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Full text of "Comptes rendus des séances de la Société de biologie et de ses filiales"

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COMPTES  RENDUS  DES  SÉANCES 


ET 


MÉMOIRES 


LUS 


A  LA  SOCIÉTÉ  DE  BIOLOGIE 

PENDANT  L'ANNÉE  1870. 


Par 


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COMPTES  RENDUS  DES  SEANCES 


ET 


IRES 


DE   LA 


SOCIETE  DE  BIOLOGIE. 


TOME  DEUXIÈME  DE  LA  CINQUIÈME  SERIE 


ANNEE  1870 


VINGT-UEUXIEME   DE   LA   COLLECTION. 


AVEC    4    PLANCHES     L  1  T  H  OG  R  A  P  H  I  E  ES. 


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PARIS 

ADRIEN  DELAHAYE,  hbraiue-editeur, 

Place  de  l'École-de-Médecine. 


1872 


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LISTE 


DES  MEMBRES  DE  LA  SOCIÉTÉ  DE  BIOLOGIE 


EN  1870. 


COMPOSITION  DU  BUREAU. 


Président  perpétuel. 
Vlcc-prcsidcnts.  .  .  . 
i>ecrétaire  général.  . 

Secrétaires  ordinaires. 


Trésorier. 
Archiviste. 


M.  Claude  Bernard. 

M.   Brown-Séquard. 

M.   Charcot. 

M.  Dumontpallier. 

M.  Duquel. 

M.  Hayera. 

M.  Gréhant. 

M.  Lépine. 

M.  Gallois. 

M.  Laborde. 


MEMBRES  HONORAIRES. 


MM.  Andral. 
Becquerel. 
Bernard  (Claude). 
Bouillaud. 
Chevreul. 
Coste. 


MM.  Dumas. 
Littré. 

Milne  Edwards. 
De  Quatrefages. 

N... 
N... 


a 


VI 


MEMBRES  TITULAIRES-HONORAIRES  (1870). 


MM.   Balbiani. 
Bastien. 

Bernard  (Charles). 
Berlhelot. 
Blot. 
Bouchut. 
Bouley  (Henri). 
Bourguignon. 
Broca. 

Brown-Séquard. 
Charcot, 
Chatin. 
Davaine. 
Depaul. 

Fournier  (Eug.). 
Giraldès. 
Goubaux. 
Guillemin. 
Hillairet. 
Houel. 


MM.  Jacquart  (Henri). 
Laboulbène. 
Leblanc  (C). 
Le  Bret. 
Leconte. 
Le  Gendre. 
Liégeois. 
Lorain. 
Luys. 
Marey. 

Martin-Magron. 
Michon. 

Moreau  (Armand). 
Regnauld. 
Sappey. 

Soubeiran  (J.  L.j. 
Verneuil. 
Vidai. 
Vulpian. 


MEMBRES  TITULAIRES. 


MM.  Bail. 

Bergeron. 

Bert  (Paul). 

Bouchard. 

Carville. 

Chalvet. 

Cornil. 

Cotard. 

Duguet. 

Dumontpallier. 

Gallois. 

Gréhant. 

Gubler. 

Hardy. 

Hayem. 

Isambert. 

Jolyet. 


MM.  Krishaber. 
Laborde. 
Lancereaux. 
Legros. 
Lépine. 
Leven. 
Liouville. 
Magitot. 
Magnan. 

Milne  Edwards  (Alphonse). 
Ollivier. 
Rabuteau. 
Ranvier. 
Raymond. 
Robin  (Charles). 
Trasbot. 
Vaillant. 


vu 
MEMBRES  ASSOCIÉS. 


MM. 


Agassiz. 

MM.  Owen  (Richard) 

Baer  (de). 

Paget  (James). 

Bennett  (Hughes). 

Pouchet  père. 

Ehrenberg. 

Purkinje. 

Gurlt  (Ernst-Friedrich). 

Queteley. 

Huss  (Magnus). 

Schwann. 

Jones  (Bence). 

Siebold. 

Lebert(H.). 

Sédillot. 

Liebig  (Justus). 

Valentin. 

Mohl  (Hugo  von). 

MEMBRES  CORRESPONDANTS  NATIONAUX. 

MM.  Beylard à  Paris. 

Blondlot à  Nancy. 

Chaussât à  Aubusson. 

Chauveau à  Lyon. 

Courty à  Montpellier. 

Dareste à  Lille. 

Desgranges à  Lyon. 

Dufour  vGustave) à  Rome. 

Dugès  aîné au  Mexique. 

Duplay à  Paris. 

Ebrard à  Bourg. 

Ester à  Montpellier. 

Faivre  (E.j. à  Lyon. 

Germain  de  Saint-Pierre.,  à  Nice. 

Gosselin à  Paris. 

Guérin  (Jules; à  Paris. 

Ehrmann à  Strasbourg. 

Huette à  Montargis. 

Lecadre au  Havre. 

Leroy  de  Méricourt à  Brest. 

Lespès à  Marseille. 

Leudet  (Emile) à  Rouen. 

Martins  (Charles) à  Montpellier. 

Ollier à  Lyon. 

Pelvel à  Dives. 

Rouget à  Montpellier. 

Saint -Pierre à  Montpellier. 

Stoltz à  Strasbourg, 


VIII 

MEMBRES  CORRESPONDANTS  ÉTRANGERS. 

Grande  Bretagne. 

MM.  Beale - à  Londres. 

Berkeley  (M.  .1.) à  Kings-Cliff. 

Bowman  (W.) à  Londres. 

Carpenter  (W.  B.) à  Londres. 

Grant  (R.  E.) à  Londres, 

Jacob  (A.) à  Dublin. 

Jones  (Wharton) à  Londres. 

Maclise à  Londres. 

Marcel à  Londres. 

Nunneley à  Leeds. 

Redfern à  Aberdeen. 

Sharpey à  Londres. 

Simon  (John) à  Londres. 

Simpson à  Edimbourg. 

Thomson  (Allen) à  Glasgow. 

Toynbee à  Londres. 

Waller à  Londres. 

Williamson à  Londres. 

Allemagne. 

MM.  Bischoff à  Munich. 

Briicke  (Ernst) à  Vienne. 

Carus  (V.) à  Leipzig. 

Dubois-Reymond à  Berlin. 

Helmollz à  Leipzig. 

Henle à  Gœttingen. 

Hering à  Stuttgardt. 

Hirschfeld  (Ludovic) à  Varsovie. 

Hoffmeister à  Leipzig. 

Hyrtl à  Vienne. 

Kœlliker à  Wiirzburg. 

Leuckart à  Munich. 

Ludwig à  Vienne. 

Luschka à  Tubinge. 

Mayer à  Bonn. 

Meckel  (Albert). à  Halle. 

Rokitansky à  Vienne. 

Schaltze. à  Bonn. 


IX 

MM.  Stannius à  Rostock. 

Stilling à  Cassel. 

Virchow à  Berlin. 

Weber  (Wilhelm-Eduard). .  à  Leipzig. 
Weber  (Ernst-Heinrich). . .  à  Leipzig. 

Belgique. 

MM.  Gluge à  Bruxelles. 

Spring à  Liège. 

Tliiernesse à  Bruxelles. 

Van-Beneden à  Louvain. 

Danemark. 

M.  Hannover à  Copenhague. 

Suède. 

M.  Santesson à  Stockholm. 

Hollande. 

MM.  Donders à  Utrecht. 

Hartig à  Utrecht. 

Van  der  Hœven à  Leyde. 

Suisse. 

MM.  Duby à  Genève. 

Frey à  Zurich. 

De  la  Harpe à  Lausanne. 

Miescher à  Bâle. 

Odier à  Genève. 

Prévost à  Genève. 

Vogt à  Genève. 

Italie. 

MM.  Lusana à  Palerme. 

Martini à  Naples. 

Moleschott à  Turin. 

Vella à  Turin. 

Portugal. 

M.  De  Mello à  Lisbonne. 


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X 


E(ats>tJnis. 


MM.  Bigelow  (Henry  J.) à  Boston. 

Draper à  New-York, 

Leidy  (Joseph) à  Philadelphie. 

Brésil. 

M.  Abbott à  Bahia. 


COMPTES  RENDUS 

DES  SÉANCES  DE  LA  SOCIÉTÉ  DE  BJOLOGIE 

PENDANT  L'ANNKR  1870. 


COMPTE  RENDU  DES  SÉANCES 


DE 


PENDANT  LE  MOIS  DE  JANVIER  1870; 


Par  m.  HAYEM,  secrétaire. 


niÈSIDENCE  DE  M.  CL.  BERNARD. 


Séance  du  8  janvier. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Section  et  enlèvement  dune  portion  de  l'hémispoère  cérébral  cdez  un 
cocaoN  d'Inde;  lésions  et  phénomènes  consécutifs  a  cette  opération; 
par  MM.  Laborde  et  Leven. 

Le  !"■  juillet  1869,  après  avoir  préalablement  dénudé  le  crâne,  du 
côté  droit,  chez  un  coclion  d'Inde  très-vigoureux,  et  mis  également  à 
nu,  dans  toute  son  étendue,  l'hémisphère  cérébral  du  même  côté, 
nous  avons  enlevé,  d'avant  en  arrière,  une  portion  considérable  de  ce> 
hémisphères  dans  sa  partie  superficielle,  évitant  autant  que  possible 
de  léser  les  parties  profondes  du  cerveau  et  le  cervelet;  les  symptô- 
mes consécutifs  ont  montré  que  ce  but  avait  été  parfaitement  atteint; 
c.  R.  1870.  1 


il  y  a  eu  aussi  très-pou  de  sang  versé,  et  les  téguments  ont  été  infimé- 
diatemcnt  réunis  à  l'aide  d'une  suture. 

L'opération  à  peine  terminée,  l'animal  tomba  sur  le  côté  gauche,  et 
ses  pattes  refusèrent  tout  mouvement,  en  môme  temps  que  la  sensibi- 
lité au  pincement  y  parut  très-affaiblie.  La  température,  prise  sous  l'ais- 
selle avant  l'opération,  était  de  38  degrés  centigrades;  immédiatement 
après  elle  était  de  38°, 7. 

Lorsqu'on  stimulait  avec  instance  l'animal,  il  opérait  un  léger  mou- 
vement de  manège  à  droite. 

Toute  la  journée  il  resta  blotti  dans  un  coin,  comme  absorbé  et  som- 
nolent, couché  sur  le  côté  gauche,  ne  prenant  pas  de  nourriture,  ne  se 
mouvant  que  lorsqu'on  l'y  excitait  fortement,  et  alors  chancelant  sur 
ses  pattes  et  tombant  invinciblement  sur  les  pattes  antérieure  et  pos- 
térieure gauches.  Cependant  la  sensibilité  était  moins  obtuse. 

Le  lendemain  rnatin,  un  mieux  très-appréciable  s'était  opéré  dans 
l'état  de  l'animal  :  il  mange  du  pain  que  nous  lui  offrons  et  il  se  meut 
spontanément,  mais  avec  un  dandinement  particulier  et  tout  penché 
sur  le  côté  gauche. 

Les  jours  suivants,  cet  état  dé  parésie  diminue  progressivement,  et 
trois  semaines  environ  après  l'opération  qu'il  a  subie,  il  faut  un  exa- 
men attentif  pour  constater  l'existence  de  la  paralysie,  laquelle  semble 
prédominer  dans  la  palle  antérieure  gauche. 

Une  particularité  qu'il  importe  dès  à  présent  de  signaler,  c'est  que 
cette  même  patte  est  le  siège  d'une  atropine  de  volume  manifeste,  et 
nous  verrons  plus  tard  que  cette  atrophie  coïncidait  avec  une  réelle 
altération  du  tissu  musculaire. 

Quoi  qu'il  en  soit,  et  à  cela  près  de  quelques  phénomènes  que  nous 
venons  de  mentionner,  l'animal  avait  complètement  repris  en  appa- 
rence son  état  normal,  les  fonctions  cérébrales  ne  paraissaient  pas  no- 
tamment troublées,  lorsque  vers  les  derniers  jours  du  mois  de  septem- 
bre dernier,  nous  nous  aperçûmes,  à  la  suite  d'un  examen  attentif, 
d'une  manifestation  nouvelle  dont  lun  des  yeux  était  le  siège  :  c'était 
Vœil  droit,  il  y  existait  une  opacité  déjà  très-accusée  de  la  cornée 
transparente,  et  il  était  facile  de  se  convaincre  par  un  essai  approprié 
que  la  vue  de  ce  côté  était  très-imparfaite.  Cette  opacité  alla  croissant 
jusqu'au  mois  de  novembre,  époque  à  laquelle  la  vision  ne  s'exerçait 
plus  :  l'animal  nous  fut  montré  en  ce  moment  et  nous  pûmes  constater 
que  l'œil  droit  était  complètement  perdu,  qu'il  était  flétri  et  comme 
rentré  dans  l'orbite,  et  que  sa  partie  antérieure  et  cornéenne  présen- 
tait une  surface  opaline  blanchâtre  et  comme  ridée. 

L'animal   étant  mort  accidentellement  (étranglé   par  un  chien)  le 
24  novembre  dernier,  nous  en  avons  soigneusement  l'ait  l'autopsie  et 


3 

nous  vous  en  apportons  les  résultats,  surtout  en  ce  qui  concerne  Tor- 
gane  expérimentalement  affecté. 

Voici  d'abord  les  deux  yeux  extraits  de  Torbite  :  on  voit  combien  le 
globe  oculaire  droit  diffère  du  gauche  et  par  son  volume  et  par  son 
aspect.  Ce  volume  est,  en  effet,  réduit  plus  que  de  moitié,  et  tandis 
que  l'œil  gauche  a  conservé  tous  les  attributs  physiques  et  anatomiques 
normaux,  le  droit  est  comme  flétri,  ratatiné  et  entièrement  opaque. 
Toutefois  il  est  à  remarquer  qu'il  s'agit  là  d'une  simple  altération  de 
nutrition,  sans  processus  aigu  irritatif  ou  d'autre  nature,  puisque  tout 
produit  d'un  pareil  travail  morbide  fait  défaut,  notamment  le  pus  ou 
l'ulcération.  Quant  à  l'altération  intime  des  membranes  en  particulier, 
le  désir  de  vous  soumettre  les  pièces  intactes  nous  a  empêché  de  les 
étudier  jusqu'à  présent;  mais  nous  y  reviendrons,  convaincus  que  la 
rétine  doit  avoir  sa  participation  à  cet  état  pathologique. 

Ce  qui  semble  le  prouver  à  priori,  c'est  que  le  tronc  du  nerf  optique 
droit  est  visiblement  atrophié  relativement  au  nerf  optique  gauche. 

Nous  arrivons  au  cerveau  lui-même,  que  nous  avons  dû,  pour  bien 
l'étudier,  faire  suffisamment  macérer  dans  une  solution  d'acide  chro- 
mique;  cette  circonstance  ne  permet  pas  de  constater  aussi  facilement 
aujourd'hui  les  particularités  qui  s'offraient  à  l'état  frais. 

La  plaie  faite  à  la  voûte  crânienne,  singulièrement  rétrécie  d'ailleurs, 
était  fermée  par  un  pont  fibreux  peu  résistant,  auquel  adhèrent  inlé- 
rieurement  quelques  parcelles  d'une  substance  molle,  pulpeuse,  (jue 
nous  avons  bientôt  reconnue  pour  être  du  tissu  cérébral  altéré.  L'hé- 
misphère cérébral  droit  mis  à  nu  présentait,  d'avant  en  arrière,  vers 
son  milieu,  une  cicatrice  blanche  nacrée,  comme  rubanée,  s'étendant 
de  la  corne  antérieure  du  lobule  postérieur  en  traversant  la  scissure 
sylvienne,  mais  très-superficiellement;  toutefois  la  continuité  de  la  ci- 
catrice n'était  pas  absolument  complète;  elle  était  interrompue  vers 
son  tiers  postérieur,  et  là  le  tissu  cérébral  semble  se  jomdrc  à  lui-même 
d'un  côté  à  l'autre  ;  le  tissu  lui-même  est  comme  froncé  tout  autour  de 
la  cicatrice,  effet  de  la  rétraction  de  celle-ci.  La  perte  de  substance 
qui  répond  à  la  cicatrice  représente  environ  le  tiers  de  1  hémisphère 
cérébral. 

Le  tissu  cicatriciel  lui-même  est  essentiellement  constitué  par  des 
éléments  cellulo-fibreux  contenant  des  noyaux  et  quelques  cellules 
disséminées  embryo-plastiques.  Nulle  part  au  sein  même  de  la  cicatrice 
nous  n'avons  rencontré  d'éléments  nerveux  proprement  dits;  mais  au 
niveau  de  la  courte  interruption  il  y  en  a  en  grand  nombre,  mêlés  à  de? 
fibrilles  de  tissu  conjonclif  qui  semble  prédominer,  des  tubes  nerveux 
interrompus,  mais  parfaitement  constitués,  et  des  cellules  nucléolées, 
qui  pourraient  bien  être  l'effet  d'une  régénération. 


4 

Dans  toute  la  sphère  de  la  lésion,  les  vaisseaux  capillaires  abondent 
et  leurs  parois  sont  manifestement  granuleuses. 

Les  autres  parties  de  l'encéphale  nous  ont  paru  être  saines.  Nous 
avons  le  regret  de  n'avoir  pu  examiner  suffisamment  la  moelle  allongée, 
à  raison  des  grandes  difficultés  que  présente  son  extraction  du  canal 
vertébral  ;  mais  les  phénomènes  déjà  signalés  du  côté  de  l'un  des 
membres  supérieurs,  et  les  altérations  de  structure  que  nous  allons 
signaler  dans  les  muscles  de  cette  patte,  nous  portent  à  croire  que  des 
lésions  secondaires  descendantes  existaient  très-probablement  dans  les 
jiarties  supérieures  de  l'axe  spinal. 

En  effet,  les  muscles  de  la  patte  antérieure  droite  ne  présentaient 
pas  seulement  une  atrophie  généralisée;  les  faisceaux  primitifs  eux- 
mêmes  étaient  atrophiés  et  altérés,  comme  ils  le  sont  habituellement 
sous  l'influence  des  lésions  médullaires,  c'est-à-dire  qu'ils  offraient  la 
dégénérescence  granuleuse  très-appréciable,  la  striation  restant  in- 
tacte en  elle-même. 

Telles  sont  les  principales  particularités  que  ce  fait  expérimental  a 
présentées  ;  elles  sont  assez  remarquables  pour  que  nous  les  résumions 
en  quelques  mots  afin  de  les  faire  ressortir  : 

1°  Atrophie  totale  de  l'œil  correspondant  à  l'hémisphère  cérébral 
lésé  ;  atrophie  paraissant  résulter  d'une  altération  de  nutrition  pure, 
sans  autre  processus  appréciable  :  cette  altération  ne  démontre-t-elle 
pas  une  véritable  influence  trophique  exercée  par  le  cerveau?  A  cette 
atrophie  de  l'œil  se  rattache  évidemment  celle  du  nerf  optique  cor- 
respondant. 

2"  Phénomènes  de  paralysie  de  la  motilité  et  de  la  sensibilité  bien 
prononcés,  au  début,  dans  les  membres  du  côté  opposé  à  celui  de  la 
lésion  cérébrale;  préexistence  de  ces  phénomènes  avec  atténuation  de 
plus  en  plus  marquée  jusqu'au  moment  de  la  mort  de  l'animal. 

3°  Atrophie  consécutive  des  muscles  de  la  patte  antérieure  droite 
(côté  de  la  lésion  cérébrale),  et  de  dégénération  granuleuse' commen- 
çante des  faisceaux  primitifs  de  ces  mêmes  muscles;  lésions  de  nature 
à  révéler  une  altération  secondaire  et  descendante  de  la  moelle  épi- 
nière,  bien  que  cette  altération  n'ait  pu  être  constatée  directement. 

Faisons  remarquer,  à  ce  sujet,  que  les  observations  négatives  ré^cem- 
ment  publiées,  touchant  à  la  production  expérimentale  des  lésions  se- 
condaires de  la  moelle,  sont  tous  relatifs  à  de  simples  incisions  faites 
dans  la  substance  cérébrale;  or  le  fait  que  nous  venons  de  relater,  et 
d'autres  qui  sont  en  cours  d'observation,  nous  portent  à  penser  qu'il 
ne  suffit  pas  d'une  simple  piqûre  ou  incision,  mais  que  l'enlèvement 
d'une  certaine  portion  de  matière  cérébrale  est  nécessaire  pour  réa- 
liser l'une  des  conditions  essentielles  du  résultat  dont  il  s'agit;   c'est 


5 

d'ailleurs  ce  que  montre  plus  amplement  la  suite  de  ces  recherches. 
M.  Brown-Séquard  dit  qu'il  y  a  déjà  près  de  vingt  ans,  il  a  ob- 
servé l'atrophie  du  bout  central  des  nerfs  après  leur  section.  Lors- 
que M.  Waller  a  fait  connaître  son  importante  théorie  des  centres 
trophiques,  M.  Brown  Séquard  a  signalé,  entre  autres  objpclions,  !o 
fait  que  le  bout  central  des  nerfs  périphériques  sectionnés  n'est  pas 
sans  altération  comme  le  voudrait  cette  théorie.  Les  mêmes  causes, 
selon  toutes  les  probabilités,  déterminent  les  altérations  soit  dans  le 
bout  central,  soit  dans  le  bout  périphérique  d'un  nerf  coupé  ;  mais  il 
est  tout  naturel  que  celles-ci  soient  plus  prononcées  dans  le  bout  in- 
férieur. Il  s'est  assuré  que  l'atrophie  du  bout  central  n'est  pas  seule- 
ment due  à  un  arrêt  de  développement,  cette  altération  se  produisant 
(à  un  moindre  degré  il  est  vrai)  chez  les  animaux  adultes,  comme  chez 
les  jeunes. 

—  M.  Laborde  fait  une  communication  relative  àun  fait  de  dégénéra- 
tion secondaire  probable  de  la  moelle  survenue  chez  un  cochon  d'Inde 
consécutivement  à  l'ablation  du  tiers  d'un  hémisphère  cérébral  prati- 
quée au  mois  de  juillet. 

M.  Charcot  dit  que  c'est  un  sujet  à  reprendre;  il  rappelle  que  ré- 
cemment M.  Westphal  a  obtenu  des  résultats  positifs. 

M.  BkowvSéquard  fait  remarquer  que  le  développement  de  ces  dé- 
générations secondaires  présente  bien  des  inconnues.  MM.  Vulpian  et 
Dickinson  ont  vu  qu'après  les  amputations  c'est  tantôt  le  cordon  posté- 
rieur, tantôt  le  cordon  antérieur  de  la  moelle  qui  est  atteint.  11  croit 
que  l'irritation  primitive  se  transmet  par  l'intermédiaire  du  tissu  con- 
jonctif  et  que  ce  sont  les  altérations  de  ce  tissu  qui  produisent  celles  des 
tissus  nerveux. 

—  M.  Laborde  signale,  à  propos  du  fait  qu'il  a  rapporté,  que  l'animal 
qui  était  devenu  épileptique  a  guéri  par  l'administration  du  bromure  de 
potassium. 

—  M.  Brown-Séquard  fait  voir  des  animaux  chez  lesquels,  selon  toute 
apparence,  il  y  a  eu  transmission  par  hérédité  d'une  altération  ac- 
quise accidentellement  par  leur  père.  Il  fait  observer  aussi  que  la 
femelle,  mère  de  ces  animaux,  présente  une  déformation  semblable, 
mais  moindre. 

M.  Brown-Séquard  rappelant  les  observations  d'un  observateur  an- 
glais de  notre  temps,  M.  Harvey,  qui  démontrent  que  les  caractères 
physiques  û'un  père  peuvent  se  transmettre  par  l'intermédiaire  des 
petits  à  leur  mère,  dit  qu'il  y  a  lieu  de  croire  que  cette  femelle  a  été 
influencée  de  cette  manière. 

—  M.  Ranvier  expose  à  la  Société  les  résultats  (qu'il  a  déjà  com- 


6 

muniqués  à  l'Académie  des  sciences)  sur  la  production  de  l'œdème  sur 
des  chiens;  la  ligature  de  la  veine  cave  n'a  pas  produit  d'oedème,  tandis 
qu'il  se  produisit  dans  l'une  des  pattes  après  que  sur  le  même  animal  le 
nerf  scialique  a  été  sectionné. 

M.  Ranvier  a  étudié  les  lésions  du  tissu  conjonctif  œdématié  :  le 
nombre  des  globules  blancs  normaux  augmente  considérablement.  Les 
cellules  plates,  au  bout  de  vingt  heures,  sont  devenues  globuleuses; 
elles  ont  toutes  subi  la  dégénération  granulo-graisseuse;  on  les  pren- 
drait pour  des  cellules  des  glandes  sébacées.  Le  noyau,  visible  après 
coloration,  se  trouve  dans  le  milieu  de  la  masse  granuleuse.  M.  Ranvier 
insiste  sur  la  différence  que  présente  cet  œdème  d'avec  le  gonflement 
phlegmoneux  sous  le  rapport  de  la  mobilité  du  liquide. 

—  M.  Carville  présente  un  chien  sur  lequel  il  a  répété  avec  succès 
l'expérience  de  M.  Ranvier. 

— MM,  CnARcoTetJoFFROY  communiquent  un  cas  d'ataxie  locomotrice 
avec  arthropathie  de  l'épaule  droite.  Ils  ont  observé  que  la  moelle, 
indépendamment  des  lésions  de  l'ataxie  (sclérose  des  cordons  posté- 
rieurs), présentait  une  déformation  de  la  corne  antérieure  droite  limitée 
à  rétendue  du  renflement  cervical. 

M.  Charcot  ne  pense  pas  que  la  sclérose  des  cordons  postérieurs  puisse 
à  elle  seule  expliquer  le  développement  des  arthropathies  spéciales  de 
l'ataxie,  parce  que  la  sclérose  des  cordons  postérieurs  est  constante 
dans  cette  maladie,  tandis  que  les  arthropathies  y  sont  relativement 
rares. 

Répondant  à  quelques  questions  qui  lui  sont  adressées,  M.  Charcot 
expose  les  caractères  cliniques  de  l'arthropathie  de  l'ataxie;  quant  à 
l'anatomie  pathologique  de  cette  arthrite,  elle  n'est  encore  fondée  que 
sur  une  seule  nécropsie  que  M.  Charcot  a  communiquée  l'an  dernier  à 
la  Société  !  Ce  qu'au  point  de  vue  anatomique  cette  arthrite  offre  de 
particulier,  c'est  l'atrophie  très-rapide  des  têtes  osseuses  qui  est  carac- 
téristique à  la  première  période  de  l'affection.  Plus  tard,  une  hypertro- 
phie osseuse  peut  survenir. 

M.  Ranvier  remarque  à  ce  propos  que  c'est  au  début  seulement  que 
les  diverses  arthrites  ont  des  caractères  anatomiques  bien  tranchés 
(arthrites  goutteuse,  rhumatismale,  tumeur  blanche,  arthrite  sèche); 
qu'à  une  période  un  peu  avancée  des  altérations  identiques  peuvent  se 
montrer  dans  les  différentes  arthrites. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures. 


Séance  du  15  janvier, 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  VuLPiAN,  à  propos  du  procès-verbal,  donne  quelques  détails  sur 
l'examen  des  membres  du  chien  qui  avait  été  opéré  par  M.  Carville  et 
présenté  dans  la  dernière  séance.  Du  côté  de  la  section  du  nerf  scia- 
tiatique  il  existait  une  coagulation  dans  les  vaisseaux  plus  étendue  et 
plus  manifeste  que  du  côté  opposé.  Les  veines  surtout  contenaient  des 
thromboses  qui  siégeaient  dans  des  troncs  assez  volumineux. 

M.  Ranvier  a  trouvé  des  thromboses  veineuses  une  fois  sur  cinq  ;  dans 
les  autres  cas,  il  existait  des  dilatations  des  capillaires  et  des  accumu- 
lations de  globules  blancs;  mais  M.  Ranvier  n"a  pas  encore  terminé  ses 
études  sur  ce  sujet. 

IM.  Laborde  a  vu  se  former  des  thromboses  veineuses  dans  les 
cas  de  section  simple  du  nerf  sciatique.  Dans  ces  cas,  les  animaux 
meurent  avec  des  infarctus  pulmonaires.  Sur  des  lapins  et  des  cochons 
d'Inde  auxquels  MM.  Leven  et  Laborde  avaient  fait  la  section  du  nerf 
sciatique,  il  s'est  produit  dans  quelques  cas  un  peu  d'œdème  dans  le 
membre  correspondant;  mais  il  était  moins  développé  que  dans  les 
expériences  de  M.  Ranvier. 

M.  Ranvier  a  fait  un  grand  nombre  de  fois  des  sections  du  sciatique 
chez  le  chien  sans  jamais  produire  de  l'œdème.  Dans  ces  sortes  de  re- 
cherches, il  y  a  une  erreur  à  éviter,  c'est  de  prendre  pour  un  œdème 
formé  pendant  la  vie  l'infdtration  plus  ou  moins  grande  qui  survient 
lorsque  le  cadavre  de  l'animal  est  resté  pendant  quelque  temps  sur  un 
plan  incliné. 

M.  Brown-Séquard  n'a  jamais  observé  d'œdème  à  la  suite  de  la  sec- 
tion simple  du  nerf  sciatique. 

M.  Hayem  a  profité  de  l'expérience  faite  par  M.  Carville  et  conGr- 
mative  de  celles  de  M.  Ranvier  pour  étudier  au  microscope  l'état  des 
vaisseaux  du  membre  œdématié.  Il  a  vu  qu'il  existait  une  stase  san- 
guine étendue  aux  capillaires  et  aux  veines  avec  des  dilatations  irrégu- 
lières de  ces  vaisseaux,  et  que  de  plus  un  assez  grand  nombre  de  glo- 
bules rouges  s'étaient  extravasés.  D'ailleurs,  on  reconnaissait  déjà  à 
l'œil  nu  de  petits  points  ecchymotiques  dans  le  tissu  œdématié.  Il  y  a 
donc  ici  des  phénomènes  de  stase  et  d'issue  des  globules  comparables 
à  ceux  qui  ont  été  décrits  par  Cohnheim  dans  la  membrane  natatoire 
de  la  grenouille. 

De  plus,  M.  Hayem  a  voulu  voir  sur  cet  animal  si  les  phénomènes 
de  la  stase  étaient  modifiés  par  la  section  du  sciatique. 


8 

En  coupant  le  sciatique  d'un  côté  sur  une  grenouille  curarisée,  on 
constate  un  élargissement  des  artérioles  et  une  dilatation  consécutive 
des  capillaires. 

Si  l'on  fuit  alors  au  niveau  de  chaque  cuisse  la  ligature  do  la  veine 
principale,  on  se  met  chez  la  grenouille  dans  des  conditions  fort  ana- 
logues à  celles  de  l'expérience  de  M.  Ranvier.  On  voit  alors  que  du 
côté  non  sectionné  les  phénomènes  de  stase  se  développent  peu  à  peu 
et  assez  rapidement  d'abord  dans  les  capillaires,  puis  dans  les  veines, 
et  plus  tard  enfm  dans  les  artérioles  de  la  membrane  interdigitale. 

Du  côté  de  la  section  du  nerf  sciatique  les  mômes  phénomènes  se 
produisent,  mais  plus  lentement,  et  la  circulation  est  déjà  arrêtée  com- 
plètement depuis  plus  de  vingt-quatre  heures  du  côté  Opposé,  que  l'on 
peut  encore  voir  ici  une  circulation  irès-fuible  et  très-gônée  dans  les 
artérioles.  De  plus,  les  vaisseaux  restent  plus  dilatés,  et  la  patte  offre 
une  coloration  plus  rouge.  On  peut  donc  penser  que  dans  l'expérience 
de  M.  Ranvier  la  production  de  l'œdème  se  trouve  facilitée  par  la  dila- 
tation des  artérioles  qui  permet  l'abord  d'une  plus  grande  quantité  de 
sang,  et  cela  pendant  plus  de  temps  que  du  côté  opposé. 

M.  Ranvier  étudie  encore  actuellement  le  mécanisme  de  la  produc- 
tion de  l'œdème,  et  il  ne  fera  connaître  que  plus  tard  sa  conclusion; 
mais  il  ne  croit  pas  à  la  valeur  des  expériences  faites  sur  la  grenouille. 
D'après  lui,  il  y  a  trop  de  causes  d'erreur  à  éviter.  D'abord,  il  n'est  pas 
certain  que  le  sciatique  contienne  des  vaso-moteurs;  la  paralysie  de 
la  patte  qui  résulte  de  la  section  du  sciatique  sufnt  à  expliquer  les 
changements  de  circulation.  D'autre  part,  il  n'est  pas  certain  qu'il  y  ait 
dans  ce  cas  une  dilatation  des  vaisseaux;  car  on  observe  chez  la  gre- 
nouille des  variations  très-grandes  dans  le  diamètre  des  vaisseaux  sans 
que  l'on  fasse  intervenir  une  cause  extérieure.  Enfin,  il  n'y  a  pas  d''œ- 
dème  chez  la  grenouille  à  cause  du  peu  d'abondance  du  tissu  conjonc- 
tif.  Ces  considérations  ont  engagé  M,  Ranvier  à  laisser  de  côté  complète- 
ment les  grenouilles  pour  ce  genre  d'expériences. 

M.  Leve.n  a  souvent  vu  de  l'œdème  chez  la  grenouille,  et  il  croit  que 
cet  animal  a  suffisamment  de  tissu  conjonctif  pour  en  avoir. 

M.  Ranvier  pense  que  le  boursouflement  que  présentent  les  grenouilles 
dans  certaines  conditions  ne  constitue  pas  un  véritable  œdème.  Il 
change  rapidement,  suivant  le  milieu  et  la  position  dans  lesquels  on 
observe  l'animal. 

iM.  Hayem  croit  à  la  réalité  de  la  dilatation  des  petites  artères  après 
ia  ëecliun  au  sciatique  chez  la  grenouille,  et  il  rappelle  à  M.  Ranvier 
qu'il  a  fait  ses  études  sur  des  individus  curarisés.  D'ailleurs  tous  les 
observateurs  ont  admis  la  présence  de  nerfs  vaso-moteurs  dans  le  scia- 
tique de  la  grenouille. 


9 

M.  Vllpiax  demande  à  M.  Ranvier  si  dans  ses  expériences  il  n'a  ja- 
mais vu  d'œdème  des  deux  côtés.  M.  Philipeaux,  en  répétant  l'expé- 
rience en  question,  vient  d'observer  dernièrement  un  œdème  bilatéral. 

M.  Ranvier  a  toujours  vu  jusqu'ici  l'œdème  se  produire  uniquement 
du  cô'é  de  la  section  du  nerf  sciatique. 

M.  Brown-Séquap.d  a  déjà  annoncé  à  la  Société  qu'une  simple  section 
de  la  peau  faite  au  niveau  de  la  région  épileptogène  guérit  souvent  les 
animaux  rendus  épileptiques  par  section  de  la  moelle  ou  du  nerf  scia- 
tique.  Aujourd'hui  M.  Brown-Séquard  désire  attirer  l'attention  sur  un 
de  ces  faits  plus  remarquable  que  les  autres,  à  cause  de  cette  particu- 
larité que  la  guérison  a  été  immédiate. 

Dès  le  moment  où  la  section  de  la  peau  a  été  faite,  les  propriétés  de 
la  zone  épileptogène  ont  été  modifiées.  L'anesthésie  qui  existe  toujours 
à  un  certain  degré  a  disparu  et  la  zone  a  perdu  complètement  sa  fa- 
culté épileptogène.      ' 

M.  Charcot,  à  propos  des  faits  énoncés  par  M.  Brown-Séquard,  ra- 
conte brièvement  l'histoire  d'une  malade  qu'il  observe  en  ce  moment  à 
la  Salpêtrière.  Elle  est  atteinte  d'un  mal  de  Pott  situé  très-bas,  avec 
compression  de  la  queue  de  cheval  ou  des  nerfs  qui  forment  le  plexus 
lombaire.  Il  existe  un  affaiblissement  des  membres  inférieurs  et  de  l'hy- 
peresthésie  dans  quelques  groupes  nerveux,  particulièrement  sur  le 
trajet  du  crural  gauche.  Les  moindres  attouchements  à  ce  niveau  sont 
très-douloureux.  De  temps  en  temps  il  y  a  des  accès  douloureux  très- 
intenses.  Un  mois  après  un  de  ces  accès,  la  malade  a  été  prise  tout  à 
coup  d'une  attaque  épilepliforme  avec  morsure  de  la  langue,  pâleur  do 
la  face,  écume  sanguinolente.  Depuis  cette  époque,  il  y  a  eu  deux  nou- 
velles attaques  du  même  genre.  Doit-on  voir  dans  ce  fait  une  simple 
coïncidence  ou  bien  un  certain  rapport  entre  les  phénomènes  d'excita- 
tion de  quelques  troncs  nerveux  et  des  attaques  épileptiformes? 
M.  Charcot  pense  que  celte  dernière  supposition  est  d'autant  plus  ac- 
ceptable que  la  malade  n'a  jamais  eu  antérieurement  d'affection  ner- 
veuse. 

M.  Charcot  a  cherché  en  vain  chez  celte  femme  une  zone  capable  de 
produire  des  attaques. 

M.  Leven  demande  à  M.  Brown-Séquard  s'il  existe  dans  la  science  un 
grand  nombre  de  faits  démontrant  la  guérison  de  l'épilepsie  à  la  suite 
de  sections  faites  au  niveau  du  point  de  départ  de  l'aura. 

M.  Brown-Séquard  rappelle  qu'il  a  mentionné  dans  son  livre  et  dans 
ses  cours  un  nombre  considérable  de  faits  qui  démontrent  qu'une  irri- 
tation quelconque  produite  sur  le  siège  de  l'aura  peut  guérir  l'épi- 
lepsie. 

D'autre  part,  le  fait  expérimental  sur   lequel  M.   Brown-Séquard 


10 
vient  de  faire  une  nouvelle  communication  à  la  Société,  ne  peut  laisser 
aucun  doute  dans  l'esprit  sur  la  valeur  du  caractère,  de  l'irritation  de 
la  zone  épileptogène.  Il  est  clair,  en  effet,  que  chez  les  animaux  c'est 
bien  certainement  la  section  qui  produit  la  guérison,  tandis  que  chez 
l'homme  on  peut  toujours  se  demander  si  celle-ci  n'a  pas  été  spon- 
tanée. 

—  M.Hayeh  communique  à  la  Société  les  résultats  complètement  né- 
gatifs de  recherches  entreprises  dans  le  but  de  voir  si  le  sang  ne  con- 
tient pas  dans  quelques  maladies  aiguës  ou  chroniques  un  excès  d'a- 
cide urique. 

On  sait  que  Garrod  et  depuis  plusieurs  observateurs,  parmi  lesquels 
il  faut  citer  M.  Charcot,  ont  trouvé  dans  la  sérosité  des  vésicatoires 
appliqués  chez  les  goutteux  une  certaine  quantité  d'acide  urique.  Des 
recherches  du  même  genre  entreprises  dans  le  rhumatisme  aigu  ou 
chronique  ont  donné  des  résultats  négatifs;  mais  on  pouvait  se  de- 
mander si  la  présence  de  l'acide  urique  était  un  fait  tout  à  fait  spécial 
à  la  goutte. 

M.  Hayem  a  examiné,  sous  ce  rapport,  par  le  procédé  du  fil,  la  séro- 
sité d'un  grand  nombre  de  vésicatoires  appliqués  dans  un  service  d'a- 
dultes des  deux  sexes  atteints  d'affections  très-diverses,  et  il  n'a  jamais 
trouvé  de  cristaux  d'acide  urique. 

Il  fait  de  plus  remarquer  que  la  sérosité  du  vésicatoire  recueillie 
dans  un  verre  se  coagule  constamment  au  bout  de  quelques  minutes, 
résultat  identique  à  celui  que  RI.  Vulpian  a  fait  connaître  à  la  Société 
à  propos  des  expériences  entreprises  par  iSlM.  Legros  et  Onimus  sur  la 
genèse  des  leucocytes. 

M.  Charcot  fait  observer  que  dans  certains  cas  indépendants  de  la 
goutte,  on  trouve  des  cristaux  d'acide  urique  :  c'est  lorsqu'il  existe  des 
troubles  de  la  sécrétion  urinaire,  comme  dans  les  néphrites  anciennes. 
Il  en  a  trouvé  récemment  dans  un  cas  d'anurie  de  cause  inconnue, 
chez  une  malade  qui  n'avait  aucune  affection  des  jointures. 

On  n'en  rencontre  jamais  dans  le  rhumatisme,  même  dans  les  cas 
chroniques  que  beaucoup  de  médecins  confondent  encore  avec  la 
goutte. 

Dans  cette  dernière  maladie,  pour  trouver  l'acide  urique,  il  convient 
d'appliquer  le  vésicatoire  loin  du  siège  de  l'inflammation. 

Dans  la  goutte  aiguë  légère,  il  existe  de  l'acide  urique  au  moment  où 
l'accès  va  se  développer,  mais  non  en  général  pendant  l'accès  môme. 
Lorsque  la  maladie  est  chronique,  on  trouve  toujours  de  l'acide  urique 
dans  le  sang,  mais  peu  ou  même  pas  du  tout  dans  l'urine. 

M.  Bert  demande  si  l'on  a  fait  l'examen  de  la  sérosité  des  vésica- 


11 

toires  sur  1  homme  sain  et  aux  diverses  périodes  de  la  formation  des 
ampoules.  Dans  un  cas  où  il  avait  fait  placer  un  vésicatoire  pour  une 
simple  névralgie,  il  n'a  pas  observé  la  coagulation  sig'nalée  par  MM.  Vul- 
pian  et  ïlayem. 

M.  Hayem  a  toujours  observé  cette  coagulation,  et  cela  à  tous  les 
degrés  d'évolution  des  ampoules  et  souvent  chez  des  individus  atteints 
d'affections  très-bénignes. 

M.  VuLPiAN  a  fait  un  grand  nombre  de  recherches  de  ce  genre,  et  il  a 
toujours  trouvé  un  petit  caillot  fibrineux  au  bout  de  vingt  à  trente 
minuies.  Lorsqu'on  enlève  cette  première  coagulation,  il  n'est  pas  rare 
d'en  voir  se  former  successivement  plusieurs  autres. 

M.  CnARcoT  attire  l'attention, de  la  Société  sur  l'état  de  la  moelle 
dans  deux  cas  de  paraplégie  suivis  de  guérison.  Le  premier  fait  est  re- 
latif à  un  mal  de  Pott  qui  avait  produit  une  paralysie  par  compression 
de  la  moelle  et  dans  lequel  la  paraplégie  a  disparu  après  plusieurs  ap- 
plications de  pointes  de  fer  au  niveau  de  la  déformation.  Il  est  pro- 
bable que  dans  ce  cas,  comme  M.  Charcot  l'a  vu  plusieurs  fois,  la  com- 
pression est  due,  non  pas  aux  fragments  osseux,  mais  à  la  matière  ca- 
séeuse  qui  vient  presser  directement  sur  la  dure-mère  rachidienne. 

La  malade,  après  être  restée  quelque  temps  guérie  de  sa  paralysie 
des  membres  inférieurs,  a  été  prise  de  coxalgie  et  a  succombé. 

A  l'autopsie  on  a  trouvé  les  lésions  ordinaires  de  la  compression  de 
la  moelle  :  aplatissement  de  la  moelle  et  léger  ramollissement  à  ce  ni- 
veau; sclérose  ascendante  des  faisceaux  postérieurs  et  altération  des- 
cendante dans  les  cordons  antéro-latéraux.  Il  n'y  avait  aucune  diffé- 
rence entre  cette  moelle  et  celle  des  individus  qui  meurent  paralysés. 

Le  deuxième  fait  se  rapporte  à  une  malade  atteinte  de  paraplégie  qui 
avait  été  considérée  comme  incurable.  Il  n'y  avait  pas  de  mal  de  Pott. 
La  guérison  semble  avoir  été  produite  par  un  traitement  au  nitrate 
d'argent.  La  malade  marchait  bien  et  n'avait  conservé  qu'un  peu  de 
rigidité  dans  le  membre  inférieur  droit  lorsqu'elle  a  été  prise  d'a- 
dénie. 

A  l'autopsie  on  a  trouvé  dans  un  point  de  la  région  dorsale  de  la 
moelle  une  sorte  de  gonflement  grisâtre,  d'aspect  gélatineux,  sorte  de 
sclérose  partielle  occupant  environ  2  centimètres  de  longueur.  Il  s'é- 
tait produit  encore  ici  une  altération  secondaire  ascendante  et  descen- 
dante. Dans  ces  deux  faits  la  disparition  des  signes  fonctionnels  de  la 
paraplégie  a  donc  été  obtenue  sans  changement  appréciable  dans  la 
lésion  médullaire.  M.  Charcot  reviendra  d'ailleurs  sur  l'examen  histo- 
logique  de  ces  deux  moelles. 

M.  Laborde  demande  à  M.  Charcot  s'il  croit  véritablement  à  l'effica- 
cité des  pointes' de  fer  dans  le  traitement  du  mal  de  Pott. 


12 

M.  Charcot  possède  des  observations  qui  ne  peuvent  laisser  aucun 
doule  sur  la  valeur  réelle  de  cette  méthode. 

M.  DuMONTPALLiER  fait  obscrver  que  Pott  déjà  avait  préconisé  l'em- 
ploi des  cautères  et  de  la  potasse  caustique. 

M.  Charcot  est  persuadé  que  les  pointes  de  feu  réussissent  mieux  que 
les  caustiques: 

M.  Laborde  montre  des  pièces  analomiques  qui  se  rapportent  à  un 
cas  de  ligature  du  nerf  sciatique  chez  un  cochon  d'Inde.  L'animal  est 
mort  rapidement  à  la  suite  d'infarctus  des  poumons.  Le  nerf  a  subi  sa 
régénération  aulogénique  et  les  lésions  qui  s'étaient  produites  à  l'ex- 
trémité de  la  patte  sont  complètement  cicatrisées.  Le  bout  périphéri- 
que du  nerf  est  plus  gonflé  que  dans  les  expériences  du  môme  genre. 
Il  existe  au  niveau  de  la  ligature  une  névrite  évidente. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 


Séance  du  22  janvier. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  Dumontpallier,  à  propos  de  la  communication  faite  par  M.  Charcot 
dans  la  dernière  séance  sur  le  traitement  de  la  paralysie  dans  le  mal 
de  Polt  par  les  pointes  de  feu,  rappelle  le  mémoire  de  Pott  lui-même 
qui  employait  une  méthode  très-analogue. 

En  effet,  il  appliquait  sur  la  gibbosilé  des  cautères,  des  sétons,  et 
M.  Dumontpallier  ne  comprend  pas  bien  comment  des  pointes  de  feu 
peuvent  déterminer  un  effet  plus  puissant  que  ces  derniers  moyens. 

M.  Coarcot  a  fondé  son  opinion  sur  des  observations  prises  à  la  Sal- 
pétrière  et  qui  paraissent  très-concluantes.  Les  malades  qu'il  a  obser- 
vées étaient  dans  des  conditions  particulières.  On  envoie  en  effet  dans 
cet  établissement  les  malades  qui  survivent  et  sont  considérés  comme 
incurables.  Elles  n'ont  pas  d'abcès,  pas  de  complications  graves;  pres- 
que toutes  ont  été  traitées  sans  succès  par  la  méthode  de  Pott,  et  ce- 
pendant les  pointes  de  feu  produisent  une  amélioration  considérable 
et  souvent  des  guérisons  au  point  de  vue  des  troubles  fonctionnels. 
Toutefois  M.  Charcot  ne  sait  pas  pourquoi  les  pointes  de  feu  réussis- 
sent mieux  que  tout  autre  traitement. 

M.  Brown-Séquard  rappelle  que  M.  Bouvier  a  préconisé  les  cautéri- 
sations avec  la  pointe  d'une  allumette  et  qu'il  les  regarde  comme  plus 
utiles  que  les  cautères. 

M.  Laboude  a  vu  un  très-grand  nombre  de  malades  atteints  de  mal  de 
Pott,  et  il  a  suivi  longtemps  la  pratique  de  M.  BouvieV.  Il  aurait  donc 


13 

beaucoup  de  choses  à  dire  à  ce  propos;  mais  il  désire  faire  remarquer 
que  la  question  la  plus  importante  au  point  de  vue  de  la  marche  et  du 
traitement  est  sans  contredit  celle  du  siège.  On  remarque,  en  effet, 
que  lorsque  le  mal  de  Poit  est  situé  très-haut,  ce  sont  les  symptômes 
de  paralysie  qui  dominent,  qu'au  contraire  les  abcès  deviennent  plus 
fréquents  lorsque  l'affection  est  placée  très-bas.  Dans  ce  dernier 
cas,  le  traitement  de  M.  Charcot  peut  et  doit  avoir  de  l'impor- 
tance. Mais  il  n'en  est  pas  de  même  dans  le  cas  contraire,  parce  qu'a- 
lors l'abcès  ne  se  porte  pas  à  l'extérieur  et  produit  par  compression  des 
phénomènes  de  paralysie. 

On  voit  souvent,  ajoute  M.  Laborde,  des  paralysies  qui  disparaissent 
tout  à  coup  pour  se  répéter  chaque  fois  qu'il  y  a  un  nouvel  abcès.  Il 
faut  donc  savoir  tenir  compte  de  ces  variétés  dans  la  marche  de  la 
maladie  pour  apprécier  la  valeur  d'un  traitement.  M.  Bouvier  a  depuis 
longtemps  abandonné  les  fortes  cautérisations;  il  emploie  seulement 
les  applications  de  teinture  d'iode.  D'ailleurs,  certaines  malades  ont 
présenté  des  alternatives  de  guérison  et  de  paralysie  sans  suivre  au- 
cun traitement.  C'est  donc  là,  comme  on  le  voit,  une  question  très- 
complexe. 

M.  Charcot  ne  veut  pas  entrer  dans  des  développements  qui  lui  pa- 
raissent inutiles  sur  les  différentes  variétés  du  mal  de  Pott.  Il  n'a 
parlé  du  traitement  par  les  pointes  de  feu  que  d'unemanière  incidente, 
et  les  observations  qu'il  a  recueillies  à  la  Salpêtrière  lui  paraissent 
extrêmement  probantes. 

M.  LEVEt*  fait  une  nouvelle  communication  sur  les  expériences  de 
ligature  de  la  trachée.  Il  a  cru  d'abord  que  lorsqu'on  faisait  cetteopé- 
ration  le^^  animaux  mouraient  tout  à  coup,  comme  foudroyés.  Depuis, 
il  a  vu  que  ce  résultat  n'est  pas  constant,  el  que  souvent  les  animaux 
meurent  asphyxiés.  M.  Leven  ne  s'est  pas  encore  rendu  un  compte 
exact  de  ces  différences. 

M.  Grécant  fait  remarquer  qu'en  liant  la  trachée  on  peut  irriter  soit 
le  pneumo-gastrique,  soit  le  laryngé  supérieur  et  produire  ainsi  un  arrêt 
des  mouvements  respiratoires. 

M.  Buown-Séquard  demande  à  M.  Leven  comment  il  opérait  dans  les 
cas  où  il  a  vu  survenir  une  mort  subite. 

M.  Leven  a  obtenu  ce  résultat  en  cherchant  à  introduire  dans  la  tra- 
chée une  canule  qui  quelquefois  déchirait  ce  conduit. 

M.  Brown-Séquard  fait  remarquer  qu''il  né  faut  pas  confondre  les 
effets  d'une  déchirure  avec  ceux  de  la  simple  ligature. 

M.  Leven  a  vu  la  ligature  produire  le  même  résultat;  mais  il  ne  sait 
pas  encore,  comme  il  vient  de  le  dire,  quelles  sont  les  conditions  né- 
cessaires pour  obtenir  une  mort  aussi  prompte. 


14 

3M.  Brown-Séquard  a  fait  un  très-grand  nombre  de  fois  la  ligature  de 
la  trachée  sans  obtenir  le  résultat  annoncé  par  M.  Leven. 

De  même  pour  les  faits  relatifs  à  l'asphyxie  par  l'acide  carbonique, 
M.  Brown-Séquard  a  toujours  vu,  contrairement  à  M.  Leven,  survenir 
des  convulsions  ;  mais  il  faut  pour  cela  que  l'acide  carbonique  respiré 
soit  pur.  Lorqu'il  renferme  une  certaine  quantité  d'air,  l'animal  peut 
vivre  assez  longtemps  s;ins  présenter  de  convulsions.  Il  serait  impor- 
tant de  savoir  quelles  sont  les  conditions  dans  lesquelles  M.  Leven  a 
obtenu  les  résultats  qu'il  avait  annoncés. 

M.  Leven  a  fait  les  expériences  d'une  manière  très-simple.  Il  plaçait 
les  animaux  dans  une  cloche  qui  recevait  un  courant  d'acide  carbo- 
nique à  la  partie  inférieure  et  se  remplissait  ainsi  de  bas  en  haut.  De 
cette  manière  les  animaux  plongés  au  sein  d'une  atmosphère  d'acide 
carbonique  meurent  sans  passer  par  une  période  d'excitation,  sans 
avoir  un  seul  mouvement  convulsif.  D'ailleurs  M.  Leven  rappelle  que 
d'autres  physiologistes  soutiennent  en  Allemagne  la  même  théorie  et 
considèrent  l'acide  carbonique  comme  un  gaz  stupéfiant  et  non  con- 
vulsivant. 

M.  Laborde  a  vu  plusieurs  fois,  notamment  dans  un  cas  de  déchirure 
de  la  trachée,  des  faits  de  mort  subite  rapportés  par  M.  Leven,  en  as- 
sistant ce  dernier  dans  ses  expériences. 

M.  LiouviLLE  présente  plusieurs  pièces  anatomiques  recueillies  chez 
un  malade  qui  a  succombé  à  la  fièvre  typhoïde.  Elles  sont  relatives  à 
diverses  altérations  musculaires  avec  abcès  d'un  des  grands  droits,  et 
plusieurs  infarctus  viscéraux.  (Il  remettra  une  note.) 

M.  CnARcoT  demande  à  M.  Liouville  si  le  caillot  situé  dans  l'auricule 
n'a  pas  pu  être  le  point  de  départ  d'embolies. 

M.  Liouville  fait  observer  que  le  caillot  siégeait  dans  l'auricule 
droite  et  que  les  infarctus  dépendent  d'oblitérations  artérielles.  Il 
pense  que  les  dernières  devaient  être  sous  Tinfluence  soit  de  throm- 
boses artérielles,  soit  d'embolies  parties  des  caillots  veineux.  C'est  là 
un  fait  assez  complexe. 

M.  Bouchard  a  observé  dernièrement  deux  cas  de  fièvre  typho'ide 
avec  thromboses,  et  en  réunissant  les  particularités  qu'ils  présentent, 
ils  pourraient  former  un  ensemble  comparable  au  fait  dont  vient  de 
parler  M.  Liouville.  Dans  un  cas  il  y  avait,  en  effet,  des  thromboses 
veineuses  ;  dans  l'autre,  au  contraire,  une  thrombose  de  l'artère  splé- 
nique  avec  infarctus  de  la  rate,  et  dans  ce  dernier  fait  rien  ne  pouvait 
faire  songer  à  la  possibilité  d'une  embolie. 

M.  CnARcoT  rappelle  qu'il  a  fait  connaître,  pour  le  cancer,  les  throm- 
boses artérielles  par  inopexie;  le  fait  do  M.  Bouchard  serait  donc  très- 


15 

intéressant  au  point  de  vue  de  l'histoire  générale  des  coagulations  ar- 
térielles spontanées. 

M.  LANCEREAuxfait  observer  que  les  thromboses  artérielles  sans  alté- 
ration de  la  paroi  du  vaisseau  sont  au  moins  très-rares.  Il  a  cru  pen- 
dant quelque  temps  à  leur  existence,  à  cause  du  travail  de  M.  Charcot; 
mais  aujourd'hui  il  a  complètement  abandonné  cette  opinion.  D'après 
les  faits  d'artérite  observés  par  M.  Hayem  dans  la  fièvre  typhoïde,  il 
est  probable  que  la  coagulation  de  l'artère  splénique  trouvée  par 
M.  Bouchard  était  due  à  une  lésion  de  la  paroi  du  vaisseau. 

M.  Bouchard  n'a  pas  fait  l'examen  de  l'artère  oblitérée;  mais  rien  ne 
prouve  encore,  d'après  lui,  que  les  ihrombosesartérielles  soient  incapa- 
bles de  se  produire  sans  altération  vasculaire, 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 

Séance  du  29  janvier. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  Gréhaxt  présente  à  la  Société  la  thèse  qu'il  a  soutenue  récem- 
ment pour  le  doctorat  es  sciences  naturelles,  sur  l'excrétion  de  l'urée 
par  les  reins.  Il  rappelle  à  ce  propos  ses  précédentes  communications 
et  attire  spécialement  l'attention  de  la  Société  sur  la  dernière  conclu- 
sion de  son  travail,  qui  est  en  contradiction  avec  les  faits  énoncés  par 
Zalesky  : 

«  La  ligature  des  uretères  et  la  néphrotomie  sont  deux  opérations 
identiques  quant  à  leurs  résultats;  elles  suppriment  toutes  deux  la 
l'onction  éliminatrice  des  reins  et  n'apportent  aucun  obstacle  à  la  for- 
mation de  l'urée  qui  a  lieu  en  dehors  des  reins.  » 

M.  VuLPiAN  demande  à  M.  Gréhants'il  a  cherché  à  se  rendre  compte 
des  causes  qui  peuvent  avoir  induit  les  autres  observateurs  en  erreur. 

M.  Gréoant  attribue  ces  différences  d'abord  à  l'exactitude  plus 
grande  avec  laquelle  il  a  dosé  l'urée  dans  le  sang  et  à  certaines  condi- 
tions de  l'expérience,  comme  l'élimination  de  l'urée  par  l'intestin, 
question  qui  n'a  pas  encore  été  sufBsamment  élucidée. 

M.  Bert  fait  remarquer  que  Zalesky  s'est  trop  pressé  de  conclure 
que  les  observateurs  qui  l'ont  précédé  s'étaient  trompés.  Les  faits  sur 
lesquels  s'appuie  cet  auteur  ne  sont  pas  effectivement  assez  con- 
cluants. 

Sur  ses  trois  expériences  d'ablation  des  reins  chez  le  chien,  une 
seule  peut  être  regardée  comme  véritablement  bonne.  Dans  ces  condi- 
tions, on  peut  se  demander  si  M.  Zalesky  n'a  pas  observé  un  fait  ex- 
ceptionnel. Il  n'a  pas  retrouvé  d'urée  dans  l'estomac,  mais  il  pouvait  y 


16  ' 

en  avoir  dans  la  sueur;  en  tout  cas,  il  fallait  rechercber  avec  plus  de 
soin  ce  que  l'urée  pouvait  être  devenue.  Toutefois,  M.  Zalesky  a  mon- 
tré que  les  conditions  indiquées  par  M.  Cl.  Bernard  comme  devant 
produire  un  excès  d'urée  dans  le  sang,  ne  suffisent  pas  toujours  à 
amener  ce  résultat. 

Le  môme  reproche  s'applique  aux  expériences  faites  sur  les  oiseaux 
et  les  serpent?.  On  doit  encore  se  demander  si  le  défaut  d'accumula- 
tion d'acide  urique  dans  ces  cas  n'est  pas  due  à  l'élimination  de  cette 
substance  par  diverses  sécrétions. 

M.  VuLPiAN,  pour  appuyer  les  observations  de  M.  Bert,  fait  observer 
que  l'urée  peut  être  éliminée  en  nature  par  l'intestin.  Chez  un  malade 
atteint  d'albuminurie  brightique,  M.  Vulpian  a  fait  analyser  les  selles 
par  M.  Guyochin,  interne  en  pharmacie,  et  l'on  y  a  trouvé  de  l'urée. 
Si  M.  Zalesky  ne  s'est  pas  mis  à  l'abri  de  celte  cause  d'erreur,  on  doit 
considérer  ses  expériences  comme  peu  concluantes  (!). 

M.  CuALvET  croit  aussi  à  Télimmation  de  l'urée  en  nature  par  l'in- 
testin. Il  en  a  trouvé  plusieurs  fois  dans  les  selles  de  malades  atteints 
de  fièvre  typhoïde. 

M.  Brown-Séquard  fait  observer  que  l'urée  peut  s'accumuler  aussi 
dans  les  articulations  et  que  ses  voies  d'élimination  sont  multiples. 

M.  CnALVET  :  L'urée  peut  s'éliminer  abondamment  chez  l'homme  par 
la  peau;  mais  nous  ne  savons  pas  ce  qui  se  passe,  sous  ce  rapport,  chez 
les  animaux.  On  en  trouve  dans  la  sueur  des  individus  atteints  de  fiè- 
vre intermittente,  par  exemple,  et,  chose  remarquable,  il  n'en  existe 
pas  dans  la  sueur  des  rhumatisants. 

i\l.  Brovvn-Séquard  a  déjà  montré  à  la  Société  des  cochons  d'Inde  qui 
offraient  une  altération  de  l'oreille  transmise  par  hérédité.  Un  fait  ana- 
logue s'observe  pour  les  lésions  de  la  putte  consécutives  à  la  section 
du  nerf  sciatique.  Ainsi  trois  jeunes  cochons  d'Inde  nés  de  parents 
ayant  eu  le  nerf  sciatique  coupé  ont  les  doigts  d'une  patte  altérés 
comme  ceux  de  leurs  parents,  et  comme  tous  les  autres  cochons  d'Inde 
provenant  de  parents  tout  à  fait  sains  n'ont  rien  de  semblable,  il  y  a 
quelque  probabilité  que  cette  altération  est  due  à  l'influence  de  l'hé- 
rédité. 

M.  Bert  rapporte  qu'il  avait  essayé  en  vain  de  faire  reproduire  par 
hérédité  certaines  lésions  chirurgicales.  C'est  ainsi  qu'après  avoir 
enlevé  les  yeux  successivement  à  quatre  générations  de  rats,  il  a  con- 
staté que  les  enfants  naissaient  toujours  avec  des  yeux  parfaitement 
normaux.  11  existait  cependant  chez  eux  une  légère  atrophie  des  lobes 

(1)  Voir,  pages  suivantes,  même  séance,  l'analyse  des  matières  intes- 
tinales par  M.  Guyochin. 


17 

optiques.  Ces  expériences  montrent  donc  que  ce  n"est  guère  qu'à  partir 
de  la  quatrième  génération  que  l'on  pourrait  obtenir- un  résultat.  D'ailleurs 
certaines  pratiques  très-anciennes,  comme  celle  de  la  circoncision, 
par  exemple,  prouvent  que  les  lésions  chirurgicales  n'ont  pas  de  ten- 
dance à  se  transmettre  par  hérédité  ! 

M.  VuLPiAN  rappelle  que  M.  Philipeaux,  dans  de  nombreuses  expé- 
riences d'ablation,  soit  de  la  rate,  soit  du  testicule,  a  toujours  obtenu 
également  des  résultats  négatifs.  Il  serait  facile,  d'ailleurs,  de  recueil- 
lir un  grand  nombre  de  faits  de  ce  genre;  ce  qui  prouve  l'intervention 
d'une  cause  accidentelle  lorsque  les  faits  paraissent  positifs. 

M.  Laborde  demande  à  M.  Brown-Séquard  si  l'hérédité  agit  directe- 
ment pour  produire  les  troubles  de  la  nutrition  de  la  patte,  ou  bien  si 
elle  exerce  son  influence  en  déterminant  d'abord  l'épilepsie. 

M.  Brown-Séquard  fait  observer  que  l'hérédité  de  l'épilepsie  provo- 
quée est  parfaitement  établie  par  les  faits  qu'il  a  constatés  depuis  long- 
temps. 11  ajoute  que  certaines  déformations  de  l'oreille  paraissent  aussi 
se  transmettre  directement  par  hérédité;  mais  que  pour  le  troisième 
fait,  celui  qui  est  relatif  aux  altérations  de  la  patte  l'influence  directe 
de  l'hérédité  ne  lui  semble  encore  que  probable.  En  tout  cas, 
M.  Brown-Séquard  pense  que  certaines  lésions  provoquées chezles  pa- 
rents par  la  section  des  nerfs  peuvent  se  transmettre  directement  aux 
petits. 

—  M.  VuLPiAN  présente  au  nom  de  M.  J.  M.  Philipeaux  un  cas  de 
transplantation  de  Cergot  d'un  jeune  coq  dans  la  crête  du  même 
animal. 

L'expérience  a  été  faite  le  20  juin  1850.  L'ergot  extirpé  sur  la  patte 
gauche  d'un  jeune  coq,  âgé  de  40  jours,  avait  été  introduit  dans  la 
crête  de  ce  même  animal,  et  l'incision  pratifjuée  sur  la  crête  pour 
permettre  cette  insertion  avait  été  réunie  à  l'aide  d'un  pain  à  cacheter, 
imbibé  de  gomme. 

Deux  ans  après,  l'animal  ayant  été  sacrifié  pour  dautres  expériences, 
on  put  examiner  avec  soin  l'ergot  transplanté,  lequel  depuis  longtemps 
faisait  une  saillie  considérable  hors  de  la  crête. 

Lorsque  l'ergot  a  été  introduit  dans  la  crête,  il  avait  l'aspect  et  les 
dimensions  de  celui  qui  est  mis  sous  les  yeux  de  la  Société  et  qui  a 
été  enlevé  sur  un  jeune  coq  d'environ  40  jours.  On  sait  qu'à  cet  âge 
l'ergot  n'adhère  pas  à  l'os  du  tarse,  mais  qu'il  fait  corps  avec  la  peau 
et  qu'il  est  formé  exclusivement,  comme  les  ongles,  d'une  substance 
cornée  au-dessous  de  laquelle  existe  une  mince  couche  de  Malpighi 
et  le  derme.  U  n'y  a  alors  ni  cellules  cartilagineuses  ni  cellules  os- 
c.  R.  1869.  .  2 


18 

seuses.  Peu  à  peu  l'ergot  se  développe,  s'ossifie  et  se  soude  à  l'os  du 
larso  d'une  manière  complète. 

L'ergot  transplanté  n'avait  contracté  aucune  adhérence  avec  les  os 
du  crâne.  Il  s'était  accru  de  la  môme  façon  que  l'ergot  resté  en  place 
sur  le  tarse  du  côté  droit;  il  avait  acquis  la  même  configuration,  et, 
à  cause  sans  doute  de  la  vascularité  plus  grande  de  la  crôte,  sa  lon- 
gueur est  devenue  un  peu  plus  grande  que  celle  de  l'ergot  non  extirpé 
(ce  dernier  ergot  a  en  effet  0'°,040  de  longueur,  tandis  que  l'ergot  trans- 
planté a  0"°, 045  de  longueur). 

La  structure  de  l'ergot  transplanté  a  aussi  la  même  structure  que 
l'ergot  resté  en  place  :  c'est  un  tissu  osseux  creusé  de  canaux  de  Ha- 
vers  plus  larges  que  ceux  du  tissu  osseux  du  tarse,  comme  il  est  facile 
de  s'en  convaincre  par  l'examen  microscopique  de  coupes  minces 
faites  sur  ces  diverses  parties.  Les  cavités  osseuses  (ostéoplastes)  sont 
aussi  plus  grandes  dans  les  ergots  (l'ergot  transplanté  et  l'ergot  non 
extirpé)  que  dans  les  os  du  squelette  du  coq  qui  a  subi  l'expérience. 
Les  deux  ergots  sont,  l'un  et  l'autre,  recouverts  de  lames  épidermi- 
quos  cornées. 

Bien  qu'il  s'agisse  là  d'une  expérience  déjà  bien  connue  et  faite  par 
plusieurs  physiologistes,  M.  Phiiipoaux  a  cru  devoir  présenter  ces 
pièces  à  la  Société  de  biologie,  non-seulement  à  cause  de  l'étude  dé- 
taillée qu'il  a  faite  de  l'ergot  transplanté,  mais  encore  parce  que  l'ab- 
sence de  régénération  sur  place  de  l'ergot  enlevé  sur  la  patte  gauche 
est  un  nouvel  exemple  à  ajouter  à  ceux  que  cet  expérimentateur  a 
déjà  publiés  et  qui  prouvent  que  les  parties  complètement  enlevées 
ne  sont  pas  reproduites  par  régénération. 

—  M.  CnALVET  montre  à  la  Société  une  famille  de  jeunes  chiens  sur 
laquelle  il  a  entrepris  une  série  d'expériences  sur  l'allaitement. 

Deux  de  ces  jeunes'animaux  ont  été  élevés  au  biberon,  et  tandis  que 
le  chien  laissé  à  la  mère  pesait  1,100  grammes,  ces  deux  chiens  pesaient 
chacun  800  grammes.  Us  ne  sont  pas  devenus  malades,  l'élevage  au  bibe- 
ron n'a  pas  été  pernicieux;  mais,  rendus  à  la  mère,  ils  sont  restés  beau- 
coup moins  développés,  et  leur  dentition  se  fait  tardivement. 

M.  Chalvel  fait  observer  qu'il  y  a  une  grande  différence  entre  le  lait 
vivant  et  le  lait  mort.  Il  appelle  laitvivant'celui  qui  vient  d'être  extrait 
de  l'animal;  c'est  le  seul  à  l'aide  duquel  on  puisse  élever  les  animaux 
sans  les  rendre  malades.  Toutefois,  pendant  les  premières  semaines,  il 
est  complètement  impossible  de  remplacer  le  lait  de  la  mère. 

De  plus,  dans  ces  recherches,  il  faut  tenir  compte  très-exactement 
de  la  manière  dont  les  animaux  sont  protégés  contre  la  température 
extérieure.  Aussi  c'est  en  été  que  les  expériences  doivent  être  failes 


19 
de  préférence.  M.   Chalvet  reviendra  prochainement  sur    ce  sujet. 

—  M.  Charcot  raconte  brièvement  l'histoire  clinique  d'une  malade 
atteinte  de  paralysie  progressive  de  la  langue  et  des  lèvres,  etc.  (labio- 
glosso-pharyngée  de  quelques  auteurs),  et  désire  faire  connaître  dès 
maintenant  le  résultat  de  ses  recherches  nécroscopiques. 

La  maladie  était  très-bien  caractérisée  ;  la  langue  était  paralysée, 
mais  n'offrait  pas  d'atrophie  apparente.  Toutefois  il  existait  dans  cer- 
tains groupes  musculaires  une  atrophie  évidente.  Cette  combinaison 
existe  dans  plusieurs  autres  observations. 

Vers  la  fin  de  la  maladie  l'alimentation  était  devenue  très-difficile 
et  se  faisait  à  l'aide  d'une  sonde  œsophagienne.  Tout  à  coup,  sans  qu'il 
y  eût  de  la  fièvre,  le  pouls  s'éleva  à  200  pulsations  par  minute  et  resta 
ainsi  pendant  deux  ou  trois  jours;  puis  la  mort  survint  par  syncope. 

A  l'autopsie  on  a  trouvé  plusieurs  muscles  atrophiés  :  trapèzes,  del- 
toïdes, plusieurs  muscles  du  bras  et  de  l'avant-bras.  Us  étaient  déco- 
lorés, jaunes  et  graisseux.  La  langue,  non  altérée  à  l'œil  nu,  était  éga- 
lement un  peu  atrophiée  et  contenait  des  fibres  granuleuses  analogues 
à  celles  que  l'on  trouve  après  les  sections  de  nerfs. 

On  sait  que  pour  M.  Duchenne  il  y  a  une  distinction  complète  entre 
la  paralysie  et  l'atrophie. 

Certes,  ce  n'est  pas  là  ce  que  montrent  les  faits.  Le  système  ner- 
veux a  été  étudié  au  microscope  avec  soin.  Les  nerfs  criàniens  n'étaient 
pas  lésés.  Le  bulbe,  qui  paraissait  parfaitement  intact  àlœil  nu,  n'of- 
frait d'altération  que  dans  les  noyaux  de  Thypoglosse. 

11  n'existait  pas  trace  de  la  prétendue  sclérose  du  bulbe.  Les  foyers 
gris  seuls  étaient  malades,  et  laltération  paraissait  avoir  pour  siège 
primitif  les  cellules  nerveuses  elles-mêmes. 

A  l'état  normal  on  sait  que  d'après  L.  Clarke  on  trouve  dans  le  noyau 
de  l'hypoglosse  de  grandes  cellules  multipolaires  non  fortement  pig- 
mentées. Dans  le  bulbe  malade,  les  cellules  ne  se  coloraient  pas  par 
le  carmin  comme  à  l'état  normal;  elles  étaient  petites  et  sans  pôles. 
En  les  étudiant  par  comparaison  avec  un  bulbe  sain,  leur  altération 
devenait  plus  évidente. 

MM.  Charcot  et  Joffroy  ont  présenté  dernièrement  à  la  Société  une 
altération  analogue  observée  dans  un  cas^d'atrophie  musculaire  pro- 
gressive qui  atteignait  également  la  langue,  mais  ici  les  lésions  étaient 
portés  à  l'extrême. 

M.  Charcot  rapproche  ces  altérations  des  centres  nerveux  avec  atro- 
phie des  muscles  des  faits  de  paralysie  infantile  dont  il  a  été  question 
dernièrement  à  la  Société. 

M.  Dusîo.NTPALLiER  rappelle  à  ne  propos  que  Trousseau  a  publié  dans 


20 

sa  clinique  (1)  une  observation  analogue,  dans  laquelle  la  mort  avait 
eu  lieu,  non  par  syncope,  mais  par  asphyxie. 

Dans  le  bulbe  examiné  par  MM.  Dumonlpallier  etLuys,  il  existait  une 
altération  qui  certainement  n'a  pas  été  aussi  bien  délimitée  que  celle 
décrite  par  M.  Charcot,  mais  qui  paraissait  cependant  très-importante. 

M.  Brown-Séquard  signale  une  observation  analogue  dans  les  j\Ie- 
Dico-ciuRURGiCAL  TRANSACTIONS.  M.  Browu-Séquard  a  vu  le  malade;  il 
était  atteint  d'une  atrophie  musculaire  généralisée. 

M.  Hayem  fait  observer  que  dans  un  assez  grand  nombre  de  cas  d'a- 
trophie musculaire  progressive,  il  existe  à  côté  de  l'atrophie  une  pa- 
ralysie de  quelques  muscles  encore  intacts  ou  à  peine  altérés,  et  il 
demande  à  M.  Charcot  si  dans  les  faits  qu'il  a  observés  les  lésions  ana- 
tomiques  peuvent  rendre  compte  de  ces  différences. 

M.  Charcot  pense  que  la  distinction  établie  entre  la  paralysie  et  l'a- 
trophie est  surtout  théorique.  Dans  la  majorité  des  cas  ces  deux  symp- 
tômes sont  mélangés;  mais  jusqu'ici  on  ne  sait  pas  encore  comment  les 
lésions  que  l'on  a  trouvées  agissent  pour  produire  les  phénomènes 
cliniques. 

M.  IsAMBERT  demande  si  M.  Charcot  a  trouvé  une  altération  du  muscle - 
crico-aryténoïdien  postérieur.  L'atrophie  de  ce  muscle  a  été  niée  par 
M.  Duchenne,  et  il  serait  important  de  savoir  si  elle  existe  alors  que 
la  dilatation  de  la  glotte  peut  encore  avoir  lieu. 

M.  CnARcoT  a  trouvé  les  deux  crico-aryténoïdiens  postérieurs  ma- 
lades, mais  inégalement  atrophiés. 

Examen    de   matières    liquides  diarrhéiques  provenant  d'un    malade    at- 
teint  DE   maladie   de   BrIGHT  ;    PRÉSENCE     d'aLBUMINE   ET    d'uRÉE   DANS   CES 

matières;  recherche  faite  par  M.  Guyochin,  interne  en  pharmacie  à 
la  Pitié. 

Constant  (Antoine)  39  ans,  terrassier,  né  à  Langres  (Haute-Loire), 
entre  à  la  Pitié,  salle  Raphaël,  n°  16,  le  17  août  1869.  Interrogé  sur 
l'état  antérieur  de  sa  santé,  il  dit  être  entré,  il  y  a  un  an  et  demi,  dans 
le  service  de  M.  Gubler,  à  Beaujou,  pour  la  même  maladie  dont  il  est 
atteint  aujourd'hui.  A  sa  sortie  de  l'hôpital  Beaujon,  son  état  était 
considérablement  amélioré.  L'urine  du  malade  au  moment  de  son 
entrée  à  la  Pitié  contenait  beaucoup  d'albumine.  Examinée  plusieurs 
fois  depuis,  de  distance  en  distance,  elle  a  toujours  contenu  de  l'albu- 
mine. Mais  les  recherches  s'étaient  bornées  à  ce  point. 

État    actuel,   7    janvier   1870.    —    L'urine    est    peu    abondante; 

(1)  T.  II,  p.  282  (2«  édition,  1865;. 


21 

500  grammes  au  plus  i)ar  vingt-quatre  heures,  c'est-à-dire  le  tiers  à 
peine  de  la  quantité  normale.  Le  malade  se  plaint  de  cette  miction 
difficile  et  douloureuse;  il  demande  des  tisanes  diurétiques  ;  il  croit 
qu'il  serait  guéri  s'il  pouvait,  selon  sa  propre  expression,  «  uriner 
comme  tout  le  monde  et  non  par  le  derrière.  »  En  effet  la  sécrétion 
urinaire  si  imparfaite  est  en  partie  suppléée  chez  le  malade  par  une 
diarrhée  très-liquide.  M.  le  professeur  Vulpian,  pensant  qu'il  serait 
intéressant  de  rechercher  si  les  éléments  de  l'urine  ou  du  moins  son 
principe  essentiel,  l'urée,  se  retrouveraient  dans  les  matières  liquides 
éliminées  par  l'anus,  me  demanda  de  faire  celte  recherche.  100  gram- 
mes d'urine  et  100  grammes  de  ce  flux  diarrhéique  ont  été  séparé- 
ment analysés  pour  y  rechercher  et  y  doser  spécialement  l'urée. 

L'urine  légèrement  acide  marque  1,020  à  l'uromètre.  Sa  couleur  et 
l'odeur  ne  présentent  rien  de  particulier.  Sa  consistance  est  considé- 
rablement augmentée  ;  le  liquide  semble  filant  comme  une  solution 
de  gélatine  ou  de  blanc  d'œuf,  phénomène  dû  sans  doute  à  la  pré- 
sence d'une  assez  grande  quantité  de  mucus  dans  l'urine.  Il  y  a  aussi 
une  grande  quantité  d'albumine  que  précipitent  facilement  l'acide 
nitrique  ou  la  chaleur  seule.  L'urine  pesée  avec  soin  a  été  évaporée 
à  une  basse  température  en  consistance  sirupeuse  et  reprise  par  l'al- 
cool absolu.  La  solution  alcoolique  décolorée  et  fillrée  a  été  évaporée 
à  siccité  au  bain-marie  et  après  refroidissement  complet  traitée  par 
une  petite  quantité  d'acide  azotique  dilué  et  complètement  exempt 
de  gaz  nitreux.  Il  s'est  formé  ainsi  un  précipité  d'azotate  d'urée  qui, 
desséché,  a  pesé  1  gramme  15  centigrammes,  quantité  qui  correspond 
à  55  centigrammes  d'urée  pure.  L'urine  du  malade  contenait  donc 
55  centigrammes  d'urée  pour  100  ou  5  grammes  50  centigrammes  par 
litre.  Cette  quantité,  bien  inférieure  à  la  moyenne  normale  (25  à  30 
grammes  pour  1,000),  paraîtra  plus  faible  encore  si  l'on  réfléchit  au 
peu  d'urine  sécrétée.  Mais  nous  trouvons  une  compensation  partielle 
dans  le  liquide  qui  constitue  les  selles  du  malade. 

A  l'aspect  physique,  c'est  un  liquide  filant  dans  lequel  nagent  des 
grumeaux  analogues  à  du  lait  caillé.  Soumis  au  même  traitement  chi- 
mique que  l'urine,  il  a  laissé  précipiter  par  l'ébullition  et  l'alcool 
concentré  une  quantité  considérable  d'albumine.  L'urée  y  était  aussi 
contenue  dans  la  proportion  de  32  centigrammes  pour  100,  soit  3  gram- 
mes 20  centigrammes  pour  1,000.  La  présence  de  l'albumine  et  de 
l'urée  est  ici  d'autant  plus  remarquable  que  ces  deux  corps  et  sur- 
tout l'urée  n'entrent  point  ordinairement  dans  la  composition  des  ma- 
tières fécales. 

En  résumé,  la  somme  d'urée  dans  les  deux  liquides  n'est  que  de 
8  grammes  70  centigrammes,  chitîre  inférieur  à  la   quantité  normale. 


V.-: 


00 

L'urée  est  donc  produite  chez  le  raalade  en  quantité  peu  considérable 
ou  plus  probablement  elle  est  incomplètement  éliminée.  Elle  doit  s'ac- 
cumuler dans  les  autres  liquides  de  l'économie  et  principalement  dans 
le  sang. 

20  janvier.  Lexamen  des  matières  fécales  a  donné  les  résultats 
suivants  : 

Le  diarrhée  est  beaucoup  moins  liquide.  Il  serait  impossible  aujour- 
d'hui d'en  prendre  la  densité,  ce  qui  aurait  pu  se  faire  facilement  au 
moment  de  la  première  analyse.  Les  grumeaux  blanchâtres  ont  pres- 
que entièrement  disparu.  L'odeur  est  celle  des  matières  fécales,  tandis 
que  la  première  fois  elles  étaient  presque  inodores.  A  l'examen  chi- 
mique l'albumine  a  été  trouvée  moins  abondante  et  l'urée  ne  s'y  trou- 
vait que  dans  la  proportion  de  23  centigrammes  pour  100,  c'est-à-dire 
2  grammes  30  centigrammes  pour  1,000. 

Le  malade  est  mort  le  1"  février  1870.  Les  reins  sont  tous  les  deux 
très-altérés.  Leur  surface  est  couverte  de  petites  granulations  blan- 
châtres. La  substance  corticale  présente  un  aspect  et  une  coloration 
qui  indiquent  l'existence  d'une  altération  graisseuse.  La  paroi  des 
calices  et  du  bassinet  est  épaissie  et  la  membrane  muqueuse  est  in- 
jectée. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 

Le  secrétaire,  Hayem. 


COMPTE  RENDU  DES  SÉANCES 


DE 


^    p- 


LA  SOCIETE  DE  BIOLOGIE 

PENDANT  LE  MOIS  DE  FÉVRIER  1870; 

Par   m.   R.  LEPINE,  secrétaire. 


PRÉSIDENCE  DE  M.  CL.  BERNARD. 


Séance  du  5  février. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  CoRNiL  communique  à  la  Société  la  relation  abrégée  d'un  cas 
d'arthrite  tuberculeuse. 

Cette  lésion  a  été  trouvée  chez  un  homme  de  50  ans,  au  niveau  du 
coude.  Le  début  de  la  lésion  a  pu  être  bien  précisé  et  datait  d'environ 
vingt  mois. 

A  l'autopsie,  tuberculose  presque  généralisée.  Il  existait  des  granu- 
lations dans  la  plupart  des  organes;  en  arrière  de  la  trachée  siégeait 
un  abcès  puriforme  dû  è\  une  transformation  caséeuse  très-avancée  des 
ganglions  bronchiques.  Il  y  avait,  de  plus,  un  mal  de  Pott,  qui  avait 
détruit  un  disque  intervertébral  et  produit  plusieurs  foyers  purulents 
autour  de  la  moelle.  Malgré  la  compression  évidente  de  celle-ci,  il  n'y 
a  pas  eu  de  paralysie. 


24 

Le  point  sur  lequel  M.  Cornil  attire  spécialement  l'attention  est  rela- 
tif aux  alléralions  de  la  jointure. 

La  synoviale  était  rcmpiie  de  pus,  la  surface  était  tomenteuse,  très- 
épaisse  dans  toute  la  masse.  A  l'oeil  nu  on  y  apercevait  déjà  un  grand 
nombre  de  granulations  tuberculeuses  miliaires.  Au  microscope  on 
voyait  une  sorte  de  tissu  embryonnaire  au  sein  duquel  on  pouvait  assez 
bien  délimiter  les  granulations  tuberculeuses.  Les  os  étaient  parfaite- 
ment sains.  C'est  donc  là  une  synovite  tuberculeuse  bien  caractérisée, 
qui  est  très-différente  des  tumeurs  blanches  ordinaires. 

—  M.  Hayem  présente  à  la  Société  des  pièces  relatives  à  deux  cas  de 
purpura  hemorrliagica  avec  lésions  des  artères  correspondant  aux 
foyers  hemorrhagiques. 

Le  premier  cas  est  relatif  à  une  femme  phthisique  morte  d'hémor- 
rhagies  multiples.  M.  Labadie-Lagrave,  qui  a  pris  l'observation  de  la 
malade,  se  propose  de  la  publier  plus  tard. 

Les  organes  soumis  à  Tétude  par  M.  Hayem  sont  la  peau  et  l'intestin. 

Dans  le  fragment  cutané  on  observe  une  ecchymose  qui  porte  sur 
toute  l'épaisseur  du  derme  et  du  tissu  cellulo-adipeux  sous-cutané. 
La  teinte  ecchymotique,  violacée,  est  plus  étendue  dans  le  derme  que 
(kins  ce  dernier  tissu.  Au  microscope,  sur  des  sections  faites  perpen- 
diculairement à  la  surface  et  comprenant  toute  l'épaisseur  de  la  pièce, 
on  trouve  les  particularités  suivantes  :  1°  une  infiltration  de  globules 
rouges  pressés  les  uns  contre  les  autres  entre  les  éléments  de  tous  les 
tissus  de  la  peau  et  du  tissu  cellulo-adipeux;  2"  un  grand  nombre  de 
petits  vaisseaux,  veinules  surtout,  remplis  par  des  globules  rouges; 
3°  des  vaisseaux  vides,  aplatis,  probablement  comprimés  par  l'épan- 
chement  du  sang  avoisinant;  4°  un  certain  nombre  d'artérioles  obli- 
térées offrant  un  épaississement  plus  ou  moins  marqué  de  Tendartère 
qui  efface  presque  complètement  leur  calibre  et  contenant  soit  des 
globules  rouges,  soit  des  masses  fibrineuses,  finement  granuleuses. 
Ces  vaisseaux  irrités  et  oblitérés  sont  assez  nombreux  ;  ils  siègent 
presque  exclusivement  dans  les  cloisons  les  plus  volumineuses  du 
tissu  cellulo-adipeux  au  pourtour  de  la  tache  ecchymotique. 

Dans  l'intestin  on  voit  une  infiltration  sanguine  diffuse  et  assez 
étendue  de  la  muqueuse.  Sous  la  séreuse  on  aperçoit  des  traînées 
rouges  dues  à  la  présence  des  vaisseaux  remplis  de  sang  coagulé.  Ces 
vaisseaux  se  poursuivent  assez  loin  dans  le  fragment  de  mésentère 
enlevé  avec  Tinteslin. 

Au  microscope  la  muqueuse  et  le  tissu  sous-muqueus  ne  sont  pas 
altérés.  On  y  voit  seulement  quelques  globules  rouges  plus  ou  moins 
déformés. 


25 

Sur  les  coupes  qui  comprennent  le  tissu  sous-péritonéal  on  voit  que 
les  vaisseaux  visibles  à  l'œil  nu  sont  des  branches  artérielles  remplies 
plus  ou  moins  complètement  par  des  caillots  sanguins.  La  paroi  de  ces 
vaisseaux  est  saine. 

Dans  le  mésentère,  en  pratiquant  des  coupes  perpendiculaires  à  la 
surface  et  au  niveau  des  troncs  vasculaires,  on  trouve  un  grand  nombre 
de  vaisseaux  artériels  remplis  de  sang  coagulé,  les  uns  aplatis,  les 
autres  distendus  par  des  caillots  sanguins.  Dans  quelques  troncs  obli- 
térés il  existe  comme  dans  la  peau  une  endartérite  hyperplastique 
plus  ou  moins  marquée  qui  rétrécit  ou  efface  presque  le  calibre  de 
l'artère.  Cette  lésion  consiste  en  une  sorte  d'hypertrophie  des  élé- 
ments de  l'endartère  dans  laquelle  on  voit  un  tissu  fibrillaire  irrégulier 
et  une  grande  quantité  de  petits  éléments  arrondis  ou  un  peu  angu- 
leux. Dans  quelques  points  on  trouve  également  un  épaississement 
notable  de  la  tunique  externe  qui  renferme  aussi  des  amas  d'éléments 
analogues  à  ceux  de  la  tunique  interne.  Les  parties  les  plus  altérées 
sont  éloignées  d'abord  de  l'intestin  d'une  distance  de  4  à  8  centi- 
mètres. 

La  pièce  relative  au  second  cas  de  purpura  hemorrhagica  a  été  éga- 
lement remise  au  présentateur  par  M.  Labadie-Lagrave.  Elle  a  été  re- 
cueillie chez  un  adulte  et  consiste  en  un  lambeau  de  peau  enlevé  dans 
la  région  deltoïdienne  au  niveau  d'une  large  ecchymose. 

Sur  une  coupe  perpendiculaire  à  la  surface,  on  voit  que  la  teinte 
hémorrhagique  s'enfonce  dans  l'épaisseur  du  derme  et  du  tissu  cellulo- 
adipeux  en  présentant  une  forme  conique  bierfmanifeste  à  base  très- 
large  tournée  du  côté  de  l'épiderme.  Vers  la  pointe  de  cône  on  trouve 
à  l'œil  nu,  au  milieu  du  tissu  adipeux  sain,  une  artère  assez  volumi- 
neuse de  2  à  3  millimètres  de  diamètre.  Sa  paroi  est  très-épaissie, 
blanchâtre,  et  sa  lumière  à  peine  visible  est  représentée  par  une  tache 
rouge  centrale. 

Au  microscope  on  constate  que  l'épaississement  de  ces  vaisseaux  est 
dû  à  une  endartérite  hyperplastique  très-prononcée  et  que  la  lumière 
vasculaire  est  complètement  oblitérée  à  ce  niveau  par  un  caillot  formé 
de  fibrine  et  de  globules  rouges.  En  suivant  les  branches  de  cette  ar- 
tère qui  pénètre  dans  le  foyer  hémorrhagique,  on  voit  que  l'endarlérite 
et  les  coagulations  sanguines  s'étendent  sur  une  assez  grande  étendue. 

D'après  les  faits  constatés,  tant  à  l'œil  nu  qu'au  microscope,  dans 
les  deux  cas  précédents,  M.  Hayem  pense  que  les  hémorrhagies  de  la 
peau  et  de  l'intestin  sont  la  conséquence  d'une  artérite  diffuse  des 
troncs  sous-cutanés  et  des  artères  du  mésentère.  Les  foyers  hémor- 
rhagiques  doivent  être  regardés  comme  des  infarctus  de  la  peau  et  de 
l'intestin. 


26 

Mais  le  présentateur  observe  que  jusqu'ici  ces  lésions  sont  excep- 
tionnelles dans  l'histoire  anafomique  du  purpura,  et  il  ajoute  que  ré- 
cemment chez  un  sujet  cachectique  qui  avait  présenté  pendant  la  vie 
tous  les  symptômes  de  la  maladie  de  Werlhoff,  les  parois  des  vaisseaux 
qui  environnaient  les  foyers  hémorrhagiques  n'offraient  aucune  lésion 
appréciable.  Ce  dernier  fait  a  été  publié  par  M.  Rue  dans  I'Union  mé- 
dicale, 1870. 

D'ailleurs  l'anatomie  pathologique  du  purpura  n'est  pas  encore  faite. 
Il  est  permis  de  supposer  que  ce  phénomène  symptomatique  peut  être 
dû  à  des  lésions  variables  nées  sous  l'influence  de  maladies  diverses. 
Cependant  il  est  utile  de  rapprocher  dès  maintenant  ces  exemples 
d'endartérite  des  thromboses  et  embolies  cutanées  signalées  chez  les 
vieillards  comme  causes  du  purpura  sénile  et  des  altérations  hémor- 
rhagiques de  la  peau  et  des  muqueuses  qui  ont  été  observées  dans 
plusieurs  cas  d'endodardite  ulcéreuse. 

M.  Charcot  fait  observer  que  le  purpura  est  un  symptôme  qui  peut 
être  lié  à  des  états  morbides  très-différents.  D'autres  altérations  vas- 
culaires  que  celles  indiquées  par  M.  Hayem  peuvent  se  rencontrer  dans 
certains  cas,  et  à  ce  propos  on  peut  citer  une  observation  de  Fox,  dans 
laquelle  il  existait  une  dégénérescence  amyloïde  des  vaisseaux  de  la 
peau.  Relativement  à  Thémorrhagie  cérébrale,  M,  Charcot  fait  remar- 
quer que  lorsque  cette  lésion  se  rencontre  dans  le  purpura  elle  ne  pro- 
duit que  peu  ou  pas  de  phénomènes  cliniques,  et  constitue  ainsi  une 
trouvaille  d'amphithéâtre.  C'est  ce  qui  a  lieu  aussi  pour  les  hémorrha- 
gies  liées  à  la  leucocythémie  et  signalées  par  MM.  Ranvier  et  Ollivier. 
Dans  ces  divers  cas  on  ne  trouve  pas,  en  effet,  de  véritables  foyers 
hémorrhagiques,  mais  de  simples  hémorrhagies  capillaires  ou  des 
•ecchymoses.  MM.  Charcot  et  Bouchard  ont  donc  eu  raison  de  dire  que 
la  véritable  hémorrhagie  cérébrale,  telle  qu'on  la  connaît  en  clinique, 
est  toujours  liée  à  la  lésion  spéciale  des  artérioles  qu'ils  ont  décrite 
sous  le  nom  d'anévrysraes  miliaires, 

M.  Hayem  est  également  persuadé  que  le  purpura  ne  peut  être  con- 
sidéré que  comme  un  symptôme  et  qu'à  ce  titre  il  peut  être  sous  la 
dépendance  do  lésions  variées.  Mais  la  plupart  de  ces  altérations  sont 
encore  inconnues,  et  il  lui  a  paru  très-intéressant  de  pouvoir  démon- 
trer que  dans  certains  cas,  peut  être  exceptionnels,  le  phénomène  hé- 
morrhagie était  lié  à  une  artérite  oblitérante.  11  resterait  maintenant 
à  rechercher  quelles  sont  les  conditions  dans  lesquelles  cette  altéra- 
tion vasculaire  prend  naissance. 

M.  Lecros  demande  à  M.  Hayem  si  l'oblitération  des  artères  ne. pour- 
rait pas  être  consécutive  à  Thémorrhagie.  L'infiltration  sanguine  pour- 


27 
rait  à  elle  seule  déterminer  une  compression  des  vaisseaux  et  une 
coagulation  du  sang  dans  leur  intérieur. 

M.  Hayem  fait  observer  que  les  artères  dans  lesquelles  il  existait  de 
l'endartériiene  siégeaient  pas  dans  les  foyers  mêmes  d'infiltration  san- 
guine» Ainsi  pour  Ihémorrhagie  intestinale  c'est  dans  les  artères  du 
mésentère  à  plusieurs  centimètres  de  l'intestin  que  l'on  trouve  la  throm- 
bose par  endartérite,  et  dans  la  peau  on  voit  les  artérioles  malades  et 
oblitérées  dans  le  tissu  cellulo-adipeux  à  une  certaine  distance  de 
l'ecchymose.  Au  sein  de  cette  dernière  il  existe  plusieurs  vaisseaux 
comprimés  par  le  sang;  mais  ils  sont  faciles  à  distinguer  de  ceux  dans 
lesquels  la  paroi  altérée  a  été  le  point  de  départ  de  la  coagulation. 

M.  BoucnARD  pense  aussi  que  le  purpura  peut  être  dû  à  des  causes 
très-variées,  et  il  signale  parmi  celles-ci  l'influence  de  l'élévation  de 
la  température.  Dans  une  expérience  faite  avec  M.  Blache,  il  a  main- 
tenu un  chien  dans  un  bain  d'eau  tiède  de  manière  a  élever  la  tem- 
pérature de  l'animal  jusqu'à  44°,  et  ces  observateurs  ont  produit  ainsi 
des  ecchymoses  du  tissu  du  cœur. 

M.  CoRNiL  n'a  examiné  qu'un  seul  cas  de  purpura  et  il  na  pas  trouvé 
de  lésions  vasculaires.  Le  malade  avait  eu  de  lastomatorrhagie,  et  il  exis- 
tait sur  la  muqueuse  buccale  de  petites  élevures  fongueuses  très- 
molles  et  un  peu  papillaires. 

—  M.  Brown-Séqoard  fait  voir  à  la  Société  un  cochon  d'Inde  qui  est 
devenu  cpileptique  à  la  suite  d'une  fracture  de  la  jambe. 

Il  montre  ensuite  une  capsule  surrénale  très-hypertrophiée,  d'une 
coloration  chocolat  chez  un  cochon  d'Inde  mort  à  la  suite  d'une  lésion 
de  la  moelle  épinière.  Pour  M.  Brown-Séquard,  il  est  très-probable 
qu'il  existe  une  relation  évidente  entre  l'état  morbide  des  capsules  sur- 
rénales et  la  terminaison  fatale  des  lésions  médullaires.  Dans  les  cas 
de  fracture  de  la  colonne  vertébrale  observés  chez  l'homme,  l'hyper- 
trophie des  capsules  surrénales  n'a  été  encore  notée  qu'une  seule  fois. 
Il  serait  intéressant  de  rechercher  s'il  n'existe  pas  dans  ces  cas  des 
symptômes  que  l'on  pourrait  rattacher  aux  lésions  des  capsules  sur- 
rénales. 

—  M.  Brown-Séquard  a  fait  depuis  l'année  1862  le  relevé  des  prin- 
cipaux symptômes  indiqués  dans  la  plupart  des  observations  de  mala- 
dies de  l'encéphale.  Il  est  arrivé  ainsi  à  établir  qu'il  existe  des  diffé- 
rences très-tranchées  entre  les  symptômes  des  lésions  traumatiques  et 
des  affections  organiques  de  la  moitié  droite  et  ceux  des  mêmes  altéra- 
tions de  la  moitié  gauche  du  cerveau. 

C'est  ainsi  par  exemple  que  les  lésions  du  côté  droit  produisent  plus 
fréquemment  des  troubles  variés  de  la  nutrition  [escharre,  œdème,  etc.) 


28 

et  des  évacuations  involontaires.  Ainsi  sur  à  peu  près  le  même  nombre 
de  faits  relatifs  au  côté  gauche  de  l'encéphale,  ou  trouve  pour  les  lé- 
sions de  l'hémisphère  droit  : 

49  fois  des  évacuations  involontaires  doubles  (urine  et  matières 
fécales); 

19  fois  des  évacuations  involontaires  simples  (urines  ou  matières 
fécales). 

Et  pour  l'hémisphère  gauche  : 

24  fois  des  évacuations  involontaires  doubles; 

H  fois  des  évacuations  involontaires  simples. 

Dans  cette  statistique  il  n'a  pas  compté  les  cas  dans  lesquels  l'éva- 
cuation involontaire  a  existé  lorsqu'il  y  avait  une  perte  complète  de 
connaissance. 

—  M.  JoFFRQ-ï  fait  une  communication  sur  le  mécanisme  du  tremble- 
ment dans  la  sclérose  en  plaques  de  la  moelle  épinière. 

M.  CiiARcoT  fait  observer  à  M.  Joffroy  que  dans  la  sclérose  en  pla- 
ques le  tremblement  n'est  pas  modifié  lorsque  les  malades  ont  les  yeux 
fermés,  ce  qui  paraît  peu  en  rapport  avec  sa  manière  de  comprendre 
ce  phénomène. 

M.  Joffroy  répond  à  cette  objection  que  l'incoordination  de  l'ataxique 
qui  augmente  lorsqu'on  ferme  les  yeux  au  malade,  diffère  complète- 
ment du  tremblement.  Lorsque  l'ataxique  veut  faire  un  mouvement  il 
s'éloigne  beaucoup  de  son  chemin,  et  ne  peut  le  retrouver  qu'à  l'aide 
de  la  vue.  Dans  la  sclérose  en  plaques,  le  malade  qui  veut  exécuter  un 
mouvement  s'éloigne  peu  de  son  chemin,  il  conserve  la  notion  de  l'en- 
droit où  se  trouve  sa  main  par  exemple,  et  le  mouvement  d'ensemble 
reste  coordonné. 

M.  Charcot  n'a  pas  cherché  jusqu'à  présent  à  édifier  une  théorie  des 
symptômes  de  la  sclérose  en  plaques.  Il  a  rencontré  dans  ce  sujet  des 
difficultés  qui  lui  paraissent  encore  insurmontables.  Toutefois  relative- 
ment au  tremblement  il  avait  songé  à  une  autre  hypothèse  que  celle  dé- 
veloppée par  M.  Joffroy. 

Le  tissu  nerveux  dans  la  sclérose  en  plaques  n'est  pas  modifié  comme 
dans  les  autres  variétés  de  sclérose.  On  retrouve  toujours  les  cylindres 
d'axe  et  par  conséquent  la  lésion  n'est  pas  aussi  profonde  qu'elle  pourrait 
le  paraître.  Ces  cylindres  d'axe  conservent  très-probablement  leurs 
propriétés  comme  conducteurs,  non  pas  à  un  degré  normal,  mais  suf- 
lisant  encore  à  la  transmission. 

Il  en  résulte  que  dans  la  sclérose  en  plaques  les  malades  peuvent 
mouvoir  leurs  membres;  mais  la  transmission  se  fait  lentement,  d'une 
manière  saccadce,  et  le  mouvement  est  tremblé. 


29 

M.  BoDCHARD  fait  observer  que  lorsque  les  fils  électriques  présentent 
une  certaine  longueur,  le  passage  de  l'électricité  ne  se  fait  plus  que 
d'une  manière  saccadée.  Il  pourrait  donc  y  avoir,  non  pas  élongation 
des  tubes  nerveux,  mais  par  altération  de  la  myéline,  des  sortes  de  sac- 
cades dans  la  transmission  de  Tinflux  nerveux. 

M.  Brown-Séquard  pense  que  la  perle  de  la  myéline  permet  une  trans- 
mission par  voisinage  de  fibres  à  fibres,  d'où  il  résulte  que  les  ataxiques 
font  agir  plus  de  parties  qu'ils  n'en  veulent  mouvoir. 

M.  Balbiani  fait  observer  que  la  myéline  n'est  pas  indispensable  puis- 
que chez  les  insectes  et  les  mollusques  les  tubes  nerveux  sont  dépourvus 
d'enveloppe  de  myéline. 

M.  Brow\-Séquard  rappelle  que  lorsque  la  myéline  est  coagulée 
dans  les  nerfs,  !a  propriété  des  nerfs  moteurs  persiste  encore  un  cer- 
tain temps. 

M.  JoFFROY  fait  remarquer  que  dans  la  sclérose  rubanée  des  cordons 
latéraux,  la  lésion  anatomique  est  analogue  à  celle  de  la  sclérose  en 
plaques. 

Les  tubes  nerveux  deviennent  plus  petits,  la  myéline  disparaît,  et 
malgré  cette  disposition  on  n'observe  pas  de  tremblement  dans  cette 
première  affection. 

—  M.  Rabcteau  communique  le  résultat  de  ses  recherches  sur  un 
nouveau  groupe  de  sels,  les  sulfovinates.  Si  l'on  prend  par  exem- 
ple le  sulfovinate  de  soude,  sa  formule  peut  être  représentée  par 
8Na(C2H^jSO\ 

Il  y  a  donc  un  radical  éthyle,  et  il  était  intéressant  de  rechercher 
s'il  est  brûlé  dans  l'économie.  Les  expériences  de  M.  Rabuteau  prou- 
vent que  le  sel  introduit  dans  l'organisme  s'élimine  en  nature.  Si  le 
métal  est  inoffensif,  le  sel  l'est  également. 

Le  sulfovinate  de  soude  injecté  dans  les  veines  produit  de  la  consti- 
pation. L'observateur  en  a  conclu  alors,  d'après  des  expériences  anté- 
rieures, qu'il  devait  être  purgatif.  Et  en  effet,  c'est  peut-être  le  meil- 
leur de  tous  les  purgatifs  connus  jusqu'à  ce  jour.  Sa  saveur  est  presque 
nulle  et  il  laisse  dans  la  bouche  un  arrière-goût  sucré.  Employé  à  la 
dose  de  10  à  1 5  grammes,  il  produit  de  trois  à  quatre  selles  chez  l'homme 
et  sans  aucune  sensation  de  colique. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 

Séance  du  12  février. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  CuARcoT  donne  quelques  nouveaux  détails  sur  les  lésions  anato- 


.         30 
miques  des  noyaux  de  l'hypoglosse  dans  le  cas  de  paralysie  glosso- 
labio-pharyngée  dont  il  a  entretenu  dernièrement  la  Société. 

Les  cellules  nerveuses  en  sont  très-iUrophiécs  et  l'allération  princi- 
pale porte  sur  le  corps  même  de  la  cellule.  Les  noyaux  et  le  nucléole 
sont  relativement  bien  conservés.  Un  grand  nombre  des  cellules  atro- 
phiées contiennent  du  pigment  jaune. 

M.-Charcot  montre  les  préparations  et  les  dessins  relatifs  à  ces 
lésions. 

M.  VuLPiAN  demande  à  M.  Charcot  si  toutes  les  cellules  offraient  cette 
sorte  d'atrophie  pigmentaire.  Dans  les  faits  d"atrophie  des  cellules  de 
la  moelle  que  M.  Yulpian  a  eu  l'occasion  d'examiner,  le  corps  des  cel- 
lules devenu  très-pâle  ne  se  colorait  plus  par  le  carmin  comme  à  l'état 
normal,  et  le  noyau  et  le  nucléole  étaient  tout  à  fait  pâles  et  atro- 
phiés. 

M.  Charcot  n'a  pas  trouvé  d'autre  altération  que  celle  qu'il  vient  de 
décrire.  Ainsi  RJ.  Balbiani  pensait  que  Talléralion  devait  dahord  por- 
ter sur  le  nucléole  et  le  noyau  avant  d'atteindre  le  corps  de  la  cellule, 
il  ne  paraît  pas  en  être  ainsi.  De  plus,  dans  ce  cas,  la  névroglie  n'est 
pas  altérée  primitivement,  il  ne  s'y  produit  pas  d'irritation  analogue  à 
celle  que  l'on  observe  dans  la  sclérose.  Ce  sont  les  cellules  nerveuses 
qui  sont  primitivement  affectées;  mais  elles  ne  prolifèrent  pas  comme 
celles  du  tissu  interstitiel.  M.  Charcot  fait  en  outre  remarquer  que  dans 
le  fait  qu'il  a  observé  les  racines  nerveuses  étaient  moins  altérées  que 
les  cellules,  ce  qui  prouve  que  les  lésions  ne  marchent  pas  de  la  pé- 
riphérie au  centre  comme  quelques  auteurs  l'ont  pensé. 

M.  Hayem  fait  observer  que  les  altérations  des  cellules  nerveuses 
peuvent  être  de  diverses  espèces.  Dans  le  cas  d'atrophie  musculaire 
progressive  qu'il  a  publié  dans  les  Auch.  de  puys.,  mars-avril  1869,  les 
cellules  étaient  pâles,  le  noyau  et  le  nucléole  à  peine  apparents  ;  elles 
ressemblaient  à  de  petites  cellules  étoilées  du  tissu  interstitiel.  Dans 
ce  cas  la  lésion  était  donc  tout  à  fait  analogue  à  celle  des  observations 
de  M.  Vulpian.  Au  contraire,  les  altérations  décrites  par  M.  Charcot 
ont  quelque  analogie  avec  celles  qui  ont  été  signalées  par  F.  Meschede 
et  par  Meynert  dans  les  cellules  des  couches  corticales  chez  les  para- 
lytiques généraux.  Relativement  à  la  prolifération  des  cellules  ner- 
veuses, M.  Hayem  rappelle  que  Tigges,  puis  Meynert,  prétendent  l'a- 
voir observée  dans  quelques  cas.  Tous  ces  faits  démontrent  donc  l'im- 
portance et  la  variété  des  altérations  des  cellules  nerveuses. 

M.  Charcot  rappelle  que  L.  Clarke  a  déjà  décrit  avec  beaucoup  de 
soin  les  lésions  pigmentaires  des  cellules  dans  la  moelle,  et  que  From- 
mann  les  a  également  indiquées  dans  la  sclérose  en  plaques;  mais  il  ne 


31 

sait  pas  si  ces  altérations  sont  les  mêmes  que  celles  qui  ont  été  obser- 
vées dans  les  couches  corticales. 

M.  Charcot  aborde  ensuite  une  autre  question  relative  au  même  fait. 
M.  Duménil  a  déjà  montré  la  coïncidence  de  l'atrophie  musculaire  et 
de  la  paralysie  glosso-labio-pharyngée  et  dans  le  cas  qu'il  a  observé 
comme  dans  celui  de  M.  Charcot  la  langue  était  altérée  ;  mais  il  n'y 
avait  pas  d'altération  granulo-graisseuse.  Cette  altération  peut  manquer 
dans  l'atrophie  musculaire  ordinaire,  et  ou  voit  alors  une  atrophie  sim- 
ple avec  prolifération  des  noyaux  musculaires. 

Ces  particularités  font  croire  à  M.  Charcot  que  dans  le  cas  où  l'on  a 
dit  que  la  langue  n'était  pas  altérée,  c'est  que  l'on  recherchait  exclu- 
sivement la  dégénérescence  granulo-graisseuse.  En  lisant  les  observa- 
tions on  voit,  en  effet,  que  la  langue  était  toujours  un  peu  atrophiée. 
Elle  ne  contenait  pas  de  graisse;  mais  peut-être  aurait-on  pu  y  trouver 
l'atrophie  simple  telle  qu'elle  se  montre  quelquefois  dans  les  autres 
muscles.  -Ce  point  a  une  grande  importance,  parce  qu'il  a  servi  en  par- 
tie de  base  à  la  théorie  qui  place  le  point  de  départ  des  lésions  dans  le 
grand  sympathique.  On  a  dit,  en  effet,  que  la  langue  n'était  pas  alté- 
rée parce  que  le  grand  sympathique  était  sain  et  que  l'hypoglosse  seul 
était  malade,  et  c'est  ainsi  qu'on  a  voulu  séparer  la  paralysie  glosso- 
labio-pharyngée  de  l'atrophie  musculaire  progressive. 

M.  Hayem  fait  remarquer  à  M.  Charcot  que  dans  cette  dernière  ma- 
ladie on  voit  quelquefois  des  muscles  paralysés  sans  atrophie.  Ainsi, 
dans  l'observation  citée  plus  haut,  il  y  avait  une  paralysie  complète 
du  diaphragme  qui  avait  été  parfaitement  reconnue  par  M.  Duchenne 
lui-même,  et  cependant  à  l'autopsie  le  diaphragme  a  été  trouvé  com- 
plètement sain.  Ce  point  était  d'autant  plus  important  que  les  muscles 
véritablement  atrophiés  n  étaient  pas  graisseux  ;  ils  offraient  cette  atro- 
phie simple  avec  multiplication  des  corpuscules  musculaires  que 
M.  Charcot  vient  de  rappeler. 

On  pourrait  donc  peut-être  voir  dans  quelques  cas  une  paralysie  do 
la  langue  sans  atrophie,  comme  on  observe  une  paralysie  d'autres 
muscles  et  du  diaphragme  en  particulier. 

M.  CnARCoT  est  parfaitement  convaincu  que  dans  la  plupart  des  cas 
d'atrophie  musculaire  progressive,  il  n'y  a  pas  de  distinction  bien 
nette  entre  la  paralysie  et  l'atrophie.  On  trouve  toujours  des  muscles 
qui  ne  fonctionnent  pas,  sans  qu'on  puisse  expliquer  cette  paralysie 
par  l'atrophie  des  fibres.  Mais  il  est  encore  Irès-difSciie  de  savoir 
comment  se  produisent  ces  deux  phénomènes  différents.  Ainsi,  dans  la 
paralysie  infantile  qui  s'accompagne  également  de  lésions  des  cellules 
nerveuses,  on  voit  la  paralysie  survenir  brusquement,  puis  celle-ci 
disparaît,  et  les  muscles  qui  restent  paralysés  s'atrophient.  Pour  la 


32 

lan.que,  il  osl  certain  que  la  paralysie  reconnaît  pour  cause  l'altération 
des  noyaux  de  l'hypoglosse,  et  comme  cette  lésion  est  la  seule  qui  soit 
primitive,  c'est  à  elle  aussi  que  Ion  doit  rapporter  l'atrophie. 

M.  Laborde  pense,  d'après  quelques-unes  de  ses  expériences,  qu'il 
existe  une  différence  réelle  entre  les  lésions  des  muscles  de  la  vie  de 
relation  et  celles  de  certains  muscles,  comme  la  langue,  par  exemple. 
Il  croit  que  Tatrophie  moins  rapide  de  ces  derniers  serait  capable  d'ex- 
pliquer les  différences  signalées  par  M.  Charcot. 

M.  VuLPiAN  a  fait  un  grand  nombre  de  fois  l'examen  de  la  langue 
après  des  sections  expérimentales  des  nerfs  hypoglosses,  et  il  a  tou- 
jours observé  des  altérations  très-rapides  et  très-profondes.  Celles-ci 
sont  môme  plus  marquées  que  dans  les  autres  muscles,  mais  elles  sont 
du  môme  genre.  (Voir  Arcu.  de  phys.,  septembre-octobre  1869.) 

M.  Vulpian  a  vu  en  outre  qu'à  la  suite  de  ces  sections  les  noyaux  de 
l'hypoglosse  ne  sont  pas  altérés.  Les  cellules  restent  tout  à  fait  nor- 
males, tant  sous  le  rapport  du  nombre  que  sous  celui  des  dimensions. 
Ce  résultat  est  conforme  à  la  conclusion  que  le  môme  observateur  a 
tirée  de  ses  études  sur  l'état  des  centres  nerveux  après  les  sections 
de  nerfs  périphériques  (ÂRcn.  de  pqys.,  novembre  et  décembre  1869). 

Enfin,  d'après  M.  Vulpian,  lorsque  la  section  des  nerfs  porte  sur  un 
point  très-rapproché  de  leur  sortie  des  centres  (nerf  facial  dans  le 
bulbe,  par  exemple),  l'atrophie  musculaire  consécutive  est  la  même 
que  lorsqu'on  a  coupé  le  tronc  nerveux. 

M.  Charcot  fait  observer  que  l'intégrité  des  cellules  de  l'hypoglosse 
signalée  par  M.  Vulpian  après  la  section  du  nerf,  confirme  pleinement 
l'hypothèse  qu'il  a  émise  sur  le  point  de  départ  de  la  maladie  dans  les 
cellules  elles-mêmes. 

M.  Laborde  n'a  pas  voulu  précédemment  faire  allusion  à  la  rapidité 
de  Tatrophie,  mais  bien  à  la  variété  de  cette  lésion.  Les  recherches 
qu'il  a  entreprises  ne  l'ont  pas  conduit,  sous  ce  rapport,  aux  mêmes 
résultats  que  ceux  énoncés  par  M.  Vulpian. 

—  M.  Lancereaux  montre  à  la  Société  les  pièces  anatomiques  rela- 
tives à  un  cas  de  cachexie  saturnine  avec  goutte. 

—  M.  Carville  communique  les  premiers  résultats  d'expériences 
entreprises  avec  M.Hayem,  sur  les  variations  de  la  tension  artérielle. 

—  M.  Brown-Séquard  rapporte  qu'à  la  suite  d'une  section  d'une  moitié 
latérale  de  la  moelle  épinière  chez  un  chien,  il  a  observé  une  anssthésie 
complète  de  tout  le  corps.  Puis  au  bout  de  six  jours  la  sensibilité  est  re- 
venue. M.  le  docteur  Séguin,  présent  à  l'expérience,  a  constaté  que  les 
oreilles  et  le  côté  droit  du  corps  étaient  sensibles,  mais  qu'il  y  avait 


33 
un  retard  très-grand  dans  la  perception.  M.  Brown-Séquard  dit  qu'il 
regrette  beaucoup  de  n'avoir  pas  examiné  létat  de  la  sensibilité  avant 
l'opération.  En  effet,  l'animal  était  peut-être  déjà  anesthésique  avant 
la  lésion.  On  sait  que  l'hystérie  existe  chez  les  chiens  et  que  chez  eux 
comme  chez  Thomme  cette  affection  produit  de  l'anesthésie.  Chez  une 
chienne  mise  en  expérience  au  Collège  de  France,  en  1855,  en  présence 
d'une  commission  de  l'Institut,  il  a  constaté  une  analgésie  absolue  de 
la  peau  et  des  troncs  nerveux,  avec  persistance  de.  la  sensibilité  aux 
racines  postérieures  des  nerfs. 

M.  Brown-Séquard  montre  ensuite  un  cochon  d'Inde  qui,  étant  guéri 
d'une  épilepsie  consécutive  à  la  section  du  nerf  sciatique,  est  redevenu 
épileptique  à  la  suite  dune  fracture  de  jambe. 

Tous  les  animaux  qui  ont  subi  la  section  du  nerf  sciatique,  et  sont 
devenus  épileptiques,  guérissent  de  l'épilepsie.  La  guérison  se  fait  at- 
tendre un  temps  qui  varie  de  vingt-six  jours  à  trois  mois  et  douze  jours. 
Les  animaux  sont  alors  redevenus  parfaitement  sensibles. 

—  M.  Ménard  montre  les  pièces  anatomiques  recueillies  chez  un 
chien  mort  probablement  de  cancer. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 

Le  secrétaire,  M.  Hayem. 


Séance  du  19  février. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  Laborde,  à  l'occasion  du  procès-verbal  et  à  propos  delà  commu- 
nication de  M.  Charcot,  dit  que  d'après  Guislain  des  corps  de  Gluge 
pourraient  être  formés  aux  dépens  du  noyau  de  cellules  nerveuses. 

M.  MoREAu  fait  une  communication  sur  les  variations  de  la  pression 
artérielle.  Le  fait  principal  qui  sert  de  base  à  la  communication  de 
1\1.  Moreau  est  que  l'énervation  d'une  artère  mésentérique  y  supprime, 
les  pulsations  pendant  la  demi-heure  qui  suit  l'opération.  M.  Moreau 
dépose  une  note  détaillée  sur  le  bureau. 

M.  Ranvier  demande  à  M.  Moreau  si  pendant  ce  temps  l'artère  est 
contractée  ou  bien  si  elle  est  dilatée,  l'absence  de  pulsation  s'expli- 
quant  dans  ce  cas  par  l'hypothèse  que  la  limite  d'élasticité  de  la  paroi 
artérielle  se  trouverait  dépassée. 

M.  Moreau  ne  peut  répondre  d'une  manière  catégorique  à  la  question 
de  M.  Ranvier.  L'excès  de  sécrétion  intestinale  qui  se  produit  dans  ce 
cas  semble  impliquer  une  dilatation  ,  mais  il  ne  l'a  pas  constatée  aus- 
sitôt après  l'énervation. 

C.  R.  1870.  3 


34 

M,  Legros  croit  que  l'absence  de  pulsation  peut  s'expliquer  par  la 
suppression  des  contractions  artérielles  péristaltiques  qui  est  la  con- 
séquence de  rénervation. 

A  ce  sujet  une  courte  discussion  s'engage  entre  MM.  Ranvier  et 
Legros;  M.  Ranvier  soutient  que  la  théorie  de  M.  Legros  n'est  pas 
appuyée  par  les  faits. 

—  M.  MicHAL'D  communique  un  cas  de  tumeur  hétéradénique  du 
rachis. 

•  M.  Ranvieu  considère  la  tumeur  présentée  par  M.  Michaud  comme 
un  épithélioma  cylindrique;  il  pense  qu'il  devait  exister  une  tumeur 
primitive  dans  l'estomac  ou  dans  Tinteslin,  l'absence  de  symptômes 
ne  suffisant  pas  pour  exclure  la  possibilité  d'un  épithélioma  étalé 
plus  ou  moins  en  nappe. 

—  M.  YuLPiAN  présente,  au  nom  de  M.  Philipeaux,  la  note  suivante  : 

Expériences  montrant  que  des  rondelles  enlevées  a  l'aide  d'une  cou- 
ronne DE  TRÉPAN  SUR  UN  ANIMAL,  PEUVENT  ÊTRE  TRANSPLANTÉES  DANS 
l'ouverture  au  CRANE  DUN  ANIMAL  DUNE  MÊME  ESPÈCE  ET  SE  SOUDER  AUX. 
BORDS    DE    CETTE    OUVERTURE;    par  M.     J.-M,    PniLIPEAUX. 

M.  Vulpian  présente  à  la  Société  de  biologie,  de  la  part  de  M.  J.-M. 
Philipeaux,  des  pièces  montrant  les  résultats  d'expériences  relatives 
à  la  transplantation  du  tissu  osseux.  Il  s'agit,  dans  ces  cas,  de  trans- 
plantation de  rondelles  enlevées  sur  le  crâne  de  cochons  d'Inde,  et 
réimplantées  dans  des  ouvertures  faites  au  crâne  d'autres  cochons 
d'Inde.  Voici  le  procédé  opératoire  employé  par  M.  Philipeaux. 

Sur  quatre  cochons  d'Inde  âgés  de  40  jours,  il  a  enlevé,  le  5  août 
18G0,  avec  {une  couronne  de  trépan  d'un  diamètre  de  9  millimè- 
tres, un  disque  osseux  sur  le  côté  gauche  du  crâne.  Sur  d'autres 
cochons  dinde  du  même  âge,  avec  une  couronne  de  trépan  de  11  mil- 
limètres de  diamètre,  il  a  retiré  du  môme  côté  du  crâne  une  rondelle 
osseuse  qui  avait  9  millimètres  de  diamètre,  c'est-à-dire  juste  le  dia- 
mètre de  l'ouverture  pratiquée  sur  les  premiers  animaux.  Cette  ron- 
delle a  été  immédiatement  placée  dans  l'ouverture  susdite;  la  plaie 
des  cochons  d'Inde  ainsi  opérés  a  été  fermée  à  l'aide  d'un  point  de  su- 
ture. Les  cochons  d'Inde  qui  ont  successivement  fourni  les  disques 
osseux  transplantés  ont  été  rais  hors  de  cause  et  utilisés  pour  d'autres 
expériences. 

Aucun  accident  appréciable  ne  vint  troubler  la  guérison  des  ani- 
maux sur  lesquels  avait  été  faite  la  transplantation.  Un  d'eux  a  été 
tué  au  bout  de  quinze  jours,  la  soudure  de  l'os  transplanté  et  du  pour- 
tour de  l'ouverture  crânienne  n'avait  pas  eu  lieu.  Les  trois  autres  ont 


35 
été  tues,  l'an  au  bout  de  vingt  j  ours,  le  second  au  bout  de  vingt-cinq 
jours,  le  dernier  au  bout  de  trente  jours.  Ce  sont  les  crânes  de  ces 
trois  animaux  qui  sont  soumis  à  l'examen  de  la  Société. 

Sur  la  pièce  provenant  de  l'animal  qui  a  survécu  vingt  jours  à  l'opé- 
ration, on  reconnaît  facilement  que  la  rondelle  transplantée  s'est  sou- 
dée dans  une  grande  partie  de  son  pourtour  au  bord  de  Touverture  du 
crâne  ;  dans  le  quart  environ  de  sa  circonférence,  elle  est  séparée  de 
ce  pourtour  par  une  membrane  d'aspect  fibreux  ;  à  ce  niveau,  le  bord 
de  l'ouverture  crânienne  est  un  peu  érodé  et  devenu  irrégulier.  D'ail- 
leurs la  soudure  paraît  avoir  eu  lieu  surtout  au  niveau  de  la  face  pro- 
fonde du  crâne,  car  du  côté  de  la  surface  extérieure,  on  reconnaît 
encore  très-bien  la  circonférence  de  la  rondelle,  circonférence  qui,  en 
certains  points,  fait  une  légère  saillie  au-dessus  de  l'os  environnant. 
De  plus,  le  disque  osseux  transplanté  a  subi  manifestement  une  exfo- 
liation superficielle  dans  presque  toute  son  étendue.  C'est  au  niveau 
de  la  surface  interne  du  crâne  qu'a  eu  lieu  le  travail  de  soudure,  qui 
a  consisté  surtout  en  une  production  osseuse,  partie  de  la  lame  interne 
du  crâne,  et  qui  s'est  avancée  au-dessous  de  la  rondelle  transplantée 
en  y  adhérant  et  de  façon  à  en  revêtir  une  petite  portion.  L'ouverture 
médiane  faite  sur  la  rondelle  transplantée  par  le  perforateur  du  trépan 
paraît  s'être  un  peu  agrandie.  , 

On  peut  faire  à  peu  près  les  mêmes  remarques  à  propos  de  la  pièce 
n"  2  (-animal  mort  vingt-cinq  jours  après  l'opération). 

Seulement  ici  il  n'y  a  pas  eu  d'exfoliation  de  la  lame  externe  de  la 
rondelle  crânienne  transplantée.  Il  s'est  fait,  du  côté  de  la  surface 
interne  du  crâne,  un  travail  analogue  à  celui  qui  vient  d'être  indiqué 
pour  la  pièce  précédente.  De  plus,  il  y  a  soudure  évidente  des  bords 
de  la  rondelle  à  presque  toute  l'étendue  du  bord  de  l'ouverture;  cette 
soudure  peut  facilement  être  reconnue  par  l'examen  de  la  face  externe 
du  crâne.  Le  trou  médian  de  la  rondelle  transplantée  s'est  aussi  un 
peu  agrandi. 

Enfin,  sur  la  pièce  n°  3  (cochon  d'Inde  mort  trente  jours  après  l'o- 
pération), on  voit  que  la  moitié  au  moins  de  la  rondelle  transplantée 
a  été  détruite,  soit  par  résorption,  soit  par  nécrose.  Au  niveau  de  cette 
partie  détruite,  l'ouverture  du  crâne  est  fermée  par  une  membrane 
d'apparence  fibreuse.  Ce  qui  reste  de  la  rondelle  transplantée  paraît 
avoir  subi  une  exfoliation  superficielle,  mais  est  adhérent  au  bord 
correspondant  de  l'ouverture.  A  sa  région  profonde,  ce  débris  de  ron- 
delle est  recouvert  par  du  tissu  osseux  de  nouvelle  formation,  né  de 
la  lame  interne  de  la  portion  du  crâne  contiguë,  et  ayant  tout  à  fait 
l'aspect  de  cette  lame  interne. 

Des  essais  ont  déjà  été  faits  de  greffe  de  rondelles  osseuses  enlevées 


30 
au  moyen  tlu  trépan;  M.  Ollier,  qui  lui-môme  a  fait  avec  succès  une 
(cnlative  de  ce  genre,  donne  un  aperçu  de  ces  essais.  Mais  il  s'agissait 
dans  tous  les  cas  de  réimplanlation  de  rondelles  osseuses  dans  les  ou- 
vertures qu'on  avait  pratiquées  pour  les  enlever;  c'étaient,  en  un  mot^ 
des  grefles  d'os  d'un  individu  sur  lui-même.  Dans  les  expériences  dont 
il  est  rendu  compte  ici,  il  s'agit  au  contraire  de   transplantatmi  de 
rondelles  crâniennes  d'animaux  sur  d'autres  animaux  de  la  môme  es- 
pèce. 11  y  a  d'ailleurs  là  peut-être  une  condition  de  succès  en  ce  que 
c'est  ainsi  seulement  que  l'on  peut  placer  dans  des  ouvertures  faites 
avec  un  trépan  des  disques  osseux  les  obturant  exactement. 

Ainsi,  l'on  peut  considérer  comme  un  fait  prouvé  expérimentalement 
que  des  rondelles  transportées  au  crâne  d'un  animal,  dans  une  ouver- 
ture faite  au  crâne  d'un  autre  animal  de  la  même  espèce,  peut  se  sou- 
der aux  bords  de  celte  ouverture  de  façon  à  la  fermer  plus  ou  moins 
complètement.  Et  cette  soudure  osseuse  a  lieu,  bien  que  les  disques 
osseux  transplantés  soient  dépouillés  de  pé?icrdnc  et  de  dure-mère. 

M.  LiouviLLE  dit  qu'un  crâne  a  été  présenté  récemment  à  la  Société 
anatomique  sur  lequel  on  pouvait  constater  que  la  reproduction  osseuse 
était  restée  très-imparfaite. 

W.  'VuLPiAN  dit  que  l'âge  est  une  condition  importante. 

—  M.  Laboude  expose  devant  la  Société  une  théorie  plujsiologiquc  de 
ta  résorption  des  liquides  morbides  épanchés  dans  les  tissus  de  Céco- 
nomie ;  théorie  fondée  sur  l'influence  de  la  contraction  musculaire 
provoquée  par  un  courant  électrique  d'une  intensité  suffisante  et  d'une 
graduation  progressivement  insensible. 

Sur  des  animaux  chez  lesquels  des  petites  collections  purulentes 
s'étaient  formées  au  sein  des  masses  musculaires  des  pattes  posté- 
rieures, à  la  suite  de  sections  profondes  des  nerfs,  j'ai  vu,  dit  M.  La- 
borde,  les  collections  se  résorber  rapidement  lorsque,  dans  le  but 
d'interroger  l'état  de  la  conlractilité  des  muscles,  je  faisais  poser  à 
travers  ceux-ci  un  courant  graduellement  renforcé  à  l'aide  d'aiguilles 
implantées  dans  le  tissu  musculaire. 

Faisant  application  de  ces  donnés  à  un  cas  d'hydrocèle  de  la  tu- 
jiique  vaginale,  datant  de  quatre  mois  et  d'un  volume  assez  considé- 
rable, j'ai  obtenu,  dans  une  première  séance  de  vingt  minutes,  la  ré- 
sorption immédiate  d'un  tiers  au  moins  du  liquide,  et  dès  le  lendemain 
matin  il  avait  entièrement  disparu. 

Je  me  suis  servi  d'aiguilles  d'un  nouveau  modèle  pourvues  d'une  tête 
appropriée  à  l'adaptation  des  fils  isolants  qui  font  partie  du  petit  appa- 
reil do  M.  G.  Trouvé  {trousse  électrique)^  appareil  qui,  par  sa  commo- 
dité et  par  sa  parfaite  graduation,  est  éminemment  approprié  lui-même 


37 
au  but  dont  il  s'agit.  Les  aiguilles  ont  été  implantées  jusque  dans  Id 
poche  liquide,  de  manière  à  creuser  complètement   les  enveloppes 
scrotales,  et  le  plus  loin  possible  l'une  de  l'autre,  en  ayant  en  outre  le 
soin  de  ne  pas  laisser  converger  leurs  pointes. 

Le  quatrième  jour  après  l'opération  une  petite  quantité  de  liquide 
s'était  reproduite,  pouvant  être  évaluée  auquartde  la  quantité  première. 
Une  nouvelle  application  de  vingt  minutes  a  amené  la  disparition  du 
liquide,  séance  tenante.  Un  bandage  légèrement  compressif  a  été 
placé  sur  le  scrotum,  et  quinze  jours  après  le  liquide  ne  s'était  pas 
encore  reproduit.  Ce  qu'il  importe  de  remarquer,  c'est  que  nous  avons 
usé  graduellement  de  toute  l'intensité  du  courant  fourni  par  l'appareil, 
de  façon  à  provoquer  la  contraction  musculaire  la  plus  forte  et  la  plus 
continue  possible.  Cette  contraction  a,  d'ailleurs,  été  telle  que  \e  tes- 
ticule a  été  chassé  par  le  crémaster  dans  l'anneau  inguinal  à  une  assez 
grande  hauteur,  et  qu'il  y  est  demeuré  près  de  vingt-quatre  heures; 
tout  cela  sans  douleur  bien  appréciable  ni  durant  ni  après  l'opération. 

Je  n'ignore  pas  que  cette  méthode  thérapeutique  n'est  pas  nouvelle, 
en  principe;  mais  si  elle  a  si  peu  de  crédit  aujourd'hui,  n'est-ce  pas  à 
cause  de  l'insufîisance  des  procédés  et  surtout  à  cause  du  mode  d'ac- 
tion ou  moyen  mis  en  usage  ?  Selon  moi,  l'adjonction  des  aiguilles  est 
nécessaire  pour  obtenir  un  résultat  certain;  et,  de  plus,  il  importe  de 
déterminer  les  contractions  les  plus  énergiques  possibles,  sans  passer 
par  de  brusques  secousses. 

Dans  ces  conditions,  l'intervention  des  contractions  musculaires 
provoquées  et  l'influence  de  ces  contractions  sur  la  circiUalion  vei- 
neuse, en  particulier,  et  par  suite  sur  les  phénomènes  de  résorption, 
ne  saurait  être  mise  en  doute.  Et  s'il  en  est,  en  réalité,  ainsi,  il  y  a, 
dans  le  fait,  le  point  de  départ  d'une  méthode  thérapeutique  qui  peut 
être  généralisée. 

Je  poursuis,  à  cet  égard,  des  essais  dont  je  ferai  connaître  ultérieu- 
rement les  résultats,  s'il  y  a  lieu. 

M.  Ranvier  combat  l'interprétation  de  M.  Laborde;  il  pense  qu'on 
agit  sur  les  nerfs  vaso-moteurs  de  la  séreuse. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 

Le  secrétaire,  M.  R.  Lépi.ne. 

Séance  du  26  février, 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 
M.  Ranvier,  à  propos  de  la  communication  faite  dans  la  séance  pré- 
cédente par  M.  Moreau,  avait  dit  qvie  la  théorie  proposée  par  W.  Le 


38 
gros,  et  qui  est  relative  à  l'influence  des  contractions  rhylhmiques  des 
artères  sur  la  progression  du  sang,  ne  lui  paraissait  pas  fondée.  A 
l'appui  de  l'exactitude  des  propositions  qu'il  a  émises  dans  la  séance 
précédente,  il  apporte  l'expérience  suivante  dont  il  rend  témoins  les 
membres  de  la  Société. 

La  membrane  interdigitale  d'une  grenouille  étant  convenablement 
placée  sous  le  champ  du  microscope,  M.  Ranvier  paralyse  le  cœur  de 
l'animal  au  moyen  de  la  méthode  employée  parLudwig,  c'est-à-dire  à 
l'aide  d'un  fort  courant  d'induction.  Or  on  constate  que  la  circulation 
s'arrête  presque  en  môme  temps  que  le  cœur.  M.  Ranvier  insiste  sur 
la  portée  de  cette  expérience  qui,  selon  lui,  montre  péremptoirement 
l'influence  du  cœur  sur  la  progression  du  sang.  L'expérience  de  Be- 
zold  (ligature  de  l'aorte  à  son  origine),  faite  d'ailleurs  dans  un  autre 
but,  excellente  pour  démontrer  ce  que  Bezold  se  proposait  de 
prouver,  ne  serait  pas  dans  l'espèce  aussi  probante,  à  cause  du  barrage 
constitué  par  la  ligature  qui  empêche  l'arrivée  du  sang  pulmonaire 
dans  le  système  artériel.  Dans  l'expérience  de  M.  Ranvier,  au  con- 
traire, il  n'y  a  pas  de  barrage. 

Relativement  au  fait  de  M.  Moreau ,  M.  Ranvier  répèle  ce  qu'il  a  dit 
dans  la  dernière  séance ,  à  savoir  que  le  pouls  est  suspendu  dans  les 
deux  conditions  opposées  de  dilatation  et  de  rétrécissement  extrêmes 
de  l'artère.  C'est  ce  dont  on  peut  s'assurer  par  l'examen  de  la  mem- 
brane interdigitale  de  la  grenouille. 

M.  Laborde  objecte  à  M.  Ranvier  que  le  courant  interrompu  ne  se 
limite  pas  au  cœur,  qu'il  peut  agir  sur  les  nerfs,  de  telle  sorte  que 
l'expérience  de  M.  Ranvier  n'aurait  pas  la  valeur,  qu'il  lui  attribue. 
Mieux  vaudrait  paralyser  le  cœur  par  une  compression  exercée  à  l'aide 
des  doigts. 

M.  Ranvier  dit  qu'il  n'est  pas  sûr  en  comprimant  le  cœur  de  ne  pas 
effacer  plus  ou  moins  ses  cavités.  Dans  ce  cas  on  retomberait  dans  les 
conditions  de  l'expérience  de  Bezold ,  qu'il  a  précédemment  criti- 
quées. 

—  M.  JoFFROY,  au  nom  de  M.  Parrot  et  au  sien ,  fait  une  communica- 
tion sur  un  cas  de  paralysie  infantile. 

—  M.  Lépîne  met  sous  les  yeux  de  la  Société  l'estomac  d'un  cochon 
d'Inde  dont  la  muqueuse  présente  de  petites  taches  ecchymotiques 
très-nombreuses. 

Le  10  février  (il  y  a  quinze  jours),  on  a  enfoncé  une  pointe  de  trépan 
à  la  partie  antérieure  du  pariétal,  droit  de  cet  animal,  et,  avec  une 
lame  tranchante,  on  a  fait  une  petite  ponction  dans  l'hémisphère  céré- 
bral. L'animal  pesait  888   grammes.  —  Avant  l'opération  la  tempéra- 


39 

ture  du  rectum  était  39", 4  C.  —  Aussitôt  après  elle  s'était  abaissée 
à  38°.  (La  respiration  avait  été  notablement  gênée  pendant  qu'on  le 
maintenait.) 

Deux  heures  après  la  température  était  à  39°,6.  Pas  de  paralysie 
appréciable ,  pas  d'hyperesthésie,  pas  de  mouvements  de  rotation.  Le 
lendemain,  la  température  était  39°, 8.  Ou  répète  l'expérience  de  la 
veille  en  enfonçant  l'instrument  plus  profondément.  11  y  a  une  hémor- 
rhagie  assez  abondante,  cris  et  mouvements  de  roulement;  tempéra- 
ture, 39°, 7;  poids,  860  grammes. 

L'animal  a  dépéri  progressivement  les  jours  suivants.  Examiné 
avec  soin  le  23  février,  il  présente  un  amaigrissement  considérable 
(560  grammes);  il  marche  difficilement,  le  museau  appuie  sur  le  sol  ; 
pas  de  paralysie  nette,  mais  faiblesse  générale.  Température,  33°, 5. 
Mort  le  lendemain  matin.  A  l'autopsie  ,  cicatrice  ocreuse  peu  étendue 
à  la  partie  la  plus  antérieure  du  lobe  cérébral  droit.  A  l'examen 
microscopique,  corps  granuleux,  grains  d'héraatosine  et  cristaux 
d'hematoïdine. 

Les  poumons  sont  sains.  Le  foie ,  examiné  comparativement  avec  le 
foie  d'un  animal  de  môme  grosseur,  présente  des  cellules  très-grais- 
seuses. Les  reins  paraissent  sains.  Les  capsules  surrénales  sont  rouges 
et  très'friables.  Les  muscles  (examinés  au  microscope)  paraissent 
sains.  L'estomac  est  de  volume  ordinaire  ;  la  muqueuse  est  couverte 
de  petites  taches  rouge  brunâtre,  très-régulièrement  arrondies  et  fai- 
sant un  léger  relief;  leur  diamètre  moyen  est  de  2  à  3  millimètres.  A 
l'examen  microscopique,  on  constate  que  les  cellules  des  glandes 
stomacales  sont  fortement  colorées  en  jaune  ;  elles  ont  la  couleur  que 
présentent  les  grains  d'hématosine.  Dans  quelques  glandes  on  recon- 
naît les  globules  sanguins.  Il  ne  paraît  pas  y  avoir  d'hémorrhagie  en 
dehors  des  glandes. 

La  muqueuse  intestinale  est  saine. 

En  résumé  il  s'agit  d'ecchymoses  stomacales  qui  paraissent  dé- 
pendre de  la  lésion  cérébrale  produite  chez  cet  animal.  On  sait  que 
Schiff  a  insisté  sur  les  ecchymoses  stomacales  qui  se  produisent  chez 
les  animaux  à  la  suite  de  l'extirpation  du  plexus  solaire. 

M.  Charcot  rappelle  qu'il  a  fréquemment  observé  à  la  Salpètrière 
ces  ecchymoses  stomacales  chez  des  apoplectiques.  M.  Andral  en  a 
observé  dans  l'intestin.  On  connaît  aussi  celles  du  péricrâne,  de 
l'endocarde  dans  les  mêmes  conditions.  Relativement  à  la  production 
de  ces  ecchymoses  qui  ont  un  siège  si  différent,  M.  Charcot  croit 
qu'elles  doivent  être  rapportées  à  ia  paralysie  vaso-motrice.  Elles  ne 
sont  pas  un  phénomène  précoce,  contemporain  de  l'attaque,  mais  leur 
époque  d'apparition  est  tardive;  elles  manquent  quand  la  mort  sur- 


vient  très-rapidement.  Tout  récemment  M.  Charcot  a  observé  deux 
cas  do  de  vastes  foyers  hémorrhagiquesavec  rupture  des  ventricules 
du  cerveau  et  mort  rapide  ;  il  n'y  avait  nulle  part  d'ecchymoses. 

M.  Hayen  demande  à  M.  Charcot  si  l'on  observe  des  ecchymoses 
dans  l'apoplexie  qui  est  due  à  un  ramollissement  cérébral. 

M.  CnARcoT  répond  affirmativement  et  cite  à  ce  sujet  une  observation 
publiée  par  M.  Lépine  dans  le  numéro  de  septembre  1869  des  Aucuives 

DE  PHYSIOLOGIE. 

M.  Brown-Séquard  n'a  vu  que  très-rarement  des  ecchymoses  stoma- 
cales; ce  qu''il  a  observé  fréquemment  chez  divers  animaux,  ce  sont  des 
ramollissements  delà  muqueuse  gastrique  à  la  suite  de  lésions  de  l'en- 
céphale. 

Section  transversale  complète   de  la  rate  en   deux  parties  sur  un  uat 

ALBINOS  ;    GUÉRISON  ;    ÉTAT  DE   l'oRGANE  SPLÉNIQUE    AU    MOMENT    DE    LA    MORT, 

SIX  MOIS  APRÈS  l'opération;  par  J.  M.  Piiilipeaux. 

Le  15  août  1869,  M.  Philipeaux,  sur  un  très-jeune  rat  albinos,  après 
avoir  fait  sortir  la  rate  au  travers  de  la  paroi  abdominale,  la  divise 
transversalement,  d'un  coup  de  ciseaux,  en  deux  moitiés  inégale?. 
L'épiploon  splénique  a  été  respecté.  La  rate  est  réintégrée  dans  la  ca- 
vité abdominale,  la  plaie  abdominale  est  rapprochée  par  des  points  de 
suture;  l'animal  guérit,  et  l'on  n'observe  aucune  modification  fonc- 
tionnelle à  partir  du  moment  de  la  guérison  de  la  plaie. 

On  examine  l'élatde  la  rate  chez  cet  animal,  mort  le  25  février  1S70. 
Comme  les  mem.bres  de  la  Société  peuvent  le  voir,  on  reconnaît  bien 
le  lieu  de  la  section  :  les  deux  segments  de  la  rate  sont  accolés  et  pa- 
raissent même  soudés  intimement  dans  une  partie  de  l'étendue  des 
surfaces  de  section  en  contact.  Au  niveau  du  point  de  la  coalescence, 
la  rate  a  contracté  des  adhérences  avec  les  parois  abdominales,  et  l'on 
voit  des  vaisseaux,  relativement  assez  larges,  qui  vont  de  ces  parois  à 
la  face  convexe  de  Torgane,  à  l'endroit  où  a  eu  lieu  la  réunion. 

La  rate  a  augmenté  considérablement  de  volume  depuis  le  jour  de 
l'opération.  Elle  avait  alors  17  millimètres  de  largeur;  elle  a  actuelle- 
ment 42  millimètres  de  longueur,  qui  se  décomposent  ainsi  :  10  milli- 
jnèlres  pour  un  des  segments  et  26  pour  l'autre. 

M.  Brown-Séquard  a  détruit  sur  un  pigeon  la  portion  inférieure  de  Ta 
moelle  depuis  le  milieu  de  la  région  dorsale;  or,  bien  que  la  destruc- 
tion ait  été  à  peu  près  complète,  on  peut  observer  chez  cet  animal  que 
le  pincement  de  l'une  des  pattes  détermine  de  légers  mouvements  ré- 
flexes dans  l'autre  patte.  Mais  ce  n'est  pas  sur  ce  fait,  qu'il  avait  déjà 
signalé  en  18i9  à  la  Société,  que  M.  Brown-Soquard  veut  insister  au- 


41 
jourdhui  ;  c'est  sur  cet  autre  fait  que  les  plumes  arrachées  au  niveau 
de  la  plaie  faite  au  dos  n'ont  pas  repoussé,  tandis  que  la  cicatrisation 
de  la  plaie  s'est  faite  avec  une  très-grande  rapidité. 

Chez  un  autre  pigeon,  au  contraire,  dont  la  moelle  a  été  simple- 
ment sectionnée,  la  cicatrisation  de  la  plaie  a  été  plus  lente,  mais  les 
plumes  ont  repoussé  avec  une  énergie  tout  à  fait  insolite,  et  il  s'est 
montré  une  poussée  de  petites  plumes  sur  les  pattes  de  cet  animal. 

M.  Vblpian  demandée  M.  Brown-Séquard  s'il  rapproche  le  fait  de  la 
cicatrisation  rapide  chez  le  premier  animal  du  fait  de  cicatrisation, 
également  plus  énergique  des  plaies  de  l'oreille  d'un  lapin  auquel  le 
grand  sympathique  a  été  sectionné  au  cou. 

M.  Brown-Sé«uard  répond  affirmativement.  Il  résulte  d'expériences 
qu'il  a  faites  que  la  cicatrisation  de  toute  espèce  de  plaies,  brûlu- 
res, etc.,  se  fait  plus  vite  dans  les  membres  dont  les  nerfs  ont  été  sec- 
tionnés. 

M.  Laborde  rappelle  qu'il  a  antérieurement  soutenu  devant  la  Société 
une  opinion  opposée.  Contrairement  à  M.  Brown-Séquard,  il  rapporte 
les  altérations  de  nutrition  qui  peuvent  se  produire  à  la  suite  de  la 
section  des  nerfs,  du  sciatique  par  exemple,  à  un  défaut  de  nutrition. 

M.  Brown-Séquard  répond  que  Schrœder  Van  der  Kolk  avait  déjà  sou- 
tenu la  même  manière  de  voir  que  M.  Laborde ,  mais  que  la  justesse 
de  son  interprétation  lui  est  démontrée  par  le  fait  qu'il  suffit,  pour 
empêcher  les  altérations  de  nutrition  de  se  développer,  de  donner 
certains  soins  à  l'animal  en  expérience.  Ces  lésions  ne  se  produisent 
jamais  d'ailleurs  quand  la  sensibilité  a  reparu,  parce  qu'alors  l'animal 
cesse  de  se  mordre.  Chez  le  chien  et  chez  le  chat  on  n'observe  pas  de 
ces  altérations  dénutrition.  Chez  l'homme  il  en  est  de  même.  Jamais 
la  section  d'un  nerf  (sans  irritation)  n'en  détermine. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 

Le  secrétaire,  R.  Lépine. 


COMPTE  RENDU  DES  SÉANCES 


DE 


r  r 


LA  SOCIETE  DE  BIOLOGIE 

pendant  le  mois  de  mars  1870; 
Par  m.  GRÉHANT,  secrétaire. 


PRÉSIDENCE  DE  M.  CL.  BERNARD. 


Séance  du  5  mars. 


M.  Brown-Séquard  présente  un  cochon  d'Inde  chez  lequel  tous  les 
nerfs  du  bras  furent  coupés  il  y  a  plus  d'un  an,  et  bien  que  l'animal,  en 
marchant,  appuyait  sur  le  sol  le  dos  du  poignet,  cette  partie  n'a  pré- 
senté aucune  altération  de  nutrition.  M.  Brown-Séquard  a  montré  un 
chat  dont  le  nerf  scialique  a  été  coupé  en  mars,  et  l'on  n'a  observé  que 
les  premiers  symptômes  de  l'épilepsie,  chez  ce  chat  et  chez  un  autre, 
tous  deux  opérés  il  y  a  près  d'un  an. 

M.  Brown-Séquard  n'a  vu,  après  la  section  du  nerf  sciatique,  qu'un 
amaigrissement  peu  considérable  du  côté  de  la  section.  Il  n'y  a  eu 
aucune  autre  altération  de  nutrition. 

M.  Brown-Séquard  présente  aussi  un  pigeon  dont  la  moelle  épinière 
fut  coupée  dans  la  région  lombaire,  et  chez  lequel  la  faculté  du  vol  se 
montre  affaiblie. 


44 

M.  Scliiff  a  signalé  depuis  longtemps  déjà  celle  diminulion  de  puis- 
sance après  la  seclion  de  la  moelle  épinière.  Les  parlicularités  nou- 
velles sur  lesquelles  M.  Brown-Séquard  veut  appeler  rallenlion  sont  : 
l"  que  ce  n'est  pas  à.  une  paralysie  des  muscles  sternaux  qu'est  due 
cette  influence  ;  2°  que  rexlirpalion  d'une  petite  partie  de  la  substance 
grise  du  renflement  lombaire  suflit  pour  diminuer  la  puissance  du  vol. 
11  ajoute  que  plus  la  moelle  est  coupée  haut,  ou,  en  d'autres  termes, 
plus  on  se  rapproche  de  la  naissance  des  nerfs  de  l'aile,  plus  le  vol 
devient  difficile. 

—  M.  Bouchard  communique  l'observation  d'un  homme  qui,  après  une 
chute  sur  le  siège,  fut  pris  de  paralysie  des  muscles  et  de  la  sensi- 
bilité des  membres  inférieurs.  La  paralysie  a  fait  des  progrès  ascen- 
dants, et  le  malade  est  mort  asphyxié;  à  l'autopsie,  on  a  trouvé  une 
myélite  des  plus  intenses,  non  accompagnée  d'hémorrhagie.  Mais  il  y 
avait  une  hémorrhagie  dans  chacune  des  capsules  surrénales. 

—  M.  MoREAO  présente  une  tumeur  des  parois  de  l'estomac  d'un  chien  : 
c'était  un  kyste  fermé  rempli  d'entozoaires  vivants.  M.  Vaillant  de- 
mande à  M.  Moreau  si  l'examen  attentif  de  l'animal  a  été  fait  ;  chez  le 
cheval  on  trouve  très-fréquemment  des  tumeurs  de  l'estomac  qui 
communiquent  avec  l'intérieur  de  cet  organe,  et  qui  contiennent  or- 
dinairement des  filaires  ou  des  spiroplères  ;  les  entozoaires  trouvés 
par  M.  Moreau  seront  examinés  avec  soin. 

—  M.  Babuteau  présente  un  échantillon  de  bromal  pur;  par  des  expé- 
riences faites  avec  M.  Goujon  sur  des  lapins  et  des  chiens,  M.  Babu- 
teau a  reconnu  que  le  bromal  injecté  en  solution  aqueuse  sous  la  peau 
est  irritant  et  tonique,  mais  jamais  les  animaux  n'ont  présenté  une 
anesthésie  complète,  bien  que  le  bromal  traité  par  les  alcalis  donne 
du  bromoforme. 

M.  Legros,  sur  un  chien  qui  avait  succombé  à  l'action  du  bromal  et 
qui  avait  cessé  de  respirer,  vit  revenir  les  mouvements  respiratoires 
pendant  deux  ou  trois  minutes  après  l'application  d'un  courant  con- 
tinu. 

M.  Charcot  parle  des  symptômes  ascendants  de  la  moelle  qui  se 
présentent  quelquefois  dans  les  lésions  des  parties  inférieures  de  la 
moelle;  dans  le  mal  de  Pott,  par  exemple,  lorsqu'il  y  a  compression 
de  la  région  lombaire,  on  peut  observer  quelquefois  des  troubles  de  la 
coordination  des  mouvements  du  bras;  M.  Charcot  pense  que  ces 
troubles,  qui  n'arrivent  pas  à  une  véritable  paralysie  des  membres  su- 
périeurs, tiennent  à  une  extension  de  la  sclérose  des  cordons  posté- 
rieurs. 

M.  Bkown  Séquard,  dans  diverses  affections  de  la  partie  inférieure 


de  la  moelle,  a  observé  de  même  des  picotements,  des  fourmillements 
dans  le  bras,  signes  de  congestion  de  la  moelle  au  niveau  du  plexus 
brachial;  mais  dans  certains  cas,  on  nobservait  aucun  symptôme  au 
niveau  du  tronc  ;  on  ne  pouvait  donc  admettre  alors  une  propagation 
continue  de  la  maladie  de  la  moelle  de  bas  en  haut.  M.  Brown-Séquard 
pense  qu'on  pourrait  expliquer  les  symptômes  par  ce  fait  que  souvent 
l'irritation  d'un  nerf  sensitif  détermine  de  la  congestion  dans  d'autres 
parties  du  système  nerveux. 

M.  LiouviLLE  demande  s'il  ne  faudrait  pas  dans  ces  cas  tenir  compte 
de  Tinflammation  des  méninges.  M.  Charcot  répond  que  dans  les  cas 
qu'il  a  observés,  on  n'a  pas  noté  de  méningite. 

M.  Brown-Séquard  fait  observer  qu'une  méningite  qui  se  serait  pro- 
pagée de  bas  en  haut  aurait  été  reconnue  par  des  symptômes  à  la  ré- 
gion dorsale,  et  d'ailleurs  une  méningite  siégeant  au  voisinage  de  l'ori- 
gine des  nerfs  du  bras  aurait  été  manifestée  par  des  symptômes 
beaucoup  plus  accusés  et,  en  outre,  par  une  affection  herpétique  très" 
douloureuse  que  M.  Brown-Séquard  a  observée  au  bras  dans  plusieurs 
cas  d'inflammation  des  méninges  de  la  région  indiquée. 

Le  secrétaire,  Gréhant. 

Séance  du  12  mars. 

M.  MoREAU  a  examiné  avec  M.  Vaillant  le  ver  que  renfermait  la 
tumeur  de  l'estomac  du  chien  présentée  dans  la  dernière  séance  :  c'est 
un  spiroplera  sanguinolenta,  fréquent  chez  le  loup  et  le  chien.  L'es- 
jiècc  du  cheval  est  beaucoup  plus  petite.  M.  Legros  a  trouvé  dans  l'es- 
tomac d'un  coq  le  spiroplera  nasiUa. 

—  M.  Brown-Séquard  présente  un  cochon  d'Inde  dont  l'oreille  est  dé- 
formée et  qui  provient  d'un  mâle  dont  l'oreille  offrit  la  même  défor- 
mation à  la  suite  de  la  section  du  grand  sympathique  au  cou.  D'autres 
cochons  d'Inde  provenant  de  mères  ayant  les  pattes  altérées  à  la  suite 
de  sections  des  nerfs  sciatique  et  crural  présentent  aussi  les  mêmes 
altérations  des  pattes. 

M.  GiRALDÈs  pense  que,  pour  établir  si  l'hérédité  est  en  cause,  il 
faut  multiplier  la  même  lésion  sur  vingt  femelles,  par  exemple,  puis 
voir  combien  de  fois  elle  se  transmettra. 

M.  Brown-Séquard  répond  que  la  question  n'est  pas  aussi  facile.  J'aj, 
dit-il,  quarante  femelles  présentant  des  altérations  des  doigts  et  dont, 
les  petits  ne  sont  pas  modifiés;  le  fait  de  la  transmission  est  donc  ex- 
ceptionnel et  ne  s'est  montré  plus  fréquent  qu'à  la  suite  de  la  section 
des  deux  nerfs  de  la  patte  chez  la  mère. 


46 

M.  Grédant  propose  comme  moyen  simple  d'analyse  du  sang  appli- 
cable à  l'étude  de  ce  liquide  dans  les  maladies  et  dans  diverses  con- 
ditions établies  expérimentalement  chez  les  animaux,  le  mode  de 
traitement  qu'il  a  employé  pour  la  recherche  de  l'urée  du  sang. 

La  détermination  de  l'eau  contenue  dans  le  sang  présente  déjà  des 
difficultés  :  si  l'on  abandonne  le  sang  à  la  coagulation,  le  caillot  placé 
dans  une  étuve  à  100°  est  difficile  à  dessécher  complètement,  les  cou- 
ches superficielles  forment  un  vernis  sec  qui  empêche  la  dessiccation 
de  la  partie  centrale.  Mais  si  on  recueille  le  sang  non  coagulé  et  après 
l'avoir  agité  dans  un  flacon  pour  le  défibriner,  si  on  le  traite  par  le 
double  de  son  volume  d'alcool,  on  obtient  une  bouillie  qui,  soumise  le 
lendemain  à  la  presse,  laisse  un  tourteau  facile  à^pulvériser.  Cette  pou- 
dre se  dessèche  bien  dans  l'étuve. 

D'une  autre  part,  on  déterminera  le  poids  du  résidu  de  l'extrait  al- 
coolique, et  dans  ce  résidu  l'urée  et  quelques  sels  solubles  dans  l'al- 
cool. 

Le  tourteau  pesé  après  dessiccation  renfermant  les  substances  albu- 
minoïdes,  que  l'alcool  a  coagulées  et  toute  l'hémoglobine,  pourra  en- 
suite être  soumis  à  quelques  autres  recherches. 

M.  BoucnARD  pense  aussi  que  l'emploi  de  l'alcool  est  utile  dans  une 
analyse  de  sang  rendue  pratique,  mais  il  préfère,  au  lieu  de  défibriner 
le  sang,  l'injecter  d'abord  dans  un  flacon  renfermant  un  certain  vo- 
lume d'alcool. 

HÉMICnORKE  DROITE  DE  DATE  RÉCENTE  CHEZ  UN  VIEILLARD  DE  73  ANS.  A 
l'autopsie,  nÉMOKRnAGlE  SUR  LE  TRAJET  DU  PÉDONCULE  CÉRÉBRAL  GAIICnE, 
AU    NIVEAU    DE    SON    INSERTION    SUR    LA    COUCDE    OPTIQUE;    par  M.   MaGNAN. 

Chev...  Joseph,  73  ans,  lapidaire,  entre  au  bureau  d'admission 
(Sainte-Anne),  le  7  mars  1870.  Ce  malade,  dont  les  antécédents  sont 
inconnus,  présente,  au  moment  de  son  arrivée,  des  mouvements  cho- 
réiques  dans  le  bras  et  la  jambe  du  côté  droit.  Il  est  loquace  incohé- 
rent, répond  très-incomplétement  aux  questions.  C'est  avec  la  plus 
grande  peine  que  l'on  parvient  à  savoir  que  cet  état  remonte  à  trois 
ou  quatre  jours  seulement.  On  ne  peut  avoir  sur  la  sensibilité  de  ré- 
sultats précis,  toutefois,  le  malade  paraît  sentir  quand  on  le  pince  ;  il 
retire  un  peu  le  membre. 

Dans  la  journée  du  8,  les  convulsions  sont  incessantes  pendant  le 
réveil;  elles  gagnent  le  cou  et  la  face,  mais  restent  limitées  au  côté 
droit;  elles  augmentent  avec  rémotion,  diminuent  quand  lesujet  acca- 
blé de  fatigue  tend  à  s'assoupir  et  s'arrêtent  presque  entièrement  lorsque 
le  sommeil  est  complet. 


47 

Le  9  mars,  les  mouvements  choréiques  ont  augmenté  d'intensité,  la 
face  est  grimaçante  à  droite,  le  bras  et  la  jambe  sont  constamment 
agiles.  Vers  une  heure  de  l'après-midi,  le  malade  devient  pâle,  puis 
cyanose  à  deux  reprises  différentes;  les  convulsions  diminuent,  se 
suMendent,  et  la  mort  survient  brusquement  comme  par  syncope. 

AcTOPsiE  le  1 1  mars.  —  Les  méninges  épaissies,  opalines  par  places, 
s'enlèvent  avec  facilité  dans  toute  l'étendue  du  cerveau';  les  circon- 
volutions d'une  teinte  jaunâtre,  d'un  volume  moindre,  sont  étroites, 
saillantes,  séparées  par  des  anfractuosités  profondes.  Les  vaisseaux 
sont  athéromateux,  et  par  places  on  peut,  en  pressant,  avec  lesdoigts 
faire  sortir  des  cylindres  assez  épais  d'une  substance  jaunâtre  ne  lais- 
sant qu'une  faible  portion  au  centre.  La  surface  des  ventricules  laté- 
raux, déprimée  en  quelques  points,  présente  un  épaississement  de 
l'épendyme.  Des  coupes  pratiquées  de  la  superficie  vers  le  centre, 
dans  toute  l'étendue  du  cerveau,  font  voir  des  lacunes  dans  la  sub- 
stance blanche,  mais  surtout  dans  le  corps  strié  et  la  couche  optique, 
qui  en  sont  criblés  des  deux  côtés. 

Une  incision  pratiquée  sur  le  pédoncule  cérébral  gauche  à  son  inser- 
tion sur  la  couche  optique,  met  à  découvert  un  foyer  hémorrhagique 
du  volume  d'une  petite  noisette,  composé  de  caillots  mous,  rougeâ- 
tres,  de  date  récente;  le  tissu  du  voisinage,  déchiré,  est  infiltré  de 
sang.  La  protubérance,  le  bulbe  n'offrent  point  d'altération  apprécia- 
ble. Le  lobe  gauche  du  cervelet  présente  à  sa  face  inférieure  et  sous- 
jacente  à  la  pie-mère  une  plaque  jaunâtre  de  ramollissement  ancien, 
de  l'étendue  d'une  pièce  de  20  centimes. 

Les  méninges  rachidiennes  sont  injectées  dans  toute  leur  étendue  ; 
les  coupes  de  la  moelle  ne  montrent  qu'une  faible  injection  de  la 
substance  grise. 

Le  cœur,  fortement  contracté,  est  dur,  rigide;  ses  cavités  sont  vides 
de  sang. 

L'aorte  athéromateuse  présente  des  plaques  jaunâtres,  surtout  vers 
les  valvules  sigmo'ides. 

Le  foie  paraît  normal. 

Les  reins  ont  une  teinte  légèrement  jaunâtre  dans  leur  couche  cor- 
ticale. 

La  mort  survenue  brusquement  semble  avoir  été  produite  par  syn- 
cope, ainsi  que  le  fait  supposer  l'état  dans  lequel  le  cœur  a  été  trouvé 
à  l'autopsie.  En  négligeant  les  lésions  multiples  des  deux  hémisphères 
cérébraux  qui  se  rattachent  à  la  démence  sénile,  et  qui  ne  sauraient 
être  invoquées  pour  expliquer  les  convulsions  choréiques,  nous  res- 
tons en  présence  de  ce  double  fait:  d'une  part,  une  hémorrhagie  ré- 
cente sur  le  trajet  du  pédoncule  cérébral  gauche  ;_^d'aulre  part,  une 


48 
bi-michorùc  droite   récente.  V  a-t-il  une  relation  continue  entre  ces 
tloux  faits?  C'est  probable,  mais  les  données  de  pliysiologie  patholo- 
gique ne  nous  paraissent  pas  permettre  une  affirmation  positive. 

M.  Charcot  fait  remarquer  qu'il  est  singulier  de  voir  une  hémorrha- 
gie  ayant  ce  siège  produire,  au  lieu  de  paralysie,  des  mouvements  a^- 
réiformes. 

M.  Brown-Séquard  cite  l'opinion  de  son  ami  M.  Jackson,  qui  croit 
que  des  embolies  du  corps  strié  peuvent  être  en  rapport  avec  la  cho- 
rée;  M.  Brown-Séquard  a  observé  lui-même  trois  cas  d'hémiplégie 
par  lésion  cérébrale,  dans  lesquels  les  malades  tournaient  le  bras  en 
mouvement  de  tire-bouchon;  ce  mouvement  choréique  augmentait 
quand  on  voulait  l'arrêter.  M.  Brown-Séquard  croit  que  des  phéno- 
mènes très-variés  peuvent  être  produits  par  des  hémorrhagies  céré- 
brales, bien  que,  dans  beaucoup  de  cas  de  chorée,  on  ne  trouve  pas 
de  lésions. 

M.  Bert  a  fait  installer  ses  appareils,  qui  serviront  à  étudier  l'in- 
fluence des  diminutions  ou  des  augmentations  de  pression  sur  l'orga- 
nisme. Plusieurs  expériences  ont  été  faites  d'abord  pour  rechercher 
quelles  altérations  éprouve  l'air  lorsqu'un  animal  est  placé  dans  une 
cloche  et  soumis  à  une  forte  diminution  de  pression.  Dans  un  cou- 
rant d'air  continu  dont  la  pression  est  de  16  à  18  centimètres  de  mer~ 
cure,  les  animaux  meurent  asphyxiés,  le  sang  est  noir  dans  les  cavités 
du  cœur.  L'analyse  a  montré  dans  l'air  de  faibles  altérations,  18  p.  100 
d'oxygène  et  2  p.  100  d'acide  carbonique;  dans  ces  conditions,  l'oxy- 
gène n'entre  pas  dans  le  sang. 

Un  chat  est  mort  très-rapidement  dans  une  atmosphère  dont  la  pres- 
sion était  de  18  centimètres. 

Un  autre  chat  est  mort  au  bout  de  sept  minutes  dans  une  atmosphère 
pareille. 

Un  cochon  d'Inde  a  séjourné  quatre  heures  dans  une  atmosphère 
dont  la  pression  a  varié  de  16  centimètres  à  10  centimètres  et  demi. 

Par  la  rentrée  subite  de  l'air,  l'animal  parut  plus  malade;  sa  tempé- 
rature était  de  20  degrés. 

Par  une  raréfaction  soudaine,  les  gaz  intestinaux  se  dilatent  et  peu- 
vent asphyxier  l'animal  par  l'obstacle  apporté  au  jeu  des  poumons. 

Le  secrétaire,    Grédant. 

Séance  du  19  mars. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Lj  correspondance  imprimée  comprend  un  mémoire  de  M.  Liouville, 


49 

intitulé  :  Note  sur  la  coexistence  d'altérations  anévrysmales  dans  la 
rétine  avec  des  anévrysmes  des  'petites  artères  dans  l'encéphale. 

—  M.  Gréhant  publie  un  fait  qu'il  a  observé  en  pratiquant  la  respi- 
ration artificielle  chez  un  chien  curare;  un  manomètre  à  mercure  in- 
diquait dans  Tarière  fémorale  une  pression  de  15  centimètres.  On  donna 
beaucoup  d  amplitude  et  de  fréquence  aux  mouvements  du  soufflet,  et 
l'on  vit  la  pression  tomber  à  5  centimètres;  on  souffla  ensuite  dans  la 
trachée  de  l'air  soumis  à  la  pression  de  6  centimètres  de  mercure,  la 
même  dépression  fut  observée  ;  en  même  temps  les  veines  se  gonflaient 
et  les  artères  se  vidaient.  Ainsi  une  augmentation  de  pression  s'exer- 
çant  seulement  dans  les  bronches  produit  une  compression  des  vais- 
seaux des  poumons,  et  diminue  la  quantité  du  sang  qui  traverse  ces 
organes.  Cet  effet  mécanique  a  été  vérifié  de  même  chez  un  chien 
normal,  puis  sur  lespounions  détachés.  On  fit  circuler  artificiellement 
du  sang  défibriné  par  l'artère  pulmonaire  ;  dès  qu'on  insuffla  fortement 
les  poumons,  la  quantité  de  sang  qui  revenait  par  les  veines  pulmo- 
naires diminua  beaucoup. 

M.  Bert  fait  remarquer  que  déjà  autrefois  des  physiologistes  ont  pu 
tuer  des  animaux  en  insufflant  fortement  les  poumons. 

M.  Carville  cite,  à  propos  du  fait  observé  par  M.  Gréhant,  les  obser- 
vations qu'il  a  faites  sur  lui-même  pendant  un  traitement  à  l'air  com- 
primé. L'eff'et  de  cette  compression  de  l'air  a  été  de  diminuer  le  nombre 
des  pulsations  et  des  respirations,  et  de  provoquer  l'appétit;  de  plus, 
avant  le  traitement,  M.  Carville  ne  pouvait  expulser  des  poumons,  par 
une  expiration  aussi  forte  que  possible  que  1100  centimètres  cubes  d'air, 
et  après  deux  mois  de  traitement,  ce  volume  est  devenu  égal  à  2  litres. 

M.  Bert  dit  que  la  communication  de  M.  Carville  n'est  pas  compa- 
rable avec  celle  de  M.  Gréhant,  qui  est  relative  à  une  insufflation  li- 
mitée au  poumon,  tandis  que  dans  l'air  comprimé  les  pressions  se 
transmettent  dans  tous  les  sens  et  se  font  équilibre. 

M.  Gréhant  a  vu  se  produire  l'apnée  signalée  par  M.  Rosenthal  en 
exagérant  beaucoup  les  mouvements  de  la  respiration  artificielle.  Ce 
phénomène  pourrait  être  expliqué  par  la  diminution  de  la  circulation. 

Il  n'est  pas  essentiel,  dit  i\l.  Brown-Séquard  ,  d'injecter  beaucoup 
d'air  pour  voir  l'apnée  ;  quelquefois,  au  bout  de  huit  à  dix  minutes  d'in- 
sufflation, l'animal  fait  à  peine  des  mouvements  respiratoires,  et  au 
bout  d'une  demi-heure  la  température  peut  être  abaissée  de  8  degrés. 

M.  Bert  communique  les  résultats  de  plusieurs  expériences  faites 

sur  des  lapins  placés  dans  des  cloches  dont  l'air  était  d'abord  lentement 

raréfié  et  renouvelé;  puis  quand  la  pression  était  arrivée  à  un  certain 

point,  1(BS  cloches  étaient  fermées.  L'asphyxie  se  montra  d'autant  plus 

c.  R.  1870.  4 


50 

vite  que  la  pression  de  l'air  était  plus  petite  et  sous  une  pression  de 
18  centimètres;  l'air  avait  reçu  beaucoup  moins  d'acide  carbonique  et 
perdu  beaucoup  moins  d'oxygène  que  sous  une  pression  plus  élevée. 

—  M.  Brown-Spquard  rappelle  (lu'il  a  montré,  il  y  a  deux  mois,  des 
cochons  d"Inde  offrant  une  altération  de  l'oreille  que  le  père  avait 
présentée  à  la  suite  de  la  section  du  sympathique  au  cou  ;  quatre  petits 
sur  cinq  ont  présenté  cette  altération,  qui  paraît  donc  se  transmettre 
par  hérédité. 

M.  Brown-Séquard  présente  un  cochon  d'Inde  dont  les  poils  tom- 
bent dans  la  zone  épileptogène,  après  la  section  de  la  moelle;  ces  ani- 
maux ont  des  convulsions  fréquentes,  mais  ils  ne  se  frottent  pas  ;  il  y 
a  eu  probablement  chute  de  poils  par  influence  nerveuse. 

M.  Laborde  demande  s'il  ne  faut  pas  invoquer  le  grattage  pour  expli- 
quer la  chute  des  poils. 

M.  Brown-Séquard  répond  que  chez  les  cochons  d'Inde  ayant  des' 
altérations  considérables  de  la  patte,  avec  perte  des  ongles,  la  chute 
des  poils  s'est  montrée  cependant  et  quelquefois  en  vingt-quatre  heures. 
De  plus,  c'est  juste  au  moment  où  ces  animaux  cessent  d'avoir  des  atta- 
ques et  lorsque  le  grattage  diminue,  s'il  ne  cesse  pas,  que  les  poils  tom- 
bent. 

M.  Vaillant  n'est  pas  persuadé  que  le  frottage  puisse  faire  tomber 
les  poils. 

Remarques  a  l'occasion  d'une  observation  de  taenia  multiple 
CHEZ  l'homme;  par  M.  Léon  Vaillant. 

L'observation  que  j'ai  l'honneur  de  présenter  aujourd'hui  à  la  So- 
ciété n'est  pas  nouvelle  en  elle-même,  mais  les  conclusions  auxquelles 
elle  peut  conduire  me  paraissent  de  nature  à  jeter  quelque  jour  sur 
certains  faits  rapportés  par  d'anciens  auteurs  et  sur  lesquels  il  n'est 
pas  inutile  d'attirer  un  instant  Tattention  dos  helminthologistes. 

Au  commencement  du  mois  de  janvier  dernier,  M  Donnadieu,  pro- 
fesseur à  1  École  normale  spéciale  de  Cluny,  me  communiqua  1  obser- 
vation prise  sur  une  femme  qui  avait  rendu  en  une  seule  fois  un  paquet 
de  taenias.  En  examinant  avec  soin  ces  vers,  il  reconnut  la  présence 
de  cinq  têtes;  la  longueur  de  tous  les  strobiles  réunis  était  de  IG  mè- 
tres. Les  têtes  étaient  armées  de  crochets,  le  pore  génital  était  latéral.  A 
ces  carjctères,  M.  Donnadieu  reconnut  le  isenia  solium  ;  \\  a  d'ailleurs 
bien  voulu  m'envoyer  une  portion  d'une  chaîne,  et  la  forme  de  l'utérus 
à  branches  peu  nombreuses  et  ramifiées  confirme  pleinement  cette 
détermination. 

La  présence  de  plusieurs  vers  solitaires  sur  un  même  individu  est 


51 

un  fait  bien  établi  aujoura'hui,  et  je  renverrai  pour  plus  de  détails  à 
l'excellent  traité  de  M.  Davaine,  où  se  trouvent  rassemblées  d'assez 
nombreuses  observations  qui  ne  peuvent  laisser  aucun  doute  à  ce  su- 
jet [l].  Mais  on  trouve  cité  dans  tous  les  traités  d'helminihologie  des 
cas  de  cestoïdes  d'une  longueur  prodigieuse,  faits  sur  lesquels  des  ob- 
servations, analogues  à  celles  que  je  rapporte  ici,  peuvent  faire  naître 
des  doutes  légitimes. 

En  effet,  dans  tous  les  cas  bien  observés,  la  longueur  du  tœnia  so- 
lium  ne  paraît  pas  excéder  8  mètres,  et  le  plus  souvent  même  reste 
bien  au-dessous.  D'un  autre  côté,  dans  les  espèces  du  même  groupe 
observées  sur  les  différents  animaux  sauvages  ou  domestiques,  la  taille 
ne  varie  que  dans  des  limites  relativement  restreintes,  comme,  par 
exemple,  du  simple  au  triple.  Il  peut  donc  paraître  admissible  que  ces 
longueurs  extraordinaires,  40  mètres  par  exemple,  chiffre  cité  par  Du- 
jardin,  ont  été  obtenues  en  prenant  pour  un  seul  et  même  individu 
plusieurs  animaux  dont  on  a  additionné  les  différents  strobiles;  ce  qui 
aurait  pu  avoir  lieu  dans  le  cas  rapporté  par  M.  Donnadieu,  si  ce  zoo- 
logiste n'avait  eu  l'attention  de  rechercher  soigneusement  les  por- 
tions céphaliques. 

Si  le  tEBnia  se  rangeait  parmi  ce  que  j'appellerais  volontiers  les  ani- 
maux ordinaires,  les  raisons  que  je  viens  d'énoncer  pourraient  faire 
regarder  la  question  comme  définitivement  tranchée;  nous  savons,  en 
effet,  que  chez  ces  derniers  les  limites  extrêmes  que  peut  atteindre  la 
taille,  surtout  lorsqu'il  s'agit  des  animaux  sauvages,  ne  dépassent 
guère  celles  dont  je  parlais  tout  à  l'heure  à  propos  de  la  taille  des  vers 
cesto'ïdes  autres  que  le  (œnia  solium.  INlais  aujourd'hui  les  naturalistes 
sont  d'accord  pour  regarder  ces  helminthes  comme  une  réunion 
d'animaux  distincts  naissant  successivement  comme  des  bourgeons  à 
la  partie  postérieure  du  scolex  ou  tête;  en  un  mot,  il  faut  y  voir  une 
colonie  comparable  à  celle  que  forment  certains  zoophytes,  tels  que  le 
corail  et  autres  êtres  analogues,  désignés  vulgairement  sous  le  nom 
de  polypes. 

Suivant  cette  manière  de  voir,  on  serait  en  droit  de  se  demander 
si  dans  de^  circonstances  favorables  ces  colonies  ne  pourraient  pas 
prendre  un  accroissement  excessif  sous  linflence  d'une  nourriture 
plus  abondante  ou  toute  autre  cause  analogue.  C'est  là  un  fait  qui  mé- 
riterait d'être  étudié,  ou  tout  au  moins  sur  lequel  l'esprit  doit  être 
tenu  en  éveil;  les  régimes  si  différents  de  l'espèce  humaine,  les  con- 
ditions si  variées  de  son  existence,  pourraient  donner  quelque  poids 
à  cette  manière  de  voir. 

(1)  Traité  des  enlozoaires^  p.  96,  note  2.  Paris,  1860. 


52 

Toutefois,  en  attendant  des  observations  à  l'abri  de  toute  objection, 
il  est  non-seulement  prudent  de  suspendre  son  jugement,  mais  je  di- 
rais même  que  tout  porte  à  supposer  que  les  faits  auxquels  je  fais  al- 
lusion résultent  d'une  erreur  et  que  la  taille  du  tœnia  solium,  comme 
celle  des  autres  espèces  animales,  ne  peut  être  regardée  comme  va- 
riant dans  deslimites  très-étendues. 

M.  MoREAu  dit  que  les  observations  relatives  à  la  longueur  des  taenias 
se  feraient  mieux  chez  le  chien. 

M.  DuMONTPALLiER  fait  remarquer  que  rarement  le  médecin  diagnos- 
tique le  taenia  avant  la  sortie  spontanée  ou  accidentellement  provoquée 
du  cestoïde. 

—  La  Société  nomme  M.  Rabuteau  membre  titulaire. 

Le  Secrétaire,  M.  Gréhant. 

Séance  du  26  mars, 

Le  procès-verbal  de  la  séance  précédente  est  lu  et  adopté. 

—  M.  Bouchard  communique  un  procédé  d'analyse  chimique  du  sang 
qui  permet  de  déterminer  le  poids  exact  du  sérum  et  celui  des  globules 
frais  par  différence.  On  fait  une  première  saignée  de  10  grammes  de 
sang  que  l'on  reçoit  dans  une  capsule  où  le  sang  se  coagule.  Un  deuxième 
poids  de  sang  de  10  grammes  est  reçu  et  additionné  aussitôt  d'un  cer- 
tain poids  de  solution  saline  neutre  ou  de  solution  de  sucre;  le  sang 
étant  coagulé  dans  les  deux  capsules  et  le  caillot  bien  séparé  du  sérum, 
on  recherche  le  poids  d'albumine  contenue  dans  1  gramme  de  sérum 
pur  et  de  sérum  étendu.  Pour  cela,  on  ajoute  au  sérum  quelques  gouttes 
d'acide  nitrique,  on  porte  à  l'ébullition;  l'albumine  coagulée  est  lavée 
sur  un  filtre  avec  de  l'acide  nitrique  au  vingtième,  puis  le  filtre  est  des- 
séché, et  l'on  obtient  le  poids  d'albumine  contenu  dans  chaque  échan- 
tillon de  sérum.  Supposons  que  1  gramme  du  sérum  pur  contient  un 
poids  p  d'albumine,  le  poids  inconnu  x  du  sérum  séparé  du  caillot  et 
retenu  encore  dans  celui-ci  contient  px  d'albumine.  1  gramme  de  sé- 
rum étendu  renferme-t-il  p'  d'albumine,  le  poids  du  sérum  étendu,  qui 
est  a;  +  /  {t  étant  le  poids  de  liquide  salin  ou  sucré  surajouté)  renfer- 
mera un  poids  d'albumine  égal  à  [_x  +  i)  p';  or  dans  les  doux  cas,  puis- 
qu'on a  pris  le  même  poids  de  sang,  la  quantité  d'albumine  contenue 
dans  chaque  échantillon  est  la  même;  on  aura  donc  px=  {x  +  l]  p'. 

D'où  a;  =-^,. 


53 

Connaissant  le  poids  du  sang  et  le  poids  du  sérum,  on  obtiendra  par 
différence  le  poids  de  la  fibrine  et  des  globules,  et  pour  obtenir  le 
poids  de  la  fibrine,  il  suffira  de  laver  le  caillot  dans  un  nouet  de  linge 
qui  retient  la  fibrine. 

Ce  procédé  suppose  que  le  liquide  surajouté  ne  modifie  pas  la  com- 
position des  globules;  une  solution  aqueuse  de  sucre  de  canne  d'une 
densité  de  1,024  satisfait  à  cette  condition. 

L'emploi  de  ce  mode  d'analyse  a  donné  à  M.  Bouchard  des  résultats 
concordants: 

ijOOO  parties  de  sang  de  lapin  contenaient: 

605  de  sérum, 
392  de  globules  frais, 
3  de  fibrine. 

Chez  deux  malades  atteints  de  rhumatisme,  l'analyse  a  donné  dos 
nombres  très-voisins  : 

»"■  malade.  2*  malade. 

Sérum 640,61     ....    638 

Fibrine.    ...         5  ....        6,9 

Globules..  .  .    354,37    ....     354,3 

M.  Bouchard  conseille  d'employer  le  môme  procédé  pour  la  re- 
cherche de  la  quantité  totale  du  sang. 

M.  Chalvet  fait  remarquer  combien  le  dosage  de  l'albumine  par  la 
chaleur  est  difficile;  certaines  variétés  d'albumine  se  congèlent  à  65*, 
d'autres  à  75"  ou  à  95°;  il  y  a  des  urines  qui  précipitent  ainsi  à  des 
températures  diverses. 

M.  Bouchard  fait  remarquer  que  dans  ses  expériences  il  agit  sur  le 
même  sang  et  coagule  toute  l'albumine. 

M.  Chalvf.t  pense  que  les  globules  étant  pesées  à  l'état  frais,  on 
pourrait  avoir  le  fer  et  constater  si  le  rapport  du  poids  du  fer  au  poids 
des  globules  est  constant;  s'il  en  est  ainsi  du  dosage  des  globules,  on 
pourrait  substituer  celui  du  fer,  qui  est  très-faible. 

M.  Bouchard  pense  qu'on  ne  peut  pas  déduire  le  poids  des  globules 
de  celui  du  fer,  parce  que  dans  diverses  conditions  les  globules  peuvent 
être  plus  ou  moins  gonflés  et  contenir  plus  ou  moins  d'eau. 

— M.  Hayem  présente  à  la  Société  le  résultat  d'une  de  ses  expériences 
sur  la  cicatrisation  des  muscles  à  la  suite  des  sections  sous-cutanées. 

Le  5  mars  1870,  on  a  fait  sur  un  cochon  d'Inde  adulte  et  bien  por- 
tant la  section  sous-cutanée,  à  l'aide  d'un  ténotome,  des  muscles  de 


u 

la  patte  antérieure  droite,  en  coupant  jusqu'à  l'os.  Le  14  mars  la  même 
opération  a  été  pratiquée  sur  la  patte  antérieure  gauche,  mais  la 
section  a  été  moins  profonde. 

Lailinial  est  sacrifié  le  26  mars,  soit  vingt  et  un  jours  après  la  pre- 
mière section  et  àoute  après  la  seconde. 

A  l'autopsie  on  voit  que,  du  côté  droit,  la  section  a  porté  sur  le 
triceps  brachial ,  en  intéressant  la  plus  i:rande  partie  de  l'épaisseur  du 
musc'e.  Le  nerf  et  les  vaisseaux  correspondants  ont  été  divisés.  Il  en 
résulte  une  déformation  de  la  région  qui  consiste  surtout  en  une  sorte 
d'enfoncement  ou  vide  au  niveau  du  point  où  devrait  exister  le  ventre 
même  du  muscle.  Ce  creux  est  occupé  par  une  bride  flbreuse  qui 
adhère  aux  aponévroses  et  au  tissu  cellulaire  voisins.  Les  deux  moi- 
gnons musculaires  sont  écartés  dun  centimètre  et  demi  environ  ;  ils  se 
sont  cicatrisés  isolément,  et,  de  chaque  côté,  cette  cicatrice,  par  ses 
adhérences  aux  parties  voisines,  forme  cette  bride  fibreuse  indiquée 
plus  haut.  Sur  une  coupe  longitudinale  du  moignon  supérieur,  le  tissu 
musculaire  paraît  sain,  rosé,  et  offre  absolument  le  même  aspect  que 
celui  des  muscles  non  lésés. 

LVxirémité  du  moignon  est  d'un  blanc  rosé,  nacré  et  d'aspect  com- 
plètement fibreux. 

Le  moignon  inférieur,  celui  qui  adhère  à  l'olécrâne,  présente  de 
même  une  cicatrice  flbreuse  à  son  extrémité.  La  partie  musculaire  se 
compose  de  deux  portions  distinctes  :  l'une  périphérique,  rosée,  plus 
pâle  que  les  muscles  sains,  mais  d'une  apparence  à  peu  près  normale  ; 
la  seconde,  centrale,  forme  un  noyau  bien  circonscrit,  jaunâtre,  qui 
fait  saillie  sur  la  surface  de  corps  et  ressemble  aux  infarctus  dits  flbri- 
neux.  A  ce  niveau,  la  consistance  du  tissu  musculaire  est  caséeuse. 

Du  côté  gauche,  le  triceps  n'a  éié  coupé  que  dans  une  partie  de  son 
épaisseur,  et  les  deux  moignons  rétractés  sont  reliés  entre  eux  par  une 
cicatrice  fibreuse. 

L'examen  microscopique  révèle  les  particularités  suivantes.  Dans 
le  voisinage  des  cicatrices,  le  tissu  musculaire  présente  les  caractères 
de  la  myosite  subaiguë.  Les  ûbres  sont  en  dégi^nérescence  vitreuse  ou 
granuleuse,  les  noyaux  sont  multiples,  quelques-uns  vésiculeux.  Les 
parties  les  plus  voisines  de  la  cicatrice  sont  riches  eh  fibres  atrophiées, 
qui  se  terminent  en  pointes  souvent  bifurquées  remplies  de  noyaux  et 
de  fines  granulations. 

En  pénétrant  dans  l'épaisseur  du  moignon  musculaire,  le  tissu  ne 
tarde  pas  à  reprendre  ses  caractères  normaux,  excepté  au  niveau  du 
foyer  caséeux  décrit  plus  haut. 

Celui-ci  est  constitué,  en  effet,  par  des  fibres  désagrégées,  en  dégé- 
nérescence vitreuse  ou  granulo-vitreuse,  et  dans  la  préparation  on 


5g 

trouve  des  corps  myo-plastiques  libres,  composés  d'un  corps  de  cel- 
lule fusiforme  à  prolopla?ma  finement  granuleux,  et  d'un  noyau  avec 
nucléole  complètement  semblable  aux  noyaux  musculaires. 

Dans  le  tissu  des  diverses  cicatrices  on  constate  au  milieu  des  élé» 
menls  conjonctifs  des  traînées  plus  ou  moins  riches  en  corpuscules  ou 
plaques  granuleuses  contenant  un  ou  plusieurs  noyaux  musculairesi 
Ces  éléments  abondent  surtout  dans  la  partie  de  la  cicatrice  qui  tou- 
che le  tissu  niusculaire;  plus  on  s'éloigne  de  ce  point,  plus  le  tissu 
cicatriciel  prend  les  apparences  du  tissu  conjonctif  fibreux;  çà  et  là 
on  voit  encore  des  noyaux  d'origine  musculaire  entourés  de  granula- 
tions granulo-graisseuses. 

Cette  expérience  démontre  que  dans  les  sections  musculaires  les 
moignons,  après  s'être  rétractés,  s'enflamment  à  leur  suiface  libre  et 
sont  le  siège  d'une  myosile  subaiguë  néoplastique  dans  laquelle  les 
éléments  anciens  donnent  naissance,  par  prolifération  des  cellules  mus- 
culaires, à  des  corps  myoplastiques  abondants;  que  ce  travail  inflam- 
matoire, loin  de  produire  une  restitution  complète  de  la  forme  et  du 
volume  du  muscle,  ne  donne  lieu,  en  détinitive,  qu'à  des  brides  ou  ci- 
catrices fibreuses  dans  lesquelles  on  ne  retrouve  plus  au  bout  de  quel- 
que temps  que  des  vestiges  des  éléments  musculaires  multipliés. 

Dans  toutes  les  expériences  analogues,  M.  Hayem  a  obtenu  le  même 
résultat,  et  il  a  remarqué  que  les  corps  myoplastiques  fusiformes  qui 
apparaissent  très-rapidement  à  la  surface  des  sections  ont  dès  l'abord 
un  noyau  tout  à  fait  semblable  aux  noyaux  musculaires.  11  admet  que 
ces  éléments  doivent  leur  apparition  à  la  multiplication  des  cellules 
musculaires  des  fibres  sectionnées.  En  tout  cas,  il  n'a  jamais  pu  véri- 
fier l'opinion  de  Waldeyer,  qui  fait  provenir  ces  éléments  du  tissu  in- 
terstitiel. 

Cette  expérience  offre  encore  une  particularité  importante,  c'est  la 
présence  de  ce  foyer  caséeux  dans  l'épaisseur  du  moignon  inférieur  du 
côté  droit.  Le  fait  de  la  section  des  vaisseaux  qui  se  rendaient  à  cette 
partie  doit. le  faire  considérer  comme  une  lésion  anémique,  un  véritable 
infarctus,  et  U.  Hayem,  en  présentant  cette  pièce  à  la  Société,  fait 
remarquer  son  analogie  avec  les  foyers  décolorés  caséeux  que  l'on 
trouve  autour  des  hémorrhagies  musculaires  symptomatiques  et  qui 
sont  liés,  ainsi  que  le  présentateur  l'a  montré  antérieurement,  à  des 
obstructions  vasculaires. 

(Consulter  à  ce  sujet  :  Études  sur  les  myosites  symptomatiques. 
(Akch.  de  phys.  normale  et  path,,  p.  480  et  suiv.  et  p.  429.) 

—  M.  Rabuteau  propose  d'employer  l'acide  phospho-molybdique  pour 
déceler  les  alcaloïdes  végétaux,  qu'il  précipite  ;   ce  réactif  est  très- 


56 
sensible  et  permet  de  reconnaître  de  la  nicotine  dans  la  fumée  du 


cigare. 


—  M.  Laborde  présente  un  œuf  de  poule  sans  coquille  dont  l'albumen 
est  peu  abondant  et  dont  le  jaune,  très-développé,  offre  un  prolonge- 
ment caudiforme.  D'autres  œufs  de  la  même  poule,  pondus  ensuite, 
ne  contiennent  que  l'albumen  et  sont  pourvus  de  coquille. 


COMPTE  RENDU  DES  SÉANCES 


DE 


r  F 


LA  SOCIETE  DE  BIOLOG 

PENDANT  LE  MOIS  D' AVRIL  1870; 

Par  m.  GRÉHANT,  secrétaire. 


PRÉSIDENCE  DE  M.  CL.  BERNARD. 


Séance  du  2  avril. 


Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  esl  lu  et  adopté. 

On  a  parlé  dans  la  dernière  séance  des  variétés  de  matières  albumi- 
noïdes  qui  existent  dans  le  sang;  M.  Brown-Séquard  rappelle  à  ce  sujet 
que  son  ami  M.  Donnel  a  trouvé  dans  le  sang  une  certaine  quantité 
de  substance  analogue  à  la  caséine,  non  coagulable  par  la  chaleur  et 
dont  la  proportion  varie  beaucoup  suivant  l'état  de  jeûne  ou  de  di- 
gestion. Cette  substance  se  convertit  probablement  en  albumine  par 
la  suite. 

—  M.  Rabuteau,  par  des  expériences  qu'il  a  faites  sur  lui-môme,  a 
reconnu  que  sous  l'influence  d'une  ingestion  de  5  grammes  de  bicarbo- 
nate de  potasse  par  jour,  le  chiffre  de  l'urée  a  baissé  de  30  grammes 
à  25  grammes.  Ainsi  les  alcalins  paraissent  diminuer  les  combustions 
et  M.  Rabuteau  les  croit  peu  utiles  dans  la  glycosurie;  à  cette  dose  de 


#f^fc 


(tlBRARY    r 


58 

5  grammes  les  alcalins  ont  augmenté  l'appétit;  mais  à  cette  dose  ils 
n'ont  pas  produit  d'effet  diurétique. 

Le  traitement  par  l'eau  de  Vichy,  dit  M.  Brown-Séquard,  augmente 
l'appéiit  au  début,  puis,  loPï^qu'il  est  trop  prolongé,  produit  souvent  un 
clat  de  faiblesse  presque  immédiate. 

—  M.  Legkos  a  étudié  la  terminaison  des  conduits  biliaires  dans  les 
lobules  du  foie.  Comme  on  le  sait,  celte  terminaison  se  fait  par  un  ré" 
seau  très-fin  dont  les  mailles  entourent  les  cellules  hépatiques.  (Ir- 
minger,  Fiey,  Kolliker).  Par  des  injections  au  nitrate  d'argent  faites 
sur  des  foies  de  lapins,  M.  Legros  a  reconnu  sur  les  derniers  canali- 
cules  qui  ont  3  millièmes  de  millimètre  de  diamètre  un  épithélium 
aplati,  mince  et  pavimenleux,  tandis  que  les  conduits  plus  gros  sont 
pourvus  d'un  épithélium  prismatique.  M.  Legros  appuie  sur  celle  ob- 
servation la  distinction  des  deux  fonctions  glycogénique  et  biliaire; 
l'épithélmm  du  réseau  intralobulaire  sécréterait  la  bile  et  les  cellules 
du  foie  formeraient  la  matière  glycogène. 

—  M.  CoKNiL  fait  une  communication  relative  à  la  structure  du  foie. 
Sur  un  foie  d'ictère  grave  très-mou,  les  cellules  de  la  périphérie  des 
lobules  étaient  atrophiées  et  le  réseau  des  canalicules  biliaires  était 
bien  visible;  ces  canalicules  étaient  dilatés  et  offraient  Un  épithélium 
pavimenleux  semblable  à  celui  dont  M.  Legros  a  parlé. 

M.  Cornil  ne  croit  pas  fondée  la  distinction  analomique  des  deux 
sécrétion^;  les  cellules  hépatiques  qui  contiennent  du  pigment  biliaire 
doivent,  dit-il,  contribuer  à  la  sécrétion  de  la  bile. 

J\L  Legros  répond  qu'il  a  examiné  l'épilhélium  du  réseau  biliaire  et 
qu'il  ne  croit  pas  que  cet  épithélium  si  mince,  si  altérable,  ait  été  ob- 
servé à  l'élat  normal;  relativement  au  rôle  de  cet  épithélium,  M.  Le- 
gros ajoute  que  dans  les  glandes  salivaires  on  ne  dit  pas  que  la  salive 
est  sécrétée  en  dehors  de  Tépithélium,  mais  par  l'épilhélium  lui-même. 

M.  Chaucot  fait  remarquer  que  dans  les  rétentions  anciennes  débile 
des  concrétions  biliaires  dilatent  les  canalicules  môme  les  plus  fins, 
et  que  l'abcès  est  produit  probablement  par  rupture  des  canalicules  et 
effusion  de  bile  en  nature. 

M.  Ranvier  est  de  l'avis  de  M.  Cornil.  On  sait,  dit-il,  que  le  pancréas 
est  consLilué  d'une  manière  analogue  à  un  acinusdu  foie;  on  trouve  de 
fins  canaux  qui  pénètrent  entre  les  cellules,  mais  les  acini  des  glandes 
salivaires  sont  entièrement  remplis  de  cellules;  il  ne  reste  qu'une  lu- 
mière très-peiite  au  centre,  et  jusqu'ici  M.  Ranvier  n'a  pas  réussi  à  in- 
jecter un  réseau  entre  les  cellules  salivaires  au  delà  de  la  lumière  cen- 
trale. 


59 

M.  Legros  rappelle  qu'il  a  parlé  d'un  réseau  intralobulalre  avec  paroi 
etépithélium. 

—  M.  Brown-Séquard  présente  un  cochon  d'Inde  auquel  manquent 
plusieurs  phalanges  et  qui  provient  d'un  père  offrant  la  même  altéra- 
tion; c'est  le  septième  exemple  observé  par  M.  Brown-Séquard  d'une 
transmission  pareille  par  hérédité. 

M.  Brown-Séquard  montre  un  cochon  d'Inde  qui,  après  des  lésions 
compliquées,  section  du  sciatique,  fracture  du  fémur,  présente  une 
perte  de  poils  dans  la  zone  épileptogène.  Chez  cet  animal  la  patte  ma- 
lade ne  pouvait  être  portée  au  cou,  et  conséquemment  ce  n'est  pas 
parce  qu'il  s'est  gratté  que  les  poils  sont  tombés. 

~  M.  VuLPiAN  présente,  au  nom  de  M.  Philipeaux,  plusieurs  observa- 
tions relatives  à  la  possibilité  de  transmettre  par  voie  de  génération, 
chez  les  animaux,  des  mutilations  produites  artiflciellement.  Les  petits 
nés  d'animaux  auxquels  on  avait  enlevé  la  rate  ont  toujours  présenté 
une  rate  normale,  tandis  qu'un  rat  auquel  on  avait  extirpé  le  testicule 
droit  a  donné  trois  petits  mâles;  deux  présentaient  une  atrophie  très- 
prononcée  du  testicule  droit;  chez  le  troisième  on  ne  put  reconnaître, 
par  la  palpation,  la  présence  de  ce  testicule.  M.  Philipeaux  se  propose 
de  continuer  ces  expériences. 

—  M.  PoucBET  a  étudié  le  développement  des  leucocytes  ou  globules 
blancs  et  des  hématies  ou  globules  rouges  chez  les  embryons  d'axo- 
lotls. D'après  JM.  Pouchet,  à  une  certaine  époque  on  ne  voit  aucun 
globule  blanc  dans  lo  sang,  mais  on  trouve  des  globules  blancs  doués 
de  mouvement  amibo'ide  dans  le  tissu  conjonctif.  En  comparant  les 
globules  blancs  et  les  globules  rouges,  M.  Pouchet  a  reconnu  la  pré- 
sence de  granulations  analogues  dans  ces  deux  éléments,  et  il  pense 
que  les  globules  rouges  sortent  des  vaisseaux,  se  décolorent  dans  le 
tissu  conjonctif  et  deviennent  des  globules  blancs;  mais  le  passage  des 
globules  rouges  à  travers  les  parois  n'a  pu  être  suivi  complètement. 

—  M  Bouchard,  en  appliquant  le  procédé  de  détermination  de  la  quan- 
tité du  sang  qu'il  a  fait  connaître,  a  trouvé  chez  un  chien  pesant 
l^y'i.bO,  752  grammes  de  sang,  ou  un  peu  plus  de  1/10°  du  poids  de 
l'animal. 

— M,  Leteinturier  communique  une  observation  d'hémiplégie  à  gauche, 
accompagnée  d'une  paralysie  du  nerf  moteur  oculaire  commun  du  côté 
droit;  il  y  avait  du  côté  paralysé  un  abaissement  de  température  de 
Û%4. 

L'autopsie  a  montré  une  hémorrhagie  localisée  dans  le  pédoncule 
cérébral  droit. 


60 

M,  Leven  avait  diagnostiqué  une  hémorrhagie  au  niveau  de  lorigine 
du  moteur  oculaire  commun. 

M.  Brown-Séquard  fait  remarquer  qu'il  a  déjà  signalé,  en  1858,  qu'un 
abaissement  de  température  limité  à  une  moitié  du  corps  est  un  impor- 
tant symptôme  des  lésions  de  la  protubérance.  Ce  phénomène  dépend 
sans  doute  de  l'excitation  des  nerfs  vaso-moteurs,  bientôt  suivie  d'une 
paralysie  de  ces  nerfs  et  d'une  élévation  consécutive  de  la  tempéra- 
ture. 

Séance  du  9  avril. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  Lépine  communique  un  fait  qu'il  a  observé  chez  le  cochon 
d'Inde.  Si  l'on  pratique  la  trachéotomie  et  qu'on  injecte  dans  une 
bronche  un  liquide  irritant,  de  l'alcool,  par  exemple,  l'œil  se  ferme  à 
moitié  de  ce  côté  et  se  remplit  de  larmes.  Ce  phénomène  est  persis- 
tant, et  ce  n'est  point  une  irritation  transmise  exclusivement  à  l'ori- 
gine du  facial  par  le  pneumo-gastrique,  car  il  a  lieu  même  après  la 
section  de  ce  dernier  nerf. 

Sur  des  grenouilles  j'ai  également  réussi ,  dit-il ,  à  obtenir  par  l'irri- 
tation du  poumon  une  action  réflexe  du  côté  de  l'œil.  On  met  à  nu 
l'un  des  poumons,  et  l'on  y  injecte,  au  moyen  du  trocart  creux  d'une 
seringue  de  Pravaz,  une  ou  deux  gouttes  d'ammoniaque.  Au  bout  de 
quelques  instants  on  observe  un  retrait  momentané  de  l'œil  du  côté 
correspondant,  puis  souvent,  quelques  secondes  plus  tard,  de  l'œil 
du  côté  opposé.  Par  de  nombreuses  expériences  de  contrôle,  je  me 
suis  assuré  qu'il  faut  une  forte  excitation  des  nerfs  sensitifs  pour  pro- 
duire un  effet  semblable.  La  section  seule  du  nerf  sciatique  ou  du  nerf 
lombaire  n'amène  pas  le  retrait  de  l'œil  du  côté  correspondant.  Je  me 
borne  aujourd'hui  à  ces  indications  sommaires,  espérant  faire  pro- 
chainement de  ces  phénomènes  l'objet  d'une  communication  plus  dé- 
taillée. 

M.  Brown-Séquard  a  vu  avec  la  section  d'une  moitié  latérale  de  la 
moelle,  et  après  la  section  de  certains  nerfs,  de  la  congestion  et  du 
larmoiement  de  l'œil  de  ce  côté,  mais  les  phénomènes  ne  furent  pas 
durables,  tandis  qu'ils  sont  persistants  dans  l'expérience  de  M,  Lé- 
pine  ;  il  est  probable  qu'il  s'agit  ici  d'une  influence  des  nerfs  vaso- 
moteurs. 

M.  Brown-Séquard  a  signalé  chez  l'homme  la  dilatation  et  la  con- 
striction  des  vaisseaux  après  le  pincement  de  la  jambe  ;  la  température 


61 

s'élevait  à  l'oreille  et  s'abaissait  au  cou;  après  la  section  du  sciatique 
chez  les  animaux,  il  en  est  de  même. 

M.  Ranvier  demande  quel  était  l'état  du  poumon  après  les  injections 
irritantes.  L'injection  a  pénétré  dans  quelques  lobules,  ditM.  Lépine, 
le  sang  s'est  coagulé  dans  les  vaisseaux,  mais  il  n'y  eut  point  de 
pleurésie. 

—  M.  Brown-Séql'ard  expose  les  résultats  de  l'autopsie  d'un  cochon 
d'Inde  qui  après  section  du  sciatique  avait  guéri,  mais  qui  après  une 
deuxième  section  faite  plus  haut  présente  des  tubercules  dans  les 
poumons,  dans  la  rate.  Il  est  probable  que  tous  ces  accidents  se  sont 
produits  en  trois  semaines. 

M.  LiouviLLE,  à  propos  de  ce  fait,  parle  d'une  inoculation  de  pro- 
duits de  méningite  tuberculeuse  qu'il  fit  chez  un  cochon  d'Inde;  l'a- 
nimal est  mort  seulement  au  bout  de  deux  mois. 

M.  Ranvier  demande  à  M.  Brown-Séquard  si  les  expériences  non 
suivies  de  tuberculisation  n'ont  pas  été  faites  à  la  campagne  et  si,  au 
contraire ,  les  plaies  suivies  de  tuberculisation  ont  été  faites  chez  des 
animaux  placés  dans  de  moins  bonnes  conditions  hygiéniques  et  dans 
un  lieu  où  se  peut  faire  l'inoculation. 

C'est  à  peu  près  ce  que  j'ai  dit,  répond  M.  Brown-Séquard  :  Dans 
mon  laboratoire,  situé  rue  Gay-Lussac ,  28,  jamais  je  n'ai  vu  de  tu- 
berculisation soit  après  des  plaies,  soit  même  après  des  inoculations 
artificielles  ;  sur  trente-six  cochons  d'Inde,  pas  un  seul  n'est  devenu 
tuberculeux.  Un  trente-septième,  qui  avait  reçu  sous  la  peau  un  gan- 
glion tuberculeux,  est  devenu  tuberculeux  après  quatre  ou  cinq  mois. 
Tandis  que  dans  le  laboratoire  de  l'École  pratique  j'ai  observé  trois  cas 
de  tubercules.  Relativement  à  la  vitesse  de  production  des  tubercules, 
M.  Brown-Séquard  rappelle  un  fait  qu'il  a  signalé  à  la  Société  en  1850. 
Un  lapin,  après  la  section  du  sympathique  au  cou,  était  devenu  tuber- 
culeux quatorze  jours  après  l'opération.  J'avais  trouvé  avant  M.  Wille- 
min  ,  dit  j\I.  Brown-Séquard,  que  fréquemment  les  plaies  du  cou  ren- 
dent les  viscères  abdominaux  tuberculeux  en  quinze  jours  à  quatre 
semaines. 

—  M.  Brown-Séqu.\rd  communique  des  observations  qu'il  a  faites 
sur  la  distance  à  laquelle  les  deux  pointes  d'un  compas  appliqué  sur  la 
peau  donnent  la  sensation  d'une  seule  pointe;  si  l'on  applique  les 
pointes  sur  deux  branches  nerveuses  différentes,  lune  venant  du  tri- 
jumeau ,  l'autre  d'une  paire  cervicale,  par  exemple,  il  peut  y  avoir 
sensation  d'une  seule  pointe.  Au  cou ,  à  la  face,  à  l'oreille,  au  menton, 
il  faut  pour  cela  que  la  dislance  soit  inférieure  à  2  centimètres. 
M.  Brown-Séquard  a  fait  souvent  l'application  du  compas  chez  les  ma- 


62 
ladfi?;  en  règle  générale,  c'est  la  pointe  supérieure,  la  plus  voisine  de 
l'orbitp,  qui  est  perçue  lorsqu'il  y  a  sensation  d'une  seule  pointe;  dans 
des  cas  pathologiques,  quand  en  appliquant  le  compas  sur  la  face  et 
l'épaule  une  seule  pointe  est  sentie,  c'est  celle  de  la  face.  Chez  cer- 
tains malades  qui  présentaient  une  anesthésie  absolue  pour  d'autres 
excitants,  les  pointes  étaient  senties  cependant;  la  sensation  du  lieu 
touché  paraît  donc  tenir  à  une  faculté  spéciale. 

M.  Bert,  à  l'occasion  de  cette  communication  de  M.  Brown-Séquard, 
rapporto  un  fait  qu'il  a  observé  sur  lui-même.  Atteint  d'une  inflamma- 
tion très-douloureuse  de  la  conque  auditive,  il  s'aperçut,  en  employant 
le  compas,  que  la  distance  minimum  à  laquelle  étaient  perçues  los 
deux  pointes  était  environ  le  double  de  la  distance  normale.  Cepen- 
dant le  contact  des  pointes  était  douloureux.  Or  l'oreille  n'avait  pas 
sensiblement  grandi  ;  on  ne  peut  objecter,  comme  on  pouvait  le  faire 
aux  observations  semblables  qu'a  faites  M.  Bert  sur  des  abcès  volumi- 
neux ou  sur  l'abdomen  des  femmes  enceintes,  que  les  extrémités  ner- 
veuses ont  été  écartées  les  unes  des  autres  par  la  distension  générale 
de  la  région.  Ce  fait  a  un  intérêt  d'un  autre  ordre.  L'oreille  malade 
paraissait  à  M.  Bert  beaucoup  plus  grande  que  dans  l'état  normal.  C'est 
là  une  illusion  ordinaire  pour  toutes  les  parties  enflammées  :  or  elle 
n'avait  pas  réellement  grossi,  et  la  distinction  des  pointes  y  était  plus 
obtuse;  ceci  est  contraire  à  un  principe  généralement  admis.  Si  l'on 
porte  en  divers  points  de  son  corps  une  même  ouverture  de  compas, 
on  n'a  pas  partout  une  même  sensation  de  distance.  A  la  cuisse,  par 
exemple,  la  distance  des  pointes  paraîtra  très-faible,  plus  grande  à  la 
face,  énorme  sur  les  lèvres.  En  d'autres  termes,  la  distance  des  pointes 
paraîtra  d'autant  plas  gramie  que  sur  les  régions  interrogées  la  distance 
minimum  perceptible  de  ces  pointes  sera  plus  petite;  d'après  cette  rè- 
gle, l'oreille  malade  où  la  distance  minimum  perceptible  des  pointes 
avait  augmenté  aurait  dû  paraître  plus  petite,  et  le  contraire  arrivait. 
Ceci  montre  qu'il  faut  faire  intervenir,  dans  l'origine  de   la  notion  de 
l'étendue  des  régions  de  notre  corps,  d'autres  éléments  que  celui  de  la 
distance  perceptible  des  pointes. 

—  M.  MoNOD  communique  l'observation  d'un  vieillard  de  75  ans 
mort  à  la  suite  de  fracture  du  col  du  fémur,  chez  lequel  on  a  trouvé 
les  poumons  remplis  d'abcès  métastatiques,  sans  que  l'autopsie  ait 
montré  de  plaie  en  aucune  région  du  corps.  M.  Monod  se  demande  s'il 
y  a  eu  une  influence  générale  dépendant  de  la  salle  qui  présente 
beaucoup  de  cas  d'jnfections  purulentes. 

En  1867,  à  la  Charité,  M.  Liouville  a  vu  chez  M.  "Velpeau  un  cas 
analogue  d'infection  purulente  sans  aucune  plaie. 


63 

M.  MoREAu,  à  la  Maternité,  pendant  une  épidémie  de  fièvre  puerpé- 
rale, a  vu  une  élève  sage-femme  non  enceinte  prise  de  fièvre  puerpérale. 

M.  DuMONTPALLiER  rïippelle  que  dans  la  discussion  qui  a  eu  lieu  à 
l'Académie  de  médecine,  en  1858,  on  a  communiqué  deux  observations 
de  fièvre  puerpérale  chez  deux  élèves  sages-femmes  pendant  la  période 
menstruelle.  Dans  ces  deux  cas  n'éiait-on  pas  autorisé  à  supposer  que 
Tinfection  générale  avait  eu  son  origine  dans  l'exfoliation  suppurante 
de  la  muqueuse  utérine?  Quant  aux  observations  d'infection  purulente 
sans  plaie  extérieure,  comme  dans  le  cas  rapporté  par  M.  Monod,  on 
doit  rechercher  d'abord  si  le  foyer  de  la  fracture  n'est  pas  le  siège 
d'une  phlébite  suppurative;  et,  si  l'examen  était  négatif,  il  faudrait  de 
plus  rechercher  avec  soin  si  quelque  organe,  riche  en  vaisseaux  vei- 
neux, n'est  point  affecté  de  phlébite.  Chez  les  vieillards,  il  n'est  pas 
rare  de  trouver  à  l'autopsie  des  abcès  de  la  prostate  dont  l'existence 
n'avait  point  été  soupçonnée  pendant  la  vie.  Dans  une  observation,  re- 
cueillie par  M.  Gubler  dans  le  service  de  Lenoir,  à  l'hôpital  Necker,  il 
fut  permis  de  constater  qu'un  abcès  de  la  prostate,  qui  communiquait 
librement  avec  les  tissus  veineux  de  cet  organe,  avait  été  la  source 
d'une  infection  purulente  dont  le  point  de  départ  n'avait  pas  été  soup- 
çonné pendant  la  vie   du  malade.  M.  Dumontpallier  ajoute  que  l'exa- 
men, fait  par  M.  Monod,  n'établissant  pas  la  non-exislence  d'une  phlé- 
bite suppurative  dans  le  foyer  de  la  fracture  ou  en  tout  autre  endroit  où 
la  phlébite  peut  être  constatée  chez  les  vieillards,  il  n'est  pas  permis  à 
M.  Monod  d'afQrmer,  dans  le  cas  qu'il  nous  communique,  l'existence 
d'une  infection  purulente  sans  phlébite.  —  Les  conditions  de  l'air  am- 
biant et  l'état  général  du  malade  peuvent  avoir  une  importance  étiolo- 
gique  majeure  dans  la  fièvre  puerpér.de  ou  dans  l'infection  purulente  ; 
mais  l'expérience  clinique  a  établi  que  les  états  morbides  ne  s'observent 
en  général  que  dans  les  cas  de  plaie,  de  phlébite  ou  d'abcès  commu- 
niquant avec  les  veines. 

— M.  Laborde  parle  de  recherches  qu'il  a  faites  pour  distinguer  la  mort 
apparente  et  la  mort  réelle.  Une  aiguille  d'acier  enfoncée  dans  les 
tissus  de  l'homme  vivant  se  rouille,  et  ne  se  rouille  pas  quand  elle  est 
introduite  dans  les  tissus  d'un  cadavre.  C'est  en  se  fondant  sur  ce 
fait  pour  distinguer  la  mort  réelle  de  la  mort  apparente  que  M.  La- 
borde a  reconnu  un  état  de  mort  apparente  chez  un  homme  que  l'on 
croyait  mort  et  que  des  soins  assidus  ont  rappelé  à  la  vie. 

— M.  Carville  arépété  avecM.Lépine  l'expérience  d'injection  de  li- 
quides irritants  dans  l'une  des  bronches;  chez  le  lapin  et  le  chien  le 
phénomène  de  constriction  de  la  paupière  s'est  montré  le  môme; 
M.  Carville  a  déterminé  l'influence  exercée  sur  la  tension  du  sang 
par  cette  expérience. 


64 


Séance  du  23  avril, 

M.  GouBAux  présente  une  portion  sternale  de  la  colonne  vertébrale 
d'un  cheval  ayant  huit  côtes  du  côté  droit  et  sept  côtes  du  côté  gauche. 
La  côte  surnuméraire  se  trouve  articulée  sur  une  vertèbre  rudimentaire  ; 
l'apophyse  épineuse  de  cette  vertèbre  est  soudée  à  l'apophyse  épineuse 
située  au-dessus. 

— M.  BrownSéquard  a  remarqué  chez  des  cochons  d'Inde  latransmis- 
sion  par  hérédité  des  altérations  des  membres  ,  et  chez  quelques-uns 
de  ces  animaux  l'existence  de  la  zone  épileptogène. 

On  provoque  chez  ces  animaux  l'attaque  en  pinçant  doucement  la 
zone  épileptogène.  Chez  l'un  d'eux  l'attaque  est  incomplète. 

Sur  un  jeune  cochon  dinde  il  existe  un  doigt  surnuméraire  ;  le  père, 
au  contraire,  avait  perdu  une  portion  de  doigt  à  la  suite  de  la  section 
du  sciaiique. 

Chez  un  autre  cochon  d'Inde,  qui  se  trouvait  dans  des  conditions 
analogues  d'hérédité ,  il  existe  aussi  une  portion  de  doigt  surnumé- 
raire. 

A  propos  de  la  présentation  de  M.  Lépine  à  la  dernière  séance, 
M.  Brown-Séquard  a  remarqué  aussi  une  diminution  dans  l'ouverture 
palpébrale,  une  élévation  de  la  température,  une  augmentation  de  la 
sensibilité  de  l'oreille  du  même  côté  et  un  redressement  du  pavillon 
de  l'oreille. 

On  peut  mesurer  l'orifice  palpébral  à  l'aide  d'un  compas  à  divisions 
millimétriques  que  M.  Brown-Séquard  met  sous  les  yeux  de  la  Société. 

M.  Laborde  fait  remarquer  qu'il  a  vu  lui-même  la  diminution  de  l'o- 
rifice pal[)ébral  et  de  l'ouverture  pupillaire  à  la  suite  de  l'hémisection 
de  la  moelle. 

M.  Bro\v>-Séquar0  avait  noté  ces  faits  en  1848,  1849  et  18bî,  tandis 
que  plus  tard  il  n'a  pas  observé  les  altérations  des  yeux  toutes  les  fois 
que  les  animaux  se  sont  trouvés  dans  de  bonnes  conditions  hygiéni- 
ques. La  cause  de  ces  différences  tient  aux  conditions  hygiéniques  où 
se  trouvaient  les  animaux  en  expérience.  Les  altérations  sont  des  con- 
jonctivites, des  cataractes. 

Sur  des  cochons  dinde  opérés  en  juillet  1868,  la  pupille  et  l'orifice 
palpébral  sont  rétrécis. 


FxPÉRIENCES     MONTRANT    QUE    LE     CRISTALLIN     PEUT     SE    RÉGÉNÉRER     CHEZ     LES 
MAMMIFÈRES  ,      PAR    UNE    FORMATION     NOUVELLE     DANS     LA     CAPSULE    CRISTAL- 

linienne;  par  M.  J.  M.  Philipeaux. 

M.  J.  M.  Philipeaux  met  sous  les  yeux  de  la  Société  de  biologie 
des  pièces  qui  montrent  les  résultats  d'expériences  récentes  qu'il  a 
faites  sur  la  régénération  du  cristallin.  Bien  que  plusieurs  auteurs 
aient  déjà  prouvé  la  possibilité  de  cette  régénération  chez  les  mammi- 
fères, c'est  un  fait  qui  ne  paraît  pas  encore  admis  définitivement.  Bur- 
dach  (1)  et  Henle  (2)  citent  Cocteau  et  Leroy  (d'ÉtioUes),  Middlemore, 
comme  ayant  vu  quelquefois  le  cristallin  se  reproduire  chez  des  mam- 
mifères auxquels  on  l'avait  enlevé.  C.  Mayer  aurait  constaté  cette  re- 
production chez  un  lapin  sur  lequel  il  avait  pratiqué  l'extraction  du 
cristallin  quatre  mois  auparavant.  Chez  l'homme,  Vrolik  aurait  vu  une 
régénération  incomplète  du  cristallin  après  l'opération  de  la  cataracte 
par  abaissement,  condition  qui,  à  la  vérité,  rend  cette  assertion  fort 
contestable.  D'autres  expérimentateurs  sont  arrivés  aux  mêmes  résul- 
tats, en  ce  qui  concerne  les  mammifères,  et  l'on  peut  en  trouver  l'é- 
numération  dans  la  note  que  M.  Milliot  a  insérée  dans  les  Comptes 
rendus  de  l'Académie  des  scIE^CEs  (3).  Dans  cette  note,  qui  contient  le 
résumé  de  nombreuses  expériences  sur  le  sujet  en  question,  M.  Milliot 
a  donné  une  nouvelle  et  complète  démonstration  de  la  régénération  du 
cristallin.  Et  cependant,  malgré  toutes  ces  preuves  concordantes,  le 
fait  de  la  régénération  du  cristallin  est  considéré  encore  aujourd'hui 
comme  douteux  par  certains  auteurs,  surtout  par  les  ophthalmologis- 
tes.  «  On  ne  saurait  admettre,  dit  M.  Wecker  (4),  que  la  capsule, 
a  privée  de  son  contenu,  mais  laissée  en  rapport  avec  ses  annexes,  soit 
«  propre  à  fournir  les  éléments  d'une  lentille  de  nouvelle  formation.  » 

M.  Philipeaux  a  obtenu  aussi  des  résultats  tout  à  fait  décisifs  et  qui 
confirment  entièrement  les  conclusions  de  M.  Milliot  et  des  expérimen- 
tateurs plus  anciens. 

Sur  six  jeunes  lapins  âgés  de  3  mois,  il  a  pratiqué  l'extraction 
du  cristallin  en  laissant  la  capsule  en  place.  L'opération  a  été  des  plus 
simples.  Après  avoir  ouvert  la  cornée  par  kératotomie  inférieure,  à 
l'aide  dun  couteau  à  cataracte,  sur  les  animaux  non  chloroformés  et 

(i)  Traité  de phijsiologie,  t.  VIII,  \\  288. 

(2)  Encyclopédie  anatomique.  Anatomie  générale,  t.  I,  p.  368. 

(3)  Mémoirce  sur  la  génération  du  cristallin  (Comptes  rendus  de  l'Aca- 
démie DES  sciences,  28  janvier  1867). 

(4)  Traité  tUéorique  et  pratique  des  maladies  des  yeux,  deuxième 
édition,  1868,  t.  II,  p.  12. 

C.  R.  1870.  5 


66 

maintenus  par  un  aide,  il  a  incisé  la  capsule  antérieure  avec  une  ai- 
guille à  cataracte,  puis,  au  moyen  d'une  légère  pression  faite  sur  le 
globe  oculaire  avec  le  manche  de  l'aiguille,  au-dessous  de  la  cornée,  il 
a  fait  sortir  le  cristallin  au  dehors.  Aucun  pansement  n'a  été  fait,  et 
l'on  s'est  contenté  de  faire  soigner  très-attentivement  les  animaux,  au 
point  de  vue  de  l'hygiène. 

Un  de  ces  lapins  a  été  examiné  quinze  jours  après  Topération  :  la 
capsule  était  tuméfiée,  épaissie,  et  elle  paraissait  contenir  déjà  un  ru- 
diment de  tissu  cristallinien. 

Un  second  lapin  a  été  examiné  vingt-cinq  jours  après  l'expérience. 
La  capsule  était  beaucoup  plus  épaissie  que  chez  l'animal  précédent; 
l'épaississement  siégeait  surtout  au  voisinage  du  bord  adhérent  de  la 
capsule. 

Chez  le  troisième  lapin,  sacrifié  quarante  jours  après  l'expérience, 
l'épaississement  était  encore  plus  prononcé;  le  tissu  de  cet  épaississe- 
ment,  semblable  à  celui  du  cristallin,  formait  un  anneau  complet  en 
dedans  de  la  circonférence  de  la  capsule. 

Les  trois  autres  lapins  ont  été  examinés  :  l'un  au  bout  de  soixante 
jours  après  l'opération,  un  autre  au  bout  de  quatre  mois,  et  le  dernier 
au  bout  de  cinq  mois  et  vingt  jours.  La  régénération  était  de  plus  en 
plus  avancée  ;  et,  chez  les  deux  derniers,  elle  était  complète  ou  à  peu 
près  :  le  cristallin  avait  recouvré  sa  forme  lenticulaire,  et,  chez  le 
dernier,  il  avait  presque  son  volume  normal. 

Ce  sont  les  diverses  phases  de  ce  travail  de  régénération  que  l'on 
peut  voir  sur  les  pièces  présentées  à  la  Société  :  on  y  voit,  en  effet, 
l'état  du  cristallin  de  l'œil  opéré  chez  les  six  animaux  dont  il  vient 
d'être  parlé.  On  peut  constater  le  début  du  travail,  c'est-à-dire  l'é- 
paississement de  la  capsule  sur  la  pièce  n°  1.  La  pièce  n"  6  montre  la 
régénération  achevée,  et  les  quatre  pièces  intermédiaires  font  suivre 
les  progrès  de  cette  regénération. 

Il  ne  suffisait  pas  d'iiilleurs  de  reconnaître  que  la  capsule  cristalli- 
nienne  s'était  remplie  peu  à  peu  d'une  matière  offrant  la  consistance 
et  la  transparence  normales  du  cristallin  ;  il  fallait  de  plus  trouver 
dans  le  corps  régénéré  la  structure  de  cette  lentille.  M.  Philipeaux  a 
vu,  comme  M.  Milliot,  et  comme  Yalentin  (cité  par  M.  Milliot)  l'avait 
vu  aussi  dès  1842,  que  le  cristallin  régénéré  est  formé  de  tubes  tout  à 
fait  semblables  à  ceux  du  cristallin  normal.  Ces  tubes  existent  déjà 
lors  des  premières  phases  du  travail  de  régénération;  ils  sont  alors  un 
peu  plus  larges  que  lorsque  ce  travail  est  terminé. 

Ces  expériences  de  M.  Philipeaux,  qui  viennent  confirmer  d'une 
façon  si  nette  celles  de  ses  prédécesseurs,  ne  peuvent  laisser  aucun 
doute  sur  la  question  dont  il  s'agit;  et  l'on  doit  admettre  au  nombre 


67 
des  régénérations  incontestables,  celle  du  cristallin  chez  les  jeunes 
mammifères.  Pour  que  cette  régénération  ait  lieu,  il  faut  que  la  cap- 
sule soit  laissée  en  place  et  n'ait  pas  été  trop  dilacérée;  il  faut  encore 
qu'il  n'y  ait  eu  issue  que  d'une  très-faible  quantité  d'humeur  vitrée. 

Hémiplégie  gaucbe  avec  paralysie  alterne  de  la  troisième  paire  droite, 
résultant  •  dun  ramollissement  du  pédoncule  cérébral  droit;  par 
M.  Oyon. 

Le  27  mars  1870,  entre  dans  le  service  de  M.  Vulpian  à  la  Pitié  la 
nommée  Ducroquet  (Geneviève),  âgée  de  78  ans  :  elle  présente  une 
légère  hémiplégie  à  gauche,  peut  encore  serrer  légèrement  avec  la 
main  gauche  et  soulever  la  jambe  au-dessus  du  plan  du  lit,  mais  ne 
peut  marcher  ni  se  tenir  debout  sans  être  soutenue;  légère  paralysie 
faciale  du  même  côté  ;  rien  d'appréciable  du  côté  des  yeux. 

L'intelligence  est  très-obscurcie  ;  on  ne  peut  avoir  aucun  renseigne- 
ment précis  sur  les  antécédents. 

Le  lendemain  28  mars,  on  constate  une  aggravation  de  l'hémiplégie, 
surtout  marquée  au  membre  supérieur  qui  est  inerte;  les  doigts  seuls 
exécutent  de  petits  mouvements  de  flexion;  le  membre  supérieur  peut 
encore  être  soulevé  au-dessus  du  plan  du  lit,  La  sensibilité  est  intacte 
des  deux  côtés.  On  note  un  phénomène  nouveau,  la  paralysie  de  la 
troisième  paire  droite;  l'œil  est  complètement  fermé,  et  quand  on  sou- 
lève la  paupière,  on  constate  que  les  mouvements  du  globe  oculaire 
en  dedans,  en  haut  et  en  bas,  sont  impossibles,  ceux  en  dehors  res- 
tant seuls  possibles.  L'iris  ne  participe  pas  à  la  paralysie;  la  pupille 
est  contractée,  et  même  plus  étroite  qu'à  gauche. 

L'intelligence  est  plus  nette;  la  malade  se  plaint  de  douleurs  de  tête 
dans  le  côté  droit,  existant  depuis  un  certain  temps;  elle  raconte  que 
la  veille  elle  est  tombée  en  sortant  de  son  lit  sans  pouvoir  se  relever. 
Le  même  accident  lui  serait  arrivé  huit  jours  auparavant  sans  qu'il  en 
soit  résulté  de  paralysie. 

Les  jours  suivants  la  paralysie  devient  complète  à  gauche  ;  la  malade 
gâte,  et  il  y  a  tendance  aux  eschares  des  fesses,  surtout  à  gauche. 
Môme  éiat  de  l'œil  :  strabisme  externe. 

Mort  le  10  avril,  sans  qu'on  ait  rien  constaté  d'anormal  dans  les 
différents  appareils. 

A  l'autopsie  faite  le  11  avril,  on  trouve  les  artères  de  la  base  plus  ou 
moins  scléro-athéromatheuses  sans  rétrécissement  notable  de  leur  ca- 
libre, sauf  la  cérébrale  postérieure  droite  qui  est  presque  oblitérée. 

Dans  la  partie  du  pédoncule  cérébral  droit  contiguë  à  la  couche  op- 
tique, un  foyer  de  ramollissement  rouge  paraissant  de  date  récente  et 


68 

du  volume  d'une  petite  noisette  de  forme  irrégulière;  rien  dans  les  au- 
tres parties  de  l'encéphale  ni  de  la  moelle. 

Le  nerf  moteur  oculaire  cornéen  droit,  pendant  l'extraction  de  l'en- 
céphale, a  été  arraché  de  ses  insertions  pédonculaires  :  examiné  au 
microscope,  il  présente  des  points  altérés  (état  segmenté  de  la  myé- 
line) et  d'autres  où  les  tubes  étaient  sains. 

Rien  de  spécial  dans  les  autres  organes. 

Ce  fait  présente  de  l'intérêt  à  ce  point  de  vue  qu'on  a  pu  faire  pen- 
dant la  vie  le  diagnostic  du  siège  et  même  de  la  nature  de  la  lésion 
en  se  fondant  sur  l'aggravation  progressive  de  l'hémiplégie  et  l'appari- 
tion secondaire  de  la  paralysie  alterne  de  la  troisième  paire. 

Il  y  a  de  plus  à  noter  que  le  nerf  moteur  oculaire  commun  était  al- 
téré comme  après  une  section  expérimentale,  ainsi  que  le  fait  remar 
quer  M.  Vulpian,  mais  non  dans  son  entier,  ce  qui  peut  expliquer  l'ab- 
sence de  paralysie  de  l'iris  et  la  contraction  de  la  pupille. 

Séance  du  30  avril. 

M.  Raymond  présente  la  deuxième  partie  du  Traité  cTanatomie  vété- 
rinaire de  M.  Leyh,  professeur  à  TÉcole  vétérinaire  de  Sluttgard, 
ouvrage  traduit  par  M.  Zundel  et  annoté  par  M.  Ménard. 

—  M.  JoFFROY  communique  des  faits  relatifs  à  l'atrophie  aiguë  ou  chro- 
nique des  cellules  nerveuses  de  la  moelle  et  du  bulbe,  à  propos  d'une 
observation  de  paralysie  labio-glosso-laryngée  qu'il  a  faite  avec 
M.  Duchenne  (de  Boulogne). 

M,  Charcot  appelle  l'attention  de  la  Société  sur  cette  communica- 
tion, qui  paraît  établir  d'une  manière  certaine  que  les  cellules  mo- 
trices de  la  moelle  peuvent  s'altérer  primitivement;  mais  M.  Charcot 
n'adopte  pas  encore  Thypothèse  de  M.  Joffroy,  qui  dislingue  dans  les 
cornes  antérieures  de  la  moelle  des  cellules  motrices  présidant  au 
mouvement  et  des  cellules  trophiques  présidant  à  la  nutrition,  cel- 
lules dont  la  lésion  produirait  dans  les  muscles  la  paralysie  ou  des 
troubles  de  nutrition. 

M.  Vulpian  n'accepte  pas  non  plus  cette  distinction  des  cellules,  et 
l'on  pourrait  recourir  à  l'hypothèse  plus  simple  de  deux  sortes  de  lé- 
sions des  cellules;  par  exemple  on  peut,  comme  l'a  dit  M.  Brown- 
Séquard,  admettre  une  atrophie  rapide  dépendant  d'une  irritation, 
et  une  atrophie  lente  et  passive.  M.  Vulpian  a  remarqué  que  le  muscle 
affecté  perd  en  même  temps  sa  contractilité  et  sa  sensibilité  dans  des 
cas  où  les  cellules  des   cornes  antérieures  étaient  seules  atteintes. 


69 

M.  Vulpian  a  trouvé  une  altération  de  la  substance  grise  dans  la  moelle 
de  Lecomte,  qui  avait  une  atrophie  musculaire.  Dans  un  cas  d'atro- 
phie et  de  paralysie  des  deltoïdes,  à  la  suite  d'une  variole,  M.  Vulpian 
croit  à  une  lésion  de  la  moelle. 

M.  Charcot  fait  remarquer  qu'on  observe  quelquefois  à  côté  de  l'a- 
trophie musculaire  progressive  des  cas  d'atrophie  musculaire  sympto- 
matique  consécutive  soit  à  une  extension  en  avant  de  la  sclérose  des 
cordons  postérieurs,  soit  à  une  compression  de  la  moelle  par  les  fausses 
membranes  d'une  méningite. 

M,  LiouviLLE  observa  aussi  une  atrophie  et  une  paralysie  des  muscles 
de  l'épaule  à  la  suite  de  la  variole. 

M.  Laborde,  à  propos  delà  communication  de  M.  Joffroy.fait  remar- 
quer qu'il  est  difficile  d'admettre  que  dans  la  paralysie  infantile,  toutes 
les  cellules  des  cornes  antérieures  soient  prises,  quand  quarante-huit 
heures  après  tous  les  symptômes  peuvent  avoir  disparu. 

M.  Charcot  maintient  cette  opinion  que  la  paralysie  infantile  est  due 
à  l'atrophie  aiguë  des  cellules  des  cornes  antérieures. 

—  M.  Bert  communique  les  expériences  relatives  au  tic  des  chiens. 
Ainsi  que  l'a  reconnu  M.  Chauveau,  la  section  de  la  moelle  cervicale 
n'a  point  fait  disparaître  le  tic.  Les  opiacés  à  haute  dose,  le  bromure  de 
potassium,  l'éther  donné  jusqu'à  insensibilité  de  la  cornée  n'ont  point 
arrêté  le  tic.  Tandis  que  le  chloroforme  le  supprime,  probablement  en 
portant  son  action  sur  les  cellules  sensibles  de  la  moelle,  la  strychine, 
au  contraire,  réveille  le  tic.  Dans  un  cas  de  tic  des  membres  anté- 
rieurs, M.  Bert  a  découvert  la  moelle,  l'a  sectionnée  au-dessus  et  au-des- 
sous de  la  naissance  des  nerfs  des  membres  antérieurs,  puis  a  sectionné 
la  moelle  dans  le  sens  antéro-postérieur.  Les  racines  postérieures  furent 
coupées  et  le  cordon  postérieur  delà  moelle  fut  enlevé;  malgré  toutes 
ces  lésions  le  tic  persista.  La  section  des  racines  antérieures  l'arrêta 
aussitôt.  M.  Bert  croit  que  le  point  de  départ  de  la  maladie  réside  dans 
la  substance  grise  et  particulièrement  dans  les  cellules  sensibles. 

M.  Vulpian  demande  à  M.  Bert  quelles  sont  les  raisons  qui  lui  font 
placer  le  siège  de  la  maladie  dans  les  cellules  sensibles.  M.  Bert  ré- 
pond que  le  chloroforme  et  la  strychine  agissent  sur  les  cellules  sensi- 
bles ou  sur  les  points  de  la  moelle  qui  reçoivent  les  impressions. 

M.  Legros  a  fait  des  recherches  analogues  avec  M.  Onimus  ;  sur  des 
chiens  choréiques,  la  moelle  fut  séparée  de  l'encéphale  et  l'animal  fut 
conservé  par  la  respiration  artificielle.  Les  racines  postérieures  furent 
sectionnées,  puis  avec  des  ciseaux  courbes  la  partie  postérieure  de  la 
moelle  fut  enlevée;  l'ablation  des  cordons  postérieurs  fit  disparaître  le 
tic  ;  un  tendon  de  muscle  choréique  traçait  les  mouvements. 


70 

Sur  la  moelle  mise  à  nu,  MM.  Legros  et  Onimus  ont  reconnu  que  le 
courant  continu  ascendant  augmente  les  mouvements  choréiques,  tan- 
dis que  le  courant  descendant  les  diminue.  Quand  les  mouvements 
choréiques  sont  arrêtés,  le  courant  ascendant  même,  appliqué  de 
l'anus  à  la  gueule,  les  fait  reparaître.  L'excitation  d'une  racine  posté- 
rieure a  produit  de  la  contracture  dans  le  membre,  puis  une  augmen- 
tation des  mouvements  choréiques  ;  la  peur  arrête  ces  mouvements. 

M.  Brown-Séquard  fait  remarquer  que  la  chorée  chez  l'homme  peut 
dépendre  d'une  irritation  de  siège  très-variable.  Ainsi  un  névrôme 
dans  un  cas  observé  par  Borelli,  un  ongle  incarné  dans  un  autre  cas, 
ont  été  le  point  de  départ  de  la  maladie.  La  chorée  doit  être  considérée 
comme  une  manifestation  réflexe  dont  la  cause  peut  être  très-ré- 
pandue. 

M.  Bert  ajoute  qu'il  n'a  pas  fait  l'ablation  des  cornes  postérieures 
de  la  moelle,  et  qu'il  faut  se  défier  quand  à  la  suite  d'une  lésion  les 
mouvements  du  tic  disparaissent. 

M.  VuLPiAN  regarde  comme  très-difficile  l'ablation  des  cordons  pos- 
térieurs de  la  moelle  sans  lésion  des  cornes  postérieures. 

M.  Trasbot  fait  remarquer  que  le  tic  du  chien  paraît  identique  avec 
la  chorée;  cette  maladie  chez  le  chien  est  souvent  suivie  de  lésions 
diverses,  par  exemple  d'atrophie  des  muscles  antérieurs. 

Le  tic  des  chiens  est  une  maladie  qui  ne  guérit  pas,  dit  M.  Brown- 
Séquard,  tandis  que  la  chorée  de  l'homme  guérit  en  général,  et  que  les 
tics  chez  l'homme  sont  incurables. 

M.  Trasbot  répond  qu'on  a  réussi  quelquefois  à  guérir  la  chorée  du 
chien  à  l'aide  de  la  strychnine. 


COMPTE  RENDU  DES  SÉANCES 


DE 


r  r 


LA  SOCIETE  DE  BIOLOGIE 

pendant  le  mois  de  mai  1870; 
Par  m.  HAYEM,  secrétaire. 


PRÉSIDENCE  DE  M.  CL.  BERNARD. 


Séance  du  7  mai. 

DES   DIFFÉRENCES    DE    CONTRACTILITÊ     SOUS   l'iNFLUENCE    DES    COURANTS    INDUITS 

ET  DES  COURANTS  CONTINUS;  par  M.  Onimus.  , 

Lorsque  les  muscles  sont  sains,  les  contractions  les  plus  fortes  ont 
lieu  avec  les  courants  induits  ;  les  courants  continus  au  contraire  ne 
déterminent  que  des  contractions  très-faibles,  et  pour  les  obtenir,  il 
faut  surtout  agir  sur  le  trajet  des  nerfs. 

Dans  beaucoup  de  cas,  et  presque  dans  tous  les  états  pathologiques, 
la  proposition  précédente  est  renversée,  c'est-à-dire  que  la  contractilité 
électro-musculaire  devient  plus  marquée  pour  les  courants  continus 
que  pour  les  courants  induits. 

On  peut  sous  ce  rapport  distinguer  trois  cas  :  1°  celui  où  la  contrac- 
tilité existe  pour  les  deux  sortes  de  courants,  mais  où  elle  est  plus  pro- 
noncée pour  les  courants  continus;  2°  celui  où  la  contractilité  a  dis- 
paru pour  les  courants  induits,  mais  existe  encore,  quoique  faiblement, 
pour  les  courants  continus;  3°  celui  où  la  contractilité  a  disparu  pour 


72 

les  courants  induits  et  persiste  pour  les  courants  continus,  même  plus 
forte  que  pour  les  muscles  sains. 

1°  Dans  la  première  série,  nous  pouvons  ranger  tous  les  cas  où  la 
nutrition  du  muscle  a  été  modifiée.  Ainsi,  cela  s'observe  lorsque  les 
muscles  ont  été  très-fatigués  et  à  la  suite  d'affections  générales  comme 
la  fièvre  typhoïde.  Il  en  est  de  même  dans  l'atrophie  musculaire 
progressive.  Dans  tous  ces  cas,  avec  les  courants  continus,  on  obtient 
des  contractions  aussi  énergiques  et  même  souvent  plus  énergiques  en 
électrisant  directement  les  muscles  qu'en  agissant  sur  les  nerfs,  ce  qui 
n'a  jamais  lieu  à  l'état  normal. 

Après  la  mort  d'un  animal,  on  rencontre  des  phénomènes  du  même 
genre.  A  mesure  que  Tirritabililé  musculaire  s'affaiblit,  on  voit  que  les 
cournnts  continus  déterminent  des  contractions  plus  fortes  que  les  cou- 
rants induits.  11  arrive  un  moment  où  les  courants  induits  ne  détermi- 
nent plus  de  contractions,  tandis  que  les  courants  continus  en  provo- 
quent même  de  très-manifestes.  Nous  avons  eu  l'occasion  d'observer 
ces  phénomènes  chez  l'homme. 

La  même  différence  d'action  des  courants  électriques  a  lieu  pour  les 
muscles  des  embryons. 

2°  Dans  les  cas  de  dégénérescence  granuleuse  des  muscles  avant 
l'altération  complète  ou  lorsque  celle-ci  vient  à  s'amender  et  que  la 
fibre  musculaire  recouvre  peu  à  peu  sa  structure,  on  obtient  encore  les 
courants  continus  des  contractions,  tandis  qu'on  n'en  obtient  plus  avec 
les  courants  induits. 

Lorsque  la  guérison  a  lieu,  le  retour  des  contractions  volontaires,  et 
de  celles  produites  par  les  courants  induits,  est  presque  toujours  pré- 
cédé du  rétablissement  de  la  contractilité  pour  les  courants  continus. 
Dans  la  paralysie  infantile,  dans  les  paralysies  saturnines,  dans  des 
atrophies  consécutives  à  des  sciatiques,  on  observe  également  que  la 
contractilité  abolie  pour  les'  courants  induits  persiste  pour  les  courants 
continus. 

3"  Dans  certains  cas  de  paralysie  rhumatismale  et  de  paralysie  trau- 
matique,  la  contractilité  abolie  pour  les  courants  induits,  non-seulement 
existe  pour  les  courants  continus,  mais  est  plus  grande  que  pour  les 
muscles  homologues  sains. 

L'époque  de  la  maladie  influe  beaucoup  sur  les  phénomènes  obser- 
vés. C'est  ainsi  que  dans  un  cas  de  paralysie  rhumatismale  du  nerf 
facial,  nous  avons  observé  : 

Sous  le  rapport  des  interruptions  des  courants,  qu'au  début  de  la 
paralysie  et  jusqu'au  moment  où  les  mouvements  volontaires  sont  re- 
venus, les  courants  induits,  même  en  employant  des  interruptions  très- 
lentes,  n'ont  pas  d'action  sur  les  fibres  musculaires  paralysées. 


73 

Que  pour  les  courants  continus,  en  dehors  de  la  paralysie,  on  ob- 
tient encore  des  contractions  en  faisant  50  à  60  interruptions  par 
seconde.  Un  mois  après,  les  contractions  par  ces  mêmes  courants  dis- 
paraissent si  on  dépasse  4  à  8  interruptions  par  seconde. 

Lorsque  les  contractions  volontaires  réapparaissent,  les  interruptions 
peuvent  de  même  être  plus  rapides,  elles  peuvent  être  de  40  à  50  par 
seconde,  ei  devenir  encore  plus  fréquentes  à  mesure  que  la  pression 
devient  de  plus  en  plus  complète. 

Sous  le  rapport  de  Vinfluence  des  pôles,  le  pôle  positif  qui,  sur  les 
muscles  sains  donne  des  contractions  moins  fortes  que  le  pôle  négatif, 
agit  au  contraire  plus  énergiquement  sur  les  muscles  paralysés,  au 
moins  pendant  un  certain  temps. 

Sous  le  rapport  de  C intensité  du  courant,  il  faut  toujours  un  cou- 
rant moins  fort  pour  les  muscles  paralysés  que  pour  les  muscles  ho- 
mologues sains.  Tandis  qu'il  faut  dix-huit  éléments  pour  déterminer  la 
contraction  de  ces  derniers,  il  ne  faut  employer  pour  les  muscles  pa- 
ralysés que  douze,  huit  et  même  quatre  éléments.  Plus  la  paralysie 
est  complète,  moins  le  courant  a  besoin  d'être  intense. 

La  forme  de  la  contraction  diffère  à  ces  différentes  périodes;  elle 
s'éloigne  peu  à  peu  de  la  forme  de  la  coatraction  des  muscles  striés 
pour  se  rapprocher  de  celle  des  muscles  lisses;  elle  devient  lente  et 
progressive.  De  plus,  la  fibre  musculaire  qui  se  contracte  ainsi  sous 
l'influence  des  courants  continus  reste  en  partie  contractée  pendant 
tout  le  temps  que  le  courant  est  appliqué. 

M.  Charcot  fait  observer  que  plusieurs  des  points  qui  sont  mis  en 
lumière  dans  le  travail  de  M.  Onimus,  ont  été  déjà  énoncés  par  divers 
auteurs  allemands,  et  que  rien  n'est  mieux  démontré  actuellement  que 
le  fait  de  contractions  musculaires  obtenues  par  les  courants  continus, 
alors  que  les  courants  interrompus  ne  donnent  plus  rien. 

M.  Brown-Séquard  rappelle,  relativement  à  l'influence  des  divers  ex- 
citants musculaires,  que,  en  1849  et  1851,  il  a  établi,  par  des  expé- 
riences faites  sur  des  suppliciés  et  de  grands  animaux,  qu'au  moment 
où  la  rigidité  cadavérique  va  se  montrer,  les  courants  indirects  les 
plus  forts  ne  produisent  aucun  effet,  alors  que  le  choc  des  muscles  dé- 
termine encore  une  contraction. 

Ce  fait  a  été  depuis  vérifié  par.un  grand  nombre  d'expérimentateurs, 
et  en  supposant  même,  comme  M.  Chauveau  a  cherché  à  le  démontrer, 
que  le  galvanisme  agisse  mécaniquement  comme  un  choc,  il  existe  des 
différences  importantes  entre  les  résultats  obtenus  par  les  diverses  es- 
pèces d'excitants.  Chez  l'homme  vivant,  dans  certains  cas  pathologi- 
ques où  l'irritabilité  musculaire  est  altérée  (dans  la  phthisie,  la  pleu- 
résie chronique,  etc.)  un  choc  léger  sur  les  muscles  du  thorax  peut 


luulLiBRARr  '^ 


5^'/S5' A  S©i    '^  ^ 


74 
produire  un  état  de  contraction  locale  analogue  à  celle  qui  se  produit 
après  la  mort  lorsque  la  rigidité  cadavérique  s'approche.  Ce  phéno- 
mène, qui  a  de  l'analogie  avec  ce  que  Trousseau  a  décrit  sous  le  nom 
de  tétanie,  s'observe  particulièrement  sous  l'influence  d'un  état  ané- 
mique. 

A  propos  de  cette  question,  le  même  observateur  déclare  qu'il  ne 
s'explique  pas  comment  la  volonté  peut  faire  contracter  des  muscles 
qui  refusent  de  réagir  sous  l'influence  des  courants  induits,  ainsi  que 
M.  DuGhennedit  l'avoir  observé  dans  certaines  paralysies  faciales  par 
exemple.  Il  est  probable  que  ces  faits  n'ont  pas  été  l'objet  d'une  étude 
assez  attentive.  D'autre  part,  M.  Brown-Séquard  a  vu  également  des 
muscles  atrophiés  se  contracter  sous  l'influence  de  courants  faibles  et 
incapables  d'agir  sur  des  muscles  sains,  fait  qui  démontre  que  l'excita- 
bilité peut  être  plus  grande  dans  un  muscle  faible  que  dans  un  muscle 
fort. 

M.  Onimus  a  constamment  vu  les  muscles  qui  se  contractent  sous 
l'empire  de  la  volonté  entrer  aussi  en  contraction  lorsqu'on  emploie 
des  courants  suffisamment  forts.  D'une  manière  générale,  la  force  du 
courant  est  en  rapport  avec  le  nombre  des  fibres  qui  se  contractent. 

M.  "VcLPiAN,  à  l'appui  des  propositions  énoncées  par  M.  Brown-Sé- 
quard,  dit  qu'il  a  eu  l'occasion,  et  cela  un  grand  nombre  de  fois,  de 
constater  que  l'action  mécanique  possède  encore  un  certain  eff"et,  alors 
que  les  courants  induits  ou  continus  n'en  ont  plus. 

Il  ajoute  qu'après  les  lésions  des  nerfs,  contrairement  à  ce  que  plu- 
sieurs auteurs  ont  avancé,  la  contractilité  ne  se  perd  pas.  Cependant 
on  sait  que  dans  ces  cas  les  muscles  s'altèrent;  mais  si,  au  lieu  d'agir  à 
travers  les  téguments,  on  met  les  fibres  musculaires  à  nu,  on  peut  se 
convaincre  de  la  persistance  de  la  contractilité  sous  l'influence  des 
courants  continus  (pinces  de  Pulvermacher). 

Dans  les  conditions  où  l'on  se  trouve  pour  juger  la  question  chez 
l'homme^  on  peut  dire  que  l'électricité  n'agit  plus.  La  contractilité 
électrique  n'est  pas  perdue,  mais  elle  est  effectivement  amoindrie. 

M.  Laborde  fait  remarquer  que,  ainsi  qu'il  l'a  déjà  démontré  avec 
M.  Leven,  le  chlorure  de  codéine  est  un  excitant  très-précieux  de  la 
contractilité  musculaire,  et  dont  l'action  se  produit  même  dans  les  cas 
où  des  courants  électriques  induits  ne  paraissent  plus  avoir  d'effet.  Ce 
réactif  peut  montrer,  par  exemple,  que  dans  des  cas  d'atrophie  et  d'al- 
tération de  structure  des  muscles,  à  la  suite  de  section  de  nerfs  mixtes, 
notamment  du  sciatique,  la  contractilité  musculaire  est  en  réalité  abolie 
partiellement  dans  ces  muscles  qui  semblent  cependant,  sous  l'in- 
fluence d'un  excitant  général  comme  l'électricité,  avoir  conservé  leur 


.X     vj--. 


75 
propriété  physiologique  entière;  résultat,  d'ailleurs  en  harmonie  avec 
celui  de  l'examen  histologique,  qui  révèle  des  altérations  de  structure 
plus  ou  moins  avancées  d'un  plus  ou  moins  grand  nombre  de  fibres 
musculaires,  tandis  que  d'autres  restent  à  peu  près  saines  :  ces  der- 
nières seules  sont  eontraclUes. 

Note  sur  l'influence  de  la  menstruation  sur  la  nutrition,  le  pouls 
ET  LA  TEMPERATURE,  par  le  docteur  Rabuteau, 

Lorsque  l'homme  est  soumis  à  un  régime  identique,  il  élimine,  à 
l'état  normal,  par  les  urines  une  quantité  d'urée  qui  est  sensiblement 
constante.  Ayant  exécuté  dans  ces  trois  dernières  années  plus  de 
800  dosages  d'urée,  j'ai  pu  constater  sur  une  vaste  échelle  ce  fait  qui 
est  devenu  pour  moi  un  axiome.  Aussi  peut-on  faire  sur  l'homme  des 
expériences  prolongées  dans  le  but  de  reconnaître  l'action  d'un  médi- 
cament sur  la  nutrition. 

Il  n'en  est  pas  de  même  chez  la  femme.  Bien  que  soumise  à  un  ré- 
gime identique,  elle  n'élimine  pas  constamment  la  même  quantité 
d'urée.  Ce  fait  même  m'avait  embarrassé  d'abord,  mais  j'en  ai  bientôt 
découvert  la  cause  dans  la  menstruation. 

Dans  ces  derniers  temps,  une  jeune  femme  a  bien  voulu  m'aider 
dans  mes  recherches,  en  essayant  sur  elle-même  deux  médicaments. 
Les  expériences  faites  à  ce  sujet  ont  été  divisées  en  trois  périodes, 
pendant  lesquelles  elle  a  suivi  le  même  régime.  Elle  n'a  pas  pris  de 
médicaments  pendant  la  première  période,  afin  qu'il  me  fût  possible  de 
déterminer  la  quantité  normale  d'urée  rendue  chaque  jour,  et  de  re- 
connaître les  changements  qu'apporteraient  ces  agents  dans  les  com- 
bustions pendant  la  seconde  période  ;  enfin,  pendant  la  dernière,  elle 
n'a  pas  pris  non  plus  de  médicament. 

Je  rapporterai  ailleurs  les  expériences  dont  il  est  question  dans  cette 
note.  Je  me  bornerai  pour  le  moment  à  insister  sur  les  résultats  acquis 
pendant  les  périodes  où  l'organisme  n'était  sous  l'influence  d'aucune 
substance  étrangère. 

Les  températures  ont  été  prises  dans  le  vagin. 

Urée  des  24  heures.  Pouls  Température 

Grammes.  à  8  h.  du  matin.       à  8  h.  du  matin. 

Le  20  mars      ..  70 37°,50 

21  »  67      37%50 

22  »  ...o.       68       37°,60 

23  23,77  68  37°,50 

24  23,50  67  37°, 40 

25  23,00  65  37",35 

26  18,38  63  37",30 


76 

Les  règles  commencent  le  26  mars  et  cessent  le  31.  Pendant  ce 
temps  les  urines  ne  sont  pas  recueillies  à  cause  du  sang  qu'elles  con- 
tiennent. 

Urée.  Pouls.  Température. 

Grammes. 

Le  27  mars      »  »  37%28 

28               »  »  37°,10 

29               »  »  » 

30               »  60  37%05 

31                »  »  » 

Le    1"  avril     »  »  37°,i8 

2  «  »       37%20 

3  »  »       37M5 

4  17,14  63  37%15 

5  17,21  65  37-',15 

6  18,32  71  3T°,30 

7  17,75  70  37%26 

8  18,02  68  37%45 

9  20,08  70  37°,30 

10  20,00  69  37%  40 

Je  me  dispenserai  de  citer  les  chiffrés  trouvés  du  M  au  21  avril, 
période  au  commencement  de  laquelle  l'ingestion  d'un  sel  dont  je  re- 
cherche l'action  avait  modifié  la  nutrition.  Mais  le  21  l'urée  s'est 
élevée  au  chiffre  ordinaire.  Il  en  a  été  de  même  le  lendemain  et  il  en 
aurait  été  sans  doute  de  même  aussi  les  jours  suivants  si  l'influence 
des  règles  ne  s'était  déjà  fait  sentir  deux  jours  avant  leur  apparition 
qui  a  eu'  lieu  le  24. 

Urée.  Pouls.  Température. 

Grammes. 

Le  21  avril  19,02  68  37%50 

22  19,05  55  37°,40 

23  16,73  64  37%25 

24  15,28  .....  62  37%20 


25  »  59 


Tels  sont  les  premiers  faits  que  j'ai  à  signaler.  J'aurais  désiré  suivre 
avec  plus  de  soin  la  dernière  observation  où  l'on  voit  d'une  manière 
nette  la  diminution  de  l'urée,  du  pouls  et  de  la  température.  Mais  je 
me  propose  de  continuer  mes  recherches  malgré  les  difficulté  qu'elles 
présentent. 

En  résumé  : 

1°  Sous  l'influence  de  la  menstruation  la  nutrition  se  ralentit;  le 
pouls  s'abaisse,  et  la  température  diminue  chez  la  femme.  D'après  les 


ÎV 


77 

chiffres  indiqués  plus  haut,  l'urée  a  diminué  de  plus  de  20  pour  100, 
le  nombre  des  pulsations  de  plus  de  10,  et  enfin  la  température  s'est 
abaissée  d'un  demi-degré. 

2°  Ces  effets  physiologiques  se  manifestent  même  avant  l'apparition 
des  règles  et  persistent  quelques  jours  après  leur  cessation. 

Recherches  sur  l'action  des  caféiques   sur  la  nutrition, 
par  le  docteur  Rabuteau. 

Le  groupe  des  caféiques,  créé  par  M.  Bouchardat,  comprend  le  café, 
le  thé  proprement  dit,  le  thé  du  Paraguay  et  le  guarana,  qui  renfer- 
ment un  même  alcaloïde,  la  caféine.  Toutes  ces  substances  paraissent 
posséder  les  mêmes  propriétés  physiologiques,  mais  une  seule  d'entre 
elles,  le  café,  a  attiré  l'attention  des  expérimentateurs.  Toutefois,  les 
recherches  faites  sur  cette  dernière  substance  sont  encore  peu  nom- 
breuses, et  la  caféine  a  été  étudiée  plutôt  au  point  de  vue  toxique 
qu'au  point  de  vue  physiologique. 

Dans  des  expériences  inédites  auxquelles  j'ai  pris  part,  l'un  de  mes 
élèves  et  ami,  M.  Eustratiade,  a  étudié  sur  lui-même  l'action  du  café 
torréfié  et  de  la  caféine,  au  point  de  vue  de  la  nutrition.  Il  a  trouvé 
une  diminution  très-notable  de  l'urée  après  avoir  pris  des  doses  assez 
fortes  de. ces  agents.  C'est  pour  compléter  son  travail  que  j'ai  entrepris 
des  recherches  dont  j'offre  aujourd'hui  les  prémices.  Je  me  suis  pro- 
posé en  effet  d'étudier  tous  les  caféiques,  et  j'ai  commencé  par  le  thé 
et  par  le  café  vert  pris  en  infusion  à  des  doses  faibles. 

L'expérience  que  j'ai  faite  sur  moi-même  a  été  divisée  en  cinq  pé- 
riodes, durant  lesquelles  j'ai  suivi  un  régime  identique.  Pendant  la 
première,  la  troisième  et  la  cinquième  période,  j'ai  suivi  mon  régime 
ordinaire ,  mais  pendant  la  deuxième  j'ai  pris  trois  fois  par  jour,  le 
matin,  à  midi,  et  le  soir,  une  infusion  de  5  grammes  de  thé  hyson,  et, 
pendant  le  quatrième,  j'ai  pris  de  même  une  infusion  de  5  grammes  de 
café  vert.  Par  ce  moyen  il  m'a  été  facile  de  déterminer  les  effets  de 
ces  deux  agents  sur  les  combustions  et  sur  la  circulation. 

Le  tableau  suivant  contient  les  résultats  auxquels  je  suis  arrivé. 

1"  période.  —  Régime  ordinaire. 

Dates.                 Urines  des  24  heures.       Urée  totale.  Pouls. 

Du  4  au  5  avril 1175  24,12  » 

5-6  — 1231  23,93  73 

6  —  7  -  1150  25,83  » 

7  —  8  — 1030  2û,36  75 

8  —  9  -  1045  26,66  75 

moyenne 1126       24,98       74 


78 
2*  période.  —  15  grammes  de  thé  par  jour. 


Dates. 

Urines  des  24  heures. 

Urée  totale. 

Pouls. 

9   -   10   -    . 

.  .  . . 

•1200     .... 

.    26,32     

67 

10  -  11    -    . 

.  • . . 

1227     .... 

..     25,20     

63 

11  -  12  —  . 

• . . . 

1055     .... 

,.     23,26     

64 

12  -  13  -  . 

•  • . . 

1045     .... 

..     20,27     

63 

13  —  14  —  . 

.    .    •    0 

1196     .... 

,.     23,16     

63 

moyenne. 

. . . . 

1145     .... 

,.     23,64     

64 

3*  péi 

■iode. 

—  Régime 

ordinaire. 

14  —  15  -   . 



1080     ..., 

,.     25,49     

67 

15  -  16  —  . 

•  •  •  • 

1180     ..., 

..     25,94     

69 

16  —  17  —  . 

•  •  •  • 

961     .... 

..     24,52     

» 

17  —  18  -  . 

•  •  •  • 

1078     ..., 

..     24,54     

68 

18  —  19  —  . 

<  •  •  • 

930     ... 

..     24,49     

, .     25,00     ...,. 

67 

moyenne. 

1046     .... 

68 

4'  période.  — 

15  grammes  de  café  vert. 

19  —  20  -  . 

•  «  •  ■ 

1430     ... 

. .     22,23     

60 

20  —  21  —  . 

•  •  •  • 

1152     ... 

..     23,00     

62 

21  —  22  -  . 

•  •  •  • 

1098     ... 

..     22,02     

60 

22  —  23  -  . 

•  •  •  • 

1500     ... 

..     20,16     ..... 

65 

23  —  24  -   . 

•  •  •  • 

1114     ... 

..     21,59     

.     21,80     

64 

moyenne. 

1259     .... 

62 

5°  péi 

riode. 

.  —  Eégime 

ordinaire. 

Du  24  au  25  —  . 

• .  *  > 

1350     ... 

..     26,01     

» 

25  _  26  -  . 

.... 

1247     ... 

..     28,15     

71 

26  —  27  —  . 

. .  • . 

1082     ... 

..     26,50     

64 

27  -  28  -  . 

. . . . 

1242     . . . , 

..     26,33     

71 

28  —  29  —  . 

. . . . 

1290     ... 

,.     23,90     

..     26,18     

71 

moyenne. 

1242     ..., 

69 

La  comparaison  des  moyennes  inscrites  dans  la  deuxième  colonne 
de  ce  tableau  nous  apprend  que  le  thé  et  le  café  vert,  pris  aux  doses 
indiquées,  ont  agi  comme  de  faibles  diurétiques.  Cependant  il  ne  fau- 
drait pas  croire  que  ces  deux  substances  fussent  complètement  dénuées 
du  pouvoir  d'activer  la  fonction  rénale.  Afin  de  mieux  mettre  en  évi- 
dence leurs  propriétés  diurétiques,  j'ai  suivi  une  méthode  que  j'ai 
adoptée  dans  une  étude  de  tous  les  agents  réputés  diurétiques,  étude 
qui  sera  publiée  plus  tard. 

On  dit  souvent,  et  je  suis  parfois  de  cet  avis,  que  les  diurétiques 


79 

n'agissent  que  par  l'eau  qui  leur  sert  de  véhicule,  qu'en  d'autres  termes 
l'eau  seule  est  un  véritable  diurétique.  Cette  proposition  est  évidem- 
ment exagérée  dans  la  plupart  des  cas.  Pour  dégager  la  vérité,  il  faut 
suivre  une  certaine  méthode;  voici  celle  que  j'ai  adoptée  dans  un  grand 
nombre  de  cas. 

Je  prends  le  matin  à  jeun  une  certaine  quantité  d'eau,  200  grammes 
par  exemple,  après  avoir  eu  soin  d'uriner.  Puis,  trois  heures  après,  je 
recueille  mes  urines.  D'autres  fois  je  bois  de  même  le  matin  et  à  jeun 
200  grammes  d'eau  contenant  la  substance  dont,  j'étudie  les  propriétés 
diurétiques  et  je  recueille  les  urines  éliminées  pendant  les  trois  heures 
suivantes.  Il  est  évident  que  si  j'obtiens  dans  ce  dernier  cas  une  plus 
grande  quantité  d'urine,  la  substance  ingérée  a  agi  comme  diurétique. 

En  procédant  de  cette  manière  dans  l'étude  du  thé  et  du  café  vert, 
je  suis  arrivé  aux  résultats  suivants  : 

1°  Du  4  au  8  avril  inclusivement  ayantbu  chaque  matin,  à  huitheures, 
200  grammes  d'eau  ordinaire,  la  moyenne  des  urines  éliminées  de  huit 
heures  à  onze  heures  a  été  de  113  grammes. 

2°  Du  8  au  13,  c'est-à-dire  pendant  la  deuxième  période,  la  quantité 
moyenne  des  urines  éliminées  pendant  le  même  temps  a  été  de  129 
grammes  après  avoir  pris  200  grammes  d'une  infusion  préparée  avec 
5  grammes  de  thé. 

3"  Du  13  au  18,  j'ai  bu  de  l'eau,  et  la  moyenne  a  été  de  127  grammes. 

Du  18  au  23  j'ai  bu  200  grammes  d'une  infusion  faite  avec  5  grammes 
de  café  vert,  et  la  moyenne  obtenue  a  été  de  137  grammes. 

Enfin,  du  23  au  28,  sous  l'influence  de  200  grammes  d'eau,  la 
moyenne  des  urines  éliminées  de  même  pendant  trois  heures  a  été  de 
111  grammes. 

On  voit  d'après  ces  chiffres  que  le  thé  et  le  café  en  infusion,  à  la  dose 
de  5  grammes  ,  n'ont  encore  exercé  qu'une  faible  action  diurétique. 
Si  après  l'ingestion  d'une  tasse  de  café  on  ressent  davantage  le  besoin 
d'uriner,  ce  besoin  est  moins  produit  par  la  répléiion  de  la  vessie  que 
par  une  excitation  des  fibres  de  cet  organe,  excitation  produite  par  la 
caféine,  qui  a  la  propriété  de  faire  contracter  les  fibres  musculaires 
et  de  produire  même  du  tétanos  lorsqu'elle  a  été  ingérée  à  dose  toxi- 
que. Je  ferai  la  même  observation  au  sujet  du  thé. 

Le  thé  elle  café  vert  ont  diminué  l'urée.  Toutefois,  l'action  de 
cette  dernière  substance  a  été  beaucoup  plus  marquée  que  celle  de  la 
première. 

En  prenant  la  moyenne  des  nombres  24,98,  25,00  et  26,18,  on  trouve 
le  nombre  25,38  qui  indique  la  quantité  moyenne  de  l'urée  éliminée 
pendant  le  régime  ordinaire.  Or,  en  comparant  ce  dernier  nombre  et 
les  chiffres  23,64  et  21,80  trouvés  pendant  la  troisième  et  la  quatrième 


80 

période  de  l'expérience,  on  trouve  que  le  thé  pris  en  infusion  à  la 
dose  de  15  grammes  n'a  diminué  Curée  que  de  6,85  pour  100,  tandis 
que  le  café  vert,  pris  à  la  même  dose,  a  diminué  ce  principe  de  14,11 
pour  100. 

Le  pouls  a  subi  des  variations  correspondantes  à  celles  de  l'urée,  et 
c'est  le  café  qui  a  produit  encore  ici  le  maximum  d'effet.  Il  est  infini- 
ment probable  que  si  j'avais  dosé  l'acide  carbonique  éliminé  par  les 
voies  respiratoires,  j'aurais  trouvé  des  variations  analogues;  c'est  ce 
que  je  ferai  bientôt. 

Enfin,  je  ferai  remarquer  que  les  effets  observés  se  sont  manifestés 
dès  le  jour  où  j'ai  pris  ces  deux  substances,  et  qu'ils  ont  disparu  dès  le 
moment  que  j'ai  cessé  d'en  faire  usage. 

Le  thé  et  le  café,  diminuant  l'urée,  ralentissent  les  combustions, 
étant  de  véritables  médicaments  d'épargne,  suivant  l'expression  de 
M.  Sée.  Ils  sont  utiles  aux  gens  dont  l'alimentation  est  insuffisante, 
aux  travailleurs  exposés  à  de  grandes  fatigues.  On  s'explique  ainsi 
comment  les  mineurs  belges,  avec  une  ration  alimentaire  très-inférieure 
à  la  ration  ordinaire,  peuvent  conserver  la  santé  et  une  grande  vigueur 
de  forces  musculaires.  Tandis  que  les  religieux  de  la  Trappe  absorbent 
15  grammes  d'azote  chaque  jour  par  les  aliments,  les  mineurs  belges 
n'absorbent  que  14^'',80  de  ce  principe,  mais  ils  prennent  chaque  jour 
deux  litres  d'une  infusion  de  café. 

—  M.  Brown-Séquard  fait  voir  à  la  Société  un  cochon  d'Inde  sur  le- 
quel il  a  pratiqué  la  section  de  quelques-unes  des  racines  du  sciatique 
et  la  compression  de  la  moelle  épinière.  L'opération  a  eu  pour  résultat 
une  paralysie  des  deux  membres  inférieurs,  de  la  vessie  et  du  rectum. 
Le  fait  important  sur  lequel  l'expérimentateur  appelle  l'attention  est 
celui-ci  :  on  peut  voir  à  la  partie  postérieure  des  pattes  de  petites 
eschares  recouvertes  de  croûtes  sanguinolentes.  Ces  lésions  de  nutri- 
tion ont  présenté  d'abord  l'apparence  de  petites  vésicules  et  elles  ont 
pris  naissance  dans  l'espace  de  quarante-huit  heures  dans  des  points 
qui  n'ont  subi  aucune  compression;  il  faut  donc  admettre  qu'elles  sont 
dues  à  l'influence  du  système  nerveux;  et  il  est  probable,  vu  les  phé- 
nomènes qui  ont  été  observés,  qu'elles  sont  la  conséquence  d'une 
irritation  de  la  moelle  épinière  et  de  ses  nerfs.  Il  y  a  eu  en  effet  dans 
les  membres  malades  avec  une  augmentation  de  température,  une 
atrophie  excessivement  rapide,  des  soubresauts  convulsifs  et  des  roi- 
deurs  (1).  Ce  fait  est  extrêmement  important  quand  on  le  met  en  re- 

(1)  Cet  animal  a  été  tué  quelque  temps  après,  et  M.  Pierret  a  constaté 
l'existence  d'une  myélite. 


81 
gard  des  cas  de  simple  paralysie  à  la  suite  de  la  section  de  la  moelle 
épinière  ou  de  ses  nerfs.  Dans  le  cas  de  paralysie  sans  irritation  il  y  a 
atrophie  musculaire  lente,  sans  autre  altération  de  nutrition;  dans  les 
cas  d'irritation  de  la  moelle  ou  de  ses  nerfs,  il  y  a,  au  contraire,  une 
atrophie  musculaire  excessivement  rapide  avec  ulcérations,  hémor- 
rhagies  et  d'autres  altérations  de  nutrition. 

M.  Laborde  fait  observer  que  dans  tous  ces  cas  on  trouve  une  élé- 
vation de  la  température  dans  les  membres;  mais  bientôt  après  ce 
premier  effet,  il  survient  une  diminution  de  température,  qui  une  fois 
déclarée  persiste  pendant  très-longtemps. 

—  M.  MuRON  présente  des  pièces  anatomiques  relatives  à  un  cas  de 
suppuration  du  liquide  encéphalo-rachidien  surveuue  chez  un  individu 
cachectique. 

La  séance  est  levée  à  cincj  heures  et  demie. 


Séance  du  14  mai. 

M.  Buown-Séquard,  à  propos  du  procès-verbal  de  la  dernière  séance, 
signale  une  cicatrisation  rapide  d'une  plaie  siégeant  chez  un  cochon 
d'Inde  au  voisinage  de  l'urètre;  malgré  le  contact  de  l'urine;  cette  plaie 
n'avait  pas  été  produite  par  pression. 

—  M.  Legros  a  reçu  du  Gabon  deux  poisons  différents  :  l'un  sert  à 
prendre  les  éléphants  ;  c'est  une  écorce  que  l'on  jette  dans  les  mares 
où  boivent  ces  animaux,  et  qui  produit  leur  engourdissement.  M.  Legros, 
avec  l'extrait  de  cette  écorce,  a  pu  aussi  endormir  des  animaux. 

Le  second  poison  se  trouve  sur  des  flèches;  il  s'appelle  Inné;  en- 
foncée dans  la  cuisse  d'un  chien,  une  flèche  l'a  tué  en  huit  minutes. 
Quand  on  place  ce  poison  sous  la  peau  d'une  grenouille,  on  voit  bien- 
tôt le  cœur  s'arrêter  en  systole, et  l'animal  continue  à  sauter;  pour 
M.  Legros,  la  cause  de  la  mort  qui  survient  bientôt  c'est  l'arrêt  du 
cœur. 

M.  Brown-Séquard  trouve  étonnant  que  le  poison  produise  des  cram- 
pes sur  le  cœur  et  n'agisse  pas  sur  les  autres  muscles.  L'explication 
de  l'arrêt  du  cœur  ne  pourrait  être  donnée,  dit  M.  Brown-Séquard, 
que  si  le  poison  produit  d'abord  des  mouvements  très-violents  du  cœur, 
car  on  sait  que  des  excitations  galvaniques  répétées  font  apparaître 
dans  le  cœur  la  rigidité  cadavérique  au  bout  de  huit  à  dix  minutes. 

M.  Leven  dit  qu'on  ne  connaît  pas  de  substance  toxique  qui  tue  par 
contracture  du  cœur. 

c.  R.  1870.  6 


82 

M.  Bert,  eu  examinant  les  deux  grenouilles  présentées  par  M.  Le- 
gros  à  l'appui  de  son  opinion,  voit  disparaître  très-vite  les  mauvements 
réflexes  et  les  mouvements  volontaires,  puis  les  mouvements  respira- 
toires s'arrêtent;  le  nerf  sciatique  perd  la  motricité  et  les  muscles  leur 
contractilité,  et  cependant  le  cœur  continue  à  battre;  ainsi  le  poison 
ne  paraît  pas  agir  primitivement  sur  le  cœur. 

M.  Legros  répond  que  les  grenouilles  ont  été  empoisonnées  inégale- 
ment par  une  môme  flèche,  et  qu'il  a  vu  chez  d'autres  animaux  le  cœur 
s'arrêter  définitivement.  Les  expériences  seront  répétées. 

M.  Brown-Séquard  a  vu  en  1858  que  la  piqûre  du  bulbe  rachidien 
au  voisinage  du  nœud  vital  peut  être  suivie  d'une  aff"ection  convulsive. 
Récemment,  M.  Brown-Séquard  a  vu  survenir  des  signes  d'épilepsie, 
chez  le  cochon  d'Inde,  douze  jours  après  la  lésion  dundes  cordons  pos- 
térieurs de  la  moelle  épinière,juste  au-dessus  de  Torigine  de  la  seconde 
paire  cervicale,  c'est-à-dire  au  milieu  de  la  partie  du  centre  nerveux 
donnant  origine  aux  nerfs  de  la  zone  épileptogène.  Le  fait  remarquable 
chez  cet  animal  est  que  la  peau  de  la  face,  de  même  que  celle  du 
cou  et  de  l'épaule  animée  par  la  troisième  et  la  quatrième  paire  cer- 
vicale possèdent  la  faculté  épileptogène.  L'irritation  du  cordon  posté- 
rieur s'est  transmise  au  siège  de  l'épilepsie,  qui,  chez  les  cobayes,  est 
situé  dans  la  moelle  épinière  près  du  bulbe,  et  de  là  s'est  transmise  à 
la  peau  de  la  face  et  du  cou  y  produisant  la  faculté  épileptogène. 
M.  Brown-Séquard  n'admet  pas,  avec  Nothnagel,  que  la  lésion  du  pont 
de  Varole  produise  l'épilepsie.  Quand  on  coupe  le  nerf  sciatique,  une 
irritation  est  transmise  vers  le  siège  central  de  l'épilepsie  et  de  là  une 
autre  irriiatton  est  envoyée  à  la  zone  épileptogène  où  elle  modifie  la 
nutrition. 

M.  Brown-Séquard  rappelle  les  faits  de  M.  Moreau  et  de  M.  Prompt, 
démontrant  que  la  ligature  de  certaines  artères  a  été  suivie  de  con- 
gestion des  viscères  ;  après  la  ligature  de  l'artère  splénique,  M.  Moreau 
a  vu  la  rate  se  congestionner.  M.  Prompt,  après  la  ligature  de  l'artère 
rénale,  a  observé  une  congestion  du  rein.  M,  Brown-Séquard  a  ob- 
servé une  congestion  du  foie  après  la  ligature  de  la  veine-porte; 
dans  ces  phénomènes,  M.  Brown-Séquard  fait  jouer  un  rôle  aux  nerfs 
vaso-moteurs  et  au  reflux  du  sang  par  les  veines.  Pour  expliquer 
l'élévation  de  température  dans  un  membre  après  la  ligature  de  l'ar- 
tère principale,  M.  Brown-Séquard  remarque  que  la  ligature  paralyse 
les  nerfs  vaso-moteurs  qui  se  distribuent  à  toutes  les  branches.  Si  au 
contraire  l'artère  est  oblitérée,  sans  que  les  nerfs  soient  atteints,  la 
congestion  et  l'élévation  de  la  température  n'ont  pas  lieu.  C'est  ce 
que  M.  Brown-Séquard  et  M.  Charcot  ont  observé  chez  un  malade  de 
M.  OUivier;  un  caillot  avait  oblitéré  l'artère  fémorale,  le  membre  pré- 


sentait  une    diminution  de   tempéiatiire,   ici    les  nerfs  vaso-moteurs 
étaient  restes  intacts. 

Si  l'on  pouvait  lier  une  artère  rénale  et  oblitérer  l'autre  par  un  bou- 
chon, il  est  probable,  dit  M.  Brown-Séquard  que  le  premier  rein  serait 
seul  congestionné. 

M.  VuLPiAN  croit  que  M.  Brown-Séquard  se  rattache  à  cette  opinion, 
qu'après  la  ligature  des  artères  le  sang  retourne  par  les  veines;  c'est 
ainsi  que  M.  Vulpian  a  expliqué  ce  fait  de  MM.  Prévost  et  Cotard, 
dans  lequel  une  portion  de  la  rate  s'est  congestionnée  immédiatement 
a  la  suite  d'une  embolie  par  l'artère;  M.  Vulpian  a  parlé  aussi  de  l'ir- 
ritation qui  se  fait  par  suite  de  l'anémie  locale,  et  qui  pourrait  être 
une  cause  d'appel  de  sang  et  une  cause  de  dilatation  des  vaisseaux  par 
action  réflexe. 

M.  Brown-Séquard  répond  que  les  faits  dont  il  a  parlé  sont  tout  à 
fait  différents  de  ceux  de  MM.  Prévost  et  Cotard,  dans  lesquels  il  ne 
s'agit  que  d'une  partie  d'un  viscère.  Quant  à  l'appel  du  sang,  qui  le  fait 
affluer  dans  les  parties  irritées,  il  est  incontestable,  et  c'est  en  grande 
partie  à  cause  de  cette  attraction  du  sang  qu'est  due  l'hyperémie  à 
l'entour  des  infarctus  viscéraux  dans  les  expériences  de  MM.  Prévost 
et  Cotard.  Dans  l'expérience  célèbre  de  M.  A.  Bernard  sur  les  glandes 
salivaires,  il  est  évident  que  les  échanges  entre  le  sang  et  les  tissus 
sont  activés  et  qu'il  y  a  une  attraction  du  sang  dans  les  tissus.  A  pro- 
pos du  rôle  important  que  M.  Brown-Séquard  fait  jouer  aux  nerfs  vaso- 
moteurs,  M.  Bert  rappelle  qu'il  a  enlevé  tous  les  nerfs  des  reins,  qu'il 
a  même  gratté  l'artère  et  qu'il  n'y  a  eu  aucune  altération  des  reins. 

M.  Brown-Séquard  a  constaté  le  même  fait,  et  les  animaux  ont  sur- 
vécu à  la  section  des  nerfs  des  reins;  mais  la  section  des  nerfs  n'est 
pas  la  même  opération  que  la  ligature  de  l'artère.  M.  Brown-Séquard 
a  toujours  observé  une  légère  congestion  du  rein  à  la  suite  de  la  sec- 
lion  des  nerfs.  M.  Ranvier  a  répété  aussi  l'expérience  de  Mûller  et  n'a 
point  obtenu  la  destruction  du  rein  à  la  suite  de  la  section  des  nerfs. 

M.  Legros  dit  que  dans  les  faits  de  ligature  des  artères  on  ne  tient 
pas  assez  compte  des  circulations  collatérales;  quand  on  lie  la  veine- 
porte,  le  sang  arrive  par  l'artère  hépatique. 

Pour  M.  Brown-Séquard,  il  y  a  deux  causes  d'augmentation  du  sang 
après  la  ligature  des  artères,  il  y  a  reflux  du  sang  par  les  veines  et 
afflux  de  ce  liquide  par  les  voies  collatérales. 

M.  MuRON  mentionne  l'observation  d'un  cas  de  suppuration  du  li- 
quide céphalo-rachidien  chez  un  individu  atteint  de  rétention  d'urine. 


84 
Séance  du  21  mai. 

M.  Legros,  à  l'occasion  du  procès-verbal  do  la  dernière  séance,  an- 
nonce qu'il  a  repris  ses  expériences  avec  le  poison  des  flèches  du 
Gabon,  et  qu'il  a  obtenu  constamment  l'arrêt  du  cœur  en  systole; 
M.  Legros  montre  ce  résultat  à  la  Société. 

M.  Bert  a  essayé  le  même  poison  sur  deux  chats;  le  premier  est 
mort  au  bout  de  vingt  minutes;  le  cœur  était  arrêté  en  contraction 
complète;  les  nerfs  et  les  muscles  possédaient  encore  leurs  propriétés. 
Chez  le  second  animal,  la  mort  survint  au  bout  d'une  heure;  à  l'ouver- 
ture de  la  poitrine,  on  vit  les  ventricules  arrêtés,  le  droit  en  diastole, 
le  gauche  en  demi-systole;  très-rapidement  les  ventricules  devinrent 
contractés  et  rigides.  Les  faits  observés  par  M.  Bert  à  la  dernière 
séance  sur  les  deux  grenouilles  présentées  par  M.  Legros  étaient  donc 
exceptionnels. 

M.  Legbos.  m.  Bert  considère  la  systole  du  cœur  comme  un  phéno- 
mène de  rigidité  cadavérique,  mais  je  persiste  à  croire  que  c'est  un 
phénomène  actif,  et  que  le  cœur  s'arrête  en  systole. 

Relativement  à  la  rapidité  de  l'apparition  de  la  rigidité  cadavérique, 
M.  Carville  parle  d'une  expérience  qui  consiste  à  faire  tourner  rapi- 
dement un  lapin  tenu  par  les  mem.bres  postérieurs  ;  la  mort  survient  au 
bout  de  cinq  minutes  ;  il  y  a  des  hémorrhagies  cérébrales,  et  la  rigidité 
cadavérique  se  produit  dans  les  membres  postérieurs  au  bout  de  trois 
minutes. 

—  M.  Hayem  communique  le  résultat  de  ses  études  sur  les  premières 
phases  des  abcès  métastatiques  du  foie. 

Ces  recherches  ont  été  faites  sur  des  foies  d'individus  morts  d'infec- 
tion ou  fièvre  purulente  à  une  période  plus  ou  moins  avancée,  et  pré- 
sentant presque  toujours  des  abcès  métastatiques  dans  divers  organes. 
Parmi  les  pièces  que  M.  Hayem  a  examinées,  les  unes  provenaient  du 
service  de  M.  Yerneuil,  les  autres  lui  ont  été  communiquées  par 
M.  Trersier,  interne  dans  le  service  de  M.  Guérin  à  l'hôpital  Saint- 
Louis. 

Les  lésions  métastatiques  débutent  par  des  taches  pâles,  d'un  blanc 
grisâtre  ou  jaunâtre.  Ces  taches,  constituées  par  des  acini  décolorés, 
dispersées  çà  et  là  dans  un  tissu  plus  ou  moins  congestionné,  sont  en 
général  groupées  autour  des  ramifications  secondaires  de  la  veine- 
porte,  dans  lesquelles  on  aperçoit  à  l'œil  nu  ou  avec  la  loupe  des  coa- 
gulations sanguines.  Dans  quelques  cas  les  foyers  anémiques  occupent 
une  étendue  assez  considérable,  et  roblitération  porte  sur  des  bran- 


85 
ches  veineuses  de  moyen  calibre.  Ils  forment  alors  des  taches  d'un 
blanc  jaunâtre  en  nombre  variable,  occupant  souvent  la  surface  de 
l'organe  et  présentant  l'aspect  d'infarctus  décolorés.  Leur  forme  est 
irrégulière,  feslonnée  sur  les  bords,  mais  toujours  plus  large  à  la  péri- 
phérie que  dans  la  profondeur  de  l'organe. 

Autour  des  acini  décolorés  ou  de  ces  infarctus,  il  y  a  quelquefois 
un  peu  d'extravasation  sanguine;  mais  le  plus  souvent  le  tissu  hépati- 
que paraît  tout  à  fait  normal,  et  l'oi^  passe  brusquement  de  la  partie 
saine  à  celle  qui  est  malade. 

Dans  un  cas,  le  foie  contenait  une  quantité  innombrable  de  petits 
foyers  d'un  blanc  jaunâtre  ressemblant  à  de  très-fines  granulations  mi- 
liaires,  mais  ne  faisant  aucune  saillie  à  la  surface  des  coupes. 

Les  altérations  microscopiques  étaient  les  mêmes  dans  tous  les  faits; 
elles  peuvent  se  résumer  ainsi  : 

Tous  les  vaisseaux  capillaires  des  parties  décolorées  sont  remplis  de 
globules  blancs  du  sang,  de  telle  sorte  que,  dans  l'épaisseur  des  aci- 
ni, les  trabécules  de  cellules  hépatiques  sont  aussi  nettement  séparées 
que  dans  un  foie  parfaitement  injecté,  tant  sont  nombreux  les  globules 
blancs  pressés  entre  ces  cellules.  En  même  temps  on  trouve  dans  les 
veines  qui  accompagnent  les  ramifications  de  la  capsule  de  Glisson 
(extra-lobulaires),  des  caillots  composés  surtout  de  fibrine  et  de  quel- 
ques globules  blancs  et  rouges. 

Les  veines  sus-hépatiques  (intra-lobulaires)  sont  libres  ou  bien  rem- 
plies également  de  sang  coagulé;  quelques-unes  de  globules  blancs.  Il 
existe  aussi  dans  certains  points,  autour  des  petits  vaisseaux  et  entre 
les  éléments  de  la  capsule  de  Glisson,  une  infiltration  de  leucocytes. 
Les  gros  caillots  visibles  à  l'œil  nu,  occupant  de  grosses  branches  vei- 
neuses, siègent  presque  tous  dans  les  rameaux  de  la  veine-porte  ; 
quelquefois  cependant  dans  les  veines  sus-hépatiques;  mais  M.  Hayem 
n'en  a  pas  encore  vu  dans  les  artères. 

Lorsque  les  altérations  sont  plus  avancées,  on  trouve  alors,  surtout 
à  la  périphérie  des  lobules,  des  amas  plus  ou  moins  considérables  de 
leucocytes  qui  remplissent  complètement  le  tissu  du  foie.  Ces  amas 
constituent  d'abord  une  sorte  d'infiltration  purulente,  au  niveau  de  la- 
quelle les  cellules  disparaissent  peu  à  peu  par  atrophie  granuleuse; 
plus  tard  on  voit  apparaître  dans  les  points  qui  répondent  aux  petits 
abcès  miliaires  visibles  à  l'œil  nu,  des  espaces  parfaitement  réguliers, 
arrondis,  composés  uniquement  de  leucocytes  pressés  les  uns  contre 
les  autres.  Les  cellules  hépatiques  qui  sont  directement  en  rapport 
avec  ces  foyers  sont  atrophiées  ;  mais  dans  une  étendue  qui  ne  dépasse 
pas  l'épaisseur  d'une  à  deux  cellules.  Les  autres  éléments  du  foie  sont 
parfaitement  sains,  de  sorte  que  les  abcès  paraissent  être  creusés 


86 

comme  à  1  emporte-pièce,  au  milieu  d'un  tissu  tout  à  fait  normal.  Sur 
des  coupes  fines,  après  le  durcissement  du  foie  dans  l'alcool,  il  est  fa- 
cile de  remarquer  que  les  abcès  proviennent  de  l'accumulation,  à  la 
périphérie  des  lobules,  des  leucocytes  qui  sont  passés  en  si  grand 
nombre  dans  les  réseaux  capillaires,  et  qui,  à  mesure  qu'ils  s'extrava- 
senl,  forment  des  amas  d'abord  diffus,  puis  réguliers,  au  niveau  des- 
quels les  cellules  du  foie  sont  complètement  détruites. 

Pendant  que  M.  Hayem  faisait  «es  études,  M.  Vulpian  a  recueilli  de 
son  côté,  à  la  Pitié,  plusieurs  foies  d'individus  morts  d'infection  puru- 
lente, et  il  y  a  trouvé  des  altérations  complètement  semblables,  et  sur- 
tout des  foyers  anémiques  dus  à  des  coagulations  du  sang  dans  les  vei- 
nes, et  au  sein  desquels  les  trabécules  cellulaires  étaient  séparées  par 
des  traînées  de  leucocytes. 

Ces  résultats  anatomiques  paraissent  donc  toujours  être  les  mêm(.'s, 
toutes  les  fois  que  l'abcès  métastatique  n'est  pas  encore  complètement 
constitué.  Il  serait  facile  de  faire  voir  combien  ils  viennent  à  rencon- 
tre des  théories  les  plus  récentes  émises  sur  le  mode  de  formation  des 
abcès  métastaliques.  Mais  sans  entrer  pour  le  moment  dans  la  discus- 
sion de  ces  théories,  M.  Hayem  insiste  sur  la  nouveauté  des  détails 
anatomiques  que  révèlent  ces  faits,  et  particulièrement  sur  la  coagula- 
tion précoce  du  sang  dans  les  veines,  et,  d'autre  part,  l'accumulation 
des  globules  blancs  dans  les  capillaires  et  entre  les  trabécules.  Ce  der- 
nier phénomène  est  en  rapport  avec  la  théorie  de  la  suppuration  par 
émigration  des  globules  blancs. 

M.  Hayem,  en  continuant  cette  étude  sur  le  foie  et  d'autres  organes, 
espère  pouvoir  indiquer  plus  tard  le  point  de  départ  exact  de  ces  lé- 
sions. 

—  M.  Brown-Séquard  présente  sept  cochons  d'Inde  qui  sont  morts  très- 
rapidement  à  la  suite  de  lésions  de  la  base  de  l'encéphale;  chez  tous 
ces  animaux  on  trouve  des  hémorrhagies  des  poumons,  et  chez  quel- 
ques-uns de  l'emphysème.  Cependant,  chez  six  d'entre  eux,  les  mou- 
vements volontaires  et  les  mouvements  de  la  respiration  se  sont  arrê- 
tés immédiatement. 

M.  Charcot  a  observé  dans  certains  cas  d'hémorrhagie  cérébrale  des 
ecchymoses  à  la  face  interne  du  cœur  et  dans  l'estomac. 

M.  Bro\v\-Séquard  ne  croit  pas  qu'une  paralysie  vasculaire  puisse 
produire  des  hémorrhagies. 

M.  LiouviLLE,  chez  des  malades  morts  à  la  suite  d'attaques  violentes 
d  épilepsie,  a  constaté  des  ecchymoses  et  des  hémorrhagies  dans  les 
poumons  et  le  cœur  ;  dans  certains  cas  de  variole  grave,  IM.  Liouville  a 
vu  des  hémorrhagies  dans  le  corps  thyroïde. 


87 

M.  BrowN'Séquard  trouve  les  faits  relatifs  à  l'épilepsie  différents  de 
ceux  qu'il  a  observés;  car  les  convulsions,  l'asphyxie,  la  compres- 
sion des  poumons  peuvent  servir  à  expliquer  les  lésions  observées  à  la 
suite  de  l'épilepsie. 

M.  Ranvier  rappelle  que  Troja,  à  la  suite  de  l'asphyxie  par  le  charbon  , 
a  trouvé  des  ecchymoses  et  des  perforations  du  poumon;  lorsqu'on 
produit  lentement  l'asphyxie  chez  les  animaux,  on  obtient  ces  ecchy- 
moses et  ces  perforations  dont  le  mécanisme  est  encore  inconnu. 

M.  Brown-Séquard  fait  remarquer  que  chez  les  animaux  qu'il  montre 
et  qui  succombent  sans  convulsions  à  la  suite  de  lésion  de  la  protu- 
bérance ou  d'ablation  du  cervelet,  la  rigidité  cadavérique  n'existe  pas 
encore,  bien  que  leur  mort  date  déjà  de  plusieurs  heures. 

M.  Brown-Séquard,  en  vue  de  produire  l'épilepsie,  a  pratiqué  chez 
des  cochons  d'Inde  des  ligatures  des  membres  inférieurs  qui  ont  été 
suivies  de  gangrène  ;  ceux  qui  ont  perdu  entièrement  le  pied  présentent 
des  attaques  convulsives  comme  après  la  section  du  sciatique.  Ceux 
chez  lesquels  seulement  un  ou  deux  doigts  ont  été  enlevés  ne  sont  pas 
devenus  épileptiques. 

Le  même  expérimentateur  annonce  que  si,  chez  des  cochons  d'Inde 
épileptiques  par  section  du  nerf  sciatique,  on  passe  la  pointe  d'une 
aiguille  sur  la  peau  du  cou,  dans  la  zone  épileptogène,  les  animaux 
secouent  brusquement  la  tête  à  droite  et  à  gauche.  Rien  de  pareil  ne 
s'observe  chez  un  animal  sain. 

M.  Brown-Séquard,  après  avoir  rappelé  qu'il  a  démontré  que  le  phé- 
nomène singulier  qu'on  appelle  douleur  ou  constriction  en  ceinture 
peut  exister  non-seulement  autour  du  tronc,  mais  encore  aux  mem- 
bres, et  même  aux  pieds  et  aux  orteils,  indiquant  le  siège  d'une  lésion 
de  la  moelle  épinière  ou  de  ses  méninges,  communique  le  fait  suivant  : 
Chez  une  dame  non  hystérique,  une  aiguille  à  acupuncture  fut  enfoncée 
au  niveau  de  l'extrémité  supérieure  du  tibia;  deux  heures  après,  une 
douleur  en  ceinture  se  produisit  autour  du  membre  et  persista  tant  que 
l'aiguille  ne  fut  pas  enlevée  (c'est-à-dire  pendant  plusieurs  heures). 

Quelques  jours  après,  l'application  d'une  aiguille  à  acupuncture  fut 
suivie  d'une  douleur  de  constriction  circulaire  (en  ceinture)  au-dessus 
des  malléoles;  ce  fait  que  l'irritation  d'un  seul  ramuscule  nerveux 
éveille  une  douleur  aussi  étendue,  renverse  les  diverses  théories  émises 
pour  expliquer  les  sensations  douloureuses  en  ceinture. 

— M.  Rabuteau  présente  un  autre  poison  végétal  du  Gabon,  rapporté 
par  M.  Peyri;  l'extrait  des  racines  agit  comme  la  strychnine  et  tue  une 
grenouille  en  dix  minutes. 

M.  RdbuLeau  regarda  l'alcool  comme  nn  excellent  diurétique.   Si  à 


88 

sept  heures  du  matin  on  prend  100  grammes  d'eau,  de  sept  heures  à  dix 
heures  on  rend  120  grammes  d'urine.  Si  l'on  prend  100  grammes  d'eau- 
de-vie,  on  rend  dans  le  même  laps  de  temps  600  grammes  d'urine. 

— M.LiouviLLEa  observé  un  fait  de  méningite  cérébro-spinale  tubercu- 
leuse chez  un  homme  de  58  ans.  Des  adhérences  se  sont  établies  entre 
les  deux  faces  de  l'arachnoïde,  et  dans  ces  adhérences  se  trouvent  des 
tubercules,  quoique  le  siège  le  plus  fréquent  soit  dans  le  tissu  sous- 
arachnoïdien. 

M.  Charcot  fait  remarquer  que  dans  un  dernier  numéro  du  Médical 
Times  (12  février  1870),  on  trouve,  publié  par  M.  le  docteur  Moxon,  un 
cas  de  tuberculisation  des  méninges  spinales,  en  même  temps  que  des 
méninges  cérébrales. 

M.  Hayem  ne  croit  pas,  comme  M.  Liouville,  que  la  maladie  s'étende 
du  cerveau  à  la  moelle,  mais  il  pense  qu'il  y  a  plutôt  coexistence  des 
deux  affections. 

M.  Liouville  dit  qu'il  peut  y  avoir  extension  ou  coexistence,  et  que 
pour  le  moment,  il  n'affirme  rien  à  ce  sujet. 

M.  Brown-Séquard  fait  remarquer  qu'il  y  a  deux  extensions  :  l'une 
par  contiguïté,  l'autre  faite  à  distance  par  le  système  nerveux.  A  la 
suite  de  certaines  plaies,  on  a  signalé  de  la  névrite  siégeant  en  des 
points  différents  du  système  nerveux. 

M.  Hayem  admet  la  propagation  par  contiguïté  dans  les  maladies  in- 
flammatoires, mais  dans  une  maladie  générale  qai  se  manifeste  par  des 
lésions  dans  la  moelle,  dans  les  poumons  et  dans  différents  viscères, 
la  localisation  sur  la  moelle  est  reliée  au  fait  de  la  tuberculose  géné- 
ralisée. 

Pour  M.  Brown-Séquard,  là  où  se  trouve  un  foyer  d'inflammation,  là 
se  développeront  les  tubercules;  des  dépôts  de  tubercules  peuvent  se 
former  à  la  suite  d'une  influence  nerveuse,  parce  que  cette  influence 
peut  causer  des  inflammations. 

Vaisseaux  capillaires  dans  la  tunique  musculaire  des  veines  ; 

par  M.  Muron. 

La  présence  des  vaisseaux  capillaires  dans  la  tunique  externe  des 
vaisseaux  a  été  établie  depuis  bien  longtemps,  et  personne  ne  s'avise- 
serait  de  les  nier  dans  celte  tunique.  Il  n'en  est  plus  de  môme  pour  la 
tunique  moyenne  des  vaisseaux,  qui  est  constituée  par  des  faisceaux 
de  fibres  musculaires  et  des  lames  élastiques.  Si  Kœlliker  croit  pou- 
voir avancer  que  les  auteurs  admettent  des  vaisseaux  capillaires  dans 
a  tunique  moyenne,  il  est  loin,  quanta  lui,  de  pousser  aussi  loin  l'af- 


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firmation.  Son  opinion  se  résume  dans  le  doute  suivant  :  s'il  y  a  des 
vaso-vasorum  dans  la  tunique  rausculeuse  des  vaisseaux,  ils  n'exis- 
tent qu'à  la  périphérie  de  cette  tunique,  et  en  tout  cas  ils  ne  dépas- 
sent pas  sa  partie  moyenne. 

Gimbert  les  a  cherchés  vainement,  dit-il  ;  ses  essais  ont  toujours  été 
infructueux.  Il  a  tout  fait  pour  les  voir,  injections,  variations  dans  les 
moyens  de  préparation.  Aussi  n'hésite-t-il  pas  à  nier  leur  présence. 

Il  est  vrai  que  les  injections  qui  rendent  tant  de  services  pour  arri- 
ver à  la  structure  des  tissus  ne  peuvent  être  utiles  pour  des  tissus 
aussi  élastiques.  Du  moment  où  un  liquide  vient  à  distendre  ces  lames 
élastiques,  la  réaction  se  manifeste  tout  aussitôt,  et  le  fait  refluer  par 
action  mécanique.  Une  injection,  faite  sous  une  certaine  pression,  et 
longtemps  prolongée,  pourrait  certainement  triompher  de  ces  résis- 
tances; mais  ces  conditions  sont  toujours  difTiciles  à  réaliser,  et  c'est 
pour  cela  que  tous  les  histologistes  se  trouvent  à  peu  près  d'accord 
sur  ce  point,  que  les  vaisseaux  capillaires  ne  se  trouvent  pas  dans  la 
tunique  musculo-élastique  des  vaisseaux. 

Je  m'arrête  à  une  opinion  directement  opposée,  et  je  dis  :  Il  existe 
des  vaisseaux  capillaires  dans  la  tunique  musculo-élastique  des  veines, 
et  de  plus,  ces  vaisseaux  y  sont  nombreux. 

Le  procédé  dont  il  faut  se  servir  pour  leur  démonstration  est  des 
plus  simples.  Il  faut  profiter  des  hasards  que  nous  fournit  la  clinique. 
Nous  avons  pris  un  tronçon  de  veine  enflammée  depuis  trente-six 
heures  seulement.  Cette  veine  se  faisait  remarquer  par  une  extrême 
vascularisation  dans  ses  parties  extérieures,  et  probablement  aussi 
dans  ses  parties  intérieures.  Nous  avons  placé  ce  tronçon  immédiate- 
ment dans  du  liquide  de  Miiller,  et  achevé  son  durcissement  dans  l'alcool . 

Les  conditions  que  nous  demandions  tout  à  l'henre  pour  espérer  la 
pénétration  de  l'injection  se  trouvaient  réalisées  dans  leur  complet  : 
nous  avions  une  injection  naturelle.  Rien  de  plus  facile  dès  lors  que  de 
démontrer  la  présence  des  capillaires. 

A  un  faible  grossissement  (60  diamètres),  on  voit  d'abord  un  grand 
nombre  de  vaisseaux  gorgés  de  sang.  Ces  vaisseaux  se  montrent  sous 
deux  aspects.  Quelques-uns  se  voient  dans  le  sens  longitudinal,  et  se 
bifurquent.  Pour  le  plus  grand  nombre,  on  ne  voit  que  la  section  trans- 
versale. 

Il  ne  faudrait  pas  croire  qu'ils  soient  isolés  à  une  certaine  distance 
les  uns  des  autres;  ils  sont,  au  contraire,  nombreux,  et  en  quantité 
aussi  grande  que  dans  la  tunique  externe. 

On  constate  leur  existence,  non-seulement  vers  les  limites  externes 
de  cette  tunique  moyenne  ;  on  les  voit  dans  toute  son  épaisseur,  et 
aussi  jusqu'à  la  tunique  interne. 


Ce  qui  établit  une  différence  entre  les  vaisseaux  de  la  tunique  ex- 
terne et  ceux  de  la  tunique  moyenne,  c'est  leur  structure.  Tandis 
qu'on  voit  dans  le  première  quelques  vaisseaux  entourés  de  fibres  mus- 
culaires, on  ne  distingue  dans  la  seconde  que  des  vaisseaux  capillaires  à 
proprement  parler.  Une  membrane  amorphe,  parsemée  çà  et  là  de 
noyaux,  les  constitue  tout  entiers.  Peut-être  y  a-t-il  pour  les  vaisseaux 
plus  volumineux  une  substance  connective  striée,  qui  double  la  mem- 
brane amorphe  ;  mais  nulle  part  nous  n'avons  vu  de  fibres  musculaires 
les  envelopper. 

Us  siègent  principalement  entre  les  faisceaux  de  fibres  musculaires, 
et  ont  une  direction  longitudinale,  dans  le  sens  môme  de  l'axe  du  vais- 
seau, reliés  entre  eux  par  quelques  branches  horizontales.  Le  réseau 
qu'ils  forment  ressemble  en  tous  points  au  réseau  vasculaire  du  tissu 
osseux. 

Quant  à  leur  diamètre,  nous  ne  donnerons  pas  des  limites  absolu- 
ment précises.  Ces  vaisseaux  distendus  par  le  sang  avaient  un  volume 
un  peu  exagéré.  Tels  qu'ils  se  présentaient,  ils  offraient  un  diamètre 
variable  entre  0°"°,015  et  0°"",030.  Mais  nous  le  répétons,  ce  volume 
nous  paraît  un  peu  trop  considérable. 

Malgré  le  soin  avec  lequel  nous  les  avons  recherchés  dans  la  tunique 
interne,  nous  n'avons  pas  réussi  à  les  voir.  Ce  n'est  pas  à  dire  qu'ils 
n'existent  pas.  En  variant  les  modes  de  préparation,  peut-être  arrive- 
ra-t-on  à  les  démontrer.  Toutefois  nous  ne  croyons  pas  leur  pré- 
sence aussi  indispensable  que  dans  la  tunique  moyenne.  Baignée  con- 
tinuellement par  du  sang,  cette  tunique  interne  peut  aspirer  faci- 
lement par  endosmose  tous  les  matériaux  nécessaires  à  sa  nutrition, 
tandis  que  pour  la  tunique  moyenne,  la  partie  la  plus  importante  de 
tout  le  vaisseau,  il  était  absolument  indispensable  que  des  moyens  de 
réparation  existassent.  Sans  cesse  en  action  par  son  élasticité  et  par 
sa  contractilité,  cette  tunique  devait  posséder  des  vaisseaux  pour  opé- 
rer ces  échanges  moléculaires.  L'anatomie  vient  donc  de  démontrer 
encore  une  fois  ce  que  l'induction  physiologique  pouvait  faire  pres- 
sentir. 

Séance  du  28  mai. 

M.  BROWit-SÉQUARD,  à  loccasion  du  procès-verbal  de  la  dernière 
séance,  annonce  que  les  trois  cochons  d'Inde  qu'il  a  soumis  à  l'ampu- 
tation des  membres  inférieurs  sont  devenus  complètement  épilepti- 
ques.  Relativement  aux  sept  cochons  d'Inde  qui  ont  succombé  à  la 
suite  de  lésions  des  centres  nerveux,  M.  Brown-Séquard  fait  remar- 


91 

quer  qu'il  importe,  en  répétant  des  expériences  de  cette  espèce,  de  se 
mettre  à  l'abri  d'une  cause  d'erreur  :  c'est  que  les  poumons  des  co- 
bayes étant  très-délicats,  des  pressions  mêmes  assez  légères  faites  sur 
le  thorax  peuvent  y  produire  des  ecchymoses. 

— M.  LiocviLLE,à  propos  du  procès-verbal,  présente  une  pièce  offrant 
une  hémorrhagie  considérable  du  corps  thyroïde  survenue  chez  un 
varioleux,  dans  un  cas  de  variole  hémorrhagique. 

M.  Liouville  montre  de  plus  une  série  de  corps  thyroïdes,  recueillis 
également  chez  des  varioleux  (hommes  et  femmes),  qui  ont  succombé 
assez  rapidement,  et  dans  lesquels  il  fait  remarquer  des  congestions, 
une  hyperémie  notable,  une  arborisation  très-considérable  de  vais- 
seaux gorgés  de  sang,  et  parfois  de  petites  ecchymoses  et  des  hémor- 
rhagies  avec  infiltration  hématique. 

Or,  dans  ces  cas,  les  malades  n'ont  pas  paru  avoir  succombé  à  ce 
qu'on  appelle  la  forme  hémorrhagique  de  la  variole.  Toutefois,  il  y  avait 
le  plus  souvent  des  ulcérations,  des  pustules,  de  véritables  altérations 
varioliques  des  conduits  aériens  (épiglotte,  larynx,  trachée  et  bron- 
ches). 

Un  premier  examen  micrographique  a  montré  à  M.  Liouville,  dans 
tous  les  cas,  des  modifications  pathologiques  dans  la  glande  thyroïde 
elle-même,  modifications  qui  indiquent  une  véritable  thyroïdjte  aiguë. 

M.  Ranvier  dit  qu'il  ne  faudrait  pas  attribuer  cette  hémorrhagie  à  des 
symptômes  asphyxiques,  car  elle  peut  être  déterminée  par  une  lésion 
du  larynx. 

—  M.  Brown-Séquard  montre  à  la  Société  un  chien  qui,  après  la  sec- 
lion  des  cordons  postérieurs  de  la  moelle  devient  épileptique.  Chez 
l'homme  l'épilepsie  a  lieu  très-souvent  à  la  suite  de  lésions  du  cerveau 
ou  plutôt  de  ses  membranes.  Chez  un  cochon  d'Inde,  après  la  section 
dutuberculequadrijumeauantérieuretdu  pédoncule  cérébral, M. Brown- 
Séquard  observa  le  mouvement  de  rotation  en  manège  des  mouve- 
ments convulsifs  irréguliers,  et  en  outre  des  attaques  d'épilepsie  fran- 
ches. Seulement,  il  faut  remarquer  que  la  zone  épileptogène  était  si- 
tuée à  gauche,  c'est-à-dire  du  côté  opposé  à  la  lésion  cérébrale,  tandis 
que  lorsqu'on  coupe  une  moitié  latérale  de  la  moelle  ou  le  nerf  scia- 
tique,  la  zone  épileptogène  est  située  du  même  côté. 

M.  Brown-Séquard,  chez  doux  malades  atteints  d'épilepsie,  a  obtenu 
un  commencement  d'attaque  convulsive,  par  irritation  de  la  zone  épi- 
leptogène avec  l'aiguille  à  acupuncture. 


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CONCLUSIONS  d'un  TRAVAIL  SUR  LE  SULFOVI.NATE  DE  SOUDE; 

par  le  docteur  Rabuteau. 

Au  mois  de  décembre  dernier,  j'ai  fait  connaître  à  la  Société  les  ré- 
sultats de  quelques  recherches  que  j'avais  faites  sur  les  sulfovinates 
et,  en  particulier,  sur  le  sulfovinate  de  soude.  Depuis,  j'ai  multiplié 
mes  expériences,  j'ai  administré  moi-même  et  fait  administrer  ce  nou- 
veau purgatif  dans  divers  hôpitaux.  Bien  que  les  observations  soient 
déjà  assez  nombreuses  pour  permettre  de  poser  des  conclusions,  je 
n'insisterai  pour  le  moment  que  sur  les  points  suivants  : 

1°  Le  sulfovinate  de  soude  purge  à  des  doses  relativement  faibles;  la 
dose  de  25  grammes  est  toujours  suffisante;  10  grammes  suffisent  chez 
les  enfants  et  parfois  chez  les  adultes. 

2°  Le  nombre  des  selles  varie  suivant  la  quantité  ingérée.  A  la  dose 
de  20  grammes  dans  trois  verres  d'eau,  il  produit  en  gênerai  quatre  à 
cinq  selles  et  cinq  à  huit  à  la  dose  de  25  grammes.  Les  effets  commen- 
cent à  se  manifester  en  général  au  bout  d'une  heure. 

3°  Le  sulfovinate  de  soude  est  le  plus  doux  des  purgatifs  salins.  Il  ne 
produit  aucune  fatigue,  aucune  douleur;  il  fait  môme  disparaître  les 
coliques  qui  pouvaient  exister  avant  son  administration,  par  exemple 
dans  certaines  diarrhées  qu'il  peut  arrêter  rapidement. 

4°  Ce  médicament  ne  produisant  aucune  douleur,  aucune  contraction 
intestinale  anormale,  agissant  en  un  mot  comme  type  des  purgatifs 
dyalitiques,  peut  être  prescrit  même  pendant  la  menstruation  et  pen- 
dant la  grossesse. 

5°  A  cause  de  sa  saveur  très-faible  d'abord,  puis  sucrée,  il  est  pris 
sans  répugnance  par  les  personnes  les  plus  difficiles  et  par  les  en- 
fants. 

6°  Le  sulfovinate  de  soude  doit  être  préféré  au  citrate  de  magnésie, 
attendu  qu'il  présente  les  avantages  de  ce  dernier  sel  et  non  ses  incon- 
vénients. D'abord  il  est  plus  agréable  à  prendre  que  le  citrate  de  ma- 
gnésie, lorsqu'il  est  dissous  dans  Teau  de  seltz;  en  second  lieu,  il  ne 
peut  déterminer  la  formation  d'aucun  calcul.  On  sait  au  contraire  qu'il 
est  dangereux  de  recourir  trop  longtemps  à  l'usage  des  sels  magné- 
siens, et  aucun  médecin  judicieux  ne  prescrira  ces  sels,  même  le  ci- 
trate, aux  vieillards  et  surtout  à  ceux  qui  sont  atteints  d'un  catarrhe 
de  la  vessie,  afin  de  ne  pas  déterminer  la  formation  de  calculs  de  phos- 
phate ammoniaco-magnésien. 

M.  Charcot  par  l'emploi  du  carbonate  de  soude  et  du  carbonate  de 
potasse  à  haute  dose,  dans  le  rhumatisme  articulaire  aigu,  a  obtenu  la 
diminution  de  la  température,  et  à  la  dose  de  30  grammes  par  jour, 
M.  Charcot  n'a  observé  aucun  symptôme  hémorrhagique. 


93 

—  M.  Waller,  membre  correspondant  de  la  Société,  qui  assiste  à  la 
séance,  communique  des  observations  sur  la  compression  du  vago- 
sympathique  au  cou,  chez  l'homme^  compression  faite  dans  un  but  thé- 
rapeutique. Dès  1846,  M.  Waller  a  proposé  l'emploi  de  l'irritation  mé- 
canique des  nerfs  comme  moyen  de  diagnostic  des  maladies  du  système 
nerveux;  par  exemple,  l'irritation  du  nerf  cubital  au  coude  produit 
des  phénomènes  moteurs  et  de  sensibilité,  et  cette  sensibilité  peut  va- 
rier dans  les  limites  étendues  que  parfois  la  compression  de  ce  nerf 
peut  amener  une  syncope. 

En  1849,  M.  Waller  a  publié  des  fats  sur  l'irritation  de  l'œil,  et  a 
démontré  que  la  production  des  phosphènes  peut  servir  à  diagnosti- 
quer des  maladies  de  la  rétine  et  du  nerf  optique. 

Les  opérations  de  M.  Waller  sur  le  vago-sympathique  remontent  à 
l'année  1861;  la  compression  de  ce  nerf  produit  des  effets  que  l'on 
rapportait  à  tort  à  la  compression  de  la  carotide. 

La  compression  de  ce  nerf,  dit  M.  Waller,  nous  fournit  un  moyen 
excellent  pour  arrêter  les  convulsions  hystériques. 

A  la  suite  d'une  compression  faite  sur  lui-même,  dans  la  région  cer- 
vicale, M.  Waller  a  constaté  une  diminution  d'anxiété  précordiale; 
une  sensation  de  nausée,  qui  peut  aller  au  vomissement.  La  pupille  sou- 
vent est  dilatée  complètement;  dans  certains  cas  on  observa  du  côté 
comprimé  une  diminution  de  température  de  1%5  à  2"  centigrades  (par 
irritation  des  nerfs  vaso-moteurs). 

Chez  des  lapins  dont  on  a  lié  les  quatre  artères  de  la  tête,  sans  pro- 
duire d'accidents,  si  Ion  galvanise  le  sympathique,  on  obtient  immé- 
diatement les  convulsions  par  anémie. 

Ce  qui  démontre  que  la  compression  agit  bien  sur  le  nerf  vago-sym- 
pathique, c'est  qu'au  bout  d'une  minute,  en  voit  le  rhythme  respira- 
toire changer  d'allure,  on  observe  des  inspirations  plus  longues  et  ra- 
lenties; on  observe  quelquefois  des  phénomènes  de  collapsus  nerveux 
ou  de  surélévation  comme  ceux  que  M.  Bert  a  observés.  Des  phéno- 
mènes analogues  ont  déjà  été  décrits,  par  Aristote,  qui,  après  la  com- 
pression des  veines  du  cou,  a  vu  l'homme  fermer  les  yeux  et  tomber 
insensible  comme  s'il  était  étranglé.  Dans  plusieurs  cas,  M.  Waller  a 
vu  la  compression  déterminer  la  syncope. 

Dans  un  cas  d'hémicranie  intermittente  rebelle  contre  laquelle  tout 
avait  échoué,  la  compression  du  vago-sympathique  amena  une  guérison 
définitive. 

M.  Brown-Séquahd,  au  nom  de  la  Société,  remercie  M.  Waller  de  sa 
communication  ;  M.  Brown-Séquard  est  d'avis  qu'il  est  très-utile  d'in- 
troduire dans  la  thérapeutique  des  procédés  simples;  mais  chez  les 
hystériques  qui  sont  exposées  à  la  syncope,  la  compression  pourrait 


94 

être  dangereuse.  M.  Brown-Séquard,  dans  un  cas  de  migraine  (chez  un 
de  nos  plus  distingués  collègues)  a  essayé  de  galvaniser  le  sympathique 
au  cou,  sans  galvaniser  le  vague;  au  bout  de  quelques  secondes,  le  pa- 
tient tomba  sidéré  et  fut  quelque  temps  à  revenir  de  sa  syncope.  La 
compression  peut  être  plus  facilement  graduée  que  la  galvanisation, 
etje  crois,  dit  M.  Brown-Séquard,  que  la  méthode  de  compression  des 
nerfs ,  due  à  M.  Waller,  rendra  de  grands  services  à  la  thérapeu- 
tique. 

—  M.  JoFFROY  fait  une  communication  relative  au  tétanos.  Dans  un 
cas  de  tétanos  traumatique,  suivi  de  mort  au  bout  de  quatre  jours,  la 
moelle  durcie  dans  l'acide  chromique  a  présenté,  au  niveau  du  bulbe, 
une  congestion,  et  même  une  rupture  des  vaisseaux  avec  sortie  des 
globules  rouges. 

M.  VuLPiAN,  dans  un  cas  de  tétanos  spontané,  a  trouvé  à  l'œil  nu  de 
la  congestion  de  la  substance  grise  et  une  dilatation  de  certains  espaces 
périvasculaires.  M.  Vulpian  croit  que  ces  congestions  ne  sont  pas  pa- 
thogéniques,  mais  secondaires  ;  la  lésion  primitive  est  évidemment 
celle  des  éléments  de  la  moelle. 

M.  Hayem  dit  qu'il  est  fréquent  dans  les  maladies  de  la  moelle  d'ob- 
server des  globules  rouges  dans  les  gaines,  même  lorsque  la  paroi  des 
capillaires  est  saine;  cependant  dans  un  cas  d'hémorrhagie  cérébrale, 
avec  héraorrhagies  dans  les  gaines,  M.  Hayem  a  trouvé  une  rupture 
de  vaisseau. 

M.  JoFFRoy  a  vu  l'issue  des  globules  rouges,  mais  n'a  point  vu  de  rup- 
ture. 

M.  Legros  dit  que  les  tétaniques  meurent  par  asphyxie,  et  l'asphyxie 
peut  produire  la  congestion  de  la  moelle. 

M.  LiouviLLE  demande  si  les  lésions  de  la  moelle  étaient  plus  grandes 
à  l'origine  des  nerfs  lésés,  qui  ont  été  le  point  de  départ  du  tétanos. 

M.  JoFFROv  répond  qu'il  n'a  rien  vu  de  spécial. 

M.  LiouviLLE,  dans  deux  cas,  a  trouvé  une  vascularisation  plus  in- 
tense, à  l'état  frais,  à  l'origine  médullaire  des  nerfs  dont  la  lésion 
avait  produit  le  tétanos. 

M.  Lépine,  dans  un  cas  de  tétanos,  a  trouvé  une  augmentation  des 
noyaux  dans  la  région  lombaire. 


COMPTE  RENDU  DES  SÉANCES 


DE 


r  F 


LA  SOCIETE  DE  BIOLOGIE 

pendant  le  mois  de  juin  1870; 
Par  m.  HAYEM,  secrétaire. 


PRÉSIDENCE  DE  M.  CL.  BERNARD. 


Séance  du  4  juin, 

M.  MuRON  présente  un  kyste  qui  s'est  développé  dans  un  ganglion 
lymphatique  du  cou  ;  la  paroi  de  ce  kyste  offre  exactement  la  struc- 
ture d'un  ganglion. 

—  M.  Hayem  complète  une  observation  qu'il  présenta  à  la  Société  au 
mois  de  juillet  1869;  il  s'agissait  d'un  malade  qui  fut  pris  de  convul- 
sions à  l'âge  de  2  ans;  des  contractures  survinrent  dans  les  membres 
inférieurs,  et  la  marche  ne  put  jamais  avoir  lieu  sans  béquilles.  A  l'âge 
de  24  ans,  le  malade  est  mort  de  phthisie  pulmonaire. 

L'examen  de  la  moelle  montra  les  cellules  nerveuses  intactes;  il  n'y 
avait  aucune  lésion  pouvant  être  attribuée  à  la  paralysie  infantile; 
mais,  dans  les  coupes,  M.  Hayem  trouva  de  l'hypertrophie  des  gaines 
vasculaires,  et  plusieurs  foyers  hémorrhagiques  dont  les  plus  volumi- 
neux avaient  1/10*  de  millimètre  de  diamètre. 


96 

Il  est  impossible,  dit  M.  Hayem,  de  dénommer  actuellement  ce  fait, 
qui  ne  se  rattache  pas  à  la  paralysie  infantile. 

M.  Brown-Séquard  présente  deux  cochons  d'Inde  femelles  qui,  à  la 
suite  de  la  lésion  du  corps  resliforme,  ont  offert  une  gangrène  de 
l'oreille.  Tous  les  petits  nés  de  ces  femelles  présentent  la  même  alté- 
ration. 

M.  Brown-Séquard  a  reconnu  par  beaucoup  d'expériences  compara- 
tives que  les  lésions  de  la  moitié  droite  de  l'encéphale  ne  produisent 
pas  les  mêmes  effets  que  les  lésions  de  la  moitié  gauche.  Sur  47  ani- 
maux opérés  du  côté  droit,  11  seulement  survivent;  sur  27  animaux 
opérés  du  côté  gauche,  16  survivent.  Ainsi  les  lésions  à  droite  sont 
plus  souvent  fatales,  et  les  faits  montrent  aussi  quelles  le  sont  plus 
rapidement.  Il  en  est  de  même  chez  l'homme;  dans  les  cas  de  paralysie 
à  gauche  chez  l'homme,  dépendant  de  lésion  cérébrale  droite,  les  pa- 
ralysies sont  en  général  beaucoup  plus  considérables. 

M.  Brown-Séquard  a  remarqué  qu'il  y  a,  en  général,  une  élévation 
de  température  plus  grande  après  la  lésion  à  droite  qu'après  la  lésion 
à  gauche. 

M.  Leven  demande  à  M.  Brown-Séquard  si  les  causes  de  la  mort  sont 
bien  dues  à  des  désordres  du  côté  du  système  vaso-moteur.  M.  Leven 
a  fait  aussi  des  expériences  sur  les  centres  nerveux,  et  dans  certains 
cas,  la  mort  eut  lieu  par  hérnorrhagie  à  la  base  de  l'encéphale.  Il  sem- 
ble, dit  M.  Leven,  que  le  système  vaso-moteur  est  distribué  d'une  ma- 
nière uniforme. 

M.  Brown-Séquard  répond  qu'il  a  fait  des  lésions  semblables  à  gauche 
et  à  droite,  et  qu'il  a  évité  autant  que  possible  la  lésion  des  vaisseaux 
pouvant  produire  des  hémorrhagies  considérables;  d'ailleurs,  les  co- 
chons d'Inde  résistent  bien  à  l'hémorrhagie,  et  dans  beaucoup  de  cas 
la  mort  est  surtout  causée  par  des  altérations  produites  dans  les  pou- 
mons, et  en  particulier  des  ecchymoses,  de  l'œdème,  de  l'inflamma- 
tion et  de  l'emphysème. 

Je  crois,  dit  M.  Brown-Séquard,  que  lés  deux  côtés  du  cerveau  sont 
semblables  l'un  à  l'autre  quant  à  leurs  propriétés  et  à  leurs  fonctions 
à  l'époque  de  la  naissance,  mais  que  l'une  des  moitiés  de  l'encéphale 
suffisant  seule  pour  l'exercice  de  nombre  de  fonctions  des  deux  moi- 
tiés, il  en  résulte  que  l'une  de  ces  parties  est  employée  seule  pour  cer- 
tains actes  et  l'autre  pour  d'autres  actes.  De  là  un  développement 
plus  considérable  des  propriétés  afférentes  aux  diverses  fonctions,  le 
cerveau  gauche  se  développant  davantage  que  le  droit  pour  certaines 
de  ses  propriétés,  et  le' droit,  de  son  côté,  se  développant  davantage 
aussi  pour  d'autres  propriétés.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  est  certain  que 
chez  l'homme,  ce  sont  les  lésions  du  côté  droit  de  l'encéphale  qui  dé- 


97 
terminent  surtout  les  altérations  dénutrition  (eschares,  œdème,  etc.), 
ainsi  que  la  paralysie  des  sphincters.  Ce  n'est  pas  seulement,  comme 
on  le  croit,  l'aphasie  qui  est  liée  aux  lésions  du  cerveau  gauche  ;  c'est 
aussi  la  perte  de  la  parole,  dépendant  de  la  paralysie  de  la  langue  ou 
du  larynx,  avec  ou  sans  aphasie.  Ces  paralysies  sont  bien  plus  rares 
dans  les  lésions  du  cerveau  droit.  Enfin  on  peut  dire,  ajoute  M.  Brown- 
Séquard,  que  le  cerveau  gauche  se  développe  comme  centre  de  la  vie 
intellectuelle  et  animale,  et  que  le  cerveau  droit  se  développe  comme 
centre  de  la  vie  organique. 

A  la  suite  de  la  piqûre  d'un  des  poumons  avec  une  aiguille  à  acu- 
puncture, M.  Brown-Séquard  a  vu  survenir  l'occlusion  partielle  des 
paupières,  que  M.  Lépine  a  obtenue  par  des  injections  irritantes  dans 
le  poumon.  Il  signale  aussi  ce  fait  singulier  que  l'introduction  d'une 
aiguille  dans  le  poumon  produit,  chez  un  animal,  le  mouvement  de 
manège. 

M.  Brown-Séquard  a  observé  la  chute  des  poils  dans  la  zone  épilep- 
togène  chez  plusieurs  cochons  d'Inde  qu'il  montre,  et  dont  la  patte  n'a 
point  d'ongles.  Il  est  évident,  dans  ces  cas,  qu'on  ne  peut  attribuer  au 
grattement  la  chute  des  poils. 

—  M.  Gréhant  rapporte  des  expériences  qu'il  fit  pour  déterminer 
exactement  avec  quelle  rapidité  l'oxyde  de  carbone  introduit  dans  les 
poumons  se  combine  avec  les  globules  du  sang. 

Chez  un  chien,  on  découvrit  la  carotide,  puis  on  mit  par  une  muse- 
lière les  poumons  de  l'animal  en  communication  avec  une  cloche  ren- 
fermant de  l'air  mélangé  de  1/10°  d'oxyde  de  carbone;  puis  on  fit  plu- 
sieurs prises  de  sang.  Entre  la  dixième  et  la  vingt-cinquième  seconde 
après  le  début  de  l'inhalation  du  gaz  toxique,  le  sang  artériel  renfer- 
mait 14,6  p.  100  d'oxygène  et  4,3  p.  100  d'oxyde  de  carbone.  Entre 
1  minute  15  secondes  et  1  minute  30  secondes,  le  sang  renfermait  4 
p.  100  d'oxygène,  et  18,4  p.  100  d'oxyde  de  carbone.  On  voit  donc 
que  si  l'homme  pénètre  dans  un  milieu  toxique,  dès  la  première  mi- 
nute le  gaz  délétère  peut  être  absorbé  et  produire  des  accidents. 

M.  Gréhant  pense  qu'il  serait  très-utile  de  conseiller  aux  ouvriers 
qui  descendent  dans  des  puits  ou  dans  des  fosses  dont  l'air  peut  être 
toxique,  de  se  faire  toujours  précéder  d'une  cage  contenant  un  petit 
mammifère,  un  rat  ou  un  cochon  d'Inde. 

Pour  dégager  complètement  l'oxyde  de  carbone  combiné  à  l'hémo- 
globine, M.  Gréhant  emploie  le  procédé  suivant  :  après  qu'on  a  extrait 
les  gaz  du  sang  à  40  degrés  dans  le  vide,  on  fait  arriver  dans  le  sang 
le  double  de  son  volume  d'acide  sulfurique,  et  l'on  porte  le  bain  d'eau 
à  100  degrés;  l'oxyde  de  carbone  combiné  à  l'hémoglobine  est  alors 
C.  R.  1870.  7 


98 
dégagé  et  recueilli;  placé  dans  les  mêmes  conditions,  le  sang  normal 
ne  fournit  jamais  d'oxyde  de  carbone. 

M.  CoALVET  demande  si  quelque  temps  après  l'intoxication  par 
l'oxyde  de  carbone,  le  sang  est  capable  de  reprendre  do  l'oxygène 
en  aussi  grande  quantité  qu'auparavant. 

M.  Gréhant  répond  que  M.  Claude  Bernard  a  établi  dans  son  cours 
du  collège  de  France,  que  l'oxyde  de  carbone  disparaît  assez  rapide- 
ment chez  l'animal  intoxiqué,  et  que  le  sang  reprend  toutes  ses  pro- 
priétés. 

M.  Brown-Séquard  dit  que  l'oxyde  de  carbone  n'est  pas  aussi  toxique 
qu'on  pourrait  le  penser,  puisque  des  personnes,  par  leur  métier,  en 
respirent  constamment. 

M.  Cualvet  fait  observer  que  les  cuisiniers  sont  souvent  anémiques, 
et  que  l'anémie  ne  guérit  point  par  une  bonne  alimentation;  mais  si 
les  malades  sont  envoyés  dans  des  pays  de  montagne,  ils  guérissent 
facilement. 

M.  Carville  demande  ce  que  sont  devenus  les  animaux  après  l'in- 
toxication. 

M.  Gréhant  a  vu  que  les  animaux  se  rétablissaient,  mais  dans  les 
heures  qui  suivent  l'empoisonnement  par  l'acide  de  carbone,  les  ani- 
maux ont  paru  incapables  de  faire  un  travail  mécanique,  ce  qui  s'ex- 
plique par  la  diminution  de  l'oxygène  dans  le  sang. 

~  M.  Laborde  présente  un  thermomètre  dont  le  réservoir  est  en- 
châssé dans  une  aiguille  d'acier,  et  qui  est  destiné  à  prendre  la  tem- 
pérature des  muscles,  pour  juger  de  la  mort  apparente.  M.  Laborde 
affirme  que  si  l'on  trouve  dans  les  muscles  une  température  de  20  à 
25  degrés,  la  mort  est  certaine. 

Chez  un  animal  tué  par  submersion  dans  l'eau,  dans  la  cavité  thora- 
cique  explorée  par  ce  thermomètre,  la  température  était  34  degrés; 
dans  les  muscles  de  la  cuisse  elle  était  de  30  degrés. 

Une  heure  plus  tard,  dans  la  cavité  thoracique,  on  trouva  31  degrés 
et  dans  la  cuisse  26°, 5. 

M.  LiouviLLE  dit  que  dans  beaucoup  de  cas  de  mort,  la  température 
des  tissus  reste  élevée  pendant  longtemps.  La  température  extérieure 
du  cadavre,  dit  M.  Laborde,  peut  être  difTérente  de  celle  des  parties 
profondes. 

—  M.PiERRET  communique  une  observation  d'ataxie  locomotrice  pro- 
gressive; l'examen  de  la  moelle  a  fait  reconnaître  des  altérations  de  la 
substance  grise. 


99 

Saturnisme  chronique  avec  accès  de  goutte  et  arthrites 
URATiQUEs;  par  le  docteur  E.  Lancereaux. 

COLIQDES,  SATURNISME  ET  PARALYSIE  DES  MUSCLES  EXTENSEURS  DES  AVANT- 
BRAS  ;  ACCÈS  DE  GOUTTE,  ALBUMINURIE  ET  URÉMIE;  ATROPHIE  DES  EXTEN- 
SEURS. INFILTRATION  CRATIQUE  DES  CARTILAGES  ARTICULAIRES  DES  ORTEILS; 
NÉPHRITE    INTERSTITIELLE. 

L...,  âgé  de  43  ans,  exerce  depuis  l'âge  de  11  ans  la  profession  de 
peintre  en  bâtiments.  A  15  ans,  il  fut  pris  d'une  première  attaque  de 
colique  saturnine,  et  depuis  lors  il  en  a  eu  quatre  ou  cinq  autres.  Il  y 
a  quatre  ans,  il  a  été  atteint  pour  la  première  fois  d'une  paralysie  des 
extenseurs  des  avant-bras  qui  n'a  jamais  complètement  disparu.  A  37 
ans,  il  est  pris  tout  à  coup  d'un  gonflement  articulaire  douloureux  du 
gros  orteil  gauche  qui,  après  huit  ou  dix  jours,  disparaît  et  se  trouve 
remplacé  par  un  gonflement  analogue  de  l'orteil  opposé.  Ces  affections 
des  orteils  sont  accompagnées  de  douleurs  tellement  vives  qu'il  en  ré- 
sulte une  insomnie  absolue  pour  le  malade. Trois  attaques  semblables  ont 
eu  lieu  depuis  lors  ;  la  dernière,  survenue  au  mois  d'août  1869,  ne  s'est 
pas  limitée  aux  pouces  des  pieds,  elle  a  gagné  l'articulation  tibio-tar- 
sienne,  les  talons,  et  même  les  articulations  métacarpo-phalangiennes 
des  doigts.  L'attaque  tout  entière  ne  dura  pas  moins  d'un  mois.  Les 
pieds  surtout  ont  été  le  siège  d'un  gonflement  considérable;  plusieurs 
bains  de  vapeur  furent  administrés,  et  le  malade  put  reprendre  son 
travail.  Il  fut  obligé  de  le  quitter  de  nouveau  en  novembre,  à  cause  des 
palpitations  et  de  l'oppression  vive  qu'il  éprouvait,  principalement  s'il 
venait  à  monter  un  escalier.  Dans  ces  conditions,  il  se  décida  à  venir 
à  l'hôpital ,  et,  le  5  janvier  1 870,  je  l'admettais  à  la  Charité  (salle  Saint- 
Michel,  n"  2).  La  peau  offre  une  teinte  jaunâtre  assez  marquée;  les 
lèvres  sont  cyanosées,  la  face  est  peut-être  un  peu  bouffie,  mais  il  n'y 
a  pas  en  ce  moment,  et  jamais,  au  dire  du  malade,  il  n'y  a  eu  d'œdème 
aux  jambes.  Les  muscles  extenseurs  de  l'avant-bras  sont  paralysés  des 
deux  côtés,  car  si  le  malade  relève  ses  poignets,  il  parvient  difficile- 
ment à  étendre  ses  doigts.  Malgré  une  oppression  assez  vive,  la  respi- 
ration est  partout  pure,  les  battements  du  cœur  sont  énergiques,  les 
bruits  sont  normaux.  Les  viscères  de  l'abdomen  ne  sont  pas  altérés,  à 
part  les  reins.  Pâles  et  décolorées,  les  urines  se  troublent  par  l'acide 
nitrique  et  la  chaleur;  elles  sont  manifestement  albumineuses.  Le  ma- 
lade ne  se  souvient  pas  d'y  avoir  jamais  vu  de  dépôts  d'acide  urique. 
Son  père  est  mort  asthmatique  et  catarrheux,  à  l'âge  de  56  ans  ;  sa  mère 
a  été  victime  d'un  accident,  et  une  de  ses  sœurs  paraît  avoir  succombé 
à  une  affection  chronique  de  la  poitrine.  (Bromure  de  potassium,  3  gr.; 


100 
bain  sulfureux.)  Le  lendemain,  la  peau  n'est  pas  colorée  en  noir,  ainsi 
qu'il  arrive  à  la  suite  d'un  bain  sulfureux,  quand  le  tégument  est  re- 
couvert de  molécules  de  plomb. 

Le  10  janvier,  vomissements  pituiteux  dans  le  courant  de  la  journée, 
saveur  de  la  bouche  extrêmement  désagréable;  la  veille  au  soir,  vo- 
missement alimentaire,  constipation,  céphalalgie,  tendance,  à  la  som- 
nolence, vue  un  peu  brouillée.  La  quantité  d'urine  rendue  est  d'un 
litre  et  demi,  la  densité  de  1,010.  (Huile  de  ricin,  30  grammes). 

Du  10  au  22,  persistance  des  vomissements  biliaires  et  alimentaires. 
Le  24  janvier,  au  matin,  à  la  suite  d'un  vomissement ,  perte  subite  de 
connaissance,  accès  convulsifs  des  muscles  de  la  face  et  des  membres 
avec  écume  à  la  bouche;  terminaison  de  ces  accès  par  gonflement  et 
congestion  de  la  face.  A  la  visite,  le  faciès  est  étonné,  la  face  est  bouf- 
fie, la  parole  est  gênée,  la  tête  est  lourde.  Le  malade  accuse  dans  les 
bras  des  secousses  qu'il  compare  à  des  décharges  électriques,  il  se 
plaint  d'une  céphalalgie  qu'il  fait  remonter  à  un  an  et  qu'il  caractérise 
par  la  dénomination  de  migraine;  hier,  il  a  saigné  quelques  gouttes  de 
sang  par  le  nez;  104  pulsations,  pouls  ample  et  vibrant,  impulsion 
cardiaque  énergique;  vomissements,  constipation  opiniâtre;  je  diag- 
nostique :  accidents  urémiques.  (Tartre  stibié  en  lavage,  10  centigr.) 
Les  urines,  toujours  pâles  et  décolorées,  prennent  sous  l'action  de  la 
chaleur  et  de  l'acide  nitrique  une  teinte  laiteuse  sans  qu'il  soit  possi- 
ble d'y  voir  des  flocons';  un  excès  d'acide  dissout  presque  totalement 
le  précité  et  détermine  une  coloration  rosée  ;  absence  de  sucre  dans 
l'urine. 

25  janvier,  garde-robe  unique;  vomissements  abondants,  saveur  dés- 
agréable de  la  bouche;  intelligence  nette,  parole  embarrassée.  Les 
urines,  examinées  au  microscope,  renferment  quelques  cylindres  hya- 
lins granuleux  et  des  phosphates  de  chaux.  Les  jours  suivants,  amélio- 
ration notable;  le  malade  urine  chaque  jour  plus  d'un  litre  de  liquide. 
Le  27,  il  a  une  nouvelle  attaque  convulsive  en  déjeunant;  il  pâlit 
tout  à  coup,  la  tête  se  renverse  en  arrière,  les  yeux  se  tournent  en 
haut,  le  faciès  se  tuméfie,  la  connaissance  se  perd,  les  muscles  de  la 
face  et  les  bras  sont  agités  par  intervalles  de  secousses  violentes;  l'at- 
taque dure  en  tout  dix  minutes.  (Tartre  stibié,  10  centigrammes.) 

Le  30  janvier,  céphalalgie,  oppression,  saveur  fétide  de  la  bouche, 
léger  embarras  de  la  parole,  intelligence  lourde.  Les  poignets  peu- 
vent être  étendus,  mais  il  est  impossible  au  malade  de  relever  les  doigts  ; 
les  extenseurs  des  avant-bras  sont  paralysés.  La  face  est  un  peu  tumé- 
fiée à  gauche,  sans  doute  parce  qu'il  y  a  décubitus  de  ce  côté;  92  pul- 
sations, 16  respirations,  (15  grammes  d'eau-de-vie  allemande.)  La  visite 
était  à  peine  terminée,  que  le  malade  fut  pris  sous  nos  yeux  d'un  nou 


101 

vel  accès  convulsif;  comme  toujours,  il  perd  connaissance  en  même 
temps  que  sa  tête  se  renverse  en  arrière  et  que  ses  yeux  regardent  en 
haut;  les  convulsions  sont,  à  la  face,  prédominantes  à  gauche;  aux 
membres,  ce  sont  des  secousses  rapprochées  s'exéculant  dans  le  sens 
de  la  flexion.  Au  bout  d'une  minute,  ces  secousses  cessent,  la  face  est 
cyanosée,  un  liquide  écumeux  s'écoule  de  la  bouche.  Le  malade  se  met 
à  ronfler,  et,  pendant  ce  temps,  le  pouls,  qui  était  à  92,  devient  oscil- 
lant et  tombe  à  36,  puis  tout  à  coup  la  face  revêt  une  teinte  cadavé- 
reuse et  la  respiration  s'arrête.  Cet  état  dure  pendant  près  d'une  mi- 
nute, le  pouls  continuant  à  baisser  sans  disparaître  complètement.  Alors, 
sous  l'influence  de  la  flagellation  et  de  l'excitation  produite  sur  la  mu- 
queuse des  fosses  nasales  par  des  vapeurs  ammoniacales,  survient  une 
première  inspiration,  puis  une  seconde  assez  longtemps  après;  enfin  le 
malade  fait  entendre  un  ronflement  considérable,  et  deux  minutes  plus 
tard  les  yeux  commencent  à  se  rouvrir,  le  ronflement  persiste  encore, 
puis  la  respiration  se  rétablit.  Le  lendemain,  l'eau-de-vie  allemande 
avait  amené  sept  ou  huit  garde-robes;  la  nuit  avait  été  bonne,  la  tête 
était  lourde;  pouls,  84;  température,  36,2.  (Lavement purgatif.) 

2  février,  légère  dyspnée;  les  urines  rendues  dépassent  toujours  un 
litre,  elles  continuent  à  être  transparentes;  densité,  1,009;  réaction 
acide.  Secousses  convulsives  dans  la  nuit,  épistaxis  vers  deux  heures 
du  matin. 

4  et  5  février,  nouvelles  épistaxis  peu  abondantes.  Bouffissure  de  la 
face  sans  œdème  des  jambes.  Sensation  d'anéantissement;  surdité  de- 
puis quelques  jours,  affaiblissement  notable  de  la  mémoire.  (15  grammes 
d'eau-de-vie  allemande.) 

6  février,  le  malade  a  peine  à  rassembler  ses  idées,  sa  parole  est 
embarrassée,  il  a  l'apparence  d'un  homme  à  moitié  éveillé.  Nous  ap- 
prenons, par  le  voisin,  qu'il  sommeille  et  qu'il  ronfle  presque  constam- 
ment. La  quantité  d'urine  rendue  ne  dépasse  pas  un  demi-litre;  84  pul- 
sations; température,  35,4  dans  l'aisselle. 

7  février,  même  état;  nuit  agitée,  le  malade  s'est  levé  et  s'est  pro- 
mené; à  la  visite,  respiration  ronflante,  faciès  hagard,  carphologie,  le 
malade  ramasse  et  retourne  les  objets  sur  son  lit,  inconscient  de  ses 
actes,  mais  conscient  de  son  état,  car  il  se  dit  toqué.  Les  urines  ren- 
dues dans  les  vingt-quatre  heures  ne  dépassent  pas  un  demi-litre.  Deux 
selles  peu  abondantes,  malgré  un  lavement  des  peintres.  Léger  écou- 
lement coloré  par  le  conduit  auditif  droit. 

Le  9,  état  plus  sérieux,  hyperesthésie  marquée  de  la  peau  de  la  face, 
point  douloureux  à  l'émergence  des  filets  de  la  cinquième  paire.  Agi- 
tation dans  la  nuit,  une  faible  quantité  d'urine  a  été  rendue  dans  le  lit. 

Le  10  février,  épistaxis,  selles  involontaires,  urine  toujours  album  i 


102 
neuse,  non  floconneuse;   le  malade  se  lève  sans  savoir  ce  qu'il  fait, 
cherche  quelqu'un,  et  le  reste  du  temps  il  est  somnolent. 

Le  11  février,  somnolence  et  coma  pendant  toute  la  nuit;  la  mort  a 
lieu  tout  à  coup,  à  six  heures  du  matin,  sans  le  moindre  mouvement. 

Autopsie  le  12.  —  Absence  d'anasarque  ou  d'œdème.  Les  articula- 
tions des  pieds  sont  examinées  avec  soin,  et  l'on  constate  que  les  car- 
tilages des  articulations  métatarso-phalangiennes  sont  affectés  de  dé- 
pôts blanchâtres  multiples  d'urates  de  soude.  Les  articulations  des 
deux  gros  orteils,  dont  l'une  est  représentée  fig.  I,  ont  leur  carti- 

Fig.  1.  —  Infiltration  uratique  des  cartilages  articulaires  (saturnisme). 


lage  d'incrustation  et  leurs  ligaments  infiltrés  des  mômes  sels,  qui 
y  forment  des  dépôts  abondants.  Les  articulations  tibio-tarsiennes, 
celles  des  genoux  ne  paraissent  pas  modifiées  à  l'œil  nu.  Les  articula- 
tions du  poignet  offrent  des  dépôts  très-fins  à  peine  visibles.  A  l'avant- 
bras  droit,  les  muscles  extenseurs  des  doigts,  extenseurs  propres  du 
petit  doigt  et  de  l'index,  long  abducteur  et  court  extenseur  du  pouce, 
sont  pâlf's,  jaunâtres  et  manifestement  atrophiés.  Le  cubital  postérieur 
et  le  second  radial  externe  sont  simplement  un  peu  décolorés.  Le  pre- 
mier radial  est  intact.  L'avant-bras  gauche  présente  le  môme  état, 
sauf  que  le  premier  radial,  de  teinte  jaunâtre,  est  un  peu  atrophié. 
Quant  aux  autres  muscles,  ils  sont  complètement  sains;  les  tendons  ne 
sont  pas  altérés.  L'examen  microscopique  des  muscles  atrophiés  nous 
apprend  qu'un  grand  nombre  de  faisceaux  primitifs,  notablement  dimi- 
nués de  volume,  conservent  néanmoins  leur  striation.  La  réduction 
éprouvée  par  ces  faisceaux  varie  de  la  moitié  au  quart  du  volume  nor- 
mal. Elle  est  moindre  sur  certains  points,  et  il  semble  qu'un  certain 
nombre  de  fibres  musculaires  ne  se  révèlent  que  par  le  sarcolemme 
présentant  dans  son  épaisseur  des  noyaux  d'autant  plus  nombreux  que 
l'atrophie  est  plus  marquée.  Les  nerfs  qui  se  rendent  aux  muscles  ainsi 


103 
modifiés,  c'est-à-dire  les  branches  des  nerfs  radiaux,  se  font  remar- 
quer par  l'altération  de  leur  myéline  qui  est  finement  granuleuse.  La 
moelle  épinière  est  de  consistance  et  de  coloration  normales,  excepté 
à  la  partie  antérieure  du  renflement  cervical,  où  la  coloration  devient 
grisâtre.  A  ce  niveau,  les  racines  antérieures  nous  paraissent  un  peu 
atrophiées.  Pourtant  l'examen  de  ces  racines  et  des  racines  postérieu- 
res, après  macération  dans  l'acide  chromique,  ne  dévoile  aucune  trace 
d'ulcération.  De  même,  la  moelle  cervicale,  examinée  à  l'aide  de  coupes 
fines,  n'a  donné  d'autre  résultat  que  la  constatation  d'une  anomalie 
dans  la  forme  de  la  substance  grise  des  cornes  antérieures,  au  nivean 
de  la  deuxième  paire  cervicale.  Cette  anomalie,  probablement  congé- 
nitale, consistait  en  un  développement  anormal  de  substance  grise  et 
de  cellules  dans  la  région  postéro-externe  de  la  corne  gauche.  Il  ré- 
sultait de  là  une  disproportion  considérable  entre  les  deux  moitiés  de  la 
substance  grise;  toutefois  la  partie  surajoutée  différait  de  la  substance 
grise  normale.  La  substance  blanche  du  cerveau  est  ferme,  les  ventri- 
cules sont  normaux,  mais  dans  la  corne  sphénoïdale  du  côté  gauche 
existe  une  fausse  membrane  rouillée,  colorée  par  la  présence  de  grains 
d'hématine  et  de  cristaux  d'hématoïdine.  Ce  produit  membraneux  est 
l'indice  d'un  foyer  hémorrhagique  de  petit  volume  remontant  à  plu- 
sieurs mois.  Semblable  altération,  moins  étendue,  se  rencontre  dans 
le  point  opposé  de  l'hémisphère  droit.  La  surface  du  quatrième  ventri- 
cule est  lisse,  pâle  et  opaline;  les  barbes  du  calamus  scriptorius  font 
défaut. 

Les  poumons  sont  le  siège  d'adhérences  lâches  et  anciennes,  ils 
présentent  d'abondantes  taches  pigmentaires  et  un  petit  foyer  de 
pneumonie  caséeuse  devenue  calcaire.  Les  ganglions  bronchiques  sont 
volumineux.  La  muqueuse  laryngée  est  normale.  Le  cœur,  chargé  de 
pelotons  graisseux  à  sa  base,  sur  sa  face  antérieure  et  sur  ses  bords  , 
présente  de  larges  plaques  laiteuses  à  l'origine  de  l'aorte  et  à  la  face 
antérieure  des  oreillettes.  Le  ventricule  gauche  est  ferme,  rouge,  con- 
sidérablement hypertrophié,  et  de  là  résulte  pour  tout  l'organe  une 
forme  conoïde  bien  marquée  (cœur  de  bœuf).  L'orifice  mitral  est  nor- 
mal, mais  l'orifice  aortique  est  un  peu  insuffisant  par  suite  de  l'épais- 
sissement  du  bord  adhérent  des  valvules  et  de  l'adhérence,  sur  leurs 
bords,  de  deux  d'entre  elles.  L'aorte,  un  peu  large,  offre  à  sa  faceln- 
terne  des  plaques  saillantes,  semi- transparentes  ou  jaunâtres,  située^ 
principalement  dans  le  voisinage  des  orifices  des  branches  collatérales. 
Les  carotides  sont  modifiées,  et  quelques-unes  des  artères  cérébrales 
sont  athéromateuses.  Les  artères  rénales,  dilatées,  sinueuses,  ont  leurs 
parois  hypertrophiées.  Les  reins,  petits  et  atrophiés,  sont  réduits  de  plue 
de  moitié  de  leur  volume;  leur  surface  extérieure  ,  inégale,  est  parsa 


104 

mée  de  fines  granulations  grisâtres  ou  jaunâtres,  dans  les  intervalles 
desquelles  rampentdes  vaisseaux  variqueux  injectés.  Leurs  capsules  fi- 
breuses sont  opalines,  peu  épaissies,  difficiles  à  décoller.  La  substance 
du  rein  est  ferme,  indurée,  pigmentée  dans  ses  parties  déclives.  A  la 
coupe,  elle  est  lisse,  un  peu  brillante  ;  sous  le  microscope,  elle  présente 
un  épaississement  notable  du  stroma  conjonctif,  qui  est  infiltré  de  jeu- 
nes éléments  nucléaires,  et  une  diminution  très-marquée  du  calibre 
des  tubes  urinifères  t  et  des  glomérules  de  Malpighi  g,  fig.  2.  Toute- 

Fig.  2.  — iVèphrite  interstitielle  (ceupe  microscopique). 


fois,  au  niveau  des  granulations  de  la  surface,  la  trame  conjonctive  n'est 
pas  modifiée,  et  les  tubes  urinifères  T  ont  conservé  des  dimensions 
assez  normales.  Les  cellules  épithéliales  de  ces  tubes  n'offrent  rien  de 
particulier;  celles  des  tubuli,  plongées  au  sein  du  stroma  altéré,  sont 
un  peu  granuleuses,  et  quelques-unes  renferment  une  substance  col- 
loïde c.  La  vessie  est  dilatée  par  l'urine,  ses  parois  sont  hypertrophiées. 
Le  foie  est  simplement  hyperémié,  le  pancréas  est  normal,  la  rate  est 
grosse.  L'estomac,  rétréci,  offre  des  replis  saillants  et  nombreux  sur  sa 
face  interne.  Sa  muqueuse,  épaissie,  recouverte  par  un  mucus  épais  et 
visqueux,  difficile  à  détacher,  est  pigmentée  dans  la  région  pylorique, 
injectée  dans  celle  du  cardia;  ses  glandules  sont  saillantes  (gastrite 
urémique).  La  muqueuse  intestinale,  recouverte  d'un  mucus  visqueux, 
de  teinte  grisâtre  ardoisée,  est  beaucoup  moins  altérée  que  celle  de 
l'estomac.  Le  testicule  gauche  est  affecté  d'hydrocèle  et  atrophié. 


105 
Dès  l'âge  de  11  ans,  un  homme  exerce  la  profession  de  peintre  en 
bâtiments;  de  15  à  30  ans,  il  a  plusieurs  accès  de  colique  saturnine; 
vers  l'âge  de  37  ans,  il  éprouve  une  première  attaque  de  goutte  aux 
pieds,  et  depuis  lors  il  subit  trois  attaques  semblables;  à  39  ans,  il  est 
pris  de  paralysie  des  avant-bras;  à  43  ans,  il  perd  ses  forces,  éprouve 
de  l'oppression,  de  l'insomnie,  de  l'inappétence;  en  un  mot,  il  est  al- 
buminurique.  Bientôt  surviennent  des  accès  éclamptiques  qui  mettent 
son  existence  en  danger,  et  cette  série  d'accidents  morbides  se  termine 
enfin  par  le  coma  et  la  mort.  Les  muscles  extenseurs  des  avant-bras 
sont  décolorés,  atrophiés;  leurs  faisceaux  primitifs  conservent  la  stria- 
tion  normale,  mais  ils  sont  réduits  au  tiers  ou  au  quart  de  leur  volume, 
un  certain  nombre  ont  même  complètement  disparu;  les  nerfs  qui  se 
rendent  à  ces  muscles  ont  leur  myéline  granuleuse.  La  moelle  épinière, 
malgré  les  recherches  attentives  faites  par  M.  Pierret  et  par  moi,  ne 
paraît  pas  altérée.  Les  cartilages  diarthrodiaux  des  articulations  méta- 
tarso-phalangiennes  sont  incrustés  d'urates  alcalins.  Les  reins  sont 
atrophiés,  granuleux  (néphrite  interstitielle);  il  existe  une  endocardite 
légère,  et  le  cœur  gauche  est  le  siège  d'une  hypertrophie  notable, 
l'estomac  présente  les  lésions  de  la  gastrite  urémique.  Cet  ensemble 
symptomalique  si  complexe  et  tout  à  fait  propre  à  jeter  le  trouble  dans 
l'esprit  pourrait  bien  faire  croire  que  plusieurs  maladies  sont  ici  en  pré- 
sence. Il  n'en  est  rien  ;  ces  différents  accidents  s'enchaînent  entre  eux  ; 
et,  en  définitive,  il  s'agit  simplement  ici  d'un  cas  d'intoxication  satur- 
nine chronique.  Personne,  en  effet,  ne  doute  que  les  coliques  et  la  pa- 
ralysie des  extenseurs  ne  soient  causées  par  le  plomb.  Après  les  re- 
cherches de  Garrod  et  celles  de  Charcot,  auxquelles  ce  fait  vient  don- 
ner une  confirmation  anatomique,  il  est  incontestable  que  l'intoxication 
saturnine  a  dû  jouer  un  rôle  dans  l'infiltration  uratique  des  cartilages 
articulaires.  On  peut  admettre  aussi,  comme  je  me  suis  appliqué  à  le 
démontrer  dans  d'autres  circonstances,  que  c'est  au  plomb  que  doi- 
vent être  rapportées  l'altération  des  reins  et  celle  de  l'aorte.  D'un  autre 
côté,  l'hypertrophie  du  cœur  et  l'affection  gastrique  sont  des  lésions 
subordonnées,  la  première  aux  altérations  rénales  et  aortique,  la  se- 
conde à  l'excrétion  de  quelques-uns  des  principes  de  l'urine  par  la  mu- 
queuse stomacale.  Ainsi,  lésions  musculaires,  articulaires,  rénales  et 
aortique  produites  par  le  plomb;  lésions  de  l'estomac  dues  à  une  in- 
toxication urémique,  telle  est  l'interprétation  des  désordres  constatés 
dans  ce  fait  morbide  qui  a  pour  origine  un  métal  dangereux  et  dont 
l'emploi  devrait  être  rigoureusement  défendu.  C'est  là  une  réunion 
d'altérations  pour  lesquelles  l'appellation  de  saturnisme  viscéral  pa- 
raît très-appropriée.  Quant  à  l'atrophie  musculaire  localisée  dans  les 
muscles  extenseurs  des  avant-bras,  elle  consiste,  non  dan»  un  état  gra- 


106 
nuleux  avec  perle  de  la  strialion  du  faisceau  musculaire  primitif,  mais 
dans  la  diminution  du  diamètre  transversal  de  ce  faisceau,  sans  aug- 
mentation appréciable  des  noyaux,  et  dans  sa  disparition  plus  ou  moins 
complète  (I), 

Observation   d'une   inégale  production  et  d'une  différence  de  composi- 
tion  DU    LAIT    pour    les    DEUX   SEINS   DE   LA   MÊME   FEMME;  par  LoUIS  SOUR- 

DAT,  préparateur  de  chimie  au  laboratoire  de  M.  de  Romilly,  rue  des 
Petits-Hôtels,  20. 

Ayant  remarqué  la  préférence  très-visible  qu'un  enfant  manifestait 
pour  le  sein  droit  de  sa  mère,  préférence  déjà  manifestée  par  deux  en- 
fants précédents,  et  ayant  fait  en  même  temps  la  remarque  que  le  sein 
préféré  était  plus  volumineux  que  l'autre,  fournissant  environ  le  dou- 
ble de  lait,  j'ai  pensé  qu'il  serait  intéressant  d'examiner  séparément 
chacun  de  ces  deux  laits.  Je  m'étais  d'abord  borné  à  prendre  la  den- 
sité et  le  poids  du  résidu  sec;  puis  j'ai  dosé  le  beurre.  Enfln,  voulant 
voir  comment  les  autres  éléments  étaient  répartis,  j'en  ai  fait  l'analyse 
complète. 

Les  résultats  de  cet  examen  sont  consignés  dans  le  tableau  que  je 
joins  à  cette  communication.  Des  nombres  de  ce  tableau  il  ressort  les 
faits  suivants  : 

1°  La  composition  du  lait  de  la  même  femme  (pour  les  deux  seins 
pris  ensemble)  comparée  d'un  jour  à  l'autre  est  très-variable  sans  qu'il 
y  ail  des  changements  appréciables  dans  l'état  de  sa  santé.  Il  suffit 
d'une  fatigue  momentanée,  d'un  petit  changement  de  régime,  d'un  sé- 
jour du  lait  plus  ou  moins  prolongé  dans  les  mamelles,  etc.,  pour  ame- 
ner ces  variations  de  composition.  Ainsi,  dans  huit  analyses,  portant 
sur  l'ensemble  du  lait  des  deux  seins,  le  poids  du  résidu  sec  a  varié 
depuis  10,10jusqu'à  13,70  p.  100 ou  ::  1  :  1,35. 

La  densité  a  été  aussi  très-variable.  J'ai  obtenu  pour  la  moyenne  des 
deux  seins  depuis  0,980  jusqu'à  1,031. 

2°  La  composition  du  lait  varie  encore  d'un  sein  à  l'autre  et  cela 
dans  le  même  temps.  C'est  là  le  fait  qui  est  l'objet  principal  de  ma  com- 
munication. Ainsi,  le  lait  du  sein  droit,  qui  est  de  beaucoup  le  plus 
abondant,  est  aussi  le  plus  riche  en  matières  fixes,  dans  des  rapports 
qui  sont  :;  1,20  :  1  pour  le  minimum  et  :r  1,74  :  1  pour  le  maximum. 

3°  Dans  ces  conditions,  le  beurre  est  ordinairement  sécrété  en  bien 
plus  grande  quantité  par  le  sein  droit  que  par  le  sein  gauche  ;  ;  1,50  :  1 
pour  le  minimum  et  ;:  9  :  1  pour  le  maximum.  J'ajoute  ici  que  le  seul 

(1)  Voyez,  sur  le  môme  sujet,  un  cas  de  paralysie  saturnine,  etc., 
Gaz.  méd.  1862,  p.  709,  et  Umon  médicale,  15  septembre  1863,  p,  13. 


107 
aspect  de  ces  deux  derniers  laits  aurait  suffi  pour  amener  la  constata- 
tion d'une  différence  si  considérable. 

4"  Les  matières  azotées,  caséum  et  albumine  sont,  de  même  que  le 
beurre,  sécrétés  par  le  sein  droit  en  plus  grande  quantité  que  par  le 
sein  gauche  X  1,90:  1  pour  le  maximum, 

5°  Il  est  un  fait  digne  de  remarque  :  c'est  que  les  principes  solubles, 
lactose  et  sels,  dosés  dans  cinq  analyses,  se  sont  trouvés  répartis  d'une 
manière  à  peu  près  égale  dans  les  deux  seins.  Cependant,  dans  les  deux 
analyses  où  il  y  a  eu  une  petite  différence,  cette  différence  s'est  trou- 
vée en  faveur  du  côté  le  plus  faible  en  beurre. 

Pour  les  sels,  cette  différence  est  aussi  dans  le  même  sens.  De  sorte 
qu'il  semblerait,  d'après  ces  quelques  analyses,  qu'il  y  ait  quelque 
corrélation  entre  les  matières  grasses  et  azotées  d'une  part  et  les  ma- 
tières solubles,  d'autre  part. 

La  dernière  analyse  a  donné  par  exception  des  nombres  plus  forts 
pour  le  sein  gauche,  La  raison  de  ce  renversement  paraît  être  dans  ce 
fait  :  que  le  lait, 'pour  cette  fois,  n'a  pu  qu'être  extrait  à  grand'peine 
pour  les  9/10,  le  dernier  1/10  étant  venu  très-facilement.  Ce  lait  pour- 
rait donc  être  considéré  comme  une  réserve  plus  complètement  éla- 
borée, le  lait  nouveau  n'étant  pas  encore  monté,  et  l'on  sait  que  les 
dernières  parties  du  lait  sont  bien  plus  crémeuses  que  les  premières. 
Cette  raison  expliquerait  cette  anomalie. 

Observations  générales.  —  L'enfait  allaité  jusqu'à  ce  jour  presque  ex- 
clusivement avec  ces  deux  laits,  se  porte  bien.  Il  est  du  sexe  féminin, 
âgé  de  7  mois,  pesant  7''S830.  Ses  deux  frères  aînés,  nourris  du  môme 
lait,  s'en  sont  aussi  bien  tro,uvés. 

Il  est  à  noter  qu'il  s'agit  là  d'un  cas  héréditaire,  car  la  mère  de  la 
femme,  dont  le  lait  est  l'objet  de  ce  travail,  avait  elle-même  le  sein 
droit  plus  développé  que  le  gauche  et  de  même  encore  pendant  le  temps 
de  la  lactation  seulement.  Elle  a  néanmoins  élevé  huit  enfants,  dont 
cinq  filles.  Parmi  celles-ci,  trois  se  sont  mariées  et  ont  eu  des  enfants, 
mais  il  n'y  en  eut  qu'une  seule  qui  hérita  de  cette  particularité,  sans 
que  rien  la  favorisât,  ni  dans  ses  habitudes,  ni  dans  ses  travaux  ordi- 
naires qui  sont  ceux  du  ménage. 

Pensant  que  des  faits  de  cette  nature  n'avaient  pas  été  signalés  jus- 
qu'ici, j'ai  cru  qu'il  serait  intéressant  d'appeler  sur  eux  l'attention  des 
observateurs.  Il  est  en  effet  probable  que  ce  cas  n'est  pas  unique  et 
que  l'on  pourra  en  découvrir  d'analogues.  Il  serait  aussi  curieux  de 
constater  si,  dans  d'autres  glandes  paires,  il  y  a  identité  dans  la  quan- 
tité et  dans  la  composition  de  leurs  sécrétions.  Il  y  a  là  un  côté  physio- 
logique que  mes  études  purement  chimiques  ne  me  permettent  pas 
d'aborder  et  que  je  ne  puis  qu'indiquer  à  de  plus  habiles. 


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du  nourrisson. 

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110 


Séance  du  11  juin. 


DE     l'influence     de     LA    MENSTRUATION     SUR     LA     NUTRITION;     par    le     dOCleUT 

Rabuteau. 

Dans  une  note  communiquée  naguère  à  la  Société  de  biologie  j'ai 
établi  les  deux  points  suivants  : 

1°  Sous  Cinfluence  des  règles,  Curée  diminue  de  plus  de  20  p.  100 
dans  les  urines,  le  pouls  se  ralentit  et  la  température  s'abaisse  d'au 
moins  un  demi-degré. 

2°  Ces  variations  commencent  à  se  manifester  un  ou  deux  jours 
avant  l'apparition  des  règles  et  disparaissent  quelques  jours  après. 

J'ai  pu  depuis  continuer  mes  recherches  malgré  les  difficultés 
qu'elles  présentaient,  et  l'observation  suivante  ne  renferme  pas  de 
lacunes  comme  les  premières  que  j'ai  communiquées.  La  femme  à  la- 
quelle je  suis  redevable  de  ces  nouvelles  recherches  est  la  même  que 
celle  qui  m'a  fourni  les  premières  données  à  ce  sujet;  elle  est  âgée  de 
28  ans,  elle  jouit  d'une  bonne  santé  et  est  régulièrement  menstruée. 

Les  résultats  de  mes  analyses  sont  consignés  dans  les  tableaux  sui- 
vants. Je  les  considère  comme  d'autant  plus  importants  que  la  femme 
a  suivi  un  régime  identique  pendant  toute  la  durée  de  mes  recherches 
et  que  les  températures  ont  été  prises  dans  le  vagin. 

Les  règles  ont  commencé  dans  la  journée  du  22  mai  et  ont  cessé  le  26. 
J'ai  d'ailleurs  marqué  d'un  astérisque  les  jours  pendant  lesquels  elles 
ont  eu  lieu. 

Dates.  Urine  des  Urée  Urée  totale. 

24  heures.  pour  1000. 

mai   990     20,32     20,12 

—    757     25,30     19,15 


Du  19 

au 

20 

20 

- 

21 

21 

— 

22 

*  22 

— 

23 

*  23 

— 

24 

*  24 

— 

25 

♦  25 

— 

26 

26 

— 

27 

27 

— 

28 

28 

29 

29 

— 

30 

30 

— 

31 

1000  20,00  20,00 

1020  18,23  18,59 

1285  13,10  16,83 

995  14,75  14.66 

776  21,76  16,89 

846  19,00  16,07 

950  »  » 

1362  12,15  16,55 

1218  13,23  16,13 

1085  16,12  17,50 


111 

Dates.  Urine  des  Urée  Urée  totale. 

24  keures.  pour  1000. 

juin 1233     14,41  17,77 

—    715     24,41  i7,4b 

—  1250  14,85  18,56 

—  1175  16,18  19,01 

—  1324  14,41  .....  19,08 

—  1305  15,36  20,05 

—  1200  16,79  20,15 


Du 

31 

au 

1' 

1 

— 

2 

2 

— 

3 

3 

— 

4 

4 

— 

5 

5 

— 

6 

6 

— 

7 

Dates.  Pouls  Température 

à  8  h.  du  matin.  à  8  h.  du  matin. 

19  mai 67     37%45 

20  -      68     37°,40 

21  —      65     37°,40 

*  22  —  60  37°,25 

*  23  —  57  37%20 

*  24  —  54  37M0 

*  25  -  56  37%15 

*  26  —  53  37M5 

27  —  55 37°,00 

28  —  52     37°,05 

29  —  60     37M0 

30  —  61      37°,10 

31  —  61     37°,20 

l"juin  61     37°, 10 

2  —      64  37°;15 

3  —      70  37°,25 

4  -      72  37°,35 

5  —      67 37%50 

6  —      64  

7  —      68  37°,45 

L'examen  de  ces  chiffres  vient  prouver  de  nouveau  les  propositions 
que  j'ai  énoncées.  Dès  la  veille  du  jour  où  les  règles  ont  apparu,  le 
pouls  a  diminué,  et  cette  diminution,  ainsi  que  l'abaissement  de  la 
température,  a  été  notable  le  matin  du  22  mai.  bien  que  la  femme  ne  se 
soit  aperçue  du  retour  de  ses  règles  que  deux  heures  plus  tard.  Mais 
lemolimen  hémorrhagique  s'était  déjà  opéré.  La  diminution  de  l'urée  a 
été  une  fois  de  plus  de  25  pour  100  (voyez  le  chiffre  14,75  correspon- 
dant au  24-25  mai),  l'abaissement  de  la  température  a  été  de  un  demi- 
degré;  enfin  le  pouls  a  oscillé  entre  les  termes  extrêmes  52  et  72, 
c'est-à-dire  que  le  nombre  des  pulsations  a  varié  de  28  pour  100, 


112 

Les  variations  concomitantes  dans  l'élimination  de  l'urée,  dans  le 
pouls  et  la  température,  impliquent  nécessairement  des  variations  ana- 
logues dans  l'exhalation  de  Tacide  carbonique.  Oa  sait  en  effet  que 
lorsque  l'urée  diminue  l'acide  carbonique  diminue  également:  Il  ne  peut 
d'ailleurs  en  être  autrement  ici,  puisque  toutes  les  combustions  orga- 
niques sont  diminuées  à  cause  de  la  perte  d'un  certain  nombre  de  glo- 
bules qui  sont  les  vecteurs  de  l'oxygène.  C'est  pourquoi  j'espère  avoir 
bientôt  l'occasion  de  réfuter  une  erreur  grave  commise  par  MM.  Andral 
et  Gavarret  (1), 

Ces  expérimentateurs,  après  avoir  établi  que  la  combustion  du  car- 
bone augmente  chez  l'homme  depuis  l'enfance  jusqu'à  une  certaine 
époque  pour  diminuer  ensuite  et  retomber  chez  le  vieillard  à  un  chiffre 
très-bas,  ont  avancé  que  chez  la  femme  non  enceinte  cette  progres- 
sion ascendante  puis  décroissante  n'avait  pas  lieu  de  la  même  manière. 
Pour  eux,  depuis  l'époque  où  s'établissent  les  règles  jusqu'à  celle  de  la 
ménopause,  la  femme  n'exhalerait  pas  plus  d'acide  carbonique  que  la 
jeune  fille  de  douze  à  quinze  ans;  puis,  à  l'époque  de  la  ménopause, 
la  combustion  du  carbone  s'accroîtrait  brusquement  pour  décroître  en- 
suite avec  l'âge. 

Je  démontrerai  prochainement  que  la  première  partie  de  cette  der- 
nière proposition  est  entachée  d'erreur;  que  sur  les  trente  ans  pendant 
lesquels  la  femme  est  réglée,  il  y  en  a  vingt  pendant  lesquels  les  choses 
se  passent  chez  elle  comme  chez  l'homme.  Je  démontrerai  que  pendant 
l'intervalle  compris  entre  les  cinq  ou  six  jours  qui  suivent  la  cessation 
des  règles  et  un  jour  ou  deux  avant  leur  retour,  la  femme  élimine  non- 
seulement  plus  d'urée,  mais  plus  d'acide  carbonique  que  la  jeune  fille, 
de  même  que  l'homme  adulte  exhale  plus  d'acide  carbonique  que  l'en- 
fant (2).  Les  auteurs  que  j'ai  cités  ont  pris  pour  règle  générale  ce  qui 
n'est  qu'une  exception  dépendant  de  l'influence  immédiate  des  règles 
et  temporaire  comme  elles. 

—  M.  Vaillant  expose  des  faits  relatifs  à  l'étude  anatomique  du  genre 
Pontobdelle,  qui  appartient  au  groupe  des  vers;  ces  faits  sont  publiés 
dans  les  Annales  des  sciences  naturelles  (février  1870).  Le  genre  des 
Pontobdelles  est  caractérisé  par  la  présence  de  deux  ventouses  termi- 
nales, l'absence  d'yeux  et  de  prolongements  branchiaux;   la  bouche 

(1)  Annales  de  chimie  et  de  physique,  1843,  3«  série,  t.  VIII,  p.  129 
et  suivantes. 

(2)  La  femme,  dont  il  est  question  dans  cette  note,  et  moi,  nous  éli- 
minons sensiblement  la  même  quantité  d'urée  et  d'acide  carbonique 
lorsqu'elle  n'a  pas  ses  règles  et  lorsque  nous  suivons  un  régime  iden- 
tique. Elle  ne  pèse  pas  plus  que  moi,  60  kilogrammes  environ. 


113 

présente  une  trompe  protactile  ;  elle  n'est  point  armée  de  mâchoires. 
Ces  animaux  sont  ordinairement  fixés  sur  le  corps  des  raies. 

—  M.  Brown-Séquard  présente  un  cochon  d'Inde  chez  lequel  il  a  pra- 
tiqué une  section  entre  le  cervelet  et  les  tubercules  quadrijumeaux  du 
côté  gauche;  le  nerf  trijumeau  a  été  coupé.  Il  y  a  dix-huit  jours  que 
cet  animal  a  subi  l'opération;  pendant  les  dix  premiers  jours,  l'animal 
a  présenté  le  mouvement  de  roulement.  La  même  opération  faite  trois 
fois  du  côté  droit  a  produit  constamment  la  mort. 

Le  même  expérimentateur  dit  que  lorsque,  chez  un  cochon  d'Inde, 
après  avoir  fait  la  section  du  nerf  sciatique  et  avoir  constaté  que  l'ani- 
mal s'est  guéri  après  être  devenu  épileptique,  si  l'on  pratique  une 
deuxième  section  du  nerf  au-dessus  de  la  réunion,  l'épilepsie  apparaît 
de  nouveau.  Mais  si  la  deuxième  section  est  faite  au-dessous  de  la  ré- 
union, jamais  on  ne  produit  l'épilepsie;  ainsi  le  lieu  de  réunion  des 
nerfs  paraît  être  un  obstacle  à  la  propagation  des  irritations  que  l'on 
provoque  au-dessous.  M.  Brown-Séquard  a  remarqué  que  la  deuxième 
section  faite  au-dessus  de  la  réunion  des  nerfs  est  plus  promplement 
efficace  pour  provoquer  l'épilepsie  que  la  première. 

M.  Brown-Séquard  montre  les  capsules  surrénales  d'animaux  morts 
à  la  suite  d'opérations  sur  la  moitié  droite  OU  gauche  de  l'encéphale, 
pour  faire  constater  qu'elles  sont  congestionnées.  Il  a  toujours  trouvé 
des  congestions  des  capsules  surrénales  dans  ces  circonstances. 

M.  LioDviLLE  et  M.Hayem  coupèrent  chez  un  cobaye  la  moelle  épinière 
dans  le  tiers  inférieur;  l'animal  vécut  douze  jours  ;  on  trouva  le  rectum 
distendu  par  des  masses  dures  qui  avaient  en  plusieurs  points  ulcéré, 
de  dedans  en  dehors,  et  môme  perforé  l'intestin,  et  causé  une  périto- 
nite qui  a  dû  être  la  cause  de  la  mort.  M.  Liouville  rapproche  de  ce 
fait  l'observation  qu'il  fit  en  1868,  à  la  Salpêlrière,  sur  une  femme, 
d'une  distension  considérable  du  gros  intestin  causée  par  une  tumeur 
qui  comprimait  le  rectum  -,  au  niveau  de  la  partie  distendue  se  trouvaient 
des  ulcérations. 

— M.  MicHAUD  communique  les  résultats  de  l'examen  de  la  moelle  épi- 
nière qu'il  fit  chez  deux  individus  qui  offraient  des  cas  de  pied  bot. 
Chez  le  premier,  il  y  avait  un  pied  bot  équin,  qui  était  survenu 
à  la  suite  de  paralysie;  l'autopsie  a  montré  une  atrophie  graisseuse  des 
muscles  du  mollet.  Dans  la  moelle,  dans  les  cornes  antérieures,  il  y  avait 
atrophie  et  même  disparition  des  cellules  nerveuses  ;  les  lésions  étaient 
surtout  prononcées  dans  les  régions  cervicale  et  lombaire.  Dans  le  se- 
cond cas,  on  avait  affaire  à  un  pied  bot  congénital,  c'était  un  double 
pied  bot  varus  équin.  La  moelle  fraîche  paraissait  normale,  mais  après 
durcissement  et  coloration  par  le  carmin,  on  trouva  une  myélite  limitée 
c.  K.  1870.  8 


114 

à  la  partie  inférieure  de  la  région  cervicale;  des  amas  de  substance 
blanche  pénétraient  dans  la  substance  grise  et  disloquaient  les  cornes 
antérieures. 

M.  VuLPiAN  a  parlé  dans  son  cours  des  altérations  des  muscles  dans 
le  pied  bot;  il  a  dit  qu'il  était  probable  qu'il  y  avait  des  lésions  de  la 
moelle;  les  observations  de  M.  Michaud  confirment  ces  présomptions. 
Chez  une  femme  qui  avait  une  luxation  congénitale  de  la  hanche  avec 
atrophie  des  muscles,  M.  Vulpian  trouva  la  moelle  altérée;  aux  envi- 
rons du  canal  central,  il  existait  une  multiplication  d'éléments  du  tissu 
conjonctif  se  colorant  par  le  carmin.  Cette  partie  s'étendait  et  inter- 
rompait les  cornes.  Dans  les  relations  d'autopsie  de  pied  bot  publiées 
par  M.  Broca,  on  voit  des  atrophies  musculaires  disséminées  qui  pa- 
raissent dues  à  des  lésions  de  la  moelle.  La  pièce  présentée  par  M.  Mi- 
chaud  a  été  recueillie  dans  mon  service,  dit  M.  Charcot  :  il  y  avait  des 
traces  d'une  myélite,  et  je  suppose  que  cette  myélite  existait  chez  le 
fœtus  et  a  été  la  cause  d'une  attitude  vicieuse.  Il  faut  distinguer  en 
général  le  pied  bot  paralytique  causé  par  la  paralysie  de  certains  mus- 
cles et  le  pied  bot  spasmodique  qui  est  la  conséquence  d'une  attitude 
vicieuse. 

M.  Laborde  dit  que  dans  tous  les  faits  de  M.  Broca  il  y  avait  de  l'al- 
tération graisseuse  et  de  l'atrophie  dans  certains  muscles;  ces  faits  ne 
doivent  pas  être  confondus  avec  ceux  de  la  paralysie  infantile.  M.  La- 
borde ajoute  qu'il  faut  distinguer  le  pied  bot  héréditaire  et  le  spontané  : 
dans  le  premier,  il  n'y  a  point  sans  doute  d'altération  de  la  moelle; 
dans  les  altérations  non  transmises  il  peut  en  être  autrement.  M.  La- 
borde croit  que  le  pied  bot  se  transmet  fatalement. 

— M.  Trouvé  présente  à  la  Société  une  série  d'instruments  qui  permet- 
tent de  rechercher  les  projectiles  dans  les  tissus;  l'un  d'eux  consiste 
en  un  petit  électro-aimant  qui  fait  vibrer  un  trembleur  lorsque  deux 
fils  métalliques  isolés  viennent  parleurs  extrémités  rencontrer  une  sur- 
face métallique  qui  forme  le  circuit  d'une  pile. 

Séance  du  18  juin. 

M.  Rutherford,  professeur  de  physiologie  à  King's  Collège,  assiste  à 
la  séance. 

—  M.  Rabuteau  propose  pour  le  dosage  des  sels  ammoniacaux  le  pro- 
cédé de  Lecomte,  qui  s'applique  au  dosage  de  l'urée.  Les  hypochlorites 
décomposent  l'ammoniaque,  et  l'azote  qui  se  dégage  est  recueilli.  Il  y 
a  dans  l'organisme  des  sels  ammoniacaux,  et  il  est  probable,  dit  M.  Ra- 


115 

buteau,  qu'ils  sont  éliminés  par  les  poumons  sous  forme  de  carbonate 
d'ammoniaque. 

M.  Rabuteau,  ayant  examiné  différentes  eaux-de-vie,  n"a  trouvé 
dans  l'eau-de-vie  de  vin  ni  alcool  butylique,  ni  alcool  amylique;  tan- 
dis que  l'eau-de-vie  de  betterave  contient  ces  alcools  qui,  probable- 
ment, produisent  les  accidents  d''alcoolisme.  L'alcool  amylique,  dit 
M.  Rabuteau,  est  toxique  pour  les  grenouilles  à  la  dose  de  1  pour  1000  ; 
taudis  que  15  pour  100  d'alcool  éthylique  ne  tuent  pas  ces  animaux. 

—  M.  Hayem  a  injecté  sous  la  peau  du  dos,  chez  des  chiens,  une  cer- 
taine quantité  de  cinabre,  et  a  obtenu  des  abcès,  puis  l'infection  puru- 
lente; le  but  de  M.  Hayem  était  de  suivre  les  globules  blancs  impré- 
gnés de  la  matière  colorante  dans  leurs  migrations.  A  l'autopsie  on 
trouva  dans  les  abcès  des  globules  de  pus  qui  étaient  colorés;  mais  le 
plus  grand  nombre  de  ces  corpuscules  était  incolore.  Dans  les  gan- 
glions lymphatiques,  il  y  avait  des  cellules  contenant  du  cinabre; 
M.  Hayem  en  trouva  aussi  dans  les  artères  pulmonaires  et  dans  les  al- 
véoles. Ainsi  un  liquide  dune  plaie  peut  entrer  par  les  veines  et  par 
les  lymphatiques,  et  des  corpuscules  blancs  colorés,  qui  sont  entrés 
dans  la  circulation,  peuvent  en  sortir  et  se  retrouver  dans  les  abcès 
métastatiques. 

M.  Ranvier  fait  remarquer  qu'il  n'y  a  point  que  les  globules  blancs 
qui  absorbent  le  cinabre,  mais  que  cette  propriété  d'imprégnation  ap- 
partient à  une  foule  d'éléments  cellulaires,  tels  que  les  cellules  du 
tissu  conjonctif,  de  la  moelle  des  os,  comme  l'ont  démontré  les  travaux 
de  Poniick  et  de  Langerhans.  De  plus,  ces  auteurs  ont  montré,  dit 
M.  Ranvier,  que  si  les  matières  colorantes  sont  injectées  dans  le  sang, 
les  ganglions  lymphatiques  ne  sont  pas  infiltrés  de  matière  colorante, 
tandis  que  si  l'injection  est  faite  dans  le  tissu  cellulaire,  les  ganglions 
lymphatiques  sont  infiltrés  primitivement. 

M.  Hayem  croit  volontiers  que  des  particules  colorées  peuvent  péné- 
trer dans  l'organisme  par  d'autres  éléments  que  les  globules  blancs, 
mais  il  pense  que  son  expérience  est  intéressante  au  point  de  vue  du 
transport  des  particules  colorées  d'une  plaie  dans  le  poumon. 

— M.  Bert  présente  un  animal  qui  a  été  placé  dans  un  grand  appareil, 
à  raréfaction  de  l'air,  une  sonde  avait  été  fixée  dans  l'artère  carotide  et 
pouvait  communiquer  avec  l'extérieur.  Lorsqu'on  eut  diminué  consi- 
dérablement la  pression  autour  de  l'animal,  on  ouvrit  la  sonde,  et  l'air 
extérieur  se  précipita  dans  les  artères,  l'animal  fut  tué  :  dans  ces  con- 
ditions, on  trouve  de  l'air  partout,  dans  le  système  circulatoire,  dans 
le  tissu  cellulaire,  et  même  dans  les  séreuses.  M.  Bert  a  remarqué  que 


116 

l'air  ainsi  injecté  tue  les  nerfs  moteurs,  tandis  que  la  contractilité  mus- 
culaire persiste. 

— M.  Gréhant  ajoute  à  la  communication  qu'il  a  déjà  faite  sur  les  effets 
d'une  forte  insufflation  des  poumons,  quelques  résultats  d'expériences 
qui  montrent  par  quel  mécanisme  la  circulation  est  diminuée  ou  ar- 
rêtée. 

Chez  un  chien,  on  a  introduit  une  sonde  de  plomb  remplie  d'une  so- 
lution de  carbonate  de  soude,  par  la  veine  jugulaire,  presque  dans  la 
veine  cave  inférieure,  dans  le  thorax,  et  l'on  réunit  cette  sonde  avec  un 
manomètre;  dès  qu'on  insuffle  les  poumons  par  l'air  comprimé  sous 
une  pression  constante  de  6  centim.  de  mercure,  on  voit  le  mercure 
monter  dans  le  manomètre  jusqu'à  5  ou  6  centimètres,  et  la  pression 
dans  les  veines  devient  à  peu  près  égale  à  celle  qui  existe  alors  dans 
les  artères.  Pour  mieux  démontrer  ce  fait,  M,  Grehant  emploie  le  ma- 
nomètre différentiel  de  M.  Claude  Bernard;  l'une  des  branches  commu- 
nique par  la  sonde  avec  la  veine  cave,  l'autre  avec  l'artère  carotide; 
dès  qu'on  insuffle  les  poumons,  on  voit  les  deux  niveaux,  d'abord  dis- 
tants de  14  centimètres,  se  rapprocher  peu  à  peu  jusqu'à  l'égalité,  et  le 
mercure  rester  immobile.  Ainsi  la  circulation  est  arrêtée  par  compres- 
sion des  vaisseaux  dans  les  poumons,  et  le  sang  reste  en  repos  dans 
tous  les  vaisseaux  de  la  grande  circulation.  Cette  conclusion  est  en- 
core confirmée  par  l'expérience  suivante  :  on  fait  sur  le  poumon  de  la 
vache  une  injection  de  sang  défibriné  par  l'artère  pulmonaire,  pression 
de  5  centim.  de  mercure,  et  on  recueille  le  sang  qui  revient  réguliè- 
rement par  les  veines  pulmonaires  ;  l'insufflation  des  poumons  arrête 
immédiatement  l'écoulement  du  sang. 

M.  Brown-Séquard  demande  à  M.  Gréhant,  si  dans  son  expérience,  le 
cœur  continue  à  battre;  il  faut  remarquer,  dit  M.  Brown-Séquard, 
qu'une  forte  injection  de  sang  dans  la  veine  jugulaire  arrête  le  cœur. 

M.  Gréhant  a  reconnu  que,  dans  le  tracé  des  indications  du  manomè- 
tre placé  dans  une  artère,  on  observe  quelques  secondes  après  l'insuf- 
flation, une  ligne  horizontale  parallèle  à  la  ligne  des  abscisses  qui  ne 
présente  aucune  ondulation;  M.  Gréhant  se  propose  devoir  directe- 
ment si  le  cœur  continue  à  battre. 

—  M.  Laborde  présente  les  ovaires  d'une  poule  qui  produit  des  œufs 
incomplets  dépourvus  de  coquille,  et  dans  les  ovaires  il  y  a  une  réten- 
tion évidente  des  jaunes, 

—  M.  Brown-Séquard  a  montré  à  la  Société  une  série  de  poumons 
offrant  des  hémorrhagies  à  la  suite  de  lésions  de  l'encéphale;  le  cer- 
velet, les  lobes  cérébraux  et  une  partie  du  corps  strié  sont  incapables 


117 

de  produire  ces  lésions,  mais  toutes  les  autres  parties  de  la  base  sont 
capables  de  les  développer;  cependant,  lorsqu'on  a  coupé  les  lobes 
cérébraux  et  même  les  lobes  olfactifs,  il  peut  arriver  que  du  sang  s'é- 
panche et  aille  irriter  les  parties  qui  peuvent  déterminer  ces  ecchymo- 
ses dans  les  poumons.  La  portion  de  protubérance  qui  est  la  plus  voi- 
sine du  pédoncule  cérébelleux  moyen  est  la  plus  efficace  pour  produire 
ces  lésions.  Les  nerfs  qui  conduisent  cette  irritation  naissent  de  la 
moelle  épinière  au-dessous  de  l'origine  des  nerfs  phréniques,  de  la 
partie  située  entre  la  quatrième  cervicale  et  la  quatrième  dorsale;  la 
section  des  sympathiques  et  des  nerfs  vagues  n'empêche  en  rien  les  lé- 
sions pulmonaires.  La  transmission  se  fait  en  partie  d'une  manière  croi- 
sée en  partie  directement,  car  l'irritation  d'une  moitié  de  l'encéphale 
fait  apparaître  les  hémorrhagies  surtout  de  l'autre  côté  du  poumon, 
et  aussi  mais  à  un  moindre  degré  du  même  côté.  Si  l'on  coupe  une 
moitié  latérale  du  bulbe  et  qu'on  irrite  une  moitié  de  la  base  de  l'en- 
céphale, on  constate  que  les  deux  poumons  contiennent  des  foyers  hé- 
morrhagiques. 

—  M.  Brown-Séquard  a  fait  avec  M.  Lombard  plusieurs  expériences  : 
après  la  ligature  de  la  trachée  et  une  forte  insufflation  des  poumons, 
on  a  obtenu  des  ecchymoses  pulmonaires  à  la  suite  de  l'irritation  de 
la  base  de  l'encéphale;  puis  laissant  s'affaisser  les  poumons,  on  a  vu 
des  foyers  hémorrhagiques. 

Dans  certains  cas,  les  hémorrhagies  se  sont  produites  sous  les  yeux. 
En  ouvrant  le  thorax  on  a  vu  les  poumons  s'affaisser,  l'asphyxie  se 
produisait  chez  l'animal;  on  lésa  le  cerveau  à  la  base,  puis  par  l'in- 
sufflation artificielle  on  conserva  l'animal,  et  l'on  vit  les  hémorrhagies 
se  produire  sous  les  yeux. 

M.  Brown-Séquard  a  remarqué  que  lors  des  lésions  de  la  base  de 
l'encéphale,  il  y  a  une  cause  de  mort  qui  résulte  d'une  production 
énorme  de  mucus  bronchique. 

J'ai  vu,  dit  M.  Brown-Séquard,  un  malade  atteint  de  méningite  as- 
phyxié, par  une  production  pareille  de  mucus  dans  les  poumons. 

M.  LiouviLLE  rappelle  que  M.  Cruveilhier  a  vu  des  malades  succomber 
à  des  lésions  des  poumons  à  la  suite  d'hémorrhagies  cérébrales.  Dans 
les  cas  d'hémorrhagie  cérébrale,  dit  M.  Charcot,  on  trouve  tantôt  des 
ecchymoses  pulmonaires,  tantôt  des  pneumonies  lobaires  ou  lobulaires. 
Les  ecchymoses  péricrâniennes  sont  toujours  consécutives.  L'hémor- 
rhagie  cérébrale  commence,  puis  les  hémorrhagies  externes  appa- 
raissent. M.  Charcot  n'a  jamais  vu  d'ecchymoses  péricrâniennes  dans 
les  cas  d'apoplexie  foudroyante. 

M.  Brown-Séquard  explique  la  production  d'hémorrhagies  dans  le 


118 
poumon,  par  la  théorie  suivante;  L'irritation  du  centre  nerveux  dé- 
termine une  contraction  fixe  des  veines,  l'artère  se  contracte  d'une 
manière  péristaltique  vers  la  périphérie,  et  le  sang  comprimé  déchire 
les  petits  vaisseaux. 

Séance  du  25  juin. 

M.  Gréhant  a  recommencé  chez  un  chien  l'expérience  d'insufflation  pul- 
monaire, après  avoir  introduit  une  aiguille  dans  le  cœur;  la  pression 
dans  le  gazomètre  et  dans  les  poumons  étant  égale  à  6  centimètres  de 
mercure,  le  cœur  s'arrêta  complètement  au  bout  de  quelques  se- 
condes. 

M.  Bert  a  soumis  dans  cet  appareil  plusieurs  animaux  à  une  diminu- 
tion considérable  de  pression,  puis  a  recherché  la  composition  des  gaz 
du  sang  dans  l'état  normal  et  dans  ces  conditions  nouvelles  :  un  chien, 
placé  dans  l'appareil,  se  trouva,  au  bout  d'une  demi-heure,  dans  une 
atmosphère  dont  la  pression  était  seulement  égale  à  31  centimètres  de 
mercure;  on  prit  alors  du  sang  à  l'aide  d'une  sonde  et  d"une  seringue 
dans  l'artère  fémorale  et  les  gaz  du  sang  furent  extraits;  on  obtint  les 
résultats  suivants  : 

Sang  normal.  Sang  pris  dans  les  conditions 

de  l'eipérience. 
iOO  cent,  cubes  de  sang  contenaient  :  100  cent,  cubes  de  sang  contenaient  : 

39" acide  carbonique 31" 

17,5 oxygène 12 

Les  gaz  étant  secs  à  0°  et  à  la  pression  de  76  centimètres,  dans  l'ap- 
pareil à  extraction  des  gaz  du  sang,  M.  Bert  introduit  d'abord  un  cer- 
tain volume  d'eau  distillée  qu'il  prive  de  gaz,  afin  d'étendre  le  sang  et 
de  diminuer  la  mousse. 

—  M.Ranvier  fait  connaître  des  expériences  qu'ila faites  avecM.Cor- 
nil  pour  rechercher  ce  que  devient  le  sang  consécutivement  aux  hé- 
morrhagies  produites  dans  les  séreuses  et  dans  le  tissu  conjonctif. 
Quand  on  injecte  du  vermillon  très-fin  dans  la  cavité  péritonéale  chez 
le  rat,  les  cellules  épithéliales  de  l'épiploon  se  gonflent  et  absorbent  la 
matière  granuleuse,  en  même  temps  les  globules  de  pus  qui  apparais- 
sent s'imprègnent  aussi.  On  a  dit  que  la  pénétration  des  granulations 
dans  les  globules  blancs  a  lieu  par  des  mouvements  amyboïdes  ;  pour  les 
cellules  épithéliales,  il  n'est  pas  certain  qu'elle  ait  lieu  par  ce  méca- 
nisme, car  lorsque  les  cellules  ont  encore  une  cuticule,  les  granulations 
pénètrent  encore;  mais  sous  l'influence  de  l'irriiation,  les  cellules  se 


119 

gonflent  perdent  leur  cuticule,  et  les  granulations  pénètrent  plus  facile- 
ment. Lorsqu'on  injecte  du  vermillon  ou  du  bleu  d'aniline  dans  le  tissu 
cellulaire  d'un  chien,  on  voit  les  cellules  du  tissu  conjonclif  se  pig- 
menter comme  celle  de  l'épiploon.  Dans  le  tissu  conjonctif  comme  dans  le 
péritoine,  on  voit  survenir  une  inflammation,  les  cellules  plates  se  gon- 
flent, se  pigmentent;  un  grand  nombre  de  globules  blancs  apparais- 
sent. Longtemps  après,  cinq  mois  après,  M.  Ranvier  a  trouvé  chez  le 
rat  une  quantité  considérable  de  granulations  dans  les  cellules. 

Si  l'on  injecte  avec  une  seringue  de  Pravaz  2"  de  sang  défibriné 
dans  le  péritoine  d'un  rat,  on  obtient  des  phénomènes  analogues  à  ceux 
qui  sont  produits  par  le  vermillon  ;  les  cellules  endothéliales  se  gonflent, 
des  globules  de  pus  se  forment,  les  uns  sortent  des  vaisseaux,  proba- 
blement d'autres  viennent  des  cellules  épithéliales.  Les  globules  du 
sang  se  modifient,  deviennent  plus  petits,  plus  rouges.  Ces  change- 
ments ont  été  décrits  par  Rindfbisch,  qui  injectait  du  sang  dans  les 
sacs  lymphatiques  de  la  grenouille.  Des  granulations  de  globules  rouges 
réfringentes  et  colorées  sont  absorbées  comme  l'était  le  cinabre.  La 
matière  colorante  du  sang  se  modifie  peu  à  peu,  se  convertit  en  hé- 
maline,  et  ainsi  se  produisent  les  changemeuts  de  couleur  des  ecchy- 
moses; la  disparition  définitive  de  l'ecchymose  peut  être  attribuée  au 
transport  de  la  matière  colorante  par  les  globules  blancs. 

—  M.  Troové  présente  un  appareil  électro-médical  très-portatif,  qu'il 
construit,  et  qui  permet  de  graduer  à  volonté  les  courants  induits,  soit 
en  recouvrant  plus  ou  moins  d'un  cylindre  de  cuivre  le  cylindre  de  fer 
qui  est  placé  au  centre  de  la  bobine  inductrice,  soit  en  retirant  ce  cy- 
lindre de  fer. 

M.  Carvîlle  demande  si  cet  instrument  permet  d'obtenir  toujours 
un  courant  de  même  intensité. 

M.  TuouvÉ  répond  que  pour  atteindre  ce  but  il  faut  employer  une 
pile  qui  reste  constante. 

M.  Laborde,  quia  employé  l'appareil  de  M.  Trouvé,  est  convaincu 
que  la  graduation  des  courants  induits  est  parfaite. 

—  M.  Brown-Séquard  montre  un  cochon  d'Jnde  qui,  après  la  section 
du  trijumeau,  a  off"ert  une  suppuration  de  la  surface  de  la  cornée;  au- 
jourd'hui, trente-trois  jours  après  l'opération,  un  travail  de  réparation 
a  eu  lieu  et  le  pourtour  de  la  cornée  est  à  peine  opaque. 

Chez  un  cochon  d'Inde  dont  la  moelle  fut  coupée  au-dessous  de  l'ori- 
gine du  nerf  sciatique,  M.  Brown-Séquard  a  observé  seulement  une  lé- 
gère paralysie  de  la  vessie.  Six  mois  après  l'opération,  l'animal  est  de- 
venu tout  à  fait  épileptique.  Dans  l'articulation  du  coude-pied,  il  s'est 
fait  un  gonflement  très-considérable,  qui  a  été  précédé  de  la  gangrène 


120 
d'un  doigt.  M.  Brown-Séquard  se  demande  si  cette  lésion  s'est  pro- 
duite sous  l'influence  du  système  nerveux.  On  sait  que  M.  Charcot  a 
signalé  des  cas  d'arthropathie  dépendant  d'affections  du  système  ner- 
veux. 

Relativement  à  la  production  des  attaques  chez  les  animaux  rendus 
épileptiques,  M.  Brown-Séquard  fait  remarquer  qu'il  ne  faut  pas  pincer 
avec  violence  la  peau  de  la  zone  épileptogène,  car  les  douleurs  vives 
arrêtent  l'attaque  au  lieu  de  la  provoquer.  Récemment,  M.  Brown-Sé- 
quard faisait  une  expérience  avec  M.  Lépine,  et  produisait  des  lésions 
de  la  base  de  l'encéphale;  l'animal  fut  pris  de  convulsions  à  plusieurs 
reprises.  On  constata  que  de  fortes  douleurs  arrêtaient  les  convul- 
sions. 

—  M.  Brown-Séquard  a  constaté  chez  un  malade  de  M.  Ollivier  l'ar- 
rêt des  convulsions  par  la  production  de  douleurs  très-vives.  Il  serait 
important  de  répéter  ces  expériences  chez  l'homme.  Mais  quand  la 
connaissance  est  perdue  chez  l'homme,  onn'essaye  plus  aucune  action. 
Mais  je  suis  convaincu,  dit  M.  Brown-Séquard,  que  si  l'on  tiraillait  les 
membres  avec  violence  pour  provoquer  de  la  douleur,  on  pourrait  ar- 
rêter l'attaque. 

M.  Carville  demande  si  ce  n'est  pas  pour  produire  de  la  douleur 
qu'on  a  proposé  l'emploi  de  l'électricité  dans  ces  cas.  Si  l'on  produit 
une  douleur  très-vive,  à  l'aide  de  l'électricité,  chez  un  cochon  d'Inde 
en  attaque,  dit  M.  Carville,  arrêterait-on  ^'attaque? 

Il  est  très-possible,  répond  M.  Brown-Séquard,  que  la  douleur  arrête 
l'attaque.  M.  Onimus  a  fait  cesser  des  attaques  par  des  courants  conti- 
nus qui  n'étaient  pas  très-intenses. 


COMPTE  RENDU  DES  SÉANCES 


DE 


r  r 


LA  SOCIËTË  DE  BIOLOGIE 

pendant  le  mois  de  juillet  1870; 
Par  m.  HAYEM,  secrétaire. 


PRÉSILENCE  DE  M.  CL.  BERNARD. 


Séance  du  2  juillet. 

M.  Leven  communique  à  la  Société  le  résultat  des  recherches  qu'il  a 
commencées  sur  l'action  de  Vaconitine. 

Ce  poison,  rangé  à  tort  parmi  les  narcotico-âcres,  puisqu'il  n'a  ja- 
mais produit  de  narcotisme,  est  un  poison  musculaire  au  même  titre 
que  la  digitaline  et  la  vératrine. 

A  la  dose  de  un  dixième  de  milligramme  introduit  sous  la  peau,  un 
oiseau  est  foudroyé  sans  convulsions;  son  action  se  porte  sur  toute  l'é- 
tendue de  la  moelle,  et  il  produit  la  mort  par  arrêt  du  cœur  et  des  pou- 
mons. A  l'autopsie,  ces  derniers  sont  gorgés  de  sang,  ainsi  que  le  cœur; 
quant  à  la  contractilité  des  nerfs,  au  bout  de  dix  minutes  elle  se  trouve 
épuisée,  plus  vite  même  que  dans  l'empoisonnement  par  la  digitaline. 

M.  Leven  reproduit  son  expérience  sur  un  cochon  d'Inde,  devant  la 
Société. 

M.  Brown-Sequard,  à  propos  de  la  communication  de  M.   Leven, 


122 

rappelle  un  fait  depuis  longtemps  signalé  par  Waller.  Ce  fait  est  le 
suivant  :  Si  l'on  mélange  l'aconitine  avec  le  chloroforme,  l'alcool  et 
l'axonge,  l'absorption  de  l'aconitine  est  considérable;  si  le  chloroforme 
manque  à  ce  mélange,  l'aconitine  s'absorbe  beaucoup  moins. 

—  M.  Brown-Séquard  donne  le  résultat  de  ses  recherches  sur  le  siège 
central  de  l'épilepsie. 

Si  l'on  devait  se  rapporter  aux  premiers  mouvements  réQexes  de 
l'attaque  d'épilepsie  pour  déterminer  ce  siège  central,  sa  localisation 
varierait  beaucoup,  puisque  ces  mouvements  réflexes  peuvent  se  mon- 
trer du  côté  des  muscles  de  la  vessie,  du  pénis,  de  l'œil,  de  la  langue, 
du  cou  et  souvent  même  sur  les  fibres  musculaires  des  vaisseaux  cé- 
rébraux seulement,  ainsi  que  le  démontrent  un  grand  nombre  d'at- 
taques consistant  seulement  en  une  perte  de  connaissances. 

D'autre  part  il  est  difficile  de  s'appuyer  sur  autre  chose  que  ces 
mouvements  réflexes  pour  établir  le  siège  central  de  l'épilepsie. 

En  Allemagne,  Kusmalil  et  Tenner,  Schrœder  van  der  Kolk  l'avaient 
placé  dans  le  bulbe;  mais  on  sait  que  les  lésions  du  bulbe  manquent 
souvent  dans  l'épilepsie,  et  que  certaines  lésions  du  bulbe  peuvent  ne 
pas  donner  lieu  à  des  phénomènes  convulsifs,  tandis  que  des  convul- 
sions énormes  peuvent  tenir  au  contraire  à  des  lésions  de  parties  bien 
différentes. 

Selon  Nothnagel,  ce  siège  central  serait  la  protubérance.  Cette  opi- 
nion avait  déjà  été  mise  en  avant,  puis  réfutée.  Nothnagel  s'appuie  sur 
des  expériences  nombreuses,  dans  lesquelles  il  démontre  qu'en  effet 
une  piqûre  ou  une  section  de  la  protubérance  amène  des  convulsions 
qui  ressemblent  à  la  chorée  électrique,  mais  ces  convulsions  n'ont  rien 
de  l'attaque  d'épilepsie  véritable,  soit  chez  l'homme,  soit  chez  les 
animaux. 

En  effet,  l'épilepsie  est  une  affection  qui  se  manifeste  par  des  atta- 
ques revenant  à  des  époques  plus  ou  moins  éloignées  et  caractérisées 
par  quatre  grands  signes,  qui  sont  : 

1°  Des  mouvements  convulsifs,  toniques  et  cloniques; 
2°  La  perte  de  connaissance; 
3°  L'altération  de  l'intelligence  après  les  attaques; 
4°  Quelquefois  un  sommeil  plus  ou  moms  durable  après  des  atta- 
ques d'une  grande  intensité.  (Un  sommeil  de  trois  ou  quatre  mmutes  a 
été  observé  par  M.  Brown-Séquard  sur  un  animal  après  une  attaque.) 
Or  M.  Brown-Séquard  est  parvenu  à  reproduire  ces  attaques  com- 
plètes d'épilepsie  un  grand  nombre  de  fois,  en  blessant  un  point  quel- 
conque de  la  région  du  pont  de  Varole,  comprise  entre  les  tubercules 
nates  et  le  bulbe,  à  la  hauteur  de  la  troisième  vertèbre  cervicale. 


123 

Avec  une  section  plus  ou  moins  complète  de  la  moelle  au  voisinage 
du  bulbe,  on  donne  naissance  à  des  attaques  d'épilepsie  qui  durent 
deux  à  trois  minutes.  L'attaque  commence  par  un  mouvement  de  grat- 
tement de  la  face  opérée  par  la  patte  postérieure;  puis  les  convulsions 
commencent  de  ce  côté  du  corps  ;  la  même  chose  se  manifeste  alors 
de  l'autre  côté,  et  l'attaque  devient  complète,  avec  insensibilité  de  la 
face. 

Sur  dix  expériences  de  ce  genre,  on  peut  voir  se  produire  une  syn- 
cope respiratoire  et  cardiaque,  et  alors  l'épilepsie  manque. 

Dans  d'autres  circonstances,  la  section  n'est  pas  assez  étendue  pour 
amener  l'épilepsie,  ou  bien  celle-ci  peut  ne  se  produire  qu"un  certain 
temps  après  qu'on  a  opéré  la  section  de  la  moelle;  mais  il  faut  toujours 
que  le  cœur  n'ait  point  cessé  de  battre. 

A  ce  sujet,  M.  Brown-Séquard  rappelle  les  différences  qu'il  a  signa- 
lées, en  1855,  dans  des  leçons  faites  à  Dublin,  entre  Véiat  syncopal  et 
et  Vétat  asphyxique. 

Dans  l'état  syncopal,  l'animal  est  refroidi  comme  un  cadavre;  il  y  a 
cessation  de  tous  les  actes  vitaux  en  apparence,  avec  pâleur  et  livi- 
dité, mais  le  cœur  bat  encore  faiblement. 

Dans  l'état  asphyxique,  au  contraire,  on  voit  de  violents  mouve- 
ments convulsifs,  des  attaques  d'épilepsie,  avec  un  pouls  très-fort  et 
une  chaleur  extrême,  qui  se  conserve  encore  quelque  temps  après  la 
mort. 

M.  CnARcoT  :  Dans  les  apoplexies,  dans  les  grandes  lésions  centrales 
du  cerveau,  il  se  fait  en  quelques  heures  un  abaissement  de  plusieurs 
degrés  dans  la  température  centrale,  et  l'explication  à  en  donner  est 
difficile.  Au  dernier  congrès,  à  Inspriick,  Haydenhaën  a  rendu  compte 
d'expériences  dans  lesquelles  il  arrive  à  conclure  à  une  sorte  de  trans- 
formation des  forces,  en  dehors  d'une  simple  déperdition;  la  chaleur 
deviendrait  alors  latente. 

M.  Brown-Séquard  fait  remarquer  qu'après  la  section  de  la  moelle 
au-dessous  du  siège  central  de  l'épilepsie,  chez  un  animal  insufflé,  on 
peut  provoquer  une  attaque  épileptiforme  complète.  En  irritant  la  zone 
épileptogène  du  côté  opposé,  on  produit  une  sorte  d'attaque,  mais  moins 
violente. 

Après  avoir  coupé  la  moelle  au  voisinage  du  bulbe,  on  détermine 
dans  la  peau  du  cou  un  certain  degré  de  la  faculté  épileptogène.  Mais 
dans  ces  cas  on  ne  produit  pas  des  attaques  aussi  intenses  que  par  la 
section  du  nerf  sciatique. 

Donc  :  1*  La  moelle  épinière  seule  peut  donner  des  attaques  épi- 
leptiques; 


124 

2»  Et  la  production  de  la  zone  épileptique  peut  se  fajre  rapidement 
après  la  section  de  la  moelle,  mais  à  un  faible  degré. 

—  M.  Brown-Séquard  rappelle  que  dans  les  lésions  de  l'encéphale, 
on  constate  souvent  des  plaques  écchymotiques  du  côté  des  poumons. 
Il  a  obtenu  une  sorte  d'oedème  de  ces  mêmes  organes  dans  les  sections 
transversales  du  bulbe,  de  la  protubérance  ou  de  la  moelle.  Cette  sorte 
d'œdème  pulmonaire  se  produit  immédiatement  dans  les  expériences 
qu'il  a  faites;  mais  le  microscope  n'a  pas  encore  prononcé  sur  la  natura 
de  cette  lésion  pulmonaire. 

—  M.  Brown-Séquard  présente  un  cochon  d'Inde  issu  d'une  mère  qui 
a  déjà  produit  deux  petits  nés  avec  l'absence  de  plusieurs  doigts.  Ce 
dernier,  auquel  il  manque  une  phalange,  commence  à  devenir  épilep- 
tique, probablement  par  suite  de  l'altération  du  nerf  sciatique  de  ce 
côté. 

—  M.  JoBERT  expose  les  recherches  qu'il  vient  de  faire  sur  l'organe 
sciatiforme  des  poissons. 

Selon  lui,  cet  organe  existerait,  quoi  qu'on  en  ait  dit,  chez  tous  les 
poissons,  même  à  l'état  embryonnaire. 

Les  cellules  supérieures  de  cet  organe  sont  aplaties,  et  polygonales 
par  pression  réciproque,  et  elles  sont  perforées  au  centre  au  niveau  de 
l'organe  sciatiforme. 

M.  CoRNiL  demande  si  toutes  les  cellules  épithéliales,  comme  chez 
l'homme,  reçoivent  un  filet  nerveux,  ou  s'il  y  en  a  simplement  quelques- 
unes. 

M.  JoBERT  croit  qu'un  certain  nombre  seulement  de  ces  cellules  sont 
perforées  pour  correspondre  à  ces  filets  nerveux.  D'ailleurs  il  doit  re- 
mettre une  note  complète  à  ce  sujet. 

Contributions  a  l  étude  des  effets  physiologiques  et  thérapeutiqukb  de 
l'alcool,  par  le  docteur  Rabuteau. 

Dans  une  communication  faite  récemment  à  la  Société  de  biologie, 
j'ai  avancé  que  l'alcool  était  sinon  le  meilleur,  du  moins  l'un  des  plus 
excellents  diurétiques.  Ainsi,  tandis  qu'après  avoir  bu  100  centimè- 
tres cubes  d'eau  le  matin,  à  sept  heures  par  exemple,  on  ne  rend  en 
moyenne  qne  100  à  150  centimètres  cubes  d'urine  pendant  les  trois 
heures  suivantes,  on  en  rend  500  à  800  centimètres  cubes  après  avoir 
bu  100  centimètres  cubes  d'un  cognac  ordinaire. 

Ce  fait  intéressant  m'a  servi  à  expliquer  : 

1'  L'apparition  de  la  polyurie  succédant  witiiédiatement  à  des 
excès  alcooliques,  ce  qui  a  été  observé  maintes  fois  sans  que  l'on 


125 
connût  la  liaison  de  cet  état  morbide  avec  l'ingestion  exagérée  de 
l'alcool. 

2"  La  gnérison  par  l'alcool,  d'hydropisies  survenues  chez  les  bu- 
veurs après  la  privation  des  liqueurs  alcooliques,  et  qui  ne  pouvaient 
disparaître  que  par  le  retour  à  la  cause  qui  les  avait  déterminées, 
comme  l'a  observé  M.  Brierre  de  Boismont. 

3°  L'absence  des  sueurs  nocturnes  après  Tingestion  de  l'alcool.  J'ai 
proposé  à  ce  sujet  l'emploi  de  ce  médicament  si  simple  à  la  place  de 
l'acétate  de  plomb  qu'on  a  prescrit  d'une  manière  fâcheuse  aux 
phthisiques. 

J'appellerai  aujourd'hui  l'attention  de  la  Société  sur  une  interpréta- 
tion nouvelle  des  effets  de  l'alcool  considéré  comme  cause  de  la  goutte 
et  de  la  diathèse  urique. 

On  a  admis  que  l'alcool  ralentissait  les  combustions  organiques, 
parce  qu'il  diminue  la  température.  J'ai  contribué  de  mon  côté  à  éta- 
blir cette  action  modératrice  de  l'alcool  sur  la  nutrition,  eu  démontrant 
que,  sous  l'influence  de  200  grammes  de  cognac  pris  chaque  jour, 
l'urée  totale  de  la  journée  diminuait  de  plus  de  20  p.  100.  Ce  fait 
semblerait  confirmer  les  opinions  de  la  plupart  des  hygiénistes,  relati- 
vement à  l'étiologie  de  la  goutte.  En  effet,  pour  eux,  les  combustions 
étant  diminuées,  il  se  forme  dans  l'organisme  un  excès  d'acide  urique, 
corps  moins  oxydé  que  l'urée,  et  qui  se  transformerait  en  celle-ci  lorsque 
les  oxydations  sont  plus  actives  dans  l'économie.  Il  me  semble  que 
cette  théorie  ne  peut  être  admise  complètement  aujourd'hui. 

En  effet,  s'il  est  vrai  que  lorsque  les  oxydations  sont  activées  par 
l'exercice,  l'acide  urique  se  transforme  en  urée,  il  est  certain  que 
toutes  les  fois  qu'un  agent  introduit  dans  l'organisme  diminue  l'urée, 
il  diminue  également  l'acide  urique.  C'est  ainsi  qu'agissent  les  iodures,  le 
café,  le  thé  et  la  caféine,  d'après  des  recherches  déjà  publiées  par  moi 
ou  qui  le  seront  bientôt.  Ayant  eu  l'occasion  de  faire  déjà  près  de  huit 
à  neuf  cents  dosages  d'urée  dans  l'urine,  j'ai  pu  maintes  fois  observer 
cette  relation  entre  l'urée  et  l'acide  urique  à  l'état  normal.  Quand  lun 
de  ces  principes  varie  dans  un  sens,  l'autre  varie  dans  le  même  sens. 

L'alcool  ne  fait  pas  exception  à  cette  règle  générale.  Loin  d'aug- 
menter l'acide  urique,  il  le  diminue.  Et  augmenterait-il  d'ailleurs  cet 
acide  qu'il  en  favoriserait  l'élimination,  ainsi  que  celle  des  urates,  par 
suite  de  ses  effets  diurétiques  si  remarquables.  L'interprétation  que 
l'on  a  donnée  relativement  à  l'étiologie  de  la  goutte  et  de  la  diathèse 
urique  chez  les  gens  qui  font  bonne  chère,  et  qui  usent  largement  des 
liqueurs  alcooliques,  ne  repose  donc  sur  aucun  fait  scientifique.  C'est 
pourquoi  je  propose  l'explication  suivante. 

L'acide  urique  est  insoluble  dans  l'alcool  et  l'urate  de  soude  est  très- 


126 
peu  soluble  dans  ce  même  liquide.  Ces  deux  composés  sont  par  suite 
rendus  moins  solubles  dans  l'économie  sous  rinlluence  des  liqueurs  al- 
cooliques. Ils  se  déposent  en  certains  points,  là  où  la  circulation  est 
moins  active,  mais  où  l'alcool  peut  pénétrer  facilement,  comme  par- 
tout, à  cause  de  son  pouvoir  difFusible,  ou,  d'une  manière  plus  exacte, 
à  cause  de  sa  volatilité.  Arrivé  là,  il  précipite  peu  à  peu,  et  molécule  à 
molécule,  l'acide  urique  et  l'urate  de  soude. 

Je  ne  veux  point  dire  toutefois  que  l'alcool  soit  la  seule  cause  de  la 
goutte  et  de  la  diathèse  urique.  Le  défaut  d'exercice,  chez  les  indi- 
vidus qui  font  bonne  chère  et  ne  boivent  que  peu  ou  même  pas  de  li- 
queurs alcooliques,  est  certainement  l'une  des  causes  de  ces  maladies. 
L'acide  urique  peut  se  trouver  alors  augmenté, et  l'état  normal,  auquel 
je  faisais  allusion  plus  haut,  peut  ne  plus  exister.  J'ai  seulement  tenu 
à  préciser  le  rôle  de  l'alcool  que  je  considère  comme  n'augmentant 
pas  par  lui-  même  la  production  de  Cacide  urique  et  des  urates,  mais 
comme  précipitant  ces  principes  dans  ^économie. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 


Séance  du  9  juillet. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

ÉTDDES  BE  TUERMOMÉTRIE  DANS  LA  SYNCOPE  PROVOQUÉE  ET  DANS  LES  HÉMORRHA- 
GIES  artificielles;  TEMPÉRATURE  COMPARÉE  DES  CAVITÉS  CENTRALES  ET  DES 

TISSUS  PROFONDS  PÉRIPHÉRIQUES  ;  par  le  docteur  Laborde. 

Dans  une  des  dernières  séances,  j'ai  donné  uh  aperçu  des  modifica- 
tions parallèles  de  la  température  des  cavités  centrales  (thorax)  et  des 
tissus  profonds  périphériques  (muscles),  dans  la  syncope  expérimentale 
par  compression  directe  du  cœur. 

Ces  résultats  ne  diffèrent  pas  sensiblement  de  ceux  que  l'on  obtient 
en  produisant  la  syncope  par  la  section  instantanée  de  la  moelle  épi- 
nière  tout  au  voisinage  de  la  région  bulbaire. 

Voici  les  chiffres  obtenus  dans  une  de  nos  expériences,  pouvant  ser- 
vir de  type  :  chez  un  jeune  cochon  dinde,  dont  la  température  nor- 
male, avant  l'expérience,  était  : 

Dans  la  cavité  thoracique,  38° 

Dans  les  muscles  de  la  cuisse,    37°,4 

Après  avoir  dénudé  très-rapidement  et  dans  une  petite  étendue  la 
région  cervicale  supérieure  et  postérieure,  nous  incisons,  à  l'aide  d'un 


127 

bistouri  insinué  entre  les  lacunes  vertébrales,  la  moelle  aussi  complè- 
tement que  possible  :  l'animal  tombe  immédiatement  sur  le  flanc,  sans 
respiration,  le  cœur  arrêté  dans  ses  battements,  les  yeux  révulsés,  les 
membres  un  peu  roides;  mais  sans  convulsions  appréciables  ; 

A  ce  moment  : 
A  5  heures  20  minutes  du  soir  :  température  dans  le  thorax,      38', 

id.  dans  les  muscles,  36° 

A  5  heures  40  minutes  du  soir  :        id.  dans  le  thorax,      37° 

id.  dans  les  muscles,  34* 

A  6  heures  10  minutes  du  soir  :         id.  dans  le  thorax,      34° 

id.  dans  les  muscles,  30<» 

A  7  heures  un  quart  du  soir  :            id.  dans  le  thorax,      28° 

id.  dans  les  muscles,  24° 

A  9  heures  un  quart  du  soir  :           id.  dans  le  thorax,      22° 

id.  dans  les  muscles,  19° 

La  rigidité  cadavérique  s'établit. 

Il  importe  surtout  de  noter  à  part  la  décroissance  parallèle  des  deux 
températures,  la  disproportion  entre  la  modification  subie  au  début  par 
la  température  centrale,  qui  est  presque  nulle,  malgré  la  syncope  con- 
firmée, et  l'abaissement  presque  immédiat,  au  contraire,  de  la  tempé- 
rature périphérique. 

Dans  cet  ordre  de  faits,  il  nous  a  paru  intéressant  d'étudier  l'in- 
fluence exercée  par  les  hémorrhagies  artificielles,  et  de  comparer  ces 
divers  cas  d'hémorrhagies. 

Voici  un  exemple  relatif  à  l'/iemorrAagie  veineuse  et  à  Vhémorrliagie 
artérielle. 

Sur  un  jeune  cochon  d'Inde  très-vigoureux,  la  température  dans  les 
muscles  de  la  cuisse  droite  étant  32°,5  (l'animal  est  tout  tremblant  de 
peur). 

A  10  heures  et  demie  du  matin,  par  une  température  ambiante  de 
20  degrés,  je  sectionne  rapidement  la  veine  jugulaire  droite;  le  sang 
coule  noir  et  en  nappe  comme  dans  une  saignée. 

Après  une  diminution  successive,  l'hémorrhagie  s'arrête  à  10  heures 
40  minutes.  10  minutes  après  l'opération,  la  température  des  muscles 
de  la  cuisse  est  alors  à  32  degrés.  A  10  heures  45  minutes  elle  n'a  pas 
changé. 

Je  fais  alors  une  section  rapide  de  la  carotide  du  même  côté  :  le  sang 
jaillit  rapidement  et  abondamment.  L'animal  tombe  sur  le  flanc. 

A  10  heures  48  minutes,  c'est-à-dire  trois  minutes  après  la  section  du 
vaisseau,  convulsions  terminales. 

La  température  de  la  cuisse  est  tombée  à  31  degrés. 


128 

Dans  la  cavité  thoracique,  où  nous  avons  établi  à  demeure  un  de  nos 
thermomètres,  la  température  est  à  ce  moment  32°, 5. 

A  10  heures  50  minutes,  l'animal  est  mort. 

La  décroissance  de  la  température  se  fait  alors  dans  la  proportion 
suivante  : 

»A  11  heures  25  minutes cuisse,  27° 

thorax,  30° 

A  1  heure  (2  heures  et  demie  après  l'opération),    cuisse,  22° 

thorax,  25°, 5 

A  1  heure  35  minutes cuisse,  21°, 9 

thorax,  24°, 5 

A  8  heures  du  soir cuisse,  20* 

thorax,  22» 

Le  résultat  des  faits  expérimentaux  de  cette  nature,  c'est  la  diffé- 
rence d'influence  de  Vliémorrhagie  veineuse  et  de  Vhémorrhagie  arté- 
rielle sur  les  modifications  de  la  température  profonde;  presque  nulle 
dans  l'hémorrhagie  veineuse,  cqHq  modification  est  très-rapide  et  très- 
marquée  dans  l'hémorrhagie  artérielle. 

M.  Charcot  fait  remarquer  qu'en  Allemagne  la  plupart  de  ces  obser- 
vations ont  été  faites,  et,  relativement  à  la  saignée  ordinaire,  on  sait 
qu'il  existe  à  la  suite,  d'abord  un  léger  abaissement  de  la  température 
centrale,  puis  une  sorte  de  réaction,  que  les  sujets  observés  soient 
avec  ou  sans  fièvre. 

Plusieurs  théories  ont  été  données  pour  expliquer  ces  faits.  D'après 
celle  de  Fels,  en  particulier,  lorsqu'on  soustrait  une  certaine  quantité 
de  sang,  les  liquides  interstitiels  des  tissus  entreraient  en  circulation, 
et  ces  liquides  seraient  doués  de  qualités  pyrétogènes.  La  chose  n'est 
pas  impossible;  ce  qui  expliquerait  cet  abaissement  de  la  tempéra- 
ture, suivi  de  son  élévation. 

On  sait  d'ailleurs,  et  Wunderlich  l'a  parfaitement  démontré,  qu'il  y 
a  réfrigération  dans  la  saignée. 

M.  Charcot  rappelle  ensuite,  à  propos  de  la  température  centrale, 
l'effet  de  l'arrêt  du  cœur  sur  cette  température.  Il  a  pu  l'observer  chez 
une^femme  atteinte  de  rupture  du  cœur  avec  hémorrhagie  dans  le  péri- 
carde, et  qui  n'est  morte  qu'une  dizaine  d'heures  après  cette  rupture,  à 
la  suite  de  trois  ou  quatre  syncopes.  Une  heure  après  la  première  syn- 
cope, la  température  du  rectum  était  à  36  degrés,  température  relati- 
vement basse. 

Ce  même  effet  s'observe  encore  dans  le  cours  des  maladies  aiguës; 
dans  un  cas  de  pneumonie,  par  exemple,  où  Ion  rencontre  d'ordinaire 


129 
une  courbe  régulière,  M.  Charcot  a  vu  une  chute  de  la  température 
établissant  une  courbe  irrégulière  et  répondant  à  une  complication 
inflammatoire  du  côté  du  péricarde. 

On  observe  encore  un  abaissement  très-rapide  de  la  température 
centrale  dans  le  développement  de  la  péritonite  par  rupture  intesti- 
nale, dans  l'apoplexie  foudroyante  par  rupture  des  anévrysmes  mi- 
liaires.  D'ailleurs  le  phénomène  du  choc,  quel  qu'il  soit,  amène  tou- 
jours après  l'attaque,  mais  surtout  un  peu  après,  cet  état  de  collapsus 
avec  refroidissement,  état  qui  était  connu  déjà  des  anciens  auteurs. 

M.  Laborde  insiste  pour  qu'on  fasse  une  distinction  profonde  entre 
les  températures  selon  qu'elles  sont  prises  dans  tel  ou  tel  organe.  Le 
mot  température  centrale  ne  suffit  pas;  il  faut  y  ajouter  un  mot  qui  rap- 
pelle l'organe  où  elle  est  prise. 

—  M.  Renadt  communique  à  la  Société  le  résultat  de  ses  recher- 
ches sur  la  structure  du  cordon  ombilical.  Il  est  amené  par  ces  re- 
cherches à  se  trouver  en  désaccord  avec  Recklinhausen  sur  les  stomata 
et  les  canalicules  du  cordon.  Ces  stomata  et  ces  canalicules  n'existe- 
raient pas  selon  lui  ;  le  tissu  du  cordon  charrierait  simplement  une  ma- 
tière muqueuse  et  non  de  la  lymphe. 

—M.  Bert  rapporte  qu'il  a  fait  il  y  a  deux  ans,  avec  M.  Jolyet,  des  ex- 
périences au  sujet  d'injections  de  diverses  substances  dans  la  vessie, 
d'où  il  concluait  que  la  vessie  absorbe.  M.  AUing,  interne  des  hôpitaux, 
vient  de  reprendre  ces  expériences,  et  il  est  arrivé  à  des  résultats  très- 
significatifs. 

Si,  après  avoir  introduit  une  sonde  dans  la  vessie,  on  ouvre  le  ventre 
en  même  temps  qu'on  met  une  ligature  sur  l'urèthre,  et  qu'on  injecte 
une  solution  de  strychnine  dans  la  vessie,  l'animal  ne  meurt  pas. 

Mais  si  l'on  refait  l'expérience  en  injectant  la  solution  dans  l'urèthre 
seulement,  qu'on  a  séparé  de  la  vessie  par  une  ligature,  l'animal  meurt. 

D'où  il  suit  que  la  vessie  n'absorbe  pas,  et  que  le  canal  seul  absorbe  : 
c'est  là  une  solution  importante  qu'il  faut  appliquer  aux  résultats  si 
contradictoires  des  nombreuses  expériences  faites  à  ce  sujet  de- 
puis 1824. 

—  M.  Chouppe  présente  deux  pièces  d'anatomie  comparée. 

La  première  a  trait  à  un  poulet  qui  était  animé  de  mouvements  de 
rotation  pendant  la  vie,  et  chez  lequel  on  trouva  après  la  mort  : 

Les  lésions  de  la  pneumonie  dans  le  poumon  droit- 

Des  lésions  qui  se  rapprochent  de  celles  de  l'infection  purulente  dans 
le  foie; 

Une  endocardite  végétante  très-nette  à  la  valvule  mitrale,  et  dans 
l'aorte  un  caillot  récent  non  adhérent. 

C.  R.  1870.  9 


i30 

La  seconde  se  rapporte  à  un  poisson  trouvé  mort  le  4  juillet  avec  un 
ventre  très-dislendu,  contenant  150  grammes  de  liquide  citrin  et 
filant.  Les  deux  feuillets  péritonéaux  étaient  couverts  de  fausses  mem- 
branes, et  l'ovaire  était  le  siège  d'une  sorte  de  kyste  avec  nodosités 
formées  par  des  amas  de  cellules  purulentes  ou  granuleuses.  Les  parois 
étaient  composées  de  quelques  fibres  conjonctives.  En  un  mot,  cette 
tumeur,  placée  au  voisinage  des  parois  de  l'oviducte,  ressemble  à  un 
sarcome  encéphaloïde. 

M.  Bert  :  Ce.  dernier  cas  démontre  une  fois  de  plus  que  les  inflam- 
mations des  séreuses  existent  chez  les  animaux  à  sang  froid,  comme  les 
reptiles,  les  poissons,  etc.  Le  fait  a  été  démontré  de  la  façon  la  plus 
péremptoire;  mais  le  pus  est  plus  rare  que  les  fausses  membranes. 

La  séance  est  levée  à  six  heures. 


Séance  du  16  juillet. 

M.  Laborde  continue  l'exposé  de  ses  recherches  sur  les  variations 
de  température  selon  les  diverses  parties  du  corps.  (V.  la  séance  du 
Qjuillet,  p.  126.) 

1°  Dans  l'état  normal  ou  physiologique,  la  température  ce«0'a/e  chez 
les  animaux  mammifères,  représentée  par  la  température  de  la  cavité 
thoracique,  ne  coïncide  pas  avec  la  température  du  rectum,  ni  même 
avec  elle  des  muscles  des  membres. 

Trois  de  mes  thermomètres  étant  plongés,  l'un  dans  la  cavité  thora- 
cique, au  voisinage  du  cœur,  l'autre  dans  les  muscles  de  la  cuisse,  le 
troisième  dans  le  rectum  d'un  cochon  d'Inde  vigoureux,  voici  ce  que 
l'on  observe,  lorsque  la  colonne  mercurielle  s'est  fixée  dans  les  trois 
instruments,  c'est-à-dire  au  bout  de  trois  à  cinq  minutes  ; 

(Température  extérieure  à  l'air  libre- 25°.) 

Thermomètre  dans  le  thorax  (région  diaphragraatique).     37°      centig. 

Thermomètre  dans  le  rectum 36"        — 

Thermom.  dans  les  muscles  de  la  cuisse  (éiatstatique).    34°, 5     — 

Différence  de  1  degré  centig.  environ  entre  les  trois  régions. 

C'est  là  une  donnée  dont  il  importera  de  tenir  compte  dans  les  fu- 
tures observations  de  thermoraétrie  sur  les  animaux  ei  sur  l'homme, 
soit,  à  l'état  physiologique,  soit  à  l'état  pathologique,  —  et  qui  est,  peut- 
être,  de  nature  à  atténuer  l'exactitude  des  observations  faites  jusqu'ici 
avec  la  désignation  de  température  centrale  appliquée  à  la  tempéra- 
ture rectale. 

2°  Après  la  mort,  quelle  qu'en  soit  la  cause,  le  refroidissement  pro- 


131 
gressif  du  cadavre  subit,  dans  son  p'us  ou  moins  de  rapidité,  l'influence 
des  conditions  ambiantes  de  température;  mais  le  chifiFre  par  lequel  est 
exprimé  le  refroidissement  est  toujours  inférieur  d'au  moins  un  degré, 
à  celui  de  la  température  ambiante  actuelle. 

Voici  deux  exemples  pris  dans  deux  conditions  opposées  :  une  tem- 
pérature extérieure  très-élevée  etune  température  1res- basse. 

Premier  cas.  —Un  cochon  d'Inde  mort  à  la  suite  d'une  hémorrhagie 
artérielle,  —  et  ayant  après  la  mort  une  température  de 

32°5  centig.  dans  la  cavité  thoracique, 

31°  centig.  dans  les  muscles  de  la  cuisse, 
reste  placé,  durant  vingt-quatre  heures,  dans  un  milieu  dont  la  tempé- 
rature diurne  varie  de  24°  à  24°,5. 

Au  bout  de  ces  vingt-quatre  heures,  la  température  du  cadavre  est 
tombée  à 

22°, 5  centig.  dans  le  thorax, 

22°  centig.  dans  les  muscles. 

A  ce  moment,  les  deux  thermomètres  enlevés  de  leur  place  respec- 
tive remontent  presque  immédiatement  à  24°  et  24°, 5. 

La  température  du  cadavre  était  donc  inférieure  de  2  degrés  à  la 
température  ambiante. 

Deuxième  cas.  — Le  16  janvier  1870,  à  l'École  pratique  (pavillon  de 
M.  Ledentu),  la  température  extérieure  était  1  degré,  la  température 
du  pavillon,  fortement  chauffé  par  un  poêle  rougi,  de  5  à6  degrés  centig., 
sur  un  cadavre  nouveau,  complètement  refroidi  à  la  surface. 

Le  thermomètre,  enfoncé  dans  les  muscles  de  la  cuisse  gauche  (ré- 
gion antérieure),  marque  0  degré  et  s'y  maintient.  Dans  les  muscles  de 
l'avant-bras  du  même  côté,  même  température  0  degré. 

Ainsi  la  température  du  cadavre  dans  les  muscles  est  inférieure  de 
5  degrés  à  celle  de  la  température  ambiante  artificielle. 

M.  CoRNiL  demande  s'il  ne  faudrait  pas  tenir  compte,  pour  les  cada- 
vres, de  Tévaporation  qui  se  produit  à  la  surface  et  qui  est  capable  de 
le  refroidir. 

M.  Rabcteau  pense  qu'il  a  pu  se  glisser  quelques  erreurs  dans  des 
recherches  aussi  délicates  :  pour  sa  part,  il  a  peine  à  comprendre  qu'un 
corps  puisse  avoir  une  température  plus  faible  au  bout  d'un  certain 
temps  que  celle  du  milieu  ambiant. 

M.  Laborde  insiste  sur  la  réalité  des  phénomènes  qu'il  a  observés. 

M.  Rabutead  rapporte  que  Liebrich  n'a  pas  trouvé  avec  le  chloral 
les  mêmes  effets  sur  les  grenouilles  que  sur  les  lapins;  il  a  repris  ces 
expériences  avec  M.  Napierolski,  et  ses  résultats  sont  contraires  à  ceux 


132 
de  M.  Liebrich.  En  été,  les  grenouilles  sont  anesthésiées  parle  chloral, 
comme  les  animaux  à  sang  chaud. 

M.  Laborde  rappelle  que  les  grenouilles  sont  anesthésiées  dans  l'eau 
chaude,  ce  qui  infirmerait  les  conclusions  de  M.  Rabuteau. 

M.  Rabuteau  fait  remarquer  qu'il  ne  s'est  pas  placé  dans  les  mêmes 
conditions. 

—  M.  Leven  rapporte  des  expériences  d'après  lesquelles  le  strych- 
nisme  n'existe  pas  si  l'on  donne  en  même  temps  aux  animaux  l'aconi- 
tine  et  la  strychnine  dans  certaines  proportions.  D'oia  il  résulte  qu'on 
peut  opposer  la  paralysie  à  l'excitabilité  de  la  moelle. 

M.  Leven  démontre  ensuite,  par  d'autres  expériences,  comment  le 
curare  paralyse  la  moelle,  contrairement  à  l'opinion  de  M.  Vulpian. 
Pour  faire  ces  expériences  avec  le  curare,  comme  avec  l'aconitine,  il 
faut  que  la  circulation  soit  respectée  dans  les  membres,  et  alors  on 
voit  que  la  moelle  est  atteinte  par  l'aconitine  comme  elle  l'est  par  le 
curare. 

D'ailleurs,  si  l'on  donne  le  curare  à  un  animal,  on  voit  cesser  la  res- 
piration; la  sensibilité  et  la  motilité  se  perdent.  Donc  il  meurt  par  les 
centres  nerveux. 

Donc  les  poisons  tuent  le  système  nerveux  du  centre  à  la  périphérie, 
et  non  de  la  périphérie  au  centre. 

Deux  observations  d'oblitération  de  l'artère  vertébrale  du  côté  gauche  ; 
recueillies  par  M.  Luneau,  externe  dans  le  service  de  M.  Proust,  à 
la  Charité. 

Deux  malades  ont  succombé  dernièrement  et  à  quelques  jours  de 
distance,  dans  le  service  de  M.  Proust,  à  la  Charité,  à  une  affection  que 
nous  croyons  très-rare,  et  les  lésions  que  nous  avons  trouvées  à  l'au- 
topsie sont  de  nature  à  éclairer  en  quelques  points  la  pathologie  du 
bulbe  rachidien. 

I.  La  première  de  ces  malades  était  une  femme  âgée  de  68  ans,  qui 
entra,  le  29  mai  1870,  dans  la  salle  Sainte-Madeleine, 

Celte  femme,  qui  exerçait  la  profession  de  femme  de  ménage,  avait 
joui,  jusqu'au  commencement  de  cette  année,  d'une  bonne  santé  habi- 
tuelle. Elle  n'avait  jamais  eu  de  rhumatisme,  de  palpitations,  ni  d'œdème 
des  membres  inférieurs. 

Au  mois  de  janvier  de  cette  année,  elle  a  été  prise  d'une  attaque 
apoplecliforme  qui  lui  a  laissé  une  hémiplégie  dont  elle  a  mis  trois 
mois  à  se  relever  complètement. 
Le  29  mai,  jour  de  son  entrée,    à  huit  heures   du   matin,  pendan 


133 

qu'elle  était  occupée  à  faire  un  ménage,  elle  sentit  tout  à  coup  le  côté 
gauche  du  corps  subir  un  engourdissement  tel  qu'elle  s'affaissa  sur  elle- 
même. 

La  parole  lui  manqua  complètement,  et  elle  s'efforça  en  vain  d'ap- 
peler du  secours,  car  elle  avait  conservé  toute  sa  connaissance. 

On  l'apporta  à  l'hôpital,  et  le  lendemain  nous  constatons  l'état 
suivant  : 

La  malade  est  couchée  dans  le  décubitus  dorsal  avec  l'apparence  de 
la  plus  grande  faiblesse. 

Les  traits  sont  déviés  et  la  commissure  de  la  bouche  légèrement  tirée 
du  côté  droit.  L'orbiculaire  des  paupières  du  côté  gauche  n'est  point 
paralysé.  Les  pupilles  sont  normales.  L'hémiplégie  faciale  est  donc  fort 
incomplète. 

L'hémiplégie  du  côté  gauche  du  corps  est  également  plus  apparente 
que  réelle,  car  la  main  gauche  peut  serrer  avec  assez  d'énergie.  La  sen- 
sibilité cutanée,  loin  d'être  anéantie,  est  peut-être  un  peu  augmentée 
au  bras  et  à  la  jambe. 

Mais  les  symptômes  qui  dominent  tous  les  autres  sont  une  aphonie  et 
une  dysphagie  complètes. 

Le  malade  parle  à  voix  basse,  mais  répond  parfaitement  à  toutes  les 
questions  qu'on  lui  pose,  et  son  intelligence  est  si  nette  quelle  a  con- 
servé toute  sa  gaieté  et  qu'elle  répond  en  souriant. 

La  langue  est  déviée  du  côté  gauche,  ses  mouvements  sont  embar- 
rassés; l'expuilion  est  impossible. 

Le  voile  du  palais  est  complètement  insensible.  Les  muscles  du  pha- 
rynx sont  également  paralysés.  Dans  l'arrière-gorge,  des  mucosités 
abondantes  et  épaisses  se  sont  accumulées,  et  l'on  est  obligé  de  les  re- 
tirer artificiellement.  L'air  qui  passe  à  travers  ces  mucosités  pendant 
la  respiration  produit  des  râles  bruyants,  et  il  survient  de  temps  en 
temps  des  accès  de  suffocation  provoqués  par  le  passage  de  ces  muco- 
sités dans  les  voies  aériennes. 

La  langue,  les  muscles  du  pharynx  et  du  larynx  sont  donc  manifes- 
tement paralysés. 

Au  cœur  on  entend  des  bruits  tumultueux,  sans  qu'on  puisse  distin- 
guer de  souffle.  Les  artères  sont  athéromateuses.  Le  pouls  est  à  72, 
large,  irrégulier  et  mou.  La  température  du  creux  axillaireestde  36°, 6. 

Dans  toute  l'étendue  de  la  poitrine  il  existe  des  râles  sibilants  et 
ronflants,  mais  pas  de  râles  humides. 

Les  trois  jours  suivants,  les  choses  sont  restées  dans  le  même  état  ; 
cependant  il  y  a  eu  une  légère  amélioration  dans  tous  les  symptômes. 

La  malade,  qui  jusque-là  avait  pris  des  aliments  à  l'aide  de  la  sonde 
œsophagienne,  a  pu  le  2  juin,  veille  de  sa  mort,  avaler  seule  quelques 


134 

cuillerées  de  bouillon  sans  avoir  à  redouter  d'accès  de  suffocation 
comme  les  jours  précédents. 

Le  même  jour,  la  voix  est  un  peu  revenue.  La  température  et  le  pouls 
se  sont  relevés. 

De  plus,  il  est  facile  d'analyser  ce  même  jour  les  troubles  de  la  mo- 
tilité  du  côté  gauche;  les  forces,  en  effet,  sont  bien  revenues.  Quand 
on  commande  à  la  malade  de  prendre  de  la  main  gauche  un  objet 
quelconque  placé  sur  sa  table  de  nuit,  elle  lance  le  bras  dans  cette  di- 
rection, heurte  et  renverse  l'objet  qu'elle  veut  prendre,  le  roule  en 
tous  sens  avant  de  pouvoir  le  saisir,  et  le  laisse  tomber  quand  elle 
veut  l'approcher  de  sa  bouche.  Toute  précision  lui  manque  dans  les 
mouvements,  et  quand  on  lui  dit  de  porter  le  doigt  au  bout  de  son  nez, 
elle  vient,  après  des  mouvements  irréguliers,  choréiformes,  le  placer 
brusquement  sur  l'œil  ou  sur  la  bouche. 

La  miction  involontaire  persiste  depuis  le  commencement  de  la  ma- 
ladie; il  n'y  a  pas  eu  d'évacuations  alvines. 

Le  3  juin,  le  pouls  s'élève  tout  à  coup  à  112;  le  hoquet  survient  et  la 
malade  succombe  le  lendemain  matin. 

A  I'autopsie,  la  moelle  a  été  enlevée  avec  les  plus  grandes  précau- 
tions; des  coupes  pratiquées  à  différentes  hauteurs  ont  démontré  qu'elle 
n'avait  pas  subi  de  lésion. 

Les  artères  vertébrales  ont  été  divisées  un  peu  au-dessous  de  l'en- 
droit où  elles  pénètrent  dans  la  diire-mère  rachidienne.  Le  tronc  basi- 
laire  et  la  vertébrale  du  côté  droit  ont  un  canal  parfaitement  libre; 
quelques  plaques  d'athérome  existent  sur  leurs  parois.  Les  sylviennes 
ne  sont  pas  obstruées. 

Mais  l'extrémité  supérieure  de  l'artère  vertébrale  du  côté  gauche 
est  oblitérée  par  un  caillot  sanguin  dont  le  sommet  coniiiue  est  dirigé 
du  côté  de  l'encéphale,  et  qui  se  continue  en  bas  dans  les  sinuosités 
que  décrit  l'artère  avant  de  pénétrer  dans  le  canal  rachidien. 

La  coloration  du  caillot,  vu  à  travers  les  parois  de  l'artère,  est  noi- 
râtre. L'extrémité  du  cône  paraît  un  peu  décolorée. 

Le  caillot  remplit  et  distend  l'artère  où  il  semble  enfoncé  comme  un 
coin.  Il  est  distant  d'environ  1  centimètre  et  demi  du  tronc  basilaire. 

L'artère  cérébelleuse  postérieure  et  inférieure  est  oblitérée  dans 
toute  son  étendue;  les  rameaux  qui  en  parient  pour  pénétrer  dans  le 
bulbe  sont  également  remplis. 

M.  Charcot,  qui  a  bien  voulu  examiner  cette  pièce,  a  cherché  si  la 
substance  médullaire  n'était  pas  altérée  au  niveau  de  ces  artères  obli- 
térées qui  sont  les  artères  nourricières  du  bulbe.  Des  fragments  pris  au 
niveau  du  plancher  du  quatrième  ventricule,  non  loin  des  noyaux  d'o- 
rigine de  l'hypoglosse,  du  spinal  et  du  facial  ont  laissé  voir  au  micros- 


135 

cope  des  corps  granuleux  et  des  altérations  semblables  à  celles  qu'on 
trouve  dans  le  ramollissement  cérébral  ischémique. 

Le  lobe  gauche  du  cervelet  présentait  aussi  des  points  ramollis. 

Ce  travail  de  ramollissement  s'était  évidemment  accompli  depuis  que 
l'oblitération  artérielle  s'était  faite,  et  il  n'y  a  rien  là  qui  nous  étonne 
si  nous  nous  rappelons  que  la  malade  n'est  morte  qu'au  septième  jour. 

Persuadé  que  nous  avions  sous  les  yeux  une  embolie  de  l'artère  ver- 
tébrale, nous  en  avons  cherché  l'origine  dans  les  cavités  gauches.  Les 
valvules  étaient  athéromateuses,  surtout  la  valvule  mitrale,  mais  il  n'y 
avait  aucune  trace  d'érosion  à  leur  surface.  L'aorte,  au  contraire,  pos- 
sédait de  nombreuses  plaques  d'athérome  ulcérées. 

Enfin,  pour  avoir  une  probabilité  de  plus  en  faveur  de  l'embolie,  nous 
avons  recherché  avec  grand  soin  s'il  n'y  avait  pas  d'infarctus  dans  les 
organes  abdominaux  qui  en  sont  le  plus  habitHellement  le  siège.  Le 
foie  et  la  rate  n'en  portaient  pas  de  traces,  mais  le  rein  gauche  avait 
sur  son  bord  convexe  une  cicatrice  profonde,  non  douteuse,  d'infarc- 
tus ancien. 

Aussi,  en  raison  de  la  brusquerie  de  l'attaque,  en  raison  de  la  forme 
du  caillot,  en  raison  des  lésions  de  l'aorte  et  enfin  de  la  présence  d'un 
infarctus  ancien  du  rein  gauche,  nous  pensons  qu'il  faut  rapporter  à 
une  embolie  l'oblitération  de  l'artère  vertébrale  qui  a  été  le  point  de 
départ  des  accidents  que  nous  avons  observés  ici. 

Ce  premier  point  établi,  nous  ne  saurions  trop  mettre  en  relief  les 
altérations  du  bulbe  que  le  microscope  a  démontrées  à  M.  Charcot. 
Elles  viennent  confirmer  par  un  fait  pathologique  les  expériences  mo- 
dernes qui  ont  été  entreprises  pour  démontrer  avec  quelle  rapidité  la 
substance  des  centres  nerveux  se  désorganise  quand  elle  est  privée  des 
matériaux  de  nutrition  que  le  sang  lui  fournit. 

IL  Le  second  fait,  que  nous  avons  observé  quelques  jours  après,  se 
rapproche  beaucoup  du  premier. 

11  s'agit  cette  fois  d'un  cocher  de  63  ans,  qui  entra  le  6  juillet  dans 
la  salle  Saint-Jeau-de-Dieu. 

Quoique  ce  malade  ail  fait  des  abus  considérables  de  boissons  al- 
cooliques, il  n'accuse  aucune  maladie  grave  dans  ses  antécédents. 

La  veille  de  son  entrée,  après  son  repas  du  soir,  il  a  été  pris  de  mal- 
aise. Pendant  la  nuit  des  vomissements  survinrent,  et  il  remarqua  à 
ce  moment,  qu'il  lui  était  impossible  davaler  des  liquides. 

En  même  temps  il  essaya  en  vain  de  se  lever  et  de  se  tenir  debout, 
celle  difficulté  de  se  tenir  debout  était  survenue  brusquement.  Les 
jours  précédents  encore,  le  malade  avait  pu  faire  14  kilomètres  sans  se 
fatiguer. 


136 

A  son  entrée  à  l'hôpital  on  constate  une  grande  faiblesse  musculaire 
ei  une  sorte  de  résolution  générale. 

Malgré  cela  le  malade  conserve  toute  son  intelligence  et  toute  sa 
gaieté. 

Il  y  a  une  impossibilité  complète  d'avaler,  et  cependant  le  voile  du 
palais  se  contracte  bien  et  les  liquides  rejetés  ne  passent  ni  dans  le 
larynx,  ni  dans  les  fosses  nasales. 

Les  membres  supérieurs  ne  semblent  pas  paralysés,  et  la  pression  de 
la  main  est  assez  énergique.  Le  tremblement  des  mains  est  très-marqué. 
Le  malade  peut  cependant  très-bien  porter  à  sa  bouche  la  cuiller  ou  le 
verre  qu'on  lui  commande  de  prendre  sur  sa  table  de  nuit.  Le  tremble- 
ment des  mains  communique  à  ces  objets  un  léger  mouvement,  mais  il 
n'y  a  pas  de  phénomènes  ataxiques. 

Il  existe  un  peu  d'hypereslhésie  aux  membres  inférieurs,  mais  ce 
qu'il  y  a  de  remarquable  de  ce  côté,  c'est  que  lorsqu'on  fait  lever  le 
malade  on  le  voit  tituber,  chanceler  comme  un  homme  paralysé,  avec 
une  grande  tendance  à  se  laisser  tomber  du  côté  gauche;  il  a  même 
fait  des  chutes  de  ce  côté,  et  il  porte  au  coude  une  plaie  qui  l'atteste. 

Aucune  tendance  au  recul  ou  à  la  progression  en  avant;  aucun  phé- 
nomène d'incordination,  et  s'il  restait  couché  on  ne  s'apercevait  cer- 
tainement pas  des  signes  de  faiblesse  que  nous  venons  d'indiquer  aux 
membres  inférieurs. 

Nous  ne  constatons  rien  du  côté  des  yeux,  sinon  une  ophthalmie  an- 
cienne de  l'œil  gauche. 

Les  artères  sont  athéromateuses. 

Dans  la  nuit  qui  suivit  son  entrée,  il  y  eut  un  peu  d'agitation;  le  ma- 
lade se  leva;  on  put  le  ramener  assez  facilement  à  son  lit. 

Le  lendemain  matin  il  nous  annonça  qu'il  se  trouvait  beaucoup 
mieux  et  qu'il  avait  pu  avaler  quelques  cuillerées  de  liquide. 

On  vint  l'examiner  à  deux  heures;  il  répondit  avec  sa  parfaite  con- 
naissance, put  s'asseoir  sur  son  lit,  et  à  peine  venait-on  de  le  quitter 
qu'il  retomba  à  la  renverse  et  mourut  aussitôt. 

Nous  trouvons  à  I'adtopsie  les  valvules  du  cœur  épaissies  et  recou- 
vertes de  plaques  athéromateuses.  La  paroi  interne  de  l'aorte  est  cou- 
verte également  de  concrétions  calcaires,  et  plusieurs  plaques  sont 
manifestement  érodées  et  ulcérées. 

Les  artères  de  la  base  de  l'encéphale  sont  également  envahies  par 
l'athéromp.  Le  tronc  basilaire  ressemble  à  un  tube  rigide  dont  on  dé- 
prime difficilement  les  parois. 

L'artère  vertébrale  du  côté  gauche  est  absolument  dans  le  même 
état  que  la  basilaire.  A  1  centimètre  de  son  abouchement  dans  l'artère 
basilaire,  elle  est  complètement  obstruée  par  un  caillot  sanguin  déco- 


137 
loré,  jaunâtre.  Ce  caillot  n'a  guère  plus  de  1  centimètre  de  longueur,  et 
la  cérébelleuse  postérieure  et  inférieure  qui  sur  cette  pièce  naît  au- 
dessous  du  point  où  elle  naît  habituellement  est  parfaitement  libre  et 
n'est  nullement  obstruée. 

Nous  n'avons  pas  trouvé  de  traces  d'infarctus  dans  les  organes  abdo- 
minaux. 

En  résumé,  les  symptômes  qui  nous  ont  frappé  chez  ce  malade  sont 
d'abord  un  début  brusque,  quoique  moins  caractérisé  que  chez  notre 
premier  malade,  puis  cette  paralysie  de  la  partie  supérieure  de  l'œso- 
phage. Ni  les  lèvres,  ni  la  langue,  ni  le  voile  du  palais,  ni  le  pharynx, 
ni  le  larynx  n'étaient  ici  en  cause.  Le  malade  pouvait  opérer  les  pre- 
miers temps  de  la  déglutition,  il  conservait  un  instant  les  liquides  in- 
gérés, puis  il  était  forcé  de  les  rejeter  un  instant  après  par  une  sorte 
de  régurgitation,  absolument  comme  s'il  avait  eu  un  rétrécissement  de 
la  partie  supérieure  de  l'œsophage. 

Nous  ne  craignons  pas  de  dire  que  si,  dans  notre  premier  cas,  le  groupe 
des  symptômes  que  nous  observions  pouvait  faire  supposer  à  peu  près 
la  lésion  qui  les  provoquait,  le  début  insidieux  chez  notre  second  ma- 
lade, l'absence  presque  complète  de  signes  sur  lesquels  on  pût  baser 
un  diagnostic  rendait  ce  diagnostic  extrêmement  difficile.  C'est  pour- 
quoi il  nous  paraît  bon  que  ces  faits  soient  connus,  car  en  pareille  oc- 
casion le  pronostic  étant  très-grave,  il  faut  savoir  se  tenir  prêt  à  toute 
éventualité. 

M.  CflARcoT  fait  remarquer  tout  l'intérêt  qui  s'attache  à  ces  deux 
communications  dans  lesquelles  il  a  été  permis  d'obtenir  les  phéno- 
mènes d'ischémie  bulbaire  avec  ramollissement  circonscrit  du  bulbe. 
Les  phénomènes  qu'on  a  constatés  se  rapprochent  sensiblement  de 
ceux  qui  s'observent  dans  la  paralysie  labio-glosso-pharyngée. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 


Séance  du  23  juillet. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté 

M.  Rabuteau,  à  propos  du  procès-verbal,  revient  sur  ce  qu'il  a  dit  dans 

la  dernière  séance,  au  sujet  du  chloral. 
M.  Liebrich  a  constaté  l'anesthésie  par  le  chloral  chez  les  grenouilles. 

M.  Gubler  expérimentant  en  hiver,  n'a  point  constaté  cette  anesthésie. 

La  vérité  se  trouve  du  côté  de  M.  Liebrich;  l'interprétation  à  donner 

consiste  dans  la  métamorphose  du  chloral  qui  n'a  pas  lieu  en  hiver, 

tandis  qu  elle  a  lieu  en  été. 


138 

M.  Ranvier  :  J'ai  expérimenté  également  le  chloral  sur  les  grenouilles, 
par  une  température  atmosphérique  élevée.  La  solution  saturée  de  chlo- 
ral dont  je  me  servais  était  au  centième:  c'est  celle  qui  m'a  semblé  la 
meilleure  pour  obtenir  des  résultats  assez  rapides  ;  en  y  ajoutant  une 
partie  d'eau  et  en  y  plongeant  une  grenouille,  on  observe  un  empoi- 
sonnement lent  et  progressif. 

Tout  d'abord  l'animal  n'est  pas  anesthésié,  mais  hypnotisé.  La  gre- 
nouille étant  retournée  et  mise  sur  le  dos,  reste  immobile;  si  on  la 
touche,  elle  éprouve  une  secousse  et  se  replace  sur  le  ventre.  Ce  n'est 
que  plus  tard,  la  grenouille  étant  sortie  de  la  solution,  un  quart  d'heure 
après  environ  que  l'aneslhésie  a  lieu. 

Avec  une  solution  au  deux-centième,  si  l'on  fait  une  injection  hy- 
podermique, les  mêmes  effets  se  produisent,  mais  avec  un  intervalle 
moindre  entre  les  deux  périodes. 

M.  Rabuteau  :  J'ai  constaté  en  effet  que  d'abord  les  grenouilles  sont 
excitées,  puis  qu'elles  deviennent  immobiles;  si  alors  on  les  pique 
elles  ne  sentent  pas,  mais  si  on  les  pince,  elles  se  retirent,  et  plus 
tard  elles  ne  sentent  plus  rien  ;  le  cœur  ne  cesse  pas  de  battre. 

M.  Ranvier  :  Le  fait  important  est  de  savoir  que  l'hypnotisme  précède 
l'anesthésie. 

M.  Laborde:  Les  grenouilles  employées  par  M.  Ranvier  meurent-elles 
après  l'anesthésie? 

M.  Ranvier  :  Je  ne  les  ai  pas  vues  mourir. 

M.  Laborde  :  J'ai  observé  les  mêmes  phénomènes  d'hypnotisme  suivi 
d'aiiesthésie  même  en  ne  plongeant  dans  la  solution  de  chloral  que  les 
pattes  des  grenouilles.  Mais  quant  à  moi,  toutes  les  fois  que  les  gre- 
nouilles ont  présenté  une  anesthésié  complète,  elles  sont  mortes  en- 
suite. Il  y  a  là  probablement  aussi  une  question  de  dose. 

M.  Carville  :  En  janvier  dernier,  j'ai  fait  de  mon  côté  des  recherches 
sur  le  chloral,  pour  savoir  sur  quel  organe  il  portait  son  action.  J'ai 
toujours  vu  que  les  grenouilles  anesthésiées  mouraient.  J'ai  vu  ensuite 
qu'à  l'aide  d'injections  hypodermiques  faites  dans  la  patte  de  la  gre- 
nouille,  la  tête  étant  enlevée,  le  chloral  produisait  son  action  :  il  le 
produisait  encore  après  l'ablation  du  bulbe,  mais  une  fois  la  moelle 
détruite,  toute  action  du  chloral  était  également  anéantie,  de  sorte 
qu'il  m'a  été  possible  de  conclure  à  l'action  du  chloral  sur  la  moelle. 
Le  chloral  agit  donc  sur  la  moelle  avant  d'agir  sur  le  cerveau  :  car  si 
la  moelle  est  détruite,  la  mort  a  lieu  rapidement,  avec  ralentissement 
des  battements  du  cœur. 

M.  Legros  :  J'appuie  la  manière  de  voir  de  M.  Carville  ;  la  moelle  est 
touchée  avant  le  cerveau,  et  le  chloral  fait  cesser  les  mouvements  cho- 
réiques  sur  le  chien  avant  les  mouvements  volontaires. 


139 

M.  Carville  :  Je  rapporterai  à  ce  propos  le  fait  d'un  jeune  chien  pris 
de  tétanos  probablement  spontané,  dans  une  écurie  de  Clamart  où  se 
trouvait  un  cheval  atteint  de  tétanos  et  deux  autres  jeunes  chiens 
également  tétanisés.  Tons  ces  aniniaux  sont  morts,  sauf  le  premier  au- 
quel on  administra  du  chloral,  et  qui  en  une  demi-minute  s'endormit. 
On  ne  sait  pas  malheureusement  ce  qu'il  est  devenu. 

Tous  ces  ehieris  tétaient  à  la  même  mère  sans  que  celle-ci  fût 
atteinte  de  tétanos. 

—  A  propos  du  procès-verbal,  M.  "Vulpian  fait  remarquer  que  la  ma- 
nière de  voir  de  M.  Leven  est  contraire  aux  idées  généralement  reçues 
en  physiologie.  On  admet  les  effets  de  paralysie  sur  les  nerfs  d'abord, 
sans  nier  absolument  l'action  des  poisons  sur  la  moelle. 

—  M.  Ranvier,  inscrit  depuis  deux  séances  pour  répondre  à  M.  Le- 
gros  au  sujet  de  la  communication  de  M,  Renaud  sur  la  structure  du 
cordon  ombilical,  prend  la  parole. 

En  parlant  des  cellules  des  tendons.  M.  Legros  a  dit  qu'on  trouvait 
les  extrémités  des  cellules  s'efïilant,  et  que  les  fibres  des  tendons 
naissent  aux  dépens  de  ces  cellules.  C'est  là  une  opinion  ancienne, 
mise  en  avant  par  Schwan,  admise  d'abord  par  Henle,  mais  qu'on  est 
surpris  de  voir  accepter  encore  aujourd'hui.  Henle  lui-même  a  changé 
d'opinion  à  ce  sujet,  et  avec  de  bonnes  préparations  l'idée  ancienne 
n'est  plus  souténable.  Il  est  impossible  de  saisir  en  effet  une  relation 
directe'entre  les  fibres  tubulées  et  les  fibres  des  tendons.  Ces  der- 
nières ne  se  développent  donc  pas  aux  dépens  des  cellules  tubulaires. 

M.  Legros  a  nié  ces  cellules  tubulaires.  MM.  Kœlliker,  Ludwig  et 
Schweigger-Seydel,  qui  ont  vu  mes  préparations,  les  admettent. 

Dans  le  fait  de  M.  Renaud,  M.  Legros  objecte  que  les  cellules  du 
cordon  ne  sont  pas  des  cellules  plates.  C'est  là  un  fait  qu'il  sufiit  de 
regarder  pour  constater  sa  réalité. 

Pour  le  mot  endotliélium  admis  par  His,  il  ne  signifie  rien  ici  et  n'a 
par  conséquent  aucune  importance. 

M.  Legros  :  C'est  précisément  au  sujet  de  ce  mot  endothélium  que 
j'ai  été  amené  à  faire  quelques  observations. 

M.  Rantier  :  J'ajouterai  que  les  cellules  du  tissu  conjonctif  ne  sont 
jamais  dans  l'intérieur  des  faisceaux  connectifs.  Les  auteurs  qui  les 
ont  décrites  au  centre  de  ces  faisceaux  se  sont  laissé  prendre  à  des 
illusions  d'optique.  Kœlliker  a  supprimé  dans  sa  deuxième  édition  les 
figures  qu'il  en  avait  données  dans  sa  première.  Frey  persiste  à  les 
représenter  ;  mais  il  faut  bien  savoir  que  chaque  faisceau  représente 
une  individualité  bien  distincte,  à  la  surface  duquel  on  trouve  accolés 
les  éléments  cellulaires.  L'acide  acétique,  en  individualisant  les  fais- 


140 

ceaux,  rend  cette  distinction  très- évidente.  Toujours,  en  un  mot,  les 
cellule*  sont  à  la  surface,  ce  qui  rend  impossible  toute  idée  de  forma- 
tion des  faisceaux  de  tissu  conjonctif  par  ces  cellules. 

Schweigger-Seydel  a  émis  l'opinion  d'une  sécrétion  extérieure  aux 
cellules  pour  la  formation  de  ces  faisceaux  conjonctifs  dans  la  cornée. 

M.  Brown-Séquard  :  Dès  l'annnée  1865  j'avais  été  à  même  d'observer, 
après  la  section  des  racines  des  nerfs  dorsaux  d'un  côté,  une  hyper- 
eslhésie  avec  paralysie  du  mouvement  dans  le  côté  correspondant,  et 
de  plus  anesthésie  dans  le  membre  postérieur  du  côté  opposé.  C'é- 
taient là  les  mêmes  phénomènes  qu'on  obtient  par  la  section  d'une 
moitié  latérale  de  la  moelle  épinière  au  cou,  au-dessus  de  l'origine  du 
nerf  phrénique. 

Toujours  ces  phénomènes  ont  lieu  à  des  degrés  plus  ou  moins  ac- 
cusés. 

Si  l'on  a  mis  à  nu  le  diaphragme  et  qu'on  enlève  une  épaule,  on  voit 
la  moitié  du  diaphragme  et  les  muscles  intercostaux  du  côlé  où  l'on  a 
pratiqué  cette  mutilation,  agir  avec  plus  d'énergie.  Si  l'on  vient  à  lier 
le  paquet  vasculo-nerveux  qui  répond  aux  membres  supérieurs,  et 
qu'on  ouvre  le  thorax,  on  voit  alors  s'augmenter  l'exagération  des  mou- 
vements de  la  moitié  correspondante  du  diaphragme  et  des  muscles 
intercostaux  de  ce  côlé.  Si  on  lie  simplement  les  vaisseaux,  il  ne  se 
produit  rien  ;  si  au  contraire  la  ligature  porte  sur  les  nerfs,  ces  phé- 
nomènes se  montrent. 

On  ne  peut  guère  les  expliquer  que  par  une  irritation  des  nerfs  du 
bras;  agissant  sur  la  moelle  par  anémie  reproduisant  une  paralysie 
vaso-motrice  de  ce  même  côlé  du  corps. 

Ces  mêmes  phénomènes  augmentent  par  l'ablation  du  ganglion  Iho- 
racique  supérieur  correspondant. 

Dans  quatre  cas  de  lésions  du  ganglion  thoracique  supérieur  gauche, 
il  s'est  produit  un  œdème  considérable  du  poumon  correspondant  sans 
hémorrhagie. 

Dans  l'un  de  ces  cas  les  deux  ganglions  thoraciques  supérieurs  ont 
été  intéressés,  et  l'œdème  s'est  montré  des  deux  côtés. 

Dans  un  cinquième  cas,  semblable  au  précédent,  il  s'est  encore 
montré  un  peu  d'œdème. 

Dans  vingt-deux  cas  où  le  ganglion  toutentier  a  été  enlevé,  l'œdème 
n'a  pas  eu  lieu. 

Dans  quelques  cas  les  ganglions  ont  été  lésés  légèrement,  et  on  a 
vu  paraître  seulement  un  peu  d'œdème. 

Dans  beaucoup  d'autres  cas  le  ganglion  n'a  pas  été  touché,  et  il  ne 
s'est  produit  aucun  phénomène  particulier  du  côté  des  poumons. 


141 

Il  y  a  donc  là  une  série  de  faits  positifs  et  négatifs  qui  ont  tous  un 
très-grand  intérêt. 

Dans  un  cas  de  destruction  du  ganglion,  on  a  observé  un  mouve- 
ment de  manège  du  côté  opposé. 

Notons  aussi  que  l'œil  se  ferme  à  moitié  du  côté  correspondant. 
Quant  à  la  pupille,  je  l'ai  vue  deux  fois  contractée,  deux  fois  resser- 
rée, sans  qu'il  me  soit  possible  de  savoir  pourquoi. 

Dans  un  cas  de  destruction  des  deux  grands  sympathiques,  j'ai  pu 
observer  chez  un  cochon  dinde,  après  trois  ou  quatre  mois,  que  le 
cerveau  était  et  plus  petit  et  plus  congestionné  que  chez  un  animal  du 
même  âge  n'ayant  pas  subi  cette  opération. 

M.  Carville  :  Cette  exagération  de  mouvement  dans  la  moitié  du 
diaphragme  et  les  muscles  intercostaux  du  côté  où  l'épaule  a  été  en- 
levée n'était-elle  pas  précisément  la  conséquence  de  cette  ablation, 
uniquement  dans  le  but  physiologique  de  suppléer  les  mouvements  de 
l'épaule  qui  manque? 

M.  Brown-Séquard :  Je  croirais  plus  volontiers  l'inverse;  et  si  cette 
suppléance  devait  avoir  lieu,  ne  serait-ce  pas  plutôt  du  côté  sain? 

M.  Carville:  J'ai  souvent,  sur  des  lapins,  enlevé  le  ganglion  thora- 
cique  supérieur  et  cela  sans  tournoiement.  Il  est  vrai  que  chez  les  lapins 
c'est  une  opération  difficile. 

M.  Brown-Séquard  :  Je  n'ai  opéré  que  sur  des  cochons  d'Inde,  et 
toujours  à  gauche,  où  l'opération  est  plus  facile.  Or,  sur  quatre  cas, 
j'ai  observé  quatre  fois  ce  tournoiement. 

C'est  une  sorte  de  roulement  du  côté  opposé,  qu'on  observe  aussi,  à 
un  moment  rapproché  de  la  mort,  chez  les  animaux  auxquels  on  a  en- 
levé une  capsule  surrénale.  Ce  mouvement  se  rapporte  probablement 
à  une  irritation  des  nerfs  du  grand  sympathique. 

Terminaisons  nerveuses  chez  les  poissons;  par  M.  Jobert,  docteur  en 
médecine,  licencié  es  sciences  naturelles,  et  M.  Grandeï  (de  Liège), 
docteur  en  médecine. 

Nous  avons  l'honneur  de  communiquer  à  la  Société  de  biologie  le 
résultat  de  recherches  entreprises  sur  les  terminaisons  nerveuses  chez 
les  poissons. 

Nos  travaux  communs  ont  été  surtout  dirigés  sur  les  poissons  d'eau 
douce,  et  comme  exemple  nous  avons  choisi  le  cyprinus  carpio. 

C'est  dans  la  lèvre  que  nous  avons  recherché  les  organes  terminaux 
nerveux  pour  en  faire  l'anatomie. 

Rappelons  en  quelques  mots  la  disposition  de  l'épiderme.  Celui-ci 
se  compose  de  plusieurs  couches  de  cellules;  les  plus  profondes,  qui 


142 
sont  implantées  directement  sur  le  derme,  ont  la  forme  de  longs  bâ- 
tonnets disposés  en  palissade  et  serrés  les  uns  contre  les  autres. 

Les  cellules  situées  au-dessus  sont  presque  lozangiques;  celles  qui 
leur  sont  superposées,  presque  rondes  et  peu  serrées.  Enfin  la  couche 
tout  à  fait  superficielle  de  l'épiderme  offre  des  cellules  irrégulièrement 
aplaties  et  polygonales  par  pression  réciproque. 

C'est  profondément  dans  l'épiderme  que  se  trouvent  ces  cellules  en 
forme  d'amphores  à  aspect  spécial,  à  noyaux  granuleux  réfractant  for- 
tement la  lumière,  qui  ont  reçu  le  nom  de  cellules  muqueuses  et  qui 
viennent  s'ouvrir  par  déhiscence  (Leydig)  à  la  surface  de  l'épiderme, 
produisant  ainsi  ce  mucus  abondant  qui  constitue  pour  l'animal  un  vé- 
ritable enduit  protecteur. 

Si  l'on  examine  une  coupe  convenablement  faite  de  la  lèvre  de  la 
carpe,  on  voit  au  milieu  de  cet  épiderme  décrit  plus  haut  s'élever  de 
hautes  papilles  du  derme.  Celles-ci,  simples  ou  composées,  se  terminent 
par  une  extrémité  creusée  en  forme  de  coupe,  et  sur  le  fond  de  cette 
coupe  repose  un  organe  ovoïde  d'aspect  particulier  que  Leydig,  qui  a 
signalé  le  premier  son  caractère,  nomme  organe  cyathiforme. 

Disons  de  suite  que  la  papille  dermique  présente  une  boucle  vascu- 
laire,  et  qu'à  côté  des  vaisseaux  enroulés  irrégulièrement  on  voit  monter 
directement  deux  faisceaux  nerveux  vers  le  sommet  de  la  papille. 

Au  niveau  du  fond  de  la  coupe,  le  tube  nerveux  disparaît. 

Ces  nerfs  sont  des  nerfs  à  myéline;  l'emploi  de  l'acide  osmique  le 
dénote  absolument. 

Si  l'on  examine  une  coupe  obtenue  sur  une  lèvre  de  carpe  ayant 
macéré  pendant  vingt-quatre  heures  environ  dans  une  solution  d'acide 
chromique  très-faible  (teinte  1/35  p.  100  de  baume  de  Canada),  on  voit 
que  le  fond  de  la  coupe  terminale  de  la  papille  contient  une  matière 
granuleuse  parsemée  de  noyaux  réfractant  fortement  la  lumière.  Presque 
toujours  après  cette  macération,  une  partie  de  l'épiderme  et  du  corps 
cyathiforme  a  disparu,  ce  qui  permet  de  constater  que  cet  organe  est 
formé  de  deux  sortes  d'éléments  bien  distincts. 

Ceux  de  la  périphérie,  figurés  déjà  par  Leydig,  ont  la  forme  de  lon- 
gues cellules  renflées  dans  leur  milieu,  et  à  leur  extrémité  supérieure 
présentant  un  noyau  brillant;  l'analomiste  allemand  leur  suppose  la 
propriété  dêlre  rétracliles.  Nous  ne  saurions  adopter  cet  avis. 

Ces  cellules  sont  insérées  au  bord  de  la  coupe  papillaire;  souvent 
une  seule  insertion  se  bifurque  et  donne  ainsi  naissance  à  deux  cel- 
lules. Le  bord  papillaire  est  finement  dentelé;  l'extrémité  d'insertiou 
des  éléments  cellulaires  l'est  également. 

Nous  disions  plus  haut  que  le  fond  de  la  coupe  papillaire  était  rempli 
par  une  masse  granuleuse  formée  de  noyaux.  Cette  masse  se  réduit  en 


143 

fibrilles,  et  l'on  voit  s'en  élever  verticalement  des  filaments  très-fins 
réfractant  fortement  la  lumière  et  offrant  une  ou  plusieurs  variétés 
caractéristiques.  Les  bâtonnets  forment  le  deuxième  élément,  l'élé- 
ment central  du  corps  cyathiforme. 

Nous  fondant  sur  l'aspect  caractéristique  de  la  masse  granuleuse  et 
de  ses  filaments ,  nous  avons  considéré  ceux-ci  comme  la  vraie  termi- 
naison du  nerf  papillaire. 

Les  éléments  périphériques  du  corps  cyathiforme  ne  seraient  plus 
alors  que  les  organes  protecteurs  appartenant  à  l'épithélium. 

Un  fait  important  à  constater  est  celui-ci  :  la  partie  supérieure  du 
corps  cyathiforme  traverse  l'épiderme  et  se  trouve  immédiatement  en 
contact  avec  le  liquide  ambiant. 

En  effet,  en  examinant  l'épiderme  par  sa  face  supérieure,  on  le  voit 
percé  de  trous  qui  donnaient  passage  aux  corps  spéciaux  que  nous  ve- 
nons de  décrire. 

En  dilacérant  avec  précaution,  on  obtient  même  des  cellules  épi- 
théliales  superficielles  perforées  qui  se  trouvaient  placées  immédiate- 
ment au-dessus  de  l'extrémité  de  l'organe  nerveux. 

Il  est  facile,  sur  une  coupe  fraîche,  de  s'apercevoir  que  l'on  n'est  pas 
victime  d'une  illusion. 

Une  légère  pression  exercée  sur  le  verre  à  couvrir  fait  immédiate- 
ment faire  saillie  aux  filaments  du  centre,  et  aucune  cellule  épidermi- 
que  n'est  entraînée. 

Nos  recherches  communes  faites  sur  la  carpe  nous  ayant  amené  à  cfes 
conclusions,  M.  Jobert  se  trouvant  à  Arcachon,  a  pu  les  poursuivre  sur 
un  poisson  à  organe  tactile  spécial,  le  muUus  barbalus  (mulet  des  an- 
ciens Romains  qu'ils  employaient  pour  faire  le  garum,  et  dont  l'agonie 
réjouissait  les  convives  à  cause  des  couleurs  brillantes  et  changeantes 
que  l'on  observe  chez  ce  poisson  au  moment  de  la  mort).  Chez  le  pois- 
son et  dans  son  organe  tactile,  les  corps  cyalhiformes  atteignent  jusqu'à 
0°"",1  de  hauteur. 

Les  papilles  du  derme  ne  sont  plus  capuliformes,  mais  bien  arron- 
dies, et  de  leur  sommet  on  voit  émerger  un  pinceau  de  fibrilles  bril- 
lantes faisant  suite  au  nerf  dont  le  trajet  est  très-facile  à  suivre  dans  la 
papille. 

Ces  fibrilles  brillantes  s'étalent  en  éventail  à  peu  de  distance  du  som- 
met de  la  papille  et  forment  là  un  amas  de  matière  granuleuse  sembla- 
ble à  celui  observé  chez  la  carpe. 

Sur  cette  masse  repose  le  corps  cyathiforme. 

Du  centre  s'élèvent  les  filaments  ayant  les  mêmes  caractères  opti- 
ques, réfraction  puissante  de  la  lumière  et  le  même  aspect  variqueux. 


144 

L'acide  osmique,  le  chlorure  d'or  colorent  vivement  celte  masse  gra- 
nuleuse. 

Si  l'on  emploie  la  soude  étendue  et  que  l'on  suive  attentivement  son 
action,  on  voit  peu  à  peu  disparaître  les  éléments  périphériques  des 
corps  cyalhiformes,  les  filaments  du  centre  résistent  à  l'aclion  du  ré- 
actif; mais  après  un  jour  ou  deux,  malgré  toutes  les  précautions,  les 
préparations  sont  perdues. 

La  section  du  nerf  operculaire  qui  innerve  l'organe  tactile  du  rouget 
produit  une  altération  dans  les  organes  terminaux.  Après  un  mois,  la 
matière  granuleuse  avait  disparu  presque  entièrement  à  la  base  du 
corps  nerveux,  l'action  du  chlorure  et  de  l'acide  osmique  le  prouvaient 
nettement.  Les  nerfs  des  papilles  étaient,  eux  aussi,  fortement  altérés. 


Séance  du  30  juillet. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

—  M.  DupuY  communique,  au  nom  de  M.  Brown-Séquard,  le  résul- 
tat d'expériences  faites  au  sujet  de  la  reproduction  de  parties  d'os  en- 
levées. 

a.  Sur  un  jeune  chien  auquel  M.  Brown-Séquard  a  enlevé  les  lames  la- 
térales de  deux  vertèbres,  au  mois  de  décembre  dernier,  on  trouve 
une  reproduction  parfaite  de  ces  lames,  avec  intégrité  complète  de  la 
moelle,  qui  cependant  est  adhérente  au  tissu  fibreux  qui  recouvre  la 
portion  d'os  nouvelle.  Cette  adhérence  de  la  moelle  est  constante  dans 
tous  les  cas. 

Du  côté  du  crâne,  une  portion  d'os  enlevée  s'est  égalemeat  repro- 
duite: on  remarque  seulement  un  développement  moindre  du  crâne 
du  côté  gauche,  celui  où  une  portion  d"os  a  été  enlevée. 

b.  Sur  un  chien  adulte  opéré  en  janvier  dernier  de  la  même  façon, 
on  a  vu  se  reproduire,  du  côté  des  vertèbres,  une  portion  d'os  plus 
épaisse  que  celle  qui  avait  été  enlevée. 

Notons  que  dans  ces  cas  le  canal  spinal  nest  jamais  rétréci;  le  con- 
traire s'observe  plus  souvent,  et  le  pont  osseux  de  nouvelle  formation 
présente  une  forte  concavité  à  sa  face  interne. 

Dans  l'un  de  ces  cas,  on  observe  une  ulcération  de  la  fesse  avec  une 
sorte  d'escharre. 

Ces  faits  démontrent  donc,  contrairement  à  ce  que  l'on  avait  avancé 
récemment,  que  la  substance  osseuse  enlevée  peut  se  reproduire; 
M.  Brown-Séquard  l'avait  déjà  signalé  à  la  Société  de  biologie  dès 
l'année  1849. 


140 

—  M.  Leve.n  revient  sur  ce  qu'il  a  dit  dans  les  séances  précédentes,  et 
il  persiste  à  considérer  l'expérience  de  M.  Cl.  Bernard  comme  non  con- 
cluante. Pour  lui,  les  divers  poisons,  comme  le  curare,  comme  l'aco- 
nitine,  n'agissent  que  sur  la  moelle  d'abord,  et  secondairement  sur  les 
nerfs. 

M.  Ranvier  :  Je  persiste  à  considérer  comme  extrêmement  con- 
cluante l'expérience  de  M,  Cl.  Bernard  :  elle  démontre  que  le  chloro- 
forme, par  exemple,  atteint  d'abord  la  sensibilité  par  les  nerfs  sensi- 
bles, tandis  que  le  curare  atteint  d'abord  la  motilité  par  les  nerfs 
moteurs.  Il  y  a  là  deux  poisons  qui  agissent  en  sens  inverse.  Peut-être 
aussi  faut-il  tenir  compte  des  doses  employées  par  M.  Leven. 

M.  Leven  :  Les  doses  ne  font  rien  à  la  chose. 

W.  Laborde  :  Je  crois  de  mon  côté  que  l'on  peut  tenir  compte  des 
doses  employées.  Je  crois  de  plus  que  JNl.  Leven  va  trop  loin,  quand  il 
rapporte  tout,  uniquement,  à  l'action  sur^la  moelle.  Que  cette  action 
sur  la  moelle  soit  réelle,  je  n'en  doute  pas  ;  mais  nous  devons  aussi 
admettre,  et  les  faits  le  démontrent,  que  tels  poisons  agissent  plus  par- 
ticulièrement et  primitivement  sur  les  nerfs  moteurs,  comme  le  cu- 
rare par  exemple,  tandis  qu'il  en  est  d'autres  qui  agissent  plus  parti- 
culièrement et  primitivement  sur  les  nerfs  sensitifs,  le  chloroforme  par 
exemple.  C'est  en  cela  que  se  révèle  l'action  élective  des  poisons; 
c'est  donc  là  une  question  de  subordination  des  phénomènes  que  l'on 
observe,  et  rien  autre  chose. 

M.  Leven  :  Je  persiste  à  croire  que  l'expérience  de  M.  Cl.  Bernard 
ne  prouve  rien,  et  que  l'action  primitive  de  ces  poisons  est  sur  la 
moelle. 

M.  LE  Président  demande  à  M.  Leven,  qui  accepte,  de  vouloir  bien, 
pour  abréger  la  discussion,  reproduire  devant  la  Société  quelques-unes 
de  ses  expériences. 

—  M.  Ollivier  rapporte  devant  la  Société  les  principaux  traits  d'une 
observation  de  claudication  intermittente.  Il  s'agit  d'un  malade  qui  se 
trouve  en  ce  moment  dans  son  service  de  la  Charité  annexe.  (Voy.  Mé- 
moires, p.  89.) 

M.  Carville  :  Comment  expliquer  l'intermittence  des  accidents? 

M.  Charcot  :  Ce  fait  a  été  observé  d'abord  chez  le  cheval,  où  la  clau- 
dication inlermillente  est  plutôt  un  symptôme  qu'une  maladie.  Chez  le 
cheval,  en  effet,  on  observe  cette  même  claudication  intermittente  :  s'il 
va  doucement,  il  ne  boite  pas,  s'il  se  met  à  aller  vite,  il  boite.  Si  la 
lésion  frappe  l'aorte,  il  boite  des  membres  postérieurs;  si  elle  atteint 
seulement  une  de  ses  branches,  il  boite  d'un  seul  membre.  Il  y  a  donc 
C.  R.  1870.  10 


146 

one  lésion  permanente  et  un  phénomène  qui  s'y  rapporte,  mais  qui  est 
intermillent. 

Voici  l'explication  que  j'en  donnais  à  l'époque  où  j'ai  publié  ma  pre- 
mière observation,  explication  que  je  donne  encore  aujourd'hui  pour 
ce  qu'elle  vaut  et  faute  de  mieux. 

Les  contractions  musculaires  s'accompagnent  d'actes  chimiques,  pour 
lesquels  un  afilux  de  sang  plus  considérable  est  nécessaire.  Or  cetafflux 
de  sang  doit  être  plus  grand  dans  la  marche  que  dans  l'inaction  ;  mais 
il  faut  que  cet  afflux  soit  possible.  Sinon,  il  survient  une  sorte  de  rigi- 
dité cadavérique  des  muscles,  avec  crampes;  ce  qui  tient  alors  à  l'in- 
sufSsance  de  la  circulation. 

Les  cas  de  ce  genre  sont  rares  chez  l'homme.  Je  n'en  connais  qu'un, 
se  rapportant  à  un  membre  supérieur  ;  il  a  été  observé  par  Eulenibourg 
(de  Berlin).  (Il  s'agit  d'une  femme  qui  a  vu  tout  à  toup  son  membre  su- 
périeur pâlir  et  s'engourdir;  elle  peut  faire  de  petits  ouvrages;  mais 
si  elle  se  livre  à  de  grands  mouvements,  elle  est  prise  aussitôt  de 
crampes,  de  convulsions  de  ce  bras,  et  ne  peut  plus  pendant  un  certain 
temps  en  faire  usage.) 

M.  Carville  ;  En  chirurgie,  a-t-il  été  possible  d'observer  la  même 
chose? 

M.  GiRALDÈs  :  Chez  les  animaux  la  ligature  de  l'aorte  amène  une  pa- 
ralysie des  deux  membres  postérieurs  immédiatement.  Chez  l'homme, 
non.  D'un  autre  côté,  on  cite  beaucoup  de  cas,  chez  l'homme,  de  liga- 
ture des  iliaques  dans  lesquels  la  circulation  s'est  parfaitement  rétablie 
sans  amener  à  la  suite  d'accidents  semblables  à  ceux  dont  on  vient  de 
parler. 

M.  Charcot  :  En  consultant  les  auteurs  au  sujet  de  ces  résultats  de 
ligature,  on  remarque  que  leurs  observations  sont  très-laconiques,  et 
surtout  qu'ils  n'ont  point  recherché  quelles  ont  pu  être  les  conséquen- 
ces de  ces  ligatures;  ils  se  contentent  de  dire,  le  plus  souvent  :  le 
malade  a  guéri.  Mais  pouvait-il  marcher?  Or  il  faut  savoir  qu'il  existe 
trois  catégories  de  faits.  Tantôt  les  malades  ont  guéri  parla  formation 
d'une  circulation  collatérale  suffisante  et  assez  rapide  ;  tantôt  la  gan- 
grène est  survenue;  tantôt,  enfin,  sans  qu'il  y  ait  eu  gangrène,  la  circu- 
lation ne  s'est  pas  rétablie  d'une  façon  parfaite.  C'est  dans  cette  der- 
nière catégorie  intermédiaire  de  faits  que  je  serais  tenté  de  placer  ceux 
dont  nous  parlons  en  ce  moment.  L'attention  des  chirurgiens  n'a  pas 
été  fixée  particulièrement  sur  ce  sujet,  et  les  détails  d'une  claudica- 
tion intermittente  légère  ont  pu  passer  inaperçus. 

Le  cas  bien  connu  de  M.  Barth  ne  serait-il  pas,  pour  ainsi  dire,  une 
ébauche  de  ces  faits  :  l'oblitération  de  l'aorte  avait  amené  une  para- 
plégie incomplète  chez  son  malade. 


147 
M.  GiRALDÈs  :  On  ne  saurait  assimiler  tous  ces  faits. 
M.  Charcot  :  Sans  doute,  et  je  crois  qu'il  faut  distinguer  entre  les 
ligatures  chirurgicales  et  les  oblitérations  spontanées.  On  a  vu  beau- 
coup de  choses  jusqu'ici;  mais  on  n'a  pas  tout  vu.  Connaissait-on,  jusqu'à 
il  y  a  vingt  ans,  la  relation  des  affections  de  la  moelle  avec  le  cancer 
du  sein?  Nullement,  c'est  à  Haushipp  et  à  Cazalis  qu'on  doit  la  con- 
naissance de  ces  faits. 

M.  Laborde  :  On  pourrait  voir  ce  que  dit  l'observation  d'un  malade 
de  M.  Velpeau  auquel  on  avait  lié  l'iliaque  primitive  et  dont  on  a  fait 
plus  tard  l'autopsie. 

—  M.  LiouviLLE  fait  voir  un  cochon  d'Inde  devenu  tuberculeux  après  une 
section  de  la  moelle.  On  remarque  du  côté  des  fesses  une  ulcération 
de  la  peau. 

Tous  les  organes,  poumons,  rate,  foie,  péritoine,  etc.,  sont  le  siège 
d'une  grande  quantité  de  granulations  qui  paraissent  être  de  nature 
tuberculeuse. 


COMPTE  RENDU  DES  SÉANCES 


DE 


r  r 


LA  SOCIETE  m  BIOLOGIE 

PENDANT  LE  MOIS  d'aOUT  1870  (I); 

Par   m.   HAYEM,  secrétaire. 


PRK SILENCE  DE  M.  CL.  BERNARD. 


Séance  du  4  août. 


Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  Carville  présente  à  la  Société  une  réduction  du  troquarl  à  pas  de 
vis  employé  dans  la  ponction  des  kystes  de  l'ovaire.  Cet  instrument 
est  destiné  à  expérimenter  sur  les  veines,  pour  en  étudier  la  tension, 
sans  interrompre  le  cours  du  sang. 

M.  Ranvier  doute  que  cet  appareil  soit  sans  inconvénients  dans  les 
expériences  que  M.  Carville  a  l'intention  de  faire. 

Kyste  simple  GA^GLlONNAIRE;  par  M.  Muron. 

Nous  donnons  ici  l'examen  microscopique  d'une  paroi  de  kyste  dé- 
veloppé dans  la  région  du  cou. 

K  notre  connaissance,  il  n'existe  aucun  fait  certain  de  kyste  simple 
ganglionnaire.  Le  fait  que  M.  Richard  a  présenté  à  la  Société  de  chi- 
rurgie a  semblé  être  un  kyste  ganglionnaire.  Les  preuves  qui  ont  été 

(1)  Vacances  du  8  août  au  15  octobie  1670. 


150 
données  ont  incontestablement  une  certaine  valeur,  mais  elles  ne  sont 
pas  absolues,  et  je  n'en  veux  pour  preuve  que  l'opinion  opposée  de 
quelques  membres  de  cette  Société. 

Les  ganglions  ont  une  structure  tellement  différente  des  autres  tis- 
sus, qu'il  est  impossible  de  les  confondre.  Si  donc  la  paroi  d'un  kyste, 
situé  dans  une  région  où  existent  de  nombreux  ganglions,  est  repré- 
sentée par  le  tissu  même  des  ganglions,  la  preuve  directe  sera  donnée 
du  siège  de  ce  kyste  dans  un  ganglion  lymphatique. 

Voici  d'abord  quelques  mots  relatifs  à  la  pièce  anatomique  que 
M.  Verneuil  a  eu  l'obligeance  de  nous  remettre. 

La  tumeur  enlevée  par  M.  Verneuil  avait  son  siège  dans  la  région 
sus-claviculaire;  elle  présentait  des  adhérences  profondes  assez  in- 
times qui  nécessitèrent  quelques  tractions  légères. 

Son  volume  était  celui  d'un  œuf  de  dinde.  L'incision  laissa  écouler 
une  quantité  assez  grande  de  liquide  rougeâtre;  ce  liquide  n'a  pas  été 
examiné. 

Il  restait  donc  une  poche  kystique  entourée  de  toutes  parts  par  une 
paroi. 

La  surface  interne  de  la  poche  présentait  une  rougeur  assez  uni- 
orme;  on  y  voyait  des  inégalités,  des  saillies  en  forme  de  brides  ou 
de  colonnes  assez  analogues  à  celles  du  cœur,  et  l'aspect  général  était 
en  tous  points  ressemblant  à  la  face  interne  d'une  oreillette  cardiaque. 
11  y  avait,  en  etlet,  des  colonnes  adhérentes  dans  toute  leur  étendue, 
tandis  que  d'autres  se  trouvaient  libres  à  leur  partie  moyenne. 

L'épaisseur  de  cette  paroi  était  à  peu  près  égale  dans  tous  ses  points 
et  variait  entre  3  et  6  millimètres.  Les  parties  les  plus  épaisses  cor- 
respondaient aux  saillies  intérieures. 

En  faisant  une  coupe  fraîche,  on  voyait  à  l'œil  nu  que  le  tissu  même 
de  la  paroi  avait  un  aspect  grisâtre  et  ressemblait  à  celui  des  gan- 


glions. 


Le  raclage  pratiqué  à  la  face  interne  et  placé  sous  le  champ  du  mi- 
croscope ne  montrait  nulle  part  des  plaques  de  cellules  épithéliales; 
on  n'y  voyait  que  quelques  cellules  fusiformes  ou  quelques  noyaux 
isolés. 

Le  raclage  pratiqué  sur  le  tissu  grisâtre  de  la  paroi  montrait  un 
grand  nombre  de  globules  lymphatiques. 

Nous  avons  fait  des  coupes  sur  cette  pièce,  durcie  dans  l'alcool,  et 
alors  il  nous  a  été  facile  de  voir  que  le  tissu  était  celui  des  ganglions. 
On  y  trouvait,  en  effet,  un  tissu  réticulé,  c'est-à-dire  une  série  de  fila- 
ments s'anastomosant  les  uns  avec  Tes  autres  et  circonscrivant  des 
aréoles  dans  lesquelles  étaient  logés  les  globules  lymphatiques. 

Il  s'agissait  bien  évidemment  d'un  tissu  ganglionnaire,  mais  ce  tissu 


151 

avait  subi  quelques  modifications  de  structure  qui  étaient  dues  à  la 
compression  excentrique  du  liquide.  Ce  tissu  était  devenu  un  peu 
fibreux;  des  faisceaux  assez  nombreux  de  tissu  connectif  se  voyaient 
disséminés  autour  des  aréoles  et  leur  donnaient  une  épaisseur  plus 
grande. 

C'était  là  la  seule  modification  de  structure.  Il  n'y  avait,  en  aucun 
point,  de  dégénérescence  muqueuse  ou  colloïde,  ce  qui  nous  aurait 
permis,  s'il  y  en  avait  eu,  d'expliquer  la  formation  de  ce  kyste. 

Nous  ne  sommes  donc,  relativement  à  ce  point  de  pathologie,  pas 
plus  avancés  que  pour  les  kystes  développés  dans  le  tissu  cellulaire. 

Sur  les  cellules  sécrétoires  du  rei.n;  par  M.  A.  Muron. 

Le  rein  est  un  organe  physiologique  double,  tout  à  la  fois  organe 
éliminateur  et  organe  sécréteur. 

Il  nous  paraît  inutile  de  citer  les  divers  auteurs  qui  ont  défendu 
telle  ou  telle  hypothèse.  Le  fait  physiologique  que  nous  venons  d  ex- 
primer représente  aujourd'hui  l'opinion  générale;  et  la  preuve  princi- 
pale en  est  tirée  de  l'absence  de  certains  principes  dans  le  sang,  tels 
par  exemple  l'acide  urique,  l'acide  hippurique,  et  aussi  de  la  quantité 
très-faible  d'urée  dans  le  sang,  tandis  que  ce  produit  se  trouve  repré- 
senté par  un  chiffre  énorme  dans  l'urine. 

Si  maintenant  nous  cherchons  à  déterminer  le  siège  de  la  sécrétion 
à  proprement  parler,  nous  voyons  que  Bowmann  (1),  dans  son  travail, 
est  arrivé  à  formuler  l'opinion  suivante  :  les  glomérules  ne  sécrètent 
que  l'eau  de  l'urine,  et  les  autres  éléments  de  ce  liquide  ne  se  sépa- 
rent du  sang  que  dans  les  canalicules,  par  l'action  des  cellules  épithé- 
liales. 

Ainsi,  voilà  nettementexprimée  cette  distinctionjde  la  sécrétion  et  de 
l'excrétion  des  principes  constituants  de  l'urine;  celle-ci  étant  pure- 
ment et  simplement  un  phénomène  d'exosmose,  celle-là  représentant 
un  véritable  travail  organique.  El  tandis  que  l'excrétion  urinaire  se 
trouve  principalement  liée  aux  conditions  de  la  circulation,  à  la  vitesse 
du  sang,  à  la  tension  du  sang  dans  ses  canaux,  au  contraire,  !a  sécrétion 
des  principes  propres  de  l'urine  est  sous  la  dépendance  directe  des 
éléments  anatomiques  des  tubes  rénaux. 

Cela  est  tellement  vrai  qu'on  n'a  qu'à  comparer  le  rein  avec  les 
autres  organes  glandulaires  pour  arriver  à  la  démonstration  de  celte 
conclusion.  Prenons  pour  exemple  la  glande  sous-maxillaire,  et  nion- 

(1)  De  la  structure  et  des  fonctions  des  glomérules  de  Malpighi 
(Philos,  transact.,  1842.) 


152 

Irons  la  ressemblance  complète,  soit  au  point  de  vue  des  sécrétions, 
soit  au  point  de  vue  des  caractères  microscopiques  représentés  par 
l'élément  sécréteur  lui-même. 

Sans  rappeler  toutes  les  différences  chimiques  qui  existent  pour  le 
liquide  salivaire,  lorsque  la  glande  sous-maxillaire  sécrète  abondam- 
ment, comme  cela  a  lieu  lors  de  l'excitation  de  la  corde  du  tympan, 
ou  au  contraire  lorsque  la  sécrétion  se  produit  lentement  et  d'une  ma- 
nière insensible,  je  dois  indiquer  cependant  (]ue  le  liquide  dans  le 
premier  cas  est  limpide,  fluide,  à  peine  visqueux,  tandis  que  dans  le 
second  cas  ses  caractères  sont  absolument  inverses.  L'un  contient 
beaucoup  d'eau  et  une  faible  quantité  de  substances  propres  au  liquide 
salivaire,  l'autre  renferme  ces  substances  en  quantité  considérable. 

De  même  pour  le  liquide  urinaire.  L'urine  de  la  boisson  est  limpide, 
presque  incolore,  contient  à  peine  d'urée;  l'urine  de  la  nuit  est  jau- 
nâtre, riche  en  urée  et  acide  urique.  La  différence  du  produit  sécrété 
qui  existe  pour  ces  deux  espèces  de  glandes  tient  à  la  même  cause. 
Dans  la  glande  sous-maxillaire,  tout  comme  dans  l'organe  rénal,  le  li- 
quide limpide,  incolore,  provient  surtout  de  l'excrétion;  c'est  à  peine 
s'il  y  a  sécrétion.  Et  pour  retrouver  les  produits  propres  de  ces  li- 
quides il  faudrait  agir  sur  de  grandes  quantités.  Le  sang  affluant  en 
abondance  dans  les  capillaires  de  ces  organes  voit  sa  leni^ion  s'aug- 
menter, d'où  exosmose  beaucoup  plus  grande,  d'où  absence  d'arrêt  dans 
les  conduits  excréteurs;  ce  liquide  d'excrétion  se  trouve  ainsi  éliminé 
sans  qu'il  ait  eu  le  temps  de  se  modifier  par  la  sécrétion  cellulaire. 

La  deuxième  variété  du  liquide  de  la  glande  sous-maxillaire  est  le 
résultat  d'une  véritable  sécrétion.  Ce  liquida  provient  d'une  part  de 
l'exosmose  sanguine,  d'autre  part  de  la  rupture  des  éléments  cellu- 
laires épilliéliaux.  C'est  en  effet  un  des  faits  physiologiques  les  mieux 
démontrés  aujourd'hui  que,  là  où  se  produisent  des  phénomènes  de  sé- 
crétion, il  existe  des  cellules,  véritables  corps  vivants,  qui  élaborent 
dans  leur  intérieur  les  matières  caractéristiques  de  l'humeur  sécrétée, 
et  qui,  parvenues  à  un  certain  degré  de  maturité,  éclatent  et  laissent 
échapper  ces  substances.  Ces  éléments  cellulaires  qui  fonctionnent 
ainsi  subissent  à  coup  sûr  des  modifications,  lesquelles  ont  été  parfai- 
tement décrites  par  plusieurs  auteurs,  et  en  particulier  par  Ranvier. 
Les  cellules  deviennent  vésiculeuses;  elles  sont  infiltrées  par  une  ma 
tière  transparente,  laquelle  les  convertit  en  une  sorte  d'ampoule;  lo 
protoplasma  est  refoulé  à  la  périphérie  avec  le  noyau,  et  tout  le  reste 
de  la  cellule  se  trouve  rempli,  distendu  par  cette  matière.  Ce  sont  là 
les  cellules  sécrctoir'es  qu'on  rencontre  partout  où  il  y  a  une  sécrétion 
quelconque,  dans  les  glandes  salivaires.  fifins  l'intcsiin  à  l;i  •="rfcice  des 
villosités. 


Cellules  sécré- 
toires  isolées. 


153 
Si  donc  il  y  a  sécrétion  de  la  part  du  rein  ,  ces  êmes  éléments 
avec  des  caractères  analognes  doivent  se  rencontrer.  Or  c'est  préci- 
sément ce  qui  a  lieu,  au  moins  chez  le  lapin.  Lorsqu'on  examine  les 
tubuli  du  rein  de  cet  animal,  on  est  frappé  immédiatement  de  la  dif- 
férence d'aspect  que  présentent  les  cellules  épithéliales,  suivant  qu'on 
les  considère  dans  la  substance  corticale  ou  dans  la  substance  médul- 
laire. Dans  la  première,  les  cellules  sont  granuleuses  et  ressemblent 
plus  ou  moins  à  celles  qu'on  rencontre  chez  l'homme.  Dans  la  sub- 
stance médullaire,  au  contraire,  les  cellules  sont  plus  volumineuses  ; 

beaucoup  (Ventre  elles  sont  infiltrées 

2.  Tube  rénal  ren-  ^., 

fermant  des  cel-  pur  unc  matière  transparente  tout 
Iules  séciétoires.  ^^  |^^^^^  analogue  à  celle  que  Con  ren- 
contre dans  les  cellules  des  glandes 
salivuires.  Le  protoplasma  est  éga- 
lement refoulé  à  la  périphérie  avec 
le  noyau ,  et  toute  la  cellule  se 
trouve  convertie  en  une  véritable 
ampoule  vésiculuire.  Chacune  de  ces 
cellules,  examinée  isolément,  res- 
semble en  tous  points  aux  cellules 
qu'on  trouve  da7is  les  culs-de-sac  glandulaires  :  ce  sont  de  véritables 
cellules  secrétaires. 

Il  existerait  ainsi  dans  le  rein  une  portion  à  laquelle  serait  dévolue 
tout  spécialement  la  fonction  de  l'excrétion  pure  et  simple,  et  elle 
serait  représentée  anatomiquement  par  les  glomérules  de  Malpighi. 
A  cette  fonction  première  viendrait  s'en  ajouter  une  deuxième,  la  sé- 
crétion à  proprement  parler,  et  cette  élaboration  de  certains  produits 
se  ferait  aux  dépens  des  cellules  épithéliales  des  tubuli,  principalement 
dans  la  substance  médullaire. 

La  démonstration  de  cette  double  fonction  de  l'organe  rénal  se 
trouve  par  cela  même  produite  au  point  de  vue  anatomique.  Mais 
à  ces  deux  preuves,  physiologique  et  anatomique,  nous  en  ajouterons 
volontiers  une  troisième  tirée  de  la  pathologie  expérimentale. 

Il  existe  une  sorte  de  balancement  entre  les  deux  organes  rénaux. 
Si  l'un  d'eux  se  trouve  affecté  d'une  lésion,  les  actes  physiologiques 
ne  se  font  qu'incomplètement,  et  il  doit  en  résulter  pour  l'autre  une 
suractivité  de  fonctionnement. 

Cela  se  rencontre  constamment  dans  les  autopsies.  Un  rein  est  af- 
fecté de  suppuration  par  une  cause  quelconque;  le  rein  opposé  aug- 
mente de  volume,    et  à  la  coupe  on  constate  une  congestion  intense, 
pouvant  même  aller  jusqu'à  la  suppuration  dans  quelques  points. 
Une  congestion  se  produit;  c'est  là  le  fait  que  nous  prenons,  et  qui 


154 
importe  seul  pour  le  moment.  Cette  congestion  indique  naturellement 
une  exagération  dans  ses  actes  physiologiques,  l'excrétion  et  la  sécré- 
tion. Or  si  notre  hypothèse  est  vraie,  les  phénomènes  de  congestion, 
qui  se  développent  secondairement  dans  le  rein,  vont  porter  plus  spé- 
cialement sur  la  partie  la  plus  importante  de  l'organe,  celle  qui  est 
chargée  d'opérer  les  actes  de  sécrétion.  La  raison  à  donner  en  est  bien 
simple.  Les  actes  d'élimination  peuvent  se  produire  partout  ailleurs 
que  dans  le  rein,  par  l'intermédiaire  des  glandes  sudoripares  et  des  di- 
verses muqueuses  bronchique  et  intestinale.  Mais  pour  ce  qui  est  d'une 
fonction  propre,  la  formation  d'acide  urique,  d'acide  hippurique,  l'or- 
gane seul  qui  en  est  chargé  peut  le  faire. 

Voyons  ce  que  va  nous  donner  l'expérimentation.  Nous  avons  déter- 
miné des  contusions  rénales  chez  un  certain  nombre  de  lapins,  et  produit 
par  conséquent  des  lésions  rénales  dans  ce  rein.  Le  rein  opposé  se  trou- 
vait entièrement  congestionné,  et  cela  dans  toutes  nos  expériences,  au 
deuxième  jour,  au  dixième  jour,  au  vingtième  jour.  Cette  congestion  est 
plus  intense  dans  la  portion  médullaire,  dans  la  partie  rénale  qui  recèle 
les  cellules  sécrétoires.  Rien  de  plus  facile  du  reste  que  de  le  con- 
stater :  à  l'état  normal,  cette  portion  de  l'organe  est  blanche;  on  la 
dirait  invasculaire;  lorsqu'on  vient  à  examiner  le  rein  du  côté  opposé 
à  la  contusion,  cette  substance  médullaire  a  pris  une  teinte  rosée.  Sur 
la  surface  de  la  coupe  on  voit  se  dessiner  une  série  de  lignes  rouges, 
qui  ne  sont  autre  chose  que  des  vaisseaux  gorgés  de  sang. 

Ue  plus,  nous  avons  vu  qu'à  l'état  normal  les  cellules  de  cette  sub- 
stance étaient  pou7'  un  cerlain  nombre  remplies  d'une  matière  trans- 
parente. A  la  suite  de  cette  congestion  intense,  la  plupart  des  cellules 
ont  subi  cette  modification.  Que  conclure  de  cette  congestion  générale 
de  l'organe,  plus  intense  dans  sa  portion  médullaire?  Que  conclure  de 
ce,t  autre  fait,  l'abondance  plus  grande  des  cellules  sécrétoires,  sinon 
que  le  rein  a  une  suractivité  fonctionnelle  pour  ses  actes,  l'excrétion 
et  la  sécrétion,  et  que  cette  suractivité  a  lieu  surtout  pour  son  acte 
principal,  la  sécrétion. 

Les  cellules  vésiculeuses,  dites  cellules  sécrétoires,  que  nous  ve- 
nons de  découvrir  chez  les  lapins,  se  voient-elles  chez  l'homme?  On 
peut  répondre  hardiment  par  la  négative.  Dans  tous  les  examens,  nous 
n'en  avons  jamais  rencontré.  Ce  qui  n'empêche  pas  que  des  cellules 
préposées  à  la  sécrétion  doivent  exister,  seulement,  ne  se  présentant 
pas  sous  cet  aspect  de  cellules  vésiculeuses,  les  moyens  que  nous 
avons  à  noire  disposition  ne  sont  pas  suffisants  pour  les  reconnaître. 
Nous  poursuivons  du  reste  cette  étude,  et  nous  espérons  pouvoir  ap- 
porter des  renseignements  plus  étendus  sur  ce  sujet  si  intéressant. 


155 

HéiMORRHAgie  de  la  moelle  épinière;  par  Bourneville. 

PARALYSIE  SUBITE  t)D  BRAS  GAUCHE;  DOULEURS  VIVES  A  LA  NUQUE  ET  DANS  LE 
CÔTÉ  GAUCHE  DU  COU  ;  PAS  DE  PARALYSIE  DE  LA  FACE  NI  DES  MEMBRES  IN- 
FÉRIEURS; ACCÈS  DE  suffocation;  mort;  DESCRIPTION  NÉCROSCOPIQUE  DES 
FOYERS    HÉMORRHAGIQUES    DE    LA    MOELLE. 

Obs.  —  Grandj...  (Françoise),  58  ans,  est  entrée  le  10  octobre  1870 
à  l'hôpital  de  la  Pitié,  salle  du  Rosaire,  n"  29  (service  de  M.  Marotte.) 
Elle  serait  malade  depuis  cinq  jours.  Le  6  octobre,  elle  s'est  réveillée 
avec  une  douleur  siégeant  à  la  nuque  et  dans  le  côLé  du  cou.  Le  muscle 
sterno-mastoïdien  droit  était  contracture;  la  face  était  déviée  vers  l'é- 
paule droite,  mais  il  n'y  avait  pas  de  rotation  des  yeux.  La  parole  est 
libre.  Il  n'y  a  aucune  trace  de  paralysie  faciale;  les  plis  du  front,  des 
paupières,  les  sillons  naso-labiaux  ne  présentent  pas  de  différence. 

Le  bi'as  gauche  est  paralysé  :  soulevé,  il  retombe  inerte.  Toutefois, 
la  paralysie  n'est  pas  absolue,  car  la  malade  parvient  à  fléchir  un  peu 
les  doigts.  La  sensibilité,  de  ce  côté,  est  obtuse.  Les  membres  infé- 
rieurs sont  normaux. 

Gr...  assure  ne  pas  avoir  eu  d'attaque  apoplectique  et  ne  pas  être 
sujette  à  des  étourdissements.  Elle  dit  aussi  avoir  éprouvé,  il  y  a  deux 
ans,  des  accidents  tout  à  fait  semblables  à  ceux  dont  nous  sommes  té- 
moin. Ils  se  seraient  dissipés  au  bout  de  quelque  temps,  et  depuis  lors 
elle  n'aurait  rien  ressenti. 

11  octobre.  L'état  de  la  malade  est  le  même  :  ni  paralysie  de  la  face, 
ni  paralysie  des  membres  inférieurs.  Huile  de  ricin,  15  gr.  ;  huile  de 
croton,  deux  gouttes. 

12  octobre.  La  langue  est  un  peu  plus  humide  ;  la  soif  est  modérée  ; 
la  déglutition  n'est  pas  gênée;  il  n'y  a  pas  eu  de  vomissements,  mais 
des  selles  abondantes. 

Il  semble  qu'il  existe  à  gauche  des  vertèbres  du  cou,  surtout  vers 
la  partie  moyenne  de  la  région,  un  empâtement  des  parties  molles.  La 
pression  est  difficilement  supportée  à  gauche  des  apophyses  épineuses 
des  quatrième  et  cinquième  vertèbres  cervicales.  Toutefois,  c'est  en- 
core la  nuque  qui  est  le  siège  des  plus  vives  souffrances. 

En  présence  de  ces  symptômes  et  en  l'absence  de  phénomènes  mor- 
bides du  côlé  de  la  face,  de  l'intelligence  et  des  membres  inférieurs, 
nous  crûmes  à  une  affection  des  vertèbres  du  cou,  comprimant  la  moelle 
ou  les  troncs  nerveux  qui  concourent  à  la  formation  du  plexus  bra- 
chial. 

13  octobre.  La  paralysie  est  la  même  au  bras  gauche.  La  tête  est  por- 
tée à  droite  et  en  arrière.  La  malade  retire  sa  jambe  gauche  du  lit,  l'ai- 


156 
longe,  la  fléchit  et  la  remet  en  place.  Cependant  elle  paraît  un  peu 
moins  forte  que  la  droite. 

La  sensibilité  est  conservée.  G...  répond  moins  bien  aux  questions; 
on  dirait  qu'il  y  a  de  l'incertitude  dans  ses  idées.  La  parole  n'est  pas 
embarrassée. 

Langue  très-sèche,  brunâtre;  pas  de  dysphagie  ;  selles  et  urines  in- 
volontaires. Pas  d'érythème,  ni  d'eschare,  etc. 

Soir.  La  malade  a  pris,  sans  peine,  du  potage  à  onze  heures.  Jusqu'à 
trois  heures  elle  n'avait  rien  offert  de  spécial.  Voyant  que  l'heure  de  la 
clôture  des  visites  du  dehors  allait  sonner  et  (|u'on  ne  venait  pas  la 
voir,  elle  a  été  contrariée,  et  à  quatre  heures  elle  a  été  prise  d'un  accès 
(rétouffemcnt  :  les  lèvres  étaient  pâles,  la  face  et  les  doigts  bleuâtres, 
violacés;  la  malade  se  plaignait  d'une  grande  oppression.  On  la  fit 
asseoir,  mais  avec  difficulté,  parce  que,  dit-on,  le  corps  et  particuliè- 
rement le  tronc  étaient  roides  et  qu'elle  ne  s'aidait  pas.  La  dyspnée 
est  allée  en  augmentant;  la  respiration  est  devenue  de  plus  en  plus  rare 
et  G...  est  morte  à  cinq  heures. 

Autopsie  faite  le  ib  octobre.  — Tête. — Péricrâne,os,  etc.,  sains.  Les 
artères  de  la  base  oiïrent  çà  et  là  quelques  plaques  athéromateuses. 
La  pie-mère  est  normale  et  se  détache  sans  peine.  Les  circonvolutions 
cérébrales  sont  d'une  intégrité  parfaite.  Il  en  est  de  même  des  hémis- 
phères eux-mêmes.  L'incision  des  pédoncules  cérébraux  ne  montre 
rien  de  particulier.  —  Cervelet  sain  de  même  que  la  protubérance  : 
différentes  coupes  pratiquées  soit  sur  les  hémisphères  cérébelleux , 
soit  sur  la  partie  moyenne  de  \à  protubérance^  soit  enfin  sur  les  pédon- 
cules cérébelleux  y  noni  fait  découvrir  aucune  lésion,  aucun  point  ané- 
vrismatique. 

Bulbe.  — Sur  une  coupe  du  bulbe,  à  1  centim.  1/2  au-dessous  des 
olives,  on  aperçoit  trois  foyers  hémorrliagiques  :  le  premier  siège  sur 
la  partie  antérieure  de  la  moitié  gauche  du  bulbe  (cordon  antéro-latéral^^; 
il  a  2  à  3  millimètres  de  longueur  sur  1  à  2  de  largeur  ;  le  second  oc- 
cupe en  partie  la  corne  antérieure  gauche  de  la  substance  grise  et  le 
faisceau  latéral;  il  a  les  mêmes  dimensions  que  le  précédent;  — le 
dernier  est  situé  sur  la  partie  postérieure  de  la  moitié  droite  du  bulbe, 
entre  le  sillon  médian  postérieur  et  la  corne  postérieure  droite  ;  il  me- 
sure 2  millim.  1/2  sur  1  u\illim.  Ces  trois  foyers  ont  une  couleur  noire, 
foncée,  et  le  tissu  nerveux  qui  les  environne  a  une  coloration  brunâtre, 
ce  qui  fait  paraître  encore  les  foyers  plus  larges  qu'ils  ne  le  sont  en 
réalité. 

Aspect  extérieur  de  la  moelle.  —  A  4  ou  5  millim.  au-dessous  de  la 
coupe  qui  sépare  le  bulbe  de  la  moelle,  on  voit,  à  gauche  du  sillon  mé- 
dian antérieur,  une  tache  rouge  d'environ  4  millim.,  due  à  un  caillot 


i57 
qui  n'estséparé  de  l'extérieur  que  par  une  membiane  très-mince  et  qui 
a  dévié  le  sillon  médian  à  droite. 

Au-dessous  de  cette  taclie  existe  une  saillie  semi-ovoïde,  ayant  1 
centim.  de  hauteur  sur  8  millim.  de  largeur,  répondant  aux  tiers  an- 
térieur et  latéral  de  la  moitié  gauche  de  la  moelle  :  on  dirait  que,  à 
ce  niveau,  la  moelle  fait  hernie  Sur  la  moitié  supérieure  de  cette 
sorte  de  tumeur,  le  sang  est  pour  ainsi  dire  à  nu,  tandis  que  dans  la 
moitié  inférieure  le  sang  est  encore  retenu  par  une  couche  si  peu 
épaisse  de  tissu  nerveux  qu'elle  laisse  voir  la  coloration  violacée  du 
caillot. 

De  l'extrémité  inférieure  de  cette  saillie  descend  une  traînée  noirâ- 
tre de  1  à  2  millim.  de  largeur  et  de  3  centim.  de  longueur.  La  racine 
antérieure  correspondante  est  distendue  et  les  filets  nerveux  qui  la 
composent  sont  écartés. 

Coupes  horizontales.  —  1°  Une  coupe  tr  nsversale  pratiquée  à  17 
millim.  au-dessous  du  sillon  qui  sépare  le  bulbe  de  la  protubérance, 
met  à  découvert  un  caillot  noir,  ovcïde,  ayant  4  millim.  sur  3  et  sié- 
geant au  niveau  de  la  corne  antérieure  gauche  et  de  la  partie  anté- 
rieure du  cordon  antérieur  correspondant.  Le  foyer  hémonhagique  ar- 
rive presque  jusqu'à  la  périphérie  de  la  moelle,  d'une  part,  et,  de  l'autre, 
à  2  millim.  de  la  commissure  antérieure. 

2°  Sur  une  coupe  faite  à  25  millim.  du  bord  inférieur  de  la  protubé- 
rance, on  découvre,  sur  une  coupe  transversale,  le  prolongement  du 
caillot  précédent  qui,  à  cette  hauteur,  mesure  2  millim.  sur  1  1/2;  il 
est  encore  ovuïde  et  intéresse  surtout  le  cordon  antérieur  gauche. 

3°  Vient  ensuite  la  coupe  oblique  de  la  moelle,  faite  pour  la  séparer 
du  bulbe;  nous  avons  décrit  l'aspect  qu'elle  offrait  :  nous  n'y  revien- 
drons donc  pas. 

4°  A  4  centim.  du  sillon  précité,  c'est-à-dire  au  niveau  de  la  partie 
moyenne  de  la  saillie  ovoïde  que  nous  avons  décrite,  une  coupe  hori- 
zontale montre  :  1°  un  caillot  brun  noirâtre,  grenu,  occupant  le  centre 
môme  de  la  section  et  débordant  vers  le  sillon  latéral  gauche;  2"  un 
caillot  d'un  rouge  assez  clair  avec  deux  points  plus  foncés,  ayant, 
d'une  façon  générale,  un  aspect  lisse;  ce  caillot  occupe  la  corne  anté- 
rieure gauche  et  presque  tout  le  cordon  antérieur.  En  effet,  sur  la  li- 
gne qui  répond  au  sillon  d'origine  des  racines  antérieures,  il  n'est  sé- 
paré du  dehors  que  par  la  pie-mère  spinale.  Ces  deux  caillots  se  tou- 
chent suivant  leur  plus  grand  diamètre  et  ont  à  peu  près  les  mêmes 
dimensions  (4  millim.  sur  2  1/2  à  3).  A  l'œil  nu,  ils  paraissent  être  de 
deux  âges  différents. 

5»  A  8  centim.  au-dessous  du  bord  inférieur  de  la  protubérance,  on 
voit  un  caillot  de  4  millim.  de  largeur,  aboutissant  extérieurement  à  la 


;-^if 


158 

traînée  noirâtre  que  nous  avons  signalée  sur  la  face  antérieure  de  la 
moelle.  Sur  une  coupe  pratiquée  2  centim.  plus  bas,  on  ne  trouve  rien 
d'anormal.  De  nombreuses  sections  faites  sur  la  région  lombaire  de  la 
moelle  n'ont  fait  découvrir  aucun  anévrisme.  (Nous  avons  conservé  la 
moelle  pour  un  examen  plus  approfondi  qui  sera  fait  sous  la  direction 
de  M.  Charcot.) 


COMPTE  IIRNDU  DES  SÉANCES 


DE 


r  r 


LA  SOCIETE  DE  BIOLOGIE 

PENDANT  LE   MOIS   d'OCTOBRE    1870; 

Par  m.   HAYEM,  secrétaire. 


PRÉSIDENCE  DE  M.  CHARCOT, 


Séance  du  22  octobre. 

M.  Laborde  présente  au  nom  de  M.  Gubler  de  l'ouate  imbibée  de 
glycérine  puis  exprimée,  qui  forme  un  tissu  légèrement  onctueux, 
suffisamment  absorbant,  qui  constitue  un  excellent  moyen  de  panse- 
ment. 

A  l'occasion  de  cette  communication,  M.  Leven  appelle  l'attention 
de  la  Société  sur  les  avantages  de  la  dissémination  des  blessés  dans 
les  petites  ambulances.  Il  résume  son  opinion  en  ces  termes  :  Mieux 
vaut  une  petite  ambulance  sans  médecin  qu'un  grand  médecin  dans 
une  grande  ambulance. 

M.  Ranvier  appuie  l'opinion  de  M.  Leven  et  déplore  les  accumu- 
lations de  blessés  dans  les  ambulances  de  l'Intendance  et  de  la  So- 
ciété internationale,  où  l'infection  purulente  fait  de  nombreuses  vic- 
times. 

M.  HouEL  accepte  en  partie  ces  critiques,  mais  il  pense  qu'il  ne  faut 
pas  faire  fi  de  l'intervention  chirurgicale  autant  que  M.  Leven.  Dans 
les  fractures  comminulives  par  armes  à  feu,  elle  est  absolument  indis- 
pensable. 


160 
—M.  Hayem  communique  une  observation  de  fracture  comminutive  du 
crâne  avec  issue  d'un  champignon  de  matière  cérébrale.  Le  malade 
est  mort  d'infection  purulente  au  bout  de  huit  jours  seulement.  Les 
deux  lobes  frontaux,  surtout  le  droit,  étaient  détruits,  substance  grise 
et  substance  blanche;  l'arachnoïde  avait  suppuré,  mais  la  pie -mère 
n'était  pas  enflammée.  Malgré  des  lésions  énormes,  il  n'y  avait  eu  ni 
commotion  ni  collapsus;  l'intelligence  était  conservée,  la  sensibilité 
et  la  motilité  étaient  intactes,  la  parole  était  conservée  ainsi  que  le 
sens  du  goût. 

—  M.  BoucnABD  signale  à  la  Société  un  fait  qu'il  n'a  trouvé  signalé  ni 
dans  les  traités  qui  s'occupent  de  la  variole  ni  dans  les  ouvrages 
d'ophthalmologie  ;  c'est  une  iritis  survenant  le  plus  souvent  à  un 
seul  œil  chez  les  malades  convalescents  de  variole  ou  de  varioloïde 
quand  la  période  de  dessiccation  est  terminée  et  que  la  desquammation 
s'opère  déjà.  Cette  iritis,  dont  M.  Bouchard  a  recueilli  le  premierexemple 
en  1858,  à  Lyon,  et  qu'il  a  retrouvée  depuis,  chaque  année,  notamment 
à  l'Hôtel-Dieu  de  Paris  en  1869  et  1870,  où  il  a  plusieurs  fois  appelé 
l'attention  des  élèves  de  la  clinique  sur  ce  fait,  se  présente  en  ce  mo- 
ment à  son  observation  chez  huit  malades  dans  une  ambulance  mili- 
taire de  vario'eux.  La  maladie,  qui  apparaît  tardivement,  n'a  été  pré- 
cédée ni  de  pustules  des  paupières  ou  de  la  conjonctive,  ni  de  kératite. 
Elle  se  traduit  par  une  douleur  orbitaire  avec  retentissement  à  la  tempe 
et  à  la  racine  du  sourcil,  par  de  la  gêne  de  la  vue,  un  arc  grisâtre  péri- 
kératique  avec  vascularisation  radiée  très-fine  de  la  sclérotique  au 
voisinage,  (|uelquefois  modification  de  la  couleur  et  de  la  contractilité 
de  l'iris.  L'action  locale  de  l'atropine  amène  un  soulagement  et  une 
guérison  rapides.  Mais  dans  le  premier  cas,  où  le  traitement  ne  fut  pas 
administré,  les  douleurs  devinrent  intolérables  et  il  resta  un  état  de 
synéchie  antérieure.  Dans  un  autre  cas  il  se  développa  une  kératite 
secondaire.  D'une  façon  générale,  la  maladie  est  donc  bénigne. 

Un  fait  qui  mérite  d'être  signalé,  c'est  que  chez  plusieurs  des  ma- 
lades on  constate  en  même  temps  des  douleurs  articulaires,  quelque- 
fois de  la  péricardite,  dans  un  cas  même  il  y  eut  endocardite.  M.  Bou- 
chard compare  cette  iritis  secondaire  à  celle  de  la  blennorrhagie,  et 
signale  les  rapprochements  qu'on  pourrait  établir  entre  ces  manifesta- 
tions de  la  variole  sur  les  séreuses  et  ce  qu  on  a  appelé  le  rhumatisme 
blennorrhagique,  le  rhumatisme  scarlatineux. 

M.  Leven  a  eu  l'occasion  d'observer  un  cas  de  ce  genre  ;  il  a  été  plus 
grave,  et  l'iritis  s'est  terminée  par  un  phlegmon  de  l'œil. 

,    M.  Ollivier  a  remarqué  aussi  dans  ([uelques  cas  l'iritis  chez  des  va- 


161 
rioleux  qui  paraissaient  n'avoir  pas  de  pustules  de  la  conjonctive;  mais 
en  retournant  les  paupières,  il  a  découvert  des  pustules. 

M.  Laborde  dit  qu'on  peut  en  ce  moment  observer  quelques  cas 
d'iritis  chez  des  varioleux  à  l'hôpital  Beaujon,  dans  le  service  de 
M.  Gubler,  mais  ce  sont  des  irilis  qui  compliquent  les  pustules  de 
la  conjonctive  ou  de  la  cornée. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  un  quart. 

Séance  du  29  octobre. 

M.  Hayem  présente  à  la  Société  les  pièces  anatomiques  relatives  au 
fait  suivant  : 

AU  MOMENT  DE  LA  CONVALESCENCE  d'uNE  PNEUMONIE  FRANCHE  ,  MORT  SUBITE 
DUE  A  DES  EMBOLIES  PULMONAIRES  QUI  AVAIENT  POUR  POINT  DE  DÉPART  DES 
VEINES   VARIQUEUSES    NON    ENFLAMMÉES    DES   MEMBRES    INFÉRIEURS. 

C...,  âgée  de  49  ans,  domestique,  entre  le  9  octobre  1870  à  la  Cha- 
rité (salle  Saint-Joseph,  n»  9)  dans  le  service  de  M.  Bernutz. 

C'est  une  femme. robuste,  habituellement  bien  portante.  Elle  est  tom- 
bée malade  brusquement  cinq  jours  auparavant  et  offre  tous  les  signes 
d'une  pneumonie  franche  du  côté  droit.  Cette  pneumonie  marche  de 
bas  en  haut,  de  la  base  au  sommet,  et  s'accompagne  de  symptômes 
adynamiques  qui  font  redouter  une  terminaison  fâcheuse.  Cependant 
le  20,  la  maladie  entre  nettement  en  résolution  :  la  fièvre  tombe,  la 
langue  se  nettoie  et  redevient  humide.  On  entend  dans  le  thorax  des 
râles  de  retour,  l'appétit  renaît.  Le  25,  la  malade  demande  la  permis- 
sion de  se  lever;  elle  se  sent  très-bien. 

Dans  la  journée,  elle  marche  seule  jusqu'aux  commodités;  puis  là 
appelle  du  secours,  et  au  moment  où  l'on  s'approche,  on  la  trouve 
étendue  à  terre  dans  une  sorte  d'état  syncopal. 

On  va  quérir  avec  empressement  l'interne  de  garde;  mais  lorsqu'il 
arrive,  soit  un  quart  d'heure  à  peine  après  le  début  des  accidents,  la 
malade  est  morte. 

Les  personnes  du  service  qui  l'ont  entourée  pendant  ces  quelques  mi- 
nutes font  le  récit  suivant  : 

Remise  au  lit  elle  était  d'une  pâleur  extrême,  ses  extrémités  étaient 
froides,  comme  privées  de  sang,  sa  respiration  était  anxieuse, et  ce- 
pendant la  connaissance  n'était  pas  abolie. 

Cette  femme  n'a  jamais  présenté  d'œdème  des  jambes;  elle  n'avait 
pas  de  cicatrices  d'ulcères  variqueux,  et  les  varices  trouvées  sur  le  ca- 
davre n'avaient  pas  attiré  notre  attention  avant  la  mort. 

C.  R.  1870.  11 


102 

Autopsie  le  27  octobre.  —  Cadavre  parfaitemenl  conservé;  lenipéra- 
tiire  basse. 

Cavité  thoracique.  —Adhérences  anciennes  à  droite  au  niveau  du 
lobe  supérieur.  Celle  parlie  du  poumon  esl  lourde  el  offre  Tempreinle 
des  côtes.  Le  tissu  esl  encore  hépalisé,  elsur  des  coupes  on  peut  étu- 
dier les  caractères  très-intéressants  de  la  pneumonie  lobaire  en  voie 
de  résolution. 

Dans  les  parties  inférieures  du  poumon  :  engouement  avec  crépita- 
tion normale  ;  tout  à  fait  à  la  base,  légère  suffusion  sanguine  diffuse. 

Poumon  gauche:  emphysème  vésiculaire  peu  intense;  congestion 
légère  avec  un  peu  d'infiltration  sanguine  diffuse  à  la  base. 

Cœur  :  Infiltration  sanguine  peu  abondante  dans  le  tissu  cellulaire 
du  médiastin  près  du  péricarde.  Le  cœur  a  un  volume  normal  ;  léger 
épaississement  du  bord  libre  de  la  mitrale;  pas  de  lésions  d"oriûce, 
pas  de  caillots. 

En  ouvrant  Varlère  pulmonaire,  on  rencontre  dès  sa  bifurcation  un 
grand  nombre  de  caillots  de  la  grosseur  d'une  plume  d'oie  environ,  au 
nombre  de  iO  à  12  de  chaque  côté.  Ces  caillots,  dont  la  grosseur  et  la 
longueur  sont  très-variables,  sont  bloqués  dans  toutes  les  branches  qui 
parlent  de  l'artère  pulmonaire.  Ils  sont  tous  parfaitemenl  libres,  sans 
aucune  espèce  d'adhérence,  et  n'offrent  pas  le  moindre  rapport  ;de 
forme  ou  de  calibre  avec  l'artère  dans  laquelle  ils  sont  arrêtés.  Leur 
aspect  est  assez  uniforme  :  ils  sont  tous  foncés  dans  leur  partie  prin- 
ci[)ale  el  rosés  blanchâtres  en  quelques  points  peu  étendus;  ils  se  ter- 
minent en  pointe  mousse  et,  retirés  des  vaisseaux,  ils  sont  sinueux  et 
offrent  des  renflements  ou  de  petits  mamelons  arrondis  qui  se  sont  cer- 
tainement moulés  sur  des  dilatations  ou  des  valvules  veineuses.  Le  plus 
long  de  ces  caillots  n'a  pas  moins  de  15  centimètres;  il  présente  une 
branche  ou  diverticule  de  1  centimètre.  Ce  long  tube  cruorique,  facile 
à  enlever,  est  engagé  à  gauche  dans  deux  des  premières  bifurcations 
de  l'artère  pulmonaire,  de  telle  manière  qu'il  esl  à  cheval  sur  un  épe- 
ron vasculaire  el  forme  une  anse  tournée  vers  l'orifice  de  l'artère  pul- 
monaire. 

Dans  les  petites  branches  de  l'artère  pulmonaire,  les  caillots  embo- 
liques  sont  prolongés  par  de  petites  coagulations  récentes,  d'une  cou- 
leur gelée  de  groseille,  qui  occupent  les  quatrième  et  cinquième  bran- 
ches de  bifurcation,  les  trois  ou  quatre  premières  étant  remplies  par 
les  caillots  emboliques. 

La  crosse  aortique  est  un  peu  large  el  contient  quelques  plaques 
calcaires. 

La  raie  est  très-grosse,  molle  avec  hypertrophie  des  corpuscules 
blancs. 


163 

Les  reins,  le  foie,  les  intestins,  l'estomac,  les  organes  génitaux  et  les 
annexes  sont  parfaitement  sains. 

L'encéphale  est  également  irréprochable  à  l'œil  nu;  il  n'est  même 
pas  d'une  pâleur  bien  manifeste. 

Les  gros  vaisseaux  que  l'on  met  habituellement  à  découvert  dans  une 
autopsie  ne  présentent  rien  de  particulier;  il  en  est  de  même  des  veines 
crurales. 

Quelle  peut  donc  être  l'origine  des  embolies  pulmonaires?  M.  Hayem 
l'a  trouvée  en  explorant  avec  soin  les  veines  des  membres  inférieurs. 

En  effet,  il  existe  des  varices  superficielles  des  deux  côtés,  surtout 
à  droite,  au  niveau  des  mollets.  Ces  dilatations  veineuses  intéressent 
surtout  la  saphène  externe  jusqu'à  son  embouchure  dans  la  poplitée. 

A  gauche  les  varices  contiennent  deux  ou  trois  caillots  non  adhérents 
complètement  semblables  à  ceux  trouvés  dans  les  artères  pulmonaires. 
A  droite  ces  caillots  sont  bien  plus  nombreux  et  plus  volumineux  et 
ils  sont,  sous  le  rapport  du  volume,  de  l'aspect,  de  la  forme,  etc., 
complètement  analogues  aux  caillots  emboliques. 

Tous  ces  caillots  d'origine  veineuse  se  sont  formés  en  même  temps, 
et  comme  ils  sont  à  peine  décolorés  en  quelques  points  limités ,  peu 
durs  et  très-foncés,  ils  ne  paraissent  pas  remonter  à  plus  de  quelques 
jours  (huit  à  quinze  au  plus). 

La  paroi  des  veines  variqueuses  est  saine,  sauf  les  altérations  com- 
munes aux  varices  ordinaires  de  développement  moyen.  Les  caillots 
sont  tous  faciles  à  détacher^  sauf  ceux  qui  sont  comme  intriqués  en 
certains  points  dans  les  valvules  et  les  bosselures.  Les  veines  poplitées 
et  crurales  des  deux  côtés  sont  larges  et  contiennent  du  sang  fluide, 
non  coagulé.  Les  caillots  des  veines  variqueuses  étaient  disposés  de 
manière  à  être  soumis,  de  la  part  de  ces  grosses  veines,  à  une  sorte 
d'aspiration.  M.  Hayem  résume  et  interprète  ces  faits  de  la  manière 
suivante  : 

Pendant  le  cours  de  la  pneumonie  il  s'est  produit  dans  les  veines 
variqueuses  une  coagulation  du  sang,  et  cela  sans  phlébite;  puis,  au 
moment  même  où  la  malade  se  levait  pour  la  première  fois,  sous  l'in- 
fluence d'efforts  musculaires  et  d'un  surcroît  d'activité  dans  la  circu- 
lation, les  caillots  des  veines  variqueuses  se  sont  détachés,  ont  été  lan- 
cés en  grand  nombre  dans  les  branches  de  l'artère  pulmonaire,  et  la 
mort  a  eu  lieu  en  quelques  minutes  sous  Tinfluence  de  ces  embolies 
multiples  et  volumineuses. 

M.  Hayem  fait  remarquer  les  points  les  plus  importants  de  cette  ob- 
servation. 

Déjà  en  1868,  dans  le  service  de  M.  Tardieu  à  l'Hôtel-Dieu,  il  a  ob- 
servé un  cas  de  mort  subite  par  embolies  pulmonaires  chez  une  femme 


164 
variqueuse.  Mais  dans  ce  dernier  fait  les  varices  étaient  enflammées, 
on  sentait  des  cordons  durs,  la  phlébite  non  douteuse  donnait  une  ex- 
plication facile  de  la  coagulation  du  sang  et  pouvait  faire  redouter  la 
fatale  complication  qui  est  survenue  brusquement. 

Dans  le  cas  actuel,  la  cause  de  la  coagulation  dans  les  veines  vari- 
queuses est  plus  insolite,  moins  bien  connue.  Il  y  a  eu  dans  le  cours 
de  la  pneumonie  qui,  en  somme,  a  été  grave,  quelque  chose  d'analogue 
à  ce  qui  se  passe  dans  la  phlegmatia  alba  dolens;  c'est-à-dire  que  l'al- 
tération du  sang  dans  la  pneumonie  et  peut-être  aussi  le  ralentisse- 
ment, l'affaiblissement  de  la  circulation  sont  les  seules  causes  qui  puis- 
sent, comme  dans  les  cachexies,  être  invoquées  pour  expliquer  la  coa- 
gulation du  sang.  Toutefois,  celle-ci  a  eu  lieu  exclusivement  dans  les 
veines  variqueuses.  Aussi  ce  fait  prouve-t-il  que  les  varices  offrent  du 
danger  non-seulement  dans  les  cas  où  elles  sont  le  siège  de  phénomè- 
nes inflammatoires,  mais  encore,  ce  qui  paraît  beaucoup  moins  connu, 
alors  qu'elles  sont  simples.  Cette  observation  établit,  en  effet,  que  dans 
le  cours  d'une  phlegmasie  aiguë,  peut-être  faudrait-il  dire  seulement 
d'une  pneumonie,  les  veines  variqueuses  peuvent  devenir  le  siège  de 
coagulations  spontanées. 

Ce  point  paraît  avoir  une  grande  importance  à  M.  Hayem  relati- 
vement à  la  question  si  souvent  discutée  et  encore  mal  définie  des 
morts  subites  dans  les  maladies  aiguës  et  à  l'époque  de  leur  conva- 
lescence. 

Note  sur  la  présence  des  bactéries  dans  le  sang  des  érysipélateux; 
par  le  docteur  Nepveu,  ancien  interne  des  hôpitaux. 

Cherchant  un  jour  à  constater  le  fait  annoncé  par  M.  Vulpian,  la  mul- 
tiplication des  globules  blancs  dans  le  sang  pris  sur  une  plaque  d'érysi- 
pèle,  je  fus  amené  à  y  reconnaître  aussi  l'existence  de  bactéries. 
!..  Désirant  faire  quelques  recherches  sur  ce  sujet,  voici  les  précautions 
que  je  crus  devoir  prendre  par  la  suite.  Il  fallait  opérer  avec  la  plus 
grande  rapidité  possible  pour  éviter  l'action  prolongée  de  l'air  sur  le 
sang  à  examiner;  aussi  installai-jemon  microscope  à  côté  môme,  de  mes 
malades.  Il  fallait  en  outre  que  les  plaques  de  verre  fussent  parfaite- 
ment nettes;  je  les  nettoyais  dans  de  l'alcool,  et  je  les  faisais  passer 
pendant  quelques  secondes  dans  la  flamme  d'une  lampe  à  esprit-de-vin  ; 
puis,  afin  d'être  bien  sûr  de  n'introduire  dans  le  sang  à  observer  aucun 
élément  étranger,  je  l'ai  toujours  examiné  dans  son  propre  sérum. 

J'ai  pu  rassembler  dix  observations  sur  ce  point  :  dans  tous  les  cas, 
moins  un,  j'ai  trouvé  des  bactéries  dans  le  sang,  et  encore,  dans  ce  der- 
nier fait,  l'érysipèle  à  son  déclin  disparaissait  complètement  le  lende- 


165 
main.  De  ces  dix  observations, je  ne  rapporterai  que  les  quatre  pre- 
mières. 

Obs.  I.  —  Madame  Camusard,  59  ans,  entre  à  Lariboisière  ,  salle 
Sainte-Jeanne,  pour  une  tumeur  du  sein.  La  tumeur  est  enlevée  le  24 
février  1868;  c'était  un  sarcome  muqueux.  Cette  femme,  excessive- 
ment nerveuse  et  très-affaiblie  par  de  nombreuses  privations,  était  per- 
suadée que  tout  irait  mal;  elle  est  prise  en  effet  d'érysipèle  ambulant 
quelques  jours  après,  et  au  bout  d'une  quinzaine  de  jours  elle  succom- 
bait avec  un  eschare  au  sacrum. 

Au  moment  où  le  sang  fut  examiné,  l'eschare  ne  s'était  pas  encore 
produite.  Dans  une  piqûre  faite  à  un  doigt,  je  trouvai  un  ou  deux  bac- 
téries dans  le  champ  du  microscope;  c'était  le  bacteriiim  pîinctum 
d'Ehrenberg. 

Dans  ce  premier  fait,  la  malade  était  tellement  impressionnable,  que 
je  ne  pus  obtenir  d'elle  d'examiner  le  sang  pris  dans  une  plaque  érysi- 
pélateuse  par  une  piqûre  d'épingle. 

Obs.  II.  —  Jacquemin  (Apolline),  52  ans,  entre  salle  Sainte-Jeanne  le 
18  mai,  pour  un  cancer  du  sein;  opérée  le  24  mai,  elle  est  atteinte  de 
trois  érysipèles  successifs  ;  elle  guérit. 

Dans  le  sang  pris  sur  une  piqûre  faite  sur  une  plaque  érysipélateuse, 
je  trouve  une  multiplication  assez  notable  des  globules  blancs;  il  y  en 
avait  7-8  sur  le  champ  du  microscope,  à  un  fort  grossissement,  le  n»  9, 
immersion  d'Hartnack.  Les  globules  rouges  sont  accolés  les  uns  aux 
autres  en  piles  très-élégantes.  Au  bout  de  4  à  5  minutes,  il  se  produit 
sur  tout  le  champ  de  la  préparation  une  foule  de  fins  cristaux  en  ai- 
guilles d'une  grande  longueur.  Enfin,  à  côté  de  granulations  élémen- 
taires immobiles  à  reflet  jaunâtre,  on  aperçoit  de  petits  corpuscules 
ovoïdes  animés  de  mouvements  assez  vifs  et  très-variés,  indépendants 
de  toute  espèce  de  courants  et  très-capricieux:  ce  sont  des  bactéries, 
ils  vont  et  viennent  à  droite,  à  gauche,  s'approchent  un  instant  des  glo- 
bules rouges,  puis  disparaissent  entre  deux  piles  pour  reparaître  de 
Douveau;  ils  sont  au  nombre  de  trois,  quatre,  quelquefois  cinq  par 
champ  de  microscope.  Ces  corpuscules  sont  en  tout  semblables  à  ceux 
qu'Ehrenberg  et  Dujardin  ont  décrits  sous  le  nom  de  bacterium  punc- 
tum. 

Le  sang  extrait  d'une  piqûre  faite  à  un  doigt  présente  les  mêmes  par- 
ticularités :  les  bactéries  y  sont  en  moins  grand  nombre;  il  faut  même 
parcourir  toute  la  gouttelette  de  sang  avec  le  microscope  pour  en  dé- 
couvrir quelques-uns. 

Obs.  III,  —  Bertoud  entre  le  9  juillet  pour  une  plaie  de  la  région  mé- 
tacarpienne. On  le  traite  par  l'irrigation  continue;  il  se  produit  néan- 


166 
moins  une  plaque  érysipélateuse  deux  jours  après,  qui  s'étend  sur  tout 
l'avant-bras. 

Des  bactéries,  mais  en  moins  grand  nombre  que  dans  les  faits  précé- 
dents, existent  dans  le  sang  pris  aux  points  malades. 

Obs.  IV.  —  Amédée  Appert  entre  à  Lariboisière  le  deuxième  jour  d'un 
érysipèle  de  la  face.  Au  moment  de  l'examen,  la  fièvre  a  en  partie  dis- 
paru; l'érysipèle  disparaît  complètement  le  lendemain;  c'est  le  qua- 
trième érysipèle  de  la  face  en  trois  ans. 

Le  sang  pris  dans  une  piqûre  faite  à  un  doigt  présente  tout  d'abord, 
avant  que  le  microscope  soit  au  point,  une  zone  finement  granuleuse  con- 
nuedepuisFeltzsouslenomde  zone  immobile,  et  (]ueLûders(l}  regarde 
comme  formée  de  vibrions  immobiles,  «  ruende  Fibrionen.  »  Une  fois 
le  microscope  au  point,  on  voit  se  mouvoir  dans  le  sérum  sanguin  des 
corpuscules  un  peu  plus  gros  que  ceux  qu'on  observe  dans  la  zone  immo- 
bile, les  uns  lentement,  d'autres  avec  une  assez  grande  vivacité  dans 
le  liquide  ;  ils  s'unissent  parfois  deux  à  deux  ;  leur  mouvement  ne  con- 
siste pas  dans  un  mouvement  d'oscillation,  c'est  un  mouvement  de  trans- 
lation bien  net.  A  côté  de  ces  corpuscules  on  distingue  très-nettement 
des  granulations  immobiles  et  de  longs  cristaux  très-fins,  très-grêles  et 
très-longs  qui  s'enchevêtrent  dans  le  liquide  et  ressemblent  à  ceux  que 
l'on  trouve  dans  la  septicémie  et  que  Feltz  a  le  premier  signalés  dans 
cette  maladie. 

De  l'ensemble  de  ces  observations  et  d'autres  faits  que  nous  avons 
examinés  depuis,  il  me  semble  permis  de  tirer  les  conclusions  sui- 
vantes : 

1°  Il  existe  des  bactéries  dans  le  sang  extrait  d'une  piqûre  faite  sur 
une  plaque  d'érysipèle;  ces  bactériessont  en  assez  grand  nombre:  trois, 
quatre,  cinq,  quelquefois  six,  sept  dans  le  champ  du  microscope  (im- 
mersion n"  9,  d'Hartnack), 

2°  Les  bactéries  existent  aussi  dans  le  sang  pris  en  tout  autre  point 
que  sur  la  plaque  d'érysipèle,  au  bout  du  doigt,  par  exemple,  pour  un 
érysipèle  du  tronc;  leur  nombre  est  moins  considérable  :  un,  deux, 
trois,  rarement  davantage  dans  toute  la  gouttelette  de  sang  qu'on  exa- 
mine. 

3°  Dans  tous  les  cas  observés,  la  variété  de  bactérie  trouvée  a  toujours 
été  le  bacterium  punclum  d'Ehrenberg. 

4°  Si  les  bactéries  existent  dans  VértjsipèLe  tranniatique^  comme  le 
font  voir  quelques-uns  des  faits  précédents,  ils  paraissent  exister  aussi 

(1)  Liiders,  Archives  de  Max.  Schultze,  1867,  tome  III,  page  318. 


167 

dans  les  érysipèles  dits  spontanés  (voy.  plus  haut  l'obs.  IV);  il  resterait 
à  déterminer  si  le  fait  est  constant. 

La  présence  des  bactéries  dans  le  sang  des  érysipélateux  n'a  été 
iOMpfonnee  jusqu'ici  que  par  Volkmann.  Dans  l'article  Érysipèle  qu'il 
a  écrit  dans  le  Traité  de  chirurgie  générale  et  spéciale  de  Pilha  et 
Biiroih  (1),  il  dit,  page  158  :  «  Peut-être  des  microphytes  jouent-ils  dans 
la  production  de  l'érysipèle  un  grand  rôle  comme  ferment.  »  Plus  loin 
encore  il  ajoute  :  «  L'origine  de  la  propagation  sur  place  de  l'érysipèle 
est  peut-être  dans  les  mouvements  de  cellules  voyageuses  {wanderude 
Zelien)  ou  de  microphytes,  »  Pour  lui  donc  l'existence  de  ces  faits  est 
encore  problématique,  c'est  une  pure  hypothèse.  Aussi  se  demande-t-il 
en  terminant  si,  dans  son  principe,  l'érysipèle  est  un  poison  ou  un  fer- 
ment, «  ist  es  ein  Gift  ?  ein  Ferment?  » 

Les  hypothèses  de  Volkmann  sur  la  propagation  de  l'érysipèle  ne 
doivent  pas,  ce  nous  semble,  rester  dans  l'ombre.  Certainement,  à  côté 
du  mouvement  circulatoire,  les  mouvements  amiboïdes  des  globules 
blancs,  d'une  part,  les  mouvements  des  bactéries,  d'autre  part,  doi- 
vent être  des  facteurs  importants  dans  la  propagation  de  l'érysipèle; 
encore  faut-il  remarquer  que  la  vivacité  des  mouvements  des  bacté- 
ries est  bien  autrement  grande  que  celle  des  leucocytes. 

Certains  faits  (ïinoculaiion  pourraient  peut-être  trouver  quelque 
explication  dans  les  données  précédentes.  Dœpp  (de  Saint-Péters- 
bourg) (2)  rapporte  le  fait  suivant  :  Un  médecin  vaccine  neuf  enfants 
avec  du  vaccin  pris  sur  un  enfant  atteint  d'érysipèle,  et  les  neuf  en- 
fants sont  aussi  pris  d'érysipèle.— Un  autre  fait  bien  connu  est  encore 
celui  de  ce  barbier  anglais  qui  rase  un  érysipélateux;  le  client  qui  vint 
après  fut  pris  d'érysipèle  de  la  face. 

Comment,  dans  cet  ordre  d'idées,  expliquer  l'apparition  des  épidé- 
mies (3)  dont  fourmille  l'histoire  de  cette  affection?  Sont-elles  dues  à 
une  prolifération,  sous  certaines  conditions  encore  indéterminées,  de 
ces  organismes  inférieurs  répandus  dans  l'atmosphère,  de  ces  germes 
dont  Pasteur  a  démontré  l'existence  qui  parviendraient  à  entrer  dans 
le  sang  à  la  faveur  de  solutions  de  continuité  des  téguments  internes 
et  externes,  si  minimes  qu'elles  fussent  ?  Sont-elles  dues  à  des  altérations 
primitives  des  liquides  qui  se  trouvent  à  leur  surface,  altérations  qui 

(1)  Handbuch  der  allgemeinen  u>d  SPECIELLEX  CHIRURGIE  (Bd  I,  II  Thcil, 
article  Érysipèle,  par  Volkmann). 

(2)  Schmidt's  Jahrbucher,  Bd  XXX,  page  184. 

(3)  Épidémies  diverses  :  américaine,  rapportée  par  Hirsch;  —  ita- 
lienne, 1700,  parTozzi;  —  françaises,  parDarluc,  1750,  par  Fenestre, 
1861,  etc.  ;  —  anglaises^  par  Gibsou  et  Mac  Dowell. 


168 
serviraient  de  milieu,  de  point  de  ralliement  au  développement  ulté- 
rieur de  ces  organismes  toujours  présents  dans  les  fluides  ambiants? 
Faut-il  encore,  comme  Liiders  (1)  le  suppose,  admettre  dans  le  sang  à 
l'état  normal  des  vibrions  immobiles  [rufiende  Vibrionen)  qui  seraient 
prêts  à  prendre  des  développements  ultérieurs,  lorsque  le  milieu  dans 
lequel  ils  se  trouvent  commence  à  s'altérer,  en  un  mot  des  vibrions 
immobiles  qui  deviendraient  mobiles  lorsque  le  sang  serait  contaminé 
par  une  substance  septique  ? 

Voilà  des  hypothèses  qu'il  est  tout  aussi  difficile  d'attaquer  qu'il  a 
été  facile  de  les  édifier.  Pour  le  présent,  contentons-nous  de  les  men- 
tionner et  de  faire  pressentir  le  rôle  que  peut  jouer  dans  l'explication 
de  ces  épidémies  la  présence  des  bactéries  dans  le  sang. 

Quoi  qu'il  en  soit,  au  point  de  vue  anatomo -pathologique ,  d'une 
part,  l'existence  des  altérations  viscérales  dans  l'érysipèle  (tuméfac- 
tion trouble  et  dégénérescence  granulo-graisseuse  des  principaux  vis- 
cères) (2),  d'autre  part,  l'existence  de  bactéridies  dans  le  sang,  rappro- 
chent l'érysipèle  du  grand  groupe  des  septicémies.  A  ce  sujet,  il  n'est 
peut-être  pas  inutile  de  rappeler  que  Piorry,  en  1843,  désignait  déjà 
dans  son  Traité  de  médecine  pratique  l'érysipèle  sous  le  nom  de  sep- 
tico-dermite. 


(1)  Liiders  (voy.  Archives  de  Max.  Schullze,  1867,  tome  III,  p.  318); 
sur  le  même  point,  consulter  Bettelheim  Cari  (Wiener  Presse,  1867), 
et  Richardson  (American  journal  of  médecine,  1867). 

(2)  Emil  Ponfick,  Dissertation  inaugurale,  Heidelberg.  Veber  diepa- 
thologiscli  anatomisclien  veraederungen  der  inneren  organe  bei  loed- 
licfi  verlanfenden  erysipelcn. 


FIN  DES  COMPTES  RENDUS  DES  SÉANCES. 


MÉMOIRES 


LUS 


A  LA  SOCIETE  DE  BIOLOGIE 

PENDANT  L'ANNÉE  1870. 


MÉM.  1870, 


MÉMOIRE 

SUR    UNE 

NOUVELLE  ANOMALIE 

DE  LA  COLONNE  VERTÉBRALE 

CARACTÉRISÉE 

PAR   LA   PRÉSENCE  D'UNE  VERTÈBRE  DORSALE  SURNUMÉRAIRE  ENCLAVÉE 

ET  PAR  UN  NOMBRE  DE  CÔTES 

DIFFÉRENT  DANS  CHACUNE  DES  PAROIS  THORACIQUES 

Observation  recuillie  sur  un  cbeval 

Par   M.    ARMAND   GOUBAUX, 

Professeur  d'auatumie  et  de  physiologie  à  l'Ecole  vétérinaire  d'AIfort, 
membre  titulaire  de  la  Société  de  Biologie. 


Dans  un  Mémoire  Sît7'  les  anomalies  de  la  colonne  vertébrale  chez 
les  animaux  domestiques,  que  j'ai  communiqué  à  l'Académie  des 
sciences  dans  la  séance  du  23  septembre  1867,  et  qui  a  été  imprimé 
dans  le  Journal  de  l'anatomie  et  de  la  physiologie  de  l'homme  et 
DES  animaux  (numéros  de  novennbre  1 867  et  de  janvier  1868),  j'ai  fait 
connaître  toutes  les  anomalies  que  j'avais  eu  l'occasion  de  constater 
sur  les  nombreux  cadavres  qui  ont  été  utilisés  pour  les  études  anato- 
miques,  depuis  le  jour  oii  j'ai  été  chargé  de  cette  partie  de  l'ensei- 
gnement à  l'École  d'Ali'ort  jusqu'à  celui  de  la  publication  de  ce  tra- 
vail. 

Les  observations  que  renferme  ce  mémoire  sont  assez  nombreuses, 
et  elles  sont  plus  ou  moins  intéressantes. 

Je  n'ai  pas  l'intention  de  revenir  aujourd'hui  sur  toutes  ces  di- 


4 
verses  anomalies;  cependant  je  puis  obligé  de  dire  que  toutes  celles 
que  j'ai  observées  depuis  l'époque  sus-indiquée  n'ont  fait  que  me 
lortifier  dans  les  opinions  que  jai  émises,  à  la  fin  de  ce  mémoire, 
sous  la  forme  de  conclusions. 

Une  nouvelle  observation,  que  je  viens  de  faire  tout  récemment, 
m'a  déterminé  à  rédiger  ce  nouveau  mémoire,  tout  à  la  fois  comme 
une  suite  et  un  complément  de  mon  premier  travail.  Voici  celte  ob- 
servation : 

Obs.— Un  cheval  hongre,  sous  poil  bai,  d'une  taille  un  peu  au-dessus 
de  la  moyenne,  très-vieux,  qui  est  resté  quinze  jours  daus  l'écurie  au 
service  d'anatomie,  et  sur  lequel  on  n'a  remarqué  aucune  déviation 
de  la  colonne  vertébrale,  a  été  sacrifié  pour  les  dissections  le  lundi 
31  janvier  1870. 

Le  jeudi  3  février,  la  dissection  du  cadavre  était  déjà  assez  avancée, 
lorsque  les  élèves  eurent  l'idée  de  compter  les  côtes  :  ils  reconnurent 
qu'il  y  avait  18  côtes  du  côté  droit  et  seulement  17  du  côté  gauche,  et 
ils  me  firent  part  de  la  remarque  qu'ils  venaient  de  faire. 

J'examinai  le  cadavre  immédiatement;  je  comptai  les  côtes  moi- 
même,  et  je  reconnus  l'exactitude  de  l'observation  des  élèves.  Était-ce 
là  un  fait  semblable  à  d'autres  que  j'avais  constatés  antérieurement? 
Le  nombre  difierent  des  côtes,  à  droite  et  à  gauche,  était-il  le  résultat 
de  la  transformation  en  une  sorte  de  côte  de  l'apophyse  transverse  du 
côté  droit  de  la  première  vertèbre  lombaire?  Je  constatai  tout  de  suite 
que,  d'une  part,  les  deux  premières  côtes  étaient  sur  le  même  plan,  et. 
d'autre  part,  que  les  deux  dernières  côtes  étaient  aussi  sur  la  même 
ligne  transversale.  Je  ne  tirai  aucune  conclusion  quelconque  immé- 
diatement après  avoir  fait  les  constatations  dont  je  viens  de  parler,  et  je 
recommandai  aux  élèves  qui  disséquaient  ce  cadavre  de  ne  pas  diviser 
la  colonne  vertébrale,  afin  que  je  pusse  l'étudier  lorsqu'ils  auraient 
terminé  leurs  dissections. 

Le  cadavre  fut  à  ma  disposition  le  samedi  5  février,  et  voici  ce  que 
je  notai  tout  d'abord.  Il  y  a  : 

7  vertèbres  cervicales; 

6  vertèbres  lombaires; 
5  vertèbres  sacrées; 

7  côtes  sternales  du  côté  gauche; 

8  côtes  sternales  du  côté  droit. 

Une  anomalie  me  parut  devoir  exister  dans  la  partie  antérieure  de  la 
région  dorsale  du  rachis.  En  conséquence,  je  fis  diviser  lu  colonne  ver- 
tébrale en  avant,  entre  la  6"=  et  la  7*  vertèbre  cervicale,  et  en  arrière 


5 
entre  la  7'  et  la  8'  côte  du  côté  gauche  et  la  8"  et  la  9^  côte  du  côté 
droit.  Le  même  jour,  je  m'occupai  de  préparer  en  squelette  naturel  la 
pièce  anatomique  pour  en  faire  l'examen  ultérieurement. 
Voici  la  description  de  cette  pièce  anatomique  (1)  ; 

A.  Face  inférieure  de  la  région  dorsale  du  rachis. 

La  ligne  médiane,  représentée  par  la  crôte  inférieure  ou  médiane  du 
corps  des  vertèbres  dorsales,  se  dévie,  à  partir  de  la  première  ver- 
tèbre dorsale  jusqu'à  la  partie  postérieure  de  la  troisième,  graduelle- 
ment, mais  très-fortement  d'avant  en  arrière,  de  dedans  en  dehors  et 
de  gauche  à  droite  ;  puis,  à  partir  du  dernier  point  sus-indiqué,  elle  se 
dévie  de  nouveau,  dans  les  mêmes  proportions,  mais  en  sens  inverse, 
c'est-à-dire  de  dehors  en  dedans,  d'avant  en  arrière  et  de  droite  à  gau- 
che, jusqu'à  la  partie  antérieure  de  la  septième  vertèbre  dorsale  dont 
la  diversion  est  à  peu  près  normale. 

Une  règle  posée  sur  le  milieu  de  la  face  inférieure  de  la  septième 
vertèbre  cervicale  et  sur  le  milieu  de  la  face  inférieure  du  corps  de  la 
septième  vertèbre  dorsale  permet  de  mesurer  la  déviation  latérale  :  le 
sommet  de  l'angle  que  forme  cette  déviation  correspond  à  la  partie  pos- 
térieure de  la  troisième  avec  la  partie  antérieure  de  la  quatrième  ver- 
tèbre dorsalOj  et  à  la  partie  inférieure  de  l'articulation  de  la  tête  de  la 
quatrième  côte  du  côté  gauche. 

En  examinant  comparativement  le  volume  de  chacune  des  moitiés 
latérales  du  corps  des  vertèbres,  on  arrive  aux  conclusions  suivantes: 

1"  La  moitié  gauche  du  corps  des  2%  3%  4"  et  5^  vertèbres  dorsales 
est  plus  large  que  la  moitié  droite  du  corps  de  ces  mêmes  vertèbres. 

2°  Dans  les  6^  et  7"  vertèbres  dorsales,  les  deux  moitiés  latérales  du 
corps  sont  de  même  volume. 

La  particularité  la  plus  remarquable  qu'on  constate  sur  cette  face 
de  la  région  dorsale  est  la  suivante  : 

Il  existe  une  vertèbre  ou  portion  de  vertèbre  enclavée  :  elle  est  si- 
tuée au  sommet  de  l'angle  de  la  déviation  générale  dont  il  a  été  ques- 
tion, c'est-à-dire  du  côté  droit,  et  c'est  évidemment  à  cause  de  sa  pré- 
sence que  le  nombre  des  côtes  est  différent  dans  chacune  des  parois 
thoraciques.  Cette  vertèbre  ou  portion  de  vertèbre  porte  la  quatrième 
côte  du  côté  droit. 

En  examinant  avec  attention,  on  reconnaît  que  la  troisième  vertèbre 
dorsale  répond,  par  sa  moitié  droite  ou  la  plus  petite  d'après  ce  qui  a 
été  exposé  plus  haut,  à  la  partie  antérieure  de  la  vertèbre  surnumé- 
raire ou  enclavée,  tandis  que  par  sa  moitié  gauche,  qui  est  très-dévc- 

(1)  Nota.  La  pièce  anatomique  est  présentée  à  la  Société. 


6 
loppce,  ainsi  qu'il  a  été  dit  aussi  plus  haut,  répond  à  la  moitié  corres- 
pondante delà  quatrième.  11  s'ensuit  nécessairement  que  la  quatrième 
vertèbre  dorsale  répond  à  droite  à  la  partie  postérieure  de  la  vertèbre 
dorsale  surnuméraire  ou  enclavée. 

On  comprend  maintenant  que  : 

1°  La  vertèbre  dorsale  surnuméraire  ou  enclavée,  entre  la  partie 
postérieure  de  la  troisième  et  la  partie  antérieure  de  la  quatrième,  a 
rendu  la  direction  de  la  région  dorsale  vicieuse; 

2°  Que  cette  vertèbre  a  donné  à  la  région  dorsale  une  longueur  plus 
grande  du  côté  droit  que  du  côté  gauche; 

3°  Que  les  côtes  du  côté  droit  doivent  être  plus  nombreuses  que  du 
côté  gauche.  En  effet,  elles  sont  au  nombre  de  dix-huit  du  côté  droit, 
et  seulement  de  dix-sept  du  côté  gauche  ; 

4"  Que  les  côtes  sont  plus  rapprochées  les  unes  des  autres  (les  troi- 
sième, quatrième  et  cinquième)  du  côté  gauche  que  les  côtes  corres- 
pondantes du  côté  droit. 

B.  Partie  supérieure  des  vertèbres  dorsales  ou  région  spinale. 

Elle  doit  être  examinée  du  côté  droit  et  du  côté  gauche. 

1°  Côté  droit.  —  On  compte  huit  apophyses  épineuses,  et  l'on  re- 
marque cette  particularité  que  la  troisième  est  soudée  à  la  quatrième 
dans  les  quatre  cinquièmes  environ  de  sa  longueur.  De  plus,  l'ensem- 
ble des  apophyses  épineuses  décrit  une  courbure  convexe  dont  la  partie 
la  plus  saillante  répond  à  la  quatrième.  Ce  sont,  du  reste,  les  apophyses 
épineuses  troisième  et  quatrième  qui  doivent  être  examinées  en  par- 
ticulier, car  toutes  les  autres  sont  bien  distinctes  les  unes  des  autres 
et  ont  leurs  dimensions  normales. 

Examen  des  troisième  et  quatrième  apophyses  épineuses. 

Je  dois  tout  d'abord  rappeler  que  la  troisième  apophyse  épineuse 
appartient  à  la  troisième  vertèbre  dorsale,  et  que  la  quatrième  appar- 
tient à  la  vertèbre  dorsale  que  j'ai  appelée  surnuméraire  ou  enclavée. 

Chacune  de  ces  apophyses  est,  à  la  base  ou  à  la  partie  inférieure,  ré- 
trécie  d'avant  en  arrière,  et  a  près  de  moitié  moins  de  développement 
que  celle  qui  les  précède  (la  deuxième)  ou  que  celle  qui  les  suit  (la 
cinquième). 

Ces  deux  apophyses  sont  d'abord  distinctes,  et  elles  sont  unies  par 
ua  ligament  interépineux,  puis  elles  se  soudent  et  demeurent  soudées 
dans  tout  le  reste  de  leur  longueur,  jusques  et  y  compris  leur  extré- 
mité supérieure.  Dans  leur  ensemble,  elles  forment  une  apophyse  épi- 
neuse unique,  qui  est  très-large  d'avant  en  arrière,  mais  qui  n'a  cer- 
tainement pas  la  largeur  qu'auraient  les  deux  apophyses  normales  si 
elles  étaient  soudées. 


En  considérant  la  direction  de  l'apophyse  épineuse  de  la  troisième 
vertèbre  dorsale,  on  acquiert  la  certitude  que  la  portion  annulaire  ou 
spinale  de  cette  vertèbre  est  dirigée  obliquement  d'avant  en  arrière  et 
de  gauche  à  droite. 

En  ce  qui  concerne  les  apophyses  articulaires  situées  l'une  à  la  partie 
antérieure  et  l'autre  à  la  partie  postérieure  de  chaque  vertèbre,  voici 
ce  que  l'on  remarque  : 

i"  Celle  de  la  partie  antérieure  de  la  troisième  vertèbre  dorsale  est 
distincte,  et  recouverte,  comme  à  l'ordinaire,  par  l'apophyse  articu- 
laire postérieure  de  la  deuxième. 

2°  Celle  de  la  partie  postérieure  de  la  troisième  vertèbre  dorsale  est 
soudée  à  la  correspondante  ou  à  l'antérieure  de  la  vertèbre  surnumé- 
raire ou  enclavée,  mais  cependant  on  voit  encore  un  peu  la  trace  de  la 
séparation  primitive  de  ces  apophyses. 

Il  en  est  de  même  pour  les  rapports  de  l'apophyse  articulaire  posté- 
rieure de  la  vertèbre  dorsale  surnuméraire  ou  enclavée  avec  l'apophyse 
articulaire  de  la  vertèbre  suivante  :  elles  sont  soudées. 

J'ajoute,  pour  terminer  l'examen  de  la  face  droite  de  la  partie  annu- 
laire ou  spinale  de  cette  région  dorsale,  que  : 

a.  Toutes  les  apophyses  transverses  des  vertèbres  dorsales  sont  bien 
distinctes  les  unes  des  autres  ; 

b.  La  tubérosité  de  chacune  des  côtes  s'articule  avec  la  facette  arti- 
culaire que  porte  chacune  des  apophyses  transverses; 

c.  Enfin,  que  chaque  côte,  par  sa  tête,  s'articule  à  la  fois  avec  deux 
vertèbres,  au  moyen  de  la  cavité  de  conjugaison  dont  la  moitié  anté- 
rieure appartient  à  la  partie  postérieure  du  corps  de  la  vertèbre  anté- 
rieure, tandis  que  la  moitié  postérieure  appartient  à  la  partie  du  corps 
de  la  vertèbre  postérieure. 

La  dernière  particularité  qu'il  y  ait  à  noter,  c'est  que,  à  l'exception 
de  la  quatrième  côte,  toutes  les  côtes  sont  espacées  comme  dans  les 
conditions  ordinaires.  Mais  la  quatrième  côte  a  son  extrémité  supé- 
rieure plus  rapprochée  de  celle  de  la  troisième  et  plus  éloignée  de  celle 
de  la  cinquième,  à  cause  de  la  déviation  de  la  ligne  médiane,  ainsi 
que  je  l'ai  déjà  fait  remarquer  précédemment. 

2°  Côté  gauche.  —  L'ensemble  des  apophyses  épineuses  est  dévié  en 
sens  inverse  de  ce  qui  a  été  indiqué  pour  le  côté  droit,  c'est-à-dire 
qu'il  décrit  une  concavité  dont  la  partie  moyenne  répond  à  la  qua- 
trième. 

Les  troisième  et  quatrième  apophyses  épineuses  sont  les  seules  qui 
soient  à  examiner  en  particulier. 

Elles  sont  plus  complètement  soudées  du  côté  gauche  que  du  côté 
droit  ;  c'est  à  peine  si,  tout  à  fait  à  la  partie  inférieure,  on  voit  le  tiers 


.1 1  L I  B  R  A  r- 


V 


>■, 


.9"» 


8 

de  la  largeur  de  la  quatrième,  mais  elle  augmente  graduellement  do 
largeur  de  bas  en  haut. 

En  examinant  avec  attention,  on  arrive  à  conclure  que  la  partie  in- 
férieure de  l'apophyse  épineuse  de  la  vertèbre  dorsale  surnuméraire  ou 
enclavée  est  plus  complète  du  côté  droit  que  du  côté  gauche,  et  cela 
résulte  de  ce  qu'elle  est  dirigée  obliquement  d'avant  en  arrière  et  de 
gauche  à  droite.  Si  l'on  tient  compte  dans  cet  examen  du  mode  sui- 
vant lequel  se  développe  l'apophyse  épineuse  des  vertèbres  dorsales 
(deux  noyaux  d'ossification  latéraux  qui  s'opposent  l'un  à  l'autre  par 
leurs  faces  correspondantes  au-dessus  de  la  portion  annulaire),  le  noyau 
d'ossification  du  côté  gauche  de  l'apophyse  épineuse  de  ila  quatrième 
vertèbre  dorsale  est  avorté,  relativement  au  moyen  d'ossification  ho- 
mologue ou  du  côté  droit.  Pour  moi,  il  n'y  a  aucun  doute  à  cet  égard. 

D'un  autre  côté,  les  apophyses  épineuses  sont  soudées,  et  il  en  est 
de  même  des  apophyses  articulaires,  ainsi  qu'on  le  voit  à  la  base  des 
apophyses  épineuses  des  troisième,  quatrième  et  cinquième  vertèbres 
dorsales.  Enfin,  il  me  paraît  évident  que  l'apophyse  transverse  de  la 
troisième  vertèbre  dorsale  s'est  soudée,  confondue  avec  celle  de  la 
vertèbre  surnuméraire  ou  enclavée.  C'est  pour  cette  raison  qu'il  y  a, 
du  côté  gauche,  une  côte  de  moins  que  du  côté  droit.  Enfin,  je  termine  en 
faisant  remarquer  que  l'extrémité  supérieure  des  deuxième,  troisième, 
quatrième  et  cinquième  côtes  est  plus  rapprochée  que  dans  les  condi- 
tions ordinaires,  et  que  leur  rapprochement  est  dû  à  deux  causes  :  la 
concavité  de  la  région  dorsale  du  côté  gauche  et  la  présence  d'une  ver- 
tèbre enclavée  ou  surnuméraire  du  côté  droit. 

En  résumé,  chez  le  cheval  qui  est  le  sujet  de  cette  observation  : 

Le  nombre  des  vertèbres  cervicales,  des  lombaires  et  des  sacrées 
était  normal. 

Le  nombre  des  côtes  était  de  dix-sept  à  gauche  et  de  dix-huit  à 
droite. 

Ordinairement  le  nombre  des  côtes  sternales  est  de  huit  et  celui 
des  côtes  asternales  est  de  dix,  mais  il  y  a  quelquefois  des  anomalies 
à  cet  égard.  Chez  le  sujet  de  cette  observation,  il  y  avait  sept  côtes 
sternales  à  gauche  et  huit  à  droite. 

Le  nombre  différent  des  côtes  dans  chacune  des  parois  thoraciques 
est  en  rapport  avec  une  anomalie  qui  existe  dans  la  région  dorsale 
du  rachis,  à  savoir  qu'une  vertèbre  dorsale  surnuméraire  ou  encla- 
vée se  fait  remarquer  entre  la  troisième  et  la  quatrième  qui  ont  leur 
développement  normal. 


9 

Cette  vertèbre  surnuméraire  ou  enclavée  se  fait  remarquer  sur- 
tout du  côté  droit,  et  elle  est  peu  visible,  dans  sa  partie  spinale  seu- 
lement, du  côté  gauche.  C'est  la  présence  de  cette  vertèbre  qui  a 
été  la  cause  de  la  déviation  qu'on  observe  dans  la  partie  antérieure 
de  la  région  dorsale. 

La  situation  de  cette  vertèbre  est  telle  que  la  déviation  du  rarhis 
a  pu  passer  inaperçue  sur  le  cheval  vivant,  attendu  qu'elle  répon- 
dait à  la  région  du  garrot,  ou  entre  les  deux  épaules. 

Telles  sont  les  faits  principaux  qui  ressortent  de  cette  observa- 
tion. 

Maintenant,  laissons  de  côté  les  détails  qui  ressortent  de  cette  ob- 
servation pour  n'en  considérer  que  le  fait  principal. 

J'ai  dit  qu'il  y  avait,  chez  le  sujet  de  cette  observation,  une  ver- 
tèbre surnuméraire  ou  enclavée  dans  la  région  dorsale,  et  j'en  ai 
fait  connaître  la  situation  et  les  connexions.  Est-ce  bien  là  une  ver- 
tèbre surnuméraire,  et  doit-elle  être  considérée  comme  enclavée 
entre  les  voisines?  Ce  sont  là  deux  points  qu'il  faut  examiner  succes- 
sivement, et  à  l'occasion  de  l'examen  desquels  il  faut  produire  toutes 
les  preuves  nécessaires  pour  qu'il  ne  reste  de  doute  dans  l'esprit 
de  personne.  Mais  avant  d'aborder  la  discussion,  il  importe  d'expo- 
ser en  peu  de  mots  ce  que  l'on  constate  dans  les  conditions  ordi- 
naires. 

Chez  le  cheval,  les  vertèbres  dorsales  sont  ordinairement  au  nom- 
bre de  dix-huit,  et  par  conséquent  il  y  a  dix-huit  côtes  de  chaque 
côté.  Je  dis  que  ce  sont  là  les  nombres  normaux,  et  j'insiste  sur  ce 
fait,  bien  qu'il  ne  soit  pas  absolument  rare  de  rencontrer  des  ano- 
malies qui  consistent  soit  dans  une  diminution,  soit  dans  une  aug- 
mentation. Ainsi,  abstraction  faite  de  la  taille  des  individus,  il  y  a 
des  chevaux  qui  ont  : 

Dix-sept  vertèbres  dorsales  et  dix-sept  paires  de  côtes;  et  il  en 
est  d'autres  qui  ont  : 

Dix-neuf  vertèbres  dorsales  et  dix-neuf  paires  de  côtes. 

J'ai  fait  connaître  tous  ces  faits,  d'après  mes  observations  person- 
nelles, dans  mon  premier  mémoire,  et  ce  sont  les  seuls  qu'il  était 
nécessaire  de  remettre  ici  sous  les  yeux  du  lecteur. 

Nous  avons  vu,  chez  le  cheval  qui  fait  le  sujet  de  la  présente  ob- 
servation, que  les  côtes  étaient  au  nombre  de  dix-huit  du  côté  droit, 
et  seulement  au  nombre  de  dix-sept  du  côté  gauche.  Ghacun  de  ces 


tn 
nombres  peut  se  faire  remarquer,  —  nous  l'avons  dit  plus  haut,  — 
mais  alors  il  est  le  même  du  côté  gauche  et  du  côl6  droit,  ou  bien, 
dans  quelques  cas  exceptionnels,  ainsi  que  Daubeuton  et  d'autres  en 
ont  lait  la  remarque,  la  difrérence  du  nombre  des  côtes  est  apparente 
seulement  et  non  réelle,  et  elle  tient  au  développement  anormal  de 
l'apophyse  transverse  de  la  première  vertèbre  lombaire  qui  a  acquis 
un  développement  analogue  à  celui  des  côtes.  Tous  ces  faits  sont 
bien  différents  de  celui  que  présentait  le  sujet  de  cette  observation. 
Pour  lui,  il  est  certain  que  le  nombre  des  côtes  est  naturellement 
différent  dans  chacune  des  parois  thoraciques,  et  il  est  non  moins 
certain  que  le  nombre  des  côtes,  plus  élevé  du  côté  droit  que  du  côté 
gauche,  est  lié  à  la  présence  d'une  vertèbre  qui  existe  en  plus  du 
côté  droit,  car  du  côté  gauche  on  n'en  voit  qu'une  faible  portion  re- 
présentée par  la  partie  annulaire  ou  spinale  qui  est  soudée  à  la  partie 
correspondante  de  la  vertèbre  voisine.  C'est  là  le  fait  dominant  dans 
l'anomalie  que  présentait  le  sujet  de  cette  observation, 

Peut -on  considérer  cette  vertèbre  que  j'ai  appelée  surnuméraire  et 
enclavée  comme  une  vertèbre  normale,  dont  le  développement  serait 
moindre  que  dans  les  conditions  ordinaires  à  cause  de  la  déviation 
qu'avait  éprouvée  la  colonne  vertébrale  dans  la  partie  antérieure  de 
la  région  dorsale  du  rachis?  On  ne  saurait  soutenir  cette  opinion. 
En  effet,  si,  primitivement,  cette  vertèbre  avait  eu  son  volume,  sa 
forme  et  ses  connexions  ordinaires,  il  est  certain  qu'elle  eût  été  en 
rapport  avec  une  côte,  du  côté  gauche  et  du  côté  droit.  On  voit  bien 
la  côte  du  côté  droit,  mais  il  n'y  a  aucun  vestige  de  celle  du  côté 
gauche,  et  on  ne  voit  pas  davantage  les  surfaces  articulaires  qui  de- 
vaient servir  à  établir  les  connexions  de  cette  vertèbre  avec  cette 
côte.  Donc,  la  côte  du  côté  gauche,  qui  devait  correspondre  à  la  qua- 
trième du  côté  droit,  n'a  jamais  existé. 

Par  les  mêmes  raisons,  cette  vertèbre  doit  être  considérée  comme 
surnuméraire  (du  côté  droit,  relativement  au  côté  gauche),  et  si  l'on 
ne  tient  aucun  compte  de  la  déviation  vertébrale  qui  doit  être  attri- 
buée, sinon  exclusivement,  du  moins  à  peu  près  exclusivement  à  sa 
présence,  elle  doit  être  considérée  comme  enclavée,  et  dans  tous  les 
cas  comme  une  vertèbre  incomplète  ou  imparfaite,  placée  entre  des 
vertèbres  dont  le  développement  est  normal  :  c'est  cette  particula- 
rité qui  caractérise  essentiellement  celte  nouvelle  anomalie. 

Dans  mon  premier  mémoire,  je  nai  pas  cru  devoir  adopter  la  clas- 


11 

sificalion  proposée  par  M.  Isidore  Geotlroy-Sainl-Hilaire,  en  ce  qui 
concerne  les  anomalies  de  la  colonne  vertébrale. 

M.  Isidore  Geoffroy- Saint-Hilaire  a  pensé  que  «  les  divers  cas, 
soit  d'augmentation,  soit  de  diminution  du  nombre  des  vertèbres  se 
rapportent  très-naturellement  à  trois  genres,  »  et  il  les  a  étudiés 
«  sous  les  noms  de  changements  apparent,  compensé  et  réel.  » 

Cette  division  n'embrassait  pas  toutes  les  observations  que  j'avais 
faites,  et  c'est  pour  cette  raison  que  j'ai  établi  la  suivante  : 

A.  Anomalies  par  transposition  des  caractères  des  vertèbres. 

B.  Anomalies  du  nombre  des  vertèbres  composant  chacune  des 
régions  du  rachis,  comprenant  : 

1°  L'augmentation  du  nombre; 

2°  La  diminution  du  nombre. 

Ces  deux  dernières  anomalies  embrassent  celles  que  M.  Isidore 
Geoffroy-Saint-Hilaire  a  appelées  changements  apparent,  compensé 
et  réel. 

Toutes  les  observations  que  j  ai  publiées  dans  mon  premier  mé- 
moire ont  été  facilement  rangées  sous  ces  différents  chefs  ;  mais  sous 
lequel  devra  se  trouver  ma  dernière  observation?  J'avoue  que  cette 
question  m'embarrasse,  car  si  l'on  examine  la  pièce  anatoraique,  il 
y  a  évidemment  du  côté  gauche  une  diminution  du  nombre  des  ver- 
tèbres dorsales  et  une  diminution  du  nombre  des  côtes,  relativement 
au  nombre  normal.  Si,  au  contraire,  on  l'examine  du  côté  droit,  il  y 
a  le  nombre  norraaUles  vertèbres  dorsales,  et  aussi  le  nombre  nor- 
mal des  côtes.  Mais  dans  tous  les  cas,  et  c'est  ma  conclusion  finale, 
il  y  a  une  différence  entre  le  côté  droit  et  le  côté  gauche.  C'est  pour 
cette  raison  que  je  considère  cette  anomalie  comme  essentiellement 
caractérisée  par  une  vertèbre  surnuméraire  enclavée.  (Dans  la  série, 
elle  correspondrait  à  la  quatrième.) 

L'observation  que  je  viens  de  présenter  m'a  remis  en  mémoire  un 
fait  que  j'ai  communiqué  à  la  Société  nationale  et  centrale  de  méde- 
cine vétérinaire  dans  la  séance  du  2?  avril  1858,  sous  le  titre  de  : 
Description  anatoviique  dhin  chien  bossu.  Réflexions  sur  les  lésions 
que  présente  le  squelette  de  cet  animal.  Jusqu'à  un  certain  point,  ces 
deux  observations  peuvent  fournir  matière  à  des  rapprochements (1). 

(1)  Voyez  Recueil  de  médecine  vétérinaire,  tome  XXXV,  ou  5*^  de  la 

i"  série.  Année  1858  page  758, 


12 

Sans  reproduire  ici  tous  les  détails  qui  ont  6té  notés  lors  de  la 
dissection  de  ce  chien,  et  en  me  bornant  à  rappeler  les  particulari- 
tés principales  de  la  région  dorsale,  il  y  a,  comme  on  va  le  voir, 
quelques  traits  qui  sont  communs  dans  les  deux  observations.  En 
effet: 

1"  La  région  dorsale  de  ce  chien  ne  portait  que  onze  apophyses 
épineuses,  au  lieu  de  treize  qui  est  le  nombre  normal.  En  exami- 
nant la  face  inférieure  de  la  région,  on  y  reconnaissait  treize  vertè- 
bres. Donc,  il  y  avait  eu  disparition  de  deux  apophyses  épineuses. 

2°  Le  nombre  des  côtes  n'était  pas  en  rapport  avec  celui  des  ver- 
tèbres dorsales,  car  il  y  en  avait  dix  du  côté  droit,  et  seulement  neuf 
du  côté  gauche,  au  lieu  de  treize  de  chaque  côté  qui  est  le  nombre 
normal. 

Je  ne  rappelle  que  ces  faits,  car  il  faudrait  reproduire  l'observa- 
tion dans  toute  son  étendue;  ce  serait  hors  de  propos,  je  le  crois, 
mais  il  est  certain  qu'elle  est  très-intéressante  dans  tous  ses  dé- 
tails. 

Gomme  conclusion,  je  citerai  seulement  la  phrase  par  laquelle  se 
termine  cette  observation,  en  l'appliquant  aussi  à  la  dernière. 

Ces  deux  observations  seront  peut-être  de  celles,  si  nombreuses, 
que  l'on  trouve  dans  la  science,  qui,  à  l'époque  de  leur  publication, 
semblent  n'avoir  pas  d'importance,  mais  qui  en  acquièrent  plus  tard, 
lorsque  des  faits  nouveaux,  plus  complètement  observés,  permettent 
de  faire  des  généralisations  en  réunissant  tous  les  matériaux  épars 
qui  se  rattachent  à  l'étude  d'une  même  question. 

Alfort,  le  17  mars  1870. 


NOTE 


S«K    UN 


CAS  DE  TÉTANOS  TRAUMATIQUE 

AUTOPSIE  :  EXAMEN  MICROSCOPIQUE  DE  LA  MOELLE,  DU  BULBE 
ET  DE  LA  PROTUBÉRANCE,  DES  MUSCLES  ET  DES  NERFS; 

lue  à  la  Société  de  Biologie 

Par  M.  ALIX  JOFFROY. 


Eugène  Lançon,  âgé  de  12  ans  et  demi,  est  entré  à  l'hôpital  de 
Sainte-Eugénie,  dans  le  service  de  M.  Marjolin,  le  8  décembre  1869. 
Je  remercie  M.  Marjolin  et  son  interne,  M.  Debove,  d'avoir  bien  voulu 
me  communiquer  les  détails  de  l'observation  et  me  confier  le  soin  de 
l'autopsie. 

Les  premiers  symptômes  observés  par  les  parents,  et  pouvant  être 
rapportés  au  tétanos,  se  sont  montrés  dans  la  journée  du  9  décembre 
1869,  c'est-à-dire  la  veille  de  son  entrée  à  Sainte-Eugénie.  Le  trau- 
matisme, cause  de  ces  accidents,  datait  de  huit  jours,  et  consistait  dans 
l'écrasement,  produit  par  un  engrenage,  des  trois  derniers  doigts  de  la 
main  droite.  Le  petit  doigt  était  écrasé  dans  toute  sa  longueur.  L'annu- 
laire présentait  une  lésion  analogue  des  deux  dernières  phalanges,  le 
médian  n'était  atteint  qu'à  la  dernière. 

A  son  entrée  à  l'hôpital,  la  plaie  présentait  un  mauvais  aspect,  sup- 
purait mal,  tandis  que  les  parties  voisines  étaient  infiltrées  de  pus. 
Les  premiers  symptômes  caractéristiques,  observés  la  veille,  con- 
sistaient en  roideur  des  muscles  du  cou  et  en  difficulté  d'écarter 
les  arcades  dentaires.  Lorsque  nous  vîmes  le  malade  le  8  au  soir,  on 
notait,   outre  ces  signes,  une  roideur  tétanique  très-marquée  dans 


14 

les  membres  supérieurs  et  inférieurs,  et  dans  les  muscles  respira- 
teurs. De  là,  une  gêne  de  la  respiration,  se  traduisant  par  la  rapi- 
dité et  le  peu  d'amplitude  des  mouvements  respiratoires.  En  même 
temps  le  pouls  était  très-rapide.  Tous  ces  symptômes  redoublaient 
d'intensité  par  moments.  Enfin,  l'enfant  succomba  le  10  décembre;  la 
mort  sembla  causée  par  l'asphyxie.  L'autopsie  fut  pratiquée  vingt-trois 
heures  après  la  mort,  par  une  température  froide,  le  cadavre  étant  dans 
un  bon  état  de  conservation.  Il  n'y  avait  rien  à  noter  dans  les  viscères, 
sauf  une  congestion  assez  vive  des  poumons,  des  reins  et  du  foie.  L'en- 
céphale était  complètement  sain  à  Toeil  nu,  et  l'on  ne  peut  signaler  au- 
tre chose  qu'un  léger  degré  de  congestion  des  méninges.  La  moelle 
présente,  à  l'œil  nu,  les  mêmes  troubles  de  la  circulation,  mais  à  un  plus 
haut  degré.  Le  canal  vertébral  étant  ouvert,  on  trouve  dans  toute  sa 
longueur,  entre  la  dure-mère  et  le  canal  osseux,  un  épanchement  séro- 
sanguinolent  en  partie  coagulé.  La  moelle  enlevée,  et  la  dure- mère  ou- 
verte sur  la  ligne  médiane,  en  avant  et  en  arrière,  la  pie-mère  apparaît 
fortement  congestionné  dans  toute  sa  longueur.  Faisant  alors  des  cou- 
pes transversales,  un  examen  très-attentif,  à  l'œil  nu,  de  la  substance 
nerveuse,  ne  nous  permet  de  voir  qu'une  particularité  ayant  quelque 
importance,  c'est  la  dilatation  des  vaisseaux  qui  se  trouvent  dans  la 
commissure  grise,  au  voisinage  du  canal  central.  Nulle  part,  on  ne  re- 
marque d'altération  de  la  substance  grise  ou  blanche,  soit  pour  la  con- 
sistance, soit  pour  la  couleur.  Le  renflement  cervical  est  particulière- 
ment examiné  à  ce  point  de  vue,  et  l'on  peut  affirmer  que  dans  ce  cas 
i!  ne  présentait  aucune  modification  notable. 

Examen  microscopique.  1"  Muscles.  On  trouve  les  caractères  normaux 
de  la  fibre  musculaire  dans  toutes  les  préparations  des  muscles  sui- 
vants, examinés  à  l'état  frais,  savoir  :  muscles  du  mollet,  des  parois 
thoraciques,  du  bras  et  de  l'avant-bras  droit  et  de  la  nuque. 

2°  Nerfs.  Le  nerf  cubital  seul  a  été  examiné.  Les  tubes  nerveux  ne 
présentaient  aucune  altération.  Nous  n'avons  pas  noté  non  plus  la 
moindre  lésion  du  tissu  conjonctif  des  nerfs. 

3°  Protubérance^  bulbe  el  moelle.  Des  coupes  minces,  transversales, 
pratiquées  dans  ces  parties  du  système  nerveux  central,  après  durcis- 
sement dans  l'acide  chromique,  nous  ont  montré  des  particularités 
intéressantes. 

Dans  la  protubérance,  on  remarque  sur  toutes  les  coupes  une  disten- 
s'on  notable  de  tous  les  vaisseaux  sanguins,  plus  remarquable  dans  la 
substance  grise,  c'est-à-dire  là  où  la  vascularité  est  plus  grande.  Çà  et 
là,  on  trouve  sur  les  coupes,  et  surtout  sur  celles  plus  voisines  des  pé- 
doncules cérébraux,  des  globules  sanguins  sortis  des  vaisseaux  et  rem- 
plissant plus  ou  moins  le  canal  périvasculaire.  Enfin,  en  certains  points, 


15 

irrégulièrement  disséminés,  mais  principalement  au  niveau  des  fais- 
ceaux qui  constituent  les  pyramides  antérieures,  on  note  de  véritables 
hémorrhagies,  visibles  à  l'œil  nu  sur  les  coupes  minces.  Au  microscope 
on  voit  les  globules  sanguins  sortis  des  vaisseaux  et  de  la  gaîne  péri- 
vasculaire,  et  répandus  dans  la  substance  nerveuse,  former  ainsi  un 
petit  foyer  plus  ou  moins  arrondi,  dont  le  diamètre  est  parfois  de  huit 
à  dix  fois  celui  du  vaisseau  qui  a  produit  l'hémorrhagie.  La  pie-mère  de 
la  protubérance  présente  des  traces  de  congestion  non  moins  vive. 

Dans  le  bulbe,  on  note  les  mêmes  phénomènes.  Seulement,  les  hé- 
morrhagies sont  plus  rares  et  moins  considérables.  La  réplétion  des 
vaisseaux  est  ici  le  fait  dominant.  C'est  surtout  au  voisinage  du  qua- 
trième ventricule  qu'on  remarque  la  congestion,  c'est-à-dire,  comme 
nous  l'avons  déjà  fait  remarquer,  là  où  il  y  a  plus  de  vaisseaux.  Enfin, 
le  canal  central  présente  à  sa  surface,  sur  la  couche  épithéliale  qui  le 
tapisse,  un  exsudât  fibrineux  assez  abondant.  La  pie-mère,  au  bulbe, 
offre  les  mêmes  caractères  qu'à  la  protubérance. 

Dans  la  moelle,  on  trouve  encore  la  congestion,  mais  elle  n'a,  presque 
nulle  part,  produit  ces  petits  foyers  d'hémorrhagie  qui  viennent  d'être 
décrits.  On  apercevait  généralement  quelques  globules  sanguins  dans 
le  canal  périvasculaire.  Au  voisinage  du  canal  central,  tous  ces  espaces 
p'riartériels  sont  dilatés  et  remplis  par  un  exsudât  fibrineux.  Cette  exsu- 
dation se  retrouve  dans  le  canal  central  de  la  moelle,  mais,  de  même 
qu'au  bulbe,  l'exsudat  n'est  pas  assez  abondant  pour  le  remplir. 

L'examen  microscopique  ne  montre  rien  de  spécial,  au  niveau  du 
renflement  cervical.  Dans  les  coupes  faites  à  ce  niveau,  la  comparaison 
de  la  moitié  droite  et  de  la  moitié  gauche  ne  montre  aucune  différence. 

En  résumé,  l'examen  microscopique  montre  ici  :  1°  une  congestion 
considérable  de  la  pie-mère  dans  toute  la  hauteur  de  la  moelle,  du 
bulbe  et  de  la  protubérance,  avec  issue  des  globules  sanguins  formant 
par  places  de  véritables  petits  foyers  d'hémorrhagie  ;  2"  une  conges- 
tion de  la  substance  grise  et  de  la  substance  blanche  de  la  moelle,  du 
bulbe,  et  de  la  protubérance.  Dans  le  bulbe,  et  surtout  dans  la  protubé- 
rance, cette  réplétion  a  donné  lieu  à  de  petits  foyers  hémorrhagiques. 
3°  Le  canal  central,  dans  toute  la  longueur  de  la  moelle  et  du  bulbe,  a 
été  le  siège  d'un  exsudât  fibrineux  peu  abondant.  4°  Nous  ferons  re- 
marquer que,  nulle  part,  il  n'y  avait  trace  de  multiplication  des  éléments 
conjonctifs  ni  d'altération  des  éléments  nerveux. 

Avant  de  rechercher  quelle  est  la  valeur  de  cette  observation  et 
des  détails  d'anatomie  pathologique  qu'elle  renferme,  il  importe  de 
faire  remarquer  qu'il  s'agit  ici  du  tétanos  à  forme  aiguë,  c'est-à- 
dire  de  cette  forme  de  la  maladie,  contre  laquelle  presque  toujours, 


16 

siuon  toujours,  ont  échoué  jusqu'ici  toutes  les  médications.  Notre 
vénéré  maître  M.  Giraldès,  chirurgien  à  l'hôpital  des  Enfants-Ma- 
lades, a  parfaitement  établi,  dansune  de  ses  leçons  cUniques,  ladis- 
tinction  qui  doit  être  faite,  entre  cette  forme  aiguë  et  presque  fa- 
talement mortelle,  et  une  autre  forme  moins  rapide  dans  son 
développement,  généralement  rémittente,  et  favorable  à  tous  les 
moyens  thérapeutiques,  y  compris  l'expectation.  Cette  distinction 
entre  le  tétanos  aigu  et  le  tétanos  subaigu  ou  chronique,  très-im- 
portante au  point  de  vue  clinique,  ne  l'est  pas  moins  au  point  de 
vue  physiologique. 

Puisque  certains  cas  de  tétanos  guérissent  sans  laisser  de  traces 
durables  de  leur  existence  antérieure,  on  est  porté  à  supposer  que 
les  lésions  des  centres  nerveux  ne  consistaient  alors  qu'en  modifica- 
tions transitoires,  et  non  en  lésions  irrémédiables  (1).  Quelles  peu- 
vent être  ces  modifications,  sinon  des  troubles  de  la  circulation, 
entraînant  à  leur  suite,  des  changements  dans  les  propriétés  des 
éléments  nerveux  qu'ils  sont  chargés  de  nourrir,  et,  par  consé- 
quent, dans  les  fonctions  qui  sont  sous  la  dépendance  des  centres 
nerveux.  11  n'est  guère  permis  de  s'arrêter  à  une  autre  hypothèse, 
quand  on  voit  la  rapidité,  avec  laquelle  les  accidents  se  succè- 
dent, et  leur  peu  de  durée,  soit  que  la  maladie  se  termine  par  la 
mort,  ou  même  par  la  guérison.  Cette  manière  de  voir,  à  laquelle 
on  est  amené  par  l'observation  des  malades,  trouve  son  entière 
justification  dans  l'examen  anatomique  qu'on  vient  de  lire.  On  a 
vu  que  les  lésions  consistaient  en  congestion.  Par  places,  il  s'est 
bien  produit  de  petites  hémorrhagies ,  mais  ce  n'est  là  qu'une 
exagération  de  la  congestion,  et  il  ne  serait  pas  permis  de  conclure 


(l)  Nous  ne  voulons  pas  aflSrmer,  que  les  lésions  des  centres  nerveux 
qui  existent  dans  le  tétanos,  soient  forcément  transitoires,  d'après  ce 
seul  fait,  que  l'affection  guérit  sans  laisser  de  troubles  persistants  de  la 
motilité  ou  de  la  nutrition  des  muscles.  Nous  avons,  en  effet,  déjà  fait 
remarquer  dans  une  Note  sur  un  cas  de  sclérose  en  plaques  disséminées 
(Société  de  biologie,  1869)  que  certaines  paraplégies  complètes  pou- 
vaient guérir,  alors  que  persistaient  les  lésions  de  la  moelle  auxquelles 
on  attribue  habituellement  la  paralysie  des  membres  inférieurs.  Plu- 
sieurs observations  ont  été  faites  dans  ce  sens  par  notre  maître 
M.  Charcot,  à  qui  nous  devons  la  notion  de  ces  particularités. 


17 
de  ce  fait,  que  ces  hémorrhagies  existent  nécessairemeat  dans  le  téta- 
nos. De  même  qu'on  comprend  facilementque  les  petites  hémorrhagies 
qui  se  sont  produites  dans  ce  cas,  auraient  pu  être  plus  considéra- 
bles, on  comprendra  également,  qu'elles  auraient  pu  ne  pas  exister. 
Une  légère  variation,  en  plus  ou  en  moins,  dans  le  degré  de  la  con- 
gestion, suffisait  pour  produire  l'un  ou  l'autre  de  ces  changements. 
Nous  eu  arrivons  donc  à  trouver  que,  dans  les  centres  nerveux,  la 
congestion  est  la  seule  lésion  qui  existe  à  coup  sûr  dans  le  tétanos 
D'autres  lésions  peuvent  se  produire,  telles  que  des  hémorrhagies, 
mais  elles  sont  accidentelles,  ne  sont  pas  primitives,  et  tiennent  à 
une  exagération  de  la  lésion  véritable  dont  il  vient  d'être  question  : 
la  congestion.  Nous  ajouterons  de  suite,  pour  bien  expliquer  notre 
façon  de  comprendre  la  production  des  accidents  tétaniques,  qu'eu 
disant  que  la  congestion  est  la  lésion  véritable,  nous  ne  voulons 
nullement  dire  qu'elle  est  la  cause  des  convulsions  et  des  au- 
tres accidents  de  la  maladie.  Nous  sommes,  au  contraire,  porté  à 
croire,  que  la  congestion  n'est  qu'un  phénomène  secondaire,  une 
conséquence  du  tétanos;  mais  elle  n'en  a  pas  pour  cela  moins  d'im- 
portance, car  on  ne  peut  nier  que  ces  troubles  profonds  do  la  circu- 
lation dans  les  centres  nerveux,  une  fois  produits,  n'exercent  une 
intluence  considérable  sur  l'intensité  des  symptômes.  Afin  donc 
d'éviter  tout  malentendu,  nous  dirons  simplement  que  la  congestion 
est  la  seule  lésion  consianic ;  ce  mot  ne  préjugeant  rien  sur  le  mode 
pathogénique  de  la  lésion,  et  son  rôle  dans  la  maladie. 

Quant  à  cette  congestion,  qui  peut,  comme  on  vient  de  le  voir, 
être  le  point  de  départ  d'autres  lésions,  telles  qu'hémorrhagies  in- 
terstitielles, et  peut-être  même,  dans  certains  cas,  daltéraiions  des 
éléments  nerveux  eux-mêmes,  quelle  est  son  origine,  quel  est  son 
mode  de  production?  Nous  avouerons  que  nous  ne  pouvons  nous 
l'expliquer.  Peut-être  s'agit-il  là  d'une  action  réflexe,  dont  le  point 
de  départ  est  la  plaie,  et  dont  le  résultat  serait  la  paralysie  des  vais- 
seaux des  centres  nerveux.  Mais  quelle  est  l'excitation  qui  donne 
lieu  à  ce  phénomène  réflexe?  Pourquoi  cette  excitation  agit-elle, 
non  pas  sur  une  région  donnée  et  limitée  de  la  moelle,  mais  bien 
sur  toute  la  moelle,  sur  le  bulbe  et  la  protubérance?  Voilà  l'inconnu. 
Ce  sont  bien  les  plaies  par  écrasement,  par  déchirures,  etc.,  qui  se 
compliquent  le  plus  fréquemment  de  tétanos,  mais  il  n'y  a  pas  là  ia 
cause  du  tétanos,  il  n'y  a  ià  qu'une  circonstance  favorable  à  son  dé- 
MÉM.  1870.  2 


18 
veloppement.  On  peut  en  dire  autant  du  froid  humide  lui-même, 
dont  l'intluence  est  cependant  bien  reconnue.  Peut-être  serait-il 
plus  rationnel  de  croire  à  une  sorte  d'empoisonnement,  analogue  à 
celui  produit  par  la  strychnine.  Les  premiers  symptômes  sont  en 
effet  toujours  les  mêmes,  quelle  que  soit  la  lésion  primitive;  leur  dé- 
veloppement, leur  marche  présentent  toujours  le  môme  tableau:  ce 
sont  bien  là  des  considérations  propres  à  faire  songer  à  une  altéra- 
tion du  sang.  Mais  encore  dans  cette  hypothèse  on  arrive  à  un  in- 
connu: quelle  est  la  cause,  quelle  est  la  nature  de  cet  empoison- 
nement? 

Nous  ne  poursuivrons  pas  cette  recherche  sur  la  manière  dont 
se  produit  la  congestion.  Nous  ajouterons  que  les  deux  mêmes 
hypothèses,  de  l'action  réflexe  et  de  l'empoisonnement,  ont  été  pro- 
posées pour  expliquer,  non  plus  seulement  la  congestion,  mais  tous 
les  symptômes  caractéristiques  du  tétanos.  Ici  encore  on  peut  faire 
à  chacune  de  ces  théories  les  mêmes  objections  que  plus  haut.  Peut- 
être  serait-il  préférable  d'invoquer  les  deux  théories  à  la  fois  pour 
l'explication  que  l'ori  veut  donner.  En  eflet,  l'hypothèse  de  l'action 
réflexe  est  entièrement  satisfaisa-ite,  si  l'on  suppose  que  précédem- 
ment le  pouvoir  réflexe  de  la  muelle,  ait  été  considérablement  ac- 
cru, comme  dans  le  strychnisme.  Or  l'empoisonnement,  de  nature  in- 
connue il  est  vrai,  dont  il  est  question  dans  la  seconde  hypothèse, 
pourrait  fort  bien  produire  cette  augmentation  de  l'action  réflexe. 
Cet  empoisonnement  produirait  une  modification,  non  pas  dans  la 
forme,  mais  dans  les  propriétés  des  éléments  nerveux  (ce  qui  ne  veut 
pas  dire  qu'il  n'y  ait  pas  de  lésions  de  ces  éléments,  qu'il  n'y  ait  pas, 
par  exemple,  de  modifications  chimiques  dans  leur  subtance)  ;  là 
serait  la  cause  de  l'augmentation  excessive  du  pouvoir  réflexe  de  la 
moelle.  C'est  alors  seulement  que  la  plaie,  ainsi  que  d'autres  causes 
mécaniques  extérieures,  joueraient  le  rôle  d'excitant,  mettraient  en 
jeu  ce  pouvoir  réflexe  si  considérable,  et  donneraient  lieu  aux  acci- 
dents convulsifs  si  terribles  qu'on  observe  dans  cette  maladie.  En 
résumé,  on  voit  que  l'étude  anatomo-pathologique,  à  laquelle  nous 
nous  sommes  livrés,  ne  nous  fournit  aucune  donnée,  ni  sur  l'étio- 
logie  ni  sur  la  nature  de  l'afl'ection  ;  elle  ne  nous  montre  que  les  con- 
séquences du  tétanos,  des  lésions  qui  sont  le  résultat  et  non  la  cause 
de  la  maladie.  Toutefois  on  a  vu  que  parmi  ces  lésions  secondaires 
il  (Ml  est  une  que  nous  regardons  connue  tonstunte  et  que  nous 


19 
croyons  ne  devoir  varier  que  par  son  déliré  dïntensité.  C'est  la  con- 
gestion de  la  moelle,  du  bulbe,  de  la  protubérance  et  des  méninges. 
Et  à  ce  propos  nous  ne  pouvons  passer  sous  silence  les  considéra- 
tions thérapeutiques  qui  suivent. 

Parmi  les  remèdes  administrés  aux  tétaniques,  on  est  frappé  de 
voir  donner  des  agents  qui  produisent  sur  la  moelle  les  modifications 
de  la  circulation  les  plus  opposées.  On  sait,  en  effet,  que  la  strych- 
nine a  été  employée  pour  combattre  l'affection  dont  il  est  ici  ques- 
tion. On  aurait  pu  être  porté  à  renoncer  à  cette  idée,  en  songeant  à 
l'analogie  qui  existe  entre  les  accidents  dus  au  tétanos  et  ceux  dus 
à  l'empoisonnement  par  la  strychnine.  L'examen  nécroscopique  de  la 
moelle,  même  sans  le  secours  du  microscope,  démontre  qu'il  y  a 
congestion  des  plus  vives  dans  les  deux  cas;  il  est  donc  évident 
qu'on  n'est  pas  en  droit  d'attendre  de  l'administration  de  la  strych- 
nine aux  tétaniques  autre  chose  qu'une  aggravation  des  accidents. 
Cette  remarque  relative  à  la  strychnine  n'a  que  peu  d'importance, 
parce  qu'aujourd'hui  on  ne  songe  plus  guère  à  employer  cet  agent 
thérapeutique  contre  le  tétanos;  mais  en  revanche  on  emploie  sou- 
vent des  poisons  qui  produisent  sur  la  circulation  de  la  moelle  des 
modifications  analogues  à  celles  déterminées  parla  strychnine.  Nous 
citerons  plus  particulièrement  les  sels  de  fopium  (  1  ) ,  dont  f  emploi  doit 
être  absolument  repoussé.  Par  contre,  fétude  qui  vient  d'être  faite 
semble  devoir  engager  les  chirurgiens  à  recourir  aux  préparations 
qui  diminuent  la  quantité  du  sang  dans  les  centres  nerveux,  tels  que 
la  belladone  et  l'ergot  de  seigle  (2),  ainsi  qu'aux  révulsifs  violents  ap-» 


(1)  M.  le  docteur  Frédéric  Bonnefm  a  démontré  dans  sa  thèse  {Rc- 
clierches  sur  l'action  convulsivante  des  poisons,  Paris,  1851),  que  cer- 
tains poisons  agissent  sur  la  moelle,  comme  la  strychnine;  il  cite  en 
particulier  la  morphine.  M.  Brown-Séquard  s'est  assuré  de  la  réalité 
du  fait  par  un  grand  nombre  d'expériences.  Nous  ajouterons  que  les 
tétaniques  sont  généralement  constipés;  que  la  constipation  favorise 
singulièrement  la  congestion  de  la  moelle,  et  que  c'est  encore  là  un 
motif  pour  ne  pas  administrer  l'opium. 

(2)  Brelonneau,  Payan,  Barbier  et  Trousseau  ont  traité  avec  succès 
des  paraplégiques  au  moyen  de  la  belladone  et  de  l'ergot  de  seigle. 
M.  Brown-Séquard  a  le  premier  précisé  les  cas  où  l'on  doit  administrer 
ces  médicaments,  véritables  antidotes  de  la  congestion  de  la  moelle, 
en  les  séparant  de  toute  une  classe  de  paralysies  que  Ion  doit  traiter 


20 
pliqués  sur  la  nuque  et  la  colonne  vertébrale.  De  plus,  le  bromure 
de  potassium,  à  causes  de  ses  propriétés  bien  connues,  serait  ad- 
ministré dans  le  but  de  diminuer  l'excitabilité  de  la  moelle. 

parla  strychnine,  dont  les  propriétés  sont  inverses, à  ce  point  de  vue. 
(Voir,  sur  ce  point,  le  livre  de  M.  Brown-Séquard  intitulé:  Leçons 
sur  le  diagnostic  et  le  traitement  des  principales  formes  de  paralysie 
de5mem6re3in/'tfrteM?'5,  Paris,  1864.)  Dans  ce  même  ouvrage,  M.  Brown- 
Séquard  dit  :  «  Non-seulement  j'ai  vu  diminuer  le  calibre  des  vaisseaux 
sanguins  de  la  pie-mère  médullaire  chez  des  chiens  qui  avaient  pris 
de  fortes  doses  de  belladone  ou  d'ergot  de  seigle,  mais  je  me  suis  as- 
suré aussi  que  le  pouvoir  réflexe  de  la  moelle  épinière  (très-probable- 
ment comme  conséquence  de  la  contraction  des  vaisseaux)  diminue 
beaucoup  sous  l'influence  de  ces  deux  remèdes,  qui  agissent,  dans  ce 
cas,  en  s^ens  inverse  de  la  strychnine.  » 


NOTE 

SUR  LE  TISSU  MUQUEUX 

DU  CORDON  OMBILICAL 

Communiquée  à  la  Société  de  Biologie,  dans  sa  séance  du  9  juillet  1370, 

Par  M.   J.    RENAUT, 

Interne  des  bôpitaux  de  Parï». 


Les  recherches  récentes  de  M.  Ranvier  sur  la  structure  lutime  des 
lendons  et  du  tissu  conjonctif  lâche  ont  démontré  la  nécessité  de 
soumettre  de  nouveau  à  l'analyse  un  certain  nombre  d'autres  tissus, 
parmi  lesquels  le  tissii  muqueux,  origine  de  tous  les  autres  chez 
Tembryon,  m'a  semblé  occuper  le  premier  rang.  Je  n'exposerai  ici 
que  les  résultats  de  mes  études  sur  la  substance  propre  du  cordon 
ombilical  (gélatine  de  Warthon),  de  la  nature  de  laquelle  on  a  sur- 
tout discuté  dans  ces  dernières  années,  et  qui  paraît  aussi  la  plus 
parfaite  des  substances  muqueuses,  c'est-à-dire  la  mieux  développée 
au  point  de  vue  morphologique. 

Schwaon  est  le  premier  qui,  au  milieu  de  la  gelée  qui  entoure  les 
vaisseaux  ombilicaux,  découvrit  des  cellules  munies  de  prolonge- 
ments ramifiés;  plus  tard,  Virchow  démontra  que  cette  gelée  avait 
tous  les  caractères  d'un  tissu  et  possédait  une  forme  typique.  Il  la 
considéra  comme  composée  d'un  tissu  aréolaire  contenant  de  la  mu- 
cine  dans  «es  intervalles.  Une  substance  fibreuse  et  striée  formerait 


22 
le  stronia  des  aréoles  et  contiendrait  des  éléments  étoiles,  véritables 
cellules  plasmatiques  canaliculées  anastomosées,  et  charriant  les  sucs 
dans  toutes  les  parties  du  tissu  privé  de  vaisseaux  (1). 

Frey  considéra  ensuite  le  tissu  propre  du  cordon  ombilical  comme 
<;onstituô  par  un  réseau  cellulaire  à  branches  anastomosées,  sur  le- 
quel viendrait  se  condenser,  en  l'enveloppant,  un  système  de  travées 
résultant  de  la  solidification  de  la  substance  muqueuse.  De  cette 
façon,  chaque  cellule  ou  prolontjement  de  cellule  occuperait  Taxe 
d'une  fibre  de  tissu  conjonclif  qui  l'envelopperait  de  toutes  parts; 
les  mailles  de  ce  tissu  seraient  remplies  de  matières  muqueuses 
contenant  çà  et  là  quelques  cellules  embryonnaires  non  modifiées 
destinées  à  former  plus  tard  des  vésicules  adipeuses  (2). 

On  ne  tarda  pas  à  reconnaître  que  les  figures  étoilées  qu'on  ob- 
serve sur  les  préparations  obtenues  par  la  méthode  de  Gerlach  ne 
sauraient  être  considérées  comme  de  véritables  cellules,  mais  bien 
comme  des  espaces  stellaires,  limités  par  une  membrane  analogue 
à  la  capsule  du  cartilage  et  contenant  des  cellules  plus  ou  moins 
libres  dans  leur  cavité  (3). Plus  récemment,  en  1868, Koster  (4), appli- 
quant au  cordon  ombilical  les  idées  de  Recklinghausen,  admit  dans 
le  tissu  muqueux  un  système  de  canaux  noueux,  tapissés  par  un 
endothélium  discontinu,  cheminant  au  milieu  des  mailles  de  la  gé- 
latine de  Warthon,  et  contenant  des  cellules  probablement  mobiles. 
Cependant  Koster  ne  put  arriver  à  voir  une  membrane  propre  à  ces 
canaux  qu'il  différenciait  totalement  du  réseau  plus  grossier  injecté 
autrefois  par  Fohmann  à  l'aide  du  mercure  (5).  Par  contre,  il  semble 
se  rapprocher  de  l'opinion  de  "Wissmaun,  qui  voyait  dans  les  ré- 
seaux étoiles  de  la  gélatine  de  Warthon  des  capillaires  embryon- 
naires; mais  pour  Koster,  ces  réseaux  seraient  des  capillaires 
lymphatiques,  des  canaux  du  suc,  s'ouvrant  peut-être  à  la  surface 
du  cordon  par  des  stomata  ou  bouches,  et  non  des  capillaires  san- 
guins, dont  le  cordon  de  l'homme  est  dépourvu. 

Tel  était  l'état  de  la  question  lorsque  j'entrepris  dernièrement, 

(1)  Patli.  cclhil.,  trad.  française,  page  85.  1866. 

(2)  Frey,  Trailé  d'Inslot.et  d'Iiistliock.,  page  222. 

(3)  Ibid^  Note  de  M.  Ranvier. 

(4)  Koster,  Dissert,  inaug.  WurUbourg.  1868. 

(5)  Fohiniinn.  Journ.  de  Ticdmann  cl  Trcveranus,  foinc  IV,  1832^ 


23 
dans  le  laboratoke  de  médecine  expérimentale  au  Collège  de  France, 
une  série  de  recherches  dont  je  vais  ici  exposer  le  résultat.  J'ai 
surtout  étudié  les  rapports  des  éléments  cellulaires  du  cordon  avec 
les  fibres  connectives,  et  l'observation  m'a  amené  à  considérer  d'une 
façon  très-simple  la  structure  du  tissu  muqueux. 

La  substance  muqueuse  qui  entoure  les  vaisseaux  du  cordon  et  le 
pédicule  plus  ou  moins  atrophié  de  la  vésicule  ombilicale  est  limitée 
elle-même  en  dehors  par  le  prolongement  de  la  membrane  amnios. 
Au-dessous  du  revêtement  amniotique,  existe  du  tissu  muqueux 
lâche;  autour  des  vaisseaux  on  voit  une  couche  plus  ou  moins 
épaisse  de  fibres  longitudinales,  blanches,  plus  opaques  que  le  reste 
(lu  tissu  et  se  tordant  en  spirales  comme  les  vaisseaux  quelles  en- 
globent. 

Dans  la  portion  périphérique  du  cordon,  la  substance  muqueuse 
proprement  dite  est  plus  abondante  que  partout  ailleurs.  Ordinaire- 
ment, dans  les  cordons  adultes,  c'est-à-dire  recueillis  sur  des  fœtus 
à  terme,  elle  se  répartit  irrégulièrement.  11  en  résulte  de  petites 
masses  globuleuses,  translucides,  improprement  appelées  myxômes 
du  cordon,  qui  donnent  à  celui-ci  un  aspect  noueux.  Si  la  disposi- 
tion noueuse  existe  sur  la  pièce  que  Ton  veut  examiner,  on  peut 
en  profiter  pour  retrancher,  à  l'aide  de  ciseaux  courbes  sur  le  plat, 
de  minces  lamelles  de  tissu  muqueux,  sinon  on  détermine  arti- 
ficiellement des  nodosités  en  produisant  par  une  injection  de  sérum 
iodé  ou  de  nitrate  d'argent  en  solution  au  millième  de  l'œdème 
artificiel  au  niveau  du  point  que  l'on  veut  examiner. 

Les  portions  ainsi  retranchées  s'étalent  régulièrement  sur  la  lame 
de  verre,  et  (surtout  si  l'on  a  opéré  sur  un  myxôme,  auquel  cas  les 
éléments  restent  contenus  dans  leur  milieu  gélatineux  normal), 
montrent  une  structure  très-régulière.  On  voit  alors  des  fibres  con- 
jonctives finement  striées  ou  ondulées,  anastomosées  les  unes  avec 
les  autres  et  formant  des  alvéoles  de  dimension  variable.  Outre  ces 
fibres  qui,  semblables  aux  mailles  d'un  filet,  englobent  la  substance 
muqueuse  dans  un  réticulum  assez  persistant,  on  en  voit  d'autres 
plus  minces  qui  traversent  çà  et  la,  comme  des  cordelettes  très- 
grêles,  le  champ  de  chaque  alvéole. 

Les  rapports  des  éléments  cellulaires  avec  les  fibres  que  nous  ve- 
nons de  décrire  sont  très-simples.  Sur  des  préparations  provenant 
d'un  myxôme  ou  d'un  œdème  artificiellement  proiiuit  par  lirijoctiou 


u 

de  sérum  iodé  ou  de  nitr^ite  d'argent  au  millième,  traitées  par  le 
picro-carmiiiate  d'ammoniaque  et  conservées  dans  la  glycérine  aci- 
difiée, on  voit,  au  bout  de  quelque>  jour?,  la  mucine  former  un  préci- 
pité granuleux  qui  fixe  absolument  les  éléments  cellulaires  dans  leur 
position.  On  peut  alors  reconnaître  que  les  fibres  du  tissu  muqueux 
sont  recouvertes  de  cellules  plates  constituées  par  une  large  plaque 
de  protoplasma  et  par  un  noyau  vésiculeux.  Le  revêtement  ainsi 
formé  par  ces  cellules  est  discontinu,  et  les  éléments  eux-mêmes 
sont  peu  adhérents  aux  fibres,  le  long  desquelles  on  les  voit  souvent 
glisser  avant  de  devenir  libres.  Souvent  aussi  on  voit,  le  long  des 
travées  conjonctives,  les  éléments  cellulaires[plats  qui,  se  présentant 
par  leur  tranche,  semblent  des  traînées  granuleuses  et  offrent,  seu- 
lement au  niveau  de  leur  noyau,  un  point  plus  rouge  en  forme  de 
bâtonnet. 

Les  fibres  conjonctives  elles-mêmes,  soumises  à  l'action  de  la  gly- 
cérine acidifiée,  se  gonflent  en  se  tordant  sur  leur  axe;  il  eu  résulte 
un  aspect  nioniloforme  de  la  fibre  qui,  au  niveau  de  chaque  étran- 
glement, présente  un  petit  collier  très-mince  se  colorant  forte- 
ment en  rouge  par  le  carmiii  ou  le  picro-carminale  d'ammo- 
niaque. 

On  voit  que  cette  disposition  du  tissu  aréolaire  du  cordon  situé 
sous  le  revêtement  fourni  par  l'amnios  rappelle  d'une  manière  frap- 
pante la  structure  du  tissu  cellulaire  lâche  sous-cutané  dont  cette 
couche  pourrait  être,  d'après  Wircbow,  considérée  comme  le  prolon- 
gement. La  seule  différence  consiste  en  ce  fait  que  les  mailles  du 
tissu  muqueux  de  Warthon  sont  très-régulièrement  aréolaires  et 
qu'elles  contiennent,  au  lieu  de  lymphe,  de  la  mucine,  coagulabie 
par  l'acide  acétique  sous  forme  de  précipité  trouble  et  granuleux. 
On  trouve  du  reste  au  milieu  des  tissus  muqueux  et  plongés  dans  la 
mucine  elle-même  des  cellules  embryonnaires  très-semblables  aux 
cellules  du  corps  vitré  ou  aux  globules  blancs  du  sang. 

C'est  dans  cette  couche  périphérique  que  Koster  a  découvert  et 
injecté,  dit-il,  un  système  particulier  de  canaux  du  suc.  D'après  lui, 
ces  canaux  renflés  au  niveau  des  espèces  alvéolaires  se  resserrent 
pour  passer  d'un  alvéole  à  l'autre:  de  là  leur  vient  l'aspect  noueux 
qu'ils  possèdent.  Ils  suivraient  également  la  direction  des  fibres 
conjonctives  qui,  tendues  comme  des  sortes  de  cordelettes,  leur  ser- 
viraient ainsi  do  soutiens.  J'ai  fait,  en  me  conformant  à  la  technique 


25 
indiquée  par  Koster,  des  injections  de  bleu  de  Prusse  dans  les  cou- 
ches les  plus  superficielles  du  tissu  muqueux  du  cordon  sans  obte- 
nir autre  chose  qu'une  extravasation  de  liquides  et  une  coloration 
assez  intense  de  tissu  aréolaire.  Il  est  vrai  que  j'ai  fait  usage  d'une 
solution  aqueuse  de  bleu  de  Prusse  très-pénétrante, et  qui  ne  difl'use 
pas,  tandis  que  Koster  a  sans  doute  employé  la  solution  oxalique. 
Mais  cette  modification  du  procédé  opératoire  n'aurait  pu  que  favo- 
riser l'injection  des  canaux  propres  du  suc.  Du  reste,  les  injections 
qui  déterminent  dans  les  cordons  une  apparence  de  réseau  canaliculé 
ne  sauraient  réussir,  de  l'aveu  de  Koster,  que  sur  des  cordons  macé- 
rés, et  dont  la  matière  muqueuse  est  très- modifiée.  Celle-ci  se  déplace 
alors  facilement,  et  le  liquide  pénétrant  dans  les  mailles  du  tissu 
muqueux  se  répand  en  formant  un  réseau  noueux.  Sur  un  cordon 
frais,  la  piqûre  la  plus  superficielle  ne  peut  déterminer  l'apparition 
du  réseau;  il  se  forme  une  boule  bleue,  et  en  écrasant  cette  boule 
on  ne  peut  jamais  obtenir  à  sa  périphérie  aucune  apparence  de  ré- 
seau. Ce  fait  semble  démontrer  non-seulement  l'absence  de  canaux 
du  suc,  mais  même  de  capillaires  lymphatiques,  car  on  sait  avec 
quelle  facilité  on  peut  injecter  les  lymphatiques  du  pli  de  l'aine  en 
écrasant  une  boule  formée  dans  le  tissu  lâche  de  la  région  par  l'in- 
jection rapide  d'une  solution  de  bleu  de  Prusse  (Ranvier). 

Il  ressort  de  ces  premiers  faits  une  forte  présomption  contre  l'exis- 
tence dun  réseau  canaliculé  dans  les  mailles  du  tissu  muqueux 
aréolaire  :  ce  tissu  parait  au  contraire  constitué  par  des  fibres  entre 
lacées  formant  des  alvéoles  remplis  de  matière  muqueuse,  fibres  sur 
lesquelles  sont  disposées  des  cellules  plates  qui  leur  forment  un  re- 
vêtement discontinu,  qui  parfois  sont  formées  de  plaques  étroites  et 
très-longues  d'un  protoplasma  contenant  un  ou  plusieurs  noyaux 
vésiculaires,  mais  sont  toujours  appliquées  à  plat  sur  une  fibre  le 
long  de  laquelle  elles  s'étendent  souvent  très-loin.  Cette  présomption 
continue  à  s'aflirmer  lorsqu'on  pratique  sur  des  fragments  de  cordon 
conservés  dans  le  liquide  de  Millier,  puis  immergés  dans  de  la 
gomme  et  dans  l'alcool,  des  coupes  minces,  que  l'on  examine  ensuite 
dans  la  glycérine  acidifiée  par  l'acide  formique  après  coloration  dans 
le  picro-carminate  d'ammoniaque. 

On  ne  retrouve  plus,  sur  de  pareilles  préparations,  les  figures  étol- 
lées  qu'on  observe  si  nettement  sur  les  pièces  desséchées,  colorées 
au  carmin  et  traitées  par  l'acide  acétique,  mais  bien  des  fibres  en- 
MÉM.  1870.  3 


26 
trelacées  formant  à  la  périphérie  des  alvéoles  et  tapissées  de  grandes 
cellules  plates,  quelquefois  anastomosées  par  le  fusionnement  de 
leur  protoplasma  et  ne  présentant  jamais  l'apparence  d'un  tissu  ré- 
gulier. 

Si,  sur  des  coupes  longitudinales,  c'est-à-dire  parallèles  à  l'axe  du 
cordon,  on  étudie  très-complôtement  le  tissu  plus  dense  qui  entoure 
les  vaisseaux  ombilicaux,  on  voit  alors  qu'en  ce  point  le  tissu  mu- 
queux,  pauvre  en  substance  colloïde,  est  composé  de  fibres  longitu- 
dinales entre  lesquelles  on  distingue  de  grandes  cellules  plate  s  qui 
tapissent  la  périphérie,  mais  ne  sont  jamais  contenues,  comme  l'a- 
vait pensé  Frey,  dans  l'axe  même  des  fibres  conjonctives. 

Ces  cellules,  dont  on  voit  surtout  bien  les  rappoi'ts  après  une  lé- 
gère dissociation  de  la  coupe  mince,  constituent  également  aux 
fibres  longitudinales  du  tissu  muqueux  un  revêtement  discontinu; 
souvent  elles  s'anastomosent  par  leurs  prolongements  protoplasmi- 
ques  à  la  surface  de  la  fibre,  mais  sans  former  autour  d'elle  un  ré- 
seau régulier;  bien  plus  souvent  elles  restent  isolées  sous  forme  de 
plaques  irrégulières  et  sans  longs  prolongements.  La  dénomination 
de  cojys  fusiformes,  usitée  par  quelques  histologistes,  ne  saurait 
non  plus  leur  convenir,  car  lien  n'est  plus  variable  que  la  forme  de 
ces  plaques,  qui  n'offrent  le  plus  souvent  l'aspect  d'un  fuseau  que 
lorsqu'on  les  voit  de  profil.  Dans  ce  cas,  on  comprend  facilement 
que  la  présence  seule  d'un  noyau  vésiculeux  renflé  au  milieu  d'une 
cellule  plate  détermine  une  semblable  apparence. 

De  ce  qui  précède,  nous  nous  croyons  autorisé  à  aflirmer,  dès  à 
présent,  que  le  tissu  muqueux  du  cordon  est,  dans  les  parties  riches 
en  mucine,  formé  par  un  réseau  de  fibres  conjonctives  tapissé  de 
cellules  plates  ne  différant  guère  du  tissu  conjonctif  lâche  que  par 
la  présence  de  la  mucine  qui  distend  ses  mailles.  Quant  au  tissu 
périvasculaire  du  cordon,  il  n'est  pas  sans  présenter  quelque  ana- 
logie avec  le  tissu  de  la  cornée  transparente.  Dans  tous  les  cas,  il 
n'existe  dans  le  cordon  ni  réseau  plasmaliqce  constitué,  comme  le 
prétendait  Wirchow,  par  un  réseau  cellulaire  canaliculé,  ni  système 
particulier  de  canaux  vecteurs  du  suc,  comme  Koster  a  cru  pouvoir 
dernièrement  l'établir. 

A  cette  dernière  théorie  se  rattachent  quelques  considérations  sur 
l'épithéhum  qui  recouvre  la  surface  libre  du  cordon.  Cet  épithélium, 
prolongement  de  celui  qui  recouvre  famnios,  est  formé  de  deux 


27 
couches,  l'une  superficielle,  l'autre  profonde.  Au-dessous  de  ces  deux 
lames  épithéliales  existe  une  couche  de  cellules  plates  qui  les  sépare 
du  tissu  muqueux  proprement  dit,  et  sur  laquelle  je  reviendrai  tout 
à  l'heure. 

Lorsqu'on  examine  avec  un  objectif  à  grand  angle  d'ouverture 
une  mince  lamelle  détachée  de  la  surface  d'un  cordon  immergé  pen- 
dant quelque  temps  dans  le  liquide  de  Millier,  ou  mieux,  quand 
après  argentation  dans  une  solution  au  trois-centième  et  coloration 
dans  le  picro-carminate  d'ammoniaque,  on  transporte  sur  une  lame 
de  verre  les  couches  épithéliales  du  cordon,  on  voit  que  la  couche 
profonde  est  constituée  par  des  cellules  pavimenteuses  contenant 
chacune  un  noyau  central.  La  couche  superficielle  est  formée  par 
de  larges  plaques  irréguhères  à  bords  crénelés,  dans  lesquelles  Ta- 
cide  oxalique  décèle  un  noyau  bien  distinct  de  celui  de  la  couche 
profonde.  Cette  sorte  de  cuticule  superficielle,  pas  plus  que  la  cou- 
che épithéliale  profonde  ne  présente  jamais  de  lacunes  ou  stomates 
analogues  à  ceux  qui  ont  été  décrits  ou  figurés  par  Koster;  toutes 
les  cellules  se  rejoignent  au  contraire  par  leurs  bords  dentelés,  sans 
laisser  le  moindre  interstice. 

Mais  on  observe  souvent  autour  du  noyau  d'une  cellule  épithé- 
liale, dans  la  couche  profonde,  de  nombreuses  gouttes  de  matière 
réfringente,  probablement  colloïde,  qui  sur  certains  points  se  réu- 
nissent pour  former  un  globe  unique  très-volumineux,  et  qui  sem- 
ble, quand  on  abaisse  l'objectif,  présenter  un  double  contour.  A  un 
faible  grossissement,  de  pareilles  figures  peuvent  facilement  en 
imposer  pour  un  orifice  ou  stomate;  mais  avec  un  objectif  puissant, 
on  remarque  que  toujours  la  cuticule  épithéliale  superficielle  passe 
au-dessus  de  ces  globes  muqueux  et  les  recouvre  complètement. 
Quelquefois  deux  masses  colloïdes  superposées  simulent  grossière- 
ment l'aspect  présenté  par  les  cellules  caliciformes  de  l'intestin, 
destinées,  comme  l'a  fait  voir  M.  Ranvier,  à  la  sécrétion  du  mucus. 
Mais  toujours  la  lame  épithéliale  passe  au-dessus  d'elles,  et  la  disso- 
ciation permet  de  voir  qu'il  s'agit  là, non  d'une  cellule  ouverte,  mais 
bien  d'une  cellule  épithéliale  devenue  vésiculeuse  présentant  un 
noyau  refoulé  à  la  périphérie,  toujours  absolument  fermée,  et  qu'on 
n'ouvre  qu'en  rompant  sa  p'aroi. 

A  la  suite  de  la  description  très-détaillée  que  donne  Koster  des 
prétendus  stomates,  souvent,  dit-il,  remplis  de  matière  muqueuse 


qui  semble  refluer  des  canaux  du  suc.  ou  trouve,  exposée  avec  quel- 
ques réticences,  celte  opinion  que  de  pareils  orifices  pourraient 
bien  communiquer  avec  un  réseau  superficiel  des  Safikanalchen, 
situé  au-dessous  de  l'épithélium.  J'ai  en  effet,  en  employant  des  so- 
lutious  assez  fortes  de  nitrate  d'argent,  déterminé  à  la  surface  du 
cordon  l'apparition  d'un  réseau  de  figures  étoilées,  tout  à  fait  iden- 
tiques à  celles  dessinées  par  Koster,  mais  l'interprétation  que  je 
donne  à  ces  figures  est  très-différente. 

Sur  une  préparation  prise  à  la  surface  du  cordon  et  montrant  l'é- 
pithélium, ou  voit  au-dessous  de  celui-ci,  eu  abaissant  l'objectif,  une 
couche  de  cellules  plates  analogues  à  celles  de  la  couche  conjonctive 
qui  revêt  la  surface  des  tendons.  J'ai  pu  me  convaincre  directement 
que  c'est  cette  cocuhe  qui  donne  par  l'argentatiou  un  réseau  étoile; 
elle  semble  destinée  à  limiter  extérieurement  le  tissu  muqueux  et 
à  servir  de  soutien  aux  couches  épithéliales.  La  présence  de  cette 
couche  de  revêtement,  pas  plus  que  celles  de  masses  colloïdes  déve- 
loppées dans  le  protoplasma  qui  entoure  le  noyau  des  cellules  épi- 
théliales, ne  saurait  donc  venir  à  l'appui  des  idées  de  Koster  sur  la 
structure  du  tissu  muqueux  du  cordon  ombilical. 


DÉTERMINATION 


DES 

INSECTES  NUISIBLES  AUX  FRUITS  DU  NOYER 

(JUGLANS  REGIA) 

Communication  faite  à  la  Société 

PAR 

M.  LE  Docteur  A.   LABOULBÈNE 

Membre  honoraire  delà  Société  de  Biologie,  etc. 


La  connaissance  exacte  des  insectes  nuisibles  importe  à  la  fois  au 
naturaliste  et  à  l'agriculteur;  aussi  le  professeur  Charles  Robin 
m'ayant  envoyé,  pendant  l'automne  de  l'année  1868,  des  noix  véreu- 
ses, je  me  suis  attaché  à  connaître  les  insectes  qui  les  habitaient. 
Ces  noix  ont  été  trouvées  dans  le  département  de  l'Ain,  sur  les  co- 
teaux de  Revermont;  les  noyers,  pendant  les  mois  de  septembre  et 
d'octobre,  avaient  la  moitié,  au  moins,  de  leurs  fruits  tombés  à  terre 
et  dans  un  état  anormal. 

La  coque  des  noix,  dépouillée  de  l'enveloppe  verte,  offrait  souvent 
au  point  d'attache  un  trou  noirâtre.  Les  deux  valves  séparées  lais- 
saient apercevoir  l'amande  rongée  et  une  grande  quantité  de  grains 
brunâtres  formés  par  les  déjections  d'une  larve.  De  plus,  la  sub- 
stance même  de  la  noix,  ou  l'amande,  avait  par  places  une  teinte  fon- 


30 
cée,  et  parfois  le  tissu  propre  en  était  gâté,  ratatiné  ou  couvert  de 
moisissure.  Enfin,  dans  plusieurs  fruits,  j'ai  remarqué,  en  exami- 
nant avec  soin,  des  filaments  soyeux  réunissant  entre  eux  les  grains 
excrémentiels  et  brunâtres  déjà  signalés. 

Je  trouvai  deux  vers  blanchâtres,  de  taille  moyenne,  à  tète  écail- 
leuse  et  pourvus  de  seize  pattes,  qui  étaient  certainement  des  Che- 
nilles. Je  leur  attribuai  les  fils  de  soie  et  les  déjections,  sous  forme  de 
grains,  qui  remplissaient  les  noix  attaquées.  Le  trou  du  liile  de  la 
uoix  était  aussi  produit  par  ces  chenilles  au  moment  où  elles  sor- 
taient du  fruit  pour  se  métamorphoser  au  dehors. 

Mais  il  y  avait  aussi,  indépendamment  des  deux  chenilles,  un 
grand  nombre  de  pupes  d'un  roux  marron  et  qui  ne  pouvaient  ap- 
partenir qu'à  un  insecte  diptère.  Ces  pupes  se  trouvaient  partout 
dans  la  cavité  de  la  noix  gâlée.  Au  bout  d'une  à  deux  semaines,  il  en 
est  sorti  une  quantité  de  petites  mouches  noires  ;  celles-ci  se  rappor- 
taient toutes  à  la  même  espèce,  la  Siphonella  nucis,  qu'Edouard  Per- 
ris  a  fait  connaître  pour  la  première  fois  (i),  il  y  a  plus  de  trente 
ans,  en  accompagnant  son  travail  de  figures  nombreuses. 

Je  n'ai  pas  vu  les  larves  de  la  Siphonella,  mais  Charles  Robin  les 
a  remarquées  dans  les  noix  véreuses  ;  ces  larves  s'étaient  transfor- 
mées en  pupes  pendant  le  trajet  du  département  de  l'Ain  jusqu'à 
Paris. 

Quant  aux  deux  chenilles  dont  j'ai  parlé.  Tune  d'elles,  après  s'être 
chrysalidée,  a  produit  la  Carpocapsa  pomonana. 

g  II. 

..  L'éclosion  fort  nombreuse  de  la  Siphonella,  en  me  faisant  revoir 
lÉb^ryvail  si  estimable  d'Edouard  Perris,  m'a  permis  de  compléter 
ges'iQlJBe^rvations.  J'ai  pu  envoyer  les  mouches  en  Allemagne,  à  Schi- 
n«iî'tit)';Wihnerlz,  et  obtenir  de  leur  part  une  détermination  précise 
qui  me  permet  d'établir  sûrement  la  synonymie  de  la  Siphonella 
nucis. 

Edouard  Perris  décrit  successivement  la  larve,  la  nymphe  et  l'in- 
îeolye'ijmi^fai'fl  ■JgJnJîiii"riier-à  ajouter  d'une  manière  générale  à  ses 
de8Giii^tic>w$'^^tôuVéfois>jié'fera'i'Temarquer,  pour  ce  qui  a  rapport  à 

tiMWi'j  'i!)  'JJiKmap  'ihatir^  ùnu  3o  ^ — 

-(l(iJ)  È'à.,^tàqisÇ\Pf0tiâè  'sur'hW'abtmlle  esf.èce  de  Siphonella  (Xti- 
[lAi^iî^  j9Bii4 -Si<î>fiiKïiÉiïlw[r;i(nf  !FBAMqBJ'1839i  !p!j.39,  pi.  IV,  fîg.  1-8). 


31 

la  larve,  que  l'organe  situé  sur  le  premier  segment  du  corps,  après 
le  pseudocéphale,  est  positivement  un  stigmate  antérieur  à  six  divi- 
sions. Je  regrette  de  n'avoirpu,  par  l'observation  directe,  contrôler 
les  digitations  de  ce  stigmate. 

La  pupe  représente  en  raccourci,  et  sous  une  forme  ramassée,  la 
larve  d'où  elle  provient.  A  ce  titre,  je  puis  dire  que  cette pupe  est 
formée  de  onze  segments,  la  tête,  ou  mieux  le  pseudocéphale,  étant 
cachée  et  non  comprise.  Perris  a  représenté  un  très-grand  nombre 
de  divisions  sur  la  figure  qu'il  a  donnée  de  la  pupe,  environ  dix- 
huit  {loc.  cit.,  pi.  IV,  fig.  3).  En  faisant  varier  l'éclairage  sous  une 
forte  loupe,  j'ai  reconnu  des  divisions  segmentaires  plus  épaisses, 
allant  jusqu'aux  bords  latéraux,  puis  des  sillons  transversaux  très- 
fins  et  intermédiaires;  il  y  a  trois  divisions  au  thorax,  avec  un  re- 
bord épais,  et  huit  à  l'abdomen,  ce  qui  fait  onze  en  tout.  A  la  partie 
postérieure  se  trouvent  les  deux  petites  cornes,  aboutissant  des  stig- 
mates postérieurs  de  la  larve  et  en  dessous  Torifice  anal  ;  enlin  j'ai 
remarqué  en  arrière  et  de  chaque  côté,  sur  cette  pupe,  de  petites 
dentelures  latérales,  dont  Perris  n'a  point  fait  mention. 

La  dessoudure  des  trois  premiers  segments  thoraciques  a  été  dé- 
crite, et  sur  la  partie  inférieure  restent  accolées  les  mandibules  de 
la  larve.  Sur  la  pupe  de  la  Siplionella  on  trouve  donc,  comme  sur 
la  plupart  des  muscides,  une  image  de  la  larve,  et  je  répète  ici  ce 
que  j'ai  déjà  dit  dans  un  autre  travail  :  l'étude  des  pupes  ne  doit 
pas  être  négligée  (1). 

La  description  donnée  par  Ed.  Perris  de  la  Siplionella  nucis  (loc. 
cit.,  p.  45-46)  concorde  de  tous  points  avec  lea insectes  parfaits  que 
j'ai  eus  en  très-grand  nombre  sous  les  yeux  et  que  j'ai  envoyés  en 
Allemagne.  Il  n'y  a  par  conséquent  aucun  doute  à  avoir  sur  la  légiti- 
mité de  l'espèce.  Ces  insectes  ont  été  soumis  à  Schiner  et  Winnertz, 
et  ils  ont  séparément  reconnu  tous  les  deux  la  Siphonella  nucis  E. 
Perris. 

Léon  Dufour  avait  eu  dans  sa  collection  ce  diptère  donné  par 
Perris,  et  il  l'avait  communiqué  à  Macquart.  Malheureusement  l'in- 
secte a  disparu,  détruit  par  les  authrènes  ;  mais  dans  les  manuscrits 

(1)  Mélaniorphoses  d'une  mouche  parasite  [Tachina  villica)  (Anna- 
les DE  LA  Société  ent.  de  France,  1861,  p.  2411. — Observations  sur  les 
Insectes  iubérivores,  etc.  (idem,  1864,  p.  77-79,  pi.  II,  fig.  7  et  8). 


32 
je  trouve  l'indication  suivante  delà  main  de  Léon  Dufour  :  "  Sipho- 
nella  wmc«5  Perrisest  la  5.  oscinina  Marquant  ex  ipso^=Chlorops  ni- 
tida  Meig.,  diffère  du  ruficornî,  ex  Macquart.  Or,  Macquart  a  décrit 
cette  Mouche  dans  son  Histoire  naturelle  des  diptères,  t.  II,  p.  585, 
et,  comme  le  fait  remarquer  Edouard  Perris  à  la  fin  de  son  mémoire, 
cette  description  de  Macquart  ne  cadre  pas  avec  la  SiphoncUa  nucis. 

D'autre  part,  le  consciencieux  Schiner,  auteur  des  Z)jp?e?'a  aus- 
triaca,  dislingue  la  S.  nucis  de  la  Madiza  {Siphonella)  oscinina  de 
Fallen,  qui  n'est  point  celle  de  Zeltcrstedl  (1). 

Enfin,  J.  Winnertz,  qui  a  eu  sous  les  yeux  la  véritable  Siphonella 
nucis  de  Perris  que  je  lui  ai  communiquée,  avait  pris  aux  environs 
de  Gréfeld  la  Sii,konella  oscinina  de  Fallen,  qu'il  avait  envoyée  à 
Schiner  (2). 

D'où,  en  définitive,  il  résulte  que  la  Siphonella  nucis  de  Percls 
est  une  espèce  distincte,  que  Macquart  confondait  à  tort  avec  la 
•S,  oscinina  de  Fallen. 

Mais  la  Siphonella  oscinina  de  Macquart  et  de  Fallen  est  dif- 
férente de  la  Siphonella  ou  Madiza  oscinina  de  Zelterstedt  ;  dès 
lors  le  nom  d'ÉJouard  Perris  doit  prévaloir,  comme  l'a  établi 
Schiner  dans  ses  Diptères  d'Autriche,  et,  en  fin  de  compte,  la  syno- 
nymie de  la  Mouche  qui  fait  le  sujet  de  ce  travail,  doit  être  établie  et 
délimitée  de  la  manière  suivante  : 

Siphonella  nucis  Éd.  Perris. 
—  non  oscinina  Macquart. 

Madiza  (Siphonella)  oscinina  Fallen. 
^  —  —  non  Zetterstedt. 

Chlorops  nitida  Meigen. 

Madiza  laevigata  Fallen. 
—    oscinina  Zetterstedt. 

Je  terminerai  par  une  dernière  remarque,  et  elle  n'est  pns  la  moins 
importante.  Éd.  Perris  pensait  que  les  excréments  et  le?  filaments 

(1)  Schiner,  Fauna  austriaca^  Die  Fliegen,  Theil  II,  p.  229-231, 
1864. 

(2)  Schiner,  Ioc.  cit.,  p.  231  :  Deutschen  Arten.  Siphonella  osci- 
nina. 


33 

soyeux  qu'il  avait  observés  dans  les  noix  véreuses  à  Mont-de-Marsan, 
à  la  fin  de  septembre  1838,  étaient  produits  par  la  larve  d'un  Gurcu- 
lionite  et  que  celle-ci  était  sortie  par  le  trou  du  bile  de  la  noix.  Je  ne 
crois  pas  cette  opinion  vraie.  Je  m'appuie,  pour  repousser  l'idée 
d'une  larve  de  Curculionite,  sur  l'absence  de  filière  buccale  chez  les 
larves  de  cette  famille,  entre  autres,  et  plus  particulièrement,  celles 
des  Balaninus.  J'ai  positivement  vu  deux  chenilles  dans  les  noix  que 
j'ai  observées,  et  enfin  l'éclosion  de  la  Carpocapsa  prouve  sans  ré- 
plique l'existence  de  cet  insecte  lépidoptère  et  non  celle  d'un  Co- 
léoptère  à  son  premier  état  de  larve.  Dès  lors  le  rapprochement  fait 
par  Schiner  dans  la  note  des  mœurs  ajoutée  à  la  caractéristique  du 
genre  Siphonella  {Die  Fliegen,  Theil  II,  p.  228)  est  erroné.  Schiner 
dit,  en  effet,  que  Egger  et  Fraueufeld  ont  observé  la  larve  de  la  S. 
nucis  dans  les  capitules  d'un  Cirsium  avec  les  larves  du  RhinoajUus 
latiroiris,eX  «  qu'il  est  très-intéressant  de  trouver  que  Perris  l'avait 
vue  en  compagnie  d'un  Gurculionide.  » 

A  mon  avis,  la  larve  de  la  Siphonella  nucis  vit  de  matières  gâtées , 
peut-être  des  excréments  d'autres  larves,  et  elle  n'est  pas  redoutable 
au  même  titre  que  la  Carpocapsa  pour  les  dégâts  qu'elle  cause.  Perris 
a  parfaitement  dit  qu'elle  n'est  point  parasite  :  elle  vit  des  dégâts  de 
la  Cavpocapsa,  qui  est,  en  définitive,  l'auteur  principal  du  dégât  et 
qui  rend  les  noix  véreuses. 


NOTE 


SDR 


UN  CAS  D'UTÉRUS  ET  DE  VAGIN  DOUBLES 

Communiquée  à  la  Société  de  Biologie  en  janvier  1870 

Par  le   Docteur  Auguste  OLLIVIER. 

(Voy.  planche  I.) 


I 

Dans  le  courant  du  mois  d'août  1869,  est  morte  à  l'hôpital  Lariboi- 
sière  une  femme  âgée  de  42  ans,  qui  a  présenté  à  l'autopsie  une  ano- 
malie remarquable  des  organes  internes  de  la  génération. 

Mariée  à  25  ans,  cette  femme  a  eu  cinq  enfants  dont  deux  sont 
morts  en  bas  âge.  Les  quatre  premiers  accouchements  furent  très-ré- 
guliers, mais  au  cinquième  on  dut  appliquer  le  forceps. 

Au  moment  de  son  admission  à  l'hôpital  (17  avril),  elle  prétendait 
être  enceinte  de  huit  mois.  Le2  mai  elle  accouchait  sans  difficulté  après 
avoir  eu  trois  attaques  d'éclampsie.  A  la  première  attaque,  la  langue 
violemment  serrée  entre  les  arcades  dentaires,  avait  été  déchirée  en 
plusieurs  endroits.  Les  ulcérations  ainsi  développées  donnèrent  lieu 
aune  très-abondante  suppuration.  Bientôt  apparurent  tous  les  symp- 
tômes d'une  septicémie  commençante.  Ces  accidents  persistèrent  tant 
que  durèrent  les  ulcérations  de  la  langue,  cest-à-dire  jusqu'à  la  fin  de 
mai. 

A  ce  moment  la  malade  entra  dans  une  phase  nouvelle,  ou  plutôt  des 
phénomènes  demeurés  jusqu'alors  inaperçus  devinrent  de  plus  en  plus 
évidents.  L'abdomen  se  développa  peu  à  peu,  et  il  fut  aisé  de  recon- 


36 

naître  l'existence  d'une  ascite.  Un  examen  très-minutieux  n'ayant  fait 
découvrir  aucune  tumeur  intrapéritoncale,  on  s'arrêta,  par  exclusion, 
à  l'idée  d'une  cirrhose.  Trois  mois  après,  la  malade  succombait  aux 
progrès  de  cette  affection. 

Quoique  le  toucher  vaginal  eût  été  pratiqué,  on  n'eut  aucune  notion 
sur  l'existence  de  dispositions  anormales  du  vagin  et  de  l'utérus. 

,  A  l'autopsie,  en  examinant  les  organes  contenus  dans  le  bassin,  on 
fut  surpris  de  constater  la  présence  de  deux  utérus. 

Ces  organes,  comme  vous  le  voyez,  sont  séparés  l'un  de  l'autre,  par 
un  intervalle  assez  considérable  dans  lequel  pouvaient  s'insinuer  les 
anses  intestinales. 

Le  corps  de  l'utérus  gauche  est  plus  volumineux  que  celui  du  côté 
droit.  Il  a  atteint  un  développement  considérable,  tel  qu'on  le  rencon- 
tre chez  les  femmes  qui  ont  eu  plusieurs  enfants.  Il  offre  une  différence 
frappante  avec  le  corps  de  l'utérus  droit  qui  est  beaucoup  plus  petit. 
Déplus,  celui-ci  a  conservé  l'aspect  que  l'utérus  présente  lorsqu'il  n'a 
jamais  subi  le  développement  qu'amène  la  présence  d'un  embryon. 
("Voy.  planche  1,  EE.) 

La  différence  entre  les  deux  cols  utérins  n'est  pas  moins  remarqua- 
ble. Celui  de  gauche  est  déchiqueté  :  l'orifice  externe  est  déformé, 
ainsi  que  cela  arrive  normalement  après  plusieurs  grossesses,  tandis 
que  le  col  utérin  du  côté  droit  présente  tous  les  caractères  du  col 
vierge.  (DD.) 

Les  annexes  de  l'utérus  n'ont  pas  subi  de  modifications  notables  : 
seulement,  au  lieu  de  se  fixer  aux  deux  angles  du  fond  de  l'organe,  ils 
s'attachent  à  l'angle  externe  de  chacun  des  deux  utérus.  Us  ont,  au 
reste,  conservé  des  deux  côtés  leurs  rapports  réciproques.  On  trouve 
successivement  d'avant  en  arrière  le  ligament  rond  (GG),  puis  la 
trompe  (HH)  et  l'ovaire  avec  son  ligament  (L).  Le  ligament  large  pos- 
sède tous  ses  caractères  normaux  (FF). 

Le  vagin  est  aussi  divisé  en  deux  parties  (B  et  C)  par  une  cloison 
médiane  complète  :  il  n'existe  aucune  espèce  de  communication  entre 
le  vagin  droit  et  le  vagin  gauche. 

En  avant,  la  cloison  médiane  se  termine  par  une  extrémité  triangu  - 
laire  qui  a  le  même  aspect  que  celui  des  petites  lèvres,  et  qui  proé- 
mine  légèrement  au  niveau  des  parties  génitales  externes  :  celles-ci  ne 
présentent  aucune  anomalie. 

II. 

Les  annales  de  la  science  renferment  un  très-peiit  nombre  de  cas 
dans  lesquels  on  a  observé  un  utérus  double,  accompagné  de  deux 


37 
vagius.   Il  est  à  remarquer,  en  outre,  que,  dans  la  plupart  de  ces 
cas,  une  telle  anomalie  coïncidait  avec  d'autres  lésions  congénitales, 
et  généralement  la  mort  suivit  la  naissance  de  près. 

M.  Léon  Le  Fort  (1),  dans  sa  thèse  d'agrégation,  signale  sept  exem- 
ples d'utérus  double.  Ce  sont  les  faits  de  Palfyn  (2),  Saviard  (3)j 
Frankel  (4),  Depaul  (5),  Mayer  (6),  Puech  (7)  et  Wasseige  (8).  Dans 
tous  ces  cas,  il  s'agit  d'enfants  qui  sont  morts  peu  de  temps  après  la 
naissance. 

M.  Le  Fort  cite  un  seul  exemple  de  deux  utérus  tout  à  fait  séparés 
et  indépendants  l'un  de  l'autre,  observé  chez  une  adulte  par  Bon- 
net (9).  C'était  chez  une  femme  âgée  de  25  ans,  au  moment  où  elle 
fut  examinée.  La  description  de  Bonnet  laisse  supposer  qu'il  existait 
aussi  un  vagin  divisé  dans  toute  sa  longueur  en  deux  par^ies  par 
une  cloison  médiane. 

Le  cas  dont  nous  venons  de  donner  la  description  présente  des 
particularités  encore  plus  remarquables.  La  femme  était  âgée  de- 
42  ans  au  moment  où  elle  s'est  présentée  à  notre  observation  :  elle 
avait  eu  cinq  enfants,  qui  tous  ont  vécu.  La  mort,  chez  elle,  a  été  le 
résultat  d'une  maladie  accidentelle,  sans  relation  aucune  avec  la 
disposition  singulière  des  organes  génitaux  (10). 

(1)  Léon  Le  Fort,  Des  vices  de  conformation  de  l'utérus  et  du  vagin, 
et  des  moyens  d'y  remédier.  Paris,  1863,  p.  47. 

(2)  Palfyn,  Description  anatomique  de  deux  evfanls.  Leyde,  1708, 
p.  20. 

(3)  Saviard,  ISouveau  recueil  d'observations  chirurgicales.  Paris, 
1702,  p.  397,  obs.  94. 

(4)  Fraenkel,  Diss.  deorganor.  gen.  defonnit.  Berlin,  1825. 

(5)  Depaul,  Bull,  de  la  Soc.  anat.,  1853,  t.  XXVIII,  p.  353. 

(6)  Mayer,  Jourîjal  de  Graefe  et  Walther.  1829,  t.  XIII,  p.  546. 

(7)  Puech.  Comptes  relndus  de  l'Acad.  des  sciences.  1857,  t.  XLV,  p.  687. 

(8)  Waisseige.  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique.  1852-1853,  vol.  XII, 
p.  701. 

(9)  Bonnet.  Pliilosopli.  transact.  1725,  p.  142. 

(10)  Il  s'agit  très-vraisemblablement  ici  d'une  cirrhose  d'origine 
puerpérale.  Il  nous  fut  impossible,  en  effet,  de  retrouver  chez  notre 
malade  aucune  des  causes  habituelles  de  la  cirrhose,  et  comme  dans 
les  faits  que  nous  avons  publiés  dans  un  autre  travail  (Nouvelle  note 
sur  C endocardite  et  C liémiplégie  puerpérale  ;  in  iMémoires  de  la  Société 


38 

La  manière  dont  ces  anooaalies  se  produisent  est  bien  connue  au- 
jourd'hui. On  sait  que,  depuis  le  lieu  d'insertion  des  ligaments 
ronds  jusqu'au  point  où  ils  viennent  s'ouvrir  dans  le  cloaque,  les 
deux  conduits  de  MûUer  restent  séparés  au  lieu  de  s'adosser,  11  en 
résulte  qu'ils  subissent  séparément  les  phases  successives  du  déve- 
loppement qui  doit  amener  la  formation  de  l'utérus  ;  ainsi  s'explique 
l'existence  de  l'utérus  double  {utérus  duplex,  diductus,  didelphis  des 
auteurs).  Les  annexes  de  l'utérus  ont  habituellement  une  évolution 
normale. 

Le  cloaque  qui,  chez  l'emhryon,  est  le  point  de  dùpart  du  vagin, 
présente,  comme  on  sait,  une  cloison  médiane.  Oi-,  s'il  arrive  que 
cette  cloison  persiste  au  lieu  de  se  résorber,  elle  divise  le  vagin  en 
deux  parties  distinctes. 


DE  BIOLOGIE,  1869,  5^  série,  t.  I,  p.  128),  il  nous  semble  rationnel  d'ad- 
mettre l'influence  de  la  grossesse  sur  le  développement  de  l'affection 
hépatique. 


DESCRIPTION  ET  FIGURE 
DE  LA  LARVE 

DE  L'ELUS  MEUS 

Communication  faite  à  la  Société 

PAR 

M.  LE  Docteur  A.  LABOULBÈNE 

Membre  honoraire  de  la  Société  de  Biologie,  etc. 
(Voyei  planche  II.) 


Des  savants  d'un  grand  mérite,  tels  que  Westwood,  Kolenati  et 
Erichson,  ont  connu  et  signalé  tour  à  tour  les  larves  de  coléoptères 
du  genre  Elmis,  mais  ils  ne  paraissent  les  avoir  décrites  que  sur 
des  exemplaires  desséchés.  Leurs  travaux  ne  donnent  qu'une  idée 
superficielle  et  incomplète  de  ces  animaux  articulés;  beaucoup  de 
faits  importants  leur  ont  nécessairement  échappé,  car  ces  faits  sont 
faciles  à  observer  pendant  la  vie,  tandis  qu'une  dépouille  sèche  ne 
peut  les  offrir. 

Les  larves  des  Elmis  vivent  constamment  immergées  dans  les 
ruisseaux  d'eau  courante,  et  accrochées  sous  les  pierres  au  moyen 
d'ongles  robustes.  Leur  démarche  est  très-lente,  et  elles  ressemblent 
beaucoup  à  de  petits  Crustacés.  J'ai  trouvé  en  abondance  à  Santigny, 
dans  le  département  de  l'Yonne,  les  larves  des  Elmis  œneus  et  Wolk- 


40 
wan,  et  j'ai  pu  les  étudier  vivantes  pendant  plusieurs  jours.  La  des- 
cription qui  suit  est  relative  à  la  première  de  ces  deux  larves,  beau- 
coup plus  commune  que  sa  congénère. 

Larve  de  l'Elmis  .eneus  (Voyez  les  figures  de  la  planche  II). 

hAî{\A.oblonga,  antice  latior,  posiice  aitenuata,  lateribus  corporis 
dilaiatis,  nec  non  fimhriatis ;  supra  convexiuscula  subtus  plana; 
capitaia,  antennata,  ocellata;  cinerea  lutescens  aut  virescens;  sub- 
coriacea,  punctata.  Caput  parvulum  ;  thorax  latum,  abdomen  cau- 
daium,  marginalum,  branchiis  prœditum;  stiginaia  novem  utrinque. 
Pedes  breviores,  tarsorum  wigue  valido. 

Longitudo  lineam  sequat  vel  paulo  excedit  (2  à  3  millim.). 

Habitat  sub  lapidibus  aâfixa,  in  aqua  iorrentiori.  In  Gallia  haud 
in/reçuen*  (Paris,  Santigny  (Yonne),  Âgen,  Saint-Sever,  etc.). 

Larve  oblongue,  ayant  l'apparence  d'un  petit  Crustacé;  d'un  gris 
jaunâtre  et  un  peu  verdâtre  en  dessus;  jaunâtre  ou  livide  en  des- 
sous, avec  les  côtés  du  corps  d'une  couleur  plus  claire,  dilatés  et 
frangés  sur  tous  les  segments,  sauf  le  dernier. 

Têle  petite,  mais  bien  visible,  un  peu  triangulaire,  avec  deux  li- 
gnes pâles  et  réunies  en  V  en  arrière.  Antennes  courtes,  jaunâtres, 
composées  de  trois  articles,  le  premier  transversal,  rétraclile,  le 
deuxième  le  plus  allongé,  surmonté  de  deux  petits  articles  de  moi  • 
tié  moins  longs  que  lui  et  superposés  dans  un  plan  vertical;  l'un 
d'eux,  placé  plus  en  haut,  est  terminé  par  un  petit  poil  (fig.  2). 
Ocelles  au  nombre  de  cinq  de  chaque  côté,  situés  derrière  les  an- 
tennes et  sur  deux  rangées,  la  première  de  trois,  la  deuxième  de 
deux  stemmates. 

Bouclie  formée  par  un  labre  transversal,  faiblement  sinué  sur  les 
côtés,  muni  de  poils  à  base  très-large,  ayant  la  forme  d'écaillcs  laci- 
niées  et  au  nombre  de  dix  en  tout  (fig.  3).  Mandibules  triangulaires, 
élargies  à  la  base  et  terminées  en  haut  par  deux  fortes  dents  bifides 
(fig.  4)  ;  à  la  partie  interne  se  trouve  un  appendice  eu  forme  de  cirrhe, 
velu  en  dessus.  Mâchoires  à  lobe  fendu,  garni  de  poils  formant 
brosse  à  l'extrémité,  avec  un  palpe  de  deux  articles,  le  second  plus 
petit  et  terminé  par  deux  appendices  minuscules  (fig.  5).  Lèvre  in- 
férieure trapézoïde,  velue  en  avant,  portant  deux  petits  palpes  biar- 
ticulés,  dont  le  second  article  est  très-petit  (fig.  6). 


41 

Thorax  plus  élargi  que  le  reste  du  corps.  Protliorax  grand,  aussi 
long  que  les  deux  segments  qui  le  suivent,  échancré  en  avant,  arrondi 
sur  les  côtés.  Méso  —  et  métathorax  transversaux,  arrondis  pareille- 
ment sur  les  côtés. 

Abdomen  formant  un  triangle  isocèle  à  base  antérieure,  régulière- 
ment atténué,  composé  de  neuf  segments,  qui  diminuent  insensible- 
ment de  largeur  ;  les  bords  sont  amincis  et  élargis  comme  au  thorax, 
mais  non  arrondis,  car  ils  sont  prolongés  en  arrière  (fig.  1  et  8).  Le 
dernier  segment  est  triangulaire,  légèrement  tronqué  et  entaillé;  il 
diffère  en  dessus  et  eu  dessous  :  en  dessus  il  est  formé  par  une  pla- 
que uniforme  (fig.  11);  en  dessous  il  offre  d'abord  une  première  par- 
tie qui  est  la  face  ventrale  du  segment,  puis  un  opercule  terminal 
(fig.  12). 

L'opercule  est  petit,  recouvrant  une  cavité  branchiale,  et  muni  à 
l'extrémité  de  deux  crochets  recourbés  en  dessous  (fig,  12  et  13).  Sur 
la  larve  vivante  on  voit  sortir  fréquemment  de  l'extrémité  du  corps 
quand  l'opercule  s'abaisse,  trois  faisceaux  de  branchies  d'un  blanc 
satiné  ou  argenté,  fort  éclatant;  il  y  en  a  un  de  chaque  côté  du  corps 
et  le  troisième  est  terminal.  Chaque  faisceau  part  d'une  tige  com- 
mune, puis  se  divise  en  deux  ou  trois  pinceaux  de  filaments  (fig.  Il, 
12,  13),  et  enfin  chaque  filament,  terminé  par  une  extrémité  arron- 
die, se  compose  d'un  tube  cylindrique  pourvu  d'une  fine  paroi  à  tra- 
vers laquelle  s'opère  la  respiration  de  la  larve  (fig.  14). 

Le  bord  de  tous  les  segments,  à  part  le  dernier,  est  dilaté,  aminci, 
demi-transparent  et  garni  d'une  frange  ciliée  (fig.  1).  Examinée  à  un 
léger  grossissement,  cette  frange  se  trouve  formée  de  poils  écailleux 
et  découpés  sur  les  bords  comme  certaines  plumes  d'oiseaux  (fig.  8); 
à  un  plus  fort  grossissement,  Tapparence  est  celle  de  folioles  à  limbe 
plus  ou  moins  allongé  ou  arrondi,  à  bordure  pectinée  ou  laciniée 
(fig.  8  et  9).  Le  nombre  de  ces  poils  squamiformes  n'est  pas  constant; 
ils  varient  sur  les  segments  d'un  côté  à  l'autre  et  sur  les  divers  an- 
neaux qui  se  suivent. 

Le  dessus  du  corps  est  ponctué  sur  la  partie  dorsale  ainsi  que  dans 
les  deux  tiers  postérieurs  des  rebords  latéraux.  On  trouve  environ 
huit  à  dix  rangées  alternes  de  points  sur  les  segments  thoraciques 
et  abdominaux  ;  les  points  sont  varioliformes,  avec  un  petit  poil  cen- 
tral. Plusieurs  de  ces  poils  sont  élargis.  Du  reste  cet  élargissement 
des  poils  peut  être  observé  sur  plusieurs  endroits  du  corps,  dans  la 
MÉM.  1870.  4 


42 
Ijouche,  par  exemple,  sur  la  mâchoire  (voy.  lig.  5)  où  les  poils  sont 
tantôt  bitldes,  tantôt  simples.  La  ponctuation  du  dessous  du  corps 
est  plus  faible  et  plus  ôparse. 

Sur  la  ligne  médiane  du  corps  en  dessus,  une  fine  impression  lon- 
gitudinale s'étend  depuis  le  milieu  du  prolliorax  jusquen  haut  du 
dernier  segment. 

Les  pattes  sont  courtes,  mais  fortes  et  robustes,  composées  d'une 
hanche,  d'un  trochanter,  d'un  fémur  ou  cuisse,  d'un  tibia  ou  jambe, 
enfin  d'un  tarse  ayant  l'ongle  terminal  robuste  et  portant  en  dessous 
un  poil  roide  (lig.  7). 

Les  stigmates,  au  nombre  de  neuf  paires,  sont  situés  :  le  premier , 
qui  est  thoracique,  au  bord  antérieur  du  métathorax,  au  point  où 
commencent  l'amincissement  et  la  transparence  du  rebord  du  seg- 
ment; les  huit  autres  qui  sont  abdominaux,  sur  les  4%  5%  6%  1%  8% 
9*  10*  et  11"  segments,  d'autant  plus  près  du  bord  antérieur  qu'ils 
sont  plus  voisins  du  thorax,  le  dernier  au  milieu  du  1 1=  segment. 

A  part  une  taille  plus  grande,  la  larve  de  ÏElmis  Wolkîuari  ressem- 
ble tout  à  fait  à  celle  de  YEhnis  seneus.  La  coloration  est  la  même; 
les  allures  roides  et  le  genre  de  vie  sont  Identiques. 

La  Mg.  1  de  la  planche  II  présente  une  coloration  moins  prononcée 
au  milieu  du  premier  segment  abdominal  ou  quatrième  segment  du 
corps;  beaucoup  de  larves,  mais  non  point  toutes,  offrent  cette  par- 
ticularité, très-visible  chez  la  larve  placée  dans  l'eau  et  allongeant 
son  corps  pendant  la  marche. 

L'appareil  respiratoire  est  projeté  au  dehors  sans  rhythme  précis, 
à  intervalles  irréguliers;  on  dirait  un  éventail  resplendissant  qui 
sort  au  gré  de  l'animal  immergé,  s'étale  et  puis  rentre  brusquement 
dans  le  corps  de  la  larve  de  VElmis  seneus. 

Cette  larve  est  fort  curieuse.  J'appelle  l'attention  sur  les  poils 
dilatés  et  abords  pluraeux  placés  comme  des  folioles  pectinées,  ou 
des  écailies  élégantes,  sur  presque  toutes  les  parties  du  corps.  H 
en  est  de  môme  des  poils  du  labre  (dg.  3),  de  ceux  de  la  mâchoire, 
tantôt  bifides,  tantôt  péniciUés  (lig.  5),  et  surtout  de  ceux  qui  for- 
ment une  frange  continue  sur  les  bords  latéraux  des  segments.  Les 
pattes  courtes  ont  uu  ongle  robuste,  pourvu  en  dessous  d'un  poil 
très-fort,  destiné  évidemment  à  maintenir  la  larve  bien  accrochée 

(lig-'i')- 
Les  antennes  offrent  au  bout  du  second  article  deux  petits  cylin- 


43 
drcs  supGrpo3(js  (ng.2).  J'avais  cru  d'aborJ  à  un  seul  arliclft  canncl(5, 
mais  il  yen  a  deux,  placés  dans  un  même  plan  vertical,  dont  le  su- 
périeur porte  un  appendice;  cette  disposition  est  nettement  perçue 
sur  l'antenne  ayant  déjà  macéré  et  qu'on  a  renversée  surle  côté  après 
une  préparation  heureuse. 

J'ai  dit  dans  la  diagnose  de  la  larve  «  occllata,  »  mais  je  n'ai  point, 
alors,  signalé  le  nombre  des  ocelles.  Ceux-ci,  en  effet,  sont  trés-dif- 
liciles,  sinon  à  reconnaître,  du  moins  à  compter  :  je  crois  en  avoir 
aperçu  cinq  sur  deux  rangées,  mais  je  ne  les  ai  pas  assez  bien  vus 
pour  les  représenter  par  une  figure. 


En  comparant  maintenant  cette  larve  à  colles  déjà  connues  dos 
Potamophiius  (I)  et  du  Macromjc.lms  (2),  décrites  par  Léon  Dufour 
et  J.-iM.  Pérez,  je  trouve  que  la  larve  du  Potamophile  est  grande, 
coriacée,  ayant  en  dessus  quatre  rangs  de  cannelures.  L'extrémité 
du  corps  otrre  deux  pointes  sur  le  douzième  segment.  L'appareil 
branchial  est  pourvu  de  trois  faisceaux  de  chaque  côté  et  d'un 
faisceau  médian.  La  disposition  anatomique  de  l'appareil  respira- 
toire a  été  élucidée  par  le  savant  anatomiste;  il  existe  des  sacs 
aérifères  dans  l'intérieur  du  corps,  venant  des  stigmates  abdomi- 
naux. Chaque  tronc  stigmatique  aboutit  à  quatre  trachées  dilatées, 
ou  cylindres  trachéens,  qui  remplissent  la  fonction  de  réservoir 
pour  l'air  puisé  par  les  branchies  ou  bien  les  stigmates,  et  qui, 
dans  les  naufrages  auxquels  sont  exposées  ces  larves,  leur  servent 
de  vessie  de  sauvetage. 

L'antenne  a  deux  appendices  sur  le  second  article  et  les  ocelles 
sont  au  nombre  de  cinq  placés  sur  deux  rangés,  la  première  de  trois, 
la  seconde  de  deux  seulement,  dans  une  petite  excavation  oculaire. 
Léon  Dufour  n'a  pas  figuré  les  parties  de  la  bouche. 

Il  résulte  de  cette  conformation  que  la  larve  du  Potamophile  est 


(1)  Léon  Dufour,  Éludes  sur  la  larve  du  Potamophiius  (Annaî.es  des 

SCIRNCES    NATURELLES,    ZoOL.,    4^   Sério,    t.  XYH,    p.    1G2,   pi.    ],   fl".    1  à  9, 

1862). 

(2)  .L-M.  Ferez,  Histoire  des  métamorphoses  du  Macronychiis  4-tu- 
berculatus  et  de  son  ■parasite  (Annales  de  la  Sodfêté  ent.  de  France 

ISG3,  p.  G2I,  pi.  14). 


44 
trùs-voisinc  de  rello  de  ÏFAinis,  mais  moins  encore  que  celle  du 
Macronyque. 

J.-M.  Péroz  a  complètement  observé  la  larve  et  la  nymphe  du 
Macronyque,  et  il  a  très-lidùlement  représenté  l'insecte  dans  ces 
deux  états.  La  larve  est  ponctuée,  sans  côtes,  mais  avec  une  fine 
ligne  médiane;  le  dernier  segnnent  est  fendu.  Les  antennes  ressem- 
blent extrêmement  à  celles  de  l'Elmis.  Le  mandibule  est  identique 
et  pourvue  du  cirrhe  que  j'ai  signalé;  cependant  je  suis  en  désac- 
cord avec  Pérez  sur  les  palpes  maxillaires,  auxquels  il  donne  au 
moins  quatre  articles.  Enfln  l'opercule  du  dernier  segment  ainsi  que 
l'appareil  branchial  se  ressemblent  beaucoup  dans  les  deux  larves. 

Mais  ce  qui  distingue  au  premier  coup  d'œil  la  larve  d'Elmis  de 
ses  voisines  génériques,  c'est  la  forme  élargie  du  thorax,  les  franges 
foliacées  du  rebord  aplati  des  segments  :  là  est  le  trait  caractéristique. 
Les  poils  élargis  du  corps  paraissent  exister  dans  quelques  endroits 
chez  la  larve  du  Potomaphilus,  car  Pérez  dit,  en  parlant  du  labre: 
«  Les  soies  ou  épines  sont  rameuses  et  d'une  rare  élégance.  -  (ânn. 
Soc.  ENï.  France,  18G7,  p.  623). 

ANALYSE  DES  TRAVAUX  DÉJÀ  PUBLIÉS  SUR  LES  LARVES  DES  ELMIS. 

Cliapuis  et  Candèze  (1),  ont  reproduit,  d'après  Erirhson,  la  des- 
cription d'une  larve  d'Elmis  déjà  donnée  dans  les  Archives  de 
WiEGMANN,  puis  daus  la  Faune  des  Insectes  d'Allemagne,  et  depuis 
répétée  par  Sturm.  La  planche  111,  fig.  7,  7  a  et  7  6  représente  une 
larve  d'Elmis  sans  nom  d'espèce,  avec  la  tète  grossie,  en  dessus  et 
en  dessous;  mais  ces  figures  laissent  à  désirer. 

En  remontant  aux  sources,  on  trouve  que  P.-J.-W.  Millier,  dans  le 
Magasin  d'Illiger,  t.  V,  p.  194,  avait,  en  1824,  parlé  d'une  larve 
d'Elmis  indéterminée.  Westwood  (2)   le  premier  a  décrit  et  repré- 

(1)  Cbapuis  et  E.  Candèze,  Catalogue  dcslarves  deColêopières,  etc. 

(MÉMOIRES  DE  la    SOCIÉTÉ   ROYALE  DES  SCIENCES  DE    LiÉGE,   t.  VIII, 

tirage  à  paît,  p.  109-110,  j)!.  III,  fig.  7,  7a,  7  b,  1853). 

(2)  J.-O,  Westwood,  An  introduction  to  the  modem  Classification 
■of  Insects,  etc.,  vol.  I,  p.  113  et  118,  fig.  7,  n"jl6etl7,  1839.  Lalarve 
représentée  fig.  7,  n"  18,  ne  paraît  pas  voisine  des  Elinis,  comme  le 
disent  Chapuis  et  Candèze:  c'est  plutôt  une  larve  de  Névroptère,  ainsi 
que  le  pense  Westwood. 


45 
sentô  une  larve  présumée  QVElmis  œneus;  mais  la  description  est 
presque  nulle  et  la  ligure  incomplète,  quoique  mieux  saisie  que  celle 
de  Ghapuis  et  Gandèze.  Le  dernier  segment  de  la  larve  est  très-for- 
tement bilobé. 

Westwood  a  évidemment  observé  une  larve  morte  et  contractée, 
et  peut-être  n'a-t-il  pas  eu  sous  les  yeux  une  larve  identique  avec 
celle  que  j'ai  dessinée,  mais  d'espèce  voisine.  La  même  remarque 
peut  s'appliquer  à  la  figure  donnée  par  les  auteurs  du  Catalogue  des 
larves  des  Coléoptères.  Du  reste,  dans  les  manuscrits  de  Léon  Du- 
fourj'ai  trouvé  une  figure  rappelant  celle  de  Westwood,  représen- 
tant une  larve  d'ECî/iù  contractée;  mais  les  fraiiges  étaient  simple- 
ment indiquées.  Léon  Dufour  n'avait  dû  observer  l'insecte  qu'à  la 
loupe. 

Dans  la  collection  de  Léon  Dufour,  qui  est  en  ma  possession,  il  y 
a,  collée  sur  papier-carte,  une  larve  d'Elmis,  peut-être  celle  (lui  a 
servi  à  faire  la  figure  dont  je  viens  de  parler.  Aube  avait  aussi  dans 
sa  collection,  à  côté  de  l'insecte  parfait,  une  larve  (VElmis  œneus. 

Erichson,  dans  les  Akchives  de  Wiegmann  de  1841,  t.  I,  p.  107, 
parle  encore  de  la  larve  à'Elmis  lithophilus  Germar. 

Kolenati  (1)  a  décrit  et  figuré  la  larve  de  VElmis  Maugetii,  prise 
dans  le  Tess,  sous  des  pierres,  à  plus  de  quatre  mille  pieds  d'éléva- 
tion; mais  la  description  est  confuse,  incomplète,  et  la  ligure  très- 
mauvaise.  Si  l'on  compare  le  dessin  de  Kolenati  avec  la  figure  1"  de 
la  planche  11,  on  verra  que  ce  dessin  est  à  peine  esquissé,  et  le  seul 
détail  donné  pour  la  disposition  des  poils  squameux  est,  je  le  crain.s, 
fort  infidèle;  ce  poil  serait  découpé  seulement  en  dessous.  Enfin  Ko- 
lenati a  compté  les  écailles  bordant  les  segments  :  30  au  prothorax , 
15  au  mésotborax,  13  aumétalhorax,  8  à  chaque  segment  abdominal, 
de  chaque  côté,  puis  il  a  calculé  leur  nombre  total.  J'aurais,  je 
l'avoue,  préféré  à  cette  apparence  d'exactitude  si  minutieuse,  une 
description  soignée  et  uu  dessin  meilleur. 

Enfin  John  Le  Gonle  (2)  a  rapporté  au  premier  état  de  VEurypal- 


(1)  Kolenati,  Die  larve  vonElmis  Maugetii  Latreille  fWiener  entom. 
Munatschrift,  IV'Band,  s.  88,  89,  taf.  V,  Gg.  2  a,  larve;  b  un  appen- 
dice, 1860). 

(2)  Joni\-L.  Le  CoiMe,  Synopsis  of  llic  ParnidcO  of  Ihc  UnUcd  Stades 


40 
pus  Le  Coniei  (insecte  voisin  des  Elmis]  un  pelit  animal  des  ruis- 
seaux (l.e  New-York  et  de  la  Pensylvanie,  qui  ressemble  à  une  Tri- 
lobite,  et  qui  avait  été  décrit  comme  une  espèce  de  Crustacé  par  de 
Kay  sous  le  nom  de  Fluvicola  Ilerrickii. 

Le  Conte  a  parfaitement  reconnu  chez  cette  larve  les  plus  grands 
rapports  avec  celle  des  Elmis  qu'a  fait  connaître  Ericlison  {Naturges- 
chichte  der  Insect.  Deutschlands,  t.  III,  p.  525). 

11  n'existait  à  la  place  où  j'ai  récolté  les  larves  qui  font  le  sujet  de 
ce  travail  que  les  Elmis  œneus  et  Wolkmari  à  l'état  parfait  :  donc 
la  larve  figurée  et  décrite  est  Lien  celle  de  Vœneus.  Aucun  doute 
n'est  possible  sur  la  légitimié  de  Tespèce.  J'avais  heureusement 
récolté  un  grand  nombre  de  spécimens,  et  Aube,  qui  avait  d'abord 
pensé  à  la  possibilité  d'une  espèce  nouvelle,  s'est  assuré  comme 
moi  qu'il  n'y  avait  pas  de  caractères  distinctifs  pour  les  séparer  de 
VElmis  œneus. 

On  a  vu  après  la  diagnose  de  la  larve  que  je  l'avais  trouvée  sur 
divers  points  de  la  France.  Elle  est  commune,  facile  à  saisir  et  à 
observer.  Je  fais  un  appel  à  de  nouvelles  observations  et  surtout  à 
la  recherche  de  la  nymphe  qui  compléterait  le  cycle  d'évolutions  de 
VElmis  œneus. 

(Procedings  of  the  Academy  of  natural  Sciences  of  Philadelphia, 
vol.  VI,  n°  1,  p.  41,  1852.  —  The  Transactions  of  the  cnlomological 
Society  of  London,  new  séries,  vol.  II,  Proceedings  january,  1853, 
p.  65). 


RECHERCHES 

POUR   SERVIR   A    L'HISTOIRE 


DES 


ORGANES  TACTILES  DES  INSECTES 

Communiquées  à  la  Société  de  Biologie 

Par  M.  le  Docteur  JOBERT 

Licencié  es  sciences  naturelles. 


Depuis  Leydig,  peu  de  recherches  hislologiques  ont  été  faites  sur 
ce  sujet.  Cet  anatomiste,  le  premier,  a  décrit  les  terminaisons  ner- 
veuses en  rapport  avec  les  poils  de  la  peau  chez  la  larve  de  la  Core- 
tlira  'plumicornis  (i).  Des  investigations  du  même  gence  ont  porté  sur 
d'autres  invertébrés;  des  rotateurs  de  petits  crustacés  ont  présenté 
des  dispositions  analogues.  Citons  encore,  comme  s'étant  occupés  de 
sujets  aOerents,  Schodler  (5),  Meissner  (3),  MuUer  (4),  Gegenbaur  (5), 
Semper.  En  1858,  en  France,  M.  Lespès  (6)  étudiait  les  organes  an- 

(1)  Leydig,  Hist.  comp.,  6,  239,  240  et  241,  cIZeits.  f.  W.Z.,  a.  1851. 

(2)  Schoedler,  Arch.  f.  Naturg.,  1856. 

(3)  Meissner,  Zeits.  f.  W.  Z.  Mermis,  albicains  et  nigreacens. 

(4)  Sennper,  Reisc  berickt.  Terin.  nerv.  des  Ascidies  (Zeits,  f.  W. 
Z.,  t.  XV. 

(5)  Lespès,  Ann.  des  sciences  nat.  t.,  avec  l'indication  des  travaux 
anlérieurs  de  Dufour,  J.  Muller,  Siebold,  Erichson;  Diigès  et  Lacordaire. 

(6)  Ciaparède,  Ann.  des  scIE^'GES  nat.,  t.  XI. 


48 
tpnnaires  chez  un  certain  nombre  d'insectes,  et  quelque  temps  aprô?, 
M.  Claparède,  dans  le  même  recueil,  publiait  une  réfutation  de  ces 
recherches.  Ilyks  (l),en  Angleterre,  a  étudié  le  même  sujet  etconclut  à 
la  présence  des  saccules  nerveux  à  la  base  des  canaux  cliitineux 
observés  dans  les  antennes.  Plus  récemment,  M.  le  docteur  Landois  (2) 
a  publié  un  travail  sur  les  organes  de  l'audition  du  Cervus  Lucocniis. 
Nous  avons  recherché  quelle  était  la  disposition  des  nerfs  dans  di- 
vers organes  des  insectes,  tels  que  la  trompe  des  diptères,  les  palpes 
de  ces  mêmes  diptères,  de  quelques  orthoptères  et  de  quelques  hy- 
ménoptères. 

Nous  avons  observé  les  animaux  vivants,  et  si  nous  avons  donné 
le  nom  d'organes  du  tact  aux  diverses  parties  du  corps  qui  ont  été 
l'objet  de  nos  investigations,  c'est  qu'en  effet  les  animaux  les  em- 
ploient à  cet  usage. 

Cependant  il  nous  semble  que  la  question  ne  doit  pas  être  résolue 
dans  ce  sens  seulement. 

La  trompe  des  mouches  pourrait  être  à  la  fois  organe  du  toucher 
et  le  siège  de  la  gestation.  Dans  les  antennes  les  auteurs  jusqu'alors 
ont  exclusivement  placé  le  siège  de  l'audition,  et  cependant  il  suffit 
d'examiner  un  longicorne  en  marche  pour  supposer  que  ces  organes 
sont  destinés  à  apprécier  la  nature  des  obstacles.  En  explorant  la 
route,  le  chemin,  le  longicorne  avance  lentement,  portant  ses  an- 
tennes en  avant,  touchant  alternativement  le  sol  avec  chacune  d'elles, 
comme  un  aveugle  le  fait  avec  son  bâton.  Un  bruit  léger  se  fait-il  en- 
tendre, lïnsecte  s'arrête  soudain,  relève  ses  antennes  et  les  agite  en 
tous  sens;  peut-être  alors  écoute-t-il?  Les  antennes  ne  serviraient- 
elles  qu'à  cet  usage?  Cependant  si  l'on  observe  des  Lamellicornes  co- 
prophages  vivants,  on  pourrait  conclure  que  les  antennes  peuvent 
être  aussi  chez  eux  le  siège  de  l'olfaction.  En  effet,  si  des  fèces  vien- 
nent d'être  rejetées  par  des  animaux  domestiques,  bientôt  on  voit 
arriver  à  tire-d'ailes  et  remontant  dans  le  vent  un  nombre  consi- 
dérable de  Lamellicornes,  portés  jusqu'à  eux  par  le  courant  d'air. 
L'odeur  spéciale  de  la  proie  a  été  perçue,  et  ils  sont  accourus  eu 
foule.  A  quelque  distance,  ils  s'arrêtent,  se  dressent,  écartent  les  loc- 
melles  de  leurs  antennes,  les  agitent,  et  seulement  après  cette  ma- 
il) Ilyks,  Transactions. 
(>')  Landois,  Arcuiv.  anat.  microscop.,  II.  Schulze,  1868. 


49 
nœuvre,  fondent  d'un  vol  sur  les  débris  qui  doivent  leur  servir  d'ali- 
ments. 

Si  je  relate  ici  ces  divers  faits,c'est  uniquement  dans  le  butde  mon- 
trer qu'il  est  imprudent  de  vouloir,  ainsi  qu'on  l'a  fait,  localiser  des 
fonctions;  la  structure  anatomique  de  ces  terminaisons  nerveuses, 
comme  on  le  verra  plus  loin,  est  pour  ainsi  dire  identique  dans  les 
organes  très-différents  que  nous  avons  observés.  Aussi  on  compren- 
dra notre  réserve  dans  l'appréciation  des  divers  usages  auxquels  ils 
sont  destinés. 

ANATOMIE. 

Trompe  des  diptères.  —  Chez  ces  animaux  on  sait  que  l'appareil 
buccal  consiste  en  une  grosse  trompe  coutlée  dont  l'extrémité  libre 
s'élargit  en  un  disque  (l)qui  n'est  autre  chose  que  la  lèvre  inférieure 
qui  se  renverse  en  bas  et  en  dehors. 

Cette  trompe,  outre  un  certain  nombre  de  pièces  qui  représentent 
les  diverses  parties  de  l'appareil  buccal  des  insectes,  porte  deux 
palpes  qui  sont  les  palpes  maxillaires  claviformes  et  garnies  de  poils 
plus  ou  moins  longs. 

Dans  les  muscidés,  la  lèvre  inférieure  forme  un  disque  à  peu  près 
circulaire  dans  les  syrpheset  les  tabaniens;  elle  est  formée  de  deux 
grands  lobes  ovalaires  séparés.  Nous  reviendrons  plus  loiu  sur  l;i 
structure  de  la  lèvre  inférieure  des  hyménoptères  que  nous  avons 
étudiés. 

Les  palpes,  suivant  les  genres,  sont  plus  ou  moins  développées.  La 
structure  du  disque  terminal  de  la  trompe  des  diptères  offre  une 
disposition  extrêmement  élégante.  Du  milieu  du  disque  partent  de? 
prolongements  qui  vont  rayonner  dans  tous  les  sens.  Ces  sortes  de 
rayons  ont  l'apparence  spiraléedes  trachées  et  paraissent  former  de 
véritables  cylindres  creux.  Mais  un  examen  attentif  montre  qu'il 
n'existe  pas  de  spirale  conaplète,  et  que,  de  plus,  ce  sont  de  simples 
replis  de  la  membrane  chitineuse.  Le  cylindre  est  incomplet  à  la 
partie  profonde. 

Entre  ces  colonnes  trachéiformes  se  trouvent  de  petites  cupules 

(1)  Voir  Milne-Edwards,  Leçons  de  physiologie,  t.  V,  p.  533  et  suiv. 
et  Blanchard,  Allas,  Règne  animal,  Insectes,  pi.  178,  et  Comptes  ren- 
dus DE  l'Académie  des  sciences,  18l>0,  t.  XXXI,  p.  424. 


s 


50 

sur  lesquelles  reposent  de  petits  poils  dont  quelques-uns  dans  la 
iiiouche  domestique  ne  mesurent  pas  plus  de  'i  à  5  ceulièmes  de  mil- 
limètre. 

Sur  la  face  postérieure  du  disque  et  presque  au  bord  sont  implan- 
tés de  grands  poils  non  pennés  s'élargissant  à  leur  base.  Ces  poils 
sont  unis  par  une  membrane  mince  hyaline  avec  la  membrane  cliiti- 
neuse;  ils  sont  très-mobiles. 

Leur  direction  est  d'abord  de  bas  en  haut  et  d'arrière  en  avant; 
mais  ils  se  recourbent  et  viennent  faire  saillie  en  avant  de  la  face 
antérieure  de  la  trompe,  si  bien  que  Tinsecte,  quand  il  projette  cet 
organe,  doit  effleurer  avant  tout  les  objets  avec  l'extrémité  de  ces 
longs  poils. 

La  lèvre  des  diptères  est,  comme  nous  l'avons  dit,  constituée  par 
un  disque  ovalaire  plus  ou  moins  complet.  En  réalité  ce  disque  est 
formé  par  deux  parties  symétriques  qui  se  reploient  quand  le  veut 
l'animal  et  s'appliquent  Tune  sur  l'autre  comme  les  deux  feuillets 
d'un  livre. 

Deux  gros  nerfs  qui  viennent  des  ganglions  cérébroïdes  sont  des- 
tinés à  se  distribuer  dans  le  disque  terminal.  Ces  deux  troncs  ner- 
veux marchent  parallèlement,  escortés  de  grosses  trachées  qui  vont 
se  divisant  à  mesure  que  le  nerf  se  divise  lui-même. 

Ces  nerfs  sont  recouverts  d'une  couche  de  grosses  cellules  d'épi- 
thélium  pavimeuteux  qui,  le  plus  souvent  chez  les  grandes  mouches 
[vomitoria  sarcophaga^  sont  infiltrés  de  pigment  jaune  bistre  qui 
rend  l'étude  du  trajet  du  nerf  très-facile.  Cet  épithôlium  se  retrouve 
sur  l'organe  terminal  que  nous  décrirous  plus  loin. 

Ce  disque  terminal  de  la  trompe  forme  une  sorte  de  grande  cavité 
close  dans  laquelle  arrivent  de  chaque  côté  les  gros  nerfs.  A  leur 
entrée  ils  se  divisent  immédiatement  en  une  multitude  de  branches. 
Dans  cette  cavité  se  trouvent  également  des  organes  qui  paraissent 
importants  :  ce  sont  quatre  glandes  ayant  la  forme  de  petits  disques 
de  0,1  de  millimètre  de  diamètre.  Ces  glandes  sont  formées  de  cel- 
lules ayant  une  membrane  enveloppante  hyaline  et  possédant  cha- 
cune leur  conduit  excréteur  propre. 

Ces  glandes  jouent-elles  un  certain  rôle  dans  Pacte  de  la  digestion 
à  la  façon  de  la  salive?  Le  liquide  que  l'on  voit  poindre  à  l'ouverture 
(lu  conduit  quand  on  excite  la  trompe  provient-il  de  ces  organes? 
Nous  ne  saurions  faire  sur  ce  point  que  des  hypothèses. 


Les  nerfs,  nous  l'avons  dit,  se  divisent  en  plusieurs  branches  qui 
vont  elles-mêmes  se  ramifiant. 

Les  unes  et  les  autres  se  dirigent  vers  les  cupules  qui  se  trouvent 
à  la  base  des  poils. 

Rappelons  en  quelques  mois  la  disposition  du  tégument  chez  les 
insectes. 

On  sait  que  la  peau  des  insectes  est  formée  de  deux  couches  :  Tune 
externe,  formée  de  chitine,  solide,  résistante  ;  l'autre  profonde,  molle, 
formée  de  cellules  trôs-visibles  non  colorées. 

«  La  couche  externe  se  continue  avec  les  parties  internes  con  ■ 
jonctives  chitinisées.  »  (1) 

Le  squelette  chitinisé  est  percé  de  canaux  traversant  perpendicu- 
lairement les  lamelles.  A  la  surface  extérieure  ils  s'élargissent  en 
cupules  à  la  face  profonde  également;  ils  sont  quelquefois  ramifiés. 

Suivant  Leydig,  dans  quelques-uns  de  ces  canaux  monteraient  des 
prolongements  papillaires  délicats. 

Sur  le  fond  des  cupules  extérieures  repose  la  base  des  poils; 
ceux-ci  peuvent  quelquefois  manquer;  souvent  aussi  ils  sont  rudi- 
niontaires,  et  leur  existence  a  été  démontrée  par  M.  Claparùde  dans 
les  cupules  des  antennes  du  hanneton.  Nous  avons  vu  plus  haut  qu'ils 
existent  sur  la  surface  extérieure  de  la  trompe  des  diptères  et  qu'ils 
y  sont  extrêmement  peu  développés. 

C'est  vers  la  base  des  poils  qui  surmontent  ces  canaux  chitinisés 
que  se  dirigent  les  branches  nerveuses  à  cellules  molles  pour  s'y 
perdre  après  avoir  auparavant  donné  naissance  à  des  organes  par- 
ticuliers. 

Au-dessous  de  la  couche  des  cellules  sous-chitineuses  la  branche 
nerveuse  se  renfle  tout  à  coup  et  l'on  se  trouve  en  présence  d'un  organe 
piriforme  très-nettement  délimité. 

La  paroi  est  hyaline;  on  n'y  distingue  pas  de  noyaux;  souvent, 
comme  nous  l'avons  observé,  ce  renflement  est  recouvert  par  une 
couche  de  cellules  pigmentées  de  jaune;  les  renflements  qui  corres- 
pondent aux  grands  poils  qui  sont  implantés  au  pourtour  du  disque 
de  la  trompe  afl^ectent  une  forme  presque  sphérique.  Ceux  qui,  au 
contraire,  se  trouvent  à  la  base  des  poils  rudimentaires  implantés 

—  ■     ■  ■    ■  -  I  I     ■        I  .. 1,111  ,  ^ii..i>mmij_i      .i.jj.j.i.,,! 

(1)  Leydig,  Hist.  comp.,  p.  119. 
(2j  Loc>  cit. 


52 
sur  la  face  antérieure  du  disque  de  la  trompe  sont  plus  alloniït'?, 
fusiformes  et,  rappellent  par  leur  forme  et  leur  apparence  les  tubes 
muqueux  des  sélaciens. 

Ces  renflements  vont  bientôt  en  diminuant  de  volume  à  mesure 
qu'ils  se  rapprochent  de  la  couche  chitineuse;  ils  traversent  la  cou- 
che de  cellules  molles  et  vont  se  loger  dans  les  cupules  dont  nous 
parlons  plus  haut  et  au  sommet  de  laquelle  s'ouvre  le  canal  qui  tra- 
verse les  lames  chitineuses. 

Arrivé  eu  ce  point,  leur  trajet  devient  invisible.  Nous  verrons  plus 
loin  ce  qui  se  passe. 

L'intérieur  de  ce  renflement  sacciforme  contient  une  matière  très- 
finement  granuleuse  et  l'on  y  aperçoit  des  cellules  à  contour  très- 
(lélimité  contenant  un  grand  noyau  granuleux. 

L'imbibition  de  ces  noyaux  se  fait  rapidement  par  le  carmin  soit 
sur  les  préparations  exlemporanées,  soit  sur  celles  que  l'on  obtient 
après  macération  dans  la  liqueur  de  Muller  très-étendue  ou  l'acide 
chromique  très-faible.  Nous  avons  également  fait  usage  de  l'acide 
osmique  Irès-ôtendu;  mais  sous  l'influence  du  réactif,  le  centre  de 
Forgane  se  teint  très-rapidement  en  noir;  les  contours  des  cel- 
lules disparaissent  et  l'on  n'a  plus  sous  les  yeux  qu'un  aspect  gra- 
nuleux. 

Dans  ces  organes  j'ai  pu  compter  jusqu'à  sept  ou  huit  de  ces  cel- 
lules très-facilement  observables. 

Il  existe  donc  au  centre  une  cavité  contenant  des  éléments  et  une 
substance  différente  de  celle  de  l'enveloppe,  car  celle-ci  se  colore  à 
peine. 

Du  sommet  de  cette  cavité  part  un  filament  à  double  contour  ré- 
fractant très-facilement  la  lumière  cheminant  vers  l'extrémité  ex- 
térieure du  renflement. 

Au  premier  abord  on  pourrait  croire  que  c'est  un  canal  creusé 
dans  le  centre,  mais  c'est  bien  uu  tube  cylindrique  offrant  même  une 
certaine  résistance. 

Il  arrive  que  dans  la  dilacération  les  nerfs  et  leurs  extrémités  ren- 
flées sont  violemment  arrachées  et  séparées  de  la  couche  de  chitine. 
C'est  par  la  dilacération  qu'ont  été  obtenues  les  préparations  qui  ont 
été  mises  sous  les  yeux  de  la  Société. 

Tout  le  monde  a  pu  constater  qu'à  rextrémltc  du  renflement  les 
parois  étaient  brisées,  arrachées;  mais  le  Olament  central  résiste  le 


53 
plus  souvent  et  il  émerge  de  l'organe  dans  une  longueur  de  O^^jOOS 
ouû""",U04. 

Isolé  ainsi,  on  peut  l'observer,  constater  son  indice  de  réfraction, 
mais  l'observation  peut  ^ire  poussée  plus  loin. 

A  la  suite  de  l'action  de  l'acide  osmique,  il  arrive  que  la  couche 
de  cellules  molles  sous-chitineuses  se  détache  pour  la  dilacération 
par  lambeaux,  comme  le  fait,  par  exemple,  l'épiderme  des  vertébrés 
après  macération  dans  Tacide  acétique  sur  des  préparations  heureu- 
ses, et  j'ai  pu  en  exposer  sous  les  yeux  des  membres  de  la  Société. 
On  peut  voir  les  organes  terminaux  nerveux  cheminer  au  milieu  de 
«•es  cellules  et  dépasser  la  limite  qui  les  séparait  de  la  couche  de  chi- 
tine. En  effet,  nous  avons  dit  que  ces  organes  allaient  se  mettre  en 
contact  avec  les  cupules  qui  sont  surmontés  des  canaux.  De  plus,  à 
cette  limite  extrême  on  peut  constater  que  le  filament  central  émerge 
et  monte.  Il  se  met  donc  en  rapport  avec  le  canal  chitineux  dans  le- 
quel il  s'engage;  mais  nous  ne  le  suivons  pas  au  delà;  il  apparaît 
sous  un  fort  grossissement  comme  brisé  en  bec  de  flûte. 

Mais  on  le  retrouve  flottant  dans  la  préparation  des  poiLs  de  la  cavité 
desquels  sort  un  prolongement  d'aspect  semblable  et  paraissant  lui 
aussi  brisé  violemment.  La  couleur  noire  des  poils  empêche  l'explo- 
riition  de  la  cavité  des  poils. 

Des  trachées  très-fines  se  ramifientsur  le  renflement  et  s'y  perdent. 

Si  maintenant  nous  cherchons  à  nous  rendre  compte  de  la  vérita- 
ble nature  de  ce  filament,  il  ne  nous  parait  pas  probable  qu'il  soit 
de  nature  nerveuse.  Il  n'est  pas  possible  qu'il  soit  de  nature  tra- 
chéenne, car  son  diamètre  est  quatre  fois  au  moins  celui  des  troncs 
les  plus  ténus  qui  l'entourent;  il  est  vrai  que  souvent  les  trachées  of- 
frentdes  renflements  nombreux  ;  le  filament  central  a  partout  laméme 
dimension,  et  du  reste  on  peut  le  suivre  jusqu'aux  cellules  centrales. 

Il  est  plus  probable  qu'il  est  de  nature  cbitineuse.  Sur  les  poils 
arrachés,  il  nous  apparaît  comme  un  tube  creux  qui  continuerait  la 
cavité  centrale  du  poil.  Il  est  probable  que  les  parois  tapissent  le  ca- 
nal chitineux,  et  se  mettent  en  contact  avec  la  face  profonde  des 
parois  de  l'organe  nerveux,  constituant  ainsi  une  sorte  de  mem- 
brane externe  de  sa  cavité.  De  même  que  la  couche  de  pigment  qui 
tapisse  sa  paroi  externe  est  formée  par  la  couche  de  cellules  colorées 
qui  séparent  la  couche  molle  du  tégument. 

Les  branches  nerveuses  dans  leur  trajet  offrent  souvent  des  ren- 


lloments  remplis  do  cellules  et  dans  la  trompn  dos  éryslalos  et  des 
synphes.  Leur  portion  tout  à  fait  terminale  ne  se  compose  guùre 
que  de  ces  renflements  placés  bout  à  bout.  Nous  avons  recherchi'; 
les  organes  que  nous  venons  de  décrire  dans  la  trompe  des  muscidés 
de  quelques  syrphydes,  Térystale,  le  pynphe  du  iiroseillier,  chez  le 
taon  des  bœufs,  et  toujours  nous  les  avons  rencontrés  avec  les  mê- 
mes caractères.  C'est  dans  la  mouche  de  viande  que  nous  les  avons 
trouvés  à  leur  dimension  maximum.  Chez  les  sarcophages,  ils  sont 
également  très-volumineux. 

Les  palpes  maxillaires  clarviformes,  implantés  sur  la  trompe,  oiïren  t 
également  chez  les  mouches  une  disposition  semblable.  Ils  sont  hé- 
rissés de  poils  à  la  base  des  plus  grands.  J"ai  pu,  sur  plusieurs  pré- 
parations, constater  la  présence  de  ces  renllements. 

Pulpes  viaxUUiires  des  or tlwjUères.  — On.  sait  que  les  palpes  maxil- 
laires des  orthoptères  se  terminent  par  un  article  claviforme.  La  con- 
sistance de  sa  paroi  est  peu  résistante,  et  à  l'œil  nu  on  aperçoit  que 
sa  cavité  est  remplie  d'une  pulpe  molle,  facilement  dissociable. 

Si  l'on  examine  de  plus  près,  on  reconnaît  chez  les  locustes,  les 
rourlillières,  les  grillons,  que  celte  pulpe  est  composée  par  une  série 
d'organes  analogues  à  ceux  qui  existent  dans  la  trompe  de  la  mouche. 

Tous  sont  fortement  pressés  les  uns  contre  les  autres,  et  leur  ex- 
trémité externe  vient  se  mettre  en  rapport  avec  la  face  profonde  de 
la  paroi  percée  de  canaux,  surmontés  chacun  d'un  petit  poil. 

Chez  la  courtillière,  l'organe  est  fortement  pigmenté  de  noir  à  son 
extrémité  périphérique. 

Tous  ces  renllements  fusiformes  sont  les  terminaisons  de  deux  gros 
troncs  nerveux  qui  viennent  se  ramifier  dans  l'article  terminal  du 
palpe  maxillaire.  Entre  les  deux  chemine  un  tronc  trachéen  qui 
aussitôt  entre  dans  la  cavité  de  l'article,  se  recourbe  en  crosse,  et 
de  la  courbure  partent  les  troncs  trachéens,  qui  se  ramifient  à  l'infini 
et  forment  autour  des  rendements  nerveux  un  véritable  lacis. 

Ces  renflements  nerveux  contiennent,  comme  chez  la  mouche,  de 
grandes  cellules  à  noyaux  volumineux  très-apparents.  On  retrouve 
des  dispositions  à  peu  près  semblables  dans  la  langue  des  orthoptères. 
De  gros  troncs  nerveux  s'y  ramifient  et  olTrent  des  amas  de  cellules 
a  leurs  extrémités.  Il  en  est  de  même  dans  ces  rennements  qui  exis- 
tent aux  tarses,  et  qui  ont  été  décrits  comme  des  organes  d'audition. 

Nous  avons  retrouvé  dans  les  antennes  de  la  guêpe  commune  do 


55 
semblables  organes  en  rapport  avec  l'ouverture  inférieure  des  ca- 
naux de  la  chitine,  ainsi  que  dans  les  antennes  de  la  locuste  viri- 
dissima. 


Nous  avons  plus  haut  fait  mention  d'une  disposition  spéciale  que 
nous  avions  observée  dans  la  lèvre  inférieure  d'un  hyinénoptère. 
L'eumône  pomatine  nous  a  fournicet  exemple.  On  saitque  cet  insecte, 
commun  dans  le  midi,  se  fait  des  nids  de  terre  pétrie  fort  intéres- 
sants. Une  planche  de  l'ouvrage  tle  M.  Blanchard  fl)  représente  ces 
nids  tels  qu'on  les  rencontre  le  long  des  murailles  oîi  ils  sont  appli- 
ques. Cet  insecte  a  été  retrouvé  aux  environs  de  Paris.  Ea  Lorraine, 
nous  l'avons  rencontré.  Il  construit  son  nid  particulièrement  sur  les 
pierres  sèches  dont  les  murs  de  clôture  des  vignobles  sont  formés. 

Chez  ces  insectes  comme  chez  les  autres  hyménoptères,  et  les  guê- 
piaires  en  particulier,  la  lèvre  inférieure  est  formée  d'une  partie  mé- 
diane s'élaigissant  et  formant  des  lobes  terminés  en  fuseau.  A  son 
extrémité  libre,  de  chaque  côté  s'observent  les  lobes  latéraux  ou 
paraglosses,  qui  ont  la  forme  de  petites  languettes  qui  se  terminent 
aussi  en  pointe  de  fuseau.  Les  palpes  labiaux  ont  quati'e  articles  e'- 
sont  garnis  de  poils. 

La  lèvre  inférieure  et  ses  paraglosses  otfrent  une  structure  très- 
élégante. 

A  l'extrémité  des  deux  points  de  la  languette  et  à  celle  des  para- 
glosses se  trouvent  deux  corps  sphériques  jaunâtres,  dont  la  teinte 
foncée  tranche  vivement  sur  celle  de  l'appareil.  Des  poils  courts  co- 
niques sont  implantés  sur  la  surface  externe  de  cette  sphérule  qui  à 
sa  base  est  percée. 

Par  cette  ouverture  pénètrent  dans  la  sphérule  deux  troncs  ner- 
veux accompagnés  de  trachées.  Des  faisceaux  musculaires  de  fibres 
striées  viennent  s'insérer  au  bord  de  l'ouverture  et  à  la  partie  pro- 
fonde de  la  sphère. 

Les  nerfs,  une.  fois  entrés  dans  l'organe,  se  divisent,  se  renflent 
suivant  la  disposition  observée  et  décrite  dans  les  muscidés.  On  peut 
voir  par  transparence  qu'à  chacun  de  ces  poils  que  nous  avons  raen- 


(I)  Blanchard,  Métamorphoses  des  insectes.  In-8".  G.  Baillière. 


56 

tioiinés  correspond  un  rcnnpment  avec  cellules  nerveuses,  llislolo- 
giquemeiit,  il  n'y  a  là  rien  de  nouveau. 

Mais  les  renflements  nerveux  ainsi  localisés  aux  pointes  de  la  lan- 
guette et  des  paraglosses  doivent  donner  à  l'organe  une  très-grande 
sensibilité;  peut-être  même  sont-ils  le  siège  de  la  gestation. 

Chaque  renflement  sphérique  contient  environ  de  douze  à  vingt 
de  ces  renflements  terminaux. 

En  terminant,  je  signalerai  une  disposition  spéciale  observée  dans 
les  palpes  des  carabriques. 

J'ai  eu  à  ma  disposition  plusieurs  insectes  de  ce  genre.  Correspon- 
dant à  des  cupules  surmontées  des  canaux  qui  traversent  la  chitine, 
se  trouvent  profondément  des  organes  ayant  la  forme  de  petits  hari- 
cots. Ils  ont  une  apparence  granuleuse  et  sont  enveloppés  d'une 
membrane  mince  hyaline.  De  Tinlérieur  sort  un  canal  à  parois 
minces.  On  ne  voit  dans  l'intérieur  de  cet  organe  aucune  cellule.  Du 
reste,  il  n'existe  aucune  connexion  avec  les  nerfs.  Ces  petits  organes 
sont  des  glandes.  Leurs  canaux  sont  tout  à  fait  semblables  à  ceux 
des  glandes  salivaires. 


NOTE 

SUR  LES  CORPUSCULES  CALCAIRES 

DES  ÉGHINOGOQUES 

Communiquée  à  la  Société  de  Biologie 

PAR 

M.  LE  Docteur  A.  LABOULBÈNE 

Membre  honoraire  de  la  Société  de  Biologie,  etc. 
(Voyez  planche  III.) 


Les  petits  corps  qui  font  l'objet  de  ce  travail  ont  été  signalés  par 
un  grand  nombre  d'auteurs  et  vus  par  tous  ceux  qui  ont  regardé  des 
Échinocoques  k  un  grossissement  convenable.  Néanmoins  leur  étude 
n'est  pas  complète,  et  c'est  pour  remplir  cette  lacune  que  j'offre  à 
Ja  Société  les  descriptions  et  les  figures  qui  suivent.  J'ai  pu  à  plu- 
sieurs reprises  me  procurer  des  Échinocoques  dans  un  état  complet 
de  conservation  et  d'autres  plus  ou  moins  altérés.  La  plupart  de  ces 
observations  ont  été  faites  avec  un  de  mes  internes  M.  Quinquaud. 

Quand  on  examine  au  microscope  un  Échinocoque  avec  un  faible 
grossissement,  on  voit  des  granulations  dans  l'épaisseur  de  sa  mem- 
brane enveloppante. 

A  un  plus  fort  grossissement,  on  aperçoit  une  ligne  sombre,  d'une 
certaine  épaisseur,  qui  délimite  ces  grosses  granulations  dont  le 
MÉM,   1870.  5 


58 
centre  est  transparent:  ce  sont  les  corpuscules  calcaires  des  Échino- 
coque?. 

Si  l'on  consulte  les  ouvrages  traitant  de  cette  question,  on  reste 
convaincu  que  l'étude  de  ces  corpuscules  a  été  négligée.  En  effet,  Le- 
bert  (1),  Gervais  et  Van  Beneden,  Davaine,  etc.,  ne  font  que  les  si- 
gnaler. Il  en  est  de  même  de  Steenstrup,  de  Siebold  et  de  Kiichenmeis- 
teir  (2),  qui  les  nomme  Kalkkoerperchen;  il  est  probable  que  tous 
ces  observateurs  les  ont  ainsi  désignés  sous  le  nom  de  corps  calcaires, 
à  cause  de  l'effervescence  qui  se  produit  lorsqu'on  traite  ces  corpus- 
cules par  les  acides. 

Le  professeur  Gh.  Robin  est  celui  qui  les  a  mieux  étudiés,  et  voici 
ce  qu'il  en  dit  (3)  :  «  Elle  (la  membrane  externe  des  Échinocoques) 
renferme  toujours,  dans  l'animal  complètement  développé,  des  cor- 
puscules de  carbonate  calcaire,  arrondis  ou  ovoïdes,  foncés  à  la  cir- 
conférence (qui  quelquefois  semble  comme  limitée  par  deux  lignes 
excentriques),  brillants  au  centre,  dissous  avec  effervescence  par  les 
acides,  et  dont  le  diamètre  varie  de  0,10  à  0,15.  Ils  laissent  après 
eux  une  légère  trame  organique.  » 

Les  corpuscules  subissent  des  altérations  consécutives.  En  effet,  à 
mesure  que  lÉchinocoque  se  flétrit,  les  corpuscules  s'altèrent  égale- 
ment :  tantôt  on  les  voit  former  de  petites  agglomérations  centrales, 
tantôt  on  les  trouve  dispersés  à  la  circonférence,  ou  bien  ils  sont 
très-éloignés  les  uns  des  autres.  Plus  tard  apparaissent  des  granula- 
tions fines,  qui  se  développent  assez  souvent  vers  le  centre,  et  llna- 
iement  on  peut  voir  deux,  trois  noyaux  brillants  au  centre,  qui  se 
résolvent  en  granulations  calcaire?. 

(1)  H.  Lebert,  Physiologie  pathologique,  l.  II,  p.  500,  1845.  «  Ces 
globules  sont  probablement  de  nature  albumineuse  ou  graisseuse.  »  — 
P.  Gervais  et  P.  J.  Van  Beneden,  Zoologie  médicale,  t.  II,  p.  271,  1859, 
représentent  des  Échinocoques  à  corpuscules,  mais  ne  les  décrivent 
pas._C.  Davaine,  Traité  des  entozoaires,  etc.,  p.  viii  et  xiii,  Synopsis, 
1860.  —V.  Cornil  et  L.  Ranvier,  Manuel  d'histologie  pathologique, 
repartie, p.  336,  1869.  <«  Le  corps  de  l'animal  est  parsemé  de  disques 
calcaires.  » 

(2)  F.  Kiichenmeister,  Die  in  nnd  an  dem  Korrper  des  Lebenden 
Menschen  Varasiicn,  Seiten  1-55  et  146.  Leipzig,  1855. 

(3)  P.  II.  Nysten,  Dictionnaire,  \-:'  édition,  par  E.  Litlré  et  CI.'.  Ry- 
biB,p.  48'!,  1865. 


59 

Tous  les  corpuscules  subissent  cette  modification ,  de  telle  sorte 
qu'à  un  certain  raomentils  ressemblentàdes  corps  granuleux  ;  mais  ils 
font  effervescence  sous  l'influence  des  acides, etalorsils  disparaissent 
presque  complètement.  Dans  l'épaisseur  de  la  membrane  externe  de 
l'Échinocoque  on  peut  reconnaître  ces  granules,  qui  sont  mélangés 
soit  à  des  granulations  graisseuses  et  protéiques,  soit  quelquefois 
pigmentaires,  granulations  qui  se  reconnaissent  à  leurs  réactifs  spé- 
ciaux. 

Enfin,  tous  ces  grains  calcaires  se  désagrègent  et  se  désunissent 
pour  se  disséminer  dans  la  bouillie  kystique  de  l'Acéphalocyste. 

g  II. 

Ln.  forme  des  corpuscules  calcaires  est  très-variable,  ainsi  qu'on 
peut  le  voir  d'après  la  planche  111.  Ordinairement  arrondis  ou  ellip- 
tiques, tantôt  ils  sont  munis  d'un  noyau  central  on  latéral,  tantôt 
ces  noyaux  sont  au  nombre  de  deux  et  de  trois  ;  déjà  les  corpuscules, 
représentés  par  e,/,  g,  r,  s,  f,  x,  y,  commencent  à  s'allérei'. 

Les  corpuscules  g,  h,  i  sont  limités  par  deux  lignes  très-accusées. 
Ce  fait  avait  été  signalé  par  Charles  Robin. 

D'autres  fois  ils  ont  la  forme  ovoïde,  ou  celle  d'un  sablier  (voy.  la 
planche  III,  m,  p),  et  dans  ce  cas,  ou  bien  ils  sont  entourés  par 
une  seule  ligne  de  contour  limitant  un  espace  transparent,  ou  bieu 
il  existe  plusieurs  lignes  parallèles  (p). 

Ils  peuvent  également  être  arrondis,  sphériques,  et  avec  des  cou- 
ches concentriques  (n,  o).  Dans  ce  dernier  cas,  ils  ont  subi  déjà  uu 
début  d'altération,  car  on  ne  les  rencontre  pas  avec  celte  forme  dans 
la  période  d'état  de  l'Échinocoque.  ^ 

Quel  est  exactement  le  nombre  de  ces  corpuscules  calcaires?  — 
Voici  quatre  moyennes  obtenues  en  comptant  les  corpuscules  de 
250  Échinocoques  (les  chiffres  indiquent  le  nombre  de  petits  corps 
calcaires  observés  sur  un  premier  plan);  il  faudrait  donc  doubler 
les  nombres  obtenus  pour  avoir,  approximativement,  la  somme  to- 
tale des  corpuscules  de  l'Échinocoque. 


\C/ 


A 


GO 


1"  série.  .  .  . 

...     50 

Oc        

.  .  .     42 

3«      -   .   .  .  . 

.  .  .     41 

4*      -   .  .  .  . 

.  .  .     40 

Le  nombre  des  corpuscules  a  été  compté  sur  des  Echinocoques  qui 
étaient  au  summum  de  leur  développement. 

§  IV. 

Pour  apprécier  la  composition  organique,  ou  chimique  des  corpus- 
cules des  Echinocoques,  on  s'est  jusqu'ici  contenté  de  produire  Tef- 
lervesceuce  à  l'aide  de  la  plupart  des  acides;  ce  qui  est  facile  à  ob- 
tenir (acides  acétique,  azotique,  chlorbydrique,  sulfurique,  etc.). 

11  convient  cependant  de  prendre  une  petite  précaution  pour  ne 
pas  croire  à  un  dégagement  d'acide  carbonique,  lorsqu'il  s'agit  sim- 
plement d'un  dégagement  de  bulles  d'air  :  il  faut  mouiller  complè- 
tement avec  de  l'eau  distillée  le  dépôt  du  kyste. 

Avec  l'acide  oxalique,  je  suis  arrivé  à  voir  les  cristaux  caractéris- 
tiques de  l'oxalate  de  chaux. 

Le  carbonate  de  chaux  se  présente  dans  certains  cas  sous  la  forme 
cristalline  telle  qu'on  l'observe  dans  l'urine  des  herbivores,  c'est- 
à-dire  en  forme  de  sablier,  ou  parfois  en  forme  de  sphère  avec  des 
couches  concentriques. 

Après  l'action  des  divers  acides,  il  reste  encore  une  trame,  qui  ne 
disparait  pas,  mais  qui  peut  pâlir  beaucoup,  et  cette  trame  se  colore 
un  peu  en  jaune  au  contact  de  l'acide  chlorbydrique. 

Mais  ce  que  l'on  n'a  point  encore  indiqué,  c'est  qu'il  y  a  autre 
chose  que  du  carbonate  de  chaux;  déjà,  après  l'observation  de 
l'effervescence,  on  pouvait  prévoir  qu'il  y  avait  un  autre  élément 
chimique;  en  effet,  quand  on  fait  agir  un  acide  faible  sur  ces  corps, 
l'effervescence  est  légère  et  le  corps  reste  parfois  intact. 

Si  l'on  fait  passer  sous  la  préparation  renfermant  les  corpuscules 
d'Échinocoque  quelques  gouttes  d'oxalate  d'ammoniaque,  on  voit  au 
bout  d'un  certain  temps  se  former  des  cristaux  d'oxalate  de  chaux 
aux  dépens  du  phosphate  de  chaux. 

Et  si  alors  on  ajoute  un  sel  de  magnésie  et  au  besoin  un  excès 
d  ammoniaque,  il  se  forme  des  cristaux  si  caractéristiques  de  phos- 


61 

phate  ainmoniaco-magnésiea;  parfois  la  cristallisation  se  fait  atten- 
dre assez  longtemps. 

CONCLUSIONS. 

En  résumé,  il  existe  dans  les  corpuscules  calcaires  des  Echinoco- 
ques  dont  je  viens  de  donner  la  description  : 

r  Une  matière  organique  ; 
2*  Du  carbonate  de  chaux  ; 
3»  Du  phosphate  de  chaux. 


^^^.  rvî»"^ 


ERRATUM 


Le  Mémoire  ci-contre,  Sur  l'action  toxique  de  V acide  phénigue,  a  été 
présenté  à  la  Société  de  Biologie  par  MM.  Bert  et  Jolyet. 


A  placer  en  regard  de  la  page  63  des  Mémoires. 


RECHERCHES 

SUR  L'ACTION  TOXIQUE 


»s 


L'ACIDE  PHENIQUE 

MÉMOIRE  PRÉSENTÉ  A  LA  SOCIÉTÉ  DE  BIOLOGIE  EN  1869  (1) 


PAR 


M.  PAUL  BERT. 


On  peut  dire  que  l'acide  phéiiique  doit  au  docteur  Jules  Lemaire(2) 
son  droit  de  cité  daos  les  sciences  biologiques.  Les  travaux  remar- 
quables de  cet  expérimentateur  ont  montré  tout  ce  que  peuvent 
attendre  la  physiologie  expérimentale,  la  pathologie  interne  et  ex- 
terne, d'un  agent  dont  la  puissance  s'étend  sur  tous  les  êtres  vi- 
vants. Il  n'y  a  donc  pas  lieu  de  s'étonner  que,  par  un  de  ces  engoue- 
ments enthousiastes  habituels  chez  les  médecins  praticiens,  on  ait 
employé  à  l'aventure  l'acide  phénique  dans  toutes  les  maladies  où  il 
pouvait  être  question  d'infection  ou  de  parasitisme.  L'expérience  a 
déjà  fait  justice  de  la  plupart  de  ces  tentatives,  dont  un  certain 
nombre  doivent  être  reléguées  hors  du  domaine  scientifique. 

11  nous  a  semblé  qu'il  était  bon,  avant  de  s'engager  davantage, 

(1)  Voir  Comptes  rendus  de  la  Société  de  Biologie,  Paris, 
1869,  p.  194. 

(.2)  De  V acide  phéniqtie;  1^«  édit.,  1383;  2»  édit.,  1365. 


04 
d'étudier,  par  voie  d'analyse  physiologique,  l'action  de  cette  remar- 
quable substance  sur  les  organismes  supérieurs. 

Le  travail  de  M.  Lemaire  fournit  déjà  sur  ce  point  des  renseigne- 
ments importants.  L'attaque  phénique  y  est  parfaitement  décrite. 
L'élimination  par  le  poumon  d'une  grande  partie  de  l'acide  injecté 
dans  l'estomac,  s'y  trouve  relatée.  M.  Lemaire  a  également  constaté 
une  action  sur  la  sensibilité  et  une  congestion  des  centres  nerveux 
qui  lui  fait  dire  que  «  c'est  sur  le  système  nerveux  que  l'acide  phé- 
«  nique  agit  principalement  (1).  » 

Mais  la  physiologie  moderne  exige  une  localisation  plus  précise  et 
des  démonstrations  plus  rigoureuses.  L'animal  empoisonné  par  l'a- 
cide phénique  périt  avec  des  convulsions  :  celles-ci  sont-elles  dues 
à  des  troubles  circulatoires,  à  une  altération  du  sang,  à  une  excita- 
talion  des  fibres  musculaires,  des  fibres  nerveuses  motrices,  des  ex- 
trémités terminales  des  fibres  sensitives?  ou  encore  faut-il  les  attri- 
buer à  une  action  exagérée  des  centres  nerveux  réceptifs  ou  moteurs? 
Telles  sont  les  questions  qui  se  posent  naturellement  à  l'esprit  et 
auxquelles  nous  avons  essayé  de  répondre  dans  le  présent  travail. 

Nous  étudierons  successivement  : 

1°  Les  effets  de  l'intoxication  par  l'acide  phénique  à  dose  immé- 
diatement toxique. 

2°  Les  effets  de  l'intoxication  chronique  par  l'acide  phénique,  et 
l'accoutumance  à  cette  substance.  , 

Enfin,  nous  appellerons  l'attention  sur  certaines  lésions  d'organes 
q-ui  se  produisent  consécutivement  à  l'administration  de  l'acide  phé- 
nique. 

I 

Nos  expériences  ont  porté  particulièrement  sur  des  chiens  et  des 
lapins.  Nous  avons  injecté  dans  l'estomac  3  à  4  grammes  d'acide  phé- 
nique cristallisé  en  solution  au  30"  ou  au  100^  pour  des  chiens  de 
moyenne  taille;  environ  1  gramme  pour  des  lapins. 

Voici  quels  ont  été,  dans  ces  conditions,  les  phénomènes  qui  ont 
suivi  l'ingestion  du  poison  : 

Presque  immédiatement  après  l'introduction  de  la  substance  dans 
l'estomac,  l'animal  éprouve  une  sorte  de  frissonnement  et  d'inquié- 
tude particuliers,  et,  s'il  est  livré  à  lui-même,  il  change  continuel- 

(l)  Dciixiômo  iViition.  p.  10'2. 


65 
lement  de  place.  Mais  bientôt  il  s'affaiblit,  d'abord  du  train  posté- 
rieur, puis  des  membres  antérieurs;  il  titube  et  trébuche  à  chaque 
pas,  puis  il  tombe  sur  le  flanc  sans  pouvoir  plus  se  relever.  Ces 
phénomènes  initiaux  de  l'empoisonnement  se  montrent  dans  les  deux 
à  cinq  premières  minutes  qui  suivent  l'administration  du  poison.  Alors 
au  frissonnement  ont  succédé  des  secousses  convulsives  cloniques 
qui  occupent  les  divers  muscles  des  membres,  du  tronc,  de  la  face, 
des  yeux;  les  muscles  du  larynx  participent  à  cet  état,  et  il  y  a  des 
cris  convulsifs  incessants.  Chose  curieuse,  dans  le  rhytlime  successif 
de  ces  convulsions  qui  agitent  les  quatre  mem-bres,  il  se  trouve 
comme  l'indication  d'une  marche  continuelle,  et  de  fait,  avant  de  tom- 
ber, l'animal  semblait  en  proie  à  un  besoin  de  locomotion  auquel  ses 
forces  n'ont  bientôt  plus  répondu. 

Si  la  dose  du  poison  est  faible,  on  s'assure  aisément  que  les  con- 
vulsions s'exagèrent  lorsqu'on  pince  ou  qu'on  excite  l'animai, 
comme  il  advient  pour  la  strychnine. 

Une  salivation  exagérée  se  produit,  excitée  qu'elle  est  par  les 
mouvements  de  mastication  continus  qu'entraînent  les  convul.-ions 
des  muscles  des  mâchoires;  les  yeux  restent  ouverts,  les  pupilles 
légèrement  dilatées.  Cet  état  de  convulsions  cloniques  dure  deux, 
trois,  quatre  heures.  Alors,  si  la  dose  d'acide  pliénique  n'est  pas 
mortelle,  les  convulsions  diminuent  peu  à  peu  d'intensité  et  de  fré- 
quence; les  muscles  se  soumettent  de  nouveau  à  la  volonté  et  repren- 
nent leur  force  graduellement;  l'animal  soulève  d'abord  la  tète,  puis 
les  mouvements  volontaires  apparaissent  dans  les  membres  anté- 
rieurs, et  enfin  dans  le  train  postérieur;  l'animal  se  soutient  sur  les 
pattes,  faible  d'abord  ;  mais  il  reprend  rapidement  sa  force  et  revient 
bientôt  à  son  état  normal. 

Si  la  dose  du  poison  est  mortelle,  les  convulsions  deviennent  de 
moins  en  moins  fréquentes  et  font  place  à  une  sorte  de  paralysie 
des  muscles  de  la  vie  de  relation,  qui  gagne  les  muscles  respira- 
toires; les  mouvements  de  la  respiration  s'alfaiblissent  peu  à  peu, 
ainsi  que  les  battements  du  cœur,  qui  deviennent  en  même  temps 
irréguliers  ;  la  température  s'abaisse  et  l'animal  meurt. 

Nous  n'insisterons  pas  davantage  sur  la  description  de  ces  phéno- 
mènes de  l'empoisonnement  ordinaire  par  l'acide  phénique.  Le  lec- 
teur désireux  d'avoir  des  détails  plus  nombreux  se  reportera  avec 
fruit  à  la  première  partie  du  livre  de  M.  Lemaire. 

MÊM.  1870  6 


66 

Tel  n'est  pas  toujours,  cependant,  le  mode  de  terminaison  funeste. 
Dans  quelques  cas  rares,  surtout  quand  lu  dose  du  poison  est  forte, 
la  mort  a  lieu  presque  subitement  dès  le  début  de  la  phénicatiou. 
Elle  semble  avoir  alors,  pour  mécanisme  prochain,  un  arrêt  des  ven- 
tricules du  cœur;  et  en  effet,  dans  ce  cas,  on  trouve  le  sang  rouge 
dans  les  cavités  gauches  du  cœur,  et  noir  dans  les  cavités  droites. 
Nous  rapportons,  comme  exemples  de  ce  mode  de  terminaison,  les 
deux  expériences  suivantes  : 

EXP.  I.  —  Chien  mâtiné  du  poids  de  14  livres.  Administration  de 
3  grammes  d'acide  phénique  dans  l'estomac.  L'animai  est  pris  de 
tremblement  convulsif  après  trois  minutes.  On  a  quitté  des  yeux  un 
instant  l'animal  ;  on  le  revoit  les  pattes  raides  et  étendues  et  la  tête 
rejetée  en  arrière,  expirant.  On  ne  sent  plus  les  battements  du  cœur. 
Le  dernier  mouvement  de  l'animal  a  lieu  six  minutes  après  l'in- 
jection. 

On  fait  aussitôt  l'autopsie  :  Contractions  rhythmiques  des  oreil- 
lettes, contractions  fibrillaires  des  ventricules.  Les  cavités  du  cœur 
sont  dilatées  et  remplies  de  sang.  Le  sang  est  noir  dans  le  ventricule 
droit,  rouge  dans  le  gauche  :  Le  sang  recueilli  dans  des  soucoupes 
se  coagule  bien. 

Il  n'y  a  rien  dans  la  trachée,  ni  dans  les  poumons.  Ceux-ci  sont 
violacés  et  revenus  sur  eux-mêmes,  ne  crépitant  pas  sous  la  pres- 
sion; les  petites  bronches  paraissent  aplaties.  Après  l'insufflation,  le 
poumon  devient  blanc  et  crépitant. 

Il  n'y  a  pas  de  caillots  dans  les  artères  pulmonaires.  Les  organes 
abdominaux  sont  sains,  l'estomac  contient  du  pain  et  une  partie  du 
iiquide  de  l'injection. 
Le  bulbe  rachidien  est  pâle,  en  apparence  anémié. 
45  minutes  après  la  mort,  le  nerf  sciatique  est  encore  un  peu  ex- 
citable ;  après  2  heures  45  minutes,  la  galvanisation  des  muscles  pro- 
duit encore  une  contraction  faible  qui  se  manifeste  par  un  sillon  li- 
néaire au  point  d'application  des  pôles. 

2  heures  40  minutes  après  la  mort  la  rigidité  musculaire  est  com- 
mençante. 

Exp.  II.  —  Chienne  jeune,  ayant  eu  antérieurement  les  deux  nerfs 
récurrents  coupés  (poids  3  kilog.). 

Le  26  mai  1870,  à  3  heures  2  minutes,  on  lui  injecte  dans  l'esto- 
mac 2  grammes  d'acide  phénique  dissout  dans  60  grammes  d'eau. 
Aussitôt  après,  l'animal  rendu  libre,  fait  deux  à  trois  fois  le  tour  du 
laboratoire  en  courant;  puis,  il  fait  quelques  efforts  de  vomissements  ; 


67 
comme  on  soulève  ranimai  poui*  rempécher  de  vomir,  il  semble  qu'il 
va  mourir. 

Posé  à  terre,  il  fait  encore  quelques  mouvements  respiratoires 
dont  le  dernier  a  lieu  à  3  heures  5  minutes. 

A  ce  moment,  on  implante  une  aiguille  au  travers  du  thorax,  dans 
le  coeur;  on  observe  des  mouvements  rhythmiques  de  l'aiguille 
4  minutes  après  la  dernière  respiration. 

On  fait  aussitôt  l'autopsie  :  Les  oreillettes  se  contractent  encore 
d'une  façon  rhythmique,  les  ventricules  sont  arrêtés  et  remplis  de 
sang.  Le  cœur  ouvert,  on  trouve  le  sang  rouge  dans  les  cavités  gau- 
ches, et  noir  dans  les  cavités  droites.  On  galvanise  le  nerf  pneumo- 
gastrique gauche,  et  l'on  produit  l'arrêt  des  contractions  des  oreil- 
lettes, puis  celles-ci  repartent  malgi'é  la  galvanisation.  On  répète 
plusieurs  fois. 

A  3  heures  45  minutes,  les  nerfs  ne  sont  plus  excitables,  les  mus- 
cles sont  contractiles. 

A  4  heures  15  minutes, les  muscles  offrent  encore  delà  contractilité. 

Les  poumons,  à  la  coupe,  laissent  suinter  du  sang  rouge,  ne  cré- 
pitent pas  quand  on  les  presse  entre  les  doigts. 

Rien  de  particulier  dans  les  bronches. 

Le  sang  normalement  coagulable. 

Mais,  ainsi  que  nous  le  disions  tout  à  l'heure,  ce  mode  de  termi- 
naison soudaine  de  l'empoisonnement  par  l'acide  phénique  est  l'ex- 
ception. Le  plus  souvent,  les  accidents  durent  pendant  un  certain 
temps,  alors  même  qu'ils  sont  susceptibles  de  se  terminer  par  la  mort. 

Ils  présentent  alors  la  physionomie  que  nous  avons,  en  commen- 
çant, succinctement  décrite.  A  considérer  ces  convulsions  singuliè- 
res, dans  lesquelles  les  muscles  en  trépidation  continuelle  semblent 
se  contracter  individuellement,  sans  nulle  synergie,  et  qui  rappel- 
lent l'aspect  d'un  membre  dans  lequel  on  fait,  par  l'artère,  une  in- 
jection d'eau,  la  première  question  qui  se  pose  est  de  savoir  si  ces 
convulsions  sont  en  réalité  idio-musculaires  ou  si  elles  sont  sous  la 
dépendance  du  système  nerveux  central.  Une  expérience  bien  sim- 
ple sullii  pour  résoudre  la  question.  Si,  en  effet,  en  pleine  phase 
convulsive,  on  tranche  le  nerf  moteur  d'un  membre,  on  voit  tous 
les  muscles  animés  par  ce  nerf  se  mettre  en  résolution  complète.  Si, 
de  plus,  on  lie  chess  une  grenouille  tout  un  membre  postérieur,  en 
respectant  seulement  le  nerf  sciatique,  ou  voit  que  ce  membre, 
dans  lequel  ne  pénètre  pas    le  poison,  est  pris  de  convulsions  en 


68 
même  temps  que  celui  du  côté  opposé.  Il  est  donc  bien  évident  que 
les  convulsions  dépendent  d'une  excitation  des  centres  nerveux. 

La  même  conséquence  se  tire  des  expériences  dans  lesquelles  on 
emploie  le  curare  ou  le  chloroforme  pour  calmer  les  accès  convul- 
sifs.  Nous  en  rapportons  ici  deux  : 

ExP.  III.  —'Lapin  phéniqué  la  veille,  le  17  novembre,  et  sur  le- 
quel on  a  coupé  le  nerf  sciatiquc  droit. 

Phéniqué  à  nouveau  à  3  heures  25  minutes  en  injectant  dans  l'es- 
tomac 40  grammes  de  la  solution  au  100«.  Les  convulsions  se  mon- 
trent très-rapidement.  On  constate  de  nouveau  qu'il  n'y  a  aucune 
convulsion  dans  les  doigts  de  la  patte  dont  le  sciatique  a  été  coupé, 
tandis  que  les  doigts  de  l'autre  patte  sont  continuellement  agités  par 
des  mouvements  alternatifs  de  flexion  et  d'extension. 

3  heures  30  minutes.  On  injecte  sous  la  peau  de  l'aisselle,  2  cent, 
cubes  de  la  solution  de  curare. 

Les  convulsions  diminuent  peu  à  peu  d'intensité. 

3  heures  40  minutes.  On  doit  faire  la  respiration  artificielle, 

3  heures  50  minutes.  Cessation  des  convulsions  cloniques. 

4  heures  10  minutes.  Galvanisation  des  nerfs  sciatiques  de  l'un  et 
'lautre  côté.  Aucun  mouvement  du  membre. 

4  heures  20  minutes.  Réinjection  dans  l'estomac  de  40  cent,  cubes 
de  la  solution  acide  phéniqué. 

4  heures  30  minutes.  Galvanisation  des  sciatiques.  Rien  dans  les 
pattes.  Le  cœur  ausculté  bat  l'égulièrement. 

6  heures.  Respiration  abdominale  qui,  spontanée,  devient  peu  à  peu 
plus  forte.  Petits  mouvements  convulsifs  dans  la  face,  le  nez.  Ces 
mouvements  augmentent  d'intensité,  se  montrent  plus  tard  dans  les 
muscles  du  cou,  de  l'épaule  et  du  thorax.  On  cesse  la  respiration 
.irtiûcielle,  l'animal  respire  seul  d'une  façon  suffisante.  Abandonné 
;\  6  heures  30  minutes. 

18  novembre.  Le  lapin  est  trouvé  mort. 

ExP.  IV.  —  Grenouille  curarée. 

Empoisonnement  par  le  curare  à  10  heures  15  minutes,  le  27  no- 
vembre. 

Bien  empoisonnée  à  10  heures  25  minutes. 

On  place  sous  la  peau  de  la  patte  gauche  des  cristaux  d'acide  phé- 
niqué. 

La  grenouUIe,  observée  jusqu'à  minuit,  ne  présente  aucune  con- 
vulsion. 

28  novembre,  Morte, 


C9 

Exp,  V.  —  Chien  du  poids  de  15  livres. 

Le  1er  avril  1870,  à  midi  35  minutes,  on  injecte  dans  l'estomac  de 
l'animal  60  grammes  d'une  solution  d'acide  phénique  au  30». 

Après  deux  minutes,  l'animal  est  pris  de  tremblement;  il  va  et 
vient  sans  cesse  dans  le  laboratoire;  après  cinq  minutes,  l'animal 
est  sur  le  flanc  en  proie  aux  convulsions  cloniqucs. 

Après  dix  minutes,  les  convulsions  sont  plus  marquées  encore,  et 
il  y  a  des  cris  convulsifs  très-fréquents,  de  la  salivation.  Signes  très- 
nets  de  sensibilité;  les  convulsions  sont  exagérées,  et  l'animal  pousse 
un  cri  à  chaque  pincement,  même  léger,  de  la  patte  ou  de  la  queue. 

On  soumet  alors  l'animal  à  l'action  du  chloroforme.  Pendant  deux 
à  (rois  minutes,  les  convulsions  sont  nettement  exagérées  par  les 
respirations  de  chloroforme.  Après  cinq  minutes,  elles  se  ralentis- 
sent, et,  après  dix  minutes,  elles  ont  complètement  cessé  :  l'animal 
est  calme  et  parfaitement  endormi.  On  cesse  alors  les  inhalations  de 
chloi'oforme.  A  peine  sont-elles  supprimées  depuis  une  minute,  que 
les  convulsions  réapparaissaient.  Les  pupilles  sont  légèrement  di- 
latées, les  pattes  sont  chaudes  à  la  main. 

Après  trente-cinq  minutes  à  partir  du  début  de  l'expérience,  on 
constate  des  signes  très-nets  de  sensibilité,  par  le  pincement  des 
pattes  et  l'attouchement  de  la  cornée. 

A  1  heure  lî  minutes,  on  soumet  de  nouveau  l'animal  aux  inhala- 
tions de  chloroforme,  et  l'on  observe  les  mômes  phénomènes  que 
précédemment  ;  les  convulsions  sont  d'abord  augmentées  ;  elles  sont 
complètement  abolies  huit  minutes  plus  tard.  Les  respirations  de 
l'animal  sont  alors  très-calmes,  les  battements  du  cœur  rapides  et 
réguliers.  Pas  de  signes  manifestes  de  sensibilité.  A  1  heure  22  mi- 
nutes, on  suspend  les  inhalations  de  chloroforme. 

Une  heure  dix  minutes  après  le  début  de  l'expérience,  les  convulsions 
cloniques  commencent  à  s'apaiser;  les  mouvements  de  l'animal  de- 
viennent volontaires  et  moins  incoordonnés,  et  vingt  minutes  plus 
lard  l'animal  est  sur  les  pattes,  allant  et  venant  dans  le  laboratoii'e. 
Il  tremble  encore  un  peu  et  sa  démarche  et  mal  assurée. 

11  reste  à  se  demander  si  les  centres  nerveux  supérieurs  sont  seuls 
excités  par  le  poison,  ou  si  la  moelle  épinière  tout  entière  est  in- 
toxiquée. Les  expériences  suivantes  résolvent  la  question  dans  ce 
dernier  sens. 

Exp.  VI.  —  Chien  terrier  vigoureux. 

On  a  mis  la  partie  supérieure  de  la  région  lombaire  de  la  moelle  à 
nu,  et  opéré  deux  sections  transversales  de  la  moelle.  On  donne  à  ce 


70 

chien,  paralysé  du  train  postérieur,  à  4  heures  35  minutes,  100  gram- 
mes de  la  solution  d'acide  phéniquc  au  30^.  Apres  dix  minutes,  on 
trouve  l'animal  en  état  de  convulsions  cloniques.  Ces  convulsions 
occupent  les  membres  postérieurs  paralysés,  aussi  bien  que  les 
membres  antérieurs,  et  s'y  montrent  avec  la  même  intensité.  A 
6  heures  30  minutes  l'animal  est  dans  le  même  état.  On  le  trouve 
mort  le  lendemain  matin. 

ExP.  VII,  3  décembre.  —  Chien;  section  de  la  moelle. 

Petit  chien  de  cinq  jours.  Injection  dans  l'estomac  de  6  grammes 
de  la  solution.  10  grammes  pour  200 ,  à  4  heures.  —  4  heures 
5  minutes,  état  convulsif  bien  développé.  Section  de  la  moelle  au 
niveau  des  pattes  antérieures. 

4  heures  10  minutes,  convulsions  cloniques  dans  le  train  antérieur, 
face  et  pattes  antérieures,  et  dans  le  train  postérieur,  mais  moins 
marquées.  Les  pattes  postérieures  sont  prises  de  mouvements  d'ex- 
tension et  de  retrait  alternatifs  ;  mouvement  de  la  queue. 

4  heures  30  minutes.  Idem. 

4  heures  40  minutes.  On  ouvre  l'abdomen  et  on  fait  sortir  par  la 
plaie  la  masse  intestinale.  Quelques  anses  intestinales,  observées  à 
plusieurs  reprises  pendant  quelques  minutes,  ne  paraissent  pas 
éprouver  de  mouvements  péristaltiques. 

Exp.  VIII.  —  Sur  un  autre  petit  chien,  on  sectionne  d'aboi'd  la 
moelle,  et  on  injecte  ensuite  la  solution  d'acide  phénique  à  4  heures 
10  minutes. 

4  heures  15  minutes.  Commencement  des  convulsions  dans  le 
train  postérieur. 

5  heures.  Encore  convulsions,  mais  très-afifaiblies.  Les  convul- 
sions spontanées  sont  rares,  mais  on  les  rend  fréquentes  et  fortes 
par  des  excitations  périphériques. 

Exp.  IX,  27  novembre.  —  Grenouille;  section  de  la  moelle. 

Sur  une  grenouille  verte,  on  met  à  nu  la  moelle  au-dessous  du 
bulbe.  L'animal  perd  un  peu  de  sang. 

Onze  heures.  L'animal  est  remis,  les  mouvements  réflexes  du 
train  postérieur  sont  bien  nets. 

On  l'empoisonne  par  l'acide  phénique  sous  la  peau  de  la  patte 
gauche. 

Minuit.  Il  n'y  a  pas  encore  de  convulsions. 

28  noveail)re,  huit  heures.  Les  membres  postérieurs  sont  agités 
de  convulsions  cloniques  spontanées. 

29.  Idem 


71 
30.  Idem. 

1er  décembre.  Encore  convulsions  à,  la  suite  d'excitations  péri- 
phériques. 

Nous  avon?,  une  seule  fois,  injecté  directement  l'acide  phénique 
dans  le  sang.  La  mort  est  survenue  avec  une  grande  rapidité,  et  par 
arrêt  du  cœur. 

Exp.  X.  —  Chien. 

Dans  la  veine  fémorale  injecté  lentement  21  centimètres  cubes 
d'eau  contenant  0  gr.  63  centigr.  d'acide  phénique.  Le  cardiomètre 
marquait  une  pression  de  13  à  17  centimètres.  Immédiatement  après 
l'injection,  surviennent  les  tremblements  :  le  cardiomètre  monte 
jusqu'à  20  centimètres. 

Presque  aussitôt,  il  retombe  à  12-,  après  quelques  minutes,  la 
respiration  s'arrête,  la  pression  cardiaque  s'abaisse  à,  4  centimètres  ; 
puis  surviennent  deux  ou  trois  soupirs,  et  le  cœur  s'arrête. 

La  langue  est  noire,  le  sang  noir  partout.  Tiré  des  vaisseaux,  il 
rougit  et  se  coagule.  Les  nerfs  moteurs  agissent  sur  les  muscles, 
le  nerf  pneumogastrique  fait  contracter  les  fibres  musculaires  du 
poumon. 

II 

Les  deux  expériences  qui  suivent  ont  été  instituées  dans  le  but 
de  rechercher  s'il  existe  une  accoutumance  à  l'action  de  i'acide  phé- 
nique, comme  cela  a  lieu  pour  certaines  substances.  Nous  avons 
voulu  voir  si,  en  donnant  tous  les  jours  des  doses  croissantes  d'acide 
phénique,  on  peut  ainsi  arriver  à  dépasser  la  dose  toxique  mortelle, 
et  si  alors  suspendant  l'administration  des  doses  d'acide  phénique, 
pendant  un  temps  sufhsant  pour  que  l'animal  perde  son  accoutu- 
mance à  la  substance,  on  peut  le  tuer  par  une  dose  toxique  limitée. 

Exp.  XI.  —  Chien  du  poids  de  21  livres. 

Le  20  mai,  on  injecte  dans  l'estomac  1  gramme  d'acide  phénique 
dissout  dans  30  grammes  d'eau.  Ce  chien  offrait  un  tremblement 
très-fort  avant  l'administration  de  la  substance,  de  sorte  qu'il  est  dif- 
ficile de  faire  la  part  du  tremblement  causé  par  l'acide  phénique. 
L'animal  va  et  vient  continuellement  dans  le  laboratoire ,  sans  pré- 
senter de  faiblesse  bien  marquée. 

Le  21  mai,  on  donne  1  gr.  50  cent,  d'acide  phénique  :  mômes  efiets 
que  la  veille,  tremblement  un  peu  plus  marqué. 

Le  22  mai,   on  donne  2  grammes  de  la  substance  :  après  quinze 


72 
minutes,  tremblement  assez  marqué,  accompagné  de  faiblesse.  L'ani- 
mal va  et  vient  sans  cesse.  Après  trente  minutes,  Tanimal  est  remis. 

Le  23  mai,  on  ne  donne  pas  l'acide  phénique. 

Le  24  mai,  on  porte  la  dose  à  3  grammes.  Huit  minutes  après  son 
administration,  l'animal  est  couché  sur  le  flanc  en  proie  aux  convul- 
sions cloniques  générales.  —  Mouvements  continuels  des  mâchoires, 
cris  convulsifs,  salivation  assez  marquée. 

Après  une  heure,  même  état.  Après  deux  heures,  les  convulsions 
diminuent,  l'animal  est  toujours  sur  le  flanc,  flasque.  Sensibilité  au 
pincement  de  la  queue. 

Après  2  heures  30  minutes,  l'animal  se  remet  et  soulève  la  tête, 
mais  demeure  toujours  sur  le  flanc.  Après  trois  heures,  il  est  debout 
et  tremble  peu. 

Le  25  mai,  on  donne  3  gr.  50  cent,  d'acide  phénique.  Après  dix 
minutes,  tremblement  et  faiblesse.  Après  quinze  minutes,  il  tombi' 
presque  sur  le  train  postérieur.  Néanmoins  ,  l'animal  va  et  vient 
sans  cesse  dans  le  laboratoire.  Après  vingt-cinq  minutes,  l'animal 
est  plus  faible  encore,  il  tombe  au  moindre  choc  ;  il  s'accule  pour 
boire,   tremble  peu.  Après  quarante  minutes,  l'animal  se  remet. 

Le  26  mai,  3  gr.  50  centig.  Après  huit  minutes,  le  chien  est  sur  le 
flanc  dans  une  agitation  convulsive  clonique  générale.  Après  1  heure 
40  minutes,  il  se  replace  sur  les  pattes  ,  mais  il  est  faible  et  tombe 
facilement.  Après  deux  heures,  il  est  plus  fort  et  ne  tremble  plus. 

Le  27  mai,  3  gr.  50  cent.  Après  cinq  minutes,  tremblement  et  fai- 
blesse. Après  quinze  minutes  ,  il  est  couché  sur  le  flanc,  dans  les 
convulsions  ;  mouvements  des  pattes  comme  de  marche.  Convulsions 
des  yeux  qui  sont  tournés  en  bas  et  en  avant. 

Après  vingt-cinq  minutes,  les  convulsions  sont  faibles  ,  l'animal, 
fait  effort  pour  se  relever.  Après  une  heure,  il  est  mieux  et  se  remet, 
mais  il  offre  encore  après  deux  heures  de  petites  convulsions  dans 
divers  muscles  des  membres  et  de  la  face. 

Le  28  mai,  on  porte  à  4  grammes  la  dose  d'acide  phénique.  Après 
dix  minutes,  l'animal  est  sur  le  flanc,  dans  les  convulsions.  Après 
1  heures  20  minutes,  il  se  replace  sur  les  pattes  ,  mais  il  retombe 
aussitôt  ;  il  n'est  bien  remis  qu'après  deux  heures. 

29  juin.  Dans  l'intervalle  de  l'administration  des  doses  quotidien- 
nes d'acide  phénique,  l'animal  est  bien  gai,  vif,  et  ne  paraît  jjresquc 
nullement  influencé.  Appétit  vorace. 

On  donne  4  grammes  d'acide  phénique.  Après  deux  minutes  ,  se 
montrent  les  convulsions  cloniques  générales  ;  l'animal  est  couché 
sur  le  flanc,  flasque  ,  et  ne  fait  aucun  effort  pour  se  soutenir  sur  les 
pattes  quand  on  cherche  à  l'y  placer. 


73 

Après  une  heure,  même  état ,  mais  les  convulsions  s'épuisent  et 
sont  moins  fortes  ;  larmoiement  et  salivation.  A  ce  moment,  l'animal 
ne  paraît  pas  sentir  de  forts  pincements  des  pattes  et  de  la  queue, 
ou  du  moins  il  ne  le  manifeste  pas.  A  deux  heures,  l'état  de  l'ani- 
mal est  à  peu  près  le  même. 

Après  deux  heures  trente  minutes,  il  est  amélioré.  — L'animal  sent 
nettement  le  pincement  de  la  queue  ou  des  pattes  ,  les  convulsions 
sont  faibles.  L'animal  revu  trois  heures  après  est  trouvé  parfaitement 
remis. 

Le  30  mai,  4  grammes.  Tremblement  après  cinq  minutes. 

Après  dix  minutes,  faiblesse,  tombe,  mai'i  peut  se  relever. 

Après  vingt  minutes,  idem. 

Après  une  heure ,  le  tremblement  est  moindre  ,  l'animal  est  plus 
fort  et  se  remet. 

Le  31  mai,  4  grammes.  Après  cinq  minutes,  l'animal  est  sur  le 
flanc,  en  état  de  convulsions. 

Après  deux  heures  trente  minutes  l'animal  revient  à  lui. 

Le  l^r  juin,  4  grammes.  Mêmes  effets  que  la  veille. 

Le  2  juin,  4  grammes.  Sur  le  flanc  après  cinq  minutes  dans  les 
convulsions. 

Après  deux  heures,  on  retrouve  l'animal  debout  et  i-emis. 

Le  3  juin,  4  grammes.  Après  cinq  minutes  il  tombe  sur  le  côté. 
—  tremblements. 

Après  deux  heures,  il  cherche  à  se  relever.  Après  trois  heures 
il  est  remis. 

Le  4  juin.  On  donne  4  grammes  d'acide  phénique  dans  deux  blancs 
(l'œuf. 

Après  cinquante  minutes,  l'animal  est  toujours  debout,  mais  très- 
faible  du  train  postérieur.  Les  tremblements  ne  sont  pas  très-mar- 
qués .  Après  une  heure  trente  minutes,  l'animal  arepris  sa  force  en  partie . 

Le  5  juin,  4  grammes.  Après  sept  minutes ,  l'animal  est  sur  le 
flanc  dans  les  convulsions.  Après  deux  heures,  il  est  dans  le  même 
état.    Après  quatre  heures,  il  est  remis. 

Le  6,  l'injection  n'est  pas  faite. 

Le  7,  on  donne  4  grammes.  —  120  pulsations,  14  respirations,  tem- 
pérature, 40". 

Après  cinq  minutes,  l'animal  tremble  et  faiblit  du  train  postérieur. 

Après  huit  minutes,  il  est  couché  sur  le  côté,  dans  les  convulsions. 

Après  une  heure,  même  état.  —  160  pulsations  faibles,  18-20  res- 
pirations, température,  39*. 

Après  1  heure  40  minutes ,  l'animal  soulève  la  tête  ;  il  est  sur  les 
pattes  après  2  heures  20  minutes 


74 

Le  8  juin,  on  porto  à  4  gr.  50  cent,  la  dose  d'acide  phonique. 

Après  cinq  minutes,  l'animal  est  sur  le  flanc,  dans  les  convulsions. 

Après  deux  heures,  l'état  est  le  même. 

Après  trois  heures,  il  est  sur  ses  pattes,  mais  faible. 

Le  9,   on  donne  4  gr.  50  cent.   Après  trois  minutes,    l'animal   est 
sur  le  flanc  en  proie  aux  convulsions  cloniques. 

Quatre  heures  après,  l'état  est  encore  le  même. 

Le  10  juin,  on  porte  la  dose  à  5  grammes.  Mêmes  résultats  que  la 
veille.  L'animal  a  uriné  :  ni  sucre,  ni  albumine  dans  l'urine. 

Le  il,  5  grammes.  L'animal  revient  après  2  heures  30  minutes. 

Le  12,  5  grammes.  Convulsions  après  cinq  minutes;  se  remet 
après  3  heures  30  minutes. 

Le  13  et  le  14  juin,  on  ne  fait  pas  d'injection. 

Le  15,  on  baisse  la  dose  d'acide  phénique  à  4  grammes. 

Après  deux  minutes,  l'animal  tremble  et  faiblit  ;  après  quatre  mi- 
nutes, il  est  sur  le  flanc,  ses  muscles  agités  par  des  convulsions  clo- 
niques énergiques.  x\près  2  heures  30  minutes,  il  soulève  la  tête  et 
cherche  à  se  relever.  Après  trois  heures,  il  est  sur  ses  pattes,  et  va 
et  vient  dans  le  laboratoire,  mais  il  est  faible  surtout  du  train  posté- 
rieur. 

Les  jours  suivants,  on  suspend  l'administration  des  doses  d'acide 
phénique. 

Le  16  juin,  respirations,  14;   pulsations,  144. 

Le  17,  respirations,  12;  pulsations,  136. 

Le  19,  respirations,  10-11    pulsations,  110;  température,  39°. 

L'animal  mange  toujours  avec  la  même  avidité,  paraît  un  peu  fai- 
ble du  train  postérieur.  Ses  yeux  sont  sains. 

Le  21  juin,  on  trouve  l'animal  à  l'agonie,  et  cependant  le  20  rien 
ne  semblait  annoncer  une  fin  si  prochaine.  Le  chien  est  couché  sur 
le  côté  et  ne  peut  se  tenir  sur  les  pattes.  Les  battements  du  cœur  sont 
lents,  irréguliers  et  faibles.  Le  thermomètre  marque  33°  dans  le  rec- 
tum. Une  heure  plus  tard,  31°.  L'animal  s'éteint  lentement  et  meurt 
trois  heures  après. 

Une  heure  et  demie  après  la  mort,  le  cœur  se  contractait  encore. 
Deux  heures  après  la  mort,  les  nerfs  offraient  pour  la  dernière  fois 
des  traces  d'e.xcitabilité. 

Les  poumons  sont  sains,  ainsi  que  le  foie.  Les  reins  offrent  un  as- 
pect graisseux  très-prononcé.  Beaucoup  de  muscles  du  train  posté- 
rieur et  des  gouttières  vertébrales  offrent  une  altération  graisseuse 
très-avancée.  Les  muscles  du  train  antérieur  sont  à  peu  près  sains. 

Exp.  XIL  — Chien  épagneul  adulte,  du  poids  de  14  kilog.  et  demi. 
On  injecte  dans  l'estomac   1  gramme  d'acjde  phénique  cristallisé. 


75 
dissout  dans  30  gi-ammes  d'eau.  La  môme  dose  est  répétée  les  jours 
suivants,  du  24  mars  jusqu'au  17  avril.  L'animil  après  chaque  dose 
d'acide  phéaique  ne  parait  éprouver  d'autres  effets  qu'un  léger 
tremblement,  surtout  marqué  dans  le  train  postérieur,  tremblement 
du  reste  très-passager. 

Le  17  avril  on  porte  à  1  gr.  50  cent,  la  dose  d'acide  phénique  et 
on  la  continue  jusqu'au  l*"""  mai.  On  observe  les  mêmes  effets,  un 
peu  plus    accentués    que  précédemment. 

Le  1""  mai,  2  grammes  d'acide  phénique.  —  Tremblement  pas- 
sager dans  les  muscles  du  train  postérieur,  de  la  face,  accompagné 
d'une  légère  faiblesse  dans  les  pattes  postérieui*es. 

Le  6  mai,  l'injection  n'est  pas  faite. 

Le  7  mai,  on  donne  les  deux  grammes  d'acide  phénique  à  10  heu- 
res du  matin.  Après  vingt  minutes,  l'animal  est  pris  de  convulsions 
cloniques  ou  tremblement  général,  assez  marqué,  surtout  si  on  le 
compare  au  tremblement  qui  a  suivi  l'administration  des  doses  précé- 
dentes. L'animal  est  en  môme  temps  plus  faible  sur  ses  pattes,  mais 
ne  tombe  pas.  Il  va  et  vient  incessamment  dans  le  laboratoire.  Il 
mange  avidemment  le  pain  qu'on  lui  donne,  mais  il  a  quelque  peine 
à  le  prendre  à  terre,  et  ses  pattes  faiblissent  sous  lui.  Il  y  a  une  cer- 
taine raideur  dans  les  pattes.  —  A  onze  heures,  l'animal  est  à  peu 
près  complètement  remis.  « 

Le  8  mai,  la  dose  de  2  grammes  occasionne  le  même  tremblement 
que  la  veille,  mais  la  faiblesse  de  l'animal  est  beaucoup  moins 
marquée. 

Le  10  mai,  l'animal  est  toujours  bien  portant,  et  ne  présente  rien 
de  particulier  dans  l'intervalle  '  des  prises  d'acide  phénique.  Yeux 
parfaitement  sains. 

On  porte  alors  à  2  gr.  50  cent,  la  dose  d'acide  phénique.  Mêmes 
effets  qu'avec  2  grammes  :  tremblement,  faiblesse  et  surtout  rai- 
deur des  pattes. 

Le  17  mai,  on  donne  3  grammes.  Effets  très-marqués .  Une  heure  après 
l'animal  ne  se  tient  qu'avec  beaucoup  de  peine  sur  ses  pattes,  et  ne 
peut  ramasser  un  morceau  de  pain  qu'on  lui  jette  ;  il  fombe  de 
temps  en  temps  sur  le  train  postérieur,  pour  peu  qu'il  s'embarrasse 
dans  sa  corde  :  mouvements  convulsifs  généralisés,  convulsions  des 
yeux. 

Le  18  mai,  on  donne  3  grammes  à  une  heure.  Effets  habituels 
après  vingt  minutes  :  faiblesse  moindre  que  la  veille  ;  l'animal  ne 
tombe  pas,  môme  quand  on  le  pousse  légèrement. 

Deux  heures  plus  tard,  l'animal  est  complètement  remis  ;  il  y  a  en- 


7fi 

core  quelques  petites  contractions  dans   les    muscles  de   la  face,  les 
paupières,  les  cuisses. 

Le  26  mai,  à  4  heures  30  minutes,  on  donne  3  grammes  50  centi- 
grammes d'acide  phénique  cristallisé.  Après  dix  minutes,  tremble- 
ment et  faiblesse,  surtout,  dans  le  train  postérieur.  Après  trente  mi- 
nutes, l'animal  est  très-faible,  tombe  plusieurs  fois.  Les  battements  du 
cœur  sont  faibles,  on  les  compte  avec  peine  ;  172  pulsations  (130  avant 
l'expérience).  Après  trois  quai-ts  d'heure,  la  faiblesse  est  plus 
grande  encore.  L'animal  tombe  et  ne  peut  plus  se  relever. 

Après  1  heure  30  minutes,  l'animal  se  remet,  se  tient  assez  bien 
sur  ses  pattes  ;  il  y  a  encore  un  tremblement  léger. 

27  mai.  Depuis  quelques  jours,  on  remarque  que  les  yeux  sont 
notablement  injectés  et  un  peu  œdématiés  ;  il  n'y  a  rien  à  la  cornée. 

On  donne  les  3  gr.  50  cent,  de  la  substance.  Tremblement  et  fai- 
blesse après  dix  minutes  ;  l'animal  se  tient  encore  assez  bien  sur  les 
pattes.  Après  une  heure,  tremblement  et  faiblesse  plus  marqués; 
l'animal  écarte  les  pattes  pour  ne  point  tomber,  s'appuie  contre  la 
table.  2  heures  30  minutes  après,  le  chien  est  en  partie  revenu  à  son 
état  normal,  sauf  quelques  contractions  des  muscles  de  la  face  et  des 
paupières  et  un  reste  de  faiblesse. 

Le  28  mai,  3  gr.  50  cent.  Après  quinze  minutes,  tremblement  et 
faiblesse.  Après  vingt-cinq  minutes,  l'animal  tombe  presque.  Après 
quarante-cinq  minutes,  même  état.  Deux  heures  après,  l'animal  est 
remis. 

Le  29  mai,  on  administre  4  grammes  d'acide  phénique.  On 
compte  136  pulsations  et  20  respirations.  Après  quinze  minutes, 
tremblement,  faiblesse,  raideur  dans  les  pattes.  Après  trente  minu- 
tes, l'animal  est  sur  le  flanc,  sans  pouvoir  plus  se  soutenir  sur  les 
pattes.  L'état  convulsif  des  muscles  n'est  pas  très-marqué,  comme 
on  l'observe  chez  les  chiens  auxquels  on  donne  pour  la  première 
fois  une  forte  dose  d'acide  phénique. 

Après  une  heure,  même  état  (170  pulsations,  20  à  24  respirations 
inégales,  les  unes  larges,  les  autres  petites  et  brusques). 

Deux  heures  après  le  début,  l'animal  s'est  replacé  sur  les  pattes, 
mais  il  offre  encore  du  tremblement  et  de  la  faiblesse. 

30  mai.  Les  4  grammes  d'acide  phénique  offrent  sensiblement  les 
mêmes  effets  que  la  veille,  et  durant  le  même  temps. 

31  mai,  4  grammes.  Tremblement  après  cinq  minutes. 

Après  1  heure  30  minutes,  l'animal  est  couché  et  très-faible. 
Après  2  heures  30  minutes,  l'animal  est  remis,  et  ses  forces 
sont  revenues. 

Le  l»""  jtiin,    il   y   a   toujours  de   l'injection  des  conjonctives;  les 


cornées  sont  saines.  Ecoulement  de  mucosités  purulentes  par  la 
narine  droite.  Température  rectale  400,2.  Respirations  16,  pulsa- 
tions 120. 

On  donne  les  4  grammes  d'acide  phénique,  qui  produisent  les 
phénomènes  ordinaires.  Après  une  heure,  l'animal  tombe  et  se  tient 
à  peine.  Après  deux  heures,  il  est  moins  faible,  mais  sa  marche  est 
toujours  mal  assui'ée  ;  il  ne  reprend  sa  force  que  3  heures  30  mi- 
nutes après  le  début  de  l'expérience.  La  température  est  alors  do 
39"   4,  -les  respirations   de  16   à    18,  les  pulsations  128. 

Le  2  juin,  4  grammes.  L'animal  est  remis  après  2  heures 
30  minutes. 

Le  3  juin,  4  grammes.  Température  40  degrés,  respirations  20, 
pulsations  148. 

Après  dix  minutes,  tremblement  et  grande  faiblesse  après  qua- 
rante-cinq minutes.  Température  40  degrés,  respirations  30,  pulsa- 
tions 160. 

Après  trois  heures,  l'animal  se  remet,  mais  tremble  toujours. 
Quatre  heures  après  il  y  a  encore  un  léger  tremblement, 

Le  4  juin,  4  grarnmes.  Respirations,  15,  pulsations  120. 

Après  trente  minutes,  tremblement  et  grande  faiblesse  ;  l'animal 
ne  tombe  pas.  Après  une  heure,  même  état.  Après  deux  heures, 
l'animal  tremble  toujours,  reste  couché,  mais  il  se  soutient  assez 
bien  sur  ses  pattes.  Respirations  20,  pulsations  136. 

5  juin,  4  grammes.  Pulsations  160,  respirations  16. 

Après  cinq  minutes,  tremblement  et  faiblesse,  et  après  trente 
minutes,  sur  le  flanc.  Respirations  40,  inégales  d'amplitude,  le  cœur 
ne  peut  qu'avec  peine  être  senti.  Après  2  heures  30  minutes,  l'ani- 
mal est  en  partie  revenu  à  son  état  normal.  Pulsations  160,  respira- 
tions, 24. 

6  juin.  Même  dose,  mômes  effets. 

7  juin,  4  grammes.  Température  39°,8,  respirations  26,  pul- 
sations 144. 

Après  cinq  minutes,  tremblement  et  faiblesse. 

Après  vingt-cinq  minutes,  l'animal  est  sur  le  flanc.  Après  une 
heure,  idem.  Respirations  30,  pulsations  156.  Après  deux  heures, 
Fanimal  se  remet. 

8  juin.  On  porte  cà  4  gr.  50  cent,  l'acide  phénique. 

Après   dix   minutes,    l'animal   se   tient   à  peine  sur  les  pattes  ; 
tombe,  mais  peut  se  relever. 
Après  quarante-cinq  minutes,  l'animal  est  couché  et  tremble. 
Après  deux  heures,  l'animal  se  tient  debout,  mais  toujours  faible. 
Les  yeux  ne  sont  plus  injectés  depuis  quelques  jours,   mais   plu- 


78 

tôt  anémiés  ;  on  constate  aussi  que  les  conjonctives  offi-ent  une 
teinte  ictérique  très-prononcée,  ainsi  que  la  muqueuse  buccale. 

Le   9  juin,  4   gr.   50   cent.  Pulsations  100,  respirations  30. 

Après  trente  minutes,  l'animal  qui  tremble  se  tient  à  peine. 

Après  trois  heures,  l'emis. 

10  juin.  Pulsations  136,  respirations  20.  Toujours  ictère.  L'animal 
est  triste,  abattu,  restant  pi'csque  constammeit  couché  et  refusant 
toute  nourriture  depuis  hier.  Aussi  on  suspend  l'administration  des 
doses  d'acide  phénique. 

Le  15  juin,  l'ictère  est  moins  prononcé,  les  sclérotiques  sont 
moins  jaunes,  l'animal  est,  du  reste,  plus  gai,  mange  mieu.x.  Pulsa- 
tions 152. 

Le  16.  Pulsations    112,    respirations    16.    39o,2    dans    le    rectum. 

Le  19.  Pulsations  100,  respirations  15  à  16. 

Le  22.  Le  chien  est  revenu  sensiblement  à  son  état  antérieur,  les 
conjonctives  n'offrent  plus  la  teinte  ictérique. 

Le  23.  Pulsations  110,  respirations  14  à  16,  39  degrés  dans  le  rec- 
tum. 

Le  6  juillet.  Le  chien  paraît  entièrement  remis  de  tous  ces  acci- 
dents qu'il  a  présentés  antérieurement. 

On  lui  injecte  dans  l'estomac  4  gr.  50  cent,  d'acide  phénique  cris- 
tallisé dissout  dans  120  grammes  d'eau.  (On  a  compté  120  pulsations, 
18  respirations,  38°, 4  dans  le  rectum. 

Après  trois  minutes,  l'animal  tremble  et  est  faible. 

Après  cinq  minutes,  il  tombe  sans  pouvoir  se  relever. 

Après  quinze  minutes,  le  tremblement  est  très-fort  et  continu  et  on 
observe  comme  antérieurement,  outre  ce  tremblement,  des  secousses 
convulsives  très-fréquentes  des  muscles  des  membres,  de  la  tête,  du 
cou  et  des  mâchoires. 

Après  trois  heures,  l'animal  commence  à  soulever  la  tête,  et  essaye 
de  se  soulever  sur  les  pattes  de  devant,  mais  il  ne  peut  encore  se 
soutenir. 

Après  quatre  heures,  l'animal  se  relève,  ne  tremble  presque  plus. 
Pulsations  176. 

Le  7  juillet.  Pulsations  144,  respirations  32.  L'animal  refuse  de 
manger,  mais  il  reste  gai  et  caressant. 

La  relation  des  expériences  précédentes  montre  qu'il  existe  une 
accoutumance  à  raclion  de  l'acide  phénique,  (jui,  sans  être  bien  mar- 
quée, est  cependant  réelle.  Chez  les  deux  chiens  qui  font  le  sujet 
des  expériences,  nous  avons  pu,  par  le  moyen  de  doses  ruolidiennes 
croissantes  d'acide  phénique,  parvenir  à  leur  administrer  des  quan- 


79 

tités  de  cette  substance  {1  et  3  gr.)  qui  ne  faisaient  que  les  impres- 
sionner faiblement  et  passagèrement,  alors  que  ces  mêmes  doses, 
données  à  des  chiens  de  même  taille,  mais  d'emblée,  eussent  produit 
des  accidents  relativement  intenses  et  prolongés. 

Ces  expériences  montrent  aussi  que  cette  accoutumance  des  ani- 
maux à  l'action  de  l'acide  phénique  diminue  très-rapidement,  puis- 
(lu'il  suffit  de  suspendre  un  jour  l'administration  d'une  tlose  donnée 
2  gram.)  pour  que  celle-ci,  donnée  le  jour  d'après,  impressionne 
l'animal  à  un  degré  plus  élevé  qu'elle  ne  l'avait  impressionné  la 
veille,  et  qu'elle  ne  l'impressionne  le  jour  suivant. 

Enfin,  dans  une  des  deux  expériences,  nous  avons  pu  porter  à 
5  grammes,  progressivement,  la  dose  d'acide  phénique;  et  suspendant 
alors  pendant  cinq  jours  l'administration  de  la  substance,  une  dose 
de  4  granjmes  (ra(  ide  phénique,  donnée  le  quatrième  jour,  a  pu  ame- 
ner la  mort  de  l'animal. 

m 

Nous  avons  montré,  par  les  expériences  consignées  au  jJ  l^',  que 
la  mort  consécutive  à  l'empoisonnement  par  l'acide  phénique  peut 
survenir  dans  deux  conditions  difi"érenles  :  brusquement  ei  presque 
instantanément  par  ariêt  du  cœur;  ou  plus  lentement,  à  la  suite 
d'excitations  convulsives  prolongées. 

Mais  il  peut  arriver,  en  outre,  que  l'animal  qui  a  reçu  une  dose 
d'acide  phénique  assez  forte  pour  le  jeter  à  terre  avec  convulsions, 
se  remette  sur  ses  pattes  et  revienne  à  une  apparence  de  santé,  pour 
périr  quelques  jours  après.  Ici  le  mécanisme  de  la  mort  est  tout 
différent.  Elle  est  évidemment  produitepar  une  maladie  pulmonaire. 

L'expérience  suivante  peut  éire  considérée  comme  un  type  qui 
s'est  fréquemment  reproduit. 

Exp.  XIII.  —  Chien  adulte  du  poids  de  13  livres. 

Injection  dans  l'estomac  de  3  grammes  d'acide  phénique  cristal- 
lisé dans  90  grammes  d'eau. 

Après  cinq  minutes,  l'animal  est  couché  sur  le  flanc  en  proie  aux 
convulsions.  Après  trois  heures  30  minutes,  l'animal  se  remet,  se 
place  sur  ses  pattes  de  devant,  mais  ne  peut  encore  se  tenir  debout. 
Vingt  minutes  plus  tard,  l'animal  va  et  vient,  mais  faible.  Il  a  un 
vomissement;  il  est  agité  d'un  tremblement  général. 

Le  lendemain  15,  Tanimal  reste,  couché  et  ne  mange  pas. 


80 
16,  même  état.  Mort  le  17-18.  A  l'autopsie,  on  constate  dans  les 
deux  poumons  des  noyaux  de  pneumonie  commençante.  Les  autres 
viscères  sont  sains. 

On  peut  obtenir  un  résultat  analogue  en  fragmentant  la  dose  mor- 
telle d'aride  phénique.  C'est  ce  que  nous  avons  fait  dans  l'expé- 
rience suivante  : 

ExP.  XIV,  28  mai  1869.  —  Chien  pesant  21  livres. 

Administration  dans  l'estomac  de  1  gramme  d'acide  phénique.  A 
10  heures  15  minutes  on  compte  124  pulsations,  40  respirations; 
température,  380,8.  Les  yeux  sont  examinés  et  trouvés  sains. 

A  10  heures  45  minutes,  idem.  Le  chien  ne  paraît  pas  plus  faible. 

A  onze  heures,  on  donne  de  nouveau  1  gramme  de  la  substance 
(168  pulsations,  20  respirations).  On  observe  les  mêmes  secousses, 
mais  plus  fortes  qu'à  la  suite  de  la  pi-emière  dose.  Faiblesse  peu 
marquée. 

A  midi,  l'animal  est  toujours  sous  l'influence  de  l'acide  phénique, 
et  offre  de  petites  contractions  librillaires  dans  divers  muscles.  On 
administre  un  troisième  gramme. 

A  1  heure  10  minutes  un  quatrième  grannne. 

Après  trente-cinq  minutes,  le  pouls  marque  132,  la  respiration,  32, 
la  température,  38°, G. 

A  2  heures  5  minutes  on  donne  le  cinquième  gramaie.  Api'ès 
10  minutes,  secousses  musculaires  fortes  et  plus  fréquentes.  Après 
trente  minutes,  l'animal  est  ndeux,  et  n'a  presque  plus  de  treiiible- 
ment  quarante-cinq  minutes  après. 

A  3  heures  25,  un  gramme;  après  cinq  minutes,  tremblement  plus 
fort  qu'il  n'a  encore  été. 

A  4  heures  15  minutes  on  administre  le  septième  gramme.  (On 
constate  qu'il  y  a  une  injection  très-forte  de  la  conjonctive  oculo- 
palpébrale  et  de  la  membrane  clignotante,  qui  sont  très-tuméfîôes. 
L'animal  reste  couché,  mais  il  peut  parfaitement  se  tenir  sur  les 
pattes.)  Après  dix  minutes,  l'animal  est  sur  le  flanc,  dans  les  con- 
vulsions. Sa  respiration  est  très-embarrassée. 

A  sept  heures,  toujours  même  état  de  convulsions  cloniques;  l'a- 
nimal peut  se  tenir  sur  les  pattes,  mais  il  se  recouche  aussitôt. 

Mort  dans  la  nuit  du  28  au  29  ;  l'animal  est  froid  et  en  rigidité 
cadavérique. 

A  l'autopsie,  on  constate  des  caillots  récents  dans  la  cavité  du 
cœur. 

Poumons  :  congestion  très-forte  du  lobe  inférieur  droit  ;  plaques 
ecchymotiques  disséminées,  sous-plcuralcs,  œdème  du  tissu  pulmo- 


81 
naire  ;  nscères  abdominaux  sains.  Reins  et  loie  cungestionnés.  Cer- 
veau et  moelle  :  congestion  des  méninges.  Au  niveau  du  bulbe  et 
moelle  cervicale,  œdème  considérable  du  tissu  cellulaire  sous-cu- 
tané qui  environne  l'orbite,  et  de  l'orbite  des  paupières  ;  cornées 
iiaines. 

Oq  voit  qtie,  dans  cette  expérience,  aux  altérations  pulmonaires 
se  sont  jointes  des  altérations  curieuses  du  côté  des  yeux.  Celles-ci 
ont  parfois  acquis  une  beaucoup  plus  grande  intensité. 

Exp.  XV.  —  Chien  du  poids  de  17  livres.  Température,  38", 8. 

Injection  dans  l'estomac  de  3  grammes  d'acide  phénique  dans 
90  grammes  d'eau,  le  27  mai,  4  heures  40  minutes. 

Après  trois  minutes,  tremblement;  après  cinq  minutes,  le  chien 
tombe  sur  le  train  postérieur,  et  ne  peut  bientôt  plus  se  relever. 
Après  dix  minut<^s,  il  est  couché  sur  le  flanc;  ses  muscles  sont 
agités  de  convulsions  cloniques  générales.  Après  trois  heures,  il  est 
dans  le  même  état.  Après  quatre  heures,  les  convulsions  diminuent 
d'intensité,  la  respiration  est  plus  facile;  il  revient  manifestement. 
Un  peu  plus  tard,  il  soulève  la  tète,  se  soutient  sur  le  train  antérieui' 
un  instant,  mais  retombe  aussitôt.  L'animal  est  revu  le  lendemain  : 
il  est  abattu  et  triste.  40  respirations,  144  pulsations  à  la  minute  ; 
température,  39°, 05.  11  y  a  une  injection  très-forte  de  la  conjonctive 
oculo-palpébralc,  et  un  fcdème  des  paupières  des  deux  côtés;  les 
cornées  sont  ternes. 

Le  29  mai,  il  y  a  50  respirations,  180  pulsations  et  39", 2  dans  le 
rectum.  Même  état  des  yeux,  mais  plus  avancé;  cornées  opaques. 
Mort  dans  la  nuit  du  30  mai.  A  l'autopsie,  on  constate  que  la  plèvre 
est  le  siège  d'une  inflammation  avec  pseudo-membrane,  et  que  le 
lobe  postérieur  du  poumon  gauche  correspondant  est  hépatisé. 

Exp.  XVL  —  Chien  d'un  an.  du  poids  de  15  livres. 

Le  30  avril  1869,  onze  heures,  on  injecte  dans  l'estomac  3  gram- 
mes d'acide  phénique  cristallisé,  dans  90  grammes  d'eau. 

Quelques  minutes  après  l'injection,  les  convulsions  cloniques  gé- 
nérales commencent,  et,  après  huit  minutes,  l'animal  est  couché  sur 
le  flanc  sans  pouvoir  plus  se  relever.  Il  est  en  proie  à  des  secousses 
musculaires  incessantes,  occupant  les  divers  muscles  de  la  face,  des 
yeux,  du  tronc,  des  membres  et  du  larynx  (cris  convulsifs).  Pupilles 
moyennement  dilatées.  Après  une  heure,  les  convulsions  cloniques 
sont  toujours  aussi  violentes.  La  température  rectale  e^t  de  3C°,1 
i^SOo  avant  l'expérience) .  On  constate,  d'une  façon  tres-nette,  la  per- 

MÉM.  1870  7 


S2 

sistunce  de  la  scnsibilitù  au  pincement  de  la  patte  ou  de  la  queue, 
chaque  pincement  exagérant  l'état  convulsif,  et  arrachant  souvent 
un  cri  à  l'animal.  Pupilles  très-légèrement  dilatées  après  deux 
heures.  Les  convulsions  cloniques  existent  toujours;  cependant  l'a- 
nimal reprend  de  la  force;  il  peut  se  tenir  sur  les  pattes. 

Après  trois  heures,  il  est  remis.  Il  a  un  vomissement  bientôt 
suivi  de  deux  autres. 

Les  jours  suivants  l'animal  refuse  la  nourriture,  il  reste  presque 
constamment  couché.  Le  4  mai,  il  est  toujours  malade,  triste,  abattu. 
Il  y  a  de  la  fièvre;  la  respiration  est  très-fréquente.  Le  5  mai,  les 
yeux  qui  étaient  déjà  chassieux,  sont  pris  d'ophthalmie  purulente  : 
la  vue  est  perdue,  il  y  a  une  fonte  purulente  des  deux  cornées;  lu 
sensibilité  de  la  cornée  est  néanmoins  conservée  des  deux  côtés.  Il 
y  a  toujours  beaucoup  de  fièvre.  On  compte  80  respirations  à  la 
minute.  On  entend,  à  l'auscultation,  des  râles  fins  des  deux  côtés  de 
la  poitrine. 

Le  6  mai  au  soir,  l'animal  est  presque  mourant. 

On  le  trouve  mort  le  7.  On  fait  l'autopsie  à  8  heures  du  matin. 

Il  n'y  a  pas  de  rigidité  cadavérique.  Les  viscères  sont  encore 
chauds.  Foie,  sain;  pas  de  sucre.  Reins,  sains.  Estomac,  sain;  pas 
d'injection  vasculaire  ni  d'ulcération.  Cœur,  caillots  récents  dans  les 
cavités.  Poumons,  hépatisation  des  deux  poumons,  à  part  un  lobe 
supérieur  du  poumon  droit,  lequel  est  très-congestionné. 

Dans  les  expériences  que  nous  venons  de  citer,  nous  voyons  les 
animaux  mourir  du  troisième  au  quatrième  jour  après  la  phénica- 
tion,  après  avoir  présenté  des  ophthalmies  purulentes;  et  à  l'au- 
topsie nous  trouvons  des  lésions  plus  ou  moins  avancées  de  la  pneu- 
monie. 

Quels  rapports  y  a-t-il  entre  ces  lésions  et  l'intoxication  par  l'a- 
cide phénique  ?  Doit-on  voir  là  une  simple  coïncidence,  ou  bien  au 
contraire  doit-on  regarder  ces  lésions  comme  une  suite  plus  ou 
moins  rare  de  l'empoisonnement  par  l'acide  phénique? 

C'est  la  dernière  hypothèse  que  nous  adoptons.  Ces  lésions  pul- 
monaires se  sont,  en  effet,  présentées  plusieurs  fois  à  notre  obser- 
vation, et  les  animaux  qui  les  ont  offertes  étaient  parfaitement  bien 
portants  avant  le  jour  de  laphénication.  Dans  tous  les  cas,  l'injection 
de  l'acide  phénique  dans  l'estomac  n'a  présenté  aucune  difficulté, 
et  l'on  ne  peut  pas  dire  qu'une  partie  de  la  solution,  ayant  été  in- 
troduite dans  les  voies  aériennes,  aurait  amené  consécutivement 


83 
ces  lésions  puliiiùiiaires.  Nous  admettons  donc,  comme  une  ?uite 
assez  fréquente  de  l'empoisonnement  par  l'acide  phénique,  l'inflam- 
mation du  poumon,  et  comme  une  suite  assez  rare  la  kérato-cou- 
jonctivite  purulente,  sans  pouvoir  expliquer  le  mode  de  génération 
de  cette  dernière  lésion. 

Quant  aux  pneumonies,  la  première  idée  qui  se  présente  est 
qu'elles  sont  dues  à  l'élimination  par  les  poumons  de  l'acide  phé- 
nique. Si  telle  en  était  la  cause,  il  semblerait  qu'on  dût  la  produire 
presque  infailliblement  en  faisant  respirer  à  des  animaux  de  l'air 
chargé  de  vapeurs  d'acide  phénique.  Or,  en  plaçant  des  rats  sous 
des  cloches  que  traversait  un  courant  d'air  qui  avait  barboté  dans 
de  l'acide  phénique  pur  et  liquide,  nous  n'avons  jamais  pu  les  re- 
produire, ni  même  amener  l'intoxication  phénique. 

Malgré  ces  résultats  négatifs,  nous  croyons  que  l'explication  qui 
précède  doit  être  considérée  comme  satisfaisante. 

IV 

L'un  de  nous  (1)  a  montré,'  il  y  a  quelques  années,  que  l'acide  phé- 
nique, lorsqu'il  est  agité  en  très-petite  proportion  avec  une  solution 
de  curare  et  de  chlorhydrate  de  strychnine,  sépare  de  ces  solutions 
la  matière  toxique;  celle-ci  se  met  en  granulations  très-finos  que 
l'on  peut  séparer  par  le  filtre.  Le  même  effet  se  produit  avec  la  di- 
gitaline et  le  chlorhydrate  de  codéine,  mais  non  avec  les  sels  sem- 
blables de  morphine  et  de  narcéine.  On  obtient  encore  le  même 
résultat  lorsque  le  poison  est  mélangé  à  du  sang  ou  même  à  des 
matières  en  putréfaction. 

Citons,  comme  exemple,  l'expérience  suivante  : 

Exp.  XVir.  —  Dans  100  grammes  de  sang  poum,  puis  additionné 
d'eau,  cuit  et  filtré,  on  fait  dissoudre  3  grammes  de  strychnine  à  l'aide 
d'une  goutte  d'acide  nitrique.  Quelques  gouttes  de  ce  mélange  tuent 
rapidement  une  grenouille. 

On  agite  après  avoir  ajouté  trois  gouttes  d'acide  phénique  :  il  se 
produit  aussitôt  une  émulsion  qui  ne  peut,  malgré  de  nombreux  fil- 
trages, devenir  tout  à  fait  transparente. 

Cependant,  après  une  dizaine  de  filtrages,  on  agite  le  liquide  avec 
de  l'éther,  à  trois  i-eprises  pour  dissoudre  l'acide  phénique  ;  puis  on 
décante  et  fait  bouillir  pour  chasser  tout  l'éther. 

(I)  V.  Compte  RENDU  boc.  di.-;  biologie,  pour  l'année  1865,  p.  155. 


84 

Une  grande  quantité  (2  grammes  au  moins)  de  ce  liquide  nocca- 
sionnc  aucun  accident  à  une  forte  grenouille.  On  lave  le  premier 
filtre  dans  l'eau  bouillante  ;  on  agite  à  deux  fois  avec  de  l'éther  et  on 
décante. 

Quatre  heui'es  après  la  tentative  inutile  d'empoisonnement,  on  in- 
jecte sous  la  peau  de  la  grenouille  quelques  gouttes  du  liquide  dé- 
cante :  convulsions  après  trois  minutes,  mort  en  sept  ou  huit. 

Tout  le  poison  était  donc  resté  sur  le  filtre. 

Il  y  a  évidemment  là  pour  la  médecine  légale,  et  peut-être  même 
pour  l'industrie,  un  procédé  de  recherches  de  certains  poisons  qui 
mériterait  d'être  étudié  par  les  hommes  compétents.  Mais  ces  faits 
intéressent  d'une  autre  manière  les  physiologistes. 

En  effet,  la  solution  toxique  ainsi  additionnée  d'un  peu  d'acide 
phonique  peut  être  à  peu  près  impunément  injectée  sous  la  peau 
■k'S  animaux  ;  cette  absence  d'action  est  due  à  la  présence  de  l'acide, 
qui  ralentit  l'absorption  en  coagulant  les  matières  albuminoï  les 
environnantes.  Si,  en  effet,  on  l'enlève  en  employant  Féther,  la  li- 
i[ueur  reprend  toute  sa  puissance  toxique. 

On  pouvait  se  demander  si,  en  faisant  arriver  simultanément  dans 
le  sang,  mais  par  des  voies  différentes,  le  poison  et  l'acide  phénique, 
celui-ci,  agissant  sur  celui-là,  en  empOcherait  l'action.  Nous  avons 
fait  sur  ce  sujet  un  assez  grand  nombre  d'expériences  qui  nous  ont 
montré  que  les  choses  ne  se  passent  pas  ainsi;  l'empoisonnement, 
a  la  suite  d  injections  sous-cutanées,  a  lieu  aux  doses  liabiluelles, 
malgré  remploi  de  l'acide  phénique  en  solution  dans  l'estomac.  Il 
est  probable  que  la  dose  qui  devrait  pénétrer  dans  le  sang  pour 
annihiler  l'effet  du  poison  (en  admettant  que  ceci  puisse  avoir  lieu), 
serait  plus  que  suflisante  pour  tuer  elle-même  l'animal. 

Nous  croyons  enfin  devoir  rapporter  ici  le  récit  d'expériences  que 
lit  autrefois  l'un  de  nous,  dans  le  laboratoire  de  M.  Cl.  Bernard,  à 
L'époque  oîi  M.  Davaiiie  découvrit  dans  le  sang  de  rate  la  présence  des 
nactéiidies.  L'idée  d'employer  contre  cette  maladie  l'acide  phé- 
nique, ce  poison  si  redouté  des  organismes  inférieurs,  devait  venir 
naiurelleaieui  à  l'esprit.  L'expérience  fut  faite  de  la  manière  sui- 
vante (1)  : 


(l)  Voy.  Compte  be^du  Soc.  de  Biologie  pour  1869,  p.  61 


85^ 
Exp.  XVIII.  —  Du  sang  de  rate  sec,  lourni  par  M.  Davaiue,  fut 
inoculé  à  un  cochon  d'Inde.  Quarante-huit  heures  après ,  l'animal 
étant  mourant,  on  inocula  à  douze  lapins,  sous  la  peau  du  dos,  quel- 
ques gouttes  de  son  sang,  qui  fourmillait  de  bactéridies.  Six  de  ces 
lapins  avaient  absorbé,  quelque  temps  avant  l'inoculation,  30  ou  40 
centigrammes  d'acide  phéniquc  en  dissolution  ;  trois  autres  furent 
soumis  à  cette  médication  aussitôt  après  l'inoculation.  Enfin,  les 
trois  lapins  restant  no  piùrent  pas  d'acide  phonique.  Or,  les  douze 
animaux  moururent  à  peu  près  eu  même  temps. 

Nous  ne  prétendons  pas  révoquer  eu  doute  les  résultats  que  disent 
avoir  obtenu  de  l'emploi  de  l'acide  phénique  dans  le  traitement  des 
maladies  charbonneuses,  des  vétérinaires  distingués.  Nous  avons 
voulu  seulement  faire  sentir,  par  le  récit  d'une  expérience  que  nous 
déclarons  Bous-mêmes  être  incomplète  et  insuffisante,  combien  il 
serait  utile  de  ne  pas  se  contenter  d'observations  qui  prêtent  toujours 
à  la  controverse,  mais  d'instituer  dans  le  laboratoire  des  expériences 
comparatives,  qui  seules  pourraient  décider  la  question.  Le  temps 
nous  a  manqué  jusqu'ici  pour  réaliser  le  programme  bien  simple 
que  voici  :  ' 

Prendre  un  certain  nombre  (douze  par  exemple)  de  lapins  aussi 
semblables  que  possible  : 

1°  En  mettre  trois  pendant  quelques  jours  dans  l'état  d'intoxication 
chronique  par  de  faibles  doses  d'acide  phénique  (30  ou  40  centigi-am- 
mes)  administrées  par  l'estomac. 

2"  Donner,  une  heure  avant  l'inoculation,  à  trois  autres  lapins,  une 
dose  énergique  (75  centigrammes)  d'acide  phénique. 

Inoculer  alors  aux  douze  lapins  du  sang  charbonneux  pris  sur  un 
animal  mourant  de  la  maladie  (et  non  du  sang  desséché,  dont  l'action 
est  très-peu  sûre). 

3°  Six  heures  après,  donner  aux  animaux  2°  une  forte  dose  (  50 
centigrammes)  d'acide,  et  ainsi  de  suite  de  six  en  six  heures, 

4°  Toutes  les  deux  heures ,  donner  aux  animaux  1°  et  à  trois  de 
ceux  qui  n'ont  encore  rien  pris,  de  petites  doses,  10  à  20  centigram- 
mes d'acide.  , 

5»  Laisser  intacts  les  trois  derniers  lapins ,  et  voir  ce  qu'il  ad- 
viendra. 

RÉSUMÉ   ET  CONCLUSIONS. 

La  conséquence  la  plus  importante  en  pratique  qui  se  puisse  tirer 
des  expériences  précédentes,  c'est  la  grande  puissance  toxique  de 


86 

l'acide  phonique.  3  ou  4  grammes  suffisent,  en  effet,  pour  tuer  ra- 
pidement un  chien  de  grande  taille. 

Il  ne  faudrait  pas  en  tirer  la  conséquence  que  l'homme  ne  périrait 
qu'avec  une  dose  proportionnée  à  son  poids,  c'est-à-dire  cinq  ou  six 
fois  plus  forte.  L'un  de  nous  a  pu  autrefois  injecter  d'un  coup,  sans 
parvenir  à  le  tuer,  2  grammes  de  chlorhydrate  de  morphine  dans  la 
veine  jugulaire  d'un  chien,  et  le  quart  de  cette  dose  suffit  pour  tuer 
un  homme. 

L'acide  phénique  est  donc  un  poison  des  plus  redoutables,  et  qu'on 
laisse  fort  inconsidérément  entre  les  mains  de  tous,  à  l'état  pur  où 
à  l'état  de  solution.  C'est  cette  dernière  forme  qui  nous  parait  la 
plus  dangereuse,  parce  qu'on  délivre  également  des  solutions  faibles 
pour  usage  interne,  desquelles  il  n'y  a  rien  à  craindre,  et  des  solu- 
tions pour  usage  externe,  assez  fortes  pour  qu'une  méprise  entraîne 
de  funestes  conséquences.  Ou  peut  prédire  que  la  première  grande 
épidémie  qui  nous  frappera  sera  signalée  par  des  erreurs  de  ce 
genre.  Mais  il  doit  nous  suffire  d'avoir  indiqué  ce  danger. 

Que  si  maintenant  nous  cherchons  à  nous  rendre  compte,  avec  la 
précision  qu'exige  la  physiologie  moderne,  du  mode  d'action  de 
l'acide  phénique  sur  les  animaux  vertébrés,  nous  trouvons  qu'il 
agit  comme  la  strychnine,  sur  l'excitabilité  de  la  moelle  épinière. 

Comme  la  strychnine,  l'acide  phénique  augmente,  au  début  de 
l'empoisonnement,  la  sensibilité  de  l'animal,  pour  la  diminuer,  l'a- 
bolir même,  lorsque  la  période  convulsive  a  épuisé  la  moelle  épi- 
nière. 

Comme  elle,  il  amène  des  convulsions  dans  tout  le  corps,  alors 
même  que  la  moelle  épinière  a  été  séparée  en  deux  dans  la  région 

dorsale. 

Ces  convulsions,  comme  celles  de  la  strychnine,  apparaissent  spon- 
tanément, s'exagèrent  à  chaque  mouvement  respiratoire  et  peuvent 
être  suscitées  par  les  excitations  extérieures. 

Comme  celles  de  la  strychnine  encore,  elles  sont  arrêtées  par  le 
chloroforme,  le  chloral,  Téther,  par  le  curare,  par  la  section  d'un 
nerf  muteur  dans  la  région  animée  par  ce  nerf. 

Comme  elles,  elles  laissent  intactes  la  contractilité  musculaire  ei 
l'excitabilité  nerveuse,  surtout  dans  les  parties  où  la  section  du  nerf 
moteur  a  empêché  l'épuisement. 


87 

Gomme  elles,  elles  apparaissent  dans  le  membre  lié  d'une  gre- 
nouille, où  le  poison  n'a  pu  pénétrer,  parce  que  le  nerf  moteur  est 
resté  en  rapport  avec  la  moelle  épinière. 

Gomme  la  strychnine,  l'acide  phénique  à  très-hautes  doses  tue 
instantanément,  presque  sans  convulsions;  ou  trouve  dans  ces  cas 
les  ventricules  du  cœur  arrêtés  en  diastole. 

Dans  l'empoisonnement  ordinaire,  la  mort  a  lieu,  par  l'acide  phé- 
nique comme  par  la  strychnine,  par  épuisement  de  la  puissance 
excito-motrice  de  la  moelle  épinière.  La  force  des  convulsions  va  en 
diminuant,  les  mouvements  respiratoires,  les  battements  du  cœur 
se  ralentissent,  la  pression  cardiaque  s'abaisse  jusqu'à  zéro,  et  la 
scène  se  termine  par  un  dernier  soupir  (1). 

Mais  les  convulsions  de  l'acide  phénique  diffèrent  considérable- 
ment d'apparence  d'avec  celles  de  la  strychnine.  Gelles-ci  sont,  en 
effet,  comme  chacun  sait,  toniques,  régulières,  c'est-à-dire  surve- 
nant d'ensemble  dans  le  corps  tout  entier;  celles  de  l'acide  phénique 
sont  au  contraire  essentiellement  cloniques  et  irrégulières  :  ce  sont 
des  trépidations  qui  affectent  successivement  même  les  différentes 
parties  d'un  muscle. 

La  différence  la  plus  remarquable  entre  la  strychnine  et  l'acide 
phénique  est  présentée  par  les  accidents  qui  suivent  l'administra- 
tion de  celui-ci  et  peuvent  entraîner  la  mort.  Nous  voulons  parler 
des  inflammations  pulmonaires  et  de  ces  singulières  altérations  de 
l'œil  qui  les  accompagnent  souvent. 

Les  accidents  pulmonaires  sont-ils  dus  à  l'irritation  causée  par 
l'élimination  de  l'acide  phénique,  élimination  qui  se  fait  certaine- 
ment par  cette  voie,  et  y  a-t-il  là  quelque  chose  de  comparable  aux 
néphrites  consécutives  à  tant  d'empoisonnements?  Ou  bien  sont- 
ils  le  résultat  d'une  action  sur  lès  extrémités  soit  périphériques, 
soit  centrales,  des  nerfs  pneumogastriques  ?  La  première  hypothèse 
nous  paraît  beaucoup  plus  vraisemblabe,  mais  nous  avons  indiqué 
I)lus  haut  les  raisons  qui  nous  forcent  à  suspendre  encore  notre 
jugement. 

Nous  signalons  aux  expérimentateurs  et  aux  pathologistes  cette 


(1)  Voir  pour  la  question  du  dernier  soupir  :  Leçons  sur  la  physio- 
logie de  la  respiration;  par  P.  Bert,  p.  431. 


88 
relation  singulière  entre  les  altérations  du  pouiuoa  et  celles  des 
yeux.  Il  y  a  là  une  sympathie  jusqu'ici  inexplicable  et  dont  ou  doit 
pouvoir  trouver  la  trace  dans  d'autres  circonstances. 

Disons  enfin  que  l'usage  de  l'acide  phéiiique  à  dose  a??pz  forte 
pour  donner  des  convulsions  a  pu  être  prolongé  pendant  trois  mois 
(Exp.  X),  sans  troubles  graves,  et  qu'une  certaine  accoutumance  à 
ce  poi?on  a  pu  être  remarquée  :  accoutumance  bien  légèie,  puis- 
qu'elle ne  dépasse  pas  le  double  de  la  dose  mortelle,  et  qu'elle  dis- 
paraît par  une  interruption  d'un  seul  jour. 


OBSERVATION 

POUR  SERVIR  A  L'HISTOIKE 

de  la 

CLAUDICATION  INTERMITTENTE 

CHEZ   L'HOMME 

Par    le    docteur    Auguste   OLLIVIEK 

(Communiffiiée  à  la  Soc.  de  Biologie  le  30  juillet) 


1 

Les  médecins  vétérinaires  ont  signalé  depuis  longtemps  chez  le 
cheval  l'existence  d'une  maladie  qu'ils  désignent  sous  le  nom  de 
boiterie  ou  de  claudication  inlermitlente.  Cette  affection  est  produite 
par  une  oblitération  artérielle  qui  reconnaît  pour  cause  soit  une 
oblitération  directe  de  la  lumière  du  vaisseau,  soit  une  compression 
extérieure. 

Les  premiers  faits  de  cette  nature  ont  été  rapportés  par  Bouley 
jeune  (1)  en  1831  et  par  Goubaux  (2)  en  1846.  Douze  ans  plus  tard, 
M.  Charcot  (3),  dans  une  communication  faite  à  la  Société  de  Biolo- 
gie, donna,  pour  la  première  fois,  une  description  étendue  des  si- 


(1)  Bouley  jeune.  Académie  de  médecine,  séance  du  18  octobre 
1831,  et  Archivks  de  médecine,  1831.  1'"  série,  t.  XXVII,  p.  425. 

(2)  Goubaux.  Mémoires  sur  les  paralysies  rfu  cheval  causées  par 
Voblitération  de  r aorte  postérieure  et  de  ses  division<i  terminales;  in  Re- 
cueil   DE  MÉDECINE    VÉTÉRINAIRE  PRATIQUE,    1846,  2^  série,    t.  III, 

p.  578. 

(3)  Charcot.  Sur  la  claudicatioii  intermittente  observée  dans  un  cas 
(V oUilération  complète  de  V une  des  artères  iliaques  primitives;  in  Comp- 
tes RENDUS   et  mémoires    DK    LA    SoClÉTK    DE  BIOLOGIE.     18.58,  2"* 

série,  t.  XII.  p.  225. 


90 
gnes  cliniques  et  des  lésions  anatomiques  de  la  claudication  inter- 
mittente chez  l'homme,  à  propos  d'un  cas  qu'il  avait  eu  l'occasion 
d'observer  à  l'iiôpital  de  la  Charité. 

Les  auteurs  qui  depuis  se  sont  occupés  des  oblitérations  des  ar- 
tères ne  signalent  chez  l'homine  rien  de  semblable  à  la  claudication 
intermittente.  H.  Lebert  (1),  qui  a  écrit  pour  le  Traité  de  pathologie 
de  Virchow  le  long  chapitre  des  maladies  des  vaisseaux,  passe  com- 
plètement ces  faits  sous  silence  et  ne  mentionne  même  pas  le  cas  de 
M.  Charcot. 

L'histoire  du  malade  que  nous  soumettons  à  l'appréciation  des 
membres  de  la  Société  nous  paraît  être  une  nouvelle  observation  de 
claudication  intermittente  ,  observation  dans  laquelle  on  trouve 
quelques  particularités  intéressantes  qui  ne  sont  pas  signalées  dans 
le  travail  de  M.  Charcot. 

Obs.  —  Le  nommé  Pierre  Tondeur,  âgé  de  42  ans,  imprimeur  en 
taille-douce,  est  admis,  le  26  février  1870,  dans  mon  service,  à  l'hô- 
pital de  la  Charité- Annexe  (ancien  hospice  des  Incurables),  salld 
Sainte- Anne,  n»  15. 

Son  père  est  mort  d'un  catarrhe  pulmonaire  à  l'âge  de  67  ans  ;  sa 
mère  vit  encore  et  se  porte  bien.  Il  a  perdu  deux  sœurs  qui  sem- 
blent avoir  été  emportées,  jeunes  encore,  par  la  phthisie  pulmonaire. 
Enfin,  il  lui  reste  un  frère  et  une  sœur  qui  sont  en  bonne  santé. 

Depuis  trente  ans,  cette  homme  fait  le  métier  d'imprimeur  en 
taille-douce.  Son  travail  est  fort  pé  lible,  mais  il  n'a  jamais  souflert 
de  privations  et  a  toujours  habité  un  logement  salubre.  Point  d'ex- 
cès alcooliques,  excès  vénériens  seulement  depuis  quelques  années. 

Il  est  très-nerveux,  très-impressionui oie,  mais  il  n'a  jamais  eu 
d'attaques  de  nerfs.  Comme  maladies  antii'ieures,  nous  ne  trouvons 
que  plusieurs  blennorrhagies  qui  ont  gué l'i.  rapidement,  un  zona  du 
côté  gauche  et  enfin  un  chancre  induré,  contracté  en  1866.  Ce  chan- 
cre s'accompagna  d'adénopathie  bi -inguinale  indolente.  Le  diagnos- 
tic fut  porté  par  Follin,  qui  prescrivit  des  pilules  de  protoiodurc  de 
mercure.  Mais  ces  pilules  ne  furent  point  prises.  Quatre  ou  cinq 
mois  après,  apparition  de  troubles  de  la  vision.  Sur  ces  entrefaites, 
le  malade  fit  une  chute  sur  le   dos  et  dut  entrer  dans  un  service  de 


(1)  Lebert.  Kranktieilen  der  Blu'-und  Ly  nphge fasse  ;    in  ViRCHOW's 
Haudbuch  der  spec.  Pathol.  UNO  Thérap.,  1867. 


l'hôpital  Beaujon  où  on  lui  dit  qu'il  avait  en  même  temps  un  iritis 
sjq^bilitique  de  l'œil  droit.  Après  un  séjour  de  courte  durée,  il  quitta 
l'hôpital  sans  avoir  suivi  de  traitement  spécifique.  Pendant  les  deux 
années  suivantes,  néanmoins,  il  n'eut  aucun  accident  :  ni  chute  do 
cheveux,  ni  maux  de  gorge,  ni  éruption  à  la  peau. 

Le  16  mai  1868,  il  ressentit  subitement,  pendant  son  dîner,  un 
froid  considérable  dans  le  pied  droit,  principalement  au  gros  orteil. 
Deux  heures  après,  il  éprouva  dans  les  mêmes  parties  de  très- 
vives  douleurs  qui  persistèrent  aussi  intenses  durant  la  nuit  entière. 
Puis  il  sentit  un  engourdissement  de  tout  le  membre  inférieur,  mais 
sans  aucun  changement  de  coloration  ni  de  volume.  Le  gros  orteil 
seul  devint  très-pâle  et  comme  tuméfié.  La  marche  était  difficile  à 
cause  de  la  douleur,  et  ce  ne  fut  qu'avec  beaucoup  de  peine  qu'il 
put  se  traîner  jusqu'à  l'Hôtel-Dieu,  où  il  fut  admis  dans  une  salle  de 
chirurgie.  Là  on  le  traita  pour  un  ongle  incarné  qu'il  avait  au  pied 
gauche  et  on  fit  peu  attention  au  gros  orteil  droit.  La  douleur  dis- 
parut le  lendemain  et  le  gonflement  douze  jours  après.  Sorti  de  l'hô- 
pital après  guérison,  il  reprit  son  métier  ;  mais  il  dut  bientôt  l'aban- 
donner, obligé  qu'il  était  de  travailler  debout.  La  douleur  revint,  et 
comme  il  se  croyait  atteint  de  rhumatisme  chronique,  il  alla  deman- 
der des  bains  à  l'hôpital  Saint-Louis.  On  le  fit  entrer  dans  un  des 
services,  et  pendant  un  mois  il  fut  soumis  à  un  traitement  qui  con- 
sista en  douches  froides  et  bains  de  vapeur.  Après  un  court  séjour 
à  Vincennes,  il  retourna  à  son  imprimerie.  A  ce  moment,  il  lui  était 
impossible  de  marcher  plus  de  deux  ou  trois  minutes  sans  s'arrêter 
par  suite  des  douleurs  qu'il  ressentait  dans  le  mollet  et  les  malléoles. 
Mais  tant  qu'il  restait  debout,  il  ne  souflrait  pas.  La  température 
exerçait  sur  lui  une  grande  influence.  C'est  ainsi  que,  dui-ant  les 
temps  froids,  la  jambe  devenait  douloureuse  et  glacée,  tandis  que  les 
douleurs  étaient  presque  nulles  ou  du  moins  supportables  par  les 
temps  chauds. 

Le  malade  travailla  pendant  un  an,  puis  les  mômes  accidents  se 
reproduisirent.  Il  entra  alors  à  l'Hô tel-Dieu  dans  le  service  de 
M.  Gueneau  de  Mussy.  On  le  traita  par  l'iodure  de  potassium,  des 
bains  sulfureux  et  des  douches  froides  a])pliquées  sur  les  jambes  et 
les  pieds.  Il  ne  put  supporter  l'électrisation.  C'est  à  cette  époque 
seulement  qu'on  s'aperçut  que  sa  jambe  droite  était  atrophiée.  En 
outre,  lorsqu'on  le  faisait  marcher,  il  commmençait  à  boiter  au  bout 
de  quelques  minutes.  Le  30  octobre  dernier,  il  quitta  l'Hù tel-Dieu 
sans  avoir  obtenu  aucune  amélioration.  Il  reprit  son  métier  malgré 
les  douleurs  qu'il  ne  cessait  d'éprouver,  jusqu'au  moment  où  celles- 


i:i,  devenant  tiop   intenses,  il  dut  se  l'aire  admettre   île  iiouvt'Mii   à 
l'hôpital. 

Yoici  dans  quel  état  nous  le  trouvons  le  27  février  : 

Il  n'existe  aucune  différence  de  coloration  entre  les  deux  mem- 
bres inférieurs,  mais,  par  la  simijle  application  de  la  main,  on  con- 
state que  les  téguments  sont  moins  chauds  à  droite  qu'à  gauche.  En 
outre,  le  membre  inférieur  droit  est  sensiblement  atrophié  :  il  me- 
sure deux  centimètres  de  moins  que  le  membre  gauche  ;"i  la  partie 
moyenne  de  la  cuisse  et  de  la  jamb(î. 

Les  mouvements  qu'on  fait  exécuter  au  malade  sont  très-précis. 
Lorsqu'on  lui  dit  de  maintenir  ses  membres  dans  l'extension  ou  la 
(lexion,  il  nous  est  presque  impossible  de  les  fléchir  on  de  les  éten- 
dre, surtout  le  membre  gauche. 

La  jambe  et  le  gros  orteil  gauches  sont  le  siège  d'élancements  qui 
deviennent  encore  plus  accusés  lorscpi'on  découvre  ces  parties. 

Les  différentes  modalités  de  la  sensibilité  (tact,  douleur,  tempéra- 
ture, chatouillement)  paraissent,  au  premier  abord,  parfaitement  in- 
tactes; mais,  à  un  examen  plus  attentif,  on  reconnaît  qu'elles  sont 
un  peu  affaiblies  à  droite. 

La  contractilité  électrique  est  à  peu  près  la  môme  des  deux  côtés. 
Quant  à  la  sensibilité  électrique,  elle  est  diminuée  du  côté  droit. 

Le  malade  boite  en  marchant;  il  tient  la  jambe  écartée  du  tronc, 
mais  ne  fauche  point.  Il  peut  marcher  ainsi  pendant  sept  à  huit  mi- 
nutes feans  souffrir,  puis  il  s'arrête  tout  à  coup  :  il  est  pris  d'une  vio- 
lente douleur  dans  le  mollet  droit  et  de  crampes  dans  le  pied  qui  so 
cambre.  Si  on  vient  alors  à  explorer  la  température,  on  constate  une 
notable  différence  en  faveur  du  côté  gauche. 

On  ne  perçoit  plus  de  battements  sur  aucune  des  artères  du  mem- 
bre inférieur  droit. 

Jamais  on  n'a  pu  constater  l'existence  des  battements  de  l'artère 
fémorale,  bien  qu'ils  aient  été  fréquemment  recherchés  avec  grand 
soin. 

Le  cœur  n'est  point  augmenté  de  volume  et  ses  bruits  sont  nor- 
maux. 

Les  artères  radiales  ne  sont  point  athéromateuses. 

Aucun  trouble  de  l'appareil  respiratoire  ;  l'appétit  est  conservé  et 
les  garde-robes  sont  régulières. 

Le  système  nerveux  et  les  sens  spéciaux  ne  présentent  rien  à  no- 
ler,  si  ce  n'est  un  rétrécissement  notable  de  la  pupille  di-oite. 

Traitement  :  lodui-e  de  potassium,  bains  sulfureux. 


93 

Le  15  mars,  le  malade  est  pris,  en  déjeunant,  d'un  étourdissenienl 
après  lequel  il  rend  tout  ce  qu'il  venait  de  manger.  Il  est  à  noter  que. 
depuis  plusieurs  jours,  il  se  plaignait  de  maux  de  tête  très-intenses, 
surtout  la  nuit. 

On  élève  la  dose  quotidienne  d'iodurc  de  potassium  ù  2,  3  et  même 
4  grammes. 

Sous  l'influence  de  ce  traitement,  la  céphalalgie  diminua  peu  à 
peu,  sans  disparaître  complètement.  A  plusieurs  reprises,  elle  repa- 
rut accompagnée  de  vertiges.  Quant  à.  l'état  du  membre  inférieur 
droit,  il  n'a  pas  changé  jusqu'à  ce  jour. 

Eq  résumé,  nous  voyons  survenir  subitement,  sans  cause  pro- 
chaine appréciable,  une  série  de  symptômes  qu'il  est  difficile  de  rap- 
porter à  autre  chose  qu'à  une  diminution  permanente  de  la  vascula- 
risation  du  membre  inférieur  droit.  L'abaissement  de  la  température 
qu'on  y  constate  montre  bien  qu'il  ne  reçoit  plus  la  quantité  de  sang 
néces.'^aire  à  sa  nutrition.  L'atrophie  considérable  subie  par  ce  mem- 
bre est  la  conséquence  immédiate  du  défaut  de  nulritiou  dans  toutes 
ses  parties. 

Nous  avons  ailleurs  (1)  mis  en  doute  l'existence  de  ratrophie  mus- 
culaire dans  le  cours  de  la  clauicdation  intermittente  par  oblitéra- 
tion artérielle.  En  eiïet,  nous  ne  l'avions  rencontrée  dans  aucun  des 
faits  publiés  antérieurement.  Dans  le  cas  actuel,  l'atrophie  est  bien 
manifeste,  puisque  des  mensurations  exactes  nous  ont  montré  que, 
à  la  jambe  et  à  la  cuisse,  on  constatait  une  différence  de  2  centimètres 
on  faveur  du  membre  inférieur  gauche. 

Les  phénomènes  dus  à  l'arrêt  de  la  nutrition  deviennent  encore 
plus  marqués  lorsque  le  membre  est  eu  activité  durant  la  marche. 
On  voit  alors  survenir,  comme  signes  de  l'ischémie  du  membre,  des 
douleurs  violentes  dans  le  mollet,  des  crampes  dans  le  pied;  la  diffé- 
rence de  la  température  en  faveur  du  côté  gauche  e.4  plus  marquée, 
et  non-seulement  la  claudication  rend  la  marche  plus  dillicile,  mais 
le  malade  se  voit  bientôt  forcé  de  s'arrêter  et  de  s'asseoir.  Même  à 
ce  moment,  les  battements  des  artères  ne  peuvent  plus  être  perçus 
au  doigt  sur  aucun  point  du  membre. 

Tous  ces  symptômes  nous  indiquent  bien  qu'il  y  a  dans  la  masse 
totale  du  sang  du  membre  inférieur  droit  une  diminution  considé- 

(l) Des  atrophies  musculaires.  Thèse  d'agrégation,  Paris,  1869, p,  101, 


94 
rable,  due  au  défaut  de  pcrm('abilité  de  certains  points  de  son  arbre 
artériel.  La  localisation  du  siège  primitif  de  l'oblitération  nous  pré- 
sente, dans  ce  cas,  de  grandes  difficultés  et  nous  ne  pourrions  faire  à 
ce  sujet  qu'une  liypotbèse  toute  gratuite.  Cependant,  hâtons-nous 
d'ajouter  que  depuis  l'entrée  du  malade,  on  a  fréquemment  exploré 
l'artère  fémorale  et  que  toujours  il  a  été  impossible  de  constater 
l'existence  de  battements  au  niveau  de  ce  vaisseau. 

II 

Depuis  longtemps,  on  a  cherché  à  donner  une  explication  satis- 
faisante des  singuliers  phénomènes  que  peut  provoquer  l'oblitéra- 
tion artérielle.  Dans  un  article  sur  Vartérite,  M.  H.  Bouley  (1)  a  voulu 
les  expliquer  par  l'insuffisance  de  la  quantité  de  sang  qui  afflue  vers 
les  muscles  quand  ceux-ci  sont  en  activité,  ce  qui  les  rend  impro- 
pres à  remplir  leurs  fonctions. 

«  Mais  les  muscles,  dit  M.  Bouley,  ne  demandent  pas  pour  fonc- 
tionner une  même  quantité  de  sang  à  tous  les  temps  de  leur  action. 
L'artère  imparfaitement  oblitérée,  ou  les  voies  anastomotiques  adja- 
centes peuvent  leur  en  envoyer  une  quantité  qui  suffise  pour  l'en- 
tretien de  leur  activité,  alors  que  le  corps  est  seulement  en  équi- 
libre sur  ses  colonnes  de  soutien,  ou  mis  à  une  allure  lente,  et  qui 
deviendra  complètement  insuffisante  lorsque  les  muscles  seront 
sollicités  à  des  contractions  plus  intenses  et  plus  répétées,  comme 
celles  que  nécessitent  des  allures  plus  rapides.  Dans  ces  cas,  l'iner- 
tie musculaire  se  manifeste  d'une  manière  intermittente  :  au  repos 
et  pendant  les  allures  lentes  et  peu  prolongées,  les  membres  dont 
les  artères  sont  malades  remplissent  encore  assez  bien  leurs  fonc- 
tions, comme  colonnes  de  soutien  ou  comme  agents  d'impulsion; 
mais  la  marche  vient-elle  à  être  activée,  peu  de  temps  se  passe 
avant  que  se  manifestent  des  désordres  dans  la  locomotion,  carac- 
térisés d'abord  par  raffaiblissemeat  crois^ant  de  l'action  musculaire 
dans  les  membres  dont  l'artère  est  malade,  et  puis,  en  dernier  lieu, 
par  l'inertie  complète  de  ces  membres  ;  d'où  résulte  presque  fatale- 

(1)  H.  Bouley.  Article  Ariérite;  in  Nouveau  dictionnaire  de  mé- 
decine, DE  CHIRURGIE  ET  d'hygiènk  VÉTÉRINAIRES.  Paris,  1856, 
t.  n,  p.  60. 


95 
ment  la  chute  du  coips  sur  le  sol,  qui  y  reste  étendu  jusqu'à  ce  que 
la  circulation  générale  se  soit  ralentie  et  que  les  muscles  frappés 
d'inertie  momentanée,  aient  récupéré  par  le  repos  leur  excita- 
bilité. )) 

M.  Gharcot(l),  s'appuyant  sur  des  données  semblables,  les  a  appli- 
quées au  malade  qui  fait  le  sujet  de  son  intéressant  travail.  Pour 
cet  auteur,  en  effet,  tous  les  phénomènes  qu'on  observe  sont  sous 
la  dépendance  de  l'ischémie  qui  survient  dans  les  divers  tissus,  et 
en  particulier  dans  les  muscles  du  membre  malade.  Lorsque  les 
muscles  fonctionnent,  les  actes  chimiques  de  leur  nutrition  s'exé- 
cutent avec  bien  plus  d'énergie  que  pendant  le  repos.  Or,  dans 
ces  cas,  la  quantité  du  sang  qui  apporte  les  matériaux  nutritifs 
ne  suffit  plus  et  les  muscles  subissent  des  modifications  qui  leur 
font  perdre,  au  bout  d'un  certain  temps,  leur  irritabilité. 

Nous  admettons  entièrement  cette  théorie  qui  donne  une  exphca- 
tion  claire  et  nette  des  phénomènes  qu'on  observe  dans  la  claudica- 
tion intermittente. 

111 

A  quelle  cause  faut-il  attribuer  l'oblitération  des  artères,  dans  le 
cas  que  nous  venons  de  rapporter? 

Tout  d'abord,  excluons  la  possibilité  d'un  anévrysme  comme  dans 
l'observation  de  M.  Charcot,  ou  d'une  tumeur  développée  sur  le  tra- 
jet d'une  artère.  Rien  ne  saurait  justifier  une  semblable  supposition. 

Pouvons-nous  songer  à  une  embolie?  Le  début  subit  des  acci- 
dents appelle  une  hypothèse  de  ce  genre.  Mais  c'est  en  vaia  que 
nous  avons  cherché  l'existence  d'une  source  embolique  sur  un  point 
lie  l'arbre  artériel;  en  outre,  le  cœur  est  sain,  ses  battements  et  ses 
bruits  sont  parfaitement  normaux. 

Une  altération  athéromateuse  des  artères  ne  saurait  non  plus  être 
mise  en  cause.  Il  s'agit,  en  effet,  d'un  homme  vigoureux,  à  peine 
âgé  de  42  ans,  nullement  alcoolique,  et  chez  lequel  on  ne  trouve 
aucune  trace  de  dégénérescence  artérielle. 

Serait-ce  une  trombose?  Cette  hypothèse  supposerait  une  altéra- 
tion primitive  des  parois  artérielles  ou  une  modification  profonde 

(1)  Charcot,  loc,  cil. 


96 
dans  la  cumpusitiou  du  liquide  sanguiu.  Mais  uotre  malade  parais- 
sait être  en  bonne  santé  au  moment  où  l'accident  est  survenu. 

Cependant  il  est  un  point  dans  l'histoire  de  cet  homme  qui  n'est 
peut-être  pas  sans  quelque  importance  :  c'est  l'existence  d'une 
maladie  syphilitique  remonlaiit  à  plus  de  quatre  ans.  Y  aurait  il 
là  un  rapport  de  cause  à  eiïet?  Cela  est  possible,  mais  nous  n'osons 
l'aflirmer.  Pour  être  en  droit  d'établir  une  corrélation  entre  ces  deux 
ordres  de  faits, —  infection  syphilitique  et  oblitération  artérielle,— 
de  nouvelles  observations  nous  semblent  encore  nécessaires. 


NOTE 

SUR  UNE  COLORATION  PARTICULIÈRE 

DE  LA  PEAU 

CHEZ   LES   POLISSEUSES  SUR  ARGENT 

POUVANT  CCNSTITUEU  UN  SIGNE  d'IDENTITÉ 
'immuniquce  à  la  Société  do  Biologie,  le  39  octobre  ^870, 

PAR 

M.  le  D'  Âagnste  OLLITIEH. 

(Voy.  plancho  IV.) 


I 

L'étude  des  modifications  produites  sur  le  corps  humain  par 
Texercice  des  différentes  professions  manuelles,  a  enrichi  la  méde- 
cine légale  de  données  très-importantes.  En  etîet,  le  maniement 
longtemps  répété  d'un  même  instrument  ou  d'une  même  prépara- 
tion chimique  détermine  sur  certaines  parties  des  lésions  qui  peu- 
vent servir,  dans  un  moment  donné,  à  reconnaître  la  profession 
à  laquelle  se  livrait  un  individu,  et  fournir  ainsi  un  renseigne- 
ment précieux  sur  son  idendité.  C'est  M.  Devergie  (1)  et  surtout  le 

(1)  Devergie,  Traité  de  médecme  légale^  1840,  2«  édit.  T.  II,  p.  535. 
MÉM.  187U  8 


98 
professeur  TarJieu  (1)  qui  nous  ont,  les  premiers,  appris  à  connaître 
ces  faits  et  à  en  tirer  les  conséquences  qu'ils  comportent.  Plus  tard, 
M.  Vernois  (2),  résumant  ce  qui  avait  été  publié  avant  lui  et  appor- 
tant de  nouvelles  recherches,  a  contribué  puissamment  à  élucider 
les  questions  d'idenditô  relatives  aux  professions.  Les  observations 
de  ce  médecin  ont  porté  sur  plus  de  cent  cinquante  industries.  Ce- 
pendant tout  n'a  pas  été  dit  sur  ce  sujet  intéressant,  et  il  reste 
encore  à  indiquer  bien  des  signes  dont  le  médecin  légiste  pourrait 
tirer  grand  profit. 

II 

Le  fait  suivant,  que  nous  avons  l'honneur  de  présenter  à  la  So- 
ciété, montre  que,  chez  les  polisseuses  sur  argent,  il  peut  survenir  à 
la  longue,  sur  certaines  parties  du  corps,  des  changements  dans  la 
coloration  de  la  peau,  changements  qui  nous  semblent  particuliers 
à  cette  profession  et  méritent  à  ce  titre  d'être  signalés. 

Obs.  —  La  nommée  H....  Marguerite,  âgée  de  72  ans,  est  admise, 
le  27  mars  1870,  à  l'annexe-Charité,  salle  Saint- Joseph,  n^  16, 

Cette  femme  n'a  jamais  eu  de  maladies  sérieuses,  bien  qu'elle  eût 
toujours  vécu  dans  de  mauvaises  conditions  hygiéniques  et  souvent 
même  au  milieu  de  grandes  privations.  Elle  a  eu  huit  enfants  qui 
sont  tous  morts  en  bas  âge. 

Depuis  cinquante  ans  elle  fait  le  métier  de  polisseuse  sur  argent. 

La  maladie  qui  l'amène  à  l'hôpital  est  un  catarrhe  pulmonaire,  da- 
tant de  plusieurs  années  et  présentant  en  ce  moment  des  symptômes 
aigus.  Nous  constatons,  en  effet,  des  râles  muqueux  disséminés 
dans  les  deux  poumons.  Sous  l'influence  du  kei'mès  et  des  sulfu- 
reux, la  sécrétion  bronchique  diminua  graduellement,  et,  lorsque  la 
malade  quitta  l'hôpital,  l'état  des  voies  respiratoires  était  très-satis- 
faisant. 

Mais  là  ne  résidait  point  l'intérêt  qu'offrait  cette  malade.  Lors  de 

(1)  A,  Tardieu,  Mémoire  sur  les  modifications  physiques  et  chimiques 
que  détermine,  dans  certaines  parties  du  corps,  V exercice  des  diverses 
professions,  pour  servir  à  la  recherche  médico-légale  de  l'idendité,  in 
Annales  d'hygiène  et  de  médecine  légale,  1849.  T.  XLII,  p.  388 
et  1850.  T.  XLIII,  p.  131. 

(2)  Vernois,  De  la  main  des  ouvriers  et  des  artisans  au  point  de  vue 
de  Vhygiène  et  de  la  médecine  légale,  in  Ann.  d'hyg.  ET  DE  MÉd.  LÉg., 
1862,  2e  série.  ï.  XVII,  p.  104. 


99 
son  examen  un  fait  attira  vivement  notre  attention  :  c'était  une  colo- 
ration d'un  bleu  pâle  et  sale  de  la  face  et  des  avant-bras. 

A  la  face,  cette  coloration  est  uniformément  répandue,  mais  elle 
est  moins  prononcée  sur  les  points  les  plus  saillants,  les  pommettes, 
le  menton,  les  arcades  sourcillières.  Les  cheveux  voisins  du  front 
sont  encore  noirs,  tandis  que  ceux  de  l'occiput  sont  tout  à  fait  gris. 
>  Aux  avant-bras,  la  coloration  bleue  n'a  pas  les  mêmes  caractères 
qu'à  la  face  :  elle  se  présente  sous  forme  de  petites  taches,  extrême- 
ment nombreuses,  dont  quelques-unes  atteignent  un  à  deux  millimè- 
tres de  diamètre.  Elle  est  bien  plus  prononcée  sur  l'avant-bras 
gauche,  surtout  vers  son  bord  interne.  (Voy.  pi.  IV,  fig.  1.)  C'est  en 
effet  ce  bord  qui  repose  sur  la  table  recouverte  de  poussière  métal- 
lique pendant  l'opération  du  polissage.  Sur  la  face  antérieure  de 
l'avant-bras  droit,  non  loin  de  l'articulation  radio-carpienne,  il  existe, 
indépendamment  d'an  pointillé  très-fin,  quatre  ou  cinq  taches  bleuâ- 
tres d'une  largeur  de  deux  millimètres,  (Voy.  pi.  IV,  fig,  2.) 

L'intérieur  de  la  bouche  n'offre  rien  de  particulier  à  signaler  :  il 
n'y  a  point  de  liseré  gingival  au  niveau  des  dents  qui  subsistent  en- 
core. Des  lavages  faits  à  diverses  reprises,  tant  sur  la  face  qu'aux 
avant-bras,  d'abord  avec  du  savon,  puis  avec  de  l'acide  azotique 
étendu  d'eau,  n'amenèrent  aucun  changement  dans  la  coloration 
bleue  des  téguments. 

Il  est  à  noter,  d'après  les  renseignements  fournis  par  notre  ma- 
lade, que  plusieurs  ouvrières,  qui  travaillaient  depuis  longtemps  dans 
le  même  atelier,  présentaient  cette  même  coloration  de  la  face,  des 
mains  et  des  avant-bras. 

III 

Il  était  bien  difficile  de  confondre  cette  coloration  bleuâtre  de  la 
peau  avec  celle  que  l'on  observe  quelquefois  chez  les  personnes  qui 
ont  absorbé  une  certaine  quantité  de  sels  d'argent.  Et  cependant  on 
devait  se  demander  si  l'on  n'avait  pas  affaire  à  un  cas  de  ce  genre, 
parce  que  la  malade,  constamment  exposée  aux  poussières  d'argent, 
pouvait  en  absorber  par  la  bouche.  Mais  si,  à  la  face,  la  coloration 
bleuâtre  était  uniformément  répandue,  elle  y  était  plus  accusée  au 
niveau  des  rides,  des  dépressions,  c'est-à-dire  dans  les  points  où  les 
poussières  se  fixaient  le  plus  facilement.  D'un  autre  côté,  on  ne  re- 
trouvait ni  les  taches  brunâtres  de  la  muqueuse  buccale,  ni  le  liseré 
gingival,  si  communs  dans  l'argyrie.  Enfin,  le  siège  particulier  de 
la  coloration  aux  avant-bras,  la  forme  que  celle-ci  présentait,  indi- 
quaient nettement  son  origine  et  son  mode  de  production. 


100 

En  recherchant  ce  qui  a  été  écrit  sur  la  coloration  de  la  peau  chez 
les  ouvriers  occupés  au  polissage  ou  au  brunissage  des  métaux, 
nous  n'avons  rien  trouvé  qui  ressemblât  à  ce  que  nous  avons  ob- 
servé chez  notre  malade. 

Les  brunisseuses  en  cuivre,  dit  M.  Tardieu  (1),  ont  à  la  main  droite 
toute  la  face  palmaire  calleuse  et  noircie.  M.  Vernois  (2)  donne  pour 
ce  métier  les  signes  suivants  :  «  callosités  de  moyenne  intensité  à 
la  face  interne  de  la  main  droite,  dans  tous  les  points  devenus  sail- 
lants pendant  la  flexion  totale,  avec  apparence  noirâtre  de  ces  par- 
ties; état  sain,  lisse  et  blanc  des  points  placés  entre  les  plis  pen- 
dant l'extension  de  la  main.  »  Il  n'y  a  là,  comme  on  le  voit,  rien  de 
semblable  à  la  coloration  d'un  bleu  sale  que  nous  avons  constatée 
chez  la  femme  qui  fait  l'objet  de  cette  communication. 

Cette  incrustation  de  la  poussière  d'argent  dans  l'épaisseur  de  la 
peau,  à  la  suite  d'un  contact  longtemps  répété,  peut  donc  constituer 
un  signe  important  d'identité  et  permettre  au  médecin  légiste  d'ar- 
river, dans  certains  cas,  à  la  découverte  de  la  vérité. 

(1)  Tardieu.  Mémoire  cité  (Ann.  d'hyg.  et  de  méd.  lég,,  1849, 
t.  XLII,  p.  399). 

(2)  Vernois.  Loc.  cit.,  p.  116. 


NOTE 


SUR  LA   PATHOGENIE 


DE 


L'ALBUMINURIE  PUERPÉRALE 


Communiquée  à  la  Société  de  Biologie,  le  34  décembre  <870, 


PAR 


LE  D'  Auguste  OLLIVIER. 


I 

L'époque  précise  du  début  de  l'albuminurie  dans  le  cours  de  la 
grossesse  est  difficile  à  détermwier  ;  on  comprend  sans  peine,  du 
reste,  qu'il  en  soit  ainsi.  D'un  côté,  les  femmes  enceintes  ne  sont 
généralement  admises  dans  les  services  hospitaliers  qu'au  moment 
du  travail  ou  peu  de  temps  auparavant;  d'un  autre  côté,  lorsque  la 
marche  de  la  grossesse  est  régulière,  s'il  ne  survient  aucun  symp- 
tôme particulier,  [capable  d'éveiller  l'attention,  l'examen  des  urines 
n'est  ordinairement  pratiqué  qu'à  des  intervalles  assez  éloignés; 
de  telle  sorte  que  le  début  de  l'albuminurie  peut  facilement  échap- 
per à  l'attention  des  observateurs. 

Le  passage  de  l'aUbumine  dans  les  urines  est  cependant  un  acci- 


102 
dent  assez  fréquent  de  la  grossesse,  puisque,  sur  205  femmes  en- 
ceintes, M.  Blot  l'a  observé  41  fois  (1). 

L'examen  suivi  des  urines  a  pu  cependant  être  fait  dans  un  cer- 
tain nombre  de  cas.  Il  a  permis  de  constater  que  l'albuminurie  des 
femmes  enceintes  peut  parfois  apparaître  de  très-bonne  heure. 

Il  existe  déjà  dans  la  science  plusieurs  observations  d'albuminu- 
rie puerpérale  précoce.  D'après  Cazeaux  (2),  M.  Bach  (de  Strasbourg) 
l'aurait  observée  six  semaines  après  le  début  de  la  grossesse.  Cet 
auteur  dit  l'avoir  vue  lui-même  à  quatre  mois  chez  une  primipare 
qui  accoucha  deux  mois  plus  tard  d'un  enfant  mort-né,  et  qui,  dix- 
huit  mois  après  sa  délivrance,  présentait  encore  des  traces  d'albu- 
mine dans  son  urine,  bien  que  tout  œdème  ait  disparu  depuis  six 
mois.  M.  Cahen  (3)  rapporte  dans  sa  thèse  une  observation  dans  la- 
quelle l'albuminurie  a  débuté  au  cinquième  mois. 

En  1865,  j'eus  l'occasion  d'observer,  à  l'Hôtel-Dieu,  le  passage  de 
l'albumine  dans  les  urines,  dès  le  troisième  mois  de  la  grossesse 
chez  une  primipare,  âgée  de  27  ans.  Il  ne  survint  aucun  accident  et 
l'accouchement  fut  régulier  et  facile,  malgré  la  persistance  de  l'al- 
bum.inurie.  Mais  la  délivrance  n'amena  point  la  guérison  de  cette 
femme;  il  se  déclara  plus  tard  de  la  bouffissure  de  la  face,  puis  un 
œdème  généralisé,  et  vingt  mois  après  son  accouchement,  elle  suc- 
combait avec  tous  les  symptômes  de  la  maladie  de  Bright  arrivée  à 
sa  dernière  période.  L'autopsie  n'a  pu  être  faite.  Néanmoins,  il  ne 
saurait  s'élever  aucun  doute  sur  l'exactitude  du  diagnostic,  en  rai- 
son des  phénomènes  observés  durant  la  vie  et  de  l'état  des  urines 


(1)  Blot  (Hippolytc).  De  l'albuminurie  chez  les  femmes  enceintes;  ses 
rapports  avec  V èclampsie,  son  influence  sur  l'hémorrhagie  utérine  après 
l'accouchement.  Th.  de  doct.  Paris,  1849,  p.  22. 

Les  chiffres  donnés  par  M.  Blot  ont  été  contestés  plus  tard  (Wic- 
gor,  Recherches  sur  réclampsie  uroémiqiie .ïn  Gaz.méd.  de  Strasbourg, 
1854,  t.  XIV,  p.  292.  Je  dois  cependant  ajouter  que,  d'après  mes 
propres  recherches  sur  ce  sujet,  les  chiffres  de  M.  Blot  ne  me  pa- 
l'aissent  pas  exagérés. 

(2)  Cazeaux.  Ti-aité  théorique  et  pratique  de  Vart  des  accouchements. 
7e  édition,  revue  et  annotée  par  Tarnier.  Paris,  18G7,  p.  491. 

(3)  Calicn  (]Maycr).  De  lu  néphrite  ulbumimuse  chez  les  femmes  en- 
ceintes.Th..  de  doct.  Paris,  184G,  p.  15. 


103 
qui  nous  présentèrent  constamment  au  microscope  des  cylindres 
hyalins  en  assez  grand  nombre. 

11  n'entre  point  dans  mes  intentions  de  retracer  ici  l'histoire  de 
l'albuminurie  puerpérale  qui  a  déjà  fait  l'objet  de  si  nombreux  tra- 
vaux. Je  désire  seulement  présenter  quelques  observations  sur  les 
caractères  spéciaux  que  peut  revêtir  cette  albuminurie  dans  un  cer- 
tain nombre  de  cas.  Habituellement  l'albuminurie,  après  avoir  ac- 
compagné la  grossesse  jusqu'à  la  délivrance,  disparaît  peu  de  temps 
après  sans  laisser  de  traces;  dans  ces  conditions,  il  ne  s'agit  évi- 
demment que  d'une  albuminurie  passagère,  accidentelle.  Mais  il  n'en 
est  pas  toujours  ainsi  :  l'albuminurie  peut  persister,  passer  à  l'état 
chronique  et  constituer  la  véritable  maladie  deBright.  L'observation 
que  je  viens  de  rapporter  en  est  une  preuve  évidente.  Cette  opinion, 
combattue  par  plusieurs  auteurs,  a  été  défendue,  à  peu  près  en 
même  temps,  par  MM.  Leudet  (1)  et  Imbert-Gourbeyre  (2),  qui  ont 
apporté  à  son  appui  des  faits  parfaitement  concluants. 

D'après  Roberts  (3),  sur  6,220  personnes  qui  ont  succombé  à  la 
maladie  de  Brigbt,  en  Angleterre,  de  1857  à  1861,  il  y  avait 
3,699  hommes  et  2,521  femmes.  La  proportion  relative  entre  les  deux 
sexes,  pour  tous  les  âges,  était  donc  de  60  femmes  pour  100  hommes. 
Mais,  dans  la  période  de  la  vie  où  la  grossesse  est  possible  (de  20  à 
45  ans),  la  mortalité  des  femmes  était  bien  supérieure  à  cette  pro- 
portion :  elle  était  de  80  femmes  pour  100  hommes.  La  seule  conclu- 
sioD,  ajoute  Roberts,  que  l'on  puisse  tirer  d'une  telle  statistique, 
c'est  que  l'état  puerpéral  est  une  cause  puissante  —  a  py-olific  cause 
—  de  maladie  deBright.  On  doit  donc,  aujourd'hui,  faire  entrer  en 
ligne  l'état  puerpéral  dans  l'étiologie  de  cette  affection. 

II 

11  est  un  autre  point  très-important  sur  lequel  je  désire  appeler 
l'attention  :  je  veux  parler  de  la  pathogénie  de  l'albuminurie  puer- 
pérale. 

(1)  Leudet.  Mémoire  sur  la  néphrite  albumineuse  consécutive  à  l'al- 
buminurie des  femmes  grosses.  In  Gaz.  hebd.,  1854,  t.  I^r,  p.  456  et  504- 

(2)  Tmbert.  Gourbeyre.  De  l'albuminurie  puerpérale  et  de  ses  rapports 
avec  l'éclampsie.  In  Mém.  DE  l'Acâd.  de  méd.,  1856,  t.  XX,  p.  1. 

(3)  Roberts.  A  practical  treatise  on  nrinary  and  rénal  disease,  etc., 
1865,  p.  289. 


104 

Cette  question  si  controversée  peut,  à  mon  avis,  être  élucidée  par 
les  faits  que  j'ai  mentionnés  quelques  lignes  plus  haut. 

Diverses  théories,  comme  on  sait,  ont  été  proposées  pour  expli- 
quer l'albuminurie  des  femmes  enceintes  (1).  Toutes  peuvent,  en 
somme,  se  résumer  en  deux  principales. 

Dans  la  première,  on  a  admis  que  la  gêne  apportée  par  le  dévelop- 
pement du  fœtus  à  la  circulation  veineuse  des  reins  amenait  une 
augmentation  de  tension,  et,  par  suite,  à  travers  ces  organes,  une 
filtration  exagérée  du  sérum  du  sang,  entraînant  l'albumine.  L'al- 
buminurie serait  donc  la  conséquence  d'une  hypérémie  rénale  pas- 
sive (Lever  (2),  etc.) .  Mais  la  possibilité  d'une  compression  quelconque 
exercée  par  l'utérus  gravide  tombe  nécessairement  dans  les  cas 
dont  il  vient  d'être  question.  L'albumine  apparut  dans  les  urines 
dès  les  premiers  mois  de  la  grossesse.  —  Du  reste  cette  théorie, 
si  plausible  à  première  vue,  ne  soutient  pas  l'examen,  même  quand 
il  s'agit  d'une  grossesse  de  sept  à  huit  mois  ;  en  effet,  si  l'hypothèse 
de  la  compression  était  fondée,  on  devrait  très-fréquemment,  sinon 
toujours,  constater  de  l'albuminurie  dès  cette  époque.  D'un  autre 
côté,  comment  se  fait-il  qu'on  n'observe  pas  le  même  phénomène 
avec  ces  tumeurs  abdominales  énormes  qui  sont  capables  d'exercer 
une  action  mécanique  tout  au  moins  égale  à  celle  de  l'utérus  gravide  ? 

M.  le  professeur  Gubler  (3)  a  victorieusement  réfuté  la  théorie 
de  la  compression  mécanique.  Aussi  ue  saurions-nous  mieux  faire 
que  de  citer  le  passage  suivant,  pour  en  finir  avec  cette  théorie  : 
«  Quant  au  refoulement  excentrique  exercé  par  le  globe  utérin,  je 
remarque  que  portant  à  la  fois  sur  tous  les  points  de  la  paroi  du 
ventre  et  des  coussins  élastiques,  représentés  par  la  masse  intesti- 
nale, cette  pression  se  ferait  obstacle  à  elle-même  en  réduisant  les 

(1)  Litzmann,  Die  Krankheit  vnd  die  Eclampsie  der  ScJnvangeren, 
Gebœrenden  und  Wœclmerinnen,  in  Deutsche  Klinick,  1852,  t.  IV, 
p.  209,  a  signalé  une  variété  d'albuminurie  puerpérale  qui  n'a  rien  de 
commun  avec  celle  que  nous  étudions  et  qui  reconnaît  pour  cause 
ime  irritation  catarrhale  ou  blennhorrcc  de  la  vessie.  Cet  auteur  ne 
l'a  guère  observée  que  chez  les  femmes  en  couches. 

(2)  Lever.  Case  of  puerpéral  convulsions  with  remarks.  Li  Guy's  HOS- 

riTAL  REPORTS,  1843,  p.  405. 

(3)  A.  Gubler.  Article  albuminurie  in  DlCT.  ENCYCLOP.  DES  SC.  MÉD., 
1865,  t.  II,  p.  472-473. 


105 
parenchymes  en  même  temps  que  le  calibre  des  canaux  veineux. 
De  plus,  ceux-ci,  placés  en  arrière,  dans  un  enfoncement,  et  proté- 
gés par  la  saillie  de  la  colonne  vertébrale,  ressentiraient  moins  que 
d'autres  organes  les  effets  de  cette  compression. 

«  D'ailleurs  si  le  refoulement  des  intestins  par  la  tumeur  hypo- 
gastrique,  en  déterminant  un  obstacle  à  la  circulation  en  retour, 
devient  cause  d'albuminurie,  ce  trouble  fonctionnel  doit  être  pro- 
portionnel au  développement  de  l'utérus,  et  doit  se  produire  de 
même  par  le  fait  de  la  présence  d'un  kyste  ovarique  ayant  atteint, 
en  quelques  mois,  des  dimensions  comparables  à  celles  de  l'utérus 
gravide.  Or,  d'une  part,  les  femmes  affectées  d'bydramnios,  ne  sont 
pas  plus  exposées  que  d'autres  à  l'albuminurie  et  à  ses  consé- 
quences ;  d'autre  part,  les  ascites  et  les  hydropisies  enkystées  de 
l'ovaire  ne  déterminent  pas  le  passage  de  l'albumine  dans  l'urine.  » 

Une  autre  théorie,  plus  généralement  acceptée,  est  celle  qui  fait 
dépendre  l'albuminurie  d'une  altération  dans  la  composition  du 
sang.  La  grossesse  est  en  effet  l'un  des  états  dans  lesquels  ce  liquide 
subit  les  modifications  les  plus  importantes.  Parmi  ces  modifications, 
il  en  est  une,  la  diminution  de  l'albumine,  à  laquelle  on  a  fait  jouer 
un  grand  rôle.  Cette  diminution  de  l'albumine,  signalée  pour  la  pre- 
mière fois  par  Becquerel  et  Rodier  (I),  a  été  bien  étudiée,  quelques 
années  plus  tard,  par  MM.  Devilliers  et  J.  Regnauld  (2).  On  sait  que 
pour  1,000  parties  de  sang  la  quantité  normale  de  l'albumine  est 
en  moyenne  de  70.  Ces  observateurs  ont  trouvé  que,  pour  les  sept 
premiers  mois  de  la  grossesse,  la  moyenne  donne  68,6  pour  le  chiffre 
de  l'albumine  ;  mais,  dans  les  derniers  mois,  la  diminution  est  bien 
plus  frappante,  puisque  ce  chiffre  tomba  dans  dix  analyses  à  66,4. 

Comme  on  le  voit,  la  décroissance  de  l'albumine  est  surtout  appa- 
rente dans  les  derniers  mois  de  la  grossesse.  Il  est  donc  difficile 
d'expliquer  par  là  les  albuminuries  précoces,  survenant  dès  les  pre« 
miers  mois  de  la  grossesse. 


(1)  Becquerel  et  Rodier.  Recherches  sur  les  altérations  du  sang. 
Paris,  1844. 

(2)  Jules  Pv,egnauld.  Des  modifications  de  quelques  fluides  de  Vêcono- 
mie 'pendant  la  grossesse.  Th.  de  doct.  Paris,  1847.  —  Devilliers  fils  et 
J.  Ptegnauld.  Recherches  sur  les  hydropisies  des  femmes  enceintes.  In 
Argh.  gén.  de  MéD-,  1848,  1«  série,  t.  XVII,  p.  312. 


^*V      "*'•'*'    /-v/ 


106 

M.  Gubler,  s'appuyant  C-galement  sur  les  changements  que  subit 
la  composition  du  liquide  sanguin,  a  proposé  une  autre  explication 
de  l'albuminurie  puerpérale  :  «  Pendant  la  grossesse,  dit  le  savant 
professeur,  le  sang  de  la  mère  doit  fournir  au  fœtus  les  matériaux 
de  sa  nutrition,  mais  seulement  sous  une  forme  soluble  et  diffusible, 
puisqu'il  n'y  a  pas  d'inosculation  entre  les  vaisseaux  des  cotylédons 
fœtaux  et  maternels.  Ce  sont,  en  conséquence,  les  diverses  modifi- 
cations de  l'albumine  qui  sont  appelées  à  nourrir  le  nouvel  être,  et 
pendant  ce  temps-là  l'organisme  maternel  doit  pourvoir  à  une  double 
dépense.  Par  une  ingestion  plus  copieuse,  par  une  économie  plus 
stricte  des  éléments  protéiques,  ou  bien  par  ces  deux  causes  réunies, 
il  faut  qu'une  plus  grande  quantité  de  ces  matériaux  se  trouve  à 
chaque  instant  disponible. 

«  Il  suffit,  par  exemple,  qu'en  vertu  d'un  simple  changement  dans 
le  mode  de  combustion  respiratoire  les  substances  ternaires,  venues 
du  dehors,  soient  seules  brûlées,  et  que  les  matières  albuminoïdes, 
échappant  à  Faction  catalytique  du  foie  comme  à  la  combustion  di- 
recte dans  les  capillaires  artériels,  soient  complètement  réservées 
pour  le  rôle  d'aliment  plastique.  Or,  dans  ce  mode  nouveau  de  fonc- 
tionnement, une  économie  mal  réglée  ou  novice  et  s'essayant  pour 
la  première  fois,  peut  aller  au  delà  du  but,  et  l'albumine  devenir  ex- 
cessive relativement  aux  besoins  des  deux  organismes  greffés  l'un 
sur  l'autre.  La  chose  est  même  d'autant  plus  facile,  que  l'albumine 
qui  a  traversé  le  corps  du  fœtus,  sans  être  employée  à  son  dévelop- 
pement, revient  incomburée,  puisque  la  respiration  n'est  pas  encore 
établie  chez  ce  dernier,  dont  l'urine  contient  normalement  de  l'albu- 
mine, comme  celle  des  batraciens,  et  ne  renferme  jamais  d'urée.  De 
plus  cette  albumine  intacte,  rentrée  en  presque  totalité  dans  la  cir- 
culation de  la  mère,  attendu  que  la  sécrétion  rénale,  sans  issue  au 
dehors,  est  presque  nulle  durant  la  vie  intra-utérine. 

«  L'albuminurie  chez  la  femme  enceinte  implique,  d'après  cette 
manière  de  voir,  une  production  excessive  des  substances  albumi- 
noïdes eu  égard  aux  besoins  des  deux  organismes.  Mais  tantôt  c'est 
la  mère  qui  fabrique  trop,  tantôt  c'est  le  fœtus  qui  ne  consomme  pas 
assez;  d'autres  fois  les  deux  circonstances  concourent  au  résultat. 
Si  les  produits  naissent  avec  les  dimensions  et  le  poids  ordinaires, 
on  doit  eu  conclure  que  l'albuminurie  provenait  du  désordre  de 
l'organisme  maternel.  Si  une  mère  albuminurique  donne  le  jour  à 


107 
un  enfant  exigu  et  malingre,  il  y  a  lieu  d'accuser  l'insuffisance  de  ce 
dernier  d'avoir  occasionné  la  superalbuminose  sanguine  et  la  filtra- 
tion  albumineuse  par  les  urines  (1).  » 

Si  cette  manière  de  voir  répondait  réellement  aux  faits,  l'albumi- 
nurie devrait  être  un  épipbénomône  fréquent,  sinon  presque  con- 
stant, de  la  grossesse.  Mais  on  sait  qu'il  n'en  est  pas  tout  à  fait  ainsi. 
On  ne  pourrait  non  plus  expliquer  le  passage  de  l'albumine  dans  les 
urines  dès  les  premiers  mois  de  la  grossesse,  alors  que  les  dépenses 
occasionnées  par  la  nutrition  du  fœtus  sont  encore  peu  considéra- 
bles. Enfin  —  et  cette  objection  s'applique  également  à  l'hypothèse 
de  l'hypoalbuminose  —  comment  se  rendre  compte  de  la  cesssation, 
quelquefois  si  rapide,  de  l'albuminurie  après  l'accouchement?  Il  fau- 
drait, dans  ce  cas,  admettre  qu'une  aussi  profonde  altération  du 
sang  peut  disparaître  presque  instantanément.  Or  cela  ne  parait 
guère  vraisemblable. 

Aussi  quelque  séduisante,  quelque  ingénieuse  que  soit  la  théorie 
de  l'albuminurie  puerpérale  donnée  par  M.  Gubler,  croyons-nous  de- 
voir lui  préférer  une  autre  explication,  basée  sur  des  faits  physiolo- 
giques bien  connus,  et  pouvant  s'appliquer  à  beaucoup  d'autres  états 
pathologiques  développés  également  sous  l'influence  de  la  grossesse. 

On  sait  combien  sont  fréquents  les  phénomènes  sympathiques  ou 
réflexes  qu'on  observe  chez  les  femmes  enceintes.  La  présence  du 
fœtus  dans  la  cavité  utérine  détermine,  par  action  réflexe,  des  trou- 
bles de  circulation,  de  nutrition,  des  modifications  de  structure  dans 
un  grand  nombre  d'organes.  De  là  des  états  pathologiques  variés, 
dont  les  uns  apparaissent  très-fréquemment,  d'une  manière  régu- 
lière pour  ainsi  dire,  tandis  que  d'autres  ne  se  montrent  que  d'une 
façon  presque  exceptionnelle.  Parmi  ces  derniers,  nous  citerons 
l'augmentation  de  volume  du  corps  thyroïde,  l'hypertrophie  du 
cœur,  etc.,  etc. 

Les  reins  n'échappent  pas  à  cette  remarquable  action  exercée, 
sur  la  plupart  des  organes,  par  le  produit  de  la  conception.  Sous 
l'influence  de  l'irritation  que  celui-ci  détermine  à  distance,  il  se 
produit  dans  les  reins  une  suractivité  de  nutrition,  une  congestion 
plus  ou  moins  intense  qui  peut  donner  naissance  à  une  néphrite 
catarrhale,  décelée  par  la  présence  de  l'albumine  dans  les  urines. 

(1)  A.  Gubler.  Loc.  cit.,  p.  473. 


108 

Le  processus  peut  s'arrêter  là  et  disparaître  après  l'accouchement. 
L'altération  passagère  du  rein  ne  laisse  dans  ce  cas  aucune  trace 
après  elle. 

Dans  certaines  circonstances,  au  contraire,  l'altération  persiste 
après  la  délivrance,  devient  permanente  et  passe  à  l'état  chronique. 
On  observe  alors  une  véritable  néphrite  parenchymateuse,  une  ma- 
ladie de  Bright  qui  pourra  plus  tard  amener  à  sa  suite  tous  les  acci- 
dents que  comporte  cette  redoutable  maladie. 

On  peut  donc  dire  que  l'albuminurie  puerpérale  n'est  pas  un  fait 
particulier,  mais  qu'elle  reconnaît  une  cause  plus  générale,  qui  em- 
brasse une  grande  partie  de  la  pathologie  de  la  grossesse. 


OBSERVATIONS  PHYSIOLOGIQUES 


SUR 


LE  TŒNIA  SOLIUM 


PAR 


M.  LE  nocTEUR  A.  LABOULBÈNE, 

Membre  honoraire  de  la  Société  de  Biologie,  professeur  agrégé  à  la  Faculté, 
médecin  de  l'hôpital  Nerl^er. 


Tous  ceux  qui  ont  pratiqué  des  vivisections  et  qui  ont  vu  dans  les 
intestins  des  animaux  des  helminthes  cestoïdes  vivants,  connais- 
sent les  mouvements  très-lents  qu'ils  présentent.  Les  anneaux  du 
corps  de  ces  vers  se  resserrent  en  prenant  une  forme  allongée,  ou 
au  contraire  ils  s'élargissent  dans  le  sens  transversal.  Les  ventouses 
de  la  tête  s'allongent  ou  se  raccourcissent  lentement,  sous  l'œil  de 
l'observateur  comme  les  tentacules  de  certains  mollusques,  mais 
avec  une  grande  lenteur.  Ces  ventouses  s'étant  flxées  sur  un  point 
de  l'intestin  y  adhèrent  avec  énergie. 

Les  cucurbitains,  ou,  en  d'autres  termes,  les  fragments  de  Tœnia 
que  rendeat  la  plupart  des  personnes  atteintes  du  ver  solitaire  sont, 
à  leur  sortie  du  corps  humain,  pourvus  de  mouvements.  Plusieurs 
fois,  les  malades  m'ont  signalé  et  montré  ces  contractions  remar- 
quées par  eux,  lorsqu'ils  mettaient  ces  fragments  dans  l'eau  tiède, 
et  même  lorsqu'ils  regardaient  attentivement  ces  anneaux  du  ver, 
placés  sur  leur  main  ou  au  bout  de  leur  doigt.  Les  changements  de 
forme  varient  de  l'allongement  produisant  un  rectangle  à  bords  la- 
téraux rapprochés,  et  puis  arrivent  jusqu'au  carré  transversal,  ou 
très- élargi.  Ces  mouvements  sont,  par  conséquent,  de  la  plus  grande 
netteté. 


110 

^11. 

Quand  on  fait  rendre  à  un  malade  un  Tœnia  solium  par  un  pro- 
cédé méthodique,  par  exemple  avec  la  racine  de  grenadier  et  l'huile 
de  ricin,  presque  toujours  le  ver  n'est  point  mort  au  moment  de  son 
expulsion.  Si  ou  le  recouvre  d'eau  tiôde,  il  exécute  bientôt  des  mou- 
vements appréciables  qu'on  pourrait  comparer  à  une  très-lente  rep- 
tation, ou  plus  exactement  à  des  mouvements  périslal tiques  et  an- 
tipéristaltiques. 

Dans  les  conditions  précitées,  le  ver  atteint  par  la  substance  an- 
thelminthique  est  faible  et  dépourvu  de  sa  complète  motilité,  néan- 
moins on  le  voit  remuer  et  changer  de  forme  pendant  un  quart 
d'heure  et  jusqu'à  une  demi-heure,  à  une  heure  environ.  On  peut 
observer  la  protraction  des  ventouses,  mais  elle  n'est  pas  très-forte 
et  ces  mêmes  ventouses  ne  peuvent  faire  adhérer  la  tête,  ainsi  qu'il 
est  facile  de  s'en  assurer  en  plaçant  celle-ci  sur  divers  corps  mous 
et  sur  les  anneaux  mêmes  du  ver. 

'à  m. 

Si  le  Tœnia  a  été  rendu  en  entier  après  avoir  été  expulsé  au  moyen 
d'un  purgatif  léger,  tel  que  l'huile  de  ricin,  ce  qui  est  rare  ;  ou  peut- 
être  s'il  est  sorti  spontanément,  ce  qui  est  plus  rare  encore,  on  com- 
prend que  les  mouvements  du  ver  doivent  être  très-énergiques.  Ils 
sont  alors  à  leur  état  normal,  ce  qui  n'a  pas  lieu  avec  un  antliel- 
minthique  puissant  qui  les  diminue  toujours  et  qui  parfois  les  abolit 
en  tuant  l'helminthe.  J'ai  pu  observer  un  fait  de  ce  genre  et  j"en  ai 
rendu  témoin  mon  ami  M.  le  docteur  Davaine,  si  compétent  en  hel- 
minthologie.  C'est  d'après  ses  conseils  que  j'ai  présenté  à  la  Société 
de  biologie  l'exposé  suivant  : 

Obs.  —  Un  homme  de  35  ans,  ouvrier  dans  une  usine,  se  présente 
un  lundi,  vers  deux  heures  de  l'après-midi,  à  la  consultation  du  Bu- 
reau central,  place  du  Parvis-Noti-e-Dame.  Il  demande  avec  anima- 
tion à  parler  de  suite  au  médecin  parce  qu'il  vient  de  rendre  quel- 
que chose  d'extraordinaire. 

En  examinant  cet  homme,  il  était  facile  de  s'apercevoir  qu'il  avait 
un  degré  assez  prononcé  d'ivresse.  Il  tenait  à  la  main  un  de  ces 
verres  épais,  avec  lesquels  les  marchands  de  vin  servent  leurs  habi- 
tués. Dans  le  verre  se  trouvait  un  corps  rubanné,  blanchâtre,  que 
cet  homme  alBrmait  avoir  rendu  et  qui  remuait  lentement. 


1!1 

Il  me  fut  facile  de  reconnaître  un  Tœnia  solium  exécutant  en  effet 
des  mouvements  bien  nets;  je  n'en  avais  encore  point  vu  de  si  pro- 
noncés. 

Cet  homme  disait  n'avoir  jamais  eu  de  maladies  graves,  ni  d'acci- 
dents épileptiformes  ;  il  ne  sut  pas  me  renseigner  sur  le  fait  d'avoir 
encore  rendu  jusqu'à  ce  jour  des  fragments  de  tœnia.  Du  reste, 
son  état  d'ébriété  nuisait  beaucoup  à  la  compréhension  de  mes  de- 
mandes. 

Tout  en  interrogeant  cet  homme  et  en  lui  faisant  répéter  à  plu- 
sieurs reprises  comment  il  avait  rendu  ce  ver  et  dans  quelles  cir- 
constances, j'observai  le  Tœnia  avec  une  loupe.  Je  pus  très-bien 
voir  la  partie  amincie  du  col  et  la  tète  qui  la  terminait.  J'essayai  de 
soulever  avec  le  manche  arrondi  d'un  porte-plume  la  tête,  et  je  vis 
qu'elle  adhérait  fortement  à  un  gros  anneau  du  corps  sur  lequel  elle 
était  posée.  Après  avoir  plusieurs  fois  cherché  à  la  détacher,  les  ten- 
tatives réussirent  et  la  tête  fut  enlevée  et  reportée  sur  un  autre  an- 
neau. 

Peu  de  temps  après,  l'adhérence  de  la  tête  était  devenue  si  grande 
que  j'aurais  certainement  rompu  le  cou  du  ver  plutôt  que  de  le  déta- 
cher. 

Le  malade  m'apprit  qu'il  ne  s'était  point  purgé,  qu'il  avait  pris 
a  seulement  le  matin  plusieurs  gouttes  d'eau-de-vie  «  et  qu'il  venait 
de  déjeuner  avec  des  camarades,  chez  un  marchand  de  vin,  dans  une 
des  ruelles  voisines  du  Parvis.  Il  avait  eu,  vers  la  fin  du  repas,  des 
coliques  auxquelles  il  avait  d'abord  résisté,  puis  il  avait  été  obligé  de 
sortir  de  table.  Pressé  par  le  besoin  d'aller  à  la  garde-robe  et  pour 
ne  pas  monter  aux  lieux  d'aisance  situés  à  un  étage  supérieur,  il 
avait  pris  un  vase  de  nuit  sous  un  lit  de  la  chambre  voisine  et  il 
avait  rendu,  avec  des  matières  diarrhéiques  jaunâtres,  «  un  paquet 
blanc  ».  Il  était  formé  par  ce  ver,  qu'il  avait  de  suite  ramassé  avec 
un  morceau  de  bois  et  placé  dans  un  verre  du  comptoir. 

Ce  récit  fut  répété  sans  variantes,  à  plusieurs  reprises. 

Je  voulais  rendre  témoin  de  l'adhérence  de  la  tête  du  Tœnia  SO' 
hum  humain,  le  docteur  Davaine,  et  je  prévins  de  la  rareté  du 
fait  et  de  son  intérêt,  Gastebois,  chef  du  Bm-eau  central,  dont  l'o- 
bligeance était  extrême.  Loin  de  m'empêcher  d'accomplir  mon  désir, 
il  m'engagea  à  partir  de  suite,  et  j'allai  montrer  à  mon  savant  ami  le 
Tœnia  que  je  venais  d'observer  d'une  manière  si  inattendue. 

M.  Davaine  constata  de  nouveau,  comme  je  l'avais  fait,  les  mou- 
vements du  tœnia  ;  il  put  aussi  se  convaincre  de  la  très-forte  adhé- 
rence de  la  tête,  et,  en  voulant  savoir  jusqu'à  quel  degré  elle  s'exer- 
çait, il  tira  sur  le  cou  du  ver,  et  la  tête,  résistant  toujours,  le  cou  se 


112 
rompit.  Le  ver  était,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  un  Tcmia  solium  armé, 
nettement  caractérisé. 

En  rentrant  au  Bureau  central,  je  trouvai  l'ouvrier  qui  avait  dormi 
en  m'attendant.  Il  se  souciait  peu  du  ver  qui  l'intéressait  médiocre- 
ment, depuis  qu'il  savait  ce  que  c'était  et  dont  il  était  content  d'être 
débarrassé,  mais  il  réclamait  le  verre  à  boire  du  marchand  de  vins. 
Le  verre  était  reslé  chez  M.  Davaine,  et  je  donnai  à  cet  homme  une 
pièce  d'argent  avec  laquelle  il  revint  probablement  chez  le  mar- 
chand de  vins. 

En  résumé,  on  vient  de  voir  par  ce  fait  que  le  Tœnia  solium  a  une 
puissance  de  fixation  extrême  au  moyen  de  ses  ventouses,  et  que  le 
cou  se  rompt  avant  que  la  tête  lâche  prise. 

Le  ver  étant  ordinairement  fixé  sur  la  muqueuse  intestinale,  la 
tête  reste  dans  le  corps  quand  l'expulsion  des  anneaux  rubannôs 
a  lieu.  Ce  n'est  que  très-rarement  que  le  ver  ayant  fixé  sa  tête  sur 
un  anneau  de  son  propre  corps,  il  a  pu  sortir  parfaitement  vivant  et 
en  entier. 

Il  résulte  de  ces  données  physiologiques  les  indications  les  plus 
précises  pour  l'expulsion  du  Tœnia  soimjn  et  des  autres  vers  cestoïdes 
de  l'homme. 

Quand  le  tœnia  est  tourmenté,  quand  une  substance  anthelmin- 
thique  arrive  dans  l'intestin,  le  tœnia  cherche  à  s'accrocher  par  ses 
ventouses;  si  la  dose  est  trop  faible  ou  s'il  s'écoule  trop  de  temps 
avant  lexpulsion,  le  ver  a  le  temps  de  se  rétablir  et  il  se  fixe  trùs- 
fort  ;  alors  si  l'expulsion  a  lieu,  la  tête  ne  sort  pas  avec  les  an- 
neaux rubannés  du  ver. 

Il  faut  donner  un  anthelminthique  ou  une  substance  engourdis- 
dissant  le  tœnia  et  puis,  peu  de  temps  après,  l'expulser  rapidement 
au  moyen  d'un  purgatif.  Le  ver  n'a  pas  la  possibilité  de  se  fixer  et  il 
sort  complètement  avec  la  tête. 

Certains  anthelminthiques,  tels  que  le  kousso  et  le  kamala,  ont  à 
la  fois  une  action  sur  le  ver  et  une  propriété  purgative.  Néanmoins, 
si  lever  ne  sortait  point  assez  rapidement  après  l'ingestion  de  ces  mé- 
dicaments, il  serait  utile  de  ne  pas  trop  attendre  et  de  donner  un 
purgatif  léger.  De  cette  manière,  ou  arriverait  à  faire  rendre  le 
tœnia  pendant  qu'il  est  sous  l'action  de  la  substance  anthelminthique, 
et  qu'il  n'est  pas  fixé  sur  la  muqueuse  intestinale. 

FIN  DES  MÉMOIRES. 


PLANGHES, 


MÉW.   ISTO 


EXPLICATION  DES  PLANCHES. 


PLANCHE  I. 


LIEHfS  ET  VAGIN  DOUBLES. 


(Mémoires,  page  35.) 


A.  A.  Cloison  de  séparation  des  denx  vagins. 

B,  G.  Les  denx  vagins. 

D.  D.  Les  deux  cols  utérins. 

E.  E.  Le  corps  des  deux  utérus. 
P.  F,  Les  ligaments  larges. 

6.  6.  Les  ligaments  ronds. 
U.  H.  Les  trompes. 

I.  L'ovaire  gancbe.  L'ovaire  droit  existait  qiK>iiu'iI  n'ait  pas  été  reproduit  sur 
kl  planche. 


PL.  1. 


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«'•ucradnal.lilli. 


Jiiip  E  eccpiet  a.  Paris  . 


N 


PLANCHE  II. 

L.SilVE   DE   L'eLMIS   ^NELS. 
(Mémoires,  page  59.) 


Fis.  1.  Larve  de  VElmis  œneus,  grossie,  et,  à  côté  d'elle,  mesure  de  sa  grandeur  natu- 
relle. 

2.  Antenne  gmelie  de  cette  larve,  très-grossie,  ainsi  que  les  fi^jures  suivantes. 

S.  Labre,  ou  liivre  supérieure,  avec  les  poils  laciuiés  qui  eu  garnissent  le  bord  anté- 
rieur. 

4.  Mandilmle  droite  fortement  deuléf,  et  munie  en  derlans  d'un  appendice  cilié. 

5.  Mâchoire  du  roté  giuche  de  la  bouche,  pourvue  d'un  pilpe  biarticulé. 

6.  Lèvre  inféri'nire  munie  de  deui  palpes  biarticulés, 

7.  Oigle  tciininant  le  tarse  d'une  patte,  mon'rant  en  dessous  un  poil  épais  et  mobile. 

8.  Bord  de<i  ■iei/mcnl.<i  latérani  du  corps,  grossi,  pour  mettre  en  évidence  les  appendices 

foliacés  cl  laciniés  qui  le  garnissent. 

9.  Les  appendices  du  bord  des  se;:mftiits  plus  grossis  que  sur  la  figure  précédente. 

10.  Un  seul  de  ces  nrqancs  encore  plus  giossi,  pour  représenter  nettement  les  di5cou- 

pures  qui  l'i  ntourent. 

11.  Extrèmilc  du,  corps  de  la  larve  fortement  grossie,  vue  en  dessus,  montrant  l'appa- 

reil res;jiratoire  étalé  sous  forme  de  trois  falsceaui  de  branchies. 

12.  ilême  extrémité  du  cor;}^,  mais  vue  en  dessous.  Le  dernier  segment  est  pourvu  d'un 

petit  opercule  qui  s'ouvre  pour  donner  passage  aux  branchies. 

13.  Encore  la  même  extrémité  du,  corps  placée  de  profil,  ponr  faire  bien  saisir  l'enserallê 

des  organes  déjà  figurés  dessus  et  dessous. 
11.  Trois  des  /llamrnts  branchiaux,  extrèracracnt  grossis. 


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ImpJIoiii.'-li'.  .'',  r.  Mujnon 


PLANCHE  III. 

COnPLSCULES  CALCAIIŒS   DES  ECIIIXOCOQLES. 

(Mémoires,  page  57.) 

FiG.  I.  Échitiocoque  du  foie  dn  riionime  présentaut  le  proboscide  iiivagiiié  et  doal  le  corps  est 
garni  de  corpwicules  calcairex,  au  nombre  de  cinquante  enTiroii  sur  un  premier 
piaa. 

La  double  rangée  de  croehuts  a  été  représentée,  mais  les  quatre  ventouses  placées  eu 
arrière  ont  été  omises  pour  ne  pas  compliquer  la  figure. 

Los  lettres  depuis  a  jusqu'à  y  désignent  les  diverses  fornifs  des  corpuscules  cal- 
caires : 

</,i,C,(/.  Corpuscules  arrondis  et  à  noyaux. 
g,  h,  i.  Corpuscules  à  double  contour. 

m,  p.  Corpuscules  en  sablier. 
n,o,p.  Corpuscules  alignes  concentriques. 
qb-y.  Corpuscules  altérés  et  granuleux. 

(Les  figures  au  grossissement  des  objectirs  3  et  t>  de  Cachet.,  avec  l'oculaire  n"  3.) 


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PLANCHE  IV. 

COLOUATION   PARTICULIÈRE   DE    LA    PRAU    CHEZ   LES  POLISSEUSES 

SLR  ARGENT. 


(Mémoires,  page  S7.) 

Fn.  1.  Bord  interne  de  l'avant-brasganche,  parsemé  do  petites  taches  Llci'.àlres  eîtrd-memcnt 
nombreuses. 

FiG.  2.  FacH  aritérip\ire  de  l'avant  bras  drpit.  sur  hiqrelle  on  voit,  ;ndr;^'i:d;imn'C!:t  d'u 
pointillé  tfès-fln,  quatre  ou  cinq  taulic.^  bler.â'.ics  plus  larges. 


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PL,  4. 


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Imu  .E  ecquet , Paris  . 


TABLE  DES  MÉMOIRES 

DE  l\  SOCIETE  DE  îiîULOGIE. 


Pages 

1.  Mémoire  sur  une  tiouveilo  anomalie  de  laToloiine  Teriébrale,  caraclérisée 

par  la  présence  d'une  veriébre  (iorsale  surnuméraire  enclavée  et  par  un 
nombre  de  côles  dilTerent  dans  cliacune  dos  parois  iboraciques  ;  obser- 
vation recueillie  sur  un  cheval;  par  M.  Arinand  Goubaux s 

2.  Note  sur  un  cas  de  lélanos  trauraatique;  par  M.  Alix  JofTroy 13 

3.  Noie  sur  le  tissu  muijueux  du  cordon  ombilical  (gélatine  de  Warlhon);  par 

M.  J.  Renaul 21 

4.  Détermination  des  insectes  nuisibles  auï  fruits  du  nojer  [Junlans  regia) ; 

par  M.  A.  Laboulbène 29 

5.  Noie  sur  »»  cas  d'utérus   et  de  vagin  doubles;  par  il.  Augusie  Ollivitr 

(Yoy.  plancli»  !) 3S 

6.  Description  et  fl;;ure  de  la  larve  de  l'Elmis  .£neus;  par  W.  A.  Laboulbène 

(Yoy.  planche  II) S9 

7.  Recherches  pour  servir  à  l'Iiistoire  des  organes  tactiles  des  insectes;  par 

M.  Jobert il 

8.  Note  sur  les  corpuscules  calcaires  des  ccbinocoques;  pjr  M.  A.  Labouîbcno 

(Voy.    planche   111} ST 

9.  Recherches  sur  l'action  toxique  de  l'acide  phonique;  par  M.  Paul  Rert.     .        63 

10.  Observation  pour  servir  à  i'tiistoire  de  la  claudication  intermittente  chez 

l'homme;  par  M.  Augusie  OUivier 8a 

11.  Noie  sur  une  coloration  particnliére  de  la  peau  chez  les  polisseuses  sur 

argent,  pouvant  consliluer  un  signe  d'identité;  par  M.  Auguste  Ollivier 
(Voy.  planche  IVj 07 

12.  Noie  sur  la  paihogénie  de  ralbumintiriL"  puerpérale  ;  par  5Î.  Au};.  Ollivii-r.      nu 

13.  Obsi'ivalions  pii^siolu^iqucs  sur  le  Tcrnia  Kiiium;  par  .M.  A.  I.aboulbètK'.    '  U9 


MN    !>!•:    I,A    iAIli.K    lîE?    MFMOHIKS. 


TABLE  ANALYTIQUE  DES  MATIÈRES 


COXTENUKS 


DANS  LES  COMPTES  KENDUS  ET  LES  MEMOllIES 


DE  LA  SOCIÉTÉ  DE  BIOLOGiE 


pour,  l'année  1870  (1). 


A 

C.    K.  M. 

Abcès  iiiélaslaliques  dit  fiiic;  par  M.  Haycin >si  • 

Acunitine  ^Poison  inusculuire  ;  par  M.  Leveii l'-i  » 

Air  comprimé  (Action  de  V]  sur  la  respiration  et  lu  circulation;  par 

M.  Carville. 4y 

Air  (Injection  d'i  dans  les  artères  ;  |)ar  >5.  licrt ii5  » 

Albuminurie  puerpérale  (Noie  sur  la  pullioiiénie  (!e  l');  par  .M.  Augusie 

Ollivier "  lot 

Alcool  (Effets  physiologiques  et  tliérapeiJti(|ues  de  1';  ;  par  M.  Rabufeau.  .  i."i  » 

Allaitement  (Conse(|uences  de  I')  ariiliciol  et  naturel;  par  M.  Clialvcl.  )s  » 
Anesthésie  de  tout  le  corps  dans  un  cas  de  lésion  d'une  moitié  latérale 

de  la  moelle  épiniére;  par  .M.  15ro\vn-Sé(iuard :i2  " 

Artère  vertébrale  (Oblitération  de  1")  du  cùte  gauciie;  parM.Luneau.  iy2  » 
Artères  (Lésions  des)  dans  deux  cas  de  purpura   lieiiiurrhaj;ica  ;   par 

.M.  Hayem '^i  " 

Artérielle  (Variations  de  la  pression);  par  M.  î.loreau S:4  i> 

— Discussion;   par  M.  Ranvier. 3H  " 

Arthrite  tuberculeuse;  par  Î\I.  Cornil ^j  " 

Arthropathie   consécutive  à   une    lésion    de   la   moelle  épiniére;   par 

AL  Urown-Séquard Jif  » 

Arthropathie  de  l'cpaule  dans  ra'axie  locoiiiotrice  ;  par  M>,].  Cliarcot 

ei-loffroy ti  » 

Atrophie  a i;jiie  ou  (■liroiii(iue  des  cellules  ne.'veuses  de  la  nioeile;  par 

M.  Joil'roy 63  » 

(1)  Les  l'.'-^oa  iii(l.irinet's  a  la  liiarg'j  stuil  celles  dos  coi^iptos  rei;(lus(C'..ri.)  et  dc>-  mi''HiO!r?b  {}[}. 

lujlLIBRARYl::cj 


'^Z 


1t!l 

C       H.  H. 

Atrophie  musculaire  loiite  ou  rapide  sulv.iiu  le  degré  d'irrilalion  de  I.i 

luoelle  ou  des  nerfs;  par  M.  Browii-Sé(|uard f.o         » 

B 

Bactéries  dans  le  sani;  dos  crysipélateux;  par  M.  Nepveu I6i  » 

Biliaires  (Terminaison  des   conduits)  dans   les   lobules  du    foie;  par 

M.  Le-ros 58  » 

Brumal  (Action  du);  par  ?.î.  Rabuteau 44  » 

C 

Caféiques  (Action   des)  sur  la  nutriiion  ;  p.ir  M.  Habuteau 77  » 

Capsules  surrénales  (Hypertrophie  des)  à  Ja  suite  de  lésions  de  la  moelle 

épinicre;  par  M.  Browri-Sequard -21  » 

Cérébral  (Lésion  du  pédoncule)  du  côlé  droit;  par  il. Leicinturier.  .  .  S9  » 
Cerveau    (Knlèvemeni   d'un   hémisphère  du).   LiTets   consécutifs;    par 

MM.  Laborde  et  Leven 1  » 

Chloral  (Action  du)  ;  par  M.  Rabuteau 137  » 

Ciaiïdicatioia  interniitienle;  par  M.  Oliivier (-15  sa 

—par  M.  Cliarcol i<iî  ■ 

Coîléïne  (Action  du  chlorure  de)  sur  la  contractili(é  ;  par  M.M.  Laborde 

et   Leven 74  » 

Cote  surnuméraire  chez  un  cheval;  par  S!.  Goubaux 6i  > 

Grâne  (Transplantation  d'une  couronne  de  trépan  sur  le)  d'un  animal 

de  même  espèce;  par  M.  Philipeaux Tii  » 

Cristallin  (lU'sénération  du)  chez  les  tuamniiféres;  par  M.  Philipeaux.     .  65  •< 

D 

JSiurétique  (Action)  de  l'alcool  ;  par  M.  îîabutoa» 87  » 

Douleur  (De  la)  dite  en  ceinture;  par  M.  Brown-Sétiuard 87         » 

E 

Ecchymoses  et  emphysème  des  poumons  à  la  suite  de  lésions  de  b  basa 

de  l'encéphale;  par  M  Brown-Scquard 8G         » 

Schînocoques  (Corpuscules  calcaires  dos)  (avec  planche);  par  51.  La- 

boulbéne »        57 

Sjlectriclîé.  Influence  différente  des  courants  iiiduits  et  di's  couranis 

continus  sur  la  contractililé;  par  M.  Oninius 71  » 

Encéphale  (Lésion  morlelîe  de  1')  sans  troubles  de  l'intelligence,  de  la 

parole, du  mouvement  et  de  la  sensibilité;  par  M.  Ilajcm 160  » 

Encéphale  (Symptômes  variables  suivant  le  cô:é  de  1")  ()ui  est  le  siépe 

des  lésions;  par  M.  Brown-Sé((uard -.^7  cl       Os         « 

îJpiîepsie  (Siège  centra!  de  1');  par  iM.  IJrown-Scquard 122  » 

Épilepsie  par  lésion  des  cordons  postérieurs  de  la  ir.oellc  immédiate- 
ment au-dessous  du  bulbe;  par  M.  lîrown-Séijuard fc2         > 

Epilepsie    consécutive    à    la    ligature    des    membres   inférieurs;    par 

M.  Rrown-Sequard 87  ■ 

«îpiîepsie  consécutive  à   l'amputation  des  membres;  par  M.  IJrown- 

Séquard .        90  » 

Épilepsie  (De  l'action  des  sections  successives  d'un  même  nerf  sur  la 

production  de  1');  par  M.  [irown-Scquard iiS         » 


Epilepsie  ;Une  viûleiila  douleur  peiil-el!e  arriMer  une  allaque  d')?  par 

M.  BrownSéquard ^.^^ 

Spileptogène  iZone)  située  sur  le  corps  du  côte  oppose  aux  lésions  cé- 
rébrales, par  M.  Brown-Séquard g. 

Epileptogène  (L'irritation   de   la    r.one)  peut  guérir   l'épilepsie;    par 

M.  Brown-Séquard g 

Estomac  i.Taches  ecchymotiques  de  T)  après  lésion  de  l'encéphale;  par 

M.  Lépine 3g 

— par  M.  Ctiarcot -.y 

V 

Foie  (Structure  du);  par  11.  Cornil j3 

H 

Sémichorée  droite;   par  M.  Magnan ^g 

Sérédité  des  lésions  acquises  ;  par  M.  Brown-Séquard 5 

— parM.Bert 1 6.  4 j,  50,  59,  64  et  ûîi 

Héréditaires  (Mutilations);  par  M.  Philipeaus 5a 

hypoglosse  (Lésions  du  nojau  de  I'    dans  la  paralysie  labio-glosso- 

larynyée;  par  M.  Ciiarco' .^9 

I 

Inné  (Action  sur  le  cœur  du  poison  appelé;;  par  M.  Legros  .     .      Si  et  a 

—par  M.  Berl. 34 

Insectes  nuisibles  aux  fruits  du  noyer;  par  M.  Laboulbéne îa 

Insufflation  pulmonaire  (Effets  de  1')  ;  par  M.  Gréhant.    .      49,  iiG  et  liS 

Iritis  après  la  variole;  par  M.  Bouchard uo 

K 

Ityste  ganglionnaire:  par  M.  Muron il9 

L 

^ait  (Différences  dans  la  quantité  el  la  composition  du;  pour  les  deux 

seins  de  la  même  femme;  par  M.  de  Romiily 105 

Siarve  de  l'EIrais  .ffineus  (avec  planche);  par  M.  Laboulbéne » 

ïieucocytes  (Circulation  des)  et  dépôts   dans  les  viscères  à   la   suite 

d'une  injection  sous-cutanée  de  cifiabre;  par  M.  Hayem tn 

Zieacocytes  ^Développement  des',;    par  .M.  Pouchel ;,9 

M 

]^al  de  Pott  [Discussion  sur  le  traitement  du)  par  ilM.  Charcol,  Dunionl- 

paliier  et  LaLorde i^ 

ISenstruation  (Induenfc  de  la)  sur  la  nutrition,  le  pouls  el  la  tempé- 
rature: par  M.  Rabuteau "j 

^Menstruation  (De  l'influence  de  la)  sur  la  nutrition;  par  M.  Babuleau.  no 

SSoeJîe  cpiniére  (Hcmorrhsgie  de  la);  par -M.  Bourneville i:.5 

3C£oelîe  (Action  primilive  des  poisons  sur  la);  par  M.  Leven «•ii 

Rîcelle  (Altérations  des  cornes  anlérieures  de  la)  dans  deu.t  observations 

de  pied  boî;  par  M.  -Michaud !13 

Moelle  I  Lésions  de  la")  dans  le  mal  de  Polt,  après  disparition  de  la  para- 
plégie; par  M.  Cliarrot n 

Bîort  subiiu  par  embolies  pulmonaires;  par  \l.  I!a\em loi 


t..    H.  ». 

MortMiliile  par  l.iZAtiire  de  la  iracln'e  ;  par  M.  l.oven 13  • 

Mort  (Moyen  de  con^later  la  morl  appaienle  et  la  mort  réelle);  par 

I\i.  Laliordc fi"!  >■ 

Muscles  (Cicaliisalion  des)  à  la  suiie  de  sections  sons-cutanées;   par 

I\!.  Hayem 53  • 

lyîyélite  conséciilive  à  une  cliule  sur  le  sic?e:  par  .AT.  Bouchard.    ...  <4  » 

NerFs  dorsaux  (lifTels  de  la  section  des);  par  M.  Drown-Séquard.    .     .      un         • 
Kerveuses(Tcrniinaisons;  cbez  les  poissons;  par  MM.  JoberletGrandey.      i-ii 

O 

Œdème  du  membre  inférieur  et  lésions  du  lissu  conjonctif  après  lipa- 

lure  de  la  veine  cave  et  section  du  nerf  scialique  ;  par  M.  Ranvier.  .  g  " 

(Edènie  du  membre  inférieur  après  ligature  de  la  veine  cave  et  section 
du    nerf  sciatique  (Discussion  sur  \');  par  MM.  Vulpian,   Ranvier, 

I. aborde  et  Hayem 7  • 

Ombilical  (Slruclure  du  cordon):  par  M.  Renaul fit        -.'t 

Organes  tactiles  des  insectes;  par  M.  Jobert 47  • 

Osseux  (Reproduction  du   lissu)  du   crâne  et  du  canal  rachidien;  par 

MM.   BrownSéfjuard   et  TJupuy ii4  » 

Oxyde  de  carbone    rapidité  de  la  combinaison  de  l'j  avec  les  globules 

du  sang.  ;  par  M.  Grébant y*         >• 

P 

Paralysie  alterne  par  lésion  d'nn  pédoncule  cérébral;  par  M.  Oyon.    .  ci         » 

Péritoine  (Inllammalion  du)  chez  un  poisson  .-par  M.  Crouppe.    .     .     .  in.i          » 

Phénique  (Action  toxi(|ue  de  l'acide);  par  M.  Bert o:i          » 

Polisseuses  sur  argent  (Coloration  de  la  peau  chez  les)  (avec  planche); 

par  M.  Auguste  Ollivier »        ;.7 

Puerpérale  (Noie  sur  la  paihogénie  de  l'albuminurie)  ;  par  M.  Auguste 

Ollivier.  • »       k'i 

Purulente  (Infection)  sans  plaie  apparente;  par  M.  Duraonlpallier.  .     .  fiî          " 

Purulente  (Infeclion)  sans  plaie  extérieure;  par  M.  Monod 6i 

R 

Rate  (Lésions  de  la)  suivies  de  cicatrisation;  par  M.  Philipeaux.  .    .    .  <o  » 

Rein  (Cellules  sécrétoires  du);  par  M.  Muron i."!!  » 

Eteins  [du  rôle  des)  dans  l'excrétion  de  l'urée;  par  M.  Grébant.  ...  il  » 
Résorption  des  liquides  morbides  (Théorie  physiologique  de  la);  par 

M.  Laborde S6  » 

Rotation  (Mouvement  de)  chez  un  poulet  atteint  de  pneumonie,  etc.    .  I2!>  » 

S 
San»  ("Analyse  du)  chez  des  animaux  soumis  à  dilTérenles  pressions 

aimospbériques;  par  M.  Bert ''.8  » 

Sang  (Analyse  du);  par  M.  Gréhant ACy  >■ 

Sang  (Procédé  d'analyse  du);    par  M.  Bouchard 5i  » 

Sang:  (Examen  de  la  serosilédes  vésicaloircsdu)  paraissant  démontrer 
que   le    sang   ne    renferme  pas    d'acide    uricjue   dans    quelques 

maladies  aiguës  ou  chroniques;  par  M.  Hayem lo 

Sang  des  érysipélaleux  renfermant  des  bactéries;  par  M.  Kepveu.    .    .      Iti4  • 
Sang  Modifications  du)  épanché  dans  les  séreuses  et  dans  le  tissu  con- 
jonctif: par  MM    Ranvier  et  Cornil ns          i 


127 

C.    R.  SI. 

SaturnUme  chronique  et  gouUe;  par  M.  I.ancereaui yy 

Sensibilité  cutanée 'Mesure  de  la);  par  M.  Brown-Séquanl 6i          • 

Strychnine    et   aconiline   (Action  opposée  de    la    —    et  de    1');   par 

M.  Levcn 132          • 

Sulfovinates  r  Action  expérimentale  des);  par  M.  Rabuteau.  .    .      29  et  9i         • 

T 

Température  des  muscles  dans  la  mort  réelle  et  dans  la  mort  appa- 
rente; par  M.  Laborde S8  • 

Température  dans  les  syncopes  et  les  hémorrhagies;  par  M.  Laborde.  fis  » 

Température  dans  les  diverses  parties  du  corps;  par  M.  Laborde.    .    .  130  m 

Tendons  et  tissu  conjonclif  (Structure  des  —  et  du);  par  M.  Ranvier.    .  1S9  >< 

Tétanos  traumatique;  par  M.  Jolîroy.     .         «  •^ 

Tétanos  (Congestion  et  hémorrhagie  du  bulbe  dans  le);  par  M.  JofTroy.    .  94  >■ 
Thromboses  et  embolies  dans  la  (ièvre  typhoïde;  par  M.M.  Liouville  et 

Bouchard H  » 

Thyroïdite  aiguë  dans  la  variole;  par  -M.  Liouville m  . 

Tic  (Du)  chez  le  chien  et  de  la  choree  chez  l'hoinme;  par  M.  Bert.    .     .  G9  >• 

Tœnia  multiple  chez  l'botnme;  par  M.  Vaillant ;")0  >• 

—  «o/ium  Observations  physiologiques  sur  le  ;  par  M.  A.  LabouU>ène.  .  »  ii>9 
Transplantation  de   l'ereol  d'un  jeune  coq  dans  la  croie   du  même 

animal;  par  M.  Philipeaux i7  » 

Tremblement  dans  la  sclérose  en  placjues  de  la  moelle  epiniére;  par 

M.  JofTroy '.8  . 

u 

Ulcérations  intestinales  consécutives  à  la  section  de  la  moelle  éptniére; 

par  M.M.  Liouville  et  Hayem nî  « 

Urée  (Action  du   bicarbonate  de   potasse  sur  l'excrétion   de  1');    par 

M.  Rabuleau Ii7  ■ 

Urée     (Élimination    de    l' )    par    l'intestin;    par     MM.     Vulpian    et 

Guyochin 20         » 

Utérus  et  vagin  doubles  (avec  planche);  par  M.  Auguste  Ollivier 3.''> 

V 

Vago-sympathique  (Expériences  physiologiques  et  thérapeutiques  par 

compression  du  ;  par  M.  W'aller 93  » 

Vaso-moteurs  (Action  des  nerfs)  sur  la  circulation  et  la  température 
après  arrêt  de  la  circulation  ou  oblitération  artérielle;  par 
M.  Brown-Séquard Sj  » 

Vaisseaux  capillaires  dans  la    tunique   musculaire   des  veines;    par 

M.  Muron f^         » 

Vertèbre  dorsale  surnuméraire  enclavée  sur  un  cheval;  par  M.  Gou- 

baux 3  » 

Vessie  (La  muqueuse  de  la)  absorbe-t-ellc.' par  MM.  Bert  et  Jolyct.  •    .      i'.'9         » 

Y 

TTeux  (Action  sur  les)  de  l'irritation  de  la  muqueuse  bronchique;  par 

M.  Lépine 6')  • 

— Id.;parMM.  Lépine  et  Carville 63         » 

VrS  DE  LA  TABLE  ANALYTIQUE. 


TABLE  DES  MATIERES 

PAR  NOMS  D'AUTEURS. 


B 

C   R.  M. 

Dert Air  (Injection  d')  dans  les  arlùres ii5  » 

—  Hérédité  des  lésions  acquises IG  « 

—  Phénique  (Action  t-oxique  de  l'acide) »  G3 

—  Sang  (Analyse  du)  chez  des  animaux  soumis  à  dif- 

férentes pressions  atmosphériques 48  » 

—  Tic  chez  les  chiens  et  chorée  chez  les  hommes.  .  .  69  « 
—  et  JoL\ET.  .  .  .  Vessie  (La  muqueuse  de  la)  absorbe-t-elle?  .  .  .  .  129  >• 
Bouchard Iritis  après  la  variole 160  » 

—  Myélite  consécutive  à  une  chute  sur  le  siège.  .    .    .  44  » 

—  Sang  (Procédé  d'analyse  du) 52  » 

UoURNEViLtE.    .  .  .  Moelle  épinière  (Hémorrhagie  de  la) 155  » 

Brown-Séquaud.  .  Capsules  surrénales  (Hypertrophie  des)  à  la  suite 

des  lésions  de  la  moelle  épinière 27         » 

—  De  la  douleur  dite  en  ceinture 87         » 

—  Anesthésie  de  tout  le  corps  après  la  section  d'une 

•  moitié  latérale  de  la   moelle  épinière 32         « 

—  Arthropatbie  consécutive  à  une  lésion  de  la  moelle 

épinière 119  » 

—  Atrophie  musculaire  lente  ou  rapide,  suivant  le  de- 

gré d'irritation  de  la  moelle  ou  de  ses  nerfs.    .    .       80         » 

—  Epilcpsie  (Siège  central  de  1') 122  » 

—  Epilepsie  par  lésion  des  cordons  -postérieurs  de  la 

moelle,  immédiatement  au-dessous  du  bulbe.  .  .        82         » 

—  Epilepsie  consécutive  è  l'amputation  des  membres.        90         » 

—  Epilepsie  consécutive  à  la  ligature  des  membres  infé- 

rieurs         87  » 

—  Epilepsie  (De  l'action  des  sections  successives  d'un 

même  nerf  sur  la  production  de  1') HZ  » 

—  Epilepsie  (Une  violente  douleur  peut-elle  arrêter  une 

attaque  d') 120         » 

'    -       —  L'irritation  de  la  zone  èpileptogène  peut  guérir  l'é- 

pilepsie 9         » 

—  Epileptogène  (Zone)  située  sur  le  corps  du  côté  op- 

posé à  la  lésion  cérébrale 9i         » 

MÉM.    1S7U.  10 


130 

C      R. 

lluowN-SugLAiiD.  .  Nerfs  dorsaux  (Effets  de  la  section  des) i40 

—  Encéptiale  (Symptômes  variables  suivant  le  côté  de 

l'encéphale  qui  a  été  lésé) 27,  9G,  no 

—  Mouvement  (Affaiblissement  du)  dans  les  parties  cor- 

respondantes aux  lésions  guéries  du  système  ner- 
veux         43 

—  Emphysème  et  ecchymoses  des  poumons  à  la  suite 

de  lésions  de  la  base  de  l'encéphale     ....      8g,  116 

—  Hérédité  des  lésions  acquises.  .  .      5,  16,  45,  50,  59,  64,  9(5 

—  Sensibilité  cutanùe  (Mesure  de  la) 6i 

—  Vaso-moteurs  (Action  des  nerfs)  sur  la  circulation  et 

la  température  après  arrêt  de  la  circulation  arté- 
rielle         82 

—  et  DuPL'Y Osseux  (Reproduction  du  tissu)  du  crâne  et  du  canal 

rachidien i44 


Carville Air  comprimé  (Action  de  1) 49 

Charcot Estomac  (Ecchymoses  de  1')  après  lésions  de  l'encé- 
phale   39 

—  Claudication   intermittente 146 

—  Hypoglosse  (Lésions  du  noyau  de  l'j  dans  la  paraly- 

sie labio-glosso-laryngée 29 

—  Moelle  (Lésions  de  la)  dans  le  mal  de  Pott,  après 

disparition  de  la  paraplégie u 

—  et  JoFFROY.  .  .  .  Arthropathie  de  l'épaule  dans  l'ataxie  locomotrice.  .  6 

Chalvet Allaitement  naturel  et  artificiel  (Conséquences  de  l'j.  i8 

—  Elimination  de  l'urée  par  l'intestin  et  par  la  peau.  .  16 
CORNML Arthrite  tuberculeuse 23 

—  Foie  (Structure  du) 58 

CuOLPPE Rotation  (Mouvements  de)  chez  un  poulet  atteint  de 

pneumonie,  etc 129 

—  Séreuses  (Inflammation  des)  chez  les  poissons.    .    .  130 

D 

DuMONTPALLiER.  .  .  Purulentc  (Infection)   sans  plaie  apparente.    ...  63 


GouBAUx Côle  surnuméraire  chez  un  cheval 64 

—  Vertèbre  dorsale  surnuméraire  enclavée  sur  un  che- 

val   3 

Gréhant Insuniation  pulmonaire  (Effets  de  1').  ...      49,  116,  118 

—  Oxyde  de  carbone  (Rapidité  de  la  combinaison  de  I') 

avec  les  globules  du  sang 97 

—  Reins  (Du  rôle  des)  dans  l'excrétion  de  l'urée.    .    .  i5 

—  Sang  (Analyse  du) 46 

GuYOcniN Exame.n  des  matières  liquides  de  l'intestin  chez  un 

malade  atteint  de  la  maladie  de  Rright.    .    .    •  .  20 

H 

Uavem ,  Abcès  métaslatiiiues  du  foie S4 


131 

c    n-       u. 
Uayeh Artères  (Lésions  des)  dans  deux  cas  de  purpura- 

hemorrhagica 24         » 

—  Encéphale  (Lésion  inorlelle  de  1')  sans  troubles  de 

l'intelligence,  de  la  parole,  du  mouvement  et  de  la 
sensibilité. 160         » 

—  Leucocytes  (Circulation  des)  et  dépôts  dans  les  vis- 

cères à  la  suite  d'une  injection  sous-cutanée  de 

cinabre H5         » 

—  Muscles  (Cicatrisation  des)  à  la  suite  des  sections 

sous-cutanées 53         » 

—  CEdèmo  du  membre  inférieur  (Anatomie  et  physio- 

logie pathologiques  de  1')  après  ligature  de  la  veine 

cave  et  section  du  nerf  scialique 7         " 

—  Sang  (L'examen  de  la  sérosité  des  vésicatoires  parait 

démontrer  que  le)  ne  renferme  pas  d'excès  d'acide 
urique  dans  quelques  maladies  aiguës  ou  chro- 
niques   10  » 

—  Mort  subite  par  embolies  pulmonaires i6i         » 

J 

JoBEKT Organes  tactiles  des  insectes »          4  7 

—  et  Grandey.  .  .  Nerveuses  (Terminaisons)  chez  les  poissons.    ...  i4l          » 

JoiFROY Atrophie  aiguë  ou  chronique  des  cellules  nerveuses 

de  la  moelle 68         » 

—  Tétanos  (Congestion  et  hémorrhagie  du  bulbe  dans  lo).  si         » 

—  Tétanos   traumati<|ue »        i3 

—  Tremblement  dans   la  sclérose    en    plaques    de   la 

moelle  épiniére 28         " 


Labordk Résorption  des  liquides  morbides  (Théorie  physiolo- 

gi(|uedela).    .    .    .    , 36 

—  Température  dans  les  diverses  parties  du  corps.  .    .      130 

—  Température  dans  la  syncope  et  dans  les  hèmorrha- 

gies 120 

—  Température  des  muscles  dans    la   mort  réelle  et 

dans  la  mort  apparente si 

—  Mort  apparente  ou  réelle  (Procédé  pour  reconnaître 

la) 63 

—  et  Leven Cerveau  (Lésions  et  phénomènes  consécutifs  à  l'en- 
lèvement d'un  hémisphère  du) 

—  Codéine  (Aciion  du  chlorure  de)  sur  la  coniractililé.. 
Laboulbène Echinocoques   (Corpuscules  calcaires  des)  (avec  pi.) 

—  Insectes  nuisibles  aux  fruits  du  noyer 

—  Larve  de  l'Elniis  Jîneus  (avec  planches) 

—  Observations  physiologiques  sur  le   Tœnia  solium. 

Lancereaux Saturnisme  chronique  et  goutte £9 

Legkos Biliaires  (Terminaisons  des  conduits)  dans  les  lobu- 
les du  foie 58 

—  Inné  (Action  sur  le  cœur  du  poison  appelé).  .    .      Si  et  84 
Lépine Action  sur  les  yeux   de  lirriialicn  de  la  muqueuse 

bronchi(|ue, 60 


1 

n 

74 

i> 

^ 

57 

n 

•i9 

)> 

39 

V 

109 

132 

C.    H. 

LÉPiNE Eslomac  (Taches  eccliymoiiques  de  1')  après  lésion 

de  l'encéphale 38 

Leteinturier.  .  .  .  Cérébral  (Lésion  du  pédoncule)  du  côté  droit.  ...  59 

Leven Aconiline  (Poison  musculaire) iJi 

—  Moelle  (Action  primitive  des  poisons  sur  la).    .    .     .  I45 

—  Strychnine  et  aconitine  (Action  opposée  de  la  et  de 

1') 132 

—  Trachée  (ElTels  de  la  ligature  de  la) 13 

LiouviLLE Tromboses,  embolies  et  infarctus  dans  la  fièvre  ty- 
phoïde   14 

—  Thyroïdite  aiguë  dans  la  variole 91 

—  et  Hayeu.   .  .  .  Ulcérations  intestinales  consécutives  à  la  section  de 

la  moelle  épinière 113 

LuNEAu Artère  vertébrale  (Oblitération  de  l)  du  côté  gauche.      132 

M 

Magnan Ilémichorée  droite .  46 

MicBAUD Moelle  (Altérations  des  cornes  antérieures  de  la)  dans 

deux  observations  de  pied  bot 113 

MoNOD Purulente  (Infection)  sans  plaie  extérieure.    ...  62 

MoREAU Artérielle  (Variations  de  la  pression) 33 

—  Kyste  de  l'estomac  rempli  d'entozoaires  chez  un  chien.  44 

MuRON Kyste  simple  ganglionnaire 149 

*  —  Rein  (Cellules  sécrétoires  du).  .  ' 151 

—  Vaisseaux  capillaires  dans  la  tunique  musculaire  des 

veines 88 

N 
Nepveu Bactéries  dans  le  sang  des  érysipélatcux ie4 

O 

Ollivier Claudication   intermittente ;    .    .    . 

—  Claudication  intermittente  chez  l'homme 

—  Polisseuses  sur  argent  (Coloration  de  la  peau  chez 

les)  (avec  planches) 

—  Albuminurie  puerpérale  (Sur  la  pathogénie  de  1').  . 

—  Utérus  et  vagin  doubles  (avec  planches) 

Onimus Electricité.   Inlluence  différente  des  courants  conti- 
nus et  des  courants  induits  sur  la  contraclilité.    . 

Oïos Paralysie  alterne  par  lésion  d'un  pédoncule  cérébral. 

P 

PiiiLiPEAUx Cristallin  (Régénération  du)  chez  les  mammifères.  .  . 

—  Héréditaires  (Mutilations) 

—  Transplantation    de  l'ergot  d'un  jeune  coq  dans  la 

crêle  du  même  animal 17 

—  Crâne  (Transplantation  d'une  couronne  de  trépan  sur 

le)  d'un  animal  de  même  espèce 34 

—  Lésions  do  la  rate  (Cicatrisation  des) 40 

Poi'cuET Leucocytes  (Développement  des) 59 


,45 

89 

)) 

89 

n 

97 

i> 

101 

1) 

35 

71 

n 

67 

» 

64 

D 

59 

» 

Rabuteau. 


Ranvier. 


—  et  COKNIL. 


Renaut.  .   .    . 
ROMILLY   (De). 


Vaillant. 


Waller, 


133 
R 

C.    R. 

Alcool  (Effets  physiologiques  et  thérapeutiques  de  !')•  124 

Diurétique  (Action)  de  l'alcool 87 

■  Bromal  (Action  du) 44 

Chioral  (Action  du) i37 

■  Caféiques  (Action  des)  (Café  et  tbé)  sur  la  nutrition.  .  77 
Menstruation  (Influence  de  la)  sur  la  nutrition,  le 

pouls  et  la  température 75 

Menstruation  (De  l'influence  de  la)  sur  la  nutrition,  iio 
Sulfovinates    (Action  expérimentale  des).   ...     29,  92 
Urée  (Action  du  bicarbonate  de  potasse  sur  l'excré- 
tion de  1') ,    .  57 

Artérielle  (Variation  de  la  pression) 33 

CEdème  du  membre  inférieur  et  lésion  du  tissu  con- 
jonctif  après  ligature  de  la  veine  cave  et  section  du 

nerf  sciatique 6 

Tendons  et  tissu  conjonctif  (Structure  des  —  et  du).  139 
Sang  (Modifications  du)  épanché  dans  les  séreuses 

et  dans  le  tissu  conjonctif li8 

.  Cordon  ombilical  (Structure  du) ,    .  129 

.  Lait(Différence  dans  la  quantité  et  la  composiliondu) 

pour  les  deux  seins  de  la  même  femme lOS 

V 

Txnia  multiple  chez  l'homme. 50 

W 

Vago-sympatliique  (Expériences   physiologiques   et 
thérapeutiques  par  compression  du) 93 


2t 


FIN  DES  TABLES.