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WHITNEY LIBRARY,
1 1 AKYARD UNIYERSITY
THE GIFT OF
.). I). WHITNKY,
Slui-i/is lliioper Prnfessor
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MUSEUM or COMPAKATIVE ZOOLOGY
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COMPTES RENDUS
HEBDOMADAIRES
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
PARIS. — IMPRIMERIE DE GAUTIIIER-VILLARS, RUE DE SEI^•E-SAI^■T-GEnMAI^, 10, PRES I, INSTITUT.
COMPTES RENDUS
HEBDOMxVDAIRES
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES
PUBLIÉS,
CONFORMÉMENT A UNE DÉCISION DE L'ACADÉMIE
«Lu date va 4$ duiUet 4835.
PAR MM. LES SECRÉTAIRES PERPÉTUELS.
TOME SOIXANTE ET ONZIÈME.
JUILLET — DÉCEMBRE 1870.
PARIS,
GAUTHIER- VILLARS , IMPRIMEUR -LIBRAIRE
DES COMPTES RENDUS DES SÉANCES DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES,
SUCCESSEUR DE MALLET-BACHELIER,
(Juai des Auguslins, 55.
1870
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES,
SÉANCE DU LUNDI 4 JUILLET 1870.
PRÉSIDÉE PAR M. CHEVREUL.
MEMOIRES ET C03OITJNICATI01VS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
GÉODÉSIE. — Noie sur les pyramides de VUlejuif el de Juvisy;
par M. Delaunay.
« La base géodésiqne de Villejiiif à Juvisy a joué un rôle important dans
l'hisloire des sciences. C'est à la suite de la première mesure de cette base
par Picard, en iG'yo, et à l'aide des conséquences que ce célèbre astro-
nome en a tirées sur les véritables dimensions de la Terre, que Newton a pu
reconnaître l'identité entre la force qui retient la Lune dans son orbite et
la pesanteur terrestre.
» On lit dans le Mémoire intitulé : Mesure de la Terre par M. l'abbé
Picard [Mémoires de l'Académie des Sciences, t. YII, p. i3'}i) :
« Dans le dessein que l'on s'était proposé de travailler à la mesure de la Terre, on a jugé
que l'espace contenu entre Sourdon, en Picardie, et Malvoisine, dans les confins du Gasti-
nais et du Hurepois, serait très-commode pour l'exécution de cette entreprise; car ces deux
termes, qui sont distants l'un de l'autre d'environ Sa lieues, sont situés à peu près dans un
même méridien, et l'on avait su, par plusieurs courses faites exprès, qu'ils pouvaient être
liés par des triangles, avec le grand chemin deVillejuive (i) à Juvisy; lequel chemin, étant
pavé en droite ligne sans aucune inégalité considérable, et d'une longueur telle qu'on verra
( i) On disait autrefois FillejuU'e au lieu de Fillejiiif, qui est l'orthographe actuelle.
( 6 )
ci-après, est propre pour servir de base fondamentale à toute la mesure qu'on y avait en-
treprise.
» Pour mesurer actuellement la longueur de ce chemin, on chosit quatre bois de pique
de deux toises chacun, qui, se joijjnant à vis deux à deux par le gros bout, faisaient deux
mesures de quatre toises chacune.
>i L'ordre que l'on garda en mesurant, fut que lorsqu'une des mesures avait été posée à
terre, l'on y joignait l'autre bout à bout le long d'un grand cordeau, puis on relevait la
première, et ainsi de suite; et pour compter avec plus de facilité, on avait donné dix fiches
à celui des mesureurs qui s'était rencontré la ])remière fois à la tète des deux mesiiies, le-
quel devait laisser une fiche à chaque fois qu'il poserait sa mesure à terre; ainsi, chaque
fiche valait 8 toises, et quand les dix fiches avaient été relevées, on marcpiait 80 toises.
a C'est ainsi qu'on a mesuré deux fois la distance depuis le milieu du moulin de Ville-
juive tout le long du grand chemin jusqu'au Pavillon de Juvisy, laquelle distance a été
trouvée de 6662 toises 5 pieds en allant, puis de 5663 toises i pied en revenant; mais,
comme l'on n'espérait pas pouvoir approcher plus près de la justesse, on a partagé le dif-
férent, s'arrêtant au compte rond de 5663 toises pour la longueur ou base fondamentale,
sur laquelle nous avons établi tous les calculs ci-après. »
» La même base a été mesutce de nouveau en 1740 par Jacques Cassini
et Lacaille. On lit, en effet, dans l'ouvrage de Cnssini de Thin-y intitulé :
Ln Méridienne de r Observatoire royal de Paris, vérifiée dans toute l'étendue
du royaume par de nouvelles observations (p. 19) :
« Pendant ce temps, mon père, aidé de M. l'abbé de Lacaille, s'occupa à vérifier la base
de M. Picard et la direction de la méridienne.
X On ne voyait plus, des deux termes de la base de M. Picard, que l'emplacement du
moulin de Villcjuive; et quand même on les aurait reconnus, les maisons qu'on a bâties et
la quantité d'arbres que l'on a plantés dans l'alignement de cette base n'auraient pas permis
de voir récipro(]uement ces deux termes.
» Le parti que |)rit mon père, après avoir bien examiné le terrain, fut de mesurer une
autre base, à peu près dans la même direction, et de la rapporter, soit à celle de M. Picard,
au cas que l'on en pût reconnaître évidemment les termes, soit ."i un des côtés de ses triangles.
» Nous parlerons, dans la suite, des différents moyens qui furent mis en usage pour
tenter cette voie; il nous suffira de dire ici qu'elles ont réussi toutes deux, et qu'il en a ré-
sulté que la base de M. Picard était trop longue d'environ 6 toises. »
» Et plus loin (p. 37 du même ouvrage) :
<i Après avoir mesuré la base et s'être assuré de sa grandeur précise, mon père s'a|)pli-
qua à la recherche des termes de celle de M. Picard. 11 fit fouiller dans les lieux où l'on en
voyait des vestiges. On reconnut avec évidence les pierres qui avaient servi d'assise au mou-
lin de bois de Villcjuive, et les fondements du Pavillon de Juvisy. Ayant abaissé de ces
deux points des perpendiculaires sur la direction de notre base, ou trouva que le coin du
Pavillon de Juvisy tombait à 28 toises 3 pieds ç) pouces en deçà du teime méridional, et
<pie !<■ moulin de Villejiiive répondait à un point éloigné en deçà du |)iquet, par rapport à
Villejuive, de ^2 toises 5 pieds 7 pouces : ce qui lit voir que la base de M. Picard, rap-
( 7 )
portée à nos mesures, devait être de 5657 'oises 2 pieds 8 pouces, au lieu 5663 toises, avec
une différence qui est à raison de i toise sur 1000.
» A la page 34 du même ouvrage {Méridienne vérifiée) il est dit :
« On s'était proposé de faire construire deux pyramides de pierre aux extrémités de
la nouvelle base, pour servir de monuments plus durables que n'étaient les termes de
M. Picard. »
M Et deux pages plus loin (page 36) :
« On doit construire une pyramide à la ])lace de l'arbre qui a servi de terme méridional :
on en a bâti une en I •342, à 18 toises 5 pieils 8 pouces au delà du piquet qui servait de terme
septentrional, ce qui fait que nous avons supposé la base entière de 5748 toises justes. «
» Une vérification de la base de Villejuif à Juvisy ayant été faite en 1 766,
les deux pyramides existaient.
)i Telle est l'origine des deux pyramides de pierre que l'on voit encore
aujourd'hui à gauche de la grande route de Paris à Fontainebleau, l'une à
l'entrée du village de Villejuif, l'autre sur le territoire de Juvisy, au point où
la route coinmeiice à s'abaisser dans la vallée de l'Orge. Ces monuments,
qui ont la forme d'un piédestal carré garni d'une corniche et surmonté
d'un obélisque, sont un peu inégaux : celui de Juvisy a environ 10 mètres
de hauteur; celui de Villejuif est un peu plus petit. Ils appartiennent à l'A-
cadéiTiie des Sciences.
» La pyramide de Juvisy est située tout au bord de la route, à l'angle
qu'elle forme avec un chemin de grande communication. Elle est protégée
par une ceinture carrée de huit grosses bornes, et est en parfait état de
conservation.
» La pyramide de Villejuif se trouve au milieu de propriétés cultivées,
situées au bord de la route et à une certaine hauteur au-dessus de son ni-
veau. Elle s'est moins bien conservée que la pyramide de Juvisy. Pour la
protéger contre les causes de dégradation provenant de la culture du ter-
rain environnant, l'Académie a acheté récemment une portion de ce ter-
rain ; des bornes placées aux angles indiquent les limites de la propriété de
l'Académie.
» Mais cette mesure de précaution n'était pas suffisante. J'ai été chargé
par la Conmiission administrative de faire poser autour de la pyramide de
Villejuif une ceinture de grosses bornes pareilles à celle de Juvisy; l'inté-
rieur du carré formé par ces bornes à été garni, comme à Juvisy, d'un pavé
en pente destiné à éloigner les eaux de la base de la pyramide. Le contour
du terrain acheté par l'Académie a été, en outre, garni d'iuie double ligne
( 8 )
de pavés. En même temps, j'ai fait faire à la pyramide elle-même les répa-
rations dont elle avait besoin.
» La Commission administrative a décidé que des inscriptions en lettres
dorées sur marbre noir seraient fixées aux deux pyramides, afin de rappeler
la signification de ces monuments. Ces inscriptions sont posées. On lit sur
la pyramide de Villejuif :
PYRAMIDE DE VILLEJUIF
extrémité nord de la base géodésique
de villejuif a juvisy
1670 (Picard)
1740 (J. Cassi.ni ET Lacaille)
PROPRIETE DE L ACADEMIE DES SCIENCES
» La pyramide de Juvisy porte une inscription analogue.
1) Je terminerai en indiquant par le croquis ci-joint les positions que les
deux pyramides occupent relativement aux bases qui ont été mesurées en
1670 et 1740.
A c D E B
A est la pyramide de Villejuif; B celle de Juvisy; C est le piquet auquel se terminait la base mesurée
par J. Cassini et Lacaille; D est le point .luquel correspond le moulin de Villejuif (base de Picard);
E est le point auquel correspond le Pavillon de Juvisy (base de Picard).
Distance EB 28' 3p' 9?"
Base (le Picard, ED 5657 2 8
Distance DA 61 5 7
Base de J. Cassini et Lacaille, AB... 5748' op' oP"
GÉOLOGIE. — Noie sur les roches qu'on a rencontrées dans le creusement
du tunnel des Alpes occidentales, entre Modane et Bardonnèclie ; par M. Eue
DE BeACMOXT ( I ) .
« L'Europe entière a été attentive à l'ouverture du passage souterrain
qui doit réunir la P'rance à l'Italie en traversant la crête des Alpes occi-
(i) L'Académie a décidé que cette Communication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Compte rendu.
(9)
dentales. Tout le monde a suivi avec intérêt les progrès de cette utile entre-
prise, qui doit arrivera son terme en 1871. La galerie qu'on appelle le
plus souvent le Tunnel du mont Cenis ne traverse pas, à proprement parler,
le mont Cenis, mais elle se dirige de Modane vers Bardonnèche, en passant,
à 24 kilomètres au sud-ouest du col du mont Cenis, sous la côte traversière
située entre le col de la Pelouze et le col de la Roue.
» M. Ange Sismonda, professeur de minéralogie et de géologie à l'Univer-
sité de Turin, dont l'Académie connaît depuis longtemps les beaux travaux
sur la constitution géologique des Alpes du Piémont et de la Savoie, s'est
trouvé plus à portée qu'aucun autre géologue de visiter les travaux qui se
poursuivent depuis treize ans pour l'exécution du tunnel des Alpes occiden-
tales. Il a pu le faire sans aucun obstacle, car le Gouvernement italien, qui,
aux termes des traités, tait creuser le tunnel, accorde constamment à M. Sis-
monda les facilités nécessaires pour vérifier l'exactitude du rapport fait
par M. Mans et par lui à l'époque où a été conçue pour la première fois
l'idée de percer les Alpes dans lé but de mettre l'Italie en communication
avec la France par le chemin de fer Victor-Emmanuel. C'est avec un carac-
tère officiel qu'il parcourt annuellement les chantiers.
« Dans un dernier voyage, exécuté pendant le cours de l'été dernier,
M. Sismonda a recueilli, à plusieurs exeuiplaires, avec le concours de
MM. les ingénieurs Copello et Borella, directeurs des travaux, foutes les
roches qui ont été rencontrées dans le percement, et il a bien voulu me
faire l'honneur de m'envoyer, au mois de décembre dernier, une de ces
précieuses collections, qu'il a eu la bonté de compléter dernièrement, en
m'apportaut lui-même plusieurs échantillons supplémentaires. Je profite
de la présence de M. Sismonda parmi nous pour mettre cette collection
sous les yeux de l'Académie, afin que les géologues qui se trouvent à Paris
puissent recueillir de la bouche même du savant professeur de Turin les
intéressants détails que, plus que personne, il est à même d'ajouter au cata-
logue des échantillons rassemblés par lui.
>i Les échantillons sont au nombre de cent vingt-sept, mais il reste une
lacune correspondante aux parties du tunnel qui ont été percées depuis le
mois de septembre dernier et à celles qui restent encore à percer. Éva-
luant à sept le nombre des échantillons qui combleront plus tard cette
lacune, j'ai numéroté toute la collection en une seule série, depuis le n° 1,
qui se rapporte à la partie du tunnel, voisuie de Modane, jusqu'au n" 134
qui appartient à la |iartie voisine de Bardonnèche.
C. K., 1870, i' Semestre. (.T. LXXl, N" 1.) 2
( «o)
» J'ai dressé ensuite, de la collection totale, un catalogue où les échan-
tillons se suivent dans l'ordre de leurs numéros qui est celui de leurs
distances à l'entrée septentrionale du tunnel; mais avant de parler de ces
distances, qui sont indiquées pour chaque échantillon, il est nécessaire
d'entrer dans quelques détails sur la longueur et la position du tunnel.
» L'ouverture septentrionale du tunnel est située près de Modane, dans
la vallée de l'Arc, affluente de l'Isère et du Rhône, à 1202™, 82 au-dessus de
la mer. L'entrée méridionale est située près de Bardonnèche, dans la vallée
de RochemoUe, affluente de la Doire ripaire et du Pô, à l'altilufle de
1 335™, 38. La distance horizontale entre les verticales des deux entrées du
tunnel est de 12220 mètres.
» L'entrée méridionale étant, d'après les données précédentes, plus
élevée de i32™,56 que l'entrée septentrionale, on voit que le tunnel a
dans son ensemble une pente d'environ 1 1 millimètres par mètre corres-
pondant à peu près à ^degré (37' 17"). Mais cette pente moyenne n'ap-
partient rigoureusement à aucune partie du souteri'ain qui forme un léger
coude dans le sens vertical. Près de l'entrée méridionale il présente un point
culminant élevé de 3 mètres au-dessus de cette entrée, et à partir de ce
point il descend régulièrement, d'une part vers Bardonnèche et de l'autre
vers Modane, de manière à ce que les eaux qui pourraient s'y introduire,
près de l'une ou de l'autre entrée, tendent naturellement à s'écouler par
cette même entrée.
» Pour l'objet que nous nous proposons, nous pouvons faire abstraction
de ces pentes légères et considérer le tunnel comme représenté par luie
ligne droite horizontale tirée de l'une à l'autre des verticales de ses deux
extrémités.
» Le plan vertical dans lequel se trouve compris le tunnel est dirigé, par
rapport au méridien astronomique, du nord i4 degrés ouest au sud i4 degrés
est; c'est aussi la direction de la ligne droite horizontale à laquelle nous le
réduisons par la pensée.
)) Cette direction n'est pas perpendiculaire aux plans des couches du
terrain, qui, d'aprèsles observations obligeamment communiquées à M. Sis-
monda par M. l'ingénieur Mella, sont dirigées en moyenne, et d'une ma-
nière à peu près constante, du nord 35 degrés est au sud 35 degrés ouest
du monde et plongent du côté du nord-ouest en formant, avec l'horizon,
un angle de 5o degrés. Le tunnel les coupe donc obliquement, et par con-
séquent suivant une longueur supérieure à leur épaisseur réelle.
)) Pour l'exploration d'iui groupe de couches fortement inclinées, un
( II )
tunnel est comparable à un sondage : un sondage vertical couperait de même
ces couches obliquement. Dans le cas qui nous occupe, le tunnel a sur le
sondage un double avantage : d'abord, il a beaucoup plus de développe-
ment que ne pourrait en avoir un sondage, car il a 12220 mètres de lon-
gueur, tandis qu'on n'a guère fait de sondages ayant 1000 mètres de
profondeur, c'est-à-dire -^ de la longueur du tunnel. En outre, le tunnel
a entamé les roches sur une largeur assez grande pour qu'on puisse y
pénétrer, les observer en place et choisir les échantillons destinés à les
représenter, ce qu'on ne peut faire dans un sondage.
» L'obliquité de la perforation n'entraîne aucun inconvénient sérieux. Le
tunnel des Alpes occidentales apprend à la géologie fout ce que pourrait
lui apprendre un sondage dirigé perpendiculairement aux plans des cou-
ches ; mais un sondage ou un puits de plus de 7000 mètres de pronfon-
deur, dirigé suivant une ligne oblique à l'horizon serait, quant à présent,
inexécutable; et si la géologie pouvait disposer des millions nécessaires pour
opérer, dans son seul intérêt^ un pareil percement, on ne saurait faire au-
trement que de le diriger horizontalement. L'ouverture du tunnel a relevé
la science de sa pauvreté comparative, et elle a lieu de se féliciter de ce que
ce grand monument de l'industrie est devenu, en même temps, un véri-
table monument scientifique.
» Remarquons toutefois qu'il ne l'est devenu que par l'énergique persévé-
rance de M. Sismonda et de MM. les ingénieurs Copello et Borella, qui ont
pris soin de noter toutes les couches traversées, et d'en recueillir des échan-
tillons, avant que le muraillement du tunnel les ait dérobées pour toujours
à nos regards. Cette séquestration forcée dçnne un prix tout spécial à la
collection que M. Sismonda m'a permis de présenter, en son nom, à l'Aca-
démie et m'a engagé à en dresser un catalogue plus détaillé que ne l'a-
vait fait mon savant ami. J'espère qu'elle portera l'Académie à accueillir
ce catalogue avec bienveillance dans son Compte rendu, comme le procès-
verbal d'observations qui ne pourront être réitérées.
» Il est essentiel de remarquer que, le tunnel coupant les couches obli-
quement, les distances auxquelles il les rencontre successivement ne don-
nent pas la mesure exacte de leurs épaisseurs respectives, comme le ferait
un sondage vertical dans des couches horizontales. 11 donne des épaisseurs
exagérées comme le fait un sondage vertical traversant des couches in-
clinées.
» Les épaisseurs des couches indiquées par le tunnel sont donc sujettes
à une réduction, mais cette réduction est facile à opérer. Le tunnel étant di-
2..
( 12 )
rigé vers le nord i4 degrés ouest, et les couches vers le tiord 35 degrés est,
la direction du tunnel coupe celle des couches sous un angle de 49 degrés.
On a aussi à tenir compte de l'inclinaison des couches qui plongent, comme
il a élé dit, du côté du nord-ouest, en faisant avec l'horizon ini angle de
5o degrés. D'après ces données, on trouve aisément, par une fornnile con-
nue, que l'épaisseur des couches mesurée obliquement sur la direction du
fmmel est à leur épaisseur réellej" mesurée perpendiculairement à leur sur-
face, dans la proportion de 100 à 58 environ (1). Il faut ajouter que le
parallélisuie des couches, dans la longueur du tunnel, n'étant (pi'approxi-
malif, et quelques-unes d'entre elles présentant des inflexions assez mar-
quées, ou ne peut viser à ime très-grande rigueur dans la réduction tlont
il s'agit; d'où il résulte qu'an nombre 58 on pourrait substituer, pour sim-
plifier, le nombre 60 et réduire les épaisseurs indiquées par le Imniel dans
la proportion de 100 à 60 on de 10 à 6, c'est-à-dire en retrancher suiq)lo-
ment les -^ pour avoir les épaisseurs normales.
» Le percement du tunnel a été commencé séparément à ses deux extré-
(l) a étant l'angle formé par la direction des couches et celle du tunnel, / étant l'incli-
naison des couches par rapport à l'horizon, e l'épaisseur d'une couche mesurée par la ligne
du tunnel el F. l'épaisseur normale de cette même couche, on a
E = 6".sina sini.
Dans le cas actuel a = 49", ' ^= 5o° ; si l'on fait e = i , on a
logE = Iogsin49°logsin5o" :
logsin49" = 9,8777799
logsin5o" = 9,8842540
19,7620339,
d'où l'on tire
logE = — I -1-0,7620339, E = 0,57014, soit environ 58 centièmes.
Appliquant la même formule à l'épaisseur totale des couches traversées par le tunnel dont
la longuein- est de 12 220 mètres, on a
logsin49" = 9,877,7799
logsinSo" := 9,8842540
l0gI2 22O =: 4,0871423
23 ,8491762,
logE = 3,8491762, E = 7o66,o4-
Cette épaisseur est inférieure à la longueur totale du tunnel de 5 i54 mètres, quantité i\n
peu supérieure aux ,'„ de cette longueur, (|ui seraient de 4f^<^''^ mètres.
( i3 )
mités sous la forme de deux galeries marchant à la rencontre l'une de
l'autre, pour se réunir dans l'intérieur de la montagne intermédiaire. Les
deux galeries ne se sont pas encore rencontrées. Le 3o juin dernier, la ga-
lerie partant de Modane avait atteint la longueur de 4723™, 55, et celle par-
tant de Bardonnèche la longueur de 66o3'",65. La somme des longueurs
des deux percements exécutés était donc de 11 327™, 20, et la longueur
totale du tunnel devant être de 12220 mètres, on voit que les deux fronts
de taille marchant à la rencontre l'un de l'autre, n'étaient plus éloignés que
de 892"', 80.
» De part et d'autre, on cheminait depuis assez longtemps dans des cal-
caires schisteux forts analogues entre eux, et connue ces calcaires schisteux
sont d'une composition très-uniforme, il est prohable que, dans le perce-
ment des 892'", So encore intacts, on ne rencontrera pas autre chose que
ces mêmes calcaires schisteux.
» M. Sismouda a joint à chacun des échantillons qu'il a eu la bonté de
me donner la distance du point où il a été pris à l'entrée de la galerie d'où
il provient, distance déterminée avec le concours de l'ingénieur, directeur
du travail, M. Copello, pour la galerie partant de Modane, et M. Borella,
pour la galerie [partant de Bardonnèche. J'ai conservé soigneusement dans
le catalogue ces précieuses indications, mais, pour les échantillons pro-
venant de la galerie de Bardonnèche, j'y ai joint celle de la distance à l'en-
trée septentrionale du tunnel, près de xModane, distance qui s'obtient par
luie simple soustraction, en partant de la longueur connue du tunnel entier,
qui est de 12220 mètres. Cela permet de comparer les couches entre elles,
comme étant les membres d'une même série, ainsi qu'elles le sont en effet,
et de les comprendre toutes dans un catalogue unique et continu.
Catalogue des roches traversées par le tunnel des Alpes occidentales.
JN° 1, à 282 mètres de Modane. — Schiste artrileux ou grès à grain très-fin, un peu micacé,
(le couleur ardoisée.
N" 2, à 283 mètres de M. — Schiste argileux à texture fibreuse, de couleur ardoisée.
N° 3, à 365 mètres de M. — Quartis hyalin blanc, avec un peu de chlorite, en veines dans
le schiste argileux.
N" 4, à Sto mètres de M. — Schiste argileux ou grès à grain fin, un pdu micacé, de couleur
ardoisée.
N" 5, à BtS mètres de M. — Schiste argilo-calcaire à surfaces luisantes, de couleur noire.
11 est légèrement effervescent dans l'acide chlorhydricjue.
N" 6, à 385 mètres de M. — Schiste argileux d'une structure fibreuse très-prononcée, ;i
surfaces luisantes, de couleur noire.
( '4)
N° 7, à 4^9 mètres de M. — Quartz hyalin blanc, accompagné de spath calcaire, de dolomie
lamellaire, de talc, de chlorjte et de pyrite, en veines dans les schistes.
N° 8, à 658 mètres de M. — Schiste argilo-quartzeux noir, à surfaces d'écrasement luisantes,
contenant des veinules d'anthracite, semblable à celui qui forme habituellement
le toit et le mur des couches d'anthracite.
N° 9, à 790 mètres de M. — Schiste gris, légèrement calcarifère, à surfaces micacées bril-
lantes, contenant des nodules irréguliers de quartir hyalin.
N° 10, à 1 102 mètres de M. — Grès schisteux gris à surfaces micacées brillantes.
N" II, à ii36 mètres de M. — Grès schisteux légèrement calcarifère, gris, à surfaces mi-
cacées brillantes.
N" 12, h 1228 mètres de M. — Schiste argileux ou grès, à grain très-fin, un peu micacé, de
couleur ardoisée, à surfaces luisantes d'un aspect fibreux, analogue aux n°' 1,
2 et i.
N° 13, à laSi mètres de M. — Grès schisteux légèrement calcarifère, gris, à surfaces mica-
cées brillantes.
N" 14, à i3i3 mètres de M. — Conglomérat quartzo-talqueux, à noyaux de quartz hyalin
fondus et ramifiés dans la masse, d'apparence métamorphique.
N° 15, à 1872 mètres de M. — Grès quartzeux gris, à gros grains, calcarifère, à surfaces
micacées brillantes.
N" 16, à i3']3 mètres de M. — Conglomérat quartzeux, à noyaux de quartz hyalin fondus
et ramifiés dans la masse, à surfaces micacées brillantes, analogue à la fois aux
n"^ U et 1,5.
N° 17, à i388 mètres de M. — Schiste argileux ou grès à grain fin micacé, de couleur
ardoisée, sujet à contenir les empreintes végétales qui accompagnent ordinaire-
ment l'anthracite.
N° 18, à 1425 mètres de M. — Anthracite, d'une variété très-habituelle «Jans la contrée.
N° 19, à i586 mètres de M. — Grès quartzeux à grains fins, à feuillets minces, à surfaces
micacées brillantes, d'un gris clair.
N" 20, à 1707 mètres de M. — Grès quartzeux gris, à surfaces micacées brillantes.
N" 21, à i865 mètres de M. — Quartz hyalin accompagné de dolomie lamellaire présen-
tant la forme du rhomboèdre primitif, de talc, de mica, de chlorite et de pyrites,
en veines dans les grès.
N° 22, à 2027 mètres de M. — Schiste micacé verdâtre, probablement métamorphique.
N° 23, à 2o36 mètres de M. — Schiste gris calcarifère, à surfaces micacées brillantes, tra-
versé par des petits filons remplis de cristaux de carbonate de chaux, offrant la
forme du rhomboèdre équiaxe et du prisme hexagonal.
N" 24, à 2090 mètres de M. — Schiste talqueux verdâtre, onctueux au toucher.
^"25, à 2i5o'",65 de M. — Quartzite blanc grenu, à éclat gras dans la cassure, conte-
nant une veine de quartz hyalin blanc avec veinules talqueuses, et quelques py-
rites, accompagné d'anhydrite; situé à la base du système anthracifère.
N° 2C, à 2i52"',90 de M. — Quartzite à grain fin, d'un gris bleuâtre, à éclat gras dans
( i5)
la cassure, à surfaces de séparation ondulées, luisantes, couvertes de petites
paillettes d'apparence talqueuse, avec veines d'anhydrite blanc cristallise.
N° 27, à 2i54 mètres de M. — Quartzite à grain fin d'un gris bleuâtre pâle, à éclat gias
dans la cassure, à surfaces de séparation ondulées, couvertes de petites pail-
lettes d'apparence talqueuse; avec veines d'anhydrite.
N' 28, à 2i56 mètres de M. — Quartzite grenu blanchâtre, à éclat gras dans la cassure,
avec pyrites et veines d'anhydrite cristallisé.
N" 29, à 2171 mètres de M. — Quartzite grenu, à éclat gras dans la cassure, présentant
des nuances verdâtres et violacées irrégulièrement entremêlées, et des surfaces
de séparation courbes couvertes de petites paillettes d'apparence talqueuse.
N° 30, à 2i8i mètres de M. — Quartzite grenu, à éclat gras dans la cassure, présentant des
nuances légères de couleur verdâtre ou violacée, des surfaces de séparation
courbes recouvertes de petites paillettes d'apparence talqueuse, traversé par un
petit filon d'anhydrite blanc cristallisé et renfermant de nombreux cristaux
d'anhydrite pénétrant la masse.
N° 31, à 2188 mètres de M. — Anhydrite blanc saccharoïde à gros grains, intercalé dans
le quartzite et contenant des modules irréguliers d'une substance blanchâtre
d'apparence stéatiteuse (lithoraarge ?), ainsi que du talc.
M" 32, à 2189 mètres de M. — Anhydrite blanc saccharoïde à gros grains, semblable au
précédent et intercalé de même dans le quartzite. Il est traversé par des feuillets
interrompus de talc verdâtre, onctueux au toucher, analogue au n° 24.
N" 33, à 2211 mètres de M. — Quartzite blanc grenu, à éclat gras dans la cassure, divisé
en feuillets courbes couverts de paillettes verdâires, d'apparence talqueuse et
enveloppant un rognon irrégulier d'anhydrite lamellaire à gros grains d'une
teinte rosée, donnant sur la langue une légère saveur salée.
N° 34, à 233o mètres de M. — Quartzite blanc grenu, à éclat gras dans la cassure, présen-
tant des traces de schistosité et des nuances verdâtres, renfermant quelcpes cris-
taux d'anhydrite qui paraissent avoir pénétré dans les fissures.
N" 35, à 2425 mètres de M. — Quartzite blanc grenu, à éclat gras dans la cassure, à sur-
faces de séparation couvertes de paillettes d'apparence talqueuse, et associé à du
talc verdâtre, onctueux au toucher, analogue aux n"' 24 et 32.
N° 36, à 2435 mètres de RI. — Schiste talqueux, verdâtre, onctueux au toucher, analogue
aux n°° 24, 32 et 35, intercalé dans le quartzite.
N° 37, à 2442 mètres de M. — Quartzite blanc, à éclat gras dans la cassure, à feuillets
couverts d'un enduit talqueux verdâtre et associé à un anhydrite lamellaire à
très-large clivage, transparent, blanc et nuancé de teintes violacées. (Très-bel
échantillon.)
N" 38, à 2444 mètres de M. — Quartzite blanc grenu, à éclat gras dans la cassure, présen-
tant sur les surfaces de séparation quelques traces de matière talqueuse.
N° 39, à 247^ mètres de M. — Quartzite grenu à éclat gras dans la cassure, de nuances
vertes et violacées, ayant une surface couverte d'un reste de l'anhydrite auquel
( i6 )
il était adhérent, et semée de nombreux cristaux de pyrites de fer, qui se mon-
trent aussi dans l'intérieur du fragment.
W 4-0, à 247^ mètres. — Quartzite grenu, à éclat gras un peu terne dans la cassure,
nuancé de vert et de violet, renfermant quelques pyrites.
N° il, de 2476 a 2480 mètres de M. — Talc schisteux d'un vert clair, onctueux au toucher,
avec veines irrégulières d'anliydrite blanc saccharoïde.
N° 42, à 2482 mètres île M. — Anhydrite blanc saccharoïde contenant do ]ietits noyaux
irrcguliers de talc d'un gris verdàtre en paillettes agglomérées.
N" i3, de 2481 à 2487 mètres de M. — Anhydrite grenu d'un blanc bleuâtre, non effer-
vescent, contenant des cristaux d'anhydrite blanc lamelleux et des groupes de
fragments de calcaire compacte, noirâtre, un peu bitumineux, effervescent et
soluble dans l'acide chlorhydrique, qui semblent résulter de la dislocation de
fragments plus gros.
]N° kk, à 2489 mètres de M. — Anhydrite grenu, d'un gris bleuâtre, contenant des nodules
irréguliers de talc, d'un blanc verdàtre en lamelles agglomérées, du quartz bleuâtre
cristallisé, des nodules ramifiés de dolomie lamellaire blanchâtre et des rognons
de sel gemme cristallisé, d'un jaune de miel, qui paraît avoir rempli des cavités
géodiques, où il s'est moulé sur les cristaux des autres substances.
N" 45, à 25o3 mètres de M. — Anhydrite grenu d'un gris bleuâtre clair, à cassure esquil-
leusc, ne donnant pas sur la langue de saveur salée.
N° 46, à 25o5 mètres de M. — Anhydrite grenu grisâtre, à cassure esquilleuse, sans saveur.
N" 4-7, de 2491 à 2624 mètres de M. — Anhydrite d'un gris bleuâtre clair, à cassure esquil-
leuse, non effervescent, sans saveur.
N" 48, à 2613 mètres de M. — Anhydrite grenu, blanc, sans saveur, non effervescent, pré-
sentant des traces de soufre, renfermant de petits fragments de calcaire compacte,
noirâtre, un peu bitumineux, soluble dans l'acide chlorhydrique, comme au
n°43.
1N° 49, de 2525 à 2665 mètres de M. — Anhydrite grenu d'un gris verdàtre, donnant sur
la langue une saveur salée, contenant des fragments de calcaire noir et de pe-
tites cavités irrégulièros qu'on peut supposer jirovenir de la dissolution de petits
nodules ramifiés de sel gemme.
IN° oO, à 2697 mètres de M. — Calcaire compacte brun, à cassure esquilleuse, analogue aux
fragments des n"' 43 et 48, renfermant des petits fdons et des veines irrégulières
tl'anhydrite blanc grenu.
N° 51, à 2G()8 mètres de M. — Calcaire gris schistoïde grenu, très- effervescent, avec veines
et petits fdons de spath calcaire blanc, et lamelles noirâtres. La masse et les veines
se dissolvent très-rapidement dans l'acide chlorhy(lri<iue, et il ne reste dans l'acide
que des |)aillettes de mica et de talc, des particules d'anhydrite et des grains
de quartz hyalin.
N" 52, à 2708 mètres de M. — Anhydrite blanc, grenu, sans saveur appiéciablc, renlernic
dans le calcaire et contenant des fragments de calcaire compacte, noirâtre, analogues
à ceux des n"' 43 et 48.
( 17 )
N° 53, à 3,717 mètres de I\l. — Calcaire j^ris, cristallin, non seliisleux, livs-liuiUnirtu so-
luble dans l'acide chlorhydrique.
N" 54, à 27 19 mètres de M. — Calcaire d'un blanc grisâtre, cristallin, znnè.
N° 55, à 2736 mètres de M. — Schiste talqueux, verdâtre, avec nnances violacées.
N" 5(), à 2744 mètres de M. — Quartz gi'enii schistoide. à feuillets couverts de talc jaunâtre.
N" 57, à 2799 mètres de M. — Calcaire cristallin, grisâtre, un peu zone, mais non scliisleu\,
contenant des paillettes de mica et quelques pyrites, très-faciU'ment soluble dans
l'aride cldorliydrique.
N° 58, à 2833 mètres de M. — Calcaire schisteux, ;i veines alternatives de calcaire hlanc
cristallin, et de schiste noir, contourné, brillant.
N" 59, à 2836 mètres de M. — Calcaire schisteux, très-effervescent, à feuillets noirs et lui-
sants, traversé ])ar des veines blanches de quartz hyalin et de calcaire spathique.
N" 60, à 2869 mètres de M. — Anhydrite grisâtre, grenu.
N" 61, à 3334 mètres de M. — Calcaire schisteux blanc, cristallin, à feuillets schisteux
noirs, luisants, présentant des surfaces de glissement; très-effervescent, mais ne
se désagrège pas complètement dans l'acide chlorhydrique.
!N° 62, entre 3334 et 4192 mètres de ]\I. — Schiste gris très-qnartzeux, calcarifère, conte-
nant des veinules d'anhydrite, intercalé dans les schistes.
N" 03, entre 3334 et ^ig^ mètres de I\I. — Schiste talqueux verdâtre, très-quartzeux, cal-
carifère, contenant des veinules d'anhydrite et quelques pyrites.
N" 64, entre 334o et 4 '92 mètres de M. — Schiste calcarifère, d'un noir verdâtre, à feuil-
lets brillants, un peu satinés.
N" 65, entre 334o et 4'92 mètres de M. — Id., contenant des veines blanches de quartz
et de spath calcaire.
N° 66, entre 334o et 4i9''- mètres de M. — Schiste calcarifère, d'un noir verdâtre, à feuil-
lets ondulés, brillants, un peu satinés.
N" 67, à 4'9'- mètres de M. — Schiste calcarifère, d'un gris noirâtre, à feuillets ondulés,
brillants, un peu satinés.
[Intervalle de 1918 nièlres; sept numéros laissés en blanc.)
IN° 75, à 61 10 mètres de Bardonnkche (61 lo mètres de Modane (milieu du tunnel ). — Cal-
caire cristallin, gris, schistoïde, à feuillets ondulés d'un gris noirâtre, brillants,
un peu satinés; il est très-effervescent, mais ne se désagrège pas complètement,
et laisse un squelette cohérent mais friable.
N" 76, à 5900 mètres de B. (6320 mètres de M.). — Calcaire cristallin, gris, sableux, avec
veines de calcaire s])athique blanc; il est très-effervescent, et se désagrège com-
plètement dans l'acide, en laissant des paillettes micacées et beaucoup de grains
et de petits fragments anguleux de quartz hyalin blanc formant environ, d'après
l'analyse de M. Moissenet, i4 pour 100 du poids total.
1N° 77, à 5889 mètres de B. (633t mètres de M.). — Calcaire cristallin gris, sableux, à cas-
sure esquillense, avec veines de calcaire s|)athique blanc et de quartz; Irès-effcr-
C. R., 1870, :<" Semestre. (T. LXXI, N" 1.) 3
( I« )
vescent; se dissout rapidement dans l'acide chlorhydrique, en laissant un résidu
formé en grande partie de grains et de petits fragments anguleux de quartz.
N° 78, à 585o mètres de B. (6870 de M.). — Calcaire cristallin, gris, scliisteux, à surfaces
micacées, très-effervescent; laisse un lésidu friable contenant du sable quartzeux
qui forme environ 0.5 pour loo du poids total (M. Moissenet).
N° 79, à 58oo mètres de E. (6420 mètres de M.). — Calcaiie scliisteux, gris, cristallin,
à surfaces luisantes, d'un gris noirâtre, très-effervcscenl; laisse un résidu com-
posé en grande partie de grains de quartz.
N° 80, à 5^00 mètres de B. (652o mètres de M.). — Calcaire schisteux cristallin, gris, sableux,
à feuillels contournés, à surfaces luisantes d'un gris noirâtre, un peu satinées,
avec veines de quartz hyalin et de calcaire spathique blanc.
N° 81, à 5'joo mètres de B. (657.0 mètres de M.). — Calcaire schisteux, gris, cristallin,
sableux, à feuillets d'un gris noirâtre, luisants, un peu satinés, très-effervescent.
N° 82, à 565o mètres de B. (ôS^o mètres de M.). — Schiste cilcarifère, noir, à surfaces
luisantes, contournées, faiblement effervescent.
N° 83, à 56oo mètres de B. (6620 mètres de M ). — Schiste noir luisant, d'un éclat un jieu
satiné, à feuillets ondulés, non effervescent.
N° 84, à 555o mètres de B. (6670 mètres de M.). — Schiste noir, à reflets verdàtres, à
feuillets ondulés, luisants, satinés, alternant avec de petites lentilles de quartz
blanc calcarifère.
N° 85, à 5450 mètres de B. (6770 mètres de M.). — Calcaire schisteux, gris, cristallin, à
feuillets micacés, traversé par des petits filons blancs de quartz hyalin et de spath
calcaire.
N" 86, à 5400 mètres de B. (6820 mètres de M.). — Calcaire schisteux, gris, cristallin,
sableux, à feuillets de schiste noir, luisant, satiné.
N° 87, à 5370 mètres de B. (685o mètres de M.). — Quartz et spath calcaire blanc, en
veines dans le calcaire schisteux gris.
N° 88, à 5341 mètres de B. (6879 mètres de M.). — Calcaire schisteux, gris, cristallin,
sableux, avec feuillets de schiste noir, satiné, luisant, traversé par des petits liions
blancs de spath calcaire et de quartz. Il laisse dans l'acide un squelette cohé-
rent qui raye le verre, et qui est composé en partie de petits grains de quartz
blanc.
N" 89, à 533.3 mètres de B. (0897 mètres de M.). — Calcaire cristallin, gris, sableux, très-
effervescent; laisse un sijuelette cohérent qui raye le vci're et contient beaucoup
de grains de quartz.
N" 90, à 5320 mètres de B. — Calcaire gris, cristallin, schisloïde, â feuillets de schiste noir,
luisant, satiné et de schiste talqueux. Il contient des veinr^s de quartz hyalin et
de calcaire spathique blanc.
N" 91, à 5266 mètres de B. {%54 mètres de M.). — Calcaire gris, cristallin, sableux, avec
veines de spath calcaire blanc et de quartz hyalin.
N" 92, à 5197 mètres de B. (7028 mètres de M.). — Id.
( '9 )
N° 93, à 5173 mètres de B. (7047 mctres de M.). — Calcaire schisteux, giis, ciistaliin,
sableux, avec feuillets île schiste gris, nuance de vert, luisant et satiné.
N° 94, à 5i66 mètres de B. (7054 mètres de M.). — Calcaire schisteux, cristallin, gris,
sableux, très-effervescent, avec feuillets de schiste noir, biillant, satiné, et veines
blanches de spath calcaire et de quartz hyalin.
N° 95, à 5i63 mètres de B. (7057 mètres de Bl.). — Calcaire schisteux, giis, cristallin,
sableux, à feuillets de schiste gris, luisant, satiné.
N" 90, à 5119 mètres de B. (7101 mètres de M.). — Schiste noir luisant, à feuillets idu-
tourncs, faiblement effervescent, passant, en quelcpics points au schiste talqueux,
et contenant de grosses veines de quartz hyalin et de sjjalli calcaire blanc.
iN° 97, à 5i 12 mètres de 8.(7 108 mètres de M.). — Calcaire schisteux giis, cristallin, sableux,
à feuillets micacés avec veines talqueuses, contenant de grosses veines de quartz
hyalin et de calcaire S[)athique blanc.
N° 98, à 5ioo mètres de B. (7120 mètres de M.:. — Schiste noir, luisant, satiné, calcari-
fère, avec veines de quartz hyalin et de calcaire spalhique blanc.
N° 99, à 5o5o mètres de B. (7170 mètres de M.). — Calcaire sableux, cristallin, gris, schis-
teux, à feuillets contournés de schiste noir luisant, contenant des veines de quartz
hyalin et de spath calcaire blanc.
N" 100, à 5o43 mètres de B. (5177 mètres de M.). — Calcaire un peu cristallin, gris, schis-
teux, à feuillets noirs, brillants, satinés, très-effervescent; laisse dans l'acide
un squelette un peu friable, mais rayant le verre, composé principalement de
petits grains de quartz hyalin ayant l'apparence d'un grès. (De même que plu-
sieurs des précédents, cet échantillon pourrait être désigné aussi bien comme
grès calcarifère que comme calcaire cristallin.)
N° 101, à 5027 mètres de B. (7193 mètres de BI.). — Calcaire gris, sableux, cristallin,
schisteux, à feuillets noirs luisants, avec veines de quartz hyalin et de calcaire
spathique blanc.
N" 102, à 5oi8 mètres de B. (7202 mètres de M.). — ' Calcaire gris, cristallin, schisteux,
à feuillets de schiste noir luisant, très-effervescent ; laisse un squelette friable,
composé principalement de schiste noir.
N" 103, à 5ooo mètres de B. (7220 mètres de M.). — Schiste talqueux, calcarifèie, à feuillets
luisants, ondulés; traversé par des veines de quartz hyalin et de spath calcaire
blanc. Il est très-effervescent et laisse un squelette solide, rayant le verre; les
grains de quartz y sont plus enveloppés que dans les calcaires schisteux.
N" 104-, à 4906 mètres de B. (73i4 mètres do M.). — Calcaire schisteux, gris, silicifère,
cristallin, à feuillets d'aspect micacé ou talqueux.
N" 105, à 490" mètres de_B. (7320 mètres de M.). — Calcaire schisteux, gris, silicifère,
cristallin, à feuillets brillants, d'aspect micacé, avec veines blanches de quartz
hyalin et de spath calcaire.
N° 106, à 4878 mètres de B. (7342 mètres de M.). — Calcaire schisteux, gris, cristallin,
à feuillets noirs, contournés, luisants, avec veines blanches, de spath calcaire et
de quart: hyalin, et pyrites disséminées.
( 20 )
N° 107, à 48l>8 mètres du B. (^352 mètres de M.). — Calcaire cristallin gris, schisteux, à
feuillets d'un gris noirâtre, luisants, contournés, avec veines blanches de spath
calcaire et de (|uartz hyalin, très-effervescent; laisse un squelette cohérent, com-
])0sé en grande ])arlie de particules de quartz liyalin.
N" 108, il 4855 mètres de B. ('j365 mètres de M.). — Calcaire schisteux gris, cristallin,
silicifère, à feuillets d'un noir verdàtre, d'apparence talqueuse, avec veines
blanches de quartz hyalin et de spath calcaire.
N° 109, il 4700 mètres de B. (^520 mètres de M.). — Calcaire schisteux gris, cristallin,
avec veines blanches de quartz hyalin et de spath calcaire, contenant de petites
veines tal(]ueuses. Il est trés-eflervescent el laisse un squelette cohérent, siliceux.
N° 110, à 4688 mètres de B. (7532 mètres de M.). — Calcaire cristallin gris, silicifère,
schisteux, à feuillets luisants d'un gris noirâtre, avec veines blanches de quartz
hyalin et de calcaire.
N° 111, à 4000 mètres de B. (8220 mètres de M.). — Calcaire cristallin gris, schisteux, à
feuillets contournés, noirâtres, à reflets talqueux, avec veines blanches de quartz
hyalin et de spath calcaire blanc. Il est très-effervescent, et laisse dans l'acide
chlorhydrique un squelette peu solide, contenant beaucoup de parties schisteuses
et du quartz hyalin blanc, grenu ou fragmentaire.
IS" 112, il 35oo mètres de B. (8720 mètres de M.). — Calcaire schisteux gris, cristallin, à
feuillets noirs luisants. Il est très-effervescent, et laisse dans l'acide chlorhvdrique
un squelette peu cohérent, contenant beaucoup de schiste noir et un peu de
quartz hyalin blanc, grenu ou fragmentaire.
N° 113, il 3ooo mètres de B. (9220 mètres de M.). — Calcaire schisteux gris, cristallin, à
feuillets noirs, luisants. •
]N° ni, il 25oo mètres de B. (9720 mètres de M.). — Id.
N" 115, entre 2200 et 2i4o mètres de B. (entre 10020 et 10080 mètres de M.). — Id.
N" 116, entre igi6 et 1873 mètres de B. (entre io3o4 et io347 mètres de M.). — Id.,
avec veines blanches de quartz hyalin et de spath calcaire.
N° 117, entre 1873"', 60 et i825",5o de B. (entre io346'",4o et io394"',5o de M.).
— Id., avec veines blanches de quartz hyalin et de spath calcaire i>résentant des
traces de talc.
N" 118, entre 1825 et 178 j'", 60 de B. (entre loSgS et io435"',4o de M.). — Id., avec
jietits filons blancs de qiiarlz hyalin et de calcaire spalhi(|ue.
TU" 119, entre 1784"', 60 et i744"',5o de B. (entre io435"',4o et 10475"', 5o de M.). —
Calcaire gris, cristallin, schisteux, à feuillets ondulés d'un gris noirâtre, brillants,
avec veines de quartz hyalin et de calcaire spathique blanc contenant du talc
jaunâtre et de>. pyrites.
N" 120, entre 1744"', 5o et 1701 mètres de B. (entre io475'",5o et loSig mètres de M.).
— Calcaire gris, cristallin, schisteux, à feuillets d'un gris noirâtre, brillants, (juel-
<|uefois micacés, avec veines de quartz hyalin et <le calcaire spathicjue blanc.
N" 121, entre 1667'", 80 et iG23"',6o de B. (entre io552"',2oet io596"',4u Je ^l-)- —
( 21 j
Cakaire i;ns, nislallin, scliis'eiix, à feuillets ondules d'un gris noirâtre, brillants,
présentant quelques reflets talqueux, avec veines de quartz hyalin et de calcaire
spatliique blanc.
N" 122, à 1490 mètres de B. (10730 nièlres de M.). — Calcaire cristallin, yris, schisteux, à
feuillets noirs, biiilants.
1N° 123, à i4';0 niètres de B. (io-5o mètres de M.). — Calcaire crislalliii, yris, scliisleux, à
feuillets ondulés, noirs, brillants.
Pi" 12i, à itjoo mètres de B. (10S20 mètres de M.). — Calcaire cristallin, gris, schisteux, à
feuillets noirs, luisants.
N° 125, à 1357 mètres de B. (io863 mètres de M.). — Id.
N° 12(5, à l34o mètres de B. (10880 mètres de M.). — Id., avec veines de quartz hyalin et
de calcaire spathique blanc, présentant des parties vertes d'apparence talqueuse.
N° 127, à 1200 niètres de B. (à 1 1020 niètres de M.). — Calcaire gris, cristallin, schisteux.
N° 128, à 1200 niètres de B. (à 1 1020 niètres de M.). — Id., avec grosses veines de quartz
hyalin et de spath calcaire blanc.
N" 129, à I i5o mètres de B. (à 1 1070 mètres de M.). — Calcaire gris, cristallin, schisteux,
à feuillets noirs, brillants, contenant de grosses veines de quartz hvalin et de spath
calcaire blanc.
K" 130, à 1070 mètres de B. (à i i i5o mètres de M.;. — Calcaire gris, crislallin, seliisleux.
K° 131, à 1024 mètres de B. (à 11196 mètres de M.). — Id., à feuillets de schiste noii-
luisant.
N° 132, à 1000 mètres de B. (à 1 1220 mèties de M.j. — Id., avec veines tie quartz hyahn
et de calcaire spathique blanc.
N° 133, à 5oo mètres de B. (à i 1720 niéties de RI.,. — Calcaire giis, cristallin, schisteux,
à feuillets noirs luisants.
N° 134, à i56 niètres de B. (à 12064 mètres de M.). — Id., avec veines de quartz hyalin
blanc.
» Le CaLilogue précédent n'indique pas l'épaisseur de la couche formée
par chaque espèce de roche. Une pariie de ces roches se resseniblenl lel-
lement, qtie leurs Umiles sont indistinctes; d'autres, au contraire, se dis-
tinguent très-nettement, et elles ont joué, dans les travaux dn percement,
des rôles très-différents, à cause des obstacles que la dureté de quelques-
unes d'entre elles y a apportés. Les ingénieurs chargés de la direction des
travaux, jM?.î. Copello et Borella, ont tenu note exacte de l'épaisseur siiivatit
laquelle chacune de ces roches a été traversée, ainsi (jiie du tenqjs tjui y a
été employé, et M. Sismonda a résumé ces notes dans ini tahle.iii qu'il
a joint à l'envoi de la collection, et que je ne puis mieux faire que de
placer ici.
( 22 )
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( 23 )
" Il me reste à ajouter, au Catalogue et au tableau qui précèdent, des
remarques et quelques observations générales tirées en partie des Lettres
et des Communications verbales de M. Sismonda. »
PHYSIQUE. — Réponse aux Observations présentées par M. H. Sainte-Claire
Deville, sur (es varindons de température produites par le mélange de deux
liquides; par M. Jamin.
« Mon confrère M. H. Sainte-Claire Deville m'accuse d'avoir supprimé,
dans une citation extraite de l'un de ses Mémoires (i) , les six mots sui-
vants : n d'après la règle que j'ai donnée », et d'avoir ainsi altéré ou obs-
curci sa pensée. Cette suppression, que je n'ai pas dissimulée, puisqu'elle est
indiquée par des points, s'explique très-naturelleirient. Toute citation ayant
pour objet de mettre en liuuière un point déterminé doit être courte et
négliger les accessoires, pour ne pas distraire l'attention du lecteur. J'ai
obéi à cette nécessité. Je l'ai fait de bonne foi, sans aucune intention mal-
veillante, et sans soupçonner l'émotion que j'allais produire. Je prie mon
honoré confrère de croire à tous mes regrets.
» Pour ce qui est de la question scientifique qui a donné lieu à ce débat,
il importe qu'elle soit sérieusement discutée. Je vais donc résumer les idées
de M. H. Sainte-Claire Deville et les miennes, discuter les objections qui
m'ont été faites et laisser l'Académie juge.
» M. H. Sainte-Claire Deville mêle, à zéro, un équivalent d'acide sul-
furique pur avec deux équivalents d'eau. La température monte jusqu'à
i38 degrés, mais le volume ne change pas. Cette conservation du volinne
jiendant le changement de température est un fait très-remarquable.
M. H. Sainte-Claire Deville l'avait prévu, dit-il, en s'appuyant sur des
considérations de mécanique, qu'il expose comme il stiit (2) :
« En partant de la théorie des ondulations, on admet que l'intensité de la chaleur varie
comme le carré de la vitesse des niolecides de l'élher. En supposant (\i\c les températures
représentent à peu près proportionnellement l'intensité de la chaleur, on voit qu'elles repré-
sentent aussi le carré de ces vitesses, et par conséquent des forces vives.
« Dans l'hypothèse de la matérialité de la chaleur, je suppose que la chaleur latente est
comme un ressort bandé entre deux molécules qni s'attirent en vertu de la cohésion; et de
(i) Comptes rendita. t. L^ p. 536.
(2) Cnmptes rendus, t. L, p. 535.
f 24 I
l'équilibre de ces deux foires risnltc l'étal arliiel du cnips. Soit r (irio fonclion du (om|is
qui i-c])i rsenic l'espace que parcourrait dans lo Iciiqis l la luolrcnlc m si clic recevait l'inqyul-
sionde cercssort,au nionicnl où il se d'^liande; 0^^ — élanl la vitesse dont elle serait animée,
* ctt
me' serait la force vive on l'intensité de cette clialcur devenue sensible. Or je crois (|u'on ne
peut, à moins de tomber dans l'erreur des créations de forces, admettre d'autre source à la
chaleur dégagée dans les combinaisons cliiiniqucs que la clialcur latente enfermée dans les
corps qui s'unissent. Du moment ([u'il v a un échauffement produit, il y a une force mé-
canique développée dont il est même facile de donner aujourd'hui l'exacte valeur; donc le
principe mécanique de la conservation des forces vives doit ici trouver son a|iplication.
Or la chaleur sensible, développée par deux corps qui se combinent sans changer d'état,
et en se contractant comme l'acide sulfurique, doit être fournie par la clialeur latente
qu'exhalent ces deux corps au moment de la combinaison, et cette chaleur est é'galc à celle
que perd le composé pour passer de la température à laquelle s'est opérée la réaction à la
température initiale. »
» L'Académie veri'a dans ces lignes des suppositions sur la nature de la
chaleur; elle y reconnaîtra surloiit une lirpolltèsc flagrante, &uv la chaleur
latente considérée comme exhalée par les corps an moment de leur com-
binaison; je pense cju'elle n'y trouvera rien qui, de près ou de loin, res-
semble à tme détnonstration de la conservation du volume pendant que
deux liquides se combinent, c'est-à-dire du fait qui est en question.
» Elle ne l'y trouvera pas, parce que cette démonstration est impossible
el que, d'autre part, le fait n'est pas général. 11 n'est plus vrai, si l'oti change
les proportions d'acide sulfurique et d'eau; il ne l'est pas davantage quand
on mélange l'alcool et l'eau ou les liquides examinés par MM. Russy et
Huignet. Il n'est à pou près vérifié, en un mot, qise dans le cas particulier
qui a servi à l'ét.iblir; dans tous les autres, on voit le volume diminuer, et,
si l'on voulait qu'il redevînt égal à celui ries composants, il faudrait chauffer
le mélange à une température supérietire à celle qu'il pretid en se formant.
» Malgré cette variation qu'il a reconnue lui-inéme, 1\I. H. Sainte-Claire
Deville persiste à maintenir la conservation du volume comme une loi in-
discutable, nécessaire et démontrée en principe. Dans mon opinion, c'est
une hypothèse.
» Mais comme, an réalité, le volume dimiiuie, il faut expliquer la diver-
gence qu'on trotive entre l'hvpothèso et les faits. M. H. Sainte-Claire De-
ville croit y réussir en disant qu'au moment de la réaction le mélange se
refroidit, perd de sa tem|)ératuie, de sa chalein-, de sa force vive, comme
les machines, et cpiil en perd précisément la (pianlilé (|u'il (audrait lui
rendre |)oiir l'élever, de sa teiiqx'ralin'e, à ctdie (|ui lui donnerait le volume
( ^5 )
des composants; telle est la rècjle que M. H. Sainte- Claire Deuille a donnée
pour calculer In chaleur perdue.
» On le voit, cette théorie revient à ces deux points : i" admettre, con-
trairement à l'expérience et sans aucune raison théorique, le fait de la con-
servation du volume; 2" corriger l'inexactitude de cette première hypothèse
par cette seconde supposition, tout aussi gratuite, que si le mélange n'a pas
la température qui lui est assignée, c'est qu'il se refroidit.
IL
)) La théorie que j'ai proposée est plus simple (1 ) ; elle ne spécifie aucune
relation entre le volume des composants et celui du mélange; elle admet
seulement que la chaleur contenue dans les éléments, à la température où
on les mêle, est égale à celle du composé, à la température qu'il prend en
se formant. Cette hypothèse peut être considérée comme un axiome. On en
déduit aisément, entre les températures et les chaleurs spécifiques, l'équa-
tion de condition
M = (7- y,)t + '^0,
dans laquelle M est une quantité constante pour chaque mélange, et qu'on
peut déterminer par une expérience unique et une lois pour toutes (2).
» M. H. Sainte-Claire Deville critique la démonstration que j'ai donnée
de cette formule, et il propose de la remplacer par la suivante, sur laquelle
j'appelle particulièrement l'attention (3) :
n On prend quatre vases imperméables à la chaleur : dans deux de ces vases, on intro-
duit des poids éijaux £ d'eau; dans les deux autres, des poids égaux a d'un autre corps,
l'alcool par exemple (la somme e + a =; i''^). La température de tous ces liquides est la
même et égale à t°. On prend un des vases pleins d'eau, et l'on verse intégralement cette eau
dans un des vases contenant de l'alcool, de manière à en faire un mélange homogène. En se
formant, ce mélange s'échauffe jusqu'à (f-t-9)°, tandis que la température de l'alcool et de
l'eau, qui sont séparés dans les deux autres vases, ne change pas et reste égale à t°. Il est
nécessaire, à moins de supposer une création de forces, que la quantité de chaleur contenue
dans le mélange d'eau et d'alcool à la température (t -h S)° soit exactement la même que la
quantité totale de chaleur contenue dans les éléments eau et alcool dans les deux autres
(i) Comptes rendus, t. LXX, p. i3og.
(2) M. Berlhelot a donné, dans le tome VI des Annales de Chimie et de Physique, une
formule pour calculer la chaleur dégagée dans les actions chimiques. Cette formide et la
mienne sont analogues et peuvent rentrer l'une dans l'autre, comme je le montrerai lors de
la publication des expériences que je poursuis avec M. Amaury.
(3) Comptes rendus, t. LXX, p. iS'jC).
C R., 1870, 2" Semeitre. (T. LXXl, IN" 1.) 4
( 26 )
vases, et qui sont toujours à la température de i"; car nous supposons qu'il n'y a aucune
perte de chaleur, par travail externe, par rayonnement ou par contact avec les vases. Pre-
nons les trois vases restants et plongeons-les dans la glace fondante. Le mélange d'eau et
d'alcool à (l -H 6)° va perdre une quantité de chaleur '/(/-+- 6), son poids étant i et sa cha-
leur spécifique y. Les éléments séparés, eau et alcool, étant à t°, perdront une quantité de
chaleur égale à y, t (y, étant la chaleur spécifique moyenne ec ■+- ctc' des deux liquides, en
adoptant la notation de M. Janiin). L'excès de la perte de chaleur subie par le mélange d'al-
cool et d'eau sur la perte de chaleur subie par les éléments de ce mélange, quand tous ces
liquides arriveront à la même température zéro, sera
y(^-t-e) — y,/ = (y-y,)f-+-ye.
Or, c'est précisément cette expression M à laquelle arrive M. Jamin par la considération du
zéro absolu, et qui, dans tous les cas, ne peut être définie que par une somme algébrique
de deux quantités de chaleur. Cette définition acceptée, l'expression
M =(v — y,)t-hyQ
équivaut à une identité. "
» Résumons : on calcule la différence des chaleurs perdues par le mé-
lange et par ses éléments; on trouve y[t -h- 6) — y, t. Or, pour avoir une
relation, il faut égaler cette différence à quelque chose; eh bien! on écrit
qu'elle est égale à elle-même ou à {y — ''/,)t -h yO : c'est là toute la démons-
tration. C'est comme si l'on disait deux et deux font quatre. Pour en arriver
là, il ne fallait ni raisonnement ni quatre vases; on pouvait écrire tout de
suite un résultat qui n'a besoin d'aucune espèce de démonstration.
M Je ne puis laisser croire que « c'est là précisément l'expression à la-
)> quelle arrive M. Jamin. » Je n'ai pas commis une faute de raisonnement
aussi flagrante; je n'ai pas écrit cette identité. J'ai écrit que (y — y^)t + yO
est une quantité constante^ ce qui établit une véritable relation entre
y,y,,t et 6. J'ai lieu de me plaindre que ma pensée ait été altérée et trans-
formée en une véritable naïveté.
M Je poursuis :
n Comme il n'existe aucun moyen de déterminer directement RI et autrement qu'en
déterminant par l'expérience toutes les quantités y, y,, t ei 0 qui entrent dans l'expression,
il s'ensuit que celle-ci ne peut servir ni à prévoir ni à expliquer aucun phénomène. Par
conséquent, MM. Bussy et Bnignet ont tiré de leurs belles expériences toutes les conclusions
dont elles sont susceptibles à ce point de vue. »
» Si mon honorable confrère votdait bien prendre la peine de relire la
Note qu'il critique, il regretterait peut-être la condamnation qu'il prononce
contre ma formule, car il verrait qu'elle a expliqué beaucouj) de résultats
et qu'elle en a prévu quelques autres, que j'ai explicitement énoncés et que
(27 )
l'expérience a vérifiés depuis; elle n'aurait jamais pu le faire si elle n'était
qu'une identité.
» Mais je vais lui prouver son erreur par un argument plus palpable, et
lui montrer que cette formule explique, prévoit et même calcule la tempé-
rature t' d'un mélange formé de £ parties d'eau à t° et de a. parties d'alcool
à i°. On trouvera, dans le tableau suivant, ces températures calculées à
côté des températures observées par M. Amaury et moi. Ces résultats sont
inédits et font partie d'un travail qui sera ultérieurement communiqué à
l'Académie :
N"
1.
t
0,9',
a =
0,09,
M
= 6.
Obs
ervé.
Calculé.
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t
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59
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84
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79
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81 ,20
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t
,75, » = o
t'
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10,00.
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Observé.
Calculé.
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0
21 ,60
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28° 06
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45,20
49,80
5o,57
79.00
62,00
77, 5o
78,08
N° 4.
;o,G6, K = o,34, M = 9,5.
i"
4,00
55,60
84,40
-4,00
55,00
63,85
Observé. Calculé.
0 o
I I ,00 I 1 ,02
57,60 58,57
79,00 80,54
» Je serais heureux que M. H. Sainte-Claire Deville voulût bien sou-
mettre sa théorie à la même épreuve; si elle en triomphe aussi aisément que
la mienne, elle aura acquis une sanction expérimentale qui lui a jusqu'à
présent manqué : mais je crois qu'elle ne le peut pas. C'est parce qu'elle
ne le peut pas qu'elle est vague, et c'est parce que ma formule le peut
qu'elle est précise.
m.
» Lorsqu'un gaz exprimé dans un volume invariable se refroidit peu
à peu, il perd par degré une fraction -^^^ de sa pression; par consé-
quent, à — 273 degrés, cette pression doit être nulle. La température de
— 273 degrés est donc « celle où les molécules absolument immobiles
» et séparées les unes des autres par les mêmes distances qu'aux tempéra-
» lures ordinaires, n'agissant plus par leurs chocs continuels sur les corps
(28 )
» extérieurs, cesseraient de produire l'effet inécaiiiqne que nous appelons
» i)ression; en un mot, c'est la teni|iérature où la somme des forces vives
» moléculaires serait nulle. Mais force vive et chaleur sont devenues
» poiu". nous termes synonymes, et nous pouvons dire, sans abandonner
» le terrain solide de l'expérience, que la température de — 273 degrés est
» ce zéro absolu declinlf.wquon a cherché à déterminer de tant de manières,
» et qu'on a cru, à une certaine époque, séparé par un intervalle infini de
» tonte température observable (i). »
» La nécessité du zéro absolu est ime conséquence de la théorie méca-
nique de la chaleur; son existence est démontrée par les belles expé-
riences de M. Person; elle a été admise par tous les physiciens, et il n'y a
plus qn'à savoir le point de l'échelle thermométrique où il faut le fixer.
J'ai donc légitimement employé ce mot, et je le maintiens. Mais il est facile
de voir que, s'il entre dans la phrase que M. H. Sainte-Claire Deville cii-
tiqne, la chose qu'il représente n'entre pas dans mon raisonnement, qui
subsisterait tout entier lors même que ce mot disparaîtrait.
» Ce raisonnement s'appuie uniquement sur cette hypothèse : à la tem-
pérature de la glace fondante, l'eau et l'alcool contiennent une quantité
de chaleur déterminée, qui est inconnue, mais qui est définie. Je m'étotuie
d'autant plus de voir M. H. Sainte-Claire Deville critiquer celte hypothèse
que j'aurais trouvé naturel qn'il la réclamât comme sienne, tant il s'est
donné de peine pour l'établir :
« ... J'insiste sur ce point, que mon expérience de l'enseignement me fait considérer
comme à peu près inaperçu dans la science aujourd'hui, qu'à moins de supposer une créa-
tion de force, il faut admettre que la clialeur dégagée pendant la combinaison préexiste dans
les éléments à l'état de chaleur latente ou de force définie, comme je viens de le faire. . . .
(t. L, p. 538).
» ... Les corps simples sont des composés de chaleur et do matière;" la chaleur se dé-
gage par la combinaison, el le composé devient de plus en plus slable et inerte, au fur et à
mesure que, s'étant plus intimement combiné,- il a perdu plus de chaleur. . . (p. 538). «
» M. H. Sainte-Claire Deville a même été jusqu'à donner un nom à cette
chaleur; il l'appelle chaleur jjldocjislkjue.
<• Dans le cours de ce travail, j'ai appelé chaleur latente ou p/ilogistique la somme
de chaleur emmagasinée dans les corps. Cetle chaleur latente n'est donc jias uniquement
celle qui fait varier l'état des corps. Je ferai remarquer, à ce propos, qu'en supposant au-
tour des molécules, et même entre les molécules intégrantes des corps composés, une atmo-
(l) Veudet, Exposé de la Théorie mécanique de la chaleur, p. 74-
( 29)
sphère calorifique, je ne fais que reproduire Vhypnthèse des atmosphères électriques d'Am-
père, et m'appuyer sur l'opinion de Berzclius (p. 587). »
» L'Académie voudra bien remarquer que notre confrère avoue ici ce
qu'il a nié dans sa Note: il avoue avoir fait une hypothèse, et même avoir re-
produit celles de Berzélius et d'Ampère. Il admet une chaleur de constitution,
une chaleur latente, tout en essayant de me l'interdire; il supprime le mot
de zéro absohi qui paraît lui déplaire; mais il en crée un autre que je n'ai
pas mission de défendre, celui de chaleur plilogislique.
» Si l'on veut bien y réfléchir, on reconnaît qu'il sera à tout jamais im-
possible de voir la constitution intime de la matière, et que nous sommes
condamnés à la deviner, à la représenter par des hypothèses. Tout le monde
en fait, ceux qui les condamnent bruyamment, comme ceux qui croient
qu'elles sont un de nos moyens d'étude. Nos plus grandes découvertes n'ont
été que de grandes hypothèses : Gilbert a supposé que la Terre est un ai-
mant pour expliquer la boussole; Newton a supposé que la lumière est
composée pour expliquer le spectre ; Pascal a supposé que l'air est pesant
pour expliquer le baromètre; entre Kepler et Newton il y a toute la dis-
tance de l'attraction universelle. Rappelons-nous Ohm et la théorie des cou-
rants. Ampère et son hypothèse sur le magnétisme; rappelons-nous Fresnel^
dont le génie semblait être de deviner la cause de tous les phénomènes
qu'il entrevoyait. Rappelons-nous que toutes nos théories reposent aujour-
d'hui sur l'hypothèse de l'éther, et nous reconnaîtrons que, si, dans les
sciences, l'observation a eu sa grande part, l'imagination des hommes a
joué un rôle supérieur. Ces généralisations seraient à l'avenir impossibles
si, par l'effet d'une philosophie qui n'est pas la mienne, l'horizon scienti-
fique se réduisait à la simple portée de nos sens.
» Je crois avoir établi :
» 1° Que la théorie thermo-chimique de M. H. Sainte-Claire Deville est
une hypothèse et ne permet d'établir aucune vérification expérimentale;
» 2° Que ma formule ne mérite pas les critiques dont elle a été l'objet;
» 3" Que la démonstration donnée par M. H. Sainte-Claire Deville con-
duit à une simple identité;
» 4° Que ma théorie explique et calcule l'élévation de température du
mélange de deux liquides. »
( 3o )
Observations de M. H. Sainte-Claire Deville sur ta Communication
précédente de M. Janiin.
« M. Jamin, malgré ma prière, et au détriment de la discussion, a ré-
pondu verbalement à ma Note du 27 juin. Sans cette circonstance, j'au-
rais attendu la publication de ses critiques avant de faire mes observations.
Les critiques qu'il a faites de mon Mémoire de 1860 me semblent toutes
inexactes, et il m'a prêté des opinions que je n'ai jamais énoncées. Mais
comme elles n'ont aucun trait à la question qui nous divise, je n'en par-
lerai pas. Toutefois il m'a semblé que, dans son exposé verbal, M. Jamin
citait encore d'une manière incomplète certains passages de mes Mémoires.
S'il en est ainsi dans ce qui sera imprimé, je rétablirai purement et simple-
ment les textes dans leur intégrité. Un mot seulement sur ce qui a été dit
en séance par M. Jamin.
» Il a développé ce qu'il a écrit au bas de la page i3i i , tome LXX :
« 1° M est constant pour un mélange en proportions données : donc le deuxième membre
» de l'équation doit être invariable, ce qui exige que 9 diminue si t augmente. »
M Les nombreuses expériences Jaites par MM. Jamin el Amaury pour véri-
fier ces concUisions [voir p. i3j2) ne pouvaient aboutir à un autre résultat,
si la quantité de chaleur reste constante, à moins d'erreurs conunises dans
la détermination des chaleurs spécifiques 7 et y, ou des températures t et ô.
» Je maintiens donc tous les termes de ma dernière Note. »
PHYSIQUE. — Action de l'eau sur le fer et de l' hydrocjène sur l'oxyde de fer
[troisième Mémoire (i)]; par M.. H. Sainte-Claire Dkvili.e.
« Pour compléter l'exposé succinct de mes travaux, il me reste à don-
ner les résultats que j'ai obtenus, en faisant réagir l'hydrogène sur l'oxyde
de fer.
» Mes expériences dans cette voie sont encore peu nombreuses, mais les
conséquences qu'on en déduit sont très-claires et identiques à celles que la
réaction inverse de l'eau sur le fer métallique m'a permis d'établir dans
mes deux premières Communications.
» L'oxyde de fer que j'expérimente aux températures élevées doit être
nécessairement l'oxyde magnétique. Je le prépare en chauffant dans la va-
peur d'eau, vers 800 degrés, du fer spongieux résultant de la réduction du
(i) Voyez Comptes rcntlus, t. LXX, p. i io5 et 1201.
( 3. )
sesquioxyde de fer par l'hydrogène. Cet oxyde est amorphe, noir, présen-
tant à sa surface quelques points rouges dus sans doute à une quantité
très-petite de sesquioxyde de fer.
» Des échantillons ainsi préparés ont été mis dans trois tubes de porce-
laine, communiquant^ d'une part, à mes appareils manométriques, et d'autre
part à une source d'hydrogène parfaitement pur.
» L'un de ces tubes de porcelaine a été chauffé dans un four à huile
minérale à une température voisine de 1600 degrés. Le second a été
chauffé dans de la vapeur de zinc (io4o degrés), et le troisième dans la
vapeur de cadmium (860 degrés).
» Après avoir fait le vide dans les appareils et y avoir introduit l'hydro-
gène, j'ai vu ce gaz s'absorber peu à peu, de l'eau se former et se condenser
dans une petite cornue qui en contenait déjà et qui était maintenue à une
température constante. J'ai obtenu les résultats suivants (i) :
Température Température Tension Tension Oxyde Oxygène
de Toxyde de de Thydrogène de l'hydrogène de fer enlevé à l'oxyde
de fer. l'eau. humide. sec. employé. de fer.
mm mm
860° j 0° 17,4 12,8 1 ?■■ er
i .5 35,9 23,2 1 9,78 0,56
io4o I " ;^'° 9'4 14,55 0,38
( i5 3o,o 17,3 )
1600 ? o 10,0 5,4 20 qq.™"'s
» On vérifie l'exactitude de ces nombres en réoxydant la petite quan-
tité de fer formé au moyen de la vapeur d'eau fournie par la cornue et
après avoir extrait l'hydrogène formé par une première ou une seconde
réduction. Malgré la prépondérance considérable de l'oxyde de fer, l'hy-
drogène se reproduit et donne invariablement les nombres que je viens
d'inscrire au précédent tableau.
» Il s'ensuit que toutes les lois qui président à la formation de l'hydro-
gène, quand ou met une faible quantité d'eau en présence d'une grande
quantité de fer, se retrouvent au.\: températures citées les mêmes et avec
les mêmes constantes dans le cas de l'absorption d'une faible quantité
d'hydrogène par une grande quantité d'oxyde de fer.
» J'ai vérifié d'une autre manière le même principe lorsque le fer est
chauffé dans le soufre bouillant à 44o degrés.
(i) Si la matière contient un peu de sesquioxyde de fer, il faut détruire celui-ci en rem-
plissant l'appareil deux ou trois fois d'hydrogène, le poids de ce gaz restant toujours très-
petit par rapport au poids de l'oxyde employé.
( 32 )
» Du fer, qui avait déjà servi à des déterminations de tensions faites à
36o degrés, a été chauffé pendant trente jours et trente nuits consécutifs à
44o degrés, pendant qu'un courant de vapeur d'eau, à une tension moyenne
de i5 à i6 millimètres, passait à sa surface. L'hydrogène humide était en-
levé au feu et à mesure de sa production par une pompe de Sprengel fonc-
tionnant constamment pendant la journée et permettant de recueillir !e gaz
dans une cloche graduée. A la fin la pompe indiquait que la production
de l'hydrogène était devenue nulle ou insensible.
» A quelque moment qu'on interrompe l'action de la pompe, par con-
séquent quelle que soit la proportion du fer oxydé relativement au fer
métallique, pourvu que celui-ci existe encore en quantité sensible, la ten-
sion de l'hydrogène devient invariable et égale à sa valeur primitive, l'eau
de la cornue étant maintenue à zéro.
u Le fer introduit à l'origine pesait 7^"^, 80. La quantité d'hydrogène
recueillie dans la dernière de ces expériences a été de 3263 centimètres
cubes, mesurés à la température et à la pression extérieures. L'oxyde de
fer du tube pesait 10^, 25 ; mais ce dernier poids avait perdu un peu de
son exactitude par suite d'un accident. J'ai fait l'analyse de la matière et
j'ai trouvé que i^', 5i65 de cet oxyde donnaient i^^SgS de sesquioxyde de
fer calciné (i), d'où l'on conclut :
Fer 73,8
Oxygène 26,2
100 ,0
» Il est amorphe, noir, magnétique mais non polaire. L'acide sulfurique
concentré et bouillant l'attaque superficiellement, en le recouvrant d'une
couche de sulfate anhydre. L'acide nitrique concentré exerce sur lui une
action presque nulle à froid et très-faible à chaud, L'acide chlorhydrique
le dissout facilement à froid, en donnant une liqueur d'un brun foncé pré-
cipitable en noir par la potasse. Je n'ai jamais obtenu une quantité sensible
d'hydrogène en dissolvant la matière par l'acide chlorhydrique.
(1) L'analyse avait été tentée en traitant au ronge i^'.S de cet oxyde par un lourant
d'hydrogène. Quoique l'expérience ait été recommencée trois fois et qu'elle ait duré
seize lieures, l'oxyde était loin d'être réduit. Il n'accusait que :>.4,6 pour 100 d'oxygène.
Enfin, traité par l'acide nitrique faible, le fer produit laissait encore un résidu notable
d'oxyde. J'ai dû préférer une méthode d'analyse moins commode mais plus sure, qui con-
siste à transformer la masse entière en sesquioxyde.
( 33 )
» Les rapports équivalents
Fe' 73,7
0^ 26,3
représentent exactement la composition de cet oxyde (i). Le composé
2FeO, Fe^O' = Fe''0'* pourrait être comparé à un sel bibasique.
» Quand on aura préparé la série de tous les oxydes obtenus à toutes les
températures depuis 200 jusqu'à 1600 degrés, il sera très-curieux d'en
étudier la composition, la densité et enfin la chaleur de combinaison avec
un même acide, l'acide chlorliydrique par exemple.
» Si tous ces oxydes avaient la même composition, si par exemple ils
étaient tous de l'oxyde magnétique, ils différeraient entre eux probable-
ment comme les divers soufres étudiés par MM. Mitcherlicb, Dumas, mon
frère, MM.Favreet Silbermann,Berthelot et d'autres chimistes; ce seraient de
vrais isomères, peut-être en nombre indéfini, dont les propriétés physiques
varieraient d'une manière continue, depuis ceux qui sont prodiuts à
200 degrés, jusqu'aux oxydes préparés à 1600 degrés.
» Si tous ces oxydes n'avaient pas la même composition, par exemple
si leur formule était successivement (3FeO, Fe^O^), (aFeO, Fe^O'),
(FeO, Fe-0'), il est probable que le phénomène de leur formation serait
discontinu. Il y aurait alors à déterminer entre quelles limites fixes de tem-
pérature chacun d'eux pourrait être obtenu, et, au point de vue de la
chimie générale, cette étude aurait de l'importance. Ce serait un excellent
sujet de travail pour un jeune chimiste qui voudrait entrer dans l'étude
de la chimie de précision.
» Résumé et conclusion. — J'ai donné une méthode pour comparer des
phénomènes qui ont résisté à toute mesure et qu'on a expliqués jusqu'ici
par l'intervention de forces imaginaires.
» Appliquant cette méthode à l'oxydation du fer par leau, je fais voir :
» 1° Que l'accroissement de la tension de l'hydrogène formé au con-
tact du fer et de la vapeur d'eau est un phénomène continu, quand on fait
(i) Je ne puis affirmer que le fer introduit dans mes appareils ne contenait pas, même
après un long traitement par l'hydrogène, des traces d'oxyde magnétique. La matière ana-
lysée avait été oxydée partiellement à 36o degrés par la vapeur d'tau avant de l'élre com-
plètement à 44° degrés.
C. R., 1870, 2» Semestre. (T. LXXI, N» 1.) 5
( 34 )
varier (l'une manière progressive la tension de la vapeur d'eau sans faire
varier la tem|)(''ratiire du ler;
» 2° Que la tension de l'hydrogène correspondant à nne tension inva-
riable de la vapeur d'enu décroit d'une manière continue, quand la tempé-
rature augmente progressivement;
» 3° Que ces mêmes lois s'observent dans le phénomène inverse de la
réduction de l'oxyde de fer par l'hydrogène.
M Ces résultats ont une expression mathématique très-simple que je dé-
velopperai lorsque j'aurai un nombre d'expériences assez grand pour dé-
terminer ses constantes avec quelque précision.
» Ou en conclut qu'il sera possible d'établir, entre les réactions de
certains métaux, des relations numériques fondées sur les tensions de
l'hydrogène obtenu par la décomposition de l'eau dans des conditions
de température, de pression et même de réactions chimiques convenable-
ment choisies.
» C'est ainsi qu'on pourra comparer, en les déterminant en nombre,
les actions qu'exercent sur l'eau, le fer, le cuivre et même le platine. J'ai
trouvé, en effet, que ce métal peut décomposer l'eau avec une très-grande
facilité dans les circonstances suivantes : si l'on fait passer au-dessous du
rouge sombre un courant de vapeur d'eau sur un mélange de platine en
mousse et de cyanure de potassium, il se dégage beaucoup d'hydrogène et
il se forme, entre autres produits, de grandes quantités de platino-cyanure
de potassium.
» Persuadé que tous les phénomènes de changement d'état : combinai-
son, décomposition, dissolution, passage à l'étal solide, liquide ou gazeux,
lesquels sont tous accompagnés d'un dégagement ou d'inie absorption de
chaleur latente, que ces phénomènes sont liés entre eux par luie cause
commune dont nous devons rechercher et mesurer les effets, persuadé
enfin que l'établissement des analogies est la voie la plus sûre, non pas pour
arriver aux premières vérités, mais pour s'en rapprocher, sans danger pour
la science, j'ai comparé, sans faire aucune hypothèse, aux phénomènes de
l'hygrométrie les résultais auxquels je suis parvenu. Cette méthode exclut
les théories absolues; elle ouvre, par le procédé de l'induction, la voie aux
expériences nouvelles; el, comme les analogies indiquent d'elles-mêmes les
différences à |)ressenlir, elle ouvre la |)orle à l'analyse et à la critique qui
n'a dès lors rien à détruire, mais tout à discuter, préciser et perlec-
tionner. »
(35)
CHIMIE ORGANMQUE. — Sur tes isomères des étitcrs cyamiriques.
Réponse à M. S. Cloêz par M. A.-W. Hofmann.
« Dans la séance de l'Académie du 3o mai, M. Cahonrs a déposé nne
Note due à M. Cloëz et portant pour titre : Rëclamalion de priorité pour la
découverte des étiiers cyaniques et c/nnuriques. Les vacances de la Pentecôte
m'ont empêché de lire, immédiatement après leur apparition, quelques
numéros des Comptes rendus : M. Cloêz voudra donc bien m'excuser de ne
répondre qu'aujourd'hiîi à sa réclamation.
» La Note de M. Cloëz est relative à une Communication que nous avons
faite, M. Oishausen et moi, à l'Académie des Sciences, et qui portait sur
quelques corps engendrés dans une réaction découverte par M. Cloëz.
Cette Note contient le passage suivant :
« Maintenant, pour montrer que le Mémoire, présenté le 9 mai dernier, à l'Aeadémie
des Sciences, par MM. Hufmann et Otto Oishausen sur les isomères des élhers cyanuriques
ne reiif<'rme rien de nouveau sur le sujet que j'ui traité, dont je ni'orcu|)e toujours, et jiour
lequel je revendique hautement la priorité, je demande la permission à l'Académie de lui
soumettre les principaux passages de mon travail pouvant servir à établir mes droits. »
)) Dans la longue citation qu'il fait suivre, M. Cloëz présente un résumé
de ses observations sur les corps en question. Personne ne pensera à lui en
contester le mérite. Mais les détails que l'auteur donne sur ses expériences
ne touchent en rien aux recherches dont nous avons communiqué les
résultats à l'Académie.
» Je pourrais me contenter de cette simple déclaration et laisser aux
personnes compétentes la tâche de décider otj les observations de M. Cloëz
cessent et où les nôtres commencent. Mais comme le domaine |de la chimie
s'est étendu à un tel point que les savants ne peuvent qu'à grand'peine se
tenir au courant des recherches dont ils ne s'occupent pas spécialement,
l'Académie me pardonnera de revenir en peu de mots sur les diverses
phases, quelquefois singulières, des expériences dont il s'agit.
M 11 y a treize ans, en 1857, M. Cloëz (i) a fait à l'Académie une intéres-
sante Couuiuinication intitulée : Nouvelle série des bases artificielles oxygé-
nées. S'appuvant sur la réaction du chlorure de benzoïle sur les élliylates
métalliques, réaction qui donne naissance à l'éther benzoïqiie, M. Cloëz a
traité l'étliylate de sodium par le chlorure de cyanogène. Il dit à ce sujet :
(i) Comptes rendus, t. XLIV, p. 482.
5..
(36 )
« J'iii essayé île ])ro(Iiiiie les élhers cvaniqiie et cyanmiqiie par un procédé scnihl.ihle,
en faisanl réagir les cliloiiues tle cyanogène gazeux, li(|uicles et solides sur l'alcool sodé ; la
léaction a Lien eu lieu eoiiime je m'y attendais; mais, en examinant les produits, je me suis
aperçu (|u'ils difléraient complètement par leur nature de ceux que je cliercluiis à ob-
tenir. »
» Le produit obtenu n certainement la composition du cyanate cilivlique,
mais il dilfére essentiellement dans ses propriétés de l'éther cyanique dé-
couvert par M.Wurtz. M. Cloéz noaime le prétendu nouveau cor|)s cyané-
iholinc.^ et est disposé, ainsi (pi'il ressort du titre doiuié par lui à sa Com-
luunication, à le regarticr coiume une base oxygénée. Voici ses ]iaroles :
o La cvanetlioline appartient, avec les corps analogues fournis par les divers alcools, à
une nouvelle série parallèle à celle du glycocolle, de l'alanine, de la lencine, etc. Ces deux
séries sont très-rapprochées ; les ])ropriétés chimiques de leurs termes respectifs corrcs])on-
dants sont semblables; connaissant les unes, on peut presque à coup sûr deviner les antres. >>
» Celte manière de voir ]iaraît, en effet, justifiée par les ol)servations cpie
M. Cloëz déclare avoir faites sur la façon dont ce corps se comjjorfe vis-à-
vis des acitles.
c La plupart des acides, dit IM. Cloëz, le dissolvent en formant des combinaisons cristal-
lisables parfaitement définies. Il se dissout dans l'acide cldorhydrique, avec lequel il forme
un rlilorhvdrale cristallin, susceptible de s'unir au bichlorure de platine, en donnant lieu à
un sel double de couleur jaune. Le sulfate s'obtient sous forme de petits cristaux prisma-
tiques. "
» Toutefois on peut remarquer que M, Cloëz ne relate aucune analyse de
ces combinaisons « parfaileineiU définies ».
» Tel est le résiuué du Mémoire de M. Cloëz. La cyanétboliiie n'a été
l'objet d'aucune reclierclie pendant les huit amures suivantes. Ce nVst qu'en
i8G5 (i) que l'attenlion des cbimisles a été de nouveau attirée sur la cyané-
tboline, par quelques expériences remarquables de M. Gai, expériences qui
ont contribué à faire connaître la véritable natiu-e de ce cor[)s.
» Après avoir examiné l'action des acides cblorhydrique et bromliydri-
que sur quelques-uns des étliers ordinaires, et avoir reconiui que l'alcool
se sépare toujours à l'état de cblornre ou de bronuire étli\ liqiie, M. Gai a
étudié aussi l'innuence de ces deux acides sur l'éther cyanique de M.Wurtz,
et la cyaiiétholine de M. Cloëz. Ayant trouvé cpie le premier doiuiail de
l'acide carbonique et de l'étbylamine, tandis que le dernier se décomposait
en acide cyanurique et clilorure d'élbyle, il est arrivé à la conclusion, par-
(l) Comptes tendus, t. LXI, p. 52^.
( 37 )
faitement logique, que ce qu'on nommait cyanétlioline n'est que le véritable
éther élhylique de l'acide cyanique.
« Ce serait donc, dit-il, au produit obtenu par l'action du chlorure de cyanogène sur
l'alcool potassé qu'il faudrait conserver le nom iVéther cyanique; cette formule devrait
s'écrire
C'H*
C^Az \
» Quant à la substance provenant de la réaction du sulfo-vinate et du cyanale de potasse,
les propriétés qu'elle possède tendraient à la faire dériver plutôt de l'ammoniatine. Dans
cette hypothèse, sa composition doit être, ainsi qu'on l'a proposé, représentée par la for-
mule
C'H=
Az
» Les deux Mémoires que nous venons de citer sont les setds dont nous
ayons eu connaissance lors de la rédaction de notre travail sur les isomères
des élhers cyanuriques.
» En 1866, un an après les travaux de M. Gai, M. Cloëz est revenu sur
la matière dans sa thèse de docteur, intitulée : Recherches sur les élhers
cjaniqiies el leurs isomères.
» C'est de ce travail, qui n'a été inséré ni dans les Comptes rendus de
l'Académie, ni dans les Annales de Chimie et de Physique, ni dans \e Journal
de la Société Chimique de Paris, qu'ont été puisées les citations faites par
M. Cloèz dans la Note soumise à l'Académie le 3o mai.
» 11 résulte de ces citations que M. Cloëz a renoncé aux idées sur la
cyanétholiue d'abord émises par lui. Le nom même de ce corps disparaît
entièrement des citations; il n'est plus aucuiîcment question des combinai-
sons parfaitement définies dont il était parlé dans la première Note.
M. Cloèz se rallie aux idées exprimées par M. Gai, sans cependant se pro-
noncer clairement sur la question de savoir si les corps dont il parle sont
des éthers cyaniques ou cyanuriques. Voici ses paroles :
« Ces produits sont isomériques avec les éthers cyaniques de M. Wurtz, mais ils en dif-
fèrent complètement i)ar leurs propriétés : ce sont des liquides huileux, insolubles dans
l'eau, non volatils; ils se comportent avec les alcalis hydratés à la manière des éthers com-
posés ordinaires, en donnant de l'alcool et un cyanate : ils rentrent donc dans la règle gé-
nérale, et doivent être considérés à ce titre comme les véritables éthers cya/iùjiics ou ija-
nuriqiics. a
» Au sujet des doutes qui lui sont restés à cet égard, M. Cloèz, à la fin
de sa citation, dit encore fort clairement :
(38)
« Fidèle à la méthode expérimentale, je ne déciderai pas si les composés cyaniques qui
correspondent aux otliers df M. AViirlz sont des polyraèri's de ces mêmes éthers, pouvant
être représentés d'une manière générale par la formule
M(C"AzOC="rP"-^'0).
» Il m'a été impossible d'employer le nioven auquel on a ordinairement recours pour
résoudre une question de ce genre. Les produits que j'ai étudiés n'étant pas volatils sans
décomposition, je n'ai pas pu en prendre la densité de vapeur. »
» C'est précisément à ce point que, quatre ans après la publication de
la théorie de M. Cloëz, nous avons repris, M. Olshausen et moi, l'étude des
corps formés par l'action du chlorure de cyanogène sur l'élhylate de so-
dium.
» Ce n'est pas seulement en prenant la densité de vapeur qu'on peut
décider si l'on a affaire à un élher cyanique ou cyanurique. Il est d'autres
moyens d'y arriver. La méthode employée par M. Olshausen et moi est
fondée sur les faits bien connus, que l'élher d'iui acide monobasique, traité
par l'ammoniaque, produit un amide, que celui d'un acide bibasique en
produit deux, et que l'éther d'un acide tribasique doit en produire trois.
Étant admis que le corps étudié était un élher cyanique, il ne pourrait
donner naissance qu'à un amide. Le composé
CN,CIPO
traite par l'ammoniaque produit seulement l'amide
CN,H=N.
» Du corps trimoléculaire, du cyanurate de méthyle,
j CH'O
C W CH' O
( CH'O
par contre, déiiveroul trois amides différents, dont voici les formules :
C=N'
(
CH'O
( CTFO
( IPN
CIFO
C'N' ) H=N
C'N'
IPN
ir-N
H^N
H^N
» De ces trois amides les deux premiers caractérisent l'éther cyanurique.
» C'est dans le coiu's de nos éludes au sujet de l'aclion de l'auMnouiaque
sur le corps résultant du traitement de l'éthylale de sodiiun par le chlo-
rure de cyanogène, que nous avons été assez heureux pour découvrir les
( 39 )
corps dont la théorie indiquait l'existence, et nous avons ainsi résolu la
question que les expériences de M. Cloëz avaient laissée sans réponse.
» En traitant le corps mélhylique, nous avons obtenu le composé niono-
amidé, que nous avons analysé, soit seul, soit combiné avec le nitrate d'ar-
gent. En voici les formules :
ICWO (CH'O
C'N' CIPO et C'NMCH'O, AgNO'.
( H^N ( H=N
i> Du traitement du corps éfhylique par l'ammoniaque sont sorties les
combinaisons monoamidée et biamidée que nous avons également analy-
sées. Ces corps renferment :
Combinaisons monoamidées.
C'N' C-H^O et C'NMC^H'O, AgNO%
Combinaison biamidée,
(C^H^O
c?w
H^N.
( H-N
)) Les combinaisons amidées, que nous venons de découvrir, dérivent,
personne ne le contestera, cVélhers cyaniiriques et non cyaniques.
» Ces observations présentées, nous croyons pouvoir êlre assurés que
M. Cloëz, après avoir relu notre travail avec une bienveillante attention,
reconnaîtra qu'en somme nos résultats ne sont pas si dénués de nouveauté
qu'il s'est hasardé à le dire.
» Peut être fera-t-il davantage et acoordera-t-il que notre travail non-
seulement comble une lacune importante, laissée par ses piopres recher-
ches, mais encore fait à celles-ci des rectifications qui ne sont pas sans va-
leur.
» Ainsi, parlant de la combinaison mélhylique, M. Cloéz dit dans un
passage qu'il emprunte à sa thèse :
« Lorsque l'esprit de bois employé à la préparation du métliylate de soude n'est pas
anhydre, la production de l'isocyanate par le chlorure de cyanogène diminue beaucoup,
elle est même quelquefois nulle; il se fait dans ce cas des produits secondaires dont l'étude
mérite d'être suivie.
( 4o )
« Je mentionne à ce propos l'existence d'une belle substance blanche cristallisablc, qui
s'est foiniée dans une préparation où l'esprit de bois employé n'avait pas été snf(isaninicnt
rectifié. Cette matière, peu soluble dans l'eau, a pu être séparée facilement du chlorure de
sodium. En la traitant ensuite par l'alcool bouillant, elle s'est déposée par le refroidissement
de la dissolution, en cristaux brillants, aplatis, de forme rhoniboïdale.
1 L'analyse de cette matière m'a conduit à la représenter par la formule
C''H"'Az'0",
et j'ai proposé de la désigner provisoirement sous le nom de méthylantoïne. o
» Je crois ne pas me tromper en disant qu'après avoir ht notre Mémoire,
M. Cloëz sera le dernier à maintenir la formule qu'il avait donnée à la
méthylantoïne
ou, si nous recourons à la notation maintenant en usage,
Q6IJ.0JVJ4O3.
» Il ressort de nos recherches que la méthylantoïne n existe pas et que
si ÎM. Cloëz est ai rivé à admettre l'existence de ce corps et la formule ci-
dessus, c'est qu'il Itii a échappé qu'il avait entre les mains un mélange de
deux substances différentes. M. Cloè'z, s'occupant encore du travail com-
mencé par lui dès i86'j, répétera, nous en avons la ferme conviction, nos
expériences, et nous espérons que, dans ses mains comme dans les nôtres, la
prétendue méthylantoïne, simplement traitée par l'élher, se séparera encya-
nurate méthylique et le dérivé amidé, savoir : les corps
CH^^N'O^ et C'H'N'O^
» Quand il se sera procuré de cette manière le cyauin-ate de méfhyle,
M. Cloëz ne manquera certainet)\ent pas de vérifier cet autre fait assez
curieux que nous avons constaté, savoir : tpie le cyanurale de méthvle,
qtii, traité par des réactifs, fournit, avant d'être clinnjjé, de V alcool mélhj-
liqiie et de V acide cyanurique, se transforme, après avoir été citauffé, en acide
carbonique et métliylamine.
» Nous nous bornons à ces observations et laissons l'Académie apprécier
si M. Cloëz était fondé à déclarer, comme il l'a fait dans sa Note dti «S mai,
que le Mémoire île MM. Jlofmann et Ollo Olshausensurles isontèies des éthers
cyanuriques ne renferme rien de nouveau. »
(4i )
NOMEVATIOAS.
L'Académie procède, par la voie du scrutin, à la nomination d'ini Cor-
respondant, pour la Section de Médecine et de Chirurgie, en remplacement
de feu M. Lawrence.
Au premier tour de scrutin, le nombre des votants étant Sg,
M. Ticbert obtient 36 suffrages.
M. Kolliker 2 »
M. Bowman i »
M. Lebekt, ayant réuni la majorité absolue des suffrages, est proclamé
élu.
L'Académie procède, par la voie du scrutin, à la nomination d'un Corres-
pondant, pour la Section d'Anatomie et de Zoologie, en remplacement de
feu M. Cams.
Au premier tour de scrutin, le nombre des votants étant 3g,
M. Brandt obtient 19 suffrages.
M. Darv^in 16 »
M. Huxley 3 »
M. Loven i »
Aucun des candidats n'ayant réuni la majorité absolue des suffrages, il
est procédé à un second tour de scrutin.
Le nombre de votants étant 38,
M. Brandt obtient 22 suffrages.
M. Darwin 16 »
M. Brandt, ayant réuni la majorité absolue des suffrages, est proclamé
élu.
L'Académie procède, par la voie du scrutin^ à la nomination d'une
Commission de deux Membres, pour la vérification des comptes de l'année
précédente.
MM. Mathieu et Brongniart réunissent la majorité des suffrages.
C. R., 1870, a« Semestre. (T. LXXI, N» I.)
6
( 4a )
RAPPORTS.
ANALYSE MATHÉMATIQUK. — Rapport Sur un Mémoire de M. Bouquet,
relatif à la théorie des intégrales ultra-elliptiques.
(Commissaires : MM. Bertrand, Hermile, Serret rapporteur.)
« Le Mémoire de M. Bouquet dont l'Académie nous a chargés de lui
rendre compte se rapporte au célèbre théorème d'Abel sur les transcen-
dantes ultra-elliptiques, et il a exclusivement pour objet la démonstration
d'un théorème nouveau qui peut être regardé comme un complément de
celui d'Abel, au moins en ce qui concerne le cas le plus simple des trans-
cendantes de première espèce d'une classe quelconque. Ce cas est le seul
que l'auteur ait développé, mais l'analyse dont il a fait usage est assurément
susceptible d'extension.
» Dans le cas dont il s'agit, le théorème d'Abel assigne une valeur con-
stante à une certaine somme d'intégrales du même élément différentiel^
prises avec des signes convenables; on peut supposer que les limites infé-
rieures de ces intégrales soient zéro et les limites supérieures sont des
variables liées entre elles par des équations algébriques.
» C'est l'étude de la constante du théorème d'Abel que M. Bouquet a
entreprise, et cet habile géomètre est parvenu à démontrer qu'on en obtient
la valeur en ajoutant entre eux un certain nombre d'éléments fixes, après les
avoir multipliés par des nombres entiers, qui peuvent'étrc positifs, nuls ou
négatifs. Les éléments dont je parle sont des intégrales définies qui
répondent au même élément différentiel que celles à limite supérieure
variable auxquelles se rapporte le ihéorème d'Abel; elles sont prises,
comme celles-ci, à partir de zéro, et leurs liniiles supérieures sont les valeurs
de la variable pour lesquelles l'élément différentiel devient infini.
» La démonstration que M. Bouquet a donnée de son théorème est remar-
quable |iar sa simplicité. Prenant pour point de départ des résultais impor-
tants dus à ses devanciers et particulièrement à M. Puiseux, l'auteur a su
mettre habilement à profit la considération, reconnue aujourd'hui indis-
pensable, de rinlégralion exécutée suivant des contours quelconques.
» I>e résultat obtenu |)ar AT. liîoiiqupt remplit un desideratum signalé à
plusieurs reprises par Legendre. L'illustre fondateur de la théorie des
fonctions elliptiques a développé dans le tome III de son ouvrage (3""" sup-
plément) un grand nombre d'applications du théorème d'Abel, et il s'est
(43)
occupé, à l'égard de quelques trauscendantes pailiculières, de la délermi-
nation delà constante. « Celte question, dit-il, dont il ne paraît pas qu'on
» puisse donner la solution à jiriori et d'iuie manière générale, mérite de
» fixer rattention des analystes par les résultats très peu variés et très-
)) simples qu'on obtient constamment dans les cas parliculiers. » Traitant
à un autre endroit des mêmes transcendantes particulières, il affirme, cpioi-
qu'il n'en ait pas la démonstration, que la constante peut toujours s'expri-
mer par les deux mêmes éléments, quel que soit le nombre des iniégrales
dont la somme algébrique a pour valeur cette constante; et il ajoute : « Des
» exemples nombreux appuient cette assertion, que la théorie n'a pas jiis-
» qu'à présent établie d'une manière absolument certaine. »
» La généralité de ce fait analytique, qu'admettait LegendiT, est nu'se
hors de doute par le théorème de iM. Bouquet, duquel elle résulte imnié-
diatement.
M En résumé, le Mémoire de M. Bouquet renferme un résidlat nouveau et
intéressant. Nous proposons donc à l'Académie de lui accorder son n]i|)ro-
bation, et d'en ordoiuier l'insertion dans le Recueil des Savants élranqers. »
Les conclusions de ce Rapport sont adoptées.
MÉMOIRES PRÉSENTÉS.
ZOOLOGIE. — Observations sur l'histoire naturelle des Ecrevisses.
Note de M. Chantran.
(Commissaires : MM. Milne Edwards, Coste, Claude Bernard, É. Blanchard.)
« Les observations que j'ai l'honneur de communiquer a l'Académie ont
été faites au Collège de France, sous les yeux de M. Coste, dans son labo-
ratoire d'embryogénie comparée, où il m'a chargé de donner mes soins à
celles de ses expériences qui sont relatives à la pisciculture. Je présente
donc ces observations avec d'autant plus de confiance, que leur exactitude
a été vérifiée par l'illustre professeur.
» Accouplement. — L'accouplement chez les Ecrevisses a lieu pendant
une période qui comprend les mois de novembre, décembre et janvier. Le
mâle saisit la femelle avec ses grandes pinces, il la renverse, et, pendant
qu'il la tient couchée sur le dos, il se place de manière à verser, dans un
premier acte, sur les deux lamelles externes de l'éventail caudal, la matière
fécondante. Puis, après cettepremièreopération qui dure quelques minutes,
6..
( 44 )
il la romène brusquement sous son ;ibdomen, afin d'effectuer un second
dépôt de semence sur le plastron, autour de l'ouverture externe des ovi-
ductes, par le curieux mécanisme si exactement décrit par M. Coste.
» Ponte. — Suivant le degré de maturité des œuls, lors du rapproche-
ment des sexes, la ponte a lieu à une époque qui varie de deux à quarante-
cinq jours après l'accouplement. Au moment où cette fonction va s'accom-
plir, la femelle se couche sur le dos et ramène sa queue sur le j)lastron, de
manière à former avec son abdomen une chambre dans laquelle l'ouvertiu'e
des oviductes se trouve comprise, et dont la paroi sécrète une humeiu- vis-
queuse destinée à engluer les œufs et à les retenir attachés, pendant l'incu-
bation, aux appendices abdominaux. Quand les choses sont dans cet état,
la ponte s'effectue. Elle s'opère en une seule fois, ordinairement pendant
la nuit, rarement pendant le jour. L'incubation dure environ six mois,
l'éclosion a lieu en mai, juin ou juillet.
» Mues. — La première mue a lieu dix jours aprèsl'éclosion ; la seconde,
la troisième, la quatrième et la cinquième, de vingt à vingl-cinq jours de
distance les unes des autres, en sorte que le jeune animal change cinq fois
de carapace dans l'espace de quatre-vingt-dix à cent jours, qui correspon-
dent aux mois de juillet, août et septembre. A partir de ce dernier mois,
jusqu'à la fin du mois d'avril de l'année suivante, il n'y a pas de mue.
» La sixième mue a lieu en mai, la septième en juin et la huitième en
juillet. Il y a donc huit mues pendant les douze premiers mois de la vie de
la jeune Ecrevisse.
» Dans la seconde année, il y a cinq mues : la première et la deuxième
en août et septembre, la troisième, la quatrième et la cinquième en mai,
juin et juillet.
» Dans la troisième année, je n'ai observé que deux mues, qui s'opèrent :
la première en juillet et la deuxième en septembre. C'est à partir de ce
moment que la jeune Ecrevisse devient adulte en entrant dans sa quatrième
année.
» Lorsque les Écrevisses sont adultes la mue n'a plus lieu qu'une seule
fois par an pour les femelles; elle a lieu, au contraire, deux fois pour les
mâles : ce qui explique pourquoi ces derniers ont une j)lus grande taille
que les femelles, l'accroissement étant en proportion du nombre des mues.
Pour les mâles adultes, la première unie a lieu en juin et juillet et la
seconde entre août et septembre. Quant aux femelles, leur unique mue
s'accomplit entre août et septembre.
» Pour effectuer sa mue, l'animal se met sur le flanc, avec sa tète et son
(45)
dos il soulève son corselet qui fiiit bascule, comme un couvercle sur sa char-
nière, ptiis quand il a ainsi presque complètement dégagé la partie anté-
rieure de son corps, il se sépare entièrement de sa vieille carapace par un
brusque mouvement de la partie postérieure. Ce travail, qui dure environ
dix minutes, est favorisé par la sécrétion préalable d'une matière gélatineuse
entre les deux carapaces qui facilite leur dégaînement.
» Douze heures après la mue, les pattes de l'Écrevisse sont déjà assez
fermes pour pincer fortement, vingt-quatre heures après elles sont complè-
tement durcies; les parois du dos restent plus longtemps flexibles, mais au
bout de quarante-huit heures elles ont atteint un degré de consistance à
peu près normal.
» Les petits restent attachés aux fausses pattes de la mère pendant dix
jours après l'éclosion, c'est à ce moment que la première mue a lieu : elle
s'effectue sous la queue même de la mère (i). Si les jeunes s'en détachent
avant cette époque, ils ne jieuvent pas vivre séparément; mais après cette
première mue ils abandonnent parfois la mère pour y revenir jusqu'au
vingtième jour, époque à laquelle ils peuvent vivre indépendants.
» Je suis disposé à croire qu'après leur première mue les jeunes Écre-
visses se nourrissent, sous la queue de la mère, des pellicules des œufs et
de la carapace provenant de cette première mue. Mais, j'attends de nou-
velles observations pour pouvoir l'affirmer d'une manière positive. »
MÉTÉOIWLOGIE. — Le printemps de 1S70. Note de M. Guapelas.
(Renvoi à la Section île Physique.)
« Quand un mois est très-pluvieux ou trop sec, que sa température
semble dépasser la moyenne ordinaire ou lui être inférieure, on est générale-
ment prompt à s'imaginer que le climat du lieu qu'on habite ou même
celui du monde entier se modifie. C'est ce qui eut lieu en effet, à Paris, au
mois d'avril iSSy. Pour mettre fin à ces bruits ridicules, M. Arago ouvrit
les registres de l'Observatoire et fit voir clairement que la quantité de pluie
tombée en 1837, qui s'élevait à 63 millimètres, et qui paraissait si extra-
(i) J'ai pu constater, à l'aide du microscope, comme l'a inonlré M. Chantran à l'Académie,
que les petits restent pendus sous l'abdomen de la mère, par l'intermédiaire d'un fdament
hyalin, chitineux, qui s'étend d'un point de la face interne de la coque de l'œuf jusqu'aux
quatre filaments les plus internes de chacun des lobes de la lame membraneuse médiane de
l'appendice caudal. Ce filament existe déjà lorsque les embryons n'ont encore atteint que les
trois quarts environ de leur développement avant l'éclosion. (Ca. Robin.)
( ^.<3 )
ordinaire, n'atteignait même pas celle qui avait été constatée pendant les
années antérieures.
» Le priiileiiips de 1870 offre certainemont des caractères s|H'ciaiix qu'il
est utile de constater, et qui seront rendus plus intéressants encore par la
comparaison que l'on peut établir avec les années précédentes.
» Dans cette étude rapide, nous considérerons trois points principaux :
la température, la direction des vents, le degré d'humidilé.
» i" Tempcraltire. — Les observations faites à Paris, de 1 SoG à 1869,
fournissent, pour la température moyeiuiedu printemps (avril, mai etjuin),
i/| degrés, qui se répartissent ainsi : avril, 9", 81; mai, i/i",52; juin, 17", 34-
On trouve aussi que la température la plus élevée observée à P;iris depuis
i665, à l'air et à l'ombre, est de + 38°, 4 le 8 juillet 1793.
» Ceci posé, celte année, nous avons obtenu, pour températin-e moyenne
du printemps (avril, mai et juni), 16°, 3. soit 2°, 3 au-dessus de la moyenne.
La tempéralm-e moyenne de juin s'est élevée à 20°, 29, soit 2", 95 au-
dessus de la moyeuîie.
» Mais, si nous nous reportons seulement à 18GS, que l'on semble avoir
déjà oublié, nous trouvons, pour le printemps d'abord, une température
moyenne égale à 19°, i; puis, pour la température de juin, une moyenne
égale à 23", 17, températures vraiment extraordinaires. Le |)riiitenips de
1870, tout en étant évidemment fort chaud, n'a donc pas ce|)endant pré-
senté une température aussi exceptionnelle qu'on pouvait le croire à /jnon".
» Les journées les plus chaudes de la saison que nous venons de tra-
verser ont été les 18, 20, 21 mai, qui ont donné jusqu'à ■+- 82 degrés à
l'ombre, et le 23 juin, qui s'est élevé jusqu'à + 33 degrés.
» 2° Direction des venls. — Ce qu'il y a de principalement remarquable,
et ce qui doit surtout attirer l'attention, c'est la prédominance marquée
des vents compris entre le nord et le nord-est. En effet, si nous consultons
nos registres météorologiques, nous voyons que ces vents, depuis le mois
de février, n'ont pour ainsi dire pas cessé de souffler sur notre horizon.
)) En calculant la direction moyenne des vents enregistrés depuis cette
époque, nous obtenons un courant général situé à i" /\2' du nord-nord-
ouest, entre le nord et le nord-nord-ouest.
» Un tel résultat explique immédiatement cette sécheresse persistante,
péiiodique, et celte chaleur très-grande qui caractérisent si bien le prin-
temps de 1870.
» 3° Humidité. — En établissant la balance entre les jours de pluie et de
beau temps, nous trouvons 22 jours de pluie, ré|)artis ainsi (pi'il suit :
( 47 )
5 jours en avril, 12 en mai et 5 en juin, contre 69 jours de beau temps. Il
faut remonter, je pense, au siècle dernier pour trouver un résultai semblable.
» Comme dernier point intéressant, nous dirons, en terminant, que, si
l'on considère seulement la série d'années comprises entre i8/|2 et 1870,
on trouve ce fait très-curieux, pour cette saison, bien entendu : c'est qu'une
période humide est parfaitement indiquée depuis 1842 jusqu'à 1861, épo-
que depuis laquelle les choses se passent tout différemment, c'est-à-dire
qu'à partir de 1862 jusqu'aujourd'hui, une période de sécheresse s'ac-
centue déplus en plus, comme aussi, depuis cette même année 1861, la
température semble augmenter d'une manière très-appréciable. »
M. Daitdix adresse un Mémoire relatif à diverses questions de Météoro-
logie, et particulièrement à la sécheresse actuelle. Suivant l'auteur, la cause
de cette sécheresse doit être attribuée à la persistance des vents fixés, de-
puis plusieurs mois, du nord-ouest au nord-est; ces vents n'ont passé vers
le sud-ouest, pendant un jour ou deux et à de rares intervalles, que pour
revenir aussitôt à leur direction primitive. Chaque année, au printemps,
les mêmes phénomènes se produisent, mais avec moins de durée. Enfin,
l'auteur pense que les particularités offertes, à cette saison de l'année, par
notre climat, doivent se rapportera quelques phénomènes correspondants
dans les régions glaciaires du pôle nord.
(Renvoi à la Section de Physique.)
M. Ch.Leblon soumet au jugement de l'Académie un Mémoire portant
pour litre : « Système de chemin de fer rural et de montagnes ; adhérence
parfaite des roues avec le rail «.
« Dans ce système, dit l'auteur, l'adhérence des roues de la locomotive
au rail résulte uniquement du poids du train à remorquer. La locomotive,
réduite au rôle de générateur de force, devient très-légère et n'est plus
qu'une locoiuobile, les roues n'étant plus motrices, mais soutenant seule-
ment l'ensemble du système, chaudière, machine, etc. Sa puissance motrice
agit sur un système mlliésif, composé de quatre roues d'inégales grandeurs,
dont le travail utile consiste à serrer les deux côtés angulaires du rail, avec
une force résultant du poids total du train. »
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
M. W. DE FoNviKLLE trausmetà l'Académie, par l'entremise de M. Jamin :
1° Une description, accompagnée de plusieurs figures, d'un halo solaire
(48)
observé le 23 juin 1870. Cette description est le résumé de trois observa-
tions extraites du numéro du 3o juin du journal anglais Nature, observa-
tions qui doivent, suivant l'auteur, se rapporter à un seul et unique nuage
glacé, venant du nord.
2° La description d'un halo solaire observé par lui-même, à Pontoise, le
3 juillet 1870. Le phénomène a été vu de 6^20™ à 7*'3o™ environ : le re-
froidissement brusque de la température, observé ce jour-là, serait en fa-
veur des idés de Bravais, attribuant la production des halos à des prismes
de glace formés dans les nuages.
» M. W. de Fonvielle pense que les apparitions de ces phénomènes
pourraient être considérées comme annonçant de la pluie, en plus ou moins
grande abondance suivant que les nuages glacés sont plus ou moins épais.
On a constaté de la pluie en Angleterre, aussi bien qu'en France, après les
apparitions de halos dont il fait mention.
(Renvoi à la Section de Physique).
M. Cave Thomas adresse, pour être substituée à son précédent Mémoire
manuscrit « sur la Théorie esthétique de la lumière », une épreuve, impri-
mée en anglais, d'une Lecture faite par lui sur le même sujet.
Ce document sera renvoyé, comme l'avait été le Mémoire manuscrit, à la
Section de Physique.
M. Pretis de Sainte-Croix adresse, de Menton, une démonstration élé-
mentaire du postulalum d'Euclide.
(Renvoi à la Commission nommée pour toutes les Communications
relatives à ce sujet.)
M. Terrien adresse une rectification au Mémoire qu'il a soumis au juge-
ment de l'Académie, sur la décomposition de l'eau par la pile électrique.
(Renvoi à la Commission précédemment nommée.)
CORRESPONDANCE.
M. LE Ministre des Lettres, Sciences et Beai;x-Arts informe l'Acadé-
mie qu'il approuve le choix lait par elle, du lundi 11 juillet, pour sa
séance publique annuelle.
( 49 )
M. LE Ministre des Lettres, Sciences et Beaux-Arts autorise l'Acadé-
mie à prélever sur les reliciiiats disponibles des fonds Montyon, conformé-
ment à sa demande, diverses sommes destinées à des publications ou à des
recherches scientifiques.
M. le Secrétaire perpétuei, sii^inale, parmi les pièces imprimées de la
Correspondance, une brochure de M. Husson, portant pour titre : « His-
toire du sol de Toul. Dix-se|)tième Note sur l'origine de l'espèce humaine
dans les environs de cette ville ».
ASTRONOMIE. — Sur la lumière de la comète de TVinnecke [Comète I, 1870).
Note de MM. Wolf et Rayet, présentée par M. Delaïuiay.
« Nous avons pu, depuis les premiers jours de juin, observer à plusieurs
reprises le spectre de la nouvelle comète de Winnecke. Comme ceux des
deux comètes du même astronome, déterminés en i868 et 1869 par l'un
de nous, celui-ci paraît se composer de trois bandes lumineuses, se déta-
chant sur un fond continu. La plus brillante de ces bandes est celle du
milieu; la seconde est assez rapprochée de la première, du côté le moins
réfrangible; la troisième, située de l'autre côté et un peu plus éloignée,
est beaucoup plus pâle. L'extrême faiblesse de la lumière de ces bandes
ne nous a pas permis d'en déterminer les positions absolues. Mais l'aspect
en paraît identique à celui des spectres de comètes déjà observés; et il est
à souhaiter que la détermination des positions puisse être faite sous des
climats où l'astre, à son lever, n'est pas déjà noyé dans la lumière de l'au-
rore. Il est peu probable que, d'ici à son périhélie, la comète augmente
assez d'éclat pour nous permettre ces mesures. L'identilé ou du moins la
ressemblance des spectres des diverses cou)ètes, leur différence au con-
traire avec les spectres des nébuleuses proprement dites, sont des carac-
tères précieux qui permettront sans doute un jour de déterminer la nature
et l'origine de ces astres singuliers.
» Nous avons été particulièrement frappés de la faiblesse du spectre de
cette comète, qui cependant est assez brillante pour être bien visible à
l'aide d'un chercheur de 6 centimètres d'ouverture. Une nébuleuse du
même éclat apparent donnerait un spectre facilement mesurable. Sans doute
il faut remarquer d'abord que la lumière de ta comète est pour nous bien
affaiblie par les premières lueurs de l'aurore. Mais nous avons dit que les
C. K., 1870, 2« Semeatre. (T. LXXI, M» 1.) 7
( -'ïo)
bandes lumineuses se détachent sur un spectre contiiui, particulier à la
comète. Celle-ci diffère donc, à ce point de vue, d'une nébuleuse, dont la
lumière se concentre tout entière dans un petit nombre de lignes, qui sont
par suite très-hriilantes. Eu même temps, nous reconnaissons l.i double ori-
gine de la lumière de la comète, une lumière propre qui donne les bandes,
et luie autre portion empruntée au Soleil. Que la lumière réfléchie existe
en quantité très-sensible dans la comète, c'est ce que prouve le fait, con-
staté par nous, que la limiière de cet astre est partiellement polarisée dans
un plan passant par le Soleil. Cette polarisation est assez forte pour èiro
démontrée à l'aide d'un simple prisme biréfringent. D'ailleurs elle ne peut
élre confondue avec la polarisation atmosphérique, si l'on a le soin, coiiune
l'a indiqué depuis longtemps iM. Praczmouzki, d'observer les deux images
de la comète sur la partie couunune des deux images du fond du ciel. »
GÉOMÉTRIE. — Remarques sur une Note de M. Darboux, relalive à la surface
des centres de courbure d'uue surface algébrique; par 31. E. Catalan.
« Je demande à l'Académie la permission de lui soumettre les remarques
suivantes, qui me sont suggérées par la lecture du Compte rendu de l'avant-
dernière séance. A peine ai-je besoin de déclarer que je ne suis animé d'au-
cun esprit de dénigrement à l'égard de M. Darboux; nul, plus que moi,
ne reconnaît le mérite de ce jeune et déjà célèbre géomètre.
» I. La formule R = '^ se trouve à la page 26'i de mes Mélanges ma-
thématiques.
» II. Les formules X^ = -,7-1 — , , , , , — *-4t' etc., ne sont pas nouvelles :
a^[a^ — b^) [a' — c^) '
je les ai trouvées (ce qui n'était pas difficile) en 1868; M. Gilbert, mon
savant confrère à l'Académie de Belgique, les a trouvées aussi, et il est pro-
bable qu'elles se sont présentées à tous les professeurs qui ont eu à traiter
la question du lieu des centres de courbure de t' ellipsoïde .
» IIL il est bien vrai que l'équation R = B* — 4A.C = o ne présente
pas toujours l'enveloppe des courbes (*) représentées elles-mêmes par
(■) Mêr+''(s)+'=="^
mais M. Darboux ne va-t-il pas un peu loin en affirmant que c'est précisé-
(*) A la page i33i des Comptes rendus, on a imprimé par erreur : des cercles.
(5i )
ment le contraire qvi arrive, et que R = o représente le lieu des points de re-
broiisseinent des combes? Si, par exemple, on prend les liyperboles dont
l'équation est
(2) c- -i-{a: -hj)c -hi — jcy = 0,
on trouve
(3) (20o'^+ i) (I) V {:r^-^2Xj+j"- + 2) g + 27^+1 = o,
et, comme équation de l'enveloppe,
(4) x^ + 6xj- + jr^— 4 = o.
Dans ce cas, la fonction R a pour valeur
[œ -jY{jc^ -h 6jcj-hJ^ - 4);
donc, si l'on fait abstraction du facteur (x — jY, sur lequel je reviendrai
tout à l'heure, R = o représente l'enveloppe des hyperboles données, et
non le lieu des points de rebroussemenl de ces courbes, au moins je le suppose.
» IV. Ce n'est pas fout : à l'appui de sa thèse, M. Darboux fait ob-
server qu'e/j général les équations
ne peuvent être vérifiées simultanément. D.ins l'exemple précédent, l'équa-
tion (6) est
{jc'' H- 2XJ + j" -+- y-){J -^ 3x) — 'î{2X- -h i) [x -+- 3j) = o,
ou
( J - Jc) {j- + 6x7 + x^ - 4) = o;
c'est-à-dire
[j — x)'K = o.
I) On pourrait évidemment midtiplier les vérifications de la règle ordi-
naire. Quels sont donc les cas d'exception ta cette règle?
» V. Soit
(7) c^+Pc--+-Q = o,
P et Q étant fondions de x et de j'. La solution singulière est
(8) P^--4Q = o.
» D'iui autre côté, si l'on élimine c entre la proposée (7) et sa différen-
7--
( -^2 )
tielle immédiate, on tronvo une rqiialion de la forme (i), dans laquelle
(A=(;?)'-p.^^5?-Q(fy.
d.TJ ,h- djC ^^\dx j
Il résulte, de ces valeurs,
Par conséquent, l'éijiiation lî = o se décompose en
(8) P'^-4Q = o,
qui représente r enveloppe des < nurhes ['j), et en
/f/P ,IQ _ dP f/Q\\_
^ ' \d.r dy dy d.r I
Celle-ci appartient nu lien îles j'oints nii se touchent les courbes simultanément
représentées par
P = X
et par
Q - P;
X, [). étant des constantes arbitraires.
n Dans l'exemple ci-dessus,
V = x -i- y, Q = I — .Tj,
et l'équalion (i f) se réduit à
(12) {.T—j)-=0.
Celle-ci, dont nous avons déjà parlé, représente donc le lieu des points de
contact d'un système de droites parallèles et d'li)'per!iolcs homolhélicpics. En
outre, celte équation (12) est une solution singulière de
ou
. l'd^ \ 2 , - . , / dy\
-+- 2}- 4-1=0.
» VI. Soif encore l'équntioi) /n<^f//'a/e
(i3) 4j:'-' -4- 2(j: — 3j) + c -+-X- = o.
( 53 )
que j'ai prise pour exemple dans une Note sur In Théorie des solutions sin-
(/idièrcs [Journal île l'Ecole Polytechnique , XXXP cahier). Il en résulte
l'équation différentielle
(•4) 3x(|)'-6r| + ^ + 2j = o,
et, comme équation de l'enveloppe des paraboles (i3),
(r5) (x - 3jr)2 = 4-r-.
Si l'on égale à zéro la fonction B^ — 4 AC, on a
3^'^ = jc[jc -h 2J-),
c'est-à-dire la relation (i5). Ici l'on ne rencontre pas du tout l'exception
que M. Darboux signale comme devant arriver si fréquemment.
» VII. Soient, pour abréger,
f a\ dP dp n dq , d(i ^
('^) ^=«' dV = ^'' -;z7.==«' ^=r^'
alors ies fonnules'fg) deviennent
A = fr--pfif5'-f-Qfi%
B == 2(a'fi' + Qap) - V{oc[i'+a'fi),
C = a'--Paa' + Q«=';
et la relation (lo) se réduit à l'identité
B--4AC = (P^- liQ){afi'- a'/3)-,
que l'on rencontre dans la théorie des nombres. On a ainsi un rapproche-
ment, peut-être bien inattendu, entre deux parties différentes de l'analvse.
» VIII. Puisque l'occasion s'en présente, je mentionnerai trois proposi-
tions sur le lieu des centres de courbure de i ellipsoïde :
» 1° Le lon(/ (rime même liipie de couibure de l'ellipsoïde, le rayon principal
varie eu raison inverse de la distance du centre au fdan taii</ent;
» 2° La surface dont il s'arpt est l' enveloppe des ellipsoïdes représentés par
a'-x- 1^' y' c':^
[a' — Vf "*" (6^ — X-)2 "*" (c'— V)' ~ ' '
» 3" Chacun de ces ellipsoïdes touche l'enveloppe suivant une arête de rebrous-
semcnl. »
( 54)
ÉLECTRICITÉ STATIQUE. — Sur une propriété du condensateur de Foltn,
qui na pas encore été considérée. Note de M. P. Yoi.piceli.i.
tt Deux condensateurs électriques, géométriquement semblables entre
eux, possèdent le même coefficient m d'induction, c'est-à-dire que la charge
du plateau inducteur présente le même rapport, dans l'un et dans l'autre
condensateur, avec la charge du plateau induit.
1) Démonstration . — L'électricité d'un condensateur se trouvant en équi-
libre, le potentiel (i) complexe de cette électricité, distribuée sur ses deux
plateaux, pris pour un point quelconque intérieur à chacun d'eux, est
regardé comme constant ponr le même plateau. Ce potentiel complexe est
composé d'un nombre infini de parties, qu'on peut classer en deux groupes,
dont l'un provient des éléments du plateau collecteur on inducteur^ l'autre
de ceux du plateau condensant ou induit.
» Si donc on a deux condensateurs et que l'un d'eux, que nous
appellerons B, ait toutes ses dimensions k fois plus grandes ou |dus
petites que celles de l'autre, que nous appellerons A; si les plateaux
collecteurs de ces deux condensateurs ont la même charge £, les âanx
électricités contraires seront en équilibre dans l'un et l'autre condensateur.
Soit m le coefficient d'induction du condensateur A : nous savons que
la charge induite dans son plateau condensant doit être —nie. Il est évi-
dent que notre première assertion sera vraie, quand nousaïuons déinoniré
que la charge induite dans le plateau condensant de B sera, elle aussi,
exprimée par — 7?Z£.
» Quant au condensateur B, supposons : i° que h charge e de son
plateau collecteur ou inducteur soit distrdiuée send)lablement à celle
du plateau collecteur de A; 2° que le coi'densaleur B possède le nu^ne
coeflicient d'induction que A, c'est-à-dire que son plateau condensant ou
induit |)osséde, lui aussi, la charge — nis; 3" que celle charge induite soit
distribuée semblablement à celle du plateau correspondant, a|iparlcnant
an condensateur A. Cela étant supposé, démontrons que l'électricité du
condensaîeiu" B doit encore se trouver, elle aussi, en équihbre.
» Considérons, dans la niasse du condensateur B, \i\i point quelconque
p', placé semblablement à un autre point y; dans la masse du condensa-
teur A. En outi-e, divisons la suilace des deux plateaux du cundensalenr B
(l) Trailé de Calcul différentiel et intégral, de M. Bcrtrarul, 2" partie, p. 438, § 468;
Paris, 1870.
( 55 )
de la même manière que les surfaces des deux plateaux du condensa-
teur A. En imaginant maintenant les deux potentiels, pris l'un relative-
mont au point /; dans l'intérieur de la masse du condensateur A, l'autre
relativement au point// dans l'intérieur de la niasse du condensateur B,
il sera clair que les lignes droites réunissant les éléments superficiels élec-
triques avec les deux points respectifs p, p' de ces deux potentiels,
devront conserver, dans ces deux cas, les mêmes positions relatives; c'est-
à-dire que deux lignes droites quelconques du système relatif an conden-
sateur A font un angle égal à celui que font les lignes droites corres|)on-
dantes analogues du système relatif au condensateur B. En outre, pour la
condition de la similitude, puisque le condensateur B doit avoir tontes ses
dimensions k fois plus grandes ou plus petites que celles du condensateur A,
il est clair que, dans le condensateur B, les distances de chaque élément
électrique au point // seront k fois plus grandes ou plus petites que celles
de chaque élément correspondant au point p, dans le condensateur A. Et
comme l'élément du potentiel doit être en raison inverse de la distance de
l'élément électrique du point auquel se rapporte le potentiel même, il est
clair que l'on obtiendra chaque élément du potentiel, relatif au condensa-
teur B, en multipliant par k l'élément potentiel relatif au condensateur A.
)) 11 s'ensuit immédiatement que le potentiel du condensateur B doit
être aussi constant, dans les trois suppositions que nous avons faites, celui
du condensateur A étant regardé comme constant, et l'on aura le potentiel
complexe de B en multipliant celui de A par k.
» Mais la condition unique, nécessaire et suffisante pour l'équilibre
électrique, sur un ou plusieurs conducteurs, c'est que le potentiel complexe
de toute l'électricité doit être constant pour un point quelconque des
mêmes conducteurs, pourvu que ce point soit considéré dans le même
cori)s; donc l'électricité dans le condensateur B est en équilibre, même
dans les trois suppositions précédentes. Et, puisque nous avons démon-
tré (i) que la distribution électrique en équilibre, sur un ou plusieurs con-
ducteurs, doit être unique, nous pouvons conclure de tout cela que les
trois suppositions faites d'abord sont vérifiées, c'est-à-dire que le coefficient
d'induction, ou rapport électro-statique ni, est le même en A et en B, et
que les distributions sur les deux plateaux de A sont semblables respecti-
vement à celles des deux plateaux de B.
» En outre, puisque, dans le même condensateur, le coefficient m ne
(l) Comptes rendus, 1869, t. LXVIII, p. 976.
( 56 )
dépend pas de la charge électrique, si l'on change a en s', on arrivera au
même résultat, quoique les charges des deux condensateurs soient diffé-
rentes entre elles, pourvu, bien entendu, que ceux-ci soient tout à fait
semblables l'un à l'autre. Donc notre première assertion reste démontrée
dans tous les cas.
» Nous donnerons, de cette proposition et des conséquences qui en
dépendent, une démonstration indépendante de la notion du potentiel,
afin de remplir un vide qu'on rencontre, soit dans les cours de physique,
soit dans les traités d'électricité statique, même les plus étendus. »
PHYSIQUE DU GLOBE.— Observations magnétiques Jaites à Makerstoivn [Ecosse)
et Trevandrum, près du cap Comorin. Note de M. Bitou.v (*).
I.
« Parmi les résultats des observations faites sons ma direction à Ma-
kerstown, en Ecosse, pendant les années 1 842-1 85o, j'ai fait la remarque
que la variation des moyennes annuelles de déclinaison magnétique parais-
sait avoir une liaison avec la période des perturbations magnétiques (**); et
j'ai insisté sur ce fait plus tard, dans le Philosophical Magazine pour juil-
let i858. Les observations, continuées après mon départ, en i85o jusqu'en
i856, par mon aide M. Hogg, ont ajouté à l'évidence de cette inégalité, qui
paraissait également dans les moyennes annuelles pour la force horizontale
et la force verticale (***); ce qui a été trouvé aussi par M. Lloyd, dans la
discussion des observations de Dublin (****). Onze années d'observations
faites sous ma direction, à Trevandrum, près du cap Comorin, de i854
à i865, et continuées depuis cette époque par mes deux meilleurs aides,
sont venues confirmer ce résultat. Comme les observations d'Arago, faites
à Paris entre i8ao et i835, donnent ce même résultat, je crois le temps venn
de publier un examen sérieux de lévidence sur laquelle cette conclusion
est fondée.
» Quoique nous ne connaissions pas la loi du mouvement des pôles ma-
gnétiques, il m'a paru permis, pour un temps limité, de représenter son effet
(*) L'Académie a décidé que cette Communication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Ciimptc rendu.
(**) Trans. Roy. Soc. Edin., t. XIX, pi. II, p. 12.
(*") Jhid. p. 31,45.
(****) Trans. B rit. Assor., i86l.
( 57 )
sur le mouvement annuel de l'aiguille aimantée par une fonction circulaire;
ainsi, si nous représentons la marche de la déclinni^n moyenne par une
courbe de sinus où le minimum corresponde à la plus grande déclinaison
occidentale, et que nous mesurions le temps sur la tangente au minimum,
nous aurons les équations suivantes pour déterminer la courbe:
j-=:fl(i — cosS), dj- =: as'iuO dQ, d'^j = a cosQciQ-,
où j- est la différence entre la déclinaison au minimum et à une époque 6,
le temps écoulé depuis le minimum ; dÔ est l'arc parcouru dans une année,
qui est supposé assez petit pour que l'on puisse employer les différentielles,
et a est une constante.
» Si, comme je l'ai supposé, il y a une variation présentant inie période
de près de dix ans (comme pour les perturbations magnétiques), super-
posée à la variation séculaire, nous pouvons trouver des différences libres
de cette inégalité seulement en les prenant pour les dizaines d'années. On
trouve aussi, pour Makerstown, les différences suivantes {vo/ez le ta-
bleau Il :
AV-
Aj, calculé d'après les formules.
1851-1841 62', 34 ' 62,39 62,35
1832-184.2 63,25"^°'^' 63,44 63, 3o
1833-1843 64,i5^°'9' 64,40 64,25
1854-1844 65,24^''°^ 65,28 65, i5
1855-1845 66,07"^°' 66,08 66, i3
» Les moyennes des valeurs de A j" = 64', 2 et de A-j' = o',C)'i5 ont
donné une première approximation, de laquelle j'ai pu conclure, pour
l'époque moyenne 184^, 5,
dj- = 6, 474, d-jr = o, 0938.
» J'ai cherché la valeur de j- pour la même époque, et je l'ai trouvée
a|)proximativeraent [* )
/ = 2°.
» Avec ces valeurs de j--, dy et d'-j\, nous trouvons des équations
données
0 — 68°37', f/5 = 2"5',7, «=190', 22.
(*) La note, qui n'a pu trouver place ici, est reportée à la page suivante.
C. K., 1S70, 1' Semestre. (T.LXXl, N° 1.) °
( 58 )
» La troisième colonne du tableau I donne les quantités A qu'il faut
ajouter aux moyennes observées pour avoir les valeurs calculées d'après la
formule
( Déclinaison = 26''52',98 (*)
I — 190', 22 fi — cos(5i°5r,4 -+- «.2°5',7)],
où « est le nombre de l'année compté depuis 18^0,3.
» Afin d'éviter toute erreur, j'ai fait un second calcul en supposant,
comme il est permis pour un petit arc, que la seconde différence est con-
stante; les cinq différences décennales b.y donnent cinq équations de la
forme
n[n-~ i)
A j- = I o a -t-
2
lesquelles donnent, par la méthode des moindres carrés,
(2) Déclinaison = 25°84',7o (*) — 5', 812 .n — o',0937
où n est le nombre de l'année à partir de i84i ■
» On verra que la seconde différence 2 est à peu près celle qui a été
employée pour obtenir la formule (i). Les quantités A à ajouter aux
Déclinaison par Beaufoy, à Bnshykeath, en 1818 (o) 24.38,0
Correction (différence de latit. et longit. par rapport à Greenwich) . — 3,3
Déclinaison à Grecnwicli, en i8i8 24. 34, 7
Les observations horaires à Greenwich, en i845 et 1846, com])a-
rées avec celles de Rlakerstown pour les mêmes années, donnent,
Makerstown minus Greenwich 2.16,0
Supposant cette différence à peu près la même en 181 8, nous aurons
la déclinaison à Makerstovyn en 1818 26.50,7
Un premier calcul donne la correction au maximum en i8i5.... — i,3
Déclinaison à Makerstown au maximum 26.52,0
Déclinaison en 1 848 24.52,0
Ce qui donne y ■ 2.00,0
Je dois dire qu'aucune erreur possible dans cette estimation ne modifierait les conclusions
des calculs. ( f'oir la note pour la valeur de a ;\ Paris.)
(*) La première constante des formules (1) et (2) est prise telle, que la moyenne des
valeurs calculées approche la moyenne des valeurs observées.
(a) CEuvrei d'Àrago {Notices scieniijiques), I. I, p. l^■]b.
( 59)
moyennes observées, pour avoir les valeurs dérivées de la formule (2), se
trouvent dans la quatrième colonne du tableau (*).
Tableau I. — Déclinaison magnrtique à Maherstown et a Paris.
MAKERSTOWN.
PARIS.
DÉCROIS-
A
A
ANNÉE.
DÉCLINAISON
occidentale
SEMENT
annuel.
Form. (i).
Form ().).
ANNÉE.
DECLINAISON
occidentale.
SEMENT
annuel.
Form. (3).
Form- (^).
1841
25.33,68
-)- I ,02
r
-H I ,02
1820
0 1
22.27,70
o',63
1
-H 1,00
+ o',93
1842
28, /i5
5,23
■+■ 0,55
-t- 0,44
1821
22,07
-+- 0,85
+ 0,81
1843
22,85
5,60
■+■ o,3i
-+- o,>4
1822
20,96
1,11
+ 1,00
-H 0,98
1844
i7,oG
5.79
-+- o,i3
— 0,07
1823
19,72
1,24
+ 1,09
+ 1,08
1845
11,33
5,74
-0,23
- 0,42
1824
20,81
';09
- 1,33
- 1,34
1846
5,97
5,35
— 1,10
— 1 ,26
1825
'9,75
1,06
— 1,79
— 1,80
1847
2/1.59,61
6,36
— ",07
— 1,18
1826
17, ''1
2,6.
- 0,88
— 0,90
18 '18
51,82
7,79
+ 0,29
H- 0,23
1827
14,10
3,04
-+- 0,28
+ 0,24
1849
lib.ii
6,61
-h 0,38
-1- 0.37
1828
I i,c6
3,o'i
+ 1,25
-t- >,'9
1850
38,96
6,î5
-(- o,o3
H- 0,o5
1829
8,68
2,38
+ 1,38
+ i,3o
1851
3i,3.'i
7,62
-H 0,97
-i- 1,01
1830
6,62
2,06
+ 1 ,00
+ 0,92
1852
25,20
6,14
+ 0,36
-+- 0,39
1831
4,20
2,42
+ 0,80
+ 0,70
1853
18,69
6,5i
-!- 0,07
+ o,o5
1832
rt
r
,/
1854
II, 8î
6,77
+ 0,09
— 0,02
1833
//
n
//
//
1855
5,25
6,57
— 0,24
-0,45
1834
//
ti
„
//
1835
21.54,50
II
- 1,82
— 2,20
» J'ai traité les premières et les dernières dix différences A de la co-
lonne 4 du tableau, par la formule ordinaire de sinus, ce qui donne, pour
la variation par rapport à la moyenne,
i84r,5 à i85o,5; A = o', 754 sin(|x4- 81°);
p. = o pour 1841,5, et le maximum a lieu pour 1841,75,
1846,5 à i855,5; A = o',992 sin ([j!, + 94°);
juL = o pour i85i ,5, et le maximum a lieu pour i85i,4.
» Il résidte de ces calculs, qu'une cause produisant une inégalité dans
la marche de l'aiguille aimantée vers l'est avait son effet maximiuu de retar-
dalion vers le milieu <ie 1841 et de i85i; ou son effet maximum d'accélé-
ration vers le milieu de 1846 et de i856.
(*) Un calcul fait par M. Chambers, quoique fontJé sur l'iiypollièse ine.\acle que la pre-
mière différence est constante, montre l'inégalité assez exactement pour les années i845
à i853. (Voir Trans. Roy. Soc. Edin., Supp., t. XXIII, p. 23; 1860.)
(6o)
» Les observations d'Arago soîit complètes pour tontes les années depuis
1820 jusqu'à i83o; il n'y a que les moyennes pour les premiers six mois
de i83i, et pour les quatre mois de janvier, février, octobre et novembre
de i835; mais j'ai trouvé des moyennes pour ces deux années assez près(*)
[voyez le tableau). D'après ces moyennes, nous avons trois différences dé-
cennales qui donnent trois équations avec la seconde différence constante,
desquelles j'ai obtenu, comme poin- Makerstown, formule (2), la formide
suivante
(3) Déclinaison = 22°23',7o — o',78.// — o',i84 " -,
où n est le nombre de l'année compté depuis 1820,3. Les quantités A
dans l'avant-derniére colonne du tableau, ajoutées aux moyennes obser-
vées, donnent les valeurs calculées d'après formule (3).
» J'ai fait un autre calcul, comme le premier pour Makerstown (**), où
la différence j)' entre la déclinaison au maximum et à une époque nQ, à
partir de 1820,5, est représentée par la formule
^ = rt[i — cos(a + n5)],
a étant l'arc qui correspond à 1820,5, et Q l'arc parcouru dans une année.
» Nons aurons, par les deux différences décennales, les équations sui-
vantes :
i83o-i820 : 2asin(a+ 50)sin5ô = 16', 08,
i835-i825: 2rtsin(a+ io9)sin56 = 25',25.
» J'ai supposé a connu, et je liù ai donné une valeur, 170 minutes, un
(*) OEuvrcs de F. Arago [Notices scientifiques), t. L, p. 5o3, 5o4 :
Moyenne de six mois de i83i à 1 83 1,25 22.4,78
Correclion pour - année (i an = 2', 32). — o,58
Moyenne pour 1 83 1 ,5 22 . 4 , 20
Moyenne de quatre n)ois de i835 correspondant à i835,46. . 21 .54,63
Correction pour 0,04 an ( i an = 3', aS ) — o , 1 3
Moyenne ])cmr i835, 5 2i.54,5o
(*') Le n()iiil)ro d'années d'observation à Paris csl trop limite pour avoir une honne
approximation à la valeur de a?)-, comme à Makerstown.
(6i )
peu moins grande que d'après les équations de Makerstown (*). On tire
de ces équations 5 = i°5']',2, « = 6° 26', et
(4) Déclinaison = 22° 24', 7 — i7o[i — cos(6''26'-+-)! . i<'57',4)]'
» Les quantités A dans la dernière colonne du tableau, ajoutées aux
moyennes observées, donnent les valeiu'S calculées d'après formule (4).
» Les variations des quantités A sont représentées approximativement
par les formules
1820-1829 A = i',3osin (/j. + 90°)
, ,. , " > 'i M- = 0,1 820,5.
l822-l83l A = l',26sUl(fJL+92°) "^ '
» La conclusion est la même que celle que j'ai déjà déduit des obser-
vations de Makerstown, le maximum de retardation ayant lieu vers le
milieu de 1820.
» Des observations de Makerstown et de Paris, nous pouvons tirer la con-
clusion que l'inégalité décennale est indépendante du mouvement des pôles
magnétiques, puisque sa valeur a peu varié, pendant que le mouvement sé-
culaire a changé depuis moins de i minute jusques près de 7 minutes
par année.
» La formule (i) donne, pour l'époque du maximum de déclinaison occi-
dentale àMakerstown, i8i5,7, qui n'est probablement pas loin de la vérité.
Si l'on pouvait supposer que cette formule, calculée d'après les données
pour l'époque moyenne de 1848, 5, soit aussi exacte pour les trente-trois
années suivantes que pour les trente-trois années précédentes, nous pour-
rions conclure que la marche accroissante di- l'aiguille aimantée vers le nord
a déjà cessé.
IL
» Des observations horaires de la déclinaison magnétique ont été faites
à Trevandrum de 1 854 à 1 865 ; mais depuis février de cette dernière année,
huit observations seulement ont été faites journellement, avec le même
instrument et avec toutes les précautions observées depuis le commence-
ment (**). Les moyennes annuelles se trouvent dans le tableau IL
(*) Une différence assez considérable dans la valeur de a ne changerait pas les valeurs
de A; ainsi, si nous prenons a = 190', comme pour Makerstown, nous aurons 9 = i''5o',4ï
et a ^ 6"8', et les valeurs de A seraient les mêmes (pour l'arc de 1820,5 à i835,5) que
celles trouvées dans le tableau paria formule (4).
(**) Cet instrument est lu à travers le mur de la chambre dans la(|uclle il est enfermé, et
(6a)
Tablead II. — Déclinaison magnétique à Trevandrum.
A
DECLINAISON
ACCROISSEMENT
orientale-
annuel.
^^
FormQle (s).
Formule (G).
Formale (7).
1855,5
" 1
0.26,52
— 0,36
— 0,80
- 0,72
55,5
26,52
0,00
- 0,36
— 0,47
— 0,45
56,5
26,90
0,38
— 0,20
— 0,11
- o,.4
57,5
27,77
0,87
- 0,17
-f- 0,08
-f- 0,07
58,5
29.37
.,5o
— 0,29
-+- 0,10
-1- 0,01
59,5
30,91
1,64
— 0,28
-1- 0,22
-H 0,12
60,5
32,56
1,65
-t- 0,22
-+- 0,57
-+■ 0;47
61,5
34,85
2,29
-f- 0,20
-H 0,45
-t- 0,35
62.5
37, >6
2,3.
-t- 0,29
-+- 0,40
-1- 0,33
63,5
39,62
2,46
+ 0,25
-h 0,23
-1- 0,18
64,5
42,10
2,48
-H 0, l3
— 0,02
— o,o5
65,5
44,49
2,39
— 0,07
— o,3i
-o,3i
66,5
46,56
2,07
— o,ig
- 0,48
— 0,45
67,5
47,84
1,28
— 0,06
— 0,12
— 0,08
68,5
43, 9>
1,07
-(- 0,08 .
■+- 0,12
-+■ 0,18
69,5
49>98
1,07
— 0,02
+ 0,01
-+- o,i3
» La première conclusion à tirer de ces moyennes est que la déclinaison
orientale a eu un minimum vers i854 ou i855. Des observations faites par
mon prédécesseur, M. Caldecok, en i84i, donnent une déclinaison, pour
cette année, de près de o°4o'E.; comme cette déclinaison a été de nouveau
atteinte vers i86/},o, si le mouvement vers l'occident avait suivi la même
loi que celui vers l'orient, le minimum aurait dii avoir lieu eu iSSa ou
i853 : cependant les moyennes mensuelles indiquent plutôt i855,o pour
l'époque de minimum.
)) Ainsi les différences de moyennes pour les mois correspondants en
i854 et i855 sont, depuis février (*) :
1853-1854.
Févr.
-o',o4
Mars.
— o',20
Avril.
-o',33
Mai.
-o',i3
Juin.
-l-o',l5
Jiiill.
4-0', 21
Août.
Ho',08
!Scpt.
Oct.
-o',i6
Nov.
- o',oo
Déo.
-o',i3
» Les différences de moyennes annuelles (troisième colonne du tableau)
un senoiid instriimt'nt, dont la liinelle a pour point de repère une marque à près de
2 lieues de dislanrc, est toujours <)l)servé en même temps que l'autre.
(*) Les observations avec cel instrument commençaient avec le mois de fc:vrier i854.
(63)
montrent qu'il y a un arrêt dans l'augmentation de la vitesse de la marche
vers l'est en i858-i86o; que l'augmentation de vitesse a cessé en 1862-
1864, et que l'accroissement annuel a diminué après cette dernière année,
mais restant constante de 1867 à 1869. Tout ceci indique, ou tuie forte
inflexion dans la courbe qui représente la marche de l'aiguille aimantée
vers l'est, ou une période extrêmement courte comparée avec la période
que nous connaissons en Europe. Mais si l'on regarde la carte de déclinaison
magnétique calculée d'après la théorie de Gauss, on trouvera une expli-
cation pour une période assez limitée, et l'on verra qu'outre la ligne de
nulle déclinaison à l'occident des Indes, il y en a une autre plus à l'orient
qui forme un nœud, et qu'il y a des points de rebroussement dans les
autres lignes.
» J'ai cherché, comme pour Paris et Makerstown, à trouver des formules
qui représentent la marche de l'aiguille à ïrevandrum. A cause de la
courte période, dix ans couvrant plus de 90 degrés, la méthode des diffé-
rentielles n'est pas possible; et l'on ne peut pas supposer la seconde diffé-
rence constante, comme pour les petits arcs de Makerstown et de Paris.
Comme l'arc parcouru dans une année est assez considérable, j'ai pu em-
ployer la méthode suivante ressemblant à celle pour Paris [formule (4)]-
1) J'ai pris les différences pour dix ans, et j'ai supposé, comme aupa-
ravant, que l'on pourrait représenter la différence, entre la déclinaison
à une époque quelconque et au minimum, par la formule
jo — a[i -h cos(a + n6)],
où a est l'arc depuis le minimum jusqu'à 1 854,5, 6 est l'arc parcouru dans
une année, et n est le nombre de l'année à partir de 1 854,5. Les différences
décimales Aj" nous donnent les équations suivantes :
/ 2asin(a + 59) sinSO = Ajo =: i5,58,
(I) < 2flsin(a -f- 69)sin59 =:4ji ^ 17,97,
2« sin(a + 7G) sin59 = Aj) 3 = '9)66,
d'
ou
Ajo ■+- Ar2
cosô =
2 A/,
2« sin(a -+-79) sin59 =r Sji ^= 19,66,
(II) } 2« sin(a + 89) sin59 = Aja := 20,07,
2asin(a -I- 99)sin56:= Aj, = 19,64,
d'
ou
( 64)
2 A J-,
o I
De I, on tire e = ii.ao, a.^ — 8.0, «1=12,42,
De II, on tire 6 = 11.45, a=: — 3,49, « = i1î'j4'
» J'ai pris les moyennes de ces valeurs pour calculer j', ou
e = ii°32', a = -5°55', a = i2',o8,
et la formule devient
(5) Déclinaison =o°26',i + i2,o8[i — cos(«.i i°32' - 5°55').
» Les quantités A, colonne 4 du tableau, ajoutées aux moyennes ob-
servées, donnent les valeurs dérivées de cette formule.
i> Ou a, pour l'époque du minimum, i855,o, qui s'accorde parfaitement
avec la conclusion tirée des moyennes mensuelles.
)) Comme une petite erreur dans les constantes donne ime différence dans
les valeurs, et aussi dans l'époque exacte du maximimi et du minimum
de A, et comme dix ans n'est probablement pas exactement la durée de
l'inégalité, j'ai fait aussi le calcul avec des différences pour onze ans, en
substituant 5|ô à la place de 5Ô dans les équations (I) précédentes; les dif-
férences
i866,5-i855,5 = 20', o4, io67,5-i856,5 = 20', 94,
1868,5-1857,5 = 21', i4
donnent
5 = io"3o', a^ + S^S', fl = i3',33,
et nous avons la formule
(6) nécHnaison = o°25',72 + i3',33[i - cos(/i.io<'38' -+- 3°5')].
» On a les valeurs dérivées de cette formule, en ajoutant les quantités A
('colonne 5 du tableau II) aux moyennes observées. J'ajoute les valeurs
de A (colonne 6) qui résultent des équations ayant un petit changement
dans les valeurs des différences : la formule approximative obtenue est
(7) Déclinaison = 0°25',8 + i2',47[i— cos(«. io°38'+ i°io')\.
» On verra, par le tableau ci-dessous, à quel degré les différences déri-
vées de ces formules approclient des différences observées.
(65 )
Différences
observées. calculées
Hifférences
observées.
calcu
lees.
10 ans.
form.(5).
II ans.
form. (6).
form. (7)
1864-1834. .
. i5,58
16,07
1865-1854..
• '7.97
18,46
18, 38
1865-1835..
• '7'97
18,26
1866-1835..
20,04
20, o3
20,04
1866-1836..
19,66
•9'72
1867-1836..
. 20,94
20,93
21 ,00
1867-1837...
20,07
20, 38
1867-1857..
. 21,14
21,18
21 ,25
1868-1858...
19,64
20,21
1869-1858..,
. 20,71
20,62
20,77
1869-1859..
• 19. °7
19,23
» On peut voir que c'est la formule (6) qui représente le mieux les diffé-
rences observées. J'ai supposé que les différences observées sont indépen-
dantes de l'effet de l'inégalité, aussi bien que de toute autre i» régularité. Si
ces suppositions sont inexactes, une représentation exacte des différences
par le calcul sera impossible: mais, quelle que soit la formule approximative
que l'on emploie, les différences A donnent toujours à peu près le même
résultat; qu'il y a une inégalité dans la marche de l'aiguille aimantée vers
l'est, qui a eu son maximum en accélération vers l'année 1861 ou 1862.
Ce résultat, on le remarquera, est exactement l'opposé de celui qui a été
déduit des observations de Paris et de Makerstown pour les années 1820-
1825 et 1 841-1 845 ; mais on doit se rappeler que Trevandrum est dans une
latitude magnétique sud.
» J'ai exprimé l'idée que, quoiqu'il y eût une liaison appareiite entre
cette inégalité et la période des perturbations magnétiques, il n'y avait
cependant pas un rapport de cause et d'effet (*) ; cette idée n'a pas été
partagée par M. Xiloyd, qni a fondé son opinion sur l'inégalité pour la force
magnétique. J'ai basé ma conclusion, pour la déclinaison, sur le fait que
la déclinaison magnétique à Makerstown^ déduite des observations des
cinq jours, les plus calmes magnétiquement de chaque mois, en i844i ft
de sept jours de chaque mois en i845, a été la même, à quelques centièmes
lie minute près, que la déclinaison obtenue de toutes les opérations (**).
J'ai cru que les perturbations magnétiques pourraient être liées avec les
phénomènes électriques qui accompagnent si probablement la formation des
taches solaires, et on a rapporté la production de ces taches, au moins en
partie, à une action des planètes. Si l'on pouvait accepter cette hypothèse, il
me paraît probable que l'action, quelle qu'elle soit, ne pourrait pas être
(*) Phil. Mag., Jiily i858.
(**) Iraris. Roy. Soc. Eitiii., t. XIX, 2= Part., p. xxiv.
C. R., 1870, 1' Semestre. (T. LXXI, N" « .)
(66)
limifée au Soleil, mais qu'elle devrait être sentie directement par les courants
électriques de la Terre aussi. Nous aurions donc, de celte manière, une
cause directe pour l'inégalité décennale, et peut-être pour une partie des
pertuibations magnétiques.
)) Les observations de Trevandrum ont im intérêt spécial, pour ce qui
concerne la position et le mouvement des lignes de déclinaison et des pôles
magnétiques. J'ai réussi, en quittant Trevandrum, à avoir des observations
continuées, particulièrement en vue de la variation séculaire, jusqu'à la fin
de cette année-ci, et j'espère que. dans l'intérêt de la science, le Gouver-
nement de Ravaucore pourrait se décider à laisser continuer les observa-
tions pendant quelques années encore, puisque nous sommes arrivés pré-
cisément à luie époque de la plus grande importance, pour ce qui concerne
cette variation. »
PHYSIQUE. — Sur les thermomètres de Deluc. Extrait d'une Lettre
de M. Legrand à M. Jamin.
« Dans la Note que vous avez insérée au Compte rendu de la séance de
l'Académie du 2 mai dernier, vous vous êtes laissé aller à dire, d'après
Renou, auquel vous répondiez, que Deluc fixait la température du sang à
29^,9 R., au lieu de 29°, 5 R., se trompant ainsi de 4 dixièmes de degré.
Pourtant il n'y a là aucune erreur du physicien genevois, et les deux nom-
bres se réduisent l'un à l'autre, quand on remonte aux règles qu'il suivait
dans la construction de ces instruments. En effet, il prenait le point d'ébul-
lition de l'eau à la ])ression atmosphérique de 27 pouces de mercure qu'on
a souvent à Genève ; il le dit expressément {Modifications de ratmosplière,
par Deluc), et désire qu'on suive son exemple afin de rendre les thermo-
mètres comparables. Or, un instrument mar<|uant 80 degrés dans l'eau
bouillant sous la pression de 27 pouces ou ^So™™, 89, marquerait 80^,874
sous la pression de 760 millimètres, et, là où il marque 29°, 9, un tlieruio-
mèlre octogésimal, gradué comme on le fait aujourd'hui, eu prcnaul le
])oiiit de l'eau bouillante à cette dernière pression, marquerait seulement
29°, 57, conformément à la proportion
80", 874 R. de Deluc : 80" R. actuel :: 290,9 : x = 29°, 57.
» L'erreur serait ainsi réduite à o°,07; mais y at-il erreur? On peut en
douter, puisque M. Renou dit lui-uièrue que la tempér.iture du sang de
l'hounue varie nolableiuenl. Pour mou compte, je n'estiiue pas la mienne
à moins de Z-] degrés C. ou 29°, G R. »
( 6? )
PHYSIQUE. — Sur la compressibililé el la dilntalion des cjaz.
Note de M. A.magat, présentée par M. Balard.
n J'ai présenté à l'Académie, le 17 mai 1869, un travail relatif à la com-
pressibililé tles gaz, dans lequel j'ai essayé de démontrer, j)ar une expérience
directe, que les attractions entre molécules gazeuses sont insuffisanles pour
expliquer les écarts de la loi de Mariotte. Je me suis aperçu depuis que
ma démonstration n'élait pas rigoureuse, et je désire anjourd'iuii la com-
pléter; les résultats auxquels j'arrive sont du reste les mêmes.
» J'ai dit : « Si les écarts de la loi de Mariotte résultaient seulement de
» l'altraclion des molécules, ces écarts seraient fonction de leur distance
» moyciine, et par conséquent du volinue, de telle sorte qu'en opéiant snr
» la même masse gazeuse à des températures différentes, ces écarts seraient
» les mêmes si le volume final et le volume initial, c'est-à-dire avant et
» après la compression, étaient les mêmes. » Ayant donc pris un volume V
de gaz à la pression P et à la température ordinaire, je l'ai réduit à un vo-
lume V à peu près moitié, au moyen d'une pression P', et j'ai déterminé
PV
la valeur du rapport ^tït?; puis, ayant chauffé ce gaz jusque vers 98 degrés,
el l'ayant de nouveau ramené au volume initial V par une pression P", je
l'ai encore comprimé jusqu'à V, comme précédemment, sous unq pression
P'", et j'ai déterminé la valeur du rapport ^s-^ ; ce rapport s'étant trouvé
très-différent du premier, j'en ai conclu, comme cela est vrai du reste, que
l'écart n'est pas fonction du volume seul ; mais cela ne suffit pas pour
prouver que cet écart n'est pas produit par l'attraction moléculaire seule.
En effet ;
» Supposons, pour un instant, que l'attraction seide produise les écarts,
et désignons par p la [)ression interne qui, selon plusieurs auteurs, s'ajou-
terait à la pression extérieure pour diminuer le volume du gaz, et soit p' la
quantité analogue qiiand le gaz est réduit à moitié; on devra alors avoir eu
réalité
d'où l'on tire facilement
(P'+//)V' '
V'
P'V ' "*" P'V
« L'écart se trouve ainsi représenté par
P'V
( 68 )
o Soit L^^ cet écart, on a donc
^ — p'v' ■
» Dans la seconde phase de l'expérience, soit à 98 degrés, nous aurons
de même
(P"+/^)V _,
(P"'h-//)V' '
puisque p ei p' sont les mêmes, les volumes V et V n'ayant pas été changés.
On a donc, pour le nouvel écart (à 98 degrés),
"" - P"'V' '
d'où l'on conclut que
C _ P'"
C' ~ ¥"
» Or voici les résultats d'une expérience sur l'acide sulfureux :
C = 0,01 86, P"'=ri87', i4o;
i'= 0,0078, P'= 138*^, 222.
» Ces nombres sont loin de satisfaire à la relation précédente; il faudrait,
pour cela, que, «^ étant égal à 0,0186, C' fût égal à 0,0137, au lieu de
0,0078. La différence entre ces deux nombres ne saurait être attribuée aux
erreurs expérimentales. Du reste, mes résultats relatifs à l'ammoniaque et
à l'acide carbonique conduisent à la même conclusion.
» Il reste donc établi, par l'expérience directe, que les attractions entre
molécules ne suffisent pas pour expliquer les écarts de la loi de Mariotte.
» Ces expériences m'ont conduit à étudier les variations des coefficients
de dilatation des gaz; mais il y a ici une difficulté de plus : il faudrait avoir
pour point de comparaison un gaz parfait, et ce gaz n'existe pas. Cepen-
dant, si l'on compare, par exemple, l'acide sulfureux, qui s écarte beaucoup
de la loi de Mariotte, avec l'air, qui s'en écarte fort peu, on jiourra, ayant
déterminé les écarts successifs du coefficient de dilatation de l'acide sulfu-
reux et les écarts de la loi de Mariotte aux mêmes températures, trouver
une relation entre ces deux sortes d'écarts; cette relation se rapprochera
d'autant plus de la relation vraie, que le gaz étudié sera plus imparfait rela-
tivement à l'air.
» On pourra ensuite, en appliquant à l'air lui-même la relation trouvée,
sinon déterminer, du moins se faire une idée assez nette des variations que
subit le coefficient de dilatation de ce gaz, en considérant comme gaz par-
( 69)
fait celui dont le coefficient de dilatation serait, non pas constant, comme
on le dit souvent, mais en raison inverse de la température absolue à partir
de laquelle on le prend.
» J'ai déjà commencé un travail dans ce sens; sans donner aujourd'hui
de résultats numériques, je puis cependant dire que le coefficient de l'am-
•iioniaque, comparé à celui de l'air, décroît plus vite que celui de l'acide
carbonique, et que celui de l'acide sulfureux décroît plus vile que celui de
l'ammoniaque : résultat qui vient confirmer cette remarque, que j'ai déjà
faite, que les gaz se rapprochent d'autant plus de la loi de Mariotte pour
une même élévation de température, que leur point d'ébidlition est plus
élevé. »
CHIMIE. — Sur les composés phnsphoplatiniques.
Note de 31. P. Schutzesberger.
« J'ai l'honneur d'annoncer à l'Académie que je suis parvenu à isoler
les radicaux des combinaisons pliospho-platiniquesdécrite dans ma dernière
Note insérée en Extrait dans les Comptes rendus.
» En traitant les composés Ph(C=H50)'PtCl= et Ph'' (C='HM))«PtCl- en
solution alcoolique, par du zinc, le Uquidc, primitivement j.iune clair,
passe au brun et laisse, après évaporalion, une masse visqueuse noiie doù
l'eau retire du chlorure de zinc. Le résidu noir, insoluble dans l'eau, so-
luble dans l'alcool, a pour formule
Ph(C='H^O)'Pt ou Ph-(C-H=*0)''Pt,
suivant que l'on a employé l'un ou l'autre chlorure. lise combine direcle-
meut au chlore ou au brome, et reproduit les sels jaunes primitifs.
» Je me propose d'appliquer la même réaction aux sels ammonio-pla-
tiniques de Reiset et Magnus. J'ajoute, pour compléter cette première partie
de mon travail, que les acides Ph(HO)^PtCP, Ph-(HO)''PtCr-, et leurs
éthers Ph(C'H'0)'PtCl% Ph'(C'H'0)«PtCl- ont été obtenus par l'ac-
tion de l'eau ou de l'alcool absolu sur les combinaisons PhCPPtCl- et
Ph-Cl*PtCl^; l'alcool ordinaire peut être remplacé par d'autres alcools
homologues pour la formation des éthers homologues des précédents. »
CHIMIE ORGANIQUE. — Sur la fermentation carbonique et alcoolique de l'acétate
de soude etde l'oxalate d'ammoniaque; par M. A. Béchamp.
« L'acétate de soude, comme beaucoup d'autres sels, peut moisir lors-
que, dissous dans l'eau, ou l'expose au contact de l'air. J'ai voulu profiter
( 70)
de ce fait pour résoudre un poiut de l'histoire des fermentations. J'ai tenté
de produire de l'idcool avec des matières presque minérales, sans addition
d'aucune matière fermeiitescible capable de produire du sucre, ni d'aucun
ferment provenant d'un milieu en fermentation. Ce problème, je l'ai résolu
par les expériences suivantes.
» I. F trinenlalion carbonique et alcoolique de C acétate de soude. — L'acé-
tate de soude a été préparé, de toutes jiièces, en saiurant la soude caus-
tique récemment fondue avec de l'acide acétique rectifié sui- l'acide sul-
furique. Le sel a été cristallisé, et l'on n'a employé que les cristaux des
premières cristallisations. Je ne rapporterai que les deux expériences sui-
vantes.
» A. Le 4 février 1864, on mit dans une fiole :
Acétate de soude cristallisé 3oo grammes
Eau aSoo centimètres cubes
J^a fiole, simplement fermée par un papier, est abandonnée sur une étagère
du laboratoire. Le 10 mai, les moisissiu-es commencent à apparaître. Le
i5 aoiJt, la solution, qui était parfaitement neutre, est franchement
alcaline. Je ne mets fin à l'e-xpérience que le 20 mai 1868. La liqueur est
filtrée et les ferments recueillis sur un filtre taré. Ils sont composés de
microzymas, de petites bactéries ou bactéridies, et de mucors volumineux,
formés de filamenls enchevêtrés d'un mycélium grêle.
Poids des ferments séchés à 100 degrés o^', i5
La liqueur filtrée est largement alcaline. Par des distillations et rectifi-
cations sur du carbonate de potasse calciné, j'obtiens enfin une liqueur
qui, versée dans un tube gradué sur un carbonate de potasse également
calciné, laisse se séparer une couche d'alcool qui mesure o'^'^,6. C'est bien
de l'alcool, car il brrile, au bout d'une baguette de verre, avec la flamme
caractéristique; car, oxydé par l'acide chromique, il dégage de l'aldé-
hyde, et forme de l'acide acétique dont j'ai formé de l'acétate de soude
qui a cristallisé.
» L'acétate de soude du résidu de la distillation a été séparé par cris-
tallisation. Les eaux mères alcalines ont exigé, pour leur saturation,
ii5 cetitimètres cubes d'un acide titré, contenant 48, G pour 1000 d'acide
sulfurique, ce qui correspond à 6^'', 85 d'acide acétique disparu. Pendant
la saturation, il se dégage de grandes quantités d'acide carbonique. Enfin,
en distillant les liqueurs saturées, et transformant en sel de soude le pro-
( 71 )
duit distillé, j'ai isolé des eaux, mères incristallisables eik petite quantité,
dans lesquelles j'ai pu constater, par la réduction du nitrate d'argent et
du bichlorure de mercure, l'existence de traces d'acide formique.
» B. Le 29 mai 1868, dans le but de déterminer quelle pouvait être
l'influence de l'air dans la réaction, l'opération suivante a été mise en
train :
Acétate de soude cristallisé loo grammes.
Carbonate de chaux pur o^'', lo
Phosphate de chaux o^'', lo
Alun ammoniacal o^'', 07
Eeau 2000 centimètres cubes.
La fiole est d'abord fermée par un papier. Huit jours après, on adapte her-
métiquement un tube abducteur, fermé par une couche d'eau. Bientôt
l'eau s'élève dans le tube, et le 28 octobre elle atteint un niveau qui ne
varie plus. Je fais sortir, pour l'analyser, de l'air de l'appareil : ce n'est que
de l'azote; son volume ne change pas par la potasse et l'acide pyrogallique
réunis. Le volume de l'air dans l'appareil était, à zéro et o™, 76, de
l\5o centimètres cubes. Il avait donc été absorbé 94", 5 d'oxygène.
>) Les liquetu's distillées ont fourni assez d'alcool pour le caractériser
par l'inflammation.
» La Hqueiu- alcaline, résidu de la distillation, a exigé i4''S4 de l'acide
sulfurique au titre de ^—^, soit acide acétique disparu : o^', 86. De l'acide
carbonique se dégage pendant la saturation.
» Pour brûler o^'', 86 d'acide acétique, il faudrait o^'',9i7 d'oxygène,
soit 641 cenliuiélres cubes. Or l'air n'en a fourt)i que 9^ centimètres cubes.
Ce sujet mérite donc un nouvel examen ; d'autre part, pour former l'alcool
il faut de l'bydrogène : l'eau est probablement dècom|Kisée. J'ai institué
des expériences pour résoudre cette nouvelle face de la question.
» IL Ferinenlntion carbonique et alcoolique de roxalnle if ammoniaque. —
Dans les mêmes circonstances que l'acétate de soude, l'oxalate d'auuno-
niaque engendre |)areillement de l'alcool, et, en outre, de l'acide acétique.
)) L'oxalale d'auunoniaqtie avait élé préparé avec de l'acide oxalique
sublimé et de l'aunnouiaque caustique préparée exprès. L'oxalate avait été
cristallisé et recrislallisé.
» Le 8 octobi-e 1868, mis en expérience :
Oxalate d'ammoniacjiie cristallise ... 65 grammes.
Euu aooo centimètre cubes.
( 7- )
» La solution est parfaitement neutre. Des moisissures se développent
lentement; la liqueur devient, bientôt après, franchement alcaline et
l'alcalinité augmente rapidement. On met fin à l'expérience le ■y avril 1869.
M Les moisissures sont fixées aux parois de la fiole, en touffes d'une
grande blancheur. Elles se composent essentiellement d'un mycélium grêle,
entrelacé de belles cellules ou spores elliptiques et de microzymas; pas de
bactéries. Leur poids, lorsqu'elles sont desséchées, est à peine de oS'',o8.
» La liqueur est très-alcaline. Elle exige 2^'^,o3 d'acide oxalique pour
être neutralisée, et il se dégage de l'acide carbonique. Il y a donc au moins
2 grammes d'acide oxalique détruits. La solution saturée est distillée. Le
produit étant alcalin, on le rectifie avec de l'acide sulfurique; enfin, par des
rectifications sur le carbonate de potasse calciné, et en versant le produit
dans un tube gradué sur une nouvelle partie du même sel, il se sépare au
moins 0*^*^,3 d'alcool, que j'ai caractérisé comme plus haut, par l'inflamma-
tion et par l'oxydation à l'aide de l'acide chromique, etc.
» Dans une autre expérience, confirmative de celle-ci, je me suis assuré
que l'oxygène de l'air était aussi totalement absorbé, mais que cette quan-
tité n'était pas suffisante pour rendre compte de la destruction de l'acide
oxalique.
» Enfin, dans l'une et l'autre expérience, il se forme une petite quantité
d'acide acétique.
» Ainsi, l'acétate de soude et l'oxalate d'ammoniaque, même en absor-
bant de l'oxygène, produisent de l'alcool, et, en outre, l'un de l'acide for-
mique, l'autre de l'acide acétique, accompagnés d'une quantité considérable
d'acide carbonique. Il paraît évident, en tenant compte de la quantité d'oxy-
gène absorbé, que l'eau est décomposée dans ces opérations; je n'insiste
pourtant pas sur ce point, les expériences n'ayant pas été dirigées dans ce
sens. J'y reviendrai. Quoi qu'il en soit, l'oxalate d'ammoniaque, si voisin du
carbonate, donne de l'alcool : c est bien là un phénomène de synthèse
totale. Et si l'on considère que les ferments n'ont pu consommer que les
éléments de l'oxalate d'ammoniaque en même temps que les éléments de
l'air, on doit considérer que la cellulose de leur trame est elle-même for-
mée par synthèse totale à l'aide des mêmes matériaux.
» Et puisqu'on désigne une fermentation par les composés les plus
abondants qui se forment, on voit que le titre de ce travail est parfaitement
légitime. Mais qui ne voit en même temps qu'ici l'expression de fermen-
tation n'a plus de sens, l'acétate de soude et l'acide oxalique, ou l'oxalate
d'ammoniaque ne contenant évidenunont pas, même en puissance, l'un au
( 73 )
moins, l'édifice de l'alcool ? Voilà pourquoi je considère que ces expériences
démontrent absolument que les produits formés viennent des moisissures,
sont formés dans ces moisissures, lesquelles, fonctionnant d'abord connue
appareils de synihèse, forment la matière organique de leurs tissus, et dé-
sassimilant ensuite, sécrètent l'alcool et les autres produits qui prennent
naissance.
» Mais on peut réduire l'expérience à des termes encore plus simples.
» m. Production de l'nlcool par les éléments de l'air et de V eau. — J'ai pris
de l'eau distillée très-pure, je l'ai exposée au contact de l'air, dans une
fiole fermée par un papier. Des moisissures incolores y ont apparu : ces
moisissures étaient formées de microzymas, de très-petites bactéries et d'un
mycélium très-fin. L'appareil a été misa l'étnve, et après six mois, j'ai pu
recueillir assez d'alcool pour s'enflammer largement. Il s'était formé en
même temps une petite quantité d'un acide volatil et de l'ammoniaque. Je
n'ai pas besoin de dire que de l'eau distillée, placée dans les mêmes con-
ditions, mais où des moisissures ont été empêchées d'apparaître, n'a rien
fourni du tout.
u Dira-t-on que l'eau distillée, que l'acide carbonique et les éléments de
l'air, lesquels sont seuls intervenus, ont fermenté? Évidemment non; mais
on dira avec raison que les moisissures ont végété, ont opéré la synthèse
de leur propre substance, comme font tous les végétaux, et qu'elles ont
ensuite désassimilé de l'alcool formé par elles à l'aide de cette même sub-
stance. »
PHYSIOLOGIE. — Sur la vitalité du virus-vaccin ; par M. Melsens.
« Sans prétendre discuter les diverses opinions émises sur la nature du
virus-vaccin, je me suis demandé s'il ne serait pas permis de le considéier
comme iu\ ferment, susceptible, quand on le place dans des conditions
convenables, de se reproduire à la façon du ferment alcoolique, ou de l'as-
similer à certains ferments solubles tels que le principe actif du malt ou la
partie soluble de la levure de bière.
» S'il en était réellement ainsi, le virus-vaccin devrait être /ue ou rendu
inactif par les corps qui détruisent la vitalité du ferment alcoolique; il en
serait encore de même poin- certames actions physiques, par exemple lors-
qu'on l'expose, à l'état humide, à une température un peu élevée. Par
contre, ce virus devra résister à des températures très-basses dans les con-
C. R., 1870, 2« Semestre. (T. LXXI, NT) I O
( 74 )
ditions de mes expériences récentes sur le ferment alcoolique [Comptes
rendus, t. LXX, séance du ar mars 1870, p. 609).
» Voici le résullat d'une première expérience à ce sujet :
» Du vaccin, d'origine jcnnérienne, a été recueilli à riiô|)ital Saint-Pierre,
à Bruxelles, le 14 juin 1870. Il m'a été remis le 18 du même mois, dans
quatre tubes capillaires scellés à la cire à cacheter. J'ai enfermé ces quatre
tubes dans un petit tube de verre d'un faible diamètre et à parois excessi-
vement minces; ce tube a été ensuite scellé à la lampe, puis introduit au
centre d'un tube large, à parois minces et bien garanti de l'action de la
température extérieure par des enveloppes de linge. Le gros tube a été
rempli d'acide carbonique solide, et l'on y a ajouté peu à peu de l'élher
refroidi et de l'acide carbonique solide, de façon à maintenir le tube avec
le vaccin au centre de la pâte, pendant environ une heure et demie, à une
température de 78 degrés C. au-dessous de zéro.
» M. le D'^ Jacobs, médecin de l'École de Médecine vétérinaire de
Bruxelles, a fait usage de trois de ces tubes le lundi 20 juin dernier. Voici
ce qu'il m'écrit à ce sujet, en date du 28 juin :
« Deux tubes ont été employés pour vacciner un enfant de sept mois; cinq ])iqûres ont
donné, le ay, cinq belles pustules, présentant à un degré remarquable le caractère du bon
vaccin. Un tube a été employé le même jour pour vacciner un entant de treize mois; quatre
piqûres ont donné, le 27, trois belles pustules offrant le même caractère que cliez le pre-
mier enfant. »
» Je poursuis mes recherches dans le but de savoir si de nouveaux faits
pourront autoriser de nouveaux rapprochements entre le vaccin et cer-
tains ferments susceptibles de se reproduire en dehors de l'économie vivante,
en lui mot, si le virus-vaccin peut être 5ei?îe et peut se multiplier dans des
vases de laboratoire. Quelques expériences m autorisent à en conserver
l'espoir,
» Conclusion. — Abstraction faite de toute considération sur la nature
du virus-vaccin, il est donc prouvé qu'un froid d'environ 80 degrés C. au-
dessous de zéro ne détruit pas la vitalité, l'action spéciale du virus-vaccin.
A cette même température, la vitalité du ferment alcoolique subsiste, comme
je l'ai rappelé plus haut. »
PHY.SIQUE DU GLOBE. — Le climat de l'Alsace et des Fosges. Note de
M. Ch. Grad, présentée par M. Ch. Sainle-Claire Deville.
« J'ai eu l'honneiu" d'exposer à l'Académie les lois de la distribution de
la pluie en Alsace et dans les Vosges, dans luie Communication faite à la
( 75 )
séance du 2 septembre 1866 : aujourd'hui je me propose d'appeler son
attention sur les autres éléments du climat de la même région, uotammenl
sur la température et la direction des vents. J'ai recueilli dans ce but les
observations faites sur une vingtaine de points différents, embrassant des
séries plus ou moins complètes, mais dont les unes, celles de Strasbourg,
ont été continuées presque sans interruption pendant une période de
soixante-dix ans, de 1801 à iS'jo. Ne pouvant examiner ici ces observations
en détail, je me bornerai à en iudicpier les plus importants résultats pour
les principales stations.
» Voici d'abord les températures moyennes depuis i845, pour six sta-
tions d'Alsace et deux des Vosges :
STRASBOURG
ICDTRATUZEIM
COLMAP.
COIÎRSDORFr
THASN
WESSERLING
SYNDICAT
ÉPINAL
AMNÉES.
Altllude ■■
Altitude :
AlUIudc :
Altitude:
Altitude:
Allilude:
Altitude :
Altitude :
ii4 moires.
iGo mèties.
300 mètres.
222 mètres.
23» mètres.
487 melres.
G20 mètres.
33» mètres.
1S45
0
8,3
//
0
//
0
9,0
0
0
II
0
0
//
1846
11,1
II
//
1 1 ,0
II
II
II
1847
9,3
II
,r
9,5
7,8
II
II
1848
9,8
II
II
•0,7
7,2
II
II
1849
9,6
II
II
9,6
8,2
II
II
1850
9,'
II
II
1 1 ,3
7, '
II
II
1851
9,6
1,
II
9,2
7,6
II
II
1852
.1,3
II
II
10,0
7,8
II
9,2
1853
9,3
II
II
8,8
8,4
8,1
8,5
1854
10,1
II
II
8,5
7,8
8,1
8,6
1855
9,2
II
9,2
8,1
8,2
6,5
9,3
1856
10,3
II
1 1 , 1
8,7
8,2
8,2
8,6
1857
11,1
II
10,4
9,8
9,0
8,3
9,8
1858
11,0
,1
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8,2
8,2
8,7
1859
11,2
II
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II
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1860
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10,1
10, G
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II
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1867
9,8
10,5
10,5
II
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9,8
1868
10,6
10,6
1 1 ,G
n
11,1
II
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10,9
1860
10,6
10, G
11,1
II
11,5
II
7,'
10, G
» La température moyenne à Strasbourg a été de 10°, 2 pour la période
de 1845 à 1870, tandis que pour la période de 1801 à i8/|i, le professeur
Herrenschneider a obtenu une moyenne de 9°, 9, la température annuelle
10..
( 76)
la plus basse étant de 8°, a en 1829, et la plus élevée de 11°, 4 pu i8i/). Au
Syndical, dans les Vosges, nous trouvons une moyenne de 8 degrés pour
des observations faites de i856 à 1870, à 620 mètres d'altitude. A Goers-
dorff, qui se trouve à 222 mètres au-dessus de la mer, vers la rencontre de
la plaine d'Alsace avec la région montagneuse, la moyenne obtenue pour
vingt-deux années d'observations, par M. l'abbé Mûller, est de 9°, 54, et, à
Wesserling, dans la vallée de la Thur, à 4^7 d'altitude, la moyenne de
1846 a 1864 est de 8°,!. Chaque année le thermomètre s'élève en moyenne,
à Strasbourg, à 3i degrés centigrades; il y a toujours atteint au moins
26 degrés et n'en a jamais 36 en ce point. A Ichtratzheim, également situé
en plaine et à une distance de quelques lieues seulement, la température
s'est élevée à lui maximum de 37°, 4 dans le courant du mois d'août i863.
C'est la plus haute temjjérature de l'air observée en Alsace à l'ombre.
Quant aux degrés les plus bas, Strasbourg présente une température mi-
niuia moyenne de — 1 3 degrés par année, toujours inférieure à — 4 degrés
et qui est descendue à — 23 degrés le 3 février i83o, et à — 19 degrés
le 3i décembre 1869. Le même jour, où la température s'abaissa à Stras-
bourg .'I — 23 degrés, elle est descendue à — 28 degrés à Mulhouse. En
aucun point de la France, un froid aussi violent n'a sévi en ce siècle dans
la région habitée. Dans les montagnes d'Alsace, nous ne trouvons non plus
un froid comparable pendant toute la durée qu'embrassent nos observa-
tions. En somme, le thermomètre a varié à Strasbourg de 59'',3 en ce siècle,
tandis que les températures extrêmes présentent entre elles une amplitude
de 56", 6 à Ichtratzheim; de 60", 7 à Wesserling; de 55 degrés à Épinal; de
50", 5 seulement au Syndicat, dont l'élévation est cependant de 620 mètres
au-dessus du niveau de la mer. A Paris, pendant la période des observa-
tions exactes faites depuis le dernier siècle, le thermomètre a oscillé en tout
de 61°, 5, quantité égale à l'écart des températures extrêmes en Alsace.
» Les variations mensuelles ou d'une même saison sont beaucoup moins
fortes. Ainsi, pendant les dix dernières années, de 1860 à 1869, la tempé-
rature de l'hiver a varié à Ichtratzheim de 37 degrés, soit de — i^°,'2 à
18 degrés, et à Wesserling l'écart a été de l^o degrés, soit de — 23 degrés
à 17 degrés. En été, les variations sont plus faibles : elles ont atteint 34 de-
grés à Ichtratzheim et 37 degrés à Wesserling, tandis qu'en autonuie et au
printemps les oscillations s'élèvent à 49 degrés ponr Wesserling et à 42 de-
grés pour Ichtratzheim. Quant aux variations pendant le même mois, nous
constatons à Ichiralzheim, de 1860 à 1869, des oscillations de 38 degrés en
avril, de 36 degrés en septembre, de 28 degrés en décembre, de 3i degrés
( 77 )
en juin. A Wesserling, il y a eu, de 1 846 à 1 864, des variations de 4° degrés
en décembre et en mars, de 38 degrés en juin, de Sa degrés en octobre.
Dans les hautes Vosges, au Syndicat, les variations ont été, de i856 à [86g,
de 34 degrés en avril, de 26 degrés en décembre, de 3o degrés en juillet,
de 27 degrés en octobre. On voit combien varient les écarts extrêmes des
différents mois. Les moyennes mensuelles ont aussi différé d'une année à
l'autre de i5 degrés, témoin le mois de janvier, qui a atteint à Strasbourg
la température uioyenne de 6", 6 en i834j et celle de — 8°, 2 en i83o.
Voici d'ailleurs, pour les diverses .saisons et pour l'année entière, le tableau
des températures observées simultanément dans deux stations de la plaine
et dans deux stations des montagnes.
1867-68.
RÉGION DE LA PLAINE.
Moy.
RÉGION
DES
MONTAGNES.
ICmRATZHElM.
COLMA
MASSEVAtX
SY.NDICAT.
Haï.
Min.
Moy
Mai
0
i5,9
29, G
31,4
28,0
Min.
Mai.
0
10,0
27,8
28,6
24,2
28,6
Min.
Moy.
Mai.
0
12,0
3o,2
3o,5
27,0
3o,5
Min.
Moy.
Hiver
Printemps . . .
Été
0
18,0
3o,8
34,4
3o,o
34,4
0
— l5,2
— 5,6
6,5
— 9,0
0
0,89
11,11
19,52
10,64
0
-.7,5
- 5,3
9, S
- 7,0
0
.,54
12,57
20,96
11,39
0
-.1,4
- 2,5
8,2
-5,4
0
0,61
9,38
,7,88
8,9'l
0
— 16,0
— 8,8
4,0
-7,2
0
- 2,72
8,5i
16,43
7,8.
Automne. . . .
Année. . .
-l5,2
10,55
3, ,4
-17,5
11,61
-11.4
9,36
— 16,0
7,56
» Ichtratzheimse trouve à 160 mètres d'altitude et Colmar à 200 mètres,
mais j)lus au sud, tandis que Massevaux est situé à 4 16 mètres d'altitude
vers l'entrée de la vallée de la Doller, et le Syndicat dans la vallée de Clenrie
à l'intérieur des hautes Vosges, à une élévation de 620 mètres. La distribu-
tion de la température aux différentes époques de l'année est à peu près la
même dans la plaine et sur les montagnes. Sa diminution dans le sens de la
hauteur est de i degré pour i5o à 200 mètres d'élévation verticale : dans
les Alpes suisses, on observe une diminution toute semblable. Sous le rap-
port des cultures, nous ferons remarquer que la plaine d'Alsace est surtout
vouée à la production des céréales; les pentes des Vosges, moins sujettes à
la gelée que les régions basses, portent de beaux vignobles entre 200 et
400 mètres d'altitude, tandis qu'à une élévation plus grande le fond des
vallées est revêtu de prairies et qu'on ne trouve plus de champs de blé
qu'aux bonnes expositions entre 4^0 et 800 mètres d'altitude.
( 78 )
» La comparaison des vents aux différentes stations met tout d'abord en
évidence l'influence du relief sur la marche des courants inférieurs. Cepen-
dant si l'on se borne à mettre en regard les observations des stations de la
plaine, on trouve une concordance frappante entre la direction des vents
à Strasbourg, à Ichtratzheim et à Colmar. La prédominance appartient aux
vents du sud-ouest, et, dans une année moyenne, le rapport des vents aus-
traux aux vents boréaux est de i48 à loo. La proportion n'est pas con-
stante pour toutes les saisons. Pendant le semestre d'été, du 21 mars an
21 septembre, le rapport des vents du sud au vent du nord est seidement
de 121 à 100, et pendant les six autres mois, il est de 178 à 100. Ainsi les
vents du sud arrivent plus souvent à la surface du sol en hiver qu'en été.
Les caractères des courants opposés sont d'ailleurs nettement distincts.
Les vents du nord paraissent plus froids, accompagnés d'une forte pression
barométrique : ils amènent un ciel serein, et le beau temps persiste pendant
leurdurée. Au contraire, avec les vents du sud et du sud-ouest, la tempé-
rature s'élève, le baromètre se tient moins haut, l'atmosphère devient hu-
mide, le ciel se couvre de nuages et le temps tourne à la pluie. Enfin, tan-
dis qu'en Alsace les vents d'est et d'ouest manquent souvent pendant un
mois entier, les vents du sud et du sud-ouest se montrent chaque mois.
L'espace dont je dispose ne me permet pas d'entrer ici dans de plus longs
développements. Je me bornerai à caractériser le climat de l'Alsace par ses
variations brusques de température, présentant souvent un écart de 20 de-
grés et plus le même jour, de plus de 5o degrés entre les extrêmes de l'été
et de l'hiver, avec la prédominance des pluies d'été et un état hygro-
métrique moyen de ^5 degrés environ. »
ZOOLOGIE. — Nos deux Hirondelles et leurs nids; par M. J.-B. IVoitlet.
« J'aime beaucoup les oiseaux, et par-dessus tout les Hirondelles, qui,
tous les ans, viennent nous demander un asile pour quelques mois, nous
rendre, en retour, des services incontestables, sans néanmoins aliéner ja-
mais leur liberté. Je me suis déclaré leur protecteur dans noire bourg de
Venerque, près de Toulouse, et, depuis bien des années, les enfiints, pour
m'èlre agréables, ont pris l'habitude de résister au triste plaisir de violer
les nichées de celles qui, presque à la portée de leurs mains, s'établissent
sous le péristyle de ma maison, ou sous les planchers de mes étables et tle
mes granges. J'ose dire tjue, depuis mon enfance, j'ai vécu dans la familia-
rité de ces charmants oiseaux.
( 79)
» Les étudiant depuis si longtemps, je n'ai jamais vu qu'ils aient modifié
leurs habitudes en quoi que ce soit, et c'est avec une très-grande surprise
que j'ai lu la Communication faite à l'Institut de France par M. A. Pou-
cliet, le 7 mars dernier, sur la transformation des nids de l'Hirondelle de
fenêtre.
» Si, à Rouen, cette Hirondelle a modifié l'architecture de son nid,
comme l'a cru M. Pouchet, je puis affirmer que rien de semblable ne s'est
passé ici, où nos Hirondelles restent fidèles à leur vieille manière, qui
n'est pas la même, tant s'en faut, pour chaque espèce.
» Il va sans dire qu'il ne faudrait pas se méprendre sur la valeur de
l'identité des nids dont il va être question ; il en est de ceux-ci comme
des nids de tous les oiseaux, que des circonstances, dues à leur empla-
cement, peuvent modifier, sans eu changer la forme essentielle el caracté-
ristique.
» Voici comment toutse passe chez nous et certainement partout ailleurs,
même à Rouen : nous avons deux espèces à' Hirondelles familières; je né-
glige les Hirondelles de rivage et les Martinets, pour ne penser qu'à celles
qui établissent leurs nids à l'intérieur ou l'extérieur de nos habitations.
Linné les a nommées : l'une est son Hirundo rustica, et l'autre son Hirundo
urbica.
» La première revient à l'espèce que les ornithologistes français désignent
par la dénomination à^ Hirondelle de cheminée, et que, dans notre idiome
roman-languedocien, nous nous contentons d'appeler Hiroundèlo, signi-
fiant la vraie Hirondelle. En cela nous avons raison, puisque c'est celle-là
qui, avec des pieds nus et le ventre blanc, a le Iront, les sourcils et la gorge
teints de brun-marron très-vif, représentant ainsi la Progné de la Fable an-
tique, tachée du sang dn jeune Itys, stigmate indélébile de son crime.
M ^J Hirundo urbica de Linné, en français Hirondelle de fenêtre, est dé-
signée dans notre patois sous le nom de Faucil : elle est d'un beau blanc
sur tout le dessous du corps et le croupion ; ses pieds sont revêtus d'un
épais duvet blanc.
)> Ces deux types, distincts par de si excellents caractères, ne se mêlent
pas entre eux et ont des habitudes quelqî'.e peu différentes. C'est ainsi que
l'Hirondelle rustique arrive toujours la première et nous quitte aussi avant
l'autre. Elle se montre plus confiante que sa congénère et se rend, en quel-
que sorte domestique. C'est celle-là seule qui niche dans l'intérieur de nos
maisons, dans les lieux fréquentés par l'honune, dont elle semble recher-
cher la compagnie. Autrefois, avec nos grandes et vieilles habitations à la
( 8o )
campagne, mal fermées et souvent en partie inhabitées, ces Hirondelles
trouvaient des abris partout; maintenant, nous ne les supportons guère
que sous les grandes galeries, les grands couverts, et dans nos métairies et
nos granges, où nos paysans les respectent, dans la croyance que ces oi-
seaux portent bonheur aux maisons qu'elles préfèrent.
« Leurs nids n'ont jamais ressemblé à ceux de l'Hirondelle citadine, et à
défaut des oiseaux qui les habitent, on ne peut se méprendre sur les ou-
vrières qui les ont bâiis. Les nids de l'Hirondelle rustique rentrent dans la
catégorie de ceux que M. Pouchet suppose avoir été récemment perfec-
tionnés et qu'il attribue, bien mal à propos, à l'IIirondelle citadine. Ceux-ci
sont largement ouverts en balcon dans toute leur partie libre, et les oisil-
lons qui les occupent peuvent, en se rangeant tout autour, montrer leurs
têtes à l'extérieur, ce qu'ils ne manquent pas défaire, en attendant la bec-
quée de leurs parents.
» L'Hirondelle citadine, moins confiante, ne choisit jamais l'intérieur de
nos maisons pour y construire son nid : c'est à l'extérieur, sons les auvents
de nos toits, sous les grandes corniches, toujours très-haut, qu'elle s'éta-
blit. Au lieu d'isoler ses nids, comme le fait l'Hirondelle rustique, elle les
groupe par lignes continues, parfois doublées et même triplées. Je viens
d'en compter, ainsi rangées, plus de cent sous la saillie du toit de ma mai-
son, au midi, sur une cour.
» Mais ce qui distingue essentiellement ces nids de ceux de l'Hirondelle
rustique, c'est leur plus grande profondeur et leur très-petite entrée circu-
laire, tout juste assez grande pour laisser passer l'oiseau, non sans quelques
efforts de sa part : c'est là ce que M. Pouchet* a ajipelé l'ancien système de
nidification de l'Hirondelle citadine, à laquelle ces nids appartiennent réel-
lement, mais à l'exclusion des premiers formant galerie.
» Nous sommes convaincu que, malgré les adhésions déjà obtenues par
l'ingénieux système de M. Pouchet (tant certains esprits se laissent gagner
facilement aux choses de l'imagination), les naturalistes qui prendront la
peine d'étudier scientifiquement cette question arriveront à cette consé-
quence, que l'Hirondelle de fenêtre n'a introduit aucun perfectionnement
dans son mode de nidification durant la première moitié du siècle actuel,
comme M. Pouchet l'a annoncé au monde savant. L'observation des faits
vient, au contraire, confirmer l'opinion de Spallanzani, fornudée dans l'iui
de ses intéressants Mémoires sur les Hirondelles, et que M. Pouchet vf-
grettera d'avoir (jualifiée d'erreur »j«)i/yé5te, à savoir : « que chaque espèce
» construit son nid sur un modèle qui lui est propre, qui ne change jamais
( 8i )
» et se perpétue de siècle en siècle. » Ainsi sera rétablie la vérité, nu mo-
ment éclipsée par le merveillieux, qui est, en histoire naturelle, ce que le
surnaturel est en philosophie. »
PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. — Expériences sur (a fanaison des plantes.
Note de M. Ed. Prillieux, présentée par M. Ducharire.
« Dans le Mémoire que j'ai l'honneur de présenter à l'Académie, je me
suis proposé de résoudre la question de savoir si une plante fanée peut,
dans certaines conditions, reprendre sa fermeté et sa fraîcheur sans absor-
ber de l'eau du dehors. Dans les expériences qui ont trait à l'absorption de
l'eau par les feuilles, il est souvent fort difficile d'essuyer bien complète-
ment les plantes, et par suite d'employer la balance pour constater s'il y a
eu absorption ou non. Il y avait donc, à ce point de vue, un intérêt parti-
culier à déterminer d'une façon précise si, quand on voit une plante fanée
se redresser et relever ses feuilles, on est en droit de conchu'e, sans avoir
recours à la balance, qu'elle a absorbé de l'eau.
» J'exposerai ici sommairement plusieurs expériences faites dans ce but.
» Première expérience. — Cinq feuilles de Malvn sylvestris, complètement
fanées, sont coupées en laissant aux pétioles toute leur longueur, et les
coupes sont mastiquées pour empêcher qu'il n'y ait absorption par les sur-
faces à vif. Elles pèsent S^'^gS. Elles sont suspendues, sous une grande
cloche de verre, dans de l'air saturé d'humidité. Au bout de trois jours, les
feuilles ont repris leur turgescence ; elles sont redevenues fermes et fraîches.
Elles ne pèsent plus alors que 5^% 58; elles ont perdu oS',4o : elles n'ont
donc pas absorbé d'humidité du dehors, tout en cessant d'être fanées.
» Deuxième expérience. — Une jeune tige de Campanula Trnclielium,
extrêmement fanée au soleil et amollie à tel point que son exirémité pend
perpendiculairement sous l'action de la pesanteur, est suspendue dans l'air
humide, après qu'on a mastiqué la coupe. Dès le lendemain, la |)ortion
pendante se relève et atteint presque la position horizontale, puis elle con-
tinue à se redresser encore et finit par être verticale.
» De jeunes inflorescences de Solidago canadensis se relèvent de même,
quoique moins complètement. Au commencement de l'expérience elles
pesaient, pendantes, 4^% 53 ; à la fin elles pesaient, relevées, /|S',i 5 seu-
lement.
» Troisième expérience. — Une jeune branche de Sureau, portant trois
paires de feuilles, pèse, très-fanée, i6s',6o. Mise dans l'air humide, ellere-
C. R., 1870, 2» Semestre. (T. LXXI, IN» 1.) II
( 8a )
prend lentement un peu de fraîcheur. Au bout de six jours, la paire supé-
rieure de feuilles et l'extrémité de la tige se sont redressées. Les feuilles
inférieures, bien qu'assez fraîches, ne se relèvent pas. Le rameau, à ht fin
de l'expérience, ne pèse plus que ]56%6o.
)> Qtialrième expérience. — Un pied mâle de Mercurialis annua pèse, très-
fané, S^'jSS. On le suspend dans l'air humide; la tige est si molle que ses
deux extrémités pendent perpendiculairemeut c!e chaque cÔLé du support.
Dès les lendemain la plante devient plus ferme : au bout de deux jours,
elle est complètement redressée, et ses feuilles sont redeveiuies fraîches.
Elle ne pèse plus alors que 3s'', 'j'y.
» Cinquième expérience. — Un pied très-fort de Parielaria nfficinolis se
fane à un soleil ardent; la partie supérieure et encore tendre de la tige pend
sans soutien, sous l'action de la pesanteur. Elle pèse S^^ôS. On la suspend
dans l'air humide. Dès le troisième jour, elle est beaucoup moins fanée; le
quatrième jour, la fige est presque complètement redressée; les feuilles sont
relevées et ont repris leur turgescence et leur fraîcheur. La plante cepen-
dant a perdu de son poids une quantité assez notable; elle ne pèse plus
que 46% 78.
M Les feuilles supérieures et les petits rameaux secondaires qui portent
les fleurs et, en général, les parties les plus jeunes deviennent surtout
fermes et fraîches. La tige, dans une partie de sa longueur, s'est retirée
sur elle-même, et au lieu d'être cylindrique comme d'ordinaire, elle s'est
aplatie; mais ce resserrement n'a pas atteint jusqu'au sommet; l'extré-
mité de la tige, sur une longueur d'environ 8 centimètres, est demeurée
cylindrique.
» Cette expérience montre assez nettement un fait qui ressort, du reste,
de l'ensemble de mes observations : c'est que les parties les plus jetuies et
les plus rapprochées du sommet reprennent leur fraîcheur aux dépens
des parties inférieures. Dans une plante fanée, isolée dans l'air humide,
elles cèdent le peu d'eau qu'elles contiennent encore aux parties élevées,
auxquelles elles rendent la fermeté et la turgescence.
» Il se passe là quelque chose de fort analogue à ce qu'on voit se produire
dans ini tubercule de Pomme de terre qu'on laisse exposé à l'évaporalion
dans une chambre, comme l'a très-bien observé M. Nœgeli [Botnn. Miltlieil.,
p. 38). La Pomme de terre, qui était ferme et lisse, s'amollit et se ride, en
perdant de l'eau par évaporation. Or, on voit que ces changements se font
d'abord à la base du tid)ercule, jiuis se propagent de la base au sonunef. A
un moment on voit la Pomme de terre molle et plissée dans sa moitié
( 83 )
inférieure, ferme et lisse encore dans sa moitié supérieure; puis il n'y a
plus que le sommet même et les parties voisines des bourgeons latéraux
en voie de développement qui soient lisses; tout le reste est ridé et plissé.
Enfin, quand le tubercule est déjà presque sec, la pousse terminale con-
tient encore un tissu turgescent et un épidémie lisse. 11 se produit là un
courant d'eau très-évident, qui se dirige de bas en haut. Il en est de même
dans les expériences que je viens de rapporter : il s'y est fait aussi un trans-
port de l'eau, de la base au sommet des organes isolés au milieu de l'air
humide, et c'est par suite du déplacement du liquide, de la base au sommet
des tiges, des tiges dans les feuilles, du pétiole dans le limbe des feuilles
(première expérience), que les tissus fanés, qui sont voisins du sommet,
reprennent leur turgescence, tandis que les feuilles inférieures restent
fanées et que la partie inférieure de la tige se resserre, se vide et se des-
sèche.
» Il résulte de l'ensemble des expériences que je viens de rapporter,
que les parties fanées des plantes peuvent reprendre, dans certains cas,
leur fermeté, leur fraîcheur, et redevenir turgescentes sans recevoir d'eau
du dehors. Ces expériences permettent, en outre, de se rendre compte de
ce qui se passe en pareil cas, et de reconnaître que la cessation de la
fanaison est due alors à un déplacement de l'eau qui se porte de la base
au sommet des organes; certaines parties regagnant leur fraîcheur pre-
mière, grâce à l'eau que d'autres leur cèdent. »
BOTANIQUE. — Sur In zone génératrice des appendices végétaux.
Note de M. Cave, présentée par M. Duchartre.
« La zone génératrice, dont nous avons signalé l'existence chez les ap-
pendices normaux ou modifiés est en parfaite continuité avec celle qui
existe dans les organes axiles. Pour le prouver, je prends sur n'importe
quel végétal un bourgeon très-peu avancé, et je le coupe longiludinalement.
J'observe alors ce qui a été décrit par un grand nombre de botanistes et
étudié par tous. Je vois l'axe très-surbaissé, entièrement cellulaire, ainsi
que les feuilles rudimentaires auxquelles il donne naissance. Dès cet ins-
tant, on peut reconnaître la zone génératrice, et s'assurer qu'elle est con-
tinue avec elle-même dans l'axe et les appendices.
). Ce que je viens de dire suffit, à la rigueur, pour prouver noire pro-
position. Mais il me semble utile de suivre les changements qui vont s'ef-
fectuer. La structure, exclusivement cellulaire, ne persiste ni dans la tige
I !..
(B4 )
ni dans les feuilles, et les faisceaux tîbro-vasculaires ne lardent pas à se
dessiner. Pour eux. encore la continuité est parfaite. Pourtant une diffé-
rence est à noter, différence importante, car elle entraînera une diversité
de position pour les parties nouvelles.
» Dans un organe jeune, la zone génératrice n'est pas réduite à une
mince couche, elle forme pioportionnellement une grande jiartie de l'éj^ais-
seur totale, et cette importance relative va en diminuant à mesure que
l'organe avance en âge. C'est dans l'épaisseur de cette couche formatrice
que les trachées ont pris naissance. Dans l'axe, elles laissent en dehors
d'elles la portion la plus active de la zone génératrice. La même chose a
lieu pour les nervures des feuilles.
w Au contraire, dans tous les points où du parenchyme doit se dévelop-
per, c'est la partie interne de cette même zone qui conserve l'activité la
phis grande. En conséquence, les nervines vont se comporter à la façon
des tiges : on doit y distinguer une portion corticale et une portion cor-
respondant au bois. Entre ces deux régions se trouve englobée une portion
de la zone génératrice commune à tout l'organe. Cette disposition explique
le degré croissant de complication que nous offrent les nervmes à mesure
qu'elles deviennent plus âgées. Elle nous montre en outre que les nervures,
s'accroissant surtout par leur face externe ou inférieure, doivent faire de
ce côté de la feuille une saillie de plus en plus prononcée.
)) Suivons par la pensée le parenchyme dans son développement. La
zone génératrice de ce tissu cellulaire est d'abord continue avec celle des
nervures qui le traversent. Mais, peu à peu, de nouvelles rangées de cellules
s'organisent entre les parties préexistantes et l'épiderme supérieur. C'est
immédiatement sons cette enveloppe que l'on trouve la fraction la plus
active du cambium foliaire. La conséquence naturelle est une séparation
de plus en plus nette, entre les parties jeunes des nervures et les éléments
nouveaux du parenchyme. En d'autres termes, la continuité qui a existé
d'abord disparaît par suite des progrès de la végétation, et échapperait à
celui qui se contenterait d'examiner une petite portion d'une feuille adulte,
soit en section transversale, soit en coupe longitudinale. Maison en trou-
vera toujours au moins les traces, si l'on étudie des parties suffisamment
jeunes.
» Ainsi l(; sonunet de la feuille du tilleul, ainsi la base des folioles infé-
rieures du rosier nous montrera la zone génératrice générale contenant
encore les nervures. Chez la plupart des feuilles, le développenu-nt, dans
chaque section transversale, se fait du milieu vers les bords. Presque tou-
( 85 )
jours aussi, en regardant ces bords au microscope, nous y avons signalé
l'existence d'une zone unique.
)) En dernière analyse, si l'on venait à me demander où se fait le chan-
gement de position de cette zone génératrice, je dirais : Il se fait sur toute
la feuille, le long des lignes de séparation des nervures et du parenchyme.
Mais pourrait-on dire encore : Où s'établit la transition entre ces deux dis-
positions différentes? La réponse est facile : La transition se fait par les
parties nouvelles, quelles qu'elles soient, par les endroits où la zone géné-
ratrice, commune à tout l'organe, contient encore les nervures.
» Je me résume en formulant quelques principes :
» 1° Dans un organe appendiculaire jeune, on remarque une continuité
parfaite entre la zone génératrice de l'organe et celle de l'axe sur lequel
il naît;
» 1° Cette continuité primitive persiste toujours entre l'axe et les ner-
vures. Mais la zone génératrice des nervures et celle du parenchyme s'éloi-
gnent l'une de l'autre, par suite des progrés de la végétation.
» 3° Même dans une feuille adulte, on trouve des traces de la continuité
primitive en examinant les parties les plus récemment formées. »
GÉOLOGIE. — Sur la position des calcaires à Terebratula janitor, dans tes
Basses-Alpes. Note de M. Ch. Vélain, présentée par M. Des Cloizeaux.
« 11 existe, dans certaines parties du midi de la France et notamment
dans le département des Basses-Alpes, entre l'oxfordien supérieur et les
marnes néocomieunes à belemnites plates et à petites ammonites ferrugi-
neuses, des assises puissantes de calcaires compactes lithographiques, dans
lesquels, les géologues de la Provence voulaient voir les représentants
de tout le jurassique supérieur ; M. Hébert depuis longtemps avait
établi que ces calcaires devaient appartenir plutôt au néoconiien le plus
inférieur; mais cette opinion, loin d'être admise par tous les géologues,
était au contraire vivement discutée. Plusieurs mois d'explorations faites
dansles Basses-Alpes, sous les auspices de M. Hébert, avec deux de mes amis,
MM. Hollande et Bachelet, me permettent de pouvoir donner sur ces régions
nue bonne série de coupes qui doivent 6xer déQnitivement la place que ces
calcaires occupent dans la série des terrains.
» Dans toutes les localités que nous avons explorées dapuis Saint-Julien-
en-Beauchène jusqu'à Castellane, nous avons constaté que la formation
jurassique s'arrête à cette zone de l'oxfordien supérieur que caractérisent
( 86 )
les ammonites tortisulcatus , polyplocm , tenuiholatiis , etc. Au-dessus
vienneut en concordance parfaite des calcaires lithographiques, im|)ossibles
souvent à distinguer miuéralogiquemeut des précédents, mais qui ren-
ferment une faune nouvelle et distincte d'ammonites néocomiennes et qui
sont caractérisés par la lerebralula janilor (Pictet). Ces calcaires, d'une
épaisseur assez variable, deviennent très-marneux à leur partie supérieure,
et passent ainsi insensiblement aux marnes à bélemnites plates qui les sur-
montent.
» Deux coupes que j'ai l'honneur d'adresser à l'Académie, prises l'une
près de Castellane, l'autre près de Barréme, pourront démontrer la superpo-
sition immédiate des calcaires à Terebratula janilor sur l'oxfordien supérieur.
» A cette distance de Castellane, si l'on franchit les crêtes successives du
mont Cheirou pour faire l'ascension du Courchon, on quitte les calcaires
néocomiens à Scapliiles Ivanii pour se trouver bientôt devant luie masse
considérable de couches fortement repliées vers le nord, constituées à la
base par des calcaires très-durs, pétris de gryphées arquées et appartenant
par conséquent au lias inférieur. Au-dessus viennent d'autres calcaires avec
silex branchus, puis des marnes noires, très-schisteuses, presque sans fos-
siles, alternant dans leur partie supérieure avec de petits lits de calcaires
renfermant de nombreuses Ammonites plicalilis de petite taille : ces der-
niers calcaires deviennent de plus en plus puissants et sont alors très-fossi-
lifères. Avec V Ammonites tortisui atus, qui y est très-commune, j'ai trouvé
là une ammonite ayant beaucoup de rapports avec V Ammonites Hauffii
d'Oppel, et qui indique là l'oxfordien supérieur, le niveau de V Ammonites te-
nuilobatus; cette espèce, en effet, accompagne toujours {'ammonites tenuilo-
batus, dans le Wurtemberg, à Barjols, à Escragnoiles, à Grenoble, etc. Sur
cet oxfordien reposent des calcaires, noduleux, bréchiformes, avec.4»i/»o-
niles rocjoznicensis (Zeischner), espèce néocomienne, puis les calcaires li-
thographiques à Terebratula janitnr. La superposition immédiate du riéoco-
mien inférieur sur l'oxfordien supérieur est donc là bien évidente, et rien
en ce point ne saurait être rapporté au Coral-rag, au Rimmeridje ni au
Porlland.
» J'ai retrouvé cette même superposition en me rendant de Digne à Bar-
réme par l'ancienne route.
» Cette roule coupe la grande chaîne des Dourbcs au col de Chaudon,
et l'on peut aborder facilement eu ce point les sommets de ces montagnes.
J'ai retrouvé là, sur des marnes oxfordiennes, des calcaires avec Ammonites
pol/plocus constituant les crêtes abruptes de cette grande chaine, et recou-
( 87 )
verts directement par des calcaires Ammonites ptycho'icus et Terebmlula ja-
nilor. Ces derniers calcaires se lient d'une façon insensible aux marnes
néocomiennes à belemnites plates et à ammonites ferrugineuses qui vien-
nent ensuite; de sorte que les caractères stratigrnphiques vieiment s'ajou-
ter à ceux que la Paléontologie nous avait précédemment fournis pour em-
pêcher de pouvoir mettre entre ces deux assises une séparation nette et
tranchée; les calcaires à Terebmlula janilor doivent donc faire partie du
néocomien et en représenter les dépôts les plus inférieurs. »
PHYSIOLOGIE. — Observation d'une inégale production et d'une différence
de composition du lait pour les deux seins de la même femme ; par M. Louis
SocRDAT. (Extrait.)
« Ayant remarqué la préférence très-visible qu'un enfant manifestait
pour le sein droit de sa mère, préférence déjà manifestée par deux enfants
précédents, et ayant fait en même temps la remarque que le sein préféré
était plus volumineux que l'autre et fournissait environ le double de lait,
j'ai pensé qu'il serait intéresssnt d'examiner séparément chacun de ces deux
laits. Je me suis d'abord borné à prendre la densité et le poids du résidu
sec, puis j'ai dosé le beurre; enfin, voidant voir comment les autres élé-
ments étaient répartis, j'en ai fait l'analyse complète.
» De cet examen sont ressorties les conclusions suivantes :
)) 1° La composition du lait de la même femme (pour les deux seins en-
semble), comparée d'un jour à l'autre, est très-variable, sans qu'il y ait des
changements appréciables dans l'état de sa santé. Il suffit d'une fatigue
momentanée, d'un petit changement de régime, d'un séjour du lait plus ou
moins prolongé dans les mamelles, etc., poin- amener ces variations de
composition. Ainsi, dans huit analyses portant sur l'ensemble du lait des
deux seins, le poids du résidu sec a varié depuis io,io jusqu'à 13,70
pour 100, ou :: I ; 1,35.
w La densité a été aussi très-variable. J'ai obtenu, pour la moyenne des
deux seins, depuis 0,980 jusqu'à i,o3i.
» 2° I^a composition du lait varie encore d'un sein à l'autre, et cela dans
le même temps. C'est là le fait principal de ma Communication. Ainsi, le lait
du sein droit, qui est de beaucoup le plus abondant, est aussi le plus riche
en matières fixes, dans des rapports qui sont :: i,ao: i pour le minimum,
et :: 1,74*. i pour le maximum.
» 3° Dans ces conditions, le beurre est ordinairement sécrété en bien
( 88 )
plus grande quantité par le sein droit que par le sein gauche : ; t,5o; i
(minimum) et 9 : i (maximum). J'ajoute ici que le seul aspect de ces deux
derniers laits aurait suffi pour amener la constatation d'une différence si
considérable.
» 4° Les matières azotées, caséum et albumine, sont, de même que le
beurre, sécrétées. par le sein droit en plus grande quantité que par le sein
gauche, ;; 1,90 : I pour le maximum.
» 5° Les principes solubles, lactose et sels, ceci est digne de remarque,
dosés dans cinq analyses, se sont trouvés seuls répartis d'une manière à
peu près égale dans les deux seins. Cependant, dans les deux analyses où
il y a eu une petite différence, cette différence s'est trouvée en faveur du
côté le plus faible en beurre.
» Pour les sels, cette différence est encore dans le même sens. De sorte
qu'il semblerait, d'après ces quelques analyses , qu'il y ait quelque corré-
lation entre les matières grasses et azotées, d'une part, et les matières
solubles, d'autre part.
» La dernière analyse adonné, par exception, des nombres plus forts
pour le sein gauche. La raison de ce renversement paraît être dans ce fait :
que, cette fois, le lait n'a pu être extrait qu'à grand'peine pour les^, le
dernier dixième étant venu très-facilement. Ce lait pourrait donc être con-
sidéré comme une réserve plus complètement élaborée, le lait nouveau
n'étant pas encore monté, et l'on sait que les dernières parties du lait sont
bien plus crémeuses que les premières. Cette raison expliquerait cette ano-
malie. »
M. MoRELLET adresse, de Strasbourg, une Noie relative à une machine
à coudre, mise en mouvement par un moteur mécanique. Cette machine,
imaginée par M"^ Garcin, a reçu le nom de « couseuse automate ».
Cette Note sera soumise à l'examen de M. le général Morin.
A 5 heures trois quarts, l'Académie se forme en Comité secret.
La séance est levée à 6 heures un quart. É. D. B.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE PUBLIQUE DU LUNDI 11 JUILLET 1870,
PRÉSIDÉE PAR M. CLAUDE BERNARD.
PRIX DÉCERNÉS.
SCIENCES MATHÉMATIQUES.
GRAND PRIX DE 3IATHEMATIQUES.
(Commissaires : MM. Bertrand, Chasies, Liouville, Bonnet,
Serret rapporteur.)
Piapport sur le Concours de l'année 1069.
L'Académie avait proposé, pour sujet de grand prix de Mathématiques
à décerner en 1869, la question suivante :
« Perfectionner en quelque jjoint essentiel la théorie du niouveiiient de trois
» corps qui s'attirent mutuellement, suivant la loi de la nature, soit en ajoutant
» quelque intégrale nouvelle à celtes déjà connues, soit en réduisant d'une
» manière quelconque les difficultés que présente la solution complète du pro-
» blême, n
Un seul Mémoire a été envoyé au Concours, il porte cette épigraphe :
« Il y a peut-être quelque avantage à présenter la théorie de la Lune comme
» une application des formules générales du problème des trois corps. »
C. R., 1870, 2" Semestre. (T. LXXI, M» 2.) I 2
(90 )
La première partie du Mémoire est consacrée au développemoiit d'une
analyse éli'g.inte et ingénieuse, pai- laquelle l'auteur ramène la solution
générale du problème des trois corjis à l'intégration d'mi système canonique
de huit écpiations différentielles du premier ordre dont on connaît une
intégrale, savoir : celle des /orces vives. L'une des variables primilivemenl
introduites ne figurait que par sa différentielle, et elle a été éliminée, à
l'instar du nœud i\b Jacobi; sa détermination ultérieure s'effectue donc
par une quadrature. Enfin, comme !e temps n'entre aussi que par sa dif-
férentielle, dans les équations, il peut lui-même être éliminé, et il est per-
mis de dire, avec l'auteur, que la solution du problème exige seulement
l'intégration de six équations différentielles du ])remier ordre et deux
quafi ratures.
INIais tel était déjà l'état de la question après le travail de Jacobi sur
V élimination des nœuds. Qiuuit au perfectionnement f|ui consiste à former
un svstème canonique de huit étpiations différentielles du premier ordre
dont on connaît l'intégrale des forces vives, il a été déjà réalisé récemment,
d'une manière très-différente à la vérité, dans un tiavail comiiuniiqué à
l'Académie et inséré dans les Comptes rendus de ses séances.
La seconde partie du Mémoire a |)oiu- objet l'application des formules
de la première partie à la théorie de la Lune. L'auteur ne préseule qu'à
titre d'essai cette application, et il se borne à une première approximation ;
la Commission exprime le regret que celte partie importante du Mémoire
n'ait pas reçu plus de développements.
Si le Mémoire envoyé au Concours ne rem])lit pas suffisamment les con-
ditions du |)rogramme arrêté par l'Académie, il n'eu révèle pas moins chez
son auteur des qualités éminentes et un talent mathématique d'un ordre
élevé. Le résultat déjà obteiui permet d'espérer que de nouveaux efforts
apporteront des iierfectiouncmenis |)lus notables à inie théorie qui intéresse
à la fois, à un haut degré, l'Analyse mathématique et l'Astronomie.
En résiuné, la Commission décide qu'il n'y a pas lieu de décerner le
prix, et elle propose à l'Académie de remettre la question au Concours
pour 1872.
L'Académie adopte les conclusions de ce Rapport.
( 9' )
GRAND PRIX DES SCIENCES MATHÉMATIQUES.
QUESTION PROPOSÉE EN 1864 POUR lOGC, PUIS REMISE AU CONCOURS, APRES MODIFICATION,
POUR 18G9.
(Commissaires : MM. Faye, Liouville, Laugier, Le Verrier,
Delaunay rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 1869.
L'Académie avait mis au Concours, pour 1869, '^ question suivante:
« Discuter complètement les anciennes observations d'éclipsés qui nous ont été
» transmises par l 'histoire, en vue d'en déduire la valeur de l'accélération séi u-
» taire du moyen mouvement de la Lune, sans se préoccuper d'aucune valeur
» théorique de celle accélération séculaire; montrer clairement à quelles con-
» séquences ces éclipses peuvent conduire relativement ci l' accélération dont il
» s'aqit, soit en Un assignant forcément une valeur précise, soit au contraire en
» /;( laissant indélerminée entre certaines limites. »
Deux pièces sont parvenues au Secrétariat de l'Institut; aucune d'elles
n'a paru mériter le prix.
La Commission, vu l'importance de la question proposée, demande à
l'Académie de la mettre de nouveau au Concours pour l'année 1873.
L'Académie adopte cette proposition.
PRIX D'ASTRONOMIE,
FONDATION LALANDE.
(Commissaires : MM. Delaunay, Faye, Mathieu, Liouville,
Laugier rapporteur.)
Rapport sur le Concours tle l'année 1869.
L'existence d'iui grand nombre de petites planètes entre Mars et Jnpiter
est sans contredit un des faits les plus remarquables dont la science soit
redevable aux astronomes du xix" siècle.
Les découvertes successives des astéroïdes exercent sur les progrès de
l'Astronomie une double influence : elles agrandissent le domaine de nos
connaissances uranographiques, et elles augmentent d'année en année le
nombre et l'habileté des astronomes calculateurs. Aussi l'Acadénne, à plu-
sieurs reprises, a-t-elle encouragé un genre de recherches si utile; nous lui
12..
(9^ )
rappellerons avec plaisir les noms bien connus de MM. Hencke de Driessen,
Hind, de Gasparis, Luther, Goidschmidt, Chacornac, etc., qui tous ont
obtctui plusieurs fois la médaille de Lalande.
Parmi les astronomes qui, dans ces dernières années, ont enrichi la
nombreuse famille des petites planètes, la Commission signale M. James
Watson, directeur de l'observatoire d'Ann-Arbor (Etats-Unis). Cet habile
astronome a découvert les neuf astéroïdes n°' 79, 93, 94, 100, loi, io3,
io4, io5 et 106, dont les htiit dernières dans le court intervalle d'une
année.
En conséquence, la Commission propose à l'Académie de décerner,
pour l'année i86g, le prix d'Astronomie fondé par Lalande à M. James
AVatson.
L'Académie adopte la proposition de la Commission.
PRIX DE MÉCANIQUE,
FONDÉ PAR M. DE MONTYON.
(Commissaires ; MM. Morin, Combes, Diipin, de Saint-Venant,
Phillips rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 18C9.
M. Arson, Ingénieur en chef de la Compagnie parisienne d'éclairage et
de chauffage par le gaz, est auteur d'un travail important exécuté dans ces
dernières années par ordre de iAL de Gayffier, Directeur de la Compagnie,
sur l'écoulement des gaz dans de longues conduites.
L'envoi du gaz à de grandes distances du lieu de sa production présente
particulièrement un intérêt considérable, et cette question n'avait pas en-
core été l'objet d'études précises, comme il en avait été fait pour le mou-
vement de l'c-au dans les conduites de distribution, notamment par feu
M. Darcy. Girard avait bien fait connaître, en 1821, les résultats d'expé-
riences exécutées par lui sur ce sujet; mais l'emploi qu'd fit de tubes très-
petits (des canons de fusils) ne permettait pas de croire que ces résultats
fussent applicables à de grosses conduites en fonte brute.
D'Aubuisson, en i^-i"], avait avancé la question en soumettant à l'expé-
rience des tuyaux (h" pUis grandes dimensions; m:ii'< U n'avait pu. apprécier
les volumes de gaz écoulés que par le calcul, tM la détermination déjà si dé-
licate des diminutions de pression par le frottement ])ouvait être affectée de
toutes les incertitudes qui planent sur celle des volumes ainsi obtenus.
(93)
De ces deux séries d'observations, Navier avait conclu, pour représenter
le frottement des parois, une formule monôme qui, avant les recherches
de M. Arson, était exclusivement employée et qui supposait cette force in-
dépendante du diamètre et de la nature des tuyaux.
Les expériences de M. Arson ont eu lieu, d'abord à l'usine de Saint-
Mandé sur de l'air, puis à celle de la Villette, sur de l'air et sur du gaz de
l'éclairnge. Elles ont été exécutées sur des conduites de grandes dimensions.
Toutes les précautions ont été prises pour garantir l'exactitude des obser-
vations. Les volumes étaient mesurés par des compteurs dedimensionset de
puissance diverses selon les cas. Les pressions étaient constatées au moyen
d'instruments spéciaux d'une extrême précision.
Voici maintenant les principaux résultats obtenus par M. Arson et qui
lui ont valu la médaille d'or de la Société des Ingénieurs civils.
Il ressort de ses expériences que la formule monôme précédemment
adoptée comme représentant le frottement des parois ne doit pas être con-
servée, mais doit être remplacée par une expression binôme, contenant
deux termes proportionnels, l'un à la vitesse moyenne et l'autre à son
carré.
Il a montré que les coefficients numériques qui entrent dans cette for-
mule ne sont pas constants pour un même gaz, comme on le croyait jusqu'a-
lors, mais qu'ils dépendent du diamètre et de la nature des parois, résultat
qui présente une analogie frappante avec ceux obtenus par M. Darcy pour
les conduites de distribution d'eau.
Il a donné, comme conséquence de nombreuses expériences, les valeurs
de ces coefficients pour les dimensions des conduites qui se rencontrent le
plus fréquemment dans les applications.
Enfin, pour répondre à un besoin de la pratique qui se présente aussi
dans la question des conduites de distribution d'eau, il a calculé et publié
des tables très-étendues, relatives à l'air et au gaz de l'éclairage et destinées
à éviter des calculs souvent longs et pénibles, ainsi que les chances d'er-
reur qui en résultent. Ces tables font connaître, pour les volumes du gaz
écoulés pas seconde ou par heure, les vitesses moyennes et les pertes de
charge rapportées à looo mètres de longueur de conduite et évaluées en
mètres de hauteur d'eau.
L'importance et l'utilité pratique de ces recherches et des résultats aux-
quels elles ont conduit ont amené la Commission à accorder à 31. Arson
le prix de Mécanique.
(94 )
PRIX DE STATISTIQUE,
FONDÉ PAR M. DE MOKTTON.
(Commissaires : MM. Mathieu, Diipin, Eoussingault, Passy,
Bienaymé rapporteur.)
Rapport sur le Concours <le l'année I8C9.
De tout temps les collections de faits d'espèces si différentes, que l'on
comprend, bien à tort, sous le nom commun de Statistique, ont été très-
estimées. « T.es observations ont créé les sciences; et l'expérience dirige la
vie des hommes selon la science; l'inexpérience la mène au hasard, » Ce
sont les paroles de Polus, ou peut-être de Platon lui-même dans le Gorcjias,
et Aristote, dans la Mélaphjsique, ajoute que c'est avec justesse que Polus
se prononce ainsi sur la nécessité des observations. Mais la nécessité des
renseignements numériques, recueillis avec précision, ne s'est jamais ma-
nifestée peut-être avec plus d'évidence que dans le siècle actuel. Partout
des Bureaux de Statistique ont été fondés, partout on a multiplié les publi-
cations. Seulement, il faut l'avouer, les résultats acquis n'ont pas souvent
répondu au but qu'on send:)lait se proposer. Les causes de l'insuccès sont
palpables. Le défaut de connaissances mathématiques conduit souvent à
rassembler des masses de faits incomplets; et quand on les a réunis avec
grandes peines, on veut absolument en tirer les conséquences qu'ils ne peu-
vent donner. C'est surtout une opinion bien fausse, quoique très-répandue,
qui nuit au succès : on s'imagine que rien n'est plus facile que d'exécuter
ce genre de travaux. On les abandonne en quelque sorte au premier venu
parce qu'on ne veut pas constituer de vraies comi)tabiiités savantes, qui .se-
raient absolument indispensables. On recule devant les dépenses. Sans nul
doute, elles seront considérables quand il s'agira de parvenir enfin à toutes
les connaissances qui se présentent confusément à l'esprit dès qu'on pro-
nonce le mot de Statistique. C'est une immense comptabilité à établir, à di-
riger scientifiquement : ou jjlutôt ce sont des complabilités très-différentes
les unes des autres à suivre avec persévérance pour chaque nature de faits.
Il faut tout enregistrer d'avance, car on ne refait pas la statistique du passé.
L'ouvrage que la Commission, chargée de décerner le prix fondé par M. de
Montyon, a distingué entre tous dans le Concours de 18G9, en fournit une
preuve nouvelle. Tout ce qui était consigné par le ISIiuislèrc de la Guerre
dans les registres des hôpitaux et dans les contrôles de l'armée a pu être
( 95)
relevé et a donné des résultais d'une grande exactitude. Mais quand il s'est
trouvé des lacunes dans ces vastes comptabilités, le zèle infatigable de l'au-
teur n'est pas parvenu à les combler. On ne peut que le louer de n'avoir
pas même essayé dans certains cas la moindre conjecture. Il faut .«avoir, en
ces matières, ne pas aller au delà des faits authentiques. L'invention, si
brillante ailleurs, ne servirait ici qu'à propager des idées inexactes.
L'Ouvrage remarquable dont il s'agit est dû à M. Chenu, et est intilulé;
Statistique médico-chiiurgicale de la campaqne d'Italie en iSSg et 1860. Déjà
l'Académie avait décerné un prix à M. Chenu, pour son excellent travail
sur la mémorable campagne de Crimée. Les deux volumes qu'il publie au-
jourd'hui sur les combats de nos soldats en Italie ont paru mériter le même
honneur. Ils offrent le même intérêt saisissant, au point de vue histo-
rique de la campagne et au point de vue des résultats chirurgicaux. Le lec-
teur s'y laissera entraîner, car la chronique de l'armée, quelque simplement
qu'elle soit racontée, met en évidence l'héroïsme de nos troujies. Après
l'avoir lue, nul ne prendra pour des lieux communs ces louanges qui revien-
nent si souvent dans nos histoiies ou tlaus nos chants pat/ioliques : ce ne
sont |)as de vains mots. IMalheureusement la gloire n'est achetée qu'à haut
prix, la vaillance paye ses gloires parfois bien chèrement. On n'eu est que
trop convaincu, en parcourant, même rapidement, la partie chinu-gicale,
c'est-à-dire presque tout l'ouvrage. Sans cesse elle met sous les yeux les plus
pénibles tableaux.
Toutefois ce n'était pas ces deux faces du travail de IM. Chenu que votre
Conunission devait considérer. Il fallait sans doute en tenir compte, pour
bien juger de la grande valeur statistique de ces volumes, qui renferment
près de 2000 pages; mais c'est aux nîédecins, c'est aux historiens qu'il
appartiendra d'examiner ces nombreux documents à leurs points de vue
spéciaux. Voire Commission n'avait à apprécier que l'exactitude de celle
collection de faits si considérable ; et à cet égard, elle n'a que des éloges à
donner à la persévérance et aux soins scrupuleux de l'auteur. Un très-
grand nombre de faits sont ajjpuyés de listes nominatives. Toute l'armée
d'Italie a pu en vérifier les détads. Ils ont subi l'épreuve de la discussion
publique, et il serait vraiment superflu d'insister ici sur les mérites de l'Ou-
vrage au point de vue purement statistique. Déjà le volume sur la guerre
de Crimée avait mis hors de doute les procédés employés par ]M. Chenu,
pour arriver à une constatation complète et consciencieuse des faits qu'il
avait à réunir.
Il est bon d'en faire ressortir le résultat principal : c'est que cette cam-
(96)
pagne de trois mois, qui a vu tant de glorieux combats et la grande bataille
de Solferino, a moins coûté à la France que l'on n'aurait pu le craindre.
Voici la récapitulation des pertes de 1 armée :
Tués 2536
Disparus 1 1 28
Blessés et maludes morts aux Iiôpilaux. 5oio
Total des morts 8674
Il y avait eu près de 20000 blesses, dont 17000 sur le champ de ba-
taille.
D'après divers renseignements, l'auteur évalue, à 2800 morts ou dispa-
rus, les pertes de l'armée sarde, qui avait eu l\g2i blessés.
Les perles de l'ennemi sont nécessairement bien supérieures. On manque
toutefois de renseignements posilifs à ce sujet. Les morts sur le champ de
bataille seraient au notiibre de 54oo. Mais les hommes disparus excéderaient
17000, dont une gratide partie sans doute se retrouveraient parmi les jiri-
soimiers. Les blessés et les malades excéderaient 4oooo.
A la fin de son grand et excellent travail, l'auteur a placé un appendice de
quelques pages sur la Population de la France et sur le liecnitement de l'ar-
mée. Votre Commission est obligée de faire des réserves au sujet des calculs
de cet Appendice ou des conséquences hasardées que l'auteiu' en déduit.
La belle comptabilité du Recrutement tenue au Ministère de la Guerre lui a
fourni le rapport de 63 sur 100 pour le nombre des jeunes gens de vingt ans
rapproché des naissances correspondantes. Mais il n'est possible d'en rien
conclure relativement à l'accroissement de la population. On en a la preuve
dans les Tables de Belgique : le nombre des survivants de vingt ans est aussi
de 63 sur 100 dans ce pays; et l'accroissement annuel moyen de la population
est signalé comme double de celui que fournit la statistique de la Franco.
Les causes de l'accroissement apparent d'une population sont très-difficiles
à dégager. La mortalité des vingt premières années est égale en France et en
Belgique, et même à fort peu près dans toute l'Europe. Cependant la popu-
lation paraît s'accroître très-inégalement dans les divers pays. Il est bien
clair que cette apparence doit se prononcer dans les régions otî rémigra-
tion est considérable, et où, |)ar suite, le nombre des décès est diminué.
Semblablement, puisqu'il subsiste en France autant d'hommes à vingt ans
que dans le reste de l'Europe, on ne peut affirmer que la diminution si
désirable du nombre des décès des enfants en nourrice puisse avoir une
notable influence sur la population. Il faut arriver à supprimer cette grande
( 97 )
mortalité qui frappe une partie des enfants des grandes villes contiés à des
nourrices éloignées et parfois peu scrupuleuses. L'expérience prononcera
ensuite sur l'influence des résultats heureux qu'on peut obtenir, et c'est un
devoir de les rechercher avec sollicitude. En attendant, on peut voir avec
quelque satisfaction que le rapport des survivants de vingt ans n'est pas
moindre chez nous qu'à l'étranger, et qu'en même temps le nombre des
mariages paraît être supérieur.
Au surplus, l'Appendice qui motive ces réflexions ne dépend en aucune
façon de l'Ouvrage de l'auteur, et c'est à la partie statistique seule de cet
Ouvrage, à la collection de faits, que votre Commission a décerné le prix.
Parmi les autres Livres ou Mémoires nombreux que la Conuiiission a dû
examiner, elle s'est vue obligée d'en écarter plusieurs du Concours, qui
a uniquement pour objet la Statistique. Inutile de répéter encore, cette
année, qu'on envoie trop souvent des récits purement historiques, des dis-
cussions économiques, qui ne reposent que sur de vagues indications et
non sur la base des collections de faits, authentiquement et numérique-
ment constatés. La Commission, toutefois, a décerné deux meiilions hono-
rables.
La première est accordée à une brochure substantielle intittdée : Données
générales d'une Slatislique des Conseils de prud'hommes, recueillies el publiées
sous les auspices des Conseils de Lyon. MM. Magué et Poly, secrétaires de ces
(Conseils, ont rassemblé des renseignements très-exacts sur l'instilution des
prud'hommes. Leur travail [jaraît très-bien fait et très-propre à éclairer le
public sur la situation de cette iustitiUion, qui devient de jour en jour d'un
plus grand intérêt. Depuis soixante ans il a été créé cent douze Conseils;
mais douze ne fonctionnent pas. Entre les cent autres, qui comptent en
moyenne quatorze membres, 47 3oo affaires annuelles se trouvent très-
inégalement réparties, car trente-huit Conseils n'ont reçu que 932 affanes.
A Paris, un membre, en moyenne, a eu aSi affaires à décider, tandis que
la moyenne générale n'est que de 46. L'institution n'existe que dans qua-
rante-sept départements, et le Nord seul a dix Conseils. On voit combien
ces utiles justices industrielles et conunerciales pourraient être augmen-
tées en nombre. Cet accroissement est surtout le but de la publication de
MM. Magué el Poly. Mais leur travail, qui paraît n'avoir pas été exécuté
sans peines et sans difficultés, n'en est pas moins une statistique à la fois
curieuse et digne de l'attention des législateurs et des moralistes.
La seconde mention honorable est attribuée à un travail tout différent :
Le Guide du Perrier^ irailé hisloricjue el pratique de lu fabrication des verres,
O.K., 1870, 2» Semeurs. ( T. LXXI, N» 2.) I 3
( 98 )
cristaux, vitraux, par M. Bon temps. Sous ce titre sont réunis une foule de
renseignements des plus solides sur l'histoire et les procédés de cette fabri-
cation, dont les produits ont un usage journalier si important au bien-être
de la population. Mais lorsqu'il s'est agi de données numériques, l'auteur
n'a pu inscrire dans son livre que des évaluations. Et on le conçoit sans
peine : il est presque impossible de savoir avec précision les opérations de
chaque fabrique ou maison de commerce. Néanmoins la grande expé-
rience de M. Bontemps rend ses évaluations beaucoup plus dignes d'atten-
tion que ne le sont d'ordinaire les indications de cette espèce. Voici un
résumé très-curieux qu'il a formé en réunissant tous les faits épars dans les
différents cluipifres de son Guide :
Evaluation de la fabrication.
Verre à viti'c
Glaces
Bouteilles (i lo ooo ooo)
Cristaux
Gobeleterie
fr
12 5oo 000
i3 000 000
l4 000 000
l/| 000 000
10 000 000
63 5oo 000
POIDS
du
produit.
3i 000 000
i3 8oo 000
100 000 000
1 1 5oo 000
21 000 000
177 3oo 000
POIDS
des matières
premières.
kg
44 000 000
i5 260 000
118 000 000
i5 000 000
28 000 000
220 260 000
POIDS
NOMBRE
du
combustible.
d'ouTfiers
emploies.
kg
lOD 000 000
2 700
99 5oo 000
4 000
240 000 000
3Soo
38 000 000
5 000
75 000 000
4 200
557 Sooooo
19700
3 200 000
3 5ao 000
4 000 000
4 000 000
3 3 00 000
18 000 000
Assurément, une valeur de 63 millions de francs, dont 18 en salaires
pour près de 20000 ouvriers, mérite bien les recherches des statisticiens.
Elles seront grandement facilitées par l'Ouvrage de M. Bontemps, dont la
lecture est indispensable comme préparation à une statistique delà verre-
rie. Quant à l'auteur, comme il le dit lui-même, c'est de la technologie
qu'il a voulu faire. Aussi ce n'est que pour la moindre partie que son
œuvre a paru mériter une place dans ce Concours.
En résumé, la Commission a décerné :
i" Le prix du Concours de 1869 à M. Ciie.\u pour l'excellente collection
de faits renfermés dans les deux volumes in-folio portant le titre de Statis-
tique médico- chirurgicale de la campagne d'Italie en i85g et 1860; Paris,
1869;
2° Une mention honorable à MM. 31agué et Poly pour le volume iu-8"
(99)
intitulé : Données générales d'une Statistique des Conseils de prud'hommes;
Lyon, 1869;
3" Une mention honorable à M. Bontemps pour les renseignements
statistiques de son Ouvrage in-8° intitulé : le Guide du Verrier, etc.; Paris,
1868.
PRIX FONDÉ PAR M"" la Marquise DE LAPLACE.
UneOrdonnance royale ayant autorisé l'Académie des Sciences à accepter
la donation, qui lui a été faite par Madame la Marquise de Laplace, d'une
rente poin- la fondation à perpétuité d'un prix consistant dans la collection
complète des Ouvrages de Laplace, prix qui devra être décerné chaque
année au premier élève sortant de l'École Polytechnique,
Le Président remet les cinq volumes de la Mécanique céleste, V Exposition
duS/slème du Monde et le Traité des Probabilités à M. François-Henri Voisin,
né le 3 décembre 1848, à Pagny-la-Blanche-Côte (Meuse), sorti le premier
en 1869 d^ l'École Polytechnique et entré à l'École impériale des Mines.
PRIX DAMOISEAU.
(Commissaires : MM. Laugier, Mathieu, Delaunay, Le Verrier,
Faye rapporteur.)
L'Académie avait proposé, pour le prix Damoiseau, la question sui-
vante :
« Revoir la théorie des satellites de Jupiter; discuter les observations et en
» déduire les constantes quelle renferme, et particulièrement celle qui fournil
» la détermination directe de la vitesse de la lumière; enfin construire des Tables
» particulières pour chaque satellite. »
L'Académie n'ayant reçu jusqu'à présent aucune pièce sur cette ques-
tion, votre Comuiission a l'honneur de vous proposer de la remettre au
Concours et d'étendre jusqu'en 1872 la limite de rigueur. Voici les motifs
de cette proposition. La question de 1869 rentre complètement dans l'es-
prit de la fondation Damoiseau; elle est toute d'actualité, car les Tables de
Delambre, continuées par Damoiseau, dont se servent tous les calculateurs
d'éphémérides, ne s'étendent que jusqu'à 1880; enfin le grand problème
de la vitesse de la lumière a pris dans ces derniers temps ime importance
nouvelle, grâce à de récents travaux théoriques et pratiques du plus haut
intérêt. Il est donc à désirer que la solution qu'en fournit l'observatioji
i3..
( loo )
des éclipses des satellites de Jupiter soit soumise à une révision attentive
sur l'ensemble des documents qui se sont accumulés depuis les traviiux de
Delamhre, et dont on n'a encore tiré aucun parti.
Nous prions l'Académie, vu l'importance de la question, d'élever à cinq
mille francs la valeur du prix à décerner en 1872 au nom de notre savant
et regretté confrère. La somme de cinq mille francs sera constituée au
moyen des arrérages disponibles de la fondation Damoiseau. Dans le cas
où ces arrérages ne suffiraient pas pom- former la totalité des cinq mille
francs, l'Académie la compléterait en prenant sur d'autres fonds dispo-
nibles.
Les conclusions de ce Rapport sont adoptées.
[Foir aux Prix proposés.)
PRIX TRÉMONT.
(Commissaires : MM. Morin, Phillips, Chevreul, Delaunay,
Combes rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 1869.
M. le baron de Trémont a légué à l'Académie des Sciences une somme
annuelle de i 100 francs pour aider dans ses travaux tout savant, ingénieur,
artiste ou mécanicien auquel une assistance sera nécessaire « pour atteindre
» un but utile et glorieux pour la France. »
La Commission chargée de décerner le prix fondé par M. le baron de
Trémont l'accorde à M. Le Roux, poiu- aider et encourager ce savant à
poursuivre les recherches qu'il a commencées depuis longtemps et dont les
premiers résultats ont reçu l'approbation de l'Académie, qui en a ordonné
l'insertion dans le Recueil des Savants étrangers, recherches qui ont pour
objet :
i" La détermination des indices de réfraction des vapeurs de mercure,
de soufre, d'arsenic, de sodium et autres corps qui ne prennent l'état ga-
zeux qu'à des températures élevées ;
2° L'étude des courants thermo-électriques, dans laquelle l'auteur ne
s'est pas borné à observer, comme on l'avait fait jusqu'ici, les températures
qui se manifestent aux points de jonction de (\eux conducteurs hétéro-
gènes, mais s'est proposé de déterminer exactement en calories les quan-
tités de chaleiu" développées soit aux points de jonction des conducteurs,
soit dans la masse des conducteius homogènes.
( loi )
Pour ces recherches délicntes, M. Le Roux a dû et devra encore recourir
à des dispositions expérimentales et à des appareils nouveaux, d'une con-
struction difficile et coûteuse. Votre Commission a l'honneur de vous [)ro-
poser de fixer à trois ans la durée de la jouissance, par M. Le Roux, du legs
de M. le baron de Trémont.
PRIX PONCELET,
FONDÉ PAR M"= V PONCELET.
(Commissaires : MM. Liouville, Morin, Bertrand, Serret,
Combes rap|)orteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 1869.
Aux termes de l'acte de donation, le prix Poncelet est destiné à l'auteur
de l'Ouvrage qui aura le plus contribué aux progrès des Sciences mathéma-
tiques pures ou appliquées, publié dans les dix années qui auront précédé
le jugement de l'Académie.
La Commission propose à l'Académie de décerner ce prix, pour l'année
1869, au D' J. Robert Mayer, Correspondant de l'Académie à Heilbronn,
pour l'ensemble de ses Mémoires sur la Théorie mécanique de la chaleur,
dont le premier remonte à l'année 1842 et que l'auteur a réunis, en 1867,
en un volume imprimé à Stuttgart sons le titre : Die Mechanik der TFiirme.
L'Académie adopte la proposition de la Commission.
( I02 )
SCIENCES PHYSIQUES.
PRIX DE HIEDECEVE ET DE CHIRURGIE.
APPLICATIONS DE 1,'ÉLECTFICITÉ A I.A THERAPEUTIQUE.
(Commissaires : MM. Becquerel, Bernard, Longet, Bouillaud, Cloquef,
Nélaton, Jainin, Coste, Ed. Becquerel rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 18G9.
L'Académie avait mis au Concours, pour 1866, la question des applica-
tions de l'électricité à la thérapeutique; mais, à la suite d'un Rapport au
nom d'une Commission composée de MM. Serres, Velpeau, Rayer, Clo-
quet, Longet, Robin et Becqtierel rapporteur (i), elle décida qu'il n'y avait
pas lieu à décerner le prix dont la valeur est de cinq mille francs, et que
la question serait remise au Concours pour l'année 1869. Néanmoins, elle
accorda une médaille de la valeur de quinze cents francs à M. Namias, de
Venise, pour les efforts incessants qu'il avait faits dans le but de répondre
scientifiquement à la question proposée par l'Académie, et pour les obser-
vations iniéressantes qu'il avait déjà recueillies.
Cette année, onze concurrents se sont présentés et ont adressé des Ou-
vrages dont la plupart sont manuscrits et conliernient de nombreuses
observations sur l'influence que peut exercer l'électricité dans différents
cas pathologiques.
La Commission ne s'est pas arrêtée d'une manière spéciale à l'exposé
historique des faits déjà publiés, ni à la description des appareils électriques
employés, et qui sont généralement connus, sujets traités plus ou moins
complètement, comme la Commission le reconnaît, dans la plupart des
Mémoires présentés, et cela conformément au programme; mais elle a dis-
tingué particidièrement les recherches de deux des concunents, qui se sont
proposés d'établir les bases de l'électro-thérapie sur les phénomènes phy-
(i) Comptes rendus, t. LXIV, p. 483 et 538.
( 'o3 )
siologiques produits par l'influence de l'électricité sur l'organisme à l'état
sain et à l'état pathologique.
MM. Legros et Onimus (n" 9 du Concours) ont adressé plusieurs séries
de recherches d'électro-physiologie comprenant lesrésidtals de nombreuses
observations parfaitement coordonnées, qu'ils ont cherché à appliquer à des
cas pathologiques déterminés.
Matteucci avait observé que dans les nerfs qui sont parcourus par un
courant électrique, il se forme, au moment de l'ouverture du circuit, un
courant en sens contraire du premier, attribué à des effets de polarisation
et qui produit fréquemment des contractions. MM. Legros et Onimus ont
constaté ces effets chez l'homme à l'état de santé et à l'état pathologique.
Ils ont rapporté également les observations qu'ils ont faites sur l'homme
et d'après lesquelles le courant descendant ou direct (i) empêche les ac-
tions réflexes et dimiinie l'excitabilité de la moelle, tandis que le courant
ascendant ou inverse les excite. Les recherches qu'ils ont faites sur les
effets du courant inverse sur les nerfs moteurs, leur ont montré que ces
effets paraissaient dus à une action réflexe et étaient d'autant plus éner-
giques que l'excitabilité des nerfs sensitifs et de la moelle était plus grande;
les effets produits devenaient presque nuls lorsque les nerfs sensitifs ou la
moelle avaient perdu leur excitabilité : les courants directs agissent alors
sur les nerfs moteurs.
Plusieurs observateurs ont vu que dans certaines paralysies périphé-
riques, les muscles perdent de leur excitabilité pour les courants induiîs,
tandis que celle-ci est, au contraire, conservée et même augmentée pour
les courants de la pile; effets dus aux différences (te direction, de durée et
d'intensité du courant électrique. Ce phénomène, d'après MM. Legros et
Onimus, est constant chaque fois que la fibre musculaire striée est mo-
difiée dans les conditions normales; il en est de même pour les fibres mus-
culaires lisses et pour celles des embryons.
Ils ont fait à ce sujet une longue étude de l'influence des courants pro-
venant des appareils d'induction et des piles sur les fibres lisses (intestins,
vessie, matrice, etc.), et ils ont constaté des différences d'action entre les
(i) On admet, comme on le sait, que le courant électrique dans le ciicuiî extérieur d'une
pile et dirigé du pôle + nu pôle — , se propage dans le corps du centre à la périphérie;
le courant direct est donc centrifuge, et, partant du la moelle épinièrej se dirige dans le
sens «les ramifications nerveuses.
( '"4 )
courants induits et les courants continus, et, pour ces derniers, suivant leur
direction.
En examinant l'influence variable exercée par les courants continus sur
les vaisseaux capillaires, ils ont observé que, si le courant direct dilate les
vaisseaux, le courant inverse les resserre, surtout dans les preiuiers instants
du passage de l'électricité, mais sans déterminer une oblitération com-
plète. Cette influence s'exerce également sur le cœur et sur le système res-
piratoire.
Nous ajouterons que MM. Legros et Onimus, pour comparer entre eux
les résultats qu'ils ont obtenus, ont fait usage de la méthode graphique
qui est généralement employée aujourd'hui dans les recherches physio-
logiques.
En résumé, ces expérimentateurs habiles, sans adopter particulièrement
aucune théorie, conduits uniquement par l'expérience, ont réuni aux faits
déjà connus ceux qu'ils ont observés, et ont cherché à les appliquer à la
thérapeutique dans des cas nombreux. La Commission pense que, s'ils se
bornent aux circonstances qui sont bien définies et s'ils prennent pour
guides les phénomènes électro-physiologiques, ils ne peuvent manquer, dans
la voie où ils sont engagés, d'arriver à des résultats importants pour la pra-
tique médicale.
M. Cyon, déjà connu par des recherches physiologiques justement appré-
ciées, dans un Ouvrage manuscrit ayant pour titre : applications de l'électri-
cilé à la (hérapeutiqiie (n" 6 du Concours), a fait un exposé très-dévelo|)pé
des connaissances électro-physiologiques en adoptant exclusivement les
vues théoriques de M. du Bois-Reymond, c'est-à-dire en considérant comme
base des fonctions musculaires et nerveuses une force électromotrice des
éléments des muscles et des nerfs, à laquelle il suppose une origine orga-
nique. Les savants sont aujourd'hui divisés au sujet de cette hypothèse, et
un certain nombre d'entre eux, comme Matteucci, M. Liebig, Ilcrmann, etc.,
se basent avec juste raison sur des faits nombreux pour adopter l'origine
chimique du dégagement de l'électricité dans les tissus musculaires et ner-
veux, mais sans la préciser: les deruiers travaux d'un des Membres de la
Commission (i) viennent à l'appui de celte opinion, en établissant les cir-
constances dans lesquelles les actions chimiques peuvent se manifester.
M. du Bois-Reyiiiond avait observé qu'un nerf qui est traversé dans sa
(i) M. Becqufiel.
( io5 )
longueur par un courant électrique acquiert des facultés nouvelles; il a
appelé ce nouvel état du nerf dans lequel se trouvent modifiées les forces
électromofrices, étal électrotoniqiie (i). De nombreuses objections lurent
faites à cette hypothèse : M. Pfluger crut les lever en précisant les circon-
stances dans lesquelles l'irritabilité nerveuse était produite par le passage
d'un courant constant dans une portion d'un nerf. Il appela zone ancteclro-
tonique et zone calhéleclroloniqiie les zones qui se trouvent dans le voisinage
de l'électrode positive et de l'électrode négative : dans la première, l'irrita-
bilité du nerf est diminuée; dans la seconde, elle est augmentée.
M. Cyori partage ces vues hypothétiques, puis expose, avec de grands dé-
veloppements, les travaux exécutés poiu- attaquer ou défendre l'électro-
tonisme. Il traite du rapport entre l'irritation du nerf et l'excitation muscu-
laire dont s'est occupé M. Fick au moyen du miographe. Il a déterminé
lui-même ce rapport sur l'homme en faisant usage du muscle adducteur
du pouce, et a pensé démontrer l'identité des forces électromofrices et
vitales. En faisant contracter ce muscle, il a déterminé le lapport entre
l'irritabilité du nerf et la coniractilité du muscle, d'où il a conclu que les
effets observés 'par Pfluger se vérifient sur le vivant, ce qui ouvrirait, selon
lui, un nouveau champ d'investigation aux savants qui se livrent à l'étude
des maladies nerveuses.
Il expose ensuite les expériences faites par M. Fick et d'autres physiolo-
gistes allemands sur la subordination da l'irritation à la force excitante, dont
il pense que les résultats pourraient être utilement appliqués à la thérapeu-
tique. C'est ainsi qu'il traite des effets des courants constants et d'induc-
tion sur l'excitabilité des nerfs et des muscles; des effets obtenus par M. Hei-
denhain sur les nerfs fatigués; de l'électrisation localisée; des effets pro-
duits sur les nerfs sensitifs; enfin de l'examen des cas pathologiques dans
lesquels les muscles et les nerfs donnent lieu à des effets différents, sui-
vant qu'on emploie des courants continus ou des courants d'induction
alternatifs.
M. Cyon a fait preuve d'érudition en ce qui concerne particulièrement la
(i) Cette expression est semblable à celle qiie Faraday a employée pour désigner l'état
particulier de tension que possèdent les molécules d'un corps parcouru par un courant
électrique, pendant le passage même de ce courant, ou bien soumis à rinfluenie de l'in-
duction. Cet état, pour s'établir ou se détruire, donnerait lieu, dans les corps, aux phéno-
mènes d'induction. Cette dénomination, en physiologie, n'est donc pas appliquée au même
ordre de phénomènes.
C. R., 1870, 1' Semestre. (T. LXXI, N» 2.) ' 4
( io6 )
physiologie allemande, dont il est un des partisans. Il indique les cas pa-
thologiques où l'électricilé pourrait ètie enij^loyée, mais il parie peu des
applications qu'il a faites et des l'ésultats qu'il a obtenus.
Cet expérimentateur cherche, comme ou le voit, à fonder l'électro-
pathologie et l'électro-thérapiesur l'électro-physiologie, méthode qui nous
paraît très-rationnelle à suivre. L'exposé de sou Ouvrage, en dehors des
idées théoriques sur lesquelles la Commission n'a pas à se prononcer, est
fait avec méthode; mais ce travail est une sorte de programme qui demande
à être développé et appuyé par des faits bien constatés.
Plusieurs des Ouvrages et des Mémoires présentés par les autres concur-
rents renfern)ent de nombreuses observations bien coordonnées, mais ils
n'ont pas paru à la Commission avoir une direction aussi scientifique que
les précédents et basés sur l'application de faits physiologiques bien définis
en vue d'éclairer la médecine.
La Commission s'abstient de revenir sur les .développements donnés
dans le Rapport de 1866 sur la marche à suivre dans les applications (i) ;
elle se borne à citer les indications mentionnées lors de la publication du
Programme des prix, et d'après lesquelles les concurrents devaient :
« 1° Indiquer les appareils électriques employés, décrire leur mode
» d'application et leurs effets physiologiques;
» 2° Rassembler et discuter les faits publiés sur l'application de l'élec-
» Iricité au traitement des maladies, et en particulier au traitement des
» affections des systèmes nerveux, musculaire, vasculaire et lymphatique;
» vérifier et com|jléter par de nouvelles études les résultats de ces obser-
)' vations, et déterminer les cas dans lesquels il convient de recourir, soit
» à l'action des courants intermittents, soit à l'action des courants con-
» linus. »
La Commission rappelle encore que l'Académie ne demandait pas seu-
lement aux concurrents tme réiuiion de faits obtenus par ch^s méthodes
empiriques, mais des règles certaines pour servir de gnides dans la voie si
délicale des applications de l'électricité à la thérapoulique. Elle fait remar-
quer également que, bien que les expérimentateurs aient distingué les effets
produits suivant le sens de la propagation de l'électricité et selon qjie les
courants électriques sont continus ou alternatifs, ou bien fournis par des
appareils d'induction, elle aurait désiré que l'influence de l'intensité et de
la durée du passage de ces courants contiiuis ou alternatifs, ainsi que les
(l) Comptes rendus, t. LXIV, p. 483 et 538.
( I07 )
effets d'induction qui pourraient se produire dans l'organisme à la ferme-
ture et à l'ouverture du circuit eussent été l'objet d'un examen plus ap-
profondi.
Néanmoins la Commission a vu avec beaucoup d'intérêt les travaux des
divers concurrents, notamment ceux de MM. Legros et Onimus et de
M. C}on, et elle a constaté les progrès réels qu'a faits depuis le dernier
Concours la question des applications de l'électricité à la médecine, et qui
sont dus sans aucun doute aux recherches entreprises en vue de répondre
au Concours ouvert par l'Académie; mais cette question ne lui semble pas
complètement résolue. Elle a donc l'honneur de soumettre à l'Académie les
propositions suivantes :
i" Il n'y a pas lieu de donner le prix cette année;
1° La question proposée, en raison de son importance, est maintenue au
Concours, et le prix, dont la valeur est de cinq mille francs, pourra èlre
décerné après une nouvelle période de trois années {voir aux Prix proposés
pour 1872);
3° Il est accordé à MM. Legros et Onimus une médaille de la valeur de
trois mille francs pour l'ensemble de leurs travaux et les résultats impor-
tants qu'ils ont déjà obtenus eu vue des applications de l'électricité à la
physiologie et à la thérapeutique;
4° Il est accordé à M. Cyon une médaille de la valeur de deux mille francs
pour les mêmes motifs.
Ces conclusions sont adoptées par l'Académie.
PRIX DE PHYSIOLOGIE EXPÉRIMENTALE,
FONDÉ PAR M. DE MONTYON.
(Commissaires : MM. Cl. Bernard, Milne Edw^ards, Coste, Longet,
Brongniart rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 1869.
Parmi les travaux publiés récemment sur la Physiologie végétale, il en
est qui touchent aux phénomènes les plus intéressants de la nutrition des
plantes.
On sait que les fonctions de ces êtres sont soumises, d'une manière directe,
à l'action de la lumière, et que leurs parties vertes, en particulier, sont le
siège de phénomènes inverses dans l'obscurité et sous l'influence de la
14..
( io8 )
lumière. Mais ces résultats, obtenus par l'étude d'organes très-complexes,
tels que les feuilles de la plupart des végétaux, n'avaient pas pu être suivis
dans la profondeiu' de leurs tissus et dans les éléments organiques qui les
constituent.
Il existe cependant des végétaux très-simples dans lesquels les cellules,
qui forment par leur agrégation les tissus des organes composés des végé-
taux d'un ordre plus élevé, sont, pour ainsi dire, isolées, mises à découvert et
dans lesquels on pouvait espérer voir directement ce qui doit se passer
dans les organes plus compliqués des autres végétaux ; les Conferves, dont
les filaments déliés sont formés d'une série de cellules renfermant de la
matière verte et les autres parties constituantes des cellules des feuilles ;
les Mousses, dont les feuilles ne sont souvent formées que par une seule
couche de cellules sans épidémie, devaient se prêter à cette étude.
C'est le but que s'est proposé 31. Fa.mitzin en prenant pour sujet de ses
recherches une espèce de Spirogyra^ Conferve dans laquelle chaque cellule
des filaments contient plusieurs bandes de matière verte ; il a constaté que
ces bandes de matière verte ne contenaient que de la chlorophylle plus ou
moins colorée, lorsque ces filaments avaient été maintenus pendant un
certain temps dans l'obscurité; qu'exposées, au contraire, à l'action de la
lumière d'une manière continue, au moyen du vif éclairage d'une lampe
au pétrole, elles se remplissaient de grains de fécule qui disparaissaient
de nouveau sous l'influence de l'obscurité.
Il a également déterminé, par des expériences comparatives, l'influence
de la lumière et de l'obscurité sur l'allongement de ces filaments et sur la
multiplication des cellules qui les constituaient.
Enfin, voulant se rendre compte de l'action des divers éléments de la
lumière, il a soumis des portions de ces filaments de Spifocjyra à l'influence
de la lumière colorée en jaune par luie dissolution de chromate de |)olasse
et en bleu par une dissolution ammoniacale d'oxyde de cuivre. Il vit
alors que la multiplication des cellules s'opérait aussi rapidement, et même
plus rapidement, sous l'influence de la lumière jaune que sous l'action de
la lumière blanche, tandis que l'accroissement était nul, en éclairant par la
lumière bleue, comme dans l'obscurité : la même chose eut lieu pour la
production de l'amidon.
Ces dernières observations faites, au moyen de la lumière colorée par sa
transmission à travers des liqueurs colorées, pourraient ne pas paraître
parfaitement concluantes*, cependant les résultats inverses que nous aurons
tout à l'heure à signaler dans d autres phénomènes leur donnent une
grande valeur.
( I09 )
Il serait trop long de suivre M. Famitzin dans les recherches analogues
qu'il a faites sur l'influence de la lumière, sur les Oscillatoires et sur divers
Infusoires colorés en vert, les Euglena et les Chlamydomonas, que beaucoup
de phénomènes de leur vie rapprochent des végétaux.
Nous ne dirons rien non plus de ses observations sur l'influence de
l'intensité de la lumière sur la coloraiion verte, plus ou moins rapide,
des végétaux étiolés, dans lesquels il a constaté, ainsi que M. Prillieux
l'a vérifié par d'autres procédés, qu'une lumière directe trop intense est
moins favorable à ce phénomène qu'une lumière affaiblie par un léger
écran.
Mais le fait sur lequel nous voulons insister, parce qu'il démontre mieux
que tout autre l'influence de la lumière sur la vitalité de la cellule, c'est
l'observation des changements de position des grains de chloro|)hylle dans
les cellules de certaines feuilles, suivant qu'elles sont exposées à la lumière
ou placées dans l'obscurité; ces observations, faites sur les feuilles d'une
espèce de Mousse, avaient été révoquées en doute par quelques observa-
teurs habiles et n'avaient pas, par cette raison, fixé l'attention autant
qu'elles le méritaient; leur exactitude vient d'être constatée sur une autre
Mousse, Funaria h/grometrica, par M. Prillieux, puis par M. Koze, qui nous
en a rendu témoin. Le fait est donc hors de doute, et les études faites par
M. Borodine et publiées récemment semblent le généraliser et lui donner
plus d'importance en l'étendant à beaucoup d'autres végétaux.
On sait que la coloration verte des cellules des feuUles et d'autres organes
des végétaux est due à une matière spéciale, la chlorophylle, qui colore
soit le protoplasma contenu dans la cellule, soit, le plus ordinairement,
dans les cellules adultes, des grains arrondis ou ellipsoïdes, d'une forme
et d'une grosseur très-uniforme dans un même tissu, qui sont appliqués à la
face interne de la paroi de la cellule.
Ces grains, qui sont généralement aplatis et plutôt lenticulaires que sphé-
riques, sont plus ou moins nombreux dans chaque cellule, et c'est à leur
nombre, autant qu'à l'intensité de leur coloration, qu'est due la couleur
verte plus ou moins foncée de chaque cellule, et, par suite, du tissu qu'elles
constituent.
Tantôt ces grains de chlorophylle, ou plutôt de matière albuminoide
colorée par la chlorophylle proprement dite, couvrent toute la surface in-
térieure de la cellule; ils se touchent et ont quelquefois l'apparence hexa-
gonale; tantôt, au contraire, ils sont peu nombreux et placés à distance sur
la paroi interne des cellules. C'est cette dernière disposition qu'on observe
( iio)
sur lf;s organes d'un vert pâle de beaucoup de plantes aquatiques, de di-
verses plantes gr.isses, de plusieurs Mousses et Hépatiques.
Dans le premier cas, il paraît difficile que les grains de clilorophylle
changent de jilace, à moins de ne plus rester appliqués contre la surface
interne des parois des cellules. Dans le second on conçoit, au contraire,
qu'ils peuvent occuper des positions diverses.
C'est ce qui a lieu, en effet, sous l'influence de la lumière ou de l'obscu-
rité.
Déjà, en 1857 et en 1859, M. Boehm, dans un travail important sur la
chlorophylle, avait signalé, à l'Académie des Sciences de Vienne, les chan-
gements de position que présentaient les grains de chlorophylle dans les
cellules de certaines plantes grasses, selon qu'elles étaient exposées à luie
vive lumière devant la fenêtre d'une serre ou placées en ]ilein air. Dans le
premier cas, les grains de chlorophylle s'aggloméraient sur un point de la
paroi des cellules. Ce changement de position s'opérait assez rapidement;
il avait lieu soit sous l'action de la lumière blanche, soit sous celle trans-
mise à travers un verre bleu; il n'avait pas lieu dans l'obscurité ni sous
l'influence de la lumière rouge.
Ces intéressantes observations n'attirèrent peut-être pas assez l'atlention
à cette époque; en outre, les plantes grasses, 5e(/Hm et autres, sur lesquelles
elles furent faites n'étaient pas les plus favorables à l'observation microsco-
pique des phénomènes alternatifs qui se passaient dans l'intérieur des
cellules.
La lame plane, formée d'iuie seule couche de cellules, dépourvue d'épi-
derme, qui constitue les feuilles des Mousses observées d'abord par M. Fa-
milzin, permettait mieux de suivre, sur les mêmes cellules, les cliangeincnts
qui s'opéraient dans leur sein. M. Faniitzin reconnut que, pendant le jour,
les grains de chlorophylle étaient disséminés sur les faces correspondant à
la surface de la feuille qu'on peut a|>peler les /(/tts superficielles; qui', la
nuit, au contraire, ces grains étaient réunis sur les parois latérales, les
faces snperficielles en étant dépourvues. Il s'assura que ce changement de
position s'opérait assez rapidement soit à la lumière solaire, soit à la
lumière d'une lampe. Enfin, en étudiant l'action des rayons colorés, il vit,
comme M. Boehm, que les rayons bleus avaient la même action que la
lumière blanche et, qu'au conlrairt-, sous l'influence des rayons jaunes,
ainsi qne M. Boehm l'avait observé pour les rayons rouges, les grains de
chlorophylle occu|)aient leiu- position nocturne.
Les observations publiées en 1869 par M. Borodine étendraient l'exis-
( ,ri )
tence de ces phénomènes à diverses plantes phanérogames sur lesquelles les
ohservations ont pu être faites avec la même précision que sur la Mousse
étudiée par M. Fariiitzin. Les résultats sont les mêmes quant à l'influence
de l'obscurité ou de la lumière sur la position des grains dv chlorophylle.
Enfin, les observations que j'ai déjà citées de MM. Prillieux et Roze ont
montré dans une autre Mousse des phénomènes semblables, qui se géné-
raliseront sans doute. Remarquons toutefois que ce n'est que dans les
cellules où les grains de chlorophylle sont écartés les uns des autres qu'on
peut espérer observer ces phénomènes, toutes les plantes à coloration verte
intense et à grains de chlorophylle contigus ne paraissant pas pouvoir y
donner lieu. L'action de la lumière y détermine-t-elle quelque autre chan-
gement? c'est ce que nous ignorons.
Rien n'établit encore bien positivement la nature de ces mouvements.
Les grains de chlorophylle sont-ils actifs ou passifs dans ces change-
gements de position?
M. Famitzin, comme M. Boehm, semble penser, sans l'établir d'une
manière positive, que les grains de chlorophylle se meuvent par eux-mêmes,
rampent sur la paroi de la cellule et se répandent sur la partie la plus
éclairée, comme certains animaux infusoires et les Zoospores se dirigent
vers la lumière.
Les observations que M. Roze a communiquées à l'Académie dans une
de ses dernières séances, en montrant que, dans ces Mousses, les grains de
chlorophylle sont unis entre eux par des filets très-ténus de plasma, peuvent
faire penser que ces filets plasmatiques, qui représentent la partie essen-
tiellement vivante de la cellule, sont la cause des changements de position
des grains de chlorophylle; mais il ne faudrait pas confondre ces change-
ments de position de certains éléments constitutifs de la cellule, sous l'in-
fluence du passage de l'obscurité à la lumière ou de la lumière à l'obscu-
rité, suivis de l'immobilité de ces parties, tant que les conditions physiques
extérieures ne changent pas, avec les nu^nvements de circulation intracel-
lulaires continus, ayant lion la nuit et le jour, sans que la lumière paraisse
avoir d'influence marquée sur eux.
Dans ces mouvements comme ceux qui se présentent dans les tubes des
Chara, dans les cellules du Vallisneria et du Nayas, dans les cellules dos
poils corollins, etc., des grains de chlorophylle peuvent être entraînés par
le courant général du suc cellulaire, ou dans les canaux particuliers du pro-
toplasma, mais ils n'occupent pas de position fixe diurne et nocturne. Ce
sont des mouvements de ce genre que M. Gris, dans son Mémoire sur la
( '12 )
chlorophylle, a signalés dans les jeunes cellules du Sempervivum, mouve-
ments qui entraînaient de petits granules de chlorophylle du nucleiis vers
la paroi de la cellule, ou, réciproquement, en suivant les petits filets de pro-
toplasma qui irradiaient de ce nucleus.
On voit quelle différence il y a entre les observations de M. Famitzin
sur ce sujet et celles qui les avaient précédées; jointes à celles du même
savant siu- l'action de la lumière siu- l'accroissement des cellules du Spiro-
gyra et sur le développement de la matière verte, elles ont paru à la Com-
mission très-dignes du prix de Physiologie expérimentale, qu'elle décerne
à 31. Famitzix.
En outre, une mention honorable est accordée par elle à 3IM. Léon
Tripier et Arloing : i° poiu- avoir démontré les premiers, dans les nerfs
sensitifs cutanés, l'existence d'une sensibilité récurrente jusqu'ici reconnue
seulement dans les nerfs moteurs; 2° pour avoir établi expérimentalement
que l'influence des nerfs sensitifs de la peau s'étend en dehors de leur zone
de distribution anatomiqtie; 3° que la persistance de la sensibilité dans le
bout périphérique des nerfs sectionnés, et la persistance de la sensibilité
dans la peau corrcspondanic sont deux phénomènes connexes, qui ne se
présentent jamais l'un sans l'autre.
Ayant coupé successivement les nerfs collatéraux d'un doigt sur des
chiens, ces expérimentateurs ont recoiuiu qu'une pareille section n'a pas
pour conséquence, comme on l'auniit cru, l'anesthésie du quart, de la
moitié, puis des trois quarts des téguments de ce doigt, mais que la pré-
sence d'un seul nerf collatéral dans v\u doigt suffit pour y conserver
partout de la sensibilité.
Dans l'expérience précédente, MM. Tripier et Arloing (en prenant cer-
taines précautions indiquées dans leur Mémoire) ont constaté la sensibilité
dans le bout périphérique des nerfs collatéraux d'un doigt, tant qu'un de
ces quatre nerfs était intact. Cette sensibilité récurrente disparaissait avec
la section du quatrième nerf collatéral.
Dans une autie expérience, ayant découvert le bout périphérique d'une
branche métacarpienne du radial, chez le chien, vingt-quatre jours après
sa résection, ils l'ont trouvé sensible, et, de plus, l'examen microscopique
qui en a été fait, après durciss(;ment convenable, a montré des tubes ner-
veux sains au milieu de faisceaux de tubes dégénérés. Dans ce cas, con-
cluent les auteins, la sensibilité du bout périphérique, après un temps jilus
que suffisant pour amener sa dégénération, tenait donc à la présence de
fibres nerveuses sensibles dont les propriétés physiologiques étaient con-
servées.
( n3 )
Enfin, pour démontrer la relation constante, signalée par eux, entre la
sensibilité de la pean, après la section des nerfs cutanés et l'existence de
la sensibilité récurrente dans ces nerfs (relation indiquant la présence de
communications anastomotiques entre leurs filets terminaux), MM. Tripier
et Arloing ont institué l'expérience qui suit.
Sur un chien, ils ont sectionné un des nerfs collatéraux externes de l'in-
dex; puis, à l'aide de trois incisions, deux longitudinales et une transver-
sale, ils ont isolé (les incisions s'étendaient jusqu'aux os) la peau recou-
vrant le bout périphérique de ce nerf des trois auti-es nerfs collatéraux; le
lambeau ne comnuiniquait plus avec les neris que par la peau du bourielet
du doigt. Trois quarts d'iieure après l'opération, le lambeau et le bout
nerveux périphérique qu'il recouvrait étaient sensibles. D'après cette expé-
rience, MM. Arloing et Tripier ont été amenés à admettre un réseau ner-
veux cutané, accepté jusqu'ici seulement par quelques histologistes, et ilont
l'existence se trouverait pour la prenuère fois démontrée physiologiqucment.
La Commission, en accordant à MM. Léon Tripier et Arloing une men-
tion très-honorable pour ce travail, propose à lAcadémie, outre la somme
attribuée au prix de Physiologie expérimentale décerné à M. Famitzin,
d'accorder une somme de six cents francs à AIM. LÉo.\ Tripier et Arloing.
L'Académie adopte cette proposition.
PRIX DE MÉDECINE ET DE CHIRURGIE,
FONDÉS PAR M. DE MONTYON.
(Commissaires : MM. Andral, J. Cloquet, Cl. Bernard, Nélaton, Laugier,
Longet, Coste, Bobin, Bouillaud rapporteiu*. )
Rapport sur le Concours de l'année 10G9.
Parmi les nombreux Ouvrages soumis à la Commission, il en est trois
auxquels elle propose de décerner des prix (lui de deux mille cinq cents
francs et les deux autres de deux mille francs chacun); trois auxcjuels elle
propose d'accorder des mentions honorables de mille cinq cents francs
chacune: et elle en cite trois autres, à l'iui desquels elle [)ropose un en-
couragement de mille francs pour continuation de travaux, et une citation
sans argent aux deux autres.
§ L — Prix.
L M. i.E D' JuxoD, inventeur de ces grandes ventouses désignées souvent
sous son nom, adresse à l'Académie un travail manuscrit ayant pour titre :
C. R., 1870, 2' Semestre. (T. LXXI, N" 2.) l5
( "4 )
Des médications hémospasique et aérothéra pique ^ on De la compression et de
la raréfaction de l'air tant sur le corps que sur les membres isolés.
Dans l'introduction de son manuscrit, M. le D"^ Junod a eu soin de pré-
ciser l'expression de médication aérothérnpique ou d'aréotliérapie, déclarant
qu'il ne s'en sert que pour indiquer l'emploi des bains d'air comprimé. Il
revendique, comme lai appartenant, \a. première idée ou l'initiative de cette
méthode, dont la première application formelle à la thérapeutique appar-
tient à M. Tabarié, et qui, depuis une vingtaine d'années, a été le sujet
de plusieurs Ouvrages. Les plus importants de ces Ouvrasses sont ceux, sans
contredit, de M. le D"^ Pravaz, ancien élève de notre glorieuse École Poly-
technique (i), et de M. Berlin, de Montpellier.
En 1 835,- dans un Rapport de M. Serres à l'Académie sur les prix de
Médecine et de Chirurgie, le savant rapporteur indique d'abord les effets
puissants qu'on obtient des grandes ventouses du D' Junod, et dont la
cause immédiate est la diminution de pression atmosphérique dans les ré-
gions où ces ventouses sont placées, effets que l'art peut utiliser dans cer-
taines maladies. Puis il ajoute : « M. Junod fait servir aussi ses grandes ven-
touses à comprimer l'air autoin- d'un membre, et alors, par un effet inverse
du précédent, le sang est refoulé vers les parties soustraites à la compression.
On peut ainsi déterminer une action et ime réaction dont il est permis
d'espérer des résultats utiles dans le traitement de certaines maladies. »
La Corimiission dont M. Serres était le rapporteur, considérant que les
cylindres de M. Junod et la pompe qu'il y adapte constituaient une acquisi-
tion importante pour la thérapeutique, proposait d'accorder à ce médecin
un encouragement de deux mille francs, et la proposition fut adoptée par
l'Académie.
Il ne s'agissait pas alors des effets de l'augmentation et de la diminution
de la pression atmosphérique sur le corps humain tout entier. Mais M. le
D' Junod ne tarda pas à s'occuper de cette nouvelle question. Le Mémoire
qu'il lui consacra fut adressé par lui à l'Académie, et confié à une Com-
mission dont M. Magendie fut le rapporteur. Nous reviendrons un peu plus
loin sur ce Rapport. Qu'il nous suffise poiu" le moment de rappeler à l'Aca-
démie que ce travail n'a jusqu'ici reçu d'elle aucune récompense, et c'est
pour cela que M. Junod le présente au Concours de cette année.
Il y a déjà trois quarts de siècle passés, en 1783, la Société des Sciences
de Harlem proposait un sujet de prix dans lequel il était question de l'in-
(i) Cet Ouvrage a pour titre : Essai sur Temploi médical de l'air comprimé; Lyon, i85o.
( ii5 )
fluence de l'air condensé sur l'économie vivante. Voici, d'ailleurs, dans
quels termes elle avait formulé cette proposition de prix : « i° Décrire l'ap-
pareil le plus propre à faire des expériences sur I'aiR condensé, de la façon
la plus commode, la plus assurée; i° rechercher avec cet appareil l'action
de l'air condensé dans des cas différents, s'occuper, entre aiilres, de la vie
animale, de l'accroissement des plantes et de l'inflammabilité des différentes
espèces d'air. »
Un tel sujet de prix annonce bien l'époque à laquelle il fut proposé. Il
était, en effet, pour ainsi dire, à l'ordre du joiu-, en 1783-, dans ces temps
mémorables où la chimie pneumatique marchait de conquête en conquête;
dans ces temps où Lavoisier, bien jeune encore, mais en quelque sorte
pressé d'arriver à l'immortalité, venait, par un trait de son beau génie, de
dérober à la nature ce secret, si longtemps caché, de la combustion respira-
toire, et, comme un autre Prométhée, de découvrir ainsi un véritable /eu
sacré de la vie, puisqu'il ne saurait s'éteindre sans que la vie ne s'éteignît
elle-même.
Quoi qu'il en soit, la Société des Sciencos de Harlem fnt assez mal récom-
pensée d'avoir si heureusement choisi le sujet de son prix, car il ne lui fut
adressé aucun Ouvrage contenant la solution des problèmes proposés.
De l'aveu de Pravaz lui-même, dont l'Académie a récompensé les tra-
vaux sur Vemploi médical de T air comprimé^ c'est à M. le D' Junod que l'on
doit Vinitialive autlienticjue des recherches concernant Vaction de l'air com-
primé sur le corps humain.
Celte initiative date de i834, époque à laquelle M. le D' Junod, dans un
Mémoire présenté à l'Académie, fit connaître les effets de la condensation
de l'air sur l'homme en état de santé.
« Lorsque, dit-il, on augmente de moitié la pression naturelle de l'at-
mosphère, on remarque ces phénomènes : La membrane du tympan, refou-
lée vers l'oreille interne, devient le siège d'une pression incommode qui,
toutefois, se dissipe peu à peu à mesure que l'équilibre se rétablit, proba-
blement par l'introduction de l'air condensé dans la caisse du tympan, à
travers la trompe gutturale; le jeu de la respiration se fait avec une facilité
nouvelle, la capacité du poumon pour l'air semble augmenter, les inspi-
rations sont grandes et moins fréquentes que dans l'état ordinaire, et,
au bont de quinze minutes, une chaleur agréable se fait sentir dans la
poitrine.
» La circulation du sang paraît modifiée; le pouls est plein, et se dé-
prime difficilement ; le calibre des vaisseaux superficiels diminue et peut
i5..
( ii6 )
même s'effacer coinplôtcmcnt, de sorte que le sang, dans son retonr vers
le cœur, suit la direction des veines profondes.
» Les fonctions inlelleclnelies sont excitées, l'iaiagiiuiiion est vive, les
pensées s'accompagnent d'un charme parlicnlier, et, chez quelques per-
sonnes, il se manifeste une sorte de délire, d'ivresse; le système musculaire
partage cet accroissement d'activité, les mouvements sont faciles, éner-
giques, et semblent plus assurés.
» Les actes digestifs et toutes les sécrétions, particidièremenl celles de la
salive et de l'urine, s'exercent avec facilité.
» Ou dirait que le poids du corps est diminué d'une manière sensible :
du moins telle est la sensation qu'éprouve la personne renfermée dans l'ap-
pareil à condensation. »
Dans le Mémoire où M. Jiuiod faisait ainsi ooniirtître l'influence de l'air
condensé sur l'homme vivant, il s'occupait également de celle ([u'exerce
sur celui-ci la diiuinulion de la pression de ce même gaz. Aussi portait-il
ce titre : Des effets de raiiginentalian et de la diminution de la jjrcssion alnto-
sphérique sur le corps huinfiin.
Le Ra|jport fait à l'Institut, en i835, par Magendie, siu' le Mémoire de
M. Junod, se terminait ainsi : « Vos Commissaires, qui ont été témoins îles
expériences de cet auteur, ont en outre remarqué avec intérêt les modifica-
tions que la voix subit sous l'influence de la |)lus ou moins grande densité
de l'air : à mesure que la pompe joue pour raréfier l'air, la voix perd de
son intensité; dans le cas de compi'ession, elle piend, au contraire, lui éclat,
nn timbre très-prononcé et non moins extraordinaire.
» Ainsi, à l'aide de l'appareil de M. Junod, où l'air comprimé ou raréfié
se renouvelle sans cesse par lui mécanisme très-simple, on peut avoir la
plupart des sensations qu'éprouvent les aéronautes lorsqu'ils s'élèvent à
une grande hauteur, ou celles qui naissent sous la cloclie à plongeur. »
En résumé, à M. le D"" Junod, qui, par sou invention des grandes ven-
touses, avait déjà bien mérité de la thérapeutique, et obtenu de l'Académie,
comme nous l'avons rappelé plus haut, un |)nx de deux mille francs;
à M. le D'' Jiuind appartient l'Iicureuse et féconde initiative des travaux siu'
les effets de l'air couijirimé, soit siu- l'homme sain, soit sui' l'iiouime
malade.
Les applications importantes dont cet inventeur peut, jusqu'à un certain
|)oint, être considéré comme le promoteur, et dcuit queUjues-unes ont été
récompensées par l'Académie (celles de Trd^arié et Pravaz), ajoutent en
quelque sorte à la valeur intrinsèque des travaux de M. Jiuiod. Aussi voire
( '17 )
Commission vous propose-t-elle de lui accorfîer le plus élevé des trois prix
qu'elle a décernés.
II. M. LE D' Hubert vo\ Lusciika, professeur d'anafomie à l'Univer-
sité deTuhingen, est déjà bien connu de l'Académie par de nombreux Ira-
vaux d'analomie qu'il s'est empressé de lui d'adresser, à compter de l'an-
née 1 856 (i).
Ces travaux, soit sous forme de simples Mémoires, soit sous celle de véri-
tables Ouvrages, roulent particulièrement sur \'aualomie dite des régions,
l'une des plus importantes divisions de l'analoinie. Cette anatomie des ré-
gions ou topographique porte aussi le nom de chirurgicale, en raison des
données si précieuses et si nndiipliées qu'elle fournit à la chirurgie, sous le
double rapport du iliagnostic et du traitetiient des maladies, qui sont du
ressort particulier de cette branche de la science de l'homme malade. Le
nom de méclico-cliinirgicnle lui convient mieux encore, puisque, sous le
double rapport indiqué tout à l'heure, elle n'éclaire et ne sert pas moins la
médecine que la chirurgie elle-même, lesquelles ne diffèrent po'wl au fond
l'une de l'autre, et constituent, par leur alliance fraternelle, une seule et
même science.
Quoi qu'il en soit, M. le D*' von Luschka a choisi pour objet de ses
recherches les questions encoie peu étudiées et les plus difficiles de l'ana-
tomie des régions. Il a mis à contribution, pour l'élucidatiou de ces ques-
tions, les divers moyens d'analyse anafomique par l'intermédiaire des-
quels la connaissance de la structure interne des tissus s'est ein-ichie, depuis
une trentaine d'années, de tant d'heureuses découvertes.
Mettons sous les yeux de l'Académie la liste des principaux tra\aux dont
il s'agit :
1° llechcrches sur In stniclitre des corps dits glandes de Paccliioni;
2° Reclien lies sur les nerfs du canal vertébral et de In dure-mère céréhro-
raclndienne,sur le nerf jliréni(jue;
3° Sur une nouvelle espèce de glande sans conduit excréteur que M. Lusciika
a découverte, et désignée ious le nom de glande coxigienne ;
4° Traité sur In constitution et le développenjenl des articulations sympln-
saires et liémidinrtliroïdnles (l'Académie, en iSSg, a décerné une menlion
honorable à ce Traité);
( I ) Comptes rcnrius des séances île l 'Acailéinie, t. XLII, etc.
( ii8 )
5° et 6° Monographie des membranes séreuses de l'homme et des plexus vas-
culaires sniitjuins de l'encéphale;
n° et 8" Analonne médico-chinin/icale du thorax el des organes inlrn-thora-
ciques; Etude anatomique du pharynx de l'homme [i).
C'est ce dernier Ouvrage que M. le D'' Luschka a plus particulièrement
soumis à l'examen de la Commission, et c'est aussi celui que vos Commis-
saires ont l'honneur de vous proposer comme digne de l'une des hautes
récompenses dont l'Académie peut disposer en faveur des travaux de cet
ordre.
Voici quels sont les points les plus saillants et les données les plus neuves
de cet important Ouvrage. On y trouve d'abord d'intéressantes particula-
rités sur les dispositions des muscles et des nerfs du pharynx, ainsi que sur
leurs rapports avec les vaisseaux du cou. Nous ne saurions trop signaler
les recherches de l'auteur sur la structure de la trame, des papilles et des
glandes de la membrane muqueuse du pharynx, jusqu'ici entrevues plutôt
que décrites avec une clarté vraiment anaiomique. Ces parties, que
M. Luschka, armé des instruments et procédés de précision employés de-
puis déjà plusieurs années, a si bien décrites, figureront désormais parmi
les objets les mieux connus. Ou peut considérer comme de véritables dé-
couvertes, en matière de science anatomique, plusieurs des détails relatifs à
la structure inliuie et de la membrane muqueuse pharyngienne elle-même,
et de ses glandes, de ses follicules clos, ainsi que les dispositions, aux divers
âges, de cette portion qui fevèt la voùle du pharynx, laquelle est le plus
souvent le siège de prédilection des tumeurs diies pol/pes naso-pharjngiens.
On aime à voir avec quelle sagacité l'auteur insiste sur les rapports qui exis-
tent entre ces dispositions aiiatomiques et le développement des affections
aiguës ou chroniques de la partie qui les présente. En cela, comme en tant
d'autres choses, on aime à reconnaître res|)rit de celte Ecole française qui,
depuis Bichat, l'un de ses plus grands maîtres, n'a jamais cessé le cours de ses
conquêtes.
Eu somme, l'Ouvrage de M. Luschka, dont un atlas de douze planches
représente, avec une fidélité remarquable, les particularités du texte,
jusque-là peu ou point connues, comble une des lacunes de l'anatomie. Il
mérite donc, à plusieurs titres, l'approbation de l'Académie.
Aussi la Commission vous propose-t-elle d'honorer d'iui de vos prix le
i) Sur le Hxxu aiiénoiite de la partie niisale du pharynx de l' homme, i vol. in-4°.
( 119 )
savant professeur de Tiibingen, prix auquel il a d'autant plus de droits
que, dans les aulres travaux adressés par lui, se rencontrent aussi des re-
cherches dont la Médecine et la Chirurgie pourront, sous plus d'un rapport,
faire d'utiles applications.
III. MM. Paulet et Sarazin ont présenté, pour le Concours aux prix
de Médecine et de Chirurgie, un Ouvrage intitulé: Traité d' Analomie lopo-
(jraplïiqiie (grand in-8°, avec Atlas), comprenant les applications de cette
branche de l'anatoinie à la pathologie et à la médecine opératoire. Depuis
une cinquantaine d'années que l'anatomie descriptive a été étudiée sons le
nouveau point de vue, qui lui a mérité ce nom lV analomie lopograpliique ou
A' analomie des régions, elle a été fléjà le sujet de plusieurs publications plus
ou moins importantes, au premier rang desquelles il f;mt placer celles de
Velpeau (1826), de Blandin (1826), de Jarjavay, de M. le Professeur Richet,
de M. Béraud, dont l'Académie, il y a quelques années, a récompensé les
efforts (i).
En Allemagne et en Angleterre, comme en France, divers Ouvrages ont
été publiés sur l'anaiomie des régions.
Mais une telle matière est si vaste à la fois et si féconde, qu'il faudra bien
du temps à ceux qui la travaillent pour parvenir à l'épuiser.
Les livres qui lui sont consacrés seraient d'iuie assez médiocre utilité, s'ils
n'étaient accompagtiés d'un nondjre suffisant de planches, représentant
exactement les objets dont ils conliennent la description. Sous ce dernier
rapport, en particulier, tous laissaient plus ou moins à désirer.
L'Ouvrage de MM. Paulet et Sarazin, sous cet important rapport, non
moins que sous celui de la description elle-même, est destiné à combler de
nombreuses lacunes.
Ces anatomistes ont disséqué chaque région, en respectant leur configu-
ration, de manière à ce que les chirurgiens et les médecins qui consulteront
leurs figures puissent en quelque sorte se reconnaître immédiatement. Ils
ont également eu soin de conserver scrupuleusement les rapports des or-
ganes situés dans chaque région. L'un des deux (M. le ly Sarazin) a lui-
même reproduit ensuite, par le dessin et la chromo-lithographie, tous les
détails anatomiques, et il a fait preuve, dans cette opération, d'une exac-
(i) M. Duval , chirurgien de la Marine française, M. Leyendre ont également publié,
l'un un Atlas d' Anatoinie chirurgicale, l'autre un Allas d' Anntomic chirurgicale homolo-
graphique.
( I20 )
titiifle à laquelle ne sauraient toujours |)arvenir les plus habiles artistes,
étrangers aux connaissances anatomiques (i).
Le partie descriptive achevée, les auteurs font ensuite ressortir, avec une
rare clarté, quelles sont les applications des diverses dispositions anato-
miques à la pathologie et à la médecine opératoire, en se montrant toujours
au niveau de l'état de la science sur laquelle portent leurs études.
Non contents d'exposer les choses déjà reçues dans le domaine de nos
connaissances, MM. Paulet etSarazin ont enrichi d'un bon nombre de nou-
veaux détails la description, quelquefois obscure en certains points, de
plusieurs régions. Ces données nouvelles sont plus spécialement relatives
à la déteimination rigoureuse des rappoits des organes entre eux, délermi-
nation qui peut être considérée comme le principal flambeau du chirurgien,
dont l'instrument doit être porté dans les lieux où ces organes ont leur
siège.
D'après tout ce qui précède, on ne saurait refuser à MM. Paulet et Sa-
razin, chirurgiens d'armée, l'honneur d'avoir bien mérité de la science à
laquelle ils ont consacré leurs recherches. Aussi la Commission à l'examen
de laquelle ces recherches ont été renvoyées a-t-elle pensé qu'il était juste
de vous proposer de décerner à leurs auteurs im des prix dont elle dispose.
§ II. — Mentions honorables avec encouragemi';nts de la valeur
DE « QUINZE cents FRANCS ».
I. I/Ouvrage de M. le D' H. Rogeii, médecin de l'Hôpital des En-
fants, etc., a pour litre: Recherches cliniques sur la cliorée, te rhumatisme et
les maladies du cœur chez tes enfants.
Le but principal auquel tendent ces recherches, c'est de démontrer :
1° Que la chorée constitue une affection de nature rhumatismale, idée
pathogénique à peine entrevue, dit M. Roger, par les auteurs, et n'ayant
pas encore cours dans la pratique, « malgré les travaux remarquables de
quelques observateurs modernes, IMM. Sée et Bolrel principalement » ;
2° Qu'il existe entre cette chorée d'origine rhumatismale et les maladies
du cœur les mêmes rapports qu'entre ces maladies el d'autres formes rhu-
matismales.
M. Roger commence par une étude spéciale du rhumatisme chez les
enfants. Il en signale la fréquence, à partir de l'âge de cinq ans (il est, selon
(i) I.c nombre de ces belles planciies, pour les deux volmiifs ilc texio, ne s'élève pas à
moins de deux cents.
( 121 )
lui, tout à fait exceptionnel avant l'âge de trois ans) jusque dans la seconde
enfance, époque à laquelle il devient presque aussi fréquent que chez les
adultes. Il affirme ensuite que, dans l'enfance, comme à tous les âges, le
froid humide est la cause la plus active du rhumatisme, sans en excepter
celui de la scarlatine. Enfin, il a constaté que, comme aux âges plus avancés,
de toutes les coïncidences rhumalismales, celles du côté du cœur sont les plus
fréquentes, et il fait remarquer que, dans certains cas de ces coïncidences,
c'est par une phlegmasie cardiaque que commence la série des manifesta-
tions rhumastismales.
M. Roger a constaté que le rhumatisme cérébral est moins fréquent chez les
enfants que chez les adultes. Il ne l'a observé que dans des cas où le rhu-
matisme articulaire coïncidait avec la chorée, et il se demande si celle-ci ne
peut pas être considérée elle-même comme une forme de rhumatisme céré-
bral ou spinal.
Mais il est une coïncidence, une complication du rhumatisme que, selon
M. Roger, l'on peut dire propre à l'enlânce; et c'est de la chorée qu'il
s'agit. Cette autre loi de coïncidence repose sur des faits observés par l'au-
teur, en grand nombre, et dans des circonstances diverses.
M. Roger termine cette première partie de ses recherches par la proposi-
tion suivante, que nous rapportons textuellement : « La description du
rhumatisme chez les enfants ne peut plus ne pas comprendre la danse de
Saint-Guy à titre d'élément important, de même que les descriptions de la
chorée ne sauraient omettre la chorée rhumatismale. Il y a entre ces deux
maladies non-seulement liaison, parenté, filiation réciproque, mais presque
identité de nature. »
Dans la seconde partie, le médecin de l'Hôpital des Enfants traite, comme
nous l'avons dit, des rapports des maladies du cœur avec la chorée chez les
enfants, et désigne sous le nom de chorée cardiaque celle qui coïncide avec
ces maladies (i). Il rapporte plus de soixante observations particulières
pour démontrer que cette coïncidence n'est pas fortuite, mais bien l'ex-
pression d'une loi entre ces dernières maladies et la chorée elle-même.
D'ailleurs, étant donnée l'origine ou la genèse rhumatismale de la chorée, il
ne s'agit plus ici que d'un cas particulier d'affection rhumalismale, confir-
mant la loi de coïncidence entre les affections rhumatismales en général et
les affections du cœur, telle qu'elle a déjà été formulée par l'auteur de ce
(i) M. Roger a soin de noter qu'il ne donne pas ce nom aux palpitations choréiques
purement nerveuses.
C. R., 1870, 3« Semestre. (T. LXXI, N» U.) 16
( 122 )
Rapport. On lit, avec un vif intérêt, dans le travail de M. Roger, toutes les
particularités, toutes les conditions relatives à l'espèce particulière de rhu-
matisme que représente la chorée, espèce dont il a fait une étude spéciale.
Cet habile et ingénieux observateur ne croit pas, dit-il, se faire illusion
en pensant que cette étude est essentiellement neuve. I.a Connnission, en
tenant compte, avec M. Roger lui-même, de quelques travaux antérieurs,
et notamment de ceux de M. Sée sur les rapports de la chorée avec les ma-
ladies du cœur, se plaît à reconnaître que son étude, sous certains poinis
de vue, est en effet essentiellement neuve.
En tout cas, c'est bien à M. Roger qu'appartient l'honneur d'avoir essayé
de prouver que, sous des noms si différents, et malgré la diversité îles appa-
rences, rhumatisme, chorée, phlerjmasie du cœur, ne sont, en dernière analyse,
que trois formes d'un seul et même processus morbide. Par sa monogr;ipliie
de l'entité nosologique, à laquelle il a donné le nom de chorée rhumato-
cardinque, ayant pour fondement ses observations sur les enfants, il s'est
acquis de justes droits à figurer très-honorablement parmi les observa-
teurs qui, (le notre temps, ont été assez heureux pour fournir à l'histoire
des altections rhumatismales des matériaux plus ou moins nouveaux et
précieux.
Nous proposons donc à l'Académie de décerner une mention à l'auteur
de cette monographie, auteur qui porte dignement un nom trop cher à
l'Institut pour qu'il en ait perdu le souvenir.
II. Un auteur anonyme (i) a composé une longue monographie sons ce
titre : Typhus des Arabes [Typhus exnnlhémaùque ou pétéchinl) : épidémie
de 18G8 (2). Voici la substance des sept Chapitres en lesquels cette mono-
grapliie est divisée.
1" C luses. — !/é|)i(léinie du typhus arabique qui, en 18G8, a éclaté sur
toute la c6\f .septentrionale de l'Afrique, est une des suites de la misère et
de la famine d(nit le Maroc, l'Algérie, la Tunisie, la régence de Tripoli ont
subi les atleuites. Après avoir couvé au sein des populations malheureuses,
(i) Le cachet de son Mémoire ayant été rompu par M. le Président, nous avons constaté
cjue l'auteur était M. Amedée Maurin, l'un des médecins de notre armée d'AIViciue.
(2) Manuscrit (petit in-folio) de 5o4 pages, accompagné de deux yrands tableaux.
L'auteur appelle l'attention de ses juges sur le second de ces tableaux, relatif à einquaule-
qiuilre cas de fièvres intei niitteutes, c> Ijrpe spécial, observés en un seul mois, affection,
selon lui, jus(]u'alors inconnue, et (jui serait comme le mélange des deux maladies régnantes
à cette époque.
( 1^3)
le génie épidémiqiie a sévi non-seulement sur les indigènes, mais aussi sur
les Eiu'opéens en contact avec eux. Les agglomérations formées de leur
réunion donnèrent naissance au conlaghim, cause première et essentielle de
la maladie. Après avoir exposé les conditions météorologiques de l'Algérie,
de i865 à 1868, l'auteur trace la description des lieux dans lesquels ses
observations particulières, au nombre de cent quarante-cinq, ont été re-
cueillies, et indique les mesures de précaution qui furent prises.
2° Pathogénie. — Le typhus des Arabes, dit l'auteur, provient cVtin
miasme procluil par l'organisme humain^ descendit à un certain état de clébilité
qui favorise la décomposition des tissus, et communicpie une virulence spéciale
aux émanations passant du corps de l'homme dans l' atmosphère ambiante. Divers
agents plongés dans le foyer ou le milieu de la contamination possèdent la pro-
priété de conserver et de communiquer la contagion typhigène.
3° Anatomie pathologique. — Une lésion pour ainsi dire palhognomonique
du typhus arabique est celle que l'auleur annonce avoir trouvée dans les
intestins, et qu'il décrit sous le nom de plaques rasées. Cette lésion, selon
lui, serait au typhus indiqué ce que l'altération des plaques de Peyer est
à la fièvre typhoïde, c'est-à-dire son caractère analomique. L'auteur ajoute
qu'elle n'avait point été signalée jusqu'à ce jour (i).
L'état de plusieurs organes, considérés soit dans leur élément solide, soit
dans leur élément flnide, n'est pas décrit d'une manière suffisamment dé-
taillée, lacune d'autant plus regrettable que les procédés physiques et chi-
miques d'exploration ont acquis, dans ces derniers temps, les plus heureux
perfectionnements. En ce qui concerne, par exemple, les altérations du
sang, si importantes à étudier en matière de maladies de l'ordre typhique,
l'auteur s'exprime ainsi :
« L'action du miasme dans le typhus ne peut être analysée ni décrite.
Elle doit se réjléchir sur les éléments constitutifs les plus précieux du sang,
la fibrine et les globules Elle ôte à ces éléments la propriété de servir à
la réparation organique....
» Lorsqu'on place sur le champ du microscope le sang d'un typhique,
on observe que les globules sont en quantité moindre qu'à l'état normal,
mais que les globulins y sont en plus grande abondance; d'où l'on peut
(i) IM. Maurin a fait parvenir à l'Académie un échantillon de la lésion intestinale qu'il a
décrite sons le nom de plaques rast-t-s, échantillon conservé dans un flacon d'alcool. Le
rapporteur, en présence de M. J. Ciocjuci, a examiné la ])ièce, U'ès-bien conservée, et ils
avouent n'v avoir trouvé aucune lésion considérable et carcictéristique des plaques intesti-
nales.
16..
( 1^4 )
conclure, on bien qu'il y a eu déperdition rapide des globules, ou arrêt
dans la nutrition. »
C'est à l'article Analomie pathologique (p. 67), que l'auteur a cru devoir
discuter la question très-grave de la nature spéciale, pour ne pas dire 5/je-
cifique, de la maladie nommée par lui typhus des Arabes. Celte maladie, dans
son opinion, constitue une variété typhique parfaitement définie, qu'il ne
faut pas confondre avec les autres variétés du même nom. Les altérations
anatomo-palhologiques ne peuvent, à son avis, être confondues avec celles
pro|)res à la fièvre typhoïde. « Le typhus des Arabes, ajoute l'auteur, a son
génie propre, ses manifestations propres, qui ne permettent pas de le con-
fondre avec des affections typhiques offrant pourtant une symptomatologie
à peu près semblable. »
Les confrères de l'auteur qui ont partagé avec lui la tâche, honorable à
la fois et périlleuse, de soigner les personnes frappées par l'épidémie, ne
paraissent pas avoir tous adopté sa théorie, puisqu'il déclare hii-mème, à
l'article Traitement, que la divergence dont ce point capital a été l'objet
doit être attribuée à la divergence des opinions sur la nature de la maladie.
Pour les uns, en effet, il s'agissait d'une forme de fièvre typhdule ; pour
d'autres, du typhus feber d'Irlande; pour d'autres enfin, du typhus des
camps.
Il a donc régné quatre opinions différentes sur la nature de l'épidémie,
dont l'Ouvrage que nous analysons contient la description.
Votre Commission n'a pas trouvé, dans les faits et les raisonnements de
l'estimable auteur de cet Ouvrage, les données nécessaires pour la solution
du problème dont nous venons de nous occuper.
4° Symptomatologie. — Composé de soixante pages, ce Chapitre ne sau-
rait être ici l'objet d'une analyse détaillée. Contentons-nous d'appeler
l'attention de l'Académie sur les trois symptômes suivants, signalés parti-
culièrement par l'auteur : éruption pétéchiale plus ou moins abondante;
odeur nauséeuse exhalée autour d'eux par les malades; acidité très-pro-
noncée de leur haleine.
5° Contagion. — Parmi les observations que l'auteur a recueillies, vingt-
cinq lui ont paru particulièremtnt propres à témoigner en faveur de la
contagion. Il partage en quatre catégories les individus atteints par voie
de contagion : la première contient les individus qui ont couché dans la
même chambre que des typhiques, et par conséquent respiré le même air;
la seconde, ceux qui, par suite de liens de parenté, se sont trouvés en con-
tact continuel avec les malades; la troisième, ceux qui ont seulement ap-
( ï=^5 )
proche des malades ou couché dans les appartements que ces derniers
avaient occupés; la quatrième enfin, ceux qui ont donné des soins aux
malades.
6" Traitement. — Ce Chapitre ne contient réellement rien d'essentielle-
ment nouveau, ce qui, nous devons le faire remarquer, contraste quelque
peu avec le caractère de nouveauté que l'auteur reconnaît à la maladie. Cet
auteur avoue ne pas connaître de traitement prophylactique capable d'ar-
rêter le développement de la maladie, ni de médication à l'aide de laquelle
les personnes vivant à proximité des typhiques puissent être préservées. Il
conseille fortement néanmoins les moyens désinfectants.
Il annonce d'ailleurs, et nous l'en félicitons, « qu'il résulte des relevés
statistiques que, dans le service où se trouvaient ses malades (salles Saint-
Philippe et Sainte-Elisabeth), la mortalité a été de beaucoup la plus
faible. »
7° Mortalité (i). — Elle a été de lo environ pour loo chez les hommes,
et de près de i5 chez les femmes. Sur un total de 208 malades, elle a été
de 10 à 1 1 pour 100.
L'Ouvrage que nous venons d'analyser « est, dit l'auteur, le fruit d'une
année entière de laborieuse observation ». Nous le reconnaissons volon-
tiers, et nous ajouterons qu'il roule sur un sujet de haute importance.
Aussi la Commission propose-t-elle à l'Académie de lui décerner une men-
tion honorable.
III. M. Knocb, chirurgien en premier de l'hôpital militaire de Saint-
Pétersbourg, est auteur de divers Mémoires (a) ayant pour objet l'histoire
de l'évolution de l'un des hehninthes parasites de l'espèce humaine, le
Bothriocéphale large ( Tœnia lata, Bolhriocepliahim ou Dibotlirium latum). Peu
commun en France, cet entozoaire abonde, au contraire, et pullule en
Suisse, en Pologne et en Russie. Jusqu'aux travaux de M. Knoch, on ne
possédait aucuns renseignements précis sur le mode de propagation des
Bothriocéphales. Mais, depuis cinq années que cet observateur a soiunis à
l'Académie des Sciences plusieurs Mémoires sur ce chapitre important,
nous n'aurons plus à regretter, avec les auteurs de la Zoologie médicale,
MM. Beneden et Gervais^ nos savants Correspondants, de ne pas savoir sous
(i) Foir l'article Contagion, où l'auteur a consigné ses recherches sur le chiffre compa-
ratif des morts et des guéris.
(2) Quatre brochures en langues russe et allemande, et une Note manuscrite.
( 1^6 )
quelle forme et dans quelles conditions vit, pendant son premier âge, le
Bolhriocéphale, passant dans le canal digestif de l'homme, pour s'y déve-
lopper sous son élal strobilaire on propagateur.
Les dernières recherches expérimentales du savant physiologiste de
Saint-Pétersbourg (i) ont démontré, de la manière la plus précise, que
l'embryon du Bolhnocépliale large ne subit pas de métamorphose particu-
lière, à l'instar de l'embryon des Ténias chez l'homme, en ver rubané
adulte. Tout récemment, cet expérimentateur, par une sorte de bonne for-
tune physiologique, a trouvé dans le canal intestinal de jeunes chiens,
non-seulement des exemplaires de Bolhriocéphale adulte, mais encore les
Scolex, lesquels étaient, avant lui, complètement inconnus. Ses expériences
lui ont permis en outre de conclure que les embryons du Bothriocéphale
large, introduits dans le canal intestinal du chien, n'opèrent pas de migra-
tions dans les divers organes de l'animal soumis à l'expérimentation; d'où
il suit que ces embryons ne s'enkystent pas, ne passent pas à l'état de
C/slicerques, à la manière des embryons de Ténias, après leur introduction,
mais qu'ils accomplissent leur évolution directement, et pour ainsi dire
de toutes pièces, dans le canal intestinal de l'animal qui les a reçus, sous
forme de Bothriocéphale, d'abord à l'état de développement imparfait, puis
à l'état adulte.
La Commission n'a pu constater par elle-même les résultats annoncés par
M. Knoch; mais elle n'a pu mettre en doute l'exactitude des expériences
qui les ont fournis. Ces résultats ne sont pas d'ailleurs seulement décrits
par le savant observateur russe, mais ils sont aussi représentés dans des
figures cpii, certes, ne sont pas imaginaires. Leur concordance ne s'est
jamais démentie dans une assez longue série d'expériences, méthodique-
ment combinées, et pratiquées dans les conditions les plus appropriées au
sujet étudié.
Votre Commission s'est donc crue autorisée à considérer les travaux de
M. Knoch comme constituant, en matière d'helminthologie en général
et d'helminthologie médicale en particulier, un progrès assez important,
pour proposer à l'Académie d'accorder à son auteur une mention hono-
rable.
(i) Après avoir figuré, en abrégé, clans les Cnviptc.y rendus tics scnncps ilc l'Àradémic des
Sciences, ces recherches ont été publiées intégraleiiienl, en 1868, à Paris, dans le Journal
d' Anatomic cl de Physiologie.
( 127 )
§ III. — Citation sans argent et encouragement de mille francs
POUR continuation de travaux.
La Commission se plaît à citer avec éloges :
1° L'Essai sur les maladies du cœur chez les enfants, par M. le D"' IIené
Blache;
2° Les Etudes photographiques de M. Rocdaxovsky sur le système nerveux
de l'homme et de quelques animaux supérieurs.
Enfin, elle propose un encoiirfigement de mille francs à M. Saixt-Ctr,
pour la continuation de son Elude sur la teigne faveuse chez les animaux
domestiques.
PRIX DIT DÉS ARTS INSALUBRES,
FONDÉ PAR M. DE MONTYON.
(Commissaires : MM. Combes, Boussingault, Payen, Peligot,
Chevreul rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 18C9.
Plusieurs pièces ont été examinées par la Commission des Arts insalubres.
Deux seulement ont arrêté son attention ; mais ce n'est pas dire que les autres
sont rejetées à toujours, parce que depuis l'origine de la fondation Montyon
concernant les Arts insalubres, un travail écarté aujourd'hui n'est pas frappé
d'une exclusion définitive, et il est tels travaux auxquels un simple encou-
ragement avait été donné qui, i)lus lard, ont rendu des services assez mul-
tipliés et assez considérables pour qu'on les ait jugés alors dignes d'un
prix.
C'est conformément à cette manière de voir que la Commission accorde
à M. Pnnout un prix qu'elle propose à l'Académie de porter à la somme de
deux mille cinq cents francs pour l'invention d'une sorte de mastic propre à
recouvrir la surface extérieure des tuyaux, des chaudières, des étuves, etc.,
avec la double intention de conserver la chaleur interne, et de diminuer
ainsi réchauffement de l'air extérieur et l'effet du rayonnement sur les ou-
vriers exposés à le recevoir, effet toujours très-incommode quand il n'est
pas dangereux. Le procédé de M. Pimont, d'accord avec l'économie du
combustible, est donc fort avantageux au point de vue de l'hygiène des
ouvriers qui passent de longues heures dans les lieux où les appareils pré-
cités sont établis.
( 128 )
Le Rapport ci-joint, de M. Payen, sur la composition du mastic de M. Pi-
mont et les nombreux avantages constatés par un long usage, justifie,
d'abord l'encouragement que l'Académie a donné il y a plusieurs années
à M. PiMO\T, et le prix que nous lui décernons aujourd'hui, en proposant
à l'x^cadémie de le porter au maximum, à savoir : deux mille cinq cents
francs.
La Commission, après avoir examiné avec une attention toute particu-
lière les procédés de sauvetage, dans le cas d'incendie, de M. Charrière;
après avoir été témoin, dans la grande cour du Palais de r[nstitut,du méca-
nisme de ces procédés, elle a pensé, à l'unanimité de ses Membres, que, si ces
procédés ne sont point encore entrés dans la pratique, vu leur simplicité,
leur nouveauté et la facilité de leur exécution, ils donnent à leur auteur,
M. Charrière, droit à un prix que la Commission propose de porter au
maximum de deux vaille cinq cents francs.
La Commission, avons-nous dit, a examiné avec une attention toute par-
ticulière les procédés de M. Charrière, et voici pourquoi : les Commissions
auxquelles nous succédons ont constamment observé le principe de ne
donner des |irix qu'à des procédés mis en pratique avec tm succès constaté, et
ce principe nous le maintenons comme excellent à tous égards.
Les considérations suivantes, pensons-nous, convaincront l'Académie
que la Commission n'y a pas été infidèle en décernant ce prix à M. Char-
rière,
On verra d'abord, dans le Rapport ci-annexé de M. Combes, les détails
des appareils de sauvetage imaginés par M. Charrière et la raison de
leur efficacité; en outre, les conclusions des épreuves auxquelles une Com-
mission des sapeurs-pompiers de la ville de Paris les a soumis. M. le lieule-
tenant-colonel de Dionne, organe de celte Commission, s'énonce en ces
termes : « Aussi la Commission croit qu'il serait très-avanîageux, dans l'in-
» térêt de la sûreté publiqtie, que cet appareil fût en quantité suffisante dis-
» posé dans les hôpitaux, les lycées, institutions, etc., partout, en un mot,
» où les sauvetages pourraient, en raison du grand nombre des personnes à
» sauver, présenter de sérieuses difficultés, et que le corps des sapeurs-pom-
» piers aura dans cet appareil une précieuse ressource toutes les fois qu'il le
» trouvera dans une habitation où doivent se faire les sauvetages. » En pré-
sence de ces faits, la Commi.ssion des Arts insalubres n'aurait-elle pas paru
à l'Académie manquer à la volonté du fondateur des |)rix concernant les
Arts insalubres, si elle n'avait pas profité de l'occasion d'en décerner un à
un homme qui, de simple ouvrier devenu fondateur d'un établissement
( 129 )
considérable, a reçu, à la suite des Exposilions de l'iiKhistrie, d'abord la
croix de chev.alier, puis celle d'officier de la Légion d'honneur, et qui, retiré
des affaires après une fortune lionorableuienl acquise, a consacré ses loisirs
et sou argent à l'accomplissement de l'œuvre à laquelle nous proposons à
l'Académie de décerner le prix des Arts insalubres le plus élevé. Certes,
l'Académie, en le votant, ne trouvera que des approbateurs parmi les nom-
breuses personnes qui connaissent la vie industrielle de M. Charrière et les
services qu'il a rendus à la Chirurgie.
Rapport de M. Payen
SUR l'enduit dit <i c:ALOBIFUGE plastique » DE M. PIMOJiT.
Depuis plus de douze ans, M. Pimont s'occupe des moyens d'amoindrir
les déperditions de chaleur qu'occasionnent, dans diverses industries, soit
l'évacuation de liquides rejetés bouillants ou encore très-chauds, soit les
vapeurs d'échappement des chaudières ou machines, soit euiin le rayon-
nement des surfaces des chaudières ou conduites d'eau, de vapeur et d'air
laissées à nu ou mal enveloppées.
Ses procédés, graduellement perfectionnés jusque datis ces derniers
temps, appliqués avec succès dans un grand nombre d'usines et même
dans les appareils de chauffage de la Marine, réalisent de notables écono-
mies de combustible et rendent moins pénible et moins insalubre le travail
des ouvriers.
L'un des procédés de M. Pimont qui reçoit les applications les plus géné-
rales consiste dans l'emploi d'un mastic île sa composition, dont on
recouvre les surfaces externes des tuyaux des chaudières et des étuves. Ce
mastic à base d'argile (i) est assez i)eu conducteur de la chaleur pour pré-
server les ouvriers du rayonnement, qui les fatiguait beaucoup et était nui-
sible à leur santé; en évitant d'ailleurs les condensations trop abondantes
de la vapeur d'eau transmise à de grandes distances, il prévient les chocs
ou ébranlements qui compromettaient la solidité de ces conduites et déter-
minaient parfois des ruptures dont les réparations étaient plus ou moins
difficiles, dangereuses et toujours dispendieuses.
(i) 11 contient, en doses un peu variables, de l'argile mise en pâte, du tourteau de graines
oléagineuses en pâte également, de l'Iiuile résidu des dépôts d'épuration, du degias, de la
bourre de poils, du poussier de charbon de bois, de la suie et de la sciure. Ces substances
hétérogènes, à l'aide de tours de mains, bien entendus, sont intimement mélangées et |)ien-
nent graduellement un retrait régulier sans manifester de tissures : les larges enduits sont
consolidés par l'interposition de menus fils de fer et de minces lames en bois.
C. R., 1870, -2= Semestre. (T. LXXl, N" 2.) ' 7
( i3o)
L'auteur est parvenu à garantir les ouvriers des émanations incommodes
et insalubres qui se dégagent, eu certaines circonstances, pendant le séchage
des laines, eu pratiquant cette opération dans un appareil fermé : les mani-
pulations sont dés lors devenues plus faciles et économiques.
Rapport de M. Combes
SUR LES APPAREILS DE SAUVETAGE DE M. CHARRIÈRE.
La Commission décerne lui prix à M. Charriére, ancien fabricant d'instru-
ments de chirurgie, pour les moyens et appareils qu'il a imaginés ou per-
fectionnés, afin de faciliter le sauvetage des personnes surprises par un
incendie et auxquelles il ne reste d'autre issue que les fenêtres de la
maison envahie par les flammes.
M. Charriére a cherché d'abord à assurer aux personnes ainsi mises en
péril la possibilité de se sauver elles-mêmes, sans l'aide de secours apportés
de l'extérieur. Les moyens qu'il propose pour cela sont des plus simples.
Tout le monde connaît les poulies installées au-dessus des fenêtres des gre-
niers ou étages supérieurs d'un édifice, poin* élever ou descendre des fardeaux.
M. Charriére apporte à la poulie ordinaire les additions suivantes : la gorge
élargie de manière à contenir deux ou trois circonvolutions de la corde;
l'axe avec lequel elle est solidaire est prolongé, à l'une de ses extrémités, en
dehors de la chape qu'il traverse et sur ce prolongement est fixée une roue
à rocliet sur laquelle est appuyé, par l'action d'un ressort d'acier, un valet
tournant autour d'un axe fixe saillant sur la joue extérieure de la chape;
ce valet engagé dans les dents de la roue, laisse la poulie libre de tourner
dans un seul sens, en mettant obstacle à la rotation de sens contraire; une
corde, d'une longueur au moins égale à un peu plus de deux fois l'élévation
de la poulie au-dessus du sol extérieur, est enroulée deux ou trois lois au-
tour (le cette poulie mi fixe.
Au moyeu de cet appnreil, une personne d'une force et d'une adresse
médiocres peut, sans ,mcnn aide exlérieur, descendre de la fenêtre sur le
sol en modérant autant qu'elle le voudra la vitesse de la descente, ou re-
monter de l'extérieur à la hauleur de la fenêtre. Les manœuvres à la des-
cente et à la montée siu'Iout, sont singulièrement facilitées par une ceinture
de sauvetage semblable a celle des sa|)eurs-poaipiers. Celte ceinture en-
toure le coips en (le^^ous d<'s aisselles, est miuiie il'uu ou (\cwii anneaux
en fer solidement fixés, qui sont auieiiés en avant sur la jioilrme de la per-
sonne qui en fait usage, et d'un taquet en fer ayant la forme d'un croissant
( i3i )
fixé par son milieu, la convexité appliquée contre la ceinture et les deux
cornes faisant saillie. Ce taquet se trouve près de l'anneau ou des anneaux
d'attache et est aussi ramené sur la poitrine à la partie antétis'jre du corps.
Pour la descente, l'extréinité du hriu de la corde de sauvetage pendant
du côté (le la poulie vers lequel la rotation est empêchée par le valet engagé
entre les dents de la roue à rochet, étant ramenée près de la ]ioulie et
l'autre brin pendant jusqu'à terre, la personne, que nous supposons pourvue
de la ceinture de sauvetage, commence par s'attacher solidement à l'extré-
mité de la corde passée dans les anneaux au moyen de deux ou trois noeuds
faciles à faire; puis, en tirant avec les mains sur le brin pendant de la corde,
elle se soulève à la hauteur de l'appui de la fenêtre, franchit cet appui et se
laisse descendre en modérant la vitesse autant qu'elle le veut-, il suffit, pour
cela, qu'elle exerce avec les mains, sur le brin de la corde auquel elle n'est
point attachée, ime légère traction qui, ajoutée h l'action du frottement
développé par la corde qui glisse sur le contour de la poulie rendue fixe,
fera équilibre à la plus grande partie de son propre poids supportée par
le brin de la corde auquel elle est suspendue. Veut-elle s'arrêter com-
plètement en un point quelconque de la descente, elle n'a qu'à augmenter
un peu la traction qu'elle exerce avec les mains sur le brin pendant de la
corde, pour que cette traction, réunie au frottement, devienne prépondé-
rante par rapport au reste de son poids, et la vitesse sera bientôt tout à fait
éteinte; si elle veut stationner dans cette position, il lui suffira de tourner
une fois ou deux le brin pendant de la corde autour du taquet de sa ceui-
ture. Elle restera alors suspendue, avec le libre usage de ses mains.
La manœuvre pour monter du sol de la rue ou d'un point de station-
nement à la hauteur de la fenêtre, sans être beaucoup plus difficile que
la manœuvre à la descente, exigera cependant un peu plus de force et
d'adresse. Il faudra, en effet, pour l'ascension, que l'opérateur tire avec les
mains, sur le brin pendant librement de la corde, de manière à lui faire
porter plus de la moitié de son poids, ce qui entraînera la rotation de la
poulie et de la roue à rochet solidaire avec elle, avec soulèvement du
valet, qui s'engagera dans les dents successives de la roue. La traction sur
le brin pendant devenant moindre, la poulie ne pourra pas tourner en sens
contraire, et la hauteur gagnée restera acquise; un nouvel effort de traction
sur le brin pendant, exercé avec un mouvement de ressaut de l'opérateur
de bas en haut, le fera arriver plus haut, et ainsi de suite. L'opérateur
pourra, en cas de fatigue, couper son ascension par des intervalles de
repos complet en enroulant le brin pendant de la corde autour du taquet
17..
( l32 )
de la ceinture. La poulie mi-fixe n'est utile, comme on le voit, que pour
l'ascension; dans la descente, elle peut être remplacée par une poulie en
bois fixe, dont l'axe en fer serait solidaire avec la cliai)e, et dont la gorge,
assez large pour recevoir deux ou trois circonvolutions de la corde de sau-
vetage, |)onrrait être recouverte d'une lame mince de cuivre, afin de pré-
venir toute tliaiice d'échanffement excessif du bois par le frottement.
Il n'est pas possible cpie les fenêtres des maisons restent garnies de
poulies saillantes, pendantes à l'extérieur et garnies d'ime corde de sau-
vetage, en prévision des chances d'incendie subits et violents qui auraient
coupé toute retraite par les escaliers. Aussi M. Charriére admet-ii que l'ap-
pareil consistant en une poulie fixe ou mi-fixe, garnie de sa corde de sau-
vetage, sera conservé dans l'appartement et mis en place au moment même
de s'en servir. Il s'est préoccupé avec juste raison de rendre cette mise en
place très-facile et très-prompte, et, avant tout, de chercher un appui of-
frant des garanties suffisantes de solidité et qui se rencontrât partout. Après
de nombreux essais, // s'esl nrrélé au mo/eii stiivnnl, qui nous parait aussi nou-
veau qu ingénieux.
La chape de la poulie porte à sn partie supérieure un anneau allongé
en fer venu de forge avec elle, qui est saisi dans l'anse formée par une
large sangle pliée sur elle-même, dont les deux extrémités vont se rat-
tacher à une plaque en acier de forme rectangulaire. Une fente paral-
lèle aux longs côtés de la plaque est pratiquée dans son milieu; on
passe dans cette fente les extrémités de la sangle repliée, qui vont l'une
et l'autre s'enrouler derrière la plaque, autour d'ime verge ou tringle
en fer plus longue et plus large que la fente; elles sont solidement alla-
chées à celte tringle et entre elles. La chape de la poulie se trouve ainsi
reliée à la plaque par la sangle repliée, qui a, entre deux, une longueur
de 21 à 3o centimètres. La plaque est garnie à sa face interne, c'est-à-dire
du côté regardant la poulie, de six pointes faisant saillie à ses quali-e
angles et vers les milieux de ses longs côtés; elle est munie, en outre,
d'une douille en fer i)rofonde de i5 à 20 contimètres, appliquée à sa face
externe au milieu d'un des longs côtés, et d'iui diamètre assez grand pour
qu'on puisse y enfoncer un manche cylindrique en bois d'une certaine
longueur, tel que le manche d'un balai. La corde de sauvetage est placée
sur la poulie, qu'elle envelopjie deux ou trois fois : une de ses exlri'--
mités ramenée près de la poulie est rattachée à la corde pendante de l'autre
côté par une ficelle; le resf'î de la corde, dont la longueur est, comme nous
l'avons dit, un jieu plus cpie tlouble de la hauteur des fenêtres au-dessus du
( i33 )
sol extérieur, est enroulée sur un dévidoir de forme appropriée. Au moment
du danger, la fenêtre est ouverte; on jette, à l'aide du manche, la sangle
sur l'extrémité supérieure du battant de la croisée portant l'espagnolette ou
crémone, tout près de l'espagnolette, la plaque étant du coté de l'intérieur,
la poulie du côté de l'extérieur; ou ferme ce battant de croisée, après avoir
amené la plaque en fer à être appliquée sur le barreau supéiieiu'; on accroche
l'espagnolette par le bas et l'on fait effort en tirant sur la poulie qui csl à
l'extérieur. La plaque s'applique, à l'intérieur, tout à la fois sur le barreau
supérieur de la croisée et sur son dormant; les pointes dont elle est garnie
s'y enfoncent, et la poulie se trouve ainsi suspendue par la sangle pincée
entre le barreau supérieur de la croisée et son dormant, à un point d'appui
fixe qui, dans le cas même où les bois de la croisée seraient vieux et ver-
moulus, offrirait encore une grande résistance.
La personne qui dirige le sauvetage jette alors par la fenêtre la corde de
sauvetage enroulée sur son dévidoir, détache la ficelle qui lie son extré-
mité supérieure au brin pendant de l'autre côté, attache à cette extrémité
directement ou par l'intermédiaire de la ceinture de sauvetage la personne
.qui doit descendre, et l'aide au besoin à monter sur l'appui de la fenêtre.
La descente s'opère par la manœuvre déjà décrite.
Une Commission, composée d'officiers du régiment des sapeurs-pom-
piers de Paris, présidée par M. le lieutenant-colonel de Dionne, a soumis
h de nombreuses expériences l'appareil de M. Charrière. Voici le jugement
qu'elle en a porté dans un Rapport écrit par son Président.
« Ce dernier appareil a été expérimenté par la Commission, qui a
reconnu qu'il était de nature à inspirer toute confiance, que sa simplicité,
sa légèreté, la facilité de la manœuvre étaient telles, qu'elles lui paraissent
constituer un progrès très-réel et très-important dans la science des sau-
vetages.
» M. Charrière a résolu de la manière la plus ingénieuse, la plus simple
et la plus sûre le problème tant de fois cherché de trouver de suite un
point suffisamment solide dans l'intérieur de la pièce où doit se faire le
sauvetage. Aussi la Commission, à l'unanimité, croit qu'il sérail très-auaiUngeu.x,
dans l'intérël de la sûreté publique, que cet nppareiljût en quantité suffisante
déposé dans les hôpitaux, les lycées, institutions, etc., partout, en un mol, oit les
sauvetages pourraient, en raison du (jranil nombre de personnes en danger,
présenter de sérieuses difficultés, et que le corps des sapeurs-pompiers aura dans
cet appareil une ressource précieuse, toutes les fois qu'il le trouvera dans une
Itaintation oit doivent sejaire les sauvetages. »
( i34)
Les expériences répétées en notre présence, dans les bâtiments mêmes
du pahis de l'Institut, ont eu aussi un plein succès et confirment l'opi-
nion favorable exprimée par la Commision d'officiers du régiment des
sa[)eurs-pompiers de Paris, dont l'aulorilé est si grande en pareille matière.
Il sera sans doute possible et même assez f'acde de décider les adminis-
trateurs d'otablissemenls tels que les liôpitaux, les lycées, les iusliui-
tioiis, etc., à y faire déposer et conserver en bon étal de service un nombre
convenable d';ippareils aussi simples que celui dont il s'agit, et à avoir
dans leur personnel plusieurs individus exercés à l'iuslaller rapidement et
à en faire usage non-seulement pour eux-mêmes, mais |)our diriger te sau-
vetage, en attendant au moins l'arrivée des sapeurs-pompiers, qui, l'appa-
reil à poulie mi-fixe une fois installé, pourront monter du dehors et venir
prendre la direction des opérations. Mais on ne peut espérer que la con-
naissance et l'usage de cet appareil soient, avant longtemps au moins,
assez répandus pour qu'on le trouve au besoin dans les habitations parti-
culières. Il faudra donc presque loujoiu's que l'appareil soit apporté par
les pompiers eux-mêmes, qui accéderont au logis incendié en usant de leurs
échelles, ou y pénétreront, comme ils le font actuellement, par les toits ou
par des brèches ouvertes dans les maisons voisines. Pour le cas où ces voies
d'accès n'existeraient pas et où l'on n'aurait point d'échelles de longueur suf-
fisante, M. Charrière propose d'établir une communication entre les habi-
tants de la maison et les pompiers ou autres personnes de l'extérieur par un
procédé imité du porte-amarre, ou des flèches de sauvetage Delvigne.
Il attache à une simple balle ronde en caoutchouc, un bout de la ligne
qui est attachée par son autre extrémité à l'angle d'une plaque en tôle sur
lequel elle est envidée. Il déroule la ligne, l'étend sur le sol, en ayant
soin d'écarter tout obstacle qui l'empêcherait de suivre la balle qui est
lancée dans la direction de la fenêtre ou du balcon à atteindre : avec un
peu d'adresse, on réussit à la faire arriver après deux ou trois tentatives.
On peut aussi faire arriver le bout de la ligne au balcon, au moyen d'une
longue tige légère, composée, comme les lignes de pêche, de plusieurs par-
ties creuses rentrant à coulisse les unes dans les autres. Les habitants
du logis, une fois en possession de l'extrémité de la ligue, l'attachent à
un point fixe et peuvent amener à eux la poulie fixe ou mi-fixe avec ses
accessoires; il suffit que l'une des personnes présentes connaisse le moyen
de la fixer entre le battant d'une croisée et son dormant. Si l'appareil ainsi
introduit est la poulie mi-fixe, avec roue à rochet, un pompier pourra
monter et prendre la direction du sauvetage.
( i35)
M. Charrière décrit minutieusement, dans sa brochure sur le sauvetage
des incendies, les appareils précédents, les manœuvres à faire et plusieurs
accessoires utiles, en particidier les sacs de sauvetage dans lesquels on
peut placer des femmes, des enfants ou des malades.
Après la lecture de ces Rapports, les conclusions tendant à accorder:
1° Un prix de aSoo francs à M. Pimont, pour la composition de son
enduit dit calorifuge plastique;
2° Un prix de aSoo francs à M. Charrière, pour ses appareils de sau-
vetage,
sont adoptées par l'Académie.
PRIX BRÉANT.
(Commissaires : MM. Cl. Bernard, Jules Cloquet, Nélaton, Stan. f.augier,
Bouillaud, Andral rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 18(J9.
Parmi les Ouvrages,au nombre devingt-cinq, adressésau Concours pour le
prix Bréant, que la Commission a eu à examiner cette année, il en est un
qu'elle a particulièrement distingué. Cet Ouvrage, dont M. le D"^ Facvel
est l'auteur, a pour sujet l'étiologie et la prophylaxie du choléra. Ou y
trouve exposés les travaux considérables entrepris sur cette matière par la
Commission sanitaire internationale qui, sur l'uiitiative de l'Empereur, s'est
réunie à Conslantinople à l'effet de chercher l'origine du choléra, de déter-
miner les lois de sa propagation, et enfin de proposer les moyens soit de
tarir le fléau dans sa source, soil de l'arrêter dans sa marche envahissante
vers l'Europe. iM. Fauve! a pris à ces travaux luic part puissante; il a posé
au sein de la Commission et éclairé de ses idées un grand nombre de ques-
tions qui y ont été discutées, et son intelligente et active intervention a été
pour beaucoup dans la solution des plus importantes.
Un premier fait capital est démontré par l'Ouvrage de M. Fauvel : c'est
que le choléra, maladie endénnque d.ins l'Inde, a son origine dans ce pays,
et que, nulle part ailleurs que dans l'Inde, et peut-être dans quelques pays
linutrophes, on ne le voit se développer spontanément. Circonscrivant da-
vantage la question, il établit que le choléra existe surtout en permanence
dans certaines localités de la vallée du Gange; mais ne marchant qu'avec
les laits, d déclare que ceux que l'on possède ne permettent pas d'affirmer,
( >'^(3 )
comme on l'a sou\ent répété, que ce soient les alluvions du fleuve qui lui
donnent naissance.
Lorsque, de simplement endémique, le choléra devient épidémique, les
faits relevés par M. Fauvel lui ont appris que le plus souvent cette redou-
table transformation est due à des déplacements de grandes masses
d'hommes, ceux surtout qu'occasionnent les pèlerinages, et de grands mou-
vements de troupes.
M. Fauvel admet comme incontestable la Iraiismissibilité du choléra. Ce
principe, prouvé par les faits qu il a rassemblés, étant admis, vient luie
autre question, celle des agents par lesquels le choléra est transmissible. De
ses recherches sur ce point, M. Fauvel conclut que les deux piincipaux
agents de cette transmissibilité sont l'air expiré par les cholériques, et cehii
qui est chargé des émanations de leins déjections. Il regarde aussi connue
susceptibles de transmettre la maladie les divers vêtements portés par les
cholériques; mais les faits ne lui ont pas démontré qu'elle ait jamais été
communiquée par les marchandises, non plus que par les cadavres des per-
sonnes mortes du choléra. Toutefois, comprenant toute la ré.serve qu'il
faut apporter dans de pareilles questions, il déclare, avec la Commission,
que ces objets doivent être regardés comme suspects. Enfin, au nombre îles
moyens de transmission du choléra, M. Fauvel place les localités imprégnées
des détritus cholériques, lesquelles, conservant longtemps la propriété de
dégager le principe cholérique, peuvent entretenir ainsi une épidémie, ou
la régénérer.
On sait combien la science est encore peu fixée sur la question de savoir
jusqu'à quel point et dans quelle mesure l'air peut être un véhicule du
principe cholérique. Il résulte à cet égard du travail de M. Fauvel qu'U
n'y a pas de fait bien avéré qui prouve qu'au delà de loo mètres de dis-
tance du foyer d'infection, l'air ait jamais été un agent de transmission du
choléra. Mais, dit l'auteur, ce qui le transmet au loin et l'enlrelieiit, ce sont
les grandes agglomérations d'honunes; la marche des épidémies du cho-
léra s'effectue toujours, suivant l'énergique expression de M. Fauvel, dans
le sens des coiiranls liiiinains. Il prend une intensité nouvelle toutes les
fois qu'il est importé au milieu de pojiidations entassées, et sa violence
augmente alors en proportion des mauvaises conditions hygiéniques, telles
que la misère, la malpropreté, une aération iusulfisanle, la température
élevée de l'atmosphère, les exhalaisons d'un sol imprégné de matières orga-
niques. Tandis que les grands déserts, dit M. Fauvel, sont une barrière des
plus puissantes contre le choléra, et que les caravanes qui, parties de la
( 1^7 )
Mecque, les traversent pour se rendre en Egypte et en Syrie, n'ont jamais
apporté le choléra clans ces contrées, les comninnicalions par uier sont, au
coniraire, les voies les plus propres à le propager.
La question si importante du temps d'incubation du choléra occupe une
grande place dans ce travail, et l'on y trouve sur ce point des approxima-
tions c[ui peuvent servir de règle.
Voilà la première i)artie de l'Ouvrage de M. Fauvel, qui, tonte impor-
tante qu'elle est, n'a été faite en quelcjue sorte que pour fournira la se-
conde une base solide et un point de départ assuré. Cette seconde partie
est consacrée à exposer quelles sont les mesures à prendre, soit pour
éteindre le choléra clans son foyer primitif, soit pour s'opposer à sa propa-
gation par les voies de terre et de mer, soit pour faciliter sa disparition des
lieux qu'il a envahis.
Sur ces diverses questions, sur celle surtout des routes diverses par les-
quelles peut s'engager le choléra dans son immense parcours de la vallée
du Gange à l'Europe, ce livre contient des études approfondies et des vues
nouvelles, relativement siutout aux lieux où il importe le plus de surveiller
l'envahissement du fléau.
La Commission propose à l'Académie d'accorder à M. Fauvel, pour cet
Ouvrage qui a fixé la science sur de graves questions, et déterminé d'impor-
tantes améliorations dans les institutions sanitaires, une récompense de cinq
mille francs, totalité de l'intérêt annuel du legs Bréant.
En dehors de cette œuvre capitale, la Commission a remarqué trois Ou-
vrages, ciu'elle croit devoir signaler, à des titres divers, à l'attention de
l'Académie.
Sous le nom d'Eludés géographiques cl scientifiques sur les causes cl les
sources du choléra asiatique, M. Puoeschel a soumis au jugement de l'Aca-
démie un travail étendu, accompagné de cartes qui n'en sont pas la partie
la moins importante, dans lequel il a réuni un très-grand nombre de faits
et de documents relatifs aux questions que soulèvent ces études. On doit
nu juste éloge au labeur si considérable cju'a dû coûter à l'aiîteur la re-
cherche de tant de matériaux dans les Ouvrages nombreux et divers où ils
sont disséminés. Il en est résulté, si je puis ainsi dire, une vue d'ensemble
qui a un intérêt véritable, et dont l'utilité est manifeste. Parfaitement au
courant des acquisitions de la science moderne, il a recherché, avec les lu-
mières qu'elle lui fournissait, toutes les circonstances qui, dans l'atmo-
sphère, à la surface du sol, dans les eaux qui le couvrent, et dans les êtres
organisés vivants ou morts, peuvent concourir au développement de cer-
(;. R., 1870, -i' Semestre. (T. LXXl, M» 2.) ' ^
( '38 )
tains agents nuisibles, animés ou iiinnimés, cause probable de plusieurs
maladies épidémiques. Bien que l'exactitude de plusieurs des opinions émises
par l'auteur ne soit pas toujours étayée par lui de preuves sutflsantes, son
travail, qui témoigne d'une instruction peu commune et de beaucoup d'in-
telligence, ne peut qu'être médité avec fruit par tous ceux qui s'occupent
des questions relatives à l'étiologie soit du choléra, soit d'autres maladies
endémiques et épidémiques.
Dans une Notice sur les mesures de préservation prises à Batna (Algérie)
pendant le choléra de 1867, M. Dckerley, médecin-major, a rapporté lies
faits qui portent le cachet d'une bonne observation, et qui prouvent l'in-
fluence favorable que l'isolement, la destruction par le feu ou la désinfec-
tion des matières contaminées, et des mesures bien entendues d'iiygiene
ont eue sur l'état sanitaire de cette ville, qui, pendant deux mois, a été,
ainsi que ses environs, préservée du choléra, tandis que les territoires voi-
sins étaient ravagés par une épidémie de choléra très-meurtrière. Une carte
topographique met en évidence les faits consignés dans ce Mémoire.
Enfin la Commission a jugé digne d'être honorablement citée ime excel-
lente statistique, due à M. le D' Géry père, des décès par le choléra
qui ont eu lieu dans le quartier Folie-Méricoiirt pendant les années
i865 et 1866. Ce travail, d'une incontestable utilité, est fait avec un soin
qu'on ne saurait trop louer. En l'entreprenant, M. Géry a donné un bon
exemple; l'exécution de beaucoup de statistiques semblables fournirait à
l'histoire du choléra de précieux documents.
PRIX CUVIER.
(Commissaires: MM. Elie de Beaumont, Brongniart, de Quatrefages,
Daubrée, Milne Edwards rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 1869.
La Commission chargée de décerner le prix Ciivier pour l'année iSfig a
décidé, à l'unanimité, que celle marque de haute estime senùt donnée à
M. EiiKENBERG, Associé étranger de l'Académie à Berlin.
Les travaux de M. Ehreidiorg, commencés il y a |)rés d'un demi-siècle,
et |)oursuivis sans relâche jusqu'au moment actuel, sont si bien connus de
tous les naturalistes, et les services rendus à la zoologie [)ar cet observateur
habile sont d'un ordre si élevé que la Commission croit inutile de motiver
son vote.
( i39 )
Le nom de M. Ehrenberg ne peut que jeter un nouvel éclat sur la liste
des iinturalistes auxquels l'Académie a décerné le prix Cuvier, et votre rap-
porteur se borne à l'appeler que ces lauréats sont MM. Agassiz, J. Millier,
R. Owen, LéonDufour, Murcliison et de Baer.
PRIX BORDIN.
RÔLE DES STOMATES DANS LES FONCTIONS DES FEUILLES.
(Commissaires : MM. Duchartre, Decaisne, Tulasne, Naudin,
Brongniart rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 1869.
L'Académie, en mettant ce sujet au Concours, désirait que les concur-
rents déterminassent, par des expériences précises, la part des stomates
dans l'ensemble des fonctions des feuilles en distinguant ce qui appartient
à l'épiderme dépourvu de stomates et à celui qui en est pourvu, dans le-
quel les stomates doivent jouer un rôle essentiel; elle aurait désiré qu'on
étudiât le mode d'action de ces deux surfaces différentes des feuilles au
point de vue de l'exhalation ou de l'absorption de l'eau, aussi bien qu'à
celui de l'exhalation et de l'absorption des gaz.
Trois Mémoires ont été envoyés au Concours à l'époque fixée pour sa clô-
ture ; chacun d'eux renferme des observations et des expériences intéres-
santes. Des points importants qui se rattachent à la question mise au Con-
cours ont été étudiés et souvent résolus d'une manière qui laisse peu de
doutes, surtout dans deux des Mémoires qui ont été adressés à l'Académie
(sous les n"' 2 et 3).
Mais on peut dire que ce sont certains élémetits de la question qui ont
été abordés, plutôt que la question elle-même.
Chacun des auteurs le reconnaît, poin- ainsi dire, en déclarant que le
temps lui a manqué pour compléter ses recherches et qu'il n'est pas arrivé
au terme des études qu'il se propose de continuer.
Il est certain que la question, telle que la posait le programme du Con-
cours, n'est pas résolue d'une manière positive, et que les conclusions
énoncées par les savants auteurs de ces Mémoires sont, dans certains c;is,
des présomptions plus ou moins vraisemblables plutôt que des vérités
démontrées ou, dans d'autres cas, seulement des conclusions partielles
relatives à des phénomènes particuliers, cpii jouent sans doute un rôle
important dans les fonctions qui font l'objet de ce Concours, mais sans
résoudre la question elle-même telle qu'elle avait été présentée.
i8..
( >/io )
D.nis cette situation, vu rintérèt du sujet et l'espoir que la question
pourra être résolue soit p;ir les concurrents actu(>]s, soit par d autres
savants, la Commission pense qu'il y a lieu de remettre la question au
Concours.
Nous n'entrerons, pour ce motif, ilans aucun détail sur les Mémoires
envoyés cette année, car la question étant maintenue au Concours, il y
aurait des inconvénients évidents à faire connaître et à discuter les tra-
vaux de chacun des compétiteiu-s; les méthodes d'expérimentation em-
ployées par eux et les résultats qu'ils eu ont déjà obtenus, ne devant être
connus du public et de leurs concurrents qu'autant qu'ils le jugeront con-
venable.
Conformément h la proposition de la Commission, l'Académie remet au
Concours pour l'année 187a, la question du rôle des stomates dans les fonc-
tions des feuilles, telle qu'elle l'avait proposée pour 1869.
Le terme pour l'envoi des Mémoires est fixé, exceptionnellemeut, au
3i décembre 1871. Ces Mémoires devront être écrits eu hançais ou en
latin; ds pourront être manuscrits ou imprimés, |)orler le nom de l'auleur
ou le renfermer dans un billet cacheté, la Commission se réservant le
droit d'ouvrir ce billet si elle juge nécessaire de se mettre en rapport avec
l'auteur pour la vérification des faits signalés dans son Mémoire.
[Foir aux Prix PROPOsris.)
PRIX BORDIN.
(Commissaires : MM. Coste, Milne Edwards, de Quatrefages, Robin, Emile
P)lanchar(l rapporteur.)
Rapport siii' le Concours de l'année 10G9.
L'Académie a proposé en 18G6, comme sujet de Concours pour le |irix
Bordiu à décerner en 1869 : la Monncjrapliie (/'iz/i nn'iinnl invertébré marin.
Dans la pensée de la Commission chargée de formulei- le programme, les
concurrents devaient s'attacher à faire une étude profonde de l'organisation
et des conditions biologiques d'un animal qui n'aurait pas encore été l'ob-
jet de recherclies bien ^'tendues. On désirait, en un mot, que la science
s'enrichisse d'une de ces monographies, qui, en apportant des détails d'une
extrême précision sur les appareils organiques et sur les diverses phases du
développement end)ryonuaire d'un type |)arliculier, donnent lieu à de
nouvelles comparaisons et facilitent ainsi de nouvelles généralisations.
Deux Mémoires ont été envoyés pour ce Concours. L'un, inscrit sous le
( i4i )
n° 1, a pour titre : Recherches zoolor/iqucs cl anntomiques sur des N^ëmatoides
non parasites, marins, et pour épigraphe : MaQi7v. Les vers de la classe des
Helminlhes et de l'ordre des Néin.itoides habitent dans les milieux les plus
différents. Il y a les espèces parasites, — ce sont pour la plupart des vers
intestinaux — et les espèces errantes, terrestres et aquatiques. I>es premières
ont été beaucoup étudiées dans leur organisation; mais les autres, n'ayant
pas excité aussi vivement l'intérêt des naturalistes, ont été plus négligées.
On a seulement quelques travaux sur les Anguillules et les Gordius, les
plus connus des Nématoïdes libres, et uu nombre fort restreint d'observa-
tions sur les espèces marines.
Le travail que nous avious'à apprécier a pour objet la détermination des
caractères zoologiques et l'étude comparative de l'organisation interne de
vingt-deux espèces méditerranéennes recueillies dans les parages de Mar-
seille. L'auteur, ayant à s'occuper d'animaux qui paraissent n'avoir encore
été enregistrés dans aucun Ouvrage descriptif, s'est appliqué d'abord à les
bien caractériser, et il a fait preuve d'un bon esprit scientifique, en tenant
à s'assurer que les signes distinctifs extérieurs coïncidaient avec des j)arti-
cularités anatomiques importantes. La seconde partie du Mémoire est con-
sacrée à l'exposition des résultats obtenus par la recherche anatomique.
Nous y trouvons une étude consciencieuse des téguments et des muscles,
d'intéressantes remarques relatives à la cavité générale du corps. Les ob-
servations sur l'appareil digestif qui conserve les traits caractéristiques de-
puis longtemps signalés, chez les vers Nématoïdes, nous font connaître
simplement quelques modifications suivant les espèces, mais l'auteur a vu
et décrit avec soin des glandes qui n'existent pas chez les Nématoïdes para-
sites. Le système nerveux, que personne encore n'avait étudié chez les Néma-
toïdes marins, a été l'objet d'investigations sérieuses, et nous pensons que
ses parties les plus importantes ont été assez exactement reconnues. Une
ré.serve plus grande nous est commandée à l'égard d'une détermination des
organes des sens, et surtout d'un appareil d'audition que l'auteur croit
avoir découvert. Les organes de la génération ont montré dans leur en-
semble une très-grande ressemblance avec ceux que l'on a décrits chez
d'autres représentants du même type zoologique, mais des détails précis
relatifs à diverses espèces ont été constatés. Le Mémoire sur des JScmalovhs
marins, se termine par des remarques stn- le développement de l'embryon,
qui ajoutent peu aux faits observés, chez des vers du même ordre, et par
des considérations physiologiques sur l'alimentation et sur la digestion.
On voit par cet exposé que le ti'.ivaii a été exécuté avec une véritable
( l42 )
intelligence du sujet, et qu'il contribue très-notablement à faire connaître
un type zoologiquc jusqu'ici assez négligé. L'étude de ce type, cependant,
n'est pas achevée. Connue conclusion, l'auteur formule ses appréciations
sur les affinités naturelles des Néniatoïdes marins. La détermination précise
de ces affinités offre, en effet, un intérêt réel, car elle doit être la consé-
quence d'études assez approfondies pour que tous les faits soient rendus
bien comi)arables. Il existe plusieurs groupes zoologiques composés d'es-
pèces présentant les mêmes caractères généraux et ayant des conditions
d'existence fort différentes, par exemple, les Planaires, qui sont des vers
aquatiques, et lesTrématodes, qui sont des vers intestinaux. L'auteur estime
qu'à la façon de ces deux formes, les Néniatoïdes marins et les Néniatoïdes
parasites constituent aussi deux groupes bien distincts du même ordre. La
question ainsi posée, il est facile de se convaincre que les comparaisons
n'ont pu être suffisamment rigoureuses encore pour que toutes les ressem-
blances et toutes les différences entre les représentants des deux groupes
se trouvent mises en lumière. On peut croire, d'ailleurs, que les conditions
biologiques, si dissemblables en appai-ence, coïncident moins ici que ne le
pense l'auteur avec d'importantes particularités d'organisation, car avec
les données actuelles encore fort incomplètes, il est vrai, il ne paraît plus
douteux que le même genre de vie de certains vers néniatoïdes ne change
durant les phases de leur existence.
Le Mémoire inscrit sous le n° 2 est la Monocjrapltie de deux esjièces
d'Ancées du golfe de Nciptes [Ancœiis paratlelui, J . forficula Costa et //. ille-
pidus ) .
T,es Ancées, petits Crustacés de l'ordre des Isopodes, furent, il y a quel-
ques années, de la part de M. Hesse, l'objet d'un travail jugé digne par
l'Acaelémie tle prendre place dans le Recueil des Savants élranqers. M. Hesse,
ayant beaucoup observé les espèces des côtes de l'Océan, s'était assuré que
les Pranizes, considérées précédemment comme représentant une hirme
générique particulière, étaient les larves ou les femelles des Ancées; le pre-
mier, il avait recoiuui les métamorphoses de ces animaux. Mais jusqu'ici,
seules à peu près, les formes extérieures de ces Crustacés avaient été étu-
diées. L'auteur du Mémoire soumis à notre examen s'est attaché à l'obser-
vation des parties internes et des changements qui s'opèrent dans l'orga-
nisme |iendant les phases successives du développement. Une |iremière
partie de sou travail est consacrée aux individus adultes. Les pièces tégu-
mentaires, les appendices, les muscles, l'appareil digestif, les organes de la
génération y sont étudiés d'une manière comparative dans les deux sexes
. ( i43 )
et d'une façon qui laisse peu à désirer, car des rapprochements avec les
autres Crustacés de l'ordre des Isopodes contribuent à donner la précision
aux faits observés. Le système nerveux a été examiné, dans ses parties prin-
cipales tout au moins; à l'égard de l'appareil de la circulation du sang, la
recherche a été moins heureuse: elle nous éclaire simplement sur la forme
et la position du cœur, et sur le trajet des grosses artères; elle nous laisse
encore dans l'ignorance relativement à la marche du sang veineux, ainsi
qu'au système de canaux qui apporte au cœur le sang artérialisé.
Après l'étude des Ancées adultes, l'auteur s'occupe de leurs larves de-
puis la sortie de l'œuf jusqu'à la dernière métamorphose, décrivant avec
un soin presque minutieux les divers étals par lesquels passe l'animal
quant à ses formes extérieures et à son organisation interne. Il compare ces
états transitoires à l'état permanent des adultes, et, dans cette comparaison,
il fait ressortir avec habileté la signification biologique des changements qui
s'effectuent. Sous leur forme de larves, les Ancées vivent parasites sur la
peau des Poissons dont ils sucent le sang; leurs pattes, leurs pièces buc-
cales sont appropriées à ce genre de vie ; leur tube digestif, qui doit recevoir
une grande qunntité de nourriture, est énorme. Adultes, les Ancées vivent
libres et semblent presque ne plus agir que pour les besoins de la repro-
duction; alors se modifient leurs appendices, la bouche cesse d'être apte à
la succion, il y a une certaine atrophie de l'appareil alimentaire. L'auteur
du Mémoire que nous examinons a bien suivi et bien compris ces modifi-
cations, qui sont eh rapport avec les variations dans les conditions d'exis-
tence.
Dans un dernier chapitre, il étudie la formation des œufs et leur déve-
loppement après la fécondation, mais cette partie du travail, à la vérité
très-difficile, laisse beaucoup de lacunes.
Nous devons ajouter que le texte est accompagné de dix planches d'une
exécution remarquable, qui permettent de ne conserver aucune incertitude
sur la valeur des observations.
En résumé, comme on a pu en juger par notre rapide analyse, les deux
Mémoires envoyés au Concours pour le prix Bordiu sont des œuvres fort
estimables, qui, l'une et l'autre, se recommandent par le nombre des faits
constatés pour la première fois. Ces travaux témoignent delà |>art de leurs
auteurs un talent d'observation incontestable, beaucoup de persévérance,
et une conscience absolue dans des recherclies exirémenient difficiles.
Malgré ces qualités que nous nous plaisons à signaler, et malgré la valeur
des résultats que nous avons été heureux de constater, aucun des deux
( '44 )
Mémoires cependant ne répond d'nne manière complète au vœu delà Com-
mission qui a proposé le sujet, à l'espérance qu'il avait fait naître. La pré-
férence à attribuer à l'un ou l'autre des deux Ouvrages demeure délicate.
Des deux côtés, il y a des résidlats notables obtenus, et également dus à
des efforts persévérants, bien que les grandes difficultés n'aient pas été sur-
montées. En présence de cette situation, la Commission n'éprouve aucun
embarras; elle pense que ]es Recherches mr les Némaloïdes marins, ei la
Monographie des Jncées du golfe de Naples, étant vraiment dignes d'une
marque d'estime et des encouragements de l'Académie, il convient de par-
tager le prix Bordin entre les deux concurrents.
Le Mémoire n" 1, portant pour épigraphe : Ma.ê:7ii, a pour auteur
M. A.-F. Mauiox, préi)arateur à la Faculté des Sciences de Marseille.
Le Mémoire n° 2 est de M. NicoL.is Wagxeii, professeur à l'Université
de Kasan.
PRIX JECRER.
(Counnissaires : MM. Reguault, Ralaid, Fremy, Wurtz, Cahours,
Clievreul rapporteur.)
La Section de Chimie, à l'unanimité, a décerné le prix Jecker à
M. Friedfx, pour ses Recherches sur des (omposés (ht ilhciuin correspondant
aux composés d'origine organique.
PRIX BARBIER.
(Commissaires : MM. Nélaton, Bussy, Brongniart, Cl. Bernard,
Cloquet rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 10G9.
Des sept Mémoires qui ont été envoyés au Concours du prix Barbier,
deux seulement ont fixé l'attention de la Connuission et lui ont paru dignes
de récompense.
Le premier est de M. Mirault, professeur honoraire à l'École de Médecine
d'Angers, chirurgien honoraire de l'Hôtel-Dieu, etc.; il a pour titre: De
Voc( hision chirurgicale temporaire îles j)aupicrcs dans le traitement de Cectrojnon
cicatriciel.
H y a vi<igt-sei)l ans, M. Mirault publiait sa première observation d'oc-
clusion palpébrale [Annales d'oculisticpie, avril i84a, t. XXV) appliquée
au traitement de l'ectropion double. Depuis cette é|)oqne, un grand nombre
( 145)
de chirurgiens ont employé cette méthode opératoire qiii est conçue de la
manière la phis rationnelle, et qui a donné les meilleurs résultais.
Lorsque les deux paupières sont renversées, il est facile de les ramener
dans le lieu qu'elles doivent occuper normalement, en pratiquant à peu de
distance de leur bord libre des incisions convenablement disposées; mais
bientôt les voiles palpébraux sont entraînés par la rétraction du tissu cica-
triciel qui se forme sur la surface mise à nu par la disseclion, et les ra-
mène à la po.sition vicieuse qu'ils occupaient avant l'opération. Les chirur-
giens savent qu'aucun bandage, aucun topique ne met à l'abri de cette
réiraclion cicatricielle.
C'est pour les éviter que M. Mirault eut la pensée de réunir par la suture
les deux bords avivés des paupières, après les avoir amenés au contact.
Après cette réunion, les deux paupières tendent à se renverser de nouveau,
mais si on les enchauie l'une à l'autre par la soiidure de leurs bords, la
rétraclilité cicatricielle agit en sens inverse pour chaque paupière et le ren-
versement consécutif devient impossible.
Il ne reste plus qu'à séparer les paupières en divisant la suture au bout
d'un certain temps.
L'expérience est venue confirmer l'exactitude de ces données théoriques,
et l'occlusion palpébrale temporaire a pris rang parmi les opérations les
plus utiles, pour la restauration des paupières. Mais dans certains cas, et
entre autres, dans l'ectropion uni/iolpébrnl, cette méthode n'est plus appli-
cable. Dans ce cas, la paupière saine non déplacée ne résiste pas à l'attrac-
tion exercée par la paupière renversée, le succès exige deux tractions en
sens inverse, ou au moins la soudure de la paupière renversée à un |Kjint
disposé de manière à résister à la traction.
C'est pour atteindre ce but que M. Mirault a modifié son opération, mo-
dification qui constitue le point principal du présent Mémoire.
Étant donné un ectropion iinipalpéliral, il taille un lambeau de forme
triangulaire, dont la base correspond au bord ciliaire de la paupière, il le
dissèque et le rend assez libre pour que l'on puisse facilement le rabattre
au devant de l'œil, où il faut le retenir.
Dans ce but il fallait le fixer à lui point qui ne se laissât pas entraîner
parla rétraction cicatricielle; or, ce point, il le trouve, non plusau bord,
mais à la base de la paupière non renversée; il forme, à l'aide d'une incision
en T, deux lambeaux triangulaires au-dessous desquels il insinue et fixe
le lambeau formé avec la paupière disséquée et renversée au devant de
l'œU.
C. R., i8;o, 2" Srmeslre. (T. LXXI, N" 2.) IÇ)
( i46 )
L'expérience est venue encore sanctionner les données de la théorie, et
l'auteur présente, à l'appui de sa conception chirurgicnie, une observation
qui ne laisse rien à désirer. Deux photographies prises l'une avant la res-
tauration palpébrale, l'autre après cette opération, mettent en toute évi-
dence les avantages de la méthode.
Le second Mémoire est de M. le D' B. Stilling, médecin à Cassel.
Jusqu'en iSSy, l'ovariotomie était presque toujours mortelle; M. Stilling
attribua ce résultat à deux causes : i° l'hémorrhagie secondaire dans la ca-
vité de l'abdomen, provenant du pédicule lié et abandonné dans le bassin;
2° la péritonite secondaire produite par l'épanchement de sang et de ma-
tières puriformes et sphacélées sorties du pédicule lié et transformé en gan-
grène derrière la ligature.
M. Stilling, frappé de ces deux causes de mort, résolut de les éviter et
de changer ainsi une opération si grave, et presque constamment mor-
telle, en une opération salutaire et relativement peu dangereuse.
Voici son procédé : au lieu de 1. lisser retomber le pédicule de l'ovaire,
après l'extirpation de la tumeur, dans la cavité de l'.djdomen et de l'aban-
donner dans la cavité péritonéale, il le fixe hors de cette cavité, dans l'angle
inférieur de la plaie du ventre, de manière à laisser voir la surface du pé-
dicule coupé et lié, tandis que tout le reste de la plaie est hermétiquement
fermé.
De cette manière, chaque hémorrhagie secondaire devient une hémor-
rhagie externe que l'on peut voir et tarir, et la sécrétion du pus provenant
du pédicule ne peut jamais s'épancher dans la cavité du péritoine.
En procédant ainsi, sur neuf opérées, M. Stilling en a sauvé six.
M. Stilling a publié son procédé opératoire en iS/ji, dans le journal alle-
mand de Hulscher, intitulé: ILumover' sclie Ànnalen, nouvelle série i8/|i, et
plus tard dans d'autres journaux.
Ce procédé a été adopté en Amérique, en Angleterre, en France et en
Allemagne, et par lui, des centaines de femmes ont été sauvées.
En j85o,, un médecin anglais a publié cette méthode comme un procédé
hii appartenant, et, à Londres, un autre médecin anglais a énoncé, dans ses
Ouvrages, que la nouvelle modHicalion de l'ovarintoniie datait de l'in-
vention de son compatriote; nous croyons devoir signaler ces erreurs.
En conséquence, après avoir discuté la valeur réelle de ces deux Ouvrages,
la Commission a proposé de pai tager le prix Barbier pai- moitié, entre
M. MiRAUi.T, d'Angers, et M. B. Stii.mivg,
( i47 )
PRIX GODARD.
(Commissaires : MM. Coste, RernarcI, Robin, Nélaloii,
Milne Edwards rap[)orfenr.)
Rapport sur le Concours de l'année 1869.
L'Académie, en acceptant les legs destinés à la fondation de prix spé-
ciaux, a toujours entendu interpréter de la manière la plus large et la plus
conforme aux intérêts des sciences, les dispositions testamentaires relatives
à ces institutions. Aussi, lorsqu'aucune clause formelle ne s'y opposait pas,
les Commissions chargées de décerner ces prix n'ont-elles jamais hésité
à introduire d'office dans les Concours les travaux qui leur paraissaient
dignes de récompense. La Commission dont j'ai l'honneur d'élre ici l'in-
terprète s'est conformée à ces précédents, etj ne trouvant parmi les pièces
soumises dueclement à son jugement aucun Mémoire assez important pour
obtenir le prix Godard, elle a porté son attention sur les antres publica-
tions qui, depuis quelques années, ont été faites, soit sur l'anatomie des
organes génito-urinaires, soit sur la physiologie ou la pathologie de ces
parties. Plusieurs travaux de cet ordre lui ont paru dignes de la récompense
qu'elle avait à décerner; m;iis elle a cru devoir accorder la préférence à une
série de recherches due à un des anatomisles les plus habiles et les plus
laborieux de l'époque actuelle : M. le Professeur Hyrtl, de Vienne en
Autriclie.
Ce savant occupe depuis longtemps un rang élevé dans l'estime des ana-
tomistes. Il a souvent adressé à l'Académie des observations d'un grand in-
térêt, et en 1861 le prix de Physiologie, fondé par M. de Montyon, lui fut
décerné pour un ensendile de travaux qui avaient principalement pour
objet l'Angiologie, et qui étaient de nature à jeter d'utiles lumières sur di-
verses questions de Physiologie générale. Les recherches auxquelles nous
accordons aujourd'hui une récompense particulière sont d'un autre ordre.
Elles ont pour objet le mode d'organisation de l'appareil génito-urinaire
chez les Poissons, et elles sont essentiellement du domaine de l'Anatouiie
comparée.
M. Hyrtl a publié successivement plusieurs Mémoires d'une grande im-
portance sur ce sujet. Dans un premier travail, il a traité de la morpho-
logie de l'appareil urinaire des Poissons. Il a étudié ensuite, d'une manière
très-approfondie, la conformation des glandes rénales, les connexions de
leurs canaux excréteurs avec la vessie urinaire et les rapports de celle-ci avec
19..
( i48 )
la fosse cloacale chez un très-grand nombre de ces animaux ; il s'est occupé
ensuite des organes génitaux de la Chimère et de la structure de l'appareil
génito-urinaire des Ganoïdes. Le nombre de faits nouveaux que !\1. Hyitl a
introduits ainsi dans la science est très-grand ; toutes ses observations sont
d'une exactitude remarquable, et nous n'hésitons ])as à dire que depuis
vingt ans il a plus contribué que tout autre aux progrès de cette partie de
l'histoire anatomique des Poissons.
Ces travaux rentrent directement dans le programme du prix institué
récemment par feu M. Godard, poiu- encourager l'étude anatomique et
physiologique des organes génito-urinaires, et leur importance nous a
paru considérable. Par conséquent, la Commission a décidé à l'unanimité
que le prix Godard^ pom* l'année 1869, sera décerné à M. Hyktl, pour
ses recherches sur les organes génito-urinaires des Poissons.
PRIX SAVIGNY.
(Commissaires : MM. de Qnatrefages, Blanchard, Coste, Ch. Robin,
Milne Edwards rapporleur.)
Rapport sur le Concours de l'année 18C0.
La Commission chargée de décerner le prix Savigny pour 1869 n'a reçu
aucun travail; elle propose de le réserver pour le Concours de l'année 1870.
Cette proposition est acceptée par l'Académie.
PRIX DESMAZIÈRES.
(Commissiiires : MM. Brongniart, Duchartre, Decaisne, Gay,
Tulasne rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 1069.
Quatre Ouvrages ou Mémoires ont été adressés;» l'Académie pour con-
courir cette année au prix Desmazières.
L Le premier est lui volume in-8" de XX et i i4o pages, divisé en trois
Parties, accompagné de uomlireuscs figures dans le texte et publié à
Leipzig, de 1864 à 18G8, sous le titre de Flora europœn Alcjamm aquœ
didcis et submarinœ; il a [)our auteur M. le D' Louis Rabetihorst, de Dresde
bien connu en Allemagne pour ses nombreuses pid)lications sur les diverses
branches de la cryptoganue. Cet Ouvrage contient la description abrégée
de toutes les Algues que son titre désigne, il les présente méthodiquement
( i49 )
classées, et ne pourra manquer irètre fort utile aux botanistes (jiii désireront
être initiés à la déterunnalion spécifique de ces plantes et à la connaissance
des caractères principaux de leur organisation.
IT. Deux Mémoires d'une beaucoup ifioindre étendue sont dus à M. le
D'' Edouard Strasburger, actuellement professeur de botanique à l'Univer-
sité d'Iéna (ci-devant à Varsovie ) ; ils sont relatifs aux organes sexuels et à
la fécondation dans les Fougères et dans le Marclinitia polymorplia, petite
plante de la famille des Hépatiques.
Bien qu'un assez grand nombre de botanistes se soient successivement
appliqués a vérifier et à compléter les curieuses découvertes de M. Lcszczyc-
Sumiuski, M. Strasburger a su donner de l'intérêt à l'exposé de ses re-
cherches par la précision des détails, la correction et le nombre des obser-
vations, de façon qu'il semble aujourd'hui difficile d'ajouter quelque no-
tion importante à la connaissance que nous avons du phénomène de la
fécondation dans les Fougères. La circonstance la plus délicate sur laquelle
insiste particulièrement M. Strasburger consiste dans l'introduction du
spermatozoïde à l'intérieur de l'archégone. Suivant cet habile observateur,
une humeur visqueuse excrétée par l'organe femelle aiderait puissamment
à cette introduction, et le spermatozoïde descendu jusque sur la gono-
sphère s'y appliquerait en un point indiqué d'avance par une tache spéciale.
Le spermatozoïde ne se plongerait dans la gonosphère que sur cette tache
copulative ; un seid suffirait à la rendre fertile, à troubler sa limpidité ini-
tiale et à provoquer sa division en cellules.
La vésicule souvent traînée par la spiricnle fécondatrice n'est rien autre
chose, aux yeux de M. Strasburger, que la vacuole centrale de la cellule-
mère du .spermatozoïde, et celui-ci se débarrasse toujours de cet ap|)en-
dice avant de pénétrer dans l'archégone, bien loin de l'entraîner avec lui,
comme il devrait le faire si celte vésicule contenait réellement les matières
vraiment fécoîidantes.
En ce qui touche le Marchaulia pol/morplia, il n'a été pour M. Strasbur-
ger, après ses recherches sur les Fougères, que l'objet d'unie étude compa-
rative; aussi l'auteur n'a-t-il donné son attention qu'à l'examen des or-
ganes sexuels et de leurs rapjiorls. Ses observations sur le développement
de l'anthéridie différent sur plusieurs points de celles publiées par M. Tlof-
meisler, et s'accordent davantage avec l'exposition faite par M. Kny de l'é-
volution des Riccin. M. Strasburger décrit avec le plus grand détail la
formation initiale de cette anthéridie et son partage successif et régulier en
( i5o )
une infinité de cellules quadratiques, dont chacune dorme naissance à un
spermatozoïde plus petit que celui des Fougères. Le mode de développe-
ment de ce filament fécondateur est presque le même dans les Fougères,
les Hépatiques et les Mousses, tandis que l'évolution de lanlhéridie offre
plus de dissemblances. Quant à l'organe femelle ou archégone, son histoire
]iour toutes ces plantf s est très-uiiiforme. M. Slrasburger signale, comme
exemple, la grande similitude de l'archégone du Marclianlia avec celui des
Fougères : le même mucilage rejeté par le col archégonial, le même rôle
conducteur exercé par ce mucus sur les spermatozoïdes, la gonosphère éga-
lement marquée d'une lâche copulative, etc. (i).
ITI. Enfin, sous le n" 3, se trouve inscrit au Secrétariat de l'Académie un
Mémoire sur les Bactéries, publié par M. le D"" Hermann Hoffmann, profes-
seur de Botanique à l'Université de Giessen, Mémoire qui a paru dans la
Botanische Zeiluiuj de Berlin (l. XXVII, nn. i5-ao; 1869), et dont les
Annales des Sciences nnliirelles de Paris ont donné récemment une traduc-
tion.
Les Bactéries sont du nombre des corps organisés les plus simples et les
plus ténus que nous connaissions, cependant leur rôle dans l'économie de
la nature est loin d'être insignifiant; leur histoire se rattache, en effet,
d'une manière intime à celle de la fermentation et de la putréfaction, de
ces phénomènes qui, comme l'a dit nn chimisie éminent, conlribucnl plus
que tous les autres à restituer à l'atmosphère et au règne minéral la matière
organique que la vie a cessé d'animer, et conséquemment à rendre possible
la perpétuité de la vie à la surface du globe (2). Celte fonction des Bacté-
ries leur étant évidemment commune avec les Champignons, on peut en ti-
rer un motif très-plausible de les retenir parmi ces végétaux, où leur place
est d'ailleurs aussi facilement justifiée que dans aucun autre groupe d'êtres
organisés.
Bien que M. Hoffmaïui n'ait pas négligé le côté biologique de l'histoire
des Bactéries, il n'a point eu cepentlant l'intention de les ttiidier spéciale-
ment, comme M. Pasteur, au point de vue de leur action chimique siu" les
(1) Les deux Momoiics de M. Ed. Strashurj^er ont été publiés ensemble dans les Annales
de Botanique scientificjue de M. Pringsbeim, t. VII (1869); le premier avait déjà paru dans
les Mcmnires de l'Àradéniie dis Sciences de Saint-Pétersbourg ( ■j" série, l. XII, n" 3;
1868), et les Annales des Sciences naturelles de Paris en ont donné une tradnrlion (S' série,
t. IX, [1868], p. 227-247, PL Xlllet XIV).
(2) Voyez les Comptes rendus, t. LVI (i863}, p. 734 et suiv.
( i5i )
milieux liquides ou solides dans lesquels ils se développent; de là sont ré-
sultées sans doute les divergences d'appréciation que l'on peut signaler en
comparant les opinions de M. Hoffmann avec celles de notre illustre con-
frère. Celui-ci, se réservant toutefois do discuter au besoin la valeur, plus
ou moins réelle, des distinctions spécifiques admises par M. Ehrenberg, re-
connaît que les Vibrions ou Bactéries n'ont pas tous, à beaucoup près, le
même caractère physiologique, et par suite le même rôle chimique; que les
uns, comme le Bacteriiim Terino et le Monas Crepmculum, vivent en absor-
bant le gaz oxygène dissous dans les liqueurs putrescibles, comme les I\!u-
cédinées consomment l'oxygène de l'air atmosphérique pour y substituer
de l'acide carbonique, tandis que les Vibrions proprement dits vivent
sans oxygène libre et aux dépens des matières azotées qu'ils transforment
en produits plus simples, que comburent ensuite les Bactéries et les Mu-
cor (i). S'il est vrai, d'ailleurs, que les animalcules -ferments, comme
M. Pasteur les appelle, ne sontguère sûrement distingués et reconnusqu'aux
effets chimiques qu'ils produisent, nous sommes moins surpris que M. Hoff-
mann ne se soit pas mis plus en peine de préciser des distinctions spéci-
fiques. Bien qu'il n'ait pas absolument décliné celte tâche, il s'est borné,
pour la commodité de ses démonstrations, à faire des Bactéries trois caté-
gories, caractérisées surtout par les dimensions relatives de ces corpuscules.
La théorie de la putréfaction et de certaines fermentations, telle que
M. Pasteur l'a exposée, semblerait contredite par M. Hoffmann, s'if était
vrai, comme ce dernier le voudrait croire, que toutes les Bactéries usent
semblablement du gaz oxygène. Faut-il mieux su|jposer que les expéri-
mentations du professeur de Giessen n'ont jamais eu pour objet que des
Bactéries, connue le Bacterinm Termo et le Monas Crepiiscuhim, et non des
Vibrions- ferments proprement dits? Peut-être aussi, comme l'a soupçonné
M. Pasteur, que les mêmes Vibrions auraient vis-à-vis de l'oxygène, deux
modes d'existence différents (^voyez les Comptes rendus, t. LVI, p. 420
et 1 192, aux notes).
On ne lit point sans étonnement, dans le Mémoire de M. Hoffmann,
qu'il est parvenu à cultiver artificieliemenl les Bactéries et même qu'il lésa
vues croître dans l'air, sur un corps modérément humide. Dans cette con
dition insolite, elles arrivent pourtant à former des chapelets assez allongés
et qui se dressent les uns contre les autres à la manière des soies du ve-
lours.
(i) Foyez le volume précité des Coinptms rendus, |). i 189-1 194.
( i52 )
Une grandf question que notre auteur n'a point voulu éviter, car elle
s'imposait nalurellouient à lui, c'est celle de l'origuie des Bactéries, de ces
corpuscules en quelque sorte ubiquistes et que les partisans de la (jénérotion
sponlanée invoquent si volontiers comme témoins des forces génératrices
qu'ils prétendent inhérentes à la matière. M. Hoffnuitm n'hésite |)as à se
décl.u'er ouvertement contre cette doctrine : ses observations, dit-il, sont
à tous égards défavorables à l'hvpothèse de la qcnératio7i iponlfinée; les Bac-
téries, d'ailleurs, onf des caractères morphologiques trop précis, pour qu'on
soit autorisé à n'y voir que des formations rudimentaires, inconsistantes,
d'où, le temps aidant, des influences inconnues pourraient faire sortir des
êtres plus complexes : les Bactéries sont des êtres achevés, qui ont, à l'égal
des plus nobles créatiues, des ancêtres et une postérité.
Après cette analyse rapide des Ouvrages soumis à l'examen de- votre Com-
mission, il ne reste plus à son rappoiteur qu'à faire connaître la décision à
laquelle elle s'est arrêtée.
Votre Commission partage cette année le prix Desmazières, d'une ma-
nière égale, entre MM. Hoffmaw et Rabexhoiist. L'Académie, en ratifiant
ce suffrage, honorera deux auteurs que recommande un grand nombre de
publications estimables, relatives tant à la mycologie qu'a l'histoire des Al-
gues. M. Iloffmann, en effet, a bien mérité de la science, non-seulement
]iar ses nombreuses recherches per-sonnelles, mais encore par des revues
|)éri()iliques de la littérature mycoiogique, grâce auxquelles les botanistes
adonnés à l'étude des Champigno!is sont tenus au courant de toutes les
publications qui intéressent leur science favorite. D'autre part, indépen-
damment du livre dont nous avons pailé plus haut, on doit à M. Raben-
liorst, entre autres œuvres, une Flore complète de la Lusace, une Flore
crypiogamique d'Allemagne, des travaux divers sur les Diatomées et des
E.xsiicatn très-considérables d'Algues et de Champignons, qui ont répandu
parmi les botanistes de toutes les nations de très-utiles matériaux d'étude.
Votre Comuiission.se |)lait, en oiilre, à accorder une mention honorable
aux diux Mémoires de M. STKASBiiRtiEit, dans lesquels elle croit recon-
naître loeuvre d'un observaleur habile et exact.
I-cs piopositions de la Comniissitui sont approuvées par l'Académie.
( I-« )
PRIX THORE.
Commissaires : MM. Milne Edwards, Brongniart, Blanchard, Decaisne,
Tiilasne rapporteur.)
Rapport sur le Concours de l'année 1069.
En l'absence de livres ou Mémoires envoyés à l'Académie avec l'intention
exprimée de concourir au prix dont il s'agit, la Commission a distingué
parmi les publications françaises récentes, concernant les végétaux cryp-
togames, le livre de M. Henri Bonnet intitulé : Ln Truffe; étude sur les
truffes comestibles nu point de vue botanique, entomologique, forestier et corn-
mercinl. (in-8°; Paris, Adr. Delahaye, i86g.)
M. Henri Bonnet, actuellement Vice-Président du Comice agricole et
membre de la Chambre consultative d'Agriculture de l'arrondissement
d'Apt (Vaucluse), a continué sur les Truffes des études et des recherches
auxquelles M. Etienne Bonnet, son père, l'avait de bonne heui-e initié, et
son livre est comme le fruit de deux existences consacrées aux mêmes re-
cherches. Personne n'ignore que, poin- l'abondance et la qualité de ses
Truffes, le comtat Venaissin ne le cède en rien au Périgord tant vanté;
mais ce que l'on sait peut-être moins, c'est que ces précieux champignons,
demeurés si longtemps des produits spontanés du sol et rebelles à toute
culture, n'ont pu cependant mépriser absolument les soins de l'intelligent
agriculteur venaissin. La culture des Truffes serait une industrie si pro-
ductive qu'il n'est pas surprenant qu'elle ait été maintes fois tentée; mais
jusqu'ici le succès n'a répondu qu'aux efforts des cultivateurs qui se sont
bornés à reproduire le plus exactement possible toutes les conditions offertes
par les truffières naturelles, c'est-à-dire à créer des bois clair-semés sur les
sols argilo-calcaires aimés des truffes. Un double résultat agricole a été
ainsi atteint, ce qui a fait dire à un homme très-compétent que la culture
des Truffes aura probablement plus d'efficacité pour le reboisement des
montagnes du midi de la France que la crainte des inondations et tous les
encouragements de l'administration des Forêts.
Le livre de M. Bonnet n'a pas seulement pour objet de faire connaître
les pratiques des agriculteurs qui ont, comme lui et autour de lui, créé des
truffières artificielles de plus ou moins d'étendue, c'est encore un livre tie
doctrine, écrit tant pour propager, parmi les agriculteurs provençaux, la
science acquise par les recherches des botanistes contemporains, que pour
combattre, comme il convient, les préjugés, les erreius et les opinions plus
C. R., 1870, 2" Semeatrt. (ï. LXXI, N» 2.) 20
( i54)
ou moins hasardées, mises itnpnulemmeiU en circulation depuis quelques
années à propos de tubériculture.
La plus spécieuse de ces opinions est celle qui a donné naissance à la
théorie des chênes tntjfiers, d'après laquelle certains clièues auraient, dans
une mesure plus grande que d'autres, la faculté de produire des Truffes
sous leur ombre, et pourraient en outre transmettre ce privilège à leur
descendance. Malheureusement il n'y a là qu'une double hypothèse qu'au-
cune expérience sérieuse n'a encore justifiée. Bien que les Truffes aient
coutume de vivre dans le voisinage des arbres, de même que les Bolets, les
Oronges et une multitude d'autres champignons, on en rencontre parfois
très-loin de leur ombre et tout à fait, ce sendjle, en dehors de leui' in-
fluence; d'ailleurs cet habituel voisinage ne suppose pas nécessairement
un parasitisme réel. En fait, on n'a jamais pu jusqu'ici surprendre la
moindre adhérence parasite entre la Truffe ou son mycélium et les racines
vivantes des arbres voisins; d'où suit que, selon toutes les vraisemblances,
ce champignon n'emprunte les éléments de sa nutrition qu'à des matières
privées de vie, comme le font les champignons épigés. Or, s'il en est ainsi,
le chêne truffier n'exercerait sans doute son action propice que par les dé-
tritus de ses feuilles et de ses ramilles, ou par les exsudations ou excré-
tions problématiques de ses radicelles. S'il n'est pas absolument impossible
que l'influence obscure ainsi exercée soit plus favorable à la Truffe de la
part de tel chêne que de tel autre de la même espèce, encore faudrait-il en
administrer une preuve satisfaisante. Cependant il ne paraît même pas que
celte preuve ait été essayée. Quand, dans une chênaie fertile en truffes, on
ne trouve ces champignons qu'autour de certains arbres, on n'en saurait
conclure que ces arbres privilégiés possèdent vis-à-vis de la Truffe des qua-
lités refusées à leurs congénères. La nature, l'état et l'exposition du sol ne
sont certainement pas choses indifférentes; et si on les suppose identiques
par toute la chênaie, ou peut répondre que les agents naturels chargés de
répandre les semences de la Truffe ne les ont pas encore transportées là
où cette plante souterraine fait défaut. De quel végétal pourraif-on dire
avec vérité qu'il croît nécessairement partout où il peut vivre? Aucun, évi-
demment, n'est distribué sur la teire avec celte profusion qui ne laisserait
forcément subsister qu'un nombre extrêniement restreint de types végétaux.
Lors donc que, dans une truffière naturelle ou artificielle, des arbres sem-
blables et voisins ne nourrissent pas tous également des Tiuffes au tour d'eux,
il est jusqu'à présent impossible d'affirmer que les individus tubérifèies
ont intrinsèquement une propriété que les autres ne possèdent pas.
( -55 )
En ce qui touche la transmissibilité supposée de cette prétendue pro-
priété individuelle, on voudrait savoir qu'elle a été l'objet de quelques ex-
périences comparatives; existe-t-il une truffière où l'on puisse affirmer que
les arbres tubérifères proviennent tous de glands cueillis sur des chênes
notoirement truffiers, et que les arbres stériles en Truffes sont lotis nés
d'arbres également stériles? ou bien, si rien d'aussi absolu ne se rencontre,
peut-on du moins constater sûrement quelque part une fertilité hydno-
phore manifestement plus grande chez les individus issus de parents déjà
très-fertiles? Ce sont là des desiderata fort légitimes de la part des botanistes
ou des tubériculteurs qui voudraient asseoir leur jugement sur autre chose
que de pures suppositions plus ou moins désintéressées.
Dans cet état de la question, M. Henri Bonnet, fort de son expérience
personnelle, se déclare nettement contre la théorie des cliéiies truffiers,
aussi bien que contre celle de la mouche truffigène, qu'il faut, à plus juste
titre encore que la première, reléguer parmi les fables. La Truffe n'est
point le résultat de la piqûre d'une racine de chêne par un insecte quel-
conque. Sa structure est trop bien celle d'une plante sKJf/enen's et non celle
d'une galle; d'ailleurs, comme nous l'avons déjà dit, elle n'a pas la moindre
adhérence avec les racines des arbres qui ombragent sa retraite, et aucun
des nombreux insectes qui vivent à ses dépens n'appartient au groupe de
ceux qui, comme les Cynipset les Cécidomyes, produisent habituellement
les galles.
Votre Commission, ayant égard à l'intérêt qui s'attache au livre dont
nous i)arlons, tant à raison du sujet qu'il traite qu'à cause de l'esprit de
jugement et de saine critique dont il porte l'empreinte, décerne à M. Hemu
BoNXET le prix TJiore, pour cette année.
20..
( i56 )
PRIX PROPOSÉS
Pour les années 1870, 1871, 1872 et 1873.
SCIENCES MATHÉMATIQUES.
PRIX A DECERNER EN 1870.
GRAND PRIX DES SCIENCES aiATHEMATIQUES.
QUESTION PROPOSÉE POUR IS.'ÎS, REMPLACÉE PAR UNE AUTRE POUR 18GI, REMISE A 1865,
PUIS A 1868 ET ENFIN A 1807 ; NOUVELLE QUESTION PROPOSÉE POUR 1870 : REPRODUC-
TION DU PROGRAMME DE l'aNNÉE PRECEDENTE.
La question mise au Concours pour 1867 n'ayant été le sujet que d'un
seul Mémoire qui n'a pas été jugé digne du prix, la Commission a proposé
de retirercetle question du Concours et de la remplacer par la suivante :
« Rechercher cxpérinienlalemenl les modifications qu éjJi ouue la lumière clans
1) son mode de jiropai/alion et ses propriétés, par suite du mouvement de In
» source lumineuse el du mouvement de l'observateur. »
L'Académie a adopté la proposition de la Commission.
Le prix consiste en une médaille d'or de la valeur de trois mille fiancs.
Les Mémoires ont dû être remis au Secrétariat de l'Institut avant le
i" juin 1870.
PRIX D'ASTRONOMIE,
FONDATION LALANDE.
I^a médaille fondée par M. de Lalande, pour être accordée annuellement à
la per.-oniie qui, en France ou ailleurs (les Membres de l'Instilut exceptés),
aura fait l'observaliou la plus intéressante, le Mémoire ou le travail le plus
utile au progrés de l'Astronomie, sera décernée dans la prochaine séance
publique de 1870.
( i57 )
Ce prix consistera en une médaille d'or de la valeur de cinq cent quarante-
deux francs.
Le terme de ce Concours est fixé au i^'' juin di^ chaque année.
PRIX DE MÉCANIQUE,
FONDÉ PAR ai. DE MONTYON.
M. de Montj'on a offert une rente sur l'État, pour la fondation d'un
prix annuel en faveiu- de celui cpii, au jugement de l'Académie des Sciences,
s'en sera rendu le plus digne en inventant ou en perfectionnant des instru-
ments utiles au progrès de l'agriculture, des arts mécaniques ou des
sciences.
Le prix consistera en une médaille d'or de la valeur de quatre cent v'uvjl-
septfrancs.
Le terme du Concours esl fixé au i'"' juin de chaque année.
PRIX DE STATISTIQUE,
FONDÉ PAR M. DE MONTYON.
Parmi les Ouvrages qui auront pour objet une ou jilusieurs questions
relatives à la Slalislique de la France, celui qui, au jugement de l'Académie,
contiendra les recherches les plus utiles sera couronné dans la prochaine
séance publique de 1870. On considère comme admis à ce Concours les
Mémoires envoyés en manusciit, et ceux qui, ayant été im|)rimés et [jubliés,
arrivent à la connaissance de l'Académie; sont seuls exceptés les Ouvrages
des Membres résidants.
Le prix consistera en une médaille d'or de la valeur de quatre cent cin-
quante-trois francs.
Le terme du Concours est fixé au i*^'' juin de chaque année.
PRIX FONDÉ PAR M"' la Marquise DE LAPLACE.
Une Ordonnance royale a autorisé l'Académie des Sciences à accepter la
donation, qui lui a été faite par Madame la Marquise de Lnplace, d'tnie
renie |30ur la fondation à perpétuité d'un pi'ix consistant dans la collection
complète des Ouvrages de La|îlace.
Ce prix sera décerné, chaque année, au premier élève sortant de l'École
Polytechnique.
( '58)
PRIX EXTRAORDINAIRE DE SIX MILLE FRANCS
SUR LAPPLICATIOX DE LA VAPEUR A LA MARIXE MILITAIRE.
QUESTION PROPOSÉE POUR 1837, REMISE A I 8S9, PROROGÉE A 1862, PUIS A ICC4,
A iOGC, A 1868 ET ENFIN A 1870.
Ce prix n'ayant pas été décerné en 1868, le Concours a été prorogé jus-
qu'à l'année 1870.
Les Mémoires, plans et devis ont dû être adressés an Secrétariat de
l'Institut avant le i^juin 1870.
PRIX DU LEGS DALMONT.
Par son testament en dale du 5 novembre i863, feu M. Dalmout a mis
à la charge de ses légataires universels de payer, tous les trois ans, à l'Aca-
démie des Sciences, une somme de trois mille francs, pour être remise à celui
de MM. les Ingénieurs des Ponts et Chaussées en activité de service qui lui
aura présenté, à son choix, le meilleur travail ressortissant à l'une des
Sections de cette Académie.
Ce prix triennal de trois mille francs sera décerné pendant la période de
trente années, afin d'épuiser les /rc/ite mille francs légués à l'Académie et
d'exciter MM. les Ingénieurs à suivre l'exemple de leurs savants devanciers,
Fresuel, Navier, Coriolis, Cauchy, de Prony et Girard, et comme eux ob-
tenir le fauteuil académique.
Un Décret impérial en date du 6 mai i865 a autorisé l'Académie à accep-
ter ce legs.
En conséquence, l'Académie annonce qu'elle décernera |)our la seconde
fois le prix fondé par feu M. Dalmout, dans sa séance publique de 1870.
PRIX PLUMEY.
Par un testament en date du 10 juillet 1859, feu M. J.-B. l'iumey a lé-
gué à l'Académie des Sciences vingt-cinq actions de la Ranque de France
■I pour les dividendes être employés chaque année, s'il y a lieu, en nu prix
à l'auteur du periectioiiiiem(uit des machines à vapeur ou de toute autre
invention qui aura le plus contribué au progrès de la navigation à vapeur. »
En conséquence, l'Académie annonce qu'elle décernera, dans sa séance
. ( '59 )
publique de 1870, une médaille de la valeur de deux mille cinq cents francs
au travail le plus important qui lui sera soumis sur ces matières.
Les Mémoires ont dû être déposés au Secrétariat de l'Institut avant le
i" juin 1870.
PRIX PONCELET.
Par Décret en date du 22 août 1868, l'Académie a été autorisée à
accepter la donation qui lui a été faite au nom du Général Poncelet par
M^^veuvePoncelet, pour la fondation d'un prix annuel destiné à récompen-
ser l'Ouvrage le plus utile aux progrès des Sciences inathéuiatiques pures
ou appliquées, publié dans le cours des dix années qui auront précédé le
jugement de l'Académie.
Le Général Poncelet, plein d'affection pour ses Confrères et de dévoue-
ment aux progrès de la science, désirait que son nom fût associé d'une
manière durable aux travaux de l'Académie et aux encouragements par les-
quels elle excite l'émidation des savants. M"'' veuve Poncelet, en fondant ce
prix, s'est rendue l'interprète fidèle des sentiments et des volontés de l'il-
lustre Géomètre.
Le prix consistera en une médaille d'or de la valeur de deux mille francs.
Les Mémoires ont dû être déposés au Secrétariat de l'Institut avant le
i*''juin 1870.
PRIX A DÉCERNER EN 1871.
GRAND PRIX DE MATHEMATIQUES.
QUESTION SUBSTITUÉE A CELLE PROPOSÉE POUR 1867 : REPRODUCTION DU PROGRAMME
DE l'année précédente.
(Commissaires : MM. Serret, Liouville, Chasles, Hermite,
Ossian Bonnet rapporteur.)
La question proposée pour 1867 était énoncée en ces termes :
« Apporter un progrès notable dans la théorie des surfaces algébriques. »
Un seul Mémoire avait été envoyé au Concours, et la Commission a jugé
qu'il n'y avait pas lieu à décerner le prix. Sur sa |)roposilion, l'Académie
a retiré la question du Concours et l'a remplacée par la suivante :
( i6o )
« Faire réliide des équnlions relatives à la délerminnlion des modules sin-
» guliers,poiir lesquels In formule de transformation dans la théorie des fonctions
» elliptiques conduit à la inullijilicalion complexe. »
Le prix, qui consistera en une nuHlailIe d'or de trois mille francs., sera
décerné ilans la séance publique de l'année i8~i. Les pièces de Concours
devront èlre déposées au Secrétariat de l'Institul avant le i'"'' juin de la
même année.
PRIX FOURNEYRON.
QRESTION PROPOSÉE POCR l' ANNÉE 187t.
(Commissaires : MM. Morin, Phillips, Piobert, Dupiii,
Combes rapporteur.)
L'Académie des Sciences a été autorisée, par Décret du 6 novembre i 86-7,
à accepter le legs qui lui n élé fait par M. Benoît Fourneyron d'une somme
àe cinq cents francs de rente sur TElat fiançais, pour la fondation d'un jirix
de Mécanique appliquée à décerne'; tous les deux ans, le fondateur laissant à
l'Académie le soin il'en rédiger le programme.
En conséquence, l'Académie décernera, pour la première fois, s'il y a
lien, dans la séance [lublique de l'année 1871, un jirix de la valeiu- de
mille francs à celui qui, depuis le 1"'' janvier 18G8, aura apporté, au jugement
de l'Académie, le perfectionnement le plus important à la construction on
à la théorie d'iuie ou plusieurs machines hydraulitiucs, motrices ou autres.
La valeur des yierfectionnements et la justesse des vues théoriques devront
être confirmées par des exj)ériences.
Les Mémoires, écrits en français ou en latin, devront être déposés au
Secrétariat de l'Institut avant le i''''juin 1871.
PRIX A DECERNER EN 1872.
GRAND PRIX DES SCIENCES MATHEMATIQUES.
(Commissaires : MM. Liouville, Delaunay, Chasies, Serret,
Fizean rapporteur.)
L'Acaflémie propose pour yS-j-?. la question suivante :
« Etudier C élasticité des corps cyislidlis('sau double point de vue expérimental
» cl théorique. »
( '6, )
Le prix consistera en une niéclaille fie la valeur de trois mille francs.
Les Mémoires devront être parvenus au Secrétariat de l'Institut avant le
1*' juin 1872.
GRAND PRIX DE RIATHÉMATIQUES.
QUESTION PROPOSÉE POUR 18C9, MAINTENUE AU CONCOURS POUR 1872 : REPRODUCTION
DU PRÉCÉDENT PROGRAMME.
La question proposée est la suivante:
« Perfectionner en quelcjue ])oint essentiel la théorie du mouvement de trois
» corps qui s'attirent mutuellement, suivant la loi de ta nature, soit en ajoutant
» quelque intégrale nouvelle à celles déjà connues, soit en réduisant d'une
» manière quelconque les difficultés que présente la solution complète du pro-
» blême. »
Le prix consistera en une médaille de la valeur de trois mille francs. Les
Mémoires devront être parvenus au Secrétariat avant le i" juin 1872,
PRIX BORDIN.
(Commissaires : MM. Serret, Liouville, Becquerel, Combes,
Delaunay rapporteur.)
Le prix sera décerné au travail, analytique ou expérimental, qui aura le
plus contribué à établir la théorie des raies du spectre.
Le prix consistera en une médaille d'or de la valeur de trois mille francs.
Les Ouvrages (imprimés ou manuscrits) adressés pour le Concours de-
vront être déposés, francs de port, au Secrétariat de l'Institut avant le
1" juin 1872, terme de rigueur. Les Ouvrages écrits en langue étrangère
devront être accompagnés d'une traduction en français ou en latin.
PRIX DAMOISEAU.
QUESTION PROPOSÉE EN 1866 POUR 18GD , REMISE DE NOUVEAU AU CONCOURS POUR 1872 :
REPRODUCTION DU PROGRAMME DES DEUX ANNÉES PRÉCÉDENTES.
Un Décret impérial a autorisé l'Académie des Sciences à accepter la dona-
tion, qui lui a été faite par Madame la Baronne de Damoiseau, d'une somme
de vingt mille francs, « dont le revenu est destiné à former le montant d'iui
» prix annuel qui recevra la dénomination de prix Damoiseau.
C. R., 1890, 2» Semestre. (T. LXXI, N" 2.) 21
( >6a )
» Ce prix, quand l'Académie le jugera utile au progrès de la science,
» pourra être converti en prix triennal sur une question proposée. »
La question proposée pour l'année 1869 était la suivante :
» Revoir la théorie des sntelliles de Jupiter; discuter les observations et en dé-
» diiire les constantes qu'elle renferme, et particulièrement celle qui fournit une
0 détermination directe de la vitesse de la lumière; enfin, construire des Tables
» particulières pour chaque satellite. »
Aucune pièce sur cette question n'étant parvenue au Secrétariat, l'Acadé-
mie, sur la proposition de la Commission, décide, d'une part, que la ques-
tion sera maintenue au Concours et, d'antre part, que le prix qui sera
décerné, s'il y a lieu, en 1872, sera porté à la valeur de cinq mille francs.
En conséquence, l'Académie décernera, dans la séance publique de
l'année 1872, ce prix de cinq mille francs au travail qui répondra le mieux
au programme ci-dessus.
Les Mémoires seront reçus jusqu'au i^'"jnin 1872, terme de rigueur.
PRIX TRÉMONT.
Feu M. le Baron de Trémont, par son testament en date du 5 mai 1847,
a légué à l'Académie des Sciences une somme annuelle de onze cents francs
pour aider dans ses travaux tout savant, ingénieur, artiste ou mécanicien,
auquel une assistance sera nécessaire « pour atteindre un but utile et glo-
rieux pour la France. »
Un Décret en date du 8 septembre i856 a autorisé l'Académie à accepter
cette fondation.
En conséquence, l'Académie annonce que, dans sa séance publique
de 187a (i), elle accordera la somme provenant du legs Trémont, à titre
d'encouragement, à tout « savant, ingénieur, artiste ou mécanicien » (pii,
se trouvant dans les conditions indiquées, aura présenté, dans le courant
de l'année, lUie découverte ou un perfectionnement paraissant répondre le
mieux aux intentions du fondateur.
(1) Le prix décerné en 186g, l'a été comme la fois précédente, avec jouissance pour trois
années.
( i63 )
PRIX A DÉCERNER EN 1873.
GRAND PRIX DES SCIENCES MATHÉMATIQUES.
QUESTION PROPOSÉE EN 1304 POUR 186G, REMISE AU CONCOURS APRÈS MODIFICATION
POUR 1069 ET PROROGÉE JUSQu'eN 1875.
La question proposée est la suivante :
« Disculer complélement les anciennes obsei~uations d'écIipses qui nous ont
M été transmises par l'histoire, en vue d'en déduire la valeur de l'accélération
» séculaire du moyen mouvement de la Lune, sans se préoccuper d'aucune
» valeur théorique de celte accélération séculaire; montrer clniremciit à quelles
» conséquences ces éclipses peuvent conduire relativement à l'accélération dont
» il s'agit, soit en lui assignant forcément une valeur précise, soit au contraire
» en la laissant indéterminée entre certaines limites. »
Le prix consistera en une médaille d'or de la valeur de trois mille francs.
Les Mémoires devront être parvenus au Secrétariat avant le i" juin ïS'j?>,
lenne de rigueur.
11,.
( >64 )
SCIENCES PHYSIQUES.
PRIX A DECERNER EN 1870.
GRAND PRIX DES SCIENCES PHYSIQUES.
QUESTION PROPOSÉE F.N 1887 POUR 1870: REPRODUCTION DU PROGRAMME
DE l'annke précédente.
(Couiinissaires : JMM. lioiissingault, Cl. Bernard, Brongniart^ Clievreul,
Milnc Edwards rapporteur.)
« Histoire des plténoniènes (jénésiqucs qui yréc'edciil le dcvcloppemcnl de
» l'embryon chez les animaux dioïqiics dont la reproduction a lieu sans accou-
)i plement. »
Depuis quelques années le mode de reproduction des pucerons et des
autres animaux dits jtarthénocjénésiques a été l'objet de recherches nom-
breuses, mais les naturalistes ne sont pas d'accord sur plusieurs des points
les plus importants de l'histoire de cette fonction. L'Académie désirerait que
l'on en fit ime élude plus approfondie, et que l'on déterminât s'il existe,
ou non, chez les femelles qui se imdtiplient sans accouplement préalable,
quelque phénomène analogue à la fécondation déteriuinéo d'ordinaire par
l'action des spermatozoïdes sur l'œuf.
Les Mémoires, manuscrits ou imprimés et rédigés en français, ont dû
être déposés au Secrétariat de l'Institut avant le i*''juin iS^o.
PRIX DE PHYSIOLOGIE EXPÉRIMENTALE,
FONDIl par ai. DE MONTYOIV.
Feu M. de Monfyon ayant offert une somme à l'Académie des Sciences,
avec l'intention que le re\enu en fût affecté à un prix de Physiologie expé-
linienlale à décerner chaque année, et le Gouvernement ayant autorisé cette
fondation par une Ordonnance en date du 22 juiliet 1818,
L'Académie annonce qu'elle adjugera une médaille d'or de la valeur de
( i65 )
sept cent soixnnle-qiintre jrnncs à l'Ouvrage, imprimé ou manuscrit, qui lui
paraîtra avoir le plus contribué aux progrès de la Physiologie expérimentale.
Le prix sera décerné dans la prochaine séance publique.
Les Ouvrages ou Mémoires présentés par les auteurs doivent être envoyés
au Secrétariat de l'Institut avant le i"' juin de chaque année.
PRIX DE MÉDECINE ET CHIRURGIE
ET
PRIX DIT DES ARTS INSALUBRES,
FONDÉ PAR M. DE AIONTYON.
Conformément au testament de feu RL Auget de Monfyon, et aux Or-
donnances du 29 juillet 1821, du a juin iSaS et du i?> août 1829, il sera
décerné un ou plusieurs prix aux auteurs des Ouvrages ou des découvertes
qui seront jugées les plus utiles à Varl de c/uérir, et à ceux qui auront trouvé
les moyens de rendre un art ou un métier moins insalubre.
L'Académie a jugé nécessaire de fliire remarquer que les prix dont il
s'agit ont expressément pour objet des découvertes et inventions propres à
perfectionner la médecine ou la chirurgie, ou qui diminueraient les dan-
gers des diverses professions ou arts mécaniques.
Les pièces admises au Concours n'auront droit au prix qu'autant qu'elles
contiendront une découverte parfaitement déterminée.
Si la pièce a été produite par l'auteur, il devra indiquer la partie de son
travail où cette découverte se trouve exprimée : dans tous les cas, la Com-
mission chargée de l'examen du Concours fera connaître que c'est à la dé-
couverte dont il s'agit que le prix est donné.
Les sommes qui seront mises à la disposition des auteurs des découvertes
ou des Ouvrages couronnés ne peuvent être indiquées d'avance avec préci-
sion, parce que le nombre des prix n'est pas déterminé; mais la libéralité
du fondateur a donné à l'Académie les moyens d'élever ces prix à une valeur
considérable, en sorte que les auteurs soient dédommagés des expériences
ou recherches dispendieuses qu'ils auraient entrepiises, et reçoivent des
récom])euses proportionnées aux services qu'Us auraient rendus, soit en
prévenant ou diminuant beaucoup l'insalubrité de certaines professions,
soit eu perfectionnant les sciences médicales.
Conformément à l'Ordonnance du aS août 1829, outre les prix annoncés
( i66 )
ci-dessus, il sera aussi décerné des prix aux meilleurs résultats des recherches
entreprises sur les questions proposées par l'Académie, conformément aux
vues du fondateur.
Les Ouvrages ou Mémoires présentés par les auteurs doivent être envoyés
au Secrétariat de l'Institut avant le i" juin de chaque année.
PRIX BRÉANT.
Par son testament en date du 28 août 1849, feu M. Bréant a légué à
l'Académie des Sciences une somme de cent mille francs pour la fondation
d'un prix à décerner « à celui qui aura trouvé le moyen de guérir du cho-
léra asiatique ou qui aura découvert les causes de ce terrible fléau (i). »
Prévoyant que ce prix de cetU mille francs ne sera ])as décerné tout de
suite, le fondateur a voulu, jusqu'à ce que ce prix soit gagné, que l'intéi'ét
du capital fût donné à la personne qui aura fait avancer la science sur la
qncstion du choléra ou de toute autre maladie épidémique, ou enfin que
ce prix pût être gagné par celui qui indiquera le moyen de guérir radicale-
ment les dartres ou ce qui les occasionne.
Les concurrents devront satisfaire aux conditions suivantes :
1° Pour remporter le prix de cent mille francs, il faudra :
(i) Il paraît convenable de reproduire ici les propres termes du fondateur : « Dans l'état
» actuel de la science, je pense qu'il y a encore beaucoup de choses à trouver dans la com-
» position de l'air et dans les fluides qu'il contient : en effet, rien n'a encore été découvert
» ausujet de l'action qu'exercent sur l'économie animale les fluides électri(jues, ma|,»nétiqiies
» ou autres; rien n'a été découvert également sur les animalcules qui sont répandus en
» nombre infini dans l'atmosphère, et qui sont peut-être la cause ou une des causes de cette
» cruelle maladie.
» Je n'ai pas connaissance d'ajjpareils aptes, ainsi que cela a lieu pour les liquides, à
>' reconnaître l'existence dans l'air d'animalcules aussi pt'lits que ceux que l'on aperçoit dans
» l'eau en se servant des instruments microscopiques que la science met à la disposition de
» ceux qui se livrent à cette élude.
» Comme il est probable que le prix de cent mille francs, institué comme je l'ai expliqué
» plus haut, ne sera pas décerné de suite, je veux, jusqu'à ce que ce prix soit gagné,
» que l'intérêt dudit capital soit donné par l'Institut à la personne qui aura fait avancer la
• science sur la question du choiera ou de toute autre maladie éiiidcmique, soit en donnant
» de meilleures analyses de l'air, en y démontrant un élément morbide, soit en trouvant un
• procédé propre à connaître et à étudier les animalcules qui jus(ju'à présent ont échappé
• à l'œil du savant, et qui pourraient bien être la cause ou une des causes de la maladie. >•
( '67 )
« Trouver une médication qui guérisse le choléra asiatique dans l'immense
» majorité des cas; »
Ou
« Indiquer d'ime manière incontestable les causes du choléra asiatique, de
» façon que)! amenant la suppression de ces causes on fasse cesser l'épi-
» demie; »
Ou enfin
« Découvrir une prophylaxie certaine, et aussi évidente que l'est, par exemple,
a celle de la vaccine pour la variole. »
2° Pour obtenir le prix annuel, il faudra, par des procédés rigoureux,
avoir démontré dans l'atmosphère l'existence de matières pouvant jouer
un rôle dans la production ou la propagation des maladies épidémiques.
Dans le cas où les conditions précédentes n'auraient pas été remplies, le
prix annuel pourra, aux termes du testament, être accordé à celui qui
aura trouvé le moyen de guérir radicalement les dartres, ou qui aura éclairé
leur étiologie.
Les Mémoires, imprimés ou manuscrits, ont dû être parvenus au Secré-
tariat de l'Institut avant le i" juin 1870.
PRIX BORDIN.
QUESTION PROPOSÉE EN 1867 POCR 1870 : REPRODDCTION DU PROGRAMME
DE l'année précédente.
(Commissaires : MM. Boussingault, Cl. Bernard, Brongniart, Chevreul,
Milne Edwards rapporteur.)
« Anatomie comparée des Annélides. »
Il existe encore beaucoup de lacunes dans l'histoire anatomique des
Annélides marins, particulièrement dans ce qui est relatif aux organes de
la génération. L'Académie demande une étude approfondie et comparative
de la structure intérieure d'un certain nombre de ces animaux appartenant
aux différentes familles naturelles les plus importantes. Elle désire que les
descriptions soient toutes accompagnées de figures faites d'après nature.
Les Mémoires, manuscrits ou imprimés et rédigés en français, ont dû
être déposés au Secrétariat de l'Institut avant le i"juin 1870.
( i68 )
PRIX JECKER.
Par un testament, en date du i3 mars i85i, feu M. le D'^ Jecker a fait à
l'Académie lui legs destiné à accélérer- les progrès de la Chimie organique.
En conséquence, l'Académie annonce qu'elle décernera, dans sa séance
publique de 1870, un ou plusieurs prix aux travaux qu'elle jugera les plus
propres à hâter le progrès de cette branche de Chimie.
PRIX BARBIER.
Feu M. Barbier, ancien Chirurgien en chef de l'hôpital du Val-de-Grâce,
a légué à l'Académie des Sciences une rente de deux mille francs, destinée à
la fondation d'un prix annuel « pour celui qui fera une découverte pré-
» cieuse dans les sciences chirurgicale, médicale, pharmaceutique, et dans
» la botanique ayant rapport à l'art de guérir. »
Les Mémoires ont du être remis au Secrétariat de l'Institut avant le
i" juin 1870.
PRIX GODARD.
Par un testament, en date du 4 septembre 1862, feu M. le D' Godard a
légué à l'Académie des Sciences « le capital d'une rente de mille francs,
» trois pour cent, pour fonder un prix qui, chaque année , sera donné au
M meilleur Mémoire sur l'anatomie, la physiologie et la pathologie des
B organes génito-urinaires. Aucun sujet de prix ne sera proposé.
B Dans le cas ou une année le prix ne serait pas donné, il serait ajouté
» au prix de l'année suivante. »
En conséquence, l'Académie annonce que ce prix sera décerné, dans sa
séance publique de 1870, au travail qui remplira les conditions prescrites
par le donateur.
Les Mémoires ont dû être parvenus au Secrétariat de l'Institut avant le
i" juin 1870.
PRIX SAVIGNY,
FONDÉ PAR M-^" LETELLIER.
Un Décret impérial, en date du 20 avril 1864, a autorisé l'Académie des
Sciences à accepter la donation qui lui a été faite par M"^ Lelellier, au nom
( i69 )
de Savigny, d'une somme de vingt mille francs pour la fondation d'un prix
en faveur des jeunes zoologistes voyageurs.
« Voulant, dit la testatrice, perpétuer, autant qu'il est en mon pouvoir
» de le faire, le souvenir d'un martyr de la science et de l'honneur, je
» lègue à l'Institut de France, Académie des Sciences, Section de Zoologie,
» vingt mille francs au nom de Marie-Jides-César Le Lorgne de Savigny,
» ancien Membre de l'Institut d'Egypte et de l'Institut de France, pour
» l'intérêt de cette somme de vingt mille francs être employé à aider les
» jeunes zoologistes voyageurs qui ne recevront pas de subvention du
» Gouvernement et qui s'occuperont plus spécialement des animaux sans
» vertèbres de l'Egypte et de la Syrie. »
PRIX DESMAZIÉRES.
Par son testament olographe, en date du i4 avril i855, M. Baptiste-
Henri-Joseph Desmazières, demeurant à Lambersart, près Lille, a légué
à l'Académie des Sciences un capital de trente-cinq mille francs, devant être
converti en rentes 3 pour loo, et à servir à fonder un prix annuel pour
être décerné «à l'auteur, français ou étranger, du meilleur ou du plus utile
écrit, publié dans le courant de l'année précédente, sur tout ou partie de la
Crypiogamie. «
Conformément aux stipulations ci-dessus, un prix de seize cents francs
sera décerné, dans la séance publique de l'année 1870, à l'Ouvrage ou au
Mémoire jugé le meilleur parmi ceux publiés dans l'intervalle de temps
écoulé depuis le précédent Concours, et qui auront été adressés à l'Aca-
démie avant le 1" juin 1870.
PRIX THORE.
Par son testament olographe, en date du 3 juin i863, M. François-Fran-
klin Thore, demeurant à Dax, a légué à l'Académie des Sciences une in-
scription de rente 3 pour 100 de deux cents francs, pour fonder un prix
annuel à décerner « à l'auteur du meilleur Mémoire sur les Cryptogames
cellulaires d'Europe (Algues fluviatiles ou marines, Mousses, Lichens ou
Champignons), ou sur les mœurs ou l'anatomie d'une espèce d'Insectes
d'Europe. »
Ce prix, attribué alternativement aux travaux sur les Cryptogames cel-
lulaires d'Europe et aux recherches siu' les mœurs ou l'anatomie d'ua
G. R., 1870, 2= Semestre. (T. LXXl, N" 2.) 22
( '7° )
Insecte, sera décerné, en 1870, au meilleur travail, manuscrit ou imprimé,
paiini ceux qui auront été adressés à l'Académie avant le i*''JMin 1870,
sur un sujet relatif aux mœurs ou à Tanatomie d'un Insecte.
PRIX A DECERNER EN 1871.
GRAND PRIX DES SCIENCES PHYSIQUES,
PROPOSÉ EN 18G8 POUR lUTl.
(Commissaires : MM. Brongniart, Milne Edwards, Boussingault, Dumas,
Decaisiie rapporteur.)
La Commission désignée pour proposer le sujet du Grand Prix des
Sciences naturelles qui devait être décerné en 1869 a adopté :
V Elude de la Fécondation dans la classe des Chumpifjnons.
Les auteurs rechercheront les organes à l'aide desquels s'opère la fécon-
dation, soit dans le groupe des B.isidiosporés, soit dans celui des Théca-
sporés, sur lesquels on ne possède encore que des notions fort incom-
plètes.
Les Mémoires, écrits en latin ou en français, devront être accompagnés
de dessins explicatifs.
Le prix consistera en une médaille d'or de trois mille francs.
L'Académie proroge ce concours à 1871.
Les pièces de Concours devront être déposées au Secrétariat de l'Institut
avant le i" juin 1871.
PRIX BORDIN,
PROPOSÉ EN 18G8 POUR 1871.
(Commissaires : MM. Milne Edwards, Brongniart, Becquerel, Cosie,
Elie de Beaumont rapporteur.)
<( Faire connaître les ressemblances et les différences qui existent entre les jiro-
n dnclions organiques de toute esj)èce des pointes australes des trois continents de
» l'Afrique, de l'Amérique méridionale et de t' .dusiralie, ainsi que des terres
» intermédiaires, et les causes quon peut assigner à ces différences. »
( 17' )
On comprendra dans le travail les êtres marins qui peuplent les côtes des
trois continents et les fossiles qui y ont été découverts.
On se bornera à l'élude des parties des trois continents qui sont situés
au sud du 2$^ parallèle de latitude australe, et, sans faire tuie étude nou-
velle des climats déjà connus des trois régions, on s'attachera essentielle-
ment à constater l'influence des constitutions météorologiques que leur
assignent les observations recueillies par les différents voyageurs qui s'en
sont occupés; on devra surtout tenir compte des effets qu'on sait déjà être
produits parles courants marins [voir la Note de M. Becquerel).
On indiquera les conséquences que peuvent avoir, pour les théories pa-
léontologiques, les résultais auxquels on sera arrivé.
L'Académie désirerait que la question fût traitée d'une manière com-
plète, mais elle pourrait se contenter d'une solution partielle qui se horrie-
rait soit aux végétaux, soit aux animaux, soit même à une partie du règne
animal, par exemple aux vertébrés ou aux invertébrés. I/Académie n'hésite
même pas à déclarer qu'elle préférerait une solution partielle, mais appro-
fondie, à une autre qui serait plus générale et en même temps plus super-
ficielle.
NOTE DE M. BECQUEREL.
Remarques sur ta situation géographique et l'état climatérique des pointes les plus saillantes
des continents dans V héinisphcre austral.
Cap Horn : Lat., 55° 28' 5o"; temp. mny., 5 degrés.
Cap de Bonne-Espéiance : Lat., 33°55'; temp. moy., 19°, 4°-
Cap le plus niériilional de l'Australie : Lat., 39 degrés; temp. moy., 10 degrés.
Cote ouest de rAméritpie : Lat., 20 degrés; temp. moy., iy°,4o.
Injluence des courants marins sur les climats.
Le pôle austral est le point de départ de trois courants d'eau froide.
Le courant central vient frapper la côte occidentale tie l'Auiéri'pie du Sud, vers le 4o'' dé-
gré de latitude; I.à il se partage en deux branches. La liranclie qui se ilirige vers le sud
côtoie la Patagonie, tourne le cap Horn; revenant des liasses l.iîludes, elle réchauffe tiuites
ce.s côtes. Celle cjui lemonle vers le nord côtoie le Chili et le Pérou el adoucit le climat de
ces contrées, voisines de l'equaleiir, dont la leinpéraUire est plus élevée que la sienne, et
qui, comme on sait, est très-différent de celui du Brésil, à latitude égale.
Il résulte de l'influence exercée |)ar ces di'nx couranis sur la température de l'air, dans
les lieux ip-.ine sont pas sous la même latitude, que la végétation piésenle les mêmes carac-
tères au Chili qu'à la Terre-de-Feii et que les colibris se trouvent depuis le Chili jusi|u'au
cap Horn.
Le second courant austral d'eau froide, situé à l'ouest du précédent, vient frapper la côte
22..
( 172 )
occidentale de la Nouvelle-Hollande et se partage en deux branches. L'iine se dirige vers le
sud, où elle côtoie le cap le plus méridional qu'elle réchauffe, venant d'une latitude plus basse.
L'autre branche remonte vers le nord, en côtoyant la IV'ouvelle-Iloliande, dont elle re-
froidit la cote, venant de hautes latitudes; vers les îles de la Sonde, elle va rejoindre le grand
courant É(|uino\ial, se dirige vers le sud, entre l'Afrique et Madagascar, contouine le cap de
Bonne-Espérance, où elle est considérée comme courant d'eau chaude; aussi sa température
moyenne est-elle de 19", i, sous une latitude de 33°, 5, tandis que l'on rencontre cette même
température, sous la latitude de 20 degrés, sur la côte occidentale de l'Amérique du Sud,
dont la température est rafraîchie par le courant d'eau froide provenant de la branche cen-
trale du courant polaire, qui vient heurter les côtes du Chili.
La température moyenne étant la même au cap de Bonne-Espérance que sur la côte occi-
dentale de l'Amérique du Sud, à des latitudes bien différentes (33°,55 et 20 degrés), cette
différence dépend de ce que le cap de Bonne-Espérance est côtoyé par un courant d'eau
chaude, tandis que la côte ouest de l'Amérique l'est par un courant d'eau froide.
Les courants marins doivent donc être mis au nombre des causes qui influent sur la
faune et la flore des parties les plus méridionales des continents.
M. de Humboldt dit, dans son Asie centrale, t. III, p. l'yS : « Dans l'hémisphère austral,
les extrémités pyramidales des continents qui se prolongent inégalement vers le pôle sud
offrent le climat des îles. Des étés d'une température très-basse sont suivis, au moins jus-
qu'aux 48" et 5o' degrés de latitude, d'hivers peu rigoureux; d'où il résulte que les formes
végétales de la zone torride, les fougères en arbre et les belles orchidées parasites, ]ieuvent
avancer au sud jusque vers le 38" et le 46' degré de lat. aust., tandis que, dans l'hémi-
sphère boréal, les fougères en arbre et les orchidées ne dépassent pas le tropique du Cancer,
etc., etc. )i
Le pi'ix consistera en une médaille d'or de la valeur de trois mille francs.
Les Mémoires niaimscrits devront être déposés an Secrétariat de i'In-
slitut avant le i" juin 1871.
Les noms des auteurs seront renfermés dans des billets cachetés qui ne
seront ouverts que si la pièce est couroiniée.
PRIX BORDIN.
QUESTION SUBSTITUÉE ES 1866 A CELLE QUI AVAIT ÉTÉ rRÉCÉDEMMENT PROPOSÉE CONCEKKANT
LA STRUCTURE DES TIGES DES VÉGÉTAUX : REPRODUCTION DU PROGRAMME DE 1869, QUESTION
PROPOSÉE DE NOUVEAU POUR 1871.
(Commissaires : MM. Milne Edwards, Boussingault, Bernard, Decaisne,
Brongniart rapporteur.)
(( Etudier le rôle des stomates dans les foiirlioiis des feuilles. «
L'Acadétnie, en proposant cette question, désire que, par des recherches
expérimentales et par des observations aiiatomiques sur les plantes sou-
( ^i"» )
mises aux expériences, les concurrents cherchent à déterminer le rôle que
les stomates jouent dans les phénomènes de respiration diurne ou nocturne,
d'exhalation ou d'absorption aqueuse dont les feuilles sont le siège princi-
pal dans les plantes.
Les Mémoires (manuscrits ou imprimés) devaient, ainsi que l'annonçait
le programme des deux années précédentes, être parvenus au Secrétariat
de l'Institut avant le i*" juin 1 871, et porter le nom de leur auteur, afin que
les expériences pussent au besoin être répétées par hii sous les yeux de
la Commission.
PRIX CHAUSSIER.
Feu M. Franck-Bernard-Simon Chaussier a légué à l'Académie des
Sciences, par testament en date du ig mai i863, « une inscription de
rente de deux mille cinq cenis francs par an, que l'on accumulera pendant
quatre ans pour donner un prix sur le meilleur Livre ou Mémoire qui aura
paru pendant ce temps, et fait avancer la Médecine, soit sur la Médecine
légale, soit sur la Médecine pratique. »
Un Décret, en date du 7 juillet 1869, a autorisé l'Académie à accepter
ce legs. Elle propose de décerner pour la première fois ce prix, de la valeur
de dix mille francs, dans sa séance publique de l'année 1871, au meilleur
Ouvrage paru dans les quatre années qui auront précédé son jugement.
Les Ouvrages ou Mémoires devront élre déposés au Secrétariat de l'In-
stitut avant le i^' juin 1871.
PRIX DE LA FONS-MÉLICOCQ.
Feu M. de la Fons-Mélicocq a légué à l'Académie des Sciences, par tes-
tament en date du 4 février 1866, une rente de (rois cents francs, (rois pour
cent, qui devra être accuiiudée, et « servira à la fondation d'un prix qui
sera décerné tous les trois ans au meilleiu* Ouvrage de Bolanique sur le nord
de la France, c'est-à-dire sur les départements du Nord, du Pas-de-Calais, des
Ardennes, de la Somme, de l'Oise et de l'Aisne. »
L'Académie décernera ce prix, qui consiste en une médaille de la valeur
de neuf cents francs, dans sa séance publique de 1871, au meilleur Ouvrage
manuscrit ou imprimé remplissant les conditions stipulées par le testateur.
Le terme du Concours est fixé au 1^' juin 1871 .
( 174 )
PRIX GEGNER.
Feu M. Jean-Louis Gcgner, par testament en date du i 2 mai 1868, a iégiié
à l'Académie des Sciences « un nombre d'obligations suffisant pour former
le capital d'un revenu de quatre mille Jrancs, destiné à soutenir un savant
pauvre qui se sera signalé par des travaux sérieux, et qui dès lors pourra
continuer plus fructueusement ses recherches en faveur du progrès des
sciences positives. »
L'Académie des Sciences a été autorisée, par Décret en date du 2 octo-
bre 1869, à accepter cette fondation. Elle décernera, pour la première fois,
le prix Gegner dans sa séance publique de l'année 1871.
Les pièces adressées au Concours devront être déposées au Secrétariat de
l'Institut avant le 1" juin iB^f.
PRIX A DECERNER EN 1872.
PRIX DE aiEDECiNE ET DE CniRURGIE POUR L'ANNEE 1872.
QUESTION PROPOSÉE FN 18G0 POUR liiGG, ET REMISE A 1809, ET ENFIN A 1872.
L'Académie avait proposé, comme sujet d'un prix de Médecine et de
Chirurgie, et remet au concours pour 1872,1a question suivante:
« De Vnpplicalion de F électricilé à la thérapeuticjue. »
Les concurrents devront :
1° Indiquer les appareils électriques employés, décrire leur mode d'ap-
plicalion et Iciu's effets physiologiques;
2° Rassembler et discuter les faits publiés siu- l'ajjplication de l'électricité
au Irailemeiit des mahidies, et en p.irliculicr au Irailemcut des affections
des systèmes nerveux, musculaire, vasculaire et lymphatique; vérifier et
compléter par de nouvelles études les résultats de ces obticrvations, et
déterminer les cas dans lesquels il convient de recourir, soit à l'action des
courants intermittents, soit à l'action ties coûtants continus.
Le prix sera de la somme de cinq mille Jrnms.
Les Ouvrages, écrits en français, devront être parvenus an Secrétariat de
l'Institut avant le i" juin 1872.
( 175)
PRIX ALUUMDERT.
(moue de kutrition des champignons.)
(Commissaires : MM. Dumas, Milne Edwards, Claude Bernard, Decaisne,
Broiigiiiiirt rapporteur.)
Ija grande classe des Champignons se distingue de tous les antres groupes
du règne végétal par l'absence constante dans tous ses tissus de la matière
verte des feuilles ou chloro|>hylle. Celte absence de la chlorophylle indique
des relations très-différentes entre ces plantes et l'atmosphère ambiante,
et, par suite, un mode de nutrition aussi très-différent de celui des autres
végétaux.
Quelles sont les sources où les Champignons puisent le carbone et l'azote
qui entrent dans leur constitution? quels sont les autres éléments qui, joints
à l'oxygène et à l'hydrogène, sont nécessaires à leur développement?
Les expériences faites sur quelques Mucédinées peuvent déjà répandre un
certain jour sur ce sujet, mais ne suffisent pas pour expliquer le mode de
nutrition et d'accroissement des grands Champignons qui prennent nais-
sance dans le sol ou sur le tron'c des arbres, dans des conditions très-diffé-
rentes des moisissures, et dont la masse des tissus s'accroît souvent avec une
grande rapidité.
Des Champignons déjà soumis à la culture, l'Agaric de couches {Agaricm
campeslris, L.), le Polypore de la pierre à Champignon, ou Pielra Jomjnia
des Italiens [Pol/poriis tuberaster. Pries), et quelques autres qui se prêteraient
peut-être à une culture expérimentale, conduiraient sans doute à des résul-
tats intéressants.
En proposant pour sujet de prix l'élude du mode de nutrition des Chompi-
gnons, l'Académie demande que, par des expériences précises, on détermine
les relations du mycélium des Champignons avec le milieu dans lequel il
se développe, ainsi que les rapports de ce mycélium et du Champignon
complètement développé avec l'air ambiant, et qu'on constate ainsi l'ori-
gine des divers éléments qui entrent dans la composition des Champignons
soumis à ces expériences.
Le prix consistera en une médaille d'or de la valeur de deux mille cinq
cents francs.
Les Ouvrages et Mémoires, niannscrils ou imprimés, en français ou en
latin, devront être déposés au Secrétariat de l'Institut avant le i" juin iS'ja.
( ,76 )
PRIX SERRES.
Feu M. Serres, Membre de l'Institut, a légué à l'Académie des Sciences
une somme de soixante mille francs,^ trois pour cent ^ pour l'institution d'un
prix triennal « sur l' embryologie générale appliquée autant que possible à la
Physiologie et à la Médecine. »
Un Décret en date du 19 août 18G8 a autorisé l'Académie à accepter ce
legs ; en conséquence, elle propose de décerner pour la première fois un
prix de la valeur de sept mille cinq cents francs, dans sa séance publique de
l'année 1872, au meilleur Ouvrage qu'elle aura reçu sur celte importante
question.
Les Mémoires devront être déposés au Secrétariat de 1 Institut avanl le
i^'"juin 1872.
PRIX A DÉCERNER EN 1875.
PRIX MOROGUES.
REPKODUCTION DU PROGKAMMR DES ANNÉES PRÉCÉUENTES.
Feu M. de Morogues a légué, par son testament en date du aS oc-
tobre I 834, "'16 somme de dix mille francs, placée en rentes siu* l'État, pour
faire l'objet d'un prix à décerner tous les cinq ans, alternativement : pnr
l'Académie des Sciences Physiques et Mathématiques, à l'Ouvrage qui aura
fait faire le plus grand progrès à V agriculture en France, et par l'Académie
des Sciences Morales et Politiques, au meilleur Ouvrage sur l'état du paupé-
risme en France et le moyen d'y remédier.
Une Ordonnance en date du 26 mars 1845. a autorisé l'Académie des
Sciences à accepter ce legs.
L'Académie annonce (pi'elle décernera ce prix, en iSyS, à l'Ouviage
remplissant les conditions prescrites par le donateur.
IjCs Ouvrages, imprimés et écrits en français, devront être déposés au
Secrétariat de l'Institut avant le 1" juin 1873.
( ^77 )
PRIX CUVIER.
La Commission des souscripteurs pour la statue de Georges Cuvier ayant
offert à l'Académie une somme résultant des fonds de la souscription restés
libres, avec l'intention que le produit en fût affecté à un prix qui porterait
le nom de Prix Cuvier, et qui serait décerné tous les trois ans à l'Ouvrage le
plus remarquable, soit sur le règne animal, soit sur la géologie, et le Gou-
vernement ayant autorisé cette fondation par une Ordonnance en date du
9 août i83c),
L'Académie annonce qu'elle décernera, dans la séance publique de i 873,
un prix (sous le nom de Prix Cuvier) à l'Ouvrage qui sera jugé le plusremar-
quable entre tous ceux qui auront paru depuis le i" janvier i86(j jusqu'au
3i décembre 1872, soit sur le règne animal, soit sur la géologie.
Ce prix consistera en une médaille d'or de la valeur de quinze cents francs .
PRIX L. LACAZE.
Par son testament en date du 24 juillet i865 et ses codiciles des aS août
et 22 décembre 1866, feu M. Louis Lacaze, docteur-médecin, à Paris, a
légué à l'Académie des Sciences trois sommes de cinq mille francs chacune,
dont il a réglé l'emploi de la manière suivante :
« Dans l'intime persuasion où je suis que la Médecine n'avancera réel-
» lement qu'autant qu'on saura la Physiologie, je laisse cinq mille francs
« de rente perpétuelle à r Académie des Sciences, en priant ce corps savant
» de vouloir bien distribuer de deux ans en deux ans, à dater de mon
» décès, un prix de dix mille francs (10 000 fr.) à l'auteur de l'Ouvrage
» qui aura le plus contribué aux progrès de la Phjsiologie. Les étrangers
» pourront concourir
» Je confirme toutes les dispositions qui précèdent; mais, outre la
» somme de cinq mille francs de rente perpétuelle que j'ai laissée à l'Aca-
» demie des Sciences de Paris pour fonder un prix de Physiologie, que je
» maintiens ainsi qu'il est dit ci-dessus, je laisse encore à la même Âcadé-
» mie des Sciences deux sommes de cinq mille francs de rente perpétuelle,
» libres de tous frais d'enregistrement ou autres, destinées à fonder deux
» autres prix, l'un pour le meilleur travail sm* la Physique, l'autre pour
» le meilleur travail sur la Chimie. Ces deux prix seront, comme celui de
» Physiologie^ distribués tous les deux ans, à perpétuité, à dater de mon
C. R., 1870, 2" Semestre. (T. LXXI, N" 2.) ^3
( 178 )
» décès, et seront aussi de dix mille francs chacun. Les élrangers pourront
» concourir. Ces sommes ne seront pas partageables, et seront données
» en totalité aux auteurs qui en auront été jugés dignes. Je provoque ainsi,
» par la fondation assez importante de ces trois Prix, en Europe et peut-
» être ailleurs, une série continue de recherches sur les sciences naturelles,
» qui sont la base la moins équivoque de tout savoir humain; et, en
» même temps, je pense que le jugement et la distribution de ces récom-
» penses par V Académie des Sciences de Paris sera un titre de plus, pour ce
)) corps illustre, au respect et à l'estime dont il jouit dans le monde rntier.
)) Si ces prix ne sont pas obtenus par des Français, au moins ils seront dis-
)) tribnés par des Français, et par le premier corps savant de France. »
Un Décret en date du 27 septembre iSGg a autorisé l'Académie à accep-
ter cette fondation; elle piopose, en conséquence, de décerner poiu- la pre-
mière fois, dans sa séance publique de l'année 18^3, Iroix prix de dix mille
francs chacun aux Ouvrages ou Mémoires qui auront le plus contribué aux
progrès de la Physiolocfie, de la Physique et de la Chimie.
Les travaux devront être déposés, manuscrits ou imprimés, au Secré-
tariat de l'Institut, avant le 1" juin 1873.
CONDITIONS COMMUNES A TOUS LES CONCOURS.
Les concurrents, pour tous les prix, sont prévenus que l'Académie ne
rendra aucun des Ouvrages envoyés aux Concours; les auteurs aui'ont la
liberté d'en faire prendre des copies au Secrétariat de l'Institut.
Par une mesure générale prise en i865, l'Académie a décidé que la clô-
ture des Concours pour fous les prix qu'elle propose aurait lien à la même
époque de l'année, elle terme a été fixé au premier juin.
LECTURE.
M. Dumas lit l'Éloge historique de Pei-ouze.
É. D. B. et D.
( 179 )
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
I/Académie a reçu, dans la séance du [\ juillet 1870, les ouvrages dont
les titres suivent :
Recueil de Mémoires de Médecine, de Cliimrqie et de Phnrmncie militaires,
publié par ordre du Minisire de la Guerre, 3^ série, t. XXIV. Paris, 1870;
in-8°.
Mémoire sur une transformation géoméirirpie et sur la surface des ondes; par
M. E. Catalan. Bruxelles, 1870; in-/i°. (Extrait du tome XXXVIII des
Mémoires de l'Jcadénne royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-zlrls de
Belijiciue.)
Bulletins et Mémoires de la Société médicale des hôpitaux de Paris, t. VI,
2* série, année 1869. Paris, 1870; in-S" relié.
Du trav'iil fonctionnel chez l' homme; par M. C. POELMAN. Bruxelles, 1 8-0,
opuscule in-S*^.
Sujets de prix proposés par C Académie impériale des Sciences, Inscriptions et
Belles-Lettres de Toulouse pour les années 1871, 1S72, 1873. Toulouse, sans
date; in-8°.
Société impériale havraise d'études diverses. Procès-verbaux. Le Havre, 1 870;
in-8°.
Annales de la Société académique de Nantes et du département de la Loire-
Inféiieure, 1869, 2* semestre. Nantes, 1870; in-8°.
Sur une forme générale de développement et sur les intégrales définies; par
M. C.-J. IIlLL. Sans lieu ni date; br. in-4".
L'ingegno... Etude sur Ferdinand de Luca; par M. A. CiALDi. Rome,
1870; br. in-8".
Se... Si Porlolevante exclut le flot courant comme cause de son ensablement;
Lettre de M. A. ClALDl. Rome, 1870; br. in-S".
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE DU LUNDI 18 JUILLET 1870,
PRÉSIDÉE PAR M. CHEVREUL.
MEMOIRES ET CORIMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE,
M. Duhamel, en faisant hommage à l'Académie d'un volume intitulé :
Des Méthodes dajis les Sciences de rnisonneineiit [quatrième Partie), s'exprime
comme il suit :
« J'ai l'honneur de présenter à l'Académie la dernière Partie de mon
ouvrage sur les méthodes dans les sciences de raisonnement. Dans la pre-
mière Partie, j'ai exposé d'une manière générale la marche que l'on doit
suivre dans la recherche ou la démonstration de la vérité, et dans l'établis-
sement d'une science de raisonnement. J'en ai tait d'abord l'application
aux sciences les plus simples, celle des nombres et celle de l'étendue : je
considère aujourd'hui la science des forces.
» Les données des deux premières sont fondées, jusqu'à un certain point,
sur l'observation; mais elles sont d'une telle nature, que l'esprit conçoit
qu'elles subsisteraient lors même que le monde matériel serait anéanti. Il
n'en est pas de même de la science des forces; elle dépentl de la nature
de ce monde, qui aurait pu être créé différent de ce qu'il est, et soumis à
d'autres lois. Les données de cette science doivent donc reposeï' sur l'ob-
servation de ces lois, et sur des expériences propres à les manifester.
» Il est un point sur lequel nous espérons obtenir l'assentiment des
géomètres et des philosophes : jusqu'ici, dans l'étude du mouvement pro-
C R., 1870, 2' Semestre. (T. LXXI, N" 5.) 24
( i82 )
diiit par les forces, on a commencé par considérer ce qu'on appelle le
tnouvement absolu ; et ce n'est qu'après en avoir établi la théorie qu'on passe
à celle du mouvement relatif. Nous nous sommes placé dans un ordre
d'idées tout différent : nous ne fondons rien sur le mouvement on le repos
absolu; nous n'en parlons même que pour coudjattre cette notion, qui ne
repose que sur la fixité supposée des points de W'Sjjace abisoUi, c'est-à-dire
sur un cercle vicieux, où entre la considération d'un être purement imagi-
naire. »
SÉRICICULTURE. — Rapport adtes'-é à l\-l( odérnie sur les i-(hitltnts des é liiralions
pmiiqnes de ver à soie, effaliiéi s au moyen de graines préparées par les
procédés de sélection; par M. Pastelk.
« Au mois d'octobre dernier, M. le M;n-échal Vaillant me tit part du désir
de l'Empereur, de soumettre à une grande expérience pratique mon pro-
cédé de confection de la semence saine des vers a soie, procédé qui résume
l'ensemble de mes études de ces dernières années, et que je considère
connue propre non-seulement à éloigner le fléau actuel, mais en outre à
donner à la sériciculture une prospérité qu'elle n'a jamais connue. J'ac-
ceptai donc avec empressement et reconnaissance l'offre du INIaréchal.
» La propriété choisie pour cette épreuve fut celle de Villa-Vicentina,
près de Trieste, dans le Frioul autrichien, la plus importante parmi celles
de la Couronne pour la culture du mûrier. On peut y élever loo onces de
graine, que je me procurai auprès de trois des personnes qui avaient appli-
qué en 1869 mon procédé de grainage, MM. Raybaud-Lange (Basses-
Alpes); D'"Milhau, duPoujol (Hérault), et Gourdin, de Saint-Hippolyte-du-
Fort (Gard). Les 100 onces furent distribuées entre les colons de la villa
au nombre de cinquante, par petits lots, pour la plupart de i et 2 onces;
une éducation était de 3 onces et une autre de 5 onces, mais l'administra-
tion se réserva aS onces pour une grande éducation.
» La mise en |)r.iti(|ue de mon procédé consiste essentiellement: 1° à
élever une graine parfaitement saine,, autant que possible cellulaire, pour
éducation de reproduction; 2° à élever, pour éducation de produit, la
graine issue de ces éducations de reproduction, lesquelles doivent satisfaire
aux deux conditions suivantes : une excellente marche des vers de la qua-
trième mue à la moulée à la bruyère, jointe à l'absence complète, ou à peu
près, des corpuscides rians les papillons.
» Par l'application rigoureiise de ces prescriptions, les récoltes n'ont
plus à craindre que les maladies accidentelles provoquées par des condi-
( i83 )
lions climateriques et par l'inexpérience des éleveurs. En d'autres termes,
la récolte de la soie se trouve ramenée aux conditions normales de toutes
les industries agricoles, toutefois avec cet avantage dont elle était privée,
même aux plus beaux jours de sa prospérité, que l'éducateur est sur
d'opérer sur une graine originairement très-saine.
» Il résulte de ce qui précède que l'épreuve tentée sur le domaine de
l'Empereur ne devait pas se borner, pour être complète, à la constatation
du résultat des éducations de produit faites avec les loo onces dont j'ai
parlé. Il fallait que, par des éducations dirigées en vue de la reproduction,
j'établisse la possibilité de la préparation sur place d'une quantité de
graine plus ou moins considérable, tout au moins suffisante pour les be-
soins de la propriété de Villa -Vicentina en 1871. De cette manière, le
cercle des opérations serait complet, et l'administration du domaine
n'aurait plus qu'à les continuer avec les mêmes errements dans les années
ultérieures.
» En conséquence, je confiai au gardien de notre habitation de Villa-
Elysa, éleveur soigneux et expérimenté, trois sortes de graines celhdaires,
de trois provenances différentes, formant ensemble a|^ onces. Je ferai re-
marquer que ces graines cellulaires, pas plus que les 100 onces dont j'ai
parlé, n'avaient été préparées par moi. J'insiste sur ces détails, afin de bien
montrer que mon procédé est déjà appliqué sûrement dans toutes ses |)ar-
ties par un grand nombre de personnes.
» De ces 7^ onces de graine cellulaire, une m'avait été fournie par M. le
D'' Milliau, une autre par M. Sirand, pharmacien à Grenoble, et la demi once
restante par M. de L.lchadenède, |)résidfnt du Comice agricole d'Alais. Ceci
posé, voici les résultais de la campagne séricicôle, t;int à Villa-Vicenlina
qu'à Vilia-Elysa.
» A Vilia-Elysa, les 2^ onces de graine cellidaue ont marché à merveille.
La récolte, tout entière en magnifiques cocons jaunes, déiKi.-sa 45 kilo-
grammes à l'once de 25 grammes pour chacune des trois petites éduca-
tions. Bien plus, j'eus la satisfaction de constaier que toutes trois étaient
excellentes pour la reproduction. C'était plus que je n'avais espéré, car en
faisant trois éducations de graine cellidaire de trois provenances diffé-
rentes, j'avais eu principalement pour but de ne pas me mettre a la merci
des résultats d'une seule éducation faite en vue du grainage, précaution
toujours bonne à prendre.
)> Quant aux 100 onces de graine industrielle élevée par les colons de
Vdia -Vicentina, le produit total a été de 3ooo kilogrammes, c'est-à-dire
de 3o kilogrammes à l'once. C'est une fois et demie au moins le rende-
24..
( >84 )
ment moyen des époques de prospérité. Dans ce nombre moyen sont
comprises quatre éducations qui ont complètement échoué par la maladie
des moi'ts-flats, quatre qui n'ont eu qu'une demi-récolte, et deux un quart
de récolte seulement. I/éducation des aS onces de l'adunnistration a pio-
duit près de 89 kilogrammes à l'once. Je l'avais composée à dessein avec
trois des sortes de graine des trois personnes que j'ai nommées : 10 onces
graine Milhau, 9 onces graine Gourdin et G onces graine Rayhaud-
Lange (i).
w Je dois ajouter que la moyenne du rendement aurait été sensiblement
plus élevée si bon nombre des colons n'avaient mal fait écloreleur graine.
L'hiver ayant été fort rigoureux, la graine fut très-dure à éclore. Quelques-
uns la cliatdfèrent outre mesure; d'autres même, croyant qu'elle n'éclo-
rait pas, la remplacèrent par de la graine japonaise de reproduction, qui,
pour le dire en passant, donna un produit presque nul. On peut évaluer
à 10 onces au moins la graine qui fut perdueà l'éclosion, par l'inexpérience
des éleveurs.
» En résumé, et malgré les accidents que je signale et les insuccès que je
viens de mentionner, accidents et insuccès qui ont été de tous les temps et
de tous les pays, l'épreuve tentée à la demande de l'Empereur a eu le
résultat le plus satisfaisant. Depuis vingt-cinq ans on n'avait vu à Villa-
Vicentina une récolte de cocons aussi abondante et de plus belle soie. La
joie était générale parmi tous les colons, et on le comprendra aisément --i
j'ajoute, d'une part, que la récolte a été absolument nulle dans le pays pour
toute une partie de graine de Transylvanie d'une valeur atteignant un million
de francs, et si, d'autre part, je mets en regard de ce qui précède le résuliat
d'une récolte des années précédentes à Villa-Vicentiiia. Voici celle de
,869:
» En 1869, on a posé io5 onces de graine à Villa-Vicentina :
55 cartons japonais originaires,
5o onces de graine de la Corse.
» Le produit total a été de Hoo kilogrammes de cocons marchands qui
ont été fournis uniquement par les 55 cartons japonais, lesquels ont donné,
en conséquence, environ 14''^, 5 par carton. Les 5o onces de graine de
la Corse ont échoué complètement. Il faut noter, en outre, que les cocons
(i) On cite une cHiicafion faite en Italie de la graine de RI. Pasteur, qui a donné, chez
M. le professeur Chiozza, pour ■?.5 yrauinies, 67''% 678 de cocons, nombre qu'on n'avait pro-
bablement jamais réalisé. [Nntc du Sccrèlaite perpétuel.)
( i85 )
japonais n'ont été vendus, en 1869, qu'à raison de 5 francs le kilogramme,
tandis que les cocons de nos belles races indigènes ont atteint, en 1870, le
prix de 8*^', 4o. Enfin, le carton japonais avait coûté a5 francs en moyenne
fen 1869, tandis que la graine élevée en 1870 fut achetée i5 francs l'once
seulement. Bref, la récolte de 1869 a produit environ i5oo francs, et celle
de 1870, au contraire, plus de 22000 francs, défalcation faite du prix
d'achat des semences. D'autre part, la récolte de 1871 se trouve assurée
par la confection sur le domaine même d'une centaine d'onces de graine
industrielle et de plusieurs onces de graine cellulaire, qui seront une source
de semences pour les années ultérieiues.
» Je ne sais quels efforts ont été tentés cette année, en France, pour
l'application de mon procédé de confection de la semence saine; j'espère
qu'ils auront continué actifs et fructueux, et qu'ils auront triomphé des
résistances intéressées et des contradictions sans fondement. Dans la liante
Italie et dans la basse Autriche, le progrès est de plus en plus marqué.
A peine étais-je arrivé dans le Frioul, que je faisais connaissance avec un
des plus riches et des plus intelligents agricidteurs de la contrée, M. le
DT^évi, et j'apprenais avec autant de bonheur que de siu'prise, qu'à lui seul
et pour ses propres éducations de cette année, il avait fait, en 1 869, 1 5o onces
de graine cellulaire. Présentement il en confectionne plus de 3oo. Tout
auprès de Villa-Vicentina, M. le professeur Chiozza en prépare 4oo onces,
et c'est la première fois néanmoins qu'il se livre à ce travail.
» Dans la haute Italie, M. le marquis Crivelli vient d'obtenir une récolte
de plus de loooo kilogrammes de cocons jaunes par une nouvelle appli-
cation rigoureuse, savante et perfectionnée même, paraît-il, des principes
que j'ai établis. Encore quelques années, et le commerce des graines avec
le Japon aura disparu et la sériciculture aura reconquis toute sa pro-
spérité.
» L'Académie ne s'étonnera pas que je lui offre les prémisses du Rappoi t
par lequel je devais rendre compte à M. le Maréchal Vaillant de la mission
que Sa Majesté avait daigné me confier. L'intérêt persévérant que la Com-
pagnie a témoigné à l'étude de la maladie des vers à soie et à mes propres
travaux, m'obligeait à l'instruire la pre:nière du succès qui couronne ses
efforts et les miens. »
L'Académie décide qu'un exemplaire de ce Rapport sera adressé aux
Comices et Sociétés d'agriculture par l'intermédiaire de M. le Ministre
de l'Agricidture et du Commerce.
( i86)
HYDRODYNAMIQUE. — Démonslration élémentaire de In Jannitle de propagation
d'une onde ou d'une intumescence dans un canal prismatique; et remarques
sur les jiropagations du son et de la lumière, sur les ressauts, ainsi que sur
la distinction des rivières et des torrents ; par M. de Saint- Vexant (').
« 1. Plusieurs ingénieurs s'occupent en ce moment, dans une vue pra-
tique, fie questions relatives aux ondes liquides. Dans l'espoir de faciliter
leurs utiles recherches, où ils paraissent vouloir employer surtout des
méthodes géométriques, je crois devoir donner ici, avec diverses remar-
ques qui s'y rattachent, une démonslration élémentaire du plus simple et
du mieux confirmé des résultats que l'analyse a fournis sur ce sujet intéres-
sant, c'est-à-dire de la formule de Lagrange (**)
(i) A=v^,
dans laquelle, g désignant l'accélération 9™, 809 due à la gravité, k repré-
sente la célérité ou la vélocité (***) de propagation d'une intumescence ou
d'une onde solitaire provoquée dans l'eau primitivement stagnante d'un
canal prismatique à section rectangle, d'ime profondeur Ii, par une impul-
sion horizontale qui a été donnée quelque part au liquide sur toute cette
profondeur.
» A tous les phénomènes de variation de pression dans des masses ga-
zeuses répondent généralement, comme on sait, des phénomènes de varia-
tion de niveau dans des masses liquides.
» Aussi, ce que nous avons à dire est tout à fait analogue à la démons-
tration qui a été donnée il y a plus de (juarante ans par M. Babinet, dans
ses leçons orales, de la fornuile de la propagation du son : démonstration
qui devrait figurer, je crois, dans tous les cours de physique (****); car
(*) L'Académie a décida' que celle Commtinicalion, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Compte rendu.
(**) Méc. anal., 2" ])artie, section XI, article 36.
(•**) Mois que j'emploierai quel(|iief(iis afin d'éviter la confusion avec les vitesses réelles
des molécules ou des tranches fluides ou solides.
(**** ) On ne la trouve que dans l'ouvrage : E.rcrcires sur la physique, ou Recueil de ques-
tions susceptibles de J aire l'objet de compositions écrites, ])ar M. I. (Isidore) Pierre, dont la
seconde édition est de 1862 (igG"" exercice, p. i55). Comme je ne connaissais pas ce livre
de l'éminent (Correspondant de la Section d'itconomie rurale lors de la publication (iSb'j ) de
mon Mémoire Sur le choc longitudinal de deu.r barres élastiques [Journal de M. Liouville,
1' série, t. XII, n' IG, p. 355j, je présentais comme élanl de moi cette démonstration
( i87 )
elle se réduit, en appelant p la densité de la matière d'une colonne élas-
tique soit gazeuse, soit solide, E son coefficient d'élasticité ou Ey les forces
à appliquer en sens contraires à ses deux bases extrêmes, d'une superficie
supposée =1, pour la raccourcir dans une petite proportion j, à dire
très-simplement que si une pareUle force est supposée appliquée à une
seule des deux bases, et si l'on nomme k la longueur primitive inconnue
de la partie de celte colonne ou de ce prisme dans l'étendue de laquelle la
compre^siouy se sera propagée au bout de l'unilé de temps, on doit égaler
l'inlensité Ey de la lorce motrice au produit de la masse pk de la partie
ainsi mise en mouvement, par la vitesse qui lui a été communiquée, vi-
tesse qui est kj, puisque c'est bien là ce dont a cheminé la base sollicitée,
avec les autres sections, qui, après leur rapprochement, sont restées aux
mêmes dislances les unes des autres : ce qui donne Ey = pk.kj, d'où l'on
tire bien la formule connue de propagation d'une compression ou d'une
dilatation dans l'air ou dans une tige
(.) k=^^.
Du reste, dans cette formule, le coefficient d'élasticité E peut avoir une va-
leur autre que celle qui convient à l'état d'équilibre, vu que le mouvement
de compression d'un amas de molécules disjointes peut y susciter des vibra-
tions calorifiques; en sorte qu'elle |)eut tout aussi bien donner la valeur
réelle de k que sa valeur newtonienue, qui lui est toujours inférieure (*).
" 2. Soient donc maintenant ABDC la section longitudinale de l'eau
simple. J'en ai déjà restitué à M. Babinet la priorité dans une Note d'un Rapport du ai fé-
vrier 1870 sur un Mémoire de M. Boussinesq relatif aux ondes liquides périodiques (Comptes
rendus, t. LXX, p. 36l).
(*) On peut démontrer de même, pour expliquer simplement les principes mathématiques
de la théorie de la lumière, la formule de propagation des glissements
-Gg transversaux ou des ondes planes, que l'on tire ordinairement des équa-
tions différentielles du mouvement intérieur des corps ou des milieux élas-
tiques. Soit G le coefficient de l'élasticité transversale dans un ])risme de
matière abcd dont les sections, d'une superficie = i , sont supposées
glisser l'une devant l'autre en restant parallèles, sous l'action d'une force
G g appliquée tangentidlement à la base ad, en sorte que les fibres longi-
tudinales mn, sans se courber, s'inclinent toutes d'un très-petit angle
mnm' ^ g sur les normales à ces sections. Si, au bout de l'unité de temps,
k est la longueur totale mn des portions ainsi mises successivement en
mouvement, la force Gg aura imprimé à une masse ^k une vitesse mm' =z /g. On a
A E'JT ,G T
( 188 )
slagiiante d'un canal |jrisiiialique indéfini à arêtes horizontales, et abcd sa
section transversale, qne nous supposerons d'abord rectangle et d'une
hauteur h. L'équihbre subsis-
\- -y-j / tera si l'on remplace sa partie
Y^ïEfir-Zr7 de gauche AEFC par un jjlan
i; ' — <: vertical solide E'EF joignant
normalement le fond et les
bords. Or supposons qu'on imprime à ce plan une petite vitesse horizon-
tale constante de gauche à droite, il en résultera un relèvement de l'eau
ou une intumescence d'une hauteiu' ties-pctite s, croissant uniformément
en longueur. Si, au bout de l'unité de temps, k désigne la longueur
inconnue qu'avait primitivement la portion du fluide FE'GI ainsi tumé-
fiée, ou dont la hauteur h est devenue h -\- i, comme cette longueur se
trouve réduite à /-; » le plan solide aura cheminé de k — k-, ou -7-5
vu la petitesse supposée de c devant h. Ce cheminement pendant un
temps = I est la vitesse du plan E'F, vitesse qui aura été imprimée à
toute la portion fluide FE'GI par la force avec laquelle il a fallu pousser
le plan. Et cette force, différence des pressions sur les sections E'F et GI,
a pour intensité og£ par unité superhcielle de la section primitive si ^0 re-
présente la densité du fluide. La masse de cette portion fluide mise en
mouvement est (sX-, aussi par unité de section. Égalant la force au produit
donc G{; = p/.Xg, d'où
-^'
(2 his]
P
exprimant la vélocité de la propagation longitudinale du iiioiiveincnt de glissement trans-
versal supposé.
On pourrait, comme je l'ai dit au IMcnioire sur le choc des barres, laire comprendre clai-
iement,avec des plaques de verre rtrfsuper|)osées, comment une vitesse très-petite /j; = «mî',
qu'on imprime aux sections les unes après les autres dans un sens parallèle à leur surface, et
dans des temps qui sont de plus en plus courts ainsi que les espaces ])arcourus, engendre
une vélocité île propagation nin = /■ très-grande.
ha />ério<licilc des mouvements imprimes en des sens opposés n'a besoin d'être intioduite
qu'ensuite dans ces considérations et démonstrations, où il est préférable de ne s'occuper
d'.ibord (jue de la propagation d'im simple mouvement de compression, de dilatation ou de
glissement qui se eoulintie en aflVclaul des lougueurs croissantes. C'est, je le crois, Jiarce
que Newton a voulu introduire de piiuie abord les vibrations, ipiil n'a présenté qu'une
démonstration obscure et jugée inacceptable.
( i89 )
de la masse mue par la vitesse qu'elle a imprimée à celle-ci pendant le
temps = I, on a
d'où, pour la vélocité ou célérité de la propagation de l'intumescence fluide,
quelle que soit sa hauteur supposée seulement très-petite, et, p.ir consé-
quent aussi, quelle que soit la vitesse de progression du plan solide EF,
dont l'impulsion a déterminé la formation de cette intumescence,
{l reproduit) kz=\/gli;
c'est-à-dire la vitesse qu'acquerrait, comme l'observe Lagrange, un corps
tombant librement de la moitié de la hauteur de l'eau dans le canal.
» On ne considère ordinairement, en mécanique, que des masses de
grandeur invariable. Des forces constantes leur impriment des vitesses
uniformément croissantes. L'on voit qu'il peut y avoir lieu quelquefois de
considérer des masses variables. Si elles croissent uniformément ou pro-
portionnellement au temps, les mêmes forces leur impriment des vitesses
constantes, comme celles que nous avons appelées kj ou A--
» Au reste, l'exactitude de l'expression (i) est subordonnée à la suppo-
sition que le frottement de l'eau est négligeable. Ce frottement tend à aug-
menter l'intumescence, et, en outre, à ralentir sa propagation.
» 3. Si le plan ET, au lieu d'être poussé à droite, était tiré à gauche,
on aurait, du côté droit, en place d'une intumescence, une dépression, se
propageant toujours avec la vélocité exprimée par \'gk, pourvu que sa
hauteur fût très-petite. Si ce même plan avance pendant un temps très-
court, puis recule, ou bien cesse d'avancer, il en résultera ce que Scott
Russel a appelé une onde solitaire, se propageant de même, c'est-à-dire (*)
avec une vélocité dépendant uniquement de la piofondeur.
» On peut produire également, comme l'a remarqué le même expéri-
mentateur, soit une intumescence continue, soit une onde sans aucun mou-
vement de solide plongé, au moyen d'une effusion, c'est-à-dire en versant
en E une quantité quelconque d'eau (**).
» 4. 11 est facile de généraliser l'expression (i) de k pour un canal pris-
(*) Annales des Ponts et Chaussées, 1837, 1' semestre, p. i63.
(**) Annales des Ponts et Chaussées, 1887, 2= semestre, p. i65.
C. R., 1870, 1' Semestre. (T. l.XXI, N" 3.)
( igo )
matique ayant une section d'eau abcd i\e forme quelconque, et, aussi, de
voir ce qu'on aurait si la hauteur £ de l'intumescence n'était pas tout à fait
négligeable devaiil la profondeur moyenne primitive du fluide.
» Soient, dans l'état d'équilibre, u la superficie de cette section, et /sa
largeur à fleur d'eau. Connue la section nouvelle de la partie tiunéfiée sera
hi + e/, sa longueur, au bout d'ini temps t, aura été réduite de kt à
kt -• Il y aura donc eu, dans ce même temps f, une vitesse imprimée
à une masse fluide
ptjikl
par la force motrice, ditlérence des deux produits triples : i" île la pesan-
teur spécifique pg du fluide; i'^ des superficies w -h s/, w des sections E'F,
GI; 3° des profondeurs respectives de leurs centres de gravité au-dessous
de E' et de G. Or cette diflérence est
e
Il faut, après l'avoir multipliée par le temps t de l'action, l'égaler à la
quantité de mouvements engendrée, ou au produit des deux valeurs qu'on
vient d'écrire pour la vitesse et pour la masse. On en tire, pour la vélocité :
(3) ^=\/§l7-^^)'
qui ne se confond avec la formule (i) relative au canal rectangle qu'en
négligeant le ternie en £ devani la profondeiu' - = //.
» Russel, <"t plus récemment M. Bazin, ont recoiuui j);ir l'expérience (')
qu'il faut effectivement, sous le radical de la fornude, faire à la profondeni'
moyenne - ou luiiforme h une addition d'autant plus grande que l'intu-
mescence ou l'onde est plus élevée. S'ils on! trouvé pour cette addition,
£ plutôt que ■§£, cela peut tenir à l'effet du frottement, comme nous avons
dit tout à l'heure. Des exj)ériences de M. de Caligny oiu également con-
firmé la fornude de Lagrange, sous celte condition, très-bien remarquée,
que si l'ébranlement générateur de l'onde a été peu [)rofond, l'on attende,
(') Mciiiiiirc cik- lie Riissol. Kt, iM. Bazin, Cmiiptcs rendus, l. LV, p. 353, et t. LVII,
|). 3o2.
( '9' )
pour mesurer la vélocité de celle-ci, que le mouvement ail en le temps de
s'étendre à toute la profondeur du canal. Dès lors, comme dans les expé-
riences de Russel, sa vélocité de propagation reste constante, quel que soit
l'espace déjà parcouru.
» Si cette condition est remplie initialement, on si le monvenient longi-
tudinal a été imprimé dans toute la section d'eau EF jusqu'au fond, comme
le suppose tout ce qui précède, on voit que la formule (i) ou (3) peut
être considérée comme s'ap|)liquant à des profondeurs quelconques, ou
n'ayant pas l'extrême petitesse que Lagrange supposait.
» 5. M. Bazin a constaté une autre particularité que la simple considé-
ration des vitesses relatives pouvait faire théoriquement prévoir.
» C'est que, si l'eau du canal est courante au lieu d'être inunobile, il
faut, à (i) ou (3), ajouter sa vitesse propre, ou l'en retrancher, pour avoir
la vélocité de la propagation, dans l'espace, d'une onde que Foi! y pro-
voque quelque part, soit par un ébranlement, soit par une effusion de
fluide.
» Qu'arrivera-t-il donc si, la propagation étant considérée dans un sens
opposé à celui du courant, la vitesse U de celui-ci est égale ou sunérieine à
\/g/j, h désignant la profondein- moyenne, on si
H!
= ou > I ?
» Théoriquement, c'est-à-dire en négligeant les frottements, les forces
centrifuges qui peuvent agir aux extrémités des intumescences, les inéga-
lités des vitesses dans une même section, etc., l'intumescence liquide sera :
1° immobile si U- = g/r, 2" entraînée par le courant avec luie vitesse
U_ i^jah siU^ excède g/?, à moins qu'un dispositif particulier, tel qu'un
barrage en aval, ne la retienne à la même place ou ne renouvelle on quel-
que sorte l'effusion qui la provoque.
)) 6. Cela est d'accord, tant avec les faits, qu'avec une théorie présentée
par M. Bélanger dès 182S d'une manière différente et plus adaptée aux
circonstances dans lesquelles ils ont été observés; car ces faits sont ceux du
ressaut, observés par M. Bidone, vers i8ao,dans un courant artificiel rapide
et peu profond, et, depuis plus longtemps, par les meuniers de l'Alsace et
d'autres pays, vers l'extrémité inférieure des coursiers de leurs roues motrices,
quand le niveau de l'eau d'aval s'élève jusqu'à un certain degré seulement
au-dessus de l'eau de ces coursiers. Or M. Bélanger a reconnu théorique-
ment la nécessité de l'existence de ce phénomène en discutant l'équation du
( 192 )
mouvement permanent non imiiorme des eaux, posée par le j)rincipe des
forces vives, en ayant égard à ce que celle — > que l'eau possède par unité
2. g
de poids écoulé à lra\ers une section où sa vitesse est U varie avec la pro-
fondeur // (vu la constance du débit hlV ), conformément à ce que donne
'^^^ dh ~ gh
» Mais le principe des forces vives n'est pas le seul qui doive être em-
ployé dans les calculs relatifs aux eaux.
.) On sait que D. Bernoulii, qui s'en est servi pour déterminer leurs vitesses
et leurs écoidements, a employé, dans une dernière section de son Hydro-
dynamique, un autre principe, celui des quantités de mouvement, estimées
dans un sens choisi à volonté, pour calculer leurs réactions et impulsions.
» M. Bélanger, après avoir ingénieusement combiné ensemble ces deux
principes qui lui ont fourni, sur des points où Borda a combattu Ber-
noulii, des conclusions justes et lucidement motivées, a recoiuiu que le
ressaut ne pouvait être bien calculé que par celui des quantités de mou-
vement (le même que nous avons employé ci-dessus pour d'autres éva-
luations), qui dis|)ense de faire entrer dans les équations, comme il le
remarque, les forces intérieures, dont le travail est inconnu.
» Suivant son raisonnement fort simple, si h et /;,
sont les profondeurs nb, a,b, de l'eau avant et après
iid( son brusque relèvement dans un canal rectangulaire de
j largeur /, et si U, U, sont les vitesses dans les deux
" *' sections correspondantes, la force qui agit sur la por-
tion abh,n, pour retarder son mouvement supposé permanent est la diffé-
rence p"lk, — — Pglh - des pressions sur ces deux sections, et la quantité
de mouvement engendrée dans un petit temps dt est la différence de celles
des deux tranches écoulées en amont et en aval, d'épaisseurs respectives
Udt, \],df, ce qui donne à M. Bélanger l'équation
(5) Lglh/li-poih'l\fU = plh\]dt.\]-plh,V,df.U,,
ou, en remplaçant U, par U -^ et divisant par pgldt, puis par {fi,—h) h-,
h, (h, \ U'
Drf<
(6) - 1 " + n = 2
( 193 )
équation dont M. Bélanger tire la hauteur /?,, et jiar suite celle //, — h du
ressaut, et qui évidemment, comme il l'observe, ne peut en donner un que
quand U'U excède gh. Cette condition qui lui était déjà fournie par l'équa-
tion différentielle qu'il a posée en i8a8 pour exprimer le mouvement per-
mriuent dans un lit régulier, est, comme on voit, aussi celle que l'on tire
des considérations du numéro précédent.
» Remarquons même que si Q désigne le débit hW par unité de temps,
du courant permanent que nous considérons, d'où U = -y? et si nous sup-
posons le ressaut infiniment petit, l'équation (3) se réduit à
1 g h
d'où, effectuant les différentiations et divisant par dh,
On obtient ainsi immédiatement U = slgh pour la condition du passage
entre les deux états où il y a et où il n'y a pas ressaut.
» Sans entrer dans plus de considérations, j'ose recommander l'étude
de ces diverses manières d'arriver à la même formule, comme étant sans
doute propre à éclairer cet intéressant sujet, et à concilier peut-être en-
semble les explications diverses qui ont élé proposées du phénomène de la
bnrre ou du mascaret, qui se manifeste à marée montante vers lenibou-
chure des fleuves aux grandes marées montantes : phénomène très-bien
étudié il y a quelques années par M. Partiot (*), qui parait disposé aujour-
d'hui à le rattacher à la propagation de l'intumescence suivant la loi trouvée
par Lagrange.
» 7. Mais, ce qui précède peut conduire à une autre conséquence digne
d'intérêt.
» De la discussion de l'équation citée du mouvement permanent, et
aussi des relatioiis ci-dessus, exprimées par les équations (i), (4), (7), dont
les deux dernières donnent les variations de force vive et de quantité de
mouvement répondant à des variations de profondeur, l'on peut conclure
qu'il existe deux sortes de cours d eau, se comportant de manières bien
(*) Comptes rendus, i858, t. XLVII, p. 65 1, et Annales des Ponts et Chaussées, i86i,
"■ semestre, p. i'].
( 194 )
différenles, et caraclérisés respeclivement par
\]-<gh et U=>gA.
» Dans les premiers, les abaissements et relèvements de la surface des
eaux se propagent ou se font sentir en amont jusqu'à des distances indé-
finies, et les accidents du fond du lit n'ont sur cette surface cpi'une influence
peu sensible.
» Dans les seconds, au contraire, les relèvements et abaissements du
fond se font sentir dans le même sens, sur la surface, d'une manière frès-
marquée, et les gonflements et dépressions de celle-ci ne se propagent
en amont qu'à des distances ordinairement très-faibles, et en tous cas
bornées.
» Dans les premiers, où la liantcnr due à la vitesse U est inférieure à la
demi-profondeur -> les obstacles ne sont surmontés que par le seul poids
de l'eau qui s'amoncelle en amont.
» Dans les seconds, c'est en quelque sorte de haute lutte que le fluide les
franchit, et par la seule impulsion due à sa vitesse acquise U, plus grande
par rapport à la profondeur h; à moins que ces obstacles ne soient assez
hauts pour que le courant devienne forcément de première espèce sur une
certaine longueur.
» Les diverses parties ou tranches des premiers s'appuient, se sou-
tiennent, modèrent mutuellement leur descente, et sont en quelque sorte
solidaires les unes des autres. Tandis que dans les courants de seconde
espèce chaque partie coule à peu près indépendamment de ce qui arrive
aux autres, sans que l'existence de celles d'aval exerce d'influence retarda-
trice sur celles qui sont à une certaine distance en amont.
» D'où il suit que, dans les premiers courants, tout est calme, dans les
seconds tout est impétueux; que la surface des premiers doit être à peu
près unie, malgré ini fond rugueux, et que la surface des seconds doit
être onduleuse, agitée, et porter l'empreinte plus ou moins distincte des
rugosités prononcées du fond.
» Or il me semble que les dénominations de ces deux espèces de cours
d'eau sont déjà trouvées. Pour peu qu'on se rende compte de l'idée que
l'on attache aux mots (orient et rivière, celui-ci doit être appliqué aux cou-
rants de première espèce, celui-là aux courants de deuxième. Celle sorte
(le définition paraît préférable à celles qu'on trouve dans quelques ailleurs
anciens.
( 195)
» Leur distinction ne tient ni à la senle grandeur de la vitesse ni à la
profondeur, elle tient à leur "relation on au rapport, pour les nues plus
petit, pour les autres plus grand que l'unité, entre la hauteur due à la
vitesse et la demi-profondeur moyenne. Presque tous les cours d'eau, en
temps d'étiage, ont des parties calmes ou non torrentueuses, appelées dor-
mants, et des parties réellement torrentueuses, qui sont les rapides ou les
gués; et, pendant les crues, tout est ordinairement à l'état non torrentueux,
malgré la grandeur plus considérable des vitesses. Et ce n'est pas une pure
affaire de mots, car, dans l'état torrentueux, pour peu que le fond soit pier-
reux, vu l'agitation de la surface et de toute la masse fluide, les coefficients
du frottement sont probablement plus considérables que dans l'état non
torrentueux. Il y aurait lieu, ainsi, de considérer, dans le choix de ces
coefficients, la relation qu'il y a outre la vitesse et la profondeur des cours
d'eau pour lesquels ou les fait entrer dans des calculs de vitesses, de pentes
et de débits. »
PHYSIQUE. — Sur les pouvoirs rolaloires magnétiques des liquides.
Extrait d'une Lettre de M. de la Uive à M. Dumas.
« .... Je viens de terminer, sur la polarisation rotaloire magnétique des
liquides, un travail que je vais incessamment livrer à l'impression; mais je
tiens auparavant à vous en transmettre un extrait abrégé, que je vous prie
de vouloir bien communiquer à l'Académie.
» La première Partie de ce travail est consacrée à la description de l'appa-
reil et des procédés d'expérimenlatiou dont j'ai fait usage ; j'y décris en par-
ticulier un électro-aimant d'une grande puissance, et la manière dont j'ai
pu annuler l'influence des tubes de verre cjui servent à clore les tubes pleins
des liquides soumis à l'expérience, et celle des variations d'intensité du
courant qui aimante l'électro-aimant. A l'occasion des divers essais prt'li-
minaires que j'ai faits, j'indique un moyeu assez exact et assez sensible de
mesurer la force de l'électro-aimant, en particulier de ce qu'on nomme,
avec Faraday, le champ magnétique, en se servant, pour cela, de la polari-
sation magnétique.
» Dans la seconde Partie, je donne les résultats que m'a fournis la déter-
mination du pouvoir magnéto-rotatoire de quelques liquides; j'insiste sur le
fait assez curieux que, tandis que l'acide sulfurique monohydratc (HOSO')
a pour coefficient magnéto-rotatoire spécifique, l'eau distillée étant prise
pour unité, 0,750; l'acide sulfureux liquide anhydre (SO^) a 1,240 pour
coefficient, à la température de 12 degrés.
( 19^ )
» Dans la troisième Partie, j'étudie l'influence delà température sur le
pouvoir magnéto-rofatoire des liquides; sou effet général est de diminuer ce
pouvoir. Pour quelques liquides très-dilatables, tels que l'alcool, la dimi-
nution du pouvoir magnéto-rotatoire est assez exactement proportionnelle à
celle de la densité; pour d'autres moins dilatables, tels que l'eau, il dé-
croît plus rapidement que la densité, ce qui prouve que la chaleur agit de
deux manières, soit surtout en modifiant la densité, soit aussi directe-
ment.
» Dans la quatrième Partie, je compare le pouvoir magnéto-rotatoire d'un
mélange de deux liquides à celui que possèdent ces deux liquides. Dans le
cas où les deux liquides qu'on mélange n'exercent point d'action chimique
l'un sur l'autre, ou n'en exercent qu'une très-faible, comme l'alcool et
l'eau, ou l'eau et l'acide sulfurique formant une solution qui ne ren-
ferme qu'une très-petite proportion d'eau ou d'acide (moins de -^ en
volume), le pouvoir magnéto-rotatoire du mélange est la moyenne du
pouvoir magnéto-rotatoire des ingrédients, et, s'il y a changement de den-
sité, son augmentation est proportionnelle à celle de la densité. Mais s'il y a
une forte action chimique entre les liquides mélangés, comme cela a lieu
en mélangeant de l'eau et de l'acide sulfurique en quantités qui se rap-
prochent de l'égalité, alors la variation du pouvoir magnéto-rotatoire n'est
pas proportionnelle à celle de la densité; elle est plus rapide, ce qui prouve
que le fait de la combinaison modifie le pouvoir magnéto-rotatoire des
corps qui se combinent, en le rendant plus faible qu'il ne le serait s'il était
simplement la moyenne des pouvoirs magnéto-rotatoires des ingrédients.
» Dans la cinquième Partie, j'expose les résultats que j'ai obtenus en
soumettant à l'expérience deux liquides isomères, l'éther amylacétique et
l'éther valérique, qui m'ont été donnés par M. Rerthelot au printen)ps de
i86(). Plus tard, dans le courant de l'hiver dernier, M. Wur!z ayant bien
voulu m'envoyer quelques échantillons de liquides isomères qu'il avitii
préparés lui-même, j'ai pu étendre le champ de mes expériences. Soit avec
les échantillons de M. Berthelot, soit avec ceux de M. Wurtz, j'ai trouvé
que l'acétate d'amyle avait un pouvoir magnéto-rotatoire sensiblement plus
fort que le valératc d'étiiyle, et que ce dernier a un pouvoir légèrement
plus fort que le butyrate d'isopropyle que M. Wurtz m'avait aussi envoyé
avec ses deux isomères, l'acétate d'amyle et le valérate d'éthyle. L'alcool
amylique est aussi un peu supérieur, sous ce rapport, à l'hydrate d'aniylèue
son isomère, et l'amylamine a également un pouvoir magnéto-rotatoire
plus fort que l'isoamylamiue, son isomère; ces quatre derniers liquides
( 197 )
m'avaient aussi été envoyés par M. Wuriz. Ainsi les corps isomères ont des
pouvoirs magnéto-rotatoires différents, ce qui prouve que cette propriété
ne lient pas seulement à la nature même des éléments qui entrent dans leur
composition, mais aussi au mode de groupement de ces éléments, La den-
sité ne paraît pas exercer sur le pouvoir niagnéto-rotatoire des isomères la
moindre influence, tandis que l'ordre que suit la grandeur de ce pouvoir
dans un même groupe d'isomères est exactement le même que celui que
suit lélévation de leur température d'éhullition.
n On trouvera dans le Mémoire lui-même bien des détails que j'omets
ici, ainsi que le tableau des expériences. J'ajouterai seidement encore que
l'étude du pouvoir magnéto-rotatoire des corps me paraît devoir jeter du
jour, soit sur leur constitution moléculaire, soit sur la différence qui peut
exister entre de simples phénomènes de dissolution et de véritables com-
binaisons chimiques. »
PHYSIQUE. — Nouvelles recherches sur les actions électro-capillaires. Formation
de Voxychlorure de cuivre cristallisé et d'autres composés analogues ; par
M. Becquerel. (Extrait.)
» Les phénomènes électro-chimiques résultant d'actions capillaires con-
stituent aujourd'hui une des branches les plus importantes des sciences
phvsico-chimiques, attendu qu'ils se produisent dans tous les cas où deux
liquides différents, étant séparés par un tissu perméable, un espace capil-
laire a parois de nature quelconque, donnent lieu à des courants électriques
agissant comme forces chimiques. La paroi de ces espaces eu contact avec
le liquide qui se comporte comme acide, dans sa réaction sur l'autre li-
quide, est l'électrode négative, et la paroi opposée l'électrode positive. On
conçoit d'après cela que les actions électro-capillaires doivent se produire
dans la plupart des corps poreux en contact avec des liquides différents
qui ne se mêlent que très-lentement.
M L'intensité de ces actions dépend de la force éleclromotrice des deux
liquides et de leur pouvoir conducteur. Cette force a déjà été déterminée
dans un assez grand nombre de cas; dans ce Mémoire, j'ai cherché comment
elle variait avec la densité des liquides. M. Ed. Becquerel avait reconnu
que, dans la réaction d'un liquide sur un métal, la densité du premier était
en général sans influence bien sensible sur l'intensité de cette force; je
montre, par une série d'expériences, qu'il en est de méiue dans le contact
des liquides que j'ai essayés.
C. R., 1870, a" Semestre. (T. LXXl, N» 3.) 26
( i9« )
» Mais si la force électromotrice des liquides en contact ne varie pas
sensiblement avec leur densité, il n'en est pas de même de la quantité d'ac-
tion chimique produite, attendu qu'elle est dépendante de la conductibi-
lité du circuit, avec laquelle elle est dans un rapport direct.
» Les expériences dont il vient d'être question m'ont conduit à recher-
cher quels étaient les effets chimiques produits, en soumettant à l'expé-
rience, dans un appareil électro-capillaire, l'acide nitrique et une dissolution
de potasse caustique, liquides employés dans le couple à gaz oxygène,
dont j'ai donné la description en i835 [Comptes rendus de l'Académie, t. I,
p. /|55), appared dans lequel les deux liquides sont séparés par un dia-
phragme perméable et mis en communication par un fil de platine; l'acide
est décomposé et il y a un dégagement abondant de gaz oxygène autour du
fil qui se trouve dans la potasse.
» Dans l'appareil électro-capillaire, la fissure remplace le fil de platine ;
l'expérience démontre que l'acide nitrique est également décomposé. Quant
au gaz oxygène, il paraîtrait qu'au lieu de se dégager sur la paroi positive,
il reste en dissolution ou se combine avec la potasse pour la peroxyder.
» Lorsqu'on remplace la dissolution de potasse par une autre de prot-
oxyde de plomb dans cet alcali, la force électromotrice est à peu près la
même et est égale à 29, celle du couple à acide nitrique étant 100; mais les
effets chimiques sont différents, lorsque l'on substitue à l'acide nitrique
une dissolution métallique, telle que celle de nitrate.de cuivre, de nitrate
d'argent, de chlorure d'or, etc., avec le nitrate de cuivre on obtient sur la
paroi négative une couchée paisse de deutoxyde de cuivre anhydre, formé
de couches concentriques ayant un aspect cristallin et une certaine densité.
Ce composé a l'apparence d'un minéral. En opérant avec les dissolutions
de nitrate d'argent et de chlorure d'or, les métaux sont réduits, en même
temps qu'il se forme, sur la paroi positivede la fêlure, du peroxydedeplomb
ayant une certaine dureté.
)) En opérant avec la dissolution de potasse, la réduction métallique n'a
pas lieu, quoique la force électromotrice soit à peu près la même dans les
deux cas ; la présence dans l'alcali d'un composé oxydable pour opérer la
réduction métallique, est nécessaire pour dépolariser la paroi positive, re-
couverte d'oxygène donnant lieu à un courant en sens inverse, qui s'oppose
à l'action chimique, c'est-à-dire à la réduction.
» A la suite du Mémoire, se trouve une Note relative à la production,
dans un laps de temps de quinze années, de l'oxychlorure de cuivre cris-
tallisé (alacamite) ou cuivre chloruré des minéralogistes, absolument sem-
( Ï99')
blable à celui que l'on trouve dans les mines de cuivre du Chili et du Pérou;
quant à l'aspect, à la couleur et à la cristallisation, la couleur est d'un vert
foncé et les cristaux sont des prismes droits rhomboïdaux avec des pointe-
ments aux sommets. On a obtenu des produits semblables avec le bismuth.
L'appareil employé est le même que celui qui m'a servi, à quelques diffé-
rences près, pour former les doubles chlorures, les doubles iodures, etc.
[annales de Physique et de Chimie^ t. XXXXI, p. 33). »
météorologie:. — Des observations de température faites sous le sol au Jardin
des plantes, de i864 à 18^0; par MM. Becquerel et Edm. Becqcerel.
(Extrait.)
« Nous avons établi au Jardin des Plantes, en 1864 (i)i des câbles
thermo-électriques, à l'aide desquels ou observe la température de la
terre de 5 mètres en 5 mètres au-dessous du sol, à partir de i mètre de
la surface, jusqu'à 36 mètres. La discussion des observations recueillies
a conduit aux conséquences suivantes :
» La marche des températures, qui est régulière, prouve que ces ap-
pareils sont susceptibles d'une très-grande précision, quand on est familia-
risé avec leur emploi, qui ne présente du reste aucune difficulté. Leur in-
stallation est telle, qu'ils ne peuvent éprouver aucune altération sensible,
dans un laps de temps considérable, puisque le Irou de sonde où ils ont
été placés est rempli de béton. Aussi pourront-ils servir à constater si la
température locale, jusqu'à la profondeur de 36 mètres, éprouve ou non
des changements pendant une longue période de temps.
» Dans les tableaux I et II, on voit que les températures moyennes à
chacune des huit stations de i86/| à 1868, de 1864 à 1869 et de 1867 à 1869,
comparées aux températures moyennes de l'air à l'Observatoire impérial
et à celles observées au Jardin des Plantes, lesquelles sont déduites des
maxima et des minima, conduisent aux conséquences suivantes :
)) A 36 mètres, la température est invariable et égale à 12°, 47 : les très-
légères différences que l'on trouve tiennent à des erreurs d'observation.
» A 3i et 26 mètres, la température moyenne est la même et égale à i2'',34-
» A 21, i6, 1 1 et 6 mètres, elle est sensiblement la même, puisque les
différences ne j)ortent que sur les centièmes de degré.
» Les différences entre les températures moyennes ont été, aux huit sta-
(i) Voir Mémoires de l'Académie des Sciences, t. XXXVI.
26..
( 200 )
tions, pendant les six années :
De 6 à I mètres o°,68
» II 6 » , \
» i6 II » > insensibles.
» 21 i6 » 1
» 26 21 > qo.So
■> 3i 26 ■> nulle.
.. 36 3i " o",i3
EnGn de 36 i » i°,2i
» Or, comme à i mètre au-dessous du sol la température moyenne esta
peu près la même que celle de l'air à la surface, il en résulte que, pour ime
profondeiH" de 36 mètres, il y a augmentation de température égale à i'',2i;
et de i°,o8, pour des profondeurs de 26 à 3i mètres : ce qui rentre dans
les déterminations faites sur différents points de nos climats moyens. Pen-
dant 1868, année exceptionnelle, où la température de l'air à été de i i°,90
à l'Observatoire impérial, les différences de températures moyennes ont été
Entre 6 et i mètre o°,22
Entre 1 1 et 6 mètres o'',o8
» Ce sont les seules profondeins oîi la température extérieure ait exercé
une influence, car an delà les différences ont été à peu prés nulles.
» Si l'on examine quelle est la distribution de la chaletu' pendant les
six années dans les diverses saisons, comme on le voit d;ius le tableau H,
on arrive aux résultats suivants :
)) A 36 et 3 1 mètres les saisons n'exercent auciuie influence sur la distri-
bution de la chaleur.
n A 26 et 16 mètres, les maxima et minima de temj)érature ont lieu aux
mêmes époques que dans l'air, c'est-à-dire en été et en hiver. Cet état de
chose est facile à expliquer, comme nous l'avons déjà dit dans le précédent
Mémoire ()) : à 16 mètres, on commence à pénéirer dans la nappe d'eau sou-
terraine qui alimente les puils du J.iniin des Vlanles et s'écoule sans cesse
vers la Seine, nappe qui reçoit directement les eaux atmos|iliériques: à
■î6 mètres on trouve la deuxième nappe souterraine qui repose sur l'argile
plastique et qui est alimetuée également par les eaux pluviales.
» A 1 1 et 1 6 mètres, les maxima et les itiinima se montrent (-n auloiiim;
et au printemps à i mètre; ils ont lieu comme dans l'air.
» On voit, d'après ce qui précède, que le câble électrique est capable de
résoudre avec une grande exactitude les questions relatives à la distribu-
(l) Voir Coinplcs rendus, I. I,XVI1, p. l i5o.
( 20I )
tion de la chaleur dans l'écorce du globe et de constater si elle éprouve ou
non des changements avec le temps.
» Nous venons de disposer également au Jardin des Plantes des câbles
thermo-électriques qui permettront d'observer la température jusqu'à
I mètre de profondeur à des distances très-rapprochées, sous un sol dénudé
et sous un sol couvert d'une végétation herbacée, là où se trouvent les ra-
cines des plantes et des arbres, afin de voir l'influence qu'exerce l'état du
sol sur le rayonnement calorifique à l'intérieur.
» Voici les résumés des observations indiquées plus haut :
Températiiic moyenne de Tair.
Observatoire. Jardin des Plantes.
1867 io°5o io°8o
18G8 11,90
1869 10,80 11,62
Tableau I. — Moyennes des six années de l864 « 1869.
ANNÉES.
A 36™.
A SI"».
A 26m.
A 21"".
A 16".
A 11"».
A 6"».
A 1".
1864
0
12, /,S
12,52
12,55
12, /i2
12, /JO
12, /|5
0
12,38
12,38
.2,/i'l
12,28
12,25
12,35
0
12,35
12,41
■2, 'il
12,24
I2,3o
12,35
0
12, 14
12,10
12,02
11,94
12,00
12,08
0
12,08
11,75
11,78
11,88
1 2 , o5
12,07
0
12,18
1 1 ,60
■•>77
11,87
12,12
12,23
0
12,05
.1,64
'1,77
",77
12,04
,2,36
0
10,52
10,87
11,07
",59
11,82
12,01
1 1 ,26
1865
1866
1867
1868
1S69
Moyennes des si.\ années. .-. . . .
Mot. des cinq premières années.
MoY. des trois dernières années.
■5,''l7
12,34
12,34
12, 04
11,92
11,96
">94
12, /i7
,2,34
12,. 34
12,04
11,91
i',9'
11,85
11,11
■ 2,/,S
12,29
1 .,29
12,00
12,00
12, o5
12,06
11,70
TAEi.F.Air II. — Mijycnucs des saisons de 1864 « 18'yo.
saisons;
A 36'".
A 31"".
A 261".
A 21'".
A 16'".
A 11"».
A 6"».
A 1'".
Hiver (décembre, jaiiv. et lévr.).
Printemps
0
12,47
12,4/
12,48
12,47
0
12,34
12,34
12,35
12,33
0
12,11
12,28
12,58
12,40
0
12,04
12,19
12,09
12,05
0
1 1 ,80
11,87
12,02
">99
0
12,01
11,87
11,93
12,17
0
12,41
1 1 ,22
11,65
12,56
0
7,70
8,3i
14, 58
14,4s
Été.
Moyennes
12,47
■2,34
12,34
12,09
",02
",99
11,96
11,27
( 202 )
PHYSIQUE. — Sur les variations de température produites par le mélange de
deux liquides. Réponse à l;i dernière Communication de M. Jamin ; par
M. H. Sainte-Ci.aiiie Deville (i).
« J'ai cru devoir, dans ma Note du 27 juin (voir Comptes rendus, t. LXX,
p. 13^9 et i38o), abréger autant que possible l'examen critique d'une for-
mule publiée par M. Jamin dans le même volume (p. i3i i). Les termes de
sa réponse me prouvent que je n'ai pas été compris, et me forcent d'entrer
dans quelques détails.
» A cette page i3i i, M. Jamin écrit :
g Ae H- A'a — A" est une quantité constante pour un même mélange, variable avec les
)) proportions e et a. Appelons-la M, on a
M = (7 — 7,) f + 76.
» Cette formule doit représenter tous les phénomènes. »
» Ma critique ne porte que sur le cas général, le seul intéressant, 011 s est
variable, le seul cas dont MM. Bussy et Buignet se soient occupés. Je la
reprends.
» Par un raisonnement inattaquable et élémentaire, je démontre que
l'expression j{t -h 6) — y, <, identique (2) avec la formule (7 — 7i) ^ "*" 7^^
que M. Jamin avait trouvée par la considération du zéro absolu, représente
là différence entre deux quantités de clialeur parfaitement spécifiées dans
ma Note. Quand on discute cette formide, on trouve tout de suite deux
cas à examiner.
» 1° Dans le premier cas, e étant variable (le seul dont je me sois occupé,
le seul intéressant), l'expression M = (7 — 7,)^ + yS est composée de Irois
termes, tous trois variables, puisque M, 7, 7, et 6 sont des fonctions incon-
nues d'e, et qu'il n'existe auctuie relation entre set les quantités M, 7, y,, 6.
(1) Foir séance du 4 ji'iii P- 23.
(2) Dans sa Note {vnir le Compte rendu du 4 juillet, p. 26), M. Jamin affecte de croire
que je lui attribue l'identité (7^ — 7,) f -)- 78 = 7 (/ + 8) — 7,/, qui n'oxprinie, en effet,
qu'une transposition d(.' tcruK's indiquée d'une manière abrégée. Ici, pour tonte [jcrsonne
li;ibituée au lang.ige algébrique, le signe n= signifie c'est-à-dire. Toute confusion, d'ailleurs,
doit cesser (jiiand j'écris iMuucdiatenicnt après: « l'expression M = (7 — 7t)'-l-76 équi-
vaut à une identité. » Malgré cela, malgré les explications que j'ai données en séance sur ce
point, M. Jamin persiste à imprimer un long passage de forme ironiipie {7>oir )>. îG) comme
s'il pouvait encore se tromper sur le fonds de ma critique. L'Académie jugera le procédé.
( 203 )
» Il sera donc impossible d'eu rien tirer d'une manière générale; car, si
l'on détermine par expérience y, y,, Q pour une valeur parliculière d'e (o, i
par exemple), il sera évidemment impossible d'en déduire par le calcul au-
ciuie valeur correspondante de ces quantités quand on donnera à s une
autre valeur quelconque (0,2 par exemple), de prévoir, par conséquent,
aucun phénomène.
« MM. Bussy et Buignet ont donc tiré de leurs belles expériences toutes
» les conséquences dont elles sont susceptibles à ce point de vue », comme
je l'ai dit t. LXX, p. i38o.
» D'ailleurs M ne peut être défini autrement que par la somme algébrique
des deux quantités de chaleur (y — j,)t et yO. J'en conclus que cette ex-
pression ne vaut pas plus qu'une identité, c'est-à-dire qu'elle équivaut à une
identité, comme je l'ai dit (séance du ij juin, p. i38o).
)) Ainsi, dans le cas difficile et seul intéressant où £ est variable, l'expres-
sion M = (y — y,)t — yô ne nous dit rien (i).
» 2° Si, au contraire, £ est constant (2), tout est dit, et le jjroblème, bien
connu d'ailleurs, est tout résolu ; car y et y, sont constants, et il n'y a dès
lors besoin d'auciui principe nouveau, d'aucune expérience pour faire voir
que la somme M = (y — y, )t -t- yd est nécessairement constante, quel que
soit t. Cette équation, en réalité, nous apprend, ce que nous savons déjà,
que le rapport des accroissements des températures est invariable quand
les chaleurs spécifiques sont constantes. Par conséquent, M est constant,
quelle que soit la température t (3).
(i) Comme il faut d'abord déterminer 7, y, et 9 pour chaque valeur particulière d't avant
de calculer M, il s'ensuit que les conclusions des paragraphes 2°, 3° et 4" (lignes de i3 èi 27)
de la page i3i i ne peuvent avoir aucune utilité dans le cas général, surtout la conclusion 3°,
qui est d'ailleurs entachée d'une erreur de raisonnement que je signale à l'attention de
M. Jarain.
(3) Je n'ai pas discuté ce cas dans ma Note du 27 juin. L'ne conlusion, à la(]uelk' je n'ai
pourtant pas donné lieu, se manifeste à chaque instant dans la réponse de M. Janiin, parce
qu'il ne distingue pas ces deux cas si différents.
(3) Voici la démonstration élémentaire de cette proposition ;
Prenons deux vases iraperraéal'les à la chaleur, contenant l'un une quantité donnée t
d'eau, l'autre une quantité i — e = a d'alcool, et tous les deux à zéro. En les mélangeant,
nous obtiendrons de l'alcool étendu à 0„ degrés. Prenons deux autres vases contenant les
mêmes quantités e d'eau et i — s d'alcool encore à zéro. Ajoutons une même quantité de
chaleur au mélange à 9„ et aux éléments de ce mélange à zéro. La température du mélange
deviendra t -\- 0 (notation de M. Janiin), et la température commune des éléments séparés
deviendra t. La chaleur spécifique 7 du mélange et la chaleur spécifique moyenne 7, dis
[ 204 )
» Démontrer la constance de M au moyen de l'expérience, en faisant
varier t seulement, c'est, non pas démontrer un principe nouveau (quand
on en a la prétention on fait un cercle vicieux), ou, ce qui revient au même,
énoncer inie idée nouvelle ( i ), mais c'est constater jiar l'expérience la légi-
timité des principes qui ont servi à calculer les chaleurs spécifiques intro-
duites dans les formules, ou contrôler l'exactitude de ses déterminations
expérimentales. En faisant subir cette épreuve aux nombres publiés par
M. Jamin (p. 27), on voit que les erreurs d'observation peuvent, par l'em-
ploi de ses procédés calorimétriques, aller jusqu'à ji^, —;, ^, jj, -^ et
même ^ de la quantité observée dans ses expériences. »
PHYSIQUE. — Réponse à des critiques de M. Jamin à propos d'un Mémoire
publié en 1860; par M. H. Sainte-Claire Deville (2).
« Les discussions scientifiques, quand elles sont dépouillées de tout
caractère personnel, ont, je crois, une grande importance pour les progrès
des sciences. Je vais profiter de la circonstance présente et des dissenti-
ments profonds qui me séparent de M. Jamin pour exposer, sous forme de
réponse, quelques idées que je crois utile de propager.
» Dans le Mémoire (voir Comptes rendus, t. LX, p. 534) qu'attaque
M. Jamin, j'ai exposé quelques opinions dont une partie, la meilleure sans
doute, doit être rapportée à l'inlliience qu'ont exercée sur mon esprit l'en-
seignement et les conversations scientifiques de mon excellent maître,
iVF. Dumas. Je lui ai rendu l'hommage que je lui dois dans ma dernière
leçon sur l'affinité devant la Société Chimique. (Paris, Hachette, 1869,
p. 65.)
» Je pourrais me contenter de déclarer qu'il n'y a aucun rapport, ni pro-
éléments sont invariables par hypoihèse; on aura, d'après le principe même qui a servi à
calculer ces chaleurs spécifiques,
(^+ 9 — e„)y =7,/.
Cette équation se vérifiera toujours, quel que soit /, et pourra servir à calculer l'une des
quantités qui y entrent en la prenant pour inconnue. On en tire
f{t + B) — 7,f, c'est-à-dire (7 — y,)t 4-78 = 79,, = M.
Or 79„ est constant; donc 1\1 est constant, quel que soit/, pourvu que z, 7 et 7, soient
constants. c. q. r. d.
(i) Foir l. LXX, p. i3io, lif^ne 16.
(2) Voir Comptes rendus du 4 juillet, p. 28.
( 205 )
chain ni éloigné, entre les idées que m'attribue M. Jamin et celles que j'ai
publiées, et renvoyer les lecteurs à mon Mémoire de 1860; mais comme il
s'ae;it ici de points de doctrine fort délicats, je traiterai la question avec
quelques détails.
» A l'époque où j'écrivais mon Mémoire, la cause des phénomènes
calorifiques de la Chimie était universellement rapportée à une cause
occulte, à une sorte d'archée que l'on i\ppe.\\e ofinité. Cependant, dans son
enseignement, M. Dumas faisait intervenir les chaleurs de combinaison
comme déterminant, par leurs grandeurs relatives, les réactions ihimiques
et les déplacements réciproques des corps les uns par les autres. MM. Favre
et Silbermann, dans leur travail devenu classique, ont donné à cette idée
une vérification expérimentale des plus frappantes, et qui restera comme
un monument de la science française.
» Mais l'affinité était toujours là comme cause première et, selon moi,
comme cause occulte, capable de donner aux problèmes de la Chimie une
solution facile, mais entachée de cercle vicieux.
» Je pensais alors et je pense encore qu'aucune différence essentielle ne
sépare les phénomènes mécaniques attribués à la cohésion et les j)héno-
mènes chimiques rapportés à l'affinité. Dès lors la chaleur de combinaison
existe en puissance dans les éléments, avant leur combinaison, au même
titre que la chaleur latente dans la vapeur d'eau avant sa condensation. Les
phénomènes de dissociation que je découvrais à cette époque rendaient
encore plus prochaine cette analogie, que je crois avoir aujourd'hui rendue
incontestable.
M Pour donner un corps à cette idée, j'eus recours, non pas à une hy-
pothèse, mais à une image (i), en comparant chaque particule élémentaire
(i) Il y a en effet une grande différenic entre une comparaison et une hypothèse, et je
!a montrerai dans les phénomènes de l'élasticité des gaz. Toutes les expressions : tension,
force élastique, détente, qui se rapportent aux fluides élastiques, indiquent que les proprié-
tés d'un gaz comprimé ont toujours été ciim])arées uniquement et nécessairement aux pro-
priétés d'un ressort bande. Anssi faut-il considérer comme une fiction mathématique foit
utile sans doute, mais échappant, comme le point et la ligne droite, je ne dis pas seidement
à la réalisation, mais encore à l'imagination, l'hypothèse du zéro absolu situé à • — 2^3 de-
grés environ pour le gaz parfait encore inconnu qui, restant gazcu.x à cette température, ne
se détend plus dans le vide. Je dis gaz parfait, car si l'on prend les gaz incoercibles, comme
l'hydrogène, l'azote, l'oxygène, etc., chacun de ces gaz possède un coefficient de dilatation
propre, comme l'a fait voir iNI. V. Regnault, et détermine un zéro absolu particulier.
r,. K.. 1870, Q« Spmeure. ( T. LXXl, N" 3.) ^7
( 206 )
à un ressort à détente très-sensible qui se débande par une action exté-
rieure très-fail)le (allusion à l'action de la lumière sur un nu-lange de
chlore et d'hydrogène), et produit un mouvement dont la destruction en-
gendre la chaleur. Cette image fait percevoir très-netteineut que la chnleur
peut exister en puissance dans un corps sans que sa manifestation soit né-
cessaire en toutes circonstances.
» Cette image m'a servi à exposer mes idées sur l'affinité : elle me per-
met de faire voir, ce qui paraîtra tout simple aujourd'hui, que la chaleur
est, en puissance, à l'état latent dans les corps qui se combinent. J'en
prends un exemple dans les combinaisons ou dissolutions des liquides entre
eux. Je trouve que, si l'on détermine la chaleur de contraction, c'est-à-dire
la quantité de chaleur qu'il faudrait dépenser pour comprimer par un pro-
cédé mécanique les éléments d'une combinaison et les réduire au volume
ordinairement plus petit que garde la matière conibinée, cette quantité de
chaleur est plus que suffisante pour expliquer les phénomènes calorifiques
de la combinaison. Dans un seul cas la chaleur de contraction est juste
suffisante pour rendre compte de réchauffement produit par le mélange de
2 équivalents d'eau et de i équivalent d'acide sulfiuique monohydraté.
» J'appelle chaleur de contrnction la quantité de chaleur nécessaire pour
ramener le volume V des éléments au volume v de la combinaison. Si l'on
connaît le coefficient de dilatation du liquide depuis zéro jusqu'à une tem-
pérature plus élevée que la température manifestée pendant la combinai-
son, la chaleur spécifique c du liquide sujjposée constante entre les mêmes
températures et m son poids, on aura pour la chaleur de contraction la
valeur
/y— c\ m
V \ me
7-')-'
la température à laquelle le mélange reprend son volume primitif étant
V— c
» Croirait-on que M. Jamin appelle principe, celle règle que j'ai donnée
pour calculer les perles de lempéralure, et par conséquent (\ps pertes de vo-
lume, et il m'attribue l'énormilé d'appeler ce prétendu principe le principe
de la conservation des volumes (voir page 24), quand la règle que j'ai donnée
n'a plus de sens général si V = v dans tous les cas.
)i Je ne veux |)as atlribiu;r à M. Jamin l'iulenlion d'avoii' altéré ma
pensée exprimée brièvement dans mon Mémoire de 1860, appliquée dans
( 207 )
le tableau que contient ce Mémoire développée dans une leçon professée
en 1864 devant la Société Chimique pour rendre cette pensée ridicide et
plus facilement attaquable. Cependant il dit de ma modeste formule :
n Malgré cette variation ([ii'il a reronnue lui-même, M. H. Sainte-Claire Deville pcr-
1) siste à maintenir la conservation du volume comme une loi indiscutable, nécessaire et
» démontrée en principe (souligné). Dans mon opinion, c'est une hypothèse. »
» On ne trouvera nulle part dans mon Mémoire ni les mots prétentieux
conservation du volume, ni les mots principes de la conservation du volume,
loi indiscutable, nécessaire et démontrée en prim ipe, quoique ce dernier soit
souligné par M. Jamiii. Mais on y trouvera les six mots : avec la règle que
j'ai donnée, six mois dont la suppression, accompagnée d'un jugement plus
que sévère sur des expériences qui n'avaient pourtant aucun rapport avec
celles de M. Jamin, a déterminé ma réclamation du 27 juin.
» Cela dit et après avoir répudié toute ressemblance entre mes travaux
et l'analyse ironique qu'en a faite M. Jamin, je rétablirai en entier un pa-
ragraphe que M. Jamin a encore tronqué au détriment de la clarté et du
sens de mes idées. Le voici tout entier, et je souligne les lignes supprimées
par M. Jamin {voir t. LX, p. 538 et SSg) :
« Lorsque Lavoisier eut détruit le système de Stahl, on' ne lui laissa pas le temps d'expli-
quer les phénomènes physiques de la combustion. Si du phlogislique on dégage l'oxygène,
on voit qu'il n'y reste plus que la chaleur latente, et dès lors les idées de Stahl deviennent ab -
solument justes : Les corps simples sont des composés de chaleur et de matière : la chaleur
se dégage par la combinaison, et le composé devient d'autant plus stable et inerte au (ur et
à mesure que s'étant plus intimement combiné, il a perdu plus de chaleur, ce qui /ait que
le sulfate de baryte est un corps qu'on ne peut plus ouvrir, suivant l'expression allemande,
qu'en le soumettant aux températures les plus élevées. »
» On voit qu'en m'exprimant ainsi j'emploie le langage adopté par
Lavoisier qui faisait de l'oxygène la combinaison d'un radical inconnu avec
le caloricjue, le langage de Stahl (consultez les opinions philosophiques de
M. Chevreul) et de ses successeurs, qui ont parlé très-savamment des corps
dépouillés de phlogistique, et doués, par suite, d'une grande stabilité. Iso-
lée de ce qui la précède et la suit dans mon Mémoire, la citation de
M. Jamin permet, en effet, de m'attribuer une hypothèse et un style qui
paraîtront ridicules aujourd'hui.
« J'ai écrit, connue me le reproche M. Jamin, les mots : chaleur Intente
ou phlogistique. Si j'avais pu deviner, il y a dix ans, que M. Jamin ferait
aujourd'hui île phlogislique un adjectif, ce qui est bien hardi, j'aurais
prudemment écrit, en renversant l'ordre des mots, phlogistique ou chaleur
27..
( 208 )
latente. Mais comme le mot phlogistique est un substantif, je peux consi-
dérer le terme au moins bizarre de chaleur phlogistique, connue appartenant
en propre à M. Jamin et non à moi-même à qui il l'attribue dans un passage
très-ironique de sa réponse.
» Je passe volontiers sur les termes désobligeants qui fourmillent dans la
réponse de M. Jamin qui n'a rien de pareil à me reprocber. Mais je dois,
pour mon honneur scientifique, relever une expression blessante contenue
dans cette phrase :
1 Tout le monde, dit M. Jamin (p. 29), en fait (des hypothèses), ceux qui les con-
damnent bruyamment comme ceux qui croient qu'elles sont un de nos moyens d'étude. «
)) Tout le bruit que j'ai jamais fait depuis trente-deux ans que j'ai pré-
senté mon premier Mémoire à l'Académie, je l'ai fait devant notre compa-
gnie. J'ai encore dans son sein des maîtres aimés et vénérés qui m'eussent
averti, si j'avais devant eux manqué de modestie et dont je n'ai jamais reçu
que des encouragements. Je ne puis admettre que M. Jamin ait pesé
mûrement tous les termes de cette phrase, sans quoi il aurait pensé que ce
n'est pas à un confrère plus jeune que moi dans la vie, dans la science et
dans l'Académie qu'il convenait de me conseiller le silence après avoir pro-
voqué cette discussion par des citations tronquées et par une critique que je
crois injuste et inopportune. »
CHIMIE OUGANIQUE. — Recherches relatives à l'action des chlorures de platine,
de palladium et d'or sur les phosphines et les arsines; par 3131. Aie. Cahours
et H. Gal.
« La triméthylphosphine retrace d'une manière si fidèle les propriétés
de la triéthylphosphine qu'il semblait superflu de répéter sur cette sub-
stance des expériences semblables à celles que nous avons relatées relati-
vement à l'action réciproque du bichlorure de platine et de la combinaison
éthylée. Nous avons cru néanmoins devoir entreprendre cette recherche
afin de nous assurer s'il ne se présenterait pas quelque différence dans la
conduite du phénomène. Il n'en est rien, ainsi que nous avons pu nous
en convaincre, et nous n'aurons en quelque sorte qu'à répéter ici ce que
nous avons dit dans notre première Note.
» Du contact de la triméthylphosphine et du bichlorure de platine nais-
sent deux produits, l'un jaune et l'autre blanc, possédant luie composition
identique et présentant des apparences exactement semblables à celles des
composés que fournit la triéthylphosphine. L'insolubdilc du sel blanc dans
( 209 )
l'éther et la solubilité du sel jaune dans ce liquide permettent, comme
dans le cas de la phosphine éthyU^e, d'opérer la séparation de ces corps
d'une manière complète.
» Affectant la forme de prismes opaques jaune de soufre lorsqu'd se sé-
pare d'une dissolution alcoolique, le sel jaune se dépose d'une solution
éthérée sous la forme de prismes transparents jaune de succin.Ce produit se
transforme dans le composé blanc isomérique, sous les diverses influences
que nous avons signalées à l'égard de la combinaison éthylée.
» Mis en présence d'une dissolution alcoolique de bromure et d'iodure
de potassium, il reproduit des phénomènes analogues à ceux qui résultent
du contact des mêmes dissolutions avec le sel jaune formé par la triéthyl-
phosphine.
» Considérant comme inutile de pousser plus loin l'énumération de ces
analogies, nous nous bornerons à citer les analyses qui établissent les for-
mules des sels jaune et blanc :
I. o*'',354 de sel jaune ont donné, par leur combustion avec l'oxyde de cuivre, o*'',i47
d'eau, et o^'',228 d'acide carbonique.
II. o8'^,382 du même produit ont donné o^', 257 de chlorure d'argent.
III. 06'', 479 du même échantillon ont donné o^"', 222 de platine métallique.
IV- o«%389 de sel blanc ont donné, par leur combustion avec l'oxyde de cuivre, o^'', 147
d'eau et o5'',247 d'acide carbonique.
Résultats qui, traduits en centièmes, conduisent aux nombres suivants :
r. II. m. IV.
Carbone i7î56 » » i7)36
Hydrogène 4)^' " " 4i47
Chlore » 16, 68 » v
Platine • » 4^ > ^^ "
qui s'accordent avec la formule
Ph(C='H^)'PtCl.
» Cette dernière exige en effet :
C 36, o 17,18
H' 9,0 4,28
Ph 3i,o 14,80
Pt 98,0 46,98
Cl 35,5 16,96
209,5 100,00
» On voit donc que la trimétliylpliosphiue réduit, à la manière de son
( 2IO )
homologue éihylé, le bichlorure de platine, et le ramène à l'état de proto-
clilorure, avec lequel elle forme deux composés isomériques dont les pro-
priétés vnrient suivant le mode de préparation.
» Le sel jaune, insoluble dans l'eau pure, se dissout dans ce liquide lors-
qu'on lui ajoute une certaine quantité de triméthylphosphine, et laisse dé-
poser, par l'évaporation, un produit cristallisable qui paraît être le corres-
pondant du sel de Reiset.
» Une solution concentrée de bichlorure de platine forme, dans la
dissolution de co produit, un précipité semblable à celui que nous avons
signalé dans notre dernière Note, relativement à la combinaison éthylée.
ACTION DU BICHLORURE DE PLATINE SUR LES ABSINES.
« Les phosphines formant, avec le protochlorure de platme, des com-
binaisons qui correspondent aux sels de Magnus et de Reiset, il y avait
quelque intérêt à rechercher si les arsines ne se comporteraient pas d'une
manière toute semblable. Les analogies si frappantes que présentent ces
deux groupes de combinaisons le faisaient pressentir, l'expérience a plei-
nement réalisé ces prévisions. Nous avons pu nous procurer, en effet, en
nous plaçant dans des circonstances analogues à celles que nous avons
signalées dans nos précédentes Notes, des combinaisons de composition
analogue, et présentant l'isomoriihisme le plus complet. Nous allons
décrire en quelques mots le mode de préparation de ces produits.
» Si, à une dissolution aqueuse concentrée de bichlorure de platine,
additionnée de son volume d'alcool, on ajoute, goutte à goutte, de la tri-
éthylarsine, en agitant vivement, après chaque addition, pour établir un
contact intime entre toutes les parties du mélange, celui-ci s'échauffe nota-
blement. La couleur brun foncé, que présentait le liquide au début, va
s'affaiblissant graduellement, et finit par devenir d'un jaune légèrement
brunâtre lorsque la réaction est terminée.
» La liquciu-, abandonnée au refroidissement, laisse bientôt déposer des
cristaux jaunes de soufre, que l'éther sépare eu deux substances distinctes,
l'une se dissolvant avec facilité dans ce véhicule, tandis que l'autre y est
complètement insoluble.
)) La solution éthérée, étant abandonnée à l'évaporation spontanée dans
un petit cristallisoir à fond plat, laisse déposer de gros cristaux jaunes de
succin, d'une transparence parfaite, qui ressemblent de la manière la plus
complète au sel jaune formé par la triéthylphosphine avec lequel ils sont
isomorphes.
{ 211 )
» En opérant sur une dizaine de grammes de matière, on obtient des
prismes volumineux et d'une grande netteté qui atteignent au iDoins t cen-
timètre de côté. Dissous dans l'alcool bouillant, ce produit s'en sépare par
le refroidissement sous la forme de prismes opaques plus déliés d'un jaune
de soufre.
» Soumis à l'analyse, ce composé nous a donné les résultats suivants :
I. o'"", 35o d'un premier échantillon ont donné, par leur combustion avec l'oxyde de cuivre,
o'^iGi d'eau et o"", 3o8 d'acide carbonique.
II. G*'', 4o3 du même produit ont donné o'^igS de chlorure d'argent.
III. o''', 5oo du même produit ont donné o^'', i63 de platine.
IV. q"',382 d'un second échantillon ont donné o'^ii^ô d'eau et o^"', 339 d'acide carbonique.
» Ces résultats, traduits en centièmes, conduisent aux nombres suivants :
I. II. m, IV.
Carbone 23,98 » » 5'4>'9
Hydrogène 5, 08 » » 5, 11
Chlore >> 12, 1 5 » »
Platine » » 82,60 >
qui s'accordent avec la formule
Ai(C*H>)',PtCl.
» Cette dernière exige en effet
C'= 72,0 24,38
H" i5,o 5,01
As 75,0 25, o4
Pt 98,0 32,83
Cl 35,5 i2,o4
295,5 100,00
)) La portion que l'éther a refusé de dissoudre se dissout avec facilité
dans l'alcool bouillant, et se dépose de ce liquide par le refroidissement
sous la forme de longs prismes d'un jaune très-pâle. Lorsque la liqueur
qui renferme les cristaux s'est refroidie très-lentement, on obtient des
prismes minces qui atteignent plusieurs centimètres de longueur si l'on
opère sur environ 10 grammes de matière.
« Soumise à l'analyse, cette substance nous a donné les résultats sui-
vants :
I. 0^,452 de matière ont donné, parleur combustion avec l'oxyde de cuivre, o"',207 d'eau
et o''',4o5 d'acide carbonique.
( 212 )
II. o«'',429 ^" même produit ont donn<'- o*'',2i2 de chlorure d'argent.
m. o*',45i du même produit ont donné, par la calcinaiion, o8%i47 de platine.
» Ces résultats, traduits en centièmes, conduisent aux nombres :
I. n. m.
Carbone 24,42 » »
Hydrogène 5, 09 » ■>
Chlore » 12,12 »
Platine » » 32 ,48
qui s'accordent, comme on voit, avec la formule précédente, et établissent
de la manière la pins nette l'isomérie de ce produit avec le sel jaune de
succin.
)) Les arsines se comportent donc, ainsi qu'il résulte des faits que nous
venons de rappeler, de la tiiênie manière que les phosphines dans leur
contact avec le bichlonire de platine.
» Les sels jaune et blanc, dont nous venons d'indiquer la formation,
agissent sur des solutions alcooliques de bromure, d'iodure de potassium
et d'acétate de potasse, de la même manière qne leurs analogues dans la
série phosphorée. Quant à ces corps, ils diffèrent des composés qui résid-
tent de l'action réciproque du bichlorure de platine et de la Iriétliylplios-
phine, en ce que la variété jaune ne paraît pas se transformer dans la
variété blanche, sous les influences qui permettent d'opérer cette modi-
fication dans la série phosphorée.
» Les sels jaune et blanc s'unissent à la Iriéthylphosphine en donnant
naissance au correspondant du sel de Reiset
[As(Cm»)']%PtCl.
» action du clilorurc de palladium sur la Iriéthylarsine. — Le chlorure de
palladium se comporte à l'égard de la triéthylarsine do la même manière
qu'avec la triéthylphosphine. Les phénomènes qui se produisent dans le
contact de ces corps sont exactement les mêmes, et nous n'aurions en
quelque sorte qu'à répéter ce que nous avons dit dans notre seconde Note.
" Le produit qui résidte de l'action réciproque de ces corps se présente
sous la forme de beaux prismes, d'un jaune légèrement orangé, très-volu-
mineux, d'une transparence parfaite, qui sont isomorphes avec ceux que
fournit la Iriéthylphosphine. Leur composition est exprimée par la fornude
As(C'nn%PdCl.
( 2.3 )
ACTION DU SESQUICHLOEURE u'oR SUR LA TRIÉTHYLARSINE.
» Une dissolution alcoolique de sesquichlorine d'or s'échanffe lorsqu'on
y verse de la triéthylarsine goutte à goutte, et ne tarde pas à se décolorer.
Il est important d'éviter l'élévation de la température. Si l'on négligeait en
effet cette précaution, une certaine quantité d'or pourrait se séparer sons
forme métallique, et dans ce cas l'opération serait manqnée. La liqueur
incolore étant filtrée, puis soumise à l'évaporation spontanée, laisse déposer
de magnifiques prismes complètement incolores, entièrement semblables à
ceux que fournit la phospbine triéthylée, mais qui sont plus volumineux et
possèdent un plus grand éclat.
» Cette matière, dont nous ne décrirons pas ici les propriétés, présente
une constitution parfaitement analogue à celle de la combinaison phospho-
rée, ainsi que l'établissent les analyses suivantes:
I. o^^rjoû de matière ont donné, par leur combustion avec l'oxyde de cuivre, o»'', i^o d'eau
et o^'',268 d'acide carbonique.
II. o*'',4i8 du même produit ont donné o"',i54 de chlorure d'argent.
III. o*'',497 du même produit ont laissé, par la calcination, o5'',249 d'or métallique.
» Ces résultats, traduits en centièmes, conduisent aux nombres sui-
vants :
I. II. III.
Carbone 18,26 » »
Hydrogène 3 ,90 » »
Chlore » 9 > °9 "
Or 11 o 5o, 12
et s'accordent avec la formule
As(C*H»)',Au'Cl,
d'où l'on déduit les noimbres
C" 72,0 18,12
H'-' i5,o 3,78
As 75,0 18,87
Au' 200,0 5o,3i
Cl ,..., 35,5 8,92
397,5 100,00
» La triéthylarsine se comporte donc, ainsi qu'il résulte des faits relatés
C. R., 18-0, a» Semestre. (T. LXXI, N<> 5.) 28
( 2,4 )
clans cette Note, de la même manière que la triéthylpliospliine, résultat au-
quel on devait s'attendre, en raison des analogies si profondes que l'on
observe entre ces deux composés.
» Quelques expériences que nous avons tentées avec la triélhylslilhine
tendent à conduire à la même conclusion. »
PHYSIQUE. — Recherches thermiques sur le caractère métallique de l hydrogène
associé au palladiuui (suite) : Sur un couple vollaïque dans lequel l'hydro-
gène est le métal actif; par M. P. -A. Favre.
« L'année dernière j'ai eu l'honneur de communiquer à rAcadémie(i)
les résultats des recherches que j'avais entreprises sur la chaleur mise en
jeu lorsqu'une lame de palladium remplace la lame de platine d'un couple
de Smée ou bien la lame négative d'un voltamètre à lames de platine et
fixe l'hydrogène du sulfate d'hydrogène électrolysé; ou bien encore lors-
qu'une lame de palladium, préalablement chargée d'hydrogène, remplace
la lame positive du même voltamètre et fixe sur l'hydrogène qu'elle ren-
ferme le radical métalloidique, SO', du sulfate d'hydrogène électrolysé
pour reconstituer cet électrolyte.
» On se rappelle que l'interprétation de ces résultats fournissait de
nouvelles preuves du caractère métallique de l'hydrogène à ajouter à celles
que T. Graham venait de faire connaître.
» Pour ne pas laisser incomplètes mes recherches thermiques sur la
nature métallique de l'hydrogène associé au palladium, il restait à faire
une dernière expérience, afin de démontrer que cet hydrogène, lorsqu'U
remplace le métal actif d'un couple voltiiïque, constitue le métal actif d'un
nouveau couple. Il fallait établir que ce nouveau couple possède une
énergie voltaique (exprimée en calories) qui lui est propre, et qu'en l'asso-
ciant à d'autres cou|)les de même nature on peut former une pile suscep-
tible de développer un courant dont Vénergie, exprimée aussi en calories,
est également bien déterminée.
» C'est ce que j'ai réalisé on opérant de la manière suivante :
» Dans un couple de Daniell, j'ai remplacé la lame {le zinc amalgamée,
qui baigne dans l'acide sulfurique siilfisanuuent dilué, par une lame de
palladium chargée d'hydrogène.
» Le nouveau couple, ainsi fornié, fonctionTie en tout couHiie le couple
(i) Comptes rendus, séances des 'j et ?8 juin i86g.
(215)
ptiinilif : seulement c'est l'hydrogène, et non |ilus le zinc, qui joue le rôle
de niélal actif, en se substituant au cuivre du sulfate de cuivre électrolysé;
et, comme dans le couple de Danieil, ce dernier métal se dépose sur le
pl.itine qui plonge dans le sulfate de cuivre que renferme le vase extérieur.
I) Dans une tiès-procliaine Communication, qui sera la seconde que
j'aurai l'honneur de taire à l'Académie sur V énercjie vollaùjiie des couples,
je ferai connaître l'énergie voltaïque du coujile hydrogène et plaline ac-
tionné par le sulfate de cuivre. Cette énergie est faible et peut être déter-
minée ex|)érimentalement ou bien pai- le calcul et à l'aide des données
numériques qui m'ont été fournies par des expériences antérieures ( i ).
Mais si, comme je viens de le dire, l'énergie voltaïque de ce nouveau
couple est faible, il suffit, comme pour toute autre espèce de couple, d'en
réunir un nombre suffisant pour obtenir une pile capable de développer
un courant très-énergique et susceptible d'opérer la ségrégation chimique
des sels qui s'électrolysent le plus difficilement. »
N03IINATI0NS.
L'Académie procède, par la voie du scrutin, à la nomination d'une
Commission chargée de juger le concours du prix de Statistique pour
l'année 1(870.
MM. Hienaymé, Mathieu, Ch. Dupin, Passy, Boussingault réunissent la
majorité des suffrages.
L'Académie procède, par la voie du scrutin, à la nomination d'une Com-
mission de neuf Membres, pour juger le concours des prix de Médecine et
de Chirurgie.
MM. Cl, Bernard, Cloquet, Nélaton, St. Laugier, Bouillaud, Andral,
Longet, Robin, I^arrey réunissent la majorité des suffrages.
MÉMOIRES PRÉSENTÉS.
M. jVetter adresse, de Rennes, une Note relative aux soins à prendre
pour détruire, après la variole et pendant la ])ériode de dessiccation des pus-
(i) Comptes rendus, séances ilcs 7 t't 8 juin et du 5 juillet i86f).
28.
( 51^i )
tnips, les croûtes qui entourent le lit du malade. En étalant un drap autour
du lit, et l'enlevant à mesure qu'il se couvre de débris cutanés, pour dé-
truire ces débris par le feu, l'auteur a observé une diminution notable dans
la transmission de la maladie. C'est d'ailleurs un fait admis en Médecine
que, dans toutes les fièvres éruptives, rougeole, scarlatine, variole, c'est
surtout à l'époque de la convalescence qu'il y a danger poiu' l'entourage du
malade, sans doute à cause de la desquammation elle-même : enfin on s'est
servi autrefois pour les inoculations, à défaut de pus variolique, des croûtes
elles-mêmes.
(Renvoi à la Section de Médecine.)
M. Cauvet adresse un Mémoire « sur la structure du Cytinet (Cytinus
hypocyslis, L.) et sur l'action que produit ce parasite sur la racine des
Cistes ». Une seconde Partie de ce Mémoire est relative à la structure de la
racine du Cisliis monspcliensis.
(Renvoi à la Section de Botanique.)
M. RÉZARD deWouves adressc, poiu' être joiute au Mémoire présenté par
lui le 6 juin dernier, sur l'émétique comme traitement abortif de la variole,
luie observation qui vient à l'appui de ce mode de traitement.
(Renvoi à la Commission précédemment nommée.)
M. V. Cassaigxes adresse, de Marseille, une Note relative à la filtration
naturelle des eaux de rivière, et à l'application qu'il croit pouvoir en faire
prochainement aux eaux de la Durance.
(Commissaires : MM. Dumas, Moiin, Combes, H. Sainte-Claire Deville.)
M. Ehri.icii adresse, d'Alexandrie, une Note relative au choléra.
(Renvoi à la Commission du legs Bréant.)
M. Goubet adresse une Note relative à la théorie des principes île la
Géométrie élémentaire.
(Renvoi à la Commission nommée i)our les Communications
relatives au postulatum d'Euclide.)
( 217 )
CORRESPOXD ANCE
M. H. Lebert, nommé Correspondant pour la Section de Médecine et
de Chirursie, adresse ses remercîments à l'Académie.
MM. AitsoN, BoxxET, Hoffmann, Kxoch, Le Rors, Luschka, Marion,
Sai\t-Cyr adressent des remercîments à l'Acadéiiiie, pour les distiuclions
dont leurs travaux ont été l'objet dans le concours de l'année 1869.
GÉOMÉTRIE. — Délerinination des cléinenls de rarêle de rebroussement
d'une surface dévelopjiable, définie par ses équations tangenlielles. Noie
de M. L. Painvin, présentée par M. Bertrand (1).
« 1. Il arrive très-fréquemment que les équations tangentielles d'une
surface développable résullenl immédiatement des données d'une question,
ou s'en déduisent par des calculs généralement simples, tandis que la re-
cherche (les équations ordinaires de son arête de rebroussement présente
des difficultés très-grandes et souvent insurmontables. Il est donc impor-
tant d'avoir des formules qui permettent d'étudier, sur les équations tan-
gentielles elles-mêmes, les propriétés de cette arête de rebroussement; ces
formules, qui n'ont jamais été données, font l'objet de cette Note.
» 2. Notations :
u, p, U' sont les coordonnées tangentielles d'un plan, c'est-à-dire les in-
verses des coordonnées à l'origine de ce plan; les axes des coordon-
nées sont supposés rectangulaires. Si ce |)lan est tangent à une surface
développable, ce sera le plan osculateur en un certain point M de
l'arête de rebroussement;
.r, j-, z seront les coordonnées du point M.
» Je désignerai, en outre, par
a, p, y, les angles de la tangente en M à l'arête de rebroussement ;
X, p., V, les angles de l'axe du plan osculateur;
^, v7, Ç, les angles de la normale principale ;
(i) L'Académie a décidé que cette Communication, liien ((ue dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée eu entier au Compte rendu .
( 2.8 )
lis, l'élément de l'arête de rebroiissement ;
d'y, l'angle de deux tangentes infiniment voisines;
dz, l'angle de deux plans osculateiiis infiniment voisins;
6, l'angle au sommet du cône droit osculateur;
R, le rayon de courbure;
T, le rayon de torsion.
» 3. Une surface développable étant définie par deux équations langen-
lielles, telles que
/{a, i-, u') = o, F(u, V, w) = o,
nous pouvons regarder u, v, w comme des fonctions déterminées d'un cer-
tain paramètre arbitraire. Pour siinplifiei" l'écrituie des formidcs, nous po-
serons
/
,,
(0
a, = du, a., = d'- u,
V, = dv, l'o = d'- <,>,
H', := d<,y, M'o = d'- w;
(3)
(lu ih
TT -'^^ V - ''^
A =
u V
i',
w =
dA
cl\
ilA
(/A
elA
\ ' au, «Cj " an'.j
(4) R ^ -{Ud'u+Yd'v-hWdUv)
w
II'
?/.> l*., U'n
» On aura alors les formules suivantes :
(II)
V
z
w
( ) 'î^ — '!l — El —"^
(3) ,/, = £'^^^/u^-^V.!
Wj.
;ni
COSfi
: s/u'
, > cosa cos p cos'/
I
(3)
cosÇ
6'v/u^-(-v',+w^
cos» cosÇ
cW:— (l'V, (.■l), — «W, hV,— .'U, £"^„..t.„:-4.„,^y/uj+v;+"\V^
. , rfcos).
( 219
d COS p.
dcoiv
■u.
flV]
;2)
(3)
f/cosa
rfcosS
rfcos7
£ fl COS E = Il — ■- ^ — u , A
.(,/'
-hv
3 5
A
.'(U
■
V^+Wl)
3
3
\/u'
+
('2+«''
(U!
-W.!
l) dz — - ££'
„^U;+V;+W^
'2) r/a=s's"'^"^^"^'"'
(V)
(3) R=:£
v/^
H
(4) T =-££'£" ^(U
w
« Les lettres £, e', c" désignent rt i ; ainsi on a £ =: ± i, e' = ± j,
£" = ± I ; j'ai adopté des accents différents ponr conserver au choix des
signes + et — toute l'indépendance qu'il peut avoir.
» Remarque I. — Dans les formules qui précèdent, les cond^inaisons des
quantités £, c', e" ont été faites de manière à vérifier constamment, en gran-
deur et signes, les importantes relations (J.-A. Serret, Calcul différentiel,
p. 4oH; ou Bertrand, Calcul différentiel, p. 622) :
dx = ciscosa; dcosa =^ cos,^clc; ^cosX = cos^(/t;
dcosS, = — cosada — cosldx;
» Remarque II. — Si l'on assujettit les qiianlités R et T à élre jositives,
on a les conditions suivantes :
(VI)
£'=—£, si A > o;
£'==+£, si A < o ;
+ 1, si -->o;
A
H
» On voit alors que les formules précédentes ne renfermeront plus que
la seide quantité £ = ± i ; on fixera sa valeur suivant les besoins de la
question.
» Rcin<irquc 111. — Les foruudes que je viens de donner ne sont pas ap-
( 220 )
plicables au cas où la développable est circonscrite au cercle imaginaire de
l'infini. Cette variété de surfaces développahles présente d'ailleurs des pro-
priétés très-singulières, mais ce n'est pas le lieu d'en parler.
» 4. Ou appelle cône droit osculaleur en M un cône de révolution ayant
son sommet en ftl et touchant trois plans tangents infiniment voisins.
» Les équations tangentielles du cône droit, oscnlateur en M(j", 7, z),
sont
l Ux + Yf + Wz —1 = 0,
(VU) ■ fufcos).
= U^ + V^ + W=;
;^cos«)+.v(cos,a-;^;cos,3
W(cosy — y C0S7J
U, V, W sont les coordonnées tangentielles variables.
» Désignons par 9 Vangfe ai(ju que fait le demi-axe du cône oscnlateur
avec la demi-droite définie par les angles c, /3, 7; et soient a', p', 7' les
angles avec les axes positifs des coordonnées, du demi-axe que nous
venons de définir; si l'on pose
(VIII)
(l) d'j) = — £i" \fl'7-
on aura, sans andjiguïté,
dT%
(2)
tango =
dr'
sin6 = -—5
dfù
cos» =
dw'
i cosa'= cosacos5 — cosXsin5,
cos/3'== cos/3cos5 — cos|7,sin5,
COS7COS6 — cosv sinS;
COS7
on sait que l'axe du cône oscnlateur n'est autre que la génératrice de la
développable t édifiante.
» 5. L'application de ces formules à la surface développable
(•)
ta -+- 4'- 4- n>^ =
h-v'
m'a conduit à des résultats simples et remarquables, que je vais signaler.
» La seconde des équations (i) représente un ellipsoïde dont les axes
sont a, h, c; la première équation représente une sphère concentrique dont
le rayon est /■.
» On sait que la surface développable circonscrite aux denx surfaces (i)
est dii huitième ordre et de la cpintrièmc classe, et que son arête de rebrons-
senient est du douzième ordre et de la quatriètne classe.
( 221 j
)) Après avoir posé
A = h-- c\ P. = r== - a-, C = a-- Ir
(A, = i--, B,= i--, C.= i--,
on Irouve, pour les coordonnées .r, j-, z du point M, les valeurs très-
simples
» On trouve encore que :
» i" Les axes des plans osculateurs sont parallèles aux génératrices du cône
A, x^+ B,j^+ C, s=' = o.
» 2° Les tangentes de l'arête de rebroussement [ou génératrices de la déve-
loppable) sont parallèles aux génératrices du cône
x' r' ~-
x; + i; + c: = °5
ces deux cônes sont réciproques; les propositions i*^ et 2" sont des con-
séquences l'une de l'autre.
M 3° Les normales principales sont parallèles aux génératrices du cône
A, A' B, B= C, C=
— l 1 -, 1 r- = o.
X-' y- z-
» L'arête de rebroussement est une courbe rectifiable; en représentant
par s la longueur d'un arc quelconque, on a
3
(4) s = const. - — -— - {k\iî' + B^- + C7U'-)2
Al ri] C"!
» Si l'on désigne par p la distance du centre couiniuii à un point quel-
conque M de l'arête de rebroussement ; si 11 et T sont le rayon de cour-
bure et le ra\on de torsion en ce point, on a les équations suivantes,
remarquables par leur sim|)licité,
(5) f =. r^- + [s + k)\
(6) r-V^,-^^^mnv,
(7) '■'I^='^^('^ + /')"-.,
(8) \ = '~-^
c. R., i8-;o, i' Semestre. (T. LXXl, N" ô.) 29
( 222 )
S est la longueur de l'arête de rebroussement, comptée à partir d'un cer-
tain point fixe; //, v, w sont les coordonnées du plan osculateur à l'ex-
trémité M de l'arc s ; A est une constante.
» Si l'on suppose, par exemple,
a>b^c et a~;>r';^b,
l'arc s sera compté à partir du plan des xj\ et la constante k aura pour
, \l~ A, B,
valeur r- — •
Cl
» 6. Je me suis également occupé de la courbure des surfaces définies
par leur équation tangentielle ; je demanderai à l'Académie la permission
de lui soumettre prochainement les résultats relatifs à cette (pieslion. »
PHYSIQUE. — De la possibilité d' obtenir des signaux de feu d'une très-grande
portée. Note de M. F. Lucas, présentée par M. Ed. Becquerel.
« Dés l'année 1867, certaines considérations théoriques m'ont conduit à
penser que le problème des feux de brume, pour les phares et les télégraphes
lumineux, pourrait probablement être résolu au moyen de la décharge
périodique d'un puissant condensateur électrique. Une JNote que j'avais eu
l'honneur d'adresser à ce sujet à l'Académie a été publiée dans les Comptes
rendus du 23 septembre.
» Le point de départ de ma théorie consistait dans Vextiéme petitesse de
la durée d'une étincelle électrique. A défaut d'autres données numériques,
j'avais assimilé la durée des grandes étincelles à celle de l'éclair, qu'Arago
disait inférieure au nnllionicme de la seconde. Cette hypothèse était erronée,
mais je suis en mesure de la rectifier.
» Les recherches expérimentales sur la durée des étincelles électriques
que j'ai entreprises, dans ces derniers temps, en collaboration avec M. Cazin,
professeur de physique au Lycée Bouaparle, permettent de substituer une
donnée certaine à la donnée hy|)othélique dont j'avais d'abord fait usage.
» Deux Notes que nous avons présentées, en nom collectif, à l'Académie
des Sciences, et qui ont été insérées dans les Comptes rendus des aS avril et
20 juin 1870, ont établi que la durée j>^ de l'étincelle électrique est liée à la
surface s de la batterie et à la distance explosive / par la formule
(>) j = h{i-a'),i-b'),
a al b étant deux fractions indépendantes de la nature et du diamètre des
boules.
(2a3 )
» En prenant pour unité de surface ^ celle de l'armature extérieure
(1243 centimètres carrés) d'une des jarres de Leyde dont nous disposions,
et pour unité de distance explosive l le millimètre, nous avons trouvé
i a = o,8o36i,
^^^ ( /; = 0,93955.
» Le paramètre h reste indépendant du diamètre des boules, pourvu que
ce diamètre soit au moins de 7 millimètres; mais ce paramètre dépend de
la substance des boules.
)) En prenant le millionième de seconde pour unité de temps, nous avons
obtenu, pour des boules de platine,
(3) h = \Ç>i.
» L'étain, le charbon, le laiton, le cuivre et le zinc nous ont donné des
valeurs un peu plus grandes.
» Dans nos expériences, les étincelles jaillissaient à l'air libre; une faible
résistance était interposée entre la batterie et les boules; les surfaces de
ces dernières étaient recouvertes de la couche pulvérulente que font naître
les fortes décharges. Les mêmes conditions seront toujours faciles à rem-
plir.
» La formule (i) montre que si j et / augmentaient indéfiniment, j ten-
drait vers un maximum égal au paramètre h. Or c'est en faisant croître la
surface du condensateur et la distance explosive qu'on peut augmenter la
puissance de l'étincelle. Par conséquent :
» Loisquon augmente l'énergie de la décharge électrique, la durée de l'étin-
celle tend vers un maximum déterminé.
» Ce maximum est de 161 millionièmes de seconde pour des boules de
platine. Ce métal est inoxydable et peu volatil; c'est lui qui donne aux
étincelles les moindres durées; il conviendrait parfaitement pour créer les
signaux de feu périodiques dont j'ai parlé plus haut.
» Supposant qu'on ait écarté les deux boules de platine d'une quantité
convenable, imaginons :
» j° Que l'on construise un condensateur assez puissant pour donner à l'é-
tincelle électrique une intensité de 10000 becs de Carrel ;
» 2° Que ion mette en œuvre une source d' électricité statique assez abon-
dante pour faire succéder les décharges de deux en deux secondes.
» Avec une période aussi courte, qui permettrait à l'éclat de se repro-
duire 3o fois par minute, l'observation du signal périodique dont il s'agit
29..
( 224 )
serait aussi facile, aussi imtnanqunble que celle d'un feu continu de même
intensité.
» Comme, toutes choses égales d'ailleurs, la portée Inmineuse d'nn
si«ïnal est indépendante de sa durée et dépend seulement de son intensité
réelle, notre signal aurait la même portée qu'un feu permanent d'une in-
tensité de loooo becs Carccl, soit 5oo fois l'intensité de lare vol laïque du
phare de la Hève. Il serait donc visible de très-loin, alors même que l'at-
mosphère serait chargée de brumes.
» Or, la dinéed'un éclat étant inférieure à i6i millionièmes de seconde,
et, à forliori, inférieure à-^^ de seconde, le rappoil de la duiée d'un éclat
à celle d'une éclipse serait inférieur à 7^^.
» Pendant un temps quelconque, une heure, par exemple, il n'y aurait
dépense de lumière que pendant la dix-millième partie de la durée totale
du fonctionnement du feu périodique. La quantité de lumière dépensée serait
inférieure à celle cpie dépenserait, dans le mente temps, une seule lampe Carcel.
» Ce mode de distribution de la lumière présenterait donc un immense
avantage.
» Ainsi se trouve confirmée, par des considérations nouvelles et basées
sur une donnée numérique certaine, la possibilité d'obtenir^ au moyen de
i étincelle élettriaue, des siijnaux de feu d'une portée considérable.
» Suffira-t-il, pour obtenir ce grand résultat, d'atteler en assez grand
nombre les engins dont on fait usage aujourd'hui dans les cabinets de phy-
sique? Faudra-t-il construire des engins d'une force nouvelle, jdus puis-
sants que ceux qu'on emploie dans les laboratoires les mieux montés?
» Cette question ne peut être élucidée que par l'étude jîliotométrique
des étincelles. Or les seuls travaux qui, ;i ma connaissance, aient été faits
sur ce sujet, sont dus à Masson. Ils datent d'une trentaine d'années et, i)ar
conséquent, remontent à une époque où l'on ne savait produire l'étincelle
électrique que sur une très-petite échelle. Les Mémoires de Masson, malgré
leur incontestable mérite, ne sauraient donc pas indiquer avec certitude
les intensités des fortes étincelles qu'il conviendrait d'employer pour des
signaux de feu.
» S'il m'est possible d'exécuter, comme j'en ai le projet, les expériences
nécessaires pour compléter les travaux de Masson relativement à la photo-
mélrie électrique, j'aurai l'Iionneur de communiquer à l'Académie les
résultats de ces recherches. «
( 225 )
ASTRONOMIE PHYSIQUE. — Etuclc pltotngrnjihiciiie du Soleil à V Observalnire
impérial de Paris. Note de M. L. Sonrel. (Extrait.)
« J'ai l'honneur de présenter à l'Académie des spécimens des études
photographiques solairt^s entreprises à l'Observatoire impérial, giàce à la
bienveillance de M. Delaunay, directeur de cet établissement. Ces étiules
se poursuivent sans interruption, depuis le commencement d'avril. L'ap-
pareil dont je me sers est l'équalorial du jardin, à monture anglaise, dont
l'objectif a été travaillé par Foucault.
» Des quatre épreuves soumises aujourd'hui à l'Académie, deux sont des
soleils entiers, de ii et de i8 centimètres. Les deux autres sont la repro-
duction, l'une d'un groupe entier pour le 17 mai 1870, l'autre d'une por-
tion de ce même groupe, vu le lendemain. Ces deux dernières sont extraites
de soleils de 80 centimètres et de i"',70 de diamètre.
» Dans toutes ces épreuves, on distingue très-nettement l'ombre et la
pénombre des taches, la différence d'éclat de leurs diverses parties, enfin
les facules qui les avoisinent »
Après quelques détails, poiu- l'intelligence desquels l'examen des photo-
graphies elles-mêmes est nécessaire, l'auteur ajoute :
a J'ai pu déjà, grâce à l'emploi de grossissements très-variés, me faire
une idée de l'évolution des taches, et contrôler, par des observations dont
on ne peut contester la sincérité, les iflées que j'ai eu Thonneur de sou-
mettre à l'Académie en août 1869, et que je ne pouvais alors étajer que sur
des dessins très-consciencieusement faits. Les faibles grossissements me
servent à réiniir les éléments nécessaires à la détermination des trajectoires
des taches ; les forts grossissements doiuient les détails des taches. Leur
ensemble est une base indispensable à l'étude de la météorologie solaire.
Quand la série des groupes étudiés sera suffisante, l'exposé des résultats
obtenus sera l'objet d'un Mémoire spécial.
» Aujourd'hui je désirais surtout montrer le parti que l'on peut tirer
de la photographie pour entrer dans le détail de l'élude du Soleil. Il me
paraît démontré que, même avec un réfracteur dont l'objectif a un très-
long foyer, on peut faire des photographies astronomiques, si l'on se place
dans des conditions convenables, qui dépendent à la fois de l'éclat de
l'astre à photographier, du pouvoir optique de la limette et de l'état de
l'atmosphère le jour de l'expérience. »
( 226 )
CHIMIE ORGANIQUE. — Décomposition de l'acide oxalique. Note
(le ^I. P. Cables, présentée par M. Bussy.
« Contrairement à ce qui arrive pour les autres acides organiques,
quand on soumet à rélectrolysc une solution d'acide oxalique, on con-
state que non-seuI(Mi)ent l'acide ne se concentre pas au pôle positif, mais
qu'il éprouve à ce pôle une; perte considérable. Ou n'y trouve, en effet, que
de l'acide carbonique dû à l'action de l'oxygène qui se dégage à ce pôle(i).
>' Or l'oxygène se trouve ici dans les conditions que l'on désignait na-
guère encore sous le nom d^étnt naissant, état qui, selon M. H. Sainte-
Claire Deville, ne saurait exister, puisqu'à l'état libre les corps paraissent
avoir les mêmes propriétés; c'est-à-dire, dans le cas actuel, que si la for-
mation d'acide carbonique était due à l'état naissant de l'oxygène, à l'état
libre ce gaz devrait produire les mêmes phénomènes. C'est dans cet ordre
d'idées que M. Bussy nous pria d'examiner laction d'un courant d'oxygène,
sur ime solution d'acide oxalique à différentes températiu'es : voici les
résultats de nos expériences.
)) Dans un malras contenant une solution concentrée d'acide oxalique
pur, nous avons fait passer un courant d'oxygène pur. Au sortir du matras,
ce gaz lavé traversait deux flacons d'eau de baryte. L'appareil ayant élé
privé d'air, nous avons fait passer un courant d'oxygène |)endant trois
heures, et nul phénomène uo s'est manifesté à la température ordinaii'e.
Le matras a alor.s été chauffé au bain-marie vers loo degrés, et au bout
d'une demi-heure il s'était formé assez de carbonate de baryte pour que
nous ayons pu vérifier .ses caractères. L'expérience paraissait décisive. Mais
l'action de l'oxygène pouvait bien n'être que mécanique, ce qui nous en-
gagea à la répéler d'une autre façon.
» Le courant d'oxygène fui remplacé par un coiu-ant d'hydrogène pur
et l'expérience répétée dans les conditions premières. Or, à la température
ordinaire, l'eau de baryte ne se troubla j)as, tandis que lorsque nous chauf-
fions le matras vers loo degrés, elle accusait à sa sortie la présence mani-
feste de l'acide carbonique. Les deux gaz avaient donc agi de la même
façon, ils paraissaient n'avoir eu qu'une action mécanique, c'est-à-dire
avoir uniquement servi au lrai)s|wrl des jjroduils de la décomposition de
l'acide oxalique : l'acide carbonique et l'acide forniique.
(l) lîoiJRGdlN, Jniirnnl <lr Pliysiquc ft ili' Cliiniir, 4' S''ri<\ |). f)?., I. VIII.
( 227 )
» Mais nous n'avions pas constaté encore la formation de ce ilernier.
Pour vérifier sa présence, nous avons placé à l'entrée et à la sortie du ma-
tras, deux tubes contenant une solution de nitrate d'argent. Or, au bout de
deux heures, le nitrate n'était pas altéré à l'entrée, tandis qu'il était mani-
festement réduit à la sortie, sous l'influence des deux courants de gaz.
» Ces expériences nous paraissaient plus concluantes avec un gaz plus
inerte. Nous les avons reprises une troisième fois avec l'azote, et les ré-
sultats ont été absolument conformes aux premiers. Comme l'oxygène et
l'hydrogène, un courant d'azote favorise donc et rend bien manifeste la
décomposition ou peut-être mieux la dissociation vers loo degrés de la
solution aqueuse d'acide oxalique.
» Ces expériences ont les plus grands rapports avec celles de M. Gernez,
que rappelle M. H. Sainte-Claire Deville dans ses savantes leçons sur l'af-
finité (i). Elles contredisent au contraire celles de M. Giov. Bizio (2) qui
attribuait la décomposition de lacide oxalique en dissolution à l'action de
l'oxygène de l'air.
» Ces recherches ont été faites au laboratoire de l'école pialique de
l'école de pharmacie. »
CHIMIE OliGAlNiQUE. — Transformation du cidomi en aldélijde, par snhstiluliou
inverse. Note de M. J. Personne, présentée par M. Bussy.
« La transformation des acides chloracétiques en acide acétique ordi-
naire, obtenue par M. Melsens, en substituant l'hydrogène au chlore de
ces composés à l'aide de l'amalgame de sotlium, m'a fait penser qu'il serait
possible d'obtenir un résultat semblable avec le eliloral C^HCl'O-, et de
le transformer ainsi en aldéhyde C'H''0", type chimique dont il paraît
dériver.
» Cette transformation ne peut s'exécuter dans une liqueur alcaline; ou
sait, en effet, avec quelle énergie les alcalis transforment le chloral hydi até
en chloroforme et acide formique; mais elle s'effectue avec la plus giande
facilité par l'intermédiaire du zinc au sein d'une liqueur acide. Il stdfit de
mettre un pende tournure de zinc dans une solution d'iiydrate de chlor.d,
acidulée par l'acide sulfurique ou chlorhydrique, pour percevoir l)ientot
l'odeur de l'aldéhyde. En opérant dans une cornue munie d'un lécipient
(1) Leçim.i sur l'offiiiité professées n la Société ChimiijUi', j). 62, l86g.
(3) Bidklin de la Hociété Chimique, p. 4--9' '""*' 1870.
( 2'i8 )
bien refroidi parla glace, et en ayant le soin de n'ajonter l'acide étendu
que par très-petites fractions, la panse de la cornue étant chauffée vers
■+- 5o degrés, j'ai pu produire une tpiantité d'aldéhyde assez grande pour
la rectifier et en obtenir de Taldéhydate d'ammoniaque, en quantité suffi-
sante j)our en bien constater tous les caractères qui ne laissent aucun doute
sur sa nature. Outre l'aldéhyde, il se produit, dans ces circonstances, une
quantité considérable des polymères de l'aldéhyde, et surtout la paral-
déliyiie, qui nage eu couche huileuse à la surface du liquide distillé.
» Celte expérience fait voir que le chloral CMlCl'O- dérive bien de l'al-
déhyde C^H^O'', qu'il régénère par substitution inverse, de même que le
trichlorure acétique CHICFO^ ou chlorure; de dichloracétyle C*HC1^0-Cl,
son isomère de composition, dérive de l'acide acétique, puisque ce dernier,
traité au sein de l'eau par l'amalgame de sodium, se transforme en acide
acétique C^H'O*.
» J'ai réalisé, en outre, la combinaison de l'ammoniaque avec le choral
anhydre C'HCl'O-, AzH^ ou aldéhydate d'annnoniaqne trichloré, tout à
fait conq)arable à l'aldéhydate d'annnoniaqne CM4'^0-, AzH'.
» Ce composé s'obtient en faisant arriver très-lentement du gaz ammo-
niac sec dans un vase renfermant une très-petite quantité de chloral anhydre
bien refroidi : c'est un corps blanc, fusible et volatil ; son odeur est com-
parable à celle de l'aldéhydate d'ammoniaque; traité par l'acide sulfuriqu(>
concentré, il régénère le chloral anhydre, avec formation de sulfate d'am-
moniaque; enfin l'eau le découipose en chloroforme et tormiate d'ammo-
niaque.
» Si, pour effectuer cette combinaison, on opère sur des quantités de
chloral de plus de 2 à 3 grammes, et que le courant de gaz ammoniac ne
soit pas bien ménagé, la masse s'échauffe, malgré l'emploi d'un réfrigérant
énergique, et alors on obtient toujours, outre le produit princi|)ai (aldéhy-
dale d'ammoniaque trichloré), une quantité assez grande d'un liquide siru-
peux. L'examen de ce liquide m'a fait voir qu'il était constitué par du
chloroforme C-HCl% qui a été isolé par distillation, et par de la formamide
C'AzlFO", avec laquelle j'ai obtenu de l'acide cyanhydrique à l'aide; de
l'anhydride phosphorique. L'ammoiiiaque, en se combinant avec le chloral
anhydre, peut donc, selon les circonstances, s'tuiir directeiiunt à lui ou
provoquer son dédoublement selon l'égalité suivante
CMIC1'0--+- AzH^ = C-HCP-f- C=0=,AzIP.
» Quoique la production du chloral par 1 action directe du chlore sur
( 229 )
l'aldéhyde n'ait pu encore être réalisée, je pense que les faits que je viens
d'exposer, joints à la combinaison du chloral avec le bisulfite de soude
déjà connue, ne doivent plus laisser subsister le moindre donte sur la véri-
table constitution de ce corps, et qu'on doit considérer le chloral comme
de l'aldéhyde trichlorée. »
PHYSIOLOGIE EXPÉRIMENTALE. — Influence du développement hâtif des os
sur leur densité. Note de M. A. Sanson, présentée par M. Ch. Robin.
« J'ai fait connaître, il y a déjà plusieurs années, la théorie du phéno-
mène de la précocité des animaux de boucherie, réalisé empiriquement
par Backewell, an siècle dernier. J'ai montré que toutes les conséquences
de ce phénomène, d'une importance économique assez grande pour que
son auteur ait pu être, à juste titre, considéré comme l'un des bienfaiteurs
de l'humanité, ont leur point de départ dans l'achèvement hâlif du sque-
lette, manifesté par la prompte soudure des épiphyses des os longs, et par
l'éruption corrélative des dents permanentes ou dents d'adulte.
» L'examen anatoiniqne et physiologique de l'animal précoce fait voir,
en effet, que sous l'influence île cet achèvement hâtif de l'évolution du
système osseux, tous les autres tissus de son économie acquièrent, dans un
moindre temps, les propriétés qui les caractérisent à l'état adulte, lorsqu'ils
l'ont atteint normalement. Les propriétés organoleptiques de la chair ou
de la viande, par exemple, qui sont surtout à prendre en considération
dans ce cas, ne diffèrent point, chez les sujets d'une même race, au même
degré d'évolution des os, quel que soit le temps écoulé depuis leur nais-
sance. Ainsi, chez les espèces qui sont communément adultes après six ans,
ces propriétés se montrent après quatre ans avec leur développement com-
plet lorsque, dès ce moment, la soudure de toutes les épiphyses est indiquée
par l'évolution entière de la dentition permanente, ce qui est le signe exté-
rieur non douteux de la précocité, en vertu de laquelle l'animal a réelle-
ment vécu davantage en moins de temps.
» Mais la modification produite dans la durée de l'évolution du système
osseux par les circonstances de la précocité n'est pas sans influence sur les
propriétés particulières de ce système. C'est un fait bien connu que le sque-
lette des sujets précoces est toujours moins volumineux que celui des ani-
maux de même race, considérés comparativement comme tardifs. L'ossa-
ture fine de ces sujets est une de leurs qualités les plus estimées par les éle-
C. R., 1870, -l" Semestre. {T. LXXI, N» 5.) 3o
( ^3o )
vpurs. Ils pensent et disent aussi, en se fondant, par nne simple induction,
sur celle exiguïté coinparative dn squelette, qne cehii-ci est plus léger. Il y
a là une erreur sur laquelle mon but principal est d'appeler, dans cette
Note, l'altenlion par une démonstration rigoureuse.
» Nous prendrons pour base de cette démonstration deux fémurs pro-
venant de deux béliers mérinos, âgés l'un et l'autre de quinze mois. L'un
de ces béliers appartenait à une famille précoce qui vit dans le département
du I>oiret ; l'autre était un de ces méiinos communs qui peu|)lent le dé-
partement d'Eure-et-Loir, et qui sont connus sous le nom de méiinos de la
Beaiice. Les deux os ont été choisis de préférence, parce que ce sont ceux
chez lesquels la soudure des épiphyses a lieu d'abord. Toutes celles du pre-
mier sont entièrement soudées; elles sont toutes au contraire encore dis-
tinctes et séparées de la diaphyse dans le second. Nous désignerons le pre-
mier sous le nom de fémur précoce; le second sous celui de fémur commun.
Leurs densités respectives ont été déterminées au laboratoire de l'École
Normale, par M. H. Sainte-Claire Deville lui-même, que je me plais à
remercier ici de son obligeante condescendance.
» Voici maintenant les résultats numériques de l'examen de ces deux os :
Lonîjiieur Poids de l'os Volume de Tos
de la diaphyse. entier. entier. Densité,
m gr ce
i" Fémur précoce o,i3 Q^jQS 70 ^ j^4^
2° Fémur commun. .. . 0,16 99>4') 78 '>274
)) Les chiffres qui précèdent expriment le phénomène |)our tous les cas
analogues. La réduction de la taille et du poids absolu du squelette, chez
les sujets de même âge et de même race, doués de la précocité, s'accom-
pagne toujours d'une augmentation du poids spécifique ou de la densité
des os, contrairement à l'opinion reçue pai mi les éleveurs. Or, cette aug-
menialioii de densité fournit une confirmation nette de la théorie physio-
logique que j'ai donnée de la précocité. En elfet, elle ne peut être due qu'à
une proportion |)lus forte des matières minérales dans la constitution du sys-
tème osseux; et en déterminant les conditions de la méthode d'alimentation
qui réalise, à coup sur, la précocité du développement, j'ai fait voir que le
rôle |)rincipal, dans celte méthode, appartient aux graines ou semences ri-
ches en phosphate calcaire, qui entrent dans la ration à titre d'aliment com-
plémentaire. Par la direction ainsi imprimée à l'active nutrition du jeune âge,
les corpuscules osseux s'organisent en abondance; ils envaliissent plus tôt la
couche de chondroplastes qui séj)are les épiphyses de la diaphyse et par la-
( 23i )
quelle se fait en longueur l'accroissement de celle ci. Une fois la soutiure
opérée par l'ossification complète de cette couche de ch()n<lio[)l.Tsles, l'os
étant achevé, la nutrition n'a plus, comme dans les cas ordinaires, qu'à
pourvoir à son entretien. Celui-ci est devenu moins onéieux, si l'on peut
ainsi dire, en matières organiques, par le fait du moindre volume de l'os.
Celles qui auraient dû pourvoir à raccroissement du tissu osseux restent
donc disponibles et peuvent servir, avec les matières minérales de la ration
alimentaire, au développement ultérieur des parties molles, des masses mus-
culaires et adipeuses, notamment, dont l.i prépondérance caractérise à un
très-haut degré les animaux précoces. Cftte prépomlèraiice donne à leur
corps la forme cubique tant recherchée comme indice certain d'un fort
rendement en viande nette.
» C'est ainsi que la conformation particulière des animaux précoces de
boucherie est la conséquence nécessaire du phénomène physiologique tlont
la condition fondamentale vient d'être mise en évidence et que, contraire-
ment à l'opinion répandue parmi les éleveurs les plus habiles, la précocité ne
dépend point de la conformation, mais bien la conformation de la préco-
cité. D'où il suit, comme conclusion pratique, que, dans les opérations
d'élevage des animaux de boucherie, la méthode d'alimentation des jeunes
importe encore [)lus que la sélection des reproducteurs, puisque les beautés
relatives de la conformation, témoins de l'aptitude, sont toujours en raison
du degré de hàtivité de la soudure des épiphyses des os longs. »
PHYSIOLOGIE THÉRAPEUTIQUE. — De l'action des alcalins sur l'organisme. Note
de M3I. Rabuteau et Constant, présentée par M. Ch. Robin.
« En 1825, M. Chevreul publia dans les Mémoires du Muséum d'histoire
naturelle, t. XII, ses recherches remarquables sur l'action siuuiltanée de
l'oxygène gn/eux sur un grand nombre de subst.mces organiques. Il dé-
montra que telles substances organiques, qui ne se décomposeraient |)as au
milieu de l'atmosphère dans un temps déterminé, s'y décomposent plus ou
moins vite dans ce même temps lorsqu'elles sont mises en cont^îct avec les
dissolutions alcalines, qui, sans la présence de l'oxygène, ne produiraient
d ailleurs aucune altération dans ces mêmes substances.
» Plus tard, les thérapeutistes, se fondant sur les faits signalés par l'il-
lustre chimiste, on établit une théorie relative à lacliou «les alcalins. D'après
cette théorie, qui n'était basée sur aucune expérience scientifique faite ni
sur les animaux, ni sur l'homme, et dont M. Mialhe a été un des principaux
3o..
( 232 )
promoteurs, les alcalins devaient être des agents puissants d'oxydation, ils
devaient augmenter l'urée et l'acide carbonique et, de plus, activer la cir-
culation. Ils devaient, par conséquent, agir comme des médicaments pré-
cieux dans la glycosurie et dans l'albuminurie, en un mot reconstituer
l'économie par leur action sur la nutrition.
» Mais les résultats chimiques devaient bientôt faire justice de cette
théorie erronée et faire dire à Trousseau que : L'abus des alcalim avait fait
plus de mal que l'abus de l'iode. 11 est en effet reconnu aujourd'hui que
les alcalins sont toujours inutiles, sinon nuisibles, dans la glycosurie, ce
qu'avaient déjà démontré d'une manière directe les expériences de M. Pog-
giale, qui a vu que la glycose ne diminuait pas dans l'organisme sous l'in-
fluence du bicarbonate de soude. Il est reconnu que ces mêmes médica-
ments produisent les effets les plus désastreux dans l'albuminurie. On sait
également que les alcalins épuisent rapidement l'économie au lieu de la
reconstituer.
» Ces derniers faits ne sont pas admis par tous les médecins, entre autres
par les médecins des eaux de Vichy. D'un autre côté, pour ruiner une
théorie qui a la prétention de se baser sur des faits observés même en
dehors de l'organisme, il faut lui opposer des expériences directes. C'est
cette dernière tâche que nous avons entreprise, soutenus par la pensée
d'être utiles à la science et à la pratique médicale. Nos expériences .sont
peu nombreuses encore, mais la rigueur que nous avons introduite dans le
procédé que nous avons suivi, et les l'ésultals concordants auxquels nous
sommes arrivés, nous permettent déjà de poser des conclusions. D'ailleins
ces résultats expliquent tous les faits observés au lit du malade, effets inex-
plicables d'après la théorie que nous combattons; ils viennent par consé-
quent jeter quelque jour sur l'action naguère si obscure des composés alca-
lins.
» Nous avons expérimenté sur les bicarbonates de potasse et de soude.
Pendant tout le temps de l'expérimentation; on a suivi un régime ausii
identique que possible qui avait été adopté quelques jours auparavant, afin
de discerner complètement l'action de ces médicaments.
M L'un de nous a pris 5 grammes de bicarbonate de |iotasse par jour
(28'', 5 au déjeuner et 2^'', 5 au dîner), pendant cinq jours de suite. En com-
parant les quantités d'urée éliminée sous l'influence de ce sel et pendant les
cinq jours précédents et les cinq jours suivants, nous avons vu que ce
principe immédiat avait diminué d'au moins 20 pour 100. Le nombre des
pulsations a diminué.
( à-M )
» Chez une femme qui a pris, pendant sept jours, 6 grammes de bicar-
bonate de potasse par jour, l'urée a diminué de 23 |)our loo. Le pouls n
diminué ainsi ijue la température. Ces trois résultats indiquaient évidemment
un ralentissement des combustions.
I) Enfin l'un de nous a pris, pendant dix jours de suite, 5 grammes de
bicarbonate de soude par jour. I-a diminution de l'urée a été parfois de
plus de 20 pour loo, et les battements cardiaques se sont ralentis.
» Nous ne notons ici que les résultais principaux de ces expériences,
dont la première a duré quinze jours, la seconde dix-huit jours et la troi-
sième vingt jours, en tenant compte du temps pendant lequel on dosait
l'urée et l'on notait le pouls et la température, bien que l'on ne prît pas
de médicament. Ces expériences seront d'ailleurs rapportées ailleurs avec
tous les détails nécessaires. Nous dirons seidement que l'appétit a dimi-
nué, que l'un de nous fut obligé parfois de se forcer pour prendre la ration
d'aliments qu'il s'était prescrite; nous dirons également qvi'il s'est manifesté
un commencement notable d'anémie, surtout chez la femme qui prit en
tout l\i grammes de bicarbonate de potasse. Ce dernier fait prouve une
diminution de globules, diminution que des expériences directes, com-
mencées sur les animaux, nous ont déjà permis de constater. Enfin nous
avons noté un affaiblissement général, surtout sous l'influence du bicar-
bonate de potasse.
» Ces données expérimentales donnent l'explication d'un paradoxe thé-
rapeutique que nous allons signaler d'abord ; elles expliquent également
les faits chimiques contraires à la théorie admise jusqu'ici, et rendent
compte de l'épuisement produit par les alcalins.'
» i" Il existe un groupe de médicaments tempérants, les refric/erentia de
Linné, parmi lesquels se trouvent les fruits acides. Or ces fruits acides
donnent naissance à des carbonates alcalins dans l'économie : on était
obligé d'admettre cju'ils agissaient d'abord comme tempérants, puis comme
médicaments oxydants. Nos expériences [ironvent que ces substances sont
tempérantes, depuis le moment de leur introduction dans l'économie jus-
qu'à leur élimination complète.
» a° Certaines maladies essentiellement fébriles, telles que le rhumatisme
articulaire aigu et même la pneumonie, sont heureusement influencées par
les alcalins. On sait que ces médicaments, loin de produire des effets
incendiaires, dus à un prétendu accroissement des oxydations, |)roduisent
dans ces maladies une détente générale, une diminution du pouls et de la
température, ce qui est conforme à nos expériences.
( a34 )
» 3° Si les alcalins favorisaient les oxydations, ils devraient agir comme
des médicaments héroïques dans la glycosurie et dans l'albumiiierie. Or
les eaux alcalines ont produit souvent les effets les plus désastreux dans
ces maladies.
» 4° I-*"» médicaments qui activent les oxydations accroissent la force
vitale. Tel est le sel marin qui, ajouté en excès aux aliments, a produit,
d'après des recherches de M. Rabuteau, une augmentation de l'urée de
20 pour 100 (1). Or les alcalins produisent des effets directement opposés.
Nous dirons pourtant qu'à très-fnible dose ils n'ont pas diminué les oxyda-
tions, qu'ds ont au contraire paru les augmenter, ce que nous expliquons
par leur transformation en chlorure dans l'estomac à l'aide de l'acide
chlorhydrique du suc gastrique. Mais alors il ne s'agit plus d'un médica-
ment alcalin.
» Tels sont les principaux résultats de nos recherches et les principales
déductions qu'on en peut tirer. Quant à la raison des effets des alcalins,
nous croyons qu'elle réside dans leur action primitive sur les globules san-
guins qu'ils détruisent, attendu que ces globules sont les agents vecteurs
de l'oxygène, par conséquent les agents directs des oxydations.
» Nous ne dirons rien des alcalins considérés comme lithontriptiques
vis-à-vis des calculs d'acide urique. Leur action est ici parfaitement claire,
et nous n'avons rien à ajouter. Nous nous élèverons seulement contre
l'opinion admise encore par quelques médecins, que les alcalins peuvent
être utiles contre tous les calculs, même contre les calculs phosphatiques.
En effet, dans nos expériences, les urines qui ont été en général claires
sous l'influence des alcalins, étaient troubles le premier jour de l'ingestion
de ces médicaments. Cette exception est conforme aux faits signalés déjà
par Wohler, qui a vu que, sous l'influence des alcalins, les urines laissaient
déposer des phosphates terreux. Les dosages d'urée et les recherches pra-
tiques que nécessitaient nos expériences ont été faites dans le laboratoire
de M. Robin. »
(i ) Cette augmentation de la combustion, produite par le sel marin, explique comment les
animaux, soumis au régime salé par M. Boussingault et M. Plouvicz, avaient plus de vigueur
et n'augmentaient pas de poids, bien que les aliments fussent eonsommés en plus grande
quantité.
( 235 )
MICROGRAPHIE. — Recherches et expériences sur la nature et l'origine des
miasmes paludéens ; par M. P. Balestra. (Extrait par M. Balard.)
« En examinant au microscope les eaux des marais Pontins, celles
de Mnccarebe et d'Ostie, on les voit remplies d'Infusoires de différentes
espèces, selon la provenance de l'eau et son degré de corruption (Bursa-
riens, Trichodiens, Vorlicelliens). Mais, parmi ces êtres, celui qui frappe
le plus par sa présence dans les eaux de ces marais, et toujours en nombre
proportionné au degré de leur putréfaction, est une petite plante, un
microphyte granulé qui appartient à l'espèce des Algues, d'une forme
spéciale et constante, qui rappelle un peu celle du Cactus peruvianus. Il est
toujours mêlé à une quantité considérable de petites spores, de yoVô ^^
milliinèlre de diamètre, jannes-verdâtres et transparentes, ainsi qu'à des
sporanges ou vésicules contenant ces spores, de -j-|^ à ■— de millimètre de
diamètre, et de formes très-caractéristiques.
» Cette Algue surnage à la surface de l'eau ; elle est irisée si elle est
jeune, et reproduit l'apparence de taches d'huile. A la température basse
des caves, ainsi que dans l'eau ne contenant pas de végétaux, cette Algue
et. les spores nombreuses qui l'accompagnent ne se développent que très-
lentement. Si elle se trouve au contact de l'air, exposée aux rayons solaires
en présence de végétaux en décomposition, elle pousse vite en laissant
dégager de petites bulles gazeuses.
» Mais il n'en est plus ainsi si l'on ajoute à l'eau qui les contient quel-
ques gouttes d'une solution d'acide arsénieux, de sulfite de soude, et mieux
encore de sulfate neutre de quinine. Toute végétation de l'Algue cesse
alors à la surface de l'eau; celle qui s'était déjà développée s'altère, les
spores deviennent minces et transparentes, et les sporanges éprouvent une
altération qui ne permet plus de les reconnaître. En faisant pénétrer par
capillarité, sur le porte-ohjet du microscope, une solution de sulfate de
quinine, dans la goutte d'eau que l'on examine, on voit aussi les Infusoires
mourir à l'instant, et l'Jlgueet les spores s'altérer profondément.
» Ces spores et ces sporanges peuvent -ils se disséminer dans l'air?
Deux méthodes différentes ont permis d'acquérir la preuve de cette dissé-
mination. Si, au moyen de la glace, on condense l'eau que contient l'at-
mosphère des lieux paludéens, cette rosée contient quelque chose d'orga-
nique et colore à l'ébuilition le chlorure d'or en violet. Le microscope y
fait découvrir des granules qui, bleuissant par l'iode, semblent ainsi être
de nature amyloïde, mais et surtout des quantités considérables des mêmes
( 236 )
spores, mêlées de quelques sporanges que renferment les eaux, les uns et
les autres reconnaissables à Icuis formes spéciales et caractéristiques. Au
lieu (le la conclens itiou de leau par la glace, on a fait traverser une petite
quantité d'eau distillée par de l'air pris après le ci^ucher du soleil, à 20 cen-
timètres du sol, et injecté par le mouvement d'une pompe. En opérant
avec des quantités d'air variant de i mètre à 8 mètres cubes, on a obtenu
de l'eau cliargée de spores comme celle de la rosée déposée par la glace,
en expérimentant soit dans l'air paludéen, soit à la surface d'un vase à
large ouverture, dans lequel on avait mis une couche de 3 centimètres
de l'eau des marais.
» En examinant de la même manière l'air pris dans la ville de Rome
et dans ses environs, JM. le D'' Balestra a obtenu les mêmes spores en pro-
jiortions différentes, selon l'épuque et la saison : elles étaient beaucoup plus
abondantes a la iin d'août, et surtout quand on expérimentait le jour qui
suivait la fin de la pluie. Ce nombre de spores était pourtant beaucoup
moindre que quanti on opérait sur l'eau condensée dans l'atmosphère des
marais.
» Celte eau, contenant des spores recueillies dans l'air, développe
promptement a la surface l'Algue d'où elles jirovit'nnent quand on ajoute à
cette eau quelques feuilles écrasées d'une plante quelconque. Mais toute
végétation reste suspendue, et l'Algue pM'oduite est modifiée et presque dé-
truite, comme quand on opère avec l'eau des marais, si l'on ajoute quel-
ques gotittes d'une solution de sulfate de quinine, de sulfite de soude ou
d'acide arséiiieux.
» Les spores flottant dans l'eau de la rosée, pas plus que celles qui sont
disséminées dans l'eau des marais, ne paraissent subir aucune influence de
l'action d'un courant d'air chargé fortement d'ozone.
» L'eau dans laquelle on avait fait passer 8 mètres cubes d'air aj)rès
l'avoir acidulée par l'acide chlorhydrique, n'a pas fourni des quantités
sensibles d'ammoniatpie. Quant aux ga/, qui s'échappent des eaux cor-
rompues, on en a trouvé, dans quelques expériences, un volume égal à
i5 poin- 100 environ de celui de l'eau. Ils étaient foimés d'acide sulfliy-
drique, d'acide carbonique et d'hydrogène protocarboné. Les buffles vivent
au milieu de ces eaux corrompues, qui sont si luiisibles aux honunes. M. le
le D'' Balestra a été atteint deux fois do la fièvre intermittente, pendant ses
recherches; une fois, après avoir senti, malgré lui et d'une manière assez
forte, l'eau en fermentation qui était couverte d'Algues nouvelles en pleine
végétation, mêlées à une quantité extraordinaire de spoi'es cl d'Inlusoires.
( '-37 )
» M. Balestra, par les observations nombreuses qu'il a faites, est con-
duit à penser que le principe miasmatique des lieux paludéens réside
dans les spores elles-mêmes ou dans quelques principes vénéneux qu'elles
renferment. L'Algue qui les produit ne se développe pas dans les temps de
sécheresse, mais elle peut se développer à la suite d'une i)luie faible, tombée
dans les temps chauds, qui laisse bientôt à sec le terrain qu'elle a mouillé,
ou même par les fortes rosées et les épais brouillards qui s'élèvent de la
mer et des étangs, et à la suite desquels peuvent se produire le détachement
et la migration des spores : l'auteur explique ainsi le développement de la
fièvre intermittente qui, faible et momentanément suspendue en temps de
sécheresse, acquiert auprès de Rome une grande intensité pendant les mois
d'août et de septembre. Si cette endémie de fièvre paludéenne ne se manifeste
pas en hiver, c'est, selon lui, moins à cause du froid qui empêche la végé-
tation de l'Algue, en retardant la décomposition des substances organiques,
que par l'abondance des pluies qui recouvrent les lieux où existent ces
spores. Leur dissémination dans l'air, possible à la rigueur même du mi-
lieu de l'eau, comme on l'a vu plus haut, est activée d'une manière notable
par l'état de siccitédu sol sur lequel elles sont déposées. Il explique aussi,
par l'action des sels de quinine siu- les spores, la puissante vertu antimias-
matique de ces médicaments. »
MINÉRALOGIE. — NoIe sw des comliinaisons crislnllisées d'oxyde de plomb et
d'' oxyde d'antimoine, d'oxyde de plomb et d'acide antinionique, de ti provim e
de Conslantine {Algérie). Note de M. Flajolot, présentée par M. Combes.
« Il existe, à Go kilomètres au sud de Bône, à côté d'ime source thermale
Irès-fréquentée par les Arabes et connue sous le nom de Hamman-Nbaïl-
Nador, un gisement considérable de calamine, contenu dans les calcaires
nununulitiques, dans lequel ou rencontre en abondance des géodes tapis-
sées de cristaux qui me paraissent être des espèces minérales nouvelles.
» L'une de ces espèces est ime combinaison d'oxyde d'antimoine et
d'oxyde de plomb, dont la formule est Sb^O',2PbO. Elle se présente en
cristaux très-aplatis, de forme tabulaire, portant des biseaux aigus sur leurs
quatre côtés. La densité de ces cristaux est de 7,02. Leur couleur est le
brun enfumé, plus ou moins foncé; ils sont translucides, et leur cassiu'e a
un éclat résineux. Leiu' dureté approche de celle de la chaux carbonalée.
» Leur poussière est gri^e; chauffée dans un vase ouvert elle dégage, au
<:. R., 1870, i' Semestre. (T.LXXI, N" ô.) ^1
( 238 )
rouge naissant, des vapeurs blanches d'oxyde d'antimoine, niais dans nn
vase couvert on peut porter la température jusqu'au ramollissement du
verre sans qu'il se dégage de vapeurs. Par l'actiou de la chaleur, la matière
prend une couleur jaune-orange, qui devient jaune-citron très-clair après
le refroidissemeul.
» L'acide chlorhydrique, même étendu d'eau, attaque très-facilement ce
composé; la dissolution a lieu sans laisser de résidu, si le volume du dis-
solvant est assez considérable, et avec dépôt de chlorure de plomb dans le
cas contraire. Eu ajoutant de l'eau à la solution, il se forme lui précipité
blanc d'oxychlorure d'antimoine. En traitant la sub.siance par IVicide azo-
tique concentré, il se dégage d'abondantes vapeurs d'acide hypo-azotique,
il se forme de l'azotate de plomb qui se dissout, et de l'acide antimonique
qui reste insoluble, mais la décomposition ne se fait pas complètement.
Un mélange d'acide azotique étendu d'eau et d'acide tartrique dissout
lentement la matière, sans laisser de résidu.
» L'analyse de cristaux très-purs m'a donné le résultat suivant :
Oxyde d'antimoine 44)Oo
Oxyde de plomb 56, oo
100,00
» Cette composition ne s'accorde pas bien avec la formule Sb^O', 2P6O.
Il y a là quelque chose de particulier que je me propose d'étudier.
» Dans les géodes où l'air et l'humidité ont pu avoir accès, les cristaux
que je viens de décrire se sont transformés, sans changer de forme, en une
matière jaune-citron, opaque, ressemblant à du plomb molybdaté. La res-
semblance est d'autant plus grande que les cristaux de ce dernier minéral
sont le plus souvent des tables biselées, dérivant du prisme à base carrée.
Toutefois cette forme des anciens cristaux, que le nouveau com|iosé a con-
servée, n'est pas sa forme propre, car je l'ai trouvée dans quelques rares
échantillons en aiguilles très-déliées, translucides et d'une belle couleur
jaune. Mais je n'ai pu distinguer le type cristallin, ni en isoler une quantité
suffisante pour faire l'analyse.
» La substance dont il s'agit a les caractères suivants ;
» Chauffée au rouge, elle dégage de l'eau et de l'acide carbonique, et
elle devient d'un brun foncé; après le refroidissement elle reste d'un beau
jaune orange.
» L'acide chlorhydrique ne l'attaque que difficilement à froid, et, même
à chaud, l'acide carl)iini([ue qu'elle contient ne se dégage que lentement.
( ^'^9 )
La dissolution s'effectue sans résidu dans un volume suffisant de liquide et
avec dépôt de chlorure de plomb si la liqueur n'est pas assez étendue. Une
addition d'eau précipite de l'acide antimonique.
M L'analyse chimique d'iui des échantillons les plus purs que j'ai trouvés
m'a donné :
Oxyde d'antimoine 4 > 80
Acide antimonique 35, 5o
Acide carbonique 4 > ^o
Oxyde de plomb 5i ,5o
Eau 4 ' 00
100,00
» L'oxyde d'antimoine provient d'un peu de la combinaison Sb'O'.aPbO
non encore altérée, et l'on peut écrire l'analyse ainsi :
Sb-O^aPbO 11,80
Sb=O^PbO 59,10
CO'.PbO 25,10
HO 4,00
» Les quantités d'antimoniate de plomb, de carbonate de plomb et d'eau
conduisent à la formule
Sb^O'.PbO + CO^PbO + aHO.
)) L'antimoniate et le carbonate de plomb sont-ils considérés ensemble
ou seulement mélangés? L'action des acides me ferait penser qu'ils sont
combinés, mais je réserve mon opinion jusqu'à ce que j'aie pu me procurer
des cristaux purs en aiguilles pour en faire l'analyse.
M Outre ces matières cristallisées, la calamine fie Hammam Nbaïl con-
tient en mélange une substance amorplie, ressemlilant ;t de l'argile ocreuse,
qu'on isole aisément au moyen de l'acide chlorhydrique dans lequel elle
est insoluble, et qui, tlesséchée à 100 degrés, a pour composition
Acide antiuioni(jue 63, 5o
Sesquioxyde de fer . 3i ,4o
Eau 5,10
100,00
» Cette composition correspond à la formule Sb-0*.Fe"0' + IHO.
» Si la combinaison d'oxyde d'antimoine et d'oxytle de [)lond) que je
viens de décrire est bien une espèce minérale nouvelle, je pro(>oserai de
l'appeler nadotite, du nom de la localiié où est son gisement, laquelle porte
le nom de Djehtl-Nador. »
3i..
( 24o )
M. A.Valabrègue adresse une Note concernai)! riiifliieiice île la force
centrifuge sur les marées.
M. DcKAiVD soumet à l'apprécialion de l'Académie une lassefiltrc, destinée
à rendre la limpidité à une eau contenant en suspension des corps solides.
Ce petit appareil a la dimension d'une lasse moyenne; elle est en toile iiu-
perméable, et munie à l'intérieur d'une sorte d'entonnoir renversé, en fla-
nelle épaisse, qui est surmonté d'un petit tuyau servant à as])irer l'eau
avec la bouche.
M. Trémaux adresse une épreuve de la quatrième Partie d'un Ouvrage
en voie de publication, sur le « principe de la vie animale et végétale ».
« M. Chasles fait hommage à l'Académie, de la part de M. le prince
Boncompagni, des deux premiers cahiers du tioisième volume du Bullellino
délie Scieiize tnatematiche efisiche. Le premier cahier, de janvier 1870, con-
tient un article fort étendu de M. E. Siacci, de Turin, sur les Ouvrages du
comte de Fagnano. Il s'agit principalement du célèbre théorème sur cer-
tains arcs d'ellipse dont la différence est algébrique, théorème qui a inspiré
aussitôt de beaux Mémoires à Euler, à Lagrange et à Legendre, et marque
ainsi l'origine de la théorie des fonctions elliptiques. A la suite de ce tra-
vail se trouvent deux pièces qui se rapportent au même sujet : d'abord un
Mémoire sur le comte de Fagnano, existant en manuscrit dans la Biblio-
thèque du Vatican; puis un Exposé, par M. A. Genocchi, des recherches
auxquelles la théorie des fonctions elliptiques et abéliennes a donné lieu
jusqu'à nos jours. La livraison de février contient une analyse, parM.Hoûel,
d'un Ouvrage du D'' G. Friedlein, écrit en allemand, sur les procédés de
calcul employés dans l'antiquilé et au moyen âge. »
« M. CiiASLES présente en outre, au nom de ses collègues de la Section
mathématique des Hautes Études, les quatre numéros de mars, avril, mai,
juin, du Bulletin des sciences tnalliémaliiiues et aslrononiiqitcs. Ces luiméros
contiennent un article de M. Bcrlrand, sur la vie et les travaux de Caucliy;
un article de M. Radau, sur les complexes de Pliicker; de M. lloiiel sur le
Diclionniiirc nialliémalicjue allemand de MM. Hoffmann etNatani, sur les
Eléments de inatlicmatiques de M. Ballzer, sur lui Traité de M. Hankel
relatif à la discontinuité des fonctions; des articles de M. Darboux, sur i\n
modèle delà surface du troisième degré à vingt-sejjl droites réelles exécuté
( 24i )
par M. Wiener, sur ks siiigiilarilés des courbes et sur un Mémoire de
M. Zeuthen; un article de M. Beltranii, sur un Mémoire île M. Christoffel,
relatif aux lignes géodésiques. La partie relative aux Mémoires comprend
l'analyse des Malhemalisclte Jniialcn, de MiNI. Clebsch et Neunianii, des
Astronomische Nacliricltlen, du Journal de M. Liouville, du Bulletin dit j)rincc
Boncompacjni, des Archives de M. Grïinerl, des journaux danois, des Pliilo-
sopliical Transactions de la Société royale de Londres, du Giornale publié
à Naples par M. Battaglini ; du lîecueil des Sociétés d'Edinburgli, de Man-
chester, de l'Institut Lombard ; des Académies de Berlin, d'Amsterdam, de
Goettingue, etc. »
A 4 heures trois quarts, l'Académie se forme en Comité secret.
La séance est levée à 6 heures. 1).
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
L'Académie a reçu, dans la séance du i8 juillet 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Des méthodes dans les sciences de raisonnement; par M. J.-]\L-C. DUHAMEL,
Membre de l'Institut. 4* Partie. Paris, 1870; in -8°.
Bulletin des Sciences mathémnliijues et astronomiques, rédigé par M. G. Dah-
BOUX, avec la collaboration de RIM. HoiJEL et I>OEWY, sous la direction de la
Commission des Hautes Études, t. P% mars à juin 1870. Paris, 1870; 4""'
iu-S". (Présenté par M. Chasies.)
Histoire du solde Tout. Dix-septième Noie sur l'oiigine de l'espèce humaine
dans les enviions de cette ville: par M. HUSSON. Toul, 1870; br. in-8''.
-Rapport à i Académie de Bordeaux sur deux Mémoires de MJNI. LiNDER et le
Comte Alexis de Chasteignier, et réplique aux observations critiques de
M. Raulin sur ce Ilapport, suivi d'une Note additionnelle relative à deux fos-
siles du sud-ouest; par M. Ch. DES MouLiNS. Bordeaux, 1870; in-8°.
Expériences comparatives exécutées en 1S68, près de Berlin, avec un canon
( 2^2 )
prussien en acier Rriijip se clinrtjt'unt /i<ir la ( niasse, el le canon de fVootwicli de
228"™, 6; par M. C. DE Doppelmaih. Traduction du Journal de r Arldicrie
rusic, 1869, par M. MARTIN DE BuETTES. Paris, 1870; in-8° avec planches.
Le bassin de Paris. Recueil de Mémoires vebdifs au bassin tertiaire de cette
région et à l'époiptc tertiaire. Culaloipie des Molluscjucs des sables inférieurs;
par M. A. Watelet. Paris, 1870; in-8''.
Les emjrais chimiques appiupiés à la 1 allure de la vigne. Expériences agri-
coles faites à liocliet en 1869 pm- M. C. Saintpierre. Monrpellier, 1870;
br. 111-8°.
Le vin au point de vue liygicnicpie et alimentaire ; par 'M. C. Saiintpie1!RE.
Aloiitpellier, 1870; br. iii-8".
Premières expériences sur la deslrnction du pmeron de la viipie; Note par
MM. Planchon e< Saintpierre. MonrpelUer, x868-, br. iu-8''.
Les atmosphères respirables des (uves vinaires, etc.; par M. t". Saintpierre.
Paris, 1869; br. in-8^
Chute de Moise et des potentats religieux, etc.; par M. A. -S. B., 2' édition.
Lyon, 1870; in- 12. (2 exemplaires. )
Examen critique de la loi du 3o juin 1808 sur les aliénés, par la Société
médico-pratique de Paris. Rapport fait an nom de la Commission par le D'' CoL-
LINEAU. Paris, 1870; br. iii-8°. (2 exemplaires.)
Congrès international pour le proqrès des sciences géographiques, cosmogra-
phiques el commerciales, qui sera tenu à .-hivers du i4 au 21 août 1870 : Pro-
gramme définitif. Anvers, 1870; iii-4".
Pli.-J. Roux, s<i vie, ses œuvres; par M. UiONis DES Carrières. Auxerre,
1870; br. iM-8''. (Extrait du Bulletin de la Société des sciences hiitoiiques et
naturelles de l'Yonne.) (Présent!^ par M. le llaron Larrcy.)
BtiUettiiio... Rnllelin de biblioiiraphir et (T histoire des Sciences malhcnuitiipies
el physiques, puolié par JM. B. Boncompagni, t. 111, janvier et février 1870.
Rome, 1870; 2 u"' in-4". (Présenté par M. Cbasles.)
Siil... Sur le théorème du Comte de Fagnano ; Note pai M. 1'". SlACCl.
Rome, 1870 ; iii-4".
Saggio.., Essai d'un Cours de l'hysapie élémentaire; par M. G. LUVINI.
4^ édition. Turin, 1868; 1 vol. 111-12.
Alcuue. . . (hiebjnes expériences et considérations concernant l'adhésion entre
les Liquides cl les solides; par M. G. LuviM. Turin, 1870; br. 111-8".
( 243 )
Alcune... De quelques prinripaux rdyauncmcnts météoriques déduits des ob-
servations des étoiles filantes faites à Berijame par M. J. Zezfom pendant les
années 1867, 1868, 1869; /wr M. Schiaparklli. Milan, 1870; in-8°.
Anales... Annales de l'Observatoire de marine de San Fernando, publié, par
ordie supérieur, par le Directeur M. C PUJ.VZON. a*' section : Observations mé-
téorologiques, 1870. San Fernando, 1870; in-8".
Arniy... Rapports annuels du département in<;dicnl de l'armée pemlant l'an-
née 1868, t. X. Londres, 1870; hr, in-8". (Présenté par M. le Baron
Larrey.)
Military... Hygiène militaire. Lecture fuite à rinslitulion des services imis
royaux par M. F. de Chaumont. Br. in-8". (Présenté par M. le Baron
Larrey.)
Ricerche... Recherches et expéi'iences sur la nature et le qenre des miasmes
paludéens, etc.; par M. P. Balestra. Borne, 1869; br. in-8".
A Catalogne... Catalogue des cartes des possessions britanniques dans rinde
et autres parties de l' Asie, publié par ordre du Secrétaire cVÉlat de Sa Ma/esté
pour l'Inde. Londres, 1870; grand in-8".
Programm... Programme de l'École royale polytechnique rhéno-westpha-
lienne d' Aachen , année scolaire 1870-1871. Aachen, 1870; in-8°. *
Ueber... Sur les cristaux de chondrodite de Finlande ; par M. DE RoKSCriA-
ROW. Saint-Pétersbonrg, 1870; br. in-8°.
Ueber... Sur les cristaux de Greenochile; par M. DE ROKSCIIAP.OW. Saint-
Pétersbonrg, 1870; br. in-8°.
Ueber... Sur l'olivine du fer de Pallas; par M. DE Kokscharow. Saint-
Pétersbourg, 1870; in-Zj".
Verhandiiingen... Mémoires de la Société impériale minéralogique russe de
Saint-Pétersboun/, 2'' sév\e, t. V. S.iinlPetersbourg, t870; in8".
COMPTE RENDU
DES SEANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES
SÉANCE DU LUNDI 25 JUILLET 1870,
PRÉSIDÉE PAR M. CHEVRECL.
MEMOIRES ET COMftïUÎVICATIOIVS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDAMTS DE L'ACADÉMIE.
M. LE Président de l'Institut iiivile l'Académie à désigner l'un de ses
Membres pour la représenter, comme lecteur, dans la prochaine séance
publique annuelle des cinq Académies de l'Institut, qui doit avoir lieu le
i3 août procliain.
GÉOGRAPHIE PHYSIQUE. — Remarques sa)' qucUines paiitcidarUés du sol
des Landes de Gascogne; par M'. Faye.
« Les Landes de Gascogne que je viens de visiter pour la seconde fois,
à plus <le trente ans d'intervalle, ont déjà Hxé l'attention de l'Académie par
l'importante transformation qu'elles ont subie dans ces derniers temps. Ces
vastes plaines que j'ai vues désertes, et dont les bruyères servaient à nom lir
misérablement quelques troupeaux de montons surveillés de loin par des
pasteurs à échasses, sont couvertes aujourd'hui de riches semis de pins
maritimes. Mais ce qui n'a pas changé, c'est la couche imperméable d'alios
(jue l'on V rencontre partout à une ju'olondeur moyenne d'environ i n)étre,
couche pierreuse,, de couleur bruiie, d'é[)aisseur variabie, mais générale-
ment assez faible, et recouvrant elle-même une couche iiuiéHnie de sable
identique à la couche superficielle. L'influence de cette couche invisible sur
la condition des habitants des Landes a étégrauile. En maintenant les pro-
C. U., I^^O, 2' .Stnieil;e, (T. LXXI, ^'> 4.) J2
( 246 )
duits de la décomposition végétale dans la couche supérieure d'un sol
presque sans peiile, l'alios a fixé pendant des siècles la fièvre intermittente
dans ces pauvres contrées, où, de plus, une nourriture presque antédilu-
vienne, le pain sans levain {craclmde), a conservé longtemjis piiinii les liabi-
tanls comme une dernière trace des maladies préhistoriques. Aujourd'hui
les fièvres ont disparu, on ne parle plus de la mystérieuse et sinistre pel-
lagre, et l'alios ne fait guère sentir désormais ses effets que sur les racines
pivotantes des pins qu'il force à se transformer en racines traçantes.
» Ayant eu, ces jours-ci, l'occasion d'assister à Mont-de-Marsan à une
excellente leçon de INI. le D' Mourrus sur la constitution physique du sol
des Landes, j'ai cru m'apercevoir que 1 aiios n'était guère plus coiuui qu'à
l'époque où j'étudiais nioi-même ce pays, il y a un tiers de siècle. J'en ai
conclu que les idées que je m'étais faites autrefois sru' la formation de cette
couche si singulièrement intercalée dans l'épaisseur du sable pourraient
offrir encore quelque intérêt, et j'ai espéré que l'Académie me permettrait
de revenir sur d'anciens souvenirs que l'aspect tout nouveau pour moi des
Landes assainies et enrichies vieiit de rappeler bien vivement à mon esprit.
» Chargé, en 1837, d'opérer le nivellement d'une partie des Landes de
Bordeaux, entre les étangs du littoral et le bassin d'Arcachon, j'avais dû y
joindre d'assez nombreux sondages dans le but d'estimer les difticultés du
terrain pour les opérations subséquentes. Je fus frappé alors de ne rencon-
trer l'alios que dans les Landes proprement dites, tandis que je n'en trouvais
ni dans les marais, ni sur les rives des étangs, ni dans les dunes, même
celles qui, à l'abri des vieilles forêts, n'avaient jamais été remaniées par les
vents depuis des siècles.
» Entrons d'abord dans quelques détails bien connus des Landais. Le
sable de la Lande, ainsi que celui des dunes et celui que la mer rejette jour-
nellement sur le littoral, est bianc, mêlé de quelques giains nnirs qui con-
tiennent du fer peroxyde et une certaine proportion d'oxyde de manganèse.
Lavé d'abord par l'eau de la mer, puis par les pluies, pendant bien des
siècles, il ne contient absolument rien d'immédiatement sohible. Quant à
l'alios, c'est une couche inférieure d'un brun rouge foncé, assez com-
pacte, et qui ne cède cpi'à la pioche. En ceitains lieux il se délite assez vile
à l'air en se desséchant; ailleurs, il est assez dur pour être employé comme
pierre; à bâtir. C'est un sable analogue au précédent, coloré et surtout
cimenté par une sorte de matière organique légèrement ferrugineuse.
Quand on pratique en été un trou un peu large dans le sol, en s'arrètant
à l'alios, on voit le fond de ce trou se reuiplir peu à peu, par infiltralion
( '-47 )
latérale, (run peu d'eau jaune à peine potable. Mais si l'on perce l'alios,
ou trouve immédiatement au-dessous une eau assez abondante et parfaite-
ment limpide. Depuis mon premier voyage on est parvenu à conserver à
cette eau inférieure sa limpidité première en recouvrant de ciment les pa-
l'ois des puits jusqu'à l'alios, de manière à supprimer les infiltrations de la
couche de sable supérieure.
» Comment cet alios s'est-il formé? car il est bien évident qu'il n'a pas
été déposé sur une couche de sable plus ancienne, pour être ensuite uni-
formément recouvert d'une nouvelle alluvion de sable. Il a dû se former
sur place, au sein de la couche sablonneuse qui constitue le sol actuel des
Landes, et la présence d'ime matière organique dans cet alios donne à
penser que la végétation superficielle de la Lande a dû y contribuer. Mais,
s'il en est ainsi, pourquoi l'alios ne se trouve-t-il pas dans les forêts sécu-
laires des dunes, dont le sol est recouvert de broussailles et de fougères;
pourquoi pas dans les marais également séculaires du liltoral (là du moins
où les dunes sont fixées de temps immémorial)?
» Mes sondages me donnèrent la solution de ces questions, 11 en résulte
en effet que si en hiver et au commencement du printemps le sol presque
horizontal des Landes est constamment baigné d'eau pluviale, l'action du
soleil pendant la moitié chaude de l'année abaisse progressivement par
évaporation le niveau de ces eaux jusqu'à une profondeur de i à 2 mètres.
Cette sorte d'étiage des eaux souterraines est d'ailleurs en rapport avec le
niveau général des étangs et marais qui bordent à l'intérieur la chaîne
des dunes, en sorte qu'il se produirait à la fin de chaque été, à la même
profondeur à peu près, alors même que l'alios n'existerait pas. Cela posé,
il suffit de se reporter à la décomposition que les racines des végétaux de
la Lande doivent subir par leur longue immersion semi annuelle dans l'e-ui
stagnante (eau pluviale), pour comprendre que les produits de cette dé-
composition ont dû être entraînés chaque aimée pendant l'été à travers
la couche supérieure, non plus au loin comme dans les pays à sources,
mais verticalement jusqu'à la profondeur constante de i mètre. Pendant
la stagnation périodique de l'étiage, les produits de la pourriture végétale
ont le temps de se déposer à cette profondeur, et de cimenter en quelque
sorte les grains de sable de cette couche (i). Puis, comme l'opéiation a
dû se renouveler chaque année pendant une longue série de siècles, il en
(1) J'imagine que ce ciment de nature organique, coloré par un peu d'oxyde de fer
livdraté, doit contenir aussi des matières siliceuses provenant de l'aclion végétale [voir à ce
32..
( 2/,8 )
est rpsullé une couche ci'oissanle d'alios plus ou moins comp;icle, qui
continue sans doute à s'accroître sous nos yeux.
» On s'explique dés lois poin-quoi l'alios manque dans les marais, qui
restent presr|U(' loujoiu's couverts d'eau en <'U'\ et où, par suite, cet étiage
de I à 2 niélrcs de profondeur ne se prodini pas; pourquoi l'alios manque
dans les dunes qui ont été fixées bien des siècles avant le célèbre Brémon-
tier par les forêts du littoral, car ces dunes ne sont jamais uiouillées comme
les Landes en hiver, et ne présentent, pas plus que les marais, le phéno-
mène d'une napp»^ d'eau souterraine qui ne s'abaisse jamais en été au delà
d'uni' limite donnée. Ou voit donc nettement que la formation de l'alios a
dû être déterminée |)ar la réunion de ces trois circonstances : i° immersion
du so! pendant l'hiver; 2^ dessèchement progressif du sol à partir du prin-
lem|Ds; 3' étiage permanent de la couche d'eau provenant des pluies an-
nuelles et forcée, faute de pente, à baisser verticalement sur place. A ces
conditions, d'ailleurs, la végétation piopre aux Landes a pu s'y établir, et
il ne faut pas l'oublier : sans végétation, point d'alios.
» iMais, je \i' répète, là où une seule de ces conditions mancjue, notre
couche imperméable manque aussi. Dans les dunes boisées, par exemple,
bien que le sablf en soit partout humide, sauf à la surface, l'eau qui tombe
du ciel y descend constamment sans s'arrêter à un niveau donné; elle
coule incessamment soit vers la mer, soit vers les marais de l'intérieur;
aussi peut-on trancher une dune du haut en bas et y suivre les longues
racines des pins qui s'y étendent sans obstacle. Nulle part je n'y ai vu de
traces d'alios, même dans ces parties horizonlales qu'on nonune lètes, où
pousse non plus le pin ni la bruyèi'e, mais nue herbe l'are et succulente.
n II restait pourtant un caractère inex|iliqué de l'alios : je veux parler
de ces traces de matièie ferrugineuse qui contribuent sans doute à sa ci-
nK^ntalion et à sa coloration rougeâtre. Mes idées ne purent se fixer à ce
sujet que beaucoup plus tard, giâce aux travaux des chimistes qui ont
étudié l'action que la poui riture végétale exerce sur les oxydes de fer et sur
la formation du fer limoneux des mar.iis. Il y a une trentaine d'années, un
de ces chimistes, M. Spindler, a montré comment la décomposition des ra-
cines r.'iméne le peroxyde de fer contenu dans le so! à nu état d'oxydation
inférieure et le reiici attaquable par les acides faibles provenant de la pour-
siijot In Note (le i\I. le Si'cri'l.iire |)ci|)(liu'l el colle di' i\I. TlKiiaitl dans le Compte tendu
(lu a' juin denier, p. i.'jia), :iiinenient on ne s'ixpliiiiniail gucie \:\ dureté et ia consis-
lance que prrscnlc fréipicniment l'idios.
( '49 ) ■
riture végétale, tels que i'acide carbonique et l'acide créniqiie de Berzeliiis,
de telle sorte que des racines en décomposition finissent par décolorer com-
plètement le terrain ocreux qu'elles traversent. D'un autre côté notre
confrère M. Danbrée, dans un Mémoire remarquable en date de iS/jS, a
rattaché à cette action chimique des végétaux la formation des fers limo-
neux des lacs de Suède, en montrant que le fer ainsi rendu soluble sur de
grands espaces est réuni et entraîné par les sources et les ruisseaux, et
qu'il reprend ensuite son oxydation première lorsque les eaux reviennent
au contact de l'air. Il se dépose alors, sous forme de fer limoneux, au
fond des lacs et des marais, où l'eau ferrugineuse de ces petits cours d'eau
s'arrête et devient stagnante, en constituant à la longue des couches d'un
minerai d'une grande richesse.
» Ijes choses se sont passées autrement dans les T>p.ndes, comme on vient
de le voir; car le manque de pente et les touffes mcltipliées de gazon à la
surface ne permettent pas aux eaux, en général, de se réunir ainsi en cours
d'eau ou en sources, puis en lacs ou en marais stagnants. C'est donc sur
place que l'effet s'est produit sous l'infliiejice de l'air qui a pénétré
dans le sol à mesin-e que le niveau de la couche aqueuse s'abaissait pen-
dant l'été, et la quantité de fer qui se retrouve dans telle partie de l'alios
représente seulement la quantité infinitésimale qui a été attaciuée jusie
au-dessus d'elle par la pourriture végétale dans la partie noirâtre (\u sable
des Landes.
» Cependant on rencontre aussi dans les I^andes des régions à pente suf-
fisante, où l'opiM-alion de concentration des eaux ferrugineuses si bien dé-
crites par M. Daubrée, a dû se pioduire; mais alors le résultat a été,
comme en Suède, une couche de fer limoneux dé[)osée dans les bassins de
stagnation, tels que les marais situés du côté de Mimizan, où l'on retrouver
en effet des nùncrais exploitables. Des forges ont même été crééts dans
cette partie des Landes, mais après avoir épuisé le fer limoneux de (es
contrées, elles en sont réduites aujourd'hui, si je suis bien informé, à faire
venir de loin des minerais d'une autre origine.
» Revenons maintenant au rôle de ce sous-sol imperméable, et à son in-
fluence sur la salubrité du pays. Depuis mon prenùer voyage, des rigoles
peu profondes ont suppriuîé les unlle ol)stacles superficiels à l'écoulement
des eaux, en sorte que la moindre pente devient efficace; les racines peu
altérables des pins ont remplacé celles des bruyères et des herbes dont le
chevelu pourrissait en partie chaque année; il en est résidté Cjue la conta-
nùuation du sol supérieur par les matières végétales eu fermenlation a dis-
( 250 )
paru, el avec elle ont disparu aussi ces fièvres intermittentes qui impri-
maient un cachet particulier de di'hilité à la race de ce pays. Celte influence
des fermenis maintenus dans le sol supérieur par un sous-sol imperméable
m'a vivement frappé, et m'a conduit plus tard, par voie d'analogie, à une
généralisation qui intéresse l'iiygiène. Partout où il existe à o™,7.^ ou
I mètre de profondeur un sous-sol imperméable, ou rencontre la fièvre
intermittente si le sol est contaminé par la pourriture végétale, et des fièvres
de nature typhoidale si le sol est contaminé par la pourriture animale. Ce
dernier point est établi à mes yeux par une longue expérience personnelle.
Chaque fois qu'en visitant un établissement public j'ai appris que les affec-
tions muqueuses ou typhoïdales y revenaient périodiquement, j'ai constaté
aussitôt, par l'étude du sol, la présence d'une couche supérieure infectée
reposant sur un sous-sol imperméable; et réciproquement, chaque fois
que j'ai trouvé un pareil sous-sol horizontal, avec des couches supérieures
contaminées de longue date par des puisards, des fosses non étanches, etc.,
j'ai constaté la permanence ou plutôt le retour de l'épidémie. Incapable
d'apprécier en homme de l'art le rapport qui doit exister entre un sol in-
fecté et ces maladies, j'ai pu du moins constater l'existence de ce rapport,
et indiquer le moyen d'en supprimer le premier terme, c'est-à-dire la
cause. Ce moyen est analogue à celui (|ui a si bien réussi à assainir les
Landes, en supprimant en grande partie la pourriture végétale, et en pro-
curant l'écoulement latéral des eaux que l'alios empêche de se perdre dans
l'épaisseur d'un soi perméable. De même, après avoir supprimé les causes
d'infection animale, il suffit de faciliter, aux eaux de pluie qui doivent en-
lever les ferments dangereux accumulés dans le sol, un écoulement latéral
rapide au moyen d'un drainage convenable, au lieu de les laisser stagner
dans la couche superficielle où les maintiendrait l'imperméabilité du sous-
sol.
» Je ne quitterai pas ce sujet sans dire un mot des incendies qui vien-
nent de ravager et qui désolent peut-être encore, an moment où je parle, ces
immenses plantations de pin maritime qui font aujourd'hui la richesse, la
salubrité et l'ornement des Landes. En parcourant en wagon ces vastes
pi^nadas, j'ai été frappé de voir que l'incendie n'a nulle part pu franchir la
voie ferrée. A l'est, des espaces incendiés s'étendent à porte de vue; à
l'ouest, des pignadas intactes et verdoyantes. Il m'a semblé dès lors qu'en
ménageant de distance en distance, dans les semis, des bandes de terrain où
l'on se bornerait à arracher les bruyères et les ajoncs qui, en temps de sé-
cheresse, propageraient l'incendie au ras du sol, on liu)itcrait à coup sur et
f 25[ )
d'avance les ravages du fléau, surtout si ces bandes réservées étaient per-
pendiculaires à la direction des vents régnants. Bientôt ces bandes de ter-
rain se recouvriraient d'une herbe fine et courte; elles offriraient à la vaine
pâture une ressource qui tend à disparaître entièrement dans les semis
opérés aujourd'hui sans solution de continuité. Les propriétaires per-
draient, il est vrai, le revenu de ces bandes protectrices, mais ils éviteraient
la ruine de l'incendie, ou bien ils verraient diminuer notablement la lourde
prime d'assurance qu'ils ont à payer annuellement pour s'en garantir. Les
pasteurs des Landes ont de tout temps mis le feu aux bruyères à la fin de
l'été, pour augmenter quelque peu, l'année suivante, les ressources paca-
gères de ce maigre sol : c'est une coutume des plus antiques, témoin le fait
cité par M. Arago, dans une Notice sur lu Météorologie, des doléances que
les vignerons du Médoc adressèrent à la couronne d'Angleterre (à l'époque
où les Anglais possédaient la Guyenne) contre cette habitude invétérée
qu'ils considéraient comnie capable de nuire à leurs vendanges. Les gens
du Médoc se plaignaient en effet île ce que ces incendies continuels, au
commencement de l'automne, produisaient des nuages de fumée lourde,
de véritables brouillards secs que les vents régnants amenaient et faisaient
planer sur leurs vignes. Cette pratique a diminué à mesure que les semis
envahissaient les Landes; elle n'a pourtant pas entièrement disparu; c'est
pourquoi l'on a soupçonné ces joiu's-ci les pasteurs landais d'avoir causé
les sinistres actuels par leur procédé habituel de mettre le feu aux bruyères
desséchées. J'espère que les enquêtes ouvertes aujourd'hui démontreront
l'innocence de ces braves gens et que les récents sinistres seront unique-
ment imputables à de simjjles accidents favorisés par la sécheiesse exlra-
orduiaire de cette année. Cette sécheresse a doinié en effet un degré de
combustibilité de plus à des matériaux déjà si inflammables en temps or-
dinaire. Mais, quelle que soit l'origine de ces malheurs, il y a lieu d'es-
pérer que le procédé d'isolement systématique c[ue je viens d'indiquer
pour les semis nouveaux suffirait à circonscrire étroitement les dévasta-
tions de ces mers de feu qui se propagent aujourd'hui sans obstacles sur
des milliers d'hectares (i) : j'ai donc cru qu'il était utile de le signaler
en attendant une solution meilleure. »
(i) C'est par des trancliées analogues, pratiquées à la hâte à travers les pignadas, qu'on
parvient quelquefois à limiler l'incendie; mais c'est là une ressource extrême et trop sou-
vent impraticable.
( 252 )
CHIMlli MlNtHALE. — Examen d'une roche schisteuse imprécjnée d'une malicre
charhontieuse^ tirée de la collection adressée à r académie par M'Sl. Ravizza
et Colomba (i). Noie de M. H. Saixte-Claike Deville.
« L ecliarililloii soiiniis à l'analyse est composé d'une substance schis-
teuse, très-fusible, sur laquelle se trouve une matière charbonneuse qui im-
prègne également la niasse.
» Cette malière perd 9 pour 100 au ronge et il suffira de l'incinérer pour
avoir fait tout ce qui! est bon de tenter pour arriver à la connaissance de
sa nature.
» L'échantillon hrojé et traité par un acide dunne un très-faible déga-
gement d'acide carbonique. Si l'on calcine la pierre en vase clos, puis à
l'air, on trouve :
Matières volatiles 9> '4
Charbon 0,22
Cendres 90 ,64
I 00 , 00
w Le rapport entre la quantité des matières volatiles et le résidu de char-
bon prouve qu'on a affaiieà une malière bitinnineuse qui imprègne la
roche, et non une substance de la natiu'e de la houille ou de l'anthracite.
)) Les cendres ou stdjstances fixes et incombustibles contiennent :
Silice .... 56
Alumine et oxyde de fer 26
Chaux, alcalis, etc 18
» C'est probablement un schiste bilinnineux. »
100
Ati'IiiONOMiL l'iiYSlQUli. — JSoiiihdlcs renuirijucs sur Icà s/itclres fournis pur dwers
types d'étoiles. Lillrc du P. Seccih à M. le Secrétaire perpétuel.
« Rome, ce 1 5 juillet 1870.
» Dans uno de mes Communications précédentes sm- les spectres stel-
laires, j'ai indiqué que j'ai abordé cette élude avec un grand prisme placé
devant l'objectif, ayant 6 pouces (o'",i6) de diamètre et environ i i degrés
(i) Voir Comptes rendus, t. LXX, p. i 122 (séance du 23 mai 1870 j.
( 253 )
d'angle réfringent; il a été exécuté par M. Merz. La dispersion directe
opérée par ce prisme est d'environ un demi-degré entre les raies extrêmes
de l'hydrogène, pour les étoiles de premier type. En employant des oculaires
différents, on peut obtenir des grossissements divers et une séparation des
raies très-considérable. Ordinairement j'emploie une lentille cylindrique,
combinée avec lui oculaire sphérique grossissant loo fois, et lui oculaire à
deux lentilles cylindriques dont le pouvoir est 200 environ. Avec cette
disposition, la hunière reste considérable, car la dilatation transversale
est très-modérée. Cette grande dispersion est très- utile pour reconnaître
les détails des raies et lein-s formes, mais la quantité de lumière reste dimi-
nuée'à cause de la petite ouverture à laquelle la lunette se trouve bornée:
elle es! réduite d'un tiers. Pour cette raison, ce prisme n'a pas une
supériorité considérable sur le système employé d'abord par moi et qui
consistait eu lui spectroscope ordinaire composé, mais dans lecpiel on
avait substitué à la fente une large Iculille cylindrique. Un avantage réel
pourrait être obtenu seulement si l'ouvertuie du prisme égalait celle de la
Ituiette, ce qui, dans le cas actuel, serait bien difficile à réaliser. Ce sys-
tème cependant, comme l'a déjà remarqué M. Respighi, peut bieix s'appli-
quer à de petites limettes. On peut avoir un bon résultat même avec un
angle réfringent plus petit, car le grossissement de l'oculaire peut com-
penser la quantité de la dispersion directe. Pour reiulre les observations
plus expéditives, jai placé sur la grande lunette un aulie chercheur, con-
venablement dirigé, de sorte cju'd était très-facile de retrouver les étoiles.
« Venons maintenant aux résultats obtenus.
» J'ai déjà averti que Sirius présentait une dilatation remarquable des
mies de l'hydrogène, ce qui pouvait conduire à juger de la pression consi-
dérable que ce gaz possède datis l'atmosphère de cette étoile. J'ai vérifié
cette particidarité dans lui grautl nombre d'étoiles de ce type, comme
a d'Ophiuchus, celles de la Grande Ourse, a de l'Aigle, « de la Lyre, etc.
Les trois raies qui se retrouvent dans le bleu et le violet, pour cette der-
nière étoile, peuvent se représenter, par rapport à leur intensité, par les
trois coiu'bes suivantes :
T w
» Ou voit que la dernière raie VV «st très-dilatée et dillnse, et conslitue
une véritable bande. La raie F est plus tranchée, mais notablement dilfuse.
C r;.. 16-0, 1' Semestre. (T. LXXI, N" 4.1 -'^3
( 254 )
La dernière W, qui est ordinairement difficile à voir dans l'hydrogène,
est une bande très-large et très-faible. Il est remarquable que l'ordre de
ces dilatations suit celui qui a été déjà relevé dans le spectre direct du gaz
lui-même, selon les différentes pressions. La raie C est difficile à bien dé-
finir, à cause du défaut de lumière dans le rouge extrême.
» jNIais la classe d'éloiles les plus intéressantes à examiner, par ce moyen
puissant, était celle des troisième et quatrième types. Le troisième type
paraît réellement composé de la superposition de deux spectres : l'un [a)
consistant dans les raies métalliques propres au deuxième type, seulement
grossies et dilatées à cause de la couclie plus épaisse de vapeurs que les
rayons ont traversée, à peu près comme dans les taches de notre Soleil;
l'autre [b) paraît lui spectre à larges bandes (sept ou huit principales) dont
le type est a Hercule. Le second spectre est plus ou moins fort dans les dif-
férentes étoiles; ainsi, à peine sensible dans Aldébaran, il est très-fort dans
Antarès, «Orion, ^ Pégase, etc.
M II fallait d'abord s'assurer que la diffusion observée dans les zones du
premier type n'est pas due à un défaut de précision dans l'appareil : cela
résulte de l'examen des étoiles de deuxième et de troisième type, car les
raies métalliques connues sont nettement définies et tranchées, malgré la
grande dispersion. C'est ce qui est très-nettement visible dans Antarès,
surtout dans le vert pour celles du fer et du magnésium. Les raies D
cependant sont diffuses et mal terminées, ce qui rend leur séparation diffi-
cile, comme dans les taches très- profondes. iMalgré que cette étoile soit
tro|> basse et que l'atmosphère ait été habituellement trop agitée pour
donner des résultats complètement satisfaisants, il n'y aucun doute à cet
égard.
» Quant à « d'Hercule, cette étoile, examinée plusieurs fois avec un
état atmosphérique très-bon, n'a donné aucune trace de résolubilité des
coloiHies principales, quoique ces colonnes fussent très-nettement tranchées
du côté le moitis réirangible du spectre. Malgré les forts gro.>>sissements
employés, on n'a vu aucune trace des lignes secondaires, mais seulement
une irrégularité d'intensité dans la lumière de ces colonnes. Cette con-
clusion est remarquable, car le pouvoir dispersif du prisme combiné avec
l'oculaire est équivalent à ce que donnent trois prismes dans le spcctroscope
ordinaire : dispersion bien sutfisante pour montrer les lignes secondaires
dans les spectres cannelés de l'azote et du carbone. On ne saurait donc
attribuer à l'impuissance de l'instrinm iil un tel défaut de résolution.
» Il est vrai que, dans des soirées exceptionnelles, avec de faibles dis-
( 255 )
persions, on a réussi à voir des traces de résolubilité, mais il peut se faire
que ce soit là un effet des inégalités d'intensité, faisant que des bandes un
peu plus vives se présentent comme des raies ou des lignes. Il arrive ici
ce qui a lieu pour les bandes ou zones des planètes, Jupiter par exemple,
lesquelles avec des faibles grossissements apparaissent très -nettes et bien
terminées, tandis que, avec des pouvoirs plus forts, leurs bords sont diffus.
Or ici la réalité est évidemment mieux représentée par de forts grossisse-
ments, car ces zones ne peuvent pas avoir des limites tranchées comme
les solides : elles doivent être diffuses.
» TTn contrôle à cette théorie pouvait être obtenu au moyen des étoiles
du quatrième type, et surtout de la belle étoile qui se trouve dans la
Grande Ourse en ^ = i2''38'°3o^ c? = -f- 46''i3', grandeur 6. Cette
étoile donne un spectre formé de trois bandes principales, qui, avec un
faible grossissement, paraissent sillonnées de lignes brillantes; mais avec
le grand prisme, ces lignes se résolvent en bandes brillantes, mal terminées
aux bords. Ainsi, par exemple, la bande du milieu a une intensité lumi-
neuse qui peut se représenter |iar la courbe suivante :
» On voit que les lignes plus vives du milieu qui, avec une petite dis-
persion, paraissent être des raies brillantes, sont de véritables bandes.
» J'ai déjà fait remarquer ailleurs l'analogie de ce spectre avec celui de
l'étincelle électrique produite dans la vapeur de benzine, qui, lui aussi, est
indécomposable en raies fines et capillaires, comme les métaux.
» Il est sans doute prématuré de tirer des conséquences de ces faits,
encore trop incomplets, mais je crois ne pas trop aller au delà des faits
observés en disant que non~seidement les atmosphères de ces astres de
troisième et surtout de quatrième type ont une composition différente de
celle de notre Soleil, mais qu'elles paraissent être à une température suffi-
samment basse pour donner les spectres propres aux gaz à basses tempéra-
tures, ceux qu'on appelle de premier oidre.
» Dans Satinne, j'ai vérifié les trois bandes dans le jaune et le rouge
que j'ai déjà annoncées autrefois. »
33..
( 256 )
MÉTÉOROLOGIE. — Sur une brochure nouvelle de M. Hirn;
par M. Faye.
« J'ai riiomiour i\v présenter à l'Académie, (fe la part de noire savant
Correspondanl M. Hirn, une brochure inlitidée : Inlroduclion à l'élude mé-
téorolocjique de l'Alsace. Celle curieuse brochure devrait plutôt s'appeler
une Invitation à l'étude de la Météorologie en France, car l'auteur s'y est pro-
posé (le montrer conniient les théories nouvelles de la chaleur sont appe-
lées à donner luie f:ice nouvelle à cette science. Si, en effet, la Météorologie
est, malgré les belles entreprises de M. I.e Verrier et la croMlion à Paris
d'un Observatoire spécial, bien moins généralement cultivée chez nous que
chez nos voisins, c'est qu'il n'est |)as du génie français tle s'attacher ar-
demment à des problèmes trop indéterminés; nous n'aimons guère, eti gé-
néral, acciuuuler les faits poiu' l'amour des faits, ou dans un but trop va-
guement appréciable. C'est ce que M. Hirn a coiiqiris : aussi s'est-il attaché
à donner un coips à la Météorologie en y iritroiluisant la Thermo-dyna-
mique. Ou remarquera, en particulier, sa théorie nouvelle de la grêle. Je
ne l'ai pas encore assez étudiée pour donner à ces idées une adhésion
sans réserve, mais je crois pouvoir dire du moins que le travail de M. Hun
feia é|ioque en Météorologie, et qu'il sera lu par tous Us amis des sciences
avec le jilus vif intéiét. »
NOMIÎMATIOIVS.
L'Académie procède, par l.i voie du scrutin, à la nomination d'une Com-
mission qui sera chargée de juger le concoins du pi-ix des Arts insalubres,
pour l'aïuiée 1870.
MM. Chevreul, Payen, Combes, Boussingaull, ])(uiias réiuiissent la ma-
jorité des suffrages.
L'Académie procède, par la voie du scrutin, à la nomination d'une Com-
mission qui devra juger le concours du prix de Physiologu> exj)éruuentale
|)our l'année iS'yo.
MM. Cl. Bernard, Longet, Hobin, Mihie Edwards, Coste réunissent la
majorité des sulhages.
( ^--'l )
RAPPORTS.
PHYSIQUE MATHÉMATIQUE. — Rapport Sur an Mémoire de M. Massieii , inli-
(iilé : Mémoire sur les fonctions caractéristiques des divers fluifles et sur
la théorie des vapeurs.
(Commissaires : MM. Regnauit, Combes, Bertrand rapporteur.)
« Le Mémoire de M. Massieu, dont nous venons rendre compte à I'Acm-
démie, nous semble conçu dans un excellent esprit. Acceptant sans les dis-
cuter et sans s'arrêter à les démontrer de nouveau les deux théorèmes im-
portants dont on a fait la base de la théorie mathématique des effets
calorifiques, M. Massieu s'attache d'abord à les lésumer sous la forn)e la
plus simple, et son travail apporte à cette théorie tant étudiée un progrés
réel et incontestable.
» Le problème dont la solution rendrait la théorie parfiite et déiiniiive
serait celui-ci :
« Exprimer pour chaque corps, en fonction de deux variables indépen-
» dantes, la température et la pression, parexemjjle, les divers éléments
» physiques qui en dépendent, tels que le volinne et les deux caloriques
» spécifiques. En se bornant à ces trois inconiuies qu'd semble impossible
» de séparer, la théorie générale résinnée dans deux tViéorèmes, dont l'un
» peut s'appeler ihéorcme de Carnol ou de Clausnis, et l'autre théorème de
H Mayer ou de Joule ^ fournit deux équations .seulement entre trois incon-
» nues, qui restent par conséquent indéterminées, et il ne saurait en être
» autrement, puisque les relations à obtenu- changent complètement de
» forme, cela paraît évident, avec la nature et l'état des corps. »
» La première partie du travail de M. Massieu, consacrée à ce problème
général, en donne la solution complète et fort simple, dans l'expression de
laquelle figure explicitement une fonction arbitraire qu'il nonuiie caracté-
ristique, et dont la forme, variable d'une substance à l'autre, peut servir
à caractériser chacune d'elles en déterminant tous ses éléujents calori-
ficjues.
« L'intégration complète de deux équations différentielles partielles du
second ordre doit sembler, dans l'état de la science, une boinie fortune
inespérée qu'aucune méthode coiuiue ne pourrait promettre. Aussi n'est-ce
pas par cette voie que I\L Massieu aborde le problème. Les deux équa-
tions dont il s'agit expriment, on lésait, que certaines expressions sont des
( 2*58 )
différentielles exactes; c'est en prenant pour inconnues leurs intégrales, ou
plutôt eu les considérant comme données, que l'on obtient la solution dont
l'extrême simplicité accroît plutôt qu'elle n'amoindrit le mérite. Nous
croyons utde de donner ici l'expression complè;e des formules Us plus
simples définitivement adoptées par M. Massieu.
» Soit f/Q la quantité de chaleur nécessaire pour faire passer un corps,
de la température t à la température t + dt, et du volume v au volume
V + dv; ou sait que p désignant la pression, et A un coefficient constant
pour tous les corps, les expressions
dQ—Apdi',
dq
où T désigne la température absolue comptée à partir de — 278 degrés,
doivent être des différentielles exactes; et que c'est ainsi que peuvent se
traduire les deux théorèmes fondamentaux de la théorie nouvelle.
» Posons donc
dQ—Apdi> = d\]
nous en conclurons
r/U + Apdi' + SdT = SdT -4- T^S = ^(TS);
SdT + Apdif = d{TS - U).
H =TS — U,
^H = Sdt -j- Apdv.
on a donc
Posons
nous aurons
La fonction H est caracléristique du corps, et M. Massieu montre très-aisé-
menl que cette fonction étant connue, on peut, par de simples différentia-
tions, exprimer toutes les propriétés calorifiques du corps correspondant,
au moyen de cette fonction H et de ses dérivées. On a |)ar exemple, i)our
représenter les deux ciialeurs spécifiques.
A=T ^
A'
r/ H
dt'
r/-H
dv-
= T
d\i
dt'
( 2% )
Le coefficient de dilatation jS à pression constante, c'est-à-dire le rappoit
de la dérivée du volume — - an volume ini-niême, est
clt ^
d'K
/5
—
I dvclt
dv''
à
vol
urne const
</ H
/3'
dvdt
1) Quoique celte première partie du Mémoire de M. Massieu ne con-
tienne aucun principe théorique nouveau, et qu'elle se résume dans l'ex-
pression plus simple et plus élégante de deux théorèmes très-connus, nous
n'hésitons pas à la déclarer très-digne de l'approbation de l'Académie;
l'introduction de la fonction caractéristique dans les formules qui résument
toutes les conséquences possibles des deux théorèmes fondamentaux,
semble, pour la théorie, un service analogue et presque équivalent à celui
qu'a rendu M. Clausius, lorsqu'il a donné au théorème de Carnot l'expres-
sion si élégante et si lumineuse qui le rattache à la fonction nomuiée par
lui entropie.
» M. Massieu, après avoir proposé pour l'étude des corps l'emploi nou-
veau de la fonction caiactéristique, recherche l'expression de cetle fonc-
tion pour les gaz parfaits d'abord, pour les vapeurs saturées et pour les
vapeurs surchauffées.
» L'étude des gaz parfaits, c'est-à-dire des fluides qui suivraient rigou-
reusement les lois de Mariotte et de Gay-Lussac, ne laisse subsister c^u'une
inconnue : le calorique spécifique à pression constante; en admettant,
ainsi que l'a trouvé M. Regnault pour quelques gaz, qu'on puisse le consi-
dérer comme constant, le problème est entièrement résolu. M. Massieu
pourtant y applique ses formules et donne l'expression de la fonction
caractéristique en fonction du volume et de la température.
» En étudiant ensuite les vapeurs saturées, M. Massieu retrouve d'iuie
manière élégante des résultats célèbres et déjà classiques, découverts par
M. Clausius, et son seul but est, comme il le déclare, de luonlrer [lar ces
applications la simplicité et la généralité de sa méthode.
» Le chapitre relatif aux vapeurs surchauffées laisse plus de place à
l'incertitude; l'expérience ici n'a pas encore suffisamment préparé le ter-
( afio )
rniii, el dans les formules générales ingénieusement obtenues par M. iMas-
sien subsistent des inconnues sur lesquelles on en est réduit à des hypo-
thèses plus on moins jjlausibles.
» M. Massieii avait adopté d'abord celle de la constance du calorique
spécifique à voliiuie constant, en as^similanl, sous ce point de vue très-impor-
tant au moins, les vapeurs à un gaz parfait; il y substitue ensuite une loi
empirique cpii permet une plus grande aj^proximation, sans présenter tou-
tefois une plus grande garantie d'exactitude théorique.
» M. Massieu a en néanmoins, sur cette question difficile, le mérite de
donner une formule indéjjpndanle de toute hv|)othése, par laquelle toutes
les questions relatives à l'étude physique des vapeurs se trouveront réso-
lues le jour où l'on aura di-tcrminé, poin* chaque température et pour
chaque pression, les valeurs du calorique s|)écifique à pression constante.
» Conclusions. — En résumé, le Mémoire de jNI. Massieu nous paraît très-
digne d'être approuvé par l'Acadénne, et inséré dans le Recueil des Savants
étrangers. »
I^es conclusions de ce Rajjport sont adoptées.
MÉMOIRES PllESEIVlÉS.
M. TosTiviiîET adresse, de Trémuson (Côtes-du-Nord J, une Note relative
aux résultats fjii'd a obtenus en cherchant à faire couver ties peidrix en
cage.
(Renvoi à la Section île Zoologie.)
M. LouKAu adresse, d'Oloron-Sainte-Marie (Basses-Pyrénées), une Note
manusci'ite et luie brochure i-elalives à un « cercle releveur ", destiné à
servir à la fois de gra])homètre, de planchette, de l)Oussole et de niveau.
(Renvoi à la Section de Géométrie.)
M. PiiÉTis DE Sainte-Ckoix aclrcsse, de Menton, une nouvelle Lettre
concern;inl ses |)récédenteK Communicalions sur wm' démoustralion élé-
meufoire du iioslulaliiin d'iùiclide.
(Renvoi à la Commission précédemment uonnnée.)
M. Lu.vEAU adresse tui Mémoire intitulé « IMoiivemeut perpétuel ; pro-
blème îésolu p;ii' <lix systèmes différents ».
(Jn fera savoir à l'auteur (pie, en vertu d'iuie décision générale, prise
ancieiuiement par l'Académie, les C^ommunications sur ce sujet sont con-
sidérées comme non avenues.
( 26. )
CORRESPONDANCE .
MM. BoNTEMPs, Friedel, Hvrtl adressent des remercîmenfs à l'Aca-
démie, pour les distinctions dont leurs travaux ont été l'objet dans le con-
cours de l'année 1869.
M. LE Secrétaire perpétcel signale, parmi les pièces imprimées de la
Correspondance :
1° Un Mémoire accompagné de planches et portant pour titre « Études
faites dans la collection de l'École des Mines, sur des fossiles nouveaux et
mal connus. Premier fascicule : Mollusques tertiaires, par M. F. Bayan »
et une brochure du même auteur sur les « Terrains tertiaires de la
Vénétie » ;
2° Les vingt-quatre dernières livraisons de l'ouvrage de M. Plée sur les
« Types des fainilles des plantes de France ». L'ouvrage, mainteuiint com-
plet, contient 2400 figures coloriées, prises sur nature; c'est le fruit de
vingt-trois années de travail.
ASTRONOMIE. — Bestatiration d'un cadran solaire conique, sur un fragment
rapporté de Pliénirie par M. Renan. Note de M. A. Laussedat, pré-
sentée par M. Bertrand.
« Pendant la campagne que l'armée française fit en Syrie, en 1860,
M. Renan, chargé d'une mission scientifique dans cette contrée, obtint du
commandant en chef de l'expédition le concours d'une compagnie de chas-
seurs à pied, pour faire pratiquer des fouilles en différents endroits de l'an-
cienne Phénicie. Parmi les objets les plus intéressants que l'on parvint à
découvrir à Oum-el-Awamid (i), se trouve un fragment de cadran solaire
sur lequel l'attention du savant philologue fut d'abord attirée, parce qu'on
y apercevait les traces d'une inscription phénicienne.
» En examinant de plus près le bloc de pierre, déjà précieux à ce pre-
mier titre, on reconnut en outre qu'il présentait une porlion de surface
(i) Cette localité est située à quelques lieues au sud de Gour (Tyr) ; on ignore son nom
phénicien. M. Renan y a trouvé plusieurs inscriptions et des débris de monuments mieux
conservés et mieux caractérisés que partout ailleurs.
C. H.. 1R70, 7' S^m->s(«. (T. I.XXI, N<>4.) -^^
f 962 )
concave sur lacuiellc Irois lignes sensiblement droites rayonnant dim
même centre étaient recroisées pnr trois autres tracées dans le sens de la
coiirhiire de la surface.
» M. Bertrand, à qui M. Renan fit voir cette pierre, n'hésita pas à y re-
connaître un cadran solaire conique ; les lignes snisiblement droites étaient
des lignes horaires et les coui'hes étaient les trajectoires de Tondjre de
l'extrémité dti style aux solstices et aux éqninoxes. En mesurant l'espace-
ment de ces arcs de cercle, on arrivait facilement à en conclure l'angle au
sommet du cône, qui se trouva être sensiblement égal à la latitude du lieu
pour lequel avait été construit le cadran.
» M. Bertrand ni'ayant engagé a étudier à mon tour la pierre jiliéni-
cienne, je n'eus d'abord qu'à reconnaître l'exactitude de son diagnostic et
celle du résultat auquel il était parvenu. En examinant ensuite attentive-
ment les lignes horaires, je constatai qu'une seide était droite et que les
deux autres coupant la base au cône et les arcs de cercle qui lui sont paral-
lèles sous des angles aigus, ne l'étaient pas. Cette remarque m'a heu-
reusement mis sur la voie de la restitution complète du cadran (i). La ligne
droite était indubitablement la méridienne, t'X les grandeurs des arcs inter-
ceptés \y,\r les lignes horaires montraient que ces lignes ti'étaient pas desti-
nées à indiquer ]es heures (kjalcs que nous enq)loyons aujourd'hui, mais les
heures temporaires (2), en usage chez la plupart des peuples <îe l'antiquité.
» La disposition aussi bien que I;) forme du cadran, et ou pourrait ajou-
ter celle du mouvement lui-inéme, résultaient de cet indice assez faible en
apparence. A la rigueur, la méridienne qui était une génératrice du cône
aurait pu être couchée horizontalement, et l'égalité de l'aiigle au sommet
avec la latitude semblait appeler cette solution; mais le sens dans lequel
croissent les angles horaires, de l'tm des solstices à l'autre (angles que l'on
peut évaluer d'après les grandeurs des arcs interceptés entre les lignes ho-
raires), l'écartait absolument et obligeait à donner à la méridienne une
inclinaison égale au double de la latitude (3).
» [>e cadran devant marquer les heures, depuis le lever jusqu'au coucher
(i) Les conjectures que j'ai du faire el les calculs auxquels elles donnaient lieu exigeaient
des vcriiications <|ui m'ont été facilitées, grâce à l'obligeance de M. le Conservateur des an-
tiques du Louvre (jui a bien voulu melire à ma disposition un surmoule de la pierre.
(2) L'heure temporaire est le douzième de l'intervalle de temps écoulé entre le lever et le
cnuclier du soliil, i|iiellc ipie soit l.i saison ou l'époque de l'année.
(3) M. Rerli.ind .ivail eu le pressentiment de cette disposiliou du cadran.
( 263 )
du soleil, on peut aftiriiiei' à coup sûr qu'il était terminé su|jé!ieuiement
par le pian horizontal mené par l'extrémité indicatrice tlu style, lecpiel
plan coupe le cône suivant une parabole .Du côté méridional, le |)lan de
la base de ce cône, dont luie partie se trouve conservée, formait une siu--
face terminale inclinée parallèlement à l'équateur. Langle de la méi'i-
dienne avec ce plan pouvait se mesurer avec assez d'exactitude sur la
pierre, et l'on avait ainsi une vérification de la latitude. Les résultais
obtenus par les deux voies différentes s'accordent entre eux, et avec la
véritable latitude qui est de 33° 8', à ^ degré près.
» Quant aux" lignes horaires, les trois arcs des solstices et des équinoxes
étant tracés siu' la surface conique, et limités au plan horizontal, le con-
structeur du cadran n'a eu, pour les délerminei-, qu'à diviser chacun de
ces arcs en douze parties égales, et à luiir par un trait contiru! les poinis
de division coirespondants. Il était même iiuuile tle les prolonger au delà
de l'arc du solstice d'hiver, mais on voit sur le fragment conservé qu'elles
ont été continuées jusqu'à la rencontre de la méridienne en un point qui
est leur sommet coinnuin. Ces lignes sont eu effet des branches d'hyper-
boles dégénérant en une ligne droite, la méridieiuie, et passant à la parabole
qui répond siu' le pl-aii de l'horizon au commencement de la première hetiie,
et à la fin de la douzième. Peut-être l'astronome [)liénicien n'avait-il
achevé ces lignes que dans un but de décoration; peut-être était-il assez
bon géomètre pour avoir voulu conq^léter les hyperboles jusqu'à leur
sommet. Ce qu'il y a de certain, c'est que ce cadran offrait à !a vue simul-
tanément la ligne droile, le cercle, la parabole et des hyperboles, dont les
paramètres varient progressivement. L'ellipse seule faisait défaut dans celte
série des sections coniques.
» L'extrémité méridionale du style parallèle à l'axe du monde élant seule
en état d'indiquer l'heure sur cette espèce de cadran, il est en quelque
sorte évident qu'on devait substituer à ce style luie simple lis^e horizontale
placée dans le plan du méridien, et partant du sonunet comnuin des
courbes horaires.
o Le cadran proprement dit se Irouvait ainsi entièrement reconstitué,
maison ne pouvait pas se contenter de le poser sur lui base horizontale à
cause (lu surplomb considérable de sa face méridionale parallèle à l'équa-
teur. Il était donc extrêmement probable qu'il devait être soutenu par ties
coins ou consoles placés de part et d'autre de la cavité conique. Cette
construction rationnelle du petit édifice que nous avions conjecturée et
que nous avons fait réaliser dans le modèle exposé sous les yeux de l'Aca-
34..
( a6/, )
demie, s'est trouvée pleinement justifiée par la Forme donnée aux anciens
cadrans sphériques, dont plusieurs spécimens sont conservés au Musée du
Louvre, au Brilish-Musenm, à Naples,.etc.
» Tous ces anciens cadrans appartiennent d'ailleurs au type désigné par
Vitruve sous le nom à'hemicycHuin, lequel est luie modification de Vhemi-
splieriuni de Bérose, dont il ne diffère que par l'ablation de la partie méri-
dionale de l'hémisphère, à partir du tropique du Cancer.
» Dans une énumération des cadrans connus de son temps, Vitruve
nomme le cône et en attribue l'invention à Dyonisiodorius, sans autres
détails. Delambre, qui connaissait si bien l'astronomie ancienne, n'en
savait rien de plus. Il est donc fort probable que la découverte de M. Renan
a mis au jour pour la première fois un exemplaire de cette espèce de cadran
qu'il faut considérer comme étant d'invention plus récente que l'hémi-
sphérium et l'hémicyclium. La construction matérielle en était certaine-
ment plus simple (la suiface du cône étant plus facile à travailler que celle
de la sphère); mais, par cela même, elle était plus savante, et la forme en
était beaucoup plus élégante.
(La partie ombrée île ce dessin représeiile le frjgmenl du cadran rapporlé de Pliënicie.)
» L'époque de cet intéressant petit nionumeiit est certainement posté-
rieure aux travaux des grands géomètres d'Alexandrie sur les sections co-
niques. M. Renan a découvert en outre, dans le même lieu, d'autres
inscriptions dont la date ne pouvait pas remonter à plus d'un siècle avant
l'ère chrétienne; il est donc extrêmement probable que ce cadran doit être
rangé parmi les œuvres de la renaissance gréco-égyptienne, et c'est ce que
( 2(3,'-. )
nous avons voulu exprimer par le système de décoration que nous avons
appliqué à son siq5|)orl:. Quoi qu'il en soit, la pierre phénicienne paraît
mériter d'être signalée à tous ceux qui s'intéressent à l'histoire des
sciences.
■» P. S. — M. Renan avait antérieurement soumis la pierre phénicienne à
l'examen d'un éminent archéologue, M. Woepcke, qu'une mort pi'ématurée
a enlevé à la science. Le résultat des recherches de M. Woepcke (i) est
entièrement conforme, dans son ensemble, à celui auquel nous sommes
arrivé de notre côté. Nous n'en avons eu connaissance, M. Bertrand et
moi, que tout récemment, et quand le travail cjue j'ai l'honneur de sou-
mettre à l'Académie était entièrement terminé. Celui de M. Woepcke, au
mérite duquel je m'empresse de rendre justice, était néanmoins incomplet;
il laissait plusieurs points de la question dans l'ombre, et pour quelques
autres, la solution était soupçonnée, mais sans démonstration. Nous n'a-
vons donc pas seulement retrouvé l'interprétation de M. Woepcke, nous
en avons comblé les lacunes, et, en lisant la Lettre du savant antiquaire,
bien loin de regretter le tenqis que nous avons passé à refaire son travail
et à le compléter, nous y avons trouvé avec une vive satisfaction la preuve
de l'exactitude d'un'e restitution que l'on peut, croyons-nous, considérer
désormais comme authentique. »
PHYSIQUE DU GLOBE. — Nouvelles remarques sur les variations de iai<juille
aimantée. Extrait d'tuie Lettre de M. Broun à M. le Secrétaire
perpétuel (2).
« Dans une Note que j'ai eu l'honneur d'ailresser récemmeiit à l'Aca-
démie, j'ai fait remarquer que ;
« Si l'on peut supposer que cette formule (1), calculée d'après les
» données pour l'époque moyenne de 1848, 5, soit aussi exacte pour les
» 33 ans après cette époque que pour les 33 ans précédents, nous pour-
» rions conclure que la marche accroissante de l'aiguille aimantée vers le
« nord a déjà cessé. »
)) La formule [!i), pour Paris, indique le même fait, quoique l'éjjoque
soit moins certaine, à cause de l'incertitude sur la valeur de la constante a.
(1) Journal Jsialir/ue, t. I, 6" série.
(2) ^oir la première Noie de M. Bduii, Cunij/fcs rendus, t. I>XXI,p. 56 (séance du
4 juillet 18'jo).
( 266 )
La forumle (i) donne i858 pour l'époque, à Makerstown, où raccoisseaieut
lie la maiche vers l'est auiait dû cesser.
» J'ai reçu aujourd'hui, de M. Lamont, les moyennes annuelles de la
déclinaison magnétique à Munich, poiu- les années iS^i a 1868 (elles ont
|)aru dans ses JVoclienberichte)^ elles montrent que la conclusion tirée de
la formule pour Makerstown était juste.
» Voici les décroissements décennaux de la déclinaison occidentale à
Munich :
Période de lo ans. Diflércnce décennale.
1841 à l85l .... 1. 9,77
1842 i852 1.11,88
1843 i853 ..i3,66 ■
1844 1854 i.i4,36
1845 i855 1.15,39
1846 iS56 .. 1.14,62
1847 '^^7 i.i5,3o
184s i858 '.«4,90
1849 1859 I.12,5l
1 850 1 860 I 1 3 , 99
i85i i8fii i.i5,56
i852 1862 1.12,90
i853 i863 1 . 1 1 ,42
1 854 1 864 • 1.10,10
i855 i865 I. 9,80
1 856 1 8()6 1 . 1 G , 97
1857 1867 1 . 1 1 ,o3
i858 1868 1.11,75
» Ainsi la différence décennale, après avoir crû jusque vers i85o (i845
à i855), est restée avec des valeurs variables jusqu'à i856; elle a diminué
jusque vers 1860 (i855 à i865), sa valeur étant la même que vers 1846 :
d('|>uis 1860 (i855 à i865), il y a eu une recrudescence, mais si leule
(pi"d es! douteux si cela continuera.
» I^es différences pour des périodes moins longues, comme poui' trois
ans, montrent d'iuie manière plus marquée le changement du décroishC-
ment annuel ; ainsi
De 184 f .1 1844 '<-' ilccroisscment était 6,7 par ;innée.
.. i85i 1854 » » 8,0
. i86i 1864 >. . 6,4
» Il n'est pas possible de représenter les différences décennales poiu-
( ^-^1 )
Munich par une formule quelconque; elles sont trop irrégulières vers l'épo-
que du maximum.
» Nous sommes arrivés, en Europe comme à Trevat)clrum, à une partie
importante de la combe qui représente la marche annuelle de l'aiguille
aimantée. »
GÉOMÉTRIE. — Réponse aux observations de M. Catalan, dti ^juillet dernier;
par M. G. Darboux.
« M. Catalan a présenté à l'Académie [Comptes rendus, t. LXXI, p. 5o),
quelques remarques sur deux points de ma Note relative au lieu des centres de
courbure d' une surf ace algébrique. [Comptes rendus, t. LXX, p. rSsS.) Comme
la proposition critiquée par cet habile géomètre me paraît offrir quelque
intérêt, je demande la permission à l'Académie de la défendre et de ré-
pondre aux observations de M. Catalan. Je rétablis d'abord le passage
critiqué :
<t Considérons une équation difliTentieile que, pour plus de simplicité, nous supposerons
du second degré en — :
A, B, C étant des fonctions de x et de /. On admet qnV« général, les courbes représentées
par cette équation différentielle ont une enveloppe, et <pie cette enveloppe est donnée par
l'équation
(2) R = B- — 4AC=o.
C'est précisément le contraire qui arrive; en général, les courbes n'ont pas d'enveloppe, et
la courbe R = o est le lieu de leurs points de rebroussement.
dr
» Si les courbes avaient en effet une enveloppe pour tous les points de celle-ci, ^- serait
dr
donné p.nr
l'équation différentielle; on aurait donc
dR dR dr dr
dr "*" dr dr ^°' di~ '
B
2 a'
d'oij
(3)
dR B dR
dr 7.K d)'
Cette dernière équation devrait donc être vérifiée en même temps que l 'équnlion R ^ o, ce qui
n'a pas lien en général, puisque R et sont deux fonctions indépendantes l'une de
l'autre. »
( 268 )
» Tel est le raisonnement que j'avais donné (t. LXX, p. i33i-i332).
S'il est inexact, pourquoi M. Catalan ne signalc-t-i! pas le point précis où
j'ai commis une erreur?
» On peut d'ailleurs le remplacer par le suivant, tout aussi rigoureux,
qui m'est comnuuiiqué par un iMembre de l'Acailéniio :
» Soit une équation différentielle
» Prenons la dérivée de cette équation par rapport kj"'
-r— , = O.
Si entre cette équation et la précédente on élimine y' , on admet qu'on
aura, en général, la solution singulière. Il résulte de là qu'en déduisant des
deux équations les valeurs de j" et de j ', la valeur obtenue pourj' devrait
être la dérivée de la valeur obtenue pour 7-, résultat évidemment absurde,
lîuisque la composition en x de l'équation différentielle est tout à fait arbi-
traire, et qu'on pourra, dans les formules, remplacer im coefficient con-
stant par une fonction quelconque de x, sans rien changer à la suite des
opérations (il n'y a pas de dérivée prise par rapport à x).
« Il est donc établi qu'en général, la courbe R = o n'est pas l'enveloi^pe
des courbes du système. Il pourra d'ailleurs, cela est évident, se présenter
les trois cas suivants :
» i" L'équation de condition (3) est satisfaite pour tous les points de
la courbe R = o : alors cette courbe peut être et est en général l'en-
veloppe ;
» 2° L'équation de condition (3) n'est pas satisfaite pour les points de
la courbe R = o : c'est là le cas général, et alors la courbe R = o est, en
(jénéral, le lieu des points de rebroussement ou, si l'on veut, des points
singuliers des courbes représentant les intégrales particulières;
» 3" La courbe R = o peut se décomposer en deux parties, l'une pour
laquelle l'équation de condition est satisfaite, et qui est l'enveloppe, l'autre
pour laquelle cette équation fie condition n'est pas satisfaite, et qui est, en
général, un lieu de points singuliers.
» Il ne faudrait pas qu'on se méprît sur la jiortée des propositions pré-
cédentes. Elles pourront se trouver en défaut. Il y ;i à faire une discus-
sion de la nature de celles qui se présentent dans la tliéorie des points
siiigulin's. Quaiifl on a étudié le point doub!''. on doit passer nu point
( .69 )
triple, puis au point quadruple, etc. Les exemples fournis p;ir M. Catalan
ne sont donc pas de natnre à faciliter la discussion. Tout le monde com-
prend que lorsqu'on dit d'une proposition qu'elle est vraie en qénérnl, on
indique par cela même qu'il y a une infinité de cas dans lesquels elle ne
trouve pas son application. Eu outre, il faut, dans la théorie qui nous oc-
cupe, distinguer avec le plus (jrand soin le cas où l'équation nest jias inléqrée
et n'est pas susceptible d'inléciration de celui oit l'on a rintc(/rale qénérnle.
» Si l'on ad met, eu effet, qu'étant doiuiéeune équation différentielloqnel-
conquc, celle équation a une intégrale générale de la forme ©(x, ^^ C)=:o,
où la fonction (o est finie, continue et hien déterminée, dans une étendue
suffisante du plan, et pour toutes les v;ileiu's de C comprises entre certnines
limites, il n'y a plus de difficulté, et dès que l'équation précédente fournit
pour C plusieurs valeurs quand on se donner? et ^", il y a luu^ solution
particulière qui est l'enveloppe des courbes du système. ^lais rien ne prouve
qu'étant donnée ime équation différentielle, elle ait en général une inté-
grale de la forme indiquée. Admettre celte |iroposition, c'est faire une
hypothèse justifiée sans doute dans la |)Iupart des cas ou l'on sait intégrer,
mais qui est loin d'être démontrée dans le cas le plus étenrlu, celui où l'on
ne sait pas trouver l'intégrale générale.
» Quant à la remarque de M. Catalan sur les centres de coiu'bure de
l'ellipsoïde, elle est fondée. Je suis très-heureux de reconnaître : i° que les
formules en question n'étaient pas d'une recherche bien difficile; 2" qu'elles
sont dans les Mélanges de M. Catalan. Je leur avais donné place dans ma
Communication, siutout pour mettre en évidence les huit coniques singu-
lières de la surface.
« Je profiterai de l'occasion pour compléter un point de ma Communi-
cation du 20 juin dernier. Étant dotuii''!' l'équation
a(I)" + »£ + '^ = °.
il a été établi plus haut que la courbe dont l'équation est
B--/4AC = o
n'est pas en général l'enveloppe des courbes du système; mais je n'.ivais
pas démontré que, dans ce cas, elle est en général le lieu des peints sin-
guliers de ces courbes. La démonstration rigoureuse de celle proposilion
se déduit Irès-facdement des beaux résidlats obtenus par AiM. Biiot et
c. K., 1870, 7' S'-men-e. (T. LXXI, N" 4.) 35
( 270 )
Bouquet, dans leur Mémoire Sur l'intégration des équations différentielles
[Journal de l'Ecole Polyteclinicfue, Cahier XXXVI, p. i33). On peut aussi
employer les considérations suivantes :
n Traçons la courbe (R) dont l'équation est B* — 4AC = o, et suppo-
sons qu'elle soit réelle; elle sépare en général les
points du plan pour lesquels la valeur de -^ fournie
/ \ par l'équation différentielle est réelle des points pour
/ \ lesquels cette valeur est imaginaire. Soit la courbe (a)
'(r) ^ ' représentant une solution particulière; d'après ce
qu'on a vu plus haut, cette courbe viendra couper la
courbe (R ) en un point M sous un angle fini. On voit bien que la courbe (a)
ne peut se prolonger dans la région où le coefficient angulaire de la tan-
gente est imaginaire. Donc le point M est un point singulier.
» Ce mode de démonstration, quoique peu rigoureux, puisqu'il est fondé
sur la considération du réel et de l'imaginaire, me paraît pourtant de na-
ture à former la conviction des géomètres.
)) Voici deux exemples remarquables de l'application des propositions
précédentes :
» 1. Si, sur une surface, on étudie les lignes asymptotiques, ces lignes ne
peuvent être réelles que dans la partie où la surface est à courbure néga-
tive. Cette région est limitée parla ligne de double inflexion, ou lieu des
points à indicatrice parabolique. Cette ligne n'a pas en général pour tan-
gentes les diamètres des indicatrices paraboliques; elle est un lieu fie points
de rebroussement pour les lignes asymptotiques.
» IL Considérons deux surfaces fermées se coupant suivant une courbe
réelle. Si l'on cherche sur la première (A) les courbes dont les tangentes
sont tangentes à l'autre (B), ces courbes auront pour enveloppe la courbe
d'intersection des deux surfaces, et, pour lieu de points de rebroussement,
la courbe de contact avec (A) de la développable circonscrite à (A) el
à (B). ..
THERMO-DYNAMIQUE. — Sur l'équivalent mécanique de la chaleur et sur les
propriétés électro-thermiques de l'aluminium; par M. J. Vioi.ij;.
« Dans la Note que j'ai eu l'Iioiuieur de soumettre à l'Académie le
i3 juin dernier, je faisais connaître les résultats que j'avais obtenus dans
des expériences faites au moyen île l'apjiareil de Foucault poiu- délermiiier
l'équivalent mécanique de la chaleur. Dans ces ex|)ériences je ni'élais servi
( 271 )
d'un disque de cuivre rouge, semblable à celui dont Foucault lui-même
avait fait usage pour manifester réchauffement considérable que l'on peut
obtenir avec la disposition qu'il avait donnée à l'expérience d'Arago. De-
puis, j'ai employé successivement des disques de plomb, d'élain et d'alumi-
nium, et en suivant la même méthode que pour le enivre, j'ai obttnu pour
l'équivalent mécanique de la chaleur les nombres
435,8
avec l'étain
437,4
» le plomb
434 »9
« raluminiuin
bien voisins du nombre
435,2
trouve avec le eu
» Cet accord ne semblera sans doute pas sans importance si l'on consi-
dère que les expériences ont porté sur les métaux les plus ditïérenls peut-
être au point de vue physique, le plomb et le cuivre. Du reste, on en jugera
par le tableau suivant qui donne les élévations de température observées
sur les différents métaux, pour une même rotation de cinq minutes, avec une
vitesse de 1 833', 6 à la minute:
Cuivre 8'',8o5
Étain . , 5°, 602
Plomb 5°, 255
Aluminium 9°, 209
)) L'échauffement du disque d'aluminium a donc été le plus considérable,
et cela bien que le poids de ce disque ne fût pas Je tiers du poids du disque
de cuivre et pas le quart du poids du disque de plomb; les disques avaient
en effet sensiblement le même volume. Mais d'autre pari, la chaleur spéci-
fique de l'aluminium est énorme (plus du double de celle de cuivre), et
par conséquent, à égalité de masse et pour une même élévation de tempé-
rature, raliimiiiiiim est de tous les mélaux celui qui agira le plus énergi-
quement sur les corps à l'aide desquels on cherchera cà reconnaître cette
élévation de température.
» Il n'est donc [)as douleux que ce métal devrait être employé de préfé-
rence à tout autre pour répéter l'expérience de Foucault et jiour montrer,
dans un cours, l'échauffement énorme qu'elle peut produire.
» Je dois d'ailleurs remarquer que, pour toutes les expériences d'éleclri-
cilé, l'aluminiimi est le métal par excellence, très-bon conducteur et d'une
légèreté exceptionnelle; il est le seul doni on devrait se servir j)our les con-
35..
( 272 )
ducleiirs mobiles de la table d'Ampère. Son inaltérabilité, jointe à sa bonne
conductibilité, le recommande aussi d'une façon toute spéciale pour les
j)iéces fixes des a[)parei!s électriques, et il remplacerait avec avantage le
cuivre dans la construction des télégiapheset des machines magnéto élec-
triques : c'est un point sur lequel il n'est jias inutile, je crois, d'appeler
l'attention des constructeurs. »
CHIMIE ORGANIQUE. — Recherches sur les dérivés bromes de l'acide acéliciue
anhydre. Note de M. H. Gal, présentée par W. Calioiu-s.
« Toutes les tentatives faites jusqu'à présent pour obtenir les dérivés
bromes ou chlorés des acides anhydres ont échoué; on sait, en effet,
que lorsque l'on fait réagir directement le bionie sur l'acide acétique
anhyih e par exemple, il ne se prodint pas de phénonune de sidjslitiitiou,
mais que ce composé se dédouble et doruie naissance à un mélange de
bromure d'acétyle et d'acide monobromacétique; la formule suivante rend
compte de celte réaction :
{.'H'O" + .iBr = C'H'O^Br 4- C'H^BrO' (i).
» l^aiis l'impossibilité de provoquer une substitution directe, il fallait
donc songer à trouver un |)rocédé détourné pour obtenir les composés
bromes dérivant des acides anhydres. L'étude de ces dérivés |)résentait
d'autant plus d'intérêt qu'on pouvait espérer trouver parmi eux le j)reinier
terme de substitution, ce qui aurait fixé définitivement l'équivalent des
acides anhydres.
M Le procédé général indiqué ])ar Gerhardt, pour préparer les acides
anhydres, consiste à fair réagii' le chlorure d'un radical acide sur le sel de
potasse ou de soude correspondant; on conçoit facilement qu'en em-
ployant un chlorure ayant déjà subi des substitutions de la part du
chlore, il se prodiiir.i un anhydride dans letjuel un ou plusieius étpiiva-
lenls d'hydrogène seront remplacés par le même nombre d'équivalents
de chlore.
» Les exiiériences (pie j'ai l'honneur de soumettre à l'Académie ne sont
relatives qu'à l'acide acétique anhydre et, vu la dilficullé fi'oblenir les dé-
rivés chlorés du (. Iilorure d'acétyle, j'ai eu recours aux dérivés Ijiomés du
même radical.
(1) Comptes reniliis, I. LIV, |). S^o.
( 273 )
» J'ai versé du bromure d'acétyle monobromé (C*H'-BrO^,Bi) sur de.
l'acétate de soude foudu et pulvérisé, le mélange s'est échauffé et j'ai soumis
le tout à la dislillatiou ; il est passé un liquide, qui, rectifié, est entré en
ébullition à iSy degrés; la température s'est élevée graduellement jusqu'à
245 degrés; à ce point, elle est restée stationnaire, et j'ai pu recueillir un
liquide incolore qui, soumis à l'analyse, a fourui les résultats suivants :
I. i^%i 10 de substance brûles par l'oxyde de cuivre ont donne o8',73'2 d'acide carbonique
et o", ibo d'eau.
II. o«'',43o de matière traités par la potasse et l'azotate d'arj^ent ont produit o^^Gao de
bromure d'argent.
» Ces résultats traduits en centièmes donnent
I. II.
Carbone 18,0 »
Hydrogène 1,8 »
Brome » 61 ,3
" ]jd substance analysée n'est autre chose que rie l'acide acétique
anliy<lre bibromé, la formule de ce composé (CH"* Br^O") exige, en effet,
C 18,4
H 1,5
Br 61,5
» Qtiant au liquide bouillant de 1^7 à 25o degrés, il est coiiq)osé en
grande partie par l'acide acétique anhydre.
» ]ja formation de. ces corps s'explique facilement : il est probable, eu
effet, que par l'action du bromure d'acétyle monobromé siu- l'acétate de
soude, il se produit d'abord de l'acide anhydre monobroiué, d'après la
formule
CH^O-)^ C"H=BrO' C'H'O') Na
' O- + = ' 0 -I- 5
Na \ Br C"H'BrO' ) Br
et que ce composé, sous l'action de la chaletii-, se dédouble ensuite de la
manière suivante :
l C»H-BrO' I C'H^O-J C'H^BrO^/^
2 ! 0' = 0- + ' 0-'.
I C'U^O^) OH^O'j CMl-BrOM
" L'acide acétique anhydre bibromé ne se solidifie p;!S nK'iue à zéro.
Versé dans l'eau, il se rend au fond de ce liquitie et y di piUMÎt jieu à peu
en se transformant en acide nionoliroi-.iacétique.
» On peut obtenir ce dernier paifaileiiient ciilallisé en ab:uuionuant
■( -^74 )
l'acide anhydre à l'air humide. Le nouveau composé se dissout dans
l'alcool avec dégagement de chaleur eu donnaut naissance à de l'élher
inonobromacélique.
» On conçoit qu'en employant du bromure d'acétyle bibromé et Iri-
bromé, on obtiendrait de même l'acide acétique anhydre qiiadribromé ou
acide bibromacétique atihydre et l'acide acétique anhydre perbromé ou
acide tribroniacétique anhydre. Je n'ai pas cru devoir continuer ces re-
cherches, mon but |)rincipal, en les commençant, étant de chercher ù ob-
tenir le composé
qui se forme probablement dans la réaction que j'ai décrite, mais qui, mal-
heureusement, se dédouble sous l'action de la chaleur, ainsi que je viens
de l'indiquei'. »
CHIMIE. — Dosaqe uohiniéliiqite des fluorines saliihlcs.
Note de M. P. Guyot. (Extrait.)
« J. Nickiès a montré que le fluorure de potassium donne, avec le per-
chlorure de fer, un précipité blanc de sesquifluoferrate, représenté par
Fe-Fl', 2KFI, et que ce précipité se forme même au détriment de combi-
naisons organiques déjà produites (i).
» En pnrlaiit île cette observation, j'ai cherché à doser les fluorures so-
inbles à l'aide du perchloriu-e ferri(|ue. Pour cela, je me sers d'une solu-
tion pour laquelle je connais exactement la quantité de fer contenue dans
r centimètre cube de la solution : d'un autre côté, je prends lui poids
déterminé de fluorure de potassium, que je fais dissoudre dans un volume
connu d'eau distillée. Le dosage se fait avec 10 centimètres cubes tic la
solution de fluorure; on les place dans un verre avec quelques gouttes d'iuie
solution de succinate d'ammoniaque, puis on ajoute, à l'aide d'une burette
grailuée, du perchloriu-e ferrique, jusqu'à ce qu'il se forme une leinte
brime.
» J'ai aussi essayé d'employer le sulfocyanure de pota.ssium on de
sodium, le prussiate jaune et le tannin, à la place du succinate d'ammo-
niaque; mais, avec ces réactifs, il est très-difficile de saisir exactement le
(1) Revue (les Cours scientifiques, t.V, n" 24, p. Sgo.
( ^75 )
moment où il faut s'arrêter, parce qu'il se forme des colorations plus on
moins visibles, avant que tout le fluorure soit passé à l'état de sesquifluo-
ferrate de potasse. Le succinate d'ammoniaque ne donne un précipité brini
que quand tout le fluor du fluorure est précipité. »
PHYSIOLOGIE. — Nouvelle démonstration de In régénération osseuse après les
résections sous-périostées articulaires. Note de M. Ollier, présentée par
M. Claude Bernard.
(c Aux preuves que j'ai déjà apportées en faveur de la régénération
osseuse chez l'homme, après les résections sous-périostées des articulations,
je puis aujourd'hui en ajouter une nouvelle qui, je l'espère, sera définitive-
ment concluante.
u Jusqu'ici je n'ai pu démontrer cette régénération que par des observa-
tions cliniques, c'est-à-dire par la constatation, sur le vivant, du résultat de
la résection après la guérison des opérés. Dans certains cas, comme après
l'ablation de la moitié supérieure de l'humérus, ou la résection totale du
coude sur une hauteur de 7 ou 8 centimètres, la reproduction de masses
osseuses, renflées, articulées entre elles, ne pouvait laisser le moindre doute
dans l'esprit des chirurgiens qui ont été à même de voir, à côté du membre
opéré et guéri, les portions osseuses enlevées. Mais ceux qui n'ont pas
examiné mes opérés pourraient faire des réserves sur mes interprétations,
en s'appuyant sur la difficulté d'apprécier, à travers la ])eau, l'état réel
d'une articulation réséquée, et en m'o|)posant les résultats négatifs signalés
par d'autres opérateurs, après des résections réputées .semblables aux
miennes, ou au moins publiées sous le même nom.
» Les faits que j'ai l'honneur de soumettre à l'Institut, comme complé-
ment de mes études expérimentales sur la régénération osseuse, et qui ont
été recueillis sur des opérés morts un certain temps après une résection du
coude, viennent démontrer, d'une manière encore plus rigoureuse que
l'observation sur le vivant, la justesse de mes déductions expérimentales.
» La régénération osseuse se fait chez l'homme comme chez les Mammi-
fères sur lesquels j'ai expérimenté. Elle obéit aux mêmes lois, s'opère dans
les mêmes conditions d'âge et de milieu, et fait défaut dans les mêmes cir-
constances. Dans certains cas seulement, elle se fait d'une manière plus
régulière chez l'homme, parce qu'il se prête mieux que les animaux à l'im-
mobilisation que nécessite le traitement consécutif
» Les deux opérés dont l'autopsie m'a permis de vérifier ces proposi-
( 276 )
tions ont succombe'', l'un dix-luiit mois, l'autre imi an après la résection fin
coude. T>p premier étiiit âgé de ig ans, le second de l\g. Chez le pins jeune,
la reproductioi) a été plus abondante et plus régulière; il y a eu iiou-seu-
lenient reconstitution de l'articulation, par le rapprocliemenl des surfaces
de section, mais encore l'égénéralion des extrémités osseuses : tuhérosités
humérales, oiécràne.
>i Unit mois après la résection, mon opéré se trouvait dans de bormes
conditions locales et générales. Il ne restait qu'un petit trajet fistnleux, qui
donnait de temps à autre ini peu de .sérosité purulente. Les mouvements
actifs d'extension, de flexion, de pronation et de supination étaient rétablis
et se perfectionnaient de jour en jour.
» Une phtliisie pulmonaire se déclara, et, à [larlir île ce moment, jusqu'à
la fin de la vie, le malade traîna mie existence misérable. Plusieurs articu-
lations (épaule, hanche), saines jusque-là, furent atteintes de tumeur fon-
gucuse et de carie; l'articulation réséquée éprouva de nouveau les mêmes
altérations et supj)ura jusqu'à la fin.
» Voici les principaux détails de raiito|)sie, relativement à la forme des
extrémités osseuses reproduites et à leurs rapports.
» L'extrémité inférieure de l'huméius est la partie la plus régidièremcnt
reconstituée. Vue par sa face antéiieure, elle présente nue forme triangu-
laire. Son sommet se confond avec la diaphyse de l'os, et ses angles, terminés
par des prolongements saillants, représentent l'épicondyle et l'épitrochlée.
Sa base cori-espoml à l'inlerligue articulaire. Les tuhérosités latérales
mesin-eut près de 4 centimètres, de leur sommet à leur base qui se contitjue
avec la diaphyse. La section de l'os ayant porté à 42 millimètres de l'inter-
ligne articulaire, et toute la portion élargie de l'humérns avant jjar cela
même été retranchée, il n'y a pas de doute possible sur l'origine des tn-
l)éiosités que nous avons cfuistarées à l'autopsie. Rien que la p.ortion nou-
velle se continue régulièrement et paraisse, au premier abord, confondue
avec la p'iiiion ancienne, on la distingue à son aspect rugueux et à l'ab-
sence de la concile compacte, lisse qui recouvre les os normaux.
» I.,e cubitus se termine par un olécrâne de non\('Ile for-mation, long de
3 centimètres, qui forme, avec la portion ancrenne de l'os, un angle obtus
ouvert en avant, de sorte que les limites entre la portion anciiMine et la
]i()rtion nr)uvelle sont faciles à établir, (let olécrâne forme ainsi un crochet
qui, ])lacé en ai'rière entre It^s Inbérosilés nouvelles, emboile rinmK'iiis et
assure la solidité de l'.'.rlicnlation.
» En dedans du point ou roh'crâite s'articule avec la face postérieure de
( 277 )
l'hiimérds, on trouve, sur le nouveau condylo interne, nne gouttière bien
dessinée et occupée |)ar ie nerf cubital, cotninea l'état normal.
» Quant au radius, il se termine par un renflement formé \r.iv l'addition
d'iuie substance osseuse nouvelle, mais sans que la forme fie la cujnile ait
été rej)ro(luite.
» Toutes ces masses nouvelles étaient recouvertes par un périoste épais.
» Les diverses insertions musculaires, qui avaient été détachées au mo-
ment de l'opération, se sont rétablies dans leiu-s rapports normaux. T,es
nuiscles sont pâles, atrophiés, en raison du long repos auquel ils ont été
condamnés dans les derniers mois de la vie, mais on retrouve distincte-
ment toutes leurs insertions, même celle de l'ancôné. Le triceps s'insère
sur la pointe et sur les bords de l'olécràne, et agit sur le cidjitus seid. f.e
brachial antérieur s"insère sur une saillie coronoïdienne de nouvelle for-
mation.
» Au centre de la portion nouvelle de i'huiiiérus, dans l'écaitement des
deux tubérosités latérales, on trouve une masse tibrt-use, dure, mais non
encore ossiiiée, recouverte en avant par quelques lobules graisseux. Les
surfaces articulaires ne sont pas recouvertes d une couche chondroïde. Le
retour de la suppuration dans le coude avait non-seulement empêché les
processus réparateurs de se compléter, mais encore amené les désordres
qu'on constate dans les arthrites chroniques sup|)urées; l'iiilérieur de l'ar-
ticulation était, dans presque toute son étendue, tapissé pai' une mend)rarie
granuleuse, plus ou moins bourgeonnante.
» Le second opéré sur lequel j'ai [)u constater, par l'aulopsie, le degré
réel de la régénération osseuse est mort d'albuminurie, un an après l'opé-
ration. Malgré les mauvaises conditions dans lesquelles d a vécu, >a santé
n'ayant été satisfaisante que du deuxième au .sixième mois après 1 1 résec-
tion, j'ai trouvé, du côté de l'humérus, deux niasses latérales, épaisses, sail-
lantes, dirigées, comme dans le cas précédent. L'une en bas et en dehors,
l'autre en bas et en dedans, de manière à former une espèce de mortaise
qui empêchait toute mobilité latérale du radius ei du cubitus. La tubérosité
externe est surtout très-développée; elle est d'une seule pMèce, et mesure
4 centimètres; l'interne est complétée par un noyau osseux indépendant.
» Le nerf cubiial était logé dans une gouttière osléo-bbreuse, en arrièie
<le la tubérosité interne.
» L'olécràne, de forme irrégulière, se continue dans le tendon ilu triceps
par une série de noyaux osseux indépendants.
C. R., i8;o, 1' Semestre. (T. LXXI, N" 4.) 36
( ^7» )
» La reproduction de ces larges tubérosités hiimérales me paraît, ici,
d'autant plus remarquable que le malade avait quaraiile-neuf ans, et que,
d'après mes recherches expérimentales, on ne peut compter, dans lâge
adulte, que sur une génération très-imparfaite.
» Toutes les insertions des muscles, (iétacliées au moment de l'opération,
se sont rétablies dans leurs rapports normaux sur les masses osseuses nou-
velles. On les retrouve aussi régulières que dans le cas précédent.
» Ces résultats sont extrêmement démonstratifs eu faveur de mes procédés
opératoires, qui reposent sur la conservation intégrale de la gnine périosléo-
capsulaire, c'est-à-dire de toutes les parties fibreuses, périoste, tendons, liga-
ments, qui entourent le.s extrémités osseuses et limitent les articulations (i).
La partie périostique de la gaîne sert à la régénération des extrémités os-
seuses ; et, dans les cas où celte régénération ne peut pas avoir lieu, à cause
de l'âge trop avancé du malade, une articulation nouvelle se reconstitue
encore entre les surfaces de section, grâce à la conservation des moyens
d'union et des organes de mouvement. Les muscles continuent à agir, par
l'intermédiaire de la gaîne périostique, sur les os qu'ils doivent mouvoir. »
CHIMIE ANIMALE. — Sur tes graisses du chyle. Note de M. Dobroslavine,
présentée par M. Wiutz.
« J'ai commencé un travail sur les matières grasses du cliyle des herbi-
vores. Ces matières m'ont été remises par MM. Wurtz et Colin.
» M. le professeur Colin m'a remis, en outre, une certaine quantité de
chyle de vache, qui a été desséché et épuisé par l'éther. La matière grasse
ainsi obtenue se présentait à l'état d'une masse jaunâtre, solide, en partie
cristalline, qui se dissolvait à froid dans l'éther et dans l'alcool à 96 pour 100,
en laissant un dépôt blanchâtre. Ce dernier ne se dissolvait que dans de
l'éther tiède, et dans de l'alcool (à g5 pour 100) bouillant. Par le refroidis-
sement, la matière grasse dissoute dans l'alcool bouillant se séparait de la
dissolution en flocons blancs comme la neige, et se rassemblait au fond
des vases. Quelquefois, lorsque la solution n'était pas concentrée, la matière
"rasse au lieu de se déposer en flocons, se précipitait sous forme de grains
blancs dans lesquels on pouvait à l'aide d'une loupe reconnaître très-
facilement des aiguilles groupées en mamelons. Recristallisée 5 à 6 fois
dans de l'éther tiède et dans de l'alcool à gS pour 100 bouillant, cette ma-
(i) Traité expérimenlal et clinique de la rés;i'ricration des os, t. I et II.
( 279 )
lière grasse préseniait toujours le même aspect, et avait un point de fusion
constant à f\o degrés. I^es analyses de cette matière grasse m'ont donné les
résultats indiqués dans la note (i).
» Cette matière grasse n'a pu être saponifiée qu'à l'aide d'une dissolu-
lion alcoolique de potasse caustique. Pendant cette saponification, qui
s'opérait très-aisément de 4o à 5o degrés environ, il se dégageait de l'am-
nioniaque facile à constater. Le savon obtenu a été soumis à plusieurs
cristallisations dans l'éther, dissous dans l'eau distillée et précipité parle
chlorure de baryum. En décomposant le sel de baryte par l'acide chlorhy-
driqne faible on a obtenu un acide gras cristallin. Cet acide fut purifié par
compression dans du papier, sous une forte presse, et soumis à plusieurs
cristallisations dans l'éther et dans l'alcool à gS centièmes, jusqu'à ce qu'il
présentât un point de fusion constant.
» L'acide ainsi purifié a été soumis à l'aîialyse, qui a donné les chiffres
correspondants à la formule de l'acide stéarique CH'^O" :
Trouvé. Calculé.
c 75,98 76,05
H 12,93 12,68
» Mais comme le point de fusion de l'acide analysé n'était situé qu'à
60°, 5, et son point de solidification entre 58 et 55 degrés, ou en moyenne
56°, 5, il est probable qu'il constitue un mélange de 60 pour 100 d'acide
stéarique et de 4o pour 100 d'acide palmitique, mélange qui, selon
M. Heintz, fond à 60°, 3, et se solidifie à 56", 5
» Les eaux mères de la saponification ont été, saturées par un courant
(1) Ges analyses pourraient conduire sensiblement à la formule
C'HM '
ainsi (jiie le montrent les chiffres suivants :
Trouvé.
I. II. 111. IV. V. Calculé.
C 75,19 75,36 '> » .. 75,13
H 12,65 12,36 » » » 12,36
Az » » 2,09 1,61 2,77 2,24
O » » » >» D H
On remarquera la présence de petites quantilés d'azote parmi les elémenls de cette matière
grasse.
36..
( 28o )
d'acide car]joniqiie, <''v,t poires jiisfju à .siccilé et é|)nisées nar de l'alcool
à g5 pour loo. J.'cxirail alcoolique évaporé a donné im résidu jaunâtre,
sirupeux, fjui ne se dissolvait p;is dans de l'étheiet se mélangeait en toutes
proportions avec l'alcool et l'ean. Ce n'était évidemment que la glycérine
de la graisse saponifiée.
» La portion des matières grasses au chyle soIid)le dans l'élhcr froid
est iTSiée, après l'éNaporatiou de l'éllier, à rét;it d'une huile jaune foncé,
qui est restée fluide au-dessous de la température ordinaire. Celte huile
ne paraît être atitre chose que de l'oléine.
M Tout en jjublianl les résultats de nies recherches, je n'ose |)as encore
eu tirer des conclusions définitives, surtout i-elativement à la présence de
l'azote trouvé dans les graisses, sachant condiien il est difficile de purifier
les corps gras en général, et surtout quand on ne peut ojiéter que sur
lUie quantité de m.itière peu abondante.
» Ce travail a été fait au laboratoire de M. Wnriz, »
ZOOLOGIE. — Recherches sur la génération des Gastéropodes. Note de M. Pkrf.z,
présentée par M. Milne Edwards. (Extrait par l'Auteur.)
« Ij'opinion la plus généralement professée sur la fécondation des Gas-
téropodes androgynes consiste à admettre que le sperme déposé lors de
l'accouplement dans la poche co|)idatrice séjourne plus ou moins long-
temps dans cette cavité, attendant^ pour les féconder au passage, les œufs
mùis qui, plus lard, tlesceudront de l'oviducte. Des faits nombreux, obser-
vés chez des Limaces et des Hélices, ont convaincu l'auteur que les choses
ne se passent point de la sorte. ^
)) Peu de temps après l'accouplement, les spermatozoïdes, devenus libres
dans la poche couulalrice par la rupture du s|)ermato])hore, s'engagent
dans le can;il de la poche, le jiarcourent dans toute sa longueur, et arrivent
ainsi <laus le veslilMiic. Ils traversent celle cavité, atteignent l'orifice de
l'oviducte, et ])éneti'ent enfin dans ce dernier conduit, où on les ren-
contre à des hauteins variables suivant l'époque plus ou moins éloignée
de raccouj)lem('ut. Il s'en trouve jusque dans le voisinage de la glande de
l'albumine.
» I^e sperme échappé de la poche copulatrice |irogresse sous la forme
d'iui cordon, assez épais dans la jiremière partie de son parcours, assez
cohérent, pour (|u'il soit facile, en certains cas, de le déga.<>er dans toute
sa longcur, et en parfaite continuité, depuis la poche copulatrice jusque
( 2,S, )
dans l.i pMi'tie inléneiire de l'ovuliictp. Les spermatozoïdes qui compost'iit
ce faisceau ne diffèrent point par leur forme de ceux c]iie l'on observe dans
le canal efférent de la glande hermaphrodite; mais ils s'en distini;;uent par
les mouvements dont ils sont animés, et l'arrangement particulier c[u'ils
affectent. Agités d'une sorte de tremblotement ondulatoire, ils s'enroulent
en spirale les uns autour des autres, et progressent de la sorte m se prêtant
un mutuel appui.
» Où s'arrête cette migration des spermatozoïdes? En quel lieu se fait la
fécondation? l^es anatomistes ont décrit depuis longtemps une sorle de
diverticulimi à la terminaison du eau, il efférent de la glaiiiie heiiuaphro-
dite. Cet organe, immédiatement accolé contre la base de la glande de l'al-
bumine, est remarquable par l'épaisseur et la raideiu- élastique de ses
parois; sa forme est celle d'une anse à branches contiguës. C'est tians ce
tliverticule, dont la struettu'e intérieure est assez compliquée, que se ren-
dent les spermatazoïdes provenant de l'accouplement; c'est là c[u'ils séjour-
tienl, et que s'opère la fécondation, au moment de la descente des ovules.
Un ai'tifice organique particulier, dont la description ne [lent trouver place
ici, paraît s'opposera ce que, lors d'un accouplement ultérieur, ce s|ierme
ne soit entraîné par celui qui pourra descendre du canal efférentde la glande
liermaphrodite.
» Le sperme versé dans la poche copulatrice [jar la rupture du sperma-
topbore n'abandonne jamais en totalité ce réservoir poiu' passer dans l'ovi-
ducte. Une partie, généralement la plus grande, y demeure et ne tarde pas
à se désorganiser. On peut observer, sur un nombre rssez grand de sujets,
toutes les phases de sa transformation en cette matière brune bien connue,
dont la poche est ordinairement remplie.
» Ainsi donc, malgré leur mélange dans la glande hermaphrodite, les
deux éléments de la génération demeurent sans action l'un sur l'autre dans
cet organe, et l'accoupleuient est nécessaire à la fécondation.
» On s'est beaucoup occupé de la formaliou du spermatophore, mais
personne encore n'en a observé et décrit le mécanisme. Les analogies dt; sa
forme avec celle de la cavité du pénis ont fait penser qu'il est produit dans
l'intérieur de cet organe. C'est en effet ce qui a lieu : la partie ddalée ou
antérieure du spermatophore [H. aspersa) se fornu; dans le pénis propre-
ment dit, la partie amincie ou postérieure, contournée en spirale, se forme
dans le flagellum. Durant les préludes de la copulation, au ujonunl niême
où elle commence, le spermatophore n'exisîe pas encore. M.'.issi l'on sépare
deux Hélices accouplées depuis cpiiuze à vingt minutes, on trouve la paroi
( 282 )
interne du pénis enduite d'une couche assez mince d'une substance molle,
analogue à celle dont le spermatophore est formé. A ce moment, tantôt le
pénis ne contient pas encore de sperme, tantôt on en voit un amas au-des-
sous de l'orifice du canal déférent; mais jamais il n'en pénètre dans le fla-
gellum. Quand l'accouplement a duré mi peu plus longtemps, la forme du
spermatophore se dessine et se maintient, sa portion flagellaire se consti-
tue, et le nodiis, resté d'abord ouvert dans le voisinage du canal déférent,
se complète, et achève d'englober la masse spermatique.
.1 Le spermatophore entièrement formé remplit exactement le flagellum
jusqu'à son souunet, d'une part, et il distend, de l'autre, toute la cavité du
pénis, jusque tout près de son extrémité. Il ne commence à pénétrer dans
les organes feinelles du conjoint qu'après sa complète formation.
■» Le dard calcaire qui sert aux Hélices à s'exciter mutuellement se dé-
tacbe, à chaque accouplement, du sac qui l'a produit. Tantôt il tombe à
l'extérieur, et on le retrouve à côté des Hélices accouplées; tantôt elles s'en
transpercent réciproquement, et on le voit profondément fiché dans le flanc
(le l'une ou de l'autre : dans ce cas, on le retrouve plus tard en voie tie
résorption dans la cavité viscérale; tantôt enfin, le retour an sac sur lui-
même fait tomber le dard dans le vestibule : il s'élève alors peu à peu dans
le canal de la poche ou le canal accessoire, où il se résorbe à la longue. Le
dard tombé du sac se régénère; cinq à six jours suffisent à sa complète
reproduction, dont on peut suivre tontes les phases. »
GICOLOGIE. — Noie sur tes calcaires à Terebratula di[)bya dans les Alpes
françaises, de Grenoble à la Méditerranée ; par M. Dieulafaiï.
« L'ime des questions qui, depuis quelques années, occupent le plus les
géologues en France, en Suisse et en Allemagne, est celle de ces dépôts
désignés d'abord par Oppol sons le nom d'e7a^e tilhnniipie, par M. Hébert
sous celui de zone à Terehralnla diphya, et que le savant professeur de la
Sorboniie rapiîoita, au grand étonnement de tous les géologues, à la for-
mation crélacée.
» Depuis plus de dix ans cpie j'étudie les Alpes méridionales, j'ai oi)tenu
un certain nombre de résultats généraux. Les suivants, en particulier, ex-
trails d'un Mémoire fjue j'achève en ce moment, se rapportent direcleMunt
à cette grande question.
» A. Au point de vue des |)arlies élevées de la formaliou jurassique, il
faut dislinguer dans les Al|)es françaises deux régions complètement diflé-
( 283 )
renies : celle de l'Ouest er celle de l'Est, ce qui jusqu'ici n'avait pas même
été soupçonné (i).
Région de l'Ouest.
» B. Les assises qui constituent l'oxfordien, les assises à Ter. dipliya
[Ter. janitor), les assises à ^Jin. ptyclioïcm., etc., etc., en un uiot toutes
les assises qui s'étendent depuis la base de l'oxfordien jusqu'aux assises
à Ammonites ferrugineuses du uéocomien présentent, de Grenoble à Cas-
tellane, des caractères généraux et des faunes toujours identiques. La seule
chose importante à signaler, c'est la diminution progressive de tout l'en-
semble à mesure qu'on s'avance de Grenoble vers Castellane.
» G. L'oxfordien supérieur est constitué, au point de vue paléonto-
logique, par la zone à Am. biarmalus, Jrn. tra?isversariuSj etc., etc.; puis,
à ao ou 3o mèlres plus haut, par la zone à Jm. leimilobatus, Am. iphicerus,
Am. tracli/notus, etc., etc. Les espèces les plus essentiellement oxfordiennes,
et en particulier ÏAm. tortisulcalus, se rencontrent toujours dims la zone à
Am. tenuilobalus ; mais, en outre, l'ensemble des caractères pétrographiques
et stratigraphiques est tel, qu'il est absolument impossible de placer cette
zone ailleurs qu'à la partie supérieure de l'oxfordien.
» D. Les assises à Ter. janitor et à Am. ptyclioïais, etc., reposent immédin-
tement sur la zone à Am. tenuilobalus, et jamais je n'ai pu rencontrer un
seul fossile commun aux deux zones. L'hiatus vital est absolu. Toutefois, en
ce qui concerne les types de Térébratules trouées, je crois qu'on arrivera à
établir qu'ds descendent plus bas qu'on ne l'admet aujourd'hui.
Région de l'Est.
» E. La succession des assises, la nature et la disposition des faunes
sont identiquement les mén)es que dans l'Ouest, jusqu'à la zone à Am.
tenuilobalus inclusivement. Mais, au lieu de trouver au-dessus d'elle, comme
dans l'ouest, les assises à Ter. janitor et à Am. ptyctioicus, on rencontre :
(i) Je limite provisoirement ces deux régions par une ligne qui, descendant du nord i
peu près suivant le méridien, s'arrête à Castellane, puis de là suit la vallée de l'Asse en se
dirigeant par consé(|uent au nord-ouest, tourne à l'est et au sud pour aller passer à JIous-
tiers, prend à partir de là la direction du sud-ouest, et, après plusieurs inflexions en sens
divers, vient expirer au boCd de l'étang de Berre, où je la reprendrai plus tard. Une autre
ligne ayant la même signification se confond, depuis Marseille jusqu'au fleuve du Var, avec
la ligne de faîte qui sépare actuellement le bassin de la Méditerranée de celui de la Durance.
J'appelle région de l'Ouest ou première région : i° tout ce qui se trouve à droite de la pre-
mière ligne quand on la suit en descendant du nord; 2° tout ce qui se trouve au sud delà
deuxième ligne, c'est-à-dire la Provence méridionale. J'appelle région de t" Est ou deuxième
région tout ce qui se trouve entre les deux lignes tracées plus haut.
( 3«4 )
i" 80 mètres de calcaires compactes montrant, à la partie supérieure, de
gros rognons de silex et lui certain nombre de fossiles, parmi lesquels Rh.
astieriaiifi d'Orb. (type), une grande Térébratule, tics r.idioies de Rliabdo-
ciihiris cupriiuetitaim, des tiges A' yJj)iocriniis intixiiniis d'Oib. (type), des
coraux, etc.; 2" 100 mcti'es de calcaires grenus et parfois à pâte assez fine;
3" luie épaisscm- variable de calcaires siliceux et magnésiens montrant, à la
paille su|)érieure, luie faune curieuse, connue pendant longtemps seule-
ment à i'Ecliaillon près Grenoble, et qu'on ap|)elle aujourd'hui zone à Tere-
brnlula inornvica, du nom d'un de ses fossiles les plus remai'quî^.bles. C'«'st
seidemenl au-dessus de cet borizon, c'est-à-dii'e à plus de 200 mètres au-
dessus de la zone à .7/h. leituilobatiis, qu'où rencontre les calcaires lilho-
grapbiques et les calcaires marneux renfermant la faune de V.lin. ply-
chuïciis, alors que, dans la région de l'Ouest, cette faune est au contact de
la zone à ylm. tenuilohatm. Je n'ai jamais rencontré dans la région de l'Est
ini seul fossile commun aux assises à Ter. morauica et aux assises à ^lu.
ptychoïcus. H y a donc là encore \.\u bialus \ilal absolu.
» F. Les assises qui lecouvrent dans l'Ouest la zone à Ani. lenuilobalus
et, dans l'Est, la zone à Ter. moravka offrent, jusqu'aux dt'pôts à Ammoniles
fei-rugineuses du néoc:omien, la liaison la plus comjjlete, les passages les
mieux ménagés, aussi bien dans la faune que dans la composition des
roches et la distribution des sédiments.
1) .\insi, en jugeant sunplement par comparaison, \\ y a nécessairement
clans la région Ouest des Alpes françaises, la seule qu'on ait étudiée avec
quelque soin jusqu'ici, une lacinie énorme correspondant au corallien, au
kimmendgien et au portlandien classiques. Dans cette région des Alpes, la
foi inatiou jurassiqns s'arrête à la fin de l'oxfordien. Dans la région de l'Est,
la série jurassique est beaucoiq) plus développée que dans l'Ouest; mais je
ne la considère pas cependant comme complète.
» Les assises à Ter. janitor de l'Ouest et à Jm. plj'choïctis de l'Est sont
séparées, de la manière la plus absolue, des assises jurassiques sur lesquelles
elles reposent. Elles se relient, au contraire, d'inie manière si intime avec
la base de la formation crétacée, qu'il est impossible de songer même à en
faire un étage distinct : elles constituent la division inférieure de l'étage
néocomien.
" J'ari ive ainsi exaclement aux mêmes conclusions cjue M. Hébert, et je
m'en a|)plau(lis d'aulaiU plus que les éléments mis en œuvre dans mon
Mémoire sont de l'ordre exclusivement stratigrapliicjue, alors (jne ceux du
savant prolèsseur de !a Sorbonne étaient, dans celte circonstance, tout à
fait du domaine de la paléontologie. »
( 285 )
GKOLOGIE. — Note sur les systèmes de montatjnes et sin- les terrains du désert
d'Atacama. [Extrait fl'iine Lettre de M. Pissis à M. Élie de Beau-
mont (i).]
« Santiago, 1 1 juin 1870.
« Le voyage que j'avais à faire dnns l'intérieur du désert d'Atacama s'est
heureusement terminé, et j'ai pensé qu'un aperçu de la géologie de cette
région peu comme pourrait vous offrir quelque intérêt.
» Les grandes lignes qui dessinent le relief de ce désert se rapportent à
trois systèmes stratigraphiques; on y trouve, comme dans le reste du Chili,
ime chaîner maritime et une vaste dépression longitudinale située entre
celle-ci et la cordillère des Andes. La direction de la chaîne maritime, qui
s'étend sans interruption depuis les 26°3o' jusqu'à l'embouchure du rio Loa
(21 -5^ degrés environ), se rapporte au cercle primitif du pent.igone du Chili
(N. 8° 43' 26"). C'est aussi la direction de la grande dépression longitudi-
nale et de la ligne anticlinale de la chaîne des Andes jusque sous le j/i" ^'f-
gré. Là, elle change brusquement de direction pour prendre celle du
nord-est jusqu'au volcan de Panil, situé par 22 degrés.
» Ce système de direction nord-est — sud-ouest est celui qui prédomine
dans toute l'étendue du désert; les plus hantes crêtes de la région des Andes
sont alignées suivant cette direction, et il en est de même de celles de la
chiiîne maritime; cette direction se rapproche beaucoup de celle d'ini
autre cercle primitif du même pentagone orienté N. l\[\° l^'i' i&' , 'j E.
M Enfin, le troisième système parallèle à la direction de la côte du Pérou,
entre Arica et Pisco, est représenté par la grande vallée du rio Loa, et
par de profondes coupures qui se présentent à la fois dans la chaîne
maritime et dans la région des Andes; c'est aussi la direction d'une haute
créie neigée qui s'étend du volcan de Missio à celui de Polapi, et qui doit
être considérée comme la limite australe du haut plateau bolivien.
» C'est dans l'espèce d'anse formée par la rencontre de cette crête avec
celle qui, venant du sud-ouest, aboutit au volcan de Paiiil, que l'on trouve
le plus grand nombre de montagnes volcaniques. Plusieurs, telles que le
volcan de San-Bartole, celui de San-Pedro, le Carcanaîe, le Polapi et le
Missio, fument encore. Le dernier était en éruption depuis le conunence-
(i) Voir la dernière Lettre de M. Pissis. [Comptes rendus, t. LXIX, p. i3iq, séance du
ao décembre 1869.)
C R., 1S70, a« 5<-mpjfrf. (T. LXXI, iSo-i.) "^7
( 28G )
ment du mois de mars, et, le 22 aviil, le village de Calama a été en grande
partie détruit par un tremblement de terre qui s'est fait sentir fortement
sur toute la côte, depuis Arica jusqu'à Caldera.
» Les formations du désert dAlacama sont les mêmes que celles du
Chili, mais elles y sont autrement distribuées; le grès rouge du trias, qui
ne paraît dans le sud qu'à une certaine distance à lest de lu chaîne mari-
time, commence à se montrer sur la côte à partir du 26^ degré, il est tra-
versé par de nombreux dykes de porphyre augitique, qui suivent la direc-
tion du premier cercle. Les couches des terrains dévoniens et siluriens
occupent la majeure partie de la chaîne maritime, où elles ont été soulevées
par des masses syénitiques dirigées nord-est — sud-ouest; quelquefois ces
masses occupent l'axe de vastes boutonnières, autour desquelles toutes les
rocheSj depuis le granité à gros cristaux et le gneiss jusqu'aux grès du trias,
ont été relevées. Les mêmes roches se montrent encore dans la région des
Andes; mais on y trouve de plus les trachytes, qui occupent de grandes
surfaces, ainsi que quelques lambeaux du lias et du terrain jurassique.
» Le bassin du rio Loa est occupé par une vaste formation lacustre, qui
s'étend depuis la chaîne maritime jusqu'à la base des Andes, où elle entoure
les volcans de San-Pedro et de Carcanale. Ce terrain paraît avoir épiouvé
plusieurs soulèvements successifs, qui auraient diminué l'étendue de la
surface occupée par les eaux ; il présente trois bassins enclavés les uns
dans les autres; le plus grand et le plus ancien se compose de hauts pla-
teaux, formés de couches de grès et d'argile recouvertes par des calcaires
siliceux. Le second bassin, situé à un niveau bien inférieur à celui des pla-
teaux, olfre une composition analogue, seulement le calcaire y est remplacé
par une puissante formation de gypse. Enfin le troisième bassin, qui paraît
devoir se rapporter à l'époque quaternaire, forme les escarpements qui
dominent le Loa. Il se compose de terrain de transport, recouvert par des
couches d'un calcaire qui contient une grande quantité d'empreintes végé-
tales.
» C'est aussi à la même époque que paraissent devoir se rapporter les
vastes dépôts de sel marin, de sulfate et de nitrate de soude, qui occupent
presque toutes les parties planes du désert. Le sel marin y forme des cou-
ches dont l'épaisseur dépasse souvent i mètre; il recouvre presque toujours
le nitrate de soude, et celui-ci repose immédialen\ent sur une espèce de
brèche, composée de fragments de roches anciennes cimentées par du
gypse. L'abondance du sel marin pourrait faire croire à une an( ieinie com-
mimication de ces |)laines avec la mer; mais je n'y ai trouvé aucun débris
( 287 )
des coquilles qui sont si abondantes dans les terrains quaternaires de la
côte; le fond de ces anciens lacs est d'ailleurs à un niveau bien supérieur
à celui du terrain quaternaire de Mejillones.
» De grandes rivières, si l'on en juge par la longueur du lit et le volume
des roches qu'elles ont transportées, venaient se déverser clans ces lacs. En
renioniant les lits de ces anciens cours d'eau jusqu'aux montagnes où ils
prenaient leurs sources, il n'est pas rare de rencontrer des traces ù'an-
ciennes cascades où les roches usées et polies témoignent d'une action des
eaux longtemps prolongée; de telle sorte quil n'est pas possible d'attribuer
ces anciens lits de rivières aux pluies d'orage qui tombent encore à de
longs intervalles sur des parties limitées du désert; celles-ci n'y produisent
que des ravins étroits et profonds, et les débris qu'elles entraînent ne pré-
sentent jamais des fragments arrondis et polis comme ceux des anciennes
rivières. Tout semble donc indiquer qu'à partir de la fin de l'époque ter-
tiaire il s'est opéré un grand changement dans le climat de cette région.
» Durant ce voyage, je me suis surtout occupé de fixer un grand non)bre
de positions géographiques qui seront les bases qui vont me servir pour
tracer la carte de ce désert. »
GÉOLOGIE. — Examen chimique d'wi ciment tnétamorpltisé dans la source Bayen,
de Ludion. Note de 31. F. Garrigou, présentée par M. Daubrée. (Extrait.)
« Les faits mis au jour par M. Daubrée sur l'action métamorphique des
eaux thermominérales ont éveillé l'attention des naturalistes. M'étant déjà
occupé des effets exercés par les eaux suKureiises d'Ax et de Luchon sur
les granités et les béions qui ont servi à la construction des bassins dans
lesquels on conserve l'eau minérale, je désire faire connaître immédiate-
ment un fait que j'ai nouvellement observé.
» Pendant que M. J. François terminait, en i852, les galeries de recherche
des sources de Luchon, un ouvrier eut l'idée de jeter dans la source Bayen
une boule de la grosseur des deux poings, fuite avec le ciment dont ou
tapissait les murs des galeries. Cet hiver, ce même ouvrier, s'étant rappelé
ce fait, a enlevé le ciment qiû avait ainsi séjourné dix-huit ans dans l'eau
minérale, à 6/| degrés centigrades, et me l'a remis. Son adhérence sur le
granité d'où s'échappe l'eau de Bayen était complète.
» Le ciment naturel qui recouvre encore les parois des galeries de re-
cherche des sources, et dont j'adresse un échantillon à l'Académie, est jau-
37..
( 2S» )
iiâlre et grenu, Irès-friable quand ou le presse avec quelque force; les arêtes
de sa cassure ne sont nullement tranchantes.
» Le même ciment métainorphisé, et mélangé à quelques fragments de
schistes noirs très-petits, est gris très-clair et bleuté à l'intérieur; sa cassuie
est tranchante, presque à la façon d'un silex; la substance est dure et ré-
sistante au marteau. La surface externe de cette masse métamorphique est
couverte de petits cristaux de chaux carbonalée.
» D'ajjrès l'examen comparatif de la composition chimique de ces deux
ciments, le ciment, d'abord riche en carbonates, a acquis une forte propor-
tion de silice; il a gagné en outre de la matière organique et une faible
quantité de fluor.
» Ce fait vient se placer à la suite d'autres qui sont devenus classiques et
qui ont fait reconnaître comme très-probable l'intervention de l'eau dans
la transformation des roches pendant les anciennes périodes géologiques.
» J'ajouterai que le ciment naturel ne contient pas la moindre trace
des microzynias que M. Béchamp a déjà signalés dans plusieurs roches.
L'absence de ces organismes n'a rien d'extraordinaire, ])uisque le ciment a
été obtenu par la cuisson d'un calcaire et que les microzvmas cessent
d'exister et de vivre à une températiue de i lo degrés environ. Le ciment
niétamorphisé, au contraire, contenait une certaine quantité de niicrozymas,
ainsi que j'ai pu le vérifier avec le savant professeiu' de Montpellier. »
GliOI.OGIE. — Conicinporanéilé de l'homme avec le grand otm des cavernes
et te renne dans la aiverne de Garcjas {Hautes- Pjrénéi s). Noie de
MUI. F. Gakrigou et de Chasteigner, présentée par M. de Quatre-
fages. (Extrait.)
n La caverne de Gargas est creusée dans le terrain crétacé iidérieur
(étage aptien) dont est composée la montagne de Gargas, entre le village
de ce nom an nord et celui de Tn)iran au sud, sur la limite des départe-
ments des Hautes-Pyrénées et de la Haute-Garonne, à quelques kilomètres
de Montrejean.
» Immédiatement à gauche de l'entrée, dans un enfoncement du ro-
cher, une tranchée peu profonde nous a |)ermis de recoiniaitre un fover de
l'âge du remie, avec outils en silex, ossements de cerfs et tle renne, de
cheval, de bœuf, tous cassés longitudinalement et Iransversalemenl j)ai-
l'homme.
» Ce foyer est siiiiérienr à une couche argileuse régnant dans toute la
( 28<, )
caverne, et renfermant en abondance des ossements d'Uisus spelœus. Sin*
ceitains points, mie stalagmite plus on moins épaisse reconvre cette couche.
Dans un point de la caverne, voisin du foyer de l'âge dn renne, elle avait
plus de 4° cenlimèlres d'épaissein'. Au-dessons, gisaient les débris parf\ii-
tenient conservés des espèces suivantes : Vrsns spelœus, Ursiis arctos ou
prisais (?), Felis spelcei, Hyena spelœn, Bos unis (?), deux chevaux, l'iiii
grand, l'antre petit, etc. Les ossements de ces animaux sont artificiellement
cassés, suivant le même mode de cassiu'e cpie ceux des autres cavernes
habitées par l'homme, à l'époque où vivaient également ces grands mam-
mifères; souvent ils sont accompagnés de petits débris de charbon. »
M. Garuigou adresse en outre, par l'interMiédiaire de M. Danbrée. luie
Noie portant pour titre « Dépôts glaciaires de divers âges géologiques dans
les Pyrénées ». i.
SÉRICICULTURE. — Sur les résttltats obtenus ciuis les niac/naiier/es du déparlemenl
des Basses-Alpes. Extrait d'une I,eltre de M. de Vallier.
« La sériciculture a été déplorable cette année dans la partie du dépar-
tement qui lient des magnaneries. Seul M. Raybaud-Lange, qui suit à la
lettre les doctrines de M. Pasteur, a obtenu un résultat exceptionnel. Il a
vendu pour 64ooo frnncs de cocons.
» La loutine, malheureusement, est l'ennemi mortel des habitanis et
lutte contre le progrès. »
M. BuuGGRAEVE adrcssc, de Gand, une Note relative à un système de
pansement des plaies, au moyen du plomb laminé, en lames très-minces.
Ce système, employé à 1 hôpital de Gand pour le pansement des plaies de
fabrique, a déjà fourni des résultats excellents. Les feuilles de plomb s'aji-
pliquent comme le taffetas d'Angleterre et sont maintenues par des bande-
lettes agglutinantes. Ce mode de pansement présente, suivant l'auteur, les
avantages suivants : i" le plond) e^t doux et frais au contact de la plaie;
2" il dispense d'employer la cliarpie, qui est une cause permanente d'é-
chanffement et d'infection; 3° la couche de sulfure qui se forme empêche
la putréfaction, et le développement des organismes qui raccom[)agnent;
4° la plaie, une lois pansée, peut être lavée et rafraîchie au moyen d<' i'e.iu
froide, sans qu'on ait à déranger le pansement; 5" c'est un moyen d'éviter
les opérations sommaires.
( 290 )
« M. H. Saixte-Claire Deville communique rextrail d'une Lettre qu'il
a reçue de M. Cossa, professeur à Udine.
» Dans celte Lettre, M. Cossa mentionne des expériences très curieuses,
faites au moyen de l'amalgame d'aluminium. Ces expériences ne sont pas
assez différentes de celles qui ont été publiées depuis longtemps par M. L.
Cailletet et par M. Ch. Tissier pour que l'auteur en publie les détails, d'ail-
leurs très-intéressants. Mais M. Cossa a entrepris des études originales sur
les iodures de quelques radicaux alcooliques et sur l'amalgame d'alumi-
nium considéré comme réducteur. Suivant lui, et contrairement à ce
qu'ont annoncé MM. Hallewacks et Schafarik, l'aluminium attaque com-
plètement, au bout de quelques jours, Tiodure d'éthyle en tubes scellés
à la températine ordinaire.
» M. Cossa a aussi préparé l'aluminium-éthyle au moyen de 1 action de
l'aluminium sur le stannéthyle. «
A 5 beures, l'Académie se forme en Comité secret.
La séance est levée à 5 heures trois quarts. E. 1). B.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
I/Académie a reçu, dans la séance du ^5 juillet 1870, les ouvrages dont
les titres suivent :
De 1(1 méthode à posteriori expérimentale et de ta (/énéialilé de ses ap-
plicalionsi par M. E, CutîVKEUL, Membre de Flnslituf. Paris, 1870; 1 vol.
in-i 2
IiUrodiirtion à l'étude météorologique et cl/tnatérique de C Alsace ; par
M. G. -A. IliiiN. Colmar, 1870; in-8°. (Présenté par M. Eaye.)
Types de climpie jumillc et des primipnux genres de plantes iroissanl sponta-
nément en France, etc.; pur M. F. PLiili, liv. i43 à iGG. Paris, sans date;
in-4" texte et planches.
/-*(( lunitionncmcitt des amlnilanres dvilcs cl internationales sur le < lianij) de
bataille; par M. J.-P. HoiNNAFOlNT. i'aiis, 1870; br. iii-8". (Pré.-enlé par
M. Houillaud.)
( 291 )
Remarrjues sur une Note de M. Dnrbou.x relative à la surface des centres de
courbure d'une surface algébrique ; par M. E. Catalan. Paris, 1870; in-4°.
Journal d' Agriculture de la Càte-d' Or, publié par le Comité central d^ Agri-
culture de Dijon, n"' 6 et 7, juin et juillet 1870. Dijon, iS'yo; 2 brochures
in-8°.
Etudes faites dans la collection de l'Erole des Mines sur des fossiles nouvemix
ou mal connus, i" fascicule : Molluscpus tertiaires; parM. F. BayaN. Paris,
1870; in-4° avec planches.
Sur les terrains tertiaires de la Vénétie; par M. F. Bayan. Paris, 1870;
br. in-8°. (Extrait du Bulletin de la Société géologique de France.)
Mélanges botaniques; par M. P. Sagot. i vol. in-8° relié. (Présenté par
M. Brongiiiart.)
Défense des colonies, IF; par M. J. Barrande. Prague et Pj^is, 1870;
in-8° avec luie carte.
Di... De quelques écrits attribués à Augustin Cauchy. Observations de M. A.
GenoCCHI. Turin, 1870; br. in-8'\
Sur une règle de convergence des séries ; par M. A. GenoCChi. P.iris, sans
date; br. iii-8°.
Sur la théorie élémentaire des produits infmii; par M. A. GKiNOCCHl. Paris,
sans date; br. in-8",
Sopra... Sur quelques minéraux et roches du Pérou. Lettre de M. A.
d'Achiardi à M. C. Regnoli. Pise, 1870; br. in-S".
Siil... Sur un mode de conservation et il' amélioration du vin au moyen de
l'électricité. Réflexions de M. G. DoTTO. Sans lieu ni'<!:ite; br. iu-8".
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI l" AOUT 1870,
PRÉSIDÉE PAR M. DELAUNAY.
MEMOIRES ET COMMUNICATIOIVS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
SÉRICICULTURE. — Sur la maladie corpiisculeuse des vers à soie.
Noie de M. MauLs.
(( J'ai fait connaître à l'Académie, an mois de jnin 1868, les résultats
avantageux que j'avais obtenus en élevant les vers de i kilogramme de
graine que m'avait remis M. Raybaud-Lange.
» Outre les éducations principales, de petites éducations précoces faites
avec la même graine, et mises à éclore le i5 mars, donnèrent, du 7 au
8 mai, des cocons qui me fournirent des papillons reproducteurs exempts
de corpuscules. J'en fis quelques petits lots de graines, qui tous ont donné
de bonnes réussites en 1865. Mais j'ai dû recourir au graiuage cellulaire,
tel que l'a indiqué M. Pasteur, pour maintenir exemptes de maladie les
semences provenues, en 1869, de mes petites éducations.
» J'ai continué, en 1869 et 1870, de concert avec mon frère, M. Léon
Mares, de grandes et de petites éducations, au moyen des graines que
M. Raybaud-Lange a bien voulu me fournir, et qui sont faites d'après les
méthodes de M. Pasteur; j'en ai obtenu, pour la récolte des cocons, le
même succès qu'en 1868. On peut en juger par ce qui suit.
» En 1869, année signalée par des gelées tardives qui détruisirent une
C. K., 1870, 2' Semestre. (T. LXXl, N" S.) 38
( ^94 )
partie de la feuille de uuirier, et par des chaleurs précoces au uiois de ni;ii,
ai oncos (de iS gianiiiies rime) ont produit, à Lannac, ■yoo kilogrammes
de bous cocons, soit 33 kilogrammes par once.
» Une autre éducation faite à Saint-Gély a produit, pour 21 onces de
graine, '766 kilogrammes di- cocons, soit 36''^, 5 par once.
» A INIonjpeliier, 2 y onces de la graine que je fis en 1868 ont produit
77 kilogrammes de cocons, soit 3i kilogrammes par once.
» A Saint-Gély, 5 onces de la même graine ont produit 200 kilogrammes
de cocons, soit /40 kilogranunes par once.
» Ainsi, les graines issues de papillons non corpusculeux, faites à Mont-
pellier en 1868, se sont montrées aussi bonnes que celles des Basses-
Alpes.
» Mais il faut prendre des précautions pour conserver la pureté de la
graine. Aussi les petites éducations destinées au grainage doivent-elles,
autant que possible, être faites avec des semences entièiement exemples tle
corpuscules, et pour cela il faut avoir recours aux pontes cellulaires; au-
trement, on s'ex|)ose à n'obtenir que de beaux cocons dont les papillons
sont en grande partie corpusculeux. C'est ce qui m'est arrivé en 1869 et
en 1870, avec les graines des lîasses-Alpes.
" Pendant ces deux années, les papillons de toutes mes éducations ont
été trés-infectés de corpuscules, quoique la plupart des chrysalides se
soient montrées saines jusqu'au moment de leur éclosion. Une petite édu-
cation précoce, que j'avais faite pour graine avec les mêmes semences que
les grandes, a été moins attaquée; mais elle n'a pas été suffisamment
exempte pour être mis» au grainage dans son ensemble. J'ai trouvé
5o pour 100 de corpusculeux parmi les papillons examinés. J'ai dû recourir
aux pontes cellulaires, pour avoir une graine pure. Il en a été de même
quand j'ai voulu conserver la race de vers élevés en i8(J8.
» Dans les grandes éducations de 1869, tous les papillons que j'ai exa-
minés ont été corpusculeux, malgré de belles apparences.
» En 1870, les mêmes faits se sont reproduits; une pelite éducation de
5 grannues de graine provenant de M. Raybaud- lange, mise à éclore le
i5 mars, m'a doinié, du 5 au 6 mai, 9 kilogrammes de cocons; 4° pour
100 des pa|)iilons exanunés se sont montrés corpusculeux. Ces cocons,
de race jaune, étaient remarquablement beaux: 4'5 suffisaient pour
I kilogramme.
I. Dans ma giaiide éducation de Lannac, faite avec la même semence, et
dont les vers sont montés du 26 au 28 mai, j'ai trouvé 90 pour 100 de
( 295 )
pnpillons corpuscnleux; il fallait Sgo cocons pour faire le kilogramme.
Cependant ils étaient de très-bonne qualité, et aucune maladie intercur-
rente ne s'est montrée parmi les vers; mais leur montée a été très-hàlée
par les fortes chaleurs de la fin de mai, et les cocons ont été plus petits.
» Les éducations de 1870 ont donné les résultats suivants :
» aS onces (de aS grammes l'une) ont produit, à Lannac, 34 kilogrammes
de cocons par once.
• 25 onces ont produit, à Saint-Gély, 19 kilogrammes de cocons par
once. Cette éducation a été fort diminuée par la grasserie ou jaunisse qui
se déclara totit à coup, an moment de la montée, sous l'influence de fortes
chaleurs orageuses. Cette maladie emporta environ le tiers des vers.
» 2 i onces de la même graine, montées dans le même local cinq jours
plus tôt^ ont été moins atteintes, et ont produit 22'''', 4 par once.
» 4 onces de graine provenant de M. Raybaud-Lange, des mêmes que les
précédentes, élevées séparément à Saint-Gély, ont produit 40 kilogrammes
de cocons par once. Les vers de cette éducation sont montés cinq jours plus
tard que les premiers.
» Une demi-once de graine, faite à Montpellier, avec les races de 1868,
a produit 21 kilogramtnes de cocons, soit 42 kilogrammes par once.
)) Il n'y a pas eu de mort-flats, à l'état de maladie intercurrente, dans les
éducations que je viens de citer; il ne s'en est produit qu'un fort petit
nombre sporadiquement, comme cela ari'ive dans toutes les éducations de
quelque importance.
» Ayant observé au microscope, en 1869 et en 1870, un grand nombre
de vers atteints de grasserie, j'ai reconnu que beaucoup d'entre eux étaient
très-corpusculeux. Si l'on extrait leur sang par une piqûre, on le trouve
souvent rempli de corpuscules, à raison de cinq cents à mille par champ, et
plus encore. Il en est de même du liquide qui sort spontanément de leur
corps dans la dernière période de leur vie, et dont ils souillent tout ce
qu'ils touchent : feuilles, litières, claies, et les vers voisins.
» Ce fait démontre que la maladie des corpuscules se développe sur les
mêmes individus, concurremment avec d'autres maladies bien caractérisées,
comme la grasserie, et, de plus, au point de vue de l'infection corpuscu-
lense, il a une certaine importance, car les vers gras et corpuscnleux,
vivant au milieu des autres et se traînant parmi eux, sans cesse agités par
la maladie, la propagent, par contact, d'une manière très-rapide et très-
dangereuse.
" Les éducations clans lesquelles ils se manifestent deviennent vite im-
38..
( 296 )
propres à la production de la graine. Jusqu'à présent, je n'ai observé de
vers à la lois gras et corpusculeux, que dans le dernier âge, mais ils peu-
vent se rencontrer aussi dans les premiers, et ils suffisent alors pour com-
promettre la réussite de l'éducation où on les trouve.
» Les faits que je viens de rapporter, ainsi que ceux de 18G8, m'auto-
risent à conclure que les procédés de grainage indiqués par M. Pasteur
sont d'une complète efficacité pour combattre la maladie des vers à soie,
et pour refaire sûrement les graines saines, point de départ indispensable
de toute éducation dont la réussite n'est pas abandonnée au basard. Le
problème de la guérison de cette maladie ruineuse, qui a jeté dans l'éco-
nomie rurale des contrées séricicoles une si profonde perturbation, est
résolu, par la reproduction assurée, soit des semences saines, soit de graines
capables de fournir, en quantité suffisante, les cocons que réclame l'in-
dustrie. On est désormais en droit d'espérer, de cette intervention de la
science dans la pratique de la production de la soie et dans son perfec-
tionnement, les résultats les plus féconds; ils ne se feront pas attendre.
M L'exemple donné par M. Raybaud-Lange, en appliquant les procédés
de M. Pasteur à la production des semences de vers à soie sur une grande
échelle, commence à être suivi. C'est la meilleure preuve que ces procédés
sont pratiques, et que l'usage du microscope, appliqué à l'examen des
papillons, |)eut être facilement introduit partout où on le voudra. Je
puis citer, dans l'Hérault, M. Milhaud, au Poujol, qui a fait, en 18(19,
plus de 200 onces de graines dont les résultais ont été généralement
bons. M. Milhaud a continué en 1870, encoiuagé par M. le comte de
Rodez.
» La création de laboratoires spécialement destinés à l'examen, par le
microscope, des pa|)illons de grainage, est aujourd'hui une nécessité, soit
pour former de nombreux observateurs, soit pour mettre à la })ortée de
tout le monde (par une légère rétribution) les moyens de faire examiner
les papillons des cocons qu'on voudrait réserver pour la re|)roducliou, et
pour en obtenir une indication sur leur état de pureté. ..
M. i.K Makéchal Vaillant communique à l'Académie divers dociuiients
qui mettent en évidence la supériorité des résultats obtenus |)ar l'emploi
des procédés de sélection de M. Pasteur, en Tialie et dans le midi de la
France.
Les fermiers de la Villa-Viccntina ont voulu attester les impressions
( 297 )
qu'ils avaient reçues de l'application, faite sons leurs yeux, des procédés
de M. Pasteur^ et ils ont adressé la Lettre suivante à notre confrère:
« Le devoir et la reconnaissance, disent-ils, nous obligent à remercier
publiquement le savant illustre qui, pendant son trop court séjour à la
Villa-Vicentiiia, a fait avec tant de succès la démonstration pratique de
son procédé de sélection cellulaire pour la production des vers à soie de
notre pays.
» Nous garderons le plus précieux souvenir de sa présence parmi nous,
et nous devons le juste hommage de nos éloges à sa méthode : avec elle,
nos éleveurs sont assurés désormais de récoltes abondantes et des meil-
leures réussites, »
Une Lettre de M. Ra/baud-Lange contient les passages suivants :
n Le nom de M. Pasteur va être entouré de bénédictions en Italie,
comme il l'est déjà en France : vous savez combien les graines faites d'après
son système ont réussi cette année, partout. Le succès a été presque gé-
néral. Aussi, nous arrive-t-il, de tous côtés, des demandes trop nombreuses
pour pouvoir les satisfaire toutes, quoique le grainage de 1870 soit bien
supérieur à celui de l'an dernier. Nous aurons environ 16000 onces de
graine et 80000 couples de sélection. Et avec cela, il faut refuser tous les
jours de nouveaux engagemenis. Soit que cela provienne de' la pureté de
la graine, ou des conditions atmosphériques, jamais la proportion des bons
sur les mauvais lots n'avait été aussi considérable que cette année : trois
sur quatre; tandis qu'en 1869 c'était un sur quatre. Les papillons ont été
aussi plus beaux et plus vigoureux que nous ne les avions encore vus. Ils
faisaient l'admiration des nombreux visiteurs qui nous arrivaient de l'Ar-
dèche et de la Drôme, en quête de graine, souvent refusée. Il nous a fallu
avoir cinq microscopes en travail, la chambre chaude pleine d'échantillons,
plus de deux cent cinquante, et quatre ateliers de grainage.
» Les exemples n'ont pas été rares^ dans la dernière récolte, de 5o, 60
et même 62 kilogrammes de cocons pour sS grammes de graine. »
Enfin, M. Arnoux écrit des Mées (Basses-Alpes) :
« Je suis toujours de plus en plus satisfait de la méthode de M. Pasteur
pour faire le grainage. L'année dernière, j'avais confectionné dix mille cel-
lules, dont la graine nous a donné cette année des résultats inconiuis jusqu'à
ce jour. Une once de iB grammes a produit 65 kilogranmies de magni-
fiques cocons. La moyenne a été de 5o kilogrammes. Tous ces cocons ont
( ^98 )
produit un superbe papillonnago, dont 8 à lo pour loo, au plus, ont donné
quelques corpuscules par champ, et beaucoup n'en ont pas donné. Aussi
la vente de sept à huit mille onces de graine, provenant de mes cellules de
l'année dernière, a élé très-facile, ce qui m'a encouragea enfiire vingt mille
cette année, de divers lois n'ayant pas de corpuscules, après la ponte. »
MÉMOlllES PRÉSENTÉS.
VITICULTURE. — De l' identité spécifique du Phylloxéra des feuilles et du Phyl-
loxéra des racines de la vigne. Note de MM. J.-E. Pi.axchox et J. Licii-
TEXSTEIN, présentée par M. Decaisne. [Extrait par les Auteurs (i).]
(Renvoi à la Section de Zoologie.)
« Dès le mois d'aovit 1869, nous signahons comme très-probables les
rapports de filiation entre deux formes, en apparence diverses, du Phylloxéra
vastatrix. Le premier type, que nous appelons radicicole, est l'insecte dont
les piqûres déterminent sur les racines de la vigne des altérations pro-
fondes, entraînant le dépérissetnent et la mort du cep; le second type, dit
qallicole, provoque sur la feuille du même arbuste des excroissances ou
galles verruciformes, faisant saillie à la face inférieure du limbe et s'ou-
vrant à la face supérieure par un orifice garni de poils.
» Entre les jeunes insectes des racines et les jeunes qui s'échappaient de
la cavité des galles, la comparaison la plus attentive n'avait pu mettre en
relief aucune différence marquée. Entre les mères pondeuses des galles et
les pondeuses aptères des racines, on a pu noter, au contraire, quelques
diversités de forme, d'organisation et de moeurs, susceptibles de faire sup-
poser entre les deux types une diversité spécifique. J.es premières, presque
toujours isolées au fond d'une salle, peuvent y pondre jusqu'à deux cents
œufs; leur corps, au moins chez les individus venus de Bordeaux, est fine-
ment chagriné, mais dépourvu do tubercules (a). Les secondes, groupées
(i) Les auteurs joignent à cette Communication diverses brochures portant pour titres :
« Instructions pratiques adressées au.\ viticulteurs, sur la manière d'observer la maladie du
Phylloxéra et le Phyllo.xera lui-même », par MAJ. Planchon et Licliicnsteiri ; « Conseils
pratiques contre le Phylloxéra .>, par MM. Planchon et Lirlitenstein ; « La Phtliiriose, ou
Pédiculaire de la vigne chez, les anciens, et les Cochenilles de la vigne chez les modernes »,
par M. Planchon ; • Essais préliminaires sur la destruction Au Phylloxéra », par.!/. Planchnn.
(2) 11 existait quelques individus avec tubercules parmi les femelles pondeuses des galles
découvertes par nous, à Sorgues (Vaucluse), te 1 1 juillet 1869. Du reste, d'après les obser-
( 299 )
sans ordre sur les racines, pondent tout au plus du trente à quarante œufs ;
leur forme est plus ovoïde, à cause du plus grand allongenienl de l'abdo-
men; leur thorax est relativement moins large; enfin, après leurs premières
mues, six rangées de tubercules mousses se dessinent sur la région dorsale
et sur le rebord ventral de leur corps.
M Mais ces différences, tant organiques que biologiques, n'impliquent
pas nécessairement une divefsité d'espèce. D'après le polymorphisme connu
des Aphidiens et des Coccides, on devait plutôt soupçonner, dans les deux
types, des formes allernanles ou parallèles de la même espèce, modifiées
dans leur structure eu raison de la diversité même de leurs conditions
d'existence, mais dérivant l'une de l'autre, ou pouvant rentrer l'une dans
l'autre par des voies de filiation inconnues. Des expériences tentées par
nous à Montpellier, par M. Laliman à Bordeaux, parlaient dans le .sens
de cette hypothèse. Nous avions vu les jeunes Phylloxéra sortis des galles
se fixer sur des fragments de racine, y vivre pendant plus d'un mois et n'y
périr que d inanition, par suite d'une insuffisance de nourriture. Réduite
à ces proportions, l'expérience était à refaire. Il n'y avait là que les indices
d'un fait dont il fallait poursuivre la démonstration évidente : elle confirme
de tout point ce que l'hypothèse avait pressenti.
» Le 12 juillet dernier, nous enfermions, dans des flacons, des racines
fraîches et saines de vigne, à côté de feuilles chargées de galles, que venait
de nous envoyer M. Laliman, de Bordeaux. Des centaines de jeunes Phjl-
loxera s'échappaient déjà de ces galles. Ne trouvant pas de jeune feuille
à piquer pour y développer des galles nouvelles, les insectes se fixèrent sur
les racines. Douze jours après, ils formaient sur ces racines des groupes
serrés, parmi lesquels des femelles adultes en train de pondre et des jeunes
à divers âges, la plupart tendant vers l'état adulte. Les plus jeunes n'avaient
pas de tubercules apparents : ceux "de moyenne grosseur, de même que
les femelles adultes, portaient les tubercules caractéristiques, et tous, du
reste, par leurs formes, leur mode de vie, la dimension et la couleur de
leurs œufs, se confondaient absolument avec les Phylloxéra souterrains
qui vivent normalement sur les racines.
" Voilà donc un fait nettement, expérimentalement établi. Le /'/i///o.ve/(7
des feuilles, ou la forme gallicole et aérienne, peut devenir le Phylloxéra
valions de M. le D"" Signoret, corroborées par les nôtres, il y a, parmi les Phrlloxcra des
racines, des formes encore mal définies, à lubercules plus ;m mois développés, même lors-
qu'il est question d'insectes adultes, comparables quant à l'âge.
( 3oo )
des racines, c'esl-;i-dire la forme /Y7c/jcào/e et soutcM-raiiie du même insecte.
» Reste à découvrir néanmoins comment s'établit, dans la nature, Ja
fdiafion d'une forme à l'autre. Ici l'hypothèse seule intervient, et c'est sous
toutes réserves que nous hasardons les conjectures suivantes.
» Les Phylloxéra ailés, sortis de terre à l'état de nymphe, puis passés à
l'état paifait et transportés au loin par lèvent, pondent probablement leurs
deux ou trois œufs sur les tiges ou les feuilles de la vigne. De ces œuls,
sortent les individus aptères qui produisent les premières galles. Les jeunes
sortis de ces galles développent de nouvelles galles sur les feuilles en voie
d'évolution (expérience du D'Signoret, observation de M. Laliman). Quand
l'évolution des feuilles est ai'i'êtée, en septendjre par exemple, les insectes
descendent sur les racines : ils s'y établissent peut-être tout seuls, si le cep
n'est pas infecté, peut-être parmi des individus souterrains dont ils prennent
vite les caractères.
» Jusque-là les suppositions sont assez plausibles. Où l'incertitude est
complète, c'est sur le cycle des filiations qui ramèneront l'insecte ailé.
Toujours rare sur les racines, celle forme ailée se produit-elle parmi les
aptères souterrains, par une évolution nécessaire, si bien que tout individu
aptère devrait, après un nombre déterminé de générations agames, donner
naissance à l'insecte ailé? Est-ce, au contraire, à des circonstances particu-
lières de nutrition, de conditions extérieures, qu'est soumise la production
de la forme ailée et aérieiuie? Il est permis d'hésiter entre les deux hypo-
thèses : le plus sage encore est d'en appeler à l'observation, à l'expérimen-
tation pour résoudre le problème.
» C'est poui- ne pas mêler davantage l'hypothèse aux faits, que nous
ajournons toute discussion sur l'identité probable du Phylloxéra vasUilrix
avec le Phylloxéra on Pemphigus vitifolia des Américains. Nous ne voulons
pas insister, non plus, sur les caractères des galles, sur le soin que doivent
mettre les viticulteurs à bien observer ces excroissances, pour les tlélriiire
comme recelant les colonies, les corps d'avant-garde do l'insecte dévasta-
teur. Tout cela demande encore des éludes, avant d'être mis hors de dis-
cussion. Le seul tait à conclure de cette Note, c'est que le Phylloxéra va$la-
trix des galles se transforme directement en Phylloxéra vastalrix des lacines;
en d'autres termes, que, sous des formes diverses, les deux types sont la
même espèce, modifiée par adaptation à des milieux, à des modes de vie
différents. »
« M. MiLNE Edwards ajoute qu'ayant eu l'occasion d'examiner hier quel-
( ^oi )
ques feuilles provenant de vignes du Bordelais attaquées par le Phyiloxère,
il a constaté que les galles ouvertes ne sont pas toujours des galles aban-
données et vides, comme ou le suppose généralement. Ces excroissances
sont creusées d'une cavité qui reste béante pendant que l'insecte logé dans
son intérieur y pond ses œufs et que ces oeufs se développent. M. Milne
Edwards a trouvé, dans beaucoup de ces berceaux, un noudjre tres-con-
sidérablede jeunes Phylloxéres dont les dimensions étaient microscopiques.
lien conclut que les vignerons ne doivent pas considérer connue inoffen-
sives les feuilles qui portent des galles ouvertes ; qu'il faudrait, au contraire,
en faire la cueillette avec soin, puis les brûler, car, dans les localités où le
Phyiloxère se multiplie de la sorte, ou détruirait, par ce moyen simple et
peu dispendieux, une multitude de reproducteurs avant que ceux-ci aient
eu le temps de descendre en terre et d'aller attaquer les racines de la vigne.
Cette cueillette, pratiquée en grand et avec soin, ralentirait prohableujent
les progrès du mal, et peut-être même pourrait-elle donner des résultats
encore plus considérables. M. Milne Edwards pense donc qu'il conviendrait
d'appeler d'une manière toute particulière l'attention des vignerons sur l'ap-
parition des galles ou excroissances en question. »
M. DE Séré adresse, de Pau, une Note portant pour titre : « Du couteau
électrique et de ses applications à la chirurgie militaire '>. Celte Note est
relative au couteau électro-caustique, à chaleur graduée au moyeu d'une
échelle de platine, que l'auteur a déjà soumis au jugement de l'Académie (i).
(Renvoi à la Section de Médecine et de Chirurgie.)
CORRESPOI\D ANCE .
M. LE SECiiÉTAiRE PERPETUEL Signale, parmi les pièces imprimées de la
Correspondance, une brochure de M. Figuier, portant pour titre : « Armes
de guerre et bâtiments cuirassés ».
ASTBONOMIE PHYSIQUE. — Sw le specUe de V nlmosphève solaire.
Note de M. G. Rayet.
<i IjPS Communications faites à l'Académie par M. I^ockyer et par moi
montrent que le nombre des lignes brillantes du spectre de l'atmosphère
(i) Comptes rendus, 5 février 1866, t. LXII, p. 3ofi.
C. R., 1K70, 2« Semestre. (T. I.XXI, N» S.) Sg
f 302 )
solaire est variable comme les conditions dans lesquelles se forment les
protubérances. C'est ainsi que, certains jours, on ne rencontre dans le
spectre d'une protubérance que les lignes de l'hydrogène, tandis que le
lendemain on pourra y trouver des lignes du magnésium, du sodium, du
fer, du nickel, etc. ; mais, et c'est là une remarque d'une haute impor-
tance pour la ihéorie de la constitution du Soleil, lorsque, par exemple,
le cercle d'une protubérance donne des lignes brillantes appartenant au
fer, ces lignes sont toujours peu nombreuses. Ainsi le spectre à lignes
noires du Soleil renferme environ quatre cent soixante lignes, qui coïn-
cident exactement avec les lignes brillantes du spectre électrique du fer,
et dans le spectre de l'atmosphère solaire on ne rencontre guère que
cinq lignes pouvant être attribuées à des vapeurs incandescentes de ce
métal.
» Il faut évidemment des conditions particulières, pour que les vapeurs
de fer de l'atmosphère solaire ne donnent que cinq lignes.
» Les vapeurs de magnésium, de sodium, etc., se trouvent dans des condi-
tions analogues, car sur les sept lignes du spectre complet du magnésium
il n'y en a que trois qui deviennent lumineuses, et sur les neuf lignes du
spectre du sodium les deux lignes D deviennent seules brillantes.
» Un catalogue complet et exact des lignes brillantes de l'atmosphère
solaire est donc important à établir.
B A ce point de vue, je crois devoir signalera l'Académie que le 23 juillet
j'ai observé, pour la première fois, sur le bord est-nord-est du disque solaire
le renversement des lignes dont les longueurs d'onde sont les suivantes :
Dix-millionièmes
de millimètre.
5i66,6 la ligne ^4 du magnésium.
5197,0 ligne du fer.
5233,4 ligne du manganèse.
5275,0 la substance correspondante est inconnue.
53i5,9 ligne du fer.
5362.0 ligne du fer.
5370,4 ligne du fer.
5534.1 ligne du baryum.
» I/observation des cinq premières lignes est une conhrmation des tra-
vaux de M. Lockyer.
» Les trois dernières lignes n'ont encore été signalées par aucun obser-
vateur.
» En ajoutant les lignes brillantes précédentes à celles dont j'ai signalé
( 3o3 )
le renversement dans des Notes antérieures on trouve qu'il est possible de
voir dans l'atmosphère solaire vingt-deux lignes lumineuses.
)) Les observations précédentes ont été faites avec le spectroscope décrit
dans ma Note du 23 juin dernier. »
THERMO-CHIMIE. — Recherches thermo-chimiques utr les sulfures.
Note de M. Bekthelot (i).
« J'ai formulé en 1867 un principe général de thermo-chimie (2) qui
permet de prévoir les réactions d'après le signe des quantités de chaleur
mises enjeu, ilans les condilions mêmes tles expériences. Ce principe est
indépendant des considérations fondées sur la cohésion, la solubilité ou la
volatilité, lesquelles servent de base aux lois de Berthollet; mais il ne s'ap-
plique avec pleine certitude qu'aux réactions rapides, et dans lesquelles ne
figure aucun corps éprouvant un commencement de décomposition spon-
tanée.
» C'est par ce principe que j'ai expliqué, dans de précédentes publi-
cations :
» 1° Les décompositions inverses des iodures par le chlore et des chlo-
rures par l'acide iodhydrique, soit en Chimie minérale (3), soit en Chimie
organique ;
» 2" Les phénomènes contraires de la substitution de l'hydrogène par
le chlore et de l'iode par l'hydrogène (4);
» 3° Les réactions hydrogénanles que l'acide iodhydrique exerce sur
tous les composés organiques, réactions qui vaiient avec la concentration
de l'acide (5);
» 4" Les conditions qui président à la formation et à la décomposition
des chlorures acides (6) et à celles des acides atdiydres ("7);
» 5° La décomposition de certains chlorures métalliques j)ar l'eau et
{{] L'Académie a dt'ciilé que cette Coniiminication, bien ([ue dépassant en étendue les
limites réglementaires, seiait insérée en entier au Compte rendu.
(2) Comptes rendus, t. T,X1V, p. 4i4> ^^ surtout Annales de Chimie et de Pliysi(jue,
4' série, t. XVIII, p. io3.
(3) Comptes rendus, t. LXIV, p.4'4-
(4) Comptes rendus, t. LXIX, p. 636 et 638.
(5) Bulletin de la Société Chimique, -i." série, t. IX, p. 104.
(G) Comptes rendus, t. LXIX, p. 635.
(7) Comptes rendus, t. LXIX, p. 633.
39..
( 3o./4 )
la ié;iclion inverse de I acide clilorhydrique sur les oxydes correspon-
dants (i).
u Par ce même principe, j'ai encore expliqué l'efficacité des doubles
décompositions pour former les corps qui dégagent de la chaleur en se dé-
composant (2) et les conditions singulières de la forn)ation de ces corps;
les phénomènes attribués à Vétat naissant (3); les réactions en<lothermiques
et exothermiques (4), etc., etc. Bref, je me suis efforcé de rjuuener à ce
seul princi|)o la plu|)art des phénomènes de la Statique chimique (5j.
(l ) Comptes rendus, t. LXIX, p. 63q.
(2) J tin aies de Chimie et de Physique, 4' série, t. XVIII, p. ■;, i5, etc. (lésuiné de diverses
publications faites depuis i864).
(3) Annales de Chimie et de Plnsiquc, 4" série, t. XVIII, p. 61 et 66.
(4) Annales de Chimie et de Physique, 4" série, t. XVIII, p. 6 et suivantes.
(5) Afin de prévenir tout soupçon d'un emprunt dissimulé, je regarde comme un devoir
de relever quelques phrases écrites par M. H. Sainte-Claire Deville dans un Mémoire récent
[voir ce Recueil, p. 2i5). Cet honorable savant affirme que M. Dumas, « dans son ensei-
gnement, faisait intervenir les chaleurs de combinaison comme déteiminant, par leurs gran-
deurs relatives, les réactions chimiques et les déplacements réciproques des corps les uns par
lesautres ». Une assertion aussi ])récise aurait besoin d'être établie autrement que |)ar des
souvenirs privés, qui remontent nécessairement à vingt ou vingt-cinq ans au moins. Or
M. Dumas, dans l'éloquent Exposé de ses idées sur l'aftinilé chimique, qu'il a imprimé en 1868
[Comptes rendus, t. LXVII, p. 6o31, a pris soin de présenter hii-mcme un résumé des vues
originales de son enseignement. Entre autres idées importantes, formulées avec sa netteté
ordinaire, il énonce les suivantes {p. 606 et 607 ), l'une conforme aux lois de Berthollet, et
d'après laquelle : « Les phénomènes de double décomposition sont toujours déterminés par
la production du composé le plus condensé et par^sa précipitation ». M. Dumas dit encore
que II les éléments d'un composé chimique qui se séparent ont besoin d'être portés à une
température d'autant plus haute, qu'ils ont émis plus de clialeiu- en s'unissant ».
Il ne me convient pas de discuter ici ces vues remarquables; mais je dois insister sur ce
point, que !M. Dumas n'a pas écrit un mot qui ressemble à l'énoncé que M. H. Sainte-Claire
Deville lui attribue. M. Chcvreul n'a pas fait davantage intervenir les chaleurs de combinai-
son dans les déveiopiiemcnts intéressants par Icstjuels il précise le sens véritable du mot
cohésion dans l'énoncé des lois de Berthollet [Comptes rendus, t. LXVII, p. 6i4, 64o).
MM. Favrc et Silbermann, loin de donner au principe énoncé ci-dessus « une vérification
expérimentale des plus frappantes »,dans leurs nombreuses et importantes recherches, ne l'ont
jamais cité; mais ils ont développé le même ordie d'idées (]iie M. Dumas (ro//- spécialement
Annales de Chimie et de Physique, t. XXXVII, p. 485). Enfin, M. H. Sainte-Claire Deville
lui-même ne semblait pas soupçonner l'importance de ce principe jusqu'à ces derniers temps,
comme on peut s'en :issiii<'r par la lecture des r)l)servations (|u'il a présentées en annonçant
la décomposition du cliloruie d'argent par l'acide iodliydrique [Comptes rendus, t. LXIV,
p. 3-24).
( 3o5 )
M Aujourd'hui je me propose d'en faire l'application aux réactions mul-
tiples et souvent contraires que présentent les sulfures métalliques.
» On sait quel parti l'analyse chimique tire des réaclions exercées par
l'hydrogène sulfuré sur les solutions métalliques. Tantôt le sel dissous
n'éprouve aucune réaction de la part de l'hydrogène sulfuré, non plus que
des sulfures alcalins; tantôt il fournit des précipités diversement colorés.
Ces précipités se forment dans la liqueur, quelle qu'en soit l'acidité; ou
bien ils apparaissent seulement sous l'influence des sulfures alcalins; ou
bien encore ils se forment dans les liqueurs neutres, et ils se retlissolvent
sous l'influence des acides minéraux, soit dilués, soit concentrés. Jusqu'ici
ces réactions multiples n'ont pas été prévues à l'avance, parce qu'elles
échappent pour la plupart aux lois ordinaires de la Statique chimique. La
décomposition d'un sulfure insoluble par un acide, avec formation d'un
sel soluble et d'hydrogène sulfuré ilissous, est même en contradiction for-
melle avec les lois de Berthollet.
» Je me propose de montrer que ces phénomènes divers, et jusqu'ici
inexpliqués, sont conformes au principe général de thermo-chimie rajipelé
ci-dessns. J'entrerai dans les détails, parce qu'ils sont la vraie pierre de
touche des théories (i).
I. — RÉACTION DES SULFURES ALCALINS SUR LES SELS MÉTALLIQUES EN DISSOLUTION.
» En général les sulfures alcalins donnent naissance à des sulfures métal-
liques, lorsqu'ils agissent sur les sels métalliques dissous. Calcidons la
chaleur dégagée. Soit le système initial suivant : potasse, hydrogène sid-
furé, sel métallique, tous ces corps étant supposés dissous dans une grande
quantité d'eau, et soit le système final : sel de potasse et sidfure métallique.
On peut passer d'un système à l'autre en suivant deux marches différentes.
Première marche.
» Première réaction: Potasse + sel métallique = sel de potasse + oxyde
métallique.
» Deuxième réaction : Oxyde métallique -f- hydrogène sulfuré dissous
= sulfure métallique -f- eau.
» La première réaction donne lieu à un dégagement de clialeiu- + A,
(i) Les chiffres cités dans le cours de ce Mémoire sont les valeurs moyennes que l'on
obtient en combinant les expériences de MM. Hess, Andrews, Grahain, Favre et Silbermann,
Abria, Woodt., Thomsen, Marié-Davy etTroosi, Hautefeuille, Berihelot et Lon|^uinine, etc.
( 3o6 )
parce que l'union de la potasse avec les acides étendus dégage presque
toujours plus de chaleur que l'union des uiènies acides avec les oxydes
métalliques (i), lorsqu'il y a formation dv sels soluhles. D'après l'expé-
rience, A dépasse 3ooo calories pour i équivalent (O = 8 grammes).
» La seconde réaction donne aussi lieu à un dégagement de chaleur, ■+- B,
savoir :
Formation de ZnS-t- 7600
« de FeS + S3oo
» de CuS + i54oo
» de PGS -r- 10200
» de AgS + 28700.
» B égale ou dépasse 7600 calories.
« La chaleur dégagée par la somme des deux réactions A -+- B égale ou
dépasse donc 10600 calories.
Dciirième marche.
)) Première réaction : Potasse et hydrogène sulfuré dissous = sulfure
alcalin dissous.
» Deuxième réaction : Sulfure dissous H- sel métallique = sulfure métal-
lique -+- sel alcalin.
» La première réaction dégage + 36oo pour 1 équivalent.
« Soit X la quaulité dégagée par la deuxième réaction, ou a
A + B = 36oo + X,
mais
A + B > 10600,
«loue X est positif et dépasse 7000 calories. La formation des sulfiu'es métal-
liques par la réaction des sels mél.iUiques dissous sur les sulfures alcalins
se produira donc il'uuc uiauicre nécessaire.
II. — RÉACTION UKS ACIDES SUE LES SULFURES ALCALINS.
» Les sulliuTs alcalins sont décomposés en général par les acides avec
spoiulanl et d'hydrogène
KS + Il Cl = lvCl +IIS.
formation d'un sel conespoiulanl et d'hydrogène sulfuré :
(1) La seule exceplion coiimu' csl l;i naflion ilr l'iK-idu cyaiiliy(lii(]iio sur l'oxyde de
iiu'icui'f, I;u]uelle dégaine plus de ilialcur (]iie relie i\\\ uièuie acide sur la [lolasse. Aussi la
[xilasse ne précipite-t-ellc point l'oxyde de mercure dans les solutions du cyanure.
( 3o7 )
» La réaction peut avoir lieu entre les corps anhydres ou entre les corps
dissous. Dans le dernier cas, l'hydrogène sulfuré peut demeurer dissous ou
bien prendre la forme gazeuse.
» Or, dans tous les cas, la réaction est nécessaire, d'après noire prin-
cipe. En effet, en partant des éléments libres à la température ordinaire,
K + S = KS solide + 453oo
H H- Cl = H Cl gaz -t- 23900
69200
Dantre part
K-f- Cl =IC Cl solide io?.70o
H -f- S = HS gaz... 235o
io5o5o
Dissous . 5o8
Dissous 4i3
Dissous 98400
Dissous 5700
I o4 I 00
)> Donc la réaction KS + HCl = KCl + HS dégage :
» Tous les corps étant supposés isolés, + 36 200;
» Tous les corps étant supposés dissous, + 12000;
» Enfin, tons les corps demeurant dissous, à l'exception de HS, qui de-
vient gazeux, + 8700.
» Soit encore la réaction d'un oxacide sur un sulfure alcalin :
NaO dissoute -f- HS dissous, + 36oo,
NaO dissoute +SO''H dilué, +16000,
NaO dissoute + C'H'O' dilué, +i34oo.
» D'où il suit que la réaction de l'acide sulfurique étendu sur le sulfure
alcalin dissous, avec formation d'hydrogène sulfuré dissous, dégage
+ 12400, et celle de l'acide acétique, + 9800.
» Si l'hydrogène sulfuré devient gazeux, l'acide sulfurique dégage 9100,
et l'acide acétique 6 5oo calories. Toutes ces réactions se produiront donc
d'une manière nécessaire.
» Entre les acides qui décomposent les sulfures alcalins, l'acide carbo-
nique se distingue par des réactions toutes spéciales; on sait en effet que
l'acide carbonique en excès décompose les sulfures dissous, tandis que
l'hydrogène sulfuré employé sous forme gazeuse et en excès décompose
aussi les carbonates alcalins dissous, ou même anhydres. Ces deux réac-
tions inverses ont été étudiées, entre autres, par Henry, et discutées avec
beaucoup de sagacité par Gay-Lussac : il les explique par la décomposition
partielle que les bicarbonates alcalins (i), pris isolément, manifestent déjà
(i) Annales de Chimie et de Physique, ?/ série, t. XXX, p. 2g3 ; 1825.
( 3o8 )
à la température ordinaire, l;i décomposition se poursuivant et devenant
complète sous l'influence de l'hydrogène sulfuré et en vertu d'un méca-
nisme purement physique, que Gay-Lussac ramène expressément à « la
» théorie des vapeurs «. Quel que soit le mérite de ces explications, il y
manque deux points essentiels, à savoir : pourquoi l'acide carbonique
commence à décomposer les sulfures dissous, et pourquoi l'acide sulfhy-
drique commence à décomposer les carbonates neutres. C'est cette double
lacune que je vais essayer de combler.
» Examinons d'abord la formation des carbonates et celle des sulfures,
pris isolément :
Carbonate jicutre :
NaO en solution élendue -+- CO' dissous dégaj^e loioo
« " -t- CO' gazeux » 12800 environ
Bicarbonate :
NaO dissoute + CO- dissous dégage 11 000
" » -h CO' gazeux » i63oo environ
Sulfures :
NaO en solution étendue -1- HS dissous dégage 36oo
o u -f- HS gazeux >■ 6goo
» u H- H-S' dissous ■< 7200
» » 4- H' S' gazeux « i38oo
>■ Il résulte de ces chiffres que l'acide carbonique dissous ou gazeux doit
déplacer l'acide sulfhydrique sous forme dissoute, et cela, soit qu'il forme un
carbonate neutre, soit qu'il forme un bicarbonate. L'acide sidfhydrique,
ainsi devenu libre dans la dissolution, se dégage ensuite et à mesure, s'il
est entraîné par un courant gazeux.
» La réaction inverse exige une discussion plus approfondie. Dans une
dissolution étendue, elle résulte, comme Gay-Lussac l'a fort bien recoiuui,
de la transformation du carbonate neutre en bicarbonate, et de la décom-
position spontanée que ce dernier éprouve à la température ordinaire. En
vertu de cette dernière décomposition, une partie de l'acide carbonique se
trouve à l'état libre dans la liqueur, et, par conséquent, susceptible d'être
entraînée par le courant gazeux. Si le bicarbonate se régénère inces-
samment par quelque réaction, la totalité de l'acide carbonique finira |)ar
être éliminé. Il faut donc établir cpi'iui carbonate neutre en dissolution est
changé par un excès d'acide sulfliydrique gazeux en bicarbonate. La réac-
(3o9)
tion est la suivante :
C-0*,2Na() + H=S- =C=0\NaO,HO + NaS,HS.
» Le calcul thermique se décompose en deux parties :
Séparation du carbonate neutre en bicarbonate et aUali libre. . . — r)9.oo
Union de l'alcali libre avec l'acide suUhydrique gazeux -t-i38oo
+ 4600
)) La réaction dégage 4600 calories : sa réalisation est donc conforme
au principe. Mais elle ne sautait avoir lien, si ce n'est au contact du gaz
sulfhydrique et de la dissolution. Le bicarbonate produit, étant instable
par liii-mètne, exhale une partie de son acide carbonii|ue dans l'atmosphère
de gaz sulfhydrique, en présence de laquelle il prend naissance.
» On voit par là que la réaction d'un excès d'acide suif hydrique se pro-
duira seulement avec le corps gazeux; tandis que celle d'un excès d'acide
carbonique aiua lieu mètne en dissolution : les carbonates dissous doi-
vent donc être plus difficiles à décomposer par un excès d'acide sulfhy-
drique que les sulfures dissous par un excès d'acide carbonique : opposi-
tion déjà remarquée par Henry dans ses expériences, et qui avait excité
l'étonnement de Gay-Lussac.
m. — RÉACTION nE l'hydrogène sulfuré sur les divers sels métalliijues;
ET RÉACTION DES ACIDES SUR LES SULFURES MÉTALLIQUES.
» Je prendrai comme types les sulfures des métaux suivants : zinc et fer,
plomb, cuivre, argent, lesquels fourniront des exemples de toutes les réac-
tions essentielles.
Sulfures de zinc et de fer.
» L'oxyde de zinc, réagissant sur les acides, dégage les quantités de cha-
leur suivantes, lesquelles sont à peu près les mêmes avec l'oxyde anhydre
ou hydraté :
Zn 0 + HS dissous ^600 ( i )
» -I- HS gazeux 1 1000
» + SO^H dilué 1 1 à 12000
» H- H Cl ou AzO'H dilués 10 à iiooo
» -t- C'H'O' dilué 7600
» 11 réstdte de ces nond^res que :
» 1° Les acides siilfurique, chlorhydrique, azotique étendus doivent dé-
(i) Ce nombre est probablement un peu trop faible.
C. R., 1870, -2" Semestre. (T. LXXl, N» Ij.) 4°
( 3io )
composer le sulfure de zinc, en formant de l'hydrogène sulfuré dissous : ce
dernier prendra consécutivement la forme gazeuse sous l'influence d'un
courant gazeux ou de la vapeur d'eau.
M La décomposition s'efteclucra mieux avec les acides concentrés, parce
que de tels acides dégagent ])lus de chaleur eu s'unissant à l'oxyde de
zinc (i); l'excès suffit pour expliquer la formation immédiate du gaz suif-
hydrique.
» 2° A l'inverse, l'hydrogène sidfuré gazeux produira un conmiencement
de décomposition sur les sels neutres de zinc en dissolution, siiécialement
sur le chlorure et l'azotate; mais l'action s'arrêtera presque aussitôt, dès que
l'acide formé dans la solution tendra à se concentrer.
» 3° L'acétate de zinc (et les sels organiques analogues) pourra être dé-
composé complètement sous l'influence d'un excès d'hydrogène sulfuré
gazeux.
» Toutes les circonstances observées dans les expériences sont en con-
formité parfaite avec ces prévisions tiiermochimiques.
» Soit maintenant le protoxyde de i'er. Ce corps dégage à peu près les
mêmes quantités de chaleur que l'oxyde de zinc, en réagissant sur l'hydro-
gène sulfuré et sur les acides sulfinique, chlorhydrique, azotique, acétique.
Aussi les réactions de l'hydrogène snlfiu'é sur les jM'otosels de fer, et celles
du sulfure de fer sur les acides sont-elles analogues, en général, à celles
des sels de zinc (2). En effet, les acides minéraux décomposent le sulfure
de fer, tandis que l'hydrogène sulfuré gazeux détermine un commencement
de précipitation dans une solution d'acétate ferreux.
Sulfure de plomb.
PbO (3) + HS dissous dégage 10200
» HS gazeux ■- i35oo
" AzO'H clciulu (sel soluble). ... » gSoo
» HCI étendu (sel insoluble).... " i i 200
» SO' II étendu (sel insoluble) ... » 11 3oo
» C'H'O' étendu (sel soluble). ... « 7200
(i) Ils dég.igCMt en plus la sonune des valeurs absolues de la ebaleiir qui serait dégagée
])ar leur dissolution <lans un excès d'eau pure, et de la elialeur qui serait absorbée |)ar la
dilution des solutions de sulfate de zinc dans ce même excès d'eau pure ou acidulée.
(2) Sauf de légères différences de détail, qui trouveront sans doute leur e\j)lica;ion dans
des déterminations calorimétriques ]ilus précises.
(3) Anbydrc ou liydralé.
( :^i> )
» Il résulte de ces nombres que :
1' i" Les sels de plomb solubles seront décomposés par l'hydrogène
sulfuré dissous ou gazeux;
» a° Le gaz sulfhydrique décomposera tous les sels de plomb, y compris
le sulfate et le chlorure;
» 3° Les acides qui forment des sels insolubles (chlorure, sulfate) cor-
respondent à peu près au même chiffre que l'acide sulfhydrique dissous;
ils seront difficilement décomposés par cet agent, et la réaction changera
de signe avec la concentration des acides, laquelle augmente la chaleur
dégagée; on sait, en effet, que le sulfure de plomb est décomposé par les
acides chlorhydrique et sulfurique un peu concentrés;
» 4° Cette réaction inverse n'a pas lieu avec l'acide acétique, parce que
l'écart est trop grand pour être comblé par la faible chaleur de dissolution
de cet acide.
Sulfure de cuivre.
CuO + HS dissous ''égage i54oo
S0< H étendu „ 83oo
» HCl et AzO'H étendus.. » 6400
» ci* H* 0* étendu » 5 200
» Ces quantités sont à peu près les mêmes avec l'oxyde anhydre ou
hydraté.
» Il résulte de ces nombres que les sels de cuivre en solutions étendues
seront décomposés par l'hydrogène sulfuré. Le sulfure de cuivre ne se dis-
soudra pas d<uis les acides étendus. Cependant les acides chlorhydrique ou
sulfurique extrêmement concentrés pourront l,e décomposer, p;uce que
leur union avec l'oxyde métallique dégage en plus la somme de la quan-
tité de chaleur correspondante à leur dissolution dans l'eau et de la quan-
tité de chaleur (prise avec le signe contraire) qui serait absorbée par le
fait de la dilution de la solution du sel métallique formé.
» Toutes ces prévisions sont vérifiées par l'expérience.
Sulfure il 'argent.
AgO -t- HS dissous dégage 28000
» SO*FI étendu (sel en partie insoluble) ... » io4oo
1 AzÛ'H étendu (sel soluble) » nooo
» HCl étendu (sel insoluble) » aSooo
» Les sels d'argent, le chlorure compris, seront donc en général décom-
posés par l'hydrogène sulfuré; tandis que le sulfure d'argent ne se dissou-
dra pas dans les acides étendus.
/,o..
( 3i2 )
» Signalons enfin ces dernières conséquences du principe, conséquences
qne l'expérience confirme :
» Le sulfure de plomb, introduit dans la solution d'un sel de cuivre,
doit en précipiter le cuivre sous fonr.c de sulfure; car la séparation de
l'oxj'de de cuivre uni aux divers acides dans les sels absorbe moins de
chaleur que celle de l'oxyde de plomb uni aux mêmes acides, tandis que
l'union de l'oxyde de cuivre avec l'hydrogène sulfuré dégage plus de cha-
leiu' que l'union de l'oxyde de plomb. La somme des valeurs absolues de
ces deux quantités, laquelle détermine le sens de la réaction, est comprise
entre 7000 et 10 000 calories.
» Le sulfure de |jlomb doit également précijjiter, et précipite en effet
l'argent sous forme de sulfure dans une solution de nitrate d'argent; car
cette réaction dégage 20000 calories.
)) Enfin le sulfure de cuivre décompose l'azotate d'argent dissous, avec
formation de sulfure d'argent : réaction prévue, caielle dégage 12000 ca-
lories.
» On voit que notre piincipe permet d'annoncer à l'avance toutes les
circonstances essentielles des réactions que l'hydrogène sulfuré exerce sur
les solutions métalliques, ainsi que les circonstances des réactions que les
divers acides exercent sur les sulfures, alors même que ces réactions sont
contraires aux lois de Berthollet. Les vérifications les plus décisives peut-être
que l'on puisse citer sont les cas dans lesquels inie réaction change de signe
thermique :
» Soit, par exemple, lorsqu'on passe d'un corps à un autre dans une
même série de substances analogues (action des acides étendus sur les sul-
fures alcalins, sur les sulfures de zinc et de fer, sur les sulfures de cuivre et
d'argent);
)) Soit encore lorsque les réactions entre les mêmes composés sont ren-
versées par le simple changement de quelque circonstance physique qui
modifie les quantités de chaleur mises en jeu (actioti inverse des acides
étendus et des acides concentrés sur le sulfure de plomb).
» Voici quelques autres exemples d'un renversement dans les réactions,
corrélatif avec le changement de leur signe thermique sous l'influence
d'iuie inégale concentration :
IV.
» D'après Grégory, le chlorure d'argent récemment préci|>ité est dé-
composé complètement par la potasse concentrée, avec formation d'oxyde
( 3i3 )
d'argent et de chlorure de potassium. En présence d'une solution très-
étendue, non-seulement la réaction n'a plus lieu; mais l'oxyde d'argent dé-
compose le chlorure de potassium, avec formation de chlorure d'argent et
de potasse caustique. Ces réactions singulières et opposées pouvaient être
prévues. En effet
Ag -f- Cl := Ag Cl dégage.. .. 34 800
R + 0 = KO diluée 76300
Ag-t-0 = AgO dégage 6 100
K + Cl =K CI dissous .... 97800
io3 goo
» La réaction
AgO -hRCI +Aq = AgCI + KO + Aq
dégage donc + 7200 environ, dans des solutions étendues : ce qui explique
la décomposition du chlorure de potassium jjar l'oxyde d'argent.
» Four rendre compte de la réaction inverse, il suffit de remarquer qu'en
présence d'une moindre quantité d'eau la formation de la potasse dégage
de moins en moins de chaleur. La diminution peut s'élever jusqu'à 12900,
limite relative à l'hydrate de potasse solide : KO, HO. An contraire, la
formation du chlorure de potassium dans une solution concentrée absorbe
moins de chaleur que dans une solution étendue; si le sel se séparait sous
forme solide, la différence serait 4200. La limite des quantités de chaleur
dégagées par les réactions ci-dessus sera donc:
Ag-t-CI =AgCI 34300
K-f-H=0-=KOHOsolide.. . 63 4oo
Ag + 0 = AgO 6100
K+C1 = KC1 solide 102000
io8 100
98 200
)) La réaction inverse, pour de tels systèmes,
Ag O -»- HO -H KCl -. Ag Cl + KO,HO,
déeaserait donc loooo calories environ. A la vérité, cette réaction n'est
guère possible physiquement, à la température ordinaire. Mais elle de-
vient possible, et elle a lieu en effet, avec la potasse en fusion, condition qui
diminue à peine de 2000 à 3ooo calories le nombre précédent. La réaction
doit aussi avoir lieu, et elle a lieu en effet, avec la potasse en solution très-
concentrée, tant que subsiste le signe de la différence précédente. Au delà
de ce terme, c'est-à-dire dans des dissolutions plus étendues, c'est la léaction
inverse que l'on observe.
V.
» I>a préparation de la potasse caustique, au moyen de la chaux éteinte
et du carbonale de potasse, va nous fournir une autre vérification des
( 3.4 )
mêmes principes. On sait, en effet, que le carbonate de polasse, en solution
étendue, est décomposé par l'iiydrate de chaux, avec formation de carbo-
nate de chaux et de potasse caustique. Ce résultat pouvait être prévu d'après
les nombres suivants:
CO' gazeux H- KO en solution étendue = KO,CO' dégage. . . 12800
C0= gazeux -f- CaO, HO . = CaO,CO= .. ... 4700
» Ainsi l'hydrate de chaux doit décomposer le carbonate de potasse, en
solution étendue, avec dégagement de 2000 calories environ.
» Mais la réaction du gaz carbonique sur l'hydrate de potasse solide,
avec formation de carbonate neutre solide, dégagerait environ 25 000 calo-
ries, chiffre très-supérieur à 14700. Si l'hydrate de potasse est dissous dans
une petite quantité d'eau, la réaction dégagera des quantités comprises entre
aSooo et 12800, et qui s'écarteront d'autant plus du dernier chiffre que la
solution sera plus concentrée. Il existera doue une concentration limite,
pour laquelle l'hydrate de chaux cessera d'agir sur le carbonate de polasse.
Pour une concentration plus grande, la réaction inverse deviendra possible,
c'est-à-dire que la potasse décomposera le carbonate de chaux.
» Toutes ces conséquences sont conformes aux circonstances bien con-
nues, mais jusqu'ici inexpliquées, de la préparation des lessives alcalines.
» Je ne citerai pas pour le moment de nouveaux exemples, me proposant
de revenir encore sur ce sujet. Qu'il me soit permis d'y insister ; car il s'a-
git desavoir si la statique de Berthollet, qui a si longtemps régné dans la
science, ne doit pas être remplacée par des lois plus profondes et plus gé-
nérales. »
CHIMIE. — Action du j)eiUachlorute cl du pcnlalxomuic df. phosphore
sur divers étiiers. Note de M. L. He.vky (i).
« J'ai attiré, à divers reprises déjà (2), l'attention des chimistes sur la
différence qui existe, au point de vue de l'action des chlorures des radicaux
négatifs en général, notamment du pentachlorure et du pentabromure de
phosphore, entre l'hydroxyle (HO) et les groupements éthérés correspon-
dants, méthoxyle (CH'O), éthoxyle (C^H'O), etc.
(i) L'Académie a décidé que cette Couimunication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Compte rendu.
(2) Bulletin de l'Académie de Belgique, ■>.' série, t. XXVII, p. (k)i; t. XXVIII, p. 21 l,
399 et 552.
( 3i5 )
» Tandis que l'hydroxyle (HO) est, quelle que soit sa fonction, alcool,
acide ou phénol, facilement remplaçable, et dès la température ordinaire,
par un atome de chlore ou de brome sous l'action de PhCP ou de PhBr%
les groupements éthérés méthoxyle, élhoxyle ne subissent^ dans les mêmes
circonstances, aucun remplacement de ce genre et résistent à l'action de
ces agents. J'ai l'honiiein- de faire connaître à l'Académie, dans la présente
Note, quelques réactions nouvelles à l'appui de cette idée générale.
» 1. Glycollate et lactale d'élhjle (i )• — O" sait quelle est l'action qu'exer-
cent sur les acides biatomiques et monobasiques (acides alcooliques), tels
que l'acide glycollique C=H= O < ^^, le pentachlorurc et le penlabromure
de phosphore.
» Il était à prévoir que, sous l'action de ces mêmes composés, les éthers
de ces acides, éthers qui sont en même temps des alcools monoatomiques,
seraient éthérifiés de la même manière, (HO) étant remplacé par Ci ou
par Br, et transformés en élhers de l'acide monoatomique et monobasique
correspondant, monochloré ou monobromé. Cette prévision a été con-
firmée par l'expérience.
» Le pentachlorurc et le penlabromure de phosphore attaquent éncrgi-
quement, et dès la température ordinaire, le glycollate et le laclate d'éihyle;
il se dégage abondamment de l'acide chlorhydrique ou de l'acide broinhy-
drique; après deslinction par l'eau du PhOCl' ou du PhOBr' formé, le
nouvel éther formé reste sons forme d'un liquide insoluble dans l'eau et
plus dense que celle-ci; on le lave avec une solution de carbonate so-
dique, et on le dessèche sur du chloriu-e de calcium.
» J'ai obtenu de cette façon le chloro-acétate et le bromo-acétate d'éthyle,
le chioropropionate et le bromopropionate d'éthvie (2).
» Sauf le bromopropionate d'éthyle, ces produits sont bien connus et
possèdent des propriétés qui permettent de les recoiuiaîlre aisément; je ne
m'y arrêterai pas davantage. Le bromopropionate, qui n'a pas encore, que
je sache, été signalé, mérite une mention spéciale.
CO,C=H*0
I
(i) Le lactale d'cllivle dont il est ici question est le paralaclatc CH, HO
( CH'
1 CO,C=H"0 1 CO,C=H»0
I \ I
(?) •; CHCI et CH,Br
CH" ( CH'
( 3i6 )
» Il est en tous points analogue au produit chloré correspondant : c'est
un liquide incolore, limpide, mobile, d'une odeur éthérée, piquante, inso-
luble dans l'eau, d'iuie densité 1,396 à -4- i 1 degrés, et bouillant, sans dé-
composition, à 159-160 degrés (non corrigé). oS','^i34 de ce corps ont
fourni 0^^7392 de bromure d'argent, ce qui correspond à 44)09 pour 100
de brome; la formule C^H* Br (C^H') 0° en demande 44» '9 ponr 100.
» Ces réactions doivent théoriquement s'accomplir entre i molécule de
l'élher glycollique ou lactique et i molécule do PhCP et de PliBr'; il n'en
est pas ainsi dans la réalité: alors que l'on emploie l'éther et le composé
phosphore dans ces proportions, une partie de cehii-ci demeure inaltérée.
C'est qu'à côté delà réaction principale, réaction de PhCI* ou Phlîr' sur
l'éther, il se produit une réaction secondaire : l'oxychlorure PhOCl' et
l'oxybromure PhOBr' de |ihosj)hore réagissent à leur tour sur l'hydroxyle
(HO) alcoolique de l'éther primitif, poiu' produire des éthers phosphoriques
complexes. C'est une réaction analogue à celle de l'oxyclilonn'e de car-
bone (CO)CP et du clilorocarbonate d'éthyle CO C^ . sur le glycollate
d'éthyle, réaction que M. Heiniz a fait récemment connaître (1).
» Il résulte de là que le rendement final de ces réactions, en éther chloré
ou brome, est beaucoup moindre que le rendement théorique.
» Je ne me suis pas arrêté pour le moment, malgré l'intérêt qu'ils peu-
vent présenter, à examiner ces éthers phosphoriques complexes: ces pro-
duits sont vraisemblablement fixes, circonstance qui doit rendre leur
purification difficile.
» II. Malale el tarlrale diéthyliques. — Le pentachlorure de phosphore,
PhCi% réagit aussi et avec beaucoup d'énergie, déjà à froid, sur le malate
diélh/lique, C^H* (C" H^ )^0^ (2); l'action de ce composé sur le tarlrale,
C*H''(C^H')^0°, du même radical est beaucoup moins vive; il est nécessaire
de chauffer légèrement. On opère comme précédemment i)our séparer et
purifier le produit formé. Il y a à faire sur ces réactions, au point de vue
du rendement, les mêmes remarques que précédemment.
» Je pouvais m'altendre à ce que, comme précédemment, V kydroxjle
(i) Annalen (1er Chcmie und Pharmacie, t. CLIV, p. 25^ (juin 1870).
(2) J'ai préparé le malate diétiiylique par la réarlion de l'iodiire d'éllivlc sur le mainte
<liargenli<iuc, en présence de l'éther anhydre; la réaction s'aecoin|)lit rapiclcnicnt à la tem-
pérature de l'ébullition de l'éther; on chasse celui-ci par la distillation; le malate d'éthyle
s'obtient facilement par ce procédé à l'état de pureté, .l'ajouterai (jue ce procédé a déjà
été employé avec avantage par M. Berthelol, pour obtenir le tarlrale d'éthyle.
( :^>7 )
alcoolicjiie (HO) contenu dans ces étiiers fût éthérifié et remplacé |)ai un
atome de chlore Cl, avec formation de succinale d'éthyle niottochloré,
C*H'C1(C^H^)'0% dans le cas de l'étlier malique, et de succinate d'élhyle
bichloré, C*H-Cl^(C^H'j-0*, dans le casderélher tartiique. Les choses ne
se sont pas passées de cette manière.
» J'ai obtenu avec l'éther malique du fuinarate d'élliyle^ C*H^(C*H°)°0'
et avec l'élher tartrique du citloromaléale d'élhyle, CHCI (C^H')^0\
» Les éthers malique et tartrique se sont donc comportés, dans cette
circonstance, comme les acides malique et tartrique libres; on sait, en
effet, que, soumis à l'action du pentachlornre de phosphore, PhCl"', ces
acides donnent respectivement les chlorures de fuinaryle [G' W'0-)Ç\- et de
chloromaléyle (C^HClO-)Cr-, produits qui, traités par l'eau, se convertis-
sent en acide fumarique (i) et chloromaléique (2).
» L'éthery(<man(jiwe est analogue à l'éther succinique: c'est un liquide
incolore, limpide, peu odorant, bouillant vers 22$ degrés; sa densité à
II degrés est égale à i,ioG. Sous Faction des bases fortes, on en retire
aisément de l'acide fumarique, facilement reconnaissable,
» L'éther chloromaléique est un liquide huileux, assez épais, d'une odeur
fade, assez désagréable, d'une densité de i,i5 à 11 degrés, bouillant entre
25o et 260 degrés. oS"^, 43ii de ce corps ont fourni 0^% 3o6o de chlorure
d'argent, ce qui correspond à 17,55 pour 100 de chlore; la formule
C*HCl(C-H«)-0' en exige 17,19 y^our 100.
» On peut conclure de là que, soumis à l'action du peidachlorurc el du
peiilabromure de phosphore, les éthers neutres des acides alcooliques se compor-
tent comme les acides libres eux-mêmes auxquels ils correspondent, sauf l' inal-
tération des groupements (CH'O), (C^IPO) correspondant à lliydroxyle
acide (HO).
» J'ai soumis à l'action du pentachloi me de phosphore un grand nombre
d'autres éthers neutres, tels que l'éther ordinaire (C'-H')-O; l'acétate, le
bulyrate, le valérale d'éthyle; le benzoate de méthyle, celui d'éthyle ; le
carbonate et le chlorocarbonate d'éthyle (CO)CI (C'-H'O); l'oxalate, le
succinale, le fumarate d'éthyle ; le glycoUate diéthylique C^H-O(C-H'O)-,
etc.: tous les éthers restent inaltérés, à la température ordinaire, au con-
tact de PhCl^. Je n'ai pas recherché si, dans d'autres circonstances, à
(ij LiES-BoDART, Comptes rendus, t. XLIII, ji. 3gi.
(2) Perrin et DcppA, Cumptcs rendus, t. IV, p. 44''
C. R., 1870, 2" Semestre. (T. LXXl, M" Ij.) 4^
( 3.8 )
chaud pnr exemple, il y a, ce qui est probable, une rt^actioii, et quels peu-
vent être les produits de celle-ci; il suffisait pour le moment, à mon but,
de constater que, dans les conditions oii /'hydroxyle (HO) est, qu'elle quen
soit la fonction, acide, alcool ou phénol, si énercjiquement attaqué, les groupe-
ments ÉTllÉRÉS (CH'O). (C^H'O), etc., demeunnt imdtérés, quelle que soit
aussi leur fonction. C'est ce que je crois avoir surabondamment démontré.
)) Cette stabilité des groupements éthérés méthoxyle, éthoxjle, etc., sous
l'action de PhCI', me paraît importante à divers points de vue; elle per-
met notamment de produire des combinaisons propres à combler les
lacunes que laissent souvent, dans nos classifications, les dérivés liydroxy-
lés simples. J'ai déjà fait connaître précédemment (i) \e chlorure d'éth/-
lycolly le (ij^W^O) isomère avec le monocbloro-acélatc d'étliyle, chlo-
rure (|ui lient lieu, dans la série des combinaisons glycolliques, du véritable
CO
chloruiede l'acide glycollique (C^H-Q) , isomère de l'acide nionoclilo-
ro-acétique, chlorure inconnu et impossible à obtenir.
» Les nionochluruies des acides biatomiques et bibasiques, tels que
monochlorures des acides oxalique et succiniquc, n'existent pas non j)lus
et ne [)euvent même cxistei- à l'état libre. J'espère les remplacer par les dé-
rivés éihérés
Cl
(C^O') chlorure d'élhyloxyoxalylc,
(C'H'OM chlorure d'étlilvloxvsuccinvle.
« J'ajouterai, en finissant, que je crois avoir obtenu, des à présent, |)ar
l'aclii^n du pentachlorure de phosphore sur l'oxamated'élhyle (C*0") • >
v< H' Kj
1 r C'Az
le cyanolormiale • :
•^ CO-C'H'O
CO-H'Az C'Az
4-PCI'=i -+- POCP-H 2HCI.
CO-C'H^O CO-C'H'O
» J'aurai riioinienr de faire connaître ultérietn-ement à l'Académie le
résultat des recherches (pic je ferai poursuivre dans celle diieclion, dans
mon laboratoire. »
(1) Butliliii (le r Aciidcniic tic Bch^niuc, t. XXVII, ?." sOrie, |). Giji .
(3i9)
CHIMIE MINÉRALE. — Analyse de la narlorile, nouvelle espèce minérale
de la province de Conslantine {Algérie). Note de M. F. Pisani.
« Dans la séance du i8 juillet dernier, M. Flajolot a présenté à l'Aca-
démie des Sciences une Note sur des combinaisons cristallisées d'oxyde
de plomb et d'oxyde d'antimoine, d'oxyde de plomb et d'acide antimo-
nique. L'auteur donne, pour la première de ces combinaisons, la formule
Sb^O','2PbO, ainsi que l'analyse suivante :
Oxyde de plomb 56, oo
Oxyde d'antimoine 4i>ot)
100,00
» Cependant il ajoute que : « Cette composition ne s'accorde pas bien
» avec la formule Sb-0% aPbO. »
» Ayant eu occasion d'examiner cette nouvelle substance, j'ai de suite
reconiui, outre l'antimoine et le plomb, une quantité assez notable de
chlore. Aussi, après avoir eu connaissance de l'analyse de M. Flajolot, je
me persuadai que l'un des deux corps, antimoine ou plomb, avait été
dosé par différence : autrement, l'auteur aurait dû trouver un déficit assez
considérable dans le total de son analyse. Je me mis dès lors à refaire en-
tièrement l'analyse de la nadorite, et je trouvai en effet, pour l'oxyde de
plomb, des nombres concordant avec ceux de M. Flajolot, et, pour
l'oxyde d'antimoine, une quantité bien moindre, le reste étant du chlore
dont j'ai également déterminé la quantité (9 pour 100).
» Ce nouveau minéral a été trouvé dans un gisement de calamine à
60 kilomètres au sud de Bône, dans une localité nommée Djebel-Nador,
ce qui lui a fait donner par l'auteur le nom de nadorite.
» La nadorite forme, d'après M. Flajolot, des cristaux très-aplatis, de
forme tabulaire, portant des biseaux aigus sur leur quatre cotés. Couleur
brun-jaunâtre, translucide. Eclat adamantin dans la cassure. Dureté = 3 en-
viron. Densité = 7,02. Poussière jaunâtre.
i> Au chalumeau, sur le charbon, se réduit facilement en dégageant
des fumées d'antimoine et donnant un enduit jaune; vers la fin, on obtient
lin grain métallique assez malléable. Dans le tube décrépite, puis fond en
donnant un sublimé blanc. Chauffée, avec une perle de sel de phosphore sa-
turée d'oxyde de cuivre, donne la réaction du chlore. Soluble en totalité
dans l'acide chlorhydrique étendu; parle refroidissement, il se dépose des
cristaux de chlonue de plomb. La liqueur se trouble fortement par l'ad-
41-
( 320 )
flitinn de l'eau. Un mélange d'acide nitrique étendu et d'acide tnrtfiqne la
dissout complètement, la solution précipite abondamment par le nitrate
d'argent.
» Elle m'a donné à l'analyse :
Oxyde d'antimoine 37 ,^0
Oxyde de plomb 2'j,ôo
Plomb 26,27
Chlore 9 1*^0
100,27
» Ce qui correspond à la formule
(Sb^O%PbO) +PbCl,
qui donne par le calcul
Sb^O^ 36,82
PbO 28,12
Pb 26,11
Cl 8,95
100,00
» La nadorite forme donc bien une espèce minérale nouvelle, et pré-
sente de plus un grand intérêt, puisque c'est la première fois qu'on ren-
contre du chlore dans un composé naturel contenant de l'antimoine. Les
seuls oxychlorures de plomb connus jusqu'ici sont la matlockite et la meu-
dipite : la première a pour formule
PbO + PbCl,
et la seconde
2 PbO + PbCl.
La nadorite se rangerait donc à la suite de cette dernière, et pourrait être
considérée comme une mendipite antimonifère, et en effet on a pour ces
deux minéraux :
Mendipite 2(PbO)-f- PbCl.
Nadorite (Sb'0%PbO) -h PbCl.
» La nadorite est souvent accompagnée d'une substance d'un jaune
citron, qui est un produit de sa décomposition , et possède la même forme
cristalline. Cette substance, qui, d'après M. Flajolot, contient de l'oxyde
d'antimoine, de l'acide antin)onique, de l'oxyde de plomb, de l'acide car-
bonique et de l'eau, dans des proportions conduisant à la formule d'un
antimoniate et carbonate de plon)b hydraté (mélangé d'iui i)eu de uado-
( 3a, )
rite non altéré), n'est peut-être qu'un mélange de cériise et de bleinière,
puisque j'ai constaté, sur certains morceaux, de petits cristaux de céruse. Le
peu de matière que j'ai eu à ma disposition ne m'a pas permis d'exanuner
plus attentivement ce minéral jaune. »
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Sur remploi de l'acide phéniqiie. Note de
M. F.-C. Calvert, présentée par M.Chevreul. (Extrait.)
« C'est au D'' David Davis, de Bristol, que revient l'honneur d'avoir
systématisé, depuis 1867, l'emploi de l'acide phéniqne comme agent dés-
infectant(i). A l'époque de la dernière apparition du choléra à Bristol, on
fit usage d'une poudre composée de i5 pour 100 d'acide phéniqne et crésv-
liqiie, que l'on avait soin de projeter soit sur les matières en décomposition,
soit sur les déjections des malades: les vêtements des cholériques étaient
lavés dans de l'eau contenant de l'acide phéniqne.
» Par ce moyen, le D'' Davis n'a pas eu deux cas de mort successifs
dans la même habitation, et rarement une seconde personne attaquée. On
obtint depuis les mêmes résultats favorables contre le typhus, les fièvres
typhoïdes, la scarlatine et la variole. Le chiffre de la mortalité à Bristol,
qui était de 36 à 4o personnes sur 1000 avant l'application de ce système,
n'est plus aujourd'hui que de 18 à 20. Enfin les villes de Glasgow, Liver-
pool et Manchester ont adopté ce même procédé.
» L'acide phéniqne a été également employé avec succès pour combattre
un cas épidémique de typhus qui s'était déclaré dans le village de Terling
(comté de Sussex) dans les mois de janvier et février 1868. Avant l'appli-
cation de l'acide phéniqne, sur 900 habitants, 3oo avaient été attaqués du
typhus. Pendant trois semaines que dura 1 application du produit, 2 per-
sonnes seulement furent attaquées, sans suite fatale, après quoi il n'y en eut
plus d autres.
» C'est d'apiès ces résultats que le gouverneur anglais a prescrit l'usage
de l'acide phéniqne comme désinfectant, soit à bord des navires de guerre
ou des navires de commerce, soit dans l'armée, dans les prisons d'État ou
dans les hôpitaux. »
(i) L'iisaye «le l'acide phénique, comme désinfectant, a ('té prati(]né <n grand, à Paris,
dès i865; il est devenu réjj;leinentaire pour le service des Pompes fiinèhres en 1866. L'As-
sistance publique en fait également usage. I^e Comité d'Iivgiènc du Ministère de l'Intérieur
l'a recommandé depuis longtemps. [Note du Serréinirr perpctiiit.)
( '^22 )
CHIMIE. — Sur le dtiijagement d'azote pur, des matières organiques azotées.
Note (le M. F. Calvert, présentée par M. Chevreiil. (Extrait.)
« J'ai en l'honneur d'annoncer à l'Académie qne les matières organi-
ques azotées du régne animal laissent dégager de l'azote pur lorsqu'on les
traite par les hypochlorites.
» Après des essais très -variés pour me placer dans des conditions
capables de fournir des résultais constants, j'ai trouvé que, loi.sque l'on
place dans un ballon, doni la capacité est connue, 200 centiniélres cubes
d'une solution d'hypochlorite de chaux pur (selon moi, celui du com-
merce contient trop d'impuretés), contenant un poids connu d'acide hypo-
chloreux, |iar exemple 5,476 d'acide à la teujpéralure ambiante, et qu'on
y ajoute 100 centimètres cubes d'une solution de gélatine contenant i ,5 de
gélatine purifiée, il se dégage un gaz que l'examen prouve être de l'azote,
avec des traces de composés chloreux. On lave le gaz avec un peu de soude
caustique, on le sèche, et l'on en détermine le volume ou le poids. On ob-
serve, en outre, que la liqneur d'hypochlorite se trouble, et, peu à peu, il
se forme un préci|)ité de carbonate de chaux que l'on recueille, qu'on lave
et que l'on convertit en sulfate de chaux : son poids indique la quantité île
carbone que la matière organique a perdue, ou qui a été convertie en acide
carbonique. Il faut environ de cinq à six heures pour que l'action de l'acide
hvpochloreux sur les matières organiques soit complète.
» Je me bornerai à doinier ici les quelques résultats suivants, cpii
résument plusieurs analyses :
Quantité d'azote QuaiUilé d'azoli!
qui existe inibe en liberté
dans 100 parties. p.ii' l'acide iiypochloreux.
Géhitiiie '5,7 5,3gi
Albumine '5,7 75810
Calcine l5,8 6, •210
Laine '7>7 7>8io
Soie '7»6 6,900
M II est inléressani d'obstTver qne les matières azotées d'origine animale
perdent toutes environ à peu prés un tiers de leur azote à l'état de gaz.
» Je suis occupé, en ce enoment, à étudier les produits organiques qui
sont les résultats de cette action chimique. »
( 323 )
PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. — Résultais de quelques expériences mycolocjiques.
Note de M. E. Roze, présentée par M. Brongniart.
« I. M. OErsted, de Copenhague, à qui l'on doit d'avoir réalisé le pre-
mier des expériences très-concluantes sur la traiisfornialioii du Podisoina de
la Sabine en Rœstelia cancellala du Poirier, expériences que j'ai refaites
nioi-tnème avec succès, a fait connaître depuis {Bolniilsclte Zeitung, 12 juil-
let 1867) que le Podisoma ctavariceforme du Genévrier produisait sur
l'Aubépine le Hœstelia penicillala .
» Le Genévrier présente deux Podisoma : le P. clauariœjonne dont il vie/it
d'être question, et le P./i/snim qui s'y rencontre plus rarement. J'ai répété
l'expérience de M. OErsted, mais en opérant à la fois siu- l'Aubépine avec
chacun de ces deux Podisoina, et cela dans des conditions absolument iden-
tiques.
» Lef. clavariœjormey a parfaitement reproduit le R. penicillala; le P. fus-
cum n'a, au contraire, donné qu'un résultat négatif. Il est donc à présumer
que ce dernier se choisit ime autre de nos Pomacées pour y développer une
troisième espèce de Rœstelia : c'est ce qui pourra ressortir d'expériences
ultérieures.
» II. L'histoire de Veirjot des Graminées, et de celui du Seigle en parti-
culier, depuis les beaux travaux de M. Tulasne et les recherches de plu-
sieurs autres observateurs, ne laisse plus, pour être complète, que certains
points douteux à élucider expérimentalement. Ce sont les résultats de quel-
ques expériences faites cette année à ce point c!e vue, que j'ai l'honneur de
faire connaître à l'Académie. Je les résumerai en ces ternies :
» Des ergots de Seigle, enterrés l'hiver et tenus dès le printemps dans
une humidité constante, donnèrent, dans une culture faite en plein air,
des Claviceps purpurea, Tul., depuis la fin d'avril jusqu'à la fin de juin.
» Des fragments d'ergots donnèrent aussi bien des Claviceps que des
ergots entiers.
» Des ergots d'une récolte antérieure à celle de l'année dernière ne don-
nèrent aucun Claviceps; ceux de la dernière récolte, mis en terre à la fin
d'avril, se comportèrent de la même façon.
" Des épis de Seigle, rapprochés de Claviceps effectuant leur développe-
ment biologique normal, ne furent qu'en très-petit nombre infectés par le
transport aérien des spores du Claviceps.
» Des conidies de la Sphacélie, récoltées dès le premier ou le deuxième
jour de leur émission, germèrent très-bien au bout de vingt-quatre heures
( 324 )
d'immersion conlimie. 11 est k remarquer, du reste, que le liquide qui les
fient en suspension se dissout .dors très-rapidement dans l'eau, ce qui n'a
plus lieu vers le troisième jour.
» Des épis de Seigle, en fleur, trempés dans une solution de ce suc coni-
diophore d'émission récente, moulièreut huit à dix jours après, sur quel-
ques-unes de leurs fleurs, les piemiers développements de la S|)liacélie,
caractérisés par l'émission d'un même suc conidiophore. Des résultats
identiques furent obtenus sur des épis d'un Blé de mars [cape wlieal), et
sur ceux du Triliciim repens. I.a même expérience, faite avec le suc coni-
diophore des Sphacélies de ce Blé, donna les mêmes résultats sur des épis
(le Seigle.
» De très-petites gouttelettes d'une eau très-chargéc de ces mêmes coni-
dies (il s'agissait du suc conidiophore émis par les épillets de Trilicum re-
pens infectés eux-mêmes par les conidies de ce Blé) furent déposées avec
soin sur l'extrémité des Stigmates de cinq fleurs d'un épi de Lolium perenne;
ces cinq fleiu-s exsiulèrent toutes, huit jours après, le suc conidiophore ca-
ractéristique du développement des Sphacélies.
» Un certain uombi-e de capitules de Clauiceps purpiirca, arrivés à ma-
turité, furent écrasés légèrement dans une quantité d'eau suffisante pour
y immerger des épis; plusieurs gouttes de cette eau, examinée au micro-
scope, contenaient en sus])ension de vingt à trente spores libres du Clnviceps.
» L'immersion, dans cette eau, de plusieurs épis de Seigle et de Trili-
cum repens hit également suivie, dix jours après, de l'apparition sur ces épis
de quelques S])hacélies à suc conidiophore. De plus, des gouttelettes de
cette eau introduites entre les balles de quelques fleurs de Seigle y iléter-
miuèrent,dans le même temps, lui développement très-net de S|)hacélies.
» Enfin, toutes les fleurs de ces Graminées, qui dénotèrent ainsi la pré-
sence de la Sphacéiie, y montièrent peu après l'appaiilion du Sclcroliuni,
vulgairement appelé ergot.
» Il me jjar.iîl résinter de tous ces faits que les agricuiteius ne devraient
jamais employer, pour le semis, des graines de Seigle provenant de la ré-
colte de l'année; que les spores du Glaviceps éprouvent une certaine diffi-
culté à se transporter sur la partie de la fleur des Graminées qu'elles doi-
vent infecter, mais qiu' le suc conidiophore des Sphacélies, au moyen de
la pluie et des vents, contribue tout au contraire à propager activement le
parasite; que la partie de la fleur susceptible d'infection est tout spécia-
lement le stigmate; cpie les spoies du Cbvicepi, ont la faculté de déteruii-
ner la naissance de la S[)hacélie; que les conidies de la Sphacéiie jouent le
( 325 )
même rôle; enfin, que le Claviceps purpurea est un parasite commun très-
probablement à plusieurs de nos Graminées, soit spontanées, soit culti-
vées, mais certainement au Seigle, au Blé, au Triticum repens et au Loliiim
perenne. »
MÉTÉOROLOGIE. — Maximum de température à Poitiers, le 24 juillet 1870.
Note de M. Ch. Contejean.
« Il est si rare en France devoir le thermomètre dépasser 35 degrés, et à
plusforleraison [\o degrés,que jene crois pas inutiledesignalerun maximum
inusité et tout à fait extraordinaire qui s'est manifesté à Poitiers le 24 juil-
let dernier. Les observations ont été faites dans l'intérieur de la ville, il est
vrai, mais au milieu de vastes jardins. Le thermomètre était exposé dans
l'un d'eux, tantôt suspendu à l'ombre des arbres ou des murailles à i^jSo
du sol, tantôt tourné en fronde, et à l'ombre, à la hauteur du bras étendu.
L'instrument dont je me servais est le n° 2446 de M. Baudin; l'hiver der-
nier, j'en avais vérifié le zéro, qui correspondait exactement à celui de la
graduation.
» Les journées précédentes avaient été fort chaudes; le vent soufflait du
nord-est, par un ciel constamment serein. Les journaux de Poitiers indi-
quent comme maximum : le 21, 34°, 9; le 22, 34°, 8; le 23, 34°, 5. Le 24,
même vent et même ciel. Dès la matinée, la chaleur était extrême. J'obser-
vai à partir de midi et demi; et jusqu'à 2'' 35" je fis au moins quarante lec-
tures du thermomètre. Le maximum absolu arriva à i''io™; il fut de 4i°,2
au thermomètre suspendu à l'ombre d'un arbre, et pendant quelques ins-
tants d'un calme parfait. Quelques bouffées d'air venant du côté des mu-
railles à l'ombre firent descendre le mercure à 40°, 8. Immédiatement après,
loiu-né en fronde, l'instrument marquait 4i°>o. Pendant ces deux heures et
demie d'observations, et dans les conditions les plus variées d'expérience et
d'exposition, la température se maintint entre un miuimiun de 39°,5 et le
n)aximum indiqué. Le plus grand nombre des lectures donna /\o°,'i.
A chaque instant, et sous l'influence du moindre vent, les indications se
déplaçaient de quelques dixièmes de degré,
» Tous les objets à l'ombre, et surtout les corps métalliques, donnaient,
au toucher, une sensation de chaleur comme s'ils eussent été exposés au
soleil. Pour la première fois de ma vie, et sans doute pour la dernière, je
vis le thermomètre baisser rapidement de plusieurs degrés quand on en
C. R., 1870, 2= Semeitre. (T. LXXI, N» S.) 4^
( 326 )
tenait la boule enlre les doigts ou quand ou la mettait dans la bouche.
Iv'instrument n'étant pas gradué au delà de 4i degrés, je ne pus, à mon
grand déplaisir, prendre la température en plein soleil; mais il me semble
qu'elle ne devait que |)eu dépasser le maximum obtenu à l'ombre.
» A partir de 2 heures, la chaleur commença à diminuer; à 4''3o'", la
température n'était plus que de 39°,2 à l'ombre; mais au soleil, le mercure
montait encore à /io"i9- A 5 heures, le vent sauta brusquement du nord-est
au sud-ouest; de légers nuages envahirent le ciel et voilèrent momentané-
ment le soleil, et des raffales d'un vent relativement frais firent descendre le
thermomètre à 35 degrés. Pendant la nuit, le tonneire gronda fréquem-
ment, mais il tomba à peine quelques gouttes de pluie. Le aS, le vent con-
titniait à souffler du sud-ouest, le ciel était, par moments, nuageux ; le maxi-
mum ne dépassa pas 29 degrés. »
PHYSIQUE DU GLOBE. — Sur le régime pluvial des Alpes françaises.
Note de M. V. Raclin, présentée par M. Le Verrier.
« Dans deux Notes sur le Réc/ime pluvial du bassin occidental de la AJéditer-
ranée, et sur le Régime pluvial de l'Algérie^ publiées en 1868 et 1869, j'ai
avancé que, dans l'Europe septentrionale et médiane, etc., en Sibérie jus-
qu'au Kamtschatka, il y a, pendant les trois mois d'été, mie prédominance
des pluies d'autant plus marquée, qu'on s'avance davantage vers l'est; et j'ai
établi que, dans la région méditerranéenne, il y a au contraire pénurie de
pluies pendant la même saison.
» Il était intéressant de rechercher quel est, en France, le régime pluvial
de la chaîne des Alpes qui sépare les deux grands bassins orographiques
de l'Europe septentrionale et de l'Europe méridionale: c'est ce que j'ai pu
faire au moyen surtout des observations du service des Ponts et Chaussées,
que les ingénieurs en chef des départements alpins ont bien voulu me com-
muniquer : M^L Du Moulin, pour Chambéry; Gentil, pour les Hautes-
Alpes; Monnet, pour les Basses-i\lpes; Forestier, pour l'Ardèche, et Hardy
pour la Drôme. Feu Viard ayant rassemblé, en i855, les éléments d'un
travail sur la météorologie des Alpes, j'ai trouvé la plupart des documents
relatifs à l'Isère, dans les manuscrits déposés à la Faculté des Sciences de
Montpellier. Le surplus a été emprunté à diverses publications.
» On aurait pu croire, à priori, que le régime septentrional, à pluies
d'été, si bien établi dans la plaine de la Suisse, à Zurich et à Genève, à
Chambéry et même dans la Maurienne, à Grenoble et àI>yon, et aussi dans
(327 )
la vallée du Rhône, jusqu'au confluent de l'Isère, d'une part; et dans la
plaine lonibardo-vénitienne, de l'Adriatique jusqu'au delà de Milan et
Turin, d'autre part; que ce régime se serait continué dans les hautes mon-
tagnes également froides de la partie occidentale des Alpes, qui du mont
Blanc s'avance au sud jusqu'à TNice et Draguignan. Mais il n'en est rien,
comme l'établissent les deux tableaux ci-après.
» Dans les hautes soaunités septentrionales, au grand Saint-Bernard, le
régime méditerranéen est fortement accusé : les pluies d'été n'y sont guère
que les deux tiers de celles du printemps, qui l'emportent un peu sur celles
d'automne: et cette pénurie d'eau atmosphérique en été va en s'accen-
tuant davantage, à mesure que de cette station septentrionale on se rap-
proche davantage de la Méditerranée, excepté dans la vallée du Drac, à
La Mure-et-Corps, où les pluies d'été ne sont pas de beaucoup inférieures
à celles du printemps.
» Dans les Hautes-Alpes, à Briauçon, les pluies de printemps très-pré-
dominantes l'emportent presque au double sur celles d'été. Dans les autres
stations, à Embrun, Gap et Serres, et aussi à Die, dans la Drônse, les pluies
d'automne atteignent en moyenne une hauteur double de celles de l'été.
» Dans les Basses-Alpes, à Barcelonnette, Digne, Manosque et Castel-
lane, la différence entre les pluies d'été et d'automne devient encore plus
grande. Elle se poursuit sur les plateaux du Var à Régusse.
» Sous le rapport de la quantité annuelle de pluie qui arrive moyenne-
ment sur le sol, dans les Alpes françaises, il y a de grandes différences entre
les diverses stations. Celle du grand Saint-Bernard, la plus élevée, reçoit la
plus grande quantité d'eau. Dans la Savoie et l'Isère, dans les Hautes-Alpes
et aussi dans les Basses-Alpes, la quantité, beaucoup moins considérable,
va en général en augmentant à mesure que les stations sont moins élevées;
tout aussi bien de la Maurienne à Chambéry et Grenoble, que de Briançon
à Die et Valence (Drôme), et de Barcelonnette à Régusse (Var), ainsi qu'on
peut le voir en consultant la colonne des quantités annuelles du premier
tableau.
» Ainsi, tandis que, dans les Pyrénées, la quantité annuelle d'eau atmo-
sphérique va en augmentant avec l'altitude, c'est plutôt (à l'exception du
grand Saint-Bernard) l'inverse qui se produit dans les Alpes françaises,
d'ailleurs beaucoup moins pluvieuses. »
42..
( 328 )
Tableau comparatif des quantités moyennes annuelles et trimestrielles générales
d'eau tombées dans les seize stations des Alpes occidentales.
OBSERTATECRS.
ALTr-
Tl'DES.
Grand Saint Bernard.
Genève
S'-Jean deMaurienne.
Chambéry
La Mure-et-Corps. . .
Grenoble
Briançon
Embrun
Gap
Serres
Die
Barcelonnelte
Digne
Manosque
Castellane
Régusse
Les Religieux
Plantamour
Mottard
Ponts et Chauss..
Ponts et Chauss..
Demarclii
Mines ; hôp. milit
Ponts et Chauss.,
Ponts et Chauss..
Ponts et Chauss..
Ponts et Chauss..
Ponts et Chauss.,
Ponts et Chauss.
Ponts et Chauss.
Ponts et Chauss.
Gros-Lejeune. . .
mot
2.'l9>
!\o-j
577
273
913
2l3
870
7/10
662
4i3
1173
(i39
370
78C
5i5
ANNEES
d'oliservalion.
1842-60 (iç))
1826-60(35)
1835-47(1 3)
1839-G9(i/|)
1845-54(10)
1846-54 (9)
1845-69(11)
1858-68(11)
1846-68(1/1)
1857-66(10)
1848-68(21)
1858-66 (9)
1858-66 (9)
1858-66 (9)
1858-66 (9)
1853-66 (i4)
1209, I
82 '1,2
972,0
1060, 1
C83,/|
io52,5
535,2
6o3,6
79'), 9
706, /|
732,9
439,7
705,5
632,2
873,4
999,3
3o5,7
•37,9
iS6,i
220,8
127,3
i83,4
75,2
1 10,8
144.9
i35,3
108,8
86,5
144,8
129,3
187,6
211,0
PRIN-
TEMPS.
354,8
■84,9
208,3
2G'|,6
176,0
260,0
'78,7
143,7
201 , 1
166,3
194,8
■29,'
211,1
161 ,0
239,8
268,8
349,0
222,9
248,2
273,5
i54,8
3i3,6
108,2
126,9
146,3
112,2
171,2
56,3
101 ,0
84,6
1 16,6
129,3
AU-
TOMNE.
329,6
278,5
329,5
3oi ,2
225,3
295,5
173,1
222,2
3o4,6
292,6
258,1
167,8
248,6
257,3
329,4
390,2
II. — Tableau comparatif des quantités moyennes mensuelles générales d'eau tombées
dans les seize stations des Alpes occidentales.
Grand Sain|.-Eernard.. .
Genève
Saint-Jean de Maurienne.
Chambéry
La Mure-et-Corps
Grenoble
Briançon
Embrun
Gap
Serres
Die
Barcelonnette
Digne
Manosque
Castellane
Régusse
JANV.
FÉVR.
MARS.
AVRIL.
MAI.
JDIN.
JUILL.
AOUT.
SEPT.
1
125,1
93,9
96,3
■35,9
122,6
100,2
75,7
73,1
98,9
'17,8
38,0
3l,5
59,5
83,9
72,7
69,0
81,2
99,9
68,3
75,6
59,4
56,1
92,7
69,3
88,2
90,7
106, 1
80,1
56,1
94,2
79,'!
9',o
90,0
71,0
1.2,5
111,2
46,2
39,3
32,1
76,2
67,7
-19,7
34,1
71,0
66,3
68,8
66,9
5i,o
129,8
79,2
95,7
97,2
120,7
77,9
26,2
26,5
44,6
79,5
54,6
43,3
28,7
36,2
5i,3
45,2
33,1
53,6
37,4
52,7
58,6
3o,8
37,5
72,4
5', 9
35,7
66,9
58,1
76,1
68,3
32,7
45,3
85,6
46,7
4-, 7
68,5
39,3
58,5
60,2
23,5
28,5
100,3
35,9
35,2
46,0
64,5
84,3
64,6
40,2
66,4
Si, 8
27,7
36,4
'17,0
35,7
46,4
17,8
22,0
16,5
57,6
40,4
33,2
75,4
47,'
88,6
5o,i
21,7
29,2
62,4
38,7
40,5
65,6
33,1
62,3
46,1
1 1 ,6
26,9
75,6
65,6
42,4
90,6
45,.
104,1
61,5
'7,9
37,2
78,6
80,8
54,.
97,3
5o,3
121,2
67,2
23,6
38,5
88,2
129,0
100,6
126,3
100,0
93,7
122,7
77,2
88,0
1 5o , 4
'27,9
108,0
60,9
100,4
110,6
i5i
i85,.i
101,7
78,0
97,'
90,0
65,3
94,9
44,'
61,8
68,6
64,4
68,3
49,3
85,8
7','
99,7
116,6
86,4
52,1
42,2
84,6
41,8
47,7
22,5
32,5
57,3
46,9
37,7
22,4
7', 2
5o,i
79,6
76,1
( 329)
PHYSIQUE DU GLOBE. — Sitr un tremblement de terre survenu au Mexique,
le 1 1 mai 1 870; par M. Chassin . Extrait d'une Lettre adressée à M. Larrey,
présentée par M. Ch. Sainte-Claire Deville.
« J'ai la satisfaction de vous annoncer que je suis heureusement arrivé
à Mexico, après une brillante traversée; il n'en a pas été de même pour le
parcours de Vera-Cruz à la capitale, car, le soir de notre arrivée à Puebla,
nous avons été réveillés par un tremblement de terre, qui a eu lieu le
I 1 mai à 1 i*" 18" du soir.
» 11 fut assez prolongé, car il dura quarante à quarante-cinq secondes;
ses oscillations furent tiés-allongées dans le sens du nord-est au sud-ouest,
mais sans secousses ni trépidation. La ville et ses monuments eurent trés-peu
à en souffrir. L'État d'Oaxaca est la partie du pays qui a eu à ressentir les
plus violents effets; la ville du même nom eut plusieurs de ses maisons et
églises détruites par la violence du tremblement; le palais du gouverneur
dut être abandonné rapidement; il y eut de trois à quatre cents personnes
ensevelies sous les décombres, et beaucoup de blessés.
» Cependant là encore n'était pas le centre d'action du fléau : c'est à
Pochutla et dans ses environs que se sont produits les phénomènes les plus
saillants. Je dois à un ami qui était sur les lieux mêmes une relation trés-
détaillée de ce tremblement. Je crois qu'elle vous intéressera.
» Pochutla est un petit endroit situé dans l'État d'Oaxaca, à 4 lieues de
Puerto-Angel, sur l'océan Pacifique. Le 1 i mai 1870, il y avait fait une
chaleur étouffante pour ces pays déjà torrides ; le narrateur dit qu'il fut pris
d'une suffocation et d'un malaise indéfinissables, ses cheveux se dressaient
sur sa tête (cet état électrique n'est pas rare au Mexique) ; il se sentait comme
une envie de pleurer, ii ne put faire sa sieste, l'insomnie se prolongea très-
avant dans la nuit : c'est elle qui le sauva.
» Le 1 1 mai, à 1 1'' 17" du soir, il était à causer avec un ami, une table
les séparait, lorsqu'il se sentit soulevé violemment sur son siège, la table fut
renversée, la lampe alla rouler an milieu de la salle, tous les meubles furent
agités avec fracas; d'un bond il s'élance vers la porte, il ne peut l'ouvrir,
le mur s'est enfoncé en perdant son aplomb, les secousses redoublent, il lui
est impossible de se tenir debout, du reste il a le vertige (identique au mal
de mer). Les oscillations, les secousses, les trépidations se succèdent avec
rapidité; ajoutez à cela les bruits formidables qui précèdent et accompa-
gnent chaque ébranlement, l'on aura une faible idée de l'horreur de la si-
tuation.
( 33o )
« Les détonations souterraines, que l'on pourrait comparer, dit le correspondant, à la dé-
cliarge simultanée de plus de cent canons, sont presque continuelles, à tel point que l'on
voit bien plutôt les maisons s'écrouler aux pâles clartés de la lune que l'on ne les entend.
La notre est là marquée par un monceau de ruines, un être vivant erre sur ces débris : c'est
le domestique qui, retiré dans sa chambre, n'a dû son salut qu'à la chute successive des
murs qui la formaient.
'< Chaque habitant s'éloigne des habitations, car le danger est là, toutes les maisons en
pierre ne forment plus que des débriset des ruines. Les maisons ou jacales, faitesde branches
de bambous, de palmiers, ont seules résisté. A part quelques hangars, Pochulla n'est plus
qu'un amas de ruines : douze minutes avaient suffi pour le détruire.
» La chaleur du sol, qui s'augmente à chaque instant, au point de nous faire craindre la
formation d'un cratère, le danger des crevasses nous obligent à chercher un lefugc sur un
rocher qui est à quelques cents mètres de la place ; presque toute la populati(m y a passé la
nuit. C'était un spectacle bien pénible que celui des mères comptant leurs enfants, des pères
courant après les absents, des vieillards fuyant à pas lents im sol qui manquait sous leurs
pieds. Ils étaient tous frappés d'épouvante et de stupeur en présence de ce grand cataclysme ;
on ne pensait pas encore à pleurer les absents et la perte de ce qui avait été le foyer et le
refuge de la famille.
» La nuit fut horrible, elle se passa dans des angoisses poignantes. Le 1 2 et le 1 3, les mou-
vements tumultueu.x du sol furent incessants. Les grondements étaient continuels; on pou-
vait à peine marcher en s'accrochant à un arbre, à une pierre, au sol lui-même. Personne
ne cherche d'abri : les jacales sont balancés sur leurs quatre pieux par une force invisible,
mais irrésistible.
» La chaleur est accablante, l'atmosphère est lourde, on respire avec peine, un léger
brouillard en trouble la transparence; à l'horizon, on voit comme une bande légère qui s'il-
lumine de temps à autre de lueurs étranges, rougeàtres, qui durent quatre à cinq secondes,
on croirait à une aurore boréale pendant ces deux jours; l'on a très-peu pensé à satisfaire
son ajipétit, peu de personnes ont pris du sommeil.
» Le i4 mai, il tremble un peu moins, l'on peut marcher. Quchjues individus s'aven-
tuient dans leurs maisons de bambous, il arrive des nouvelles du dehors. Un habitant de
Puerto-Angel dit que le chemin est à peine praticable, à cause des pierres soulevées et de
celles qui se sont décrochées du flanc des montagnes.
» Le i5, il tremble encore, mais moins fort. Quelques Indiens nous portent la nouvellede
la destruction presque totale de IMiahuatlan, ils disent également que le chemin est entière-
ment encombré de pierres détachées du flanc des collines, lesquelles sont fendillées en tous
sens, laissant échapper à chaque instant une ou plusieurs pièces de roche, qui vont obstruer
la route ou rouler au fond des ravins. Ces brfives gens disent qu'il pleut des pierres, la cir-
culation est devenue périlleuse.
» Le 16, il a tremblé plusieurs fois la nuit et le jour, mais avec moins de violence; ce-
pendant il y a toujours trépidation et production de bruits souterrains. Ceux-ci vont en
s'affaiblissant, pour se reproduire ensuite comme des coups de piston d'une inuuense machine
à vapeur. C'est alors que le sol soulevé représente bien le fonctionnement d'une soupape de
sûreté. D'autres fois, ces sourds grondements ont l'air de se produire dans une immense ca-
verne creusée sous nos pieds, prête à s'effondrer.
( 33i )
» Le 17 mai, à 4 heures de l'après-midi, il n'y avait eu que trois épouvantables secousses
précédées et suivies de ces grognements horribles et sonores se terminant parfois en sourds
gémissements, semblables à la plainte qu'arrache la fatigue. L'état général est moins mau-
vais que les jours antérieurs, le moindre bruit, une pierre qui se détachait, le hennissement
d'un cheval, n'importe quoi, suffisait pour donner l'alarme. La tension électrique diminue.
» La nouvelle de la destruction d'Ocotlan nous arrive; il y a eu quelques morts et des
blessés. Lasiclia, à i5 lieues d'ici, n'est plus qu'un monceau de ruines : 2 morts, quelques
blessés.
» Les changements produits dans l'intérieur et à la surface du sol sont les suivants : la
lagune de Chicagua a disparu entièrement par une immense fissure, laissant à sec poissons et
caïmans. A Cayula, il y a apparition de sources nombreuses qui ne tarderont pas à former
un lac étendu. Près de Puerto-Angel, un torrent à sec s'est rempli d'eau courante; cela s'est
produit également dans d'autres endroits. A Pochutla, un puits desséché depuis longtemps
s'est rempli d'eau, il sert aujourd'hui aux besoins de la localité. A Tanameca, il s'est formé
un lac. A Huatalco il est apparu une source d'eau chaude ; le sol environnant est brûlant. Un
Indien qui fut visiter sa famille au village de Nahuatla n'y trouva que des ruines; les habi-
tants avaient fui.
» Le 18 et le ig, il a tremblé très-fort avec trépidation et bruits sourds et prolongés.
Le -.^.G, il n'y a plus rien eu. »
M. JoccLET adresse une Note relative à un procédé destiné à empêcher
la transmission des maladies, par l'arrêt des poussières en suspension dans
l'air. Une idée émise par M. Tyndall a conduit l'auteur à faire des expé-
riences avec des respirateurs de coton, ne laissant arriver l'air sur les lèvres
ou dans les narines qu'après l'avoir tamisé au travers d'une mince couche
d'ouate. Ces expériences, commencées depuis (rois mois, semblent indi-
quer que c'est là un moyen efficace pour combattre l'anémie des mineurs,
les maladies si fréquentes dans les ateliers oii l'on travaille le plomb, le
cuivre, le mercure ou le verre.
MM. Wallée et BnACHET adressent une Note relative à un « Régula-
teur automoteur électrique ».
M. Delaurier adresse des remarques concernant une Note récente de
M. F. Lucas, sur la possibilité d'obtenir des signaux de feu d'une grande
portée.
M. Pionnier adresse un travail intitulé : « Le compte du temps ».
A 4 heures un quart, l'Académie se forme en Comité secret.
La séance est levée à 6 heures im quart. D.
( 332 )
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQITE.
L'Académie a reçu, dans la séance du i*"^ août 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Direction générale des forets. Météorologie joreslière, année 1869. Br. in-8°.
(aS exemplaires. )
Dialogues sur la Mécanique; par M. PlARRON deMondesir. Paris, 1870;
in-S».
Travaux du Conseil d'hygiène puhlitjue et de salubrité du département de la
Gironde pendant l'année i86g, t. XII. Bordeaux, i87o;in-8°.
Le cercle releveur ou graphoniètre-planchette-boussole-niveou. Proposition
d'un nouvel instrument de géométrie réunissa)il tous les autres; par IM. J.-A.
LouRAU. Pau, 1870; in-8°.
Société de Médecine légale de Paris, fondée en 1868. Bulletin, t. I, fasci-
cule 2, 1870. Paris, 1870; in-8°.
Armes de guerre et bâtiments cuirassés; par M. L. Figuier. Paris, 1870;
grand in-8'' illustré. (Extrait des Merveilles de la Science.)
Proceedings... Procès-verbaux de la Société royale de Géograplde, t. XIV,
n° II. Londres, 1870; in-8''.
Proceedings... Procès-verbaux de la Société mathématique de Londres,
n°' aS et 26. Londres, sans date; in-8°.
Estudios... Eludes analytiques sur la trisection de l'arc et résolution pra-
tique de ce problème; par MM. J. Lacheuz et i. Otoun. Madrid, 1870;
br. in-8°.
Nederlandscli... Archives botaniques néerlandaises rédigées par MM. Su-
RINGAR e< Cop, t. IV, 4* fascicule. Leeuwarden, 1870; in-8".
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
•-»»»«
SÉANCE DU LUNDI 8 AOUT 1870,
PRÉSIDÉE PAR M. DELAUNAY.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. I.E PaiêsiDENT informe l'Académie que sa prochaine séance aura lien
le mardi 16 août, au lieu du lundi i5.
PHYSIQUE MATHÉMATIQUE. — Relation entre les chaleurs spécifiques et les coef-
ficients de dilatation d'un corps quelconque ; par M. Phillips.
« Le Mémoire très-intéressant de M. Massieu, au sujet duquel un Rap-
port de MM. Regnault, Combes et Bertrand est inséré dans les Comptes
rendus du 25 juillet, donne lieu à une conséquence qu'il me parait ulile
de mentionner.
» Conservons les notations du Rapport. On a, H désignant la fonction
caractéristique du corps,
d\\ = Sdt -+■ Kpdv,
d'où
» De plus, k et k' étant les deux chaleius spécifiques, la première à
C. R., 1870, a" ifmcs^re. (T. LXXI, N» G.) 4^
( 334 )
pression constante el la seconde à volume constant,
(a) a = t' ""
[dm
(Il (h
dVi
di>'
//=T
d'E
et
» Le coefficient de dilatation ê à pression consfanto, ou - ^» esl
(4) 6= ■
I dii
di'
1 dt dv
dv'
» Enfin, le coefficient §' que M. Massieu a appelé coefficient de dilala-
I 1 1 dp
tion a volume constant, itl qui n est autre que — h? est
' ^ ^ p dt
(5)
6' =
dm
dtdv
dE '
» Éliminons, entre les cinq équations (i), (a), (3)., (4), (5), les quatre dé-
d^n dm d^'v
df ' dtdv^ dv^ "' di>
rivées partielles, ^—5 -^-5 — nr et -r-> ce qui se tait tres-simpiement. Il
vient alors
(6) A-- A'= ASê'pcT,
qui est une relation simple entre les chaleurs spécifiques et les coefficients
de dilatation d'un corps quelconque.
» Dans le cas d'un gaz permanent, on a
/7i' = RT et A-A'=AR,
et la formule (6) devient
(7)
et, en effet, on a, dans ce cas,
ê = ^ et g'
— • »
T
( 335 )
SYSTÈME MÉTRIQUE. — Sur la division décimale du quadrant;
par M. A. d'Abbadie.
« Deux Lettres que j'ai reçues sur la division décimale des angles m'ont
paru assez intéressantes pour que j'en transmette des extraits à l'Aca-
démie.
)) La première est de M. Radau, qui m'écrivait en juin dernier de Berlin.
Après m'avoir appris que M. Fôrster, directeur de l'Observatoire de cette
ville, et qui y préside à la Commission du mètre, est tout à fait partisan de
la division décimale du quadrant, M. Radau ajoute :
« Les objections de MM. Wolf et Yvon Villarccau me semblent inutiles, car la seule raison
sérieuse qui puisse être donnée en faveur d'une réforme des divisions du cercle, c'est la
simplification des calculs numériques. Or le quadrant est l'unité inévitable ])our les calculs
numériques : c'est l'unité des Tables de logarithmes, et la seule qui soit naturelle. Ce serait
étrange s'il fallait d'abord retrancher o,25 de o,3i884 avant de prendre dans les Tables le
sinus de l'angle oi,3i884 ou bien s'il fallait retrancher o,3i884 de o,5o, la circonférence
étant l'unité. Au contraire, avec le quadrant pris pour unité, on n'aurait plus qu'à consi-
dérer les décimales, puisque, dans ce cas,
sini,35o= coso,35o
sin2,35o= — sino,35o
sin 3 , 35o = — cos o , 35o
sin4,35o= sino,35o
Il D'ailleurs l'application à la géographie exige la division décimale du quadrant, puisque
le méridien est déjà divisé en quarante millions de mètres et non pas en dix millions. C'est
là un point sur lequel vous auriez dû appuyer. La définition du mètre est la division déci-
male du quart de la circonférence terrestre. Avec la même 'division appliquée aux latitudes,
on aurait inunédiatement la différence de latitude en kilomètres. »
» La seconde Lettre est du célèbre directeur de l'Observatoire de
Greenwich :
" Quant aux divisions décimales de l'espace et du temps, je ne les patronne pas beaucoup,
non parce que je ne leur fais pas bon accueil, mais parce qu'il est, à mon avis, impossible
de les conserver en usage généralement, et parce /pie celui qui soutient des projets inefficaces
ressemble au défendeur d'une forteresse ouverte. Cependant, on peut voir mon grand res-
pect pour une division décimale, dans le fait qu'en effectuant mes réductions lunaires (la plus
grande réunion de calculs qu'on ait jamais entreprise en astronomie), j'ai employé exclusi-
vement la division décimale du quadrant. En outre, je m'en suis servi, il y a longtemps,
dans mes investigations sur la masse de Jupiter, où il fallait calculer des lieux de son qua-
trième satellite. Mais il ne convient pas de s'essayer à imposer ces choses à l'humanité en
général. Que chaque savant emploie la division qui va le mieux à son but. Quand je faisais
43..
( 336 )
une enquête sur les poids et mesures, je reçus d'un homme pratique une remarque qui me
frajipa beaucoup : <• Autant de fois qu'un savant pèse Jupiter, on mesure, dans les mesures
» vulgaires, assez de blé pour faire la masse de Jupiter. » Ceci est un peu exagéré, mais il
y a de la vérité au fond. »
» Malgré l'autorité qu'inspirent, à tant de titres, les opinions de M. Airy,
je suis persuadé qu'il serait encore plus favorable à la division décimale du
quadrant, s'il avait assisté en France à l'adoption de la très-majeure partie
de notre système métrique. Les deux exemples personnels qu'il veut bien
citer montrent qu'un calculateur sagace préfère la division décimale quand
il s'agit d'un travail considérable. Les facilités que M. Airy s'est ménagées
pour ses réductions existent aussi en détail, et on les augmenterait encore
si l'on observait aussi décimalement, après avoir ainsi divisé tous les instru-
ments qu'on fera dans l'avenir pour l'usage des observatoires.
» Les objections qu'on oppose, en les exagérant, à l'usage d'une divi-
sion contenue implicitement dans la définition légale du mètre n'existent
que poiu' une très-faible partie dans l'arrangement des Tables astrono-
miques. On venl en jouir sans aborder l'immense travail de les fonder; peu
d'astronomes consentent mêiue à en calculer les résultats, et ce travail est
confié à un nombre fort restreint de calcidateiirs, auxquels mi changement
de divisions importe assez peu. Mesera-t-il donc permis d'espérer que notre
laborieux et savant confrère M. Delaunay adoptera la division décimale
dans ses Tables de la Lune, que tout le monde attend avec tant d'impa-
tience? »
PHYSIQUE. — Sur la délcnniualioit du rapport des deux chaleurs spécifiques
des gaz; par MM. Jamin et Richard.
« Lorsqu'on fait passer lui courant électrique dans une résistance placée
à l'intérieiu' d'iui récipient rempli de gaz, il se dégage, par unité de temps,
une quantité de chaleur représentée par la formule Q = RrP. Cette cha-
leur élève la températiu'e du gaz, et l'on peut constater réchauffement
produit soit en laissant le gaz se dilater librement à la pression atmosphé-
rique et en mesurant la variation de son voliune, soit en maintenant son
volume constant et en mesurant sa variation de pression. Nous avons
pensé que des expériences établies dans ces conditions pourraient présenter
quelque intérêt.
» Supposons la pression constante; soient V le volume du gaz, P son
poids, C sa chaleur spécifiqtu> à pression constante; si l'on doiuu' au gaz la
( 337 )
quantité de chaleur Q, la température s'élèvera de A, et l'on aura
Q = PC AT.
Soient AV sa variation de volume et a le coefficient de dilatation, on a
Va
d'où
, , „ PCAV
(0 Q = T-v-
» Comme P = VD, on a
a
ce qui fait voir que la variation de volume est indépendante du volume de
l'appareil, et il en est ici comme pour le thermorhéomètre de M. Jamin.
1) Supposons maintenant le volume constant et la pression variable, on
aura comme précédemment
Q = PCAt',
C étant la chaleur spécifique à volume constant.
» Mais M' = --»
Ha
donc
)) Si les deux quantités de chaleur Q sont égales, c'est-à-dire si l'on a
employé le même courant pendant le même temps, on aura
AH
V-^/' c AV
)) L'appareil que nous avons employé se compose d'une grande cloche
de 6o litres de capacité qui vient se placer exactement dans ime gouttière
circulaire pratiquée dans le support sur lequel elle repose. On rend la fer-
meture hermétique en versant dans la gouttière une quantité cotjvenahle
de mercure. L'appareil calorifère est formé d'une résistance de fil de laiton
ou de platine qu'on a tendue à l'intérieur de la cloche sur des fils de soie
collés sur le verre par leur extrémité.
» Le support est percé de quatre ouvertures. Les deux premières servent
à introduire le gaz dans l'appareil et à le vider; une troisième établit la
( 338 )
relation avec un petit manomètre à eau de faible section ; la quatrième, qui
est très-large, communique, au moyen d'un robinet à large section, avec
un gazomètre analogue à ceux des usines à gaz. Si l'on veut opérer sur des
gaz secs, on remplace l'eau du réservoir par de l'huile ou de l'acide sulf'u-
rique; le poids du liquide déplacé par l'enveloppe du gazomètre était équi-
libré par une longueur convenable de chaîne enroulée sur la poulie d'une
machine d'Atwood, afin de donner plus de sensibilité à l'appareil. Enfin, la
chaîne était terminée par un contre-poids portant un index qui indiquait les
variations de volume sur une règle divisée. L'appareil étant bien équilibré,
lorsque l'on fait passer un courant dans la cloche, on voit le gaz se dilater,
l'index du gazomètre descendre, tandis que le manomètre n'indique aucune
variation de pression.
» Pour faire l'expérience à ])ression constante, on fait passer le courant
pendant une minute, en notant toutes les cinq secondes la position de
l'index du gazomètre; on interrompt alors le courant, on observe la des-
cente de cinq secondes en cinq secondes, et l'on construit ime courbe qui
permet de faire la correction du refroidissement.
» Lorsqu'on veut faire l'expérience à volume constant, on commence
par faire sortir un peu de gaz, afin de commencer l'expérience à une pres-
sion inférieure à la pression atmosphérique; dans ces conditions on n'a
pas à craindre que la cloche se soulève par suite de l'augmentation de
pression; on opère exactement de la même manière que précédemment.
» Dans la formule (3), on peut remplacer la variation de volume —
A H'
par une variation de pression -= — En effet, à la fin de l'expérience le vo-
lume est V-(- AV, la pression est H. Si l'on voulait le ramener au volume V,
la pression serait H 4- AH', de sorte que l'on aurait, d'après la loi de Ma-
riotte,
(V + AV)H = V(H-4-AH')
ou
AH' _ AV
"h" "■ T '
de sorte que la formule (3) deviendrait
» Celte valeur AH' serait donnée par le manomètre; l'index du gazomètre
ne donne qu'une quaiitilé proporlioniielle, mais il est facile de (iélcM-niiner
( 339 )
le coefficient de proportionnalité, comme on le fait pour le voluménomètre
de M. Regnault.
» Nous avons trouvé dans nos expériences 1,67 comme moyenne d'un
grand nombre de déterminations.
» Lorsque nous opérons à volume constant, nous commençons par
faire sortir du gaz de la cloche, de sorte que le poids P n'est pas le même
dans les deux expériences. La formule (Zj) devient
£ _ P' AH
C ~ p" ÂlP ■
» lùi correction est facile à faire; les poids P' et P sont entre eux comme
les pressions ; dans l'une de nos expériences, la pression atmosphérique
étant 758 millimètres, la pression du gaz était 758 millimètres diminuée
C
d'une colonne d'eau de 186 millimètres. Dans le cas, le rapport p7doit être
diminué de 0,017 ''^ ^^ valeur.
» Voici quelques-uns des résultats que nous avons obtenus pour l'air sec,
l'acide carbonique et l'hydrogène:
Jir sec.
AH
AV
AH'
C
C
186
166
i34.
94
82-
217
'97
■ 59
1 1 1
96
129
.18
95
66
57
Moyenne
1,42
i,4o
■'39
1)4'
1,42
.,4,
Acide
carbonique.
l52
192
ii5
i,3i
1 12
142
85
1 ,3o
214
i58
280
2o3
.67
121
Moyenne
1,28
'.29
1.29
Hjdrogèn,
e.
174
256
•202
3o3
121
181
i,4i
1,42
172
2o4
122
1,40
Moyenne i,4i
( 34o )
» Pendant la dilatation à pression constante, une partie dn gaz passe
dans le gazomètre, de sorte que la chaleur en échauffe une masse constam-
ment décroissante; mais il est facile défaire celte correction, qui, du reste,
n'influe pas sur le chiffre des centièmes, et nous ne voulons pas aller plus
loin dans cette Communication, que nous regardons comme un premier
essai.
» M. Akin, dans le Pliilosophical Magazine de 1864, p. 34 1, avait pro-
posé le mode d'échauffement par le courant électrique pour mesurer la
chaleur spéciBque des gaz à volume constant. Le procédé qu'il indique est
d'abord peu pratique, et, de plus, il est impossible de mesurer la valeur
absolue de la chaleur spécifique à volume constant par la méthode précé-
dente. En effet, une partie seulement de la chaleur cédée par le fil sert à
échauffer le gaz, l'autre se perd par rayonnement comme si la résistance
était placée dans le vide. De sorte que si l'on calculait la chaleur spécifique
au moyen d'une des formules (i) ou (2), on obtiendrait un nombre trop
fort. Dans l'une de nos expériences à pression constante, nous avons trouvé
pour chaleur spécifique de l'air 0,409 au lieu de 0,23^, ce qui donne, pour
la fraction de chaleur perdue par rayonnement, o,425.
» Cette quantité de chaleur perdue par rayonnement dépend de l'excès
de la température du fil sur celle de l'enceinte. Il importait de vérifier que
cet excès reste très-sensiblement le même quand on échauffe le gaz à
pression constante ou à volume constant. A cet effet, nous avons divisé
notre courant en deux parties, la première passait dans la cloche, la seconde
dans une résistance égale, maintenue à une teiii|)éralure constante au
moyen d'un courant d'eau froide et dans un rhéostat à fil de platine; un
galvanomètre différentiel indiquait l'égalité. Lorsque le fil de la cloche
s'chauffc, sa résistance augmente, et, pour rétablir l'équilibre, il faut une
certaine longueur du rhéostat. Dans nos expériences, un millimètre du
rhéostat correspondait à ^^^ <^6 degré. Avec une pareille disposition, il était
facile de mesurer la température finale du fil et d'étudier son mode d'é-
chauffement. Nous avons constaté d'abord que l'état stalionnaire est atteint
au bout de cinq secondes environ. Dans les expériences que nous venons
C
de décrire pour mesurer — » il ne faut donc pas tenir compte de la pre-
mière et de la dernière observation. On trouve ensuite que l'excès est le
même, qu'on opère à pression constante ou à volume constant.
» Nous avons i)U de cette manière mesurer les températures finales des
( 34i )
fils plongés dans les différents gaz, et nous avons vérifié que les excès sont
projjortionnels au carré de l'intensité du courant, ce qui est indiqué par
les lois de Joule. Nous avons observé diverses particularités remarquables.
Par exemple, pour l'air sec et l'air humide ou chargé de vapeurs de ben-
zine, nous n'avons pas trouvé de différences bien marquées, soit pour la
température finale du fil, soit pour la quantité de chaleur perdue par
rayonnement lorsqu'on emploie une même intensité de courant et une
même résistance.
» Ces résultats, ainsi que d'autres qui sont en préparation, seront pro-
chainement connnuniqués à l'Académie. »
PHYSIQUE. — Réplique aux Notes publiées par M. H. Sainte-Claire Deville
le \ S juillet dernier; par M. J. Jamin.
« Je demande à l'Académie la permission de répliquer brièvement aux
deux Notes que M. H. Sainte-Claire Deville a insérées dans le Compte rendu
du i8 juillet dernier. Ces Notes, qui témoignent d'une vive irritation, con-
tiennent des critiques de détail, des discussions grammaticales, des insi-
nuations contre ma bonne foi, et se terminent par lui rappel vigoureux au
respect que je dois à l'âge et au mérite de M. H. Sainte-Claire Deville. Ce
sont des arguments auxquels je ne répondrai pas un seul mot. Je ne revien-
drai pas davantage sur l'analyse et la critique que j'ai données du Mémoire
publié par M. H. Sainte-Claire Deville eu 1860. Je maintiens mon opinion
tout entière, et je persiste à penser que ce travail n'a pas jeté sur la science
la lumière que son auteur suppose. Toutefois je ne continuerai pas la
discussion sur ce point: je ne le ferais que si j'y étais ramené par la con-
tinuation de mes travaux; mais je viens défendre les idées que j'ai récem-
ment exposées. Je le ferai avec calme et bonne foi, sans sortir de la ques-
tion scientifique, qui, seule, intéresse l'Académie.
» Je rétabhrai d'abord les termes du débat :
» Si l'on mêle à t^ un poids e d'alcool avec un poids a = 1 — s d'eau, le
mélange prend la température t-\-Q. 0 est-il constant rpiel que soit ^? Non.
Peut-on trouver une relation entre la température t des éléments et la tem-
pérature f + 0 du mélange? Je réponds oui, et j'établis cette relation
comme il suit.
» A la température de la glace fondante, le poids £ d'alcool contient une
quantité de chaleur Ae, inconnue, mais déterminée; chauffe-t-on ce corps
C. R., i8;o, 2» Semeurc'. (T. LXXI, N" G.) 44
( 342 )
à t degrés, il absorbe zct et contient
7 = As + îct (*).
De même, le poids a d'eau contiendra
ç'= A'« + ac't;
de même aussi le mélange des deux liquides, dont le poids est égal à l'unité,
renfermera, à sa température de formation t + Q,
ç"=A"+ 7(^ + 0).
» Je fais maintenant cette hypothèse que le mélange contient, à / -+- 6,
la iiiérne quantité de chaleur que ses élémenls à t, c'est-à-dire que
q" ^ q -{- q\ ce qui donne, en représentant par y, la chaleur spécificjue
moyenne £C + ac' des deux liquides,
7(< + 0) - 7,« = As-f-A'a — A";
A et A' sont constants; A" varie avec les proportions du mélange.
Ac + A'« — A" est donc une quantité absolument inconnue et variable
avec £; elle n'est pas déterminée, et par conséquent l'équation précé-
dente ne permettra pas de calculer la valeur de 0 pour des valeurs quel-
conques de c.
» Mais si £ est constant, c'est-à-dire s'il s'agit d'un mélange eu propor-
tion déterminée, et qu'on ne fasse varier que sa températuie t, alors le
second membre est constant; il suffit de le déteruiiner une fois pour toutes,
au moyen d'une expérience unique, jiar exemple en faisant le uiélange à
zéro, ce qui donne un réchautfement 9,,, et l'on a
75,, = A£ + A'a — A".
Par suite, l'équation devient
(1) 7(^ + 5) -7,/ = 7^0 = M.
{*) Désignons par m -f- nt ]a chaleur spécifique élémentaire de l'alcool, (jiii est, comme
on le sait, égale à -j-- lui intcyrant 011 acira la chaleur totalr contenue dans le liquide on
Il ^-
q = ml -\ h A.
2
m H est ce qu'on noinnie la chaleur spécifi(|ne moyenne, c'est-à-dire c; A est la cons-
2
tante introduite ])ar l'intégration, c'est la valeur de ij quand / = o.
( 343 )
» Il est bien évident que 5o, et par suite M, change avec e, qu'il ftiut le
mesurer pour chaque mélange, et que le résultat obtenu pour l'un d'eux ne
se lie pas à celui qui convient à un autre.
» Une fois qu'on connaîtra 9„ pour un mélange donné, on poiu-ra cal-
culer les réchauffements 0 qui se produiront quand ou fera ce même
mélange à des températures quelconques t. On voit de suite que 0 dimi-
nue, devient nul et négatif à mesure que t augmente.
» Tel est le résumé du problème simple et bien défini que j';ii soumis à
l'Académie. Examinons maintenant les objections qui m'ont été faites.
» Dans sa première Note, M. H. Sainte-Claire Deville ne fait aucune dis-
tinction : mon équation est une identité; elle ne peut rien prévoir, rien
calculer. Après que j'eus montré qu'elle explique, prévoit et calcule les
températures t -h & que prend un mélange fait à diverses températures t,
il distingue deux cas : le premier, qui s'occuperait de tous les mélanges
à la fois et les embrasserait dans une théorie commime; le second, qui
examinerait chacun d'eux l'un après l'autre et calculerait les valeurs de 0
en fonction de 6„.
» Ma critique, dit-il, ne porte que sur le premier cas, le seul inté-
» ressaut, » et il démontre aisément que ma formule ne le résout pas,
parce que le deuxième membre est indéterminé : c'était évident. Je ne
l'ignorais pas. Je réponds donc à M. H. Sainte-Claire Deville que sa critique
porte sur un cas que je n'ai jamais songé à traiter, et qu'elle est sans objet.
Il ne faut pas me prêter des intentions contraires à l'esprit et à la lettre de
ma Note, pour se donner le plaisir facile de les réfuter.
» Ce cas écarté, j'arrive au second, qui a fait exclusivement le sujet de
mon travail, et que mon contradicteur déclare tout résolu et bien connu.
Il critique d'abord ma démonstration, et il en propose une autre. Or j'ai
montré, et je maintiens, que M. H. Sainte-Claire Deville fait un raisonne-
ment incomplet, qui ne peut conduire à aucune équation. Il affirme qu'en
écrivant y{t -+- 6) — y, t = (y — 7i)^ + yO , il a voulu simplement dire
y{t -+- ô) — Y,^ ou {y — y,)t -h yO : soif. Mais, pour faire une équation, il
faut deux membres : le premier est -/[t +■ Q) — ytt: où est le second? Je
demande qu'on me le montre; je ne le trouve ni explicitement, ni implici-
tement exprimé; je ne le trouve pas dans le raisonnement, et je défie
qu'on l'y trouve. Je prie les personnes que cette question intéresserait de
relire le passage que je signale (Comptes rendus, t. LXX, p. 1579). Elles
reconnaîtront l'exactitude de mes assertions.
» Au reste, tout eu maintenant que sou raisonnement est inattaquable,
44-
( 344 )
je soupçonne que M. H. Sainte-Claire Deville en a reconnu \o défaot; car,
tians sa dernière Note, il change sa démonstration. Pourquoi le ferait-il, si
la première était bonne? pourquoi ajouterait-il un deuxième membre à son
équation s'il ne l'avait oublié une première fois? Malheureusement cette
deuxième tentative est aussi infructueuse que la première, ainsi qu'on en
va ju£;er. Je transcris textuellement [Comptes rendus, t. LXXI, p. 2o3, en
note) :
• Prenons deux vases imperméables à la chaleur, contenant l'un une quantité donnée
d'ean, l'antre une (juanlité i — e =r « d'alcool, et tous les deux à zéro. En les n)élangeant,
nous obtiendrons de l'alcool étendu à 6„ degrés. Prenons deux autres vases contenant les
mêmes quantités e d'eau et i — s d'alcool encore à zéro. Ajoutons une même quantité de
chaleur au mélange à 6„ et aux éléments de ce mélange à zéro. I>a température du mélange
deviendra ^4-9 (notatiou de M. Jamin), et la température commune des éléments séparés
deviendra t. La chaleur spécifique 7 du mélange et la chaleur spécifi([ue moyenne 7, des
éléments sont invariables par hypothèse; on aura, d'après le principe même qui a servi
à calculer ces chaleurs spécifiques
{t-h9 — 6,)y=y,t.
Cette équation se vérifiera toujours, quel que soit /, et |)ourra servir à calculer l'une des
quantités qui y entrent en la prenant pour inconnue. On en tire
7(<-f-9) — y,t, c'est-à-dire (7 — 7,) / 4- 7S = 79, = M.
Or 79(1 est constant ; donc M est constant, quel que soit t, pourvu que £, 7 et 7, soient cons-
tants. C. Q. F. D. »
» Analysons ce raisonnement. On mêle les deux corps à zéro, ce qui élève
la température jusqu'à do; puis on donne an mélange une quantité de cha-
leur y,t, ce qui le chauffe jusqu'à t-^0. Ainsi, c'est à zéro, et toujours
à zéro, que le mélange est formé; ce n'est j)as à f°. Or luie équation ne con-
tient que ce qu'on y met, et, pui.squ'on n'y fait pas entrer la condition que
le mélange est formé à t", on ne peut en tirer l'élévation de température
qui en résidterait.
» Que faut-il trouver? la température t -i- & que prend le mélange
quand on le forme avec des éléments pris à i°. Que trouve M. II. Sainte-
Claire Deville? la température t + 0 que prend le mélange formé à zéro.
Quand on lui foiu-nit une chaleiu- y,t, 0 n'est pas le même que 0.
M. H. Sainte-Claire Deville a confondu deux choses essentiellement dis-
tinctes.
» L'équation de M. H. Sainte-Claire Deville est, comme il le remarque
fort bien, une relation évidente et coiniue qui exprime les rapports des
échauffements de deux corps quand on leur fournit une égale quantité de
( 345 )
chaleur; elle n'apprend rien sur l'élévation de température 0 que prend le
mélange foruié à t°, puisque 6 n'y entre pas.
» Que faudrait-il faire? [1 faudrait d'abord chauffer les éléments à /",
c'est-à-dire leur fournir luie quantité de chaleur -y, /, puis les mêler, ce qui
les porterait à ^î H- 0, et prouver que l'on a
y{t-h 0) —7,/ =M.
Or M. H. Sainte-Claire Deville ne le fait pas.
» Ou bien il faudrait prouver que t+Q est égal k t-\-9, c'est-à-dire
qu'un mélange formé à zéro, et auquel on fournit ensuite une quantité de
chaleur y,t, s'élève à une températiu-e t -h 0 égale à / + 0, ou à la tem-
pérature que prend le mélange quand on le produit avec des éléments pris
à t°. Cela est justement ce qui est en question.
» Or, puisque cela n'est pas évident, il faut prouver que 0 est égal à 5,
ce qui exige qu'on s'appuie ou sur un principe reconnu, ou sur une hypo-
thèse. On peut y arriver de plusieurs manières.
» On peut y arriver :
» Eu supposant, comme je l'ai fait, que le mélange, à la température
t -\-Q, qu'il prend au moment de sa formation, contient la même (|uantité
de chaleur que ses éléments à t°;
» Ou bien en s'appuyant sur lui principe que M. Berfhelot a développé
dans ses remarquables études sur la Therniochimie [Annules de Chimie el de
Physique, 4*" série, t. VI, p. 292). M. Berthelot suppose que le mélange
soit en premier lieu formé à zéro, ce qui dégage une quantité de cha-
leur Qo. 11 fait ensuite une autre opération, qui consiste : 1° à élever les
éléments à i°, ce qui absorbe y^t^, 2"^ à faire le înélange, ce qui dégage Q^;
3° à ramener ce mélange à zéro, ce qui absorbe y t. Or, dans ces deux
opérations, les états initiaux et finaux étant les mêmes, les quantités de
chaleur dégagées ou absorbées seront les mêmes, et l'on aura la relation
générale
Qo = Q<- 7.^ + 7^ = Q^ + (7-7.) ^•
Or
donc
Qo = 7^o> Q« = 7^;
7^0 = 75 + (7 -7,)/.
» On pourrait encore raisonner comme il suit : à zéro les éléments con-
tiennent une quantité de chaleiu' As + A'a que nous désigiserons, pour
abréger, par B.
( 346 )
» En les chaiiffitnt séparément jusqu'à t, ils absorberaient y, <; en les
mêlant, ils prendront ou dégageront Q^; ils seront ;W + 0 et contiendront
finalement
B-t-7, i + Q«.
Échangeons l'ordre des opérations : mêlons les corps à zéro, ils prendront
on dégageront Q„ et arriveront à ôj ; chauffons-les de Sj, à / + 0, ils absor-
beront y(< -I- 0 — S„) et contiendront
B + Qo + 7(^ + 0- ^o)-
Dans les deux cas ils constitueront le même mélange à / -f- 0; leurs cha-
leurs totales seront égales, et l'on en tirera
» Or, si l'on admet que les chaleurs dégagées ou absorbées par le mé-
lange sont les mêmes à o et à /, ce qui est |)robable, le premier membre
sera nul et l'on retombera sur l'équation (i). Réciproquement, si l'équa-
tion (i) est vraie, on en conclura que Qf = Qq. On pourrait concevoir, au
contraire, que Q< ne fût pas égal à Qo, alors l'équation ne serait pas
exacte.
» En résumé, de quelque façon qu'on s'y prenne, il faut justifier l'équa-
tion (i) par une démonstration qui sera plus ou moins facile, n:ais il faudra
en faire une. Dans les cas où cette équation est justifiée, on peut remar-
quer que 0 =: 6. C'est une sorte de loi physique qui vaut autant que
l'hypothèse sur laquelle elle est fondée, et qui s'énoncerait ainsi : Si l'on
échauffe les éléments à /", c'est-à-dire si on leur donne une quantité de
chaleur y, ^, et qu'on fasse le mélange, il prend une température f -f- 0 égale
à celle qu'il aurait si l'on faisait le mélange à zéro, et qu'on lui fournît
ensuite une quantité de chaleur y,/.
» Quant à l'importance de cette relation (i),elle n'échappera à personne,
elle prouve que si -y et y, sont différents, ce qui est le cas général, la chaleur
qui se dégage dans une cond^iiiaison est variable : elle est yôp quand cette
combinaison est faite à zéro, elle est y0 quand on la produit à t°. Celte
chaleur peut être positive ou négative, grande, petite ou nulle suivant les
lempérattires. Elle ne représente pas l'équivalent thermique d'une combi-
naison, comme on l'a cru; elle est une fonction compliquée, et jusqu'à
présent tout à fait inconnue. On l'a mesurée à la lempéralure ordinaire, la
croyant constante; il faut maintenant chercher connnent elle varie avec t
pour toutes les combinaisons possibles. »
( -^47 )
MÉMOIRES PRÉSEIXTÉS.
ÉLECTRICITÉ. — Nouvelles expériences sur les armatures el le plateau fixe
de la machine de Hollz. Note de M. Laborde. (Extrait.)
(Renvoi à la Commission précédemment nommée.)
« Les armatures jouent un rôle si important dans la machine de Hoitz,
qu'elles méritent une attention particulière. On a déjà remplacé la fenêtre
du plateau fixe par un simple trou, traversé par la pointe qui entretient la
charge de l'armature; puis on a fixé, sur ce même plateau, une bande d'étain
qui le contourne et vient présenter sa pointe au plateau mobile. Cetle
pointe a peu d'action sur elle, si elle est collée sur le verre : elle doit
s'avancer vers le plateau, dont elle prend l'électricité.
)) J'ai adopté une autre disposition, dans laquelle un fil métallique relié
à l'armature vient présenter son autre extrémité, non entre les deux pla-
teaux, mais au devant du plateau mobile, au lieu de dissimuler seule-
ment une partie de l'électricité développée sur la face opposée, il la neu-
tralise directement et charge ainsi l'armature. Cette disposition a plusieurs
avantages: elle permet de rapprocher les deux plateaux, de taire aux
pointes tous les changements exigés par les expériences, et de les mettre
plus près de la surface chargée, puisqu'elles n'en sont plus séparées par
l'épaisseur du plateau mobile. Cette dernière circonstance facilite la mise
en train de la machine. Les fils doivent être recuits, [)Our se prêter à toutes
les courbures, et revêtus de gutta-percha, excepté aux extrémités où l'on
en laisse quelques centimètres à découvert. Pour les soutenir dans lu posi-
tion qu'ils doivent occuper, et afin de les en retirer facilement, on fixe un
tube de verre horizontalement auprès de l'armature, et l'on y fait entrer à
frottement le fil revêtu de gutta-percha, auquel on a donné d'avance les
courbures convenables.
» J'ai diminué de moitié, puis des trois quarts, la largeur de l'armature,
sans m'apercevoir d'une différence dans la quantité d'électricité produite;
enfin, poussant les choses à l'extrême, je l'ai remplacée par un fil de
cuivre : tout a marché comme piécédemmcnt, avpc cette différence cepen-
dant que, si l'on éloigne les deux plateaux, la quantité d'électricité diminue
beaucoup plus qu'avec l'armature ordinaire, et la machine se désamorce
facilement.
» Pour expliquer l'influence de ce simple fil, qui n'avait pas un millimètre
( 348 )
de diamètre, j'ai supposé que l'électricité dont il était chargé se répandait
à quelque distance autour de lui et formait ainsi une armature invisible.
En effet, si, pendant le jeu de la machine, on le retire, le dévelop])emont de
l'électricité n'en continue pas moins, et, dans l'obscurité, on peut voir le
fil revêtu de gutta-percha alimenter, par une aigrette, l'armature invisible.
Afin que l'action de cette aigrette ne soit pas trop limitf'e, l'extrémité du
iil d'où elle s'échappe doit être un peu séparée du verre. Les bouts opposés
de ce fil présentent toujours des signes contraires d électricité : ce que
l'on comprendra sans peine, si l'on ne perd pas de vue qu'une pointe
donne, mais ne reçoit pas.
» Quand on nettoie le verre avec beaucoup de soin, l'armature ne s'y
forme que lentement et péniblement; mais, une fois qu'elle commence à se
|uoduire son efficacité se révèle promptement : l'humidité de l'air, les cor-
[)uscules qui y flottent sans cesse ne tardent pas d'y former une couche à
demi conductrice, qui tient lieu d'armature.
» Dans la revue scientifique /es Mondes, j'ai fait connaître le moyen de
transformer la machine électrique ordinaire en machine de Hoitz; et j'ai
expliqué le changement de signes électriques qui se produit sur les con-
ducteurs, lorsqu'ils sont unis par un condensateur, ou lorsqu'on ramène le
plateau sur lui-même. Ce changement peut avoir lieu égalenieiU lorsque
les deux conducteurs sont mis en contact; mais il ne se |U'oduit alors
qu'après un grand nombre de tours, et il faut doubler ou tripler ce nombre
lorsqu'on éloigne les fleiix plateaux; ce qui prouve bien, ainsi que je l'ai
fait remarquer dans la même Note, que l'électricité développée sur le pla-
teau fixe prend part à ces changements.
» Dans celte machine, le plateau fixe est remplacé par une feuille de
verre, appuyée sur la tablette et soutenue à sa partie supérieure par un
simple tampon de caoutchouc. Cette disposition rend très-faciles les expé-
riences suivantes.
M Si, après la mise en train de la niachinc, on enlève le tampon de
caoutchouc, la feuille de verre deveiuie libre se [)réci|)ite sur le plateau;
lorsqu'on veut l'en séparer, on éprouve une assez vive résistance; pour
la mesurer, je me suis servi d'un ressort dont la tension équivalait à
4oo grammes au moment de la séparation. Ce poids ne représente (pi'une
partie de l'ai traction totale, parce que le ressort fixé sur la partie supérieure
de la feuille de verre agit ainsi à l'extrémité d'un levier. D'ailleurs cette
attraction varie beaucou|) pendant le jeu de la machine : elle est à son
maxinuun lorsqu'on nuit les deux conducteurs, et elle duninue rapidement
( 349)
lorsqu'on les sépare. On l'annule entièrement quand on ramène le plateau
mobile sur lui -même.
» Si l'on met les conducteurs en contact, l'un avec la garniture inté-
rieiue d'une bouteille de Leyde, l'autre avec la garniture extérieure, l'at-
traction diminue à mesure que la bouteille se charge, et elle augmente tout
à coup après chaque décharge spontanée. Ces expériences prouvent que
le plateau prend d'autant plus d'électricité que les conducteurs se déchar-
gent plus facilement et plus complètement.
» Voici quelques effets d'un autre genre, produits sur le plateau fixe.
On saupoudre de fécule ou de fleur de soufre la partie du plateau où la
pointe doit former l'armature invisible, armature qui peut s'étendre, ainsi
qu'on le verra, à plus de 20 centimètres au-dessus de la pointe. Ou met la
machine en mouvement : dès que les conducteurs changent de signe, la
fécule est chassée dans le sens du plateau mobile, et fuit conune une onde
devant l'armature factice, eu laissant derrière elle une stratification large-
ment espacée, qui s'arrondit en ellipse an-dessus de la pointe. Un fragment
de coton dans les mêmes circonstances ne glisse pas, mais il roule sur lui-
même en fuyant l'armature.
j) En saupoudrant le plateau fixe après que le changement de signes
électriques s'est manifesté, on obtient de suite une stratification toute dif-
férente : elle est comme estompée, et souvent parsemée de disques trans-
parents. Elle indique la présence de l'électricité négative et s'étend à 20
ou 7.5 centimètres au-dessus de la pointe. Si l'on a affaire à l'électricité
positive, la figure n'est plus la même : elle se compose d'aiguilles serrées
les unes contre les autres, ou s'embranchant les unes sur les autres, qui
naissent de la pointe et s'élèvent en s'épanouissant jusqu'à 12 ou 1 5 cen-
timètres. »
« M. Eue de Beaumont présente, de la part de M. Delesse, une Carte
litliologique de l'embouchure de la Seine.
» Cette carte a été exécutée d'après le système suivi précédemment par
M. Delesse. Elle fait connaître la nature minéralogique des fonds recou-
verts par la mer, et elle montre comment sont répartis les divers dépôts se
trouvant à l'état meuble, ainsi que les roches déjà consolidées qui sont
antérieures à l'époque actuelle. La constitution géologique des côtes a
d'ailleurs été figurée d'après la carte de la Seine-Inférieure par M. Passy.
Il en résulte qu'on peut suivre jusque sous la mer les couches formant les
C. R., i8';o, a" Semestre. (T. LXXI, N" C.) 4^
(35o)
côtes émergées, et particulièrement celles qui appartiennent soit à la craie
et anx calcaires jurassiques, soit aux argiles de Dives et de Honfleur. Les
affleurements sous-marins de ces couches se retrouvent jusqu'à une grande
distance des côtes. "
(Renvoi à la Coiumission précédemment nommée.)
M. L. AuBERT soiunet au jugement de l'Académie un « onzième Mé-
moire sur les solides soumis à la flexion ».
(Renvoi à la Commission précédemment nommée.)
M. Pasqpale adresse, de Rovigo, une Note écrite en itnlien siu- la direc-
tion des aérostats.
(Renvoi à la Commission des Aérostats.)
M. S. Vinci adresse, de Catatie, une Note relative au choléra.
(Renvoi à la Commission du legs Rréant.)
M. A. Netter adresse, de Rennes, un Mémoire portant pour titre :
« Théorie de la variole envisagée au point de vue des fermentations ».
(Renvoi à la Section de Médecine et de Chirurgie. )
M. J. Gaube soumet au jugeaient de l'Académie un Mémoire portant
pour titre « Du bromure de fer et de potassium ».
(Reuvoi à la Section de Chimie.)
CORRESPOTVDANCE .
M. J.-R. Meyer adresse ses remercîments à l'Académie, qui a décerné
le prix Poiicelel à ses travaux sin- la théorie mécauique de la chaleur.
M. LE Secrétaire perpétuei, signale, parmi les pièces imprimées de la
Correspondance, une brochure de M. C. D^Dame intitulée : « Étude sur la
genèse et la propagation du charbon », et un volume du P. J.-M. Saïuui-
Solaro, portant jjour titre : « Recherches sur les causes et les lois des mou-
vements de l'atmosphère; vents rcclilignes ».
( 35i )
M. LE Secrétaike perpétuel, en présentant à l'Académie, au nom de
l'auteur, un ouvrage intitulé : « Recherches générales sur les surfaces
courbes, de M. Gauss », traduites par M. E. Roger, et accompagnées par lui
de Notes et d'études sur divers points de la Théorie des surfaces et sur cer-
taines classes de courbes, donne lecture des passages suivants de la Lettre
d'envoi de M. E. Ro^er:
« ... A la suite de l'ouvrage de Gauss, j'ai publié, de mèmc! que dans
la précédente édition, deux Mémoire consacrés, le premier à l'étude des
propriétés les plus générales des surfiices continues, le second aux trajec-
toires minima, c'est-à-dire aux courbes qui, dans l'espace libre ou sur une
surface donnée, rendent minimum une intégrale de cette forme fr^[i')(fs,
dans laquelle ^^i' est l'élémenl linéaire de la courbe et y(t') une fonction
quelconque de la vitesse que prendrait un mobile assujetti à la parcourir
sous l'influence d'un système doiuié de forces; cette famille de courbes
comprend en particulier les géodésiqucs, les brachistochrones, les lignes
de plus grande pente, les trajectoires de moindre action d'Euler, les orbites
planétaires, etc.; et ces courbes, ainsi que cela a lieu pour les sections co-
niques, possèdent des propriétés tantôt particulières à une ou à plusieurs
espèces, tantôt couununes à la famille tout entière.
» La présente édition du premier de ces Mémoires renferme plusieurs
théorèmes ayant Irait, pour la plupart, à la courbtu'e des surfaces. L'Aca-
démie a déjà accueilli (i) l'énoncé de quelques-uns de ces théorèmes. J'ai
fait usage, dans presque toutes mes démonstrations, d'un système particu-
lier de coordoinièes curvilignes dont l'emploi permet d'aborder et de ré-
soudre très-simplement diverses questions de physique mathématique et de
géométrie pure qui |jrésenlent, quand on a recours à d'autres méthodes,
des difficultés presque insurmontables. Parmi ces questions, je citerai ici
seidement celle qui consiste à déterminer la surface qui contient le volume
le plus grand possible, sous une étendue superficielle donnée.
» Mon second Mémoire s'est accru d'une addition relative aux trajec-
toires planétaires. Revenant sur une question importante que j'ai déjà trai-
tée dans une publication spéciale (2), j'ai retrouvé, par une autre voie, les
lois des mouvements planétaires dans l'hypothèse d'une diminution sécu-
laire uniforme et extrêmement lente attribuée à toutes les masses du sys-
ii) comptes rendus, t. LXIX.
(2) Rcclicrrhcs sur le système du monde (1862).
( 352 )
téme. Mon analyse acUielle se fonde snr la variation des constantes arbi-
traires introduites par une première approximation; c'est une nouvelle
application d'une méthode dont la fécondité a été souvent éprouvée. Les
résultats auxquels je parviens ainsi ne sont point contredits par l'obser-
vation et permettent au contraire d'expliquer certaines anomalies récem-
ment signalées; ces résultats peuvent se résumer de la manière suivante :
» I. La (rajecloire suivie par une planète se compose d'une série d'ellipses
dont le grand fixe s'accroît avec le temps, suivant une progression géométrique
exactement inverse à. la progression d'après laquelle les masses diminuent.
» II. Les périliélies possèdent un mouvement uniforme et direct, identique
pour toutes tes planètes. Si la vitesse de ce déplacement angulaire était
connue pour une seule |)lanète, la diminution de l'unité de masse dans
l'imité de temps serait par cela même déterminée. Or, d'après M. Le Ver-
rier, le périhélie de Mercure est affecté d'un mouvement angulaire, inexpli-
qué jusqu'ici, de 38 secondes pour un siècle; de là, par un calcul très-
aisé, se déduit la valeur de la diminution séculaire de l'unité de masse, et
cette valeur est «^0,000092.
« IlL Le moyen mouvement décroît., pour chaque jilancle, suivant une pro-
gression (jéométricpie deux fois plus rapide que celle qui se rapporte oux masses.
» IV. Le rapport de l'excentricité au grand axe est sensiblement constant,
de sorte que chaque orbite, variable dans son orientation el dans ses
dimensions, demeure toujoiu's semblable à elle-même.
« V. En faisant abstra. tion des excentricités et des inclinaisons sur l'ëclip-
lique, les trajectoires planétaires, considérées dans leur continuité, se réduisent
toutes à une seule et même courbe, une spirale logarithmique qui s'écarte indé-
finiment du Soleil.
» L'extrême petitesse du coefficient a rend complètement insensibles les
variations des dimensions linéaires du système planétaire, au moins pour
le petit nombre de siècles que les observations astronomiques embrassent
avec certiiude. Quant aux moyens mouvements, une valeur même beau-
coup plus faible de a suffirait à mettre rapidement en évidence leurs iné-
galités, si la diminution des masses n'influait pas exactement de la même
manière, ainsi qiu; je l'ai démontré dans mes Recherches sur le système du
monde, et sur les durées des révolutions et sur celles des rotations.
» Je dois ajouter que la diminution séculaire des masses ne paraît pas
absolument ideulique pour tous les corps du système planétaire. Par là
s'exijlicjuerait l'accéléralion séculaire dont le moyen mouvement de la lune
paraît affecté; on conçoit, en effet, que si les durées T et T' du jour sidéral
.. (35:^ )
et de l'année terrestre viennent à être modifiées de telle sorte que le rap-
port — soit altéré, le moyen mouvement de la lune en sera nécessaireiiient
troublé. L'explication bien connue à lac[uelle M. Delauna\^ a eu recoiu's,
pour rendre compte de l'anomalie dont il s'agit, revient à faire varier, sous
l'influence des marées terrestres, un seul des termes du rapport ^r' "
PHYSIOLOGIE EXPÉRIMENTALE. — Recherches sur les effets loxiqiies du ni'boun-
dou ou icaja, poison d'épreuve usité au Gabon. Note de MM. Rabuteau
et Peyre, présentée par M. Ch. Kobin.
« L'un de nous a rapporté du Gabon, en 1869, <li'f'cp'<^s racines de
m'boundou. Elles avaient été arrachées par lui-même, sur un sol humide,
dans le voisinage de la rivière Como, à 3o lieues dans l'intérieur des terres.
Il est très-difficile de s'en procurer au Comptoir. D'ailleurs, les féticheurs
ont soin de cacher aux Européens, et même aux indigènes, les endroits où
se trouve la plante, ce qui fait que, jusqu'à" ce jour, on n'a pu eu avoir que
quelques rares échantillons qui n'ont pas sulfi à faire mie étude coiiijjlèle
des propriétés toxiques du m'boundou.
M Les racines qui ont servi à nos recherches avaient ; la plus grosse,
3 cenfimètres de diamètre au collet; la plus petite, i centimètre à peu près.
On n'en trouve pas dont la grosseur dépasse 3 centimètres. Leur longueur
varie entre 5o et 70 centimètres. Leur écorce, fraîche ou sèche, est rou-
geâtre à sa siu'tace; elle est d'un rouge vif au-dessous de l'épidrrnie; elle
est peu épaisse. Le bois qu'elle recouvre est blanc grisâtre et très-diu-.
» Nos expériences ont été faites presque toutes avec l'i'corce, quelques-
unes avec le bois de la racine dont nous avons préparé des extraits aqueux
et alcooliques. L'écorce et le bois sont tous les deux très-amers; leurs infu-
sions, lors même qu'elles sont très-diluées, possèdent encore une amertume
extrême. Traitées par l'iodure de potassium ioduré ou par l'acide phospho-
molybdique, elles donnent des précipités abondants. Elles renferment donc
un alcaloïde (peut-être plusieurs) que nous croyons être le même dans
l'écorce et dans le bois, parce que les résultats observés chez les animaux
nous ont paru identiques : la seule différence que nous ayons trouvée,
c'est que leurs extraits alcooliques nous ont paru plus actifs que leurs ex-
traits aqueux. Nous avons remarqué toutefois, dans les effets, une autre
différence, légère il est vrai, lorsque nous avions porté le poison dans l'es-
tomac au lieu de l'injecter sous la peau des animaux.
( 354 )
» D'après les nombreuses expériences que nous avons faites, avec des
closes variables de poison, chez les grenouilles, les lapins et les chiens,
nous croyons pouvoir établir de la manière suivante l'action toxique du
in bùundou.
M Introduit, à dose très-faible, sous la peau des grenouilles, le poison
produit seulement une gène des mouvements, une sorte de paralysie qui
fait que ces animaux ne peuvent sauter que très-difficilement et qu'ils
marchent comme les crapauds. La gène des mouvements est telle, que
nous avons cru d'abord avoir affaire à un poison présentant quelque ana-
logie avec le ciuare, ce qui n'est pas, car les contractions nnisculaires se
produisent bien lorsqu'on excite les nerfs. Ces effets s'observent lorsqu'au
lieu d'introduire sous la peau l'extrait, qui est très-actif, on y place un peu
de la poudre de la racine. Ils ont disparu au bout d'une heure complète-
ment, lorsque nous avions introduit sous la peau l'extrait aqueux en très-
faihle quantité.
» A la dose de 3 milligrammes, cet extrait, introduit sous la peau des
grenouilles, produit d'abord la gêne des mouvements que nous venons de
signaler, puis bientôt, au bout de dix miiuites au plus, l'animal éprouve
des secousses, des convulsions tétaniques. Ces convulsions ne se produisent
pas spontanément en générai, mais on les détermine en touchant l'animal,
ou simplement eu frappant la table sur laquelle il repose. Si la dose est
plus forte, I centigranune par exemple, les convulsions apparaissent plus
vite; il y a de l'opisthotonos, mais il est rare qu'on puisse soulever l'ani-
mal tout d'une pièce comme lorsqu'on l'a empoisonné avec la strych-
nine. Il y a toujours un certain relâchement, comparé à ce qu'on observe
dans le strychnisme; de plus, les grenouilles ne sont pas rigides après leiu-
mort, qui arrive en un temps qui ne dépasse guère trois quarts d'heure, à
moins que la dose ne soit faible : alors l'animal, mis dans de l'eau, revient
à lui-même complètement au bout de quelques heures.
M Eu i)réparant une grenouille d'après la méthode de M. Claude
Bernard, c'est-à-dire en liant la piirlie inférieure du tronc à l'exception
des nerfs lombaires, puis en iiUroduisant l'extrait sous la peau, nous nous
sonniu'S assurés que le ni bouiidou agit sur la moelle épinière. Ce n'est pas
un poison nniscul.iire.
» L'extrait de m' hoiiiidnii, injecté sous la peau d'un lapin à la dose de
lo centigrammes en solution aqueuse, en deux ou trois endroits diilérents,
afin que l'absorption soit plus rapide, tue cet animal eu vin^l minutes.
Cuiq à dix minutes après l'injection, il éprouve, dès qu'on le louche, des
( 355 )
soubresauts énergiques, des secousses qu'on pourrait comparer à des se-
cousses électriques, en même temps qu'il y a une gène considérable des
mouvements des membres, surtout des membres postérieurs. Il meurt as-
phyxié; on peut prolonger sa vie en pratiquant la respiration artificielle.
T^a même dose, injectée en im scid point, ne détermine pas la mort; au bout
dune à deux heures, l'animal n'a plus que de faibles secousses, qu'on pro-
voque en le touchant, en le soulevant, et même elles disparaissent totale-
ment. Il mange avec appétit.
B Ce f;ut prouve évidemment que l'élimination du poison doit être
rapide.
» Le même extrait, à la dose fie i5 centigrammes, dissous dans 3o à
4o grammes d'eau, et porté dans l'estomac d'un lapin, a fait mourir cet
animal au bout d'une heure cinq minutes. Les accidents, qui furent les
mêines que les précédents, commencèrent à se manifester dix minutes après
l'introduction du poison. A la dose de 4o centigrammes, les effets sont fou-
droyants.
» Les symptômes que nous avons observés chez les chiens sont du même
ordre et apparaissent, suivant la dose, au bout de cinq à dix minutes en
général. Si l'on remarque que leur apparition est tardive, on la provoque
instantanément, de même que chez les lapins, en soulevant ces animaux
ou simplement en les touchant. De même que chez les premiers, les se-
cousses sont énergiques; leur respiration est haletante, leurs membres pos-
térieurs sont comme paralysés. L'incertitude et la difficulté des mouvements
s'observe surtout lorsque, an lieu d'injecter sous la peau la solution aqueuse
de l'extrait, on l'a introduite dans l'estomac. Un chien, à qui nous avions
fait avaler aS centigrammes d'extrait dissous dans 4o grammes d'eau, nous
a rappelé le bâton que les Gabonnais veulent faire franchir au malheureux
qui a pris le breuvage d'épreuve; cet animal, sensible aux caresses, et
obéissant à la voix qui l'appelait, ne pouvait plus franchir des escaliers
hauts de i8 centimètres. Toutes les fois qu'il voulait faire un effort, il trem-
blait comme le sorcier empoisonné, et éprouvait de violentes convulsions
tétaniques. Au bout d'une heure, il éprouvait encore des convulsions, même
sous l'influence de la peur; mais, luie heure plus tard, c'est-à-dire deux
heures après l'ingestion du poison, il n'existait plus qu'une légère roideur
dans les mouvements, et il mangeait de bon appétit. Ses oreilles et son
museau, qui étaient chauds auparavant, étaient redevenus frais.
» Une dose de 4o centigrammes d'extrait, introduite dans l'estomac,
fait moiu'ir lui chien en vingt minutes. Il meurt asphyxié au milieu de con-
( 356 )
viilsions télaiiiques; ses sphinclers se relâchent, d'où résulte une émission
(l'urine et de matières fécales. On peut observer une hémorrhagie nasale,
hémorrliagie que l'on a observée également chez les Gabonnais. La rigi-
dité cadavérique ne commence à a[ paraître qu'au bout d'un temps consi-
dérable, trois quarts d'heure environ.
» En raison de ces faits, nous pensons que le principe ou les principes
actifs dix m' boundou produisent des effets qui présentent une certaine ana-
logie avec ceux que produit la strychnine, mais qui en diffèrent notable-
ment sous divers rapports. Ces effets se rapprocheraient plutôt de ceux île
la bruciiie; mais nous avons remarqué (pie le m' boiatdou ne produisHil ja-
mais la raucité de la voix chez nos chiens mis en expérience, tandis que,
contrairement à ce que l'on admet eu général, nous avons remarqué cette
raucité de la voix chez d'autres chiens auxquels nous avions fait prendre
de la brucine.
» Le in boundoii est un poison extrêmement rapide; mais nos expé-
riences tendent à démontrer (pTil s'élimine vite et qu'on |)eut conjurer les
accidents mortels en pratiquant la respiration artificielle.
» MM. Pécholier et Saiutpierre ont fait avant nous, en 1866, quelques
recherches sur le m boiindou (voyez Journal d'nnalotnie el de physiologie j
de M. Robin). Ces expérimentateurs n'avaient à leur disposition qu'iuie
faible quantité de racine. Ils ont pu néanmoins observer la plupart des
symptômes que nous avons notés. Toutefois, nous ne pouvons dire avec
eux que le poison, après avoir produit des convulsions tétaniques, amène
l'insensibilité, la paralysie et la mort. C'est la gène des mouvements que nous
avons observée au début, et la mort est arrivée au milieu des convulsions.
» Toutes nos recherches ont été faites au laboratoire de M. Ch. Robin,
à la Faculté de Médecine. » — »
VITICULTURE. — Sur un moyen pour einpëctitr l'irruption du Phylloxéra vas-
tatrix dans les vicpies non encore infestées. Lettre de 31. J. Lichte.\stei.\
à M. Dumas.
« Le Phylloxéra^ cause ou effet, n est plus en discussion : M. de Serres,
à Orange, a mis l'insecte sur des vignes saines, il les a tuées; M. Faucon, à
Graveson, a au contraire débarrassé des pucerons, par une submersion
prolongée, des vignes très-.itteintes, il les a sauvées: sublalà causa, totlitur
efjectus (détruisez le Phylloxéra, vous sauvez les vignes). C'est un fait
acquis.
( 357)
» Dés le premier jour où j'eus l'honneur d'entretenir la Société Entomo-
logique de France des mœurs des Phylloxéra, j'exprimai l'idée que l'étude
de ces insectes et de leurs métamorphoses devait rendre les plus grands ser-
vices pour arriver au moyen de les détruire. Après avoir relu les ouvrages
des maîtres, Réaumur, Degeer, Ratzeburg, etc., et avoir correspondu avec
les savants contemporains qui se sont le plus occupés d'Hémiptères, notam-
ment Signoret, à Paris, et Riley, en Amérique, j'ai émis, collectivement avec
M. Planchon, la supposition que l'insecte nous venait des États-Unis. Il y
était déjà décrit, depuis quinze ans, par Asa Fitch, et par Walsh, Shinier
et Riley. J'ajoutais qu'il était identique à l'insecte américain, malgré l'ha-
bitat de celui-ci qui se rencontre dans des galles sur les feuilles, tandis que
le nôtre n'avait d'abord été trouvé que sur des racines. Des expériences
décisives ont fait aujourd'hui de nos soupçons une certitude; nous avons
élevé les insectes sortis des galles sur les racines, ils s'y sont multipliés, et
nous sommes en train d'élever, toujours sur les racines, la seconde géné-
ration de ces Phylloxéra des galles, qui, je l'espère, nous donneront
quelques insectes ailés.
» T. es habitudes d'un autre insecte du même groupe, le Cocciis Laricis,
admirablement observé par le savant Ratzeburg, offrent la plus grande
analogie avec celles du Phylloxéra. Ce même auteur dit, à propos des re-
mèdes (f° i86), qu il n'en connaît pas d'autres que celui d'enlever la partie
malade,
« Pour le Phylloxéra, c'est le même remède que je propose, et c'est au
retour d'une excursion de quelques jours dans les vignobles les plus envahis,
après avoir vu le peu de résultat des essais tentés et courageusement pour-
suivis par des propriétaires aussi actifs qu'intelligents, que je dis, avec une
triste et profonde conviction : L'insecte une fois bien et largement établi
sous terre est indestructible.
» Mais je me hâte d'ajouter que rien n'est plus facile que d'empêcher
son envahissement, à distance des lieux infestés dont les vignobles sont
perdus et déjà à moitié arrachés. Cet envahissement doit avoir lieu par l'in-
secte ailé, dont la progéniture forme, sur les feuilles, des galles très-faciles
à voir et à reconnaître; il ne s'agit que d'organiser, de mai en août, une
active surveillance dans les vignobles, et de faire enlever et brûler les sar-
ments dont les feuilles présenteraient des galles de Phylloxéra. »
C. R., 1S70, 2" Semestre. (T. LXXI, N» G.)
46
( 358 )
ÉCONOMIE RURALE. — Surune variëtédt vignes qui parail être à Cabrides ntteinles
du Phylloxéra vastalrix. Extrait d'une Lettie de M. L. Laliman à
M. Dumas.
« Le 19 juillet dernier, j'ai eu riionneur d'adresser à M. le Minisire
de l'Agriculture une demande qui était accompagnée d'échantillons de
feuilles de vignes, et qui avait pour but, d'indiquer trois ceps du genre
OEslivalis d'Amérique, cjui sont depuis trois ans à l'abri des atteintes du
Phylloxéra, au moins dans la Gironde.
» Je crois, en attendant un remède pratique, qu'il est utile d'exami-
ner les études faites sur ce sujet par mon fils et par moi. Je demande
qu'après contrôle, on fasse exécuter, dans un autre département ayant subi
le fléau, une plantation de vignes de ce genre, qui convertirait, je l'espère,
les plus sceptiques. »
A 4 heures, l'Académie se forme en Comité secret.
La séance est levée à 4 heures un quart. É. D. B.
PUBLICATIONS PERIODIQUES REÇUES PAR l'aCADÉMIE
PENDANT LE MOIS DE JUILLET 1870.
Annales de la Propagation de la foi; juillet 1870; iu-B".
Annales de la Société d' Hjdrologie médicale de Paris; 12^ livraison, 1870;
in-8°.
Annales de l'Observatoire Météorolocjique de Bruxelles; n" 5, 1870; in-4".
Annales des Conducteurs des Ponts et Chaussées; mai 1870; in-S".
Annales du Génie civil; juillet 1870; in-H".
Annales industrielles; n°' 19 et 20, 1870; in-4°.
Annales niédico-psycholoqicines; juillet 1870; iu-.S".
Aasocintion Scientifi(jue de France; lUdletin hebdomadaire, n"* 179 a i83,
1870; in-8".
Atti del reale Istiluto f ombardo di Scienze, Leltcre cd Arti; 7® cahier. Milan,
1870; in-S".
Bibliollièqne universelle et Revue suisse; n" 151,1870; in-8".
Bulletin de C Académie impériale de Médecine; n"' des 3i juin cl i T) juil-
let 1870-, in.8°.
( 359)
Bullel'm de l' Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux- Arts de
Belgique; u° 6, 1870; in-8°.
Bulletin de la Société d^ Agriculture, Sciences et Arts de laScirtlie; i" tri-
mestre, 1870; in-S".
Bulletin de la Société Botanique de France; Revue bibliographique B, 1870;
in-8°.
Bulletin de la Société ci Encouragement pour l'Industrie nationale; mai
1870; in-4°.
Bulletin de la Société de Géographie; avril et mai 1870; in-8°.
Bulletin de la Société française de Photographie; juin et juillet 1870;
in-8°.
Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse ; juin 1870; in-8°.
Bulletin général de Thérapeutique; n°^ des 3o juin, i5 et 3i juillet 1870;
in.8°.
Bulletin hebdomadaire du Journal de l' Agriculture; n°^ 27 à 3i, 1870; in-8°.
Bullettino meteorologico dell' Osservatorio del R. Collegio Carlo Alberto;
n°4, 1870; in-4°.
Bullettino meteorologico del B. Osservatorio del Collegio Romano; n° 6,
1870; in-4».
Bulletin météorologique mensuel de l'Observatoire de l'Université d'Upsal;
n°6, 1870; in-4°.
Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des Sciences;
n°' I à 4, 2* semestre 1870; in-4°.
Correspondance slave; n"^ 5 1 à 61, 1870; in-4°-
Cosmos; n°' des 2, 9, lô, 23, 3o juillet 1870^ in-8°.
Gazette des Hôpitaux; u°^ 75 à 89, 1870; in-4°-
Gazelle médicale de Paris; 11°' 27 à 3i, 1870; iu-4°.
Il Nuovo Ciraento. .. Journal de Physique, de Chimie et d'Histoire naturelle;
avril 1870; in-S".
Journal d'Agriculture pratique; n°* 26 à 3o, 1870; in-8°.
Journal de Chimie médicale, de Pharmacie et de Toxicologie; juillet 1870;
in-S".
Journal de l'Agriculture; n°^ 96 et 97, 1870; in-8"'.
Journal de la Société impériale et centrale d'Horticulture; mai et juin 1870;
in-8°.
Journal de l'Eclairage au Gaz; n°' 3i et 32, 1870; in-4°.
Journal de Mathématiques pures et appliquées; juin 1870; m-lf.
Journal de Médecine vétérinaire militaire ;_, mai 1870; in-8°.
Journal de Pharmacie et de Chimie; juillet 1870; in-8°.
( 36o )
Journal des Connaissances médicales et pharmaceutiques i n'^^'^ i8 à 21, 1870;
in-S".
Journal des Fabricants de Sucre; 11°' 1 1 à i5, 1870; in-fol.
Journal (général de l' Instruction j)ubli(jue ; n"' 26 et 28 à 3o, 1870; in-4".
Kaiserliclie... Académie impériale des Sciences de Vienne; n°* 16 et 17,
1870; in-8°.
L'Abeille médicale; n°* 27 à 3i, 1870; in-4°.
L'Art dentaire; juin 1870; in-8".
L'Art médical ; juiWel 1870; in-8°.
La Santé publique; n*" 76 à 80, 1870; in-4°.
Le Gaz; n° 6, 1870; m-l^°.
Le Moniteur de la Photographie; n"* 8 et 9, 1870; in-4".
Le Mouvement médical; 11°' 27 à 3i, 1870; in-4*'.
Les Mondes; n°' des 7, i4) 21, a8 juillet 1870; in-8°.
Magasin })ittoresque; juin et juillet 1870; gr. in-8".
Marseille médical; n"^ 6 et 7, 1870; in-8°.
Matériaux pour l'histoire positive et philosophique de l'homme; avril, mai et
juin 1870; in-8°.
Monatsbericht... Compte rendu mensuel des séances de l'Académie royale
des Sciences de Prusse; mai 1870; in-8°.
Nouvelles Annales de Mathématiques ; juillet 1870; in-8".
Nouvelles météorologiques; juillet 1870; in-8°.
Observatoire météorologique de Montsouris; 29 et 3o juin, i à 28, 3o et
3t juillet 1870; in-4°.
Répertoire de Pharmacie; juin et juillet 1870 ; in-S".
Revue Bibliographique universelle; juillet 1870; in-8°.
Revue des Cours scientifiques ; n'*'' 3i à 35, 1870; in -4°.
Rei'ue des Eaux et Forêts; n" 7, 1870; in-8°.
Revue de Thérapeutique médico-chirurgicale; u"' i3 à i5, 1870; in-8''.
Revue hebdomadaire de Chimie scientifique et industrielle; n''" 34 à 37, 1870;
in-S".
Revue maritime et coloniale; juillet 1870 ; in-8°.
Revue médicale de Toulouse; juillet 1870; in-8°.
Società reale di Napoli. Rendiconto dell' Jccademia délie Scienze fisiche e
malematiche ; fascicules 3 et 4, 1870; in-4''.
The Academy; n" 10, 1870; in-4°.
The Food Journal; juillet 1870; in-8°.
The Scienti/ic Revieiv; n" 7, 1870; in-4".
COMPTE RENDU
DES SEANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI 16. AOUT 1870,
PRÉSIDÉE PAR M. DELAUNAY.
MEMOIRES ET COMMUNICATIOIVS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. Serret, en offrant à l'Académie le tome V des OEnvres de Lagrancje,
qu'il publie au nom de l'État, s'exprime ainsi :
« J'ai l'honneur de présenter à l'Académie le tome V des OEitvres de La-
grange, qm termine la longue série des Mémoires publiés par l'illuslre auteur
dans les Recueils de l'Académie de Berlin.
» Les géomètres et les astronomes y trouveront réunis les grands tra-
vaux de Mécanique céleste par lesquels Lagrange s'est montré l'émule
souvent heureux de Laplace, et dont l'influence sur le développement de
cette branche des Mathématiques appliquées ne le cède assurément à
aucune autre.
» Le tome VI, dont l'impression, déjà conunencée, se poursuit active-
ment, comprendra les Mémoires de Lagrange publiés dans les Recueils de
l'Académie des Sciences de Paris et de la Classe des Sciences mathématiques
et physiques de l'Institut de France.
u Voici les titres des Mémoires contenus dans le tome V que je dépose
aujourd'hui sur le bureau de l'Académie :
Théorie de la libralion de la Lune et des autres phénomènes qui dépendent de la figure
non sphcrique de cette Planète.
0. R., 1870, 2' Semestre. ( T. LXXl, N" 7.) 4?
( 362 )
Théorie des variarions séculaires des éléments des Planètes. (Première Partie.)
Théorie des variations séculaires des éléments des Planètes. (Seconde Partie.)
Théorie des variations périodiques des mouvements des Planètes. (Première Partie.)
Sur les variations séculaires des mouvements moyens des Planètes.
Théorie des variations périodiques des mouvements des Planètes. (Seconde Partie.)
Sur la manière de rectifier les méthodes ordinaires d'appro.ximation pour l'intégration des
équations du mouvement des Planètes.
Sur une méthode particulière d'appro.\imation et d'interpolation.
Sur une nouvelle propriété du centre de gravité.
Méthode générale pour intégrer les équations aux différences partielles du premier ordre,
lorsque ces différences ne sont que linéaires.
Théorie géométrique du mouvement des aphélies des Planètes pour servir d'addition aux
Principes de Newton.
Sur la manière de rectifier deux endroits des Principes de Nevrton relatifs à la propaga-
tion du son et au mouvement des ondes.
Mémoire sur une question concernant les annuités.
Mémoire sur l'expression du terme général des séries récurrentes, lorsque l'équation géné-
ratrice a des racines égales.
Mémoire sur les sphéroïdes elliptiques.
Mémoire sur la méthode d'interpolation.
Mémoire sur l'équation séculaire de la Lune.
Mémoire sur une loi générale d'optique.
Rapports.
SYSTÈME MÉTRIQUE. — Division décimale des aiujles et du temps;
par M. YvOiX Villarcead.
« Dans la Communication faite à l'Académie par M. d'Abbadie le 8 août,
notre confrère fait connaître les opinions de deux savants étrangers : je
demande à l'Académie la permission de les discuter un in.slant.
» L'honorable directeur de l'Observatoire de Greenwich s'exprime
ainsi :
« Quant aux divisions décimales de l'espace et du temps, je ne les pa-
» tronne pas beaucoup, non parce que je ne leur fais pas un bon accueil,
» mais parce <[u'il est, à mon avis, im[)ossible fie les conserver en usage
» généralement, et parce que celui qui soutient des projets inefficaces res-
» semble au défenseur d'une forteresse ouverte. »
» Cette phrase est loin d'être favorable à la thèse que soutient notre
confrère, en |)r()posant la division décimale du quart de jour et dti quart
de cercle. Il ne l'a sans doute reproduite que pour être fidèle à la vérité,
( 363 )
en la disant tout entière. Quant à moi, j'ai exprimé l'opinion qu'une ten-
tative de réforme, sous ce rapport, ne pourrait réussir qu'autant que l'on
aurait recueilli les adhésions des savants les mieux placés pour entraîner
celles des autres : si j'ai pris part à la discussion, c'est luiiquement pour
montrer que les propositions de M. d'Abbadie auraient pu être amélio-
rées par un choix plus convenable de l'unité angulaire et de l'unité de
temps.
» Lorsqu'un peu i)lus loin je lis ces mots : « Il ne convient pas de s'es-
» sayer à imposer ces choses à l'humanité en général », je suis de l'avis
de M. Airy; mais je ne saurais compi'endre comment il peut proposer
« que chaque savant emploie la division qui va le mieux à son but ».
Veut-on, par exemple, que celui qui préférerait la division décimale de la
circonférence prenne le soin de dresser, pour son usage parliculier, des
Tables trigonométriques et autres, dont les arguments soient appropriés à
ce mode de division?
» M. d'Abbadie est persuadé que si M. Airy « avait assisté en France à
« l'adoption de la très-majeure partie de notre système métrique, cet as-
» tronome serait encore plus favorable à la division décimale du quadrant.
» Les deux exemples personnels qu'il (M. Airy) veut bien citer, ajoute notre
» confrère, montrent qu'un calculateur sagnce préfère la division décimale
» quand il s'agit d'un travail considérable. »
» Le savant directeur de l'Observatoire de Greenwich a donné, en
mainte circonstance, les preuves d'une sagacité incon[eslah\e; mais il
faut reconnaître que, dans le cas dont il s'agit, M. Airy a simplement fait
comme beaucoup de ses prédécesseurs. En effet, les Tables astronomiques
renferment un grand nombre d'arguments qui sont exprimés en parties
décimales de l'angle droit; ajoutons que souvent même on en trouve aussi
un grand nombre qui sont rapportés à la circonférence prise pour unité.
Parmi les Tables nouvelles qui présentent cette particularité, il convient
de citer les Tables lunaires de M. Hansen.
)) Laissons un instant les extraits delà correspondance de M. d'Abbadie
et revenons à la question soulevée par notre confrère.
» M. d'Abbadie réclame l'emploi de la division décimale des angles et du
temps. Disons en passant qu'il est vraiment regrettable que les hommes de
science qui ont le plus contribué à la vulgarisation du système décimal, en
soient réduits à faire usage de l'ancien mode de niunéralion des angles et
du temps, et cela uniquement, faute de s'entendre sur l'opportunité des
47-
( 364 )
modificntions à apportera la graduation des instruments et sur la nécessité
de transfortiier heautoiip de résultats théoriques et un nombre considérable
de données expérimentales.
» Les auteurs du système métrique, (pie de pareilles difficidtés n'arrê-
taient pas, ont choisi le jour |)our uni lé de temps, et le quart de cercle
pour unité angulaire. Or M. d'Abbadie, jugeant avec raison que les parties
du jour et celles de la circonférence doivent se correspondre, de telle sorte
que l'on puisse passer sans calcul des unes aux auties, et reconnaissant
l'impossibilité d'oblenir ce résultat avec les unités adoptées par les auteurs
du système métrique, propose de changer l'une d'elles, l'unité de temps,
en conservant l'autre. Il existe évidemment une autre solution qui consiste
à conserver l'unité de temps et à changer l'unité angidaire : c'est celte
solution qui m'a paru le plus avantageuse à beaucoup d'égards. On voit
ainsi c[ue M. d'Abbadie et moi, nous sommes d'accord relativement à
l'application du sysiéme décimal aux angles et aux temps, et relativement
à la nécessité de passer-, sans calcul, des angles aux temps, et inversement:
nous différons d'opinion sur le choix, non des unités, mais de l'une seide
de ces unités, puisque l'adoption de l'une fixe le choix del'atilre, quand
on remplit la condilicu de correspondance des angles aux temps, que je
vier)s de ra|îpeler.
» Malgré cela, j'essayerais en vain de discuter le choix de l'unité de temps,
sans m'occuper de l'unité angulaire: en effet, nous n'avons aucun moyen
sûr de mesurer un temps, qui soit indépendant de la mesure d'un angle.
Les mesures du temps fournies ipar les meilleurs appareils chronométriques
n'offrent aucune sécurité, quand leur marche n'est pas contrôlée par les
passages méridiens des étoiles; on ne peut pas faire usage des indications
de ces appareils, si l'on necotniaît pas leurs mouvements diurnes. Or, comuwui
s'obtient cette évaluation du mouvement diurne, si ce n'est |)ar l'obser-
vation des passages consécutifs d'une même étoile à un méridien donné?
et le fait de ces observations ne constitue-t-il pas très-réellcmcnt la mesure
d'un angle égal à une circonférence (i)? La terre a fait un tour sur son axe
(i) Une circonférence est niesiirce sur un cercle, dès que l'alidade en tonrnant dans nn
même sens vient à passer une prciuière fois ))ar son point de dcpail. Dans le cas qui nous
occupe, l'alidade est la perpendiciiliiiie abaissée de l'étoile sur l'axe de la Terre, au moment
du premier passatçe ; le plan du méridien emporte cette dioite et la ramène au second passage,
ilans sa direction primitive : il faut seulement remarquer que, dans celte mesure d'une
circonférence, l'alidade se meut sans que nous ayons besoin d'y porter la main.
( 365 )
dans lin temps ^gal, par définition, au jour sidéral. Cette durée du jour
est le seul intervalle de temps que les astronomes puissent mesurer avec
quelque confiance dans le résultat; toute fraction de cette durée est incer-
taine, elle ne peut s'obtenir qu'en supposant les appareils chronométriques
doués d'un mouvement parfaitement régulier, et rien ne permet à la
rigueur de constater cette parfaite régularité, pas même l'accord d'un
grand nombre de ces appareils; car ils peuvent être soumis à des influences
perturbatrices communes (température, pression barométrique, actions de
la Lune, du Soleil, des marées, actions magnétiques, etc.).
)) L'unité de temps adoptée parles astronomes, leyo^r^ est donc parfaite-
ment justifiée; elle répond exactement à une circonférence, à un tour, angle
qui fixe la grandeur de cette unité de temps. Quoi de pins )m/i(re/dès lors,
que de prendre la circonférence ou le tour pour unité angulaire, puisque
l'on veut bien rechercher les unités naturelles?
» M. d'Abbadie peut être assuré que le quart de jour ne sera adopté,
pour unité de temps, par aucun astronome, sans en excepter celui qui pré-
side à Berlin la Commission du mètre, et que M. d'Abbadie croit avoir
amené à ses idées. Il ne peut davantage espérer que les ingénieurs consentent
à exprimer en quadrants les nombres de tours dont ils se servent pour éva-
luer la vitesse de rotation des corps tournants.
)) Je pourrais terminer ici cette discussion, cependant il me paraît con-
venable de réfuter les allégations de l'un des correspondants de M. d'Ab-
badie, en ce qui concerne le choix de l'unité angidaire fondé sur l'usage
des Tables frigonométriques décimales.
» Je ne reviendrai pas sur les considérations relatives à la période des
fonctions trigonométriques et à l'analogie que présentent les angles et les
logarithmes, considérations que j'ai présentées dans le cours de la discus-
sion : « La seule raison sérieuse qui puisse, dit-on, ètr-e donnée en faveiu'
» d'une réforme des divisions du cercle, c'est la simplification des calculs
» numériques. » Je suis étonné de voir un mathématicien distingué pro-
duire une telle assertion, je ne la relèverai pas. Mais je lis, à la suite, cette
autre assertion purement gratuite : « Le quadrant est l'unité inévitable pour
» les calculs numériques : c'est l'unité des Tables de logarithmes et la seule
» qui soit naturelle. » J'eusse compris que l'on eût dit : La considération
du quadrant est inévitable; mais, dans cet ordre d'idées, il serait aussi
exact de considérer l'octant, puisque les Tables trigonométriques, calculées
pour un octant, servent aussi bien pour la circonférence entière que pour
( 366 )
le quadrant. Pourquoi donc, s'appuyant sur la considération des Tables
trigonométriques, ne propose-t-on pas de prendre pour unité angulaire la
huitième partie de la circonférence? Au point de vue de l'auteur, cette
unité serait plus naturelle encore que le quadrant.
« Ce serait étrange, dit-on, s'il fallait d'abord retrancher o'',25 de
» 0*1,31884, avant de prendre dans les Tables le sinus de l'angle o'', 3 1884,
» ou bien s'il fallait retrancher o'', 3 1884 de o'',5o, la circonférence étant
M l'unité. Au contraire, avec le quadrant pris pour unité, on n'aurait plus
» qu'à considérer les décimales, puisque, dans ce cas,
sini,35o^ coso,35o,
sin 2 , 35o = — sin o , 35o,
sin3,35o :=■ — coso,35o,
sin4,35o= sino,35o. »
» Ici, l'auteur est tout à fait dans l'erreur. En effet, s'il est vrai qu'il suf-
fise, pour entrer dans les Tables, de considérer l'argument o'', 35o, il n'en
faut pas moins considérer les parties entières i^, a*", 3'', 4'', pour distinguer
s'il faut prendre le sinus cherché dans la colonne des sinus ou dans celle des
cosinus, s'il faut donner au nombre trouvé le signe + ou le signe — .
Supposons que, comme cela arrive fréquemment en Astronomie, on ait
affaire à un angle comprenant plusieurs circonférences, et que cet angle
soit exprimé en quadrants: il faudra préalablement diviser la partie entière
par le nombre 4i et considérer les unités restantes o, 1,2, 3. Il est donc
absolument inexact de dire que Von n'aurait plus qu'à considérer tes déci-
males.
» Au contraire, si l'on prend la circonférence pour unilé, on doit faire
absoltniient abstraction de la partie entière de l'angle donné, et ne s'oc-
cuper que de la partie décimale. Alors il se présentera deux cas : 1° les
arguments des Tables seront compris entre o'' et o'^, 25(*), et les calcu-
lateurs compareront la partie fractionnaire à l'un des nombres o'', aS,
o'^, 5o et 0^,75, exactement comme ils comparent les nombres de degrés
moindres que 36o , à 90, 180 et 270 degrés : dès lors rien ne sera
changé à leurs habitudes; 2" les en-têtes de colonnes des Tables, à l'instar
des Tables anglaises de Robert Shortrede ou des Tables françaises de
Callet, présenteront quatre arguments accompagnés de signes; dans ce
cas, toute opération soustractive se trouvera évitée. Il est bon d'ajouter
(* ) I.a lellre ' désigne ici un Inttr ou une circonférence.
( 367 )
que les colonnes des arguments et leurs en-têtes se trouveront réduits de
moitié, puisque le choix de l'unité angulaire et de l'unité de temps ne né-
cessite plus la distinction entre les angles exprimés en degrés et les angles
exprimés en heures. Les Tables gagneraient ainsi en clarté.
» J'ai dit, dans une précédente Communication, que Padoption de la
circonférence pour unité ne nécessiterait pas le calcul de nouvelles Tables :
je demande la permission de le Caire voir par un exemple.
» Supposons que l'on veuille construire, à l'aide des Tables centésimales
calculées de cent-millième en cent-millième du quadrant, de nouvelles
Tables équivalentes, pour l'étendue, aux Tables sexagésimales de Callet.
Ces dernières, qui sont calculées de lo en lo secondes sexagésimales, se
composent, pour les 45 degrés, de 45 X 60x6 = 16200 lignes. Or si l'on
prend dans les Tables centésimales les nombres correspondants à o'', 00000,
o"!, 00004, o'',ooop8,..., ces nombres répondront aux fractions 0,00000,
0,00001, 0,00002,... de la circonférence, et l'on aura formé une Table
trigonométrique de cent-millième en cent-millième de la circonférence, qui
contiendra ^Xiooooo ou 12600 lignes. Ce nombre est comparable à
16200; l'intervalle des arguments répondrait d'ailleurs à I2",96, nombre
qui n'excède pas beaucoup l'intervalle 10 secondes des Tables de Callet.
Ainsi, il suffirait de prendre les fonctions trigonométriques de quatre en
quatre, dans les Tables centésimales, en les limitant à sept décimales, et
de substituer à leurs argiimenis la série des nombres de cent-millième en
cent-millième, pour avoir des Tables décimales équivalentes à celles de
Callet.
» Un dernier motif est invoqué, en faveur de la division centésimale du
quadi«ant, par celui des correspondants de M. d'Abbadie dont je viens de
discuter les appréciations : « La déftnilion du mètre est la division décimale
» du (jiiarl de la circonférence terrestre. Avec la même division, appliquée
» aux latitudes, on aurait immédiatement la différence de latitude eu kilo-
)) mètres. » Il est vrai que le mètre a été défini la dix-millioiiiiiiie |)iirlie
d'un quart de méridien, comme si tous les méridiens terrestres étaient réel-
lement égaux (ce qui est loin d'être démontré). Mais, cette définition, on le
sait trop bien, n'offre plus aujourd'hui qu'un intérêt historique. L'unité
linéaire dont toutes les nations civilisées réclament l'adoption est le mètre
légal, dont le prototype est déposé aux Archives de France. Or la longueiu-
de ce mètre est telle, qu'un quart de méridien en contient de un à deux
( 368 )
mille en sus des lo millions qu'elle devrait seulement contenir, pour s'ac-
corder avec la définition abandonnée. Il n'y a donc aucune nécessité de
poursuivre une relation chimérique entre le quadrant et le mètre. Dire que
les différences de latitude peuvent, dans le système du quadrant pris pour
unité, s'exprimer, sans calcul, en kilomètres, c'est faire complètement
abstraction de l'aplatissement terrestre et des inégalités de la surface de ni- ^
veau. Un svstème qui d'ailleurs se prêterait à un tel résultat laisserait tou-
jours des calculs à effectuer pour les longitudes dont on s'est gardé de par-
ler, et que cependant il importe de considérer autant que les latitudes. »
PHYSIQUE. — Quelques mots nu sujet de la Note insérée par M. Jamin dans
le Compte rendu du 8 août. Note de M. H. Sainte-Claike Deville.
« Je n'ai rien à ajouter aux observations très-élémentaires que j'ai op-
posées aux conclusions de M. Jarain. Je termine, pour ce qui me concerne,
cette discussion, désormais inutile à la science, par un acte de justice qui
me décide seul à prendre la parole aujourd'hui.
« L'idée nouvelle de M. Jamin, m'écrit un de nos plus éminenls con-
» frères, est très-explicitement développée dans le Mémoire de Person
» [Jnncdcs de Chimie et de Physique, 3* série, t. XXXIII), où l'on trouve
» identiquement la même formule, sauf les notations. Seulement, il ne la
» donne que poiu- ce qu'elle est : savoir une relation entre les diverses
» quantités de chaleur que peut dégager luie même réaction, suivant la
« température à laquelle elle se passe. »
» Je regrette de n'avoir pas profité de cette circonstance, qui m'était
inconnue, pour rendre témoignage aux travaux d'un ancien collègue et
d'un savant ami, M. Person, dont les travaux ont une très-haute valeur. »
Le P. Secchi, en présentant à l'Académie le volume qu'd vient de publier
sous le titre « le Soleil », s'exprime comme il suit :
« J'ai l'honneur de présenter à l'Académie l'ouvrage que je viens de
publier sur le Soleil. Ce livre contient tous les travaux qui ont été effectués
pendant les dernières années, non-seulement au Collège Romain, mais par
tous les savants contemporains qui s'en sont occupés. J'espère qu'il sera
trouvé au niveau de la science actuelle.
» L'ouvrage est divisé en trois Parties. La première, après l'exposé des
moyens modernes d'observation, contient ce qui regarde la structure du
( 369 )
Soleil; la seconde, ce qui concerne l'influence de cet astre dans l'unisers;
la troisième, ses relations avec les étoiles.
» Les recherches spectrales et les dernières découvertes faites pendant
les éclipses ont reçu des développements considérables. Je prends la liberté
de signaler ce fait, que tout ce qui est exposé dans ce livre a été, autant
qu'il était possible, contrôlé par ma propre observation.
» Je dois remercier ici mon confrère le R. P. Larcher, qui a bien voulu
se charger de revoir mon manuscrit, pour en faire disparaître les touriuires
étrangères, et l'éditeur M. Gauthier-Villars, qui n'a épargné ni soins ni
sacrifices pour rendre l'exécution de l'ouvrage parfaite à tons les points de
vue. o
MÉMOIRES PRÉSENTÉS.
M. Cauvet adresse la troisième Partie de son Mémoire concernant l'ac-
tion produite par le cytinet siu' les racines des Cistes.
(Renvoi à la Section de Botanique.)
CORRESPONDANCE .
CHIMIE ORGANIQUE. — Sur l'alcool ainylique normal. Note de MM. Ad. Lif.bkn
et A. Rossi, présentée par M. Wuriz.
« Nous avons fait connaître, l'année dernière, lui nouvel alcool butylique
différent de l'alcool de fermentation et représentant le quatrième terme dans
la série homologue des alcools normaux. En prenant cet alcool pour point
de départ et en appliquant, pour nous élever dans la série, les uiéines mé-
thodes synthétiques qui nous avaient conduits jusque-là, nous avons réussi
à obtenir un nouvel alcool amylique, que nous appelons normal, et qui offre
avec l'alcool amylique connu les mêmes relations que celles que présente
notre alcool butylique avec l'alcool butylique de fermentation.
» Pour obtenir ce nouvel alcool, nous avons commencé par préparer le
cyanure de butyle normal et l'acide valérique, qui lui correspond. Cet
acide est encore nouveau, et isomère avec l'acide valérique, qu'on obtient
par l'oxydation de l'alcool amylique ordinaire. L'acide valérique normal
ressemble d'adleurs beaucoup à l'acide connu, seulement son odeur se
rapproche un peu plus de celle de l'acide butyrique. Il bout, d'une ma-
nière constante, à i84 ou i85 degrés, sous la pression de 736 millimètres.
C. R., 1870, 2» Semestre. (T. LXXI, N» 7.) 4^
( 370 )
Ses sels et surtout ceux des métaux lourds ne sont que très-imparfaitement
humectés par l'eau. Son sel de baryum cristallise en petites paillettes anhy-
dres, tandis que le valérate ordinaire de baryum est un sirop incristalli-
sable. Nous décrirons, du reste, cet acide, ainsi que tous les corps que
nous avons fait dériver de l'alcool butylique normal, dans un Mémoire
s|)écial.
» Le sel de chaux de l'acide valérique normal a été mélangé avec du
formiate, et le mélange soumis par petites portions à la distillation sèche.
On a obtenu, de cette façon, l'aldéhyde valérique, bouillant à environ
I02 degrés et isomère avec le valéral. Cette aldéhyde, traitée par l'hydro-
gène naissant, nous a fourni l'alcool.
» L'alcool amylique normal ressemble beaucoup à l'alcool amylique de
fermentation. Il s'en distingue par son point d'ébullition plus élevé, qui est
à 187 degrés, sous la pression de 740 millimètres. Il donne par l'oxydation
de l'acide valérique. Nous avons préparé, par des méthodes connues, le
chlorure, le bromure, l'iodure, l'acétate d'amyle. Tous ces éthers ont été
obtenus à l'état de pureté, et possèdent des points d'ébullition supérieurs
à ceux des éthers'amyliques ordinaires. La constitution de l'alcool amylique
normal doit être exprimée par la formule
CH' = C
CH'.OH
CH'.CH'.CH^CH'
H
H
OH,
tandis que l'alcool amylique de fermentation a probablement la constitu-
tion qui lui a été attribuée par M. Erlenmeyer, savoir
CH' CH'
\/
CH = C
CH'
CH^OH
CH'.CH(CH')'
H
H
OH
M On a nommé auparavant, et quelques chimistes continuent encore à
nommer, alcools normaux les alcools de fermentation. Or on sait mainte-
nant que les sucres fermentes contiennent des alcools de nature diverse,
qu'on ne peut pas réunir dans la même série. D'ailleurs il est évident que,
dans ce cas, la provenance ne nous enseigne rien sur la constitution de ces
substances. Ce fait fortuit qu'un corps est connu depuis longtemps (comme
l'alcool amylique ordinaire) n'est pas non plus une raison pour en faire la
( 371 ) ^
base d'une classification scientifique. Nous réservons donc le nom d'alcools
normaux à ceux des alcools primaires dont les atomes sont combinés de
la manière la plus simple qu'on puisse concevoir, en formant une chaîne
des atomes de carbone. En mettant de côté toute hypothèse, on peut encore
définir les alcools normaux comme ceux, parmi tous les isomères :
u 1° Qui sont les plus stables et qui ont les points d'ébullilion les plus
élevés;
» 1° Qui donnent les éthers les plus stables (notamment qui ne se dé-
composent pas aussi facilement en produisant CH"") et qui ont les points
d'ébullition les plus élevés;
» 3° Qui donnent à l'oxydation des acides contenant le même nombre
d'atomes de carbone, acides qui, parmi les isomères, ont les points d'ébul-
lition les plus élevés et paraissent résister le mieux à l'oxydation ultérieure.
» Quant à la constitution que nous attribuons à l'alcool amylique normal,
nous nous appuyons, pour la démontrer, sur la série des réactions synthé-
tiques que nous a fournies ce corps. Nous avons dit qu'il a été préparé au
moyen de l'alcool butylique normal, et cet alcool à son tour s'obtient,
comme on se le rappelle, avec l'acide butyrique de fermentation. Tous les
chimistes sont d'accord sur la constitution de cet acide, qu'on peut exprimer
par la formule CH'-CH^-CH^-CO.OH. D'ailleurs, l'un de nous l'a préparé
synthétiquement avec l'alcool propylique normal, qu'il avait obtenu au
moyen de l'acide propionique préparé avec le cyanure d'éthyle.
» Il y a donc un enchaînement régulier de réactions synthétiques, qui
rattache notre alcool amylique normal à l'alcool éthylique, et nous nous
fondons sur la constitution bien connue des coipposés éthyliques pour en
déduire celle de l'alcool amylique. Une telle conclusion serait sans doute
bien téméraire, si nous nous étions limités à étudier seulement notre point
de départ (l'alcool éthylique) et le produit final (l'alcool amylique normal).
Mais nous avons eu soin d'étudier tous les nombreux produits intermé-
diaires, d'établir la constitution chimique et d'examiner les propriétés
physiques de chacun des produits de transformation, qui successivement
sont passés entre nos mains, et c'est cette étude longue et pénible qui
nous donne la confiance d'énoncer que l'alcool amylique, qui fait l'objet
de cette Note, est un corps nouveau, le véritable homologue de l'alcool
éthylique, et qu'il possède la constitution que nous lui avons assignée. »
48.
( 37a )
CHIMIE ANIMALE. — Recherches expérimentales sur les modifications de la
con)position immédiate des os. Note de M. F. Papillon, présentée par
M. Wurlz.
« Il est aujourd'hui démontré, jusqu'à 1 évidence, que les phénomènes
de ht vie sont toujours le produit régulier d'un ensemble d'éléments déter-
minés, la fonction précise d'un certain nombre de facteurs assignables.
Parmi ces facteurs des diverses équations vitales, les uns sont à peu près
fixes, les autres sont variables dans de certaines limites, susceptibles de
maxiîna et de minima.
» Cette conception générale a été pour moi le point de départ d'une
série de recherches concernant justement les limites et les variations du
déterminisme physiologique. J'ai commencé par étudier dans quelle mesure
les principes immédiats normaux de l'économie peuvent être remplacés par
d'autres principes, et je suis arrivé dans cette voie à des résultats intéres-
sants.
» Je demande à l'Académie la permission de lui en signaler brièvement
quelques-uns relatifs à la composition immédiate des os, me réservant
d'insister plus tard sur les questions nombreuses que soulève déjà l'examen
attentit deces faits, et sur la doctrine qu'une grande quantité d'expériences
en cours d'exécution permettra d'établir touchant les transmutations dans
l'ordre et la nature des ingrédients de l'organisme.
» Les recherches que je résume ici, et dont je ne fais ressortir que la
conséquence la plus immédiate et la plus saillante, démontrent que l'on
peut substituer une certaine quantité de strontiane, de magnésie, d'alumine
à la chaux normalement contenue dans les os.
» Expérience I. — Le lundi 6 septembre 1869, un jeune pigeon est
renfermé dans une cage et soumis au régime suivant : eau distillée mélangée
de chlorures, carbonates, su.lfates et nitrates de potasse et de soude dans
la proportion de i ^ gramme par litre; blé roulé dans luie pâte fine, ob-
tenue avec du phosphate de strontiane pur et le liquide précédent addi-
tionné d'un peu d'acide chlorhydrique (i).
(i) .le dois dire ([ue ce l)lé n'a pas été trié grain par grain, et c'est un tort grave, <]iie Je
n'ai pas commis dans les expériences qui m'ont occupé depuis. Le blé des grainetiers con-
tient toujours des fiagiiienls et des cailloux calcaires, aux(pi(ls il faut certainement attribuer
la quantité de chaux encore notable ipii a subsisté dans les os dont l'examen fait l'objet de
ce travail.
( 373)
» La vie de l'animal ne semble pas éprouver de modification sous l'in-
fluence de ce régime. Toutes les fonctions s'accomplissent de la façon la
plus régulière.
» Le i" avril 1870, le pigeon est sacrifié. Il est cuit et désossé avec
toutes les précautions convenables. Les os sont calcinés et l'analyse des
cendres donne, en centièmes, les chiffres suivants :
Chaux 4*3» 7^
Strontiane 8 ,45
Acide phosphorique 4" >8o
Phosphate de magnésie i ,80
Résidu 1,10
99>8o (i)
» Expérience II. — Le 16 septembre 1869, un petit rat blanc âgé, de
dix jours environ, est enfermé seul dans une cage et mis au léginie d'eau
distillée et minéralisée comme dans le cas précédent, de riz et de gluten
additionnés de phosphate d'alumine dans la proportion de moins de i dé-
cigramme par jour.
» Aucun changement sensible ne se manifeste dans la santé ou dans les
habitudes de l'animal.
» Le 29 novembre de la même année, au moment où je m'apprêtais à
lui donner de la nourriture, le rat meiut après quelques convulsions. L'au-
topsie révèle des désordres intestinaux et une sorte d'entérite grave. L'in-
testin est noir-violâtre et rempli de sang. Je songe alors à examiner mon
phosphate d'alumine, et j'y trouve une certaine quantité de grains durs et
moins ténus que les autres. C'est probablement, l'action prolongée et toute
mécanique de ces grains sur l'intestin qui a déterminé l'irritation mortelle.
» Le rat est bouilli dans l'eau distillée, puis désossé; 100 d'os calcinés
donnent à l'analyse :
Alumine 6,9$
Chaux 4 ' > ' " ( ' )
» Expérience III. — Le 16 septembre 1869, un petit rat blaiu-, frère du
précédent, est soumis aux mêmes conditions, à cela près que le phosphate
d'alumine est remplacé par du phosphate de magnésie. Il est l'objet des
mêmes soins et des mêmes observations.
» Le aS novembre suivant, ce rat est sacrifié, en pleine vigueur. Les os
( I ) Analyse faite par M. Pisani.
( 374 )
obtenus, et traités comme clans l'autre cas, sont soumis à l'analyse et don-
nent siu" loo :
Magnésie 3 ,56
Ctiaux 46,i5 (i)
» J'ajoute que, chez tous ces animaux, les os avaient conservé leur
aspect et leurs propriétés physiologiques, qu'aucune perturbation ne s'était
produite dans le système de leurs fonctions normales.
» Voilà les laits positifs que je tenais à communiquer à l'Académie.
D'autres expériences, plus décisives, plus complètes, et entreprises sur un
champ plus étendu, donneront, je l'espère, une nouvelle force et un nouvel
aspect à la démonstration que je poursuis. Encore une fois, je réserve pour
l'avenir toute discussion théorique et touie induction doctrinale, qui seraient
aujourd'hui prématurées.
» Ces recherches ont été faites dans le laboratoire de mou éminent
maître M. Ch. Robin, que j'aime à remercier ici de son affectueuse bien-
veillance et de ses précieux conseils. »
PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. — Sur la zone (jénéralrice des appendices
chez les végétaux moiiocot/lédons. Noie de 31. Cave.
« Chez les plantes monocolylédones, la zone génératrice occupe, dans
la feuille normale ou modifiée, la position que nous avons déjà signalée,
c'est-à-dire qu'elle correspond à la face supérieure ou interne de l'organe.
» Voici les principaux arguments que je fais valoir pour établir cette
vérité. Qiiehpies-uns sont empruntés à des travaux antérieurs, d'autres me
sont personnels.
» Chez les Orchidées, M. Tréciil divise la structure des feuilles eu trois
types. Dans le troisième, il conslate que le tissu vert est isolé de l'épiderme
par des titricules incolores et que ces cellules ne sont pas toutes de même
nature. Il a remarqué que le développement de ces diverses rangées de
cellules se fait de la face inférieure de la feuille à sa face supérieure.
» Dans les planches qui accompagnent son Mémoire sur la sécrétion pré-
sentée par la feuille du Colocasia anlicpioruni, M. Duchartre montre, de la
manière la ])lus nette, cpie le lissu perpendiculaire ou serré est plus jeune
que le reste du mésophyiie. Taudis que ce dernier est, chez certaines
feuilles, parvenu à sa structure iléfinitive, le tissu serré conniience à peine
(i) Ces analyses ont été faites par M. Cliarles Mène.
( 375 )
à s'organiser sur un organe un peu jeune : il est réduit à une couche. Dans
un appendice un peu plus âgé, on trouve, selon les points, une seule ran-
gée de ce tissu, ou deux tout au plus. Il y eu a deux ou trois séries dans
la feuille adulte. Sur uue même section transversale, pratiquée dans une
feuille qui n'a pas encore atteint son état définitif, on voit cette page supé-
rieure apparaître vers le milieu et manquer sur les bords.
» Afin de généraliser ces résultats, j'ai examiné avec attention un cer-
tain nombre de feuilles appartenant à des plantes du deuxième embranche-
ment. Parmi celles-ci, je citerai particulièrement les suivantes : Chamœrops
humitis, Phœnix dactylifera, Agave americana, Yucca nioëfolia, Hedychium
Gœrtiieridnuiii, Hœmantlms cocciiieus, Arundo donax. J'ai même dessiné un
certain nombre de figures relatives à cette dernière plante.
» Ne voulant pas entrer ici dans des détails que je réserve pour im
Mémoire plus développé, je me contenterai de dire : Le développement du
parenchyme rappelle, à s'y méprendre, celui du mésocarpe et s'effectue dans
le même ordre. Des conclusions identiques s'imposent donc à nous : nous
devons considérer comme plus âgé le tissu infériein-, comme plus jeune la
région voisine de l'épiderme supérieur.
» L'examen des faisceaux fibro-vasculaires confirme ce qu'a montré
l'étude du parenchyme. Quelle que soit la plante monocotylédone dont
nous ayons regardé la feuille au microscope, nous avons constamment vu
les faisceaux en question plus jeunes à la face supérieure qu'à la face in-
férieure. Dans V Arundo donax, si l'organe est très-jeune, on remarque une
seule rangée de nervures, celles qui, plus tard, correspondront à la face
extérieure. Mais, naturellement, la page supérieure ne s'étant pas encore
développée, ces nervures sont assez rapprochées de l'épiderme supérieur.
A mesure que l'organe avance en âge, ces mêmes nervures .sont éloignées
de la face supérieure par le développement des parties nouvelles. En même
temps, de nouveaux faisceaux fibro-vasculaires apparaissent dans ces por-
tions récemment formées. Aussi l'organe adulte a-t-il deux couches de ner-
vures : les plus âgées sont à la face inférieure, les plus jeunes occupent la
face supérieure.
» Ainsi, les mêmes lois régissent le développement des feuilles en épais-
seur, dans les rletix embranchements de plantes phanérogames. S'il s'agit
d'appendices modifiés, ces conclusions conservent leur vérité. Pour s'en
convaincre, il suffit de se reporter à létude faite par M. Trécul sur la struc-
ture du grain de blé et aux conséquences théoriques que jeu ai déduites.
Dans mes travaux sur les fruits, j'ai fréquemment analysé des ovaires
( 37f> )
adultes chez des plantes monocotylédones, liliacées ou autres, et j'ai con-
stamment trouvé la zone formatrice occupant la même place que dans les
fruits provenant de végétaux dicolylédons. »
HISTOIRE DES SCIKNCES. — Sur les découvertes nstronotniques des anciens.
Note de M. AV. de Foxvielle, présentée par M. Jamin. (Extrait.)
« M. Litirow a prononcé, il y a quelque temps, à Vienne, un discours
sur Vimperfeclion des connaissances scientifiques des anciens, qui a été traduit
daTis un de nos journaux scientifiques. Les principaux arguments de
M. Littrow sont empruntés au beau Traité écrit par Plutarque sur les
taches de la figure de la Lune.
» Ce Traité renferme, entre autres, lui passage qui me paraît avoir été lu
par Newton avec plus d'indulgence que par le savant astronome autrichien.
Ce passage (p. 1 1 3o du second volume des OEuvres momies de Plutarque,
édition Didot) peut se traduire comme il suit :
'< Le mouvement même de la Lune, le tourbillonnement produit jwr sa révolution autour
de la Terre est ce qui l'cnipéche de tomber. C'est ainsi que le mouvement circulairi' des
objets placés dans une fronde s'oppose à ce qu'ils reviennent au centre. Car il est dans
la nature du mouvement d'entraîner chaque corps, à moins qu'il ne soit détourné par un
autre. Si la pesanteur ne fait pas tomber la Lune, c'est <lonc parce que sa tendance est détruite
par le mouvement circulaire. Ce qui serait étonnant, ce serait que la Lune ne tombât point,
si elle demeurait en repos cnnimc la Terre et qu'elle fût dépourvue de rotation. »
» Je doute beaucoup que M. Littrow puisse, en 1870, s'exprimer
d'une façon plus nette et plus précise. »
M. P. CosTE adresse une Note relative à l'équivalent mécanique de la
chaleur.
M. DE Saint-Cricq Casacx adresse, de Chàteauneuf, une Note relative
au maxiiuiun de température du 2/4 juillet dernier.
« M. DE Tessan, au nom de M. A. Cialdi, fait lionirnage à l'Académie
d'un exetuplaire d'une nouvelle publication de ce savant Italien.
» Cet ouvrage, écrit en français, porte pour titre : Les Ports-Chenaux et
Port-Saïd, et contient, en 160 pages, un résumé coiuplet des faits et des
principes développés dans son grand ouvrage : Sul moto ondoso del mare et
su le correnti di esso, ecc.
( 377 )
» On y trouve, en outre, un nouvel et cliautl plaidover en faveur de Vap-
plication, à Port-Saïd, de l'ingénieux expédient que le savant auleur a
imaginé pour empêcher les barres de se former à l'entrée des chenaux. «
La séance est levée à 3 heures trois quarts. D.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
I/Académie a reçu, dans la séance du 8 août 1870, les ouvrages dont
les titres suivent :
Le Jardin fruitier du Muséum; par M. J. Decaisne, Membre de l'Institut,
109'= liv. Paris, 1870; in-4°, texte et planches.
Etudes sur la genèse et la propagation du charbon; pur M. C. D.WAlNE.
Paris, 1870; br. in-8°.
Recherches sur les causes et les lois des mouvements de ralmosphère; pm- le
P. J.-M. Sanna-Solaro. Vents rectilignes. Paris, 1870; in-8°.
Recherches générales sur les surfaces courues; par M. C.-F. Gauss, traduites
en français; suivies de notes et d'études sur divers jwinls de la théorie des sur-
faces et sur certaines classes de courbes; par M. E. RoGER, a'' édition. Gre-
noble, 1870; in-4°.
Méthode et formule pour la résolution des équations du troisième degré ; par
M. Roger Alexandre. Paris, sans date; in-8".-
Essais de physiologie universelle. Théorie des lois de l'c(juiUbre ; par M. II.
Laroque. Paris, 1870; in-12.
Paléontologie française ou Description des animaux invertébrés fossiles de la
France. Terrain crétacé, iiv. aS, t. VIII, Zoophyles; par M. DE Fromentel.
Paris, 1870; in-8" texte et planches.
Annales de la Société impériale d'Agriculture, Industrie, Sciences^ Arts et
Relies- Lettres du département de In Loire, t. XIII, année i8Gt), liv. 1 à /j,
janvier à décembre. Saint-Étienue, 1870; in-S".
Noie sur une caverne à ossements de l'île de Malte; par M. A. ISSEL. Paris,
1870; opuscule in-8". (Extrait des Matériaux pour l'Histoire de l'homme.)
c. R., 1870, 2« Semestre. (T. LXXl, M» 7.) • ^9
( 37» )
Résumé des reclitrclies conrernanl l'ancienneté île r homme en Liijurie; par
M. A. ISSEL. Paris, 1870; opuscule in-8°. (Extrait des Comptes rendus du
Comjrès d'anltiropologie et d'archéologie préliisloriqiie.)
Questions mises nu concours j)ar la Société des yJrts et Sciences, élnhlie à
Ulrecht [Pays-Bas), 1870. Sans lieu ni dali>; opuscule in-8'\
Animal... Rapport annuel du Commissaire pour les brevets d'' invention,
année 18(37, '• I ^ i^'- Washington, i8()8; 4 ^o'- iii-8" reliés.
L'Académie a reçu, dans la séance du 16 août 1870, les ouvrages dont
les titres suivent :
Le Jardin fruitier du Muséum ; par M. J. Decaisne, Membre de l'Institut,
liv. I 10. Paris, 1870; in-4°, texte et planches.
OEuvres de La/jrange^ publiées ]>fir les soins de M. J.-A. Serret, sous les
auspices de S. Exe. le Ministre de i Instruction publique, t, Y. Paris, 1870;
in-4°. (Présenté par M. Serret.)
Le Soleil; par le P. A. Secchi. Paris, 1870; in-8'\ (Présenté par l'aiiteur.)
Maladie de la vigne. Le Phylloxéra. I/istructions prntiipics adressées par
MM. J.-E. PLAiNcriON elJ. Lichtenstein. Montpellier, 1S70; hr. in-8".
La phlhiriose ou pédiculaire de la vigne chez les anciens, et les coche-
nilles de la vigne chez les modernes; par M. J.-E. Planchon, Paris, 1870;
hr. in-8°.
Maladie de la vigne. Conseils pratiques contre le Phylloxéra ; par MM. J.-E.
Planchoîn ef J. Lichtenstein. Montpellier, 1870; l)r. in-8".
Essais préliminaires sur la destruction du Phylloxéra; par j\L J.-E. Plan-
chon. Montpellier, 1870; hr. in- 12°.
Mémoire sur l'insalubrité des poêles enfante; par M. Carret. Chamhéry,
18G9; in-8°.
Du chauffage des magnaneries comme cause et comme remède de la maladie
des vers à soie; parM. Carret. Clunubéry, 1870; in-8".
(Ces deux derniers ouvrages sont adressés par l'auteur à la Coin mission
des Arts insalubres.)
Les ports-chenaux et Porl-Said; par M. A. ClAl.DI. lîomo, 1870; iii-8".
(Présenté par M. deTossan.)
( 379 )
Du calcul des machines à vapeur clans le cas de la détente; par M. L.-M.-P.
COSTE. Paris et Montpellier, i87o;in-i8.
Rapport sur i ostréiculture à Arcaclion et à Hayling en 1869; par M. J.-L.
SOUBEYRAN. Paris, sans date; opnscule in-8°.
Rapport sur l'acclimatation du saumon en Tasmaniej par M. J.-L. Sou-
BEYRAN. Paris, sans date; opuscule in-8°.
Rapport sur l'exposition des produits de pêche de la Haye en 1867; par
M. J.-L. SouBEYRAN. Paris, 1870; in-8°.
La pêche du hareng ; par M. J.-L. SouBEYRAN. Angers, sans date;
br, in-8°.
Alimentation des armées en campagne: viande de cheval; par M. Degroix,
vétérinaire en premier à la Garde de Paris. Paris, 1870; opuscule in-8''.
Délia... De la variabilité des espèces : Note sur la théorie de Darwin; par
M. A. IsSEL. Gènes, i865; br. in-8°.
Délia... De la faune malacologique de la mer Rouge; parM. A. ISSEL. Flo-
rence, 1870; br. in-8''.
Dei... Des tnollusques terrestres et d'eau douce recueillis dans r archipel de
Malte; Note par M. A. Issel. Pise, 1868; br. in-8°.
Intorno... Note sur le Chiton de la mer de Gènes; par M. A. IssEL. Sans
lieu ni date; opuscule in-8°.
Ostriche... Huîtres de la porte de Gênes; par M. A. ISSEL. Turin, 1868;
br. in-80.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI 22 AOUT 1870,
PRÉSIDÉE PAU M. DELAUNAY.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
MiiTROLOGiE. — Note sur la première session de In Commission inlernalionale
du mèlre, tenue à Paris du 8 n» i3 août 1870; par M. i-e cÉxÉnAi, Moiii\.
« L'Académie sait que le Gouvernement de l'Empereur a proposé, en
i86q, aux divers États étrangers avec lesquels il était en relations, la for-
mation d'une Commission internationale chargée de l'exécution d'un
mètre, aussi cxaclement que possible égal à celui des Archives de l'Empire.
» L'époque de la réunion ayant été fixée antérieurement aux événe-
ments actuels, et une partie des savants désignés étant déjà arrivés on en
route pour se rendre à Paris, il n'était pas possible de différer celle jire-
mière session, et elle a eu effectivement lieu au jour indiqué.
)) M. le Ministre de l'Agriculture et du Commerce ayant désiré con-
naître l'ensemble des travaux de cette session préparatoire, je lui ai adressé
le Rapport sommaire suivant, qu'avec son autorisation, et d'accord avec
M. Mathieu, Président de la Commission, il me parait intéressant de faire
connaître à l'Académie :
« La Commission a clos, le samedi 1 3 août, cette première session oiivcric le 8 de ce mois,
et, après avoir arrêté le programme des principales questions qu'il convient de meure à
C. K., 1S70, 2<= Semestre. (T. LXXI, N" 8.) 30
( 382 )
l'i-tude, elle s'est ajournée, sans date déterminée, à une épo(|ne assez, ralnic pour pernieltio
à tniis les pays intéressés d'y envoyer leurs délégués.
» Sur vini;t-tinq États étrangers qui avaient accepté l'invitalion de la France, vingt étaient
représentés; ce sont :
» L'Aulriclu'-Hongrie, le Chili, la Colombie, l'Kspagne, les Étals Romains, les Élats-tnis
de l'Amérique du Nord, la Répuliliipie de l'Equateur, la Grande-Uretagne, la Grèce, l'Italie,
le Nicaragua, le Pérou, le Portugal, la Russie, San-Salvador, la Norvège, la Suède, la Suisse,
la Turquie.
11 Les hommes distingués dont la Bavière, la Confédération de l'Allemagne du Nord et le
Wurtemberg nous avaient fait espérer le l'onconrs, n'ont pu se rendre à voire appel; leur
absence nous a paru très-regrettable, et nous aurions vivement désiré les voir participer à
nos travaux.
11 .Te joins à ce Rapport l'état détaillé de la composition de la Commission.
Il Le nombre des États rcpréscnlés et la haute conipélence des Coujmissaires présents ont
donné ù cette iireniièrc session une grande importance ])Our les travaux fulurs de la Com-
mission internationale, dont le premier soin a été de constituer son Rureau, que, d'un
accord unanime, elle a composé ainsi qu'il suit :
Président: M. Mathieu, de l'Inslilut de France.
/ M. Strove, de l'Académie des Sciences de Saint-Pétersbourg;
l M. JIiLLER, de la Société Royale de Londres;
M. Hekrt, Secrétaire de l'Institut smithsonien;
JL HhRR, Professeur de Géodésie et d'Astronomie à l'École Polytech-
nique de Vienne;
M. le général Morin, de l'Institut de France.
M. Tresca, Sous-Directeur du Conservatoire dos Arts et Métiers;
M. MiRscH, Directeur de l'Observatoire de Neufchàtel.
Fice- Présidents :
Secrétaires :
» Le mode de votation a été, de l'avis de MM. les Commiss.iiies étrangers, n-glé sur le
pied de l'égalité pour tous les Membres présents, comme le plus simple et le plus pratique,
mais seulement en ce qui concerne les travaux ])réparatoires.
1) Après avoir |)ris une connaissance sommaire des éludes préparatoires de la Commission
française, la réunion, dans une discussion générale des questions ([u'il lui paraissait impor-
tant de traiter et en admettant que celle de l'exécution d'un mètre international devait
avoir la priorité, a exprimé le vœu que son jirogranuuc fût étendu aux autres éléments
du système métrique et en particulier à l'uniié de poids.
» Votre prédécesseur, par l'organe de M. le Directeur du commerce intérieur et de l'in-
dustrie, qu'il avait chargé de le représenter,, a fait connaître à la Commission qu'il adhérait
ù ce vœu, pour tout ce (jui se rapporterait au système métrique en lui-même. Cette Com-
munication, (jui a été reçue avec une grande satisfaction, a conduit la Commission à établir
les programmes de deux ordres tie (piestions principales, dont elle ])ropose l'étude à tous
ses Membres.
■> Les premières relatives au mètre lui-même. Les .secondes conceinant le kilogramme.
)i La Commission s'est aussi occupée des mesures de conservation à prendre, quant aux
étalons internationaux.
( 383 )
« Toutes ces études proposées et demandées aux Membres de la Commission interna-
tionale, et dont les résultats doivent servir de base à ses résolutions ultérieures, sont de
nature à être |)oursuivies séparément par chacun de ses Jlenibres, dans l'intervalle des
réunions.
» Mais la Commission a pensé qu'il serait utile d'en faire une obligation dincte à un
Comité des travaux préparatoires qui sciait composé d'un certain nombre de Comiiiissaircs
étrangers et de tous les Membres de la Commission française.
» M. Airy, assisté de M. Chisholni, M. le général baron Wrède, et MM.Wild, Hirsch,
Ibanez, Steiubeil, Fœrster, Lang et Hilgard, ont été désignés pour faire partie de ce Comiié.
» Il a d'ailleurs été expressément entendu que tous les Slenibres de la Commission inter-
nationale pourraient de droit partici| er à ces études et qu'ils jjrendraient part aux travaux
du Comité toutes les fois qu'ils se trouveiaient à Paris.
» Pour tenir, en outre, tous les Membres au courant des travaux déjà faits ou à faire,
il a été décidé que, non-seulement les procès-verbaux détaillés des séances antérieures de la
Commission française, mais encore ceux des séances de la première réunion de la Commis-
sion internationale, ceux des séances ultérieures du Comité et même les documents adressés
par des Membres de la Commission seraient imprimés in e.rtenso et envoyés à chacun d'eux.
■> Tel est. Monsieur le Ministre, l'ensemble des résultats généraux de cette première réunion,
essentiellement prépaiatoire, pour les travaux d'une Commission inlernalion:de à huiuelle
tant de Gouvernements différents, au nombre desquels se trouvent cette fois ceux des divers
Etats de l'Amérique, ont accepté tle participer, par l'envoi de Commissaires choisis parmi
les illustrations de la science. Tenue au milieu des graves préoccupations que suscite la lulte
gigantesque qui émeut le monde entier, cette réunion, par le calme qui y a régné, par la
libéralité, par la bienveillance réciproque, par le remarquable esprit de concorde et de con-
ciliation qui ont présidé à ses discussions, ainsi que par l'étendue et la profondeur des
vues et des connaissances scientiliques qui y ont été exposées, nous a offert le spectacle
consolant d'une assemblée d'hommes éminents, étrangers les uns aux autres par la natio-
nalité, mais liés par un commun amour de la science et de la civilisation. «
MEMOIRES PRÉSEIVTÉS.
M. H. Meyer adresse, de Charleston, iiiie siiile à ses recherches rela-
tives aux questions d'analyse indéterminée.
(Renvoi à la Section de Géométrie.)
M. Del.iurieu adresse une Noie relative à un procédé particulier pour
lancer les projectiles de guerre.
(Commissaires: MM. Morin, Piobert, Vaillant.)
M. GiKAKu adresse une Note relative à une disposition destinée à per-
rver à de grandes distances.
(Commissaires: MM. Morin, Piobert, Vaillant.)
5o..
mettre d'observer à de grandes distances
( 384 )
M. TosTiviNT adresse, c!e Tréiiuison, une nouvelle Note relative à foii
procédé pour élever les perdrix en domesticité.
(Renvoi à la Commission précédemment nommée.)
MM. PiciioT et Malapert adressent à l'Académie mi spécimen de leurs
« sachets de charpie carbonifères » modifiés de manière à les rendre à la
fois antiseptiques et hémostatiques.
(Renvoi a la Section de Médecine et de Chirurgie.)
CORRESPOND AI\ CE.
M. J. BorssiNESQ prie l'Académie de vouloir bien le comprendre parmi
les candidats à la place laissée vacante, dans la Section de Géométrie, par le
décès de M. Lamé.
(Renvoi à la Section de Géométrie.)
MlîCAINIQUE CÉLESTE. — Sur les iiivgalilés de Ici Lune duesà l'action des planètes.
Extrait d'une i.ettre de M. S. ]\e\vc».mb à M. Delaunay.
« Washington, 38 juillet iS'-o.
» Chargé, en vertu des fonctions que je remplis à l'Observatoire naval,
de revoir la Tliéorie et les Tables de la Lune, je me suis occupé tout d'abord
des inégalités à longue période qui peuvent être produites par l'action des
planètes. J'ai établi, pour les calculer, une méthode dont l'idée m'a été
suggérée par l'étude de votre Théorie de la Lune. Je suis arrivé ainsi à lui
résultat inallendn, que je vous demande la permission de vous comn)ii-
niquer.
» Dans ma métliode, aucune distinction n'est faite entre les inégalités
produites par l'action directe de la planète et celles qui sont réfléchies par
l'intervention de la Terre. Mais, en retranchant de mes expressions, pour
les variations différentielles des éléments, certaines expressions qui sont à
peu près identiques avec les variations produites par l'aclion directe de la
planète, et en considérant les restes de ces soustractions comme re|)résen-
tant les actions réfléchies « par l'intermédiaire de la Terre », il me semble
que ces dernières peuvent être obtenues de la manièie suivante :
» i" Dans votre Théorie de la Lune (t. II, p. 8o3 à 924) vous donnez les
expressions de V, U, P eu fonction de a, r, y, rt', e', /, g, h, /', g', h'. Diffé-
-'Je',
( 385 )
reniions ces expressions de manière à obtenir
da de dg ° ah'
et (le même pour oU et c?P.
). 2." Dans le tome II (p. 235 et 236), vous donnez les expressions de
L, G, Il en fonclion de a, e, 7, a', e' . De là, nous pouvons tirer les équations
huivanles :
O = -7- (?rt + —- tf(? + -;- 07 + ;^ 0« 4- -r7 fJ*
dn de c/y ' a a de
dG , dO ^ dG ^ dQ ^ . dG ^ ,
t/a f/f (^7 ' da' de
dH ^ da . dE ^ "^H . , '^H . ,
rfrt de d'/ ' da' de
« 3" Dans ces expressions, regardons on! et ô*e' comme les variations de
rt' et e' produites par l'action des planètes; alors, des trois équations linéaires
ainsi formées, nous tireron;^ âa, âe et 07. Nous pourrons remai'quer que les
valeurs nnmériqnes de '—-, — -, • • • ? peuvent être employées.
' da r/e ' r J
» /i" Dans les valeurs de '—■> '-^■> '-4 (p. 237 et 238), remplaçons a, e,
* dt dt lit ^^ ' - ' 1 »
7, a\ e\ par a + an, e -+- âe, . . . , e' -h èe\ et nous obtiendrons ainsi
d .5 1 d .rjg d .'1 h
dt dt dt '
d'où, en intégrant, nous tirerons
(?/, 0^', c?//;
nous prendrons pour cl*/', c?i;', 0// les valeurs produites par les pertiul)a-
tioi'.s (les planètes.
» 5" Substituant les valeurs de ùa^ âr,. . . , d'il' ainsi obtenues dans les
expressions de â\, c?U, âP, nous aurons les perturbations [iroduites par
les planètes, réfléchies par l'intermédiaire delà Terre.
» Les seuls termes négligés dans cette théorie contiennent en facteur le
produit de la masse de ia lAine par la force perturbatrice du Soleil ; ils sont
probablement très-petits.
» Je suis arrivé à ce résultat seulement à la iin d'une analyse trop longue
poiu'ètre indiquée dans une lettre.
» A l'aide de ces formules, j'ai f lit un calctd approché des termes dépen-
( 386 )
danl (le 8V— i3E, et j'ai retrouvé en gros [subslanlially] votre résultat de
o", 27. Les deux premiers ternies de raccélération séculaire ont aussi été
exacleinent re|iroduits. »
ÉLECTRICITÉ. — Sur un pliénomène de choc en retour, observé à Porlo-Alegre
[Brésil). Noie de M. Laranja e Oliveira, transmise par M. Meurand.
« Un fait extrêmement curieux de choc en retour, le premier de ce
genre au Brésil, vient de se produire sur un de mes domestiques.
» Le 9 juin, à 1 heures du matin, il rentrait à la maison; l'atmosphère
était chargée d'électricité, les éclairs se succédaient avec rapidité, et le
tonnerre grondait au loin; ti peu de distance du sol planait un éj.ais nuage,
d'où tombaient de larges gouttes de pluie; une légère brise souiflait du
sud.
» A 100 mètres à peu près de ma maison, aux environs de la ville, au
moment où un éclair sans tonnerre paraissait au-dessus de sa lète, il sentit
une forte commotion ; une démangeaison aiguë, comme celle d'une épingle
plantée dans les chairs, commença à la plante des pieds, s'empara des
jambes et de tout le corps; un tremblement et un abattement général le
retinrent sur place; ses cheveux se hérissèrent au point qu'il fut obligé de
retenir son chapeau, afin qu'il ne tombât pas. Il vit pendant ce temps-là
s'élever du sol, à 2 mètres environ de lui, une fumée blanche à la base
(selon ses propres expressions), accompagnée de petits éclairs consécutifs;
le tout n'avait duré qu'un instant.
» Dès qu'il put se mouvoir, il franchit la dislance qiii le séparait de ma
demeure, où il arriva encore atterré du pliénomène doni il venait d'être
involontairement le spectateur, et qu'en homme simple il attribua aux
âmes de l'autre monde.
» Un»' clef de porte qu'il avait dans la poche de son pantalon attirait,
encore deux jours après, une aiguille suspendue à lui fil. »
MÉTÉOROLOGli;. — i^olc Sur les étoiles filaitlcs du mois d'aoïil ; par M. Cuapelas.
(i J'ai l'honneur de mettre sous les yeux de l'Académie le résultat de
nos observations des étoiles filantes périodiques du mois d'août 18^0.
» Je dois, avant loul, signaler cette année comme vraiment exceptionnelle
i)ar la rareté des étoiles filantes en général; depuis longtemps, je pense,
un fait semblable ne s'était pas jiroduit.
u dette pénurie de météores, jointe aux temps souvent couverts, nous a
( 387 )
naturellement empêchés de suivre, ainsi que nous le faisons chaque aimée,
la montée du phénomène d'août, qui commence toujours à s'accentuer dès
les premiers jours de juillet.
» Quant à la constatation du maximum, elle a présenté celle fois une
très-grande difficulté, non-seulement par l'état du ciel presque constam-
ment couvert, mais encore par la présence de la Lune dans son plein à celte
époque.
» Néanmoins, ne voulant pas laisser exister de lacune dans les obser-
vations de ce genre, nous donnons aujourd'hui à l'Académie les résultats
qu'il nous a été possible de recueillir, et cela avec le plus grand soin.
» Pendant la nuit du lo, qui nous a donné une heure et demie de bonne
observation, par un ciel moyen estimé à 0,6, nous avons pu observer
quarante-six étoiles filantes, parmi lesquelles figurent deux bolides de troi-
sième grandeur.
» La direction moyenne des étoiles fihuites était, comme toujours (et
surtout à celte heure, io''i5'°à 1 1''45'"), du nord-est au nord-nord-est. Quant
au point de radiation, vu le petit nombre de météores, il eût été difficile
de le préciser. Les constellations qui ont le plus fourni sont cependant :
Persée, Cassiopée, la Girafe et l'Aigle.
» Opérant comme nous le faisons loujours, afin de pouvoir établir des
points de comparaison, c'est-à-dire ramenant à minuit, par un ciel serein,
le nombre des étoiles observées, et faisant subir à ce résultat la correction
nécessaire pour faire disparaître l'influence de la Lune, nous avons obtenu
pour nombre horaire, moyen, à minuit, cinquante-six étoiles filantes, ce qui
donne sur l'année dernière une petite augmentation de trois étoiles.
» Le phénomène, en réalité, est donc encore à l'état stationnaire.
» A I hein-e du malin, le ciel s'étant complètement couvert, nous n'avons
pu indiquer l'heure exacte du maximum. Mais ce que nous pouvons dire
en terminant, c'est que, pendant l'observation possible, le phénomène
marchait à raison de 0,6 d'étoile filante par minute. »
« M. d'Avezac présente à l'Académie, au nom de l'auteur don Salvador
Clavijo, général du génie de l'armée espagnole, résidant aux Canaries, un
petit volume récemment publié à Sainte-Croix de Ténérife, sous le titre de
Rejlexioiies sobre el sistema planelnrio.
» Le sujet principal des méditations de l'auteur, c'est le mouvement de
rotation des corps célestes compris dans notre système planétaire; mouve-
ment qui, pour les satellites et pour les comètes, est synchronique avec le
( 388 )
mouvement de translation. Il ne peut concevoir que ce mouvement soit si
complètement étranger aux conditions d'iiarmonie générale, qu'il pût être
accidentellement accéléré, ralenti, ou supprimé, sans quil en résultât au-
cune pertuihation dans le système : telle serait bien pointant la consé-
quence rigoureuse de la loi nevvtonienne de 1 attraction, puisqu'elle ne tient
compte, en réalité, que des masses et des distances ; mais cette loi unique
n'est pas irréfragablement considérée comme suffisante pour l'explication
de tous les phénomènes, et l'on a tenté, pour certains cas spéciaux (à pro-
pos des comètes par exemple), de faire intervenir subsidiairement, dans le
vide théorique Hos espaces planétaires, tantôt un éther résistant, tantôt une
force répulsive rayonnante, ou bien encore une polarité ou magnétisme
cosmique, quelque chose enfin qu'il reste à découvrir. Il y a là, suivant
l'expression imagée du savant espagnol, une sorte de protestation de la dé-
mocratie céleste contre le principe d'autorité absolue de la loi d'attraction;
et il en tire argument pour demander que ses vues concernant le mouve-
ment rotatoire ne soient point écartées préjudiciellement, par le seul motif
qu'elles ne seraient pas circonscrites dans les conséquences immédiates de
cette imique loi.
» En sonuiie, l'auteur n'a eu d'autre prétention que de cherchera résu-
mer, dans une formule empirique, à la manière de l'échelle des distances
planétaires de Bodc, l'hypothèse d'une relation qui lui semble devoir exis-
ter, entre les rotations respectives des planètes et de leurs satellites, et, par
une extension ultérieure de sa pensée, entre les rotations des diverses pla-
nètes nuiluellement comparées, et même enfin, entre chacune de celles-ci
et celle du Soleil. Il n'est point arrivé à une expression que les vérifications
numériques aient confirmée d'une manière générale; mais il a rencontré
néanmoins, dans l'application de celle qu'il a essayée, certaines coïnci-
dences notables et quelques tendances d'approximation, par lesquelles il
se croit autorisé à concitue qu'il y a tout au moins des indices plausibles
de l'existence effective d'une relation susceptible d'être fornuilee, les résul-
tats obtenus, tout insuffisants qu'ils soient, ne pouvant être considérés
comme de [iurs caprices du hasarda
» M. d'Avezac dé|)ose sur le bureau, en même temps que le volume, la
traduction d'une lettre espagnole explicative, dont ce petit ouvrage était
accompagné. >>
La séance est levée à 3 lieures trois quarts. E. D. B.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI 29 AOUT 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MÉMOIRES PRÉSENTÉS.
HYDRODYNAMIQUE. — Essai théorique sur les lois trouvées expérimentalement
par M. Biizin pour l'écoulement uniforme de Veau dans les canaux décou-
verts. Noie fie M. J. Roussinesq, présentée par M. de Saint-Venant.
(Renvoi à la Section de Géométrie.)
(c M. Em. Mathieu, en i863 {Comptes rendus, t. LVII, p. Sao), et moi-
même, en 1867 [Comptes vendus, t. LXV, p. 46), nous avons montré que les
formules données par Navier pour représenter les mouvemenls des fluides,
en tenant compte de leurs frottements intérieurs, sont exactes lorsque les
vitesses varient avec continuité d'un point aux points voisins. Il suffit, en
effet, d'admettre que dans ce cas la vitesse est nulle contre les parois
mouillées, hypothèse dont j'établis à l'article cité, par un raisonnement
simple, l'extrême vraisemblance, pour que ces formules conduisent aux lois
expérimentales si précises de M. Poiseuille sur l'écoulement des liquides
dans les tubes capillaires, et aussi, comme je le montre au § X d'un Mé-
moire sur l'influence des frottements dans les mouvements réguliers des fluides
[Journal de Matliématicpies, t. XIII, 1868), à celles de M. Graham relatives
à la transpiration des gaz. Les mêmes formules rendent également compte
de deux lois sur l'écoulement permanent de l'eau à travers les sables, dé-
couvertes par MM. Darcy et Ritter [les Fontaines publiques de la ville de
c. R., 1870, 2» Semestre. (T. LXXl, N» 9.) 5l
( 390)
Dijon, par M. Darcy, p. Sgo), et consistant en ce que la dépense par
chaque mètre carré de base d'une couche sablonneuse, de nature homogène,
esi proportionnelle à la pression et en raison inverse de l'épaisseur de la
couche; car, si l'on assimile une couche pareille à un réseau de tubes très-
petits disposés suivant les trajectoires des diverses molécules liquides, tubes
dont la longueur moyenne sera évidemment proportionnelle à l'épaisseur
de la couche, et dont la forme et les dimensions dépendront de sa nature,
ces lois découleront immédiatement des deux premières de M. Poiseuille,
relatives à la pression et à la longueur des tubes, et qui subsistent (§ VIII
du Mémoire cité), la première dans tous les cas, et la seconde toutes les
fois que ces tubes sont décomposables en petites parties sensiblement pa-
reilles les unes aux autres et d'ailleurs irrégulières.
» Mais je fais voir au § IX du ménie Mémoire qu'il n'en est pas ainsi lors-
qu'il s'agit de canaux découverts ou de tuyaux de conduite d'un certain
calibre. Le liquide, n'étant plus alors aussi resserré latéralement, possède
toujours des mouvements oscillatoires rapprochant ou éloignant brusque-
ment des parois le fluide qui en est voisin. L'action tangentielle qu'exerce
la paroi sur ce fluide change donc sans cesse, et, par ses variations com-
binées avec la vitesse générale de translation du même fluide, imprime à ce
dernier des mouvements rotatoires. Ceux-ci se transmettant aux couches
liquides plus intérieures, toute la masse fluide est bientôt sillonnée de
tourbillons dont la matière glisse, avec une vitesse relative finie, sur celle
qui l'environne. La moyenne des vitesses observées en un même point du-
rant un petit instant n'est donc plus sensiblement égale à chacune d'elles,
et la force tangentielle moyenne exercée à travers un petit élément plan
fixe doit dépendre, non-seulement de la manière dont varie cette vitesse
moyenne au\ points environnants, c'est-à-dire des dérivées du premier
ordre par rapport aux coordonnées .r, r, z de ses trois composantes u, t-, w
suivant les axes, mais encore de la grandeur et du nombre des disconti-
nuités dont les vitesses vraies y sont affectées. En effet, les frottements
produits dans ce cas étant dus à des glissements finis entre couches adja-
centes, doivent être bien plus grands que si les vitesses vraies variaient
avec continuité de chaque point aux points voisins.
» B')rnoiis-nous à étudier le mouvement permanent uniforme dans un
tuyau à section rectangulaire de hauteiu' 2h et de base horizontale indé-
finie, ou à section circulaire de rayon R, en supposant ce tuyau : i'^ plein
de liquide; 2° rempli seulement jusqu'à son milieu, avec une atmosphère
calme au-dessus. Nous prendrons : pour axe des x d'iui système de coor-
( 391 )
données rectangulaires, et dans le sens du mouvement, l'axe même du
tuyau ; pour axe des j, une horizontale; pour axe des z, une droite, dirigée
en bas, dont a désignera l'inclinaison sur la verticale, et nous admettrons,
pour abréger, que la pression soit la même à l'entrée et à la sortie du tuyau.
Les vitesses moyennes seront réduites à leurs composantes m, et chaque
surface d'égale vitesse se composera, dans le premier cas, des deux plans
z^ = const., ou d'un cylindre de rayon /■ décrit autour de l'axe des x; dans
le second, de la partie de ces surfaces qui est au-dessous du plan des xy.
Appelons F l'action taiigentielle moyenne, évidemment parallèle aux x,
qui est exercée sur l'unité de cette surface, p la densité du liquide. L'égalité
des frottements à la composante suivant les x Au poids du liquide compris
dans une surface d'égale vitesse, ou entre une de ces surfaces et la surface
libre, donnera
(i) soit F + pg'z.sina = o, soit 2F 4- pgrsina = o.
F dépend : i" de la vitesse Uf, du liquide voisin de la paroi, car cette vitesse
est un élément essentiel dans la production des tourbillons auxquels sont
dus les frottements considérés : la force F s'annulant presque lorsque ii^
s'annule, la manière la plus simple dont elle puisse en dépendre, c'est de
lui être proportionnelle; 2° des mouvements oscillatoires perpendicidaires
à la paroi dont sont animées les particules liquides qui s'en trouvent voi-
sines : en effet, ces mouvements constituent l'autre élément varia!)le qui
concourt à la formation des tourbillons; comme ils sont favorisés par la
grandeur de la section et gênés au contraire par les parois, le plus simple
est de supposer F en raison directe de la section et inverse du contour
mouillé, c'est-à-dire proportionnel au rayon moyen h ou-; 3° des varia-
tions que subit, à partir des parois, en allant vers l'intérieur, l'agitation
due aux mouvements tourbillonnaires, car les consitiérations précédentes
ne la définissent qu'aux points voisins des parois; il est nature! de supposer
cette agitation, et par suite F, constante si les surfaces sur lesquelles elle se
propage à partir des parois, et qui sont parallèles à celles-ci, ont toutes la
même aire, et variables en raison inverse de cette aire si elles ne sont pas
toutes égales; dans le cas du tuyau rectangulaire de base indéfinie, elle
sera partout la même, tandis que, dans celui du tuyau circulaire, elle vau-
dra, à la distance r de l'axe, sa valeur à la paroi multipliée par le rapport
de R à r; s'il y a une surface libre, nous admettrons qu'on puisse négliger
dans une première étude les phénomènes spéciaux (par exemple une cer-
5i..
( 392 )
taine perte de force vive translatoire) qu'y entraîne l'exagération des moii-
vemenls tourbillonnaires, surtout quand les vitesses moyennes y sont
petites; 4° F dépend enfin de la distribution des vitesses moyennes autour
du point considéré, c'est-à-dire de la dérivée— ou — ? qui définit cette
distribution : en effet, cette dérivée, mestu-ant le glissement moyen du fluide
adjacent à la face extérieure de la surface z'' = const. ou r=const. sin-
celui qui occupe l'autre face, donne son signe à F, et il est naturel, tant
qu'elle ne sera pas trop grande, de lui supposer F proportionnel. D'après
cela, A désignant un coefficient variable avec le degré de poli des parois,
on aura
(2) SOU F= pgKii.h—, soit F=pgAuo-j^-
Pour z = A ou /• = R, — F est égal au frottement exercé sur le liquide par
l'unité de surface de la paroi. Ce frottement doit être supposé proportion-
nel : i° A U01 c'est-à-dire au nombre des molécules fluides qui viennent s'y
heurter; 2" à une certaine fonction de Mq qui représentera l'action tangen-
tielle moyenne de la paroi sur ces molécules, et qui, s'annulant presque
pour «0 très-petit, pourra sans doute être prise de la forme Bii^, si cette
vitesse n'est ni trop petite, ni trop grande. On conçoit qu'il varie en outre
avec les mouvements oscillatoires du liquide, cest-à-dire avec le rayon
moyen h ou — • Désignons par B un coefficient dépendant de ce rayon et
des rugosités de la paroi, et il viendra
r3) pour z = h ou r=R, —Y = pgBir = pgBul.
)) Au moyen des relations (i), (a), (3), et en appelant U la vitesse
moyenne, u, la vitesse sur l'axe des x, on trouve aisément
u I vB / z'\ TT / ' v/b\ ri — ■■ —
(4) \ soii -JL^ = -^ -+- "Ç^ ( i — Ç-\ U = (^ + ,r|^ )\/^sina;
I TT • v/B n—- — 8 v/B /r~.
\ «i, — u = sou fr-- \/rt sin y. , sou p 77— 1/ - sin«.
V bA' SbAya
» Ces fornudes ont justement la forme de celles que l'expérience a indi-
quées à M. Bazin, et elles ne diffèrent sensiblement de celle que M. Darcv
a donnée pour représenter les vitesses dans les tuyaux circulaires pleins de
( 393 )
liquide, qu'aux points voisins de la paroi, pour lesquels cet habile expéri-
mentateur n'a fait aucune observation : les vitesses qu'il a mesurées ont été
prises seulement sur l'axe des tuyaux, ainsi qu'au tiers et aux deux tiers
des rayons. A égalité de rayon moyen, les formules (4) donnent U un peu
plus grand quand la section est circulaire et offre, par conséquent, le moins
de parois possibles^, que lorsqu'elle est un rectangle de base indéfinie et
présente, au contraire, plus de périmètre mouillé que les autres formes
usitées : pour toutes celles-ci, l'expression de U sera donc à peu près la
moyenne des deux précédentes. On voit, au contraire, que la valeur de
H, — U est assez variable avec la forme de la section. Enfin, dans les expres-
sions de u^ le coefficient de \jh sina — est un peu plus grand que celui de
\Jhs\na—' Tous ces résultats sont d'accord avec les expériences de
M. Bazin. »
La séance est levée à 3 heures un quart. D.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
L'Académie a reçu, dans la séance du 22 août 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Evolution médicale, ou de rélectricité du sang chez tes animaux vivants. De
l'anestlïësie etde l'unité des forces physiques et vitales; par M. H. Scoutetten.
Metz, 1870; br. in-8°.
Instruction pour la production de la glace et sa conservation dans les campe-
ments militcdres; par M. Ch. Tellier. Paris, 1870; br. in- 18.
Annuaire spécial des vétérinaires militaires, année 1870. Pnris, 1870;
br. in-8°.
Mémoires de la Société d' Agriculture, Sciences, Belles-Leltns cl Arts d'Or-
léans, 1^ série, t. XIII, 11° 3, 1870, 3* trimestre. Orléans, 1870; iu-8".
Archives néerlandaises des Sciences exactes et naturelles publiées par la Société
hollandaise des Sciences de Harlem, et rédigées par M. E.-H. vON Baumhauer,
t. V, liv. I à 3. La Haye, 1870; 3 br. iu-8''.
( 394 )
^dlcjœ japonicœ Musei botanici Lucjduno-Balnvi; nuc/oreW.-F.-R. StiRiNGAE.
Harlemi, 1870; br. iii-Zi".
Die... Oiléolotjie el myohrjie du Sciiirus viilgaris, \j.\ parM.^\. C.-K. HOFF-
MANN et H. Weyenbeugh. Harlem, 1870; in-4°.
1870. Lhle des Membres de la Société hollandaise des Sciences de Harlem.
Sans lieu ni date; in-4".
Programma... Programme de la Société hollandaise des Sciences de Harlem
pour les années 1869 et 18'jo. Sans lieu ni date; 2 opuscules in-4°.
Observations... Observations et recherches sur l'albinisme de la race nègre;
par M. J. Jones. Philadelphie, 1869; br. in-8°.
First... Premier Rapport sur les ressources agricoles de la Géorgie; par
M. J. Jones. Augusta, 1860; in-8°.
Researches... Recherches sur la fausse vaccination; pur M. J. JONES.
Nashville, i867;in-8°.
Clinical... Ménwires cliniques. Etudes faites à l'hôpital de la Charité delà
Nouvelle-Orléans ; par M. J. Jones. Sans lieu ni date; Ijr. in-8°.
Mollities... Le ramollissement des os, etc.; par M. J. JoNES. Philadelphie,
1869; br. in-8^
Chemical... Analyse chimique du sel gemme de la Louisiane. Nouvelle-
Orléans, 1869. (5 exemplaires. )
(Ces six ouvrages sont offerts, au nom de l'auteur, par M. 1'. Gervais.)
The... Journal de la Société royale de Géographie, t. XXXIX, 1869.
Londres, sans date; in-8° relié.
Proceedings... Procès-verbaux des réunions scientifiques de la Société zoolo-
gique de Londres, 1869, 2* et 3^ parties, Londres, sans date; in-S",
Transactions... Transactions de la Société zoologique de Londres, t. \ II,
1''* et 1^ parties. Londres, 1869 ; in-4".
The... Journal trimestriel de la Société géologique, t. XXVI, n" 102.
Londres, 1870; in-8''.
Atti... Actes de la Société italienne des Sciences naturelles, t. Xli, fasci-
cules 3 et 4- Mdan, 1870; 2 br. in-S".
Sulla... Sur les lois de la division en deux carrés d'une puissance quelconque
d'un chiffre quelconque sembbdiU-menl divisible en une seule fois; Note du prof.
^■ol,l>ICELLl. Sans lieu ni date; br. in-4". (Extrait iWn Actes de iJcodémie
pontificale c/esNuovi Lincei.)
( 395 )
Nota... Sur la solution géncrale en intégrales de l'équittion
.X- + y- = z, X- -h y^ = z'^.
Note du [jrof. VOLPiCELLi. Sans lieu ni date; br. in-4°- (Extrait des ^ctes de
l'académie pontificale des IVuovi Lincei.)
Le... Les anhydrides et les oxydrides de la théorie atomique, etc.; par M. F.
Orsoni. Sciacca, 1870; br. ii!-8°.
Reflexiones... Réflexions sur le système planétaire; par M. S. Clavijo.
Santa-Cruz de Ténériffe, 1870; iii-8". (Présenté |)ar M. d'Avezac.)
Das... Le Musée impérial-royal Monlanislische et la Société des Amis des
Sciences de Vienne; par M. W. DE Haidinger, Vienne, 1869; in-8".
Natiiurkiindig... Journal d'histoire naturelle des Indes néerlandaises,
t. XXXI, 7* série, i"^^ partie, liv. i à 3. Batavia, 1869; in-8".
L'Académie a reçu, dans la séance du 29 août 1870, les ouvrages dont
les titres suivent :
Bulletin de l'Académie impériale des Sciences de Saint-Pélersbourcj , t. XIV,
n°' 4 à 6. Saint-Pétersbourg, 1870; 3 n°Mn-4°.
Mémoires de l'Académie impériale des Sciences de Saint-Pétersbourg ,
7' série, I. XIV, n°' 8 et 9; t. XV, n°' i à 4. Saint-Pétersbourg, 1869- 1870;
6 liv. in-4''.
Bulletin de la Société impériale des Naturalistes de Moscou, publié sous la
rédactio)i duD' B.E!SA]\D, année 1869, n°' 1 à 4- Moscou, 1869-1870; 4 bro-
chures in-8°.
The... Journal de la Société chimique, t. VIIl, mai, juin, juillet 1870.
Londres, 1870-, 3 br. in-S".
PUBLICATIONS PÉRIODIQUES REÇUES PAR 1,'aCADÉMIE
PENDANT LE MOIS d'aOUT i}J70.
Annales de Chimie et de Physique; juillet 1870; in-8°.
Armâtes de l' Observatoire Météorologique de Bruxelles; n" 6, 1870; in-4".
Annales des Conducteurs des Ponts et Chaussées; juin 1870; in-8".
Association Scientifique de France ; Bulletin hebdomadaire, n°* 184 à 187,
1870; in-8°.
{ 396 )
Bibliothèque universelle el Revue suisse; n° 152,1870; in-S".
Bulletin de l' Académie impériale de Médecine; 3i juillet 1870; in-8".
Bulletin de l'Académie royale de Médecine de Belqique^ n" 4» 1^70; in-8°.
Bulletin de l'Académie royale des Sciences, des Lctties cl des Beaux-Arts de
Belgique; n" 7, 1870; in-S**.
Bulletin de la Société de Géograpine; juin 1870; in-8°.
Bulletin de la Société Géologique de France; feuilles 3i à 44^ 1870; in-8".
Bulletin de la Société Pliilomalliique; jaiwler a mars 1870; in-8°.
Bulletin général de Thérapeutique; i5 aoiJt 1870; in-8°.
Bulletin hebdomadaire du Journal de l'Agriculture; n°* 32 à 35, 1870; in-8°.
Bullettino meleorologico del R. Osservatorio del Collegio Romano ; n° 7,
1870; in -4".
Correspondance slave ; n^^ 62 à 72, 1870; in-4°.
Cosmos; n°' des 6, i3, 20, 27 août 18-0; in-8°.
Gazette des Hôpitaux; n°' 90 à 100, 1870; in-4°.
Gazette médicale de Paris; n"* 32 à 35, 1870; in-4°.
Il Nuovo Cimento... Journalde Physique, de Chimie etd' Histoire naturelle;
mai 1870; in-8°.
Journal d' Agriculture pratique; n°'*3i à 34, 1870; in-8".
Journal de Chimie médicale, de Pharmacie et de Toxicologie; août 1870;
in-8°.
Journal de l'Agriculture; n°^ 98 et 99, 1870; in-8''.
Journalde la Société impériale el centrale d'Horticulture; juillet 1870;
in-8°.
Journal de l'Eclairage au Gaz; n°' 33 el 34, 1870; in-4''.
Journal de Médecine de l'Ouest; juin 1870; iii-8°.
Journal de Médecine vétérinaire militaire; aoîit 1870; in-S".
(La suite du Bulletin au piochain numéro.)
ERRATA.
(Séance du 16 août 1870.)
Page 3G6, ligne 2, au lieu de Callet, lisez Caillet.
Page 3G8, ligne l, au lieu de qu'elle, lisez qu'il.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI 5 SEPTEMBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES LUS.
ANATOMIE VÉGÉTALE. — Sur (a zone génératrice des appendices chez
les végétaux monocolylédons ; par M. Cave (seconde Note).
(Renvoyé, ainsi que la Note précédente, à la Section de Botanique.)
« J'ai montré que, chez les végétaux monocotylédons , les parties nou-
velles des feuilles ou, d'une manière plus générale, des appendices occu-
pent la face supérieure de ces organes. 11 me reste à prouver que ces
parties nouvelles de la feuille sont en continuité avec les portions récem-
ment formées de la tige. Sous ce rapport, la tâche sera facile. On sait,
en effet, que les nervures des feuilles sont, chez les nionocotylédons, la
continuation directe des faisceaux de la tige. Or ces faisceaux s'organisent
aux dépens d'autant de masses de cambium, et seulement dans les parties
les plus jeunes. Par conséquent, rappeler que les nervures de la feuille sont
le prolongement des faisceaux fibro-vasculaires de la lige, c'est dire que les
parties nouvelles de l'une continuent les portions jeunes de l'autre.
» La démonstration générale est donc donnée. Mais je vais, pour plus
de précision, examiner quelques cas particuliers.
» Un certain nombre de Monocotylédons présentent, ainsi qu'on le sait,
une zone annulaire de cambium placée comme celle des Dicotylédons, et
C. R., 1870, a» Semenre. (T. LXXI, N» 10.) Ss
( 39» )
la tige s'épaissit par des couches concentriques. Ce mode de croissance
étant admis pour les tiges, et, d'un autre côté, le développement général
de la feuille étant le même pour les deux embranchements de plantes pha-
nérogames, les raisonnements que nous avons invoqués à propos des végé-
taux dicotylédons conservent leur valeur.
» Une différence est pourtant à noter. Outre cet anneau cambial, les
plantes dont il est ici question possèdent des faisceaux disséminés au sein
du corps central et se portant dans les feuilles après un trajet plus ou
moins long. Mais, d'après ce que j'ai dit en commençant, la continuité
même de ces faisceaux est une preuve du principe que nous voulons
établir.
» M. Van Tieghem nous montre chez l'Accrus une zone génératrice per-
manente et complète. Il signale chez d'autres Aroïdées une pareille couche
enveloppant seulement une moitié de la tige. Voici dans quels termes clairs
et précis s'exprime l'auteur : e Ainsi, par cette couche où aboutissent à la
» fois les terminaisons inférieures des faisceaux foliaires et les insertions
w des faisceaux radicaux, les feuilles et les racines sont en communication
n dirtcle. »
» M. Naudin a étudié, en i844i 1^ développement des axes et des appen-
dices végétaux. Il a très-spécialement porté son attention sur les bulbes du
Narcissus jjseudo-narcissus, qui font l'objet de dessins très-soignés et très-
démonstratifs. Or il est impossible de signaler la moindre différence entre
ces figures et celles qui se rapportent aux végétaux dicotylédons. On y
trouve la même position pour les faisceaux fibro-vasculaires dans les feuilles
jeunes, le même éloignement progressif de la face supérieure à mesure
qu'on examine des portions plus âgées, et surtout la même continuité
entre les faisceaux de la jeune feuille et ceux de la tige, c'est-à-dire la même
continuité entre les parties en voie de formation.
» Les anatomistes ne sont pas d'accord sur la manière dont s'opère la
croissance chez les végétaux qui ne présentent pas d'anneau cambial per-
sistant. Mais, ainsi qu'on va le voir, la solution de celte question difficile
n'est pas nécessaire pour la démonstration de notre principe.
« Certaines Aroïdées, les Palmiers et les Graminées vont servir à nos
explications. Outre les deux types que nous avons cités, M. Van Tieghem
fait connaître deux autres modes de structure chez les belles plantes qu'il
a étudiées. Dans un de ces types, les faisceaux fibro-vascnlaires primitive-
ment simples jouissent de la propriété de se multiplier. « Cette multipli-
» cation, dit l'auteur, s'opère pendant que le faisceau s'élève vers le centre
( 399 )
» pour le parcourir sur une certaine longueur. Les groupes simples s'en
» séparent clans leur ordre de formation et à des hauteius différentes |)our
» se rendre aux feuilles. « Donc, ajouterons-nous, les foyers d'activité sont
en communication sur les axes et les appendices.
» Chez le quatrième groupe admis par l'auteur, les faisceaux restent
toujours simples et se portent successivement dans les feuilles.
» Chez les Palmiers, l'activité vitale est très-intense dans le bourgeon
terminal. On doit même distinguer dans cet organe une couche de tissu cel-
lulaire doué au plus haut degré de la faculté productrice.
» C'est là que les nouveaux organes appendiculaires prennent naissance,
et, en ce point, on ne saurait nier la parfaite continuité des parties nou-
velles tant que celles-ci restent exclusivement cellulaires. Mais des fais-
ceaux fibro-vasculaires naissent dans cette même couche du bourgeon,
s'allongent constamment par leur extrémité supérieure et se rapprochent
ainsi de la base des jeunes feuilles avec lesquelles ils se mettent en commu-
nication directe.
» J'ajouterai que mes études personnelles sur le bourgeon des Graminées,
et particulièrement de VÀrundo donax, m'ont montré exactement les
mêmes faits. Un Mémoire développé, dont il me reste seulement à coor-
donner les éléments, sera même accompagné de planches.
» Comme on le voit, j'ai laissé de côté la question relative à l'existence
d'une zone génératrice temporaire chez les Monocotylédons qui ne présen-
tent pas un anneau persistant de cambium. Ce n'est pas que je méconnaisse
l'importance de ce problème : je me propose, tout au contraire, d'appliquer
à l'éclaircissement de cette difficulté une méthode qui m'a déjà rendu des
services dans mes études sur les fruits. Pour cela, je soumettrai à la germi-
nation les graines de quelques Palmiers et de Graminées. Les jeunes plantes
qui se développeront seront examinées successivement au microscope, et
la comparaison des résultats obtenus me permettra, sans doute, de me
former une conviction personnelle.
» J'aurai l'honneur de soumettre à l'Académie les faits nouveaux que
j'aurai pu observer.
» Je résume dans les termes suivants les conclusions les plus générales
qui me semblent résulter de mes recherches :
» L Dans tous les végétaux phanérogames, les parties nouvelles des
appendices sont situées à la face interne ou supérieure de ces organes ;
» IL Les parties récemment formées dans les appendices sont en conti-
nuité parfaite avec les portions nouvelles de la tige.
52..
( 4oo )
» Une conséquence philosophique me paraît, dès lors, s'imposer à notre
esprit : les axes végétaux el les appendices qui en émanent forment un
ensemble naturel entre les deux parties duquel il esta peu près impossible
{le tracer une ligue de démarcation nette et précise. »
MÉMOIUES PKÉSEINTÉS.
PHYSIQUE MATHÉMATIQUE. — Note complémentaire au Mémoire sur les ondes
liquides périodiques, présenté le 29 novembre 1869 et approuvé par l'Aca-
démie le 21 février 1870 (1). — Etablissement de relations générales et nou-
velles cuire l'énergie interne d'un corps fluide ou solide, et ses j)ressions ou
forces élastiques. Note de M. Bocssi.vesq, présentée par M. de Saint-
Venant. (Extrait par l'auteur.)
(Renvoi à la même Commission que le Mémoire précédent sur le
même sujet.)
« Je considère un corps soumis à des déformations continues quelcon-
ques, et dans lequel j'admets, soit que la température absolue se trouve
constanuueut nulle, c'est-à-dire que les molécules n'exécutent aucun mou-
vement vibratoire d'amplitude insensible, soit que chacun des éléments de
volume dans lesquels on peut le décomposer, chauffé primitivement d'une
manière quelconque et rendu ensuite imperméable à la chaleur, ait sa tem-
pérature fonction à tout instant de la forme et des dimensions actuelles de
l'élément, mais indépendante de la manière spéciale dont cette forme et
ces dimensions ont précédemment varié. Les forces élastiques et l'énergie
interne, généralement fonctions, pour tout élément de volume, de sa tem-
pérature actuelle et des changements de forme et de dimensions qu'il a
subis, ne dépendront plus que de ces changements, puisque la tempéra-
ture sera nulle ou en dépendra elle-même,
» J'appelle, avec Lamé, N,, N2, N3, T,, Tj, T3 les composantes, suivant
trois axes fixes de coordonnées rectangulaires, des forces élastiques exer-
cées, à l'époque t, sur l'unité de surface des éléments plans menés à cette
époque, perpendiculairement aux trois axes, par une molécule du milieu
dont .r, j", z et u, v, w désignent les coordonnées j)rimilives et les déplace-
ments; avec M. de Saint-Venant, ?i, ;^^, ^^ les trois dilatations respectives
reçues, à la même époque t, par les trois arêtes, primitivement parallèles
aux axes et menées à partir de la molécule (,r, y, z) d'un parallélépipède
(l) Cnmptrx rendus, t. LXX, p. 36o.
( 4oi )
matériel extrêmement petit, et g,.., g,^, g^,. les cosinus des angles faits à la
même époque actuelle par les deux de ces trois arêtes qui étaient primitive-
ment perpendiculaires aux axes des jc, des j% des s; enfin $, fonction de
;)„ 3,., . .., g;rv» l'énergie interne, rapportée à l'unité du volume qu'avait ce
parallélépipède élémentaire dans l'état primitif du milieu. J'obtiens pour
les forces élastiques les expressions générales suivantes :
- I I r rf'^ / dii\^ d'i' du'' d<b du'' d<i> du du r/* du / (lu
^' ~ T^r^Yd^, y'^ dJ:) '^ d^,d? ~^ d^.d?'^ '^ d^, d7 dl ~^ '^ d^.d'zy ~^ dr
d<t> I du\ dii~]
de, \ dx) dy\ '
I 1 rf* dv da' r/* / dv\ div d'\> dv i ^ div\
, -l_ 9 1 f/D, dx d.r doi \ dy j dy da, dz \ ~^ dz j
di>\ [ da'\ dvdn~\ d'h T du dw dt> ( dœ\'\
dy)y^ 11) -^ dzdj\^ d^X_dz7n-'^d.y^Tz)\
di> r dvd<i' l dv \ da^ )
dOi Y dx dy \ dy j d.r J ) '
I et des expressions pareilles pour No et To, N3 et T3;
où 1 + 5, valeur actuelle du volume primitivement égal à i, est donné
par
/ du\ r dv\ I div\ dt'div f du\ d<v du ( dv\
' + ^='y-^Tx)y+dy)y-^Tz)-didçy-^ii-)-d^T.y+d^-)
du de f di\'\ du di> <hv du dv div
dy dx \ dz J dy dz dx dz dx dy
d<i>
"da,
di
1 +
et OÙ D|, Do, D3, G|, Go, G3 sont donnés par
?.. = — I + v'i + 2D, ,
W'Z
v/iH-?.D, v/l + 2Ï>3
et ainsi des autres; en sorte que les dérivées
remplacées par leurs valeurs
/ f/* I rf* I / rf'l' d'\>
d'\<
dr,:
-7— >•••. ^— doivent être
do, «G,
\ ,
rf* I rf*
)'
./G, - (i + .\)(i + :>.)'/s^. '
[do,
» Quant aux six dérivées—^, '-7^ ■>■••■> -7—' elles ont une signification
géométrique intéressante. Déconiposons, en trois forces jiarallMes aux
( 402 )
arêtes actuelles de l'élément parallélépipède dont les faces étaient d'abord
perpendiculaires aux axes des coordonnées, la force élastique exercée ac-
tuellement sur chacune de ces faces : la dérivée -pr-i par exemple, sera égale
à la projection, sur la direction actuelle de l'arête qui était primitivement
parallèle aux x, de la force élastique totale exercée sur l'unité de la super-
ficie primitive d'une des deux faces auxquelles aboutit cette arête; la dé-
rivée - — » de $, par rapport au cosinus de l'angle que forment les arêtes
primitivement parallèles au plan desj'z, est égale au moment oblique, rap-
porté à l'unité du volume primitif du parallélépipède, de l'un des deux
couples formés par les composantes, suivant ces arêtes, des forces élasti-
ques appliquées aux faces parallèles à la troisième arête; en d'autres
termes, cette dérivée s'obtiendra en multipliant l'une de ces composantes
par la droite qui joint le centre de la face à laquelle elle est appliquée au
centre de la face opposée, et en divisant le produit obtenu par le volume
primitif du parallélépipède.
» Enfin, dans le cas où les dérivées "' "' '" ' sont assez petites pour
qu'on puisse négliger leurs carrés et leurs produits, dans les expressions
de N,, N2,.. ., Tg, ces expressions, qui se réduisent à
Tvr / ^ ^ \ '^'^ /du \ if* [du \ d^
N, = (l-.V-^>.)^^-H(.^-g..);^^+(.^-g,,.)^^,
rp / _ ^ ^ ^ u-v dw d<ti div d^ dv d'\> dw rf*
dy d'iy dz dii, f/x dg^j. dx d^^^
sont susceptibles, suivant la forme qu'on adopte pour <!>, fonction du se-
cond degré des t>, g, de prendre successivement deux formes principales,
dont l'une a été trouvée par Cauchy au moyen d'un calcul d'actions molé-
culaires. Une méthode, basée sur le calcul des variations, que M. de Saint-
Venant a employée dans son Mémoire de i863 Sur la Dislribulion des élas-
ticités, etc., inséré au Journal de Mathématiques, t. VIII [voir la quatrièwie
note après les formules (10)], et aussi dans un complément qu'il va publier
au même Journal {Note sur une modification, etc., 1870), donne les mêmes
résultats pour ce cas particulier. »
( 4o3 )
MÉTÉOROLOGIE. — Théorie de MarioUe sur les oscillations barométriques.
Note de M.W. de Fonvielle. (Extrait.)
« On trouve à la page i6i du premier volume des Œuvres de Mariolte,
imprimées à Paris en i ']l\o, une théorie très-ingénieuse pour expliquer com-
ment le baromètre monte avec le vent du nord et baisse avec les vents du
sud-ouest :
a Le nord et le nord-est font ordinairement élever le mercure des baromètres, non-seule-
ment parce qu'ils rendent l'air plus pesant (i), mais aussi parce qu'e/z soufflant contre la
terre de haut en bas, et en pressant l'air par ce moyen, ils augmentent son ressort, ce qui
fait élever le mercure. Les oscillations barométriques qui accompagnent le sud et le sud-
ouest reçoivent une explication analogue.
I) Le sud et le sud-ouest, qui viennent de loin, soufflent suivant les tangentes de la terre
et soulèvent l'air supérieur, et par conséquent diminuent le ressort de l'inférieur, d'où il
arrive que le baromètre se baisse. »
» Je crois devoir appeler l'attention sur cette remarque oubliée, qui
introduit dans la barométrie un élément nouveau, l'action dynamique des
courants d'air interposés entre la surface de la terre et le périmètre de
notre atmosphère. »
M. Zaliwski soumet au jugement de l'Académie, une disposition de la
pile à éléments zinc-charbon, qu'il pense pouvoir donner une intensité
maximum pendant douze heures. Cette pile fonctionnerait sans dégagement
gazeux et pourrait servir à l'éclairage des forts pendant la nuit. Le zinc,
décapé et mis à nu, serait entouré d'une solution de chlorhydrate d'am-
moniaque; le vase poreux contiendrait de l'acide azotique, concentré par
l'acide sulfurique.
(Renvoi à l'examen de M. H. Sainte-Claire Deville. )
M. Zaliwski adresse une Note sur les propriétés des poudres de guerre
au chlorate de potasse, dont la propriété brisante pourrait être atténuée par
un mélange intime avec l'acide oxalique pulvérisé.
(Commissaires : MM. Morin, Fremy.)
M. OzANAM appelle l'attention de l'Académie sur un nouveau procédé de
pansement des plaies et blessures, par l'acide carbonique dissous dans l'eau.
(i) Sans doute à cause de sa contraction par le froid (W. de F.).
f 4o4 )
Ce procédé auiail l'avantage : i° de diminuer la douleur, par l'action
anestliésique du gaz carbonique; 2" de réduire les inflammationset de pré-
server des érysipèles et gangrènes, eu isolant les plaies du contact de l'air;
3° d'activer la cicatrisation; 4" ''« permettre de nettoyer aisément les plaies
profondes, au moyen d'un jet liquide produit sous pression, sans l'inter-
veutiou du linge ou de l'éponge, véhicules fréquents de la contagion.
CORRESPONDANCE .
M. AVatson et M. Stillixc adressent leurs remercîmeuts à l'Acadé-
mie, pour les distinctions dont leurs travaux ont été l'objet dans le dernier
concours.
M. LE Secrétaire perpétuel signale, parmi les pièces imprimées de la
Correspondance, la deuxième édition d'un ouvrage de M. J. GïVart/ intitulé :
a La chambre noire el le microscope : pholomicrograpliie pratique », et donne
lecture des passages suivants de la Lettre d'envoi :
« Les héliogravures que contient cet ouvrage ont été prises direcleuient
sur les négatifs. J ai l'honneur de présenter à l'Académie diverses épreuves
à l'appui ; elles ont été obtenues d'après les procédés indiqués. Ces épreuves
consistent particulièrement eu Diatomées choisies parmi les jjIus subtiles de
celles que l'on considère comme tests, formant ainsi un Essai d'une synopsis
photomicrographique. Ce moyen de reproduction rend, avec une perfec-
tion remarquable, des détails autrement insaisissables. Les grossissements
ont varié entre 5oo et 800 diamètres, sans que la netteté fût compromise.
Pour l'éclairage, les rayons réfractés et les rayons incidents n'étant pas
dans le même plan normal à la surface réfringente, il en résulte des phé-
nomènes d'interférences, qui sont une des principales sources de fausse
interprétation. En outre, la texture des frustules, jointe à leur transpa-
rence capricieuse et à l'irisation de quelques-unes, concourt à augmenter
les perturbations lumineuses. Ce n'est qu'en corrigeant la lumière, par l'in-
terposition d'une cuve contenant un liquide monochrome et en rectiliant la
précision de l'éclairage, que l'on arrive à reproduire correctement les
caractères génériques des Diatomées.
i> Les spécimens d'épreuves positives sur verre, que je présente égale-
ment à l'Académie, sont destinés aux projections à la lanterne, excellent
instrument pour la démonstration des sujets microscopiques. Une épreuve
( 4o5 )
positive est préférable à la projection directe d'une préparation, parce que,
tout en conservant la forme, on peut donner une plus grande amplitude,
sans craindre ni la détérioration provenant de la chaleur dégagée par l'ap-
pareil éclaireur, ni l'absorption de la lumière par le sujet lui-même, généra-
lement peu transparent. De plus, connue la photogra[)hiesur verre est déjà
par elle-même un agrandissement, on a ainsi l'avantage d'en reculer les
limites sans pour cela perdre en netteté ce que l'on gagne en grossisse-
ment. »
ASTRONOMIE. — Découverte d'une nouvelle comète par M. Cloggia.
Communication de M. Delauxat.
« Une nouvelle comète vient d'être découverte à l'Observatoire de
Marseille, dans la nuit du 28 au 29 août, par M. Coggia. Voici les |)ositions
de cette comète, observées le jour et le lendemain de la découverte :
Temps moyen
do Marseille. ]R apparente. D apparente. Observateurs.
Aorit 28 1 3'- 22'" 52% 2 3''7"'4iS37 4-5°45'52",2 Coggia
.. 29 i5''57'"2is8 3''4»>53',64 -l- 6° 20' 28", 3 Stephan
Position moyennes, pour 1870,0, des étoiles de comparaisons .
JR apparente. U apparente.
Août 28 991 B. A. C, 6=1 Si'S"' 32',75 + 6°io' i5",7
., 29 157 H. in Weisse, 7" 3''io"i3s89 -4- 6° 19' 4", 4
» La comète, vue au télescope (de 0^,80 de diamètre), a l'apparence
d'une nébuleuse ronde assez étendue (2' de diamètre environ), avec un
noyau caractérisé vers le centre; elle est assez brillante.
» Celte comète a été observée à l'aris, par M. Lœwy ; voici la position
qu'il a obtenue :
Temps moyen
de Paris. 31. Distance polaire.
3 Septembre. ... 1 1"" i2'"7%2 2''5o"'5oS67 8o''55'4o",2
Position moyenne, pour 1870,0, de l'étoile de comparaison.
Réduction Distance Réduction
®. au jour. polaire. au jour.
901 Weisse 2''52'"4i%3i -i- i%74 8o°53'ii",o — i4"4„
C. R., 1870, 2« Semestre. (T. LXXI, N» 10.) 53
( 4o6 )
MINÉRALOGIE. — Composition chimique de la nadorite.
Lettre de M. Flajolot à M. Combes.
« Bône, le 11 août 1870.
» J'ai repris l'analyse de la nadorite, et cette fois j'ai trouvé ce qui
m'avait échappé.
» Ce minéral contient du chlore dans la proportion de 8,85 pour 100.
Voici, du reste, les résultats de ma dernière analyse :
Plomb 5i ,60
Antimoine 3?. , ?.5
Oxygène 8,00
Chlore 8,85
100,70
» La quantité de l'antimoine a été calculée en adoptant l'équivalent
806,5 de Berzélius. Si l'on prenait celui de M. Dmnas, 762,5, on trouve-
rait 3o,5o seulement d'antimoine, et, au lieu d'avoir un excédant de poids,
on aurait un déBcit de i,o5.
» Ces résultats d'analyse conduisent à la formule élémentaire :
Sb^Pb^O^Cl,
que l'on peut écrire, si l'on veut,
Sb=*0='Cl.2PbO,
de telle sorte que le minéral peut être considéré comme une combinaison
d'oxyde de plomb et d'oxychlornre d'antimoine, savoir :
Oxyde de plomb 55 ,6
Oxychlorure d'antimoine, Sb'O^Cl,... 43)4
» Tous les dosages que j'ai faits de l'oxyde de plomb ont donné les
mêmes résultats, de même que ceux de l'oxygène nécessaire pour amener
la substance au maximum d'oxydation. La quantité de l'oxygène 8,00,
calculée sur les données des deux dosages, doit être très-exacte. En divi-
sant le poids du chlore 8,85 par son équivalent 443,2, on trouve qui! ne
diffère de 0,02 que d'une fraction insensible, de sorte que le rapport de
l'oxygène à celui du chlore, en équivalents, est exactement de 4 h i •
» Ainsi donc, la composition de la substance et la formule sont dans un
accord parfnit avec les équivalents du jjlonib, du chlore et de l'oxygène, et
le faible désaccord qu'il y a avec l'équivalent de l'anlimoine ne dépasse pas
(4o7 )
les écarts qui ont lieu dans les analyses des composés d'antimoine, avec les
meilleures méthodes de dosage.
» Je crois donc que la formule peut être considérée comme exacte.
» Je ferai remarquer que les proportions atomiques du plomb et de
l'antimoine sont les mêmes que dans la première formule que j'avais don-
née, et que l'on passe de la première à la dernière, en remplaçant i équi-
valent d'oxygène par i équivalent de chlore.
» La nadorite me paraît un minéral fort remarquable, et les échantillons
en sont déjà recherchés. Mais les cristaux inaltérés sont encore rares, et
depuis que j'ai trouvé ceux que j'ai eu l'honneur de vous adresser, je n'ai
plus rien rencontré. »
PHYSIOLOGIE EXPÉRIMENTALE. — Essai sur le venin du Scorpion.
Mémoire de M. Jousset, présenté par M. Claude Bernard.
« Le Scorpion a excité de tout temps la curiosité des naturalistes. Assez
commun dans le midi de l'Europe, où sa piqûre est redoutée à l'égal de la
morsure des serpents venimeux, il a été très-souvent étudié. Arislote, Pline
et Galien ont rapporté sur lui des ftibles étranges. Plus tard Fabricius,
Redi, Swammerdam,Vallisnieri, Lewoenhock, etc., et surtout Maupertuis,
Amoureux, Guyon et Blanchard, ont expérimenté son venin, mais sans par-
venir à se rendre un compte exact de son action.
» Des nombreuses espèces de Scorpion classées par les zoologistes, trois
seulement méritent d'attirer notre attention, parce qu'elles habitent le midi
de la France et l'Afrique :
» 1° Le Scorpio Europœus, petite espèce (o™,o3) assez commune dans les
caves, les décombres et les vieux murs: sa piqîire est insignifiante à cause
de la quantité très-minime de son venin;
» 2" Le Scorpio Occiianus, jaune clair et beaucoup plus grand (o™,07)
que le premier: on le trouve à la campagne, blotti sous des pierres; il est
peu commun, et sa piqûre est souvent suivie d'accidents formidables;
M 3° Le Scorpio Jlfer, originaire de l'Asie, et assez commun en Afrique,
est un insecte qui atteint o™,i2 et o*", i5,et dont la piqûre est certainement
mortelle pour l'homme. Je n'ai pu me procurer cette dernière espèce : c'est
le Scorpio Occitnnus qui forme le sujet de cette étude.
» L'appareil venimeux du Scorpion est situé à l'extrémité de l'appendice
caudal. Il a la forme d'une ampoide terminée par un aiguillon noirâtre
recourbé, très-dur et aigu, percé près de la pointe de deux petites fentes
53..
( 4o8 )
qui donnent écoulement au venin accumulé dans l'ampoule. L'animal s'en
sert pour se défendre, et aussi pour tueries proies dont il s'empare. N'eûl-
il à faire qu'à une faible mouche, il commence toujours par la piquer avant
de la porter à sa bouche. La mort est instantanée. Chez les animaux volu-
mineux, les vertébrés, tels que le chien, le lapin, etc., la mort ne survient
qu'après un temps plus ou moins long et subordonné à la quantité de venin
inoculée.
)) Le venin est un liquide incolore et limpide, franchement acide comme
tous les venins, soluble dans l'eau en toutes proportions, peu soluble dans
l'alcool, insoluble dans l'éther, d'une densité un peu supérieure à celle de
l'eau.
» L'examen microscopique montre un liquide parfaitement transparent,
renfermant çà et là quelques cellules épithéliales et de fines granulations
dont la présence n'est pas constante.
)) La quantité de venin contenue dans l'ampoule est Irès-petite; on peut
l'évaluer eu moyenne à 2 milligrammes pour un Scorpion de forte taille.
Son activité est très-grande, puisque cette quantité suffit pour donner la
mort rapidement à un chien de moyenne grosseur.
» La complication des phénomènes occasionnés chez les organismes
élevés par l'introduction de ce venin dans l'économie fait qu'd est difficile
de bien suivre la marche de l'empoisonnement chez ces animaux; mais
chez lesGrenouilles, et surtout les Rainettes dont la membrane interdigitale
est mince, pour peu cju'ou ait la précaution de doser convenablement la
quantité de venin employée, on parvient à obtenir des effets se dévelop-
pant assez lentement pour qu'on puisse les suivre et les observer avec toute
la netteté désirable.
» Les personnes qui voudront reprendre ces expériences auront tout
avantage à se servir du Lilla viridis.
» Le but que je me suis proposé dans ce Mémoire a été de déterminer
d'une manière précise sur quel élément histologique ce venin exerce son
action, car telle est la tendance de l'école expérimentale actuelle, et nous
ne devons pas oublier que la méthode précise à l'aide de laquelle on
cherche aujourd'hui à pénétrer jusqu'au fond des mystères de l'organisme
a été spécialement développée au Collège de France dans les travaux du
savant mailre qui a illustré la Physiologie française.
» Les premières expériences que j'aie faites m'ont montré que les Gre-
nouilles succombaient rapidement sous l'influence de doses très-minimes
de venin de Scorpion. La mort survenait sans convulsions; la peau des
( 4o9 )
Rainettes vertes prenait constamment une teinte violacée et se montrait
injectée. En outre, le membre piqué devenait le siège d'une rigidité mus-
culaire complète.
» Alors j'ai cherché à suivre, en examinant le cours du sang pendant
l'empoisonnement, la marche des phénomènes.
M Expérience. — Une Rainette verte est préalablement fixée sur un liège
et la membrane interdigitale de la patte droite étalée sous le microscope.
» La circulation est très-active.
» Le champ de l'instrument comprend un vaisseau capillaire moyen
dans lequel trois ou quatre globules peuvent passer de front et un autre
capillaire bifurqué dans chacune des branches duquel un seul globule peut
s'engager à la fois.
» Inoculation dans les muscles de la cuisse droite de l'animal de oS'',ooo4
de venin frais.
» Deux minutes après l'inoculation, la coloration caractéristique com-
mence à apparaître.
» Le cours du sang se ralentit sensiblement. (Le calibre des capillaires,
mesuré exactement, reste le même pendant toute la durée de l'expérience.)
» Cinq minutes. Dans le capillaire moyen, au milieu de globules nor-
maux, on voit passer d'autres globules qui ont l'air déformés, allongés et
constamment escortés de plusieurs autres auxquels ils semblent adhérer.
» A mesure que le cours de la circulation se ralentit, on distingue mieux
les phénomènes. Un de ces globules déformés escorté de deux autres est
arrivé à la bifurcation du capillaire fin dont il obstrue la double entrée.
Dans un mouvement de l'animal, un autre globule sain parvient à se glis-
ser et à entrer dans la branche de droite, mais en emportant attaché après
lui un filament détaché du globule altéré contre lequel il s'est frotté au
passage.
« Dans le capillaire moyen, où les globules sont devenus très-nombreux,
on les voit rouler lentement et par agglomération de quatre ou cinq.
» Dix minutes. Les globules stationnent dans les c.qiillaires et les en-
combrent. De temps en temps, un léger mouvement de progression se fait
sentir alternativement dans un sens ou dans l'autre. Il n'est que passager et
n'aboutit à rien.
» De petits caillots de sang extravasé dans les tissus se voient çà et là
dans le voisinage des capillaires fins.
» Je n'ai pu assister à leur formation.
)) Trente minutes. La rigidité musculaire de la patte est établie. Elle est
( 4io)
infiltrée. Tous les vaisseaux capillaires sont remplis de globules rouges
tassés les uns contre les autres et immobiles.
» La sensibilité est parfaitement conservée et très-vive.
» Manifestation de douleur vive pendant l'excitation des muscles par un
faible courant d'induction. Cette excitation n'amène aucun mouvement
dans les masses de globules contenus dans les capillaires. Les muscles rigides
se contractent faiblement. Les nerfs moteurs sont excitables.
» La grenouille n'est pas très-prise; les deux pattes seules sont colorées.
» Le cœur bat normalement, la respiration est un peu ralentie.
M L'expérience, interrompue à 7 heures du soir, est reprise le lendemain
à 10 heures, la quantité de venin étant trop faible pour amener la mort.
» L'animal est revenu à sa couleur ordinaire, il paraît dans son état
normal, sauf la patte piquée, qui est toujours dans l'extension, infiltrée,
mais moins rigide que la veille. Elle est très-sensible aux excitations, et
l'animal commence à la mouvoir an prix de grands efforts.
a A chacune de ces tentatives, les muscles sont le siège de mouvements
spasmodiques analogues à ceux que produit un courant électrique inter-
mittent.
» La circulation a reparu dans quelques capillaires. Le plus grand
nombre est obstrué par un magma rougeâtre où il est impossible de dis-
tinguer la forme des globules.
» 3 heures du soir, c'est-à-dire environ vingt-quatre heures après l'ino-
culation, il reste encore dans la patte piquée quelques mouvements spasmo-
diques et une indécision qui persiste pendant plusieurs jours.
» Expérience. — Du sang de Grenouille est placé sous le microscope
avec un fort grossissement, on introduit sous la lamelle qui le recouvre du
venin de Scorpion.
» Au bout de dix secondes, les globules en contact avec le venin s'ar-
rondissent ; leur contour devient absolument linéaire, et ils ressemblent à de
petites masses gélatineuses.
» Leur consistance diminue ensuite peu à peu, car ils s'agrandissent et
s'étalent. Leur aspect est alors celui d'une gouttelette huileuse. Le noyau
devient de moins en moins visible. En inclinant le microscope on opère un
mouvement lent de descente, mais seulement dans les globules normaux,
les autres sont presque tous collés au verre. Pendant ce mouvement de
descente, les globules sains qui rencontrent les globules altérés y adhèrent,
et s'ils s'en séparent, ce n'est que difficilement el en entraînant après eux
une portion de ces derniers sous forme d'un long filament visqueux.
(4ii )
» Enfin si plusieurs globules altérés sont voisins, leur masse en s'étalant
finit par se confondre en une seule plaque visqueuse dans laquelle on dis-
tingue çà et là des noyaux non encore dissous.
» Des nombreuses expériences relatées dans ce Mémoire il semble que
l'on puisse tirer les conclusions suivantes :
» 1° Le venin du Scorpio Occitamts agit directement sur les globules
rouges du sang et paraît n'agir que sur eux;
» 2° Sou action a pour résultat de faire perdre aux globules la propriété
de glisser les uns sur les autres;
» 3" En perdant cette propriété ils s'agglutinent les uns aux autres et
aux globules sains de manière à former de petites masses qui obstruent l'en-
trée des capillaires et mettent obstacle à la circulation.
» C'est par ce mécanisme, et en s'opposant à la plus indispensable des
fonctions, que ce venin place l'économie animale dans des conditions in-
compatibles avec la vie.
» Il en résulte encore qu'une quantité déterminée de venin est néces-
saire pour que l'animal soit empoisonné. Le venin de Scorpion, comme tous
les autres venins probablement, n'agit donc que quantitativement et d'une
manière purement chimique, ce qui le différencie des virus dont l'action
paraît analogue à celle des ferments. »
La séance est levée à 4 beures. É. D. B.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
L'Académie a reçu, dans la séance du 5 septembre 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Le Jardin fruitier du Muséum; par M. J. Decaisne, Membre de l'Institut,
III® liv. Paris, 1870; in-4°, texte et planches.
Physionomie de nos contrées et particulièrement du bassin de Paris avant et
pendant ta première apparition de l'homme ; par M. E. ROBERT. Paris, 1870 ;
br. in-8°.
Pierres et métaux; par M. A. Mangin. Tours, 187 1; in-S" avec
figures.
Mémoires couronnés et autres Mémoires publiés par l' Académie royale de
Médecine de Belgique; collection in-S", t. \", 2* fascicule. Bruxelles, 1870;
in- 8°.
( 4l2 )
PUBMCATIONS PERIODIQUES REÇUES PAR l'aCADÉMIE PENDANT
LE MOIS d''aOUT 1870. (lin.)
Journal de Pharmacie et de Chimie; n°^ 22 et 23, 1870; in-8°.
Jourmd des Fabricants de Sucre; 11°' 16 à 18, 1870; in-fol.
Journal général de r Instruction publique; n° 3i, 1870; in-Zi".
Kaiserliche... Académie impériale des Sciences de Vienne; n°^ 18 à 20,
1870; in-S".
L Abeille médicale; n"' 32 à 37, 1870; in-4°.
V Aéronaute ; n°' 27 à 3o, 1870; iu-8°.
VArl dentaire; juillet 1870; in-8°.
UArt médical; août 1870; in-S".
La Santé publique; 11°' 81 à 84, 1870; in-4°.
Le Gaz; n" 7, 1870; in-4°.
Le Moniteur de la Photographie; n°' 10 et 1 1, 1870; in-4°.
Le Mouvement médical; 11°' 32 à 35, 1870; in-4°.
Les Mondes; n°' des 4, 11, 18, aS juillet 1870; in-8''.
V Imprimerie; n° 79, 1870; in-4''.
Marseille médical; n° 8, 1870; in-8°.
Montpellier médical.... Journal mensuel de médecine; août 1870; in-8'\
Nouvelles Annales de Mathématiques ; août 1870; in-S".
Nouvelles météorologiques; août 1870; in-8°.
Observatoire météorologique de Montsouris; août, i à 29, 1870; in-4°.
Répertoire de Pharmacie; août 1870; in-8°.
Revue Bibliographique universelle; août 1870; in-8°.
Revue des Cours scientifiques; n""* 36 à 39, 1870; in-4°-
Revue des Eaux et Forêts; n" 8, 1 870; in-8°.
Revue de Thérapeutique médico-chirurgicale ; n° 16, 1870; in-S".
Revue hebdomadaire de Chimie scientifique et industrielle; n"' 38 à l\o, 1870;
in-
Revue maritime et coloniale; août 1870; 111-8".
Revue médicale de Toulouse; août 1870; in-8''.
The Food Journal; août 1870; in-8".
The Pharmaccutical .Journal and Transactions; 3'' série, n°' 1 à 5, 1870;
in-S".
The Scientific Review; 11" 8, 1870; 111-4".
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES,
M»»»<
SÉANCE DU LUNDI 12 SEPTEMBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOffiES ET CO^DIUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDAINTS DE L'ACADÉMIE,
ASTRONOMIE. — Sur la manière d'observer le prochain passage de Vénus;
par M. Simon Newcomb. Note de M. Fayë.
« M. S. Newcomb a bien voulu m'adresser, il y a quelques jours, une
Notice lue par lui à la National Academy of Sciences (U. S.) sur le prochain
passage de Vénus. J'ai pensé que rAcadéiiiie aimerait à avoir connaissance
de ce travail qui montre qu'on se préoccupe en Amérique de ce grand
phénomène tout autant qu'en Europe. M. Newcomb a voulu contrôler sé-
rieusement l'opinion qui, dans la bouche de Haliey, a donné jadis un si
grand crédit aux passages de Vénus. Dans son Mémoire sur l'observation
du passage de Mercure à Sainte-Hélène, ce grand astronome déclare qu'il
avait observé, à moins d'une seconde près, le contact intérieur de Mer-
cure et du Soleil, et c'est sur ce haut degré de précision qu'il établit l'es-
poir d'arriver, par les passages de Vénus, à mesurer avec luie exactitude
extrême la distance de la Terre au Soleil.
)i M. Newcomb a pris la peine de réduire au centre de la Terre toutes
les observations du dernier jjassage de Mercnre en novembre 18G8, et il
en a formé un tableau très-instructif dont j'extrais les nombres suivants :
G. R., 1870, 3« Semestre. (T. LXXI, N" 11.) o4
( 4'4 )
Contact observé Contact observé
atec déformation de l'image. s:ins déformation de Pimage.
îibo" — 2,4 Le Verrier, inst. 2i''o""— 3,o Rayet,
+ /^,o Stone. -f- 1,5 Liais.
-+- 4>7 Dunkin. ■+- 4,9 André.
-1-11,3 Criswick. -4- 8,3 Villarceau.
4-12,6 Carpenter, inst. + " j4 Wolf.
+ 17,3 Buckingham. -t- 14,2 Diiner.
-t-29,6 Pohl.
» J'ai exclu les observations où les bords des astres sont notés comme
mal définis, et celles dont le caractère ne se range pas dans les deux co-
lonnes ci-dessus. M. Newcomb a d'ailleurs tenu compte de l'ouverture et
du grossissement, qui a beaucoup varié d'un observateur à l'autre; il en
conclut qu'il n'existe aucune dépendance entre ces éléments et l'instant
de l'observation.
)) Il résulte clairement de ce tableau que Halley se faisait quelque illusion
lorsqu'il se flattait d'avoir observé à i seconde près l'instant d'im phéno-
mène identique. On voit aussi que la même incertitude existe, soit que le
phénomène se présente avec le caractère géométrique de deux disques en
contact, ou qu'il soit altéré par une certaine déformation des images.
» M. Newcomb conclut de là que l'observation du prochain passage de
Vénus échouera si l'on se contente d'observer comme autrefois les contacts
intérieurs. Il propose les mesures photographiques. L'Académie verra
sans doute avec intérêt que, plus les astronomes approfondissent cette
question, plus ils se rallient à l'emploi de la photographie. M. New^comb
n'y pressent qu'une difficulté, celle de déterminer exactement l'échelle
angulaire des images, et il conseille, pour cela, aux observateurs l'emploi
d'appareils parallactiques qui permettraient de photographier les Pléiades
avant et après l'observation de Vénus (i). Mais il me semble, et c'est ime
suggestion que je soumets aux astronomes, qu'il existe un moyen bien plus
simple et bien plus praticable, moyen que j'ai employé moi-même avec un
plein succès. 11 consiste à iihotographier plusieurs fois une même partie du
disque solaire pendant qu'il passe dans le champ de la lunette immobile,
et à enregistrer les instants, à -g-^ de seconde près, par le télégraphe élec-
trique. Les bords ou plutôt les petites taches du Soleil fournissent, sur ces
images, des points de repère parfaits pour déterminer la valeur angulaire
(i) On sait que ce sont les aslroiiomes îles États-Unis qui sont parvenus les premiers à
photographier les étoiles el même des systèmes steilaires tels que les Pléiades.
(4i5 )
des parties de l'image. Le même procédé permettra d'étudier complètement
les déformations dues au système optique dans toutes les directions, car
il suffit de prendre d'autres empreintes d'une nouvelle série de positions
du Soleil, après avoir fait tourner la lunette autour de son axe d'un angle
de 90 degrés par exemple.
» Ce dernier procédé, qui n'a été appliqué jusqu'ici qu'à l'occasion de
j'éclipse de i858, dans les ateliers de M. Porro, me semble préférable, pour
l'étude du système optique, à celui qu'on a adopté dans le même but à
l'Observatoire de Kew, dont les astronomes ont poussé si loin l'étude pho-
tographique des taches du Soleil. A Rew on s'est contenté, si je ne me
trompe, de photographier une grande règle divisée placée à une certaine
distance, ou un dôme éloigné dont les dimensions étaient exactement
connues. »
HYGIÈNE PUBl.lQUE. — Quels soJit les vrais agents chimiques qu'il faut opposer
à rinfeclion miasmatique. Note de M. Faye.
« Je n'ai pas la prétention de rien apprendre de nouveau sur ce point
à l'Académie ; il s'agit simplement d'im préjugé longtemps répandu
sous l'autorité de la science elle-même; j'ai cru qu'il pourrait être utile
d'avertir une bonne fois le public que la science a totalement changé à
cet égard.
» Depuis la découverte de l'acide muriatique oxygéné, vers la fin du der-
nier siècle, les moyens préconisés jadis par la vieille médecine pour désin-
fecter l'air ont été abandonnés pour faire place, au chlore, au chlorure de
chaux et aux vapeurs nitreuses. On ne manquait pas de faire remarquer à
tous propos que les anciennes fumigations se bornaient simplement à mas-
quer la mauvaise odeur des émanations méphitiques, tandis que le chlore
décompose ou détruit tous les gaz odorants, tels que les hydrogènes sul-
furé, phosphore, carboné, l'ammoniaque, etc., auxquels on attribuait alors
l'infection miasmatique.
» Mais on sait aujourd'hui, par les travaux mêmes de notre Académie,
que l'infection miasmatique est due à une tout autre cause. La décompo-
sition naturelle des matières organiques donne lieu, en effet, à l'émission
de deux genres de matières qu'il importe de ne plus confondre : l'un
sensible à l'odorat et parfaitement innocent à petites doses, à savoir les
gaz puants ou méphitiques; l'autre inodore, impalpable et invisible, mais
doué d'une sorte de vie et d'une incroyable faculté de dissémination :
54..
( 4i6 )
celui-là seul est dangereux. Ce sont ces germes invisibles, et non les gaz
odorants, qui développent dans les corps de nature organique sur lesquels
ils se déposent les phénomènes de la fermentation ou ceux des affections
morbides les plus redoutables. Il n'y a donc pas lieu de s'étonner que le
chlore en quantité respirable soit sans action sur ces ferments impal|)ables
mais vivants, tandis qu'il détruit chimiquement les gaz méphitiques. Heu-
reusement la chimie nouvelle nous foiuMiit aujourd'hui tonte luie série
d'agents nouveaux doués d'une action spéciale, agents qui ne décom|)osent
pas les émanations méphitiques comme le chlore, mais qui agissent direc-
tement sur les germes suspendus dans l'air. Ce sont les substances du
genre de l'acide phénique, du phénol, de la créosote, etc., et il est inté-
ressant de voir que des traces de ces agents véritablement désinfectants se
retrouvent dans les substances que la vieille médecine préconisait autrefois,
c'est-à-dire la suie, la fumée et le goudron.
» Concluons de là que si dans une salle de malades on entretenait un
dégagement de chlore, en vue d'assainir l'air ambiant, ou si l'on s'efforçait
d'en renouveler continuellement l'atmosphère, cela ne dispenserait nidle-
ment le médecin de se préoccuper de l'infection miasmatique. De là le
mode remarquable de pansement qui a pris tant d'importance dans ces
derniers temps et qui consiste dans l'emploi de bandages ou d'a|)pareils
combinés de manière à exclure rigoureusement le contact de l'air, et par
suite les germes qu'il tient toujours en suspension.
» Mais si, au lieu d'employer le chlore, on avait constamment recours
aux désinfectants véritables d'origine phénique, appliqués au malade lui-
même ou plutôt aux objets de pansement, on supprimerait directement
l'infection, tout en laissant au médecin une latitude beaucoup plus grande
dans sa manière d'opérer, c'est-à-dire en le délivrant de l'obligation de
recourir aux pansements hermétiques.
» Je voudrais donc, et c'est uniquement pour cela que j'ai cru devoir
prendre la parole sur un sujet si éloigné de mes travaux ordinaires, que
l'opinion publique cessât de confondre, sous le nom général de désinfec-
tants, les agents chimiques qui se bornent à détruire les mauvaises odeurs (i)
et ceux qui attaquent directement ou neutralisent les germes des plus ter-
ribles affections morbides. Quant à moi, si j'ose ici citer ma bien faible
expérience personnelle, je n'ai jamais vu de plaie, grande ou petite, prendre
(i) Il ne peut cire ici queslion des agents qui serviraient iini(|nenient ù masquer ces
odeurs par d'autres moins rc[)Uf;nanles : personne ne s'en préoccuiie plus.
(4i7)
un mauvais caractère quand elle était pansée tout d'abord avec des linges
imbibés d'eau phénolée.
» Ce n'est pas à dire qu'on doive renoncer à l'emploi des agents chimi-
ques qui détruisent, comme le chlore, les matières animales, en leur fai-
sant franchir du premier coup toute cette série de fermentations putrides
d'où paraissent se dégager les innombrables germes contenus dans l'atmo-
sphère : ces agents rendront plus efficaces les soins généraux de salubrité,
mais, je le répète, l'air ambiant, même l'air sans cesse renouvelé, n'en
contiendra pas lîioins des germes préexistants, venus souvent de fort loin;
pour les combattre, il faut recourir à d'autres agents bien connus aujour-
d'hui des médecins, agents dont l'emploi est heureusement à la portée de
tout le monde, et dont je viens de rappeler la nature. »
M. DcMAS présente à ce sujet les observations suivantes :
« Notre confrère paraît ignorer qu'on se sert depuis plusieurs années à
Paris de l'acide phéuique, conune préservatif contre la contagion, dans un
grand nombre de cas. L'Administration des ponspes funèbres, en particu-
lier, a reçu l'ordre, depuis cinq ou six ans, de faire usage, dans tous les
cas de maladies épidémiques, choléra, variole, etc., d'un mélange d'acide
phénique et de sciure de bois: l'Assistance publique en a fait autant pour
les hôpitaux; le Ministère de l'Intérieur en a recommandé l'ajiplication gé-
nérale dans tous les cas de maladies présumées contagieuses.
» On réserve le chlorure de chaux à la désinfection du sol ou de l'air
empuantés par les liquides, les gaz ou les vapeurs; mais, concurremment,
et pour combattre les miasmes, on fait usage de l'acide phénique. Du reste,
la question des procédés de désinfection et d'assainissement fait le sujet,
en ce moment, d'études très-attentives, et le Comité d'hygiène examine
les procédés anciens ou nouveaux qui lui ont été soumis; il ne m'appar-
tient pas de dire quelles mesures il arrêtera. Ceux de nos confrères qui en
font partie y feront prévaloir, certainement, les moyens les plus dignes de
confiance. »
m. Chevreul s'énonce dans les termes suivants :
« Il y a une distinction à faire entre les désinfectants comme le chlore,
et les corps qui agissent comme l'acide phénique.
» Ces désinfectants sont loin d'agir d'une manière unique :
» i" L'acide sulfureux et l'acide sulfhydrique humides, tous les deux
odorants, se décomposent réciproquement en deux corps inodores, l'eau
et le soufre; ils sont donc mutuellement désinfectants.
(4i8 )
» 2° L'acide chlorhydriqiie corrosif, irritant, et l'ammoniaque odorante
se neutralisent en s'unissant de manière à former un composé inodore, le
chlorhydrate d'annnoniaque.
» 3" Le chlore et l'ammoniaque présentent à la fois une décomposition
et une combinaison neutre. Une portion d'ammoniaque est réduite en
azote inodore et en acide chlorhydrique qui neutralise la portion d'am-
moniaque non décomposée.
» Il existe des désinfectants qui, comme le charbon, agissent non plus
en formant, comme les précédents, des composés définis, ou en remettant
en liberté un des éléments des corps réagissants, mais en s'unissant par une
affinité qui fut qualifiée de capillaire dès 1821 .
M Ce genre d'union est très-fréquent ; exemples: le charbon qui absorbe
les gaz odorants et les principes colorants d'origine organique; les étoffes
qui se teignent en conservant leur forme ; les matières terreuses qui agissent
sur l'eau, l'ammoniaque et les parties tant gazeuses que liquides des engrais.
)) Ce sont les corps de ce genre que je préconise, lorsqu'il s'agit de la
désinfection de l'engrais humain, et non des corps qui le désinfectent en
l'altérant plus ou moins profondément, ou en formant des composés plus
ou moins stables, incapables de rien donner à la végétation des plantes,
ou céder en temps utile ce que l'engrais non désinfecté lui eût cédé.
» Je ne reconnais l'utilité de la désinfection de l'engrais humain par des
corps qui l'altèrent profondément en formant des composés plus ou moins
stables que comme pratique transitoire pour arriver, sinon à l'emploi de
l'engrais en nature, du moins à sa désinfection opérée avec des corps qui
n'agissent que par une faible affinité capillaire.
)' Cette distinction faite, il ne faut pas croire que si l'on a exagéré l'effi-
cacité du chlore et des hyj)ochlorites, cette exagération est un motif pour
en rejeter l'emploi dans des cas autres que ceux où leur bon usage est in-
contestable; car le chlore en présence de l'eau et les hypochlorites agissant
à la manière de l'eau oxygénée, c'est-à-dire comme dénaturant, altèrent
profondément une foule de matières organiques parmi lesquelles il peut y
avoir des venins, des virus, des miasmes, etc., etc., on aurait donc tort, dans
des cas où son défaut d'action n'est pas démontré, d'en })roscriie l'usage en
principe. Ici je rapproche l'action du chlore et des hypochlorites de celle
qu'ils exercent dans le blanchiment des étoffes.
» Que sait-on bien aujourd'hui de l'action de l'acide phonique sur les
composés organiques dont la décomposition spontanée, exhalant une mau-
vaise odeur, justifie l'expression déjouer d' infedion?
(4i9)
» C'est qu'il agit principalement sur la source de ta mauvaise odeur ^ et en
arrête le cours. Mais comme je l'ai consldté sur plusieurs matières orga-
niques, il n'agit pas sur la mauvaise odeur, comme le chlore agit par
exemple sur l'acide suifhydrique, l'ammoniaque, etc.
» Je ne parle pas de l'action qu'il peut exercer sur des composés orga-
nisés, appelés spores, fermenls, etc. Telle est, si je ne me trompe pas, l'opi-
nion de M. Calvert, mon élève, qui prépare aujourd'hui l'acide phénique
pour le monde entier.
» En résumé, dans ce que j'ai étudié, l'acide phénique agit sur la source
matérielle de la mauvaise odeur et non sur cette mauvaise odeur. »
M. DcMAS demande à ajouter quelques mots.
« Tous les chimistes sont d'accord pour admettre que le chlorure de
chaux décompose les gaz hydrogénés répandus dans l'air.
» Quant à l'acide phénique, son action est double.
» L'acide phénique détermine certainement un temps d'arrêt dans la
décomposition des matières organiques albuminoïdes. Il agit à la façon du
tannin. C'est opérer une sorte de tannage que d'employer l'acide pliénique.
» Mais à côté de cette action, je crois qu'il en possède une seconde très-
importante, qu'il ftiut spécifier.
« Quand on taune un muscle mort, on arrête la décomposition ; lorsque
l'on tanne dessporules vivants, on peut les tuer. De même, quand on fait
agir l'acide phénique sur des sporules, sur des germes en suspension dans
les liquides fermentescibles, on les tue, absolument comme la créosote
versée dans une dissolution sucrée arrête la fermentation alcoolique en
tuant les ferments, et comme le tannin prévient la formation visqueuse.
» L'acide phénique, à mon sens, non-seulement arrête la décomposition
organique, mais tue les germes, les agents vivants, dont le développement
engendrerait ou propagerait les maladies épidémiques.
» C'est en partant de cette idée qu'il m'a paru toujours nécessaire de
conserver les fumigations chlorées pour désinfecter l'air, mais de faire
intervenir en outre l'acide phénique, dont les vapeurs vont en quelque
sorte rechercher et tuer dans une atmosphère viciée les miasmes et les
germes morbides. Les formules que j'ai données à l'autorité publique, et
qu'elle a adoptées, sont fondées sur ces principes.
» Eu résumé, désinfecter et assainir font deux. Il convient d'utiliser
simultanément et le chlore et l'acide phénique. »
( /.20 )
Après les remarques de M. Dumas sur l'acide phénique, M. Chevrell
s'exprime en ces termes :
« J'ai eu plaisir à entendre M. Dumas parler d'un tannage à propos de
l'acide phénique. Je ne dirai pas, en commençant, l'Académie se rappelle,
car ce que je vais ajouter aux observations que je viens de faire remonte
à l'année 1809, et je n'ai pas la prétention d'invoquer le souvenir de mes
confrères pour une époque si reculée.
» Les conclusions principales auxquelles m'avaient conduit des recher-
ches sur les tannins artificiels, exposées dans trois Mémoires lus à l'Aca-
démie (i), sont les suivantes :
» 1° Il est impossible de maintenir l'opinion, qui régnait alors, à savoir
l'existence d'un principe immédiat unique des végétaux, qu'on appelait
tannin et qui était caractérisé par la propriété de précipiter la gélatine.
» Cette impossibilité était la conséquence de la diversité décomposition
chimique élémentaire des corps qui possèdent cette propriété.
» 2° En faisant dépendre la propriété de précipiter la gélatine d'iuie
forte affinité du corps tannant pour la gélatine, je retrouvais cette propriété
dans des corps de nature la plus différente :
» a. D'abord dans les tannins artificiels de M. Hatchett que je venais
d'examiner;
» b. Dans le muriate (Viridium, auquel Vauqueliu venait de reconnaître
la propriété de précipiter la gélatine et la saveiu- astringente;
» c. Dans le bicliloruie de mercure, dont Deyeux s'était servi, peu d'an-
nées auparavant, pour conserver le cadavre d'un général du premier
Empire;
» d. Plus tard, je fis la remarque que l'eau de chlore, qui j)récipite tant
de liquides d'origine organique, a elle-même une saveur astringente.
» 3° Je déduisis la conservation des matières organiques unies à une
substance tannante de leur insolubilité dans l'eau, c'est-à-dire de la stabilité
chimique acquise par les matières organiques en vertu de leur combinaison.
» 4" Je considérai la saveur astringente, lors même qu'elle appartient à
des corps qui ne précipitent pas la gélatine, comme concomitante avec leur
propriété de s'unir aux matières animales, et ce rapprochement me con-
duisit à faire les remarques suivantes :
» a. Il existe des sels, comme ceux d'alumine, de glucine, etc., qui
(i) Annales de Cliiiitie, t. LXXII et LXXIII : i"' Mémoire, lu le 17 d'avril 1809;
2' Mémoire, lu le 10 de juillet 1809; 3'' Mémoire, lu le 21 d'août 1809.
( 42. )
ont, avec la saveur astringente, une saveur sucrée : dans plusieurs sels de
plomb, la saveur sucrée domine sur la saveur astringente ;
» h. Il existe des corps, doués d'affinité pour les matières organiques,
qui ont une saveur plus ou moins amère, avec une saveur astringente ou
légèrement astringente.
;. 5° Enfin, j'admis la possibilité que des corps qui coagulent fortement
les matières organiques ne sont poisons qu'en formant des composés solides
avec les humeurs et les tissus des animaux.
» Nota. — Le temps me manque pour parler des causes d'infection
des eaux, du sol des cités populeuses et des terres arables. Je renvoie mes
observations au Compte rendu prochain. »
CHIRURGIE. — Obsewations relalivts aux indications chirurgicales et aux
conséquences des amputations, à la suite des blessures par les armes de
guerre. Lettre de M. Sédillot à M. le Président.
« Haguenau (Ambulances volontaires), 2 septembre 1870.
)) Le salut de milliers de blessés appelle le concours et les efforts de tons
les chirurgiens, pour arriver aux meilleures méthodes et aux plus sûrs
procédés des opérations nécessilées par les armes de guerre : à ce titre,
je soumets à l'appréciation de l'Académie, et à celle de mes confrères mili-
taires et civils, quelques remarques inspirées par une longue expérience
et par l'observation récente de plus de quinze cents blessés et de plus de
deux cents amputations, parmi lesquelles j'ai dû en pratiquer une qua-
rantaine, et jusqu'à quinze dans une seide journée.
» La rè^le la plus importante et la moins contestée est d'opérer avant le
développement de la période inflammatoire, dès les deux premiers jours de
la blessure. Ces amputations, dites immédiates ou primitives, sont parfois
encore possibles le troisième et le quatrième jour sm- les hommes à
réaction tardive, mais ce sont des cas exceptionnels.
» Pendant la période inflammatoire, les opérations sont suivies d'une
effrayante mortalité; mais elles l'emportent grandement sur l'expeclalion,
au moins dans les conditions d'encombrement inévitable où l'on se trouve,
» L'influence des localités, des saisons, des soins, des eaux, des approvi-
sioimements, de la nourriture, de la nationalité, exige de nouvelles inves-
tigations.
» A Haguenau, à Bischwiller,àReichshoffen, àWalbourg,à Durrenbacli,
C. R., 1870, 2' Semestre. (T. LXXI, N» li.) 55
( 4^2 )
H Pfaffenhoffen et dans quelques autres localités que nous avons visitées,
il nous a semblé que l'expectation n'avait pas sauvé ini blessé sur vingt.
La gangrène, les hémorrhagies et, plus tard, les infections purulentes et
putrides étaient rapidement mortelles, paiiout où de nombreux malades
étaient réunis. Peut-être a-t-on été plus heureux dans des maisons parti-
culières renfermant seulement un ou deux blessés; mais la mortalité y a
été encore très-considérable et excessive.
» Les amputations secondaires, ou pratiquées pendant la période inflam-
matoire, ont généralement donné des résultats immédiats excellents. Les
blessés accusaient tous une amélioration remarquable; leur figure expri-
mait le contentement. Ils s'applaudissaient de ne plus souffrir et d'avoir
recouvré de l'appétit, du sommeil, de la confiance; mais quelques-uns ont
succombé à la gangrène, un plus grand nombre à des hémorrhagies répé-
tées; enfin, du huitième au seizième jour, et au delà, ont apparu de fré-
quentes infections, avec abcès métastatiques, dont la guérison a offert fort
peu d'exemples. L'état pidtacé des plaies, sorte de pourriture d'hôpital,
des abcès, des infiltrat ioi/s sanieuses, des hémorrhagies consécutives ont
fait de tristes ravages parmi les opérés, et en font encore.
» Quant aux amputations tardives, le moment en est à peine arrivé, et
il restera peu de malades susceptibles d'en profiter.
» On obtiendrait, croyons-nous, des résultats moins affligeants :
» 1° En introduisant dans les ambulances le principe de la division du
travail, si féconde en toutes choses : un seul opérateur, bien secondé,
pourrait pratiquer cent amputations, au moins, par jour, et si l'on admet
la nécessité d'une amputation sur dix blessés, proportion probablement
trop élevée, l'on comprendra quel rôle important doit être attribué à Fa
rapidité opératoire;
» 2° En renonçant à tous les procédés compliqués, à tous ceux qui
rendent les guérisons longues et difficiles, comme les résections, par
exemple, en adoptant, à l'imitation d'un grand maître, le baron Larrey,
les procédés les plus simples et les plus prompts.
» Les projectiles actuels produisent de si graves désordies et exposent à
des suppurations si étendues, qu'on doit s'imposer comme règle :
1) jJ. De réduire les plaies des moignons au plus petit diamètre;
» B. De favoriser, avant tout, le libre écoulement du pus, doctrine que
nous défendons depuis plus de vingt années;
« C. D'adopter, en outre, une réforme radicale des méthodes d'am-
putation : sans crainte de heurter et de contredire l'oiiinion de tous les
( 423 )
chirurgiens tlii siècle dernier et du nôtre, nous soutenons qu'au lieu de
renfermer les extrémités osseuses au milieu des chairs, dans les amputa-
tions de continuité, il faut les en faire sortir, et en voici les raisons.
» Nous prendrons pour exemple l'amputation de la cuisse, particuliè-
rement choisie comme sujet d'étude de toutes les méthodes et procédés
opératoires.
)) Avec un moignon creux, l'os tend à blesser, ulcérer el mortifier les
parties en contact, nuit au transport des blessés, exige des pansements
répétés, empêche le dégorgement des plaies tenues fermées et l'écoulement
du pus, et rend très-pénible la recherche des vaisseaux atteints d'hémor-
rhagie.
» En laissant l'os au dehors de la plaie, le moignon est plein_, naturelle-
ment soutenu, insensible aux mouvements du malade et par conséquent à
son transport. Les procédés circulaires, dans lesquels les vaisseaux sont
coupés plus perpendiculairement que par aucun autre, sont applicables.
La plaie, très-petite, peut être réunie inmiédiatement dans la plus grande
partie de son étendue, offre une surface très-bien disposée pour la recherche
du siège des hémorrhagies, et permet au pus de s'écouler librement et au
dégorgement de s'effectuer, lorsque la réunion n'a pas eu lieu.
» La plus forte objection à adresser à cette méthode est l'obstacle
qu'apporte à la guérison définitive un os isolé et saillant, mais on en iera
la résection au moment où la plaie sera presque entièrement cicatrisée, et,
avec la précaution de détacher et de renverser le périoste, cette opération
présentera peu de danger.
» J'ai visité un grand nombre d'ambulances,' et entre autres celle de
M. Icessel, professeur agrégé de la Faculté de Médecine de Strasbourg, où
j'ai trouvé plus de vingt-cinq amputés de la cuisse : partout les blessés
amputés avec des moignons creux, ou avec de vastes lambeaux antérieurs
ou autres, avaient offert plus d'accidents et avaient succombé en plus grand
nombre que ceux dont les moignons étaient coniques et l'os saillant.
M L'expérience semble donc ici confirmer les raisons théoriques que
nous venons d'exposer.
» J'ajouterai qu'une amputation dans laquelle on vent laisser l'os saillir
au delà des chairs ne diffère pas autant qu'on pourrait le supposer d'une
amputation ordinaire. C'est au reste un sujet à étudier plus longuement,
mais voici des procédés que nous avons pratiqués. On divise circulaire-
ment la peau; on la fait relever, par simple pression si elle est souple et
saine, en manchette si elle est adhérente ou infiltrée, et l'on coupe les
55..
( 424 )
chairs jusqu'à l'os en un ou deux temps, selon leur épaisseur et leur résis-
tance. On dénude légèrement l'extrémité osseuse et on la scie à un centi-
mètre environ des muscles. Le moignon ainsi formé est conique. On en
retranclie, s'il y a lieu, les masses musculaires proéminentes et les nerfs qui
dépassent la plaie, et, après avoir lié les vaisseaux avec section à ras des
ligatures, on panse à plat, on rabat la peau sur le moignon, tout autour
de l'os laissé au dehors, si l'on essaye la réunion immédiate partielle.
Quelques points de suture réunissent les téguments que l'on comprime
légèrement, avec un linge trempé dans du digestif et de la charpie, contre
la plaie, pour en assurer riuunobilité et l'adhésion luiiforme, et l'on com-
plète le pansement par une compresse, une bande ou une cravate Mayor.
On examine le lendemain si le moignon n'est pas ti^p serré. Les téguments
repoussés en arrière, et entraînés dans ce sens par la rétractilité et la con-
traction des muscles, se réunissent plus ou moins bien à la plaie et dimi-
nuent, par leur adhésion, l'étendue des surfaces de suppuration. Si le
moignon s'enflamme et s'engorge, il devient convexe, repousse encore la
peau plus haut et plus en arrière, et l'os, toujours saillant, ne blesse pas les
parties qu'il dépasse, et le moignon ne retient pas le pus. A la jambe, le pro-
cédé ovalaire, que nous avons autrefois décrit, avec section médiane de la
peau (Larrey), au devant du tibia, et petits lambeaux latéraux, avec peu de
muscles, donne de très-beaux résultats. Pour la désarticulation de l'épaule,
la régie est de couper très-bas la peau de l'aisselle, pour éviter la rétention
du pus ou la production d'abcès le long des parois thoraciques. On en-
lève avec soin les masses musculaires du deltoïde, des pectoraux et du
grand dorsal, et l'on assure l'écoulement des liquides, malgré la réunion
immédiate, par une mèche ou drain placés à la partie déclive de la plaie.
Toutes ces questions ont une importance pratique trop grande pour que
nous ne nous réservions pas d'y revenir plus tard.
» Voici les cas d'amputation que nous admettons, en répétant qu'il ne
s'agit pas défaire exceptionnellement une opération brillante, qui réussit
une fois sur cent, mais de sauver la vie au plus grand nombre possible
des opérés:
» A. Toute blessure pénétrante du genou par un projectile exige impé-
rieusement, sans hésitation et sans retard, l'amputation de la cuisse.
» B. Toute plaie de l'articulation scapulo-iiumérale avec fracture de la
tête osseuse réclame la désarticulation du bras. Nous proscrivons la résec-
tion, à moins de circonstances favorables exceptionnelles. Nous avons tenté
cette opération quatre fois dans le mois dernier. Un de nos malades est
( 4^5 )
mort de gangrène; deux autres, l'un à Walbourg, l'autre à l'hôpital d'Ha-
guenau, ont succombé à des accidents infectieux, avec frissons et abcès
métaslaliques, sans parler de la variole qui s'était déclarée chez l'un de ces
blessés. Le quatrième, arrivé au seizième jour de sa résection, faite pour
une fracture en éclat de la tète humérale, a été pris d'hémorrhagie, et,
comme dernière ressource de salut, nous lui avons désarticulé l'épaule.
Le bras était dur, très-volumineux et rempli, depuis l'extrémité osseuse
qui touchait la cavité glénoïdale jusqu'au coude, d'une collection de pus
sanieux. L'opération date de trois jours, et le malade va bien; mais, comme
toutes nos plaies, dans les salles de l'hôpital, sont couenneuses et phagédé-
niques, nous avons peu d'espoir de le sauver.
» C. Quant aux fractures de la cuisse, du bras, des deux os de la jambe,
de l'avant-bras, des articulations du poignet et du cou-de-pied, avec fracas
osseux, nous croyons encore l'amputation indiquée.
» D. L'expectation peut être tentée dans les fractures partielles de la
main et du pied, celles d'un seul os de la jambe et de l'avant-bras, et du
col et de la tète du fémur. Dans ces deux derniers cas, nous aurions recours
à la résection et à la désarticulation, à une époque ultérieure, si la vitalité
des malades avait été assez puissante pour les soustraire aux dangers des
premiers accidents.
» On sera disposé peut-être à traiter notre chirurgie de barbare, et l'on
nous accusera de multiplier des mutilations, que l'on pourrait éviter ou
remplacer par des résections ou par des consolidations lentement et diffi-
cilement obtenues : nous répondrons que c'est la véritable chirurgie
conservatrice, parce qu'en sacrifiant les membres elle sauve la vie.
» Nous terminerons en disant, avec tous les chirurgiens de nos jours,
que la dissémination des blessés est une mesure indispensable, qui décide
de la vie ou de la mort de milliers d'hommes, et que le transport des con-
valescents et de tous ceux qui sont capables de supporter les fatigues d'un
déplacement dans des lieux bien aérés, salubres et éloignés du théâtre de
la guerre, est le meilleur moyen d'assurer leur guérison. »
« M. Ch. Sainte-Claire Deville a le regret d'annoncer à l'Académie
que la plus grande partie des observations et des publications faites par
l'Observatoire météorologique central de Montsouris a dû être arrêté depuis
plusieurs jours, l'autorité militaire ayant fait une réquisition auprès de
M. le Ministre de l'Instruction publique, à l'effet d'utiliser le bâtiment pour
la défense de Paris.
( 4^6 )
» Ce regret est, d'ailleurs^ diminué par la pensée qu'il eût été impos-
sible de conserver en sécurité des instruments fragiles et délicats dans
une construction, en partie composée de bois, recouverte par une vitrine
et située à loo mètres des fortifications.
» Grâce à la courtoise obligeance de M. l'Amiral Méqiiet, chargé du
commandement dans cette zone des fortifications de Paris, les mesures les
meilleures ont pu être prises pour mettre en sûreté les instruments et les
papiers importants de l'Observatoire, jusqu'au moment où les travaux
pourront y être repris.
)) M. Ch. Sainte-Claire Deville saisit cette occasion de remercier l'Aca-
démie de l'intérêt qu'elle n'a cessé de témoigner à l'œuvre qu il a été chargé
d'organiser, et des encouragements qu'elle a bien voulu lui accorder. »
CORRESPONDANCE .
PHYSIOLOGIE. — Su?' un moytn propre à annuler les effets de l'alimenlalion
insuffisante. Note de M. Rabcteau, présentée par M. Claude Bernard.
« En i85o, M. de Gasparin communiquait à l'Académie des Sciences
des observations d'un haut intérêt relativement aux effets du café. Ce sa-
vant faisait voir que les mineurs de Charleroi pouvaient conserver la santé
et une grande vigueur de forces musculaires, en faisant usage d'iuie nour-
riture moitié moindre que celle qu'uidiquent la théorie et l'observation jour-
nalière. A l'aide d'aliments renfermant moins d'azote et de carbone que la
ration quotidienne des trappistes dont le teint est pâle et qui travaillent cinq
fois moins qu'un ouvrier ordinaire, les mineurs belges formaient des ou-
vriers plus énergiques que les mineurs français d'Anzin, qui se nourissaient
bien j)lus largement. Mais les mineurs belges faisaient chaque jour usage de
2 litres il'une infusion préparée avec 3oS'',59 de café. Cette infusion venait
aiuuder les effets fâcheux d'une alimentation insuffisante.
» Les observations de M. de Gasparin furent d'abord accueillies avec
une certaine incrédulité; mais il fallut bientôt en reconnaître l'exactitude.
» En 1860, M. Jousand rapporta, dans sa thèse inaugurale présentée à
la Faculté de Médecine de Pans, des faits qui venaient confirmer les précé-
dents. Cet observateur, à l'aide cle._i2o grammes de café en poudre et 3 li-
tres d'infusion faite avec 200 grammes de divers cafés, soit en moyenne
46 grammes par jour, put supporter un jeûne absolu de sept jours entiers
et consécutifs, sans rien retrancher de ses occupations habituelles. II put
( 427 )
même se livrer à un exercice musculaire plus actif et plus prolongé que ce-
lui qu'il prenait ordinairement et sans éprouver d'autres troubles orga-
niques qu'un peu de fatigue et un amaigrissement assez faible.
» Ces observations justifient complètement les opinions de M. Payen, de
M. Bouchardat et de M. Sée sur le café. Pour M. Payen, cette substance
empêcherait de se dénourrir ou diminuerait la déperdition. M. Sée la range
parmi les médicaments d'épargne.
» On avait déjà dit que le café diminuait l'urée, mais aucune expérience
scientifique quelque peu suivie, si ce ne sont celles de Bocker, n'avait été
faite à ce sujet. Cette lacune a été comblée à l'aide de recherches faites, à
mon instigation, par mon ami M. Eustratiade, de Smyrne, qui a étudié sur
lui-même les effets de la caféine et du café dans des expériences qui ont
duré quarante-neuf jours, pendant lesquels il s'est astreint à un régime
identique et a recueilli ses urines chaque jour. 3o centigrammes de caféine
diminuèrent l'urée de plus de 28 pour 100, et une infusion de 60 grammes
de café torréfié la diminua de plus de 10 pour 100. Je puis affirmer l'exac-
titude de ces résultats, car j'ai fait moi-même les dosages de l'urée. Entre
autres faits observés, je citerai un ralentissement notable du pouls, ralen-
tissement qui avait été déjà signalé nettement par d'autres auteurs, malgré
des opinions contraires reposant sur des faits mal observés (Eustratiade,
Thèse de Paris, 1870).
» La caféine et le café torréfié diminuent donc les oxydations et tempè-
rent le mouvement de dénutrition.
» J'ai fait à peu près à la même époque, sur moi-même, des expériences
avec le café vert et, de plus, avec le thé. Les premiers résultats de ces ex-
périences, que je continuerai, ont été annoncés cette année à la Société de
Biologie.
» Je m'étais proposé d'étudier la théobromine et le cacao; les circon-
stances ne m'ont pas permis encore de mettre mon projet à exécution. Mais
je fais en ce moment même l'expérience suivante, à laquelle les circon-
stances actuelles peuvent donner une grande importance.
)) A un chien de taille ordinaire je ne donne chaque jour que
20 grammes de cacao eu poudre, une infusion de 20 grammes de bon café
torréfié, le tout additionné de 10 grammes de sucre. J'ajoute du sucre afin
que cet animal puisse prendre ce mélange sans répugnance, car une
chienne que j'essaye de soumettre à ce même régime refuse absolument par-
fois d'y goiiter.
» A un autre chien, de même taille que le premier, je ne donne égale-
( 428 )
nient chaque jour que 20 grammes de pain, 10 grammes de beurre ordi-
naire, pour remplacer le beurre contenu dans le cacao, et 10 grammes de
sucre.
)) Depuis huit jours que dure l'expérience, le premier chien nourri au
cacao et au café se porte très-bien, il n'a pas maigri pour ainsi dire et il a
conservé ses allures habituelles. Le dernier au contraire est considérable-
ment amaigri et exténué; cependant les quantités de carbone et d'azote
contenues dans son alimentation insuffisante équivalent largement aux
quantités des mêmes principes contenus dans la ration de l'animal soumis
au régime du café et du cacao.
» Tels sont les premiers résultats d'une expérience dont la fin n'est pas
douteuse. Le premier chien conservera la santé et la force pendant long-
temps, le dernier mourra bientôt.
» Si je publie cet essai, c'est qu'il forme avec les données précédentes un
ensemble de faits dont les conséquences n'échapperont à personne relati-
vement à l'alimentation insuffisante. J'ai la conviction qu'un homme pour-
rait vivre plusieurs mois, et conserver de la force, en faisant usage chaque
jour uniquement de i5o grammes du mélange suivant :
Cacao en poudre 1 000 grammes .
Café infusé 5oo »
Thé infusé 200 »
Sucre 5oo »
» En évaporant les infusions de café et du thé on n'obtiendrait qu'un
faible poids de résidu sec, de sorte que le mélange précédent ne pèserait
pas plus de 1600 grammes et pourrait suffire à l'entretien de dix jours.
Rien n'est d'ailleurs plus agréable que cette préparation précédente
lorsqu'on l'a délayée dans de l'eau bouillante. Pour ma parr, moi qui aime
les expériences, je ne manquerais pas de m y soumettre si je venais dans les
circonstances actuelles à manquer de vivres.
» Je voudrais donc voir le Gouvernement de la défense nationale faire
pénétrer dans les villes assiégées ce mélange alimentaire appelé à rendre les
plus grands services. Rien ne serait plus apte pour la réussite qu'une appro-
bation de l'Académie des Sciences. »
M. Le Masurier prie l'Académie de vouloir bien prendre connaissance
du contenu d'un j)li cacheté dont elle avait accepté le dépôt.
Ce pli, ouvert en séance par M. le Secrétaire perpétuel, contient l'indica-
( 429 )
tion d'une application spéciale de la lumière électrique. L'Académie prie
M. Dumas de l'examiner, pour en faire immédiatement l'usage qu'il jugera
convenable, en se conformant aux intentions de l'auteur.
M. P. GuTOT adresse une Note relative au développement d'organismes
particuliers dans le pain fait avec la farine de seigle.
La séance est levée à 4 heures et demie. D.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
L'Académie a reçu, dans la séance du 12 septembre 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
De la molilité des conferves; yar M. J. Girard. Amiens, 1870; br. in-S".
La chambre noire et le microscope. Photomicrographie pratique; par M. J.
Girard, 2^ édition. Paris, 1870; in-12.
Ambulances à parois recouvertes de plastique cahrifuge-hydrofucje , avec
aération réglée à volonté: importante amélioration du service de santé; par
M. P. PiMONT. Rouen, 1870; br. in-4°.
La... La musique, science et art; par M. G. Privitera ; fascicules 1 5 et 16.
Sans lieu ni date; in-/i°.
C. R., iS'jo, a" Semestre. (T. LXXl, N» II.) 56
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE DU LUNDI 19 SEPTEMBRE !870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Sur la salubrité du sol et des eaux.
Note de M. Chevreul,
« J'ai remis au Compte rendu de cette séance (19 de septembre) les consé-
quences de quelques propositions générales sur ihycjiène des villes, relative-
ment au sol et aux eaux naturelles. En en faisant un résumé très-court, je
priorai ceux de mes lecteurs qne le sujet intéresse de recoiu-ir à un Mémoire
sur V hygiène des cités populeuses, inséré tome XXIV des Mémoires de l'Aca-
démie, qui fut lu le 9 et le 16 de novembre 1846.
PREMIÈRE PROPOSITION.
« Pour qu'un sol arable soit salubre, c'est-à-dire |)ropre à la germina-
tion et au développement d'une plante, il faut qu'il permette à la graine
et aux spongioles des racines d'avoir le contact de l'oxygène atmosphé-
rique.
» Consécpiences. — Tout sol qui renferme une matière quelconque inor-
ganique ou organique capable d'absorber rapidement l'oxygène atmo-
sphérique du sol est contraire à la végétation, c'est pour cela que ;
u i" Des boues des curenrs de fossés qui renferment du protosulfui'e
C. R., 1870, 2» Semestre. (T. LXXI, N° 12.) 5y
( 432 )
de fer, (les résidus de lavage de soude qui renferment du sulfure de calcium
nuisent à la végétation;
» 2" Des irrigations faites avec des eaux chargées de matières organi-
ques et très-aptes à absorber le gaz oxygène peuvent nuire à la végétation,
fait qui n'est pas en opposition avec l'influence que des eaux moins char-
gées pourront avoir de faire verser les plantes;
» 3° Le drainage qui, en évacuant l'excès de l'eau d'un sol, permet à
l'air d'y pénétrera la profondeur îles drains, contribuant ainsi à étendre
le sol en profondeur, est favorable à la végétation.
DEUXIEME PROPOSITION.
» Les eaux naturelles ne sont salubres qu'à la condition de tenir de
l'oxygène atmosphérique en solution ; et ce n'est qu'à cette condition que
les animaux peuvent y vivre.
0 Conséquences. — i" Tonte matière organique qui séjourne dans l'eau
durant un certain temps la rend insalubre en s'emparant de son oxygène
atmosphérique.
» C'est en cela que des poissons assainissent les eaux des tonneaux des
jardins, en s'emparant des matières organiques dont ils se nourrissent, et
qui, autrement, en altéreraient la pureté.
» 2" Les plantes aquatiques verdoyantes frappées par le soleil contri-
buent à entretenir la salubrité des eaux, en s'assimilant, comme engrais,
des matières d'origine organique, et en dégageant de l'oxygène provenant
delà décomposition de l'acide carbonique; mais ces causes n'empêchent
pas que des gaz délétères puissent se dégager de la boue du fond de l'eau.
» S"" Une eau courante, toutes choses égales d'ailleurs, est une contii-
tion de sahibrité, relativement à une eau stagnante. Aussi est-ce une
grande faute commise contre l'hygiène, lorsqu'on interrompt le mouve-
ment d'un cours d'eau par des barrages et qu'on le réduit ainsi en flaques,
en mares, en sections d'eau stagnante.
» Un travail détaillé inédit sur les eaux de la Bièvre, commencé en 1827
et continué jusqu'à ces derniers temps, me permet de restreindre quelques
conclusions trop générales qui ont été tirées récenunent d'iui trop petit
nombre d'expériences faites à l'étranger.
» 4" Les matières organicpies peuv. ut contribuer à l'insalubrité des
eaux naturelles, en absorbant l'oxygène de l'acide snifurique uni aux
bases alcalines.
» I elle est l'origine des sulfures de calcinm, de potassium, etc., qui se
( 433 )
forment dans des eaux que renferment des tonneaux de chêne, dont on a
négligé de carboniser l'intérieur d'après le conseil de Berthollet.
» 5° Il y a nécessité que les cimetières situés sur des collines n'aient
pas leur pente du côté des villes. Tel est l'inconvénient de la situation du
cimetière du Père-Lachaise de Paris.
» Je n'ai point parlé dans ce qui précède de l'action de la lumière sur
les matières organiques que l'on a intérêt à détruire : son efficacité est
prouvée par les nombieuses séries d'expériences sur la décoloration des
étoffes teintes, exposées en même temps au gaz oxygène et à la lumière, ou
même encore à la chaleur obscure.
Conséquences des deux propositions .
« i" J'ai donné une attention toute particulière aux combustions lentes
dont les matières organiques sont susceptibles sous l'influence de la lu-
mière.
1) Ces combustions lentes sont une cause de salubrité, lorsqu'elles ont
lieu sous cette influence dans des eaux aux dépens de l'oxygène atmo-
sphérique qui s'y dissout incessamment. Cette combustion de la matière
organique, que j'ai fait connaître il y a longtemps, par le contact de l'air
libre, empêche l'infection de l'eau contenant des sulfates alcalins qui aurait
lieu, si elle était privée du contact de l'air.
» 2° Tout ce qui. s'oppose à la pénétration de l'eau aérée, des pluies
dans le sol, est contraire à la salubrité de ce sol.'
» Dans les rues pavées des villes, le fer qui se détache du fer des che-
vaux et des roues des voitures finit par gagner les entres des pavés et passe
bientôt à l'état d'oxyde noir magnétique. Cet oxyde devient ainsi un ob-
stacle à l'aération du sol inférieur.
» Il est remarquable, d'après mes expériences, que le fer métallique qui
est en contact avec de l'eau, des matières organiques et du sulfate de
chaux s'oxyde simplement, et qu'alors il ne se produit pas de protosulfure
de fer.
» Mais il n'en est plus de même lorsque du sulfate de chaux dissous dans
l'eau avec une matière organique se change en sulfure : si celui-ci rencontre
un oxyde de fer, il se produit immédiatement du sulfure de ce métal.
» 3° Le pavage des rues doit être considéré sous deux aspects dif-
férents :
57..
( 434 )
» Il est sal libre en ce qu'il éloigne les eaux stagnantes des murs des
maisons ;
H II est insalubre en ce sens qu'il empêche les eaux pluviales tenant de
l'oxygène atmosphérique de pénétrer dans le sol, et dès lors met obstacle
à l'action salubre de ce gaz.
» 4° Une cause d'infection du sol relative à la disparition de l'oxygène de
ce sol, est l'usage déplorable d'enterrer les conduites de gaz : car le gaz
contient des huiles qui, se condensant en liquide, deviennent la cause de
l'infection du sol, dès qu'il y a une rupture, une fonte dans la conduite. Je
me trompe fort si l'on ne voit plus tard le triste effet de cette infection.
» J'ai eu l'occasion de préserver un jardin public de la mortalité des
arbres qu'occasionnait la fuite du liquide séparé du gaz circulant dans des
tuyaux simplement enterrés, en conseillant à l'archictectc de les placer
dans des canaux en maçonnerie.
» 5° La salubrité d'une maison exige, sinon son isolement, du moins la
libre circulation de l'air sur deux de ses faces o[)posées, la pénétration de
la lumière dans l'intérieur des apparteu)ents et le renouvellement de l'air
qui est en contact avec les murailles intérieures du rez-de-chaussée.
» Dans un ouvrage inédit, je fais l'apiilication des principes précédents
aux nouvelles constructions des maisons de Paris et à la suppression des
cours, des jardins et des puits, w
JVote de M. Ciievreul relative à la demande adressée à l' Académie d'ouvrir un
volume de ses Mémoires pour recevoir le septième Mémoire de ses recherches
chimiques sur la teinture, qui sont relatives à la laine et au suint.
« M. Chevreul demande à ses confrères, qu'ils veuillent bien lui accor-
der la faculté de commencer l'imiiression d'un ouvrage sur la laine, com-
prenant l'examen du suint cl t'élude des propriétés de sa matière Jilamenteuse
purifiée.
» L'origine de ce travail remonte à l'année i8o5, et depuis quarante-
deux ans il s'en est occupé d'une manière pour ainsi dire continue comme
le témoignent les communications de plusieurs de ses recherches qu'il a
faites déjà à l'Académie.
a Cet ouvrage est le produit de toutes les recherches de M. Chevreul
sur l'analyse organique immédiate ap|)liquée à l'examen du suint.
1) M. Chevreul fait connaître d'une manière précise la grande différence
qui distingue l'analyse organique immédiate de l'analyse minérale.
( 435 )
» Il examine la laine au point de vue physique, chimique et physiolo-
gique, puis au point de vue de l'économie des arts, dont elle est la matière
première.
» Ce qui détermine M. Chevreul à demander l'impression immédiate de
celles de ses recherches, qui sont terminées, c'est que son laboratoire des
Gobelins sera probablement exposé aux premières bombes prussiennes, et il
se reprocherait de n'avoir pas prévenu la destruction d'iui travail dont la
publication peut avoir quelque utilité pour la science et l'industrie, à cause
des faits nombreux qu'il embrasse et du temps qu'il a consacré à lutter
contre des difficultés qu'aucune de ses autres recherches ne lui a pré-
sentées.
» La demande de M. Chevreul, accueillie à l'imanimité par l'Académie,
a dû, conformément au règlement, être renvoyée à l'examen de la Com-
mission administrative. »
CHIRURGIE. — Suite (les indications relatives aux amputations faites à la suite
de blessure par les armes de guerre. — Suites funestes de l'encombrement et
de tout ce qui s'oppose à une parfaite aération des lieux où sont reçus les
blessés. — Conditions qui devront augmenter les chances de guérison- mesures
proposées à cet effet. Note de M. Sédillot.
« Haguenau (ambulances volontaires de la Société internationale
des secours aux blessés), ii septembre 1870.
» L'affreuse mortalité des blessés par armes de guerre appelle l'atten-
tion de tous les amis de la science et de l'humanité, et je suis certain de
la sympathie de l'Académie en vous entretenant de ce sujet. La question
« de la conservation des blessés » devrait être mise et rester à l'ordre du jour
des Académies et des Sociétés de Médecine, et je voudrais que les proposi-
tions que j'ai l'honneur de vous soumettre pussent être adoptées ou rem-
placées par des dispositions mieux conçues et d'une plus complète effica-
cité.
» L'étude du traitement et des résultais des blessures de guerre révèle
douloureusement de proibndes dissidences entre les hommes de l'art les
plus éininents.
» Le problème des amputations immédiates ou tardives, mis au con-
cours par notre anciennne et glorieuse Académie de Chirurgie, a seulement
changé de termes et se débat entre les partisans de la conservation des
membres, forcés de revenir, dans beaucou[) de cas, aux amputations tar-
( 436 )
clives, et ceux des amputations pratiquées immédiatemeuî, dans le but d'évi-
ter la nécessité d'y recourir pendant la période inflammatoire. L'on n'est
d'accoril ni sur les cas ni sur l'opporlimité des amputations. Là où les uns
ont éprouvé des revers, d'autres ont obtenu des succès, et l'art, hésitant et
déconcerté, poursuit une doctrine et des règles qui semblent fuir devant
ses recherches.
» Le perfectionnement des armes de guerre et l'aggravation des bles-
sures n'expliquent pas ces dissidences. Une cause semblable ne saurait pro-
duire des effets différents, et la raison doit s'en trouver dans des influences
variables.
» Le choix des méthodes et des procédés opératoires, l'iiabileté des
chirurgiens modifient sans doute le nombre des guérisons, mais l'expérience
démontre que la part en est faible, comparativement à celle des conditions
hygiéniques, si néfastes, parfois, qu'aucun blessé ne survit. N'est-il pas
évident que des hommes souffrants, affaiblis, attristés, accumulés dans des
espaces étroits, infects et bientôt infectieux, sans air, sans médicaments,
sans linge, sans pansements, souvent sans aliments et sans eau potable,
sont voués à une mort inévitable. L'ouvrage de M. le docteur Chenu,
couronné par l'Académie, n'en offre que des preuves trop répétées et trop
lamentables.
M Une vérité fondamentale s'est fait jour et n'admet plus de discussion.
Il faut placer les blessés dans des conditions hygiéniques favorables, et
pour cela les disséminer. Mais comment, dans quelles proportions, siu"
quelle étendue de territoire, par quels moyens leur assurer des soins mé-
dicaux? Voilà ce qu'il importe d'établir. L'Amérique, dès ses premiers pas,
a presque entièrement résolu ces difficultés par de magnifiques bara-
quements, où s'accumulaient toutes les ressources : viandes fraîches, con-
serves, fruits, légumes et autres aliments variés, laitage, glace, aération
parfaite, pharmacies complètes, chirurgiens chargés, sans intermédiaiics
inutiles et par cela même dangereux, de la direction de tous les services;
ordre de brûler de fond en comble ces hôpitaux improvisés, dès qu'une
apparence infectieuse en compromettait la salubrité; transports et évacua-
tions rapides par chemins de fer et bâtiments maritimes appropriés; aucun
secours ne faisait défaut. Mais quelle nation européenne est capable de
fournir une première mise volontaire de 4oo millions pour secours à ses
blessés? Il nous faut donc chercher d'autres ressources. Celles d'aujour-
d'hui, qnoicjue supérieures à celles dont on s'est longtemps contenté, sont
absolument insuffisantes. Partout nous voyons des hôpitaux, des ambu-
(437 )
lances, des villages et des villes encombrés. Du huitième au douzième
jour, on reconnaît les lieux où séjournent les blessés, à l'odeur de suppu-
ration et de gangrène qui s'en dégage. Quelques jours |)lus tard, l'infec-
tion est générale et entraîne une immense mortalité. Le personnel médical
et hospitalier n'échappe pas à cette action délétère, marquée, dès le début,
par des affections gastro-intestinales plus ou moins graves. Comment de
malheureux blessés pourraient-ils y résister! On fait partira pied, en voi-
ture, eu chemin de fer, les moins atteints; ceux qui le sont plus dangereu-
sement occupent les lieux publics et les maisons offertes par le dévoue-
ment et la charité des habitants, mais malgré ces précautions, l'encom-
brement est partout, et dix ou vingt mille blessés, quelquefois davantage,
ne peuvent être facilement disséminés à de grandes distances. Le pays
entier doit être appelé à concourir à des mesures de salut plus radicales,
et les médecins civils sont seuls capables, par leur nombre, leur zèle et
leurs lumières, de subvenir à de si impérieuses exigences et de complé-
ter la médecine militaire, qui ne compte pas mille docteurs et est dé-
bordée.
» En règle générale, tous les blessés sont transportables, et la preuve en
est fournie par les champs de bataille, où il n'en reste pas un seul au bout
de peu de jours.
» Un autre fait, digne de toutes les méditations, est qu'un homme jeune,
sain et bien constitué, placé dans des conditions hygiéniques favorables,
échappe habituellement aux traumatismes les plus compliqués, comme la
médecine de nos villages en offre de si remarquables exemples. Là est la
source d'indications capitales. I^arrey et d'autres chirurgiens ont signalé,
avec une certaine surprise, l'état inespéré de blessés transportés à de grandes
distances, en raison des nécessités de la guerre, et retrouvés en bonne
voie de guérison. Le changement de lieux et une meilleure aération les
avaient sauvés.
M Des conditions différentes de salubrité sont donc les |irincipales causes
des succès et des revers des chirurgiens et de leurs dissidences. Si les am-
putations immédiates sont plus heureuses, c'est qu'à ce moment l'air n'est
pas encore vicié. La mortalité des amputations faites jiendant la période
inflammatoire tiendrait à ce qu'elles ont lieu en pleine infection nosoco-
miale, et l'issue moins défavorable des amputations consécutives s'expli-
querait, en partie au moins, par un commencement d'assainissement des
localités, débarrassées par la mort d'un encombrement fatal.
» Pour éviter de pareils désastres, assurer dans les plus larges limites le
( 438 )
salut des blessés et ne sacrifier que les membres condamnés par une expé-
rience unanime, nous proposons les mesures suivantes :
» j" liCS blessés seront assez écartés les uns des autres, pour prévenir
par ce seul fait la viciatioii des localités et de l'air ambiant.
» 2° A cet effet, on pratiquera dès le premier ou le second jour de la
blessure les amputations et les résections que l'opinion unanime des
hommes de l'art rend indispensables, et l'on appliquera le principe de la
conservation, au moins provisoire, dont on fera courir les chances heu-
reuses aux blessés, dans tous les cas où il y aura doute et hésitation.
» 3" Ces opérations terminées et les appareils et les bandages exigés par la
nature des lésions étant placés, on dirigera sur des lieux désignés à l'avance
un nombre déterminé de blessés, réiiarlis aux distances réglementaires qui
auront été fixées. Deux personnes seidement pourront occuper une même
chambre suffisamment espacée. C'est un moyen de société, de protection
et de confiante intimité dont les malades se trouvent généralement bien.
» l\° Les plus longs transports seront supportés par les moins souffrants.
Ceux dont l'état exige le plus de ménagements et de soins seront envoyés
de préférence dans les cités universitaires.
» 5" Les blessés recevront leur solde de guerre jusqu'à guérison, pour
alléger volontairement les charges de ceux qui les recevront, ou améliorer,
comme ils l'entendront, leur situation. Tous auront la faculté de se faire
transporter, sans frais à leur charge, dans leur famille ou chez les parents et
les amis qui les réclameront, et dont les moyens d'installation seront
reconnus favorables. Les blessés non réclamés seront placés chez les per-
sonnes qui auront offert de les recevoir. Si cette hospitalité spontanée était
insuffisante, on la rendrait obligatoire, avec des conditions de surveillance
confiées à des Commissions spéciales.
» 6° Les visites, pansements et opérations seront gratuits et le Gouverne-
ment en réglera les honoraires, d'après un tarif général, aux hommes de
l'art dont le choix sera libre. Les mêmes dispositions s'appliqueront à la
fourniture des médicaments.
» 7° Le brassard de la Société internationale sera remis aux nobles
femmes que la charité et le dévouement décideront à se consacrer aux soins
des blessés. Des instructions et une organisation spéciales seront assignées
à cette vaste confrérie de secours.
» 8" Une Commission nommée par l'Institut, l'Académie de Médecine,
le Conseil de salubrité de Paris et le Conseil supérieur de santé des ar-
mées établira d'urgence les règles de la dissémination des blessés; les dis-
( 439 )
tances à maintenir entre eux; la situation isolée et salubre des localités qui
leur seront affectées; le minimum de cubage d'air reconnu indispensable;
le choix, dans les villes, des maisons à proximité des places, des jardins,
des espaces libres; les indications relatives au régime alimentaire, aux vêle-
ments, aux premiers secours, aux pansements, aux opérations.
» 9° Les préfets, sous-préfets, maires, curés, pasteurs, médecins, mem-
bres des Conseils général et municipal, les sociétés médicales, les associa-
tions religieuses et de charité veilleront, dans les limites de leur compétence,
à ce que rien de ce qui touche à la santé des blessés ne soit négligé.
» lo" Un Rapport sur la nature des blessiu'es, des complications et acci-
dents, et des résultats définitifs du traitement sera fourni par le médecin
traitant, et permettra, avec les renseignements officiels de l'autorité mili-
taire, de compléter l'histoire de chaque cas particulier et d'arriver à des
statistiques du plus haut intérêt pour les indications opératoires, la gravité
relative des blessures et les moyens les plus assurés de la guérison.
» Conclusion. — L'adoption de ces mesures nous paraît le plus sûr
moyen de sauver des milliers de blessés et de prévenir une multitude de
mutilations imposées à l'art par les fatales conditions d'encombrement,
d'insalubrité et d'insuffisance de soins que déplorent l'humanité et la
science. »
M. Dumas donne connaissance de la Lettre suivante, que lui adresse
M. Edm. Becquerel.
'< Mon père me charge de vous prier d'exprimer à ses confrères ses plus
vifs regrets de ne pouvoir se réunir à eux dans de si graves circonstances.
Absent de Paris depuis plusieurs mois, sa santé s'est trouvée altérée dans
ces derniers temps, et des atteintes répétées de dyssenterie l'ont beaucoup
affaibli. Ce motif me retient près de lui, d'autant plus qu'un avis de la
Préfecture nous a annoncé l'envahissement prochain de notre département.
Je vais me joindre à la garde nationale pour la défense de notre territoire,
et ici, comme par toute la France, il y a un grand élan patriotique.
» Chatillon-sur-Loing (Loiret), ce i6 septembre 1870. »
Après avoir donné lecture de cette Lettre, M. Dumas fait, à l'occasion
de l'absence du Vice-Président de l'Académie, M. Coste, la Communication
suivante :
« Dans les circonstances oii nous nous trouvons, l'absence de notre
C. U., 1870, 2« Semestre. (T. LXXl, N" 12.) J"
( 44o )
lionorable Vice-l'résident, M. Coste, pouvant èire remarquée, je regarde
comme un devoir de rappeler à nos confrères qu'elle est due à la longue
et grave affection qui l'éloigné de nous, et qui, malgré une amélioration
sensible, ne lui permet pas de reprendre encore le cours de ses occupations
et de nos travaux communs. J'ai eu récemment encore l'occasion d'ap-
prendre de ses nouvelles par un membre de sa famille, et de lui faire con-
naître une fois de plus loul l'intérêt que l'Académie porle an rétablisse-
ment de sa santé. »
CORRESPOIVDANCE.
M. LE Secrétaire perpétuel fait hommage à l'Académie, de la part de
M. Zantedeschi, de deux nouveaux opuscules écrits en italien, publiés par
lui dernièrement.
Le premier a pour objet rEleclro-Cliimie appliquée à l'industrie el aux
beaux-arts.
Le second traite des Bourrasques de f atmosphère solaire el de leur con-
nexion possible avec les bowrasiptes de l'atmosphère terrestre.
M. A. Brachet adresse une Note sur les avantages que présente l'emploi,
pour les besoins de la guerre, de l'aérostat Meusnier, et s'attache à faire
ressortir la supériorité qu'a ce système sur ceux dont on pourrait songer à
faire l'application pour la défense nationale.
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
A 4 heures, l'Académie se forme en Comité secret.
COMITÉ SECRET.
Sur l'avis de la Commission administrative, la demande faite par M.Che-
vreul de commencer dès à présent l'impression de son travail sur la laine
et le suint est adoptée. Ce travail fera la tète d'un nouveau volume des
Mémoires de l'Acculémie.
M. Chevreul adresse à ses confrères l'expression de sa vive reconnais-
sance.
La séance est levée à /( heures et demie. E. D. B.
( 44i )
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
L'Académie a reçu, dans la séance du 19 septembre 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Compte rendu des travaux de la Société impériale de Médecine, Chirurgie et
Pharmacie de Toulouse, depuis le C) mai \S6g jusqu'au l'jmai 1870. Toulouse,
1870; in-8°.
Intorno... De l' électro-chimie appliquée à l'industrie et aux beaux-arts.
Lettre du prof. F. Zantedeschi à l'auteur de l'important ouvrage intitulé: Les
grandes inventions anciennes et modernes de l'ingénieur Besso. Paris,
1870; br. in-8°.
Délie... Des bourrasques de l'atmosphère solaire et de la relation qui peut
exister entre ces bourrasques et celles de l'atmosphère terrestre; Note du prof.
F. Zantedeschi. Venise, 1870; br. in-8°. (Extrait des Actes de l' Institut vé-
nitien des Sciences, Lettres et Beaux- Arts.)
ERRATUM.
(Séance du 5 septembre 1870.)
Page 402, ligne 20, au lieu de ( i — Di — ^, — t», —, Usez (i — 'i, — D^ — i. )
\ ' d^ ' -^ ' rfg^.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE DU LUNDI 26 SEPTEMBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
« M. P. Gervais présente à l'Académie deux Mémoires qu'il vient de
faire paraître dans les « Nouvelles Archives du Muséum » : le premier,
« Sur les formes cérébrales propres aux Marsupiaux » ; le second, « Sur
les formes cérébrales propres aux Carnivores vivants et fossiles ». Ce der-
nier est suivi de remarques sur la classification des mêmes animaux.
» M. P. Gervais offre en outre à l'Académie, les livraisons VI à VIII de
« l'Ostéographie des Cétacés (texte et planches) », qu'il pubhe avec la col-
laboration de M. Van Beneden. »
MÉMOIRES LUS.
HYGIÈNE PUBLIQUE. — De i alimentation des habitants, dans une ville en état
de siège. Note de M. G. Grimaud (de Caux).
« Dans une ville en état de siège et bien fortifiée, la question est dans
les vivres. Si les vivres ne font pas absolument défaut, il suffit du courage
de quelques combattants énergiques et expérimentés, pour maintenir la ré-
sistance. Les irrésolus s'entraînent; les timides eux-mêmes sont stimulés,
C. R., 1870, t* Semestre. (T. LXXl, N" 13.) Sg
( 444 )
et, la valeur montant au cœur, ils réalisent à la lettre le vers du poète
latin :
Saepè etiam viclis redit in prsecordia virtus.
» Ainsi on gagne clii temps ; des secours arrivent, souvent d'où on les
attendait le moins, car la Providence est grande, et le triomphe est assuré.
» Une instruction populaire a été publiée, dans laquelle on parle de
suppléer au pain par le riz, les pommes de terre et le sucre. On n'y fait pas
mention du blé, dont on a emmagasiné de grandes quantités, tant en gerbes
qu'en grains provenant de la dernière récolte. Il ne sera pas inutile de dire
ici, d'après les résultats d'une expérience personnelle, comment on peut
utiliser le blé en grains, sans le réduire en farine pour le transformer en
pain; et comment on peut se passer ainsi du moulin et du four.
» J'habitais Venise, avec ma famille, quand la révolution éclata. Venise
était imprenable, comme toute ville inondée. Si Venise eût tenu trois ans,
il n'y a pas de puissance européenne qui se fût opposée à la résurrection de
cette république; et la France, en la soutenant, eût réparé une grande
injustice.
» Dans celte capitale, les approvisionnements pouvaient être poussés
au delà de trois ans. La terre ferme resta ouverte pendant plusieurs mois,
ainsi que la mer, occupée par la flotte sarde, jusqu'après la bataille de
Novare. Les besoins sérieux se 6rent sentir aussitôt qu'il fallut renoncer à
sortir du port et de la lagune. Bientôt pour la population plus de pain,
plus de viande, plus de poisson, plus de vin, plus de vinaigre, plus d'eau,
si ce n'est celle de puits artésiens, dans laquelle prédominait la matière orga-
nique azotée, c'est-à-dire l'élément constituant du typhus. Le typhus ne fit
pas défaut, il vint se joindre an choléra et à la famine qui secondèrent les
boulets jusque-là impuissants des Autrichiens.
» Le jour où le pain nous manqua, ce fut une rude épreuve. J'avais un
sac de blé dont je m'étais approvisionné à tout hasard; mais il n'y avait
plus de moulins dans Venise. J'essayai de l'écrasement; les pierres s'égru-
geaient, et j'obtenais plus de sable que de farine.
» Je fis tremper le grain et frotter, longtemps, pour enlever les aspérités
de l'enveloppe. I^e blé se gonfla, il prit un aspect brillant et doré, qui fai-
sait plaisir à voir. Je le fis bouillir dans de l'eau à la façon du riz, avec tout
ce que je pus me procurer d'aromates et d'épices. Au bout de quatre hein-es
de cuisson, rien n'était plus savoureux. Je savais que ce serait nourrissant, et
que le mélange naturel du gluten et delà fécule ne pouvait être que sa-
lubre.
(44*5 )
» Il suffisait d'une cuillerée de grain, puisée dans le sac, pour l'alimen-
tation d'une personne. Mailces et serviteiu's, nous étions quatorze d;ins la
maison; on puisait donc dans le sac quatorze cmllerées. Nous atteignîmes
le moment de la délivrance (i), sans qu'aucun de nous souffrît de la ma-
ladie ou de la faim, pendant que, deux mois durant, des barques chargées
de morts prenaient le chemin du cimetière (3o morts par jour, dans une
ville où la moyenne était de 6. ) »
« M. Dumas prie l'Académie de l'excuser si, contrairement à l'usage
qui interdit à ses Membres d'engager une discussion devant elle à l'occa-
sion d'une lecture faite par une personne qui n'appartient pas à la Com-
pagnie, il ajoute quelques indications à la Note de M. Grimaud (de Caux).
Les circonstances justifient trop cette infraction.
» Il est certain, comme le dit M. Grimaud (de Caux), que le blé peut être
consommé en nature, et qu'il forme un aliment complet; il ne l'est pas
moins que la mouture en réduit le poids utile, d'une manière digne d'at-
tention, et qu'elle en écarte des parties que la digestion mettrait à profit.
)) Or, dans l'approvisionnement de Paris, qui, au moment de l'investis-
sement, comptait environ 4oo,ooo quintaux de farine et 100,000 quintaux
de blé, il était évident que le blé jouait un rôle important, et qu'il n'était
pas indifférent de le considérer comme représentant seulement 70,000 quin-
taux de farine ou bien, au contraire, son propre poids d'aliment,
» Il n'a pas semblé douteux que cette dernière supposition fût la
meilleure. Un administrateur très-distingué, M. Gauldrée Boileau, s'est sou-
venu que les Romains des premiers siècles vivaient de blé grillé, moulu et
converti en bouillie; qu'on avait attribué à cette nourriture la bonne santé
et l'énergie robuste de leurs soldats, et qu'on avait regardé l'habitude de
manger du pain, introduite plus tard, chez ce peuple, comme une cause
d'affaiblissement. De leur côté, les Arabes mangent réellement le blé en
nature, après l'avoir décortiqué et cuit à la vapeur en quelque sorte, comme
nous mangeons le riz crevé. M. Grimaud (de Caux) veut qu'on fasse bouillir
le blé; c'est un troisième procédé culinaire.
(1) A cette occasion, je fis connaissance avec tous les livres de cuisine que je pus me
procurer. Ce fut Beauvilliers qui me servit le plus. La mer ne nous livrant pas de poisson et
la lagune étant épuisée, il ne restait que du fretin dont personne ne savait se servir. J'y trou-
vai l'élément de réductions très-substantielles, qui servirent plus dune fois à varier hos repas.
Je m'étais préparé à subir d'auU'es extrémités, et, si le siège eût duré plus longtemps,
Beauvilliers aidant, plus d'un rat de lagune aurait été préparé aux fines herbes.
59..
( 446 )
» L'expérience seule peut apprendre de quel côté la population pari-
sienne portera sa préférence. Mais le problème est à l'étude; chacun peut
s'en occuper ; la solution proposée par M. Grimaud (de Caux) vient s'ajouter
à celles qui étaient en voie d'examen; il peut s'en produire d'autres et,
assurément, il faudra les examiner avec bonne volonté.
» Il convient de se souvenir que 4 de blé donnent 3 de farine, qui re-
produisent 4 de pain seulement. Sans être perdu pour l'alimentation hu-
maine, le quart du poids du blé pourrait recevoir en ce moment une ap-
plication plus directement utile.
» M. Dumas ajoute que, si l'on a provoqué de grands approvisionne-
ments en blé, cependant, on n'a jamais songé à donner chaque jour satis-
faction aux besoins de Paris par la mouture de ce blé. Ce n'est pas ainsi que
le problème s'est posé. On a cherché à donner au blé le rôle d'auxiliaire
et à préparer les moyens de mouture pour une quantité de blé suffisante
au tiers ou au quart de la consommation.
» Les meules de la Manutention militaire et celles de l'Assistance pu-
blique ne suffisaient pas. Mais M. Cail s'est chargé de monter un nombre
considérable de petites meules verticales à rotation rapide, et l'Administra-
tion a demandé à l'habile ingénieur de l'Exposition universelle, M. Krantz,
d'installer, dans tous les points de Paris où se trouvaient des moteurs, des
moulins ordinaires à meule horizontale. On peut donc dire que le pro-
blème est résolu. Le blé entrera, sous forme de farine faite à Paris méme^
pour un tiers ou un quart au moins dans la consommation, à moins qu'on
ne préfère le consommer en nature.
M II n'est peut-être pas inutile de remarquer, dit encore M. Dumas,
qu'il existe à Paris, en quantités importantes, de l'orge et de l'avoine pro-
pres à fournir des gruaux qui constituent d'excellents aliments.
» La farine d'avoine entre, en particulier, dans l'alimentation de certains
peuples d'une façon normale. Il n'y a pas en Ecosse, par exemple, une seule
famille, riche ou pauvre, où le déjeuner ne débute par une bonne assiet-
tée de bouillie d'avoine, qui forme un mets très-agréable, très-sain et très-
nourrissant.
» A l'appui d'une opinion énoncée par notre confrère M. Payen, je con-
state, dit enfin M. Dumas, que le pain renfermant tout le son du blé est un
pain de luxe en Angleterre, et qu'on regarde comme hygiénique d'en man-
ger deux fois par semaine.
» On est en présence, dans tout ceci, d'habitudes prises à modifier, et
de procédés de cuisine à découvrir ; mais le rôle de la science n'est-il pas
(447)
de combattre tous les préjugés? sa mission n'esl-elle pas d'aborder les pro-
blèmes les plus humbles, dès qu'il s'agit de l'intérêt public? »
M. Chevreul demande la parole et s'exprime comme il suit :
« Le pain fut connu, dès la plus haute antiquité, de quelques peuples,
notamment des Égyptiens, connue l'atteste la distinction admise par les
Israélites, du pain d'avec le pain azyme, distinction qu'ils tenaient de la
civilisation égyptienne.
» Persuadé depuis longtemps de la circonspection qu'il faut apporter
dans toutes les questions relatives à l'ahmentation, et considérant combien
sont nombreuses et variées les influences que l'eau, le sel et la cuisson
exercent sur les qualités des légumes et des viandes (i), je suis fort réservé
lorsqu'il s'agit de questions relatives à la nutrition et surtout à la substitu-
tion d'un aliment nouveau à un aliment connu de tous, depuis une époque
fort reculée.
» Dieu me gardedecritiquerla Communication de M. Grimaud (deCanx);
car je suis pénétré, dans les circonstances actuel les, de reconnaissance pour
tous ceux qui, de bonne foi, tendent à en atténuer la gravité! Ce que je
veux dire, c'est que le grain de froment cuit dans l'eau ou à la vapeur n'est
pas du pain, c'est-à-dire un aliment préparé avec de la farine de froment ou
de seigle, réduite en pâte avec de l'eau et du sel, puis levée par fermenta-
tion et cuite enfin; ce pain, qui présente à l'état solide ses parties au canal
inslestinal, est, à mon sens, dans une condition différente d'un aliment li-
quide ou à l'état de bouillie. Bien entendu que je ne parle pas d'une cir-
constance accidentelle, mais d'un état de choses permanent.
» Quant aux progrès faits en boulangerie, eu égard au plus grand ren-
dement de pain, tiré d'un poids donné de froment, on ne peut oublier
dans cette Académie la part qui revient à M. Mège-Mouriez, ainsi qu'eu
rendent témoignage plusieurs Rapports, notamment un premier Rapport
qui lui fut soumis en 1857, et le compte rendu par le Directeur de l'assis-
tance publique d'une pratique de deux ans de ce procédé à la boulangerie
des hospices de la ville de Paris.
» Un fait ressort encore des recherches de M. Mège-Mouriez, c'est la
coloration du pain bis (brun noirâlre), due, non au son, comme tout le
monde le croyait avant lui, mais à une altération d'une certaine quantité
delà matière fermentescible; fait mis hors de doute par M. Mège-Mouriez,
(i) Voir Comptes rendus de la séance duïia de janvier et du 2 de mars lëS"].
( 448 )
qui présenta à l'Acndémie du pain blanc dans lequel le son visible à la
loupe et même à loeil i.n était disséminé, et qui expliqua le résultat d'une
expérience faite antérieurement à Scipion par trois personnes, y compris
l'inventeur d'un procédé qui s'était engagé, dans une Lettre adressée à
l'empereur Napoléon III, à faire du pain blanc avec la totalité du grain
de froment simplement décortiqué. Les juges du procédé, M. de Salonne,
le Directeur de la boulangerie de Scipion, et le général Favé, alors colonel,
furent bien surpris de constater que le pain obtenu d'une farine privée de
son était bis !
» Ce fait, inexpliqué alors, fut expliqué plus tard par le travail de
M. Mège -Mouriez.
» Que l'Académie me permette de revenir sur l'histoire des connais-
sances chimiques.
» Deux grands faits chimiques., relatifs aux sociétés humaines, remontent
à une haute antiquité. D'abord la découverte du feu, puis celle du pain fer-
menté, ou du pain proprement dit, connu des anciens Égyptiens, comme
je l'ai dit; c'est de l'Egypte que la préparation du pain passa en Grèce,
puis de la Grèce à Rome.
» Le phénomène de l'accélération de la fermentation dans une pâte de
farine, produite par l'introduction qu'on y f^^it d'une pâte déjà en fermen-
tation très-avancée, ou de la levure, agit fortement sur l'esprit d'un certain
nombre d'esprits observateurs ; car il présentait ce fait qu'une pâle en fer-
mentation ou ferment, introduite dans une pâte, la faisait entrer en fermen-
tation qu'elle n'aurait pas éprouvée sans cette introduction. La conclusion
scientifique était que le ferment était un corps qui en transformait un autre
en sa propre substance.
1) Voilà le fait sur lequel j'ai insisté dans mes écrits sur l'histoire de la
chimie, parce qu'il est le point de départ de tous les s^^stèmes de médecine
dont la brise est In FERMENTATION, et celui de riiypothèse nlclnmique, telle que
je l'ai développée et telle que la résmne le deuxième Tableau de l'Histoire
des principales opinions que l'on a eues de la nature chimique des corps (i).
» Cette hypothèse, tout à fait conforme aux idées de Platon sur la nature
des éléments, énoncées dans le Timée, et conséquemment aux idées des néo-
platoniciens, devait sortir de l'École d'Alexandrie, et je crois cette opinion
incontestable.
i) f^oir le tome XXXVIII des Mémoires fie l'Académie.
(449)
» D'après les écrits alchimiques, théoriques ou spéculatifs, l'hypothèse
alchimique peut se résumer en ces termes :
» L'or et /'ARGEiNT de la nature sont morts, l'art alchimique consiste à com-
muniquer la VIE à des parcelles de ces métaux qui, acquérant ainsi la vertu d un
FERMENT, ont la propriété de transmuer des métaux imparjaits en leur propre
substance.
» Cette conclusion explique très-bien pourquoi, dans l'épître apocryphe
de la reine Isis à son fils Horus , l'auteur se résume en disant que /'oR pro-
duit /'or (i). »
« M. Payen désire ajouter un document de quelque importance aux
faits intéressants qui viennent d'être signalés à l'attention de l'Académie,
Mais d'abord il s'empresse de reconnaître que, si l'on consommait le blé en
nature, conformément aux indications contenues dans la Note dont M. Gri-
maux (de Caux) vient de donner lecture, on gagnerait, en substance nu-
tritive pour l'homme, environ les 25 à 3o centièmes du poids du grain, qui
restent dans le son suivant les procédés usuels de mouture.
» On réaliserait ainsi une alimentation plus complète, plus salubre et
plus économique : le son contenant, en plus grande abondance que les
parties sous-jacentes du périsperme, certains principes azotés, gras et salins,
assimilables ou favorables à la digestion.
» Les portions non digestibles éliminées des farines blanches auraient
pu remplir elles-mêmes un rôle utile, car on a depuis très-longtemps con-
staté en Angleterre que, pour entretenir normalement l'intégrité des fonc-
tions digestives, il convient de consommer de temps à autre un pain con-
fectionné avec le produit de la mouture du froment, sans eu rien séparer,
c'est-à-dire le produit que l'on désigne communément sous la dénomina-
tion de pain de son. On fabrique, dans plusieurs grandes boulangeries de
Paris, ce pain spécial dont la mie est brune, et que l'on pourrait, à juste
titre, nommer pain de froment.
» Le problème de la fabrication économique d'un pain de ce genre me
(i)Pour montrer la différence existant enl:re ma manière de comprendre l'iiypottièse
alcliiiiiic|ne, je reproduis le passage suivant de l'Histoire de la Chimie du D"^ Hoefer, t. I
(i" édition), p. 2-6 : « Cette épîire, écrite dans un langage tout mystique, me |)araît une
» satire sanglante des divagations ihéoriques et obscures sur la p erre pliilosopliale ; car
« l'auteur, après avoir fait jurer le silence par toutes les puissances du ciel et de l'enfei-,
» apprend à l'initié que pour Jairc de l'or, il faut de l'or, en proclamant que c'es/ là tout le
» mystère. »
( 45o )
semble, dit M. Payen, être aujourd'hui résolu. En effet, dans une des der-
nières séances de la Société centrale d'Agriculture, M. Sézille voulut bien,
à ma demande, présenter un remarquable spécimen d'un pain qu'il fabrique
couramment en Hollande, et qui subvient à une alimentation économique
et salubre. Le procédé est simple, et dispense d'ailleurs de la mouture et
des blutages.
» Voici en quoi il consiste : le blé, d'abord superficiellement humecté,
est soumis à une légère décortication qui le dépouille de son épicarpe, for-
mant environ 5 centièmes seulement du poids total. Le grain, ainsi décorti-
qué, est immergé dans l'eau à -h 3o ou 35 degrés, pendant sept à huit heures,
jusqu'à ce qu'il en ait absorbé une assez grande quantité (5o à 60 centièmes)
pour céder à la pression sous les doigts. On le malaxe alors entre des cylin-
dres, pour le réduire en pâte. Cette pâte est aussitôt soumise aux procédés
usuels de panification, à l'aide de levain ou de levîire.
» I,es échantillons qui nous ont été présentés ont paru d'excellente
qualité; la nuance un peu brune de la mie a pu être sensiblement amélio-
rée, à l'aide d'une fermentation plus rapide de la pâte. Cette nuance était
d'ailleurs bien moins foncée que celle des pain» dits de son, qui sont con-
sommés périodiquement en Angleterre et habituellement aussi par un assez
grand nombre de personnes en France, comme alimentation hygiénique.
» Sans doute, il serait bien désirable que l'on parvînt à obtenir ce pain
de froment exempt de la coloration brime, qui déplaît aux consomma-
teurs, bien qu'elle soit exemple de toute influence sur les qualités alimen-
taires; peut-être l'intérêt de ménager nos subsistances, tout en améliorant
le régime alimentaire, viendra-t-il apporter son concours pour vaincre ce
préjugé.
» Il serait sans doute convenable de songer aussi à utiliser, au profit
d'une saine alimentation, d'autres approvisionnements qui existent à Paris,
par exemple en associant, dans une juste mesure, à parties égales, le riz,
si abondant en matière féculente, aux graines ou farines de légumineuses ;
celles-ci, plus riches en substances azotées, grasses et salines, compenseraient
ce qui manque au riz sous ce rapport; on composerait ainsi une des rations
alimentaires douées des propriétés nutritives convenables, et de nature à
être, avec avantage, partiellement substituées au pain. »
M. CuEVREOL fait remarquer que le pain présenté à la Société d'Agricul-
ture par M. Sézille était tres-coloré, et celui qu'il présenta huit jours après
l'était sensiblement moins, comme l'a dit M. Payen ; ce fait ne semble-t-il
( 45i )
pas prouver, ainsi que le pain bis obtenu à la boulangerie de Scipion d'un
blé décortiqué, qu'il y a une cause favorable à la coloration du pain dans
la confection d'une pâte où se trouvent tous les principes immédiats in-
ternes de la farine de froment? »
« M. MiLNE Edwards, à propos de la Comminiication de M. Grimaud,
insiste sur l'importance du rôle physiologique des condiments ou autres
substances très-sapides et aromatiques dans le travail de la digestion, par-
ticulièrement quand les parois de l'estomac ne sont pas stimulées par le
contact d'aliments solides. En effet, la sécrétion des principaux agents de la
digestion (le suc gastrique et le suc pancréatique) ne se fait souvent que
d'une manière insuffisante lorsque Pestomac ne reçoit que des aliments à
l'état pultacé, à moins que le govit de ceux-ci ne soit relevé par des épices
ou autres substances dont l'action stimulante sur cet organe est analogue.
Cette observation s'applique également à l'emploi du riz, qui, additionné
d'une très-faible quaritité d'aliments azotés, est susceptible de constituer
pour l'homme une excellente nourriture, et peut être d'une grande res-
source pour la population de Paris, dans les circonstances actuelles. »
M. Chevrecl, à la suite de ces remarques, ajoute : *
« Personne, n'est plus convaincu que moi de l'influence des matières
odorantes dans les aliments, mais l'effet de l'une d'elles est loin d'être le
même sur tous les individus. Je sais par ma propre expérience que les
aliments solides que l!on consomme en grande quantité ne sont pas très-
odorants, et que l'organe de l'odorat est plus tôt rassasié que l'organe du
goût. Quant à moi, par exemple, je ne pourrais prendre, avec le même
plaisir, autant de raisin muscat que de chasselas de Fontainebleau. »
CORRESPOIVDAIVCE.
MÉTÉOROLOGIE. — Jiirore boréale du zli Septembre 1870.
Note de M. Chapelas.
« J'ai l'honneur de communiquer à l'Académie quelques détails sur la
magnifique aurore boréale ({ue nous avons observée dans la nuit du 24 au
25 courant, de 8''3o"' à 1 1 heures.
» 9 heures. — Le phénomène occupe un espace compris entre 7 Bouvier
G. K., 1870, 2« Semestre. (T. LXXl, ^'> 13.) 6o
( 452 )
et la fête de la Grande Ourse; soit, 44 degrés en amplitude. A ce moment,
un beau rayon d'un blanc vif s'élève jusqu'à «Dragon.
)) 9''io"'. — La matière qui a donné naissance à ce rayon s'étend et
forme une large surface verdâtre-, puis, tout à coup, s'élance vers la Cou-
ronne boréale un beiiu rayon rouge.
» 9''i5'". — Les rayons ont disparu; il ne reste plus du phénomène
qu'une vive lueur blanche au-dessus des brunes qui couvrent l'horizon.
» g'^So". — L'aurore semble s'éteindre complètement.
» lo''^'". — Le phénomène reprend une grande intensité. A ce moment
l'aïuore apparaît dans toute sa splendeur; s'étendant de la Couronne
boréale jusqu'à Q Cocher, soit, iio degrés d'amplitude. Les rayons, très-
nombreux et d'un rouge sang très-vif, s'élèvent jusque près le carré de la
Petite Ourse; ce qui donne une altitude de 48 degrés. Le petit arc était
parfaitement accentué; l'aurore présente assez l'image d'un peigne armé de
ses dents.
» De lo'' i5™ à 1 1 heures, les rayons s'effacent et reparaissent sucessive-
ment, offrant des nuances Irès-belles, dans lesquelles le rouge domine.
» Le mouvement général de cette apparition était de l'est à l'ouest. En
résumé, l'aurore boréale du 24 septembre peut être classée parmi les appa-
ritions remarquables. »
A 4 heures un qviart, l'Académie se forme eu Comité secret.
La séance est levée à 4 heures et demie. D.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
L'Académie a reçu, dans la séance du aC septembre 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Ostéograplik'. des Cétacés vivants et fossiles, comprenant la descvijAion et l'ico-
nographie du squelette et du système dentaire de ces animaux; par MM. VAIS
Benf.den et P. Gervais, liv. 6 à 8, texte et planches.
Mémoire sur les formes cérébrales propres aux Marsupiaux ; par M. P. Ger-
vais. .Sans lieu ni date; iu-4°. (Extrait des Nouvelles Arcliives du Muséum.)
Mémoire sur les formes cérébrales propres aux carnivores vivants et fossiles.
( 453 )
suivi de remarques sur ta classification de ces animaux; par M. P. Gervais.
Sans lieu ni date; in-4''. (Extrait des Nouvelles Archives du Muséum.)
Atti... Actes de l'Académie pontificale de Nuovi Lincei, décembre 1868
à juin 1869. Rome, 1869; 3 broch. in-4°.
ERRATUM.
(Séance du 19 septembre 1870.)
Page 43i , dernière ligne, au lieu de 1° De» boue» des cureurs de fossés, liseï i* Des
boues, des curures de fossés.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI 3 OCTOBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES ET COM^ÏUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
MÉCANIQUE. — Sur l'affût de l'amiral Lnbrousse; par M. Faye.
« Les événements qui nous détournent de nos travaux habituels, et
mettent aux mains de plusieurs de nos confrères le mousquet ou l'écou -
Villon, dirigent impérieusement nos pensées vers des sujets d'une ac-
tualité plus saisissante. C'est ce qui m'a engagé à vous soumettre quelques
réflexions sur un problème de mécanique appliquée à la défense des places,
sujet fort étranger à nos réunions ordinaires, mais dont l'ancienne Aca-
démie s'est souvent occupée. Il s'agit de transformer le mouvement de
recul d'une arme à feu en un mouvement d'abaissement vertical, de ma-
nière à la mettre à l'abri, et d'emmagasiner en même temps une force suf-
fisante pour lui faire reprendre, à volonté, sa position première sans altérer
sa direction.
)) La solution de ce problème de mécanique a une grande importance;
les Anglais l'ont vivement poursuivie dans l'intérêt de la défense de leurs
côtes; à mon humble avis elle est appelée, et c'est là ce que je désire
développer, à changer totalement nos systèmes de fortifications et à inter-
vertir le rapport de puissance qui a existé, depuis plusieurs siècles, entre la
défense et l'attaque des places ordinaires. Il ne m'appartient pas d'en faire
C. R., 1870, 2« Semeur'. (T. I.XXl, ^" Ut.) 6l
(456)
l'historique : mais c'est un devoir de rappeler ici la solution récente du capi-
taine Moncrief basée, comme les précédentes je crois, sur un système de
contre-poids fort ingénieux, mais fort encombrant. L'affût Moncrief a obtenu
un grand ot légitime succès en Anglelerre, où il est fort employé pour
l'armement des batteries côtières; toutefois il ne paraît pas susceptible
d'applications plus étendues, du moins est-ce là un desideratum auquel, de
l'autre côté du détroit, aucune satisfaction n'a pu être donnée jusqu'ici. Je
n'ai donc pas à m'en occuper plus longtemps.
» La véritable solution de cet important problème a été obtenue en
France : elle est due à un de nos plus savants marins, M. l'amiral La-
brousse, dont l'Académie n'ignoi-e pas le mérite. Bien qu'if n'existe qu'un
exemplaire de cet affût, il est déjà trop connu, en France et à l'étranger,
par des expériences publiques, pour qu'il soit nécessaire de le décrire ici
en détail. Je rappellerai seulement qu'il est fondé sur un théorème de mé-
canique relatif aux mouvements du parallélogramme articulé, bien plus
simple que celui qui a reçu tant d'applications dans les machines à vapeur,
sur le jeu de ressorts en usage dans nos chemins de fer et sur la puissance
d'un nouveau frein imaginé par l'amiral Labrousse. Je n'insisterai pas da-
vanttage : nos savants confrères, M. l'amiral Paris ou M. Dupuy de Lôme,
présents à la séance, entreraient beaucoup mieux que moi dans les détails de
cet admirable appareil. Ce qui devait me frapper plus particulièrement dans
cet affût, c'est ce qui en fait un véritable instrument de précision, une sorte
de théodolite avec ses deux cercles et ses deux mouvements en azimut et en
distance zénithale, et surfout l'artifice mécanique qui maintient mathémati-
quement l'axe du tir dans la direction voulue, malgré la force de l'explosion
et l'énergie du recul. En le voyant jouer avec tant d'élégance, je me rap-
pelais involontairement le pacifique parallélogrannne de Walt, ou mieux
encore celui qui sert à l'Observatoire de Greenwicli, à mettre à jiortée de la
lunette méridienne le bain de mercure sur lequel l'astronome doit observer
les astres par réflexion. Voilà un canon de 19 centimètres d'ouverture qui
pèse 8000 kilogrammes, qui lance des obus de Sa kilos avec luie vitesse de
près de 4oo mètres par seconde, et dont les mouvements s'accomplissent
avec l'aisance et je dirai presque le moelleux d'un de nos gnuids ajipareils
astronomiques, chefs-d'œuvre des ingénieurs les plus habiles en fait d'in-
struments de précision. J'ai l'honneur de mettre sous les yeux de l'Académie
diverses photographies de ce remarquable appareil, tout en regrettant que
certaines pièces aient été masquées à l'objectif; le système des ressorts par
exemple est à l'intérieur du châssis et on ne peut juger complètement de
( 457 )
l'agencement du frein puissant qui serf à régler à la main les évolutions
d'une masse pesant 80 quintaux.
» Au point de vue de la défense, l'avantage de ce système est double.
D'abord il est totalement à l'abri des coups directs de l'ennemi, lorsque
la pièce s'est abaissée derrière le parapet par l'effet du recul, en bandant
ses ressorts. Dans cette position, le chargement s'effectue aisément; le
pointé peut être corrigé ou modifié au moyen de tiges latérales faisant à
peine saillie au-dessus du rempart, et, pour cela, les mouvements en azimut
et en hauteur angulaire s'opèrent micrométriquement avec une précision
extrême : tout cela, je le répète, à l'abri d'un rempart non interrompu par
l'embrasure ordinaire. Un simple déclic suffit ensuite pour que la pièce se
relève d'elle-même, en restant rigoureusement parallèle à la direction qui
vient de lui être donnée. Elle apparaît un instant au-dessus du parapet;
le projectile est lancé et le recul la replace aussitôt à l'abri. J'évalue à
]%5 le laps de temps pendant lequel la pièce peut être vue du dehors, et
renseigner l'ennemi sur sa position exacte (r).
» Le second avantage est l'amplitude énorme du tir : elle n'est pas
réduite à quelques degrés comme dans les affûts ordinaires tirant par une
étroite embrasure : elle est de 180 degrés, ou plutôt elle comprend le tour
entier de l'horizon. Quant à l'amplitude du tir en hauteur, elle varie de
— 3o à -h 4o degrés, c'est-à-dire de 5oà 120 degrés en distance zénithale. Il
semble de prime abord que cet affût si délicatement articulé devrait se détra-
quer sous l'effort puissant de l'explosion, mais l'action du recul, en opérant
tangentiellement au cercle décrit par le bras principal du parallélogramme
articulé, se transforme immédiatement en un mouvement doux et jamais
en un choc redoutable.
» Mais, je le répète, ce n'est pas la description minutieuse de l'affût
Labrousse que j'ai voulu exposer à l'Académie, car cet affût est déjà connu,
même à l'étranger: mon but est simplement d'exposer les conséquences de
cette invention telles qu'elles se sont présentées à mon esprit.
» Ces conséquences résultent des propriétés que je résume ici : 1° char-
gement et pointé à l'abri des coups directs de l'ennemi (2) ; 2° suppression
(i) Le tir à barbette avec les affûts ordinaires a été depuis longtemps abandonné à terre,
parce que les pièces toujours en vue étaient trop .faciles à démonter. Avec la précision
actuelle du tir, personne ne pourrait songer un seul instant à revenir à ce système aussi
dangereux pour les pièces que pour leurs servants.
(2) Les pièces peuvent même être mises dans des sortes de puits qu'on blinderait et qu'on
casematerait au besoin.
61.
( 458 )
des embrasures qui ne permettent le tir que dans des directions assez étroi-
tement limitées et qui servent elles-mêmes de points de mire; 3° tir égale-
ment précis dans tous les azimuts; 4" possibilité de tirer dans les fossés
eux-mêmes.
» En considérant que les systèmes divers des fortitications actuelles,
si savants, mais si compliqués, si longs et si coûteux à établir, sont fondés
avant tout sur les exigences d'un tir étroitement limité par des embrasures,
je suis arrivé à penser qu'il serait facile aujourd'hui de revenir au polygone
primitif débarrassé de ses bastions et autres appendices; car avec l'affût
Labrousse, il n'y aurait plus ni point mort, ni secteur sans feux. Loin
de là, il n'y aurait pas, dans une plaine à peu près horizontale, un seul
point, à la distance actuelle du tir, sur lequel on ne pût faire converger les
feux de deux faces au moins de l'ouvrage. Quant à l'enfilade d'une des
faces, cet inconvénient serait, à mon avis, largement contrebalancé par
la riposte d'enfilade de cette face elle-même (si on nie- permet un mot nou-
veau pour une chose toute nouvelle), car ses pièces, alignées dans le sens
de leur longueur, pourraient tirer toutes dans une direction unique, sinon
à la fois, du moins successivement, et à i%5 d'intervalle. Quant aux fossés,
outre que l'affût Labrousse permet de les inonder de mitraille, on sait que
l'art de projeter des balles nombreuses avec précision, dans une direction
déterminée, a fait dans ces derniers temps un pas décisif; il suffirait donc
de confier leur défense à des tourelles imperceptibles placées aux angles et
blindées au besoin, quand bien même le front rectiligne à protéger aurait
plus d'iui quart de lieue d'étendue.
» Une si grande simplification aurait à son lourdes conséquences dont
je ne crois pas exagérer la portée en disant qu'elle permettrait de nuilli-
plier rapidement les lieux de refuge pour les populations inoffensives comme
aux temps de Vopidum gaulois, tout en permettant aux plus jeunes de
tenir la campagne. Je ne sais si je m'abuse, mais il me semble que ces lieux
de refuge, véritables places fortes de prenner ordre, pourraient être choisis
de manière à constituer, par leurs relations mutuelles, une ou plusieurs
lignes de défense et de communication entre les points les plus iuiportants
de notre territoire (i), tandis que, dans le système si complexe et si coûteux
des fronts bastionnés, on est condamné à laisser, entre nos forteresses
faciles à investir, des intervalles immenses beaucoup trop aisés à franchir.
(i) Par exemple, les forts détachés qui entourent Paris, distribués en ligne droite et unis
par des travaux accessoires, suffiraient pour nous relier ù la mer ou au cœur de la France.
( 459 )
» Est-ce aller trop loin que d'attribuer un tel rôle à la simple supériorité
du système de pièces tirant à l'abri et avec précision dans tous les azimuts,
sur le système de pièces dont l'action est limitée et compromise à la fois
par des embrasures? Je ne le pense pas : dans cet ordre de faits, l'histoire
montre que toutes choses, même les plus grandes, même celles qui con-
stituent la force ou la sécurité des sociétés, dépendent de simples solutions
scientifiques souvent mal jugées au début. Sans sortir de ce sujet, j'en
trouverai des exemples fameux. Tant que la mécanique n'a réussi à im-
primer aux mobiles qu'une force vive insignifiante due au simple travail
des bras, la fortification a di^i se réduire à une simple enceinte en polygone
convexe flanquée de tours aux angles, et en cet état de choses la défense
a pu devancer l'attaque et lui rester constamment supérieure comme jouis-
sant de l'avantage du travail des forces humaines accumulé d'avance. Aussi
quand vers le v" siècle l'invasion des barbares commença à se dessiner, on
vit toutes les villes de notre Gaule s'entourer rapidement de fortifications
de ce genre, dont les temples eux-mêmes fournirent les principaux maté-
riaux : j'en ai examiné, l'an passé, un type bien remarquable dans l'an-
cien Périgueux (Vesunna). La défense était alors tellement supérieure à
l'attaque que les races civilisées ont pu résister à l'invasion (i) : du moins
le torrent des barbares a-t-il passé et repassé bien des fois sur notre pauvre
pays sans parvenir à effacer nos races ni à les ramener entièrement à leur
niveau.
» Mais l'invention de la poudre à canon ou plutôt la découverte de sa
puissance mécanique, capable de communiquer presque instantanément à
des boules de métal une force vive de plusieui;s centaines de milliers de
kilogrammètres, a donné pour plus de trois siècles l'avantage à l'attaque, au
moins quand il s'agit de sièges réguliers et de petites place's faciles à in-
vestir. Il fallut des lors renoncer au système usité jusqu'à la fin du moyen
âge, et l'on vit apparaître le système des fortifications actuelles, dont la
savante complication s'est trouvée d'ailleurs en harmonie avec la nature
des guerres modernes, guerres d équilibre politique ou d'influences com-
merciales. Il n'y aurait donc rien d'étonnant à ce qu'une simple invention
mécanique comme celle de l'amiral Labrousse produisit également de
(i) Alise elle-même, ce dernier boulevard des Gaules, cinq siècles auparavant, ne serait
pas tombée, je crois, si l'armée de secours de Vergasillaune, au lieu de se jeter en deux
attaques soudaines sur les lignes savamment fortifiées des Romains, avait commencé par
s'appuyer elle-même sur quelques retranchements.
( 46o )
grands effets, et changeât radicalement un système basé sur d'anciennes
inventions moins heureuses, en rendant, comme je le disais tout à l'heure,
à la défense son antique supériorité.
HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES. — Traduction de deux passages de Slobée
inexpliqués jusqu ici ; par M. Bie.vaymé.
» L'histoire des Pythagoriciens et de leurs doctrines ne nous est par-
venue qu'à l'état de légende. Les renseignements contemporains font
presque entièrement défaut, et ce n'est que dans des ouvrages postérieurs
de près de huit siècles qu'on aperçoit, au milieu de puérilités nombreuses,
quelques traces de science réelle. Ainsi, l'on a constaté que les Pythago-
riciens avaient nettement distingué des nombres les quantités incommen-
surables, et qu'ils savaient qu'on ne peut exprimer celles-ci que par une
suite illimitée de paroles ou de chiffres. Mais on ignorait qu'ils eussent un
mot propre pour exprimer ce que nous entendons par série. Or, cette notion
ressort de plusieurs textes de l'antiquité et elle se trouve, en particulier,
confirmée par deux extraits que le Recueil de Stobée attribue à des Pytha-
goriciens. Ces deux passages sont restés jusqu'ici inexpliqués, et même le
savant Heeren a cru que le texte en était altéré. Mais la traduction suivante
montrera, en les éclairant l'un par l'autre, qu'il n'y a rien à changer au texte
tel qu'il nous est parvenu, et que le sens en est fort clair pour ceux qui
ont quelque habitude de la lecture des mathématiciens grecs. Il suffit de
se rappeler ici que le mot ofoç signifie un terme [terminus dans Boëce, d'où
est venu notre mot français) et que l'expression avctKoyov d'après la dé-
finition d'Euclide, veut dire en progression géométrique. Mais il faut ajouter
qu'ix^écriç signifie une série. Moici les deux textes grecs, avec la traduction
française en regard. Après les avoir lus, il ne paraît pas douteux que l'on
n'écarte et les scrupules de Heeren sur l'intégrité du texte original et l'in-
terprétation qu'il en avait proposée.
Slobée, Eclogœ Physicœ, I, 9. Fragment qui suit un texte de Moderatiis, et que l'on croit
être du même auteur.
Tiïèî rm k,-iOfiùv ci''X>!' wrifujuttrc r'iv fit- «■ Quelques-uns ont affirmé que l'unité est
,âU, Tm S\ Ù^Afi-^rm rl't,- tcZto S-'i ra^« rifc- '« principe des nombres, et que le un est le
X • ' ■ .• - ~ . , ~ principe des choses nombrées. Or cet un est
- ,' , , _^ ' lin corps divisible à l'infini; de manière que
■ ^ ^ ■ I les choses nombrées dillcrcnt des nombres
«ra^âra». ElSio^i ^è x.'ut 7oZro ^fi Iri tSv àf-i- comme les corps diffèrent des choses incor-
Bfiù-j iiTif'/^a-utTi> TU! àf'xu! 01 fui koitiçah ni» porelles. Mais il faut savoir encore que les
(46i )
aoiç ratapt* ri (Pi; ra; rSv cf-av lyJJttj-ii;, }î â\>
ufriol ri Kui sr'O/TToi tooitrxi (vol. I, p. 5,
édit. RIeineke; Leipzig, 1860. Éd. Heeren,
p. 20).
Stobée, ibid., I, 5. Fragment de Butherus.
' O 'Sttpiuva^ mû âpricu riMaripoi Imvo fttv yàp
apXI" **' teAo? xa( ftia-at ^X^'t " "^ rou /tta-au
io-not^rxi' Kai 0 f-ctv^ oTfOT ùv yivavr'J-t «vctAoyûv
Kai 'TS-foi fuiùi'a;, rccï; a'urov ^af-tciç y.a.Ta.\!tfi-
Biîvii mùç rai; yfufifials ■zs-ipitj^oftivou;' 0 St iv
o'tKil» fiiv yivofiito; oloizroTt iripctivtrctr orcci
J" Ê V zrtpitrtryi '^îvy.raty uuroç ri ^ip^raç rvy^avit
KO.) TîJ» rziXivpctv A070V i)^ou(rait is-^ii (t. I, p. 3,
édit, Meineke. Éd. Heeren, p. i4)-
modernes ont introduit comme principe des
nombres la monade et la dyade, mais que
les anciens Pylli:igoiiciens avaient introduit
comme principes toutes les séries de termes
dans leur consécution, par lesquelles sont
conçus les nombres pairs et impairs, u
<i L'impair est plus parfait que le pair,
car il a un commencement, une fin et un mi-
lieu, tandis que le pair est privé de milieu;
et lorsque les nombres sont engendrés en
progression géométrique et d'unité en unité,
l'impair, dans ses propres places, comprend
les nombres renfermés par des lignes, tandis
que le pair, se trouvant dans sa propre place,
n'est jamais terminé. Lorsque, au contraire,
il est engendré dans une place impaire, il a
lui-même une limite et il possède un côté ra-
tionnel. "
» Maintenant, quelques mots seront encore utiles pour expliquer com-
plètement le sens de ces deux passages.
» D'abord IModeratus confirme ce que nous apprenaient déjà d'autres
témoignages, que ce sont les modernes, c'est-à-dire les successeurs de Pla-
ton, qui ont introduit dans les idées pythagoriciennes la considération de
la dyade, tandis que les anciens, c'est-à-dire les vrais pythagoriciens, carac-
térisaient surtout les nombres par le rôle qu'ils jouaient dans toutes les
espèces de séries. Peut-être hésiterait-on sur ces mots « toutes les espèces
de séries » ttclcsclç, ix.^i7etç, si l'on ne voyait dans V Introduction à C Arithmé-
tique de Nicomaque avec quel soin et quel détail il classifie les diverses
séries des nombres naturels. Le fragment de Butherus, beaucoup plus an-
cien que celui de ModeraUis, ne cite, en effet, que les progressions géomé-
triques.
» Voici comment il faut entendre ce fragment. Si l'on écrit les termes
d'une progression géométrique croissante, au-dessous de la série des
nombres naturels qui indiquent leur place dans la série, par exemple :
1 2 3 4 5 6. . .
1 3 9 27 81 243. . .,
on voit sur-le-champ que le nombre impair écrit dans une place impaire est
un carré ; il a un côté rationel TrXiupav Àoyov tXouffatv.
( 462 )
» Si, de même, on avait écrit nne progression en termes pairs :
i 2 3 4 5 6. . .
1 2 4 8 16 32. . .,
on voit que le nombre pair n'est un carré que dans les places impaires.
» L'interprétation qui précède semble rendre aux deux témoignages de
Buthenis et de Moderatus une valeur historique que depuis des siècles
l'obscurité du texte avait cachée. «
CHIMIE ORGANIQUE. — Note relative à de nouveaux composés, résuUnnl de rttnion
de l'acide c^anique et des dijférents étlters cyaniques avec les éthers des
acides atnidés de la série aromatique; par MM. Aug. Cahours et H. Gal.
« M. Paul Griess a signalé, dans l'action réciproque de .l'acide benza-
mique et du cyanogène, la formation d'une substance de composition
assez complexe qui se dédouble sous l'influence de l'acide chlorhydrique
en plusieurs produits, dont le plus important fut considéré par lui comme
une combinaison d'acide benzamique et d'acide cyanique. Une étude plus
attentive de cette dernière établit en effet qu'elle présentait l'identité la
plus parfaite avec lui produit antérieurement obtenu par M. Mentuschine
en faisant agir une solution de cyanate de potasse sur une dissolution de
sulfate d'acide benzamique. Ce produit paraîtrait également prendre nais-
sance, d'après M. Griess, en chauffant l'acide benzamique avec de l'urée :
dans ce cas il y aurait dégagement de gaz ammoniac.
» L'un de nous ayant fait connaître, il y douze ans (i), les éthers d'un
certain nombre d'acides amidés [benzamique, cuminamique, anisamique, etc.)
et démontré que les propriétés basiques de ces composés s'exaltaient con-
sidérablement par rétliérificatton, nous avons pensé que ces éthers devaient
aussi bien, et même mieux, que les acides qui leur correspondent former
avec l'acide cyanique des combinaisons parfaitement définies: c'est ce que
l'expérience a confirmé de la manière la plus nette. TVous pensions en
outre que ces composés devaient se dédoubler sous l'influence de l'ammo-
niaque en alcool et en créalines aromatiques, ou du moins en leurs iso-
mères, ainsi que l'exprime, pour le cas particulier de l'éther benzamique,
l'équation suivante :
C" H' (C H' ) AzOS C=H AzO' H- Az H' = C H^O' + C" H» Az'O'.
Elhiar hcnzamique. Acide cyanique. Alcool. Oo.iline benzoïqiie.
(i) A. Cahobrs, Ànn. de Chim. ft de Phys., 3' série, t. LXIII, p. 322.
( 463 )
>) Bien que cette réactio» ne nous ait pas fourni les résultats que nous
attendions, nous pensons devoir faire connaître l'existence d'un assez grand
nombre de composés résultant de l'association soit de l'acide cyanique, soit
des divers éthers cyaniques avec les éthers fournis par les acides amidés de
la série aromatique, tels que les éthers benzaméthylique, cuminamétylique,
anisamétylique, etc.
» Ces composés, qui cristallissent tous avec la plus grande facilité, peu-
vent s'obtenir à l'aide de procédés très-simples.
» S'agit-il d'obtenir les combinaisons résultant de l'union de l'acide
cyanique avec les éthers formés par les acides amidés, on opère de la ma-
nière suivante :
» On verse, dans une solution tiède du sulfate de l'éther amidé mis en
expérience, une dissolution aqueuse de cyanate de potasse, en ajoutant
cette dernière par petites portions. Dès que le contact des deux liquides
est étabh, le mélange se trouble. Si les solutions sont concentrées et
chaudes, il se sépare immédiatement une matière huileuse qui se concentre
bientôt en une masse cristalline. Les dissolutions sont-elles étendues et
froides, la liqueur se trouble peu à peu et laisse déposer une poudre
cristalline.
» On peut extraire de ce dépôt la combinaison, à l'état de pureté par-
faite, soit en le jelant sur un filtre, le lavant, le séchant et le reprenant par
de l'alcool concentré qui dissout le cyanate et laisse le sulfate alcalin formé.
L'évaporation de la dissolution alcoolique abandonne la combinaison sous
la forme de prismes durs et friables.
» Le second mode de purification consiste à 'traiter le dépôt, préalable-
ment lavé, par l'eau boudlante, et à filtrer immédiatement la liqueur. La
combinaison se sépare par un refroidissement très-lent, sous la forme de
fines aiguilles brillantes qu'on jette sur un filtre, qu'on lave et qu'on des-
sèche. Une seconde cristallisation opérée dans les mêmes conditions donne
un produit parfaitement pur.
» La combinaison des éthers amidés avec les différents éthers cyaniques
s'obtient d'une manière non moins commode, et la purification en est aussi
simple.
» A cet effet, on ajoute à l'éther liquide ou fondu, ce qui, dans ce der-
nier cas, n'exige qu'une très-faible élévation de température, environ son
volume d'éther cyanique ou de l'un de ses homologues. Le mélange, qui
s'échauffe très-notablement, se concrète graduellement à mesure qu'il se
C. R., 1870, 1' Semestre. ( T. LXXI, N° 14.) 62
( 464)
refroidit et finit par se prendre en une masse que l'on comprime dans du
papier buvard pour absorber un peu du liquide qu'il pourrait retenir.
» Les composés formés dans ces circonstances, qui sont insoUibles dans
l'eau froide ou ch.iucl(>,se dissolvent en quantités considérables donsTéther,
qui ne les abandonne sons forme solide que par une évaporation com-
plète. L'alcool les dissout également en trop fortes proportions pour qu'ds
puissent s'en séparer par l'évaporation sous des formes bien nettes. Lors-
qu'on veut se procurer ces produits en cristaux parfaitement définis, il faut
opérer de la manière suivante.
» On les dissout dans de l'alcool du commerce, en chauffant légère-
ment, puis on ajoute de l'eau jusqu'à ce qu'un léger trouble commence à se
manifester. Lorsque ce terme est atteint, on fait tomber de l'alcool goutte
à goutte dans la liqueur, jusqu'à ce qu'elle soit complètement éclaircie,
puis on l'abandonne à l'évaporation spontanée.
» Il est important que la cristallisation s'effectue dans des liqueurs très-
étendues; les échantillons obtenus sont d'autant plus beaux.
» Ces derniers, lorsqu'on opère dans des vases cylindriques, se séparent
généralement sous la forme de longues aiguilles soyeuses, qui présentent la
plus grande ressemblance avec l'asbeste.
» Les acides benzamique, cuminamique, anisamique, etc., donnent éga-
lement avec l'éther cyanique et ses homologues, des composés entièrement
semblables à ceux que fournissent leurs éthers.
» Les différents composés dont nous venons d'indiquer la formation
donnent, soit par l'action de la chaleur, parleur contact avec les acides et
les alcalis, des réactions dont nous ne saurions parler ici, cette étude étant
trop incomplète. Nous n'avons d'autre but aujourd'hui que de faire con-
naître l'existence de ces composés intéressants, qu'on pourrait considérer
comme des sortes d'urées composées, représentées par les formules géné-
rales
i (C^O^)", [ [C^'O')",
Az / , et Az jj,
» Les analyses de ces nombreux composés, dont nous avons étudié les
propriétés physiques avec la plus sérieuse attention, nous ont fourni des
résultats qui concordent de la manière la plus parfaite avec la théorie. Nous
en donnerons le détail dans un Mémoire étendu que nous ferons paraître
prochainement. »
( 465)
HISTOIRE DES SCIENCES. — Note sur un papyrus qui contient des fraqmetits
d'un Traité d'optique et, à cette occasion, sur /'Optique inédite de Ptolémée;
par M. Egger, de l'Académie des Inscriptions.
« Parmi les papyrus grecs rapportés de Sakkarah, en 1869, P^*" notre
compatriote et correspondant M. Aiig. Mariette, se trouvent les fragments
d'un rouleau opisthographe, ou écrit des deux côtés, dont le contenu paraît
intéresser l'histoire de la Physique, et, à ce titre, me semble digne d'être
signalé à nos confrères de l'Académie des Sciences.
» On y reconnaît sur un côté (le seul dont je m'occuperai ici) les débris
de sept colonnes d'une ancienne et belle écriture qui peut remonter pour
le moins au II" ou au m* siècle de l'ère chrétienne. Les phrases ou restes
de phrase qu'on y peut lire attestent une grécité des meilleurs temps. 11
est difficile d'y saisir la suite d'un raisonnement complet; toutefois les
trois fragments dont je vais donner une traduction provisoire suffisent à
montrer clairement que nous avons là sous les yeux des pages d'un Traité
d'optique et peut-être d'optique spécialement appliquée à l'astronomie (i).
Col. I. — ... l'air l'emportant par sa profondeur, et, à la fin, des grandeurs immenses
disparaissent peu à peu : car des îles, des villes et des pays sont séparés par de grands es-
paces, de manière que ceux dont l'air éteint le moins les couleurs, ceux-là se voient néces-
sairement à la plus grande distance, et leurs volumes, de grands qu'ils étaient, deviennent
très-petits. . . .
Col. III. — Car, à leur lever et à leur coucher, nous voyons leur révolution. Car l'astre
paraissant toujours plus grand à son lever, il est nécessaire qu'ils paraissent se déplacer.
C'est pourquoi, aussitôt après le lever, nous avons la sensation de leur mouvement, en
voyant. ...
Col. IV. — ... devient également apparent. Beaucoup d'astres dont nous voyons les
mouvements paraissent changei-. Ceux qui paraissent semblables à des astres qui se meuvent
paraissent se mouvoir également... . Ceux qui gardent respectivement la même distance
paraissent souvent immobiles, parce que ni plus. . .
» Dès que j'eus constaté le caractère de ces Fragments et des autres,
malheureusement trop courts pour être traduits, que renferme notre pa-
pyrus, j'en fis part à mon ami M. Th. Henri Martin, dont l'Académie
(i) C'est l'occasion de rappeler qu'un des papyrus grecs du Musée du Louvre, publiés
en 1 866 par l'Académie des Inscriptions dans le Recueil des Notices et Extraits des Manuscrits
contient un long fragment d'un Traité élémentaire d'astronomie; mais les fragments dont
nous nous occupons aujourd'hui paraissent d'une valeur bien supérieure au papyrus astro-
nomique du Louvre.
6a..
( 466 )
connaît et apprécie les travaux sur l'histoire des sciences dans l'antiquité,
et les indications qu'il voulut bien me fournir m'aidèrent utilement à con-
stater que le texte du papyrus-Mariette est inédit, et m'induisirent à con-
jecturer qu'il pourrait bien appartenir à YOptique iuéilite de Ptolémée.
» Et d'abord ces fragments sont inédits; au moins ne les ai-je retrouvés
dans aucun des ouvrages grecs sur l'optique que menlionne et qu'analyse
le plus récent historien de cette science (E. Wilde, t. 1, publié à Berlin
en i838), dans aucun des extraits sur ce sujet que renferme l'estimable
collection de Schneider {Eclocjœ Ph/sicce, léna, 1801, in-8"). Seulement,
je retrouve dans quelques textes anciens (i) l'observation relative à la
différence du volume apparent des astres, selon qu'on les considère au
zénith ou à l'horizon. Ces rapprochements, si fugitifs et incomplets qu'ils
soient, nous portent à croire que nos nouveaux fragments appartiennent
à quelque traité vraiment scientifique, à l'ouvrage de quelque écrivain
autorisé, parmi les anciens, sur les matières dont il s'agit. Or nul n'a été
plus autorisé que le célèbre astronome Ptolémée, au n*' siècle de notre ère,
et Ptolémée avait écrit une Optique en cinq livres, plusieurs fois citée avec
éloge par ses successeurs, par les écrivains du moyen âge et par les mo-
dernes jtisqu'au commencement du xviu" siècle.
» Cette Optique, de bonne heure traduite en syriaque, comme tant d'au-
tres ouvrages scientifiques des Grecs, puis du syriaque en arabe, existait,
dans la traduction arabe, au xn" siècle, en Sicile, où elle fut traduite de
l'arabe en latin par un certain Eugenius Ammiratus, et la traduction latine,
faite malheureusement sur un manuscrit qui ne contenait plus le premier
livre, existe encore aujourd'hui dans deux manuscrits de notre grande
Bibliothèque nationale, dans un troisième manuscrit à la Bibliothèque
ambrosienne de Milan, et peut-être dans un quatrième à la Bodléienne
d'Oxford. Il est étonnant que la mémoire d'un tel livre se soit tellement
effacée que le plus savant historien de la littérature grecque, J.-A. Fabri-
cius, ait pu le croire tout à fait perdu, et que le second éditeur de la
Bihliothique (jrecque, G.-C. Harless, n'ait pas relevé cette erreur. Elle l'a
été, au commencement de ce siècle, en France, par Delambre, dès l'année
i8o3, et dans un Mémoire analytique lu dans xuie séance publique de l'In-
stitut en 181 1, reproduit l'année suivante, en allemand, dans les Anmikn
de Gilbert; puis par Caussin, dont un premier Mémoire sur ce sujet,
(i) Cléomède, II, i; SexUis Empiricus, Contre les Mtionomcs, V, 8?.; Cf. Olympiodore,
dans Schneider, l. II, p. SgS, et Dutens, Origine des dccouvcrtes, t. II, p. 118.
(467 )
lu en 1811 à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, et inséré, en
1 822, au tome VI du Recueil de celte Compagnie ( nouvelle série). La Lande,
Laplace et Alexandre de Ilumboldt ont eu connaissance de ladite traduc-
tion latine, et ils en ont apprécié l'importance. En i8i4, l'italien Giamb.
Ventnri, dans le tome I"' (resté unique) de ses Commentari sopra la sloria
e le teorie dell' Otika (Hologne, in-4°), a donné une intéressante analyse
des quatre livres de la traduction d'Eugenius Ammiratus d'après le ma-
nuscrit de Paris, n" 3710, utilement corrigé à l'aide du manuscrit FD, 45 1
de l'Ambrosienne, et dans son analyse il constate l'identité de l'ouvrage
latin avec celui que citent, sous le nom de Ptolémée, soit les astronomes
grecs, soit les écrivains du moyen âge, comme Roger Bacon.
» Soutenu par une vive curiosité, qui suppléait tant bien que mal à
mon incompétence, et par le souvenir de quelques études autrefois entre-
prises sur diverses parties de la Physique des Anciens, je me suis fait un
devoir d'explorer les deux seuls manuscrits de V Optique latine de Ptolémée
qui fussent à ma disposition (ceux de Paris), en attendant des renseigne-
ments que j'ai demandés sur les travaux de Venturi et sur le manuscrit de
la Bodléienne d'Oxford, renseignements que je ne puis guère espérer de
recevoir avant le rétablissement de la paix dans notre malheureuse France.
J'ai donc étudié celui des deux manuscrits parisiens (l'ancien n° 7377) qui
porte aujourd'hui le n° 10260, et qui paraît être de la fin du xvi* siècle,
manuscrit fort lisible, mais plein de lacunes et de fautes, que reproduit à
peu près toutes le second de nos manuscrits, et celte lecture n'a que trop
confirmé pour moi le jugement de Delambre et de Caussin sur l'état d'alté-
ration où nous sont parvenus les quatre livres dte Ptolémée.
» A travers trois traductions et à travers un nombre de copies que l'on
ne saurait déterminer, le texte du grand astronome est devenu souvent
inintelligible. Les dessins et figures géométriques qui l'accompagnent
n'ont plus avec le texte leur juste rapport; les lettres de renvoi ont été
souvent changées, de façon que l'explication ne répond plus exactement
aux figures. Néanmoins, je crois pouvoir affirmer qu'aucune des phrases
du texte grec conservé par le papyrus Mariette ne se retrouve dans ces
quatre livres, malgré quelques analogies entre les deux textes (1). Mais il
ne faut pas oublier que le premier livre est perdu, et que ce premier livre
pouvait contenir les considérations et observations du genre de celles que
(i) Par exemple, au folio 5, où l'auteur traite de la vision relativement à l'obliquité du
rayon visuel par rapport à la verticale du lieu d'observation.
( 468 )
nous reconnaissons dans nos fragments grecs. Au début même du deuxième
livre, l'aiiteiir semble se référer à son premier livre pour ce qui concerne
des obstacles interposés entre l'œil et l'objet visible. Or le fragment traduit
ci-dessus de la première colonne du papyrus se rapporte évidemment à ce
sujet.
» Quoi qu'il en soit de ces rapports entre l'ouvrage grec dont provien-
nent nos fragments sur papyrus et l'ouvrage de Ptolémée, deux conclusions
peuvent être tirées de ce qui précède :
» 1° Le papyrus-Mariette nous apporte de précieux débris des doctrines
de l'antiquité, et il méritera d'être publié aves le même soin que les autres
pièces de ce genre exhumées de l'Egypte depuis un demi-siècle : je ferai
de mon mieux pour remplir prochainement ce devoir,
» 2° V Optique latine de Ptolémée, même en son état actuel de mutila-
tion, mérite au plus haut degré de trouver un éditeur après tant de siècles
d'oubli. Ce travail exigera, comme l'a bien montré Caussin, dans son Mé-
moire de i8i2, l'alliance d'un philologne et surtout d'un orientaliste, avec
un physicien de profession, ou la réunion de ces deux qualités dans la
personne d'un seul savant. M. Th. -H. Martin serait, je crois, capable d'y
suffire; mais sa modestie parait décliner une tâche aussi lourde, et d'ail-
leurs d'autres travaux l'occupent et l'occuperont longtemps encore. M.Ch.
Thurot, dont nos confrères ont pu lire récemment un ]\Iémoire approfondi
sur l'histoire du principe d'Archimède et une très-ingénieuse révision du
texte des Météorologiques d'Aristote, semble aussi appelé à nous rendre, soit
seul, soit avec le secours de quelque autre savant, le service de procurer
celte difficile publication. Tour ma part je n'ai pu, je n'ai voulu que saisir
l'occasion de signaler à l'attention de nos confrères un sujet d'études depuis
longtemps négligé. Déjà, dans la séance du 26 août dernier, j'ai eu l'hon-
neur d'en entretenir l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres; je serais
heureux que l'autorité de l'Académie des Sciences s'ajoutât aux encourage-
ments qui pourront susciter, en France, le laborieux éditeur qu'attend
depuis si longtemps V Optique de Ptolémée. »
(469)
MÉMOIRES LUS.
HYGIÈNE MILITAIRE APPLIQUÉE. — Du soldat en cnmpnrjue et devant l'ennemi;
j)ar]!^l. G. Grimaud, fie Ca!ix. (Extrait pSr l'Auteur.)
(Commissaires: MM. Morin , Dtipuy de Lôme, Larrey).
(( La provision d'un soldat en campagne et marchant à l'ennemi ne com-
prend que deux sortes d'objets : des vivres et des munitions, le tout pour
deux ou trois jours, si ce n'est pour quelques heures de marche et de com-
bat. Quanta son armement, il est purement offensif : sabre-baïonnette et
fusil ; tout pour l'attaque, rien pour la défense : rien qui protège et abrite
contre les coups de l'ennemi.
» Fournir au soldat le moyen d'assurer sa subsistance, sans avoir besoin
d'attendre nne distribution de vivres dont il a laissé les magasins derrière
lui; le pourvoir de protection contre l'ennemi, sans augmenter le poids du
fourniment; ces deux questions se résolvent par ime simple modification,
ou plutôt dans une meilleure distribution des éléments qui constituent l'é-
quipement, lesquels éléments deviennent une protection efficace, au lieu
d'être un embarras sur le dos du soldat.
M Du sac militaire. — Le sac actuel a des défauts qui le rendent impropre
à porter une charge supérieure à 20 kilogrammes. Par le fait de son épais-
seur raccourcie, il force le marcheur à se courber en avant, posture anor-
male qui contribue à épuiser promptement ses forces. L'attache des bre-
telles est trop haute; elles scient les aisselles du porteur. La forme bombée
de la surface appliquée au dos comprime et échauffe la colonne vertébrale.
Ajoutez qu'avec une pareille construction la poitrine n'est point abritée :
il n'y a de protégé que le dos, circonstance qui, en bien des cas, peut
avoir sa gravité.
» Le fourniment d'un tel sac consiste en vivres, linge et chaussures, us-
tensiles de cuisine et matériaux de campement, tels que fragment de tente
et bâton d'étai; distribuez tout cela de la façon suivante, et le problème est
résolu. Doublez la surface du sac, en diminuant de moitié son épais-
sein-; et, pour cela, construisez une carcasse métallique, d'environ 60 centi-
mètres de large et 78 de haut, sur 5 centimètres d'épaisseur; habillez cette
carcasse d'une toile imperméable. Divisez, par une gaîne en deux comparti-
ments égaux, le contenant qui en résulte, et vous aurez un sac double, plus
long, plus large, moins épais que le sac ordinaire, mais bien plus facile à
( 470 )
porter, comme il est aisé de le démontrer. Vous ouvrez et fermez ce sac
par les deux côtés, au moyen de boucles et de lacets en cuir, comme les
portemanteaux de cavalerie. Vous le remplissez des effets d'équipement et
d'habillement ainsi que des vivres et des ustensiles eu métal qui complè-
tent le fourniment de chaque homme et de son escouade.
» On harnache ce sac de telle manière qu'on peut, à volonté, le porter
sur le dos ou sur la poitrine. Si on le porte sur le dos, comme il s'étale sur
une plus large surface et qu'il s'appuie sur le bas des reins, il ne tend
point à descendre; et ainsi il charge moins les épaules que celui dont nos
fiintassins se servent actuellement.
» Deux autres circonstances contribuent aussi à rendre son poids moins
sensible. Il ne gène pas la colonne vertébrale, dont la saillie vient se loger
dans la gouttière formée par la gaine longitudinale du milieu. De plus,
cette gaîne, contenant une tige d'acier d'une utilité multiple, au moindre
repos, on abaisse la tige jusqu'au sol, et le fautassin se déleste de son sac,
absolument comme un joueur d'orgue de son instrument sur le bâton
d'appui qui lui sert de canne.
» Pour le mettre devant la poitrine, le ceinturon est armé d'un cran qui
vient s'articuler avec une pièce en métal correspondante, disposée à cet
effet à la partie inférieure du sac. Et ainsi, qu'on porte ce sac par devant,
qu'on le porte par derrière, le poids en est moins incommode, et le fardeau
parait allégé, par cela même que sa gravité correspond au bas des reins,
soit directement, soit par l'intermédiaire du ceinturon .
» Voici comment il protège. Jl est garni, à l'extérieur, de plusieurs
annexes en cuir. Ces annexes servent à lo^^er : i^les ustensiles en métal
nécessaires, soit à chaque homme, soit à son escouade; 1° une pelle plate,
ou plaque de bêche en métal; 3" sur les côtés, en dehors, un bâton de
support se divisant et s'ouvrant selon sa longueur, pour former une croix
de Saint-André. Ce sont là des éléments de blindage, permettant d'aborder
l'ennemi jusqu'à la distance de i5o mètres, sans avoir rien à craindre des
petits projectiles. Le fusil se porte en bandouillèrc; et une cartouchière, en
cuir raide, est fixée en haut ou en bas du sac. Si vous marchez à l'ennemi,
vous portez le sac par devant ; si vous battez en retraite, vous le mettez sur
le dos : des deux façons, le torse entier est préservé.
» La tète est garantie au moyen d'une coiffure en cuir mou, formant
supérieurement une poche plate, dans laquelle on glisse, pour le combat, la
plaque métallique. Cette coiffure, en raison de sa mollesse, se prêtant à
toutes les inclinaisons, se penche en visière sur la figure et abrite toute la
( 471 )
partie supérieure de la tète, jusqu'aux yeux. Ainsi lestée, une telle coiffure
pèse encore moins que le casque de l'infanterie prussienne.
» Quant aux jambes, on les protège avec le fragment de tente attribué
à chaque soldat pour effectuer le campement. Ce fragment de tente, plié en
neuf doubles ou feuillets, se suspend à la partie inférieure du sac, au moyen
de boutons ; son flottage suffit pour amortir, par ses plis, à une distance
de i5o mètres, les petits projectiles, et garantir les membres inférieurs
jusqu'au-dessous des mollets.
» L'ensemble de cet équipement défensif a été calculé sur le poids ré-
glementaire du soldat ordinaire en campagne.
» Théorie du combat. — On marche le sac en avant, le fusil en batidouil-
lère, en tirailleurs; à un moment propice, c'est-à-dire quand le canon a
dit son mot, on s'aventure à la rencontre de l'ennemi, jusqu'à la distance
de i5o mètres. La position étant choisie, le combattant abaisse au point
utile la tige engaînée ; il fixe au sol, en croix de Saint-André, le bâton de
support, et il dépose le sac, en plan incliné, sur cet ap|)ui triangulaire. Il a
ainsi un abri, derrière lequel il charge et décharge son fusil à volonté, ap-
puyant le canon sur l'un ou l'autre côté du sac. Il peut viser juste et tirer
à loisir, surtout sans fatigue, car son arme pèse sur le sac et non plus sur le
bras.
» Supposez les combattants disposés en ordre mince, ou même en chaîne
clair-semée de tirailleurs, les petits projectiles de l'ennemi n'auront sur eux
que peu d'effet. Les balles réussies, celles qui porteront coup, viendront
s'amortir: i° sur le sac rembourré parles effets d'habillement et blindé
par les ustensiles de cuisine ; 2° sur la plaque mobile du casque ; 3° enfin
sur les plis multiples du fragment de tente, suspendu en bas du sac.
» Campement. — Le combat étant fini, et la victoire acquise ou la retraite
accomplie, il s'agit de camper pour se reposer et faire la soupe. Dans l'état
actuel des choses, chaque soldat est muni d'un fragment de toile et d'un
bâton brisé : on les joint par quatre et l'on construit des tentes-abris, occu-
pant un très-petit espace en superficie et en élévation, permettant seulement
la position couchée aux quatre fantassins qui en ont fourni les matériaux.
La cuisine se fait dehors pour l'escouade de dix ou douze hommes.
)) Cette cuisine en plein air a plusieurs inconvénients. Elle utilise fort
mal le combustible, souvent difficile à trouver dans le rayon occupé. Elle
cuit mal et avec lenteur les aliments. Au vent et à la pluie, elle fume et aveu-
gle, sans chauffer et par conséquent sans sécher le soldat. De plus, sa po-
C. R., 1870, 2« Semestre. (T. LXXI, N" 14.) 63
(472)
sition, en dehors de ia tente-abri, met le désordre dans la compagnie, en
détruisant tonte symétrie castra-métative. Enfin, à proximité de l'ennemi,
elle décèle le bivouac.
» Avec le fourniment du nouveau sac, ces inconvénients sont bien
amoindris, s'ils ne sont pas tout à fait éliminés. Pour un campement passager,
un repos de courte durée, il suffit de quelques minutes pour accoupler des
sacs arcboutés, et, avec leur aide, dresser pour douze hommes une tente et
sa cuisine.
» S'agit-il d'un campement prolongé, la pelle visière qui sert d'abri à la
tête de chaque tireur pendant le combat, fournit le moyen de construire
un four de campagne pour la cuisine sous la tente même, et de donner à
celle-ci l'élévation que l'on veut, en y pratiquant les rigoles indispensables.
En un quart d'heure, les douze pelles de l'escouade font toutes les excava-
tions et les remblais nécessaires ; cinq ou six paires de sacs sont arcboutés,
et procurent instantanément un échafaudage de grande tente, qu'on recouvre
avec la toile à neuf plis dont chaque soldat est en possession. Là, tout le
monde est à l'abri, et relativement à son aise; le feu des cuisines est caché
aux yeux de l'ennemi, la fumée en est moins intense et moins aveuglante,
et, dans la mauvaise saison, on peut s'y sécher et s'y chaulfer. Avec de la
farine, on cuit instantanément la galette pour lester l'estomac, en atten-
dant les distributions régulières, toujours trop lentes à se réaliser.
» L'invention de ce système d'armes défensives, dont je viens d'entretenir
l'Académie, appartient au général polonais Miéroslawsld. Je n'ai ici que le
mérite d'en avoir compris la portée et les avantages au point de vue de la
conservation du soldat et de son hygiène. »
MÉMOIRES PRÉSENTÉS.
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Observations relatives à la panification.
Lettre de M. 3Ièue MouKiiis à M. le Président.
(Renvoi aux Sections de Chimie et d'Agriculture, auxquelles
MM. Dumas et Bussy sont priés de s'adjoindre.)
« J'ai l'honneur de soumettre à l'Académie quelques observations rela-
tives à la question du pain, observations dont elle appréciera l'opporlunilé.
Mes recherches, les Rapports de M. Chevreul et la sanction d'une longue
pratique ont prouvé que, pour avoir du pain doué de toute sa puissance
nutritive, il faut le préparer avec tous les principes immédiats du grain.
( 473 )
moins ses enveloppes les plus grossières; mais ils ont prouvé aussi que
ce pain n'est réellement bon que si l'on empêche la formation du pain bis,
c'est-à-dire raltération d'une partie de ces principes immédiats. Cette ob-
servation est essentielle, et, en l'oubliant, on s'expose à de tristes déceptions.
» Si, en effet, on fabrique du pain avec toutes les parties du grain, et si
pour cela on emploie les procédés ordinaires, le ferment contenu dans le
tissu embryonnaire (céréaline) change l'amidon en dextrine et en glucose,
liquéfie en partie le gluten, et le pain devient bis, lourd et pâteux. Ces dé-
fauts ont leur importance; mais ce qui est beaucoup plus grave, c'est que,
par cette altération complexe, ce pain change de nature, devient laxatif et
perd une partie de sa force alimentaire. On sait, en effet, que le pain de tout
grain, dit de son, est plutôt un médicament qu'un aliment, et que les mé-
decins le prescrivent depuis longtemps contre la constipation habituelle.
» On comprend les graves inconvénients d'un pain de cette nature, introduit
dans le régime, alors surtout que la ration de viande serait diminuée. Le
pain bis en usage dans les campagnes ne saurait être une objection, parce
que la farine qui le produit est toujours blutée, et que la couleur bise pro-
vient surtout du seigle et de l'orge. Il faut donc, à tout prix, éviter cette
altération, et, pour cela, on doit employer les moyens indiqués par moi,
approuvés par l'Académie et appliqués à l'Usine de la ville de Paris, où, dit
l'ancien directeur de l'Assistance publique, dans un exposé officiel daté
de 1868, ce procédé, donne depuis plus de six ans, du pain de première
qualité, permet de supprimer le pain bis et produit une économie de
looooo francs environ par an, selon l'administration, et de 200000 francs
suivant les calculs faits par les Commissions.
» Malgré ces résultats satisfaisants, ce procédé n'a pas été poussé jusqu'à
la dernière limite du rendement, limite qu'on atteint ainsi qu'il suit.
» On humecte le blé avec 5 pour 100 d'eau salée, qui a la curieuse pro-
priété de s'arrêter devant la membrane embryonnaire; puis on enlève les
téguments extérieurs, à l'aide d'un décortiqueur, et le blé devient alors si fa-
cile à broyer que, si Ton manque de meules, un moulin à café peut suffire à
cette opération.
» Le blé, broyé est divisé en deux parties : 1° la farine fine provenant de
l 'intérieur du grain ; 2° les gruaux, représentant les couches extérieures. Ces
gruaux contiennent les principes initritifs les plus importants, c'est-à-dire
le gluten le plus élaboré pour la nourriture du tissu musculaire, le pho-
sphate de chaux animalisé pour le tissu osseux, l'albumine et l'huile phos-
phorée pour le tissu nerveux, etc. Mais, ne l'oublions pas, ces gruaux
63..
( 474 )
contiennent aussi le tissu embryonnaire et la céréaline dont il faut empêcher
l'action.
» Pour cela on fait, avec la farine fine et du levain, une pâte molle, et,
quand cette pâle est arrivée au degré de fermentation voulu, on y ajoute les
gruaux.
n Les phénomènes qui se passent alors sont bien simples. L'humidité
pénètre les gruaux, qui s'hydratent rapidement et font une pâte homogène,
tandis que la céréaline, n'ayant phis le lenqjs d'incubation nécessaire pour
agir, et retenue du reste dans des cellules restées entières, ne peut plus at-
taquer les principes immédiats, et laisse le pain avec sa saveur naturelle et
avec toutes ses forces nutritives.
» On peut dire en résumé que, lorsqu'on prépare le pain avec toutes les
parties du grain à l'aide des procédés ordinaires, on n'obtient qu'un ali-
ment débilitant, tandis qu'on obtient un pain normal essentiellement nu-
tritif en empêchant l'altération de la pâte par la céréaline, à l'aide des
moyens indiqués, moyens qui, dit le Rapport officiel inséré dans le J/o-
n//eu/- du 2'3 décembre 1860, « auraient pour effet, s'ils se généralisaient,
I) d'apporter une économie d'un huitième dans la consommation. »
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Sur (' emploi de la farine d' avoine dans l'alimentation.
Extrait d'une Lettre de M. Wilson à M. Dumas.
(Renvoi à la Commission désignée pour la Communication qui précède.)
« Permettez-moi de confirmer, par ce que j'ai pu constater personnel-
lement, ce que vous avez dit au sujet de la farine d'avoine (i). C'est un
aliment de très-grande consommation, non-seulement en Ecosse, mais
surtout en Irlande, où l'on en fait de la bouillie et du gâteau qui se con-
serve pendant dix à douze jours sans s'altérer.
)) Pour faire de la farine d'avoine, on n'a qu'à décortiquer le grain et le
faire concasser. L'opération est très-simple, et je ne doute pas qu'elle
|)uisse être organisée facilement sur une grande échelle.
» Je me mets à la disposition de l'Académie, pour tous les renseignements
qu'elle pourra désirer sur ce sujet. »
(i) Compte rendu de la séance précédente, p. 446-
( 475 )
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Sur tes moyens de faire entrer la farine de blé dans
la confection d'aliments doués de propriétés nutritives suffisantes. Note de
M. L. AuBERT. (Extrait.)
(Renvoi aux Sections de Chimie et d'Agriculture, auxquelles
MiNI. Dumas et Bussy sont priés de se joindre.)
« ... J'ai moulu dans un moulin à café loo grammes de blé; puis, dé-
layant la farine ainsi obteuue dans 4oo grammes d'eau et chauffant jusqu'à
l'ébullition, j'ai obtenu une bouillie épaisse, ayant un goût de gluten pro-
noncé et désagréable, mais douée de propriétés nutritives.
» Pour ôter à cette bouillie le goût désagréable du gluten, on pourrait
y ajouter du beurre: le prix du beurre étant en ce moment trop élevé, j'ai
employé le saindoux. Si le saindoux est un peu rance, comme cela arrive
souvent, on peut commencer par y faire frire im oignon, puis verser la farine
délayée dans l'eau et chauffer jusqu'à l'ébullition. On peut remplacer l'oi-
gnon par l'ail, ou bien encore ajouter à cette bouillie du fromage.
» En ajoutant du saindoux, je n'ai plus employé que 85 grammes de blé
au lieu de lOO. Voici exactement les proportions, pour deux préparations
différentes :
i
Blé (nettoyé), moulu dans un moulin à café 85^''
Eau 46o
I. ( Sel marin i ,5
Saindoux ; • • ■ ^^
Oignon coupé en petits morceaux et frits dans le saindoux. ... j5
Par rébullition, l'eau est réduite à environ 4oo grammes. .
Blé (nettoyé), moulu dans un moulin à café SSs''
Eau 46o
II, / Sel marin ' ,5
Saindoux i5
Fromage de gruyère 20
On chauffe le tout ensemble, et assez lon,r;lemps pour que le gruyère fonde.
)
» Je propose également de préjiarer un pain ayant la même composition
que ces bouillies, mais avec une quantité d'eau moindre, pour obtenir une
pâte ferme. On aurait ainsi un pain sans levain, ou biscuit, dont la conser-
vation et le transport seraient faciles.
» Ce biscuit ayant une grande valeur nutritive sous un petit volume, le
consommateur devrait être prévenu des quantités en pain et en viande que
( 476)
représenteraient loo grammes du biscuit lui-même. Je demande que des
expériences soient faites sur ce sujet. »
M. TouRNiER adresse une Note concernant les avantages qu'il croirait
pouvoir signaler dans une mesure qui consisterait à proscrire l'usage du
pain frais, et à livrer exclusivement à la consommation le pain cuit de la
veille.
(Renvoi à la Commission nommée pour les Communications
qui précèdent.)
CORRESPONDANCE.
M. LE Secrétaire perpétuel signale, parmi les pièces imprimées de la
Correspondance, une brochure de 31. de Chancourtois sur « l'interpréta-
tion des imaginaires en physique mathématique «. Ce travail est celui qui
a été soumis par l'auteur au jugement de l'Académie dans la séance du
18 janvier 1869 (i).
La séance est levée à 5 heures. É. D. B.
PUBLICATIONS PERIODIQUES REÇUES PAR l'aCADÉMIE
pendant le mois de SEPTEMBRE 1870.
Annales de f Aqriculture française; n°' des i5 et 3o juillet 1870; in-8°.
Association Scientifique de Frame ; Hulletin hebdomadaire, n° 188, 1870;
in-8".
Bulletin de V Académie impériale de Médecine; n^^des i5et3i août 1870;
in-8".
Bulletin de l'Académie royale de Médecine de Behjique, n° 5, 1870; in-8°.
Bulletin de l'Académie royale des Scie7ices, des Lettres et des Beaux-Arts de
Belgique; n° 8, 1870; in-8".
Bulletin de la Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale; juin
1870; in-4°.
fi) Comptes rendus, t. LXVIII, p. 127.
(477 )
Bulletin général de Thérapeutique; 3o août, i5 et 3o septembre 1870;
in-8°.
Bulletin hebdomadaire du Journal de l' agriculture ; n°^ 36 à 38, 1870; in-8°.
Bultettino meteorolocjico dell' Osservatorio del B. CoUecjio Carlo Alberto;
n°5, 1870; in-4^
Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des Sciences;
11°' 10 à i3, 2^ semestre 1870; in-4°.
Correspondance slave; n°^ 73 à 79, 1870; in-4°.
Journal d'Agriculture jH'atique; n"* 35 à 37, 1870; 10-8".
Journal de l'Agriculture; n"' 100 et loi, 1870; in-8°.
Journal de l'Eclairage au Gaz; n°' 35 et 36, 1870; in-4°.
Journal de Mathématiques pures et appliquées; mai 1870; in-4°.
Journal de Médecine de l'Ouest; 3o avril 1870; in-8''.
Journal de Pharmacie et de Chimie; septembre 1870; in-8*'.
Journal des Connaissances médicales et pharmaceutiques; n"^ 24 et 25, 1870;
10-8".
Journal des Fabricanîs de Sucre; n"' 20 et 21, 1870; in-fol.
L'Abeille médicale; n°' 36 à 38, 1870; in-4°.
L'Aéronaute; août 1870; in-8°.
L'Art médical; septembre 1870; in-8°.
La Santé publique; n"' 85 et 86, 1870J in-4°.
Le Gaz; n° 8, 1870; in-4°.
Le Moniteur de la P holographie; n"' 12 et 1 3, 1870; in-4°.
Le Mouvement médical; n" 36, 1870; in-4°-
Les Mondes; n°' des i" et 8 septembre 1870; in-8°.
Magrasm /jj«ores(/ue; août et septembre 1870; in-4".
Nouvelles Annales de Mathématiques; septembre 1870; in-8*'.
Observatorio... Publications de l'Observatoire météorologique de l'Infant
don Luiz à l'École Polytechnique de Lisbonne; mars à mai 1870; in-f".
Bévue des Cours scientifiques ; n"^ 4o et 4i, 1870; in-4''.
Bévue des Eaux et Forêts; n"' 17 et 18, 1870; in-8°.
Bévue maritime et coloniale; septembre 1870; in-8*'.
The Food Journal; septembre 1870; in-8''.
The Scientific Bevieiv; n" 9, 1870; in-4''.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE DU LUNDI 10 OCTOBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. DupcY DE LÙME donne lecture d'un « projet d'aérostat dirigé, muni
d'un propulseur. » L'impression de cette Note sera réunie à celle de la
Communication par laquelle M. Dupuy de Lôme se propose de la complé-
ter très-prochainement.
MÉMOIRES LUS. ,
M. Pellarin donne lecture d'une Note concernant l'hygiène des blessés
et des opérés.
(Commissaires : MM. Milne Edwards, St. Laugier, Larrev.)
MÉMOIRES PRÉSENTÉS.
M. J. MoRiN soumet au jugement de l'Académie une Note relative k
l'inflammation de la poudre, à distance, par l'électricité.
L'auteur croit devoir préférer, à la production d'une étincelle électrique,
réchauffement d'une portion résistante du conducteur qui transmet le
courant.
(Commissaires : MM. Dumas, Morin, H. Sainte-Claire Deville, Jamin.)
G. R., 1870, i' Semestre. (T. LXXl, N" 18.) 64
(478)
CORRESPOA DANCE.
M. LE Secrétaiiie perpétuel signalc, parmi les pièces imprimées de la
Correspondance :
1° Un Mémoire de M. Dabi, imprimé en anglais et portant pour titre :
« Examen de la règle de Newton pour trouver le nombre des racines ima-
ginaires d'une équation »;
2° Un travail de M. A. Colin, publié dans la « Gazette hebdomadaire
de Médecine et de Chirurgie «, et intitulé : « Des conditions sanitaires de
l'armée de Paris ».
M. Brisac adresse une Note concernant l'emploi des légumes et du blé
vert en Alsace et en Lorraine :
« Chez tous les israélites, en général, on mange beaucoup de légumes
secs, pois, haricots, lentilles, riz, et orge perlé. On mange encore beau-
coup, en Lorraine et en Alsace, de ce qu'on nomme le krinnenkorn, c'est-à-
dire blé vert; on le récolle alors qu'il est encore vert, et, tout sec qu'il est
quand on le mange, il conserve encore de sa couleur primitive; quant au
blé, quand il est bien accommodé avec un morceau de viande un peu grasse,
c'est une nourriture bienfaisante. Ou f;ut souvent des mélanges de riz avec
des pois, de pois avec des haricots ou de l'orge : tous ces mélanges ne sont
connus que des israélites, mais je les ai vus souvent appréciés même par
les étrangers qui n'y étaient point accoutumés. »
M. Grimal'd (de Caux) adresse une Note complémentaire à celle qu'il a
soumise au jugement de l'Académie, dans la séance du 26 septembre der-
nier :
«... Pour utiliser le blé en grain comme aliment, quand on est privé
des moyens usuels d'en faire du pain, il est inutile de le décortiquer. Le
décorticage priverait d'ailleurs le grain de la partie nutritive inhérente au
son. Voici ma foramle. Mettez le blé à tremper dans de l'eau de Seine (je
parle pour Paris), pendant quelque temps, deux heures au moins; frottez
bien les grains les uns contre les autres, ahn d'enlevei" des restes de glume
qui adhèrent à l'épiderme, sous forme de poils très-déliés, lesquels viennent
surnager par le fait du malaxage; retirez le blé de son eau de lavage, faites-le
égoutter, meltez-le à cuire dans im vase, avec un peu d'eau, et traitez-le ab-
( 479 )
soliiment comme chi riz. Le blé est cuit quand le grain s'écrase sous les
doigts. Pour condiment, on peut employer toute espèce d'aromates. Mais il
suffit de sel, de poivre et d'une pointe d'ail pour obtenir un aliment savou-
reux, nutritif et de la plus facile digestion.
» Une cuillerée de grain suffisait, à Venise, pour remplacer le pain d'une
personne; mais il faut tenir compte des climats. Peut-être à Paris devrait-
on doubler cette ration, quoique ce soit à peu près celle que l'on donne
en riz à un cipaye dans l'Inde. »
M. WiLSON adresse quelques nouveaux documents sur l'emploi de la
farine d'avoine et du blé en nature, comme aliments :
« Les trois quarts des forts paysans irlandais et écossais du nord se nour-
rissent d'avoine principalement, avec de la bouillie et du gâteau d'avoine
et des pommes de terre. La bouillie se mange soit avec du lait, soit avec du
beurre, de la mélasse ou du sucre; le gâteau, comme du pain ordinaire.
» En ce qui regarde le pain fait avec de la farine entière, qui est très-fort
en usage en Angleterre, sous le nom de brown bread^ la fabrication de celte
farine est très-facile, et, avec des machines que j'ai trouvées ici, on pour-
rait, avec une dépense relativement très-faible, faire moudre 3oo ooo à
4oo ooo kilogrammes par jour. »
M. L. AuBEUT adresse une nouvelle Note relative à l'emploi des matières
grasses mélangées avec le blé en nature, comme aliment.
31. Dumas, après avoir donné connaissance à l'Académie des Communi-
cations qui précèdent, s'exprime comme il suit :
« L'Académie ayant accueilli avec intérêt les Communications que j'ai
eu l'honneur de lui soumettre au sujet des subsistances en blé, farine ou
céréales de la ville de Paris, il m'a semblé que le moment était venu de
l'entretenir des opérations auxquelles a donné lieu, de son côté, l'approvi-
sionnement en viande, en me bornant au rôle d'historien et laissant à la
Commission à porter un jugement dont l'opportunité me paraît évidente,
dans un moment où il faut que rien ne soit compromis.
M Dès que la menace d'un siège à soutenir a rendu nécessaire la concen-
tration sur Paris d'une quantité de bétail capable de nourrir sa population
pendant sa durée, on a compris qu'il fallait porter tout l'effort sur le bœuf,
le mouton et le porc.
64..
( 4«o )
» La population de Paris consomme volontiers du veau; mais, dans les
circonstances présentes, mieux valait assurément garder le lait des vaches
laitières pour les enfants et les malades que de le livrer aux veaux de
boucherie. On n'a donc pas amené de veaux.
» La population de Paris consomme volontiers aussi du porc, sous toutes
les formes. Malheureusement, on n'a pu en faire entrer une quantité suffi-
sante aux besoins de la consomm;ïtion normale; l'époque n'était pas favo-
rable.
» La base principale de l'alimentation de Paris en viande repose donc
sur le bœuf et sur le mouton.
» Ce point établi, il est facile de comprendre que les troupeaux reçus
en ville offraient deux sortes de sujets : les uns, capables de soutenir le
choc du changement de situation, pouvant prospérer ou du moins vivre
sans dépérir dans un nouveau milieu; les autres, blessés, fatigués de la
route, impropres par des causes diverses à être utilement gardés et nourris
dans les parcs intérieurs, instantanés. Les premiers ont été réservés pour
la consommation, comme viande fraîche, et sont livrés successivement aux
abattoirs. Les seconds ont été plus spécialement réservés aux procédés de
conservation.
» Ces opérations qu'il s'agissait d'improviser dans Paris et d'y organiser
sur une large échelle, ont été l'occasion des plus sérieuses concur-
rences.
» Tout le monde connaît la méthode d'Appert qui fournit à la marine et
aux voyageurs des conserves de toute nature et spécialement des viandes
préparées qui résistent à de longues années de garde. Les produits que les
successeurs d'Appert livrent au commerce forment la base d'une industrie,
qui n'avait qu'à continuer ses opérations, sûre d'être encouragée et re-
cherchée par la population aisée.
» Il faut en dire autant des produits analogues obtenus par MM. Ozouf
et Couder, dont les qualités excellentes ont été reconnues par tous ceux
qui ont eu à les apprécier, mais qui constituent également des mets tout
préparés et non des viandes conservées. Or, ces mets doivent être consommés
tels qu'ils sont, et l'uniformité de leur préparation peut devenir pour l'esto-
mac une cause de fatigue; les viandes, au contraire, prennent les formes et
reçoivent les usages que souhaitent les consommateurs. Couser\er les
viandes sans apprêts, d'ailleurs, était le seul moyen d'en rendi'e la garde
suffisamment économique, pour qu'il fût permis de l'effectuer rapidement
et sur une grande échelle, comme c'est le cas en ce moment.
( 48. )
» Trois procédés réalisant cette condition de laisser la viande à son état
naturel et d'en permettre la garde, sans la soumettre à la cuisson, ont été
mis en pratique.
» Le premier repose sur l'application pure et simple des méthodes de
salaison en usage dans les ports pour les besoins de la marine. Il est mis en
pratique à l'abattoir de Grenelle par M. Cornillet, qui a organisé son atelier
avec une complète intelligence des besoins de cette industrie. Les viandes
salées qu'il prépare reçoivent cette salure à fond, qui garantit la conserva-
tion des approvisionnements de long cours, mais qui n'était peut-être pas
indispensable pour la circonstance, où il s'agissait de garder la viande pen-
dant deux ou trois mois seulement.
» C'est sur cette dernière donnée que se fonde M. Wdson, Irlandais, in-
venteur d'une méthode particulière qu'il a longtemps pratiquée dans son
pays, et qu'il a proposée comme spécialement propre aux circonstances
dans lesquelles se trouve la ville de Paris. En effet, elle permet d'opérer
par une salure plus modérée et d'assurer la conservation pour un temps
suffisant, tout en laissant aux viandes certaines quaUtés qui les placent
dans une condition intermédiaire entre les viandes fraîches et les viandes
salées proprement dites. Les ateliers de M. Wilson ont été installés d'une
façon rapide et pratique à l'abattoir de la Villette. Son personnel, amené
d'Irlande, est venu s'enfermer avec lui à Paris, la veille même de l'inves-
titure de la ville. Il est impossible de méconnaître que M. Wilson, dans
cette circonstance, a écouté le désir de servir la France.
)) Son procédé repose sur un ensemble de précautions parfaitement
d'accord avec les princijies de la science. Ainsi, il demande que le bétail
soit reposé avant d'être abattu : la viande d'un animal forcé ne se garde
pas; celle d'un animal fatigué par la marche se conserve mal. M. Wilson
ne veut pas qu'on souffle les bœufs qu'il doit préparer, et il n'est pas be-
soin de démontrer, en effet, que cette opération offre l'inconvénient de
semer dans les chairs des spores capables d'en amener la décomposition.
Il fait dégorger les viandes au moyen d'une première salure, en prenant
soin d'ouvrir au couteau les masses musculaires trop épaisses et d'y pra-
tiquer des poches qu'on remplit de sel. Enfin, les viandes dégorgées sont
placées dans la saumure et maintenues à une température qui ne dépasse
pas lo degrés, au moyen dadditions convenables de glace.
» On obtient ainsi les effets plus favorables de la salaison d'hiver, même
dans les saisons d'été ou d'automne. Dans le cas particulier où se trouve
( 482 )
Paris, on conserve, de la sorte, la viande pour quelques mois avec un de-
gré de salure modéré, qu'on fait disparaître ensuite facilement, en la sou-
mettant à une immersion dans l'eau pendant quelques heures.
» Le procédé de la salure ordinaire et celui de M. Wilson conviennent
parfaitement au bœuf. L'un et l'autre, essayés sur le cheval, s'y sont
appliqués sans difficulté. Ni l'un ni l'autre ne paraissent convenir au
mouton.
« C'est ainsi qu'après avoir expérimenté sur le bœuf, d'abord, un pro-
cédé tout à fait différent proposé par M. Gorges, on a été conduit à le
spécialiser sur le mouton.
» M. Gorges annonce avoir pratiqué sa méthode en Amérique, à la
Plata, et mettre au service de la population de Paris, comme MM. Cor-
nillet et Wilson, une expérience éprouvée. Son procédé constitue une
application intéressante de l'ime des réactions les plus simples de la
chimie. Les premiers essais en ont été jugés satisfaisants; mais ils n'avaient
eu qu'une courte durée.
» Les viandes, dépecées et lavées, sont soumises à l'action d'un bain
acidulé par l'acide chlorhydrique, auquel succède un second bain con-
tenant du sulfite de soude. On les enferme ensuite dans des boîtes en
fer-blanc contenant i kilogramme de viande, 5 kilogrammes, lo kilo-
grammes, à volonté, en les saupoudrant de sulfite de soude. On ferme la
boîte à la soudure, pour prévenir la rentrée de l'air. La viande est pénétrée
d'abord par l'acide chlorhydrique, ensuite par le sulfite de soude. L'action
réciproque de ces deux agents donne naissance à du sel marin et à de
l'acide sulfureux. L'effet antiseptique de ce dernier est bien connu.
)) La conservation obtenue par l'acide sulfureux a conduit à tenter l'ex-
périence sur une quantité de viande plus considérable. Si cette épreuve
réussit, il en résultera que, dans tous les cas où les vases n'ont pas besoin
d'être déplacés, et par conséquent pour toute ville de guerre menacée, on
pourra, à trè.s-bas prix et avec une faible main-d'œuvre, emmagasiner de
larges provisions de viande. Mais l'expérience n'a pas prononcé et je ré-
serve mon propre jugement.
M Pour les voyages et pour les approvisionnements de mer, les boîtes
de 1,5, lo kilogrammes des modèles adoptés par M. Gorges sont préfé-
rables. Les maniements, les déplacements qu'elles subissent peuvent, en
effet, en déterminant des fissures, permettre la rentrée de l'air el amener
l'altération des produits. Il y a donc tout intérêt à circonscrire la perte.
( 483 )
» Les viandes ainsi préparées sont soumises pendant une demi-heure
à l'action d'un bain d'eau tiède, et exposées à l'air pendant une demi-
journée avant de les employer.
» Les chantiers de M. Gorges, installés au voisinage de l'abattoir de
Grenelle, sont, comme on l'a dit plus haut, spécialement appliqués à la
préparation du mouton.
» Les circonstances qui ont amené l'installation dans Paris des trois ate-
liers de préparation et de conservation des viandes par la salaison ordi-
naire, la salaison modérée à froid et par le sulfite ne seront pas perdues
pour l'avenir. Les ouvriers et contre-maîtres qui s'y forment conserveront
à Paris ou dans le pays des industries dont on n'avait peut-être pas com-
pris jusqu'ici tout l'intérêt.
» Pour l'alimentation d'un grand marché, ces procédés, perfectionnés
par l'étude et par la pratique, permettraient d'amener de loin la viande
dépecée et choisie, et d'attendre pour sa mise en vente le moment favo-
rable, sans avoir d'altération à craindre. Le rayon d'arrivée pourrait donc
s'étendre, et le temps affecté à la consommation ne serait plus limité,
comme il l'est pour la viande vendue à la criée.
» Une autre considération recommande de tels procédés à l'attention pu-
blique. Les maux causés par la guerre ne finissent pas avec la guerre.
L'Europe aura à compter avec une large destruction de bétail causée par
la sécheresse et le manque de fourrages, par l'alimentation destructive des
armées en campagne et par la peste bovine que l'armée prussienne répand
dans les contrées qu'elle occupe. Un procédé qui permettrait le transport
à bon marché et sur une grande échelle des viandes de l'Amérique ou
de l'Australie en Europe, trouverait probablement dans cet ensemble de
circonstances cruelles une occasion décisive de témoigner de son effi-
cacité.
» Je n'arrête pas l'attention de l'Académie sur les procédés d'enfumage
des viandes ou d'application directe de l'acide sulfureux gazeux sur elles
qui ont été proposés. On n'avait pas de temps à perdre en essais.
» Mais les viandes provenant du bétail consacré à la préparation des
viandes conservées, de même que celui qui est abattu chaque jour pour
la consommation de la viande fraîche, ne sont pas le seul aliment dont il y
ait à s'occuper dans un moment aussi grave que celui que nous traversons.
L'animal livré au boucher fournit encore des produits secondaires qui
peuvent, à l'aide de préparations appropriées, concouru' de la manière la
plus utile à la nourriture des habitants.
( 484 )
» Ainsi, Paris manque de beurre; uon-séulement le beurre frais n'y
arrive plus, mais tous les efforts tentés pour y faire parvenir de larges
quantités de beurre salé ont été impuissants.
» Mais on sait que le beurre peut être suppléé par la graisse de bœuf,
non par sa totalité, mais par ce produit de première qualité qu'on désigne
sous le nom de graisse de rognon, et qui rivalise, en effet, avec le beurre de
cuisine. Le reste de la graisse de l'animal n'était pas accepté jusqu'ici pour
les usages culinaires, et formait une seconde qualité abandonnée aux usages
industriels. Il n'était pas au-dessus des ressources de la chimie d'enlever à
la graisse de seconde qualité les substances qui lui communiquent une
odeur ou un goût déplaisants. Les études dirigées en ce sens sont devenues
inutiles, M. Dordron, ayant résolu le problème. Le produit qu'il prépare
avec les graisses de seconde qualité ebt supérieur à celui qui constitue la
graisse de première qualité, c'est-à-dire la graisse de rognon.
» Un second problème appelait l'intervention de la chimie. Le sang de
porc est utilisé comme aliment et forme la base du boudin. Le sang de
bœuf et celui de mouton ne devraient-ils pas entrer également dans l'ali-
mentation?
» Il est difficile d'estimer les quantités exactes de sang que contiennent
un bœuf ou un mouton; il l'est moins d'apprécier le poii-ls réel des pro-
duits de ce genre que le boucher livre à l'exploitation. Elle paraît pouvoir
être évaluée, en moyenne, à ii kilogrammes par tête de bœuf et à 2 kilo-
grammes par tête de mouton, en ce moment.
» En comptant 55o bœufs et 35oo moutons comme représentant la
consommation moyenne actuelle, on a donc 65oo kilogrammes de sang
de bœuf et 7000 kilogrammes de sang de mouton, environ 14000 kilo-
grammes pour le tout.
» Dès à présent, ces quantités sont ou peuvent être utilisées. Sous l'im-
pulsion de M. le Maire du 19* arrondissement d'un côté, et de l'autre, sous
celle de M. Riche, dont les travaux sont bien connus de l'Académie, on
est parvenu à former avec le sang de bœuf un boudin accepté par les con-
sommateurs, et dont la fabrication utilise la totalité de ce produit.
» Tout chimiste s'étant occupé de l'analyse et de l'étude du sang pou-
vait prévoir que le problème serait d'une solution plus difficile en ce qui
concerne le sang de mouton. Aussi, n'est-on pas parvenu à le convertir
en boudin. Il serait hors de propos d'en déduire les causes en ce moment.
M. Riche essaye de l'utiliser en terrines, formées de riz, de graisse et de
sang de mouton, composition (jui, convenablement épicée et cuite au four,
( 485 )
réunirait les trois formes d'aliments nécessaires à l'homme : les aliments
aibnmineux, gras et féculents.
M Les mufles et les pieds de bœuf délaissés autrefois par l'alimentation
sont devenus l'objet d'une exploitation profitable sous ce rapport.
» L'Académie n'a pas oublié la longue et savante discussion dont l'em-
ploi de la gélatine des os fut l'objet devant elle, il y a trente-cinq ans en-
viron. Les uns disaient qu'elle pouvait remplacer la viande; d'autres lui
contestaient le pouvoir alimentaire; de plus sages, enfin, considéraient
la gélatine comme un aliment, sans doute insuffisant, si on l'employait seul,
mais, très-utile, s'il était associé à des aliments gras ou féculents.
» Témoin, pendant la disette de 1816, des bienfaits produits dans la fa-
brication des soupes économiques par la gélatine des os ou plutôt par les
cartilages qu'ils laissent quand on les traite au moyen des acides; ayant
d'ailleurs pris part aux travaux de la Commission de la gélatine dans le
sein de l'Académie, il m'est resté démontré que la gélatine des os est ali-
mentaire, et qu'elle doit être employée, de préférence, sous forme de carti-
lages ajoutés à la viande, dans la préparation du boudlon,
» Ne pourrait-on pas recueillir tous les os, déjà utilisés en nature dans
la fabrication des soupes économiques et les traiter par les acides, pour
débarrasser leur tissu cartilagineux de la partie terreuse qui en empêche la
dissolution dans le bouillon ?
» L'opération consiste; on ne l'ignore pas, à les soumettre à l'action de
l'acide chlorhydrique du commerce, étendu de quatre ou cinq fois son
volume d'eau. Les os minces sent dépouillés de calcaire en deux ou trois
jours; les os épais en exigent huit ou dix. Égoultés et lavés, les cartilages
doivent être mis dans une dissolution faible de sulfite de soude, pendant
vingt-quatre heures, puis lavés à grande eau.
» L'acide sulfureux les préserve d'altération. Il est inutile de les sécher
et il vaut mieux les introduire bien lavés, bien égouttés et frais dans le pot-
au-feu. Sous cette forme, la réjouissance n'est plus une fiction.
» La quantité de gélatine des os qui peut rentrer ainsi dans l'alimenta-
tion représente 10 pour 100 environ de la matière provenant de l'animal
abattu.
» Parmi les industi'ies accessoires auxquelles donnerait lieu l'utilisation
des produits secondaires du bétail livré à la boucherie, il est nécessaire
d'appeler encore l'attention de 1 Académie sur les peaux de boeuf et sur
celles de mouton.
C. R., 1870, oe Semestre. (T. I.XXI, N" îii.) 65
( 486 )
» Au premier moment, ou n'a songé qu'à se préserver des dangers de la
corruption des masses de peaux sortant chaque jour des abattoirs et ne
pouvant plus être soumises aux opérations de la tannerie. Il fallait aussi
prévenir les pertes que l'Etat aurait en à subir par leur destruction. On les
a donc salées.
» M;iis U m'a semblé qu'on pouvait aller plus loin. Préparées par luie
immersion dans l'eau contenant du phénale de soude ou de l'acide phé-
nique et de la glycérine, ces peaux pourraient devenir incorruptibles et
rester souples.
» Les peaux de bœuf ainsi préparées offriraient sur nos remparts un
coucher sain k nos soldats.
» Les peaux de mouton munies de leur toison serviraient, pendant les
journées pluvieuses et les nuits froides, de fourrures éminemment propres
à mettre les sentinelles à l'abri des intempéries.
» Il serait à souhaiter, qu'ainsi qu'on a trouvé des entrepreneurs pour
les industries dont il a été question en premier lieu, (juelques manufactu-
riers inoccupés en ce moment missent leurs connaissances pratiques au
service de la ville pour l'exploitation des os et pour la préparation des
peaux. La nécessité d'accroître la quantité d'aliments dont la population
dispose n'a pas besoin d'être démontrée. Il suffit de parcourir nos ambu-
lances et de voir combien les affections rhumatismales, les amygdalites,
les affections d'entrailles, etc., y témoignent des effets du froid et de l'hu-
midité des nuits, pour être convaincu que l'amélioration des bivouacs et
celle du vêtement des sentinelles auraient des résultats également dignes
d'intérêt au point de vue de l'humanité et à celui de la défense.
» L'Académie me pardonnera les détails dans lesquels je suis entré
devant elle. L'approvisionnement de la ville, commencé dans la nuit du
4 au 5 aoiit, a exigé, de la part de rx\dministration, des efforts, et produit
des effets que l'histoire appréciera. L'Académie reste dans son rôle et
accomplit sa mission, quand elle intervient, de son côté, pour rendre plus
sûre l'application des préceptes de la science à la pratique des opérations
qui intéressent l'alimentation, l'hygiène et la défense de Paris. Devant un
intérêt de cet ordre, les moindres détails ont leur prix. »
« M. MiLNE Edwards, à l'occasion des Comnuinications précédentes
sur les procédés de conservation de la viande, entretient l'Académie de
quelques essais qu'il a faits, en vue d'obtenir très-promptement la salaison
d'animaux entiers. A l'aide d'un réservoir, contenant de l'eau saturée
( 48? )
de sel marin et mis en communication avec l'une des grosses veines de
l'animal récemment tué (la veine jugulaire, par exemple), on injecte, avec
la plus grande facilité, le liquide conservateur dans les vaisseaux capillaires,
dont les muscles ainsi que les autres organes sont creusés, et l'on imprègne
de sel tous les tissus plus complètement que l'on ne saurait le faire en faisant
pénétrer le chlorure de sodium de la surface vers les parties profondes, on
même en poussant la saumure dans le tissu cellulaire intermuscvdaire ainsi
que cela se pratique pour la salaison des jambons; une opération analogue
estf;ùte journellement, et avec un plein succès, dans les laboratoires ana-
tomiques pour la conseivalion des animaux destinés à la dissection ; elle
est très-facile à exécuter, et elle paraît susceptible d'être utilisée industriel-
lement : un bœuf tout entier pourrait être salé de la sorte en quelques
minutes.
» M. Milne Edwards rappelle aussi que les propriétés nutritives de la
gélatine des os ont été prouvées de la manière la plus évidente par les
expériences physiologiques faites, il y a environ quarante ans, par son frère
William Edwards et par M. Balzac, de Versailles. Un animai nourri avec
du pain et de l'eau seulement diminue de poids rapidement; nourri avec
du pain et de la gélatine, il résiste beaucoup mieux et peut même augmen-
ter de poids; enfin, nourri avec celte dernière ration additionnée d'une
quantité très-minime de bouillon sapide et aromatisé, il engraisse le plus
ordinairement. M. Milne Edwards partage donc complètement l'opinion
de M. Dumas, au sujet de l'importance du rôle alimentaire des os dépouillés
des sels calcaires par l'action de l'acide chlorhydrique, et, pour plus de dé-
tails sur cette question, il renvoie au huitième volume de ses Leçons sur ta
Physioiocjie et l' Anatomie comparée de l'homme et des animaux, p. 20.4. »
M. Dfxaisne demande la parole et s'exprime comme il suit :
« Puisque l'Académie se préoccupe de la question d'alimentation et
de l'usage de viandes salées, je crois qu'il serait utile de recommander
la culture de plantes culinaires rustiques et d'une végétation rapide.
» Il ne s'agirait pas, en ce moment, de vouloir obtenir de gros légumes;
on viserait seulement à la production de feuilles destinées à combattre
le danger qui pourrait résulter de l'usage prolongé de viandes salées. Pour
obtenir cette verdure, il conviendra de semer les graines assez drues et
de ne pas repiquer le jeune plant. Ces plantes alimentaires se parta-
gent naturellement en plusieurs groupes : les unes, telles que les Mâches,
serviraient uniquement de salades; les autres, comme les Laitues et les
65..
( 488 )
Romaines de toutes sortes, les Chicorées, Endives, Escaroles, pourraient se
manger crues ou cuites. Enfin, \es Épinards, le Pourpier, les jeunes feuilles
de tous les Choux, en y comprenant même celles de Colza et de la Mou-
tarde blanche, ainsi que des Navets, se mangeraient cuites. Les jeunes
feuilles des Navets sont d'iui usage général dans le nord de l'Europe, ainsi
que celles de plusieurs Amarantes en Chine. En même temps qu'on culti-
verait ces diverses plantes pour en obtenir de la verdure, je crois qu'il
serait utile d'en recommander d'autres comme condiments; je citerai le Cres-
son alénois, le Persil, le Cerfeuil et surtout les Madis, qui entraient, il y a peu
d'années encore, associés au pain, dans l'alimentation. Plusieurs de ces es-
pèces pourraient se cultiver sur couches eu employant la niasse énorme de
fumier que produisent actuellement les animaux domestiques introduits
dans Paris. »
M. Payen ajoute ce qui suit à la Communication de M. Milne Edwards :
« M. Martin de Lignac a fondé sur l'injection une méthode perfec-
tionnée de salaison des viandes.
» Plusieurs des membres du jury ont pu voir, comme moi-même, à l'oc-
casion du concours international de 1867, '"^^ préparations effectuées en
grand dans l'usine de cet ingénieux agriculteur-manufacturier, sise boule-
vard de Charonne.
» Un réservoir, établi à l'étage au-dessus de l'atelier de préparation,
contenait la saumure formée d'une solution de sel marin et d'un peu d'azo-
tate dépotasse; plusieurs tubes flexibles, munis de robinets, amenaient,
à la volonté des ouvriers saleurs, cette solution vers autant de sondes à
injection; celles-ci, introduites dans les pièces à préparer, préalablement
pesées, injectaient, sons la pression de a^ySo environ, la solution saline.
Aussitôt la quantité utile, proportionnée au poids de chaque pièce, intro-
duite, la balance sur le plateau de laquelle on l'avait posée trébuchait; le
robinet étant aussitôt fermé, le dosage exact se trouvait obtenu.
» Pour compléter la salaison des parties superficielles, on pratiquait une
immersion dans la saumure.
» Le fimiage était, dans cette usine, opéré méthodiquement, dans une
vaste étuve avec des quantités de bois pesées, et à des températures déter-
minées à l'aide de plusieurs thermomètres convenablement espacés.
» Plusieurs des jurés français et étrangers ont constaté la qualité
remarquable des produits préparés ainsi, notamment des langues et des
jambons.
( 489 )
» Le Rapport de !a section spéciale déclarait que rinnovation appor-
tée dans le procédé de salaison était l'un des principaux motifs qui avaient
fait décerner une médaille d'or à M. Martin de Lignac, inventeur de plu-
sieurs autres procédés remarquables, en particulier des conserves de lait
concentré adoptées par la marine et d'un bouillon concentré destiné aux
expéditions lointaines. »
M. Chf.vrecl, en approuvant les observations faites par M. Decaisne,
relativement à la culture des plantes légumineuses qui se développent ra-
pidement, présente les remarques suivantes :
M II s'en faut beaucoup que les légumes dont on consomme les feuilles
et les péricarpes charnus aient des pouvoirs nutritifs égaux, et, quand il
s'agit de l'alimentation de l'homme, ces légumes ne doivent être considérés
que comme un accessoire à un régime fortifiant. Il en est autrement des
graines que M. Chevreul a comparées (en 1837) aux œufs des animaux,
relativement à leur richesse en principes immédiats les plus nutritifs, et
rappelons que des feuilles et des péricarpes renferment généralement en
moyenne -^ de leur poids d'eau, proportion considérable relativement à
l'eau des graines.
» La laitue est fort peu nourrissante, et d'anciens agriculteurs (Sagrit)
ne lui attribuaient la propriété alimentaire qu'après la cuisson. L'épinard
l'est un peu plus. Mais M. Chevreul pense, comme M. Decaisne, qu'à
la suite d'aliments salés, l'addition des légumes et de la laitue même est
favorable à la santé, précisément parce qu'ils renferment des acides, des
matières colorées, etc., dont les viandes salées sont dépourvues.
» Quant aux choux verts, ils sont très-nourrisants, et 100 parties de
feuilles se réduisent, par la dessiccation, généralement de i3 à i4 parties
sèches; ils dépassent donc la moyenne, en partie sèche, des légumes et des
péricarpes charnus; ils contiennent, en outre, des principes immédiats très-
variés et propres à la nutrition. Ainsi :
» Ils renferment plusieurs principes azotés, dont l'un coagulable par la
chaleur, comme l'albumine, est analogue à l'albumine elle-même, mais non
identique, selon M. Chevreul ; les autres restent en dissolution après la
coagulation ;
» Ils renferment du sucre, une matière gommeuse, des matières colorées
toutes assimilables, des acides, etc.;
» Ils renferment au moins deux principes odorants organiques, un prin-
cipe sulfuré et un principe doué de l'odeur de la matière complexe que
( 490 ^
M. Thenard a appelée osmazome. M. Chevreul reviendra dans un moment
sur celte dernière matière.
» Les choux contiennent une quantité notable de phosphates de chaux,
de magnésie, de fer et de manganèse. Fait remarquable, le phosphate de
chaux d'une partie du suc n'est point précipité par l'ammoniaque, tandis
que le phosphate de magnésie l'est à l'état de sel double.
» Les choux renferment beaucoup de sels, du citrate et du sulfate de
chaux, et souvent une quantité notable d'azotate de potasse.
» Les choux verts sont éminemment propres à l'alimentation des ani-
maux, et, comme Angevin, M. Chevreul sait le rôle qu'ils jouent, dans l'éle-
vage des animaux domestiques de l'ouest de la France, ou associés au
lard, surtout dans l'alimentation des habitants des campagnes.
» Quant à la conservation des viandes, quant aux salaisons, M. Che-
vreul fait l'observation qu'on doit éviter, autant que possible, de laver à
grande eau la matière qu'on veut conserver, par la raison que les principes
spéciaux qui donnent aux viandes cuites des arômes divers préexistent, à
l'état latent, dans une matière que ce liquide dissont.
» En triturant de la chair de boeuf, de la chair de perdrix, par exemple,
avec de l'eau froide, dans un mortier de verre ou de porcelaine, en faisant
concentrer dans le vide sec l'eau de lavage, on obtient une liqueur concen-
trée, qui se coagule par la chaleur en exhalant, l'eau de la chair du boeuf,
l'odeur du bouillon ; l'eau de la chair de la perdrix, l'odeur qui se déve-
loppe lorsqu'on fait cuire cet oiseau.
» Ces arômes spéciaux caractérisent plusieurs viandes. C'est dans l'eau
qui renferme les arômes à l'état latent que M. Chevreul a découvert la créa-
tine, qui a été l'objet d'un travail approfondi de la part de M. Liebig. »
La séance est levée à 5 heures. D.
( 491 )
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
L'Académie a reçu, dans la séance du lo octobre 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
De r interprétation des imaginaires en i>li/sique maihématique; par M. A.-
E.-B. DE Chancourtois. Paris, sans date, br. in-4°. (Deux exemplaires.)
Verhandelingeii. . . . Mémoires de la Société batavienne des Arts et des
Sciences; t. XXXIII. Batavia, 1868, in- 4°.
Tijdschrift. . . . Journal pour l'histoire, la géographie, l'ethnologie indiennes,
publié par la Société batavienne des Arts et des Sciences sous la direction
de M. W. STORTENBr.KER ; t. XVI, liv. 2 a 6 ; t. XVII, liv. i à 6, t. XVIII,
liv. !. Batavia, 1866 à 1869, 10 liv. in-8°.
Katalogus. . . . Catalogne de la collection ethnologique du Muséum de la
Société batavienne des Arts et des Sciences. Batavia, 1 868, in-8°.
Katalogus. . . . Catalogue de la collection numismatique du Muséum de In
Société botavienne des Arts et des Sciences. Batavia, 1869, in -8°.
Notulen.... Extraits des Procès -verbaux des assemblées générales et des
séances du Conseil de la Société batavienne des Arts et des Sciences; liv. 4^7-
Batavia, 1867 à 1869, 4 bv. in-8°.
Astronomische. . . . Observations astronomiques faites à l'Observatoire de
Bonn; t. VII, 2* partie. Bonn, 1869, in-4°.
Abbandlangen. . . . Mémoires de la Société royale des Sciences de Goltingue^
1869, in-4^
Acla universitatis Limdensis, 1867. — Mathématique et histoire naturelle.
Lund, 1867-1868, in-4°, avec planches.
Acta universitatis Lundensis, 1867. — Philosophie, philologie et histoire.
Lund, 1 867-1 868, in-4°.
ERRATA.
(Séance du 3 octobre 1870.)
Page 461 , première colonne, ligne i, an lieu de S't, lisez è'\.
» » ligne 7, ou lieu de Hrrivo, lisez 'i<mv ■ c
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI 17 OCTOBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. LE Président de l'Ixstitct prie l'Académie de vouloir bien désigner
l'un de ses Membres pour la représenter, comme lecteur, dans la prochaine
séance générale de l'Institut, remise au mercredi 26 octobre prochain.
Philosophie de la Science. — De la différence et de L'analogie de la méthode
à posteriori expérimentale^ dans ses applications aux sciences du concret et
aux sciences morales et politiques; par M. E. Chevrecl (i).
« N'ayant point imaginé l'expression de sciences morales et politiques, je
suis désintéressé à la défendre; mais, consacrée par la dénomination d'une
des cinq Académies de l'Institut de France, je l'admets comme fait.
n Si cette expression a une signification réelle, l'histoire, titre de la
y section de cette Académie, doit avoir le caractère scientifique ; dès lors se
pose la question : En quoi consiste ce caractère?
» Il se trouve dans un système de propositions générales admises comme
principes à l'aide desquels le raisonnement démontre la vérité de conclu-
(i) L'Académie a décidé que cette Communication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Compte tendu.
C. R., 1870, î« Semestre. (T. LXXI, N» 16.) 66
(494)
sions auxquelles ont conduit la simple observation toujours, et l'expé-
rience quand elle a été possible.
» Dans les sciences morales et politiques, ces principes formulés par des
philosophes, par des législateurs, en un mot par ceux qui, doués du sens
moral, exercent une heureuse influence sur la société humaine, ont été
reçus par tous les membres de cette Société, doués pareillement de ce même
sens, avec une profonde reconnaissance, convaincus qu'ils sont de leur
nécessité pour le bonheur des hommes.
» C'est aux savants livrés à l'étude des sciences morales et poliliijues qu'il
appartient d'appliquer les principes de la morale et du droit aux jugements
portés sur des actes du ressort des sciences dont ils s'occupent; mais avant
d'aller plus loin, je ferai remarquer que V étude des faits tiioraux concernant
l'individu, complément de l'étude de l'anatomiste, du physiologiste, du na-
turaliste et du médecin, appartient réellement au domaine des sciences du
concret, quoique faite par un homme qui, eu égard à ces sciences, peut
n'être ni anatomiste, ni physiologiste, ni naturaliste, ni médecin, mais il
étudie V homme-individu sous des rapports que les autres savants ne consi-
dèrent pas en général comme essentiels à leurs études familières rentrant
incontestablement dans le domaine du concret.
» S'il est vrai que le savant livré à l'étude des sciences morales et poli-
tiques se livre à celle des faits moraux et intellectuels que présente Thomme-
individu, \e substantif propre, le CONCRET, incontestablement son étude
essentielle, porte sur les faits moraux et sociaux que présentent des ensem-
bles d'hommes vivant en société, des substantifs appellatifs, parce que tel est,
en effet, l'objet des sciences morales et politiques.
» Ai-je besoin de rappeler que par substantif propre on entend un être
physique palpable ou concret comme un minéral, une plante, un animal,
et encore un être métaphysique impalpable, tel que l'àme, Dieu, etc. ;
» Et que le substantif appellatif comprend des ensembles de substantifs
propres comme l'expriment les mots races, espèces, genres, familles, ordres,
classes, embranchements, règne, d'usage en histoire naturelle.
» Pourquoi l'étude des faits moraux et intellectuels occupe-t-elle géné-
ralement le savant qui appartient au domaine des sciences morales et poli-
tiques, plutôt que le savant qui appartient au domaine des sciences du con-
cret?
» La cause première en est la faiblesse de l'esprit humain, et de cette
faiblesse même découle la nécessité de la division du travail intellectuel
lorsqu'il s'agit de connaître le monde où nous vivons.
(495 )
» On conçoit dès lors que le savant livré à l'étude des sciences morales
et politiques est bien mieux préparé à l'étude des faits moraux et intellec-
tuels de l'individu, que le savant livré à l'étude des sciences et si nom-
breuses et-si diverses du concret, telles que la chimie-physique, l'anatomie,
la physiologie, la zoologie et la médecine. La disposition des esprits à s'oc-
cuper exclusivement, les uns des sciences du concret^ et les autres des sciences
morales et politiques , a l;i plus fâcheuse influence sur la connaissance du vrai,
ou, en d'autres termes, sur la philosophie, et c'est fort de cette opinion que
je n'ai jamais perdu l'occasion démontrer les liens d'union des sciences de
ces deux catégories.
n En définitive, on peut dire avec vérité que, dans les sciences morales
et politiques, les savants vont du général au particulier, du substantif ap-
pellntifaii substantif propre, tandis que, dans les sciences du concret, les sa-
vants ont suivi l'ordre inverse, du particulier ils vont au général, du sub-
stantif propre au substantif appellatif.
» Les choses amenées à cet état, rendons- nous compte de la différence
de l'application de la //ie7/(0f/e a posteriori expérimentale, d'abord à la science
du concret, puis aux sciences morales et politiques, et montrons en même temps
que cette différence n'est point extrême.
§ I. — application de la méthode aux sciences du concret.
» Les mathématiques pures s'occupent d'une seule propriété de la ma-
tière, la grandeur, science admirable parce que la démonstration de ses
propositions repose, sur les raisonnements les plus rigoureux; et les autres
sciences du domaine de la philosophie naturelle partent de l'observation
des phénomènes que présentent des êtres concrets afin d'en déterminer la
cause immédiate : telles sont actuellement la chimie et la physique, par
exemple.
» C'est surtout en suivant la marche de l'esprit dans les recherches du
ressort de la chimie, science essentiellement expérimentale que je suis
arrivé à formuler, il y a plus de trente ans, lamélhode a posteriori expéri-
mentale.
» La chimie, aussi bien que la physique, observe des phénomènes que
des êtres concrets présentent; elle en cherche la cause immédiate, et c'est
la conclusion, à laquelle l'induction l'a conduite, que la méthode a posteriori
expérimentale a pour but de contrôler, en instituant des expériences propres
à en démontrer l'exactitude.
» A mou sens, cette méthode doit s'appliquer à toutes les sciences du
66..
(496)
ressort du concret autres que la chimie el la physique. Dès à présent, la géo-
logie et la physiologie y ont recours, et les avantages en sont connus de
tous ; sans doute elle s'appliquera tôt ou tard à la botanique et à la zoologie,
qu'il y a un demi-siècle on qualifiait de 5ne»ires purement descriptives.
» Quant aux sciences agricoles et médicales, qui ne sont en réalité que
des applications des sciences naturelles pures, personne aujourd'hui ne
doute qu'elles se prêtent essentiellement au contrôle de la méthode a poste-
riori expérimentale^ contrôle auquel elles doivent incontestablement leurs
progrès récents.
» En définitive, j'ai la conviction que toute recherche scientifique qui
aboutit complètement au concret se prête par là même au contrôle expéri-
mental. Dans le cas où elle y échapperait, l'esprit pourrait recourir à un
système de raisonnements rigoureux et comparables aux raisonnements
d'usage en mathématiques.
§ II. — Application de ta méthode aux sciences morales et politiques.
» Les sciences morales et politiques diffèrent essentiellement des sciences
du concret en ce qu'il leur est impossible de vérifier, psLV V expérience pro-
prement dite, une opinion relative à des acleSj à des faits sociaux concernant
un ensemble d'individus, comme il est possible au savant livré à Vétude du
concret de contrôler des inductions, des théories par des expériences pré-
cises.
» La raison en est simple. Un fait social étant la résultante d'actes d'in-
dividus qui ne sont plus, ou, s'ils vivent encore, la circonstance où le fait
s'est produit différant des circonstances piésentes à cause des changements
incessants de toute société, l'impossibilité de reproduire à volonté les cir-
constances du passé rend impossible le contrôle expérimental dans le pré-
sent, en supposant même qu'il eût été possible antérieurement.
» Il y a donc là, dans l'application de la méthode, une différence réelle
et incontestable.
)) Dans ces conditions, de quelle utilité est la méthode à posteriori ex-
périmentale à l'égard des sciences morales el politiques? pourra-t-on se de-
mander.
)) La voici :
» C'est d'abord de persuader à tout esprit curieux de remonter à la cause
immédiate d'un phénomène, d'un effet, d'un fait accompli, qu'il y a nécessité
de rechercher si ce fait est complexe, et, dans le cas de l'affirmative, de s'ef-
forcer à le réduire aux faits simples dont il est la résultante. A cet égard,
(497)
analogie parfaite entre cette étude et la manière dont l'esprit du chimiste
procède dans l'application de l'analyse à la matière complexe. Une fois
qu'on se croit arrivé à la réduction du fait en ses faits simples, on recourt
à la synthèse, afin de voir si tous les faits simples concourent réellement à
la manifestation du phénomène, de V effet, du fait complexe, et s'ils suffisent
à en expliquer toutes les circonstances; et c'est cette analyse au fait com-
plexe du domaine des sciences morales et politiques qui permet, surtout
dans les faits simples en lesquels l'esprit l'a réduit, d'appliquer la méthode
du contrôle en se livrant à l'étude comparative de faits simples analogues.
» En définitive, la marche à suivre dans les recherches du ressort des
sciences morales et politiques étant celle que prescrit la méthode dans les re-
cherches du ressort des sciences du concret, quand il s'agit des cas où l'expé-
rience n'est pas possible, nous sommes ainsi conduits à imprimer le carac-
tère scientifique résidant essentiellement, comme je l'ai dit, dans la démons-
tration qui s'adresse à la raison, parce que les raisonnements sont déduits
d'axiomes ou de principes admis avant tout comme vrais. Parla, j'éloigne
\es paradoxes aussi séduisants que dangereux quand ils émanent d'un écri-
vain tel que Jean-Jacques Rousseau.
» Il y a évidemment tout avantage à la fois pour un auteur ami de la
vérité, et pour un lecteur désireux de s'instruire, qu'avant tout, des prin-
cipes soient posés et admis comme vrais, et qu'ensuite les raisonnements
appuyés sur ces principes soient exposés.
» Si les principes ne sont pas admis du lecteur, il lui est inutile de lire
des raisonnements qui s'appuient sur ces principes.
» Au contraire, les principes admis, et les raisonnements donnés par
l'auteur à l'appui des opinions qu'il désire faire prévaloir dans le public
en étant rigoureusement déduits, le but de l'écrivain sera atteint.
)) Que l'on examine les connaissances comprises dans les diverses sec-
tions de l'Académie des sciences morales et politiques de l'Institut, et l'on
pensera sans doute que la section de V histoire générale et particulière est
celle qui semble s'éloigner le plus des sciences. Quand les autres sections,
comme celle de morale et de législation, sembleraient aussi s'en éloigner,
n'oublions pas que le dogmatisme qu'elle possèdent à un haut degré leur
donne un caractère de certitude, de positif qui, en y réfléchissant, les rap-
proche de la science plutôt qu'il ne les en sépare. Quant à V économie poli-
tique et à la statistique, par la nature variée des faits qu'elles coordonnent,
elles n'ont évidemment qu'à gagner à se rapprocher des sciences du con-
cret, afin d'établir par le raisonnement les conclusions qu'elles formulent.
( 498 )
La statistique, particulièrement, ne peut persuader ni convaincre ceux qui la
consultent qu'en justifiant préalablement l'exactitude des chiffres sur les-
quels elle a travaillé, en disant comment elle les a recueillis, les raisons
de croire à leur exactitude, en insistant sur le contrôle d'une série de chif-
fres par des chiffres d'autres séries; incontestablement, les contrôles de chif-
fres sont tout à fait dans l'esprit de la méthode a posteriori expérimentale,
comme l'est si évidemment le contrôle des quatre premières règles de
l'aiilhiuéfiqne qu'on en appelle les preuves.
» Je reviens à V histoire, et je me trompe fort si je ne fais pas partager
mes convictions sur le caractère scientifique qu'elle possède à un haut degré,
si l'on veut bien suivre mes raisonnements.
» Qu'est-ce que l'histoire comme science?
». A mon point de vue, elle est essentiellement l'exposé fidèle des faits
sociaux que |)résentent, dans l'ordre des temps, les sociétés humaines.
» i" Il appartient à la critique historique d'établir l'exactitude, la vé-
rité des faits que l'historien met en œuvre, en ayant toujours égard à la
chronologie, sans laquelle il n'y a pas d'histoire.
» 2" A la science de l'historien, à sa perspicacité, à son génie, il appar-
tient pour une époque donnée de dire quels sont les faits simples dont se
compose chaque fait complexe siu- lequel il arrête son attention et quelle
part revient aux personnages historiques de cette époque.
» Au moraliste, à l'homme de loi, au philosophe, il appartient de juger
les institutions sociales ainsi que les actions des personnages historiques qui
ont parlicipéà des faits sociaux.
» C'est dans cette appréciation, et des institutions sociales, et des houunes
dont l'histoire a conservé les noms, faite avec savoir et impartialité, re-
posant sur des raisonnements rigoureux, exposée avec clarté et éléganc»?,
que réside le mérite de l'historien. Il sera coinpté j^armi les hommes de
génie s'ij découvre de ces faits considérables qui n'avaient point été aperçus
de ses prédéce:-.seurs, et ces faits considérables peuvent être des relations,
des rtipj)otls que des faits déjà coinuis ont entre eux, mais qui étaient restés
inaptMçiis jusqu'au moment où l'homrne de génie tira le voile cpii les avait
cachés.
» Qu'est-ce que Vhistoirc envisagée de ce point de vu(!?
» C'est une véritable histoire naturelle de l'hounne en société;
» C'est l'histoire de la civilisation.
» A quelles conditions une œuvre historique a-t-elle le caractère scien-
tifique?
( 499)
» C'est que l'historien aura préalablement énoncé ses principes d'appré-
ciation en ternies précis quant aux mots, et de la manière la plus sensée et
la plus irréprochable quant à la raison, à la morale et à la justice;
» C'est ensuite que les faits sociaux, qu'il a appréciés d'après ces pi-in-
cipes, soient nettement définis et aient satisfait à toutes les exigences d'une
critique sévère autant qu'éclairée ;
» C'est que l'appréciation de ces faits, au point de vue de leur liaison
avec les faits antérieurs et avec les faits ultérieurs, soit aussi satisfaisante
que possible;
» Qu'il en soit de même de l'appréciation des faits, au point de vue du
droit et de la morale;
» Enfin, que V appréciation, qui ici correspond à la théorie dans les
sciences du concret, soit l'application rigoureuse des axiomes et des prin-
cipes posés en premiei- lieu.
» Quelle est la conséquence rigoureuse, incontestable de la qualification
de science donnée à Vhistoii^e?
)) C'est qu'une oeuvre historique, qui méritera la qualification de scien-
tifique, correspondra à l'œuvre scientifique des sciences du concret.
» Dès lors, pour que l'iiistorien ait atteint son but, il aura été logicien
avant tout, qualité compatible avec la beauté de la forme littéraire qui fait
le grand écrivain, qualité compatible avec le génie qui met en relief des
rapports aussi approfondis que réels qui avaient échappé ijusque là à l'his-
toire, qualité compatible enfin avec la morale et la justice qui jugent les
actes des individus et des peuples indépendauunent de toute considération
en dehors de la vérité!
» Celte explication me sauvera, je l'espère, de deux reproches con-
traires :
» \jej)reniier, qu'on m'attribuât l'idée d'abaisser l'historien, quand je
le louerai de ses jugements, parce que, d'acord avec la raison, ilssontétran-
gers à sa religion, à ses opinions politiques, à son affection personnelle, à
sa patrie;
» Le second, de vouloir abaisser la gloire de ceux qui ont attaché leurs
noms à des œuvres dignes des suffrages des juges les plus compétents; mais
il me sera permis défaire remarquer qu'il existe un grand nombre d'histoires
auxquelles la qualification de scientifique n'est pas applicable, parce que
évidemment les auteurs ont présenté l'histoire dans un intérêt particulier,
soit pour rehausser la gloire d'un individu ou d'un peuple et abaisser celle
( 5oo )
des autres, soit dans l'intérêt d'une opinion religieuse, soit dans l'intérêt
d'une forme de gouvernement au détriment d'une autre.
» En définitive les œuvres dont je parle peuvent avoir un mérite supé-
rieur, mais la participation du talent de l'avocat me fait dire que le carac-
tère scientifique ne s'y montre pas d'une manière absolue.
» Après ces considérations générales sur les différences et les analogies
de la mélliode a posteriori expérimentale, dans ses applications aux sciences
du concret d'une part, et d'une autre part aux sciences morales et politiques,
me sera-t-il permis de dire à l'Académie le motif qui m'a conduit à traiter
d'une manière détaillée le sujet dont je viens de parler en raccourci?
» Plusieurs de mes amis, après la lecture du livre de la méthode
A POSTERIORI expérimentale et de la généralité de ses applications que j'eus
l'honneur de présenter l'an dernier à l'Académie, m'ont fait l'observation
que la différence de l'application de la méthode aux deux catégories de
sciences dont je viens de parler était si grande, qu'indubitablement je
m'attirerais des critiques fondées, si moi-même je ne les prévenais pas en
signalant celte différence.
» Telle est l'origine de l'ouvrage dont sont extraites les considérations
générales que je viens d'exposer.
» Achevé le 3i août dernier, anniversaire de ma quatre-vingt-quatrième
année, la première page recevait ce jour-là même une dédicace à la mé-
moire de Mirabeau.
» Dans les circonstances actuelles, ignorant le sort de l'unique manu-
scrit que je possède, je me suis décidé à la Communication d'un résumé
concis qui complète un ensemble d'idées dont la publication principale
remonte à mes Lettres à M. Fillemain (i) où se trouve la définition du
mot fait relativement aux sciences, aux lettres et aux beaux-arts; c'est
effectivement à cette définition que se rattache la suite de mes écrits :
r histoire des connaissances chimiques, la distribution des connaissances humaines
du ressort de la philosophie nnlureile, enfin le livre de la méthode A POSTERIORI
expérimentale et le livre inédit dont je viens d'entretenir l' Académie, qui en est
le complément.
» Il me reste à dire qu une partie du livre inédit est l'application de la
méthode A POSTERIORI expérimentale à l'histoire de la révolution française
(i) Lettres adressées à M. Villemain sur la mollioileen général et sur la délinition du mol
ftiit, par M. E. Chevreul. Paris, Garnier frères; iS56.
( 5o. )
depuis 1789 jusqu'à ces derniers temps, ayant voulu donner une preuve de
fait de la possibilité de l'application de mes idées aux sciences morales et
politiques.
)) Qu'on ne m'attribue pas la prétention d'avoir voulu écrire nue œuvre
historique : ma tâche s'est bornée à choisir un ensemble de faits, que je
crois précis et vrais, pour les interpréter par la jutre logique, conformément
à la méthode à laquelle toutes mes recherches scientifiques ont été sub-
ordonnées; aussi dis-je explicitement :
« En m'adressant au public, il est donc entendu que je ne lui parle ni
» comme catholique ou protestant, ni comme monarchiste ou républicain,
» ni même comme Français; je le répète, je ne lui parle que comme logicien
» qui envisage les faits sociaux conformément à cette méthode ».
Péroraison.
n En terminant ma lecture par ces lignes empruntées à une œuvre qui
n'est pas encore imprimée, c'est dire qu'elles furent écrites avant les événe-
ments qui frappent si cruellement la France.
» Le souvenir du calme profond où j'étais alors, la pensée du bien que
l'humanité avait déjà retiré de la culture de l'esprit me peignaient l'avenir
sous les couleurs les plus riantes, et tout ce qui resserre les liens des trois
branches du génie de l'homme, les Sciences, les Lettres et les Beaux-Arts,
me semblait devoir de plus en plus rapprocher les peuples et les unir par
les sentiments si doux de la fraternité. Quelques mois se sont écoulés : et
quel changement !
» Ici même, dans le palais de l'Institut, cette grande association des
connaissances humaines, que voyons-nous ? les fenêtres de la bibliothèque
garnies des acs de terre! Les objets uniques ont disparu, la prévoyance les
a mis dans des souterrains à l'abri de la bombe; malheureusement tous les
livres peuvent disparaître comme les manuscrits de Strasbourg ! Même
crainte pour des chefs-d'œuvres uniques de l'art, pour des collections des
produits de la nature; mêmes précautions pour les conserver, prises aux
musées des Beaux-Arts et d'Histoire-naturelle !
» Et nous sommes au xix" siècle; et il y a quelques mois que le
peuple français ne se doutait pas d'une guerre qui a mis sa capitale en état
de siège, qui a tracé autour de ses remparts une zone déserte où celui qui
a semé n'a pas récolté! Et il y a des universités publiques où l'on enseigne
le beau, le vrai et le droit !!!
C. R., 1870, 1= Semeslre. (T. LXXI, N" IC.) 67
( 502 )
» Dans ces jours de désastres où la réalité a dépassé l'imagination,
espérons pour ceux qui nous remplaceront sur cette noble terre de France
que, du sein des peuples civilisés qui ont l'œil sur|Paris, théâtre d'une
grande tragédie, le calme avec lequel ils auront suivi toutes les péri-
péties du drame jusqu'au dénouement, témoignera de l'impartinlité qu'ils
porteront dans le jugement de ces événements au point de vue du droit
et de la morale !
» A|irés avoir pesé toutes les conséquences des faits accomplis, peut-
être adresseront-ils un appel aux honuiies de tous les pays qui joignent
à la chaleur du cœur l'énergie d'une conscience éclairée, afin d'aviser
au moyen de mettre désormais im terme à des faits déplorables qui n'ont
rien d'analogue dans l'histoire des peuples civilisés. Qui sait si la pro-
testation de l'Institut de France, adressée à toutes les Académies du monde
lettré, ne donnera pas quelque jour accès dans un congrès international
à ceux qui ne sont connus que par des œuvres intellectuelles?
» Qui oserait taxer aujourd'hui d'utopie l'espérance de voir naître un
grand bien d'un grand mal ? L'institution internationale en faveur des
blessés, passée si vite du projet à la réalité, à jamais titre d'honneur pour
la ville de Genève, ne confirme-t-elle pas l'espérance du triomphe du droit
sur la force, et dés à présent ne dit-elle pas à tous : Ln grandeur momie d'un
peuple ne se mesure pas à retendue superficielle qu'il occujic sur la terre! »
MÉCANIQUK Al'PLiQUtlE. — Projet d'aéroslal dirigé, iiuiiii d'un jiyojiuheur ;
par M. DupuY deLomr (i).
« La recherche des moyens de diriger les aérostats, en leui- imprimant,
par une force motrice qui leur soit propre, une vitesse horizontale par
rapport à l'air extérieur qui les soutient et les entraine avec lui, a déjà
donné lieu à bien des projets. Malheureusement aucun d'eux n'a encore
été réalisé, ni même amené à un point d'étude tel fju'on [)uisse le coTisi-
dérer comme fondé sm* des calculs suffisamment approchés (le la vérité, ni
sur des dispositions praticables sans trop de difficidtés. Telle est du moins
l'impression qui m'est restée des projets qui sont parvenus à ma comiais-
sance.
» Il eu est de même povu' la locomotion aérienne au moyen d'appareils
( I ) L'Académie a décidé que cette Communication, bien que dépassant en étendue les
limites régicmenlaires, serait insérée en entier au Compte rendu.
( 5o3 )
plus lourds que l'air, où ils se maintiendraient et se mouvraient comme
l'oiseau au moyen d'organes présentant des surfaces résistantes mises en
mouvement par un moteur, et trouvant aussi leur appui sur Tair par le fait
même de leur vitesse de translation.
» Il n'entre point dans mes vues d'entretenir l'Académie en ce moment
de ce problème si ardu, mais si intéressant, d'une machine volante.
M II s'agit d'un projet plus modeste, celui d'un aérostat auquel on pour-
rait imprimei- une vitesse d'environ 8 kilomètres par rapport à l'air
ambiant.
» Pressé par le désir d'arriver dans les circonstances présentes à ime
application aussi prochaine que possible, en évitant trop d'expériences pré-
liminaires, je me suis attaché dans ce travail à n'adopter pour tous les
détails que des solutions simples reposant sur l'application de procédés déjà
connus, de façon que l'ensemble de l'appareil ne soit que la résultante de
combinaisons déjà pratiquées avec succès par les aéronautes.
» En me bornant ainsi à une vitesse très-modérée, ce n'est jias que je
ne considère comme possible, dans l'état actuel de la science, d'obtenir
pour des aérostats des vitesses très-supérieures; mais en présence des
difficultés (le pratique grandissant avec les vitesses qu'on se propose, je me
suis décidé à n'aborder pour le moment que le problème relativement
simj)!e d'un aérostat se mouvant avec une vitesse d'environ 8 kilomètres
à l'heure et susceptible de soutenir cette vitesse au moins pendant une
journée entière.
» Un appared de ce genre ne permettra d'avancer, vent debout, par ra[)-
port à la surface de la terre, ou de suivre par rapport à cette surface toutes
les directions désirées, que quand le vent n'aura qu'une vitesse au-dessous
de 8 kilomètres. Cela ne sera sans doute pas très-fréquent, car cette vitesse
n'est que celle d'un vent qualifié brise légère.
» Quoi qu'il en soit, cet aérostat ayant une vitesse propre de 8 kilo-
ujétres à l'heure, lorsqu'il sera emporté par un vent plus rapide, aura la
faculté de suivre à volonté toute route comprise dans tui angle résultant
de la composante des deux vitesses.
» Par exemple, avec un vent ayant une vitesse de 4 mètres par seconde,
soit de i4tî7 kilomètres à l'heure, correspondant à la qualification de brise
fraîche, l'aérostat projeté suivra à volonté toute route comprise dans im
angle de 33 degrés de chaque côté de la direction du vent; ce qui lui don-
nera la latitude de se mouvoir dans un secteur de 66 degrés. Si la vitesse
du vent est de 8 mètres par seconde, soit de 28^ kilomètres à l'heure, cor-
67..
( 5o4 )
respondant à la qualification âe forte brise, cet aérostat aura la faculté de
se mouvoir dans un angle de i6 degrés de chaque côté du lit du vent, ce
qui laissera encore à sa disposition un secteur de Sa degrés.
» Chacun peut se rendre compte d'ailleurs que, d'une manière générale,
la direction à donner à l'aérostat par rapport à celle du vent, pour obtenir
comme résultante des deux vitesses et des deux directions le inaxiviuni
d'écart possible, fait avec la direction du vent un angle un peu plus ouvert
que l'angle droit. L'angle aigu complémentaire est égal à l'angle inférieur
d'un triangle rectangle qui a pour base la vitesse propre à l'aérostat et pour
hypoténuse la vitesse du vent. L'angle aigu du sommet du même triangle
est égal à l'angle d'écart maximum possible avec les vitesses que l'on consi-
dère.
» Les plans, que je me propose de présenter à l'Académie à une pro-
chaine séance (i) montreront les solutions que j'ai adoptées, tant pour les
principaux détails que pour l'ensemble d'un aérostat réalisant le problème
tel que je viens de le poser; mais j'ai cru intéressant de lui soumettre dès
aujourd'hui la forme et les dispositions principales de cet aérostat, l'éva-
luation de la puissance motrice nécessaire pour assurer la vitesse indiquée
de 8 kilomètres à l'heure, enfin la nature du moteur que j'ai choisi, parmi
les divers procédés applicables, comme les plus simples et les plus sûrs pour
porter et employer cette puissance motrice en la soutenant au besoin
pendant une dizaine d'heures.
» Je dirai tout d'abord que je n'ai pas cru devoir recourir, pour le gon-
flement du ballon, à l'emploi de l'hydrogène pur, malgré la réduction de
volume et par suite l'augmentation de vitesse qui en fussent résultées. La
difficulté de confectionner des tissus et des vernis capables de contenir assez
longtemps l'hydrogène pur, en s'opposant à l'action de l'endosmose et de
l'exosmose, me paraît justifier ce choix. Le problème de la confection de
pareilles enveloppes sera probablement résolu un jour; quelques personnes
croient même posséder déjà la solution ; mais, pour le moment, il m'a paru
qu'il serait imprudent de recourir à des procédés autres que ceux qui ont
le mieux réussi aux aéronautes.
» Je m'en suis donc tenu à l'emploi du gaz hydrogène carboné tel qu'il
se fabrique pour l'éclairage. Il permet de compter sur une force ascension-
nelle de '^35 grammes par mètre cube sous luie pression atmosphérique de
(i) Cette première partie de la Communication a été faite ù l'Académie dans la séance du
lo octoi)re 1870.
( 5o5 )
76 centimètres de mercure, et à la température ordinaire. Si l'on avait
affaire à quelque usine fabriquant habituellement son gaz d'éclairage à une
densité supérieure, il serait facile d'y obtenir le gaz à la densité que j'ai fait
entrer dans mes calculs en le produisant, pour cet usage spécial, sous l'in-
fluence d'une plus haute température. Au besoin on y mêlerait un peu de
gaz hydrogène pur.
» La nécessité de maintenir la direction de l'aérostat sensiblement en
ligne droite, et de faire qu'elle ne se modifie qu'à la volonté de l'aéronaute
agissant sur le gouvernail, exige que l'ensemble de l'appareil présente,
d'une façon très-caractérisée, un axe horizontal de moindre résistance,
ainsi qu'une surface de résistance latérale placée à l'arrière du centre de
gravité. Ce n'est donc pas seulement pour la convenance de réduire la rési-
stance de l'aérostat à la marche horizontale qu'il faut renoncer à la forme
du ballon ordinaire, dont la surface est engendrée par la révolution d'un
méridien autour d'un axe vertical. Un pareil aérostat, muni d'un moteur,
serait sans cesse, pour sa direction, dans un état d'équilibre instable,
exposé à tournoyer sur lui-même en faisant ce qu'on appelle en marine des
embardées intolérables.
)) J'ai donc adopté une forme oblongue suffisamment caractérisée, mal-
gré les difficultés qui en résultent pour le maintien de cette forme sous
l'action du vent provenant de la vitesse, ainsi que sous la traction des sus-
pentes de l'édifice qui doit porter les voyageurs, les colis, le moteur, le
lest, etc. Cette forme oblongue nécessite encore des dispositions particu-
lières pour éviter, sous l'influence d'un dégonflement partiel, des dénivel-
lements trop sensibles de l'axe qui doit rester horizontal. Tout considéré,
j'ai adopté pour la forme du ballon celle d'une surface de révolution en-
gendrée par une courbe spéciale se rapprochant d'un arc de cercle de
7 mètres de flèche, et tournant autour de sa corde de 42 mètres de lon-
gueur. Cette corde constitue l'axe horizontal du ballon, dont la longueur
est réduite à 4o mètres, en substituant, pour la solidité de la construction,
une petite surface sphérique à la pointe des extrémités.
» Le volume est ainsi de 386o mètres cubes, et la maîtresse section ver-
ticale de i54 mètres carrés.
» La résistance à la déformation sous l'action du vent provenant de la
vitesse propre à l'aérostat s'obtient par le maintien dans son intérieur
d'une tension du gaz sans cesse un peu supérieure à celle de l'air ambiant.
Cet excédant de tension sera maintenu entre 3 et 4 dix-millièmes d'atmo-
sphère, ce qui fait de 3 à 4 kilogrammes par mètre carré de la surface de
( 5o6 )
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( 5o7 )
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( 5o8 )
l'enveloppe. Cette pression existera à la partie basse du ballon et s'ajoutera,
dans la partie supérieure, à celle résultant de la force d'ascension des gaz
intérieurs.
» Pour s'opposer à la déformation sous la traction des suspentes (indé-
pendamment de l'effet de la pression intérieure des gaz), la nacelle est d'une
forme allongée et d'une construction rigide. Elle présente en outre, à son
avant ainsi qu'à son arrière, deux appendices également rigides faisant
fonction de brancards de nacelle. Les suspentes en corde de soie descen-
dent du filet deux par deux dans des plans perpendiculaires à l'axe longi-
tudinal du ballon, et sont fixées tant sur la nacelle que sur les brancards.
Ces suspentes sont croisées par quelques étais obliques destinés à s'opposer
seulement à un mouvement de balan de l'avant à l'arrière.
» Une autre disposition également praticable, et qui a sur la précédente
des avantages et des inconvénients, consisterait dans l'emploi d'un cadre
rigide oblong placé horizontalement entre le ballon et la nacelle. Ce cadre
recevrait du ballon des suspentes comprises deux par deux dans des plans
perpendiculaires à l'axe longitudinal; puis, des suspentes obliques, partant
du cadre, porteraient en dessous la nacelle réduite à la longueur voulue
pour la commodité du service.
» Pour maintenir le ballon sans cesse gonflé dans les conditions indi-
quées ci-dessus, en présence des déperditions de gaz sur lesquelles il faut
compter, ou lorsque l'aéronaule en fera échapper volontairement pour
opérer une descente partielle ou totale, il sera introduit de l'air atmosphé-
rique dans un petit ballon logé à cet effet dans l'intérieur du grand et
remplissant ainsi une fonction ayant quelque analogie avec la vessie nata-
toire des poissons. Si, le petit ballon étant rempli, le dégonflement du
giand ballon continuait, il serait alors introduit lui supplément d'air atmo-
sphérique directement dans les gaz du grand ballon. »
» Il est évident que si l'on ne considérait que la simplicité, on se borne-
rait à ce dernier procédé. On éviterait ainsi le poids de l'étoffe nécessaire
à la confection de cette poche. C'est environ 5o kilogrammes qui pourraient
être ajoutés au lest; mais la poche de la dilatation, malgré la réduction
qu'elle occasionne sur le lest, procure la faculté d'opérer un plus grand
nombre de montées et de descentes alternatives. En effet, elle permet de
faire ces montées et ces descentes sans perdre de gaz; d'où il suit que la
presque totalité du lest n'aurait à faire face qu'aux déperditions à travers
l'enveloppe. Je renvoie la démonstration de cette assertion à la fin de cette
Note pour ne pas scinder l'exposé principal, et j'en viens de suite à l'éva-
( 5o9 )
luation du travail nécessaire pour imprimer la vitesse de 8 kilomètres à
l'heure, par rapport à l'air ambiant, à l'aérostat conformé comme je l'ai
dit ci-dessus.
» Par suite de ces données, on a :
Section de la maîtresse partie du ballon porteur i54™''
Section de la maîtresse partie de la nacelle et de la partie du corps des
hommes dépassant la nacelle, environ 4'"''
Filet et suspentes en corde de soie i o""i
» Il importe d'évaluer séparément la résistance qu'opposeront à la
marche à travers l'air ces diverses parties de l'aérostat.
» Si c'étaient des plans minces se présentant perpendiculairement au
courant d'air, il résulte des recherches faites à ce sujet, par divers expéri-
mentateurs, que la pression exercée par ce courant, à la vitesse de 8 kilo-
mètres à l'heure (ou de 2^,222 par seconde), serait de o''s,665 par mètre
carré.
)) Mais on sait que la pression d'un courant d'air, comme d'iui courant
d'eau, diminue dans une très-grande proportion quand ces courants n'ont
qu'à contourner des solides façonnés pour faciliter le mouvement du gaz
ou du liquide autour d'eux.
» L'étude des navires a fourni à cet égard des données nombreuses qui
manquent encore pour l'air. Toutefois, les données relatives au mouvement
des masses aqueuses autour d'un corps plongé dans leur milieu peuvent
fournir un moyen d'estimer au moins des miniina pour le coefficient de ré-
duction entre la résistance des plans minces soumis perpendiculairement à un
courant d'air et celle de corps à maîtresse section égale en surface au plan
mince, mais configurés de manière à faciliter la division de l'air à l'avant
et son replacement à l'arrière.
» Parmi les navires comparables au ballon porteur qui nous occupe, au
point de vue capital des angles d'incidence du courant à l'avant, des rayons
de courbure des sections longitudinales, et enfin des angles d'incidence
de remplacement du fluide à l'arrière, on n'en saurait trouver dont la rési-
stance, rapportée à la surface de la maîtresse section, ne ressorte pas à
moins de ^ de la résistance du mètre carré de plan mince frappant per-
pendiculairement la surface. Il est des navires où ce rapport descend à
moins de -^.
» Il est facile de vérifier cette assertion en comparant pour divers navires
C. R., 1870, 7' Semestre. (T. LXXl, N" IC.) 68
( 5.0)
à roues à aubes les vitesses respectives du navire et des aubes par rapport
à l'eau, ainsi que la surface des aubes d'une part et la maîtresse section de
l'autre.
» Cela posé, no serait-il pas légitime de compter que le ballon porteur
qui nous occupe présenterait également une résistance à la marche dans
l'air, réduite à ^ de la résistance du plan mince, si ce ballon pouvait con-
server Informe régulière du dessin? Mais cette- dernière hypothèse n'est pas
réalisable : il faut compter que le ballon, sous la pression de son filet, pré-
sentera des surfaces plus ou moins bombées dans l'intervalle des mailles.
Pour tenir compte de la déformation partielle de la surface géométrique,
produisant une multitude de petites ondulations, j'estime qu'on leur fera
une large part d'influence, en doublant la résistance calculée.
» Pour la nacelle, les formes sont également étudiées de manière à fa-
ciliter son passage dans l'air autant que le permettent les exigences de sa
fonction; mais elle n'aura pas une surface polie, les rayons de courbure sont
petits, elle porte des hommes et des objets sans forme définie, et il est, par
suite, prudent de porter le coefficient de réduction de la résistance de cet
ensemble par rapport au plan mince au i.
» Enfin, pour les cordonnets du filet ou les cordes de suspente, leur
diamètre et par sxiite leur rayon de courbure étant très-petits, j'ai porté leur
coefficient de réduction par rapport à la surface plane à 4-
» Cela posé, la résistance de l'aérostat à la marche se composera ainsi
qu'il suit :
Ballon sans filet i54""' à o,665 feraient \02^^,/^i9. : à yj on a 5''^, 120
Nacelle et accessoires. . 4 à o,665 » 2 ,660 : à | -. i ,33o
Filet et suspentes 10 à o,655 » 6 ,65o : à | 1. 3 ,35o
Résistance totale c) ,800
)) La vitesse de l'aérostat est de 2'", 22 par seconde; le travail final ac-
compli par l'aérostat marchant à cette vitesse est donc de 9''s,8oo x 2™, 22
ou de 21''^'", 77.
» Je me propose d'employer comme propulseur, pour obtenir la poussée
et la vitesse calculées ci-dessus, une hélice à quatre ailes dont le diamètre,
le pas el le nombre de tours découlent des considérations suivantes.
» Raisonnons d'abord comme si le ballon porteur était seul, bien con-
forme au plan, sans filet el sans nacelle. Si l'on tenait à avoir entre la vi-
tesse V et le produit du pas par le nombre de toius, px n, le même rap-
port que celui constaté dans les navires à hélice bien proportionnés, il
(5ii )
faudrait donner à l'hélice un diamètre tel, que la surface du cercle circon-
scrit fût le quart de la maîtresse section. Cette maîtresse section étant de
i53'°'ï,93, le diamètre de l'hélice serait de 7 mètres, et l'on pourrait comp-
ter alors qu'on aurait p x ?z = i,i6.V.
» Mais nous avons admis que le ballon porteur résisterait deux fois plus
qu'il ne le ferait avec sa forme théorique, en raison des déformations mul-
tiples de la surface. Notre ballon représente donc pour la résistance un
ballon fictif, à forme régulière, d'une maîtresse section double, ce qui fait
3o8 mètres carrés. Nous voyons, en outre, dans le tableau des rési-
stances partielles, que les appendices du ballon porteur, tels que filet,
nacelle, etc., donneront lieu à une résistance estimée à 4''^, 68 ajoutée à
celle de 5''^, 12 propre au ballon. 11 faut donc accroître encore la sur-
/. r. . 1 1 « .11 5,12 + 4,68 ,
face fictive de la maîtresse section dans le rapport p -, la pre-
mière correction l'a déjà portée à 3o8 mètres carrés; elle devient, par la
seconde, égale à 589 mètres carrés. Le quart de cette surface est de
147 mètres carrés, et le diamètre du cercle correspondant est de i3'", 70.
» Ce grand diamètre d'hélice étant d'un emploi difficile, je préfère bor-
ner le diamètre à 8 mètres en admettant une perte de travail un peu plus
grande en recul de l'hélice.
» Or, en remplaçant une hélice par une autre géométriquement sem-
blable, ne différant que par le diamètre, la résistance à la marche restant
constante, les carrés des reculs sont inversement proportionnels aux sur-
faces des cercles des deux hélices, ou, ce qui revient au même, aux carrés
des diamètres, ce qui fait que les reculs sont inversement proportionnels
aux diamètres.
)) Avec l'hélice de i3™, 70, dans le cas qui nous occupe, nous avons vu
qu'on aurait
^ X « = i,i6.V;
1, > 1 I P>Cn —V r-
d ou le recul = ^ = o,id.
» Avtc un diamètre réduit à 8 mètres, nous aurons donc
!^ — = 0,16 X—^ = 0,274;
d'où
p' X n' = i,274.V.
Or V = i33™,33 par minute; donc
p' X «'= i69'",85 par minute.
68..
( 5i2 )
» En faisant le pas égal au diamètre, on est dans de très-bonnes condi-
tions d'inclinaison des ailes; on en déduit le nombre de tours par minute :
» Cette allure convenant pour un treuil à bras, il en résulte l'égalité du
diamètre des poulies de l'hélice et du treuil.
» Le travail de l'hélice ainsi constituée se compose de sa poussée paral-
lèle à l'axe, multipliée parle produit de son pas par le nombre de tours,
puis du travail de frottement dans l'air.
» La pren)ière partie donne par seconde
9^8ox^^=27''^-,75.
Le travail du frottement de l'air sur ces ailes en taffetas bien tendu, à la
vitesse qui résulte des données précédentes, ne saurait ressortir à plus de
2^^'", 25. Le travail total à transmettre à l'hélice est donc finalement de
3o kilogramniètres.
» En présence de cette petite puissance motrice, il m'a paru avantageux
de ne pas recourir à une machine à feu quelconque et d'employer simple-
ment la force des honïmes. Quatre hommes peuvent, sans fatigue, soutenir
pendant une heure, en agissant sur une manivelle, ce travail de 3o kilogram-
mètres, qui n'exige de chacun d'eux que 7''s™,5. Avec une relève de deux
hommes, chacun d'eux pourra travailler une heure, se reposer une demi-
heure, et ainsi de suite, pendant les dix heures du voyage, qui sont une des
données de cette étude.
» Étant admis l'emploi des hommes comme moteur, j'ai placé l'hélice
au-dessus de la nacelle, on dessous du ballon, au milieu de sa longueur.
L'axe de l'hélice est horizontal, parallèle à l'axe longitudinal du ballon, et
à 6", 20 au-dessus du fond de la nacelle. Sa distance en contre-bas de l'axe
du ballon est de 16™, 80.
» Un treuil à manivelles, placé dans la nacelle, est mis en mouvement
par les quatre hommes. Ce treuil jx)rte une poulie, qui correspond à une
poulie de même diamètre placée sur l'arbre de l'hélice; une courroie les
réunit. Le nombre de tours commun au treuil et à l'hélice est, comme on l'a
déjà vu, de 21 ~ par minute pour 8 kilomètres à l'heure.
» Dans cette position de l'hélice, quand elle fonctionnera pour entraîner
l'aéroslat, la résistance de l'air s'exerçant pour la plus grande partie sur
le ballon, il en résulte un couple de forces tendant à faire dévier l'aérostat
( 5i3)
de la situation d'équilibre au repos, laquelle correspond à l'axe du ballon
parfaitement horizontal. Le couple d'inclinaison provenant de l'action de
l'hélice, à l'allure de marche normale, aura pour mesure la poussée de g''^, 80
multipliée par sa distance à la résultante des résistances partielles; cette
dislance à l'axe de l'hélice est de 12^,20, ce qui donne 1 19''^", 56. Le poids
total de l'aérostat, en matières plus lourdes que l'air, est de 2478 kilo-
grammes avec tout son lest. Il est de aoZ}3 kilogrammes à la fin du lest. Le
centre de gravité de ce poids sans lest est à i5'",75 en contre-bas du point
d'application de la force ascensionnelle du ballon ; par suite, le sinus de
l'angle d'inclinaison qui résulte de ce couple a pour mesure — ^-^ — '^ — rj
ce qui correspond à un angle de o degrés i3 minutes. Cet angle est com-
plètement négligeable.
» Dans certains moments, poiu' atteindre, par exemple, un point voulu
du sol à la descente, on pourra mettre à la fois les six manœuvres sur le treuil
au lieu de quatre; chacun d'eux poinra, en outre, pendant quelques mi-
nutes, doubler son travail. La puissance transmise à l'hélice sera alors mo-
mentanément triplée, ce qui fera que la vitesse de l'aérostat deviendra
2,22 X v3 = 3™, 20, soit de 11'"', 5 à l'heure. Le nombre de tours par mi-
nutes commun au treuil et à l'hélice passera de 21'°"'% 25 à 3o'°"'%84-
Enfin la poussée horizontale de l'hélice deviendra
9^8o X (^y = c)^8o X 2,02= 20^38.
La force de poussée étant momentanément ainsi doublée, le petit angle
d'inclinaison sera également doublé et deviendra o degrés 26 minutes, ce
qui est encore parfaitement négligeable.
» Des calculs qui précèdent, il résulte qu'on peut établir ainsi qu'il suit
le devis géométrique de cet aérostat :
Dimensions piincipalcs.
Longueur du ballon porteur 40- {H^Zi^lll)-
Diamètre i^'".
Volume du ballon 386o™'.
Volume de la poche de dilatation 386°"^.
Différence de leurs volumes , 3474™'-
Force ascensionnelle, à la pression atmosphérique de o", 76, à raison
de 735 grammes par mètre cube de gaz d'éclairage, mélangé au
besoin d'hydrogène pur 2553''^
( 5i4 )
rUcssc et force motrice.
Vitesse projetée par rapport à l'air ambiant 2'", 22 par seconde.
Id. id. S'''' à l'heure.
Force motrice en kilogrammètres réalisée sur l'hélice 3o''5'".
Limite admise pour la durée du voyage 10''.
Nouibre d'hommes employés à la fois comme moteur ^homn.es^
Relève « » 2La,n,nes.
Diamètre de l'hélice 8"".
Pas 8"-.
Fraction de pas par aile j-
Nombre de tours par minute pour l'allure ci-dessus 21"""% aS.
Poids au départ.
Ballon porteur avec sa poche intérieure et sa soupape (complet sans son filet) . !^i^^.
Filet en corde de soie 90
Gouvernail • . • i3
Ancre aS
Vergue 1 35
Nacelle 255
Hélice, treuil, ventilateur i4o
Agrès de nacelle 3o
Six manœuvres, un timonier, un aéronaute, un passager 63o
Bagages et vivres 4^
Instruments d'observation 20
Dépêches 235
Lest disponible 4^5
Total 2478*^8
» La force ascensionnelle étant 2553 kilogrammes, elle surpassera le
poids à enlever au départ du sol de 75 kilogrammes, soit de 3 pour 100, ce
qui est une proportion convenable pour qu'un aérostat s'enlève du sol
avec une bonne vitesse ascensionnelle.
» Après avoir établi l'ensemble des dispositions principales relatives à
cet aérostat, il est intéressant de contrôler le calcul estimatif de la résis-
tance dans l'air à une vitesse de 8 kilomètres à l'heure par des considéra-
tions d'une autre nature.
» Il est plausible d'admettre que si le ballon porteur, au lieu de se
mouvoir dans l'air, était un corps solide de même forme se mouvant dans
l'eau, la résistance à la même vitesse serait dans le rapport des densités de
l'eau et de l'air. Or, la densité de l'air étant à celle de l'eau dans le rap-
( 5i5)
port i sous la pression atmosphérique de o", 76, il en résulte que le tra-
vail pour faire mouvoir l'aérostat dans les parties basses de l'atmosphère
ne doit être que les 0,00129 ^^^ celui qui serait nécessaire pour faire mou-
voir le même volume dans l'eau. Ce travail serait encore moindre dans les
régions plus élevées.
» Or il résulte des données relatives à la propulsion des navires qu'un
bâtiment à hélice, supposé complètement plongé dans l'eau, ayant la forme
de notre ballon dessiné, se mouvrait, à la vitesse de 8 kilomètres à l'heure,
correspondant à /i-ii>^ noeuds, avec une puissance motrice qui ne saurait
dépasser io5 chevaux de ^5 kilogrammètres mesurés sur les pistons à va-
peur. En doublant cette puissance (comme nous avons établi qu'il conve-
nait de doubler le coefficient de résistance en raison de la multitude de
petites déformations de la surface), on arrive à 210 chevaux; ce qui ne fait
pas sur larbre de l'hélice plus de iS^ chevaux.
» Passant de ce résultat à la puissance nécessaire pour faire mouvoir le
ballon dans l'air, on trouve
i5n X ' =: o,2o3 cheval.
' 1000
» Telle serait la puissance à employer si le ballon était seul : mais nous
avons vu que la présence du filet de suspension et de la nacelle avec son
équipage augmente la résistance propre au ballon dans le rapport de i, 9
à i; nous arrivons donc, pour la puissance motrice nécessaire à l'ensemble
de l'aérostat, à o,2o3 x i ,9, ce qui fait o, 385 cheval de 75kilogrammétres,
ou, en kilogrammètres, 28,''S'n92. Nous avions trouvé, par le premier pro-
cédé, 3o kilogrammètres.
» Des expériences directes sur les aérostats eux-mêmes exécutés dans
leurs dimensions réelles pourront seules permettre de préciser les chiffres
à cet égard; mais ce que j'ai voulu démontrer, et ce qui me paraît établi
d'une façon plausible, c'est qu'il faudra tout au plus une puissance de
3o kilogrammètres pour imprimer à l'aérostat projeté, au moyen de l'hé-
lice définie ci-deSsus, une vitesse de 8 kilomètres à l'heure par rapport à
l'air ambiant, et que quatre hommes de service avec deux hommes de re-
lève y pourront suffire pendant dix heures.
» Je reprends maintenant l'exposé du jeu de la poche de dilatation.
Appelons P le poids dans l'air de tous les corps composant l'aérostat, enve-
loppe du ballon et objets de toute nature portés par lui, mais abstraction
(5i6)
faite du gaz qu'il contient; Vie volume total du grand ballon gonflé; V le
volume de la poche intérieure quand elle sera gonflée; D le poids en
grammes du mètre cube du gaz employé dans le ballon à la pression
atmosphérique de 76 centimètres, qu'on suppose être celle près du sol
au point de départ; A le poids du mètre cube d'air atmosphérique à cette
même pression de 76 centimètres (i).
» Le ballon en question, pour bien naviguer, doit être sans cesse gonflé,
tant au départ qu'à tout autre moment de la durée du voyage.
" Supposons qu'au départ la poche V soit pleine d'air atmosphérique
et le restant du ballon plein de gaz léger, la force ascensionnelle F, près
du sol, sera
F = (V — V')(A^'-— Ds').
» Pour que le ballon s'élève, il faut qu'on ait
F>P ou (V- V')(A- D)> P.
» Le départ se fera avec une vitesse d'ascension convenable, si la force
ascensionnelle dépasse de 3 pour 100 le poids à soulever. Posons donc
F = i,o3.P, d'où
„ (V — V')(A— D) ,. . . j. ,
F = -^ ■ (équation du départ).
i,o3
)) Le ballon montant, la pression atmosphérique diminue. Il faut donc
laisser diminuer aussi la tension du gaz intérieur de la même quantité,
sous peine de fatiguer l'enveloppe et bientôt de la compromettre. Or, puis-
que le ballon est déjà gonflé, il faudrait laisser se perdre dans l'atmo-
sphère tout l'excès de volume du gaz léger dilaté, si l'on n'avait la faculté
de laisser dégonfler la poche intérieure remplie d'air an départ. C'est ce
qui peut se faire sans difficulté par des procédés inutiles à décrire ici, et
de manière à maintenir la tension du gaz léger dans les limites suffisantes
pour le maintien des formes.
» Tant que la poche intérieure, se dégonflant, pourra faire place au gaz
(i) J'ai volontairement négligé, dans cette démonstration, l'influence des différentes tempé-
ratures. J'ai aussi supposé le ballon parfaitement ctanche. Si l'on veut pouvoir lire dans ks
formules les lois simples qu'elles représentent, il faut en dégager d'abord les influences per-
turbatrices. En les superposant ensuite, on aperçoit facilement leurs influences spéciales.
Enfin j'ai introduit dans ces calculs, pour les poiils des matières non ga/.cu/.es, les poids de
ces objets pesis diiiis l 'air, cl j'ai négligé volontairement leurs différences de poids à diverses
hauteurs.
( 5i7 )
léger qui se dilate, le ballon pourra passer d'une région à l'antre de
l'atmosphère, et sa force ascensionnelle restera la même. En effet, le vo-
lume de la partie du ballon occupée par le gaz léger augmente en raison
inverse des pressions atmosphériques; les deux densités de l'air atmosphé-
rique et du gaz diminuent dans le même rapport; leur différence diminue
donc de la même façon; le produit du volume par la différence des den-
sités reste donc constant. Le poids des corps non gazeux restant lui-même
sensiblement constant, la force ascensionnelle continue à dépasser ce poids
de la même quantité fixée au départ du sol à 3 pour loo.
» Mais le volume de la poche intérieure est nécessairement limité; quand
elle sera complètement vidée d'air atmosphérique, le gaz léger occupera
tout le volume V.
» La hauteur à laquelle le ballon sera parvenu à ce moment où la poche
intérieure terminera ainsi l'évacuation de son air correspond à une pres-
sion atmosphérique II donnée par la formule
n = 76 — — — (équation de la fin de la première phase).
» Si l'on fait V = j^ V, on a
n = o,9X 76 = 68%4,
ce qui correspond à une hauteur H = 866™.
» Cette première phase de 1 ascension achevée, le ballon ne s'arrête point
à cette hauteur, puisqu'à cette situation la force ascensionnelle reste la
même qu'au départ, dépassant le poids P de 3 pour 100. Il montera sans
qu'on jette de lest jusqu'à ce que cet excédant de la force ascensionnelle
sur le poids disparaisse, ce qui ne peut avoir lieu que par la fuite d'une
partie du gaz sortant du ballon.
» A partir de la hauteur de 866 mètres, le gaz occupant le volume to-
tal Y du ballon ne peut plus se dilater sans sortir de ce ballon, ce dont on
aura soin de lui laisser la libre faculté, en ne conservant toujours que les
3 ou 4 dix-millièmes d'excédant de pression sur l'atmosphère, excédant
utile au maintien de la forme extérieure du ballon,
» Cette seconde phase de l'ascension continuera jusqu'à ce que le ballon
soit arrivé dans une région de l'atmosphère dont la pression H' est donnée
par la formule ci-après, établissant l'égalité entre la force ascensionnelle F'
et le poids P du départ,
F' = V(A-D)^ = P,
C. R., 1870, 2« Semestre. (T. LXXI, N" IG.) 69
( 5i8 )
d'où
Or, en se reportant à l'équation au départ du sol, à savoir
p ^ (V-V')(A-D) ^
i,o3
on en tire
P V — V
A — D i,o3 '
reportant cette valeur dans l'expression II', on a
i \ V'
n' = 76 (équation de la fin de la deuxième phase).
Or nous avons aussi
V' = 0,1. V,
ce qui fait que, finalement, on a
I ,o3
pression qui correspond à une hauteur H' = 1 1 10 mètres.
» Si celte hauteur de 1 1 10 mètres, à laquelle l'aérostat est ainsi parvenu
sans jeter de lest, n'était pas trouvée suffisante, l'ascension subséquente
constituerait alors une troisième phase pendant laquelle toute élévation
supplémentaire coûterait une quantité de lest correspondant à la perte de
gaz sorti par la dilatation.
» La quantité de lest qu'il faudra ainsi jeter pour arriver à une hauteur
voulue, correspondant à une pression H", sera donnée par la formule sui-
vante, dans laquelle K représente le rapport entre le poids du lesta jeter et
le poids P de l'aérostat au départ,
P-KP = V(A-D)^,
d'où
p 70
Or nous tirons encore de l'équation du départ
A— D _ I ,o3
P "~ V — v'
d'où
„ i,o3.vn"
(5i9)
Or
V' = o,,.V;
donc
K = F — -j n" (équation applicable à tout moment de la troisième phase).
0,9X76 ' ' ^^ y J
» Si, par exemple, on voulait monter jusqu'à 1200 mètres, on aurait
n" = 65,7, '^ O"^ ^ = 0,01. Le lest à jeter, pour monter à 1200 mètres,
sera donc de i pour 100 du poids primitif total P de l'aérostat.
» Mais revenons en pensée à la hauteur de 11 10 mètres à laquelle
l'aérostat est parvenu sans jeter de lest.
» En considérant le ballon à cette hauteur, qui limite ce qu'on peut ap-
peler la deuxième phase, si, par une cause quelconque, la force ascension-
nelle vient à diminuer d'une quantité si minime qu'elle soit, l'aérostat
descendra, les gaz vont se comprimer. En raison de la loi déjà exposée, la
force ascensionnelle ne variant pas par la compression et la dilatation du
gaz léger du ballon tant qu'il y reste contenu, l'aérostat descendrait ainsi
jusqu'au sol, à l'état d'équilibre à peine rompu.
» Si, à mesure de la compression du gaz léger, on a introduit de l'air
atmosphérique dans la poche intérieure, le ballon aura été maintenu rem-
pli, et l'on pourra descendre en cet état jusqu'à ce que la poche soit pleine
d'air, sans en avoir mélangé avec le gaz léger. On arrivera ainsi à la hau-
teur correspondant à la pression atmosphérique H'", donnée par la formide
F==P = (V-V')(A-D)^,
d'oîi
P
^ (V — V')(A — D)'
Or de l'équation au départ on tire
(V-V')(A-D)=: i,o3.P,
n'" = '^^ = 73'' n8
donc
n'" — -
: ,o3
d'où
H ^ 244 mètres.
» Ainsi donc, tant que l'aérostat en question, en faisant fonctionner sa
poche comme il vient d'être expliqué, sera maintenu dans ses oscillations
de montée et de descente entre les limites de hauteur de 244 mètres à
1 1 10 mètres, il n'aura plus à perdre de gaz par le fait de ces variations de
69..
( 520 )
hauteur; il remontera très-doucement en jetant des quantités de lest très-
minimes, et l'on aura maintenu sou enveloppe intérieure sans cesse gonflée.
Tout le lest qu'il a pris au départ sera donc exclusivement destiné à com-
penser les pertes de gaz par suite de l'exosmose ou de l'endosmose, pendant
les dix heures que devra pouvoir durer le voyage.
» Nous avons vu que la quantité de lest qui figure à cet effet dans le
projet est de 435 kilogrammes, soit 0,175 du poids total enlevé; et il n'y a
pas eu besoin de toucher à ce lest pour monter à 1 1 10 mètres. 11 reste donc
tout entier disponible pour le restant du voyage.
» Je suppose ce même aérostat, sa poche de dilatation supprimée, gonflé
au départ entièrement de gaz léger ;^1 pourra emporter un supplément de
lest S = V'(A — D), en conservant la même différence entre la force ascen-
sionnelle et le poids nouveau P. Or, combinant cette expression avec
l'équation du départ (V — V')(A — D)=:i,o3.P, et avec cette donnée
V'= 0,1 .V, on en déduit
Or
donc
_ o,io3
~ 0,9
P=2478;
5=283''g,483.
» En emportant cette quantité de lest en plus, la force ascensionnelle
au départ, sous la pression de 76, sera
F„ = V(A-D).
Le nouveau poids Pq sera
P + -^P.
0.9
La différence produisant le mouvement au départ sera la même que pour
le premier aérostat et égale à o,o3.P.
» Cet aérostat s'éievant, le gaz se dilatera et s'échappera à mesure; il
arrivera à l'équilibre à une hauteur correspondant à la pression atmo-
sphérique n, donnée par la formule
V(A-D)^ = P-^-î-^P;
V I ,6 0,9
d'où l'on déduit, en combinant celte expression avec les données précé-
dentes, qui fournissent A — D en fonction de P et de V,
n, I ,oo3
( 521 )
d'où
ce qui corrresponti à une hauteur H, =: 225".
» A partir de cette hauteur, l'excès de la force ascensionnelle sur le
poids devient nul, et, pour arriver à la hauteur de iiio mètres du pre-
mier aérostat, il faut diminuer le poids en jetant du lest de façon qu'on ait
l'égalité entre la force ascensionnelle et le poids.
» Or, à cette hauteur, les deux ballons ayant tous deux le même vo-
lume V plein du même gaz léger du départ, dilaté sans mélange sous la
même pression atmosphérique, il faudra que leurs poids soient égaux.
Ainsi le ballon sans poche sera obligé, poiu' monter à cette hauteur de
1 1 lo mètres, de jeter exactement toute la quantité de lest qu'il avait prise
au départ en sus du ballon à poche, soit 283'*s^/j83.
» A partir de ce moment, s'il vient à descendre, le ballon sans poche,
pour être tenu gonflé, devra recevoir de l'air atmosphérique mélangé dans
le gaz. S'il descend, par exemple, de 1 1 lo à ^44 mètres, c'est-à-dire de la
pression 66,4 à la pression 73,78 (dans les limites d'oscillation que peut
atteindre le premier ballon sans mélanger son gaz), la nouvelle densité D'
du gaz mélangé sous la pression de 76 sera à 244 mètres de hauteur donnée
par la formule.
V(A-D')^ = P,
d'où
,6
D':
V 73,78
» Quand on voudra remonter à 1 1 10 mètres, on devra jeter une quan-
tité j^de lest telle qu'on ait
d'où
V(A-D')^ = P-4,
» Ainsi, avec la quantité de lest 435 kilogrammes qui restait au ballon
à la hauteur de 1 1 10 mètres, même en y ajoutant le poids de l'étoffe de la
poche supprimée, ce qui ferait encore 5o kilogrammes, soit en tout 485 ki-
logrammes, il n'y aurait pas de quoi faire deux oscillations dans les limites
de II 10 à 244 mètres, ce qui démontre l'avantage du ballon à poche de
dilatation. »
( 522 )
»l£3lOIRES PRESENTES.
M. A. Brachet soumet au jugement de l'Acatlémie une nouvelle Note,
concernant les divers systèmes d'aérostation déjà proposés.
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
M. BuKATY adresse une Note concernant un nouveau système d'aéros-
tats.
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
M. SoREL adresse une Note relative aux conditions que lui paraissent
devoir remplir les aérostats, pour qu'il soit possible de les diriger.
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
M, 3I0URA soumet au jugement de l'Académie des « Recherches sur la
réalisation du problème de l'aéroslation ».
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
M. P. Verdeil adresse ulie Note concernant la faiblesse du rendement
des machines à vapeur.
(Commissaires : MM. Morin, Delaunay, Jamin.)
M. Clotet adresse la description et le dessin d'une nouvelle bombe
cylindro-conique à percussion. Cette bombe se compo.se essentiellement
d'un cylindre intérieur, contenant la charge, et d'un cvlindre extérieur dis-
posé de façon qu'on puisse placer, entre sa paroi et celle du cylindre inté-
rieur, des balles de plomb ou de petits morceaux de fonte : l'explosion est
produite par une capsule qui est située à l'extrémité d'une tige située dans
l'axe commun des deux cylindres, et que la chute de bombe vient refoider
sur la paroi interne de la base du cylindre.
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
M. Hoffmann adresse une Note relative à quelques précautions aux-
quelles il lui paraît indispensable d'avoir égard, soit dans la préparation,
soit dans l'usage du boudin de sang de bœuf.
(Renvoi à la Commission nommée pour les questions relatives
à l'alimentation.)
( 5a3 )
M. FuA adresse une Note relative à un procédé de conservation des
viandes, procédé dont il a fait usage. Il consiste à immerger préalablement
la viande, pendant quelques minutes, dans l'eau bouillante un peu salée,
puis à la placer dans des pots remplis de graisse de bœuf, fondue et bien
cuite.
(Renvoi à la Commission nommée pour les questions relatives
à l'alimentation.)
CORRESPONDANCE .
M. LE Président de la Co.mmission des monnaies et médailles informe
l'Académie que, M. le Ministre des Finances ayant décidé, le lo septembre
dernier, qu'un bureau temporaire des essais serait établi à Bordeaux pen-
dant la durée de l'investissement de Paris, M. Peligot, vérificateur en chef
des essais, a été désigné pour diriger les opérations de ce bureau ; il a donc
dîi se rendre à Bordeaux avant que l'investissement fût achevé.
M. Dumas prie l'Académie de permettre qu'un passage omis par erreur
dans le Compte rendu de la séance précédente soit rétabli dans celui
de la séance actuelle; il se rapporte à la page 483, ligne i3, de sa Com-
munication :
« Dès qu'il a été question de la conservation des viandes pour les appro-
visionnements de Paris, le Comité d'hygiène publique, consulté par M. le
Ministre de l'Agriculture et du Commerce, a indiqué, parmi les procédés les
plus applicables, la salaison telle qu'elle est pratiquée dans la marine, de
temps immémorial.
» Ce procédé devait naturellement prendre une part essentielle dans la
formation des réserves de Paris, et il est juste de constater l'empressement
que M. le Ministre de la Marine a mis à seconder les efforts de l'adminis-
tration civile.
» M. le Ministre a fait venir immédiatement de Cherbourg, à la demande
de M. Renaud, inspecteur général du service de santé de la Marine, une
escouade d'ouvriers employés exclusivement aux salaisons, sous la direc-
tion d'un contre-maître habile. Ils ont permis d'installer luie usine d'essai à
Paris, et ils y laisseront des exemples propres à servir de base au contrôle
des procédés anciens ou nouveaux actuellement mis à l'épreuve. »
{ 524 )
TECHNOLOGIE. — Procédé employé aux Etals-Unis par tes indigènes pour la
préparation des j)eaux de bisons^ de cerfs et d'autres animaux de ce pays.
Extrait d'une Lettre de M. J. Simonin à M. Dumas.
« L'attention de l'Académie a été appelée récemment snr la préparation
des peaux de bœuf et de niouton qui ne peuvent, en ce moment, être en-
voyées à la tannerie. Je lui demande, à ce propos, la permission de lui
faire connaître un procédé que j'ai vu employer dans l'Amérique du Nord
par les Indiens des prairies, lors de mes différentes explorations dans ces
contrées, pendant les années 1867- 1868. Les Indiens des États-Unis, ceux
qui vivent encore aujourd'hui à l'état sauvage, notamment entre les rives
du Missouri et les Montagnes Rocheuses, préparent les peaux de bisons en
les raclant d'abord avec le plus grand soin, au moyen d'une lame de fer,
ou même, comme leurs ancêtres, d'iui ciseau de silex, quand ils n'ont pas
de métal sous la main. La peau, ainsi nettoyée, est tannée ensuite avec la
cervelle de l'animal, dont on l'imprègne peu à peu, au moyen d'un tam-
ponnage longtemps continué. Qu'il entre dans cette cervelle quelque prépa-
ration, quelques plantes particulières, c'est ce que je ne saurais dire en ce
moment; mais, ce que je puis certifier, c'est que les peaux de bison ainsi
préparées, et auxquelles on laisse généralement leur toison, acquièrent une
souplesse remarquable, comme une vraie peau de gant, n'ont aucune odeur
et se conservent indéfiniment. J'ai en ma possession une de ces peaux, qui
me servait de couvertuie, et même de lit, dans mes excursions à travers les
prairies. J'ai aussi différentes peaux de renard argenté de Californie, des
peaux de daim, etc., servant de carquois, de gaines de couteaux : toutes
sont parfaitement conservées. »
« M. RouLiN, questionné à cette occasion par M. Dumas, pour savoir si,
dans les parties du nouveau continent où il a longtemps séjourné, le pro-
cédé décrit par M. Simonin n'aurait pas été aussi pratiqué, répond, qu'à
sa connaissance on n'y a jamais eu recours dans l'Amérique méridionale
proprement dite, ni même dans aucune des provinces situées à l'est et au
sud de l'isthme de Panama. 11 est bien entendu qu'il ne peut être question,
pour ce vaste pays, de la préparation de peaux de bisons. L'animal ne s'y
trouve point, il n'existait pas non plus dans les provinces qui formaient
l'empire de Montezuma; mais l'art du mégissier n'y était pas inconnu, et
on l'appliquait aux dépouilles de divers autres mammifères. Ainsi Fernand
Cortez, dans sa première lettre à l'empereur Charles V, faisant une longue
( 525 )
éiiuniération des produits naturels ou manufacturés qui, chaque jour, étaient
exposés en vente sur la grande place du marché de Mexico, mentionne
expressément « les ptaux apprêtées avec le poil on sans le poil, et, dans
» ce dernier cas, souvent passées en couleur ». (^Barcia, Hisloriadores jjtimi-
tivos de Indias, t. I, p. 33.)
» L'art du mégissier continua assez longtemps encore, après la conquête,
à être pratiqué par les indigènes, comme le prouve im passage de l'ouvrage
de Torquemada, qui, venu dans ce pays près d'un siècle plus tard, puhlia
en iGi5 sa Monarquin indiann. Voici, en effet, ce qu'on y lit, liv. XVII,
chap. I : « Il y avait à Mexico des artisans merveilleusement habiles à ap-
» prêter les cuirs de cerfs, lions et tigres [coucjuars et jaguars), avec le poil
» ou sans le poil, et ceux-ci laissés blancs ou teints en rouge, en bleu, en
» noir ou en jaune, et tous si souples qu'on les recherche encore aujour-
» d'hui pour en faire des gants. »
» Ni Torquemada ni Cortez ne nous apprennent quels étaient les pro-
cédés auxquels avaient recours les mégissiers indigènes. Les peaux qui sor-
taient de leurs mains n'étaient point destinées à faire des vêtements; les Mexi-
cains et leurs proches voisins à l'est, qui avaient à peu près les mêmes arts,
cultivaient diverses plantes qui leur fournissaient de bonnes matières textiles
et qu'ils savaient habilement mettre en œuvre. Pins au sud et jusqu'aux
limites du Chili, on ne trouvait point non plus de sauvages vêtus de peaux.
Les peuples qui n'allaient pas tout nus portaient des vêtements d'étoffes
de coton; de sorte que les dépouilles des mammifères n'avaient, dans leur
économie domestique, presque aucune importance. Pour la guerre cepen-
dant, le cuir du tapir était recherché; son épaisseur le rendait propre à
faire de très-bonnes armes défensives et particulièrement des boucliers. La
préparation d'ailleurs en était fort simple, puisqu'elle consistait seulement
à faire sécher cette peau en l'étendant à l'air, le poil en dessous, et iiprès
l'avoir bien étirée au moyen de piquets enfoncés dans le sol poiu* l'em-
pêcher de se racornir sous faction du soleil.
» Encore aujourd'hui, dans la Nouvelle-Grenade, on dessèche de cette
manière des cuirs de bœuf, destinés à servir de coucheltes, et sur lesquelles
il m'est bien souvent arrivé de dormir, dans mes courses à travers le pays,
(^n en trouvait dans toutes les chaumières, ployées en dcun comme une
une main de papier, et il suffisait de les étendre sur le sol pour avoir son
lit tout dressé.
» Si la saison était maintenant moins avancée, je crois qu'il serait facile
et utile de préparer nue literie de ce genre avec les peaux des bêtes qui se-
C. R., 1H70, i" Semestre. (T. l.XXI, N" IG.) 7O
( 5i6 )
ront abattues durant le siège; elle fournirait à ceux de nos hommes qui pas-
sent la nuit aux remparts un couclier sain, en préserverait certainement
plusieurs des rhumatismes auxquels ils sont tous |)lus ou moins exposés.
Peut-être la science trouvera-t-elle quelque moyen économique de suppléer,
pour cette dessiccation, à ce que ne nous donne pas suffisamment la chaleur
solaire. Quand cette application, qui, nous devons l'espérer, ne sera pas bien
longue, serait devenue sans but, ces cuirs secs ne demeureraient pas sans
valeur, et l'on pourrait, ce me semble, les utiliser comme on le fait pour
les peaux de bœuf que le commerce reçoit, également à l'état sec, de
Buenos-Ayres et de Montevideo.
» Pour en revenir à la Communication de ]M. Simonin et au conseil qu'il
flonne aux industriels, de chercher dans les relations des voyageurs de plus
amples détails sur sa méthode, avant d'essayer de l'appliquer, je dirai que
cette recherche me paraît devoir rester sans résultat utile. J'ai lu plusieurs
descriptions du procédé en question et n'y ai trouvé rien d'important qui
ne soit indiqué dans la lettre; j'ajouterai qu'aucune ne fait mention d'iuie
substance végétale, qu'on emploierait en même temps que la cervelle de
l'animal, et qui contribuerait au succès de l'opération. »
M. Gaultier de Clacbry adresse une Note relative à une réglementation
qu'il croirait utile d'établir dans la fabrication du pain, pendant l'investisse-
ment de la ville de Paris :
« Quant à la forme qu'il conviendrait de donner aux pains, pour tirer le
meilleur parti possible d'une quantité déterminée de farine, l'auteur pense
(ju'il y aurait lieu d'interdire momentanément la fabrication des pains
autres que ceux de 2 kilogrammes, courts fendus à grigne, ou même ceux
qui sont connus sotis le nom de jockos.
)) Relativement à l'augmentation importante de produits alimentaires
qui peut être procurée à la population dans les circonstances exception-
nelles au milieu desquelles se trouve la capitale, il importerait d'attirer l'at-
lention sur les faits suivants.
» I-ors de la glorieuse expédition qui, en i83o, a donné l'Algérie à lu
France, d'Arcet proposa de faire entrer, dans la fabrication des biscuits de
l'armée, de la gélatine, de la viande et du S'ing ,- 3ooooo biscuits furent pré-
parés par ce moyen et embarqués dans des caisses distinctes. Malheureuse-
ment un coup do mer qui assaillit la flotte obligea à jeter à la mer ces
caisses, dont une partie seulement fut portée par les flots sur le rivage. Une
com|)araison rigoureuse devint par suite impossible.
( 5^7 )
» Il ne peut être question de la viande ou de la gélatine, et il ne s'agit
que de considérer l'emploi du sang, qui peut être employé en entier, ou de
(le la fibrine qu'on en sépare par le battage, et qu'à l'aide de machines on
amènerait facilement à un état convenable.
» La fibrine et l'albumine sont des produits riches en azote, dont les
propriétés alimentaires sont bien constatées. Le sang, qui les renferme en
proportions très-considérables, se mêle facilement à la farine et fournirait
lui pain qui, vendu avec la dénomination de paiii animalisé , laisserait
chaciui libre d'en faire usage, comme il arrive pour la viande de cheval en
remplacement de la viande de bœuf. »
M. E. Decaisne adresse une Note concernant « L'alimentation des petits
enfants, et le lait pendant le siège : »
« Puisque le lait n'est point à Paris en quantité suffisante, ne serait-il
pas possible, avec les 20000 litres que Paris peut encore fournir aujour-
d'hui, de pourvoir aux nécessités de l'heure présente? Il faudrait d'abord
que les gens valides voulussent bien s'en interdire absolument l'usage.
» On pourrait encore couper le lait dans une certaine proportion avec
de l'eau, et l'Administration devrait veiller à ce que les débitants s'abstins-
sent de le couper avant de le livrer au public.
M Parmi les succédanés du lait, il en est un qui paraît mériter une cer-
taine attention : c'est un lait de poule, fait avec l'œuf entier, blanc et
jaune mélangés avec du sucre et de l'eau, quoique sa parfaite analogie avec
le lait ne soit pas démontrée, comme on l'a fait observer. Mais resterait en-
core la difficulté de se procurer des œufs.
» On a parlé aussi de la viande crue et du thé de bœuf. Ces préparations
peuvent réussir chez certains enfants, mais l'expérience nous a appris que,
souvent, elles donnent des aigreurs, des coliques et de la diarrhée (i). »
(i) Je pense qu'il ne serait peut-être pas inutile de rappeler quelques préparations que les
Anglais emploient, avec le lait ou même sans le lait, pour l'alimentation des petits enfants.
On coupe, dans un bol, de petites tranches de pain, qu'on couvre d'eau froide; on f.iit
cuire au four, pendant deux heures, on bat avec une fourchette et l'on sucre légèrement.
Faites sécher de la mie de pain sur une assieite, à une petite distance du feu. Aussitôt
qu'elle est sèche, vous l'écrasez dans un mortier, vous la réduisez en une poudre fine, vous
passez au tamis, puis vous la mettez au four jusqu'à ce qu'elle devienne un peu rousse. Vous
prenez une petite quantité de cette poudre, vous la préparez comme le gruau et vous sucrez
légèrement.
Les Anglais font un grand u.sage des farineux pour les petits enfants, et surtout d'une la-
70..
( 528 )
M. MoissEXET adresse à l'Académie un exemplaire d'une Note lithogra-
pliiée, sur le rationnement de la population de Paris pour le pain et la
viande.
Cette Note sera jointe aux documents soumis à la Commission nommée
jiour les questions relatives à l'alimentation.
M. Pagliari appelle l'attention de l'Académie stn- IVIficacité de son
« eau hémostatique ».
La séance est levée à 5 heures un quart. É. D. B.
rine populaire parmi eux [Hard' s farinacenus food for infants). Les farineux donnent quel-
quefois de la constipation aux rnfanis. On y obvie en ajoutant un tiers de gruau.
Je citerai encore la poudre de biscuit de Lemann [Lemann's biscuit pou der), qu'on liouve
à Paris dans les pharmacies anglaises.
Enfin, je signale la préparation suivante. On fait tremper du riz de première qualité dans
leau froide, pendant une heure; on l'écrase, on ajoute de l'eau fraîche, on laisse bouillir à
petit feu, jusqu'à ce (jue la pulpe puisse passer dans une passoire; on remet dans la casserole,
on ajoute deux morceaux de sucre et on laisse bouillir encore ptndant un quart d'heure.
Maintenant, si vous mettez cette |)r(paration à un tiers de lait, vous avez un liquide ayant
la consistance d'une crème.
Parmi les cinq préparations que je viens d'indiquer, c'est cette dernière que je préfère. Je
l'ai vu employer journellement en Angleterre, avec le plus grand succès.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI 24 OCTOBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOLTILLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. DcpuY DE Lomé demande la parole et donne quelques développe-
ments nouveaux sur la manière de procéder de l'aéronaute pour diriger
un aérostat, exécuté conformément aux données qui ont fait l'objet de ses
Communications précédentes.
Cet exposé de iM. Diipuy de I^ôme, avec les figures qui en font le com-
plément indispensable, sera compris dans le prochain Compte rendu.
M. LE GÉNÉRAL MoRiN communique à l'Académie une pièce manuscrite
portant pour litre: « Sur l'équilibre des machines aérostatiques; sur les
moyens de les faire descendre et monter, et spécialement sur celui d'exé-
cuter ces manœuvres sans jeter de lest et sans perdre d'air inflammable,
en ménageant dans le ballon une capacité particulière, destinée à contenir
de l'air atmosphérique, par M. Meusnier ».
Celle pièce, qui paraîtrait être un Rapport écrit de la main de Monge,
sera l'objet d'un examen spécial, et imprimée, s'il y a lieu, dans l'un des
prochains Comptes rendus.
r. R., 1870, 2' Semestre. (T. LXXI, N" J7.) 7'
( 53o )
AIËMOmES LUS.
HYGIÈNE PUBLIQUE. — De l' alimentalion des hahilanls dans une ville en élnt
de siège. Seconde Note, par M. G. Grimadd, de Caux. (Extrait.)
(Renvoi à la Commission nommée pour les questions
relatives à l'alimentation.)
« ... Entre la situation de Venise en 1849 et celle de Paris en 1870,
abstraction faite du climat et de la saison, flont il n'est pas nécessaire de
tenir compte, tout est semblable : tout, à l'exception de la famine, qu'en
aucun cas nous n'éprouverons au même degré. C'est pourquoi la prudence
ordonne d'aviser, en recourant dès à présent à l'emploi des moyens pré-
servatifs contre les épidémies qui peuvent survenir, moyens conseillés par
une hygiène dont l'expérience a consacré l'efficacité. Ceux que j'ai à expo-
ser sont fort simples. Mais nous sommes dans des moments où la vulgarité
est le grand mérite : il s'agit d'être utile à tous.
» A Venise, aux premières manifestations épidémiques, je coupai court
à tout souci d'alimentation recherchée. Une soupe à l'ail fit partie du
régime de la maison : maîtres et serviteurs, tous les matins, dès le lever,
chacun avait sa part d'un potage dont la composition était fort simple. On
coupait le pain par larges tranches dans une soupière, et on l'arrosait
d'huile; on l'assaisonnait avec du poivre et du sel; on mettait dessus plu-
sieurs gousses d'ail cru, sim])lenient écrasées; enfin on versait sur le tout
une suffisante quantité d'eau bouillante, et l'on attendait que le pain fût
bien trempé, pour donner à chacun sa part. Ainsi que j'ai déjà eu occasion
de le dire, nous étions quatorze dans la maison, et nul de nous ne fut ma-
lade, ni pendant ni après le siège.
» Que les cantinières qui font le service des fortifications distribuent
tous les matins la soupe à l'ail, et la santé des gardiens de nos remparts
trouvera dans cet aliment im grand élément de conservation.
» A cette indication, j'en joindrai une autre qui ne vise qu'à varier l'ali-
mentation. Paris est abondamment pourvu de café et de chocolat. On
obtient un aliment excellent, très-nourrissant et qui convient à tous les
âges, en faisant une soupe avec moitié café et moitié chocolat, l'un et
l'autre cuits à l'eau et convenablement sucrés. Pour beaucoup d'estomacs,
dans les circonstances où nous sommes, c'est la matière d'un repas conve-
nable au milieu du jour. Je dis cuits à l'eau, car le bon lait nous manque
tout à fait maintenant. »
( 53, )
M. JouLiE donne lecture d'iuie Note relative à la direction des ballons.
Pour éviter la perte du lest et la perte corrélative de gaz, qui limitent le
nombre des alternatives de descentes et d'ascensions possibles, l'auteur
propose de placer dans la nacelle, au lieu de lest, un réservoir métallique,
capable de résister à une pression de aS à 3o atmosphères, et muni d'une
pompe de compression. La pompe servirait à faire passer le gaz du ballon
dans le réservoir, pour obtenir un ilégoriflement et par suite une des-
cente; poiu" obtenir l'effet inverse, il suffirait d'ouvrir un robinet, qui lais-
serait revenir le gaz du réservoir dans le ballon. Ces mouvements alterna-
tifs pourraient être indéfiniment répétés —
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
MÉaiOmES PÏIÉSEÎVTÉS.
ASTP.OINOMIE. — Sur réclijjse totale du 22 décembre prochain; Lettre
de M. Janssen à M. le Président.
« L'Académie a accueilli mes travaux avec une bienveillance si mar-
quée, elle les a recompensés d'une manière si glorieuse pour moi, que je suis
encouragé à m'adresser encore à elle pour la continuation de mon œuvre.
« Cette œuvre se rapporte principalement aux deux objets suivants :
en premier lieu, l'étude des propriétés optiques de la vapeur d'eau et leurs
applications à la Physique céleste; en second lieu, la connaissance de la
constitution des enveloppes extérieures du Soleil.
» Les propriétés optiques de la vapeur d'eau, déduites d'abord de mes
études spectrales sur notre atmosphère et démontrées ensuite directement
par l'expérience sur le tube de vapeur, à l'usine de laVillette, en 1866, ou-
vrent aujourd'hui un champ nouveau en Astronomie physique.
)) Appliquées à notre atmosphère, elles m'ont conduit à proposer une
méthode spectro-hygrométruiue pour la recherche et la mesure de la va-
peur aqueuse, non-seulement à la surface de notre globe, mais jusqu'aux
régions les plus élevées de notre atmosphère.
u Mais l'intérêt de ces nouvelles méthodes se rapporte surtout à l'Astro-
nomie. Elles ont déjà permis d'étudier les atmosphères des planètes et de
constater, chez plusieurs d'entre elles, la présence de cet élément aqueux
qui joue un rôle si considérable dans le développement de la vie à la sur-
face d'un monde.
71..
( 55i )
» J'ai abordé, an même point de vue, l'étude des étoiles. On sait que le
spectre d'un très-grand nombre d'entre elles indique la présence d'une vaste
atmosphère d'hydrogène incandescent. Sirius nous en offre un exemple re-
marquable. Ces étoiles n'ont point de vapeur d'eau dans leurs atmosphères;
il en est d'auties, au contraire, dont le spectre accuse la présence de cet
élément, et pour lesquelles l'hydrogène fait généralement défaut. N'est-il
pas naturel de penser que ces astres nous représentent des soleils en voie
de refroidissement, et que, par suite des pertes causées par un rayonnement
contiiuié à travers d'immenses périodes de temps, leurs atmosphères ont
atteint enfin la température où les gaz générateurs de l'eau peuvent s'as-
socier. Le spectre de la vapeur d'eau deviendrait ainsi un critérium pour
juger de l'âge relatif d'une étoile. Ce sont là des aperçus dont l'avenir seul
peut monti'er la valeur; je ne les indique ici que pour constater tout l'ave-
nir de ces études et faire comprendre combien je dois regretter que les in-
struments m'aient fait défaut pour les poursuivre.
» J'arrive maintenant au Soleil. La connaissance de la constitution de
cet astre est entrée, depuis ces derniers temps, dans une phase nouvelle.
La théorie que nous devons à M. Faye se vérifie de plus en plus. Elle a
eu le rare mérite de servir de guide à nos derniers travaux, et d'y trouver
ensuite d'éclatantes confirmations. Aujourd'hui, l'étude journalière des
régions circumsolaires nous est permise; elle se poursuit activement, à
l'étranger surtout, et cette étude, combinée avec celle des taches de la
surface de l'astre, paraît suffisante pour nous conduire bientôt à la con-
naissance générale du Soleil proprement dit.
» A ce point de vue, les éclipses totales ont perdu une grande partie de
leur importance; elles ne constituent plus les seules et fugitives occasions
d'étudier les phénomènes qui ont leur siège en dehors du globe visible du
Soleil. Il ne faudrait pas en conclure cependant qu'elles ne présentent plus
d'intérêt : la nature des phénomènes lumineux, si beaux et si variables, qui
constituent ce qu'on a nommé l'ai/reo/e, nous est encore inconnue. I^'au-
réole prend-elle naissance dans notre atmosphère; résulte-t-elle d'un jeu
de lumière qui se produirait sur les bords de la Lune; faut-il enfin y voir
la manifestation de matières cosmiques répandues dans le voisinage du
Soleil? Nos méthodes actuelles d'observation ne paraissent pas suffisantes
pour trancher cette question difficile et complexe. C'est peut-être une raison
de ne perdre aucune occasion d'aborder le problème.
)) Une occasion de ce genre doit bientôt se présenter. Le 22 décembre
prochain, une éclipse totale aura lieu dans le sud de l'Europe (Sicile, Al-
( 533 )
gérie, Espagne). Je sais que le Bureau des Longitudes s'en était préoccupé,
et qu'il avait bien voulu me comprendre parmi les observateurs de la mis-
sion qu'il comptait envoyer. Malgré les circonstances si critiques et si dou-
loureuses que traverse notre pays en ce moment, il ne paraît pas que la
France doive abdiquer, et renoncer à prendre sa part dans l'observation
de cet important phénomène. En dépit du siège et sans avoir à demander
à nos ennemis le passage à travers leurs lignes, un observateur pourrait, au
moment apportun, se diriger vers l'Algérie par la voie aérienne; il empor-
terait seulement avec lui les parties les plus indispensables de ses instru-
ments, sauf à les complétera Marseille avant l'embarquement.
» Si l'Académie veut bien m'accorder son appui pour la continuation
des travaux dont je viens de l'entretenir, une partie des ressouixes pourrait
être employée à la réalisation de ce projet, et je m'offrirais pour tenter ce
voyage, heureux de donner ainsi à la science ce témoignage de mon entier
dévouement. »
Cette Lettre sera transmise à la Commission administrative.
PHYSIQUE. — Sur une expérience qui confirme la double hypothèse faite par
Ampère, de V existence d'un courant électrique fermé dans chaque molécule
d'une substance macjnétique et dans la Terre; par M. P. Le Cokdier.
(Renvoi aux Sections de Physique et de Géométrie.)
« Conception théorique de la question à résoudre. ~ Soient [x, p.' e\. b, b'
les masses fictives que l'on est convenu de placer aux pôles boréaux de
deux solénoïdes et de deux aimants. Désignons l'une de ces quatre masses
par m, la Terre par T', et l'action d'un corps M' sur m par (M', m). Sup-
posons que l'on ait p. = p.', b = b', (p.', [Ji) = (p/, b), et posons Ty—\ = /,
)-^ — -' = cr_ Quand on attribue les phénomènes d'attraction et de répulsion
(T,(i) => ^
que présentent les courants, les aimants et le magnétisme terrestre à trois
causes essentiellement différentes, les lois de la mécanique laissent incon-
nus / et g, dont la détermination exige une expérience : tandis que la
double hypothèse d'Ampère exige cjue l'on ait
Donc une détermination expérimentale de/et de^ doit confirmer ou ren-
verser ces deux hypothèses.
( 534 )
» Expérience qui démontre les équations (i), — Mon frère Léon Le Cor-
dier, ingénieur, a eu l'obligeance de faire l'expérience que j'ai conçue pour
vérifier ces deux équations, et qui se réduit à constater que les axes d'un
aiiuant d'acier et d'un solénoïde infiniment petits, placés successivement
en un même point, et mobiles autour tie la verticale de ce point, s'ar-
rêtent toujours en équdibre dans le même plan vertical sous les actions,
combinées de toutes les manières possibles, des courants, des aimants et
de la Terre. Je ne puis ici qu'indiquer la théorie au moyen de laquelle j'ai
déduit de cette expérience les équations (i) : elle repose sur la définition
et sur le théorème qui suivent :
» Défniùon d\m système magnétique A, correspondant à un système 1 de
courants fermés. — On sait que 2 est toujours décomposable en éléments
plans idS de circuits fermés. A chacun de ces éléments idS, ayant pour
intensité / et pour aire plane X, correspond un élément E du système A,
formé de deux molécules magnétiques — |7. et + ^, réunies en deux points
dont la distance dn est normale à )., et satisfait à l'équation
(2) ixdn = R/X.
Le facteur R est le même pour tous les éléments idS du système 2 ; la mo-
lécule — p. est australe et placée dans X, ef -+- p. est du côté où il faut placer
l'œil pour voir le courant idS tourner dans le même sens que les aiguilles
d'une montre.
» Extension d'un théorème d'Ampère. — Soient 2 et 2' deux systèmes de
courants fermés, A et A' les deux systèmes magnétiques correspondants, défi-
nis par les constantes R et R'. On identifie l'action mutuelle qui s'exerce
en Ire 2' et 2 avec celles qui s'exercent
entre 2' et 2, ou entre A' et 2, ou entre A' et A,
en posant
(3) /...=y..«K., ou /;,,=/,,„ R', ou/,,, =/,,«RR'.
On démontrera ce principe en observant que, si l'on pose
//('^//■'^■^)'
W = -
on aura pour les travaux des actions mutuelles des deux corps solides A, A',
( 535 )
2, 2', dont l'un s'éloigne à l'infini,
La dernière de ces trois identifications a seule été faite par Ampère.
V Forme (jénéra le fies équations (i). — Soient deux fluides réels ou fictifs,
pouvant différer des fluides magnétiques uniquement par les valeurs des
coefficients relatifs à leurs actions sur les courants et les ainiants, et pro-
duisant les effets qu'on attribue au magnétisme terrestre. Soient f' une
molécule de l'un de ces deux fluides, m et m' deux molécules de fluides
magnétiques, et ids un élément de courant d'intensité i et de longueur ds.
Les équations (i) peuvent se mettre sous la forme
(4) f" = A.', (5) f^^fa.,
Ja,s Js.s Ji,s Js,s
et les cinq expressionsy^, sont définies par les formules fondamentales
(6) [m',m)=-fj^. (7) {t\m)^ - jjn^_.
(8) «,W.)=/.„^::!^^ (9) (.', /^,v) =/,/-::If^,
(lo) [i'ds' , ids) =fs,s '- — - (2COSS — 3cosô cos5').
Par des calculs bien connus, et que je supprime, on établira que / ei g
sont ce que deviennent-y^,, ^^ft,a quand on choisit les unités de manière
quejs,s, Ja,s ^i/i,s ^^ réduisent à l'unité. C'est pourquoi la question est ra-
menée à démontrer les deux théorèmes suivants :
') Théorème L — Les équations (4) et (5) résultent de la double hypothèse
d'Jmpère.
» Pour que les propriétés des aimants puissent s'expliquer par les cou-
rants d'Ampère, il faut que l'on puisse définir par l'équation (2) un sys-
tème 2' de circuits infiniment petits correspondant à un aimant donné A',
et produisant les mêmes effets que A' sur un secoml aimant A, et en même
temps sur un système 2 de coiu'ants fermés. Soit dn la distance des
pôles — p. et -4- [j. d'un élément magnétique de A : soit dti' celle des
pôles — fi'et -+- [)! d'un élément de A'. Il faut qu'une même valeur de K'
satisfasse aux deux conditions
(") w,,, = w,,„ w., = w.
A,I"
( 536 )
Or on a, en désignant par r la distance de X' à X,
W,,.= -/..«K' / \u.dn n'-£J, W,,,, = -A.R'W,
rr-'-
r
Substituant dans les deux équations (ii), et éliminant R', on trouvera (4)-
» Pour que l'hypothèse d'Ampère sur le magnétisme terrestre soit ac-
ceptable, sans qu'on ait besoin d'admettre celle qu'il a faite sur le magné-
tisme des aimants, il faut que l'on puisse définir par l'équation (2) un sys-
tème 2' de courants fermés, produisant le même effet que la Terre T' sur un
aimant A, et, en même temps, sur un courant fermé 2. Il faut, pour cela,
qu'une même valeur de R' satisfasse aux deux conditions Wj,^ = W^ ^ et
Wv. ; = Wt- ,. En traitant ces deux équations comme on a traité les équa-
tions (i i), on en déduit l'équation (5), et le théorème I est démontré.
» Mais lorsqu'on admet l'existence des courants moléculaires d'Ampère
dans les aimants, l'équation (5) devient ime identité, car alors on a iden-
tiquement/;,« =/,, et fs^„ = fs,s-
» Théorème II. — Les équations (4) el (5) sont démontrées par l' expérience
qui précède.
» Soit un aimant, assez petit pour qu'on puisse le traiter comme un
élément magnétique E, et un système de courants fermés, d'intensités con-
stantes, assez petit pour qu'on puisse le traiter comme un élément de cir-
cuit Ir/S. On placera successivement ces deux appareils en un même point G,
et on les rendra mobiles autour de la verticale de ce point. Chacun des
deux corj)s solides E, Ir/S, étant d'abord en équilibre sous l'action seule
de la Terre T', quand son axe se projette horizontalement suivant Ox, on
le déviera de cette position, en plaçant successivement, dans le voisinage
de O, un aimant fixe A', et un courant fermé fixe i'S', et l'on observera
ainsi quatre déviations. Si l'on convient de représenter la direction d'une
horizontale qui part de O par le point où elle rencontre une circonférence
horizontale, de rayon égal à l'unité et de centre O, et si l'on fait agir sur E
ou sur \dS un seul des corps ou systèmes de corps
T', A', i'S', T et A', T' et i'S',
on pourra représenter la projection horizontale de la direction d'équilibre
( 537 )
que prendra
l'axe de E 1
1 1
1 ''
a,
s,
[J-a,
IJ-S,
l'axe de I^S 1
1 par ■
1
\i,
a,
•$,
Va,
Vsi
et l'on démontrera aisément les relations
(12) y^_^/,_,sinfx„a.sinv„« =/;,„/„_, sinv„rt . sin/x„/,
(i3) J^Jc sSiniJ-sS .sinvj =/,s/a^^sinv,5 . sinp.,^
Il résulte de l'expérience que jul^ coïncide toujours avec v^, et fjt,^ avec v^.
Donc les équations (12) et (i3) deviennent (4) et (5) et démontrent le théo-
rème II.
)) Poin- que l'expérience donne des résultats précis, il faut que l'aimant
et le solénoïde mobiles soient infiniment petits. Or, il est facile de rendre
l'aiguille de déclinaison assez petite pour obtenir toute l'exactitude dési-
rable. Il n'en est pas de même pour le solénoïde ; mais l'appareil qu'on va
décrire satisfait rigoureusement à la condition demandée.
» Solénoïde spliérique. — Soit une sphère de centre O et de volume V.
En partageant son diamètre z'Oz en éléments égaux s, et menant par les
points de division des plans perpendiculaires à ce diamètre, on obtient une
infinité de parallèles S, qu'on supposera parcourus par des courants d'égale
intensité /, marchant dans le même sens que les aiguilles d'une montre
pour un œil placé en z, et constituant par leur ensemble un solénoïde splié-
rique. On trouvera que l'appareil ainsi construit reçoit identiquement, de
la Terre, des aimants et des courants extérieurs à V, les mêmes actions
qu'un circuit infiniment petit IdS, dont l'axe dn==z serait le premier élé-
I V
ment de Oz, et dont l'aire X serait définie par l'équation - z^ —• Ce circuit
est celui qui résulterait de la superposition de tous les circuits intérieurs
à V dans lesquels peut se décomposer le solénoïde sphérique, transportés
parallèlement à eux-mêmes.
» On verra aussi que cet appareil exercerait, sur l'unité positive de masse
magnétique, placée à son intérieur, la force constante et parallèle à O2
-T-Ja,s-'> qui émanerait d'un courant rectiligne indéfini d'intensité /, circu-
lant à la distance ^ £ de la molécule magnétique, et dans le plan perpen-
diculaire à Oz qui passe par cette molécule. »
C. R., 1870, 1" Semestre. (T. LXXI, N" 17.) 7'^
( 538 )
M. A. GArLDRÉE-BoiLi.EAU soumct au jugement de l'Académie un procédé
d'alimentation, applicable pendant la durée du siège. L'aliment dont il
s'agit était employé parles anciens Romains; c'est une bouillie faite avec
du blé grillé et moulu, l'auteur la désigne sous le nom de bouillie ro-
maine (i).
M. Gauldrée-Boilleau a déjà pris des mesines pour faire ouvrir à Paris,
dans le quartier des Ternes, un fourneau économique, où l'on distribuera,
moyennant un prix de 5 centimes, une portion chaude de cette bouillie,
avec lo centilitres de vin. Il se propose de venir ainsi en aide aux familles
nécessiteuses de ce quartier, et de donner un exemple pouvant susciter des
imitateurs dans les autres quartiers de la ville.
(Renvoi à la Commission nommée pour les questions relatives
à l'alimentation.)
(i) Choia: du blé. — Examen et soins préparatoires. — Blé d'hiver, parfaitement sain,
très-bien criblé. Même pour le blé qui paraîtra réunir le mieux ces conditions, on devra
extraire à la main les grains altérés, les graines étrangères et les petites pierres qui auraient
pu échapper au criblage.
Chauffage du blé. — Pour le chauffage du blé, on peut faire usage, soit de gamelles
évasées en tôle, soit de brûloirs à cylindre, soit de casseroles en fonte ou de poêles à frire.
Quel que soit le combustible employé, charbon ou bois, on ne versera dans l'ustensile
que la quantité de blé dont tous les grains pourront être mis, successivement et également,
en contact avec les parois chauffées. Agiter fréquemment le grain, en le faisant sauter dans
les vases ouverts, et évitant des coups de feu : le but à atteindre est l'évaporation de la plus
notable partie de l'eau contenue dans le blé, sans que le grain lui-même soit brûlé, ce qui
donnerait à la bouillie un goût désagréable.
Lorsque l'on se sert d'un brûloir, ouvrir le registre assez souvent, pour la sortie de la
buée d'évaporaiion qui se produit surtout au commencement, et en même temps agiter for-
tement le chargement du cylindre.
Le grillage est suffisant au moment où le grain, ayant pris uniformément un ion plus foncé
sans être charbonné, se casse sec sous la dent, par suite du plus grand développement qu'il
a pris. Aussitôt, aérer le blé à l'air libre (l'air extérieur de préférence si le temps le permet),
en le ventilant soit avec la gamelle de repas, soit avec un van, soit en l'étendant sur une
table propre. L'opération est parfaite lorsque le ble a perdu de 9 à 10 pour 100 de son
poids naturel.
Mouture. — On |)cut moudre, soit avec des moulins portatifs à café, soit avec des moulins
à manivelle. On réglera le degré de rapprochement des dents d'engrenage, de manière à
obtenir une farine aussi satisfaisante que le comporte la nature de l'appareil.
Cuisson. — Délayer la farine avec de l'eau (eau froide exclusivement), mettre le vase
sur un feu bien allumé; saler, poivrer si on le désire; remuer sans discontinuité le mélange
( 539)
M. A. ViGNAL écrit à r.icadéniie, au nom d'une Société formée par les
habitants de Paris, originaires de l'Ardèche, pour lui rappeler que, dans la
plupart des départements du midi de la France, le blé en nature tient, de-
puis un temps immémorial, une large place dans l'alimentation publique :
le blé subit simplement une décortication préalable dans le moulin. Une
Commission, prise dans le sein de cette Société, s'est assurée déjà que la
pratique des diverses préparations auxquelles cet aliment peut être soumis
s'effectuerait à Paris sans difficulté.
(Renvoi à la Comrgission nommée pour les questions relatives
à l'alimentation.)
M. Bouvet adresse une Note relative à une « force motrice applicable à
la navigation aérienne ».
L'auteur propose de substituer, aux six hommes qu'emploierait M. Du-
puy de Lôme dans le système qu'il a proposé à l'Académie, un moteur à
air dilaté par la combustion du gaz d'éclairage, puisé dans le ballon lui-
même. Avec le même poids, de 63o kilogrammes environ, cette machine
produirait un travail de 87 kilogrammèlres et demi par heure, au lieu d'un
travail de 24 à Sa kilogrammètres. La consommation de gaz ne ferait perdre
au ballon qu'une faible partie de sa force ascensionnelle, et pourrait être
compensée par l'élimination du lest : on pourrait d'ailleurs employer un
petit ballon auxiliaire, de 20 à aS mètres cubes, pour l'alimentation du
moteur.
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
avec une spatule de bois. A mesure que la bouillie bout, foisonne, épaissit, verser peu à
peu de l'eau (eau froide exclusivement), en quantité suffisante /)o(<r empêcher le mélange de
devenir trop épais. Après trente minutes, l'aliment aura acquis le dejjré de cuisson voulu.
Arrivée à ce point, la bouillie se trouve élevée à une haute température, qui, partage fait
entre les parties prenantes, leur permettra de manger chaud. L'aliment est agréable au
goût, et très-réconfortànt sans être indigeste.
Refroidie, la bouillie présente une massé coagulée qui se conserve sans altération pendant
plusieurs jours. Toutefois, lorsqu'on le pourra, il conviendra mieux, pour la manger, de la
faire réchauffer, soit à sec, dans un vase en tôle ou en fonte, soit dans un vase quelconque,
avec une légère addition d'eau.
Comme variété d'alimentation, ou pour rendre la bouillie plus nourrissante encore, on
peut faire revenir, dans le vase destiné à la cuisson, une certaine quantité de lard, de la
qualité dite lard de poitrine.
72..
( 5/io )
M. A. Brachet adresse une nouvelle Note concernant les divers systèmes
aérostatiques employés, et en particulier celui de Meusnier.
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
CORRESPONDANCE.
La Société de Géographie adresse à l'Académie la Lettre suivante :
« La Société de Géographie, dans sa séance de rentrée tenue le 21 oc-
tobre 1870, a décidé, à l'unanimité, qu'elle adhérait à la protestation de
l'Institut de France en faveur des richesses scientifiques, artistiques et lit-
téraires dont un bombardement de Paris entraînerait l'irréparable perte.
La Société a décidé, de plus, qu'elle adresserait à chacune des cinq Acadé-
mies son adhésion et ses remercîments, pour l'initiative prise par l'Institut
de France dans l'intérêt d'une cause noble entre toutes. »
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Sur l'emploi du boudin de sang de bœuf comme ali-
ment. Lettre de M. A. Riche à M. le Secrétaire perpétuel.
« Une Communication, faite dans la dernière séance de l'Académie des
Sciences (i), a pu faire penser qu'il convenait de mettre une certaine réserve
dans l'emploi du sang de bœuf comme aliment. Les observations faites, il y
a quelques années, en Allemagne, montrent, il est vrai, que des boudins de
porc fumés et longtemps conservés auraient causé des accidents. Mais ces
exemples n'ont rien de commun avec l'alimentation au moyen d'un boudin
de bœuf frais, non fumé et destiné à être mangé au bout de quelques
jours; ils rentrent dans les effets connus des viandes mal fumées.
» J'avais consulté, avant de m'occuper de ce sujet, divers médecins phy-
siologistes et, récemment, deux hommes dont l'opinion fait autorité dans
ces matières, M. Raynal et M. Huzard. Leur pensée peut se résumer ainsi :
le sang de tout animal dont la chair est reconnue saine est parfaitement
sain lui-même, quand il est récent et inaltéré. Or, on ne saigne dans les
abattoirs que les animaux reconnus comme sains. Les animaux morts sont
menés des parcs aux ateliers d'équarrissage, où ils sont détruits; les ani-
maux malades étant saignés sur place, leur sang ne peut se trouver dans les
(i) Comptcx rendus, ■p. 532.
( 54î )
abattoirs, où le sang consommé aujourd'hui pour la fabrication des prépa-
rations alimentaires est exclusivement recueilli. A cet égard, il en est donc
du sang comme de la viande.
» D'ailleurs, combien de personnes ont mangé déjà du boudin de bœuf
et n'ont eu qu'à s'en louer! N'en est-il pas de même pour le mélange de
sang de mouton, de riz et de foie, convenablement épicé et cuit au four
dans des terrines, dont vous aviez dit quelques mots dans votre intéressante
Communication sur l'alimentation actuelle de Paris? »
COSMOLOGIE. — Sur les rapports de l' Astronomie physique avec la Géologie;
par M. St. Mecnier.
« Essentiellement mathématique jusqu'ici, l'Astronomie s'est adjoint
dans ces derniers temps un chapitre tout nouveau. Grâce à une extension
inespérée des procédés de la Chimie, grâce aussi à l'attention accordée aux
météorites, les astres ont été comme les corps terrestres passés au creuset de
l'analyse. Cette étude, d'un genre si nouveau que la prévoir seulement eût.
été chimérique il y a quelque dix ans à peine, a fourni des résultats que
l'on peut résumer en deux grandes lois fondamentales relatives, l'une à
Vunité de constitution du système solaire, l'autre à Vtinilé des phénomènes
dans le même système.
» D'une partj en effet, les mêmes corps simples existent dans tous les
astres analysés jusqu'ici ; quand on a pu s'en assurer, on les a vus se grouper
en espèces minéralogiques identiques et même, dans quelques cas, on a vu
ces espèces s'associer de façon à donner lieu à des roches absolument sem-
blables entre elles, malgré la différence de leurs gisements.
» D'autre part, les phénomènes géologiques qui se manifestent sur le globe
terrestre, tels que les soulèvements, les éruptions de roches, les actions
volcaniques, la circulation de l'atmosphère et des océans ont pu être, dans
tels ou tels astres, retrouvés à des degrés divers.
» De ces deux grandes lois résulte ce fait capital, conforme d'ailleurs à
une immortelle théorie cosmogonique qu'il vient ainsi confirmer d'une
manière directe, que les astres du système solaire ont une origine commune
et qu'ils traversent, avec une rapidité en rapport avec leur volume, les
phases successives d'un refroidissement, phases qui se manifestent par les
états si tranchés du Soleil, des planètes, des satellites et des météorites.
Considérés de ce point de vue, les astres apparaissent comme de grands
touJs, dans lesquels des fonctions s'exercent au moyen d'organes particuliers
( 542 )
et qui fournissent les étapes d'un véritable développement. Ils naissent, ils
vivent, ils meurent, puis subissent le travail de la décomposition.
» L'ensemble grandiose de ces faits et de ces lois ne saurait trouver place
ni dans l'Astronomie physique, ni dans la Géologie proprement dite. Il
constitue une branche nouvelle de la science, à laquelle peut convenir le
nom de Géologie comparée, qui me paraît en définir nettement le but et le
domaine. Cette science nouvelle, si grande par son objet, se recommande
déjà par l'importance et le nombre de ses applications. Les plus directement
utiles se rapportent à la solution des problèmes fondamentaux de la Géo-
logie terrestre.
» C'est ainsi que la cause même des actions géologiques internes, qui se
manifestent à la surface du globe, paraît devoir être complètement dévoilée
par l'examen des phénomènes qui se passent sur le Soleil et sur les planètes,
ainsi que de ceux qui ont laissé des empreintes si nettes sur la Lune et dans
la substance des météorites. De toutes parts, nous avons les preuves les plus
manifestes d'une chaleur interne actuelle ou éteinte, suivant les astres, et
comme les effets que nous lui voyons produire sur ceux-ci sont identiques
aux phénomènes qui se manifestent à la surface du globe, il est impossible
de nier que ces derniers la reconnaissent pour cause. De façon que l'obser-
vation du ciel vient résoudre la question capitale de la Géologie terrestre et
que l'on pouvait croire au-dessus de tout contrôle direct.
» La structure des régions de la Terre, que leur profondeur soustrait à
l'observation, est de même éclairée, d'ime manière très-vive, par les données
que fournit l'étude des météorites; et il en résulte aussi des conséquences
bien probables relativement à plusieurs grandes questions, telles que le
mode de formation du globe, la cause du magnétisme terrestre, celle de la
grande densité de notre planète, comparée à la densité des roches que nous
connaissons, etc.
» Dans un autre ordre d'idées, il est permis de penser que les lois géné-
rales de la Météorologie pourraient être révélées ou du moins rendues plus
faciles à démêler des influences perturbatrices locales, par l'étude des mou-
vements des gaz solaires.
» Par une réciprocité complète, les notions qu'il nous est facile d'acqué-
rir à la surface du globe s'appliquent, dans beaucoup de cas, à l'explication
de phénomènes, sans cela inexplicables, que présentent les astres; les mon-
tagnes de la Lune sont des volcans, les calottes blanches des pôles de Mars
et d'autres planètes sont des glaces, les bandes de Jupiter sont des nuages
témoignant de l'existence de vents réguliers; nous pouvons affirmer toutes
( 543 )
ces choses, parce que nous avons sur la Terre des volcans, des glaces polaires
et des vents alizés.
» En résumé, la Géologie comparée, cherchant les rapports et les diffé-
rences de composition et de structure que présentent entre eux les corps
célestes et tâchant de préciser les conditions de formation de ces corps, relie
l'une à l'antre, comme on le voit, mais sans les confondre, la science de la
Terre et la science du Ciel. »
La séance est levée à 4 heures et demie. D.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
L'Académie a reçu, dans la séance du 17 octobre 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Des conditions sanitaires de l'armée de Paris; par M. A. COLiN. Paris, 1 870 ;
in-4°. (Extrait de Ia^I Gazelle hebdomadaire de Médecine et de Chirurgie,
n° 38.)
Schriften... Travaux de la Société royale de Physique et d'Economie de
Kœnicjsberq, 1 868-1 869. Koenigsberg, 1868-1869; 4 liv. in-4°.
Thermochemiske... Recherches thermo-chimiques sur tes lois de l'affinité
entre les acides et les bases à l'étal de solution; par M. J. Thomsen, Copenhague,
1869; in-4°.
Fortegnelse... Etal des publications de la Société royale des Sciences de
Copenhague. Copenhague, sans lieu ni date; opuscule 111-8°.
Oversigt... Comptes rendus de la Société royale des Sciences de Copen-
hague, 1868, n°5; 1869, n° 2. Copenhague, 1868-1869; 2 liv. in-8".
An... Examen de la règle de Newton pour trouver te nombre des racines
imaginaires d'une équation; par M. D.-A. Dalvi. Bombay, 1869; in-8°.
(2 exemplaires.)
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE DU LUNDI 31 OCTOBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
AÉROSTATION. — Sur les aérostnls dirigés (deuxième Note faisant suite à la
Communication du lo octobre); par M. Dupuy de Lôme (*).
« Dans la Note sur un projet d'aérostat dirigé, lue à l'Académie des
Sciences dans la séance du lo octobre, j'ai dit que cet aérostat aura une
vitesse propre de 8 kilomètres à l'heure par rapport à l'air ambiant, et
que, lorsqu'il sera en même temps emporté par un vent plus rapide, il
aura la faculté de suivre à volonté toute route comprise dans un angle
limite, résultant, pour chaque vitesse du vent, du rapport entre celte
vitesse et celle de l'aérostat.
» J'ai énoncé que cet angle limite des routes possibles à l'aérostat, de
chaque côté du lit d'un vent plus rapide que lui, était égal à l'angle au
sommet d'un triangle rectangle ayant pour base la vitesse de l'aérostat, et
pour hypoténuse la vitesse du vent. Autrement dit, en appelant ù cet
(*) Cette Communication est celle qui a été faite à l'Académie clans la séance précédente,
celle du 3,4 octobre.
G. U., 1870, 2« Semestre. (T. LXXl, N» 17.) 73
( 546)
v
î V et Y étant les vitesses
angle de déviation maximum, on a sini2 —
respectives propres à l'aérostat et au vent.
» Voici maintenant quelques aperçus sur la direction à donner à l'axe
de l'aérostat, direction dans laquelle il doit marcher avec sa vitesse propre,
pour que cette marche, combinée avec l'action du vent, amène l'aérostat
dans une troisième direction résultante, qui soit celle que l'aéronaute veut
suivre par rapport à la surface de la Terre.
» Soient D la rencontre de la verticale de l'aérostat avec la surface de
la Terre;
» DD' la direction du vent par rapport à cette même surface, la lon-
gueur DD' représentant aussi le chemin fiiit par le vent dans l'unité de
temps;
i> A le point auquel l'aéronatite veut arriver à la surface de la Terre.
» Joignons le point A au point D, et du point D', comme centre, décri-
vons une circonférence avec un rayon DR représentant le chemin que
l'aérostat fait par sa vitesse propre dans lutiité de temps.
» Si la ligne AD coupe cette circonférence [fi(j. i), elle le fera généra-
lement en deux points M et M'. Joignons ces deux points M et M' au
centre D'; menons par le point D une parallèle Dr au rayon D'.M. Il est
clair que si, à partir de la verticale D, l'aérostat marche avec sa propre
vitesse égale à D'M, en maintenant cotuinuellemeni son axe dans une
direction parallèle à Dr, il se mouvra suivant une route dont la projection
sur le sol sera DA, et, en continuant ainsi, il arrive à la verticale A.
Fig. I.
» Il en sera de même si, à partir du point D, l'aérostat marche avec sa
propre vitesse en maintenant son axe dans une direction Dr' parallèle
( 547 )
à D'M'. Ces deux manières de gouverner le conduiront également au |)oint
voulu A, seulement dans un tem|3S différent.
» La durée du voyage s'obtient en menant par le point A une parallèle
à la direction de l'axe du ballon ; cette parallèle coupe la direction DD',
pour le premier cas, en D"; pour le second cas, en D"^ ; les durées de voyage
D"D D" D
sont —7— pour le premier cas, et -j-f— pour le second cas, D'D étant, avons-
nous dit, égal au chemin fait par le vent dans l'unité de temps.
» De celle fig. i, il résulte aussi qu'en appelant I l'angle que fait le vent
avec la direction du point qu'on veut atteindre, 1/ l'angle suivant lequel il
faut diriger l'axe du ballon de l'autre côté de cette dernière ligne, V et V
les vitesses respectives de l'aérostat et du vent, enfin 4^ la distance de D à A,
on a
sinl' = —, sinl.
La durée du voyage est égale à
^
ou bien
VcosfdzV'cosI''
Vcosii^V"— V'sin^/
» Si, toutes choses restant égales d'ailleurs, l'angle du vent avec la
direction du point à atteindre vient à augmenter, les deux points d'inter-
section M et M' se rapprochent, et il arrive un moment où la ligne AD est
tangente à la circonférence {fiij. 2); les deux directions de l'aérostat qui
conduisent également au point voulu se confondent alors en une seule.
Fig. 2 L'angle I arrive ainsi à la li-
mite maximum d'écart que l'aé-
rostat peut obtenir avec le lit
A-"~"-^ "^-^ du vent, et Cangle V correspon-
—j dant est alors un angle droit,
c'est-à-dire que, ijoiir obtenir te
maximum d'écart précité, il faut
jaire marcher Vaérostat en diri-
geant son axe perpendiculairement
à la route suivie sur le sol.
» Si, en joignant le point de
départ au point d'arrivée, la ligne A'D ne rencontre pas la circonférence,
73.
( 548 )
cela démontre qu'avec cette direction et cette intensité du vent l'aérostat ne
peut pas atteindre le point A'.
l'ig. 3. » f^a ficj. 3 montre la solution de la question en
supposant la vitesse du vent DD' moindre que la
vitesse de l'aérostat D'R. La ligne AD coupe tou-
jours alors la circonférence ; c'est qu'en effet, dans
ce cas, il est toujours possible à l'aérostat d'at-
teindre un point placé dans une direction quel-
conque. La figure donnerait aussi, dans ce cas,
deux solutions pour la direction à donner à l'axe
de l'aérostat à l'effet de le faire cheminer dans la
direction DA; c'est la direction Dr faisant un
angle aigu avec DA qu'il faut choisir; la direction
Dr' fait bien cheminer l'aérostat sur la ligne DA,
mais en s'éloignant du point A au lieu de s'en approcher.
» Une fois posés les principes qui précèdent, il est facile de montrer
comment l'aéronaute, tant qu'il peut distinguer les objets à terre, doit agir
pour se diriger avec précision vers le but de son voyage, ou pour recon-
naître qu'il est dans la condition d'impossibilité définie ci-dessus.
» S'il peut, avant le départ, mesurer par les moyens connus la vitesse et
la direction du vent, il lui sera facile de tracer sur la carte une des fig. i, a
ou 3, suivant le cas, et reconnaître ainsi la possibilité ou l'impossibilité de
faire route vers le j)oint voulu. Il mesurera l'angle 1' qu'il doit faire faire à
l'axe de l'aérostat avec la direction de la hgne joignant le point de départ
au point d'arrivée. Des deux angles 1', c'est l'angle aigu qu'il convient de
choisir presque toujours, à moins qu'on n'ait un motif pour retarder le mo-
ment de l'arrivée tout en cheminant dans la direction voulue. Une fois
l'angle I' ainsi calculé, la direction DA étant tracée sur la carte, la direc-
tion Dr par rapport au méiidien magnétique se trouve aussi déterminée,
et la boussole peut servir à maintenir cette direction dans l'obscurité ou
dans les nuages cachant la terre; mais, la direction et la vitesse du vent étant
sujets à changer fréquemment, il importe que l'aéronaute puisse rectifier
sa manœuvre à divers moments du voyage. Il suivra donc, tant qu'il le
pourra, la marche sur le sol d'un fil à plomb suspendu à l'avant de la na-
celle, et, en ouvrant plus ou moins l'angle I, il maintiendra cette marche
sur la ligne voulue. Mais si, après avoir perdu de vue la terre, il se retrouve,
en la revoyant, hors de sa route, il faut qu'il refasse son point et se trace
une nouvelle loule à suivre.
( 549 )
)) A cet effet, il opérera de la manière suivante, qui suppose qu'il puisse
reconnaître les lieux au-dessus desquels il passe.
» Il stopera un moment, se laissera emporter parle vent seul, observera
le passage sur le sol de la direction du fil à plomb pendu à la nacelle, et
notera à une montre à seconde le moment du passage sur un point connu
qui figure sur la carte. Il tracera immédiatement, sur cette carte, une ligne
allant de ce point au point d'arrivée. Cela fait, il observera de nouveau le
fil à plomb de manière à reconnaître un second passage sur un point défini
qu'il reportera également sur la carte. Joignant ainsi, par une ligne droite,
les deux points marqués, il aura la direction du vent et pourra calculer sa
vitesse; mais ce calcul est inutile pour sa manœuvre.
)) Si la direction du vent passe à gauche de la ligne joignant sur la carie
son point d'observation au lieu qu'il veut atteindre, il dirigera l'axe de
l'aérostat, l'avant vers la droite, et il marchera avec sa vitesse propre, en
faisant d'abord im angle assez aigu avec la direction à suivre sur le sol. Il
observera alors la marche du fil à plomb; si la ligne que suit ce fil reste en-
core à gauche d'une parallèle à la ligne voulue, l'aéronaute fera ouvrir
l'angle de l'axe de l'aérostat avec la direction à atteindre. Il continuera
à observer le fil à plomb en faisant ouvrir l'angle peu à peu, jusqu'à ce
qu'il arrive à faire marcher ce fil dans la direction voulue. Il y arrivera
ainsi rapidement, à moins qu'à un certain degré d'ouverture il ne s'aper-
çoive que la route suivie par le fil à plomb cesse de se rapprocher de la
direction désirée sans l'avoir encore atteinte. Il reconnaîtra ainsi qu'il est
dans le cas de la fïg. a, la ligne DA' ne rencontrant pas la circonférence
de la vitesse. Il peut alors convenir à l'aéronaute, soit de continuer sa
route en se rapprochant le plus possible d>3 la direction qu'il se proposait
de suivre, soit de chercher un autre point d'arrivée compris dans le secteur
qui est pour le moment à sa disposition. »
AÉROSTATION. — Sur les aérostats dirigés. 3^ Note de M. Dupuy de LÔme.
<( Dans ma première Communication sur la direction des aérostats faite
à l'Académie des Sciences le lo de ce mois, j'ai dit que, parmi les nom-
breux projets auxquels cette question a déjà donné lieu, aucun, malheu-
reusement, n'a encore été réalisé ni même amené à un état d'étude tel
qu'on puisse le considérer comme praticable sans trop de difficultés. Je
me hâtais d'ajouter : telle est du moins l'impression qui m'est restée des
projets parvenus à ma connaissance.
( 55o )
» Pressé du désir que m'ont inspiré les circonstances de voir construire
aussitôt que possible un aérostat dirigé, je n'ai pas pris le temps de faire
des recherches historiques sur cette question. Dans la solution que j'ai
proposée comme facdement praticable, il arrive que je me suis rencontré
sur divers points avec des études antérieures.
» Je ne saurais utilenient relater toutes ces coïncidences ; je m'expose-
niis d'ailleurs à faire des omissions involontaires. Cependant, je tiens à
dire un mot d'un essai sur la direction des aérostats, fait en iSSa par M. Gif-
fard, vu que cet ingénieur avait adopté à cet effet des dispositions ayant
beaucoup d'analogie avec celles auxquelles j'ai été conduit moi-même,
notamment pour la forme et la tenue du ballon porteur, ainsi que pour
l'emploi d'un propulseur à hélice. M. Giffard a même de suite abordé l'em-
ploi d'une machine à vapeur de 3 chevaux pour mettre son hélice en mou-
vement. Il s'est élevé dans son aérostat le 2-2 septembre iSSa, et il lui a
imprimé une vitesse propre de 2 à 3 mètres par seconde, en le dirigeant
très-bien au moyen d'une voile-gouvernail presque identique à celle que
j'ai adoptée.
» Cependant cette tentative de M. Giffard paraît avoir été abandonnée
par l'auteur. Quelques fautes dans les proportions et l'absence d'un moyen
pour maintenir gonflé le ballon porteur ont été cause, à mon avis, que cet
essai n'ait pas été suivi de résultats plus satisfaisants.
» M. Giffard est malheureusement absent de Paris en ce moment, et
c'est un de ses amis qui est venu me faire connaître les jours derniers les
faits relatés ci-dessus, que j'ai cru de mon devoir de signaler à l'Académie
à la suite de mes Commiuiicalions sur la direction des aérostats. »
ANATOMIE VÉGÉTALE. — Remarques sur lu position des trachées
dans les fougères (7* partie) ; par M. A. Trécul (i).
Didymochlaena sinuosa Desv.
« Dans cette Communication et dans la suivante, je me propose d'entre-
tenir l'Académie de quelques espèces du groupe des plantes qui ont fait
l'objet principal du travail de M. Mohl intitulé : De structura^audicis filu uni
arhorearuni [Icon. sel. plunt. crypt. bras. Mari.), et qui ont conduit ce savant
botaniste à admettre qu'il n'existe pas de vaisseaux spiraux dans les Fou-
(i) L'Académie a décidé que cette ConiiBunication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au CoiiijHc rendu.
{ 55i )
gères, opinion^ du reste, soutenue aussi par M. Ad. Brongniart, dans son
bel ouvrage qui a pour titre : Histoire des végétaux fossiles , Paris, 1828.
Dès I Soi, M. de Mirbel avait déclaré [Journ. de Phys., de Chiin. et d'Hisl.
nnl., t. LU, p. /jSB et suiv.) qu'il ne trouvait que des fausses trachées dans
plusieurs Fougères qu'il nomme. L'avis de ces éniinents botanistes pourrait
élre justitié, si l'on s'en tenait à un certain nombre de plantes de cette
famille, ou à l'état adulte de quantité d'entre elles, et encore dans ce der-
nier cas y aurait-il de belles et nombreuses exceptions. L'une de ces ex-
ceptions serait offerte par le Didymochlaena siniiosa Desv. que M. Mohl
met au nombre des Fougères arborescentes qu'il décrit. Il est vrai qu'en
lisant ce qu'en dit le célèbre phytotomiste allemand, on est porté à douter
s'il a désigné par ce nom la plante qui existe dans nos collections vivantes.
Le doute est d'autant mieux autorisé que l'histoire anatomique et morpho-
logique du Didymochlaena est fort obscure.
» Deux questions se présentent tout d'abord à l'esprit de celui qui étudie
avec attention ce qui a été publié à cet égard. La première est de savoir si
la plante est arborescente ou seulement rhizomateuse. La seconde a pour
but de décider si les figures de tiges qui ont été signalées comme dues au
Didymochlaena siniiosa, ont réellement été tracées d'après ce végétal.
» Ce (jui suit me paraît répondre à cette double question. Les figures ana-
tomiques de tige, les premières datées, se trouvent dans la planche A de la
Flora der Vorwell de M. le comte de Sternberg, publiée à Regensburg
en 1825. Un tronçon de tige et sa coupe transversale, qui désignent la
plante comme arborescente, y sont représentés. Il n'y a pas de description.
» Dans son Histoire des végétaux fossiles, qui, porte la date de 1828,
M. Ad. Brongniart figure un tronçon de la même plante et signale le Didv-
mochtaena simiosa comme arborescent (p. i55, PL XLII,fig. 2). Notre con-
frère donne en outre une coupe transversale du pétiole de la plante vraie
{PL XXXVIl, fiij. 25), qu'il considérait sans doute comme obtenue d'un
jeune individu; et, en eftet, la figure ne montre que sept faisceaux dans
ce pétiole, qni peut en acquérir dix et douze et même jusqu'à dix-huit.
» M. de Martius, dans ses Icônes selectae plantarum cryptognmicarutn bra-
siliensium, 1828a i834,avecrimage d'un tronçon de la tige (P/.A^A7A',//V/. 1),
représentée dans les deux ouvrages précédents, et une coupe transversale
(fig 2) attribuée à la même plante, donne le port d'une fougère en arbre
[PL XXFIIl), qu'il dit être \e Didymochlaena sinuosa, ce que la description
confirme pour les trois figiu-es à la page 90.
» Dans le même volume, M. Hugo v. Mohl décrit \esfig i et 2 de la
PL XXIX de M. de Martius comme appartenant au Chnoophora [Alsophila)
( 552 )
exrelsa, mais il attribue aussi une lige arborescente au Didymochlaena si-
nuosn (p. 4i)'
» A.-C.-I. Corda, dans sa 5A-«zzen zur vergleicheiiden Phytolomie vor-und
jelzlrvellUcher Pflanzen-Stonimc, qui fait suite à l'ouvrage de M. de Sternberg,
considère (p. xxxvi), comme M. Mohl, la fg. 2 de la PI. XXIX de M. de
Martius connue appartenant à V Alsophila e.vce/so; mais ^ouv \eDidymochloeixa
sinuosn il renvoie à la PL A de M. de Sternberg, dont, je l'ai dit, la^j/. i re-
présente la même plante que la^j/. i de la PL XXIX de M. de Martius.
» J. Raddi, dans ses Filices hrasilienses (p. 42), désigne son Diplazium
pulcfierrimiim (synonyme du Didymochlaena) par les mots : « Filix elegan-
tissima arborescens. »
» Endlichei-, dans son Gênera plantarum, n° 637, le décrit par « Filix
arborescens inter tropicos Americae et in Moluccis observata... »
» W. Hooker, dans son Species filicum, t. IV, p. 5, publié en 1862, l'in-
dique avec une tige droite et arborescente [Caudex erect, stoiit^ arboreoiis).
» Tous les auteurs qui précèdent s'accordent donc à faire du Didymo-
chlaena sinuosa une fougère en arbre, mais à cette opinion sont opposés des
faits d'une haute gravité.
» D'abord, les coupes transversales et les tronçons de tige représentés
par les botanistes que j'ai nommés, offrent tous les caractères d'une tige de
Cyathéacée. Tout y est : le volume de la tige, la forme des faisceaux vascu-
laires de cette tige, les petites taches qui simulent les fascicules intramédul-
laires, la forme des cicatrices laissées par la destruction des pétioles, les-
quelles cicatrices montrent : 1° un arc de faisceaux supérieur; 2° un arc de
faisceaux inférieur; 3° un groupe de faisceaux centraux dans la région
moyenne supérieure; 4° au-dessous, deux séries obliques de faisceaux de
chaque côté dans la région centrale inférieure. Rien n'y manque.
» M. Mohl, dans sa belle étude de la tige des fougères arborescentes,
manque de précision à l'égard du Didymochlaena; ct\v, malgré l'avis de
M. de Marlius, il a dit que \es fig. i et 2 de la PL XXIX appartiennent au
Chnoophora excclsn, sans indiquer sur quoi il a fondé sa description du
Didymochlaena. On ne le sent pas dans son travail. Les caractères anato-
miques qu'il en donne sont presque identiques à ceux qu'il trace du Chnno-
pliora excelsa. Ces deux plantes sont plusieius fois citées par lui simultané-
ment. Le Cbnoophnra excelsa est palpable, on le voit partout dans la des-
cription, comme Cyathéacée, mais le Didymochlaena est insaisissable. On
ne le distingue pas des Alsophila et des Cyathea. Je le cherche en vain.
» M. Mohl paraît donc aussi avoir examiné une tige de Cyathéacée sons
le nom de Didymochlaena sinuosa. Ce qui confirme dans ce sentiment, c'est
( 553 )
le nombre seize qu'il altribue aux faisceaux de la tige de cette plante,
comme de celle du Clinooplioiu (p. 4G), nombi'e qui coïncide avec celui de la
tige désignée par Didyinochlaena dans la fg. i de la planche A de M. de
Sternberg, qui présente quinze faisceaux dont un double,
» Puisque les tiges dont il s'agit appartiennent à une Cyathéacée, il est
légitime de concevoir des doutes à l'égard de l'opinion qui veut que le
Didymochlaena soit arborescent. Il y a deux sortes d'arguments contre
cette opinion : i° ceux que fournit la plante cultivée dans nos serres, qui
est toujours à basse tige, et dont les caractères anatomiques diffèrent essen-
tiellement de ceux qui ont été donnés par M. MohI; 2° les témoignages de
Plumier, de Desvaux et de Presl.
)) Si M. Gandichaud, qui a récolté la plante, avait eu affaire à une
fougère arborescente, il l'eût certainement exprimé. Il n'a rien dit à cet
égard. D'un autre côté, Desvaux, dans le Magaziii der Gesellschaft natur-
forscliender Freunde zu Berlin, 181 1, 5* année, p. 3o3, a fait suivre sa des-
cription du signe par lequel les botanistes représentent d'ordinaire les
plantes simplement vivaces?'". Poiret qui, dans le supplément à V Encyclo-
pédie, t. II, p. 5i5, en a fait un Asplenium ramosum, y ajoute le même
signe 'W- Enfin, Plumier, que j'ai nommé tout à l'heure, a laissé dans son
Traité des Fougères dJmérique, PI. LVI, sous la désignation de Loncliitis
rainosa, cauliculis sen coslis squamosis, une figure de la même plante trouvée
à Saint-Domingue. Il donne une description précise de son port, puisqu'il
dit que des costes ou caulicules (ce sont les frondes) longues de six pieds
sortent d'une racine grosse comme le bras et chargée de restes de costes
pourries. Cette expression racine chargée de castes ou pétioles morts ne
laisse subsister aucun doute. A Saint-Domingue le Didjmochlaena sinuosa
n'est pas arborescent, il est rhizomatenx, il est vivace comme la plante des
Indes orientales décrite par Poiret et par Desvaux, comme celle qui vit
dans nos serres. J'ajouterai encore ici l'avis de Presl, qui, dans ses Deliciœ
pragenses, 1822, p. 17451a nomme Aspidium cuttratum, d'après un spécimen
du Brésil; il en fait une plante vivace, comme les derniers botanistes que
je viens de citer.
» La tige que j'ai eue à ma disposition était de même recouverte dans
sa partie inférieure par les bases persistantes des pétioles morts. Elle était
assez grêle relativement, n'ayant qu'environ un centimètre et- demi de
diamètre après l'enlèvement des pétioles. Sa coupe transversale présente
sous l'épidermela couche fibroïde noire à l'œil nu, composée de cellules
C. R., 1S70, 2« Semestre. (T. LXXI, N" 18.) 74
( 554 )
à parois jaunes, épaisses et poreuses, si commune dans les Fougères. Cette
couche entoure un p:irenchyme dans lequel sont épars, avec les faisceaux
vasculaires, de nombreux petits groupes de cellules noires, qui se mon-
trent beaucoup plus étendus sur les coupes longitudinales. En les débar-
rassant avec précaution du tissu cellulaire qui les environne, on remarque
qu'au centre de 1-a tige ils constituent des lignes trèsirrégulières, en zig-
zag, qui se relient les unes aux autres de manière à figurer souvent des
mailles. Sur les côtés de la tige, ces lignes divergent obliquement en mon-
tant vers les pétioles, dans la partie inférieure desquels elles se dispersent
et finissent bientôt. De simples cassures opérées par lui couteau peu tran-
chant, sur la tige sèche, peuvent montrer fort bien aussi la connexion de
ces groupes noirs entre eux, qui paraissent constituer un système continu,
s'étendant de la tige dans la base des pétioles.
» Les faisceaux vasculaires, propres à la tige, qui étaient au nombre de
seize dans la plante de M. Mohl,sont dans la nôtre réduits à cinq, en quelques
endroits six, sur les coupes transversales. Ils sont de grosseur inégale,
comme d'habitude, suivant la hauteur à laquelle correspond la coupe, eu
égard aux mailles entamées, dont ces faisceaux faisaient partie.
» Après les avoir séparés des tissus qui les entourent, on trouve que ces
faisceaux forment un réseau de mailles oblongues, dont la dimension varie
avec le diamètre de la lige. Elles avaient 12 millimètres de longueur environ
sur 4 à 5 de largeur, près du sommet de la tige, où le diamètre était le plus
grand. Elles n'avaient, au contraire, que 6 à 7 millimètres sur 2^ à 3 mil-
limètres, dans les parties dont la végétation avait été moins puissante.
» De chaque maille partaient tantôt sept, tantôt huit faisceaux disposés
de la manière suivante. Les deux supérieurs, qui sont les plus gros,
sont in.sérés vers les trois quarts de la hauteur de chaque maille. Une
autre paire est placée un peu plus bas sur les côtés de la maille, et
ses deux faisceaux constituants sont assez souvent à une hauteur inégale,
l'un d'eux étant très-rapproché du supérieur. Les trois ou quatre autres
faisceaux occupent, vers le bas de la maille, le pourtour du fond de celle-
ci. Ces trois faisceaux, beaucoup plus rarement quatre, sont opposés cha-
cun au faisceau d'une racine adventive. Le plus souvent même, unis avec
la partie inférieure des faisceaux radiculaires, qui sont plus forts qu'eux,
ils semblent émaner directement de la face antérieure de ces derniers. 11 y
a donc trois racines adventives (rarement quatre) au bord inférieur de
chaque maille, au bas de chacune des feuilles, entre les pétioles desquelles
ces racines arrivent au dehors.
( 555 )
» Ces racines, qui ont un millimètre et demi dans leur plus grande lar-
geur, ont leurs ramifications rangées suivant le type II de M. Clos. Elles
sont donc distiques, et composées de deux faisceaux vasculaires opposés
et fusionnés par leur partie formée par les plus gros vaisseaux. Siu- les
côtés de ce système vascidaire sont des cellules du tissu dit cribreux, et au-
tour de celui-ci une strate constituée d'une à trois rangées de cellules no-
tablement plus grandes que la généralité de celles du tissu sous-jacent. Ce
système cellulo-vasculaire central est recouvert par une zone de cellules
fibreuses noires ou jaunes (suivant l'épaisseur des coupes), finement po-
reuses, régulièrement épaissies (i). Cette zone, profonde de huit à neuf
cellules dans les racines les plus fortes, est entourée d'un parenchyme
jaune ou noirâtre, de huit à neuf cellules aussi en profondeur, dont les
deux ou trois rangées internes sont plus étroites que les moyennes, ainsi
que la rangée externe, qui porte des poils radicaux longs, en apparence
unicellulés et crépus. Les racines secondaires ont la même constitution
générale, avec réduction du nombre des éléments de chacune de leurs
parties.
» Les faiscçaux pétiolaires émanés de la tige, ou nés de ceux qui en sont
sortis, et dont le nombre varie de sept à dix-huit, sont disposés en un arc
profond ou segment de cercle, ou même en cercle complet un peu au-
dessus de la base apparente du pétiole, où les deux faisceaux supérieurs
contractent ordinairement une anastomose.
» Dans les figures données par M. Brongniart et par Link, ces deux fais-
ceaux sont représentés les plus forts, et le dessin de Link [Àbhandl. der kœn.
1 ,
(i) Une telle zone fibreuse autour du corps cellulo-vasculaire des racines existe dans
nombre de Fougères. Dans certaines espèces, chaque cellule fibreuse est régulièrement
épaissie comme dans l'exemple précédent [Blechnum occidentale, Polypodiam vulgare,
aureum); dans d'autres espèces, les cellules fibreuses sont irrégulièrement épaissies; elles ne
le sont que peu ou pas sur la moitié tournée vers l'extérieur de la racine [Asplenium
Serra, fœniculaceuin, Belangeri.) Dans VÀsplenium Serra, six grandes cellules irréguliè-
rement épaissies décrivent les six côtés d'un rhombe tronqué sur les angles aigus, autour
du système cellulo-vasculaire des racines, vues sur des coupes transversales. Enfin, dans un
grand nombre de Fougères, il n'existe pas de zone fibreuse à cette place [Blechnum brasi-
liense, Jsplenium La.siopteris, Aspidium violascens, etc.). Les racines de toutes les Fougères
que j'ai étudiées, sauf les Marattiacées, offrent le type II, passant rarement au type III. Les '
seules racines du Marattia Kaulfussii, des Angiopteris pp'illinckii et evectn ont seules montré
de cinq à seize faisceaux vasculaires réunis en partie ou non au centre de la racine, comme
cela est bien connu, surtout pour cette dernière plante, depuis les observations de RI M. Bron-
gniart, Harring et Mettenius.
74-
( 556 )
Akad. (1er PFiss. zu Berlin, i835, t. 19, fig. 3) accuse en outre le crochet
vasculaire, qui, toutefois, n'a pas été mentionné dans le texte du Mémoire,
non plus, bien entendu, que les vaisseaux trachéens dont ces faisceaux sont
pourvus.
» Ces faisceaux pétiolaires sont unis cà et là entre eux par des anastamoses,
au moyen de courtes branches horizontales ou obliques, mais l'anastomose
inférieure des deux faisceaux supérieurs, à environ deux millimètres au-
dessus de l'insertion du pétiole, est souvent remarquable, quand elle est
formée par un simple rapprochement des deux gros faisceaux, qui se fusion-
nent sur une courte étendue, et se séparent un peu plus haut, comme je
l'ai déjà signalé chez le Nephrolepis platjolis; mais cette anastomose n'existe
j)as ici à la base de tous les pétioles, et elle n'est parfois représentée que par
une courte branche horizontale ou un peu oblique.
M Ces deux gros faisceaux, après l'apparition du crochet on lamelle inflé-
chie sur leur face antérieure, qui en est recouverte eu grande partie sur vuie
grande étendue du pétiole commun et du rachis, présentent sur cette face
antérieure, deux groupes de petits vaisseaux primordiaux spiro-annelés.
L'un de ces groupes est sons le crochet, l'autre est près du bord interne
supérieur de la partie la plus épaisse du faisceau. Dans un âge avancé de
l'organe, ces vaisseaux primordiaux s'altèrent, et leurs restes fragmentés
s'observent dans des petites lacunes qui occupent les mêmes places, et qui
peuvent aussi être remplies par l'extension des cellules environnantes.
M II y a en outre, à tous les âges du pétiole, de fort beaux vaisseaux spi-
raux ou trachéens de volumes divers, sur à peu près toute l'étendue de la
face supérieure de ces deux faisceaux principaux.
» Un groupe spiro-annelé primordial, altéré aussi dans la feuille adulte,
et des vaisseaux trachéens persistants, existent également sur la face interne
de chacun des autres faisceaux pétiolaires.
» Ces vaisseaux trachéens cessent par en bas avec les faisceaux du pétiole.
Ils ne pénètrent pas dans ceux de la tige qui en sont tout à fait dépourvus.
» Tous les faisceaux pétiolaires, à partir de la région inférieure de l'or-
gane qui renferme des groupes épars de cellules noires, lesquels groupes
disparaissent, ainsi que je l'ai dit, un peu au-dessus de la base du pétiole,
sont revêtus d'une gaine noire, formée comme M. MohI l'a annoncé pour
d'autres plantes, par l'épaississement des parois des cellules parenchvma-
teuses coutiguës aux faisceaux, et cette gaîne est ordinairement un peu
plus épaisse sur la face interne du faisceau que sur sa face externe. Elle
peut être réduite à l'épaississement en noir de la seule paroi cellulaire qui
( 557 )
touche immédiatement les cellules superficielles des faisceaux, ou bien cet
épaississenient peut avoir envnhi le pouitour des cellules des deux ou trois
rangées voisines.
» On peut juger par ce qui précède, qu'à part l'insertion des racines, et
la répartition des groupes de cellules noires dans la tige, la constitution du
Didymochlaena sinuosa a beaucoup d'analogie avec celle de plusieurs des
Âspidium que j'ai décrits antérieurement, et dont les faisceaux pétiolaires
affectent la même disposition. Cette similitude va se continuer dans le
rachis.
» Comme dans la généralité des plantes dont le pétiole a plusieurs
faisceaux, le nombre de ceux-ci va en diminuant de la base au sommet du
rachis, mais cette diminution ne s'effectue pas partout de la même manière.
J'en ai déjà indiqué des modes que le défaut d'espace ne me permet pas de
rappeler. Dans la plante qui m'occupe et dans les cas semblables, les deux
faisceaux supérieurs persistent le plus longtemps, ensuite ce sont les dor-
saux médians. Les faisceaux qui disparaissent les premiers sont les plus
rapprochés des deux supérieurs, et ainsi successivement jusqu'au dernier
dorsal, et j'ai souvent remarqué, au moins pour les cinq ou six derniers,
qu'ils le font en s'unissant par leur extrémité à la face dorsale du supérieur
collatéral, après, néanmoins, s'être anastomosés plusieurs fois alternative-
ment avec lui et avec leur voisin de l'autre côté. Par conséquent la dispa-
rition des faisceaux se fait ici des supérieurs au dorsal médian.
» Il n'existe plus que ces trois faisceaux à peu près dans la partie du
rachis qui commence à ne porter que des folioles lamellaires simples. Plus
haut, quand le dernier dorsal s'est ajouté définitivement à l'un des supé-
rieurs, à celui de gauche, par exemple, ce que j'ai vu arriver à la hauteur
de la sixième foliole de ce côté à partir du sommet, il ne reste plus que ces
deux supérieurs, qui eux-mêmes se réunissent en un seul à une petite dis-
tance au-dessus, entre l'insertion de la troisième et de la deuxième folioles
lamellaires.
» Bien que l'on retrouve dans la ramification du pétiole quelques traits
de ressemblance avec ce qui se passe dans quantité de Fougères, l'insertion
des ramaux de cet organe, étudiée sur les coupes transversales, suffirait à
elle seule pour caractériser le Didymochlaena parmi toutes les Fougères que
j'ai examinées jusqu'à présent.
» Quoi qu'il y ait dans le pétiole primaire, près des pétioles secondaires
inférieurs, à peu prés le même nombre de faisceaux que beai;coi7p plusbas
(lo à i8 par exemple), les rameaux du pétiole ne reçoivent de vaisseaux
( 558 )
chacun que du faisceau supérieur du même côté. Là, le crochet vascu-
laire de ce faisceau s'élargit beaucoup. J'en ai mesuré qui, immédiatement
au-dessous du premier pétiole secondaire, avaient o'""', 5o de largeur ou
profondeur, tandis que le crochet de l'autre faisceau supérieur, qui devait
produire le deuxièuie pétiole secondaire un peu plus haut de l'autre côté,
n'avait encore que o™",3o.
» Ce beau crochet se comporte d'après le quatrième des modes que j'ai
décrits en 1869 {Comptes rendus, t. LXIX, p. 269) c'est-à-dire que son
fond émet une branche tubuleuse, très-fortement épaissie sur sa partie
dorsale, et très-mince sur les côtés et sur la face antérieure. Celle-ci s'ouvre
longitudinaiement la première, vers l'entrée du faisceau dans la base du
pétiole secondaire. On a alors une gouttière dont le fond est épaissi d'une
manière fort remarquable. Ce fond est occupé par une forte arête longi-
tudinale qui, partageant la gouttière en deux, porte les vaisseaux trachéens
et annelés sur chacune de ses faces latérales. Un peu plus haut, cette
arête médiane se fend elle-même suivant la longueur. Il en résulte comme
une troisième gouttière vasculaire située entre les deux latérales. Elle gran-
dit pronqjtement. D'abord remplie par du tissu cellulaire périphérique du
faisceau, sa région moyenne est bientôi envahie par des cellules colonies
en jaune, en brun ou en noir, comme celles qui entourent le faisceau lui-
même. Quand celte gouttière est arrivée à son maximum d'amplitude, la
coupe transversale du corps vasculaire du pétiole secondaire présente
l'image d'une triple gouttière, dont les deux latérales plus étroites oc-
cupent les bords de la médiane plus large et plus profonde.
» Le fond de cette dernière, fortement épaissi, se sépare un peu plus haut
des deux gouttières latérales, et constitue, après cette séparation, le faisceau
dorsal du pétiole secondaire, tandis que les deux gouttières latérales en
forment les deux faisceaux supérieurs.
» Telle est la disposition des trois faisceaux des ])étioles secondaires prin-
cipaux, |)rès de leur insertion. Je dis des principaux pétioles secondaires,
parce qu'il n'en est pas de même pour les pétioles de second ordre les plus
haut placés sur le rachis. En effet, le beau crochet qui existe plus bas s'af-
faiblit de plus en plus par en haut; il se raccoiucit au point de ne presque
plus recouvrir du tout la face supérieure du faisceau auquel il appartient.
Dans ce cas, ce n'est plus le fond du crochet qui fournit seul les vaisseaux
du pétiole secondaire, c'est, que l'on me passe cette expression, le manche
du crochet qui se coupe, a|)rès avoir |)roduit sur sa face antérieure une
proéminence, dont le dédoublement reforme d'un côté le crochet du fais-
( 559)
ceau pétiolaire primaire, et de l'autre, un petit crochet à la nouvelle extré-
mité latérale de la bandelette vasculaire qui s'isole pour aller dans le pé-
tiole secondaire. Cette bandelette, qui a la forme d'une gouttière relative-
ment large et déprimée, se divise bientôt en deux faisceaux : l'un plus
faible et l'autre plus fort. Ce dernier se partage de nouveau en deux un peu
plus haut. On a alors les trois faisceaux du pétiole secondaire; mais dans
les pétioles secondaires les plus fiiibles, la bandelette vasculaire peut ne se
diviser qu'en deux faisceaux, qui sont placés sur le même plan, et repré-
sentent les deux faisceaux supérieurs. Il n'y a pas de faisceau dorsal dans
ce dernier cas.
» On voit par là que les faisceaux des pétioles secondaires supérieurs,
au lieu d'être produits, connue ceux des inférieurs, suivant le quatrième
type, le sont suivant le deuxième, décrit à la page aSg du tome LXIX de
ces Comptes rendus.
» Aux trois faisceaux des pétioles secondaires qui viennent d'être men-
tionnés, s'interposent des petits faisceaux plus ou moins obliques, qui les
relient entre eux, ce qui donne souvent alors cinq faisceaux sur les coupes
transversales; mais en approchant du sommet du rachis, le dorsal, après
être allé plusieurs fois de l'un des supérieurs à l'autre, disparaît en s'alliant
à l'un d'eux comme celui du pétiole primaire. Enfin, les deux faisceaux
supérieurs se fusionnent en un seul comme dans ce dernier.
» Les pétioles tertiaires, qui portent les foUoles lamellaires, sont tous
formés par le deuxième mode ou type que je viens de rappeler. Qu'il y ait
trois faisceaux dans lepétiole secondaire ou qu'il n'y en ait que deux, cha-
cun de ces deux faisceaux, ou chacun des deux stipérieuVs s'il y en a trois,
légèrement recourbé en crochet sur le bord externe, s'élargit et émet cà et
là une petite branche, qui se prolonge dans un pétiole tertiaire, après quoi
elle constitue la nervure principale de la foliole lamellaire dans laquelle
elle émet latéralement des nervures qui se subdivisent, et qui, toutes, con-
tiennent des vaisseaux trachéens déroulés et de non déroulés. »
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Emploi de rosséine dans l'alimentation;
par M. E. Fkemy.
« Dans les circonstances actuelles, des devoirs importants et nombreux
sont imposés à la chimie. Elle intervient dans les questions qui se rappor-
tent à l'armement, en transformant les l'ails Bessemer en aciers destinés à
aos chassepots et à nos mitrailleuses; elle retire le salpêtre des matériaux
( 56o )
de démolition; elle fabrique des poudres brisantes pour les bombes et les
torpilles; la chimie s'occupe aussi des subsistances; elle conserve celles
qui peuvent s'altérer et recherche constamment si elle ne peut pas fournir
à l'alimentation quelque principe utile, négligé jusqu"àprésent.
» En me plaçant à ce dernier point de vue, je viens conseiller de faire
entrer, pour une certaine part, dans notre alimentation, i'osséine qui est la
matière organique des os.
» Je n'ai pas l'intention de revenir en ce moment sur la question rela-
tive aux propriétés nutritives de la gélatine.
» Je crois cependant que cette discussion devra nécessairement être
reprise, parce que, dans le Rapport fait à l'Académie sur l'emploi de la
gélatine comme aliment, on trouve certaines assertions que la chimie et
la physiologie ne peuvent plus accepter aujourd'hui.
» Le corps que je propose à l'alimentation actuelle n'est pas de la
gélatine, mais de Vosséine. On sait que ces deux substances sont isomé-
riques, comme l'amidon est isomère de la dextrine, mais qu'elles n'ont pas
les mêmes propriétés.
» La gélatine est un corps qui n'existe pas tout formé dans l'organisme;
il est le produit d'une transformation chimique; il résulte de l'action de
l'eau et de la chaleur sur le tissu osseux : la gélatine est, comme on le sait,
conijjlétement soluble dans l'eau, tandis que I'osséine est insoluble et vé-
ritablement organisée; c'est le tissu osseux qui a perdu ses éléments cal-
caires; on peut comparer I'osséine aux tendons, à la peau et même aux tis-
sus fibrineux. Ces explications font comprendre la différence considérable
qui, au point de vue de l'alimentation, peut exister entre la gélatine et
I'osséine : dans l'acte digestif, une substance insoluble comme I'osséine
doit se comporter autrement que la gélatine qui est soluble.
» En proposant de faire entrer I'osséine dans l'alimentation, je dois, pour
éviter toute méprise ou tout malentendu, ni'expliquer catégoriquement sur
le rôle que cette substance peut jouer, selon moi, dans la préparation des
aliments.
» Je suis loin de dire que I'osséine puisse tenir lieu de pain et de viande;
je sais qu'une substance employée seule ne peut jamais suffire longtemps
à l'ahmentatioii, et je regretle que Ton n'ait pas encore réfuté l'assertion
suivante, que je trouve dans les conclusions du Rapport fait à l'Académie,
sur les propriétés nutritives de la gélatine : « Le gluten, tel qu'on l'extrait
» de la farine de froment ou de naaïs, suffit à lui seul à une nutrition com-
» plète et prolongée. » Une nutrition ne peut être complète et prolongée
( 56i )
que par l'emploi des aliments complexes, comme le lait et le pain, qui pré-
sentent l'association convenable des éléments minéraux et organiques utiles
à l'économie animale. Le gluten, c'est-à-dire In farine privée d'amidon, de
corps gras, de substances solubles, n'est donc pas un aliment complet.
» L'osséine, prise seule, ne peut pas être alimentaire pendant longtemps ;
sous ce rapport, elle ne diffère pas de la fibrine, de la caséine et de l'albu-
mine; mais, en l'associant à d'autres corps qui complètent son action phy-
siologique, j'afBrme que l'osséine peut jouer dans l'alimentation le même
rôle que les substances azotées qui forment la base de notre nourriture.
Je crois donc que nous avons un grand intérêt à demander en ce moment
à l'industrie l'extraction économique de l'osséine.
» Cette préparation est rapide et ne présente aucune difficulté; je l'ai
rappelée dans le Mémoire que j'ai publié, il y a déjà longtemps, sur la com-
position des os : c'est elle qui m'a permis de déterminer avec exactitude
la quantité d'osséine qui se trouve dans les différents tissus osseux.
» Pour obtenir industriellement l'osséine, il suffit de scier en lames
minces les os une fois dégraissés et de les soumettre pendant quelque tem[)s
à l'action fie l'acide chlorhydrique étendu d'eau. Le résidu organique, après
des lavages et une dessiccation, n'est autre que l'osséine; ce corps ainsi pré-
paré peut se conserver indéfiniment. Quant aux eaux acides qui résultent
de cette opération, elles ne sont pas sans valeur; en les saturant par de la
chaux, elles laissent précipiter du phosphate de chaux que l'agriculture
utilise aujourd'hui avec tant de profit.
» Sachant que les fabricants de gélatine exécutent les opérations que je
viens de décrire, lorsqu'ils veulent obtenir la gélatine alimentaire, je me
suis mis en rapport avec un habile industriel, M. Bonneville, qui a bien
voulu me donner toute l'osséine utile à mes essais. M. Bonneville est per-
suadé que les fabricants de gélatine pourraient fournir en peu de temps à
la consomnialiou de Paris des quantités con-'^idérables d'osséine et que le
prix de cette substance serait beaucoup moins élevé que celui de la
gélatine.
B Les os provenant des abatages sont en ce moment presque complète-
ment perdus; ils pourront donner environ 35 pour loo d'osséine.
» Cette Communication serait éviilemmenl incomplète, si je ne parlais
pas des essais que j'ai entrepris, avec le concours empressé et intelligent de
M. Balvay, dans le but de déterminer le mode d'emploi de 1 osséine dans
l'alimentation.
C. R., 1870, 2' Semestre. (T. LXXI, ^° 18.) 75
( 562 )
Il L'osséine retirée des os par l'action de l'acide chlorhydriqiie est dure,
élastique et coriace; sous cette forme, elle n'est pas comestible; mais lors-
qu'on la soumet à raction de l'eau bouillante, elle se gonfle et se transforme
en une substance molle; l'osséine une fois cuite, présente la plus grande
analogie avec une foule de tissus fort recherchés dans l'alimentation.
)i Pour employer losséine comme aliment, il faut la laisser gonfler lente-
ment dans de l'eau froide et la faire bouillir ensuite, pendant une heure
environ, dans de l'eau salée et aromatisée par les méthodes ordinaires.
L'eau gélatineuse provenant de cette cuisson peut déjà être utilisée dans
la préparation de certains aliments. Quant à l'osséine cuite dans les condi-
tions que je viens d'indiquer, elle possède une saveur agréable et peut
recevoir facilement tous les assaisonnements culinaires, comme je l'ai re-
connu dans un repas auquel j'ai pris part.
» En résumé, je n'hésite pas à déclarer que les os qui sont perdus en ce
moment peuvent fournir à l'alimentation un tissu azoté abondant, nutritif
et imputrescible : je demande donc que la fabrication industrielle de l'os-
séine alimentaire soit immédiatement entreprise. »
M. Chevreul demande la parole et s'exprime comme il suit :
« Je partage tout à fait l'opinion de M. Fremy, relativement à la diffé-
rence existant comme aliment entre un tissu qui donne de la gélatine et
cette gélatine (i). Depuis longtemps j'ai considéré la cuisson comme ten-
(i) Le ])assage suivant, extrait du compte rendu de la séance du 21 d'août i85i de la
Société centrale d'Agriculture, en fait foi. 11 s'agissait d'une matière alimentaire préparée
en Amérique par M. Ashbel-Smitli, en mêlant à de la farine de froment une sorte de iiâte
de viande cuite à la vapeur, puis séchée dans un four. Ce mélange appelé mccthccf esl formé,
selon Playfair, de 32 de matière azotée et de 68 de matière farineuse.
Voici ce qu'on lit aux pages 769 et 760 du Compte rendu cité :
" ... Relativement à ce qu'a dit M. de Kcrgolay des travaux de M. Darcet sur la géla-
» tine, M. Chevreul présente des observations sur les expériences qui ont eu lieu à cette
I' époque.
'■ Lorsqu'on s'est occupé, dil-il, de la gélatine, les idées sur Talimentation étaient peu
• avancées; si à cette époque une discussion scientifique se fût établie, peut-être n'aurait-on
» pas été aussi loin dans des essais qui ont eu des résultats fâcheux. Il est certain, ajoute
» M. Chevreul, que les aliments destinés à l'homme doivent être très-coniplc.ves de Uu mature.
Le biscuit (]u'on vient de présenter à la Société est un des arguments les plus forts en
'■ faveur d'une thèse qu'il a soutenue il y a longtemps, en suj)p()sant, bien entendu, que cette
« préparntion renferme, comme on le dit, toute la matière azotée de l'animal qui a servi à la
( 563 )
(lanl à simplifier beaucoup de matières organiques dans leur composilion
en les rapprochant des composés minéraux d'une composilion n\oins com-
plexe (i). Je considère donc depuis longtemps la gélatine comme moins
nutritive que les tissus organisés qui la donnent. Il y a plus, c'est que tout ce
qu'on appelle gélatine n'est pas dans une condition imique relativement à
la qualité alimentaire. Ainsi, sans refuser absolument cette qualité à la gé-
latine quand elle sera associée à quelque autre matière décidément alimen-
taiie, j'admets qu'une gélatine dont la solution concentrée se prend en
gelée par le refroidissement est plus alimentaire qu'une gélatine qui a
>> confectionner, mêlée avec de la farine de froment. Quand on a voulu déterminer la valciir
» nutritive des aliments, si on a bien fait de les soumettre à un dosage élémentaire, parce que
I) les aliments contenant de l'azote sont, sans doute, supérieurs aux autres, cependant il s'en
•> faut que les subslances contenant une même quantité d'azote soient toujours également
» avantageuses pour l'alimentation, attendu qu'il y a un certain anaiigement moléculaire des
0 atomes dont il faut tenir compte. En effet, moins l'arrangement des molécules des principes
Il immédiats de la viande est modifié par les préparations culinaires, meilleur est l'aliment,
» en général, parce qu'en général, plus cet arrangement a été modifié par l'action de lu
■1 clialeur, par exemple, plus il tend à se rapprocher d'une matière inorganique ; conse-
nt quemment, plus un tissu susceptible de donner de la gélatine aura été fortement cuit, di
» manière à devenir absolument soluble dans l'eau froide, plus il perdra de sa qualité alimen-
» taire primitive. Du reste, les échantillons de OTeifréeç/" présentés seront remis à l'examen
» d'une Commission spéciale.
» M. Chevreul fait observer que dans le meetbeef il y a deux choses réunies : de la farine
>- qui est une matière solide et de la viande devenue, dit-on, soluble.
» Dans la farine de froment, on a trouvé des matières qui correspondent, par leurs pro-
« priétés immédiates, aux matières qui existent dans les animaux, savoir des matières grasses,
11 des matières albumineuscs et fibreuses, des phosphates terreux ; c'est ce qui e.vplique les
11 bons effets des graines des céréales pour la nourriture des animaux. En résumé, M . Chevreul
11 estime que la réunion de deux substances aussi nutritives que la farine et la viande, opérée
11 par un procédé qui permet de donner sous un petit volume une quantité considérable de
» nourriture, a un grand avantage, si, connue on l'avance, les matières mêlées n'ont pas
1. perdu, par ce procédé, les propriétés nutritives dont elles sont douées. «
On voit par cette note que depuis vingt ans je suis de l'opinion de M. Fremy.
(i) Il faut comprendie que cette simplification ne porte pas sur le nombre des principes
immédiats après la cuisson de la matière organique, mais sur la composition des principes
cuits, moins complexe en général que la composition des principes crus. Par exemple, c'est ce
qui arriverait à un principe immédiat qui par la cuisson donnerait de l'eau, de l'acide carbo-
nique, de l'ammoniaque, etc., etc.; car évidemment l'eau, l'acide carbonique, l'ammo-
niaque, etc., etc., sont plus simples, que le principe immédiat cru.
^ 75- ■
( 564 )
bouilli longtemps ou qui a été préparée avec de la vapeur surchauffée, de
manière que la solution ne se prend plus en gelée par la concentration et
le refroidissement.
)) Je sais, par ma propre expérience, que le tendon du bouilli qui, en
conservant sa solidité, a été gonflé par l'eau, et aussi le tissu cellulaire qui
n'est point passé à l'état de gélatine dans le bouillon, sont réellement
nutritifs.
1) Enfin, en parlant de l'assimilation de la matière aux êtres vivants,
dans l'ouvrage De la méthode à posteriori expérimentale (i), que j'ai présenté
à l'Académie à la fin de l'année dernière, j'ai insisté sur les raisons qu'il y
a de croire que dans l'assimilation de la matière minérale aux plantes il y a
un phénomène inverse de la cuisson, que j'ai appelé décuisson, phénomène
qu'il est difficile de se refuser à admettre dans l'homme, où les principes
immédiats pris a l'état cuit se retrouvent à I état cru dans les liquides des
organes et dans les tissus qui les renferment.
» Le goiït du sel, du poivre, du laurier-sauce, en un mot des assaison-
nements comprenant des matières qui peuvent affecter le goût et l'odorat,
explique en partie la préférence que l'on donne a\ix viandes cuites relative-
ment aux viandes crues; car presque toujours la chaleur développe des
arômes très-variés recherchés du gourmet, ainsi que je l'ai démontré il y a
longtemps (2) et rappelé récemment à l'Académie (3).
» C'est dans la classe des assaisonnements que rentrent les principes odo-
rants acides du beurre, des fromages et d'autres aliments fermentes. Bien
des gens seraient étonnés d'apprendre où l'un de ces acides existe. Mais,
pour être vrai, il ne faut pas oublier que dans le fromage il existe plusieurs
principes immédiats essentiellement nutritifs.
» On a [jarlé dans ces derniers temps de la nécessité d'ime matière grasse
poiu' l'alinientation, et c'est avec raison; mais l'on aurait dû s'expliquer sur
la nature de cette matière, parce qu'elle est très-variée quant aux espèces
comprises dans cette dénomination, et indubitablement les propriétés essen-
tielles de chacune de ces espèces ne sont point indifférentes à l'alimentation.
» Ainsi (les carbures d'hydrogène binaires, la cholestérine, une matière
cireuse fusible à 63 degrés, la cétine, la stéarine, la margarine, l'oléine, la
(i) Paragraphes 8 et 9, de la page 223 à la page 255 inclusivement.
(2) Riippnrl sur le bouillon de la Compagnie Hollandaise, l'ait à l'Académie des Sciences
le ig de mars i832.
(3i Compte rendu de la séance du 10 d'octobre 1870, p. 49°-
( 565 )
butyrine et des essences sulfurées, des huiles phosphorées, ne doivent pas
être confondues sous la dénomination générale de matière grasse.
» J'ai signalé, il y a longtemps, l'existence de matières grasses dans les
farines des céréales, notamment dans celle du froment. J'en ai démontré
la préexistence dans l'amidon et le gluten, aussi bien que dans les tissus
d'origine animale où Berzelius en niait l'existence, soutenant qu'elles étaient
produites par la réaction de l'alcool ou de l'éther au moyen desquels on les
extrait.
» M. Dumas rappelle qu'il a été témoin, en i8f6, à Genève, pour l'ali-
mentation des populations pauvres de la Savoie, des bons effets obtenus
par l'emploi du parenchyme des os dépouillés de sels calcaires par les
acides. On l'employait à préparer des soupes économiques.
» Quelques années après, il constatait, connue Membre de la Commission
de la gélatine et chargé de toutes les analyses, combien, au contraire, la
gélatine extraite des os par la vapeur inspirait de doutes et soulevait de
difficultés.
» En conséquence, au moment où il signalait, il y a quelques semaines,
le parti qu'on pouvait tirer des os comme aliment, il indiquait, de préfé-
rence à la gélatine des os extraite par la vapeur, l'emploi du parenchyme
qu'ils laissent après le traitement par les acides. Par suite, divers industriels
ont offert leur concours à l'administration. M. Demongeot, ingénieur des
mines, chargé de la direction du service important de l'alimentation par
les produits fournis par le bétail, leur a donné les facilités nécessaires.
» Les os traités par les acides, ou le sait, laissent un tissu parenchyma-
teux qui, plongé dans l'eau bouillante et retiré au bout de deux minutes,
puis plongé dans une dissolution gélatineuse chaude et concentrée, reste,
en se desséchant, couvert d'un vernis qui l'abrite et qui préserve de rancis-
sement la graisse dont il est encore imprégné. Cette préparation est connue
depuis longtemps. Elle est décrite dans le Traité de Chimie appliquée aux
arts (i844)-
» Ce parenchyme <les os, que notre savant confrère nomme osséine avec
MM. Verdet et Robin, constitue-t-il un mélange de divers produits ou une
espèce? Telle n'est pas la question eu ce moment.
» Ce que M. Dumas, seul survivant de la Commission de la gélatine,
tient à rappeler, c'est que cette Commission n'avait pas confondu le paren-
chyme des os et la gélatine qui en provient, et qu'elle avait constaté la su-
périorité du premier produit sur le second.
( 566 )
M M. Dumas est convaincu que, si le parenchyme des os dépouillé par les
acides et desséché n'existe pas dans le commerce depuis longtemps, cela
tient surtout à la difficulté que l'on trouve à se procurer, pour une sem-
hlable fabrication, les os frais qui lui sont indispensables.
» En résumé, soit que la gélatine extraite par la vapeur se trouve cuite,
en employant cette expression dans le sens profond que lui attribue notre
illustre doyen M. Chevreul, et que le parenchyme des os se trouve décuit,
soit par d'autres causes complexes, M. Dumas regarde comme démontré
depuis longtemps par l'expérience que le parenchyme des os est un aliment
préférable à la gélatine des os, extraite par la vapeur,
» Notre savant confrère lui parait donc être dans le vrai, lorsqu'il ajoute
le poids de son expérience récente à celui des anciens travaux, aux-
quels la Commission de la gélatine avait consacré dix années de soins
assidus.
n Sans contester absolument à la gélatine un rôle alimentaire, lors-
qu'elle était mêlée à d'autres aliments, cette Commission préférait, en effet,
l'emploi du tissu des os dépouillé par les acides.
» Ses expériences démontraient de plus que, parmi ces tissus, ceux qui
contiennent une proportion plus forte de matière animale insoluble,
comme les pieds de mouton, sont préférables à ceux qui renferment sur-
tout une matière animale soluble, comme la tète de mouton.
» Il y a donc profit à faire entrer dans la composition des aliments le
parenchyme osseux en nature, tel que le laissent les acides, au lieu d'eu
extraire seulement la partie soluble qui constitue la gélatine proprement
dite.
» Les idées admises aujourd'hui au sujet du rôle des aliments ont sou-
vent emprunté et n'ont rien changé d'ailleurs au travail de l'ancienne
Commission de ïkcadéime {Comptes rendus, t. XIII), qui, fondé entière-
ment sur l'expérience, ne pouvait qu'être confirmé par l'expérience.
» Les os fournissent donc quatre sortes de produits, ainsi rangés dans
l'ordre utile comme aliments :
» 1° Parenchyme des pieds de mouton, isolé par les acides, contenant
le plus de tissu insoluble et pouvant nourrir pendant un mois sans répu-
gnance les animaux soumis à l'expérience;
» 2° Parenchyme des têtes de bœuf ou de mouton, contenant surtout
des matières animales solubles; les animaux s'en dégoûtent au bout de
ciufl ou six jours;
» 3" Gélatine récente et inaltérée; les animaux la refusent oti s'en dé-
( 567 )
goûtent bientôt lorsqu'elle est mise seule à leur disposition, mais elle peut
être utilisée à l'état de mélange avec d'autres aliments;
» 4° Dissolutions gélatineuses altérées, même légèrement; elles exciloni
la répugnance des animaux et ne peuvent pas être employées, mémo à
l'état de mélange avec d'autres aliments. »
« M. Payex, à l'appui de l'instante recommandation présentée par
M. Fremy, en vue de décider l'application du tissu organique des os dans
l'alimentation, dit qu'il ne serait pas même nécessaire de diviser en lames
minces les os compactes et épais, opération d'autant plus dispendieuse
qu'elle s'appliquerait aux gros os longs et en lames épaisses, dits de Inivail,
employés dans la tabletterie. Le plus grand nombre des os d'un prix bien
mouidre, provenant de l'abattage des animaux, s'appliquent directement
en effet dans les usines à la préparation du tissu organique désigné sous
ie nom d'o5 amollis: tels sont les divers os minces très-irréguliers ou très-
jioreux des tètes de bœufs et de moutons ; ceux de l'intérieur des cornes
qui, bien que volumineux, offrent relativement à leur masse une surface
très-grande à l'action de l'acide en raison du nombre considérable des ca-
nalicules qui traversent toute leur épaisseur; les os très-minces d'omoplates
des moutons; les côtes minces ordinairement concassées afin d'extraire par
l'eau bouillante la matière grasse que recèle la partie spongieuse interne
de ces os; la portion élargie des côtes de bœuf après que l'on en a obtenu
les petits cercles dits moules de boutons; les os ainsi troués, désignés vul-
gairement sous le nom de dentelle, laissent une très-grande surface à l'ac-
tion de l'acide, et n'ont qu'une faible valeur comparativement avec l'os de
travail qui les a fournis.
» C'est dans les mêmes vues que l'on applique à la préparation du tissu
organique, dit osséine, les os de tibia des moutons.
M Quant aux os d'omoplates des bœufs, ils sont réservés comme os de
travail ; on se borne à entamer avec une hachette les portions renflées con-
tenant les parties spongieuses, afin que l'eau bouillante en puisse faire sor-
tir la matière grasse.
» On pourrait sans doute utiliser directement au profit de la nourriture
de l'honuiie les tissus de chondrine qui terminent les portions planes des
omoplates et des côtes, en introduisant ainsi une certaine variété de pro-
priétés spéciales généralement favorable à l'alimentation.
» Quant aux portions renflées des gros os longs (fémurs du bœuf), on
les sépare à la scie pour exti-aire la moelle, réserver la partie tubulaire au
( 568 )
travail, et diviser à la hache ou concasser les bouts renflés afin de faire
sortir par l'eau bouillante la graisse contenue dans ces parties spon-
gieuses [i).
» La matière grasse obtenue ainsi par l'eau bouillante (ou parfois directe-
mentj des parties tubulaires et spongieuses ouvertes, constituerait elle-mèrae
une excellente substance alimentaire, à la seule condition de traiter le plus
promptement possible après l'abatage, pour éviter toute altération, ceux
de ces os non destinés à être réunis à la viande dans le pot-au-feu. Ces der-
niers eux-mêmes forment une partie des matières premières de la fabrica-
tion des graisses d'os et du noir animal.
» On conçoit naturellement que le traitement des os par l'acide chlor-
hydrique exclut toute cette partie du nombre des matières premières
applicables à la fabrication du charbon d'os qui serait utilisé dans l'extrac-
tion et le raffinage du sucre.
» M. Payen, en terminant, ajoute à l'appui des importantes considéra-
tions présentées par MM. Chevreul, Dumas etFremy et de la démonstration
expérimentale fournie par M. Edwards aîné sur les propriétés nutritives du
tissu organique des os, ce fait qu'il avait observé et consigné dans les
Comptes rendus à l'époque où M. Blondiot avait bien voulu mettre à sa dis-
position un chien muni d'une canule à l'estomac permettant l'extraction
facile du suc gastrique. Ce suc, maintenu à la température de 4o degrés c".,
avait le pouvoir de désagréger et de dissoudre graduellement le tissu
organique des os. Cette réaction du principe actif spécial (pepsine ou
gasterase), qui agit d'une manière analogue sur diverses substances azotées
alimentaires, semble un indice de la propriété du tissu organique des os de
pouvoir concourir utilement pour sa part, comme les tendons et les tissus
cutanés, à la nutrition de l'homme (i). »
( i) Lorsqu'on les a laissés se dessécher au soleil, ces os gras ne fournissent plus de graisse
à l'eau bouillante parce que cette matière fluidifiée s'est substituée à l'eau hygroscopique,
et ne peut plus être extraite directement.
(2) Surtout lorsque ces substances, non entièrement désagrégées ou dissoutes par l'ébul-
lition, sont associées à d'autres aliments complémentaires plus sapides. [Des substances ali-
mentaires, p. 82. 4' édition.)
( 569 )
AÉROSTATION. — Mémoire sur l'équilibre des machines aérostalicjues, sur les
différents moyens de les faire descendre et monter, et spécialement sur celui
d'exécuter ces manœuvres sans jeter de lest et sans perdre d'air inflammable,
en ménageant dans le ballon une capacité particulière, destinée à contenir de
l'air atmospltéricpie; par M. Mecsnier (i).
)) M. Meusnier commence par examiner l'état d'équilibre des machines
aérostatiques, telles qu'on les avait vues jusqu'alors. Elles sont composées
d'une simple enveloppe remplie en tout ou en partie d'air inflammable.
» L'atmosphère pressant d'autant moins ces machines qu'elles s'élèvent
davantage, l'air qu'elles contiennent a dû se dilater de plus en plus pendant
leur ascension. Il a donc été nécessaire ou de laisser vide, en partant, une
partie de la capacité de l'enveloppe qui pût loger l'excès de volume acquis
ainsi par l'air inflammable, ou de lui ménager une issue par laquelle il
piàt s'échapper sans mettre la machine en danger de se rompre. Dès lors
l'air dont elle est remplie est toujours en quantité beaucoup moindre qu'il
ne faudrait pour la tenir pleine à la surface de la terre ou à tout autre
point plus bas que celui où elle a été considérée d'abord.
» Le volume d'un tel ballon doit donc varier continuellement suivant
les différentes hauteurs qu'il occupe dans l'atmosphère : il doit diminuer
en descendant, augmenter en montant, et se trouver généralement en raison
inverse de la pression de l'air environnant. Mais il faut encore observer
que la pesanteur spécifique de l'air atmosphérique est d'autant plus grande
qu'il se trouve plus pressé par le poids des couches supérieures. Le volume
du ballon varie donc en sens contraire de la pesanteur de l'air qui l'entoure
et suivant la même proportion. Il suit de là que dans les différents états qui
viennent d'être considérés le poids absolu de l'air qu'il déplace est toujours
le même à toutes sortes de hauteurs.
» Puis donc que l'équilibre d'une machine aérostatique n'est autre chose
que l'égalité entre son poids total et celui de l'air déplacé, cet équilibre
doit avoir lieu à toutes sortes de hauteurs, et la machine est par conséquent
indifférente à occuper une place plutôt qu'une autre dans l'atmosphère.
(i) Ce Rapport ou projet de Rapport, écrit entièrement de la main de Monge, mais non
signé, a été trouvé dans les Archives du Conservatoire des Arts et Métiers. (A. M.)
CeUe pièce est celle dont il a été fait mention dans le Compte rendu de la séance du
24 octobre, p. 52C). (E. D. B.)
C. K., 1870, ^i» Semestre. (T. LXXI, N» 18.) 76
( 570 )
» Il suit de là que si des uavigateurs aériens entrepreuuent de s'abais-
ser en évacuant eux-mêmes une portion de l'air inflammable de leur ballon,
ils diminuent le volume de l'air que ce ballon déplace, sans diminuer en
même raison le poids total de la machine, puisqu'ils n'ont évacué qu'un
fluide très-léger, l'excès de pesanteur acquis par ce moyeu se conservera le
même à toutes les positions inférieures et fera descendre la machine jus-
qu'à terre.
» Il faudrait donc, pour arrêter la machine, jeter une quantité de lest
qui compensât juste l'excès de pesanteur de l'aérostat, et, comme cette
précision est impraticable, il s'ensuit que la descente continuera si le lest
jeté est en trop petite quantité et que si, au contraire, l'on rend à la ma-
chine un petit excès de légèreté, elle remontera un peu plus haut que le
point où elle se trouvait originairement, puisque son excès de légèreté se
conservera le même jusqu'à ce qu'elle se trouve remplie de nouveau.
I) Les moyens manquent donc aux machines aérostatiques ordinaires
|)Our prendre à demeure aucune position intermédiaire entre la surface de
la terre et le point le plus haut où elles ont une fois navigué. Elles sont de
plus soumises à l'inconvénient inévitable de n'être susceptibles que d'une
navigation très-courte; quand même, en effet, on supposerait leur enve-
loppe tout à fait imperméable à l'air inflammable, la dilatation que la cha-
leur du soleil occasionne dans l'intérieur en fait fréquemment sortir des
volumes plus ou moins considérables par l'issue dont on a vu plus haut la
nécessité. Le refroidissement oblige, par la raison contraire, a jeter une
certaine quantité de lest et, par ces vicissitudes répétées, la machine se trou-
vera bientôt forcée à prendre terre, lorsqu'enfin la provision de lest se
trouvera entièrement épuisée.
» Ces considérations expliquent pourquoi tous les ballons qu'on a lâchés,
dans un grand nombre d'expériences en petit, sont demeurés si peu de
temps en l'air, malgré les soins qu'on a apportés à la construction de plu-
sieurs d'entre eux. Ces machines, abandonnées à elles-mêmes, n'ayant au-
cun moyen de jeter du lest, la première condensation les fait retomber. Si
c'est pendant le jour qu'ils ont été élevés, la nuit est devenue nécessaire-
ment le terme de leur course.
M Après avoir montré que le défaut d'un équilibre permanent est attaché
à la construction ordinaire des machines aérostatiques et tient spécialement
au changement de volume qu'elles éprouvent par la plus petite variation de
hauteur, M. Meusnier conclut que la première condition à remplir est que
l'air intérieur soit toujours un peu plus comprimé que l'air environnant.
( 5?' )
Si, en effet, une cause quelconque porte alors la machine au-dessus ou au-
dessous de son point d'équilibre, son volume ne changeant plus, ie poids de
l'air déplacé changera comme la densité de l'air qui l'entoure, l'équilibre
ne pourra subsister à cette nouvelle position et l'aérostat sera obligé de re-
prendre celle qu'il occupait d'abord.
» Après avoir donné ce moyen de conserver une position constante,
M. Meusnier cherche ceux d'en changer à volonté, sans perdre cet excès
de pression nécessaire pour chacune et sans auctme dépense d'air inflam-
mable ni de lest, de manière à obtenir, à proprement parler, une navigation
dont la durée soit illimitée. Il ne peut y avoir pour cela que deux méthodes
générales que M. Meusnier examine successivement.
» L'une consiste a faire varier à volonté le volume du ballon sans rien chan-
ger à son poids. Si^ en effet, par un mécanisme quelconque on pouvait
contracter le ballon, comme les poissons compriment leur vessie d'air, il
est clair qu'il s'abaisserait jusqu'à ce qu'il trouvât un air plus pesant, doni
un volume égal à la nouvelle capacité de la machine fît encore équilibre à
son poids. Le contraire arriverait si l'on permettait au ballon d'augmenter
en capacité. M. Meusnier fait même voir que, dans cette disposition, la
pression intérieure ne s'anéantit jamais, quoiqu'elle aille toujours en dimi-
nuant à mesure que la hauteur augmente; et il en résulte que, si la machine
a été construite de manière que son enveloppe puisse résister à cette pres-
sion pour les positions voisines de la surface de la terre, elle doit, à plus
forte raison, la supporter à toute autre hauteur.
» Mais quoiqu'il y ait des moyens d'exécuter, dans la pratique, cette
compression des ballons à la volonté des navigateurs, la complication du
mécanisme qu'il faudrait employer porte M. Meusnier à préférer la seconde
méthode ; c'est-à-dire à faire varier le poids du ballon sans que son volume
change. Il est évident que cette autre manière d'agir sur la machine doit
également servir à lui donner une position quelconque à volonté; car, si
l'on augmente son poids, elle descendra nécessairement jusqu'à ce que l'air,
devenu plus dense, puisse, sous le même volume, faire équilibre à une plus
grande pesanteur; elle montera, par une raison semblable, si son poids
absolu diminue, et, en gouvernant à volonté ces variations de poids, on
rendra les changements de position, dont il s'agit, aussi grands ou aussi
petits qu'il sera nécessaire.
» Mais pour rendre aussi variable et surtout pour augmenter le poids
d'une machine aérostatique qui est nécessairement isolée et séparée de tous
les corps dont nous pouvons disposer ici-bas, il n'y a évidemment d'autre
7^)..
( 572 )
marque que d'employer le fluide même dans lequel elle nage. Il suffit donc
d'introduire dans la machine une certaine quantité d'air atmosphérique
lorsqu'il sera nécessaire de la faire descendre. En évacuant ce même air
on la déterminera à s'élever, et, comme il entraînerait alors avec lui une
partie de l'air inflammable, si ces deux airs étaient à portée de se mêler,
il en résulte qu'il faut destiner à l'air atmosphérique une capacité particu-
lière. Telle est la marche de raisonnement qui conduit M. Meusnier à re-
connaître la nécessité d'un espace ménagé dans l'intérieur de la machine
pour contenir de l'air commun. Il observe que c'est en parcourant toutes
les dispositions possibles et par voie d'exclusion qu'il est parvenu à ima-
giner cette nouvelle disposition, et il en conclut que c'est la seule qui puisse
remplir le vrai but de la navigation qu'on cherche à obtenir.
» M. Meusnier fait voir que cette méthode remplit toutes les conditions
qu'on désirait : la pression intérieure se conserve exactement la même à
toutes sortes d'élévations, quoiqu'il semble au premier coup d'oeil qu'elle
doive augmenter de plus en plus à mesure qu'on fait descendre la machine
en y entassant du nouvel air; mais il est aisé de sentir qu'en des<;endant
ainsi, la machine rencontre des couches d'air de plus en plus élastiques,
dont la pression détruit celle qui naîtrait intérieurement, sans cela, d'une
plus grande quantité d'air logée dans le même espace. L'étoffe n'a par
conséquent à supporter qu'une tension qui ne varie point, et sa force étant
réglée pour une position quelconque se trouvera convenir pour toutes.
Le mécanisme nécessaire pour manœuvrer l'air atmosphérique, comme
cette idée l'exige, est d'ailleurs d'une grande simplicité : un soufflet ordi-
naire suffit poin- introduire cet air dans la machine, et, quand il s'agira de
l'évacuer, il ne faudra que lui ouvrir une issue, la pression intérieure le
forcera à s'échapper.
» M. Meusnier termine son Mémoire en examinant de quelle manière
il est le plus avantageux, dans la pratique, de disposer les deux capacités
qui doivent loger l'air inflammable et l'air atmosphérique. Il dislingue à cet
égard trois arrangements |)ossibles, mais il préfère le dernier, qui consiste
à renfermer le ballon d'air inflammable dans une seconde enveloppe entiè-
rement semblable : c'est l'intervalle compris entre ces deux enveloppes qui
doit contenir l'air atmosphérique. Il résulte de cette disposition plusieurs
avantages considérables : la pression intérieure ayant lieu égaleuient dans
les deux airs différents dont la machine eet remplie, l'enveloppe qui contient
l'air inflammable n'en éprouve aucune tension ; l'enveloppe extérieure est
donc seule fatiguée, et, si cotte cause pouvait au bout d'un certain temps
( ''l'^ )
y ouvrir quelque issue imperceptible, la perte d'air qui en résulterait
serait facile à réparer, puisqu'il ne s'échapperait que de l'air atmosphérique
en contact avec cette enveloppe : l'étoffe qui renferme l'air inflammable
est d'ailleurs à l'abri de toute espèce d'insulte, et cette construction tend
à rendre la machine à la fois plus sûre et plus durable.
Addition au Mémoire précédent.
» IVIM. Robert ayant construit à Saint-Cloud une machine aérosta-
tique qui contenait une capacité réservée pour recevoir de l'air atmos-
phérique comme M. Meusnier l'avait proposé à l'Académie sept mois aupa-
ravant, il fit alors à son Mémoire une addition considérable, dont nous
allons rendre compte, et qui fut communiquée avant l'expérience.
» Quoique la disposition adoptée par MM. Robert (consistant en un
petit ballon intérieur destiné à contenir de l'air atmosphérique) et com-
prise dans les troi? que M. Meusnier a examinées, ne soit pas celle qu'il
indique comme la meilleure, elle est cependant susceptible des mêmes
calculs, et l'addition dont il s'agit a pour objet de faire l'application
numérique de la théorie précédente au cas particulier du ballon de Saint-
Cloud. M. Meusnier détermine en conséquence, d'après les dimensions
de cette machine et du ballon intérieur qu'elle renfermait, quelles sont
les limites de hauteur entre lesquelles ce mécanisme peut servir à régler
à volonté l'élévation : il trouve qu'au delà de 566 toises, l'introduction de
l'air atmosphérique rie peut plus ramener la machine jusqu'à terre, parce
que le ballon intérieur se trouverait entièrement rempli avant que la
descente fût achevée; il tire de cette considération un nouvel avantage en
faveur de l'arrangement qu'il avait préféré, et pour lequel il ne saurait
exister de pareilles limites ; et il conclut que, dans le cas particulier qu'il
examine, il faut au moins éviter de s'élever au-dessus de ce terme de 566
toises ; il assigne les bornes qu'il convient de donner à l'excès de légèreté
avec lequel la machine doit être abandonnée pour ne point excéder cette
hauteur.
» M. Meusnier recherche ensuite d'où dépend la pression intérieure
qn'il est nécessaire de procurer à la machine d'après les principes établis
dans son Mémoire. Il démontre qu'elle est d'autant plus grande que l'excès
de légèreté au moment du départ a été plus considérable ; et, comme
cette pression ne doit pas excéder certaines bornes pour ne pas occasionner
dans l'étoffe une tension plus grande que la résistance dont elle est capable,
il en résulte une nouvelle condition à laquelle l'excès de légèreté doit
encore satisfaire.
( 574 )
» Mais il faut, pour connaître cette condition, avoir le moyen d'évaluer
la tension qu'éprouve l'enveloppe en vertu d'une pression intérieure donnée :
il est aisé de sentir que cette tension doit dépendre beaucoup de la figure
de l'enveloppe, et pent n'être pas la même dans toutes les parties si la sur-
face n'est pas de nature sphérique. M. Meusnier donne à ce sujet une mé-
thode générale poiu' déterminer les tensions qu'une pression quelconque
peut occasionner à tous les points d'une surface de figure quelconque, et
il ap|)liqtie cette méthode à la forme du ballon de Sainl-Cloi:d, qui, en
effet, n'était pas sphérique, mais composé d'une partie cylindrique terminée
par deux demi-sphères. îl résulte de cette théorie que la force qui tend à
ouvrir le cylindre dans le sens de sa longueur est toujours double de celle
qui tiraille les éléments d'une sphère de pareil diamètre; qu'à égalité de
pression intérieure, ces forces sont proportionnelles à l'une des dimensions
de la machine, et que, pour le cas particulier du ballon de Saint-Cloud,
dont le diamètre était de 3o pieds, une pression capable de porter un
pouce de mercure exercerait, dans l'étendue de la partie cylindrique et
dans les demi-sphères des extrémités, des tensions de 1200 et 600 livres
par pied d'étoffe.
« Ces tiraillements, beaucoup trop considérables pour le tissu frêle d'une
étoffe de soie, font conclure à M. Meusnier qu'il faudrait diminuer le plus
qu'il est possible la pression intérieure, et, par conséquent, l'excès de lé-
gèreté de la machine; mais plusieurs causes s'opposent à cette diminution.
» Premièrement, il est essentiel que la machine ait, au moment de son
départ, ime certaine vitesse d'ascension; car si le vent, qu'elle suit de né-
cessité dès les premiers instants, l'entraînait avec beaucoup plus de vitesse
qu'elle ne s'élève, elle suivrait en quittant la terre un plan très-incliné, et
pourrait aller rencontrer, même à une assez grande distance, les édifices ou
les abords qui environnent le lieu de son départ; il faut donc à cet égard
lui donner assez de légèreté pour qu'elle soit bientôt dégagée de tous les
obstacles.
M En second lieu, si la température de l'air intérieur d'une machine
aérostatique était toujours la même que celle de l'air environnant, quand
même celle-ci varierait, il y aurait toujours un degré constant de pression
intérieure; mais l'action du soleil qui pénètre l'enveloppe excite bientôt
dans l'air renfermé une chaleur plus grande que celle qui règne en dehors.
D'après les expériences de M. de Morveau, la différence à cet égard peut
facilement aller jusqu'à i5 degrés du thermomètre, et cette cause suffit
pour augmenter subitement la pression intérieure de deux pouces de mer-
cure au moins, il doit arriver la même cliose quand la machine pa.sse
( 575)
proinptement d'une couche dair échaufté dans une autre plus froide, dont
la grande capacité ne lui permet que de prendre très-lentement la tempé-
rature.
» Ces variétés inévitables dans la pression intérieure exigent donc que
les machines aéroslatiques soient en état de résister à de violentes ten-
sions, et M. Meusuier donne le moyen d'obtenir cet avantage sans que
jamais la véritable enveloppe soit fatiguée par un tiraillement continuel
qui lui ferait perdre promptement l'imperméabilité nécessaire : il faut que
celte enveloppe soit entièrement enfermée dans une sorte de filet plus étroit
qu'elle dans tous les sens; alors elle ne pourra jamais être entièrement ten-
due, et le filet dont il s'agit supportera seul l'effort dû à la pression inté-
rieure. C'est donc une règle de plus à joindre à celles qui ont déjà été
établies pour la construction des machines aérostatiques, que de leur don-
ner à l'extérieur une enveloppe de force, uniquement destinée à supporter
la compression de l'air intérieur et pi'oportionnée à cet effort.
» La machine de Saïut-Cloud n'étant point construite d'après ce prin-
cipe, qui était encore ignoré, M. Meusuier fait voir qu'elle ne peut être
exempte de faire fréquemment des pertes d'air inflammable dans le cas où
la pression, trop considérable, obligera les navigateurs à en évacuer une
partie. Il propose donc au moins un moyen de régler ces pertes de manière
qu'elles n'aient heu que dans les circonstances absolument indispensables,
et de conserver dans l'intérieur de la machine une petite pression néces-
saire pour le jeu du ballon intérieur qu'elle renfermait : c'est une soupape
que l'air intérieur puisse ouvrir de lui-même quand son élasticité passe
certaines bornes. M. Meusuier calcule la giandeur qu'il faut donner à cette
ouverture pour évacuer l'air aussi promptement que l'ascension le ferait
dilater, et il donne la force que doit avoir le ressort appliqué à cette sou-
pape pour qu'elle ne puisse être soulevée que par une pression supérieure
à celle de deux ou trois lignes de mercure que l'enveloppe peut supporter
habituellement.
» M. INIeusnier calcule ensuite l'excès de légèreté nécessaire pour que
la machine s'élève avec une vitesse de 3 pieds par seconde; il juge cette
vitesse suffisante pour que, dans le cas d'un vent ordinaire, le ballon se
dégage des objets environnants, mais il donne le moyen de connaître
l'excès de légèreté qu'il faudrait lui procurer dans le cas d'un vent plus fort.
» M. Meusnicr examine la conduite que les navigateurs auraient à tenir,
même en ne faisant pas usage de la soupape qu'il conseille et en supposant
le tissu de l'enveloppe sujet à une déperdition d'air inflammable, il prévoit
qu'alors la pression intérieure sera fréquemment réduite à rien, ce qui
( 576 )
serait le présage d'une descente prochaine; il assigne la quantité de lest
qu'il convient de jeter pour rétablir cette pression, quand il ne s'agit que
de naviguer à une hauleur constante; il détermine l'espace que la machine
peut parcourir en descendant à l'aide du soufflet disposé pour introduire
de l'air commun dans le ballon intérieur, et trouve que chaque coup de
soufflet doit faire descendre la machine d'environ 6 pieds; il indique
aussi le poids dont il convient que ce soufflet soit chargé pour faire entrer
l'air extérieur dans le ballon malgré la pression qui y règne.
» M. Meusnier propose une méthode de disposer le lest par parties
d'un poids connu, de telle sorte qu'on puisse toujours savoir le poids absolu
de la machine. Il donne eu conséquence une table calculée pour tous les
états par lesquels le ballon peut successivement passer à mesure que les
pertes d'air inflammable obligeront à diminuer son poids. Ou voit dans
cette table le poids total de l'air inflammable que la machine renferme
encore à chaque époque; la hauteur du point où, cet air remplissant la
capacité entière, le ballon intérieur se trouverait entièrement déprimé et
ne pourrait servir à l'élever davantage, ce qui constitue ce que M. Meusnier
appelle limite supérieure d'équilibre. On voit également, pour chaque état
de la machine, la position de cet autre point où le ballon intérieur,
étant tout à fait plein d'air commun, ne pourrait continuer à faire des-
cendre l'aérostat, et qui par cette raison est nommé limite inférieure d'équi-
libre. Deux autres colonnes indiquent le rapport entre la hauteur absolue
et celle du baromètre; de sorte que, à l'aide de cette table, l'état du ballon
intérieur, qu'on ne voit point, est toujours facile à conclure; c'est donc,
comme le dit M. Meusnier, une vraie table nautique offerte aux navigateurs
de l'air.
» M. Meusnier finit par calculer la déperdition dont une étoffe peut être
susceptible, suivant la grandeur de la machine et la hauteur où elle se
trouve dans l'atmosphère; et il trouve qu'en suivant le plan de conduite
qu'il propose, et en supposant l'enveloppe du ballon de Saint-Cloud de
même nature que celle du ballon parti des Tuileries le i*=' décembre 1783,
cette machine, chargée de trois hommes, pouvait se tenir en l'air pendant
un intervalle de dix-sept heures.
Observations sur l'expérience aérostatique de Saint-Cloud.
» M. Meusnier, après avoir suivi pendant plusieurs jours les préparatifs
de cette expérience, rend compte en détail de la disposition intérieure de
la machine, des circonstances de son départ, et des causes du peu de durée
du voyage qu'elle a fait.
( 577 )
» On avait eu l'intention de fixer le ballon intérieur en dedans de l'autre
par des cordons tendus de l'une à l'autre enveloppe : mais, ces cordons ne
pouvant varier de longueur comme l'auraient exigé les différentes formes
de ce ballon intérieur, ils étaient habituellement lâches, laissaient le ballon
intérieur reposer sur la partie inférieure du grand et lui permettaient d'al-
ler se placer jusque sur l'orifice de l'appendice destiné à l'évacuation de
l'air inflammable. On avait d'ailleurs placé ces attaches dans un moment
où le ballon extérieur n'était pas rempli, de sorte qu'on n'avait pu déter-
miner la vraie longueur qui convenait à ces cordons dans l'état de tension
de la machine. Ce ballon se trouvait encore sur la route d'une corde des-
tinée à gouverner la soupape placée au sommet de la machine, de façon
que cette corde était obligée de plier sous lui.
)) La machine n'était pas, à beaucoup près, remplie d'air inflammable
lorsqu'on se prépara à la laisser partir; on essaya de réparer ce défaut en
remplissant le ballon intérieur d'air commun, mais il restait encore plus
d'un quart de vide dans la capacité totale.
)) Enfin les navigateurs, s'étant d'abord procuré trop peu d'excès de lé-
gèreté et reconnu le danger de donner dans les arbres environnants, je-
tèrent à la hâte une très-grande quantité de lest.
» La machine tendait donc à monter à une très-grande élévation, par
la double raison de la grande quantité de lest qui avait été jetée et du vide
qui y restait au moment du départ.
» Elle se gonfla bientôt et occupa son volume entier : les cordons d'at-
tache du ballon intérieur se trouvant trop courts, l'un d'eux se cassa avec
bruit, et ce ballon vint couvrir à demeure l'orifiee de l'appendice; il creva
peu de temps après, son étoffe obstrua de plus en plus l'appendice d'éva-
cuation et se mêla avec la corde de la .soupape supérieure. Alors, la ma-
chine montant toujours, on chercha en vain à évacuer l'air; tous les
moyens manquaient, et la machine était dans le danger le plus imminent
de crever d'elle-même : on prit alors le parti d'y pratiquer ime ouverture;
elle se fendit sur toute sa longueur et descendit avec rapidité.
» M. Meusnier fait voir que cet événement ne tenait point au fond du
mécanisme dont on avait fait l'application, mais à une suite de fautes très-
aisées à éviter. »
MÉaiOIRES PRÉSENTÉS.
M. SoREL adresse une nouvelle Note relative au procédé d'aérostation
qu il a déjà soumis au jugement de l'Académie. L'auteur se propose d'em-
C. R., iS'JO, 2« Semestre. (T. LXXI, ti" 18.) 77
( 578 )
ployer le vent seul comme moteur, et de munir l'aérostat d'une hélice
mise en mouvement par des hommes, pour offrir une résistance à l'action
du vent et former gouvernail.
La Section de Mécanique, à laquelle avaient été renvoyés récemment les
divers Mémoires relatifs à l'aérostation, n'est représentée à Paris, en ce
moment, que par M. le général Moriu. En conséquence, et vu l'urgence
des questions qui se rattachent à ce sujet, ces Mémoires seront renvoyés à
une Commission spéciale, composée de MM. Morin, Delaunay, Dupuy de
Lôme.
M. A. Brachet adresse un nouveau Mémoire concernant les principes
de l'aérostation et les divers systèmes adoptés.
(Renvoi à la Commission précédente.)
M. Lehir adresse une Note portant pour titre « Essai sur les moyens de
diriger les aérostats et sur l'appréciation des résultats qui peuvent être oh-
tenus. Agents de locomotion et de direction faisant corps avec le ballon ».
(Renvoi à la Commission précédente.)
M. Bouvet adresse une nouvelle Note relative à un projet d'aérostat di-
rigeable, muni d'un moteur à gaz, qu'il a déjà soumis au jugement de
l'Académie.
(Renvoi à la Commission précédente.)
M. Ed. Barbou adresse un projet de navigation aérienne, accompagné
de croquis indiquant deux dispositifs différents auxquels lauteur propose
d'avoir recours.
(Renvoi à la Commission précédente.)
M. Delacroix adresse luie Note relative à un système d'aérostat, manœu-
vrant avec des voiles, des ailes mobiles et deux gouvernails.
(Renvoi à la Commission précédente.)
M. J. Gdérin soumet au jugement de l'Académie un procédé à l'aide
duquel il lui paraît possible de mettre et de maintenir eu communication
télégraphique la France du dedans avec la France du dehors.
« Ce moyen consisterait à faire partir, d'un ballon captif, un fîl télégra-
|)hique, déroulé et entraîné par un ballon libre jusqu'à l'atterrissement de ce
( 579)
dernier La portion intermédiaire du fil serait maintenue en l'air à la hau-
teur voulue par une série de petits ballons, attachés de distance en distance,
capables de neutraliser, par la différence de leur poids, la pesanteur du
fil conducteur. Le fil, armé de ces petits ballons, se développerait sans
effort ni difficulté, du pied de l'amarre du ballon captif, au fin- et à me-
sure de l'éloignement du ballon libre. La communication entre le point
d'arrivée et le point de départ serait maintenue pendant tout le temps que
le fil conducteur pourrait être soutenu à la hauteur nécessaire par les
petits ballons.
» Un autre procédé pourrait consister dans l'emploi d'un tube en tissu
imperméable, contenant le fil conducteur, lequel tube fractionné de dis-
tance en distance par une série d'intersections, et rempli de gaz hydro-
gène, constituerait une sorte de ballon tubulaire, qui se déroulerait pour
suivre le ballon libre jusqu'à son arrivée, w
(Renvoi à la Commission précédente.)
» M. Dumas regarde comme un devoir de déclarer qu'il a reçu de
M. É. Granier, à qui on doit diverses applications utiles, la communica-
tion d'un procédé qui consisterait à établir entre deux ballons captifs une
communication télégraphique, au moyen d'im fil de métal accompagné et
maintenu dans l'atmosphère par lui long boyau plein de gaz. M. Gtanier
pense avoir préparé un caoutchouc artificiel, imperméable à l'hydrogène.
L'Académie permettra que cette Note établisse la situation de M. Granier
et lui laisse le droit de présenter ses idées personnelles quand il le jugera
opportun, sans être accusé d'emprunter celles d'autrui. »
M. Cu. Teluek adresse une Note relative à l'emploi de la glace et du
froid dans les amputations.
(Renvoi à la Section de Médecine et de Chirurgie.)
CORRESPONDANCE.
GÉOMÉTRIE. — Sur une transformation géométrique. Note de M. S. Lie,
présentée par M. Chasies.
« Dans cette Note, je donnerai d'abord une méthode de transformation
qui permet de déduire de théorèmes relatifs à des droites des théorèmes
concernant des sphères ou plus généralement des surfaces du second degré
77"
( 58o )
qui contiennent une conique fixe. Cette méthode permet, quand les lignes
asymptotiques d'une surface sont connues, d'en déduire les lignes de cour-
bure d'une autre surface et inversement. La principale application que j'en
ai faite consiste dans la détermination des lignes asymptotiques de la sur-
face des ondes et plus généralement de la surface de Kummer.
» 1. Ma méthode de transformation a son point de départ dans une
correspondance que l'on peut étabhr entre deux complexes (i) de droites :
le complexe linéaire et celui dont toutes les lignes coupent le cercle ima-
ginaire à l'infini. J'ai été conduit à cette correspondance par une repré-
sentation des imaginaires du plan, que j'ai déjà exposée dans un autre
Recueil (2), mais dont je donnerai ici un court résumé.
» Quand on regarde dans l'équation suivante
BZ = X - A
Z et X comme coordonnées cartésiennes des points d'un plan, A et B comme
coordonnées tangentielles des droites, j'ai proposé de représenter la droite
du plan zx dont les coordonnées sont imaginaires, savoir
A — a -h ai, ]^ = b -h ^i
par la droite de l'espace dont les équations sont
Les droites imaginaires qui passent par uu point imaginaire du plan zx
Z — z-\-pi, X = x + yi
seront représentées par les droites de l'espace qui appartiennent à une cer-
taine congruence linéaire (c'est-à-dire qui coupent deux directrices recti-
lignes). Ces droites représentatives passent par le point de l'espace (x, /, z)
quand p est égal à zéro.
» La théorie de la corrélation entre les poinis cl les droites du plan zx
qui se définit par les équations
' ~" L,X, -(-M,Z, -t-N/. ' ~ L.X, -l-M,Z, -f- n/
ou par des équations équivalentes
_ D,X, +E, Z, +F, „ _ G.X, -|-H,Z, -hK,
^2 "~ L.x, -f-Mrz;^4^N; ' ^* ~ l, x, -<- m, z, + n;'
(i) Pluckeb, Nouvelle géométrie de l'espace; i868-6g.
(2) Comptes rendus de l'Académie de Christiania ; 1869.
( 58. )
donne dans notre représentation, en y ajoutant les équations
p, = o, p2 = o,
une correspondance muluelle entre deux espaces E, et Ej de telle manière
qu'aux points de l'un correspondent dans l'autre les droites d^un complexe; cette
correspondance a d'ailleurs conservé les caractères essentiels de la corrélation.
» Eh effet, si une droite [appartenant à un desjdeux complexes tourne
autour d'un de ses points, le point correspondant se meut sur la droite de
l'autre complexe qui correspond au point fixe.
» De là on conclut premièrement que les courbes enveloppées par des
lignes des deux complexes se correspondent une à une. Les points de cha-
cune des courbes correspondantes correspondent aux langentes de l'autre.
» En second lieu, soit une congruence appartenant à un des deux com-
plexes et sa surface focale F,. Aux droites de cette congruence correspon-
dent les points d'une surface Fj; aux points de la surface F, correspondent
les droites d'une congruence dont F^ est l'une des surfaces focales.
» Par une particularisation convenable des constantes de la corrélation,
les complexes qui se correspondent de la manière que nous venons d'ex-
poser deviendront les deux complexes indiqués d'abord. J'ajouterai que
M. Noefher (i) a considéré une correspondance entre les droites d'un com-
plexe linéaire et les points de l'espace, d'où on pourra tirer assez facilement
la correspondance mutuelle entre les deux complexes dont il s'agit ici.
» 2. Regardons maintenant dans l'espace E, un complexe linéaire C, et
dans E2 le complexe C^ dont toutes les lignes coupent le cercle imaginaire
à l'infini et établissons entre ces deux complexes la relation indiquée.
» Aux points d'une droite L, située en E, correspondent en E2 les lignes
d'une des générations d'une surface du second degré S2 passant par le cercle
imaginaire à l'infini, c'est-à-dire d'une sphère. Cette sphère se réduit à un
point si la droite L, appartient au complexe C,. Aux lignes de l'autre géné-
ration correspondent dans le cas général en E, les points d'une droite L',
qui est la conjuguée polaire de L, par rapport au complexe C,.
» A deux droites L, et ^, qui se coupent correspondent en E^ deux
sphères qui se touchent. Inversement, à deux sphères qui se touchent cor-
respondent en E, deux couples de droites (L,, L',) et (4,, jp',) dont chacune
coupe une droite de l'autre couple.
(i) Goellinger Nachhchten : « Zur Théorie der algebraischen Functionein,..., etc,
1869. P'oir ixiisii : Rete, Géométrie c/cr Lage, Zwdte Abtheilung, p. i?.7; 1868.
( 582 ).
M Si la droite 4^, se meut de manière à engendrer un complexe linéaire,
les sphères correspondantes couperont ime sphère fixe sous un angle con-
stant, angle droit si les deux complexes C, et C, sout en involulion (i).
» En général, notre méthode transforme une combinaison quelconque
de droites en une combinaison de sphères, et donne ainsi ime liaison intime
entre des théorèmes en apparence complètement différents.
» 3. Soit donnée, dans l'espace Eo, une surface F,. A cette surface cor-
respond, dans l'espace E,, une congruence, a3iant une surface focale F,.
A chaque ligne de courbure de la surface Fo correspondra alors en E, une sur-
face réglée- qui louche F, le long d une courbe as/mptolique, qui est sa propre
polaire réciproque, par rapport au complexe C, .
» En me bornant ici à énoncer ce théorème, je vais en donner quelques
applications.
» M. Darboux a démontré que la courbe de contact d'une surface quel-
conque avec la développable, circonscrite à cette surface et au cercle
imaginaire à l'infini, est une ligne de courbure de la surface; on connaîtra
donc sur la surface focale d'une congruence générale, appartenant à un
complexe linéaire, une courbe asymptotique. Les tangentes de la surface
dans les points de cette courbe appartiennent au complexe linéaire.
» Il est évident que l'on peut déterminer une ligne asymptotique, jouis-
sant de la même propriété, sur chaque surface réglée, appartenant à un
complexe linéaire. Mais, d'après les recherches de MM. Bonnet (2) et
Clebsch (3), on connaît toutes les lignes asymptotiques d'une surface ré-
glée, si l'on en connaît une. Jinsi on pourra trouver les lignes asymptotiques
d'une surface réglée, appartenant à un complexe linéaire; d'autre part, on
obtiendra par notre méthode de transformation le théorème suivant :
On peut déterminer par des quadratures les lignes de courbure de chaque
surface, enveloppée par de sphères qui coupent une sphère fixe sous un angle
constant.
n Enfiii. on peut trouver par notre théorème les lignes asymptotiques de
la surface du quatrième ordre et de la quatrième classe de M. Kunmier, et de
leurs parlicularisations : la surface des ondes, les surfaces-complexes de
Plûcker, etc. En effet, la surface de Kummer est la surface focale de la con-
(i) Klein, « Zur Théorie der Complexe crsten und zweilen Grades •, Math. A/mahn^
t. II.
(2) Journal, de l'École Potyleclifiiqiic, rallier 43, et Comptes rendus.
(3) Jou-nal de CrelleEoichaidt, t. LXVIII.
( 583 )
gruence générale du deuxième ordre et de la deuxième classe (i); mais à
une congruence de cette nature, appartenant au complexe C,, correspond
dans l'espace E^ une surfacp du quatrième ordre, contenant deux fois le
cercle imaginaire à l'infini, et l'on connaît les lignes de courbure de ces
surfaces d'après les lecherches de MM . Moutard et Darboux (2). A cha-
cune de ces lignes de courbure correspond une surface réglée du huitième
ordre qui touche la surface de Kummer suivant une ligne asymptotique.
Ces courbes seront des courbes du seizième ordre et de la seizième classe.
» Je dois à M. Klein les remarques suivantes (3). A chaque surface de
Kummer correspondent une infinité de complexes du deuxième degré,
ayant cette surface pour surface de singularilés. Chacun de ces complexes
détermine sur la surface une courbe, lieu des points dont les tangentes ap-
partiennent au complexe. Ces courbes sont précisément les courbes asymp-
totiques. On tire de là une représentation algébrique très-simple de ces
courbes, et un assez grand nombre de propriétés remarquables.
» Parmi les complexes du deuxième degré appartenant à une surface de
Kummer, on en trouve six remarquables, qui sont linéaires. Les courbes
asymptotiques correspondantes ne sont que du huitième ordre et forment,
avec les 16 coniques, situées dans les plans singuliers, la courbe de double
inflexion de la surface.
» 4. A chaque transformation linéaire de l'espace E,, correspond une
transformation de l'espace E2 qui laisse invariable, en un certain sens, les
lignes de courbure. En particulier, à la transformation de l'espace E, par
des com plexes linéaires, qui sont en involution avec C,, correspond la
transformation de l'espace E^ par rayons vecteurs, réciproques. »
HISTOIRE DES SCIENCES. — Sur les circonstances qui ont pu amener Monge à
s'occuper des cpiestions relatives aux aérostats. Lettre de M. Hachette à
M. le Président.
)) Je ne suis pas étonné que l'on ait quelque chose de Monge sur les
aérostats (4). Vous savez qu'il associait mon père à toutes ses recherches.
(1) Kummer, Ueber die algebraischen Strahlensysteme ; 1866.
(2) Comptes rendus, t. LIX, p. 240, et t. LIX, p. 243-
(3) Klein, « Ueber die complexe. .. », Math. Annalcn, t. H.
(4) Voir le Compte rendu de la séance précédente, p. Sag, et la Communication impri-
mée dans le Compte rendu actuel, p. 569.
( 584 )
Or, après l'avoir fait travailler, depuis le commencement de 1793, à l'oiga-
nisation des cours de la future École Polytechnique, il le fit partir, en mai
1794, avec Guyton de Morveau, pour l'armée de Sambre-ct-Meuse, afin d'y
organiser un service de ballons destinés à observer les mouvements de
l'ennemi; c'est ainsi que mon père s'est trouvé dans l'aérostat employé à la
bataille de Fleurus (26 juin 1794)- H avait alors 24 ans; il avait avec lui
un élève particulier, le jeune Berge, âgé de 16 ans, qui entra la même
année à l'École et devint lieutenant général d'arlillerie. Berge débuta à
l'armée comme commandant des couturières qui travaillaient aux ballons.
Quand mon père revint à Paris, après la prise de Bruxelles, il dut rendre
compte à Monge de ce qu'il avait vu et fait à l'armée de Jourdan. Je ne sais
si le Mémoire dont M. le général Morin a parlé porte une date; mais je
serais porté à croire qu'il se rapporte à l'expédition scientifique de mon
père et de Guyton de Morveau; l'expédition était toute scientifique pour
mon père, mais Guyton de Morveau était envoyé à l'armée comme repré-
sentant du peuple, pour surveiller la victoire, ce qui ne l'empêcha pas
d'employer très-heureusement ses procédés de désinfection, avec l'aide de
mon père et de Berge, pour assainir et purifier les hôpitaux de Bruxelles
que l'on trouva remplis de morts et de mourants. Je tiens toute cette his-
toire de la bouche de mon père; elle est donc authentique. Elle est peut-
être bonne à rappeler, au moment où l'on s'occupe plus que jamais d'aé-
rostats, et elle peut expliquer comment et à quelle occasion Monge a pu
s'occuper de navigation aérienne. »
MÉTÉOROLOGIE. — Auiores boréales des 24 d ^5 octobre.
Note de M. Cuapelas.
« Le soir du 24 octobre, Paris a été brillamment illuminé par une
aurore boréale magnifique. Une simple bande de stratus, qui ne s'élevait
pas à plus de 7 degrés au-dessus de l'horizon, n'a gêné en rien l'obser-
vation.
» Dès 7 heures, une clarté d'uue blancheur remarquable apparaissait
au nord, et faisait déjà présager un phénomène peu commun. Peu à peu
le ciel prenait une teinte d'un beau rose; puis tout à coup, partant du
centre du petit arc qui n'était pas encore visible, s'éleva un quadruple
rayon, qui mérite d'être signalé d'une manière particulière, car il présentait
exactement les nuances nationales.
» De M*" i5'" à 8'' 30"°, l'aurore était dans"" oute sa splendeur : le petit arc,
( 585 )
visible alors, s'élevait jusqu'à a et X du Dragon. Le grand arc, parfaitement
accentué, s'étendait de ca de la Baleine à Ô de l'Aigle : soit, en amplitude,
180 degrés; et s'élevait jusqu'au carré de Pégase : soit, en altitude, 1 10 de-
grés. Du petit arc, qui était d'un blanc verdâtre, s'élançaient une grande
quantité de beaux rayons, de même couleur que le petit arc à leur base et
d'un rouge sang très-intense à leur extrémité supérieure. Ces rayons, tan-
tôt s'étendaient en plaques rouges; tantôt, reprenant leur forme primitive,
s'élançaient de nouveau jusque passé le zémith.
» De S'^So™ à 8'' 45™, le petit arc semble comme rompu par une force
violente. Le phénomène se divise alors en deux parties : la plus petite, celle
de l'est, conserve sa courbure; l'autre, déchiquetée à ses deux extrémités,
n'est plus qu'un amas informe de teintes verdâtres. En même temps, les
plaques roviges et les rayons de même couleur s'affaiblissent peu à peu,
pour disparaître presque complètement, laissant toutefois au-dessous du
carré de Pégase, trois pointes de rayons, isolées du reste du phénomène, et
ressemblant, pour la forme comme pour les couleurs, à trois pointes de
flanunes. Pendant ce temps, persistaient aux deux extrémités de l'aurore
deux plaques rouges sang, qui semblaient augmenter d'intensité comme de
volume à mesure que les couleurs centrales s'affaiblissaient.
» A 8''45'", le phénomène semble s'éteindre; la teinte rouge générale
s'affaiblit et fait place à une teinte blanchâtre très-brillante qui persiste
jusqu'à 9''3o™; après quoi, le ciel reprend sa teinte ordinaire.
» De 10 heures à io'°45™, le ciel se couvre presque entièrement; quelques
éclaircies seulement à l'horizon nord, laissent échapper des lueurs blanches
qui vont s'accentuant de plus en plus.
» De io''45'" à II heures, le phénomène reparaît avec ses teintes rouges
magnifiques. Enfin jusqu'à minuit, heure à laquelle l'apparition s'efface
complètement, ce ne sont que des intermittences de plaques rouges et de
beaux rayons.
u Le mouvement général 'du phénomène était de l'ouest à l'est, et du
nord au sud.
» Pendant la durée de cette apparition remarquable, quinze météores
filants ont été relevés avec le plus grand soin; il est à remarquer aussi que
ces étoiles suivaient une direction coïncidant parfaitement avec les résul-
tantes des deux forces qui agissaient sur l'aurore boréale.
« Si l'aurore boréale du iL\ octobre a été vraiment remarquable, celle
C. U., 1670, 3« Semeitie. (T. LXXI, N" !«.} 78
( 586 )
du 25, n'a pas été moins intéressante à étudier, car elle a offert des parti-
cularités qu'il est rare de signaler sous nos latitudes.
» A 5 heures du soir, le ciel offrait déjà des apparences non équivoques
de la présence du phénomène au-dessus de notre horizon. En effet, à 6''2o'",
malgré un ciel couvert de petits cumukis assez violemment chassés par
un vent nord-ouesl fort, le ciel s'offrait à nous sous un aspect extrême-
ment curieux; les contours accidentés des nuages, quelques éclaircies
étaient biillamment éclairés d'une luenr rouge sang très-intense, parfaite-
ment semblable à celle qui caractérisait le phénomène de la veille. A ce
moment déjà, l'apparition avait en étendue plus de i8o degrés, et en
hauteur plus de loo degrés.
M 6''45"'. L'aurore épouvant les mêmes perturbations que dans la nuit
du 24, se partage littéralement en deux, s'étend à droite et à gauche vers
l'ouest et vers l'est, de manière à occuper un espace de près de 265 degrés,
et s'élève à plus de i5o degrés de hauteur. Le ciel, en ce moment, partici-
pait presque entièrement au phénomène.
» 7 heures. La partie nord du ciel, d'une belle couleur verdâtre, est
simplement traversée par trois larges rayons ronges, s'élevant à 3o degrés
environ.
» C'est à ce moment (^''lo'") que se présente la particnlarité qui rend
cette apparition d'aujourd'hui principalement extraordinaire. En effet, à
55 degrés environ du zémilh, entre les étoiles jt, t, n de Pégase, se forme
une large tache blanc-rose, de laquelle s'échappent peu à peu trois beaux
rayons de même nuance; à un certain moment, l'un de ces rayons devenant
plus blanc se replie sur lui-même, comme fortement perturbé par un courant
de l'ouest.
» ^''lio™. Ces rayons, devenant diffus, forment de nouveau une large
plaque, d'un beau blanc argenté, d'où s'échappent encore deux larges
rayons formant une croix nettement dessinée; puis ensuite, à ces deux
rayons, viennent s'ajouter quatre autres petits fuseaux. Il y a donc, à ce
moment, un véritable rayonnement qui se produit à notre zénith identi-
quement, comme dans les régions polaires.
» ^''/jS™. Dans la partie nord du ciel un instant découvert, la voûte
céleste sendjle reprendre sa teinte normale. L'aurore ne consiste plus, en cet
instant, qu'en de larges placards de matière diffuse rouge ou d'un blanc
bleu très-vif.
» H*" 10"'. Le ciel se couvre de plus en plus; le phénomène s'efface sensi-
blement.
( 587 )
» 9 heures. Encore quelques nuages colorés légèrement en rouge; puis
enfin à 9''3o™, le ciel se couvrant complètement, l'observation n'est plus
possible, quoique cependant nous constations encore à l'horizon quelques
bandes verdâtres brillamment éclairées. »
MÉTÉOROLOGIE. — Jurore boréale du i[\ octobre. Note de M. Salicis.
(Extrait.)
« Le phénomène se présentait sous la forme d'une portion continue de
zone centrée sur l'axe du monde et orientée selon l'est et l'ouest magné-
tique; elle s'étendait sans doute d'un point de l'horizon à l'autre et ses
extrémités paraissaient embrasser sur cet horizon un arc de i6o degrés à
peu prés.
)) La flèche, allant de l'horizon an point culminant où l'arc de méridien
magnétique correspondait, sous-tendait aS à 3o degrés; la largeur de la
zone était de 20 degrés.
» L'ensemble était formé d'une série de bandes juxtaposées, qui conver-
geaient vers le zénith; l'éclat et la coloration de ces bandes étaient va-
riables; à B*" i5™, la bande centrale prit une teinte argentée qui dura peu.
» A partir de cet instant, la division en bandes devint de moins en moins
nette et le phénomène prit, d'une façon uniforme, la teinte générale rose
foncé qu'on lui connaît. »
MÉTÉOROLOGIE. — aurores boréales des a/j et aS octobre.
Note de M. A. Gcillemin.
« Le lundi 24 octobre, vers 6 heures du soir, une lueur rougeâtre se
montra à l'horizon dans la direction du nord-nord-ouest. Peu à peu cette
lueur s'étendit, s'éleva et se fit voir sous la forme d'un arc immense, em-
brassant de l'est à l'ouest toute la région boréale du ciel. Puis, subitement,
quelques rayons d'une teinte plus éclatante et d'un rouge blanchâtre, sil-
lonnant le fond plus sombre de la zone, ne laissèrent aucun doute sur
la nature du phénomène, qui n'était autre chose qu'une magnifique aurore
polaire.
» Pendant la journée, le ciel avait été couvert de nuages, qu'emportait
un vent assez fort de la région ouest. Mais sur le soir il s'était dégagé, et,
quand le phénomène commença, les étoiles brillaient à peu près dans toute
l'étendue de la zone céleste qu'il embrassait. I/atc luuiiiioux conlinua,
jusqu'à 8 heures du soir, à augmenter d'intensité et d'amplitude jusqu'à
78..
( 588 )
atteindre et dépasser le zénith. La teinte de la lueur était surtout d'un rouge
très-prononcé à l'horizon vers les régions de l'est et de l'ouest. Dans la
direction du nord, son intensité était moindre, et l'on y remarquait le sec-
teur obscur qui s'observe fréquemment au-dessous de la zone lumineuse
dans les aurores polaires.
» Sauf les rayons qui, çà et là, et à intervalles irréguliers, sillonnaient
le fond de l'arc, et dont la teinte était d'un blanc rougeâtre on légèrement
orangé, aucune des parties de l'arc n'affectait de couleur différente du
rouge. Mais cette teinte variait assez souvent de ton ; elle était tantôt rosée,
tantôt d'un rouge sanglant, très-éclatant et très-lumineux, tantôt d'un
rouge très-sombre : en aucun cas, toutefois, elle ne cessait d'être transpa-
rente et de laisser voir sur son fond les étoiles même de troisième ou qua-
trième grandeur : on voyait très-distinctement la grande et la petite Ourse,
Cassiopée, Aldébaran, les Pléiades, etc. Au moment où l'arc atteignait le
zénith, tonte sa périphérie extérienre était bordée d'une teinte blanchâtre,
d'un ton laiteux, analogue d'aspect à la voie lactée, mais beaucoup plus
régulière et uniforme.
» Le phénomène, tout en s'affaiblissant, était visible encore après
1 1 heures du soir; mais c'est entre 8 heures et 8 heures et demie qu'il pa-
raît avoir atteint son maximum d'éclat.
» La soirée suivante, du mardi q.5 octobre, a été signalée par une nou-
velle aurore; je ne ferai qu'indiquer les caractères par lesquels elle m'a
semblé se distinguer de la précédente. L'arc lumineux embrassait également
tout le ciel de l'est à l'ouest, mais il dépassait le zénith, en le débordant
du côté du sud. Au nord, on ne distinguait, à 3o degrés environ au-dessus
de l'horizon, qu'une région assez peu étendue^ ayant la teinte rougeâtre des
autres parties de la zone. Entre le nord et l'ouest, on apercevait une région
du ciel contrastant avec les régions environnantes par sa teinte très-claire,
d'un ton blanc-verdâtre et opalescent.
» Comme dans l'aurore précédente, plusieurs rayons lumineux sillon-
nèrent, de temps à autre, le fond rougeâtre de la lueur, mais sans apparence
d'une convergence déterminée de leur direction. L'un de ces rayons, de
forme allongée, rectiligne, assez large en son milieu, nous parut remar-
quable par la persistance de sa position et de sa durée : on l'eût pris pour
un nuage.
» Entre 7 et 8 heures du soir, le phénomène de ces apparitions de
rayons de lumière prit un caractère tout à fait singulier qui mérite, croyons-
( 589 )
nous, rVètre signalé. A l'orient des constellations d'AncIromècle el de Pégase,
en un point très-voisin de deux étoiles de deuxième grandeur, fx et X, qu'on
voit à peu de distance du carré, il se forma tout à coup deux, puis trois
petites lueurs d'un blanc rosé, semblables à de petits nuages lumineux ou
à des nébuleuses, qui, persistant d'abord sous leur première forme, peu à
peu s'allongèrent comme autant de rayons rectilignes convergeant vers le
point en question. D'autres rayons apparurent successivement dans toutes
les directions et de toutes les grandeurs, mais ils présentèrent tous ce carac-
tère de convergence vers le même point du ciel, de sorte qu'en cette région
particulière, le phénomène avait tout à fait l'apparence d'une c/loire.
» Nous aperçûmes à la même heure deux bolides assez brillants, mais
nous ne pûmes en noter exactement ni le point de départ, ni la direction. »
CHIMIE INDUSTRIELLE. — Sur le système de tannage rapide des peaux,
au Mexique. Note de M. Virlet d'Aocst.
« J'ai été assez étonné d'apprendre, par les différentes Communications
faites dans la dernière séance de l'Académie, que le tannage des cuirs par
les Indiens se bornait, dans quelques parties de l'Amérique, à graisser
simplement les peaux avec la cervelle de l'animal : j'ai, moi aussi, vu
pratiquer plusieurs fois ce tannage par les Indiens du Mexique, qui em-
ploient bel et bien à cet effet plusieurs espèces de tannin, dont bon
nombre d'essences d'arbres de ce pays, sans compter de nombreux chênes,
sont très- riches et entre autres celles qu'on y nomme le Cascalolè et le Hni
zachè. Il faut d'ailleurs bien se méfier des rapporta de l'Indien qui, toujours
très-soupçonneux, cherche souvent à vous tromper et garde très-religieu-
sement le^ secrets de ses procédés.
» Le Cascalolè est un joli Mimosa à larges feuilles, à très-belles fleurs
blanches, dont les rats sont très-friants ; c'est un grand arbuste qui ne
croît qu'en terres chaudes et qti'on cultive pnncipalement sur les bords de
l'Atoyac, fleuve qui, après avoir traversé tout l'Etat de Guerrero, se jette
dans l'océan Pacifique. Le Huizachè (Mimosa odorant) est à fleurs jaunes,
il atteint à une plus grande altitude et pénètre jusque dans les terres tem-
pérées. On se sert de leurs écorces pour la teinture en noir, mais c'est par-
ticulièrement de leurs gousses, beaucoup plus riches en tannin, que l'on
fait usage pour le tannage des cuirs. Il suffit, en effet, par exemple, de
mélanger par parties égales le sulfate de fer et la poudre de ces substances,
pour obtenir immédiatement une excellente encre; de là les noms de
( Sgo )
Huizacliè qu'on donne généralement à l'encre et celui de Huiznquéro qu'on
donne, un peu par mépris, aux écrivains ou agents d'affaires dans le
pays. La poudre de ces gousses est si riche en tannin, que j'ai souvent
entendu répéter par des Mexicains qu'il suffit de 3o grammes de poudre
de Cascalotè pour transformer en vingt-quatre heures une peau de chèvre
en maroquin.
» C'est donc avec ces différentes poudres, mélangées de graisse (je n'ai
pas entendu dire qu'on employât au Mexique la cervelle de l'animal ), qu'on
frotte fortement les peaux pour les tanner; on les fait ensuite sécher au
soleil, en les étendant et les étirant avec soin. Dans cette opération, d'ail-
leurs si simple, j'ai toujours considéré que la graisse avait surtout pour
but de faire pénétrer plus facilement la poudre de tannin dans les pores
de la peau.
» Rien n'est plus curieux que d'assister dans une Mnlanza à une de ces
tueries de quatre à six mille chèvres à la fois, tueries assez fréquentes au
Mexique, où, bien que cela s'y fasse sans moyens mécaniques, l'opération se
fait avec une rapidité merveilleuse dont nous ne nous faisons pas d'idée en
Europe. En deux ou trois jours, tous ces animaux sont dépouillés, dépecés
et passés à la chaudière, à l'effet d'en extraire toute la graisse, car ces
tueries se foiit uiiiquemeut en vue des peaux et de la graisse seules; les
chairs, les os et le sang passent à la voirie et servent de pâture aux vau-
tours. On dispose ensuite la graisse en grosses mottes sphéroïdales, qu'on
renferme dans les peaux elles-mêmes, puis on les expédie sur un port
d'embarquement. »
GÉOLOGIE COMPARÉE. — Communauté d'orh/inede la serpentine
et de la chantonnitc ; par M. St. Meunier.
« C'est évideuimeut une question restée sans réponse complète, que celle
de l'origine des serpentines, et même les résultats fournis par leur étude,
loin de faciliter la solution du problème, ont amené à des conséquences
en apparence contradictoires. En effet, s'il est hors de doute que les ser-
pentines soieîit de nature éruptive, leur très-forte teneur en eau, qui s'élève
normalement à plus de i5 pour loo, est incompatible avec l'idée d'une in-
jection ignée. On sait que, bien avant de fondre, les serpentines perdent
toute leur eau et se transforment en substances essentiellement différentes,
composées surtout par le mélange en proportions variables de minéraux
péridoli(iues et pyroxéniques. De façon que si l'on admet, comme il semble
( 591 )
d'ailleurs impossible de s'y refuser, qu'elles ont été poussées de la profon-
deur à une température élevée, il faut supposer que les serpentines ont
subi, depuis leur sortie, des modifications auxquelles est dû leur état actuel.
C'est ainsi qu'on peut dire, en étendant l'acception habituelle de ce mot,
qu'elles sont réellement mélamorphiques.
» Mais, jusqu'ici, on se trouve dans l'impossibilité de montrer la roche
première d'où dériveraient les serpentines, dans cette manière de voir. Le
calcaire salin dérive du calcaire compacte, le phyllade de l'argile, le quart-
zite du grès; mais on ne trouve rien parmi les terrains sédimentaires ou
non, qui paraisse devoir donner naissance par métamorphisme aux roches
serpentineuses. Je sais bien qu'on a voulu voir dans celles-ci un produit
pur et simple de l'hydratation du péridotj mais, outre qu'on ne voit pas
par quel mécanisme cette hydratation eût pu se faire, il faut bien recon-
naître qu'il existe entre le péridot et la serpentine des différences de com-
position, que l'addition de l'eau à la première de ces roches ne suffirait pas
à faire disparaître; et surtout que rien ne permettrait ainsi d'expliquer la
structure si nouvelle de la roche transformée.
» Or, ce que les observations de la géologie proprement dite sont im-
puissantes à nous apprendre, paraît devoir nous élre révélé par la géologie
comparée. Voici comment. Dans le cours d'études minéralogiques que je
poursuis en ce moment au Muséum, relativement à la serpentine, et dont
j'espère être bientôt en mesure de faire connaître les résultats, j'ai été frappé
des analogies extrêmes de structure que présente celte roche avec certaines
météorites,. Celles-ci sont constituées par le type lithologique que j'ai ail-
leurs désigné sous le nom de cluinloiinite (i), et comprennent entre autres
les masses tombées à Luponnas (1753), à Salles (1798), à Chantonnay
(1812), à Agen (i8i4), etc.
» Examinées en tranches minces au microscope, la chantonnite et la ser-
pentine présentent rigoureusement le même aspect, c'est-à-dire qu'elles
ont la même structure : des deux parts, se montre une cristallisation égale-
ment confuse, mais dont participent toutes les molécules de la masse; des
deux côtés aussi se présentent, au milieu d'éléments lithoïdes, des grains mé-
talliques disséminés; enfin, et ce caractère est d'importance capitale, étu-
diées plus en grand, la chantonnite et la serpentine sont remarquables par
le nombre des surfaces fiotlées qu'elles contieiuient. Tout le monde connaît
les miroirs de glisseuient des serpentines : ce sont des surfaces laminées.
(i) Etablissement des types de roches météoriques (février 1870)
( 592 )
étirées et comme émaillées. Or, à la couleur près, ces surfaces se retrouvent
identiquement dans le chantonnite.
» De cette comparaison entre la structure de ces deux roches, on est évi-
demment en droit de conclure à une très-grande similitude dans les condi-
tions de formation.
» Si maintenant, passant de cette étude physique à un examen chimique,
on compare la composition de ces deux roches, on retrouve encore entre
elles des analogies très remarquables. La base est constituée des deux côtés
par des silicates magnésiens, hydratés dans la roche terrestre, anhydres
dans la masse météorique, et la composition quantitative de ces silicates se
trouve extrêmement voisine, abstraction faite de l'eau bien entendu. La
nature des minéraux métalliques disséminés donne lieu à une comparaison
de même genre. La chantonnite renferme du fer métallique, de la troïlite,
du fer chromé; la serpentine, de la magnétite, de la pyrite, du fer chromé.
La différence, très-faible comme on voit, se réduit à un état plus oxydé du
fer et plus sulfuré de la pyrite.
» Évidemment, il suffit d'admettre que la chantonnite ait été soumise à
une influence hydratante convenable, pour comprendre qu'elle se soit
transformée en une roche de nature serpentineuse, et cela sans que sa struc-
ture ait eu besoin de subir aucune modification. Ce dernier point conduit
aussi à faire considérer la chantonnite elle-même comme une roche érup-
tive, et telle est tout à fait mon opinion.
» Mais si la chantonnite est éruptive, il y a intérêt à rechercher la roche,
de position originelle, qui a donné naissance aux filons qu'elle doit consti-
tuer. Or cette roche nous est bien connue par les météorites nombreuses
dont elle forme la substance, et, dans le travail rappelé plus haut, je l'ai
désignée sous le nom (WnimalUe. Elle est représentée entre antres dans les
collections par les chutes de Charsonville (1810), Vouillé (i83i), Château-
Renard (i84i), New-Concord (1860), Tourinne-la-Grosse (i863), Aumale
{i865), DanvUle (1868), etc.
» En résumé, et en admettant que les météorites fournissent des échan-
tillons de nature à faire connaître les roches terrestres que la profondeur
do leur gissement rend inaccessibles à nos investigations, il me parait ré-
sulter de ce qui précède que rien ne justifie l'opinion qui voudrait voir
dans les éruptions de serpentine la preuve de l'existence d'un réservoir
infragranitique de ces roches.
» Pour moi, la roche normale c'est l'aumalite; les filons qu'elle a rem-
plis ont pris, par suite du mode spécial de réfroid issenient, et surtout par
( 593)
l'effet des actions mécaniques qui s'y sont développées, l'aspect pseudo-
fragmentaire caractéristique de la chantonnite. Quant aux serpentines, ana-
logues ainsi aux malachites qui couronnent les gîtes de chalkopyrite, par
exemple, elles représentent les têtes de ces filons, et ne sont, par conséquent,
qu'un produit de leur altération sous 1 influence des agents superficiels. »
ZOOLOGIE HISTORIQUE. — Sur les animaux employés par les anciens Egyptiens
à ta chasse et à la guerre; par M. Fr. Lexormaxt.
« Dans les solennelles et douloureuses circonstances que nous traver-
sons, il est doux, lorsqu'on dépose le fusil du volontaire et qu'on rentre se
reposer quelques heures à son foyer, de chercher dans la science une dis-
traction puissante, un moyen d'échapper temporairement aux poignantes
angoisses du siège. C'est la raison qui m'engage à reprendre aujourd'hui,
au bruit du canon prussien, la série d'études de zoologie historique sur les
animaux domestiques des anciens Égyptiens, dont l'Académie a daigné
accueillir avec tant de bienveillance il y a quelques mois les premières
ébauches et à lui soumettre de nouveau quelques essais du même genre.
» Le dressage de certains animaux dont l'homme utilise les aptitudes
spéciales pour en faire ses auxiliaires de chasse est un art que des peuples
encore à peine entrés dans la voie de la vie policée ont pratiqué de bonne
heure. C'est un premier degré de domestication encore très-imparfoit, et
qui, le plus souvent, n'arrive jamais à être complet. A part le chien, dont
les diverses variétés se rattachent peut-être à des espèces différentes à l'ori-
gine et domestiquées dans des contrées distinctes, mais qui paraît bien,
d'après les découvertes de l'archéologie préhistorique, avoir été le premier
compagnon que l'homme ait attaché à son service; la plupart des animaux
dont les différents peuples, plus au moins avancés dans la civilisation, se
sont appliqués à employer le concours dans leurs chasses, n'ont été amenés
qu'à un état fort imparfait de domesticité. Ils sont restés pour le chasseur
plutôt des associés d'un caractère très-indépendant et presque volontaire
que de véritables et dociles serviteurs.
» Les tribus encore si sauvages qui ont laissé des vestiges de leurs festins
grossiers dans les Kjœkkemœdcliger du nord de l'Europe avaient déjà des
chiens qui vivaient avec elles, les aidaient dans leurs chasses sur les oiseaux
du bord de la mer et se nourrissaient des reliefs de leurs repas. C'était
le seul animal domestique de ces peuplades pour qui la vie pastorale elle-
même n'existait pas encore. Aussi n'a-t-on pas lieu d'être surpris, dans un
C. R., 1870, 2' Semestre. (T. LXXI, N" 18.) 79
( 594 )
centre de civilisation aussi antique que l'Egypte, de voir an plus haut que
les monuments nous fassent remonter, c'est-à-dire quarante siècles au moins
avant l'ère chrétienne, le chien à l'état de l'animal domestique par excel-
lence, remplissant déjà, comme encore aujourd'hui, le rôle de l'hôte habi-
tuel et favori de la maison, du compagnon constant du chasseur et du
berger. Ce serait le contraire qui devrait étonner.
» Non-seulement les Égyptiens, dès les âges les plus antiques de leur
civilisation, possédaient et utilisaient le chien, mais ceux de leurs monu-
ments qui remontent aux dates les plus prodigieusement reculées nous
offrent les images parfaitement caractérisées de plusieurs variétés de chiens
très-distinctes, utilisées dès lors à des fonctions différentes et produites par
un élevage savant en vue de ces fonctions mêmes. La plupart des variétés
de chien représentées ainsi dans les bas-reliefs des tombeaux égyptiens sub-
sistent encore aujourd'hui dans le pays ou dans les contrées voisines.
» Ce sont: i° Le chien-renard à la robe fauve, au museau effilé, aux
oreilles pointues, à la queue épaisse, qui se retrouve identique à bien des
siècles de distance dans le chien des bazars du Caire et des autres villes de
l'Egypte contemporaine. Il figure sur les monuments de toutes les époques,
depuis les âges les plus recidés de l'Ancien Empire. Dans les scènes de la
vie quotidienne retracées sur les parois des tombeaux, il joue le rôle de
gardien de la maison et des troupeaux, de compagnon du maître ou de ses
colons, mais ou ne le voit jamais employé à la chasse, pas plus que ne le
sont aujourd'hui ses descendants, trop paresseux pour cet exercice. C'est
cette variété de chien dont on trouve des momies dans plusieurs des né-
cropoles antiques. C'est elle en effet qui, avec le chacal, était l'animal
sacré du dieu Auubis, le gardien des sépultures et l'une des divinités prin-
cipales du monde des morts. Les archéologues modernes ont l'habitude de
qualifier de léle de chacal la tète d'Anubis dans les images du symbolisme
religieux des bords du Nil. Pour les Grecs et les Romains il était un dieu
■Atèleck chien, lalrator Anubis. Et en effet, la tète du chacal et celle du
chien-renard de l'Egypte ne présentent pas de différences assez caractéris-
tiques pour que l'on puisse se prononcer à ce sujet d'une manière tout à
fait affirmative, les deux animaux étant également consacrés au même
dieu.
» 2" A partir de la XIP dynastie (environ 3ooo ans avant notre ère),
c'est-à-dire à partir du moment où les Égyptiens étendirent leur domi-
nation d'une manière stable sur le pays de Kousch ou les contrées du Haut-
Nil au-dessus de la seconde cataracte, nous voyons apparaître sur les
( 595 )
monuments, à côté dececliien, qui est celui qui appartient à l'Egypte d'une
manière toute spéciale, et remplir les mêmes offices à la maison et aux
champs, le chien de Dongolah, dont la tête est la même, mais dont hi
taille est plus petite, les formes plus élancées, les allures plus vives,
la robe d'un rouge brun. Ce chien est encore aujourd'hui celui qu'on
rencontre le plus habituellement dans les villages de Nubie. Ehrenberg
(Icônes et descriptiones mammalium, dec. 2) lui assigne pour souche une
espèce sauvage particulière des mêmes contrées, qu'il a nommée Canis
sabbar.
» 3° Le chien de chasse de l'Ancien Empire, figuré mille fois sur les
monuments avec cette exactitude si remarquable que les artistes égyptiens
apportaient à la représentation des animaux, est le slouglii ou grand lé-
vrier du Nord de l'Afrique, assez différent du lévrier de Syrie et ca-
ractérisé par des oreilles larges et droites, dont la race antique s'est
conservée jusqu'à nos jours avec une pureté toute particulière chez les
agriculteurs et les nomailes du Soudan égyptien. Les bas-reliefs des
tombes des dynasties primitives, autour de Memphis, le montrent toujours
tenu en laisse par des valets de chasse ou lancé dans la campagne,
poursuivant les antilopes du désert et les bouquetins, attaquant même
des animaux plus redoutables, comme la hyène et le chien hyénoïde
[Canis pictits) . Pendant toute cette époque, il est le seul chien employé
à de semblables usages. Plus tard, et tant que les monuments nous
fournissent des renseignements, c'est-à-dire jusqu'à l'époque grecque et
romaine, la race se maintient sans altération. Mais dans les temps pos-
térieurs de l'indépendance égyptienne, elle n'est plus seule en usage. A
dater de la XIP dynastie, elle est associée à une autre variété, qui paraît
provenir d'une importation étrangère et que nous voyons pour la première
fois dans les peintures des célèbres tombeaux de Béni-Hassan-el-Qadim.
» 4° Celle-ci est un grand chien-courant de haute taille, aux formes élan-
cées, aux oreilles pendantes, à la tête semblable à celle du fox-hound
anglais, à la robe variée de blanc et de noir ou de blanc et de briui rouge.
Introduit sous la XIP dynastie, ce chien devient surtout en usage avec la
XVIIP, sous le Nouvel Empire. Il est alors l'animal favori des veneurs égyp-
tiens et supplante, presque entièrement dans leurs exercices, le lévrier des
époques plus anciennes. C'est ce chien-courant que nous trouvons de
beaucoup, le plus habituellement représenté dans les scènes de chasse des
tombeaux de Gournah, décorés sous les dynasties thébaines du Nouvel
79- •
( 596)
Empire. Je citerai, comme un des exemples où les caractères propres s'en
reconnaissent le mieux, la belle peinture publiée par sir Gardner Wilkinson
[Mannets and customs oj ancient Egyplians, ?>" édition, t. 111, p. 22), où des
ciiiens-courants attaquent des troupeaux d'antilopes parmi lesquelles on
distingue la gazelle, l'algazelle, le Damatis Senegalensis, H . Smith (qui s'éten-
dait dans l'antiquité jusque dans les déserts touchant à l'Egypte, ainsi que
j'ai eu l'occasion de le remarquer dans une précédente Communication),
en même temps que le bouquetin du Sinaï et du désert Arabique, le chacal,
le lièvre d'Egypte, l'hyène et l'autruche.
» 5° Une dernière variété de chien se montre encore sur les monu-
ments égyptiens, mais exclusivement à l'époque de la XIP dynastie; car
on n'en voit des traces ni avant, ni après. D'où il faut conclure que c'était
sans doute une race étrangère, importée alors par le commerce, on ne sait
d'où, et qui ne parvint pas à se naturaliser définitivement dans le pays.
C'est une sorte de basset à jambes basses, de fort petite taille, dont le port
est exactement celui du turnspite des Anglais, mais dont la tète, au museau
effilé, aux oreilles droites et pointues, diffère absolument de celle de toutes
nos variétés de bassets. La robe est sur le dos d'un brun rouge assez clair,
nuancée de taches plus foncées; le ventre blanc. Je ne connais pas de race
vivante analogue. Celait là le chien à la mode sous les Osortasen et les
Amenemhé, 3ooo ans environ avant l'ère chrétienne. Tous les morts de dis-
tinction de cette époque se font représenter dans leur tombeau ayant
auprès d'eux leur basset favori. Mais il ne parait pas que cette race ait
jamais servi autrement que comme animal de luxe et d'agrément dans l'in-
térieur des maisons, car on ne le voit figurer ni dans les scènes de chasse,
ni dans celles de la vie pastorale. »
w M. CiiikSLEs fait hommage à l'Académie de la part de l'auteur, M. L.
Cremona, professeur de Géométrie supérieure et de Statique graphique à
rinstilut technique supérieur de Milan, d'un exemplaire d'un Mémoire sur
tes intégrales à différentielles algébriques, écrit en italien, dont l'objet est de
présenter sous une forme plus géométrique les matières traitées dans quel-
ques paragraphes du remarquable ouvrage sur la Théorie des fonctions ahé-
liennes de MM. Clebsch et Gordan. Il s'agit de la réduction des intégrales
qui ont une différentielle algébrique aux formes typiques de ce qu'on ap-
pelle les trois espèces, et du théorème d'Abel sur les intégrales de la troisième
espèce. »
( 597 )
« M. Ghasles fait hommage à l'Académie, de la part de M. le prince
Boncompagni, des livraisons de mars, avril et mai 1870 du Bulleltino de
bibliographie et d'histoire des sciences mathématiques et physiques. Les
deux premières contiennent la quatrième période (1774*1^^9) ^î^ii termine
le travail historique de M. L.-Am. Sedillot, intitulé : Les professeurs de Mn-
lliématiqiies et de Phjsique générale ou Collège de France. La livraison de mai
est consacrée à une Notice de M. F. Palermo sur la vie et les travaux du
célèbre physicien Jean-Baptiste Amici. »
« M. Chasles présente à l'Académie, au nom de ses collègues de la Sec-
tion mathématique des Hautes Études, MM. Bertrand, Delaunay, Puiseux
et Serret, les livraisons de juillet et août 1870 du Bulletin des Sciences ma-
tliématiques el astronomiques.
)) Le numéro de juillet renferme une Notice de M. F. Tisserand sur la
première partie des Leçons d' Astronomie de M. Th. Oppoizer, à l'Université
de Vienne. (Cette première partie a pour objet la détermination de l'orbite
d'un corps céleste, comète ou planète, d'après trois ou quatre observations.)
M. Oppoizer propose dans plusieurs cas des procédés de calcul qui pré-
sentent divers avantages.
» Une Notice sur un ouvrage de M. P. Mansion, de Gand, concernant la
Théorie de la multiplication et de la transformation des fonctions elliptiques, est
due au zélé rédacteur du Bulletin, M. Darboux.
)) La revue des publications périodiques contient un ré.sumé des princi-
paux articles des Comptes rendus des séances de l'Académie impériale des
Sciences de Vienne, t. LVIII, juin-décembre 1868,- et des Comptes rendus de
notre Académie, t. LXX, du 18 avril au 9 mai 1870; puis l'indication des
Mémoires contenus dans le tome XI, 1866-69, des Transactions de la Société
philosophique de Cambridge, dans le tome Vil, 1868, de V Académie des
Sciences de rinstitut de Bologne, et dans les livraisons de janvier, février,
mars et avril 1870 du Giornale di Matematiclie de Naples.
» Nous citerons encore sous le titre de Mélanges une liste étendue des
travaux de notre regretté et illustre confrère Gabriel Lamé, dont les pre-
miers essais datent de 1817.
» On trouve aussi dans ce numéro la demonstration.de quelques théo-
rèmes importants sur les lignes asymplotiques des surfaces gauches.
» Le Bulletin d'août contient une analyse par M. H. -G. Zeuthen (de Co-
penhague) de l'ouvrage de M. L. Cremona, intitulé : Preliminari di una
Teoria geometrica délie Superficie, Milan, 1866; traduit en allemand (1870)
( 598)
par M. Clirtze. Cette traduction renferme un extrait de différents autres
travaux de M. Cremona. Des observations fort justes du savant M. Zeu-
then sur l'utilité et l'importance des recherches géométriques terminent
cet article intéressant.
On trouve ensuite dans la Revue des publications périodiques une analyse
étendue des recueils suivants :
Proceedings de la Sociélé philosophique de Cambridge^ 1867;
Nouvelles de la Société royale des Sciences de l' Université de Georges- Auguste,
Gœttingue, 1868;
Bulletin de rJcadémie impériale des Sciences de Saint-Pétersbourg , t. XIII,
1868, et t. XIV, 1869;
Actes de l'Académie royale des Sciences de Suède, t. V, i863-64, et t. VI,
1 865- 1866;
Compte rendu des travaux de l'Académie royale des Scieiices de Stockliohn,
t. XXII, i865, t. XXin, 1866, t. XXIV, 1867, et t. XXV, 1868;
Nouveaux Mémoires de la Société royale des Sciences d'Upsat, S*" série, t. VI,
186G-G8;
Archives de Mathématiques et de Physique de J.-A. Gruncrf, t. LI, i'" livraison,
1869.
» A. la suite de cette longue énumération de publications périodiques, se
trouve une très-intéressante analyse par M. Iloûel, d'un Mémoire de
M. Dillner, professeur adjoint de Mathématiques à l'Académie d'Upsal, in-
titulé Calcul géométrique ou Règlesde Calcul des quantités géométriques ; Upsal,
18G8-70.
» Il s'agit de la représentation géométrique des expressions a ± b \J— i,
dans laquelle on regarde y — 1 comme un indice de perpendicularité. Cette
conception, qui a pris naissance en 1 80G dans deux ouvrages d'Argand et de
1 abbé liuée, s'est reproduite en 1828 dans deux écrits: l'un deC.-V.Mourey,
en France, et l'autre de J. Warren, en Angleterre; puis, vers i832, dans la
Méthode des équipollences de M. Bellavitis; a reçu bientôt après un nouveau
développement dans un écrit de M. A. Faure, sous le titre d'Essai sur la
théorie et l'interprétation des quantités [dites imaginaires ; et enfin a été intro-
duite délinilivement dans l'Analyse pir notre illustre Cauchy et ses disciples.
Si nous ne nous bornions pas ici aux écrits principaux sur cette nouvelle
théorie, et si nous faisions l'analyse complète des recherches qui s'y sont
rapportées, nous citerions divers autres auteurs, tels que Français, Servois,
( 599 )
Gergonne, Peacock, Playfair, Gregory, Hamilton, M. Vallès, M. Transon,
M. Hoûel lui-inéme clans son ouvrage sur la Théorie élémenlaire des quan-
tités complexes [m-^" ; 1867-68). »
A 5 heures et demie, l'Académie se forme en Comité secret.
La séance est levée à 5 heures trois quarts. É. D. B.
BULLETIN BIBLinnRAPHIQCE.
L'Académie a reçu, dans la séance du 3i octobre 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Bulletin des Sciences mathématiques et astronomiques, rédigé par M. G. Dar-
BOUX, t. 1, juillet et août 1870. Paris, 1870; 2 numéros in-8''. (Présentés
par .VI. Chasles.)
Mémoire sur un nouvel appareil contentif appliqué spécialement aux frac-
tures comminutives des jambes par armes à feu; par M. Bonnafont. Paris,
1870; br. in-8''. (Présenté par M. le baron Larrey.)
Mémoire sur l'anatomie et la physiologie du corps thyroïde et de la rate.
Similitude de structure et de fonction; par M. RiCOtr. Paris, 1870; br. in-8°.
(Présenté par M. le baron Larrey.)
Société centrale de sauvetage des Naufragés. Compte rendu de l^ assemblée
générale des Membres bienfaiteurs et fondateurs de la Société, tenue le
2/i mai 1870. Paris, 1870; in-S". (Présenté par M. le baron Larrey.)
Indication des travaux publiés par M. H. Lebert. Breslau, 1870; opuscule
in-8°. (Quatre exemplaires.)
Notice sur la vie et les travaux de Jean-Baptiste Brasseur ; par M. A. Le Roy.
Rome, 1869; in -4°. (Extrait du Bullellino di bibliografia e di storia délie
scienze matematiche e fisiche.) (Présenté par M. Chasles.)
Memorie... Mémoire concernant le marquis J.-C. De' Toschi di Fagnano,
jusqu'au mois de février i852, envoyé par le P. A. Calogera au comte
G. -M. Mazzuchelli et publié par M. B. Boncompagni. Rome, 1870; in-8''.
( 6oo )
(Extrait du BuUeUino di bibliograjia e di storin, etc.) (Présenté par
M. Chasles.)
BuUettino... Bulletin de bibliorjraphie et d'histoire des Sciences mathéma-
tiques et physiques, t. III, mars à mai 1870; 3 numéros in-4°- (Présentés
par M. Chasles.)
Considerazioni... Considérations anatomiro-patbologiques sur les glandes
sanguines et sur les tissus érectiles et caverneux ; par M. le prof. Fr. CORTESE.
Venise, 1870; in-8". (Extrait du t. XV des Mémoires de l'Institut vénitien.)
(Présenté par M. le baron Larrey.)
Report... Rapport fait au chirurgien général de l'aimée des Etats-Unis sur
la lumière d'oxy-calcium en tant quapph'qiiée à la photo-micrographie ; par
M. le lieutenant-colonel J.-J. Woodward. Sans lieu ni date; opuscule in-4°
avec 2 planches photographiées.
PUBLICATIONS PÉRIODIQPES REÇCES PAR l'aCADÉMIE
PENDANT LE MOIS d'oCTOBRE 1870.
Annales médico-ps/chologiques ; septembre 1870; in-8°.
Bulletin de l'Académie impériale de Médecine ; n"* des i5 et 3o septembre
i87o;in-8°.
Bulletin de Statistique mwiicipale ; juin et juillet 1870; in-4°.
Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'académie des Sciences;
n"' i4 à 18, 2® semestre 1870; in-4''.
Gazette médicale de Paris; n°' /[i à 44? 1870; in-4°.
Journal de l'Éclairage au Gaz; 11°' 87 et 38, 1870; in-4°.
Journal de Mathématiques pures et appliquées; juillet 1870; in-4"-
L'Aéronaute; septembre et octobre 1870; iii-8°.
Nouvelles Annales de Mathématiques; octobre 1870; in-S".
Nouvelles météorologiques; septembre 1870; in-8°.
COMPTE RENDU
DES SEANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE DU LUNDI 7 NOVEMBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. Chevreitl donne lecture d'une Note sur les subsistances et l'alimen-
tation; cette Note ayant été perdue par la personne qui s'était chargée
de la remettre à l'iniprimerie, elle sera reportée au prochain numéro du
Compte rendu.
MÉCANIQUE. — Sur la déviation des projectiles à ailettes; par M. Paye.
« On sait que les boulets cylindro-coniques à ailettes tirés au moyen de
canons rayés ne restent pas dans le plan vertical du tir, mais dévient de
plus en plus de ce plan en décrivant dans l'espace une courbe à doidilc
courbure. Cette dérivation se sididivise eu deux paris : l'une, très-petite et
purement apparente, est due, comme Poisson l'a démontré, au mouvement
de rotation de la Terre ; l'autre a été attribuée à un mouvement de préces-
sion de l'axe du projectile, provenant de ce que la résultante des actions de
l'air résistant ne passe pas par son centre de gravité.
» La première se calcule aisément : elle est à peu près égale à autant
de fois la 18000^ partie de la portée qu'il y a de secondes dans la durée du
trajet. Cette déviation a toujours lien, pour notre hémisphère, à droite du
plan de tir quel que soit son azinuit.
C. R., 1870, 2" Semestre. (T. LXXI, N" 19.) 8o
( 6o2 )
» Mais la seconde dépend du sens de la rotation du projectile, c'est-
à-dire du sens des rayures héliroidides du canon. Pour les canons de la
marine (i), où ces rayures vont de droite à gauche, en dessus, la dérivation
se fait à gauche ; pour ceux de l'artillerie de terre, où les rayures vont de
gauche à droite, la déviation a lieu à droite. F.es dérivations de ces deux
sortes de projectiles diffèrent donc du double de la déviation due à la
rotation terrestre, c'est-à-dire de 3o mètres environ pour une portée de
7000 mètres parcourne en 36 secondes. En d'autres termes, le boulet de
la marine dévie à gauche, dans ces circonstances, d'environ 3io mètres
lorsque le boulet de l'artillerie de terre dévierait à droite de 34o mètres (a).
Il serait peut-être à désirer qu'on adoptât un seul et même système, afin
de rendre applicables à l'une de ces armes les expériences et même les ap-
provisionnements de l'autre; mais il m'a semblé qu'il serait plus utile de
rechercher la cause de cette singulière déviation et de la supprimer si cela
était possible, sans demander des changements impraticables aujourd'hui.
» On comprendra encore mieux riutérêt de cette question si l'on veut
bien se rendre compte de la complication que ce phénomène a introduite
dans le pointé. Pour en tenir compte, on a dû adjoindre à la hausse
verticale qui sert à régler l'inclinaison du canon, une réglette horizon-
tale graduée le long de laquelle on fait glisser le cran de mire, à droite
pour les pièces de la marine, à gauche pour celles de l'artillerie de terre,
jusqu'au point fixé parles tables de tir. Ces tables numériques résultent
d'aillcin's d'expériences préalables pour divers calibres, expériences où
il a fallu faire varier la charge, l'inclinaison et le poids du projectile.
Leur emploi est assez sûr quand on a le bonheur de rencontrer des
poudres de même force. Toujours est-il qu'il y a à tenir compte à chaque
pointé de deux éléments à la fois, l'inclinaison de l'axe du canon, et la
dérivation (sans parler de la direction et de la force du vent), éléments
variables avec le poids du projectile, la charge et la portée.
« Enfin, si l'on jîarvenait à réaliser les grandes portées que le célèbre
ingénieur anglais M. Withworth ne désespère pas atteindre un jour avec
ses engins pui.s.sants et que j'ai cru moi-même, il y a trente ans, réaliser par
(i) Comme celui de l'amiral Labronsse, dont j'ai ('ludic'' l'^iffiit dans ma Note du 3 oc-
tobre dernier (Comptes rendus^ p. 455-46o):
(7.) En outre, sur le dévelop|ienient du cylindre de l'âme, la transformée des rayures est
une courbe lani^enle à l'origine aux ijénéiatriees, et iiou une liioile connue dans les canons
de l'arlillerie de terre.
( Go3 )
l'union de la force de projection ordinaire avec la force de réaction des
fusées de guerre, la dérivation des pi'ojecîiles rotatoires, qui croît biesi
plus vite que le carré du temps, deviendrait uis obstacle sérieux a la
précision, à moins qu'on ne tînt com[)te, dans la formation des tables,
d'une foule de circonstances accessoires.
» Poisson a le premier traité la question dans son Mémoire sur les pro-
jectiles; mais, de son temps, on ne connaissait ni les canons rayés, ni les
boulets cylindro-coniques à ailettes. Je remarquerai seulement que notre
illustre géomètre admet, pour les balles de fusil rayé tournant de gauclie à
droite, une dérivation vers la gauche, de quelques millimètres seulement à
230 mètres, tandis que des expériences |)ius récentes ont donné constam-
ment des dérivations d'im demi-métre vers la droite. Il semble ainsi que la
question traitée par Poisson n'est pas tout à fait en rapport avec la
nôtre.
)) Dans un Mémoire très-intéressant inséré aux Annales dt l'Ecole Nor-
male, un jeune professeur, M. Gauthier, a développé l'analyse de Poisson
en s'attachantà mettre en relief le double mouvement conique de nutalion
et de précession que la résistance de l'air tend à imprimer aux boulets al-
longés et tournant autour de leur axe de figure. Il a donné les expressions
analytiques de ces mouvements en ten.int compte des termes les jibis in-
fluents, puis il a introduit dans ses formules quelques données luuuériques
partiellement applicables à l'obus de 12, de manière à contrôler jusqu'à un
certain point ses résultats par l'expérience. L'accord n'est pas très-satis-
faisant.
« En réfléchissant à cette question qui intéresse la précision du tir à
longue portée, j'ai été conduit à penser que si les forces considérées dans
celte analyse tendent effectivement à donner à l'axe ces mouvements coni-
ques de nutation et de précession, les choses ne peuvent se passer pourtant
comme dans le cas d'un boulet sphérique ou d'une toupie tournant sur
un plan fixe dans un air immobile, car la résistance de l'air exaltée par
l'énorme vitesse du projectile doit, en vertu de la forme même de ce der-
nier, annuler ces tendances aussitôt qu'elles commencent à se manifester.
En outre la déviation vers la droite ne dépend pas autant qu'on l'a cru de
la situation du centre de gravité par rapport au centre de figure, puisque
l'obus creux de 19 ou de 27, et le boulet plein de même forme ont à peu
près les mêmes déviations daiis toute l'amplitude observée (1600 mètres).
Il y a donc lieu de croire cjue le phénomène de la dérivation tient à
cpielque circonstance négligée dans les travaux que je viens de citer.
80..
( 6o4 )
» Effectivement il en existe deux dont l'influence ne saurait être con-
testée, et qui n'ont pu figurer dans ces reclierches,';à savoir la partie conique
ou plutôt ogivale du projectile cylindiique et les ailettes dont il est armé.
Or cette figure joue ici un grand rôle; non-seulement elle réduit beaucoup
les effets directs de l'air tout en permettant d'augmenter la masse du pro-
jectile, ce qui a singulièrement accru les portées, mais surtout elle |)résente
une direction de moindre résistance si tranchée, que la moindre déviation
de l'axe accroît presque subitement la résistance en j)rcsenlant à la pres-
sion (le l'air tonte la surface du demi-cylindre. On sait en effet aujourd'hui
que le frottement d'un gaz sur une paroi solide et imie est peu de chose,
et que la résistance résulte bien plutôt de la pression qu'd exerce plus ou
moins obliquement sur celte paioi et de la niasse d'air mise en mouvement.
Il suit de là que dans le mouvement d'un pareil projectile lancé dans le
sens de son axe, il existe une cause énergique qui tend à régler à chaque
instant la direction de l'axe. On s'ex|)iique ainsi le fait le plus caracté-
ristique du mouvement des boulets cylindru-coniques dont l'axe ne se
ment pas, comme il le devrait, parallèlement à lui-même : la force exercée
par l'air incline cet axe simplement dans la direction de la tangente à
la trajectoire, de sorte qu'un pareil boulet marche toujours comme une
flèche, la pointe en avant; quant à la tendance à tourner précessionnelle-
ment, sous l'angle de tir, autour de la verticale du centre de gravité, elle
est incessamment détruite par l'énergique résistance de l'air.
)) Les ailettes à leur tour exercent une action complexe qui dépend de
lein-s surfaces multipliées, et de la grande vitesse de translation et de rota-
tion de nos projectiles. A raison de loo tours |)ar seconde, par exemple, les
ailettes d'un boulet de 19 frappent l'air avec une vitesse de 60 mètres par
seconde. Elles ne gardent pas longtemps cette vitesse-là; la résistance de
l'air l'amoindrit bien vite, plus vite même en proportion que la vitesse de
translation, mais, quand on jjense à la masse d'air sans cesse renouvelée que
les ailettes font tourbillonner, on ne peut s'empêcher de croire qu'il pour-
rait y avoir là quelque cause cachée de déviation. D'autre part certaines
faces de ces ailettes s'opposent plus ou moins directement au mouvement
de translation, puisqu'elles frappent l'air en ce sens avec une vitesse de 3 à
4oo mètres par seconde.
» A la vérité ces ailettes sont distribuées uniformément en deux rangées
de 4 on de 6 sur le pourtour de la partie cylindiique du boulet : quand
inie (les faces est eu h.uil, il y en a une autre en bas dans une position sy-
métrique. Si donc l'air était homogène tout autour du i)rojectile, les forces
( 6o5 )
(le résistance transportées parallèlement à elles-inèines au centre de gravité
s'y {iétniiraient deux à deux, il n'j- aur.iit pas de résultante pei-pendiculaire
au plan du lir. Mais eu réalité il existe entre les couches supérieures et in-
férieures une différence sensible de pression dont la cause principale vient
rl'étre indiquée. Si l'air n'existait pas, l'axe de rotation se transporterait pa-
rallèlement à lui-même, quel que fût l'angle de lir. Comme cet axe s'incline
continuellement sur la tangente à la irajectoire, en vertu de la résistance
de l'air, U faut que la pression de l'air sur le demi-cylindre inférieur soit
bien plus forte que dans la région opposée, où il se forme une sorte de vide.
Or cet excès de pression qu'il ne faut pas confondre avec la faible poussée
de l'air se maintient dans toute la durée du trajet, car à chaque instant
l'axe tend à conserver sa direction actuelle et n'en change progressivement
que parce qu'une force agit sur iiù.
» Il résulte de là divers effets. i° En ce qui concerne la rotation, ces
effets peuvent se réduire à un couple dont l'axe est vertical et à une petite
force perpendiculaire au plan de tir; celle-ci doit contribuer à la déviation
observée, tandis que l'action directrice du couple est incessamment dé-
truite par l'énergique action que l'air exerce dans le sens opposé au mou-
vement du projectile. 2" En ce qui concerne le mouvement de translation,
dont l'influence est de beaucoup la plus forte, nous trouvons que chaque
ailette porte, soit primitivement, soit par usure sur les raies de l'âme de la
pièce, une face inclinée parallèlement à ces raies, face qui fait l'effet d'un
petit gouvernail. Les faces situées en dessous ayant bien plus d'action que
celles d'en haut à cause de l'excès de pression, ce sont les premières qui doi-
vent réagir sur la direction du projectile. Or, si eh haut les faces hélicoïdales
des ailettes vont de gauche à droite, celles d'en bas se trouveront disposées
en sens inverse, et la pointe du projectile devra dévier constamment vers
la droite, connue le ferait la proue d'un navire dont on tournerait le gou-
vernail dans le même sens. Ici il ne s'agit plus d'un faible couple contre
lequel réagit facilement l'action directrice de l'air; c'est l'action directrice
de l'air elle même qui fonctionne en un sens légèrement oblique au plan
du tir et qui oblige le projectile à s'en écarter peu à peu.
« Cette explication est assez bien confirmée par un phénomène bien connu
des navires à hélice qu'elle a rappelé aussitôt à mon esprit. On sait en effet
que l'hélice propulsive ne pousse pas rigoureusement le navire suivant l'axe,
mais un peu vers tribord quand l'hélice est de gauche à droite conune celle
des ailettes de boulet (artil. de terre), de telle sorte que le navire dévierait
de plus en plus vers la droite, à la manière de nos projectiles, s'il n'était
( 6o6 )
maintenu par une action légère, mais constante, que le timonier doit exer-
cer sur ie gouvernail. On explique ce singulier eifet par la différence de
pression qui existe entre les couches d'eau où se meuvent les palettes ver-
ticales supérieure et inférieure de l'hélice.
» Malgré cette analogie, il faut signaler ici une différence, ou du moins
une condition particulière au boulet. Si au sortir de la pièce le boulet avait
acquis exactement et s'il conservait ensuite la vitesse de rotation correspon-
dante au pas des rayures et à la vitesse de projection, l'air ne choquerait
pas la paroi hélicoïdale des ailettes; il glisserait simplement sur cette paroi.
Mais cette vitesse de rotation n'est pas complètement atteinte, et d'ailleurs
elle se ralentit bien vile, pins vite en proportion que la vitesse de trans-
lation : aussi l'air frap])e-t-il en réalité hs ailettes dès le début et détermine
ainsi une dérivation d'abord insensible, mais bientôt plus accusée et crois-
sant continuellement.
» Il y aurait un moyen bien simple de soumettre cette explication à
l'expérience : ce serait de placer les deux couronnes d'ailettes à égale dis-
tance du centre de gravité. Dans lein- disposition actuelle, l'une de ces
rangées correspond à peu près à ce point et n'agit dès lors qu'à la façon
d'un gouvernail placé juste au centre d'un navire. Toutefois il resterait
encore un certain transport de tout le boulet vers la droite, dont j'ai indi-
qué plus haut la cause principale.
» Il seiait bien préférable de supprimer les ailettes elles-mêmes dont la
présence doit paraître nuisible indépendanuiient de toute théorie. C'est
sans doute dans celte vue que M. Withworth les a remplacées par des
faces hélicoïdales qui guident le boulet à l'intérieur d'un canon dépourvu
de rayures, mais dont l'âme est engendrée par le mouvement hélicoïdal
d'un certain |)olygone. De même certaines nations ont évité les adettes en
adoptant des projectiles entourés d'une chemise de plomb et forcés dans un
canon à rayures multiples. Mais ces combinaisons diverses laissent encore
prise à l'action de l'air. Il vaudrait mieux, ce me semble, conserver intacte
la forme cylindro-conique et trouver le moyen de se débarrasser des ailettes
au sortir de la pièce, soit en les faisant trancher, soit en les plaçant sur une
sorte de sabot que le boulet abandonnerait au sortir de la pièce. Dans la
première solution, il suffirait, je crois, de doiuier aux rainures, près de la
bouche, une plus grande j)rofondeur, et <à la paroi sur laquelle l'ailette s'ap-
puie le tranchant convenable. Le métal des ailettes étant bien plus mou que
celui de la pièc»', ce travail n'absorberait guère de force vive. Le boulet
débarrassé de ces huit ou douze saillies de 5 ou 6 millimètres conserverait
(6o7 )
plus longtemps sa vitesse, et, si ma théorie est vraie, il n éprouverait que
des déviations tout à fait insignifiantes.
» Dans la seconde solution, une unique rangée d'ailettes serait portée
par une plaque d'acier portant des tenons engngés dans le culot de l'obus,
et faisant ressort à la manière des calottes sphériques appliquées aux tam-
pons des locomotives. L'explosion aplatirait le ressort en faisant pénétrer
ses tenons plus avant dans les mortaises de l'obus, puis au sortir de la pièce,
Télasticité du ressort le ferait rejaillir en arrière du projectile. A la vérité
cette disposition serait bien éloignée du centre de gravité et il faudrait
peut-être adoucir les frottements par une exécution pins soignée ou par
l'étamage de la surface (i).
» En résumé j'ai voulu montrer que la dérivation ne provient probable-
ment pas d'un phénomène de précession, ce qui rendrait la dérivation iné-
vitable quelle que fût la forme de nos boulets, mais en grande partie des
appendices fixés autour du projectile actuel, en sorte qu'en supprimant ses
huit ailettes on ferait disparaître dans le tir une cause d'erreur ou de com-
plication et, de plus, une perte notable de force vive. Cette théorie et les
procédés qu'elle suggère sont très-faciles à contrôler par l'expérience. En
tout cas il est bon de se rendre un compte exact des motifs qui peuvent
avoir décidé les nations étrangères à remplacer nos ailettes par une dispo-
sition qui donne à l'air moins de prise, et j'ai cru qu'il ne serait pas inutile
de rechercher les moyens de faire encore mieux, dans un moment où les
hommes spéciaux, absorbés par des préoccupations plus graves, ne sau-
raient consacrer leur temps à des études pareilles dont je suis loin de me
dissimuler les difficultés. »
(i) Ce flernier procédé s'appliquerait aisément, sans ressort, an projectile mixte ^uiqnel
j'ai fait allusion au début, et qui devait être composé d'un obus ordinaire cylindro-
conique dont la partie cylindrique se prolongerait bien au delà de la base, sur 20, 3o ou
même ^o centimètres de longueur. Ce prolongement devant contenir une charge bien régu-
lièrement tassée de fusée ordinaire, il fallait la soustraire à l'influence de l'explosion. C'est
à quoi je croyais parvenir, il y a trente ans, en plaçant en avant un obturateur très-épais,
percé d'un très-petit orifice et s'appuyant sur une petite charge intermédiaire de poudre
ordinaire. Celle-ci, en faisant explosion, devait chasser l'obturateur et mettre régulièrement
le feu à la fusée. Il serait facile dès lors de placer une rangée d'ailettes sur le pourtour de
cette pièce; seulement il conviendrait, vu la longueur excessive du projectile, de placer
une seconde rangée d'ailettes, vers le centre de gravité. La permanence de l'axe et la régu-
larité de la réaction produite par la matière fusante étant assurées par la l'otation de ce
projectile, il y a lieu de croire que la force additionnelle qu'il emporterait avec lui et qui
commencerait à agir au bout d'un temps déterminé compenserait la résistance de l'air et
même accroîtrait notablement la vitesse, de manière à fournir des portées considérables.
( 6o8 )
« M. i.E SEcnÉTAïuE PKRPKTiTEL, (lésiraiit faire cesser tous les doutes que
l'intéressante Lettre de IM. Hachette (i) pourrait faire naître au sujet de la
date véritable à laquelle se rapporte l'invenlion de Meusnier, donne lec-
ture à l'Académie de quelques passages du tome III des OEuvresde Lnvoi-
sier.
» L'ancieiuie Académie des Sciences avait formé une Commission pour
s'occuper des recherches relatives aux aérostats. Celle-ci, dés la première
séance, entendait une lecture do Lavoisier qui précisait, en quelques mots,
les conditions du problème de la construction et de la direction des bal-
lons. Si le manuscrit de Lavoisier ne fût pas resté inédit durant quatre-
vingts ans, la connaissance des principes qu'il précisait eût épargné peut-
être bien d'inutiles tentatives, et provoqué des recherches mieux condji-
nées. Aux quatre questions qu'il met en évidence comme fondamentales,
on pourrait en ajouter deux qui sont nouvelles et nées des circonstances
présentes; mais le moment n'est pas encore venu de dire comment il y a
été répondu.
PROCÈS- VERBAUX.
« Première séance des Commissaires nommés par l'Académie pour les macliines aérosia-
tiqiies, tenue à l'hôtel de La Rochefoucauld, le 27 décembre 1^83, et à laquelle ont assisté :
MM. le duc de La Rochefoucauld, Le Roy, de Condorcet, Tillet, l'ahhé Bussul, Lavoisier,
Brisson, Berlhollet et Coulomb.
» M. Lavoisieu a fait iectine de l'écrit qui suit :
RÉFLEXIONS
SUR LES POINTS PRINCIPAUX QUI DOIVENT OCCUPER LES COMMISSAIRES NOMMÉS
POUR LES MACHINES AÉROSTATIQUES.
1) La j)erfection dont les machines aérostatiqiies sont susce|)!il)les dépend
u principalement de quatre choses :
» La première, de trouver une enveloppe qui réunisse la légèreté à la
» solidité et qui soit imperméable à l'air et surtout à l'air inflammable,
» même sous une charge d'un demi-pouce de merciu'c;
» La seconde, de trouver un gaz léger, facile à obtenir partout et en
» tout temps, et qui ne soit pas dispendieux;
» La troisième, de trouver un nu)y<'n de faire monter cl descendre la
» machine à volonté, dans une limite de deux à Irois cenis toises^ sans
» perdre ni le gaz, ni le lest;
(i) Comptes rendus, séance du 3i octobre 1870, |). 583.
( 6o9)
» ÏAi quatrième, enfin, de trouver nn procédé facile pour la dii-iger.
1) Sîirle premier objet, on a proposé les étofles de soie d'un tissu plus
« serré que le taffetas, et l'on pense qu'en les pénétrant de vernis à la
» gomme élastique et en appliquant deux épaisseurs l'une sur l'autre, on
» aurait une enveloppe qui tiendrait exactement l'air; c'est un sujet de
» recherches à faire.
» Sur le second objet, il est démontré que l'on peut retirer une quantité
» très-considérable de gaz de presque toutes les substances animales et
» végétales M. Berthollet a rendu compte des expériences qu'il a faites
» pour déterminer la pesanteur spécifique des différents gaz inflammables.
» Celui du charbon de terre s'est trouvé le plus léger; son poids est le tiers
» de celui de l'air ordinaire.
» Sur le troisième objet, M. Meusnier a indiqué des moyens sûrs. On ne
» peut douter, d'après ce qu'il en fait connaître, qu'en supposant une
» enveloppe capable de contenir du gaz inflammable sans perte, lorsqu'il
» pèse sur elle avec luie force de six lignes de mercure, il ne puisse donner
» à la machine la faculté de descendre ou de monter à volonté, et dans
» une latitude assez étendue.
» Enfin, en employant la force des hommes, il paraît constant qu'on
» pourra l'écarter de la direction du vent sous un angle de plusieurs
» degrés. »
» M. le Secrétaire perpétuel ajoute que le procédé de Meusnier est d'ail-
leurs décrit dans la relation de l'ascension qu'il fit à. Saint-Cloud, le..., au
moyen de la combinaison du ballon à gaz et de îa poche à air faisant fonc-
tion de vessie natatoire. »
« M. Chevrecl, après avoir entendu la communication si intéressante de
M. le Secrétaire perpétuel, lui demande si, dans les papiers qu'il a exami-
nés, il n'y en a pas qui aient trait à la pensée d'après laquelle les frères Mont-
golfier ont été conduits à imaginer leur montgolfière? M. Chevreul se trou-
vant, en i8o3, dans un salon de la rue de Caumartin, n'a jamais oublié
avoir entendu dire à une personne qui tenait de très-près aux frères Mont-
golfier, que, voyant les nuages élevés dans l'atmosphère, ils se demandèrent
si, en les renfermant dans une enveloppe imperméable de manière à com-
poser un système dont le poids fût moindre que celui du volume d'air qu'il
déplacerait, il ne s'élèverait pas dans l'atmosphère? C'est cette idée qu'ils
réalisèrent en brûlant, sous l'ouverture inférieure d'un globe ren)pli d'air,
(;. R., 1870, 1" Semestre. (T. LXXI, N" 19.) 81
( 6io )
de la paille humiHe et de la laine; ils formèrent ainsi de la vapeur dite vési-
cutaire, c'est-à-dire de la fumée, ou plutôt un image. Si M. Chevreul avait
pu oublier cette conversation, elle lui eût été rappelée par son confrère
M. Girard, l'ingénieur, qui, au grand étonneinent de IM. Chevreul, se trou-
vait avec lui dans le salon de la rue de Caumartin. »
« M. DiMAS espère que le passage suivant donnera satisfaction à l'illustre
Doyen de la Section de Chimie, dont il confirme entièrement les souvenirs
et les opinions; voici, en effet, ce qu'on lit dans le même document que je
viens d'invoquer, après un historique des tentatives ayant rnéronaulique
pour objet :
« Tel était l'état de nos connaissances sur cet objet, lorsque MM. de
» Montgolfier commencèrent à s'en occuper : il paraît que le point de vue
» sous lequel ils envisagèrent ce grand problème, d'élever des corps dans
)) l'air, fut celui des nuages; de ces grandes masses d'eau, qui, par des
» causes que nous n'avons pas encore pu démêler, parviennent à s'élever
» et à flotter dans les airs à des hauteurs considérables. Occupés de cette
)) idée, ils pensèrent aux moyens d'imiter la nature, en donnant des envc-
» loppes très-légères à des nuages factices et en contre-balançant la pression
» d'un air lourd par la réaction ou l'élasticité d'un air plus léger »
[Œuvres de Lavoisier, t. III.)
» M. Cbevrecl remercie M. Dumas avec une vive satisfaction, certain
qu'il est à présent de pouvoir citer un exemple de plus à l'appui de l'o-
pinion qu'il existe un certain nombre d'inventions dont le point de départ
a été une opinion erronée. Ainsi les frères Montgolfier sont partis d'une
idéeinexacte, lorsqu'ils ont considéré la fumée ou, ce qui est la même chose,
la vapeur vésiculaire ou le nuage comme plus léger que l'air, car tout le
monde sait aujourd'hui que \a fumée d'une cheminée, comme la vapeur
aqueuse visible du image, ne s'élèvent dans l'atmosphère que sous l'impulsion
d'un courant d'air chaud.
» M. Chevreul jusqu'à ce moment même éprouvait toujours luio vive
contrariété lorsqu'il parlait de l'idée qui avait conduit à l'invention de la
montgolfière comme erronée, faute de pouvoir citer à l'appui de cette
manière de voir un témoignage écrit de la valeur du document que
M. Dumas vient de lire. M. Chevreul se rappelle bien avoir vu des passages
du XP volume de la correspondance littéraire de Grimm (édition de
i83o) relatifs à la découverte des frères Montgolfier, mais ils sont assez
(6.1 )
confus et il s'y trouve plusieurs erreurs. S'il est question de niiaqe et surtout
Affamée dans un passage, on trouve plus loin une explication très-exacte
de l'ascension de la montgolfière, puisqu'elle est attribuée exclusivement
à l'oir chaud contenu dans la machine (i).
ÉCONOMIE DOMESTIQUE DES AiSClENS. — N Ole sur (juelijaes documents relatifs
, à l' économie domestique et aux denrées alimentaires en Eijypte sous les
Ptolémées ; par M. Egger.
« Parmi les deux cents papyrus, ou environ, écrits en langue grecque,
que nous ont rendus, depuis cinquante ans, les tombeaux de l'Egypte
ancienne, on sait que le plus grand nombre sont des documents Hnan-
(i) Après la séance de l'Académie, je n'ai rien eu de plus pressé que de revoir le XP vo-
lume de la correspondance littéraire de Grimm et de m'assurer de l'exactitude de ce que
j'avais dit à la séance. Je vais indiquer les pages où se trouvent les citations que j'ai produites,
mais il est un fait dont j'avais perdu le souvenir et qui, dans la circonstance actuelle, n'est
pas sans intérêt; c'est que les frères MontgoIQer ont imaginé 1?l montgo/Jîère dans un but de
guerre, comme on le verra par la citation suivante. Il s'agissait alors du siège de Gibraltar.
T. II, p. 4^0 : Grinim, en parlant de la découverte des frères Montgolfier, dit « que
» leur machine aérostatique, qui s'éleva dans les airs à Annonay le 5 de juin 1783, était
» en toile et en papier, remplie de gaz inflammable u, ce qui est faux.
P. 424- " • • • ce qui les engagea (les frères Montgolfier) dans cette recherche, ce fut le
» désir iP imaginer pour le siège de Gibraltar quelque ressource plus heureuse ([ue celte des
» batteries flottantes. »
L'origine du ballon se lie donc à Vidée de la guerre!
On lit, même i)age : « Une pièce de taffetas que MM. Montgolfier avaient fait venir de
• Lyon pour en faire tout simplement des doublures d'habits, leur jiarut beaucoup mieux
» employée à des expériences de physique », passage qui n'est pas d'accord avec celui de
la page 420.
P. 425. " ... On sait aujourd'hui qu'ils s'étaient procuré le gaz dont ils l'avaient
» rempli par un ])rocédé fort simple et peu dispendieux : en faisant brûler de la paille hu-
» niide et différentes substances, telles que la laine et d'autres matières, de matières de
u graisse plus ou moins inflammables, n
« ... Il ne faut donc qu'un peu de fumée pour opérer le plus beau prodige. »
Page 447'> o" '•' '* véritable explication de l'ascension.
« ... Il va lui adapter une plate-forme en fer sur laquelle on pourra brûler la |)aille,
» seul agent qu'il emploie, dont l'effet est de raréfier l'air atmosphérique contenu dans
» cette machine, ce qui suffit pour l'élever et la soutenir autant de temps qu'on pourra ali-
» inenter le feu. »
La diversité de ces passages ne montre-t-elle pas la difficulté d'écrire l'histoire des
sciences et les recherches nombreuses qu'exige la vérité du récit?
81..
( 6.2 )
ciers : lettres administratives, reçus, actes d'enregistrement, d'ordonnan-
cement, etc. La plupart ont été déchiffrés et commentés avec succès, et ils
ont fourni luie riche moisson de faits et de renseignements aux savants qui
reconstituent i liistoire de ce pays sous la domination grecque, notamment
à M. G. Lumbroso, auteur d'un Mémoire sur ce sujet que l'Académie des
Inscriptions a couronné en 1869 (i). Toutefois, il est nne classe de ces
documents dont l'interprétation laisse beaucoup encore à désirer; ce sont
les comptes de dépense domestique, dont de précieux fragments existent
dans nos collections parisiennes, dans celle du Musée de Leyde et dans
celle du Brilisli Muséum. A ces fragments vient s^en ajouter un aujourd'hui,
que M. Lumbroso n'a pu connaître et qui méiite une étude particulière :
c'est un rouleau, donné en 1866, à l'Université d'Athènes par M. Sakkinis,
et dont M. Albert Dumont, alors membre de notre École Française, avait
pris une copie fort exacte, qu'il a bien voulu me communiquer en m'auto-
risant à en faire part au public. Je prendrai occasion de cette intéressante
découverte pour jeter un coup d'oeil sur l'ensemble des comptes de dépense
épars dans les diverses collections de l'Europe et pour résumer les données
historiques qu'ils nous apportent sur la vie journalière des deux po[)ula-
tions réunies et souvent confondues sous le gouvernement des Ptolémées.
Plusieurs de ces données, se rapportant à l'habillement et à l'alimentation,
se trouvent nous offrir aujourd'hui une sorte d'opportunité qui en aug-
mente l'intérêt. C'est ce qui m'encourage à les soumettre au jugement de
nos confrères de l'Académie des Sciences.
» Les comptes dont il s'agit proviennent presque tous du même fonds,
je veux dire des archives du Sérapéum, de ce temple où vivaient, et en
assez mauvaise intelligence, des reclus et des recluses de race grecque avec
des fonctionnaires égyptiens. Le rouleau conservé aujoinxlliui à l'Univer-
sité d'Athènes n'a peut-être pas une autre provenance, mais il est cer-
tainement d'une autre main que les comptes conservés à Paris (2), à
Leyde (3) et à Londres (4), et il a cela de particulier qu'il nous offre, avec
fi) Recherches sur l'économie politique de l'Egypte sous les Lagides. Turin, imprimerie
royale, 1870, in-8". — Une mention honorable fut accordée, ilans le morne concours, à un
Mémoire de M. F. Robiou, qui n'a pas encore été publié.
(2) Publiés par l'Académie des Inscriptions, dans le tome XVIII des Notices et Extraits des
Manuscrits.
(3) Publiés ])ar M. Leeraanns, à Leyde, i833, in-4°.
(4) Publiés par M. Forshall, à Londres, i83g, in-folio; commentés, mais seulement jus-
tju'au n" ,\VIII, par M. Bernardino Puyron, à Turin, 1841. in-4".
( 6I3 )
peu de lacunes, pour seize jours d'un même mois [i\n mois d'été), la dé-
pense, d'inie famille ou d'un groupe de personnes qui vivaient en commun,
peut-être même d'une seule personne. Dans toutes ces pièces, les chiffres
de chaque article sont souvent difficiles à lire ou à interpréter; la quotité
de chaque denrée n'est pas mise en rapport avec un chiffre déterminé de
consommateurs; cela ne permet que rarement de fixer avec certitude la
valeur des objets mentionnés et d'en tirer les éléments d'une statistique ré-
gulière; enfin, beaucoup de mots, d'origine grecque ou égyptienne, dési-
gnent des objets qui nous sont inconnus. Mais, malgré ces incertitudes et
ces lacunes, la seule mention de tant d'objets de consommation est pour
nous très-instructive, comme on va le voir.
)) Environ cent objets de dépense figurent dans ces comptes : vêlements,
denrées alimentaires, combustible ou vases pour l'aménagement et la pré-
paration de ces aliments, salaires de divers services, gages et intérêt d'ar-
gent prêté, etc.
» Parmi les vêtements je citerai : des robes, tuniques et toiles, surtout
faites de lin, et, entre autres, une espèce de couverture dont la mention ne
se trouve nulle part ailleurs dans les textes anciens : c'est celle qui servait
pour la nuit [olanov iy.toifxrtTpiov); on en connaît le prix, qui est de
looo drachmes de cuivre, c'est-à-dire environ 12 francs de notre monnaie.
Puis, des serviettes dont quatre sont cotées 220 drachmes, soit environ
2^40*^; des toiles teintes, avec la pourpre, qui, sans doute, servait à la tein-
ture. A ces mentions se rattache ;le blanchissage, désigné encore aujour-
d'hui parle même mot ['t3-?^v7ijuov) en grec moderne.
» l^armi les ustensiles et les matières premières de l'industrie : la brique,
les sacs et les corbeilles, les vases de cuivre, les burettes, la lampe, les mè-
ches et l'huile à brûler; cette huile, appelée kiki et employée aussi pour la
toilette (i), est distincte de l'huile à manger ou huile d'olive, et quelquefois
de sésame, et chacune des deux espèces parait avoir été l'objet d'une indus-
trie particulière (xix/ovpj-o;, iAaioupyo;) ; l'encens pour les sacrifices; le
bois, et peut-être ce que nous appelons lesfacjots, qui se vendaient dans un
magasin spécial.
» A ces dépenses se rattachent : les prix de certains services, comme
ceux du boulanger, du foulon, du forgeron, du teinturier, du maçon
chargé de crépir un mur, du baigneur, de l'ouvrier qui porte et qui coupe
le bois, et de celui qui enlève les immondices; la location d'une échelle,
(i) DiouORE DE Sicile, Hibliol/ièt/ue historique, I, 34; Strabon, Géogr., XVII, p. 824.
( 6i4 )
la contribution aux frais de certaines fêtes, le iiolis d'une embarcation sur
le Nil, les frais d'étape d'un soldat, ce qui me rappelle qu'un autre docu-
ment gréco-égyptien nous a révélé l'existence en ce pays d'un corps ana-
logue à t\o\re infanterie de marine {va.VAXvpoiu.%yj,uoi).
» Les denrées alimentaires sont nombreuses et variées. Commençons
par celles de première nécessité. Le blé et la farine, puis le pain, quelque-
fois spécifié par l'adjectif smi/^/e ou pur, pour le distinguer, sans doute, des
gâteaux, parmi lesquels je crois reconnaître un gâteau au miel ( uihiTcvua.),
et d'un autre pain de luxe appelé c/Uestis (i); l'eau, et une liqueur fermen-
tée que désigne le mot Ojvqç ou ^^vtov, et dans la composition de laquelle
entrait l'orge, avec le fruit du mûrier.
» Le vin, comme cette espèce de bière, deux fois mentionné parmi les
rations distribuées soit à des hommes de g;u-de, soit à des espèces de doua-
niers ou inspecteurs de la navigation (Papyrus du Louvre, p. 347. Cf.
p. 335, note i). On sait par d'autres témoignages, notauunent par celui
de l'Inscription de Rosette (lignes i5 et 3o) que la culture de la vigne
avait, en Egypte, une grande importance.
)) Le vin et le z/tos étaient soumis à des impôts. L'impôt sur le zpos
s'appelait Çorvifa et paraît avoir donné au fisc royal un revenu considé-
rable, à en juger par le règlement financier dont le Papyrus LXII du
Louvre nous a conservé de nombreux fragments.
» Le miel, cité auprès des /xtXiTCà/u^Ta., dans une pièce du Musée de
Leyde, était l'objet d'un commerce spécial; le producteur de miel (mot
à mot d'abeilles, ou apicidleur, comme nous disons aujourd'hui) s'appelait
n Le tait, mentionné une seule fois dans nos comptes, le lait cuit avec le
froment formait une bouillie qui paraît avoir été fort en usage dans l'éco-
nomie domestique des Égyptiens, et que les documents de Leyde et de
Pans, d'accord avec une glose du Lexique d'Hésychius, nomment alitera :
c'était peut-éire un rafraîchissant. Au contraire, le xcfx.iç, mentionné une
fois dans l'un des Papyrus du Louvre, était, au témoignage du géographe
Strabon (2), un pain de nature astringente; mais on en ignore la com-
position.
M Le sel et le niire, peut-être compris quelquefois dans luie expression
collective qui répond à noire français condiment, assaisonnement, comme
(i) HÉRonoTE, ir, "^-j, t:t les textes njunis par les interprètes sur ce passage.
(2) XVII, p. «24.
( 6i5 )
o-^ov (mot à mot ce qui est cuit) et o-^coviov répondent à peu près an français
vulgaire/r/(0/, par opposition au pain sec (i).
» Les légumes, entre lesquels sont spécialement cités : l'ail, la laitue,
la poirée, le chou, le fenouil et la nigelle.
» Les fruits, entre lesquels la figue, la grenade, la datte, un cucurbitacée
[xoXoicvi^ov) qui était peut-être le melon ou le pastèque, la noix.
, » Les racines, parmi lesquelles je ne relève sûrement que les raves et
les railis; mais peut-être y faut-il ajouter le papyrus^ souvent mentionné
dans les comptes de Paris et de Londres; car on sait que la racine de ce
précieux végétal contribuait à la nourriture des habitants de l'Egypte (Hé-
rodote, II, ga). Un seul scrup(de m'arrête à cet égard : c'est que parmi les
objets cités dans les comptes du rouleau Sakkiiiis se trouve l'encre, mot
à mot le noir, juiXav, d'où les mots composés /utiXctiu&poXov^ qui a le même
sens, et /uiXatovpy oc, fabricant d'encre (2). Si les papyri en question étaient
du papier pour écrire, il ne manquerait plus que le calamits, mentionné
d'ailleurs dans un autre document de la Collection du Louvre (p. 324), pour
compléter l'appareil d'un scribe égyptien. Mais, à vrai dire, les mots^apT-/^
ou /3/^Aoç sont beaucoup plus usités, surtout avant l'ère chrétienne, que
furafsrupot; pour désigner le papyrus en tant que matière servant à l'é-
criture.
» Les viandes (x.pitx.) sont fréquemment mentionnées, celle de bœuf et
celle de mouton d'abord; un bœuf est évalué à environ 245 fr. de notre
monnaie; puis, et très-fréquemment, la chair d'oie. On sait, par de nom-
breux témoignages, que, de toute antiquité, l'oie fournissait aux habitants
de la vallée du Nil un de leurs principaux aliments : dès la V^ dynastie, les
tombes du Haut Empire nous montrent à l'œuvre le nourrisseur d'oie, celui
que les documents grecs [Papyrus du Louvre, p. i34, 142, i45, 3o3) ap-
pellent %n>oêoi7ZOç, et qui employait, pour engraisser sa volaille, les moyens
violents usités encore de nos jours; c'est ce qu'on peut voir, entre autres,
parles peintures murales du tombeau de Ti que reproduisait, en 1867, à
notre Exposition universelle, l'une des parois intérieures du Temple égyp-
tien si industrieusement élevé sous la direction d'Aug. Mariette-Bey.
(i) Dans le centre (!e la France, c'est le mot frippc qui est employé en ce sens (voir le
Glossaire du comte Jaubert).
{2) Ces deux derniers mots nous sont fournis par un lexique inédit de Julius Pollux
(m' siècle après J.-C.) que publie, en ce moment, dans les Notices et Extraits des Manus-
crits, M. Boucherie, professeur au Lycée de Montpellier.
( 6'6)
■) Il paraît que, comme chez nous aussi, les bovichers égyptiens utili-
saient les entrailles du bœuf et du mouton, car les documents de Leyde
mentionnent deux fois des splilanrjnides ou splanchnides, ce que l'on tradui-
rait volontiers eu français par le mot lrii)cs. Sur quelques peintures, repro-
duites dans l'ouvrage de S. Gardner Wilkinson (i), on croit reconnaître,
parmi d'autres produits culinaires, des rouleaux fort semblables à nos
boudins ou à nos saucissons.
» Les salaisons (tariclios) reviennent fréquemment dans le rouleau Sak-
kinis; et la profession de saleur [laricheiites] n'est pas moins souvent men-
tionnée dans les documents grecs (\o provenance égyptienne, sans qu'on y
distingue la nature des substances soumises à cette préparation ; et cepen-
dant il nous importerait souvent de distinguer entre le saleur de comesti-
bles et l'embaumeur, qui sont tous deux désignés \yar le même mot. Le
poisson aussi, que ne mentionne expressément aucun de nos com|)tes,
doit être quelquefois compris sous le nom générique de salaison, car il
comptait pour une bonne part dans l'alimentation des Égyptiens (Héro-
dote, II, 92, 93). Le métier de pécheur est souvent mentionné par nos do-
cuments grecs du Louvre (p. iSy, iSq, 148), et les produits de la pèche
paraissent avoir été soumis à un impôt particulier [Ihid. p. 365).
» Mais, pour ne pas trop allonger cette Note, il est temps que je donne
deux ou trois des comptes journaliers du rouleau Sakkinis et un court ré-
sumé des mentions qui y sont les plus fréquentes. Cela fera saisir dans son
ensemble l'économie d'un de ces modestes ménages dont les registres de
dépense sont parvenus jusqu'à nous par une heureuse fortune, à travers
tant de destructions.
I""' Mcsori. 3° Mcsori.
Pains, Pains,
Salaison, Huile,
Bois, Bois,
Melon, Melons,
(Une ligne peu lisible). Assaisonnements,
1' Mi'sori. . Légumes,
Pains, (Une rature),
Opson, Encre.
Bois,
Assaisonnements,
Poirées.
(i) Marinas iind Ciistnms nf the /inrient /îf;rptinrix, t. II, |>. 38 >. et suiv. Si je ne mcn-
(6.7 )
» Le registre continue jusqu'au seizième jour avec cette sobriété de dé-
tail et celte uniformité, sauf l'indication de cinq ou six noms de fournis-
seurs ou d'intermédiaires entre le consommateur et le fournisseur. Le i)ain
y reparait seize fois; les légumes et Vopson treize fois, ainsi que le bois; les
salaisons douze fois, l'huile de kiki cinq fois (i); les autres objets moins fré-
quemment : tout cela donne l'idée d'un régime singulièrement simple, mais
qui peut sembler encore nourrissant, vu la douceur du climat en Egypte.
» On voudrait, maintenant, en évaluer la dépense en monnaie de notre
temps. Mais, même si l'on pouvait toujours déchiffrer sûrement les signes
niunériques qui suivent chaque article ou qui résument la dépense de cha-
que jour, il nous manquerait encore lui élément nécessaire à l'évaluation
désirée : je veux dire la quantité de bois, de pain, de salaison, etc., dont
le prix est brièvement indiqué. C'est là une ressemblance de plus avec nos
livres de cuisine, où bien des détails sous -en tendus sont aujourd'hui
suppléés sans peine par ceux qui écrivent de tels livres et qui payent la dé-
pense. Mais cette ressemblance ne rend que plus difficile la tâche des inter-
prètes. Heureusement, on peut espérer que la comparaison, poursuivie
avec patience, de ces docunienis grecs et des documents nombreux en
langue égyptienne qui appartiennent à la même classe, permettra d'arriver
peu à peu, sur ce sujet, à des conclusions de plus en plus intéressaiîtes,
parce qu'elles seront de plus eu plus précises.
» Le court aperçu qui précède n'avait pour objet et ne pouvait avoir pour
résultat que d'attirer l'attention des savants sur un ordre de faits peu étu-
diés jusqu'ici, et qui méritent de trouver place dans un tableau général de
la vie journalière des peuples anciens. »
MÉMOIRES LUS.
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Sur l' importance actuelle des questious se rattachant à
ihygiène publique et privée et notamment la question des hémostatiques et
des désinfectants, et sur le phénol sodique. Note de M. P. Bobœuf. (Ex-
trait par l'auteur.)
(Commissaires : MM. Dumas, Bussy, St. Laugier, Bouley.)
« Le phénol sodique fournit à la fois à la chirurgie un hémostatique
tienne pas ici la chair de porc, c'est que l'usage alimentaire paraît en avoir été fort res-
treint, chez les Égyptiens, par des motifs religieux (Hérodote, II, 47)-
(i) Je ne tiens pas compte des mentions qui font partie d'un résumé à la fin du mois.
C. K., 4870, 2" Sianeilre. ( T. LX\I, N" 13.) ^2
( 6,8 )
puissant et un désinfeclant précieux n'ayant pas, connue le pcrchlorure de
fer, l'iode et autres agents généralement employés, l'inconvénient grave
d'irriter les plaies et de nuire à leur cicatrisation. Il est donc appelé à
rendre, dans les hôpitaux et ambulances, les plus importants services, si
l'on se décide à en faire usage pour les pansements et à utiliser sts pro-
priétés hémostatiques, désinfectantes et cicatrisantes.
» Dans le même ordre d idées, le phénol sodique constitue à lui seul la
pharmacie de poche que devrait porter tout combattant afin de pouvoir
arrêter, par uu pansement provisoire, les hémorrhagies cpii entraînent si
souvent la mort à la suite de blessures légères.
» Pour remédier efficacement aux causes d'insalubrité existantes, pour
combattre l'épidémie variolique, pour prévenir l'accroissement des chances
de mortalité pouvant résulter, soit de l'invasion d'autres épidémies, dyssen-
terie, choléra, etc., soit de l'encombrement des habitations, casernes, cam-
pements, hôpitaux et ambulances, en un mot pour neutraliser toutes les
influences pernicieuses qui peuvent compromettre la santé de la capitale,
il est nécessaire d'employer, sous les diverses formes indiquées, et surtout
en arrosages et pulvérisations, à l'effet d'assainir l'air et d'y détruire tous
les agents d'infection, les sels alcalins d'acide phénique, sels dont le phénol
sodique est le type le plus parfait, parce que seuls ces sels possèdent une
énergie d'action et des propriétés hygiéniques suffisantes. »
MÉMOIIIES PRÉSENTÉS.
M. Tellier écrit à l'Académie pour formuler, en quelques mots, les con-
clusions de sa Note précédeiUe sur l'emploi de la glace dans les amputa-
tions. Ces conclusions sont les suivantes :
« 1° L'emploi de la glace, tel qu'il se pratique actuellement, amène iné-
vitablement la condensation des vapeurs que contient l'air et par consé-
quent l'entiaînement des miasmes tenus par lui en sus|)ension;
» 2° Le produit de cette condensation vient imbiber la plaie et y porter
l'influence délétère de l'air des hôpitaux; par conséquent, loin de la pré-
server, on y apporte ainsi les miasmes pestilentiels qu'il importe tant d'é-
carter;
» 3° Enfin, comme remède à cet état de chose, j'indique l'emploi de
l'air froid sec, et le moyen de le prodiure aisément. ■;
(Renvoi à la Commission précédemment nommée.)
( 6-9)
M. Brachf.t adressa mie nouvelle Lettre relative à divers projets d'appa-
reils aérostaliqiies.
(Renvoi à la Commission précédemment nommée.)
M. Varenne adresse une Note- sur la navigation aérienne, accompagnée
-d'un croquis représentant les principales particularités de son système.
(Renvoi à la même Commission,)
M. I>EBRUf.E adresse une Note relative à un ballon dirigeable. L'autetu-
se j)ropose d'abord d'établir l'impossibilité de diriger les aérostats tels
qu'ils ont été compris jusqu'à ce jour. Il développe ensuite un projet de
ballon d'un nouveau modèle.
(Renvoi à la même Conuuission.)
CORRESPONDANCE .
ART Mir ITAIRE. — Sur la force de la poudre et des matières explosives.
Note de M. Berthelot (*).
« 1 . La force de la pondre dépend de diverses données, parmi lesquelles
le volume des gaz dégagés et leur température jouent un rôle fondamental :
cette température, la grandeur des pressions sous un certain volume, enfin
le travail mécanique peuvent être calculés d'après la quantité de chaleur
développée pendant la combustion de la poudre.
» 2. C'est ainsi que MM. Bunsen et Schischkoff (**) ont trouvé que
I gramme de poudre dégage 6i9'^''\5 en brûlant sons la pression atmosphé-
rique; le volume des gaz dégagés était de 193 centimètres cubes (à zéro et
o"\76o) dans les conditions de leurs expériences, qu'ils ont achevé de dé-
finir par l'analyse complète des produits briilés. Ils ont évalué la chaleur
spécifique moyenne de ces produits, pris sons volume constant, à 0,1 855
et ils ont calculé la température de romhuslinn de la poudre, dans un espace
éqal à son propre volume, en divisant 619,5 par o,i855; soit 334o degrés.
(*) L'Académie a décidé que cette Communication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Compte rendu.
{**) Pogg. Ann., t. Cil, p. 321, 1857.
82.
( 620 )
Ils évalnont ensuite le volume occupé par les gaz, dans cetio condition, à
o'='^,584, déduction faite du volume occupé par le résidu solide, et ils cal-
culent la pression en multipliant le rap|)ort 1 98:0,584 par i + a.334o; ce
qui conduit à 4374 atmosplièros.
» Tel est le calcul des auteurs et il a servi de type aux calculs analogues
faits depuis sur diverses matières explosives.
» 3. Ayant été conduit par les circonstances présentes à m'occuper de
la fabrication des poudres et des canons, il m'a semblé que le calcul pré-
cédent était défectueux, parce que la teiupéralure de combustion était cal-
culée/30ur un volume égala celui des gaz de la poudre, mesurés à zéro cl sous la
pression almosphéj-ique, au tien d'être calculée pour un volume égal à celui de la
poudre elle-même. En d'autres termes, les auteurs ont négligé la chaleur qui
se dégage lorsque 198 centimètres cubes des gaz de la poudre sont réduits
par la compression à o'''^,584. Or la quantité ainsi négligée est énorme; elle
est décuple environ de la quantité dont on lient cokupte. Je vais la calculer
d'après la théorie mécanique de la chaleur.
» 4. Soient i',, p,, t^ le volume, la pression et la température d'une cer-
taine masse gazeuse; si on l'amène à un volume iu, sans lui fournir ni lui
enlever de chaleur, les nouvelles pression et température, p, et t^, sont
données par les formules connues
A
(a) I + «^2 = .(i -+- ut,) T-
Posons :
/i = 1 ,4' 1 rapport théorique des deux chaleurs spécifiques pour les gaz;
2^3
c, la chaleur spécifique moyenne des produits de la combustion, sous
volume constant;
Qi, la quantité de chaleur recueillie dans le calorimètre, lorsque la com-
Inistion d'un kilogramme de poudre a lieu sous la pression atmo-
sphérique et avec développement d'un volume de gaz égal à t>, (en
litres et à zéro).
/, sera la température acquise par les gaz, sous le volume constant c,, ci
par rinflueiice de la quantité de chaleur Q, ; ce (pii doiuie les
î'j3 c
( 6^' )
relations :
(3) ^-^;
(4) /?, = I + c<^ = I + — r — (en atmosphères);
et par suite
(5) p,=
ou bien encore
(6) /7o — (i + afo)
(7) ,73 + /.= (.73 + 51
» Soit enfin Q^ la quantité totale de chaleiu' dégagée par i kilogramme
de poudre, lorsque les gaz de la combustion sont réduits à o degré et au
volume v^t on aura
(8) Q. = c/„
c'est-à-dire
(9) ^73c + Q,= (273c + Q,)(;-:)"'"',
(10) Qo X 4251^°™ = 0,
travail maximum qui puisse être produit par 1 kilogramme de poudre, brû-
lant dans le volume constant t',, sans changement de température.
» Ces formules peuvent servir à calculer la loi théorique de détente des
gaz de la poudre et leur réaction sur le projectile, pourvu que l'on con-
naisse la vitesse avec laquelle les gaz prennent naissance, celle du projectile
dans le canon, enfin la quantité de chaleur transformée à chaque instant
en travail mécanique. Mais je ne veux pas entrer dans cette discussion. Je
signalerai seulement une conséquence importante des formules, relative à
la comparaison de deux substances explosives différentes.
» 5. Pour une même valeur de -■> les variations des quantités 0, Qo, ^,
et ^2 sont du même ordre que celles de la quantité Q, , lorsque cette quan-
tité est considérable, sans lui être pourtant rigoureusement proportion-
nelles.
» En d'autres termes, si le rapport entre le volume des gaz (*) produits
(*) Réduits à o degré et o"','j6o.
( 622 )
par la réaction et la capacité dans laquelle la réaction s'effectue est le
même pour un même poids de deux substances explosives différentes, l'ef-
fort exercé sur les parois et le travail maximum seront à peu près propor-
tionnels aux quantités de chaleur mesurées dans le calorimètre des physi-
cieuj.
o 6. Il s'agit maintenant d'appliquer ces formules. D'.iprès les données
de MM. Bunsen e( Schisciikoff, on trouve
t, = 3340°,
p, = i3='"",23.
» Soit .r le nombre de grammes de poudre contenu dans une capacité
constante égale à 1000 cenlimèties cubes; on aura
<', Q ■>■
Cj "^ 1000 — 0,4lD.r
d'après les hypothèses des auteurs; d'où résulte
(I) p,= i\23( ^9^
Pour X
1000 — o,4i6x
'^ = -^ = 33o 5
<>, o,584 •^'^"''^'
^2 = 47000'"" au lieu de 4374,
<2 = 38700" au lieu de 334o,
Qj= 7 1 8f) ooo'^-'»', 0 =r 7180000 X 4^5 = 3o5i Sooooo''^™.
» C'est le travail-maximum que puisse effectuer, d'après les théories que
nous avons admises, 1 kilogramme de poudre en brûlant dans un espace
égal à I litre.
» 7. Comparons ces données avec les résultats que Rumfordt a obtenus,
dans des expériences directes publiées en 1797 (*), et nous parviendrons à
des aperçus inattendus sin- les états de la matière soumise à des pressions
et à des températures que l'on avajt réputées jusqu'ici inaccessibles.
» Rumfordt a mesuré l.^spressionsdévelopiiées pai' divers poids de poudre
brûlant dans une capacité constante. Un kilogramme de |)oudre, brtilant
dans I litre, développerait ainsi 55 000 atmosphères : chiffre qui n'est pas
(*) Philos. Tran.inct., 1797; — Piobert, Traite d'Jrtillrric, partie théoriqiif, 2' tir.ige
(lu la seconde éditinii, p. 39, i ; 1869.
( 623 )
fort éloigné des 47 000 indiquées par notre calcul. Pour x =: 702, l'expé-
rience a donné 11 000; le calcul indique 21 800. A partir de a: = 5oo et
au-dessous, Ruinfordt a représenté ses nombreux résultats par la formule
eiiipirique
P2 = 1,841^'"
1+0,0004 X
Tableau
(II
).
VALEURS
DE /'
, 0
'APr.Ès
Valeurs de t.
la formule (1).
Rumfordl.
I
aim
1,3
1,8
5
12, 7
9'2
10
33,7
18,6
5o
333
99
lOO
916
221
200
2640
590
5oo
I i54o
3200
702
21800
1 1800
1000
47000
55ooo
« Voici le tableau des résultats empiriques de Ruinfordt, comparés avec
les résultats calculés d'après la formule théorique (I).
Rapporl.
0,8
1,4
1,8
3,4
4,i5
4,45
3,6
2,0
0,8
» D'après ce tableau, les résultats théoriques sont voisins des résultats
réels, quand le poids de la poudre est faible; ils s'en écartent de plus en
plus, à mesure que le poids augmente, jusqu'à dépasser 4 fois les valeurs
empiriques; puis l'écart diminue, et l'égeJité tend à se rétablir lorsque la
poudre remplit presque entièrement la cspacité du canon.
M 8. Sans garantir autrement l'exactitude des résultats empiriques de
Rumfordt pour les hautes pressions, on peut cependant tirer des inductions
intéressantes de la comparaison qui précède. En effet les nombres théoii-
ques ont été calculés d'après la quantité de chaleur Q,, mesurée à zéro
et sous la pression d'une atmosphère. Or les composés observés dans ces
conditions n'existent probablement pas en totalité à la haute température
développée pendant la combustion de la poudre; ils sont remplacés sans
doute, en tout ou en partie, par des combinaisons plus simples, conformé-
ment aux phénomènes de dissociation. Par suite, la quantité de chaleur
correspondante aux réactions réelles est inférieure à Q,; ce qui tend à
rendre moins considérable la température maximum, ainsi que la pression
correspondante. On comprend dès lors les écarts entre les valeurs théo-
riques et les valeurs empiriques : ces écuts vont d'abord en augmentant
( 624 )
avec les quantités de poudre employées, parce que la température s'élève
de plus en plus, ce qui accroît la dissociation. Ainsi la température théo-
rique t^
Pour .r = I, est égale à i566°;
Pour X 1= 10, elle atteint 4470")
Pour X = loo, u 12120";
Pour -r = 5oo, u 256oo°, etc.
» Les températures véiitables sont assurément moins élevées; mais il
suffit qu'elles augmentent avec les quantités de poudre brûlées dans une
capacité constante pour donner lieu à un accroissement dans les phéno-
mènes de dissociation, au moins tant que la pression demeure comprise
entre certaines limites. Cet accroissement dans les phénomènes de disso-
ciation se traduit par l'accroissement du rapport inscrit à la quatrième co-
lonne du tableau.
» 9. Cependant, au delà de loo atmosphères ledit rapport tend à de-
meurer constant; puis il décroît et se rapproche de nouveau de l'unité.
Pourquoi celte marche singulière? Elle résulte, à mon avis, du concours
de deux circonstances.
» D'une part les lois de Tslariotte et de Gay-Lussac, à l'aide desquelles
la formule théorique a été calculée, perdent de plus en plus leur signifi-
cation physique pour des pressions aussi énormes que les pressions obser-
vées dans la combustion de la poudre. Étant donnés des gaz tellement com-
primés, leur pression varie avec la température suivant une loi bien plus
rapide que celle que nous avons admise. Les températures véritables sont
donc beaucoup moins hautes que les températures calculées, et j)ar suite
les phénomènes de dissociation éprouvent un accroissement moins marqué.
» D'autre part ces mêmes jjhénomènes dépendent de la pression, aussi
bien que de la température. L'éiat de combinaison des éléments, toutes
choses égales d'ailleurs, est d'autant plus avancé que la pression est plus
grande : relation facile à concevoir à priori et que confirment mes expé-
riences relatives à la décomposition de l'acétylène en carbone et hydrogène
sous diverses pressions par l'étincelle électrique (*). Or les pressions crois-
sent en même temps que les températures, et même beaucoup plus rapide-
ment, comme on vient de le dire : l'influence décomposante de la tempéra-
ture pourra donc être compensée et au delà par l'influence inverse de la
(*) annales de Chimie, 4" série, t. XVIII, p. 196.
( 625 )
pression. C'est précisément cette compensation qui me paraît écrite dans la
quatrième colonne du tableau II et qui tend à rajiprocher les pressions
théoriques des pressions réelles, à mesure que la poudre brûle dans un es-
pace plus voisin de son propre volume.
» 10. Les phénomènes de dissociation n'exercent pas seulement leur in-
fluence sur l'effort maximum que la poudre peut développer; mais ils in-
terviennent encore pendant la première période de délente. A mesure que
les gaz de la poudre se détendent, en agissant sur le projectile, ils se refroi-
dissent : par suite les éléments entrent en combinaison d'iuie manière plus
complète et avec formation de composés pins compliqués. De là résulîe un
nouveau dégagement de chaleiu- qui s'accroît incessamment pendant toute
une période de la détente. Eu même temps que le rapport - va en décrois-
sant, la quantité de chaleur dégagée Q\ augmente sans cesse, pour une
même valeur dudit rapport. Les pressions véritables seront donc toujours
supérieures aux pressions qin pourraient être calculées d'après la quantité
de chaleur dégagée réellement au moment de la température maximum,
tandis qu'elles seront d'abord inférieures aux pressions calculées d'après
la quantité Q, observée dans le calorimètre; mais ce dernier écart va en
diminuant et finit par s'annuler, à mesure que le volume augmente, parce
que la chaleur dégagée s'accroît, les réactions devenant plus complètes. La
courbe des pressions véritables, exprimées en fonction des volumes, est
d'abord plus tendue que la courbe des pressions théoriques, avec laquelle
elle finit par se confondre tout à fait, lorsque l'état de combinaison des
éléments est devenu le même qu'à la température ordinaire. D'où il suit
que le projectile prendra dans le canon une vitesse initiale moindre que la
vitesse calculée d'après Q,; mais cette vitesse s'accroîtra suivant une pro-
gression plus rapide que celle qui résulterait d'une déduction fondée sur
la connaissance pure et simple de la vitesse initiale ainsi calculée.
» 11. Au contraire la quantité de chaleur et par conséquent le travail
maximum que la poudre puisse développer en brûlant dans une capacité
constante peuvent être calculés indépendamment des phénomènes de dis-
sociation, pourvu que l'état final de température et de combinaison des
éléments soit exactement connu. Celte remarque est fondamentale.
M Dans une autre Communication, je comparerai les quantités de cha-
leur, les pressions et les travaux maximum pour les diverses poudres et
matières explosives. »
C. R., 1870, ■!<' Semestre. (T. LXXl, N" J9.) 83
( 626 )
SPECTIIOSCOPIE. — Sur l'analyse spectrale ijuanlitalive.
Note de M. J. Janssen.
" J'ai l'honneur de faire une |jreniière Communication à l'Académie sur
une branche nouvelle de la spectrologie; je veux parler de l'analyse spec-
trale quantitative.
» Jusqu'ici, les méthodes optiques, dans leurs applications à la chimie,
n'ont permis d'abonler que le côté qualitatif de l'analyse.
« Pour une classe nombreuse de corps, le spectroscope a fourni de pré-
cieuses indications sur leur présence ou leur absence dans un composé donné,
mais il était impossible d'obtenir, par son aide, des données certaines sur les
proportions suivant lesquelles ces corps se trouvaient associés. En un mot,
l'analyse specti'ale est restée jusqu'ici essentiellement qualitative; le mo-
ment semble venu de lui faire faire un pas de plus, eu lui |)erinettant
d'aborder les déterminations quantitatives.
» Ce progrés semble d'autant plus désirable, que les méthodes chimi-
ques de dosage sont insuffisantes dans bien des cas, notamment quand le
corps à doser entre pour une proportion extrêmement faible dans le com-
posé; ou bien encore, et c'est le cas pour le sodium, quand la substance
ne donne que des dérivés d'une grande solubilité non susceptibles d'une
séparation nette et rigoureuse.
» Cette Communication contient les résultats de mes premières études,
et j'y expose le principe qui me parait devoir servir de base à cette nouvelle
branche de l'analyse. J'eusse désu'é attendre encore et avoir un travail plus
achevé à offrir à l'Académie; mais tout récemmment, M. Champion, chi-
miste distingué du laboratoire de M. Payen, me demanda à enqdoyer les
nouveaux, procédés à la recherche de la soude dans les végétaux. Il y avait
là une application spéciale qui ne pouvait que faire progresser la question
et montrer l'avenir dont elle était susceptible. Je conununiquai donc mes
résultats à M. (Jhampion, persuadùé qu'il aurait l'occasion de les perfec-
tionner, et c'est ce qui est arrivé.
» Je fais dés maintenant cette publication, afin de permettre à M. Cham-
pion d'exposer ses recherches dont les résultats sont déjà intéressants.
» Avant d'aborder le principe de la méthode, je demandei'ai à repro-
duire ici une Note pidjliée au Congres scientifique d'Excter, en août 1869.
Ce n'est pas encore l'analyse spectrale quantitative, mais c'est la solution
( «27 )
d'une question qui m'y a contluit, et qui n'était pas résolue jusqu'ici, à sa-
voir la recherche de la soude par le spectroscope.
'I Note sur une nouvelle méthode pour la recherche de la sonde et des composés dit sodium
par l 'nnnh se spectrale.
» On sait que la recherche de la soude présente, eu analyse spectrale, des difficultés très-
grandes qui tiennent à ce que la raie du sodium se retrouve dans presque toutes les flammes,
en raison de la présence presque constante du sel marin dans l'atmosphère.
» Or, on peut lever facilement cette difficulté en employant, au lieu d'une flamme très-
chaude et fort peu éclairante, comme celle de Bunsen, une flamme très-lumincusc, comme
celle d'un bec de gaz ordinaire dans la partie la plus brillante.
» En effet, tandis qu'on aperçoit presque toujours la raie du sodium dans la partie bleue
et transparente d'un bec de gaz, on ne la trouve plus dans la partie la plus lumineuse, à
cause (le l'abondance des rayons qui avoisincnt la raie du sodium dans cette région.
» Voici donc la manière d'opérer :
Il On diiii^era le spectroscope sur la partie la plus brillante de la flamme, de manière à
obtenir un spectre brillant et conlinu dans lequel la raie du sodium n'apparaisse pas sen-
siblement. On prendra un (il de platine qui aura été préalablement porté au rouge dans
une flamme pendant quelques minutes, pour le débarrasser de toute poussière salée, et, .
avec ce (il, on portera une goutte de la solution à essayer dans la flamme du spectroscope.
En cet instant, si la liqueur contient un composé du sodium réductible par la flamme, la
raie D apparaîtra immédiatement. On peut rendre aussi peu apparente qu'on voudra la raie
du sodium en employant les parties les plus lirillantes des flammes, ou même en plaçant
entre le spectroscope et la flamme d'essai une ou deux flammes auxiliaires qui rendront la
raie D encore moins perceptible. Dans ce dernier cas, il faudra employer du sel en assez
grande quantité dans la flamme d'essai pour voir apparaître la raie D dans le spectrosroiie.
Si, au contraire, la liqueur ou le corps à essayer contient fort peu du composé sodé, on
pourra employer une partie plus transparente de la flamme; dans tous les cas, il sera pru-
dent de faire des expériences comparatives avec les fils de~ platine et de l'eau distillée, pour
s'assurer que les raies qui apparaissent sont bien dues à la substance qu'on analyse.
» Je continue ce sujet, et j'espère arriver à une anal-yse c/unntiteitire des substances à
analyser. [Report of the Bristisli association for the advancement of science, i86g.) »
)) On voit que l'esprit de ce procédé consiste à désensibiliser la flamme,
de manière que le sodium accidentel ne puisse se manifester, et que la
raie D apparaisse seuletnent si le corps contient normalement, et en quan-
tité appréciable, la stibstance sodiqtie.
» Appliqué à l'étude de quelques végétaux, le procédé a révélé la |)ré-
sence de la sonde dans pltisieurs de ceux pour lesquels la question parais-
sait douteuse. Ces résultats seront donnés plus tard.
» J'arrive maintenant à l'analyse quantitative.
» L'emploi des flannnes auxiliaires, dont il vient d'eire parle, douiie
déjà une prenuère solution de la question.
83..
{ 628 )
)) Ces flammes doivent être très-liimineuses, et ne pas donner la raie D
dans leur spectre; tel est le cas thi gaz d'éclairage brûlant dans les becs ordi-
naires. On place les flaninics auxiliaires entre la flamme d'essai et le spectro-
scope afin de noyer la lumière jaune du sodium dans une quantité plus ou
moins grande de lumière ordinaire, ce qui permet d'atténuer, autant qu'on
le veut, l'inlensité relative de la raie D dans le spectre obtenu on de ramener
cette intensité à la même valeur relative, quelle que soil la richesse en
soude de la liqueiu- essayée. Dès lors, si on fait des expériences avec des
liqueurs sodiques titrées, et qu'on détermine pour chaque solution le
nombre des flammes nécessaires pour ramener la raie D au même degré de
visibilité (on peut choisir le moment où la raie D commence à se détacher
sur le fond brillant du spectre), on obtiendra luie relation qui permettra
de prononcer sin- la richesse d'une sointion sodique proposée.
» Tel est le premier procédé qui s'est offert à mon esprit, mais on peut
en trouver un second dans la considération du temps que la substance
sodique emploie à se volatiliser. Si, en effet, on place successivement dans
une flamme des fils de platine trempés dans des solutions sodiques diverse-
ment riches, on constate que non-seulement l'abondance de la lumière
jaune augmente avec la richesse de la solution, tuais en outre que le temps
pendant lequel cette lumière jaune persiste, dans la flamme, croît aussi
dans les ujèrnes circonstances. On cherche ensuite expérimentalement la
relation qui existe entre le temps qu'une solution donnée exige pour être
entièrement volatilisée et sa richesse en substance sodique.
» Ces deux procédés sont purement expérimentaux. Je compte les étu-
dier d'une manière plus approfondie afin de les rendre susceptibles d'une
application précise. Mais déjà, il est possible de dégager de ce qui précède
les bases générales de la nouvelle analyse. Ces bases me paraissent ressortir
des considérations suivantes :
» Reprenons l'exemple choisi d'un sel de soude porté dans une flamme
à base d'hydrogène.
» Le spectroscope indique d'une manière incontestable que c'est le so-
dium incandescent qui, dans cette circonstance, produit la lumière jaune
communiquée à la flamme, hmiiére qui, par l'action du prisme, fournit
presque exclusivement les deux composantes de la raie Fraunliofé-
rienneD. Le sel de soude a donc été décomposé, et ses éléments dissociés.
Le métal mis en liberté et porté à l'incandescence rayonne sa lumière ca-
ractéristique, et, trouvant ensuite de l'oxygène dans le milieu ambiant, il
doit s'y combiner et se répandi'c dans l'almosphèreà l'état de composé so-
(^29 )
diqne. L'existence du sodium libre a été temporaire, mais incontestable;
toutes les molécules métalliques ont été successivement et pendant lui cer-
tain temps mises en liberté.
» Or, pendant la période de cette mise en liberté, si l'on admet (ce qui
jieut être très-sensiblement réalisé dans une expérience bien conduite) que
ces molécules passent par les mêmes phases d'incandescence et fournissent
la même quantité de lumière, il en résultera que la quantité tolale de
lumière sodique émise par la flamme depuis le moment où le sel com-
mence à se décomposer jusqu'à celui de son extinction, sera proportion-
nelle au nombre des molécules de sodium contenues dans le sel, et foule
méthode qui fera connaître cette quantité totale, celle intégrale de force
lumineuse, conduira à la détermination du poids de métal qui l'aura pro-
duite. C'est ainsi que la connaissance d'une quantité déterminée de ma-
tière peut être ramenée à des mesures photométriques.
» Je n'ai pas besoin d'ajouter que ces considérations s'appliquent sans
modification à tous les corps donnant dans les flammes une émission lumi-
neuse spécifique, tels que le lithium, le thallium, etc. Si le corps était libre
et porté directement dans le foyer, comme ce serait le cas pour un métal
placé dans l'arc électrique, le principe serait encore applicable, pourvu
que la substance se volatilisât régulièrement, en sorte que toutes ses par-
ticules prissent successivement une part égale à l'émission lumineuse.
» Je me réserve de développer ce sujet et d'exposer plus tard les mé-
thodes expérimentales qui me paraissent donner les meilleures applications
des principes exposés.. »
PHYSIQUE APPLIQUÉE. — La lunette de rempart. Note de 31. A. Cazin,
présentée par M. Faye.
« Il serait utile de pouvoir observer les mouvements de l'ennemi pen-
dant l'attaque, en restant abrité derrière un rempart élevé et dépourvu
d'embrasures, derrière un mur sans meurtrières ou au fond d'une case-
mate.
» Voici le principe d'un instrument que j'ai imaginé dans ce but. Au
sommet d'un tuyau vertical sont placés un miroir plnn incliné à 45 degrés
et un objectif dont l'axe est horizontal et passe par le centre du miroir.
Cet objectif est à court foyer, ce qui permet de donner à la lunette un
champ considérable. Les rayons qui, partant des objets extérieurs, traver-
sent l'objectif, sont réfléchis par le miroir et forment dans le tuyau, un peu
( 63o )
au-dessous du miroir, une image réelle de ces objets. Au milieu du tuyau
se trouve un système lenticulaire convergent, ayant pour distance focale
environ le quart de la hauteur du tuyau. L'image étant formée au-dessus
de cette lentille, à une dislance double de sa distance focale, une seconde
image se forme au-dessous à la même distance, avec la même grandeur et
en sens inverse. Mais, au bas du tuyau, est un second miroir plan, parallèle
au premier. Les rayons se réfléchissent sur ce miroir avant de former la
seconde image, et celle-ci se trouve reportée verticalement sur le côté. En-
fin un oculaire ordinaire sert à observer cette image, qui est à droite. Le
champ de l'instrument est le même que celui d'une liuiette astronomique
formée par l'objectif et l'oculaire, |)ourvu que le système convergent cpii
est au milieu et qui se comporte comme une lentille de projection ait un
diamètre suffisant.
» Avec un système convergent, de a. mètres de distance, focale on peut
voir les objets extérieurs, en se tenant à une profondeiu" de 8 mètres.
» On peut, d'après le même principe, réaliser une chambre noire pour
casemate. Il faut supprimer dans l'appareil précédent l'oculaire et le miroir
inférieur, et employer des lentilles de lo à 12 centimètres de diamètre. On
obtient une image réelle d'un champ considérable, à la profondeur vou-
lue. En disposant une troisième lentille convergente au-dessous du miroir,
de façon que les rayons forment la première image réelle, après avoir tra-
versé l'objectif, puis cette lentille, on diminue les aberrations et l'on aug-
mente la claité. Les essais que j'ai faits de cet appareil ont été très-satis-
faisants. »
BOTANIQUE. — Sur le développement des feuilles des Sarracenia.
Note de M. H. Bâillon, présentée par M. Brongniart.
« Les feuilles de forme exceptionnelle que portent les Sarracenia sont
bien connues au point de vue de leur configuration extérieure, et l'on a
bien distingué : le long cornet que représente loin- portion principale, le
couvercle, de forme variable, qui les surmonte, et même 1 espèce de crèle
saillante qui s'étend tout le long de leur bord interne. Mais les botanistes
ne sont pas d'accord sur la signification de ces différentes régions de la
feuille. L'opinion la |)lus généralement acceptée sur ce point est celle
qu'ont exposée, entre autres, A. Saint-Hilaire et M. Duchartre. « Que je
» suppose à présent, dit le premier de ces savants [Morphol. vé(jct., i^-i),
f les bords ailés du pétiole du Cilnis hiitrix ou du Dionœ/i rapprochés et
( 63i )
» sondés, j'aurai la feuille dn Sarrncenia, formée d'une urne allongée, vé-
» ritable pétiole, et d'un couvercle, véritable lame. » I-e second auteur dit
de même [Elém. de Bot., 3o8) : « On regarde généralement l'ascidie de ces
» plantes comme formée par le |)éliole, et leur lèvre postérieure ou oper-
» cule comme représentant le limbe. » Les observations organogéniques
pouvaient seules faire coiuiaître ce qu'il faut admettre de ces interpréta-
tions. Aussi avons-nous étudié le développement des feuilles dans le S. pw-
piirea, assez fréquemment cultivé dans notre pays. A leur premier âge, ces
feuilles sont représentées par de petits mamelons, à surface d'abord con-
vexe. Un peu plus tard, la base de ces organes se dilate un peu et devient
légèrement concave en dedans; c'est le premier rudiment de la gaîne, por-
tion de la feuille qui, nous le verrons, n'a aucun rapport, quoi qu'on en ait
dit, avec la cavité de l'urne des Sarrnceiiin. Cette portion vaginale, qui
prendra plus tard un assez grand développement, se comporte ici comme
dans tous les végétaux où elle existe, et n'a aucune influence sur la consti-
tution de l'urne. Le premier indice de cette dernière est une petite dépres-
sion, une sorte de fossette, d'abord bien légère, qui se produit en liant et
un peu en dedans du cône que représente la jeune feuille. Cette dépression
n'est due eu réalité qu'à une inégalité de développement dans les diverses
portions du sommet de la feuille; et l'inégalité ne se produit qu'un peu
tard, vers le sommet d'une feuille dont les portions pétiolaire et vaginale
existaient déjà. A cet égard, les feuilles des Sarracenia se comportent à peu
près comme celles des Nympliaeacées, avec lesquelles elles ont d'ailleius
tant d'analogies. Si bien qu'à cet âge les jeunes feuilles coniques des Sar-
raceitia ont la même apparence que celles des Nepenlhes, mais pour une
tout autre raison, si l'on admet, avec M. J.-D. Hooker, que l'urne de ces
derniers est le résultat du développement considérable d'une glande. Ici,
c'est bien la surface supérieure du limbe qui se trouve à ce moment ré-
duite à une fossette; aussi cette dépression est-elle tapissée d'un épidémie
qui est l'épiderme supérieur de la feuille, qui se développe d'autant plus
que celle-ci grandit davantage, et qui même se couvre ensuite de poils
dont la faculté sécrétante a été signalée par un grand nombre d'observa-
teurs. Plus la fossette se creuse, plus le limbe de la feuille prend l'appa-
rence de certaines feuilles peltées, telles que celles à^'s Nelumbo, égalenient
fort voisins des Sarracenia. Le cône large et peu profond que forme le limbe
foliaire des Nelumbo devient, dans les Sarracenia, plus profond et plus
étroit, de façon à présenter définitivement la forme d'un long cornet obco-
nique. En même temps que se produit cette déformation, la portion de la
( 6?.i )
feuille que l'on appelle l'opercule se dessine, d'une manière variable sans
doute, dans les différentes espèces. On sait qu'il y a des feuilles peltées
dont le limbe n'a pas un bord entier, mais est découpé en créuelures ou en
lobes, et que parfois ces lobes sont inégaux, le terminal-médian pouvant
être plus développé que les autres. C'est une des causes qui font que le
pétiole ne s'insère pas au centre de figure du limbe pelté, mais plus près
de sa base, laquelle est souvent plus ou moins profondément échancrée-
cordée. Dans la feuille du Sarracenia, on pouvait s'attendre dès le début à
voir un phénomène analogue se produire, parce que la fossette était en-
tourée par un rebord plus épais en haut que sur les côtés et en bas. Cette
inégalité ne fait que s'accentuer avec l'âge, et c'est le bord supérieur ([ui
grandit le plus vite, s'étrauglant ensuite un peu à sa base. Telle est l'origine
du couvercle et des saillies latérales, plus ou moins prononcées, qui sou-
vent l'accompagnent; ce sont donc, non un litube, mais les lobes inégaux
d'un limbe qui existait avant eux. Il reste à expliquer la signification de
cette sorte de carène verticale qui longe le bord interne de l'urne. Cet
organe existe, à l'état ordinairement rudiraentaire, dans un grand nombre
de feuilles peltées. On aperçoit souvent une nervure ou une crête saillante
qui s'étend dans ces feuilles, sur la face inférieure du limbe, de l'insertion
du pétiole au fond du sinus que présente la base du limbe. La crête des
feuilles du Sarracenia ne nous paraît être qu'une exagération de cette même
partie; et si elle a une direction verticale, ce n'est qu'une conséquence de
l'extrême profondeur que prend le limbe démesurément pelté de la feuille
des Sarracenia. «
ZOOLOGIE IIISTOIUQUE. — Sur les animaux employés par les anciens Egyptiens
Cl la chasse et à la guerre (deuxième Note); par M. Fr. Lkxormaivt.
« Le chacal, qui paraît être la source d'une partie au moins de nos races
de chiens, s'apprivoise aisément. On en rencontre encore aujourd'hui quel-
quefois chez les habitants de la Syrie, de l'Egypte et du nord de l'Afrique des
individus qui, pris dans leur jeunesse, ont reçu une éducation domestique
et sont, au même état que des chiens, les familiers de la maison. Il en était
de même dans l'antique Egypte. Les tombes de l'Ancien Empire montrent
à plusieurs reprises un chacal apprivoisé remplaçant le chien auprès du
défunt ou se mêlant à ses chiens. Dans un des hypogées de Béni-Hassan
(XIP dynastie), un chacal ainsi dressé prend même part à la chasse. Mais
ce sont toujours des exceptions, des faits d'élève iuciividuelle, comme
( 633 )
ceux que l'on observe de nos jours, el rien ne permet de supposer que,
chez les anciens Égyptiens, le chacal, conservant ses traits caractéristiques
d'espèce sauvage, ait été tenu habituellement dans un état de domesticité
ou de semi-domesticité, et ait compté parmi les auxiliaires accoutumés des
chasseurs.
» En revanche, une scène du beau tombeau de Ptah-hotep à Saqqarah
(V* dynastie), publiée par M. Duemicheii {Rcsultnteder Jnhœotogisch-Plioto-
grafjliischen Expédition^ première partie, PL IX ), cpii représente les valets de
vénerie de la domesticité du défunt rentrant avec leur gibier, montre leur
chef(qu'accompagne son nom |iropre, Noum-hotej)) tenant en laisse à la fois,
couplés et prêts à être lancés sur la |)isle, quatre lévriers e! deux animaux
du genre Canis , au port rapproché <le celui de l'hyène, dans lesquels
IVI. Hartmann (même ouvrage, p. 28) a leconnu, avec toute raison suivant
nous, le chien hyénoide [Canis p ictus, De.sm^r.)^ le kelb-el-sémech des Arabes,
le simir de l'Abyssinie. Cette représentation n'est pas isolée, car nous
voyons encore des individus de la même espèce, tenus en laisse dans les
bas-reliefs d'autres tombeaux de Saqqarah, dans ceux de Noub-liolcp
(IV* dynastie) (Lepsius, Denkinœler, abth. II, bl. i4), de Ra-n-kéou (IV* dy-
nastie) [Ibid., abth. II, bl. i5), et de Aseskef-ankh (V* dynastie) [Ibid.,
abth. II, bl. 5o). Les Egyptiens de l'Ancien Empire élevaient donc habi-
tuellement le chien hyénoïde pour l'employer au service de leurs chasses,
et ils avaient su tirer parti des instincts et des aptitudes naturelles de cet
animal. En effet, les voyageurs disent tous que le chien hyénoïde, à l'état de
liberté, « se livre avec ardeur à la chasse des gazelles et des antilopes.
» Dans ce cas, ajoutent-ils, plusieurs chiens hyénoïdes se réunissent en
» meute et poursuivent leur gibier avec autant d'ordre et de persévérance
» que nos meilleurs chiens-courants, et en plein joiu'. » Un peuple aussi
observateur des mœurs des animaux et aussi habile à les plier au service
que les Égvptiens, surtout ceux des époques primitives, ne pouvait manquer
d'utiliser à son profil un iiistmct aussi remarquable chez un des animaux
qui habitaient alors la zone déserte dans laquelle les terres cultivées de la
vallée du Nil sont enserrées des deux côtés.
» Il n'est pas douteux en effet que les Égyptiens de l'Ancien Empire, à
cette époque où leur civilisation devançait tellement celle des autres peuples
et en même temps se répandait encore très-peu au dehors, où ils ne pen-
saient pas à entreprendre de conquêtes extérieures et où ils ne remontaient
même pas sur les rives de leur fleuve plus haut que la deuxième cataiacle,
il n'est pas douteux, dis-je, qu'ils trouvaient le chien hyénoïde à l'élat sau-
C. R., 1870, Q« Si-niestie. (T. LXXI, K° 20.) 84
( 634 )
vage clans leurs environs immédiats et que c'est là qu'ils l'avaient pris poui'
en faire un de leurs serviteurs. Ainsi le même tombeau de Ptah-hotep qui
nous montre le chien hyénoide douiestiqué et tenu en laisse par le veneur,
le représente sur sa paroi opposée (Duemiclien, Restillate, première partie,
/'/. Vllf) sauvage, vivant dans le désert au milieu des antilopes, et attaqué
par les lévriers au milieu d'une de ces chasses qu'alors on ne menait pas
encore hien loin. Après ces temps si reculés, ni sous le Moyeu, ni sous le
Nouvel Empire, on ne voit plus le même animal, même à l'état sauvage,
figurer dans les scènes de ciiasse. Il avait probablement dès lors disparu
dans le voisinage de l'Egypte, dans le rayon babil uel des exploits de véne-
rie des grands personnages de l'empire des Pharaons. A l'époque romaine,
Pomponius Mêla (III, 9) et Solin (3o), qui le décrivent très-exactement sous
le nom de lycaou, le connaissent seulement dans l'Ethiopie de Méroé. Au-
jourd'hui on ne commence à rencontrer le chien hyénoide qu'en Abyssinie,
et de là il s'étend jusqu'au Cap. Comme beaucoup d'autres espèces afri-
caines, il a reculé graduelletnent vers le sud.
"' Le chien hyénoide était si complètement domestiqué chez les Egyp-
tiens de l'Ancien Empire qu'd se reproduisait dans la domesticité. Au tom-
beau de Ptah-hotep, un des deux animaux de cette espèce couplés poiu' la
chasse est accompagné de son petit, comme un des lévriers que le même
honune (ient en laisse. C'est du reste un des animaux dont la présence à
l'état domestique est exclusivement propre à la civilisation des dynasties
primitives et disparaît plus tard^ déjà même avant l'invasion des Pasteurs.
Cii' dès la XII* dynastie, quand le grand chien-courant commence à être
employé dans les chasses égyptiennes, le chien hyénoide cesse absolument
d'y jouer un rôle. Il semble que l'iritroduction de la nouvelle variété de
chien, sans doute préférée des veneurs, ait fait abandonner alors inie élève
qui présentait peut-être des difficultés plus grandes, à cause du caractère
rebelle et sauvage du Canis pictus. «
\m séance est levée à 5 heures un quart. 1).
COMPTE RENDU
DES SEANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE DU LUNDI 14 NOVEMBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES ET COMMUIVICATIOIVS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. LE Secrétaire perpétuel annonce à l'Académie la perte qu'elle vient
de faire dans la personne de M. Duinérll^ décédé le 12 de ce mois, à l;i suite
d'une maladie qui faisait craindre pour lu; une fin prochaine, mais qui ne
l'a pas em|)èché, chaque fois que ses forces 'e lui ont permis, et lout ré-
cemment encore, de venir prendre place au milieu de ses confrères.
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Exposë des misons jiour lesquelles ralimenl de Vhomme
et des animaux supérieurs doit èlre d'une nature chimique complexe; par
M. E. Chevreul (i).
INTRODUCTION.
(( Dans la séance de l'Académie du 7 de novembre, j'ai présenté une
Note intitulée ; De quelques sujets relatifs aux subsistrnices servant de com-
plément à des Communications antérieures. El'e était précédée tie lavant-
propos suivant dont j'ai donné lecture ;'i 1 A. adémie :.
(i) L'Académie a décidé q.ie celle Comnumicaiion, 'îieii que dépassant en éltndiie les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Compte rendu.
C. R., 1870, 2» Semestre. (T. LXXI, N" 20.) 85
( 636 )
» Un étranger, qui n'est point un Prussien, je m'empresse de le dire,
» me faisait remarquer que dans les derniers Coirtjdes rendus des séances
» de l'Académie, on lit plus dune recette que la Cuisinière bourgeoise est
» en droit de réclamer : remarque, je l'avoue, qui n'est pas dénuée de
)) vérité; et il ajoutait que quelques-unes sentent un peu le réchaufjé; allé-
" gation qu'on ne peut dire absolument fausse. Mais dans la circonstance
"' actuelle, je reconnais le premier la légitimité d'un appel aux circonstances
» atténuantes, si toutefois faute il y a. Je les invoquerais en ma faveur
» près des personnes qui jugeraient les Couimiuiications suivantes pas-
>) sibles de la critique que je viens de citer. »
» Cette Note se compose de trois paragraphes portant les titres sui-
vants :
» § I. Quelques expériences sur deux préparations faites en Amérique,
àite& farines de inandes.
» § II. Raison sur laquelle j'ai fondé la nécessité des aliments com-
plexes pour la nourriture de l'homme et des animaux supérieurs.
)) § III. Inconvénient de détourner l'acception de différents mots rléfinis
par la science.
» A ma grande contrariété, le manuscrit présenté à la dernière séance
a été perdu mercredi matin parla personne à laquelle je l'avais confié pour
le remettre à l'imprimerie. Je me suis ainsi trouvé dans la nécessité de
l'écrire de nouveau.
» Mes réflexions sur l'histoire de l'invention des frères Montgolfier ont
pu être rédigées |)Oiu' paraître dans le Compte rendu de la séance où elles
ont été faites; mais le temps m'a manqué pour la Note relative aux subsis-
tances. C'est alors qu'en me remettant à l'œuvre j'ai vu clairement que le
second paragraphe de la Note, loin d'être un accessoire aux deux autres
paragraphes, était la partie essentielle de ma Communication. A ce nou-
veau point de vue j'ai doiuié au second paragraphe l'ampleur sous laquelle
je le présente dans le Mémoire actuel, et les paragraphes I et III de la Note
prendront les titres de premier et deuxième Document.
EXPOSÉ DES BAISONS POUR LESQUELLES l'aI.TMF.NT DE l'hoMME ET DES ANIMAUX SUPÉRIEUUS
DOIT ÊTRE d'une NATURE CHIMIQUE COMPLEXE.
» J'ai souvent entendu parler de la nécessité que les aliments de l'homme
et des animaux supérieurs fussent d'une nature chimique plus ou moins
complexe; mais je ne sache pas qu'on en ait donné les raisons avant l'écrit
( 637 )
que je lus à l'Académie le 7 d'août 1837 (i). Plusieurs fois, dans ces der-
niers temps, j'ai eu l'occasion de le citer, et cependant il me semble utile
de rappeler ces raisons en les coordonnant et y ajoutant des dévelop|)e-
ments que je leur ai donnés depuis 1837 et des considérations nouvelles.
» Premier fait. — Un fait fondamental de l'acte chimique qui se passe
dans un corps vivant, relatif à l'assimilation de la matière qu'il prend an
monde extérieur pour vivre et se développer, c'est la faiblesse des forces
physiques et chimiques, ou, en d'autres termes, des causes auxquelles nous
rapportons immédiatement les modifications que la matière du dehors
éprouve à l'intérieur des corps vivants.
» Si, de tout temps, j'ai cherché à montrer l'intervention de ces forces
dans les phénomènes de la vie sans prétendre en exciiu-e toute autre, j'ai
admis, explicitement ou implicitement, que l'intensité de leur action est
faible, sinon dans tous les cas, du moins dans le plus grand nombre. Car
donnez aux forces physiques, chaleur et électricité, quelque énergie, et
les composés organiques seront décomposés s'ils existent, ou, s'ils n'existent
pas, ils ne pourront se produire dans cette circonstance; car personne
n'ignore que la vie ne persiste pas au delà d'un certain degré de tempéra-
ture, et qu'une électricité forte foudroie tous les êtres vivants.
» Supposez donc des affinités énergiques, et tout l'édifice organique va se
réduire en composés binaires les plus stables, tels que l'oxyde de carbone,
l'acide carbonique, l'eau, et eu corps simples si l'oxygène manque.
» Une explication est ici nécessaire pour qu'on sache bien le sens que
j'attache aux expressions d'affinités énergiques et d'affinités peu énergiques.
» Je n'entends pas que dans l'acte de la respiration de l'homme et des
animaux supérieurs, lorsqu'il se forme de Vacide carbonique et de Veau,
comme tout le monde l'admet, il n'y ait point une affinité énergique qui
préside à l'union de l'oxygène avec le carbone et l'hydrogène, mais je
comprends que dans une unité de temps il n'3 a qu'une très-petite quantité
pondérable de combiu'ant et de condjustible à prendre part à l'action chi-
mique, quantité déterminée par le besoin qu'a l'être vivant de cette cha-
leur développée. Or, la combustion du carbone et de l'hydrogène se passant
dans des organe^ dont la masse est considérable relativement à celle de la
matière combustible brûlée, la première ne souffre pas de la chaleur dé-
gagée par la combustion.
(l) Considérations générales l't inductions n'iativi's à la nintirre drs clrrs i^ii'dnts. —
Mémoire de l'Académie, t. XIX. — Journal des Savants, novembre 1837.
85.
( 638 )
)) En outre, ces organes se composant de tissus humides et de liquides,
et une partie de la matière qui les constitue éprouvant des changements
physiques et chimiques qui ne donnent Meu à aucun phénomène anuon-
rant une action énergique des corps qui y prennent part, je dis que ces
chom^emenis produits diuis une masîe considérahle rclaiivemenl à la masse
brûlée, te .^oni j>ar des affinilés faibles.
» Vîa pensée ainsi esp'-quée d'une manière que je crois simple et pré-
cise, je vais citer quelques causes dont Tintervention dans les phénomènes
chimiques de la vie, généralement admise, apparliennenl à -'a caiégorie des
forces dont l'action est peu énergique, à en juger par les phénomènes pas-
sagers qui peuvent apparaître connue chaleur, lumière et électricité.
» On allribue à ces causes, soii des phénomènes dits de fermentation , soit
des phénomènes résultant de la présence de certains corps qui semblent,
après l'action qu'on leur altrdDue, ce qu ils étaient auparavant.
» .Tk citerai commo exemples du premier la d\Tstase, la pepsine, la cé-
réaline, et comme exemple du second la fibrine dégageant l'oxygène de
l'eau oxygénée, à l'instar du peroxyde de manganèse.
M Je ciierai encore un fait remarquable (i), c'est la coagulation de l'al-
bumine de Tœuf par l'édier saiuré d'eau, el par l'huile volatile de térében-
thine. Si' n'y a pas d'union entre l'élher, l'huile volatile et l'albumine, ces
liquides coaguleraient lentement cette substance à l'instar de la chaleur,
sans s'unir à l'eau.
» En ctéfinilive, i! est des actions capables de produire des changements
plus ou moins grands dans les propriéiés des principes immédiats des êtres
vivants sans manifester pour cela des phénomènes correspondant à ceux
des affinités énergiques, qu'actuellement nous ne pouvons rattacher ni à
l'affinité, ni .uix forces physiques connues, telles que la chaleur, la lumière,
l'éiectricité; et la caus^ de ces actions, dont l'intervention dans les phéno-
mènes de la vie ne parai-, pas-domeuse, semble résider dans des espèces chi-
miques ou dans des tissus organisés qui les manifestent même après avoir
été séparés de l'être vivant.
Différence des principes immédiats organiques d'avec la matière minérale.
» Les plantes et les animaux diffèrent du monde minéral qui nous en-
vironne en ce que ta plupart des espèces de principes immédiats organi-
(i) Mémoire la le 9 de juillet 1821 à l'Académie : De l'influence ijue l'eau exerce sur
plusieurs substances azotées solides.
( 639 )
qties renferment un plus grand nombre d'atomes que les composés de la
naliire inorganique, ei que si les premières espèces ne renferment pas toutes
chacune comme éléments un plus grand nombre d'espèces de corps
simples que les composés de la nature inorganique qui nous environne,
elles diflereiit de ceux-ci en ce que les aloaies décidément combub>tibies,
comme !e carbone el l'hydrogène, dominent tout à fait par le nombre sur
ceux de l'oxygène essentiellement comburant. Or, parce cpie les ;iffinités les
plus énergiques sont celles du comburant et du combustible et qu elles
tendent à constituer des cocnposés binaires, tels que l'oxyde de carbone,
l'acide carbonique, l'eau, eic, on voit une cause d'instabiiiié dans la ma-
tière des èties vivants qu'on ne îrouve pas dans les composés minéraux
qui nous entourent, comme Teau, l'acide carbonique, les terres, les pierres,
parce que ceux-ci résulienl de l'union de corps simples qui ont satisfait à
leur puissante affinité pour l'oxygéoe.
» Cet elat de choses permet d'apprécier la valeur de la raison alléguée
par les partisans de la géiéral^on spontanée à ceux qui leur demandent pour-
quoi il ne se produit pio.; au ourd'hui comme autrefois sponianément des
mammiîères, des oiseaur, des rep-liles, eic. etc., puisque les partisans des
générations sponlanées admettent en principe que tout éife vivant a été
produis pai' ce qu ils a'jpellenl la naturk ! La raison qu ils en donnent est
que celte nature a perdu une puissance, une énergie dont elle joujssait
autrefois. Mais évidemment, d'après ce qui précède, celle puissance, ceite
énergie ne pouvait appartenir aux forces que nous oonnnons physiques
et chimiques, d'où découle la conséquente qu'en ne sexpliquant pas sur
la nalure de celle puissance on répond en recourant ia^plicitement à
une cause vraiment occulte.
)) Deuxième fait. — Les plantes s'assimilent la matière de plusieurs com-
posés binaires de la nature inoi-ganique,' tels que l'eau, l'acide carbonique,
l'ammoniaque, des composés d'azole oxygéné, des chlorures, des lodu-es
de poiassiuni et de sodium, des corps simples, l'oxygène, et lazole suivant
quelques personnes, des composés salins, tels que phosphates, sulfates, ;tzo-
tates, eic, etc.
» Elles produisent des principes immédials organiques ''ont lU) certain
nombre sont considérés comme identiques à d'^s prii)cipe>^ immédiats des
animaux, ei es autres leur .^ont plus ou moins analogues et toujours diffé-
rents des composés iuorgiiniques.
» Uhonime, les animaux supérieurs, la plupart des animaux inférieurs,
sinon tous, ne peuvent vivre qu'aux dépens des végétaux, immédiatement
( 64o )
s'ils sont herbivores, et inédiatement conséqnemnient s'ils sont carnivores.
» Conséquences de ces faits. — On lire la conséquence du premier et du
deuxième fait précédents.
» Les plantes sont des intermédiaires pour mettre la matière du inonde
minéral à la disposition des animaux, après qu'elles ont fait subir à cette
matière l'élaboration nécessaire à ce que les animaux [)uissent se l'assi-
miler.
» Je vais développer cette relation de l'aliment préparé 'par les plantes
pour les animaux, afin de faire bien comprendre la nécessité de la com-
plexité de composition chimique de l'aliment propre à la nourriture de
l'homme et à celle des animaux supérieurs.
» Pour bien apprécier le rapport existant entre la composition chimique
de l'aliment et celle de l'être qui s'en nourrit, il faut, comme je l'ai fait
dès 18^7, distinguer deux cas :
» i" Celui où l'être vivant tire sa nourriture d'une matière contenue
dans une graine ou dans un œuf, suivant que cet être est une plante on un
animal;
» 2° Le cas où l'être vivant croît principalement aux dépens des corps
extérieurs, comme le fait une plante pourvue d'organes verts et un animal
à l'état adulte.
» Premier cas. — Grande est l'analogie de la germination de la graine
avec le développement du germe de l'œuf, sauf cette différence que la
graine absorbe de l'eau au monde exlérimu-, tandis que l'œuf de l'oiseau
en perd, terme moyen, un cinquième.
» Mais tous les deux ont besoin d'une certaine élévation de température
avec le contact de l'air.
» Il y a encore cette analogie, que la graine et l'œuf contiennent les
principaux types de composition chimique de la jeune plante et du jeiuie
animal.
» Dans la graine on trouve des principes ternaires dont les uns sont de
nature grasse, comme l'oléine, la margarine; les autres sont solubles dans
l'eau ou susceptibles de le devenir, comme des sucres, la dexfrine, l'amidon,
des principes quaternaires azotés, counne le gluten, l'albumine végétale, des
chlorures de potassium et de sodium, des sels inorganiques essentiels à la
vie végétale.
» L'œuf des oiseaux renlerme des principes organiques ternaires et qua-
ternaires.
( «4i )
» Parmi les premiers on distingue des principes gras neutres, tels que la
cholestérine, la margarine, l'oléine; des principes gras jouissant de l'aci-
dité, tels que l'acide inargarique, l'acide oléique; un principe sucré soluble
dans l'eau.
» Parmi les principes organiques quaternaires azotés on compte l'albu-
mine, la vitelline.
» Il y existe des principes colorants, une matière huileuse phosphorée.
» Enfin des composés de la nature inorganique, comme des chlorures de
potassium, de soduun, des phosphates de chaux, de magnésie, etc., etc.
» Une considération du ressort du premier cas montre dans le lait que
suce le jeune mammifère incapable encore de s'assimiler l'aliment de l'a-
dulte, les types de compositions chimiques les plus variées et en parfaite
harmonie avec les exigences des organes du jeune mammifère.
» Après avoir parlé des différences que présentent dans le second cas la
plante adulte, si cette expression m'est permise, avec l'animal adulte quanta
l'assimilation de la matièie du monde extérieur, je reviendrai sur l'analogie
que présentent la graine et l'oeuf dans le premier cas.
» Second cas. — La différence est grande entre la plante pourvue de
feuilles et l'animal sevré de sa mère, relativement à l'assimilation de la ma-
tière du monde extérieur, puisque c'est alors que se montre la plante avec
le caractère qui la distingue le plus essentiellement de l'animal. Elle s'as-
simile des composés binaires du monde inorganique; elle vit et se déve-
loppe, tandis que si l'animal, du moins le supérieur, était réduit à ces seuls
composés binaires, il périrait.
» I^a plante pourvue d'organes verdoyants, dicotyledonée ou monoco-
tylédonée, d'une organisation moins complexe que celle des animaux, des
animaux du moins qui ne sont pas à la limite inférieure de l'échelle, ne
peut accomplir sa fonction principale, vraiment caractéristique, a savoir
l'assimilation de la matière nnnérale en principes immédiats organiques
sans les influences d'iuie certaine température et de la lumière du soleil.
» C'est alors que l'acide carbonique se décompose; son oxygène devient
gazeux en partie selon Th. de Saussure, en totalité selon Boussingault,
tandis que son carbone, en s'unissant aux éléments de l'eau, et probable-
ment aussi aux éléments de l'ammoniaque, de composés d'azote oxygéné,
constitue des principes immédiats organiques dans lesquels le principe com-
bustible, carbone et hydrogène, prédomine sur le principe comburant,
l'oxygène. Tout est conjecture dans la formation de ces principes, mais le
fait fondamenlal est incontestable, la désoxygénaiion de l'acide carbonique,
(642 )
partielle ou complète, et V union du cnihone consliluant des principes inimé-
dinis organiqttes avec excès de matière coinbusliblc.
» Il a fallu potir formuler ainsi ce J"il Jondamental pins de trente ans de
travaux, auxcjuels sont allacliés les noms de Bo !iiei ei siirtoul de Phesiley,
de liigen-Ilouiz, de Sennebier et fie Tli. de Sc*uss.:te. et j»iouiei' à ces
r)()ai- celui ('c Boussingault, qui en i864-ii5L'8a t'it que ses expériences
démontrent que ie gaz acide carbonique perd la totalité de sou oxygène,
contrairement à l'opinion de Th. de Saussure.
)) Combien l'homme et la plupart des animaux, sinon tous, diffèrent des
plantes, incapables qu'ils sont de s'assimiler la matière minérale sous la
double influence d'une certaine température et du soleil ! S'ils jouissent de
la lococjotion, s'ils ont besoin pour vivre d'une certaine température, si la
liunière du soleil leur est agréable et utile, dépendants des végétaux, ils ne
peuvent se passer de la malière hùnérale, lemlue organique par ces mêmes
végétaux qui ont séparé l'oxygène ou carbone sous l'iuHuence du soleil.
» Ces faits posés, sans hypothèse aucune, voyons conment ils concou-
rent à démontrer la nécessité que les aliments indispensables à ia nour-
riture de 1 homme et des animaux supérieurs aient une composition
chimique plus ou moins comp'exe, c'esî-à-dire qu'i's soient formés de
principes iinmédials organiques d'origine végétale et qu'ils renferment en
meine temps certains composés minéraux indispensables à l'homme et aux
animaux.
') 1° Les principes organiques dits immédiats, parce qu'ils constituent
immédiatement les êtres vivants, plantes et animaux, sont en réalité moins
s'ables que les composés du monde minéral qui nous entourent, que nous
touchons, et .'nix((uels nous comparons les premiers.
u Pourquoi ce jaiû C'est que les minéraux <pii nous entourent, que nous
touchons, ont saiisfait à l'affinité ia plus puissante uni sollicitait l'union de
leur partie coiubuslib'e avec l'oxygène: dès lors l'atmosphère ;ie peut rien
sur eux : voila pourquoi l'eai.', les pierres et les terres sont stables.
» '>es principes immédiats organiques, qui contiennent généralement du
ca'lioiteet de l'hydrogène en excèj.siir la quantité <i'oxygène qui tend à
faire ôe\\\ composés stables en r'ormani de l'acide carbonique avec le car-
bone, ec de l'eau avec llndrogène, voila une cause d'instabilité: et une
secon<'e cause est ie nombie d'atomes, ')ien plus grand dans le principe
organique que dans le composé minéral.
1) -i." La matière minérale, cpii passe dans les plantes pour constituer des
principes inunéchats organiques moins stables qu'elle, a besoin d'une force
( 643 )
extérieure, la lumière, émanée du soleil, de l'action de laquelle nous ne
pouvons rien dire de scientifique; mais le résultat matériel est incontes-
table : le carbone est séparé de l'oxygène, et la conséquence en est la for-
mation de principes immédiats avec excès de combustible.
» Comment concevoir les actions qui s'opèrent dans la plante une fois
l'oxygène de l'acide carbonique séparé? La transformation de l'amidon en
dexfrine, en sucre, la conversion du sucre en d'autres produits si remar-
quables dans la végétation de la seconde année de la racine de betterave
lorsqu'elle produit tige, fleur et graines? Évidemment ces changements se
produisent en vertu d'affinilés faibles, car si elles étaient fortes, elles dé-
truiraient les principes immédiats organiques ou les empêcheraient de se
produire. En outre, elles se passent au sein de l'eau.
1) Ces faits que présentent les plantes verdoyantes, rappelés, voyons-en
les conclusions relativement à l'alimentation des animaux.
)) Le corps de l'homme, comme celui des animaux supérieurs, se com-
pose d'un grand nombre de principes immédiats de propriétés assez di-
verses; la vie qui les anime n'a lieu qu'à cette condition : c'est ]efait.
)) Eh bien! l'animal ainsi constitué ne peut vivre exclusivement de com-
posés minéraux, quoique certains d'entre eux lui soient nécessaires; il lui
faut des principes immédiats produits par les plantes lorsque l'animal n'est
pas Carnivore.
» Précisément parce qu'il faut à l'herbivore un grand nombre de prin-
cipes immédiats divers préparés par les végétaux, il faut que ces principes,
quand ils ne sont pas identiques à ceux de l'animal, lui soient très-ana-
logues.
» Voilà pourquoi les végétaux présentent aux animaux des principes
immédiats se rapportant aux types variés de composition chimique que
présentent les principes immédiats de ces mêmes animaux.
» Voilà lu raison de l'analogie des composés ternaires et quaternaires
organiques que vous trouvez dans la plante; des matières grasses, neutres
et acides; des matières neutres, du sucre, des gommes, de la dextrine, de
l'amidon susceptible de devenir soluble, un grand nombre d'acides.
Parmi les composés quaternaires azotés, vous trouvez le gluten, l'albumine
végétale, etc.; parmi les composés minéraux, vous trouvez des chlorures
alcalins et des composés de phosphore, de soufre, de calcium, de magné-
sium, de fer, de manganèse, etc.
)) Enfin, pour aider l'assimilation, l'homme recourt à des assaisonne-
ments et l'animal lui-même n'y est pas insensible.
C. R., 1870, ■2' Semestre. (T. LXXI, m 20.) 86
( 644 )
» Les animaux carnivores, ai-je dit, se nourrissent de chair crue, d'où
la conséquence que les principes immédiats des herbivores ont la plus
grande analogie avec les principes immédiats des carnivores.
De la cuisson des aliments.
» Après avoir rappelé le fait du grand nombre des aliments soumis par
l'homme à la cuisson, j'ai dit que les modifications qu'ils éprouvent tendent
généralement à les éloigner de la composition organique en les rapprochant
de la nature minérale. Si cette remarque est fondée, comme je le crois, il
ne faudrait pas lui donner un sens trop absolu parce que le premier je re-
connais qu'on s'exposerait à l'erreur. C'est donc pour la prévenir qu'on me
permettra sans doute quelques détails, dans la conviction où je suis que
les savants livrés sérieusement à l'étude de la Physiologie ont peut-être
traité trop légèrement ou envisagé avec trop d'indifférence I'effet des pré-
parations culinaires sur les propriétés des aliments.
» Mon observation est fondée d'apiès ma propre expérience, quand on
compare le tendon ou plus généralement le tissu cellulaire comme aliment
à la gélatine qiù en provient. Je ne partirai pas du tissu cru, mais du tissu
gonflé par l'eau chaude et dans l'état où il conserve sa solidité, il est plus
nourrissant que la gelée, et celle-ci à son tour l'est plus que le liquide pro-
venant de la cuisson du tissu cellulaire à une températiue dépassant loo de-
grés, ou opérée par une ébullition assez prolongée pour qvie le liquide con-
centré ne se prenne plus en gelée quand il se refroidit.
» La cuisson n'est pas désavantageuse aux liquides albuniineux ; de fades
qu'ils sont à l'état cru, en devenant solides ils acquièrent un arôme qu'on
peut considérer comme un assaisonnement. En outre, comme l'albumine
liquide et l'albumine coagulée ou cuite sont isomères, on n'est pas surpris
de savoir que l'albumine cuite absorbée par les intestins repasse à l'état
cru, qu'elle se décuit en un mot.
» La cuisson est favorable encore à la chair musculaire par les arômes
qu'elle développe dans un certain nombre, et parce qu'elle ne nuit pas à
l'albumine, comme nous venons de le voir, et que la modification qu'elle
fait subir à la fibrine est très-légère.
» La cuisson n'est pas défavorable aux aliments farineux ni aux légumes
parce qu'elle ne change pas beaucoup la composition du plus grand
nombre, et que l'eau additionnée de j~^ de sel en relève à la fois la saveur
et l'odeur.
» ludubilablement les froiuages odoranis, comme le gruyère, le liol-
( ^45 )
Jaiide, le parmesan, sont nourrissants par la matière azotée provenant du
caséum modifié qu'ils renferment; mais cette matière l'est moins à mon sens
que le caséum frais. Les fromages odorants ont l'avantage d'un aliment qui
se conserve, et dans les localités où le lait abonde, leur fabrication permet
de préparer un aliment dont la matière première aurait pu se perdre faute
de consommateurs. Mais les fromages odorants sont à mon sens précieux
comme assaisonnement, si l'expression m'est permise, plutôt que comme
aliment, quand on les compare sous ce rapport avec le fromage dit à t<t pie.
» Dans l'alimentation on doit tenir coin|)te de la différence existant entre
l'aliment d'une digestion rapide et l'aliment d'une digestion lente, gra-
duelle. Sous ce rapport, le pain de froment est un des meilleurs que je
connaisse, un de ceux qui soutiennent le plus longtemps, surtout quand il
est associé à un aliment azoté et gras en même temps : c'est l'association
avec le lard et les clioux du pain de froment et de seigle même qui est
si favorable à la santé des habitants de l'ouest de la France. Les poissons,
dont la chair est aqueuse et molle, se digèrent trop rapidement pour sou-
tenir longtemps l'homme livré à un exercice violent qui s'en iioiurit.
» Quelle que soit l'opinion qu'on adopte relativement à la cuisson des
aliments, on sera obligé de reconnaître cpie, dans le passage de la partie
nutritive de l'aliment de la face du tube intestinal dans l'intérieur du corps
de l'homme, il y a décuisson à l'égard de plusieurs des principes immédiats
organiques de l'aliment cuit.
» Aujourd'hui on reconnaît, comme fait d'expérience, qu'un même
corps, une même espèce chimique, en s'unissant avec un autre corps,
donne lieu à un nombre plus ou moins grand de calories, suivant différents
états moléculaires où peut être le premier corps, et que ce nombre de ca-
lories est d'autant plus grand que l'union chimique est plus intense. En
admettant ce fait, je me suis demandé si, dans la décomposition de l'acide
carbonique par les plantes insolées, et lorsque l'oxygène, en redevenant
libre et gazeux, reprend les calories qu'il avait perdues en s'unissant au
carbone, il n'arrivait point que ce combustible insolé, en passant à l'état
d'élément d'un principe immédiat organique, ne retenait pas de calories,
soit qu'il en eût perdu en devenant gaz acide carbonique, soit qu'il en eût
reçu dans l'insolation de la plante. S'il en était ainsi le carbone, en s'éloi-
gnant de l'état où il se trouvait dans le gaz acide carbonique, aurait
éprouvé quelque chose d'approchant à ce que je viens de dire de la dé-
cuisson de plusieurs principes organiques cuits lorsqu'ils passent du lube
intestinal dans l'intérieur du corps de l'homme. Celte manière de voir ex-
86.,
( 646 )
pliquerait comment l'insolation, eu décomposant le gaz acide carbonique,
restituerait la chaleur nécessaire à la constitution du gaz oxygène et, en en
cédant au carbone, ne désorganiserait pas les tissus organiques où se passe
le phénomène.
» La manière dont je viens d'envisager 1 assimilation de la matière mi-
nérale dans les êtres vivants me conduit à faire remarquer que la plupart
des auteurs des Traités de Physiologie, qui ont comparé la respiration de
l'animal avec celle de la plante, sont passibles du reproche de ne pas s'être
expliqués suffisamment sur la différence essentielle des deux actes.
» L'analogie réelle entre l'animal et la plante, relativement à la respira-
tion, est le besoin de l'air atmosphérique pour la respiration.
» La différence est que l'air atmosphérique pénètre dans l'animal la nuit
et le jour, et qu'alors l'oxygène brûle du carbone et de l'hydrogène qui
sont exhalés à l'état de gaz carbonique et de vapeur créait, mais celle-ci dans
l'expiration est mêlée à une quantité d'eau qui n'est j)as le résultat de la
combustion de l'hydrogène.
» Si les feuilles d'une plante sont en contact avec l'air pendant ta nuit,
il y a production d'acide carbonique, lequel, si les feuilles appartiennent
à une plante grasse, reste en totalité dans les feuilles; mais, si celles-ci sont
minces, une partie de l'acide carbonique est exhalée dans l'atmosphère.
» Lorsque les feuilles reçoivent ïinfuence du soleil, la différence de la
plante d'avec l'animal est extrême : ce n'est plus, comme dans la nuit,
de l'acide carbonique qui est produit, mais du gaz oxygène qui se dégage,
et on en attribue l'origine à la décomposition de l'acide carbonique. C'est
donc le contraire, l'inverse de l'émission du gaz acide carbonique sortant de
la poitrine d'un animal supérieur. Et certainement la chaleur du soleil agit
en restituant à l'oxygène la chaleur qu'il a perdue en s'unissant au carbone ;
s'il n'en était pas ainsi, le dégagement du gaz donnerait lieu à un refroi-
dissement, en supposant, bien entendu, que sa décomposition fût possible
sans l'intervention de la lumière du soleil. Enfin je rappelle que la réduc-
tion du carbone est accompagnée d'un phénomène de décuisson.
Dernier es considérations sur In graine et l'œuf de l 'oiseau.
» En partant de l'analogie de la germination de la graine avec le déve-
loppement du germe dans l'œuf de l'oiseau, j'ai promis de revenir sur ce
sujet, après avoir examiné la grande différence que présente, à l'observa-
teur, l'assimilation de la matière comparée entre la plante verdoyante et
l'animal adulte; je remplis cet engagement.
( 647 )
» La période de la vie végétale s'ouvrant par la germination et com-
mençant dans la terre ou dans les eanx, dès que la graine a pris au milieu
ambiant une certaine quantité de liquide, elle présente un phénomène à
mon sens absolument semblable à celui de l'assimilation de l'aliment vé-
gétal à un corps animal; et certes, en se reportant au passé, c'est une des
belles harmonies de la nature de voir ce qui se passe dans la vie d'une
plante après la fécondation de l'ovaire : tout ce qui est nécessaire à la
maturité de la graine y converge comme à un but final; et je rappelle
qu'elle renferme, comme l'œuf de l'oiseau, les types principaux des com-
positions chimiques des principes immédiats organiques, et de plus les com-
posés minéraux nécessaires à la vie. Il y a dans la graine des tissus orga-
nisés destinés à se développer sous la forme spécifique des ascendants au
moyen de ses principes immédiats tenus en réserve sous le nom botanique
d'albumen. Cet albumen, aliment de la plante incapable encore de vivre
aux dépens de la matière du monde extérieur, nous explique par sa com-
position chimique même conunent les graines sont si nutritives et pourquoi
l'homme, les herbivores et tant de petits animaux les recherchent pour s'en
nourrir, et dès lors pourquoi le cultivateur a tant de difficulté à mettre ses
graines à l'abri des attaques du charançon et de l'alucite.
DERRIERES REFLEXIONS.
» A une certaine époque de la science on a étudié comparativement les
graines, les racines, les tiges, les feuilles, les fleurs de diverses espèces de
plantes, les oeufs de diverses espèces d'animaux, et l'on a bien fait pour
éclairer beaucoup de personnes disposées à établir des généralités, des
principes, des lois mêmes sur un trop petit nombre de faits.
» Plus tard on a soumis à des examens analytiques des ensembles de
corps connus sous des noms communs, comme corps gras, comprenant des
huiles, des graisses, des cires, comme résines, etc.; on a cherché à les
réduire en des espèces nettement délinies de principes immédiats, et quand
on y est parvenu, les résidtats ont été excellents pour la science.
» Deux ordres de recherches seraient bien dignes d'occuper aujourd'hui
les chimistes livrés à l'étude dont le but est de connaître les phénomènes
que présentent les êtres vivants.
» Le premier consisterait à étudier comparativement un même principe
immédiat, l'albumine par exemple, dans les différents liquides d'un même
animal dont d est principe immédiat, puis de répéter la même étude sur le
même principe dans diverses espèces d'animaux.
( 648 )
» Le second ordre de recherches serait de suivre la transformation que
chaque espèce des principes immédiats d'un aliment peut éprouver dans
le tube intestinal, puis lorsqu'il a passé dans le corps de l'animal qu'il doit
nourrir.
» Sans prétendre donner un programme détaillé, qui ne peut servir qu'à
ceux qui l'ont imaginé, il me suffit de signaler ces deux ordres de recherches
aux jeunes savants doués de quelque esprit d'mitiative.
» Certes je suis loin de considérer comme démontré tout ce que je viens
d'écrire, mais je crois avoir coordonné quelques idées générales qui ne
l'avaient point été. Une dernière réflexion se présente encore à mon esprit, et,
en m'y abandonnant, je m'éloigne tant de la méthode à posteriori exj)ëri-
menlale que je crains un peu qu'on attribue ma pensée à la folle du lo<jis.
Quoi qu'il en soit, l'idée du phénomène que j'ai exposé, sous la dénomi-
nation de décuisson, me paraît exacte, et c'est sous son impression que
je pose les questions suivantes, qui me sont suggérées par la manière dont
j'ai fait intervenir la considération de la décuisson dans la désoxygénalion
de l'acide carbonique lors de l'insolation des feuilles vertes.
)) N'eu est-il pas de même des éléments de beaucoup de principes im-
médiats organiques?
» West-il pas des maladies excitées par la diminution de la chaleur (du
nombre des calories) que ces éléments ont acquis en passant (h; l'état mi-
néral à l'état de matière organique?
» Enfin, dans un animal qui vient de cesser de vivre, le premier phéno-
mène qui se manifeste dans le cadavre, n'est-il pas produit par celle cha-
leur que perdent les éléments des principes immédiats?
DOCUMENTS.
/<■'■ Document. — Quelques expériences sur deux jjrépanitinris, ditis farines de viande,
faites en j^iiurir/ue.
» Il y a une vingtaine d'années au moins que je fus consulté sur le
moyen de tirer parti des viandes provenant des animaux abattus dans les
plaines de la Plata [jour en expédier les peaux eu Europe. Je me gardai
bien d'indiquer des procédés dont l'exécution se ferait par des i)ersonnes
qui me seraient inconnues, et dans des conditions climatériques que je ne
connaissais pas bien: mais, quoiqu'il en fût, je crus devoir insister sur la
nécessité d'observer certaines conditions cpii tue semblaient essentielles à
la bonne qualité du produit alimentaire qu'on se pro|iosait de préparer.
» J'indiquai <piatre conditions principales :
( 649 )
» 1° Se bien garder de cuire la viande en l'exposant à une température
trop élevée pour la sécher ;
» 2° Eviter d'en séparer une inatière soluble dans l'eau qui renferme à
l'état latent l'arôme auquel certaines viandes cuites doivent un caractère
distinctif; je citerai la viande de bœuf et celle do la perdrix;
» 3" Éviter de mettre la viande dans des circonstances où elle pourrait
s'altérer;
» [f Éviter de la mettre en contact avec des métaux, tels que le cuivre,
par exemple, qui pourraient la rendre iuiisible.
» Dans le courant de l'été dernier on m'a remis deux préparations,
sous la dénomination de farines de viandes, préparées à Bnenos-Ayres; l'une
avait été faite avec de la viande séchée à 55 degrés, c'est-à-dire à une tem-
pérature inférieure à la coagulation d'un liquide albumineux; l'autre pro-
venait d'une viande séchée à une température bien supérieure à celle où
s'opère cette coagulation, de sorte qu'elle pouvait passer pour cuite.
» Les expériences comparatives auxquelles j'ai soumis les deux prépara-
tions m'ont donné des résultats conformes à toutes mes prévisions. Dési-
gnons par A la farine de viande crue et par B ta farine de viande cuite.
» I j)artie de chaque viande a été mise dans un ballon de verre avec
3 parties d'eau distillée.
» A a absorbé l'eau de manière à former une sorte de pâte, par suite du
gonflement de la viande.
» B s'est gonflé, mais bien moins; aussi la viande était isolée d'une partie
du liquide.
» Ce résultat des deux expériences comparatives est tout à fait conforme
à ma prévision ; car, évidemment, la partie plastique albumineuse n'étant
pas cuite, a formé un liquide épais avec l'eau qui a été retenue en grande
quantité par la partie fibreuse qui elle-même s'est plus gonflée que celle
de B, qui avait été cuite.
» Les deux ballons ont été tenus plongés dans un bain-marie boudlant,
durant six heures; il s'exhalait une odeur plus suave du bouillon A que du
bouillon B.
» Après la cuisson, le bouillon A était en grande partie interposé avec la
viande, tandis que la viande B était en grande partie séparée de son
bouillon.
» Résultat conforme au précédent, car la viande B avait subi deux cuis-
sons, et dès lors elle devait être, sinon racornie, du moins plus compacte,
plus dure.
( 65o )
» Le bouillon et la viande A avaient le goût et i'odeiir du bouillon et
de la viande de bœuf, je n'oserais dire du meilleur bouillon et du meilleur
bouilli, mais certes ils n'avaient rien de désagréable.
» Il en était autrement du bouillon et du bouilli de B, et pour être juste
il fallait distinguer un premier goût et un arrière-goût : le premier était
désagréable, sans que je puisse le définir par une comparaison, mais l'ar-
rière-goût ne l'était pas.
» En définitive, sans prétendre que B ne serait pas comestible, je recon-
nais que A lui est .supérieur incontestablement.
» Je ne donnerai aucune indication des procédés suivis pour confec-
tionner les deux préparations, ne les connaissant point assez bien pour les
décrire. Mais j'ai tout lieu de penser que si les deux farines renferment
tous les principes immédiats de la cliair musculaire, elles ne les renferment
pas dans les mêmes proportions que celle-ci, tontes choses égales d'ailleurs.
Ainsi j'affirme que la graisse s'y trouve dans une proportion notablement
inférieure, car aucun des deux bouillons chauds n'a présenté à la surface
cette graisse fondue qu'on appelle vulgairement les/eu.ï du houillou. B m'a
paru en contenir moins que A. J'ai lieu de penser encore que les deux
viandes, surtout B, avant la dessiccation, contenaient moins do la matière
soluble dans l'eau où réside à l'état latent le principe aromatique de la
viande cuite, que n'en contient la viande ordinaire.
» En définitive, les deux farines de viandes que je viens d'examiner jus-
tifient toutes les prévisions que j'émettais il y a plus de vingt ans sur les
conditions qu'il faut observer pour faire de bonnes préparations de
viande avec les animaux abattus dans les plaines de la Plata.
« J'ajouterai qu'en chauffant i partie des farines avec 25 parties d'eau
dans des cornues pourvues de ballon pour recueillir les vapeurs conden-
sables, j'ai reconnu :
M i" Que, connue dans la cuisson de la viande ordinaire, les deux fa-
rines dégagent un produit sulfuré qui noircit le pa[)ier de plomb;
» 2" Que le produit aqueux de la farine A est légèrement ammoniacal,
et qu'il trouble et colore légèrement par son soufre l'acétate de plomb; le
produit aqueux de la farine B est^légèrement acide et ne trouble ni ne co-
lore l'acétate de plomb;
» 3" Que le produit aqueux de la farine A était rendu opalin par un peu
de graisse qui avait passé mécaniquement de la cornue dans le ballon ; le
produit aqueux de B était lim|)ide;
( 65, )
» 4° Que les liquides concentrés clans les cornues au même degré sont
inégalement colorés; celui qui l'est le plus est le liquide de B;
» 5° Que ces liquides, qui sont du bouillon étendu d'eau, sont tous les
lieux acides au papier de tournesol, et qu'il en est de même des viandes A
et B;
» 6° Que le principe qui donne au bouillon de B un goût et une odeur
désagréables est plus sensible encore dans le liquide B concentré que dans
son bouillon. Je ne sais à quoi comparer la sensation qu'il m'a fait
éprouver.
II' Document. — Inconvénient de détourner l'acception de différents mots
définis par la science.
M En toute circonstance où j'ai pu insister dans l'inlérêt de la science sur
la nécessité de maintenir l'acception des mots définis par elle, je ne me suis
point abstenu de le faire, convaincu des inconvénients de l'inobservation
d'une règle que justifie si puissanmient la pensée fondamentale delà nou-
velle nomenclature chimique!
» Un fait récent relatif aux corps gras considérés comme aliment ne
peut que me confirmer dans cette manière de voir. Mais avant de l'exposer,
je demande à l'Académie qu'elle veuille bien entendre quelques détails
relatifs à l'histoire des travaux auxquels les corps gras ont donné lieu.
)) En i8i3, quand je présentai à l'Académie mon premier Méinoire
sur les corps gras, j'éprouvai une vive contrariété lorsque M. Thenard, de
l'amitié duquel, je le reconnais, je n'ai jamais eu qu'à me louer, mais qui
tenait excessivement à ses opinions scientifiques, me fit tant d'observations
sur la dénomination à'acide mnrgnrique que j'avais donnée à un corps
dont l'acidité, à mon sens, ne pouvait être l'objet d'un doute, que je crus
devoir le décrire en définitive, par déférence, sous le nom de margarine, tout
en ne dissimulant pas dans mon Mémoire mon opinion sur la propriété
fondamentale que je lui avais atttibuée. Le motif allégué par M. Thenard
pour rejeter mon opinion, était que la qualification d'acide ne pouvait appar-
tenir à un composé ternaire organique qu'à la condition d'une composi-
tion équivalente à carbone -+- eau -+- oxygène ; or, l'acide margarique
équivalait à carbone -+- eau -+- hydrogène, composition, selon M. Thenard,
essentielle aux corps inflammables, conséquemment aux corps gras.
» Sans entrer dans de plus grands détails, Berthollet, qui apprécia
comme rapporteur mes travaux sur les corps gras avec tant de bienvaillance,
adopta mon opinion en disant dans son Rapport sur mon sixiètiie Mémoire
C. R., 1870, 2" Semestre. (T. LXXI, N° 20.) 87
( 652 )
le 23 décembre 1816 à l'Académie : « La suite des recherches de M. Che-
» vreul a fait voir que la margarine est un acide parfaitement analogue
» aux autres. »
» Après la découverte des acides oléique, sléarique, phocénique^ butyri-
que, caproïque, cuprique, hircique, après avoir insisté sur les différences
qu'ils présentent d'avec les corps gras neutres que j'avais définis sous les
noms de stéarine, oléine, pliocénine, but/rine, caproine, caprine, hircine,
tilinc, clioleslénne ;
)) Enfin, après l'assentiment donné par tous les chimistes à l'opinion
finale sur les corps gras siq)oniftabtes que j'assimilai aux éfhers salins
et aux sels; après avoir nettement distingué l'acide stéarique de l'acide
margarique, et après avoir montré que les corps gras neutres saponifia-
bles représentés à l'état de pureté par un acide uni à la glycérine ou à
un carbure d'hydrogène, l'éthal, je pus dire qu'il existe dans les suifs,
les graisses et les huiles, trois espèces principales de composés neutres :
la stéarine, la margarine et Voléine.
» Cette digression rétrospective n'était point inutile pour montrer la
différence réelle et incontestable existant entre les corps gras neutres, la
stéarine, la margarine et l'oléine, et leurs acides stéarique, margarique et
oléique, et comment la stéarine. In margarine et l'oléine constituent par
leur mélange des suifs, des graisses et des huiles d'après leurs proportions
respectives; et comment ces mélanges différent des beurres qui renferment
de plus de la butyrine, de la caproine, de la caprine, etc., corps neutres
qui sous l'intluence de l'air répandent des vapeurs odorantes d'acide
caprique et caproïque et surtout d'acide butyrique.
» Une fois ces différences reconnues, on sent très-bien l'erreur que com-
mettrait celui qui, sous le prétexte que l'huile d'olive représentée princi-
palement par tle la margarine et de Voléine, viendrait vous proposer de la
remplacer dans l'alimentation [)ar les acides margarique et oléique provenant
de la décomposition du savon de Marseille par un acitle.
■ Une conséquence des faits exposés, c'est qu'il n'est pas possible de consi-
dérerle mélanged'i/ne /(U(7(^ formée de margarine et d'oléine avec un ensem-
i)le d'acides stéarique et margarique servant à la confection des bougies <lites
stéiiriques, comme vni produit alimentaire équivalent à une graisse neutre
formée de stéarine, de margarine et d'oléine. Il en serait autrement d'un
mélange de stéarine et de margarine avec une huile formée de margarine
et d'oléine d'une fusibilité intermédiaire entre la stéarine et la margarine
d'une part, et d'une autre part l'huile.
( 653 )
» Récemment consulté sur la question de savoir si le mélange d'une huile
avec les acides stéariqiie et margarique pouvait remplacer une graisse, j'ai
répondu négativement, en ajoutant cependant qu'il n'était pas probable que
les corps gras acides fussent nuisibles à la santé comme toxiques.
» Lorsqu'on me consulta, on s'énonça en ces termes : Croyez-vous que
le mélnnc/e d'une huile comestible avec de la stéarine puisse remplacer une
graisse alimentaire plus fusible que la stéarine et inoitis liquide que l'huile? Ma
réponse fui affirmative. Mais lorsqu'on m'eut dit que \r stéarine était la ma-
tière grasse de la bougie stéarique, je fis la remarque précédente, et alors
V inconvénient du changement d'acception des mots définis par la science effectué
par l'ignorance ou la mauvaise foi me frappa et me détermina à écrire les ré-
flexions que je viens de faire, en répétant ici que les personnes qui me
consultaient de parfaite bonne foi avaient été trompées par le commerce et
l'industrie qui appellent stéarine dans leur transaction les acides stéarique et
margarique constituant la bougie.
» Je citerai à l'appui de mes réflexions sur l'inconvénient que je signale
un fait qui remonte à plus de vingt ans et a quelque analogie avec celui
dont je viens de parler.
» Un ouvrier en chambre vint me consulter sur la cause pour laquelle
il ne réussissait pas dans la teinture en bleu de cuve des peaux de mou-
ton pourvues de leur toison. Je lui donnai une recette; il la pratiqua sans
succès. Lorsqu'il m'en fit part, je lui demandai un échantillon de la po-
tasse qu'il avait employée, et c'est alors que je sus que les épiciers vendent
à Paris sous le nom dépotasse une soude carbonatée provenant de la calci-
uation de l'eau mère du sel de soude, fait qui se passe encore dans le com-
merce de Paris. J'ajoute que d'après mes expériences le sous-carbonate de
soude ne peut remplacer le sous-carbonate de potasse dans le montage de
la cuve d'acide.
)i Enfin M. Payen m'a assuré que cette fraude remonte à l'année 1807.
Car alors on mit dans le conunerce, sous le nom dépotasse d'homérique,
le produit dont je parle coloré par un sel de cuivre, u
MÉTÉOROLOGIE. — De la période tridodécuple ou décemdiurne dans les phéno-
mènes atmosphériques et dans leur influence sur l'état sanitaire (première
Note); par M. Ch. Sainte-Claire Deville.
« Les phénomènes naturels qui s'acconiplitisent dans les milieux inorga-
niques sont tous soumis à des lois numériques et, par conséquent, à des
87.
( 654 )
retours périodiques. Si quelques-uns de ces phénomènes semblent se sous-
traire à cette nécessité, qui ne souffre pas d'exception, cette anomalie appa-
rente tient niiiquement au grand nombre de causes de perturbation qui
affectent la loi générale. Mais toutes ces perturbations sont elles-mêmes
susceptibles, d'abord, d'être mesurées dans leurs effets, puis déterminées
dans leurs périodes, enfin d'être définies dans leur cause. Ce dernier point
(le vue, le point de vue éliologique (i) ne peut être abordé avec sécurité
qu'après le travail préalable de la Iroponomie, c'est-à-dire après la recherche
directe des variations avec le temps et avec les lieux, abstraction faite des
causes possibles ou probables de ces variations. Ce premier travail d'en-
semble, qui a pour résultat l'introduction de l'ordre dans un chaos appa-
rent, peut être comparé au défrichement d'un sol vierge et embarrassé de
broussailles. La rude tâche du laboureur ne sera appréciée que lorsque la
semence jetée par une autre main aura germé dans les sillons tracés par
lui. De même, la tâche ingrate du statisticien ou, pour mieux dire, du syn-
thétiste, qui sera parvenu à grouper sous des énoncés divers et, le plus sou-
vent, approximatifs, les innombrables faits que possédait la science et qui
semblaient isolés, ne sera appréciée que lorsqu'un esprit analytique, venu
plus tard, aura donné une formule qui permettra de vérifier, de rectifier
même ses lois empiriques, et d'en déduire une foule de conséquences nou-
velles. Pour rendre ma pensée par un exemple à jamais célèbre, on peut
dire que Kepler n'a vraiment été connu et jugé à sa véritable valeui-
qu'après que Newton eut donné sa formule générale.
» Le rôle d'un Kepler n'est peut-être plus possible, aujourd'hui que la
division du travail scientifique répartit, en quelque sorte, son œuvre entre
une foule de chercheurs. Depuis quarante ans environ, la Météorologie
est entrée dans la voie qui doit la mener un jour à de premières lois ap-
proximatives, puis, api es un long temps sans doute et avec le coucoiu's
indispensable de l'Astronomie, à une formule générale, coniprenant tous
les phénomènes.
» Deux grands procédés d'investigation ont été suivis. Dans l'un, que
l'on pourrait appeler la méthode dynamique, le savant s'identifie, en quelque
sorte, avec une moléctde d'air, la suit dans tous ses mouvements, cherche
à déterminer les diverses phases tle sou parcours et l'entrainemeut des
masses d'air, dont le déplacement est lié avec lui. Celte méthode, inaugurée
par MM. Dove, Quetelet, Piddington, Maury, etc . et qui constitue plus
(i) Point de vue crjptologique d'Ampère.
( 655 )
spécialement l'étude des mouvements de l'atmosphère, est destinée assu-
rément à un grand avenir, et, depuis plusieurs années, le service météo-
rologique international de l'Observatoire de Paris, comme le Meteorologiral
Office (le Londres, sont entrés dans cette voie féconde en résultats pra-
tiques.
» Par le second procédé d'investigation que l'on peut appeler la méthode
statique, le savant, fixé dans une station, détermine tous les phénomènes
météorologiques qui s'y manifestent, et les compare dans leur date et dans
leur intensité. La méthode dynamique embrasse d'une manière simultanée
le déplacement opéré et le temps qu'il a coûté. La méthode statique tient
compte aussi des deux ordres de variations; car, si dans une première loca-
lité, la succession des phénomènes est d'abord constatée, comme, à un
moment donné, plusieurs observateurs notent les phénomènes eu des points
divers, la discussion permet ensuite de déterminer la progression dans l'es-
pace comme dans le temps.
» (jCtte dernière méthode donne aussi le moyen d'étudier séparément
les divers ordres de phénomènes, d'en trouver la loi de succession, et de
comparer entre eux les résultats obtenus par chacun d'eux. Elle a peut-
être quelque chose de plus général que le premier mode d'investigation;
car c'est elle qui déduira la loi du retour périodique des bourrasques ou
mouvements tournants, qui se succèdent dans l'atmosphère terrestre.
» On peut dire qu'elle est d'un emploi naturel et comme instinctif: c'est
par elle que, de toute antiquité, ou a pu constater les deux extrêmes de la
température dans le jour et dans l'année, plus tard, la double oscillation
diurne du baromètre, etc. Mais son emploi n'est devenu réellement scien-
tifique que dans les premières années de ce siècle, entre les mains de l'il-
lustre Humboldt. Après lui, Rœmtz, Brewsler, Dove, Mahlmann, Kuppfer,
Sabine, Jaines Forbes, Buys-Ballot et un grand nombre de savants en Eu-
rope et en Amérique, qu'd serait impossible de citer ici, l'ont appliquée
avec succès aux diverses branches de l'atmologie, soit d'une manière géné-
rale, soit dans d'intéressantes monographies.
» lien est résulté une première approximation dans la périodicité des phé-
nomènes. Mais, comme rem|)loi des moyennes, qui était à peu |)rès le seul
instrument île recherches, avait donné tout ce qu'il pouvait fournir et était
u)habile à expliqueras inégalités des courbes par lesquelles se traduisaient
ses résultats, on s est arrêté généralement à la pensée que ces anomalies ap-
parentes étaient dues à ce que le nombre des années d'observations était
insuffisant, et qu'elles ne disparaîtraient qu'au bout d'un laps de temps qui
( 656 )
pouvait effrayer ou décourager les esprits. En attendant, on a appelé à
son aide le calcul des probabilités, et l'on s'est ainsi procuré la satisfaction
de donner, par exemple, pour les températures moyennes des divers jours
de l'année, des listes où les nombres se graduent avec une parfaite doci-
lité, et des courbes théoriques où l'œil n'est plus contrarié par d'intempes-
tives oscillations.
» En face d'une science ainsi acculée, on comprend la répulsion d'une
foule d'esprits sérieux.
» Heureusement, une autre école s'est formée, encore peu nombreuse
et qui a dû longtemps résister à l'incrédulité générale et même aux sar-
casmes de quelques-uns. Celle-ci s'est demandé si les inégalités que la mé-
thode des moyennes s'évertuait à faire disparaître n'étaient pas, au con-
traire, une condition nécessaire, liée à l'essence même des lois qui régis-
sent les phénomènes, et susceptible d'être déterminée, dans son intensité
et dans ses retours, à peu près comme les perturbations de l'orbite d'une
planète. Le problème n'a été posé avec cette généralité que dans ces der-
niers temps; mais les recherches de M. Quetelet, plus tard celles de
M. Fournet, en avaient déjà suffisamment indiqué la portée, et, dans un
cas particulier, dont j'ai donné ici même l'historique (i), les travaux de
MM. Maedler, Erman et ceux de notre regretté Correspondant, M. Petit,
fournissaient une entrée en matière précieuse et féconde.
» Tel est le point de vue auquel, voué avec ardeur, de|)uis trente ans, à
l'étude de la Météorologie, je me suis placé dans les diverses Communica-
tions que j'ai faites à la Société Météorologique de France et à l'Académie
des Sciences, et dont les premières remontent à i855. Si, depuis plus de
deux ans, j'ai cessé presque entièrement d'entretenir l'Académie de mes
études personnelles sur ce sujet, je n'y ai point renoncé cependant; mais,
ayant eu la double bonne fortune de trouver dans un Ministre de l'Instruc-
tion publique le vif sentiment des besoins actuels des hautes études scien-
tifiques, et, pour leur avocat auprès de la municipalité parisienne, un de
nos illustres secrétaires perpétuels, j'ai dû consacrer tous mes instants à
la réalisation d'un de mes vœux les plus anciens et les plus chers, l.i créa-
tion d'un établissement météorologique central, digne de notre pays et
capable de rivaliser avec ceux que l'Europe possède déjà. La regrettable
interruption qu'a forcément imposée à nos travaux une invasion, qui semble
ramener l'Europe à plusieurs siècles en arrière, nie permet aujourd'hui de
(i) Comptes rendus, t. LX, séances des 27 mars et lo avril i865.
(657 )
présenter à l'Académie un aperçu très-succinct des derniers progrès que je
crois avoir fait faire, tant à la question générale, qu'à ses applications aux
phénomènes physiologiques.
» Mais, auparavant, je voudrais encore appeler l'attention sur un sujet
qui se rattache très-directement à ce que je viens de dire, et qui a divisé les
savants : je veux parler de la valeur réelle des observations météorolo-
giques, et de l'emploi légitime qu'on en peut faire.
» Il y a, à ce sujet, deux opinions absolument opposées, extrêmes toutes
deux, et qui, toutes deux, je pense, doivent être rejetées. Ces deux avis
opposés ont un point de départ comnuui : c'est que certains phénomènes
(par exemple, la température de l'air) s'observent, en général, d'une ma-
nière un peu arbitraire, mal définie, le plus souvent imparfaite; d'où
résultent des nombres qui ne sont pas toujours comparables entre eux.
» Quelques savants, préoccupés uniquement de la perfection des moyens
d'expérimentation, pensent que de telles observations n'ont aucune valeur,
ne méritent pas qu'on les discute, et se résigneraient volontiers à ce qu'on
n'en fît plus.
» D'autres, à peu près aussi convaincus de l'insuffisance des observa-
tions, croient le mal sans remède, en prennent leur parti, n'utilisant les
résultats que pour de larges aperçus, qui ne comportent pas encore de
précision.
» Entre ces deux extrêmes, quelle est la route à tenir?
» Et, (l'abord, il y a de grandes inégalités dans la valeur des méthodes
li'observation, suivant la nature des recherches. Le baromètre, cet admi-
rable instrument, et les appareils qui donnent les éléments magnétiques ne
laissent ru^n à désirer. L'anémométrie est aussi très-suffisamment dotée :
l'anémoscope direct, que nous avons installé à Montsouris, grâce à l'habi-
leté de M. Hardy, et qu'il serait facile de rendre enregistreur, joint à l'ané-
momètre de Robinson, que M. Mangon a si ingénieusement pourvu de l'en-
registrement électrique, nous donnaient les indications les plus exactes.
Quant à l'hygrométrie, on peut dire que les perfectionnements appor-
tés par M. Regnault à l'hygromètre condenseur ont rendu la méthode
de Daniell aussi pratique qu'elle est scientifiquement irréprochable. Pour
l'appliquer d'une manière régulière, il faudrait seulement disposer d'un
personnel suffisant.
)i Laissant de côté les observations électrométriques, actinométriques,
photométriques, cyanométriques, ombrométriques et atmidométriques,
pour la plupart desquelles le principe de mesure est trouvé et qu'il ne
( 658 )
reste plus qu'à rendre d'une application plus pratique pour les unes, plus
précise pour les autres, et n'insistant pas non plus sur les procédés dits
ozonomélriques, sur l'interprétation desquels il peut y avoir dissentiment,
mais qui n'eu offrent pas moins nm? indication précieuse sur certaines pro-
priétés tres-variables de l'atmosphère, j'arrive de suite à la véritable dif-
ficidté, à celle qui a soulevé le plus de discussions, à la détermination de
la température de l'air.
» Reconnaissons d'abord que ce ne sont pas les instruments qui nous
manquent; nous en avons de parfaits: thermomètres à air, thermomètres
métalliques, thermomètres à mercure et à alcool, thermomètres électri-
ques (i). De chacun de ces instriuuents, nous en trouverons toujours faci-
lement deux du même système, qui, placés dans des conditions identiques,
donneront la température à o,o5 de degré près.
)) Là n'est donc pas la difficulté.
)) La véritable difficulté est celle-ci : un corps placé dans l'air, à l'ombre,
est nécessairement et continuellement influencé, relativement à la quantité
de chaleur qui lui parvient, parle rayonnement des objets qui l'entourent.
Or, comment rendre ce rayonnement constant, ou même seulement com-
parable, entre deux stations ?
« L'abri que j'ai fait construire à Montsouris, et dont j'ai cherché à
rendre les dispositions le plus avantageuses possible, en m'éclairant surtout
de l'expérience et des longues réflexions de mon savant ami, M. Renou, est
cependant tel, que, si deux thermomètres identiques y sont installés, et si
l'un, tout en restant constamment à l'ombre, a son réservoir de quelques
centimètres plus éloigné du double toit incliné qui les recouvre, ce dernier
donnera des maxima plus élevés et des minima plus bas que le thermo-
mètre situé plus haut; en d'autres termes, tout en fournissant sensiblement
la même moyenne, il indiquera un climat plus extrême.
» Il faut encore ajouter que deux thermomètres, placés dans des con-
ditions identiques, pourront donner des indications fort différentes, suivant
que le liquide sera du mercure ou de l'alcool, celui-ci incolore ou diver-
sement coloré, suivant que le réservoir sera nu ou recouvert de substances
douées de pouvoirs absorbants différents.
« De tout cela il résulte que la détermination de ce qu'on appelle la
température de l'air repose sur une convention, et sur une convention qui
(i) Auxquels il faudra ajouter le thermomètre de M. Lamy, fondé sur les phénomènes de
dissociation.
(659)
varie généralement d'un observatoire à l'aulre. Une seule convention
serait uniforme, ce serait celle qui consisterait, comme M. Renou l'a pro-
posé [Comptes rendus, t. XL, p. io83), à placer le thermomètre dans une
triple enveloppe, convenablement disposée, soumise à un courant conbtani,
et entièrement à l'abri des rayonnements extérieurs. On aurait ainsi une
sorte (le température normale, à laquelle on rapporterait les observations
faites dans des conditions variables et plus semblables à celles où sont
placés les corps vivants ou inertes dans l'atmosphère.
» En attendant que le crédit, à peu près suffisant, voté par la dernière
législature pour l'Observatoire de Moutsouris, en 1871, et le retour à des
conditions politiques normales permettent d'y installer un appareil de ce
genre, un thermomètre à air avec les dispositions recommandées par
M. Regnault, un thermomètre métallique réduit à un seul fil de platine,
comme l'a proposé M. Renou, ou tout autre appareil, plus ou moins sus-
ceptible d'annuler l'effet des rayonnements circumvoisins, qu'y a-t-il à
faire? Rechercher tous les moyens de correction et de comparaison, per-
mettant de ramener les unes aux autres les indications thermométriques
des divers observatoires ; faire, avant tout et régulièrement, usage du ther-
momètre-fronde. Cet instrument, même tourné à la main, au-dessus d'un
gazon, à une distance suffisante du corps et des édifices qui peuvent l'in-
fluencer, subit et traduit parfaitement les effets du rayonnement moyen de
la portion du ciel qui le recouvre. Aussi n'offre-t-il, le plus souvent, qu'une
différence insignifiante, tourné à l'ombre ou au soleil. Employé concur-
remment avec les thermomètres fixes, il donnera pour ceux-ci une cor-
rection, qui |)ourra varier avec les localités.
» En définitive, les appareils thermométriques actuels, employés avec
intelligence et discernement, non-seulement peuvent donner, pour une
même station, une mesure assez précise des variations dans la tempéra-
ture de l'air, mais ils peuvent permettre d'établir une comparaison et des
rapports suffisamment exacts entre les températures de deux stations dif-
férentes. Il n'y a donc lieu ni de les bannir absolument, ni de considérer
leurs indications comme susceptibles seulement de donner une grossière
approximation.
» Mais ici, comme dans toutes les branches de l'atmologie pratique,
il y a beaucoup à faire, et c'est pourquoi un observatoire météorologique
central devra se préoccuper autant des progrès de l'observation que des
besoins de la discussion.
C, R., 1870, a» Semestre. (T. LXXI, W 20.) 88
( 66o )
» Les développements auxquels je me suis laissé entraîner sur cette im-
portante question ne me permettraient pas, sans abuser des moments de
l'Académie, d'aborder aujourd'hui le sujet spécial dont je voulais l'entre-
tenir et que je me propose de traiter dans une prochaine Communication. »
MÉMOIRES LUS.
PHYSIOLOGIE. — Des mouvements ijue le corps de l'oiseau exécute pendant
le vol; par M. Marey.
(Commissaires : MM. Milne Edwards, Dupuy de Lôme,
Jamin.)
« Dans une Note insérée aux Comptes rendus à la date du i3 juin 1870,
j'ai décrit les méthodes et les appareils qui permettent de déterminer avec
précision la série de mouvements successifs qui constitue chaque révolu-
tion de l'aile d'un oiseau pendant le vol. J'indiquerai aujourd'hui les
mouvements que l'action de l'aile imprime au corps de l'oiseau (i).
» La translation d'un oiseau, lorsqu'il vole en battant des ailes, s'ef-
fectue suivant une ligne onduleuse dont les sinuosités sont produites par
de petits sautillements de l'animal. L'oeil peut, dans certains cas, suivre
ces oscillations verticales du corps de l'oiseau. Ainsi, quand on est placé
sur un navire que des mouettes suivent pendant de longues heures en ré-
glant leur vitesse sur la marche du vaisseau, on a tout le temps de s'exercer
à ce genre d'observation, et l'on arrive à bien constater ces oscillations
verticales; mais il est très-difficile de reconnaître à quels mouvements de
l'aile correspondent ces déplacements du corps de l'oiseau, ce qui est le
point le plus important à déterminer.
» Un autre phénomène qui échappe entièrement à nos sens est la varia-
tion périodique de la vitesse de translation de l'oiseau. Celui-ci, à chaque
révolution de l'aile, accélère et ralentit alternativement sa translation
horizontale.
» Des appareils spéciaux m'ont permis de déterminer avec précision la
(i) Le court espace assigne à ces Communications les réduit ;i une mention sommaire des
faits; le lecteur trouvera le détail des expériences dans la Revue des Cours scientijiques,
6* année, n°» 4' ' ■> '^' 37, 38, 4', 44-
( 66i )
forme et l'étendue des oscillations verticales du corps de l'oiseau, d'établir
le rapport de chacun de ces mouvements avec les différents temps d'une
3
I
I
■a ça
§ -S
ta .S'
révolution de l'aile, enfin de déterminer les variations de la vitesse hori-
zontale de l'oiseau et les instants où elles se produisent.
» L'appareil que j'emploie et que j'ai l'honneur de présenter à l'Aca-
88..
( 662 )
demie est basé, comme ceux dont je me suis servi déjà, sur la transmission
(les mouvements de l'oiseau, ;i un enregistreur an moyen d'nn Inlx' ;i air.
Ce tube t'ait communiquer l'appareil explorateur avec l'appareil enre-
gistreur.
1) Si j'agile verticalement l'appareil explorateur, on voit que le ré-
cepteur enregistre des mouvements semblables en amplitude et en
durée.
» Après m'èlre assuré que l'appareil transmettait fidèlement les mou-
vements d'oscillation verticale qui lui sont communiqués, je l'appliquai siu-
le dos d'un oiseau que je fis voler dans un vaste espace, et j'obtins le tracé
des oscillations verticales de cet oiseau pendant son vol. En opérant ainsi
sur une série d'oiseaux de différentes espèces, j'ai obtenu la série des tracés
représentés^^, i.
» Il ressort de cette figure que les différentes espèces d'oiseaux ont le
vol inégalement saccadé, et que le canard oscille beaucoup plus clans la
verticale que les oiseaux de proie.
» Si l'on enregistre à la fois les oscillations verticales de l'oiseau ei les
mouvements de son aile, on voit :
» 1° Que cbaque révolution de l'aile s'accompagne de deux oscillations
complètes de l'oiseau;
» 2° Que l'une de ces oscillations coïncide avec l'abaissement de l'aile,
et l'autre avec l'élévation de cet organe.
» On comprend facilement qu'au moment de l'abaissement de son
aile, l'oiseau monte en prenant son point d'appui sur l'air; mais qu'il rc-
nionle aussi au moment où il relève son aile, c'est plus difficile à comprendre
au premier abord. Ce phénomène va s'ex])liquer de lui-même quand nous
aurons déterminé les variations de la vitesse borizontale de l'oiseau dans
leiu'S rapports avec les oscillations verticales-
» L'appareil qui sert à enregistrer les oscillations verticales de l'oiseau
permet, si ou le place dans une autre position, d'enregistrer les cliange-
menls de la vitesse de translation. En combinant deux appareils à la fois,
on peut déterminer tous les mouvements de l'animal et connaître, à chaque
révolution de l'aile, quelle est, à la fois, la hauteur et la vitesse du corps
de l'oiseau.
» La fiij. 2, lioiil jci ne pius ici développer l'-inalyse (i), luonlre la
combinaison de ces deux ordres de mouvement.
(i) Voir Rrriif tin: Cours scientifiques, 1869, 2 ort., n" 44-
( 663 )
» ïl ressort de ces expériences que l'oiseau exécute les mouvements
suivants.
» i" En abattant ses ailes, il s'élève |)our
retomber à la fin de ce temps d'abaisse-
ment. En même temps, l'oiseau accélère sa
vitesse horizontale. J'ai indiqué dans la
Note précédente la cause de ce double
elfet.
» 2° En relevant son aile, l'oiseau s'élève
= de nouveau pour retomber ensuite; mais,
> dans ce deuxième temps, il perd beaucouj)
Z de sa vitesse horizontale.
2 » Ce dernier fait donne la clef du mé-
0 canisme de la seconde ascension ; il montre
~ que cette ascension se fait aux dépens de la
p vitesse acquise par un mécanisme analogue
^ à celui du cerf-volant, qui marchant contre
J l'air, en lui présentant nu plan incliné,
S s'élève aux dépens de la force horizontale
'° qui lui est appliquée.
ï M L'expérience m'a montré que cette se-
° coude ascension manque lorsque l'oiseau,
-S au début de son \o], n'a pas encore acquis
~ la vitesse aux dépens de laquelle elle se
1 produira.
1 » M. Liais, dans des études sur le vol
g des oiseaux, avait déjà émis cette théorie
fi (voyez Comptes rendus, t. LU, p. G97). On
retrouve la même idée dans plusieurs au-
tres auteurs, et sans démonstration expéri-
mentale.
» Dans une prochaine Note, j'exposerai
le résultat des tentatives que j'ai faites pour
reproduire synthéiiqueiucnt le mécanisme
du vol, c'est-à-dire pour réaliser, au moyen
d'un a()p,u'('il pesant, les effets de soutène-
ment dans l'ail- et de tr.mslation horizontale que l'oiseau obtient par l'ac:-
tioii de ses ailes. »
( 664 )
ZOOLOGIE HISTOKIQUE. — Sw tes animaux employés par les anciens Égyptiens
à la chasse et à la guerre (troisième Note); par M. F. Lexorma.xt.
« Le miépard [Felis jubnta) n'est figuré sur les monuments ni de l'Ancien
ni du Moyen Empire. C'est seulement avec le Nouvel Empire, lors des
grandes conquêtes de la XVIIP et de la XIX* dynastie, qu'il fait son appa-
rition dans les sculptures pharaoniques. On voit alors fréquemment, parmi
les bas-reliefs qui représentent les envoyés des populations nègres du Haut-
Nil apportant leurs tributs aux monarques égyptiens, des guépards évidem-
ment apprivoisés que l'on amène tenus en laisse avec des colliers plus ou
moins richement ornementés (entre autres représentations, voir Duemi-
chen, Hislorischen Inschriflen, 2« série, PI. III, XVII et LXI). Il est donc
clair que dès cette époque les tribus de race noire qui peuplaient les bords
du fleuve dans son cours supérieur avaient l'habitude de dresser le guépard
au rôle d'auxiliaire de l'homme dans la chasse des antilopes, comme les
Abyssins du Moyen-Age et encore aujourd'hui les Bedi M'Zab du Sahara
algérien (sur l'emploi du guépard chez les populations africaines, voir
Hartmann, Zeilscltr. d. Gesellscli. f. Erdhunde z. Berlin, t. III, p. 57), ainsi
que les Indiens. Mais en Egypte ces animaux, envoyés par les chefs des
tribus comme présents de haut prix à leur suzerain de Thèbes, étaient sans
doute réservés aux plaisirs princiers, car il ne semble pas qu'ils aient jamais
été employés dans les chasses des simples particuliers, et on ne les voit
point dans les scènes de vénerie des tombes privées.
» Une des variétés favorites du sport pour les Égyptiens de toutes les
époques de l'antiquité, aussi bien sous le Nouvel Empire que sous les dy-
nasties primitives, était la chasse aux oiseaux d'eau, principalement aux
palmipèdes qui pullulaient dans le pays comme ils font encore aujourd'hui.
Cette chasse avait lieu, non-seulement sur les lacs du Delta, certainement
moins étendus alors dans la portion orientale qu'ils ne le sont maintenant,
mais dans toutes les parties de l'Egypte, sur les canaux et les réservoirs
d'irrigation (appelés maou) qui la coupaient en tous sens, et sur les marais
(appelés p'/iou) (]u'on réservait à l'élève du bétail. On la faisait de deux
manières : ou bien avec un grand filet ou tirasse qui enfirinait d'un seul
coup une quantité considérable d'oiseaux, ou bien en atteignant l'animal
au moment où il prenait son vol, par le jet d'un bâton court et légèrement
courbé à sou extrémité, pareil au boumerang des Australiens, instrument
dont quelques échantillons sont parvenus jusqu'à nous en original (Prisse,
Choix de monwncnh égyptiens, Pi. XUI, n"6). Ce dernier système était la
( 665 )
vraie chasse à la mode parmi les gens de distinction, le divertissement na-
tional par excellence, et c'est par centaines que l'on compte les tombes de
l'Ancien, du Moyen et du Nouvel Empire où le propriétaire de la sépulture
s'est fait représenter se livrant à cet exercice. Il est debout, seul ou entouré
de quelques personnes de sa famille, sur une de ces nacelles faites de tiges
de papyrus réunies en faisceaux dont parlent tous les écrivains classiques.
Celle-ci glisse sur les eaux au milieu des roseaux, d'où s'échappent les vo-
latiles qu'arrête le bâton du chasseur ou qu'il va atteindre, car le plus sou-
vent ce dernier s'apprête à le lancer.
» Très-fréquemment, dans les tableaux de ce genre, le chasseur est ac-
compagné sur sa nacelle d'un chat favori. Mais cet animal n'est pas là seu-
lement comme un simple et inutile flimilier, dont le maître n'a pas voulu
se séparer en le laissant à la maison. Plusieurs peintures des tombeaux de
Gournah (XVIIP dynastie), une entre autres publiée par sir Gardner
Wilkinson [Manners and cusloms of ancient Egjptians, 3* édition, t. III,
p. 42), le montrent prenant une part active à la chasse et ne laissent pas
de doutes sur le rôle qui lui y était assigné. Utilisant les instincts chasseurs
du chat, les Egyptiens le dressaient pour servir de retriever dans ces occa-
sions spéciales, pour lui faire saisir et rapporter les oiseaux assommés ou
seulement étourdis par le choc du boumerang. C'est, je crois, le seul
peuple qui en ait usé ainsi. On doit remarquer de plus que jamais aucune
variété de chien n'est figurée comme remplissant le même rôle dans ces
chasses aquatiques. Sans doute la souplesse des allures du chat l'avait fait
regarder comme l'animal le plus propre à se lancer en pareil cas à la re-
cherche du gibier, sautant légèrement de touffe en touffe de roseaux, sans
s'embarrasser dans les herbes et sans s'embourber dans la vase, comme le
chien n'aurait pas manqué de faire.
M Au reste, l'Egypte antique est certainement le berceau du chat comme
animal domestique. Rien de plus connu que le rôle du chat dans la sym-
bolique religieuse des Égyptiens. C'était l'animal sacré, la personnification
vivante de la déesse Pacht, l'épouse de Ptah, le grand dieu de Meuiphis,
spécialement sous sa forme de Bast; car, sous celle de Paclit, elle était
représentée comme une lionne. De là ces images de chats sacrés en toutes
matières où les artistes égyptiens ont souvent déployé un si grand talent
d'imitation de la nature animale; de là ces catacombes dans plusieurs lo-
calités de l'Egypte antique, où l'on trouve par milliers des momies de chats
soigneusement embaumés. On n'élevait pas seulement dans certains temples
des chats auxquels on rendait les honneurs divins, comme celui dont le
( 666 )
meurtiv, par un soldat romain, occasionna la fameuse émeute que raconte
Dioflore de Sicile (I, 83). Le chat familier de chaque maison était revêtu
d'un caractère sacré, et on l'entourait de soins particuliers; à sa mort, toute
la famille prenait le deuil (Hérodote, 11, 66). C'est sans doute à une réaclion
contre les idées païennes qui s'attachaient à cet animal et le caractère
qu'elles lui avaient fait attrihuer, qu'il faut rapporter i'ahaudon presque
complet du chat dans un jiays où il avait été si multiplié. Car, dans les
maisons de l'Egypte actuelle, on ne rencontre presque jamais cet animal;
à sa place, pour se défendre contre les rats, on emploie des couleuvres fa-
milières qu'on a soin d'avoir dans toutes les habitations.
» En même temps, en effet, qu'ils avaient, conane je viens de le faire
voir, des chats dressés pour la chasse aux oiseaux, les anciens Egyptiens
élevaient surtout cet animal dans leurs maisons contre les rats. Aussi l'ar-
tiste qui a décoré le tombeau de Noum-holep à Beui-Hassan-el-Qadim
(XIP dynastie), s'est-il amusé, en figurant une nombreuse série d'animaux,
à représenter le rat (désigné par sou nom pennou) en face du chat [maou)^
qui le guette (Champollion, Moniunenls de L'Ecjyplt' ci de In Nubie, t. IV,
PL CCCCXXFIll). Dans les caricatures du papyrus satyrique de Turin, les
pompeux tableaux des victoires de Rrtmsès III, scidptés sur les murailles
du palais de Médinet-Abou, sont parodiés en combats de rats et de chats
(Lepsius, Jusivald, PI. XXIII, A), et ce sont le Pharaon et ses soldais que
le vieux caricaturiste thébaiu a figurés sous les tiaits des rais.
» Enfin le chat n'avait pas pour seule mission dans les habitations de
l'Egypte antique celle de défendre des rats; il y servait aussi à détruire les
serpents, qui se glissent si fréquemment dans les intérieurs de ce pays et
peuvent y causer de graves accidents. Ce rôle, que l'animal avait souvent
l'occasion d'exercer, a trouvé loule une série d'applications dans la symbo-
lique religieuse de la mythologie pharaonique, parmi les emblèmes de la
lutte de la divinité bienfaisante, lumineuse et solaire, contre les puissances
ténébreuses et infernales, notion qui fient une place si capitale dans la
religion de l'Egypte. Dans le chai)itre XXXIII du grand livre mystique
connu des érudils sous le nom de Rituel funéraire, la vignette roprésenle le
mort combattant dans l'autre hémisphère un serpent, ministre du principe
infernal, et le texte qui s'y rapporte dit : « Il s'attaque à toi. Quand il sera
» pour le dévorer, le rat ennemi du Soleil, lu invoqueras les ongles du
» chat des mystères. » Ces expressions sont expliquées par un précieux
jîassage du chapitre XVII du même Rituel funéraire (Lepsius, Das Todten-
buch dcr Mijypter, chap. X\Ii, col. 45-5o; Description de l' EtjYjite, Anli-
( C^7 )
quilés, t. H, PL LXXF, col. 63-56; cf. de Rougé, Revue nrchéologique,
ïioiiv. sér., t. I, p. 338 et suiv.), qui jette un grand jour sur la symbolique
du chat, du serpent et du rat, ainsi que sur l'échange des deux derniers
emblèmes. « Je suis, y est-il dit, ce grand chat qui était à l'allée du perséa
» dans An (Héliopolis), dans la nuit du grand combat; celui qui a gardé
» les impies dans le jour où les ennemis du seigneur universel ont été écra-
» ses. Explication : f.e grand chat de l'allée du perséa dans An, c'est le
» Soleil lui-même. On l'a nommé chat en paroles allégoriques; c'est d'a-
» près ce qu'il a fait qu'on lui a donné le nom de chat. » La vignetle qui
accompagne ce passage montre un chat, assis au pied d'un arbre, tenant
sous sa patte la tète d'un serpent. Dans un papyrus de Berlin [Revue ar-
chéologique, nouv. sér., t. I, p. SSg) et dans un autre du iMusée de Leyde,
il tranche avec un sabre la tète du reptile. C'est la substitution d'une allé-
gorie de fantaisie à la représentation symbolique fidèlement empruntée à
la nature.
" En effet, une très-exacte observation des moeurs des animaux a présidé
au choix de ces symboles. Le chat n'est pas moins habile à tuer les ser-
pents que les rats; il donne avec plaisir la chasse à ces reptiles. En Syrie,
j'ai vu et admiré fréquemment, lorsqu'un serpent pénétrait dans une mai-
son, l'adresse avec laquelle le chat, évitant ses morsui-es, lui rompait les
vertèbres cervicales d'un coup de patte sur la nuque, exactement comme
le représente la vignette habituelle du chapitre XVII i\u Rituel funéraire
des Égyptiens. »
MÉMOIRES PRÉSENTÉS.
ART MILITAIRE. — Sui' In force de la poudre et des matières explosives (se-
conde Partie). Note de 31. Berthelot, présentée par M. Bertrand (i).
POODRES A. BASE DE NITRATES ET DE CHLORATES,
« Pour définir la force d'une matière explosive, quatre données sont né-
cessaires, savoir :
» 1° La composition chimique de la matière explosive;
(i) L'Académie a décide que les deux Communicalions de M. Berthelot, liien qu'offrant
une étendue totale qui dépasse les limites réglementaires, seraient insérées intégralement au
Compte rendu,
C, K., 1870, 2« SemeHie. (T. LXXl, Pi» 20.) ^9
( 668 )
» 2" La composition des produits de l'explosion ;
» 3" Le volume des gaz formés;
» 4" La quantité de chaleur dégagée dans la réaction.
» Les comparaisons et les calculs seront d'autant plus faciles que des
équations plus siiu|)les lieront entre eux le corps explosif et ses produits.
Je vais examiner à ce point de vue les poudres au nitrate de potasse, au ni-
trate de sonde et au chlorate de potasse, réservant pour la troisième Partie
les composés explosifs définis.
§ I. — Poudres fin nitrate île pulasse.
•> 1. On sait que leur composition varie dans des limites fort étendues.
Soit d'abord la poudre de chasse. Sa composition est à peu près celle de la
poudre étudiée par M. Bunsen (i). En déduisant le nitre, le soufre et le
charbon échappés à la combustion (2) et en négligeant les produits acces-
s«fires, on arrive à l'équation suivante :
8(AzO^KO)+6S+l3C = 5(SO^RO) + 2((:()^KO)^-KS + 8Az+lICO^
laquelle représente assez exactement le.s analyses.
» D'après cette équation, i kilogramme de poutlre, en brûlant complè-
tement sous la pression atmosphérique, dégage (3) 644000'"' =; Q,, el
donne naissance à 216 litres de gaz permanents. En tenant compte des gaz
seulement, et d'après les hypothèses faites dans la première Partie, la for-
(i) Cette poudre renfermait :
Nitre 78,9
Soufre 9,8
Charbon 11,0
(2) On trouve ainsi par expérience :
Nitre 81,9
S i»,8
C pur 1,9
(3) Etat initial (calriilé depuis
les éléments) :
8(AzOSKO)... 8X129500 = 1036000"'
État final (calculé depuis les éiémcnls ) :
5(S0%K0). 5Xi663oo =:83i5oo
?. {CO%lCO). 2X137700=275400
KS 45300
1 1 co= II X 47°o<' =^ ^17000
I I 669200
Clialcur dégagée dans la réaction 633200 pour 983 grammes.
( 669 )
mule
„ / ii6x \'.>'
P2 = 10,7 7T-
exprime la relation entre le poids ,r de la poudre brûlé dans une capacité
constante de i litre et la pression développée. Cette formule ne diffère de
celle déjà discutée que parce cpi'elle exprime une combustion complète;
«lie fournit des nombres un peu plus forts.
» 2. Cependant on a négligé dans ces formules la vaporisation des com-
posés salins. Or les observations de Rumfordt (i) indiquent que les com-
posés produits par l'explosion de la poudre doivent tous affecter la forme
gazeuse dans les premiers moments, soit qu'ils subsistent en totalité après
refroidissement, soit que l'état de combinaison des éléments change avec
la température et la pression.
» Si tous les composés observés à froid pouvaient être réellement amenés
à l'état gazeux, sous la pression o™,76o et à une températiu-e convenable t,
leur volu'iie total serait 3o6'"(i + at). La combustion opérée sous le vo-
lume constant de 3o6 litres élèverait la température à t, = S'io-o" (2).
En général, on aurait
p,^30-»,5(^V'"'.
' " \ lOOO /
! kilogramme de poudre brûlant dans une capacité égale à i litre dévelop-
perait une pression de ôSSoo""™ := ^o, et dégagerait ^o/joooo"^"' = Qj. Le
travail maximum qui pourrait être effectué dans ces conditions est
7040000 X l^25^^. ■
» Ces chiffres ne diffèrent pas beaucoup de ceux qui ont été calculés en
négligeant la vaporit^ation des composés salins. Si l'on diminue le poids de
poudre, on augmente l'écart des tieux forniides; mais leur marclie générale
demeure la même, ainsi que les inductions tirées de leur comparaison avec
les expériences de Rumfordt.
(1) PioBERT, Traité d' Artillerie, partie théorique, ?,° tirage de la seconde édition, p. Saq.
(2) En admettant que la chaleur spécifi([ue moyenne à volume constant des produits de
la réaction est 0,121, nombre auquel on arrive par les hypothèses de Clausius : que tous
les gaz simples ont la même chaleur spécifique, et que la chaleur spécifique à volume con-
stant d'un gaz composé est égale à la somme de celles de ses éléments.
On néglige d'ailleurs la chaleur de vaporisation des composés salins; nous savons par les
expériences de M. Regnault sur les vapeurs que cette quantité diminue, à mesure (|ue les
pressions s'accroissent avec les températures.
89..
( 670 )
. » 3. Poudre de guerre. — M. Linck (i) a analysé la pondre de guerre.
En déduisant les matières échappées à la combustion (2) et les produits
accessoires, les analyses de l'auteur peuvent être représentées par l'équation
suivante :
8(AzO%KO) + 6^S + i5C = 4(S0% KO) + 2 | (CO% KO) + i jRS»
-+-8AZ + 11 i-CO*+|cO.
» D'après cette équation, 1 kilogramme de poudre, brûlée complète-
ment sous la pression atmosphérique à zéro, dégage 622 doo calories et
donne naissance à 225 litres de gaz permanents. La vaporisation totale de
tous les composés à t° produirait 3i4(n- at) sous la pression normale.
On aura donc :
» 1° En tenant compte seulement des gaz permanents,
P2 = i3,3 ( —
' \IC
2.7.5 X \''^
- o,43x^
» 2° En supposant tous les produits gazeux, t, = 5 100°;
' "^ \ I 000 /
» D'après la dernière hypothèse, i kilogramme de cette |>oudre brûlant
dans un espace égal à i litre dévelop|KM-ait 62 700 atmosphères = p.. et dé-
gagerait 6 880 000 calories ^ Qo.
» Tous ces nombres diffèrent peu de ceux relatifs à la poudre de chasse,
c'est-à-dire que les deux poudres, brûlées dans une même capacité con-
stante, développeraient les mêmes pressions et pourraient donner lieu au
même travail. La différence de leurs effets dans les armes où les gaz se dé-
tendent en changeant de volume, semble due principalement au mode de
(i) Annalcn dcr Clicmic iiiid P/irirm., t. CIX, p. 53. La poiidie analysée contenait
î^'"'»-^ , 74,7
Soufre 12,45
Charbon. 1 2 , ?.5
{2) On trouve ainsi par expérience :
Nitre .j8,7
Sou fre I •->, , 85
Caihonc 8,55
( 671 )
propagation de la combustion, moins rapide dans la poudre de chasse, à
cause de sa constitution physique (i).
» 4. Dans ce qui précède, j'ai représenté la combustion de la poudre
d'après les analyses exécutées sur les produits réels. Comparons les résul-
tats avec les réactions théoriques c[ue l'on admettait autrefois. D'après
l'équation
AzO\ KO + S -h 3C = 3CO- + RS + N,
t kilogramme de poudre devrait dégager 420 000 calories, en brûlant à
zéro et sous la pression o^^^Go. Il donnerait naissance à 33o litres de gaz
permanents à zéro. Enfin la vaporisation totale produirait à <" 4i2'(i + c<^)
sous la pression normale.
)i On tire de là, dans l'hypothèse d'une vaporisation totale, /, ^ 3390",
' ' \I000 /
I kilogramme brûlant dans un espace égal à i litre développerait 65 200 at-
mosphères et dégagerait 5 3ooooo calories.
» La quantité de chaleur dégagée d'après cette équation théorique est
beaucoup plus faible, dans toutes les conditions, que la chaleur dégagée
dans la réaction véritable. En d'autres termes, les produits qui dégagent le
plus de chaleur en se formant sont ceux qui se forment de préférence,
conformément à une relation très-générale en Chimie.
» 5. La poudre de mine renferme un excès de soufre et de charbon, par
rapport au même poids de nitre. Les composés formés dans sa combus-
tion n'ont pas été déterminés par des analyses; au moins dans ces der-
niers temps. C'est pourquoi je me bornerai à envisager l'équation théo-
rique (a) :
AzO^KO + 2S + 4G = 2CO-+ 2CO + KS- -h Az.
I kilogramme de poudre devra dégager 38o 000 calories (à zéro et o™, 760)
et produire 355 litres de gaz permanents. La vapoi'isation totale produirait
426', 5 (i H- at) sous la pression normale.
(i) Piobeit, loco citaln, p. i36 et i54.
(2) Rite exige :
Nitre 65 , o
Soufre. 20,0
Carbone ■ iO,o
(67a )
» Dans l'hypothèse de la vaporisation totale, /, = 3ioo":
/)2 = 1 2 , 4 - — - —
I kilogramme de poudre de raine, brûlant dans nn espace égal à i litre,
développerait 63 3oo atmosphères et dégagerait 4 900 000 calories.
» 6. Soit enfin la poudre avec granil excès de charbon, laquelle iournit
plus de gaz qu'aucune autre (i) :
AzO%KO + S + 6C = 6C0 4- RS + Az.
I kilogramme dégagerait 429/100 calories (à zéro et o"',y6o), en produi-
sant 5io litres de gaz peruianenls. La vaporisation totale produirait à t"
583' (i -h at) sous la pression normale. D'où t, = 32oo";
1000
p.2 — 1 2 , 8 ( -
] kilogramme brûlant dans un litre développerait 101 000 atmosphères et
dégagerait 6 3oo 000 calories.
» 7. Les nombres précédents permettent quelques comparaisons inté-
ressantes entre les effets produits par les diverses poudres.
» Supposons une poudre brûlant dans un espace qu'elle remplit entière-
ment, comme il arrive dans les mines et dans les projectiles : on peut dis-
tinguer les phénomènes de dislocation, dus surtout à la pression initiale, cl
les phénomènes de projection, dus au travail total. Or la pression théo-
rique (2) serait
Pour la poudre de chasse 655oo atmosphères.
Pour la poudre de guerre (ic>.7oo »
Pour la pondre de mine ()33oo »
Pour la poudre à e.\cès de cliarbon loiooo »
» Les trois premières devront donc donner lien aux mêmes effets de
dislocation, tandis que la poudre avec excès de charbon sera beaucoup
plus efficace.
(i) Nitre 65,5
Soufre 10,5
Carbone 24 j**
(2) Calculée dans riiy|)ollièse do la vaporisation totale (|ui Inuniil des résultais plus
comparahli's. Ou ra])pclk'ra que la densité apparente des poudres non conipriniées dilTère
peu de celle de l'eau.
( 673)
M Toutefois ces inductions sont subordonnées aux phénomènes de di-
sociation, lesquels réduisent la pression théorique initiale dans une pro-
portion inconnue.
» Au contraire, le calcul de la chaleur dégagée à volume constant, et
par conséquent celui du travail maximum sont indépendants des phéno-
mènes de dissociation. Le travail maximum sera donc proportionnel aux
nombres suivants, par kilogramme de poudre :
Poudre de chasse 7042000 X 4^5
Poudre de guerre 6880000
Poudre de mine 49000°°
Poudre à excès de charbon 63ooooo
» En ti'autres termes, la poudre de chasse et la poudre de guerre l'em-
portent sur les autres au point de vue du travail mécanique, surtout lorsque
ce travail est destiné à communiquer instantanément de la force vive aux
éclats d'un projectile brisé par l'effort d'une pression intérieure qui s'est
développée à volume constant.
M Mais si la communication de force vive se faisait peu à peu et pendant
la détente progressive des gaz à volume variable, dans un canon par
exemple, les effets seraient plus compliqués, parce qu'ils dépendraient des
phénomènes de dissociation, tels que nous les avons discutés dans la pre-
mière Partie.
§ .11. — Poudres au nitrate de soude.
» 1. Le nitrate de soude se prête aussi bien que le nitrate de potasse à
la fabrication des poudres; il a été employé en grand dans les travaux de
l'isthme de Suez et il présente une économie notable. Malheureusement ce
sel est fort hygrométrique et la conservation des poudres qu'd concourt à
former exige des précautions spéciales. Les théories thermiques que je vais
appliquer augmenteront l'intérêt qu'il peut y avoir, à surmonter ces dif-
licultés en inontrant que la poudre à base de nitrate de soude développe
une pression plus grande que la poudre au nitrate de potasse, sous le
même poids, et peut effectuer un travail plus considérable.
» 2. Soit d'abord une composition équivalente à celle que nous avons
admise pour la poudre de chasse et pour les produits de sa combustion,
constatés par expérience :
8(AzO%NaOj + 6S+ i3C= 5 (SO', Na O) + 2 (CO-, NaO)
+ NaS + 8Az-+- 11CO-.
( 67/4 )
» Cette poudre dégagera à équivalents égaux (1) presque la même quan-
tité de chaleur que la poudre à base de potasse : 647000 calories, au lieu
de 633ooo, et elle fournira le même volume de j^az, c'est-à-dire 212 litres
de gaz permanents à zéro et o'",76o; elle fournirait 3oi'(i -I- ut) dans
l'hypothèse d'une vaporisation totale.
)' I kilogramme de poudre à base de soude fournira 769000 calories
et 25i litres de gaz à zéro et o'",76o; la vaporisation totale produira
358'(n-(z<). La combustion opérée sous le volume constant de 358 litres
élèvera la température à 545o" = (,. On aura encore
j}„ = 2r''""
1 000
quantité plus grande que celle qui répond à la poudre à base de potasse.
» Les quantités de chaleur Qo seront aussi plus considérables.
» I Idlogiamme de poudre à base de nitrate de soude, brûlé dans une
capacité égale à i litre, développera une pression théorique de 85Soo atmo-
sphères et dégagera 9600000 calories.
» Ces nombres sont plus élevés d'un tiers environ que les nombres
calculés pour un même poids de poudre à base de potasse.
» En général les poudres à base de soude doivent développer des pres-
sions plus fortes et une quantité de chaleur, c'est-à-dire de travail, plus
grande que le même poids des poudres à base de potasse et à composition
équivalente. En effet, l'expérience prouve que la substitution du sodium
au potassium dans un sel défini, soit dissous, soit anhydre, donne lieu à un
dégagement de chaleur presque constant, quelle que soit la nature du sel.
Or le métal alcalin existant sous la forme saline, aussi bien dans la poudre
( 1 ) État initial :
8(AzO»NaO) 97<3,ooo
État final :
5(S0', NaO) :.. . 795,500
2(C0%Na0) ■ aG8,ooo •
NaS (environ! ' 43>ooo
1 1 CO- 517, 000
1623,500
Chaleur dégagée dans la réaction 647 4oo calories pour 842 grammes de poudre.
La chaleur spécifique moyenne à volume constant, dans l'hypothèse de la vaporisation
iotale,sera^94?^^ = o.'4«.
042
( 6-]5 )
que clans les produits de la combustion, son influence est éliminée dans
l'évaluation de la chaleur dégagée par la combustion; elle est éliminée,
dis-je, lorsque l'on évalue la chaleur pour des poids équivalents de sels
de soude et de sels de potasse. A poids égaux, au contraire, on obtiendra
beaucoup pins de chaleur, de même qu'on obtiendra un volume gazeux
plus considérable, attendu que l'équivalent du sodium est pins faible que
celui du potassium.
§ III. -— PoudiT au ( hlorate de potasse.
» La poudre au chlorate de potasse a été fabriquée autrefois dans les
proportions suivantes :
Chlorate 75, o
Soufre 12,5'
Charbon 12, 5
» Cette poudre est éminemment brisante; sa préparation a donné lieu à
de terribles accidents. Voyous si la théorie peut rendre coinpie (1(> .sem-
blables propriétés.
» La composition précédente répond aux rapports
3(ClO%KO) + 4S + loC = 3KC1 •+- /^SO- + loCO.
» I kilogramme de cette poudre (i) dégagera g'jaooo calories; elle
fournira 3i8 litres de gaz permanents à zéro et o"", ■760; ou bien encore
38G'(i + «/), à f^ et sous la pression normale, dans l'hypolhése de la vapo-
risation totale (2). Dans cette même hypothèse,
t, = 9090°,
/., = 33-(^-«A^V-'',
' ' \ 1000 /
(r) F.tut initial (li'|)iiis les éléments :
3(CI0SK0) 110,400
F.tat final :
3KCI 3o8,ioo
4S0' i55,2oo
loCO 125, oûo
588, 3oo
588,3 — 110,4=^ 477 '9 1»""' o''^,/^Ç)2 de pondre.
(2) Dans celte même hypothèse, la chaleur spécifique moyenne à volume constant des
produits serait
2,4 X 22
-. = 0,107.
C. R., 1S70, 1' Semestre. (T. LXXI, N» iiO.) QO
( 676 )
valeurs plus fortes que celles qui répondent à presque toutes les poudres à
base de nitrates.
» I kilogramme de poudre à base de chlorate, brûlé dans une capacité
égale à i litre, développera une pression lli 'oritpie de il\G!\oo atmosphères,
et dégagera i 100 000 calories.
» Les pressions exercées par cette poudre sont donc plus grandes, et
les quantités de chaleur développées plus considérables, c'est-à-dire
qu'elle doit produire à la fois des effets de dislocation et des effets de pro-
jection supérieurs à ceux des poudres aux nitrates. Ces conclusions s'ac-
cordent parfaitement avec les faits connus.
» L'extrême facilité avec laquelle détonne la poudre au chlorate de
potasse, sous l'influence du moindre choc, est une conséquence de la grande
quantité de chaleur dégagée par la combustion des parcelles enflammées
tout d'abord : cette chaleur élève la température des parties voisines da-
vantage avec la poudre au chlorate qu'avec la poudre au nitrate, et elle
propage ainsi plus aisément la réaction dans toute la masse. L'influence en
est d'autant plus marquée que la chaleur spécifique des composants est
moindre (i), et que la réaction commence avec le chlorate, d'après les
faits coimus, à une température plus basse qu'avec le nitrate de potasse.
» Tout concourt donc à rendre plus facile l'infliumnatioi) de la poudre à
base de chlorate de potasse.
» Non-seulement la poudre au chlorate est plus énergique et plus in-
flammable, mais ses effets sont plus rapides : c'est une poudre brisante. La
théorie peut encore rendre compte de cette propriété. En effet, les com-
posés produits par la combustion de la poudre au chlorate sont tous des
composés binaires, les plus simples de tous et les plus stables, tels que le
chlorure de potassium, l'oxyde de carbone, l'acide sulfureux. De tels com-
posés doivent éprouver les phénomènes de dissociation à une tem|)érature
plus haute et d'une manière moins marquée que les combinaisons plus
complexes et plus avancées, telles que le sulfate de potasse et le carbonate
dépotasse, ou bien encore l'acide carbonique, combinaisons produites par
la poudre au nitrate. C'est pourquoi les pressions développées dans les pre-
miers moments seront plus voisines des pressions théoriques avec la poudre
au chlorate qu'avec la poudre au nitrate, et la variation des pressions pro-
duites durant la détente des gaz sera plus brusque, étant moins ralentie
(i) En effet, ces deux |)ou(lres ne diffèrent que par la substitution du chlorate, dont la
clialeiir spiVifi(|ue est 0,209; au nitrate dont la chaleur spéri(i(iue est o,?3f).
( ('77 )
par le jeu des combinaisons successivement reproduites pendant la durée
du refroidissement.
» Les explications qui viennent d'être données ne s'appliquent pas seu-
lement aux poudres dans lesquelles le chlorate de potasse est uiélangé avec
le charbon et le soufre, comparées avec les poudres analogues à base de
nitrate; elles comprennent aussi toute poudre formée par l'association des
mêmes sels avec d'autres substances organiques. On peut montrer qu'il
en est ainsi sans entrer dans des calculs spéciaux, pour lesquels les don-
nées précises feraient d'ailleurs défaut. En effet, nos comparaisons reposent
sur les données suivantes, lesquelles présentent un caractère de généralité :
» i" La quantité de chaleur dégagée dans la formation de i gramme de
chlorate de potasse à partir des éléments, soit 3oo calories, est bien moindre
que la quantité, 1280 calories, dégagée dans la formation du même poids
de nitrate. Or, à poids égaux, les deux sels fournissent aux corps qu'ils
oxydent la même quantité d'oxygène; d'où il suit qu'ils doivent être em-
ployés à poids égaux dans la plupart des cas. La formation des mêmes
composés dégagera donc plus de chaleîir avec le chlorate qu'avec le nitrate,
et l'excès subsiste même en tenant compte de l'union des acides du soufre
et du carbone avec la potasse du nitrate.
1) 2° Le volume des gaz permanents est plus grand avec le chlorate de
potasse qu'avec le nitrate, parce que le potassium du premier sel demeure
sous forme de chlorure, tout l'oxygène se portant sur le soufre et le car-
bone pour produire des gaz; tandis que le potassium du nitrate relient une
partie de l'oxygène, en même temps qu'il amène une portion du soufre et
du carbone à l'état de com|)osés salins et fixes.
» Ce grand volume de gaz accroît la pression, même à une température
égale et à fortiori à une température plus élevée.
» 3" Les composés formés avec le chlorate étant plus simples en général
qu'avec le nitrate, la dissociation doit être moins marquée, et par suite le
jeu des pressions sera à la fois plus étendu, parce que la pression initiale est
plus forte; et plus brusque, parce que l'état de combinaison des éléments
varie entre des limites plus resserrées. »
TIIERMOCHIMIE. — Chaleur de formation des composés azotiques.
Note de M. Bkrthei.ot, présentée par M. Bertrand.
» Pour comparer la force des diverses poudres entre elles et avec les
autres matières explosives, il faut savoir la nature des réactions accomplies
90..
(678 )
dans l'acte de la combustion et les quantités de chaleur dégagées par les-
dites réactions. Or, le calcul de ces quantités exige, dans la plupart des
cas, la connaissance de la chaleur de formation de l'acide azotique et de
l'azotate de potasse par leurs éléments, quantités qui étaient demeurées in-
connues jusqu'à présent. J'ai réussi à les évaluer en faisant concourir les
déterminations calorimétriques de MM. Dulong, Hess, Graham, Favre et
Silberuiann, Andrews, Woods, Thomsen, Deville et Hautefeuille, etc., avec
les expériences de MM. Bunsen et Schischkoff. En admettant, avec ces der-
niers auteurs, que leur donnée calorimétrique s'applique à la formation des
substances mêmes trouvées dans leurs analyses, je suis arrivé aux valeius
thermiques que voici (i) :
I" Formation dabioxy de d'azute.
Az 4- 0- = AzO' 7000 calories.
AzO+0=A20^ 16000 »
aAzO = AzO^ + Az. , . 24600 »
(i) En raison de rimportance de ces valeurs, je crois util(! d'en exposer le calcul.
I. — Chaleur de formation par les éléments des corps qui concourent h la réaction.
AzO' 3o grammes. Az4-0^ = AzO' dégage .r : c'est l'inconnue qu'il s'agit de
déterminer.
AzOSKO lOI^'-,! I224oo"' + a:
co' 22 47000
CO 14 12600
CO%KO 6g 137'joo environ
SO%KO 87 i663oo
KS 55 45300
S'0%KO 1)5 1 38000 environ
C'KAzS' (*)
HO 9 34500
3C0',2(AzH%H0). ii8 3iiooo environ
HS 17 23oo.
Charbon. — Le charbon employé dans la fabrication de la poudre n'est pas du carbone
pur; il renferme de l'hydrogène et de l'oxygène, à peu près dans les pr()j)orliuns de l'eau.
Par exemple, le charbon de la poudre (]«e M. Bunsen a étudiée contenait sur 11,0 parties
C^7,6; H=:o,4; 0 = 3,0, Or, la combustion des charbons hydrogénés fournil plus
de chaleur que celle qui répondrait au carbone qu'ils renferment, l'hydrogène et l'oxygène
étant su|)posés à l'état d'eau préexistante, c'est-à-dire ne concourant plus à la production de
la chaleur. Ainsi, MM. Favre et Silbermann, en brûlant de la braise de boulanger (qui con-
tenait pour 1 gramme de carbone o"',027 d'hydrogène), ont trouvé 5244° calories, au lieu
( *) Le l'oiils de ce corps qui inlcrvient étanl Irès-petil, on Ta évalue comme suH'uic de potassium.
( 679 )
2° Formation de l'acide azotique.
Az + O' -t- H = AzOSHO pur et liquide 545oo calories.
Az 4- 0* + H =: AzO%HO gazeux . . environ 45ooo "
Az +0« + H = AzOSHO étendu 62000 »
AzO -h O' -t- H = AzOSHO pur. . . 63ooo calories; étendu. . . 70600 calories.
AzO^ + 0'4- H = AzOSHO »... 47600 >. 55ooo
cal cal c3
Az + 0' + HO i^AzOSHO liquide et pur 20000; étendu 27600, gazeux, env. i5oOo.
AzO -t-0* + HO=:AzOSHO » 28600; » 36ooo.
AzO=-l-0' + HO^rAzOSHG " i3ooo; » 20600.
AzOSHOétendu +0' = AzOSHO » » •' 27000.
3° Formation des azotates.
Azotate de potasse Az -I- O' + K = AzOMCO solide
Azotate de soude Az -4- 0« + ]Na = AzOSNaO
Azotate d'ammoniaque. . Az^ + O" 4- H* == AzO>, AzH',HO »
Azotate de plomb Az + O" -(- Pb =: AzOSPbO
Azotate d'argent Az + 0* -)- Ag = AzOS AgO "
4° Formation des azotites.
» L'acide azoteux AzO% HO formé en solution étendue par
Az + 0' + H dégage . . . 345oo"' ;
AzO-f-O'-l-H .. ... 43000;
AzO' + O'+H » ... 27600;
par Az 4- O^ -+ HO . .
.. AzO + 0=4- HO.
.. Az0=4-04-H0..
1 29600 calories.
122000 •>
ii4ooo »
66600 »
46000 »
o"'
■ 8600 ;
■ 6600.
de 47000, pour 6 grammes de carbone ; ce qui fait un excès de go6 calories par gramme.
J'admettrai ce chiffre pour le carbone du charbon de la poudre.
n. — Etat initial de la poudre employée.
Poids des composants Clialeur déjà dégagée
en cenliènies. dans leur formation.
AzOSKO 78,9
S 9>8
(C... 7,6 j
Charbon H... 0,4 '
( O... 3,0 )
Chaleur dégagée.
96600 4- J—^ X
34600X0,4 — 906 X 7, 6:= 6900
102600
78,9
( Voif la biiite de la note à la |Kige suivante.)
( 68o )
Azotitc de potasse. .. . Az + O' + K = AzO%KO solide env. 102000"';
Azotite d'ammoniaque. Az'-t- O' -t-H' = AzO% AzH', HO solide env. 87000;
» » Az'-+- 0'+ H' ^ AzO',AzH% HO dissous ou fondu .. . 80000(1).
IH. — État final.
SO\KO 42,2 80600
CO%KO 12,6 25ooo
S^OSKO 3,2 4400
KS 2,1 2200
C'AzKS' 0,3 So»
3C0%2(AzH',H0). 2,8 7400
3 n
AzOSKO 3,7 4400 + -^j
■* lOI
Charbon 0,7 4oo
S o, ! G
co^ 20,1 4^900
CO 0,9 800
Az 9,9 o
HS 0,18 20
H 0,02 o
O 0,14 o
qS.q 168430 H —x
• ■ lOI
o»o4
Perte i , 1 1 qoo H -v
lOI
l'7o320 H —X.
101
/? /?
Différence entre l'état initial et l'état final : 67 820 — - — - — x.
' ICI
L'expérience a donné 6i qSo. Donc x =; 7 65o, ou plus simplement 7 000.
Ce chiffre ne doit être regardé que comme provisoire, à cause de la complication des
réactions qui ont servi à le calculer.
(1) Voici quelques nombres relatifs aux décompositions de l'azotite d'ammoniaque et do
l'azotate d'ammoniaque.
PrciHiration de l'azote par l'azotite d'aiiimoriinqur.
AzO',AzH', HO dissous = Az'-1-2H'0= dégage 58ooo calories;
AzO',AzH\ HO fondu = Az'-t-2H'0' (gaz) 38ooo
Préparatian du protoxyde d'iizotc par l 'azotate d'ammoniaque.
AzOSAzH',HO (fondu) = Az'O' + aH'O' (gaz) absorbe 7500 calories.
J'ai expliqué cette réaction anormale en adiucltant une décomposition préalable du sel en
( 68. )
» Ces chiffres exigent de nouvelles expériences, avant d'être admis
comme définitifs. Cependant, j'ai cru devoir les présenter parce que les
réactions qu'ils expriment jouent un rôle très-important dans les études de
philosophie chimique. Dès à présent, ces chiffres permettent de comparer
les effets thermiques et mécaniques produits par la plupart des matières ex-
plosives. »
(Le travail dont sont extraites ces deux Notes et celle qui a été imprimée
au Compte rendu de la précédente séance sera soumis à l'examen d'ime
Commission composée de MM.Morin, Balard et H. Sainte-Claire Deville.)
M. Delacroix adresse une Note sur un système de ballons dirigeables
différent à plusieurs égards de celui dont il avait fait l'objet d'une Commu-
nication indiquée au Compte rendu delà séance du lo novembre dernier.
(Commission précédemment nommée : MM. Morin, Delaunay,
Dupuy de Lôme.)
M. DcPKis soumet au jugement de l'Académie le projet d'un système de
navigation aérienne dans lequel l'aéronaute emploierait pour s'élever et se
diriger un appareil analogue aux ailes de l'oiseau, tandis qu'un ballon sou-
tiendrait une assez grande partie du poids total de son corps pour que
l'excédant fût au-dessous de ce que lui permettraient de mouvoir ses forces
musculaires.
(Renvoi à la même Commission.)
M. Brachet envoie une nouvelle Lettre sur les appareils aérostatiques
et les services qu'on en peut tirer en temps de guerre.
(Renvoi à la même Commission.)
acide asotique gazeux et ammoniaque, entre lesquels s'exercerait l'action véritable. En
effet :
AzO^HO (gaz)-4-AzH' = Az'O^ + aH^O' dégage SaSoo calories.
Les décompositions explosives de l'azotate d'ammoniaque dégagent les quantités de cha-
leur suivantes :
AzOSAzHSHO(fondu) = Az'-h O'-l-aH^O' (gaz) +10000 calories;
AzOSAzH%HO(fondu) = AzO'+ Az-+-2H20^{gaz).. . +17000
Les inductions que j'avais développées dans les Annales de Chimie et de Physique, 4' série,
t. XVIII, p. 61 et 68 se trouvent ainsi confirmées et précisées.
( 682 )
CORRESPONDANCE.
31. LE Mi.MSTKE DE l'I!V.struction PUBLIQUE aiiHonce à l'Académie qu'il
l'autorise, ainsi qu'elle l'avait demandé, à prélever sur les reliquats <les
fonds Montyon une somme de 5ooo francs destinée à couvrir en partie les
frais d'une mission scientifique confiée à M. Jcmssen.
Cette mission a pour objet de permettre à M. Janssen de continuer, à
l'occasion de l'éclipsé solaire du 22 décembre prochain, en Algérie, en
Espagne ou en Sicile, les observations spectroscopiques qu'il a poursuivies
dans l'Inde en 1869, et pour lesquelles il aura à faire construire de nou-
veaux instruments.
Adhésion de la Socié.lé centrale d' Agriculture de France à la pinlcstation
de l'Institut contre la menace de bombardement.
« La Société, dans sa séance de rentrée du 3 novembre iH'yo, a repris
ses travaux en s'associant par un vote unanime à la déclaration formulée
par l'Institut de France contre la menace du bombardement de Paris
» Elle a chargé son Bureau d'adresser aux Présidents des cinq classes de
llnstitut une adhésion complète à sa protestation. »
(Suivent les signatures du Président, M. Chevreul, du Secrétaire
perpétuel, M. Payen, et de tous les Membres présents.)
M. LE Seckétaire perpétuel signale une pièce imprimée de la Corres-
pondance comme offrant (indépendamment de la valeur qu'elle a par elle-
même) un intérêt d'actualité; cette |)ublication est intitulée : « Premiers
secours à doimer aux blessés sur le champ de Ijataille et dans les ambu-
lances; parle 1)'' 11. liernard, j^récédée d'une Iiilroduclioii par 7. -A'. J)e-
marquajr » .
M. Dumas couHnunique la Lettre siiivanlede M""" D'Arcel-Lecoinlre, cpii
l'a chargé d'ollrir, au nom de sa nure M"'* V™ D'Arcet et au sien, à
l'Académie, des Notes et Mémoires en partie inédits et se rapportant prin-
cipalement aux recherches du savant Académicien, Joseph D'Arcet , sur
la gélatine des os et son emploi alimentaire.
n Je fais porter chez vous les cinq carions qui contiennent les travaux
» de mon père sui' la gélatine.
( 683 )
» Je suis heureuse de les offrir sous vos auspices à l'Académie et je vous
» serai très-reconnaissanle, Monsieur, de vouloir bien rappeler à celte occa-
» siou le nom de mon digne père et sa vie occupée en grande partie et
)> même sacrifiée à faire employer et accepter cet aliment et à venir ainsi
» d'nne manière si efficace au secours des indigents.
» Nous devions toujours offrir ces travaux à l'Académie, c'est un devoir
» filial, et l'initiative prise par vous, Monsieur, en ce moment d'épreuves,
» le rend des plus opportuns.
» Croyez bien, je vous prie. Monsieur, à toute ma considération et à ma
» vive gratitude. »
AÉROSTATION. — Expériences du système Giffard.
M. Dnpuy de Lôme, dans la séance du 3i octobre dernier, mentionnait en
termes des plus honorables les travaux de cet ingénieux aéronaute et ex-
primait le regret de n'en avoir eu connaissance que depuis qu'il avait fait
à l'Académie sa première publication. Les expériences qui ont prouvé
tout ce que l'on pouvait attendre de ce système n'ont pas eu en effet toute
la publicité qu'elles méritaient, et, comme l'inventeur ne peut maintenanten
faire l'objet d'une Communication directe à l'Académie, M. de Fouvielle a
pensé qu'elle accueillerait avec intérêt le récit original qu'a donné M. Gif-
fard lui-même dans le journal la Presse, numéro du 26 septembre iSSa.
Description du premier aérostat à vapeur; pur M. H. Giffard.
« L'appareil aéronautique dont je viens défaire l'expérience a présenté
pour la première fois, dans l'atmosphère, la réunion d'une machine à va-
peur et d'un aérostat d'une forme nouvelle et convenable pour la direction.
Ce dernier est allongé et terminé par deux pointes; il a 12 mètres de dia-
mètre au milieu et 44 mètres de longueur; il contient environ aSoo mètres
cubes de gaz; il est enveloppé de toutes parts, sauf à sa partie supérieure et
aux pointes, d'iui filet dont les extrémités ou pattes d'oie viennent se réunir
à une série de cordes fixées à une traverse horizontale en bois de 20 mètres
de lon^^ueur. Cette traverse porte à son extrémité une espèce de voile trian-
gulaire assujettie par un de ses côtés à la dernière corde partant du filet et
qui lui tient lieu de charnière ou axe de rotation. Cette voile représente le
gouvernail et la quille; il suffit, au moyen de deux cordes, qui viennent se
réunir à la machine, de l'incliner de droite à gauche pour produire une
C. R., 1870, -i» Semestre. (T. LXXI, N» 20.) 9'
( 684 )
déviation correspondante à l'appareil et changer de direction; à défaut de
cette manœuvre, elle revient aussitôt se placer d'elle-même dans l'axe de
l'aérostat, et son effet normal consiste alors à servir de quille on girouette,
c'est-à-dire à maintenir l'ensemble du système dans la direction du vent
relatif.
» A 6 mètres au-dessous de la traverse est suspendue la machine à
vapeur et tous ses accessoires.
» Elle est posée sur une espèce de brancard en bois dont les quatre extré-
mités sont soutenues par les cordes de suspension, et dont le milieu, garni
de planches, est destiné à supporter les personnes et l'approvisionement
d'eau et de charbon.
» La chaudière est verticale et à foyer intérieur, sans tubes; elle est
enveloppée, extérieurement, en partie, d'une enveloppe en tôle qui, tout en
utilisant mieux la chaleur du charbon, permet aux gaz de combustion de
s'écouler à une plus basse température; la cheminée est dirigée de haut en
bas, et le tirage s'y opère au moyen de la vapeur qui vient s'y élancer
avec force à sa sortie du cylindre et qui, en se mélangeant avec la fumée,
abaisse encore considérablement sa température, tout en la projetant
rapidement dans une direction opposée à celle de l'aérostat.
» La combustion du charbon a lieu sur une grille complètement entou-
rée d'un cendrier, de sorte qu'en définitive il est impossible d'apercevoir
extérieurement la moindre trace de feu. Le combustible que j'emploie est
du coke de bonne qualité.
» La vapeur produite se rend aussitôt dans la machine proprement dite;
celle-ci est un cylindre vertical dans lequel se ment un piston, qui, par
l'intermédiaire d'une bielle, fait tourner l'arbre coudé placé au sommet.
» Celui-ci porte à son extrémité une hélice à trois palettes de 3'",4o de
diamètre, destinée à prendre le point d'appui sur l'air et à faire progresser
l'appareil. La vitesse de l'hélice est d'environ i lo tours par minute, et la
force que développe la machine pour la faire tourner est de 3 chevaux, ce
qui représente la puissance de sS à 3o hommes.
» Le poids du moteur proprement dit, indépendamment de l'approvi-
sionnement et de ses accessoires, est de loo kilogrammes pour la chaudière
et de 58 pour la machine. En tout i 5o kilogrammes, soit 5o par force de
cheval ou 5 à 6 par force d'homme; de sorte que s'il s'agissait de produire
le même effet parce dernier moyen, il faudrait, ce qui serait impossible,
enlever 2,5 à 3o hommes, c'est-à-dire un poids moyen de i 8oo kilogranunes,
douze fois plus considérable.
( 685 )
u De chaque côté de la machine sont deux bâches, dont l'une contient
le combustible, et l'autre l'eau destinée à être refoulée dans la chaudière
au moyen d'une pompe mue par la tige du piston. Cet approvisionnement
l'eprésente également la quantité de lest dont il est indispensable de se
munir, même en assez grande ([uantité, poiu' parer aux fuites du gaz par
les pores du tissu ; de sorte qu'ici la dépense de la machine, loin d'être nui-
sible, a pour effet très-avantageux de délester progressivement l'aérostat
sans avoir recours aux projections de sable ou à tout autre moyen em-
ployé habituellement dans les ascensions ordinaires. Enfin, l'appareil mo-
teur est monté tout entier sur quelques roues mobiles en tout sens, ce qui
permet de le transporter facilement à terre; cette disposition pouvant, en
outre, être utile dans le cas où la machine viendrait toucher le sol avec une
certaine vitesse horizontale.
» Si l'aérostat était rempli de gaz hydrogène pur, il pourrait enlever en
totalité 2800 kilogrammes, ce qui lui permettrait d'emporter une machine
beaucoup plus forte et un certain nombre de personnes. Mais, vu les diffi-
cultés de toute espèce de s'en procurer actuellement un pareil volume, il est
nécessaire d'avoir recours au gaz d'éclairage dont la densité est, comme on
le sait, supérieure à celle de l'hydrogène; de sorte que la force ascension-
nelle totale se trouve diminuée de i 000 kilogrammes et réduite à i 800 en-
viron distribués comme suit :
Aéorostat avec la soupape 32o''i'
Filet i5o
Traverse, corde de suspension, gouvernail, corde d'amarrage. . 3oo
Machine et chaudière vide ïoo
Eau et charbon contenus dans la chaudière au moment du départ 60
Châssis de la machine, brancard, planches, roues mobiles, bâches à eau et chai'bon . ^20
Corde traînante pour arrêter l'appareil en cas d'accident 80
Poids de la personne conduisant l'appareil 70
Force ascensionnelle nécessaire au départ ... 10
» Il reste donc à disposer d'im poids de 248 kilogrammes, qu'il est plus
prudent d'affecter uniquement à l'approvisionnement d'eau et de charbon,
et par conséquent de lest. Tout ceci posé, le problème à résoudre pouvait
être envisagé sous deux points de vue principaux : la suspension conve-
nable d'une machine à vapeur et de son foyer sous un aérostat de forme '
nouvelle, plein de gaz inflammable, et la direction proprement dite de tout
le système dans l'air.
91..
( 686 )
» Sous le premier rapport, il y avait déjà des difficultés à vaincre. En
effet, jusqu'ici les appareils aérostatiques enlevés dans l'atmosphère s'é-
taient bornés invariablement à des globes sphériques ou ballons tenant
suspendu par un filet un poids quelconque, soit une nacelle ou une espèce
de panier pouvant contenir une ou plusieurs personnes, soit tout autre
objet plus ou moins lourd. Toutes les expériences tentées en dehors de
cette unique et primitive disposition avaient eu lieu à terre, ce qui est
infiniment plus commode et moins dangereux ; le plus souvent elles étaient
restées à l'état de projet ou de promesse.
» En l'absence de tout fait antérieur suffisamment concluant et malgré
les indications de la théorie, je devais encore concevoir certaines craintes
sur la stabilité de l'appareil; l'expérience est venue pleinement rassurer à
cet égard, et prouver que l'emploi d'un aérostat allongé, le seul que l'on
puisse espérer diriger convenablement, était, sous tous les autres rapports,
aussi avantageux que possible, et que le danger résultant de la réunion du
feu et d'un gaz inflammable pouvait être complètement illusoire.
M Pour le second point, celui de la direction, les résultats obtenus ont
été ceux-ci : dans un air parfaitement calme, la vitesse de transport en
tout sens est de 2 à 3 mètres par seconde; cette vitesse est évidemment
augmentée ou diminuée par rapport aux objets fixes de foute la vitesse du
vent, s'il y en a, et suivant qu'on marche avec ou contre, absolument
comme pour un bateau montant ou descendant un courant quelconque.
Dans tous les cas, l'appareil a la faculté de dévier plus ou moins tle la
ligne du vent, et de former avec celle-ci un angle qui dépend de la vitesse
de ce dernier.
r. Ces résultats sont d'ailleurs conformes à ceux que la théorie indique,
et que j'avais à peu près prévus d'avance à l'aide du calcul et des faits
acquis dans la navigation maritime.
» Telles sont les conditions dans lesquelles se trouve ce premier appa-
reil ; elles sont certainement loin d'être aussi favorables que possible. Mais,
si l'on réfléchit aux difficultés de toute nature qui doivent entourer ces
premières expériences avec des moyens d'exécution excessivement res-
treints et à l'aide de matériaux imparfaits, on sera convaincu que les
résultats obtenus, quelque incomplets qu'ils soient encore, doivent con-
duire, dans un avenir prochain, à quelque chose de positif et de pra-
tique.
» Pour cela, que faut-il? Un appareil plus considérable permettant l'em-
ploi d'un moteur relativement beaucoup plus puissant et ayant à sa dis-
( 687 )
position toutes les ressources pratiques accessoires sans lesquelles il est
impossible de fonctionner convenablement.
» Je me propose d'ailleurs d'aller au devant de toutes les objections en
faisant connaître incessamment les principes généraux théoriques et pra-
tiques sur lesquels je crois que la navigation aérienne par la vapeur doit
être basée.
1) I^es diverses explications que je viens de donner me dispensent d'en-
trer dans de longs détails sur le voyage aérien que j'ai fait. Je suis parti
seul de l'Hippodrome, le il\ à ô'^iS". Le vent soufflait avec une assez
grande violence. Je n'ai pas songé un seul instant à lutter directement
contre le vent; la force de la machine ne me l'eîit pas permis, cela étant
prévu d'avance et démontré par le calcul; mais j'ai opéré avec le plus
grand succès diverses manœuvres de mouvement circulaire et de déviation
latérale.
» L'action du gouvernail se faisait parfaitement sentir, et à peine avais-
je tiré légèrement une de ses deux cordes de manœuvre, que je voyais im-
médiatement l'horizon tournoyer autour de moi. Je suis monté à une hau-
teur de 1800 mètres, et j'ai pu m'y maintenir horizontalement à l'aide d'un
nouvel appareil que j'ai imaginé et qui indique immédiatement le moindre
mouvement vertical de l'aérostat. Cependant la nuit approchait, je ne pou-
vais rester plus longtemps dans l'atmosphère; craignant que l'appareil
n'arrivât à terre avec une certaine vitesse, je commençai à étouffer le feu
avec du sable, j'ouvris tous les robinets de la chaudière, la vapeur s'écoula
de toutes parts avec lui fracas horrible. J'eus un moment la crainte qu'il
ne se produisît quelque phénomène électrique, et pendant quelques ins-
tants je fus enveloppé d'un nuage de vapeur qiii ne me permit plus de rien
distinguer.
» J'étais en ce moment à la plus grande élévation que j'aie atteinte. Le
baromètre marquait 1800 mètres. Je m'occupai immédiatement de regagner
la terre, ce que j'effectuai très-heureusement dans la commune d'Elan-
court, près Trappe, dont les habitants m'accueillirent avec le plus grand
empressement et m'aidèrent à dégonfler l'aérostat.
» A 10 heures, j'étais de retour à Paris. L'appareil a éprouvé dans la
descente quelques avaries insignifiantes. »
( 688 )
CHIMIE APPLIQUÉE. — Sur la nitroglycérine et les diverses dynamites. Note
de MM. Ch. Girard, A. Millot et G. Vogt, présentée par M. Wurtz.
« Diiiis ces derniers temps, on s'est vivement préoccupé de la fabrication
de la nitroglycérine et de ses effets dynamiques. Les circonstances actuelles
et les conseils de M. Bertheiot, nous ont amenés à entreprendre l'étude de
cette question.
» Nous avons suivi d'abord les procédés de fabrication indiqués par
MM. E. Ropp et Nobel.
» On traite la glycérine marquant 3o degrés B. [)ar six fois son poids
d'un mélange formé d'une partie d'acide nitrique à 48 ou 5o degrés et de
deux parties d'acide snifuriqiie à 66 degrés.
» Les acides étant placés dans un vase refroidi jiar de l'eau à lo degrés C,
on y laisse tomber goutte à goutte la glycérine en réglant l'écoulement
de telle façon que la lempératine ne dépasse pas 25 degrés C. De pinson
doit agiter constamment le liquide pour qu'une forte proportion de glycé-
rine ne se trouve pas brusquement en présence de l'acide nitrique.
» Toutes ces précautions sont indispensables pour prévenir les explosions.
Il est également nécessaired'employer des acides au titre indiqué ci-dessus.
La totalité de la glycérine étant ajoutée dans les acides, on verse le mélange
dans six fois son poids d'ean, la nitroglycérine se sépare alors sous forme
d'un liquide sirupeux et légèrement opalin. On la lave à deux reprises dif-
férentes avec de l'eau, puis avec une solution alcaline, et on termine l'opé-
ration par un dernier lavage à l'eau. Par ce procédé, loo grammes de
glycérine nous ont donné i3o grammes de nitroglycérine.
)) Le rendement peut être augmenté en employant une proportion plus
grande d'acide nitrique comme M. Bertheiot nous l'a conseillé.
» En faisant agir 3 parties d'acide nitrique et 3 parties d'acide sulfuricpie
sur une partie de glycérine, on obtient 1,75 de nitroglycérine, ce qui re-
présente les j du rendement théorique. La densité de la nitroglycérine
ainsi préparée est de 1,60 à i3 degrés C .
» On doit la dessécher à l'aide du carbonate de potassium, le chlorure
de calcium produisant un dégagement de chlore. Soumise à une température
de — 20 degrés pendant plusieurs heures, la nitroglycérine ne cristallise
pas, elle ne doit, à cause de sa viscosité, se solidifier que par un froid très-
prolongé.
» Fabrication iiidnstriclU;. — Pour éviter les dangers que présente la fa-
brication en grand de la nitroglycérine, nous avons dû recourir au procéda
(689 )
suivant qui résume à quelques moditications près ceux qui ont été employés
depuis quelques années en Allemagne et en Suède.
» Les ateliers de production sont subdivisés autant que possible, et sont
séparés les uns des autres par une distance de 5o mètres environ.
» Ils sont en plein air et abrités par un toit léger recouvert en papier
bitumé. On leur donne la forme circulaire; le sol est formé de plancbes
légèrement circulaires du centre à la circonférence ; un courant d'eau coule
constamment afin d'entraîner au dehors la nitroglycérine qui pourrait se
répandre sur le sol et s'y accumuler.
» Autour de la poutre qui supporte le toit, sont rangés circulairement
six baquets dans lesquels sont placés des cylindres de verre, de grès ou de
fonte. Ce métal, n'étant pas attaqué par le mélange d'acides sulfurique et
nitrique très-concentrés, convient parfaitement pour cet usage.
» A la partie supérieure des cylindres se trouve vuie rainure remplie
d'eau qui permet de faire un joint hydraulique entre l'appareil et son cou-
vercle.
» Ce dernier est fixe et percé de plusieurs tubulures qui permettent
d'introduire dans le cylindre :
» 1° Un tube amenant au fond de l'appareil un courant d'air destiné à
agiter le liquide en lui donnant un mouvement de rotation;
» 2° Un tube en S miuii d'un robinet et par lequel on laisse couler
goutte à goutte la glycérine qui est contenue dans un réservoir supérieur;
» 'i" Un gros tuyau servant de cheminée et permettant l'alimentation des
vapeurs acides et nitroglycériques qui causent aux opérateurs de violentes
céphalalgies ;
» 4° Un thermomètre à alcool.
» Un levier prenant son point d'appui sur le bord du baquet, se fixe au
cylindre et permet, après avoir relevé le thermomètre et le tube qui amène
l'air, d'abaisser l'appareil au-dessous de son couvercle, et de verser son
contenu dans l'eau qui a servi à le refroidir.
» La cuve elle-même est percée de plusieurs trous fermés par des bou-
chons et destinés aux décantations.
» Les lavages se font au moyen d'un courant d'eau amené au fond de la
cuve par un tube terminé par une pomme d'arrosoir. Chaque opération ne
doit porter que sur 5oo grammes de glycérine, et un seul homme peut
facilement surveiller ses appareils.
» Dynamite. — On donne ce nom au mélange de nitroglycérine et de
diverses matières solides, pulvérulentes et poreuses.
( 690 )
» Incorporée avec ces matières inertes, la nitroglycérine offre beaucoup
moins de danger dans son emploi et surtout dans son transport.
» On se sert en Allemagne d'une espèce de silice poreuse appelée Kie-
selgnltr. Cette silice s'extrait d'Oberlohe en Hanovre, elle provient d'trne
variété d'algues. Le mélange se fait à 76 de nitroglycérine pour aS de
silice.
» On triture la matière sèche arrosée de nitroglycérine sur des tables en
bois à l'aide de spatules de même nature.
» N'ayant pas cette substance à notre disposition, nous avons dû son-
ger à la remplacer par d'autres substances jouissant de propriétés analo-
gues, telles que silice ordinaire, alumine, brique pulvérisée, etc.
» Pour nous rendre compte delà résistance à l'explosion de ces différen-
tes dynamites nous les avons soumises au choc.
» Nous nous sommes servis pour nos essais d'un petit marteau pilon guidé
par des fils de fer et tombant sur une enclume en acier. La dynamite à
expérimenter était placée dans un petit sac formé d'une feuille de papier
repliée sur elle-même, destinée à éviter les projections. La surface de choc
était de 2 centimètres carrés; le poids et les hauteurs de chute sont indiqués
dans le tableau (p, 691) qui contient nos expériences.
» Tous ces mélanges, les hauteurs étant les mêmes, mais le poids réduit
à 2''",470, éclatent, excepté bien entendu ceux faits avec le sucre, l'huile et
l'alcool méthylique.
» Toutefois la chute du poids étant de i mètre, les mélanges de silice,
glaise et surtout alumine exigent deux coups pour éclater.
» Nous avons essayé d'autres matières explosibles pour pouvoir établir
une comparaison sur la sécurité que présente l'emploi de ces différentes
matières.
M Nous avons ainsi vu que le coton-poudre et le fiilmi-p:ipier des pho-
tographes comprimés ne résistent pas quand le poids tombe de o^'jSo; la
poudre blanche éclate sous la chute de i mètre, la poudre au sulfure d'an-
timoine sous o™,5o. La poudre de chasse n'éclate dans auciui cas.
)) Il résidte de l'ensemble de nos expériences : i" Que les matières à
employer pour obtenir de bonnes dynamites, sont le tripoli, le kaolin, la
silice, l'alumine et surtout le sucre : ce dernier permet en outre de séparer,
si on le désire, la nitroglycérine en ajoutant de l'eau au mélange;
» 2" Que dans une dynamite la pro|)ortion d'une même matière inerte,
silice par exemple, variant par rapport à celle de la nitroglycérine, la sta-
bilité semble rester la même;
( 691 )
cuMPOsnio-v.
sots i:n poids de 4ke,700?'' toiidant de
l^XJ.
l"i,00.
O-^.ÔO.
Silice pure. ^gr.ooo j.^J^^^ diflicilcmcnl.i ^<='''*? plus diffici- | ^^,,^,g g,,^^^.
OBSEIWATKINS.
Éclate bien.
Éclate fortement.
Éclate bien.
Éclate bien.
Éclate assez diHi-
ciiement.
Éclate bien.
Éclate bien.
Éclate bien.
Éclate bien.
Éclate bien.
lement.
\ Éclate encore faci-
Nitroglycéi'ine lerjOeo
Silice 3er,ooo)
Nitroglycérine 3ei",oooS
Silice osr.^ooj
Nitroglycérine 3er,620)
Silice (provenant des \
résidus de la fabric. f
du sulfate d'alum.). 2ef,700i
Nitroglycérine isr,oooi
Alumine ler^^oo)
j Nitroglycérine 2S'',20oi
jAlumine Ser^oocl
! Nitroglycérine iSrjOOO)
Kaolin lavé et por- 1
phyrisé os^^^ool
Nitroglycérine 3er/|Oo)
Tripoli lavé îr.iioj
jNitroglycérine 2S'',685)
I Glaise porphyriséc.. . 2?'', 200
Nitroglycérine 2e'',o5o
Gypse porphyrisé. .. . SfjSoo
Nitroglycérine 3Er,G8o
Brique porphyrisée. . Ser^oco
Nitroglycérine ^^^i.ïo
^th=»'- ••■, "^^r-^"» (Éclate difficilement
Nitroglycérine ier,ooo)
Éthal i8r,cool Éclate trés-diffici-
Nitroglycérine isr^coo^ lement.
Sucre pulvérisé osr,5ooiÉclate en cartouche jj-^l^l^ difliciloment
Nitroglycérine i sr.ooo (serrée, n ecl. pas seuil
lement.
Éclate^bien.
Éclate bien, mais
\ par partie.
I
\ Éclate assez diffi-
j cilement.
Exige plusieurs
coups pour éclater.
Éclate.
Éclate.
Éclate bien.
Éclate par portions.
Éclate.
Eclate.
Éclate.
( Ces proportions dotinonl une
I poudre absolument sédie
I La dyunmile ainsi faite est
j pulvérulente, mais mouille
' le papier.
( Ce mclanfre est assez humide
] et mouille beaui-oop le pa
( picr.
'Éclate dilTicilement.
I
( Éclate très-diflici-
( lement.
Peu explosible.
Ftirroe une masse pâteuse qui
mouille peu le papier.
.Masse semi-pulvcrentc. senii-
pûteusc iiui mouille peu le
papier.
Poudre sèche ne mouillant
pas le papier.
Éclate diflicilement.
Éclate difficilement
Éclate.
( Éclate encore par
\ portions.
Éclate difficilement
Sucre pulvérisé 'f ."«"(Éclate difficilement.
Nitroglycérine ifr^oco)
Sucre pulvérisé 3cr,ooo Éclate très-mal.
Nitroglycérine 55r,3oo)
Sucre en morceaux.. ■e^ooojE<.,3,e3,,gedin,^„]t^
Nitroglycérine 2Sr,oooj
Sucre en morceaui. . Sgr.ooo ^-..^j^^^
Nitroglycérine 2Sr,oooj
Glycérine il>'r,oooj Ne part que diffi- )
Nitroglycérine 3e'',ooo) cilement.
Alcool méthylique. . 3er,oooj «■Relate pas.
iNitroglycerine ier,oooi ^
Huile 3Br,ooo) N'éclate que très
Nitroglycérine 3?'',ooo| difficilement.
; Nitrate de ba- \
Poudrel ryte oer,7û|
Nobel. jRésine of, io(
viSitroglycérine o?'',2o)
i Nitrate de ba- j
ryte oer,68f
Brai opr,!-)/
Nitroglycérine oS'',2o)
Nitroglycérine seule I
Éclate bien.
Éclate bien.
Éclate.
Éclate très-diffici-
lement.
N'éclate pas.
N'éclate pas.
Éclate mal.
Il
N'éclate pas.
Éclate.
Éclate.
N'éclate
pas. 1
N'éclate
pas. ]
N'éclate
pas.
N'éclate
pas.
N'éclate
pas.
N'éclate pas.
N'ëclate pas.
I
( Misse pâieuse dont on peut
: faire des boulettes, mouille
'( un peu lo papier.
1
Masse analogue à la précé-
dente.
Masse pûlcuse Irês-humido
qui mouille beaucoup le pa
pier.
Co mélanire donne une pâle
très-humide qui mouille for
temenl le papier.
Masse pûteuse analiiçue à
l'ar^'ile. mouille le papier
par compression.
Mélange pûieux irès-humiUe
Poudre presque set'tio qui
mouille Ires-peu le papier
Ce mélange est presque li-
quide-
Liquide très-visiioeux avec [
cristaux de sucre.
Poudre presque s<>che mouil-
lant le papier.
, Toute la nilroçlyccrine n'est j
pas absorbée par le sucre.
Toute la niiroplycérine es*
absorbée par le sucre.
Ces deux liquides ne se mélan-
gent pas bien. Il y a séparât. I
\ au bout d'un certain temps. ~
Ce mélange, à partir de -l'A
pour luii d'alcool, ne part
plus. !
Ces liquides donnent unoj
émulsion. Par le temps, les
liquides se séparent.
\ Exige pour éclater
plusieurs chocs.
Éclate.
Éclate comprimée.
\ Éclate même sous
Kine chute de o"',25.
Poudre humide qui mouille
le papier.
Poudre Comme la précédente.
Liquide.
C. R., 1S70, a*- Semestre. (T. L\Xl, N« 20.)
9^
( 692 )
» 3° Que les dynamites laissées longuement à l'air libre paraissent s'ap-
pauvrir en nitroglycérine et devenir par cela inactives.
B En terminant, nous devons remercier M. Wurtz d'avoir bien voulu
mettre son laboratoire à notre disposition. »
MÉDECINE. — Mn^^en facile et presque sûr d'atréter la diarrhée et la djssenlerie
spéciales aux soldats qui sont saisis par l'humidité et par le froid. Extrait
d'une Note de M. Déclat.
« Ce moyen, déjà sanctionné par l'expérience, permet aux hommes de
rester à leurs corps, évite leur entrée à l'hôpital, où ils sont tout particu-
lièrement prédisposés à contracter les maladies régnantes. Il consiste à faire
boire aux malades, deux jours de suite, en dehors des repas, un demi-verre
d'eau dans lequel on met, selon la gravité : pour la diarrhée, de huit à douze
gouttes d'acide phénique cristallisé (rendu liquide par l'addition d'un
dixième d'alcool ), de dix à quinze gouttes de teinture ihébaïque et de quinze
à vingt gouttes d'alcoolature d'aconit; pour la d/ssenterie, la même dose
d'acide phénique, de quinze à vingt gouttes de teinture thébaïquo, sans y
ajouter d'aconit qui, dans ce cas, semblerait plutôt avoir une action défa-
vorable.
» J'ai expérimenté cette médication au Moulin-Saquet et à l'ambulance
Croix-Nivert ; elle a également réussi à Villejnif. »
AÉROSTATION. — Note sur la nécessité défaire des expériences sur la résistance
des tissus, en vue de l' aérostation ; par M. H. Mo.\Ti:r«:i.
« Le siège de Paris vient de donner à l'aérostation une importance qu'on
lui avait refusée jusqu'ici, et il dès lors indispensable de combler certaines
lacunes qui se rencontrent dans l'ensemble des connaissances relatives à
cet art encore dans l'enfance.
» Je demande la permission de signaler à l'Académie une de ces lacunes,
la plus sérieuse peut-être au point de vue pratique. En architecture, dans
l'art nautique, dans le génie, nous possédons de nombreuses ex[)ériences
sur la résistance des matériaux employés dans les diverses constructions;
dans l'aérostation, nous ignorons complètement les données les plus essen-
tielles sur la résistance des tissus qu'on emploie dans la fabrication des
ballons.
» Il s'agit pourtant ici d'une question vitale. En 1868, le Neptune a
crevé; il y a quelques semaines, le ballon qui emportait M. Gambotta s'est
( 693)
dégonflé, et nul doute que celui qui vient de tomber entre les mains de.
l'ennemi n'ait été dans le même cas.
» La solidité du ballon et sa résistance à l'endosmose sont du reste des
conditions qui influent non-seulement sur sa sécinité, mais aussi sur la
durée du voyage aérien.
» Il importe donc de savoir : i" dans quelles conditions un ballon peut
éclater; 2° quels sont les tissus ou moyens de fabrication offrant le maximum
de résistance à la rupture; et 3° dans quelles conditions et sous quelle
pression un ballon se dégonfle.
» Comme je n'ai pas le moyen de me livrer à de pareilles recherches,
j'ai l'honneur de soumettre à l'Académie l'idée suivante, uniquement pour
attirer son attention sur cette question, qui me paraît urgente.
M Soient deux ballons captifs A et B, amarrés à deux tambours de dia-
mètre égal, assujettis à un même arl)re horizontal, de manière à rendre
simultané le déroulement des deux amarres.
» Le ballon A est dans les conditions ordinaires; il porte un observa-
teur chargé de marquer les indications d'un manomètre composé d'un
tube épais en cri.sta! et d'un tuyau flexible en caoutchouc muni d'iui robi-
net à chacune de ses extrémités. Le tube en cristal est attaché au filet de A.
» Le ballon B, fait de l'étoffe dont on veut déterminer la résistance, est
sans soupape et sans issue pour le gaz, sauf à sa partie inférieure, à laquelle
on visse l'extrémité libre du tuyau flexible, dont on a fermé le robinet
après introduction d'un liquide de couleur foncée.
» Les deux ballons étant à fleur de terre et à niveau, on ouvre les deux
robinets et l'on marque le point où arrive le liquide dans le tube de cristal,
puis on ferme les deux robinets.
» Les deux ballons montent maintenant simultanément à une hauteur
donnée, soit 1000 mètres; l'un et l'autre sont donc au même niveau et à
une distance de 5 mètres environ l'un de l'autre, afin que l'explosion de B,
!<i elle a lieu, ne nuise pas au ballon A.
» On rouvre maintenant les deux robinets, et l'observateur marque soi-
gneusement la hauteur du liquide dans le tube, indiquant la pression pro-
duite par la dilatation du gaz de R et par la température.
» Si B crève, on a le maximnm de résistance de l'étoffe dans les condi-
tions données.
» S'il ne crève pas, on marque le temps qu'il lui faut pour se dégonfler
spontanément, et l'on obtient alors la durée possible du voyage avec une
étoffe solide et bien apprêtée.
( 694 )
» L'Académie coinpienfl que je ne m'arrête pas a certains petits détails
qui se présentent d'eux-mêmes; il me suffit d'avoir indiqué un moyen
pratique pour l'essai d'une étoffe, comme on vérifie la solidité d'un pont,
d'un cordage ou d'un canon. »
M. BcissoN annonce qu'on pourra voir chez lui fonctionner un petit mo-
dèle qui démontrera, pense-t-il, la possibilité de faire mouvoir dans une
direction donnée nn ballon par un moyen complètement différent de ceux
qu'on a jusqu'ici imaginés.
M. Gaillaud adresse la description et la figure d'un appareil qu'il croit
propre à rendre sur une rivière suffisamment profonde les services qu'on
a cherché à obtenir en mer du bateau sous-marin.
M. AxDRÉ (Jean) prie l'Académie de vouloir bien lui désigner une Com-
mission à laquelle il soumettra un plan qu'il croit propre à contribuer
puissamment à la défense nationale.
L'Académie ne peut, d'après des usages constants, accéder an désir ex-
primé par M. J. André. Elle considère comme non avenue toute Commu-
nication dont on ne lui a pas fait pleinement connaître l'objet, et c'est seu-
lement quand elle en a été suffisamment informée qu'elle renvoie à l'examen
de Commissaires pris dans son sein la recherche ou l'invention pour laquelle
l'auteur lui demande son approbation,
La séance est levée à 5 heures. É. D. B.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI 21 NOVEMBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOU\TLLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
MÉTÉOROLOGIE. — De la période tridodéciiple ou décemdiurne dans les
phénomènes atmosphériques et dans leur influence sur Cétat sanitaire et
physiologique (deuxième Note) ; par M. Ch. Sainte-Claire Deville.
« Les phénomènes de Li vie, surtout ceux de la vie animale, si intime-
ment liés avec les manifestations de l'instinct; et de l'intelligence, ont des
lois qui leur sont propres et auxquelles restent parfaitement étrangères les
actions qui se passent dans les corps dépourvus d'organes. Mais la réci-
proque n'est pas vraie, les êtres organisés subissant constamment l'in-
fluence des milieux dans lesquels ils sont placés. Il en résulte que, si l'on
parvient à découvrir des retours périodiques dans les propriétés de l'un de
ces milieux, de l'air atmosphérique, par exemple, il est nécessaire que ces
variations se traduisent par certaines modifications, périodiques aussi, dans
les êtres vivants, végétaux et animaux, qui l'habitent.
» Je ne pourrai présenter avec quelque détail les faits, déjà nombreux,
que j'ai recueillis dans cet ordre de considérations que lorsque j'aurai dis-
cuté les données relatives aux éléments physiques. Or, cette discussion,
entraînant de très-longs et très-arides calculs numériques, exigera sans
C.R., 1S70, 2" Semestre. iT. LXXI, «"21.) 93
( 696 )
doute encore un temps considérable. Et comme, d'un autre côté, des rap-
ports de cet ordre intéressent les physiologistes et pourraient les engager à
poursuivre des recherches dans une voie analogue, je demande à l'Aca-
démie la permission de détacher de mes études sur ce sujet et de lui sou-
mettre quelques résultats, relatifs uniquement à l'espèce humaine. Mais il
me paraît préalablement utile de rappeler d'une manière sommaire les bases
sur lesquelles reposent les retours périodiques que je crois avoir décou-
verts dans l'ensemble des phénomènes atmosphériques.
» Dans une série de Notes sur tes variations périodiques de la letnpératiire,
publiées aux Comptes rendus de nos séances, je recherche avec soin tous les
indices de périodicité que présentent les températures terrestres, soit dans
l'année, soit dans un cycle d'années pouvant ramener régulièrement les
mêmes influences. Parmi les résultats de ce travail, je crois avoir établi
qu'il y a une certaine solidarité entre les températures moyennes de quatre
jours placés sur l'écliptique à 90 degrés l'un de l'autre. Je divise, de cette
manière l'année en quatre-vingt-dix jours quadruples (i), dont je calcule
séparément la température moyenne, et que je puis aussi étudier aux divers
points de vue de la météorologie, tous les phénomènes de l'atmosphère étant
nécessairement liés aux températures de l'air. Déjà, dans quelques-unes de
(i) J'extrais de ma Huitième N'oie {Comptes rendus, tome LXIV, p. 934), les détails sui-
vants sur la manière dont j'ai divisé l'année en go jours quadruples :
« J'ai dû répartir aussi également que possible les 365 jours de l'année tropique sur les
360 jours d'une année hypothétique, telle que la somme des longitudes héliocentriques de
quatre jours opposés fût toujours égale à 36o degrés, et (pie la différence moyenne entre ces
quatre longitudes fût un minimum. 11 est clair, en effet, que, si la différence moyenne de
longitude entre deux jours consécutifs de l'année tropique est moindre qu'un degré, cette
différence, en certaines saisons, dépasse i degré.
» On résout cette petite difficulté par le tâtonnement et avec une exactitude très-suffisante
au moyen de la Table des Longitudes héliocentriques donnée, pour chaque jour de l'année,
par la Connaissance des Temps.
>. J'ai été ainsi amené sept fois{les lo-i i et 29-30 avril, les 29-30 juin, les i2-i3, 22-23
et 3o-3i juillet, enfin les 7-8 octobre) à condenser en un seul Jour angulaire deux jours
tropiques, et, d'un autre côté, à calculer deux jours hypothétiques (un 3i novembre et
un 29 février, pour les années non bissextiles), en prenant la moyenne des deux jours
voisins.
» Ces bases établies, et l'année tropique étant ainsi ramenée l'i une année angulaire, comp-
tanl 36o jours sensiblement distants d'un degré en longitude, j'ai procédé au rapprochement,
quatre à (juatre, de ces jours placés sur l'écliptique à des distances angulaires de 90 degrés.
Il en résulte, comme on voit, 90 jours quadruples, et, comme il fallait leur assigner à
( 697 )
mes Notes, j'ai indiqué accessoirement plusieurs de ces concordances; en
particulier, pour la pression barométrique, pour les variations dans les pro-
priétés de la chaleur et de la lumière diffuses, et pour les colorations du
papier ozonomélrique de Schœnbein. J'ai même quelque peu effleuré le sujet
dont je désire entretenir aujourd'hui l'Académie, en montrant [Comptes
rendus, i. LXIII, p. 243), que, dans le mois de novembre i865, pendant
la dernière invasion du choléra, le nombre diurne des décès à Paris avait
été remarquablement en rapport avec les variations dans la température
moyenne.
» Enfin, dans un Mémoire inséré au tome XVI, p. 60, de V Annuaire de
In Société météorologique de France, j'ai discuté un très-curieux document,
qui date de l'année 1781, sur lequel j'aurai l'occasion de revenir dans le
présent travail, et j'y ai signalé l'influence de la symétrie quadruple dans
la température, dans la pression barométrique et dans l'état physiologique
de l'observateur.
» En définitive, les nombreux travaux dans lesquels j'ai fait ressortir
l'influence de la symétrie quadruple sur la répartition des températures
montre qu'il serait toutà fait inexact d'admettre, comme M. Serpieri pen-
sait l'avoir démontré, que la courbe des. températures moyennes des diffé-
chacun un rang numérique, j'ai naturellement pris pour origine et pour premier jour qua-
druple celui qui réunit les ileux solstices et les deux équinoxes, et qui se compose des 22 dé-
cembre, 21 mars, ai juin et 33 septembre. »
La définition des Jours dndécuples est donnée ainsi (même volume, p. 940) :
« Au lieu de diviser les 36o jours de Vannée angulaire que nous venons de considérer
en quatre quadrants de go degrés, partageons-les en douze séries égales de 3o jours chacune,
qui seront les mois de cette année angulaire; combinons ensemble, douze à douze, les dates
égales de chacun des mois, et cherchons si les Zo jours dodècuplc.s que nous obtiendrons de
cette manière ne présenteraient pas aussi quelque chose de régulier dans les allures de la
température moyenne. »
Enfin, j'ai fait remarquer [Comptes rendus, t. LXVIII, p. 1077, ^" note) que, au point
de vue du polygone régulier inscrit, ces deux périodes et la période tridodécuple (qui se
compose de trente-six séries consécutives de dix jours chacune, et dont je ])arlerai plus
loin) constituent trois symétries distinctes :
La symétrie quadrangulairc ou orthogonale : carré inscrit; angle au centre, go degrés;
La symétrie dodécagonalc : dodécagone régulier inscrit; angle au centre, 3o degrés;
La symétrie hexatrincontagonale : polygone régulier de 36 côtés; angle au centre,
10 degrés.
Les mots quadruple, dodécnple, tridodécuple correspondent donc aussi au nombre des
côtés du polygone inscrit.
93..
( 698 )
renfs jours de l'année jouit de cette propriété que les températures de
quatre jours pris indifféremment sur la courbe, pourvu qu'ils soient à des
intervalles équidistauts, donnent une moyenne constante et sensiblement
égale à celle de l'année entière (1). En d'autres termes, les températures
sont réparties sur tout le cours de l'année de telle manière que la moyenne
de quatre jours équidistauts peut être très-supérieure à la moyenne de
quatre autres jours aussi équidistants entre eux ou quadruples, et cette iné-
galité est soumise à certaines phases qu'on peut déterminer.
» Mais, dans ma Huitième Note, je montre que la proposition est vraie
aussi pour les températures moyennes de douze jours, répartis uniformé-
ment sur le cours de l'année, et distants, par conséquent, entre eux de
trente joins : ce qui établit l'existence d'une nouvelle symétrie, la symétrie
dodécuple.
» Dans cette manière de considérer la répartition des températures,
l'année se trouve, en quelque sorte, ramenée à une seule saison llierriiique
de quatre-vingt-dix jours, dont chacun est la moyenne de quatre jours
séparés entre eux par 90 degrés de longitude héliocentrique.
» De même, dans la symétrie dodécuple, l'année entière est représentée
par un mois thermique de trente jours, dont chacun est la réunion de douze
jours, séparés par trente intervalles égaux sur l'orbite terrestre.
» La considération des jours dodécuples confirme celle des jours qua-
druples, mais n'enlève rien à sa valeur particulière, chacune des deux
séries ayant ses propriétés intrinsèques, dont il faut tenir compte. Seule-
ment, elle introduit dans l'étude une simplification précieuse, puisqu'elle
permet de condenser en trente nombres, au lieu de quatre-vingt-dix, la ca-
ractéristique thermique d'une année.
» Cela est encore plus vrai d'une nouvelle période, trois fois plus
courte, que mes recherches m'ont conduit à distinguer dans le mouvement
annuel de la température; c'est luie période de dix jours, qui, se reprodui-
sant trente-six fois dans Wmnëe angulaire de trois cent soixante jours, con-
situe la symétrie Iridodécuple . Dans ce système, l'année se réduit à une
décade thermique, composée de dix jours, dont chacun est la moyenne de
trente-six jours, distants entre eux, sur l'écliptique, de 10 degrés de longi-
tude héliocentrique.
(i) M. Seipieri s'.ippnyait sur les |)ropriét(''s de quatre ordonnées éqnidistantes de la
sinusoïde ou d'autres courbes analogues. Mais ce qu'il fallait démontrci', c'est que les nom-
bres qui représentent la moyenne température de chacun des jours de l'année constituent
une de ces courbes. Or, mes recherches établissent manifestement le contraire.
(699)
j) Dans une Neuvième Note sur les variations périodiques de la tempéra-
ture, où je discute plus de quatre cent cinquante années d'observation, qui,
avec les quatre cent cinq ans déjà discutés dans ma Huitième Note, forment
un total d'environ neuf cents ans, répartis sur un peu plus de deux siècles,
je donnerai plus tard avec détails les éléments qui me servent à établir cette
nouvelle période. Il me suffira de faire aujourd'hui les deux remarques
siiivantes, qui résultent de mon travail :
» 1° Dans la symétrie tridodécuple, la probabilité serait trois fois plus
grande que dans la symétrie dodécuple, et neuf fois plus grande que dans
la symétrie quadruple pour que les températures moyennes de chacun des
jours de la décade thermique, qui représente l'année, fussent égales entre
elles. Si donc la courbe de ces dix jours présente des maxima et des minima,
on sera plus fondé à admettre que ces inégalités sont dues à des causes
particulières qu'il s'agit de dégager.
M 2° Bien que j'aie dû employer dans mes premières recherches le plus
grand nombre possible d'années d'observations, afin qu'on ne pût pas
m'objecter que les inégalités périodiques que je signalais étaient peut-être
particulières à quelques années choisies, j'avais établi, dès le début de mes
travaux, que les inégalités ne se présentent pas pour les mêmes jours dans
les diverses années : je montrais même (Deuxième Note, Comptes rendus,
t. LX, p. 696) qu'il y avait, dans chaque oscillation particulière, un
maximum d'écart entre les années : ce qui est un fait très-encourageant
pour la recherche du cycle d'années qui ramène, dans chaque cas, les
mêmes influences. La question a donc fait, il me semble, un grand pas,
puisque je puis et dois, dès maintenant, me débarrasser de la considération
en bloc d'un très-grand nombre d'années, que je combinais à l'aveugle,
annulant certaines influences par des influences opposées, et qu'il faut
aujourd'hui prendre à part chaque année et l'étudier dans sa caractéris-
tique thermique.
» Néanmoins, le problème reste encore très-compliqué; car il faudrait,
pour le résoudre complètement, examiner séparément chacune des inéga-
lités dans chacune des années, puisque, chaque inégalité pouvant avoir sa
cause propre, il n'est pas nécessaire que le retour des mêmes phases soit
le même poiu- toutes ces inégalités.
» En attendant qu'on puisse un jour traiter la question dans toute sa
généralité et dans toutes ses complications, l'introduction que je fais des
symétries quadruple, dodécuple et tridodécuple montre qu'il y a un cer-
tain rapport entre toutes ces causes, puisque leurs effets multiples peuvent
( 700 )
ainsi se résumer. Je ne donne donc, par le fait, que des moyens transi-
toires d'investigation, et il est évident que le premier à employer est celui
qui condense la caractéristique d'une année en le moindre nombre de
signes possible : c'est la période tridodécuple. Si l'on parvient à établir de
cette manière un premier rapport approximatif entre les diverses années,
on pourra successivement les comparer aux points de vue des symétries
dodécuple et quadruple, enfin analyser cette dernière période à son tour
et étudier cliacune des inégalités réduite à elle-même, soit dans une année,
soit dans le cycle d'années qui la ramène avec les mêmes caractères.
» Ces réflexions, dont l'Académie excusera, j'espère, la longueur,
étaient, il me semble, nécessaires, pour expliquer comment il se fait que
j'aborde de suite celle des trois symétries qui est la plus compliquée, la
symétrie tridodécuple.
M Mais avant d'eu faire l'application à l'état sanitaire et physiologique
de l'homme, j'ai voulu construire les deux périodes dodécuple et tridodé-
cuple d'après l'année entière d'observations thermométriques, du 21 juin
1869 au 21 juin 1870, que j'ai recueillies à Monlsouris, la seule véritable-
ment qui, pour la station de Paris, réunisse jusqu'ici des conditions irré-
prochables pour la position des instruments. Aussi, je n'en doute pas,
sera-t-on frappé, comme je le suis moi-même, de la netteté des résultats.
» La planche ci-contre donne, pour cette période, les valeurs des trente
ordonnées des jours dodécuples. Leur inégalité est flagrante, puisque la
température du huitième jour (qui réunit les 28 janvier, 27 février, 28 mars,
28 avril, 29 mai, 28 juin, 1" et 3i août, 3o septembre, 3i octobre, 3o no-
vembre et 29 décembre) n'est que de 8°,5, tandis que celle du vingt-sixième
jour (16 janvier, i5 février, 16 mars, 16 avril, 17 mai, 16 juin, 18 juillet,
19 août, 18 septembre, 19 octobre, 18 novembre et 17 décembre) atteint
12°, 5. La somme des températures moyennes des douze derniers jours a
donc dépassé de 48 degrés celle des douze premiers.
» Mais ce qui est plus remarquable, c'est que le premier coup d'oeil jeté
sur la courbe conduit immédiatement à la considération de la symétrie tri-
dodécuple. En effet, il est impossible de ne pas remarquer que celte courbe
se décompose naturellement en trois boucles, dont la première est convexe
vers le bas (à rexception du sixième jour, dont l'anomalie s'expliquera
bientôt), et dont les deux autres présentent, au contraire, vers le haut leur
convexité. La moyenne des dix premiers jours nest que de 9", 5 : celle des
vingt derniers est d'environ 1 1 degrés.
» Si l'on combine trois à trois ces trente jours dodécuples pour en dé-
( 7°! )
duire les dix jours tridodécuples, on obtient la première courbe de la
deuxième planche, et l'on s'explique l'anomalie apparente du maximum
que présentait le sixième
jour dodécuple. C'est qu'en
effet ce sixième jour dodé-
cuple est un des trois élé-
ments du sixième jour tri-
dodécuple qui, comme on
le voit en examinant la
deuxième planche , est un
maximum très-saillant. Ce
sixième jour tridodécuple,
que nous allons voir jouer
un rôle remarquable dans
les divers documents que
j'ai à mentiotmer aujour-
d'hui, réunit, outre les douze
jours que j'ai énumérés pré-
cédemment comme consti-
tuant le vingt-sixième jour
dodécuple, vingt-quatre au-
tres jours appartenant aux
sixième et seizième de la
symétrie dodécuple, savoir :
les 6 et 1 6 janvier, 5 et 1 5 fé-
vrier, 6 et i6 mars, 5 et
i6 avril, 7 et 17 mai, 6 et
16 juin, 7 et 18 juillet, 9 et
19 août, 8 et 18 septembre,
9 et 19 octobre, 8 et 18 no-
vembre, 7 et 17 décembre.
Sa température a été , à
Montsouris, du 21 juin 1869
au 21 juin 1870, de 11°, 2,
tandis que celle du premier
jour tridodécuple, qui commence au i" janvier et qu'on peut facilement
restituer dans sa composition, n'a été que de 10'', i. La somme des trente-
six moyennes a été, d'un côté, supérieure de 4o°,3 à ce qu'elle a été de l'autre.
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( 7°^ )
M Les limites assignées à nos Communications ne me permettraient pas
de développer avec détails les
PÉRIODE DU 21 JvriN 1869 ATJ 21 JTJrN 1810 diverses courbes que réunis-
sent les quatre petits dessins
dont je prie l'Académie d'au-
toriser l'insertion dans le texte
même de ma Note. Un coup
d'œil jeté sur les courbes en
dira plus, d'ailleurs, que de
longs commentaires. Je vais
donc me borner presque uni-
quement à indiquer le sujet
auquel se rapporte chacune
d'elles.
» La seconde courbe de
cette deuxième planche a trait
encore aux observations de
Montsouris. C'est la repré-
senlation tridodécuple des
moyennes ozonométriques
diurnes, calculées d'après huit
observations trihoraires (i).
Sans discuter cette courbe dans
ses détails, on voit immédia-
tement que ses inflexions sont
opposées à celles de la tempé-
rature. Ainsi, à l'extrémité sud
de Paris, et pendant cet inter-
valle, la coloration du papier
ioduréa été d'autant plus fai-
ble que la température était
plus élevée.
» La troisième courbe don-
ne, pour la même période, les
dix jours tridodécuples, cal-
culés d'après les observations
«loti^O
Jours Tridodécuples.
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(i) Cette observation consiste simplement dans la mesure des colorations du papier ioduré
de Schônbein, d'après l'échelle <le o à 21, établie par MM. Bérigny et Richard de Sedan.
( 7^3 )
ozonométriques établies par MM. Belgrand et Lemoine dans un grand
nombre de stations municipales parisiennes, et publiées dans le Bidlelin
de Statistique municipale. Les deux courbes ozonométriques, placées l'une
au-dessous de l'autre, ne coïncident pas dans leurs allures; et cela n'a
rien d'étonnant, puisque, dans l'intérieur ou aux limites d'une grande
ville, la coloration des papiers iodurés varie avec la direction du vent
qui amène l'air sur eux. Mais cette troisième courbe , se rapportant à
des points répartis sur toute l'étendue de Paris, peut être comparée avec
la dernière, qui soumet à la symétrie tridodécuple le nombre des décès
diurnes constatés, pour la même période, dans toute l'étendue de la
ville, et publiés aussi par le Bulletin municipal. En jetant les yeux sur
cette dernière courbe, on ne peut s'empêcher de remarquer la simpli-
cité de ses allures, qui présentent deux maxima et deux minima. Le plus
bas de ces minima tombe précisément sur le sixième jour tridodécuple,
qui donnait , à Montsouris , un maximum notable de températiue. Le
maximum des décès tombe sur le dixième jour tridodécuple, qui se com-
pose des lo, 20 et 3o janvier; 9, 19, et 29 février; 10, 20 et 3o mars;
9 et 20 avril; i, 1 1 , 21 et 3i mai; 10 et 20 juin; i, 1 1, 22-28 juillet; 3, i3
et 23 août; 2, 12 et 22 septembre; 2, i3 et 23 octobre; 2, 12 et 22 no-
vembre; I, II, 21 et3i décembre. Le nombre total des décès a été, pour
les trente-six jours de cette dernière série, de 5653, et seulement de 5386
pour les trente-six jours delà première.
» Comparée avec la courbe de l'ozonométrie, celle-ci montre que le
nombre des décès à Paris, pendant cette période, a été sensiblement in-
verse de la coloration du papier.
» Des deux dernières planches qui accompagnent cette Note, l'une pré-
sente la symétrie tridodécuple appliquée aux mortalités diurnes des quatre
années publiées jusqu'ici, pour Paris, dans le Bulletin de Statistique muni-
cipale. Ces quatre années s'étendent du 22 décembre i865 au 22 décem-
bre 1869. Malgré l'irrégularité apparente de ces quatre courbes, en 1rs étu-
diant de près, on ne tarde pas à distinguer des traits con)muns, légèrement
variables d'une année à l'autre, mais qui s'accusent nettement dans la cin-
quième courbe, moyenne des quatre antres. Tels sont le mininuim du
dixième jour tridodécuple, qui, dans la première année seulement, est re-
culé d'un jour ; le minimum du troisième jour, qui varie suivant les années,
du deuxième au quatrième; le minimum du cinquième et, enfin, celui du
septième, qui varie entre le septième et le huitième. Le maximum du pre-
G. K., 1S70, 2» Semesire. (T. LXXI, N" 21.) 94
( 7o4)
mier jour est très-clairement indiqué, mais surtout celui de ce même
sixième jour tridodécuple, sur lequel je viens plusieurs fois d'appeler l'at-
tention.
MORTAJJTE A PARIS
Jours Tridodécuples
1
» Lorsque, comme dans
les troisième et quatrième
années, il y a une tendance
générale à la diminution des
mortalités du premier au
septième jour tridodécuples,
on voit le sixième jour se re-
lever et donner un maximum
relatif.
» Cette tendance du sixiè-
me jour tridodécuple à pré-
senter un maximum de mor-
talité est très-sensible encore
dans la dernière planche.
Voici de quels éléments elle
se compose.
» J'ai pu , grâce à l'obli-
geance delà municipalité de
la ville de Boulogne sur-Mer,
consulter les registres des
décès, et en extraire vingt-
deux années complètes, sa-
voir les années i832, i83q
et les vingt ans consécutifs
qui se sont écoulés de i846
à 1866. Seulement mou tra-
vail, déjà ancien, ne porte
que sur les quatre mois, que
je réunis sous le nom com-
mun de fcbruarides, et qui
sont février, mai, août et no-
vembre, que j'étudiais plus spécialement alors. On voit que, répartis
dans la symétrie tridodécuple, ces quatre mois angulaires, commençant
respectivement au 3i janvier, 2 mai, 4 aoiit et 3 novembre, forment le
tiers de la série, c'est-à-dire douze jours tridodécuples, qui, si le prin-
( 7o5 )
cipe de régularité signalé existe réellement, doivent la présenter comme
le ferait l'ensemble des trente-six jours. Or, c'est ce qu'il est aisé de
vérifier par un coup d'oeil jeté sur cette planche. Elle contient, en effet,
trois courbes dont voici les élé-
MORTALITE ABOULOGNE-Sni-MER
s-?! Joiii's tridodécuples lebruarides
"^ félO 123!c56789 10
ments. Parmi les vingt -deux
années étudiées, six présentè-
rent une mortalité exception-
nelle, due aux deux invasions
du choléra, à des épidémies de
variole et aux maladies typhoï-
ques, amenées par la concen-
tration des troupes dans les
camps improvisés aux envi-
rons de Boulogne. J'ai réuni
dans la première courbe la
moyenne de ces six années pour
les douze jours tridodécuples
que j'ai considérés. On voit
que la mortalité y a été pres-
que double de celle qui s'est
manifestée dans les seize autres
années , condensées dans la
troisième courbe. Enfin, la
courbe du milieu représente
la mortalité moyenne pour les
vingt-deux années.
» Sans entrer dans des dé-
tails qui ne pourraient avoir
d'intérêt que pour les person-
nes qui auraient les trois cour-
bes sous les yeux, je me con-
tenterai d'y faire remarquer une succession de maxima et de minima analogue
à celle que nous venons de voir dans les cas de décès constatés à Paris
pendant quatre années. J'insisterai seulement sur le maximum présenté
encore ici par ce même sixième jour tridodécuple, qui s'est montré remar-
quable à presque tous les points de vue, assez variés, que j'ai abordés dans
cette Note. Dans la moyenne des six années exceptionnelles, on particu-
94-'
( 7o6 )
lier, on voit la mortalité, pour ce sixième jour, dépasser de près de 20
pour 100 celle qui affecte le premier jour tridodécuple.
» Toutes ces concordances, il serait, à mon avis, puéril et anliphiloso-
phique de les attribuer à cet être déraison qu'on nomme le hasard, et dont
la considération doit être absolument bannie de l'élude des phénomènes
naturels.
» J'ai poursuivi principalement aujourd'hui l'application de la symétrie
tridodécuple aux faits de mortalité dans l'espèce humaine; dans une troi-
sième et dernière Communication, je me propose de rechercher si elle se
manifeste dans quelques-uns des phénomènes physiologiques. »
« M. Ch. Sainte-Claire Deville fait hommage à l'Académie :
» i" Du Bulletin de ('Observatoire météorologique central de Monlsouris
du 1*' août au 6 septembre 1870, époque à laquelle le bâtiment du Barde
ayant été mis, provisoirement et pour les besoins du siège, à la disposition
de l'autorité militaire, la plupart des instruments en ont été retirés et le
service régulier a dû être interrompu.
» 2° Des Bulletins^ nécessairement incomplets, des mois de septembre (i)
et d'octobre, pendant une partie desquels on a pu observer, plusieurs fois
par jour, le baromètre, le thermomètre fixe et le thermomètre-fronde, le
psychromètre, la coloration des papiers Schonbein, la direction et la force
du vent, l'état du ciel.
» Il n'est pas nécessaire d'insister sur les difficultés qu'a présentées, dans
l'état actuel des choses, l'obtention de ces dernières observations, pour les-
quelles j'ai eu l'assistance de deux de mes anciens observateurs, MM. Gué-
naire et Châtelain, et celle de M. Louis Baudin, fils de notre excellent
constructeur d'instruments, lui-même déjà très-habile. Mais je ne puis me
dispenser d'exprimer ici ma reconnaissance à M. le capitaine de vaisseau
(1) On verra que nous avons pu donner, jusqu'au i5 septembre, dans le Supplément
agricole et médical, toutes nos correspondances des départements arrivées avant cette époque.
Afin que nos correspondants sachent par le Compte rendu, s'il le reçoivent, que leurs Notes
du mois d'août nous sont parvenues, je demande la permission de citer celles que nous avons
pu utiliser. Ce sont celles de MM. Naudin, à Collioure; Nonel, à Vendôme; Crouzat, à
Béziers; Souberbielle, à Laressorc; du Peyrat, à Beyrie; de Lenlilhac, iiLavallade; Carlier,
il Saint-Martin-de-Hinx; Vaillant, à Cosne-sur-Loirc; Pissot, à Doulevant-le-Chàteau; Thi-
riat, au Syndicat de Saint-Amé; Meurein, à Lille; Houzeau et Tocqueville, à Rouen;
Coquelin, à UeauficcI ; Marchand, ;i F'écanip ; A. Perrey, à Lorient ; Pralon, ;\ Blois; Parant,
à Montaryis; Nicolas, au Puy; Vincent, à Bourg.
( 707 )
Grasset et à M. le lieutenant de vaisseau Viinont, qui habitent le Barcio,
comme attachés an huitième secteur, qui nous ont aidés de tout leur pou-
voir, et dont le dernier a voulu contribuer, par lui-même, à recueillir nos
observations.
)) Enfin, je suis heureux d'ajouter que M. Jules Simon, Ministre de l'In-
struction publique, a bien voulu, malgré les difficultés financières actuelles
de son Administration, remettre au Président de la Commission de l'Ob-
servatoire de Montsouris une somme qui, toute faible qu'elle est, permet
néanmoins d'assurer la conservation de ce qui y est resté de l'ancien ma-
tériel, dont une partie, comme on le voit, est encore utilisée. »
NOMINATIOIVS.
L'Académie procède, par la voie du scrutin, à la nomination d'une Com-
mission qui sera chargée de juger le Concours pour le grand prix des
Sciences mathématiques à décerner en iS'yo (question proposée : « Re-
chercher les modifications qu'éprouve la lumière dans son mode de pro-
pagation et ses propriétés, par suite du mouvement de la source lumineuse
et du mouvement de l'observateur ».)
MM. Fizeau, Liouville, Jamin, Bertrand, Edm. Becquerel réunissent la
majorité des suffrages.
MÉMOIRES LUS.
CHIRURGIE. — Sur la propriété dont jouiraient les troncs artériels de résister^
mieux que les cordons nerveux, à l' action directe des projectiles sphériques.
Note de M. Bonnafont. (Extrait. )
(Renvoi à la Section de Médecine et de Chirurgie.)
« J'ai recueilh autrefois, en Afrique, diverses observations qui, dans
les circonstances actuelles, me semblent offrir un certain intérêt.
» Premier fait. — Le nommé M..., soldat au 26* de ligne, reçut sur le
Coudiatasy, sous Constantine, et à bout portant, la décharge d'un coup de
fusil. Le projectile pénétra d'arrière en avant dans le creux axillaire droit,
divisa le plexus nerveux presque en totalité, ainsi que la veine axillaire. Les
téguments et toutes les autres parties charnues étaient fortement dilacérés,
triturés même et noircis par la poudre; la bourre, restée dans la plaie, y
( 7o8)
avait produit un délabrement considérable. Au milieu d'un pareil désordre
l'artère seule était intacte et paraissait isolée comme un cordon, dans l'é-
tendue de quatre à cinq centimètres.
» Deuxième fait. — M. R..., alors sous-lieutenant, aujourd'hui général
de cavalerie, reçut pendant l'expédition de Sétif (i838) un coup de feu à
bout portant, tiré par un cabaïle caché derrière un rocher dans le détilé de
Karbaïte (l'ancienne Cuicrilus des Romains). La balle traversa de bas en
haut le bord postérieur de l'aisselle, le creux axillaire et vint sortir à la
partie antérieure de cette région, traversant aussi le bord formé par le grand
pectoral. La blessure mise à découvert présenta les lésions suivantes : des-
truction complète de tous les téguments du creux axillaire, tous les troncs
nerveux, l'axillaire excepté, étaient brisés ainsi que la veine; l'artère axil-
laire|était intacte et se détachait seule, dans l'étendue de quatre centimètres,
au milieu de ce désordre, et pourtant si, comme je le fis, on passait un
stylet à travers les deux ouvertures, et qu'on remît le bras dans la position
où il se trouvait au moment de la blessure, le stylet rencontrait immédia-
tement l'artère. Le projectile l'avait donc aussi rencontrée et avait di'i glisser
sur elle, pour passer dessus ou dessous avant de sortir du côté opposé —
» En présence de ces faits, il est permis de se demander s'il n'y a pas là
une cause spéciale qui a empêché la lésion de l'artère, et par suite une hémor-
rhagie mortelle, alors que les cordons nerveux qui, par leur nature, sont
beaucoup plus résistants, ont cependant été brisés sous l'influence de la
même cause.
» Cette cause spéciale et préservatrice pourrait bien résider : i° dans la
structure celluleuse et élastique des parois de l'artère : 2° et surtout dans
sa forme cylindrique, que la plénitude sanguine et les pulsations rendent
encore plus résistante. Dans ces conditions, on peut bien supposer qu'un
tube à parois lisses résistantes et élastiques puisse, jusqu'à un certain
point, imprimer une légère déviation à un projectile sphérique à surface
également lisse qui, lancé à grande vitesse et animé d'un mouvement rota-
toire rapide, se dévie souvent par la rencontre d'un obstacle quelquefois
insignifiant. »
M. C. Lefort donne lecture d'une Note relative à la « Sociologie ».
( 709 )
MÉMOIRES PRÉSENTÉS.
ART MILITAIRE. — Sur la force de la poudre et des matières explosives
(3^ Partie : Composés explosifs définis). Note de M. Rerthelot, présentée
par M. Bertrand (*).
(Renvoi à la Commission précédemment nommée.)
§ 1. Relations générales.
(( 1. Jusqu'ici nous avons étudié les poudres, c'est-à-dire les substances
dont les propriétés détonantes sont dues à l'action réciproque de leurs
composants simplement mélangés : il s'agit d'appliquer les mêmes prin-
cipes aux corps définis, dont l'explosion résulte d'une réaction interne
entre les éléments préalablement associés sous forme de combinaison. Tels
sont le chlorure d'azote, la nitroglycérine, la poudre-coton, le picrate de
potasse, etc.
» 2. Pour rendre plus commode la comparaison des propriétés de ces
corps, il me semble utile de signaler d'abord quelques conséquences des
formules établies dans la i'^'' Partie de ce travail.
)) Soit deux substances différentes, prises sous le même poids et détonant
dans des capacités égales, on aura (^*) d'après les formules (6) de la
page 621, en évaluant /Jj et p'^ et en prenant leur rapport
P2
■ ati
ou bien approximativement (***) et en raison de la grandeur des tempéra-
tures ^2 et ^0,
. . Pi __ t, "^
(II) — = TT • — 5
^ ^ P2 ^1 ".
(*) L'Académie a décidé que cette Communication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Compte rendu.
(**) /?,, «2, C|, se rapportent à l'une des substances; p\, t\, v\ à l'autre; c, et v\ sont les
volumes respectifs des gaz que chaque substance dégagerait sous o", 760 et à zéro.
Je dois signaler une erreur commise dans l'impression de la formule (2) de la page 620.
Elle doit être rétablie comme il suit :
/ „ \ *-
(2) I -)-af,= (r -f- a/,
(***) Les formules (i 1), (12) et {i3) sont tout à fait exactes, si l'on rapporte les tempe-
( 71° )
c'est-à-dire
» L'effort exercé sur les parois est proportionnel au produit de la température
développée durant l'explosion par le volume des gaz que chaque substance dégage
sous la pression atmosphérique.
» Dans le cas où la chaleur spécifique moyenne des composés formés
est à peu près la même pour les deux substances, cas qui se présente fré-
quemment, on a encore, approximativement,
Pl Q: ^
p\ ~ Q'= ■ "', '
ou
P2
"■
c'est-à-dire :
» Le travail-est proportionnel au quotient de la pression produite durant l'ex-
plosion par le volume des gaz que chaque substance dégage sous la pression atmo-
sphérique.
» Enfin, quelles que soient les chaleurs spécifiques, on peut exprimer
le travail en fonction des quantités de chaleur dégagées, par les relations
approximatives :
» 3. Les quantités Q, et f,, déterminées par expérience, servent à cal-
culer toutes les autres. On peut définir une substance explosive par ces
deux caractéristiques.
§ 2. Chlorure d'azote.
» 1. Le chlorure d'azote détone, comme on sait, en se résolvant en
éléments :
AzCl' = Az + 3 Cl.
» 2. La quantité de chaleur dégagée dans cette réaction, Q,, a été dé-
nitures au zéro absolu, en posant
T, = 273+^; r, = 273+/',;
et si l'on remplace Q,, Qj par
N, = 273^ 4- Q,; N, = 273c + Qj, etc.,
c'est-à-dire si l'on compte la chaleur dégagée depuis ce même zéro absolu.
( 711 )
terminée par MM. Deville et Hautefeuille (*) : elle s'élève à 3i6'=*\4 par
gramme de chlorure d'azote, d'après la moyenne de leurs expériences.
I gramme développe d'ailleurs Syo litres de gaz à zéro et o'",76o : c'est la
seconde caractéristique.
)) 3. Sous ce volume constant, les gaz (**) seraient portés k t, = 3970 de-
grés. Enfin
» I kilogramme de chlorure d'azote, détonant dans une capacité
constante et égale à i litre, développera une pression de 65 000 atmo-
sphères et une température de 47700 degrés. Il dégagera, dans ces con-
ditions, 3800000 calories et pourra effectuer >m travail maximum de
3800000 X liiS kilogrammètres.
» 4. Il est digne d'intérêt que la pression théorique développée par le
chlorure d'azote, dans ces conditions et même en général {***), ne diffère
pas beaucoup de celle de la poudre. Le travail maximum que le chlorure
d'azote puisse effectuer est très-considérable; cependant il ne dépasse guère
la moitié de celui de la poudre, lorsque ces deux substances font explosion
dans une capacité égale, quelle qu'elle soit. Ce sont là des résultats qui
semblent contredire, à première vue, ce que l'on sait des phénomènes ter-
ribles produits par le chlorure d'azote : le chlorure d'azote, en effet, est
regardé comme le type des substances brisantes et qui ne peuvent être
employées dans les armes, pour effectuer les travaux de projection que la
poudre réalise par sa détente progressive.
» 5. Tâchons de nous rendre compte de ces différences. La principale
sans doute doit être attribuée à la nature des produits de l'explosion et à
l'absence complète de tout composé susceptible de dissociation. Eu effet,
la pression et le travail résultent de la chaleur dégagée dans la décompo-
sition du chlorure d'azote. Or celle-ci donne naissance à des corps élé-
mentaires qui n'ont aucune tendance à se recombiner, quelles que soient
(*) Comptes rendus, t. LXIX, p. iSa.
(**) En admettant que leur chaleur spécifique moyenne à volume constant est 0,0797,
chiffre calculé d'après l'hypothèse ordinaire que tous les ga/, simples ont la même chaleur
spécifique sous le même volume.
(***) D'après la formule de la page 669
^/3o6.r\'.<'
p^ =20,5 ,
\IOOO/
formule relative à la poudre.
G. R., 187a, 70 Semestre. (T. LXXl, N" 21.) 9^
( 7'2 )
la température et la pression. La pression initiale atteindra donc tout
d'abord son maximum, et le chlorure d'azote fournira de suite (ont le tra-
vail dont il est susceptible, soit en disloquant les matériaux sur lesquels il
agit, soit en les écrasant, s'ils ne sont pas suffisamment compactes, soit
enfin en lein- communiquant sa force vive sous forme de mouvements de
projection et de rotation.
» li y a plus : la pression décroîtra très-brusquement, tant par le fait
de ces transformations que par celui du refroidissement et de la détente
des gaz; et elle décroîtra sans qu'aucune nouvelle quantité de chaleur,
produite durant la période de décroissement, intervienne pour modérer
la chute rapide des pressions. Pression initiale énorme et s'abaissant pres-
que subitement, ce sont là des conditions éminemment favorables à la rup-
ture des vases qui contiennent le chlorure d'azote.
» Ces conditions contrastent avec celles qui président à la combustion
de la poudre, puisque dans cette dernière l'état de combinaison des élé-
ments ne se produit pas tout d'abord d'une manière complète et qu'il de-
vient plus avancé à mesure que la température s'abaisse. La pression ini-
tiale est donc moindre avec la poudre qu'avec le chlorure d'azote; mais,
en revanche, elle décroît moins vite, à cause de l'intervention des nou-
velles quantités de chaleur reproduites pendant la période de refroidisse-
ment. J'ai déjà insisté sur ces considérations.
» On voit que la théorie rend assez bien compte des différences obser-
vées entre les propriétés du chlorure d'azote et celles de la poudre ordi-
naire. Cependant il faut encore signaler quelques autres circonstances,
telles que la propagation successive de la transformation dans la masse
entière, et surtout la durée des réactions moléculaires.
» 6. Pour propager la transformation dans une masse qui détone et
qui n'est pas soumise aux mêmes actions dans toutes ses parties, il faut que
les mêmes conditions physiques de température, de pression, etc., qui ont
provoqué siu' un point le phénomène se reproduisent successivement et
couche par couche dans toutes les portions de la masse. On connaît à cet
égard les nombreux travaux des Artilleurs (*) sur la vitesse de combustion
de la poudre ordinaire et sur celle de la poudre-coton, vitesse variable
avec la structure physique des poudres et leur composition chimique. Cette
vitesse varie également dans les mélanges gazeux explosifs, comme le
prouvent les observations relatives à la combustion des mélanges d'oxy-
(*) PioBEUT, Traité d'Artillerie, partie lliéorique.
{ 7'3 )
gène et d'hydrogène, ou d'oxyde de carbone, ou de gaz hydrocarbonés.
Les liquides, tels que le chlorure d'azote et la nitroglycérine, doivent
offrir des phénomènes analogues dans la propagation des réactions ex-
plosives.
» 7. Ce n'est pas tout. La masse entière étant placée dans les mêmes
conditions de température, de pression ou de mouvement vibratoire, etc.,
il semble que la réaction doive se développer instantanément dans toutes
les parties à la fois : les explosions subites du chlorure d'azote et de la
nitroglycérine pourraient paraître favorables à cette manière de voir. Ce-
pendant l'observation prouve que les réactions moléculaires réclament
en général un certain temps pour s'accomphr, même lorsqu'elles dégagent
de la chaleur. Telle est, par exemple, la décomposition de l'acide formique
en eau et oxyde de carbone. Opérée dans un vase fermé et maintenu à la
température fixe de 260 degrés, elle exige un grand nombre d'heures. Et
cependant cette réaction dégage 27000 calories par équivalent d'acide for-
mique, c'est-à-dire Sgo calories par gramme, presque la même quantité
que la déflagration d'un gramme de poudre.
)) L'acétylène changé en benzine vers le rouge sombre par une réac-
tion lente dégage, sous le même volume, autant de chaleur qu'un mélange
tonnant, formé d'oxygène et d'hydrogène dans les proportions de l'eau;
c'est le double de la chaleur dégagée par la poudre au chlorate sous le
même poids. Le cyanogène dégage deux fois autant de chaleur que la
poudre au chlorate sous le même poids, ou bien encore le double de la
chaleur dégagée par un mélange tonnant formé de gaz oxyhydrique sous
le même volume, lorsque ledit cyanogène est décomposé en carbone et
azote par l'étincelle électrique. Quoique le carbone coaunence aussitôt à se
précipiter, cependant le cyanogène ne détone point sous l'influence de
l'étincelle, ce qui est une preuve de la lenteur de la réaction.
» Je pourrais multiplier ces faits (*) : ils comprennent les corps explosifs
proprement dits eux-mêmes, maintenus à une température un peu inférieure
à celle qui détermine l'explosion. L'oxalate d'argent, par exemple, se dé-
compose lentement à 100 degrés, tandis qu'il détone à une température
plus élevée.
» Bref, toute réaction moléculaire, opérée au sein d'un corps homogène
et soumis à des conditions qui semblent identiques pour toutes ses parties,
est affectée d'un coefficient caractéristique relatif à la durée. Ce coefficient
{*) Annales de Chimie et de Physique, 4° série, t. XVIII, p. 142.
95..
( 7'4 )
dépend de la température et de la pression; il joue un rôle essentiel dans
l'élude des propriétés inégalement brisantes des composés explosifs.
» 8. Poussons jusqu'au bout cette explication. La durée plus ou moins
grande d'une réaction ne change point la quantité de chaleur dégagée par
la transformation totale d'un poids donné de matière explosive. Mais si
les gaz formés se détendent à mesure, par suite du changement de la capa-
cité que la fuite du projectile agrandit, ou bien encore par suite du refroi-
dissement dû au contact des parois, dans ces circonstances, dis-je, les
pressions initiales seront d'autant moindres que la transformation d'iui
poids donné de matière explosive durera plus longtemps. Au contraire,
lorsqu'une transformation très-rapide de toute la masse, au sein d'un vase
fermé, jointe à l'absence des phénomènes de dissociation, permet aux
pressions initiales d'atteindre l'immensité de leurs limites théoriques, ou
d'en approcher, nulle résistance connue ne pourra contenir les gaz de l'ex-
plosion.
» 9. Il en sera ainsi, non-seulement pour un corps explosif placé dans une
capacité fixe et résistante, mais pour un tel corps placé dans une mince en-
veloppe, ou sous une couche d'eau, ou même à l'air libre. En effet, quand
la durée des réactions décroît outre mesure, les gaz dégagés développent
des jn-essious qui augmentent avec une extrême rapidité; si rapidement que
les corps environnants, solides, liquides, ou même gazeux, n'ont pas le
temps de se mettre en mouvement pour y obéir graduellement; ils opposent
à la détente des gaz des résistances comparables à celle d'une paroi fixe. On
sait qu'il suffit d'une pellicule d'eau à la surface du chlorure d'azote pour
donner lieu à de tels effets. Plus la durée de la réaction approche d'être in-
stantanée, plus la pression initiale, même dans un vase ouvert, devient voi-
sine de la pression théorique, celle-ci étant calculée pour le cas d'une dé-
composition opérée dans une capacité constante, entièrement remplie par la
matière explosive. C'est ainsi que l'on peut rendre compte des effets extra-
ordinaires de destruction produits par la nitroglycérine ou la poudre-
coton comprimée, appliquées sans bourrage dans des trous librement ou-
verts, ou même à la surface des rochers et des morceaux de fer. Dans
une réaction extrêmement rapide, la commotion due au développement
sidjit (le ces pressions presque théoriques, peut se propager à travers l'air
lui-même, projeté en masse, comme l'ont montré les explosions de certaines
poudrières et les expériences de M. Abel sur une série de blocs de poudre-
coton comprimée. Le choc, propagé soit par une colonne d'air, soit par
une masse liquide ou solide, varie avec la nature du corps explosif et son
( 7'5)
mode d'inflammation : il est d'autant plus violent, que la durée de la réac-
tion chimique est plus courte et qu'elle développe plus de chaleur, c'est-à-
dire de travail, pour le même poids de matière explosive.
§ 3. Nitroglycérine.
» 1. La nitroglycérine est réputée la plus énergique des substances ex-
plosives. Elle disloque les montagnes, elle déchire et brise le fer, elle pro-
jette des masses gigantesques. Malgré de redoutables accidents, l'industrie
des Américains, des Suédois, des Anglais et d'autres peuples encore, a su
tirer parti de ces propriétés extraordinaires.
» Examinons si elles sont d'accord avec nos théories.
» 2. La décomposition de la nitroglycérine peut être représentée par
l'équation suivante :
C''H=(AzO''H)' = 6C0^4-5HO+ 3Az+0.
On voit que la nitroglycérine jouit de la propriété exceptionnelle de ren-
fermer plus d'oxygène qu'il n'est nécessaire pour en brûler complètement
les éléments (*).
» 3. I kilogramme de nitroglycérine, sous une pression de o™, 760 et
à une température capable de vaporiser l'eau, produit 7io'(i + ut) de gaz.
I litre de nitroglycérine produira davantage, soit i i35'(i + at), à cause de
sa densité 1,60. Sous le même poids, la nitroglycérine produit donc
3 4^ fois autant de gaz que la poudre au nitrate, 2 fois autant que la poudre
au chlorate. Sous le même volume, elle produit près de 6 fois autant de
gaz que la poudre au nitrate.
» 4. La chaleur dégagée dans la réaction l'emporte aussi beaucoup.
Elle peut être évaluée (**) à 291 000 calories pour un équivalent de nitro-
glycérine (l'eau étant produite sous forme gazeuse), soit 2o5iooo calories
jjour I litre; 1282000 pour i kilogramme. Cette dernière quantité est
double de la chaleur dégagée par le même poids de poudre au nitrate et
supérieure d'un tiers à la poudre au chlorate.
(*) Une partie de cet oxygène donne parfois naissance à du bioxyde d'azote.
(**) Voici le calcul.
État initial des éléments. Etat final.
C«H»0=+i50+ 3Az + 3HO = 6CO=+ 1 1 HO + 3Az -+- 0.
Première mtirche.
Qs jjsQe -^ O'* = 6CO^ + 8HO, (les autres substances n'intervenamt pas), dégage une quan-
(7i6)
» Ainsi la nitroglycérine produit sous le même poids 3 | fois autant de
gaz et 2 fois autant de chaleur que la poudre au nitrate. La différence
entre les effets produits est facde à prévoir. Les pressions théoriques (*)
sont données par la formule
'^" ' \ lOOO /
I kilogramme de nitroglycérine, détonant dans une capacité égale à i litre,
développera une pression théorique de 243 ooo atmosphères, quadruple de
celle de la poudre, une température de 93400 degrés et une quantité
de chaleur égale à igyooooo calories; le travail maximum sera presque
triple de celui de la poudre.
» I litre de nitroglycérine pèse 1^^,60; en détonant dans une capacité
tité de chaleur dont !a valeur probable doit être voisine de 4ooooo"'
{^Annales de Chimie et de Physique, ^ série, t. VI, p. 424O
Deuxième marche.
3(Az-(-0^-t- H0)= 3(AzO% HO) pur et liquide 60000
3(AzO^HO) +C«H»0'=C''H=(AzO'=H)=+ SH'O'.
La chaleur dégagée dans cette réaction ne peut être guère mesurée directe-
ment, à cause des produits accessoires d'oxydation : j'admettrai qu'elle est la
même que la chaleur dégagée dans la formation de l'éther nitrique, pour le
même poids d'acide nitrique. Or l'alcool pur en léger excès et l'acide nitrique
pur, mélangés avec les précautions convenables, réagissent immédiatement et
forment à peu près la quantité théorique d'éther nitrique. La chaleur dégagée
est d'ailleurs capable de porter le mélange à l'ébuUition, sans pourtant donner
lieu à une distillation considérable. D'après ces faits d'observation , la chaleur
dégagée doit être voisine de >; à 8000 calories. C'est à peu près la même quantité
qui se dégage lorsque l'on étend l'acide nitrique pur avec une grande proportion
d'eau ('j^ooj. Soit donc 8oooX3 = 24ooo
eH=(AzO''H)==:6CO^-f-5HO + AzH-O ..
84000 -hx
Or 4o'^oo'' ^^= ^4o*'o 4- .r; d'où l'on tire .j-^3i6ooo.
Il faut en retrancher la chaleur nécessaire pour vapori.ser 5H0, soit aSooo; et il reste
2QIOOO pour la réaction qui donne naissance à l'eau gazeuse.
(*) La chaleur spécifique moyenne des gaz de la réaction à volume constant est égMe à
20 X 2,4
— = 0,211.
227
D'où
<, = 6076° , Pi = a3'""',22.
( 717 )
complètement remplie, comme il arrive dans un trou de mine, ou bien
quand on opère sous l'eau, cette substance devrait développer une pression
de 470000 atmosphères, 8 à 10 fois aussi grande que celle produite par le
même volume de poudre. La chaleur dégagée étant 38oooooo calories, le
travail maximum pourra s'élever à plus de 16 milliards de kilogrammètres,
valeur quintuple de celle du travail maximum de la poudre sous le même
volume.
» 5. Ces chiffres colossaux ne sont sans doute jamais atteints dans la
pratique, surtout à cause des phénomènes de dissociation; mais il suffit
qu'on en approche pour expliquer pourquoi les travaux, et surtout les
pressions développées par la nitroglycérine, surpassent les effets produits
par toutes les autres matières explosibles usitées dans l'industrie. Les rap-
ports que ces chiffres signalent entre la nitroglycérine et la poudre, par
exemple, s'accordent assez bien avec les résultats empiriques observés dans
l'exploitation des mines (*).
» La rupture en éclats et l'explosion du fer forgé {**), effets que la poudre
ordinaire ne saurait produire^ sont de nouvelles preuves de l'énormité des
pressions initiales développées par la nitroglycérine.
» 6. Si la nitroglycérine est brisante, cependant elle fracture les roches
sans les écraser en menus fragments. Cette propriété s'explique encore par
le jeu des phénomènes de dissociation : les éléments de l'eau et de l'acide
carbonique doivent être en partie séparés dans les premiers moments, ce
qui diminue les pressions initiales; mais la formation de l'eau et de l'acide
carbonique, se complétant pendant la détente, reproduit successivement de
nouvelles quantités de chaleur qui régularisent la chute des pressions. La
nitroglycérine agira donc pendant la détente à k façon de la poudre ordi-
naire. Cependant la dissociation doit être moindre avec la nitroglycérine,
parce que les composés formés sont plus simples et les pressions initiales
plus fortes,
Bref, la nitroglycérine réunit les propriétés en apparence contradictoires
(*) Foir les expériences citées dans l'opuscule La Dynamite, par Trauzl, extrait par
P. Barbe, p. 91 et 92 (1870). L'effet utile de la nitroglycérine dans les carrières a été
trouvé 5 à 6 fois aussi grand que celui de la poudre de mine, à poids égal. A volume égal
« dans les trous de mine, on obtient, avec la dynamite, environ 8 fois l'effet produit par
la poudre », c'est-à-dire ii fois le même effet avec la nitroglycérine pure. Il s'agit ici des
effets de dislocation, qui dépendent surtout des pressions initiales.
(**) Même ouvrage, p. 98 et gg.
( 7^8 )
des diverses matières explosives : elle est brisante, comme lo chlorure d'a-
zote; elle disloque et fracture les roches sans les écraser, comme la poudre
ordinaire, quoique avec plus d'intensité; enfin elle produit des effets ex-
cessifs de projection : toutes ces propriétés, reconnues par les observa-
teurs, peuvent être prévues et expliquées par la théorie.
I) 7. Je pourrais montrer encore que l'inflammation provoquée sur ini
point de la masse est moins dangereuse avec la nitroglycérine qu'avec
la poudre au chlorate et même avec la poudre au nitrate, parce que la
combustion d'un même poids de matière élève moins la température des
parties voisines, soit à cause du refroidissement produit par le contact des
parties liquides ambiantes, soit et surtout à cause de Ta chaleur spécifique
de la nitroglycérine plus que double de celle des poudres au chlorate et au
nitrate.
» 8. La théorie des effets produits par la nitroglycérine ne serait pas
complète, si nous ne parlions des phénomènes du choc, et des autres
causes capables d'en provoquer la déflagration. Elle est des plus sensibles
à cet égard : il suffit de la chute d'un poids tombant de o™, aS de hauteur
pour déterminer l'explosion de la nitroglycérine (*). Mais les circonstances
de cette explosion sont très-différentes, suivant que Ton opère par simple
choc, par le contact d'un corps en iguition, faible, ou vive, ou d'une fusée
ordinaire, ou bien encore par le contact d'une amorce au fulminate de mer-
cure. M. Abel a publié à cet égard, sur la nitroglycérine et sur la poudre-
coton, des expériences très-curieuses et qui tendent à établir une grande
diversité entre les conditions de déflagration de ces substances, suivant la
manière de les faire détoner (**). Quelque étrange que cette diversité puisse
sembler à première vue, je crois cependant que les théories thermody-
namiques sont capables d'en rendre compte par une analyse convenable des
phénomènes du choc.
» Soit le cas le plus simple, celui d'une explosion déterminée par la chute
d'un poids qui tombe d'une certaine hauteur. Tout d'abord on serait porté
à attribuer les effets à la chaleur dégagée par la compression due au choc
du poids brusquement arrêté. Mais le calcul montre que l'arrêt d'un poids
de quelques kilogrammes, tombant de o™,25 ou de o™,5o de hauteur, ne
pourrait élever que d'une fraction de degré la température de la masse ex-
plosive, si la chaleur résultante était répartie uniformément dans la masse
(*) Ch. Girard, Millot et Vogt, Comptes rendus de la dernière séance, p. 691
(**) Comptes rendus, t. LXIX, p. io5-l2i, 1869.
( 719 )
entière : celle-ci ne saurait donc atteindre ainsi la température de 190 de-
grés, nécessaire pour en provoquer l'explosion.
» C'est par un autre mécanisme que la force vive du poids, transformée
en chaleur, devient l'origine des effets observés. Il suffit d'admettre que les
pressions qui résultent du choc exercé à la surface de la nitroglycérine,
étant trop subites pour se répartir uniformément dans toute la masse, la
transformation de la force vive en chaleur a lieu surtout dans les premières
couches atteintes par le choc; celles-ci pourront être portées ainsi jusqu'à
igo degrés, et elles se décomposeront aussitôt en produisant une grande
quantité de gaz : la production de ceux-ci est à son tour si brusque que le
corps choquant n'a pas le temps de se déplacer, et que la détente soudaine
des gaz de l'explosion produit un nouveau choc, plus violent sans doute
que le premier, sur les couches situées au-dessous. La force vive de ce nou-
veau choc se change en chaleur dans les couches qu'il atteint d'abord.
Elle en détermine l'explosion, et cette alternative entre un choc dévelop-
pant une force vive qui se change en chaleur, et une production de chaleur
qui élève la température des couches échauffées jusqu'au degré d'une explo-
sion nouvelle, capable de reproduire un autre choc, cette alternative, dis-
je, propage la réaction de couche en couche dans la masse entière. La
propagation de la déflagration a lieu ainsi avec une vitesse incomparable-
ment plus grande que celle d'une simple inflammation provoquée par le
contact d'un corps en ignition, et opérée dans des conditions où les gaz se
détendent librement, au fur et à mesure de leur production.
M Ce n'est pas tout : la réaction provoquée par un premier choc, dans
une matière explosive donnée, se propage avec une vitesse qui dépend de
l'intensité du premier choc, puisque la force vive transformée en chaleur
détermine l'intensité de la première explosion, et par suite celle de la série
entière des effets consécutifs. Il résulte de là que l'explosion d'une masse
solide ou liquide peut se développer suivant une infinité de lois différentes,
dont chacune est déterminée, toutes choses égales d'ailleurs, p*r l'impulsion
originelle. Plus le choc initial sera violent, plus la décomposition qu'il
provoque sera brusque, et plus les pressions exercées pendant le cours de
cette décomposition seront considérables. Une seule et même substance
explosive pourra donc donner lieu aux effets les plus divers, suivant le pro-
cédé d'inflammation.
» Voilà pourquoi la nitroglycérine et la poudre-coton comprimée pro-
duisent chacune des effets si différents, selon qu'on les enflamme à l'aide
C. R., 1870, 1' Semestre. (T. LXXI, N» 21.) 9"
( 720 )
d'un corps en ignition faible, d'une flamme, ou d'une fusée ordinaire, ou
bien à l'aide d'une fusée détonante chargée de fulminate de mercure.
» La diversité des effets est moins marquée avec la poudre-coton non
comprimée, parce que l'influence du choc initial s'exerce sur une moindre
quantité de matière, et surtout parce que la propagation des réactions suc-
cessives dans la masse y développe des pressions initiales plus faibles, et
une transformation moins directe de la force vive en chaleur transmise
au corps explosif, à cause de l'air interposé.
» La poudre-coton comprimée elle-même est moins compacte que la
nitroglycérine; à cause de sa structure, les pressions ducs aux chocs doi-
vent être sensiblement atténuées par l'existence des interstices. Aussi la
poudre-coton est-elle plus difficile à faire [détoner que la nitroglycérine :
la nitroglycérine détone par la chute d'un poids tombé d'une moindre
hauteur, par l'emploi d'une amorce chargée de poudre-coton, d'un mé-
lange de fidminate et de chlorate de potasse, etc.; tandis que la poudre-
coton ne fait pas explosion sous l'influence de la nitroglycérine, ni sous l'in-
fluence d'un mélange de fulminate et de chlorate: elle réclame le choc plus
brusque du fulminate de mercure pur. Celui-ci d'ailleurs est moins efficace
s'il est employé à nu que s'il est placé dans une enveloppe; moins efficace
dans une mince enveloppe de laiton que dans une enveloppe épaisse de
fer-blanc; il est moins efficace encore, si l'amorce n'est pas en contact avec
le coton-poudre. La nitroglycérine elle-même détone moins bien sous l'in-
fluence d'une fusée au fulminate, si elle s'est enflammée avant l'explosion
du fulminate, l'inflammation préalable ayant pour effet de produire un
certain vide entre deux.
» Tous ces phénomènes, signalés pour la plupart par M. Abel, s'expli-
quent par la valeur plus ou moins considérable des pressions initiales et
par leur développement plus ou moins subit, c'est-à-dire par les conditions
qui règlent la force vive transformée en chaleur dans un temps donné, au
sein des premières couches de la matière explosive atteintes par le choc.
» La quantité de force vive ainsi transformée dépend donc à la fois de la
brusquerie du choc et de la grandeur du travail qu'il peut développer : ce
sont là deux données qui varient d'une substance explosive à l'autre. Par
exemple, les amorces les plus convenables ne sont pas toujours celles dont
l'explosion est la plus instantanée. M. Abel a reconnu que le chlorure
d'azote n'est pas très-efficace pour enflammer la poudre-coton; l'iodure
d'azote, si sensible au moindre frottement, demeure tout à fait impuissant
à l'égard de la poudre-coton. Or le chlorure d'azote est précisément l'un
( 72 1 )
des corps explosifs décrits dans cette Note qui développent le moins de
chaleur, et par conséquent de travail, sous un poids déterminé; on conçoit
donc qu'il faille en employer davantage à titre d'amorce. Quant à l'iodure
d'azote, d'après les analogies tirées des composés iodosubstitués, son ex-
plosion doit dégager bien moins de chaleur encore et de travail, sous le
même poids que le chlorure d'azote. Son impuissance est donc facile à
comprendre.
» 9. Sans nous étendre davantage sur ces théories, il semble utile de
dire quelques mots de la dynamite.
» La dynamite est un mélange de nitroglycérine avec certaines matières
solides, et spécialement avec certaines variétés de silice ou d'alumine.
)) M. Nobel l'a proposée pour obvier aux terribles effets qui résultent de
la propagation des chocs dans la nitroglycérine liquide. Montrons que les
théories thermiques sont favorables à l'emploi de la dynamite.
» La dynamite est en effet moins brisante que la nitroglycérine, parce que
la chaleur dégagée se partage entre les produits de l'explosion et la sub-
stance inerte. Par suite, la température s'élève moins, ce qui diminue
d'autant les pressions initiales. Par exemple, la silice et l'alumine anhydres
ont à peu près la même chaleur spécifique (0,19) que les produits gazeux
de l'explosion de la nitroglycérine à volume constant. A poids égaux et
dans une capacité complètement remplie, elles abaisseront à moitié la tem-
pérature, et, par suite, la pression initiale, d'après la formule (6)
» Pour un même poids de nitroglycérine, les propriétés brisantes seront
donc atténuées proportionnellement au poids de la matière inerte mélan-
gée; tandis que le travail maximum conservera la même valeur, étant
toujours proportionnel au poids de la nitroglycérine.
» Les mêmes circonstances rendront plus difficile la propagation de
l'inflammation simple d'une petite portion de la masse dans les parties
voisines, attendu que celles-ci détonent seulement lorsqu'elles sont portées
à une température approchant de 190 degrés; la détonation même exigera
une commotion initiale plus forte pour avoir lieu.
» Si la déflagration est produite par le choc d'un corps dur ou d'une
fusée fulminante, les particules solides interposées dans le liquide réparti-
ront la force vive du choc entre la matièi-e inerte et la matière explosive,
et cela dans une proportion qui dépendra de la structure de la matière
inerte. Celle-ci change ainsi la loi de l'explosion et introduit dans les phé-
96..
( 722 )
nomènes une extrême variété, ainsi qu'il résulte des expériences de M. No-
bel et de celles de MM. Girard, Millot et Vogt sur la nitroglycérine mé-
langée avec la silice, ou l'alumine, ou l'étlial, ou le sucre.
» Il est d'ailleurs évident que les effets utiles de la matière inerte ne
se produiront complètement que si le mélange est homogène et sans aucune
séparation de nitroglycérine liquide; car le liquide exsudé conserve toutes
ses propriétés. De là encore la nécessité d'une structure spéciale dans la
matière solide.
» 10. Au lieu de diminuer l'intensité des effets de la nitroglycérine,
on peut réussir à les accroître par certaines additions. En effet, l'ex-
plosion laisse i équivalent d'oxygène disponible, ainsi qu'il a été dit. On
peut employer cet oxygène à brîiler une petite quantité de matière com-
bustible additionnelle, par exemple 4 centièmes de soufre, 2 centièmes
d'alcool, ou bien encore i centième de carbure d'hydrogène; on augmente
ainsi de près de i dixième la chaleur produite à poids égal, sans changer
sensiblement le volume des gaz. Au delà de ces proportions, les matières
combustibles additionnelles changent la nature des réactions chimiques.
» tl. Comparons enfin la nitroglycérine avec la poudre, au point de
vue du meilleur emploi d'un poids donné de nitrate de potasse. D'après les
équivalents, 3o3 parties de nitre produisent, soit 4o4 parties de poudre
ordinaire, soit 227 parties de nitroglycérine, c'est-à-dire un poids moitié
moindre. Mais, en revanche, cette dernière peut développer, dans les cir-
constances les plus favorables, une pression 8 à 10 fois aussi grande que le
même volume de poudre, et effectuer un travail quintuple.
» Il résulte de ces nombres qu'un poids donné de nitrate de potasse,
s'il pouvait être changé atomiquenient et sans perte (*) en nitroglycérine,
développerait dans un trou de mine une pression triple et un travail double
de celui que fournirait la poudre fabriquée avec le même poids de nitrate.
ij V. Poudre-colon ou pyro.ryle.
» 1. La poudre-coton ne renferme pas, comme la nitroglycérine, une
quantité d oxygène suffisante pour la combustion complète de ses éléments.
Aussi les produits sont-ils fort compliqués, à moins de simplifier la réaction
en ajoutant du nitrate ou du chlorate de potasse. Soit d'abord la poudre-
coton seule, c'est-à-dire dans les conditions ordinaires de sou eniploi.
(*) D'après les expériences de MM. Girard, Millot et Vogl, le rendement effectif serait à
peu près la moitié du rendement théorique : i partie d'acide fournissant 0,6 de nitio-
glycérine au lieu de 1,2.
( 7^3 )
En discutant les résultats assez divergents des auteurs, je suis arrivé à
représenter sa déflagration par l'équation suivante, que je donne sous toutes
réserves :
2C"H'»0"'(ÂzO''H)' = 7C=0^ + i2C^0= + aC^'H^H- H -+- 3C-HAz
+ 9H=0' +5AzO^H-2Az.
« 2. I kilogramme de poudre-coton produirait ainsi, sous la pression
normale et à une température capable de vaporiser l'eau, 8oi'(i + cet).
)) La chaleur dégagée (') serait, pour i kilogramme, 700000 calories
environ, un peu plus que pour la poudre ordinaire, mais beaucoup moins
que pour la nitroglycérine.
Oj = i5,6 (-^^ ) ' •
' \ 1000 /
» I kilogramme de poudre-coton, brûlant dans un espace égal à i litre,
développera une pression théorique de 194000 atmosphères et une quan-
tité de chaleur de ii5ooooo calories.
» Pour obtenir le maximum d'effet de la poudre-coton, la théorie, d'ac-
cord avec les expériences les plus récentes, indique qu'il faut comprimer
cette poudre et la réduire au plus petit volume possible; en effet on accroît
ainsi le rapport — » qui règle les pressions initiales.
(*) Voici le calcul :
Système initial : 48C + 4oH -
Première marche
i{C" + W> + O") — iC?'WO-"' 784000
En admettant la même chaleur de
combustion pour le colon que poul-
ie sucre, rapporté au même poids
de carbone.
io(Az + 0'-l- HO) =ioAzO«H 200000
Réaction de l'acide sur le coton, éva-
hiée à 80000
1064000
Déflagration x
.r = 769000 pour logS^"' de poudre-coton.
Chaleur spécifique moyenne des produits à vo-
lume constant :
104X2,4
0,226 :
1098
f, =: 3980°, /?, = l5,6.
loAz +90O + loHO.
Deuxième marche.
7(C=-l-0<) +658000
1 2 ( C -I- 0-) -i-Sooooo
2(C^-t-H*) 4- 44000
3(C=+ H -f- Az) . . . . . — 60000— Sa
",„ ^, ' 066000
io(H + 0) ) ^
5(Az-f- 0=) 35ooo
2Az o
H o
ig43ooo — 3a
Vaporisation de 3C'HAz
etdegH^O^ iioooo
i833ooo
1064000
X := 769000
( 724 )
» 3. Comparons la poudre-coton avec les autres matières explosives.
Elle se distingue par la grandeur des pressions initiales, plutôt que par
le travail maximum. Ainsi la pression initiale donnée ci-dessus est triple
environ de celle de la poudre ordinaire, ce qui est précisément le rapport
empirique donné par Piobert (*); mais le tr'avail maximum est seulement
i^ fois aussi grand. Cette pression initiale théorique doit être d'ailleurs
diminuée dans la pratique, comme pour la poudre ordinaire, à cause de
l'état incomplet de combinaison des éléments et de la complexité des com-
posés qui tendent à se former. De là résultera une détente moins brusque et
plus régulière, par suite d'une combinaison devenue plus complète pendant
le refroidissement. La pression initiale et le travail développés par la pou-
dre-coton surpassent même ceux de la poudre au chlorate, mais sans en
différer beaucoup (**).
» Au contraire, la nitroglycérine à poids égaux réalise un travail double
et une pression initiale supérieure d'un tiers à ceux de la poudre-coton. Il
n'est donc pas surprenant que l'industrie ait trouvé la nitroglycérine pré-
férable, d'autant que celle-ci n'exige aucune compression préalable. Par
contre, il est plus facile de répartir la poudre-coton d'une manière uni-
forme dans un espace considérable, ce qui peut offrir certains avantages
dans les applications.
» 4. Au lieu d'employer la poudre-coton pure, on peut tâcher d'en
compléter la combustion par une addition convenable d'un corps oxydant.
Tel sera, par exemple, le mélange de 54 parties de pyroxylo et de 46 par-
ties de nitrate de potasse. Il répond à l'équation suivante
C^*H"'0"'(AzO''H)^+-4|AzO«K = 4|cO'K+19|CO=+i5HO+5Az.
» I kilogramme du mélange produirait, sous la pression normale et à
t degrés, l\i\^{\-\- a.i) de gaz permanents au-dessus de loo degrés; il en
produirait 4^4' (i + ot.t\ dans l'hypothèse de la vaporisation totale.
» La chaleur dégagée (***) sera i 018000 calories. On a encore
Wo = 22,0
' ' ' \IOO0 /
(*) Ouvrage drjà elle, p. 496.
(**) 1 kilograninic de poudre au chlorate brûlant dans un espace d'un litre développe
.1 1 000 000 calories; la poudre-coton, 1 1 ûooooo.
3 3 3
(***) Système initial : 24 C -h 20H -I- 9 j; Az -t- 4 ë"^ + 7^- ï ^ "•" ^'^O.
{^\oir la suite do la note ii la paye suivante.)
( 7^5 )
» I kilogramme brûlant dans une capacité égale à i litre développera
une pression théorique de i38ooo atmosphères et une quantité de chaleur
de 1 3 400000 calories. La pression initiale sera donc un peu moindre, et
le travail maximum un peu plus fort qu'avec le pyroxyle pur. La dissocia-
tion interviendra également à un haut degré, à cause de la complexité des
produits, pour abaisser la pression initiale et pour modérer la chute des
pressions successives.
» En somme, la théorie n'indique pas que l'addition de nitrate de potasse
au pyroxyle, assez incommode à réaliser en pratique, offre de grands avan-
tages, si ce n'est pour économiser le pyroxyle. Les expériences qui ont été
faites sur des mélanges analogues formés de cellulose nitrique, imprégnée
avec le nitrate de potasse, semblent conformes à cette manière de voir.
§ 5. Picrate de potasse pur ou mélangé.
» 1. Le picrate de potasse pur détone violemment sous l'influence
d'une chaleur assez forte; mais il est loin de renfermer assez d'oxygène
Première marche.
Formation de C"H"'0'° (AzO«H)'+ loHO 534ooo
3
Formation de AzO^K X4r SgSooo
I l32000
Déflagration .r
Deuxième marche.
3
Formation de 4 ^CO'K ; . . 6634oo
"y.
Formation de 19 - CO^ 91 1800
Formation de (i5 + 5) HO 690000
2235200
Vaporisation de 1 5 HO — 70000
2 I 65ooo
l l32O00
.E = I o33ooo
pour ioi4 grammes de mélange.
Chaleur spécifique moyenne des produits supposés gazeux et à volume constant :
tS X 2 ,4 ^ ,-
^^ , —0,177, ^. = 5750", /;, = 22''"",6.
( 7^6)
pour donner lieu à une combustion complète. De là la nécessité de le mé-
langer avec du nitrate ou du chlorate de potasse. On connaît la terrible
puissance des poudres Bobœuf, Designolles, Fontaine, etc. Examinons la
théorie de ces diverses matières explosives.
» 2. Soit d'abord le picrate de potasse seul. Les produits de son explo-
sion ne sont pas bien connus. Pour simplifier, et provisoirement, j'admet-
trai l'équation suivante
C'*H2K(AzO*)'0= = CO'R + H=0- + 9CO + Az' 4- 2C.
» D'après cette équation, i kilogramme de picrate de potasse fournira,
à la température t et sous la pression normale, 585''' (i -f- ut) de gaz per-
manents au-dessus de 100 degrés; il fournira 6i'j^'"{i -+- at), dans l'hypo-
thèse de la vaporisation du carbonate de potasse.
» La chaleur dégagée (*) peut être évaluée à 872000 calories; d'où
/627.
(*) Système initial : 12C + 6H -f- 3Az -+- K + i8o + 4H0.
Première marche.
Formation de C'-FfO- 34ooo
Formation de BAzO'^H 60000
Réaction évaluée à 24000
Formation <le KO dissoute 78000
Formation du picrate solide; environ 19000
2i5ooo
Déflagration x
Deuxième marche.
Formation de CO'K 1 87700
Formation de 9CO 11 aSoo
(2 -l-4)H0 207000
452200
Vaporisation de 2 HO . — c)5oo
447700
2i5ooo
• 282700
pour 267 grammes de picrate.
Chaleur spécifique moyenne à volume constant : o, 171
f, :=5l00°, yj, = U)""",7.
( 7^7 )
I kilogramme de picrate pur, déflagrant dans un espace d'nn litre, dévelop-
pera une pression théorique de 170000 atmosphères, et une quantité de
chaleur de 12 700 000 calories. Ce sont des chiffres intermédiaires entre
ceux qui répondent à la poudre-coton et ceux relatifs à un mélange de
poudre-coton et de nitrate de potasse; et ils diffèrent peu des nombres re-
latifs à la poudre au chlorate de potasse, mêlé de soufre et de charbon. Mais
ils l'emportent de beaucoup sur les nombres qui caractérisent la poudre
ordinaire au nitrate de potasse. La violence de la déflagration du picrate
de potasse pur n'a donc rien de surprenant.
» 3. Soit le picrate mélangé de nitrate de potasse, à poids égaux
C'='H^K(AzO*)'0^ + 2gAzO'R = 3|cO'R-+- 8 |C0' -i- H=0^+ 5 g Az.
I kilogramme de cette poudre développera à t", sous la pression normale,
337'''(i + ai) de gaz permanents au-dessus de 100 degrés; ou bien
4i3"(i4-af) dans l'hypothèse de la vaporisation totale. La chaleur dé-
gagée sera environ 957000 calories ('). D'où l'on tire
p^- = ^^'^{t^T'-
)) Les résultats ne diffèrent pas beaucoup de ceux de la poudre formée
de chlorate de potasse, de soufre et de charbon, ni même de ceux que
fournit le picrate de potasse pur. L'addition du nitrate de potasse au pi-
crate paraît seulement le rendre plus facilement inflammable, en abaissant
la température de la réaction commençante.
u 4. Soit enfin le picrate de potasse mélangé de chlorate, à poids égaux
C''H-K(AzO')'0=+2gClO»K=CO'R + 2gRCl-i-iiCO^-i-H=0^4-3Az.
I) Le volume des gaz permanents formés est exactement le même à poids
égal; il est aussi presque identique dans l'hypothèse de la vaporisation sa-
line. Mais la chaleur dégagée est plus grande, soit i4o5ooo calories par
kilogramme. D'où l'on tire (** )
» I kilogramme de cette poudre, détonant dans une capacité égale à
(*) C:= 0,145, f, = 6600°, /J, = 25,2.
{**) 0=0,1 35, /, = 10400", /;i = 39,i.
C. K., 1870, 2» Semestre. (T. LXXl, N» 21.) 97
( 7=8 )
I litre, développera une pression théorique de 186000 atmospliéres, et inic
quantité de chaleur égale à 17000000 calories; le travail maximum sera
donc 7200000000 kilogrammètres. Ces valeurs l'emportent sur celles de
toutes les matières explosives solides, et ne sont surpassées que par la nitro-
glycérine. Les avantages que la pratique a assignés à la nouvelle poudre
formée de picrate et de chlorate de potasse sont donc conformes à la
théorie.
» En résumé, la force et les propriétés mécaniques des diverses sub-
stances explosives n'avaient été comparées entre elles jusqu'à présent que
|)ar voie empirique. J'ai essayé d'établir cette comparaison sur des notions
théoriques, et l'on a pu voir que les déductions ainsi obtenues s'accordent
en général, et souvent d'une manière surprenante, avec l'expérience; il est
donc permis de les prendre pour guide, soit pour obtenir le maximum
d'effet des matières déjà connues, soit pour les associer avec d'autres sub-
stances, soit enfin pour découvrir des composés explosifs nouveaux qui
possèdent des propriétés déterminées à l'avance. »
ART MILITAIRE. — De la dynamite et de ses applications au point de vue
de la cjuerve; par M. P. Champion. (Extrait par l'Auteur.)
(Renvoi à la Commission nonunée pour les Communications
relatives à l'art militaire.)
« Le Mémoire que nous avons présenté à l'Académie, et qui a été fait
avec le concours de MM. Pellet et Grenier, renferme la préparation de la
dynamite el un grand nombre d'expériences relatives à ses applications.
» La nitroglycérine résulte, comme on le sait, de l'action d'un mélange
d'acide azotique et sulfurique sur la glycérine. La dynamite s'obtient par
l'addition à la nitroglycérine d'un corps inerte, qui a pour résultat d'en-
lever à cette dernière ses propriétés dangereuses. Ne disposant pas de la
silice particulière dont on se sert en Allemagne pour cet usage, après de
nombreux essais, nous avons employé de la terre cuite finement pulvérisée.
Le mélange a été fait dans les proportions de 75 de terre et de aS de nitro-
glycérine. Eu diminuant la proportion de terre, le produit obtenu est hu-
mide et peut détoner sous le choc. Certaines autres matières, que nous
n'avons pu nous procurer dans les circonstances actuelles, peuvent absor-
ber des quantités beaucoup plus grandes de nitroglycérine.
» Expériences. -^ Nos expériences ont été faites en vue d'étudier l'effet
de la dynamite: i" sur le bois; y." le fer; 3" la fonte; 4" 1« bronze;
( 7^9 )
5° l'acier. Nous en avons conclu que la dynamite peut être employée avec
succès pour briser les canons, abattre les palissades, détruire les ponts de
bateaux de fer, etc., etc. De plus, son action brisante et locale, toute diffé-
rente de celle de la poudre, permet, dans certains cas, de l'employer par
simple contact. Cette action brisante, comparée à l'action de la poudre, a
fourni avec une même charge, placée dans des bombes ou obus, un nombre
d'éclats beaucoup plus considérable.
i> Dans une expérience faite le lo novembre au Mont-Valérien, un obus
chargé de dynamite et introduit dans un canon a été retrouvé intact dans
un talus.
» Les propriétés de la dynamite n'avaient pas été modifiées sous l'in-
fluence du choc et de la chaleur produits par la combustion de la poudre.
)) On pourrait donc, en substituant la dynanùteà la poudre dans le char-
gement des projectiles creux, arriver à une économie notable, à tous égards,
le prix de la dynamite étant inférieur à celui de la poudre. »
AÉROSTAïION. — Principe d'un nouveau système d'aérostat dirigeable.
Note de M. Sorel.
(Commissaires précédemment nommés : MM. Morin,
Delaunay, Dupuy de Lôme.)
« Le principe sur lequel je m'appuie pour diriger les aérostats consiste
principalement dans les moyens de produire une différence de vitesse entre
celle du vent et celle du ballon, afin que le vent puisse agir sur les voiles
formant gouvernail et fasse, suivant un certain angle, dévier le ballon de
la ligne du vent en le dirigeant vers le but que l'on veut atteindre.
» A est la nacelle du ballon; BB la ligne de direction du vent; CC la
ligne du but de la marche du ballon : l'angle formé par ces deux lignes est
de 20 degrés; mais si, pour le même écartement de la ligne du vent, la
route à parcourir est plus longue, on marchera dans un angle beaucoup
plus aigu, attendu que la force de déviation dans le sens du but continue
pendant toute la durée du voyage; d, e ety sont trois voiles ou gouvernails,
sur lesquels le vent exerce son action pour pousser le ballon en avant et
lui faire prendre la direction voulue; gg et hh sont deux hélices: l'hélice gg^,
placée à l'arrière de la nacelle, a pour but de créer une résistance à l'action
du vent sur le ballon, afin de rendre sa vitesse moins grande que celle du
vent; sans cela, le vent ne produirait aucun effet sur les voiles. Si l'air était
sans mouvement, on ferait agir cette hélice en sens contraire, pour exercer
97--
( 73o )
une force de traction sur la nacelle. L'hélice hh, placée sur le côté de la
nacelle, a pour but d'exercer latéralement une force de traction, pour favo-
riser la marche de la nacelle dans sa direction vers son but. Les arbres ou
axes des deux hélices peuvent se mouvoir de droite à gauche et de gauche
à droite pour faire agir les hélices de la manière la plus convenable à la
marche et à la direction, mais s'il était trop difficile d'établir un mécanisme
pour dévier les hélices, on orienterait la nacelle de manière que les hélices
produisissent le meilleur effet possible. I est une ouverture pour le passage
du vent.
» L'orientation de la nacelle étant facile par les moyens que j'ai indiqués,
on pourra faire servir les parties latérales de l'arriére de la nacelle comme
récepteurs de l'action du vent dans le sens de la direction du ballon; pour
cela on donnera à la partie postérieure de la nacelle la forme d'un coin et
l'on garnira cette partie de manière que le vent ne puisse la traverser.
rt On voit que, par mon procédé, la marche et la direction du ballon
sont la résultante des forces combinées du vent agissant sur les voiles et de
l'action mécanique de l'hélice hh, prenant son point d'appui sur l'air.
L'hélice gg a pour but de créer une résistance à l'aclion du vent, afin qu'il
puisse exercer sa force sur les voiles, car, comme le dit un vieux proverbe,
0/1 ne peut s'appuyer ipie sur ce qui résiste.
( 73i )
)) Dans le cas où il n'y a pas de vent, l'hélice gg a pour effet de produire
une force de traction sur la nacelle. »
« CONSERVATION DES VIANDES. — M. i.E Secrétaire perpétuel présente,
au nom de 31. Eugène Pelouze, un Mémoire et des échantillons relatifs à
un procédé nouveau de conservation des viandes.
« L'auteur avait cru d'abord que son travail devait être communiqué à
l'Académie. En y réfléchissant et d'accord avec le Secrétaire perpétuel, il a
pensé qu'il était plus convenable d'en ajourner la publication. Il pourra en
faire profiter le pays, et il est inutile que d'autres partagent ce profit en ce
moment.
M Le procédé de M. Pelouze, dont le Secrétaire perpétuel a eu connais-
sance dès les premiers essais de l'autein-, réalise, à la lettre, un résultat qui
paraît au premier abord paradoxal. La viande se conserve à l'air libre,
avec son apparence, son odeur et son goûî, an moins pendant deux mois,
probablement bien plus longtemps, sans qu'on puisse, pour ainsi dire, y
trouver trace appréciable d'tm agent conservateur quelconque. Elle dimiiuie
de volume et se dessèche.
)) M. E. Pelouze semble avoir découvert de nouveau le procédé de
^'ilaris, pharmacien de Bordeaux, qui à la fin du siècle dernier préparait
des viandes capables de résister longues années à l'air libre et où l'analvse
n'a jamais révélé la présence d'un agent de conservation. Cette analogie
avait paru telle au Secrétaire perpétuel, dès qu'il a été initié aux premiers
résultats de M. E. Pelouze, qu'il en a conçu immédiatement des espérances
que l'événement justifie.
» L'expérience constate qu'on peut loger dans un mètre cube environ
700 kilogrammes de viande fraîche, séparée des os, représentant soit
40 moutons, soit 3 ou 4 bœufs. Ces quantités seraient peut-être doublées,
s'il s'agissait de la viande conservée par le procédé nouveau. Le transport
parchemin de fer en serait donc rendu bien plus facile, et si, comme tout
porte à le croire, la durée de la conservation le permet, il en serait de
même du transport par mer.
» L'Académie accepte le dépôt du Mémoire de M. E. Pelouze, sous
forme de paquet cacheté. »
M. Bouvet soumet au jugement de l'Académie un Mémoire, accompagné
de planches, sur un aérostat dirigeable.
( 732)
31. Brachet adresse un « Résumé des conditions aérostaliques ».
MM. Lassimox\e, Rutv, Bakbou, Alvarez adressent diverses Notes re-
latives à raérostation.
(Ces Communications sont renvoyées à l'examen de la Commission précé-
demment nommée, Commission qui se compose de IVlM.Morin,DeIaunay,
Dupuy de Lôme).
CORRESPONDANCE.
La Société d'Acclimatation adresse à l'Académie la Lettre suivante :
« Dans sa séance de rentrée, la Société d'Acclimatation a pris connais-
sance de la Déclaration publiée par l'Institut de France, en prévision du
bombardement de Paris. A l'unanimité, elle a déclaré adhérer à cette noble
protestation de l'intelligence contre la barbarie.
» La Société a décidé, en outre, qu'il serait adressé à chacune des Aca-
démies composant l'Institut un extrait de son procès-verbal, constatant son
adhésion et exprimant sa gratitude pour l'initiative prise par notre premier
corps savant, en faveur des trésors scientifiques, artistiques et littéraires
qui sont réunis dans la capitale de la France. »
HYGIÈNE PUBLIQUE. — De l'injluence du café et du cacao sur l'alimentation.
Deuxième Note de M. Rabdteau, présentée par M. Bertrand.
« Dans une Note adressée à l'Académie le 12 septembre dernier, après
avoir rappelé les effets du café et de la caféine sur la nutrition, j'ai fait
connaître les premiers résultats d'une expérience que je faisais en ce mo-
ment sur l'alimentation par le cacao et le café. Cette expérience étant ter-
minée depuis quelque; temps, je vais la citer brièvement en entier.
» J'ai pris deux chiens de taille ordinaire, aussi identiques qu'il m'a
été possible de les trouver. A l'un d'eux, j'ai donné chaque jour, pour
toute nourriture, 20 grammes de pain, 10 grammes de beurre frais et
10 grammes de sucre; à l'autre, 20 granunes de cacao, 10 grammes de
sucre et une infusion de 20 grammes de bon café torréfié. Cette dernière
ration contenait en poids moins de matières solides que la précédente. Le
premier chien a maigri rapidement; il a été bientôt réduit à un état d'ex-
ténuation extrême, et j'ai pu observer sur lui tous les effets de l'alimenta-
( 733 )
tion insuffisante, effets si bien signalés par Chossat. Enfin cet animal a suc-
combé au bout de vingt-neuf jours du régime auquel je l'avais soumis.
» Le second chien, celui qui était soumis an régime du café et du
cacao, a conservé pendant fout ce temps ses allures habituelles et les at-
tributs de la santé. Il a maigri, il est vrai, mais infiniment moins que le
premier chien, et il se portait très-bien lorsque celui-ci a succombé. Étant
obligé de me trouver chaque jour aux remparts, je n'ai pu continuer de le
nourrir, de sorte que je l'ai abandonné sans lui donner aucun aliment, si-
non de l'eau qu'il a eue à sa discrétion. Il est mort au bout de quatre jours;
mais il a paru évident à toutes les personnes qui ont pu le voir que cet
animal aurait vécu au moins encore un mois, sous l'influence du régime
au cacao, au café et au sucre, qui lui était distribué journellement en si mi-
nime quantité.
» Cette expérience vient confirmer ce qui a été observé en Amérique
par M. de Parville; elle prouve que le café et le cacao sont des aliments
d'épargne; que s'ils ne contribuent pas beaucoup à la nutrition, ils empê-
chent la dénutrition; en d'autres termes, ces substances agissent, suivant
l'expression de M. Cl. Bernard, comme la cendre qui est jetée sur le feu.
C'est pourquoi, de même que l'alcool et le vin de bonne qualité, elles sont
utiles aux travailleurs et en général aux personnes qui mangent peu; aussi,
ne saurait-on trop recommander l'usage du bon café au milieu des circon-
stances où nous nous trouvons.
» La torréfaction dii café est une opération délicate qui, lorsqu'elle est
mal faite, peut annihiler les effets de cette précieuse substance sur la nu-
trition. J'ai employé, au début de l'expérience-que je viens de rapporter,
du café que j'avais torréfié moi-même par un procédé particulier; je me
suis servi ensuite avec avantage du café Dubois. Ce café, qui est torréfié à
l'air chaud, renferme plus de caféine que n'en retiennent les cafés torréfiés
par le procédé ordinaire; il contient en même temps moins de caféone.
Or, d'après ce que j'ai signalé dans une Note antérieure, la caféine est le
principe véritablement actif du café, celui qui modère la nutrition, tandis
que la caféone, huile essentielle développée par la torréfaction, agit d'une
manière bien différente.
» En effet, j'ai reconnu à la caféone les propriétés excitantes attribuées
au café. Chacun sait que l'infusion de café empêche le sommeil et que cet
effet n'est pas constant. On a attribué à tort cette différence d'action à
l'idiosyncrasie; c'est à la différence de composition du café qu'il faut la
rapporter. Tandis qu'une infusion de café contenant beaucoup de caféone
( 734 )
arrête le sommeil, on peut dormir après l'usage d'une infusion qui a été
débarrassée de caféone par une ébullition prolongée, et de celle qui a été
préparée avec du café trop torréfié ou du café vert, qui renferme cependant
une faible quantité d'une essence particulière qui lui donne son odeur ca-
ractéristique. Enfin j'ai reconnu que la caféone, de même que toutes les es-
sences, est toxique; ainsi, il m'a été impossible de constater la présence
d'un seul infusoire dans une infusion de café torréfié; mais des champi-
gnons peuvent se développer à sa surface. Ces champignons filamenteux
portent à leurs extrémités des spores groupées de manière à offrir un
aspect élégant qui rappelle l'inflorescence de l'œillet. N'ayant pu conti-
nuer mes recherches, je suis obligé de me borner aujourd'hui à ce simple
énoncé. »
« M. Païen dit qu'il lui parait impossible d'admettre, d'une manière
absolue, que le cacao seulement soit un aliment d'épargne, en présence
des faits nombreux et concordants qui établissent le contraire.
» Qui ne sait en effet qu'à l'époque de la conquête, les Espagnols
avaient reconnu non sans étonnement l'état de santé florissante des popu-
lations américaines qui faisaient du cacao broyé leur principale nourriture
et supportaient, sous l'influence de cette alimentation, les fatigues de longs
voyages accidentés (i); que, dès les premiers temps de l'introduction de
l'usage du chocolat en France, les mêmes qualités nutritives de cette déli-
cieuse boisson aromatique ont été reconnues par le plus grand nombre des
personnes qui la peuvent utilement digérer. M'"^ de Sévigné, dont la
santé délicate était très-affaiblie à cette époque, supportait péniblement les
abstinences qui lui étaient imposées à certains jours, elle s'en était souvent
expliquée; mais, disait-elle plus tard, « depuis que le chocolat se trouve
» au nombre des boissons permises sans interrompre le jeune, avec cette
» seule boisson je puis très-bien résister sans en souffrir aux jeûnes les plus
prolongés. »
n Les qualités nutritives du cacao ont été reconnues de même expéri-
mentalement par un très-grand nombre de consommateurs chez les diffé-
rentes nations où l'usage s'en est successivement répandu.
» Comment admettre qu'une amande, douée de l'arôme si agréable dé-
veloppé par la chaleur, et qui provoque l'appétit, soit dépourvue de qualité
( i) C'est sans aucun doute, (le cacao) un Jes aliments les plus sains et les plus prorap-
tenient réparateurs que l'on connaisse. Boussinjjault, Économ. rurale, i, I, p. 470.
(735)
nutritive, lorsque, dans sa composition immédiate, on trouve, suivant les
auteurs les plus autorisés, i^ à 20 centièmes de substances albumineuses,
10 à 12 d'amidon en granules discernables au microscope, 4o à 5o de ma-
tière grasse neutre, douce, peu susceptible de rancir, et des substances
salines (phosphates notamment) propres à d'autres fruits ou graines ali-
mentaires ? Il existe d'ailleurs une notable différence entre les liquides pré-
parés avec le café, le thé et le chocolat : les deux premiers renferment seu-
lement une partie des principes solubles extraits par infusion, le dernier
contient la totalité des substances solubles et insolubles, et notamment les
matières amylacées, albuniiiioïdes, sucrées et grasses considérées comme
des aliments les uns plastiques, les autres respiratoires.
» Sans doute, en dehors des substances albumineuses, rien n'indique ni
ne prouve que le principe immédiat azoté cristallisable appelé théobromine,
pas plus que la caféine et d'autres principes immédiats cristallisés stables,
soit assimilable; mais ce principe particulier au cacao ne semble pas pouvoir
mettre obstacle à la propriété alimentaire des autres produits dix fois plus
abondants et qui, relativement à d'autres fruits, constituent l'ensemble des
substances nutritives de ces produits de la végétation.
» Il ne faudrait pas moins que des expériences physiologiques compara-
tives, sur l'emploi du cacao associé à des substances nutritives peu sapides,
plus particulièrement chez les hommes, ce qui ne saurait offrir d'in-
convénient, pour apprécier sainement le rôle du cacao et de ses prépara-
tions usuelles dans l'alimentation, l'entretien de la force et de la santé. On
doit en effet tenir compte, dans les propriétés utiles du cacao, de l'arôme
qui excite les forces digestives et facilite l'assimilation des substances peu
sapides telles que le pain ajouté au chocolat, comme cela est parfaitement
démontré à l'égard du bon bouillon. «
« M. Dumas demande la permission de réserver son opinion, en ce qui
concerne le cacao et ses préparations. Que le café ne soit pas un aliment,
rien ne s'y oppose. Mais pour le cacao, qui renferme le tiers de son poids
de matière albuminoïde ou de fécule et la moitié de son poids i\c beture <!t
qui, converti en chocolat par l'addition du sucre, réalise !e type d'un ali-
ment complet, c'est différent. Si l'aliment complet pour l'homme semble
résulter de certaines proportions de matières albumineuses, grasses, sucrées
ou féculentes, le chocolat semble en réaliser les données et demeiner com-
parable au lait.
» Il est impossible de croire que le caractère du cacao et celui du cho-
colat, à titre d'aliment, puissent être attribués à la théobromine qu'on y
C. R., 1870, 2« Semestre. (T. LXXI, N» «21.) 9^
( 736 )
rencontre; le cacao n'en contient que 2 pour roo, et elle ne peut avoir
d'autre effet, si elle exerce une action spécifique, ce qui est probable, que
d'en prolonger l'action nutritive sans la détruire. »
M. E. Cbevreul s'exprime comme il suit :
« Je ne connais pas les expériences de M. Rabuteau, que M. Bertrand
vient de présenter à l'Académie, mais des observations auxquelles elles ont
donné lieu me suggèrent quelques réflexions que je crois devoir soumettre à
mes confrères.
» En principe, rien de plus difficile dans l'état actuel de nos connais-
sances que de prononcer au nom de la science sur l'intensité de la propriété
nutritive de tel aliment ou de tel autre, à cause de la grande différence
existant entre V idiosyncrasie des individus, et ici j'invoque mon expérience
personnelle.
» Toutes les personnes de ma famille buvaient du vin, tandis que, dès
mon plus jeune âge, une répugnance invincible m'en éloignait, et cette
répugnance dure encore. Même aversion du poisson, dégoût d'un grand
nombre de légumes, et je n'ai jamais pu me résoudre à boire du lait pur.
Conclurai-je de là que le poisson, les légumes que je n'aime pas et le lait
ne sont pas nutritifs? Non certainement, parce que je tiens compte d'un fait
général, quoiqu'en opposition avec mon idiosyncrasie.
» Je viens d'entendre que le café et le chocolat agissent de même. Quant
à mon idiosyncrasie, ils sont tout à fait différents : le café me soutient sans
que j'accepte à présent les raisons qu'on a données pour en expliquer l'effet,
tandis que le chocolat, dont le goût m'est agréable, me fait sentir le besoin
de manger une ou deux heures après l'avoir pris, effet opposé à celui du
café. Consulté dans les premières années de la conquête de l'Algérie sur
l'usage du café pour l'armée, je n'hésitai pas à le recommander avec insis-
tance, de préférence aux s|)iritueux, et le temps a prononcé que je n'avais
pas tort.
» M. Wnrtz a émis l'opinion qu'il peut y avoir dans la nutrition mie
grande différence entre tel aliment renfermant des principes albiunineux et
tel autre renfermant autant il'azote faisant partie de principes immédiats
cristallisables. Je partage son opinion, et je crois en avoir donné la raison
dans le Mémoire du dernier Compte rendu,
» A cette occasion, j'cx|)rimerai ma manière de voir relativement à Vesti-
malion de la qualiLé alimentaire d\iprès la proportion de l'azote contenue dans
les aliments.
( 73? )
» Je m'occupe depuis trop longtemps de l'analyse organique immédiate
pour ne pas être convaincu de la nécessité absolue de la consulter dans la plu-
part des questions du ressort des sciences de la vie; car les pliéiiomènes des
êtres vivants étant inhérents aux principes immédiats 'qui les constituent,
négliger la connaissance de la nature spécifique de ces principes dans la dis-
cussion des faits relatifs à l'alimentation, c'est s'exposer à l'erreur. Effec-
tivement, établir une échelle des aliments sur la proportion de leur azote
élémentaire, c'est donner prise à une critique qui a quelque analogie avec
celle qu'on a faite des travaux des premiers membres de cette Académie
qui se livrèrent dès sa fondation, durant trente ans environ, à des recher-
ches dont le but était de connaître les propriétés des plantes d'après les pro-
duits de leur distillation sèche (i). Si cette proposition est erronée depuis que
l'analyse organique immédiate a pu déterminer de la manière la plus pré-
cise tant d'espèces de principes immédiats organiques doués de propriétés
si remarqubles, ne perdons pas de vue l'époque des travaux de nos prédé-
cesseurs; la première théorie chimique, celle du phlogistique, n'existait
point encore, et l'idée des affinités chimiques ne fut introduite dans la
science que de l'ji'] k 1718.
» Je ferai remarquer qu'il y avait un progrès réel lorsque Dodart et ses
collaborateurs pensèrent avec raison, tout en reconnaissant la théorie des
quatre éléments, que les propriétés des êtres vivants en général^ et celles
des plantes en particidier, résidaient immédiatement dans des composés
de ces quatre éléments et non dans ces éléments mêmes; en cela ils envisa-
geaient la constitution des êtres vivants, comme les esprits les plus élevés
et les plus scientifiques des alchimistes avaient envisagé les métaux en les
considérant comme formés immédiatement de soufre, de mercure et de sel,
lesquels soufre, mercure et sel étaient chacun composés des quatre élé-
ments. Eh bien! il est désirable que les savants modernes ne s'exposent pas
au reproche fait aux anciens académiciens, en cherchant la solution de la
question cjui nous occupe en dehors des principes immédiats des aliments :
il fuit, pour que l'analyse élémentaire ne trompe pas, et partictdièrement
la proportion dé l'azote, ne soumettre à des analyses élémentaires compa-
ratives que des aliments réputés analogues par un long usage. A cette con-
(i) En faisant l'histoire de ces travaux dans plusieurs articles du Journal des Sai'nnts
(février, octobre, novembre i858), j'ai montré qu'ils avaient été mal jugés, et que des choses
excellentes et originales avaient été injustement méconnues des critiques. Quant à la pensée
qui avait institué ces travaux, elle était élevée; mais l'état de la science ne permettait de
faire que ce qu'on a fait alors.
98..
( 73«)
dition seulement le résultat de l'analyse élémentaire aura quelque valeur.
» J'étends cette manière de voir à l'analyse des engrais : le dosage de
l'azote ne doit jamais être séparé de la prise en considération du temps que
l'engrais met à se décomposer dans les circonstances où il est employé,
c'est-à-dire relativement au sol, au climat et à la plante qu'il doit nourrir.
» Je demanderai si, un aliment ou une matière proposée comme tel ren-
fermant de l'urée, son azote serait compté ou exclu de la quantité de l'élé-
ment qui le classe dans l'échelle des aliments? La question ainsi posée
prouve la nécessité de recourir à l'analyse immédiate, qui seule est com-
pétente pour savoir si l'urée existe ou n'existe pas dans^l'aliment soumis à
l'examen dont je parle.
M Enfin je me demande quelle est l'origine de l'azote qui est évacué, sous
forme d'urée et d'acide inique, des corps de l'homme et d'animaux supé-
rieurs à l'état adulte et supposé invariables de poids dans les vingt-quatre
heures?
)) L'azole vient-il immédiatement de l'aliment, ou vient-il de principes
immédiats préalablement formés, qui, après avoir satisfait à des actes que
la science ne connaît point encore, seraient usés, qu'on me passe cette
expression, et dès lors expulsés des corps vivants à l'état excrémentitiel ? En
ce cas, cette excrétion serait conforme à l'opinion de la réiiovalion de la
matière des organes vivants. Quoi qu'il en soit, la formation de l'urée et
de l'acide urique simultanée avec la respiration a-t-elle de l'influence soit
pour augmenter, soit pour diminuer la chaleur animale? C'est une ques-
tion qu'il me paraît utile de proposer. »
ZOOLOGllî HISTORIQUE. — Note sur riiistoiredu chai (lomesluiuc dans tnnlicjuilé;
par M. F. Lexokma.nt (i).
« J'ai dit dans une précédente Note que l'Egypte a été le berceau du
chat comme animal domestique. C'est aussi l'opinion deLink [UrwcU^ t. I,
p. 393), qui pense même qu'il n'a été introduit qu'au moyen âge en Eu-
rope et dans une grande partie de l'Asie. Je crois que sur ce dernier point
il y a lieu de modifier le dire du naturaliste allemand, et que ma propre
proposition, vraie en ce qui touche les civilisations du bassin de la Médi-
terranée, doit être aussi rectifiée, en ce que le chat paraît avoir été reçu tout
domestiqué par les Égyptiens d'autres populations africaines à une époque
(i) L'Académie a décidé que cette Communication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Comi/tc rrridit.
( 739)
que l'on peut déterminer. Au reste, l'exposé des faits relatifs à l'histoire du
chat domestique dans l'antiquité me semble prêter à quelques remarques
intéressantes.
» Si le chat, à partir d'une certaine date, a joué un grand rôle en Egypte,
sa domestication est loin de remonter aussi haut que la civilisation égyp-
tienne elle-même. On ne trouve aucune trace de cet animal dans toute la
durée de l'Ancien Empire, où pourtant les représentations familières sont
si nuiltipliées et où les sculptures des tombes nous offrent le tableau complet
de la faune domestique du pays pendant cet âge si reculé. Il est même à
remarquer que dans les monuments des dynasties primitives la déesse Bast,
qui plus tard est une déesse-chatte, est alors toujours et exclusivement une
déesse-lionne. C'est seulement sous la XIP dynastie, avec les conquêtes
dans le pays de Kouscli, que le chat commence à se montrer. Les plus an-
ciens monuments où il figure sont les tombeaux de Béni-Hassan. Il apparaît
alors en même temps que le chien de Dongolah et tout paraît indiquer qu'on
doit le regarder également comme un animal importé sous les Osorlasen et
les ^menemhé, ou bien un peu avant sous les Entef, des pays situés sur le
cours supérieur du Nil, où les indigènes l'avaient déjà réduit en domesticité.
Mais aussitôt introduit en Egypte il s'y multiplia de la façon la plus rapide,
y devint d'un usage général et y fut revêtu d'un caractère sacré.
» Au reste, le chat de l'antique Egypte, tel que nous le connaissons par
les représentations des monuments et par ses momies, diffère spécifique-
ment de notre chat le plus communément répandu, du chat de gouttières.
Si ce dernier descend certainement du chat sauvage de nos'forêts [Felisca-
tus,h.), Rûppel a établi avec non moins de certitude que la souche origi-
naire du chat domestique des anciens Égyptiens était son Felis maniculata,
espèce qui se rencontre encore à l'état sauvage dans la Haute-Nubie, ou
Soudan égyptien. Il est vrai que certaines de nos variétés de chats, eutre
autres le chat d'Espagne, dont l'origine se rattache dans la Péninsule aux
invasions arabes, paraissent provenir d'une hybridation des deux espèces
que nous venons de distinguer. H y a donc eu dans les contrées occiden-
tales de l'Europe à la fois introduction de l'ancien chat égyptien et domes-
tication du Felis caliis, qui, à l'état sauvage, est indigène de nos forêts, que
les habitants des cités lacustres de la Suisse à l'âge de pierre y chassaient
déjà et mangeaient comme gibier. De là dérive, comme conséquence forcée,
si l'on parvient à établir la récente apparition du chat en tant qu'animal
domestique en Europe, que l'introduction de l'espèce étrangère a dû avoir
lieu d'abord, et que l'espèce indigène n'a commencé à être ensuite domes-
tiquée qu'à son exemple.
( 74o)
» Remarquons d'abord que si la domesticité du chat est plus antique en
Egypte que chez aucun peuple du bassin méditerranéen et de l'Asie anté-
rieure, cet animal ne s'introduisit que tardivement, même chez les popula-
tions sémitiques les plus voisines. Il n'en est pas fait une seule fois mention
dans la Bible, et l'on ignore s'il a jamais eu un nom en hébreu. Les Assy-
riens et les Babyloniens n'ont point connu le chat, et dans leur nomencla-
ture idéographique et scientifique, qui admettait un nom générique fixe et
un nom spécifique variable comme la nomenclature linnéenne (indice
d'un esprit de méthode bien rare chez les peuples antiques), ils rappor-
taient le lion et la panthère, comme les autres carnassiers, ati genre des
chiens, faute d'un point de comparaison plus rapproché dans leurs ani-
maux domestiques. Et quand le chat réduit en domesticité commença à se
répandre chez les Sémites, ce fut le chat d'Egypte. Aussi l'écrivain arabe
Razwini (cité par Bochart, Hierozoïcon, liv. III, ch. xiv) distingue-t-il en-
core comme deux animaux tout à fait différents ce chat domestique et le
chat sauvage de l'Asie occidentale, qui est le même que le nôtre.
» Le chat, si fréquemment représenté sur les monuments égyptiens, est,
au contraire, totalement absent des monuments grecs ou romains; je n'en
connais pas une seule figure dans les œuvres de l'art classique. Et n'osant
pas m'en fier exclusivement sur ce point à mes propres observations, j'ai
consulté M. de Longpérier, dont la haute expérience et la vaste érudition
en matière d'antiquité figurée font justement autorité dans la science; il
m'a répondu avoir fait la même remarque et n'avoir jamais rencontré
aucune image de chat, grecque ou romaine, si ce n'est une fois, comme
type accessoire sur une monnaie de Tarente. Mais ces médailles offrent, à
la même place, la figure de tant d'objets différents, empruntés à la faune
sauvage de la contrée, qu'on ne peut en tirer aucune induction formelle
sur l'existence du chat domestique dans l'Italie méridionale à l'époque où
fut frappée la pièce de Tarente, un peu avant les guerres de Pyrrhus. On
peut penser que c'est le ciiat sauvage que le graveur monétaire a voulu y
représenter. Fabretti, dans son recueil d'inscriptions (p. 187, n° /jaS), cite
aussi une pierre ftméraire de Rome où il dit avoir vu sculptée la figure
d' « un chat marchant », par allusion au nom de la déhinle Cali>urnin Feli-
nila. Le monument ayant depuis longlemps disparu, on ne peut savoir si
l'animal y était caractérisé avec quelque certitude; et d'ailleurs l'inscription
n'est pas antérieure au 11* ou au m* siècle de notre ère, époque où nous
allons voir que le chat domestique commençait à être répandu dans le
monde romain. Orelli a déjà remarqué que le nom propre féminin Felicula,
« petite chatte », ne conunençait à paraître qu'à une époque assez basse.
( 74i )
» Ce qui est bien positif, c'est que, pour les Grecs de la belle époque,
le chat, aiAovpoç, n'est dans leur pays qu'un animal sauvage habitant les
forêts (Aristote, Hist. antin.^ V, 2, 3); ils ne le connaissent à l'état domes-
tique qu'en Egypte, où Hérodote signale son caractère sacré. C'était la
belette ou plutôt la fouine, ^aAî;, que les Grecs élevaient dans leurs mai-
sons pour détruire les rats, et qui y demeurait toujours dans im état plus
qu'à demi-indépendant. Les témoignages des écrivains helléniques, depuis
l'auteur de la Batraclwmyomachie, sont unanimes à cet égard, et il suffit
de renvoyer à ce qu'en a dit Bureau de lu Malle dans les Annales des sciences
naturelles de juin 1829. Ce sont seulement les écrivains byzantins du
moyen âge, comme Moschopoulos, qui, après que le chat eut complète-
ment supplanté la belette dans le rôle de protecteur des maisons contre
les rats et les souris, appliquèrent au chat le nom de yaXin; dans toute
l'époque antique il n'y a pas de doute possible sur le sens réel de ce mot.
>) Chez les Romains aussi, jusqu'à la fin du 1"^ siècle de notre ère, c'est
la muslela, identique à la yxAn des Grecs, que l'on voit élevée dans les
habitations pour le même objet, connue le prouvent les témoignages de
Plante {Siicli., act. III, se. 2, v. 43) et de Pline [Hist. nat., XXIX, 4, 16).
Le mot fêles ou felis a d'abord désigné cet animal. Varron [De re nist., III,
II) ne lui donne pas d'autre sens, et Columelle (VIII, i4) et Phèdre
(II, fab. 4) emploient ce mot également pour désigner la belette ou la
fouine. Mais ensuite, et dès la fin de la République, il fut appliqué au chat,
que les Romains commençaient alors à connaitre, par suite de l'analogie de
l'emploi qu'on en faisait. Cicéron [Tusculan., V, 27) se sert du mot felis en
parlant des chats divinisés de l'Egypte. Chez Pline, felis désigne aussi le
chat; mais il ne mentionne cet animal que parmi les espèces sauvages
{Hist. nal., X, ^3, 94; XI, 3"^, 65), bien qu'il ait eu l'occasion de le voir
déjà chassant les rats dans les maisons et qu'il décrive très-exactement sa
manière de procéder en pareil cas. A la même époque Babrius {Fab. 1 7
et 121) fait intervenir le chat domestique dans ses fables, où la critique a
déjà reconnu de nombreux indices d'origine syrienne. C'est seulement au
iv^ siècle après J. C. que le chat paraît devenir d'un usage général et habi-
tuel dans le monde romain comme animal domestique, en même temps
que se montre le véritable nom qui a toujours désigné spécialement et
exclusivement cette espèce, catas. On le rencontre pour la première fois
chez l'agronome Palladius (IV, 9) et dans une épigramme de l'Anthologie
latine (V, 162).
» Le savant M. Pictet {Les origines indo-européennes^ t. I, p. 38 1) a établi
avec son érudition et son autorité habituelles que les noms du chat dans
( 7^2 )
toutes les langues européennes n'appartiennent pas au vieux fonds du lan-
gage aryen, qu'ils sont de date récente et qu'ils tirent tous leur origine du
latin caiiis, passé aussi sous la forme -/.itTo; dans le grec byzantin. C'est
donc par les Romains que le chat domestique fut répandu en Occident,
quand eux-mêmes l'eurent adopté à l'époque où les usages orientaux
s'implantaient de plus en plus dans l'Empire. Mais l'éminent philologue a
été encore plus loin et a fait voir que le mot caliis portait en lui-même le
certificat d'origine de la contrée d'où les Romains avaient alors tiré l'em-
ploi du chat à l'état de domesticité, comme tant d'autres habitudes sy-
riennes. Catiis déri%'e en effet du syriaque kalô^ arabe kitlifit.
•» Mais le mot kntô est lui-même en syriaque un mot tiré d'une sotirce
étrangère, qui ne se rattache pas à une racine sémitique. Ici encore M. Pic-
tet, en reconstituant l'histoire du mot, donne un précieux fil conducteur
pour suivre la transmission de l'animal de peuple en peuple. Il prouve en
effet qu'il provient primitivement des langues africaines et dérive du type
qui a produit l'affadeh (du Bornou) gâda, le nouba kadiska, et le barabra
kaddhka.
» On doit remarquer ici que l'égyptien semble former une interruption
dans cette chaîne de transmission de noms. Car les mots qui désignent le
chat dans l'idiome antique, maii, et dans le copte, scliau, n'ont aucune pa-
renté avec ceux que nous venons de citer. Mais en voyant que c'est avec
les langues des populations au sud de l'Egypte qu'est apparenté le nom
arabe du chat, déjà universellement répandu dans la Péninsule avant l'is-
lamisme, n'est-on pas induit à supposer que le nom et l'animal durent
s'introduire à la fois chez les Arabes par les contrées méridionales, par le
Yéinen, doiU les relations ont toujours été si intimes et si fréquentes avec
la côte africaine voisine? Le chat domestique, que les Sémites des temps
bibliques n'avaient pas emprunté à l'Egypte, aurait été ainsi porté plus tard
des pays du Haut-Nil et de l'Abyssinie en Arabie, et de là en Syrie, d'où il
passa ensuite à Rome et dans l'Europe occidentale.
» L'existence du chat comme animal domestique est fort ancienne dans
l'Inde. Cependant il n'était connu, ni des Aryas primitifs de la Bactriane,
ni même de ceux de l'âge védique, et par conséquent il doit jMovenir dans
l'Inde d'une importation extérieure. Aussi ses noms sont-ils des composés
purement sanscrits, dont le sens ne peut faire l'objet d'iui doute, comme
mntidirapaçu^ « l'animal de la maison », çnlavrka^ « le loup de maison »,
akhubug\ « le mangeur de rats «, niûscliakàrali, « l'ennemi de la souris ».
Un seul de ces noms, celui de viràla ou vilain, semblerait au |iremier abord
offrir une certaine parenté avec le grec aiKovpoç, que l'on pourrait sup-
( 743 )
poser avoir été primitivement FaiKovfoç. Mais cette ressemblance est pure-
ment fortuite, car cLiÀoufoç est un composé tout grec pour a'ioÀovpoç, « l'a-
nimal qui dresse sa queue en panache ».
» Cependant, si le chat domestique fut certainement inconnu des Aryas
primitifs, il ne put pas en être de même du chat sauvage. Le nom par le-
quel ils le désignaient paraît être celui qui a laissé ses traces dans un grand
nombre de langues de la famille, s'appliquant le plus souvent à l'animal
sauvage, mais quelquefois aussi à l'animal domestique. C'est le persan
puschak, afghan pischik, kurde psiq, luthuanien puijê, irlandais pus etfei-
sag, ersa pusag et piseag, d'où l'anglais puss. Ce nom a passé en turc sous
la forme pischik. Ainsi que l'a remarqué M. Pictet, il semble dérivé de la
racine qui est en sanscrit putchlui, pitchha, « queue », et par conséquent
avoir été emprunté à la même particularité de la démarche de l'animal que
le grec oLiXovpoç.
» J'ai peut-être un peu trop insisté sur ces derniers détails, mais ils
m'ont paru avoir quelque intérêt en fournissant un exemple de plus des
lumières précieuses que la zoologie peut demander à la philologie compa-
rative pour l'histoire des espèces domestiques et leur transmission parmi
les anciens peuples. »
GÉOLOGIE COMPARÉE. — Relations stratigrapinques entre diverses roches
météoriques; par M. St. Meitniek.
« Les météorites Ont été surtout étudiées jusqu'ici au point de vue de
leur composition élémentaire et de leur constitution minéralogique, et il en
est résulté un ensemble de notions fort importantes, quant à la nature chi-
mique et lithotogique de ces masses extra-terrestres. Mais, à côté de ces
études, il m'a semblé utile de chercher à en instituer d'autres, dont le but
est de nous fournir des données géologiques relatives aux méiéorites.
» En effet, mettant pour le moment de côté la question de savoir d'où
elles proviennent, nous pouvons nous demander si des météorites, diffé-
rentes les unes des autres au point de vue lithologique, n'ont pas été à une
époque inconnue en relation de position.
» Déjà on a émis l'idée très-vraisemblable que les masses de nature iden-
tique dérivent d'un même gisement originel, mais on ne peut donner au-
cune preuve bien satisfaisante à l'appui de cette opinion, puisqu'il suffit
de supposer l'exercice des mêmes causes dans des régions diverses de l'es-
pace, pour comprendre la formation de masses identiques quoitjue indépen-
dantes.
C R., 1870, 2« Semestre. (T. LXXI, N" 21.) 99
(744 )
» Si l'étude de météorites semblables entre elles ne saurait, à elle seule,
être concluante, il y aurait au contraire le plus vif intérêt à démontrer
luie communauté d'origine entre des météorites différentes les unes des
autres au point de vue de leur nature lithologique. Or, tel est le résultat
auquel je crois être arrivé, dans plusieurs circonstances qui me paraissent
se prêter un mutuel appui en concourant à une même démonstration.
ij Évidemment, on ne saurait arriver à la découverte de relations strati-
graphiques entre divers types de météorites, si les échantillons que nous
possédons étaient tons homogènes, c'est-à-dire formés d'une même roche
dans toutes leurs parties. Mais il n'en est point ainsi; à côté de météorites
monogéniques, on en connaît depuis longtemps qui sont de nature ]>olycjé-
nique, c'est-à-dire qui sont comparables aux brèches terrestres, étant for-
mées comme celles-ci de fragments anguleux, cimentés ensemble, mais
différents les uns des autres.
» Cela posé, il est clair que si, dans les fragments dont la réunion
constitue nue brèche, on retrouve tous les caractères de composition et
de structure propres à des météorites monogéniques, on sera en droit d'en
conclure que ces derniers ont été quelque part en relations stratigra-
phiques entre elles et avec la brèche. Des faits de ce genre m'ont été
fournis par l'étude de la riche collection de météorites du Muséum ;
j'en indiquerai quelques-uns.
» Il est tombé en 1866 à Saint-Mesmin (Aube) une pierre qui, étudiée
au point de vue nouveau dont je viens d'essayer de faire comprendre
l'intérêt, se montre constituée par le mélange de deux roches tout à fait
distinctes. L'une, blanche, grenue et serrée, forme des fragments anguleux
de grosseur très-variable que la seconde, brune et relativement poreuse,
empâte. Ayant étudié séparément ces tleux roches, j'ai trouvé que la pre-
mière est rigoureusement identique à celle que j'ai antérieurement désignée
sous le nom de lucéite, et qui constitue à elle seule de très-nondjreuses mé-
téorites, telles que colles de Lucé ( 1768), Wold-Cottage (i^qS), Angers
(1822), Mascombes (i845), Saint-Denis Westrem (i855), Sauguis Saint-
Etienne (1868), etc. J'ai de même reconnu dans la seconde roche la ma-
tière fondamenlale de i)lusicurs masses, parmi lesquelles celles de Weslon
( 1807) et de Limerick ( i8i3) doivent être citées d'une manière spéciale ;
j'ai désigné cette roche sombre sous le nom de limerickile.
» La conclusion de ce premier fait est évidemment que, dans un astre
non déterminé, les roches dites lucéite et limerickile ont été en relation
straligrapliique entre elles et avec la brèche [mesniiiiite') qui constitue
la pierre de Saint-Mesmin.
( 745)
» On arrive absolument au même résultat par l'étude des météorites
d'Assam (1846), de Mouza-Khoorna ( i865) et de Cangas de Onis ( 1866),
également constituées par la mesminite.
» La météorite tombée à Canellas en 1861 offre avec les pierres pré-
cédentes de très-grandes ressemblances. Comme elles, elle est formée de
fragments anguleux blanchâtres, empâtés dans une roche foncée et,
de plus, cette pâte sombre est encore constituée par de la limerickite.
Mais la pierre de Canellas diffère de celle de Saint-Mesmin et des ana-
logues de celle-ci par la nature des fragments blancs empâtés. Ceux-ci,
étudiés avec le plus grand soin, se montrent absolument pareils, sous
tous les rapports, à ceux qu'on obtiendrait en concassant certaines mé-
téorites monogéniques, telles que celles de Pégu (1857), Montréjeau
(i858), Muddoor (i865), Casale( 1868), Pnompehn (1868), Hessle (1869),
etc. : ils sont formés de montréjite.
» Ce second fait prouve, comme on le voit, que la limerickite et la mon-
tréjite ont été en relation de position entre elles et avec la brèche [canel-
lite), qui constitue la pierre de Canellas, de même que, pour le dire en pas-
sant, les pierres de La Baffe (i 85 1) et de Gutersloh (i 85 1). De plus, quoique
jusqu'ici nous n'eu ayons pas la démonstration directe, il est très-probable,
d'après ce qui vient d'être exposé, que la lucéite et la montréjite, ayant
été toutes deux en rapport avec une même roche, la limerickite, ont été
aussi entre elles dans un rapport plus ou moins immédiat. Toutefois ce fait
ne sera certain que du jour où l'on aura trouvé des brèches contenant à la
fois des fragments de ces deux roches.
B Dans une Note présentée à l'Académie dans sa séance du 3i octobre
dernier, j'ai indiqué la communauté d'origine de deux roches météori-
ques distinctes, savoir : Yaumalite, représentée par les chutes de Charson-
ville (1810), de Vouillé(i83i), d'Aumale (i865), de Dauville (1868), etc.,
et la chantonnile, représentée par les chutes de Luponnas (17S3), de
Chantonnay (1812), de Pultusk (1868), etc. C'est un fait à joindre aux
précédents.
» Il en est d'autres, peut-être plus significatifs encore, que révèle l'étude
de certains fers météoriques, dont l'un des plus caractérisés est celui qu'on
a récemment découvert dans la Cordillère de Deesa au Chili. Ce fer, qui
a été décrit par M. Daubrée, dans un Mémoire présenté à l'Académie au
mois de mars 1868, se distingue de la plupart des autres masses de même
origine par sa structure brécViiforme. Il se compose d'une pâte métallique,
renfermant des fragments anguleux essentiellement pierreux. Or, il résulte
d'analyses exécutées avec le plus grand soin, et dont j'ai fait connaître déjà
(746 )
les résultats : i° que la pâte métallique est identique à la substance des
fers météoriques homogènes dont le gros bloc trouvé à Caille en 1828, eî
qui figure aujourd'hui au Miiséum, fournit le type le mieux accusé; 2° que
les fragments ne peuvent, sous aucun rapport, être distingués de la roche
météoritique constituant la masse tombée à Sétif en 1867.
» Que conclure de là, sinon que les roches représentées par les masses
de Caille [caillite) et de Sétif [ladjérile) ont été en relation? Car il serait évi-
demment absurde de supposer qiie le fer de Deesa se soit formé d'un seul
coup avec la structure polygénique que nous lui voyons.
» On voit, en résumé, que des faits déjà nombreux, observés sans idée
préconçue et avec l'appui constant de l'analyse chimique m'amènent à re-
connaître que diverses roches météoriques, très-différentes les unes des
autres, ont été en relations stratigraphiques dans un astre et à une époque
que des études spéciales parviendront peut-être à déterminer. «
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Effets des diverses préparations phéniques dans
le traitement de la variole. Note de M. Bobœuf. (Extrait.)
« La persistance de l'épidémie variolique appelle la sérieuse attention
des corps savants, et rend nécessaire l'expérimentation comparative des
nouveaux agents de préservation et de guérison qui ont été récemment pro-
posés. Parmi ces traitements nouveaux, l'emploi, pour l'usage interne, des
solutions aqueuses d'acide phénique à petites doses, n'offre aucune garantie
d'efficacité et présente de graves dangers de brûlures, de lésions et d'in-
toxication.
» Le traitement par le phénol sodique, employé à l'intérieur et à l'ex-
térieur, réunit au contraire, à une efficacité reconnue, le double avantage
de n'occasionner aucun accident, et d'épargner aux malades les traces ou
cicatrices.
» Il serait urgent que les assertions diverses fussent contrôlées par des
expériences dont le résultat serait rendu public.
La séance est levée à 5 heures un cjuart. D.
EHRJTJ.
(Séance du i4 novembre 1870.)
Page 645, ligne 1^, nu lieu de de froment et de seigle, lisez de Iroment ou de seigle.
Page 648, ligne 20, <?« /ieit de excitées, lisez causées.
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE DU LUNDI 28 NOVEMBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUMLLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. LE Secrétaire perpétuel dépose sur le bureau un exemplaire du dis-
cours prononcé le i5 novembre iSyo aux obsèques de M. ^ug. Duméril
par M. Hippolyte Larrey.
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Emploi de t'osséine dans l' alimentntion
(deuxième Communication); par M. E. Frejiy.
« En venant pour la seconde fois appeler l'attention de l'Académie sur
l'emploi de l'osséine dans l'alimentation, je veux d'abord remercier mes
confrères de l'intérêt qu'ils ont pris à une question qui ne présente pris le
caractère de celles qui sont discutées d'habitude devant eux.
» Us ont compris que dans les circonstances actuelles, l'Académie ne
pouvait pas rester indifférente à une proposition qui a pour but d'aug-
menter les ressources de l'alimentation publique.
» L'adoption d'un aliment nouveau est toujours ime chose grave et dif-
ficile : l'Académie n'a pas oublié qu'un de ses Membres, M. D'Arcet, dans un
but exclusivement philanthropique, a consacré trente années de sa vie à des
essais d'alimentation par la gélatine : ses efforts sont restés stériles et la gé-
latine a été généralement repoussée; cependant cette substance, préparée
i\. K., 1870, 2» Semeslre. (T. LXXI, N» 22.) I OO
( 748 )
avec soin et employée dans des condilions qu'il est facile de délerminer,
est un aliment véritable qui peut rendre en ce moment de grands services.
« Pour combattre les répugnances bien naturelles qu'inspire, dans l'ali-
menlation, une substance extraite des os, il me paraît utile d'aller en
quelque sorte au-devant des principales objections qui peuvent être faites
à l'osséine et qui se traduisent dans les ternies suivants :
» Quelles sont les expériences prouvant que l'osséine est alimentaire?
» Avant de conseiller l'emploi de l'osséine, il faudrait démontrer que
cette substance n'est pas nuisible à l'organisme.
M L'osséine présente la plus grande analogie avec la gélatine : or, des
Membres illustres de l'Académie ont consacré dix années à rechercher si la
gélatine était nutritive, et la question n'est pas encore résolue; la Com-
mission de l'Académie était évidemment défavorable à la gélatine, et l'on
trouve même dans les expériences publiées par elle, des faits qui prouvent
que l'alimentation, au moyen de la gélatine, a déterminé la mort d'un
certain nombre d'animaux.
» J'accepte toutes ces objections et je vais essayer d'y réj)ondre.
)> On me demande des expériences qui démontrent que l'osséine n'est pas
nuisible à l'organisme, et qu'elle est alimentaire : je réponds que ces essais
sont presque inutiles aujourd'hui, parce qu'ils sont faits depuis longtemps
et que les résultats ne peuvent pas être contestés : ils s'appliquent à l'ali-
mentation des animaux et à celle de l'homme par l'osséine.
» Je citerai d'abord les observations si importantes et trop oubliées de
M. Edwards aîné et celles de la Commission de la gélatine, qui prouvent
que le parenchyme des pieds de mouton, qui n'est autre chose que l'os-
séine, peut nourrir des animaux sans répugnance pendant longtemps.
» Je rappellerai, en outre, que l'osséine, lors même qu'elle est engagée
dans le tissu osseux, est tellement assimilable par l'organisme, que des
chiens qui mangent des os absorbent toute l'osséine qui s'y trouve et re-
jettent les sels calcaires entièrement débarrassés de substance organique.
» Le pouvoir nutritif de l'osséine, pour les animaux, ne peut donc pas
être mis en doute.
» Quant à l'emploi de l'osséine dans l'alimentation de l'homme, il m'est
facile de citer un certain nombre de faits qui prouvent que l'osséine peut
être mangée sans inconvénient et qu'elle est réellement alimentaire.
» Tout le monde connaît la réputation d'un mets [iréparé à Sainle-Me-
neliould, dans lequel la partie osseuse des pieds de cochon a été complète-
ment attendrie par un acide ; l'osséine se trouve là en quantité considérable
et dans le même état que celle que je propose à l'alimentalion.
( 749 )
» En outre les viandes blanches, la tète de veau, les pieds de mouton,
les tendons, etc., contiennent de très-grandes quantités de tissus osséiques :
leuis propriétés alimentaires ne peuvent donc pas être contestées.
» J'ajoute enfin que depuis ma Communication du 3i octobre sur I os-
séine, un grand nombre de personnes font entrer dans leur alimentation
l'osséine extraite des os, et n'en éprouvent aucun inconvénient.
» Ainsi, en m'appuyant sur tous ces faits, je crois pouvoir affirmer que
l'osséine peut être acceptée sans crainte dans l'alimentation.
» J'arrive actuellement aux objections qui portent sur la comparaison
de l'osséine avec la gélatine.
» L'osséine doit-elle être assimilée à la gélatine?
» Les répugnances, selon moi injustes, qui frappent la gélatine au point
de vue de l'alimentation, doivent-elles s'étendre à l'osséine?
» Que l'Académie me permette d'abord de lui faire connaître très-nette-
ment mon opinion sur les propriétés nutritives de la gélatine et sur les ex-
périences d'alimentation faites avec cette substance.
» En réservant la part du fait physiologique fondamental qui établit
qu'un principe immédiat ne peut jamais à lui seul constituer un aliment
complet, je considère la gélatine comme étant parfaitement nutritive et
alimentaire lorsqu'on l'emploie dans une mesure convenable.
» Dans quelle proportion cette substance peut-elle être introduite dans
une alimentation ? Sur ce point l'expérience ne s'est pas encore prononcée
d'une manière bien nette; mais j'affirme qu'on peut la faire entrer avec
avantage et en quantité très-notable dans le bouillon.
» Je suis persuadé que tous les accidents qui se sont présentés dans les ex-
périences d'alimentation par la gélatine, doivent être attribués à l'oubli de
conditions physiologiques essentielles : la gélatine avait été employée sans
doute en trop grande quantité; son mélange avec d'autres corps n'était pas
fait dans des proportions convenables; ou bien on n'avait pas tenu un
compte suffisant des questions qui se rapportent à l'aromatisation de cette
substance et qui jouent un si grand rôle dans le phénomène de l'assimi-
lation. Il est bien constaté en effet que l'aliment le plus apprécié devient
souvent impropre à la nutrition, lorsqu'on en sépare les parties aromatiques.
» Quant aux cas de mort déterminés par l'emploi alimentaire de la gé-
latine, on sait aujourd'hui que cette objection n'est pas sérieuse.
» Un animal meiut dnianition en présence de la gélatine; mais on con-
state le même fait pour la fibrine, l'albumine, les corps gras, le sucre, etc.
» La gélatine s'est donc comportée dans les essais sur l'alimentation
lOO..
( 75o )
comme tons les mitres principes immédiats qui lont la base de notre nour-
riture : c'est leur mélange en proportions convenables qui peut seul [pro-
duire un aliment complet.
» Ainsi la gélatine est alimentaire : son pouvoir nutritif est-il aussi
développé que celui de l'osséine? Je ne le pense pas.
» La gélatine, substance soluble et désorganisée, convient principale-
ment à la préparation du bouillon.
» L'osséine est un corps insoluble et organisé ; c'est un tissu véritable
que l'on peut comparer aux tissus fibrineux qui constituent les muscles;
c'est un aliment solide qui représente, même lorsqu'il est cuit, une quantité
considérable de partie nutritive, tandis que la gélatine, en raison de ses
propriétés collantes, ne peut être introduite dans l'organisme qu'en pré-
sence d'une forte proportion d'eau : la gélatine et l'osséine jouent donc
dans la nutrition deux rôles physiologiques différents.
» Ainsi l'alimentation peut tirer parti, sous deux formes, de la matière
organique azotée qui existe en si grande quantité dans les os : soit à l'état
de corps soluble, c'est-à-dire de gélatine ; ou bien sous la forme de tissu
organisé, qui est l'osséine.
)) J'aurais plusieurs considérations à présenter ici sur la préparation de
la gélatine alimentaire et sur les améliorations qu'elle peut recevoir; j'y
reviendrai plus tard : mon but spécial est d'examiner en ce moment, les
questions qui concernent l'osséine.
» En partant d'un corps dur, coriace et sans saveur qui est engagé
dans le tissu osseux, je veux montrer avec quelle facilité on le transforme
en un aliment comestible et savoureux.
)) C'est presque une question de synthèse, appliquée à l'alimentation,
que j'aborde ici; nous employons souvent l'analyse pour déterminer la
composition de nos aliments ; il s'agit, pour l'osséine, de donner à une
substance insipide ce qui lu; manque pour être comestible et alimentaire.
» Par un ensemble de soins apportés dans la préparation, la cuisson et
l'aromatisation de l'osséine, on peut faire entrer cette substance dans l'ali-
mentation, en lui conservant cependant les qualités physiologiques d'un
tissu organisé. J'examinerai rapidement ces différentes opérations.
» Préparation. — Une osséine alimentaire doit être avant tout insipide.
» Les os les plus divers peuvent être appliqués à la fabrication de l'os-
séine; mais pour la faire accepter comme aliment et vaincre certaines répu-
gnances, il faut apporter les plus grands soins dans sa préparation.
» Je crois donc que l'osséine alimentaire ne doit être produite qu'avec
des os durs et blancs dont le dégraissage est facile; il est à redouter que
( 75i )
des traces de graisse laissées dans un os spongieux ne donnent à l'osséine
une saveur désagréable.
» Lorsque l'osséine sort des bains acides, elle conserve, même après de
nombreux lavages à l'eau, une odeur sensible; poin- la rendre inodore, il
faut la soumettre à l'action d'une substance alcaline; on peut employer
dans ce but la chaux ou le carbonate de soude.
» Je présente à l'Académie de l'osséine purifiée à la chaux par M. Bon-
neville^ et de l'osséine lavée par le carbonate de soude, sortant de l'im-
porlante usine de Javel, dirigée par M. Thomas.
» La pratique déterminera, au point de vue alimentaire, quel est le
système de purification de l'osséine qui doit être préféré; dans les deux
cas les tissus osséiques retiennent une certaine quantité des corps alcalins
employés à leur purification.
). Cuisson. — Les transformations que l'osséine éprouve par l'action de
l'eau bouillante, m'ont rappelé certaines modifications que j'avais étudiées
autrefois dans nion travail sur les gelées végétales.
» J'ai démontré que dans l'organisation des végétaux, il existe une sub-
stance insoluble que j'ai nommée pectosCj qui, en se transformant isomé-
riquementsous l'influence des différents réactifs, produit un grand nombre
de matières gélatineuses.
» Il en est de même dans l'organisation animale; l'osséine des animaux
correspond, en quelque sorte, à la pectose des végétaux ; elle peut, comme
cette dernière, produire en se modifiant plusieurs corps gélaiineux diffé-
rents, que l'industrie confond, jusqu'à présent, sous le nom degétntine.
» Je ferai connaître dans un autre travail les réactions chimiques qui
permettent de distinguer les unes des autres ces diverses gélatines; je me
contente aujourd'hui de traiter la question au seul point de vue de l'ali-
mentation.
» La première action de l'eau bouillante sur l'osséine a pour effet de
la gonfler et de changer le tissu coriace qui la constitue en une substance
molle et friable : cette transformation exige environ une heure d'ébulli-
lion; arrivée à ce moment, l'osséine est cuite et comestible.
» Toute action ultérieure de l'eau bouillante est, selon moi, nuisible et
tend à changer l'osséine en une masse gélatineuse qui, dans l'alimentation,
ne présente plus les qualités du tissu osséique.
» M. Terreil, qui veut bien m'aider dans ces recherches, a reconnu
qu'en s'hydratant dans l'eau bouillante, loo parties d'osséine sèche don-
nent environ 25o parties d'osséine cuite; ainsi le nouvel aliment, rendu
comestible par la cuisson, contient 4o p. loo de substance solide; l'osséine
( 75^ )
sèche laisse par rincinération de 5 à lo millièmes de cendres, formées
principalement de phosphate de chaux; ce fait n'est pas à négliger relati-
vement à l'alimentation, car le phosphate de chaux est, comme on le sait,
un aliment minéral utile.
» L'osséine une fois cuite éprouve de nouvelles modiBcations que la
pratique doit connaître.
» Avant de se transformer en gélatine, elle perd, en partie, sa texture
organique et se change, comme je l'ai dit, en une sorte de gelée qui est
encore insoluble dans l'eau.
» Sous l'influence prolongée de l'eau bouillante, elle se dissout et forme
des substances dont les propriétés gélatineuses varient avec le temps de
l'ébullition. Dans l'emploi alimentaire de l'osséine et dans 'sa cuisson, il
faut donc se garder de confondre un tissu osséique avec un tissu fibrineux;
ce dernier s'attendrit dans l'eau bouillante et ne se dissout pas, tandis que
le tissu osséique s'altère rapidement dans l'eau chaude; il se gonfle d'a-
bord, ensuite il se désagrège et finit par se dissoudre entièrement. Quand
on ne veut pas produire de gélatine et qu'on désire conserver au tissu son
organisation, sa solidité et son insolubilité dans l'eau, qui sont pour moi
les qualités principales du nouvel aliment, il faut se garder de le laisser
longtemps dans l'eau bouillante.
» Mais lorsque l'osséine est employée pour produire des gelées ou
pour donner au bouillon un élément soluble et nutritif, il faut prolonger
l'action de l'eau sur l'osséine jusqu'à ce que le tissu soit entièrement dis-
sous; on obtient alors une gélatine de première qualité, parce qu'elle
dérive d'une osséine préparée avec le plus grand soin, et dont la pureté
est constatée facilement par les caractères extérieurs.
» Ainsi, en faisant varier le temps de la cuisson de l'osséine, on peut à
volonté produire deux aliments différents; l'un est soluble dans l'eau, c'est
la gélatine; l'autre est insoluble et organisé, c'est l'osséine cuite.
» dramatisation. — L'osséine cuite peut être employée immédiatement
dans l'alimentation; mais il est mieux de la rendre savoureuse par l'aro-
matisation.
» J'ai fait dans ce but des essais très-nouibreux. Après avoir étudié sous
toutes les formes l'action des principaux aromates culinaires et celle même
de la fumée, je suis arrivé à la pratique que je vais recommander.
» Elle consiste à laisser |)endant trente-six heures environ l'osséine une
fois cuite, dans de l'eau fioide fortement salée, et aromatisée pai' les mé-
thodes ( iiiployées d'habitude dans les salaisons.
» On obtient ainsi un aliment agréable, qui peut êlre mangé froid ou
( 753 )
chaud, que l'on peut faire chauffer dans de la graisse, mélauger à des
légumes ou à de la viande et dont le prix ne dépassera pas, je l'espère,
I franc le kilogramme, tandis que la gélatine se vend de 4 à 5 francs (i).
» Conclusions. — Les questions que j'ai traitées dans mes deux Commu-
nications sur l'osséine doivent recevoir, selon moi, une application immé-
diate et intéressent à un haut degré l'alimentation publique. Comme elles
ont pour but non-seulement de préconiser l'osséine, mais aussi de réhabi-
liter un peu la gélatine, je demande à l'Académie la permission de résu-
mer nettement mes propositions sur le mode d'emploi du tissu osseux :
» 1° Les os peuvent fournir une substance alimentaire sous deux formes
différentes et qui correspondent à deux besoins de l'alimentation : ils don-
nent d'abord l'osséine, qui est un aliment organisé et solide, et, en second
lieu, la gélatine, qui est soluble et qui doit entrer principalement dans la
composition du bouillon. Il est donc utile, dans les circonstances présentes,
que ces deux corps soient produits immédiatement sur une grande échelle,
et livrés à la consommation; l'emploi de ces deux substances dans l'ali-
mentation ne peut présenter aucun inconvénient, comme cela résulte des
faits que j'ai soumis à l'appréciation de l'Académie. Je sais qu'il existe en
ce moment à Paris une quantité considérable d'os et que l'abatage peut
en produire de aoooo à 3oooo kilogrammes par jour.
» 2" Pour ne pas compromettre l'utilisation alimentaire du tissu os-
seux, il est important que l'osséine et la gélatine ne soient préparées qu'avec
des os épurés et dégraissés avec le plus grand soin.
» 3° L'osséine ne se comporte pas dans la cuisson comme les tissus
(i) Un de nos confrères m'a demandé de faire connaître la nature et les proportions
d'aromates qui sont utiles pour rendre l'osséine agréable au goût. Je comprends l'intérêt
pratique de cette question; mais il est difficile d'y répondre, parce que l'aromatisation doit
varier avec le goût des consommateurs : je dirai seulement que l'osséine, étant insipide,
doit être aromatisée avec une forte proportion de sel, de poivre, de tliym, de laurier, de
muscade, etc.
L'eau d'aromatisation peut être vinaigrée, mais légèrement, parce que l'acide acétique se
combine à l'osséine, la durcit et la rend coriace.
Pour éviter la transformation de l'osséine en gélatine et la production d'un liquide col-
lant, il faut, autant que possible, dès que l'osséine est cuite et encore cliaude, l'assaisonner
et la manger rapidement sans la remettre sur le feu. On doit éviter l'emploi de jus acides
([ui développent toujours une saveur de colle.
Dans un moment où la viande manque pour aromatiser le bouillon, on peut employer
l'osséine et la torréfier légèrement en présence de la graisse : on obtient ainsi une masse
brune qui donne. à l'eau une saveur assei! agréable.
( 754 )
fibrineux qui constituenl la viande; elle se transforme en gélatine par l'ac-
tion prolongée de l'eau bouillante, et peut donc perdre facilement les
avantages alimentaires des tissus. Pour faire entrer cette substance dans
les habitudes de la consommatioti, il serait peut-être nécessaire de la livrer
en ce moment toute cuile et aromatisée.
j> 4" Quant à la gélatine, elle est encore sous le coup d'une prévention
qu'il ne faut pas méconnaître.
» On croit que la gélatine n'est pas nutritive, et même qu'elle est dan-
gereuse; ceux qui la font entrer dans nos aliments ne s'en servent qu'en
cachette.
» Il est important de combattre ces préjugés, parce que la gélatine,
convenablement employée, doit nous rendre en ce moment de très-grands
services.
» Chacun peut reconnaître qu'on obtient un véritable liquide alimen-
taire très-économique en faisant dissoudre lo grammes de gélatine dans un
litre d'eau chaude salée et aromatisée par de l'extrait de viande ou de lé-
gumes, et dans laquelle on ajoute une petite quantité de graisse de bœuf.
Mais il ne faut pas oublier que la gélatine, mal préparée, conserve tou-
jours une saveur désagréable de colle forte (i).
» Je crois donc que la gélatine, destinée à l'alimentation, ne doit être
produite qu'avec de l'osséine aussi pure que possible, et que son aromati-
sation culinaire, trop négligée dans les expériences qui ont été faites jusqu'à
présent, est une condition essentielle à son assimilation.
» Telles sont les considérations que j'avais à présenter sur l'emploi du
tissu osseux dans notre alimentation, qui permettra, je l'espère, de prépa-
rer dans les conditions les plus économiques du bouillon très-nutritif et
un aliment azoté contenant 4o pour loo de substance solide.
» Je désire bien vivement que mes efforts, inspirés uniquement par l'in-
térêt public, ne soient pas paralysés par des répugnances exagérées.
» En terminant, je veux adresser tous mes remercîments d'abord à
M. le Ministre de l'Agriculture et du Commerce, qui, par une mesure insé-
rée aujourd'hui même au Journal officiel^ assure une provision considérable
d'os à la consommation de Paris, et ensuite à M. Demongeot, ingénieur
des Mines, qui a compris immédiatement toute l'importance de l'emploi
alimentaire des os. »
(i) Je dois citer ici une Note très-intéressante que M. Riche vient de publier sur l'emploi
de la gélatine dans la préparation du bouillon.
( 7'^'^ )
Remarques de M. Dumas à r occasion rie celte Communication.
« Autant qu'il est permis de saisir le sens d'un Mémoire pendant une
lecture rapide, il me semble que notre savant confrère craint, d'un côté, de
se trouver en contradiction avec la Commission de la gélatine, tandis que,
de l'autre, il est d'accord avec elle.
- » Selon cette Commission, le mot gf^/o^me désigne plusieurs substances
fort différentes :
» 1° Le parenchyme organique des os, des cartilages, des liga-
ments, etc., qui se transforment en gélatine par certains procédés;
» 2" La chondrine;
» 3° La gélatine proprement dite;
0 4° Cette même substance altérée par la chaleur.
» Elle constate que la gélatine est un produit de l'art et non un élément
organique,et elle rappelle^qu'à mesure que les tissus animaux sont modifiés,
perdent de' leur texture et deviennent solubles, on les voit devenir moins
alimentaires.
,. Ses expériences lui prouvent que, parmi les parenchymes des os, ceux
qui sont les plus riches en matières organiques résistant à leau bouillante,
comme les parenchymes de pied de mouton, sont plus nourrissants que
ceux qui proviennent des têtes de mouton, qui en contiennent beaucoup
moins.
» La Commission admet, et comment aurait-elle pu faire autrement? que,
tel qu'il est dans la nature, le parenchyme des os est un alinient complet,
capable de suffire à la nourriture du chien. Elle démontre qu'il en est de
même du parenchyme extrait par les acides des pieds de mouton ; que cette
qualité ne se retrouve plus au même degré dans le parenchyme des fêtes
de mouton, et qu'elle est encore affaiblie dans la gélatine.
» Il fallait donc en revenir au premier procédé de M. D'Arcet, c'est-
à-dire l'extraction par les acides du parenchyme des os, et ne pas déve-
lopper l'usage des dissolutions gélatineuses.
» En conséquence, dès les premiers jours de l'investissement de Paris,
je signalais l'emploi du parenchyme des os à la Commission des subsis-
tances, j'en entretenais, le 10 octobre, l'Académie, et j'engageais M.Tho-
mas à traiter par les acides les os dont il retirait par la vapeur une gélatine
fort bien préparée,
» Personne n'a donc contesté dans la Commission de la gélatine, ni le
C. R., 1870, 2' Semestre. (T. LXXI, N" 22.1 'O'
( 7^^ )
lûie utile (lu pnrenchyme des os, ni les excellents résultats des premiers
travaux de M. D'Arcct, dont personne plus que moi ne respecte la mémoire
et dont je tus toujours l'ami. T,e doute s'est élevé seulement sur l'usage des
dissolutions géjaliuenses au sujet desquelles la question est complexe. »
Réponse de M. Fuemy à M. Dumas.
« J'ai eu le soin de rappeler, dans ma seconde Communication sur l'os-
séine, les résultats physiologiques si intéressants constatés par la Commis-
sion do la gélatine : je crois donc lui avoir rendu pleinement justice.
» Mais il m'est impossible d'.idmettre, avec notre savant Secrétaire per-
pétuel, qu'il y ait presque identité entre mes opinions sur l'emploi alimen-
taire des substances gélatineuses et celles qui ont été exprimées par la Com-
mission de la gélatine^ dont il était un des Membres.
» J'ai dit que je considérais l'osséine et la gélatine comme nutritives, el
pouvant rendre de grands services dans l'alimentation lorsqu'on leur don-
nait une aromatisation suffisante et qu'on les faisait entrer, en proportion
convenable, daiis cette association qui constitue un aliment complet.
» Tous mes efforts tendent donc à combattre le préjugé qui frappe en-
core aujourd'luii l'emploi des corps gélatineux dans l'alimentation, et qui
nous prive ainsi d'une nourriture azotée, économique et facile à conserver.
» Ce n'est ]ias ainsi que s'est exprimée la Commission de la gélatine :
en lisant le Rapport qu'elle a fait à l'Académie, on reconnaît facilement
qu'elle n'est pas favorable à la gélatine, comme le prouvent du reste les
passages suivants :
» Après avoir dit, page 265 ; « La concordance frappante cpli se remarque
1) entre nos résultats et ceux des expérimentateurs qui nous ont précédés
)i ne permet donc pas de partager les espérances flatteuses que certains
)i pliilaullu'opcs avaient conçues, à différentes époques, du parti qu'on
' pouvait tirer des os ", le rapporteur ajoute dans les conclusions de sou
travail : « T.a Coinmissidii n'a pas voulu se ijiononcer jiour le moment sui-
» l'emploi (le ia gélatine associée aux autres aliments dans la nourriture
-) de l'honnne. Elle a compris que les expériences directes pouvaient seules
') l'éclairer à ce sujet d'une manière définitive. Elle s'en occupe active-
» ment, et les résultats sei ont exposés dans la dernière partie du Rapport . »
)) Ces déclarations étaient faites il y a trente ans environ, et la secoudt^
partie du Raj)port n'a jamais été publiée.
» Je crois donc être en droit d(> dire (ine le lra\ail de la Commission a
( 7^7 j
été pour beaucoup dans !a rrpulsion qu'inspire la gélahin^, tt qn en pré-
conisant aujourd'hui l'emploi alimentaire des corps gélatineux, je suis
loin d'être de l'avis '!e la Cotnniission
« Quel était le but du travail de la Commission? Ce n'était pas de démon-
trer que la gélatine employée seule était impropre à l'alimentation; ce fr.i
physiologique important avait été établi déjà par M. Edwards aine.
» Il ne s'agissait plus de combattre les exagérations des partisans de iri
gélatine, car, comme !e dit encore le rapporteur : « Personne sk' soutenait
» plus que la gélatine est l'aliment par excellence, qu'un os est une tablette
» de bouillon, et que le bouillon d'os est préférable au bouillon de viande.
» On ne présentait plus la gélatine que comme une substance propre à ani-
» maliser l'eau qu'on ajoute, soit au bouillon de viande, soit aux légumes. )•
» On voit, d'après les termes mêmes du Rapport que je viens de repro-
duire, que la tâche de la Commission s'était bien simplifiée. Personne ne
proposait de remplacer la viande par la gélatine; il ne s'agissait plus ijui
de délennincr dans qucÂle proportion la gélatine pouvait être ajoutée utilemeni
dans le bouillon. C'est cette question que la Commission n'a pas traitée;
elle n'a jamais publié la seconde partie du Rapport qui devait la résoudre.
» Le public a interprété ce silence dans un sens défavorable à la géla-
line; il ne pouvait en être autrement. Un Membre de l'Acadéniie se trou-
vait engagé dans la question; on a pensé généralement qae la Commission
hésitait à donner un avis qui pût lui être défavorable. La question de la
gélatine a été alors jugée de la manière suivante :
» La gélatine n'est pas alimentaire, elle peut même être dangereuse.
» Quant à son mélange avec d'autres substances, on a pensé qu'il n'était
pas avantageux, car, il y a trente ans, une Commission de l'Acadénne
des Sciences s'était engagée à faire connaître les résultats de ses essais sur
l'association de la gélatine avec d'autres aliments dans la nourritme di
l'homme, et ce travail n'a jamais été publié.
» Selon moi, le travail de la Commission a donc été nuisible à la gélnliuc
non-senlemenl par ce ijuil disait, mais surtout par ce qu'il na pas dit.
n Tels sont les motifs qui m'ont engagé, dans nia seconde Commtmica--
tion sur l'osséine, à déclarer que la gélatine avait été injustement dépréciée
au point de vue alimentaire, et qu'il était utile de la réhabiliter.
» Je serais désolé de soulever ici une question personnelle lorsqu'en ce
moment il ne faut songer qu'à l'intérêt public : cependant il m'était impos-
sible de laisser dire, sans protester, que je n'ai fait que reproduire les résul-
tats fl'un travail, lorsque je m'efforce au contraire d'en condiattre la ten-
'lance et les conclusions.
( 75H )
» La Coniniissioii n'a jjas voulu se prononcer sur l'utilité de l'associa-
tion de la gélatine aux autres aliments : et moi je déclare que cette associa-
tion est utile.
» La Commission n'a jamais conseillé de faire entrer l'osséine dans la
nourriture de l'homme : je suis venu dire que l'osséine pouvait être rendue
comestible, et depuis un mois plusieurs personnes la font entrer dans leur
alimentation.
w La Commission a confondu dans l'expression de gélatine, le paren-
chyme des os et la gélatine soluble : j'ai démontré que ces deux corps sont
chimiquement et physiologiquement différents.
» On le voit, je me trouve en contradiction complète avec la Commission
de la gélatine, et je suis loin de reproduire ses résultats, comme le dit notre
savant Secrétaire perpétuel.
» L'Académie comprendra et excusera, je n'en doute pas, mon insistance
dans cette question. Je n'ai pas oublié les luttes pénibles que M. D'Arcet a
soutenues dans un but ])hilanthropique et qui ont, je le sais, abrégé son
existence. Il a attendu pendant dix années que l'on déclarât que la géla-
tine pouvait être employée utilement dans le bouillon : cette satisfaction,
bien légitime et la seule qu'il demandât à la lin de ses jours, ne lui a pas
été donnée. Eh bien, j'ai saisi, je l'avoue, avec bonheur, l'occasion qui s'est
présentée pour faire publiquement cette déclaration devant l'Académie et
du vivant de sa respectable veuve. »
Nouvelles remarques de M. Dumas, concernant ta cjélaline alimentaires.
<( Notre savant confrère n'a pas suivi en détail tout ce qui s'est passé
dans cette enceinte, il y a près de quarante ans. La Commission était en
présence d'opinions outrées dans les deux sens et de malentendus prove-
nant d'un mauvaise terminologie. Il est toujours dangereux de donner un
nom à des substances mal définies, le mot gélatine désignait quatre ou
cinq produits bien différents.
» Les uns disaient : « La gélatine est l'aliment type et la retirer des os
c'est faire de quatre bœufs cinq bœufs. » Je vois par un signe de M. Che-
vreul qu'il est d'accord avec moi ; le passage du Rapport, cité par M. Frémy^
répond à cette évaluation exagérée. D'autres regardaient la gélatine comme
une substance nuisible, comme un poison, qu'il fallait proscrire de l'ali-
mentation ; Ih Commission, par ses expériences, leur a donné tort.
» Tous confondaient sous ce nom de tjélntine la matière animale des
( 759 )
os, le parenchyme isolé par les acides, la gélatine en dissolution, la gé-
latine à l'état solide. Les partisans de la gélatine n'hésitaient donc pas,
admettant cette identité, à en conclnre f]ue la dissolution gélatineuse re-
tirée des os, constituait l'aliment parfait, puisqu'un chien, nourri d'os en
nature, se portait bien, engraissait et ne se dégolîtait jamais de cette ali-
mentation. Les travaux de M. D'Arcet, conduits avec autant de soin que de
persévérance, reposaient sur cette idée que la gélatine préexisterait dans
les parenchymes qui la fournissent. La Commission n'acceptait pas cette
opinion.
» La Commission de la gélatine a fait son premier Rapport en iSSa, le
second en 1841, et l'Académie l'invita à continuer les expériences, sans
émettre de vote sur ses conclusions. Je constate encore avec plaisir que
notre doyen, M. Chevreul, est d'accord avec moi sur ce point. Personne
à cette époque ne se fit illusion, et chacun comprit que la Commission
ne se réunirait plus.
» Le premier Rapport de la Commission constitue un beau Mémoire de
M. Chevreul que tous les chimistes connaissent. Le second Rapport consti-
tue un Mémoire de Physiologie, oeuvre de Mageudie; en éloignant tout
vote sur les conclusions, l'Académie lui en restituait le mérite et la res-
ponsabilité. Ce travail met en évidence les principes suivants :
» Les aliments simples ne suffisent pas à la nutrition; la fibrine, l'albu-
mine, la gélatine pure ou aromatisée, la graisse, la fécule, prises séparément,
sont des aliments insuffisants, à côté desquels les animaux meurent d'ina-
nition.
» Tel animal se laisse mourir à côté d'une ration journalière de
1000 grammes de fibrine, que i5o grammes de viande remettent sur
pied.
» Quel est donc ce principe particulier qui rend la viande im aliment si
parfait? se demandait-on alors. En attendant que la question soit résolue,
répétons que l'emploi du-ect du parenchyme des os est préférable à toute
autre manière de les utiliser et qu'il faut en revenir aux excellents pré-
ceptes et aux procédés de préparation si bien formulés par M. D'Arcet,
dès 18 14. »
M. LiouviLLE rappelle qu'à l'époque où la question des propriétés ali-
mentaires de la gélatine était encore très -vivement discutée, M. Arago
ayant eu occasion, dans une visite à l'hôpital de Metz, d'interroger les
malades pour savoir si, comme on l'avait prétendu, l'addition de gélatine
à leurs rations ordinaires leur avait paru fâcheuse, il apprit de leur bouche
(pie, non-seulement celle addition était acceptée par eux sans répugnance,
usais qu'ils seraient tres-lâchés qu'on la leur supprimât.
CHIMIE ORGANIQUE. — Note sur un acide odorant produit dans la fermentation
putride de plusieurs matières azotées et particulièrement des tendons; par
M. E. Chevreul.
« Dans le Mémoire dont on vient d'entendre la lecture, on a parlé de
l'odeur désagréable de colle forte que peut exhaler une gélatine mal pré-
parée. Cette odeur résulte en grande partie de la formation d'un acide,
analogue aux acides butyrique, caproïque, caprique, hircique, et surtout
phocénique, que j'ai obtenu pour la première fois de la fermentation pu-
tride des tendons dans l'eau distillée, lorsque je m'occupai de la question
(le savoir si les tissus azotées se changent en ndipocire dans la terre ou le
sein (les eaux, comme l'affirmait Foiircroy (0.
» En signalant cet acide dès 1820 (2), je fis remarquer que la fermenta-
tion putride du tendon donne un acide prédominant sur l'ammoniaque
formée en même temps que lui, que l'odeur en est désagréable et qu'il neu-
tralise pour 100 parties, 12 parties d'oxygène dans les bases. J'ai retrouvé
cet acide dans l'eau des laboratoires d'anatomie où des cadavres ont ma-
céré; il y est accompagné d'un autre acide pareillement volatil, mais bien
moins odorant. J'assure que le premier acide est la cause principale de la
mauvaise odeur des colles fortes.
» Cet acide uni à la baryte affecte deux formes très-distinctes; il se pré-
sente en feuillets ou cristaux incolores, et lorsqu'on fait évaporer la solution
à l'air libre ou dans un air limité séché par la chaux vive, il se réduit en
une matière incolore d'une transparence parfaite, dans laquelle il peut se
former des étoiles ou des rosaces radiées.
» Cet acide a la plus grande analogie, s'il n'y est pas identique, avec un
des acides volatils et odorants que j'ai découverts dans le suint et que je
désigne provisoirement sous le nom de parapliocénique.
» I^e paraphocénate de baryte m'a présenté des faits tout à fait analogues
au sel de baryte des cadavres relativement à sa forme et à l'action de l'eau.
» Ces deux sels, traités par l'acide phosphori(pie, donnent des acides
hydratés, solubles en toute proportion dans l'eau.
(ij Hrrlifrrliis xiir p/iifiriirs points de chimie organique et considération!; sur la luituir ilii
lang, lues à l'Acadc-inie des Sciences le 4 d'août i8?,3. {Mémoires du Musciim, t. X, p. 443-)
('.>.) Dictionnaire des Sciences naturelles, t. XVI, p. 448-44o ('820).
( 76. )
» La capacitô de saturation de l'acide paraphocénique est très-rappro •
chée de celle de l'acide des cadavres; mais mes expériences ne me pa-
raissent pas assez rigoureuses ponr conclure l'identité oti la différence des
deux acides : j'ai trouvé que loo d'acide |îarapliocéiiique saturent de i i
à 11,5 d'oxygène dans les oxvbases.
» J'ai retrouvé l'acide des cadavres dans une matière excrémenlitielle
accompagnée de deux autres substances odorantes, dont l'une est acide et
se trouve dans la matière fraiche.
» Il existe dans le suint et dans la matière grasse de la laine de l'acide
pbocénique que j'ai confondu avec le paraphocénique jusqu'à l'époque où
j'ai reconnu que ce dernier acide hydraté est soluble eu toute proportion
dans l'eau, et que certainement sa capacité de saturation est plus grande
que celle de l'acide phocénique. J'ai signalé ce dernier acide dans un Mé-
moire lu à l'Académie, le 20 d'avril 1840, et déjà imprimé dans le
XXXIX" volimie des Mémoires de l' Académif, que mes confrères ont bien
voulu consacrer à mes recherches sur la lame et le suint (1); j'ai constaté
([uc l'acide séparé de la baryte et de l'état hydraté exige pour 5,5 parties,
100 parties d'eau comme l'acide phocénique hydraté.
» Ici j'exprime le regret que les chimistes n'aient pas adopté le nom de
j)hocéni(jue, et lui aient préféré la dénomination de valérique, parce que cet
acide a été reconnu dans la racine de valériane, phisieiu's années apies que
je l'eusse découvert, et je rappellerai en avoir reconnu la présence dans
les baies et la racine du Vibunnun opulus dès 1818, et plus tard dans la ra-
cine d'orcanète; je ne pourrais affirmer en ce moment que l'acide des tieux
derniers végétaux ne fût pas le parajiliocéniqne.- »
A|)i'ès la lecture de cette Note, M. Chevueul lail part à l'Académie d'ob-
servations intéressantes communiquées par M. Payen à la Société centrale
d'Agriculture, sur les os de cheval et l'huile qu'il en a retirée. M. Chevreul
t xpi'ime le désir que M. Payen veuille bien les conuinuiiqiier lundi pro-
chain à l'Académie.
M. Payen amionceque se proposant de répondre à l'oblii^eant appel de
M. Chevreul, il aura l'honneiu' de connnuniquer une Note dans la pro-
chaine séance de l'Académie.
» M. MiLNE Edwards partage l'opinion de M. Fremy au sujet des pro-
(i) Voir, p. 40, alinéa [d] et (c).
( 762)
priétés nutritives du tissu organique des os, et il est persuadé qu'aujour-
d'hui aucun piiysiologiste ne songerait à révoquer en doute Futilité du rôle
que cette substance est susceptible de remplir dans l'alimentation de
l'homme. La gélatine, sans avoir toute la valeur nutritive que D'Arcet lui
attribuait, est loin d'être inutile dans l'alimentation, comme le prétendaient
jadis Magendie et les autres adversaires de cet académicien. M. Milne Ed-
wards ajoute que, dans le huitième volume de ses Leçons de Physiologie,
il a discuté la question, et que probablement il y reviendra dans une pro-
chaine séance. »
MÉCANIQUE. — Note sur les conditions des petites oscillations d'un corps solide
de Jujure quelconque et la théorie des équations différentielles linéaires; par
M. Y VON ViLLARCEAU.
« L'intégration des équations différentielles du mouvement de rotation
d'un corps solide, soumis à l'action de la pesanteur, a été présentée pour
la première fois par l'illustre auteur de la Mécanique analytique^ dans le
cas des petites oscillations. Bien que I existence d'un système d'axes prin-
cipaux, pour chaque point du corps, permette de simplifier les équations
à traiter, Lagrange préfère l'emploi d'axes mobiles liés au corps et non
assujettis à être des axes principaux : c'est qu'eu effet, s'il est possible,
jusqu'à un certain point, de définir la figure d'un corps quelconque, l'im-
possibilité d'assigner la densité en fonction des coordonnées s'oppose à la
détermination de la direction des axes principaux et des moments d'inertie
autour de ces axes, au moyen des six expressions intégrales
J{cc'+f^)dni, J[y- + z^)dm, S{z^ + oo^)dm;
Jxjdm, Jjzdin, J zx dm,
qui servent à fixer les directions et moments d'inertie dont il s'agit.
Lorsque l'on veut étudier le mouvement d'un corps accessible aux mesures
directes, le moyen le plus simple consiste à considérer des axes rectangu-
laires liés à ce corps et assujettis à une seule condition, consistant en ce
que l'un des axes contienne le centre de gravité du corps : la simple obser-
vation de l'équilibre autour du point de suspension permet de fixer la di-
rection de cet axe, celle des deux autres n'étant soianise qu'aux conditions
de perpendicularité. Ce n'est pas seulement en vue d'une plus grande gé-
néralité que Lagrange a conservé des termes qu'il eût pu, à l'exemple
d'Euler, faire disparaître en choisissant les axes principaux; il a sans doute
voulu rendre ses résultats plus immédiatement applicables aux circon-
stances dans lesquelles on est obligé de se placer pour l'étude des pliéno-
mènes que présente le luouvemeiit de corps tangibles (j'emploie cette expres-
sion par opposition aux phénomènes de la Mécanique céleste). Dans la
théorie du mouvement de rotation des planètes, on ne gagnerait rien à
éviter l'emploi des axes principaux, puisque la situation de tout autre sys-
tème d'axes rectangulaires serait aussi difficile à déterminer.
» Considérant les oscillations du centre de gravité autour de la verti-
cale, comme des quantités du premier ordre de petitesse, et négligeant les
termes des ordres supérieurs, Lagrange forme trois équations différen-
tielles du second ordre, entre lesquelles il élimine l'une des trois inconnues.
Pour abréger, j'écrirai le résultat de l'élimination comme il suit :
{a)
d'il dKs
f d'^s d-u
en posant f
{b) rt = CH + FG; c = CK; /^BC-F*; g = AC - G= (*),
» Ces équations étant linéaires et à coefficients constants, Lagrange
prend, pour intégrales, des termes de la forme
[c) .ï = a sin((3< 4- l?), « = y sin((5^ + /3),
et il arrive, pour déterminer le rapport - et la quantité jj, à des équations
que je transforme en les suivantes, au moyen des équations [h) et en écri-
vant/à la place de-»
[d)
» Elles fournissent l'équation caractéristique
c — g-p' ap''
» Faisant abstraction du signe des racines, et désignant leurs valeurs
absolues par p et p', on a les expressions suivantes de ^ et de « :
= «sin(pi! + /3) 4- a' ûv\{p't -i- |3'),
^•^^ «= -^asin(pr+/3)+ -^^«'sin(û'« + /3'),
où «, «', /3, |3' désignent quatre constantes arbitraires.
(*) Mécanique analytique, étlition de M. J. Bertrand, t. II, p. 236.
C. R., 1870, 2^ Saneitre. (T. LXXI, N" 22.) 102
( 7^4 )
» Ail moyen de ces valeurs, on obtient aisément celle de la troisième
fonction que je reproduis ici
(8) 0 = h„-^ht + ^^^{'),
ce qui achève la solution du problème.
» An reste, dit Lagrange, comme cette solution est fondée sur l'hypo-
)) thèse que J, M et— soient de très-petites quantités, il faudra, pour qu'elle
» soit légitime : i" que les constantes a, a' et h soient aussi très-petites;
M 2° que les racines p et o' soient réelles et inéijales, afin que l'angle t soit tou-
» jours sous le skjne des sinus. Or cette seconde condition exige ces deux-ci :
' l(/+g)' + 4(yg-«'),
» lesquelles dépendent uniquement de la figure du corps et de la situation
» du point de suspension ("). »
» C'est sur la seconde des conditions ici énoncées que je me permets
d'appeler l'attention de l'Académie. Je dis qu'il n'est pas nécessaire que
cette condition soit remplie, pour que les pelites oscillations se maintien-
nent. S'il est, en effet, nécessaire que l'équation caractéristique ne |)ré-
sente pas de racines égales, quand il s'agit d'une seule équation linéaire, il
arrive au contraire que, dans certains cas, les racines de l'équation carac-
téristique cVun système d'équations linéaires peuvent être égales, sans que
la variable indépendante sorte des signes trigonométriques ou exponentiels.
Tel est le cas qui se présente dans le problème actuel.
» f>a dernière inégalité que nous venons de rappeler peut s'écrire
{i) (/-gr + 4«^>o,
et elle sera satisfaite tant que l'une des deux quantités [J — g) et a sera
différente de zéro. Le cas de l'égalité des racines p et p' se présentera lors-
que ces quantités (/ — g) et a seront simidtanément nulles: on tire en
(* ) Je mets ici /(» au lieu de / qui se trouve dans la Mécanique analytique.
(**) Voici un cas très-simple, auquel correspondent des racines égales de l'équation ca-
ractéristique : c'est celui d'un corps solide, homogène et de révolution, oscillant autour
d'un point pris sur son axe de figure. Chacun comprendra, sans recourir au calcul, que la
petitesse des oscillations est assurée dans ce cas, si le centre de gravité est, à l'origine du
mouvement, au-dessous du centre de suspension, à une petite distance de la verticale pas-
sant par ce point, et si le mouvement oscillatoire initial est suffisamment faible.
( 765)
effet de l'équation (e)
et les valeurs correspondanles de / que fournit la deuxième équation (d)
sont
» Supposons d'abord J=g; ces deux expressions se réduiront à
P -^
/ = ±1.
» On remarquera que cette double valeur de / étant indépendante de a,
continue d'être exacte à la limite où a prend la valeur zéro. Donc si l'on a
simultanément y — g = o et n = o, on a simplement
(k) P^s/j ^^ i = ±i-
» Alors les variables s ef u prennent la forme
s = asinf i/-îi + /3 j + a'sin ( \/y f -1-/5' V
n = as[nii/jt-h^j — a' a'm (\/ ~ t -h (i'j ,
équivalente à la suivante
l s = vjsinf i/y t-he),
(0
puisque l'on peut faire
;"0
>7 sine = a sin^ 4- a' sin/S', ■/)' sin£'= a siup — a' sin|3',
•/j cos£ = acosj3 -t- a'cos/3', ■/5'cose'= acos/3 — a'cosjS'.
» Voici donc, |)our le cas de l'égalilé des racines de l'équation car;icté~
nslique, une solution qui comprend les quatre constantes nécessaires vj, vj',
£, c', et dans laquelle le temps / reste compris sous le signe des sinus.
» Pour ne laisser aucun doute sur l'exactitude de cette solution, je ferai
remarquer que la double hypothèse/ — g = o, « = o réduit les équations
I02..
( 7^6
proposées à
dO
+
c
o,
d's
dt-
-f-
c
o,
Or ces deux équations sont indépendantes, et elles admettent précisément
pour intégrales les expressions (/).
» On sait que lorsque l'on a affaire à nne équation linéaire à coefficients
constants et que l'équation caractéristique présente des racines égales dont
le degré de multiplicité est m, il faut multiplier le terme de l'intégrale cor-
respondant à la racine multiple par un polynôme du degré m — i par rap-
port à la variable indépendante : or plusieurs auteurs semblent admettre
la nécessité d'une modification analogue des termes correspondants à une
racine multiple, dans le cas d'un s/stème d'équations linéaires; ces auteurs
se bornent à renvoyer aux explications fournies à l'occasion (Yime équation
unique. J'ai cru devoir appeler l'attention des géomètres sur un point assez
important de la théorie des équations linéaires, et qui n'occupe pas une
place suffisante dans les traités sur cette matière. Peut-être la question que
je soulève a-t-elle été déjà résolue; mais il faut croire que la solution n'est
pas généralement connue, puisque l'incorrection que je signale dans la
Mécanique analytique a pu échapper à un géomètre aussi érudit que le
savant auteur de la nouvelle édition d'un ouvrage devenu classique.
» Ayant rencontré d'autres systèmes d'équations linéaires qui m'ont
présenté la même particularité relativement aux racines égales de l'équa-
tion caractéristique, et constaté que ces systèmes se résolvaient alors en
équations distinctes qui s'intègrent isolément, j'ai été conduit à rechercher
les cas dans lesquels ce fait peut se produire. Voici le premier résultat que
j'ai pu obtenir. Les équations linéaires d'ordre quelconque, à coefficients
constants, pouvant au moyen de nouvelles variables être ramenées à des
équations du premier ordre, j'ai considéré un système de deux équations
linéaires du premier ordre, et il m'a été facile d'établir que, si la carac-
téristique ayant des racines égales, ces équations peuvent néanmoins être
intégrées au moyen d'exponentielles et de fonctions trigonométriques
non affectées de facteurs algébriques contenant la variable indépendante,
le système proposé se résout en deux équations qui s'intègrent séparé-
ment. >
( 767 )
NOMINATIONS.
L'Académie procède, par la voie du scrulin, à In iioniination de la Coni-
mission qui sera chargée de décerner le prix d'Astronomie, fondation La-
lande, pour l'année 1870.
MM. Mathieu, Liouville, Delaunay, Laugier et Faye réunissent la majo-
rité des suffrages.
MEMOIRES PRESENTES.
AÉROSTATIQUE. — Sur un gaz qu'on pourrait substituer à celui qu'aujourd'hui
on emploie d'ordinaire pour gonfler les ballons. Note de M. A. Hureau de
Villeneuve.
« Ayant été nommé commissaire français accrédité pour l'Exposition
aéronautique anglaise de 1868, j'ai pu étudier à Londres les différents pro-
cédés de fabrication du gaz destiné à l'aérostation. J'ai eu l'honneur de
présenter à l'Académie le Rapport que j'ai fait stn- cette exposition et qui a
paru dans le recueil l'Aéronaute. J'ai, dans ce Rapport, traité des avantages
des différents gaz utilisables en aérostalion, notamnienî ceux de houille et
de tourbe. Le siège actuel impose à l'administration la nécessité de suppri-
mer la livraison du gaz de houille à partir du 3o novembre. Ne serait-il pas
possible de le remplacer par un autre gaz, au moins pour le gonflement
des aérostats?
» Le bois vert existe en grande abondance "dans l'enceinte de Paris. Or
le gaz extrait du bois par la distillation est moins éclairant, mais plus léger
que le gaz de houille. Sa puissance ascensionnelle est de 800 granunes par
mètre cube, tandis que celle du gaz de houille est de 600 à 65o grammes.
Il y a donc tout intérêt à employer pour le gonflement des ballons le gaz
extrait du bois vert. Les cornues des usines à gaz pourraient être conservées
sans modifications et leur chauffage serait fait au bois. Le résidu de l'opé-
ration serait du charbon d'excellente qualité qui lendrait à l'économie do-
mestique de très-grands services. Le gaz destiné à l'aérostation devrait être
lavé; on recueillerait ainsi l'acide pyroligneux et le goudron qui se forme-
raient dans la première partie de l'opération. Puis on le dessécherait et on
le ferait parvenir au gazomètre en ayant soin de maintenir flottante sur la
couche d'eau placée sous le gaz une large toile goudronnée, afin d'einpê-
( 76« )
cher que le gaz absorbe de nouvelle humidité : ce qui l'alourdirait coii>.i-
dérablement.
» Si l'on voulait employer le gaz de bois à l'éclairage, ou n'ainait qu'à
le faire barboter an milieu d'essence minérale dans l'appareil, nommé car-
burateur, et join-nellement employé. Le gaz de bois deviendrait ainsi aussi
éclairant que le gaz de houille, et permettrait de continuer l'éclairage de
Paris sans modifications dans les appareils. »
« M. Dumas croit qu'il est utile de donner immédiatement quelques
explications à ce sujet.
» La houille nécessaire à la fabrication du gaz n'est pas encore près de
manquer, surtout si l'on renonce à tenir pendant le jour la canalisation en
pression. Les fuites qui en résultent constituent une perte sans compensation
et sans nécessité.
" Il serait très-intéressant de remplacer le gaz de la houille par celui du
bois dans l'aérostation. Mais il faudrait' parer à la présence de l'oxyde de
carbone et ne pas perdre le souvenir de l'accident qu'elle détermina dans
la seule ascension qui ait eu lieu, au moyen du gaz de l'eau décompcsée
par le charbon. L'aérouaute, M. Dupuis Delcourt, perdit connaissance et
Eou ballon, voguant à l'aventure, le ramena à terre asphyxié.
» Faire au moyen du bois le gaz de l'éclairage à Paris, ce serait revenir
au therniolanipe de Joseph Lebon. Or, tous les appareils sont construits
en vue de la fabrication d'un gaz accompagné d'iui alcali, tel que celui de
la houille qui est chargé d'ammoniaque, et non d'iui gaz accompagné de
vapeurs acides, tel que celui du bois qui est toujours mêlé de vapeins
d'acide pyroligneux. Les appareils qui reçoivent, purifient ou dirigent ce
gaz seraient tous compromis par l'action de cet acide.
» De plus, la chaux manquerait pour la conversion de l'acide pyroli-
gneux en acétate de chaux.
» L'objet principal de la remarque de M. Dumas est celui-ci : la ques-
tion du remplacement de la houille par du bois ou par d'autres matières
a été soigneusement étudiée et continue à l'être; mais on se résignera dif-
ficilement à compromettre un outillage aussi inqinrlant que celui des usines
à gaz de Paris. »
M. I)i:i(oiDi£ adresse une Note sur un système aérostalique diiigeable pu
des moyens différents fie ceux qui ont été jusqu'ici jiroposés, prticédaiif par
une série d'ascensions et de descentes; chaque ascension s'opérant dans le
( 769 )
sens vertical, autant du moins que l'état de l'air le permet, la descente au
contraire se faisant obliquement et dans la direction voulue, grâce à nu
parachute-plan, incliné à l'horizon et convenablement orienté avant cha-
cune de ces descentes successives. La force ascensionnelle n'est pas obtenue
du gaz hydrogène qui ne sert qu'à équilibrer à peu près le |ioiils de tout
l'appareil, pas assez d'ailleurs pour s'opposer à une descente qu'on peut
rendre plus ou moins rapide et qui se produit dès qu'un gaz, différent du
premier, cesse de gonfler deux réceptacles symétriquement placés en avant
et en arriére du ballon principal Ce gaz est l'ammoniaque, et c'est sur son
absorption rapide que compte l'auteur de la Note pour opérer le dégonfle-
ment des deux réceptacles; sans s'expliquer d'ailleurs sur la manière dont
s'opère l'absorption par suite de laquelle doit s'opérer la descente, ni sur
la manière dont un nouveau dégagement du même ira remplir les deux
réceptacles pour produire l'ascension suivante.
(Commissaires : MM. Morin, Halard, H. Sainte-Claire Deville.)
M. C. Grin présente le projet d'un bjslèmc aérostatique dans lequel il
pense avoir remédié aux divers inconvénients reprochés à ceux qui ont été
essayés jusqu'ici. Cette exposition est accompagnée de diverses figures sans
lesquelles elle pourrait difficilement être comprise, et nous devons nous
borner à cette simple annonce.
(Renvoi à la Conunission précédemment nommée pour d'autres Conmiii-
nications relatives à l'aérostation, Conunission composée de MM. Morin,
Delaunay, Dupuy de Lôme.)
M. E. Petro adresse une Note sur les ballons captifs et sur un moyen
destiné à faire disparaître ce qu'il considère comme la cause principale de
la difficulté qu'on rencontre à maintenir ce ballon à une hauteur suffisante
pour que l'observateur puisse surveiller une vaste étendue de terrain.
(Renvoi à la même Commission.)
On renvoie à la même Conunission une Note ayant pour litre : « Ballon
dirigeable par le haut ».
M. Clotet envoie une addition à sa Note du 17 octobre dernier sur une
nouvelle bombe cylindro-coniqne.
(Renvoi à l'examen de la Section de Mécanique à laquelle MM. Delaunay
et Dupuy de Lôme ont été priés de s'adjoindre.)
MM. Brachet et Vallée adressent la description d'une lampe électriijue
( 77» )
dont ils pensent qu'on pourrait faire en ce mouieni une utile application
dans la ville de Paris pour l'éclairage des larges voies.
(Renvoi à l'examen de la Section de Chimie à laquelle est adjoint
M. Dumas.)
CORRESPONDANCE .
M. DE ScHŒXEFELD, Secrétaire général de la Société botanique de France,
transmet l'extrait du procès-verbal de la séance de rentrée de cette Société
qui déclare adhérer complètement à la protestation de l'Institut contre le
projet de bombardement de la ville de Paris.
« La Société, on reprenant le cours habituel de ses réunions, a entendu
la lecture de la déclaration de l'Institut de France réuni en assemblée géné-
rale le i8 septembre dernier; ayant donné unanimement son adhésion pleine
et entière à cette solennelle déclaration, elle croit devoir l'appuyer spéciale-
ment en vue de la conservaîion des herbiers publics et particuliers dont
quelques-uns, œuvre de plusieurs générations et libéralement ouverts aux
savants de tous les pays, sont d'un intérêt scientifique général incontesté,
et qui sont d'ailleurs plus exposés aux chances d'incendie que les autres
collections scientifiques.... »
Ont signé, au nom du Bureau de la Société et pour le Président absent,
les deux Vice-Présidents, MM. Brongniart et Roze.
M. DuM.4S présente au nom des auteurs, MM. Champion et H. Pellet,
une Note « sur quelques propriétés de la dynamite et sur un nouveau pro-
cédé de la fabrication de la nitroglycérine ». La nouveauté de ces recher-
ches et leur importance ont déterminé à présenter cette Note pour que les
auteurs puissent ainsi prendre date; mais îles raisons de même nature que
celles qui ont fait ajourner la publication de la Note de M. Eug. Pelouze
sur son procédé pour la conservation des viandes ont fait penser que pour
celle-ci il convenait de se borner pour le présent à une simple annonce.
M. Dumas dépose, de la part de l'auteur, un exemplaire de la Conférence
faite par M. Riche, le ii novembre, sur la « Manière de se nourrir dans
les circonstances présentes ».
M. BussY présente au nom de M. Soubeyran, professeur agrégé à l'École
de Pharmacie, une carte géographique sur laquelle sont inscrites, au lieu
de leur production, toutes les principales substances qui trouvent leur em-
ploi dans la matière médicale.
( 77' )
GÉOLOGIE COMPARÉE. — De l'existence de roches éruptives et de roches
métamorphiques parmi les météorites; par M. Stanislas Meunier.
« J'ai cherché à montrer, clans ma précédente Communication, cjne des
faits positifs conduisent à reconnaître des relations stratigraphiques entre
des types divers de météorites, c'est-à-dire à reconnaître la preuve que des
roches météoritiques de nature différente, dérivent d'un même gisement
originel.
)) Allant plus loin, je vais faire voir aujourd'hui que l'étude de ces rap-
ports existant entre des roches extraterrestres donne le moyen de définir
jusqu'à un certain point, au moins pour plusieurs d'entre elles, les condi-
tions spéciales de leur formation. Tandis, en effet, que le plus grand
nombre des météorites se présentent comme le résultat pur et simple du
refroidissement d'une masse fondue primitive, plus ou moins analogue à
celle qu'on obtient artificiellement par leur fusion, d'autres ont conservé
l'empreinte d'actions géologiques plus compliquées. C'est ainsi qu'il y a,
comme on va voir, des météorites offrant un caractère évidemment éruptifet
que d'autres sont manifestement le résultat d'un véritable métamorphisme.
» L'exemple le plus net et le plus concluant, puisqu'il synthétise pour
ainsi dire tous les autres, nous sera fourni par le remarquable fer que je
citais déjà dans une précédente Communication comme ayant été découvert
il y a peu d'années dans la cordillère de Deesa, au Chili. On se rappelle
que ce fer, essentiellement bréchiforme, est constitué par la réunion de
fragments pierreux de forme anguleuse et de grosseur variable, reliés
ensemble par une substance métallique qui les empâte. J'ai dit que la
partie métallique soumise à l'analyse m'a donné tout à fait les mêmes ré-
sultats qu'on avait obtenus en examinant le fer trouvé à Caille en 1828,
et que les fragments pierreux ne sauraient se distinguer, sous aucun rap-
port, de la météorite tombée en Algérie, à Tadjera, près deSétif, le 9 juin 1 867.
Or, on va voir que la pâte métallique du bloc de Deesa diffère de la mé-
téorite de Caille quant à son mode de formation, et que la pierre de Sétif,
identique, je le répète, aux fragments anguleux de la brèche chilienne,
a conservé les traces non douteuses du métamorphisme qu'elle a subi
postérieurement à sa solidification.
» Pour comprendre en quoi la pâte du bloc de Deesa se distingue du fer
de Caille, il faut rappeler en quoi consiste l'expérience de Widmannstœtten.
Si après avoir poli une surface plane sur un fer météorique, on le soumet
C. R., 1870, 3« Semenre. (T. LXXI, N» 22.) I o3
{ 77=)
à lactinn corrosive fl'nn ncido, on voit, contrairement à ce qui a lieu pour
une lame polie de (or artificiel, apparaître un moiré d'une régularité ex-
trême. Ce moiré ou, comme on dit, cette figure de Widmannsfoctten est
due à l'existence dans la masse mélallinue de divers alliacés de fer et de
nickel dont la solubilité est en rapport avec la composition et qu'une cris-
tallisation générale de l'ensemble a disposés danstiu ordre régulier. Il est
rare que deux fers différents présentent rigcu-eusement la même figure, et
il arrive que certains d'entre eux, an lieu du réseau géométrique habituel,
ne donnent que des dessins confus et comme brouillés. C'est, entre autres,
le cas du fer de Deesa, et c'est justement par ce caractère qu'il révèle son
origine éruptive. En effet, du fer de Caille étant donné, rien de plus facile
que de lui imprimer le caractère confus qui appartient à la masse chilienne.
Il suffit pour cela de le fondre dans un creuset et de l'abandonner ensuite
au refroidissement lent. Dans cette simple expérience, sa composition chi-
mique n'a évidemment pas changé, mais il n'en est pas de même de sa
sirucfure, et désormais les acides ne peuvent plus dessiner sur des surfaces
polies que des figures confuses. Je ne crois pas qu'on puisse refuser de tirer
de ce fait cette conséquence que le fer de Deesa n'est autre chose que le fer
de Caille qui, par voie de fusion, a été injecté au travers de roches pier-
reuses superposées et en a empâté des fragments; c'est dans toute la force
du terme luie brèche de filon éruplif.
» Cette conclusion est d'ailleurs pleinement confirmée par l'état de deux
fragments pierreux de la brèche de Deesa. Des expériences extrêmement
simples m'ont amené à ce résultat imprévu que la roche noire qui constitue
les fragments, et que j'ai désignée sous le nom de ladjérite parce qu'elle
forme, comme on l'a vu, la pierre de Tadjera (Sélif), peut être produite
artificiellement au moyen de certaines roches météoriliques toutes diffé-
rentes, et spécialement au moyen de celles que j'appelle aumalite et chan-
tonnite. Que l'on chauffe ces roches qui sont, comme on sait, d'une couleur
gris-clair et qu'on les maintienne pendant un quart d'heure par exemple
dans un creuset à la température rouge, ou les trouvera après refroidisse-
ment complètement transformées. Leur couleur sera devenue noire; leur
dureté et leur ténacité auront augmenté; leur densité aura subi elle-même
un léger accroissement. De sorte que, déjà semblables av;int l'expérience
à la tadjérite |x>ur la composition chimique, elles en auront pris tous les
caractères extérieurs et ne sauraient plus en aucune façon eu être dis-
li liguées.
» Il me sera sans doute permis de faire remarquer en passant que c'est
( 77'^ )
la preiinère fois que l'on parvient à reproduire artiticiellement une météo-
rite, et cela avec tant de perfection qu'il est impossible au plus habile de
reconnaître la roche naturelle de son imitation. D'ailleurs cette circon-
stance que la matière première de cette reproduction est elle-même une
météorite ne diminue pas, me semble-t-il, l'intérêt de l'expérience.
» Quoi qu'il en soit, si l'on suppose que, lors de son éruption à l'état de
fusion, le fer de Caille a empâté des fragments d'anmaliîe et de chantonnile,
il n'a pas pu le faire sans les métamorphiser en tadjérite. Dès lors la pré-
sence dans le fer de Deesa, de fragments de cette dernière roche, est,
comme je l'annonçais, une preuve de plus que ce fer constitue réellement
un fdon et dévoile des relations stratigraphiques entre la caillite et l'an-
malite. Il faut aussi faire remarquer que d'autres fers sont, comme celui de
Deesa, constitués par l'association de parties pierreuses avec des parties
métalliques, et que toujours les fragments lithoides appartiennent au 1} pe
tiès-rai'e des météorites noires. Tels sont les fers d'Hemalga, de Toule, etc.
Cette circonstance qui m'avait frappé il y a déjà plus d'un au, lorsque je
publiai l'analyse du fer de Deesa, reçoit, comme on voit, de l'expérience
une explication des plus simples. Quant à la masse de Sétif, qui ne se pré-
sente pas en contact avec des masses de fer auxquelles on puisse attribuer
son métamorphisme, on est évidemment porté à voir en elle un échantillon
de la paroi d'aumahie contre laquelle a eu lieu l'éruption niétaliiciue.
I) Remarquons ici cpie la coloration noire qui nous occupe, si différ<nl('
de la luiance que présentent les produits de fusion de l'aumalite et de la
tadjérite elle-même, constitue conune un thermomètre enregistreur qui
nous permet d'apprécier, dans une certaine- mesure, les conditions de tein-
jiérature par lesquelles ont passé certaines masses météoiitiques. Sans fane
des aujourd'hui l'application de cette observation à la couleur noire du
vernis, d'ailleurs en partie fondu, de la plupart des météorites, j'ajouterai
que les faits dont il vient d'être question paraissent de nature à jeter cpielque
lumière siu' la cause à lacpielle est due la teinte foncée que présenicnl les
surfaces de frottement si fréquentes dans beaucoup àe météorites. Quel(|ues
essais m'ont fait voir que la matière noire de ces surfaces est identicpie à
celle qui colore la tadjérite et paraît résulter d'un échauffenient local de
très-peu de durée subi par les surfaces frottantes. On en tire des notions
importantes parce qu'elles n'ont rien d'hypothétique quant au mode d'é-
ruption de ces roches bréchiformes. Il est évident, en effet, qu'elles ont été
poussées de la profondeur, alors qu'elles étaient déjà complètement soli-
difiées, et c'est à la seule action mécanique qu'il faut attribuer l'échaullè-
io3..
( 774 )
ment des parties qui, après leiii' rupture, ont pu glisser les unes contre les
autres, sans oublier toutefois que les fissures ont pu livrer un chemin plus
facile à la chaleur d'origine profonde. Cetle conséquence s'applique au
même titre aux roches terrestres éruptives. J'ai déjà insisté sur la similitude
de structure et par conséquent de mode de formation que la serpentine
présente avec la chantonnite, et j'ajoute aujourd'hui que le fait rendu si
facilement sensible ici par les miroirs de frottement, à savoir que l'érup-
tion a eu lieu à l'état solide, est beaucoup plus général qu'il ne paraît d'a-
bord chez les roches éruplives non volcaniques. Je me fonde entre autres
sur une observation récente faite dans la collection lithologique du Mu-
séum et qui me porte à croire qu'un grand nombre de roches éruptives
de l'apparence la plus compacte sont en réalité bréchoïdes. Il s'agit d'une
eurite lapportée de Pointe-Légal (Cochinchine) par M. Germain et enre-
gistrée au Catalogue Carré sous le n° 880.1. A la cassure, cette roche est
absolument com|)acte comme la plupart des pétrosilex, mais, observée sur
sa surfiice naturelle, elle se montre, par suite de l'action inégale sru* ses
diverses parties, des agents atmosphéricpies, formée de fragments anguleux
juxtaposés exactement comme la serpentine et la chantonnite.
» Mais, laissant ce sujet qui m'écarte de mon objet principal, je re-
marque que le fait de la transformation de l'aumalite et des roches a: a-
logues en ladjérite, sous la seule influence de la chaleur et en dehors de
tonte action oxydante, ne s'explique pas aisément. Je poursuis par des ex-
périences chimiques la solution de cet intéressant problème, et je me pro-
mets d'en soumettre les résultats à l'Académie. »
PHYSIQUE. — Disposition nouvelle des piles voltaïques; opptiialion
à la pile de Bunsen; par M. J.-C. d'Almeida.
« I. La disposition des piles voltaïques que j'ai l'honneur de préseii'cr à
l'Académie offre les avantages suivants : 1° soixante éléments sont mis en
activité en moins de temps qu'il n'en faut d'ordinaire pour en monter im
seul ; ils sont démontés avec la même rapidité; 2" inie économie considé-
rable des liquides excitateurs se trouve réalisée; 3° la pile est Iransportable
sans danger ni de rupture des vases, ni de déversement des liquides, quels
qae soient les cahots qui surviennent.
)) IL Voici seiie éléments de Bunsen réunis dans une même caisse sé-
paK'e en seize compartiments j)ar des cloisons de gutta-percha : ces seize
éléments peuvent être remplis simultanément de la solution d'acide sulfti-
( 775 )
riqiie. A cet effet, le fond de chacun d'eux est mis en communication avec
un tube qui, se recourbant deux fois, monte verticalement le long des pa-
rois extérieures de la caisse, et se termine un peu au-dessus du niveau où
doit venir le liquide de l'élément. Ces seize tubes sont ensuite réunis eu un
seul tuyau, qui est destiné à introduire ou à enlever la solution acide quand
on veut monter ou démonter la pile.
» Pour réaliser ces deux effets inverses, le flacon tubulé, que M. H. Sainte-
Claire Deville emploie si ingénieusement dans divers appareils de chimie,
a été mis en usage. Par un tube de caoutchouc, sa tubulure latérale infé-
rieure est maintenue en communication constante avec le tuyau dont nous
venons de parler. Si l'on élève le flacon plein de la dissolution acide, le
remplissage des compartiments se fait de lui-même; et, pour peu que l'on
ait eu soin de mesurer une fois pour toutes la quantité de liquide, on n'a
qu'à poser le flacon sur le couvercle de la pile; il ne reste plus à s'occuper
de rien. Monter la pile se réduit donc à un travail de quelques secondes.
I) Pour vider les vases, c'est-à-dire pour démonter la même pile, on
descend le flacon après l'avoir penché vivement pour reniplir avec le li-
quide en excès (qui se trouve dans le flacon au-dessous de la tubulure) le
tube de caoutchouc primitivement vide, et l'opération est terminée.
M Les vases poreux s'emplissent et se vident au moyen du même système.
Par un tube conique creux, qui traverse leur fond, ces vases sont solide-
ment fixés à l'extrémité de tubes semblables aux précétlents.
» Un vase brisé par accident se remplace aisément par un des vases de
rechange dont on a fait provision.
» Le caoutchouc, quoique altérable par l'acide nitrique, peut cependant
résister de quinze jours à trois semaines.
» IIL 11 importe de remarquer que la pile, dès qu'elle est montée, se
trouve dans les conditions ordinaires d'une pile de Bunsen. Les éléments
sont complètement séparés les uns des autres. Le liquide d'un comparti-
ment ne communique en aucun point avec le liquide des autres comparti-
ments. Cette disposition se distingue en cela de quelques autres qui sont
analogues en apparence. Dans ces derniers, une communication constante
persiste entre les solutions acides des éléments successifs; une perte est
alors déterminée par les courants dérivés qui circulent dans les solutions;
cette perte peut s'élever assez haut : dans une pile de ce genre, je l'ai trouvée
égale à o,25 de l'intensité. Il en est autrement de l'arrangement que nous
proposons, les seize éléments contenus dans la caisse valent exactement le
même nombre d'éléments ordinaires; je l'ai vérifié par expérience.
( 776 )
» IV. La pile a été rendue Iransportable, avons-nous dit, et capable de
supporter des chocs violents. Voici comment on y est parvenu. En premier
lieu, les matières qui la composent ont été autant que possible choisies
parmi les moins fragiles qui soient à notre disposition : les caisses, les
tubes, les flacons sont en gutta-percha. En second lieu, toutes les pièces
qui composent un élément ont été fixées exactement dans les positions
qu'elles doivent occuper. Les cylindres de zinc entrent assez juste dans les
compartiments; les charbons sont retenus invariablement dans les vases
poreux par des bouchons. Enfui le déversement accidentel des liquides a
été rendu impossible par la fermeture des vases poreux et parcelle de la
caisse. Une occlusion parfaite de celle-ci est obtenue j)ar un couvercle : elle
est assurée au moyen d'un tube creux de caoutchouc qui s'étend sans solu-
tion de contimiité sur le pourtour creusé du bord supérieur de la caisse,
et que le couvercle écrase incomplètement. Je dois la coiuiaissance de ce
mode de fermeture si simple et si parfait à M. L. Samson, qui s'occupe avec
grand succès de travaux de galvanoplastie. Du reste, quelque excellent
que soit le procédé d'occlusion, il vaudra toujours mieux conserver la pile
démontée pendant le transport, puisqu'elle peut être promptement mise
en activité.
» V. Dans les laboratoires, ces fermetures sont inutiles. La cuve, les
tulxs, les flacons seront d'ailleurs fabriqués en grès, en porcelaine ou en
verre, I^a pile deviendra fort peu coûteuse. En outre, une économie notable
des liquides excitateurs sera réalisée; car dans le cours d'iuie série (roj)é-
rations, l'appareil pourra être dén)onté pendant les intervalles, souvent
assez longs, qui séparent deux expériences. L'altération des liquides sera,
grâce à cette disposition, en rapport rigoureux avec les effets produits. Il
ne deviendra plus nécessaire de renouveler les liquides aussi souvent qu'on
le fait maintenant.
» 11 est bien évident <pie la disposrtion que nous venons de décrire s'ap-
plique à toute espèce de pile ; pile de Daniell, de Grove, de Smee ou
autres.
» Je ne dois pas terminer cet exposé sans remercier \\n conslrui teur
lies-eonnu, M. Diicrelet, dont le zèle et l'iiabilelé m'ont aidé à résoudre le
[Jinblème à peu près tel que je me l'étais posé. »
( 777 )
ZOOLOGIE HISTORIQUE. — Sur les animaux employés par les anciens Egy/itiens
à la chasse et à la c/uene (quatrième Note); par M. F. Liîxormant.
« Diodore de Sicile (I, 48), d'après Hécatée d'Abdère, en déciiv.nit le
grand monument de Thèbes auquel les exégètes à l'imaginatioii fertile en
légendes, qui montraient aux voyageurs grecs les édifices de l'Egypte,
avaient donné le nom de Tombeau d'Osymandyas, parle avec détails des
vastes bas-reliefs historiques qui en décoraient le péristyle d'entrée, suivant
l'usage des Pharaons guerriers du Nouvel Empire. Il en signale entre autres
un où l'on voyait « le roi combattant au premier rang quelques ennemis,
» avec à ses côtés un lion qui l'aidait dans la bataille par mie action ter-
» rible. Des exégètes, ajoute-t-il, les uns disent que c'est un véritable lion
» dressé à cet effet, élevé par le roi, qui partageait ses dangers dans les
» combats et mettait les ennemis en fuite par sa vaillance; les autres pré-
» tendent que cette image est emblématique et que le lion figure les dis-
» positions de l'àme du roi sous un éloge flatteur, parce qu'il était au plus
» haut degré vaillant et actif. »
» Malgré quelques inexactitudes depuis longtemps signalées dans les
mesures que donne l'écrivain grec, le prétendu tombeau d'Osymandyas
paraît bien être, comme l'avaient pensé les savants de notre grande expé-
dition d'Egypte et Champollion après eux, le splendide édifice connu
maintenant sous le nom plus exact dii Ramesséion de Gournah. Mais on
n'y voit plus le bas-relief signalé par Diodore. Suivant l'ingénieuse re-
marque de Champollion [Lettres d'Egypte, 2^ édition, p. 238), il devait être
sculpté sur le mur de fond du péristyle, depuis longtemps écroulé.
» En revanche, dans le poème du scribe Pentaotir, traduit par notre
éminent égyptologue, M. le vicomte de Rougé, et désormais célèbre dans
la science, nous trouvons une mention précise et formelle du lion qui ac-
compagnait Ramsès II dans les combats. On sait que cette épopée, dont on
possède trois copies, dans le papyrus Sallier et sur les murailles de Rarnak
et de Louqsor, est destinée à conserver la mémoire de l'exploit dont le Sé-
tostris des Grecs se vantait le plus, du brillant coup de tête de jeunesse par
lequel il avait dispersé presque seul, au début de son règne, une embuscade
des Iléthéens sous les murs de Qadesch, dans la vallée de l'Oronte. C'est
cet exploit que retracent les grandes scènes guerrières d'Ibsamboul, de Kar-
nak et de Loufjsor. Il était certainement figuré au Ramesséion, et différents
traits indiqués par Diodore s'appliquent d'inie manière toute spéciale aux
bas-reliefs qui s'y rapportent. Or, voici ce qu'on lit dans le poème : « Le
( 778 )
» grand lion qui marchait à côté de son char (du roi), combattait avec lui ;
» la fureur enflammait tous ses membres, et quiconque s'approchait tom-
M bait renversé. » Il s'agit donc bien d'un véritable lion, et l'explication des
» exégètes qui voyaient dans sa figure une représentation réelle, et non
symbolique, était la vraie.
» Au reste, dans le temple souterrain d'Ibsambonl (ChampoHion,
Monuments de t Egypte et de la Nubie, t. I, PI. XVII biset. XXXI) et sur
un des polygones de Louqsor (ChampoHion, t. IV, PL CCCXXFII), les
sculpteurs égyptiens ont représenté le camp de Ramsès dans cette même
expédition. Et devant la tente du roi, nous y voyons son lion, couché
et enchaîné, sous la surveillance d'un gardien armé d'une massue, car,
tout dressé qu'il fût, on ne pouvait pas laisser sans le surveiller de près
cet hôte dangereux de l'armée, dont la vanité du Pharaon aimait à se
parer, et qui était comme le symbole vivant de sa puissance.
» lùnnscs II n'est pas le seul monarque égyptien qui se soit fait accom-
pagner à la guerre d'un lion dompté et dressé à combattre aux côtés de
son char. Son successeur Rmnsès III, non moins guerrier, avait la même
habitude. Dans le bas-relief du palais de Médinet-Abou qui le représente
partant pour une de ses expéditions (ChampoHion, t. III, PL CCXP'II),
il est monté sur son char et un lion marche auprès des chevaux.
» Sir Gardner Wilkinson [Manners and customs qf ancient Egyptiaiis,
t. Ifl, p. i6) a cru que les anciens Égyptiens dressaient le lion pour s'en
servir à la chasse de la même f.icon que certains peuples du guépard. Xi
tirait cette conclusion delà peinture d'un tombeau de Béni-Hassan (XIP
dynastie), où l'on voit une lionne terra.ssant un Ibex sinaiticus au milieu
d'autres animaux, tels que gazelles, taudis qu'un chasseur s'avance l'arc
et la flèche à la main. Mais nous ne pouvons admettre la manière de voir
du savant anglais et tirer avec lui pareille conclusion d'un exemple isolé.
Les artistes de l'antique Egypte, dans ces représentations de vénerie, se
sont très-souvent i)lu à mettre eu scène, combattant ou se jouant entre
eux, les animaux que le chasseur va frapper de ses traits. 11 n'y a rien à
voir de plus dans la peinture à laquelle se réfère sir Gardner Wilkinson,
et le lion n'y est certainement pas un auxiliaire du veneur, dressé à cet
effet.
» Au reste, le lion ne se prêterait pas à une éducation de ce genre et
aucun peuple n'est parvenu à la lui imposer. Quand on lit dans Élien {De
nat. anint,, XVII, 26) que les Indiens avaient des lions, « non de la plus
» grande taille, » of% 01 fjLiynloi, dressés à les servir à la chasse, il s'agit
( 779 )
certainement d'un récit sur l'emploi des guépards, altéré en passant de
bouche en bouche. Il en est de même quand plus tard, au moyen âge,
Marco Polo (Chap. 90) nous entretient des « lyons et hipars » dont le fon-
dateur de la dynastie mongole en Chine se servait dans ses chasses. On ne
saurait en effet se méprendre sur l'animal dont il a voulu parler sous ce
nom inexact, lorsqu'il dit que les chasseurs portaient ses prétendus lions
sur la croupe de leurs chevaux et lorsqu'il les décrit par ces expressions
caractéristiques : « ils sont luit vergié de noir et de vermeil et de blanc. »
» Je ne terminerai pas cette série d'études pour lesquelles j'ai trop abusé
de la bienveillante attention de l'Académie, sans combler une lacune de ma
première Note en signalant encore deux variétés de chien de plus, repré-
sentés sur les monuments égyptiens, mais qui paraissent avoir été bien peu
répandues, puisque de l'une et de l'antre on ne connaît jusqu'à présent
qu'une seule figure.
» Ce sont :
» 1° Un chien-renard dont les formes sont exactement celles de la variété
la plus habituelle, du chien des bazars du Caire, mais dont la robeest indi-
quée comme fauve avec de grandes taches d'un brun rouge; il a été figuré
sous la XIP dynastie dans un des tombeaux de Béni-Hassan (Champollion,
t. IV, PL CCCCXXVl);
H 2° Un grand mâtin de haute taille ; Champollion ( tome IV,
PI. CCCCXXVIII) l'a fait dessiner dans un tombeau de Gournah (XVIIP
dynastie), mais sans aucune indication sur la couleur de sa robe. »
ZOOLOGIE. — Sur les Entozoaires des Dauphins; par M. H. Gekvais.
« On a signalé une vingtaine d'espèces d'Entozoaires vivant dans les
Cétacés du sous-ordre des Cétodontes, ou Cétacés qui ont des dents et sont
dépourvus de fanons. Elles ont été principalement observées chez les Dau-
phins. M. van Beneden en a donné récemment une liste complète dans les
Bulletins de l'Académie de Belgique (i).
» Il s'en faut de beaucoup que toutes ces espèces soient également bien
connues.
» Le Marsouin de nos côtes [Phoccena communis], en a fourni cinq à lui
seul ; ce sont : VJscaris simplex, le Slrongylus inflexus, le Slrong/lus minor,
le Slrongylm convoluius et le Filaria injlexicaudala.
(i) Bulletin de V Académie de Belgique, ■2.''"' série, t. XXIX, n" 4; 1870.
C. R., 1870, 2" Semestre. (T. LXXI, N" 22.) '^^^\
( 7«o )
» On n'en citait que deux dans le Delpfnnus delphis : VEcInnorhynclius
pellucidus et le Phyllobolhrium delpltini , récemment découvert par
M. Edouard van Bencden (i).
» Un Dauphin ordinaire [Delphimis delphis), disséqué l'hiver dernier au
laboratoire d'anatouiie comparée du Muséum et qui provenait de Concar-
neau (Finistère), nourrissait, indépendamment du Phyllobolhiium dont il
vient d'être question, plusieurs autres espèces qui me paraissent mériter
d'être décrites. Ce sont :
H Parmi les Nëinaloides : i° ï ascaris simplex, déjà observé dans le Mar-
souin; il vit dans l'estomac.
» 2" Une espèce encore inédite du genre Tricliosoma, trouvée dans le
poumon.
1) Parmi des Trématodes : une espèce de Douve (Disloma) extraite des ca-
naux biliaires.
» Parmi les Cestoïdes : un ver très-singulier, à corps grêle et long, sans
articulations, comparable aux Ligules mais possédant, comme les scolex
du même ordre, un renflement céphaliqne garni de quatre ventouses. Il
manque de la couronne de crochets propre à beaucoup de vers rubanés.
» La partie scoliciforme est grêle et peut avoir jusqu'à un mètre de
long. De la tête de cet animal partent deux longs canaux excréteurs on-
dulés qui se prolongent intérieurement et sont analogues à ceux que
M. van Beneden a retrouvés dans les scolex des Cestoïdes de différents
poissons osseux.
» Ces vers étaient contenus dans des kystes placés à la face inférieure du
diaphragme, sur les piliers de ce muscle et quelques-uns, mais en
moindre nombre, dans les muscles droits antérieurs de l'abdomen.
» Les kystes enveloppants sont très-volumineux ; ils mesurent de trois à
quatre centimètres de long sur deux de large, et présentent tantôt la forme
ovale ou en amande, tantôt la forme sphérique, mais celle-ci plus rarement.
» La paroi qui les constitue est assez résistante; si l'on en fait l'incision
on trouve à l'intérieur de sa cavité une seconde enveloppe, consiiluant un
second kyste dont la forme varie beaucoup.
1) l'armi ceux que j'ai examinés le \)\us grand nombre étaient sphérique.s
et l'une des moitiés était invaginée dans l'autre; cette sorte de sphère était
ombiliquée à l'un de ses pôles, une membrane très-mince et presque transpa-
rente la fixait à la paroi du premier kyste. Quelques-uns au contraire
(1) Comptes rendus, I. LXVII, j). loSi; 1868.
( 7«' )
çtaient ovales, aplatis et festonés sur leurs bords; d'autres, réunis par leurs
extrémités, communiquaient entre eux par un court pédicule creux.
» En ouvrant le second kyste on trouve le ver, pelotonné sur lui-même
à la manière d'un écheveau de fil. Comme je l'ai dit plus haut, le parasite
dont il s'agit mesure jusqu'à i mètre de long, il est très difficile de l'étendre ;
cette opération fort délicate ne peut se faire que sous l'eau.
» Il est évident que c'est là un genre nouveau reliant les Ténias aux
Ligules; mais il reste encore à en découvrir la forme génératrice consti-
tuant l'état slrobilaire. Ce genre pourrai! prendre le nom de Slenolenia et
l'espèce qui lui sert de type et que je décrirai procliaincment avec plus de
détails celui âe Stenotenin Delpldni.
» Le Dauphin qui nous a fourni des Sténoténias renfermait aussi dans sa
couche graisseuse sous-dermique de nombreux kystes plus petits, habiles
par le Phyllobollirhim Delphini.
» J'ai rencontré des Phyllobothriums dans un Nésarnac {Delplihnii,
Tiirsio) très-âgé, pris dans la Méditerranée, auprès de Cette. Ce dernier
Dauphin a également été disséqué dans le laboratoire d'anatomie com-
parée. Il ne nous a pas fourni d'autre espèce de parasites. »
AlîROSTATiON. — Remarques de M. Giraud-Teulon au sujet
d'un précédent article.
M. LE Secrétaire perpétuel, en présentant, dans le dépouillement des
pièces de la Correspondance manuscrite, une Lettre de M. Giraud-Teulon,
s'exprime dans les tei-mes suivants :
« Dans la séance du i4 novembre, en rendant compte d'un nouveau
système de nauigatioîi aérienne proposé par M. Dupuis (|iage G8i), j'ai
laissé échapper verbalement la pensée (non reproduite au Compte rendu)
qu'un homme dont le poids serait presque annulé par un ballon auquel
il serait suspendu, pourrait sans doute monter et descendre dans l'air,
au moyen d'im a])pareil comparable aux ailes des oiseaux, mais qu'il
ne pourrait probablement pas empêcher le ballon d'être entraîné par
le vent.
» M. Giraud-Teulon rappelle, à cette occasion, que « la question du
» mouvement de l'homme dans l'air a été effleurée par lui dans une simple
« Note insérée à la fin du chapitre consacré à l'étude du vol, dans son
» Traité de Mécanique animale, ouvrage publié en i858 et qui a eu l'hon-
1) neur d'être couronné, en iBGo, par l'Académie des Sciences. » L'auteur
( 782 )
témoigne la crainte que, dans la réflexion ci-dessus mentionnée, je n'aie
en l'intention de faire une allusion indirecte à son savant ouvrage.
» A cela je m'empresse de répondre que, d'une part, je ne me rappelais
pas la Note insérée dans le Traité de Mécanique animcde, et que, de l'autre,
je ne l'ai contredite on rien, puisque j'ai parlé d'un ballon exposé à être
entraîné par le vent, tandis que, comme il le déclare lui-même à la fin de sa
I.etlre, l'énoncé de M. Giraud-Teulon « ne peut naturellement s'entendre
» que d'un milieu plus ou moins en repos. «
CHIMIE. — Sur un moyen de détruire rapidement en ballon des papiers
compromettants pour les soustraire à l'ennemi. Extrait d'une Note
de M. H. Mo.NTucci.
« Les aéronautes, qui n'ont pu manquer de songer ans consé-
quences de cette fâcheuse divulgation des secrets dont ils sont porteurs et
de rechercher un moyen de la prévenir, ont évidemment reculé devant
l'imprudence, conseillée par quelques journaux, d'allumer du feu dans la
nacelle d'un ballon contenant du gaz inflammable; mais je suis quelque
peu étonné qu'on n'ait pas songé au moyen très-élémentaire de destruction
que voici :
» Il suffit de se munir d'un vase carré en cristal ou en porcelaine,
pourvu d'un couvercle en aluminium, et de la grandeur ordinaire des en-
veloppes officielles. Ce vase, contenant un bain d'acide nitrique, recevra,
au moment du danger, les dépèches préalablement percées de coups de
canif. En quelques secondes, l'écriture aura complètement disparu.
» L'acide sulfurique produirait le même effet, mais avec trop de len-
teur pour la circonstance. »
M. J. Mouix annonce à l'Académie qu'il est en mesure d'exécuter devant
MM. les Commissaires qu'elle a bien voulu lui désigner les expériences
mentioiuiées dans sa Note du lo octobre sur Y injlammation de In poudre
par l'électricité. Cependant il croit devoir faire remarquer qu'un des appa-
reils sin- lesquels il se proposait d'expérimenter ne pourra être terminé
faute d'ouvriers.
(Renvoi aux Commissaires nommés : MM. Dumas, Morin, H. Sainte
Claire Deville et Jamin.)
La séance est levée à 6 heures. E. D. B.
COMPTE RENDU
DES SEANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SEANCE DU LUiNDI :» DÉCEMBRE 3 870.
PRÉSIDENCE DE M. L10U^'ILLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. Dumas adresse à l'Acacléniie les paroles suivantes :
« Une éclipse de Soleil, totale i)oiir une partie de l'Algérie, aura lieu le
a-i décembre. M. Janssen, si célèbre j)ar les belles découvertes c]u'il a ef-
fectuées dans l'Inde à l'occasion de l'éclipsé de i8('8, était naturellement
désigné de nouveau, pour compléter ses observations, au patronage et au
concours du Biueau des Longitudes et de l'Académie, qui, avec l'autorisa-
tion de M. le Ministre de l'Instruction publique, se sont empressés de les
lui accorder.
)) M. Janssen est parti de Paris vendredi, à ^ heures du matin, par un
ballon spécial : le roUa. L'administration avait bien voulu le mettre entiè-
rement à sa disposition; cet appareil n'emportait que le savant, les instru-
ments de la science, et le marin chargé de la manœuvre.
» Notre confrère, M. Charles Deville et moi, nous assistions au départ
de M. Janssen, soit pour l'aider dans ses derniers ajipréts, soit pour lui
donner une preuve de plus de l'intérêt que l'Académie porte à ses travaux.
L'ascension, grâce aux précautions minutieuses de M. Godard aine, s'est
accomplie dans les meilleures conditions, et la direction excellente prise
par l'aérostat doit faire espérer le succès d'une expédition que menacent,
il est vrai, des périls de plus d'un genre.
C. R., i«-jo, 2" Semeslrr. (T. LXXI, N» 23.) lof)
( 784 )
» Les Secrétaires perpétuels de rAcadémie, il est utile de le déclarer pu-
bliquement, se portant garants du caractère absolument scientifique do
l'expédition et de la parfaite loyauté de ÎM. Janssen, l'ont recounnandé
ofticiellement à la protection et à la bienveillance des autorités et des amis
de la science, en quelque lieu que les chances du voyage l'aient dirigé. 11
fut un temps où ce témoignage aurait suffi pour lui assurer im accueil che-
valeresque dans les lignes ennemies. On nous a appris le doute sur ce
point. Aussi chacun a-t-il coni[)ris que des rigueins et des -menaces, non
justifiées par les lois de la guerre, aient fait à M. Janssen comme un devoir
de compter sur son propre courage et non sur la générosité d'autrui. Je
suis entouré de témoins qui peuvent attester, cependant, qu'en pleine
guerre, en i8i3, Davy, un Anglais, recevait, dans ce palais même, rhos|>i-
talité de la France, comme un honunage rendu au génie et aux droits supé-
rieurs de la civilisation.
» En suivant du regard notre digne missioiuiaire dans l'espace où il se
perdait peu à peu, j'ai senti ce souvenir se réveiller et renouveler en moi
le besoin de protester, soit au nom de la science, soit au nom des prin-
cipes eux-mêmes, contre tout empêchement qui pourrait être mis à son
expédition.
» Deux inventions françaises, liées aux gloires de l'Académie, ont con-
couru aux opérations de la défense : les ballons que Paris investi oxpédie,
les dépêches microscopiques qui lui reviennent sur l'aile des pigeons.
» La décision prise par le comte de Bismark de renvoyer devant lui
conseil de guerre les personnes qui, montées dans les ballons, essayent,
sans autorisation préalable, de franchir les lignes ennemies, intéresse donc
l'Académie. Elle ne saurait accepter que des opérations de guerre soient
punissables parce qu'elles reposent sur des princij)es scientifiques nou-
veaux; que l'homme dévoué qui, dans l'intérêt de la science, passe au-
dessus des lignes prussiennes, soit coupable de manœuvre illicite; qu'en
donnant, enfin, nos soins à l'aéronautique nous ayons contribué nous-
mêmes à fabriquer des engins de guerre prohibés.
» Comment! les voies de terre, de fer et d'eau nous étaient interdites,
la voie de l'air nous restait seule, inconstante et doutense; elle n'avait ja-
mais été pratiquée; quoi de plus légitime que son emploi? Nous l'avons
conquise par des procédés méthodiques, et si elle fonctionne régulièrement
au profit de nos armes, où est le délit?
» Que l'ennemi détruise, s'il le peut, nos ballons au passage; qu'd s'em-
pare de nos aéronautes au moment où ils touchent la terre, soit ; c'est son
intérêt, c'est la chance de la guerre. Mais que les personnes, tombant ainsi
{ 7^5 )
entre ses mains, soient livrées à une cour martiale, au loin, en pays
ennemi, comme des criminels, c'est un abus de la force.
M Lorsqu'un port est investi par terre, si la mer reste libre, l'assiégé
n'a-t-il pas le droit de s'en servir? que la tempête jette à la côte un de ses
navires, l'équipage et les passagers seront-ils traités en espions qu'on
aurait surpris pénétrant secrètement à travers les lignes ennemies? Non,
ils seront prisonniers de guerre. Dans une ville entourée de toutes parts,
comment, à son tour, la voie des airs serait-elle interdite? Le ballon qui
plane au-dessus des lignes se glisse-t-il donc au travers de ces lignes? Lorsque
toutes les populations suivent sa marche dans les airs, les unes, amies,
pleines d'espoir et l'accompagnant de leurs vœux; les autres, ennemies,
déçues et regrettant leur impuissance, comment soutenir qu'il s'agit d'une
opération clandestine, et que ce vaisseau aérien est un instrument de
guerre se glissant secrètement dans le camp de l'assiégeant.
» Mais je m'arrête. Le développement de cette question de droit des
gens n'est pas de la compétence de cette Académie; il appartient à l'Aca-
démie des Sciences morales et politiques, et je n'ajoute qu'un dernier mot.
» Dans Syracuse assiégée, Arcbimède opposant aussi aux efforts de l'en-
nemi toutes les ressources de la science de son temps, rendait pour les
Romains l'attaque de plus eu plus meurtrière. Marcellus, loin de lui faire
un crime d'avoir prolongé la défense par ses inventions, ordonna que la
vie de ce grand homme fût respectée, et, plein de regret pour sa mort for-
tuite, entoura sa fam-ille de soins et d'égards.
» Deux mille ans se sont écoulés; le christianisme a répandu sa douceur
dans les lois et dans les mœurs, et cependant. un nouvel Archimède, [)OUr
avoir créé de nouvelles combinaisons de guerre, se verrait soumis aujour-
d'hui sans pitié aux rigueurs d'une cour martiale arbitraire, si son pays
était trahi par la fortune.
» N'hésitons pas à le dire : en face de telles menaces, ceux d'entre nous
que la construction des ballons occupe; ceux que l'Académie envoie en
mission dans l'intérêt de la science n'en sont point ébranlés; et si la dé-
fense de Paris manquait d'aéronautes, on trouverait toujoius, dans cette
enceinte même ou autour d'elle, des mains exercées et îles âmes fermes
pour diriger ses patriotiques expéditions. »
L'Académie témoigne, par les |)lus vives marques d'approbation, l'as-
sentiment qu'elle donne aux paroles de M. le Secrétaire perpétuel.
Sur la proposition de M. dk Qcatkefages, appuyée par l'unanimité tle
l'assemblée, elle décide, par >ui vote, qu'elles seront consignées au procès-
io5..
( 786 )
verbal de la séance cl publiées clans les CuinfJlcs iciulub, coiiiuie i'c-xpressioii
iK; la pensée île la Compagnie.
M. LE Président désire qu'il soit bien entendu cpie le Bureau des Lon-
gitudes, qui a pi is l'initiative de l'expédition de M. Janssen, connue c'était
son devoir, partage entièrement les sentiments que l'Académie vient de
nianitester.
M. Dëlaunay appuie l'opinion de M. le Piésident, et il ajoute que le
Bureau des Lougiliuh^s, qui a préj.'aré le plan de celte exjiédition, en espère
d'heureux fruits poiu' la science.
PHYSIOLOGIE AIM'LIQUIÎK A l.'UYGlIiiNli. — Nolc itir Ic^ piOjJliclcs uiitrilivLS dts
subslnnces or(j(uiiiiii(;s tirées de^i os et sur la coinpositiuii des raiiuiis aiiinen-
taires susceulililcs (^entretenir le eor/is humain dans son étal nornud ; par
M. MiLNE EUWAKDS (l).
« La question, en réalité fort simple, de la valeur nuliilive des matières
organiques contenues dans les os est lUie de celles qui de nos jours ont
donné lieu aux discussions scieutiliques les plus passionnées et les |)lus
confuses. L'Académie eut souvent à s'en occiq)er il y a environ trente ans,
et à cette époque les jugements qu'on en porta étaient des plus contradic-
toires; mais aujourtlhui la pliq^artdes physiologistes la considèrent comme
résolue. Je partage leur opinion, et, dans un volume publié en i86S, j'ai
exposé les faits sur lesquels ma conviction rej)ose. Il est donc probable
que je ne serais pas revenu sur ce débat dans le moment actuel, si, à
l'occasion des Conununications intéressantes de M. Dumas (2) et de
M. Frcmy (3) sur l'emploi du tissu organique des os dans l'alimentation
des habitants de Paris, je n'avais vu revivre dans le public d'.niciens pré-
jugés et des idées scientifiques tpii me paraissent en désaccord avec les
principes de la physiologie moderne; or ces préjugés et ces erreurs, à
l'appui desquels on invoque des autorités scientificpies considérables, me
semblent pouvoir nuire à une chose utile, et par conséquent j'ai pensé
qu'il serait peut-être bon de dire ce qui me paraît être la vérité. J'ai pensé
(l) L'Académie a décidé que ceUe Communication, jjicn i|ue dépassant en étendtio les
limites réglementaires, serait insérée en entier an Cunijilc rendu.
[1) Voyez les Co/njjlcs rriidiis, sranccs dn 10 octol)i'(? (p. 485), du 3i octobre (p. SGCt) et
(In ■>8 novembre (p. ^SS).
{'i) t'oyez les (\>iiii>Ux rendus, sc.iiicrs iln 3i (jctohre ^p. S^y) et du y.fci iiiAenilne
(p. 747 et 756).
( 787 )
aussi qu'il ét;iit de mon devoir de remettre en lumière ce cjue mon frère
William Edwards avait fait pour établir celte vérité et de montrer l'injus-
tice du jugement léger et dédaigneux (|ue M. Magendie, parlant an nom
d'une Commission académique, porta sur les reclicrches de cet expérimen-
tateur sagace à une époque où celui-ci était trop près de la mort poiu'
pouvoir répondre à des critiques.
» On sait qu'en 1812 D'Arcet, s'inspirant peut-être d'une pensée éaiise
vers la lin du xvii'^ siècle par lui médecin français, Denis Pajîin, chercha à
utiliser pour l'alimentation des classes indigentes la substance organique
qui forme la base des os, et qui était désignée alors sons le nom de gélatine,
parce qu'on la confondait avec la matière produite par ce tissu sous l'in-
fluence j)rolongée de l'eau très-chaude. Dans ses premiers essais, D'Arcet
fit usage du parenchyme osseux débarrassé des matières calcaires par l'ac-
tion de l'acide chlorhydrique et il l'associa à d'autres substances alimen-
taires [)oui' la [^réparation des soupes dites éconoiuiques. Les résidlats
obtenus de la sorte furent jugés si favorablement par un grand nombre
d'honnnes compétents, que bientôt l'emploi de la gélatine devint usuel
dans la |)lupart de nos grands hôpitaux, et afin d'obtenir cette substance
animale à bas prix, on substitua à l'attaque des os par l'acide chlorhydrique
la cuisson à haute température dans de l'eau soumise à une pression con-
sidérable. Cette pratique dura fort longtemps et, excité par ses premiers
succès, iVArcet se laissa entraîner sur une pente où les novateurs glissent
souvent, et il tomba dans des exagérations que les hommes de science ne
pouvaient accepter. 11 vanta outre mesure les qualités alimentaires du
bouillon à la gélatine, et en même temps les établissements hospitaliers
portèrent souvent dans la préparation culinaire de ce mets une négligence
coupable. 11 en résulta que bientôt l'usage de cet aliment donna lieu à des
plaintes nondjreuses, et, en i83i, Magendie, Récamier, Dupuytren et plu-
sieurs autres médecins ou chirurgiens de l'Hôtel-Dieu de Paris cruit nt de-
voir en proscrire l'usage pour les malades confiés à leurs soins. Vers la
même époque, M. le D' Donné, se fondant sm* quelques expériences qin
lui étaient personnelles, révoqua en tloute la j-ropriété nutritive de la gé-
latine; plusieurs autres médecins ou chimistes, allant même beaucoup plus
loin, soutinrent énergiquenient que cette substance, loin d'être alimentaire,
était nuisible à la santé, et l'un d'eux invoqua l'intervention liu gouver-
nement pour en faire prohiber l'emploi. La question d'hygiène publique
posée de la sorte fut portée devant l'Acadénne et renvoyée à l'examen
d'une Commission qui chargea l'un de ses Membres, M. jMagendie, défaire
une nouvelle élude de la gélatine considérée comme aliment, (^e physio-
( 788)
logiste entreprit alors une série d'expériences qu'il prolongea pendant dix
ans, et il en exposa les résultats dans un Rapport présenté à rAcudéniie en
août i84i, travail dont la lecture produisit une impression très-défavoraLle
à l'emploi alimentaire des substances organiques extraites des os, mais
dont les bases me sembleut peu solides.
» En effet, la méthode expérimentale adoptée par M. Magendie me
paraît mal choisie. Au lieu de faire usage de la balance, instrument dont
l'emploi est des |)lus utiles dans les investigations de cet ordre, il se con-
tenta de chercher si des chiens retenus en captivité, condanuiés à un té-
gime rigoureusement uniforme, et ne recevant, potu' chaque repas, que la
substance dont il se proposait d'apprécier les quantités nutritives, continue-
raient à vivre, comme s'ils étaietît nourris de la manière ordinaire, et lors-
qu'il voyait ces animaux éprouver à la longue un invincible dégoijt pour
l'aliment unique qu'on leur présentait, et finir par mourir d'inanition à
côté d'un mets dont parfois ils avaieiU mangé d'abord avec avidité, il en
concluait que la matière soumise à cette singidiere épreuve n'était pas
nourrissante.
» Si M. Magendie s'était souvenu d'un certain conte de Lafontaine, où
le Pâté d'anguilles joue un grand rôle, il me paraît probable que le vice de
celte méthode expérimentale ne lui atuait pas échappé. Quoi qu'il en soit
à cet égard, ayant constaté que les chiens à cjui l'on fournissait, d'iuie
manière continue, pour unique aliment, de la gélatine, soit seule, soit mêlée
à des condiments propres à rendre cette matière insipide agréable au goût,
ne tardaient pas à dépérir et mouraient d'inanition au bout de quelques
semaines, il se crut autorisé à déclarer que la gélatine dite alimenlaire n'a
pas plus de pouvoir nutritif que n'en possède l'eau pure.
» Il est aussi à noter que M. Magendie obtint des résultats analogues,
en expérimentant de la même façon sur l'albumine et sur la fibrine, sub-
stances dont personne n'oserait révoquer en doute l'utilité dans l'alimen-
tation. Mais ce lait n'exerça aucune influence sur son opinion touchant la
valeur de ses exjjériences sur la gélatine, et il ressort évidemment de l'en-
semble de son Rapport que, dans son esprit, l'emploi de cette substance
était condamné d'une manière absolue et irrévocable.
» Cependant si M. Magendie n'avait pas reiusé de tenir compte des faits
constatés expérimentalement par mon frère, il aurait été obligé de recon-
naître que la gélatine bien préparée, tout en n'ayant pas une puissance
alimentaire, à beaucoup près, aussi grande que la fîbi'ine, l'albumine ou le
easèum, est susceptible de contribuer très-utilement à renireticn du travail
nutritif, et ne devait pas être rayée de la liste des substances applicables à
( 789 )
l'alimentation de l'homme, du chien ou de tout autre animal omnivore ou
carnassier.
» En effet, les expériences de Wdliani Edwards et de Bidzac (1), cousli-
tuées d'une manière rigoureusement comparative, et rendues précises par
l'emploi judicieux de la balance, avaient prouvé :
» i" Que des chiens soumis au régime du pain et de l'eau pendant un
mois environ subissaient des pertes de poids très^considérables;
» 2" Que ces mêmes animaux, nourris avec le même pain trempé dans de
l'eau, mais associé à une certaine quantité de gélatine dite alimentaire,
résistaient beaucoup mieux aux effets de ce régime insuffisant, et à la fin
de chacpie épreuve, dont la durée variait entre 21 et 86 jours, avaient en
général augmenté de poids; mais cette augmentation n'était ni régulière,
ni aussi grande que celle jiroduite normalement par le régime ordinaire et
également abondant; enfin qu'à la longue les rations composées de la
sorte deviennent à leur tour insuffisantes pour l'entretien de la vie;
» 3° Qu'il suffisait d'ajouter au mélange de pain, de gélatine et d'eau
une quantité très-minime d'un botiillon ordinaire sapide et aromatique,
pour obtenir luie augmentation régulière du poids du corps, ainsi que tous
les autres effets caractéristiques d'une bonne alimentation.
» Aucun fait consigné dans le Rapport de M. Magendie n'est venu ni
contredire ni même modifier les conclusions qui ressortent nettement do
ces expériences, bien conçues et bien dirigées. Les recherches, entreprises
plus récenniient sur le même sujet par d'autres physiologistes, corroborent
ces conclusions, et, dans l'état actuel de la science, il me semble impos-
sible de méconnaître l'aptitude de la gélatine à fournir un contingent utile
pour l'alimentation soit de l'homme, soit des animaux, sur lescpitls les
expériences dont je viens de parler ont été faites.
» Je partage donc l'opinion de M. Dumas et de M. Fremy touchant
l'utilité du tissu organique des os pour l'alimentation de la population de
Paris, aujourd'luii que, j)ar suite de la présence de reuuemi autour de nos
murs, les autres aliments azotés ont cessé d'être aussi abondants que fl'or-
dinaire dans l'intérieur de cette grande ville. J'ajouterai même que la sub-
stance désignée sous le nom d'osscine par M. Fremy me paraît être, pour
nous, un aliment très-supérieur à la gélatine que cette substance est sus-
ceptdjle de fournir par la coclion, et que D'Arcet employait pour la prépa-
ration des soupes dites économiques; mais pour motiver cette manière de
(i) « Recherches expérimentales sur l'emploi de la gélatine comme substance alimentaire »
(Archives générales de médecine, 2'^ série, t. VII, p. 2^2; i835).
( 790 )
voir, qui s';ircor(io tiTS-i)itn avec tiivers hiits observés par 'M. Aîagendic,
el pour rappeler les principes physiologiques qui me paraissent devoir
nous 2[ui(ler dans la composition de nos rations d'entretien, je crois néces-
saire de i)résenter quelques considérations générales sur la nature du travail
nutritif auquel il s'agit de satisfaire.
» La nutrition des êtres animés est un phénomène tiès-complexe, et pour
résoudre nettement quelques-unes des questions dont le public s'occiq)e
beaucoup aujourd'hui, il me semble utile d'analyser le problème phy-
siologique que l'on a besoin de résoudre. Si je ne craignais d'abuser de
l'attention que l'Académie m'accorde, j'aimerais à (lévelop|>er ce sujii im
peu longuement, mais en ce moment je veux être bref et je ne loucherai
qu'à quelque.s-uns des points les plus importants.
» Pour satisfaire aux besoins de la nulrilion, il (au! :
» 1° Que l'économie animale trouve dans la ration alimi ulaire de chaque
jour, ou d'une série peu nombreuse de jours, l'équivalent de tout ce que
l'organisme perd nécessairement pendant ce laps de temps, ainsi que la
matière propre à la constitution des tissus nouveaux en voie de formalion
pendaiU la période de croissance;
» 2" Que cette ration soit apte à provoquer le travail digestif qui est in-
dispensable pour que la plupart des aliments soient rendus absorbables et
propres à remplir dans le sang leur rôle physiologique;
.) 3" Que les aliments employés de la sorte puissent arriver dans le tor-
rent d(^ la circulation avec une certaine rapidité, et qu'à raison de la quan-
tité ou des qualités des matières qu'ils fournissent ainsi aiusarig l'orgaiiisme
n'en reçoive rien qui puisse nuire à l'accomplissement normal des fonc-
tions el à l'équilibre physiologique. En effet, la ration peut pécher par
excès aussi bien que par défaut; dans les circonstances ordinaires, il
entre ditns l'économie animale beaucoup de choses inutiles, et telle sub-
stance qui est indispensable dans une certaine proportion peut devenir
nuisible quand celle proportion esl dépassée. Or, dans ini régime hygié-
nifpie, il convient de n'enq)loyer que c(^ (]ui est utile et dV'viler toute dé-
pense superflue des forces |)hysiologiques aussi bien qiu' tout gaspillage;
des ressources alimentaires dont la société dispose.
» Des expériences variées et des calcids dont il serait trop long de rondic
coMi|ite ici, mais dont j'ai discuté ailleurs la portée (i), établissent (pie,
terme moyen, un lionune ailulte dépense clans les vingt-quatre heures, tant
(l) l'nir mos Leçons sur In P/irsIn/ot^ir <■! V Annlomiv rnmpnrrc dr l'homme et drs nui
maux, t. VIII, |). 170 et siiiv.
( 791 )
par les voies respiratoires et urinaires que j)ar les autres appareils excré-
teurs, environ aSo grammes de carbone et 21 grauinies d'azote, iiulépeii-
damment de l'hydrogène et de plusienrs autres matières minérales conte-
nues en plus ou moins grande quantité dans ses évacuations. Cette dépense
continue lors même que l'homme ne reçoit du dehors aucun aliment, mais
alors il vit aux dépens de sa propre substance; le poids de son corps di-
minue, ses forces s'abaissent, et lorsqu'il a atteint un certain degré d'affai-
blissement, il meurt tl'inanition.
a Le même résultat se produit, mais avec plus ou moins de lenteiu',
lorsque l'alimentation est insuffisante. Pour que le corps de l'homme adulte
conserve son poids et son aptitude à développer de la force, il faut que le
fluide nourricier, c'est-à-dire le sang, reçoive journellement les quantités
d'azote et de carbone que je viens d'iiidiquer.
» Il faut aussi, pour que ce carbone et cet azote soient utilisables dans
l'économie animale, qu'ils soient associés à d'autres principes et qu'ils
constituent avec ceux-ci des composés chimiques peu stables, combustibles -
et identiques ou analogues aux principes immédiats qui forment la sub-
stance des tissus organisés, et qui, dans la nature, ne se trouvent que dans
les corps vivants.
» On comprend donc facilement que la ration d'entretien ne puisse
être composée uniquement de fécule, de matières grasses ou d'antres sub-
stances qui, tout en contenant à l'état cliimi(iue voulu beaucoup de car-
bone, ne renferment pas d'azote. Sous l'influence d'un régime non azoté,
l'élimination physiologique de l'fizote continue, comme dans les cas
d'abstinence complète, et ce travail excréteur est entretenu par la sub-
stance constitutive du corps vivant, qui se détruit plus ou moins rapi-
dement.
» Les aliments azotés, tels que la fibrine, l'albumine, le caséum et le
gluten, contiennent à la fois, connne chacun le sait, de l'azote, du carbone,
de l'hydrogène, etc. lisseraient donc susceptibles de fournir, tout en étant
seuls, des rations qui rempliraient les conditions que je viens d'indiquer;
mais une ration composée de la sorte ne pourrait introduire dans le sang
la quantité de carbone indispensable, qu'en y versant en même temps un
graiid excès d'azote. Or l'entretien de la combustion respiratoire par des
substances de ce genre entraîne luie production d'urée, d'acide urique ou
d'autres substances azotées fixes, en trop grande abondance pour que
l'Iioinme puisse s'en débarrasser facilement par la sécrétion rénale, et l'.ic-
C. K., 1870, i" Semescrii. (T. LXXl, N" lie.) 1 oC)
( 792 )
cuimilalion de ces matières dans son organisme est une cause de trouble (r).
» Voilà une des raisons pour lesquelles l'honiine et la plupart des ani-
maux, qui sous ce rapport nous ressemblent le plus, ne sauraient vivre
longtemps de librine, d'albumine ou de gélatine seulement, et qu'il est
nécessaire d'associer à ces substances des matières riches en carbone, telles
que la fécule, le sucre ou les graisses, et cela en proportion considé-
rable {2).
» Les aliments les plus riclies en carbone et en hydrogène, et cajjables
par conséquejit de remplit' avec le plus de puissance le rôle de combus-
tibles physiologiques, sont les corps gras neutres. Par conséquetit, une
ration composée uniquement de matières albuminoïdes et de graisse mé-
langées en proportions convenables contiendrait, sous le plus petit volume
possible, un aliment complet, pourvu toutefois que les parois de la cavité
digeslive fussent aptes à absorber les graisses avec assez d'activité pour
verser dans le sang, en un espace de temps donné, une quantité de ces
substances contenant la dose de carbotje voulue pour l'entretien de la
combustion respiratoire. Mais on sait que, pour certains animaux, et pro-
bablement il en est de même potu- l'homnîe, celte absorption se fait avec
trop de lenteur pour pouvoir satisfaire aux besoins de l'organisme (3), et
il en résulte que les conditions dont je viens de parler ne sont remplies
(i) Ainsi la viande tie boucherie ;i l'état humide ne renferme qu'environ 11 pour 100
de carbone, et 3 pour 100 d'azote. Un homme dont la ration quotidienne serait composée
uniquement de cette substance, et qui aurait besoin d'introduire journellement dans son or-
ganisme 23o grammes de carbone et 21 grammes d'azote, trouverait la quantité voulue de
ce dernier élément dans une ration de ^00 grammes; mais ce poids de viande ne lui fourni-
rait que ni grammes de carbone, et, poùr obtenir de cet élément les aSo grammes voulus,
il lui en faudrait plus de 2 kilogrammes, ration qui introduirait dans l'économie un énorme
excédant d'azote.
Pour le chien, l'excrétion des produits azotés du travail nutritif est plus fatile, et la vie
peut être entretenue pendant fort longteuqjs à l'aide d'un régime composé uniquement de
viande.
(2) Le pain est un aliment complexe de ce genre, car il contient du gluten, qui est un
principe azoté, et de la fécule, qui est une matière très-riche en carbone ; mais il n'est jjas
assez riche en azote pour constituer seul une ratioa d'entretien, car, pour obtenir 21 grammes
d'azote, il faiulrail euq)loyer environ 2 kilogranuiies, quantité qui introduirait dans l'orga-
nisme beaucoup de carbone inutile, et serait en général difficile à digérer.
(3) Les dissolutions gélatineuses sont aussi des aliments dont l'alisorplion ne se fait (]uc
très-lentement, et c'est en paitie à raison de celte circonstance que ces substances ne sau-
raient constituer à elles seules une ration d'entretien.
( 79'^ )
que par l'association de principes organiques azotés, de matières grasses
et de substances d'un autre ordre fournissant aussi beaucoup de carbone,
mais dont l'absorption est plus rapide, le sucre, par exemple (i). Long-
temps avant d'avoir la théorie de ces phéuomènes de nutrition, ou avait
constaté l'utilité de ces mélanges, analogues à l'nssocintion dont le lait
nous offre un exemple. Prout les a signalés à l'attention des physiologistes
comme étant nécessaires à la constitution d'un aliment complet.
» Lorsqu'on cherche à bien préciser les qualités dont la réunion est
nécessaire pour que la ration d'entretien réponde aux besoins de l'écono-
mie animale, il importe également de tenir grand compte de la natine du
■travail digestif. On sait que la plupart des matières alimetitaireâ, pour de*
venir aptes à traverser les parois du tube digestif et passer de là dans le
torrent de la circulation, doivent être désagrégées ou rendues solublcs par
l'action du suc gastrique chargé de pepsine, du suc pancréatique et d'au-
tres humeurs du même ordre; mais que la sécrétion de ces liquides diges-
tifs ne se fait pas d'une manière continiie et ne s'effectue que sous l'influence
de certains stimulants. Ainsi l'estomac au repos n'est pas apte à digérer.
Dans l'intervalle des repas ce viscère ne renferme pas en quantité notable
le suc pepsique, qui seul peut opérer la digestion de la viande, et ce .suc
n'est versé dans son intérieur que lorsque le travail sécrétoire a été réveillé
dans les glandules pepsiques, soit directement par la présetice de corps so-
lides ou d'autres stimulants dans l'estomac lui-même, soit indirectement
par le contact de matières sapides sur l'organe du gnût, ou même nar l'ex-
citation que déteruiinent certains arômes des organes de l'olfaction. La
sécrétion du suc pancréatique est placée sous l'influence d'actions nerveuses
réflexes analogues, et il en est encore de même pour la sécrétion salivaire.
Par conséquent il ne suffit pas que la ration alimentaire renferme la somme
de matières consbuslibles et plastiques nécessaire à l'entretien du travail nu-
tritif et que les aliments soient digestibles, il faut aussi qu'à raison de leurs
propriétés physiques ou physiologiques ils soient aptes à provoquer l'action
des organes sécréteurs dont je viens de parler, ou bien (pie ces alitnelits
soient accompagnés de substances alimentaires aptes à produire les mêmes
effets. Cela nous explique comment un aliment insipide et à l'état liquide
(i) Ainsi, un aliment qui, sons un très-petit volume, est très-nourrissant et d'une diges-
tion facile, est de la viande contenant un peu de graisse et pilée avec du sucre. A défaut de
lait, ce mets peut être très-utile poin l'alimentation des jeunes enfants dimt l'estomac est
délicat.
io6..
( 794 )
ptMit (Inns CPrt.iiiis c;is no p.is otrc digriT, et dovenir même une canso do
Iroiihir dans l'économie animale, tandis qn'à l'élat solide on convenabie-
nunt assaisonnée, la même snbstanco pent joner nn rôle niile dans la nn-
trilion.
» J'insiste snr ces fails non-scnlemont paice qn'ils jettent beanconp de
lumière snr le rôle physiologique des condiments (i), mais aussi parce
qn'ils sont directement applicables à l'une des questions soulevées par
M. Fremy. Dans la ])luparî des essais tentés jusqu'ici pour l'ulilisalion du
tissu organique des os dans le régime alimentaire de l'hounne, cette sub-
stance avait été préalablement transformée en gélatine et était administrée
soit à l'état de dissolution dans l'eau, soit sons la forme d'une gelée très-
facile à liquéfier. M. Fremy, au contraire, préconise un mode de prépara-
lion qui conserve au tissu en question son état solide, et qui ])ar cela même
le rend pins ajite à provoquer le travail sécrétoire indispensable à l'utili-
sation de tout aliment de cet ordre. Par conséquent je vois là un progrès
notable.
» Les expériences de mon frère prouvent que la gélatine obtenue par
les j)rocédps communément employés pour la fabrication de la colle forte
ne jouit pas des propriétés nutritives de la gélatine dite alimentaire pré-
parée à basse température, en traitant les os par l'acide chlorliydrique,
lors même qne cette dernière substance est administrée en dissolution dans
l'eau, et il me paraît très-probable qne le tissu organique des os qui n'a
pas été transfoi-iné en gélatine, et qui constitue l'aliment appelé ossiiiiie par
M. Fremy, est plus nutritif que l'iuie et l'autre de ces substances. Mais je
ne m'arrêterai pas sur cette question, car les expériences directes nous
manquent pour la trancher (2), et l'histoire chimique des matières orga-
nisées est encore si obscure et si incertaine que la physiologie ne peut s'en
servir qu'avec beaucoup de réserve.
1) Il est un autre point snr lequel je demanderai la permission d'appeler
aussi l'attention de l'Académie. De tout temps, on a reconini les avantages de
la variété dans le régime alimentaire de l'homme, mais je ne pense pas qu'on
se soit rendu suffisamment compte des causes dont ces avantages dépendent.
(i) Dans tinc ])i-(''cé(lente séance, j'ai <u roccasion <lc diie f|iiel<|iics mots du lolc des ron-
dlments dans le travail de la digestion (séance du c.S seplenibre, page 45i)-
(7) Cette opinion, ])rofessée depuis longtemps par M. Dumas [Traite de C/ii/iiii\ t. VII,
p. 5ot), 1844)-' ^^^ coirohorée par ipiel<|ues-iins des faits consignés par Mageiulit; dans son
Rapport sm- le gélatine; mais les exjiériences de ce physiologiste sur ce point ne soiil pas
présentées avec les détails nécessaires |)our (|iu> la discussion en soit utile ici.
( 79-^ )
Il rst évident que, flnns le cas on la r.ilion d'un jour est insnffîsante m cer-
tains égards, il sera utile de la changer le lendemain si, en agissant ainsi,
on fournit à l'organisme ce qui lui nianqtiait la veille, et que, de la sorte,
à l'aide d'une certaine rotation, des rations toujours incomplètes quand on
les considère isolément peuvent constituer un régime satisfaisant. Mais
lorsque toutes les rations sont calculées de façon à répondre aux besoins
(lu travail nutritif, on ne voit pas bien au premier abord pourquoi il est
utile de les varier. On conçoit cependant qu'il puisse en être ainsi lorsqu'on
se rappelle, d'une part, le rôle des stimulants dont je viens de parler et,
d'autre part, les effets bien connus de l'habitude sur la vivacité des sensa-
tions (i). Il y a aussi beaucoup de raisons de croire que la rapidité avec
laquelle une substance déterminée est absorbée varie avec la proportion
de cette même matière préexistante dans les liquides de l'organisme, de
sorte que, chez un individu dont le sang est déjà riche en matières grasses
par exemple, l'introduction de nouvelles quantités de graisse dans le tor-
rent lie la circulation ne se ferait pas aussi facilement ciue si le fluide nour-
ricier de ce même individu n'en était que peu chargé, mais que cette cir-
constance n'aurait que peu d'influence sur l'absorption d'une substance
de nature différente, du sucre ou de l'albumine par exemple, et cela con-
tribuerait à nous expliquer les effets utiles de la variété dans l'alimentation.
» Je ne pousserai pas plus loin ces considérations sur l'histoire physio-
logique de la initrition, mais il m'a semblé que, dans le moment actuel,
où l'atienlion est souvent appelée sur des questions de régime alimentaire,
il pourrait être utile d'exposer brièvement quelques-unes des bases sur les-
quelles nos raisonnements à ce sujet me paraissent devoir reposer. »
(i) Un aliment cjni cesserait de stimuler l'estomac fie façon à provmpicr les actions ner-
veuses rétlexes nécessaires pour mettre en JQii les organes sécréteurs du suc gastrique, du
suc pancréatique, etc., deviendrait, ])ar cela même, indigeste, chargerait inutilement le viscère
qui le contient et déterminerait, soit le vomissement, soit des dejeclions alvines anormales.
Or chacun sait que les aliments qui ont donné lieu à des accidents de ce genre inspirent sou-
vent, pendant fort longtemps, un dégoût insurmontahle. Il n'eu faut pas conclure que ces
substances ont perdu leurs puissances nutritives et sont devenues impuissantes à concourir
à la nutrition des personnes qui ne sont pas placées dans les mêmes conditions |jlivsif)Io-
giqnes.
( 79^ )
CHIMIE INDUSTRIELLE. — Observations relatives à un passage de In Communi-
cation récente de M. Fremy sur /'Emploi de l'osséine dans ralinieiilatioii;
par M. Chevreul.
« Si, dans la st^ance dernière, j'avais entendu les paroles de INI. Fremy
que je lis dans le Compte rendu de cette séance, j'aurais demandé une expli-
cation, non stu" des opinions scientifiques, non pour discuter avec lui si la
Commission de la gélatine avait tort ou raison dans ses conclusions. Je
respecte toute opinion consciencieuse quelle qu'elle soif, et j'aime l'éco-
nomie du temps; mais la liberté doit être entière en toute discussion scien-
tifique, et ceux qui y prennent part ont le droit de citer, à l'appui de leurs
opinions respectives, tous les faits scientifiques du ressort du débat qu'ils
jugent favorables à leur tlièse. Telle est la discussion que je qualifie d'es-
sentiellement académique. Mais en combattant quelques-unes des conclu-
sions d'une Commission rie l'Académie, dire que l'auteiu' d'iuie décou-
verte a été méconnu durant sa vie, que cet auteur est mort de chagrin
après des luttes pénibles, soutenues dans un but philanthropique; parler
ensuiie de sa respectable veuve, dont personne n'avait dit un mot, c'est faire
sortir le débat du domaine de la science, pour le porter sur les personnes.
Alors la liberté de la discussion est conqjromise, et je lésais si bien qu'au-
jourd'hui même je comptais prendre la parole après M. Payen,pour résumer
rapidement quelques faits saillants de l'Iiistoii'e des travaux relatifs à la gé-
laline, et j'ai ajourné mon projet, après la lecture des phrases de M. Fremy
que j'ai rappelées. .Sentant le besoin de connaîu'e, avant totite Commtuiica-
tiou à l'Académie, le sens qu'il y attache, je demande donc à M. Fremy s'il
a fait allusion à un nasse qui me concerne, et que je vais rappeler, afin qu'il
réj)onde d'une manièie catégorique à la question cpie je me permets de lui
adresser, et qui émane du sentiment de la liberté scientifiqtre.
» Le Rapport de M. Magendie, fait le ad'aoùl 1841 , Constate qii'eir i833
je faisais partie de la Commi.ssion dite <lc la (/c7atiiic, et en outre (prc la
Commission présenta alors, « par l'organe de M. Chevreul, trn Rapport
» sur la confeclion et les propriétés du bouillon de la Compagnie hnilan-
» daise. Ce Rapport, l'Académie ne l'a pas jugé sans importance, piris-
» qu'elle en a ordonné l'impression (i). »
» Plus loin on lit :
« Comme on se pr'oposait de comparer, dans les expériences phvsio-
[i) Nore, t. XHI, p. 9.37.
( 797 )
» logiques, le bouillon de l'hôpital Saint-Lotiis à celui de la Coaipagiiia
» liollandaise, on a exécuté quelques nouvelles expériences chimiques sur
» ce dernier, qui n'ont fait que confirmer l'analyse faite avec tant île soins
» par M. Chevreul (i). »
» Comment arriva-t-il que le chin)iste rapporteur de la première Com-
mission, dont la seconde n'était pas mécontente d'après les citations pré-
cédentes, s'est trouvé en dehors de la seconde Commission?
» Un des motifs était certainement que la seconde Commission avait
perdu M. Dupuytren ; et l'Académie doit savoir que, si je fus le rapporteur
de la première, c'est à la sollicitation lapins pressante de la part du grand
chirurgien.
» Le second motif est que, la question du bouillon de gélatine résolue
en faveur de son bon usage, il devenait le bouillon des grands établisse-
ments publics, au détriment du boudlou de viande.
» Le Rapport sur le bouillon de la Compagnie hollandaise ne pouvait
avoir l'approbation des partisans du bouillon de gélatine, aussi imagina-
t-on un incident qu'il ne m'apj)artient pas de qualifier, et sur lequel j'ai
gardé un silence absolu depuis i834. Mais en ce moment même cpie j'en ai
la preuve écrite entre les mains, que M. Freuiy dise un mot, et je donnerai
lecture à l'Académie de Lettres datées du 8, du 9 et du 11 de septembre
i834; elles montreront à aies confrères si jesiiis passible de quelques re-
proches dans les luîtes pénibles que M. D' Arcet a soutenues et qui ont abféf/é
son existence, dit M. Fremy. A la suite de l'incident, je ne dis pas l'hon-
neur, mais la délicntesse d'un homme bien élevé ne me permettait pas de
rester davantage dans cette Commission. Ma retraite n'eut pas, à ce qu'il
paraît, le résuhat que s'en étaient promis ceux qui l'avaient occasionnée.
)) Maintenant M. Fremy a-t-il fait alkision à l'incident c[ue je rappelle?
» Telle est ma question. »
Réponse de M. Fhemy à M, Chevreul.
« L'Académie vient d'entendre la question qui ni'a été faite, à deux
reprises différentes, par notre honorable confrère M. Chevreul.
» Il me demande de déclarer, par oui ou par non, si je le comprends
dans les reproches que j'ai adressés aux adversaires de M. D'Arcet.
M Comme dans mes Communications sur Tosséine je n'ai pas piononcé
une seule fois le nom de M. Chevreul et que notre savant confrère a donné
sa démission de membre de la Commission de la gélatine, j'ai été fort sur-
(i) N»te, t. Xlll, p. 263,
( 79« )
pris de la question qu'il m'a adressée : je déclare donc que je n'ai rien à lui
répondre.
» Notre vénérable doyen de la Section de Chimie me |)eniu'ltia stule-
nient de lui ra|)peler que, dans toutes les circonstances, j'ai |)rofessé pour
lui luie déférence profonde. J'espérais que ces sentiments, dont il ne peut
pas douter, me préserveraient de la vive interpellation que i' Académie a
entendue.
» Je me contenterai de dire ici, d'une manière générale, que mes repro-
ches s'ailressaienl à tous ceux qui n'ont pas rendu justice aux travaux que
M. D'Arcel a poursuivis, pendant trente années, dans l'intérêt des chisses
pauvres et qui se résument dans l'affirmation suivante :
» La ijétalinc bien préjiarée peut élie employée uùlcineni ditns le bouillon.
» Du reste, les chagrins que M. D'Arcet a éprouvés sont rappelés dans
la Lettre si touchante et si triste que vient de m'adresser sa fille, et que je
demande à l'Académie la permission de lui lire, parce qu'elle fait com-
prendre le sentiment qui me porte à rap[)eler ici les litres de M. D'Arcel à
la reconnaissance publique.
» Monsieur,
M Je suis bien touchée et bien heureuse de la justice rendue par vous à
u la mémoire de mon digne père, à ses efforts incessants, à sa conviction
» inébranlable que la gélatine était nutritive; il est mort très-malheureux
» de cette lui te, aussi douloureuse pour lui qu'elle était désintéressée, mais
» persuadé que la vérité serait reconnue enfin et après lui. »
[Ma/lame Le Coëntrc, née D'Arcet. )
» Effectivement, la vérité s'est fait jour et j'ai été heureux de rendre
hommage aux travaux si utiles de M. D'Arcet, lorsque j'ai proposé Ue Jaire
entrer l'osséine dans r alimentation, de lo faire cuire dans de l'eau aromatisée,
d'employer le bouillon yélalineux pour faire de bi soupe, et de consommer
Cosséine cuite comme un aliment solide.
» Que ceux qui, aujourd'liui comme il y a trente ans, critiquent l'em-
ploi alimentaire des tissus gélatineux, songent aux circonstances graves qii<;
nous traversons, et qu'ils redoutent de prendre la responsabilité d'une op-
position qui pourrait être funeste à la population parisienne.
» Comme il s'agit de combattre des préjugés fâcheux, qui frappent encore
aujourd'hui une substance alnnentaire utile, il est de mon devoir de signaler
les faits princi|)aux qui établissent le pouvoir nutritif des corps gélatineux.
» Je dirai d'abord que j'ai été très-heureux d'enleudre notre honurable
Président, (pu est venu apporter l'aulorilé du num d'Arago dans la question
( 799 )
lie la gélatine, en rappelant que les indigents (le la ville de Melz accep-
taient dans leur alimentation la gélatine sans répugnance, et qu'ils étaient
très-fâchés qu'on pensât à la leur supprimer.
» Je tiens, en outre, à faire connaître à l'Académie une adliésion à la-
qnelle j'attache une grande valeur, parce qu'elle émane de M. le général
de division Snsane, qui a étudié depuis longtemps l'emploi alimentaire des
tissus gélatineux pour les classes pauvres, qui a constaté leius bons effets
et qui aujourd'iiui pourrait les faire entrer utilement dans la nourriture de
nos soldats.
» L'Académie connaîtra l'opinion du général Susane sur la gélatine, si
elle veut bien me permettre de reproduire ici quelques phrases d'une bro-
chure intéressante que le général publiait à IMetz en i856, et qui, hélas!
peuvent s'appliquer en ce moment à Paris :
« Rappelons-nous, et ceci n'est pas de la science, mais de l'histoire, qu'on a vu des gar-
nisons sauvées par la gélatine; des soldats qui, après avoir mangé la cliair des derniers ani-
maux et celle de leurs chevaux, ont dû ensuite en dévorer la peau, les os et les sabots, puis
les harnais et jusqu'aux semelles de leurs propres hottes, et <|hp, par ce moyen, ils ont pro-
longé assez leur vie poiu- voir venir le jonr de leiu- délivrance.
» N'exagérons donc rien et gardons-nous de pationer, par l'adhésion du silence, des o|)i-
nions qui pourraient entretenir ou faire naître les pins funestes préventions. »
» Le général Susane parle aussi, dans sa brochure, de l'emploi direct
des os pulvérisés pendant le siège de Paris par Henri TV.
)) Atijoiu-d'hui la population de Paris n'en est pas réduite, comme en
i5qo, à porter sous la meule le tissu osseux pour en faire une sorte de
farine, car la Chimie lui donne en ce moment une substance alimentaire
extraite des os, l'osséine, qtii peut foiirnir'à la fois du bouillon et un
aliment solide. »
MÉMOIRES LUS.
M, C Lefokt doime lecture de la seconde partie de son Mémoire sur la
i< sociologie » .
MÉMOIRES PRÉSENTÉS.
PUYSIOLOGIE. — Reclmrclies expérimcnlales sur In propriété aliiDcnlaire
(le la Coca; par M. Ch. Gazeau.
(Commissaires: MM. Chevreul, Dumas, Roulin.)
« Les feuilles de coca ont, dans l'Amérique du Sud, la réputation de per-
mettre de se passer, pendant plusicin-s jours, de nourriture, et cela sans
c. R., iSro, 2« Semestre. { T. l.XXI, N" 25.) ' O7
( 8oo )
déperdition aucune des forces et sans que la sensation de la faim so fasse
sentir.
» J'ai constaté moi-même cette propriété alimentaire de la coca, à la dose
do 20 à 3o grammes par jour. M'étant mis à la diète pendant deux jours
et demi, je fus fort surpris de ne pas voir les effets de ce régime se faire
sentir: le second jour, je travaillai avec autant de facilité que de coutume;
le troisième jour de diète, je pus attendre mon repas de midi sans plus
d'impatience que d'habitude.
» Beaucoup d'hypothèses ont été émises pour expliquer le mode d'action
de la coca. Dans ces dernières années, on admettait généralement qu'elle de-
vait diminuer les produits de désassimilation en enrayant le mouvement de
dénutrition ; et cetle explication paraissait fort satisfaisante à priori. Je suis le
premier qui ait cherché à éclaircir cette intéressante question par l'expé-
rimentation : dans ce but, je me condamnai durant deux mois à un régime
identique, avec ou sans la feuille américaine. Pendant ce temps, je recueillis
et analysai scrupuleusement mes urines, surtout au point de vue de l'urée.
L'élimination de cette substance a toujours augmenté sous l'influence de
la coca; de 1 1 pour 100, quand elle était prise a la dose de 10 grammes par
jour, en poudre; de 16 et de 24 pour 100, à la dose de 20 grammes. Cette
même dose éleva pendant une semaine ma température, d'une moyenne de
0°, 32: le ïiombre de mes pulsations artérielles de 11, 22 pulsations: le
nombre de mes mouvements respiratoires de 4, 6. Le sphygniographe
resta muet sous son influence. I^a coca augmente les sécrétions salivaire et
intestinale. A la dose de 10 à 20 grammes, elle accroit constamment le
poids de l'urine de 4oo grammes par vingt-quatre heures.
» La coca augmente donc l'urée, contrairement à l'hypothèse généra-
lement admise. Or, cette augmentation de l'urée, indiquant toujours un ac-
croissement d'activité dans la métamorphose des éléments azotés, expli-
que l'exaltation de la vie, l'augmentation de l'énergie musculaire chez
l'homme qui use de la coca tout en se nourrissant comme d'habitude.
» Cette substance permet encore à ceux qui sont à la diète, et mieux au
régime de l'alimenlation insuffisante, de travailler énergiquement pendant
plusieurs jours. En effet, le mouvement de nutrition étant accéléré, les
combustions organiques étant augmentées, on consomme plus ; et, partant,
on en retire pendant ce temps les avantages, qui sont une augmentalion du
travail mécanique de la machine humaine. Mais celte consouunalion exa-
gérée, cetle dépense inusitée, qui n'est pas compensée plus tard par une
quantité suffisante d'aliments, se fait aux dépens des tissus : l'homme se
( «o. )
mange lui-même, il devient autopliage, et le passif se découvrirait à la
longue dans son économie, par un amaigrissement qui serait luie suite
infaillible de ce mode exclusif d'alimentation. J'ai toujours perdu de mon
poids dans les semaines de mon régime identique pendant lesquelles je pre-
nais la coca: les expériences sur les animaux le démontrent encore.
» J'ai fait aussi quelques expériences dans le but d'expliquer l'absence
de sensation de faim pendant l'alimentation insuffisante et même la diète
avec coca. Ses effets sur la bouche, l'estomac, l'intestin se résument ainsi:
excitation légère des muqueuses, augmentation des sécrétions, anesthésie.
Cette action anesthésique si puissante de la coca sur l'estomac explique
l'absence de douleur à l'épigastre pendant la diète.
» J'ai constaté qu'une chique moyenne de coca amène dans l'estomac de
27 à 42 grammes de salive, suivant la substance adjuvante employée; ce
cjui, pour vingt chiques en quinze heures, donne de 54o à 12/10 grammes
de liquide; celui-ci, en distendant les parois du viscère, en empêche le
contact et diminue ainsi la sensation de la faim.
)) La coca étant une substance puissamment digestive, favorise l'ab-
sorption et l'assimilation de la noiuriture insuffisante; c'est une compen-
sation.
)) Enfin, sous l'influence de la coca, l'homme se mange lui-même; mais
il mange. Telles sont, suivant nous, les principales raisons qui expliquent
l'absence de sensation de faim quand on est soumis à la diète et que l'on
chique la feuille si chère aux Américains du Sud.
1) Les Bulletins militaires des guerres de l'Amérique méridionale signalent
souvent et toujours avec les plus grands éloges: l'emploi de la coca soit en
campagne, soit pendant les sièges. L'état dans lequel se trouve la capitale
de la France ne pourrail-il pas faire songer à utiliser en ce moment la
quantité de feuilles de coca qui s'y trouve? »
« M. RocLiN fait remarquer que ce que rapporte M. Gazcau des heu-
reux effets attribués à la coca par les Bulletins militaires des dernières guerres
américaines, n'a rien qui puisse surprendre les personnes un peu versées
dans l'histoire de la conquête du Nouveau-Monde, puisque les écrivains
qui nous ont fourni les premiers renseignements sur ce vaste pays et sur
ses habitants mentionnent tous au nombre de leurs habitudes les plus
étranges, celle de mâcher continuellement une feuille qu'ils n'avalent point,
et qui cependant est pour eux un remède contre la faim et la soif. Est-ce de
la part de ces gens une pure illusion? Nos historiens, pour la plupart, ne
107..
( S02 )
semblent pas disposés à le croire. T/iin d'eux, il est vnii, et jnslemenl celui
dont l'ouvrage a. été le plus répandu, craignant sans doute de paraître
trop crédide, ne répète qu'avec un Ion de doute ce qu'il a entendu dire
à cet égard (i); mais rien de pareil ne se moiiire chez ceux qui oui fait iine
longue résidence dans le pays et parlent soit d'après des témoignages par-
faitement dignes de confiance, soit d'après leurs propres observations,
tels sont Oviedo, Cieça de Léon, Garcilasso de la Vega, Acosîa, le P. Simon
et bien d'autres que je pourrais nommer (2). Le champ d'observation,
disons-le en p;issant, était, au moment de l'arrivée des Espagnols, beau-
coup plus vasie qu'il ne le fut peu après, puisqu'il s'étendait, vers l'est, de
l'isthme de Panama jusqu'au delà des embouchures de l'Oréîioque, et vers
le sud, tout le long de la Cordillère des Andes eî du liltoral de l'océan
Pacifique jusqu'aux dernières limites du Pérou. Si l'habitude de mâcher la
coca a disparu dans la plupart des provinces comprises dans ce vasIe pour-
tour, il ne faut pas l'attribuer, comme ou poiu'rait être tente de le faire, à
l'extinction de la population indigène, qui n'a été totale que pour les tribus
peu nombreuses, ni moins encore à un esprit d'inconstance dont les Indiens
ont été accusés un peu légèrement, mais à ce que cette pratique si singu-
lière, se liant presque partout à des idées superstitieuses, a été vigoureuse-
ment attaquée par le clergé espagnol, qui n'est |)as cependant arrivé sans
beaucoup de peine à y mettre fin. Ainsi quand, en 174', Nie. de la Rosa
dédiait à l'évèque de Santa-Mariha sa Floiesla, où il ne s'occupait que d'un
seul diocèse, l'habitude régnait encore parmi les Indiens soumis habitant
les pentes du Nevado de Sainte-Marthe; elle n'est plus de nos jours parmi
eux, mais on la retrouve encore chez leurs voisins les Guajitos qui, il est vrai,
( i) Il Une de leurs principales cultures, dit-il en parlant des Péruviens, est celle de la coca,
plante herbacée (]u'ils estiment autant (jue l'or, et qui ne leur semble guère moins indispen-
sable cpie le pain. Elle exige un climat très-chaud. Les indigènes en ont conlinnellement
dans la bouche, et elle éloigne d'eux, à les en croire, la faim et la soif, chose ijrodij^ieuso si
elle est vraie. » (Hixl. de las Indias, chap. clxxxiii.)
Gomara ne s'aperçoit pas ici <pi'il a déjà parlé de cette plante, sons le nom d'fJor, a
l'occasion de la province de Cuuiana (Hisl., chap. lxxix), et même d'une nianièi'e plus
complète, car il n'a pas oublié l'addition de la chaux; sculcuient il croit (|ue celle mastica-
tion n'a pas d'aulre objet que de noircir les dents, |)Tciiant ainsi pour le but un effet accès- ►
soirc et non cheiché.
(3.) OviKDO, Hi\t. gc/i. é nat. de his Iiiiliits, libr. XXIV, cap. xii. — Cieça de I eon,
cap. xovi. — AcosTA, Hixt nat. y moral de las ]nd,, lib. IV, cap. x\ii. — Simon, Notir.
/lise, dt: la co/irj. de '/'/erra- Firme : Indit
'lice.
( 8o3 )
ont trouvé le moyen de conserver jusqu'à ce moment leur indépendance.
A l'autre extrémité du périmètre que nous venons d'indiqner, an Pérou, elle
est encore en viguem-, mais là on a jugé indispensable de la respecter, re-
connaissant qu'elle contribue à entretenir les forces des indigènes employés
à d'assez pénibles travaux dont profitent surtout les habitants de race blan-
che. Dans ce pays, d'ailleurs, les ecclésiastiques n'ont pas cru de leur devoir
de combattre un usage qui n'avait aucun rapport bien apparent avec l'an-
cienne religion, sorte de sabéisme fort éloigné des superstitions grossières
entretenues chez les populations situées plus au nord par leurs piachts,
prêtres ou sorciers qu'on peut, jusqu'à un certain point, assimiler aux
chamans du nord de l'Asie. Dans une région intensiédiaire, dans le royaume
de Bogota, la religion, qui consistait aussi dans le culte des astres, avait
certaines prescriptions relatives à la coca qui portail dans ce pays, comme
dans ceux ipii sont situés siu- les bords de l'Atlantique, le nonj de liayo ou
ja/o (i); le nom de coca ou cuca^ comme l'écrit Garcilasso, est péruvien.
Le premier tiers de chaque lunaison était presque exclusivement le temps
où les hommes étaient autorisés à faire usage de la coca, et pendant cette
décade tout commerce avec les femmes leiu- était interdit; ils devaient
même coucher dans des pièces séparées, c'est du moins ce que rajjporie
Oviedo, qui tenait ses renseignements de la bouche du conquérant de la
Nouvelle-Grenade, Alonso Ximenès de Quesada, ayant eu, en sa qualité
d'historiographe des Indes, coîumnnication des Mémoires que celui-ci avait
écrits sur les lieux mêmes.
» Au Pérou, la consommation de la feuille de coca était telle, que le
P. Joseph Acosta, qui fit paraître en iSgo son Histoire nalurelle et morale
des Indes, nous apprend (liv. IV, chap. XXlî, p. 252) qu'à l'époque où il
écrivait, le commerce de ces feuilles montait chaque année, pour le seul
canton minier du Potosi, à un demi-million de j)iastrcs (2). C'est, ajoufe-t-il,
un couuuerce très-profitable pour les blancs qui l'iiclièteiit des cultivateurs
et la revendent aux Indiens. Beaucoup de gens graves, dit-il un peu plus
(i) Les deux noms assez différents à l'œil le sont très-|jcu pour l'oreille.
(2) Une pareille somme suppose un nombre prodigieux de consommateurs, ce qui ne
peut maïKiuer de sui|3rendre quand on sait que, jusqu'à la fin de l'empire des Ineas, l'usage
de la coca était interdit à toute jiersonne qui n'appartenait pas à la fan}ille royale; la famille,
il est vrai, s'était fort accrue depuis le temps de Manco-Capac; mais elle ne formait toujours
qu'une bien faible partie de la population totale, de sorte qu'on est porté à supposer que,
même avant l'arrivée de Pizarre, beaucoup de plébéiens usaient en cachette de la feuille
(lu'avaient prétendu se réserver les grands; elle était d'ailleurs précieuse aux yeux de tous,
puisqu'elle figuiait eu première ligne parmi les offrandes (jue l'on faisait aux dieux.
( 8o4 )
loin, ne veillent voir là qu'une superstition, et regardent comme imaginaires
les effets qu'on lui attribue. Pour moi, je ne puis admettre que ce soit pure
imagination, quand je vois les Indiens, avec une poignée de coca, et sou-
vent sans rien manger, faire en un setd jour une route qui d'ordinaire en
exige le double, La sauce à laquelle ils la mangent est bien digne d'un si
étrange mets. J'en ai goûté et trouvé que le tout a le goût de sumac. Cette
sauce consiste en poudre d'os broyés ou de chaux, suivant d'autres per-
sonnes; tant est que ce ragoi'it leur plaît et qu'ils donnent sans regret
l'argent qu'on leur en demande.
» Acosfa est, remarquons-le, le seul qui parle d'os broyés. L'emploi de
la chaux, s'il n'est pas universel, est du moins beaucoup plus général, et il
est mentionné expressément par Oviedo, qui dit au livre XXIV, chap. xil
(édition de Madrid, i85i-55, t. II, p. 254) : « Les Indiens, qui ont conti-
» nuellemeiit cette feuille à la bouche, portent, pendue au côté, une petite
» calebasse pleine de chaux faite de coquillages brûlés et sucent fréquem-
» ment cette chaux. »
» La Rosa est beaucoup plus explicite, et, en parlant des Indiens Ariia-
cos, que, par suite d'une idée bizarre sur l'étymologie du nom, il désigne
sous le nom d'Aurohuacos, il nous dit : « Tous ont la mauvaise habitude
» de mâcher le ja/o, et pour cela ils portent constamment à la ceinture
» le poporo , petite calebasse offrant une gorge produite artificiellement
M au moyen d'un lien circulaire placé autour du fruit lorsqu'il était encore
» tendre. Cette calebasse est remplie de chaux trés-blauche faite avec des
» coquillages de mer brûlés; elle est bouchée par un bâtonnet dont ils
» appliquent la pointe chargée de chaux sur le bout de la langue ou sur
» les lèvres »
» Le P. Simon indique aussi, quoique très-brièvement, l'usage de la
chaux. On retrouverait peut-être difficilement dans son livre, qui n'a
point de table, les passages où il a du donner des détails à ce sujet; mais
dans un Index placé à la fin du volume et contenant seulement l'expli-
cation des mots nouveaux qui y sont employés, ou lit le passage suivant,
dont la dernière phrase fait comprendrp pourquoi dans cet ouvrage, quoi-
que antérieur d'un siècle environ à celui que je viens de citer, on ne doit
pas s'altcudi'e à trouver d'iutormatious bien précises sur h; sujet qui nous
occupe. Le passage est assez court pour que je puisse ici le reproduire en
entier :
« Hayo. — C'est une feuille qui a quelque ressemblance avec celle du
» lenlisque : au Pérou, où la plante est coimue sous le nom de loca, elle
» est l'objet d'une iniportanle culture et d'un commerce Irès-avaulageux
( 8o5 )
» pour les Espagnols, qui la revendent aux Indiens; ceux-ci la mâchent
» avec de la chaux, et disent qu'elle leur donne des forces; mais c'est
» peut-être moins pour cela qu'ils la recherchent que dans une vue de
» superstition , car (75 s en servent pour entrer en communicalinn avec le
» démon . »
» Cette idée n'était pas née à Bogota, mais y avait été apportée par des
ecclésiastiques qui, presque tous, avaient auparavant séjourné parmi les
peuplades établies sur les bords de l'Atlantique, où en effet les piaches,
qui avaient la prétention d'entrer en conversation avec leurs flieux (les
démons des Espagnols), et qui n'étaient pas de purs imposteurs, dou-
blaient, quand ils étaient appelés à faire quelque prédiction, la dose du
hayo, lui associant même d'ordinaire quelque narcotique, le plus souvent
celui que fournit in)e belle espèce de datiira; ils se mettaient ainsi dans un
état de surexcitation, une sorte d'ivresse où les rêves confus qu'amenait
cette intoxication étaient interprétés par eux comme des révélations.
» Prise à part de toute idée de divination, et seulement dans le but de
soutenir les forces, la coca avait réellement et a un effet très-utile. On vient
de voir que pour les Indiens, ayant à faire dans l'espace d'iui joiu" ou deux
un trajet double de l'ordinaire, elle réussit très-bien, et c'est là un fait com-
parable de tout point à celui dont il est fait mention dans les Bulletins
militaires dont parle M. Gazeau. Ainsi, nous sommes très-suffisamment
autorisés à croire qu'au moyen de la mastication de la coca un homme
peut, malgré une alimentation insuffisante ou nulle, conserver presque entiè-
rement, pendant un jour ou deux, sa force mnscidaire; c'est là, à coup sûr,
un résultat de grande importance, même quand il serait constaté que pen-
dant tout ce temps le messager a dû se nourrir de sa propre substance. Cette
explication d'ailleurs ne suffirait plus pour le cas d'un usage joiu'nalier
continué de longues années, comme on peut l'observer chez les Indiens
employés dans les mines. Ici les aliments ne manquent pas, et l'utilité de
la coca consiste, suivatit moi, à faire cesser la sensation de fatigue que res-
sentent des hommes à qui l'on n'accorde pas le temps nécessaire de repos
dans le cours de la tâche qui leur est imposée; elle me paraît exercer ici
une action comparable à celle du vin pris à dose modérée, action connue
de toute antiquité. Chacun sait que, outre les alcooliques, des excitants
emprimlés au règne végétal ont été, sur différents points du globe et sous
diverses formes, employés dans un but presque semblable. Parmi les plantes
comprises dans cette catégorie, celle qui nous occupe, VErythroxylon coca,
demeure à peu près isolée; mais il n'en est pas de même de la plupart des
autres, et nous voyons des espèces congénères, naissant d'ailleurs dans des
( 8o6 )
pays séparés par de très-grandes distances, employées par les indigènes
pour obtenir des effets du même genre. C'est ainsi que la Cassitia qiu, d'a-
près ce que nous apprend Marc Lescarhot (Paris, 1609), était bue en abon-
dance par les guerriers Floridiens dans les quelques jours qui précédaient
une expédition guerrière, s'obtenait de VJlex vomitoria, plante très-voisine
de celle qui sert pour le malë des habitants du Paraguay, V JJex paraqiia-
riensis; la catha des Arabes, ou Celaslrus eiiulis, dont les jeunes pousses, man-
gées fraîches, produisent également, ainsi que l'atteste Bolla [Arcli. du
Mus., t. II), inie excitation agréable et qui persiste quelques heures, appar-
tient, de même que les deux plantes dont il vient d'étie question, à la
famille de Rhamnées.
» Je pourrais, si cette Note n'était déjà bien longue, ajouter quelques
mots concernant la chaux que l'on associe à la coca cotnme on l'associe à
la noix d'arec dans le bétel; celte addition, qui détermine un surcroit d'ac-
tivité des glandes salivaires, me paraît agir dans le même but. Suivant moi,
cette salivation plus abondante, qui se jModiùt comme dans la maiuluca-
tion ordinaire, concourt à produire un effet de même nature que celui qui
résulte de l'ingestion des aliments dans l'estomac, c'est-à-dire qu'elle tend,
quoique poiu' une moindre part, à relever les forces de l'individu avant
que la réparation qui s'opérera par suite de la digestion de ces aliments ait
commencé à s'accomplir.
» Puisque j'ai parlé du bétel qui doit son nom à la feuille dont on enve-
loppe la chaux et la noix, à la feuille dul'iper bétel, je ferai remarquer que
c'est aussi lUie Pipéracée, le Piper luelliyslkuin, dont la racine sert à préparer
la kava, boisson excitante en usage dans toute l'Océanie. »
31. RosTAixfi adresse une Note relative à la préparation de toiles et de
papiers au tannin et à l'acide benzoïque, pour les pansements rapides sans
linge.
(Renvoi à la Section de Médecine et de Chirurgie.)
M. Ch. Teli-if-r adresse '.me Note relative à deux procédés pour la con-
servation fie la viande. I^e premier consiste dans l'emploi ilu tioid; le se-
cond est fondé sur la dessiccation rationnelle de la viande dans le vide.
(Renvoi à la Commission nommée pour les questions relatives
à l'alimeutation.)
M. Cil. Teu.ier adresse nue nouvelle Note relative à l'cMnpIoi du froid
|ioiu- les amputations.
(Ilenvoi à la Cntumissiou précédemment nommée.)
,: 8o7 )
L'Académie reçoit, de M. Ch. Delcourt, une Note accompagnée d'un
dessin, sur un projet d'aérostat dirigeable; de M. J. Beu.ms, diverses pièces
relatives à la navigation aérienne; de M. A. Brachet, une nouvelle Note
relative à l'aéroslation ; de M. Palmard, un projet de construction des bal-
lons en ieuilles d'alutnininm.
(Ces diverses Communications sont renvoyées à la Commission
précédemment nommée.)
CORRESPONDANCE
PHYSIQUE. — Sur la chaleur spécifique des (joz sous volume consùiiit.
Note de M. J. 3Ioutier.
« C)n doit à M. Regnault une méthode précise pour mesurer la chaleur
spécifique des gaz sous pression constante, mais jusqu'ici ou a déduit la
chaleur spécifique d'un gaz sous volume constant du rapport des deux cha-
leurs spécifiques en prenant pour point de départ, soit la loi de détente
des gaz, soit la formule de la vitesse du son. I.a correction introduite par
Laplace dans la formule primitivement donnée par Newton, consiste à te-
nir compte de la chaleur dégagée dans la compression du gaz en évaluant
l'excès de pression, qui résulte de la condensation du gaz, non plus d'après
la loi de Mariotte, ce qui supposait la température constante, mais d'après
la loi même de détente du gaz. Cette dernière loi s'obtient aisément, si l'on
suppose le gaz soumis aux lois de Mariotte et de Gay-Lussac, et si l'on ad-
met que le travail intérieur soit insensible pendant la détente; ces hypo-
thèses sont tres-voisines de la vérité pour les gaz simples permanents ou
pour les gaz composés formés sans condensation des éléments, mais elles
cessent d'être admissibles pour les autres gaz, de sorte que la chaleur spé-
cifique sous volume constant est actuellement inconnue pour un grand
nombre de gaz.
» La théorie mécanique de la chaleur conduit à une solution de cette
question, indépendante de toute hypothèse sur les propriétés des gaz.
» On sait, d'une manière générale, que la chaleur spécifique sous pres-
sion constante C, la chaleur spécifique sous volume constant c, et la cha-
leur latente de dilatation l sont liées par la relation
C = c + / - ,
dl
G. K., iS^o, 2« Semeslre. (T. l.X\I, N" ïô.) '°"
( 8o8 )
daiis larJUelle fiv est racCCoisseiiiefit de voluiue qui correspond à inle élé-
vatioii di; tetli|)t'rature dt, la pression extérieure étant supposée constante.
>> D'autre part, le principe de Carnot fournit pour expression de la clia-
leu»- lateiile de dilatation
dt
A désignant l'équivalent calorifique du travail, T la température absolue,
dp l'accroissement de pression relatif à une élévation de température dt,
le volume étant supposé constant.
» Appliquons ces relations générfties â iltte triasse de gaz ayant pour
poids l'unité et occupant le voliune t» à la pression p et à la température t.
Désignons par u^ le volume qu'occuperait cette masse de gaz à la tempé-
rature de la glace fondante» si la pression p restait la même; par r?o 1'' pres-
sion qu'exercerait cette même masse de gaz à la température de la glace
fondante, si le volume v restait invariable, et enfin par a et a' les coeffi-
cients de dilatation du gaz sous la pression constante p et sous le volume
constant c,
v — Ua{\ + cr.t), p = 7St,{ï -h a't),
(Iv Ci. dp I a!
dt " l-\- (it dt " ' I -)- a! t
» Si l'on reporte ces valeurs dans les deux premières équations et si l'on
élimine /, on obtient finalement
(0 C = f + KTpv -
X
xf 1 -t- a't
» Cette relation fait connaître immédiatement la chaleur spécifique d'un
gaz sous volume constant à la température / et à la pression /), lorscjuc l'on
a mesuré :
» i" I.a cbaleur spécifique du gaz sons la pression constante p;
» u" Le volume occujié par l'unilé de poids du gaz ou la densité du
gaz;
» 3° Le coefficient de dilatation du gaz sous la pression constante p;
« l\" Le coefficient de dilatation dii gaz sons le volume constant i^.
» La détermination de la chaleui" spécifique d'un gaz sous vol mue con-
stant se trouve donc ramenée à la détermination de quatre éléments, qui
sont actuellement connus jionr un assez grand nombre de gaz, grâce aux
recliercbes de M. Régna ul t.
» La relation précédente donne lieu à quelques remarques. Si l'on ap-
( Ho9)
pelle Cg le volume occupé par le gaz à la pression yj et à la température T„
de la glace fondante, on a
(a) C = c + ATo^Po^a'-
» Si l'on suppose le ga:c parfait, les deux coefficients a, a' ont pour va-
leur commune l'invprse de T^, et alors
(3) G z= c -h A/M'„a.
" On retrouve, dans ce cas particulier, l'équation qui a permis à M. J.-R.
Mayer d'obtenir, dès 1842, la valeur de l'équivalent mécanique de la cha-
leur. Les valeurs de cet équivalent, calculées au moyen des déterminations
de M. Regnault, sont sensiblement concordantes pour l'air, l'hydrogène,
l'oxygène et l'azote, lorsque l'on déduit en outre le rapport des deux cha-
leurs spécifiques de la loi de délente des gaz ou de la formule de la vitesse
du son; il n'en est plus de même pour les autres gaz.
» Il est aisé de voir que la relation précédente doit conduire à tine va-
leur de l'équivalent mécanique de la chaleur d'aulant moins exacte que le
coefficient de dilatation du gaz sous volume constant a une valeur plus
considérable, en sïipposant même la chaleur spécifique sous volume con-
stant déterminée avec beaucoup d'exaclilude. Désignons en effet par A,
l'équivalent calorifique du travail déduit de la dernière relation,
C = <: + A,/nva,
A, = AToK' ou a, — a = a («"!(, — i).
» L'écart entre ces deux valeurs est donc d'autant plus grand, que le
coefficient de dilatation du gaz sous volume constant s'écarte davantage
de la valeur qui convient aux gaz parfaits.
)) Dans les gaz liquéfiables, eii général, le travail intérieur cesse d'être
négligeable. Si l'on désigne, avec M. Clausius, par K la chaleur spécifique
absolue, indépendante de l'état physique, par y la chaletw consommée en
travail interne lorsque la température s'élève de i degré sous pression con-
stante, par y' la chaleur consommée en travail interne lorsque la tempéra-
ture s'élève de i degré sous volume constant,
C = K -t- A{n\,c( -h y,
et, par suite,
7 — 7' = C — C - A/w„a —. Ap'o a (a'T„ — r).
1 08.
( 8io )
» On voit que la diffV'reiice entre les valeurs du trav:iil inirrieur lorsque
le gaz so dilate sons pression constante, ou sous volume constant est une
fraction du travail externe d'autant plus grande que le coefficient de dila-
tation du gaz sous volume constant s'écarte davantage de la valeur re-
lative aux gaz parfaits.
» Si l'on suppose l'équivalent mécanique de la chaleur connu, la rela-
tion (3) permet de déterminer la chaleur spécifique du gaz sous volume
constant avec une approximation dont il est aisé de se rendre compte.
Désignons par c, la valeur de la chaleur spécifique sous volume constant
déduite de la relation (3)
C = c, + Api'oC/.,
c, — c — AjH'oCf (a'To — i).
» L'écart entre ces deux valeurs est très-faible pour l'hydrogène, l'air,
l'azole, l'oxygène, l'oxyde de carbone, mais il devient sensible pour l'acide
carbonique.
» Pour ce dernier gaz, d'après les expériences de M. Regnault, la cha-
leur spécifique sous la pression de l'atmosphère à o' est C = o, 1870,
a= o,oo3G88, a = 0,003710; si l'on remplace A par 7^, ï„ par 273,
p par io333, i>o par ^ ^ 32 x i 5->q' "" ^'''f'"^"^ ^'^ '^ relation {1) c = o,\/\i
et poiu' le rapport des deux chaleurs spécifiques à zéro sous la pression de
l'atuiosphère, on obtient
- = 1 , iab.
r
» Le coefficient de détente de l'acide carbonique, qui serait égal à i ,3o
d'après Masson ou à 1,291 d'après les expériences de M. Cazin, différe-
rait donc sensiblement du rapport des deux chaleurs spécifiques. »
CHIMIE INDUSTRIKLLE. — Sur la prépamliou de l'osséinc cl de la ijëloline.
Note de M. Alf. Uiche.
« Depuis le jour où M. Dumas a entretenu l'Académie de l'utilité que
présenterait, au point de vue de l'alimentation, le parenchyme des os, et
où il conseillait d'en entreprendre en grand la préparation, il s'est ouvert
trois usines pour la fabrication de celte matière, avec les os de bœuf, de
mouton et de cheval. J'ai pensé qu'il ne serait peut-être pas inulile de pu-
blier quelques expériences que |'ai faites sur l'osséine qu'on trouve dans
( 8.. )
le commerce, parce qu'elles répondent à des queslions qne M. Freiiiy a
posées, dans ses intéressantes Communications sur ce sujet.
» Il me paraît indispensable de renoncer, une fois l'acidulation des os
terminée, à traiter le parenchyme par de la chaux, comme cela se pratique
dans certaines fabriques, parce qu'il reste, dans l'osséine, de la chaux solide
qui n'est pas enlevée ensuite par le lavage à l'eau, en raison de la faible so-
lubilité de cet alcali. En effet, M. Fremy ayant bien voulu me remettre
une certaine quantité d'osséine préparée et purifiée |^nr cette méthode, j'ai
reconnu que, jetée dans l'eau froide, elle donne au bout de |)eu de temps
un liquide qui bleuit le tournesol, et que si, après avoir enlevé cette
eau, on fait cuire l'osséine, on obtient un bouillon gélatineux fortement
alcalin.
» Ce premier essai m'a expliqué jjourquoi je trouvais à la gélatine pré-
parée avec cette matière une saveur acre, tandis que l'osséine obtenue à
Javel par M. Léon Thomas n'offre rien de semblable.
» .l'ai soumis au grillage des poids égaux d'osséine purifiée au carbonate
de soude et à la chaux. Tandis que la première ne donne que 6 à 8 mil-
lièmes d'un résidu minéral qui est insoluble dans l'eau, la seconde fournit
juscpi'à 5 pour loo .d'une substance dont la chaux libre constitue une
partie notable. Cette différence m'a fait comprendre comment il se fait que
l'osséine de M. Thomas s'attaque rapidement par l'eau, et que l'osséine de
M. Bonneville résiste longtemps à son action.
» Dans une réunion de la Société Chimique, on a objecté, contre l'em-
ploi de l'osséine, que cette matière renferme du phosphate de chaux à
haute dose, lequel pourrait ne pas être sans inconvénient. L'analyse pré-
cédente, en montrant que l'osséine bien préparée ne contient que quelques
millièmes de phosphates, répond à cette objection. Si du phosphate de
chaux, à dose minime, peut être considéré comme sans danger ou même
comme utile à l'économie, il ne saurait en être de même pour les quantités
de chaux libre signalées plus haut. C'est pourquoi l'on doit, d'une p:irî,
renoncer à la purification par la chaux telle qu'on l'exécute dans certaines
fabriques, et, d'autre part, débarrasser de cette chaux l'osséine, préparée
par ce moyen, qiii est la plus commune aujourd'hui. On y arrivera facile-
ment en remplaçant la macération à l'eau froide |)ar une macération avec
de l'eau vinaigrée, que l'on fera suivre, après un contact de huit à dix
heures, par cinq ou six lavages à l'eau pure. Comme le public ne peut pas
distinguer, à l'aspect, celte osséine calcaire de l'osséine ordinaire, le mieux
( 8i2 )
serait rie faire toujours cette préparation préalable qui est peu dispendieuse
et d'une exécution tiès-simple.
» La recommandation d'employer à la fabrication de l'osséine les os
durs est excellente. Néanmoins, ils offrent l'inconvénient d'exiger un sciage
préalable, c'est-à-dire l'emploi d'une force motrice dont on doit être avare
en ce moment. S'ils ne sont par réduits en lames, la surface est désagrégée
avant que l'acide ait pénétré dans le centre, et il faut forcer la dose d'acide,
surtout par les temps froids : toutes choses qui augmentent les frais et di-
minuent le rendement.
» La pratique a montré que les os de tête, les côtes, les vertèbres, les
cornillons se prêtent aisément à la fabrication. Il faut, il est vrai, les dé-
graisser avec soin, mais aujourd hui que les graisses de bouche sont rares,
divers industriels, et notamment MM. Arlot et C"', traitent préalablement
tons les os pour en retirer les corps gras. Ceux-ci se vendent depuis plus
d'ini mois aux halles, soit à l'état de liberté, soit associés les uns aux autres;
car on a observé que les graisses de cheval, mêlées aux graisses de bœuf et
de n)Outon, ont le double avantage de rendre celles-ci plus fluides, et (!e
leur conununiquer une odeur douce qui a quelque analogie avec celle «le
la graisse d'oie.
» M. Payen, dans ime Communication très-intéressante au Conseil de
Salubrité, a fait justice de cette opinion qui s'était répandue, que les os de
cheval ne se prêtent pas à l'extraction de la gélatine; M. Thomas et M. Du-
chêne en fabriquent de grandes quantités depuis une quinzaine de jours
et n'ont rien observé qui justifie cette assertion. »
CUIMIK INDUSTRIELLE. — Procédé fie pitrificnlinn ries suifs hnih fin rnunntrce.
Note de M. J. Casthei.az, présentée par M. Balard.
« L'intérêt que présentent dans ce moment les questions relatives à l'ali-
mentation me déterminent à soiunettre à l'Académie un procédé écono-
mique pour la purification des suifs bruts du commerce.
» Les suifs, dits de cretons, provenant de la fusion des suifs en branches,
contiennent des produits de fermentatioti et de décomposition de matières
animales mal .séparées lors de la fabrication, de l'acide hirciqtie et des pro-
duits <l'oxydation des corps gras entrant dans leur compf)sifion.
» Les suifs, dits à l'acide, obtenus en traitant les suifs en branches par
l'acide sulfurique, pour décomposer les matières animales étrangères, cou-
( Hi^)
tiennent des acides sulfogias, des acides gras et, comme les précédents, des
produits de décomposition ou d'oxydation des corps gras.
» L'odeiu" infecte qui accompagne toujours les suifs de cotuuierce,
variable suivant leur provenance, leur âge, ou les soins de fabrication, les
rend impropres à l'alimentation. Les acides minéraux ou organiques étran-
gers, les acides sulfogras et gras, les corps gras oxydés que contiennent
toujours les suifs en rendent l'emploi répugnant et même nuisible. Dans
ces conditions, en raison du siège, en présence des quantités considérables
de suifs qui se trouvent dans Paris, il devenait intéressant d'en extraire
la partie saine, c'est-à-dire les corps gras non altérés, potir les utiliser à
l'alimentation si le besoin s'en fait sentir.
» Après des essais infructueux, en suivant, il est vrai, les voies tracées
déjà, lavages à l'eau, traitements à l'acide sulfurique, au bichromate de
potasse, au chlore même (utilisé bien à tort, puisqu'il donne facilement
naissance à des produits gras chlorés), fusion, ébuUition, tiltration, etc., je
suis arrivé à un procédé plus rationnel, économique en même temps qu'in-
dustriel. Il est fondé sur la saturation ou la dissolution des acides miné-
raux ou organiques étrangers, des acides sulfogras ou gras par le carbo-
nate ou bicarbonate de soude et sur l'émulsion des corps gras oxydés qui
est plus facile et plus persistante que celle des corps gras neutres.
» Ce procédé consiste à émulsionner les suifs dans une solution faible
de cristaux de soude, à séparer par l'eau, à laver les corps gras et à répé-
ter deux ou trois fois cette opération suivant la qualité et l'aualvse des
suifs mis en travail.
» Le premier traitement se fait ainsi : prendre loo parties de suif brut,
loo parties d'eau à l'èbullition, de manière à obtenir la liquéfaction du
suif; verser 4 parties de carbonate de soude cristallisé, dissous dans ao par-
ties d'eau; opérer à une température supérieure au point de fusion du
suif; agiter jusqu'à émulsion complète; porter à l'ébidlition. Ou ajoute
4oo parties d'eau en continuant l'agitation. On laisse déposer; on siphone
les eaux qui se trouvent à la partie inférieure du vase; on recueille les corps
gras qui surnagent : comme ils contiennent encore du carbonate sodique,
on ajoute loo parties d'eau ; on les émulsionne de nouveau et on les relave
avec 4oo parties d'eau à l'èbullition. Les meilleurs suifs doivent être trai-
tés ainsi deux fois au moins, et la plupart des suifs du commerce trois fois.
» Pour les seconds traitements, les proportions du carbonate de soude
employé varient de 4 à 2 pour 100; pour les troisièmes, elles sont moin-
dres et varient de 3 à a pour 100.
( «'4 )
» L'opération se coDtiniie, soit par un simple lavage à l'eau, soit par un
lavage avec de l'eau contenant i i)our loo d'acide chlorliydrique et un
nouveau lavage poin- enlever les dernières traces de sel sodique ou d'acide.
» Tous les lavages doivent être faits à l'oau chaude, et les liquides main-
tenus à l'ébuUition pendant un quart d'heure ou une demi-heure. Celte
ébuUition est utile jjour entraîner certains produits volatils acides, salins
ou basiques. Les eaux du premier traitement entraînent la majeure partie
des acides étrangers, des acides sulfogras et gras; il est facile de s'en con-
vaincre en saturant le sel sodique par quelques gouttes d'acide sulfurique;
il se dégage une odeur très-désagréable d'acide hircique, de graisses ran-
cies, tout à fait caractéristique.
» L'application industrielle de ce procédé est très-simple : des cuves en
bois, munies d'agitateurs mécaniques et chauffées par un barbotage de
vapeur, suffisent pour ces traitements. Les précautions à prendre sont les
suivantes :
» Pour éviter les sels gras calcaires, il vaut mieux employer de l'eau
distillée provenant des générateurs ou des vapeurs perdues; à défaut, des
eaux dont on a précipité les sels de chaux par le carbonate de soude.
» Il faut réunir les eaux de réaction des cristaux de soude sur les suifs,
les saturer par l'acide cldorhydrique ou sulfurique, et lecueillir ainsi les
acides gras dissous ou les corps gras entraînés. Ces produits peuvent servir
soit pour la savonnerie, soit pour la fabrication de l'acide stéarique.
» Les perles sont insignifiantes, puisque les suifs ont été dédoublés en
acides gras de qualité inférieure, très-odorants, mais utilisables, et en corps
gras neutres assez purs pour être admis dans l'alimentation.
» Les corps gras ainsi purifiés ont perdu l'odeur lance et désagréable
du suif, et, s'ils conservent encore une légère odeur de graisse, celte odeur
disparaît à la cuisson. La meilleure manière de les employer, c'est de les
utiliser en friture pour pommes de terre, beef-steaks, horse-steaks ou autres
viandes ou aliments cuits à la poêle.
» Bien des suifs simplement chauffés et fondus, contenant des acides
gras libres ou d'autres impuretés, sont vendus à prix élevé sous le nom de
graisse do boeuf. Si les acides gras les rendent nuisibles, il importe d'en re-
coiuiaîlre facilement la qualité, et, en suivant un procédé d'essai conforme
à mou mode de purification arrêté au premier traitement, l'examen seul
des eaux peut donner en peu d'instants une indication suffisante de la qua-
lité de ces graisses. »
( 8'5)
K M. BussY, à l'occasion delà Communication qui précède, croit devoir
rappeler que depuis longtemps M. Evrard, chimiste à Douai, a proposé
d'euiployer les solutions alcalines faibles à la purification du suif. Une
fonderie de suif en branches a fonctionné d'après ce procédé pendant plu-
sieurs années, à Paris, et produisait un suif d'une blancheur et d'une pu-
reté exceptionnelles, dépourvu de l'odeur que répand le suif préparé par
les moyens ordinaires. »
« M. Paven cite, à l'appui des indications données par M. Bussy, les faits
dont il a été lui-même témoin, et qui établissent clairement les droits de
priorité de M. Evrard sur le procédé d'épuration des suifs dont il vient
d'être question.
» Cet habile et inventif chimiste, manufacturier dans l'usine qu'il avait
fondée à Douai, et dont M. Payen a suivi avec intérêt, pendant toute une
journée, les opérations parfaitement combinées, s'était proposé le double
but qu'il sut atteindre d'extraire directement hs matières grasses, tout en
les épurant, des tissus adipeux des bœufs et des moutons.
» Ces tissus bruts, dits suif en branches^ tels qu'ils arrivaient des abattoirs,
étaient placés dans une chaudière à double fond troué, à demi pleine d'une
faible solution aqueuse de soude caustique.
» Le degré du liquide alcalin était réglé de telle façon que la partie la
moins résistante des membranes adipeuses se trouvait seule attaquée, ces
membranes ainsi criblées de minimes ouvertures devenaient perméables;
dès lors en exerçant, par un simple mécanisme et à l'aide d'un deuxième
faux-fond mobile troué, une pression graduée convenablement, on faci-
litait l'issue de la matière grasse fluide au travers des membranes; ame-
nant le liquide gras surnageant au niveau d'un robinet spécial, la décan-
tation s'effectuait très-facilement dans une troisième chaudière inférieure
de dépôt.
» Quant au liquide alcalin contenant la portion des substances azotées
dissoutes, l'inventeur se proposait de les utiliser en irrigations fécondantes;
mais dabord, afin de démontrer par le fait même que son procédé épurait
réellement les matières grasses, i\ effectuait la saturation de la solution
alcaline, et parvenait ainsi sans [)eine à mettre en liberté des acides gras,
fixes et volatils qui , soigneusement recueillis, offraient des produits odo-
rants rappelant l'odeur spéciale des suifs de boeufs ou de moutons, suivant
que les tissus adipeux traités provenaient de l'une ou l'autre de ces espèces
C. R., iS'jo, 2» Semestre. (T. LXXI, IS" 23.) '«9
(8i6)
animales : ces acides gras étaient utilisés clans la fabrication des savons
communs.
» Les matières grasses ainsi épurées pouvaient dès lors être subslitnées,
pour divers usages économiques, soit de la pharmacie o\\ de la parfumerie,
à la graisse de veau naturellement exempte d'odeur désagréable, et à
laquelle, jusqu'à un certain point, elle était comparable.
» M. Payen ajoute, en terminant, que le procédé de M. Evrard se trouve
décrit dans plusiein-s éditions de la Chimie industrielle, notanunent dnns la
cinquième (i). »
« M. Balard, en remerciant MM. Bussy et Payen de leurs observations,
répond que le procédé de M. Evrard, qu'il regrette de ne plus voir employer
aujourd'hui comme il l'a été dans le temps, lui était bien connu; mais que
le traitement par les alcalis caustiques imaginé par cet indtistriel avait sur-
tout en vue l'action de cet agent sur la membrane, de manière à rendre
l'écoulement du suif plus facile. C'était, en réalité, un procédé perfectionné
de fonte du suif, et l'on peut dire qu'il donnait ce produit d'une qualité
meilleure par siirérogation. La méthode que conseille M. Casthelaz en se
contentant de carbonate de soude, au lien de soude caustique, pour l'épu-
ration d'un suif déjà extrait, conservé depuis longtemps, et altéré dans son
odeur et sou goût par tant de causes, lui paraît être un peu distincte, dans
son mode d'exécution et dans son but, de celle de M. Evrard. Dans tous
les cas, il import(> de rappeler tout ce qui concerne ces questions, au mo-
ment où des quantités considérables de ces suifs, extraits depuis longtemps
et destinés à d'autres usages, peuvent devenir nécessaires pour l'usage
culinaire, et augmenter ainsi nos ressources en une nature d'aliment qui
peut en faire consommer d'autres existant à Paris en plus grande abon-
dance. «
M. GuYOT jjropose un nouveau système télégraphique, applicable aux
places assiégées. L'Académie décide que la publication doit en être ajour-
née, tous les droits de l'auteur étant réservés. Le système de M. Gnyot
pouvant être mis en usage, il y aurait inconvénient à le divulguer,
M. L. CiiARMOLiiK adresse une Note destinée à établir qu'il avait indiqué
déjà, dès le 23 novembre dernier, remi)!oi du bois pour la fabrication d'un
(i) f^oyez p, 771 (lu If volume.
( «'7 )
gaz d'éclairage : pour augmenter le pouvoir éclairant du produit que four-
nirait le bois seul, il propose d'y joindre, soit les résidus de la distillation
des huiles de pétrole, soit ces huiles elles-mêmes, soit des bitumes, soit
(les débris animaux.
La séance est levée à /j heures et demie. D.
ERRATA.
(Séance du 28 novembre 1870.)
Page 761, ligne 17, au lieu de séparé de la baryte et de l'état hydraté, lisez séparé de
la baryte, et à l'état hydraté.
Page 764, ligne 1 1, au lieu de {/+ g)' + 4 (/^ _ « = ) , Usez (/+ gf > ^(fg _ «») .
COMPTE RENDU
DES SÉANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
SÉANCE DU LUNDI 12 DÉCEMBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEMOIRES ET COMMUNICATIOIVS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE,
« M. Chevreul avait retenu la parole pour communiquer quelques notes
sur l'histoire de la gélatine, mais la réponse de M. Fremy l'oblige à remettre
sa Communication à huit jours. 11 répondra catégoriquement à ce passage
du Compte rendu :
« Que ceux qui, aujourd'hui comme il j a trente ans, critiquent l'emploi
» alimentaire du TISSU GÉLATINEUX songent aux circonstances graves que nous
M traversons, et qu'ils redoutent de prendre la responsabilité d'une opposi-
» TION QUI POURRAIT ÊTRE FUNESTE A LA POPULATION PARISIENNE. »
ASTRONOMIE. — Sur l'expédition de M. Janssen ; par M. Faye.
« Quelques journaux ayant paru s'étonner qu'au milieu des circon-
stances graves où se trouve notre pays le Gouvernement ait conGé à
M Janssen la mission d'aller observer une éclipse, j'ai cru qu'il ne serait
pas inutile de donner ici quelques explications sur l'importance du but qu'il
s'agit d'atteindre.
» On sait que, dans ces dernières années, la théorie physique du So-
leil a été l'objet principal des efforts réunis des astronomes et des phy-
siciens. Il ne faut pas s'en étonner : outre l'intérêt, pour ainsi dire im-
C. R., 1870, 2' Semestre. (T. LXXI, Pi» 24.) I I «
( 820 )
médiat, que présente pour nous l'étude de l'astre central de notre sys-
tème planétaire, le Soleil est en quelque sorte le type de la formation la
ijIus répandue dans l'univers. Étudier le Soleil, c'est étudier eu même
temps toutes les étoiles qui brillent au ciel, qui ont même origine, et qui
passent par les mêmes phases de développement, pour aboutir sans doute
au même terme final. La découverte de l'analyse spectrale nous a ouvert,
pour cette étude, des voies inespérées; l'un de ses plus beaux résultats est
assurément la découverte de cette mince enveloppe d'hydrogène qui
entoure le Soleil, mais qui répond si peu aux idées qu'on s'était faites,
depuis longtemps, sur une vaste et puissante atmosphère dont beaucoup
d'astronomes l'avaient doté. Aujourd'hui, grâce à M. Janssen et à son émule
anglais M. Lockyer, on observe journellement les phénomènes étranges
(pie nous présente la chromosphère, et peut-être en aurions-nous déjà la
clef, si de graves événements n'étaient venus détourner presque tous les
esprits des recherches de science pure.
M Mais qu'y a-t-il au delà de cette chromosphère colorée des teintes
rosées de l'hydrogène incandescent? Le Soleil finit-il là? Est-ce là que
commence la région où la matière indé[)endante circule simplement au-
tour du Soleil, sans faire corps avec lui, c'est-à-dire la région des planètes
et des comètes? La question est capitale et non encore résolue. C'est celle
dont M. Janssen va chercher la solution dans l'Afrique française, tandis que
les astronomes italiens se sont déjà préparés à l'attaquer en Sicile, et les
astronomes anglais, russes ou allemands en Espagne, à la même date et au
même moment, le 22 de ce mois. Ils n'auront que deux minutes pour abor-
der le problème, car telle est la durée de cette éclipse totale. Sans blesser
aucune susceptibilité, sans méconnaître le mérite éminent des observateurs
de tous pays qui vont s'échelonner le 22 décembre sur le trajet de l'ombre
lunaire, armés de leurs spectroscopes, je crois pouvoir dire que ce serait
un malheur pour la science universelle, si M. Janssen y manquait, et que, si
les savants étrangers devaient désigner celui de leurs collègues de tous pays
dont la présence serait le plus désirable, en cette occasion peut-être déci-
sive, ils s'accorderaient tous à prononcer le nom de celui à qui nous devons
la mémorable découverte du mois d'août 1868, que le télégraphe des Indes
anglaises annonçait le lendemain à Paris.
» La solution est importante, en effet : elle achèvera de nous fixer sur
la constitution de notre système solaire; elle lira disparaître une foule
d'hypothèses plus ou moins arbitraires, qui empêchent encore aujoiud'hui
cette branche de la science de revêtir le caractère positif des autres branches.
( 82r )
Il esl certain qu'il existe de la matière à proximité du Soleil; raiiréole des
éclipses avec sa lumière régulièrement polarisée en est une preuve indubi-
table. Mais, cette matière, est-ce celle d'une grande atmosphère gazeuse
placée au-dessus de la chroinosphère? Alors il faudrait qu'elle fût consti-
tuée par nn gaz plus léger encore que l'hydrogène; car les éruptions
gigantesques d'hydrogène incandescent qui s'élèvent de celte région ne
tardent pas à retomber vers la chromosphère, au lieu de monter continuel-
lement comme elles le feraient dans des couches formées d'un autre gaz
plus lourd. S'il en était ainsi, la nouvelle analyse inaugurée par M. Rirch-
hoff nous révélera la nature de ce gaz par les raies particulières qu'il fera
naître dans le spectre de l'auréole. Mais cette matière circumsolaire ne se-
rait-elle pas plutôt due à l'enchevêtrement de ces myriades d'anneaux de
matériaux cosmiques qui circulent autour du Soleil en produisant pour
nous le phénomène des étoiles filantes, ou encore aux effluves cométaires
dont une partie doit décrire en tous sens, autour du Soleil, des ellipses
plus ou moins allongées? Dans ce cas encore, le spectroscope nous déci-
dera, parce que la lumière réfléchie par ces corpuscules rassemblés et con-
densés vers leur périhélie devra présenter tous les caractères de celle du
Soleil. Reste, il est vrai, le chapitre de l'imprévu, car nos prévisions et nos
théories deviennent bien incertaines dans ces régions limites; en tous cas,
nous pouvons compter sur M. Janssen pour ce chapitre-là.
» Quoi qu'il en soit, nous voici en présence de l'observation la plus
délicate et la plus difficile que l'on puisse concevoir aujourd'hui.
» Un observateur habile risque d'y échouer complètement, s'il ne s'est
préparé d'avance à toutes les éventualités. Que.l'on songe à la courte durée
de cette éclipse, et l'on comprendra qu'il ne suffit pas ici de l'habileté d'a-
nalvse incroyfible qu'ont acquise, sur des phénomènes permanents et per-
sistants, d'éminenis observateurs tels que Huggins, Lockyer, Secchi,...: il
faut encore s'être familiarisé comme M. Janssen, par des expéditions anté-
rieures, avec des phénomènes essentiellement fugitifs; il faut avoir comme
lui cette inspiration soudaine qui porte à modifier ou à remplacer '.i l'instant
un appareil trouvé insuffisant au moment décisif; il faut posséder enfin une
connaissance approfondie et surtout imparlialc de toutes les théories qui
peuvent guider ou aider l'observation.
)) C'est pourquoi j'ose dire que les observateurs de toutes nations qui se
sont donnés rendez-vous le 22 décembre dans le midi de l'Europe regret-
teraient vivement l'absence de notre délégué; ils seront heureux, au con-
traire, d'apprendre de lui que la France, malgré ses désastres passagers, n'a
1 10..
( 822 )
pas voulu se désintéresser, en cette occasion, d'un mouvement scientifiqut
auquel elle a toujours pris tant de part.
» Pour moi je voudrais que ces rapides explications contribuassent à
faire sentir au public que le Gouvernement n'a pas cédé à de minces consi-
dérations en accuedlant le vœu de l'Académie, et en accordant à notre émi-
nent missionnaire les moyens de représenter la science française dans une
circonstance décisive où notre abstention eût été à la fois remarquée et re-
grettée; je le remercie d'avoir, à l'avance, garanti le passage de M. Janssen
(Ml donnant à son excursion un caractère exclusivement scientifique. »
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Hippophagie; graisses, huiles alimentaires et subslances
gélatineuses des tissus et des os du bœuf et du cheval; par M. Payen.
« L'hippophagie, en honneur chez plusieurs nations dans les anciens
lemps, s'est propagée parmi différents peuples jusqu'à nos jours; appliquée
avec un remarquable succès par le grand chirurgien militaire Larrey, de
l'Institut, elle a été vivement recommandée dans les écrits et les conférences
publiques de notre ancien confrère Isidore Geoffroy. M. Decroix, vétéri-
naire habile, a repris cette œuvre avec un zèle, une activité et une persé-
vérance qu'on ne saurait trop louer, et notre confrère M. de Quatrefages,
au nom de la Société protectrice des animaux, lui a donné son puissant
concours. Déjà cette utile pratique avait permis d'accroître, dans une cer-
taine mesure, nos ressources en une substance nutritive saine et répara-
trice : elle commençait à être favorablement accueillie en France au mo-
ment même où l'investissement de la capitale devait bientôt, sous la
pression d'une nécessité suprême, dissiper à la fois les préjugés et les
répugnances à son égard.
» Dès lors aussi les propriétés utiles de cette chair salubre, de toutes
parts remises en lumière, furent généralement admises sans conteste par
l'universalité de la nou)breuse population parisienne récemment ac-
crue {[),
» Maintes occasions s'élant offertes d'apprécier les produits comestibles
de l'abattage des chevaux, les observateurs se sont accordés pour recon-
naître les faits suivants.
(i) L'usage de la chair du cheval avait été prôné sans succès en Angleterre durant la
campagne de Crimée, alors que le manque de viande fraîche imposait de si fâcheuses priva-
lions à l'armée britannique, tandis que les soldats français mirent largement à profit cette
fortifiante alimentation. {T/ie liorsc ax a fond for man, liy Bicknell.)
{ 823 )
» Parmi les animaux de cette espèce, les juments offrent la chair mus-
culaire la meilleure; viennent ensuite les chevaux hongres, s'ils ne sont pas
trop âgés ou trop amaigris; les produits obtenus des chevaux entiers occu-
pent, dans cette application, le dernier rang.
» D'après les expériences de personnes très-compétentes, notamment
de MM. Dailly, Magne et Reynal, les chevaux abattus en bon état doiment
un rendement en viande nette supérieur à celui des bœufs, suivant le rap-
port de 65 ou 60 à 60 ou 55 pour 100.
» Enfin, suivant les essais et applications en grand dirigés par M. Lesens,
chef des salaisons de la marine, la viande de cheval se prête, à l'égal de
celle du bœuf, à la meilleure méthode de salaison, tandis que, sous l'action
du sel marin, la chair du mouton cède une telle quantité de liquide, qu'elle
devient fibreuse et peu sapide.
» De mon côté, espérant faire profiter la science de quelques observa-
tions nouvelles, il m'a semblé qu'il serait intéressant de comparer entre
elles les substances que l'on pourrait extraire économiquement des os du
bœuf et du cheval, et plus particulièrement les graisses contenues dans les
cavités des différentes parties du squelette de chacun de ces animaux.
» L'intérêt que peuvent offrir en ce moment quelques-uns de ces pro-
duits, surtout au point de vue de l'alimentation publique, m'a décidé à
faire connaître les premiers résultats de mes expériences avant que celles-ci
fussent terminées.
» Un fiiit assez remarquable s'est rencontré dans l'examen comparatil
des substances grasses contenues : 1° dans les tissus adipeux entre les mus-
cles; 2° dans les portions tubulaires des os longs; 3** dans les extrémités
renflées des mêmes os jusqu'à une certaine distance des articulations. Les
matières grasses extraites de chacune de ces trois parties offraient des points
de fusion différents chez le même animal, plus différents encore entre les
deux espèces précitées. Quelques faits suffiront pour démontrer les carac-
tères particuliers qui appartiennent aux substances grasses des trois ori-
gines, et qui dépendent sans doute des relations entre l'oléine et les matières
grasses neutres solides isolément à la température ordinaire.
» Les matières grasses extraites des différentes parties du bœuf ont pré-
senté les points de fusion suivants :
Extraites des tissus adipeux entre les muscles 35 à 87 et 4f>
» de la moelle d'un os long 4^ '' 4^
» du bout spongieux du même os » 32 ,5
>■ Cette dernière avait été obtenue suivant la méthode usuelle précè-
( 8^4 )
déminent indiquée (i). On a coupé transversalement le bout renflé de l'os
en tranches peu épaisses, comprenant toute la zone externe compacte et la
partie interne spongieuse. Ces tranches, soumises à l'action de l'eau bouil-
lante, ont laissé sortir de leurs cavités multiples la graisse liquéfiée que l'on
a soigneusement recueillie épurée par le repos en maintenant sa liquidité
par une température suffisante.
» Des deux parties de l'os, on a obtenu les produits suivants :
Tranches du bout renflé après traitement par l'eau bouil-
lante et dessiccation 62 ,09
Graisse extraite 28,75
Eau 9 » • 5
100,00
» L'os tubulaire, dans sa portion médiane exemple des parties spon-
gieuses et ne renfermant que de la moelle, a donné :
Os cylindrique compacte 77i96
Matière yrasse 18,95
Cellules azotées et matières étrangères 3, 09
100,00
)) La substance grasse (2), d'un goût si agréable lorsque, dans les os
frais dn bœuf, elle se trouve, quoique rendue fluide par la température de
100 degrés, retenue dans les cellules du tissu delà moelle; ayant été con-
servée dans cette expérience plusieurs jours à froid dans l'os tubulaire,
exhalait une odeur de suif immédiatement après avoir été extraite à l'aide
de l'eau boudlante.
» Les graisses du cheval, obtenues par les mêmes moyens, ont présenté
des caractères tout différents.
» La substance extraite des tissus adipeux, consistante à H- i5 degrés,
était fusible à -h 16 à 18 degrés; son odeur, à peine sensible, était plutôt
(i) Compte rendu d'octobre 1870, p. 367.
(2) Dès les premières années de ce siècle, on a commencé à extraire, à Paris, la graisse
des os par l'eau bouillante en vue de la fabrication des savons de suif, le résidu osseux fut
a|)piicpié à la préparation en grand du sel ananoniac, puis du noir animal ; celui-ci destiné
au raffinage du sucre, et plus tard (181 1) à l'extraction du sucre des betteraves.
L'application industrielle de l'eau bouillante à l'extraction des matières grasses des os
glas donne un produit moyen de G ù 7 pour 100, tandis que le traitement par le sulfure
de caibono, procédé dû à M. Deiss, permet d'obtenir 10 à 11 pour 100 des mêmes os.
( 825 )
agréable, nippelant, d'après l'un de nos confrères doué du sens le plus
délicat, un léger arôme de la pomme.
» La matière huileuse que l'on obtient des extrémités renflées, intérieu-
rement spongieuses [du tibia et du cubitus (i)], exempte de toute odeur sen-
sible, ou plutôt, douée d'un très-léger arôme analogue à celui de la précé-
dente, resta fluide à zéro et même jusqu'à 7 degrés au-dessous, et cependant,
lorsque sa température fut maintenue durant quelques heures à 7 degrés au-
dessus de zéro, elle se prit eu une masse translucide dans un tube ayant i*, 5
de diamètre, et sans traces apparentes de cristallisation; elle semblait con-
server, dans cet état, à la fois sa propriété lubrifiante et une très-légère faculté
adhésive capable sans doute de maintenir un utile contact entre elle et les
parties frottantes; il serait intéressant de constater ses effets pour adoucir
les frottements dans les mouvements d'horlogerie et d'autres mécanismes
de précision. Sa prise légère en une masse translucide fit place à une liqui-
dité et une transparence complète dès qu'on élevé de i i à 2 degrés sa
température = 8 | à g degrés.
» Obtenue constamment ainsi d'organismes bien déterminés, elle serait
sans doute exempte des variations que l'on remarque dans des produits
analogues désignés sous le nom d'huile de jneds de bœuf.
» Ainsi que les deux autres, d'ailleurs, ses propriétés organoleptiques
agréables lui assignent un rôle très-utile dans les préparations alimentaires.
» La substance extraite du tissu médullaire contenu dans les mêmes os
longs a présenté des propriétés intermédiaires entre les deux précédentes
an point de vue de la fusibilité; sensiblement consistante à -f- i 5 degrés,
elle s'est liquéfiée à -+- 17°, 5 (2).
M Ces trois substances sont évidemment, en'effet, susceptibles d'êlre as-
sociées en diverses proportions avec les graisses de bœuf et de mouton, ex-
traites à l'état frais, afin de modifier favorablement à volonté leur consis-
tance et d'améliorer très-notablement leurs propriétés organoleptiques (3).
(i) Depuis l'époque (il y a plus d'un mois) où la première Communication de ces résultats
fut faite à la Société centrale d'agriculture, la substance huileuse extraite du tissu spongieux
des bouts renflés des tibias et cubitus a présenté la plus grande analogie, si ce n'est une
identité complète, avec l'huile primitivement extraite de la tête de ces os; il serait digne
d'intérêt de rechercher si la portion spongieuse contenue dans une partie du corps cylin-
droïde des mêmes os longs contiendrait une huile semblable.
(2) Dans les os longs du cheval, la partie spongieuse se prolonge fort avant dans l'intcrieur
de l'os tubulaire, ne laissant que peu de développement à la moelle libre.
(3) Une Note très-intéressante adressée dans la dernière séance par M. Riche démontre
( 826 )
» A tons les points de vue, il serait intéressant de rechercher quelles
influences pourraient exercer sur les propriétés des substances grasses pré-
citées certaines particularités relatives aux races, à la nourriture et à l'état
de santé, de maigreur ou d'embonpoint des animaux, avant de les dépecer
pour ces expériences; les résultats seraient alors plus nettement compara-
bles et leur signification plus précise.
» On pourrait savoir alors s'il n'y a rien d'exceptionnel dans les faiis
ci-dessus exposés montrant entre les degrés de fusion de la graisse des
tissus adipeux interposés dans les muscles ou sous la |3eau, et celle qui est
contenue dans les os du bœuf, des différences comprises entre 35, ^o, 46
et 32 degrés centésimaux, et, relativement au cheval, de i6 à i8 et 8 à
I o degi'és.
» Enfin si l'on peut admettre d'une manière très-générale que les sub-
stances grasses ou huileuses extraites des différents tissus du cheval offrent
des propriétés organoleptiques bien supérieures à celles des corps gras
obtenus du bœuf au point de vue de l'alimentation; tout nous porte à
croire que les applications utiles de ces substances s'étendront bien au
delà des circonstances qui les auront fait naître.
» En ce qui touche le parenchyme des os de cheval, il est facile, contrai-
rement à ce qu'on en avait dit, de l'extraire sous un état convenable pour
ralimcntation ; il devient alors très-souple, tremblotant, translucide, tel
que je le présente préparé depuis trois semaines, et conservé sans altération
sous les conditions indiquées dans une Note lue le 1 1 novembre au Con-
seil d'hygiène et de salubrité de la Seine.
» En vue de l'extraction économique de ce tissu azoté, dans cet état
particulier où les tendons et la peau convenablement désagrégés sans être
dissous sont susceptibles de contribuer à la nourriture de l'homme, il con-
vient, de même que pour les os des bœufs et des moutons, d'y consacrer
les os minces ou offrant une grande smface à l'action de l'acide (i), réser-
vant pour le travail de la tabletterie les os compactes et d'une épaisseur
suffisante.
» Ces indications, de même que toutes celles qui précèdent, ont été jus-
tifiées depuis lors par le succès des applications en grand. »
que dès aujourd'hui les substances grasses et huileuses extraites des os entrent largement
dans l'alimentation pulîlique, seules ou associées aux graisses obtenues des tissus adipeux
des animaux des espèces bovine et ovine.
(i) Compte rendu du 3i octobre, page 567.
( «27 )
MÉTÉOROLOGIE. — De la pcriode décemdiurne ou Iridodécupie dans les phé-
nomènes almospltériques el dans leur influence sur l'état sanitaire et physio-
logique (troisième Note); par M. Ch. Sai.vte-Claire Deville (i).
« L'influence de la période décemdiurne sur le nombre des mortalités
étant établie, tout fait penser qu'elle se manifestera aussi dans divers actes
physiologiques, la mort n'étant, en définitive, que le dernier de ces actes,
ou plutôt l'interruption de tous. C'est cette influence que je me propose
de démontrer dans cette troisième et dernière Note.
» Les faits et les observations sur lesquels je m'appuierai proviennent de
deux sources très-distinctes. Les premiers émanent d'un document déjà
ancien, dont j'ai parlé dans ma précédente Note : les autres sont des ob-
servations faites dans ces dernières années, et à mon instigation.
» Le premier document, très-curieux, dont je dois la comnumication à
l'extrême obligeance de M. Renard, bibliothécaire du Dépôt des cartes et
plans de la marine, sans titre général et sans nom d'auteur (2), se compose
de douze pages in-folio imprimées, et intitulées Observations météorologiques
faites à Mdcon. Ces observations commencent au 9 janvier l'jSi et finissent
au 9 janvier 1782, comprenant une année entière, sans lacune ni interrup-
tion. On observait trois fois par jour, à 8 heures du matin, à 2 heures et à
10 heures du soir, le thermomètre, le baromètre, l'hygromètre, la machine
■ électrique, et seulement deux fois par jour, le matin et le soir, les vents,
l'état du ciel et la manière d'être d'un vaporeux.
)> Le thermomètre était un thermomètre Réaumur, qui, très-probable-
ment, placé derrière des jalousies, n'accusait pas dans toute leur étendue
les variations de la température extérieure.
» Les indications du baromètre sont exprimées en pouces et lignes.
» L'hygromètre était sans doute un hygromètre de Deluc; mais, les ob-
servations ne portant pas sur l'année entière, je les ai négligées et leur ai
substitué les nombres inscrits sous le titre de machine électrique, et qui re-
présentent des distances en ligues. Ces distances né pouvaient être que les
(1) L'Académie a décidé que cette Communication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Compte rendu.
(2) Depuis lors, j'ai appris, grâce à l'obligeance et au zèle bibliographique bien connu de
M. le D'' Vacher, le nom de l'auteur de ces observations. M. Vacher a découvert, dans les
pièces manuscrites de la bibliothèque de l'Académie de Médecine, la preuve que ces obser-
vations ont été recueillies par un médecin électricien, du nom de Rcvillon. Était-ce lui-raéme,
le vaporeux qu'il observait? Tout semble rindicpier.
C. U., 1870, 2« Scmeilre. (T. LXXI, N^ 2-5.) I I I
( 828 )
longueurs variables auxquelles on tirait les étincelles de la machine.
Le médecin élecUicien pensai! avoir ainsi une mesure de la tension élec-
trique de l'air, tandis qu'il n'obtenait, par le fait, qu'une appréciation assez
grossière de l'huniidilé a'.mospbérique.
» QuMnt à îa manière d'être (.Cun vnporeux, voici comment je l'ai con-
struite. J'ai cherché à traduire en chiffres, de o à lo, aussi exactement que
je l'ai pu, les indicatioriS suivantes que je trouve sous ce titre dans les ta-
bleaux de Mâcon :
Souffrance.
Faible souffrance.
Malaise.
Plus faible.
Faible — faiblesse.
Un peu mieux, un peu plus de courage.
Mieux.
Plus fort.
Assez actif.
Assez bien.
Fort.
» J'ai construit et discuté, au point de vue de la symétrie quadruple,
les quatre courbes cjui résument ces diverses données de l'observation pour
chacun des jours de l'année. Ce travail a été publié dans V Jnnuaire de la
Société météorologique de France. Je ne reviendrai pas avec détail sur les
résultats que résume une planche de grande dimension; je ferai seulement
quelques réflexions sur la courbe qui représente la manière d'être d'un
vaporeux j qui rentre dans mon siijet.
» Celte courbe paraît moins accidentée que les trois autres; mais cela
dépend uniquement de la moindre étendue que l'on a attribuée à l'échelle
des états physiologiques extrêmes. Il est facile, en effet, de se convaincre,
en la décomposant en fragments, qu'elle reflète des conditions assez diverses
et qui ne se trouvent pas réparties dans l'année d'une manière quelconque.
» Si l'on cherche, par exemi)le, les deux nombres extrêmes, on les
trouve très-rapprochés l'un de l'autre, f^e maximum (6,5o) tombe sur le
49" jour quadruple, qui réunit les
8 février, 10 mai, 12 août cl ii novembre,
et le minimum (3,87) sur le 52'' jour quadruple, qui réunit les
) I février, i3 mai, i5 août et i4 novembre.
» Les deux moments où noire va/ioreux s'est trouvé le mieux possible et
( 8^9)
le plus mal possible se sont donc rencontrés tons deux dans ces quatre
périodes singulières, contenant Vété de la Saint-Marliii, les intempéries de la
Vienje d'août et les Saints de glace de février et de mai. En jetant les yeux
sur les deux premières coiu-bes de la planche, on s'aperçoit aussi que c'est
dans ces périodes que se sont produils les plus grands écarts de la tempé-
rature et de la pression barométrique.
» En comparant ainsi le centre de cette période et l'année entière, on
trouve les différences suivantes entre la moyenne des 365 jours de l'année
(ou des 90 jours quadruples) et celle de 8 jours quadruples, comprenant :
Du g au 17 février.
Du I r au 19 mai.
Du i3 au 21 août.
Du 12 au 20 novembre.
Pression
Longueur
M
aiiièi-e d'èlrc
Tenipcraliire.
b.iro-
de Pélincelle
d'un
mctrique.
clcclriqiie.
vaporeux.
0
10,61
mm
750,00
mm
7,o5
5,59
12,58
747'3i
5,98
4,75
Moy. (le l'année
Moy. des 8 jours quadruples. .
u II y a donc eu, pour la moyenne des 8 jours quadruples, grande éléva-
tion de température, grand abaissement de la pression barométrique, grand
accroissement de l'humidité atmosphérique, grand abaissement dans l'état
sanitaire de l'observateur : pendant ces trente-deux jours, qui forment
quatre groupes opposés dans les quatre saisons de l'année, son état phy-
siologique s'est trouvé, en moyenne, très-inférieur à son état moyen, en
même temps qu'il subissait, dans ces mêmes intervalles, les plus giandes
oscillations.
» Au reste, les relations qu'on remarque dans le petit tableau précédent
entre les quatre éléments variables se maintiennent assez généralement
pour l'ensemble des quatre courbes. La manière d'être d'un vaporeux, par
exemple, ou plutôt la courbe qui la représente a, conmie on peut s'en
assurer, des inflexions généralement opposées à celles de la courbe baro-
métrique et pUitôl parallèles à celles de la courbe qui représente les lon-
gueurs d'étincelle. En d'autres termes, le valétudinaire qui s'est ainsi ob-
servé pour notre instruction ressentait d'autant plus de bien-être que la
pression barométrique était plus faible et que l'air était plus sec.
» Mais ces rapports sont plus frappants encore lorsqu'on soumet ces do-
cuments à l'épreuve de la symétrie tridodécuple. On peut s'en assurer en je-
tant les yeux sur la petite planche ci-jointe, où j'ai réuni les lojours Iridodé-
III..
( 83o )
ciiples pour la température (exprimée en degrés centésimaux), pour la pres-
sion barométrique (i), et pour la manière d'être d'un vaporeux. Dans celle
dernière courbe, j'ai réparti entre o et ao les nombres qui représentent les
variations dans l'état sanitaire, doublant, par conséquent, l'échelle qui
avait servi pour le reproduire dans la construction des jours quadruples.
MAÇON
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Jours fa-îâcdécupîes
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» On voit que les deux courbes inférieures offrent nettement trois
(i) La pression n'est pas ramenée à zéro, faute des indications nécessaires; mais il est
évident que cette correction n'aurait ici aucune importance, puisque clia(|ne nombre l)aro-
métri(]ue est la moyenne de trenle-six jours d'obseivalion, répaiti-, à égales distances sur
l'écliptique et, par conséquent, donnant, pour leur température moyenne, Irès-suffisam-
nient la température moyenne de l'année enliùrc.
( 83i )
maxima ou relèvements ; le dernier de ces relèvements n'est représenté, dans
la première courbe, que par un arrêt sensible dans l'accroissement de la
température. En comparant les deux premières courbes (température et
pression), on voit, en outre, que, pour les premiers jours tridodécuples, les
inflexions semblables de la température précèdent d'un jour celles de la
pression, qu'elles semblent concorder vers le septième jour et s'éloignent
de nouveau.
» Durant les trente-six jours de l'année condensés dans le huitième jour
tridodécuple, la pression moyenne a dépassé de 24 millimètres celle qui
s'est manifestée dans les trente-six jours réunis sous le septième jour tri-
dodécuple.
» Quant à la courbe physiologique du vaporeux, ses trois maxima et ses
trois minima se détachent nettement. On peut remarquer que l'allure de
cette courbe est très-concordante avec celle de la deuxième; en d'autres
termes, que l'état sanitaire du vaporeux de Màcon, en 1781, s'améliorait
généralement quand le baromètre s'élevait, et se détériorait, au contraire,
lorsque la pression diminuait. Enfin, notons que le jour tridodécuple qui
a correspondu, pour lui, au maximum de bien-être est précisément ce
sixième jour, que nous avons vu déjà jouer un rôle si important dans la
répartition des températures et dans celle des mortalités.
» La seconde série de documents que je désire discuter aujourd'hui se
compose d'observations portant sur la température buccale, le nombre de
pulsations par minute et la densité de l'urine.
» La température de la bouche était déterminée en plaçant, pendant
cinq à six minutes, au-dessous de la langue, latéralement, un petit thermo-
mètre à maxima Walferdin muni d'un renflement, qui permet de diviser
très-largement l'intervalle entre 3/( et l\o degrés, et d'évaluer facilement la
température à deux centièmes ou même à un centième de degré (i). Tous
les mois, chaque thermomètre était placé dans la glace fondante, et com-
paré vers 35 degrés avec un thermomètre étalon; on tenait compte delà
variation possible des corrections.
» La densité de l'urine était mesurée au moyen du densimètre spécial
de M. Bouchardat, perfectionné pour la graduation : cette densité était ra-
(i) Ces thermomètres, d'une construction irréprochable, sortaient, aussi bien que les iiro-
mcires dont il va être question, des mains de notre habile constructeur, M. Baudin.
( 83a )
menée à une température constante de i5 degrés, d'après la table con-
struite par ce savant (i).
» Quant au nombre des pulsations, il était déterminé par l'observateiu"
assis: car on peut s'assurer que ce nombre est immédiatement accru par
la station verticale.
» Chaque observateur expérimentait sur lui-même deux fois par jour, à
son lever et à son coucher. Quatre personnes ont pris part à ces expé-
riences (2). Elles ont duié du 21 décembre 1867 au aa décembre 1869;
mais, par diverses circonstances, les deux années n'ont été complètes pour
aucun des observateurs, de sorte que je n'ai pu comparer, à ces divers
points de vue, qu'une année à la fois. J'ai dû utiliser, tantôt l'année
21 mars 1868-21 mars 1869, tantôt l'année 23 septembre 1 868-23 sep-
tembre 1869.
» Je rapporterai successivement ce qui a trait à la température buccale,
au nombre des pulsations, à la densité de l'urine.
» La partie supérieure de la planche suivante donne, pour les observa-
teurs A, B et C, chacune des dix moyennes tridodécuples de l'année
23 septembre i8G8-23 septembre 1869, et la moyenne (ponctuée) des trois
courbes. Les quatre courbes de la partie inférieure se rapportent à l'année
21 mars 1868-21 mars 1869, étudiée dans les observateurs B, C et D, et à
la moyenne de ces trois courbes tridodécuples.
)) En examinant ces huit courbes, on voit de suite qu'elles se divisent en
deux parties distinctes; la première moitié offre des discordances, tandis
qu'à partir du cinquième ou du sixième jour, toutes les courbes présentent
une concordance remarquable. Le maximum du septième jour tridodé-
cuple est frappant partout, précédé du minimum qui varie du cinquième
au sixième jour, et suivi du minimum qui varie du huitième au neuvième.
» La première courbe de la planche (p. 83/|), qui condense les deux
moyennes ponctuées, fait ressortir nettement l'oscillation du quatrième au
dixième jour, tandis que, du dixième au quatrième, elle est à peine acci-
dentée et n'offre rien d'accentué.
(i) Instruction /unir l'usage de l'uromctrc de M. linurlinrildl ; Paris, Gciiner-Baillière,
1861.
(2) L'observateur désigné par la lettre A avait de 53 à 55 ans; l'observaieur B de 3i à
33 ans; l'observateur C de 2Ç)à 3i ans; l'observateur D de 26 à 28 ans. Tous avaient l'ha-
bitude des instruments; trois sont doeteurs en uiédeeiiie et anciens internes des hôpitaux.
( i^33 )
« Si, au lieu de construire ainsi la moyenne brute des six courbes pleines
TEÎïîPÉKiiïm\E BÎÎCCALE
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Jouis tridodécuples.
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(5)
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de la planche ci-tiessus, on les examine séparément, on voit l'oscillation
( 834 )
des cinq derniers jours triodéciiples se manifester neltemenl dans tontes,
tandis que, pour la première partie, les courbes (i) et (a) d'une part, les
Jours Tridodécoples.
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Moyenne des
deux moyeimes
de la Planche
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22Décembre 1868
22 Décembre 1869
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courbes (4) et (5), de l'autre, sont absolument opposées. On a donc quatre
courbes analogues (i , 3, 4 et 6), que l'on peut combiner ensemble, et deux
autres courbes analogues entre elles (2 et 5) que l'on peut aussi rapprocher.
Il en résulte les deuxième et troisième courbes de la planche (p. 834 j, qui
présentent, en effet, concordance pour les cinq derniers jours, opposition
pour les cinq premiers.
» 11 y a là, sans doute, un effet d'idiosyncrasie, qui sera du ressort du
physiologiste (i).
» Celte dernière conclusion est confirmée par l'examen de la quatrième
(i) Mon but nV'tanl iiullciiient ici iino étii<lc physiologique, je n 'insiste point sur les
caractères particuliers du mouvement <le la température chez les divers observateurs. On
voit, néanmoins, en comparant les deux coiuhcs B, d'un côté, et, de l'autre, les trois
( 835 )
courbe, qui représente les dix jours tridodécuples de la température buccale
pour l'observateur A, pendant l'année normale du aa décembre 1868 au
22 décembre 1869. Cette courbe offre les mêmes inflexions que la seconde.
» Enfin, j'ai établi un point cle comparaison entre la température buccale
et la température de l'air, en construisant les dix jours tiidodécuples pour
la température moyenne observée à l'Observatoire de Paris, pendant cette
même aimée (22 décembre 1868, 22 décembre 1869) (i).
» On voit, en premier lieu, que cette courbe, très-simple, présente net-
tement deux minima et deux maxima. Le plus élevé de ces deux maxinia
tombe encore au sixième jour tridodécuple, sur lequel j'ai déjà si souvent
appelé l'attention dans mes précédentes Notes. La symétrie tridodécuple
s'applique donc parfaitement à la température de cette année (2).
» En second lieu, si l'on compare cette courbe à celle de la température
buccale de l'observateur A, durant le même intervalle, on remarque que
ces deux courbes sont, au moins pour les six premiers jours, presque en-
tièrement opposées dans leurs allures. Les deux maxima des 3* et 6'^ jours
pour l'air correspondent, pour la température buccale, à deux minima. Les
quatre derniers jours concordent assez bien. Des deux côtés, le minimum
absolu tombe sur le 9' jour.
» Ce seul exemple ne suffirait assurément pas pour établir la généralité
du fait : mais c'est une circonstance qu'il n'est peut-être pas inutile de
signaler aux physiologistes.
» Si l'on voulait avoir quelque appréciation numérique des écarts de
température humaine qui résultent de ces recherches, on verra, par la
courbe C (i), que, pour l'observateur C, du 23 septembre 1868 au 23 sep-
tembre 1869, la température des 36 jours simples qui constituent le 7® jour
courbes C(i), D (4) et C(5 , le contraste de ce que l'on pourrait appeler, chez rhonime, un
climat tempéré avec un climat extrême. On va voir des contrastes analogues pour le nombre
des pulsations et la densité des urines.
(i) J'ai pris les moyennes diurnes données par les Bulletins de statistique municipale, et
conclues des observations de 9 heures matin, midi, c) heures soir et minuit. Les dimanches
et jours de fête, les observations trihoraires ne se faisant pas, j'ai pris la moyenne du maxi-
mum et du minimum diurnes; et, quand ces derniers éléments manquaient aussi, j'ai conclu
la moyenne diurne par interpolation, au moyen des trois stations de Versailles, de Saint-
Mauret d'Aubervilliers.
(2) La somme des 36 températures moyennes de ce sixième jour tridodécuple dépasse de
55°, 8 la somme des températures moyennes du neuvième.
C. R., 1870, 2» Semeitre. (T. LXXI, N" 24.) ^ I 2
( 836 )
tridodécuple, a dépassé de 3", 6 la température des 36 jours simples du
9* jour tridodécuple.
» La courbe moyenne (première de la planche de la page 834), qn' se
rapporte aux quatre sujets, observés pendant dix-huit uiois, donne, jKJur
différence entre les 216 jours simples du 7* jour tridodécuple et les 216 jours
simples du 9" jour tridodécuple :o'',o35. Si l'on considérait ce nombre comme
peu différent de ce que donnerait pour un an, 21 juin 1868 — 21 juin 1869,
la moyenne des 2000000 d'habitants de Paris, il en résulterait que leur tem-
pérature moyenne pendant les 36 jours simples du 7^ jour tridodécuple
a dépassé d'environ 70000 degrés leur température moyenne pendant les
36 jours simples du 9^ jour tridodécuple (i).
» J'arrive au nombre des pulsations artérielles par minute. Trois obser-
vateurs (A,B, D) ont pris part à ce genre d'observations. Les deux pre-
mières courbes de la planche (p. 837) sont calculées d'après les périodes
d'observations. Elles ne présentent, en quelque sorte, aucun trait commun;
l'allure des premiers jours est presque opposée. Cela dépend évidemment
de ce que le caractère idiosyncrasique s'impose là plus encore que dans le
phénomène de la température du corps. On s'en convainc en examinant
les deux dernières courbes de la planche, dans lesquelles, au lieu de com-
biner des natures opposées à ce point de vue, j'ai fait abstraction des pé-
riodes communes d'observation et réuui ensemble les tempéraments sem-
blables. Si l'on compare la moyenne des deux courbes B avec la moyenne
des courbes A etD, on voit nettement dans la première trois miiiima et trois
maxima, tandis que la seconde ne présente que deux inflexions d'une
grande simplicité. On remarquera encore que le maximum absolu chez les
observateurs A et D, tombe le 5* jour tridodécuple, comme l'im des maxima
du sujet B ; de sorte que, si l'on combinait ces deux courbes, leur moyeiuie
donnerait pour le 5^ jour une saillie notable. Quant au minimiuii absolu
dans ces diverses courbes, il tomberait, en moyenne, sur le 7*^ joiu- trido-
décuple, c'est-à-dire sur celui qui a donné le maximum absolu pour la
température buccale.
» Au point de vue des appréciations numériques, on trouve que, chez
(i) Le 7'' jour tridodécuple se composerait, durant cette année, des jours suivants:
Z'] juin; 8, 19, 3o-3i juillet; 10, 20, 3o août; (), ig, aq septembre; 10, 20, 3o octobre;
g, 19, 29 novembre; 8. 18, 28 décembre 1868; 7, 17, 2'j janvier; 6, 16, a6 février; 7,
f], 27 mars; 6, 17, y.-] avril; 8, 18, 28 mai; 7, 17 juin i86g. On obtiendrait la composi-
tion du 9* jour tridodécuple en augmentant de deux jours la date de chacun de ces 36 jours
simples.
( 837 )
l'observateur A, du 23 septembre 1868 an 23 septemlire 1869, pendant les
trente-six jours simples qui constituent le quatrième (ou le cinquième)
KOJSIBBE DE POLSAIJOWS PAR MINUTE.
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jour tridodécuple, le nombre des battements du pouls a dépassé d'environ
i4o5oo le nombre des pulsations des trente-six jours simples du huitième
jour tridodécuple. Pour l'observateur D, du 21 mars i868 au 21 mars
1869, la différence des battements du pouls entre les trente-six jours
112..
( 838 )
sini|)les du sixième jour tridodécuple et les trente-six jours simples du pre-
mier jour tridodécuple a été de 109400 environ.
M 11 me reste enrorf> > meiifionni'r l;s r^ sidtats obtenus de la déttMini-
naiion de la <!• usité i!- '"iiriMe par les lii)i> ohserv.-iteiirs A, B et D.
DElh'a
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Jours tridodécuples. ^-^^^0^
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» En jetant les yeux sur la planche ci-dessus, on s'aperçoit que les apti-
tudes individuelles sont encore plus marquées dans cet ordre d'observa-
tions que dans les deux précédents. En effet, les trois premières combes
représentent, à la même échelle, les dix jours tridodécuples des densités
urinaires rapportées à celle de l'eau distillée, |)our l'observateur D, du
21 m;trs 18G8 au 21 mars 1869; pour l'observateur H, du ai mars 1868 au
23 septembre 18G9; enfin, pour l'observateur A, du 23 septembre 1868 an
( 839 )
23 septembre 1869. La première courbe n'a aucune affinité avec les deux
autres, ni pour l'étendne des variations, qui est quatre fois plus grande^
ni même pour les allures générales, puisqu'elle présente trois maxima au
lieu de deux qu'on remaïqiie dnns les dernières. Mais celles-ci, au double
point de vue de l'étendue et de la forme des oscillations, peuvent évidem-
ment se combiner, et c'est ce que j'ai fait dans la quatrième courbe, en
construisant leur moyenne sur une échelle décuple. Le minimum très-net
du sixième jour tridodécuple, qui est aussi représenté dans la courbe D,
coïncide avec le maximum de la température de l'air pendant la période
correspondante et appelle encore une fois notre attention sur ce sixième
jour tridodécuple, que j'ai tant de fois signalé dans le cours de ces trois
Notes.
» Tel est l'ensemble de faits que je désirais soumettre aux physiolo-
gistes. Je ne me dissimule pas combien le petit nombre des sujets observés,
tous soumis d'ailleurs à l'existence, eu quelque sorte, factice des habitants
d'une ville immense, a dû influencer ces résultais (i). Néanmoins, il me
sera permis de faire remarquer que l'anomalie même des conditions donne
lui à fortiori à mes conclusions, puisque des hommes à l'abri de ces in-
fluences anormales, des cultivateurs, par exemple, ou, mieux encore, des
religieux qui, comme les trappistes, associeraient à une vie active des ha-
bitudes d'une extrême régularité, seraient sans doute phis directement sou-
mis aux conditions naturelles. J'aurais rempli mon but si je pouvais décider
quelques physiologistes, disposant de moyens bien supérieurs à ceux que
j'ai utilisés, grâce au dévouement de mes zélés collaborateurs (2), à contrô-
ler, soit chez l'homme, soit chez les animaux, la réalité de cette influence
périodique des variations de l'atmosphère sur les phénomènes de la vie. «
M. Ch. Sainte-Claire Deville communique, à l'appui des réflexions
présentées, dans la dernière séance, par M. Dumas, la Lettre suivante, qui lui
est adressée par M. F. Denis :
« L'Académie, dont vous êtes un Membre si zélé, ayant pris, avec une
chaleur qui l'honore, le parti de nos aérosliers, utiles en ce moment à tant
de litres, je viens vous communiquer un fait échappé jusqu'à ce jour à la
discussion. J'ai retrouvé, parmi les papiers de mon excellent père, un ojais-
(i) Résultats incomplets aussi; car, avec la densité de l'urine, par exemple, il eût fallu
déterminer le volume du liquide expulsé dans les vingt-quatre lieurcs.
(2) Auxquels je demande la permission dixiuimer ici toute ma gratitude.
( 84o )
cille très-rare, publié, il y a près de cinquante ans, par Coutelle, l'in-
trépide commandant des aérostiers de l'armée de Sandjre-et-Meuse (i). Je
vous signale, dans le récit de cet homme de bien, qui fut aussi un savant
plein de zèle, deux Notes précieuses, parce qu'elles sont opportunes, éta-
blissant comment les Allemands entendaient jadis la législation militaire
en matièie de navigation aérienne. Un demi-siècle, à peine écoulé, n'a pu
changer aux yeux des peuples le droit impérissable de l'humanité. Voici
ces deux Notes :
Note 22, p. 9. — « Je reçus l'ordre de faire une reconnaissance sur Mayence : je me
jilaçai entre nos lignes et la place, à une demi-portée de canon; le vent était fort, et j)our
lui opposer plus de résistance, je montai seul avec plus de ?.oo livres d'e\cès de légèreté.
J'étais à plus de i5o toises d'élévation, lorscjue trois bourrasques successives me rabattirent
à terre avec une si grande force, que plusieurs des barreaux qui soutenaient le fond de la
nacelle furent brisés. Chaque fois le ballon s'est élevé avec une telle vitesse que soixante-
quatre personnes, trente-deux à chaque corde, ont été entraînées à une grande distance. Si
les cordes avaient été fixées à des grappins, ainsi qu'on me l'avait proposé, il n'y a pas de
doute qu'elles eussent été cassées si le filet n'avait pas été rompu.
1) L'ennemi n'a pas tiré; cinq généraux sont sortis de la place en élevant des mouchoirs
blaucs sur leur chapeau. Nos généraux que j'en ai prévenus ont été au-devant d'eux;
lorsqu'ils se sont rencontrés, le général qui commandait la place a dit au général français :
n Monsieur le général, je vous demande en grâce de faire descendre ce brave officier; le
« vent va le faire périr; il ne faut pas qu'il périsse par un accident étranger A la guerre;
» c'est moi qui ai fait tirer sur lui à Maubeuge. »
» Le vent s'est un peu calmé, alors j'ai pu compter à la vue simple les pièces de canon
sur les remparts, ainsi que tous ceux qui marchaient dans les rues et sur les places. »
Note 23, p. ç). — « Nous étions campés sur les bords du Rhin, devant Slanheim, lorsque
le général qui nous commandait m'envoya en parlementaire sur l'autre rive. Aussitôt que
les officiers autrichiens eurent appris que je commandais l'aérostat , je fus accablé de
questions et de compliments; un officier, qui avait passé avec moi, observa que, si mes
cordes cassaient, je jiourrais être exposé si je tombais dans le camp ennemi. <> Rlonsieur
i l'ingénieur aérien, répondit un officier supérieur, les Autrichiens savent honorer les
■> talents et la bravoure; vous seriez traité avec distinction. C'est moi qui vous ai fait voir
» le premier, pendant la bataille de Fleurus, au prince Cobourg, dont je suis l'aide de
» camp. »
» Je lui observai qu'on ne devait pas, suivant l'usage, ui'inlerdire l'entrée de la place,
puisc[u'en m'élevant sur l'autre rive, je plongeais sur la ville.
i> Le généial qui y commandait envoya le lendemain l'autorisation de me faire voir la
place si notre général consentait à m'y faire passer. «
(1) Voici le litre de la brochure de Coutelle : Sur V ai'-rnsttit cmployc aux annrrs de Saiiihrc-
et-Mcusc et lia Rhin. C'est un extrait de la JMbliogiaphic de ta France, du 3.5 avril 182c).
( «4i )
1\0»1I]\ATI0I\S.
L'Académie procède, par la voie du scrutin, à la noniinntion d'une Com-
mission de cinq Membres qui sera chargée de juger le concours de Méca-
nique (fondation Montyon), pour l'atuiée 1870.
MM. Morin, Delaunay, Dupuy de Lôme, Combes, Phillips réunissent la
majorité des suffrages. Les Membres qui, après eux, ont obtenu le plus
de voix sont MM. Liouville, Paris, Ch. Dupiii, Bertrand, Villarceau.
MÉMOIRES PRÉSEIVTÉS.
AÉROSTATION. — Sur ttn procédé de réchaiiffemenl mélliudique du <jaz d'un
aéroslnl, par In cornliustiou d^ une partie de ce gaz lui-même, pour compenser
les perles de force ascensionnelle. Note de M. Bouvet. (Extrait.)
(Commissaires précédemment nommés : MM. Morin, Delaunay,
Dupuy de Lôme.)
« Un des obstacles les plus fréquents à la longue durée des voyages
aériens est la déperdition du gaz cpii s'échappe par l'enveloppe du ballon
et qu'il est im|iossible de renouveler. D'un autre côté, la provision néces-
sairement limitée de lest qu'emporte l'aéronaute le force d'atterrir après
un parcours relativement restreint, ce qui est, comme on l'a vu dernière-
ment encore, un très-grand inconvénient.
» Pour arriver à obvier aux descentes trop rapides des aérostats, il faut
compenser la perte de force ascensionnelle provenant de l'endosmose et de
l'exosmose, en dilatant le gaz du ballon; en un mot, en combinant sous
une même enveloppe l'action de la montgolfière et celle du ballon à gaz.
« On sait que les gaz sont facilement dilatables : leur coefficient de dila-
tation est à peu près égal à — ^- D'autre part, la capacité calorifique du gaz
d'éclairage est o,35, et sa puissance calorifique est représentée par le pro-
duit du poids de i mètre cube de gaz par la puissance calorifique de i ki-
logramme de ce gaz, soit o'"',558x laSoo = 6975 calories par mètre cube.
» Le gaz à dilater est celui du ballon, et c'est la combustion d'une partie
de ce gaz qui produira la chaleur nécessaire.
» Appliquons ces données à un ballon d'une capacité de 2000 mètres
cubes de gaz. La perte de gaz par heure sera, au plus, de 20 mètres cubes,
( 842 )
soit une perte de force ascensionnelle égale à 20 x o'"',735 = i4'"',7oo, ce
qui nécessite une dépense de 14""', 700 de lest par heure pour se maintenir
à la même hauteur.
» Après la première heure de marche, le volume du ballon se trouve ré-
duit à 1980 mètres cubes; pour compenser la perte de force ascensionnelle
qui en résulte, il faudra augmenter le volume de l'aéroslat, non pas de la
capacité qu'il aura perdue, mais d'une quantité telle, que le poids de t\iir
ainai déplacé piir l'excédant de volume jirovenanl de la dilaladoti du (/az, soit
égal à la perte de force ascensionnelle, et cette quantité sera représentée par
la formule
4^ = ii-,36i.
» Cet énoncé se vérifie facilement. En effet, la force ascensionnelle du
ballon au départ est représentée par
(i) F = VP — Vp ou, en simplifiant, F = V(P — />),
F étant la force ascensionnelle du ballon au départ; V le volume du gaz
du ballon et, par suite, le volume d'air déplacé; P le poids de i mètre
cube d'air, et p le poids de i mètre cube de gaz (la température t est sup-
posée la même pour l'air et pour le gaz).
» En représentant par v le volume de gaz perdu au bout d'une heure,
la force ascensionnelle réduite F' sera représentée par
(2) F'r=(V - P)P-(V- v)p = Y{V - p)- v{V - p).
» Si donc, pour compenser cette perte représentée par p(P — p) on di-
late le gaz du ballon, la température de l'air et, par suite, le poids P reste-
ront bien les mêmes, mais la température t du gaz augmentant, le poids p
du mètre cube de gaz diminuera et deviendra/?'.
a étant le coefficient de dilatation du gaz, t^ l'augmentalion de température.
» En représentant par v' l'augmentation de volume du ballon qui résulte
de l'augmentation de température, ou a
(V-t')/>= (V+ v'-v)
ut'
» En représentant par F" la force ascensionnelle du ballon dans cette
( 843 )
nouvelle phase, on Iroiive
(3) F"= (Y—v)i'-\- (^'P — (Y+ i-'- v)-^^;
mais comme on a
l'égalité (3) devient
(4) Y"z=[W - v)V -hv'9 -{V -v)p.
» En comparant l'égalité (4) à l'égalité (2), on voit que
F"= F'+ v'V;
mais de la comparaison des égalités (i) et (2) il résulte que
F = F'+i'(P - p);
donc pour que F " = F, il faut que
(5) v'V = v{V-p).
» De cette dernière égalité, on déduit la valeur de v\
^'-— p
Il est évident que P > F — /j. Donc v ^ v' ; ce qui montre bien qu'il fau-
dra dilater le gaz du ballon d'une quantité v' moindre que le volume v de
gaz perdu. Cette quantité v' sera obtenue eu multipliant le volume de gaz
perdu par la force ascensionnelle P — /? de i mètre cube de gaz et en divi-
sant ce produit par le poids P de i mètre cube d'air à la température exté-
rieure; ce qui conduit à la formule et au nombre ii""*^, 36r dounés précé-
demment.
» Ainsi le ballon dont le volume primitif était 2000 mètres cubes et qui
se trouve réduit à 1980 mètres cubes à la température t conservera la
même force ascensionnelle qu'au départ, si sou volume est porté par la
dilatation du gaz à 1980+11,301 ou 1991™"=, 36i à la température t' ;
cette température est égale à t, la température primitive, plus <, qui repré-
sente l'accroissement de température de gaz du ballon.
» Cherchons donc la valeur de t^ et ce qu'il en coûte pour l'obtenir.
-L'augmentation de volume à produire par rapport au volume total est
C. R., 1870, -1= Semestre. (T. LXXI, N» %'l.) I '3
( 844 )
égale à — '-r, — = — t environ. Le coefficient de clilatalion du eraz étant
» 1980 174
— rî la valeur de t, sera donnée en divisant — vpar — -: /,= ^ =: i^.St.
273 174' 273 '174 ^
Cette faible augmentation de la température intérieure du ballon sur celle
de l'air ambiant n'aura pas d'influence dangereuse. (Dans les montgolfières,
cette différence atteint 5o et 70 degrés sans inconvénient.)
» Cherchons maintenant ce que coûtera cette augmentation de tempé-
rature. Le volume réduit du ballon est 1980 nièlres cubes; la cn|)acité
calorifique du gaz, o,35; l'augmentation de température à produire, i°,57.
Le nombre de calories à produire sera donc égal à
1980 X 0,35 X 1°, 57 = 1088 calories.
» La puissance calorifique de i mètre cube de gaz d'éclairage étant re-
présentée par 6975 calories, on voit qu'il faudra moins de -^ de mètre cube
de gaz pour produire la compensation nécessaire. Ainsi, en brûlant | de
mètre cube de gaz, c'est-à-dire en perdant une force ascensionnelle égale
à -^. — = o^', 122, on peut compenser une perte de force ascensionnelle,
représentée par o''s, 735 X 20 = i4''^) 700; ce qui revient à dire qu'en
brûlant i gramme de gaz on gagne lao^', 5 de force ascensionnelle. On
voit par là de quelle immense ressource peut disposer l'aéronautc |)ar
l'emploi de ce système.
» Le gaz nécessaire à la combustion vient du ballon même où il est
puisé par une pompe qui l'amène d'abord dans un petit réservoir placé
dans la nacelle pour se rendre de là au foyer, ou rëchaiiffeur construit en
métal et enveloppé d'une double toile métallique. »
Après avoir exposé en détail comment il entend l'application de son pro-
cédé aux ballons ordinaires, l'auteur ajoute ; « Le réchauffeur étant en
métal, l'endosmose et l'exosmose ne peuvent, à la pression ordinaire, se
produire, et, par suite, il ne se formera pas de mélanges détonants. La
double enveloppe en toile métallique est d'ailleurs une garantie de plus
contre les chances d'explosion.
» Je terminerai cette Note par quelques considérations générales sur
l'emploi de ce réchauffeur dans les ballons dirigeables.
» Le moteur à air dilaté par la combustion du gaz d'éclairage que j'ai
proposé, laisse échapper du piston des gaz brûlés ([ui, après avoir produit
leur effet mécanique utile, ont encore luie température de 200 à 25o degrés ;
si, au lieu de perdre ces gaz dans l'atmosphère, on les fait arriver en tout
( 8/,5 )
ou en partie dans le rôchaiifteiir, ils céderont au cjaz du ludion une partie de
leur chaleur qui ne coûte rien, puisqu'on la laisse y.erdrt hcdiiluellement.
» Ce réchauffeur est l'analogue, en quelque sorte, du condenseur <\es ma-
chines à vapeur, seulement la vapeur est ici remplacée par les gaz brûlés,
et Veau de condensation par le (jaz du ballon.
» En employant les moteurs à vapeur, une partie de la vapeur d'échap-
pement, dirigée dans le réchauffeur, produirait le même effet que les gaz
brûlés dont l'arrivée serait réglée à volonté dans le réchauffeur.
» Sans entrer dans plus de détails sur ce dispositif, dans lequel, pour
éviter la contre-pression sur le piston, on pourrait donner au réchauffeur la
forme d'un siphon, je me résume eu disant que le réchauffeur, par son
emploi facile et économique, en même temps que par les grandes facilités
qu'il donnerait à l'aéronaute, pourrait sans doute être appliqué, sous une
forme différente peut-être, à tous les aérostats en général, pojiH- augmenter
la commodité, la durée et la sécurité des voyages aériens dans les diffé-
rentes phases qui les composent. »
L'Académie reçoit, de M. Gailiiaud, une Note relative à un procédé de
préparation du gaz destiné aux aérostats; de M. Bazin, un projet de télé-
graphie électrique aérienne, réalisable au moyen d'aérostats; de M. G.
Trouvé, une Note relative à deux machines aérostatiques; de M. J. Bernis,
un « Mémoire su.r l'aérostatique transcendante, précédé d'une Note sur la
navigation aérienne »; de M. Brachet, une nouvelle Note, sur le parti à
tirer de l'aérostat de Meusnier; de M. Cn. Delcourt, quelques Notes com-
plémentaires, sur son projet d'aérostat dirigeable.
(Commissaires précédemment nommés : MM. Morin, Delaunay,
Dupuy de Lôme.)
M. G. Lamrert soumet aii jugement de l'Académie un projet de com-
munication entre Paris investi et la province.
(Commissaires : MM. Delaunay, Dupuy de Lôme.)
1 k:>.
( 846 )
CORRESPONDANCE.
PHYSIQUE. — Sur ta formule de la vitesse du son. Note de 31. J. Moutier,
présentée par M. H. Sainte-Claire Deville.
« Si l'on considère un corps de poids égal à l'unité, occupant le vo-
lume i^à la température Z et à la pression /j, la quantité de chaleur néces-
saire pour produire une transformation élémentaire est
^Q = Idu -f- cdt = Cdt + hdp,
suivant que l'on prend pour variables indépendantes le voliune et la tem-
pérature, ou bien la température et la pression. Les coefficients C, c, /
représentent la chaleur spécifique sous pression constante, la chaleur spé-
cifique sous volume constant et la chaleur latente de dilatation; le coef-
ficient h, qui n'a pas reçu de nom particulier, est lié, comme on sait, à la
chaleur latente de dilatation par la relation
h = l~,
dp
dans laquelle d\' est l'accroissement de volume correspondant à un accrois-
sement de pression dp, la température étant sup[)osée constante.
), Si la transformation élémentaire s'accomplit sans que le corps reçoive
de chaleur de l'extérieur, dQ = o,
ldi> -t- cdt = o, Cdt -+- hdp — o.
» Si l'on élimine / entre ces trois dernières équations, on a
» D'ailleurs, si l'on considère la température du cor|)s comme une fonc-
tion de p et (le c,
, dt , lit j
dt = — d\> -Jr — dp ;
di' dj> '
par suile, lorsque la température du corps demeure invariable, dt = o,
(2) '■ll-^di>+'^dp=.0.
» Si l'on appelle a. et a' les coefficients de dilatation sous pression cou-
( 847 )
stante et sons volume constant,
ch \ + at <lt I -t- a' t
* '.
(Iv VA dp pal ^ '
d'où l'on déduit immédiatement, au moyen de la relation 2),
ch I' a l -\- 'j! t
3- = X —X — \ — -•
dp p y. I + a f
I) En reportant cette valeur dans l'équation (1), on a
/o\ / Go a' l + a.t j
(3 c/»= X - X - X , .dv.
^ ' ' c V Ci I -i- a. t
» Cette équation fait connaître la variation de pression qui accompagne
une variation infiniment petite de volume, lorsque le corps ne reçoit pas
de chaleur de l'extérieur; c'est par conséquent ta loi de détente élémentaire
sans variation de chaleur.
0 Proposons-nous d'en faire l'application à la propagation du son dans
les gaz. Considérons un cylindre indéfini dont la section soit égale à l'unité
de surface, et supposons qu'un piston placé à l'orifice du cylindre se dé-
place d'une quantité infiniment petite s pendant un temps infiniment
petit 9. Si l'on désigne par V la vitesse du son, pendant le déplacement
élémentaire du piston le son s'est propagé à une distance de l'orifice égale
à YQ, et comme la section est supposée égale à l'unité, le volume gazeux
V(5 = i» a diminué de £ = — di>. Il en résulte que la pression primitive p
du gaz contenu dans le cylindre éprouve un accroissement dp déterminé
par la relation (3).
, G p a' I 4- a'
dp = -X:~X-y< — ; T- £.
' c V9 a l -h y. t
)) Si l'on appelle A la masse de l'unité de volume du gaz, l'accroisse-
ment de pression dp met en mouvement la masse gazeuse sA et lui com-
munique, au bout du temps infiniment petit 0, la vitesse V,
(4) ^p = '^r
» En é-^alant ces deux valeurs de dp, on obtient, pour la valeur de la
vitesse du son dans un gaz,
-s/
p C a.' I-f- a«
T X - X - X , r-
A c a 1 -i- ot. t
[*) Comptes rendus, t. LXXI, p. 807.
( 848 )
M La formule ainsi obtenue, indépendamment de toute hypothèse parti-
cuhère sur les propriétés du gaz, ne diffère de la formule de Newton,
après la correction de Laplace, que par l'introduction do deux facteurs
voisins de l'unilé et déterminés par les expériences de M. Regnault. Ces
facteurs se réduisent à l'unité dans le cas des gaz parfaits, c'est-à-dire des
gaz qui suivent les lois de Mariotle et de Gay-Lussac; c'est le cas considéré
habituellement. « En résumé, comme le remarque M. Regnault (*), la
» théorie mathématique n'a abordé jusqu'ici la propagation des ondes que
» dans un gaz parfait, c'est-à-dire dans un Jliiide idéal qui réunit toutes les
» propriétés que l'on a introduites fi^^ijothétiqiiemeiit dans le calcul. On ne
» s'étonnera donc pas de voir que les résultats de mes expériences soient
» souvent en désaccord avec la théorie. »
» Si l'on calcule le rapport des deux chaleurs spécifiques, non phis
d'après hi loi de détente, qui suppose le gaz parfait, mais d'après les prin-
cipes de la théorie mécanique de la chaleur, indépendamment de toute
hypothèse sur les propriétés du gaz, connue j'ai essayé de le faire dans une
précédente Communication, le désaccord entre la théorie et l'expérience,
dans certains cas, n'est qu'apparent. Prenons comme exemple le rappoit
des vitesses du son dans l'acide carbonique et dans l'air à la température
de la glace fondante; le rapport des deux chaleurs spécifiques est 1,326
pour l'acide carbonique et 1,409 pour l'air (**). En appliquant la formule
précédente, on trouve aisément pour le rapport des vitesses du son, dans
ces deux gaz à zéro, le nombre 0,7827; le rapport donné par les expé-
riences de M. Regnault sur la conduite de 067 mètres de longueur est
0,7848 (***). La valeur calculée ne diffère de la valeur fournie par l'obser-
vation que de —3 (*'**)•
(*) Mémoires de l'Académie des Sciences, t. XXXVII, ]). 54 1.
(*') Les éléments du calcul sont pour l'air, d'après les expériences de M. Regnault,
0 = 0,9,3771 entre — 3o degrés et -+- 10 degrés, a =0,003670, a' := o,oo3665 ; 011 re-
trouve le même nombre 1,40951 l'on prend pour C la valeur 0,23751 relative à l'intervalle
de zéro à 200 degrés.
Mémoires de l'Académie des Sciences, t. XXXVII, p. i3o.
On peut remarquer que 1rs expériences sur la ^^tesse du son dans les gaz permettent
de déterminer le rapport des deux clialeurs spécifiques avec plus d'exactitude que les expé-
riences faites jusiju'ici sur la détente des gaz sans variation de chaleur. Cela tient à ce que
rétablissement de la foruude relative à la vitesse du son reiiose uniquement sur la loi de
détente étémcntriire donnée par l'équation (3) et applicable à tous les gaz, tandis que l'on
ne sait au juste (pielle est la loi de détente finie pour un gaz autre <pie les gaz parfaits. Si la
( 849 )
)) Un raisonnement analogne au précédent conduit également à la for-
mule de la vitesse du son dans les liquides. Reprenons l'équation (i) et
appelons p. la diminution de l'unité de volume pour un accroissement de
pression égal à l'unité de |)oids,
àv , Ci,
— = y-, rlp = X — di>.
vdp t ' ' c pc
)» Si l'on reporte cette valeur dans l'équation (4), on obtient, après ré-
duction, pour la valeur de la vitesse du son dans un liquide,
s/i.
C
^ X -• »
A c
ZOOLOGIE HISTORIQUE, — Sur Ciiitroduclion el la domeslicité. du porc
chez les anciens Egyptiens; par M. F. Lexormant.
« L'histoire des animaux domestiques est un sujet particulièrement inté-
ressant, mais il présente encore de très-grandes obscurités. La zoologie
n'est pas, croyons-nous, complètement en mesure de résoudre à elle seule
tous ces difficiles problèmes par l'étude des races actuellement subsis-
tantes. 11 lui est nécessaire de remonter dans le passé, en appelant à son
aide les secours, jusqu'à présent un peu trop négligés par elle, que peu-
vent lui fournir les sciences de l'érudition, principalement l'archéologie
des monuments figurés et la philologie comparative, l'une recueillant les
images, souvent très-précieuses, des espèces domestiques élevées chez les
divers peuples civilisés du monde antique, l'autre permettant de suivre
dans bien des cas, à l'aide de la filiation des noms, la transmission de ces
espèces dépeuple en peuple et de remonter ainsi très-près du berceau pre-
mier de leur domestication.
» Dans cette série d'études sur les animaux domestiques de l'ancienne
É»ypte, que l'Acadéiiiie a daigné accueillir avec tant de bienveillance, nous
n'avons pas la prétention d'apporter la solution de questions que les mai-
loi lie détente pv"' = const. est applicable à l'acide carbonique, le coefficient de délente m
doit avoir pour valeur
f dp C a' I + a? ■
— ■=-x-x
p (•/(■ c Cl. 1 + a <
Aux températures voisines de zéro m déviait être égal à i ,3a6. Les expériences directes sur
la détente des gaz fournissent une valeur un [leu plus faible, en supposant la relation
^i,m __ const. exacte pour l'acide carbonique.
( 85o )
très de la science ont laissées indécises. Notre seule ambition est de fournir
aux études des naturalistes un certain nombre de faits précis, empruntés
à l'archéologie et à la philologie, qui puissent servir d'éléments dans des
recherches ultérieures. Ces faits, croyons-nous, ne leur seront pas sans
quelque utilité, et nous nous regarderions comme amplement récompensé
de nos investigations patientes si elles pouvaient indiquer aux zoolo-
gistes quelques filons à suivre dans l'ordre de sujet auquel elles se rap-
portent.
). Ainsi, en groupant aujourd'hui dans une nouvelle Note les principaux
faits que nous avons pu recueillir sur l'histoire du porc dans l'antiquité
égyptienne, nous ne prétendons pas examiner et encore moins décider les
questions graves qui se soulèvent au sujet de cet animal et divisent les sa-
vants; ni celle de savoir si notre cochon domestique dérive, comme on le
pense le plus généralement, du sanglier de nos forêts, ou bien, comme le
prétend Link (C/ru;e/<;, t. I, p. 387), d'une espèce sauvage particulière que
l'on rencontre en Perse; ni celle de savoir si pour cet animal, comme pour
plusieurs autres, diverses espèces sauvages distinctes n'ont pas été réduites
en domesticité dans des pays différents, donnant ainsi naissance aux prin-
cipaux types des variétés domestiques, si, par exemple, notre cochon com-
mun et le cochon de Siam n'étaient pas à l'origine spécifiquement diffé-
rents. Notre but est plus restreint et plus modeste : il s'agit seulement de
suivre l'histoire et le rôle de l'animal dans une des plus importantes civili-
sations des âges antiques, et de déterminer autant que possible l'époque
où il fut introduit, ainsi que la région d'où il venait.
» Le porc n'est pas en effet un des animaux domestiques de la civilisa-
lion primitive de l'Egypte. On ne le trouve jamais mentionné dans les textes
ni de l'Ancien ni du Moyen Empire, et sa figure est aussi totalement ab-
sente des monuments de ces deux grandes périodes de la culture égyptienne,
où les représentations de la vie quotidienne tracées sur les parois des tom-
beaux nous font passer en revue toutes les espèces élevées alors dans la
vallée du Nil. Et non-seulement les scènes agricoles représentées par les
artistes de ces deux époques ne montrent jamais le cochon domestique, ce
qui donne le droit d'affirmer qu'il n'était point alors connu en Egypte,
mais, circonstance plus extraordinaire, le sanglier lui-même ne figure ja-
mais dans les scènes de chasse où tant d'autres animaux tombent sous les
flèches du veneur et sont poursuivis par ses chiens. Cependant il est dif-
ficile de douter qu'il dût être dès lors abondant au milieu des marais de la
Basse-Égyple, connue il l'est encore aujourd'hui, où beaucoup de fellahs
(85i )
musulmans se nourrissent de sa chair, en dépit des préceptes du Coran.
Mais cette absence du sanglier dans les représentations de vénerie des an-
ciens Egyptiens, qui se continue à toutes les époques dont nous possédons
des monuments, s'explique par l'idée d'impureté absolue que la religion
égyptienne attachait au porc sauvage et domestique, idée qui empêchait de
le considérer comme gibier de chasse et de le manger. Il est donc probable
que si les paysans de la Basse-Egypte devaient tuer le sanglier connue ime
bête malfaisante pour défendre leurs champs de ses ravages, ou ne lui fai-
sait pas de chasse régulière, et qu'il n'était pas conforme aux usages de se
vanter d'avoir percé de ses traits cet animal impur.
» La notion d'impureté attachée par le sacerdoce de l'Egypte au porc,
soil sauvage, soit domestique, est signalée par Hérodote (II, 47)5 dont les
monuments confirment pleinement le témoignage; c'est là qu'elle a été pui-
sée par Moïse comme tant d'autres prescriptions rituelles de sa loi, bien
que l'esprit de la religion nouvelle qu'il instituait fût diamétralement op-
posé à l'esprit de la religion de l'Egypte. Dans la théorie pharaonique le
porc était un des animaux consacrés à Set ou Typhon, l'antagoniste d'Osi-
ris, la personnification la plus puissante du principe mauvais, ténébreux
et infernal. Le Rituel funéraire donne fréquemment l'épithète, injurieuse de
« porc » aux monstres ty|)honiens que le défunt rencontre sur sa route dans
l'autre monde et qu'il doit combattre avant de parvenir à la béatitude finale.
» Le rôle symbolique de cet animal est alors identique à celui de l'hip-
popotame, emblème d'un emploi plus ancien avec lequel il s'échange fré-
quemment. La Grande dévorante de l'Enfer, un des principaux génies du
monde ténébreux, chargée de châtier les âmes coupables, est représentée
le plus souvent sous la figure d'un hippopotame femelle ou bien avec une
tète d'hippopotame sur un corps de lionne; mais dans quelques-unes des
tombes royales de la XX* dynastie à Biban-el-Moloidi (Champollion ,
Monuments de r Egypte et de la Nubie, t. III, PI. CCLXXII), et sur certains
sarcophages de \,\ XXVP dynastie, comme celui de T'atio, au Musée du
Louvre (De Rougé, Calaloijue des monuments égyptiens du Louvre, D-i), elle
est figurée sous les traits d'une truie que des génies eu forme de singes
cynocéphales chassent loin de l'âme juste qui passe au tribunal d'Osiris.
C'est probablement celte Grande dévorante de l'Enfer que représentent les
images d'une truie en terre émaillée ou en autres matières que l'on trouve
parmi les amulettes suspendues au cou des momies d'une certaine époque.
» Dans les bas-reliefs si curieux du temple d'Edfou (époque des Ptolémées)
C R. i8;o. i* Semestre. (T. LXXI, N" 24.) I '4
( 852 )
relatifs au mythe d'Honis, que M. Edouard Naville a récemment publiés
[Textes relatifs au mythe d'Horus recueillis dans le temple d'Edfou, Genève,
1870, in-fol.), l'artiste, guidé par les indications sacerdotales, a retracé
en plusieurs tableaux la vengeance que le 61s d'Osiris tire du meurtre de
son père en tuant à son tour Set ou Typhon, transformé « en un hippopo-
tame rouge. » Dans les derniers tableaux la figure d'un porc se substitue à
celle de l'hippopotame, pour représenter le dieu malfaisant. Et quand on en
vient aux prescriptions rituelles du sacrifice qui se célébrait dans le temple
pour commémorer et symboliser la victoire d'Horus, il est ordonné de
faire « un cochon en pâte » et de le découper en morceaux comme fut
découpé le corps de Typhon. C'est là bien évidemment le sacrifice dont
parle Hérodote (II, 47) : « f-es Égyptiens sacrifient un porc à la Lune et à
» Dionysus (Isis et Osiris), une fois dans l'année, dans une pleine huie....
» Après en avoir brûlé la queue, la rate et la graisse du venire, ils mangent
» alors la chair de l'animal, mais le reste de l'année elle est absolument
» interdite. Les pauvres font, à la place, des cochons de pâte qu'ils dé-
w coupent après les avoir fait cuire. » Et ce qui achève de démontrer l'iden-
tité des deux cérémonies, c'est qu'Hérodote place la sienne à la pleine lune
et qu'un précieux passage d'Eusèbe [Prœpar. evang., IH, 12) assigne au
mythe de la lutte d'Horus contre Typhon, transformé en hippopotame, le
caractère de personnification d'un phénomène lunaire.
» L'idée d'impureté que la religion attachait ainsi au porc chez les an-
ciens Égyptiens explique pourquoi cet animal ne fut pas réduit en domes-
ticité ni élevé par eux pendant toute la durée des âges primitifs, où leur ci-
vilisation avait son caractère le plus original et le plus à part, sans aucune
des influences étrangères qui commencèrent à agir au temps des conquêtes
asiatiques de la XVIIP et de la X1X*= dynastie; pourquoi aussi le sanglier,
indigène dans une portion de leur pays, ne fut jamais considéré par eux
comme un gibier noble, représenté sur les monuments. Nous avons peut-
être trop insisté sur celte question, qui n'intéresse que bien peu la zoologie,
ap[)artenant plutôt au domaine de l'archéologie pure. 11 nous a paru ce-
pendant assez curieux de montrer l'origine de la prescription relative à
l'impureté de la viande de porc, qui, adoptée dans la loi mosaïque, a passé
(le là dans l'islamisme, lequel la maintient encore en vigueur chez un grand
nombre de peuples. »
La séance est levée à 5 heures. É. 1). B.
( «53 )
ERRATUM.
(Séance du 5 décembre 1870.)
Page 802. — Rectifier de la manière suivante la phrase concernant les pays dans lesipicls
li's premiers conquérants avaient constaté l'habitude de mâcher la coca en secondant l'action
sur les glandes salivaires par l'addition de la chaux vive.
n Le champ d'observations était, au moment de l'arrivée des Espagnols, beaucoup plus
vaste qu'il ne le fut peu après, puisqu'il s'étendait de l'ouest à l'est <lepuis l'Etat de Nicaragua
où la plante, comme nous l'apprend Oviedo (livre VI, chapitre xx), était connue ^ous le
nom de Vnat, qu'elle perdait en approchant de la Magdalena pour prendre celui de Hayn,
qu'elle conservait jusqu'au delà des bouches de l'Orénoque, tandis que du nord au sud on
pouvait la suivre tout le long de la Cordillère des Andes et du littoral de l'océan Pacifique
jusqu'aux dernières limites du Pérou. »
COMPTE RENDU
DES SEANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES
SEANCE DU LUNDI 19 DÉCEMBRE 1870.
PRÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MEîilOIRES ET CO^ÏMUIMCATIONS
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
M. LE Président de l'Institut invite l'Académie à désigner riiii de ses
Membres pour la représenter, comme lecteur, dans la prochaine séance
trimestrielle, fixée au mercredi 4 janvier 1871.
HISTOIRE DES SCIENCES. — Résumé liistoriqne des travaux dont la (jélaline a
été l'objet; par M. Chevrecl (i).
« Rien de plus intéressant que l'histoire des écrits relatifs à des faits
scientifiques susceptibles d'applications, surtout quand ils le sont à l'éco-
iioniie domestique.
)) L'histoire des travaux dont la gélatine a été l'objet justifie cette pro-
position, mais je ne prétends pas la faire en ce moment, vu que je ne dispose
pas du temps qu'elle exigerait, je me borne à tracer un résumé des prin-
cipaux travaux dont elle se compose dans l'ordre chronologique où ils ont
été produits.
(i) L'Académie a déciiié que cette Communication, bien que dépassant en étendue les
limites réglementaires, serait insérée en entier au Compte rendu.
C.R., iS-o, 2« S-^wriice. (T. L\X1, N"2S.) 1 ' 'J
( 856 )
§1-
« L'origine de l'hisloire de In gélatine date de la publication des travaux
de D. Papin siw la manière d'nniollir les os et défaire cuire toutes sortes de
viandes en fort peu de temps et à peu de frais.
» Eu 1680, U. Boyie avait |)arlé de son digestenr, et en 1682 Papin pu-
blia son livre.
» Papin, en homme de génie et eu observateur consciencieux, apprécia
parfaitement les faits de la cuisson des matières alimentaires d'origine ani-
male dans son digestenr; je me borne aux citations suivantes.
» Si la cuisson des os a été faite à une chaleur trop grande, la yélée étant
moins forte est aussi moins nourrissante (page 7.6).
» Le brochet donne de la gelée par la cuisson, tandis que le maquereau
n'en donne pas (page 44)-
» Le cartilage se dissout presque en entier et donné une forte gelée
(page 71).
» Enfin remarquons que la plupart des expériences de Papin ont été
faites comparativement, et de plus que quelques auteurs ont eu tort de don-
ner à croire que le bouillon qui sortait du digestem* avait toujours lui goùl
d'empyreume : avant d'imaginer mon digestenr distillatoire (1) j'ai fait un
assez grand nombre d'expériences avec le digestenr primitif pour protester
contre cette allégation.
» Je ne quitterai pas ce sujet sans faire remarquer que dans le Rapport
de Magendie fait au nom de la 2" Commission de la gélatine, la phrase sou-
lignée dans la citation suivante n'est pas exacte :
« L'appareil où s'opéraient, dit Magendie, de si surprenantes transformations fut pré-
senté à 1 Académie, qui le vil fonctionner et put ainsi contempler la vapeur îi une luiitle
température s'apptiquaitt pour la première fois à des Uiages èconomiijues (2). u
» Celte asserlion est absolument inexacte, puisque le digestenr de P.ipin,
loin d'avoir été nuaginé pour faire agir la vapeur siu' les corps, l'a été pour
faire agir un liquiite (jiielconque à luie températiue plus élevée que celle qui
le porte à l'ébullition sons la simple pression de l'air. Ajoutons que l'expres-
sion de limite température est impropre; la vérité est qu'il faut agir à inie
température supérieure à loo degrés quand on opère avec de l'eau, mais tou-
(1) Mémoires du Muséum d'Histoire naturelle, t. I", p. 375.
(2) Tome XIII, p. ?-4*') '^** Comptes rendus.
( «57 )
jours inférieiue à celle qui altérerait la matière organique soumise à l'expé-
rience.
§11.
» Claude-Joseph Geoffroy le jeune, frère d'Éfienne-Francois (i), s'était
proposé, en 1730 et 1782, de déterminer ce que l'eau bouillante enlève
aux viandes que Ton consomme ordinairement, et de connaître la propoi-
tion de l'extrait soluble pesé à l'état sec, relativement au résidu indissous
pesé de même à l'état sec. Les deux matières étaient distillées ensuite (2).
» Il soumit encore à l'action de l'eau bouillante les os, la corne de cerf,
l'ivoire, etc.
» Si les résultats généraux de ces recherches n'ont pas une grande va-
leur, il en est un auquel j'attache de l'importance, parce qu'il rentre dans
une proposition générale que j'ai mise eu avant comme règle de l'analyse
immédiate organique, et poiu' bien faire comprendre l'esprit d'après lequel
le chimiste qui l'exécute doit se guider.
» Le but de cette analyse est d'isoler les espèces chimiques qui consti-
tuent immédiatement les êtres organisés, les résultats ne doivent donc pas
être altérés; or la première observation à faire est de constater s'ils pré-
sentent les propriétés de la matière avant l'analyse.
» Eh bien! c'est un exemple à suivre que je trouve dans le travail de
Geoffroy.
» Ayant soumis à la distillation au bain-marie chaque sorte de viande,
il observa que le produit volatil de la viande de bœuf avait l'odeur propre
au bouillon de cette viande.
-) Mes recherches ont appris que le principe odorant résidant à l'état
latent dans une matière soluble, est mis en liberlé par la cuisson.
§ ni.
» Jusqu'à l'année 1758 on n'avait pas d'idée précise de la nature chi-
mique des os. Hérissant contribua beaucoup à la faire connaître par un tra-
vail remarquable qui était bien l'œuvre d'un maître.
(i) L'auteur de la Tabh- des affinités ou lappmts des différentes substances en chimie.
[1) Examen chimique des viandes qu'on emploie ordinairement dans les bouillons, par
lequel on peut connaître la quantité d'extrait qu'elles fournissent, et ce que chaque bouillon
doit contenir en suc nourrissant. [Mémoires de V Académie des Sciences, année i^So. Suite,
Analyse du i)aiii, i^Sa.)
ii5..
( 858 )
» Des os fiiiPiil |)longés dans 4 parties d'eau, rendue acide par i partie
d'acide azotique l'iimant. Après un certain temps, une matière indissoute
conservant la forme de l'os, flexible, de nature organique, fut séparée
d'inie matière soluble dans l'acide, dont Hérissant constata la nature
calcaire; mais alors on tie connaissait ni la composition des carbonates,
ni celle des phosphates. C'est donc à Hérissant qu'est due la démonstra-
tion de ce lait caiMtal : l'os est formé d'un tissu organisé et d'une matière
calcaire.
» l\ étendit cette conclusion quelques années après (1766) aux coquilles
terrestres, aux coquilles d'eaux douces et d'eaux salées, aux madrépores,
au corail, et insista sur la beauté de l'organisation des tissus organiques
durcis par la matière terreuse.
» C'est donc à Hérissant qu'on doit le procédé d'extraction du ptueii-
cliymc^ du ciirlilrnic, de Vosscine au moyen des acides. Seulement, aujour-
d'hui on préfère avec raison l'acide chlorhydriqne à l'acide azotique ; mais
n'omettons pas de l'aire remarquer que du temps de Hérissant, il était plus
facile; de reproduire inie eau acidulée toujours la même, en recourant à
l'eau forte qu'eu employant l'esprit de sel ou l'acide chlorhydriqne.
§ IV.
» En judlet 1775 parut dans \e Journal de Physique un écrit assez étendu
intitulé : Rechenhes sur une loi (j en ër a le de la nalure, ou Mémoire sur la fu-
sibilité et la (lissoluhilité des corpê relativement à leur masse, oit l'on trouve l'art
(le tirer facilenicnl et sans frais UNE MATIÈRE ALIME^'TAIRE de plusieurs corps
dans lesquels on ne reconnaissait pas cette qualité; par M. CilANGEUX.
» Je reproduis textuellement ce titre |)our nionlr<'r la prétention de l'au-
îtur, <|'ii, plein de foi dans sa loi (jénérale, se berce de l'espoir qu'elle
inelira un joui As lioinmcs en étal de ne jamais craindre la tiorrcins de la j'a-
iiiine.
)) Voyons l'apjiliealioii di; la loi de Chaugenx au sujet qui nous occupe.
). Vdclion du jeu est relative à la niasse des corps, de telle sorte que de deux
parties égales (Pua même corps, l'une présentera d'autant moins d''olistacle au
(eu qu'elle surpassera l'aalrc en surface.
» En divisant les corps, on leur donne des propriétés qui peuvent les
rendre aptes à des usages (pi'on ne pouvait prévoir avant leur division, et
Changeux cherche à en donner la preuve en s'occupant successivement des
trois règnes.
» .Je ui' j)arl< rais pas du legue minéi-al, si Changeux n'axait pas décrit
( 859)
une expérience qui est précisément celle que M. Pelouze communiqua à
l'Académie quelques mois avant sa mort.
« Le verre en masse, dit Changeux ( i ) , est indisoliible dans l'eau, c'est pourquoi on en
fait des vases, etc; cependant il devient presque aussi dissoliible que le sel, lorsqu'on le ré-
duit en poudre très-ténue. En effet, que l'on fasse bouillir cette poudre dans l'eau, et l'on
sera étonné de l'énorme quantité qui sera fondue par cette simple opération. »
» Passons aux graines des plantes farineuses. Sont-elles réduites en /"(/-
line? elles se changent très-promptement au moyen de l'eau en une GELÉE
alimentaire, ce qu'elles ne feraient que difficilement si elles étaient restées à
l'état de masse. Remarquons en passant l'expression de GELÉE alimentaire,
comme l'expression de suc nourricier, toutes les deux concernent des appa-
rences, des formes, des propriétés de matières qu'on juge comme étant l'in-
dice de la partie essentielle des aliments. Et voilà l'explication de l'opinion
de ceux qui n'attribuent la propriété nutritive de la viande qu'à la gélatine
qu'elle donne, et qui sérieusement souiiennent que les os sont plus nutri-
tifs qu'elle parce que, à |)oids égal, ils renferment plus de gélatine.
» Changeux se demande si le lin et le chanvre, après avoir été linge, ne
deviendraient pas par l'infusion et la trituration un vrai parenchpne qui,
purifié, pourrait être aussi alimentaire que la gelée fournie par les poudres
des graines farineuses ; il ajoute que ses expériences lui ont prouvé rpi'il
n'est pas de bois et de matière végétale qui par la liivision ne |>uisse servir de
nourriture à l'homme.
» Le raisonnement de Changeux appliqué aux produits d'origine animale,
le conduit à la conséquence qu'il suffit de ramollir et de dissoudre les par-
ties les plus dures des animaux, telles qiîe les cornes, les ongles, l'ivoire,
les phunes, les poils, les barbes de baleine, etc., poin* en faire luie matière
alimentaire.
» Voilà comment l'auteur est coniluil à reproduire l'idée de Papin rela-
tive à faire servir les os à l'alimentation ; mais le procédé qu'il propose poin-
atteindre ce but n'exige plus de digestetir, il suftit de diviser les os le plus
possible, soit au moyen d'un pilon, soit au moyen d'ini moidin, et d'en
soumettre la poudre à une heure d'ébuUition dans l'eau. Le produit est une
gelée, dit Changeux, aussi savoureuse, aussi restaurante que la gelée de
viande.
I) Quelques cuillerées de poudre d'os de bœuf, de veau, etc., fournironi une
[ I ) Journal de Physique, t. VI, p. 4" ('775).
( 86o )
(juaiUilé énorme de gelée qtion assaisonnera avec du sel et, si F on veut, quelques
aromates.
» N'insistons point sur la confusion, dans l'esprit de l'auteur, des pro-
priétés cliimiques de l'affinité et delà dissolution cliimique d'une part, avec
la division purement mécanique de la matière d'une autre part. Cette con-
fusion était naturelle dans l'esprit d'un homme qui n'était pas chimiste.
Quoi qu'il en soit, il n'est pas sans intérêt de rappeler ce que j'ai dit à propos
de la découverte de la Montgolfière : des idées inexactes peuvent conduire à
des découvertes, et clans le travail de Changeux que je rappelle, n'ouhlions
pas l'altération profonde du verre en poudre par l'eau houillante et l'im-
portance de son expérience de la division mécanique des os pour en
obtenir la gelée. Nous allons voir la haute estime que l'illustre Proust atta-
chait à cette découverte.
§ V.
') Nous sommes arrives à l'année 1791, époque à laquelle un opuscule
intiiidé : Recherches sur les inoyens d'améliorer la subsistance du soldat, parut
à Madrid où l'auteur, Proust d'Angers, professait la chimie, après avoir
quitté la chaire qu'il avait occupée à l'Ecole d'Artillerie deSégovie.
» Dire ici que le génie lie Proust a été mécoiuiu serait manquer étran-
gement à la vérité; car en 181G l'Académie l'appelait dans son sein à la
|)resque unanimité des suffrages, et |)ourtant il était absent de Paris et ne
quitta point l'Anjou, où il mourut en 1826. Quoiqu'il en soit, hors de cette
enceinte ses travaux ont-ils toujours été cités quand ils auraient du l'être?
je ne le pense pas, comme on le \erra; aussi ne mancjuerai-je pas l'occasion
de rappeler la grande part qu'il a dans l'histoire de la gélatine en insistant
sur le mérite scientifique de l'opuscule dont je viens de reproduire le litre.
i> Proust reconuait, avec se» [irédécesseurs et ses contemporains, en com-
mençant son écrit, que la substance de la gelée existe dans la viande et
dans les os, et qu'extrêmement attendrie dans la première, elle est bien
mieux disposée à être dissoute par l'eau, que ne l'est la substance de la ge-
lée des seconds qui se trouve en proportion plus forte, mais endurcie,
sèche et comprimée dans des cellules des os. Le digesteur fut imaginé pour
l'en extraire, mais les inconvénients de l'apj^areil ont einpéclié que l'usage
s'en étendît.
)) Proust, mettant à profit l'observation de Changeux, relative à la pré-
par.ition de la gelée, en a fait sentir l'iinporiance en comiiaranl la quantité
de gelée oblenue des os réduits en quelques morceaux seulement, comme
( 86i )
on le fait généralement dans les cuisines, avec la quantité de gelée obtenue
des mêmes os après qu'on les a eu réduits en poudre.
M Avant d'aller plus loin, disons la cause de l'exactitude des expériences
de Proust. Sachant qu'elles ne peuvent être précises sans l'usage de la ba-
lance, et que si elles sont comparatives, les conséquences n'en sont accep-
tables qu'à la condition du contrôle auquel on soumet les produits amenés
à un état identique, il reconnut en principe la nécessité d'aniener à un
état constant de siccité les gelées qu'il voulait comparer relativement à leurs
poids respectifs, sachant que les gelées renferment des quantités trop varia-
bles d'eau pour donner des résultais certains. Proust appelle pastilles de
houillon ou simplement pastilles, les gelées amenées ainsi au même degré
de siccité; et, grâce à cette manière de procéder, l'auteur des Becherches des
moyens d'améliorer In subsistance du soldat est arrivé à des conclusions
qu'aucun travail postérieur à son opuscule de 1791 n'a pu contredire,
comme je vais le démontrer sans peine.
A. Tous les os ne donnent pas In même quantité de gelée.
» En indiquant les quantités de pastilles obtenues des os, il a grand soin
de distinguer ceux-ci , afin d'éviter les mécomptes résultant d'une moyenne
prise siu- des quantités dont les extrêmes seraient fort différents.
» En outre, il distingue, pour chaque sorte d'os, deux cas très-diffé-
rents : le premier est celui où les os ont été simplement cassés en quel-
ques morceaux, comme on le fait dans les cuisines habituellement; et
le deuxième concerne les os mêmes qui déjà ont subi l'ébullition du pot-
au-feu, que l'on soumet à une nouvelle cuisson, après les avoir pulvérisés
conformément à la prescription de Changeux.
» Pour 1000 parties :
Les os de Jambes de bœuf, séparés de la moelle et de leurs extrémités,
ont donné 53 , 08 de pastilles.
Les os des articulations des cuisses et des jambes. 98,25 »
Les os des hanches ont donné 175,37 »
» Voici maintenant les résultats obtenus des mêmes os simplement
cassés, ensuite réduits en poiulre :
1280 gros. I" Cfl*.
gros
Os de jambe 2,25
« des articulations .... 6,5o
. de haoche 18, 5o
» de côte et vertèbres. . ? .
» ' de mouton ... ?
» de cochon ? i55,oo
2«
cas.
cros
71,83
'.'. i'.
:3i
'9
120,
,00
:: I :
i8
,4
208
,00
: : I :
! I I
,2
178,
.54,
,00
00
( 862 )
B. Toutes les gelées d'os ne sont pas de la même qualité.
» Toutes les gelées ne sont pas identiques : celle des côtes est préférable
à celle des os de hanche. La gelée des os de mouton a l'odeur de la viande
de l'animal.
C. Préparations diverses de gelée d'os.
» i" Bouillon. — Si quelque chose justifie la règle suivie par Proust
d'exprimer les quantités de gelée à l'état de pastille, c'est l'observation
suivante appliquée à la jiréparafion de bouillon d'os susceptibles de se
prendre eu gelée à diverses températures.
I partie de pastille et 3i parties d'eau donnent un bouillon, qui se prend
en gelée aux températures de zéro à 5 degrés.
» et 24 parties d'eau donnent un bouillon qui se prend
en gelée aux températures de 6 à g degrés.
» et 18 à 20 parties d'eau donnent un bouillon qui se
prend en gelée aux températures de 10 à i4 degrés.
M 2° Bliinc manger. — Ou prend de i4à 1 5 onces de gelée; on y ajoute
i"°'',5 de sucre, et du sel.
» On tire avec elle le lait de 1 2 amandes douces et de 4 amandes amères,
que l'on aromatise avec un peu d'écorce d'orange.
» 3" Soupe. — La gelée fait une soupe excellente avec des pois chiches,
des choux, des navets et des carottes. C'est une sorte de julieiuie.
D. Bouillon de viande.
» Proust admet qu'il faut 3 ou 4 livres de viande pour obtenir i livre
dégelée, tandis que les os en donnent bien davantage, co'.nme ou a pu le
voir quand on les traite convenablement; et il admet que i livre de gelée
représente à peu près ime detni-once de pastille; eu d'autres termes :
» De 128 à 96 parties de viande donnent 32 parties de gelée représen-
tant I partie de pastille;
» 10 livres de viande désossée, c'est-à-dire 1280 gros ont donné 4o gros
de piistille difficile à sécher. 8 gros ou i once de pastille ont donné lui
bouillon comparable à celtii d'os, en ajoutant 20, 24, 3i onces d'eau selon
la température.
» Nous verrons dans un autre Mémoire de Proust qu'en prescrivant
d'ajouter à la ration du soldat la gelée que représentent 12 onces d'os pid-
vérisés, avec lard et légumes, il comprend dans cette ration la viande que
le soldat reçoit. F.n définitive, sa décoction ou son bouillon d'os s'ajoute
à du bouillon de viande.
( 863 )
» Enfin Proust a encore le mérite d'avoir attiré l'attention sur l'avantage
qu'il y a de retirer la graisse contenue dans les os. Si les os les plus denses
n'en contieiuieut guère que o,o5 au plus, il en est qui en donnent o,i25
et même o,25. L'extraction en est fort simple, il suffit de jeter dans l'eau
bouillante les os réduits en gros fragments et non en poudre; car dans ce
dernier état il se fait un mélange tellement intime qce l'eau ne peut en
séparer la graisse. J'ai mentionné une action analogue de la magnésie cal-
cinée sur la graisse de porc (i).
» Je passe beaucoup de détails intéressants; mais ceux que je viens d'ex-
|ioser m'ont paru indispensables pour montrer la supériorité avec laquelle
Proust a traité ce sujet. Si le lecteur est curieux de recourir à l'original, il
verra quelques réflexions heureusement exprimées sur la coutume ilu bou-
cher de faire payer les os autant que la viande.
§VI.
» Il me reste, pour compléter ce que je me suis proposé de dire du tra-
vail de Proust sur la gelée des os, d'ajouter quelques mots relatifs à un
opuscide de Cadet de Vaux qui parut, je crois, en i8o3, et qui fut, de la
part de Proust, l'objet d'une critique pleine d'esprit. Mais pour que l'on
comprenne bien tout ce qui va se rattacher à l'histoire du bouillon d'os
dans la première moitié de ce siècle, je dois parler de l'influence que quel-
ques personnes dites pliilnîithiopes ont exercée sur l'usage du bouillon d'os
dans les hôpitaux et les hospices, eu voulant le substituer à celui du bouillon
de viande; car sans la connaissance de cette influence, il est impossible de
comprendre des faits relatifs aux deux Commissions dites de la gélatine que
je veux faire connaître.
» i8o3. Cadet de Faux, auteur d'une brochure sur la gélatine des os et
son bouillon.
» Cet écrit, postérieur de douze ans au moins à l'opuscule de Proust,
et de deux ou trois ans à l'extrait de cet opuscule, inséré en 1801 au
LIIP voliMue du Journal de Physique, demande quelques réflexions préa-
lables relatives à l'état de la société parisienne de la fin du xviii'^ siècle et
du commencement de celui-ci, si l'historien veut donner une idée juste
des travaux siu- la gélatine. La vérité l'exige de ma part, dans l'impossibi-
lité où je me trouve de ne pas donner pleine raison à Proust, lorsqu il
réclame devant le public, avec autant de vivacité que d'esprit, le droit de
Recherches chimiques sur les corps gras d'origine organique, p. 36o ; iSaS.
C K., 1S70, •J<'5emfSfre. (T. LXXI, N°23.) I'6
( 864 )
priorité sur Cadet de Vaux; mais je ne voudrais pas que la condaunialion,
rpiclle cpi'en soit la sévérité, donnât à penser que le juge a méconnu ce
qu'il y avait d'honorable dans un philantlnope; des relations assez intimes,
remontant à l'année 1818, ne me permettent pas le moindre doute sur le
désintéressement de sa conduite; et homme du monde aimable et agréable,
il m'a toujours paru avoir passé sa vie dans la meilleure société de Paris.
» A partir de l'avènement de Louis XVI au trône, on compte bien peu
d'écrits de quelque renom où se trouvent des mots plus répétés que sensi-
bilité et sensible. Romances, pièces de théâtre, discours académiques, plai-
doyers, écrits politiques, partout on les lit, partout on les relit. Les mots
philanthropie et philanthrope sont de la même époque; ils ont commencé à
être fréquemment euiployés dans les discussions élevées entre les écrivains
dits économistes et leurs adversaires; et tout le monde sait le prix que le
marquis de Mirabeau attachait ais titre de Vnmi des hommes! Si le mot sen-
sible fut peut-être li'op fréquemment employé et le moi philanthrope uu peu
trop prodigué, je demanderai s'il n'y a pas quelque inconvénient à ce que
des mots relatifs à des qualités morales, dont l'excellence est incontestable,
reviennent continuellement dans la conversation et dans les écrits quoti-
diens?
» La vérité est qu'un philanthrope, à la fhi du xvin^ siècle et au commen-
cement du nôtre, était quelque chose. Et qui pourrait en douter lorsqu'on
a vu comme nous, en i8io, l'indignation de tant d'honnêtes gens après la
représentation des /)e«x Gen(/res/ ils ne pardonnaient pas à Etienne, l'au-
teur de cette comédie, d'avoir fait de Dervière, un des gendres, un philan-
thrope, duquel on dit dans la pièce : « Il s'est fait bienfaisant pour être
» quelque chose », et il faut dire que les sentiments de Dervière à l'égard
(le sou beau-père Diqiré ne sont nullement philanthropiques.
n Ces souvenirs fidèles d'un temps passé montrent donc qu'un fihilan-
ihtopc comptait alors pour quelque chose. Or Cadet de Vaux eu était un,
et, à sa louange, je me plais à dire qu'il l'était de cœur. Que si ou lui
reproche d'avoir été bien avec tous' les pouvoirs qui ont toiu' à tour gou-
verné la France, si l'on peut trouver un peu trop de zèle dans une lettre où
il exprimait toute son indignation sur l'attentat de nivôse à la vie du pre-
nùer cousid rue Saint-Nicaise, hâtons-nous de faire remarquer que le
philanthrope ne demanda jamais rien pour lui, et que, s'il s'approchait du
pouvoir, l'intérêt seid de l'œuvre philanthropique, qui était sa vie même,
le guidait. Honneur donc à des intentions dont le but unique était l'intérêt
ptdilic!
» Cet hommage mérité rendu à la mémoire de Cadet de Vaux me doiuie
( 865 )
pleine liberté de le juger maintenant dans sa conduite à l'égard de l'aiileiu'
des Recherches des moyens iV améliorer la subsistance du soldat.
» Cadet de Vaux reconnaît avoir su que Proust a travaillé sur les os;
mais il s'est dispensé de lire ses recherches craignant, allègue-t-il, que les
idées d' autrui enchaînent, paralysent sa pensée; il traite des os et de leur
gélatine comme si personne avant lui n'en avait parlé, sauf Papin, inven-
teur d'une machine, d'un appareil qu'il a qualifié, en 1818, de volcan
hydraidi(jue, et qu'il a toujours considéré comme impropre à l'extraction
économique de la gélatine des os. Et si, ai)rès avoir réalisé ses idées, il a
pris connaissance des Recherches des moyens d'améliorer la subsistance du
soldat, c'est pour dire que si leur auteur a donné au public des pastilles.
Cadet lui a donné le vrai bouillon d'os, allégation sur laquelle je reviendrai
bientôt.
» La brochure publiée par Cadet, en i8o'3, est écrite facilement et avec
bonhouiie; loin de se glorifier de la découverte d'un moyeu de reudie les
os utiles à l'alimentation publique, absolument désintéressé dans la ques-
tion de l'invention, il aime à en rapporter l'iionneur à qui de droit, c est-
à-dire au CHIEN.
» En effet, cpie fait l'animal pour se nourrir de l'os?
I» Il le brise avec ses dents, l'humecte et le divise.
» Quel mérite revient à Cadet dans l'invention du bouillon d'os?
» Il n'est pas autre que d'avoir observé ce fait et de s'être dit ensuite :
brisons, humectons et divisons les os.
» Cependant, avant d'aller plus loin, Cadet s'est demandé : les os sont-ils
nutritifs?
H Et en cela, fulèle à la méthode A posteriori expérimentale, il a fait une
expérience, et l'a faite comparative, et l'expérience a été affirmative; car,
ayant fait préparer de la soupe pour ses chiens de basse-cour, il a renversé
à côté une corbeille d'os, et les chiens de Cadet ont préféré les os à la soupe,
et Cadet a conclu, en i8o3, que les os nourrissent les chiens!
» Fort de cette expérience. Cadet s'est dit : Les os sont nutritifs. Il revient
à Paris avec la conviction que le succès de l'extraction de la gélatine tenait
à la division des os, et qu'il ne s'agissait que de substituera la dent de tanimal
le PILON.
» Voilà en quels termes Cadet raconte la découverte du bouillon d'os! et
après avoir reconnu le mérite du chien qui brise, humecte et divise les os, il
dit qu'il a tranché le nœud gordien, et que l'idée de la pulvérisation des os est
et lie de l'œuf de Christophe Colomb!!
116.
( 866 )
» De Chaiigeux et de Proust, pas un mot.
» Dans cet état de choses, Proust a-t-il tort de dire à Cadet :
« Ne vous attribuez pas le mérite de la piilvérisalioii des os. Si, pour
» l'opérer, il a fallu l'esprit de Christophe Colomb, comme vous l'avancez,
» c'est à Cliatigeux qu'en revient le mérite, ainsi que je l'ai reconnu dans
» mon opuscule de 1791 ? »
» Si Cadet de Vaux ne lut l'écrit de Proust qu'après avoir réalisé sa
fléroui'erte, il ne fut ni juste ni habile en prétendant faire croire an public
que Proust n'avait fait que des PASTILLES, tandis quil avait fait le VRAI
BOUILLON d'os.
» Proust, dans son travail, avait satisfait à la science et à l'économie :
» A la science, en ramenant, comme nous l'avons vu, toutes les gelées
à un degré constant de siccité, seul moyen d'atteindre le but d'expériences
comparatives ;
» A Vcconoiiiie, en donnant des pastilles au soldai, au marin, aux voya-
geurs explorant des contrées non habitées ou sauvages, et enfin en donnant
un bouillon immédiatement aux cuisines, aux hôpitaux et aux hospices.
» Les conclusions de Proust sont trop instructives pour l'histoire, à
l'égard des amis de la vérité et des jugements de l'histoire, pour que je n'en
reproduise pas les principales. Je cite textuellement.
" M. Cadet n'est en date que le (jiiatrième on le cinquième qui ait conçu l'idcc <rnnit liorcr
la subsistance du soldat au inoven de la pulvérisation des os
') Quant à Vc.rcellencr, aux innomljrubles avantages, à la haute préférence que M. Cadet
donne aux bouillons d'os sur ceux de viande, ces Jus noirs, salés, acres, qui échauffent la
bouche, qui allèrent et qui sont, sous tous les rapports dialectiques, si inférieurs aux pre-
miers, on les tiendra avec raison pour de pures exagérations que M. Cadet n'aurait jamais
dû se permettre. De j)areilles hyperboles et pipcries jjeuvent figurer dans le langage du
charlatanisme, mais elles ne peuvent que déparer celui des sciences exactes. Le bouillon
d'os a, comme aliment, son prix sans doute, mais c'est pour l'indigence seulement, c'est |)our
le malheureux à qui le premier des biens est de satisfaire sa faim; pour l'iiommc aisé et
même pour l'artisan qui peut mettre une livre de viande dans son pot, le bouillon d'os ne
sera jamais au bouillon de viande que ce qu'est un |)oun)on de vache cuit et salé à un bon
aloyau bien rôti; et lorsijue M. Cadet vient nous dire que rien n'est plus intéressant que
l'étonnement de ses convives qui, la soupière enlevée, voient paraître, en place de lu pièce
de boeuf qu'ils attendent, un bol contenant quelques onces d'os /lulcérisés, nous pensons que
leur étounemcnt n'est pas moins fondé que le nôtre, quand nous le voyons sérieusement
nous entretenir de pareils contes.
" Je prierai en conséquence M. Cadet de vouloir bien continuer de recevoir, au
nom des invenleurs de Vamélioration de la subsistance du pauvre, les félieilalions des
sociétés savantes, des généraux, des préfets, des princes d'Allemagne, etc., et même d'y
)<pondre (ibligcanimcnt, comme pai' le passé; mais aussi de UiCUi'e sur la liasse de cetle
( 8G7 )
correspondance : affaires qui me sont étrangères, sinon la postérité, (pii sait tout mettre à sa
place, saura bien aussi redresser les torts. >•
§ VIL
» Je mentionne pour Mémoiie un travail de D'Arcet le père, qui fut in-
séré dans la Décade philosophique, en 1794-
§ VIII.
» Cadet de Vaux ne répondit pas à Proust; mais en 1818 parut nue
brochure de 1 12 pages intitulée : De la gélatine des os el de son bouillon, dé-
diée à son A. Pi. Monseigneur le Duc de Berri.
» Le nom de Proust, pas plus que celui de Cliangeux n'y sont cités; et
Cadet, sans oublier sa reconnaissance poiw le chien, se considère plus que
jamais comme rinvcnteur du bouillon d'os, et il dit :
« C'est en France que le bouillon d'os a pris naissance, il a du éprouver le sort de toutes
les découvertes qui y naissent. Que n-ai-je publié innn Traité de la gélatine comme une tra-
duction de l'anglais!
» La gélatine est l'aliment par excellence; oui, dit-il. La gélatine des os cH aux suhstaiicis
alimentaires animales, ce qu'est l'or aux autres métaux (i).
» Le bouillon de viande n'est point même, à rigoureusement parlei-, le bouillon dr ta
santé, s'il n'est associé à d'autres éléments; il n'est pas, à coup sûr. le bouillon de la mala-
die, puisque souvent il Yaggrave; comment, d';iprès cela, pourrait-il être celui de la cnnra-
Icscencc? Dès lors nous avons été autorisés [sic) à avancer qu'il ne soutenait pas la comparaison
arec celui d'os, qui convient indistinctement à la santé, h V enfance, h la vieillesse, au.r con-
stitutions faibles, enfin au.r estomacs délicats, comme étant la célatike pure, et que la di-
gestion assimile sans effort à l'économie animale qui est toute gélatine. Il n'y a (pi'une
vieille seviense d'enfant qui puisse ne pas partager cette opinion; ainsi que la nourrice à
laquelle on paye par mois tant de pots-au-feii qu'elle met ou ne met ])as (3]. «
M Enfin citons textuellement l'observalion que voici :
« Les disettes se distinguent en réelles et factices; or, en tout temps et en tout lieu, il y
a disette réelle de viande pour les classes populeuses, et auxquelles jyjus apportons ce se-
cours nouveau; mais si le quintal des os représente par ta quantité de gélatine qu'il contient
celle que donnent six cents livres de viande, et que moitié des os de la viande consommie
dans une ville suffise à nourrir ces classes, la disette de la viande n'est plus réelle, elle n'est
que factice; puisque la viande, quand elle est épuisée de son suc, n'est plus rien que du lest;
car c'est cette gélatine dissoute dans un bouillon de viande ou d'os qui seule constitue l 'ali-
ment; et la substance osseuse, avons-nous dit, donne six fois plus de gélatine que la
viande (3). «
» Les citations que je viens de faire, toutes textuelles, poturaient être
(1) Page 20.
(2) Pages 49 et 5o.
(3) Pages 92 et 93.
( 868 )
considérées comme des projjositions scientifiques, tant la manière donl Ca-
det les a formulées est absolue! En laissant décote la question de savoir si
la gélatine jouit de la propriété nutritive, sur laquelle je reviendrai (dans
la deuxième partie), les propositions relatives à l'excellence du bouillon d'os
et à la préférence qu'on doit lui accorder relativement au bouillon de viande
sont le contraire de mon opinion. Il en est de même de la supériorité du
premier sur le second expliquée par son homogénéité^ c'est-à-dire sur ce que
la gélatine possède les propriétés que j'attribue à une espèce chimique, et qui,
par la même raison, s'assimile sans effort à Yéconomic animale qui est toute
GÉLATINE. Il en est encore de même de cette proposition : les viandes ne soiil
nutritives que par leur gélatine, Le reste [c est-à-dire la partie fibreuse et l'nlbu-
niiiie cuite) ne font rien à V alimentation, elles ne sont que du lest. Si vous
ajoutez à cela que Cadet proscrit le bouilli et recommande le rùli, et qu'il
est démontré aujourd'hui, pour tous les chimistes, que le tissu qui donne
la gelée n'est pas à l'état de gélatine dans le rôti, on aura une idée juste de
la science de Cadet de Vaux en chimie organique.
)> Voilà ce que j'avais à dire de la brochure de Cadet de 1818, relative-
ment à la partie scientifique.
» Justifions maintenant la manière dont j'ai parlé de l'influence fâcheuse
que peut avoir une réunion de personnes dont la plupart sont étrangrres à
la connaissance d' éléments scientificpies constituant essentiellement certains sujets
dont elles s'occupent comme ensemble, comme association, comme société,
où sont même en majorité les hommes les plus recoinmandables, les plus
sincèrement dévoués au bonheur de l'humanité, parce qu'Us veulent em-
ployer tous les moyens dont ils disposent en fa\eur de leurs senddables;
ces hommes, véritables philanthropes, ont toutes mes sympathies : mais
quels sont les inconvénients cependant qu'une telle association peur avoir?
les voici.
» Ils viendront d'hommes se disant philanthropes et dont les uns le sont
en réalité, tandis que les autres affectant de l'être n'obéissent qu'à leur
seul intérêt. Eh bien, si ces deux grouiies de personnes sont considérés
par la société comme des membres actifs auxquels elle accorde l'autorité
d'effectuer cestains actes ressortissant de la science, il y aura inconvénient,
danger même.
» Afin de faire comprendre ma pensée et de prévenir loiïte équivoque,
je distinguerai trois groupes de personnes, en citant des noms.
« A la tête du premier, je place un duc de La Rochefoucauld-Liancourt
et je m'incline devant sa mémoire. Je lui associe un nom plus modeste sans
doute, mais qui n'en fut pas moins porté par un homme de bien, M. De-
( 869)
leiize, dont la nièce a épousé un de mes honorables confrères de la Société
d'Agriculture, M. Auiédée Durand.
» Je mets M. Cadet de Vaux dans le second groupe, comme homme dé-
sintéressé, mais incapable de diriger, au point de vue de la science, une as-
sociation philanthropique occupée de ralimentation publique.
)i Ne pouvant citer aucun personnage réel pour le troisième groupe,
comprenant Vambitieux, Vintriganl, le citarlalan, Vinlëressé, je reviens à la
comédie des Deux Gendres, et je nomme Dervière, riche capitaliste. Il s'est
fait bienfaisant pour être quelque chose, avons-nous dit avec le poète ([).
(i) Le tlialogiie suivant entre le beau-père Dupré et son fidèle domestique Comtois,
meilleur juge de Dervière que son beau-père, qui cependant a tant à s'en plaindre, fait coti-
iiaîlre parfaitement un des philanthrojies de notre troisième groupe.
DUPRÉ.
Tu méconnais, Comtois, ses bonnes qualités :
Lui, c'est un philanthrope; il est des comités
De secours, d'indigence; il régit les hospices,
La maison des vieillards, le bureau des nourrices :
Pour les i)auvres toujours il compose, il écrit.
COMTOIS.
DUPEE.
Dans les journaux encore on le vaille aujourd'hui.
COMTOIS.
Les articles tout faits sont envoyés par lui.
Il a poussé si loin l'ardeur philanthropique
Qu'il nourrit tous ses gens de soupe économique.
DUPRÉ.
COMTOIS.
Pour les temps de disette
Il vient d'imaginer un projet de diette.
Le régime est léger : pourtant, si je le crois,
Fn jeûnant de la sorte on peut vivre six mois.
DUPRÉ.
L'idée est singulière et l'invention neuve.
COMTOIS.
Kh bien, c'est moi (|a'il prend (loiir en faire l'épi'eiive
DUPRÉ.
Se peut- il ?
COMTOIS.
Oui, monsieur, le charitable humain
Pour être bienfaisant me fait mourir de faim.
Ah! la philanthropie est souvent bien barbare!
( 870 )
» Un philanthrope à la fin cln xvm" siècle et au commencement de
celui-ci était quelque chose, ai-je dit; la preuve en est dans la brochure de
Cadet de Vaux de 1818.
» Il s'est dit l'inventeur du bouillon d'os. Personne ne l'a contredit.
(3n l'a cru sur parole. Et c'est bien comme pliilaiilhrope qu'il a entretenu
Sn Sainlelé, et qu'il a su d'Elle « qu'à Rome le Pape avait onze de ces éla-
') blissements (de bouillon d'os); c'est de la bouche du Saint-Père que j'ai
» recueilli ces détails, et de sa main que j'ai été BÉNI à litre iCanù de l'Iiu-
» manilé (1). »
j> Les pages de 35 à [\t\ sont consacrées à un Rapport sur i inslititlion du
bouillon d'os, par te maire du premier arrondissement, présenté au Roi
(Louis XVIII) par délibération du bureau de charité. (Extrait du Moniteur.)
» Lorsqu'on présenta ce Rapport au roi Louis XVIII, Cadet de Vaux
était présent, et le Rapport dit :
o ... Et M. Cadet de Vaux a obtenu la ])lus douce rccom]iense que puisse désirer un
uiiti de l'humanité dans les témoignages de bienveillance dont le Roi, S. A. R. Madaiiic, et
les Princes ont daigné rhonorer. Sa Majesté, en recevant le Rai)i)ort, a dit à M. Cadet de
Vaux avec cette bonté qui ajoute tant de prix aux paroles du Roi : Je jouis du succès de cette
institution, et c'est à vnis, monsieur, que l'humanité en sera redevable. Ainsi le temps est
revenu où les sciences utiles et les vues de bien public rendent facile l'accès du trône (2). ><
» Ai-je e!i tort de dire qu'iui philanthrope était quelque chose? En voilà
luie preuve. Cadet de Vaux n'a pas fait luie expérience qui n'eiit été faite
auparavant par Cliangeux et Proust; il est béni par le Pape; Louis XVIII
le remercie comme un bienfaiteur de l' humanité ; et le nom du véritable
inventeur du bouillon d'os, Proust, Membre de l'Académie des Sciences de
l'Institut de France, n'est pas prononcé! et dans un Rapport officiel inséré
au Moniteur on dit : Ainsi le temps est revenu oii les sciences utiles et les vues
de bien public rendent facile l'accès du trône!
» Certes si Cadet de Vaux a eu un mérite, c'est de n'avoir pas tiré parti
de la position où la philanthropie l'avait élevé pour fonder une dynastie
bourgeoise.
» Il ne me reste |)lus jjour terminer la première partie de ce résumé his-
torique qu'à parler des travaux de D'Arcet.
» Je ne prétends pas assurer qu'il partageât les opinions énoncées avec
une conviction aussi parfaite que naïve par Cadet de Vaux; qu'il criait avec
lui à la nécessité pour la santé publique de proscrire à loujoiu's l'usage du
(i) Page 24 de la brochure.
(?.) Pages 42 et 43 de la brochure.
( «7' )
bouillon de viande atin d'assureur l'usage du bouillon tros, et qu'il consi-
dérât la oéiaiiue de la viande comme le seul pi'incipe nutritil qu'elle con-
tînt, la fibrine et l'albumine ne donnant que du lest an tube intestinal;
mais il est certain que les faits suivants montrent qu'un accord parfait exis-
tait entre D'Arcet et Cadet de Vaux.
» D'abord, Cadet de Vaux dit :
« Ji'iibandonnant aux sentiments d'estime et d'attachement que m'inspire la personne
de M. D'Arcet, mais surtout à celui de ma propre conviction, j'ai dû faire les honneurs de
cette gélatine, préalablement extraite de la substance osseuse (par l'acide chiorhydrique);
aussi me suis-je réuni à ce savant, du moment où ii m'eut mis dans sa confidence, pour
provoquer la concurrence de cette yclatine avec le bouillon d'os, et je me suis associé à ses
expériences avec le désir de leur succès (i). »
» Passons ensuite à D'Arcet. Dans un Mémoire inséré au Recueil dont
M. lie Moléon était l'éditeur (2), Cadet est uniquement cité pour des obser-
vations et des expériences qui apparlienneiit évidemment à l'ronst; et ce-
peiulant D'Arcet cite le nom de L'auleuv des Recherches sur les moyens d'amé-
liorer la subsistance du soldat. Par exemple, lorsque Proust, insistant sur la
quisnîité de gélatine enlevée par le pot-au-feu aux os cassés en gros mor-
ceaux et celle que ces mêmes os réduits en poudre cèdent à l'eau bouil-
lante, évidemuient la fraction de 3^ a été prise à Proust. Mais, ce qu'on n'a
pas dit, ce résultat ne concerne que l'os de la jambe privé de ses extrémi-
tés, et diffère du résultat oblenu d'os différents soumis à la même épreuve.
» D'Arcet se contente tie doiuier la quantité moyeiine de gélatine, de
graisse et de matière inorganique des os :
Gélatine 00
Graisse 10
Matiéri; inorganique (jo
lésullat bieii différent des résultats précis de divers os obtenus par Proust.
» Le fait principal des travaux de D'Arcet sur la gélatine est de l'avoir,
séparée des os au nioyen de la vapeur d'eau produite sous une pression un
peu pluslorte que celle de l'atmosphère, jjarce (ju'à une température plus
élevée elle est disposée à se réduire en asniiioiii.ique, tlit-il.
>) D'Arcet reconnaît que l'idée de son appaieil est analogue à celle d'un
1) Brochure de Cadet de i8i8, page 89.
C. K., i>-o, j" Scmtiiic. (T. LXXl, K" 'j'ii.) ' ' '
(2) Page 5
( «72 )
iip|),ireil employé en pharmacie et mentionné rlaiis l'édition de la Plmnnn-
cie de Baume de 1790.
» Indubitablement, l'extraction de la gélatine opérée à la vapeur avec
mi seul foyer agissant sur des os non pulvérisés est plus économique que
l'ancien procédé.
» Enfin D'Arcet, a conseillé de préparer la gélatine pour l'office, et la
colle forte pour les arts, en cuisant le parenchyme des os préalablement
passés à l'acide chlorhydrique. Certes, je suis loin d'élever la moindre
discussion à ce sujet; mais n'eùt-il pas été convenable de rappeler que la
séj)aration de la matière terreuse des os par les acides a|)partient à Héris-
Hant? Seidement, H employait l'acide azotique étendu de quatre parties
d'eau, tandis que D'Arcet, avec raison, a substitué à cet acide le chlorliy-
drique.
» Voilà, je crois, un résumé fidèle des (rav.iux dont la gélatine a été
l'objet. Ces faits sont coordonnés selon l'ordre chronologique, et j'espère
qu'on ne me reprochera pas d'avoir fait pencher la balance du côté où j'ai
vu la justice.
» Il me restera à dire dans la seconde partie les faits relatifs aux tra-
vaux des deux Commissions de gélatine, et c'est dans cette partie que je
répondrai d'une manière catégorique à M. Fremy. »
ASTRONOMIE. — Sur l'arl de pointer et ses lundilious i>ltysiul()<ji(jucs;
jMir M. Fave.
« On sait que les astronomes se servaient autrefois d'une alidade, c'est-
à-dire d'une ligne de mire à deux crans pour déterminer la position des
astres, jusqu'au moment où l'académicien Picard imagina de remplacer
l'alidade par une lunette munie d'un seul cran de mire. Ce fut une véri-
table révolution dans l'art d'observer : de cette époque seulement datent
.les mesures de précision; tout ce que les anciens astronomes avaient fait
est désormais hors tl'usage, sauf d.uis des cas extrêmement particuliers. On
peut définir ainsi le progrès obtenu : autrefois, avec l'alidade, il fallait
beaucoup d'exercice, d'habitude et de dispositions innées pour détermi-
ner une direction à une minute près. Aujourd'hui , du premier coup, le
premier venu poinle sur une étoile à { de seconde près, l.a jirécision est
devenue immédiatement deux ou trois cents fois plus grande: l'erreur du
pointé n'atteint pas 1 millimètre à 1 kilomètre de dislance dans les circou-
stauces favorables.
( «73 )
» Une telle supériorité, un progrès si snbil et si marcpié n'a rien d'éton-
nant. L'alidade est un inslriimenf vicieux. Il se compose de deux crans de
iTiire dont un seul peut être placé à la distance de la vision distincte. Dans
le pointé, il faut fiiriger l'axe de l'œil sur ces deux crans et amener l'ali-
da.le peu à peu dans la direction d'un troisième point placé à l'infini. 1! v
a là une opération très-complexe et de plus une impossibilité, celte de voir
nettement à la fois les trois points considérés.
» Avec une lunette, au contraire, il n'y a plus que deux points à re-
garder, et ces deux points sont amenés à la même distance de l'œil, celle
de la vision distincte. Ce mode est rationnel et n'exige d'attention et d'exer-
cice que si l'on veut atteindre les dernières limites de l'exactitude. I/autre
est tout bonnement irrationnel, et pour en tirer quelque parti, il faut une
„ assez longue éducation de l'œil et de la volonté; il faut surtout une aptitude
innée.
» Appliquons ces réflexions aux armes de tir où le système vicieux de
l'alidade s'est conservé. Il en résulte qu'avec un a])pareil optique on ferait
aisément passer le plan de lir par un but bien visible, quelle que soit sa
distance, tandis qu'avec les crans de mire il y a là une incertitude qui se
Irabit par des écarts considérables et un grand nombre de coups manques.
II faut s'exercer longtemps pour restreindre quelque peu cette incertitude;
il faut surtout posséder des dispositions naturelles, c'esl-à-dire une cer-
taine conformation cérébrale qui est fort rare. C'est pourquoi l'on a pio-
posé depuis longtemps â? remplacer le vieux système de l'alidade par un
simple appareil optique qui ferait disparaître les incertitudes inévitables
d'un pointé vicieux et qui transformerait tout servant en un excellent
pointeur. Cette modification est devenue encore plus impérieuse depuis
qu'on a donné tant de précision aux armes de tir et que l'on s'est habitué
à s'en servir à des distances énormes. C'est là sans doute ce qui aura en-
gagé tout dernièrement un de nos physiciens les plus connus de l'Acadé-
mie, M. Le Roux, à appliquer aux canons qu'il a lui-même installés dans un
de nos forts un ingénieux système optique de son invention. Mais il se
passera bien du temps avant qu'on s'occupe sérieusement de ce progrès, et
il ne faut pas s'en étonner : les astronomes eux-mêmes, pour qui un pareil
changement était chose bien facile, ont résisté plus de cinquante ans, et
n'ont adopté qu'à leur corps défendant la simple eî admirable invention
à laquelle Morin, Gascoigne, Picard et Anzout ont attaché leur nom.
M Mais le point sur lequel je désire aj)peler l'attention de l'Académie
n'est pas la substitution d'un simple objectif à l'alidade des pièces de tir,
117..
( f^/A )
mnis uno question de physiologie qui se trouve impliquée dans l'emploi
(les deux crans de mire. De tous nos sens, l'œil est le plus flifficilement
édiicable : c'est celui qui exige rallention la plus soufoiuie et l'exercice le
plus fréquent. Tout ce qui tient à l'oreille, au contraire, va pour ainsi dire
de soi, témoin la facilité et l'exaclitiide avec laquelle tout le monde se plie
aux mouvements rliythmés. Aussi l'éducation de l'oreille peut-elle se faire
collectivement siu' un grand nombre d individus, tandis que l'éducation de
l'œil est une œuvre tout individuelle,
» On parviendrait cependant à obtenir dans cette direction quelques
résultats, si l'osi appliquait aux opérations de l'œil, dans les exercices col-
lectifs, l'admirable décomposition analytique que les procédés d'éducation
militaire ont réalisée pour les opérations de nos autres membres. Alors en
faisant exécuter successivement ces mouvemenls élémentaires, bien qu'ils
ne se traduisent extérieurement que par des gestes imperceptibles, et en
insistant sur chacun d'eux suivant son degré d'importance, on parviendrait
à faire contracter à notre svstème nerveux et aux six muscles de l'œil l'ha-
bitude et par suite l'habileté et la sûreté désirables. jNîais la décomposition
des mouvements élémentaires est ici de toute nécessité; si plusieurs d'entre
eux restent confondus, l'habitude ne viendra jtas; elle sera remplacée par
une sorU; d'instinct fort imparfait et très-variable (Vwn individu à l'antre,
souvent même par le manque absolu de toute opération, en sorte que le
résultat (inal, pour beaucoup, sera entièrement livré an hasard.
» Quelles sont donc les opérations élémentaires que l'analyse nous
montre dans le pointé par alidade ou crans de mire? i° Amener rapide-
ment cl de sentiment l'alidade dans la direction de l'objet grossièrement
appréciée par la vue simple; 2° diriger l'axe optique de l'œil sur les deux
crans de mii-e, de manière à les saisir sinudtanémcnt ; 3° am.ener cet axe
et par suite l'alidade sur l'objet par un petit mouvement bien soumis à
l'attention.
» Dans l'exercice, la première opération est setde représentée; elle
s'indique par le commandement : En joue! mais rien n'y représente les
deux autres opérations élémentaires c[ui constituent essentiellement l'acte
de pointer ou de viser. Il résulte delà que l'exercice n'ayant pas familiarisé
le cerveau, la volonté et les nuiscles de l'œil et du bras avec l'acte de viser,
l'erreur probable du tir, chez les jeunes soldats smîout (pii n'oi;! pas eu
l'occasion fréquente de s'exercer isolément, est extrêmement considérable
et rend presque superflue la grande précision de leur arme. Potu- remédier
à ce grave défaut, il suffirait, si je ne me lrom|)e, de faire figin-ei- dans la
( «75 )
série des comm.Tndpmpnts les actes élémentaires dn pointé, en lui assignant
toiijoiirs un hnt, une ligne horizontale par exemple, proche ou éloignce.
C'est, du reste, ce qu'on fait pour l'artillerie où existe le commandement :
Pointez! qui précède celui de : Feu! Je suis convaincu, pour ma part,
qu'une modification de ce genre dans les exercices imposés à nos jeunes
soldais augmenterait immédiatement l'effet utile de nos armes à feu, qui a
suivi beaucoup plus les progros de la rapidité que ceux de leur précision
bien reconnue. J'ose espérer (jue les personnes qui ont réfléchi aux con-
ditions physiologiques de la précision, de l'habilnde née de l'exercice,
vonihont bien accorder quoique attention à ces simples remarques. »
ÉCONOMIE DOMESTIQUE. — Sur le procédé employé par les Indiens têtes-plates
pour obtenir riiuile des nx loiiqs ; pnr^l. Rori.ix.
« Parmi les Communications faites à l'Académie depuis l'investissement
de Paris, les plus nombreuses assurément se rapportent à deux sortes île
questions qui à une certaine époque ont excité un très-vif intérêt, mais
auxquelles les circonstances où nous nous trouvons aujourd'hui donnent
un intérêt tout particulier. On voit qu'il s'agit de l'aéronautique et de
l'ensemble des moyens employés pour tirer le meilleur parti possible dos
ressources alimentaires dont nous disposons. Relativement à ce dernier
point, bien des gens n'ont pu manquer de remarquer qu'une société civi-
lisée, par conséquent prévoyante, et qui ainsi devait être presque complè-
tement exempte de la crainte d'une disette même temporaire, se trouve,
par le fait, dans des conditions jusqu'à un certain point comparables à celles
où sont normalement des populations sauvages qui, chaque année, souffrent
d'une disette prolongée, et souvent si dure qu'elle ne leur permet qu'à
grand'peine d'attendre la saison qui leur rendra l'abondance. On ne s'é-
tonnera donc point si, de part et d'autre, on a eu recours pour |iasser dos
temps difficiles à des expédients semblables; c'est une réflexion que j'ai eu
plus d'une fois l'occasion de faire depuis plusieurs semaines, et tout récem-
ment encore à propos de la lecture faite par M. Payen sur divers produits
alimentaires obtenus des os diî cheval, tissus gélatineux, graisse, huile co-
mestible. C'est aussi stu- une huile bonne à manger, également extraite
des os, que je demande à l'Académie la permission de l'entretenir un mo-
ment. Il va sans dire que pour cette fabrication, comme poui' toutes celles
qui ont pour but d'uldiser des jiorîions habituellement dédaignées de
ve^gétaux ou d'animaux, le parallélisme entre doux classes d'hommes si
( «76 )
différentes ne ppiit porter que sur des produits qui s'obtiennent sans l'in-
tervention des réactifs chimiques, sans l'emploi de vases en métal, sans
machine un jjen compliquée; celui dont je parie n'exige rien de pareil,
pas même l'usage de vases de terre pour chauffer l'eau, que bien souvent
on porte à l'état d'ébullition en projetant dans l'auge en bois qui la con-
tient quelques cailloux rougis au feu (i), le reste de l'outillage consiste en une
méchante lame avec laquelle on hache et réduit en petits fragments les os
longs dont on a d'abord mangé la moelle, laquelle, lorsque ces os ont
a|)partenu à un grand animal, est assez copieuse et assez nourrissante pour
qu'iui seul suffise au repas d'une i)ersonne. L'observation est empruntée
à la relati(U) d'un voyage digne de toute notre attention, puisqu'il est le
premier qui se soit fait de l'un à l'autre Océan, préparant ainsi !a grande
entreprise tout récemment achevée <!e l'établissement du chemin de fer du
Pacifique.
» MM. Lewis et Clarke avaient été chargés en 1 8o4 par le Gouvernement des
États-Unis d'explorer le haut Missoiu'i ainsi que les pays situés au delà des
sources de cette rivière, au delà même des montagnes Rocheuses et jusqu'à
la mer du Sud. Cette exploration n'exigea pas moins de trois années; au mo-
ment dont je parle, vers la fin de l'année i8o5, nos voyageurs se trouvaient
près de l'embouchure de la rivière Columbia dont le territoire est occupé par
plusieurs tribus indiennes qui, ayant à peu près les mêmes habitudes, sont
souvent désignées sous le nom collectif de têtes-plates, quoique chacune ait
son nom particulier. Le 2 décembre un de leurs chasseurs avait tué un cerf
Wapiti [Elk des Anglo-Américains) et il fut apporté au camp le lendemain.
« C'était, dit le narrateur, le premier Elk que nous eussions tué depuis que
» nous avions franchi les montagnes Rocheuses, et condamnés comme nous
» l'étions depuis longtemps à ne vivj-e que de poisson, ce fut pour nous une
.) nourriture reçue avec la plus grande satisfaction. Après qu'on eut mangé
» la moelle des os des jambes, notre Indienne hacha menu ces os (évidem-
(i) T.es Assinibnines ont reçu d'Indiens ;i])])arlenant à une antre nationalité re nom, qui
sii^nido hnuiltpiin! dr pierres, et qui leur a élo donné à raison d'une invention «lui leur per-
met irimproviscr, en quelque ii<'u qu'ils se trouvent, une manuite |)ropre à faire cuire la
chair du bison qu'ils viennent de percer de leurs flèches. Ils creusent dans la terre de la
prairie un trou de capacité suffisante pour contenir la quantité de \iande juyee nécessaire
d'après !c nombre des mangeurs; ils tapissent ce trou de la peau dnni ils vieimerit de dé-
pouiller l'animal, et emplissent cette étrange chaudière d'eau (ju'ils ont bientôt f.iit bouillir
en V jetant des cailloux incandescents, la maintenant en cet eial par li' même moyen jusqu'à
ce que la viande soit cuite à point.
( «77 )
» -ment il ne s'agit ici que des extrémités) et, en les faisant bouillir, en obtint
w une pinte de graisse liquide supérieure même à la graisse solide de l'Hiii-
» nimal. » [Travtls Uj>. the Missouri^ etc., etc., cliap. XXi.) La pinte an-
glaise n'est, comme on le sait, que la moitié à peu près de l'ancienne pinte
de Paris.
» Pendant que je tenais en main le livre d'où je tirais cette citation j'eus
l'idée qu'il me fournirait aussi, peut-être, quelque renseignement sur une
autre branche de l'uïdustrie indigène relative non plus à l'alunentation mais
à l'habillement, je veux due sur le système de corroyage que M. Simonin a
vu pratiquer par les Indiens des prairies qui, sans employer en apparence
autre chose que la cervelle de l'animal, parviennent à donner à la peau du
bison la souplesse et le moelleux d'une étoffe de laine. Dans ce dessein je
parcourus successivement tous les sommaires placés en tète des chapitres,
et trouvai enhn, sinon ce quejt; cherchais, du moins un procédé de prépa-
ration du cuir des grands ruminants pratiqué dans un autre canton, et
esseniiellemeul différent du premier. Je reviendrai bientôt sur ce procédé
par lequel on se propose de rendre le cuir plus dur qu'il ne le devien-
drait sî on le laissait se dessécher naturellemeut, mais je dois auparavant
ajouter quelque chose à ce qui a été déjà dit des façons que l'on donne
aux cuirs destuiés à rester souples. J'emprtniterai ces détails à l'ouvrage de
M. Catlln: « Lettres et Notes sur les mœurs et coutumes des Indiens de l'Amé-
rique dn Nord » ; sa lettre Vil, datée du coudiient du Missouri et delà rivière
de la Pierre jaune [Yellow Slone Rio.), a surtout rapport aux usages des
Corbeaux et des Pieds-Noirs qui savent, il est vrai, préparer ces belles peaux
garnies de leur toison -dont parle M. Simonin, mais n'en font guère nn objet
d'exportation, celles que fournit le commerce aux villes des États-Unis, où
elles sont connues sous le noui de Buffalo-robes, venant surtout des pays
situés moins loin vers l'ouest. Chez ces Indiens, comme chez nos tan-
neurs, la première opération à laquelle on soumet la plupart des peaux
a pour résultat d'en faire tomber le poil. Toute la différence dans les
procédés consiste en ce qu'au lieu du baiu de chaux, c'est un bain de forte
lessive de cendres dans lequel les peaux sont maintenues quelques jours
immergées. Le poil enlevé, on tend la peau soit sur un châssis, soit sur le
soi, au moyen de piquets passant dans des trous pratiqués sur ses bords
et enfoncés en terre de manière à la tenir bien également étirée; elle reste
ainsi iiendant plusieurs jours pendant lesijuels on (a tamponne avec la cervelle^
puis on procède au raclage qui se pratique avec uu os large aiguisé sur
les bords, le plus souvent un omoplate, ou avec un outil en silex ayant à
( «7« )
peu près la forme d'iiiie hermiiiette , iiistniniciit sur lequel l'ouvrière
agenouillée pèse de tout le poids de son corps. Cela fait, ou détache la
peau, et peudaut cpi'elle sèche ou coutiuue à la travailler à force de bras
il la manière de nos corro^eurs jusqu'à ce qu'elle soit aussi moelleuse
(urelle peut le devenir. Ce travail est du déparfenienl des fetnmesqui, dans
ce cas comme dans presque tous les a.'itres, sont chargées des ouvrages les
plus rudes.
« La plupart de ces peaux, ajoute M. Calliu, sont cependant soumises
» ensuite à une autre opération tpii eu augmente la valeur et les rend
» d'un bien meilleur usage. Cette opération consiste à Its enjliiner, ce qui
» se pratique de la manière suivante. On creuse en terre un trou au
» fond duquel on dresse un feu alimenté par du bois mort, qui, en brû-
» lant, donne très-peu de flamme et beaucoup de fumée. Au-dessus de ce
» foyer on bàtil, avec qiielques menues perches, une cage conique qu'on
» recouvre d'un capuchon eu cnii' cousu sur les bords ponr mieux s'op-
» poser à l'échappement de la fumée. C'est sous cette cloche que l'on place
» les peaux auxquelles ou veut donner la dernière façon, et elles restent
» ainsi au moins un jour exposées à cette fumée chaude qu'on a bien soin
» d'entretenir. Elles ont, en sortant de l'éluve, tuie propriété précieuse
)) qu'elles n'avaient point en y entrant; elles peuvent être mouillées impu-
» nément autant de ibis qu'on le voudra, "reprenant toujours eu séchant
» leur première souj)lesse. »
» Dans un passage précédent, M. Catlin, ])arl;uit de^i armes de ces mêmes
Indiens, disait (lettre V) : « Leur bouclier est fait en peau de cou <le bison
» enfutnée et endurcie au moyen d'iuic colle forte qu'on oljtient de la corne
» du pied de la béte », ce qui ferait d'abord supposer que l'enfumage n'est
l)as réservé aux seuls cuirs qui doivent rester souples. En y réfléchissant
cependant, je me suis demandé si, dans le feu qu'on allume lorsqu'il s'agit
de faire un bouclier, la lumée qui se produit est considérée comme ayant
quelque iuqîortance, et j'en suis venu à ci-oire ([uc le ])rocédé O|)ératoire
des Piedi-Noirs pourrait bien ne différer en rien d'essentiel de celui (pii
était en usage parmi les Shoslionees, et que Lewis et Clarke iious ont lait
connaître à peu près dans ces termes :
« Leur bouclier est une pièce de cuir de bison de forme circulaire ayant
» de 2 pieds /| pouces à 2 pieds 5 de iliamètre.... Le cuir de bison sec est
» toujours à l'épreuve de la tlèche, mais les Shosliouees sont convaincus
» que, pour être parfait, un bouclier doit avoir été fabricpié avec certaines
M cérémonies mystérieuses, cpii commencent toujours par un banquet au-
( 879)
» quel prennent part les principaux guerriers et, comme de raison, quelque
)) sorcier fi). Le repas Uni, on creuse en terre un trou de diamètre égal à
» celui que doit avoir le bouclier; on place au tond des pierres rougies
» au feu, sur lesquelles on verse ensuite de l'eau qui se convertit en une
» vapeur brûlante. La peau de bison, qu'on a laissée de toute sa grandeur,
» peau qui doit être celle d'un mâle âgé de deux ans qu'on aura eu soin
» de ne pas laisser sécher depuis le moment où elle a été enlevée à l'animal,
)> est alors étendue au-dessus de la fosse brûlante et tirée en sens opposé
» par autant de mains qui peuvent eu saisir les bords; bientôt le poil qui
» est tourné en dessus se détache aisément et est enlevé par poignées. Le
» cuir, cependant, se contracte progressivement, et c'est seulement lors-
» qu'il est réduit aux dimensions que doit avoir le bouclier que s'arrête
» la première partie de l'opération; la seconde consiste à l'étendre sur un
» cuir bien lisse, préparé à la manière du vélin, contre lequel on l'applique
» fortement en le piétinant avec les pieds nus. Cette dernière partie de la
» fabrication, à laquelle prennent part successivement tous les conviés,
» dure quelquefois plusieurs jours ; après quoi le bouclier est remis so-
1) lenuellement à son propriétaire et déclaré paifait. »
» 11 me semble que celte description est complétée par l'indication de
M. Clatlin et fait comprendre l'usage de la colle forte dont Lewis et Clarke
n'ont point parlé. Elle est nécessaire pour faire comprendre l'adhésion des
deux cuirs, qui n'a pas pour effet d'augmenter seulen)ent l'épaisseur de la
rondache : la peau exposée au feu, en devenant à la fois plus épaisse et
plus dure, a perdu nécessairement quelque peu de son élasticité; la peau
parcheminée lui rend ce qui pouvait lui manquer à cet égard, et elle de-
vient dès lors plus propre à résister à un" choc qui, sans cela, tendrait
à rompre l'arme.
(i) Le bouclier est pour tnus ces Indiens d'une telle importance, qu'on n'a point lieu de
s'étonner qu'on ait cru devoir en entourer la fabrication de (|uel(jues prati(]ues religieuses
ou au moins d'un certain mystère. M. Hunt, (|iii, vers l'année i8i i, fut aussi envoyé, par
terre, des bords de l'Atlantique vers l'autre Océan, mais qui traversa les montagnes Rocheuses
en un autre point que Lewis et Clarke, eut l'occasion d'assister à une réception solennelle
qu'on faisait dans un village d'Aricaras à une troupe de guerriers qui revenaient vainqueurs.
Ceux-ci se présentaient dans leur plus bel appareil de guerre et armés d'ailleurs assez diver-
sement : '< (juelipies-uns, dit le narrateur, avaient un fusil, d'autres l'aie et la flécbe, plusieurs
le casse-téte ; tous avaient nu boiicticr rie < lar de liison, pièce d'un usage général parmi les
Indiens des prairies qui, dans ces vastes plaines, ne peuvent profiter du couvert des forêts,
pas inênie de l'abri que peuvent présenter des arbres isolés. » (Irviko: Astorin. Paris,
i836; in-8°, p. i54.)
C. U., iS-o, 3« Semestre. ( \. L.XXI, N" 2iî.) ' ' ^
[ 8So ;
» L'expédition si pénible dirigée par MM. Lewis er Clarke eut, personne
aiijo'.ird'luii ne l'ignore, le succès que s'en promettait le Gouvernement
qui l'avait ordonnée, et a en jjour résultat final l'établissement de ce cbe-
uiiii de fer, qui permet de francbir dans un temps comparativement très-
court et presque sans fatigue l'immense espace compris entre les deux
mers. La relation de ce premier voyage cependant reste pour l'ethnologiste,
ainsi (pi'ou en peut juger par les emprunts que nous venons d'y faire, un
répeitoire dans lequel il tiouvera, sin- les babiludes et l'industrie des indi-
gènes, des indications d'autant plus précieuses que bientôt ces peiqdes au-
ront disparu de la surface du globe. Parmi les renseignements qu'on en
peut tirer, qu'il nous soit permis de faire remarquer que quelques-uns
prennent des circonstances dans lesquelles nous nous trouvons aujour-
d'hui un intérêt particulier. J'ai, en commençant cette Note, indiqué une
des ressources alimentaires auxquelles ont recours les peaux- roiujes que le
besoin a rendus industrieux; en la terminant, je dirai deux mots des
épreuves cpi'ont rencontrées les hommes de race blanche une fois engagés
dans ces pays sauvages, et de la manière dont ils ont su les surmonter. On
savait bien au- départ qu'il ne fallait pas songer à emporter îles vivres poiu-
tout le voyage, et l'on comptait sur les produits de la chasse; maison eut
à traverser de vastes étendues de pays dans une saison où la chasse n'y
donnait rien. Le bisou manquant, on eut recoiu's à la viande de cheval,
qui fui acceptée sans difficulté; puis, celle-ci venant à manquer, il fallut
eu venir à la chair de chien, heureux encon; quand on put s'en procurei-.
(le. ne fut pas d'ailleurs sans avoir à vaincre bien des répugnances. » Ce-
)> pendant, remarque le narratem-, des expériences répétées nous four-
« nireul la preuve que nos hommes, exléiniés par les fatigues et le manque
« de vivres, ne reprenaient jamais plus tôt leurs forces et leur embonpoint
» que lorsqu'ils avaient été quelque temps à ce régime. » Ce fait demeura
si bien établi que, moins de ciiit] ans après, dans une nouvelle expédition
due cette fois à l'initiative d'un simple particulier, dans celle que M. Astor
cjivoyail par lerre vers l'élablissomeul commercial qu'd voulait fonder- sur
le Pacifique, à l'endjouchure de la rivière Columbia, dès que le besoin de
provisions Iraiches commença à se faire sentir, les chevaux étant rares et
chers dans le premier village indien ou l'on s'arrêta, ou n'hésita pas à y
faire empiète d'un grand nombre de chiens destinés à être mangés (r). »
(i) Irvinc. : Asinna. Paris, i836, in-8", p. 122, Des chiens d'une race particulière étaient,
chez ces Indiens ( di-s Aricaras) el chez beaucoup d'autres, élevés et engraissés comme ani-
UMUX (le lii)iii-|i('|-ic.
Mi
iVOMINATIOXS.
L'Acafléinie procède, pai' Ja voie du scrutin, à la nomination d'une Com-
mission qui sera chargée de juger le concours pour le grand prix des
Sciences physiques (question des phénomènes génésiques qui précèdent le
développement des animaux).
MM. Milne Edwards, de Quatrefages, Blanchard, Cosle, Dumas réunis-
sent la majorité des suffrages. Les Membres qui, après eux, ont obtenu le
plus de voix, sont MM. Robin, Brongniart.
L'Académie décide que la Commission précédente sera chargée égale-
ment déjuger le concours pour le prix Bordiu (question relative à l'ana-
tomie comparée des Annélides).
1/Académie procède, par la voie du scrutin, à la nomination d'une
Commission qui sera chargée déjuger le concours pour le prix Poncelcl.
MM. Liouville, Delannay, Morin, Chasies, Combes réunisseni la majorité
des suffrages. Les Membres qui, après eux, ont obtenu le plus de voix,
sont MM. Bertrand, Serret, Bonnet.
MEMOIRES PRESEIMTES.
AKROSTATIOÎS. — Du moyen de pinduire à vnloitli', à honi i/o at'roshils, un
txcédriDl de force nsrensininielle j oiir (ijiérer des montées cl des ilcsii nies
pnrlielles ; pur M. Bouvet.
(Renvoi à la Commission précédenunenf nouuuée.)
a Dans la Communication que j'ai eu l'honneur d'adresser à l'Académie
des Sciences, dans sa dernière séance, siu- la combinaison du ballon h gaz
et de la Rlontgolfiére, j'ai montré que si c repré.sente le volume île gaz
perdu, P le poids de l'air, [> le poids du g.iz, la quantité de force ascen-
sionnelle perdue est représentée par
et j ai montré aussi que, pour compenser celle perte, il laul pniduiie la
Il 8.
I 88'i )
dilatation du volume restaiil d'une quantité i»'
<> =:
enfin, par le calcul, j'ai prouvé que la combustion d'une quantité de {^az
représentant une perte ilo i grainnie de force ascensionnelle, représente
un accroissement de 122 grammes de celte même force. Un calcid ana-
logue montrerait que la combustion de i gramme de gaz d'éclairage pro-
duit 170 grammes de force ascensionnelle.
» Voici maintenant la description des deux dispositifs destinés à réaliser
les avantages qu'indiquent les chiffres ci-dessus.
» Dispositif n° 1 [fuj. i). — A est un ballon sphérique ordinaire; B est
un ballon intérieur, de forme cylindroconique, ouvert seulement à sa base.
A Ballon spbérlquu,
B Monlgolfière.
N Nacelle oti se trouve le foyer.
SS Suspentes pour maintenii- verticale la nioDlcolfière.
Au départ, ce ballon B est complètement vide, ses parois se touchent, mais
au fur et à mesure il se perd du gaz, et, par suite, de la force ascension-
nelle; alors on introduit de l'air qu'on échauffe à l'aide d'un foyer à gaz
en tout semblable à celui qui est décrit pour le dispositif n" 2. Ce ballon B,
dont la capacité est de i.^o mètres environ, remplit ici le doid)le office de
poclie d'air et de iMonIgollière. En cond)inaiit les actions si différentes
( '^« • )
de ces deux organes réunis en im senl, on voit qu'on peut, soit obtenir nn
certain échaiiffement du gaz du ballon, pour angmenler même la force pri-
mitive, soit, à un moment donné, taire arriver de l'air froid poiu' refroidir
le gaz et opérer une descente partielle ou trouver des courants favorables.
Mais cette disposition présente le grave inconvénient d'échauffer les mé-
langes détonants qui se forment par endosmose à l'intérieur de R, malgré
la construction sjjéciale du foyer; il y a là xm danger qu'il convient d'évi-
ter. Ces considérations, qui résultent des observations que M. Dumas a
bien voidu me faire, m'ont conduit à adopter le dispositif u° 2.
» Dispositif n° 2 [fig. 2, 3, 4). — Dans cette disposition, la poche d'air
est séparée de l'appareil destiné à échauffer le gaz du ballon.
A Ballon sphérique.
B Becs de gaz (iu foyer.
C ConJuit qui mène le gaz au foyer.
E Enveloppe du foyer.
O Grillage po\ir répartir le calorique dégagiï par
le foyer.
P Poche d'air gonll
P' Poclie d'air pliée.
R Appareil récliauffeur.
SS Suspentes pour maintenir le récliauffeiir dans
une position verticale.
ah Ligne de coupe .^es fg. ?> el tf.
» A est le ballon ordinaire, P la poche d'air qui, lorsqu'elle est vide, se
replie en P'; gonflée, elle prend la forme d'un anneau, et par .sa position à
la partie basse, elle augmente la stabilité de l'aérostat. R est l'appareil ré-
chauffeur, à parois métalliques, qui descend jusqu'à la nacelle où se trouve
le foyer que la /ig. 3 représente en plan et la //(/. 4 f» coupe verticale.
M Au ch'parl , la pDclie 1' esr repliée en 1'', iiutis R est plein (r;iir;
pour éviter sa déformation, on niainlient, à l'aide de la pompe, un léger
excès de pression. Cet appareil R étant métallique, il ne s'y forme pas de
mélanges détonants; !e foyer, formé par une couronne de becs de gaza
courant d'air forcé, réglé chaque fois par une clef, est entouré d'une double
enveloppe T et T' de toile métallique, qui met en garde contre toute chance
d'incendie et d'explosion. Ce dispositif a cet avantage sur le précédent, qu'il
permet, par le réchauffeur R, de produire l'augmentation de volume \>'
pour compenser la perte de force ascensionnelle, et d'introduire dans la
poche P la quantité d'air froid %< — c', de telle sorte que, tout en conservant
la même force ascensionnelle, on maintient le ballon constamment plein.
C'est là une conilition essentielle pour faire durer les enveloppes et aussi
pour les aérostats qu'on essayera de diriger. J'ajoute que le réchauffeur R et
ses accessoires pèsent i5 kilogrammes au luaximum.
» Voici, en terminant, quelques considérations sur cet appareil réchauf-
feur, qui, employé dans les ballons dirigeables, y fonctionnera comme le
condenseur des machines à vapeur.
» J'admets d'abord qu'on emploiera le moteur à air dilaté par la com-
bustion du gaz, comme je l'ai précédemment proposé. Avec la vapeur d'é-
chappement d'un moteur à vapeur, on obtiendrait le même résultat.
» Un moteur de G chevaux, force nominale, consomme 5 mètres cubes
de gaz par heure. Les gaz brûlés qui sortent du cylindre, après qu'ils
ont produit leur effet mécanique utile, entraînent une quantité de calo-
rique égale à 6976 X 5 = 34875 calories, dont il faut déduire les quan-
tités »le chaleur perdues de différentes façons (eau vaporisée pour refroi-
dir le cylindre, i''^, 5oo — 637 = 955'^^,5, et le double au moins de cette
quantité de chaleur perdue par les autres organes), soit environ 3ooo ca-
lories, il reste 31875 calories à utiliser, qu'on perd habituellement dans
l'air si on les fait arriver en loul ou en partie dans le réchauffeur. Ils y rem-
placeront le foyer; 31876 représentent la combustion de \'^ = 2''e,55
de gaz. Chaque kilograuune de gaz pouvant compenser 170 kilogrammes
de force ascensionnelle, on voit que la quantité qu'il sera possible de com-
penser, par heure, sera représentée par 170 x '2''°, 55 = 433''f^,5o, et cela
sans rien coûter.
» Ce chiffre est un chiffre théorique, mais ou p(>ul eu conclure qu'un
b;dlon de 4ooo mètres cidjes, ayant \\u nioleu!' consommant 5 mètres cubes
par heure, pourra faire fonctionner le réchaulféur sans rien dépenser, tandis
( 885 )
que, dans des conditions ordinaires, il fandrait consommer 2 et même
3 mètres cubes pour obtenir le même résultat. Je ne crois donc pas me
tromper, en disant que ce réchaiiffeur fonctioiuiera comme le condenseur
de Watt, et permettia de réaliser une économie de '5o à 4o poiu- 100 siu- la
dépense du moteur. »
MÉTÉOROLOGIE. — De la périodicité du temps, réglée d'après les indications
Joiiriiies par les phases de la Lune ipii suit celle de l'éipiinoxe. Note de
M. BÉZAKD i)E WouvEs. (Extrait.)
(Commissaires, MM. Cli. Sainte-Claire Deville, Delaunay, Laugier.)
« Conclusion. — Je crois pouvoir formuler les règles suivantes :
» i" Division du temps en deux époques, qui prennent date aux équi-
noxes, 21 mars et 21 septembre;
» 2° Durée de chaque épocjue : six Lunes ou périodes lunaires;
» 3" Dans chaque époque, trois Lunes d'augment et tiois Lunes de
décroît ;
» La Lune qui commence, après celle de l'équinoxe, règle par chacune
de ses phases la |)ériodicité du temps pendant la durée de l'époque;
» 6° Le temps qui se produit aux phases de cette Lune se reproduit aux
mêmes phases des cinq Lunes suivantes, en augmentant ou décroissant,
selon que l'on est dans la période d'augment ou dans la période de
décroît. »
M. H. GouiLLY adresse une Note relative à un procédé qui peut servir
à déterminer la direction suivie par un aérostat et sa vitesse dans l'espace.
(Commissaires : MM. Moriu, Delaunay, Dupuy de Lôme.)
M. Berger appelle l'attention de l'Académie sur une circulaire ayant
pour but la création d'un prix de 5oooo francs, pour celui qui trouverait
et ferait appliquer, soit dans l'armée, soit dans la garde nationale ou dans
un corps franc reconnu par le Ministre de la Guerre, un système dabri
mobile satisfaisant aux conditions suivantes : i" résister à la balle du fusil
Chassepot; 2" abritei' facilement quatre hommes; 3" être muni de deux
meurtrières au moins; 4" se démonter eu quatre ou cinq parties, pouvant
être portées par autant de soldats; 5" tenir lieu de lentes-abris et rempla-
cer ainsi les tentes actuelleuicut en usage dans l'armée.
(Renvoi à la Commission nommée pour les questions relatives a l'art
mihtaire.)
( 886 )
M. Brachet soumet au jugement de l'Académie un projet de canon,
porté SU!' iMi chariot blindé.
(Renvoi à la même Commission.)
CORRESPOiVDAlVCE.
M. LE Secrétaire perpétuel donne lecture de la dépèche suivante,
adressée à M. le Président de l'Académie par M. le Directeur général des
lignes télégraphiques :
'< Paris, k' i6 décembre 1870, i''25"' du soir.
» D après une dépèche du 3, que je reçois de M. Steenackers, le ballon
le Folla, monté par M. Janssen, est tombé prés de Saint-Nazaire, sans acci-
dent. Je suis heureux de vous transmettre cette excellente nouvelle. »
t'HYSIQUb: DU GLOlili — La Seine : Eludes sur le réijime de lu pluie, des
sources, des eaux eouranles; ajiplicaliuus diverses ù iarl de Cliigéiiieur et
de l'Agriculture; par M. Belgkaivd (1).
M Le public s'est vi\ement préoccupé, pendant le siège de Paris, des
crues de la Seine et de la Marne; il n'est donc pas hors de propos de faire
connaître le régime de ces deux rivièi'es et des autres cours d'eau du bassin
du fleuve parisien. Je m'occupe de ces recherches depuis i832, et de nom-
breux iMémoires, publés dans les annales des Ponts et Chaussées, le Bulletin
des Sociétés Géologique et Météorologique de Franco, établissent d'une
manière certaine la [iriorité de mes travaux sur ceux des ingénieurs et
autres savants cpii, longtemps après moi, se sont engagés dans la même
voie. I/iui de ces Mémoires a été présenté, en 18471 ^ l'Académie des
Sciences.
)) (^es études sont résumées dans deux volumes, dont l'un a été imprimé
aux frais de la ville et présenté à l'Institut par 31. Dumas, le 16 mai 1870(2).
I» L'autre est le manuscrit que j'ai l'honneur de présenter à l'Académie,
et je ne sais quand il pourra être imprimé; les circonstances où nous nous
trouvons ne se prêtent guère à une publication scientifique. J'y joins un
exemplaire de tous les Mémoires publiés par moi jusqu'à ce jour sur le
même sujet.
(i) L'Académie a décidé que celte Communiialion, bien que dépassant en étendue les li-
mites réi^lementaires, serait inséré en entier dans le Com/j/r rendu.
(■>) l.n Sri/tr : Lr bdsxiri jinrisifii nu f li'^i s iiiUélli^tonijin !■,
( 887)
» Je ne reviendrai pss sur ce que j'ai dit de l'orographie du bassin de la
Seine (i). Quoique ce bassin soit un pays de plaines, il change d'aspect,
pour ainsi dire, à chaque étape du voyageur qui le parcourt, et cette variété
si singulière, si rare dans les pays plats, il la doit à la variété non moins
grande des formations géologiques qui l'occupenl ; on verra, par le résumé
qui suit, que ces coulrasies, dus à la nature des terrains, ne sont pas moins
remarquables en ce qui concerne la composition des eaux de source, le
régime des eaux courantes et les divers produits que l'agriculture tire du sol.
» De la pluie. — Les objets princii)aux de ces études étant les eaux cou-
rantes, les sources et l'agriculture, j'ai dû faire connaître d'abord la loi de
la répartition des eaux pluviales à la surface du bassin.
» Il pleut beaucoup sur les bords dr l'Océan; cette première ligne de
maxima, correspondant aux côtes de Normandie, est peu intéressante,
puisqu'elle est sans action sur les crues du fleuve. L'uniformité d'altitude
des plateaux depuis l'Océan jusqu'au pied de la chaîne de la Côte-d'Or
détermine une décroissance sensible de la pluie; il y a une ligne de minima
presque parallèle au rivage de la Manche qui s'écarte peu de la valléi>
d'Oise. A la Champagne humide correspond une ligne de maxima qui suit
le pied de la chaîne de la Côte-d'Or ; puis il y a une décroissance brusque
vers la partie basse de cette chaîne; mais à mesure qu'on s'élève sur les
pentes de la basse Bourgogne et du Morvan, la pluie augmente jusqu'à la
ligue de faîte.
» Voici les hauteurs moyennes annuelles de pluie constatées à la sur-
face des divers bassins des grands affluents du fleuve :
mm
Bassin d'Yonne ■jSa ,8
» de la Seine proprenienl dite 684 > 3
» de la Marne 781 ,o
« de l'Aisne 622 ,0
» de l'Oise 583 ,0
Moyenne générale • . 708,4
M Le maximum de hauteur de pluie correspond à deux stations du
Morvan, le Haut FoUiu et les S^ttons (altitudes 902 et 5gG'",68).
La moyenne annuelle pour ces deux stations est i^5o™"'
Le minimum se trouve, à Venette^ prés Compiègne (altitude 4i mètres),
moyenne 4^^
La moyenne des huit pluviomètres de Paris donne 556
ij Le biissin parisien aux âges antéhistoriques , p. 49 et suivantes.
C. R., 1870, -i' Semestre. (T.LXXI, ^'"io.) ' '9
( 888 )
» Ces moyennes sont nn peu faibles, parce qne, depuis 1857, nous
subissons des sécheresses sans exemple depuis plus de deux cents ans;
aussi notre moyenne pour Paris est de 556 niilliuiétres, tandis que celle qui
résulte des observations de l'Observatoire de Paris depuis 1816 est de
575'»",59.
» Je fais graver chaque année, depuis huit ans, les hauteurs de pluie
constatées à des stations d'observations dont le nombre s'élève aujourd'hui
à plus de cent. Au bas de la feuille correspondant à un bassin figure la
courbe des variations de niveau du cours d'eau principal. On trouvera au
dossier un exemplaire de chacune de ces feuilles.
» Leur examen fait reconnaître immédiatement deux lois fort impor-
tantes. Les pluies qui produisent les crues des affluents de la Seine sont
toujours des pluies générales dues à une action almosjjliérique qui se fait
sentir, à deux ou trois jours d'intervalle, non-seulement sur toutes les par-
ties du bassin de la Seine, mais encore sur les bassins de la Loire, de la
Saône et de la Meuse; ainsi, quoique nous soyons séparés aujourd'hui du
reste du monde, de ce qu'il est tombé des pluies suffisantes pour produire
une crue à Paris, nous sommes en droit de conclure que le même phéno-
mène s'est produit sur les bassins voisins et que la Loire, la Saône et la
Meuse sont également en crue.
M Les pluies tombées de juin à octobre ne profitent aux cours d'eau que
dans les années excessivement humides. Les crues sont habituellement dues
à des pluies tombées de novembre à mai (loi déjà indiquée jjar Dausse).
» De la perméabilité du sol. — J'ai indiqué sur la carte générale du bas-
sin de la Seine jointe au dossier les terrains perméables par des rayures, les
terniins imperméables par des teintes plates.
« Voici les caractères les plus frappants de ces deux sortes de terrains.
Lorsque le sol est franchement perméable, le débouché mouillé des ponts con-
struits sur le tliabveg des vallées où il n'existe pas de sources est toujours égal
à zéro. J'ai constaté le fait sur des vallées qui ont jusqu'à 3oo kilomètres
carrés de superficie.
» Les vallées les plus profondes forment drain et attirent toutes les eaux
l)luvi;des absorbées, le reste du sol reste sec et aride; les cours d'eau sont
donc Irùs-rares.
» Les eaux pluviales passant par les sources avant d'arriver aux thal-
wegs, les crues de ces rares cours d'eau s'élèvent très-lentement et descen-
dent de même, et sont par conséquent de Irès-lomjue durée, de quinze jours
au moins.
( 889 )
» Les parties du bassin de la Seine où ces caractères essentiels des ter-
rains perméables ont été constatés sont les terrains oolithiques de la Bour-
gogne, la craie blanche de la Champagne et de la Normandie, les sables et
calcaires tertiaires du Soissonnais, du Vexin, du Yalois, etc., le sable de
Fontainebleau et le calcaire de Beauce, les alluvions des vallées. Ces terrains
occupent une surface de Sgaio kilomètres carrés.
» Lorsque le sol est imperméable, une grande partie des eaux pluviales
ruisselle à la surface du sol et afflue très-rapidement aux thalwegs. Le dé-
bouché mouillé des ponts est donc très-grand ; en divisant ce débouché par
la surface des versants situés en amont, oti a le débouché kilométrique qui
s'élève jusqu'à i"", 5o.
» En temps de pluie, le thalweg de chaque pli de terrain devient un
ruisseau : les cours d^eau sont donc extrêmement nombreux. Les eaux s'écou-
lant à la surface du sol, arrivent aux thalwegs avec une grande rapidité;
par conséquent, les crues des cours d'eau sont très-violentes, mais de très-courte
durée, rarement de plus d'un ou deux jours.
» Ces caractères essentiels des terrains imperméables ont été constatés
dans les granités et terrains /jaléezoïques du Morvan, le lias de l'Auxois et de
Langres, le terrain crétacé inférieur de la Champagne humide et du pays
de Bray, les argiles du Gâtinais, les argiles à meulière de la Brie et de Satory,
les argiles des sources de l'Eure.
» Ces terrains occupent dans le bassin de la Seine une surface de
ic)44o kilomètres carrés.
» Les rares cours d'eau des terrains perméables étant alimentés uni-
c]uement par des sources coulent toujours à pleins bords et sont bordés
de prairies humides et même de marais tourbeux (i); les fonds de vallée
des terrains imperméables balayés par des crues violentes sont an contraire
remarquablement sains et bien drainés naturellement.
)) J'appelle torrents les cours d'eau des terrains imperméables, et cours
d'eau tranquilles ceux des terrains perméables.
» Des sources. — Les limites de ce résumé ne me permettent pas d'entrer
dans de grands détails sur l'étude très-complèle des sources du bassin de
la Seine, que j'ai dû faire avant de commencer les travaux des dérivations
de la Dhuis et de la Vanne.
» Ces sources se divisent en trois classes.
i) Voir le Bassin parisien aux âges antéhistoriquee, pages 127 et suivantes.
119..
( V)
» 1° Les sources des terrains imperméables qui sont sans importance
et dont je ne parlerai point ici.
» 2° Les sources des terrains perméables qui jaillissent toujours au fond
des vallées les plus profondes, le long des rares cours d'eau de cette sorte
de terrain. Ces sources sont souvent énormes : telles sont celles de la
Vanne.
» 3° Les sources qui jaillissent à la ligne de contact d'un terrain imper-
méable et d'un terrain i)erméable qui le recouvre. Ces sources, ordinaire-
ment très-nombreuses, jaillissent aussi bien à flanc de coteau qu'au fond
des vallées.
» Trois cents sources environ ont été essayées au moyen de l'hydroti-
mètre, et se classent ainsi par ordre de pureté ;
Titres hydroti métriques,
o 0
1° Sources des granités du Morvan de 2,0 à 7,0
2° » du terrain crétacé inférieur de la Champagne de 7,0 à 12,0
3° >> du sable de Fontainebleau. Bord des vallées de la Beaiice,
plateaux de la Brie de 6,0 à 22,0
, ( » de l'arkose des bords du Morvan de 1 1 ,0 à m, 5
( » de la craie blanche. Champagne ... de 12,0 à 17,8
5° » de la craie marneuse. Champagne, Normandie de i4,5o à 22,0
fi" " du calcaire à Entroques. Bourgogne de 16,90 à 21 ,5
!" de la craie blanche recouverte de terrains tertiaires.
Champagne. Vallée d'Eure de 17,0 à 27,5
• du calcaire de Beauce. Beauce de 17,0 à 25, o
>> des calcaires oolithiques durs. Bourgogne de 17,5 à 26,0
8° » des marnes vertes, partie non gypsifère. Brie pouilleuse, de 19,6 à 3o,o
9° » de l'argile plastique. Bassin de la Marne à l'aval d'É-
pernay de ao , o à 35 , o
10" » des calcaires oolithiques marneux. Bourgogne . de 21 ,5 à 34, o
» des terrains tertiaires compris entre les marnes vertes
et l'argile plastique. Brie, Valois, Vexin de 21 ,5 à 4*^>"
12" » du lias. Auxois de 27,5 à 120,0
.,„ j » des marnes vertes, partie gypsifère. Brie entre Meulan
/ et Château-Thierry. Banlieue de Paris de 23,o à i55,o
» Les sources des u"" i, 2, 3, elc, 10 sont propres à tous les usages domes-
tiques, et lie contiennent en dissolution, pour ainsi dire, que du carbonate
de chaux.
>• Poiu- les besoins d'inie grande ville comme Paris, on peut prendre,
presque sans choisir, celles des sources w"' i , 2, 3, 4, 5 et G qui sont les plus
1 1
{ 891 )
convenablement placées. Dans les n°^ 7, 8, 9 et 10, il faut choisir, beaucoup
de sources étant trop chargées de calcaire, et ayant la propriété de faire des
incrustations dans les conduites.
1) Les sources des n"' i i, 12 et i3 sont Irès-chargées de sulfate de chaux,
et sont pour la plupart impropres aux usages domestiques. Malheureuse-
ment, presque toutes les sources de la banlieue de Paris rentrent dans ces
trois genres; la grande lentille de terrain gypsifère s'étend de Meulan à
Château-Thierry, de sorte que, pour avoir des eaux de bonne qualité, on
a dû s'éloigner beaucoup de Paris et se rapprocher de la limite de la
Champagne et de la Brie.
» J'ai constaté, par de nombreuses expériences, que les eaux sont incru-
stantes lorsque leur titre hydrotimétrique, correspondant au carbonate de
chaux, dépasse 20 degrés (i).
» Des eaux courantes. — Par décision ministérielle du 3 février i854,
j'ai été chargé du service hydrométrique du bassin de la Seine. Les varia-
tions de niveau des cours d'eau de chaque terrain sont recueillies à un
grand nombre de points du bassin et gravées tous les ans sur deux feuilles.
J'ai joint au dossier un exemplaire de toutes ces publications.
» Sur la première feuille, j'ai fait ressortir le contraste qui existe entre
les crues violentes et de courte durée des cours d'eau des terrains imper-
méables, et celles des cours d'eau des terrains perméables qui montent
lentement et descendent de même, et sont par conséquent de très-longue
durée. I-.e degré de limpidité des cours d'eau de chaque terrain est indiqué
par des teintes.
M Les variations de niveau des grands cours d'eau sont gravées sur la
deuxième feuille, et l'on reconnaît imméclialement en l'examinant que les
crues des affluents torrentiels passent les premières sous les ponts de
Paris, qu'elles donnent toujoiirs le maximum de la crue du fleuve, mais
que les crues des affluents tranquilles qui passent quelques jours après
soutiennent celle du fleuve et augmentent sa durée.
» Pour chaque terrain, les courbes des variations de niveau affectent des
formes particulières très-nettes : ainsi les courbes des crues de la Seine, de
l'Ource, de l'Aube, de l'Ornain, de la Saulx, qui coulent dans les terrains
(i) Le titre liydrotimétrique des eaux de la Dhiiis, qui est de 23 degrés aux sources, est
réduit à 20 degrés en arrivant ;ï Paris, après un parcours de i3o kilomètres. Les eaux de
rivière perdent un peu plus. En i858, après une longue sécheresse, j'ai reconnu que les
affluents de la Seine perdaient en route une parlic de leur carbonate de chaux, et que leui-
titre hydrotimétrique aboutissait à f8 degrés.
(89^ )
oolithiques, se ressemblent entre elles, mais sont très-différentes de celles
de la Sommesoade qui coule dans la craie, ou du Cousin qui coule dans
le granité.
» Lois qui régissent les crues des cours d'eau. — J'ai cherché à formuler
les lois qui régissent les crues des cours d'eau. Lorsque le bassin est en
grande partie imperméable, comme celui de la Loire, les crues étant très-
violentes, mais de Irès-courle durée, la crue du fleuve cesse de s'accroître
à partir d'un certain point, parce que la crue de l'affluent est toujours
passée lorsque celle du fleuve arrive au confluent. Il en résulte que la
portée des plus grandes eaux connues est une constante à partir de ce
point, et que les crues extraordinaires sont presque toujours dues à un
phénomène météorologique unique, agissant sur une partie restreinte du
bassin. Ainsi l'on admet assez généralement que la portée des plus grandes
crues connues de la Loire, depuis le bec d'Allier jusqu'à la mer, est de
loooo mètres cubes par seconde, et ces crues sont produites, tantôt par les
affluents supérieurs, l'Allier et la Loire, tantôt par les affluents moyens, le
Cher et la Vienne, tantôt par les affluents inférieurs, la Vienne et la Maine.
Ces crues désastreuses sont donc assez fréquentes.
» Lorsque les terrains perméables sont très-dominants, comme dans le
bassin de la Seine, les crues sont de très-longue durée; il s'ensuit non-
seulement que la portée de la crue du fleuve s'ajoute à celle de chaque
affluent, mais encore que les portées de plusieurs crues, se succédant à
quelques jours d'intervalle, s'ajoutent les unes aux autres. La crue du
fleuve va donc en augmentant depuis les sources jusqu'à la mer, et il faut
plusieurs crues des affluents, passant l'une après l'autre à de courts inter-
valles, pour produire une crue extraordinaire. Ainsi la plus grande crue
connue de la Seine, celle de i658, est due à deux crues des affluents; celle
de 1740, à cinq crues; celle de 1802, la plus grande du siècle, à quinze
crues successives. Ces phénomènes sont donc extrêmement rares.
» Une première crue des affluents produit trois à quatre jours de crois-
sance à Paris; puis le fleuve reste étal ou décroît lentement; une seconde
crue, qui passe quelques jours après, fait encore croître le fleuve pendant
trois à quatre jours, et ainsi de suite. Eîi comptant le nombre des jours de
croissance des crues anciennement observées à Paris, on peut donc facile-
ment se rendre compte du nombre des crues des affluents qui les ont
produites.
» Citons, comme exemple, la crue qui passe en ce moment à Paris. Le
24 octobre, la Seine marquait o™,2o à l'échelle du pont d'Austerlitz; une
( 893 )
première crue des affluents torrentiels la fait monter, le 5 novembre;
à i™, 5o. Soutenue par les affluents tranquilles, elle décroît très-lentement;
le i5, elle marqu*; encore i'", lo, lorsqu'une deuxième crue des affluents la
porte, le i6, à i'",4o; elle se maintient à ce niveau jusqu'au 25. Une troi-
sième crue des affluents l'élève, le 27, à i'",70, niveau qu'elle conserve
les 28, 29 et 3o; puis elle décroît jusqu'au i3 décembre. Une quatrième
crue des affluents l'élève, le 16, à 2 mètres, niveau qu'elle conserve jus-
qu'au 18, et enfin une cinquième crue la fait monter, le 21, à 2'", 90. Ainsi
cette crue, d'une très-médiocre hauteur, a été produite par cinq crues
des affluents.
» J'ai choisi un certain nombre d'affluents à versants imperméables sur
lesquels on fait des observations, et j'ai reconnu empiriquement qu'en
multipliant par 2 la montée moyenne d'une crue de ces torrents, on obte-
nait avec une approximation suffisante la montée correspondante à Paris;
j'annonce ainsi la hauteur approximative d'une crue deux ou trois jours à
l'avance.
» Le fleuve n'a éprouvé qu'une seule crue extraordinaire, celle de 1802,
dans le cours du xix" siècle, qui est un siècle sec. En revanche, les basses
eaux extrêmes y sont très-fréquentes. Au xviu'' siècle, la Seine n'est des-
cendue que dans huit années et pendant quarante jours au-dessous du
zéro de l'échelle du pont de la Tournelle qui correspond aux basses eaux
de 1719- Le nombre d'années où le fait a été constaté de 1800 à i865 est
de 23 et le nombre de jours de i25i; c'est surtout dans les dernières
années, de 1857 à 1870, que la sécheresse a été remarquable. On ne trouve
rien de semblable en remontant en arrière jusqu'au commencement du
règne de Louis XllL
» Débouché mouillé des ponts. — Mes observations permettent de calculer
facilement le débouché mouillé des ponts des vallées de moins de 100 kilo-
mètres carrés de superficie. Si le sol est très-perméable, comme celui des
terrains oolithiques de la Bourgogne, de la craie blanche de Champagne,
du sable de Fontainebleau et du calcaire de Beauce, etc., le débouché kilo-
métrique mouillé est toujours égal à zéro, et s'il n'existe pas de sources
dans la vallée, on peut la franchir avec une route, un canal, un chemin de
fer, sans y construire de pont.
» Si le sol est imperméable, comme celui du Morvan (granité), de
l'Auxois (lias), de la Champagne humide (terrain crétacé inférieur), le dé-
bouché kilométrique mouillé varie de o'°,5o à i'°,5o; quelque petite que
soit la vallée, elle ne peut être traversée par aucune voie de communica-
( 894 )
tion sans un pont, et pour certains terrains comme le lias, une vallée de
loo kilomètres carrés exigerait une arche presque aussi grande qu'une de
celles du pont de la Concorde.
» Il n'est pas possible de fixer de règle pour les grands bassins; mais,
d'après ce qui précède, on voit qu'à vitesse égale de l'eau le débouché
mouillé des ponts croît dans les terrains perméables, depuis les sources
jusqu'à la mer, tandis que dans le^ terrains imperméables, à partir du
point ou la portée des plus grandes eaux connues est constante, le débou-
ché mouillé des ponts tend lui-même a être constant.
» Questions diverses. — Les limites dans lesquelles je dois resserrer ce
Mémoire ne me permettent pas de discuter différentes questions dont j'ai
donné les solutions. Je renvoie donc au texte même des différents Mémoires
ci-joinis pour tout ce qui concerne la construction des grands réservoirs
et des digues, la défense des berges par les plantations, le règlement des
usines, les eaux courantes considérées connue eaux potables, les variations
de température de l'eau dans les réservoirs, les aqueducs et les conduites,
et j'arrive à la partie de mon ouvrage qui intéresse l'agriculture.
» AgricuUure. Parties du bassin fertilisées par la boue diluvienne. — J'ai dé-
montré dans le premier volume de cet ouvrage que le l'elief actuel du bassin
de la Seine était le résultat d'une immense érosion diluvienne (i). Les eaux
courantes ont laissé derrière elles sur certaines parties, de grands plateaux
tout unis, dépourvus de pente, comme ceux de l'Auxois, du Gâtinais, de la
Brie, du Valois, de la Beauce, du Vexin, du Soissonnais, du pays de Caux,
et alors elles ont abandonné à la surface du sol une épaisse couche de li-
mon (2). D'autres parties du bassin sont disposées en pentes plus ou moins
fortes, comme la basse Bourgogne, ou en plaines ondulées couvertes de
basses collines, comme la Champagne, et alors, quoique le sol ait été re-
couvert par les eaux limoneuses comme les parties plates du bassin, la
boue diluvienne n'a pu s'y déposer. C'est un phénomène bien connu des
ingénieurs; le limon en suspension dans les eaux courantes ne se dépose
jamais sur les parties déclives du sol (3).
» Les plateaux sur lesquels la boue diluvienne s'est déposée sont tous
(i) Voir La Seine : le Bassin parisien aux dges antéhistoriques, p. 9 el suiv.
{1) Ibidem, p. ^o et suiv.
(3) Ibidem, p. 4<3. On trouve çù et là, en Cliainpagne et en Bourgogne, des lieux l'avu-
rables où le limon diluvien a pu se déposer; en Bourgogne, on donne à ce limon les noms
de petite aubue et d'herbue.
( 895 )
naturellement fertiles, souvent plus que les vallées. Les plaines et les
pentes ontlulées qui ne sont pas recouverles de ce limon sont presque sté-
riles.
» Réparlhion des prairies. — La cultvire des prairies naturelles peut s'é-
tendre sur les terrains imperméables, aussi bien sur les pentes et les plaleiux
quaii fond des Dallées; c'est un des caractères les plus remarquables de
ces terrains : elle y est donc très-développée. Elle est au contraire reléguée
au fond des vallées des terrains perméables et seulement sur les points acces-
sihlcs aux crues des cours d'eau, et par conséquent y est peu étendue.
» Qualité des prairies. — La qualité des prairies est très-variable d'un
pays à l'antre; elle est très-médiocre dans les terrains granitiques du Mor-
vaii. Le sol argileux de l'Auxois, du Nivernais, de la Champagne humide,
du pays de Bray, des bords des vallées de la Brie donne au contraire d'ex-
cellents fourrages. La plupart des prairies des terrains perméables pèchent
par excès d'humidité, souvent même elles forment de grands marais tour-
beux (i).
» Répartition du bétail. — L'espèce bovine se plaît surtout dans les pays
à grands pâtiu-ages, c'est donc le bétail qui convient le mieux dans les ter-
rains imperméables, c'est-à-dire dans le Morvan, l'Auxois, le Nivernais, la
Champagne humide, le pays de Bray.
» L'espèce ovine, au contraire, y contracte avec une malheureuse facilité
une maladie mortelle, la cachexie aqueuse; elle se plaît au contraire mer-
veilleusement bien dans les terrains perméables; c'est donc le genre de bé-
tail qui convient le mieux eu Bourgogne, en Champagne pouilleuse, dans
le Valois, la Beauce, le Vexin, le Soissonnais, le pays de Caux.
M De la stubulation. — Il est certains plateaux imperméables dépourvus
de pentes où ces deux genres d'animaux ne peuvent être élevés sans quel-
ques précautions : les bœufs, parce (pie les prairies ne végètent pas siu- un
vaste plateau dépom-vu de pentes; les moutons, pai-ce qu'ils y contractent
mieux qu'ailleurs la cachexie aquense.
M Lorsqu'un terrain ne convient pas naturellement à un genre de bétail,
la sta bulation permaneule ou intermittente est absolument nécessaire. Ainsi,
on ne pourrait engraisser des bœufs au jiàlinage en Beauce et en Cham-
pagne pouilleuse, le sol est trop sec. On perdrait tous les troupeaux si l'on
conduisait inconsidérément les moutons au pâturage par tous les temps,
(i) Voit La Siinc : le bassin parhien an.i- âges aiHéliistoiiiiui's, p. 12'^ et suiv.
C. F... 1870, 2" Semestre. (T. LXXl, N" 2a.) ' 20
( «96 )
dans l'Aiixois, lo sol est trop frais; ils y conlracteraiciit la cachexie
aqueuse. C'est ce qui est arrivé notamment en i853.
» Drainaqe. — Le drainage n'est nécessaire, dans les terrains imper-
méables, que pour les terres labourables; il est rare qu'il soit utile dans les
prairies, excepté cependant dans celles des granités ; inversement, lorsque le
sol est perméable, on peut drainer avantageusement beaucoup de prairies,
jamais des terres labourables. Ainsi, par exemple, le drainage appliqué aux
riches pâturages du pays de Bray, terrain imperméable, serait presque par-
tout aussi funeste qu'il est utile dans les prairies de la basse Bourgogne,
dont le sol est perméable. Dans ces dernières j)rairies, l'irrigation est le
complément du drainage.
M Sylviculture. — La partie haute du bassin de la Seine est une des ré-
gions les plus boisées de la France. Le Morvan, la basse Bourgogne, la
Champagne humide, le Gàtinais sont encore aujourd'hui extraordinaire-
ment boisés. Trois contrées sont presque déboisées, l'une est imperméalile,
c'est l'Auxois, et la belle venue des bouquets de bois qu'on y voit cà et là
prouve que les forêts ont été éliminées par d'autres cidturesplus produc-
tives.
» Les deux autres régions déboisées, la Champagne pouilleuse et la
Beauce proprement dite, sont perméables, et le sol est réellement im-
propre à la culture des arbres à feuilles caduques.
» Le reboisement par les arbres à feuilles caduques se fait avec une
grande facilité dans tous les terrains imperméables et dans les terrains per-
méables sablonneux. Il est au contraire on ne peut plus difficile dans les
terrains perméables calcaires, surtout quand les calcaires sont marneux ou
gélisses.
» Le boisement pour les arbres résineux est possible même dans les ter-
rains calcaires les moins propres à la végétation sylvestre.
» Le boisement n'est utilement praticable que dans les terrains où tonte
autre culture est impossible. Il ne convient de déboiser c|ue les terrains
Irès-fertiles.. Beaucoup de jjropriétaires se sont ruinés en déboisant des
terrains moyennement fertiles.
» f'ilicullure. — Le vin de bomie qualité ne se récolte que sur les
coteaux perméables de la basse Bourgogne et de la Champagne pouilleuse.
Il existe cependant une exception : les coteaux argileux du lias de l'Auxois,
recouverts par les éboulis calcaires des terrains oolithiques, donnent de
très-bons vins ordinaires.
» Les autres contrées imperméables, le Morvan, la Champagne humide.
( 897 )
]e Gâtiiiais, la Brie, ou ne produisent pas de vin, ou en donnent de détes-
table.
» Les pays plats, qu'ils soient perméables ou non, ne donnent pas do
vin. Ainsi on ne récolte, sur les plateaux de la lîeauce, du Valois, du
Vexin, etc., que des quantités de vin insignifiantes. I-es largos vallées de
gravier des terrains crétacés sont cultivées en vigne, mais donnent de mau-
vais produits.
Mémoires joints h cette Notice.
I" Études sur le régime des cours d'eau et les cultures du département de l'Yonne; iQ5i-
1" Études hydiologiques dans le bassin de l.i Seine; i852.
3" Étude des lois qui régissent les crues des cours d'eau ; i853.
4° InQuence des forêts sur récoulenient des eaux pluviales; i853.
5" De la simidtanéité des pluies qui produisent les crues de la Seine, de la Loire, de la
Saône et de la Meuse; i854-
6° Observations du service hydrométrique de la Seine; i856.
7° Service hydrométrique de la Seine; i856.
8° Sur l'averse tombée à Paris le 2r mai 1857.
9° Note sur le puits de Passy; étude des nappes souterraines; 1861.
10" Des grands débordements de la Seine à Paris; i864-
1 1° Notice sur le régime de la pluie dans le bassin de. la Seine; i865.
12° Note rectificative de cette dernière Notice; 1867.
130 Étude sur la crue de septembre 1866.
i4° Résumé des observations centralisées de 1867.
i5° Résumé des observations centralisées de 1868.
» (Ces quatre, derniers Mémoires ont été faits en collaboration avec
M. l'ingénieur Lemoine.)
16° Carie géologique et hydrologique du bassin de la Seine; i854.
17" Observations hydrométriciues : deux séries, de i854 à i86t).
18° Observations pluviométriques de 1861 à 1868.
19" Volume manuscrit dont cette Notice est le résumé.
» Trois des Mémoires les plus importants n'ont pu être joints au dossier,
savoir :
1° Première étude hydrologique. (Il ne m'en reste qu'un exemplaire.)
2" Notice sur la Carte agronomique de l'arrondissement d'Avallon. [Ici.)
3" Recherches statistiques sur les sources du bassin de la Seine. L'édition a été perdue
dans les bureaux de la ville. »
t20..
( 898 )
THERMODYNAMIQUE. — Sur In force des matières explosives. Note
de M. \. Cazin, présentée par M. Faye.
» La chaleur que dégage en brûlant 1 kilogramme d'une matière explo-
sive telle que la poudre dépend des circonstances dans lesquelles a lieu la
combustion.
» Soient
» I le travail interne, résultat de l'aclion chimique opérée dans la sub-
stance, lequel est dépensé;
» E la somme du travail externe yjro(/i(/i et de la moitié de la force vive
créée;
» C la chaleur spécifique vraie du mélange que fournit la combustion;
» t l'élévation île température, la substance étant d'abord à zéro;
» A l'équivalent calorifique de l'unité de travail.
» La conservation de Vénergie exige que
(i) AI = Ci; + AE;
on néglige le travail interne qui est dû a la cohésion gazeuse, et l'on sup-
pose qu'il n'y ait ni introduction, ni soustraction de chaleur.
» Supposons qu'après la combustion le mélange soit ramené à zéro, en
même temps qu'un travail externe E' est dépensé. Il y aura soustraction
d'une quantité de chaleur
(2) Q = C< + AE'.
Ces deux opérations peuvent s'effectuer simultanément et graduellement
dans les diverses parties du mélange, et l'on a finalement
(3) Q = Al- A(E-E').
On voit ainsi que cette quantité dépend des travaux externes mis en jeu.
Il est naturel de supposer que I est invariable pour la même matière explo-
sive; c'est la mesure de l'énergie chimique dépensée; elle ne dépend pas
des circonstances extérieures. La ciialeur de combustion Q, qui est acces-
sible à l'observation directe, varie d'une infinité de manières, quand on
change E et E'.
» Je vais appliquer cette considération à quelques problèmes relatifs à
la force de la poudre.
» 1" l'UOBLÈMI':. — I tiiloqranune de poudre à zéro hriile sous la pression
nlrnosphéricjue assez tenlemenl pour que la jorie élaslupie des tjaz développés
( «99)
50/7 équilibrée par cette pression, et le mélange est maintenu à zéro; (juelte est
la chaleur dégagée?
» Soient
» u le volume initial;
» V le volume qu'aurait le mélange, s'il n'y avait aucune soustraction de
clialeur ;
» Vo le volume final à zéro, ces volumes étant évalués en mètres cubes;
alors
E = io334 {v — u),
E'= io334(t'- i'o).
» Donc
(4) Q = AI - A.io334((^o - /<).
» MM. Bunsen et Schichkoff ont trouvé, en expérimenlant à peu près
clans ces circonstances,
Q = 619,5 calories et i'^ = o™*^, ig3.
« En prenant
A = 7- p et « = o'"'',ooi,
420 ' '
on trouve
AI = 746,1 calories.
Telle est l'énergie chimique dépensée dans la combustion.
» 2" PROBLÈME. — I kilogramme de poudre à zéro brûle dans un esnace
clos quel qu'il soit, maintenu à la même température ; quelle est la cbaœut
soustraite ?
» Pendant l'explosion, il y a des vitesses acquises et des tourbillonne-
ments qui créent finalement de la chaleur, sans qu'il y ait aucun travail
externe mis en jeu. Alors E et E' sont nuls, et l'on a
Q = AI = 746, 1 calories,
quel que soit le volume de l'espace clos. Le travail chimique est fotalemeni
converti en chaleur sensible, qui est soustraite au mélange, tandis que,
dans le premier problème, une partie de ce travail était converti en travail
mécanique externe.
» A ce problème se rattache une question traitée par MM. Bunsen et
Schischkoff. Si la poudre brûle dans un espace clos, égal à son propre volume,
sans qu'il y ait ni introduction, ni soustraction de chaleiu' |iar les parois,
quelles sont la température et la pression finales?
f 900 )
» La formule (i) donne
746, I — et.
» En admettant, avec les auteurs cités, C = o, i855, on trouve
t = 4022°.
La pression se calcule approximativement à l'aide de la formule do Gay-
Lussac et Mariotte
M £ étant le résidu solide valant o™'', ooo4 1 6 ;
M p désigne la pression en atmosphères. On a ainsi
p = 5191 atm.
MM. Bunsen et Schischkoff, ayant pris pour Q la valeur 619,5, ont trouvé
3340° et 4374 atm.
» 3" PROBLÈME. — 1 kiloc/ramme de poudre à zéro brûle dans un espace clos
égalàv„^ et imperméable à la chaleur; puis on le réduit ati volume ii par une
compression extérieure, sans qu'il y ait ni soustraction ni introduction de cha-
leur par les parois; quelles sont la température et la iression finales?
» Dans la première période, on applique la formule (i)
746,1 = C^,
d'où
i, = 4022°
comme précédemment.
» En mettant 1*0 à la place de u dans la formule (5j, on a
p, = i5, 74 atm.
» Le changement opéré dans la seconde période est le changement ré-
versible que M. Rankine représente par une ligne adiabatique; admettons
la relation qui s'applique aux gaz simples, au moins approximativement,
d'où l'on tire
/j = 56 io4 atm.
» La formule (5) donne ensuite
t = 46 049".
( 9"' )
On voit que le travail de compression décuple l'élévation de la tempéra-
ture, ce qui est un effet étranger à l'action chimique qui développe seule
la force explosive, dans la pratique.
« Ce problème a été traité par M. Berthelot [Compte rendit du 7 novembre
dernier). Les nombres diffèrent un peu des précédents, parce que M. lier-
thelot a pris
Q=6i9,5.
On voit que ce problème diffère de celui que MM. Bunsen et Schischkoff
ont voulu résoudre.
>) On peut multiplier les exemples de ce genre; j'en citerai encore un, à
cause de l'importance que les circonstances actuelles donnent à ces études.
» 4' PROBLÈME. — I liilogramme de poudre à zéro bnVe en surnionlant
lentement la pression almospliériqiie, sans qu'il y ait ni sonstraelion ni
introduction de chaleur ; puis on comprime le mélange dans tes mêmes condi-
tions, jusquà ce qu'il ait repris son volume itiitial u; quelles sont la température
et la pression finales?
» Après la première période, la température est t^ et le volume i',. Ima-
ginons que le mélange soit ramené à zéro, sons pression constante; il y
aura soustraction de 619,5 calories (1*'' problème). Soit C la chaleur spé-
cifique du mélange sous pression constante, nous aurons
619,5 = C7,;
admettant C'= C X i,4i, on trouve
/, = 2368°;
en mettant i, t', et/, à la place de ^, « et < dans la formule (5), on a
» Dans la deuxième période, le changement opéré satisfait à la for-
nude (6), où l'on met i et c, à la place de/J, et ('„. De là on tire
p = 87 i&'j alm.
» Enfin t se déduit de la forunde (5), à l'aide de celle valeur de /),
t = 7i926«.
» Il est aisé de voii' que celle énorme élévation de température est le
résultat de deux opérations successives, dont la seconde est une dépense
( 902 )
considérable de travail externe, plus considérable que celui du 3*^ pro-
blème. Aussi la chaleur sensible créée est-elle plus grande.
» Il est évident que tous ces nombres ne servent qu'à donner une idée
de la marche des phénomènes; car les formules (5) et (61 ne sont ]>as ap-
plicables à des pressions et des températures aussi énormes. En outre, les
phénomènes chimiques qui se passent dans de telles circonstances nous
sont inconnus. »
GliOLOGlE. — Elude des gaz volcanujues de Santorin. Note de M. FotyiiÉ,
présentée par M. Ch. Cainte-Claire Deville.
« Les gaz qui se sont dégagés dans la baie de Santorin, au début de
l'éruption de i866, offraient alors une composition remarquable, sur la-
quelle j'ai eu l'honneur d'appeler l'attention de l'Académie. Ces gaz, ri-
ches, pour la plupart, en hydrogène libre, provenaient de fissures commu-
niquant avec les profondeurs du sol, parallèles entre elles et comprises
toutes dans le voisinage immédiat de la partie centrale de l'éruption. Quel-
ques-uns se dégageaient des eaux de la mer en bouillonnant près des laves
incandescentes; d'autres s'échappaient du milieu de crevasses profondes
ouvertes à l'air libre et sillonnant l'ancien sol de Nea Kameni, entre les
deux centres éruptifs désignés sous les noms de Georges et d'Jfjliroessa;
d'autres, enfin, fournissaient en brûlant des gerbes de flammes, qui jaillis-
saient au sommet même de ces monticules de fortnation nouvelle.
» En 1867, les gaz combustibles m'ont semblé avoir disparu de la plu-
part des points où/je les avais recueillis l'année précédente. Les flammes
provenant de leur combustion ne s'apercevaient plus qu'au sonnnet de
Georges. Des ébouleuients avaient recouvert les crevasses de Nea Kameni.
En revanche, de la fissure principale de l'éruption étaient sorties des masses
énormes de laves, qui continuaient encore à s'en échapper en abondance,
et qui se déversaient alors surtout vers le sud, après avoir d'abord coulé
pendant quelque temps principalement vers l'ouest. On pouvait ainsi
distinguer en 18G7 plusieurs coulées de laves avec leurs moraines caracté-
ristiques, dirigées vers la partie méridionale de l'île de Santorin. Les trois
principales étaient tournées, l'une vers le cap Acrotiri, la seconde vers le
havre d'Atheneos, la troisième dans l'intervalle des deux précédentes, à
peu |)rès veis Balos. Ces coulées, incandescentes à leurs extrémités, s'y dé-
versaient dans la mer avec un bruissement et des sifflements aigus. Or,
précisément dans ces points, on pouvait constater l'existence d'abondants
( 90-"> )
«Ic'gagements de gaz qui se déplaçaient chaque jour en suivant le progrès de
la partie terminale des coidées. Plusieurs de ces gaz examinés sur place
ne m'avaient pas paru coinbusiibles. La disposition des points où ils se
dégageaient et leur faible teneur en acide carbonique, ainsi que leur ri-
chesse en oxygène, m'avaient fait supposer qu'ils n'étaient rien antre chose
que de l'air atmosphérique enlraîné par les fragments scoriacés qui recou-
vrent l'extrémité des coulées et qui s'y éboidaient sans cesse dans la nier.
Mais l'analyse, effectuée dans le laboratoire, d'un certain nombre d'échan-
tillons de ces gaz recueillis et rapportés dans des tubes fermés à la lampe,
démontre, au contraire, que ces mélanges gazeux naturels ont une com-
position tout à fiit différente de celle de l'air. Ils renferment des pro-
portions notables de composés hydrogénés, en même temps que des quan-
tités d'oxygène et d'azote unies dans des proportions trèséloignées de
celles qui caractérisent la composition de l'air atmosphérique.
» Le premier de ces gaz (n° 1) a été obtenu à l'extrémité de la coulée
dirigée vers le cap Acrotiri; il n'en a été opéré qu'une seule prise, le
5 mars 1867. Le second (n° 2) provient de l'extrémité de la coulée dirigée
vers Balos. Nous donnons ci-dessous la composition des échantillons re-
cueillis an même point, à trois reprises différentes, le 3, le 5 et le 7 mars 1867.
» Le troisième (n" 3) provient de l'extrémité de la coulée dirigée vers
Alheneos; il n'en a été fait qn'ime seule prise, le 7 mars 18G7.
Caz no 1.
Acide carbonique. .. 0,00
Oxygùne 24,94
Azote 73, I3-
Hydrogène i ,9!
Gaz des marais. , . , . i ,00
100,00
G.a2 nO 2.
?i mars.
5 mars.
7 m.-irs.
Gaz n° .!
o,ig
0,25
0,57
0,22
20, oq
20., 4 1
18, 65
21,11
64,30
64,36
65, 5i
21, go
•4,9»
'4.7°
14,96
56,70
0,44
0,28
o,3i
0,07
100,00
100,00
100,00
100,00
animé, le
gaz n°
3
brûle
avec une
» Au contact d'un corps enflammé, le gaz n° 3 brûle avec une forte
explosion, le gaz n° 2 brûle également, mais avec une explosion très-faible.
(La combustibilité, au contact de l'air, du résidu que fournit ce gaz après
l'enlèvement de son acide carbonique et de son oxygène, m'avait échappé
sur place.) Tous ces gaz ont été recueillis dans des tubes où le vide avait
été opéré à 2 millimètres; une petite portion de l'oxygène et de l'azote,
que l'analyse y indique, provient donc certainement de l'air resté dans les
tubes, mais cette légère cause d'erreur ne change rien aux conclusions à
C. R.. iS-o, ■i' Semestre. (T. I.XXI, IN" 2i1.) ' 2 1
( 90^! )
tirer relativement à l'origine des s.-az ainsi récoltés. Tons se dégagent ex-
clusivement, en des points très-limités, à travers IVrUi de la mer, très-près
de l'extrémité des coulées incandescentes. Le lieu de leur sortie se dépla-
çant d'ailleurs en suivant le prog es de la partie terminale des coulées,
leur dévelojîpement ne peut s'expliquer qu'en supposant qu'ils étaient in-
clus dans la lave en fusion, et qu'ils s'en sont dégagés brusquement par
suite du refroidissement subit opéré au contact de l'eau de la mer, et par
suite du retrait et du fendillement qui en ont été la conséquence.
» D'autres dégagements gazeux, moins abondants, s'opéraient encore
en 1867, sur presqneHoute la périphérie du champ de l'éruption; mais ils
étaient évideminent formés par de l'air atmosphérique entraîné par les laves,
et plus ou moins modifié par son passage au travers de l'eau de la mer.
Voici, par exemple, la composition de trois de ces gaz recueillis le 5 et le
7 mars îSCy, les deux premiers (n° 4) et (n" 5) en des points où l'eau
de la mer était lim[)ide, et le troisième (n° 6) en un point où elle était
rendue laiteuse pai- de l'acide sulfhydrique décomposé.
Gaz n''4. Gaz •><> 5. Gaz n" 6.
Acide carboni(|ue 0,00 0,00 0,16
Oxygène 20,62 20,58 12, 65
Azote 79)38 79<42
'9
100,00 100,00
» J'ai encore recueilli un autre gaz essentiellement différent de tous les
précédents par sa comijosition et par son lieu de dégagement. Celui-ci se
produisait pi'ès du fond du port Saint-Georges de Nea Rameni, à l'extré-
mité de l'ancien canal compris entre Nea Kameni et Aphroessa, en un
point où j'avais déjà recueilli des gaz l'année précédente, une première
fois en mars i8(i6, alors que les laves en contact étaient encore in-
candescentes, une seconde fois en mai 1866, alors qu'elles étaient déjà
à peu près refroidies. J'ai opéré trois prises de ce gaz en 1867; le tableau
suivant en représente la composition :
N" 7, 3 mar,, 1867.
Acide carbonique 61 ,29
Oxygène o , 5o
Azote 37 '99
Hydrogène 0,11
Gaz des marais 0,11
100, GO
N" H, 5 mars 1
i8()7.
N»
9, 7 mai's
ISG7,
60, 63
56,63
0,73
>,84
38,26
4' vil
0,17
0,00
0,21
0,12
1 00 , 00
I00,00
( 9o5 )
') Les nombres insirils ci-dessus indiquent des variations sensibles dans
la composition du gaz dans un intervalle de quelques jours; mais ces va*
riatioiis sont bien ()lus nettement accusées quand on compare les gaz re-
cueillis en 1867 à ceux cjuise dégageaient au mente point un an aupara-
vant. Nous rappellerons, en effet, qu'au même endroit nous avons recueilli
en 1866 des gaz composés connue il suit :
No 10, 5 mars 1866. K» 11, la mai 1866.
Acide carbonique, 35, 60 , 84)85
Oxygène i j46 2,3i
Azote 32,o4 12,84
Hydrogène 3o,09 0,00
Gaz des marais ... 0,81 0,00
100,00 100, 00
» 1! doit exister une variation semblable, quoique bien plus faible, dans
la composition du gaz qui se dégage constamment au fond du port Saint-
Nicolas à Palœa Kanieni. Les écbanlillons de ce gaz, qui ont été recueillis
en 1866 et 1867, ont offert les coiupositions suivantes :
N» 13, 22 mai 186G,
N" ri, recueilli et analysé par N° 14,
iSmarsiSSG. MM. Reiss, Stûbel et Fritsch. 3 mars iSe^.
Acide carbonique 78,44 76,06 79'24
Oxygène 3,37 12,39 2,21
Azote 17,55 11,55 18, 3o
Gaz des marais. 0,64 0,00 o,25
100,00 100,00 100,00
» Enfin, nous avons encore à indiquer ici la composition du gaz que
nous avons extrait, par voie d'ébullition, d'une certaine quantité d'eau de
mer prise à l'extrémité de la coulée dirigée vers Balos, le 5 mars 1867. Un
litre de cette eau nous a fom-ni 38 centimètres cubes d'un mélange gazeux
composé comme il suit, et essentielletneut différent du gaz naturel qui se
désiaeeait prés de là, à une distance d'environ 10 mètres seulement :
ÎS" 15, extrait do l'eau Je lijer.
Acide carbonique 83,58
Oxygène ^,79
Azote '3.<^3
100,00
» L'examen des lésultats analytiques que nous venons de rapporter
conduit aux conclusions suivantes :
121 ..
( 9^^ )
» i" Ils coniifinent la loi de vaiiation de coiuposilioii des gazvolciuiiqiies,
établie, pour la piemière fois, par?»!. Cli. Sainte-Claire Deville et déjà dé-
veloppée précédeiuiiient jjar nous.
» 2° Ils montrent que les laves en fusion pâteuse du volcan de Santorin
ont dû entraîner jusqu'à une di.stance de plusieurs centaines de mètres de
leur |)oint d'émergence des gaz combustibles emprisonnés dans leur masse.
» 3" On voit que l'hydrogène libre et le gaz des marais en sont les élé-
ments ordinaires, et que l'hydrogène libre y semble d'autant plus abon-
dant que le gaz sort d'une lave à plus haute température.
» 4° La composition du gaz n° 3 démontre particulièrement, avec évi-
dence, que dans ces mélanges il existe simultanément de l'oxygène et de
l'hydrogène libres, lesquels restent ainsi en présence sans se combuier,
probablement à cause de la haute tenqiérature de la lave qui les ren-
ferme. Il est donc vraisemblable, d'après cela, que la vapeur d'eau qui
s'échappe en si grande abondance de tous les cratères volcaniques en acti-
vité et de tous les épanchements récents de lave, se trouve à l'état de dis-
sociation au sein de la matière fondue que rejettent les entrailles du sol. »
« M. Cii. Sainte-Ci-aiue Deville, à la suite de cette Connnuiiicalion,
et relativement à la dernière conclusion, qui lui semble avoir une grande
importance, fait observer que, dans le travail analytique fait par lui, en
commun avec INIM. F. Le Blanc et Fouqué, sur les gaz combustibles recueillis
en mer, à Torre ciel Greco, en 1862, celte proportion anormale d'oxygène
s'était déjà présentée, et que l'une des analyses avait même donné pour le
rapport de l'oxygène à l'azote les nombres 2g ; 'ji [Comptes rendus, I. LVl,
]). 118G). La présence concomitante de l'oxygène en excès et de l'hydro-
gène leur avait fait dès lors penser à la possibilité d'une dissociation entre
les éléments de l'eau. Néanmoins, le fait étant encore isolé, ils avaient [iré-
féré réserver cette opinion et attribuer l'excès d'oxygène au déplacement,
par l'ainux vlu gaz inférieur, de l'air dissous ilans l'eau d;' mer, qui
contient, connue on sait, '62 poui' 100 d'oxygène. Mais les nombres donnés
aujourd'hui dans le nouveau travail de M. Fouqué ne j)ermeltent plus de
garder cette réserve, et, en confirmant le fait déjà obsei'vé au Vésuve,
donnent une très-haute probabilité à cette opinion, formellement exprimée
])ar lui le premier, que, dans l'intérieur de la lave incandescente, les élé-
ments de l'eau sont dissociés et se combinent à un c<M'tain moment. On
expliquerait très-bien ainsi les dégagements de vaptiu's d'eau qui se pour-
suivent si longtemps sur les coulées de lave. »
[ 9» 7 )
CHIMIE INDUSTRIELLE. — Sur lin procédé de jxinifunliun dans lequel oit ferait
inlervenir le froiiienl en (ji-ains, conciirremnienl avec la farine. Note de
M. DUBIUM'AIT.
« Je prends la liberté d'appeler ralteulion de l'Académie t-ur un pro-
cédé de panification qui m'a été suggéré par mes anciens travaux sur la
fabrication de l'amidon de froment.
» Dans celle fabrication, je faisais tremper le froment et je séparais par
des méthodes diverses le gluten et l'air.idon.
» J'ai pensé que le froment trempé en grains et sans mouture, comme je
le pratiquais il y a ti-ente ans pour la fabrication de l'amidon, pourrait en-
trer en certaines proportions dans la confection du [)ain.
» Je vous remets ci-joint un échantillon du pain préparé par cette mé-
thode, et quoique ce pain ait été préparé dans de mauvaises conditions, par
des mains inhabiles, il vous tlonnera luie idée nette du procédé et du parti
qu'on poiu-rait en tirer dans un moment où la mouture seule paraît faire
défaut aux exigences de la panification.
» Vous remarquerez que le procédé en question n'exige qn'iuie trempe
préalable, qui, à une température convenable, peut s'effectuer facilement
et promplement dans tous les ateliers de boidangerie.
» IjC froment trem])é peut doubler de volume, en absorbant un peu plus
de 5o pour i oo de son poids d'eau. Il conserve intégralement tous ses prin-
cipes alibiles. Mêlé à la farine, il prend la forme alimentaire habituelle, et,
grâce à l'eau dont il est imprégné, il subit unç cuisson analogue à celle que
subit la pâte de grains moulus.
» La panification gagnerait si l'on pouvait ajouter au procédé en ques-
tion une manipulation qui n'oilVirait pas de grandes difficultés.
» Jji froment trempé, puis passé entre deux cylindres de bois ou de
fonte, formant laminoirs, entrerait avec plus de perfection dans la panifica-
tion; il suffirait en effet de le mêler avec une certaine proportion de farine,
pour l'assimiler à ce deriner produit sans rien changer à l'aspect du pain. »
PHYSIOLOGIE. — Sur l' excrétion de l'urée, considérée comme mesure de l'activité
des combustions lespiratoires. Note de M. A. Saxsox.
(c Pour la rédaction de la partie de mon Traité sur l'hygiène di!S animaux
domestiques qui concerne leur alimentation, j'ai dû soumettre à une dis-
cussion niéthndiijue les résultais des lecherches thimiipies, maintenant en
( 9o8 )
si grand nombre, qui pourraient permettre d'en établir la théorie. C'est là,
pour la zootechnie, un sujet d'importance capitale. On sait que les |)roduits
utiles des animaux sont toujoius en rapport nécessaire avec les aliments
qu'ils consomment; en outre, leur exploitation étant une opération indus-
trielle, le prix de revient doit en être léduit le plus possible, par la suppres-
sion du superflu. Dans cette discussion, il m'est arrivé souvent de trouver
les résultats des expériences en contradiction avec les faits d'observation di-
recte, admis par la généralité ties praticiens; mais alors il a été facile de
constater que les apparences contradictoires devaient être attribuées à ce
que, daiîs les expériences, il n'avait pas été tenu compte de toutes les con-
ditions du phénomène considéré. Cela ne pouvait guère manquer, car il ne
saurait y avoir, en réalité, de différence entre l'observation exacte et l'ex-
périmentation bien instituée. Je demande la permission (l'en signaler lUi
exemple à l'Académie, à l'occasion d'une Communication récente.
» Il a été éiabli dans cette Communication, faite par M. Gazeaii,
que l'usage de la coca, auquel il s'est soumis, avait eu pour conséquence
une élimination plus considérable de l'urée; l'auguientation de ce produit
dans les lu'iues a été de 1 1 pour loo avec une dose de lo grammes de coca,
de i6 et de aZj pour loo avec une dose de 20 grammes. L'auteur en con-
clut que, l'augmentation de l'urée indiquant toujours un accroissement
d'activité dans la métamorphose des éléments azotés, l'usage de la coca
|)roduit nécessairement une augmentation de l'énergie musculaire. Ce sont
là ses propres expressions. Cependant MM. Fick et Wislicenus, qui entre-
prirent en 1866 l'ascension du Faulhorn après n'avoir pris, duraîit les dix-
sept heures qui ont précédé leur départ, d'autre nourriture solide que des
gâteaux conqiosés d'amidon, de graisse et de sucre, et qui ont expérimenté
directcmeni l'uifluence d'un tel travail sur rélimination de Furée, sont ar-
rivés à de tout autres résultats. Leur ascension avait duré de 5'' 3o"' du
matin à i*" 20'" après midi. A. quatre intervalles, ils ont recueilli leur urine.
Celle de 5 heures du matin à 1^20^ après midi a été appelée par eux urine de
travail; celle de 1'' 20" à 7 heures du soir a été appelée urine après le travail.
Les quantités d'urée, évaluées en azote, ont été moindres, pendant et après
le travail, que les quantités constatées dans les urines de chacune des deux
nuits qui ont précédé et suivi l'ascension. D'où les expérimentateurs con-
cluent de leur côté, que le travail musculaire n'augmente pas la production
de l'urée, mais qu'il la diminue au contraire.
» Il n'y a là, à ce qu'il me semble, que des coiuradictious apparentes.
Dans les deux cas, les expérimentateurs ont négligé au moins une des con-
( 9"9 )
flitions importantes du problème; ils ont confondu l'urée éliminée par les
urines avec l'urée produite, ce qui es! pourtant bien différent. En effet,
l'élimination de l'urée dépend de l'activité des reins, et par conséquent la
quantité appréciable de ce produit d'oxydation est nécessairement en rap-
port avec celle de l'urine excrétée dans un temps donné. On sait que sa
proportion dans le sang peut varier chez l'homme, de o,i6 à 0,27 pour 1000.
Plus est active, toutes choses d'ailleurs égales, la sécrétion urinaire, plus
l'est aussi l'élimination de l'urée. M. Gazeau dit que la coca, à la dose de
10 à 20 grammes, accroît constamment le poids de l'urine, de Zjoo grammes
par vingt-quatre heures; MM. Fick et Wislicenns ne le disent pas, mais tout
le monde sait que, dans une marche ascendante, comme celle qu'ils ont
faite le 2g du mois d'août, en pleine chaleur de l'été, la sécrétion urinaire
est beaucoup diminuée. La quantité moyenne d'urine expulsée en vingt-
quatre heures par un homme adulte est de laSo grammes, à l'état normal;
les 4oo grammes excrétés en plus dans les expériences de M. Gazeau dépas-
sent, par rapport à cette quantité moyenne, le maximum de 2/} pour 100
qu'il a constaté dans l'urée que ses urines contenaient. On ne peut donc pas
en conclure exactement que l'usage de la coca augmente la proportion
d'urée produite, et que par conséqtjent elle n'agit point en enrayant le
mouvement de dénutrition, ainsi que l'observation semble l'indiquer; l'ex-
périence de M. Gazeau prouve seulement cpie cet usage augmente la sécré-
tion urinaire dans une forte proportion. »
La séance est levée à 5 heures trois quarts. I).
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
L'Académie a reçu, dans la séance du ig décembre 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Sur les Entozoaires des Dauphins; jiar M. H. GervaiS. Paris, 1870; opus-
cule in-4''.
Premiers secours aux blessés sur le cluunii de bataille et dans les amhulances;
par M. IL Bfcrnard, précédé d'une introduction, par M. J. N. Demarquay.
Paris, 1*370; I vol. in-12.
( ;)'o )
Conseils sur In manière de se nourrir dans les circonstances présentes ,■ confé-
rence faite le i i novembre 11^70; par M. A. RicriE. Paris, 1870; opuscule
in-8°.
De In dynamite et de ses applications an point de vue de la guerre; par
M. P. Champion. Paris, 1870; br. gr. in-8, aulographiée.
Navicjntion aérienne. Lettre aux Parisien'^, patriotes de foi, de rerur et d'ai tion ;
pnr "M. J. Rf.RNIS. Paris, 1870; opuscule iTi-/|°.
COMPTE RENDU
DES SEANCES
DE L'ACADÉMIE DES SCIEÎNCES.
SliANŒ DU LUNDI 2G DÉCEMBRL; 1870.
[•RÉSIDENCE DE M. LIOUVILLE.
MERÎOmES ET cosimu]\iî:ations
DES MEMBRES ET DES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE.
Après la lecture du procès- verbal, M. u: Président se lève et prend la
parole dars les tcines. suivants :
.' L'Académie a appris, pf.r les récits des journaux, l'arrestation récente
de notre excellent confrère, M. P. Tlienardj qui aurait été envoyé à Brème
par les ordres des généraux prussiens. Si M. Thenard a été pris les armes
à la main, en défendant son pays, nous n'avons qu'à l'en estimer encore
davantage el à nous incliner devant le sort des armes qui aurait trahi son
courage; mais si le seul motif de cette mesure est la fortune connue de
M. Thenard, et son titre desavant distingué et de Membre de l'Académie
des Sciences, alors je n'hésite pas à dire qu'une pareille arrestation serait
tout simplement une infamie, dont chaciui de nous devrait se souvenir jus-
qu'à sa dernière heure, el 'Jont un jour ou l'autre la justici; divine saurait
punir les auteurs. »
L'Académie déclare s'associer ideiiiemeiit aux paroles de M. le Prési-
dent, et décide (pi'elles seront uisérées au Coiiijtic vendu de la séaiicc.
C. K., 1870, i" Semestre. ('1 . LXM, N" iiU.) ' 2'2
( 912 )
HISTOIRE DES SCIENCES. — Résumé hislorique des travaux dont In rjélaline
a c'té t'objel (deuxième Partie); par 31. Chevrecl (i).
« Je résume de la manière la plus précise les faits principaux de l'his-
toire des travaux les plus remarquables auxquels la gélatiue a donné lieu,
faits exposés dans la première partie de cet écrit.
» De 1680 à 1G82, Denis Papin montre la possibilité d'extraire la géla-
tine des os, en les soumettant à l'action de l'eau liquide portée à une tem-
pérature supérieure à celle de l'eau bouillant sous la simple pression de
l'atmosphère.
» De 1770 à 1772, Claude -Joseph G eojfroy s'occupe de déterminer la
proportion de matière soluble que les viandes diverses cèdent à l'eau bouil-
lante.
» En 1753, Hérissant sépare la partie calcaire des os au moyen des
acides, et en 1766, a|)pliquant ce procédé aux coquilles, aux madrépores
et aux coraux, il en met la partie organisée à découvert.
» En 1775, Changeux, en partant d'une proposition, à son sens, assez
générale pour mériter le titre de loi de la lutlure, pid^lie des résultats
inexacts tenant surtout à ce qu'il ne distingue pas la division physique de
la matière de sa division opérée par Va/fmilé chimique; quoi qu'il en soit,
conformément à sa loi, il prouva, en exagéi'ant ini peu le fait pourtant,
que le verre réduit en poudre est dissous à l'instar du sel, par l'eau bouil-
lante; de j)lus, qu'on peut extraire des os éijalenienl réduits en poudre par ce
même liquide bouillant sous la .simple pression de l'atmosphère une géla-
tine savoureuse et restaurante sans recourir au digesteur de Papin, et il
n'oublia pas de recommander des aromates pour compléter les bonnes qua-
lités qu'il reconnaissait au bouillon d'os.
» En 1791, Proust publia son opuscide remarquable sur les moyens
daméliorer la subsistance du soldat, essentiellement scientifique sans cesser
d'être une œuvre d'application positive qui n'a été surpassée par aucun tra-
vail postérieur. Véritable inventeur du bouillon d'os, il en a été le juste
appréciateur; et après tant d'exagérations insensées, sachons-lui gré d'avoir
reconnu d'une manière si précise pour tous ses lecteurs éclairés et indé-
pendants, son infériorité à l'égard du bouillon de viande.
)) On voit, d'après les faits exposés dans la première partie, i^u'après
(i) L'Acadomie ,1 décide que ceUe Coniuuinicalion, bien <iiie di'i);issaiit t.n elLiidiio ks
limjlcs li-ylciucnlaiiis, stiait instixc en ciilier au Compte rendu.
• (9^3)
Proust, Jeux personnes se sont livrées avec ardeur à la propagation (\n
bouillon d'os, Cadet de Vaux et D'Arcel.
» Que le premier n'a pas seulement voulu lo Iriomphc du bouillon d'os,
mais encore l'exclusion du bouillon de viande qui, dit-il, n'est bon ni pour
l'homme sain, ni pour le malade, ni pour le convalescent, et qui, taxant
le pot-nu-feu de vieux préjugé, ne veut que du bœuf rôti, affaire de goût que
je ne discute pas.
» Mais je dois faire remarquer que, si la gélatine est le produit de l'ac-
tion de l'eau bouillante sur un tissu cellulaire, tendineux, gélatineux, vous,
Monsieur Cadet, le prétendant à l'invention du bouillon d'os, vous, le pre-
scripteur du pot-au-feu à l'avantage du rôti, vous ne donnez pas la raison
de cette supériorité de la viande cuite hors de l'eau et au sein de l'air; car,
s'il est vrai, d'après voire affirmation, que la viande nest nutritive guà raison
de sa gélatine, pour accepter votre conclusion, il aurait fallu me prouver,
par Vexpérience, que dans un rôti il y a plus de gélatine que dans un bouilli
et le bouillon qui en provient; et, avant tout, il aurait fallu expliquer aux
dépens de quoi se fait cette augmentation de gélatine : car, en y réfléchis-
sant, sans coimaître vos raisons, je me dis : Mais la substance qui produit
la gelée dans la viande mise au pot, au lieu de recevoir de l'action de l'eau
bouillante la propriété gélatineuse, est exposée, quand on la rôtit à la cha-
leur sèche, à céder à l'atmosphère une partie de l'eau qu'elle contient, et
dès lors elle me semble être à cet étal où, plus solide cju'avant la cuisson,
elle doit jouer dans la digestion le rôle de lesl plutôt que celui d'aliujent,
et je parle, bien entendu, suivant vos idées.
)) Après de telles allégations, et la réclamation de priorité si juste de la
part de Proust quant au fond et si spirituelle quant à la forme, comment
s'expliquer qu'un homme de ia valeur scientifique de Cadet de Vaux, se
prétendant l'inventeur du bouillon d'os, serait cru sur parole, et, à ce titre,
recevrait la bénédiclion d'un pape et les félicitations officielles d'un roi de
France? Ces faits seraient inexplicables si l'on ne prenait pas en considéra-
tion l'influence des sociétés dites philanthropiques ; Cadet appartenait à la
plupart, et en était un des membres les plus actifs et des plus persuasifs par
sa bonhomie et une conversation aimable à laquelle le paradoxe ne nuisait
pas auprès des gens du meilleur monde. Proust vivait loin de Paris, et,
depuis sa réclamation de i8o4, je m'estime heureux de la circonstance qui
me doiHie l'occasion de la reproduire le premier dans cette enceinte.
» D'Arcet, sans eriirer dans la question, sans se prononcer sur le
bouillon de viande, s'est principalement occupé de la préparation écono-
122..
( 9'4 )
inique du bouillon d'os, et il a préféré, .uix procédés pratiqués avant lui,
l'action de la va|)eur d'eau produite sous une pression un peu plus forte
que celle de l'aluiosphére sur les os entiers.
» Voilà l^ien où l'on en était de 'a queslion de la gélatine, lorsqu'une
Cotniiiission fut nonnnée dons l'Acai'émie des Sciences pour s'en occuper.
» Cf^ite Commission se co.nposait à l'origine de MM. Magendie, Serres,
Dupiiytren, D'Arcet, Chevreul, Flourens et Seridlas.
» Le pretnier travail dont elle s'occupa hii l'exauien (\{i l;oiiilii>n de la
Comparpue hollandaise, fondée par ?.!M. Bouwens et van Copcnaal, domi-
ciliés à Paris, examen dont ou voulut bien me confier la partie chimique;
et je répète, mon étonnement fut grand de voir dans la Commission l'in-
sistance de Diq)uytren, et an dehors celle de Thenard, pour que j'accep-
tasse le !Ôle de Rapporteiu-.
» D'Arcet donna sa démission de membre de la Commission le ^3 de sep-
tembre i83i, counne i! le dit dans une Lettre adressée à Julia de Fonte-
nelle dont j'ai en ce moment une copie certifiée par D'Arcet même.
» Le Rapport, adopté à l'unanimité des membres de la Commission, fut
lu à l'Académie le 19 de mars i832, cinq mois après la démission de
D'Arcet.
» Je rejirodnis les deux dernières conclusions du Rapport.
•• Que les soins ;i]iportés à la confection du bouillon, soit jioiir le clioiN de la viande,
soit pour la conduite des opérations nécessaires à la cuisson, soit enfin pour le distribuer
aux consommateurs, doivent en recouimander l'iisai^e nuprcs des liospices et des personnes
ijiii ne sont pas en position de fnire chez elles cette préparation ;
I Qu'il est à ilésiier que non-seulcmcnt l'usage de ce bouillon se propage, mais encore
celui de In viande rpii a scnn a le préparer; car celte viande cuite, considérée en elle-nièine
et relativement au prix aurjuel la vend la Compagnie hollandaise, est un bon rdinie/it. ■>
» De telles conclusions, présentées à l'Académie par Duj)uy!re!i, Serres,
Magendie, et Seridlas pharmacien en chef an Val-de-Grâce, concernant
raliiiieutation ptd)liqiie en général et celle des hôpitaux et des hospices en
particulier, ne pouvaient être rejetées par elle; aussi aucune objection ne
s'éleva. Loin de là, l'impression du Rapport fut votée, et alors qu'il n'y
avait pas de Compte rendu, c'était une exception honorable |)()iir le Rap-
porteur cpii n'avait nullement sollicité la mission qu'on lui avait donnée.
» Mais, évidemment, ce Rapport et ses conclusions ne pouvaient avoir
été adoptés par l'Académie sans contrarier beaucoup les |)arlisans si ex-
clusifs {\u bouillon d'os.
» D'Arcet les avait bien i)réviies, ot dès lors il s'était demandé, plusieurs
( 9'5 )
mois avant sa démission, comment il parviendrait, sinon h les faire onblier,
du moins à les atfénner. Et vf)ici ce ([u'il imagina.
» Il y avait à Paris ime Société des Sciences physi^ines, chuniiiues et aris
agricoles et industriels de France, dont le Secrétaire perpétuel était nn
M. Jnlia de Fontenelle. M. D'Arcet lui donne par écril lui rendez-vous
pour la rédaction d'un plan d' expérimentation. Ce sont les expressions que
je copie, dans une Lettre à la date du 9 de seplembre i83/|, que m'écrit
M. JuliadeFoîilenelle. Ce plan estsoimiis à la Commission, assure M. D'Arcet
à M. Jnlia de Fontenelle, et approuvé par elle. Cola dut se passer plus de
cinq mois avant la lecture du premier Rapport sur la gélatine. Et M. Julia
(le Fontenelle travaille toujours. Enfin, deux ans à jieii prés s'étaient écoulés
depuis celte lecture, et M. Julia désira la réalisation du remboursement des
frais de ses expériences, promis par la Commission, dit-il, selon V emjaijement
dont M. D'Arcet lui avait donné inssuranre. M. Julia, prés de partir pniu'
l'Allemagne, vient lire un résumé de ses expériences à l'Académie, d'après
le conseil de M. D'Arcet.
» Après la lecture, je demande la parole pour déclarer que la Commission
n'avait donné à personne la mission de faire des expériences d'après un pro-
ijr(mime approuvé par elle.
)) C'est alors que M. Julia de Fontenelle m'écrivit une Lettre datée ùvi
9 de septembre i834, dans laquelle il me parle de sa bonne foi et de sa
loyauté; je copie les passages suivants :
« Pai'is, le t) seplembre iS34.
» Monsieur et honoral)Ie maître,
» Datis la dernière séance de rAcadcniie, je lui avais adressé une Lellre en léponse à
votre observation précédente. Cette Lettre était accompagnée :
» I" De deux autres Leities de M. D'Arcet nie dcînuant rendez-vons ])our la rédaction du
plan d'expérimentation ;
I. 1" De ce plan soumis à la Commission, el qu'il nie dit être approuvé par elle; '
>i 3° De quatre Lettres de moi adiessées à cette même Commission, dans lesquelles je
parlais de la mission qu'elle m'avait donnée en teiincs si clairs qu'il ne |)Ouvait y avoir
aucun doute pour elle que je fusse persuadé que cela était ainsi. A|)rès trois ans de silence,
j'ai dû considérer cette circonstance comme une vérité d'autant plus forte que M. D'Arcet
m'avait assuré que la Commission dcmand.rait des fonds h V Acadcinie pour me rembourser
des frais de mes expériences.... L'affaire en était là (juand iVl. D'Arcet, apprenant mon départ
pour l'Allemagne, m'engagea à rédiger un résumé de mes expériences, afin de les présenter
à l'Académie; je rédigeai à la hâte quel(|ues faits, (jui nesont que la moindre partie de
mon travail ; je les lus à l'Académie.
.) Ma surprise fut grande ipiand vous files l'observation que je n'avais pas eu mission de
la Commission; le lendemain, je fus trouver M. D'Arcet, qui me confirma plus que jamais
dans cette opinion, et qui me donna sa parole d'honneur qu'il allait écrire à l'Académie pour
attester la vérité de ce (pie j'avais avanci'. Hier encore, il m'a écrit un hillil <|ui le confiiiiie
( 9>6 )
et que j'ai montré à MM. Gay-Lussac, Magcnilie et Flouions; cependant ma Lrllre à l'Aca-
déraie n'a pas été lue : je suis donc le bouc émissaire....
» ... Voici la copie de la Lettre que j'écris ce malin à M. D'Arcet :
« Monsieur,
» Rien de ce que vous m'aviez solennellement promis hier ne s'est léalisé. Ma Lettre n'a
» pas été lue à l'Institut, et, dans la vôtre, vous n'avez |)as dit un seul mot de moi pour me
» justifier. Que dois-je penser? M. Clievreul a-t-il raison?. . . Tout ce que je sais, tout ce
•> que je n'oublierai jamais, c'est que vous deviez me tendre une main ))rotectrice, et (|n'au
i lieu de cela, pour jirix de mon dévouement, vous avez laissé mon nom exposé au pilori
» du mensonge où M. Clievreul l'a placé.
). J'ai l'honneur, etc. »
)) M. Jtilia finit ainsi la Lettre qu'il ni'a adi-essée :
« ... Si je ne tenais pas à votre estime, Monsieur, je n'entrerais pas dans une Lettre
justificative; mais il importe à mon honneur compromis de démontrer ma bonne foi et ma
loyauté. J'ai conservé toutes les pièces qui en sont une |)rcuve évidente, et je les mets à vôtre-
disposition .... »
« Voici la copie du billet adressé à M. Jiilia de Fontenelle, par M. D'Arcet,
à la date du 8 de septembre i834. Je le reproduis intégralement.
n Monsieur,
o N'étant pas encore parti, je puis vous répondre sans relard. Vous êtes dans l'erreur
relalivemcnt à ma conduite : j'ai fait tout ce que j'avais promis; j'ai vu M. Gay-Lussac,
je lui ai remis une protestation contre l'assertion <Ie M. Clievreul, faisant croire que re n'était
pas d'accord avec la Commission que le progiammc des expériences avait été rédigé par
nous deux, et j'ai demandé la lecture de ma déclaration, si la rédaction du procès-verbal
ou la discussion réengagée l'exigeait.
» Ayant donné ma démission en i83i ; vous ayant indiqué M. ^Ligendie comme pou-
vant me remplacer, n'ayant plus agi, en rien, comme membre de la Commission, ce n'était
pas à moi de défendre les fiiits postérieurs, je vous avais prévenu que j'agirais coir.mc je
l'ai fait et que je ne parlerais pas de vous dans ma Lettre à l'Académie, et vous devez vous
souvenir que c'est pour cela qu'il a été convenu que je rétablirais les faits antérieurs au
23 septembre i83i, dans une Lettre que je remettrais moi-même à M. Gay-Lussac. On m'a
assuré que le procès-verbal avait été rectifié et qu'il n'avait jias été besoin de lire ma
seconde T^eltre réfutant l'assertion de M. Chevrcul; si le contraire était vrai, j'en serais bien
fâché et j'en so;ilfrirais plus que vous, mais j'aime à croire (pic M. Gay-Lussac, qui a lu ma
Lettre en ma présence, l'aurait lue à l'Académie s'il avait cru qu'il fût nécessaire de la com-
muniquer pour nous justifier tous doux, surtout moi, qui n'ai pas, autant (]ue vous, des
pièces aiitlienliques [lour me défendre; j'espère que les choses se sont mieux passées que
vous paraissez le croire. Si je me trompe, je donnerai copie de ma Lettic à la Commission
pour la bien éclairer ii ce sujet,
!• Agréez, je vous prie, Monsieui', mes salutations bien empressées.
>i Signé D'Arcet.
u Pour copie cnnfnrmc :
>! JULIA DE FOMTËNELLE.
« Ce S septembre i834. "
( 917 )
» Après ma protestation si nette provoquée par la lecture de Jnlia (jn'it
n^ avait pas mission de In Commission de In qélaline défaire des expériences,
D'Arcet devait déclarera t'ylcadéntieque j'étais dans l'erreur, qu'avant d'avoir
donné sa démission, un plan d'expériinenlation rédigé par MM. D' Arcet et Julia
avait été soumis à la Comnnssion et adopté par elle et que des fonds de V Acadé-
mie payeraient les frais des expériences.
» Si dans lu séance qui suivit ma protestation, on l'eût reconnue
inexacte, ma réponse eût été bien simple : Vous, Commission, aurais-je
dit, m'avez chargé d'un Rapport; approuvé par vous, il l'a été ensuite par
l'Académie et un an auparavant, à mon insu, vous aviez approuvé un
plan d'expériences rédigé par un membre de la Commission, /«(/c et partie,
et une personne étrangère à l'Aciidémie qui devait èlre défrayée de ses dé-
penses; ce procédé est inconcevable et j'ai raison de m'en plaindre publi-
quement.
» Au dire de D'Arcet, on aurait rectifié le procès-verbal, relativement à
nui protestation; franchement^ cela m'est indifférent, je n'ai fait aucune
démarche pour m'en assurei-, c'est une affaire de bureau, du moins c'est
D'Arcet qui l'écrit à Julia de Fontenelle.
« Après cet incident un honnête homme n'avait qu'un parti à prendre :
c'était sa démission. Elle fut donnée et acceptée. D'Arcet alors rentra dans
la Coïnmission, et deu.x. Membres nouveaux, Thenard et M. Dumas, y
furent appelés.
» Que s'y passa-t-il? Voici co que j'ai entendu dire. Si je me trompe,
M. Dumas, le seul Membre vivant de la seconde Commission, voudra bien
me rectifier.
» Un des sujets dont la Commission eut à s'occuper avant tout fut l'exa-
men de demandes relatives à des frais d'expériences accomplies avec l'in-
tention des auteurs de savoir si la gélatine est ou n'est pas nutritive. D'Arcet
voulut expliquer ces incidents; et Thenard pria la Commission de ne pas
s'en occuper parce qu'il les jugeait étrangers à la science, et l'une des de-
mandes était faite par Julia de Fontenelle.
» Cette décision me semble assez confonne à ma prolcslalion. Mes audi-
teurs et mes lecteurs prononceront.
» Mais poursuivons.
» Dans la Lettre de D'Arcet écrite à Julia de Fontenelle, on lit cette
phrase « Ayant donné ma démission en i83i, vous ayant indiqué M. Ma-
» gendie comme pouvant me remi)lacer, etc. ». A celte époque, Magendie
et D'Arcet s'entendaient donc très-bien; et poiu'quoi? Ici, je répète ce qui
(9-8 )
m'a été dit, c'ost que Mageiidie désirait me remplacer comme rapporlein-,
et alors D'Arcet présumait qu'il s'entciuliait mieux avec lui (|ii'avec moi,
quoiqu'il eût signé le Rapport sur le bouillon de la Compagnie hollandaise. Si
ce que je viens de dire est vrai, D'Arcet n'eut point à se féliciter du chan-
gement de l'ancien rapporteur.
» Quel usage ai-je fait des Lettres de Julia de FontencUe, et du billet
que D'Arcet lui écrivit pour me donner un démenli, billet certifié par sa si-
gnature? aucun.
» Quelle était l'opinion de M. Dumas, le seid survivant de la deuxième
Commission ; je crois qu'il pensait que Julia île Fonlenelle avait conclu de
quelques paroles de D'Arcet et à T015T, quil y eut une entente entre eux, et que
dés lors D'Arcet était tout à fait étranger (uix prétentions de Julia. M. Dumas
et M. Elie de Beaumonteu seraient conv.iincus encore si ^.\. Fremy, sur la
demande que je lui adressais, à savoir s'il faisait allusion, dansl'elfusion de
ses sentiments pour D'Arcet, à un incident concernant ma personne, sur sa
réponse, qu'il n'avait à dire ni oui, ni non, il ne m'avait pas mis dans la né-
cessité de montrer des Lettres qui, depuis i834, étaient restées dans mes
papiers. Tel est le conimememcnt de ma réponse catégorique à M. Frciny,
puisqu'il est la cause unique qui m'a fait romjjre une résolution accomplie
depuis iH34 jusqu'à ce jour, c'est-à-dire un silence qui a été gardé pendant
trente-six ans.
» Mais, en suivant l'ordre chronologique des faits scientifiques qui in-
téressent l'histoire de la gélatine, je vais en exposer quelques-uns qui me
concernent. Il ne faut pas oublier que je devais faire le second Rapport
sur la gélatine, et que, pendant les deux ans qui s'éioulèrent depuis le pre-
mier Rapport jusqu'à ma démission, je travaillais au second, et je dirai
qu'un certain nombre de ces travaux sont restés inédits, et que quelques-
luis seulement ont été publiés; mais, franchement, si je fusse venu dire à
l'Académie : La Commission de la gélatine a accepté ma démission, j'avais
travaillé pour ia mission dont elle m'avait chargé, et, après deux ans, quoi-
qu'elle sût bien que ma piolestalion relative à Julia était fondée, elle m'a
laissé partir, eh bien! je viens protester contre sa conduite à mon égard
en publiant des travaux entrepris pour la question qui l'occupe, j'aïuais
eu raison peut-être; mais, connaissant le monde, j'ai évité le ridicule d'une
réclamation. Qu'ai-je fait alors? J'ai rattaché un de ces travaux à mon
sixième Mémoire de mes recherches chimiques sur la teinture, la déioloralion
du bleu de Prusse par la lumière et sa recoloration à l'ombre .'-ous l'influence de
l'air. Et Dieu sait si mon idée fut heureuse de rattacher à bi décoloration
( 9^9 )
d'une éloffe teinte en bleu de Prusse et à sa rerolorniinn un travail entrepris
originairement pour un Rapport concernant l'alintentiition! La vérité est qu'elle
ne le fut guère pour moi, au jugement du réilacteiu- du feuilleton du Cour-
rier français chargé du compte rendu des séances de l'Académie des Sciences.
Si un pauvre académicien a reçu jamais une forte correction de la presse,
c'est le malheureux auteur qui vous parle. Vous allez en juger par le pas-
sage suivant :
« Malheuicusement cette dccoiivcite, aussi intéressante pour la tliéoiic (]iie pr/'cieiise
pour l'art, paraît avoir vivement transporté l'imagination de M. Chevreul, au point même
de l 'égarer bien loin de toute voie //li/mop/iique. En ajoutant à son travail expérimental
une très-longue dissertation sur la ]>liysioIogie chimique, ce savant (ce n'est pas moi qui
parle, c'est M. X... du Courrier fraiiçnis) a tdclié d'établir le plus étrange rapprochement
entre les nuances cliangeantci du bleu de Prusse et les phénomènes vitau.c, La réduction au
blanc d'une soierie-Raymond serait donc Vanalogue de la mort chez les animau.t . Cette
comparaison entre la vie et ta teinture est une des choses les plus surprenantes que nous acons
Jamais entendues. Nous savons bien que RI. Chevreul a pi is toutes précautions, et qu'à la
fin de son Rlénioire, revenant sur ses pas, il a déclaré hautement que le mystère de la vie
ne peut s'expliquer cpie par une harmonie jiréélablie, c'est-à-dire par une force jiarliculière,
inaccessible h l'expérience du poids et de lu mesure. Mais cette amende honorable nous a
paru beaucoup trop taidive pour effacer le caractère de mysticisme des vues de V auteur dont
il faut réellement chercher l'analogue dans la métaphysique indienne ou dans les mythes
arabes. En somme, V excursion de M. Cherreul dans le domaine physiologique ne nous a point
semblé heureuse, et nous vonàrwns pouvoir confiner »
M M. X.. , bien anonyme sans doute, est mort, je le sais; mais com-
ment se nommait-il? Des personnes m'ont répondu: Coqiierel; mais je
m'empresse de déclarer qu'il n'était point ministre du saint Evangile, et
dos lorsque Vannthème dont il m'a frappé, on V interdiction du douzaine phy-
siologique qu'il a prononcée contre moi, étant sorti d'une bouclie laïque, ne
m'a pas trop vivement affecté. Mais vous voyez cependant les nouvelles
tribulations d'un pauvre académicien qui, après avoir fait un premier Rap-
port et n'avoir rien négligé pour en préparer un second, suite un premier, a
été dans la nécessité de quitter la Commission devant D'Arcet et Magendie.
» Une fois à pied, comme on dit communément, ne voulant pas perdre
des recherches suivies laborieusement pendant six années, et sentant le ri-
dicule de plaintes élevées sur un congé qu'il s'était lui-même doimé, il eut
une idée (i), celle de rattacher son ancien travail, l'écrit de 1837, à ses
(i) Je dirai plus tard comment celle expression m'a été appliquée dans uu grand monde.
C R., 1870, a' Semestre. (T. l.X.\l, N" 26.) I 3.")
( 920 )
recherches sur la teinture, et c'est cette malencontreuse idée qui, au dire
de M. X..., l'a égaré de toute voie philosophique et qui, en définitive, lui a
fait interdire le domaine ph/sio logique.
» Si je reparle de l'écrit de 1837, c'est comme pièce essentielle à l'his-
toire des travaux dont la gélatine a été l'objet, et si j'entre dans des détails
qui ont deux inconvénients, je le reconnais, la longueur d'abord, et ma
personnalité ensuite, je demande l'indulgence de mes confrères en faveur
d'une défense qni veut être sérieuse et convenable, relativement à la liberté
cl au lieu où elle se produit.
» A mon début en chimie, la question thi matérialisme et du spiritualisme
qui m'avait occupé déjà au point de vue abstrait, se présenta à mon es|)ril
d'une manière spéciale, eu égard à la diversité des propriétés qu'affecte
la matière dans les minéraux, et dans la matière vivante végétale et ani-
male.
» Les matérialistes, frappés des effets de l'électricité vollaïque surtout,
étaient conduits à n'admettre dans la nature vivante que les forces qui
régissent la matière brute, telle que l'attraction moléculaire, comprenant
la cohésion et l'affinité, la chaleur, la lumière, l'électricité et le magné-
tisme.
» Les spiritiialistes, trop étrangers à l'étude de la matière, c'est-à-dire
aux sciences du concret, repoussaient rargunient qui leur était opposé par
les matérialistes.
» Dans quelle disposition d'es|)rit me trouvai-je alors?
» Elle était fort naturelle d'après l'étude que j'avais faite des doctrines
philosophiques du xvill* siècle, au point de vue de la liberlé, de la morale
et de Yculeiulement; en me montrant la faiblesse de l'esprit humain, elle me
conduisit à douter fort du mien; conclusion du reste en parfait accord
avec mon éloignement de plusieurs choses que bien des honunes recher-
chent avec ardeur.
» Dans cette disposition d'esprit, il est naturel qu'en me livrant exclu-
sivement à la science pour connaître la vérité, je devais avoir un goût pro-
noncé pour la méthode et y attacher une importance d'autant plus grande,
que l'étude et la réflexion m'avaient éclairé davantage, je le répète, sur la
faiblesse de mon esprit. La conscience de cette faiblesse, en me faisant sen-
tir la nécessité de me rendre un compte aussi fidèle que possible, de la
manière dont il procédait pour arriver, sinon à l'absolu, du ujoins à une
grande probabilité, me conduisit à définir la méthode à posteriori expéri-
mentale, telle que je l'ai fait avec précision en tirant son caractère essen-
( 9'^i )
tiel du contrôle t'X[)érimeiilal, ou d'un raisonneuieiit rigoureux, (|ua!ul
l'expérience n'est pas possible.
» Est-ce être présomptueux de croire que les personnes qui l'étudie-
ront dans les écrits que j'ai consacrés à sa définition et à sa généralité ne
la jugeront pas être une émanation de la inélapliysiqiie indienne.
» Quelle est In première conséquence de celte méthode?
» C'est de se livrer à la recherche de la cause immédiate d'un phénomène,
qu'aujourd'hui j'ose dire quelconque, tant à mou sens la méthode a de gé-
néralité.
» C'est lorsque l'induction suscitée par l'observation vous a conduit à
cette cause immédiate, que vous la soumettez au contrôle de l'expérience, ou
d'un raisonnement précis et rigoureux qui en tient heu si elle n'est pas
possible, afin de savoir si la cause immédiate à laquelle vous avez attribué
le j)hénomène observé est démontrée exacte.
» On conçoit comment, en procédant ainsi sans s'égarer, les connais-
sances s'élèvent en même temps que les causes prochaines se découvrent et
se multiplient, de sorte que les phénomènes étant supposés sur un plan
horizontal, les causes immédiates étant représentées par des verticales au
plan, les progrès des connaissances sont indiqués par des degrés pris sur
ces lignes; les /jro^rrès sont donc ascendants.
n Dans les figures graphiques de la méthode à priori, la cause première
est à l'extrémité snpérieine de la verticale et les causes secondes au-dessous.
» Si une telle figure a une signification exacte, ce n'est que pour l'en-
seignement d'un sujet parfaitement élucidé, qui a été réduit en corps de
doctrine comparable à un sujet mathématique dont toutes les proposi-
tions coordonnées ont été subordonnées en partant de la plus générale, et
descendant ensuite à celles qui en découlent, et en observant d'aller tou-
jours du général à ce qui l'est le moins.
» Mais quand il s'agit de représenter la marche de l'esprit dans des re-
cherches du ressort du concret, il n'y a que la mélliode a posteriori expé-
rimentale qui soit vraie. Vouloh-, dans le cas dont nous parions, la rem-
placer par la méthode à priori, serait une pétition de principe qui a été
avancée pourtant par un homme justement célèbre, de Blainville (i).
» La méthode A POSTERIORI expérimentale, dont le caractère essentiel est
le contrôle par l'expérience ou par un raisonnement rigoureux qui en tient
(i) De la baguette divinatoire, du pendule explorateur et des tables tournantes , par
M. E. Chevreul; Matlet-Baclielicr, i854. f'oii p i.j, ao, ni, ■>■>..
123..
( 922 )
lien, m'a conduit aux ivsultats suivants dans l'étude des pliénoniéiies de
la vie envisagée au point de vue chimique.
» C'est de clierclier si le |diénomène observé a pour cause immédiate
les forces qui régissent la matière hfute, à savoir; rattraclion moléculaire
'comprenant la cohésion et l'atlinité), la chaleur, la huniére, l'éleclricité, le
magnétisme et (ouïe autre force à laquelle on rattache des phénomènes
i\\\ monde nunéral, ceux par exemple qu'on lapporte aux nclians dites île
présent e.
» Ce n'est qu'après s'être assuré de l'impossibilité de rattacher les phé-
nomènes observés à ces forces cpii régissent le monde minéral, qu'il iaut
en chercher tlu ressort exclusif des êtres vivants.
» Je pense donc comme les matérialistes relativement à l'opporlunitéde
connnencer la recherche des causes des phénomènes de la vie |)ar celles
qui régissent le monde minéral.
» Et c'est à cette pensée que je dois l'idée d'avoir donné dans l'écrit de
1837 une application des jiliénoinèiies de /a dëcolorntion du bleu de l^russe
sous l'influence du soleil et de sa recoin rnlion dans l'oinlire sous l influence de
l'ox/gène, avec l'intention de faire saisir aux jeunes esprits occupés de
l'étude du phénomène de la vie, l'avantage de commencer leurs recherches
par voir s'il est possible de rattacher la cause de ces phénomènes aux forces
connues de la matière minérale; et voiLà comment j'ai eu recours à cette
malencontreuse étoffe de soie teinte en bleu-Raymond, et comment mon
imagination m'a égaie de toute voie |)hilosophique, et comment IM. X. m'a
interdit le domaine de la physiologie chimi(|ue.
M J'avais démontré qu'une étoffe teinte en bleu de Prusse se décolore
sous l'influence delà lumière en perdant du cyanogène, et qu'à l'ombre,
sous l'influence de l'oxygène atmosphérique, la couleur bleue reparaît.
» Voilà le phénomène.
» Voici V applicalion à une hypothèse conforme au précepte de chercher
la cause immédiate des phénomènes de la vie a\anl t(nit dans les forces
connues de la natin-e minérale.
» Un être vivant est su|)posé avoir un licpiide respiraloiie coloré en hleu
de Prusse. Ce liquide vient, dans des organes exposés au soleil, sul)ir l'ac-
tion de la lumière. Il y a EXHALATION <le cyanogène et décoloration du li-
quide.
» Ce phénomène est immédiatement suivi dune inspiration é'oxycjène
atmosphérique qui est entraîné par la circulation hors de la lumière; il se
forme alors, pour 9 atomes de cyanure blanc, 7 atomes de bleu de Prusse
( 9^3 )
et 1 atome de sesquioxyile de fer, lequel peut ensuite être sécrété par
quelque organe.
» Enfin le liquide coloré revient subir de nouveau l'influence de la
lumière, etc.
» Voici la conséquence de riiypollièse.
» Un spiritualiste, prévenu contre les liunières des sciences du concret,
aurait attribué ce phénomène à \a force dite vitale.
» Tandis que j'aurais dit : La décoloration du liquide sous l'influence de
la lumière est due à une séparation de cyanogène, et la recoloration à l'ao
tion de l'oxygène.
» Mais, au point de vue où je viens de me placer, la réaction matérielle
expliquée comme je viens de le faire ne comprend pas, je le reconnais, la
cause (le l'action émanée de l'organisation même du corps vivant.
» La difficulté d'expliquer en général l'ensemble des phénomènes qui
s'accomplissent dans le corps vivant m'a fait insister fortement sur cette
hypothèse d'un liquide respiratoire coloré en bleu de Prusse, parce qu'elle
montre que l'explication des phénomènes dont la cause immédiate est
donnée par l'étude des forces de la matière brute, ne comprend pas des
causes d'un ordre plus élevé qui dépendent de la vie même ou de l'orga-
nisation de l'être vivant.
» C'est donc ici que, me séparant absolument des matérialistes, je dis
aux spiritualistes qui voient un danger à suivre la voie que je préconise
. connue absolinnent nécessaire aux progrès des sciences relatives aux êtres
vivants, qu'ils sont dans une erreur complète en ayant cette crainte, et que
dès lors s'ils exercent, à un titre quelconque, une influence sur l'enseigne-
ment, ils ne doivent point empêcher les jeunes esprits de s'y engager, ni taxer
de matérialistes les savants qui s'y sont engagés, ni encore ceux qui en
sont les promoteurs; et les raisons que j'ai de tenir ce langage, je veux les
exposer, et, en le faisant, je répondrai en même temps à mon critique,
M. X... du Courrier français; car, en parlant d'une amende honorable que
j'aurais faite à la fui de mon écrit de 1837, trop tardive à la vérité, il s'est
complètement trompé en reproduisant mon opinion en ces termes : « Il a
» déclaré (M. Chevreul) hautement que le mystère de la vie ne peut s'e.xpli-
» (juer que par une harmonie préétablie, c'est-à-dire par une force particulière ,
» inaccessible à l'expérience du poids et de la mesure. »
» Effectivement je réponds :
» D'abord, que ce que j'appelle mystère cesse d'en être un dès qu'il est
expliqué par la science.
(924 )
» Puis, que harmonie préétablie n'est pas une expression prise dans le pas-
sage cité pour cause, mais pour l'effet d'une cause suprême.
» Ensuite, que dans ce sens je n'ai jamais eu l'idée de considérer une
force particulière unique, ainsi que l'on considère la force ou le prin-
cipe vital comme tnie expression scientifique. A mon sens, elle n'a qu'un
sens vague et vulgaire pour désigner une force inhérente aux êtres vivants
et étrangère au monde minéral.
)> C'est, au reste, ce que je vais développer.
» On aurait expliqué tous les phénomènes de la digestion, de la circula-
tion, delà respiration, de l'assiinilation, des sécrétions, etc., parles sciences
mécanique, physique et chimique, que vraisemhlablement nous n'en se-
rions pas beaucoup plus avancés que nous ne le sommes sur la cause pre-
mière de la vie.
» La nature des forces qui produisent immédiatement les effets variés
offerts à l'observation par les êtres vivants n'est pas pour moi le mystère
de la vie,
» C'est la cause de la coordination entre elles de toutes les forces qui
agissent dans l'être vivant; coordination si harmonieuse que In graine et
l'œuf vont se développer en accomplissant une succession de phénomènes
remarquables en vertu desquels nous voyons, les circonstances du monde
où nous vivons restant les mêmes, les formes des ascendants reproduites
dans les descendants d'une manière régulière, et assurer ainsi la conserva-
tion, dans l'espace et dans le temps, d'une multitude extrême des formes
spécifiques les plus variées.
» Eh bien! ce grand fait de la vie, je ne puis le concevoir, ce qui n'est
pas l'expliquer, sans le rattacher à une cause première intelligente! et ce
sont ces effets merveilleux successifs, toujours les mêmes, qui, rentrant
dans cette harmonie préétablie^ font de celle-ci une résultante qui, selon
moi, né peut être l'effet d'ini hasard aveugle, et cette harmonie préétablie,
telle que je la reconnais, est eu dehors des critiques si justes que Voltaire
a faites de l'abus des causes finales, lorsque des hommes étrangers à toutes
les sciences du concret ont voulu expliqiu^r des phénomènes du ressort de
ces sciences avec des causes finales qu'ils subordonnaient à des méthodes
A. PIUOHI.
» Je lie puis trop insister sur des raisonnements dont aucun n'est en
opposition avec la méthode \ I>0STERI0RI expérimentale, car celle-ci prescrit
comme précepte que l'explication d'uii effet rattaché à sa cause immédiate
soit démontrée vraie avant d'être acceptée par une science sérieuse. Je )ie
( 9^5 )
conçois pas autrement l'intei veution de la méthode dans l'étude de-, phé-
nomènes les plus compliqués de la pliilosophie naturelle, ceux de la vie.
Mais cette rigueur exigée pour admettre des coticlusions des recherches
dont je parle comme positives n'est point un motif de prescrire le rejet de
conclusions qui, n'étant point encore suffisamment approfondies pour
recevoir le cachet de la démonstration, ont une grande probabilité en leiu'
faveur, ou si, simples conjectures, elles ont une grande vraisemblance; n)ais
en reconnaissant la réalité des avantages de la publicité donnée à des pro-
positions émanées d'esprits investigateurs, comme très-probables ou très-
vraisemblables^ c'est à la condition expresse qu'elles seront toujours dis-
tinguées des propositions qui sont revêtues du cachet de la démonstration.
» Cette distinction faite entre la proposition démontrée, la proposition
probable et la proposition simplement vraisemblable me permet, sans sortir
de la science rigoureuse telle que la définit la méthode a POSTERIORI expé-
rimentale, de faire quelques raisonnements que j'adresse particulièrement
aux spiritualistes qui sont disposés à repousser la tendance scientifique de
commencer la recherche des phénomènes de la vie pour essayer de les rat-
tacher aux forces de la nature minérale; et, dans un sujet aussi sévère et
aussi grave que celui dont je parle, on me permettra, pour prévenir des
critiques analogues à celles de M. X... du Courrier français, de donner plus
de précision et de clarté à mes idées, en m'aidant d'une comparaison qui
exclura, je l'espère, désormais toute équivoque sur ma pensée.
» Voici un monument ! Le génie de l'artiste qui l'éleva brille dans foules
les parties de l'œuvre mutuellement dépendantes les unes des autres : l'har-
monie est partout et parfaite, pas une bouche qui ne proclame la gloire de
l'arlisle !
» Cette admiration ne s'enquiert pas de la nature des pierres de l'édi-
fice; peu importe qu'elles soient calcaires, siliceuses ou magnésiennes;
marbre, grès, granité ou porphyre.
» C'est donc la pensée intelligente, le génie de l'artiste qui a inventé
cette forme dont la beauté cause l'admiration de tous.
1) Eh bien, la recherche des causes immédiates des phénomènes si variés
que les êtres vivants présentent à l'observation du savant ne conduit qu'à
une connaissance correspondante à la nature des pierres du monument.
» Nous, appréciateur de la lenteur des procédés de ce mode d'inter-
roger la nature vivante, ne voulant pas devancer le temps pour nous ex-
poser plus tard à reculer et plein de foi dans le progrès, nous ne préten-
dons pas que nos travaux soient la limite de la science; mais, quelque
petite que soit la hauteur où nos effoils l'aieul élevée, quelque restreinte
( 9^6 )
que soit l'étendue du champ de la nature organique où ils ont été inces-
sants, notre esprit a été entraîné, non malgré lui, non en obéissant à une
imagination fougueuse el déréglée, mais en se laissant aller à une contem-
plation grave et pourtant pleine de charmes, noble et vraie poésie de la
science, qui l'a porié, par la loi de la continuité des idées, bien au delà des
limites où l'observation rigoureuse de la méthode A posteriori expérimenlalc
l'avait arrêté. Mais, loin de se soustraire à la sévérité de la méthode, il pen-
sait liù être luièle encore en contemplant cet ordre auquel chaque être
vivant est assujetti; s'il était bien alors l'homme qui atlmire l'œuvre de l'ar-
chitecte, en ne contemplant pourtant que la forme d'un ensemble de
pierres stables, fixées à la place où le maçon les a posées, combien la ré-
flexion élevait ce sentiment d'admiration lorsqu'elle se reportait sur les
fonctions dont il avait pu suivre, par l'observation la plus sévère, l'enchaî-
nement et la succession indispensables aux conditions de la vie!
» Quelle différence entre la beauté de l'oeuvre humaine et la merveille
de cet être vivant! quelle variété dans les formes qu'il affecte! il peut être
fixé au sol, dans l'air et dans les eaux! il peut marcher, ramper, njsger,
voler dans les airs! ses parties en harmonie entre elles, le sont elles-mêmes
avec les conditions du milieu où la vie s'accomplit, et l'observation des
organes intérieurs de l'être vivant est aux yeux du philosophe un spectacle
incomparable à celui de la vue des plus belles formes de l'art humain.
Toutes les formes spécifiques se conservent et se perpétuent; le mouve-
ment est partout dans l'être; la matière s'y renouvelle incessamment,
et la vie ne l'anime qu'à cette condition. Ce mouvement intérieur, com-
inenraul avec sa vie et ne finissant qu'à sa mort, jîréseiite un spectacle
sublime auquel rien n'étant comparable dans les œuvres humaines, con-
duit l'observateur à cette conclusion que l'être vivant, dépassant tout le
savoir humain, n'a pu être imaginé et créé que par une PUISSANCE divine.
» Le raisonnement est rigoureux, tandis que le contraire ne l'est pas.
Spiritualistes timorés, crovez-moi, ne craignez pas que l'étude sérieuse de
la matière vivante conduise jamais au matérialisnu'!
» Je continuerai, dans une troisième partie, ma réponse CATÉGORIQUE à
M. Freiny, en partant de l'écrit de 1837 el de son complément de 1870 (1).
» Conformément au principe qui devait servir de base à mon second Rap-
port, principe énoncé dans l'écrit de i 837, après en avoir tiré la conséquence
exposée explicitement dans le complément de 1870, j'appliquerai les rai-
(1) C'im/Jte rendu de la séance du \\ novembre 1870. t. LXXI. p. 635.
( 9^7 )
sonnenients déduits de la raison pourquoi l'aliment de l'homme et des
animaux supérieurs doit être complexe, à l'examen de la qualité alimen-
taire du carlilacje, du parenchyme, de l'osséine, relativement à la gélatine.
» Je rappellerai comme conclusion que Proust, l'inventeur du bouillon
d'os au double titre de la science et de l'application, en a été le juste appré-
ciateur, relativement au bouillon de viande.
» Et conformément à ces considérations, je parlerai du jugement de
M. Fremy, sur le second Rapporl et de la liberté des discussions acadé-
miques.
» Je communiquerai deux Lettres de Félix D'Ârcet, qu'il m'a écrites
de Rio-Janeiro. Elles seront la meilleure preuve que ma conduite a été irré-
prochable avec D'Arcet, le père de Félix. Conséquemment, si M. Fremy,
auquel je demandais de ré[)ondre oui ou non, à la question desavoir s'il avait
fait allusion à un incident particulier de la Commission de la gélatine, qui
me concernait, m'avait répondu nnti , jamais je n'aurais produit devant
l'Académie les Lettres de Julia de Fonlenelle et le billet de D'Arcet imprimés
dans la seconde partie de cet écrit. »
BALISTIQUE. — IVote sur les effets de la pénëli^alion des projectiles dans les
parties molles et les parties fibreuses ou solides du corps humain; par M. le
GÉNÉRAL MORIN.
« A l'issue de la séance de lundi dernier 12 décembre, notre confrère
M. Laugier m'ayant fait l'honneur de m'adresser quelques questions sur
les effets que noiis avions eu l'occasion d'observer, MM. Piobert, Didion
et moi, lors des expériences que nous avons exécutées sur la pénétration
des projectiles dans les corps solides ou mous, j'ai élé conduit à revoir
les Rapports que nous rédigeâmes à cette époque éloignée, et j'ai pensé
qu'il ne serait peut-être pas inutile d'en rappeler quelques passages, qui
peuvent jusqu'à un certain point aider à l'explication des phénomènes
complexes que présentent les plaies faites par les armes à feu.
» Parmi ces expériences, les plus remarquables peut-être sont celles que
nous exécutâmes sur la pénétration des projectiles dans des terres argi-
leuses [)Uis ou moins molles, et pour lesquelles des dispositions et des pré-
cautions spéciales avaient été prises.
)) Dans un coffrage de 5 mètres de largeur, 5 mètres de piofondeur et
2"',3o de hauteur, on avait placé de la terre argileuse ilc Saint-Julien, près
C. R., 1870, 2" Semestre. (T. LXXl, N» 2G.) 1 ^4
( 92B )
fie Metz. Cette terre, bien damée et moyeiiiiemenl huniide, était conleinie
antérieiirenienl i)ar des voliges minces que Uaversaietit Ifs projectiles, qui
ont été des bonlets de 12 et de a/j-
)) Après chaque coup, on relevait de suite les dimensions d'une partie
du vide formé dans la terre, puis l'on achevait ce relèvement, après chaque
série de coups, en enlevant la terre avec précaution, et en découvrant ainsi
toute la longueur du vide.
» Cette opération, exécutée avec soin, a d'abord fait constater un effet
remarquable: c'est que « aussitôt après le passage du prejectilc, la terre,
» d'abord lancée normalement à sa surface, revient sur elle-même, et que
» les dimensions de vide diminuent notablement, dans un rapport qui a
» été trouvé moyennement égal à celui de 100 à 85. » L'argile plasticpie,
même humide, est donc douée d'une certaine élasticité.
» Observation xiir le mode de formation <h: ce vide. — .... L'inlcrieur ])rcsentc une surface
fendillée, crevassée et sillonnée clans le sens du mouvement ilu piojeclile. On voit (pie toutes
les parties touchées par ce coips ont été lancées dans des directions normales à sa surface,
et que le contour de la surface cylindrique du canal engendré par le jjrojectile s'est déchire
et crevassé. En mesurant à diverses distances de l'entrée le contour total du |)iofil perpen-
diculaire à l'axe du vide, et en faisant la somme des parties ou tles petits arcs cpii portaient
des traces évidentes de leur contact avec le projectile, on a constaté que la somme de ces
parties touchées était constante et égale à la circonférence «le ce corps.
» Ces faits montrent que c'est en projetant dans des plans méridiens les divei's éléments
auxquels il communique une portion de sa vitesse, que le boulet produit des impressions
évasées, dont la forme doit alors dé|iendre de cette portion de sa vitesse et de la mobilité
<juc les molécules du milieu sont susceptibles d'actpiérir. «
» L'on conçoit facilement quels désordres de semblables effets de déchi-
rement, de projection et de compression doivent produire dans des corps
organisés, tels cpie les chairs, quand elles sont traversées par des projec-
tiles.
» f^a chaletn- transmise j)ar le projectile, pendant son passage, aux élé-
ments de la terre qu'il touche est telle, que cette argile est en partie cuite;
en pénétrant dans des parties charnues, elle pourrait donc parfois occasion-
ner un commencement de brûlure.
» Tous les résultats des expériences doiil on parle ici ont été l'objet de
recherches théoriques, en partant de l'hypothèse, basée sur quelques expé-
riences spéciales antérieures, que la résistance des tnilieux solides ou mous
à la pénétration des projectiles est proportionnelle : 1" à l'aire du gratu!
cercle du projectile; 2" à un fadeur composé de deux termes, l'un constatil
et r.'iutre propijrlioiuiel au carré de la vitesse.
( 929 )
» L'nnalyse nous a conduits à la détermination de l'équation de la courbe
génératrice du vide de l'iiiipression, cjui est une logarithmique. Or, en com-
parant les ordonnées de ce! te courbe théorique, qui sont les diamètres de
l'entonnoir à différentes distances de son extrémité, avec les diamètres
réels relevés sur le vide lui-même, on a obtenu les résidtats dont on met
la minute originale sous les yeux de l'Académie. Par la coïncidence et la
forme générale des courbes théoriques et des résultats des relèvements, on
constate avec évidence la confirmation de l'hypothèse admise comme base
des calculs.
» r,e tableau suivant donne une idée des distances auxquelles pouvait
s'étendre la projection de la matière plastique sur laquelle on opérait, et
quelques indications sur ce que peut produire l'introduction, dans lai corps
organisé, d'un projectile animé d'une grande vitesse.
Bntdct lie 24, tiré à la cluirgc de moitié. Vitesse initiale, 5'j5 mètres.
Distance à l'entrée ,„ „, ,„ „, „, „ m m m m
de l'entonnoir. . . 0,000 o,5oo 1,000 i,5oo 2,000 2,5oo 3, 000 3,5oo 4,000 4;50o
Dianièlre du vide
l'orMié 0,749 0,(^20 o,5ii 0,433 0,342 0,287 0)237 o,i9() 0,162 o,i5o
» Outre ces effets de projection des parties touchées par le projectile à
des distances d'autant plus grandes que la vitesse d'arrivée est plus consi-
dérable, nous avons aussi eu l'occasion de constater, en i834 (i), que,
dans la pénétration des projectiles dans les milieux, il se forme, en avant
de leur surface, une sorte de proue analogue à celle dont Dubuat a signalé
le premier l'existence pour les liquides, et que M. Tresca a récemment re-
connue aussi pour les solides. On lit en effet, dans le Rapport que nous
adressâmes alors au Ministre de la Guerre, les détails suivants :
» L'observation attentive du milieu, près de l'extrémité du lion, a ("ait découvrir la for-
mation graduelle, pendant le mouvement du boulet, d'une calotte <|u'il pousse en avant et
qui lui sert ù écarter latéralement 1rs molécules qui s'opposaient diiectement à son passage.
Ce mouvement, combiné avec la résistance que ces molécules éprouvent de la part de celles
sur lesquelles elles sont refoulées, les force à se diriger du coié où cette résistance est la
plus faible, et qui est évidemment le vide déjà formé en arrière du pi'ojectile.
» Ces calottes, coupées suivant un plan méridien, indiquent souvent, par des nuances
différentes, les diverses couches dont elles sont formées. La partie la plus rapprochée du
boulet est une sorte de cône Irès-aplati, composé de la matière formant la première couche
traversée par le projectile. Elle est entièrement recouverte par une deuxième couche for-
(1) Premier et seeuiid Rapports île la Commission des principes du tir ; lithograhiés; l834;
p. 39.
124..
( 93o )
mant un cône un peu moins aplati, s'étcndant jusqu'au boulet, et composé <le la matière
(l'une tranche postérieure à la première, et ainsi de suite : de sorte que les cônes qui s'en-
veloppent successivement sont d'autant plus aigus que la vitesse du projectile devient
moindre, quand il a traversé la couche correspondante.
» Sans pousser plus loin cette citation, on coinpiendra de suite com-
ment la formation d'une semblable proue conique, aux dépens de couches
successives de la matière traversée, doit occasionner des déchirements dans
des masses charnues : l'entraînement des fraguients de vêtements, d'équi-
pement, que l'on rencontre souvent dans les plaies, est dû à des effets de
ce genre.
» Les faits d'observation que l'on vient de rapporter ne sont relatifs
qu'à des terres argileuses plus ou moins molles, qui n'ont pas une analogie
complète avec les tissus charnus, lesquels sont à la fois plastiques et fi-
breux. Aussi ne peuvent-ils jeter qu'une hnnière fort indirecte sur les effets
observés dans les plaies d'armes à feu, et il me paraît utile de faire con-
naître aussi succinctement ce que nous avons pu observer sur le percement
des corps fibreux, et en particulier des bois, par les projectiles.
» Effets du choc des boulets en fonte contre le plomb. — Mais, aiq)aravant,
il n'est peut-être pas iinitile de rappeler aussi que des effets tout à fait
analogues se produisent quand des corps ductiles sont choqués et pénétrés
par des projectiles.
» Le plomb nous en a offert des exemples remarquables, dont nous
allons chercher à donner succinctement une idée par la citation de quel-
ques fragments du Rapport que nous adressâmes en i834 au Ministre de
la Guerre (i).
« Un bloc de ploml), à peu près cubique, de o'", (io sur o"',6o à la base et de o'",65
de hauteur, pesant 3ooo kilogrammes, a été coulé à l'arsenal de Metz et disposé pour le tir
au polygone. Les bouches à feu employées étaient des canons de siège de 24, et un canon
de 8 de campagne.
» Les projectiles ont été tirés à des vitesses comprises entre 190 et 38o mètres. En péné-
trant dans le plomb, ils y déterminèrent une ouverture plus large que leur diamètre, et qui
en a élé parfois plus que le double. Le contour primitif de ce vide est poussé d'avant en
arrière; il se déchire et forme une bordure dentelée, striée et découpée, régulière cl d'un
aspect brillant fort agréable à l'œil, dont on ne peut luiciix donner une idée (|u'en la compa-
rant à l'enveloppe de feuilles d'acanthe qui orne le cliai)iteau des colonnes d'ordre corin-
thien.
(i) Premier et second R/ipj>(>rls rlo l/i Conimisiinr/ des principes du tir, i834- lithographies,
p. 89 et suiv.
( 93' )
» Aux vitesses de 265 mètres et plus en i seconde, le boulet se fend dans le plomb; à
celles de 280 inètrts, il s'est brisé en nn grand nombre de fraynunts qui ont donné an vide
à l'intérieur une forme tout à fait irrégniière. »
« Mais, malgré ces accidents do rupture, et quelque biz.irres qu'ils aient
été, on a toujours constaté que le voliiii;e dti vide ftuiné élait proportion-
nel à la force vive du projectile, conloruiéinent aux principes de la mé-
canique.
» Lorsque le boulet ne se brise pas en fragments nombreux et qu'il est
en fonte dotice, sa surface antérietire se déprime sur une zone annulaire
plus ou moins large, qui présente une série d'empreintes creuses, circu-
laires, concentriques, dans lesquelles du plomb s'est incrusté. Le méial le
plus dtu- s'est donc non-seulement brisé, mais encore sa forme générale a
été altérée, et sa surface a été en quelque sorte guillochée sur inie certaine
étendue.
« Ces effets de déformation des corps cboquants ont, comme on le sait,
leius analogues dans le choc des projectiles en plomb contre des surfaces
ossetises.
» Pénélralion des projecliles dans le bois. — Dans les expériences siu" la
pénétration des projectiles dans le bois, dont je veux seulement rapporter
les circonstances qui peuvent avoir quelque rapport avec les effets des
armes sur les tissus fibreux, les pièces en cliéne de Lorraine, de qualité
ordinaire, étaient très-saines; leurs dimensions variaient du petit au [«lus
fort échantillon entre o™, 4o et o", 70. Le sapin des Vosges était de qualité
médiocre.
» Les effets de pénétration ont présenté des différences notables dans les deux espèces de
bois soumises au tir. Le chêne se laisse moins pénétrer que le sapin, et ne présente sur le
trajet du projectile qu'un vide à peine siiflisant jjour y introduire la sonde, même pour le
calibre de 24 (de o"', i5 de diamètre). Les libres se déjdacent laléralement et se resserrent
après le passage. Dans le sapin, au contraire, toutes les fibres choquées sont à peu près
rompues. »
i> Des flexions, des extensions, des déchirements analogues des fibres
charnues doivent se combiner avec les effets de projection signalés plus
haut.
» Mais quand, au lieu de s'arrêter dans le corps ot'i ils ont pénétré et
d'y perdre toute leur vitesse, les projectiles les traversent, oti comprend
facilement qtie ces effets de projection des parties touchées doivent déter-
miner à l'orifice de sortie un élargissement et des déchireitients plus ou
moins considérables.
( 932 ^
» C'est ce que l'on a leinnrqué clans toutes les expériences de pénétra-
tion sur les terres, les bois et les métanx. quand le milieu a été traversé, et
ces effets sont assez dangereux pour que dans les bâtiments en bois, recou-
verts de cuirasses en fer, la marine anglaise ait cru nécessaire d'introduire
une chemise intérieure eu fer destinée spécialement à arrêter les éclats de
bois.
» A l'inverse, l'élasticité de l'épiderme et la compressibibté des parties
charnues (ju'olle recouvre lui permettent souvent, après qu'elle a cédé le
passage au projectile, de revenir sur elle-même et de ne présenter qu'ini ori-
fice plus petit que le diamètre de ce corps.
» Choc des projectiles contre des corps solides. — Dans ce cas aussi, les ef-
fets que nous avons observés ne sont peut-être pas, pour quelques-uns du
moins, sans une certaine analogie avec les blessures faites par des aimes à
feu.
» A grande vitesse, les projectiles, même très-mous, peuvent traverser
les parties osseuses beaucoup ])his dures, en y opérant un découpage
presque régulier, analogue à l'effet d'un emporte-pièce, et sans produire au
loin d'autres lésions.
» Si la vitesse est moindre, ils brisent l'os en fragments plus ou moins
nombreux, et peut-être se produit-il quelquefois, en ties points éloignés de
celui qui a été touché, des ruptures dont ils sont la cause difficile à recon-
naître. Nous avons fréquemment observé, sur des pièces en fonte d'une
assez grande longueur, que les vibrations imprimées par le choc détermi-
naient à plus d'un mètre de distance du point touché la rupture de solides
très-épais. Dans le cas des blessures par armes à feu, les circonstances de
l'accident, l'âge et la constitution du sujet doivent avoir une influence con-
sidérable sur les effets produits.
» Le choc d'un corps solide contre un autre produit des [)liénomènes
différents, selon que l'un ou l'autre, ou tous les deux, sont pleins ou creux.
)) S'ils sont pleins et sphériques comme les boulets, celui qui est choqué
est presque invariablement brisé, et laisse un noyau de la forme d'iuie py-
ramide à cinq faces latérales et à base sphérique, dont le sommet seul est
déprimé.
» Si celui qui est choqué est creux, et que le choc n'ait lieu qu'à laible
vitesse, la partie touchée de la surface extérieure est légèrement déprimée
et devient la plus petite base d'une sorte de cône tron(|ué, à génératrices
curvilignes plus ou moins régulières, dont la base intérieure est beaucoup
plus grande, et fpii est refoulé dans l'obus.
( 9^3 )
» Des effets analogues ne peuvent-ils pas se produire dans le cas des
lésions produites par des armes à feu dans quelques parties du système
osseux, et donner lieu à des accidents graves?
» Je ne sais si les faits que je viens de rappeler, et dont l'observation
remonte à i833 et i834, pourront jeter quelque jour sur les effets com-
plexes qui se produisent dans les blessures faites, par des armes à feu, dans
les parties charnues et osseuses du corps humain. Je les livre avec réserve
à l'appréciation des hommes de l'art, et je n'en ai entretenu l'Académie
que par suite ties questions que m'avaient adressées lundi dernier mon ho-
norable confrère M. Laugier. »
« M. Roiiijx, par suite de la lecture du procès-verbal de la précé-
dente séance, demande la permission de rectifier une indication inexacte
qu'il a remarquée trop tard dans le titre de sa Note sur le procédé employé
par les Indiens Téles-plates pour utiliser, au |irofit de l'alimenfalion, la
matière grasse contenue dans les extrémités des os longs d'animaux herbi-
vores. C'est par inadvertance que, dans ce titre, de même que dans le texte,
vingt lignes plus bas, le produit obtenu des os du TVapili déjà vidés de leur
moelle est désigné sous le nom d'huile; dans l'ouvrage original quia fourni
ce renseignement, il n'est question que d'une graisse fluide [Comptes i-endus,
p. 877, 1. 2). L'indication même eût été moins précise, qu'on aurait eu des
motifs suffisants pour penser que la substance obtenue des os du Cervus
sh'on(jylocero& n'avait point les caractères physiques d'une huile proprement
dite.
» M. Piiche, dans l'intéressante Communication qu'il a faite à l'Aca-
démie (séance du 5 décembre) remarquaif, p;>ge 812, qu'on avait observé
récemment que « les graisses de cheval mêlées aux graisses de bœuf et de
mouton rendent celles-ci plus fluides » : c'est ce qu'aurait pu prédire Aris-
lote qui, dans son Histoire des animaux, livre III, chap. xvii, a eu roccasion
d'insister sur la difiérence que présentent, au point de vue de la consi-
stance, les corps gras suivant qu'ils proviennent de Ruminants ou de Pa-
chydermes (i), distinguant même chaque sorte par un nom particulier. »
(i) « Il y a, dit-il, une disU'nction f|ue l'on doit faire entre la i;raisse tliiide, irifaXti, et
la graisse solide, <rlix^; celle-ci est cassante en tous sens, et, après avoir été li(|ue(iée |>ar
l'action de la chaleur, durcit en se refroidissunt, ce qui n'arrive point à l'autre. Ainsi, quand
on fait un bouillon de chair do cheval ou de i)orc, la {graisse (jui moule à la surface n'y loiine
point, (|uand on la laisse lefroidir, une croule dure, comme c'esl le cas pour le bouillon de
chair de chèvre ou de brebis. «
Ce passage, qui est très-clair dans l'original, devient pres<iue inconipréliensiblc dans la
( 934 )
MÉÎ^IOÏRES PRÉSENTÉS.
PHYSIQUE. — Recherches mir rétat solide. Mémoire de M. J. Moutier.
(Extrait par l 'Auteur.)
(Commissaires : MM. Combes, Bertrand, H. Saiule-ClaireDeville.)
« M. Clausius a montré récemment (i) que, dans le mouvement slation-
naire d'un système quelconque de points matériels, la force vive moyenne
(In système est écjale à son viriel. Le viriel se compose de deux parties : le
traduction française dp Camus qui, vouLint rendre chacun des deux mots grecs par un seul
mot (VançMis, a traduit ïIeïç par axongc que l'usage a restreint à la seule graisse de porc,
mais qu'il eût pu étendre sans trop d'impropriété à celle du cheval, tandis que pour les deux
Ruminants dont il s'agit il avait à sa disposition le mot sitif(.[ni eût été très-convenable; c'est
même celui qu'emploie l'auteur de la Relation du Voyage de Lewis et Clarke. {.4 pint qf
grease siipeiior to tlie tallow ilulf of thc aniiiml.) Le nom par lequel la désignaient les voya-
geurs ne les cm])èchait pas de la trouver bonne à manger, et longtemps elle n'eut pas ])our
eux d'autre usage; mais, plus tard, ils ne furent pas embarrassés pour lui en trouver un
autre : dans le cours de leur longue station d'hiver sur la côte du Pacilique, la ))rovision de
chandelles qu'ils avaient faite au moment du départ s'élant éjiuisée, ils la renouvelèrent
(comme cela est dit dans le journal à la date du 7 janvier 180G) avec la graisse du AVapiti;
celle du cheval, s'ils avaient été réduits à s'en servir pour l'éclairage, n'eût été bonne qu'à
entretenir des lampes comparables à celles des Esquimaux, qui les allument d'ailleurs moins
pour éclairer que pour chauffer l'intérieur de leurs huttes et ])our préparer leurs aliments.
Revenant au passage d'Aiistote sur les deux sortes de graisses, j'ai ù peine besoin de dire
(]u'on n'y trouve |)oitit le mot Pnchyclerme, (|ui est tout moderne, et pour lequel il eût tiouvé
sans<loute un meilleur équivalent. Cependant, quand on le voit rap|MOcher, comme il le fait
ici, deux types en apparence aussi dissemblaldes que ceux des genres cheval et roc/ion, on
ne peut guère se refuser à croire qu'il les considérait comme appartinaut à un même Ordre.
Quant à l'Ordre des Rtuninnnts, il le nomme expressément, y faisant entrer tontes les es|)èces
armées de cornes, qu'elles soient persistantes ou caduques; il paraît, à la vérité, craindre
d'y réunir le genre si aberrant des Chameaux, mais il n'en indique pas moins les caractères
communs aux deux groupes, tels que l'absence d'incisives à la mâchoire siq^'i-ieiire, l'estomac
multiple et le pied bisulque, dont chaque doigt est muni de son sabot. On auia probablement
reuiarqiié, dans la définition qu'il donne du suif, l'expression fragile eu tous sens; disons,
en finissant, qu'elle n'est rien moins qu'inutile, car elle montre que le grand naturaliste
n'ignorait pas que certaines matières, lorsqu'elles se solidifient par un abaissement de tem-
péralure, prennent un arrangement régulier qui les dispose à se fendre en un sens i>lntôt
que dans un autre, taudis que le suif, lorsqu'il s'est figé, n'a rien qui ressemble à une struc-
ture cristalline, et se rompt suivant le sens des efforts aiix()uels il est soumis.
(i) Comptes rendus, I. LXX, p. i3i5.
( 935 )
viriel intérieur est égal à la demi-somme des produits que Ton forineen mid-
tipliant la force qui agit entre deux points quelconques par la distance qui
les sé|iare, le viriel extérieur égale une fois et demie le produit du volume
du corps parla pression extérieure. Si l'on applique ce théorème à la cha-
leur, la force vive du mouvement désigné sous le nom de chaleur est alors
exprimée en foiiction des forces mutuelles qui agissent entre les divers
points du corps, des distances qui séparent ces points et en outre du vo-
lume du corps et de la pression qu'il supporte. Le Mémoire que j'ai l'hon-
neur de soumettre au jugement de l'Académie contient quelques dévelop-
pements relatifs au théorème de M. Clausius.
» La première conséquence se rapporte à la loi de Dulong et Petit. On
sait que pour les corps simples à l'état solide le produit de la chaleur spé-
cifique par le poids atomique est im nombre sensiblement constant, que
pour les gaz simples peiinauents le produit de la chaleur spécifique sous
pression constante par le poids atomique est également une quaulité con-
stante et que cette deuxième constante est sensiblement égale à la moitié de
la première. Ce dernier résultat se présente comme un corollaire du théo-
rème de M. Clausius, si l'on admet que dans les corps solides, pris à une
température suffisamment éloignée du point de fusion, les forces intérieures
n'éprouvent que de faibles variations, lorsque le corps s'échauffe.
» Si l'on admet ensuite que hs atonies d'un C(.)r[)s soient séparés par
l'éther en mouvement, et que l'on applique à l'élher le théorème fonda-
mental, en supposant le cas simple où le corps offre les mêmes propriétés
dans toutes les directions, le viriel, qui pour un corps solide en général se
réduit sensiblement au viriel intérieur, peut se représenter par' la moitié du
volume interatomique qu'occupe l'éther, par une certaine force qui con-
serve la même valeur dans toutes les directions. Si l'on considère la force
vive moyenne de l'éther comme étant proportionnelle à la température ab-
solue, la force dont il est question a été désignée sous le nom de premion ùj-
terne ou de cohésion. Si l'on aduiet que la cohésion, de même que les forces
intérieures, varie peu lorsque le corps solide s'échauffe, ou trouve que pour
les corps solides, pris à une température suffisamment basse, le coefficient
de dilatation est sensiblement constant, inférieur à celui des gaz, résultat
conforme à l'expérience, et que ce coefficient de dilnlation est cVauUuil j>ltis
(jra)i(l que le volume iin'uriahle occupé par les atomes est une frcu lion j'ius pe-
tite du volume apparent du corps.
M Les formules auxquelles on arrive permettent de déleiminer le volume
C. R., 1S70, 2= SemesPi:. (T. I.XXI, N" SG.) ' 2 J
( 936 )
invariable occupé par les atomes d'un corps solide et la cohésion de ce
solide, lorsque cette dernière force n'éprouve que de fatbl<^s variations par
suite des chaugements de tenipératui"e. Pour l'or, l'argent, le plalino, le
cuivi-e, le fer, la cohésion est égale à la moitié du coefficient d'élasticité.
» Cette relation simple entre la cohésion et le coefficient d'élasticité
peut s'établir à priori, en supposant que les phénomènes calorifiques soient
dus à un mouvement vibratoire de l'éthér, analogue à celui qui produit la
lumière. Le viriel intérieur est représenté, dans cette manière de voir, par
la force vive qui correspond au mouvement vibratoire de l'éther. Sous
l'effort d'une traction très-petite, oh trouve que l'âllosigement de l'unité
de longueur est le rapport de la traction exercée sur l'unité de surface au
double de la cohésion, de sorte que, d'après les lois de l'élasticité de trac-
tion, le coefficient d'élasticité est égal au double de la cohésion.
» On sait, par les expériences de Wertheim, que le coefficient d'élasti-
cité des métaux diminue, en général, à niesure que la lempéralure s'élève,
sauf pour le fer et l'acier; la formule qui donne la valeur delà cohésion
permet de rendre compte des variations qu'éprouve ainsi le coefficient
d'élasticité par suite des changements de température.
» Cette formule rend également compte d'une relation établie autrefois
par M. Kupffer entre le coefficient d'élasticité, la cbaleur spécifique, la
■densité, le coefficient de dilatation d'un même corps et l'équivalent méca-
nique de la chaleur. Cette relation, que l'expérience vérifie, n'avait pas
été établie jusqu'ici d'une manière satisfaisante, suivant l'opinion de Ver-
det : « Il se peut que la formule de M. Kupffer soit l'expression empirique
» d'une relation que la théorie est impuissante à établir. Nous n'avons pas
» en effet prouvé que cette formule fût fausse, mais simplement qu'on ne
» pouvait la déduire d';ructui raisonnement (i priori (i). »
M La formule qui donne la valeur de la cohésion représente également,
sons une autre forme, la force désignée par Athanase Dupré sous le nom
d'altraction au contact, dans le cas où le travail interne dépend du vohime
seul.
)> Les considérations qui précèdent conduisent en outre à l'expVession
simple du travail interne effectué dans la dilatation d'un corps solide, qui
avait été donnée déjà par M. lïirn : lé travad interne est le produit de la
cohésion par l'accroissement de volume. Cette relation ne paraît pas con-
venir aux liquides en général et n'est pas applicable au sulfure de carbone
(i ) Exposé de la Théorie mécanique de la chaleur, p. i35.
(937 )
eu particulier. Diîns ce liquide, elle conduit, pour le volume invariable
occupé par les atomes, à un nombre qui excède d'environ nu tiers le vo-
lume qu'occuperaient, dans le sulfure de carbone, le carbone et le soufre
supposés cristallisés; or ce dernier volume est évidemment ime limite su-
périeure du volume occupé réellement dans la combinaison par les atomes
des deux éléments, le soufre et le carbone.
» L'expression précédente du travail interne, malgré qu'elle manque de
généralité, p(^ut rendre compte néanmoins, dans certains cas, du dégage-
ment ou de l'absorption de chaleur qui accompagnent les transformations
isomériques d'un même corps solide : le soufre, sur lequel les travaiu de
MM. Ch. Sainte-Claire Deville et Regnault ont appelé depuis longtemps
l'attention, en offre im exemple. Au moyen des formules qui précèdent, on
peut évaluer directement la chaleur de transformation du soufre prismatique
en soufre octaédrique et on trouve un nombre qui coïncide très-sensible-
ment avec. la dilférence des chaleurs de combustion obtenues par MM. Favre
ef Silbermann pour ces deux variétés de soufre.
» Le théorème de M. Clausius est applicable à tous les états de la ma-
tière; pour les corps solides ou liquides, le viriel extérieur est néglige.^ble
par rapport au viriel intérieur, il n't'ii est plus de même pour les gaz. Si
l'on représente, dans ce dernier cas, le viriel intérieur par la moitié du pro-
duit cjue l'on obtient en multi[)liant le volume du gaz par la pression
externe augmentée de la cohésion, il est facile de voir que la cohésion,
ainsi définie pour les gaz, est égale à quatre fois la valeur de la pression
interne ou cohésion que l'on déduit de la relation donnée primitivement par
M. Hirn, comme-généralisation ties lois de Mariotte et de Gay-Lussac. Les
résultats relatifs à la cohésion que l'on peut déduire de cette dernière rela-
tion, dans la théorie des gaz, s'obtiennent également au moyen du théo-
rème de M. Clausius, par un simple changement introduit dans la valeur de
la cohésion.
» On peut remarquer que le viriel extérieur est égal à la force vive qui
correspond au mouvement de translation des molécules dans la théorie de
Bernoulli, développée par M. Clausius, et que le viriel inférieur représente,
an point de vue précédent, la force vive qui correspond au mouvement
vibratoire de l'éther, de sorte que la force vive totale ou la quantité de cha-
leur réellement existante à l'intérieur du gaz est la somme de ces deux
forces vives partielles. Les mêmes raisonnements s'appliquent à tous les
états de la matière, mais la différence essentielle qui existe entre les gaz
d'une part, les solides et les liquides d'autre part, consiste eu ce que, dans
125.
( 9^8 )
ce flernier cas, la force vive qui résulte du niouvemenl de îranslatioi) des
molécules est néglige;d)le. »
M. SoREL soumet an jugement de 1' Vcadémie une Noie relative à un
moyen d'augmenter la portée des picces de canon.
(Renvoi à la Commission nommée pour I<s questions relatives
à l'art militaire.)
M. A. Bbachet adresse une Note relative à un procédé proposé par lui,
pour substituer les limettes aux alidades à piunules, pour le pointage des
canons.
(Renvoi à la même Commission.)
M. Ch. Tellier adresse luie Note relative à l'emploi de la lunette à fils
croisés, pouv faciliter le tir.
(Renvoi à la même Commission.)
M. Ch. Tellier appelle l'attention de l'Académie sur l'emploi que l'on
pourrait faire du moût d'orge, tel qu'il est préparé dans la fabrication de la
bière, poiu- l'alimentation des enfants en bas â£;e.
(Renvoi à la Commission nommée pour les questions relatives
à l'alimentation.)
M. Duméry adresse à l'Académie une « Note sur de nouveaux campe-
ments militaires ». Cette Note est accompagnée de deux figures indiquant
les paities essentielles du mode de campement jM'oposé par l'auteur, et de
tableaux comparatifs destinés à permettre d'apprécier les volumes d'air
dont chaque soldat peut disposer et les matériaux qu'il doit porter, daiss
l'ancien et dans le nouveau système de campement.
(Renvoi à la Section de Médecine et de Chirurgie.)
M. P. Madixier adresse une Note relative à une nouvelle classe de désin-
fectants.
Parmi les désinfectants gazeux, répandant nu parfum aromatique, sans
danger pour la re.-ipii-ation cA attaquant cepentl.iul les principes infectieux
de l'almosplière, l'auteur cite : i" la bagasse de canne à sucre, qui a été,
dans la Guyane anglaise, l'objet de recberrlies longtemps poursuivies |)ar
( 939 )
M. Dùllon, en i863; 2° les vapeurs que dégage la torréi':ictioii du café. On
pourrait employer également, suivant lui, pour purifier l'air des salles
d'hôpitaux, des solutions dépourvues d'odeur, par exemple les solutions
de perntauganate de potasse, de ferrate de potasse, on des solutions
douées d'une odeur qui ne serait pas répulsive, telles que celle de l'iode, etc.
(Renvoi à la Section de Médecine et de Chirurgie.)
M. P. Verbeu. adi'esse une Note relative au mouvement du pendule.
(Renvoi à la Section de Mécanique.)
M. TosELLi adresse à l'Académie : i" la description d'un « cône com-
pensateur M, destiné à faire descendre et remonter les ballons, sans jeter
de lest, et sans perdre de gaz; 2" l'indication d'un moyen qui lui paraît
propre à faciliter, pour les aéroiiautes, la déterminalion d'^ leur situation
géographique.
(Renvoi à la Commission précédemment nouuu'e.)
M. GouiLLY adresse une Note complémentaire, relativement à sa Com-
munication précédente sur un appareil destiné à mesurer la vitesse et la
direction des aérostats.
(Renvoi à la Cojnmission précédemment nommée.)
M. Prigent soumet au jugement de l'Académie la description et le dessin
d'un appareil auquel il donne le nom de « Libellule mécanique », mû par
la vapeur. L'appareil parvient déjà, dit-il, à enlever son moteur : pour qu'il
puisse enlever son conducteur, avec une provision suffisante de combus-
tible, l'auteur propose de lui adjoindre un petit aérostat, d'une capacité de
200 mètres cubes.
(Renvoi à la Commission précédemment nommée.)
A propos de ces Communications relatives à l'aérostation, M. le Prési-
dent invite les Membres de la Conuiiission qui floit examiner tontes les
questions de ce genre, de vouloir bien hâter, autant que possible, son
travail.
( 94o )
CORRESPONDANCE.
M. Dausse, Président de la Société philomathique, exprime à l'Académie
la sympathie avec laquelle la Sociélé a pris connaissance des paroles pro-
noncées p;ir M. Dumas devant l'Acadéniie, dans la séance du S.décembre,
au sujet de ia mission confiée à i!/. Jnnssen.
THERMODYNAMIQUE. — Sur la force des matières explosives.
Réponse à M. Cazin; par^l. Iîerthelot.
« Les observations théoriques de M. Cazin me semblent fondées, quoique
je n'aie pas réussi à vérifier l'exaclitude de ses calculs. En effet, la quan-
tité AI, par laquelle ce savant représente l'action chimique et qui reparaît
dans presque tous ses calculs, est évaluée par lui à 746,1 calories, au lieu
de 61 g, 5 adoi)tées par M. Bunsen ; or, en répétant le calcul d'après la for-
mule (4) de M. Cazin, je trouve 624,2. Peut-être conviendrait-il de discuter
d'une manière approfondie la question du travail intérieur des gaz, qui doit
jouer un grand rôle dans des états aussi extrêmes que ceux des matières
explosives. Mais je n'ai pas l'intention de ni'engager davantage dans des
problèmes plutôt mathématiques que physiques, qui ne sont pas de ma com-
pétence et qui n'ont pas d'ailleurs une très-grande iiriportance au point de
vue expérimental.
)) En effet les lois de Mariotte et de Gay-Lussac, sur lesquelles ces théo-
ries reposent, perdent toute signification physique dans l'étude des gaz
comprimés à plusieurs milliers d'atmosphères. En outre les chaleurs spéci-
fiques de tels gaz sont complètement inconnues et varient sans doute avec
la températiue et la pression.
M Ces réserves sont justifiées par bien des phénomènes et notamment par
les expériences de Rumfordt et par celles des artilleurs contemporains, dont
les résultats ne paraissent pas susceptibles d'être calculés à l'aide des lois
de Mariotte et de Gay-Lussac. Aussi m'étais-je gardé de présenter les chif-
fres déduits de semblables calculs comme susceptibles de quelque ap|)li-
cation précise et absolue.
» La partie de mon travail sur laquelle j'ai désiré siu'tout appeler l'at-
tention et dont l'exaclilude me paraît incontestable en principe, c'est la
comparaison entre les diverses matières explosives, établie à l'aide de deux
doimées caractéristiques et déterminables par expérience, savf)ir : la quan-
( 94ï )
tité de chaleur développée, liuiueile règle|le travail maxiimun ; et le voltinie
des gaz dégagés, lequel, combiné avec la donnée précédente, détermine !a
pression initiale. A ce point de vue, les résidtals de mon étude conservent
leur valeur comparative, ainsi que les considérations sur la dissociation, la
durée des réactions et les phénomènes du choc. »
ASTRONOMIE. — Eclipsa de Soleil du 22 décembre 1870. Mesure de la variation
de la Lumière. Note de M. C. Flammarion.
« Plusieurs astronomes et physiciens ont pris soin d'observer, penchuit
les dernières éclipses de Soleil visibles en France, la variation de tempéra-
ture causée par l'occultation de l'asîre du jour et manifestée par le llier-
momètre. H m'a paru intéressant d'observer la variation de lumière causée
par le même phénomène. Malheureusement uous n'avons pas, pour mesu-
rer la lumière, d'instrument indicateur faisant pour cet agent l'office que
remplit le thermomètre pour la chaleiu-.
» A l'époque de mes voyages scientifiques en l)alloii, la mesure de la
lumière atn)Osphérique, inférieure, intérieure et supérieure aux nuages,
avait été inscrite à mon progrannue d'observations, et j'ai du cherch.^r les
moyens de parvenir à celte constatation. Après avoir vaineaient cherché
une substance dont la propi-iété, rapjielaiit celle d« la pupille, eût été de se
contracter ou de se dilater suivant l'intensité de la lumière, j'ai imaginé
un appareil enregistreur dont les indications sont fournies par du pa-
pier sensible, albuminé et nitrate dans un bain .spécial minuti-ertsement
«lesiu'é. "Cet appareil, auquel j'ai donné le nom de Pholomèlre, a été con-
■stmit en 1867 par M. Lecoq, horloger de la marine de l'État : il m'a servi
depuis cette époque^ à observer les variations photoniéiriques des jours et
des mois, de la même manière que les variations calorifiques sont observées
sur le thermomètre.
» Jeudi dernier, 22 décembre, j'ai appliqué la même méthode à mesurer
les effets de l'éclipsé de Soleil, la diminution de lumière correspondant aux
différentes phases de ce rare phénomène, rare en réalité, puisque nous
n'avons plus cjue quali'e grandes éclipses de Soleil visibles en France jus-
qu'à la fin du siècle.
» Une bande de papier préparé se déroule dans un cylindre, unie i|)ar
lui mouvement d'hoilogerie. La lumière s'accuse par la teinte plus ou
moins foncée que prend le papier indicateiu- sous son influence. Le mou-
vement d'horlogerie est réglé selon la dta-ée des observations à faire. S'il
( 94^ )
s'agil d'une observation de moins d'une heure, telle que la mesure de l'in-
tensité de la lumière en certaines régions d'un voyage aérostatique, celle
du lever ou du coucher du Soleil, etc., on prend le mouvement d'une
heure. S'il s'agit LJ'une observation plus longue et constante, tel que l'eu-
regislrement de l'état du ciel pendant toute une journée, on prend le
mouvement de 12 heures. La durée de l'exposition du papier sensible à
la lumière dépend de l'ouverture de la fenêtre du cylindre dont ou peut
faire varier la largeur. Habituellement, et particulièrement pour les me-
sures qui Ibnt l'objet de cette Note, j'ai donné à l'exposition une durée de
3 minutes.
)) Avant el après réclijise, les observations ont été faites d'heure en
heure. Pendant l'éclipsé, les teintes du papier exposé ont été arrêtées de
10 en 10 minutes, et vers le milieu de réc]i()se de 5 en 5 minutes. J'ai en
de la sorte vingt-huit photographies successives de l'intensité de la lumière.
L'appareil, placé horizontalement, était légèrement incliné vers le Sud, à
cause de la faible hauteiu- du Soleil sm- notre liorizon au solstice d'hiver.
J'ai jn'is soin, naturellement, de me placer dans un lieu absolument dé-
couvert (sixième secteur de l'enceinte de Paris) d'où la voûte céleste est
entièrement visible.
)) J'ai l'honneur de mettre sons les yeux de l'Académie le tableau de
ces observations pholouiétriques fin 22 décembre. On y remarque, dès la
première vue, raccroissemeul graduel de la teinte de l'indicateur photomé-
trique, dû à la progression de la lumière elle-même, depuis 7 heures du
malin où elle est nulle, jusqu'à 11 heures où elle atteint sa plus grande
intensité. Puis on la voit sensiblement décroître jusqu'après midi 4o™;
milieu de l'éclipsé, où la phase du phénomène atteint 83 centièmes
du disque solaire. Ensuite la lunnère s'accroît de nouveau jusqu'à la fin
de l'éclipsé, et atteint son second maximum à 2 heures. Enfin elle décroît
successivement d'heure en heure jusqu'à 5 heines, où elle est de nouveau
nulle.
» Le ciel a été couvert ou nuageux pendant la journée entière, et le
soleil n'a brillé qu'à île rares intervalles. Si le ciel eût été pur, la dégra-
dation du papier indicateur eût été parfaitement uniforme, et la teinte la
|)lus faible du temps de l'éclipsé eût été celle de la plus grande phase.
Cependant on voit sur le tableau que la hnnière continue de diminuer après
midi 4<^'"> et reste très-faible pendant iS miuutes. Ce fait vient de ce que
le ciel s'est couvert davantage après le nnlieii de récli|)se. Pour rectifier
et compléter le sens des indications de la teinte, j'ai inscrit à la colonne
(943)
des observations les circonstances qui ont accompagné certaines phases do
l'éclipsé.
» Dans ces essais d'une mesure de la lumière, j'ai, pour pouvoir com-
parer diverses observations entre elles, adopté une échelle de teintes, éten-
dues depuis le blanc jusqu'au noir, et numéroté ces teintes depuis zéro
jusqu'à 20. Ce sont là, en quelque sorte, des decjrés de lumière, qui peu-
vent être comparés aux degrés de chaleur révélés par le thermomètre. La
nuance la plus foncée (20 degrés) a été quelquefois atteinte dans les beaux
jours d'été. En hiver, la plus grande intensité de lumière en plein soleil ne
dépasse pas 16 degrés. Il va sans dire que le papier pholométrique sidjit
toujours la même préparation, et reste le même temps exposé. Connue on
l'a remarqué, en faisant la somme des degrés de chaleur envoyés par le
Soleil pour mûrir les diverses espèces de plantes, on peirt ici remarquer
quelle immense différence existe dans la somme des degrés de lumière qui
atteignent le sol, entre les différentes époques de l'année.
» Cette échelle photométrique que j'ai adoptée est arbitraire; les
nuances sont difficiles à fixer sans être diversement affaiblies; les moments
successifs de l'e-sposition n'agissent pas d'une manière identique : cette
méthode est donc défectueuse en plusieurs points, et je me hâte de le faire
remarquer pour appeler l'attention des amis des sciences sur un moyen
plus absolu d'obtenir la mesure exacte de la lumière.
)) Le long tableau photographique qui représente ces variations de
lumière de la journée du 22 décembre ne pouvant être reproduit dans
l'impression de cette Note, on peut y suppléer en remarquant les degrés
correspondant à chaque teinte. Ainsi, à 8 heures du matin, au lever du
Soleil (ciel couvert), il n'y avait que 4 degrés de lumière. A 9 heures, le
photomètre donne 10 degrés; à 10 heures, 12 degrés, et à 1 1 heures, 14.
Ici le ciel, en partie découvert, laisse apercevoir le Soleil pendant la moitié
de la durée de l'exposition. L'éclipsé con.unence à i i''2o'°. La lumière des-
cend successivement à 1 3, 12, i i, 10 et 9 degrés jusqu'à midi 35 minutes.
A midi 3q minutes, plus grande phase de l'éclipsé, la Lune cachant les
83 centièmes du Soleil, la lumière tombe à 8", 5. En ce moment, les nuages
ralentissent leur marche rapide jusqu'alors, la température de l'air est
descendue depuis midi de — 5 à — 6 degrés, un silence se fait dans la
nature; les oiseaux, qui tout à l'heure volaient et faisaient tapage, se tai-
sent et sont cachés; on n'entend absolument que le bruit lointain du ca-
non. Le photomètre, descendu à 8 degiés, ne remonte tju'à i liciu-e où il
C. R., 1870, 2= Semestre. (T. LXXI, ^'' !iG.) » 26
( 944 )
marque 9 degrés. Puis, il atteint 1 1 degrés à i'',2o'", 12 à i'',4o™, et iS à la
fin de l'éclipsé : t'',57™. A 3 heures il redescend à 9 degrés, à 4 heures à 3,
et à 5 heures la lumière est retombée à zéro. Telles sont les circonstances
générales de l'observation photométrique des effets de Tcclipse.
» Il n'y avait sur le disque solaire qu'un groupe de taches, formé de
deux foyers principaux et situés dans la région nord-ouest, et une tache
isolée à l'ouest du centre. Cependant nous sommes actuellement à l'époque
d'un maximum de taches solaires, les derniers maxima ayant eu lieu en
novembre 1847 et octobre 1809, les derniers minima en avril i856 et
février 1867, et les comparaisons montrant que le maximum arrive envi-
ron trois ans deux tiers après le minimum.
» J'ajouterai une dernière observation générale. La lumière joue dans
la nature un rôle non moins important que celui de la chaleur. Les données
fournies par un photomètre satisfaisant ne seraient pas moins utiles peut-
être à la météorologie que celles du thermomètre : c'est ce que des études
futures nous apprendront. Mes essais de mesures, comme mon appareil,
sont très-imparfaits; mais on me pardonnera de les avoir exposés, s'ils
peuvent susciter des recherches qui donnent un jour à ce mode d'observa-
tion lés perfectionnements qui lui manquent. »
« M. Cn. Saintf.-Ci.airf. Deville, à l'occasion de l'inléressante Commu-
nication de M. Flammarion, qui montre parfaitement comment, malgré les
nombreuses variations dans la pureté du ciel, l'intervalle correspondant
au maximum de l'éclipsé a donné un minimum de lumière diffuse, désire
faire remarquer que, depuis plusieurs années, il a fait construire par
M. Hardy lui spoiopliolomètre, destiné aussi à mesurer l'action de la
lumière diffuse sur les papiers réactifs. Du mois d'août 18G9 au 6 sep-
tembre 1870, l'instrument a fonclionné à l'Observatoire météorologique
de Montsouris, et la moyenne diurne a été donnée régulièrement dans
chaque lUillelin.
» Dans une prochaine séance, il se propose de communiquer à l'Aca-
démie les résultats obtenus par lui en août 18GG, lesquels démontrent :
i^'quc la lumière dilfusc projetée par le zénith ne varie pas delà même
manière que celle qui est transmise horizontalement; 2° que ces deux
manilèsl.'ilions de la lumière solaire sont inlimcnvient liées aux autres élé-
ments météorologiques. »
( 945)
HYGIÈNE PUBLIQUE. — Conservation des viandes, moyen d'éviter les salaisons.
Note de M. L. Soubeiran.
« Il a été proposé, dans ces derniers temps, pour subvenir à l'alimenta-
tion de l'immense population de Paris, beaucoup de procédés nouveaux
de conservation des viandes, mais nous n'avons trouvé aucune indication
relative à un procédé qui a la sanction d'une pratique très-ancienne chez
divers peuples : nous voulons parler de la conservation des viandes séchées
et pulvérisées.
» Dans une des dernières séances de la Société d'Acclimatation, M. E.
Simon, consul de France en Chine, rappelait quelques-uns des procédés
culinaires employés par les Chinois et les Mongols. Au moment de préparer
leurs provisions de chasse ou de voyage, ces peuples réduisent la chair des
bœufs et des moutons en une poudre sèche, qu'ils mélangent avec de la
farine d'avoine, de mais, etc.
» L'excellence de ces poudres de viandes a été démontrée également par
les voyageurs arctiques, les Kennedy, les Kane, les Franklin, qui se sont
trouvés très-bien dans leurs lointaines et périlleuses expéditions, aussi bien
que les trappeurs de la baie d'Hudson, de l'usage du pemmican : ce n'est
autre chose qu'une viande quelconque, desséchée, broyée et saturée de
graisse, et dont une livre écjuivaut à quatre livres de viande ordinaire.
» Découpée en lanières minces, la chair de l'animal, bœuf, cerf, etc., est
dégraissée et privée de ses membranes et tendons, puis séchée au four jus-
qu'à friabilité; elle est alors broyée en une poudre assez fine, et mêlée à
un poids égal de gras de bœuf fondu ou de lard. Pour rendre le mélange
plus agréable au goùl, on peut, comme l'a fait Richardson, y incorporer
une certaine quantité de raisins de Corinlhe, ou mieux de sucre; on mange
le pemmican, dont la saveur est agréable, tel quel ou mélangé à de la
farine.
» On pourrait aussi faire du lassojo ou charqui, dont il est employé des
quantités énormes dans toute l'Amérique du Sud, qui en exporte, en
outre, des masses considérables dans diverses colonies, pour y servir à la
nourriture des travadleurs. On dégraisse les animaux, bœufs en général,
qu'on vient de tuer, on en coupe toute la chair en lanières minces, de
façon à ne plus laisser que la carcasse, et l'on plonge ces lanières un mo-
ment dans une solution concentrée de sel (quelquefois on saupoudre seu-
lement d'une légère couche de sel fin), puis on les laisse en tas pendant
une douzaine d'heures; après quoi on fait sécher au soleil (on peut substi-
126..
( 946 )
liier ;i la chaleur solaire celle d'un four), cr l'on empaquette pour l'usage
la viande, qui a perdu environ un tiers de son poids et qui forme la hase
de la noiu'riture de nombreuses populations.
» Ces procédés, qu'il nous serait facile d'imiter, ont l'avanlage :
» i" De permettre l'emploi de toutes les parties des animaux, et même
de faire, sans que l'œil en soit averti, le mélange de viandes diverses;
» 2" De permettre la conservation indéfinie d'aliments qui, sous un
volume relativement faihle, renferment une grande quantité de matière nu-
ti'itive : les transports sont donc ainsi facilités;
» 3" De ne pas avoir, comme les salaisons, une influence marquée sur
la santé, si l'usage en est prolongé sans le concours de végétaux frais qui
corrigent le mauvais effet des salaisons. »
•&^
« M. Payex, à la suite de la Communication de M. L. Soubeiran, dé-
clare qu'il jiartage complètement l'avis de l'auteur, sur les avantages de
la dessiccation des viandes, en vue de leur conservation; il désire seule-
ment informer l'Académie que la Société centrale d'Agriculture, il y a près
de trois mois, s'est occupée de cette cpiestion importante qui lui était pré-
sentée comme une des meilleures solutions de la conseivalion et du trans-
port économique de cette sidistance alimentaire.
» De son coté, M. Tresca s'est occupé d'effectuer, au Conservatoire des
Arts et Métiers, la dessiccation, dans des étuves à courant d'air chau<l, de
la viande découpée en lanières minces, suspendues à des fils; il convient
de débarrasser préalablement la chair musculaii'e des tissus adipeux. Dans
de bonnes conditions, la dessiccation a pu être achevée en quaranle-huil
heures.
)) Le produit desséché a été réduit en poudre à l'aide d'une machine
simple, analogue à l'une de celles qu'on emploie pour broyer le plâtre, et
rappelant les dispositions bien connues du moulin à café. Deux produits
de même nature, préparés à la Plata, ayant été remis à M. Chevreul, Prési-
dent de la Société, notre confrère a reconnu que l'un d'eux avait dû être
desséché à une température ne dépassant pas 55 degrés, laissant dans cette
substance les principes solubles dans lesquels réside l'arôme latent déve-
lopi)abIe à la cuisson.
■> I/autre produit avait été desséché à tuie température plus élevée,
» Tous deux pouvaient être employés pour la préparation du bouillon;
le premier était préférable au point de vue des propriiHés organoleplicpu-s.
» La viande pulvcTisée peut être très-facilement introduite dans les
{ 947 )
rations alimentaires; ajoutée, par exemple, clans les proportions de 5, lo
à i5 centièmes au riz, l'une des céréales les plus pauvres en nialières
alibiies, azotées, grasses et salines, elle complète son pouvoir nutritif et lui
laisse une saveur agréable, et offrirait l'avantage signalé par M. L. Sou-
beiran de donner aux produits du dépeçage des différents animaux les
mêmes apparences, évitant j^ar là les préjugés qui fout repousser certains
d'entre eux de la consommation.
» On comprend que la poudre de viande réaliserait une grande éco-
nomie pour l'emmagasinement et les transports, puisqu'elle représente
quatre ou cinq fois son poids de chair musculaire à l'état nornsal, conte-
nant plus (le 0,75 d'eau. Pour la conserver et la transporter au loin, il
conviendrait sans doute de l'enfermer, assez fortement tassée, dans des
barils bien secs et solidement cerclés.
» La principale difficulté pour la mise en pratique de ce procédé consis-
terait aujourd'hui dans le prix élevé et le peu d'abondance du combus-
tible. »
M. LE GÉNÉRAL MoRiN rappelle les « Essais sur la conservation des farines
entrepris par ordre du Ministre de la Guerre de 1857 à i86'3 » qui ont été in-
sérés dans les annales du Conservatoire des Arts et Métiers, essais dont les
résidtats pourraient trouver actuellement une application utile :
Si le développeuien; des lolations commerciales ol la facilité des communications par les
chemins de fer ont fait perdre une grande partie de son importance à la question delà con-
servation des blés, et en a limité l'application au\ produits de la récolte d'une ou deux an-
nées, la conservation des farines destinées à l'approvisionnement de la flotte, à celui des
places et des troupes engagées dans des expéditions lointaines, n'en est pas moins restée
d'une grande utilité. Aussi a-t-on cherché depuis longtemps les moyens de résoudre
d'une manière pratique cette dernière question. Sans rappeler ici les diverses tentatives qui
ont été faites à ce sujet, je dirai qu'elles reposent sur deux procédés différents qu'il ne serait
guère possible d'employer sinuiltanément, ce qui, d'ailleurs, ne paraît pas nécessaire,
comme on le verra plus loin.
Les deux procédés employés sont la compression et l'étuvage. Je rappellerai succincte-
ment en quoi ils consistent et quels résultais l'on peut en obtenir.
La farine étant une matière amenée à lui très-grand état de division, elle se tasse facile-
ment et prend dans les sacs ou dans les caisses où on la place une densité d'environ o''8,-54
au décimètre cube. Dans des essais que j'ai dirigés en i856-57-58 i)ar ordre du Ministre de
la Guérie, on n'a pu réduire le volume de la farine que de 3o pour 100 environ de son vo-
lume après le tassement, et l'amener à une densit." de plus de i''S,o6 au décimètre cube, en
opérant sur des caisses de o",35 de largeur sur o"',6o de longueur et o'",3o de hauteur,
contenant Go kilogrammes de farine. La |)ression exercée par centimètre carré, pour obtenir
( 948 )
cette densité, était tle8o kilogrammes, et correspoiulait pour la surface ])ressée, qui était de
35 X 60 = 2100 centimètres carrés, à -.^Sooo kilogrammes, ce qui était à ])eu près la force
niaximiim des presses dont on disposait.
Ces résultats sont d'accord avec ceux qui ont été obtenus à Brest par la marine, dans des
expériences fuites en i856.
Lorsqu'on opère sur une quantité de 5o à 60 kilogrammes avec des ca.isses en bois,
comme nous l'avons fait à Paris et comme l'a aussi essayé la marine, la nécessité de conso-
lider ces caisses par des ferrures et de donner au bois assez d'épaisseur pour qu'elles résis-
tent à la pression, conduit à un volume brut du contenant et du contenu qui com[)ense la
diminution de volume obtenue par la pression. Il n'y a donc, sous le rapport de l'arrimage,
que le faible avantage que peut procurer l'emploi des caisses au lieu de celui des sacs.
Mais si l'on agit sur des quantités plus faibles, outre qu'il est alors facile d'obtenir une
plus grande densité, l'on peut renfermer la fiirine pressée dans des boîtes en fer-blanc, ce
qui ])erniet de profiter pour l'arrimage de toute la réduction de volume opérée.
M. AVawra, de Vienne (Autriche), a présenté à l'Exposition de Londres en 1862 des fa-
rines comprimées en pains de i''s, 726 environ, n'ayant qu'un volume de i'''^,3';, et par
conséquent d'une densité de i '^'■',259 au décimètre cube, ou égale à 1,67 fois celle de la fa-
rine simplement tassée.
Or des expériences directes, dont j'ai rendu compte en i85g, sur la compression des fa-
rines, semblent indiquer que la densité ne s'accroît que proportionnellement à la racine
carrée des pressions; il s'ensuivrait que, pour obtenir la densité des farines exposées par
M. Wawra, de Vienne, il faudrait exercer une pression égale à
X = 80 X
(— ^ — ( I = 108 kiloL'rammes par mètre carré.
i,ob/ - "
Les pains de farine de M. Wawra ayant o"',i32 de diamètre, ou 174 centimètres carrés
de surface, il s'ensuit que, pour comprimer des pains de farine pesant 1*^^,726, il faudrait
cnqjloycr une pression de près de 81822 kilogrammes.
En supposant même que, par des dispositions faciles à imaginer, l'on puisse com|)rimer
à la fois plusieurs pains, il me paraît évident ()ue cette o|)ération augmenterait considérable-
ment le prix des farines ainsi préparées; car à Brest, pour obtenir une couqiression beaucouj)
moindre, il a fallu faire une dépense de 19^ 36 psr 100 kilogrammes, au lieu de 5 francs
que coûte l'emballage ordinaire.
Le procédé de M. AVawra, ou la compression par jietites quantités, qui |)erinet de doubler
la densité, paraît, il est vrai, très-favorable à la bonne conservation des farines. Pour la
mieux assurer, il avait même enveloppé les pains présentés à l'Exposition avec une feuille
d'étain; mais il se contente ordinairement de les enfermer dans une boîte de carton.
Un |)ain de farine, revenu de l'Exposition de Londres, où il avait été envoyé en mai 1862,
a été [)auifié à la Manutention de Paris en juin i863, et a donné d'excellent jiain.
Cependant il faut dire que la farine ainsi comprimée est devenue extrêmement duie; (ju'il
est indispensable de l'écraser, de la pulvériser, et, si l'on peut, de la bliilei', avant de la
mouiller et de la |)étrir; ce qui peut ollrir en campagne quelques difiicullcs à sou emploi.
Ces diverses observations me portent donc à penser que le [jrocrdé de la conseï vation des
farines par une compression énergique et par petites quantités ne peut étreaccejité que pour
( 949 )
l'usagfi des voyageurs isolés, et f[iril est trop dispendieux pour être appliqué à l'aliiiienlalion
des armées et de la flotte.
Quant à la compression des farines par quantités de 5o à 60 kilogrammes renfermés dans
des caisses en bois, quoiqu'elle augmente le prix des farines de 19 ou 20 francs, ou de
5o pour 100, si elle offrait pour la conservation de cette denrée alimentaire les garanties
nécessaires, il n'y aurait pas lien de s'arrêter devant une dépense si utile pour l'alimentatioa
de nos soldats; mais malheureusement le degré de compression que, dans le service courant,
l'on peut obtenir, ne suffit pas pour préserver la farine de 1 altération.
Des expériences faites avec soin, de i856 à iSSp, laissent d'autant moins de doute à cet
égard, que les farines que l'on avait ainsi préparées avaient été en partie conservées à l'un
des étages de la Manutention de Paris, et parfaitement à l'abri de toute humidité.
Si une partie des Rapports de la tjiarine, sur des farines comprimées à ])cu près au même
degré, semblent émettre une opinion plus favorable sur celles qui avaient supporté deux ans
à peine de conservation, cela tient peut-être à ce que les marins ne sont que trop souvent
exposés à ne consommer que des farines avariées, et d'ailleurs il faut observer que ces con-
clusions n'ont été appliquées qu'à des farines conservées dans des caisses en fer-blanc.
En résumé, il me semble que, pour le service des armées de terre et de mer, le procédé
de la compression ne peut pas être accepté, et que son emploi doit être limité à l'usage des
voyageurs isolés.
Après les essais peu satisfaisants que nous avions faits du procédé précédent, je reçus
l'ordre d'essayer de celui de l'étuvage, qui est en usage dans quelques ports de l'Océan et
particulièrement à Bordeaux.
Ce procédé consiste à introduire et à faire circuler lentement la farine dans une étuve
chauffée à no ou 80 degrés au plus pendant une ou deux heures. A cet effet, des auges
demi-cylindriques, en nombre variable, de sept a huit chez les uns, de douze à quinze chez
les autres, sont disposées les unes au-dessous des autres, et reçoivent chacune une vis d'Ar-
cbimède qui, par son mouvement, oblige la farine à la parcourir dans toute sa longueur.
Cette farine, introduite par une trémie dans l'auge supérieure, passe ainsi à la deuxième
auge, dont la vis la ramène en sens contraire pour la verser dans la troisième, et ainsi de
suite.
Parvenue à la dernière auge, la farine est versée sur l'aire d'une chambre, où elle est mise
en barils et légèrement pressée.
Une étuve à sept augets peut fournir en quatorze heures cent barils de 88 kilogrammes
de farine, à laquelle l'opération a enlevé 4 à t) pour 100 de son poids d'humidité.
L'on sait qu'à l'état normal la farine contint en moyenne 14 pour 100 de son |)oids
d'eau; mais, après avoir été amenée à n'en conserver que 10 pour 100, elle reprend, soit dans
la chambre de refroidissement où elle est mise en barils, soit dans les barils eux-mêmes,
2,5 pour 100, et en conserve en définitive 12, 5 poiu- 100.
Le résultat net de l'opération est donc bien peu im|iortant, et ;i moins que l'exposition
pendant deux heures et demie à une température qui ne doit pas dépasser 70 à 80 degrés,
ne détruise quelques germes fermentescibles, ce qui me paraît au moins douteux, il est assez
difficile de se rendre compte de l'effet propre de l'étuvage.
La rapidité avec laquelle la farine reprend l'humidité qui lui a été enlevée dans l'étuve
tient non-seulement à son avidité pour l'eau, mais encore à son excessive division; aussi
( 95o )
est-ce une mauvaise opération de la faire arriver dans une chambre de refroidissement où
on la met ensuite en Iniiil.
C'est ])ar ce motif que, dans l'installation de l'étuve d'essai que nous avons employée à
la Manutention, j'ai exiyé que le baril destiné à recevoir la farine fût introduit et rempli
dans l'étuve même, et que cette farine y fût tassée avant qu'on en sortît le baril, que l'on
fermait ensuite immédiatement.
Les barils en bois de cliène que nous avons em])loyés étaient très-secs, cerclés en fer; on
les avait maintenus pendant quelque temps dans la chambre de la machine à vapeur, et ils
avaient été rebattus à trois reprises différentes. lis étaient donc dans les meilleures condi-
tions possibles; leur prix était de i3 francs l'un, avec six cercles en fer, et ils contenaient
un |)oids net de laS.à i45 kilogrammes de farine, ce qui revenait à io',4o ou 11*^,60 par
100 kilogrammes de contenu. Mais craignant, non sans raison, comme la suite l'a nionlré,
que le bois n'absorbât une certaine quantité d'humidité, qui pourrait se transmettre à la
farine et en altérer le goût, j'ai demandé en outre que l'on fît un essai comparatif avec des
tonneaux en tôle ordinaire et en tôle galvanisée, de ?. millimètres d'épaisseur. Ce dernier
modèle a coûté 26^,90, à raison de o^8o le kilogramme. Il pesait 33''',64, et contenait
environ i 3o kilogrammes de farine, ce qui met le \m\ du récipient à ?o',70 pour 100 kilo-
grammes de farine.
Les procès-verbaux des visites faites après un an, deux ans et trois ans de séjour, et <lont
le dernier terme a été la clôture ties expériences, ont constaté les résultats suivants :
Fnriiic é tu réf.
Toiineati.r en bois. — La farine des deux tonneaux placés au quatrième étage du bâtiment
des silos de la Manutention, c'est-à-dire dans de très-bonnes conditions d'aérage , a été
trouvée en assez bon état, et jugée en outre panifîable après aération.
La conservation de la farine du troisième tonneau, placé dans le sous-sol un peu humide
du même bâtiment, était beaucoup moins satisfaisante : on v a trouvé l5 kilogrammes de
farine prise en niasse dure sentant le moisi; le reste avait un fort goût de rance et d'acidité.
Tonneau eu tôle gaU>anisce. — Farine en parfait état.
Farine non étuvée.
Tonneaux en bois. — Les trois tonneaux placés au quatiièiue étage du bâtiment des
silos ont été trouvés, comme ceux de farine étuvée, dans un état assez satisfaisant.
Les deux tonneaux du sous-sol ont donné l'un i3''', 5, l'autre 7 kilogrammes de farine
prise en masse et sentant le moisi. Le reste île la farine ivait uiu' odeur et un goût de lanee
très-prononcé.
Tonneau en tôle gah'anisée. — Farine en état ])assable, mais moins satisfaisant que celui
de la farine étuvée.
Ou a l'ait trois pails de la farine retirée des totmeaux. savoir :
I" K.irine avariée, iiuproiire au service, provenant presque en entier d<s tonneaux |)lacés
dans le sous- sol humide. La (piantilé s'est élevée à 35 kilogrammes, ou à la proportion de
8 i)Our 100 du contenu des tonneaux.
■>." Farine reconnue panifiable, ayant plus ou moins d'odeur, d'acidité, et provenant de
tous les tonneaux en bois et du tonneau en tôle de farine non étuvée. Cette farine pouvait
(95i )
être employée, même sans mL'l;tni,'e avec di- la fjiine fraîdie, a|)rès avoir rlr rrpnssie an
blutoir et pelletée pemlant plnsiours jours.
3" Farine restée en bon état, |)anifiable, sans autre préparation cpTun |)en d'eiposition à
l'air; elle provenait en totalité de la larine étuvée et renfermée dons le lonniau en tôle s;al-
vanisée.
Ponr eompléter l'apprériation (pii préeède, les farines des derniers lois ont été, après les
remaniements reeonnns nécessaires, l'objet d'éprenvcs de panification.
Les farines du deuxième lot avaient bonne main &\\ travail, belle apparence, et elles avaient
presque enlièrement perdu le goût de vieux qui les caractérisait. Le tiavail au |)étrm s'est
bien fait, et le pain, (]uoique n'ayant pas le goût très-franc, comparativement aux iiroduils
du service courant, a ]>aru assez lion et distribuable. Si la farine de ce lot avait été mélan-
gée avec de la farine fraîche, le pain eût paru irréprochable.
Les farines du troisième lot, (jui avaient été étnvées et conservées dans un baril de lôle
galvanisée, n'ont présenté, ni dans le travail, ni dans la qualité du pain, de diflcrcnce mar-
quée avec celles du service courant.
Conséquences. — Il résuite de ces expéiiences continuées pendant jdus de six années :
j" Que le procédé de la compression pour la conservation des farines ne |,cut donner de
bons résultats que quand on opère sur de petites quantités, et (ju'il ne jiaraît pas SMSce])li!)le
d'être appliqué avec avantage et économie à la préparation di' caisses de 5o à 60 kilogrammes
et plus;
n" Que le procédé de l'éluvage doit être conduit de manière que les farines soient tassées
et embarillées dans l'ctuve même, alin qu'elles ne jinissent ])as reprendre l'bnmidilê dont
elles ont été privées;
3° Qne la nature du barillage a une très grande influence sur la conservation, et que des
barils en tôle zingiiée, bien clos, permet lent de conserver, pendant trois ans au moins, à
l'elat de pureté parfaile, des farines convenablement étuvées.
Pour le service des années en campagne, il convient que les charges soient divisées et
modérées, et par conséquent les barils de farine ne devraient pas peser plus de 5o à fio ki-
logrammes l'un. Unit compris. D'une autre part il est facile de disposer une fermeture her-
métique, commode à ouvrii', qui permelte de réexpédier les barils après la consommation
de la denrée.
Il convient en effet de remarquer que les farines ainsi préparées étant destinées soit au
service de la flotte, soit à celui des approvisionnements qu'elle transporte ou à celui des
places, la conservation et le retour des barils en tôle zinguée ne doit pas offrir plus de diffi-
cultés que pour les caisses à eau.
Dans ces conditions, les frais de conservation des farines étant limités à peu près :\ ceux
de l'étuvage, ils se trouveraient bien inférieurs à ceux qu'occasionnerait l'emploi des presses
sur de petites quantités.
« M. Paten (leman le la permission de faite remarquer que les
procédés d'étiivage perfectionné des farines ont offert des succès remar-
quables dans les produits présentés aux dernières expositions internatio-
C K., 1S70, -x" Semestre. (T. LX\I, >" 2(;.) I ^7
( 952 )
nales, notamment en ce qui touche les farines importées des États-Unis on
France.
» Un seul reproche semblait pouvoir être ndressé à ces produits qui
préalablement desséchés à i'étuve ne s'étaient pas d'abord convenablement
prêtés à nos méthodes usuelles de jjanification ; mais en considérant que
généralement le? substances très-sèches absorbent difficilement l'eau, nous
avons été conduit à conseiller une simple modification consistant à laisser
plus longtemps la farine s'hydrater avec une proportion d'eau convenable,
avant de la livrer aux moyens habituels de fermentation.
» Dès lors les premières difficultés ont disp.u'u, le rendement en pain est
devenu proportionné aux quantités réelles de farine sèche, celle-ci repré-
sentant les 94 ou 90 centièmes du poids total au lieu des 84, 86 ou 88 que
contiennent les farines ordinaires.
» Sans aucun doute cependant les barils ou caisses en tôle ou tôle galva-
nisée, proposés par notre confrère le général Morin, seraient bien préfé-
rables pour ces expéditions aux barils en bois. »
ZOOLOGIE HISTORIQUE. — Sur Vintrocinclion et la domesticité du porc chez les
anciens Egy/itiens (deuxième Note) ; par M. F. Lexormaxt.
« Malgré l'idée d'impureté religieuse qui empêcha pendant toutes les
époques primitives de leur civilisation les Égyptiens de réduire par eux-
mêmes en domesticité le sanglier de leur pays ou d'emprunter aux peuples
voi.sins le cochon domestique, ce dernier animal finit par être introduit en
Egypte. Mais les indices de sa présence sur les bords du Nil ne remontent
pas plus haut que la XYIIP dynastie. C'est à dater de ce moment que nous
voyons quelquefois apparaître des troupeaux de porcs dans les scènes agri-
coles peintes sur les parois des tombeaux de Gournah. Des figures symbo-
liques de truie en terre émaillée ou en autres matières dont nous parlions
dans notre précédente Noie, aucune n'est plus ancienn!^ que la XVIIP ou
la XIX*-" dynastie, et la plupart datent d'époque plus basse, de l'âge des rois
Saïtes (viP siècle av. J.-C). C'est aussi vers le temps des Rainsès que les
documents astronomiques commencent à parler d'une constellation de la
Truie.
» Le cochon domestique de l'Egypte, tel qu'il se montre alors et que la
race n'en varie pus jusqu'aux temps romains, a des oreilles petites et droites
qui sembleraient au premier abord le rappiocher du cochon de Siam plus
que de nos occhons vulgaires aux oreilles tombantes. Cette particularité
( 953 )
est, dn reste, commune à la plupart des races de cochon de l'antiquité, à
celle que les monuments de l'art grec représentent fréquemment comme
l'anima! sacré de Déméter et à celle qai est le plus souvent figurée dans les
oeuvres de l'art romain, bien que dans ces dernières on voie aussi quelque-
fois un porc à oreilles légèrement tombantes. Mais, en revanche, le cochon
égyptien a la quei'.e tortillée de nos races communes. Son groin est forte-
ment allongé, son corps arrondi. On le représente comme ayant le dos
garni de soies rudes et dressées, et comme étant assez haut sur pattes. A
coté de cette variété, qui est la plus généralement répandue, les tombeaux
de Gournah laissent aussi, mais rarement, v*r des troupeaux d'une autre
race, beaucoup moins modifiée par la douiesticité, frés-voisine du sanglier
par ses formes et en conservant encore les défenses; les troupeaux de porcs
de cette dernière variété sont conduits par leurs pasteurs, et il n'y a pas
moyen de croire que les artistes pharaoniques, en les dessinant, aient eu
l'intention de retracer un animal sauvage. Au reste, les types des deux races
ont été très-bien donnés par sir Gardner Wilkinson [Manners and customs
of ancienl Egyptians, 3^édition, t. III, p. 34)-
» D'après la date où la figure commence à se montrer sur les monuments
de l'Egypte, le porc doit être classé, comme le cheval, au nombre des nou-
veaux animaux domestiques qui furent introduits de l'Asie dans ce pays
avec l'invasion des Pasteurs, et qui se naturalisèrent sur les rives du Nil
pendant la domination des étrangers venus par le désert de Syrie. Les
tombeaux de Gournah prouvent qu'à partir de la XVIIF dynastie, les grands
propriétaires égyptiens en élevaient des troupeaux sur leurs terres. Mais ce
n'était évidemment pas à l'usage de la population de race proprement égyp-
tienne, puisqu'il lui était interdit par la religion de manger delà viande de
porc autrement que dans le sacrifice dont nous avons parlé dans notre Note
précédente et que tout Égyptien à qui il était arrivé de toucher seulement
un cochon par hasard était obligé de se soumettre à de minutieuses puri-
fications (Hérodote, II, '/ij). C'était, suivant toute apparence, pour l'usage et
la nourriture des tribus de races étrangères qui étaient restées en grand
nombre dii temps de l'invasion sur le sol de la Basse-Egypte, qui y vivaient
dans une condition de colonat bien voisine du servage et que pendant plu-
sieurs siècles la politique des Pharaons tendit à augmenter an moyen des
prisonniers qu'ils ramenaient de leurs conquêtes en Asie. Au reste, quand
Hérodote (11,47) décrit les porchers comme formant en Egypte, de son
temps, c'est-à-dire sous la domination des Perses, une caste séparée du
reste de la population, se uiariant entre elle et exclue des temples, il semble
127..
( 9^4 )
indiquer clairement que l'élève et la garde de l'animal impur par excel-
lence constituaient une piofession exercée par une de ces tribus étran-
gères.
» Et (piand le même Hérodote (II, i4) raconte que l'on employait les
porcs lâchés dans les chanips d'où l'inondation venait à peine de se retirer
à fouler le grain lancé à toute volée sur le limon hiunide et à l'enfouir ainsi,
il signale inie habitude exclusivement propre à la Basse-Egypte, au delà de
laquelle il n'avait pas été. et où habitaient les tribus non égyptiennes, sémi-
tiques et liijycpics pour la plupart. Dans le reste du pays, ce sont les mou-
tons que l'on employait au luéme usage, comme le dit Irès-exacleinei'.t Dio-
dore de Sicile (I, 30), qui était uioiilé jusqu'à Thèbes, et comme le font
voir fréquenunent les représentations des tombeaux. [Voy. ^Vilkixsox,
Mimners and custoiiis oj ancient Eiijplions, 3*^ édition, t. IV, p. 38.)
» Au reste, l'origine étrangère du cochon domestique en Egyj)te et son
apport (le l'Asie à une date cotnpara!i\t'meiil tardive, sont attestés par le
nom le plus liabituei de cet animal dans l'idiome égy[)tien antique.
» Deux mots désignent le porc dans cet idiome. L'un, n'i\ copte n'r,
est manifestement une simple onomatopée emprinitée au grognement de
l'anim d et une; onomatopée indigène, car d'autres peuples ont r^ndu ce
grogneuient assez différemment. On sait que lien ne varie plus que la ma-
nière dont les populations de races diverses entendent et surtout rendent
dans leur langage les cris des animaux, d'a[)rés lesquels leurs noms ont été
souvent formés.
)) L'autre nom du porc en égyptien, scha ni, copte esclià, est beaucoup
plus curieux, car il découle d'une soiu'ce étrangère et se rattache avec cer-
titude au groupe des noms les plus généralement répandus du cochon chez
tous les peu|)les du rameau aryen.
» Grec crvç, vç; la lin sus;
» Ancien allemand .sh; anglo-saxon 5/((/,- Scandinave syr; allemand ^au ;
anglais sow; suédois so;
» Irlandais ia/^.cymriquc laveh; corniquo Itm-h; d'où l'anglais //oy;
» Persan scliûlc; arméiùen choz ;
» Lithuanien tchûka; russe tcimsclika ;
» L'origine de tous ces noms, avec lesquels l'égyptien scluiau se groupe
d'une façon si curieuse, prouvant que les habitants de l'anlicpie Egypte
avaient reçu le cochon domestique de populations qui elles-mêmes le
tenaient depuis peu des Aryens; leur origine, disons-nous, est établie par
le type plus développé du sanscrit çiiliuia, « l'animal qui fait çù, qui
( 955 )
gfogne. ■> Ainsi que l'a remarqué M. Pïctal {Les origines indo-européennes,
t. I, p. 370), « toutes les autres langues aryennes ne présentent que l'ono-
nialopée su ou çû, avec ou sans suffixe, et en faisant alterner la sibilante
et les gutturales, »
» Un fait qui ne manque pas tlinlérèt, c'est que dans une direction géo-
graphique tout à fait opposée les noms du porc dans les principaux idio-
mes (le la grande famille touranienue dérivent également tous du même
type aryen: finnois s/Avz; esthoiiien siçjcja; tchéréinine siisna; baschkir
siiska; léléoate scliosclika; kirghis <c7u((r/iA7( ,• tchouvache i^s/if/,- samoïède
soia. Ici encore la philologie comparative, qu'on a si bien ajjpelée « l'al-
gèbre des sciences historiques » , nous met sur la voie d'une conclusion
importante pour l'histoire naturelle.
» En effet elle prouve que le cochon a été counnuniqué par les des-
cendanls des Aryas à la phqjart des peuples de l'Asie dans les directions
les plus opposées. D'un autre côté, elle prouve également qu'il a été un des
animaux domestiques que les Aryas ont possédé le plus ancieiniement
avant la séparation de leurs tribus, quand ils habilaient encore leur
berceau commun sur les bords de l'Oxus; pour ce dernier point nous
n'avons qu'à renvoyer à la démonstration qu'en a donnée M. Victei [Les
origines indo européennes, t. I, p. ^^Bg-SyS). Mais en groupant ces deux faits,
il est difficile de ne pas en conclure que c'est à la race aryenne, pendant
son premier éiat pastoral, qu'est due la dome^tication du porc, et ceci
serait un puissant argument en faveur de l'opinion de Liidi. [Urwell, t. I,
p. 387) sur le point de départ de cet animal et son origine spécifique.
» Remarquons seulement que si ce sont les Aryas qui ont probablement
domestiqué le cochon, cet animal a élé introduit de très-bonne heure chez
les Sémites. Les prohibitions mêmes de la loi mosaitpie prouvent qu'il
était abondamment répandu parmi les populations qui envirotmaient les
Hébreux. Les 'assyriens et les Babyloniens le connaissaient à l'époque pour
laquelle nous possédons leiws monuments, époque, il est vrai, postérieure
de bien des siècles à celle de l'Ancien Empire égyptien. Le nom le plus
généralement répandu pour le porc dans les langues sémitiques est indigène
et significatif. C'est l'hébreu khaiir, arabe khanzir, de la racine kliazar,
« retourner » ; il désigne par conséquent « l'animal qui retourne la terre
avec son groin. «
» Mais en même temps l'arabe nous offre un autre nom, qui est mani-
festement d'origuie aryenne. C'est ifs, dont on ne peut guère méconnaître
la parenté avec ^et-Trfoç, le latin aper, l'ancien allemand ebiir, epur, allemand
( 956)
eber, et l'anglo-saxon enfor. Tout ce groupe de mots se rattache au sanscrit
knmpr/i, « rapide, violent », épithèle qin convenait parliculièreineiit bien
an sanglier, que dc'signent plutôt que l'animal domestique la plupart des
appellations que nous venons d'énumérer. Ici encore la linguistique fournit
un indice de transmission de l'espèce des Aryens à une partie au moins
des Sémites. »
GÉOLOGiii cOMl'AKÉii:. — 6'«r le mode de solidification du cjlohe lerrestre;
par M. St. I^Ieumek. (Extrait.)
(( P;îrmi les géologues, aujourd'hui en immense m;ijorité, qui admettent
la chaleur d'origine du globe terrestre, il s'est formé deux écoles, cpiant à
la manière dont le refroidissement et la solidification qui en est la suite se
sont opérés.
» Les uns, à l'exemple tie Poisson, et s'appuyant sur les travaux récents
de ADI. Hupkins, Fairbain, Tyndall, etc., veulent que cette solidification
soit partie du centre et ait progressivement gagné la surface; parmi eux
est M. Sterry Hunt, qui s'est signalé par la force de ses arguments (i).
» Les autres, et de beaucoup les plus nombreux, admettent l'hypothèse
inverse, suivant laquelle le globe comporte une mince croûte solide, repo-
sant sur lui noyau interne, liquide ou pâteux; au fur et à mesure du refroi-
dissement, la croûte augmente d'épaisseur par l'addition successive de
revêtements internes.
» ]j'étude de la Teri'e ne [)araît pas de ualiu-e à nous foiunii- de. faits po-
sitifs qui permettent de choisir entre les deux opinions; l'examen des au-
tres astres semble au contraire devoir jeter une vive lumière sur cette
question fondamentale.
)) J'ai démontré, par des observations lithologiques et par des analyses
appuyées d'expériences synthétiques :
» i*-' Que des météorites de types divers ont été en relations slratigra-
phiques;
» u° Que certaines d'entre elles oui subi des actions éruptiveset métamor-
phiques comparables de tous points à celles qu'éprouvent les roches ter-
restres.
» 11 en résulte, toute hypothèse mise à part, que les uiéléorilcs dérivent
d'un astre, aujourd'hui dêsafjréfjé, dont elles constituent les débris.
(\i On ilic c/iemisl/j- of tlic piiiiuvtii cii/i/i. — Conférence faiio ;i l'Iiislitiuion ro\alf! lu
3i iiiui 1867.
( 95? )
» Ceci posé, voyons si les météorites n'ont pas conservé quelque signe
auquel on puisse reconnaître dans quel sens a eu lieu la solidification de
l'astre d'où elles dérivent. D'après le principe d'unité de phénomènes, nous
serons autorisés à étendre le résultat à notre planète elle-même.
M Or, dans l'astre démoli, dont on reconnaît l'existence, comme on
reconnaît celle d'un animal éteint par la découverte de ses débris fossiles,
les roches constituantes étaient évidemment rangées, de la surface vers le
centre, suivant l'ordre progressivement croissant de leurs densités. A cet
égard, il n'y a qu'une opinion; tous les géologues partisans de l'origine
ignée» des astres admettent cette distribution, et on n'en saurait en effet
concevoir une autre.
» Comme on voit, le problème est maintenant ramené à une simple
question d'observation, parce qu'il s'agit de savoir si les météorites les plus
denses, c'est-à-dire les fers, se sont solidifiés avant ou après les météorites
les moins den.ses, c'est-à-dire les pierres, On établira du même coup
une chronologie géoçjénique parmi les roches cosmiques.
» Or l'étude des météorites éruptives, sur lesquelles j'ai eu l'hon-
neur d'appeler récemment l'attention de l'Académie, a montré que les
fers éruplifs (Deesa, Hemalga, etc.) empâtent fréquemment des fragments
pierreux, alors métamorphiques; tandis que les pierres éruptives (Chan-
tonnay, Pultusk, etc.) n'empâtent jamais de fragments métalliques, c'est-
à-dire que le fer était encore liquide ou j)âteux quand la pierre était déjà
complètement solidifiée.
« Donc, dans le globe dont les météorites sont les débris, la solidifica-
tion s'est propagée de la surface vers le centre, et l'on peut dire que les
roches météoriques métalliques sont géologiquenient plus récentes que les
masses lilhoïdes qui leur étaient superposées et qu'elles ont parfois méta-
morphosées.
M En appliquant cette conclusion à ce qui concerne le globe terrestre,
on est ainsi conduit par les faits à dire qu'ici encore la solidification s'est
propagée de la surfiue vers !e centre; c'est, je crois, le premier fait non
hypothétique contre la manière de voir de Poisson. »
M. Gazeau, à propos des observations faites récemment par M. Sanson,
relativement à ses expériences siu'Ia coca, fait remarquer que, d'après une
brochure publiée récemment par lui, ses séries de régime identique, au
lieu de dûier vingt-quatre heures, comme le demande M. Sanson, furent en
uiovenue de huit jours, quelcpiefois même davantage.
( 958 )
« J'ajouterai, dit-il, que les i'eiiilles de coca étant très-sensibles et per-
dant facilement leurs propriétés, j'ai cherché d'abord à établir expéri-
înentalemeiit les caractères des feuilles de bonne cpialité : je suis arrivé à
déniontrer qu'il faut rejeter toute feuille : i° pâle ou noirâtre; 2° n'ayant
plus ses deux lignes courbes circonscrivant la nervure médiane; 3° dont
l'épiderme |)Hraîtrait érodé à la loupe, ou serait couvert de taches brunes
ou blanchâtres; 4° qui n'aurait pas d'odeiu-, ou qui aurait une odeur nau-
séabonde; 5° dont le goût serait nul ou mauvais, et même ne produirait
pas différentes sensations que j'analyse dans la brochure.
» Poiu' bien conserver les feuilles de coca, il faut les mettre à l'abri de
l'air extérieur, de la lumière, de la chaleur et surtout de l'humidité. On
les placera dans un bocal bien fermé et toujours rempli jusqu'au bord.
» De toutes les préparations de coca, deux seulement doivent être
conservées : 1° les feuilles en chique ou pulvérisées; 2° la teinture et les
préparations qui en dérivent. Dans la contection de ces feuilles, il ne faut
jamais employer les acides, ni une chaleur excédant 60 degrés : au con-
traire il sera souvent utile d'eiiiployer une substance alcaline quelconque,
et préférablement du bicarbonate de soude.
» Appliquant ces données pharmacologiques et physiologiques de la
coca à la médecine, j'ai donné cette substance h plus de deux cents cin-
quante malades dans les hôpitaux. J'ai obtenu les plus heureux résultats
dans certaines maladies de la cavité buccale, qui résistent habituellement à
toutes les autres médications. J'ai eu encore plus de succès, devant de nom-
breux témoins, dans les maladies de l'appareil digestif. »
La séance est levée à 5 heures trois quarts. É. D. R.
BULLETIN BIBI.lOfiRAPHKJUE.
li'Académie a reçu, dans la séance du 26 décembre 1870, les ouvrages
dont les titres suivent :
Note présentée pnr M. Payen, le 11 novembre 1870, au Conseil dliygicne
et de anhibrilé du déi>'irti'menl de lu Sdiic, sur les moyens d'utiliser, au profit de
V(dimenl(ilian, In matière grasse et le tissu nrcjanique azoté des os. Paris, 1870;
opuscule in-4".
(9^9 )
Nouvelles recherches expérimentales sur la pharmacologie, In physioloijie
et la thérapeutique du Coca; par M. Ch. Gazeau. Paris, 1870; br. in-8°.
Siège de Paris : Usage alimentaire de la viande de cheval ; Communication
faite à la Société d'acrlintatntion (séance tlii 18 novembre 1870); par
M. E. Décrois. Paris, 1870; br. in-8° (deux exemplaires).
PUBLICATIONS PERIODIQUES REÇUES PAR l'aCADÉMIE PENDANT
LES MOIS DE NOVEMBRE ET DECEMBRE I8Ï0.
Annales des Conducteurs des Ponts et Chaussées ; ]u\\\ei 1870; in-8".
Bulletin de l' Académie impériale de Médecine; n°' des i5 el 3o novembre
1870; in-8".
Bulletin (jénéral de Thérapeutique; n°* des i5, 3o octobre et 3o no-
vembre 1870; in-8".
Comptes rendus hebdomadaires des séances de l Académie des Sciences;
n"' 23 à 26, 2" semestre 1870; iii-4°.
Gazette médicale de Paris; u"' 45 à Sa, 1870; in-4''.
Journal de l' Eclairage au Gaz; n°' 39 à 4^, 1870; in-4''.
L' Aéronaute; novembre 1870; in-8°.
LArt médical; octobre 1870; in-S".
Revue des Cours scientifiques ; 11"* 4^1 ^t 4^, 1870; in-4°.
Société d'Encouragement. Comptes rendus des séances; n"' i5 à 18, 1870;
C. R., 1S70, 2« S^racjirf. (T LXXl, ^"2C.) ' ^8
( 9^0 )
ERRATA.
(Séance du iZj novembre 1870.)
Page 694» ligne 5, nu lieu de M. Boisson, lisez M. Busson.
» ligne 9, au lieu de M. Gaillard, lisez M. Gailhard.
FIN DU TOME SOIXANTE ET ONZIEMK
COMPTES RENDUS
DES SÉANCES DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES.
TABLES ALPHABÉTIQUES.
JUILLET — DÉCEMBRE 1870.
TABLE DES MATIÈRES DU TOME LXXI.
Pages.
Acide acétique. — Recherches sur les déri-
vés bromes de l'acide acétique anhydre ;
Note de M. Gai '272
Acide cyanique. — Note de MM. Jiif;. Ca-
liours et G(d concernant de nouveaux
composés résultant de l'union de l'acide
cyanique et des différents éthers cya-
niques avec les éthers des acides amidés
dp la série aromatique 462
Acide oxalique. — Sur la décomposition de
cet acide ; Note de M. Caries 21G
Acide paraphocénique. — Son identité pré-
sumée avec un acide odorant produit
dans la fermentation putride de plusieurs
matières azotées, et particulièrement des
lendons; Note de M. Chevreul 760
Acide phénique. — Sur son emploi hygié-
nique ; Note de M. Calvert in
AÉRONAUTIQUE. — Note do M. DiipuY de
Lomé sur un projet d'aérostat dirigé,
muni d'un propulseur. — Supplément à
cette Note 477. 5oa et S-^.g
— Deuxième et troisième Notes sur les aé-
rostats dirigés; par te mente. . 545 et 549
— M. Moriii annonce, séance du 24 oc-
tobre, avoir entre les mains une pièce
qui paraît être un Rapport écrit de la
main de Monge et qui a pour titre ;
« Mémoire sur l'équilibre des machines
aérostatiques, sur les différents moyens
C. R., i«70, 2""' Semestre. ( T. LXXL)
ri>};cs.
de les faire descendre et monter, et spé-
cialement sur le moyen d'exécuter ces
manœuvres sans jeter de lest et sans
perdre d'air inflammable, en ménageant
dans le ballon une capacité particulière
destinée à contenir de l'air atmosphéri-
que, par M. Meusnier » î/ç)
Ce Rapport ou projet de Rapport, trouvé
dans les Archives du Conservatoire des
Arts et Métiers, et écrit enlièremenl
de la main de Monge, mais non signé,
est communiqué par M, Morin à l'Aca-
démie, dans la séance du 3i octobre. . oC»)
Sur les circonstances qui ont pu amener
Monge à s'occuper des questions rela-
tives aux aérostats; Note de M. Ha-
chette .i8j
M. Dumas donne lecture d'un pas-
sage des « CEuvies de Lavoisier »
relatif aux travaux aérostaliques de
Meusnier (inS
M. Chevreul exprime le désir d'avoii'
quelques documents relatifs aux expé-
riences des frères Montgolfier iWkj
M. Dumas, en réponse à M. Chevi-eul,
donne lecture d'un nouveau passage des
« Œuvres de Lavoisier ;> (lu»
M. Chevreul remercie M. Dumas, et fait
remarquer que les documents authen-
tiques qui viennent d'être communiqués
129
9^2
Pa
sur riiweiilion des frères MontL'olfier
iijoulent un nouvel exemple à ceux qui
prouvaient déjà qu'on peut, en partant
d'une idée erronée, arriver à une dé-
couverte réelle
Description du premier aérostat à va-
peur; par M. Giffiiril
Note de M. Damus à propos du récent
départ de M. Janssen par raérostat « le
Volta »
M. Linitville et M. DclniindY, Membres
du Bureau des Longitudes, partagent
ainsi que le Bureau loul entier les senti-
ments exprimés par M. Dumas relalive-
raenl à l'immunité dont doit jouir près
de tous les peuples civilisés le voyageur
qui remplit une mission scientifique...
M. /(■ Secrél/iirr /icrpeliicl lionne, dans la
séance du 19 décembre, communication
d'une Lettre de M. le Directeur général
des lignes télégraphiques annonçant
l'heureuse arrivée à Saint-Nazaire du
ballon « le Volta » monté par M. Jn/is-
scn
M. Ch. Sainte-Claire Deville communique
une Lettre de M. F. Denis accompagnée
d'une citation de Coutetle attestant com-
ment les Allemands entendaient, il y a
un demi-siècle, la législation militaire
en matière de navigation aérienne. . . .
- Procédé pour mettre en communication
télégraphique, au moyen d'aérostats, la
France du dehors avec la France du de-
dans; Note de M. Guérin
- Remarques de M. Dumns sur un pro-
jet analogue que lui a communiqué
M. Granier
- Note sur la nécessité de faire des expé-
riences concernant la résistance des tis-
sus en vue de l'aérostatique ; Note de
M. Moiitiicci
- Note sur un moyen de détruire rapi-
dement, en ballon, des dépèches dont la
communication pourrait être utile à l'en-
nemi ; par le nu'iiie
- Projet d'aérostat dirigeable muni d'un
moteur à air dilaté par la combustion
du gaz d'éclairage puisé dans le ballon
lui-même; Note de M. Boiwct . 539 et
- Sur un procédé de réchauffement mé-
thodique du gaz d'un aérostat par la
combustion d'une partie de ce gaz lui-
même pour compenser les pertes de force
ascensionnelle ; par le iiiciiie
- Du moyen de produire à volonté, à bord
des aérostats, un excédant de force as-
censionnelle pour opérer des montées et
des descentes partielles; par le même..
tiio
683
783
786
886
839
578
692
78a
73i
)
Sur un gaz qu'on pourrait substituer pour
le gonflement des ballons à celui qu'on
obtient de la houille; Note de M. Hit-
rciiii de f 'i lie neuve 767
■ M. Dumas fait remarquer à cette occa-
sion que la fabrication du gaz proposé
exigerait un outillage spécial, et que si
1 on essayait d'y employer celui qui sert
pour la production du gaz d'éclairage
on l'aurait promptement détérioré 768
- Note de M. Déroute i\n un nouveau sys-
tème aéronautique exigeant l'emploi de
deux gaz différents, système marchant
par une succession d'ascensions directes
et de descentes obliques dans des direc-
tions déterminées 768
- Note de AI. Pnsqutile sur la direction des
aérostats j5o
- Notes de M. Sorel concernant les condi-
tions que lui paraissent devoir remplir
les aérostats pour qu'il soit possible de
les diriger 622, 677 et 729
- Essai sur les moyens de diriger les aé-
rostats et sur l'appréciation des résul-
tats qui peuvent être obtenus : agents
de locomotion et de direction faisant
corps avec le ballon ; Note de M. Lehir. 578
- Sur la direction des ballons; Note de
M. Joulie • . 53 1
- Note de M. Debruge relative à un ballon
dirigeable 619
- Note do M. Delacroix sur un ballon diri-
geable, différent de celui qu'il avait pié-
cédemment proposé 681
- Note de M. Lecerrc ayant pour titre :
« Ballon dirigeable par le haut » 769
- Sur un procédé qui peut servir à déter-
miner la direction suivie par un aérostat
et sa vitesse dans l'espace; Note de
M. Gouillr 885 et 939
- Notes de M. Braehet relatives à divers
systèmes aérostatiques, et en particulier
à celui de Meusnier
440, 522, 540, 578, 619, 681 , 732, 807 et «45
- L'Académie a reçu, dans les séances des
17 et 3 1 octobre; des 7, 14, 21 et 28 no-
vembre; des 5, 12 et 26 décembre, di-
verses Communications relatives à l'aé-
ronautique adressées par MM. Buhaty,
Moura, — Deliu roi.v, Dupuis, Bnrhou,
— Varcnne, — Lassimone, tiuty, .tlvn-
rcz, — Grin, — Delcourt, Bernis, Pat-
marri, — Bazin, Gailliarit, Trouve, —
Toselli 522, 578,
619, G81, 694, 732, 769, 807, 845 et 939
- Note sur les ballons captifs ; par M. E.
Pctro 7U9
( 963
Pages.
— Description et dessin d'une « Libellule
mécanique » ; par M. Prigcnt gSg
Alcools. — Noie de JI.M . Liebert et Rossi sur
l'alcool amylique normal 369
Allmentation. — Sur un moyen propre à
annuler les effets de l'alimentation in-
suffisante; Noie de M. Rabuteuu 426
— De lalimenlation dans une ville assiégée ;
Mémoire de M. Grimmul, de Caux 443
— Remarques de M. Dnmns, à roccasion de
la Communication précédente, sur la
consommation du blé soit en nature,
soit, après mouture, sous la forme de
pain 445
— Remarques de M. Clicvreul, à propos de
la même Communication, sur l'histoire
de la panification et des connaissances
chimiques qui s'y rattachent 447
— Remarques faites à l'occasion de la même
Communication, par M. Paycn, touchant
les résultats déjà obtenus dans la fabri-
cation des pains contenant tous les élé-
ments du blé sans élimination du son. . 449
— Nouvelles remarques de M. Chevreul sur
le même sujet 450
— M. Milne Echvunls fait observer, tou-
jours à l'occasion de la Communication
de M. Grimaud, de Caux, l'importance
qu'a pour le travail de la digestion l'ad-
dition faite aux aliments de condiments
et substances sapides 45i
— M. C/icvreul annonce partager à cet égard
l'opinion de M. Milne Edwards 45i
— Note additionnelle de M. Grimmul, de
Caux, à sa Communication sur l'emploi
de blé en nature comme aliment 478
— Deuxième Note sur lalimenlation des
habitants dans une ville en état da siège ;
par le mente 53o
— Observations relatives à la panification;
Note de M. Mège-Mou)-iès .
472
— Sur un procédé de panification dans lequel
on ferait intervenir le froment en grain
concurremment avec la farine; Note de
M. Diibninfimt go6
— Sur l'emploi de la fiirine d'avoine dans
l'alimentation; Note de M. U'ilson. . . . l^-jl^
— Sur les moyens de faire entrer la farine
de blé dans la confection d'aliments
doués de propriétés nutritives suffisan-
tes ; Note de M. L. Aubert 475
— Nouvelle Note de M. Aubert sur l'emploi
des matières grasses mélangées avec le
blé en nature comme aliment 479
— Sur les avantages qu'aurait une mesure
qui imposerait aux boulangers l'obliga-
tion de ne livrer aux consommateurs
}
Poges.
que du pain cuit de la veille; Nolo de
M. Tournier 4^1;
Note de M. Gaultier de Claubry rela-
tive à une réglementation qu'il croirait
utile d'établir dans la fabrication du pain
pendant l'investissement de la ville de
Paris 5-2(;
Sur un aliment utilisable pendant la du-
rée du siège (la bouillie romaine); Note
de M. Gmddrée-Bmllemi 538
Note de M. f'ignal relative à l'emploi du
blé en nature comme aliment dans
l'Ardèche 53i)
Sur l'emploi des légumes secs et du blé
vert en Alsace ; Note de M. Brisdc 478
Sur l'emploi de la farine d'avoine et du
blé en nature comme aliment; Note de
M. Jf'ilsnn 47(j
Sur la culture de quelques plantes culi-
naires pour la durée du siège; Note de
M. Decaisiic 48-
Remarques de M. Chevreul sur les pro-
priétés nutritives de quelques-unes des
plantes citées par M. Decaisne 489
Note de M. Dumas à propos de Commu-
nications précédentes sur l'approvision-
nement en viande de la ville de Paris
pour le temps du siège 479
Observations de M. Milne Edwards à
l'occasion de la Note de M. Dumas, sur
un procédé de salaison de la viande et
sur les propriétés nutritives de la géla-
tine des os 48(j
Remarques de M. Payen h. propos des
observations faites par M. Milne Ed-
wards, sur les procèdes de conservation
des viandes 488
Note de M. Dumas relative à un passage
omis dans sa précédente Communication
concernant les mesures prises par l'ad-
ministration pour assurer la bonne pré-
paration des viandes soumises à la sa-
laison 5a3
Note de M. Hoffmann concernant quel-
ques précautions auxquelles il lui paraît
indispensable d'avoir égard, soit dans
la préparation, soit dans l'usage du bou-
din de sang de bœuf ài.j.
Sur l'emploi de boudin de sang de bœuf
comme aliment; Note de M. Hiche. . . . 540
Note dé M. Fua relative à un procédé de
conservation des viandes 5'i'i
M. le Secrétaire perpétuel présente, au
nom de M. Eug. Pehuze, un Mémoire et
des échantillons relatifs à un procédé
nouveau de conservation des viandes.. 7'ii
Note de M. /"t/Z/c/- concernant deux pro-
cédés pour la conservation de la viande. 8(i(i
129..
( 96^. )
Paftes. I
Note de M. Soubryran ayant pour titre :
M Consorvalion des viandes; moyen d'é-
viter les salaisons » 945
- Observations faites à cette occasion par
M. Paycn relativement aux tentatives
déjà faites pour conserver les viandes
par dessiccation 946
M. Mnrin rappL'Uc, à propos de cette Com-
munication, les essais entrepris autre-
fois par lui pour la conservation des fa-
rines g47
Observations de M. Paycn relatives aux
procédés d'étuvage perfectionné des fa-
rines '931
Emploi de l'osséine dans l'alimentation ;
Note de M. Freiny 559
Remarques faites à cette occasion par
K. Chevreid 562
Observations de II. Dumas relatives à la
Communication de M. Fremy 565
Observations de M. Payrn relatives à la
mémo Communication 56?
Annonce d'une Note de M. Chevreid sur
les subsistances et l'alimentation 601
Exposé des raisons pour lesquelles l'ali-
ment de l'homme et des animaux supé-
rieurs doit être d'une nature chimique
complexe ; Mémoire de M. Chevreid. . . 635
M. Dumas communique une Lettre de
M"*' D Arcel-Lerointre qui l'a chargé
d'offrir à l'Académie, au nom de sa mère,
Yjmc yve £)'j^,.(.et gi gy gjen , des docu-
ments en partie inédits se rapportant
principalement aux recherches du sa-
vant Académicien, Joseph D'Arcet, sur
la gélatine des os et son emploi alimen-
taire 682
Deuxième Note de M. Frcmy sur l'emploi
de l'osséine dans l'alimentation 747
Remarques de M. Dumas à l'occasion de
cette Communication 755
Réponse de M. Frcmy à quelques-unes
des remaniues de M. Dumas 756
Nouvelles remarques de M. Dumas con-
cern.int la ([uestion de l'osséine et de la
gélatine alimentaire -58
M. lAouvilh- rappelle à cetle occasion que
certains adver.-aires de la gélatine ayant
|)rétendii cpie les malades des hôpitaux
>e plaignaient de la voir entrer pour
quelque chose dans leur régime alimen-
laire, M. Arago avait constaté ([u'il n'en
était pas ainsi partout; il s'était du moins
assuréqu'à l'hôpital de Met/, cet teaddi lion
était acce|)tée comme une amélioration. 739
Sur les propriétés nutritives des sub-
stances organiciues tirées des os et sur
la composition des rations alimentaires,
susceptibles d'entretenir le corps hu-
main dans son état normal ; Note de
M. Milite Fdnan/s
— Observations de M. Chevreid relatives à
un passage de la Communication récente
de M. Fremy sur l'osséine
— Réponse de M. Fremy a\i\ remarques de
de M. Chevreul
— Communication de M. Paycn ayant pour
titre : 0 Hippophagie ; graisses, huiles
alimentaires et substances gélatineuses
des tissus et des os du bœuf et du che-
val »
— Sur le procédé employé par les Indiens
Tétes-plales pour extraire l'huile des os
longs dont la moelle a été déjà retirée:
Note de M. Rnulin 875 et
— De l'intluence du café et du cacao sur
l'alimentation ; Noie de M. Rabuteau. . .
— Remarques de M. Payen à l'occasion de
cette Communication, sur les propriétés
nutritives du cacao
— Remarques de M. Dumas à l'occasion de
la même Communication
— M. Chevreul, également à propos de la
Note de M. Rabuteau, fait remarquer
combien est peu sur le jugement qu'on
porterait sur les propriétés nutritives
d'une substance en se basant seulement
j sur la proportion de l'azote
— Recherches expérimentales sur les pro-
j priétés alimentaires de la coca ; Note de
M . Gazcau
1 — Remarques de M. Rnulin concernant l'his-
toire de la coca et les causes qui en ont
rendu l'usage moins général qu'il ne
l'était à l'époque de la découverte du
Nouveau-Monde
— Note de M. E. Decaisne concernant
(i L'alimentation des petits enfants et
le lait pendant le siège »
— Note de M. Teliicr sur l'emploi qu'on
pouriail faire, pour l'alimentation des
jeunes enfanis, du moût d'orge, tel qu'il
est préparé dans la fabrication de la
bière
— M. Mnissenet adresse à l'Académie un
exemplaire d'une Note sur le rationne-
ment de la population do Paris pour le
pain et la viande
Alios (For.mation de l'). — Remaniues de
M. Fau: sur quelques particularités du
sol des Landes de Gascogne
Anj.Mi.MUM. — Sur les propriétés électro-
thermiques de co métal ; Noie de
M. t'iollc
— M. H. Saintc-Clnirc Dcvdlc communique
quelques résultats obtenus par M. Costa
786
79t>
797
822
732
734
735
-36
799
801
.j3«
528
245
(965 )
Pages.
■190
42
383
sur les propriétés chimiques de l'alu-
minium
Analyse mathématique. — Rapport sur un
Mémoire de M. Bouquet relatif à la
théorie des intégrales ultra-elliptiques;
Rapporteur M. Serret
— M. Mryer adresse une suite à ses re-
cherches relatives aux questions d'ana-
lyse indéterminée
A.NiMAUx nA.NS l'ancienne Egypte. — Sur les
animau-x employés par les anciens Égyp-
tiens à la chasse et à la guerre ; Notes de
M. Lcnormant (i', 2", 3" et 4° parties).
593, 032, (164 et 777
— Note sur l'histoire du chat domestique
dans l'antiquité et sur l'époque à la-
quelle il a élé introduit en Egypte; par
le niciiic 738
— Note sur l'introduction et la domesticité
du porc chez les anciens Égyptiens
(1" et 2" parties) ; par A' me'me. 849 et 932
Appareils divers. — Figure et description
d'une « Libellule mécanique u ; adressées
par M. Prigent 939
— Note de M. Girard relative à une dispo-
sition qui permetd'observerà de grandes
distances 383
— Sur la couseuse automate de M"' Garcin ;
Note de M. Morellet , 88
— M. Durand présente une tasse-filtre de
son invention 240
— Notes de MM. Vallée et Brachet sur un
« Régulateur automoteur électrique » et
sur une lampe électrique pouvant, sui-
vant eux, être employée avec avantage
pour l'éclairage des grandes voies
.' 33 1 et 769
Arts militaires. — Sur l'affût de l'amiral
Labrousse ; Note de M. Fnre 455
— Sur la déviation des projectiles à ailettes ;
par /(■ même Co 1
— Note sur l'art de pointer et ses condi-
tions physiologiques; par le même. . . . 872
— Note de M. Bcrthelnt sur la force de la
poudre et des matières explosibles. . . .
*3i9> 677 et 709
— Note sur la clialeur de formation des
composés azotiques; pur le même 677
— Sur une poudre de guerre au chlorate
de potasse; Note de M. Zaliwski 4o3
Voir aussi l'article Explosircs (Ma-
tières).
— Sur les effets de la pénétration des pro-
jectiles dans les parties molles et les
parties fdjreuses du corps humain ; Note
de M. Arlh.-Jul. Morin 927
— Note et Lettre sur l'inflammation de la
poudre à distance au moyen de l'élec-
tricité; par M. /. iJfon'// 477 et 782
— Du soldat en campagne et devant l'en-
nemi : système d'armes défensives de
l'invention du général polonais Mieros-
lavvski: Note de M. Grimaud, de Caux. 409
— Lettre de M. Berger concernant la fon-
dation d'un prix destiné à récompenser
l'invention d'un système d'abri mobile
pour l'armée 885
— Note sur de nouveaux campements mi-
litaires; par M. Dumerr 93H
— Description et figure d'une nouvelle
bombe cylindro-conique à percussion ;
Note de M. Clotei, et addition à cette
Note 522 et ji»)
— Sur un procédé particulier pour lancer
les projectiles de guerre; Note de M. De-
laurier 383
— Note de M. Sorel relative à un moyen
d'augmenter la portée des pièces de
canon 938
— Projet de canon porté sur un chariot
blindé ; Note de M. Bracliet 886
— !i La lunette de rempart » ; Note de M. A.
Caziti Gj>9
— Noie sur la substitution des lunettes aux
alidades à pimiules pour le pointage des
canons; par M. Bracliet 938
— Note de M. Tellier relative à l'emploi de la
lunette à fils croisés pour faciliter le tir. 938
Astronomie. — Sur la manière d'observer le
prochain passage de Vénus; Note de
M. Fare 4i3
— Sur l'éclipsé totale du 22 décembre pro-
chain ; Note de M. Janssen .531
— Sur la mission donnée à M. .lanssen pour
aller observer en Algérie l'éclipsé to-
lale du 22 décembre 1870; Note de
M. Fare 819
— Note de M. d'Ji'czac accompagnant la
présentation faite au nom de l'auteur,
M. S. Clai'ijn, d'un volume imprimé en
espagnol et intitulé : « Réflexions sur le
système planétaire » 387
— Sur les rapports de l'astronomie phy-
sique et de la géologie ; Note M. Staa.
Meunier 5.) [
Voir aussi l'article Météorites.
.Aurores boréales. — Notes de M. Chapelas
sur l'aurore boréale du 24 septembre,
et sur celles des 24 et 25 octobre 584
— Sur l'aurore boréale du 24 octobre ; Note
M. Salicis 587
— Sur les aurores boréales du 24 et du
25 octobre; Note de M. Gaillemin. . . . 587
Azote. — Sur le dégagement d'azote pur, des
matières organiques azotées; Note de
M. CaU'crt 322
( 9Cfi )
B
Pagi'S.
Balistique. — Voir l'article .Iris militaires.
Botanique. — Sur la structure du Cytinet et
l'action qu'il exerce sur la racine des
Cistes; Notes de M. Caimt . . 216 et 3G9
Pages.
Bromures. — Mémoire sur le bromure de
fer et de potassium ; par M. Gaiibc 35o
Bulletin bibliographique. — Pages 241,
290,332, 358, 377, 393 ,41 1, 429, 44i-
452, 476, 491, 543, 599, 909 et 968
c
Cadrans solaires. - Restauration d'un ca-
dran solaire conique, tracé sur un frag-
ment rapporté de Phénicie par M. Renan ;
Note de M. Lnusscdat 261
Candidatures. — M. Boussincsq prie l'Aca-
démie de vouloir bien le comprendre
parmi les candidats à la place laissée
vacante, dans la Section de Géométrie,
par le décès de M. Lamé 384
i'.iialeur. — Sur les variations de tempéra-
ture produites par le mélange de deux
liquides; Note de M. Jamin en réponse
aux observations présentées à l'occasion
de sa Note précédente, par M. 11. Sainte-
Claire Deville 23
— Remarques de M. H. Sainte-Claire De-
ville sur la nouvelle Note de M. Jamin. 3o
— Sur les variations de température pro-
duites par le mélange de deux liquides ;
réponse de M. H. Sainte-Claire Deville
[\ la dernière Note de M. .lamin 202
— Réponse de M. H. Suintr-Claire Deville
à des critiques de M. .lamin, à propos
d'un Mémoire publié en iBGo 204
— Réplique de M. Jamin aux deux dernières
Communications de M. II. Sainte-Claire
Deville 34i
— Sur la détermination du rapport do deux
chaleurs spécifiques; Note de MM. Ja-
min et Richard 33(i
— Remarques de M. H. Sainte-Claire De-
ville au sujet de la précédente Note. . . 368
— Relation entre les chaleurs spécifiques et
les coefficients de dilatation d'un corps
quelconque; Noie de M. Plnltips 333
— De la chaleur spécifique des gaz sous vo-
lume constant ; Note de M. Moutier. . . 807
— Équivalent mécanique de la chaleur. —
Voir l'article Thermiulynamique .
C.uEHiNS DE FER. — Notc d(! M. Lehlun ayant
pour titre : « Système de chemin de for
rural et de montagnes : adhérence par-
faite des roues avec le rail » 47
CiiiBUROiE. — Notes de M. Sédillot ayant
pour litre : «Observations relatives aux
indications chirurgicales et aux consé-
quences des amputations à la suite des
blessures par les armes de guerre. —
Addition à la précédente Communica-
tion : « De l'encombrement et de ses
suites fâcheuses ; mesures proposées
pour placer les amputés dans de meil-
leures conditions hygiéniques. 421 et 435
— Note de M. Seiré ayant pour litre : « Sur
le couteau électrique et ses applications
à la chirurgie militaire » 3oi
— Note de M. Pellarin concernant l'hygiène
des blessés et des opérés 4;7
— Sur la propriété dont jouissent les troncs
artériels de résister mieux que les cor-
dons nerveux à l'action directe des pro-
jectiles sphériques; Noie de M. Bnnna-
font -07
— Toiles et papiers au tannin et à l'acide
benzo'ique pour les pansements rapides
sans linge; Note de M. fiostaing 806
— Sur l'emploi de la glace et du froid dans
les amputations; Notes de M. Ch. Tel-
licr 579, 618 et 8o(')
Chloral. — Transformation du cliloral en
aldéhyde par substitution inverse ; Note
do M. Personne 227
Ciilor.\tes. — Sur une poudre de guerre au
chlorate de potasse ; Noie de M. Za-
liu'ski 4o3
Chlorures. — Action du pent<ichlorure el
du pentabromure de phosphore sur di-
vers éthers ; Noie de M. L. Henry. ... 3i4
Climats. — Note de M. Grad ayant pour
titre : « Le climat de l'Alsace et des
Vosges » 74
Coca. — Recherches expérimentales sur la
propriété alimentaire de celte feuille;
Note de M. Gazeaii 799
— M. Roulin donne à cette occasion cpiel-
ques détails sur l'usage de mâcher la
feuille de coca, usage que les Espagnols à
leur arrivée dans le Nouveau-Monde ont
trouvé établi dans presque toute l'Amé-
rique du Sud, et au(|uel dans plusieurs
( 9^7
Pages,
provinces on a obligé les indigènes à
renoncer pour des motifs qui n'ont rien
de commun avec l'hygiène 801
— Nouvelle Noie de M. Gnzcau sur la pré-
paration et les effets physiologiques de
la coca gSy
Comètes. — Sur la lumière de la comète de
Winnecke (comète I, 1870); Note de
MM. fVolf et Riiyet 49
— M. Ddaunay annonce qu'une nouvelle
comète a été découverte à Marseille
dans la nuit du 28 au 29 août par
M.
Coggin. — Observation de Marseille
4'
et observation faite à Paris le 3 sep-
tembre 4o5
Commission des comptes. — MM. Mathieu
et Brongniart sont nommés Commis-
saires pour la vérification des comptes
dp l'année précédente
Commissions des pri\. — Prix r/rSlnristir/iic.
Commissaires; MM. Bicnaymé, Mathieu,
Ch. Dupin, Passy, Boussingault 2i5
— Prix (le Mcdecinc et de C/iiriirgir. Com-
missaires : MM. Bernard, Cloquet, Néla-
lon, S. Laugier, Bouillaud, Andral, Lon-
get, Robin, Larrey 2i5
— Prix dit des Arts insalubres. Commis-
Paegs.
saires : MM. Chevreul, Payen, Combes,
Boussingault, Dumas 250
Prix de Physiologie erpéritucntale. Com-
missaires : MM. Bernard, Longet, Robin.
Milne Edwards, Coste 2.i6
Grand prix de Sciences mathématiques
( modifications qu'éprouve la lumière
dans son mode de propagation et ses
propriétés par suite du mouvement de
la source lumineuse et de l'observateur).
Commissaires : MM. Fizeau, Liouville,
Jamin, Bertrand, Edm. Becquerel 707
Prix (V Astronomie. Commissaires :
MM. Mathieu, Liouville, Delaunay, Lau-
gier, Paye 7(1;
Prix de Mécanique (fondation Monlyon ).
Commissaires : MM. Morin, Delaunay
Dupuy de Lôme. Combes, Phillips 84'
Grand prix des Sciences physiques (ques-
tion des phénomènes qui précèdent le
développement de l'embryon dans les
cas de parthénogénésie). Commissaires :
MM. Milne Edwards, de Quatrefages,
Blanchard, Coste, Dumas. Celte même
Commission sera, cette année, par suite
d'une décision prise par l'Académie,
chargée de décerner aussi le prix Bordin. 88 1
D
DÉCÈS DE Membres et de Correspondants de
L Académie. — M. le Secrétaire perpé-
tuel annonce, séance du 14 novembre,
la perte que vient de faire l'Académie
dans la personne d'un de ses Membres,
M. Duméril, décédé l'avant-veille....
635
Dynamites. — Sur la nitro-glycérine et les
diverses dynamites; Note de MM. Gi-
rard, Mill'ot et rogt 688
— De la dynamite et de ses applications
au point de vue de la guerre ; Note de
M. P. Champion 77.8
E
Eau. - Action de leau sur le fer et de l'hy-
drogène sur l'oxyde de fer; troisième
Mémoire deM. H. Sainte-Claire Decille . 3o
— Rectification adressée par M. Terrien
pour son Mémoire sur la décomposition
de l'eau par la pile électrique 48
Eau (Cours d'). — « La Seine : études sur
les régions de la pluie, des sources, des
eaux courantes, et applications diverses
à l'art de l'ingénieur et de l'agricul-
ture » ; Mémoire de M. Belgrand 886
Eaux potables. — Note de M. Cassaignes
concernant la flltration naturelle des
rivières et l'application de ce système
à la Durance 216
Éclairage. — Sur l'emploi du bois pour la
préparation d'un gaz d'éclairage; Note
de M. Charmolue 816
Éclipses. — Voir l'article Astronomie .
Économie domestique. — Sur quelques do-
cuments relatifs à l'économie domes-
tique et aux denrées alimentaires en
Egypte sous les Ptolémées ; Note de
M. Egger Gi 2
Économie rurale. — Du Phylloxéra de la
vigne : identité spécifique du Phylloxéra
des feuilles et du Phylloxéra des ra-
cines; Note de MM. Planchon et Lich-
lenstein v>98
— Remarques de M. Milne Edwards à l'oc-
casion de cette Note 3oi>
— Sur un moyen pour empêcher l'irrup-
( 968 )
Pages,
tion du Phylloxéra vtisltitrix; Note de
M. Lichteiistcin 356
— Sur uno variété de vignes qui paraît être
il l'abri des atteintes du Phylh.rcm va.s-
tatrix; Lettre de M. L. Lnliman à
M. Dumas 358
— Sur les résultats obtenus en faisant cou-
ver des perdrix en cage ; Notes de M. To.s-
tiviret 260 et 384
Ki.ECTRlciTÉ. — Note de M. Terrien pour une
rectification à faire à son Mémoire sur
la décomposition de l'eau par la pile
électrique 48
Sur une propriété du condensateur de
Voila qui n'a pas encore été considérée :
Note de M. Volpicelli 54
— Nouvelles expériences sur les armatures
et le plateau fixe de la machine de Holtz ;
Note de M. Laborcle 347
— Sur une expérience qui confirme la double
hypothèse faite par Ampère, de l'exis-
tence d'un courant électrique formé
dans chaque substance magnétique et
dans la terre ; Note de ^^. P. Le Cordier. 533
— De la possibilité d'obtenir des signaux de
feu d'une grande portée au moyen de la
décharge périodique d'un puissant con-
densateur électrique ; Note de M. Lucas. 222
— Remarques de M. Delnutier relatives à
cette Communication 33 1
— Disposition nouvelle des piles voltaïques :
application à la pile de Bunsen; Note
de M. (VAlnuïdti. (Un de ces appareils
est mis sous les yeux de l'Académie.). 774
— Noie de M. Zidhvshi concernant une
« pile pouvant donner une intensité
maximum pendant douze heures ».... 4o3
— Sur le couteau électrique et ses applica-
Pages.
lions à la chirurgie niilitaiie; Note de
M. Serré io
Electrocapill.\ires (Actions). — Nouvelles
recherches sur ces actions ; formation
de l'oxychlorure de cuivre cristallisé et
d'autres composés anidogues; Note de
M . Becquerel 1 97
Électro-Chimie. — M. Élie de Bctiumont
fait hommage à l'.^cadémie au nom de
l'auteur, M. Zfirite/lesclii,û'\in opuscule
intitulé : « De l'électro-chimie appliquée
à l'industrie et aux beaux arts » 44"
Errata, voir p. 996.
Éthers. — Sur les isomères des éthers cya-
nuriques ; Note de M. Hofnmnn 35
— Action du pentachlorure el du penta-
bromure de phosphore sur divers éthers;
Note de M. L. Henry 3 1 4
— Éthers des acides amidés de la série aro-
matique : nouveaux composés résultant
de leur union avec l'acide cjanique el
les différents éthers cyaniques; Note de
MM. Au^. Caliours et Gai 462
Étoiles filantes. — Note de M. Chapela.s
sur les étoiles filantes du mois d'août. . 386
Explosives (Matières). — Note de M. Ber-
thelot sur la force de la poudre et des
matières explosives 619, 677 et 709
— Sur la nitroglycérine et les diverses dy-
namites; Note de MM. Girard, Millot
et Vogt 688
— De la dynamite et de ses applications au
point de vue de la guerre ; Note de
M. Clianipion 728
~ Sur la force des matières explosives;
Noie de M. Cazin 898
~ Sur la force des matières explosives; Note
de M. Berihelot en réponse à celle de
M. Cazin 940
l'KK. — Action de l'eau sur ce métal et de
Ihydrogène sur l'oxyde de fer ; troisième
Mémoire de M. H. Sainte-Claire Deville. 3o
— Sur le bromure de fer et de potassium ;
Note de M. Gaube 35o
Fermentation. — Sur la fermentation car-
bonique el alcoolique de l'acétate de
soude et de l'oxalate d'ammoniaque :
Note de .M . Béchamp 69
— Sur la théorie de la variole étudiée au
point de vue de la fermentation; Mé-
moire de M. ISrttcr 35o
Flexion. — Onzième Mémoire de M. Auhert
sur les solides soumis ;i la Hexion .... 35ii
Fluorures. — Dosage volumétrique des fluo-
rures solubles; Note de M. Guynt 274
Foudre. — Sur un phénomène de choc en
retour observé à Porto-.\lègre (Brésil):
Note de M. I.aranja e OVneira 386
( 9^9 )
Page» .
Gaz. — Sur la compressibilité et la dilata-
tion des gaz; Note de M. Amagat 67
— Note de M. Mniaier concernant la cha-
leur spécifique des gaz sous volume
constant - 807
GÉLATINE DES OS. — M. Duitias Commu-
nique une Lettre de M'"° D' Arcct-Lc-
coiritrc qui l'a chargé d'offiir, au nom
de M™ V D'Arcet et au sien, des Notes
et des Mémoires en partie inédits et se
rattachant principalement aux recher-
ches du savant Académicien, .1. D'Arcet,
sur la gélatine des os et son emploi ali-
mentaire 682
— Sur les propriétés nutritives des sub-
stances organiques tirées des os, etc.;
Note de M. Milne EiUvards 786
— Observations de M. ClieiTrut relatives à
un passage d'une Communication récente
de M. Fremy, sur l'emploi de l'osséine
dans l'alimentation 796
— Réponse de M. Frcmy 797
— Résumé historique des travaux dont la
gélatine a été l'objet; Note de M. Chc-
vreul en réponse à M. Fremy (première
et deuxième partie) 855 et 912
— Sur la préparation de l'osséine et de la
gélatine; Note de M. Riche Sic
GÉODÉSIE. — Note sur les pyramides de Vil-
lejuif et de Juvisy; par M. Delaunay.. 5
GÉOLOGIE. — Sur les roches qu'on a rencon-
trées dans le creusement du tunnel des
Alpes occidentales, entre Modane et
Bardonnèche ; Note de M. Élie de Beau-
mont 8
— Sur la position des calcaires à Tcrebra-
tulajanitor, dans les Basses-Alpes ; Note
de M. Velain 85
— Sur les calcaires à Terebrauda diphya
dans les Alpes françaises de Grenoble à
Pages,
la Méditerranée ; Note de M. DieidafoU. 282
— Systèmes de montagnes et terrains du
désert d'Atarama; Note de M. Pissis.. 285
— Contemporanéité de l'homme avec le
grand ours des cavernes et le renne
dans la caverne de Gargas (Hautes-Py-
rénées); Note de MM. Gurrigou et
Chasteigner ;i88
— Sur les dépôts glaciaires de divers âges
dans les Pyrénées; Note de M. G/ir-
rignu 289
— Note sur une carte lithologique de l'em-
bouchure de la Seine; par M. Dctessc. 349
— Sur les rapports de l'astronomie phy-
sique avec la géologie ; Note de M. Sinn.
Meunier [Voir aussi XwX,. Météorite s.) 54 1
— Note sur le mode de solidification du
globe terrestre ; par le même gSô
GÉOMÉTRIE. — Remarques de M. Catalan
sur une Note de M. Darboux, relative
à la surface des centres de courbure
d'une surface algébrique 5o
— Réponse de M. Darboux aux remarques
de M. Catalan 267
— Détermination des éléments de l'arête
de rebroussement d'une surface déve-
loppable définie par des équations tan-
gentielles; Note de M. Painrin 217
— Extrait d'une Lettre de M. Roger accom-
pagnant l'envoi d'un exemplaire de sa
traduction de l'ouvrage de Gauss inti-
tulé ; » Recherches générales sur les
surfaces courbes » 35i
— Sur une transformation géométrique ;
Noie de M. Lie 579
— Note de M. Goubet sur la théorie des
principes de la géométrie élémentaire. 216
— Démonstration élémentaire du /OT.rfHtowra
d'Euclide; Note et Lettre de M. Pretis
de Sainte-Croix 48 et 260
H
Histoire des Sciences. — Note sur les py-
ramides de Villejuif et de Juvisy ; par
M. Delaunay
— Sur les découvertes astronomiques des
Anciens; Note de M. de Fonvielle
— Traduction de deux passages de Stobée
attribués à des Pythagoriciens, et jus-
qu'ici inexpliqués ; Noie de M. Bienaymé.
— Note de M. Egger sur un papyrus qui
C.R., 1870, 1"^' Semesire. (T. LXX.I.)
5
376
460
contient des fragments d'un traité d'op-
tique, et, à cette occasion, sur l'optique
inédite de Ptolémée 465
— Note sur quelques documents relatifs à
l'économie domestique et aux denrées
alimentaires en Egypte sous les Ptolé-
mées ; par le nie'me C 1 1
Hydraulique. — Essai théorique sur les lois
trouvées expérimentalement par M. B»-
i3o
( 97»
Pages,
zin pour l'écoulement uniforme do l'eau
dans les canaux découverts ; Mémoire
de M. Boussincsq 38 1
Hydrodynamique. — Démonstration élémen-
taire de la formule de propagation d'une
onde ou d'une intumescence dans un
canal prismatique, et remarques sur les
propagations du son et do la lumière,
ainsi que sur la distinction des torrents
et des rivières; Mémoire de M. de Saint-
Vcnant l86
HYDnoGÈ.NE. — Action de l'eau sur le fer et
de l'hydrogène sur l'oxyde de fer; troi-
sième Mémoire de M. H. Sainte-Claire
Deville 3o
— Recherches thermiques sur le caractère
métallique de l'hydrogène associé au
palladium. — Sur un couple voltaïque
dans lequel l'hydrogène est le métal
actif; Note de M. Fa^re 214
Hygièxe publique. — Sur l'emploi de l'acide
phénique comme désinfectant ; Note de
M. Cahert 821
— Notede M. Frtieayanl pour litre : « Quels |
sont les vrais agents chimiques qu'il faut
opposer à linfection miasmatique ».'.. . 4i5
— Observations de M. Damas relatives à j
cette Note 4 '7!
)
Pa(;os.
Observations de M. Chrorii! sur le même
sujet 419
Remarques complémentaires de M. Du-
max à propos de la Communication de
M. Paye 4 '9
Observations de M. Chevrcul relatives
auxremarquesprésentéesparM. Dumas. 420
M. C/ierrei/l donne, dans la séance du
ig septembre, une suite à ces remarques,
ainsi qu'il l'avait annoncé à la séance
précédente 453
Mémoire de M. Jiobœiif ayant pour titre :
« Importance actuelle des questions se
rattachant à l'hygiène publique et pri-
vée, et notamment de la question des
hémostatiques et des désinfectants : sur
le phénol iodique r. 617
Sur une nouvelle classe de désinfectants,
les désinfectants gazeux, les uns char-
gés d'un arôme et les autres inodores;
Note de M. Mailinicr gSS
M. le Sccrëlaire perpétuel signale parmi
les pièces imprimées de la Correspon-
dance (séance du 10 octobre iSyoj'tm
travail de M. J. Colin intitulé : « Des
conditions sanitaires de l'armée de Pa-
ris » 478
I
Infusoires. — Note de M. Gurot relative au
développement d'organismes particuliers
dans le pain fait avec la farine de seigle. 4'-i9
Institut. — M. le Président de l'Institut
invite l'Académie à désigner l'un de ses
Membres pour la représenter comme
lecteur à la prochaine séance générale
de rinstitnt remise au 26 octobre cou-
rant 493
IS.NTRUMENTS DE PHYSIQUE. — Note de M. /.(-
grand sur les thermomètres de Deluo. 66
InSTRU.MENTS d'optique. — M. le Secrétaire
perpétuel, en présentant au nom de l'au-
teur, M. Girard, un exemplaire de la
deuxième édition de sou ouvrage « Sur
la chambre noire et le microscope », lit
quelques passages de la Lettre d'envoi. 404
I.NSTRUME.NTS d' ARPENTAGE. — NotO et brO-
churc de M. Lourau relativement à un
« Cercle releveur » destiné à servir à la
fois de graphomèlre, de planchette, de
boussole et de niveau 2G0
Isomères. — Note de M. Hnfmann sur les
isomères des éthers cyanuriques 35
Legs Bréant. — Mémoires destinés au con-
cours pour le prix concernant la guéri-
son du choléra ou des dartres; adressés
par MM. lilirlirh et Vinci 210 et
LiBEU-ui.E MÉCANIQUE. — Note de M. Pri-
gent contenant la description d'une
35o
« Libellule mécanique » dont il donne
aussi le dessin ySg
Lumière. — M. C(we-Th(inias présente une
nouvelle rédaction do son Mémoire in-
titulé ; « Théorie esthétique de la lu-
mière » 48
( 97' )
1\1
Pages.
Machines a vapeur. — Sur la faiblesse du
rendement de ces machines; Note de
M. P. Vrrdcil 522
Magnétisme terbestriî. — Observations ma-
gnétiques faites à Makerstown (Ecosse)
et Trevandriim, près du cap Comorin;
Note rie M. Broun 56
— Nouvelles remarques sur les variations
de l'aiguille aimantée; par le même. . . iG5
Marées. — Note de M. Falabrègue ayant
pour titre : « Influence de la force cen-
trifuge sur les marées » 240
MÉCANIQUE. — Sur l'affût de l'amiral La-
brousse, fondé sur un théorème de mé-
canique relatif au mouvement du paral-
lélogramme articulé, et sur le jeu d'un
nouveau frein imaginé par cet officier ;
Note de M. Fare^. 455
— Note sur les déviations des projectiles à
ailettes ; par le même 601
MÉCANIQUE ANALYTIQUE. — Notc sur les Con-
ditions des petites oscillations d'un corps
solide de figure quelconque et la théorie
des équations différentielles linéaires;
par M. Yfon T'illarcecni 762
MÉCANIQUE CÉLESTE. — Sur Ics inégalités de
la Lune dues à l'action des planètes;
Lettre de M. Nearomii à. M. Delaunay. 384
MÉTAMORPHISME. — ExamcH chimique d'un
ciment métamorphique dans la source
Bayen de Luchon; Note de M. Garri-
gou 287
MÉTÉORITES. — Note sur les rapports de l'as-
tronomie physique et de la géologie ; par
M. Stan. Meunier 54 1
— Note sur les relations stratigraphiques
entre diverses roches météoriques; par
le même 743
— Note sur l'existence dans les météorites de
roches éruptives et de roches métamor-
phiques ; par le même 771
'Voir aussi l'article Géologie.
MÉTÉOROLOGIE. — Note de M. Chnpelmj
ayant pour titre : « Le printemps de
1 870 » 40
— Mémoire de M. Dnudin relatif à diverses
questions de météorologie, et particu-
lièrement à la sécheresse actuelle 47
— Halos solaires observés le 23 juin et le
3 juillet 1870; Note de M. tr . île Fon-
fielle 47
— Note de M. Fuye accompagnant la pré-
sentation d'un opuscule de M. Hirn in-
Page
titulé : « Introduction à l'étude météo-
rologique de l'Alsace » a56
- Note de M. Coutejean intitulée : « Maxi-
mum de température à Poitiers le 24 juil-
let 1 870 n 325
— Sur le régime pluvial des Alpes françaises;
Note de M. Raulin 326
— Note de M. de Snint-Cricq Casoux rela-
tive au maximum de température du
24 juillet 1870 376
— Théorie de Mariotte sur les oscillations
barométriques; Notede M. i^f i^o«we//p. 4o3
— M. Ch. Sainte-Claire Decille annonce à
l'Académie que les observations de l'Ob-
servatoire de Montsouris sont momen-
tanément interrompues 4^5
— Note sur la période tridodécuple ou décem-
diurne dans les phénomènes atmosphé-
riques et dans leur induence sur l'état
sanitaire; par /r même.. 653, 695 et 827
- M. C/t. Sainte-Claire Derille fait hom-
mage à l'Académie d'une série de Bul-
letins de l'Observatoire météorologique
de Montsouris 706
— De la périodicité du temps réglée d'après
les indications fournies par les phases
de la Lune qui suit celle de l'équinoxe;
Note de M. £ezm-d de fFowes 885
— Mémoire de M. Belgrand ayant pour ti-
tre : « La Seine : Études sur le régime
de la pluie, des eaux courantes, des
sources »... 886
MÉTHODES. — Note de M. Duhamel accom-
pagnant la présentation de la quatrième
partie de son ouvrage sur : « Les Mé-
thodes dans les Sciences de raisonne-
ment » 181
— De la différence et de l'analogie de la mé-
thode a posteriori dans ses applica-
tions aux sciences du concret et aux
sciences morales et politiques ; Mémoire
de M. Cliei-reul 498
MÉTRIQUE (Système). — Note de M. d\4h-
badie sur la division du quadrant. . . . 335
— Sur la division décimale des angles et du
temps; Note de M. Yvon Villarceau. . 362
- Note de M. Morin sur la première ses-
sion de la Commission internationale du
mètre, tenue à Paris du 8 au i3 août
1870 38i
Minéralogie. — Sur des combinaisons cris-
tallisées d'oxyde de plomb et d'oxyde
d'antimoine, d'oxyde de plomb et d'acide
1 3o.
(972)
Pages.
anlimoniqiic de la province de Cons-
tanliiie ; Note de M. FUijoht 23/
Examen d'une roche schisteuse impré-
gnée d'une matière cliarbonneuse pro-
venant de la coUeclion adressée à l'A-
cadémie par MM. Ravizza et Colomba;
Note de M. H. Saintc-CUiire Deville.. . 25-2
Analyse de la nadorite, nouvelle espèce
minérale de la province de Constantine
(Algérie) ; Note de M. Pimni 3ig
Composition chimique de la nadorite;
Pages.
Note de M. Fhijnloi 40G
— Communauté d'origine de la serpentine
et de la chantonnite; Note de M. Scan.
Meunier Sgo
MocvE.iiENT PERPÉTUEL. — L'Académie con-
sidère comme non avenue toute Com-
munication à se sujet, décision déjà an-
cienne et rappelée à l'occasion d'un
Mémoire de M. Luneau aGo
Mycologie. — Résultats de quelques expé-
riences mycologiques ; Note de M. Roze. 323
N
Navigation. — M. Gaillard adresse la des-
cription et la figure d'im appareil dont
il croit qu'on obtiendrait, pour les ri-
vières suffisamment profondes, des ser-
vices semblables à ceux qu'on attend
pour la mer des bateaux sous-marins. .
NiTROGLTCÉRi.NE. — Voir l'article Explosives
( Matières).
Nombres (Théorie des). — Traduction de
694
deux passages de Stobée inexpliqués
jusqu'ici ; Note de M. Bieimrmé 460
Nominations. — M. Lcbert est nommé Cor-
respondant de l'Académie, Section de
Médecine et de Chirurgie, en remplace-
ment de feu M. Lcnvrcnce 41
- M. Brainlt est nommé à la place de Cor-
respondant vacante, pour la Section de
Chimie, par suite du décès de M. Cnrus. 4 1
o
Ondes liquides. — Note complémentaire au
Mémoire sur les ondes liquides pério-
diques, présenté par M. Boiissinesfj en
novembre 1869. — Établissement de re-
lations générales et nouvelles entre l'é-
nergie interne d'un corps lliiide ou so-
lide, et ses pressions ou forces élas-
tiques 400 —
Optique. — Note de M. A. Cazin ayant pour
titre : « La lunette de rempart » 629
Organograpiiie végétale. — Remarques sur
la position des trachées dans les Fou-
gères (septième partie); Notede M. Tré-
ciil 55o
— Sur la zone génératrice des appendices
rhezles végétaux monocotylédons ; Notes
de M. Cave 83, 374 et 397
— Sur le développement des feuilles des
Scirrticenia ; Note de M. Bâillon 63o
OssÉiNE. — De son emploi dans l'alimenta-
tion ; Note de M. Fremr SSg
Observations de M. Clievreul relatives à
cette Communication 5G2
Observations de M. Diinins relatives à
la même Communication 5G5
Remarques de M. Payen sur la question
traitée par M. Fremy 5G7
Remarques de M. Clievreid sur un pas-
sage de la Note de M. Fremy 79G
Réponse de M. Fremy 797
M. Clievreid annonce, séance du 12 dé-
cembre, qu'il réserve pour la séance
prochaine une Communication sur l'his-
toire de la gélatine et sa ré|)onse à
M. Fremy 8 ig
Résumé historique des travaux dont la
gélatine a été l'objet; par M. Clievreid
( première et deuxième parties). 855 et 912
Sur la préparation de l'osséine et de la
gélatipe ; Note de M. Riche 810
Paquets cachetés (OuvERTiinK ue). — Un
paquet cacheté précédenmient déposé
par M. Le Miisiirirr et ouvert sur sa
demande, le 12 septembre, se tiouvo
contenir l'indication d'une application
de la lumière électrique 4*8
Pathologie. — Importance de la destruction
des croûtes qui entourent le lit des va-
rioleux pendant la période de dessicca-
tion des pustules; Note de M. Netler. . 2i5
(973
Pages.
— Note sur la théorie de la variole envisa-
gée au point de vue des fermentations;
par le même 35o
— Recherches et expériences sur la nature
et l'origine des miasmes paludéens;
Note de M. Bnlcstra 235
— Sur l'emploi de l'acide phénique comme
désinfectant; Note de M. Calfcrt 3'2i
— Note de M. Jouglet concernant un pro-
cédé destiné à empêcher la transmission
des maladies par l'arrêt des poussières
en suspension dans l'air 33i
— Sur l'importance actuelle des questions
se rattachant à l'hygiène, et notamment
la question des hémostatiques et des dé-
sinfectants. — Sur le phénol sodique;
Note de M. Bnliœuf 617
Peaux (Préparation' des). — Procédé em-
ployé aux États-Unis par les indigènes
pour la préparation des peaux de bi-
sons, de cerfs et d'autres animaux de
ce pays; Lettre de M. Simonin à M. Du-
mas 524
— Renseignements donnés à cette occasion
par M. Roitlin sur le chamoisage des
peaux de cerfs et autres mammifères
pratiqué dans l'Empire Mexicain avant
l'arrivée des Européens 624
— Sur le système de tannage rapide des
peaux au Mexique ; Note de M. Firltt
d'Aoust 589
— Sur une deuxième façon que donnent
fréquemment les Indiens des prairies
(Haut-Missouri) aux peaux préparéos
par le procédé qu'a indiqué M. Simonin :
préparation particulière pour donner
aux boucliers en cuir la résistance né-
cessaire ; Note de M. Rotdin 873
Pendule (Mouve.ments du). — Note de
M. Verdeil sur cette question gSg
Physiologie. — Observation d'une inégale
production et d'une ditférence de com-
position du lait pour les deux seins
d'une même femme; Note de M. Soiir-
dat 87
— Influence du développement hâtif des os
sur leur densilé; Note de M. Sansun. . 229
— Nouvelle démonstration de la régénéra-
tion osseuse après les résections fous-
périostées articulaires; Note deJI. Ol-
lier 275
— Recherches expérimentales sur les modi-
fications de la composition immédinte
des os; Note de M. Papillu/i 372
— Sur les graisses du chyle; Noie de .M. J)o-
hrnslavine 278
— Recherches sur les effets loxiqucs du
m^boiindon ou icaja, poison d'épreuve
Pages.
I26
907
397
usité au Gabon; Note de MM. Rahiitcau
et Peyrt' 353
— Sur un moyen propre à annuler les effets
de l'alimentation insuffisante; Note do
M. Rabuteati
— Sur l'excrétion de l'urée considérée comme
mesure de l'activité des combustions res-
piratoires; Note de M. San.son
Physiologie végétale. — Expériences sur
la fanaison des plantes; par M. Piil-
lieux 81
— Sur la zone génératrice des appendices
végétaux ; Note de M. Cave. 83, 374 et
— Note de M. Roze ayant pour titre : <■ Ré-
sultats de quelques expériences myco-
logiques » 323
Physique mathé.matique. — Rapport sur un
Mémoire de M. Massicu intitulé : « Mé-
moire sur les fonctions des divers Huides
et sur la théorie des vapeurs » ; Rap-
porteur M. Bertrand 257
— M. le Secrétaire j>rrpétuel ûgx\&\Q parmi
les pièces imprimées de la Correspon-
dance (séance du 3 octobre) un opus-
cule de M. Chancourtois « Sur l'inter-
prétation des imaginaires en physique
mathématique » 476
— Sur la formule de la vitese du son; Noie
de M. Mnutier 846
— Recherches sur l'état solide ; par le
même 934
Platine (Composés du). — Note de M. Schiit-
zeribergcr sur les composés phosphopla-
tiniques Gg
— Recherches de MM. Aug. Caliours et
G(d relatives à l'action des chlorures
de platine, de palladium et d'or sur les
phosphines et les arsines 208
Polaris.\tion circulaire. — Sur les pou-
voirs rotatoires des liquides; Note de
M . de la Rii'c i g5
PRIX DÉCERNÉS (Concours de l'année 1869).
(Séance du 1 1 juillet 1870.)
sciences mathématiques.
— Grand prix de Sciences Mathématiques
(question concernant le problème des
trois corps). — Il n'y a pas eu lieu à dé-
cerner ce prix; la question est mainte-
nue au concours pour l'année 1872...
— Grand prix dk Sciences Mathé.watiques
(question concernant l'accélération sé-
culaire du niouNcment de la Lune). —
Il n'y a piis eu lieu à décerner le (H'Ix;
la queslion est maintenue au concours
pour l'année 1 873
— Prix d'Astronomie (fondation Lalande),
89
9'
décerné à M. /. Jf'ntsnn, qui a décou-
vert neuf nouvelles petites planètes, dont
huit dans l'espace d'une année
- Pntx DE MÉCAMQUE ( fondation Montyon) ,
décerné à M. Jr.in?i pour ses recher-
ches expérimentales sur l'écoulement
dos gaz dans de longues conduites. . . .
- Prix DE STATisTiQfE {fondation Mont\'on),
décerné à M. Clwriii, pour sa statistique
médico-chirur2:icale de la campagne d'I-
talie en i85g-i86o. — Mentions lionn-
rables ; i° à MM. Maf;ué et Poly pour
leur livre intitulé : « Données générales
d'une statistique des conseils de prud'-
hommes » ; 1° à M. Bnritpmps pour les
renseignements statistiques que fournit
son « Guide du Verrier n 94 et
Prix fondé par M""' la MAngnsE de La-
place, obtenu par M. J'aisin, sorti le
premier en i86g de l'École Polytech-
nique et entré à l'École impériale des
Mines
Prix Trémont, décerné à M. Le Rmi.r
pour l'aider <à poursuivre ses recherches
sur l'indice de réfraction de certaines
vapeurs et ses recherches sur la me-
sure de la chaleur développée par les
courants électriques
Prix Poncelet, décerné à M. /. Robert
Mnycr, pour l'ensemble de ses Mémoires
sur la (( Théorie mécanique de la cha-
leur «
sciences physiques.
Prix de Médecine et de Chirurgie (Ap-
plication de l'électricité à la thérapeuti-
que). — Il n'y a pas eu de prix décerné ; la
question est maintenue au concours pour
l'année 1872. — Une médaille de la va-
leur de 3ooo francs est accordée à
MM. Lrctros et Oninuts, pour l'ensemble
de leurs travaux sur le sujet proposé, et
une de 2000 francs à M. Cyon pour un
semblable motif 102 et
Prix de Physiologie expérimentale
(fondation Montyon), décerne à M. Fn-
niitziii, pour ses recherches concernant
I' « liilluence de la lumière sur la nutri-
tion des plantes ». — Mrrilion honorable
avec attribution d'ime somme de Goofr.
à MM. Trijiier et Jrhi/ig pour leurs
découvertes relatives aux nerfs sensitifs
cutanés 107 et
Prix de Médecine et de Chirurgie ( fon-
dation Montyon). — Prix do la valeur
de ^joo francs à M. Jiinod, pour son
Mémoire intitulé : « Des médications hé-
( 97
P.ige3.
92
99
107
4 )
mospasique et aérothérapique ». — Pri.t
de la valeur de 2000 francs accordés :
1° à M. Liischka, pour ses travaux d'a-
nalomie et spécialement d'anatomie des
régions; 2° à MM. Paulet et Snrazin,
pour leur « Traité d'anatomie topogra-
phiquo ». — Mentions Iionornble.i ac-
compagnées d'une somme de i 5oo francs
accordées : 1° à M. H. Roger, pour ses
recherches sur la chorée, le rhumatisme
et les maladies du cœur chez les en-
fants ; 2" à M. Maurin, pour sa mono-
graphie intitulée: «Typhus des Arabes»;
3° à M. Knocli, pour ses « Travaux sur
le bothryocéphale large ». — Citations
honorables : 1° de 1' « Essai sur les ma-
ladies du cœur riiez les enfants » ; par
M. Blache ; 2° des « Études photogra-
phiques sur le système nerveux »; par
M. Roiulancivsky. — Encouragement de
1000 francs à M. Sainl-Cyr, pour la
continuation de son « Étude sur la tei-
gne faveuse chez les animaux domes-
tiques ». ii3, 117, 120, 122, 125 et
- Prix dit des Arts insalubres (fondation
Montyon). — Prix de la valeur de
2600 francs accordés, l'un à M. Pimont,
pour son «Calorifuge plastique », l'autre
à M. Charrière, pour ses appareils de
sauvetage en cas d'incendies. 127 et
-PrixBréant. — Une''t»Vf)/;Y;c«AY>de5ouofr.
est accordée à M. Fniivel, pour ses tra-
vaux concernant l'étiologie et la prophy-
laxie du choiera. — Mentions trrs-ho-
norables accordées aux ouvrages sui-
vants : 1° « Études géographiques et
scientifiques sur les causes et les sources
du choléra asiatique »; par M. Proes-
chel; 2° « Notice sur les mesures de
précaution prises à Batna (Algérie) pen-
dant le choléra de 18O7 »; par M. Da-
herley; 3° « Statistique des décès par le
choléra qui ont eu lieu dans le quartier
Folic-Méricourt en i865 et 18G6 »; par
M. Gcry père i35, 1 37 et
- Prix Cuvier, décerné à M. Ehrenberg,
pour l'ensemble de ses travaux
- Prix Bordin (Rôle des stomates dans les
fonctions des feuilles). —Il n'y a pas
eu lieu à décerner de prix; la question
est maintenue au concours pour l'an-
née 1 872
- Prix lîORDiN (.Monographie d'un animal
invertébré marin). — Le prix est par-
tagé entre M. Marion, auteur de « Re-
cherches zoologiques et anatomi(iues sur
des Nématoïdes non jiarasites marins »,
cl M. Wagner, auteur d'une « Mono-
P;i(îP9,
127
i3o
i38
i38
139
( 97^
Pages,
graphie des Ancées dii golfe de Na-
ples). i4o et i44
Prix Jecker, décerné à M. Friedel, pour
ses recherches sur des composés de si-
licium correspondants aux composés
d'origine organique '44
Prix Barbier, partagé entre M. MirmiU
(Occlusion chirurgicale des paupières
dans le traitement de l'ectropion cica-
triciel), et M. Stilling (Nouveau pro-
cédé pour l'opération de l'ovariotomie).
i44 et i46
Prix Godard, décerné à M. Hyrtl, pour
ses recherches sur les « Organes génito-
urinaires des poissons " '47
Prix Savigny, n'a pas été décerné, sera
réservé pour l'an prochain '48
Prix Desmazières, partagé entre M. Rn-
bcnliorst ( Flore européenne des Algues
d'eau douce et d'eau saumâtre ) , et
M. Hoffmann (Mémoire sur les Bacté-
ries). — Mention honorable des recher-
ches de M. A/Y»/w/-g-t7- (organes se.xuels
et fécondation dans les Fougères et
dans le Manhantia iiolymorpha) i48
- Prix Thore, décerné à M. Bonnet, pour
son ouvrage sur la truffe comestible. . . i53
PRIX PROPOSÉS.
SCIENCES MATHÉMATIQUES.
A décerner en 1810.
- Grand prix de Sciences mathématiques
(question substituée en 1867 à celle qui
était retirée du concours : modification
qu'éprouve la lumière dans son mode de
propagation et ses propriétés par suite
du mouvement de la source lumineuse
et du mouvement de l'observateur)... i56
- Prix d'Astronomie (fondation Lalande). i56
- Prix de MÉCANIQUE (fondation Mon tyon). iS;
- Prix DE Statistique (fondation Montyon). 167
- Prix fondé par M"'" la Marquise de La-
place • 5?
- Prix extraordinaire de six mille francs
POUR l'application de la vapeur a la
MARINE militaire '58
- Prix du legs Dalmont 1 58
- Prix Plumey '58
- Prix Poncelet i Sg
A décerner en 1871-
- Grand prix de Sciences matiié.m.atiques
(question substituée à celle qui avait
été proposée pour 18G7; «Etude des
équations relatives à lu détermination
)
Pages.
des modules singuliers pour lesquels la
formule de transformation dans la théo-
rie des fonctions elliptiques conduit à la
multiplication complexe » iSg
Prix FouRNEYRON (destiné à récompenser
le perfectionnement le plus important
apporté depuis 1868 à une ou plusieurs
machines hydrauliques ) 160
A décerner en 1S7Î.
• Grand prix de Sciences mathématiques
(question proposée en 1869 : « Étudier
l'élasticité descorps cristallisés au double
pointdevueexpérimentaletthéorique»). 160
- Grand prix de Sciences mathématiques
(question proposée i)0ur 18G9 et main-
tenue au concours : « Perfectionner en
quelque point essentiel la théorie du
mouvement de trois corps qui s'attirent
mutuellement selon la loi de nature »). 161
- Prix Bordin destiné à récompenser le
travail analytique ou expérimental qui
aura le plus contribué à établir la « théo-
rie des raies du specire » 161
- Prix Damoiseau (question proposée pour
1869 et maintenue au concours : a Ré-
vision de la théorie des Tables de Ju-
piter ; construction de Tables particu-
lières pour chaque satellite ») 161
- Prix Trémont '^^^
A décerner en 1873.
- Grand prix de Sciences mathématiques
(question proposée pour i8Gg et main-
tenue au concours : « Discussion des
anciennes observations d'éclipsés en vue
d'en déduire la valeur de l'accélération
du moyen mouvement de la Lune »). . . i63
sciences physiques.
A décerner en 1870.
- Grand prix des Sciences physiques
(question proposée en 1867 : «Histoire
des phénomènes génésiques qui précè-
dent le développement de l'embryon
chez les animaux dioïques dont la re-
production a lieu sans accouplement »i. 164
- Prix de Physiologie expérimentale
(fondation Montyon) 1C4
- Prix de Médecine et de Chirurgie et
Prix dit des Arts insalubres iG >
- Prix Bréant 1 (J<J
- Prix Bordin (question proposée en 18G7;
« Ânatomie comparée des Annélides »). 167
- Prix Jecker 168
- Prix Barbier 168
- Prix Godard l'iS
(976 )
Pages I
■ Prix Savig.ny [fondé par M"" Letel/ier). i68
Prix Desmazières 169
• Prix Tiiore ( Travaux relatifs à l'analo-
mie ou aux mœurs d'un Insecte) 169
yi décerner en 1871.
Grand Prix des Sciences physioies (ques-
tion proposée en 1868 :« Étude de la
fécondation dans la classe des champi-
gnons » ) 1 70
■ Prix BoRDi.N (question proposée en 1868 :
« Comparaison des productions organi-
ques de toutes les pointes australes des
trois continents de l'Afrique, de l'Amé-
rique méridionale et de l'Australie, etc. « 170
Prix Bordin (question substituée en 186G
à celle qui avait été primitivement pro-
posée : « Rôle des stomates dans les fonc-
tions des feuilles ») 172
Prix Chaussier (Travaux parus dans les
quatre années précédentes et ayant con-
tribué aux progrès de la Médecine). . . 173
Prix de la Fons-Melicocq (Travaux con-
cernant la botanique du nord de la
France ) 173
Prix Gegner destiné a permettre à un sa-
vant pauvre de poursuivre des recher-
ches reconnues estimables 174
Page».
^ d,
ecerner en
1872.
— Prix de Médecine et de Chirurgie (ques-
tion proposée pour iSCg et maintenue
au concours : « Application de l'électri-
cité à la thérapeutique ») 174
— Prix Aliiumbert (question concernant le
mode de nutrition des champignons).. 176
— Prix Serres (fondation pour un pri.v
triennal sur l'embryologie générale ap-
pliquée autant que possible à la physio-
logie et à la médecine) 176
A décerner en 1873.
— Prix Morogues, destiné à récompenser
des travaux utiles à l'agriculture 177
— Prix Ci; viER, triennal 177
— Prix L. Lacaze. — Trois prix, chacun
de loooo francs, seront décernés aux
trois ouvrages qui auront le plus con-
tribué aux progrès de la physiologie, de
la j)Jnsi(jiic et de la chimie 177
Protestation de M. le Présiilcnt de l'Aca-
démie contre l'arrestation récente de
M. Tlicriard \>ZT l'armée prussienne.. 911
— L'Académie déclare s'associer pleinement
aux paroles de M. le Président, et dé-
cide qu'elles seront insérées au Compte
rendu delà séance 911
Sociologie. — Titre d'un Mémoire lu par
M. C. Lefort dans les séances du 21 no-
vembre et du 5 décembre. . . . 708 et 799
Spectrale (Analyse). — Observation de la
lumière de la comète de Winnecke ; par
MM. PFnlfel Riiyet 49
— Étude photographique du Soleil à l'Obser-
vatoire impérial de Paris; Note de
M. Sonrel 225
— Nouvelles remarques du P. Sccchi sur les
spectres fournis par divers types d'é-
toiles 252
— Sur le spectre de l'atmosphère solaire;
Note de M. Rmct 3oi
— Surranalysespcclralequantitative; Note
de M . Jririssen G2C
— Note de M. Faye sur les observations
d'analyse spectrale qui pourront être
faites dans le cours de l'expédition de
M. Janssen, pour l'observation de l'é-
clipse solaire du 22 décembre 819
Soleil. — Note du P. Secclii accompagnant
la présentation d'un exemjilaire de l'ou-
vrage (pi'il vient de faire paraître et qui
a pour titre : « Le Soleil » 368
Sur l'éclipsé totale du 22 décembre 1870 ;
Note de M. Janssen 53 1
M. Dumas, à l'occasion du voyage de
M. Janssen, qu'il a accompagné jusqu'au
moment du départ du ballon qui l'em-
menait vers sa destination, fait une lec-
ture à l'Académie sur l'immunité qui,
chez tous les peuples civilisés, a couvert
les voyageurs remplissant, comme celui
qui va observer l'éclipsé du 22 décem-
bre, une mission purement scientifique. 783
M. /./«/((vV/c désire qu'il soit bien entendu
que le Bureau des Longitudes, qui a pris
l'initiative de l'expédition de M. Janssen,
|)artage entièrement les sentiments que
l'Académie vient de manifester à l'occa-
sion de cette lecture. — M. Delaunar
ajoute que le Bureau des Longitudes es-
père d'heureux fruilsde cette expédition. 78G
JL le Présiilcnt de la Société Philomn-
tique adresse l'adhésion de la Société
aux paroles prononcées par M. Dumas
à l'occasion de la mission de M. Janssen. 940
JL J'Aie de Beaumonl présente au nom
de l'auteur, M. Z<intedeschi, une bro-
chure italienne intitulée : « Des bour-
rasques de l'atmospliere solaire et de
leur connexion possible avec les bour-
rasques de l'asmosphère terrestre »...
— Éclipse de Soleil du 11 décembre 1870 :
mesure de la variation de la lumière. . .
— Remarques faites à cette occasion par
M. C/i. Sdinte-Cliiire Dei'illc sur un a]i-
pareil permettant de mesurer l'action de
de la lumière diffuse sur les papiers
réactifs, le sporophotomètre installé de-
puis plusieurs années à Montsouris. ..
Suif. — Sur un procédé pour la purification
du suif brut du commerce; Note de
M. Cn.uhelaz
— Remarques faites, à propos de cette Com-
munication, par M. Bussy sur le pro-
cédé depuis longtemps employé avec
( 977 )
Pages.
440
944
Pages.
8i5
816
succès par M. Evmrd et où l'on faii
également usage pour la purification du
suif de solutions alcalines faibles 8i5
— Détails donnés par M. Poycn à cette oc-
casion sur le procédé de M. Evrard. . .
— Remarques de M. Buhtrd sur les diflé-
rences qui lui paraissent exister entre
la méthode indiquée par M. Casthelaz
et le procédé employé par M. Evrard. .
Suint des laines. — L'.\cadémie, sur la de-
mande de M. Chevrcid, décide qu'un
travail sur la laine et le suint qu'il pour-
suit depuis de longues années sera dès
à présent livré à l'impression et formera
la tête d'un nouveau volume des Mé-
moires 434 et
Sulfures. — Recherches thermo-chimiques
sur les sulfures; Note de M. Berihelnt .
440
3o3
TÉLÉGRAPHIE. — M. GuYot proposc Un nou-
veau système télégraphique applicable.
aux places assiégées 816
— Sur un projet de communication entre
Paris investi et la province; Note de
M. G. Lambert 845
— A'o/raussi au nom de M. /. Giiérin,}[>. 578.
Températures terrestres. — Observations
de température faites sous le sol au
Jardin des Plantes ; par MM. Becquerel
père et fils 199
Thérapeutique. — Note de M. Rézanl de
IFom-es à l'appui d'une Communication |
sur l'action de l'émétiquedans la variole. 216
— De l'action des alcalins sur l'organisme;
Note de MM. Rabutcau et Constant. . . aSi
— Système de pansement des plaies au
moyen du plomb en lames très-minces;
Note de M. Burggraeve 289
— MM. Pichot et Malapert adressent un
spécimen de leurs « Sachets de charpie
carbonifères » 384
— Pansement des plaies par une solulion
d'acide carbonique; Note de M. Ozii-
riam 4o3
— M. Pa<;iMri appelle l'attention de l'Aca-
démie sur l'efficacité de son « Eau hé-
mostatique » SaS
— Sur un moyen facile d'an êler la diarrhée
et la dyssenterie S[)éciales aux soldats
qui sont saisis par l'humidité et par le
froid ; Note de M. Déclat Cga
— Effets de diverses préparations phéniques
C. R. 1870, ■J™'^ Hrmcslte. (!'. LXl.)
dans le traitement de la variole; Note
de M. Bnbœuf. 74^
— Sur la préparation de toiles et de papiers
au tannin et à l'acide benzoïque pour
les pansements rapides sans linge; Note
de M. Bostaing 80G
Tuermochimie. — Recherches thermo-chi-
miques sur les sulfures; par M. Be?-
thelot 3o3
— Note sur la chaleur de formation des com-
posés azotiques; par le même 677
THERMO-DVNAJiiguE. — Sur l'équivalent mé-
canique de la chaleur et sur les pro-
priétés électro -thermiques de l'alumi-
nium ; Note de M. f'iolle 270
— Note de M. P. Coste concernant l'équiva-
lent mécanique de la chaleur 376
Thersio.mètres. — Noie de M. Legrand sur
la gradation des thermomètres de Deluc,
instruments pour lesquels le point d'é-
buUition do l'eau est pris à la pression
de 27 pouces de mercure, pression que
l'on a souvent à Genève 66
Toxicologie. — Note de M. R'éuteau et
Perre sur le m'hoiindoii ou icajn, poison
d'épreuve usité au Gabon 3')3
— Essai sur le venin du scorpion ; Note de
JI. Joii.\:tel 407
Tre.wblementsdeterre.— LettredeM. r//«\-
si/i sur un tiembloment de terre qui
s'est fait sentir au Mexique le 11 mai
1 870 3/9
.3i
978 )
Pages.
VACcrv. — Sur la vitalité du virus-varcin;
Note de M. Mehcns 73
Vers a soie. — Sur les résultats des éduca-
tions pratiques de ver à soie effectuées
au moyen de graines préparées par les
procédés de sélection ; Rapport adressé
à l'Académie par M. Pasteur 182
— Sur les résultats obtenus dans les ma-
gnaneries du département des Basses-
Alpes ; Note de M. T'atlier 289
— Sur la maladie corpusculeuse des vers à
suie ; Note de M. Mares 293
— M. le Maréchal Vaillant communique di-
vers documents relatifs aux procédés de
sériciculture de M. Pasteur 296
Vol des Oiseaux. — Des mouvements que
le corps de l'oiseau exécute durant le
vol ; Note de M. Marey 660
Page».
— A l'occasion de la présentation d'un opus-
cule imprimé, où il était question seule-
ment d'aéronautique, et de quelques mots
dits à ce propos par M. le Secrétaire per-
pétuel, sur l'usage que l'homme pour-
rail faire d'appareils analogues aux ailes
des oiseaux si le poids de son corps était
presque annulé par un ballon, M. Gi-
raud-Tculon croit devoir rappeler un
passage de son « Traité de Mécanique
animale » où il a abordé en passant la
question du mouvement de l'homme
dans l'air 781
Volcans. — Étude des gaz volcaniques de
Santorin ; Note de M. Fnuqué 902
— Observations relatives à cette Note; par
M. Cil. Sainte-Claire Deville 90G
z
Zoologie. — M. P. Gerçais fait hommage à
l'Académie dedeux Mémoires extraits des
«Nouvelles Archives du Muséum », l'un
sur les formes cérébrales propres aux
Marsupiaux, l'autre sur les formes céré-
brales propres aux carnivores vivants et
fossiles; puis deux livraisons nouvelles
de r « Ostéographie des Cétacés vivants
et fossiles », qu'il publie avec la colla-
boration de M. Van Beneden 443
— Note de M. Noiilec ayant pour litre : « Nos
hirondelles et leurs nids » 78
— Observations sur l'histoire naturelle des
Écrevisses ; par M. Chantran 43
Identité spécifique du Pliylloxera des
feuiles et du Pliilloxcra des racines de
la vigne; Note de MM. Planchon et
Lichtcnstein 298
Remarques de M. Milne Edtvards rela-
tives à la Note précédente 3oo
Recherches sur la génération des Gasté-
ropodes ; par ,M. Ferez 280
Sur les Entozoaires des Dauphins; Note
de M. H. Gerçais 779
Voir aussi l'article Aninxaix des an-
ciens E^'ptiens.
( 979 )
TABLE DES AUTEURS.
MM. Pages.
ABBADIE (d'). — Sur la division décimale
du cadran 335
ALVAREZ, — Note relative à l'aéroslation. ySa
AMAGAT. — Sur la corapressibilité et la di-
latation des gaz 67
ANDRAL est nommé Membre de la Commis-
sion des prix de Médecine et de Chi-
rurgie 2 1 5
ANDRÉ (Jean) prie l'Académie de vouloir
bien lui désigner une Commission à la-
quelle il soumettra un plan qu'il croit
propre à contribuer puissamment à la
défense nationale. L'Académie ne peut,
sans s'écarter d'une règle qu'elle a
constamment suivie, accéder à cette
demande 6g4
ARLOING et L. TniPiEu. — Une mention ho-
norable leur est accordée par la Com-
mission du prix de Physiologie expéri-
mentale pour avoir démontré les pre-
miers, dans les nerfs sensitifs cutanés,
l'existence d'une sensibilité récurrente
jusqu'ici reconnue seulement dans les
nerfs moteurs, etc 1 la
MM.
ARNOUX.— Lettre adressée de Mées (Basses-
Alpes), sur les excellents résultats ob-
tenus de la méthode de M. Pasteur pour
le grainage des vers à soie (reproduite
dans une Communication de M. le Ma-
réchal Vaillant) 297
ARSON. — Le prix de Mécanique (fondation
Montyon) est décerné à M. Jrson, pour
ses recherches expérimentales sur l'é-
coulement des gaz dans de longues con-
duites 93
— M. Arsoii adresse ses remercîments à
r.\cadémie 217
AUBERT. — Mémoire sur les solides soumis
à la flexion 35o
AUBERT (L.). — Sur les moyens de faire
entrer la farine de blé dans la confection
d'aliments doués de propriétés nutri-
tives suffisantes 475 et 479
AVEZAC (d') présente à l'Académie, de la part
de M. S. Glai'ijo, un volume imprimé
en espagnol et intitulé : « Réllexions sur
le système planétaire » 887
B
BAILLON (H.). — Sur le développement des
feuilles de Sarmccnin 63o
BALARD. — Remarques relatives aux diffé-
rences qui lui paraissent exister entre
les méthodes employées par MM. Cas-
thelaz et Evrard pour la purification des
suifs bruts 816
BALESTRA. — Recherches et expériences
sur la nature et l'origine des miasmes
paludéens 235
BARBOU (Ed.). — Projet de navigation aé-
rienne, accompagné de croquis indi-
quant deux dispositifs dilîérents. pro-
posés par l'auteur 578 et 732
BAZIN. — Communication relative à l'aéros-
tation 845
BÉCHAMP. — Sur la fermentation carbo-
nique et alcoolique de l'acétate de soude
et de l'oxalate d'ammoniaque 69
BECQUEREL. —Nouvelles recherches sur les
actions électro-capillaires. Formation de
l'Gxychlorure de cuivre cristallisé et
d'autres composés analogues 197
— Observations de températures faites sous
le sol au Jardin des Plantes, de 1864
à 1870. (En commun avec M. Edni.
Becquerel . ) 1 9g
BECQUEREL (Ed.m.). — Observations de tem-
i3i..
MM. Pages,
pératures faites sons le sol au Jardin des
Plantes, de 1864 à 1870. (En commun
avec M. Becquerel.) 199
— Lettre à M. Dumas exfirimanl le vif re-
gret qu'il éprouve d'èlre en ce moment
loin de Paris, retenu près de son père
malade 439
— M. Edm. Becquerel est nommé Membre
de la Commission du grand prix de
Sciences mathématiques à décerner en
1 870 ( Rechercher les modifications qu'é-
prouve la lumière dans son mode de
propagation et ses propriétés par suite
du mouvement de la source lumineuse
et du mouvement de l'observateur). . . 707
BELGR.4ND. — Travail ayant pour titre :
« La Seine : Études sur le régime de la
pluie, des sources, des eaux courantes;
applications diverses à l'art de l'ingé-
nieur et de l'agriculture » 88G
BERGEU appelle l'attention de l'Académie
sur une circulaire tendant à la fondation
d'un prix pour l'inventeur d'un système
d'abri mobile pour l'armée 885
BERNARD (Claude) est nommé Membre de
la Commission des prix de Médecine et
de Chirurgie aiS
— Et de la Commission du prix de Physio-
logie expérimentale . aâG
BERNIS. — Communication relative à l'aé-
rostation 807 et 845
BERTHELOT. — Recherches thermo-chimi-
ques sur les sulfures -Jo3
— Sur la force de la poudre et des matières
explosives 619, 6G7 et 709
— Sur la chaleur de formation des composés
azotiques 677
— Sur la force des matières explosives; ré-
ponse à M. Ccizin 940
BERTRAND. — Rapport sur un Mémoire
de M. Massieu intitulé : « Mémoires sur
les fonctions des divers fluides et sur la
théorie des vapeurs » ^57
— M. Bertrand est nommé Membre de la
Commission du grand prix de Sciences
mathématiques à décerner en 1870 (Re-
chercher les modifications qu'éprouve la
lumière dans son mode de propagation et
ses propriétés par suite du mouvement
de la source lumineuse et du mouve-
ment de l'obsorvatsur) 707
BÉZARI) DE WOLUES. — De la périodicité
du temps, réglée d'après les indications
fournies par les phases de la Lune qui
suit colle de l'équinoxe 885
BIENAYMÉ. —Traduction de deux passages
de Stobée inexpliqués jusqu'ici 460
— M. Bictuiymé est nommé Membre de la
( 9«o )
MM.
Page».
Commission du prix de Statistique ai 5
BLACHE (R.). —Une citation honorable lui
est accordée pour son essai sur les ma-
ladies du cœur chez les enfants. (Con-
cours pour les prix de Médecine et de
Chirurgie.) 127
BLANCHARD est nommé Membre de la Com-
mission chargée de juger le concours
pour le grand prix des Sciences phy-
siques (question des phénomènes qui
précèdent le développement de l'em-
bryon chez les animaux dits parthéno-
génésiques ) , et le concours pour le
prix Bordin (question relative à l'ana-
tomie comparée des Annélides) 881
BOBQEUF (P.-A.-F.). — Sur l'importance
actuelle des questions se rattachant à
l'hygiène publique et privée, notam-
ment la question des hémostatiques et
des désinfectants, et sur le phénol so-
dique 617
— Effets des diverses préparations phéni-
ques dans le traitement de la variole. .
BONNAFONT. — Sur la propriété dont joui-
raient les troncs artériels de résister
mieux que les cordons nerveux à l'ac-
tion directe des projectiles sphériques.
BONTEMPS. — Une mention honorable lui
est accordée parla Commission du prix
de Statistique pour les renseignements
statistiques de son ouvrage intitulé :
« Le Guide du Verrier, etc. »
— M. Bontcinps adresse ses remerciments
à l'Académie a6i
BONNET. — Le prix Thore lui est décerné
pour son ouvrage intitulé : « La truffe
comestible » i53
— M. Bonnet adresse ses reraercîments à
l'Académie 217
BOUDANOVSKV. — Une citation honorable
lui est accordée par la Commission des
prix de Médecine et de Chirurgie pour
ses études photographiques sur le sys-
tème nerveux de l'homme et de quel-
ques animaux supérieurs 127
BOUILLAUD est nommé Membre do la Com-
mission des prix de Médecine et de Chi-
rurgie 21 5
BOUQUET. — Mémoire relatif à la théorie
des intégrales ultra-elliptiques. Rapport
sur ce Mémoire; Rapporteur M. .S'fv/rr. 4»
BOUSSINESQ prie l'Académie de ^ouloir
bien le comi)rendre parmi les candidats
à la place laissée vacante, dans la Sec-
tion de Géométrie, par le décès de
M. Lamé 384
— Essai théoriiiue sur les lois trouvées ex-
périmentalement par M. Bazin pour l'é-
746
707
99
(98
MM. Pages.
coulement uniforme de l'eau dans les ca-
naux découverts 38ç) et 4°o
BOUSSINGAULT est, nommée Membre de la
Commission du prix de Statistique. ... 2i5
— Et de la Commission pour le prix dit des
Arts insalubres aSC
BOUVET. — Sur une force motrice appli-
cable à la navigation aérienne
539, 578 et 73i
— Sur un procédé de réchauffement métho-
dique du gaz d'un aérostat, par la com-
bustion d'une partie de ce gaz lui-même,
pour compenser les pertes de force as-
censionnelle 84 1
— Du moyen de produire à volonté à bord
des aérostats un excédant de force as-
censionnelle pour opérer dos montées
et des descentes partielles 881
BRACHET (A.). — Sur un a Régulateur au-
tomoteur électrique ». — Description
d'une lampe électrique applicable à l'é-
clairage des larges voies. (En commun
avec M. ff ailée.) 33 1 et 769
— Avantages que présente l'emploi, pour les
besoins de la guerre, de l'aérostat Meus-
nier, et supériorité qu'a ce système sur
tous ceux dont on pourrait songer à
faire l'application pour la défense na-
tionale 440
— Notes relatives à divers projets d'appa-
reils aérostatiques
522, 540, 578, 619, 681, 732 807 et 845
— Projet de canon porté sur un chariot
blindé 886
— Note relative au moyen proposé pour
substituer les lunettes aux alidades à
' )
MM. Pages,
pinnules pour le pointage des canons. . gSS
BRANDT est nommé Correspondant de l'A-
cadémie, Section d'Anatomie et de Zoo-
logie, en remplacement de feu M. Carus. 4i
BRISAC. — Sur l'emploi des légumes secs
et du blé vert en Alsace et en Lor-
raine 478
BRONGNIART est nommé Membre de la
Commission pour la vérification des
comptes de l'année 1870 4'
BROUN. — Observations magnétiques faites
à Makerstown (Ecosse) et à Trevan-
drum, près du cap Comorin... 56 et 265
BUISSON annonce qu'on pourra voir chez
lui fonctionner un petit modèle démon-
trant la possibilité de faire mouvoir dans
une direction donnée un ballon par un
moyen complètement différent de ceux
qu'on a jusqu'ici imaginés 694
BUKATY. — Note concernant un nouveau
sytème d'aérostat Saa
BURGGRAEVE. ^ Système de pansement
des plaies au moyen du plomb en lames
très-minces 289
BUSSY.— Remarques à l'occasion d'une Com-
munication de M. Casthelaz, sur un pro-
cédé de purification des suifs bruts,
procédé indiqué depuis longtemps par
M. Evrard 8i5
— M. Bussy présente, au nom de M. Sou-
beyran, une carte géographique sur la-
quelle sont inscrites, au lieu de leur
production, toutes les principales sub-
stances qui trouvent leur emploi dans
la matière médicale 770
CAHOURS (AuG.) et Gal. — Recherches re-
latives à l'action des chlorures de pla-
tine, de palladium et d'or sur les phos-
phines et les arsines 208
— Sur de nouveaux composés résultant de
l'union de l'acide cyanique et des diffé-
rents éthers cyaniques avec les éthers
des acides amidés de la série aromatique. 4(^2
CAL'VERT. — Sur l'emploi de l'acide phé-
ni(|uo 321
— Sur le dégagement d'azote pur, des ma-
tières organiques azotées 322
CARLES. — Sur la décomposition de l'acide
oxalique 226
CASSAIGNES, — Sur la filtration naturelle
des eaux de rivières et sur l'application
qu'on en peut faire aux eaux de la Du-
rance 216
CASTHELAZ. — Procédé de purification des
suifs bruts du commerce 812
CATALAN. — Remarques sur une Note de
M. Darboux relative à la surface des
centres de courbure d'une surface algé-
brique 5o
CAUVET. — Mémoire concernant la struc-
ture du Cytinet, l'action qu'il exerce sur
la racine des Cistes, et la structure de
la racine du Cistus Moiupelicnxi.s. . . .
216 et 369
CAVE. — Sur la zone génératrice des ap-
pendices végétaux 83
— Sur la zone génératrice des appendices
chez les végétaux monocotylédons....
374 et 397
MM.
CAVE THOMAS adresse une (épreuve impri-
mée en an.ïiais d'un travail destiné à
èlre substitué à son Mémoire manuscrit.
sur la « Théorie esthétique de la hi-
miére »
CAZIX (A.). — Note ayant pour titre : « La
lunette de rempart »
— Sur la force des matières explosives. . .
CHAMPION. — De la dynamite et de ses ap-
plications au point de vue de la guerre.
CHANTRAN. — Observations sur l'histoire
naturelle des érrevisses
CHAPELAS. — Sur le printemps de 1870. .
— Étoiles filantes du mois d'août
— Aurore boréale du 24 septembre 1870. .
— Aurores boréales des 24 et 23 octobre. .
CH.\RMOLUE (L.). —Note relative à l'em-
ploi du bois pour la préparation d'un
caz d'éclairage
CHAilRlÈUE. — Le prix dit des Arts insa-
lubres 11'! est décerné pour ses appa-
reils de sauvetage. (Concours de 1869.).
CH.\SLES présente, de la part de M. Boncom-
piigiii , divers numéros du « Bulleltino
di Bibliografia e di Storia délie Scicnze
matenialiche e fisiche », et, au nom de
la Section Mathématique des hautes
études, plusieurs numéros du « Bulletin
des Sciences mathématiques et astrono-
miques » 240 et
— M. Chastes fait hommage à l'Académie
d'un ouvrage de M. C/vniona: 0 Sur les
intégrales à différentielles algébriques ».
— M. Clinslcs est nommé Membre de la
Commission du prix Poncelet
CHASSIN. — Sur un tremblement de terre
survenu au Mexique le 11 mai 1870...
CHASTEIGNIER. — Contemporanéité de
l'homme avec le grand ours des ca-
vernes et le renne dans la caverne de
Gargas (Hautes-Pyrénées |. (En com-
mun avec ^L Garrigoii.)
CHENU. — Le prix de Statistique lui est dé-
cerné i)Our sa u Statistique médico-chi-
rurgicale de la campagne d'Italie en iSSg-
1 8O0 «
CHEVREUL. — Observations relatives à une
Note de M. Fnye intitulée : « Quels
sont les vrais agents chimiques qu'il faut
opposer à l'infection miasmatique?»..
4'7, 420 et
— M. Chevrctd annonce comme presque
complètement terminé un travail depuis
longtemps poursuivi, et demande à l'A-
cadémie l'autorisation d'en commencer
dès à [irésent l'impression dans les « Mé-
moires de l'Académie », où il formerait
la lèlc d'un nouveau volume
629
897
728
43
45
386
45i
584
816
128
( 9«2 )
Pages. MM. Pajes.
— De la différence et de l'analogie de la
méthode «/m.ç^eWrjW expérimentale dans
ses aiiplicationsaux sciences du concret
et aux sciences morales et politiques. 493
— M. C/icc/-(>«/ exprime le désir d'obtenir
quelques renseignements authentiques
concernant les expériences aérostatiques
des frères Montgolfier 609 et Cio
— Remarques à propos d'une Communica-
tion de M. Griinaud, de Caux, sur l'his-
toire de la panification et des connais-
sances chimiques qui s'y rattachent...
447. 45o et 45i
— Observations relatives aux propriétés nu-
tritives de quelques-unes des plantes ci-
tées [lar M. Decuisite comme pouvant
être cultivées pendant le siège 48g
— Observations relatives à une Communi-
cation de M. Frciiiy^ sur l'emploi de
l'osséine dans l'alimentation 5l3i
— M. Clirvreul donne lecture d'une Note
sur les subsistances et l'alimentation. Ooi
— Exposé des raisons pour lesquelles l'ali-
ment de l'homme et des animaux supé-
rieurs doit être d'une nature chimique
complexe. (Nouvelle rédaction de la Note
lue à la précédente séance.) 635
— Observations à propos d'une Note de
M. RahuteaK, sur l'estimation de la qua-
lité alimentaire d'après la proportion
d'azote 786
• Note sur un acide odorant produit dans
la fermentation putride de plusieurs
matières azotées, et particulièrement des
tendons 760
- Après la lecture de celte Note, M. Clic-
(7'e«/ mentionne une Communication ré-
cente faite à la Société centrale d'Agri-
culture par M. Pau-n, sur les os du
cheval et l'Iuiile qu'on en retire 761
— Observations relatives à un passage d'une
Communication deM. Fi-cnir, surl'aEm-
ploi de l'osséine dans l'alimentation ».. 796
— Résumé historique des travaux dont la
gélatine a été l'objet. .. . 819, 855 et 912
— M. Chcvrrid est nommé Membre de la
Commission du prix dit des Arts insalu-
bres. (Concours de 1870,) 256
CLOQUET (Jules) est nommé Membre de la
Commission des prix de Médecine et de
Chirurgie 2i5
CLO TE T. — Description d'une nouvelle bombe
cylindro-conique à percussion. 522 et 7(59
(TOMBES est nommé Membre de la Commis-
sion du prix dit des Arts insalubres... 256
— Membre de la Commission du prix de
Mécaniipie 84 1
434 i — Et de la Commission du prix Poncelet. . 881
597
596
881
329
98
43i
l 9
MM. Pages.
CONSTANT. — De l'arlion des alcalins sur
l'organisme. (En comnuin avec M. Hn-
buteaii. ] 23 1
CONTEJEAN. —Maximum de température à
Poitiers le 24 juillet 1870 325
COSSA. — Lettre à M. H. Snintc-Clairc De-
ville, sur les propriétés chimiques de
l'aluminium 290
COSTE est nommé Membre de la Commission
du prix de Physiologie expérimentale. . 256
— Membre de la Commission chargée de
juger le concours pour le grand prix
des Sciences physiques. (Question des
83 )
MM, Pages,
phénomènes qui précédent le développe-
ment de l'embryon chez les animaux dits
parthénogénésiques), et de la Commis-
sion du prixBordin. (Question relative à
l'anatomie comparée des Annélides. î . . . 881
COSTE (P.). — Note relative à l'équivalent
mécanique de la chaleur 376
CYON. — Une médaille lui est accordée pour
Tensemble de ses travaux en vue des
applications de l'électricité à la physio-
logie et à la thérapeutique. (Concours
pour le prix de Médecine et de Chirur-
gie : question proposée pour 1869.). . . . 107
D
D'ABBADIE. — Voir à Abbadie (d' ).
D'ALMEIDA (J.-C). — Disposition nouvelle
des piles voltaïques, application à la
pile de Bunsen 774
DARBOUX. — Réponse aux remarques de
M. Cutalamwv deux points de sa u Note
relative au lieu des centres de courbure
d'une surface algébrique » 267
DAUDIN. — Mémoire relatif à diverses ques-
tions de météorologie, et particulière-
ment à la sécheresse actuelle 47
D'.WEZAC, — Voir à An'zac (d').
DEBRUGE. — Note relative à un ballon di-
rigeable 619
DECAISNE. — Sur la culture de quelques
plantes culinaires pour la durée du siège. 487
DECAISNE (E.). — Note concernant « L'ali-
mentation des petits enfants, et le lait
pendant le siège >' 527
DÉCLAT. — Moyen d'arrêter la diarrhée et
la dyssenterie spéciales aux soldats qui
sont saisis par l'humidité et par le froid. 692
DELACROIX. — Notes relatives à un système
d'aérostat manœuvrant avec des voiles,
des ailes mobiles et deux gouvernails. .
578 et 681
DELAUNAY. — Note sur les pyramides de
Villejuif et de .luvisy 5
— M. Di'Umiiiiy, en qualité de Président,
informe l'Académie que sa prochaine
séance aura lieu le mardi 16 août, au
lieu du lundi 1 5 333
— Découverte d'une comète par M. Coggi/i. 4o5
— M. Dcliiuiiay est nommé Membre de la
Commission du prix d'Astronomie. .. . 7G7
— Membre de la Commission du prix de Mé-
canique 841
— Et de la Commission du prix Poncelet. . 881
DEL.\UUIER. — Remarques relatives à une
Note de M. Lucas, sur les signaux de
feu d'une grande portée 33i
— Note relative à un procédé particulier
pour lancer les projectiles de guerre. . 383
DELCOURT. — Communications relatives à
l'aérostation 807 et 845
DELESSE. — Note sur une carte litholo-
gique de l'embouchure de la Seine. . . . 349
DEROIDE. — Sur un nouveau système d'aé-
rostation exigeant l'emploi de deux gaz
différents, et marchant au moyen d'une
succession d'ascensions directes et de
descentes obliques 768
DE SÉRÉ. — Note sur le couteau électrique et
ses applications à la chirurgie militaire. 3oi
DIEULAFAIT. — Note sur les calcaires à
Tercbnitidii diphya dans les Alpes fran-
çaises, de Grenoble à la Méditerranée 282
DOBROSLAVINE. — Surlesgraissesdu chyle. 278
DUBRUNFAUT. — Sur un procédé de pani-
fication dans lequel on ferait intervenir
■ le froment en grains concurremment
avec la farine 907
DUHAMEL fait hommage à l'Académie du
volume qui forme la quatrième Partie
de son ouvrage : « Des Méthodes dans
les Sciences de Raisonnement » 181
DUKERLEY. — Une mention honorable lui
est accordée au concours du legs Bréant
pour sa « Notice sur les mesures de pré-
servation prises à Batna (Algérie) pen-
dant le choléra de 1 867 1 38
DUMAS prononce, dans la séance publique
pour l'année 186g, l'Éloge historique de
Pelouze 178
— M. Dumas donne lecture d'une Lettre de
M. Edm. Becquerel qui, retenu près de
son père malade, exprime le vif regret
qu'il éprouve d'être en ce moment loin
de Paris 439
— M. Dumas fait remarquer que l'absence
( 98
MM. Pages,
prolongée du Vice-Président, M. Costc,
s'explique par une maladie dont la gué-
rison se fait longtemps attendre 439
— Observations sur une Note de M. Fayc
intitulée : « Quels sont les vrais agents
chimiques qu'il faut opposer à l'infection
miasmatique »'.' 4 ' 7 et 4 ' 9
— Observations à i)ropos d'une Communica-
tion de M. Cninaud, de Caux, u Sur la
consommation du blé, soitennature, soit
après la mouture, sous forme de pain». 445
— Note à propos do diverses Communica-
tions sur l'approvisionnement en viande
de la ville de Paris pour le temps du
siège 4/9 et 235
— Observations relatives aux Communica-
tionsde M. Fremr, « Sur l'emploi de l'os-
séine dans l'alimentation ». 565, 755 et jSS
— M. Dunuis communique une Lettre de
jjmc jy j,(.gi Lfcointre, qui l'a chargé
d'offrir à l'Académie, au nom de sa mère
M°" V' UArcct et au sien, des Noies
et Mémoires en partie inédits et se rap-
portant principalement aux recherches
du savant académicien, Joseph D\4rcet,
sur la gélatine des os et son emploi ali-
mentaire G82
— M. Dumas présente, au nom de M. Eiig.
Pclouzr, un Mémoire et des échantillons
relatifs à un procédé nouveau de conser-
vation des viandes 73 1
— Obser\ationsà propos d'uneNotodeM. Ra-
biiicnii, sur les propriétt^s nutritives du
café et du cacao 735
— Observations sur une Communication de
M. /. Gucrin, concernant un moyen de
mettre en communication télégraphique
Paris et le reste de la France 579
— A l'occasion d'une Communication de
M. Hiircau de l'illcneuve, sur un gaz
pour gontler les ballons autre que celui
qui est ordinairement en usage, M. Du-
mas fait remarquer que le gaz proposé,
bien connu de toutes les personnes ayant
eu à s'occuper de la question de l'éclai-
rage, exigerait pour sa fabrication un
outillage particulier, et (pie si l'outillage
dont dispose aujourd'hui la ville do Paris
recevait une semblable application,
mémo temporaire, ce ne serait pas sans
être gravement compromis 76S
— Conmiunication faite à l'Académie à propos
du récent départ de M. Jansscn par l'aé-
rostat /(• Folta 783
— M. Dumas, en sa qualité de Secrc-
ttiire perpétuel, donne lecture d'une dé-
pêche de M. le directeur des lignes
télégraphiques, annonçant l'heureuse ar-
4 )
MM. Paget-
rivée, près de Saint-Nazaire, du ballon
le Voila monté par M. Janssen 886
— M. le Secrétaire perpétuel doxma lecture
d'un passage des OEuvrcs de Lnvnisier
relatif aux tra\aux aéroslatiques de
Meus/lier 608
— En réponse à une question posée à cette
occasion par M. Chevreul, et relative à
l'invention des frères Montgolûer, M. Du-
mas fournil, d'après le même volume
des (I Œuvres de Lavoisier », le rensei-
gnement désiré 610
— M. le Secrétaire perpétuel présente au
nom des auteurs, MM. Champion et
H. Pellet, une Note « Sur quelques
propriétés de la dynamite, et sur un
nouveau procédé pour la fabrication de
la nitroglycérine » 770
— Et au nom de l'auteur, M. Riche, un
exemplaire de la conférence faite, le
1 1 novembre, sur la « Manière de se nour-
rir dans les circonstances présentes ». 770
— M. le Secrétaire perpétuel i\g\\a\e, parmi
les pièces imprimées de la Correspon-
dance, les ouvrages suivants :
— Une brochure de M. Figuier 3oi
— Un Mémoire de M. Dalvi, imprimé en
anglais, portant pour titre : « Exa-
men de la règle de Newton pour trou-
ver le nombre des racines imaginaires
d'une équation ». — Et un travail de
M. A. Colin intitulé : « Des conditions
sanitaires de l'armée de Paris » 478
— M. Dumas est nommé Membre de la
Commission chargée de juger le con-
cours des Arts insalubres pour 1870... 256
— Membre des Commissions chargées de
juger le concours pour le grand prix des
Sciences physiques (question des phé-
nomènes qui ijrécèdent le développe-
ment de l'embryon chez les animaux
dits parthénogénésiques), elle concours
pour le prix Bordin (question relative
à l'analomie conqiaréc des Annélides). . 881
DUMÉIUL. — Sa mort, arrivée le 12 no-
vembre 1870, est aimoncée à l'Aca-
démie dans la séance du 14 635
DUMÉHY. — Note sur de nouveaux campe-
ments militaires 938
DUPIN (Cn. ) est nommé Membre de la Com-
mission du prix de Statistique 2i5
DUPUIS. — Projet d'un système de naviga-
tion aérienne 681
DUPUY DE LO.ME présente la iircmière par-
tie d'une Note sur un projet d'aérostat
dirigé 477
— Projet d'aérostat dirigé muni d'un propul-
seur 479, 5o2, 5*9, 545 et 549
(9«5)
MM. Pages.
— M. DiipKY de Lomé esl nommé Membre
de la Commission du prix de Mécanique. 84 1
MM. Pages.
1)UR.4ND soumet à l'appréciation de l'Aca-
démie une tasse-ûUre dont il est l'in-
veuleur 240
E
EDW.4RDS (Milne). —Remarques relatives
à une Communication de MM. Pliinchon
et Lichtensteiii, sur l'identité spécifique
du Phyllnxern des feuilles et du Phyl-
lo.rcra des racines de la vigne 3oo
— Remarques à propos d'une Communica-
tion de M. Grimaud, deCaux, sur l'im-
portance des condiments et des sub-
stances sapides pour le travail de la di-
gestion 45 1
— Observations, à propos d'une Note de
M. Dumas, sur un procédé de salaison
de la viande et sur les propriétés nutri-
tives de la gélatine des os 48C
— M. Milne Edivards rappelle que dans le
cours des longues recherches auxquelles
s'est livrée la Commission chargée d'exa-
miner les effets de la gélatine au point
de vue de l'alimentation, elle avait eu à
combattre des exagérations de la part
des adversaires comme de celle des par-
tisans de cette application 761
— Note sur les propriétés nutritives des
substances organiques tirées des os, et
la composition des rations alimentaires
susceptibles d'entretenir le corps hu-
main dans son état normal 786
— M. Md/ie Edivards est nommé Membre
de la Commission du Pris de Physiologie
expérimentale ....'. 256
— Membre de la Commission du grand prix
des Sciences physiques ( (Question concer-
nant les phénomènes qui précèdent le
développement de l'embryon chez les
animaux dits pnrt/iénogé/tésnjues), et
Membre de la Commission du prix Bor-
din (Question concernant l'anatomie
comparée des Annélides) 881
EGGER. — Note sur un papyrus qui con-
tient des fragments d'un Traité d'op-
tique, et, à cette occasion, sur l'optique
inédite de Ptolémée -. 465
— Note sur quelques documents relatifs à
l'économie domestique et aux denrées
alimentaires en Egypte sous les Ptolé-
mées 611
EURENBEllG. — Le prix Cuvier lui est dé-
cerné pour l'ensemble de ses travaux.
(Concours de 1869.) i38
C. K., 1870, 2""= Semestre. (T. LXXl.)
EHRLICH. — Note relative au choléra 216
ÉLIE DE BEAUMONT. — Note sur les ro-
ches qu'on a rencontrées dans le creu-
sement du tunnel des Alpes occidentales
entre Modane et Bardonèche 8
— M. Él/'e de Bemanimt présente, de la part
de M. Delessc, une carte lithologique de
l'embouchure de la Seine 349
— M. Élie de Bemimont, en sa qualité de
Secrétaire perpétuel, annonce à l'Aca-
démie la perte qu'elle vient de faire
dans la personne de M. Aug. Duméril,
décédé le 12 novembre 635
— M. le Serrétaii-e perpétuel Aè^OiO sur le
bureau un exemplaire du discours pro-
noncé, le i5 novembre 1870, aux obsè-
ques de M. Aug. DumérU par M. Hii).
Larrey 747
— M. le Secrétaire perpétuel fait hommage
à l'Académie au nom de l'auteur, M. Zan-
tedeschi, de deux opuscules écrits en
italien et ayant pour titre, l'un : « De
l'électro- chimie appliquée à l'industrie
et aux beaux-arts » ; l'autre : « Des bour-
rasques de l'atmosphère solaire et de
leur connexion possible avec les bour-
rasques de l'atmosphère terrestre >' . - . 44o
— Et, au nom de M. Chancourtois, d'une bro-
chure sur « L'interprétation des imagi-
naires en physique mathématique n... 476
— M-. le Secrétaire perpétuel, en présentant
la traduction faite par M. Roger des « Re-
cherches générales sur les surfaces cour-
bes do M. Gauss », lit à ce sujet quel-
ques passages de la Lettre d'envoi 35 1
— De même, à l'occasion de la deuxième
édition d'un ouvrage de M. /. Girard,
sur la chambre noire et le microscope,
M. le Secrétaire perpétuel donne, d'après
la Lettre de l'auteur, quelques rensei-
gnements sur celle nouvelle publication. 4o4
— M. le Secrétaire perpétuel signale, parmi
les pièces imprimées de la Correspon-
dance de diverses séances, les ouvrages
suivants :
— Une brochure de M. Husson intitulée :
« Histoire du sol de Toul; 17° Nute sur
l'origine de l'espèce humaine dans les
environs de cette ville » 49
l32
MM. Pages.
— Deux Mémoires de géologie et de paléonto-
logie de M. Baynn, et la dernière partie
de l'ouvrage deM. F. Plée a Sur les types
des familles des plantes de la France » . . 261
— Une brochure de M. Dataine « Sur la
genèse et la propagation du charbon »,
et un ouvrage du P. Sunna Solaro « Sur
les causes et les lois des mouvements
de l'atmosphère » 35o
( 986 )
MM.
Et enfin un ouvrage qui offre, indépen-
damment de la valeur qu'il a par lui-
même, un intérêt d'actualité, et qui a
pour titre : « Premiers secours à donner
aux blessés sur le champ de bataille et
dans les ambulances " : l'ouvrage est du
D'' H. Bernard, et précédé d'une Intro-
duction, par M. /.-iV. Deinarquay . . . .
Pages.
68a
FAMITZIN. — Le prix de Physiologie expé-
rimentale lui est décerné pour ses re-
cherches concernant l'influence de la lu-
mière sur la nutrition des plantes 1 12
FAUVEL. — Une récompense lui est accordée
par la Commission du prix Bréant pour
ses travaux concernant l'étiologie et la
prophylaxie du choléra i37
FAVRE. — Recherches thermiques sur le ca-
ractère métallique de l'hydrogène asso-
cié au palladium ; sur un couple vol-
taïque dans lequel l'hydrogène est le
métal actif 214
FAYE. — Remarques sur quelques particu-
larités du sol des Landes de Gascogne. 245
— Sur une brochure nouvelle de M. Him. . 256
— Sur la manière d'observer le prochain
passage de Vénus 4 ' 3
— Note intitulée : « Quels sont les vrais
agents chimiques qu'il faut opposer à
l'infection miasmatique »? 4 '5
— Sur l'affût de l'amiral Labrousse 455
— Sur la déviation des projectiles à ailettes. 601
— Sur l'art de pointer et ses conditions
physiologiques 872
— Sur l'expédition de M. Janssen 819
— M. Fayc est nommé Membre de la Com-
mission du prix d'Astronomie 7C7
FIZEAU est nommé Membre de la Commis-
sion du grand prix des Sciences mathé-
matiques à décerner en 1870 (Recher-
cher les modifications qu'éprouve la lu-
mière dans son mode de propagation et
ses propriétés par suite du mouvement
de la source lumineuse et du mouve-
ment de l'observateur) 707
FLAJOLOT. — Note sur des combinaisons
cristallisées d'oxyde de plomb et d'oxyde
d'antimoine, d'oxyde de plomb et d'a-
cide antimonique de la province de
Constantine (Algérie ) 237
— Surlacompositionchimiquedelanadorite. 406
FLAMMARION. - Éclipse de Soleil du 22 dé-
cembre 1870. Mesure de la variation de
la lumière 94 1
FONVIELLE ( W. de). — Halos solaires ob-
servés le 23 juin et le 3 juillet 1870. . . 47
— Sur les découvertes astronomiques des
Anciens 3-6
— Théorie de Mariotte sur les oscillations
barométriques 4o3
FOUQUÉ. — Étude des gaz volcaniques de
Santorin 002
FREMY (E.). — Emploi de l'osséine dans
l'alimentation 669 et 747
— Réponse à des remarques de M. Diiiuus
sur la seconde de ces Communications. 75G
— Réponse à des observations de M. Che-
vrcid relatives à un passage de celte se-
conde Note 7g7
FRIEDEL. — Le prix Jecker lui est décerné
pour ses « Recherches sur des composés
- du silicium correspondant aux composés
d'origine organique » 144
— M. Friedcl adresse ses remerciments à
l'Académie 261
FUA. — Note relative à un procède de con-
servation des viandes 523
GAILHARD. — Communication relative à
l'aérostation 845
GAILLARD. — Description et figure d'un
appareil destiné à rendre sur une ri-
vière suffisamment profonde les services
qu'on a cherché il obtenir en mer du
bateau sous-marin 694
GAL cl AuG. CAiiouns. — Recherches sur
les dérivés bromes de l'acide acétique
anhydre 27a
Noie relative à de nouveaux compo.-^és
résultant do l'union de l'acide cyanique
et des dilléronts élhcrs cyaniques avec
les éthers des acides amidés de la série
aromatique 4Ca
Recherches relatives à l'action des chlo-
(98? )
MM.
rures de platine, de palladium et dor
sur les phosphines et les arsines 208
GARRIGOU. — Examen chimique d'un ci-
ment métamorphisé dans la source
Bayen, de Luchon 287
— Conteraporanéité de l'homme avec le
grand ours des cavernes et le renne
dans la caverne de Gargas ( Hautes-Py-
rénées). (En commun avec M. Cluistci-
gnier. ) 288
— Note sur les dépôts glaciaires de divers
âges dans les Pyrénées 289
— GAUBE. — Mémoire sur le bromure de
fer et de potassium 35o
GAULDRÉE-BOILLEAU. — Note relative à
un aliment utilisable pendant la durée
du siège, et qu'on peut appeller houillic
romaine 538
GAULTIER DE CLAUBRY. — Note relative à
une réglementation qu'il semblerait utile
d'établir dans la fabrication du pain pen-
dant l'investissement de la ville de Paris. 626
GAZE AU (Ch.), — Recherches expérimen-
tales sur la propriété alimentaire de la
cnca 799
— Nouvelle Note sur la préparation et les
effets physiologiques de la coca 967
GERVAIS (H.). — Sur les eutozoaires des
Dauphins 779
GER'VAIS( P.) présente à l'Académie: 1° deux
Mémoires extraits des « Nouvelles Ar-
chives du Muséum » : le premier « Sur
les formes cérébrales propres aux Mar-
supiaux » ; le second « Sur les formes
cérébrales propres aux Carnivores vi-
vants et fossiles » ; . 2° les livraisons 6
à 8 de r « Ostéologie des Cétacées »
(texte et planches), qu'il publie avec
la collaboration de M. Van Beneden. . . 443
GÉRY père. — Une mention très-honorable lui
est accordée parla Commission du prix
Bréant pour sa statistique des décès par
le choléra qui ont eu lieu dans le quar-
tier Folie-Méricourt en 1 865 et 1 86G . . . 1 38
GIFFARD (H.). — Description du premier
aérostat à vapeur 683
MM. Pages.
GIRARD. — Sur un dispositif destiné à per-
mettre d'observer à de grandes dis-
tances 383
GIRARD (Ch.). — Note sur la nitroglycé-
rine et les diverses dynamites. (En
commun avec MM. J. Millot et G.
yogi.) 688
GIRAUD-TEULON rappelle, à l'ocasion de
remarques faites par M. le Secrétaire
perpétuel dans une précédente séance,
qu'il a, dans son « Traité de mécanique
animale », effleuré la question des mou-
vements de l'homme dans l'air, y consa-
crant une simple Note à la fin du cha-
pitre consacré à l'étude du vol 781
GOUBET. — Note relative à la théorie des
principes de la géométrie élémentaire. 216
GOUILLY. — Sur un procédé qui peut servir
à déterminer la direction suivie par un
aérostat et sa vitesse dans l'espace
885 et 939
GRAD. — Note ayant pour titre : « Le climat
de l'Alsace et des Vosges » 74
GRIMAUD (nE Caus). — De l'alimentation
des habitants dans une ville en état de
siège 443
— Sur l'emploi du blé en nature comme ali-
ment : addition à la précédente Note. . 478
— Du soldat en campagne et devant l'en-
nemi 469 et 53o
GRIN (C). — Sur un système aérostatique
exempt, suivant l'inventeur, des divers
inconvénients reprochés à ceux qui ont
été essayés jusqu'ici 769
GUÉRIN (J.). — Procédé pour mettre en
communication télégraphique la France
du dedans avec la France du dehors. . . 678
GUILLEMIN (A.). — Sur les aurores boréales
des 24 et 25 octobre 587
GUYOT (P). — Dosage volumétriquedes fluo-
rures solubles 274
— Note relative au développement d'orga-
nismes particuliers dans le pain fait avec
la farine de seigle 429
GUl'OT (A.). — Nouveau système télégraphi-
que applicable aux places assiégées... 816
H
HACHETTE. — Sur les circonstances qui
ont pu amener Monge à s'occuper des
questions relatives aux aérostats 583
HENRY (L.). — -action du pentachlorure et
du pentabromure sur divers éthers. ... 3i4
HOFFMANN (H.). — Le prix Desmazi(*res lui
est décerné pour son « Mémoire sur les
Bactéries ». (Concours de 1869.) iSa
M. Hojfmaim adresse ses reraercîments
à l'Académie 217
Note relative à quelques précautions aux-
quelles il lui parait indispensable d'avoir
égard, soit dans la préparation, soit dans
l'usage du boudin de sang de bœuf. . . Saa
l32..
MM.
HOFMANN.
Sur les isomères des élliers
fvanunques
HUREAU DE VILLENEUVE. - Sur un eaz
qu'on pourrait substituer pour gonfler
les ballons à celui qu'avijonrd'hui on
emploie d'ordinaire à cet usage 7G7
( 988 )
Pages.
35
MM. Pages.
HYUTL. — Le jiri.t Godard lui est décerné
pour ses « Recherches sur les organes
génito-urinaires des poissons ». (Con-
cours de 1869. ) 148
— M. Hrril adresse ses reraercîmonts à
l'Académie 261
JAMLX. — Réponse à des observations
présentées par M. U. Snintc-Chdre Dc-
villr, sur les variations de température
produites par le mélange de deux li-
quides
Sur la détermination du rapport des deux-
chaleurs spécifiques des gaz. (En com-
mun avec M. Richtiril.')
Réplique aux Notes publiées par M. H,
Sainte-Claire Det'ille le 18 juillet 1S70.
M. Jamin est nommé Membre de la Com-
mission du grand prix des Sciences ma-
thématiques à décerner en 1870 (Étude
des modifications qu'éprouve la lumière
dans son mode de propagation et ses
propriétés par suite du mouvement de
KNOCH. — Une mention honorable lui est
accordée par la Commission des prix de
Médecine et de Chirurgie pour ses tra-
vaux relatifs à l'histoire du bothriocé-
la source lumineuse et du mouvement
de l'observateur) 707
.TANSSEN. — Sur l'éclipsé totale de Soleil du
22 décembre 1870 53 1
23 — Sur l'analyse spectrale quantitative C2G
JOUGLET. — Note relative à un procédé
destiné à empêcher la transmission des
336 maladies par l'arrêt des poussières en
suspension dans l'air 33i
341 JOULIE. — Sur la direction des ballons 53i
JOUSSET. — Essai sur le venin du scorpion. 407
JUNOD. — Un prix lui est accordé par la
Commission des prix de Médecine et de
Chirurgie pour son travail manuscrit
intitulé : « Des médications hémospa-
siques et aérothérapiques n 1 1 3
K
phale large 1 25
— M. Kiioch adresse ses remercîmenls à
l'Académie 217
LABORDE. — Nouvelles expériences sur les
armatures et le plateau fixe de la ma-
chine de Holtz 347
LALIMAN. — Sur une variété de vignes qui
paraît être à l'abri des atteintes du Pl,yl-
Inxern vastatrix 358
LAMBERT (G.). — Projet de communication
entre Paris et la province 845
L.\RANJA F, OLIVEIUA.— Surun phénomène
de choc en retour observé à Porto-Alè-
gre (Brésil) 386
LA RIVE (np.). — Sur les pouvoirs rotatoires
magnétiques des liquides 195
LARREY est nommé Membre de la Commis-
sion des prix de Médecine et de Chi-
rurgie 2l5
L.\SSLMONNE. — Note relative à l'aérosta-
tion -32
L.\U(;iKK (P.-A.-E.) est nommé Membre de
la Commission chargée de décerner le
I prix d'Astronomie pour l'année 1870.. 7G7
LAUGIER (Sta.\.) est nommé Membre de la
Commission des prix de Médecine et de
Chirurgie pour 1870 21 5
LAUSSEDAT. — Restauration d'un cadran
solaire conique sur un fragment rap-
porté de Phénicve par M. Renan 261
LEBERT est nommé Correspondant do l'Aca-
démie, Section de Médecine etdcCliirur-
gie, en remplacement de feu M. Latv-
rence . . . • • . . . . 4 '
— M. Lehert adresse ses remercîmenls à
l'Académie 217
LEBLON. — Note intitulée : « Système de
chemin de fer rural et de montagnes.
Adhérence parfaite des roues avec le
rail « 47
LECERRE. — Note ayant pour titre : « Bal-
lon dirigeable par le haut » 769
LE CORDIER (P.). — Expérience confirmant
MM.
(989
Pages
la double hypothèse d'Ampère siirl'exis-
lence d'un courant clpctrique formé dans
chaque molécule d'une substance magné-
tique et dans la terre 533
LEFORT (C). — Note relative à la « Sociolo-
gie», première et seconde parties. 708 et 799
LEGRAND. — Sur les thermomètres de
DeUic 06
LEGROS. — Une médaille est accordée à
MM. Lei^ros et Onimiis pour l'ensemble
de leurs travaux et les résultats impor-
tants qu'ils ont déjà obtenus en vue des
applications de l'électricité à la physio-
logie et à la thérapeutique. (Concours
pour le prix de Médecine et de Chirur-
gie de 1869: question proposée.) 107
LEHIR. — Note ayant pour titre : « Essai sur
les moyens de diriger les aérostats et
sur l'appréciation des résultats qui peu-
vent être obtenus. Agents de locomotion
et de direction faisant corps avec le
ballon. » 578
LE MASURIER demande et obtient l'ouver-
tuie d'un pli cacheté contenant l'indi-
cation d'une application de la lumière
électrique 4^8
LENORMANT (F.). — Sur les animaux em-
ployés par les anciens Égyptiens à la
chasse et à la guerre. SgS, 632, 6G4 et 777
— Note sur l'histoire du chat domestique
dans l'antiquité 738
— Sur l'introduction et la domesticité du
porc chez les anciens Égyptiens. 849 et 952
LE ROUX. — Le prix Trémont lui est dé-
cerné comme encouragement à pour-
suivre ses recherches sur l'indice de
réfraction decertaines vapeurs, et celles
qui ont pour objet la mesure de la cha-
leur développée par les courants élec-
triques ._ 100
— M. Le Rnax adresse ses remercîments à
l'Académie 217
LICHTENSTEIN. — De l'identité spécifique
du Phyiloxcrn des feuilles et du Phyl-
loxéra des racines de la vigne. (En
commun avec M. Planclion.) 298
— Sur un moyen pour empêcher l'irruption
du Phylloxéra vastatrix dans les vignes
MM. Pages.
non encore infectées 356
LIE (S.). — Sur une transformation géo-
métrique 579
LIEBEN. — Sur l'alcool amylique normal.
( En commun avec M. Rossi.) 3C9
LIOUVILLE rappelle, à roccasion d'une Com-
munication de M. Fremy, sur l'emploi
de l'osséine dans l'alimentation, que
M. Arago, dans une visite à l'hôpital de
I\[etz, constata que les malades avaient
accepté comme une amélioration l'ad-
dition de la gélatine à leur régime ordi-
naire 759
— Protestation faite par M. Lioiiville, en sa
qualité de Président de V Académie, à
propos do l'arrestation récente de M. P.
Thenard par l'armée prussienne gii
— M. Liùimlle est nommé Membre de laCom-
mission du grand prix des Sciences ma-
thématiques à décerner en 1870 (Étude
des modifications qu'éprouve la lumière
dans son mode de propagation et ses
propriétés, par suite du mouvement de
la source lumineuse et du mouvement
de l'observateur) 707
— Membre de Commission chargée de dé-
cerner le prix d'Astronomie pour l'an-
née 1 870 767
— Et de la Commission chargée de juger le
concours pour le prix Poncelet 881
LONGET est nommé Membre de la Commis-
sion des prix de Médecine et de Chi-
rurgie 21 5
— Et de la Commission du prix do Physiolo-
gie expérimentale 256
LOURAU. — Note et brochure relatives à
un « cercle releveur » 260
LUCAS. — De la possibilité d'obienir des si-
gnaux de feu d'une très-grande portée. 222
LUNEAU. — Mémoire sur le mouvement
perpétuel 260
LUSCHKA (H. Vo.\). — Un prix lui est ac-
cordé, par la Commission des prix de
Médecine et de Chirurgie, pour ses tra-
vaux d'anatomie, et spécialement d'ana-
tomic des régions 116
— AL H. Ton Luschka adresse ses remer-
cîments à l'Académie 217
M
MADINIER. — Note relative à une nouvelle
classe de désinfectants 938
MAGUÉ et PoLV. — Une mention honorable
leur est accordée au concours pour le
prix de Statistique pour leur livre inti-
tulé : « Données générales d'une statis-
tique des Conseils de prud'hommes »... 98
MALAPERT et Pichot. — Sachets de char-
pie carbonifères modifiés 384
MARES. — Sur la maladie corpusculeuse
( 990 )
MM.
des vers à soie
MAREV. — Des mouvomenls que le corps
(le l'oiseau exécute pendaul le vol
MARION. — Le prix Borilin (roncours de
i8Gf) : Monograpiiie d'un animal inver-
tébré marin) lui est décerné pour son
Mémoire intitulé « Reelierclies zoologi-
ques et analomiques sur des Némato'ides
non parasites marins. »
— M. Marinn adresse ses remercîments à
l'Académie
MASSIEU. — Mémoire sur les fondions des
divers fluides et sur la théorie des va-
peurs. (Rapport sur ce Mémoire; Rap-
porteur M. Bcrtriinil. )
MATHIEU est nommé Membre de la Com-
mission des comptes pour l'année i86t).
— Membre de la Commission du prix de
Statistique
— Et de la Commission du prix d'Astronomie.
MAURIN (A.). — Une mention honorable lui
est accordée, par la Commission des prix
de Médecine et de Chirurgie, pour sa
monographie intitulée : « Typhus des
Arabes «
MAYER (R.). — Le prix Poncelet lui est
décerné pour l'ensemble de ses Mé-
moires sur la théorie mécanique de la
chaleur
— M. R. Maycr adresse ses remercîments
à l'Académie
MÈGE-MOURIÉS. — Observations relatives
à la panification
MELSENS. — Sur la vitalité du virus-vac-
cin
MEUNIER (Stan.).— Sur les rapports de l'as-
tronomie physique avec la géologie. . . .
— Communauté d'oriL;ine de la serpentine
et de la chanlonnite
— Relations slialigrapliiques entre diverses
roches météoriques
— Sur l'existence dans les météorites de ro-
ches éruptives et de roches métamor-
phiques
— Sur le mode de solidification du globe
terrestre
MEUSNIER. — Mémoire sur l'équilibre des
machines aérostatiques, sur les diffé-
rents moyens do les l'aire ilescendre et
monter, et spécialement sur celui d'exé-
cuter ces manœuvres sans jeter de lest
et sans perdre d'air inflammable, en
ménageant dans le ballon une capacité
particulière destinée à contenir de l'air
atn)osphéri(pie
MEYEH. — Suit(! à ses recherches relatives
aux questions d'analyse indéterminée. .
WILLOT (A.). — Note sur la nitroglycérine
Pages.
660
(44
217
257
41
2l5
767
35o
472
73
541
5go
743
771
956
5G9
383
MM. Pages.
et les diverses dynamites. (En commun
avec MM. Ch. Girard et G. f'oi^l.]. . . 688
>nNISTRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
(M. le) autorise l'Académie à prélever,
sur les reliquats des fonds Montyon, la
somme de 5 000 francs, destinée à cou-
vrir en partie les frais d'une mission
scientifique confiée à M. Janssen 68a
mMSTRE DES LETTRES ET BEAUX-ARTS
(M. le) api)rouve le choix fait par l'A-
cadémie du lundi 1 1 juillet pour sa
séance publi(]ue annuelle 48
— M. /c Ministre autorise l'Académie à pré-
lever diverses sommes sur les reliquats
di>ponibles des fonds Montyon 49
.MIR.VULT. — Le juix Barbier lui est décerné
pour sa méthode d' « Occlusion chirur-
gicale des paupières dans le traitement
de l'ectropion cicatriciel « 146
MOISSENET adresse à l'Académie un exem-
plaire d'une Note sur le rationnement
de la population de Paris pour le pain
et la viande SaS
MONTUCCI. — Note sur la nécessité de faire
des expériences sur la résistance des
tissus en vue de l'aérostation 692
— Sur un moyen de détruire rapidement, en
ballon, des pa|)iers compromettants qu'on
veut soustraire à l'ennemi 78a
MORELLET. — Note relative à la « couseuse
automate » de M"" Garcin 88
MORIN. — Note sur la première session de
la Commission internationale du mètre,
tenue à Paris du 8 au i3 août 1870. . . 38i
— Note sur les effets de la pénétration des
projectiles dans les parties molles et les
parties fibreuses ou solides du corps hu-
main 927
— A l'occasion d'une Note de M. Payen sur
des tentatives précédemment faites pour
conserver la viande par dessiccation,
M. Miiriii rappelle les essais entrepris
autrefois par lui pour la conservation des
farines 947
— M. Morin communique une pièce ma-
nuscrite attribuée à Monge et relative
au système aérostatique de Meusnier.. 629
— M. Morin-ç%i nommé Membre de la Com-
mission du prix de Mécanique pour 1870. 84l
— Et de la Commission du prix Poncelet
pour la même année 881
MORIN (J.) —Note relative;! l'inflammalion
de la poudre ii distance par l'électricité. 477
— M. ./. Morin annonce être en mesure
d'exécuter devant la Commission à la-
quelle a été renvoyée celle Note les
principales expériences qu'd y a men-
tionnées 78a
991 )
MM. Pages.
MOURA soumet au jugement de l'Académie
des « Réflexions sur la réalisation du
problème de l'aéroslalion " 522
MM. Pages.
MOUTIER. — Sur la chaleur spécifique des
gaz sous volume constant 807
— Sur la formule de la vitesse du son. . . . S.iG
— Recherches sur l'état solide 934
N
NÉL.ATON est nommé Membre.de la Com-
mission des prix de Médecine et de Chi-
rurgie 2 1 5
NETTER. — Importance de la deslruclion
des croûtes qui entourent le lit des va-
rioleux pendant la période de dessicca-
tion des pustules 2i5
— Mémoire sur la théorie de la variole en-
visagée sous le point de vue des fer-
mentations 35o
NEWCOMB. — Sur les inégalités de la Lune
dues à l'action des planètes 384
NOULET. — Noie ayant pour titre : « Nos
deux hirondelles et leurs nids » 78
0
OLLIER. — Nouvelle démonstration de la
régénération osseuse après les résections
sous-périostées articulaires 275
ONIMUS. — Une médaille est accordée à
MM. Onimus et Legros pour l'ensemble
de leurs travaux et les résultats impor-
tants qu'ils ont déjà obtenus en vue des
applications do l'électricité à la physio-
logie et à la thérapeuticiue. (Concours
pour le prix de Médecine et de Chi-
rurgie : question proposée) 107
OZANAM. — Note relative au pansement
des plaies par une solution d'acide car-
bonique 4o3
PAGLIARI appelle l'attention de l'Académie
sur l'efficacité de son «eau hémosta-
tique » 528
PAINVIN. — Détermination des éléments de
l'arête de rebroussement d'une surface
développable définie par .ses équations
tangentielles.- 217
PALMARD. — Communication relative à l'aé-
rostation 807
PAPILLON. — Recherches expérimentales
sur les modifications de la composition
immédiate des os 372
PASQDALE. — Note sur la direction des
aérostats 35o
PASSV est nommé Membre de la Commission
du prix de Statistique pour l'année 1S70. 21S
PASTEUR. — Rapport adressé à l'Académie
sur les résultats des éducations pra-
tiques de ver à soie effectuées au moyen
de graines préparées par les procédés de
sélection 1 8a
PAULET et SARRAZIN.-UndesprixdeMé-
dec. et de Chir. leur est accordé pour
leur Traité d'anatomie topographique . . i ig
PAYEN. — Remarques à propos d'une Com-
munication de M. Griiuaml (Ae Caux)
sur les résultats déjà obtenus dans la
fabrication de pains contenant tous les
éléments du blé sans élimination du son. 449
Remarques à propos d'observations faites
par M. Miliic Ethveirds sur les pro-
cédés de conservation des viandes 488
Observations relatives à une Communica-
tion de M. Fiemy, sur l'emploi de l'os-
séine dans l'alimentation 5G7
Observations, à propos d'une Lettre de
M. Rahiiieau, sur les propriétés nutri-
tives du cacao 734
M. Payai annonce l'intention de pré-
senter à l'Académie, dans une prochaine
séance, un travail sur les os de cheval
et l'huile qu'on en relire 761
Note ayant pour titre : « Hippophagie,
graisses, huiles alimentaires et sub-
stances gélatineuses des tissus et des os
du bœuf et du cheval » 822
Observations relatives aux tentatives déjà
faites pour conserver les viandes par
dessiccation 946
Détails sur le procédé employé par
M. /i'iva/W pour la fabrication des suifs
bruts 8i5
Observations relatives aux procédés d'é-
tuvage perfectionné des farines cjSi
M. Paycri est nommé Membre de la Com-
mission du prix dit des Arts insalubres. 2.56
{ 992 )
Pages
227
769
MM.
PELLARIN. — Note concernant l'hygiène
des blessés et des opérés 477
PELOUZE ( Eugène). — Mémoire sur un pro-
cédé pour la conservation des viandes :
des échantillons de viande ainsi conser-
vée sont mis par M. Dunws sous les
yeux de l'Académie 73 1
FEREZ. — Recherches sur la génération des
Gastéropodes 280
PERSONNE. - Transformation du chloral
en aldéhyde par substitution inverse. .
PÉTRO (E.).— Note sur les ballons captifs.
PEYRÉ. — Recherches sur les effets toxiques
du m bouiidou Ou icaja, poison d'é-
preuve usité au Gabon. (En commun
avec M. Riibutemi.) 353
PHILLIPS. — Relation entre les chaleurs spé-
cifiques et les coefficients de dilatation
d'un corps quelconque 333
— M. Phillips est nommé Membre de la
Commission du prix de Mécanique 841
PICHOT et Malapert. — Sachets de char-
pie carbonifères modifiés 384
PIMONT. — Le prix dit des Arts insalubres
lui est décerné pour son «calorifuge plas-
tique ■> 128
PIONNIER adresse un travail intitulé : « Le
compte du temps » 33 1
PISANI. — Analyse de la nadorite, nouvelle
espèce minérale de la province de Cons-
tantine (Algérie) 319
PISSIS. — Système de montagnes et terrain
du désert d'Atacama 285
PLANCHON. — De l'identité spécifique du
Phylloxéra des feuilles et du Phrlln.rcni
des racines de la vigne. (En commun
avec M. Lichteiistcin.) 298
POLV et Magué. — Une mention honoralile
leur est accordée, [)ar la Commission du
MM. Pages.
prix de Statistique, pour leur livre inti-
tulé : « Données lîénérales d'une statis-
tique des conseils de prud'hommes ». . 98
PRÉSIDENTS DE L'ACADÉMIE. - J'nyez
aux noms de MM. Liodville, Delau.naï
ET Chevreol.
PRÉSIDENT DE L'INSTITUT (M. le) invite
l'Académie à désigner l'un de ses Mem-
bres pour la réprésenter, comme lecteur,
dans la séance publique du 1 3 août 1 870. 245
— M. le Président renouvelle cette demande
en rappelant que la séance a été remise
au mercredi 26 octobre 493
— M. le Président adresse une semblable
invitation pour la séance trimestrielle
du mercredi 4 janvier 1871 855
PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ PIIILOMA-
TIIIQUE (M. le) transmet l'adhésion de
la Société aux paroles prononcées par
M. Dumas à propos de la mission de
M. Jnnsseii 94°
PRÉSIDENT DE LA COMMISSION DES MON-
NAIES ET MÉDAILLES (M. le) informe
rx\cadémie que M. Peligot est actuelle-
ment à Bordeaux pour diriger le bureau
temporaire qui y est établi 523
PRETIS DE S.UNTE-CROIX adresse une dé-
monstration élémentaire du postnlatum
d'Euclide 48 et 260
PRIGENT. — Description et dessin d'une» Li-
bellule mécanique » 939
PRILLIEUX. — Expériences sur la fanaison
des plantes 81
PROESCHEL. — Une mention très-honora-
blo lui est accordée, par la Commission
du prix Bréant, pour ses « Études géo-
graphiques et scientifiques sur les causes
et les sources du choléra asiatique ». 137
QUATREFAGES ( de) est nommé Membre de
la Commission chargée de juger le con-
cours [lour le grand prix des Sciences
physiciues ( Question concernant les
phénomènes ([ui précèdent le développe-
ment de l'embryon chez les animaux
dits parthénngénésir/iies) , et le con-
cours pour le prix Bordin (Question re-
lative à l'anatomie comparée des Anné-
lides)
881
R
R ARENIIORST. — Le prix Desmazières lui est
décerné pour sa « Flora europu_'a Algarum
aquœ dulcis et submarinœ » i52
RABUTEAU. — De l'action des alcalins sur
l'nrijanisme. (En commun avec M. Cnns-
tant.) 23.
Recherches sur les effets toxiques du
niboundou. OU icaja, poison dépreuve
usité au Gabon. (En commun avec
M. Peyré.) 253
Sur un moyen propre à annuler les effets
de ralimoiitalion insuffisante h'A
( 993)
MM. Pages.
— De l'influence du café et du cacao sur
l'alimentation 782
RAULIN. — Sur le régime pluvial des Alpes
françaises 826
RAYBAUb-LANGE. — Lettre sur les résul-
tats obtenus de la méthode de M. Pas-
teur pour le grainage des vers à soie.. . 297
RAYET. — Sur la lumière de la comète de
Winnecke. ( En commun avec M. jrolf.\ 49
— Sur le spectre de l'atmosphère solaire. . 3oi
RÉZARD DE WOUVES adresse, pour être
joint à son Mémoire sur l'émétique,
comme traitement abortif de la variole,
une nouvelle observation recueillie par
lui 216
RICHARD. — Sur la détermination du rap-
port des deux chaleurs spécifiques des
gaz. (En commun avec M. Jamin.)... 336
RICHE. — Sur l'emploi du boudin de sang
de bœuf comme aliment 540
— Sur la préparation de l'osséine et de la
gélatine 810
ROBIN est nommé Membre de la Commission
des prix de Médecine et de Chirurgie. . 2i5
— Et de la Commission du prix de Physio-
logie expérimentale 256
ROGER (H.). — Une mention honorable lui
est accordée, par la Commission des prix
de Médecine et de Chirurgie, pour ses
« Recherches cliniques sur la chorée, le
MM. Pages.
rhumatisme et les maladies du cœur chez
les enfants » lao
ROSSI.— Sur l'alcool amylique normal. {En
commun avec M. Lieben.) 369
ROSTAING. — Note relative à la préparation
de toiles et de papiers au tannin et à
l'acide benzoïque, pour les pansements
rapides sans linge 806
ROUDANOVSKY. - Ses « Études photogra-
phiques sur le système nerveux de
l'homme et de quelques animaux supé-
rieurs » sont l'objet d'une mention ho-
norable dans le Rapport sur les prix de
Médecine et de Chirurgie 127
ROULIN. — Observations relatives à la Com-
munication de M. Simonin, sur le pro-
cédé employé aux Étals-Unis par les in-
digènes pour la préparation des peaux
de bisons, de cerfs et d'autres animaux. 524
— Observations relatives à une Communi-
cation de M. Gazeau, sur la propriété
alimentaire de la coca 801
— Sur le procédé employé par les Indiens
tt'tcs-plates pour obtenir l'huile des os
longs 875
— Rectification à propos d'une indication con-
tenuedanslaCommunication précédente. 933
ROZE. — Résultats de quelques expériences
mycologiques 323
RUTY. — Note relative à l'aérostation 782
SAINT-CRICQ CASAUX (de). - Note rela-
tive au maximum de température du
24 juillet 1 870- 376
SAINT-CYR. — Une citation honorable lui est
accordée, par la Commission des prix
de Médecine et de Chirurgie, pour son
c( Étude sur la teigne faveuse chez les
animaux domestiques » 127
— M. Saint-Cyr adresse ses remercîmenls
à l'Académie 217
SAINT- VENANT (de). — Démonstration élé-
mentaire de la formule de propagation
d'une onde ou d'une intumescence dans
un canal prismatique, et remarques sur
les propagations du son et de la lumière,
ainsi que sur la distinction des rivières
et des torrents 186
SAINTE -CLAIRE DEVILLE (Ch.) annonce
que les observations de l'Observatoire
de Monlsouris sont momentanément
interrompues 4^5
— De la période tridodécuple ou décem-
diurne dans les phénomènes atmosphé-
C. R., 1870, 2"'« Semestre. (T. LXXl.)
riques et dans leur influence sur l'état
sanitaire 653, 695 et 827
— M. Ch. Sainte-Claire Devitle fait hom-
mage à l'Académie d'une série de Bulle-
tins de l'Observatoire météorologique de
Montsouris 706
— Observations, à propos d'une Communica-
tion de M. Flammarion, sur le sporo-
photomèire, appareil installé depuis plu-
sieurs années à Montsouris 944
— Observations relatives à une Note de
M. Foiiqiié intitulée : « Étude des gaz
volcaniques de Saiitorin » 906
— M. Ch. Sainte-Claire Devillc commu-
nique une Lettre de M. Denis accom-
pagnée d'une citation de CoK?c//e établis-
sant comme les .\llemands entendaient,
il y a un demi-siècle, la législation mi-
litaire en matière de navigation aé-
rienne 839
SAINTE-CLAIRE DEVILLE (H.). - Action
de l'eau sur le fer et de l'hydrogène sur
l'oxyde de fer 3
i33
MM.
— Observations sur une Communication de
M. Jamin concernant les variations de
températures produites par le mélange
de deux liquides
— Sur les variations de température pro-
duites par le mélange de deux liquides.
Réponse à une Note de M. Jamin . 202 et
— Quelques mots au sujet de la Note insérée
par M. Jamin dans le Compte rrndii du
8 août 1870
— Examen d'une roche schisteuse imprégnée
d'une matière charbonneuse, tirée de la
collection adressée à l'Académie par
MM. Ravizza et Colomba
— M. H. Sainte-Claire Deville communique
quelques résultats obtenus par M. Cmsn
sur les propriétés chimiques de l'alumi-
nium
S.4L1CIS. — Aurore boréale du 24 octobre.
SANSON. — Influence du développement
hàtif des os sur leur densité
— Sur l'excrétion de l'urée considérée comme
mesure ds l'activité des combustions
respiratoires
SARRAZIN. — Un prix estaccordé, par la Com-
mission des prix de Médecine et de Chi-
rurgie, à MM. Sarrazin et Paulet pour
leur 0 Traité d'Anatomie topographique».
SCHOENEFELD (de), Srrrctnire général de
la Société botanique de France, transmet
l'extrait du procès-verbal de la Séance
de rentrée de cette Société qui déclare
adhérer complètement à la protestation
de l'Institut contre le projet de bombar-
dement de la ville de Paris
SCHUTZENBERGER. — Sur les composés
phosphoplatiniques
SECCHI (P.). — Nouvelles remarques sur les
spectres fournis par divers types d'é-
toiles
— Le P. Sfcchi présente à l'Aciidéraie un
volume qu'il vient de publier, intitulé :
« Le Soleil >■
SECRÉTAIRES PERPÉTUELS (MM. les).
Voir aux noms do MM. Élie de Beau-
mont ET Dumas.
SÉDILLOT. — Observations relatives aux in-
dications chiruigicales et aux consé-
quences des amputations à la suite des
blessures par les armes de guerre
4*' et
( 994
Pages
3o
204
368
252
290
587
229
907
"9
770
69
252
368
435
MM. Page».
SERRET. — Rapport sur un Mémoire de
M. Bouquet relatif à la théorie des in-
tégrales ultra-elliptiques 4*
— M. Serret pré.*ente à l'Académie le tome V
des OEuires de Lagrangc 3Ci
SIMONIN (J.). — Procédé employé aux
États-Unis par les indigènes pour la
préparation des peaux de bisons, de
cerfs et d'autres animaux de ce pays. . 524
SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION (La) adresse
son adhésion à la déclaration de l'Insti-
tut en prévision du bombardement de
Paris 73a
SOCIÉTÉ CENTRALE D'AGRICULTURE DE
FRANCE (La) annonce que dans sa
séance de rentrée, qui a eu lieu le 3 no-
vembre, elle s'est associée par un vote
unanime à la protestation formulée par
l'Institut de France contre la mesure du
bombardement de Paris 681
SOCIÉTÉ DE GÉOGRAPHIE (La) adresse
son adhésion à la protestation de l'Ins-
titut contre la possibilité d'un bombar-
dement de Paris 54o
SONREL. — Étude photographique du Soleil
à l'Observatoire de Paris 225
SOREL. —Notes relatives aux conditions que
lui paraissentdevoir remplirles aérostats
pour qu'il soit possible de les diriger. .
522, 577 et 729
— Note relative à un moyen d'augmenter la
portée des pièces de canon 938
SOUBEIRAN ( L. ). — Note ayant pour titre :
<c Conservation des viandes, moyen d'é-
viter les salaisons » 645
SOURD.\T. — Observation d'une inégale pro-
duction et d'une ditTérence de composi-
tion du lait pour les deux seins de la
même femme 87
STILLING (B.). — Le prix Barbier lui est
décerné pour son perfectionnement du
procédé opératoire dans la pratique de
1 ovariotomie 1 40
— M. B. S/illing adresse ses remerciments
à l'Académie 4o4
STRASBURGER. — Une mention honorable lui
est accordée, par la Commission du |)iix
Desmazières, pour ses recherches sur les
organes sexuels et la fécondation dans
les Fougères et dans le Marcluwtia
polymorjdia 1 52
TF.I.LIER (Cii.). — Notesrelatives à l'emploi
de la glace et du froid dans les ampu-
tations 579, Cl 8 (!t
80G
— Note relative i deux procédés pour la
conservation de la viande 80G
— Note relative à l'emploi du moùl d'orge
( 995
MM. Pages,
pour l'alinifintation des jeunes enfants. 938
— Note relative à l'emploi de la lunette à
fil croisé pour faciliter le tir gSS
TERRIEN adresse une rectification à son
Mémoire sur la décomposition de l'eau
par la pile électrique 48
TESSAN (de) fait hommage à l'Académie, au
nom de M. J. Cialdi, d'un volume inti-
tulé : « Les Ports-Chenaux et le Port-
Saïd » 376
THENARD (P.). — L'annonce de l'arrestation
récente de cet Académicien par l'armée
prussienne motive une protestation de
la part de M. Liouville, Président de
l'Académie 911
TOSELLL —Communications relatives à l'aé-
rostation 989
TOSTIVIN, écrit ainsi par erreur pour
TOSTIVIRET. — Note relative aux résultats
obtenus en faisant couver des perdrix
en cage 260 et 384
MM. Pages.
TOURNIER .— Sur les avantages qu'on semble
fondé à attendre d'une mesure qui con-
sisterait à proscrire l'usage du pain frais,
et à livrer exclusivement à la consom-
mation le pain cuit de la veille 47G
TRÉCUL (A.). — Remarques sur la position
des trachées dans les Fougères {7'' partie) .
Didymochtaeim sinuosa 55o
TRÉMAUX adresse une épreuve d'une partie
d'un ouvrage en voie de publication
« Sur le principe de la vie animale et
végétale » 240
TRIPIER et Arloing. — Une mention hono-
rable leur est accordée, par la Commis-
sion du prix de Physiologie expérimen-
tale, pour avoir démontré, dans les nerfs
sensi tifs cutanés, l'existence d'une sensi-
bilité récurrente jusqu'ici reconnue seu-
lement dans les nerfs moteurs 112
TROUVÉ. — Note relative à l'aérostation . . 845
VAILLANT (Le Maréchal) communique à
l'Académie divers documents relatifs aux
procédés de sériciculture de M. Pasteur. 296
VALÂBRÉGUE.— Note concernant l'influence
de la force centrifuge sur les marées. . 240
VALLIER (de). — Sur les résultats obtenus
dans les magnaneries du département
des Basses-Alpes 289
VARENNE. — Note sur la navigation aé-
rienne 619
VÉLAIN. — Sur la position des calcaires à
Terchratida - janitor dans les Basses-
Alpes 85
VERDEIL (P.). — Note concernant la fai-
blesse du rendement des machines à
vapeur 522
— Note sur le mouvement du pendule. . . . 989
VIGNAL. — Note relative à l'emploi du blé
en nature comme aliment dans l'Ar-
dèche 539
VILL ARCEAU (Yvon). - Division décimale
des angles et du temps 362
— Note sur les conditions des petites oscil-
lations d'un corps solide de figure quel-
conque, et sur la théorie des équations
dift'érenlielles linéaires 7G2
VENCI. — Note relative au choléra-morbus. 35o
VIOLLE. — Sur l'équivalent mécanique de
la chaleur et sur les propriétés électro-
thermiques de l'aluminium 270
VIRLET D'AOUST. - Sur le système de
tannage rapide des peaux au Mexique. SSg
VOGT (G.). —Note sur la nitroglycérine et
- les diverses dynamites. (En commun
avec MM . Ch. Girard eXJ. Millot. ] 688
VOISIN (F.-H.). — Le prix fondé par M"' la
marquise de Laplace est décerné à
M. F.-H. T'oisin, élève sorti le premier
de l'École Polytechnique en 1869 et
entré à l'École impériale des Mines.. . . 99
VOLPICELLI. — Sur une propriété du con-
densateur de Volta qui n'a pas encore
été considérée 54
W
WAGNER (N. ).— Le prix Bordin (Concours
de 1869 : Monographie d'un animal in-
vertébré marin) lui est décerné pour sa
(I Monographie des Ancées du golfe de
WALLÉE et Brachet. — Note sur un régu-
lateur automoteur électrique 33i
— Description d'une lampe électrique ap-
plicable à l'éclairage des larges voies. 769
Naples » i44 WATSON (James.). — Le prix d'/Vstronomie
( 99^ )
MM. Pages.
lui est décerné pour sa découverte, dans
la même année, de huit nouvelles petites
planètes 92
— M. James fFntxon adresse ses remerci-
ments à l'Académie 4o4
MM. Pages.
WILSON. — Sur l'emploi de la farine d'a-
voine dans l'alimenlalion 474 et 479
WOLF. — Sur la lumière de la comète de
Winnecke. ( En commun avec M. Rayet.) 49
YVON VILLARCEAU. - l'oir Villauceau.
ZALIWSKI. — Note concernant une pile
pouvant donner une intensité maximum
pendant douze heures 4o3
Note relative à une poudre de guerre au
chlorate de potasse 4o3
Errata. — Les deux premières pages du n° \o reproduisent la pagination (476-477) qui appar-
tenait déjà aux deux dernières du n" 14. — Foir, pour les autres vrnUa, aux pages 353, 396, 44i,
491 et 955, ligne 37, où le mot //i doit être remplacé par///-.
SAUTMItR-VlLLAR.-i, IMPUIMËL'RI.IUllAinE DES CO.MPIES RENDUS DES .SÉANCES DE l' ACADÉMIE DES SCIENCES.
Paris. — Rue de Seine-Saint-Germain, 10, près l'Institut.
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