Il est donc très arbitraire et contraire au
sens avéré des rites de voir dans le taurobole l'union à Attis
mort et ressuscité » (1).
Que si les rites païens ne s'accordent avec les chrétiens que
génériquement, sur les notions universelles d'expiation, de pu-
rification, d'union à la divinité, ou encore sur das détails de
cérémonial ou de formulaire, ils s'en séparent de la façon la
plus abrupte sur le terrain capital des dispositions morales.
« Sans doute, dit excellemment M. Vexard, il y avait des âmes d'élite qui
cherchaient dans la mystique païenne la satisfaction d'aspirations élevées.
Mais sans parler même de l'immoralité de certains rites, il faut reconnaître
que, en général, on attendait de l'initiation aux mystères une pureté rituelle,
obtenue par des procédés presque magiques, et sans lien direct avec la pratique
de la vertu, plutôt qu'une véritable purification morale. La mystique chré-
tienne, au contraire, vise à changer les âmes, elle tend à la réforme de tout
l'homme, à la création d'un homme nouveau, en qui l'action de l'Esprit divin
se manifeste dans la sainteté de la vie et des œuvres. » (2)
(1) Lagrange, Revue biblique, 1919, p. 459. Il va sans dire qu'on ne prétend
pas, par ces rappels sommaires, décider la question de fait, qu'on trouvera
fort bien traitée dans les mémoires auxquels nous renvoyons.
(2) L. Venard, Les Origines chrétiennes, iv ; dans J. Bricout, Où en est
l'histoire des religions, 2 in-S", Paiis, Letouzey, 11)11-1912, t. II, p. 226.
LES MYSTERES PAÏENS ET LE MYSTÈRE CHRÉTIEN 469
Il y a là, qu"on y prenne garde, une différence majeure, qui
change absolument Tatmosphère religieuse des termes qu'on
prétend comparer et, pour une grande part, assimiler. Le
contexte moral, commandé lui-même par la foi en un Dieu Père,
tout-puissant, mais aussi très saint, visible aux seuls purs de
cœur, agit sur le geste et la formule chrétienne, à la façon de
ces signes déterminatifs qui assurent à un mot, dans plusieurs
langues anciennes, une signification particulière, réservée, su-
périeure, divine ou royale. Toute contamination des pratiques
anciennes de magie et de contrainte, de captation ou de sur-
prise des forces divines, est exclue par le fait même.
Il n'en allait pas ainsi dans les mystères païens, même dans
ceux qui étaient, de l'aveu général, les plus élevés, ceux d'Eleu-
sis. M. Paul FouGART, avec l'autorité que lui donne une vie
consacrée à l'étude des Eleusinia, l'affirme ainsi dans son der-
nier ouvrage : « Parmi les témoignages qui nnus sont parvenus
sur la préparation aux mystères, il n'y a pas trace d'instruction
ou de purification morale, pas de prescription pour expier ou
réparer les fautes commises, pas d'exhortation à les éviter à
l'avenir. La tâche des mystagogues consiste à débarrasser leurs
disciples de toutes leurs souillures matérielles et à les main-
tenir en cet état de pureté jusqu'à l'initiation » (1).
Ouvrons maintenant nos livres chrétiens ; étudions ce que
Jean, ce que Paul ont appris à Técole du Ohrist, et ce qu'ils
nous répètent non seulement dans leurs catéchèses aux sim-
ples, mais quand « ils parlent sagesse entre initiés », comme
dit magnifiquement saint Paul. C'est manifestement un autre
monde, l'Esprit après la cliair, la science de Dieu après les
rudiments du monde, la lumière après les ténèbres, la vie après
la mort, le réel après la figure. Assurément, ce que le mystère
chrétien révèle, c'est bien ce que prétendaient révéler les mys-
tères païens, la partie secrète, réservée, naturellement inacces-
sible, des choses divines. C'est, pour reprendre un mot employé'
à ce propos par des païens et des chrétiens, l'aventure pathéti-
que de la divinité. Mais, au lieu de fables grossières, filles de
(1) Les Miis((i(S d'f\lcusis, in-8", Paris, Pieaitl, 1914, p. 289, 290. Voir aus.si
les pénétrantes réflexions de Maurice Bkill\nt, dans ses Mystères d'Elr isis,
Paris. Renaissance du livre, [1920], p. 172 sqq. ; 184 sqq.
470 L. DE GRAXDMAISON
conceptions naturistes tournées en mime ou en histoire, et
mères d'épisodes luxuriants, aux contours njal définis, nous
avons un point de départ net, daté, sobre, pleinement histori-
que, le fait du Christ Jésus de Nazareth. Au lieu de pratiques
violentes, excitantes ou amorales, au lieu d'une purification
toute rituelle et d'un espoir d'immortalité sans gage certain,
nous avons une fontaine de pureté, un principe nouveau et les
arrhes données par l'Esprit de la vie qui ne finira pas.
De cette puissante nouveauté, les prédicateurs du Christ ont
pleinement conscience, et leurs disciples, venus de la gentilité,
tout autant. Après l'énumération de crimes capitaux ": impudi-
cité, idolâtrie, adultère, mollesse, sodomie, vol, calomnie et
crapule, on peut leur dire : « Et voilà ce que vous étiez »,
encore que non pas tous. Mais c'est pour ajouter : « Mais vous
avez été purifiés, sanctifiés, justifiés par le nom du Seigneur
Jésus-Christ et par l'Esprit de notre Dieu » (I Cor., vi, 9-12).
Plus brièvement, et l'on ne saurait mieux finir cette étude que
par un mot qui en résume Tessentiel : « N'ayez rien de commun
avec eux. Jadis vous étiez ténèbres, mais vous voici devenus
lumière dans le Seigneur. Vivez donc en fils de lumière. Le fruit
de la lumière consiste en tout ce qui est bon, juste et vrai.
Discernez ce qui plaît au Seigneur. N'ayez aucune part aux
œuvres stériles des ténèbres. Prenez, au contraire, parti contre
elles. Car ce qui se fait en secret par ces gens-là, c'est une
honte d'en parler seulement » {Ephes.. V, 8-13).
BIBL. — Outre les leçons précédentes, dans CRSER, B. Allô, L'Evangile en
lace du syncrétisme païen, in-12", Paris, Bloud, 1910 ; L'Apocalypse, in-8°,
Paris, Gabalda, 1921 — E. de Backer, Sacramentum, in-8", Paris, Picard, 1911
— Alb. Valensin, Jésus-Christ et l'histoire comparée des religioris, in-12 °,
Paris, Lecoffre, 1912 — E. Krebs, Das religionsgesch. Probletn des Vrchris-
tentumSj in-S", Miinster i. W., Aschendorff, 1913 — M.-J. Lagrange, Mélanges
d'histoire religieuse, ln-12'>, Paris, Lecoffre, 1915 ; et Rfi, 1919, t. XVI,
p. 157-217 ; 419-480 ; 1920, t. XVII, p. 420-446 — E. Jacquier, Mystères paiens,
dans DAPC, 1920, t. III, col. 964-1014 — F. J. Doelger, Sol Salutis, in-S»,
Miinster i. W., Aschendorff, 1920 ; Ichthys, in-8», Freiburg i. B., Herder,
t. I, 1910, MUnster 1. W., Aschendorff, t. II et III, 1922. — Bibliographie plus
complète et indication des auteurs non catholiques, dans BZ, RSPT, Siblica,
ERE (1918, t. IX, s. V. Mysteries) et dans Harvard Theological Revieic, octobre
1921. t. XIV, p. 287-367 (G. Krueger) ; avril 1922, t. XV, p. 196-216 (H. ^VIX-
DISCH).
Séance de clôture
Pour la dernière séance, prennent place sur Testrade
M. Mr. Von K- de Both, bourgmestre, M. Sanders, curé du Sacré-
Cœur, M. Mbrcx, président de la Société 0ns Brabant.
Les premières chaises sont occupées par MM. les échevins.
Le R. P. ScHMiDT, en une brillante improvisation, constate le
succès complet de la Semaijie et remercie tous ceux qui ont
contribué à l'assurer, organisateurs, conférenciers, auditeurs,
sans oublier les dames de la ville qui dirigeaient le service du
buffet. Les cigares exquis qu'elles offraient, leur discrète affa-
bilité, observe-t-il, n'ont pas été sans contribuer à la cordialité
des relations. On applaudit.
« La renommée de Tilbourg, conclut-il. faisant allusion au
caractère cosmopolite de l'assemblée, se trouvera bientôt portée
jusqu'aux extrémités de la terre. »
Un jésuite du Tche-ly Sud-Est, le R. P. Tchad, en quelques
phrases chinoises — qu'il a l'obligeance de traduire ■ — en
confirme pour sa part la promesse au grand mandarin du lieu.
M. Mercx dit l'impression profonde produite sur ses conci-
toyens par l'effort scientifique dont ils ont été témoins, le
réconfort que leur ont apporté certaines solutions aussi sim-
ples que solides, et promet en leur nom d'appuyer par la prière
l'œuvre si méritoire des savants qu'ils ont admirés.
Le R. P. Pinard de la Boullaye communique ensuite aux
Semainiers les suggestions et les décisions du Comité interna-
tional qui peuvent les intéresser.
« Bien que votre patience, au cours de ces laborieuses jour-
nées, ait été inlassable, MM., et votre bienveillance à l'égard
des conférenciers vraiment sans limites, j'essaierai de ne pas
abuser de l'une et de l'autre en ces derniers instants.
« FJ d'abord, vous savez heui'eux d'apprendre que le Comité
472 SÉANCE DE CLOTURE
diredeur s'est agrégé cinq conseillers dont vous avez pu apprc-
ciei' la haute com})étenee : pour l'Allemagne, M. le Professeur
Dr. (i, WuNDERLE — ])our TAutriclie, M. le Professeur Dr.
Jr.NKER — jtoiir la Fiance, le R. P. de Grandmaison — iiour
l'Italie, le R. P. Gbmelli, recteur de l'Université de Milan —
j)our la Yougoslavie, M. le Professeur Dr. Ehrlich.
« Quant, au lieu de la prochaine session, que l'on espère
tenir dans deux ou trois ans, le Comité a jugé imprudent, en
raison de la situation internationale et avant d'avoir pris des
informations plus précises, de fixer d'ores et déjà son choix
ent*re les diverses villes qui lui ont adressé des invitations.
« Gomme matière d'étude, pour la partie spéciale des cours,
il lui a paru ojiporlun d'adojiter 1" le sentiment de la culpabilité
[das Schuldbeivusslsein) , 2° l'idée de rédemption {der Erlô-
surigsgedmihe) , 3° les mystères [die Myslcrienreligionen) . Les
trois questions ont entre elles des rapports étroits et sont, à
quelques égards, au premier plan des préoccupations actuelles.
Bien que la troisième ait été déjà abordée dans la présente
session, il ne sera pas sans utilité d'y revenir, pour compléter
l'enquête et approfondir les solutions.
« En ce qui concerne l'organisation malérielle, on a décidé de
diminuer le nombi'e des conférences, pour laisser plus de temps
aux consultations privées d'étudiants à professeurs et aux déli-
bérations en groupes. On a aussi l'intention de faire une place
plus large aux conférences pratiques, dont vous avez applaudi
un modèle dans la i-ommunication de M. Bouyssonie sur la
technique des iouilles.
« Bon nombre de Semainiers ayant exprimé ce désir que les
Secrétaires leur fournissent à l'occasion les conseils et les
renseignements utiles à leurs travaux, ceux-ci se mettent vo-
lontiers à leur disposition, dans les limites de leur compétence.
« Quant aux suggestions que le Comité croit devoir vous
adresser, MM., elles se résument dans ces cpielques mots :
favoriser de toutes vos forces le travail scientiftque.
« La nécessité de cette conduite est évidente, pour l'honneur
de l'Eglise catholique d'abord, qui doit continuer à avoir des
représentants de premier rang dans toutes les branches du
savoir — et dans l'intérêt des âmes ensuite, parce que la science
qui se constituera sans nous infailliblement sera exploitée
SÉANCE DE CLÔTURE 47 3
contre nous, faute d'hommes qui imposent à l'attention certains
faits trop liai^ituellement négligés ou ignorés par d'autres sa-
vants, qui répondent aux objections de nos adversaires avec une
autorité suflisante et qui puissent donner à notre jeunesse cette
pi'emière initiation dont Tintluence est souvent décisive. Dieu
nous garde de déprécier l'apostolat pratique ! Il est indispen-
sable et nous lui devons, n'est-il pas vrai, au milieu de nos
études arides, les consolations les plus profondes de notre vie.
Mais vous n'avez pas besoin qu'on' vous démontre combien
funeste serait cette tactique — ou plutôt cette, absence totale
de tactique — qui consisterait à déclamer contre les erreurs,
loin de ceux qui les propagent, et à réconcilier avec l'Eglise,
comme au hasard des circonstances, les gens fatigués des
vains plaisirs ou lassés par la fausse science, sans porter
jamais d'attaques au plein centre et à la tête des forces adver-
ses. De cette défensive timide, de ces escarmouches d'arrière-
garde, de ces conversions de traînards, quel effet puissant pour-
rions-nous attendre ! I.e seul moyen de ruiner la fausse science,
de désabuser ceux qu'elle fascine, c'est de promouvoir la vraie,
la plus impartiale, la plus objective, la seule qui s'impose et
qui dure. Si l'on nous accuse de faire en cela de l'apologétique,
laissons dire. Puisque nous voulons la science la plus sévère,
ceux-là seuls se sentiront visés par nos ambitions qui auront
conscience de viser eux-mêmes autre chose que la Science pure
et de faire par conséquent, pour leur compte, une autre apolo-
gétique et moins avouable. Si nous ne demandons rien de plus
que l'application des règles critiques admises en tout autre
domaine, qui peut d'ailleurs nous reprendre de vouloir que la
Science serve non seulement à gorger les esprits de savoir,
mais encore à les conduire à Dieu ?
« Par quoi doit se ti'aduire l'application de cette tactique ?
« — Par le travail sérieux, pour tous ceux d'entre nous qui
publient ou qui enseignent : faire lentement pour faire bien.
Tous les vrais apôtres, peut -on dire, ont soutenu leur courage
[lar cette devise : « une âme vaut une'vie ». Puisque ce sont les
bons livres qui décident du progrès de la vraie science, est -il
exagéré pour nous, hommes d'étude, de la traduire à noire usage
par celle-ci : « un bon 'ivre vaut une vie » ?
« Ceux qui n'ont pas cette vocation spéciale doivent au moins
474 SÉANCE DE CLÔTURE
aider au bon travail. Un moyen à la portée de tous est d'attirer
de généreuses subventions aux érudits et aux revues catholi-
ques. Parmi ces dernières, il me sera bien permis, MM., — - je
parle ici en mon nom personnel, mais je suis sûr d'avoir
l'approbation du Comité et la vôtre — de nommer au premier
rang YAnthropos. Tel directeur d'une revue rivale la nomme
<( une revue de missionnaires ». Pour dédaigneuse qu'elle soit
dans la pensée de celui qui l'emploie, l'expression ne nous
déplaît pas, car c'est assurément dans une large mesure aux
contributions si soignées et si documentées des missionnaires
qu'elle doit le témoignage que lui rendait récemment un biblio-
graphe éminent : « dans son domaine, elle n'a point de supé-
rieur 1) (1). (Applaudissements). Laissez-moi citer encore la
Revue des sciences philosophiques et théologiques, dont vous avez
pu apprécier les excellents bulletins, les Recherches de science
religieuse et la dernière venue, la Revue d'ascétique et de mysti-
que, indispensable pour les études de psychologie religieuse.
« Enfin, MM., puisque nous parlons des œuvres que peut
subventionner utilement la charité catholique, ne convient -il
pas de nommer la Semaine d'ethnologie religieuse ? Elle est loin
de se croire la plus importante ; mais vous savez si son initia-
tive est utile. Oj', elle est plus riche de bonnes intentions que de
rentes et elle ne peut espérer rencontrer à chaque session, pour
subvenir à ses besoins, des Tilbourgeois ! Ne se trouverait -il
pas, si on éclairait sa générosité, quelque millionnaire qui
vouliit attacher son nom à sa fondation, comme l'ont fait en
d'autres cas les Carnegie, les Nobel et tant d'autres ?...
« Il ne me reste plus, MM., qu'à remplir un devoir de recon-
naissance.
« Tout à rijeui'e, avec une conviction et une chaleur que
vous partagiez tous, le R. P. SCHMmT a exprimé notre gratitude
envers tous ceux qui nous ont secondés. D'accord avec lui, je
vous invite à la faire monter plus ardente vers le premier de
nos bienfaiteurs, Celui qui a dit : « Aimez-vous, comme je vous
ai aimés », dont la charité rayonne sur tmites les nations sans
distinction et qui pria, à la veille de sa mort, pour que toutes
(1) « Within Us own sphère, and as supplying scientific expositions of the
culture distinctive of primitive peoples, it lias no superior » ; L. H. Jordan^
Coviparativc Religion, in-S", Londres, Milford, 1915, p. 472
SÉANCE DE CLÔTURE 475
les âmes ne fissent qu'une âme, comme son Père et lui ne font
qu'un, « ut sint unum, sicut ego et tu unum sumus ».
« Vos Secrétaires, MM., dans la préparation de la Semaine.
ont cherché à assurer avant tout ce point capital : que tous
les travailleurs, séculiers et réguliers, que toutes les congré-
gations religieuses, que toutes les nations puss^ent se sentir ici
dans une atmosphère de paix et de charité. Mais que pç^uvent les
efforts de l'homme sans la bénédiction du ciel !
« C'est le secours sensible du Dieu d'amour qui a écarté de
nous les perturbateurs conscients et inconscients, qui a inspiré
à chacun les procédés les plus délicats, qui a marqué enfin notre
Semaine du sceau des œuvres divines : « in hoc cognoscent quia
discipuli mei estis, si diligitis invicem ».
« Vous avez tous admiré, près d'ici, cette belle statue du
Sacré-Cœur, sur le socle de laquelle sont gravés en lettres d'or
ces trois mots : Régi sud cives. Vous avez applaudi à cet acte de
foi et de piété. Mais nos chers amis, les catholiques de Tilbourg.
savent bien que leur roi est notre roi. C'est d'ailleurs ce qui leur
a permis de nous aimer, avant même de nous connaître. C'est
aussi ce qui nous permet de nous aimer, malgré les divergences
de vues qui peuvent subsister entre nous.
« Daigne ce roi bien aimé nous remplir de science et d'amour,
pour que nous puissions gagner à son royaume les nations de
la terre et les réunir toutes, non pas dans un intprnationalisme
laïque, lamentable utopie, mais dans la charité chrétienne, ut
sit Deus omnia in omnibus ! »
Cette péroraison est longuement applaudie.
M. le Bourgmestre de Tilbourg, qui préside, se lève alors.
Dans les termes les plus cordiaux, il remercie la Semaine de
l'honneur qu'elle a fait à la cité, s'excuse encore une fois de
n'avoir pu la fêter comme il l'aurait souhaité et termine en
formulant l'espoir qu'elle reprendra dans quelques années le
chemin de la Hollande. Au nom de Tilbourg, le dernier mot qu'il
lui adresse est un chaleureux « au revoir ! »
Les Semainiers se rendent ensuite à l'église du Sacré-Cœur,
pour le salut solennel de clôture, donné par M. Sanders.
La cérémonie achevée, quand les orgues se sont tues, ils
récitent trois Pater, trois Ave et le De profundis pour le
R. P. Bouvier et pour tous les membres décédés depuis la der-
476 ÉPILOGUE
\
nière session. Le R. P. Schmidt en avait suggéré l'idée, dans son
allocution inaugurale. « Enfants de différentes nations, avait-il
dit, mais fils d'une même Mère, l'Eglise catholique, nous réali-
serons au cours de nos séances ce qu'écrivait le bon Père Bou-
vier, en tête de sa dernière lettre : Pax Christi ! Nous le réalise-
rons *une dernière fois, avant de nous séparer ».
La Semaine se termine par cet acte de charité.
Epilogue
Mis au courant des publications qui se groupent autour de
VAnthropos et des travaux de la Semaine d'ethnologie, le Souve-
rain Pontife a fait exprimer au R. P. Schmidt, par l'entremise
de Mgr. Marchetti, ancien Nonce apostolique à Vienne, actuel-
lement Secrétaire de la Propagande, son désir d'être informé
directement par lui de ces divers sujets. Par deux fois, le 23 et
le 25 avril de l'année courante, le R. P. Schmidt a été reçu en
audience privée.
Au cours de ces entretiens. Sa Sainteté a manifesté plusieurs
fois le vif intérêt qu'elle portait aux recherches scientifiques
concernant l'histoire des religions. De manière toute spéciale,
elle a insisté s,ur la nécessité urgente d'étudier de près certains
groupes de non-civilisés voués à une disparition prochaine.
Parlant de la Semaine, « l'œuvre n'est pas seulement utile,
a_t-elle dit ; elle est nécessaire, aux temps présents. » Elle a
daigné enfin confirmer expressément son désir de voir tenir la
prochaine session à Milan, dans cette Université du Sacré-Cœur
qu'elle a fondée, avant son élection au Souverain Pontificat.
L'idée que lui soumit le R. P. Schmidt de faire coïncider la
session avec le Jubilé de 1925 et avec l'Exposition des Missions,
qui doit s'ouvrir à Rome la même anuée, reçut sa pleine appro-
bation.
Le Comité international ne peut que déférer avec empresse-
ment et gratitude aux voeux de Sa Sainteté. Les offres géné-
reuses du R. P. Gemelli, Recteur magnifique de la dite Univer-
sité, et son industrieuse activité lui donnent d'ailleurs d'ores et
déjà le meilleur espoir de pouvoir tout organiser pour la plus
grande commodité des Semainiers.
Dieu aidant, la IV^ session aura donc lieu, en 1925. proba-
blement en septembre, à Milan.
APPENDICE
Les cercles culturels
Un tableau publié à Moedling-, en juillet 1923, sur le plan de celui qu'on
trouvera plus haut, p. 76, introduit un type nouveau (G) et précise la pensée
du R. P. SCHMIDT sur quelques points.
Nous en reproduisons ici les données, en distinguant ce qui concerne le
régime économique (Ec), l'organisation sociale (Soc), la religion (Rel.), l'aire
de diffusion (Diff.).
Les minuscules n, b, c, d, f, f, désignent les cercles établis par MM. Gr.^ebner,
Ankermann et FoY ; voir plus haut, p. 76.
Les chiffres renvoient aux pages du présent compte rendu. Ces références
sont à compléter par celles que donnent les tables alphabétiques pour chaque
fraction de territoire ou chaque institution appartenant au même cercle. Elles
ne sauraient toutefois, même par leur ensemble, suppléer à un exposé métho-
dique du sujet, qu'on devra naturellement demander aux ouvrages récents :
Fr. Graebner, Ethnologie, (dans P. Hinneberg, Die KulUir der Gegenwart,
p. III, sect. V, Anthropologie), in-S", Leipzig, Teubner, 1923, p. 447-521 ;
W. ScHMiDT et W. KoppERS, Voclker und Kulturen, in-4", Regensburg, Habbel
(en cours de publication), p. I, c. ii, p. 79 sq. ; p. Il, c. m, p. 158 sq.
A Exogam-monogamistischer Kulturkreis
I. Urkulturen. i B == a Exogam-geschlechtstotemistischer Kulturkreis
/ C = b Exogam-gleichrechtlicher Kulturkreis
• D = c Exogam-vaterrechtlichei- Kultuikreis
II. Prlmïrkult. E = rf Exogam-mutterrechtlicher Kulturkreis
/ F Vateri'echtlich-grossfamilialer Kultui-kreis
( G Totemistisch-mutterrechtliche Mischkultur
m. Sekundârknit. / H = r Freimutterrechtlicher Kulturkreis
/ I = / Freivaterrechtliche Kulturen
Pour la distinction des civilisations urchaïqties, « primitives, au moins au
sens qu'on ne leur connaît pas de devancières s, primaires, secondaires, voir
plus haut, p. 57, 232-233.
A. — Cercle cxngamo-monoc/amc.
Ec. — Petite chasse.
Soc. — Monogamie ; exogamie locale.
Rel. — Monothéisme.
Diff. — Pygmées et pygmoïdes.
Cf. : généralités, 57-8 : formes préhist, 205, 213 (208-10) ; croyances, 97, 233 :
sacrifices, 233-5, 238-9, 240-1, 247-50.
B. — Cercle exogame à totémisme de sexe [ou tasmanien].
Ec. — Petite chasse.
Soc. — Monogamie : exogainiq locale.
Rel. — Monothéisme.
Diff. - — Tasmanle, fractions du S.-E. australien.
Cf. : généralités, 57-8 : formes préhist, 205 ; croyances, 97 ; saci-ifices, 233-5,
238-9 ; initiations tribales, 331-2, 371 (356-7, 363-70).
C. — Cercle exogame à droit paritaire [ou du honmcrang^.
Ec. — Petite chasse.
Soc. — Droits égaux de l'homme et de !a femme ; exogamie locale.
478 APPENDICE
Rel. — L'ancêtre tribal conçu comme Etre Suprême ; mythologie lunaire à
orientation masculine.
Diff. — Fi-actions de l'Australie, régions des sources du Nil, Inde, Amérique
mérid. et septentr.
Cf. : généralités, 57-8, 318, 332 ; préhist, 205 ; croyances, 332 ; sacrifices,
233-5, 238-9, 270-1 ; initiât., 332, 371 (357-8, 363-70), 353.
D. — Cercle patriarcal-exogame [ou totêmistel.
Ec. — Grande chasse.
Soc. — Clans totémistes exogames ; droit paternel ; classes d'âge.
Rel. — Etre Suprême, le Soleil (masculin) ; adoration de la Nature et magie.
Diff. — Certains territoires de l'Océanie, de l'Inde, de l'Afrique, de l'Amérique
et de l'Europe (préhistorique).
Cf. : généralités, 58, 59, 60 ; préhist., 212 (205, 206) ; totémisme, 96 ; sacriflees,
238 ; initiât, 333, 371 (363-70), 353.
E. — Cercle matriarcal-exogame [ou mutriarcal'i.
Ec. — Petite agriculture.
Soc. — Deux classes de mariage exogames ; droit maternel ; soc. secrètes
d'hommes.
Rel. — Etre Suprême, la Lune (féminine) ; animisme ; culte des ancêtres.
Diff. — Spécialement, certains territoires de l'Océanie et de l'Amérique sept.
Cf. : généralités, 58, 60-1 ; préhist., 213 (206, 207) ; croyances, 97 ; sacrifices,
238 ; initiât, 334, 371 ; soc. secrètes, 95, 334-6, 353-4.
F. — Cercle patriarcal à grandes familles [ou des nomades}.
Ec. — Elevage du bétail ; vie nomade.
Soc. — Grandes familles patriarc. ; droit paternel renforcé ; droit d'aînesse.
Rel. — Etre Suprême, le Ciel (souvent avec dieux subalternes).
Diff. — Asie intérieure, Turco-tartares, Indo-européens, Sémito-hamîtes.
Cf. : généralités, 58-9 ; sacrifices, 239-40, 241, 305.
G. — Civilisation mixte totémistico-matriarcale.
Ec. — Produit de D -\- E — Mélange de la petite agriculture et de la grande
chasse.
Soc. — I*rédominance du droit soit paternel, soit maternel ; fratries.
Rel. — Etre suprême, le Soleil. Ancêtre ti'ibal (masc. ou fémin.), la Lune.
Diff. — Mer du Sud, Australie, Amérique du Nord, etc.
Cf. : général., 61 ; croyances, 339 ; sacrif., 239 ; soc. secrètes, 337-8, 339.
H. — Cercle matriarcal anexogame.
Ec. — Produit de E + F. Etage supérieur de la petite culture. Construction sur
pilotis.
Soc. — Droit maternel, sans classes de mariage ; droit maternel libre ; chasse
aux têtes ; couvade.
Rel. — Etre Suprême, le Ciel, époux de la Terre, qu'il féconde au printemps.
Diff. — Asie mérid.. Mer du Sud, Afrique occid., etc.
Cf. : généralités, 61-5 ; préhist., 217 (214-16) ; croyances, 337 ; sacrifices,
239-40 ; soc. secrètes, 337, 338-9.
I. — Civilisations paternelles anexogames.
Ec. — Produit de D [-{- E} -\- F ; alliance de l'élevage du bétail en grand et de
l'agriculture ; emploi de la charrue.
Soc. — Droit paternel libre, sans exogamie de clan.
Rel. — Etre Suprême, le Soleil, époux de la Terre, qu'il féconde.
Diff. — Asie mérid. et orient., Polynésie, Soudan, les grandes civilisations
(Eg>'pte, Babylone), à leurs débuts, etc.
Cf. : généralités, 61-5 : sacrifices, 239-40.
TABLES ALPHABÉTIQUES
!. Auteurs cités
On a ajouté aux noms des auteurs ceux de quelques personnalités
en rapport avec la Semaine.
Les chiffres gras signalent les conférences des auteurs nommés.
Aies A. d', 428. 464
AUo B., 470
Andres F.,- 15, 16,316
AnkermannB., 41, 68, 76, 90, 96, 343.
Anrich G., 460
Aristophane, 447
Aristote, 183
Armani, 355
Arnoux A., 349, 355
Aust E., 316
Bachofen J. J., 32, 49
Backer E. de, 470
Barandiaran, J. M. de, 156-68, 14,
16, 165, 168
Barth A., 286
Bartholomae Chr., 175
Bastian A., 85
Batiffol, Mgr. P., 460
Battaglia R., 218
Baudemunde, 160
Baudissin W. von, 302, 455
Baudrillart, S. G. Mgr. A., 126
Bauwens, 355
Bebel A., 85
Belot G., 142, 149, 152, 156
Bender H., 125
Berguer G., 196
Bernard, 355
Bernard J., 15, 16
Berthelon, 156
Berthelot du Chesnay, 355
Bery de Saint-Vincent, 157
Betham W., 15 7
Bey, 156
Bittremieux, 346, 355
Bleichsteiner R., 174
Boeckh A., 110
Bopp Fr., 99
Bork, 175
Bossuet, 183
Bougie, 126
Boule M., 222, 228
Bousset W., 457, 459
Bouvier Fr., 28, 29, 30, 155, 475, 476
Bouyssonle A., 228
Bouyssonie J., 218-28, 9, 14, 16, 228,
472
Boylan P., 293
Bréal M., 99
Breuil H., 218, 222, 226, 228
Bricout J., 468
Bridges Th., 316
Brillant M., 455, 469
Bros A., 13, 14, 17, 43,125-56, 156
Brou A., 14, 17
Brown, 355
Buckland A. W., 85
Bugeau, 355
Buschan G., 40
Byhan A., 182
Caland W., 278, 286
Galonné, de, 355
Campbell D., 348, 355
Canesi A., 197
Capart J., 164
Carnegie, 474
Carnoy A.-J., 112-25, 272-86,14, 17,
115, 125, 164, 287
Casartelli, S. G. Mgr. L., 13
Caspari O., 49
Ceston J. M., 355
Charencey, H. de, 156
Cheyne T. K., 459
Christaller J. G., 182
Claparède E., 191, 196
Clemen C. 460
Clément d'Alexandrie. 418
Cœurdoux G. L.., 99. 112
Colas L.., 160
Colle F., 348. 355
Columbanus, 274
Comte Aug., 49, 125, 142
i80
I. AUTEURS CITÉS
Condorcet, 49
Conrady A., 106, 111
Cotton P., 268
Cox W-, 99
Craig A., 297
Cumont Fr., 431. 437, 438, 439, 440,
455, 460, 462, 463
Curtiss S. I., 302, 312
Czainowski S., 126, 146, 156
Dale M., 260
Dalman G., 311, 312
Darmesteter J., 106
Darwin Ch. R., 316, 317, 328
De Caluwe J., 441-55, 15, 17
Déchelette J.. 228
Deimel A., 291
De Jonghe E., 340-55,352, 355, 13,
15, 20
Delacroix H., 188, 198
Delehaye H., 460
Delhaise, 349. 355
Delitzsch Fr., 291, 294
Dennett R. E., 269
Denys l'Aréopagite, 433
Deploige, Mgr. S., 156
De Witte Al., 355
Dhorme P., 29. 295, 298, 299
Diepen, S. G. Mgr., 9, 30
Dieterich A., 440, 453
Dlodore, 307
Dixon R., 37
Doelger F. J.. 460, 464, 470
Dottin G., 125
Douceré V., 164
Doumergue E., 196
Drexel A., 169-82, 14. 18, 171, 175,
176, 177. 182
Duhr J.. 455, 15, 18
Dupuis Ch. Fr., 458
Durkhelm E., 126, 127, 128, 129, 131,
132, 133. 134, 136. 138, 140, 141,
142. 143, 147, 148, 149, 150, 151.
152, 153, 154. 155. 156, 197, 230
Echalar, 163
Ehrenreich P., 33
Ehrlich I.., 356-71, 13, 15, 18, 368,
472
Eitrem S., 315
Engelkemper W., 310
Engels Fr., 85
Erman A., 178
Eschyle, 467, 442
Exteens, 228
Faber H., 196
Farnell L. R., 315
Fauconnet P., 126, 127, 137, 156
Felst S., 114, 117, 125
Finck Fr. N., 111
Firmicus Maternus, 4 66
Fischer B., 144
Fita, 162
Flournoy Th., 194, 196, 197
Forchhammer P. W., 99
Foucart G., 40
Foucart P., 442, 445, 448, 449, 451,
452-4, 455. 459
Fowler W. W., 316
Foy W., 76. 96 .
Frank C. 298, 299
Frazer J. G., 36, 63, 64, 155, 230,
241, 242, 352, 453, 461
Freud S., 197, 199
Fritsch G., 235
Frobenius L,.. 41. 68, 89, 92, 353, 355
Froebes J., 196
Gannon J., 13
Gardner P., 459
Gasparri, S. E. le Gard., 9
Geerts G., 7, 13, 19, 27, 28
Gehrich G., 455
Gemelli A., 197-203, 13, 14, 19. 192.
197. 472, 476
Gernet, 126
Gillen F., 153, 361. 366, 371
Girgensohn K., 192, 198
Goblet d'Alviella E., 455
Goldenweiser A. A., 37, 54
Gougaud, 29
Graebner Fr., 41, 68, 70, 76, 81, 89.
90. 91, 92, 95, 96, 98, 354, 371, 477
Graillot H.. 455
Grandmaison, L. de, 456-70, 13, 15,
19, 196, 472
Gressmann H., 300
Grill J., 440
Grimm, 112, 274
Grosse E., 84, 85, 86, 93, 94, 97
Gruppe O., 455
Guimaraens, F. da Costa, 197
Gunkel H., 459
Gusinde M., 317, 318, 324
Haddon A. C, 96
Hahn E., 85
Hahn Th., 235
Hardy E., 286
Harnack A., 427. 428, 440
I. AUTEURS CITES
481
Hartmann M., 315
Hatch E., 459
Hehn J., 287-301, 15, 20, 166, 292
Heiler Fr., 243, 247
Heiner Fr., 197, 199
Hennemann, 269
Henry J., 351, 355
Henry V., 278, 286
Hepcling H., 455
Herder, J. G. von, 49
Hérodote, 272, 284, 444
Hillebrand E., 218
Hillebrandt A., 286 .
Hippolyte (saint), 449
Hirt H., 99, 117. 125
Hôffding H., 196
Hofmayer W., 235
Hollis A., 355
Homère, 442, 443, 444, 445
Hommel Fr., 311
Hopkins E. W., 286
Howitt A. W., 331, 356, 357, 358,
363, 364, 365, 367, 369, 371
Hrozny Fr., 175, 177
Hubert H., 230, 236
Huby J., 441
Hucbalde, 160
Huebner, 168
Huesing G., 175
Humboldt, A. von, 181
Husserl E. G., 246
Isocrate, 448
Jacquier E., 459, 470
James W.. 197, 200
Janet P., 197
Jastrow M., 296
Jaussen A., 302, 303, 304, 309, 312,
314
Jean (saint), 462, 463, 464, 465, 467,
469
Jensen P., 289, 459
Jeremias A., 452-4, 455
Jeremias J., 293
Jérôme (saint), 435
Jevons F. B., 230
Jones W., 99, 112
Jordan L. H., 196, 474
Joyce, 355
Junker H., 414-26, 13, 15. 20, 178,
426. 472
Junod H. A., 235
Justin (saint), 438, 439, 440
Keith A. B., 287
Kennedy A. A., 4 60
Kingsley M. H., 355
Klameth G., 301-15, 15. 21
Klauber B. G., 296
Koffka K., 198
Koppers W.. 81-98, 316-28,14. 15, 21,
43, 56, 75, 81, 82, 92, 94,. 96, 97,
98, 304, 324, 331, 477
Krause Fr., 41
Krebs E., 470
Kreglinger R., 461
Kreichgauer D., 399-414, 15, 21, 414
Kristen F., 365
Kroeber A. L., 36, 52, 97
Krueger G., 470
Kuelpe O., 192, 196, 200
Kuhn Ad., 99, 109, 111
Ladeuze, Mgr. P., 13
Lafltau Fr., 8, 60
Lagrange M.-J., 29, 106, 302, 307,
313, 455, 459, 462, 468, 470
Lake K., 459
Lampridius, 165
Lang A., 31, 33, 34, 39, 453
Laotse, 413, 414
Lasch R., 40, 352
Laurence J., 319
Lebreton J.. 460, 463
I^eisegang H., 457, 463
Lemonnyer A., 13, 29
Leonhardi, M. von, 362, 364, 366, 371
Lepsius R., 182
Le Roy, S. Gr. Mgr., 13, 29, 267
Lesquien A., 178
Leuba J. H., 33, 196, 197
Lévy-Bruhl L., 126, 153, 156, 197
Lietzmann H., 439
Loisy A., 153, 231, 438, 439, 440,
441, 455, 456, 459, 461, 462, 463
Loupias, 241
Lowie R. H., 41, 53, 54, 97
Luzel. 164
Macdonell A. A.. 287
Machen J. G.. 460
Mader E.. 314
Mac Lennan J. F.. 32, 49
Maes. 355
Mainage Th.. 29. 199
Mangenot E., 463
Mannhardt W.. 453
Marchetti. Mgr.. 476
Maréchal J.. 196
Marquardt J.. 316
31
i82
I. AUTEURS CITES
Marrevec, 355
Martindale C, 441
Mathews H., 358, 371
Mauss M., 127. 134, 135, 137, 143,
144, 145, 156, 230, 236
Meier J., 373, 376, 381
Meillet A., 99, 102, 106, 107, 111, 125
Meinhof C, 182, 352
Menghin O., 203-18, U, 22, 90
Mercier, S. E. le Card., 5, 12, 13
Mercx J. K., 7, 22, 471
Merker M., 355
Meyer Ed.. 352. 461
Michelet G., 156
Michelis, E. de. 125
Mogk E-, 272
Moret A., 426
Morgan L. H.. 32, 49, 50, 51, 52, 53.
54. 55. 84. 85, 86
Moritz B., 307
Mortier F.. 13, 22
Moulton J. H.. 287
Muellenhoff C. 99
Mueller Max. 99, 109, 118, 140. 181
Munnynck, M. -P. de, 196
Murisier E., 197
Musil A., 302, 303, 304, 306, 309. 314
Nielsen D.. 307, 313
Nieuwenhuis A. W.. 39
Nil (saint), 302, 307. 308, 310, 311,
314
Nilsson M. P., 3Î5
Nobel, 474
Norden Ed., 316
Obermaier H., 204. 218, 222
Oesterreich K., 35
Oldenberg H., 109, 276. 280. 286
Parker K. L., 358, 367
Parkinson R., 381, 383
Parodi D.. 133. 136. 156
Pascal Bl., 183
Passarg-e. 352
Patterson L... 441
Paul (saint). 458, 459, 462. 463, 464.
465, 466, 467. 469. 470
Pausanias. 445
Peschel O.. 50
Pettazzoni R.. 38
Peyrony, 228
Pfister Fr., 316
Pfleiderer O., 459
Philon d'Alexandrie, 463
Picaud A., 163
Pictet Ad., 99, 115, 116
Pie XI, Sa Sainteté, 9, 476
Pinard de la Boullaye H., 67-81,
98-111. 182-96, 7, 13, 14. 15. 23. 29.
30. 43. 68, 75, 81, 106, 111, 196,
458, 464, 471
Platon, 183
Ploix Ch., 99, 109
Plutarque, 448, 465, 467
Pogge, 355
Pollera A.. 241
Porphyre. 435, 436
Prat F., 463
Preuss K. Th., 34
Prudence, 160
Prunner, 156
Pythagore, 2S5
Ramsay W., 460
Ratzel Fr., 41, 50, 68, 87, 88
Raum. 260
Ravaisson F., 462
Reche, 267
Reinach S., 230, 460
Reinisch L., 169, 182
Reitzenstein R., 457, 459, 462, 463
Renan E., 427
Reuterskiold E., 96
Rhode E., 455
Rinn L,., 182
Risco, 160
Rivers W. H. R., 50, 51, 52
Roeck Fr., 410
Roese, 440
Roscher W., 85
Rossi, J.-B. de, 438
Roth H.-L., 85
Roth W. E., 360. 361. 371
Rousseau .T.-J.. 49
Sacaze J.. 168
Sachau E., 298
Salvatorelli E.. 455
Salviac, 241
Sanda A., 301, 15, 23
Sanders, 23, 27, 471, 475
Sapir E.. 41
.Saussure. F. de, 111
Schaefer H., 42 6
Schebesta P., 258-71, 14, 23
Schlegel Fr., 112
Schmidt W., 31-47, 48-67, 229-44,
329-40, 5, 9, 13, 14, 15, 23, 27. 30.
35, 43, 51, 52. 56, 68. 69, 75, 76,
81. 90, 91, 92, 94, 95, 98, 106,
I. AUTEURS GITES
483
111. 155, 181, 205, 212, 213, 217,
230. 231. 233. 235, 243, 246,
247. 308, 314, 315, 318, 331. 356,
364, 366, 368, 369, 371, . 471, 474,
476, 477
Schneider W., 235
Schrader O., 99, 115, 117, 125, 272,
273, 275
Schrijnen J., 13, 14, 23
Schrijnen S., 125
Schroeder, L. von, 32, 125, 276
Schurtz H., 49, 50, 82, 330, 334, 352,
355
Schweizer, 355
Segond J., 198
Seler E., 37, 414
Seli&man Ch. G., 235
Sergi A.. 182
Sethe, 178
Showermann G., 455
Smith Rob.. 144. 229, 250, 302, 306.
308, 310, 311, 314
Smits, 8
Sôderblom N., 34
Spencer B., 153, 361, 365, 366, 370,
371
Spencer H.. 36
Spenger, 312
Staehlin W.. 198
Stanton V. H., 460
Starbuck E. D., 186
Starcke C. V., 50
Stengel P., 315
Stern W.. 196
Strabon. 159, 160
Strehlow C. 153, 362, 364, 366, 371
Stuebe R.. 302
Swanton W. H., 36, 52, 97
Tacite, 273
Tchao F.-X., 471
Tertullien, 437, 438, 439, 440, 441
Thouless R. H., 196
Thureau-Dangin Fr., 288, 295
Torday, 347, 355
Toutain J., 428, 429, 440, 455, 460
Trilles H., 29
Tromp. 316
Tylor E. B.. 36, 50, 229, 236, 253
Ungnad A., 300
Urroz E., 168
Usener H., 437
Valensin Alb., 470
Vallée Poussin, L. de la, 287
Van Crombrugghe C, 427-41, 13, 15, 24
Van den Bon, 355
Van der Meiren, 355
A'an Gennep A., 80, 155, 353, 355
Van Ginneken J., 106
Van Leeuwen J., S
Van Puyenbroeck, 8
Van Wing, 355
Vénard L., 468
Viegen J., 384-99, 14, 15, 25
Vinson J., 111, 165
Virchow. 355
Vogt, 156
Voltaire, 101
Vonck de Both, 8. 471, 475
"Webster H., 330, 352, 355, 364, 370, '
371
Weiss J., 459
"VVellhausen J., 301, 306, 307, 308,
311, 312
Wendland P., 439, 459
Westermann D., 182, 235
Westermarck Ed., 50, 62, 242
Wetter G. P., 457
Weule K., 352
\\Tiitney W. D., 111, 178
Wide S., 315
Wilken G. A., 229, 236
Winckler H., 174
Windisch H.. 470
Winthuis J., 372-84, 15, 26
Wissler C, 97
Wood, 286
Wunderle G., 244-58, 13. 14, 26, 196,
198, 472
Wundt W., 50, 197, 230, 231, 236,
240, 352, 439
AVyels, de, 13
Zimmern H., 293, 294, 296, 298, ,300
Zoi-oastre, 278, 285
II Dieux et Héros
Abelioni, 161
Açvlns, 121, 275
Adityas, 120
Adonis, 452, 455, 461
II. DIEUX ET HEROS
Ageion, 161, 162
Agni. 275, 276, 281, 283
Aherbelste, 161
Ahriman, 431
Ahura Mazda, 120, 276
Aiolos, 120
Alandestus, 161
Alar, Alardessis, 161
Altjira, 364
Andarte, 161
Andosso, 161
Anubis, 416, 418, 419
Aphrodite, 452
Apollon, 120. 123, 410
Arbalax, 161
Arixe, 161
Arthe, 161
Astarté, 293
Asto Ilunno, 161
Athèna, 120, 122
Atnatu, 364
.Attis, 455, 461, 466. 468
Ausôs, 121
Baelisto, 161
Baesserte, 161
Baigoriso, Baicon-ixo, 161
Baioso, 161
Bassei, 161
Bau, 288
Bayame, 34, 359, 360, 364, 367, 368,
369
Beisirisse, 161
Biamban, 357, 358, 365, 367
Bomos, 309
Boobardy, 359, 366
Brinio, 449
Çiva. 283
Coré, 443, 446, 448, 452, 454
Coyote, 36, 37
Cybèle, 455, 467, 468
Daho, 161
Daramulum, 357, 358, 364. 365, 366,
368, 369
Déméter. 337, 441, 443-4, 448, 449,
450, 451, 452, 454
Dionysos, 446. 447, 452, 455, 466, 468
Dioscures (les), 121, 275
Dyâus pitar, 106. 119-20. 122, 163
Erdelati, 161
El, 106, 109
Ele, 161
Ellil (Enlil), 297
Erditse, 161
Erensuge, 168
Erge, 161
Ereskigal, 298
Esmoun, 455
Faunus, 123
Flora. 123
Frey, 273
Garri, 161
Gaueko, 168
Gayandi, 365
Girru-Nouskou, 297
Gunanbeely, 359
Halios Gerôn, 122
Hécate, 123. 431
Hélios, 120, 121, 410
Herauscorrtsehe, 162
Hercule, 122, 161
Hermès, 120. 293. 464
Hestia. 275
Horus, 164, 416, 417, 418, 419
lauchos, 44 7
Idiatte, 161
Iluberrixo, 161
Ilumbero, 161
Indra. 280. 281. 283
Ireltxo, 168
Iscitto, 161
Ishtar. 292, 293
Ishoie, 266
Isis, 415, 416, 418, 419, 420, 422, 423,
451-2, 467
Jahvé, 309. 310
Jainko. 163
Janus, 123
Jaungoiko, 160, 163
Jupiter, 102, 106, 119
Kari, 233
Lahe, 161
Lares (dieux), 123
Larrasoni, 161
Laz, 289
Leheren, 161
Lelhunno. 161
Leza. 261, 266, 269
Liilissu, 295
Lukos, 122
Mardouk, 109, 288, 289, 290, 294, 410
Mari, 165-8
Mars. 161
Mazdâh, 119
Mavu, 267
Mimi, 122 - '
Mithra, 120, 281 — ses mystères,
427-41 — influence prétendue sur
le Christianisme, 459sq., 465, 466
II. DIEUX ET HÉROS
485
Mulkali, 361
Mnlungii, 261
Mungangaua, 357, 364, 365, 367, 369
Mimibear, 366
Nana, 289
Nebo. 289
N'ephthys, 418, 419
Nergal, 289
Ngnis, 122
Njoerdh, 273
Ng-alabal, 369
Numbarcly, 359, 366
Nzambi, 261
Odin, 109
Olentzero, 168
Ormuzd, 434
Orphée, 464
Osiris — sa nature, 415-7 — ses
mystères, 417-26, 451-2, 461, 466,
467
Ouranos, 119
Pales, 123
Parjanya, 122
Parques (les), 123
Patrick (saint), 146, 147
Pénates (les), 123
Perqunos, 122
Perséphone — v. Corè
Perun, 122
Prométhée, 122
Prthivi, 123
Prakagorri, 168
Psyché, 464
Puluga, 234
Pushan, 120
Quetzalcoatl, 402, 407
Rukut, 357, 366
Sandae, 161
Sarpanit, 289
Saule, 120
Savitar, 120
Schamasch (Shamash), 294, 300, 433
Selenê, 120
Sémèlè, 123
Seth (Set, Sit), 415, 416
Shimunenga, 269
Sol, 433, 435, 438
Sosom, 393-5, 398
Stelatese, Stelatise, 161
Sulis Belenos, 121
Sunnô, 120
Sûryâ, 120, 121
Thôr, 120, 122
Thot, 293
Tiamat, 410
Trita Aptya, 122
Tsuni-Goam, 235
Tullonio, 161
Tumana, 365
Tundun, 357. 365, 366, 367, 369
Twanyirika, 366
Tyr, 109
UitziloFOchtli, 402, 407
[Jnkulukulu, 265
Urci, 163
[Jrnia, 161
Usai, 161
Ushas, 281
Uvarna, 161
Varuna, 119, 281
Vatauineuva, 318-328
Vishnu, 120, 283
Vivasvat, 120
Wodan, 123, 124, 273, 274, 284
Yama, 124
Ynko, 163
Zanahari, 338
Zervan Akarana, 431
Zeus — étymologie, 102, 106 —
dieux parallèles, 119 — fonctions,
119 — mythologie, 443, 449-50
Zeus Madbachos, 309
!ll. Peuples et tribus.
Ababua, 343, 345, 355
Ainos, 234
Akikuyu, 345
Akra, 268
Amaflnga, 355
Ama-Xosa, 346, 355
Amwinde, 345, 355
Andamanais, 233, 234, 322, 331, 332
Arabes (préislam.), 301-316
Aranda, 362, 364, 366, 371
Arurtta, 153, 361, 364, 366, 367, 371
Aryens, 113 — v. Indoeuropéens
'i.S6
III. PEUPLES ET TRIBUS
Aschantl, 263
Athkan, 242
Aztèques, 401, 402, 407, 409, 411, 414
Babali, 343, 350
Badaga, 242
Bageshu, 345, 355
Baholoholo, 345
Balla, 262. 265, 266, 269
Bakele, 345
Bakimba, 346, 355
Bakong-o, 346, 355
Bakota, 345
Bakuba, 344, 348, 352
Bakumu, 345
Saluba, 345, 348, 355
Bambala, 343, 347, 355
Bambaia, 346, 351, 355
Bangala, 343
Bangellma, 345
Baniabangu, 348
Bantous, 338 — relations de leurs
langues avec le sumérien, 171-3,
175 — Etre suprême, 261 — ma-
triarcat, 181 — sacrifices, 259-65
Baria, 241
Barumbu, 345
Basonge, 345
Basques — relations de leur langue
avec le sumérien, 173, 174, 181
— religion et mythologie, 15 6-68
Basuto, 345
Bateke, 343 *
Batutsi, 241
Bavili, 269
Bayaka, 345
Bédouins — v. Arabes
Berbères (langue des), 177, 182
Bétchouanas, 235, 34 5
Bong, 2 67
Boschimans, 259, 267
Bulalll. 370
Bushongo, 355
Cafres, 235, 265, 345, 346, 352
Californiens, 36, 37, 41, 332
Celtes, 286, 413
Cheparra-Turrbal, 366
Chilouks, 235, 241, 265
Chinois, 66, 337, 413
Dieri, 53, 270
DInka. 235, 265
DJauan, 370
Doriens, 444, 452
Dravidiens, 62
Edomites, 303
Elamites, 170
Euahlayi, 358-60, 365, 371
Fang. 155, 345
Fuégiens, 332 — - r. Yagans
Galla, 241, 259, 265, 266
Gân, 260
Germains, 272, 273, 276, 286
Gètes, 285
Gilyaks, 234
Golah, 343, 355
Grecs, 273, 274, 285, 286, 315, 316.
413, 427 — V. Attis, Eleusis, Sa-
crifice
Hamites — civilisât. 76, 478, 59. 313
— langues, 177, 178-80 — sacrifi-
ces, 259, 265-7, 269, 270
Haussa — langue, 178-80 — sacrif.,
268
Hébreux, 241-2, 301, 308, 310
Herrero, 343, 344, 355
Hétéens — v. Hittites
Hindous, 274, 275
Hittites, 170, 175-177
Hottentots, 235, 259, 265
Hurons, 60
Indo-européens, 59, 62, 76, 125 —
dieu suprême, 106, 119-20 — pa-
triarcat, 107 — habitat primitif et
migrations, 113-15 — civilisation
et croyances, 116-24 — caractère
et destinée, 124-5 — v. Initiations,
Indoeuropéennes (langues), Sacer-
doce, Sacrifice
Iraniens, 113
Israélites — v. Hébreux
Italmes. 234
Itchmundi, 363
Jêi. 386
Kabadu, 370
Kaitish, 364, 365
Kamilaroi, 153, 358-60, 366, 368, 370,
371
Kariera, 366, 370
Khoi-Khoi ^ v. Hottentots
Kongait, 363, 370
Koryaks, 234
Kulin, 366
Kunama, 241
Kundu, 343
Kurnai, 331, 332, 356, 357, 365, 366.
369, 370, 371
Lithuaniens, 273
Maidu, 37
Makalaka, 268
III. PEUPLES ET TRIBUS
487
Malgaches, 338
Mandja, 345
Mangbetu, 345
Marind, 384-399
Maskukulumbe, 265
Massai. 265, 266, 269, 345, 352
Mayas, 403, 406
Meru, 345
Minéens, 311, 312
Mitakoodi, 360
Moabites. 303, 305
Mobali, 355
Moschi, 259, 260, 261
Mounda, 62
Miillock-Mullock, 365
Nabatéens, 311
Nahua, 401
Narranga, 370
Nullakun, 370
Papous, 76
Parnkalla, 366
Pélasges, 408, 413, 414
Perses, 272, 274, 276, 278
Pitta-Pitta, 306, 366
Punuurlu, 370
Pygmées — v. Tdhle IV
Romains, 273, 274, 276, 285, 315-6
Russes, 2 73
Sabéens, 311
Sarazins, 302, 307, 308, 310
Schilluk — V. Chilouks
Scythes, 272
Selish, 332
Semangs, 233, 240
Sémites, 59, 76, 478, 124, 302 -
V. Langues, Sacrifice
Slaves, 273
Songo, 344
Suk, 265
Sumériens, 170 — v. Langues, Sa-
crifice
Tartares, 59, 76, 478
Tchouktches, 53, 234
Thraces, 445, 455
Toegeri — v. Marind
Toltèques, 400, 402, 404, 406, 408,
411, 412, 413
Tongaranka, 366
Tongha. 259, 262
Toi.oke, 34 5
Totonaques, 4 03
Tschi, 263
Turco-tartares, 59, 76, 478
Turkana, 265
t'nderebekina, 366
VVaganda, 265, 268
Waka. 2 67
Wakindiga, 266
Wakuhve, 242
Wandorobbo, 266
Wangata, 343
Warega, 345, 349, 355
"Warrai, 370
Watutsi, 338
V/i!ya, 363, 370
Wiradjuri, 364, 365
Worgala, 366
Wotjobali'k, 370
Wulwullan, 370
Yarroinga, 366
Yagans, Yamanas, 316-328, 332
Yoruba, 268
Yuin, 332, 357, 358, 365, 368, 369,
360, 371
Zapotèques, 403
Zoulous, 262, 265
IV. Sujets traités.
Afrique — civilisations régnantes, 76,
477-8, 259, 262, 337, 338, 339, 353
langues, 177, 182 — îeurs relations
avec celles de l'Asie, 169-82 — v.
Animisme, Mânismc, Initiations,
Sacrifices...
Agnistoma, 278-80, 286
Allégorisme — ses fantaisies, 109-10
Ail Father — v. Etres SMpj-è«ics.
Mcheringa, 362, 364, 365, 366, 367
Ame — d'après Durkheim, 142, 143
— chez les Yagans, 325
Amérique — civilisations régnantes,
318, 339, 400, 414, 76, 477-8
Analogies invoquées contre l'origi-
nalité du Christianisme, 45$ ; v.
Cène, Mystères, Syncrétisnie, Théo-
phagie
Ancêtres divinisés, en Australie, 357,
359, 366, 369 — en Afrique, 265,
IV. SUJETS TRAITÉS
267, 269, 270 — v. Mânisme
Animisme — origine prétendue de la
religion, 31, 229 — critique, 34, 38,
39, 141 — son développement dans
le cercle matriarcal, 336 — en
Afrique, 260, 262-5, 267, 268, 270,
347-51 ; cf. Mânisme — chez les
Indoeuropéens, 123 - — Arabes, 303,
304, 305, 309, 310 — Yagans, 325
— influence sur l'évolution du sa-
crifice, 237, 286, 305, 309 — de
l'idée de Dieu, 39
-Vnimatisme, 34
Aniota, 350-5
Anthropologie — critère subsidiaire,
70, 75
Anthropophagie — prétendue des
Yagans, 316 — des Marind, 393 —
non primitive, 58
Asie — civilisations, 76, 477-8 —
berceau de l'humanité. 69, 75
Astrologie mexicaine, 402-6 ; cf. Di-
vination.
Atharva Veda, 284
.Aurore divinisée, 281
.Australie — civilisations, 76, 477-8,
363-71 — langues, 106, 111 —
V. Ancêti-es, Circoncision, Initia-
tions, Sociétés secrètes. Totémisme
.Austriennes (langues), 106, 111
Austronésie, 76
Autobiographies, en psychol. relig.,
187, 188, 192, 199
Avesta, 285
Babylone — civilisât., 478 — idée
de Dieu, 106 — exorcismes, 298 —
poème de Gilgamès, 297 — v. i)i-
vination, Relig., Sabhat, Sacrifice
Bantou (langues) — • v. Table III
Basque (langue) — relation avc le
sumérien, 173, 174, 181
Berbères (langues), 177, 182
Bornou (langues), 171, 182
Bouddhisme, 66
Boumerang (cercle du) — v. Cercle
Bouphonies, 315
Brahmanisme, 66, 281-3, 286
Bull roarer, 332, 343, 348, 351, 356,
357, 359, 361, 362, 364, 365, 366,
367, 369
Bush schools, 341 s., 343, 346. 358,
359-60, 332
Californie — croyances, 36, 37, 41
Cameroun — religion, 269
Cannibalisme, 262, 311, 348
Castes sociales, 63, 64, 66, 282
Cathartique — origine du sacrifice,
d'après Wundt, 240 — en Grèce et
à Rome, 316, 446 — Inde, 279
Caucase (langues du) — 170, 177
Cène chrétienne et mithriaque, 437-40
— V. Théophagic
Cercles culturels — notion, 71-73 —
classification, caractéristiques res-
pectives, 57 s., 76, 477-8 — rela-
tions avec la préhistoire, 203-18 —
la protohistoire, 181, 169 s. — con-
ti'ôle des cercles australiens, 356-71
v. Initiation, Sacrifices, Sociétés
secrètes
Churinga — v. Bull roarer
Ciel — adoré par les primitifs, 36,
38, 163-4, 304, 305 — hommage au
Ciel, dans les initiations australien-
nes, 356-7, 365, 367, 370 — culte
des Indoeuropéens, 123, 106, 163 ;
\. Dyàus — Basques, Bantous,
163-4
Circoncision, 60, 77 — dans le cercle
totémiste, 333, 353 — Europe
préhistorique, 213 — Arabes, 304
— Afrique, 342-7 — Australie,
360-6, 367, 368, 370
Civilisation originelle — inconnais-
sable, 79, 80
Christianisme — influence sur l'évo-
lution des formes sociales, 66, 67
• — lutte contre le Mithriacisme,
437-30 — prétendus emprunts aux
religions païennes, 45 6-70 — v.
Analogies, Cène, Esprit-Saint, Hel-
lénisme, Hermétisme, Mystères, Zo-
roastrisme
Clans indoeuropéens — 117
Classes d'âge, 59, 352, 368
Classes de mariage — système à
deux classes, dans le cercle ma-
triarcal, 60, 447-8, 353 — à quatre
et huit, dans les civilis. secondai-
res, 61
Communion — totémique, 230, 233 —
chrétienne et mithriaque : v. Gène.
Communisme sexuel, 52, 53, 350, 352,
387
Confucianisme, 66
Congo — sociétés secrètes, 335, 339,
347, 349 — sacriflces, 262
Convergence de probabilités (dé-
IV. SUJETS TRAITES
489
monstration par), 69-71, 74, 81, 91,
106
Crânes (usage rituel), 213, 339, 386,
394
Création — chez les Californiens,
36-7 — Marind, 389' — Austi'aliens,
358
Crémation — v. Séjnilture
Criobole — 468
Critères — de forme et de quantité,
70, 87-91 — internes et externes,
70, 71, 74
Cultes agraires, 338, 425-6, 443-4,
450-4
Cycles culturels — v. Cercles
Danses — préhistoriques, 209, 211,
213 — en Germanie, 273 — Afri-
que, 3 42, 348 — Mexique, 409-12
— Nouvelle-Poméranie, 373, 381-3
— Australie, 361, 332
Déformations corporelles — 332, 333,
334 ■ — V. Circoncision, Dents, Sn-
bincision
Dégénérescence (thèse de la), 35
Déguisements — dans les fêtes d'ini-
tiation et dans les sociétés secrètes
en général, 330 — civilisât, archaï-
ques, 3 32 — civilisât, secondaires,
339 — chez les Marind, 386, 394,
396-7 — V. Masques
Dents (ablation des) — initiations
africaines, 342, 344, 353 — austra-
liennes, 332, 353, 358, 359, 361, 362,
363, 364, 367, 369, 370
Destin — divinités présidant au, 123
— recherche du : v. Divination
Deuil, chez les Yagans, 323-5
Dieu — étymologie du mot, 100-2 —
origine des dieux, d'après Dur-
kheim, 143, 150 — idée babylon. et
idée biblique, 106 — - v. Etres su-
prêmes. Monothéisme
Divination — assyrobabylon., 295-6
— mexicaine, 402-6
Eaux (divinités des), 122
Ecole historico-culturelle — origines,
40, 41, 68, 87-98 — méthode : v.
Méth. historico-cult. — thèses :
v. Cercles culturels
— philologique — v. Méth. philol.
— sociologique — origines, 125 sq.
— méthode : v. Méth. sociol. —
thèses : v. Dieu, Héros, Morale,
Prière, Rcliciion, Sacrifice, Toté-
misme
— de féticheurs ; v. Bush schools
Economie (régime éconoinique) — dé-
finition, 82-3 — ^ théories sur ses sta-
des d'évolution, 83-97 — influence
sur l'ensemble de la civilisation,
56-65, 86-97 — formes diverses
dans les cercles culturels, 5 6-67, 76,
477-8
Egypte — v. Mystères, Osiris
Elementargedanke — v. Bastian A.
Eleusis — V. Mystères
Endogamie, 63
Ergologie — définition, 82, 83 — im-
portance du sujet, 87-91, 97-8
Esclavage, 58, 60, 63, 64, 65, 67, 95,
261
Esprits — v. Animatisme, Animisme,
Mânisme
Esprit-Saint — l'idée chrétienne et
ses sources, 457, 462-3
Ethnologie — histoire et critique de
ses méthodes ; v. Economie, Evolu-
tionnisme. Méthode
Etres suprêmes — des Indoeurop.,
119-20 ; v. Dyâus — Sémites; v. El
— non civilisés : la question de-
puis Lang, 31-40 — leur concept,
34-40, 248, 249 — en Afrique, 261
(Bantous), 235, 265 (Zoulous,
Dinka, Chilouks, Waganda), 235
(Hottentots, Cafres, Bétchouanas),
267 (Togoland), 35, 271 (Pygmées)
— Asie, 233 (Semangs), 234 (Ai-
nos, Gilyaks, Tchouktches etc.). —
Amérique, 36-7 (Californiens), 318-
28 (Yagans) — Australie, 233-4
(Andamanais), 332, 357, 366-9
(Kurnai), 359-60, 364, 365, 367-9
(Kamilaroi), 332, 357, 358-9 (Yuin),
361 (Queensland)... — Océanie, 389
(Marind ; v. Oèbe)...
Etymologie — difficulté, 100-2, 118,
119 — ses principes, 102-5, 112 —
V. Méthode philologique
Eumolpides — ■ 286, 444-6, 455
Evolutionnisme — recul récent de
ses thèses, 31-40, 48-56, 83-97 • —
erreurs de méthode, 40, 41, 68. 73,
83-6, 139, 258, 459-64 — v. Ecole
sociologique. Animisme, Mânisme,
Mystères, Prière, Sacrifice, Toté-
viisme...
490
IV. SUJETS TRAITES
Evolution des peuples — signes d'in-
dépendance, 108, 109 — esquisse de
l'évolution des formes sociales et
relig\, 48-67 ; v. Cercles culturels
— recherche de ses causes, 75, 76 ;
V. Economie, Ergologie, Production
Exogamie — 63, 76, 334, 335, 478
— V. Classes de mariage
Expérimentation, en psychol. relig.,
185, 186, 189-93, 199-201
Extrospection, en psychol. relig.,
185-9, 199
Ewhe (langues) — 172
Fétichisme, 262, 264, 265
Feu — - dieux du feu, chez les Indo-
européens, 120 ; V. Agni, Hestia,
Loki, Lukos, Ngnis — chez les
Assyrobabyl. ; v. Girru-Nnsku ■ —
chez les Basques, 162 — culte du
feu, chez les Indoeurop., 122, 275-7,
284 — épreuve du feu, dans les
initiations austral., 357, 360, 361,
362, 367, 370 ; v. Fumigations
Fontaines (culte des), chez les Bas-
ques, 158, 162
Fouilles préhistoriques — leur tech-
nique, 218-28
Fumigations — en Australie, 360,
361 — à Eleusis, 446 — v. Feu
Fustigations, en Afrique, 342
Géographie — critère subsidiaire, 70,
74, 75
Hamitiques (langues) — v. Table III.
Haussa (langue), 178-80
Hellénisme — influence prétendue
sur le Christianisme, 457-70
Hermétisme — influence prétendue
sur le Christianisme ; v. Reitzen-
stein R.
Héros (culte des), d'après l'école so-
ciologique, 126, 146, 156
Hiérogamie — v. Mariage mystique
Hittite (langue) — relation contes-
tée avec l'indoeuropéen, 175 —
avec le nubien, 175-7
Hocker — v. Sépulture
Inde — civilisations, 62, 66. 76, 358,
478 — religions, 286
Indochinoises (langues), 106, 111
Indoeuropéennes (langues) • — leur
parenté, 99, 111, 112, 113 — v.
Hittite
Indonésie — civilisation, 76, 478
Ingiet — origine et rites, 372-84
Initiations tribales — distinguées de
celles des sociétés secrètes, 329-30
— relations avec ces dernières,
330-31 — formes diverses, 269,
331-34 — Afrique, 341-47, 352-57
— Inde, 282 — Indoeuropéens, 117
— Australie, 356-71 — Amérique
méridionale (Yagans), 325, 326
Interdits ou tabous — source des
observances morales et religieuses,
d'après l'école sociologique, 129,
130, 141, 143 — du sacrifice, d'après
A. Loisy, 231 — interdits alimen-
taires, chez les Arabes, 309, 311 —
en Nouvelle Poméranie, 373, 375
— • divers en Afrique, 342, 345 —
en Australie, 357, 358
Introspection, en psychologie reli-
gieuse, 185, 186, 199, 200
Intichiuma, 130, 153, 368
Karma, 283
Kulturhistorische Méthode — v. Mé-
thode historico-culturcUe
Kulturkomplex, 71, 72
Kulturkreislehre — v. Ecole histo-
rico-culturelle
JLiangues — - origine commune indé-
montrable, 108 — classification,
111 — relations avec les races, ci-
vilisations, religions, 105, 106 —
rôle comme critère subsidiaire, en
ethnologie, 70, 74, 169-182 ; v. Mé-
thode philologique, Paléontologie
linguistique.
Les langues particulières sont
classées selon leur nom : indo-
européennes, rong, sumérien...
Leptcha — v. Rong
Léopards (hommes-léopards) — v.
Aniota
Lune (culte de la), chez les primi-
tifs, 39 — dans le cycle matriar-
cal, 335, 401 — chez les Indoeuro-
péens. 120. 121 — Arabes, 307 —
Basques, 160, 163, 164, 165 — Amé-
rique centrale, 401, 402, 407, 408,
409, 411, 412
Mage — sens du mot, 284
Magie — d'après l'évolutionnisme,
origine dQ la religion, 31, 38 — et
du sacrifice, 231, 250-2, 256 — en
fait, peu développée dans les civili-
sations archa'iques (Urkulturen),
233 — beaucoup dans les civilis.
IV. SUJETS TRAITES
491
j/ostérieures, 239, 339 - — non pré-
pondérante dans le sacrifice de
l'Inde ancienne, 280 — d'importance
croissante plus tard.' 281, 284, 286
- — de même chez les Arabes, 305
— très développée chez les Su-
méro-accadiens, 294, 295, 296, 298,
299 — en Nouvelle-Poméranie,
373-84 — magie analogique ou
sympathique, en Amérique cen-
trale, 407 — en Egypte, 425, 426
V. Divination, Cultes agraires
Mahomet (biographie), 312
Mahométisme, 66
Malayo-polynésiennes (langues), 106,
111
Mana — 142, 143, 153, 250
Mânisme — d'après l'évolutionnisme,
source de la religion, 31, 135 — et
du sacrifice, 229, 231 — en fait,
n'existe pas dans îles cercles les
plus anciens, 233, 250, 77 — de-
vient prépondérant dans le cercle
matriarcal, 239, 336, 339 — et
dans les civilisations postérieures,
339 — attesté pour les Indoeurop.,
123 — l'Inde védique. 277, et brah-
manique, 282 — très développé
dans une partie de l'Afrique, 259-
62, 265, 268, 269, 270-1 — ne sau-
rait être l'origine des rites d'Ini-
tiation et des sociétés secrètes,
353 — attesté chez les Arabes, 303
— et développé surtout aux épo-
ques plus récentes, 304, 305, 306,
312, 313, 314 — d'où les lois du
Lévitlque. 310, 314 — culte des pre-
miers ancêtres en Australie cen-
trale. 357, 359, 364, 366, 369 — au
Mexique, 402, 407 — culte des
morts en Nouvelle-Poméranie, 373,
374, 375 — esprits des ancêtres en
Nouvelle-Guinée, 397, 386
Mannbarlteltsfeste — v. Initiations
Mariages — thèses évolutlonnlstes,
32, 49 — réaction croissante, 50-5
— formes du m. dans les divers
cercles culturels. 57-67, 76, 477-8 —
en Nouvelle-Guinée, 387-8, 398 —
rituel indoeuropéen, 275 — arabe,
304 — mariage mystique à Eleu-
sis, 449-51, 453-4 — v. Commu-
nis7ne sexuel, Matriarcat, Monoga-
mie, Patriarcat
Masques, chez les primitifs — leur
origine dans le cycle matriarcal,
60, 213, 330 — leur emploi dans
l'Europe préhistorique, 209, 213 —
dans les civilisations secondaires,
339 — e'n Afrique, 355, 348 —
usages similaires en Australie,
362, 371
Matriarcat — thèses évolutionnistes,
32, 49, 54, 55, 77 — réfutation :
V. Mariage, Cercles cultit-rels (c.
matriarcal)
Médecins, chez les Yagans, 325-7 —
en Australie, 360
Mélanésie, 76
Méthode — anthropologique, 68, 11$
— ■ V. E volntionnisme
— comparative, 71, 105, 111, 131,
193-6
— • historique, en Angleterre, Améri-
que, 41, 97 ; cf. 36, 37 — Allema-
gne ; V. inéth. historico-cu.lt.
— historico-culturelle — origine et
progrès, 40, 41, 68, 87-98 — carac-
téristiques, 68-71 — procédés, 71-8,
232, 270-1 — compétence restreinte,
78-80 — objections, 80-1 — dan-
gers, 353-4 — perfectionnements
possibles, 42, 80 — sommaire de
ses conclusions, 76, 477-8 ; v. Cer-
cles culturels
— philologique — origines, 99, 112
— caractéristiques, 100-5 — utilité,
105-9, 111, 181 — application aux
langues indoeuropéennes, 115-25 —
africaines et asiatiques, 169-181
— dangers, 109-11, 116
— psychologique — 182-96, 197-203.
244-6
— ■ sociologique — exposé, 127-33 —
règles, 156 — postulats, 133-40
Mexique — v. Astrologie, Divination,
Mythologie, Sacrifice
Mon-kmêr (langues), 111
Monogamie — primitive, 32, 50, 51,
53, 57, 76, 477-8 — dans les civili-
sations primaires, 59, 117 — se-
condaires, 62 — restaurée par le
Christianisme, 62, 66 — tempo-
raire, chez les Marlnd, 387 —
V. Mariage
Monothéisme — prétendu des Bas-
ques, 159, 160 — chez les Indo-
européens, les non civilisés, etc. ;
i92
IV. SUJETS TR.\ITES
V. Etres suprêmes — origine
païenne du monothéisme t hi-étien,
d'après révolutionnisme, 45a
Morale — non primitive, d'après
Fi-azer. 241 — origine sociale,
d'acres l'école sociologique, 128-Ô .
139 — critique, 147-56 — chez les
Indoeuropéens, 119-20 — Suméro-
."ccadiens. 300-1 — dans les ini-
tiations australiennes, 357, 358,
359, 360. 367 — inattestée dans les
sacrifices africains, 270 — - et dans
les mystères êleusiniens, 446. 469
— vagniement amorcée dans ceux
dOsiris. 426 — pi-épondérante dans
le mystère chrétien. 46S-70 — v.
Prière, Sacrifice
Morts — V. Deuil, Monisme, Sépul-
ture, Tic fvtnre
Mystères — dans l'Amérique cen-
trale, 402-14 — d'Osiris, en Egyp-
te. 414-26. 451, 454 — de Déméter.
en Grèce, 441-55 — d'Adonis, Tam-
mouz, Cjbèle et Attis. 455 — re-
lations des mystères païens avec
le niystèi-e chrétien, 456-70 — leurs
analogies avec les rites des pri-
mitifs entre\Ties par L.afitau. S :
V. Cultes agraires. Initiations, So-
ciétés secrètes — question à re-
prendre. 472
M\"thologie — origine, d'après M.
Mueller, 118 — rôle de critère
subsidiaire, 70, 74, 75 — mythol.
lunaire du c matriarcal, 353, 409.
411, 478 — solaire du c; totémiste,
411. 478 — des nomades, 410 — in-
dienne et iranienne, 287 — basque.
163-S — égyptienne, 164 — incon-
sistance générale de ses données.
466
Xaturisme — système démodé. 31,
141 — adoration de la Xature.
chez les primitifs, 39 — Indo-
européens. 120-3 — Basques, 163-5
en Egypte. 415-7, 424-6 — à Eleu-
sis, 443-4 — dans le culte de
Mithra, 433-4... v. Ciel, Lune, So-
leil, Terre...
Xomades (cercle des), 478
Xormal et anormal, d'après Dur-
kheim, 130, 131
Xouvelle-Guinée — v. Mariage, So-
ciétés secrètes
Xouvelles-Hébrides, 164
Xouvelle-Poméranie — v. Sociétés se-
crètes
Xubien — parenté avec le hittite et
les langues indoeuropéennes, 175-7,
181
Orage (dieux indoeurop. de 1'), 121-2
Paléontologie linguistique — 99, 115 :
v. Méthode philologique
Pan'-ibylonisme, 86
Parenté (systèmes de) — v. Mariage,
Matriarcat, Patriarcat
Passage (rites de) — v. Initiation
Pathologie religieuse — 197, 199
Patriarcat — thèses évolutionnistes,
32, 49, 51, 54, 77 — dans les civi-
lisations primaires, 59, 107 : cf. 76.
477-S — secondaires, 62. 64 — v.
Mariage, Matriarcat, Monogamie
Pérou — ■ civilisation, 62
Phalliques (rites) — 338. 353, 444,
448, 450
Poisson, dans l'art chrétien. 464. 470
Polyandrie, 62-3
Polygamie, 59, 60, 62
Polynésie. 76. 478
I*réhistoire — v. Fouilles — compa-
raison de leurs résultats avec la
théorie des cercles culturels ; v.
Cercles — étude par les langues :
V. Paléontologie linguistique — par
le symbolisme mythologique, 410-4
— - V. Basques, Indoeuropéens
Prière — d'après l'école sociologique,
143, 144 — étude expérimentale,
198-203 — relation avec le sacri-
fice : V. Sacrifice — pr. chez les
Tagans. 320-1
Primitifs — mentalité, d'après l'éco-
le sociologique, 126 — sacrifices,
248-50. 255-58 : cf. Pygmées —
V. Etre^ suprêmes. Monogamie,
Morale, Sacrifices, etc.
Production (régime de la) — distin-
gué de l'ergologie, 82, 83 — son im-
portance comme facteur d'évolu-
tion, 91-8. 56-65 ; cf. 76, 477-S
Promiscuité primitive — v. Mariage
(thèses évolutionnistes)
Psychologie religieuse — intérêt, 182.
183 — conditions subjectives, 183-5
— théories diverses, 197-8 — v.
Méthode psychoh. Prière, Sacrifice
Puberté (rites de la) — v. Initiations
IV. SUJETS TRAITES
i93
Purifications rituelles — v. Cathar-
tique
Pj-gmées, 76, 4 77 — conceptions re-
ligieuses. 35 — monogamie, 50, 51,
57 — organisation sociale, 57-8 —
sacrifices, 233-5, 240-1, 248-50, 252,
255. 259, 267-9, 270, 271 — initia-
tions, 331 — société secrète afri-
caine, 348 — civilisation mixte, 213
Queensland (tribus du), 360-1, 365,
366, 367, 368, 371
Questionnaires, en psychologie reli-
gieuse — 187, 188
Races — ne correspondent pas aux
langues, 105, 115
Religion — étymologies douteuses du
mot, 100 — distincte de la mytho-
logie, 118 — origine et nature,
d'après l'école sociologique, 129-30,
139. 140-7 — critique, 147-56 —
ses formes originelles actuellement
inconnaissables, 79, 80, 108 — r.
des Indoeuropéens, 117-25 — de
l'Inde, 286, 287 — sémitiques, 106,
302 (et les ouvrages cités, p. 301-
15) — assyi'obabylonienne, 292,
293, 294, 296, 298 (et les ouvrages
cités, p. 292-301) — grecque et
romaine, 315, 316, 461 — orienta-
les, dans le paganisme romain, 455
— des anciens Basques, 156-68 —
des Yagans, 316-28
Rig Veda — 118, 272, 275, 280, 281,
282. 283. 284
Rong — relation avec le suinérien.
171-3, 181
Royauté absolue — origines, 63-4
Sabbat, babylonien et biblique, 292
Sacerdoce — en Afrique, 262, 263,
266 — dans l'Inde et en Perse,
272, 273, 276, 277, .278, 282-4 —
sac. indoeuropéen. 284-6 — sumé-
ro-accadien. 294, 295, 296 — mi-
thriaque, 435-7 — égri^ptien : v.
Osiris (mystères) — éleusinien,
444-5 ; cf. Eumolpides
Sacrifice — thèses évolutionnistes,
144-5, 229-31, 240, 241 — ses for-
mes dans les cercles culturels, en
général, 232-44 — en Afrique, 258-
71 — Inde et Indoeuropéens, 251,
252, 272-87 — Suméroaccadiens,
287-301 — Arabes, 301-16 — Hé-
breux et Israélites, 301. 308, 309,
310, 313, 314, 315 — Minéens, Na-
batéens, Sabéens, 311, 312, 313 —
Grecs et Romains, 315-6. 409 — au
Mexique, 407 — absence, dans
l'Amérique méridionale, 322 — et
.^n Australie, 325. cf. 370-1 — es-
sence. 236-9. 248, 287, 288 — psy-
chologie, 24 4-58 — relation avec la
prière, 243, 247-50, 252-5, 284
— aux mânes — en Afrique, 259-62,
265, 271 — Arabie, 303. 304-5, 306
— de vivres (son sens). 238
— de prémices — chez les Pygmées,
233-4, 267-8 — manque chez les
Tagans (pygmoïdes), 322 — at-
testé chez les Ainos, Gilyaks,
Tohouktches etc., 234 — Arabes,
303, 306, 307, 308, 309, 314 — en
Afrique. 266, 267-8 — on l'y trouve
adressé aux ancêtres, 262 — aux
ancêtres divinisés, 265 — en Aus-
tralie. 370-1 — sa psychologie, 238.
247-50, 252, 253, 271
— humain — absent des cercles les
plus anciens, 238-40 — et chez les
Suméroaccad., 300 — usité chez
les Arabes, les Hébreux et leurs
voisins. 313-4, 315 — en Afrique,
260-1, 263, 264. 267 — où il appa-
raît plus récent. 271 — sa psycho-
logie. 257
— expiatoire — dérivé des rites ca-
thartiques. d'après Wundt. 240 —
manque, en général, chez les Pyg-
mées, 240-1, 233 — attesté chez les
nomades, en général, 241 — les
Arabes, 312. 314, 315 — en .Afri-
que, 264, 268-70 — les civilisés, à
l'exception de la relg. égyptienne et
du bouddhisme, 241 — dans l'Inde,
28 1 — • chez les suméroaccadiens,
294, 297-8 — sa psychologie, 255-7
— expiatoire par substitution (stoll-
vertretendes SUhnopfer), 241-3 —
en Afrique, 268-70 — à Babylone,
298-300 — d'apparition tardive,
243. 257 — sa psychologie, 257-8
— communiel. chez les Arabes —
302. 305. 306, 310-3 ; v. Cène, Com-
munion totcmiquc, Thcophagie
Saints — origine 'de leur culte,
d'après l'école sociologique, 146 —
substitués aux dieux païens, 158,
162 — légendes basques, 159
494
IV. SUJETS TRAITÉS
Sargonides, 296
Science des religions — recul des
thèses évolutionnistes, 33-41
Sémitiques (langues) — relations de
parenté, 171-4, 178-82
Sept (le nombre), à Babylone et dans
la Bible, 292
Sépulture — chez les Basques, 15 8
— • les Yagans, 323 — en position
accroupie (Hocker), 210 ; cf. 412-4
Sociétés secrètes — distinguées des
initiations tribales, 329, 330, 341 —
manquent dans les Urkulturen, 332
— leur origine dans le cercle ma-
triarcal, 334-6, 95, 60-1, 353 —
plutôt absentes en Australie, oïl la
civilisation matriarcale est peu dé-
veloppée, 360, 367, 371 — formes
dans les cercles mixtes, 336-40 —
Afrique, 347-52 — Mexique, 339,
402 s. — Nouvelle-Poméranie, 372-
84 — Nouvelle-Guinée, 393-9 —
théories explicatives, 330, 352-5 —
question de méthode, 340, 354-5
Sociologie — • recul des thèses évolu-
tionnistes, 32-3, 48-56, 83-6 — nou-
velle orientation (historique), 40-1,
86-98 — régime social des divers
cercles culturels, 56-67, 477-8
Soleil — sa divinisation non primi-
tive, 39 — dans le cycle totémiste
et les civilisations qui en dérivent,
338, 477-8 — chez les Indoeuro-
péens, 120, 121 — Basques, 160,
164 — au Mexique, 407, 412 —
sacrifice au soleil, en Afrique, 266
■ — ■ dieux du soleil : v. Gèbe, Héllos,
Mithra, Shamasli, Sol, Sûryâ, Vit-
zilopotchli...
Sondergôtter, 123
Soudan — civilisation, 76 — langues,
182
Statistiques, en psychologie reli-
gieuse, 186, 187
Subincision — dans l'Europe préhis-
torique, 213 — en Australie, 360,
36], 362, 363, 368, 370
Surhérien — affinités avec le rong et
le basque, 171-3, 175, 181
Superstition — peu développée chez
les Yagans, 327
Suppléances légitimes et illégitimes,
73
Syricrêtisme ■ — v. Christianisme
Tabous — V. Interdits
Taoïsme, 66
Tatouage — dans le cercle toté-
miste, 59 — en Afrique, 342, 343
Taurobole, 468
Terre (culte de la) — dans les civi-
lisations secondaires, 337, 338,
477-8 — au Mexique, 402, 407,
408, 409, 410, 411, 413 — dans la
théogonie mlthriaque, 431 — éleu-
sienne, 453 ; v. Déméter — indo-
européenne, 121, 123
Théophagie — dionysiaque et éleu-
sinienne, 447, 467, 468 — mitliria-
que, 437-40 — v. Sacrifice com-
muniel
Théos — étymologies, 100-1
Tibéto-birmaniennes (langues), 106,
111
Totémisme — notion, 59 — forme
première de la religion, d'après
Durkheim, 142-3, 130, 136, 139 —
critique, 153-5 — non primitif, 59,
155, 233 — cercle d'origine, 59, 96,
477-8 — fusion tardive avec la
culture matriarcale, 61 — dispari-
tion,, 62 — présence dans l'Europe
et l'Afrique préhistoriques, 212,
213 — chez les Sémites, 302 —
Amérique du Nord et Californie,
332 — Australie, 153-5, 356, 361,
362, 364, 366, 368, 369, 370, 371 —
Mexique, 401, 402, 407, 411 — ne
saurait être l'origine commune de
toutes les initiations, 352
Uebereinstimmung (der Ueberreste)
V. Convergence
Urheber (thèse de Sôdei-blom), 34
Urkulturen, 477-8 — v. Cercles
Véda, 285, 286 ; cf. Atharva Veda,
Rig Veda
Védisme, 276, 281, 286, 287
Vent (dieux du), 120, 122, 123, 162
Vie future — croyances des Indo-
européens, 123-4 — Indoiraniens,
285 — notions imprécises des
Yagans, 323 — idées éleusiniennes,
442, 448-52 — mithriaques, 432,
434-5
Wirtschaft, Wirtschaftsformen, Wirt-
schaftsstufen ; v. Economie
Zoroastrisme, 287 — influence pré-
tendiie sur le Christianisme, 457,
458
TABLE ANALYTIQUE
Lettre de Son Eminence le Cardina-1 Mercier 5
La III'" session ; ses travauTf ; son compte rendu .... 7
DOCUMENTS
Organisation et but de la Semaine d'ethnologie religieuse . II
Comité international 13
Tableau synoptique des conférences 14
Noms et adresses des auditeurs de la III" session ... 16
SOMMAIRE DES CONFÉRENCES
1. Discours douverture. 27
2a. Tâches anciennes et tâches nouvelles de la Semaine,
par le R. P. Schmidt 31
I.|— PARTIE GÉNÉRALE
Introduction à l'étude ethnologique, historique,
psychologique, sociologique des religions.
2b. Die sozialen Formen der einzelnen Kulturkreise, von
Hochw. P. Schmidt 48
3. La méthode historico-culturelle, par le R. P. Pinard
de la BouLLAYE 67
4. Wirtschafts- und ergologische Formen und die
Kulturkreise, von Hochw. P. Koppers 81
5. La méthode philologique, par le R. P. Pinard de la
Boullaye 98
6. Culture et religion des Indo-européens, par M. le
Prof. Carnoy 112
7a. La méthode de l'école sociologique, par M. le Cha-
noine Bros. 1 25
-7b. Les affirmations de Técole sociologique sur la reli-
gion, par le même 140
8. La religion des anciens Basques, par Don J. M. de
Barandiaran 156
9, Afrika, Vorderasien und die friiheste Vorgeschichte.
von Herrn Dr. Drexel 169
10. Les méthodes de la psychologie religieuse, ])ar le
R. P. Pinard de la Boullaye 182
11. La psychologie de la prière, par le R. P. Gbmelli . . 197
12. Pràhistorische Archâologie und kulturhistorische
Méthode, von Herrn Prof. Dr. Menghin .... 203
13. Les fouilles pi'éhisloriques et leur teclinique. par
TAbbé J. Bouyssgnie 218
IL — PARTIE SPÉCIALE
1" SECTION : Le sacrifice
chez les peuples incultes et chez les peuples antiques.
14. Notions générales sur le sacrifice dans les cycles
culturels, par le R. P. Sghmidt 229
15. Zur Psychologie des Opfers, von Herrn. Prof. Dr.
WUNDERLE 244
16. Das Opfer in Afrika, von Hochw. P. Schebesta . . . 258
17. Le sacrifice dans Tlnde et les Indo-européens, par
M. le Prof. A. Garnoy 272
18. Das Opfer bei den Sumero-Akkadern, von Herrn Prof.
Dr. Hehn 287
19. Le sacrifice chez les Hébreux, par M. le Prof. Sanda . 301
20. Das Opfer bei den Arabern, von H. Prof. Dr. Klameth. 301
21. Opferriten der griechischen und romischen Kulte,
von Herrn Dr. Andres 315
22. La religion et l'Etre Suprême chez les Yagans, par
le R. P. KOPPERS 316
2" SECTION : initiation tribale et sociétés secrètes
chez les non-civilisés ; mystères des peuples antiques.
23. Notions générales sur l'initiation tribale et les socié-
tés secrètes, par le R. P. Sghmidt 329
24. Les sociétés secrètes en Afrique, par M. le Prof. Ed.
De Jonghe . ., V .... 340
25. Tribal Initiation and Secret Societies in Australia,
by Dr. L. Ehrligh 356
26. Die Ingiet-Mysterien auf Neupommern, von Hochw.
P. WiNTHUIS 372
27. Sociétés secrètes des Marind, par le R. P. Viegen . . 384
28. Mystères astronomico-religieux dans l'Amérique
Centrale, par le R. P. Kreighgauer 399
29. Die Mysterien des Osiris, von Herrn Prof. Dr. JuNKER. 414
30. Les mystères de Mithra, p,ar M. le Chanoine Van
Crombrugghe 427
31. Les mystèi-es d'Eleusis, par M. l'Abbé De Caluwe . 441
32. Les mystères d'Adonis et d'Attis, par le R. P. Duhr . 455
33. Les mystères païens et le mystère chrétien, par le
R. P. de Grandmaison i 456
34. Séance de clôture et discours d'adieu 471
Epilogue. — La prochaine session 476
Appendice. — Les cercles culturels 477
Tables alphabétiquesi 479
l'able des 'Sigles 10
Etablissements d'imprimerie J. Dupuis, Marcinelle (Belgique).
(O
BL
21
1922
Semaine internationale
d'ethnologie religieuse
Compte-rendu arialytique
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