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Full text of "Congrès international d'anthropologie et d'archéologie préhistoriques. Comte-rendu de la 4e session, Copenhague, 1869"

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CONGRÈS 

INTERNATIONAL 

D'ANTHROPOLOGIE  ET  D'ARCHÉOLOGIE 

PRÉHISTORIQUES 


V^EUV  lÈffdE       SE  SS  lOV^ 
1880 


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CONGRES 

INTERNATIONAL 

D'ANTHROPOLOGIE  ET  D'ARCHEOLOGIE 

PRÉHISTORIQUES 


COMPTE    RENDU 

DE    LA 

NEUVIÈME  SESSION  À   LISBONNE 

1880 


LISBONNE 

TyPOGRAPtOE    DK    L'Aca1>ÉM[E    RoVALZ    des    SaENCES 

1884 


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AVANT-PROPOS 


En  livrant  au  public  ce  Compte  rendu  de  la  9*  session 
du  Congrès  d'anthropologie  et  d'archéologie  préhistoriques 
qui  s'est  réuni  à  Lisbonne  au  mois  de  septembre  de  1880, 
je  dois  commencer  par  demander  à  nos  honorables  confrè- 
res de  bien  vouloir  "excuser  le  long  délai  qu'il  y  a  eu  dans 
cette  publication. 

Divers  obstacles  indépendants  de  notre  volonté  nous 
ont  empêché  de  présenter  ce  volume  plus  tôt.  Il  serait  su- 
perflu d'énumérer  toutes  ces  difficultés:  il  suffira  de  rappe- 
ler à  nos  collègues  qu'à  l'occasion  du  Congrès  le  secrétaire 
général,  le  regretté  général  Carlos  Ribelro,  était  déjà  sous 
le  coup  de  la  grave  maladie  qui  l'a  malheureusement  enlevé 
à  la  science  qu'il  cultivait  avec  tant  de  dévouement  et  à  la- 
quelle il  pouvait  encore  rendre  des  services  importants.  Cette 


389324 


À 


longue  maladie  l'a  empêché,  malgré  sa  grande  activité  et 
son  amour  du  travail,  de  surveiller  cette  publication,  de 
sorte  qu'en  réalité  ce  ne  fut  qu'après  sa  mort,  survenue 
deux  ans  après  le  Congrès  (le  i3  novembre  1882)  que  les 
travaux  de  publication  du  Compte  rendu  ont  été  commen- 
cés. 

La  Section  des  travaux  géolo^ques  ayant  préparé  le 
Congrès,  c'était  naturellement  à  celui  qui  a  succédé  à  M.  Ri- 
beiro  dans  l'accomplissement  des  graves  fonctions  de  chef 
de  ces  travaux  qu'incombait  la  direction  de  la  publication  du 
Compte  rendu  ;  et  c'est  sans  doute  par  ce  motif  que  M.  le 
conseiller  Hîntze  Ribeiro,  alors  ministre  des  travaux  pu- 
blics, m'ayant  nommé  à  cette  place  vacante,  m'a  aussi  char- 
gé de  diriger  cette  publication.  Je  me  fais  un  devoir  de  té- 
moigner Ici  toute  ma  reconnaissance  envers  ceux  qui  m'ont 
si  puissamment  aidé  dans  l'accomplissement  de  ce  devoir, 
et  spécialement  M.  Gonçalves  Vianna,  l'un  des  secrétaires 
du  Congrès  qui,  bien  qu'étranger  à  la  Section  géologique,  a 
pris  à  sa  charge  le  travail  de  rédaction,  la  compilation  et  la 
coordination  des  matières.  La  révision  du  texte  et  la  correc- 
tion des  épreuves  ont  été  faites  avec  le  soin  le  plus  scru- 
puleux par  M.  Gonçalves  Vianna  et  M.  Berkeley  Cotter, 
adjoint  de  la  Section  géologique,  qui,  lors  de  la  session  du 
Congrès,  se  trouvait  à  Londres  au  service  de  l'état.  L'exé- 
cution des  dessins  a  été  en  majeure  partie  confiée  à  M.  Luiz 


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Couceiro;  j'ai  lieu  de  croire  que  les  auteurs  des  mémoires 
auxquels  ils  se  rapportent  en  seront  satisfaits;  pour  ma  part 
je  tiens  à  lui  exprimer  mes  remercîments  pour  les  soins  qu'il 
a  apportés  à  l'exécution  des  planches  qui  accompagnent  la 
description  de  la  grotte  de  Furninha. 

Je  ne  saurais  passer. sous  silence  que  nous  avons  été 
guidés  dans  la  coordination  de  ce  volume  par  les  avis  ju- 
dicieux de  notre  estimable  collègue  M.  Choffat,  ainsi  que 
par  le  Compte  rendu  publié  en  1881  par  M,  Cartailhac,  qui 
a  eu  Pamabilité  d'envoyer  au  secrétariat  un  exemplaire  en- 
richi de  notes  manuscrites. 

Nos  lecteurs  remarqueront  peut-être  l'absence  de  des- 
sins des  silex  qui  ont  servi  de  base  à  la  discussion  sur  l'exis- 
tence de  l'homme  tertiaire.  Je  n'ai  pas  cru  indispensable  de 
les  faire  figurer,  puisque  la  plupart  de  ces  silex,  du  moins 
les  plus  concluants,  ont  déjà  été  reproduits  dans  différentes 
publications  par  MM.  Ribeiro,  de  Mortitlet,  Cartailhac  et  par 
d'autres  savants,  ainsi  que  dans  le  Compte  rendu  du  Congrès 
de  Bruxelles;  et  en  outre  parce  que  M.  Ribeiro  n'ayant  pas 
séparé  de  sa  propre  main  ceux  qui  devraient  être  représen- 
tés, je  n'ai  pas  voulu  faire  ce  choix  moi-même,  craignant  de 
supprimer  quelque  pièce  importante  à  l'appui  des  idées  sou- 
tenues par  notre  regrettable  confrère. 

Nous  avons  ajouté  à  l'inévitable  appendice,  l'étude  que 
M.  Alfredo  Ben  Saude  a  faite  des  roches  qui  ont  servi  à  la 


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fabrication  des  différents  instruments  en  pierre  existant 
dans  les  collections  de  la  Section  géologique.  J^aime  à  croire 
que  ce  travail  sera  bien  reçu  par  nos  lecteurs  et  je  saisis 
avec  plaisir  l'occasion  de  présenter  à  mon  estimable  collè- 
gue l'expression  de  reconnaissance  qui  lui  est  due  pour  cette 
intéressante  contribution,  qui  est  venue  enrichir  le  volume 
que  j'ai  l'honneur  de  présenter  aujourd'hui. 


Lisbonne  le  lo  septembre  i 


Joaquim  FUippe  Nery  De'lgado 
L'un  des  vice-présidents  du  Congrès 


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PEOTEOTEUE 

SA    MAJESTÉ    LE    ROI    DE    PORTUGAL 

PBËSISENT    D'HONKEXIS 

SA  MAJESTÉ  LE  ROI  DOM  FERNANDO  II 


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COMITE  D'ORGANISATION 


POUR   LA  SESSION  UE   1 88o 


PRÉSIDENT 

MM.  Andrade  Corvo  {J-  de),  conseiller  d'éiai,  ministre  honoraire,  mem- 
bre de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  directeur 
de  l'École  Polytechnique.  Lisbonne. 

SECRÉTAIRE 

RmEiRO  (Caklos),  colonel  d'artillerie,  membre  de  l'Académie 
Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  chef  de  la  Section  des  Tra- 
vaux Géologiques.  Lisbonne. 

TRÉSORIER 

Teiieira  de  Aragâo  (A.  C),  membre  de  l'Académie  Royale  des 
Sciences  de  Lisbonne,  professeur  d'hygiène  militaire.  Lisbonm 

MEMBRES  DU  COMITÉ 

AcuiAR  (A.  A.  de),  conseiller  honoraire,  membre  de  l'Académi 
Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  professeur  â  l'École  Poly 
technique.  Lisbonne. 


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MM.  AiXEN  (E.  A.),  correspondant  de  l'Académie  Royale  des  Sciences 
de  [.isbonne,  directeur  du  Musée  municipal  de  Porto.  Porto. 

Barbosa  du  Bocage  (J.  V.),  membre  de  l'Académie  Royale  des 
Sciences  de  1-isbonne,  professeur  à  l'Ecole  Polytechnique,  pré- 
sident de  la  Société  de  Géographie  de  Lisbonne.  Lisbonne. 

Bahbosa  (Antonio  Maria),  conseiller  honoraire,  membre  de  l'Aca- 
démie Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  professeur  à  l'École 
de  Médecine.  Lisbonne. 

Carvalho  (le  ur.  Thomaz  de),  membre  de  l'Académie  Royale  des 
Sciences  de  Lisbonne,  directeur  de  l'École  de  Médecine.  Lis- 


Costa  I.eite  (M.  M.  da),  conseiller  honoraire,  directeur  de  l'Aca- 
démie de  Médecine.  Porto. 

Delgado  (J.  F.  Nerv),  major  du  (jénie,  correspondant  de  l'Aca- 
démie Rovjle  des  Sciences  de  Lisbonne,  ingénieur  adjoint  de 
la  Section  des  Travaux  Géologiques.  Lisbonne. 

Ennes  (Antonio),  licencié-ès-le»res.  Lisbonne. 

FicALHO  (le  comte  de),  membre  de  l'Académie  Royale  des 
Sciences  de  Lisbonne,  professeur  il  l'École  Polytechnique.  Lis- 

Latiko  Coeij)o(J.  m.),  ministre  ei  conseiller  honoraire, secrétaire 
général  de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  profes- 
seur il  l'École  Polytechnique.  Lisbonne. 

M.\nTiNs  Sarmsnto  (F.),  correspondant  de  l'Académie  Royale 
des  Sciences  de  Lisbonne,  bachelier  en  droit.  Guimarâes. 

Mendes  Leal  (J.  HA  Silva),  ministre  et  conseiller  honoraire,  mem- 
bre de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  I^isbonne,  ministre 
plénipotentiaire  de  Portugal  en  France.  Paris. 

Pere[ra  da  Costa  (F.  A.),  bachelier  en  médecine  et  en  philoso- 
phie, professeur  â  l'École  Polytechnique.  Lisbonne. 

Pereira  da  Silva  (F.  M.),  conseiller  honoraire,  contre-amiral.  Lis- 

PossiDONio  DA  Silva  (J.),  architecte  de  S.  M,  le  Roi,  président  de 
la  Société  Royale  des  architectes  et  archéologues  portugais. 
Lisbonne. 

Silva  Leal  (J.  M.  da),  correspondant  de  l'Académie  Royale  des 
Sciences  de  Lisbonne.  Lisbonne. 


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MM.  SiLVESTRE  RjBEiKO  (/.),  ministre  et  conseiller  honoraire,  membre 
de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne.  Lisbonne. 

Vasconcellos  (F.  A.  db),  bachelier  en  philosophie,  ingénieur  adjoini 
de  la  Section  des  Travaux  Géologiques.  Lisbonne. 

ViLHENA  BxKBosA  (I.  de),  membre  de  l'Académie  Royale  des  Scien- 
ces de  Lisbonne.  Betem. 


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REGLEMENT   GÉNÉRAL 


Art  1.  Un  Congrus  intLTnaiional  d'Anthropologie  cl  d'Archéologie 
préhistoriques,  faisant  suite  aux  réunions  qui  ont  eu  lieu  en  i865  ù  la 
Spezia  et  en  1866  à  Neuchâid,  a  cti^  définitivement  constitué  à  Paris 
en  i867.~A  partir  de  1871  les  sessions  auront  lieu  tous  les  deux  ans: 
(voté  a  Bruïtelles  en  1872). 

Art.  11.  [,e  Congrès  ne  pourra  avoir  lieu  deux  fois  de  suite  dans 
le  même  pays. 

Art.  m.  Font  partie  du  Confjrùs  et  ont  droit  à  toutes  ses  publica- 
tions les  personnes  qui  en  ont  fait  la  demande  et  ont  acquitté  la  coti- 

Art.  IV.  A  la  fin  de  chaque  session,  le  Congrès  désigne  le  lieu  où 
se  tiendra  la  session  suivante;  il  choisit  en  outre,  parmi  les  savants 
rendant  dans  le  pays  désigné:  i."  le  Président  de  la  session  future, 
2.'  plusieurs  autres  savants  chargés  de  constituer,  sous  la  direction  du 
Président,  un  Comité  d'organisation. 

Art.  V,  Le  Comité  d'organisation  peut  s'adjoindre,  suivant  ses  be- 
soins, d'autres  savants  nationaux.  Il  demande  en  outre  le  concours 
des  savants  étrangers  qui  lui  paraissent  pouvoir  recueillir  le  plus  grand 
nombre  d'adhésions  en  faveur  du  Congrès.  Ceux-ci  prennent  le  titre 
de  Membres  correspondants  du  Comité. 

Art.  VI.  Le  Comité  fixe  l'époque  de  la  session,  le  nombre  des 

.  séances,  le  taux  de  la  cotisation;  il  envoie  les  lettres  de  convocation, 

recueille  et  concentre  les  adhésions  et  délivre  les  cartes  des  membres. 

Il  se  charge  de  tous  les  soins  matériels  qui  conccrnem  l'installation 

du  Congrès  et  la  tenue  de 


Art.  Vil,  Il  prépare,  publie  et  distribue,  plusieurs  mois  ù  l'avance, 
le  programme  dus  séances;  il  peut  lixer  un  certain  nombre  de  ques- 
tions; mais  il  devra  toujours  réserver  une  partie  des  séances  pour  tou- 
tes autres  questions  non  comprises  dans  le  programme,  proposées  par 
un  membre  du  Congrès  et  approuvées  par  le  Conseil. 

Art.  vdi.  Le  Bureau  du  Comité  remplit  les  fonctions  de  Bureau 
provisoire  dans  la  première  séance  de  la  session.  Les  membres  du  Bu- 
reau définitif  sont  nommés  dans  cette  première  séance,  à  la  majorité 
relative.  Cl  l'exception  du  Président,  qui  est  élu  depuis  l'année  précé- 
dente, et  du  Trésorier  déjà  institué  par  le  Comité  d'oi^anisation. 

Art.  IX.  Le  Bureau  se  compose:  i.°  d'un  Président;  2."  de  six 
Vice-Présidents,  dont  deux  au  moins  doivent  êlre  résidents;  3.°  d'un 
Secrétaire  général;  4.'  de  quatre  Secrétaires;  5.*  d'un  Trésorier. 

Art.  X.  Le  Conseil  se  compose:  i.°  des  membres  du  Bureau  dé- 
tinitif;  1.°  de  six  membres  nommés  au  scrutin  de  liste.  Font  en  outre, 
de  droit,  partie  du  Conseil:  i.'les  quatre  membres  fondateurs  du  Con- 
grès de  la  Spezia  ;  i.°  tous  les  anciens  Présidents,  qui  conservent  le  ti- 
tre de  Présidents  honoraires. — Les  membres  du  Comité  d'organisation 
qui  ne  rentreraient  pas  dans  l'une  des  catégories  précédentes,  assistent  ■ 
aux  séances  du  Conseil  avec  voix  consultative. 

Art.  x[.  Toutes  les  demandes  de  communication  survenues  pen- 
dant la  session  et  toutes  les  réclamations  sont  soumises  au  Conseil,  qui 
statue  définitivement.  Le  Conseil  est  en  outre  chargé  de  proposer  au 
vote  du  Congrès,  conformément  à  l'article  iv:  i.°  la  désignation  du 
lieu  oti  se  tiendra  la  session  suivante  :  2.°  la  nomination  du  Président 
ei  des  membres  du  Comité  d'organisation  du  futur  Congrès. 

Art.  XII.  Dans  sa  seconde  séance,  le  Congrès  nomme,  sur  la  pro- 
position du  Conseil,  une  Commission  de  publication  dont  le'Secrétatre 
général  est  président  de  droit,  et  dont  le  Trésorier  fait  également  par- 
tie. Cette  Commission,  entièrement  composée  de  membres  n: 
sera  en  outre  chargée  d'apurer  les  comptes. 

Art.  XIII.  S'il  y  a  un  reliquat,  il  sera  reporté  à  l'actif  de 


Art.  XIV.  Les  objets  offerts  au  Congrès  pendant  la  session,  ainsi  que 
.  toutes  les  pièces  de  la  correspondance,  sont  acquis  au  pays  où  la  ses* 
sion  a  lieu.  Leur  destination  est  déterminée  par  le  Conseil. 

Art.  XV.  Le  Comité  de  chaque  session  établit  un  règlement  pard- 


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culier  concernant  toutes  les  dispositions  sur  lesquelles  il  n'est  pas 
statué  dans  le  présent  règlement  général. 

Art.  XVI.  Toute  proposition  tendant  à  modifier  le  règlement  géné- 
ral devra  être  signée  de  dix  membres  au  moins,  déposée  sur  le  bureau 
pendant  le  courant  de  la  session,  et  soumise  â  l'examen  du  Conseil. 
Celui-ci,  après  en  avoir  délibéré,  prépare  un  rapport  qui  est  inséré, 
ainsi  que  la  proposition,  dans  les  publications  du  Congrès,  et  qui  est 
mis  aux  voix  sans  discussion,  par  oui  ou  par  non,  dans  la  première 
séance  de  la  session  suivante. 

t ."  Art.  additionnel  voté  pendant  la  session  de  Bologne  (i87i). 
La  langue  française  est  seule  admise  pour  les  communications  Tcr- 
bates  pendant  les  séances  et  dans  la  publication  du  compte-rendu  du  ' 
Congrès. et  des  mémoires  qui  y  sont  joints. 

a.ème  Art,  additionnel  voté  pendant  la  session  deBudapesth(i876). 
Les  membres  du  Congrès  qui  auront  été  nommés  Vice-Présidents 
pendant  quatre  sessions,  deviendront  de  droit  Vice -Présidents  hono- 


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QUESTIONS  À   DISCUTER 

Conformément  à  l'article  vu  du  Règlement  général,  le 
Comité  d'organisation  a  proposé  les  questions  suivantes  pour 
être  spécialement  discutées  pendant  le  Congrès: 

I.  Y  a-t-il  des  preuves  de  l'existence  de  l'homme  en  Portugal  pen- 
dant l'époque  tertiaire? 

II.  Comment  se  caractérise  l'âge  paléolithique  en  Portugal  pendant 
l'époque  quaternaire? 

ui.  Comment  se  caractérise  l'âge  néolithique  en  Portugal? 
I."  Dans  les  Kioekkenmoeddings  de  la  vallée  du  Tage; 
1."  Dans  les  cavernes,  soit  naturelles,  soit  artificielles,  contenant 
des  restes  humains  et  des  produits  de  l'art; 

3.°  Dans  les  monuments  mégalithiques  et  dans  d'autres  stations. 

IV.  Quelles  sont  les  notions  acquises  sur  les  caractères  anatomiques 
des  habitants  du  Portugal  dans  les  temps  préhistoriques? 

V.  D'aprCs  quels  faits  peut-on  reconnaître  la  transition  de  l'âge  de 
la  pierre  polie  à  celui  du  cuivre  ou  des  métaux  en  Portugal  ? 

VI.  Quels  sont  les  faits  constatés  sur  la  civilisation  des  peuples 
qui  habitèrent  le  Portugal  antérieurement  à  la  domination  romaine? 

Le  Congrus  visitera  des  grottes,des  camps  et  des  stations  dans  diffé- 
rentes localités  aux  envirotis  de  la  capitale,  ainsi  que  les  couches  ter- 
tiaires entre  Alemquer,  Otta  et  Azambuja. 

Après  la  clôture  du  Congrès  on  visitera  les  stations  préhistoriques  des 
deux  Citamas  de  Britetros  et  de  Sabroso,  dans  la  province  de  Minho. 


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FONDATEURS,  ANCIENS   PRESIDENTS 
ET  VICE-PRÉSIDENTS  HONORAIRES 

MM  Capeluni  (le  prof.  Je-^n),  président  du  CoagrÈs  de  la  Spezîa  ;  fon- 
dateur. Bologne. 

CoKNAUA  (le  prof.  Ehile),  directeur  du  Musée  de  Milan;  fun- 
dateur.  Milan. 

Desor  (le  prof.  E.),  président  du  Congrès  de  Neuchâtel.  Neu- 
châtel. 

Dupont  (Ed.),  directeur  du  Musée  Royal  d'Histoire  Naturelle 

■  de  Bruxelles- Bnure/to. 

Franss  (A.  W.),  conservateur  des  andquirés  nationales  et  des  col- 
lections ethnographiques  au  «Biutish  Muséum».  Londres. 

GozzADiNi  (lb  comte  g.),  sénateur,  pré^dent  du  Congrès  de  Bo- 
logne. Bologne. 

HAMU.TON  (le  comte  H.),  tncmbre  de  l'Académie  Royale  d'Archéo* 
logie,  président  du  Congrès  de  Stockholm.  Stockholm. 

LuBBOCK  (sm  John),  Bart.,  F.  R.  S.,  président  du  Congrès  de  Nor- 
wich.  Higk  Elms,  Farnbormigh  (Kent). 

M0RTILI.ET  (Gabriel  de),  professeur  à  l'École  d'Anthropologie, 
attaché  au  Musée  de  Saint-Germain-en-Laye;  fondateur.  Satnt- 
Oermain  (Seine-et-Oisej. 

PuLszEY  (F.  de),  directeur  du  Musée  National,  président  du  Con-   ■ 
grès  de  Budapesth.  Budapesth. 

NiLssoN  (Sven),  membre  de  l'Académie  Royale  d'Archéologie. 

QuATRKFAGEs  de  Bréaux  (A.  de),  membre  de  l'instiiut.  Paris. 


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MM.  Stoppani  (l'abbé  Antonio),  professeur;  fondateur.  Florence. 

VmcHow  (le  t>R,  Rudolph),  professeur  A  l'Université  de  Berlin. 

Berlin. 
VoGT  (le  prof.  Cabl).  Genève. 

WoRSAAE  (J.  J.  A.),  directeur  du  Musée  Archéologique  de  Copen- 
hague, président  du  Congrès  de  Copenhague.  Copenhague. 


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LISTE    DES   DÉLÉGATIONS 


ALLEMAGNE 

MxM.  LissAUER  (A.),  délégué  de  ta  Société  Anthropologique  âe  Danizig. 
ScHAAFFHAUSEN  (H.),  délégué  de  la  Société  Anthropologique  d'Al- 
lemagne. 
ViRCHOw  (R.),  délégué  de  ta  Société  d  Anthropologie  de  Berlin. 


BELGIQUE 
BoRMANS  (S.),  représentant  du  Gouvernement  Belge. 

ESPAGNE 
ViLANOVA  (J.),  délégué  du  Gouvernement  Espagnol. 

FRANCE 

Alclave(E.),  représentant  du  Ministère  de  l'Instruction  Publique. 

Bave  (le  baron  J.  de),  délégué  de  la  Société  Française  d'Archéo- 
logie. 

Cartailhac  (E.),  représentant  du  Ministère  de  l'Instruction  Pu- 
blique. 

Magitot  (E.),  représentant  du  Ministère  de  l'Instruction  Publique. 

Ploix  (Ch.),  représentant  de  la  Société  d'Anthropol^ie  de  Paris. 


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^ 


MM.  Possji>oNto  DA  SiLVA  (J.),  rtpréïtniam  de  la  SocJéié  Académique 
Indo-ChinoÎM:  de  Paris. 
QuATfŒFAGEs  (A.  Dt),  détégué  de  l'Associaiion  Française  pour 

l'avancement  des  sciences. 
SiFiÈRB  (C),  délégué  de  la  Société  Académique  Hispa  no -Portu- 
gaise de  Toulouse. 

GRANDE-BRETAGNE 

Evans  (J,),  représentant  de  la  Société  des  antiquaires  de  Londres, 
délégué  de  l'Institut  Anthropologique  de  la  Grande-Bretagne. 


BELLtJca  (J.),  délégué  des  Sociétés  Italiennes  d'Anthropologie  et  de 

Géographie. 
Capelmni  (J.),  délégué  de  S.  M.  le  Roi  d'Italie,  représentant  de 

l'Université  Royale  et  de  la  ville  de  Bologne. 
PiGORiNi  (L.),  représentant  du  Gouveraement  de  l'Italie. 

LUXEUBOURG 

BoRUANS  (S.),  représentant  de  l'Institut  Royal  Grand  Ducal  du 
Luxcmhourf;. 

RDSSIE 

Antonovitch  (V.),  délégué  de  la  Société  d'Archéologie  de  Moscou 

et  de  l'Université  de  S.  Vladimir  à  Kiev. 
Pawinski  (A.),  représentant  de  l'Université  de  Varsovie. 

SUÈDE 
HiLDEBRAND  (H.),  représentant  du  Gouvernement  de  Suède. 


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LISTE   DES  MEMBRES  SOUSCRIPTEURS 
ÉTRANGERS  ET  NATIONAUX 


Session  de  iSSo  à  Lisbonne' 


ALLEUAONE 

MM.     AuEGG  (le  DR.  H.),  conseiller  intime,  directeur  de  la  Maternité  à 
Dantzig.  Dantpg. 
DiERCKs  (tx  DR.  Gustave).  Liittïchaustrassc.  Dresde. 

•  Dreuve  (le  prof.  C),  membre  de  la  Chambft  des  Députés.  Sas- 

kocji»,  Danl^if;. 
DOcKER  (le  daron  de),  conseiller  des  mines  de  Prusse.  Bucke- 

«Handeluann  (le  prop.),  directeur  du  Musée  d'Archéologie  de 
Kiel.  KUl. 

•  Helm  (O.),  chimiste,  membre  de  la  Société  Anthropologique 

d'Allemagne.  Danljîg. 

•  Hesse  (M"e  c.),  née  De  Herwarth.  Bonn. 

KvHn  (le  DR.  Max),  secrétaire  de  la  Société  d'Anthropologie  de 
Berlin.  Berlin. 

•  KOsTER  (le  DR.  E.),  professeur  en  chirurgie.  Berlin. 

•  KùsTER  { Mme  Marie).  Berlin. 

•  Langerhans  (le  DR,  Paul).  Fribourg,  Bade. 

'  Le  uom  des  membres  pi^Hnu  e>t  ivii-édi  d'un  uljri^qua. 


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MM.  #  LissAutK  (le  DR.  A.)j  président  de  la  Société  d'Anthropolo^e  de 
Daatzig.  Darttjig. 
Mestorp  (m<"°  J.),  conservateur  du  Musée  d'Archéolc^ie  de  Kiel. 
Kiel. 
«MUNSTERBERC  (M.).  Datfljtg. 
Paetsch  (le  DR.  I.),  médecin.  Berlin. 
Paetsch  (M"ie  I,).  Berlin. 
#ScHAAFFHAusEN  (le  db.  Hermann),  conseîllcr  intime,  professeur  a 
l'Université  de  Bonn.  Bonn. 

*  ScHAAFFHAusEN  {m*""  Anne).  Bonn. 

*  Schaaffhausen  (msI'«  Elisabeth),  Bonn. 

*  ScHAAFFHAUSEN  (mcHb  Marie).  BoKn. 
«Schaaffhausen  (m">i«  Mathildg).  Bonn. 
#Stbin  (Albert).  £oHn. 

TiscHLER  (le  DR,  O.),  directeur  du  Musée  d'Archéologie  Préhis- 
torique de  la  Société  Physico- économique  de  Koenigsberg. 
Koenigsberg. 

*  ViRCHow  (le  DR.  Rudolph),  conseiller  intitne,  professeur  à  l'Uni- 

versité de  Berlin.  Berlin. 
Wekbeker  (J.).  Dusseldorf. 


AUTRICHE 

*  Cornu  (le  dr.  Jules),  professeur  de  langues  et  littératures  roma- 
niques  à  l'Université  de  Prague.  Prague. 

Doelter(ledr.  Charles),  professeurs  l'Université  de  Gratz, di- 
recteur du  Musée  Minéralogique  Universitaire,  ancien  géologue 
de  l'Institut  Géologique  de  Vienne.  Gratj,  Styrie. 

Kalur  (Jules).  Kallenentgehen  près  Vienne. 

Lepkowski  (le  prof,  J.),  directeur  du  Musée  d'Archéologie  de 
l'Université  de  Cracovie.  Cracovie. 

WuRMBKAND  (le  comte  Gundak£r  de).  Ankensteitt  près  Petiau. 


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BELGIQUE 

MM.     Bamps  (Anatole).  Bruxelles. 

*Beneden  (P.  J.  van),  professeur  à  l'Université  de  Louvain.  Lou- 

«Blomme  (le  DR.  A.),  secrétaire  du  Cercle  Archéologique  de  Ter- 
monde.  Termonde. 
«Blomme  (m"*).  Termonde. 

•  BoRMANS  (Stanislas),  archiviste  de  l'État,  membre  de  l'Académie 

Royale  de  Belgique.  Namur. 
«BoRMANs  (u™).  Namur. 

*Ceuleneer(ledr.  Adolphe  de),  professeur  à  l'Université  deLié- 
ge.  Liège. 
Dupont  (Ed.),  directeur  du  Musée  Royal  d'Histoire  Naturelle. 

Bruxelles. 
Janson  (Paul),  membre  de  la  Chambre  des  Représentants  de 
Belgique.  Bruxelles. 
#OuN  (Xavikr),  membre  de  la  Chambre  des  Représentants  de 
Belgique,  recteur  de  l'Université  Libre  de  Bruxelles.  Bnixel' 
les. 
Poydt  (Marcel  de).  Liège. 

•  Vanlaik  (le  prof.).  Louvain. 

«Washer  (Gustave),  membre  de  la  Chambre  des  Représentants 
de  Belgique,  administrateur  des  Hospices  et  des  Hôpitaux  de 
Bruxelles.  Bruxelles- 

•  Washer  (m").  Bruxelles. 
WiLMART  (Léopold).  Blankenberghe. 


DANEHABE 

»  Adseksen  (le  capitaine  Frédéric).  Copenhague. 

Archives  du  Musée  des  Antiquités  du  Nord.  Copenhague. 
*  Dannemand  (m™  la  comtesse),  née  comtesse  de  Schulin.  Copen- 


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Enoklhakdt  (le  prof.  Conrad),  secrétaire  de  la  Sociéié  Royale 
des  Antiquaires  du  Nord.  Copenhague. 

HERnsT  (C.  F.),  inspecteur  au  Mtisée  des  Antiquités  du  Nord. 
Copenhague. 

MuLu^R  (SoPHus),  archéologue  adjoint  au  Musée  des  Antiquités 
du  Nord.  Copenhague. 

PETERSErf^LE  iiR.  Hëhri),  archcologuî;  adjoint  au  Musée  des  An- 
tiquités du  Nord.  Copenhague. 

ScHMiDT  (i.E  FROF.  Vaij)emar).  Copcnhague. 

Sehf.sted  (F.),  chatnbellan.  Broholm,  près  Svendborg,  Fionie. 

Steinkauer  (C),  inspecteur  au  Musée  d'Ethnographie.  Copen- 
hague. 

Stephëns  (Georoe),  professeur  à  l'Université  de  Copenhague. 
Copenhague. 

Strunk  (A.),  inspecteur  au  Musée  des  Antiquités  du  Nord.  Co- 
penhague. 

Worsaae  (J.  J.  a.),  chambellan,  directeur  de  plusieurs  musées 
et  des  monuments  archéologiques  du  Danemark,  ancien  pré- 
sident du  Congrès  de  Copenhague.  Copenhague. 


ESPAQNE 

Pherson  (GuiLi-ERMo).  12,  Salon  del  Prado,  Madrid. 

Pherson  (José),  iî,  Salon  del  Prado,  Madrid. 

es  (Mancel),  professeur  à  l'Université  Littéraire  de  SévUle. 

iéville. 

(DRAs  V  Burin  (Antonio),  avocat.  17,  Cervantes,  Séville. 

BiNO  (Francisco  M.),  secrétaire  de  la  Société  d 'Anthropologie. 

o,  Huenas,  Madrid. 

ANOVA  (Jt'^n),  professeur  de  paléontologie  au  Muséum  dHis- 

oirc  Naturelle  de  Madrid,  12,  S.  Vicente  Alta,  Madrid. 

.ANovA  (Josi^),  ingénieur  en  chef  au  Corps  des  mines.  PJaza 

-ommunion  Santo  Estévan,  Valence. 


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FINLANDE 


AsPELiv  (le  prof.  J.  R.),  conservateur  du  Musée  Historique,  se- 
crétiiire  de  la  Société  d'Archéologie  de  Finlande.  Helsing/ois. 

BiBMuTHÈQUE  dc  l'Unlversîté.  Helsîn^nrs. 

Donner  (le  prof.  O.),  viee-présidetit  de  la  Société  d'Archéologie 
de  Finlande.  Hehingfors. 

Mc;s^:e  historique  de  l'Université.  Hehinijfors. 

-Bancken  (ledr.J.O.I.),  ancien  recteur  du  Lycée  de  Vasa.  Vasa. 


FRANCE 

Acv  (Ernest  i>').  40,  Boulevard  Malesherbes,  Paris. 
#Ar.GLAVE  (Emile),  professeur  i  la  Faculté  de  Droit  de  Paris,  an- 
cien directeur  de  la  Revue  Scientifique.  91,  rue  du  Point  du 
Jour,  Paris. 
Ameghino  (Florentino).  (36,  rue  Lebrun,  Paris- 
Arcelin  (Adrien),  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie  de  HScon. 

Mâcon  (Saône-et-Loire). 
Bataillard  (Paul),  archiviste  à  la  Faculté  de  Médecine  de  Paris. 
6,  rue  Cassini,  Paris. 
«Baye  (le  baron  Joseph  de).  Château  de  Baye,  Baye  (Marne}. 
«Baye  (m™  la  baronne  de).  Château  de  Baye,  Haye  (Marne). 
«Bëausacq  (m"'  la  comtesse  de).  35,  rue  d'Amsterdam,  Paris. 

Beauvois  (Eugène).  Corberon  {Côte-d'O''). 
«Berthot  (M.).  Paris. 

RoNZOM  (C),  pharmacien.  Monein  (Basses- Pyrénées). 
«Bordé  (l'arbé).  Château  de  Baye,  Baye  (Marne). 
Boucher  (Henri  du),  président  de  la  Société  de  Borda.  Dax 

(Landes). 
Boutelli.er  (de),  ancien  député.  8,  rue  des  Saints-Péres,  Paris. 
•  Cartailhac  (Emile),  directeur  de   la  revue:  Matériaux  pour 
l'histoire  primitive  de  l'homme.  5,  rue  de  la  Chaîne,  Toulouse 
(Hauie-Garonne). 


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I.  «Cazaus  dk  Fondouce  (P.),  secrétaire  général  de  l'Académie  des 
Sciences  et  Lettres  de  Montpellier.  i8,  rue  des  Ëtuves, 
Monipellier  {Hérault). 

•  Chantre  (Ernest),  sous-directeur  du  Muséum  d'Histoire  Natu- 

relle de  Lyon.  37,  Cours  Morand,  Lyon  (Rhône). 

Chasteicner  (le  comte  Alexis),  ancien  officier  des  Haras.  3,  rue 
Duplessis,  Bordeaux  (Gironde). 

Chatellier  (Paul  du).  Château  de  Kemuz,  Pont-VAbbé  (Finis- 
terre). 

Chautet  (M.),  notaire  à  Ruffec  {Charente). 

Claudon  (Édouaiid).  Jardin  des  Plantes,  Paris. 

•  Cotteau  (Edmond),  membre  de  la  Société  de  Géographie  de  Pa- 

ris. 4,  rue  Sédaine,  Paris. 

•  Cotteau  (Gustave),  ancien  président  de  la  Société  Géologique 

de  France.  Auxerre  (Yonne). 

Croizibr  (le  marquis  de),  président  de  la  Société  Académique 
Indo- Chinoise.  Parts. 

Dai-eau  (François),  membre  de  la  Société  d'Anthropologie  de 
Paris.  Bourg-sur-Gironde  (Gironde). 

Davy  de  Cussé  (L.),  conservateur  du  Musée  Archéologique. 
Vannes  {Morbihan). 

DucRosT  (A),  curé  à  Solutri (Saône-et-Loire). 
«EsCHENAUER  (Auguste),  administrateur  du  Bureau  de  Bienfai- 
sance. 149,  Boulevard  Saint-Germain,  Paris. 

•  Espous  (le  comte  d').  Bois-Bonnard  par  Ville-Perdue  (Indre-et- 

Loire). 

Falsan  (Albert),  géologue.  Collonges-sur- Saône  près  Lyon 
(Rhône). 

Faucheux  (Jules),  percepteur.  12,  rue  Brocherie,  Grenoble 
(Isère). 

Février  (le  oÉNiRAL).  34,  Quai  de  la  Charité,  Lyon  (Rhône). 

Fière  (Paul),  archéologue.  Voiron  (Isère). 

FoNTENiLLE  (Paul  de),  membre  inspecteur  de  la  Société  Fran- 
çaise d'Archéologie.  Cahors  (Lot). 

Garhigou  (le  DR.  F.).  38,  rue  Valade,  Toulouse  (Haute -Garonne). 

Gassies  (H),  directeur  du  Musée  Préhistorique  de  Bordeaux. 
Bordeaux. 


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l.     Gaudrv  (Albert),  professeur  de  palëontotogie  au  Muséum.  7  bis, 
rue  des  Saints-Pères,  Paris. 

*  GuRD  (Alfred),  professeur  à  la  Faculté  de  Sciences  et  à  la 

Faculté  de  Médecine  de  Lille.  3j,  rue  Colbert,  Lille  {Nord). 

#  GmoD,   contrôleur   principal.  3o  bis,  Boulevard  Contrescarpe, 

Paris. 
GouRDON  (Maurice),  membre  de  la  Société   Géologique   de 

France.  Villa  Maurice  à  Luchon  {Haute-Garonne). 
*Gu[MET  (Emile),  r,  Place  de  la  Miséricorde,  Lyon  (Rhône). 
Hamy  (T,  E.),  aide-naturaliste  d'anthropologie  au  Muséum.  129, 

Boulevard  Saint-Michel,  Paris. 
Jacquinot  (le  DR.).  Sawigny-les-Bois  {Nièvre). 

#  JoHANNOT  (Henri).  Anrtonay  {Ardèche). 
JoRDELL  (le  DR.).  112,  rue  Je  Rivoli,  Paris. 

JouRNÉ  (Ca-mille).  5,  Mail  des  Taujtelles,  Troyes.  {Aube). 

Lair  (le  comte  Charles  de).  18,  rue  Las-Casas,  Paris. 

Lamm  (P.  A.).  12,  rue  Sainl-Roch,  Paris. 

Laktet  (Louis),  professeur  à  la  Faculté  des  Sciences  de  Tou- 
louse. 14,  rue  du  Poni  de  Tounis,  Toulouse  (Haule-Garon- 
ne). 

*  Lauriëre  {Jules  de),  secrétaire  général  de  la  Société  Française 

d'Archéologie.  i5,  Rue  des  Saints-Pères,  Paris. 
Leguay  (Louis),  trésorier  de  la  Société  d'Anthropologie.  3,  rue 

de  la  Sainte-Chapelle,  Paris. 
Lemaire  (le  prof,).  8,  rue  des  Saints-Pères,  Paris. 
Lemiëre  (P.  L.),  membre  de  la  Société  d'Émulation  des  Côtes- 

du-Nord.  Saint-Brieuc  {Côles-du-Nord). 
Lortet(i.e  DR.  L.),  directeur  du  Muséum  d'Histoire  Naturelle 

de  Lyon,  i,  quai  de  la  Guillotière,  Lyon  {Rhône). 
Lucas  (Charles),  architecte  de  la  Ville  de  Paris.  8,  Boulevard 

De  nain,  Paris. 
#Macitot  {le  DR.  Emile),  secrétaire  général  adjoint  de  la  Société 

d'Anthropologie.  8,  rue  des  Saints-Pères,  Paris. 
Maret  (Arthur  de),  membre  de  la  Société  Française  d'Archéo- 
logie. Château  du  Menieux,  Montambœuf  {Charente). 
Marsy  (le  comte  de),  conservateur  du  Musée  Vivenel.  Compiè- 

gne  {Oise). 


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^V. 


,  «Martin  (Henri),  sénateur,  membre  de  l'Institut.  38,  rue  Vital, 

Passy,  Paris. 
MicouLs  (V.),  membre  de  la  Société  d'Émulation  des  Côtes-du- 

Nord.  Saint-Brieuc  {Câte-du-Nord). 
MiLLEscAMPS  (Gustave),  membre  de  la  Société  d'Anthropologie 

de  Paris.  19,  Boulevard  Malcsherbes,  Paris. 
MoREL,  archéologue,  receveur  des  finances.  Nyons  (Drôme). 
»MoRiN  (Adolphe).  Dieulefit  (Drôme). 

MoRiN  (Henri).  Dieulefit  (Drame). 
*MoRTiLLET  (Gabbiei,  de),  professcuf  a  l'École  d'Anthropologie, 

attaché  au  Musée  des  Antiquités  Nationales.  Saint-Germain- 

en-Laye  (Seine-et-Oise). 
Nadaillac  (le  marquis  de),  iî,  rue  d'Anjou-Saint -Honoré,  Pa- 
ris. 
NiLSSON  (Knut),  libraire- éditeur.  212,  rue  de  Rivoli,  Paris. 
*NoDET  (Henri),  membre  de  la  Société  Française  d'Archéolofiie. 

20,  quai  do  la  Mégisserie,  Paris. 
Ou-iER  (le  DR.),  professeur  à  la  Faculté  de  Médecine  a  Lyon. 

5,  quai  de  la  Charité,  Lj^n  (Rhône). 
Oluer  de  Marichard  (J.),  archéologue.  Vallon  (Ardèche). 

•  Oppert  (J.),  professeur  au  Collège. de  France.  Paris. 

•  Offert  (m""»).  Paris. 

Palustre  (Léon),  directeur  de  la  Société  Française  d'Archéolo- 
gie. Rue  de  la  Tranchée,  Tours  (Indre-et-Loire). 

Pabdo  de  Tavera  (T.  H.).  43,  rue  de  Maubeuge,  Paris. 

Perrin  (André),  éditeur.  Chambéry  (Savoie). 

Perrot  (E.).  7,  rue  du  Lycée,  Laval  (Mayenne). 
«Ploix  (Charles),  ingénieur  en  chef  de  la  marine,  président  de 
la  Société  d'Anthropologie  de  Paris.  23,  rue  de  l'Université, 
Paris. 

PoMHEROL  (B.),  avocat,  rédacteur  de  la  revue  :  Matériaux  pour 
l'histoire  primitive  de  l'homme.  36,  rue  des  Écoles,  Paris  ou 
Veyre-Mouiou  (Puy-de-Dôme). 
*PoucHET  (le  DR.  G.),  professeur  au  Muséum.  5,  rue  de  Médicis, 
Paris. 

•  QuATREFAGEs  DE  Bréau  (A.  de),  mcmbrc  de  l'Institut,  professeur 

au  Muséum.  Jardin  des  Plantes,  Paris. 


Dipit.zPdhïGopglc 


MM.  •  QuATREFAGEs  DE  Bréau  {I.éonce  be),  îngéiiieur.  Jardin  des  Plan- 
tes, Paris. 

Rav  (Jules),  conservateur  du  Musée  d'Histoire  Naturelle  de 
Troyes.  Troyes  (Aube). 

Rétif  (pRÉutHii.),  directeur  des  contributions  directes.  Besançon 
{Doubs}. 

RcviËRE  (Emile),  rédacteur  de  la  Galette  des  Hôpitaux,  membre 
de  la  Société  d'Anthropologie  de  Paris.  iSg,  rue  de  Sèvres, 
Paris. 
«RoKiNEAU  (Cyrille).  ï5,  rue  de  Marignan,  Paris. 

•  RoWNEAtJ  (Théophile).  78,  rue  Lafayetie,  Paris. 

•  Roman  (E.).  Dieulefil  (Drùtnei- 

Sabatier  (Armand),  professeur  à  la  Faculté  des  Sciences  de 

Montpellier,  Montpellier  {Hérault). 
SAlNT-^LDEPHONT(LEBARo^  de).  1  o,  rue  des  Marans,A/ifcon  (Siïi5«e- 

ei- Loire). 
Saint- Ildephont  (m™  la  baronne  de).  10,  rue  des  Marans,  Md- 

con  (Saône-et- Loire). 
Seidler  (Charles),  négociant.  i3,  rue Dobrée,  JVatH/ej {io("re-/n- 

férieure). 

•  SiPiËRE(CLÉMEKT),présidentdela  Société  Académique  Hispano- 

Portugaise  de  Toulouse.  45,  rue  des  Tourneurs,  Toulouse. 
«SiPzÈRE  (Henri).  4S,  rue  des  Tourneurs,  Toulouse. 
SoaÉTÉ  Archéologique  du  Midi  de  la  France.  Toulouse. 
SociÉTÉ  b'tIuuLATioN  des  Côtes-du-Nord.  S.  Brieuc  (Côtes-du- 

Nord). 
Société  d'histoire  naturelle  de  Toulouse.  Toulouse. 
Stirrup  (Mark).  Toulouse. 

Taillebois  (E.),  archiviste  de  la  Société  de  Borda.  Dax  (Landes). 
TouRNiER  (Benjamin).  Toulouse. 
TouRNouËR  (Raoul),  ancien  président  de  la  Société  Géologique 

de  France.  43,  rue  de  Lille,  Paris. 
Travers  (Emile).  Caen  (Calvados). 
Valentin  (Florian),  substitut  du  Procureur  de  la  République. 

Monlélimar  (Drame). 
VoGÎJÉ  (le  comte  Melchior  de),  membre  de  Tlnstitut.  1,  rue 

Fabert,  Paris. 


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GRANDE  BRUTAONE   ET   IRLAUSE 

[.     Académie  Royale  d'Irlande.  Dublin. 

Allen  (J,  Romillï).  Edimbourg. 

Anderson  (J.),  conservateur  du  Musée  d'Antiquités.  Edimbourg. 

Athen^um  Club.  Pall  Mail,  Londres. 

Atkinson,  (C.  m.).  aS,  St.  Oswald's  Road,  West  Bromplon. 

Beck  (le  révérend  j.).  Btldeslon  Rectory,  tpswich. 

BiBLiOTHÈQtjE  du  «British  Muséum».  Londres. 

BiBLioTHÈcjuE  et  Musée  publiques  de  la  ville  de  Liverpool. 

Bibliothèque  de  l'Université  de  Cambridge. 

BoULASE  (W.  C),  M.  P.,  F.  S.  A.  University  Club,  Londres. 

Brabrook  (E.  W.),  F.  S.  A.  28,  Abingdon  Street,  Londres. 

Brent  (John),  F.  S.  A.  Canlerbury. 

BuRTON  (F.  W,),  F.  S.  A.,  directeur  de  la  Galerie  Nationale. 
Londres. 

BusK  (George),  F.  R.  S.  Si,  Harley  Street,  Londres. 

Carprae  (R.).  Edimbourg. 

Carnarvon  (le  comte  de),  président  de  la  Société  des  Antiquai- 
res de  Londres.  Burlington  House,  Londres. 

Clarke  (Hvde).  3a,  St.  Geor^e's  Square,  Londres. 

Cochran-Patrick  (R.  W.),  M.  P.,  F,  S.  A.  House  of  Gommons, 
Londres. 

Collection  Christï.  io3,  Victoria  Street,  Londres. 

Collège  de  l'Université.  Gower  Street,  Londres. 

CooK  (Francis),  vicomte  de  Monserrate.  Richmond,  Surrey. 

CooTE  (H.  C),  F.  S-  A.  i3,  Westgate  Terrace,  Redcliffe  Square, 
Londres. 

Darbishire  (R.  D),  F.  S.  A.  Victoria  Park,  Manchester. 

Dawkins  (le  prok.  w.  Boyd),  F.  R.  S.  Owens  Collège,  Man- 
chester. 

Day  (Robert),  F.  S.  A.  Rochview,  Montenotte,  Cork,  Irlande. 

Eu.iOT  (sir  Walter),  K.  C.  S.  I.  Woljlee,  Howîch,  Ecosse. 
#EvANs  (John),  D.  C.  L.,  LL.  D.,  F.  R.  S.  Nash  Mills,  Hemel, 
Hempsted. 


^ 


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MM.  *EvANs  (Min>).  Hempsted. 

•  EvAHS  {m«ii«).  Hempsfed. 

Fergusson  (Jaues),  F.  R.  S.  ao,  Langham  Place,  Londres. 
FiTCH  (Robirt),  F.  S.  A.  Nonvich. 
Franks  (A.  W.),  F.  R.  S.  BriiUb  Muséum,  Londres. 
Freshfield  (Edwin),  F.  S.  A.  5,  Bank  Buildings,  Londres. 
GouDiE  (Gilbert).  3g,  Northumberland  Street,  Edimbourg. 
Greenwell  (le  chanoine  W.),  F.  R.  S.  Durham. 
Grote  (AnTHUR).  Athenxum  Club,  Londres. 
Hailstone  (Edward),  F.  S.  A.  Wallon  Hall,  Wakefield. 

•  Harrison  (Charles),  F.  S.  A.  to,  Lancasier  Gâte,  Londres. 
HooKER  (sir  J.  D.),  F.  R.  S.  Royal  Gardens,  Kew. 
HoVoRTH  (H.  H.),  F.  S.  A.  Ecdes,  Manchester. 

«HuBBARD  (Meii*  Frances).  Londres. 
Hughes  (le  prof.  T.  W  K.),  F.  S.  A.  Trinily  Collège,  Cambridge. 
Institut  Anthropologique  de  la  Grande-Bretagne  et  d'Irlande. 

4,  St.  Martins  Place,  Trafalgar  Square,  Londres. 
Jones  (le  prof.  T.  Rupert),  F.  R.  S.  Powis  Villa,  Camberley. 

Lee  (E.  J.),  F.  S.  A.  Villa  Syraatsa,  Torquay. 

Long  (Wiluam),  F.  S.  A.  Weslhay,  Wringlon,  Somerset. 

Lu&BOCK  (sir  John),  Bart.  M.  P.,  F.  R.  S.,  ancien  président  du 
Congrès  de  Norwich.  fligh  Elms,  Famborough,  Kent. 

LuKis  (le  révérend  w.  C).  Wath,  Ripon. 

Mackenzie  (J.  Whiteford).  t6,  Royal  Circus,  Edimbourg. 

Major,  (R.  H.),  F.  S.  A.  5i,  Holland  Road,  Kensington,  Londres. 

Maskelyne  (le  prof.  N.  S.),  M.  P.,  F.  R.  S.  Salthrop,  Wraughton, 
Swindon. 

Milman  (H.  s.),  directeur  de  la  Société  des  Antiquaires  de  Lon- 
dres. Lcmdres. 

MiTCHELU  (Arthur),  M.  D.,  secrétaire  de  la  Société  des  Antiquai- 
res d'Ecosse.  Edimbourg. 

Morgan  (Octavius),  F.  S.  A.  The  Friars,  Nemporl,  Monmouth- 
stùre. 

MosELEY  (le  prof.  h.  N.),  F.  R.  S.  Oxford. 

Musée  de  Géolo^e  Pratique.  Jermyn  Street,  Londres. 

Newton  (C.  T.),  C.  B.,  F.  S.  A.  British  Muséum,  Londres. 


,ï  Google 


NiGHTiNGALE  (J.  E.),  F.  S.  A.  The  Mmttt,  WiUon,  Wilts. 

NoRTHËSK  (le  comte  de),  F.  s.  A.  St.  George's  Square,  Londres. 

OuvRï  (Fkédéric),  F.  S.  A.  la,  Queen  Anne  Sireet,  Londres. 

OwEN  (le  prof.  Richard),  F.  R.  S.  British  Muséum,  Londres. 

Pekceval  (C.  s.),  F.  S.  A.  C4,  Kccleston  Square,  Londres. 

Prestwich  (le  pRor.  J.),  F.  R.  S.  Ox/ord. 

Pbicë  (F.  G.  H.),  F.  S.  A,  29,  Weymouth  Street,  Londres. 

Price  (J.  E.),  F.  S.  A.  60,  Albion  Road,  Sloke,  Newinglon. 

Read  (C.  h.),  F.  S.  A.  io3,  Victoria  Street,  Londres. 

Reeves  {F.  W.).  Londres. 

RivERs  (le  général  a.  Pitt),  F.  R.  S.  4,  Grosvenor  Gardens, 
Londres. 

RoBiNSON  (J.  C),  F.  S.  A.  10,  Vork  Place,  Portman  Square,  Lon- 
dres. 

RoBiNsoN{T.W.U.),F.S.A.HatfieldHouse,iîoM^A/on-/?-Spm=', 
Durham. 

RoLLESTON  {le  prop.  George),  F.  R.  S.  Oxford. 

RoTTON  (J.  F.),  3,  Boitons,  Brompion,  Londres. 

RuDLER  (F.  W.),  Royal  School  of  Mines.  aS,  Jermyn  Street,  Lon- 
dres. 

Russell{lobd  Arthur),M.  P.  10,  South  Audley  Streei,  Londres. 

Simpson  (le  révérend  W.  Sparrow),  D.  D.,  F.  S.  A.  1 19,  Kensiog- 
ton  Park  Road,  Lambcth,  Londres 

Smith  {J.  A.),  M.  D.,  secrétaire  de  la  Société  des  Antiquaires 
d'Ecosse.  Edimbourg. 

Smith  (R.  H.  Soden),  F.  S.  A.,  conservateur  au  Musée  de  South 
Kensington.  Londres. 

Société  des  Antiquaires  d'Ecosse.  Edimbourg. 

Société  des  Antiquaires  de  Londres.  Burlington  House,  Lon- 
dres. 

Société  Royale.  Burlington  House,  Londres. 
Spottiswoode  (William),   président  de  la  Société  Royale.  5o, 
Grosvenor  Place,  Londres. 

Sphatt  (le  contre-amiral),  c.  B.,  F.  R.  S.  Tunbridge  Wells. 

Spurrell  (F.  C,  J.).  Belvédère,  Frith,  KeiU. 

Stanley  (l'honorable  W.  O.),  F.  S.  A.  Penrhos,  Holyhead. 

Taliiot  de  Malahide  (lord),  Athena;um  Club,  Londres. 


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The  Art  Librakv.  Musée  de  South  KunsingTon,  Londres. 
TiMMiNS  (S.)-  Elvctham  Lodge,  Birmingham. 
TvLOR  (E.  B.),  F.  R.  S.  Linden,  Wellington,  Somerset. 
»  Ward  Beauclerk.  Bryanston  Square,  Londres. 
Watson,  (C.  K.),  secrétaire  Je  la  Société  des  Antiquairt 

Londres.  Burlington  House,  Londres. 
WiLLETT  (Henry).  Arnold  House,  Bnghlon. 
WvLiE  (W.  M.),  F.  S.  A.  Headington  Villa,  Ox/ord. 


GRÈCE 
Zaviziano  (le  prof.  Constantin).  Cor/ou. 


HONGRIE 

Ljuhic  (l'abbé  Siméon),  directeur  du  Musée  National.  Zagrab. 
PuLszKv  (François  de),  inspecteur  général  des  Musées  et  des 
Bibliothèques  de  Hongrie,  directeur  du  Musée  National,  an- 
cien président  du  Congrus  de  Budapesth.  Budapesth. 
•  RoMER  (le  DR.  F,  F.),  abbé  mitre,  couseiller  royal,  professeur  à 
l'Université  Royale,  conservateur  de  la  Section  Archéologique 
au  Musée  National.  Budapesth. 


ITALIE 

Angelucci  (le  major  Ancëlo),  directeur  du  Musée  d'Artillerie. 

ARorri  (le  chev.  Jacques).  Presicce,  Terra  d'Oiranto. 
«Bellucci  (le  DR.  Giuseppe),  professeur  à  l'Université  de  Pérouse. 
Pérouse. 
BoTTi  (le  chev.  Ulderigo).  Lecce,  Terra  d'Oiranto. 
#Bbunialti  (Attilio),  Pérouse. 

«Capeluni    (Giovanni),  professeur  de  géoI<^ie    à  l'Université 
Royale  de  Bologne.  Bologne. 


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1.     Castelfranco  {le  prof.  Pompeo).  Milan. 

Chieriq  {l'abbé  g.),  directeur  du  Musée  de  Re^o.  Emilie. 

CoRNAUA  {le  pro?.  Éimjo),  directeur  du  Musée  de  Milan.  Mi- 
lan. 

Deo  Gratias  (l'abbé  Perrando).  Stella  Santa  Giustina,  Ligurie. 

Fabretti  (le  prof.  Ariodante),  conservateur  du  Musée  d'Ar- 
chéologie à  l'Université  de  Turin.  Turin. 

FiDLER  (Basile),  Florence. 

FoRESTi  {le  DR.  LuiGi),aide  au  Musée  de  Géolo^e.  Bologne. 

GiAœMETTi  (le  DR.  ViNCENzo),  conservatcur  du  Musée  Civique. 
Manloue. 

GozzADiHi  {le  comte  g.),  sénateur,  ancien  président  du  Congrès 
de  Bologne.  Bologne. 

*  Incisa  {le  marquis  Emmanuel  Beccaria  de).  Rome. 

•  Krauss  (le  prof.  Alexandre).  Florence. 

Marinoni  (le  chev.  Camillo],  professeur  à  l'institut  Technique 
d'Udine.  Udine. 

Narvegna  (GitJSEPPE),  pré^dent  de  ta  Chambre  du  Commerce. 
Brindisi. 
*PiGORiNi  (le  DR.  LuiGi),  directeur  des  fouilles  et  du  Musée  Pré- 
historique Je  Rome.  Rome. 

Strobel  (le  prof.  Pelleorino).  Rome. 

Tarantini  (Arc.  Giovanni),  directeur  des  fouilles  à  Brindisi. 


LUXEUBOUEIO 


ScHOETTEH  {le  DR.  J.),  professcur  à  l'Athénée  de  Luxembourg. 
iMxembourg. 


HOBVËQE 

Musée  Archéologique  de  Christiania. 
RvGH  (le  prof.  O.).  Christiania. 

Undset  {Ingvalc),  gentilhomme  de  la  Chambre,  attaché   au 
Musée  Archéologique.  Christiania. 


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PAYS-BAS 

MM.     DiRKs  (le  DR.  J.),  président  de  la  Société  Frisonne  d'Archéologie. 

Leeutvarden. 
GoDEFRoi  (le  DR.  J.),  secrétaire  de  la  Société  des  Beaux-Arts 

et  des  Sciences  de  Nord-Brabant.  Bois-le-Duc. 
Leemans  (le  DR.  Conrad),  directeur  du  Musée  Royal  Néerlandais 

d'Anthropologie  et  du  Musée  Royal  d'Ethnographie.  I^yde. 
Leemans  (mœ»  C.  m.).  Leyde. 


Urechia  (Al 
Buckarest. 


BOUUANIE 
;),  professeur  â  l'Université  de  Bucharest. 


RUSSIE 


*ANTOHoviTCH(VLADiMiK),  professeurà  l'Université  deKiev.  ^iev. 
LiKHATCHEFi'  (le  PROF.  Amdré),  conservateur  à  l'Université  de 

Kasan.  Kasan. 
Merjkowsky  (Constantin).  S.-Pétersbourg. 
MiERZYNSKi  (le  prof.  A.),  doyeu  de  l'Univer^té  Impériale  de  Var- 
sovie. Varsovie. 
*  Pawinski  (le  DR.  Adolphe),  professeur  à  l'Université  Impériale  de 
Varsovie.  Varsovie. 
pRZEZDZiEtKi  (le  comte  Contantin).  Varsovie. 
«Zawisza  (le  comte  Jean).  Varsovie. 


SUÈDE 

Académie  Royale  des  Belles-Lettres,  d'Histoire  et  des  Antiqui- 
tés de  Sockkolm. 
AHLqvisT  (ledr.  a.  g.).  Vexio. 


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BuiMBEUG  (le  dk.  A.  B.),  attache  au  Muscc  Royal  d'Archéo- 
logie. Stockholm. 

Ekhoff  (E.), attaché  au  Musée  Royal  d'Archéologie,  Stockholm. 

Hamilton  (le  comte  H.),  grand  chancelier  des  Universités  sué- 
doises, ancien  président  du  congrès  de  Stockholm.  Stockholm. 

HiLDEBKAND  (le  dk.  6.  E.),  ancien  secrétaire  du  Musée  Royal 
d'Archéologie,  ancien  antiquaire  du  Royaume.  Stockholm. 

•  Hi[j>EBRAND  (le  DK.  Hans),  Secrétaire   du  Musée  Royal  d'Ar- 

chéologie, antiquaire  du  Royaume.  Stockholm: 
Kbamer  (le  prof.  J.  h.),  Stockholm. 
Klingspor  (C.  a.).  Upsal. 
LuNDBERo  (i^  DR.  R,  N.  K.).  Vexi'o. 
MoNTEuus  (lc  DR,  Oscar),  premier  conservateur  du  Musée  Royal 

d'Archéologie,  Stockholm. 
OuvECKONA  (K.),  conseiller  à  la  Cour  Suprême  du  Royaume. 

Stockholm. 
Reventlov  (le  comte  C,  T>.).  Harfva. 

•  Roos  (Gustaf).  Sockholm. 

Stolpe  (le  DR.  Hulmak),  second  conservateur  du  Musée  Royal 

d'Archéologie.  Stockholm. 
ToKiN  (K.).  Skara. 

WiDERG  (le  Di).  Ch.4hlj!s  F.),  professcur  au  Lycée  de  Gctle.  Gefle. 
WiTTLocK  (le  DR.  J.  A.),  médecin,  Vexio. 


SUISSE 

»Choff.*t  (Paul),  professeur  à  l'Université  de  Zurich.  Zurich. 
•  Choffat  (Mlle).  Zurich. 
Gkos  (le  dk.  V.).  Neuveville. 
Heek  (le  DR.  OswAi.n),  professeur  a  l'Université  et  nu  Polytechni- 

eu  m  de  Zurich.  Zurich. 
MoKEL  Fatio  (A.),  directeur  du  Musée  Archéologique  de  Lau- 
sanne. Lausanne. 


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PORTUGAL 

MM.     Aguiah  (Antonio  Aogusto  de),  conseiller  honoraire,  membre 

l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  professeï 

l'École  Polytechnique.  Lisbonne. 
Alemquer  (le  vicomte  de),  trésorier  de  la  Société  Royale 

architectes  et  archéologues  portugais.  Lisbonne. 
Allen  (Eduardo  Augusto),  correspondant  de  l'Académie  Ro; 

des  Sciences  de  Lisbonne,  directeur  du  Musée  Municipal 

Pono.  Porto. 
Alueida(Franciso  José  de),  membre  de  la  Société  Royale 

architectes  et  archéologues  portugais.  Lisbonne. 
Almeida  Carvalho  (Joâo  Carlos  de).  Lisbonne. 
Andrade  Corvo  (Joâo  de),  conseiller  d'état,  ministre  honors 

membre  de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne 

recteur  de  l'École  Polytechnique.  Lisbonne. 
Arbués  Moreira  (Carlos  Ernesto  de),  conseiller  honoraire, 
■  néral  de  brigade,  directeur  général  des  travaux  géodésiq 

topographiques,  hydrographiques  et  géologiques  du  Royau 

Lisbonne. 
AzEVEDo  (Fernando  de),  correspondant  de   l'Académie  Ro; 

des  Sciences  de  Lisbonne.  Lisbonne. 
Barbosa  (le  DR.  Antonio  Maria),  conseiller  honoraire,  merr 

de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  profesi 

a  l'École  de  Médecine.  Lisbonne. 


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Bakhosa  nu  Bocage(ledr.  José  Vicente),  membre  de  l'Académii' 
Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  professeur  à  l'École  Poly- 
technique, président  de  la  Société    de  Géographie  de  Lis- 
bonne. Lisbonne. 
Benalcanfoh  (le  vicomte  i)ë),  membre  de  l'Académie   Royak- 

dcs  Sciences  de  Lisbonne.  Lisbonne. 
Berkeley  Cotter  (Jorgë  Candido),  adjoint  de  la  Section  deï 

travaux  géologiques.  Lisbonne. 
Bernaroes  Bkanco  (Manuel),  associé  provinciel  de  l'Académie 

Royale  des  Sciences  de  Lisbonne.  Lisbonne. 
Bettencourt  Raposo  (Pedro  Antonio),  professeur  ù  l'École  de 

Médecine  de  Lisbonne.  Lisbonne. 
Bocage  (Carlos  Roma  du),  capitaine  du  génie,  correspondam 

de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne.  Lisbonne. 
BuRNAV  (Eduamdo),  médecin.  Lisbonne. 

Carvalho  (le  DR.  Thomaz  de),  membre  de  l'Académie  Royale 
des  Sciences  de  Lisbonne,  directeur  de  rE:x:ole  de  Médecine. 
Lisbonne. 
Carvalho  (Tito  Aucusto  de),  chef  de  bureau  au  Ministère  de 

la  marine.  Lisbonne. 
CoELiio  (Eduabdo),  rédacteur  en  chef  et  co-propriétaire  du  jour- 
nal "Diario  de  Noiicias».  Lisbonne. 
CoELHo  (!•'.  Adot.pho),  professeur  A  l'École  Supérieure  des  Let- 
tres. Lisbonne. 
CoNtEiçÂo  (Alexandre  da),  ingénieur  civil.  Figueira.da  Foj. 
CoNsiGUERi  Pedroso  (Zofiho),  professeur  à  l'École  Supérieure 

des  Lettres.  Lisbonne. 
CoRDBiRO  (LucLANo),  secrétaire  de  la  Société  de  Géographie  de 

Lisbonne.  Lisbonne. 
CoHREiA  Barata  (le  DR.  FRANCISCO  AuGusTo),  profcsscor  à  la 
Faculté  de  Philosophie  de  l'Université  de  Coïmbre.  Cam- 
bre. 
Costa  Basto  (Joâo  Pedro  d a),  correspondant  de   l'Académie 

Royale  des  Sciences  de  Lisbonne.  Lisbonne. 
CuMANo  (JusTiNo),  médecin.  Faro. 
CuNHA  Seihas  (Antonio  da).  Lisbonne. 
CuNHA  Skixas  (José  Maria  da),  avocat,  Lisbonne. 


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Daveau  (Jules),  conservateur  du  jardin  botanique  de  l'École  Po- 
lytechnique de  Lisbonne.  Lisbonne. 

Delgado  (Joaquim  Philippe  Nery),  major  du  génie,  adjoint  de 
la  Section  des  travaux  géologiques,  correspondant  de  l'Aca- 
démie Royale  des  Sciences  de  Lisbonne.  Lionne. 

Ennes  (Antonio),  licencié -ès-leitre s.  Lisbonne. 

EspREGUEiRA  (Manuel  Affonso  de),  directeur  de  la  Compagnie 
Royale  des  chemins  de  fer  portugais.  Lisbonne. 

EsTACio  DA  VciGA  (Sebastjâo  Philippes  Martins),  correspondant 
de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lbbonne.  Lisbonne. 

Feuô  (Joâo  Maria),  conseiller  honoraire,  vice-président  de  la 
Société  Royale  des  architectes  et  archéologues  portugais.  Lis- 

Ferreira  de  LouREiRo  (AooLPHo),  major  de  l'état-major.  Co'im- 

Ferrewa  Pinto  (IsinoRo).  Selubal. 

FicALHo  (le  comte  de),  membre  de  l'Académie  Royale  des  Scien- 
ces de  Lisbonne,  professeur  â  l'École  Polytechnique.  Lisbonne. 

Figanière  (Jorge  César  de),  correspondant  de  l'Académie  Roya- 
le des  Sciences  de  Lisbonne,  sous-directeur  du  Ministiïre  des 
Affaires  Étrangères.  Lisbonne. 

FoNSECA  GouvEiA  (Abiuo  Guedes  da).  Lisbonne. 

Gaspar  Gomes  (le  DR.  Joaquim  Eleutherio),  correspondant  de 
l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  professeur  à 
l'Institut  généra]  d'agriculture.  Lisbonne. 

Geraldes  (le  DR.  Albino),  professeur  à  la  Faculté  de  Philoso- 
phie de  l'Université  de  Coïmbre.  Ofimbre. 

Girard  (Alberto).  Lisbonne. 

Gomes  (Joaquim  da  Conceiçâo),  membre  de  la  Société  Royale 
des  architectes  et  archéologues  portugais.  Lisbonne. 

Gonçalves  Vianna  (Amceto  dos  Reis),  chef  de  Section  à  la  Di- 
rection Générale  des  Douanes.  Lisbonne. 

Henriques  (le  DR.  Juuo  Aucusto),  professeur  à  la  Faculté  de 
Philosophie  de  l'Université  de  Coïmbre.  Cdxmbre. 

HiRSCH  (le  DR.  loNAcio  DE  Almeida),  médecin.  Lisbonne. 

LABOtJLAYE  (Paul  de),  ministre  plénipotentiaire  de  France  à  Lis- 
bonne. Lisbonne. 


..GoiilT"*^ 


I-OPEs  (JoÂo  CaklosI,  professeur  à  l'École  de  Médecine  de  Porto. 
Porlo. 

Malheiro  (l^URENço),  ingénieur  des  mines.  Lisbonne. 

Martins  Sarmento  (Francisco),  correspondant  de  l'Académie 
Royale  desSciences  de  Lisbonne, bachelier  en  dvon.Guimarâes- 

Mattos  {Antonio  Joaquim  de),  officier  de  bureau  à  la  Douane. 
Lisbonne. 

Mendonça  Cortez  (le  DR.  JoÂo  José),  professeur  â  la  Faculté 
de  Droit  de  l'Université  de  Coïtnbre.  Coimbre. 

Mesnier  (Pedro  Gastâo).  Lisbonne. 

MoNCOKVo  (E.  DE  Athaide).  Lisbonne. 

MuNRo  (Carlos  A.),  trésorier  de  la  Société  Royale  des  archi- 
tectes et  archéologues  portugais.  Lisbonne. 

Nevës  Cabral  (José  Augusto  Cesah  das),  correspondant  de 
l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  ingénieur  des 
mines.  Lisbonne. 

Olivf.iba  FeuÂo  (Francisco  Augusto  de),  professeur  à  l'École 
de  Médicine  de  Lisbonne.  Lisbonne. 

Oliveira  Martins  (J.  p.).  Povoa  de  Varpm. 

Palmeiriu  (Augusto  Xavier),  conseiller  honoraire,  général  de  di-. 
vision.  Lisbonne. 

Paula  e  OuvEiRA  (Francisco  de),  lieutenant  d'artillerie.  Lisbonne. 

pEQurro  (Rodrigo  Affonso),  professeur  â  l'Institut  Industriel  et 
Commercial  de  Lisbonne,  secrétaire  de  la  Société  de  Géogra- 
phie de  Lisbonne.  Lisbonne. 

Pessoa  (Olïmpio  Juuo),  médecin.  Lisbonne. 

PossmoNio  DA  SiLVA  (Joaquim),  architecte  de  S.  M.  le  Roi,  pré- 
sident de  la  Société  Royale  des  architectes  et  archéologues 
portugais.  Campotide  de  Baixo  près  Lisbonne. 

Rakalho  OkticÂo  (José  Duarte),  chef  du  bureau  de  l'Académie 
Royale  des  Sciences  de  Lisbonne.  Lisbonne. 

RiBEiRo  (Carlos),  colonel  d'artillerie,  membre  de  l'Académie 
Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  chef  de  la  Section  des  tra- 
vaux géologiques.  Lisbonne. 

RooRiQUEs  (José  Juuo),  correspondant  de  l'Académie  Royale 
des  Sciences  de  Lisbonne,  professeur  à  l'École  Polytechnique. 
Lisbonne. 


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RoDRiGUEs  Ferreira  (Sihâo).  Peiofiel. 

Roquette  (Francisco  Ferreiha),  ingénieur  des  mines,  professeur 
â  l'Institut  Industriel  et  Commercial  de  Lisbonne.  Lisbonne- 

Saldanha  d'Oliveira  e  Sousa  (dom  José  de),  secrétaire  de  la  So- 
ciété Royale  des  architectes  et  archéojogues  portugais.  Lis- 

Salzbero  (t.E  BARON  Emmanuel  be),  secrétaire  de  la  légation 
J 'Autriche-Hongrie  a  Lisbonne.  Lisbonne. 

Sanches  de  Baeha  (l^  vicomte  de),  membre  de  la  Société  Royale 
des  architectes  et  archéologues  portugais.  Lisbonne. 

ScHiAPPA  d'Azevedo  (Joâo  Baptista),  chef  du  bureau  des  mines, 
professeur  à  l'Institut  Industriel  et  Commercial  de  Lisbonae. 
Lisbonne. 

SiLVA  (Carlos  Bento  da),  conseiller  d'état,  ministre  honoraire. 
Lisbonne. 

SiLVA  Amado  {le  DR.  Jos£  JoAQoiM  da),  correspondant  de  l'Aca- 
démie Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  professeur  à  l'École 
de  Médecine.  Lisbonne. 

SiLVESTRE  Ribeiro  (José),  conseiller  et  ministre  honoraire,  mem- 
bre de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne.  Lis- 
bonne. 

SiMÔES  (le  DR.AU0USTO  Phiuppe),  correspondant  de  l'Académie 
Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  professeur  à  la  Faculté  de 
Médecine  de  l'Université  de  Coïmbre.  Cdïmbre. 

SouzA  ViTERBO  (Francisco  Marques  de),  médecin.  Lisbonne. 

Teixeira  de  Aragâo  (Aucusto  Carlos),  membre  de  l'Académie 
Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  professeur  d'hygiène  mili- 
taire. Lisbonne. 

Toledo  (Joaquim  Garcia  de).  Lisbonne. 

TouRETTE  (Aiwtj'HE).  Seiubal. 

Valle  (Illidio  Avres  Pereira  do),  professeur  à  l'École  de  Mé- 
decine de  Porto.  Porlo. 

Vasconcellos  (Frederico  Augusto  de),  bachelier  en  philosophie, 
ingénieur  des  mines,  adjoint  de  la  Section  des  travaux  géolo- 
giques. Lisbonne. 

Vasconcellos  (Joaquim  de),  archéologue,  membre  de  la  Société 
d'Instruction  Publique  de  Porto.  Porlo. 


Vasconcelxos  Abreu  (Guilhekme  de),  professeur  â  l'École  Su- 
périeure des  Lettres.  Lisbonne. 

Vasconcellos  Abreu  (m"™  de).  Lisbonne. 

ViLHENA  Barbosa  (Ignacjo  t>E),  membre  de  Académie  Royale  des 
Sciences  de  Lisbonne.  Belem. 

WiTTNicH  (RicARDO  Henriqxjë),  adjoint  lie  la  Section  des  travaux 
géologiques.  Lisbonne. 


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OUVRAGES  OFFERTS  AU  CONGRÈS 


Arceuk  (Asrien),  La  classification  archéologique  appliquée  à  l'épo- 
que quaternaire,  Paris  1880. 

Bataillard  (Paul),  Les  derniers  travaux  relatif  aux  bohémiens 
dans  l'Europe  orientale,  Paris  1872. 

Batah-lard  (Paul),  Notes  et  questions  sur  les  bohémiens  en  Algé- 
rie, Paris  1S74. 

Bataillard  (Paul),  Sur  les  origines  des  bohémiens  ou  tsiganes, 
avec  l'explication  du  non  tsigane,  Paris  1875. 

Bataillard  (Paul),  Sur  les  origines  des  bohémiens  ou  tsiganes. 
Les  tsiganes  de  l'âge  du  bronze,  Paru  1876. 

Bataillard  (Paul),  État  de  la  question  de  l'ancienneté  des  tsiga- 
nes-en  Europe,  Paris  1877. 

Bataillard  (Paul),  Les  zlotars  dits  aussi  dzvonkars,  tsiganes  fon- 
deurs en  bronze  et  laiton  dans  la  Galicie  orientale  et  la  Bukovine,  Pa- 


Bataillard  (Paul),  Sur  les  anciens  métailur|;es  en  Grtee,  Paris 


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D  (Paul),  Historique  et  préliminaires  de  la  question  de 
nmponation  du  bronze  dans  li  nord  et  l'occident  de  l'Europe  par 
les  t^ganes,  Paris  1880. 

Bave  (le  baron  J.  de),  Histoire  naturelle  de  l'homme.  Époque  de 
la  pierre  polie,  grottes  préhistoriques  de  la  Marne,  Paris  iS7a. 

Baye  (le  baron  J.  de).  Pointes  de  flèches  en  silex  à  u-anchant 
transversal,  Pan'i  1874. 

Bave  (le  baron  J.  de),  Notice  sur  les  p-ott^s  préhistoriques  de  la 
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Bave  (le  baron  J.  de),  L'art  étrusque  en  Champagne,  Tours  1875. 

Baye  (le  baron  J.  de),  Les  grottes  à  sculptures  de  la' vallée  du  Petit- 
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Bave  [le  baron  J.  de).  Congrès  International  d'Anthropologie  et 
d'Archéolo^e  préhistoriques.  Compte-rendu  de  la  septième  ses^on  te- 
nue &  Stockholm,  Par»  i875. 

Baye  (le  baron  J.  de),  La  trépanation  préhistorique,  extrait  de 
■L'archéologie  préhistorique»,  Paris  i876.  , 

Baye  (le  baron  J.  de),  Congrès  International  d'Anthropologie  et 
d'Archéolo^e  préhistoriques.  Compte-rendu  de  la  huitième  sesùon  te- 
nue à  Budapest,  Tours  i876. 

Bave  (i.e  baron  J.  de),  Mémtûrc  sur  la  nécropole  franque  d'Oyes, 
Tours  18/6, 

Baye  (le  baron  J.  de),  Sépultures  gauloises  de  Flavigny,  Paris 

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Baye  (le  baron  J.  de).  Les  amulettes  crâniennes  à  l'âge  de  la  pierre 
polie,  Tours  i878. 


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Marne  1880. 

Bulletino  di  paletnologia  italiana,  diretto  da  G.  Chierici,  L.  Pigorini 
et  P.  Strobel,  anno  i,  Parma  i875. 

Bulletino  di  paletnologia  italiana,  diretto  da  G.  Chierici,  L.  Pigorini 
et  P.  Strobel,  anno  11,  Parma  i876. 

Bulletino  di  paletnologia  italiana,  diretto  da  G.  Chierici,  L.  Pigorini 
et  P.  Strobel,  anno  m,  Reggto  dell'EmUia  1877. 

Butlclino  di  paletnologia  italiana,  diretto  da  G.  Chierici,  L.  Pigorini 
et  P.  Strobel,  anno  iv,  Reggio  deirEmitia  i878. 

Bulletino  di  paletnologia  italiana,  diretto  da  G.  Chierici,  L.  Pigorini 
et  P.  Strobel,  anno  v,  Reggio  delVEmUta  1879. 

Bulletino  di  paletnologia  italiana,  diretto  da  G.  Chierici,  L.  Pigorini 
et  P.  Strobel,  anno  vi,  n.°  i  a  6,  Reggio  dell'EmUia  1880. 

Gapeluni  (J.)| Congrès  intemationald'Anthropologieetd'Archéo- 
logie  préhistoriques.  Compte-rendu  de  la  cinquième  sesûon  à  Bologne 
^%^^,  Bologne  i873. 

CARTAiuiAc(ÉMiLE),Rapport  sur  la  paléoethnologie.  [I.  Période  néo- 
lithique ou  de  la  pierre  polie,  Toulouse  i878. 

Cartailhac  (Ëmil£),  Matériaux  pour  l'histoire  primitive  et  natu- 
relle de  l'homme,  xiv  vol.,  ï' série,  tome  x,  1879,  Toulouse  1879. 

Catalogue  spécial  de  l'Exposition  des  sciences  anthropologiques 
tenue  à  Paris  en  1878,  Paris  1878, 

Cazalis  de  Fondouce  (P.),  Les  temps  préhistoriques  dans  le  sud- 


,ïGoc 


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est  de  la  France,  i*"  livraison.  L'homme  dans  la  vallée  inférieure  du 
Gardon,  Paris  1872. 

Cazalis  de  Fondouce  (P.),  Les  temps  préhistoriques  dans  le  sud- 
est  de  la  France,  2'  livraison. — Allées  couvertes  de  la  Provence,  z  ca- 
Uers,  Paris  iS7Z-i878. 

Cazaus  de  Fondouce  (P.),  Les  allées  couvertes  de  la  Provence.  Ré- 
sumé extrait  du  iBuIleiin  monumental',  Tours  1877. 

Cazaus  de  Fondoijce  (P.),  Ébauche  d'une  carte  archéologique  du 
département  de  l'Hérault,  AfontpeZ/i'er  1880.  ' 

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sur  des  cailloux  de  la  vallée  du  Rhône,  Paris  1880. 

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métallurgie  en  France.  Paris  i877. 

Chantre  (Ernest),  Les  nécropoles  du  premier  âge  du  fer  des  Al- 
pes françaises,  Lyon  1878. 

Chantre  (Ernest),  Observations  sur  les  séries  préhistoriques  de 
quelques  musées  de  l'Autriche,  Toulouse  1879. 

Chantre  (Ernest),  Association  lyonnaise  des  amis  des  sciences  na- 
turelles. Compte-rendu  de  l'année  18/8-1879.  Séance  générale  du  2  fé- 
vrier 1879,  Lyon  1879. 

Chantre  (Ernest),  Le  premier  âge  du  fer  dans  le  bassin  du  Rhône, 
Nécropoles  et  Tumulus.  Lyon  1880. 

Chantre  (Ernest),  Relations  entre  les  sistres  bouddhiques  et  cer- 
tains objets  de  l'âge  du  bronze  européen,  Lyon  1880. 


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ce. Compte-rendu  de  la  xlvi  session  générale  tenue  à  Vienne  en  iSTg, 
Paris  1880. 

Damour  (A.)  et  Fischer,  Notice  sur  la  distribution  géographique 
des  haches  et  autres  objets  préhistoriques  en  jade,  néphrite  et  en  jadéite, 
Paris  i878. 

Deutsche  Gesellschafï  (ur  Anthropologie,  Ethnologie  und  Urge- 
schichte.  Verhandlungen  der  xi  allgemeinen  Versammiung,  zu  Berlin, 
im  AugusT  1880. 

Evans{John),  Petit  album  de  l'âge  du  bronze  de  la  Grande-Bretagne, 
Londres  i876, 

Falsan  et  Chantke,  Monographie  géologique  des  anciens  glaciers 
et  du  terrain  erratique  de  la  partie  moyenne  du  bassin  du  Rhône.  To- 
mes I  et  n  avec  un  atlas,  Lyon  1879-1880. 

Fischer  (H.),  Ueber  die  Herkunft  der  sogenannten  Amazonensteine, 
sowie  iiber  das  fabelhafte  Amazonenvolk  seibst. 

Fischer  (H.),  Ueber  prahistorische  Kieselwerkzeuge. 

Fischer  (H.),  Ueber  die  Fâhigkâii  der  Quarzvarietâten,  zu  Werkzeu- 
gen  u.  s.  w.  verarbeilet  zu  werden,  Berlin  1880. 

Fischer  (H.),  Uebersicht  iiber  die  in  ofFentlichen  und  Privat-Mu- 
seen  Deutschiands,  Oesterreichs,  der  Schweiz  und  Oberitaliens  vorfind- 
lichen  grôsseren  Beile  aus  Nephrit,  Jadeit  und  Chloromelanit,  Berlin 
1880. 


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née,  tome  1,  n."  i,a,3,  Parts  1880. 


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mammalogiques  qui  les  accompagnent. 
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que lacustre  de  Villechétif  près  de  Troyes,  Troyes  1880. 

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de  langue  allemande,  Parts  1879. 

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Rych  (O.),  Norske  Oldsager,  Christiania  1880. 

Strobel  (Pelleorino),  Materiali  di  paletnologia  comparata,  raccolti 
in  Sudamerica.  Primo  e  secondo  fascicolo,  Parma  1868. 

Undset  (Ingvald),  Fra  Norges  œldre  Jernalder,  Kjëbenhavn  1880. 

Undset  (Ingvald),  Études  sur   l'âge  de   bronze  de  la  Hongrie, 
Otrisliania  1880. 

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1879,  Wars^atua  1879. 


DigitizsdbyGOOgle 


DONS  ET  FAVEURS 


Sur  la  demande  faite  par  le  Bureau,  les  compagnies  des  chemins 
de  fer  du  Portugal  et  de  l'Espagne  ont  bien  voulu  accorder  aux  mem- 
bres du  Congrès,  se  rendant  à  Lisbonne,  une  réduction  de  5o  pour  cent 
sur  le  prix  des  places. 

Dans  les  chemins  de  fer  de  l'Etat  le  transit  était  gratis  pour  tous 
les  membres  du  Congrès. 

Tous  les  membres  du  Congrès  reçurent  des  invitations  pour  assis- 
ter au  spectacle  du  aS  septembre  dans  Je  théâtre  Recreios  Whitioyne, 
le  seul  qui  se  trouvait  ouvert  à  Lisbonne,  pendant  la  saison. 

La  rédaction  du  Jornal  de  Noticias  envoya  â  chacun  des  membres 
du  Congrès  un  exemplaire,  fac-similé  du  frontispice  et  de  trois  lignes 
de  XaGa^eta  de  Lisboa,le  premier  journal  imprimé  en  Portugal  (1641), 
accompagné  d'une  notice  sur  cette  publication  et  sur  les  progrès  de  la 
presse  politique  dans  le  pays.  (Ces,  exemplaires  furent  composés  exprès 
pour  le  Congrès  Littéraire  International,  qui  se  réunit  à  Lisbonne  à 
celte  occasion). 

L'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne  fit  également  dis- 
tribuer à  chacun  des  membres  du  Congrès  des  exemplaires  de  trois 
de  ses  publications,  savoir:  la  traduction  du  Discours  de  la  couronne 
de  Démosthènes,  précédée  d'une  longue  étude  sur  la  civilisation  grec- 
que, par  le  secrétaire  général  de  l'Académie,  M.  Latino  Coelho 
Éloge  de  Camôes,  id.;  Table  de  bronje  d'AIjustrel  (romaine)  par  li 
directeur  du  Musée  de  l'Algarve,  M.  Estacio  da  Veiga;  Compte-rendt 
de  la  séance  publique  de  )  'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne 
le  9  juin  1880,  à  l'occasion  de  la  célébration  du  tricentenaire  de  Ca 


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^'Wrc-  «  -Fraa;- 


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septembre.  Dîner  à  r«Hôtel  Victor»  (Cintra),  le  28  septembre.  Dîner  à 
Braga,  le  3o  septembre. 

Le  CoMfTÉ  d'Orcanisation  se  chargea  aussi  du  logement  à  Braga, 
et  des  iransports  des  différents  membres  du  Congrès,  par  les  chemins 
de  fer  aussi  bien  que  dans  les  voitures  ordinaires,  pendant  les  quatre 
excurMOOS  qui  faisaient  partie  du  programme,  Otia,  Mugem,  Cascaes 
et  Cintra,  ei  Citania  de  Briteiros. 


ÉtabllBBoments  pablios  et  privés 
onrerts  au  membres  du  Congres  pendant  la  Sessloii 

Musée  numismatique,  bibliothèque  royale,  au  Palais  d'Ajuda. 

Observatoire  astronomique,  Parc  d'Ajuda. 

Parc  de  Necessîdades,  palais  du  Roi  Dom  Fernando. 

Galerie  de  tableaux  de  M.  le  vicomte  de  Daupias. 

École  de  Médecine  et  Hôpital  Royal  de  S.  losé. 

Musées  de  zoologie,  de  minéralogie.  Jardin  botanique  et  Observatoire 
météorologique  de  l'École  Polytechnique. 

Acadéoiie  Royale  des  Beaux-Arts,  Bibliothèque  Nationale  et  Musée  ar- 
chéologique de  l'Algarve  (ancien  couvent  de  Saint-François). 

Musée  archéolo^que  de  Carmo. 

Musée  colonial,  près  de  l'Arsenal  de  la  Marine. 

Chapelle  de  Saint-Jean^aptiste  dans  l'Église  de  Saint-Roch. 

Église  du  Sacré  Cœur-de-Jésus  (Estrela). 

Ë^ise  de  Sainte- Marie  de  Bêle  m. 

Tour  de  Belem. 

Arsenal  Militaire. 

Abattoir  Municipal. 

Aqueduc  et  réservoir  d'Aguas  Livres,  etc. 


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Réoeptione  aolensellsH,  fâtsa  et  banquets 
offerts  aux  memDrea  du  Oongrèa,  pendant  et  après  la  Session 

Par  S.  M.  LE  ROI  DOM  LUIZ,  dîner  au  Palais  d'Ajuda,  le  ï6  sep- 
tembre. 

Bal  au  Château  Royal  de  Cascaes,  le  18  septembre. 

Par  S.  M.  LE  ROI  DOM  FERNANDO,  réception  au  Palais  de  Neces- 
sidades  le  26;  réception  et  lunch  au  Château  de  Pena  (Cintra),  le  zS 
septembre. 

Par  M.  F.  Martins  Sarmento,  réception  et  lunch  dans  la  Citania 
de  Briteiros  (Minho),  le  1  octobre. 

Réceptions  par  les  dames  à  Cintra,  le  28  septembre. 

Par  I 'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  dîner  le  29  sep- 
tembre, dans  le  grand  salon  de  l'Arsenal  de  la  Marine. 

Par  la  Société  d'Instruction  de  Porto,  dîner  à  T'Hôtel  do  Porto-, 
séance  extraordinaire  dans  le  grand  salon,  feu  d'artifice  et  concert 
aux  jardins  du  Palais  de  Cristal,  le  1  octobre. 

Par  le  maestro,  M.  Breton,  directeur  de  la  Société  Union  Artislîco- 
Musical  de  Madrid,  et  au  nom  de  la  même  Société,  grand  concert  au 
Colisée  de  Lisbonne,  le  16  septembre. 

Par  le  commandant  du  8*""  régiment  d'infanterie,  concerts  de  la 
bande  martiale  du  régiment,  pendant  le  dîner,  et  le  soir  au  jardin  de 
Sant'Anna  (Braga),  le  3o  septembre. 

Par  la  Municipauté  de  la  ville  de  Lisbonne,  dîner  dans  le  grand 
salon  de  l'Arsenal  de  la  Marine,  le  a?  septembre. 

Par  la  Municipauté  de  la  ville  de  Porto,  réception  à  la  gare  des 
chemins  de  fer  de  CampanhS,  le  i  octobre.  Des  appartements  ont  été 
destinés  aux  membres  du  Congrès  dans  les  hôtels  "do  Porto»  et  «Franc- 
fon>.  Des  voitures  furent  aussi  mises  à  leur  disposition. 

Par  le  Gouverneur  Civil  du  district  de  Santarem  et  par  les  Muni- 
cipaljtés  de  Santarem,  Almeirim  et  Salvaterra  de  Magos,  réceptions  et 
fêtes  le  24  septembre. 

Par  le  Comité  d'Organisation.  Déjeuners  â  Olia,  le  21,  à  Mugem 
le  24,  a  bord  du  transport  de  guerre  VA/rica,  devant  Cascaes,  le  28 


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septembre.  Dîner  à  i'^HÔtel  Victor*  (Cintra), le  28  septembre.  Dîner  à 
Braga,  le  3o  septembre. 

Le  CoHrrË  d'Organisation  se  chargea  aussi  du  logement  à  Braga, 
et  des  transports  des  diSercnts  membres  du  Congrès,  par  les  chemins 
de  fer  aussi  bien  que  dans  les  voitures  ordinaires,  pendant  les  quatre 
excursions  qui  faisaient  partie  du  programme,  Otta,  Mugem,  Cascaes 
et  Cintra,  et'Citaaia  de  Briteiros. 


ÉtabllBsements  publics  et  privés 
ozLverta  attx  memDres  du  Oougrèa  pendant  la  Session 

Musée  numismatique,  bibliothèque  royale,  au  Palais  d'Ajuda. 

Observatoire  astronomique,  Parc  d'Ajuda. 

Parc  de  Necessidades,  palais  du  Roi  Dom  Fernando. 

Galerie  de  tableaux  de  M.  le  vicomte  de  Daupias. 

École  de  Médecine  et  Hâpiul  Royal  de  S.  José. 

Musées  de  zoologie,  de  minéralogie.  Jardin  botanique  et  Observatoire 
météorologique  de  l'École  Polytechnique. 

Académie  Royale  des  Beaux-Arts,  Bibliothèque  Nationale  el  Musée  ar- 
chéologique de  l'Algarye  (ancien  couvent  de  Saint-François). 

Musée  archéologique  de  Carmo. 

Musée  colonial,  près  de  l'Arsenal  de  la  Marine. 

Chapelle  de  Saint-Jean-Baptiste  dans  l'Église  de  Saint-Roch. 

Église  du  Sacré  Cœur-de-Jésus  (Estrela). 

Église  de  Sainte-Marie  de  Belem. 

Tour  de  Belem. 

Arsenal  Militaire. 

Abattoir  Municipal. 

Aqueduc  et  réservoir  d'Aguas  Livres,  etc. 


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ORDRES  DU  JOUR  DES  SEANCES 

EXCURSIONS 
DÉLIBÉRATIONS  DU  CONSEIL 


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ORDRES  DU  JOUR  DES  SÉANCES 
EXCURSIONS 

DÉLIBÉRATIONS   DU    CONSEIL 


Dimanolie,  19  septembre 

La  réception  des  membres  du  Congrès  eut  lieu  au  Se- 
crétariat (Section  des  Travaux  Géologiques  du  Portugal), 
dans  l'édifice  de  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lis- 
bonne. 


SÉANCE  D'OUVERTURE 

Lundi,  20  septembre 
Présidence  de  M,  Andrade  Corvo,  président. 

La  séance  est  ouverte  à  une  heure,  en  présence  de 
S.  M.  le  Roi  Dom  Luiz,  Protecteur  de  la  g*"*  session  du 
Congrès,  et  de  S.  M.  le  Roi  Dom  Fernando,  Président 
d'honneur. 

La  grande  salle  de  la  bibliothèque  de  l'Académie  Royale 
des  Sciences  de  Lisbonne,  richement  décorée,  est  divbée  en 
deux  parties.  Dans  la  première,  où  se  trouve  le  trône  ré- 
servé à  Leurs  Majestés,  prennent  place  les  ministres,  de  l'In- 
térieur M.  Braamcamp,  des  Finances  M.  Barros  Gomes,  des 


4 
Travaux  Publics  M.  Saraîva  de  Carvalho,  de  la  Justice 
M.  Adriano  Machado,  de  la  Marine  M.  le  Vicomte  de 
S-  Januario,  de  la  Guerre  M,  J.  Ghrysostomo  d'Abreu  e 
Sousa.  Cette  enceinte  est  aussi  réservée  aux  membres  du 
Corps  diplomatique,  à  ceux  de  l'Académie,  aux  hauts  fonc- 
tionnaires, aux  représentants  de  la  presse,  aux  membres 
du  Congrès  enfin.  L'autre  partie  de  la  salle,  ainsi  que  les 
galeries  spécialement  réservées  aux  dames,  sont  occupées 
par  le  public,  qui  les  remplit  entièrement. 

Un  orchestre  joue  d'abord  l'hymne  royal  et  l'hymne 
national,  puis  quelques  pièces  de  choix. 

M.  LE  Président  du  Congrès,  prononce  le  discours  sui- 
vant; 

SIRE, 

Sa  Majesté  i,e  Roi  Dom  Fernando, 

Mesdames  et  Messieurs. 

Je  dois  à  un  acte  de  pure  bienveillance,  que  je  ne  sau- 
rais justifier,  l'honneur  d'ouvrir  aujourd'hui  les  séances  du 
Congrès  international  d'Anthropologie  et  d'Archéologie  pré- 
historiques. 

J'ai  reçu  avec  la  plus  vive  reconnaissance  cette  haute  dis- 
tinction, et  je  l'estime  d'autant  plus,  qu'elle  me  permet  d'in- 
terpréter les  sentiments  de  gratitude  de  mes  compatriotes 
envers  les  savants  qui  sont  venus  honorer  Lisbonne  de  leur 
présence,  et  poursuivre  parmi  nous  leur  lumineuses  études 
et  leurs  intéressantes  discussions.  J'espère  que  parmi  les 
monuments  préhistoriques  trouvés  en  Portugal,  quelques-uns 
pourront  servir  à  éclaircir  de  difSciles  et  nombreuses  ques- 
tions soulevées,  et  résolues  seulement  en  partie,  par  la  nou- 
velle science  archéologique. 


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L'archéologie  préhistorique,  science  née  d'hier,  a  su  par 
ses  immenses  progrès,  prendre  place  au  premier  rang  par- 
mi les  sciences  qui  s'occupent  de  l'homme.  Elle  est  ve- 
nue remplir  une  immense  lacune  dans  l'histoire  de  l'huma- 
nité. 

Autrefois  on  ne  voyait  au  delà  de  l'histoire  proprement 
dite,  de  l'histoire  basée  sur  les  documents  écrits,  rien  qui 
pût  mériter  l'étude  sérieuse  de  l'archéologie,  et  on  ignorait 
presque  absolument  les  premières  origines  de  l'espèce  hu- 
maine. Les  traditions  conservées  par  les  anciennes  civilisa- 
tions, qui  possédaient  l'écriture,  suffisaient  aux  recherches 
de  l'immense  érudition  de  savants  archéologues. 

En  se  fixant  sur  les  nombreux  monuments  qui,  de  tous 
les  côtés,  sont  venus  enrichir  les  musées  d'archéologie  pré- 
historique, en  tâchant  d'interpréter  les  énigmes  qui  se  ca- 
chaient sous  leur  modeste  apparence  et  en  cherchant  à  éta- 
blir des  rapports  entre  ces  monuments  et  les  terrains  géo- 
logiques où  ils  se  trouvent  enfouis,  la  science  a  su  établir 
les  jalons  de  l'histoire  de  l'homme,  dans  ses  relations  avec 
l'histoire  des  développements  organiques  à  la  surface  de  no- 
tre planète.  Cette  étude  devenait  d'autant  plus  nécessaire 
dans  ce  moment  que  de  grands  naturalistes,  de  savants  phi- 
losophes établissaient  d'une  manière  incontestable  la  grande 
loi  de  l'évolution  des  espèces. 

Cette  loi  une  fois  établie,  il  est  devenu  de  la  plus  haute 
importance  scientifique  de  savoir  quand  l'homme  tel  qu'il 
est  actuellement,  avec  ses  caractères  essentiels,  a  paru  sur 
la  terre  et  a  pris  rang  parmi  les  autres  animaux.  Une  telle 
découverte,  quand  elle  pourra  se  dire  affermie  sur  des  ba- 
ses incontestables,  peut  nous  mener  à  la  connaissance  des 
lob  d'évolution  organique  et  morale  de  l'espèce  humaine 
aux  périodes  primitives  du  monde.  La  cause  essentielle  de 


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llntérêt  qui  s'attache  à  la  fixation  de  l'époque  géologique  à 
laquelle  se  montrent  tes  premiers  vestiges  de  Part  humain, 
les  [H'euves  premières  de  Pexistence  de  l'homme,  est,  à  mon 
avis,  celle  que  je  viens  d'indiquer. 

Pendant  des  siècles  on  a  dépensé  une  érudition  immense 
pour  dévoiler,  au  moyen  des  documents  écrits  qui  nous  ont 
été  légués  par  les  anciennes  civilisations,  l'origine  des  peu- 
ples et  les  vestiges  de  leur  dispersion  sur  la  terre;  peut- 
être  on  a  réussi  souvent  par  rapport  aux  peuples.  L^origine  de 
l'homme  et  ses  développements  primitifs  restaient  cependant 
dans  une  profonde  obscurité. 

L'archéologie  préhistorique,  en  venant  nous  apprendre 
que  des  documents  précieux  étaient  enfouis  dans  les  impé- 
rissables archives  de  la  terre,  a  élargi  d'une  manière  inat- 
tendue le  champ  des  investigations  scientifiques,  et  a  démon- 
tré la  longue  existence  sur  notre  globe  de  l'homme,  possé- 
dant déjà  des  industries  primitives  et  bien  caractérisées.  Le 
cadre  de  l'histoire  humaine  s'est  ainsi  trouvé  agrandi  dans 
l'immensité  du  temps.  Les  plus  ancieimes  civilisations,  dont 
nous  possédions  des  monuments  écrits  et  autres,  nous  rap- 
portent à  quelques  milliers  d'années  avant  notre  ère;  mais 
ces  civilisations  sont  le  fruit  d'une  longue  élaboration  des 
facultés  et  du  travail  de  l'homme,  élaboration  pour  laquelle 
il  a  fallu  des  milliers  de  siècles. 

De  la  même  manière  que  les  admirables  découvertes 
de  la  géologie  ont  déchiré  le  voile  qui  couvrait  les  phases 
mystérieuses  de  l'histoire  de  la  terre,  ainsi  que  de  l'appa- 
rition et  du  développement  de  la  vie;  de  la  même  manière 
nous  voyons  maintenant  les  efforts  persistants  et  énergiques 
de  l'archéologie  préhistorique  soulever,  de  jour  en  jour,  le 
voile  qui  nous  a  longtemps  caché  l'histoire  vraie  de  l'hom- 
me sur  la  terre. 


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7 

Quel  est  l'âge  géologique  qu^on  doit  admettre  comme 
étant  celui  qui  représente  l'époque  4a  plus  reculée  de  l'ap- 
paritioji  de  l'homme?  Les  documents  nous  font  encore  dé- 
faut pour  répondre  à  cette  question  dif&cile,  la  plus  difB- 
cile  de  toutes.  A  la  session  du  Congrès  en  1876,  le  regretté 
professeur  Paul  Broca,  que  ta  mort  nous  a  enlevé  au  mo- 
ment où  il  se  préparait  à  venir  prendre  part  aux  travaux 
du  Congrès,  disait: 

•La  découverte  de  l'homme  quaternaire  a  été  le  plus 
fgrand  événement  de  l'anthropologie  moderne.  EUe  a  ou- 
■vert  tout  à  coup  un  champ  immense  à  nos  investigations, 
«et  nul  ici  n'en  méconnaîtra  l'importance,  car  c'est  elle,  on 
■peut  le  dire,  qui  a  të  plus  contribué  à  provoquer  le  grand 
«mouvement  d'idées,  d'où  est  résulté  la  fondation  de  notre 
«Congrès. 

«La  découverte  de  l'homme  tertiaire  serait  un  événe- 
«ment  plus  grand  encore,  car  la  période  qu'elle  ajouterait 
«à  la  vie  de  l'humanité  a  été  incomparablement  plus  longue 
«que  celle  que  nous  lui  connaissons  déjà.  • 

Et  après,  le  docteur  Broca  ajoutait: 

«Aujourd'hui  (M.  Capellinivenaitdefaire  une  intéressante 
«communication  sur  l'homme  pliocène  en  Toscane)  pour  la  pre- 
•mière  fois  je  sens  mes  doutes  se  dissiper.  Je  me  déclarerais 
«même  entièrement  convaincu,  si  je  ne  m'en  rapportab  qu'à 
«mon  propre  jugement:  mais  je  dois  tenir  compte  aussi  du 
(jugement  de  mes  collègues,  et  jt  dois  craindre  de  me  trom- 

«per Je  ne  me  dissimule  pas  qu'une  question 

«aussi  grave  que  celle  de  l'homme  tertiaire  exige  beaucoup 
(de  prudence;  un  seul  fait,  une  série  de  faits  ne  suffit  peut- 
«être  pas  pour  la  résoudre  définitivement,  mais  je  dois  re- 
«connaître  que  jamais  cette  question  n'a  été  aussi  près  de 
•sa  solution.» 


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8 

Quelques  années  ont  suffit  pour  donner  à  ce  fait  sur- 
prenant une  plausibiliié,  qu'il  était  loin  d'avoir  à  l'époque 
des  célèbres  découvertes  de  M.  l'abbé  Bourgeois.    . 

Notre  esprit  recule  comme  effrayé  en  face  de  l'immen- 
sité du  temps  où  se  sont  formés  ces  terrains  tertiaires  dans 
lesquels  on  trouve,  selon  plusieurs  savants,  des  traces  cer- 
taines de  l'existence  de  rhomme.  Cependant  il  est  temps 
qu'une  pareille  et  si  intéressante  question  trouve  une  solu- 
tion définitive;  et  peut-être  Phonorable  et  savant  Congrès 
pourra  y  arriver  en  présence  des  faits  que  M.  Carlos  Ri- 
beiro,  notre  estimable  et  laborieux  secrétaire,  a  pu  obser- 
ver en  Portugal. 

Si  l'homme  a  été  le  contemporain  de  l'époque  où  le 
monde  était  en  grande  partie  enveloppé  d'une  puissante 
couche  de  glace,  il  est  naturel  de  croire  que  les  premiè- 
res contrées  qu'il  a  habitées  ont  été  celles  où  l'âpreté  du 
climat  était  moindre.  Dans  pareil  cas  c'est,  pour  ce  qui 
se  rapporte  à  l'Europe,  dans  la  région  méridionale,  aux 
bords  de  la  Méditerranée  et  de  l'Océan  Atlantique  qu'on 
doit  trouver  les  plus  anciens  vestiges  de  l'homme. 

Peut-être  nous  est-il  permis  d'espérer  que  le  savant 
Congrès  trouvera  dans  les  faits  auxquels  je  viens  de  faire 
allusion  les  moyens  d'éclaircir  ce  point  controversé  de  l'his- 
toire de  l'homme  primitif. 

L'existence  en  Portugal  de  ces  amas  de  coquilles,  re- 
jets de  cuisine,  comparabfes  à  ceux  qui  ont  été  si  profon- 
dément étudiés  au  nord  de  l'Europe,  ne  peut  manquer  d'at- 
tirer l'attention  du  Congrès.  La  position  qu'occupent  ces 
restes  curieux  de  stations  humaines,-  leur  composition  ainsi 
que  rage  qu'ils  représentent,  peuvent,  si  je  ne  me  trompe 
pas,  nous  renseigner  sur  les  migrations  des  peuplades  pré- 
historiques et  peut-être  même,  conjointement  avec  les  obser- 


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valions  géologiques,  nous  donner  une  idée  exacte  de  la  géo- 
graphie et  d»  climat  aux  temps  où  l'homme  a  laissé  les  pre- 
mières traces  de  son  industrie  en  Europe. 

Permettez-moi  encore,  Messieurs,  de  faire  appel  à  vo- 
ire bienveillance,  en  vous  priant  de  prêter  votre  attention  à 
des  faits  qui,  à  mon  avis,  méritent  bien  d'être  pris  en  con- 
sidération par  la  docte  assemblée.  Les  faits  dont  je  vous 
parie  sont  ceux  qui  peuvent  nous  renseigner  sur  l'existence, 
au  sein  des  peuplades  qui  occupèrent  PEurope  aux  âges  pré- 
historiques, de  ï'ammi$me,  mot  adopté  par  un  savant  qui, 
par  ses  recherches,  a  jeté  une  vive  lumière  sur  la  civilisa- 
tion primitive. 

L'assertion  tqu'il  existe  de  grossières  peuplades,  n'ayant 
taucune  relijpon,  quoique  possible  en  théorie,  et  peut-être 
«vraie  en  fait,  ne  repose  pas  jusqu'à  présent  sur  des  preu- 
■ves  aussi  palpables  que  nous  aurions  le  droit  de  les  de- 
cmander,  quand  il  s'agit  dVne  chose  si  extraordinaire*,  af- 
firme M.  Edward  Tylor,  en  accumulant  des  preuves  de 
son  assertion,  qui  me  semblent  suffisantes  à  effacer  les  dou- 
tes dans  les  esprits  qui  n'ont  pas  des  opinions  préconçues 
à  ce  sujet. 

Il  y  a  dans  les  conditions  fondamentales  de  l'humanité 
une  conscience,  une  lueur  religieuse,  une  puissance  virtuelle 
—  passez-moi  le  mot — qui  fait  d'incessants  efforts  pour  pé- 
nétrer au  delà  des  sens.  Voici  la  cause  de  l'animisme,  qui 
se  manifeste,  à  des  degrés  différents,  dans  le  sauvage  et 
dans  l'homme  civilisé. 

Le  sentiment  religieux,  dans  sa  plus  large  acception, 
existait-il  dans  le  monde  préhistorique?  A  quel  âge  et  sous 
quelle  forme  s'esi-il  montré  primitivement?  Quels  sont  les 
monuments — tombeaux,  amulettes  ou  autres— qui  peuvent 
mieux  guider  la  science  dans  des  recherches  si  difficiles  et 


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si  importantes?  Voilà  un  sujet  qui,  j'ose  le  dire,  mérite  bien 
d'occuper  l'étude  des  savants. 

L'homme  se  complète  par  l'action  simultanée  de  tou- 
tes ses  facultés,  primitives  et  essentielies.  Nous  devons  né- 
cessairement trouver  des  vestiges  de  l'existence  de  ces  fa- 
cultés dans  les  œuvres  grossières  de  l'homme  préhistorique. 
Sans  cela  il  ne  serait,  nous  pouvons  le  dire,  que  l'ébauche 
de  l'homme — moins  que  le  sauvage  des  temps  historiques. 

Parmi  les  monuments  archéolo^ques,  rencontrés  en 
Portugal,  le  Congrès  trouvera,  je  l'espère,  plus  d'un,  qui 
sous  ce  rapport  l'intéressera. 

L'humanité  est  bien  jeune.  Messieurs;  on  peut  dire 
que  presque  partout  elle  se  trouve  encore  dans  son  enfan- 
ce; et  cependant  la  nouvelle  science  est  venue  prouver 
que  l'homme  existe  sur  la  terre  probablement  depuis  des 
milliers  de  siècles.  Cène  idée,  faite  pour  nous  effrayer,  se 
trouve  cependant  d'accord  avec  les  faits  auxquels  nous  as- 
sistons nous  mêmes. 

L'homme,  nous  le  voyons  bien,  est  encore  loin  d'être 
arrivé  partout  à  l'état  de  civilisation,  telle  que  nous  la  com- 
prenons et  la  voyons  autour  de  nous.  Plus  de  la  moitié  du 
monde  est  encore  plongée  dans  les  ténèbres;  et  malgré  les 
merveilleux  progrès  faits,  et  par  ta  pensée  et  par  le  travail 
humain,  aux  derniers  siècles,  on  trouve,  même  au  cœur  de 
la  civilisation,  des  peuples  écrasés  par  l'ignorance,  sans  avoir 
la  conscience  ni  de  leurs  droits  ni  de  leurs  devoirs,  privés, 
enfin,  du  sentiment  moral,  qui  seul  doit  soutenir  les  pas  du 
véritable  progrès. 

La  nouvelle  science  de  l'archéologie  est  venue  nous 
prouver  que  le  développement  de  l'homme  s'est  réalisé  par- 
tout et  dans  tous  les  temps,  au  moyen  d'une  lente  évolu- 
';ment  il  s'est  trouvé,  et  il  se  trouve  maintenant 


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encore^  inégalement  arriéré  dans  son  développement  moral, 
industriel  et  physique. 

Le  devoir  des  peuples  qui  ont  devancé  les  autres  dans 
l'heureuse  voie  du  progrès  «st  de  venir  en  aide,  de  leurs  lu- 
mières et  de  leurs  efforts,  à  ceux  qui  se  trouvent  arrêtés 
aux  premiers  échelons  de  Timmense  évolution  qui  est  le  glo- 
rieux partage  de  l'humanité. 

Tous  les  hommes  sont  frères,  tous  sont  égaux  devant 
les  grandes  lois  de  la  nature.  Malheureusement  de  profonds 
abîmes  s'ouvrent  encore  entre  ceux  qui  ont  eu  le  bonheur 
d'être  les  héritiers  et  les  continuateurs  des  anciennes  civili- 
sations, et  ceux  qui  sont  privés  de  ce  précieux  héritage. 

Notre  devoir  à  nous  est  de  travailler  incessament  à  éle- 
ver le  niveau  moral  et  intellectuel  de  tous  les  peuples. 

Vous  êtes  là,  Messieurs,  pour  aider  à  cette  grande  œu- 
vre par  vos  lumières  et  votre  expérience.  Au  nom  du  Por- 
tugal je  vous  souhaite  la  bienvenue,  et  je  vous  remercie 
encore  une  fois  d'avoir  choisi  notre  pays  pour  célébrer  cette 
année  votre  neuvième  session. 

Mesdames  et  Messieurs.  En  daignant  accepter  le  titre 
de  Protecteurs  du  Congrès,  et  en  honorant  notre  séance  de 
leur  auguste  présence,  S.  M.  le  Roi  Dom  Luiz  et  S.  M.  le 
Roi  Dom  Fernando  nous  montrent  d'une  manière  éclatante 
l'intérêt  qu'ils  prennent  aux  travaux  de  cette  assemblée.  Per- 
mettez-moi, Messieurs,  d'avoir  l'honneur  de  remercier  res- 
pectueusement, au  nom  du  Congrès  d' Anthropologie,  Leurs 
Majestés  des  preuves  de  gracieuse  bienveillance  qu'elles 
ont  daigné  nous  accorder.  (Applaudissements)- 

Le  Secrétaire,  M.  Carlos' Ribeiro,  prend  ensuite  la  pa- 
role. 


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SIRE, 

Sa  Majesté  le  Roi  Dom  Fernando, 

Mesdames  et  Messieurs. 

Dans  la  session  du  Congrès  International  des  Sciences 
Anthropologiques  qui  eut  lieu  à  Paris  en  1878,  ta  ville  de 
Lisbonne  fut  désignée  pour  que  la  session  actuelle  du  Con- 
grès y  fût  célébrée.  Notre  capitale  a  eu  ainsi  la  bonne  for- 
tune et  l'honneur  de  pouvoir  offrir  rhospitalité  aux  émïnents 
savants,  qui  viennent  nous  honorer  de  leur  visite  et  éclairer 
les  discussions  par  leurs  lumières. 

C'est  la  première  fois,  Messieurs,  que  l'on  enregistre 
dans  tes  annales  de  notre  patrie  un  si  heureux  événement, 
la  réunion  dans  nos  murs  de  tant  de  savants  des  principa- 
les nations  de  l'Europe,  pour  discuter  des  questions  scien- 
tifiques qui  nous  intéressent  particulièrement.  En  effet,  à  la 
solution  des  problèmes  préhistoriques  qui  vont  être  exa- 
minés est  liée  la  connaissance  des  générations  qui  nous  ont 
précédés,  et  qui  ont  habité  ce  coin  de  l'Europe  depuis  les 
temps  géologiques  jusqu'à  ceux  auxquels  l'histoire  propre- 
ment dite  rapporte  l'existence  de  notre  espèce.  Le  Portugal 
ne  peut  que  se  féliciter  et  s'avouer  hautement  reconnaissant 
d'une  distinction  aussi  flatteuse,  et  moi,  Messieurs,  je  m'es- 
time très  heureux  de  pouvoir  être  auprès  d'hôtes  si  illustres 
l'interprète  de  ce  sentiment  national. 

Toutefois,  avant  d'exposer  en  peu  de  mots  les  sujets 
principaux  sur  lesquels  nous  croyons  devoir  appeler  l'at- 
tention de  l'honorable  assemblée,  qu'il  me  soit  permis.  Mes- 
sieurs, d'exprimer  que  le  plaisir  de  nous  voir  réunis  pour 
commencer  nos  travaux,  n'est  pas  complet.  Vous  tous,  Mes- 
sieurs, vous  devez  sentir  avec  un  profond  regret  le  vide 
que  laisse  un  de  nos  plus  illustres  collègues,  un  de  nos  plus 
vigoureux  travailleurs  qui  luttait  pour  le  progrès  des  scien- 


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ces  anthropologiques,  et  dont  la  voix  sonore,  vibrante,  plei- 
ne d'autorité,  se  faisait  toujours  entendre  dans  la  discussion 
des  problèmes  les  plus  compliqués.  Vous  devinez  que  je  fais 
allusion  à  l'éminent  professeur  Paul  Broca,  dont  la  France 
déplore  la  perte  récente,  et  avec  cette  noble  nation  tout  le 
monde  scientifique  dont  il  était  l'un  des  ornements.  Le  Con- 
grès, se  réunissant  pour  la  première  fois  après  sa  mort,  ne 
peut  manquer  de  voter  à  sa  mémoire  l'expression  de  son 
plus  vif  regret. 

Vous  savez  tous.  Messieurs,  que  ce  n'est  pas  seulement 
dans  l'étude  dès  collections  d'archéologie  et  d'anthropologie 
préhistoriques  qui  remplissent  les  grands  musées,  qu'on  doit 
chercher  la  solution  des  principales  questions  concernant  un 
pays  en  particulier  ou  une  région  quelconque  limitée;  mais 
que  cette  solution  on  la  trouvera  plutôt  dans  l'examen,  l'étu- 
de et  la  comparaison  des  collections  des  musées  plus  mo- 
destes, où  se  trouvent  rassemblés  les  faits  concernant  cha- 
que région,  et  se  rapportant  à  une  époque  donnée.  Cepen- 
dant, il  n'est  pas  possible  à  tous  les  studieux  d'examiner  et 
de  comparer  les  faits  dispersés  en  divers  pays;  d'un  autre 
côté  il  est  indispensable  au  rapide  développement  de  la 
science,  non  seulement  de  connaître  ces  faits,  mais  de  met- 
tre aussi  tes  savants  en  contact  les  uns  avec  les  autres,  pour 
se  prêter  un  aide  mutuel  en  transmettant  réciproquement 
leurs  connaissances  et  leurs  idées.  C'est  du  sentiment  de 
cette  nécessité  qu'est  venue  la  pensée  de  la  création  des 
Congrès;  et  leurs  résultats  ont  été  si  féconds,  que  l'archéolo- 
gie préhistorique,  comptant  tout  au  plus  quarante  années 
d'existence,  et  l'anthropologie  à  peine  vingt  années,  ont  obte- 
nu par  là  un  degré  de  splendeur  inattendu.  Que  le  zèle  des 
savants  se  maintienne,  et  ces  sciences  atteindront  sous  peu 
un  développement  tel  qu'aucune  autre  science  ne  l'obtien- 


..GoogK 


H 

drait,  dans  une  égale  période,  par  les  procédés  suivis  jus- 
qu'ici 

L'existence  de  l'homme  dans  nos  latitudes,  à  l'époque 
miocène,  est  un  sujet  des  plus  intéressants,  sur  lesquels 
on  puisse  appeler  l'attention  du  Congrès.  Cette  question, 
discutée  en  diverses  sessions  antérieures,  est  à  résoudre; 
cependant  les  faits  recueillis  en  Portugal  s'ofFrent  sous  un 
tel  aspect  qu'ils  aideront,  nous  osons  le  croire,  à  l'élucider; 
et  nous  sommes  convaincus  qu'après  un  meilleur  examen 
des  localités  et  après  les  discussions  que  l'importance  du 
sujet  réclame,  le  Congrès  arrivera  à  formuler  ses  idées  à 
cet  égard.  Dans  notre  musée  naissant,  organisé  dans  la 
Section  des  Travaux  Géologiques,  se  trouvent  pour  l'in- 
formation des  savants  des  documents  déjà  nombreux  qui 
les  prépareront  à  l'examen  qu'on  fera  dans  les  lieux  mê- 
mes où  ils  ont  été  recueillis. 

Une  grande  formation  sablonneuse  qui  couvre  une  par- 
tie de  nos  provinces  d'AIemtejo  et  d'Estremadura,  et  que 
nous  avons  classée  dans  l'époque  pliocène,  renferme  aussi 
des  documents  qui  attestent  l'existence  de  l'homme  à  cette 
époque.  Dans  les  couches  de  cette  formation  on  rencontre 
des  éclats  de  quartzite,  sinon  aussi  fréquents  qu'on  les  ob- 
serve dans  les  couches  miocènes,  du  moins  assez  nombreux 
pour  ne  pas  laisser  le  moindre  doute  qu'il  a  aussi  existé  un 
être  intelligent  dans  la  période  où  ces  couches  se  sont  dé- 
posées. 

Comme  celui  qui  l'avait  précédé,  cet  être  intelligent 
taillait  la  pierre  et  fabriquait  des  instruments  à.  son  usage, 
quoique  d'un  travail  assez  imparfait  et  grossier.  Il  y  a  dans 
nos  collections  un  certain  nombre  de  ces  éclats  que  le  Con- 
grès pourra  examiner;  malheureusement  il  n'est  pas  possible 
de  vérifier  l'authenticité  du  gisement,  faute  du  temps  néces- 


,ï  Google 


saire  pour  une  excursion  de  plus  outre  celles  qui  sont  dé- 
signées  dans  le  programme. 

Près  de  Mealhada  au  nord  de  Coïmbre  il  y  a  encore 
un  autre  dépôt,  que  nous  croyons  appartenir  également  à  la 
formation  pliocène  (partie  supérieure),  renfermant  aussi  des 
instruments  de  pierre  taillée. 

Différentes  espèces  des  genres  Equus,  Elephas^  Cervus^ 
et  le  fossile  végétal  que  M.  Oswald  Heer  a  nommé  Trapa 
natam,  var.  tuberculata,  caractérisent  ce  dépôt.  Immédia- 
tement au-dessus  de  ces  couches,  on  trouve  une  formation 
de  grès  de  couleur  rougeâtre  ou  ocreuse,  contenant  quel- 
ques quartzites  et  des  silex  taillés  qui  paraissent  appartenir 
au  type  de  Saint-Acheul. 

Les  vestiges  de  l'existence  de  l'homme  pendant  l'époque 
quaternaire  sont  représentés  dans  notre  pays  par  la  série 
suivante: 

i" — De  nombreux  exemplaires  de  quartzite  taillés,  ren- 
contrés dans  les  couches  recouvrant  les  plaines  qui  couron- 
nent les  flancs  de  ta  vallée  du  Tage,  et  sur  les  versants  de 
quelques  collines  de  différents  âges  géologiques. 

2° — Les  alluvions  anciennes  de  ces  vallées  principales. 

3° — Le  dépôt  inférieur  de  quelques-unes  de  nos  ca- 
vernes. 

D  serait  à  désirer  que  le  Congrès  pût  visiter  quelques- 
unes  des  localités  où  l'on  rencontre  ces  dépôts  avec  un 
plus  grand  développement,  ou  mieux  caractérisés;  mais  cela 
n'étant  pas  possible,  les  membres  du  Congrès  pourront 
examiner  dans  notre  musée  les  éclats  de  quartzite  des  dé- 
pôts qui  occupent  les  plateaux  couronnant  les  flancs  de  la 
vallée  du  Tage,  les  instruments  recueillis  dans  le  diluvium 
ancien  de  nos  montagnes  au  sud-est  de  Coïmbre,  ainsi  que 
ceux  des  dépôts  qui  recouvrent  les  formations  pliocènes 
c.  R.  5 


,ï  Google 


i6 

d*AIemtejo.  On  y  peut  examiner  la  faune  quaternaire  de 
nos  cavernes,  aussi  bien  qu'une  mandibule  humaine  et  un 
crâne  des  alluvions  du  Tage,  que  nous  croyons  appartenir 
à  la  partie  supérieure  de  la  période  quaternaire. 

Il  est  aussi  hors  de  doute  qu'à  l'époque  quaternaire 
quelques-unes  de  nos  grottes  furent  habitées,  comme  l'at- 
testent les  vestiges  de  l'industrie  humaine  qui  y  ont  été 
trouvés,  associés  aux  restes  de  certaines  espèces  éteintes. 

En  abordant  l'indication  très  sommaire  des  principaux 
faits  qui  doivent  être  rapportés  à  l'âge  néolithique,  nous 
nous  trouvons  en  face  des  monticules  de  coquilles  de  la 
v^ée  du  Tage,  lesquels  représentent  dans  l'ordre  d'ancien- 
neté relative  le  premier  terme  de  la  série  des  faits  de  cet 
âge. 

Ces  monticules,  situés  dans  les  environs  de  Salvaterra 
et  de  Mugem  et  éloignés  de  lo  à  17  lieues  de  l'Océan,  occu- 
pent les  bords  des  rivières  afHuentes  du  Tage,  à  quelques  ki- 
lomètres de  distance  de  la  rive  gauche  de  ce  fleuve.  Ces 
monticules  sont  principalement  formés  de  coquilles  marines 
{Lutraria  compressa,  Cardium  edule,  etc.):  nous  les  con- 
sidérons comme  très-semblables  en  tout  aux  kioekkenmoed- 
dings  du  Danemark,  ce  que  le  Congrès  pourra  vérifier  sous 
peu  quand  il  visitera  ces  localités. 

En  ce  qui  concerne  les  produits  de  l'industrie  et  les  res- 
tes d'animaux  rencontrés  dans  ces  dépôts,  le  Congrès  pourra 
en  fdre  l'examen  dans  le  musée  de  la  Section  Géologique. 
Ce  qui  est  surtout  notable  dans  ces  singuliers  dépôts,  c'est 
la  grande  quantité  de  dépouilles  humaines  rencontrées,  et 
la  ressemblance  extrême  entre  le  travail  des  éclats  de  quar- 
t^te  taillée  par  l'homme  de  ces  stations  et  le  travail  des  éclats 
de  quartûte  des  hommes  tertiaires  et  quaternaires.  Le  Con- 
grès, en  rapprochant  ces  faits  et  en  les  examinant  avec  sa 


ly  Google 


'7 
critique  éclairée,  tirera  de  leur  comparaison  les  conséquen- 
ces qu'il  jugera  convenable,  relativement  aux  évolutions  par 
lesquelles  l'industrie  de  la  pierre  travaillée  passa  dans  ces 
régions  pendant  un  laps  de  temps  incommensurable. 

Les  dolmens  et  autres  monuments  congénères,  si  nom- 
breux en  Portugal,  paraissent  avoir  appartenu  à  différents 
peuples  ou  races,  qui  coexistèrent  ou  qui  se  sont  succédés 
à  l'époque  de  la  pierre  polie.  On  compte  un  grand  nombre 
de  dolmens,  les  uns  couverts  et  sans  galeries,  d'autres  dé-  . 
couverts  et  avec  ou  sans  galeries,  principalement  dans  les 
provinces  de  Beira,  Extremadura  et  Alemtejo.  Parmi  ceux 
que  nous  avons  explorés  nul  n'offre  l'indice  de  l'usage  des 
métaux;  et  cependant  il  est  très  possible  que  quelques-uns 
de  ces  monuments  aient  servi  de  sépulture  pendent  l'âge 
de  la  pierre  polie,  et  postérieurement  durant  l'époque  du 
bronze  ou  celle  du  fer. 

Quoiqu'il  en  soit,  l'observation  de  ces  nombreux  monu- 
ments préhistoriques  dont  nous  avons  déjà  connaissance 
parait  annoncer  une  série  de  civilisations,  se  rattachant  les 
unes  aux  autres  depuis  le  commencement  de  l'âge  de  la 
pierre  polie  jusqu'aux  temps  historiques.  Lorsque  les  études 
archéologiques  atteindront  parmi  nous  le  développement 
qu'exige  l'abondance  des  vest^es  de  ces  civilisations  pri- 
mitives, on  connaîtra  leur  extension  et  leur  plénitude  à  des 
époques  que  ni  l'histoire  ni  la  tradition  ne  peuvent  atteindre. 

C'est  de  cette  période  que  l'anthropologie  préhistorique 
pourra  recevoir  un  important  secours  pour  la  connaissance 
des  races  qui  élevèrent  nos  kioekkenmoeddings,  qui  habitè- 
rent nos  grottes  naturelles,  et  qui  creusèrent  dans  le  roc  les 
grottes  de  Palmeila.  A  l'exception  de  ces  spécimens  et  de 
quelques  autres  obtenus  par  les  explorations  faites  dans  les 
sépultures,  dont  nous  ne  saurions  fixer  l'époque,  mais  qui 


.,Ci 


r 


i8 

Dous  paraissent  être  pré-romaioes,  nous  ne  possédons  rien 
de  plus. 

Quelques  exemplaires  trouvés  dans  les  cavernes  répan- 
dent une  clarté  précieuse,  soit  sur  la  trépanation  employée 
par  nos  troglodytes  à  l'époque  néolithique,  soit  sur  beaucoup 
de  cas  pathologiques,  de  déformations,  de  fractures,  etc.,  et 
encore  sur  l'anthropophagie  certainement  pratiquée  par  ces 
mêmes  troglodytes. 

Tels  sont,  Messieurs,  les  principaux  sujets  soumis  à 
votre  considération  éclairée,  et  nous  sommes  certains  qu'à 
l'aide  de  vos  connaissances,  tous  ces  sujets,  peu  étudiés  en- 
core, recevront  la  lumière  nécessaire  pour  prêter  à  la  science 
les  services  qui  lui  sont  dûs.  Nous  sommes  certains  aussi 
que  le  Congrès  de  Lisbonne,  en  même  temps  qu^il  répandra 
la  lumière  sur  beaucoup  de  questions  douteuses  et  qu^il  don- 
nera la  solution  d'importants  problèmes  relatifs  aux  civill- 
sations  préhistoriques  de  nos  régions,  contribuera  puissam- 
ment à  développer  parmi  nous  Pintérêt  pour  les  études  de 
la  paléontologie  humaine,  de  Parchéologie  préhistorique  et 
des  sciences  auxiliaires,  dans  la  partie  vraiment  applicable 
aux  questions  ethnographiques  et  ethnologiques.  (Applau- 
dissements). 

M.  GvpELLiNi  prononce  l'allocution  suivante: 

SIRE, 

Sa  Majesté  le  Roi  dom  Fernando, 
Monsieur  le  Président, 

Messieurs  les  membres  du  Comité  d'organisation  oc 
NEUVIÈME  Congrès  préhistorique  international. 

Mon  Auguste  Souverain  le  Roi  d'Italie,  le  Haut  Pro- 


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'9 
lecteur  de  la  cinquième  session  de  notre  Congrès  préhistori- 
que à  Bologne,  a  daigné  m'honorer  d'une  mission  tout-à-fait 
gracieuse  et  personnelle  à  l'occasion  de  l'inauguration  de  ta 
neuvième  session  du  Congrès  à  Lisbonne,  sous  les  auspices 
et  le  haut  protectorat  de  Sa  Majesté  Très-Fidèle. 

Sa  Majesté  Humbert  i"  se  souvient  avec  la  plus  vive 
satisfaction  d'avoir  assisté  à  l'une  de  nos  séances  en  1871  â 
Bologne,  et  d'avoir  pris  part  à  l'excursion  faite  à  la  nécro- 
pole étrusque  de  Marzabotto. 

Tout  récemment  Elle  a  eu  l'extrême  amabilité  de  me  rap- 
peler aussi  que,  à  cette  occasion,  Elle  avait  souhaité  de  voir 
se  réunir  en  Italie  un  Congrès  géologique  international.  Cet 
événement  va  s'accomplir  l'année  prochaine  à  Bologne,  et 
le  Roi  d'Italie  a  daigné  en  accepter  le  haut  protectorat. 

Ayant  appris  que  je  me  rendais  à  Lisbonne  pour  étu- 
dier la  question  de  l'homme  tertiaire.  Sa  Majesté  m'a  fait 
l'honneur  de  me  charger  de  saluer  en  son  nom  les  membres 
du  Congrès  international  d'Anthropologie  et  d'Archéologie 
préhistoriques.  Elle  n'a  pas  oublié  que  notre  association, 
après  quinze  années  d'une  vie  vigoureuse  et  pleine  d'intérêt 
pour  la  science  de  l'homme,  ouvre  aujourd'hui  sa  neuvième 
session  sous  un  ciel  et  sur  les  bords  d'un  fleuve  qui  rap- 
pellent  le  ciel  d'Italie  et  le  beau  golphe  de  Spezia,  où  notre 
Congrès  a  eu  son  modeste  berceau  en  1865. 

Le  Roi  d'Italie  a  voulu  s'associer  au  Roi  de  Portugal, 
qui  daigne  ouvrir  en  personne  notre  session,  honorée  aussi 
de  l'auguste  présence  de  Sa  Majesté  le  Roi  Dom  Fernando; 
il  m'a  chargé  d'exprimer  â  notre  assemblée  ses  vœux  pour 
la  pleine  réussite  de  la  nouvelle  session  et  pour  l'avenir  de 
notre  science. 

Nous  avons  la  certitude  que  ces  vœux  seront  accom- 
plis et  que  le  Congrès  de  Lisbonne  présentera  te  plus  haut 


.,Ct 


r 


intérêt,  au  point  de  vue  des  rapports  de  la  géologie  et  de 
la  paléontologie  avec  l'anthropologie  et  Parchéologie  préhis- 
toriques. 

Puisque  j'ai  la  parole,  qu'il  me  soit  encore  permis  de 
saluer  le  Congrès  au  nom  de  l'ancienne  Université  à  laquelle 
j'ai  l'honneur  d'appartenir,  et  aussi  au  nom  de  Bologne,  qui 
sera  heureuse  de  recevoir,  l'année  prochaine,  tous  ceux 
d'entre  vous  qui  voudront  bien  prendre  pan  au  deuxième 
Congrès  géologique  international  sous  le  haut  protectorat 
de  Sa  Majesté  le  Roi  d'Italie.  (Applaudissements). 

M.  Capeluni  propose  ensuite  à  l'assemblée  de  ratifier 
la  nomination  de  M.  Carlos  Ribeiro  comme  secrétaire  gé- 
néral. 

Cette  proposition  est  acceptée  et  l'élection  est  faite  par 
acclamation. 

M.  Capellini  présente  aussi  une  liste  imprimée  de  mem- 
bres du  Congrès  pour  remplir  les  fonctions  de  vice-prési- 
dents, de  membres  du  conseil  et  de  secrétaires. 

Cette  liste,  qui  avait  été  préparée  par  le  Comité  d'oi^a- 
nisation,  est  distribuée  aux  membres  du  Congrès.  Elle  est 
approuvée  sans  altération. 


,ï  Google 


PRÉSIDENT 
M.  Andrade  Corvo. 

PRÉSIDENTS  HONORAIRES 
MM.  Capeluni. 

DE  MORTILLET. 

VIOE-PRÉKDENT  HONORAIRE 
M.  A.  DE  QUATREFAGES. 

VICE-PRËBIDENT8 

MM.  A.  M.  Barbosa,  Portugal. 
B.  DU  Bocage,  Portugal. 
Delgado,  Portugal. 
Evans,  Grande  Bretagne. 

HiLDEBRAND,  Sukde. 

H.  Martin,  France. 
PiGORfNi,  Itcdie. 
RoMER,  Hongrie. 
Van  Beneden,  Belgique. 
i.  ViLANOvA,  Espagne. 
ViRCHOw,  Allemagne. 
Zawisza,  Russie. 


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SECRÉTAIRE  G-ËNÊRAL 

M.  Carlos  Ribeiro. 

SECRÉTAIRES 

MM.  Cazalis  de  Fondouce,  France. 
Chantre,  France. 

GONÇALVES  VlANNA,  POTtUgOl. 

Vasconcellos  Abreu,  Portugal, 

BEOSËTAIREa  ADJOINTS 

MM.  DE  Baye,  France. 

Adolpho  Coelho,  Portugal. 
EsTAao  DA  Veiga,  Portugal. 
Ramalho  OfiTifiÂo,  Portugal. 

HEHBRES  DU  CONSEIL 

MM.  Antonovitch,  Russie. 
BELLUcct,  Italie. 
Cartailhac,  France. 
Choffat,  Suisse. 
CoTTEAO,  France. 
CoNSiGUERi  Pedroso,  Portugal. 
Prrr-RivERS,  Grande  Bretagne  •. 
Ploix,  France. 


'  On  avait  assuré  au  bureau  permanent  que  M.  Prrr-RtvBRs  assis- 
terait  au  Congràs. 


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MM.  PossiDONio  DA  SiLVA,  Portugal. 
ScHAAFFHAUSEN,  Allemagne. 

TRÉSORIER 

M.  A.  C.  TEKEffiA  d'Abacâo. 


M.  LE  Président  du  Congrès.  Conformément  à  l'article 
ivi  du  Règlement,  je  soumets  au  Congrès  la  proposition  pré- 
sentée par  dix  membres,  pendant  la  8*"'  session,  à  Buda- 
pesth,  tendante  à  modifier  par  un  article  complémentaire  le 
même  règlement.  Je  ferai  lecture  de  cette  proposition,  ainsi 
que  du  rapport  qui  Paccompagne,  signé  par  le  regretté  pro- 
fesseur  Paul  Broca. 

«Article  complémentaire.  Les  fondateurs  du  Congrès, 
les  anciens  présidents  et  les  vice-présidents  honoraires 
nommés  en  vertu  du  deuxième  article  additionnel  du  Règle- 
ment générât  constituent  un  conseil  permanent,  chargé  de 
maintenir  la  tradition  du  Congrès,  de  veiller  à  la  bonne 
exécution  du  Règlement,  de  faire  les  études  préparatoires 
relatives  au  siège  des  sessions  futures,  et  de  faire  face  aux 
difficultés  imprévues  qui  pourraient  surgir  dans  l'intervalle 
de  deux  sessions.! 


.,Ct 


r- 


BAFPOHT  Dtr  CONSEIL 
snr  la  propoaltlon  préoAdente 

La  pensée  qui  a  dicté  cet  article  s^est  présentée  dès 
Porigine  aux  commissaires  qui  eurent  l^onneur  de  rédiger 
en  1867  le  Règlement  général  du  Congrès.  Une  association 
internationale  qui  n'a  pas  de  siège  fixe,  dont  les  sessions 
se  tiennent  chaque  année  dans  un  nouveau  pays,  au  milieu 
de  conditions  très  variables,  a  besoin  plus  que  toute  autre 
d^un  conseil  permanent,  chargé  d'assurer  sa  stabilité  et  de 
maintenir  sa  tradition.  Mais  quelque  évidente  que  fût  cette 
nécessité,  les  commissaires  de  1867  ne  purent  y  satisfaire, 
parce  que  rien  ne  désignait  encore  les  personnes  qui  devaient 
plus  tard,  par  leur  zèle  pour  le  Congrès,  par  leur  assiduité, 
par  leur  expérience,  mériter  d'être  investies  de  la  mission 
de  confiance  conférée  à  un  conseil  permanent. 

Ce  personnel  d'hommes  dévoués,  expérimentés  et  au- 
torisés, existe  aujourd'hui.  Le  moment  est  donc  venu  de 
compléter  l'organisation  du  Congrès  par  l'institution  du  con- 
seil permanent. 

Nous  pensons  qu'il  convient  d'appeler  dans  ce  conseil 
les  membres  qui  font  déjà  de  droit  partie  du  conseil  de  cha- 
que session,  savoir: 

1°  les  quatre  membres  fondateurs  de  la  Spezia; 

1"  les  anciens  présidents  du  Congrès  et  le  président 
désigné  de  ta  session  suivante; 

3"  les  membres  qui,  après  avoir  rempli  pendant  qua- 
tre sessions  les  fonctions  de  vice-présidents,  sont  devenus 


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_%s_ 

vice-présidents  honoraires,  en  vertu  de  i^article  complémen- 
taire voté  par  rassemblée  au  début  de  la  présente  session 
de  Budapesth. 

Les  attributions  du  conseil  permanent,  telles  qu^elles 
sont  définies  dans  l'article  proposé,  ne  portent  aucune  at- 
teinte à  l'initiative  des  commissions  d'organisation  instituées 
pour  chaque  session  par  le  président  désigné;  elles  n'em- 
piètent pas  davantage  sur  les  droits  conférés  par  le  Règle- 
ment à  l'assemblée  générale  du  Congrès.  EHles  ne  concernent 
que  les  circonstances  qui  surviennent  dans  l'intervalle  de 
deux  sessions,  et  sur  lesquelles,  par  conséquent,  l'assemblée 
générale  ne  peut  être  consultée.  Il  peut  se  faire,  par  exem- 
ple, que  les  événements  viennent  s'opposer  à  la  réunion  du 
Congrès  dans  la  ville  et  à  la  date  fixée  par  l'assemblée  et 
qu'il  faille  dès  lors  choisir  une  autre  ville  et  une  autre  date. 
n  peut  se  faire  encore  que  la  mort  ou  la  démission  du  pré- 
sident désigné  rende  nécessaire  la  nomination  d'un  autre 
président. 

Dans  les  deux  cas  qui  viennent  d'être  indiqués,  l'inter- 
vention du  conseil  permanent  est  absolument  indispensable, 
et  il  en  est  d'autres  sans  doute  où  elle  pourra  devenir  utile. 
Une  expérience  toute  récente  nous  a  appris  que  le  choix  du 
siège  de  la  future  session  peut  donner  lieu  à  de  sérieuses 
difficultés,  et  exiger  des  négociations  préalables  qui  ne  peu- 
vent pas  toujours  aboutir  pendant  la  durée  de  la  session. 
Le  conseil  permanent  aura  seul  l'autorité  suffisante  pour  étu- 
dier la  question  à  l'avance  et  pour  préparer  les  voies.  En- 
fin, le  président  désigné,  jusqu'ici  seul  responsable  de  l'or- 
ganisation de  la  session,  pourra  rencontrer  des  obstacles 
imprévus  et  éprouver  le  besoin  d'abriter  sa  responsabilité 
derrière  celte  du  conseil  permanent. 

Le  conseil  de  la  session  de  Budapesth  approuve  donc  à 


■'GoR^» 


runanimité  Partide  complémentaire  qui  fait  Pobjet  de  ce 
rapport. 

y.  *Broca,  rapporteur. 

C'est  sur  ce  rapport,  entièrement  conforme  à  la  pro- 
position, que  je  consulte  rassemblée. 


Les  conclusions  du  rapport  sont  mises  aux  voix  et  ap- 
prouvées à  l'unanimité. 

Après  la  proclamation  des  noms  des  délégués  des  dif- 
férents pays  et  sociétés  savantes,  la  séance  est  levée  à  2  heu- 
res et  demie. 


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DEUXIÈME  SÉANCE 

Hardi,  21  BeptemDre 

Présidence  de  M.  G^peluni,  fondateur. 

La  séance  est  ouverte  à  g  heures. 

M.  OswALD  Hebk.  Aperçu  sur  la  flore  tertiaire  du 
Portugal  (communication  lue  par  M.  le  comte  de  Ficalho). 

M.  le  comte  de  Ficalho.  Quelques  remarques  sur  le 
climat  du  Portugal  à  l'époque  tertiaire. 
Discussion:  M.  Capellini. 

M.  Carlos  Ribeiro.  L'homme  tertiaire  en  Portugal. 
Discussion:  MM.  de  Mortillet,  Evans  et  Capellinl 

'    M.  ScMAAFFHAUSEN.  L'homme  préhistorique. 
Discussion:  MM.  de  Quatrefages,  de  Mortillet,  et 

SCHAAFFHAUSEN. 

M.  Capellini  propose  la  nomination  d'une  commission 
pour  examiner  les  silex  présentés  par  M.  Carlos  Ribeiro, 
et  les  couches  où  ils  ont  été  recueillis,  ainsi  que  les  pièces  qui 
pourront  être  trouvées  sur  place. 


^O^t^CV 


\ 


28 

Le  Président  du  Congrès  nomme  les  membres  suivants 
pour  formw  cette  commission:  MM.  Capellini,  Carlos  Ri- 

BEIRO,  CaRTAILHAC,  CaZALIS   DE    FONDOUCE,  ChoffAT,  Cot- 

TEAU,  Evans,  de  Mortillet,  Vilanova,  Virchow. 
La  séance  est  levée  à  midi  et  demi. 


,ï  Google 


TROISIÈME  SÉANCE 

Hardi,  21  septemDre 
Présidence  de  M.  Evans. 
La  séance  est  ouverte  à  2  heures, 

M.  DE  Laurière.  Au  nom  de  la  Société  Française  d'Ar- 
chéologie, dirigée  par  M.  Léon  Palustre,  j'm  l'honneur  d'of- 
frir au  Congrès  d'Anthropologie  et  d'Archéologie  préhisto- 
riques réuni  à  Lisbonne,  le  Compte-rendu  du  46*"*  Congrès 
Archéolo^que  tenu  par  cette  Société  en  1879  à  Vienne 
(France). 

Ce  volume  contient  quelques  mémoires  particulièrement 
relatifs  à  l'ordre  d'idées  des  travaux  du  Congrès  de  Lis- 
bonne. J'indiquerai  seulement  les  suivants  :  Rapport  sur  les 
fouilles  exécutées  dans  les  grottes  de  la  vallée  du  Rhône,  etc., 
par  M.  H.  Nicolas  d'Avignon;  Les  troglodytes  de  VArdk- 
che,  par  M.  OUier  de  Marichard;  Stations  préhistoriques  de 
la  grotte  du  Placard,  près  de  Rochebertier  (Charente),  par 
A.  de  Maret;  L'époque  préhistorique  et  gauloise  dans  le  dé- 
partement des  Hautes-Alpes,  par  M.  J.  Roman;  De  Vancien- 
neté  de  l'homme  en  Dauphiné,  par  M.  Florian  Vallentin. 


.^ 


3o 

C'est  en  raison  du  caractère  spécial  de  ees  divers  tra- 
vaux que  la  Société  Française  d'Archéologie  a  rhonneur 
d'offrir  l'hommage  respectueux  et  sympathique  de  sa  der- 
nière publication  annuelle  au  Congrès  de  Lisbonne. 

M.  DE  Baye  présente  différents  mémoires. 

M.  DE  QuATBEFAGES  dépose  soH  ouvFage  L'espèce  hu- 
maine. 

Le  Président  remercie  au  noxf^  du  Congrès.  - 

M.  Delgado.  Description  de  la  grotte  de  Fuminha,  à 
Péniche:  Époque  quaternaire. 

Discussion:  MM.  Evans,  Delgado  et  de  Morttllet. 

M.  Zawisza.  Sur  le  quaternaire  de  la  Pologne  et  la 
grotte  du  Mammouth. 

Discussion:  MM.  Evans  et  de  Mortei^t. 

M.  Bellucci.  L'homme  tertiaire  en  Ombrie. 
Discussion:  MM.  Capellini  et  de  Quatrefages. 

La  séance  est  levée  à  5  heures. 


ithropologie  de  la  Section  des  Travaux 


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Sôanoe  dn  CkmseU,  le  21  aeptembre 


Présidence  de  M.  Andrade  Corvo. 

M.  Ch.  Ploix  présente  au  nom  de  la  Société  d'Anthro- 
pologie de  Paris  la  proposition  suivante,  signée  par  dix  mem- 
bres de  cette  Sodété. 


PROPOSITION 

Au  nom  de  la  Société  d'Anthropologie  de  Paris,  j'ai 
l'honneur,  comme  son  président,  et  appuyé  par  l'assenti- 
ment de  tous  les  membres  de  cette  Société  soussignés,  pré- 
sents au  Congrès,  de  demander  au  Conseil,  de  vouloir  bien 
proposer  au  Coi^rès  d'émetre  un  vœu  en  faveur  de  la  créa- 
tion d'une  Sodété  d'Anthropologie  à  Lisbonne. 
Le  21  septembre  1886. 

Ch.  Ploix 
E.  Magitot 
G.  de  Mortillet 
H.  Martin 
De  Quatrefages 
Emile  Cartailhac 
Ca^alis  de  Fondouce 
Ernest  Chantre 
G.  Cotteau 
Baron  J.  de  Baye 


,ï  Google 


Le  Conseil  d'un  commun  accord  n'a  pas  délibéré  sur 
cette  proposition. 

Le  Président  lève  la  Séance. 


Mercredi,  22  aeptemtire 


Excursion  à  Otta.  Environs  de  Monte-Redondo:  ter- 
rains tertiaires:  silex  taillés. 


DigitizsdbyGOOgie 


QUATRIÈME  SÉANCE 
Jendi,  23  septembre 
Présidence  de  M.  de  Mortillet,  fondateur. 
La  séance  est  ouverte  i  9  heures. 

M.  Delgado.  Les  dépôts  de  Pépoque  néolithique  for- 
mant le  sol  de  la  grotte  de  Fuminha.  Vesdges  d^anthro- 
pophagie. 

Discussion:  MM.  de  Baye,  CARTAtLHAC,  Evans,  Schaaff- 
HAusEN,  Delgado,  de  Mortillet,  Virchow,  Vasconcellos 
Abreu,  HiLDEBRAND,  H.  Martin;  Spécialement  sur  l'hypo- 
thèse de  Panthropophagie  des  habitants  de  Fuminha. 

M.  ScHAAFPHAUSEN  proposc  qu'une  commission  soit 
nommée  pour  Texainen  des  vestiges  d'anthropophagie  signa- 
lés par  M.  Delgado. 

Plusieurs  brochures  sont  présentées  au  Congrès.  On 
décide  qu'elles  reâtent  à  l'Académie  Royale  des  Sciences. 

M.  Cartailhac  propose  qu'on  prie  ceux  des  oQi-ants 
qui  auraient  des  doubles,  de  vouloir  bien  déposer  un  exem- 
plaire à  la  Section  Géologique. 


■f^i 


-h. 

Cette  proposition  est  approuvée. 

M.  Ckantke.  Monographie  sur  les  anciens  glaciers  du 
bassin  du  Rhône. 

Discussion  :  MM.  Evans  et  de  Mortillet. 

M.  Carlos  Ribeirô  fait  part  de  la  réception  de  deux  let- 
tres accompagnant  les  mémoires  suivants,  de  M.  Adrien 
Arcelin  :  L'ancienneté  de  l'homme  dans  le  bassin  moyen 
du  Rhône  et  la  vallée  inférieure  de  la  Saône,  et  de  M. 
George  Atkinson  :  Sur  l'écriture  appelée  Ogam,  que  l'on 
trouve  dans  les  Iles  Britanniques. 

M.  ViLANOvA  appelle  l'attention  du  Congrès  sur  les 
études  faites  par  M.  Frederico  de  Vasconcellos  dans  les 
dépôts  superficiels  du  bassin  du  Douro,  et  invite  ce  géolo- 
gue à  lire  lui-même  son  mémoire. 

M.  Frederico  de  Vasconcellos  donne  ensuite  lecture 
du  Résumé  d'une  étude  faite  sur  quelques  dépôts  superfi- 
ciels du  bassin  du  Douro — Présence  de  l'homme — Vesti- 
ges d'action  glaciaire. 

Le  Président  du  Congrès  nonune  une  commission, 
composée  de  MM.  Barbosa  du  Bocage,  Capellini,  Cartai- 
LHAc,  Delgado,  Hildebrand,  Mortillet,  Schaaffhausen, 
Vasconcellos  Abred  et  Virchow,  pour  l'examen  des  vesti- 
ges d'anthropophagie  révélés  par  les  ossements  trouvés  à 
Pintérieur  de  la  grotte  de  Fuminha. 

La  séance  est  levée  à  i  heure. 


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CINQUIÈME  SÉANCE 

Jeudi,  23  septembre 
Présidence  de  M.  de  Quatrefages. 
La  séance  est  ouverte  à  2  heures. 

M.  DE  Bâte.  Les  traits  caractéristiques  de  l'époque 
néolithique  en  France,  tels  qu'ils  sont  réunis  dans  les  sta- 
tions de  la  Champagne. 

Discussion:  M.  H.  Martin. 

M.  DE  Quatrefages.  Note  sur  les  dernières  découver- 
tes effectuées  dans  la  Lozère  par  M.  Prunières. 

■Discussion:  MM.  H.  Martin  et  de  Quatrefages. 

M.  Gazaus  de  Fondouce.  De  l'emploi  de  la  callaïs 
dans  l'Europe  occidentale  aux  temps  préhistoriques. 
Discussion:  MM.  Cartailhac  et  Evans. 

M.  Chqffat  présente  les  conclusions  de  la  commission 
nommée  pour  l'examen  des  silex  trouvés  à  Otta  et  des  cou- 
ches où  ils  ont  été  recueillis.   - 


Le  Président  fixe  le  samedi  pour  la  discussion  de  léon- 
ine tertiaire. 

M.  Chantre.  L^âge  du  brotue  en  Italie. 

Discussion:  MM.  de  Mortillet,  Pigorini,  Virchow, 
H.  Martin  et  Chantre. 

Observations  de  M.  H.  Martin.  Sur  deux  espèces 
d'épées  en  bronze  trouvées  en  Irlande. 

M.  Pigorini.  Objets  en  silex  et  squelette  peints  en 
rouge,  trouvés  dans  une  caverne  près  de  Rome. 

La  séance  est  levée  à  5  heures. 


Vendredi,  24  septembre 

Excursion  à  Mugem:  Kioekkenmoeddings  de  Moita  do 
Sebastiâo  et  de  Cabetjo  da  Arnida. 


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SIXIÈME  SÉANCE 

Samedi,  SB  septembre 

Présidence  de  M.  Virchow. 

Sa  Majesté  le  ROI  Dom  Luiz,  protecteur  de  la  g*"* 
Session,  et  Sa  Majesté  le  ROI  Dom  Fernando,  président 
d'honneur,  assistent  à  la  Séance,  laquelle  est  ouverte  à  9 
heures. 

M.  Choffat  fait  la  lecture  du  rapport  de  la  commis- 
sion nommée  pour  Texamen  des  silex  trouvés  à  Otia  et 
Tétude  de  leurs  condiiions  de  gisement. 

Discussion:  Sur  les  vestiges  de  Texistence  de  l'homme  en 
Portugal,  i  la  période  miocène:  MM.  de  Mortillet,  Evams, 
Capeluni,  Vilanova,  Cartailhac,  Bellocci,  Cotteau,  Vir- 
chow, Delgado,  Cazaus  de  Fondouce  et  de  Quatrefages. 

L'inscription  étant  épuisée,  le  Président  M.  Vjrchow  re- 
met la  décision  à  un  autre  congrès,  ces  questions  ne  devant 
pas  être  décidées  à  la  majorité  des  voix. 


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38 

Le  Secrétaire  Général  présente  au  Congrès,  un  mé- 
moire sur  ^Les  Lusitaniens*,  au  nom  de  son  auteur,  M.  Mas- 
tins  Sabmento. 

La  séance  est  levée  i  i  heure. 


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SEPTIÈME  SÉANCE 

Samedi,  26  septembre 

Présidence  de  M.  Vilanova. 

La  séance  est  ouverte  à  2  heures. 

M.  Cartailhac  déclare  que  la  liste  des  membres  du 
Congrès  qui  désirent  prendre  part  à  l'excursion  à  Citania 
va  être  close,  et  que  le  départ  aura  lieu  dans  la  matinée  du 
3o  septembre. 

M.  Magitot.  Essai  sur  les  mutilations  ethniques. 
Observations  de  M.  Cazalis  de  Fohdocce. 

M.  Chantre  présente  au  Congrès  son  grand  ouvrage 
Le  premier  âge  du  fer  dans  le  bassin  du  Rhône. 

M.  OuvBiRA  Feuao.  Sur  un  cas  de  microcéphalie  en 
Portugal. 

Après  avoir  lu  son  mémoire,  M.  Oliyeira  FeijÂd  fait 
entrer  dans  la  salle  du  Congrès  la  microcéphale  Bemvin- 
da,  conduite  par  sa  garde-malade. 


40 
Elle  est  examinée  avec  le  plus  grand  intérêt  par  plu- 
sieurs membres  du  Congrès. 

Discussion  sur  la  lecture  précédente:  MM.  Vilanova  et 

ViRCHOW. 

M.  Paula  e  Oliveira.  Notes  sur  les  ossements  humains 
qui  se  trouvent  dans  le  musée  de  la  Section  Géologique  de 
Lisbonne. 

Discussion:  MM.  de  Quatrefages  et  H.  Martin. 

La  séance  est  levée  à  5  heures  et  demie. 


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Séance  du  Oonseil,  le  26  septembre 


Présidence  de  M.  Andrade  Corvo. 

M.  Capellini  exprime  la  nécessité  de  faire  réunir  le 
prochain  Congrès  dans  un  pays  où  il  n^ait  pas  encore  siégé; 
il  invite  les  membres  du  conseil  des  différentes  nationalités 
à  donner  leur  avis  là-dessus. 

M.  DE  QuATREFAGEs  propose  que  le  Conseil  permanent 
soit  consulté  sur  ce  sujet;  il  ajoute  qu'il  faut  penser  aux 
frais  que  le  gouvernement  d'un  pays  doit  faire  pour  rece- 
voir le  Congrès. 

M.  DE  MoRTiLLET  appuîc  la  proposition  de  M.  de  Qua- 
trefages. 

M.  ViBCHOw  appuie  la  proposition  de  M.  Capellini  et 
celle  de  M.  de  Quatrefages;  il  fait  aussi  remarquer  que  le  choix 
du  pays  présente  encore  d'autres  difficultés,  celle  d^une  lan- 
gue officielle  du  Congrès,  par  exemple.  Il  s'abstient  de  pro- 
poser que  la  lo*""  session  ait  lieu  à  Berlin,  et  fait  voir  qu'il 
serait  mieux  de  penser  à  une  autre  capitale. 


ff>s^ 


4» 

M.  Zawisza  donne  des  renseignements  sur  des  explo- 
rations faites  dans  quelques  cavernes  et  sur  les  travaux  exé- 
cutés en  Cracovie. 

M.  Capellimi  donne  lecture  delà  proposition  suivante: 


PROPOSITION 

Les  membres  du  Congrès  qui  auront  été  cinq  fois  se- 
crétaires passeront  de  droit  secrétaires  honoraires,  et  feront 
partie  du  Conseil  permanent. 

S^ils  assistent  à  deux  nouveaux  Congrès  ils  deviendront 
vice-présidents  honoraires. 

G.  de  Mortiîlet 

Hans  Hildebratid 

G.  Capellini 

Emile  Carlailhac 

J.  Zams:ia 

Ch.  Ploix 

G.  de  Vasconcellos  Abreu 

Z.  Consiglieri  Pedroso 

Virchow 

Joaquim  Philippe  Nery  Delgado 

G.  Coiteau 

H.  Martin 

Le  conseil  décide  que  le  sujet  de  cette  proposition  soit 
présenté  à  TAssemblée  générale  du  prochain  Congrès  com- 
me un  4*""  article  additionnel. 

MM.  DE  MoRTiLLET  et  CAPEU.INI  foHt  quelques  obser- 
vations concernant  les  membres  correspondants. 


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M.  LE  Président  résume  la  question,  et  propose  qu'une 
liste  des  membres  correspondants  soit  présentée  i  chacun 
des  représentants  des  différents  pays  en  leur  signalant  les 
individus  qui  n'ont  pas  adhéré  aux  Congrès  pour  les  trois 
dernières  Sessions;  et  qu\ine  liste  soit  faite,  en  ajoutant  aux 
noms  des  membres  correspondants  les  noms  de  ceux  qui 
par  leurs  travaux  ont  contribué  au  développement  du  Con- 
grès et  à  la  bonne  réussite  des  sessions. 

Approta>ie. 

Le  Préâdent  lève  la  Séance. 


Dlmonohfl,  28  septembre 

Réception  par  Sa  Majesté  le  Roi  Dom  Fernando  au 
Palais  de  Necessidades. 

Visites  aux  Musées  et  autres  établissements  publics  de 
Lisbonne. 

Réception  par  S.  Majesté  le  Roi  Dom  Luiz,  et  ban- 
quet au  Palais  d'Ajuda. 


,Ci, 


HUITIÈME  SÉANCE 

Londl,  27  septembre 

Présidence  de  M.  Hildebrand. 

La  séance  est  ouverte  à  g  heures. 

M.  Chantre  présente  différents  mémoires  au  Congrès. 

Le  Président  du  Congrès  communique  l'invitation  faite 
par  l'Académie  Royale  des  Sciences  aux  membres  des  deux 
Congrès,  préhistorique  et  littéraire,  pour  un  dîner,  le  29  à  7 
heures,  dans  la  grande  salle  de  l'Arsenal  de  la  Marine. 

M.  H.  Martin.  Du  type  ethnique  et  anthropologique 
des  Ibères. 

Observations  de  M.  Adolpho  Coelho. 

M.  Adolpho  Coelho.  Sur  les  cultes  péninsulaires  an- 
térieurs à  la  domination  romaine. 

Observations  de  MM.   H.  Martin  et  Vasconcellos 


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45 

M.  CoNSiGLiERi  Pedroso.  Sut  quelques  formes  du  ma- 
riage populaire  en  Portugal.  Contributions  pour  la  connais- 
sance de  l'état  sodal  des  anciens  habitants  de  la  Péninsule. 

M.  DE  Baye.  Les  instruments  en  pierre  à  l'âge  des  mé- 
taux. 

Observations  de  M.  de  Mortillet. 

M.  Magitot  donne  lecture  du  mémoire  de  M.  Gustave 
MiLLEscAMPS:  Sur  les  siiex  emmanchés  de  l'époque  méro- 
vingienne. 

M.  Vasconcellos  Abreu  présente  son  mémoire:  De 
l'origine  probable  des  Toukhâres  et  leurs  migrations  à  tra- 
vers l'Asie. 

Le  Président  du  Congrès  communique  l'invitation  faite 
par  la  Sodété  d'Instruction  de  Porto,  pour  une  fête  au  Pa- 
lais de  Cristal,  dans  cette  ville,  lorsque  les  membres  du 
Congrès  y  passeront  en  revenant  de  Citant'a  de  Briteiros. 

La  séance  est  levée  à  i  heure. 


..Goc^l^  , 


NEUVIÈME  SÉANCE 

Lnndi,  27  septembre 

Présidence  de  M.  Zawisza. 

.  La  séance  est  ouverte  à  2  heures  et  demie. 

M.  le  Président  du  Congeiès  fait  part  de  la  réception 
de  plusieurs  brochures  et  mémoires  offerts  au  Congrès. 

M.  Henri  Martin  présente  au  Congrès  de  la  part  de 
M.  Alexandre  Bertrand,  directeur  du  Musée  de  Saint-Ger- 
niain,  dix-sept  photographies  représentant  des  divinités  gau- 
loises; il  fait  suivre  cette  présentation  de  quelques  remar- 
ques sur  la  mythologie  gauloise,  et  invite  les  savants  portu- 
gais et  espagnols  à  faire  des  recherches  de  ce  genre  dans  la 
Péninsule. 

Observations  de  M.  Goihet  sur  les  rapports  delà  trinité 
gauloise  avec  la  trimté  dans  l*Inde. 

M.  PiGOWNi  communique  un  télégramme  qu'il  vient  de 
recevoir  du  Prof.  Uzielli  sur  la  découverte  de  quelques  tom- 


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bes  dans  le  terramare  de  Casinalbo,  el  fait  ressortir  l'im- 
ponance  de  cette  découverte. 

M.  Belluccc.  Du  culte  de  la  pierre. 
Observations  de  M.  Magitot. 

M.  ViLANOVA.  Du  cuivre  et  du  bronze  en  Espagne,  et 
de  la  période  qui  les  a  précédés. 

Discussion:  MM.  Chantre,  Vilanova,  J.  J.  Rodricues 

et  DE  MORTILLET. 

M.  Vilanova  invite  les  membres  du  Congrès  à  visiter 
avec  lui  les  cavernes  de  Santillana,  près  Santander,  dont 
les  parois  et  le  plafond  oITrent  des  gravures  coloriées  où 
l'on  reconnait  l'aurochs.  Cette  découverte  est  due  à  M.  Mar- 
celine de  Santuola. 

M.  PossiDONio  DA  SILVA.  Sur  les  haches  en  bronze 
trouvées  en  Portugal. 

Z)«cus«b«.- MM.  Cazaus  de  Fondouce,  Chantre,  Hil- 

DEBRAND  et  DE  MoRTILLET. 

M.  PiGORiNi.  Nécropole  de  l'âge  du  bronze  en  Italie. 

M.  DE  Baye.  Les  indices  de  la  transition  de  la  pierre 
polie  à  l'époque  du  bronze. 

M.  Oppert.  Sur  Pambre  jaune  dans  la  haute  antiquité 
asiatique. 

La  séance  est  levée  à  3  heures  et  demie. 


..Cotfjlc 


Hardi,  28  Beptemtire 

Excursion  à  Cascaes  et  Qntra;  grottes  néolithiques. 
Visite  au  Château  de  Pena;  réception  par  Sa  Majesté 
le  Roi  Dom  Fernando. 

Dîner  à  l'hôtel  «Victor». 

Bal  au  château  Royal  de  Cascaes. 


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DIXIÈME  SÉANCE 

Heroredl,  29  septembre 

Présidence  de  M.  Delgado. 

La  séance  est  ouverte  à  lo  heures. 

M.  Mesnieb.  Les  formations  géologiques  de  la  Cordil- 
lère des  Andes  et  l^omme  américain. 

M.  ViLANOVA.  Quelques  détails  ajoutés  à  sa  commu- 
nication précédente  sur  l'âge  du  cuivre  en  Espagne. 

M.  Chantre.  L^s  nécropoles  du  premier  âge  du  fer 
du  Caucase  contenant  des  crânes  macrocéphaics. 

Discussion:  MM.  Virchow,  Chantre,  Antonovitch  et 

HlLDEBRAND, 

M.  Antonovitch.  Les  tumuli  de  la  vallée  du  Borys- 
thène. 

M.  Adolpho  Coelho.  Sur  les  prétendues  relations  des 
macrocéphaics  d'Hippocrate  avec  les  Qmbres. 
Discussion:  MM.  Vilanova  et  H.  Martin. 

7» 


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5o 

M.  ViHCHOw  présente  au  Congrès  plusieurs  exemplai- 
res du  prospectus  et  des  planches  d'un  grand  ouvrage  de 
MM.  Reiss  et  Stubel  sur  les  Ruines  d'Ancon;  il  ajoute  plu- 
sieurs renseignements. 

Observations  de  M,  oe  Mortillet, 

Le  Secrétaire  Général  présente  le  mémoire  envoyé  par 
M.  Bataillard:  Les  Gitanos  d'Espagne  et  les  Ciganos  de 
Portugal. 

M.  Vasconcellos  Abreu  fait  la  lecture  du  rapport  de 
la  commission  nommée  pour  l'examen  des  vestiges  d'anthro- 
pophagie des  habitants  de  la  grotte  de  Furninha. 

Réponse  de  M.  Delgado  et  observations  de  M.  Schaaff- 

MAUSEN. 

La  séance  est  levée  à  i  heure. 


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ONZIÈME  SÉANCE 

(Clôture  de  la  Session) 
Heroredi,  2B  septembre 
Présidence  de  M.  Romer. 
La  séance  est  ouverte  à  2  heures. 

M.  Pawinski  présente,  au  nom  des  auteurs  absents,  une 
magnifique  carte  archéolo^que  de  là  Prusse  occidentale  et 
des  parties  contiguës  du  grand-duché  de  Posen. 

M,  le  Président,  remercie  au  nom  du  Congrès. 

M.  Pawinski.  Sur  les  cimetières  de  l'âge  du  fer  en  Po- 
logne, avec  ou  sans  incinération. 

M.  Oppert.  Sur  la  chronologie  préhistorique. 

M.  Carlos  Ribeiro.  Les  kioekkenmoeddings  de  la  val- 
lée du  Tage.  (La  lecture  de  ce  mémoire  est  faite  par  M. 
Cartailhac  qui  ajoute  quelques  observations). 


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_5z_ 

M.  RoMER  dépose  différents  mémoires  et  donne  quel- 
ques renseignements  sur  les  fouilles  qu'il  fait  exécuter  dans 
les  quarante-cinq  grands  tumuiî  de  Nagy  Falu. 

M.  CapelliN!  propose  que  le  Comité  permanent  soit 
chargé  de  s'occuper  du  choix  de  l'endroit  où  aura  lieu  la 
10*""  Session  du  Congrès. 

M.  RoMER  fait  part  au  Congrès  que  les  mémoires  en- 
voyés par  les  membres  absents  se  trouvent  au  Secrétariat 
et  qu'ils  seront  publiés  dans  le  Compte-Rendu  de  la  Ses- 
sion. 

Le  Président  du  Congrès,  M.  Andrade  Corvo,  prend 
place  au  fauteuil. 

Puis  il  propose  à  l'Assemblée  de  remercier  Sa  Majesté  le 
Roi  Dom  Luiz  et  Sa  Majesté  le  Roi  Dom  Fernando  de  Phon- 
neur  qu' Elles  ont  daigné  faire  au  Congrès  en  acceptant  le 
haut  protectorat  ainsi  que  la  présidence  de  la  9*°"  Session,  Sa 
Majesté  la  Reine  Dona  Maria  Pia  de  la  réception  gracieuse 
qu'Elle  a  bien  voulu  réserver  aux  membres  du  Congrès  et 
Sa  Majesté  le  Roi  d'Italie  pour  l'intérêt  qu'Elle  a  daigné 
prendre  aux  travaux  de  cette  session. 

Ces  propositions  sont  reçues  par  l'assemblée  avec  ap- 
plaudissements et  votées  par  acclamation. 

Le  Président  du  Congrès  propose  ensuite  au  Congrès 
de  voter  des  remercîments  à  l'École  Polytechnique,  au  Gre- 
mio  Litterario,  à  l'Association  des  Architectes,  au  directeur 
de  l'Observatoire  Météorologique,  à  l'Académie  des  Beaux- 
Arts,  à  la  Bibliothèque  Nationale,  à  la  Direction  de  l'Obser- 
vatoire Astronomique,  à  celle  du  Musée  Numismatique. 


^ 


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53 
Ces  propositions  sont  votées  de  même  par  acclamation. 

M.  GiPELLiNi  prononce  l'allocution  suivante  : 

Après  les  remercîments  qui  nous  ont  été  proposés  par 
notre  Président  il  nous  reste  encore  bien  des  dettes  à  payer. 
J'ai  donc  l'honneur  de  proposer  à  PAssemblée  de  voter  des 
remercîments  bien  sincères: 

Au  Gouvernement  portugais  et  à  la  Municipalité  de  la 
ville  de  Lisbonne,  qui  ont  tant  contribué  à  la  réussite  de  la 
^èm»  session  de  notre  Congrès; 

A  notre  illustre  Président,  M.  Andrade  Corvo,  au  Se- 
crétaire Général,  M.  Carlos  Ribeiro,  et  à  tous  les  membres 
du  Comité  d'organisation; 

Aux  Municipalités  de  Santarem,  Salvaterra,  Almeirim, 
et  aux  populations  des  localités  que  nous  avons  visitées  dans 
nos  excursions; 

A  la  Section  des  Travaux  géologiques  à  laquelle  on 
doit  la  réalisation  du  Congrès  de  Lisbonne; 

A  l'Académie  Royale  des  Sciences  qui  nous  a  reçus,  et 
à  tous  les  établissements  scientifiques  et  artistiques  qui  nous 
ont  ouvert  leurs  portes  pendant  notre  séjour  à  Lisbonne; 

A  la  Société  d'Instruction  de  Porto  pour  l'aimable  in- 
vitation qu'elle  a  faite  aux  membres  du  Congrès  pour  une 
fête  au  Palais  de  Cristal,  lorsqu'ils  passeront  dans  cette  ville; 

A  M.  Martins  Sarmento,  pour  l'intéressante  excursion 
qu'il  nous  prépare  aux  Citanias; 

Aux  officiers  de  VA/rica,  qui  se  sont  donnés  tant  de 
peines  pour  notre  excursion  à  Cascaes. 

Messieurs.  Je  pense  que  nous  allons  tous  rentrer  chez 
nous  avec  le  vif  désir  de  revoir  ce  beau  et  intéressant  pays, 
oii  de  nouveaux  trésors  seront  rapidement  accumulés  par 
nos  habiles  confrères,  qui  nous  ont  surpris  par  les  merveil- 


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leuses  trouvailles  faites  dans  un  temps  relativement  restreint. 
{Applaudissements  répétés). 

Des  remeromems  sont  aussi  votés  aux  différentes  au- 
torités, spécialement  au  Govemeur  Civil  du  district  de  San- 
tarem;  à  M""  la  Duchesse  de  Cadaval  et  à  MM.  Gabriel  de 
Freitas  et  Dom  José  Belmonte  pour  la  permission  qu'ils 
ont  bien  voulu  accorder  de  faire  des  fouilles  dans  leurs  pro- 
priétés, à  Mugem,  à  Porto  Covo,  à  Otta. 

Le  Président  M.  Andbade  Corvo. 

Mesdames  et  Messieurs. 

Nous  voilà  malheureusement  arrivés  au  terme  désigné 
d'avance  pour  la  clôture  de  la  neuvième  Session  du  Con- 
grès anthropologique. 

C'est  pour  moi  un  triste  devoir  celui  de  prononcer  la 
clôture  de  notre  session,  laquelle,  outre  ses  magnifiques  ré- 
sultats par  rapport  à  la  science  préhistorique,  a  aussi  eu  le 
pouvoir  magique  de  nous  unir  tous  par  des  liens  de  la  plus 
sympathique  fraternité. 

Ce  Congrès,  qui  restera  un  des  plus  beaux  souvenirs 
de  ma  vie,  a  été  pour  le  Portugal  une  occasion  unique 
d'écouter  les  lumineuses  leçons  des  maîtres  de  la  science. 
Pour  moi,  ce  Congrès  est  venu  aussi  me  permettre  d'admirer 
les  hautes  qualités  d'esprit  et  de  cœur  dont  vous  m'avez 
donné  des  preuves  incessantes.  Croyez-moi,  Messieurs:  par 
mes  sentiments  de  vive  reconnaissance,  et — permettez-moi 
de  vous  le  dire  aussi — d'amitié  sincère,  je  saurai  toujours 
correspondre  à  cette  bienveillance,  qui  ne  s'est  pas  une  seule 
fois  démentie. 

Mesdames  et  Messieurs.  Je  crois  que  le  Congrès  peut 


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55 

Être  fier  des  résultats  de  ses  études.  Plusieurs  questions 
ont  été  largement  discutées;  et,  si  nous  ne  pouvons  pas 
dire  que  tous  les  membres  de  la  savante  assemblée  sont  en- 
tièrement d'accord  sur  les  sujets  controversés,  nous  pou- 
vons dire  au  moins  que  plusieurs  difficultés  se  trouvent 
vaincues,  plusieurs  dissentiments  se  sont  effacés,  et  des 
doutes  à  peine  viennent  encore  ternir  l'éclat  de  vérités  qui 
bientôt  seront  entièrement  acquises  à  la  science. 

Ce  que  nous  venons  de  voir  se  dérouler  devant  nous 
n'est  que  l'histoire  toute  vivante  des  grandes  découvertes 
de  la  science.  Ce  qui  un  jour  est  négation  devient  doute  à 
peine  le  lendemain;  puis  le  doute  se  change  en  simple  ré- 
serve, et  à  la  fin  la  vérité  éclate,  appuyée  par  des  milliers 
de  faits  incontestables.  Alors  la  conquête  scientifique  est 
réalisée  aux  applaudissements  des  tous  les  savants  sincères, 
qui,  même  par  leurs  négations,  leurs  doutes  et  leurs  réser- 
ves ont  contribué  puissamment  à  la  rendre  plus  solide  et 
plus  brillante. 

Telle  est  l'histoire  de  la  science  préhistorique  toute  en- 
tière, plus  peut-être  que  de  toute  autre  science.  Réjouissons- 
nous  de  cela,  Messieurs,  car  c'est  à  ces  difficultés  mêmes 
qu'elle  doit  ses  triomphes  les  plus  éclatants.  Sous  ce  point 
de  vue,  la  Session  du  Congrès  anthropologique  à  Lisbonne 
restera  mémorable.  L'histoire  de  l'homme,  notre  histoire  à 
nous,  a  été  reculée,  n'en  doutons  pas,  de  plusieurs  milliers 
de  siècles,  même  pour  ceux  qui  n'admettent  pas  encore  sans 
hésitation  l'homme  tertiaire. 

L'avenir,  un  avenir  prochain,  j'en  suis  convaincu,  tran- 
chera définitivement  cette  importante  question,  qui  a  été 
pendant  la  session  actuelle  du  Congrès  la  question  ma- 
jeure. 

Le  Congrès  a  fait  faire  à  la  science  préhistorique  un 


o 


56 

pas  immense,  en  ouvrant  de  larges  horizons  aux  nouvelles 
découvertes. 

Pour  nous,  les  Portugais,  la  brillante  Session  du  Con- 
grès, à  laquelle  nous  venons  d'assister,  restera  mémorable, 
et  par  ses  résultats  et  par  l'impulsion  qu'elle  ne  manquera 
pas  de  donner  parmi  nous  aux  études  de  la  science  préhis- 
torique et  de  toutes  celles  qui  viennent  lui  apporter  à  cha- 
que instant  l'aide  puissante  de  leurs  lumières.  Séparés  de- 
puis  longtemps  du  reste  de  l'Europe,  un  peu  par  notre  si- 
tuation géographique,  beaucoup  par  la  longue  élaboration 
de  notre  organisation  politique  et  économique  qui  a  duré 
un  demi-siècle,  nous  travaillons  dans  une  modeste  obscu- 
rité à  nous  mettre  au  niveau  de  la  science  moderne.  Le 
Congrès  est  venu  nous  montrer  que  nous  avons  autre  chose 
3  faire,  bien  plus  profitable  pour  la  science  et  pour  nous- 
mêmes:  ce  Congrès  est  venu  nous  faire  entrer  dans  le  cou- 
rant qui  emporte  la  science  dans  les  splendides  clartés  des 
grandes  vérités  de  la  nature. 

Nous  saurons,  j'espère,  Messieurs,  vous  accompagner 
dans  votre  glorieux  pèlerinage.  Que  les  hommes  de  scien- 
ce continuent  à  nous  aider  de  leurs  conseils  et  à  nous  en- 
courager par  leur  bienveillance! 

Nous  avons  occupé  une  grande  place  dans  l'histoire  de 
la  civilisation  moderne  au  temps  de  nos  vastes  découvertes 
maritimes.  De  ces  découvertes  la  civilisation  et  la  science 
ont  su  tirer  un  immense  profit.  Ni  l'une  ni  l'autre  ne  l'ou- 
blieront jamais,  croyons-le,  et  elles  recevront,  par  cela  même, 
avec  une  complaisance  persistante  tout  ce  que  nous  ferons 
pour  elles. 

Mesdames  et  Messieurs.  Nous  vous  avons  reçus  avec 
cette  cordialité  qui  est  un  des  caractères  distinctifs  du  peu- 


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J7_ 
pie  portugais:  nous  ne  pouvions  pas  vous  prouver  autre- 
ment notre  gratitude  et  notre  estime  pour  vous.  Nous 
en  avons  été  bien  récompensés  por  vos  aimables  bontés  et 
encore  plus  par  les  belles  discussions  que  nous  avons  tous 
suivies  avec  le  plus  vif  intérêt. 

Nous  prions  le  Congrès  d'agréer  encore  une  fois  l'as- 
surance de  notre  gratitude.  Et — permettez-moi  de  parler  en 
mon  nom  dans  ce  moment — j'ose  prier  aussi  les  membres 
étrangers  du  Congrès  de  croire  que  je  serai  toujours  recon- 
naissant pour  l'indulgence  dont  ils  m'ont  donné  les  témoi- 
gnages les  moins  équivoques.  Ce  sont  là  des  faits  trop  pro- 
fondément gravés  dans  mon  cœur  pour  que  je  puisse  ja- 
mais les  oublier.  (Apflaudissements  répétés). 

La  neuvième  Session  du  Congrès  International  d'An-  ' 
thropologie  et  d'Archéologie  préhistoriques  est  close. 


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Excursion  dans  le  nord  du  pays' 


JendJ,  30  septembre 
Départ  pour  Braga. 

Hardi,  1"  octobre 
Visite  à  Gitania  de  Briieiros.  Retour  à  Porto. 


Heroredl,  2  octobre 

Porto:  Bibliothèque  Municipale,  musée. 
Coïmbre:  Université,  musée. 


*  Pour  la  description  de  c«te  excursion  voir  VAppendk 


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COMPTE  RENDU 


EXCURSIONS 


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EXCURSION  A  OTTA 


La  journée  du  22  septembre  avait  été  > 
miner  sur  le  terrain  les  conditions  de  ^sèment 
du  miocène.  A  6  heures  du  matin,  une  centa 
nés  prenaient  place  dans  le  train  spécial  qui  d' 
porter  à  la  gare  de  Cairegado.  Au  sortir  de  ] 
purent  examiner  une  belle  coupe  des  terrains 
à  découvert  par  les  tranchées  de  la  voie;  f 
roulait  le  charmant  panorama  de  ta  ligne  des 
dra,  permettant  de  saisir  d'un  seul  coup  d'o 
des  terrains  tertiaires,  crétacés  et  jurassique: 
tie  du  pays.  De  l'autre  côté  de  la  voie  se  tro 
ses  riches  exploitations  de  sel,  et  au-delà  d 
vaste  plaine  qui  le  borde  et  la  chaîne  de  l'Ar 
de  fond  à  ce  magnifique  tableau. 

Une  vingtaine  de  voitures  attendaient  le 
à  la  station  de  Carregado,  d'où  l'on  quitta  les 
pour  se  diriger  vers  le  Nord  à  travers  les  col 


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6a 

en  se  tenant  à  peu  de  distance  à  l'ouest  des  chaînons  pitto- 
resques formés  par  les  terrains  jurassiques. 

Au  village  de  Carrcgado,  la  Commission  chargée  d''étu- 
dicr  la  question  à  Tordre  du  jour'  mit  pied  à  terre,  et  M. 
Carlos  Ribeiro  lui  fit  voir  une  coupe  d'ensemble  du  terrain 
tertiaire. 

La  caravane  continua  ensuite  à  suivre  la  route  royale, 
passant  au-dessus  de  la  riante  et  industrieuse  vallée  d'AJem- 
quer,  dont  la  verdure  et  la  fraîcheur  sont  rehaussées  par 
l'aridité  et  la  nudité  des  flancs  des  collines  qui  l'entourent. 

Vers  g  heures  on  arrivait  au  village  d'Otta,  où  les  at- 
telages furent  doublés  avant  de  pénétrer  dans  la  charneca 
(lande)  but  de  Texcursion.  La  charneca  d'Otta  est  un  vaste 
plateau  formé  par  le  conglomérat  et  les  sables  du  tertiaire 
lacustre  inférieur,  qui  vers  l'Ouest  s'appuient  en  stratification 
discordante  sur  les  terrains  jurassiques;  vers  l'Est  il  est  ca- 
ché par  un  gradin  un  peu  plus  élevé  formé,  non  pas  par  la 
molasse  marine  comme  c'est  le  cas  dans  les  environs  de 
Lisbonne,  mais  par  des  assises  de  marne  et  de  conglomé- 
rats contenant  une  faune  et  une  flore  terrestres  et  fluviati- 
les. 

Vers  le  bord  occidental  de  la  charneca  se  trouve  im 
petit  îlot  de  jurassique,  le  Monte-Redondo,  dont  l'altitude 
atteint  212  mètres;  il  est  situé  à  2  kilomètres  d'Otta, 

Arrivés  au  pied  de  cette  colline,  les  excursionistes  se 
dispersèrent  dans  les  divers  ravins,  en  quête  de  silex  taillés. 


'  Dans  la  1'"  séance  du  ai,  fut  nommée  une  Commission  composée 
de  MM.  Capellini,  Carlos  Ribeiro,  Cartailhac,  Cazalis  de  Fondouce 
Choffat,  Cotteau,  Evans,  de  Mortiilet,  Vilanova  et  Virchow,  chargée 
d'examiner  les  silex  présentés  par  M.  Carlos  Ribeiro,  ainsi  que  les  cou- 
ches oti  ils  ont  été  recueillis. 


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De  nombreuses  pièces  provenant  d'éclats,  d'autres  paraissant 
êlre  des  nucléus,  furent  enlevées  de  l'intérieur  des  couches, 
sous  les  yeux  desniembres  delà  Commission;  cependant  une 
seule  de  celles-ci  fur  jugée  ne  pas  laisser  subsister  de  dou- 
tes sur  la  taille  intentionnelle.  (Voyez  fig.  i).  Elle  fut  trou- 
vée par  M.  Bellucci,  en  présence  de  MM.  Cartailhac,  Caza- 
lis  de  Fondouce,  Vilanova,  et  d'autres  membres  du  Con- 
grès. Il  fut  en  outre  trouvé,  à  la  surface  du  sol,  plusieurs. 
pièces  incontestablement  taillées;  quelques  personnes  les 
considérèrent  comme  dégagées  du  conglomérat  par  les  agents 
atmosphériques;  un  plus  grand  nombre  les  regardèrent  com- 
me d'un  âge  moins  ancien. 

Un  lunch  servi  sous  une  vaste  tente  dressée  en  face  du 
Monte-Redondo  attendait  les  excursionistes,  qui  firent  le  plus 
grand  honneur  à  l'hospitalité  luxueuse  qu'on  leur  offrait.  Une 
trentaine  de  toasts  furent  successivement  échangés  entre  les 
membres  portugais  et  les  représentants  des  différentes  na- 
tions prenant  part  au  Congrès. 

A  une  heure,  la  caravane  se  remit  en  route,  traversant 
obliquement  la  Chameca  pour  se  rendre  à  la  colline  d'Ar- 
chino,  où  une  profonde  tranchée  permettait  d'étudier  les  cou- 
ches d'eau  douce  mentionnées  plus  haut. 

En  présence  d'une  vingtaine  de  membres  du  Congrès,  on 
dégagea  des  restes  d'animaux,  vertébrés  et  invertébrés: 
parmi  les  premiers  se  trouvait  une  mâchoire  assez  bien 
conservée  paraissant  appartenir  à  un  hipparion. 

La  superposition  de  ces  couches  sur  les  conglomérats 
miocènes  est  incontestable;  on  peut  facilement  s'en  convain- 
cre en  examinant  les  ravins  latéraux;  tandis  que  les  quel- 
ques membres  qui  s'étaient  bornés  à  voir  la  face  de  la 
tranchée  pouvaient  croire  que  les  marnes  à  Hipparion 
avaient  formé  récif  pendant  le  dépôt  du  conglomérat. 


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_64_ 

Cette  fausse  interprétation  provenait  de  ce  que  les  mar- 
nes ne  forment  qu'un  ou  deux  bancs  intercalés  dans  des  cou- 
ches de  conglomérats  et  de  sables,  présentant  les  mêmes  ca- 
ractères au-dessus  qu'au-dessous,  et  de  ce  qu'une  partie  des 
sables  supérieurs  ayant  anciennement  glissé  sur  les  couches 
de  marne  et  ayant  été  entamée  par  la  tranchée,  on  pouvait  au 
premier  coup-d'œil  la  considérer  comme  appartenant  aux 
couches  inférieures;  ce  qui  avait  fait  dire  à  un  des  membres 
du  Congrès  que  les  conglomérats  i  grimpaient  contre  la  fa- 
laise i. 

La  localité  d'Azambuja,  comprise  au  programme  dans 
le  titre  de  l'excursion,  n'a  pas  été  visitée.  Elle  estsimée  sur 
le  prolongement  des  couches  d'Archino,  à  7  kilomètres  de 
cette  localité,  au  bord  de  la  vallée  du  Tage. 

Il  était  près  de  6  heures  lorque  nous  reprîmes  le  che- 
min de  Carregado,  où  nous  attendait  le  train  qui  nous  avait 
conduits  le  matin;  il  nous  ramena  à  Lisbonne,  un  peu  fati- 
gués par  la  poussière  et  la  chaleur,  mais  enchantés  des  si- 
tes pittoresques  que  nous  avions  eu  l'occasion  de  voir  et  de 
l'hospitalité  qui  nous  avait  été  réservée. 


EXPLICATION  DE  LA  FLANCHE 

Nous  reproduisons  ici  deux  coupes  qui  ont  été  publiées 
en  1880'  et  reproduites  par  M.  Bellucci*,  et  nous  copions  en 
outre  la  figure  du  silex  taillé  qu'a  trouvé  ce  dernier  auteur. 


'  L'Homme  tertiaire  en  Portugal  par  M.  P.  Choffat.  Archives  des 
sciences  physiques  et  naturelles.  Genève,  décembre  1880,  p.  537,  pi.  m. 

'  L'Uomoter^iario  m  Portogallo.  Archîvio  per  l'Antropologia  e  la 
Etnologia.  Firenze,  vol.  m,  fascicolo  3.°,  p.  la  et  tav.  iv.  1881. 


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Excursion  à  Otta 


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L'éloignement  nous  ayant  empêché  de  corriger  le  des- 
sin de  la  planche,  il  s'y  est  glissé  deux  erreurs  qui  ont  été 
reproduites  par  M.  Bellucci;  nous  rétablissons  le  dessin 
original. 

Le  profil  u."  i  relevé  à  quelques  kilomètres  au  nord  de 
Lisbonne,  nous  montre  au  nord-ouest  le  calcaire  à  Rudis- 
tes  R,  formant  la  colline  de  Gampo.  On  sait  que  ce  calcaire 
a  été  rangé  dans  le  Turonien,  classification  qui  vient  d'être 
confirmée  par  les  déterminations  de  MM.  Cotteau  et  de 
Lorioi,  qui  y  ont  retrouvé  des  formes  connues  du  Turo- 
nien de  l'Algérie.  Ces  strates  ont  un  plongeraient  de  25° 
vers  le  sud-est. 

Au-dessus  se  trouve  la  formation  basaltique  B,  compo- 
sée de  basalte  compacte  divisé  en  gros  prismes  irréguliers, 
et  contenant  en  outre  des  cendres  et  des  marnes. 

Dans  les  lits  de  marne,  intercalés  au  milieu  des  cen- 
dres basaltiques,  se  trouvent  quelques  nids  de  fossiles  par- 
fois très-nombreux,  mais  appartenant  à  un  petit  nombre 
d'espèces. 

M,  Tournouër  en  a  publié  une  étude  dans  le  Journal  de 
Conchyliologie  (1879,  page  172,  pi.  vi).  Il  y  reconnaît  trois 
espèces  différentes  de  coquilles  terrestres,  toutes  trois  nou- 
velles, ne  permettant  par  conséquent  pas  de  fixer  l'Sge  des 
couches  qui  les  renferment.  M.  Tournouër  fait  pourtant  re- 
marquer qu'elles  ont  des  rapports  avec  les  formes  vivant 
actuellement  dans  l'Amérique  du  Sud. 

Les  lits  supérieurs  des  ma^es  basaltiques  présentent 
une  stratification  bien  visible  au  bord  de  la  route  de  Presa, 
à  quelques  pas  de  notre  coupe.  Ils  plongent  d'environ  i3° 
vers  le  sud-est  et  supportent  des  marnes  rouges  {c')  conte- 
nant des  grains  de  quartz  et  de  silex  roulés,  et  ayant  la 
même  inclinaison;  ils  forment  la  base  des  grès  miocènes 


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66 

(c^àc%  Ces  grès,  qui  sont  parfois  très  fins,  présentent  gé- 
néralement de  nombreux  cailloux  de  silex  et  de  quartzîte, 
soit  arrondis,  soit  anguleux,  mélangés  à  des  cailloux  calcai- 
res arrondis;  ils  ne  présentent  souvent  qu'un  sable  désagré- 
gé, accidentellement  relié  par  une  pâte  calcaire,  plus  rare- 
ment siliceuse. 

Des  bancs  de  ce  calcaire  blanc,  empâtant  des  silex,  se 
remarquent  en  c*;  ils  forment  une  colline  qui  supporte  la 
chapelle  d'Azenhas  Velhas.  Un  deuxième  niveau  (c*)  forme 
une  falaise  fort  étendue  et  d'une  élévation  assez  notable. 

L'inclinaison  des  strates  y  est  de  8";  pétrographique- 
ment  ce  niveau  se  distingue  du  premier  par  la  grosseur  des 
éléments  qui  ie  composent. 

Il  suffit  de  s'avancer  de  aoo  à  3oo  mètres  dans  la  direc- 
tion de  notre  coupe  pour  rencontrer  la  molasse  marine  pré- 
sentant une  richesse  de  fossiles  remarquable: 

Nous  nous  bornerons  à  citer:  Turritella  terebralis  L., 
Pynila  condita  Br.,  Voîuta  spoliata  Sow.,  Lutraria  latissima 
Desh.,  Pecten  convexo-costatus  Mich-,  et  enfin  Ostrea  cras- 
sissima  Lamk-,  qui  s'y  trouve  en  quantité  considérable. 

Au-dessus  de  la  molasse  se  trouvent  une  vingtaine  de 
mètres  de  sables  très  fins,  micacés,  contenant  quelques  pe- 
tites lentilles  de  marnes  ou  de  grains  de  quaru. 

A  i5  mètres  de  la  base  se  trouve  un  banc  de  marne 
d'un  mètre  d'épaisseur  (p).  Cette  marne  contient  de  nombreu- 
ses empreintes  de  plantes  terrestres  et  quelques  mollusques 
marins  ou  d'eau  saumâtre.* 

Ces  plantes  appartiennent  à  la  même  flore  que  celles 
trouvées  à  Azambuja  sur  le  prolongement  des  couches 
d'Archino.  (Voyez  à  ce  sujet  le  mémoire  de  M.  Heer,  pu- 
blié dans  ce  volume). 

Le  profil  ti."  2  s'étend  du  Monte-Redondo  aux  fouilles 


1 


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d'Archino,  il  a  une  longueur  de  4  '/a  km.  Il  est  important  de 
remarquer  qu'il  coupe  la  vallée  en  biais  et  qu'il  aurait  un 
kilomètre  de  moins  s'il  avait  été  relevé  directement  en  tra- 
vers de  la  vallée. 

/,  calcaires  jurassiques;  c,  conglomérats  miocènes;  p, 
couche  de  marne  avec  Hipparion,  etc. 

Les  deux  erreurs  se  trouvant  dans  la  " 
en  1880,  portent  sur  les  conglomérats  mioc 
sinateur  a  fait  passer  sous  les  calcaires  du  I 
tandis  qu'ils  les  recouvrent  au  contraire  jus 
La  deuxième  erreur  est  la  terminfûson  S. 
sables  supérieurs  aux  marnes  à  Hipparion 
au  contraire  sous  forme  de  plateau.  Ce  son 
téraux  qui  permettent  d'examiner  Archino 
mais  il  n'est  pas  possible  de  le  faire  au  suc 


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EXCURSION  A  MUGEM 


MOITA  DO  SEBASTIAO  ET  CABEÇO  DA  ARRUDA 

Le  24  septembre,  à  six  heures  du  matin,  un  train  spé- 
cial conduisit  les  excursionistes  à  Santarem,  ville  très  an- 
cienne, bâtie  sur  la  rive  droite  du  Tage,  occupant  la  base 
et  le  sommet  d'une  colline  où  l'on  voit  les  ruines  d'ancien- 
nes fortifications. 

Là  les  congressistes  sont  reçus  par  le  gouverneur  civil 
du  district  et  le  conseil  municipal  de  Santarem.  Des  dis- 
cours sont  échangés.  En  sortant  de  la  gare  on  trouve  toute 
la  population  de  la  ville  et  des  alentours  revêtue  de  ses  cos- 
tumes nationaux,  célébrant  l'arrivée  des  visiteurs  par  des 
acclamations  enthousiastes. 

Nous  laissons  la  parole  à  M.  Bellucci'. 

■La  route  était  toute  pavoisée,  la  musique  militaire  jouait 


'  Congresso  Internationale  dt  Antropoiogia  ed  Archeologia  Preisto- 
riche.  Reîa^ione  deî  Dr.  Giuseppe  Bellucci.  Eslratto  JaZ/'Archivio  per 
l 'Antropoiogia  e  la  Etnologia  di  Firenze,  vol.  si,  fasc.  3.",  p.  17-29. 


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des  hymnes  portugais.  Des  centaines  de  fusées  volantes  lan- 
cées de  tout  côté  et  pendant  longtemps  font  retentir  l'air  de 
leurs  crépitations  stridentes,  le  tout  contribuant  à  rendre  no- 
tre réception  plus  singulière  et  plus  festive.  Au  milieu  de  la 
foule  on  voyait  les  pittoresques  costumes  de  la  population 
campagnarde,  parmi  lesquels  se  distinguaient  ceux  des  cam- 
pinos,  gardiens  des  troupeaux  de  taureaux,  costumes  que 
plusieurs  jeunes  propriétaires  de  la  contrée  avait  aussi  endos- 
sés. Montés  sur  de  superbes  mules  et  sur  des  chevaux  fou- 
gueux les  campinos  faisaient  la  haie  sur  notre  passage,  tenant 
à  la  main  le  pau  ferrado,  long  bâton  caractéristique  aux 
bouts  de  cuivre  ouvragé.  Nous  traversons  la  ville,  tout  en 
fête,  puis  le  grand  pont  en  construction  sur  le  Tage,  ouvrage 
à  la  fois  hardi  et  grandiose. 

Le  pont  aura  iïoo  mètres  de  longueur  et  6  mètres  de 
largeur.  Le  jour  de  notre  passage  les  travaux  encore  inache- 
vés étaient  cependant  en  état  de  permettre  qu'on  touchât 
la  rive  opposée  du  fteuve  ;  pour  descendre  on  avait  fait  cons- 
truire exprès  un  escalier  très  commode,  à  plusieurs  étages, 
haut  de  trente  mètres,  lié  à  un  échafaudage  qui  rempla- 
çait la  partie  du  pont  encore  à  construire.  Pendant  que 
nous  traversions  le  pont  et  que  nous  descendions,  les  cam- 
pinos montés  sur  leurs  chevaux  passaient  le  fleuve  à  gué. 
Au  pied  de  l'escalier,  les  voitures  qui  devaient  nous  con- 
duire à  Mugem  nous  attendaient.  Elles  formaient  une  lon- 
gue file,  flanquée  toujours  par  de  nombreux  cavaliers.  Nous 
traversâmes  les  villages  de  Almeirim,  Bemfica  et  Mugem. 
Partout  nous  fûmes  reçus  par  les  autorités;  partout  des  dra- 
peaux, des  arcs  de  triomphe,  des  girandes  de  fusées  votan- 
tes; partout  des  populations  en  fête  accourant  sur  notre  pas- 
sage pour  nous  saluer.  Où,  cependant,  les  démonstrations 
de  cet  accueil  gracieux  et  enthousiaste  atteignirent  le  com- 


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70 
ble  ce  ftjt  aux  confins  des  communes  d'Almeirim  et  de  Sal- 
vaterra:  outre  les  autorités  il  y  avait  des  centaines  de  nou- 
veaux campînos,  en  costume,  représentés  par  les  riches  pro- 
priétaires de  ces  lieux  et  par  leurs  gens. 

Après  notre  passage  la  scène  devient  très  animée,  in- 
descriptible; nos  voitures  en  deux,  trois  files,  à  l'aventure, 
suivaient  des  chemins  indéterminés  que  les  conducteurs,  les 
uns  après  les  autres,  se  frayaient  dans  cette  campagne  ou- 
verte. Les  cavaliers  qui  flanquaient  les  files  de  voitures, 
tantôt  se  livraient  à  des  courses  effrénées  perçant  les  files, 
tantôt  prenaient  des  altitudes  pleines  de  grâce  et  d'agilité,  si- 
mulant une  véritable  fantasia  arabe,  que  non  seulement 
la  nature  et  l'aspect  du  terrain,  mais  aussi  l'ardeur  du  so- 
leil rendaient  encore  plus  vraisemblable. 

Il  était  presque  midi  lorsque  nous  arrivâmes  au  mon- 
ticule, Moita  do  Sébastian,  où  l'on  avait  pratiqué  une  large 
et  profonde  tranchée  afin  que  nous  pussions  examiner  la 
structure  du  Itioekkenmoedding  et  tous  ses  détails.  Au  fond 
de  la  tranchée,  et  sur  des  mottes  de  terre  qu'on  avait  lais- 
sées iH  situ,  on  voyait,  ça  et  là,  plusieurs  squelettes  humains 
rencontrés  dans  l'excavation.  Le  tumulus  ou  monticule  au- 
dessous  d'une  strate  de  terre  végétale,  était  entièrement  for- 
mé par  les  débris  de  coquilles  comestibles  atteignant  la  hau- 
teur de  presque  deux  mètres,  mêlés  à  quelques  galets,  à  de 
menus  et  nombreux  fragments  de  charbon,  à  de  rares  éclats 
de  silex  et  à  des  ossements  également  rares.  L'importance 
du  monument  préhistorique  se  montrait  dans  toute  son  évi- 
dence et  nous  avons  eu  l'occasion  de  faire  sur  place  bon 
nombre  d'observations. 

Plus  tard,  sous  la  même  tente  qui  nous  avait  abrités  à 
Otta,  on  nous  servit  un  lunch  magnifique;  et  tandis  que 
cela  se  passait  sous  la  tente,  on  avait  improvisé  des  repas 


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7' 
frugaux  sur  le  sol  même,  à  Pombre  des  hauts  chênes,  autour 
desquels  se  groupaient  plusieurs  de  ceux  qui  nous  avaient 
suivi  à  jVIugem  ainsi  que  les  personnes  qui  en  grand  nombre 
nous  avaient  attendus  au  lieu  même  des  explorations. 

Tandis  que  la  plupart  des  congressistes  prenaient  plai- 
sir à  contempler  cette  scène  et  jouissaient  de  la  fraîcheur 
relative  que  nous  procurait  la  tente,  un  certain  nombre,  gui- 
dés par  M.  Delgado,  se  rendirent  à  un  autre  tumulus  sem- 
blable, que  l'on  connaît  par  le  nom  de  Cabeço  da  Arruda. 

On  y  avait  aussi  fait  faire  des  excavations  spéciales  i 
cause  de  notre  visite,  et  il  faut  ajouter  que  ce  tumulus  était 
en  lui-même  plus  important,  plus  riche  en  objets  remarqua- 
bles et  en  données  scientifiques  que  celui  qu''on  avait  précé- 
demment examiné. 

L'excavation  avait  plus  d'étendue,  et  elle  se  prêtait  fort 
bien  à  faire  connaître  la  manière  dont  le  tumulus  avait  été 
sucessivement  formé,  et  à  démontrer  que  les  squelettes  hu- 
mains qui  s'y  trouvaient,  apartenaient  à  des  individus  con- 
temporains des  mangeurs  de  mollusques  qui  ont  vécu  sur 
la  tombe  de  leurs  parents  ou  de  leurs  compagnons,  et  y  ont 
laissé  une  quantité  énorme  de  valves  de  mollusques  sem- 
blables, généralement  réduites  à  des  fragments  très  menus. 

Gomme  produit  des  fouilles  faites  avant  notre  arrrivée 
on  voyait  un  grand  nombre  d'objets  vers  la  partie  centrale 
de  l'excavation,  lesquels  on  été  mis  gracieusement  à  notre 
disposition.  Après  que  chacun  de  nous  eut  fait  une  ample 
provision  d'os,  de  silex  et  de  coquilles,  nous  reprîmes  le  che- 
min pour  rejoindre  nos  confrères.  Ayant  retrouvé  nos  voi- 
tures nous  passâmes  par  la  route  que  nous  avions  suivie  le 
matin.  Vers  7  heures  du  soir  nous  nous  trouvions  à  San- 
tarem,  et  à  9  heures  nous  rentrions  à  Lisbonne  rapportant 
le  souvenir  de  Tune  des  plus  belles  journées  que  nous  ayons 


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passées,  embellie  par  un  accueil  si  plein  de  courtoisie  et  de 
démonstrations  de  sympathie,  et  rendue  si  intéressante  par 
les  monuments  préhistoriques  examinés,  lesquels,  malgré 
leur  analogie  avec  les  kioekkenmoeddings  du  Danemark, 
n'en  sont  pas  moins  une  spécialité  bien  marquée  de  la  vallée 
du  Tage.» 


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EXCURSION  A  CASCAES  ET  CINTRA 


Le  28  septembre,  à  7  heures  du  matin,  les  membres  du 
Congrès  furent  conduits  à  bord  du  transport  de  guerre 
YAfrica  dans  des  chaloupes  de  la  marine  royale. 

Pendant  le  trajet  de  Lisbonne  à  Cascaes,  les  congres- 
sistes purent  admirer  le  magnifique  panorama  qu'offre  l'es- 
tuaire du  Tage  illuminé  par  un  soleil  splendide.  On  voyait 
au  sud,  les  falaises  d'Alfeite,  d'une  cinquantaine  de  mètres  de 
hauteur,  constituées  par  les  sables  tertiaires,  à  teintes  rou- 
ges et  jaunes  qui  s'étendent  jusqu'aux  contreforts  de  l'Ar- 
rabida.  A  la  suite  se  dessinait  la  pointe  de  Cacilhas  avec 
ses  grands  magazins  de  vins  et  de  liége,  puis  on  signalait  le 
fort  d'Almada  et  la  série  de  collines,  plus  ou  moins  abruptes, 
constituées  par  la  molasse  marine  et  qui,  s'étendant  jusqu'à 
l'Océan,  forment  vers  le  sud  la  côte  maritime. 

Le  long  de  la  rive  droite  la  ville  de  Lisbonne  s'étalait 
sur  des  pentes  tantôt  douces,  tantôt  rapides,  formées  aussi 
par  la  molasse  marine.  On  voyait  la  vallée  d'Alcantara,  qui 
présente  des  sections  très  intéressantes  du  crétacé  supérieur 


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ou  calcaire  à  Rudistes.  On  remarquait  en  haut  le  vaste  pa- 
lais d'Ajuda,  où  deux  jours  auparavant  le  Roi  Dom  Louis 
avait  reçu  les  congressistes.  En  bas,  de  nombreux  palais 
entourés  de  jardins  présentent  une  luxuriante  végétation  en 
grande  partie  exotique.  Les  collines  rougeâtrcs  et  brunâtres 
qui  donnent  un  aspect  si  caractéristique  à  cette  partie  de 
la  rive  droite  du  Tage,  doivent  leur  existence  à  des  déi>ôts 
qui  précédèrent  et  qui  accompagnèrent  les  épanchements 
basaltiques,  qui  ont  eu  un  si  grand  développement  aux  en- 
virons de  Lisbonne,  surtout  dans  la  contrée  qu^on  avait  de- 
vant les  yeux.  Ces  basaltes,  se  faisant  jour  à  travers  les 
grès  et  les  calcaires  crétacés,  forment  un  lambeau  de  terrain 
très  irrégulier,  ayant  une  longueur  de  25  kilomètres  et  une 
largeur  atteignant  une  dizaine  de  kilomètres. 

Cette  formation  basaltique  est,  par  exemple  à  Bemfica, 
à  5  kilomètres  de  la  mer,  recouverte  par  des  conglomérats 
miocènes  identiques  à  ceux  de  la  charneca  d'Otta,  que 
le  Congrès  avait  déjà  examinés;  ces  conglomérats  sont  à 
leur  tour  recouverts  en  stratification  concordante  par  la 
molasse  marine.  Celle-ci,  enfin,  supporte  des  couches  la- 
custres contenant  la  flore  d'Azambuja  et  de  Quinta  do 
Bacalhao.  Par  contre,  aux  bords  du  Tage,  la  molasse  ma- 
rine repose  directement  sur  la  formation  basaltique',  sans 
qu'il  y  ait  interposition  des  conglomérats  miocènes. 

On  passe  devant  la  grande  fabrique  de  cordes  et  de  voiles 
pour  la  marine  {Cordoaria),  fondée  par  la  reine  Dona  Ma- 
ria I.  Puis  on  voit  le  monument  grandiose  qui  rapellc  les  na- 
vigations et  les  découvertes  des  portugais  au  xv  et  xvi  siè- 
cles. C'est  le  majestueux  monastère  —  Os  Jeronymos^  élevé 
par  le  Roi  Dom  Manuel,  édifice  remarquable  surtout  par  son 
architecture  dite  Manuelina.  Aujourd'hui  il  est,  en  partie, 
occupé  par  un  orphelinat  portant  le  nom  de  Casa  Pia,  dans 


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lequel  un  grand  nombre  d'enfants  reçoivent  une  éducation 
soignée. 

On  est  près  de  l'embouchure  du  Tage.  Devant  les  yeux 
des  congressistes  se  dresse  la  gracieuse  tour  de  Belem,  que' 
la  mer  entourait  complètement  il  y  a  deux  siècles, 

A  mesure  qu'on  s'avance,  on  continue  d'observer  les 
basaltes  et  quelques  lambeaux  de  la  molasse  marine  jusqu'à 
l'embouchure  du  fleuve,  où  les  calcaires  du  crétacé  supé- 
rieur et  inférieur  forment  les  falaises  devant  lesquelles 
passa  VAfrica  avant  de  mouiller  dans  la  rade  de  Cascaes, 
petite  ville  avec  citadelle  où  la  famille  royale  a  l'habitude 
de  séjourner  une  partie  de  l'automne. 

La  ville  était  tout  en  fête.  L'escadre  cuirassée  fran- 
çaise, qui  venait  de  passer  quelques  jours  dans  le  port  de 
Lisbonne,  s'y  était  arrêtée  pour  prendre  part  à  la  fête  de 
l'anniversaire  du  Prince  royal  Dom  Carlos.  Elle  salua  VAfri- 
ca^tt  tandis  que  l'on  jouait  la  Marseillaise  abord  du  vaisseau 
portugais,  on  entendait  l'hymne  royal  portugais  résonner  sur 
l'escadre  française,  qui,  ainsi  que  VA/rica,  était  entièrement 
pavoisée. 

On  descend  à  terre  et,  traversant  la  ville,  on  va  visi- 
ter les  grottes  de  Poço  Velho.  C'est  là  que  le  secrétaire  gé- 
néral, M.  Carlos  Rîbeiro,  a  fait  d'importantes  et  fructueuses 
découvertes.  Il  y  a  recueilli  en  abondance  des  squelettes  hu- 
mains, des  os  d'animaux,  des  coquilles  marines,  et  une  gran- 
de quantité  de  magnifiques  objets  d'industrie  de  l'âge  de  la 
pierre  polie,  tels  que  :  vases  en  terre  de  grandeurs  et  de  formes 
diverses,  des  couteaux  et  des  pointes  de  flèches  en  silex,  des 
plaques  de  schiste  ornées  de  dessins,  des  perles  et  d'autres 
pièces  d'ornement,  en  jais,  en  callaïs  et  en  serpentine  ;  des 
couteaux  et  des  nucléus  de  quartz  hyalin  et  enfumé  ;  des  os 
longs  fendus  et  travaillés,  des  stylets,  des  plaques,  des  pen- 


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deloques  et  d'autres  pièces  en  os;  des  haches  en  pierre  po- 
lie, des  cailloux  roules  et  usés;  des  plaques  et  d'autres  ob- 
jets sculptés  de  calcaire,  etc. 

Après  un  rapide  examen  de  ces  grottes,  les  membres 
du  Congrès  se  rendirent  à  bord  de  VAfrica  pour  déjeûner, 
après  quoi  ils  débarquèrent  pour  prendre  les  voitures  qui 
devaient  les  conduire  à  Cintra. 

Ici  nous  ne  pouvons  mieux  faire  que  de  reproduire  la 
description  qu'a  donné  M.  Cotteau'. 

« Pendant  longtemps  la  route  est  difficile  et  mon- 

tueuse;  bordée  d'opuntias  et  d'agaves  gigantesques,  elle  tra- 
verse une  contrée  aride,  desséchée,  à  peine  cultivée.  Aux 
approches  de  Cintra  l'aspect  du  sol  change;' la  verdure  re- 
paraît, et  bientôt  devant  nous  s'élève  une  haute  montagne, 
couverte  d'une  végétation  luxuriante,  au  milieu  de  laquelle 
se  montre  çà  et  là  d'énormes  roches  de  granité  grisâtre  et 
que  domine  le  château  royal  de  Pcna. 

«Nous  franchissons  en  voiture  les  premiers  contreforts 
de  la  montagne;  chemin  faisant,  j'examine  les  blocs  de  gra- 
nité qui  jonchent  de  tous  côtés  le  sol,  d'autant  plus  intéres- 
sants à  étudier  qu'ils  sont  d'origine  relativement  récente  et 
appartiennent  à  l'époque  tertiaire.  Au  premier  aspect,  on 
croirait  que  ces  roches  ont  été  entassées  ainsi  pêle-mêle,  à 
la  suite  de  quelque  violent  cataclysme  ;  mais  il  n'en  est  rien; 
leurs  formes  bizarres  et  leur  dispositions  variées  sont  dues 
simplement  aux  influences  atmosphériques. 

«A  mi-côte  à  peu  près,  nous  laissons  nos  voitures  et 
nous  traversons  à  pted  des  jardins  remplis  de  fleurs  qui  at- 


'  G.  Cortcau.  Congrès  International  d'Anthropologie  et  d'Archéologie 
préhistoriques.  Session  de  Lisbonne.  Notes  de  voyage,  p.  ï3,  24.  Auseire, 


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77 
teignent  des  dimensions  que  je  n'avais  vues  nulle  part;  les 
hortensias  bleus  et  roses  forment  de  véritables  buissons;  les 
héliotropes,  les  fuchsias  sont  grands  comme  des  arbres; 
puis  nous  entrons  dans  le  parc  royal;  pendant  près  de  deux 
heures,  toujours  en  montant,  nous  marchons  au  milieu  d'ui — 
végétation  splendide.  Les  arbres  les  plus  rares  croissentav 
une  vigueur  extraordinaire.  Ici  ce  sont  des  groupes  (ï'Ara 
caria  imbricata,  excelsa  et  brasiliensis  gigantesques,  d 
Eucalyptus  énormes,  des  pins  de  toute  espèce;  là  ce  so 
des  Leucûdeniiron  qui  font  briller  au  soleil  leurs  feuilles  d'i 
aspect  métallique;  plus  loin  c'est  un  véritable  bois  de  c 
mélias,  dont  la  hauteur  dépasse  plusieurs  mètres;  au  milji 
de  tout  cela  circulent  des  eaux  vives  et  tombent  des  ca 
cades  qu'on  franchit  sur  des  ponts  d'un  aspect  des  plus  p 
toresques.  Les  pentes  deviennent  plus  rapides,  et  avant  d'à 
river  au  château,  nous  grimpons  sur  des  ânes,  préparés  poi 
faire  cette  dernière  partie  de  l'ascension. 

«Le  château  de  Pena  fait  corps  pour  ainsi  dire  av' 
le  rocher  de  granité  qui  termine  la  montagne.  Ses  tours  cr 
nelées,  son  architecture  appartenant  à  tous  les  styles,  s 
portes  garnies  de  sculptures,  ses  murailles  revêtues  de  ca 
reaux  émaillés,  ses  terrasses  d'où  l'on  découvre  une  vue  m 
gnifique  sur  le  parc,  les  roches  de  granité  et  au  loin  sur 
mer,  lui  donnent  un  caractère  étrange  et  séduisant  à  la  fo 
Le  roi  D.  Fernando  en  a  fait  sa  résidence  d'été  et  l'a  rei 
plie  d'objets  d'art,  de  meubles  anciens,  de  tableaux,  de  faïe 
ces  précieuses.  Nous  n'oublierons  jamais  l'amabilité  parfai 
avec  laquelle  il  nous  en  fit  les  honneurs. 

iLa  journée  avançait;  nous  rejoignons  nos  voitures  qi 
après  un  long  circuit,  étaient  venues  nous  attendre,  et  p. 
une  avenue  qu'ombragent  des  arbres  séculaires,  nous  an 
vons  à  Cintra.  La  ville  était  en  fête,  et  attendait  le  Congre 


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78 
Sous  une  tente  construite  exprès  pour  nous*,  un  splendide 
festin  était  préparé.  Les  dames  de  la  ville  avaient  mis  au 
pillage  tous  les  jardins  de  Cintra.  La  salle  était  littéralement 
tapissée  de  fleurs  les  plus  éclatantes  et  les  plus  rares;  le 
coup-d'œil  était  saisissant.  Aussi,  lorsqu'à  la  fin  du  ban- 
quet, l'un  de  nous  porta  un  toast  aux  dames  de  Cintra,  ce 
toast  fut-il  accueilli  par  d''enthousiastes  applaudissements  !> 

Les  autorités  locales,  la  noblesse,  en  un  mot  toute  la 
bonne  société  a  fait  honneur  aux  congressistes  en  rivali- 
sant de  zèle  et  d^amabilités,  qui  étaient  comme  un  éclatant 
hommage  rendu  à  la  science. 

A  neuf  heures  on  retourna  à  Cascaes  pour  assister  au 
bal  offert  par  Leurs  Majestés  et  pour  lequel  on  avait  reçu 
des  invitations  personnelles. 

«La  fête  était  fort  belle  et  très  animée.  De  la  terrasse 
qui  domine  la  mer  on  apercevait  les  vaisseaux  portugais  et 
français  illuminés,  pavoises  et  lançant  par  intervalles  des 
jets  de  lumière  électrique  qui  sillonnaient  au  loin  les  flots; 
c'était  féerique.  A  trois  heures  du  matin  nous  quittons  le 
bal  et  à  sept  heures  VAfrica  nous  ramenait  à  Lisbonne*.» 


'  Sur  la  terrasse  de  l'Hôtel  Victor. 
»  G.  Cotteau.  Loc.  Cit.  p.  î5. 


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:0MMUNICATIONS 


ISCUSSIONS 


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COMMUNICATIONS  ET  DISCUSSIONS 

I 

ÉPOQUE    TERTIAIRE 


L'HOMME    TERTUIBE    EH    PORTUQAL 


M.  Carlos  Ribeiro 

On  se  rappelle  la  manière  dont  furent  reçues  dans  la 
première  moitié  de  ce  siècle,  les  découvertes  faites  par  di- 
vers naturalistes  et  géologues  sur  certains  points  de  l'Eu- 
rope, relatives  à  l'existence  de  l'homme  fossile. 

Une  école  dogmatique  et  intransigeante,  comme  celle 
qui  avait  condamné  la  loi  du  mouvement  de  translation  de 
la  terre,  les  repoussa,  nonobstant  la  lumière  des  faits  qui 
les  démontrait  brillamment. 

Tout  le  monde  sait  que  la  découverte  faite  dans  le 
comté  de  Suffolk  (Angleterre)  en  1797,  de  silex  travaillés 
de  la  main  de  l'homme,  associés  à  des  ossements  d'animaux 
d'espèces  disparues  et  dont  John  Frère  a  donné  une  rela- 
tion dans  un  mémoire  publié  en  1801,  est  un  fait  qui,  mal- 
gré son  importance,  demeura  inaperçu  pendant  plus  d'un 
demi-siècle.  Il  le  serait  peut-être  encore  aujourd'hui  si  M. 
Evans  n'en  avait  pas  donné  connaissance  au  monde  scien- 
tifique, en  1869,  dans  le  4*""  volume  des  Proceedingsoflhe 
Society  of  Auitquaries. 


82 

Le  squelette  fossile  de  l'homme,  découvert  par  l'habUe 
géologue  A.  Boue,  en  i823,  dans  les  dépôts  alluviens  du 
Rhin,  associé  aux  restes  d'animaux  d'espèces  éteintes,  fut 
condamné  de  même  par  les  naturalistes  à  un  oubli  lamenta- 
ble. 

Le  dr.  Schmerling  n'a  pas  été  plus  heureux  avec  ses 
admirables  découvertes  dans  les  cavernes  de  la  Belgique, 
qu'il  a  explorées  avec  tant  de  science  et  de  si  beaux  résul- 
tats. Ces  découvertes,  et  d'autres  faites  depuis,  ont  rendu 
évidente  l'existence  de  l'homme  préhistorique. 

Toutefois,  dans  les  Hautes  régions  scientifiques  la  sanc- 
tion officielle  continua  d'être  refusée  à  cette  vérité  déjà  ac- 
quise pour  la  science.  Cependant,  malgré  l'opposition  de 
quelques  personnes  plus  ou  moins  autorisées  et  l'indiffé- 
rence de  beaucoup  d'autres,  il  y  eut  des  naturalistes  qui 
non  seulement  accueillirent  l'idée  de  l'existence  de  l'homme 
antédiluvien  comme  une  vérité,  laquelle  s'accordait  avec  les 
lois  de  la  paléontologie,  mais  qui,  exempts  d'idées  précon- 
çues, ne  connaissant  d'autre  autorité  que  celle  qui  dérive 
des  faits  bien  confirmés  et  n'ayant  pour  but  que  la  recher- 
che de  la  vérité,  ont  repris  ces  travaux,  jusqu'à  ce  que, 
ayant  obtenu  des  preuves  nombreuses,  ils  triomphèrent  de 
tous  les  doutes  et  de  toutes  les  oppositions.  En  1860  l'exis- 
tence de  l'homme  antédiluvien  fut  enfin  proclamée. 

A  l'occasion  oij  ce  triomphe  venait  d'être  obtenu,  on 
avait  déjà  constaté  d'autres  faits  d'une  grande  importance 
pour  la  paléontologie  des  mammifères,  et  qui,  tôt  ou  tard, 
devaient  rendre  absolument  nécessaire  l'existence  de  l'hom- 
me à  l'époque  quaternaire,  et  frayer  le  chemin  à  l'admission 
de  celle  d'un  être  intelligent  existant  à  l'époque  tertiaire. 

M.  Desor  dans  son  opuscule  sur  l'homme  pliocène  de 
la  Californie  écrivait: 


,ï  Google 


83 

-  oAinsi  se  réalisèrent  les  prévisions  de  notre  ami  Qui- 
net,  qui  ne  pouvait  admettre  que  l'humanité,  la  plus  belle 
fleur  de  la  création,  fut  éclose  au  milieu  des  marécages  et 
brouillards  de  l'époque  glaciaire;  elle  devait  remonter  plus 
haut  à  une  époque  où  le  climat  était  plus  propice  et  le  ciel 
plus  clément.i 

Du  moment  où  l'étude  de  la  flore  fossile  miocène,  faite 
par  les  plus  grandes  autorités  dans  la  science,  nous  dit 
que  le  climat  de  cette  époque  dans  les  régions  de  l'Eu- 
rope était  approprié  à  la  vie  d'un  grand  nombre  de  mam- 
mifères des  principales  divisions  de  la  faune  actuelle;  dès 
que  les  quadrumanes  anthropomorphes  se  montrèrent,  pen- 
,dant  cette  période,  si  franchement  caractérisés;  des  qu^il 
est  certain  que  ce  climat  était  plus  doux  et  plus  propice  au 
développement  de  la  vie  que  les  climats  nébuleux  de  la  pé- 
riode diluviale,  où,  du  reste,  l'homme  se  retrouve  dans  tou- 
tes les  manifestations  de  son  existence;  dès  que  nous  voyons 
l'homme  fossile  de  l'Amérique,  enfin,  y  coexister  avec  les 
mastodontes;  il  ne  nous  semble  pas  qu'il  y  ait  des  objections 
sérieuses  à  opposer  à  ce  que,  dans  toutes  les  régions  du 
globe,  l'on  entreprenne  des  recherches  dans  le  terrain  ter- 
tiaire moyen,  afin  de  découvrir  les  vestiges  de  l'homme. 
Le  profond  paléontologiste  Edouard  Lartet  le  pensait  ainsi 
il  y  a  plus  de  quarante  ans. 

Effectivement,  nous  savons  tous  qu'en  i836,  ce  savant 
avait  découvert  dans  les  couches  du  terrain  miocène  de  San- 
san,  département  du  Gers,  le  Pliopithecus  atitiqiius  représenté 
par  une  mandibule  avec  la  denture  complète  consistant  en 
i6  dents  en  série  continue,  c'est-à-dire,  la  même  formule 
dentaire  de  l'homme  et  de  quelques  singes  supérieurs. 
Il  faut  remarquer  que,  jusqu'à  cette  époque,  on  avait  nié 


-^^rv, 


84 

simultanément  l'existence  du  singe  fossile,  avec  les  mêmes 
fondements  que  celle  de  l'homme  fossile. 

Et  ce  n'est  pas  seulement  cette  espèce  d'anthropomor- 
phe qui  a  été  découverte;  le  Diyopilhecus  Fontam\  espèce 
qui  a  été  de  même  rencontrée  dans  les  couches  miocènes  de 
la  France,  est  un  singe  d'une  organisation  encore  supérieure 
à  celle  du  Plioptlhecus  antiquus. 

Lartet,  parlant  de  l'homme  fossile,  n'excluait  pas  l'idée 
de  la  possibilité  de  son  apparition  à  l'âge  miocène.  En  effet 
se  rapportant  aux  explorations  faites  à  Sansan,  où  avec 
tant  de  savoir  et  de  succès  il  obtint  des  collections  magni- 
fiques de  mammifères  fossiles  de  l'âge  miocène,  il  fait  ob- 
server que  4dans  une  faune  oii  dominent  encore  des  espè- 
ces animales  qui  lui  étaient  hostiles,  l'espèce  humaine  de- 
vait être  très  gênée  dans  son  développement.»  «Ce  n'est— 
disait-il  encore — qu'après  la  disparition  successive  de  tant 
d'ennemis  redoutables,  que  l'homme  aura  pu  acquérir  une 
prépondérance  décisive  sur  les  restes  de  cette  création  qu'il 
a  ensuite  modifiée,  soit  par  l'extermination  des  espèces  nui- 
sibles, soit  par  ta  propagation  de  celles  réduites  à  la  do- 
mesticité.* 
Et  il  ajoutait  encore  : 

«Un  type  supérieur,  celui  du  genre  humain,  ne  s'y  est 
pas  rencontré;  mais  de  ce  que  sa  place  manque  dans  les 
formations  anciennes,  il  ne  faudrait  pas  se  hâter  de  conclure 
qu'il  n'existait  pas.  » 

Les  découvertes  des  deux  espèces  d'anthropoïdes  dtées, 
malgré  leur  importance,  resteraient  sans  effet  immédiat  sur 
le  développement  de  l'histoire  naturelle  de  l'homme,  si  la 
gie  n'était  pas  venue  se  placer  à  côté  de  la  paléonto- 


\ 


„Google 


85 

logie  pour  en  démontrer  l'authenticité  et  la  haute  valeur 
scientifique. 

En  effet,  les  explorations  géologiques  faites  en  Auvergne 
ont  conduit  à  la  découverte  d'un  document  important  pour 
la  démonstration  de  l'existence  de  l'homme  miocène  dans 
cette  région;  ce  fut  un  silex  taillé  intentionnellement,  extrait 
en  1870  par  M.  Tardy  d'un  conglomérat  près  d'Auriliac,  et 
dont  l'âge  est  caractérisé  par  les  restes  fossiles  du  Dino- 
therium  giganleiim^  Machaerodus  latidens  et  d'autres  es- 
pèces. 

La  découverte  du  crâne  humain  de  Calcaveras  dans  la 
Sierra  Nevada  (Californie)  n'a  pas  été  de  moindre  impor- 
tance: M.  Desor  en  a  donné  dernièrement  une  notice.  Ce 
crâne  fut  rencontré,  à  40  mètres  de  profondeur,  dans  un  puits 
ouvert  pour  l'exploitation  des  couches  aurifères  dans  cette 
localité,  et  il  était  associé  à  des  restes  de  mastodonte,  d'hip- 
parion  et  d'autres  mammifères  fossiles. 

Les  explorations  paléontologiques  de  l'illustre  abbé  Bour- 
geois conduisirent  cet  habile  géologue,  non  seulement  à  la 
découverte  des  silex  taillés  dans  les  couches  de  VElephas 
meridionalis  de  Saînt-Prest,  mais  encore,  dans  les  couches 
qui  font  partie  de  la  série  des  calcaires  de  la  Beauce,  for- 
mation caractérisée  par  les  restes  de  diverses  espèces  de 
mammifères,  parmi  lesquelles  figuraient  le  Pliopithecus  anli- 
quus^  le  Dinotherium  Cupt'eri,  le  Mastodon  angustidens  et 
d'autres. 

Des  explorations  entreprises  en  Portugal  depuis  environ 
dix-huit  ans  amenèrent  à  des  résultats  pareils,  comme  j'ai 
déjà  eu  l'honneur  de  communiquer  au  Congrès,  pendant  sa 
gime  session  à  Bruxelles.  C'est  donc  la  deuxième  fois  que  je 
m'adresse  aux  illustres  savants  qui  m'écoutent  dans  ce  mo- 
ment, sur  le  sujet  de  la  question  de  l'homme  tertiaire. 


„G»8!!l^ 


86 

Malheureusement,  je  ne  peux  soumettre  à  l'examen  du 
Congrès  une  pièce  quelconque  du  squelette  humain,  retirée 
des  couches  tertiaires  que  nous  avons  explorées;  nous  savons 
tous  combien  il  est,  et  sera  toujours  difficile  d^obtenir  de  tels 
documents. 

Sur  ce  point,  nous  n'avons  été  ni  plus  ni  moins  heu- 
reux que  les  autres  géologues  qui  se  sont  occupés  de  ces 
investigations  dans  les  couches  tertiaires.  Nous  pouvons, 
cependant,  ofirir  à  Pexamen  du  Congrès  un  certain  nombre 
de  silex  où  le  travail  intentionnel  est  plus  ou  moins  appa- 
rent, et  qui  ont  été  extraits  des  couches  miocènes,  comme 
les  membres  du  Congrès  pourront  vérifier  facilement  sur  les 
nombreux  exemplaires  mis  à  leur  disposition  dans  le  musée 
de  la  Section  des  Travaux  géologiques,  ou  sur  les  lieux  mê- 
mes. Les  marques  de  percussion  ne  manquent  pas  sur  la 
plupart  de  ces  exemplaires,  mais  les  percuteurs  rencontrés 
sont  assez  rares  ou  peu  reconnaissables.  Quelques-uns  de 
ces  percuteurs,  cependant,  ne  permettent  aucun  doute  sur 
leur  destination,  et  paraissent  avoir  servi  en  différentes  pé- 
riodes de  rage  miocène,  s'il  est  permis  de  tirer  une  telle  in- 
férence  des  restes  de  la  patine  qui  recouvrait  la  pièce  avant 
qu'elle  fût  taillée. 

Dans  ces  âges  reculés,  la  tendance  était  déjà  dominante 
de  donner  aux  instruments  en  pierre  la  forme,  d'ailleurs  rude, 
de  couteaux,  de  grattoirs,  de  haches  et  de  pointes  de  lance, 
le  tout  exécuté  très-imparfaitement,  outre  plusieurs  formes 
encore  plus  mal  déterminées,  que  Pexamen  attentif  de  no- 
tre collection  vous  fera  connaître. 

Passant  à  un  autre  ordre  de  considérations,  nous  di- 
rons que  l'examen  géologique  de  cette  partie  du  pays  nous 
a  appris  que  les  mers  de  la  période  éocène  ne  Pont  jamais 
couverte,  mais  que  dans  la  période  immédiate,  elle  fut  alter- 


„Google 


nativement  occupée  par  les  eaux  des  lacs  et  par  celles  de 
la  mer. 

La  même  étude  nous  a  révélé  également  que  la  formation 
des  dépôts  de  la  période  miocène  fut  accompagnée  de  per- 
turbations, locales  il  est  vrai,  mais  violentes,  et  qui  tout  na- 
turellement étaient  contraires  au  développement  et  à  la  con- 
servation de  la  vie. 

Effectivement,  les  émissions  basaltiques  qui  se  mani-' 
festèrent  aux  alentours  de  Lisbonne,  traversant  les  forma- 
tions crétacées,  se  déversant  principalement  sur  les  couches 
de  l'étage  à  Rudistes.  les  disloquant  profondément  et  pro- 
duisant dans  le  sol  de  grandes  inégalités,  ont  préludé  à  la 
formation  des  dépôts  de  Page  miocène.  Ce  fut  à  travers  les 
eaux  d'un  grand  lac  que  ce  phénomène  s'accomplit;  mais 
durant  la  période  de  ces  émissions  il  y  eut  des  intervalles  de 
calme  relatif  dans  cette  partie  du  sol,  ébranlée  par  les  con- 
vulsions souterraines.  Ce  calme  se  produisit  dans  des  con- 
ditions telles,  qu'il  permit  l'apparition  de  quelques  espèces 
de  testacés  dans  cette  région.  On  les  retrouve  aujourd'hui 
dans  certaines  parties  des  couches  argileuses  rouges,  inter- 
stratifîées  au  milieu  des  nappes  de  basalte.  Ces  espèces  ont 
été  examinées  par  M.  Tournouër,  qui  les  a  décrites  et  dé' 
terminées  de  la  manière  suivante: 

Bidimits  Ribeirot. 

Bulimus?  Oiisiponensis. 

Pupa  Lusitanica. 

Lorsque  l'intensité  de  l'action  volcanique  diminua,  les 
couches  de  conglomérats,  de  grès  et  d'argile  miocènes  se 
précipitèrent  au  fond  du  lac;  mais  l'action  volcanique  ne 
s'arrêta  pas  soudainement;  au  contraire  elle  continua  de  se 
manifester  durant  la  déposition  de  ces  couches,  comme  on 
peut  le  voir  sur  toute  la  surface  qu'elles  occupent  depuis 


rv 


Bemfica,  près  de  Lisbonne,  jusqu^à  Santo  Antao  do  Tojal. 
Voici,  à  notre  avis,  la  raison  pourquoi  les  silex  taillés  sont 
très  rares  dans  cette  bande  de  terrain  miocène,  où  nous 
avons  recueilli  à  peine  deux  fragments  de  silex,  qui  se  trou- 
vent dans  notre  collection  et  que  nous  croyons  dénoncer 
quelque  travaB  intentionnel. 

Les  commotions  et  les  ébranlements  du  sol,  inhérents 
à  ces  émissions,  ne  se  firent  pas  sentir  à  de  grandes  distan- 
ces, et  conséquemment  les  ouvriers  de  cette  époque,  s'éloi- 
gnant  de  ces  parages,  établirent  leurs  stations  au  bord  du 
lac,  sur  le  versant  de  la  chaîne  qui  passe  à  Alemquer.  En 
effet,  c'est  sur  la  ligne  des  couches  miocènes  qui  s^étend  du 
gud  au  nord  depuis  Carregado  jusqu'à  Cercal,  non  loin  de 
ces  versants,  que  l'on  rencontre  le  plus  grand  nombre  de 
silex  taillés. 

Les  conditions  dans  lesquelles  se  rencontrent  ces  silex 
au  milieu  des  couches,  sont  les  suivantes: 

1."  Faisant  partie  intégrante  de  la  couche- même. 

2."  Ayant  les  arêtes  vives  ou  bien  conservées,  montrant 
qu'ils  n'ont  pas  subi  de  transport  à  de  grandes  distances. 

3."  Ayant  une  patine  plus  ou  moins  épaisse  de  la  cou- 
leur de  la  roche  dont  ils  font  partie. 

Il  reste  encore  à  dire  quelques  mots  sur  l'âge  des  cou- 
ches où  l'on  a  rencontré  ces  silex  taillés. 

Les  caractères  que  ces  couches  présentent  sont  de  deux 
ordres,  l'un  géologique  proprement  dit,  l'autre  paléontôlo- 
gique. 

Parmi  les  caractères  géologiques  nous  avons  à  consi- 
dérer, la  composition  générale  de  la  formation,  sa  puissance 
et  ses  accidents. 

La  formation  qui  contient  les  silex  taillés  commence 
par  des  couches  de  calcaire  blanc  sablonneux,  lesquelles  se 


,ï  Google 


montrent  surtout  aux  environs  de  Carnide  (voisinage  de 
Lisbonne),  et  depuis  le  pont  de  Carregado  jusqu'à  Abri- 
gada. 

Ces  couches  occupent  une  bande  de  largeur  variable 
de  2  à  20  mètres,  interrompue  çà-et  là,  disparaissant  même 
sur  quelques  points.  Dans  l'ordre  ascendant  on  voit  se  suc- 
céder un  étage  de  couches  arénacéo-argileuses,  rougeàtres, 
d'épaisseur  variable  entre  5o  et  100  mètres,  quelquefois 
davantage,  qui  contiennent  les  silex  taillés. 

Recouvrant  cet  étage  on  voit  la  série  fossilifère  qui 
plonge  sous  un  étage  remarquable  de  couches  de  calcaire 
avec  Planorbes  et  Limnées  et  dont  la  stratification  et  l'as- 
pect minéral  et  pétrographique  ressemblent  plus  aux  cal- 
caires secondaires  crétacés  ou  jurassiques,  qu'aux  formations 
plus  modernes.  Cet  étage  supérieur  montre  son  plus  grand 
développement  entre  Thomar,  Sanlarem  et  Almoster. 

Ces  trois  séries  de  couches  ont  plus  de  200  mètres 
d'épaisseur. 

Les  sables  pliocènes  ont  couvert  la  formation  précé- 
dente, ils  forment  de  grandes  étendues  se  développant  sur- 
tout au  sud  de  la  vallée  du  Tage. 

Outre  les  caractères  que  présentent  les  couches  miocè-^ 
nés  et  qui  ne  se  rencontrent  pas  dans  les  dépôts  post-ter- 
tiaires, it  faut  remarquer  que  ces  couches,  surtout  les  plus 
anciennes,  se  trouvent  en  quelques  endroits  déplacées  de 
leur  position  horizontale,  comme  si  elles  avaient  été  en- 
traînées par  le  soulèvement  des  calcaires  secondaires  des 
bords  primitifs  du  bassin,  et  leurs  plans  de  stratification 
forment  des  angles  de  lo"  à  40' au-dessus  de  l'horizon.  On 
constate  ce  fsEît  près  du  pont  de  Carregado,  à  l'entrée  de  la 
ville  d'Alemquer  et  en  d'autres  parties  de  cet  affleurement 
jusqu'au  village  d'Abrïgada. 


,ïGeX)' 


t\_ 


90 
Les  phénomènes  les  plus  remarquables  dus  à  Paction 
dynamique,  postérieurs  à  cène  formation,  sont  les  failles 
qui  ont  produit  la  vallée  principale  et  les  vallées  secondai- 
res de  Sacavem,  de  l'Alviella  et  de  PAlmonda,  et  les  énor- 
mes dénudations  de  la  plus  grande  partie  des  sables  plio- 
cènes  déposés  sur  le  sol  adjacent,  du  côté  droit  du  Tage,  et 
d^une  partie  des  couches  miocènes,  ainsi  que  le  dépôt  pos- 
térieur des  grès  grossiers  avec  des  quartzites  taillés,  qui 
vinréht  couvrir  partiellement  le  haut  des  flancs  de  ces  val- 
lées. 

Nous  ferons  à  peine  mention  des  calcaires  concrétion- 
nés  quaternaires  qui  couvrent  les  calcaires  lacustres  miocè- 
nes dans  les  vallées  de  l'Alviella  et  de  TAlmonda,  formant 
de  grands  dépôts  et  remplissant  les  cavernes. 

Le  fait  géologique  le  plus  important  qui  caractérise 
cette  formation  miocène,  c'est  qu'elle  se  trouve  resserrée  en- 
tre les  formations  secondaires  etia  formation  sableuse  plio- 
cène, représentée,  sur  la  rive  droite  du  Tage,  par  le  grand 
lambeau  sableux  qui  s'étend  entre  Azambuja  et  Cartaxo  et 
qui  à  son  tour  est  recouvert  par  les  dépôts  diluviens  an- 
ciens. 

Si  les  caractères  donnés  de  cette  formation,  et  qui  lui 
assignent  sa  place  dans  la  série  des  temps  géologiques,  ne 
suffisaient  pas,  nous  aurions  les  caractères  paléontologiques, 
qui  mettent  tout-à-faii  hors  de  doute  l'âge  de  cette  forma- 
tion. Ces  caractères  se  manifestent  dans  une  série  de  cou- 
ches qui  occupent  la  partie  supérieure  de  cette  formation 
entre  les  villages  d'Otta  et  d'Azambuja;  cette  série  est  cons- 
tituée par  des  couches  de  grès  et  d'argiles,  qui  dans  quel- 
ques endroits  passent  à  des  marnes  et  à  des  calcaires,  et 
dont  l'épaisseur  ne  dépasse  pas  8  mètres.  Leur  position  est 
sensiblement  horizontale,  de  sorte  que  les  affleurements  res- 


,ï  Google 


9' 
pectifs  suivent  à  peu  près  des  courbes  de  niveau,  dont  la 
moyenne  a  une  élévation  d'environ  70  mètres. 

Cette  série  se  compose  de  deux  parties  très  distinctes  : 
rinférieure  renferme  des  plantes  Fossiles,  et  la  supérieure 
des  restes  d'animaux  fossiles. 

Ces  plantes  ont  été  déterminées  par  M.  Oswald  Heer, 
qui  a  bien  voulu  en  étudier  une  collection  que  nous  lui 
avons  envoyée.  Ce  savant  naturaliste  à  reconnu  les  genres 
et  les  espèces  suivants: 

.  Podocarpiis  eocenka,  Ung. 
Glyptostrobus  europaeus,  Brgn. 
Pinus  sp. 
Carex  sp. 

Populus  mutabilis,  Hr. 
Popultis  balsamoides,  Goepp.  '' 

Populus  glandiiiifera,  Hr. 
Juglans  bilinica,  Ung. 

Cinnamommum  polymorphim,  A.  Braun,  sp. 
Pimelea  octiingensis,  A.  Braun,  sp. 
Fraxinus  praedicta,  Hr. 
Panax  circularis,  Hr. 
Nissidium  australe,  Hr. 
Trapa  sileSi'aca,  Goepp. 
Phjrllites  serriilatus,  Hr. 

Quant  aux  restes  d'animaux  que  nous  avons  reconnus 
dans  les  couches  de  cette  série,  nous  avons  obtenu  les  espè- 
ces ci-dessous  énumérées  et  qui  ont  été  déterminées  par 
M.  Gaudry: 

Mastodon  sp. 

Sus  provincial is,  Gcrv. 


,ïGot> 


9^ 
Sus  choeroides,  Pomel. 
Sus  sp. 
Listriodon  ? 

Rhinocéros  minulus,  Guv. 
Antilope  rectiœrnis,  Serr. 
Hyoemoschus'i 
Hipparion  gracile^  Kaup. 
Eusmilus  perarmatus,  Gerv. 

Ils  se  trouvent  sur  différents  points  de  la  courbe  de 
niveau  comprise  entre  les  landes  à  l'est  d'Otta  et  au  nord 
d'Azanibu)a. 


Ce  fut  après  la  lecture  de  cette  communication  que  le 
Congrès  visita  le  gisement. 

Au  retour  de  Pexcursion  à  Otta,  la  commission  nommée, 
sous  la  proposition  de  M.  Capellini,  pour  l'examen  des  silex 
présentés  par  M.  Ribeiro,  et  composée  de  MM.  Capellini, 

CaZALIS  de    FoNDOUCE,  CotTEAL',   EvANS,  DE    MoRTILLET,   Rl- 

BEiKo,  ViLANOVA,  ViRCHOw  et  Choffat,  rappoFteuF,  adopta 
les  conclusions  suivantes,  rédigées  par  M.  Choffat. 


Oonolnaiona  dâ  la  oommisalon  ohorgée  de  1' 
dQB  Bllez  tronTâa  a  Otta 

La  commission  a  trouvé  que  les  différents  points  se 
rapportant  à  ce  sujet  peuvent  être  élucidés  par  quatre  ques- 
tions: 


,ï  Google 


i."  Ya-l-H  des  conchoïdes  de  percussion  sur  les  st'lex 
exposés  et  sur  ceux  qui  ont  été  trouvés  pendant  l'excursion? 

La  commission  déclara  à  runanîmité  qu'il  existe  des  con- 
choïdes de  percussion,  et  que  quelques  pièces  en  présentent 
même  plusieurs. 

2."  Le  conchoîde  de  percussion  prouve-til  la  taille  in- 
tentionnelle? 

Avis  différents,  que  l'on  peut  résumer  en  ce  que  M.  de 
Mortillet  considère  un  seul  conchoîde  de  percussion  comme 
suffisant  pour  prouver  la  taille  intentionnelle,  tandis  que  M. 
Evans  croit  que  plusieurs  conchoïdes  présentés  par  une 
même  pièce  ne  donnent  pas  la  certimde  d'une  cassure  in- 
tentionelle,  mais  seulement  une  grande  probabilité. 

3."  Les  silex  taillés  trouvés  à  Otta,  proviennent-Us  de 
la  surface  ou  de  l'intérieur  des  couches? 

Avis  divers  :  M,  Cotteau  les  croit  tous  de  la  surface, 
en  ce  sens  que  "ceux  qui  ont  été  recueillis  à  l'intérieur  y  au- 
raient été  introduits  par  suite  de  crevassements  des  couches. 

M.  Capellini  croit,  au  contraire,  que  les  pièces  recueil- 
lies à  la  surface  proviennent  de  l'intérieur  des  couches,  dont 
elles  auraient  été  extraites  par  l'érosion. 

MM.  de  Mortillet,  Evans,  Cartailhac  en  admettent  de 
deux  provenances,  les  unes  tertiaires,  tes  autres  paléolithi- 
ques ou  néolithiques:'  il  serait  facUe  de  les  distinguer  par 
leur  forme  et  leur  patine. 

4."  Quel  est  rage  du  gisement  des  silex  dOtta? 

Après  une  discussion  de  quelques  instants,  les  membres 
de  la  commission  se  déclarèrent  en  parfait  accord  avec  les 
faits  observés  par  les  géologues  portugais. 


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Disoassion 

M.  DE  MoRTiLLET.  .\1.  CaHos  Ribeiro  a  présenté  en  1871, 
à  l'Académie  Royale  des  Sciences  de  Lisbonne,  des  silex  et 
des  qiiartzites  tailles  provenant  des  assises  tertiaires  de  la 
vallée  du  Tagc,  L'année  suivante  il  a  soumis  les  mêmes  si- 
lex à  la  réunion  du  Congrès  international  d'anthropologie 
et  d'archéologie  préhistoriques  de  Bruxelles.  Ces  silex  n'obtin- 
rent pas  un  grand  succès.  L'abbé  Bourgeois,  lui-même,  ne 
reconnut  tout  d'abord  aucune  trace  de  travail  intentionnel. 
Un  nouvel  examen  des  divers  échantillons  lui  fit  pourtant 
remarquer  un  silex  évidemment  taillé;  malheureusement,  ce 
silex  n'avait  pas  été  trouvé  en  place.  Il  suspendit  donc  son 
jugement.  M.  Franks  seul  déclara  qu'à  son  avis  plusieurs 
des  silex  des  environs  de  Lisbonne,  présentés  par  M.  Ri- 
beiro, étaient  taillés  intentionnellement. 

Profitant  de  l'Exposition  internationale  de  Paris,  en 
1878,  M.  Ribeiro  exposa,  dans  la  galerie  des  sciences  anthro- 
pologiques, une  série  de  silex  et  de  quartzites  tertiaires. 
Les  ayant  tous  examinés  avec  le  plus  grand  soin,  ■j'ai  recon- 
nu qu'il  y  en  avait  vingt-deux  portant  des  traces  indubita- 
bles de  travail.  Tous  les  paléoethnologues,  auxquels  mon 
collègue  et  ami  Emile  Cartailhac  et  moi  avons  montré  ces 
échantillons,  ont  été  du  même  avis.  M.  Cartailhac  les  a  fait 
photographier  en  majeure  partie  et  en  a  figuré  huit  dans  les 
Matériaux  de  l'année  dernière.  Le  travail  intentionnel  de 
es  silex  et  quartzites  est  très  bien  établi,  non  seulement  par 
;ur  forme  générale,  caractère  qui  peut  être  trompeur,  mais 
ncore  et  surtout,  ce  qui  est  plus  concluant,  par  des  plans 
le  frappe  très  nets  et  par  des  conchoïdes  de  percussion  fort 


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95 
développés,  parfois  doubles,  en  relief  sur  une  face,  en  creux 
sur  la  face  opposée.  Il  ne  saurait  donc  y  avoir  de  doutes. 
Ces  divers  échantillons  sont  taillés  à  grands  éclats;  presque 
tous  affectent  une  forme  triangulaire  sans  retouches,  qu'ils 
soient  en  quartzite  ou  en  silex.  Plusieurs  montrent  encore 
sur  les  plats  et  même  dans  les  conchoïdes  de  percussion  en 
creux,  des  traces  et  fragments  de  grès,  ce  qui  établit  qu'ils 
proviennent  bien  des  couches  en  place.  Or,  ces  couches 
de  grès,  intercalées  avec  des  argiles  et  des  calcûres,  consti- 
tuent dans  la  vallée  du  Tage  une  vaste  formation  qui,  sur 
quelques  points,  atteint  400  mètres  de  puissance.  Les  cou- 
ches sont  souvent  disloquées,  et  soulevées  parfois  presque 
jusqu'à  la  verticale.  C'est  bien  là  évidemment  un  terrain 
tertiaire.  Telle  est  du  reste  la  détermination  qu'en  donne  M. 
Ribeiro,  directeur  du  relevé  géolt^ique  de  Portugal,  par  con- 
séquent l'homme  le  plus  compétent  en  cette  matière. 

Les  membres  du  Congrès  ont  pu  constater  par  eux- 
mêmes  de  la  manière  la  plus  positive,  non-seulement  la 
vérité  de  la  découverte  de  M.  Ribeiro,  mais  aussi  la  posi- 
tion géologique  précise  de  certains  silex  travaillés.  Ils  se 
sont  rendus  à  Otta,  au  milieu  d'une  formation  d'eau  douce 
très  puissante  et  très  étendue.  C'est  un  grand  bassin  lacus- 
tre, sablo-argileux  dans  le  centre,  sablo-caillouteux  sur  les 
bords.  L'être  intelligent  qui  taillait  le  silex  ne  pouvait  lais- 
ser des  traces  de  son  industrie  que  sur  les  rives  du  lac; 
aussi  est-ce  sur  les  bords  du  lac  qui  baignait  la  base  de 
Monte  Redondo  qu'ont  eu  lieu  les  recherches.  Elles  ont  été 
couronnées  de  succès.  M.  Bellucci,  l'habile  chercheur  de  l'Om- 
brie,  a  découvert  en  place  un  silex  incontestablement  taillé. 
Avant  de  le  détacher,  il  l'a  montré  à  bon  nombre  de  nos 
collègues.  Ce  silex  tenait  fortement  à  la  roche.  Il  fallut  em- 
ployer le  marteau  pour  l'extraire.  Sa  position  datait  bien  de 


.,Ci 


l'époque  du  dépôt.  En  effet,  au  lieu  d'être  à  plat  sur  une 
surface  qui  aurait  pu  se  colmater  et  se  consolider  plus  tard, 
il  était  fixé  à  la  partie  inférieure  de  la  lèvre  supérieure  d'une 
excavation  d'érosion  atmosphérique.  Il  est  donc  impossible 
de  désirer  une  démonstration  plus  complète  en  ce  qui  tou- 
che la  présence  des  silex  dans  le  gisement. 

Reste  à  déterminer  l'âge  de  ce  gisement? 

Si  les  silex  taillés  demeuraient  près  du  bord,  il  n'en  était 
pas  de  même  des  débris  de  végétaux  et  des  corps  d'animaux 
qui  flottaient  sur  l'eau.  Ils  étaient  poussés  plus  avant  dans 
le  lac  et  finissaient  par  se  déposer  au  milieu  du  sable  et  du 
limon.  Ce  sont  surtout  les  limons  qui  nous  ont  conservé  ces 
divers  fossiles.  Eh  bien,  dans  une  couche  limono-sablcuse, 
à  3  kilomètres  et  demi  au  sud-est  de  Monte  Redondo,  cou- 
che appanenant,  sans  aucun  doute,  au  lac  dont  nous  nous 
occupons,  nous  avons  pu  voir,  en  place,  des  ossements  et 
surtout  des  mâchoires  d'hipparion,  animal  éminemment  ter- 
tiaire. La  flore  des  couches  de  ce  grand  lac  tertiaire,  étudiée 
par  M.  Oswald  Heer,  et  la  faune  par  M,  Albert  Gaudry, 
montrent  que  ce  lac  appartient  au  tortonien  ou  miocène  su- 
périeur. 

Grâce  aux  patientes  et  savantes  recherches  de  M.  Car- 
los Ribeiro,  le  Congrès  a  donc  pu  constater  qu'à  l'époque 
tortonienne,  il  existait  dans  le  Portugal  un  être  intelligent 
éclatant  le  silex,  tout  comme  l'homme  quaternaire. 

M.  Evans:  Il  y  a  probablement  dans  les  couches  ter- 
tiaires quelques  éclats  offrant  des  bulbes  de  percussion.  Il 
y  a  aussi  à  la  surface  du  sol  des  silex  appartenant  au  pa- 
léolithique ou  au  néolithique,  mais,  dans  tous  les  cas,  pos- 
térieurs à  l'âge  des  couches.  Mais  les  silex  de  ce  genre  qui 
ont  séjourné  si  longtemps  à  la  surface  du  sol,  pourquoi  ne 


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seraient-ils  pas  colores  au  contact  du  grès  rouge,  imprègnes 
par  du  sable  et  de  l'argile?  Si  on  les  lavait  on  verrait  dis- 
paraître ces  traces  superficielles. 

Quant  à  la  provenance  des  silex  qui  sont  là  sous  nos 
yeux,  que  peut-on  penser?  On  nous  a  dit:  voilà  dix  ans  que 
l'on  recueille  de  ces  silex,  mais  on  ne  sait  pas  d'où  ils  vien- 
nent, de  quel  point  précis,  de  quelle  hauteur  dans  la  couche! 
En  outre  ils  n'ont  pas  de  trace  d'usure,  d'utilisation.  Ce 
sont,  peut-être,  des  éclats,  des  rebuts  de  fabrication;  mais 
alors  où  sont  les  instruments?  Je  pense,  enfin,  que  ces  si- 
lex ne  sont  pas  tous  des  bords  du  lac. 

Quant  au  côté  géologique,  ce  serait  une  impertinence 
que  de  venir  contester  les  conclusions  des  géologues  du  pays. 

Sur  place  j'ai  observé  un  grand  plateau;  de  la  carrière 
où  l'on  a  trouvé  la  faune,  on  pouvait  juger  de  la  hauteur 
relative  des  couches,  on  pouvait  se  demander  comment  une 
dénudation  purement  aérienne  aurait  pu  produire  une  telle 
action,  un  tel  résultat.  Non,  il  faut  faire  intervenir  les  cou- 
rants d'eau  douce  ou  les  courants  marins;  et  alors  on  peut 
très-bien  trouver  dans  les  couches  superficielles  des  vestiges 
des  époques  où  la  dénudation  du  plateau  s'est  ainsi  pro- 
duite. 

Combien  de  milliers  de  siècles  se  sont  écoulés  depuis 
ces  temps;  l'homme  devait  être  assez  différent  de  ce  qu'il 
est  aujourd'hui;  M.  Dawkins  prétend  l'établir.  Si  l'homme 
existait  à  l'époque  tertiaire,  il  faut  des  preuves  plus  sérieu- 
ses qu'un  fragment  de  silex.  Je  suis  bien  fier  de"  l'antiquité 
de  ma  famille,  mais  il  faut  qUe  cette  antiquité  s'appuie  sur 
des  fondements  plus  solides  qu'un  seul  bulbe  de  percus- 
sion. 

M.  Capellini:  Je  crois  que  les  silex  sont  taillés;  si  vous 


ne  l'admettez  pas,  il  vous  faudra  douter  aussi  de  tous  les 
silex  de  l'âge  de  la  pierre.  Je  dis  cela  pour  le  petit  saint 
Thomas  qui  vient  de  parler. 

Mais  d'où  viennent  ces  silex?  Je  regrette  qu'ont  n'ait 
point  pratiqué  des  tranchées;' mais  j'ai  vu  en  place  le  silex 
aperçu  par  M.  Bellucct.  C'est  là  un  fait,  il  me  suffît. 

La  question  géologique  n'est  pas  discutable;  la  coupe 
était  parfaitement  nette  ;  les  grés  passent  sous  les  couches  fos- 
silifères; d'après  la  flore  et  la  faune  si  bien  étudiées,  il  n'est 
pas  douteux  pour  moi  que  nous  avons  là  le  miocène  supé- 
rieur. Ces  terrains  par  leurs  animaux  fossiles  ressemblent 
à  plusieurs  terrains  tertiaires  de  l'Italie,  tels  que  celui  de 
Casino,  près  Sienne,  étant  peut-être  un  peu  plus  anciens, 
vu  que  l'on  n'y  trouve  point  le  tapir. 

M.  Vilanova:  Vous  venez  d'entendre  un  beau  mot 
de  la  part  de  M.  Capellini  en  appelant  M.  Evans  le  petit 
saint  Thomas,  parce  qu'il  ne  croit  pas  encore  à  l'homme 
tertiaire.  Eh  bien,  à  présent  se  lève  le  grand  saint  Tho- 
mas, permettez-moi  la  phrase,  qui  a  besoin  d'être  expli- 
quée. Le  très  honorable  Evans  peut  être  un  petit  saint 
Thomas  parce  que,  sachant  beaucoup,  il  doute  très  peu; 
mais  moi,  ne  sachant  rien,  j'ai  le  devoir  de  douter  de  tout, 
à  moins  que  les  choses  ne  se  présentent  d'une  façon  si 
claire  que  le  doute  ne  soit  plus  possible.  Mais  la  ques- 
tion de  l'homme  tertiaire  en  général,  et  celle  du  Portugal 
en  particulier  ne  s'offre  pas  à  mon  esprit  comme  je  l'au- 
rais désiré,  sans  doute  à  cause  de  la  limitation  de  mon 
intelligence.  Je  dois,  pourtant,  déclarer  avec  loyauté  que, 
relativement  à  l'authenticité  des  silex  qui  ont  été  ramassés 
par  les  infatigables  MM.  Ribeiro  et  Delgado,  je  n'ai  pres- 
que rien  à  dire,  car  la  plupart  me  semblent  vrais,  c'est-à-dire 


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travaillés  par  l'homme.  Mais  quant  à  leur  ^sèment,  la  chose 
change  complètement,  car  d^abord  je  n'ai  pas  pu  voir  un  seul 
instrument  formant  partie  du  dépôt,  tous  ayant  été  trouvés, 
au  moins  ceux  que  j'ai  vu  ramasser,  à  la  surface,  même  ce- 
lui  rencontré  par  mon  ami  Bellucci  en  ma  présence.  Quant 
â  l'époque  à  laquelle  on  doit  rapporter  la  formation  sableuse 
dans  la  surface  de  laquelle  j'ai  vu  les  instruments,  sans  oser 
contredire  l'opinion  très  respectable  des  géologues  distingués 
auxquels  on  doit  la  belle  carte  de  Portugal,  je  dois  dire  que 
le  faciès  et  même  la  composition  du  dépôt  qui  couvre  le 
terrain  jurassique  à  la  base  de  Monte  Redondo,  ne  sont  pas 
ceux  qui  caractérisent  le  terrain  tertiaire  du  territoire  espa- 
gnol. L'analogie,  et  même  je  peux  dire  l'identité  d'aspect,  de 
nature  et  des  fossiles  avec  celui  des  environs  de  Madrid,  de 
Concud  près  de  Teruel  et  de  bien  d'autres  endroits  en  Espa- 
gne, je  l'ai  vu  au  premier  coup  d'oeil  dans  la  coupe  d'Archino, 
au  moins  dans  la  partie  supérieure  composée  de  couches  de 
calcaire  marneux,  blanchâtre,  alternant  avec  des  couches  de 
marnes  et  d'argile  parfaitement  horizontales.  J'avoue,  Mes- 
sieurs, que  tous  les  doutes  relativement  à  l'existence  de  l'hom- 
me tertiaire  en  Portugal  se  seraient  évanouis,  si  nous  avions 
eu  le  bonheur  de  trouver  des  instruments  en  silex,  travaillés 
par  une  main  intelligente,  dans  le  vrai  terrain  miocène  et 
dans  l'intérieur  de  quelque  couche  de  calcaire  ou  des  mar- 
nes, à  côté  des  fossiles  caractéristiques;  une  coupe  dans 
le  dépôt  renfermant  des  silex  travaillés  par  l'homme  aurait 
été  décisive  à  ma  grande  complaisance.  Sans  le  moindre 
préjugé  relativement  à  cette  question  dans  le  sens  affirmatif 
ou  négatif,  j'ai  cru  de  mon  devoir  exprimer  les  doutes  qui 
confirment,  ou  au  moins,  qui  sont  la  raison  fondamentale  du 
qualificatif,  que  dans  le  commencement  de  mon  discoiu's  . 
j'ai  cru  devoir  m'appliquer. 


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M.  Cabtaii.hac  :  Ce  n'est  pas  chose  commode  que  d'ex- 
primer son  opinion  sur  un  ensemble  de  faits  que  M.  Ribei- 
ro  et  les  géologues  ses  compatriotes  ont  étudié  pendant  des 
aryiées;  nous  avons  entrevu,  nous  avons  passé,  et  mainte- 
nant il  faut  conclure.  Pour  ma  part,  je  retiendrai  seulement 
dans  le  débat  les  faits  qui  me  paraissent  acquis  tout  au 
moins  dans  les  limites  de  nos  connaissances  actuelles.  Je 
me  suis  rendu  plusieurs  fois  dans  des  régions  où  abonde  le 
silex  en  place,  et  plus  ou  moins  fracturé.  Je  n'ai  jamais 
trouvé  dans  ces  circonstances  un  bulbe  de  percussion  avec 
Tensemble  de  ses  caractères  tel  que  M.  de  Mortillet  vient 
encore  de  le  décrire,  tel  que  M.  Evans  lui-même  le  présen- 
tait dans  ses  ouvrages  comme  une  preuve  de  l'action  vou- 
lue, intelligente,  humaine.  Mais  j'admets  que  par  grand  ha- 
sard un  choc  naturel,  dans  des  circonstances  d'ailleurs  ra- 
rissimes,  a  pu  produire  un  bulbe  de  percussion  sur  un  silex; 
que  la  même  pièce  vienne  à  être  une  seconde  fois  l'objet 
de  la  même  opération  naturelle,  alors  c'est  un  vrai  miracle 
et  je  n'y  crois  plus. 

Or,  voilà  une  pièce  que  je  trouve  dans  les  cartons  de 
M.  Ribeiro,  dans  le  choix  fait  par  la  Commission;  je  l'avais 
déjà  remarquée  à  l'Exposition  anthropologique  de  Paris  et 
je  l'avais  moulée  parce  qu'elle  a  deux  bulbes  de  percussion, 
un  troisième  douteux,  et  une  forme  en  pointe  qui  semble 
vraiment  intentionnelle.  Or,  cette  pièce  présente  à  sa  sur- 
face non  pas  une  coloration  que  le  lavage  ferait  disparaître, 
elle  a  été  lavée,  mais  des  plaques  de  grès  toutà-fait 
adhérentes. 

Je  ne  crois  pas  qu'un  chimiste  nous  permettrait  de  dire 
que  de  pareils  dépôts  peuvent  se  former  et  s'attacher  au 

.  .silex  qui  séjourne,  le  temps  que  l'on  voudra,  à  la  surface 

■  -d'un  grès  siliceux  ! 


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Cette  seule  pièce  me  suffit,  à  présent  surtout  que  j^ai 
vu  les  lieuK.  Mais  H  y  en  a  d'autres  beaucoup  mieux  taillées, 
et  je  crois  bien  que  fa  plupart,  recueillies  à  la  surface  d'un 
sol  où  manquent  absolument  la  terre  arable  et  toute  trace 
d'autre  dépôt,  sont  réellement  extraites  du  dépôt  tertiaire 
par  l'érosion. 

Je  l'avoue,  on  pourrait  considérer  que  la  question  est 
encore  douteuse  tant  qu'elle  n'a  pas  l'adhésion  d'un  Evans; 
je  comprends  les  hésitations  parce  que  ces  petits  silex  mio- 
cènes sont,  à  certains  égards,  bien  embarrassants.  Mais  M. 
Evans  lui-même  a  reconnu  que  probablement  plusieurs  d'en- 
tre eux,  avec  un  ou  plusieurs  bulbes  de  percussion,  prove- 
naient du  grès  sous-jaccnt!  Dans  l'état  actuel  de  la  science, 
je  crois  la  question  tranchée  dans  le  sens  de  l'alhrmative. 

M.  Bellucci:  La  flore  d'Azambuja  et  celle  de  Quinta 
do  Bacalhao,  Campo  Grande  et  Portelia,  la  faune  d'Archi- 
no,  laquelle  appartient  au  même  niveau  géologique  que  les 
terrains  qui  contenaient  les  35  espèces  végétales  étudiées 
par  M.  Heer,  nous  portent  à  considérer  que  ces  terrains 
font  partie  du  miocène  supérieur.  Par  conséquent  les  con- 
glomérats miocènes  qui  reposent,  soit  sur  les  terrains  mé- 
sozoïques,  soit  sur  la  formation  basaltique,  et  qui,  à  leur 
tour,  3e  trouvent  recouverts  par  la  iïore  d'Azambuja  et  des 
environs  de  Lisbonne,  ainsi  que  par  la  faune  terrestre 
d'Archino  ou  la  faune  maritime  d'Alhandra  et  de  Lisbonne, 
appartiennent  au  miocène  supérieur,  et  représentent,  réu- 
nis aux  strates  de  calcaire  et  de  marne  avec  lesquelles 
ils  sont  en  rapport,  les  dépôts  qui  se  sont  formés  au  fond 
d'un  bassin  lacustre  qui  occupait  à  l'époque  miocène  supé- 
rieure le  centre  du  Portugal,  à  droite  du  cours  inférieur 
du  Tage.  Eh  bien!  les  silex  et  les  quartzites  éclatés,  qui 


portent  les  caractères  d'un  travail  intentionnel,  provien- 
nent positivement  de  ce  conglomérat  miocène -et  doivent 
par  conséquent  être  regardés  comme  contemporains;  quel- 
ques silex  éclatés  ont  été  trouvés  par  M.  Ribeiro  jusques 
dans  les  strates  de  grès  à  ciment  calcaire  qui  se  trouvent 
à  la  baee  des  conglomérats  près  de  Monte  Redondo. 

Voici  un  silex,  que  j'ai  trouvé  sur  place.  Avant  d'extraire 
le  silex  du  terrain  où  il  était  engagé,  j'ai  eu  le  soin  de  le  faire 
examiner  par  plusieurs  membres  du  Congrès,  qui  ont  reconnu 
qu'il  fdsait  partie  de  la  couche  même.  Cet  éclat  de  silex 
était  si  bien  dans  le  grès,  que  mon  outil  en  bois  n'a  pu 
l'en  détacher.  Il  m'a  fallu  employer  la  piochette  en  fer  de 
M.  Cartailhac  pour  briser  le  grès. 

La  position  que  cette  pièce  occupait  dans  la  couche  était 
si  bien  contemporaine  de  l'époque  du  dépôt,  qu'elle  fut  trou- 
vée solidement  fixée  à  la  partie  inférieure  de  la  lèvre  d'une 
excavation  due  à  l'érosion  atmosphérique.  Elle  se  trouvait 
engagée  dans  le  sens  horizontal,  la  surface  taUlée  tournée  en 
bas,  le  bord  coiu-be  et  coupant  en  dehors  de  fa  paroi  du  bord 
de  la  fissure.  Cette  partie  du  silex  a  une  teinte  plus  foncée 
parce  qu'elle  est  recouverte  de  petits  lichens  desséchés  et 
noircis,  ce  qui  démontre  que  l'éclat  de  silex  est  demeuré  long- 
temps dans  ces  conditions,  exposé  aux  agents  atmosphé- 
riques, et  la  forte  cohésion  qui  existait  entre  cette  pièce  et 
les  autres  matériaux  formant  le  conglomérat,  explique  pour- 
quoi elle  ne  s'en  est  pas  détachée. 

Les  parties  des  surfaces  du  silex  qui  se  trouvaient  fi- 
xées dans  le  grès,  non  seulement  présentent  une  couleur  rou- 
geâtre  qui  dépend  de  la  teinte  générale  du  conglomérat,  mais 
elles  font  voir  encore  plusieurs  incrustations  de  petits  grains 
de  quartzite,  fortement  adhérents  aux  surfaces  et  que  l'im- 
mersion dans  l'eau  n'en  a  pu  détacher. 


,ï  Google 


io3 

Par  ces  détails  et  i>ar  quelques  observations  qui  ont 
été  faites  pendant  que  la  pièce  en  question  était  encore  m 
situ,  je  n'hésite  pas  à  soutenir  qu'elle  faisait  partie  du  con-  ' 
glomérat  miocène  et  que,  par  conséquent,  on  doit  la  regar- 
der comme  contemporaine  de  ce  conglomérat. 

Maintenant,  si  nous  observons  tes  parois  des  petits  ra- 
vins plus  ou  moins  profonds  qui  sillonnent  le  terrain  en  dif- 
férentes directions,  nous  y  remarquerons  une  constitution 
parfaitement  analogue  à  celle  de  la  surface,  seulement  les 
cailloux  et  les  galets  du  conglomérat,  au  lieu  d'être  détachés, 
se  trouvent  cimentés  assez  fortement  par  une  pâte  argilo-cal- 
caire  d'une  couleur  rougeâtre,  contenant  de  nombreux  grains 
arrondis  de  sable  siliceux.  Au  milieu  de  ce  conglomérat  il  n'est 
pas  difficile  de  trouver  des  éclats  de  silex  et  de  quartzite 
empâtés  avec  des  matériaux  du  conglomérat  lui-même. 

Il  nous  est  indifférent  pour  le  moment,  que  ces  silex 
portent  ou  non  des  traces  de  travail  intentionnel.  Ce  qu'il 
importe  de  constater  c'est  que  les  matériaux  qui  constituent 
le  conglomérat  intact,  correspondent  parfaitement  à  ceux 
qu'on  trouve  à  la  surface  du  sol.  La  conclusion  que  logi- 
quement on  peut  en  tirer,  c'est  que  tous  les  matériaux  dés- 
agrégés qui  se  trouvent  à  la  surface  de  la  chameca  d'Otta 
proviennent  de  la  désagrégation  du  conglomérat  sous-ja- 
cent. 

Maintenant  le  silex  que  j'ai  recueilli  offre-t-il  des  ves- 
tiges de  travail  intentionnel.  M.  Evans  a  dit  qu'on  doit  cher- 
cher les  cônes  de  percussion  :  voici  l'éclat,  il  a  été  détaché 
de  la  surface  d'un  rognon  de  silex  et  il  non  seulement  offre 
un  cône  magnifique,  mais  sur  une  de  ses  surfaces  il  présente 
aussi  les  marques  des  éclats  détachés  précédemment,  et 
dans  la  même  direction,  lorsque  le  silex  faisait  partie  d'un 
nucléus.  Que  veut-on  de  plus?  On  peut  dire  à  la  vérité  que 


104 

cette  pièce  est  trop  grossière  pour  être  attribuée  à  un  tra- 
vail intentionnel.  Maïs  on  serait  bien  heureux  en  eiTet  de 
trouver  à  l'âge  miocène  des  pièces  régulières  et  bien  faites; 
cela  n'est  pas  possible.  On  oublie  trop  que  nous  ne  pouvons 
avoir  déjà  le  travail  et  les  objets  de  l'époque  quaternaire. 

Vous  ne  croyez  plus  au  bulbe  ! 

Que  l'on  ait  alors  la  bonté  de  nous  dire  pourquoi  ces 
silex -ci  ne  sont  pas  taillés;  pourquoi  ceux-ci  qui  sont  qua- 
ternaires, le  sont  A  quels  caractères  faut-il  s'arrêter? 

La  question  de  l'homme  tertiaire  passe  par  les  phases 
traversées  déjà  par  la  question  de  l'homme  quaternaire. 

Pour  moi,  j'arrive  aux  conclusions  générales  déjà  for- 
mulées par  M.  Ribeiro,  en  ce  qui  regarde  les  preuves  qui 
démontrent  Pexistence  de  l'homme  dans  quelques  terrains 
tertiaires  du  Portugal. 

M.  GoTTEAu:  Le  gisement  tertiaire  n'est  pas  douteux; 
les  observations  de  MM.  Ribeiro,  Delgado  et  Choffat  ont  par- 
faitement établi  ta  stratigraphie  de  cette  région,  et  les  cou- 
ches à  poudingues  surmontées,  en  certains  points,  par  les 
marnes  à  ossements  et  à  végétaux,  appartiennent  au  terrain 
miocène.  Parmi  les  silex  provenant  de  ces  couches  et  que 
la  Commission  a  examinés,  plusieurs  présentent  certainement 
les  marques  du  travail  de  l'homme;  mais  la  véritable  ques- 
tion est  de  connaître  le  gisement  stratigraphique  de  ces  si- 
lex et  de  savoir  s'ils  ont  été  recueillis  à  la  surface  ou  s'ils 
proviennent  de  rintérieur  du  dépôt.  J'éprouve  à  ce  sujet 
une  grande  incertitude.  Rien  ne  me  démontre  que  les  silex 
taillés  soient  contemporains  du  dépôt  tertiaire,  et  dans  l'état 
actuel  des  observations,  il  me  semble  plus  naturel  de  les 
considérer  comme  appartenant  à  la  surface,  et  par  consé- 
quent comme  quaternaires.  Ce  ne  sont  que  des  haches  à 


.^^  DigitizsdbyGOOgle 


io5 

peine  ébauchées,  des  grattoirs  informes  et  par  conséquent 
des  déchets  d'atelier,  ne  paraissant  pas  avoir  servi,  et  dont 
en  tout  cas  il  est  dithcile  de  préciser  l'usage.  Les  rares  si- 
lex qui  ont  été  trouvés  engagés  dans  la  roche,  ne  diffèrent 
en  rien  des  autres,  et  ne  sont  pas  suffisants  pour  démontrer 
leur  communauté  d'origine  avec  le  dépôt  tertiaire.  Il  ne  faut 
pas  oublier  quHl  sVgît  d'un  terrain  de  sables  et  de  poudin- 
gues  qui  a  subi,  à  diverses  époques,  de  puissantes  dénuda- 
tions,  d'un  sol  inégal,  meuble,  raviné  chaque  année  par  des 
pluies  torrentielles.  Quand  on  se  reporte  au  laps  de  temps 
considérable  qui  s'est  écoulé  dépuis  la  période  quaternaire, 
ne  peut-on  supposer  qu'à  une  époque  plus  au  moins  recu- 
lée, quelques-uns  de  ces  silex  ont  été  entraînés  dans  les  fis- 
sures et  qu'en  y  séjournant  pendant  des  milliers  d'années 
peut-être,  ils  ont  fait  pour  ainsi  dire  corps  avec  la  roche, 
qu'ils  ont  pris  cette  teinte  rougeâtre  qui  les  caractérise  et 
se  sont  couverts  sur  certains  points  de  grains  de  sable  ag- 
glutinés. Ne  voit-on  pas  des  faits  de  cette  nature  se  pro- 
duire tous  les  jours  sous  nos  yeux  ? 

C'est  à  titre  de  géologue,  que  vous  m'avez  appelé  à  faire 
partie  de  la  Commission,  et  c'est  comme  géologue  que  j'exa- 
mine la  question.  Lorsque  je  visite  une  carrière  et  que  j'étu- 
die les  différentes  couches  du  soi,  je  ne  tiens  que  bien  peu 
de  compte  des  fossiles  qu'on  rencontre  roulés  et  mélangés 
à  la  base.  Pour  qu'une  coquille  ait  de  la  valeur  au  point  de 
vue  stratigraphique,  il  faut  qu'elle  soit  trouvée  en  place  et 
retirée  de  la  zone  même  qu'elle  caractérise;  il  en  est  de 
même  des  silex  :  si  vous  voulez  que  leur  gisement  soit  hors 
de  conteste,  ne  les  prenez  pas  près  de  la  surface,  dans  des 
fissures  plus  ou  moins  récentes  où  ils  auront  pu  glisser.  Pra- 
tiquez au  milieu  du  dépôt  une  coupe  bien  nette  et  bien  tran- 
chée, et  si  vous  trouvez  un  silex  dans  ta  masse  compacte 


,yQ|^le 


io6 

et  non  remaniée  du  terraÏD,  vous  n'aurez  plus  de  doute  sur 
son  âge.  Malheureusement,  aucun  des  silex  que  nous  avons 
eu  à  examiner  n'a  été  recueilli  dans  de  pareilles  conditions. 
Rien  ne  s'oppose  assurément  à  l'existence  de  l^omme 
tertiaire;  mais  cependant,  dans  une  question  de  cette  im- 
portance, il  ne  faut  rien  décider  sans  une  preuve  positive 
et  matérielle;  et  quant  à  présent,  tout  en  reconnaissant  que 
l'opinion  de  MM.  Ribeiro,  de  Mortillet,  Capellini,  etc.,  est 
infiniment  respectable,  et  qu'elle  sera  peut-être  la  vérité 
demain,  )e  voudrais,  comme  géologue,  pour  me  ranger  à 
leur  avis,  des  faits  plus  précis. 

M.  VrRCHow:  Je  ne  suis  pas  géologue;  je  m'en  rapporte 
aux  spécialistes  pour  l'âge  du  gisement.  C'est  la  question 
principale  que  je  veux  mettre  plus  en  lumière  qu'on  ne  l'a 
fait  encore.  Je  me  pose  depuis  dix  ans  la  question:  peut-on 
reconnaître  dans  la  forme  d'un  éclat  de  silex  si  l'opération 
qui  Va  produite  est  intentionnelle? 

11  y  a  des  percussions  qui  se  font  naturellement  dans 
un  courant  d'eau,  sur  des  pentes.  Il  faut  donc  renoncer  au 
bulbe  de  percussion.  Le  mot  conchoïde,  proposé  par  M.  de 
Mortillet,  est  très-bon;  chaque  substance  qui  s'éclate  a  de 
ces  conchoïdes,  le  verre,  la  calcédoine,  l'obsidienne,  le  si- 
lex. Aussi  toutes  ont-elles  été  utilisées  dans  le  même  but, 
on  connaît  les  pointes  de  flèches  en  verre  de  bouteille  des 
fles  Andaman  et  de  la  Terre  de  Feu. 

On  sait  depuis  longtemps  que  toutes  ces  substances 
présentent  une  fracture  conchoïdale,  même  lorsqu'elles  n'ont 
subi  aucune  impressioh  violente  (cassure  par  l'action  de  la 
chaleur  solaire  qui  dilate  assez  brusquement  les  parties  su- 
perficielles et  amène  ainsi  leur  séparation  des  couches  infé- 
rieures); il  y  a  des  éclats  naturels  qui  ont  aussi  une  bosse. 


,ï  Google 


'07 
Alors  comment  décider  si  le  concho'tde  a  été  causé  par  un 
choc  violent  ou  par  un  mouvement  moléculaire?  La  facette 
plate,  comme  dit  M.  Zawisza,  intervient  dans  le  premier 
cas  par  une  coïncidence  fort  remarquable.  Mais  comment 
a  eu  lieu  ce  contact?  Est-ce  la  main  de  l'homme  qui  en  est 
l'auteur,  ou  bien  une  cause  naturelle? 

II  y  a  dans  le  terrain  d'Otta  de  grands  blocs  anguleux  de 
silex.  J'en  ai  moi-même  détaché  un  qui  était  en  partie  aplati, 
roulé  par  Peau.  Voilà  ce  que  tout  le  monde  peut  voir;  et 
alors  comment  admettre  que  tes  pièces  qu'on  dit  taillées  par 
l'homme,  qui  était  loin  de  là,  n'aient  pas  été  roulées.  Les 
plus  nettes  sont  les  plus  vives,  les  meilleures,  dira-t-on.  Je 
préférerais,  moi,  qu'elles  fussent  avec  arêtes  émoussées. 

Je  crois  que  les  échantillons  sont  de  la  couche  même, 
mais  ils  ne  peuvent  venir  de  loin;  ils  se  sont  fracturés,  for- 
més sur  place;  l'homme  ne  vivait  pas  dans  le  lac:  ce  n'est 
pas  lui,  c'est  l'eau  sans  doute  qui  a  fait  ces  éclats. 

Au  reste,  cette  question  est  de  nature  à  alimenter  en- 
core les  discussions  de  plusieurs  Congrès,  et  je  soumettrai 
au  prochain  une  série  d'échantillons  avec  tous  les  caractè- 
res réclamés  par  quelques  personnes  et  recueillis  dans  de 
tclies  conditions  que  l'homme  n'y  aura  été  pour  rien. 

Voyez  l'état  des  choses!  J'ai  moi-même,  dans  le  kioek- 
kenmoedding  de  Mugem,  recueilli  une  petite  pièce  de  silex, 
elle  n'avait  presqu'aucun  des  caractères  soît-disant  néces- 
saires ou  décisifs,  et  personne  n'a  douté  de  l'action  humaine. 

Ici  nous  sommes  en  désaccord  et  beaucoup  nient.  On 
cherche  avec  sagacité  des  preuves,  mais  il  n'y  a  pas  une 
pièce  qui  laisse  à  notre  esprit  une  impression  définitive. 

La  discussion  actuelle  portera  ses  fruits;  dans  un  pro- 
chab  Congrès  on  aura  étudié  de  toutes  parts,  on  sera  bien 
mieux  préparé  pour  juger. 


,ïGoOgl' 


1^ 


io8 

Pour  moi,  Je  n'ai  aucune  hostilité  contre  Phomme  ter- 
tiaire, je  crois  à  son  existence,  mais  pour  d'autres  raisons; 
ainsi,  la  pièce  présentée  par  M.  Capellini  m'a  fait  une  très 
bonne  impression. 

M.  Delcado:  Je  commence  par  déclarer  que  je  n'ai 
point  préparé  les  explorations;  les  éloges,  mérités,  qu'on 
vient  de  faire  à  M.  Ribeiro  n'en  reviennent  donc  qu'à  lui 
seul,  qui  a  fouillé,  qui  étudie  depuis  de  longues  années  ces 
gisements;  je  n'ai  fait  que  i'aider. 

Le  sujet  comprend  deux  questions:  l'une  purement  ar- 
chéologique, l'autre  géologique.  Je  ne  me  reconnais  pas  as- 
sez de  compétence  pour  émettre  une  opinion  consciencieuse 
et  sûre  sur  la  première  de  ces  questions,  laquelle,  d'ailleurs, 
vient  d'être  si  bien  éclaircie.  Je  ne  parlerais  donc  qu'en  géo- 
logue et  tout  spécialement  pour  répondre  à  M.  Evans. 

Dans  la  région  aux  silex  U  n'y  a  qu'une  formation  géo- 
logique. La  plupart,  on  pourrait  même  dire  la  totalité  des 
silex  trouvés  à  la  surface  proviennent  de  l'intérieur  des  cou- 
ches, ils  sont  les  restes  de  la  dénudatîon;  la  forme  horizon- 
tale du  plateau  dépend  de  l'horizontalité  des  couches  :  les 
silex  indiqués  par  M.  Ribeiro  étant  à  un  niveau  inférieur 
à  celui  des  espèces  fossiles  d'Archino,  qui  ont  été  détermi- 
nées par  M.  Gaudry  comme  du  tertiaire,  il  n'y  a  pas  à  dou- 
ter qu'ils  ne  soient  tertiaires  aussi. 

Un  autre  de  mes  illustres  collègues  a  parlé  de  quater- 
naire; mais  tout  le  quaternaire  du  Portugal  n'a  aucun  rap- 
port avec  le  terrain  d'Otta. 

M,  Cazaus  de  Fondouce:  J'ai  hésité  longtemps  à  de- 
mander la  parole  parce  que  je  suis  un  de  ces  timides  dont 
parlait  tantôt  M.  de  Mortillet,  de  ceux  qui  pensent  que, 


,ï  Google 


lorsqu'il  s'agit  d'introduire  dans  la  circulation  scientifique 
des  idées  nouvelles,  un  peu  de  réserve  vaut  peut-être  autant 
que  trop  de  hardiesse,  qui  hésitent  lorsque  les  preuves  qui 
leur  sont  fournies  ne  répondent  pas  absolument  aux  exigen- 
ces de  leur  esprit  et  restent  sur  les  anciennes  positions  en 
attendant  mieux.  Pourtant,  comme  le  Congrès  m'a  fait  l'hon- 
neur de  me  mettre  au  nombre  de  ses  commissaires  pour  la 
question  spéciale  qui  l'occupe  dans  cette  séance,  je  crois  lui 
devoir  compte  des  causes  de  ma  timidité.  Elles  sont  un  peu 
géologiques  et  beaucoup  archéologiques. 

Pour  ce  qui  concerne  le  côté  géologique  de  la  question 
je  dois  dire,  comme  tous  ceux  de  mes  confrères  qui  m'ont 
précédé,  que  les  géologues  portugais  ne  nous  ont  rien  laissé 
à  relever  après  eux.  Les  terrains  que  nous  avons  vus  sont 
bien  tertiaires  et  appartiennent  à  un  ensemble  miopliocène 
bien  certain.  Mais  il  me  reste  encore  des  doutes  sur  l'ori- 
gine des  silex  qui  nous  ont  été  présentés.  Viennent-ils  bien 
de  l'intérieur  des  couches?  Il  me  paraît  plutôt  qu'ils  provien- 
nent tous  de  la  surface,  ou  des  couches  superficielles  qui, 
ainsi  que  l'ont  montré  MM.  Evans  et  Gotteau,  ont  pu  être 
remaniées.  Voilà  une  première  cause  de  doute  sur  laquelle 
je  ne  veux  pas  m'étendre. 

Je  ne  m'étendrai  pas  non  plus  sur  une  seconde  cause 
de  doute  qui  provient  de  ce  que  ces  éclats,  perdus  au  milieu 
de  cailloux  roulés  et  d'éclats  à  arêtes  émoussées,  ne  sont  pas 
eux  mêmes  roulés  et  ont  conservé  leurs  arêtes  vives,  et  j'en 
viens  immédiatement  à  la  troisième  cause  de  ma  timidité,  la 
seule  que  je  vous  demande  la  permission  de  développer. 

La  question  se  pose  en  ces  termes,  au  point  de  vue  ar- 
chéologique: Peut-on  reconnaître  dans  la  forme  d'un  éclat 
de  silex,  si  l'opération  qui  l'a  produit  est  intentionnelle? 
M.  de  Mortillet  y  a  répondu  très  afifirmativement  et  M.  Vir- 


,ï  G  OOQ  le 


R, 


1 


chow  a  déclaré  au  contraire  que  pour  sa  part  il  ne  croyût 
pas  que  cela  fut  possible.  L'argument  de  M.  de  Mortillet  me 
paraît  pouvoir  se  résumer  ainsi  :  Les  silex  éclatés  incontesta- 
blement par  rhonune,  au  moyen  de  la  percussion,  présen- 
tent certabs  caractères,  donc  tous  les  silex  qui  présentent 
ces  caractères  sont  des  silex  éclatés  par  percussion.  Cette 
forme  de  raisonnement  par  induction  n'est  peut-être  pas 
tout-à-fait  correcte.  On  pourrait  demander  que  la  rigueur  de 
la  conclusion  fût  tempérée  par  quelque  mot  restrictif,  car  enfin 
on  peut  très  bien  concevoir  que  des  effets  semblables  puis- 
sent être  obtenus  par  des  procédés  différents.  Mais  ce  que 
je  ne  puis  pas  absolument  accepter  c'est  que  l'on  ajoute  à 
cette  conclusion,  comme  en  glissant,  les  mots  par  l'homme^ 
intentionnellement ,  car  les  effets  que  produit  ici  la  main  de 
l'homme,  une  cause  naturelle  peut  aussi  les  produire.  Cest 
la  proposition  principale  que  l'on  ajoute  ainsi  en  passant, 
celle  qui  aurait  surtout  besoin  d'être  démontrée  et  que  l'on 
ne  démontre  pas. 

Je  n'ai  pas  besoin  de  vous  refaire  la  démonstration  de 
la  taille  du  silex  que  vous  a  si  bien  faite  M.  de  Mortillet; 
je  me  borne  à  formuler  les  principes  suivants  qui  en  dé- 
coulent, ainsi  que  des  observations  que  vous  a  présentées 
M.  Virchow: 

I ."  Un  conckoïde  isolé  n'implique  pas  la  percussion  et 
peut  être  dû  à  un  éclatement  produit  par  une  autre  cause. 

2."  Un  plan  de  frappe  et  un  conckoïde  indiquent  le  con- 
cours de  deux  opérations,  mais  sans  intervention  nécessaire 
de  la  percussion  pour  le  second. 

3.°  Un  plan  de  frappe  avec  un  conchoide  et  ses  érail' 
lures  paraît  impliquer  une  double  percussion. 

4.°  Les  mêmes  caractères,  avec  un  conckoïde  en  creux 
sur  la  face  opposée  au  conckoïde  en  reliefs  indiquent  qu'un 


,ï  Google 


éclat  avait  été  détaché  du  noyau  avant  l'enlèvement  de  celui 
qu'on  a  sous  les  yeux  et  témoigne  par  conséquent  d'une  tri- 
ple attaque  subie  par  le  rognon  primitif. 

5°.  Un  nombre  plus  considérable  d'impressions  conchoï- 
dales  sur  un  éclat  indique  un  nombre  égal  d'actions  subies 
par  lui  avant  d'être  arrivé  à  son  état  actuel. 

Par  l'application  de  ces  principes  à  l'examen  des  éclats 
de  silex,  on  peut  reconnaître  ceux  qui  ont  été  produits  par 
percussion,  ceux  qui  peuvent  l'avoir  été  et  ceux  qui  ne  l'ont 
certainement  pas  été.  Mais  cet  examen  ne  permet  pas  de 
pousser  plus  loin  les  déductions  et  de  glisser,  comme  on  le 
fait  le  plus  souvent,  à  la  suite  du  mot  percussion,  la  qua- 
lification d'intentionnelle.  On  comprend  très  bien  que  dans 
la  nature,  des  silex  heurtés  les  uns  contre  les  autres  par  le 
mouvement  des  eaux  qui  recouvraient  les  terrains  où  ils  se 
trouvent,  entraînés  sur  les  pentes  des  collines,  soumis  à  des 
pressions  dues  aux  mouvements  qui  ont  agité  aux  époques 
géologiques  l'écorce  terrestre,  foulés  par  les  pieds  des  ani- 
maux ou  des  hommes,  exposés  aux  influences  diverses  des 
agents  atmosphériques,  on  comprend  très  bien  que  quelques- 
uns  de  ces  silex  aient  pu  être  brisés  ou  éclatés  de  façon  à 
présenter  justement  les  caractères  ci-dessus,  un  choc  natu- 
rel devant  aussi  bien  qu'une  percussion  intentionnelle  pro- 
duire un  plan  de  frappe,  des  conchoïdes  et  des  éraillures. 

Il  est  évident  toutefois  que,  plus  ces  divers  caractères 
s'accumuleront  sur  la  même  pièce,  plus  il  faudra  faire  in- 
tervenir, pour  expliquer  la  production  de  celle-ci,  le  con- 
cours de  chocs  multipliés.  Aussi  ces  éclats  se  rencontreront- 
ils  moins  fréquemment  dans  la  nature.  On  rencontre  beau- 
coup de  rognons  décapités  et  présentant  le  plan  de  frappe. 
On  rencontre  aussi  beaucoup  d'éclats  conchoïdaux.  Il  ne 
faut,  en  effet,  qu'une  opération  pour  produire  les  uns  ou 


,ï  Google 


/-^. 


les  autres.  Mais  on  rencontrera  bien  plus  rarement  des  éclats 
présentant  simultanément  le  plan  de  frappe  et  le  conchoïde, 
car  il  faut  le  concours  de  deux  opérations  successives  pour 
les  produire  ;  encore  plus  rarement  rencontrera-t-on  ces  éclats 
avec  les  éraillures  du  conchoïde.  Enfin  des  éclats  portant 
la  trace  de  deux  ou  plusieurs  conchoïdes  seront  encore  plus 
rares. 

On  m'a  dit,  dans  la  Commission,  qu^à  la  rigueur  un  choc 
naturel  pourrait  produire  des  éclats  à  un  seul  bulbe,  mais 
qu''il  serait  impossible  que  la  même  pièce  vînt  à  être  une 
seconde  fois  l'objet  de  la  même  opération  naturelle,  et  que 
par  conséquent  les  silex  à  deux  conchoïdes  ne  sont  pas  des 
éclats  naturels.  J'avoue  ne  pas  comprendre  pourquoi  ce  qui 
peut  être  produit  une  fois,  serait  impossible  une  seconde. 
La  seconde  opération  naturelle  est  aussi  possible  que  la  pre- 
mière, seulement  le  concours  des  deux  se  produira  plus  rare- 
ment. Or  ces  caractères  de  rareté  absolue  ou  relative,  qui  doi- 
vent, au  milieu  des  nombreux  éclats  produits  naturellement, 
distinguer  ceux  qui  ont  été  soumis  à  ces  opérations,  se  re- 
trouvent justement  dans  les  récoltes  faites  par  M.  Ribeiro. 

C'est  par  des  nombres  qu'il  est  impossible  d'exprimer 
que  se  chiffrent  les  éclats  de  silex  dont  la  bande  de  terrain 
qui  s'étend  au  pied  du  Monte  Redondo  est  recouverte.  C'est 
depuis  1 860,  c'est-à-dire  depuis  vingt  ans  que  M.  Ribeiro  re- 
cueille ces  éclats  avec  le  désir  d'y  trouver  les  marques  de 
l'action  humaine.  Eh  bien  !  dans  ce  grand  nombre  d'éclats, 
durant  ce  long  espace  de  temps,  notre  collègue  n'en  a  re- 
cueilli que  vingt-deux  présentant  d'une  façon  plus  ou  moins 
distincte  le  plan  de  frappe  et  le  conchoïde.  Sur  ce  nom- 
bre, trois  ou  quatre  seulement  portent  sur  le  conchoïde  des 
éraillures  caractéristiques  du  choc  qui  l'a  produit,  et  un  aussi 
petit  nombre  présentent  plus  d'un  conchoïde. 


,ï  Google 


ii3 

Comment  ne  pas  voir  avec  évidence  dans  cet  infiniment 
petit  nombre  l'effet  de  cet  accident  possible  qui  peut  et  doit 
être,  dans  cette  très  faible  proportion^  celui  du  jeu  des  forces 
naturelles?  Vingt-deux  éclats  trouvés  en  vingt  ans  au  milieu 
de  millions  de  millions,  c'est  bien  l'accident  et  cette  propor- 
tion le  démontre  victorieusement.  Et  même  ce  nombre  de 
vingt-deux  est  encore  trop  fort,  car  un  certain  nombre  de 
ceux-ci  ont  été  trouvés  ailleurs  qu'au  pied  de  Monte  Re- 
dondo.  Il  y  en  a  d'E^pinhaço  de  Cao,  de  Barquinha,  d'En- 
Costa  do  Girvo,  de  Carregado,  etc. 

Si,  sur  un  point  déterminé,  ces  éclats  se  montraient  en 
grand  nombre,  dans  une  proportion  telle  que  cette  Idée  d'ac- 
cident en  dût  être  forcément  écartée,  alors  il  faudrait  bien 
recourir  pour  expliquer  cette  production  à  une  force  inten- 
tionnelle, à  l'action  de  l'homme,  et  c'est  ce  qui  arrive  pour 
les  gisements  quaternaires.  Je  réponds  ainsi  à  M.  Capel- 
lini,  qui  disait  que  si  Ton  rejetait  les  silex  de  M.  Ribeiro, 
il  faudrait  rejeter  tous  les  silex  quaternaires.  Non,  car  pour 
eux,  j'ajoute  aux  caractères  que  nous  avons  énumérés ci-des- 
sus celui  qui  démontre  l'intention,  le  nombre,  tandis  que 
dans  les  gisements  tertiaires  du  Portugal,  non  seulement 
ce  caractère  fait  défaut,  mais  il  est  remplacé  par  son  con- 
traire, l'extrême  rareté. 

Je  voudrais  encore  répondre  un  mot  à  une  observation 
de  M.  de  Mortillet.  Notre  savant  collègue  a  dit:  L'être  intel- 
ligent qui  taillait  le  silex  ne  pouvait  laisser  des  traces  de  son 
industrie  que  sur  les  rives  du  lac;  aussi  est-ce  sur  les  bords 
du  lac  qu'ont  eu  lieu  les  recherches  et  qu'ont  été  rencontrés 
les  éclats  travaillés. — Cette  observation  est  plus  spécieuse 
que  solide.  On  sait  en  effet  que  c'est  sur  les  bords  des  lacs 
que  les  cours  d'eau  qui  s'y  jettent  déposent  les  plus  gros 
matmaux.  C'est  là  en  effet  que  sont  les  cailloux  de  silex, 


-'f* 


plus  loin,  dans  l'intérieur,  on  ne  trouve  que  des  sables  et 
du  limon.  C'est  donc  là  seulement  que  l'on  pouvait  espérer 
de  rencontrer  des  éclais  de  silex,  parce  que  c'est  là  que  sont 
les  cailloux  siliceux.  Je  n'insiste  pas,  pour  ne  pas  abuser  de 
vos  instants,  et  je  conclue. 

On  pourra  peut-être  établir  plus  tard  la  réalité  de  l'exis- 
tence d'un  être  intelligent  en  Portugal  à  l'époque  tertiaire, 
mais  la  preuve  en  est  encore  à  faire. 

M.  DE  QuATREFAGEs:  La  qucstlon  de  l'homme  tertiaire 
se  pose  encore,  pour  certaines  personnes,  d'une  manière  gé- 
nérale; pour  moi,  elle  n'est  plus  que  locale. 

Les  objections  opposées  à  l'existence  de  cet  homme  me 
semblent  aujourd'hui  relever  de  la  théorie  plus  que  de  l'ob- 
servation. Ainsi,  quelques  paléontologistes  déclarent  qu'il 
est  bien  difficile  d'admettre  que  l'homme  ait  survécu  depuis 
une  époque  dont  la  faune  mammalogique  différait  en  tout 
de  la  nôtre.  Comment  aurait-il  pu  durer,  disent-ils,  quand 
tous  les  animaux  dont  il  se  rapproche  le  plus  par  son  oi^a- 
nisation  disparaissaient?— Je  crois  avoir  répondu  depuis 
longtemps  à  cette  question.  L'homme  n'était  pas  placé  dans 
les  mêmes  conditions  que  les  bêtes.  A  son  organisation  de 
mammifère  ii  joignait  son  intelligence,  et  c'est  grâce  à  elle 
qu'il  a  pu  franchir  les  changements  de  milieu  qui  sans  doute 
ont  amené  l'exùnctîon  des  populations  animales. 

J'ai  dit  ailleurs  et  ne  crains  pas  de  le  répéter  ici:  le  plus 
ou  moins  d'antiquité  de  l'homme  est  une  question  de  fait 
et  d'observation.  Quant  aux  indications  de  la  théorie,  elles 
nous  conduisent  bien  au-delà  des  temps  miocènes.  L'homme 
par  son  corps  n'est  qu'un  mammifère,  rien  de  plus  et  rien 
de  moins;  à  ne  tenir  compte  que  du  corps,  il  a  pu  vivre  sur 
le  globe  dès  que  celui-ci  a  pu  nourrir  des  mammifères;  et 


•^ 


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Ii5 

comme  nous  connaissons  des  mammifères  qui  ont  vécu  aux 
temps  secondaires,  l'honune  a  pu  être  leur  contemporain. 
D  Pa  pu  d^autant  mieux,  qu^aux  aptitudes  physiologiques 
communes,  à  une  faculté  d^adaptation  dont  il  donne  chaque 
jour  la  preuve,  il  joignait  une  intelligence  infiniment  supé- 
rieure à  celle  de  n'importe  quel  animal,  l'intelligence  hu- 
maine. 

Mais  on  n'a  pas  eu  jusqu'ici  à  s'occuper  de  l'homme 
secondaire.  L'homme  tertiaire  est  le  seul  dont  il  s'agisse  ici. 
Cet  homme  à-t-îl  existé  et  avons-nous  trouvé  des  preuves 
de  son  existence?  Je  n'hésite  pas  à  répondre  par  l'affirma- 
tive en  ce  qui  touche  la  question  générale.  Mais  celle-ci  se 
décompose  en  un  certain  nombre  de  questions  locales.  La 
question  de  l'homme  tertiaire  portugais  est  une  de  ces  der- 
nières, et  ce  qui  se  passe  à  son  sujet  me  rappelle  ce  qui 
s'est  déjà  passé  à  propos  de  quelques-uns  de  ses  frères, 
comme  l'histoire  de  ceux-ci  a  rappelé  à  certains  égards  celle 
de  l'homme  quaternaire. 

Je  me  rappelle  l'incrédulité  que  soulevèrent  les  premiè- 
res communications  de  M.  Desnoyers  relatives  à  l'homme 
de  Saint-Prest.  Je  ne  puis  oublier  la  physionomie  de  l'illus- 
tre Lyell  en  présence  des  ossements  que  mon  confrère  pla- 
çait sous  ses  yeux.  C'était  celle  d'un  homme  qui  ne  peut  se 
refuser  à  l'évidence,  mais  que  cette  évidence  révolte.  U  se 
refusait  d'ailleurs  à  admettre  l'existence  de  l'homme  à  Saint- 
Prest,  jusqu'à  ce  qu'on  eût  trouvé  les  armes,  les  outils  qui 
avait  tué  les  animaux,  qui  avaient  fait  les  entailles. — Pen- 
dant quelque  temps  on  put  recourir  à  cette  objection;  puis 
M.  Bourgeois  la  réfuta  comme  on  sait  en  répondant  au  de- 
sideratum formulé  par  Lyell.  Depuis  lors  tout  le  monde  a 
accepté  l'homme  de  Saint-Prest;  mais  est-il  tertiaire  supé- 
rieur ou  quaternaire  inférieur?  J'ai  entendu  soutenir  les  deux 


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ii6 

doctrines.  Incompétent  pour  décider  par  moi-même  cette 
question,  je  la  renvoie  aux  géolc^es. 

L'tiîstoire  de  Tbomme  tertiaire  de  la  Beauce  ressemble 
fort  à  la  précédente.  Je  sais  que  l'existence  de  cet  homme 
est  encore  révoquée  en  doute  par  quelques-uns  de  nos  plus 
éminents  collègues.  Mais  elle  est  prouvée  pour  moi  et 
c'est  en  mon  nom  seul  que  je  parle.  Lorsque  l'abbé  Bour- 
geois me  communiqua  les  premières  pièces  qui  lui  parais- 
saient démontrer  que  l'homme  avait  vu  les  temps  miocènes, 
je  ne  lut  cachai  pas  que  ces  preuves  étaient  à  mes  yeux 
absolument  insuffisantes  et  peut-être  de  nature  à  témoigner 
plutôt  contre  qu'en  faveur  de  son  opinion.  Plus  tard,  au 
Congrès  de  Bruxelles,  je  fus  de  ceux  qui,  en  présence  de 
certains  silex  et  surtout  des  peri;oirs,  crurent  qu'ils  pour- 
raient  bien  avoir  été  façonnés  par  une  main  humaine.  Mais 
je  réservai  néanmoins  mon  opinion.  Plus  tard  encore, 
lorsque  l'abbé  Bourgeois  m'apporta  de  nouveaux  perçoirs, 
toujours  du  même  modèle,  mats  mieux  travaillés,  et  surtout 
une  hachette  ou  râcloir  avec  retouches,  je  me  déclarai  con- 
vaincu.—Je  suis  de  ceux  qui  croient  à  l'homme  tertiaire  de 
ta  Beauce. 

Si  j'ai  hésité  à  accepter  l'homme  tertiaire  de  l'abbé  Bour- 
geois, il  en  a  été  autrement  de  celui  que  M.  Capellinî  a  dé- 
couvert au  Monte  Aperto.  Ici,  les  premiers  dessins  que 
m'adressa  notre  collègue  ne  me  laissèrent  aucun  doute.  A 
moins  d'avoir  été  inventés  de  toute  pièce,  ils  étaient  abso- 
lument démonstratifs.  Les  moules,  les  pièces  originales  ont 
de  plus  en  plus  confirmé  ma  première  impression.  Les  em- 
preintes laissées  sur  ces  os  de  Cétacé  ne  peuvent  être  at- 
tribuées qu'à  un  instrument  tranchant;  seul  un  instrument 
de  ce  geive  peut  faire  des  entailles  semblables  à  celles  que 
nous  trouvons  id,  lisses  sur  im  bord  et  rugueuses  sur  l'au- 


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"7 
tre  (Ici  M.  de  Quatbefages  dessine  sur  le  tableau  noir  une 
sorte  de  schéma  de  la  coupe  de  ces  entailles).  Or,  l'homme 
seul  fabrique  et  manie  des  instruments  tranchants.  Je  crois 
donc  à  l'homme  tertiaire  de  Toscane. 

El  maintenant,  que  penser  de  l'homme  tertiaire  du  Por- 
tugal? Je  le  dis  franchement:  je  ne  saurais  me  prononcer 
encore.  Je  comprends  toute  la  valeur  des  arguments  sur 
lesquels  s'appuient  MM.  Capellini,  Cariailhac,  de  Mortiilet, 
sans  parler  de  nos  éminents  collègues  portugais  que  l'on 
pourrait  récuser  comme  étant  juges  et  parties.  Mais,  d'au- 
tre part,  les  objections  qu'on  leur  a  faites  ne  me  paraissent 
pas  être  sans  valeur. 

S'il  me  fallait  absolument  formuler  mon  appréciation 
actuelle,  je  dirais  que  la  question  de  l'homme  d'Otta  me 
semble  en  être  aujourd'hui  à  peu  près  au  point  où  se  trou- 
vait à  Bruxelles  la  question  de  l'homme  de  Thenay.  Je  viens 
de  rappeler  quel  a  été,  à  mes  yeux  du  moins,  le  résultat  fi- 
nal d'une  instruction  que  je  regardais  encore  alors  comme 
incomplète.  Je  suis  bien  près  de  croire  qu'il  en  sera  de  même 
de  celle  à  laquelle  nous  nous  livrons  aujourd'hui.  La  ques- 
tion géologique  est  définitivement  résolue.  La  question  an- 
thropologique le  sera  sans  doute  bientôt.  L'existence  de 
l'homme  d'Otta  est  dès  à  présent  presque  probable;  elle 
sera  peut-être  démontrée  au  premier  jour.  Mais  je  reste  en- 
core dans  le  doute,  estimant  qu'en  pareille  matière  on  ne 
risque  rien  en  se  renvoyant  soi-même  à  plus  ample  informé. 


L'auteur  du  mémoire  sur  l'existence  de  l'homme  ter- 
tiaire en  Portugal^  M.  Carlos  RiBEreo,  se  trouvant  griève' 
ment  indisposé,  n'a  point  pris  part  à  la  discussion. 


■r? 


M.  ViRCHow,  président;  Personne  ne  deiiflandant  la  paro- 
le, la  séance  va  être  levée.  Ce  n'est  pas  une  méthode  scienti- 
fique que  de  trancher  les  questions  à  la  majorité  des  votants. 
Il  faut  donc  remettre  la  décision  à  un  autre  Congrès. 


-^ 


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^^^ 


APERÇU  SUR  lA  FLORE  TERTIAIRE  DU  PORTUGAL 


M.  OSWALD   HeER 

Les  plantes  tenîaires  du  Portugal,  que  M.  Rîbeiro  m'a 
envoyces,  proviennent  de  quatre  localités  différentes,  savoir: 
1°  d'Azambuja  dans  le  bassin  du  Tage,  à  environ  Sg"  de 
latitude  nord,  à  45  kilomètres  au  nord-est  de  Lisbonne;  2" 
de  Quinta  do  Bacalhao;  3"  de  Areeiro  da  Quinta  da  Cruz, 
chemin  de  Portella;  4°  de  Campo  Grande.  Ces  trois  der- 
nières localités  sont  situées  à  quelques  kilomètres  au  nord- 
est  et  au  nord  de  Lisbonne. 

Je  n''ai  reçu  qu'une  espèce  de  Quinta  da  Cruz  {My- 
rica  salicina)-^  cette  localité  est  tellement  voisine  de  Quinta 
do  Bacalhao,  que  nous  pouvons  réunir  cette  espèce  avec 
celles  de  cette  dernière  localité. 

Nous  connaissons  1 3  espèces  d'Azambuja,  16  de  Quinta 
do  Bacalhao,  14  de  Campo  Grande,  en  tout  37  espèces*. 
Ces  plantes  se  trouvent  dans  une  argile  molle,  grise  ou  jau- 
nâtre et  sont  passablement  bien  conservées.  Les  feuilles  sont 
en  partie  seules,  en  partie  entremêlées  sur  les  mêmes  pla- 

'  Postérieurement  à  cette  notice,  on  a  découvert  deux  nouvelles 
espèces,  ce  qui  porte  le  nombre  total  à  39.  Elles  figurent  au  tableau, 
ce  sont  :  Nyssidium  australe  et  Trapa  sîlesiaca. 


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i 


quettes.  La  formation  lacustre  de  Quinta  do  Bacathao  oc- 
cupe un  horizon  supérieur  à  celui  des  couches  miocènes  ma- 
rines de  Lisbonne.  Celles-ci  (Almada  beds  de  Smith)  contien- 
nent un  grand  nombre  de  mollusques  marins.  Il  y  a  bien  des 
années  que  M.  James  Smith,  de  Jordan-hill*,  a  recueilli  1 5o 
espèces  dans  ces  couches:  28  %  de  ces  espèces  sont  encore 
vivantes;  dans  la  molasse  marine  suisse  les  espèces  vivan- 
tes forment  25  %»  ^^^ns  le  bassin  de  Vienne  2 1-26  "/o- 

Il  paraît  donc  que  ces  couches  marines  de  Lisbonne 
appartiennent  à  peu  près  au  même  horizon  que  la  molasse 
marine  suisse.  Au-dessous  de  ces  couches  marines  {couches 
d'Almada),  il  y  a  des  conglomérats  miocènes;  au-dessus, 
les  sables  et  les  marnes  qui  à  Quinta  do  Bacalhao  contiennent 
les  plantes  fossiles.  Les  conglomérats  miocènes  se  trouvent 
aussi  à  Azambuja  et  sont  surmontés  immédiatement  par  les 
marnes  avec  les  plantes;  la  molasse  marine  d'Almada  man- 
que à  cette  localité,  mais  la  flore  a  le  même  caractère  que 
celle  de  Quinta  do  Bacalhao  et  Gampo  Grande. 

Les  conglomérats  miocènes  d^Azambuja  contiennent 
les  silex  dont  s'occupe  en  ce  moment  le  Congrès.  Comme 

couches  avec  ces  conglomérats  sont  sans  doute  miocè- 

,  la  question  si  ces  silex  sont  taillés  par  l'homme  ou  s'ils 

it  des  produits  naturels,  est  de  la  plus  grande  importance; 

érons  que  le  Congrès  pourra  émettre  une  décision  à  cet 

trd. 
Dans  ce  mémoire  nous  ne  nous  occuperons  que  des 

ntes.  Nous  voulons  les  examiner  séparément  d'après  les 

alités. 


'  James  Smith,  of  Jordan-hiii.  On  the  Age  of  the  Teniary  Beds  of 
Tagus.  Quart.  Joura.  III.  184?.  p,  410. 


,ï  Google 


Nous  rencontrons  ici  le  plus  souvent  des  feuilles  de 
peuplier.  Ce  sont  trois  espèces  fort  répandues  dans  le  pays 
tertiaire,  savoir:  Populus  mutabilis,  P.  balsamoides  et  P. 
gîandulifera. 

Nous  les  voyons  déjà  dans  le  miocène  inférieur  où  ce- 
pendant elles  sont  très  rares;  mais  dans  le  miocène  supé- 
rieur de  la  Suisse  et  de  l'Allemagne  du  Sud  elles  forment 
des  arbres  très  répandus.  « 

"Populus  mutabilis  ne  diffère  guère  de  notre  Populus 
euphralica,  01-,  arbre  à  feuilles  coriaces,  qui  à  présent  est 
étranger  à  l'Europe,  mais  se  trouve  en  Egypte,  en  Algérie 
sur  le  bord  des  ruisseaux  et  des  fleuves,  près  du  Jourdain, 
de  l'Euphrate  et  en  Turcomanie.  L'apparition  de  P.  muta- 
bilis à  Azambuja  nous  dit  qu'à  l'époque  miocène  l'aïeul  de 
P.  euphralica  s'étendait  jusqu'au  sud-ouest  de  l'Europe. 
Nous  la  connaissons  aussi  du  nord  de  l'Allemagne  (Samland) 
et  même  du  Groenland. 

La  seconde  espèce  de  Populus  d'Azambuja,  Populus 
balsamoides,  Goepp. ,  présente  la  même  analogie  avec  P.  bal' 
samoides,  espèce  américaine,  que  P.  mutabilis  avec  P.  eu- 
phralica. Cette  espèce  se  trouve  non  seulement  dans  le  mio- 
cène supérieur,  mais  aussi  dans  le  pliocène  dii  Val  d'Arno. 
P.  gîandulifera  est  un  peu  plus  rare.  Ce  peuplier  est  le 
plus  proche  parent  de  P.  laurtfolia,  Led.,  de  l'Asie. 

Une  espèce  de  Jugions  (Juglatis  bilinica,  Ung.)  a  la 
même  distribution.  Les  ailles  blanches  d^Azambuja  nous 
en  ont  conservé  les  feuilles.  Elle  s'étend  du  miocène  inférieur 
jusqu'au  pliocène  dans  le  Val  d'Amo  (Montajone). 


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Une  feuille  du  camphrier  tertiaire  {Cinnamomum  poly- 
morphum.  A.  Braun  sp.)  nous  prouve  que  cette  arbre  ca- 
ractéristique de  répoque  miocène,  qui  se  trouvait  partout 
dans  l^Europe  méridionale  et  l'Europe  centrale,  ne  manquait 
pas  au  Portugal. 

Les  feuilles  d'un  frêne  {Fraxinus  praedicta,  Hr.)  et 
d'un  Pimeiea  {P.  oeningensis,  Hr.)  et  le  fruit  d'un  Panax 
{P.  circularis,  Hr.)  appartiennent  à  des  espèces  qu'on  n'a 
trouvées  jusqu'à  présent  qu'à  Oeningen. 

On  n'a  trouvé  que  quelques  fragments  de  Conifères  à 
Azambuja.  Une  petite  branche  et  une  écaille  détachée  et 
mal  conservée  de  Glyptostrobus  europaeus.  Brongt.  sp.,  ar- 
bre, qui  à  l'époque  miocène  s'étendait  jusqu'aux  régions  po- 
laires; une  feuille  de  Podocarpus  eocaiica,  Ung.  qui  se  trou- 
ve spécialement  dans  le  miocène  inférieur  (Oligocène),  et 
enfin  des  fragments  de  Pinus  qu'il  est  impossible  de  déter- 
miner. 

Sur  les  i3  espèces  trouvées  jusqu'à  présent  à  Azam- 
buja, 10  sont  connues  du  miocène  et  toutes  se  trouvent 
dans  le  miocène  supérieur  (molasse  supérieure  ou  formation 
d'Oeningen);  7  espèces  sont  connues  du  miocène  moyen  et 
inférieur  et  appartiennent  à  des  espèces  répandues  dans 
tout  le  pays  miocène;  5  espèces  s'étendent  jusqu'au  plio- 
cène. Quoique  le  nombre  de  plantes  trouvées  jusqu'à  pré- 
sent à  Azambuja  soit  petit,  il  nous  est  permis  d'en  tirer  la 
conclusion  que  ces  couches  appartiennent  au  miocène  supé- 
rieur et  se  sont  formées  à  la  même  époque  que  les  marnes 
calcaires  d'Oeningen  et  les  formations  du  gypse  de  l'Italie 
supérieure,  de  Guarene,  Stradella  et  Senegaglia.  L'apparition 
du  Rhinocéros  mtnutus  et  de  VHipparion  gracile  à  Azam- 
buja, animaux  foM  répandus  dans  le  miocène  supérieur,  con- 
firme cette  conclusion. 


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2.  QUINTA  DO  BACALHAO 

Les  peupliers  qui  abondent  à  Azambuja  et  nous  font 
croire  à  l'existence  d'un  lac  ou  d'une  rivière,  manquent  à 
Quinta  do  Bacalhao,  mais  les  ormes  y  sont  très  répandus.  Un 
orme  {Ulmus  plurinervia,  Ung.),  qui  par  ses  feuilles  simple- 
ment dentées,  se  distingue  de  toutes  les  espèces  vivantes  de 
l'Europe,  habitait  une  grande  partie  de  ce  continent  à  l'épo- 
que miocène.  Il  apparaît  en  Italie  à  l'époque  pliocène,  de 
même  que  Ulmus  minuta*  Goepp.  et  Planera  Ungeri,  Ett., 
dont  nous  avons  reçu  les  feuilles  de  Quinta  do  Bacalhao. 
Nous  pouvons  y  ajouter  un  charme  (Carptnus  pyramtdalis, 
Goepp.  sp.)  que  nous  connaissons  du  miocène  supérieur  de 
la  Suisse,  de  la  Siiésie  et  du  pliocène  de  PItalie. 

A  la  place  du  camphrier  que  nous  avons  rencontré  à 
Azambuja,  nous  avons  à  Quinta  do  Bacalhao  une  espèce  de 
cannellier  (Cinnamotnum  Scheuch'{eri,  Hr.)  Il  est  très-voisin 
du  cannellier  japonais,  (C  pedunculatum,  Thbg.),  arbre  re- 
marquable par  son  feuillage  brillant  et  toujours  vert. 

Les  Asclépiadées  {Acerates  veterana,  Hr.  et  A.  longi- 
pes,  Hr.)  et  les  Apocynées  {Apocynophyllum  obovatum,  Hr. 
et  A.  occidentale,  Hr.)  sont  relativement  assez  bien  repré- 
sentées. L'apparition  d'un  Eucalyptus  (£.  oceanica,  Ung.) 
est  très  intéressante.  On  a  trouvé  à  Quinta  do  Bacalhao  des 
feuilles  très  bien  conservées  et  caractéristiques  de  ce  genre. 
Cette  espèce  se  trouve  surtout  dans  le  miocène  inférieur 
de  la  Suisse,  de  l'Allemagne,  de  l'Autriche  et  de  l'Italie: 

'  Cette  espace  n'a  pas  ctc  trouvée  à  Quinta  do  Bacalhao,  nuais  i  : 
Campo  Grande, 


"W 


■_    J 


Massatongo  Ta  décrite  de  Senegaglia;  sa  détermination  ce- 
pendant est  très  douteuse. 

Quinia  do  Bacalhao  a  deux  espèces  de  Cerisiers  en  com- 
mun avec  Oeningen:  Prunus  acuminata,  A.  Braun,  et  P.  no- 
nodes,  Ung.  Prunus  nanodes  n'a  été  trouvé  ailleurs  qu'à  l'épo- 
que miocène  supérieure  (au  Locle,  à  Gleichenbei^  et  dans  le 
Val  d'Amo),  tandis  que  P.  acuminata  apparaît  déjà  dans 
l'Atlemagne  du  Nord  (Samland),  lors  du  miocène  inférieur. 

Le  Podogonium  Knorrii  formait  des  arbres  chajmanls 
et  fort  remarquables.  Nous  en  avons  recueilli  à  Oeningen 
non  seulement  les  rameaux  feuilles,  mais  aussi  les  fleurs, 
les  fruits  et  les  graines.  Il  représente  un  genre  complète- 
ment éteint  qui  se  rapproche  des  Tamarins. 

Le  Podogonium  Knorrii  devait  avoir  une  aire  très  con- 
sidérable, car  on  le  rencontre  non-seulement  à  Oeningen  et 
partout  dans  notre  molasse  supérieure,  mais  aussi  en  Alle- 
magne, en  Autriche  et  en  Bohême,  dans  les  couches  du  mio- 
cène supérieur.  Par  conséquent  j'ai  été  très  agréablement  sur- 
pris de  trouver  des  feuilles  charmantes  et  bien  conservées 
dans  l'argile  de  Quinta  do  Bacalhao  et  de  Campo  Grande. 

Quinta  do  Bacalhao  n'a  qu'une  espèce  {Fraxinus  prae- 
dicta)  identique  avec  Azambuja;  cependant  la  flore  a  le 
même  caractère,  parce  qu'elle  présente  avec  la  flore  tertiaire 
de  l'Europe  la  même  analogie  que  celle  d'Azambuja.  Elle  a 
]  I  espèces  en  commun  avec  cette  flore  et  toutes  ces  espèces 
appartiennent  au  miocène  supérieur  (à  l'exception  de  l'Eu- 
calyptus). Cinq  de  ces  espèces  sont  répandues  dans  le  mio- 
cène moyen  et  inférieur,  et  quatre  dans  le  pliocène.  Il  me 
paraît  donc  que  Quinta  do  Bacalhao  appartient  à  la  fin  du 
miocène  supérieur,  c'est-à-dire  à  l'âge  ambigu  qui  relie  le 
I  kniocène  et  le  pliocène  et  auquel  on  donne  parfois  la  déno- 
"mination  de  Mio-pliocène. 


,ï  Google 


3.  PORTELLA 

On  a  trouvé  plusieurs  feuilles  bien  conservées  àAreeiro 
da  Quinta  da  Cruz,  chemin  de  Portella,  à  peu  de  distance 
de  Quinta  do  Bacalhao.  Elles  appartiennent  à  Myrica  sali- 
ci'tta,  Ung.,  qui  était  très  répandu  à  l'époque  miocène  infé- 
rieure, moyenne  et  supérieure. 


4.  CAMPO  GRANDE 

On  a  recueilli  à  Campo  Grande  un  assez  grand  nom- 
bre de  plantes  qui  cependant  n'appartiennent  qu'à  14  espè- 
ces. L'espèce  la  plus  commune  est  une  Skimmia  {S.  Oedi- 
pus.  Ht.)  proche  voisine  d'une  espèce  du  Japon.  C'était 
probablement  un  arbre  à  feuilles  coriaces  et  brillantes,  qui 
se  distinguaient  par  leur  pétiole  épais  et  court  et  par  leur 
nervure  médiane  remarquablement  forte  à  la  base  et  amin- 
cie plus  haut.  Les  feuilles  de  l'espèce  fossile  ainsi  que  cel- 
les de  l'espèce  vivante  montrent  çà  et  là  de  petites  taches 
rondes,  provenant  probablement  d'insectes.  Le  genre  Skim- 
mia ne  se  trouve  vivant  qu'au  Japon  et  sur  l'Himalaya,  il 
n'a  pas  été  trouvé  fossile  jusqu'à  présent.  Ce  n'est  pas,  ce- 
pendant, très  surprenant  de  le  rencontrer  ici,  puisque  le 
camphrier  d'Azambuja  et  le  cannellier  de  Quinta  do  Baca- 
lhao se  rattachent  aussi  à  des  types  japonais. 

Outre  le  genre  Skimmia,  les  genres  Celastrus,  Berberis 
et  Myrica  apparaissent  en  nouvelles  espèces  à  Campo  Gran- 
de, tandis  que  les  genres  Populus,  Ulmus,  Sapindus,  Sapo' 
tacites  et  Cassia  montrent  des  espèces  communes  et  très^ 
répandues  à  l'époque  miocène  {Populus  mutabilis,   Ulmus 


,iroog^ 


126 

minuta,  Sapindus  falcifoUus^  A.  Braun,  Sapotaciies  miuor  et 
Cassia  ambigua,  Uhr.}  :  de  même  que  le  Podogonium  Knor- 
rii,  qui  est  représenté  par  un  certain  nombre  de  petites  feuil- 
les à  Campo  Grande. 

Campo  Grande  n'a  qu'une  espèce  en  commun  avec 
Azambuja  {Populus  mutabilis)  et  trois  avec  Quinta  do  Ba- 
calhao  {Planera  Uiigeri,  Acerales  longipes  et  Podogonium 
Knorrii).  Huit  espèces  de  cette  localité  sont  identiques  à  cel- 
les des  dépôts  tertiaires  de  l'Europe,  7  appartiennent  au 
miocène  supérieur  et  6  au  pliocène:  une  d'entre  elles  {Ai- 
nus  stenophylla,  Sap.)  appartient  exclusivement  au  pliocène. 
Campo  Grande  appartient  donc  au  même  horizon  que  Quinta 
do  Bacalhao  et  doit  être  placé  â  la  fin  du  miocène. 

Nous  connaissons  jusqu'à  présent  37  plantes  tertiaires 
du  Portugal,  dont  25  se  trouvent  aussi  dans  les  autres  par- 
ties de  l'Europe,  et  nous  en  rencontrons  24  dans  les  dépôts 
miocènes  supérieurs. 

Le  Portugal  a  22  espèces  en  commun  avec  la  flore  de 
la  molasse  supérieure  de  la  Suisse,  et  nous  en  rencontrons 
18  à  Oeningen;  14  espèces  se  trouvent  parmi  les  plantes 
des  argiles  bleues  et  brûlées  du  Val  d'Arno,  qui  sont  de  la 
fin  du  miocène  et  12  dans  les  gypses  de  Scnegaglia.  D'un 
autre  côté  ifi  espèces  sont  répandues  dans  les  dépôts  mio- 
cène moyen  et  miocène  inférieur  et  appartiennent  au  nom- 
bre assez  considérable  de  plantes  miocènes,  qui  ont  persis- 
té jusqu'au  commencement  du  pliocène:  plusieurs  d'entre 
elles  apparaissent  dans  cette  formation. 

En  tout,  le  Portugal  a  i3  espèces  en  commun  avec  le 
pliocène  de  l'Italie  et  de  la  France,  dont  1 1  appartiennent 
au  Val  d'Arno  (Montajonc);  une  espèce  cependant  (Alnus 
islenopkylla,  Sap.)  n'a  été  trouvée  jusqu'à  présent  qu'à  Va- 
•  quières  (en  France). 


,ï  Google 


Il  paraît  singulier  que  le  Portugal  n'ait  que  8  espèces 
en  commun  avec  la  France.  La  raison  n'en  est  pas  difficile 
à  trouver.  Les  riches  flores  tertiaires  de  la  France,  que  nous 
connaissons  par  les  beaux  ouvrages  de  M.  le  marquis  de 
Saporta,  appartiennent  pour  la  plupart  aux  époques  éocène, 
miocène  Inférieure  et  pliocène.  La  tlore  du  miocène  supérieur 
(la  flore  d'Oeningen)  manque  à  la  France  ou  bien  n'y  a  pas 
été  trouvée  jusqu'à  présent. 

La  flore  tertiaire  du  Portugal  remplit  la  lacune  entre 
le  miocène  moyen  et  le  pliocène,  et  il  n'y  a  pas  à  douter 
que  toutes  les  espèces  que  le  Portugal  a  en  commun  avec 
la  molasse  supérieure  de  la  Suisse,  se  trouveront  aussi  en 
France  et  en  Espagne  dans  les  étages  supérieurs  de  l'épo- 
que miocène,  et  probablement  elles  y  seront  découvertes  plus 
tard. 

A  cette  époque,  la  mer  s'étendait  encore  jusqu'au  Val 
d'Arno  et  couvrait  le  bassin  du  Pô,  mais  elle  avait  disparu 
de  l'Europe  centrale,  et  la  France  et  l'Espagne  formaient 
alors  une  partie  du  continent  européen,  sans  doute  recou- 
vert de  végétation.  Les  plantes  fossiles  du  Portugal  nous 
indiquent  les  premières  traces  de  cette  flore. 

Beaucoup  de  types  tropicaux  et  subtropicaux  avaient 
alors  disparu  de  l'Europe,  et  il  y  avait  moins  d'arbres  à  feuil- 
lage toujours  vert  qu'à  l'époque  éooène  et  miocène  inférieure, 
ce  qui  nous  indique  un  abaissement  graduel  de  la  tempéra- 
ture. Cependant,  à  l'époque  miocène  supérieure,  même  lors 
de  la  formation  d'Oeningen,  une  riche  végétation  doit  avoir 
recouvert  tout  le  pays.  Les  lauriers,  les  camphriers,  les  chê- 
nes toujours  verts,  les  figuiers,  les  Podogonium,  les  sapin- 
dacées,  les  palmiers  et  les  plantes  grimpantes  toujours  ver- 
tes, répandus  dans  l'Europe  centrale,  donnaient  au  paysage 
un  aspect  subtropical.  Tel  était  aussi  le  cas  en  Portugal,  et 


ia8 

même  à  un  plus  haut  degré  encore  par  suite  de  sa  situation 
australe. 

Bien  des  plantes  y  auront  subsisté  plus  longtemps  que 
dans  l'Europe  centrale,  l'Eucalyptus  de  Quinta  do  Bacalhao 
en  est  la  preuve.  A  l'époque  où  se  formaient  les  dépôts 
d' Azambuja,  de  Quinta  do  Bacalhao  et  de  Campo  Grande,  ces 
contrées  doivent  avoir  eu  un  climat  pareil  à  celui  d'aujour- 
d'hui et  même  probablement  un  peu  plus  doux. 


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Après  avoir  fait  la  lecture  du  mémoire  précédent,  M.  le 
Comte  de  Ficalho  ajoute  ies  considérations  suivantes: 


Il  est  généralement  admis  que  la  température  de  l'Eu- 
rope, très  élevée  au  début  des  temps  tertiaires  a  successi- 
vement baissé,  de  manière  à  se  rencontrer  avec  le  climat 
actuel,  et  à  descendre  même  de  quelques  degrés  au-dessous 
pendant  l'époque  glaciaire. 

En  se  fondant  sur  des  considérations  scientifiques  de 
la  plus  haute  valeur,  M.  Oswald  Heer  est  arrivé  à  con- 
clure, que,  à  l'époque  du  miocène  supérieur,  la  température 
de  la  Suisse  devait  être  à  peu  près  de  18"  (moyenne  an- 
nuelle). D'un  autre  côté,  le  savant  professeur  admet  que  la 
moyenne  actuelle  serait  dans  ce  pays  de  11",  en  supposant 
l'élévation  des  terres  au-dessus  du  niveau  de  la  mer  ré- 
duite à  200  ou  3oo  pieds,  et  les  Alpes  ne  formant  plus  que 
des  collines  basses,  c'est-à-dire,  en  faisant  abstraction  de 
quelques  causes  locales  pour  rendre  les  climats  des  deux 
époques  plus  comparables.  La  température  de  la  Suisse,  et 
en  général  de  l'Europe  moyenne,  aurait  donc  été,  à  l'époque 
des  formations  d'Oeningen,  de  7  degrés  environ  supérieure 


.ïGot^lc 


i3o 

à  l'actuelle.  Si  nous  adoptons  sans  les  discuter  ces  opinions, 
en  nous  rapportant  à  l'exposition  détaillée  et  admirablement 
déduite  du  savant  professeur',  nous  serons  conduits  à  ad- 
mettre, que  la  température  était  en  Portugal,  à  l'époque  où 
se  déposaient  les  ar^les  à  plantes  d'Âzambuja  et  de  Campo 
Grande,  plus  élevée  que  l'actuelle.  Mais  on  peut  se  deman- 
der si  la  différence  en  plus  était  en  Portugal,  comme  en 
Suisse,  de  7  degrés,  ce  qui  porterait  la  température  du 
miocène  portugais  à  un  peu  plus  de  22°.  - 

II  est  assez  difficile  de  se  rendre  compte  da  la  distri- 
bution des  températures  à  la  surface  de  l'Europe,  à  ia  fin 
du  miocène.  La  forme  comme  le  relief  des  terres  et  la  dis- 
tribution des  mers  étaient  bien  différents  de  ce  que  nous 
voyons  de  nos  jours,  et  ceci  devait  influer  sur  le  climat 
d'une  manière  difficile  à  préciser.  Un  fait  est  cependant 
avéré,  c'est  que  les  températures  décroissaient  en  passant 
des  basses  aux  hautes  latitudes.  Un  système  dHsothermes 
dont  les  courbes  nous  sont  inconnues,  traversaient  alors 
comme  aujourd'hui  toute  l'Europe.  Ceci  doit  non  seulement 
être  admis  à  priori  y  et  résultait  de  l'action  de  causes  phy- 
siques semblables  aux  actuelles,  mais  est  aussi  démontré 
par  l'examen  des  flores  fossiles.  Les  lignites  de  l'Islande, 
tout  en  nous  faisant  voir  que  le  climat  de  cette  île  était 
alors  incomparablement  plus  doux  qu'il  ne  l'est  actuellement, 
nous  montrent  cependant  une  végétation  d'un  cachet  tout 
septentrional,  et  bien  différente  de  celle  de  l'Europe  moyen- 
ne et  australe.  On  peut  dire  la  même  chose  de  la  flore  de 
l'ambre.  Quand  au  Portugal,  l'examen  des  plantes,  récem- 
ment déterminées  par  M.  Heer,  va  nous  prouver,  que  son 


'  Recherches  sur  le  Climat  et  la  Viîgétation  Ju  Pays  teniaire,  trad. 
Gaudin,  Winterthur,  1861,  p.  186  el  suiv. 


,ï  Google 


i3i 

climat  devait  être  sensiblement  plus  doux  que  celui  de  l'Eu- 
rope centrale. 

Sur  37  espèces  trouvées  en  Portugal,  ou  plutôt  sur  35, 
en  déduisant  le  Ptnus  et  le  Carex,  dont  les  échantillons 
étaient  trop  imparfaits  pour  que  l'espèce  ait  pu  être  fixée  — 
sur  35  espèces,  disons-nous,  M.  Heer  a  créé  9  espèces  nou- 
velles, nombre  très  considérable.  Cette  abondance  de  for- 
mes nouvelles  s'^explique  par  le  fait,  que  les  flores  de  l'Eu- 
rope australe,  synchroniques  avec  la  nôtre,  sont  relative- 
ment peu  connues.  On  ne  sait  rien  de  la  flore  miocène 
de  l'Espagne.  Les  flores  tertiaires  du  midi  de  la  France,  que 
les  beaux  travaux  de  M.  de  Saporta  nous  ont  fait  connaî- 
tre, appartiennent  à  l'éocène,  au  miocène  inférieur  et  au 
pliocène,  c'est-à-dire  à  des  époques  antérieures  ou  posté- 
rieur£s  à  nos  formations.  Ceci  explique  qu'on  ne  trouve, 
comme  le  remarque  M.  Heer,  que  8  espèces  communes  au 
Portugal  et  à  la  France;  et  une  seule,  VAlnus  stetiopkylla, 
qui  jusqu'à  présent  n'ait  été  trouvée  que  dans  ces  deux  pays; 
et  que,  d'un  autre  côté,  un  certain  nombre  d'espèces  com- 
munes au  Portugal  et  à  la  molasse  suisse  inférieure,  man- 
quent en  France,  où  certainement  elles  devaient  exister  pen- 
dant l'époque  correspondante.  Les  rapports  entre  la  flore 
portugaise  et  celles  des  argiles  du  Val  d'Arno  et  des  gyp- 
ses de  Senegaglia  sont  remarquables.  Sur  35  espèces  por- 
tugaises 14  sont  communes  avec  la  première,  et  12  avec  ta 
seconde.  Mais  il  y  a  en  même  temps  des  différences  con- 
sidérables, qui  s'expliquent  par  quelques  différences  d'épo- 
que et  par  l'éloignement  et  la  position  orientale  de  l'Italie, 
et  qui,  du  reste,  peuvent  paraître  d'autant  plus  sensibles, 
qu'un  plus  petit  nombre  d'espèces  a  été  étudié.  Quant  au 
rapprochement  entre  le  miocène  portugais  et  la  molasse 
suisse,  il  est  frappant;  sur  35  espèces,  nous  avons  22  com- 


l32 

munes  avec  la  molasse,  i8  avec  la  seule  fonnarion  d'Oenin- 
gen,  si  riche,  et  si  bien  connue.  Mais  à  côté  de  ces  formes 
communes  nous  trouvons  quelques  fonnes  spéciales.  Elles 
appartieruicnt,  déduction  faite  d'une  espèce  de  Skimmia^  à 
des  genres  bien  connus  et  quelques-uns  très  répandus  dans 
le  pays  teniaire;  ce  sont  les  genres  Mj-rica,  Acerates.  Apo- 
cynophyllum,  Berberis,  Celastrus  et  PhylUies.  Alors,  com- 
me dans  le  monde  actuel,  à  côté  d'espèces  à  aires  très  vas- 
tes, se  trouvaient  d'autres  à  habitation  plus  restreinte,  plus 
propres  par  cela  même  à  caractériser  les  régions.  Les  mê- 
mes genres  étaient  représentés  dans  les  différents  climats 
par  des  espèces  dissemblables.  Et  les  espèces  ncuvetlèment 
créés  par  M.  Heer,  étaient  peut-être  des  formes  australes 
de  celles  qui  habitaient  l'Europe  moyenne,  comme  nous  en 
trouvons  aujourd'hui.  L'abondance  de  formes  nouvelles, 
lo  sur  35,  nous  prouve  que  le  climat  portugais  devait  être 
différent  et  certainement  plus  chaud  que  celui  d'Oeningen. 
Entre  les  arbres,  qui  habitaient  le  Portugal,  il  y  en  avait 
un,  qui  présente  un  intérêt  tout  particulier  sous  le  point  de 
vue  qui  nous  occupe;  c'est  VEucalj'ptus  oceanica.  Cet  arbre 
a  été  très  répandu  en  Europe.  Il  existait  en  Suisse  pendant 
PAquitanien  et  le  Mayencîen,  mais  il  manque  à  l'Helvétien 
et  à  Oeningen.  De  même,  en  d'autres  contrées  de  l'Europe, 
il  existait  dans  le  miocène  inférieur  et  moyen,  mais  non 
pas  dans  le  supérieur,  car  il  est  douteux  qu'on  l'ait  trouvé 
à  Senegaglia.  On  voit  donc  que  cette  plante,  chassée  de 
presque  toute  l'Europe,  qu'elle  avait  habitée,  par  le  refroi- 
dissement dû  climat,  se  trouvait  encore  en  Portugal.  De 
même  nous  voyons  de  nos  jours  des  formes  comme  le  Lau- 
rus  le  Myrtus  ou  le  Chamaerops,  représentants  de  types 
anciennement  nombreux  et  répandus,  et  qui  aujourd'hui  sont 
isolées,  et  reléguées  aux  extrémités  australes  de  notre  con- 


A 


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j33 

tinent.  La  persistance  de  l'Eucalyptus  en  Portugal,  à  un 
moment  où  il  avait  disparu  des  autres  contrées  européen- 
nes, nous  semble  indiquer  une  douceur  exceptionelie  du  cli- 
mat de  notre  région. 

Dans  les  ai^ïles  de  Campo  Grande  on  a  trouvé  les 
feuilles  d'une  plante  très  remarquable,  que  M.  Heer  a  rap- 
portée au  genre  Sktmmia  en  lui  donnant  le  nom  de  Skimmia 
Oedipus.  Ce  genre,  dont  on  n'avait  trouvé  jusqu'à  présent 
aucune  espèce  fossile,  est  représenté  dans  la  flore  vivante 
par  un  petit  nombre  d'espèces,  dont  une  habite  les  versants 
de  l'Himalaya  et  les  autres  le  Japon.  Ce  fait,  qui  établit  un 
rapprochement  entre  la  flore  tertiaire  et  celle  du  Japon, 
n'est  nullement  isolé.  Il  est  bien  connu  qu'à  une  certaine 
époque  des  temps  tertiaires,  les  types  japonais  abondaient. 

Cet  élément  avait  une  grande  importance,  même  en  ne 
prenant  en  considération  que  le  nombre  des  espèces,  et  une 
importance  plus  grande  encore  si  Ton  remarque  la  fréquence 
des  individus,  leur  taille  et  leur  aspect.  Ne  citant  que  les 
plantes  les  plus  remarquables  et  qui  habitaient  le  Portugal  : 
le  Glj'ptostrobits  europaeus  si  répandu  dans  l'Europe  ter- 
tiaire, et  qui  se  trouve  à  Azambuja,  est  très  voisin  du  Glyp- 
lostrobus  heterophyllus  du  nord  de  la  Chine  et  du  Japon: 
le  Cinnamomum  polymorphum  d'Azambuja  est  analogue  au 
C.  camphora  du  Japon  :  et  le  C.  Scheuch\eri  de  Quinta  do 
Bacalhao  est  analogue  au  C.  peduncuîatum,  du  Japon  aussi. 
Ces  arbres  très  répandus,et  à  feuillage  brillant,  toujours  vert, 
devaient  contribuer  adonner  à  la  végétation  un  aspect  spécial. 
En  présence  de  ces  faits  il  n'est  nullement  surprenant,  que 
l'existence  d'une  Skimmia  vienne  confirmer  les  relations 
bien  connues  entre  la  flore  tertiaire  de  l'Europe,  et  la  végé- 
tation actuelle  du  nord-est  de  l'Asie. 

Si  l'on  cherche  à  reconnaître,  autant  qu'on  peut  le  faire. 


i34 

en  présence  de  données  imparfaites,  et  dans  l'état  de  nos 
connaissances  actuelles,  quel  a  été  le  chemin  suivi  par  les 
formes  de  l'extrême  Orient,  qui  a  un  moment  donné,  et 
mêlées  à  de  nombreuses  formes  américaines,  viennent  s'ajou- 
ter aux  formes  australes  des  premiers  temps  tertiaires,  la 
présence  du  Skimmia  en  Portugal  prend  un  certain  intérêt. 

On  serait  tout  d'abord  porté  à  croire  que  les  fonnes 
orientales,  ont  pénétré  en  Europe  par  l'est;  mais  les  vastes 
mers  qui  alors  séparaient  l'Asie  de  l'Europe,  devaient  pré- 
senter de  grandes  difficultés  à  l'extension  d'est  à  l'ouest. 
D'un  autre  côté,  il  est  assez  généralement  admis  que  l'Eu- 
rope a  été  reliée  à  l'Amérique  par  un  vaste  continent,  non 
seulement  dans  la  région  septentrionale,  mais  aussi  dans 
la  moyenne;  et  M.  Heer  avec  sa  grande  autorité,  est  aussi 
porté  à  admettre  que  de  son  côté  le  Japon  se  reliait  à  l'Amé- 
rique. On  peut  donc  supposer  que  quelques  formes  japo- 
naises se  sont  répandues  sur  l'Amérique  et  le  continent 
Atlantide,  et  mêlées  à  des  formes  américaines  ont  pénétré 
en  Europe  par  l'ouest.  Le  Skimmia  aurait  suivi  ce  chemin, 
et  ne  rencontrant  pas  en  Europe  des  conditions  de  dévelop- 
pement favorables,  y  aurait  pénétré  peu  profondément  et 
se  serait  localisé  dans  son  extrémité  austro-occidentale.  Il 
est  évident  que  cette  opinion — une  simple  hypothèse,  ne 
s'appuie  sur  aucune  preuve.  On  ne  sait  pas  si  le  Skim- 
mia habitait  l'Amérique  et  la  France  méridionale,  et  quant 
à  son  absence  des  autres  flores  fossiles  de  l'Europe,  c'est 
tout  au  plus  une  preuve  négative,  qui  dans  l'état  de  nos 
connaissances  n'a  qu'une  valeur  bien  restreinte. 

En  rapprochant  tous  ces  faits,  surtout  l'abondance  re- 
lative de  formes  spéciales  au  miocène  portugais  et  la  pré- 
sence si  significative  de  V Eucalyptus  oceatiica^  à  un  moment 
où  la  rigueur  du  climat  l'avait  chassé  du  reste  de  l'Europe, 


^ 


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i35 

on  peut  en  conclure  que  le  climat  du  Portugal  était  sensi- 
blement plus  doux  que  celui  de  la  Suisse. 

Doit-on  admettre,  que  ia  différence  fijt  alors  ce  quelle 
est  aujourd'hui?  en  d'autres  termes,  doit -on  admettre  que 
la  marche  du  refroidissement  se  soît  faite  uniformément  de 
manière  à  ce  que  les  rapports  entre  les  climats  soient  restés 
les  mêmes?  Il  me  semble  que  non.  On  peut  croire  que  le 
climat  tertiaire  était,  non  seulement  plus  chaud,  mais  plus 
uniforme;  et  que,  à  une  élévation  de  température  de  7  de- 
grés en  Suisse,  pouvait  correspondre  une  différence  en  Por- 
tugal un  peu  moindre. 

Sans  toucher  au  fond  de  la  question  et  à  la  cause  prin- 
cipale, encore  inexpliquée,  de  la  grande  chaleur  tertiaire,  on 
peut  cependant  remarquer  que  quelques-unes  des  causes 
secondaires,  invoquées  pour  expliquer  l'ancienne  chaleur  et 
le  refroidissement  postérieur,  ont  dû  se  faire  sentir  en  Por- 
tugal moins  que  dans  d'autres  contrées. 

Ces  causes  sont:  1"  l'élévation  de  quelques  contrées 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer;  2°  le  soulèvement  de  hau- 
tes chaînes  de  montagnes;  3"  la  disparition  de  mers  qui 
pénétraient  profondément  dans  l'Europe  centrale  et  orientale, 
et  qui,  en  "communication  avec  la  Méditerranée  et  la  mer 
des  Indes,  pouvaient  avoir  des  courants,  exerçant  sur  le 
climat  une  influence  semblable  à  l'action  actuelle  du  Gulf 
slream.  Ces  causes  touchent  peu  le  Portugal.  Sa  situation 
géographique  ressemblait  assez  à  l'actuelle.  La  mer  baignait 
ses  côtes,  car  même  en  admettant  l'existence  de  l'Atlantide, 
et  en  supposant  que  ses  prolongements  méridionaux  englo- 
baient les  archipels  atlantiques,  on  sait  qu'un  grand  bras 
de  mer  longent  les  côtes  du  Portugal  et  du  nord-ouest  de 
l'Espagne,  et  mettait  la  mer  australe  en  communication  avec 
ta  baie  de  Biscaye. 


..Co^N. 


i36 

Un  courant  semblable  au  courant  du  golfe  pouvait  lon- 
ger de  très  près  les  côtes  portugaises  et  élever  la  tempéra- 
ture hibernale;  d'un  autre  côté,  le  voisinage  d'un  grand  con- 
tinent, occupant  une  partie  de  l'emplacement  actuel  de 
l'Atlantique,  pouvait  tendre  à  élever  la  moyenne  estivale; 
mais  on  ne  peut  guère  admettre,  que  l'élévation  de  tempé- 
rature due  à  ces  causes  et  le  refroidissement  résultant  de 
leur  disparition  ftjssent  aussi  marqués  que  ceux  qui,  dans 
l'Europe  moyenne  et  orientale,  résultaient  de  changements 
autrement  importants. 

On  peut  donc  croire  que  le  climat  de  la  péninsule  ibé- 
rique a  moins  changé  dans  la  série  des  temps  que  celui  d'au- 
tres contrées  de  l'Europe.  Mais  les  faits  présentés  plus  haut, 
c'est-à-dire  la  moyenne  probable  de  18'  pendant  la  forma- 
tion de  la  molasse  suisse,  et  la  différence  entre  ce  climat 
et  celui  du  Portugal,  qu'on  ne  peut  guère  évaluer  à  moins 
de  2',  nous  forcent  à  admettre  une  moyenne  en  Portugal, 
pendant  le  miocène  supérieur,  de  20°  environ,  soit  supé- 
rieure de  5°  a  l'actuelle.  C'est  la  température  que  M.  Heer 
admet  avoir  dû  exister  à  la  même  époque  dans  l'Italie  su- 
périeure. 

Ce  climat  admet  parfaitement  l'existence  des  plantes 
qui  habitaient  alors  le  Portugal.  Comme  le  fait  remarquer 
M.  Heer,  l'aspect  de  la  végétation  est  subtropical.  Les  ty- 
pes purement  des  tropiques  ont  disparus.  Le  camphrier  et 
le  cannellier  tertiaires,  le  Podogonium,  VEucalyptus  existent 
encore.  Les  arbres  et  arbustes  à  feuillage  toujours  vert 
abondent,  comme  c'est  le  cas  encore  aujourd'hui.  D'un  au- 
tre côté  des  Populus,  un  Carpinus,  des  Ulmus,  fréquents 
dans  les  miocènes  supérieurs  de  l'Europe  centrale  et  dans 
le  pliocène  de  l'Italie,  accusent  par  leur  présence  un  climat 
tempéré, 


,ï  Google 


M.  Capeluni  fait  ressortir  l'intérêt  du  mémoire  de 
M.  Heer,  ainsi  que  des  considérations  que  M.  le  Comte  de 
FicALHo  vient  de  faire  devant  le  Congrès,  car  ces  deux  com- 
munications fixent  parfaitement  la  position  des  couches  d'oiJ 
proviennent  les  végétaux,  dans  la  partie  supérieure  des  cou- 
ches à  Congéries. 


,ï  Google 


L'HOHHE  tertiaire:  EN  ITALIE 


M.  Bellucci  :  J'appelle  ^attention  du  Congrès  sur  la  trou- 
vaille faite  récemment  à  San  Valentîno  et  Castello  délie  For- 
me, près  de  Pérouse,  d'ossements  de  différents  animaux  qui 
portent  des  incisions  droites  et  entrecoupés,  des  empreintes 
fûtes  probablement  avec  des  cailloux  en  vue  de  les  casser, 
de  deux  échantillons  d'ossements  carbonisés,  et  enfin  de  si- 
lex éclatés;  tout  cela  recueilli  dans  les  dépôts  argileux  du 
pliocène  lacustre,  caractérisé  par  une  faune  tout-à-fait  cor- 
respondante à  celle  classique  du  Val  d'Amo.  Ces  objets  don- 
nent la  preuve  de  l'existence  de  l'homme  à  l'époque  tertiaire 
dans  l'Ombrie.  Je  reviendrai  sur  cet  argument  dans  un  mé- 
moire que  je  publierai  bientôt. 

M.  Capellini;  Depuis  1875  j'ai  eu  l'occasion  d'attirer 
l'attention  des  savants  sur  la  découverte  d'ossements  d'un 
Balaenotus  près  de  Sienne,  en  Toscane,  portant  des  entail- 
les qui  par  leur  forme  et  la  place  à  laquelle  elles  se  trou- 
vent, témoignent  de  l'action  d'un  être  qui  maniait  un  instru- 
ment. 

Plus  tard,  des  ossements  d'une  Bcdaenuîa.  avec  des 


,ï  Google 


Jls. 

entailles  analogues  à  celles  du  Balamotus  de  Sienne,  ont 
été  recueillis  dans  la  vallée  de  la  Fine  dans  ta  province  de 
Rse. 

Je  tiens  a  constater  que  ces  ossements  se  trouvaient 
ensevelis  dans  des  dépôts  pliocéniques  correspondant  au 
Crag  gris  des  environs  d'Anvers. 

Au  Congrès  de  Budapesth  et  après  à  Paris,  j'ai  fait  voir 
la  plupart  des  pièces  recueillies  jusqu'alors  et  j^ai  essayé 
de  répondre  aux  objections  soulevées  par  mes  adversaires. 

Maintenant  je  présente  encore  une  omoplate  de  Balae- 
nula  trouvée  dans  la  vallée  de  la  Fine,  au  même  endroit  ou 
l'on  avait  avait  recueilli  quelques-unes  des  pièces  ci-dessus 
mentioimées. 

Sur  cette  omoplate  il  y  a  des  incisions  très  nettes,  pro- 
fondes, quelques-unes  presque  circulaires  sans  aucune  cor- 
respondance sur  les  deux  faces.  Ces  incisions  sont  identi- 
ques à  celles  que  nous  pourrions  faire  avec  une  lame  de 
silex,  ou  autre  outil  bien  tranchant,  sur  l'os  à  l'état  frais. 

Je  pense  que,  d'après  l'inspection  de  la  pièce,  l'on  doit 
se  convaincre  que  de  telles  incisions  n'ont  pu  être  faites 
que  par  une  main  armée  d'un  outil  '. 


'  V,  sur  ce  même  sujet  les  observations  de  MM.  Virchow  ei  de 
QuATREFAGEs  daHs  la  discussion  sur  l'aHomme  tertiaire  en  Pcrtuf^al-, 
pp.  io8  et  1 16, 


,ï  Google 


L'BOHHB  FHtHISTOBIQUE 


M.  SCHAAPFHAUSEN 

J'avais  choisi  l'homme  préhistorique  comme  objet  d'une 
communication  dans  cette  Session,  parceque  pendant  les  tren- 
te-six ans,  que  je  me  suis  occupé  des  études  anthropologi- 
ques, il  s'est  présenté  à  mes  yeux  plusieurs  observations  im- 
portantes, qui  sont  intimement  liées  à  la  question  :  A  quelle 
époque  l'homme  tertiaire  a-t-ilfait  son  apparition  en  Europe? 
Et  j'avais  encore  une  autre  raison:  la  discussion  sur  l'homme 
tertiaire  m'a  paru  être  la  grande  affaire  [>our  ce  Congrès,  vu 
le  résultat  des  fouilles  faites  en  Portugal  par  M.  Ribeiro. 

On  ne  se  contente  plus  de  parler  d'un  homme  préhis- 
torique, d'un  homme  fossile  qui  a  vécu  avec  les  animaux 
quaternaires,  disparus  dans  les  mêmes  contrées,  l'ours  des 
cavernes  te  renne,  le  rhinocéros  et  le  mammouth;  on  éta- 
blit maintenant  l'homme  tertiaire,  ou  plus  précisément 
l'homme  pliocène.  M.  de  Mortillet  regarde  comme  le  fon- 
dement de  toute  recherche  à  cet  égard  la  considération, 
que  l'homme  doit  avoir  eu  son  précurseur  comme  tous 
les  animaux  de  la  faune  moderne,  qui  ne  sont  que  les  des- 
cendants de  ceux  des  anciennes  couches  tertiaires.  Ainsi 
M-  Marsh  nous  a  montré  le  développement  du  cheval 


,ï  Google 


'4' 
par  une  longue  série  de  formes,  qui  se  sont  succédées  de- 
puis le  temps  éocène  jusqu'au  temps  post-pliocène.  Ce  se- 
rait une  exception  singulière  et  inexplicable,  si  Phomme  seul 
était  resté  le  même  depuis  les  temps  tertiaires  jusqu'à  pré- 
sent, tandis  que  les  mammifères  ont  subi  les  plus  grandes 
altérations.  On  doit  conclure,  que  l'homme  a  changé  plus  en- 
core que  tes  animaux,  non  seulement  parce  qu'il  était  exposé 
aux  changements  du  climat  et  de  la  nourriture,  mais  aussi 
parce  qu'il  se  développait  dans  sa  nature  même  une  nouvelle 
force  qui  exerçait  la  plus  grande  influence  sur  sa  configura- 
tion— son  intelligence.  Si  nous  distinguons  en  général  le  temps 
tertiaire  du  temps  post-pliocène  ou  quaternaire,  nous  dési- 
gnons le  premier  par  une  plus  grande  étendue  de  la  mer, 
par  une  plus  haute  température,  et  par  des  organismes,  qui 
sont  différents  de  ceux  qui  vivent  aujourd'hui.  Dans  la  pé- 
riode quaternaire  eut  lieu  un  grand  abaissement  de  tempé- 
rature, et  en  même  temps  la  déposition  des  grandes  couches 
diluviennes  contenant  les  restes  des  grands  animaux  qiû 
n'ont  pas  disparus  mais  qui  ont  changé  leur  habitat. 

Ce  fut  à  Bruxelles,  que  l'abbé  Bourgeois  soumit  au 
jugement  du  Congrès  les  silex  de  Thenay  comme  preuves 
de  l'existence  de  l'homme  dans  la  période  pliocène.  J'ai  vu 
ces  silex  à  Bruxelles  et  je  les  ai  examinés  plus  tard  à  Saint- 
Germain  avec  d'autres,  provenant  de  nouvelles  fouilles  du 
même  endroit,  et  je  ne  peux  qu'assurer,  que  parmi  ces  si- 
lex il  y  en  a  quelques-uns,  qui  sont  indubitablement  fabri' 
qués  par  la  main  de  l'homme.  Mais,  je  demande,  est-il  pos- 
sible de  séparer  avec  une  complète  exactitude,  entre  des  li- 
mites bien  précises,  les  formations  pliocènes  des  formations 
post-pliocènes,  ou  quaternaires  ?  On  a  l'habitude  de  regarder 
les  trois  périodes  du  temps  tertiaire,  l'éocène,  le  miocène  et 
le  pliocène  établis  par  Charles  Lyell,  comme  des  sections, 


142 

qui  n^ont  pas  de  transition  entre  elles  ni  avec  les  couches 
voisines;  mais  jamais  il  n'exista  dans  Pévolutîon  de  la  sur- 
face de  notre  globe  et  dans  le  développement  des  organis- 
mes qui  l'habitent,  une  telle  séparation.  Les  périodes  se 
sont  au  contraire  succédées  avec  une  certaine  continuité, 
et  les  organismes  changèrent  peu  à  peu  selon  le  changement 
des  conditions  de  leur  vie. 

Il  y  a  une  autre  observation  de  laquelle  on  avait  con- 
clu l'existence  de  l'homme  tertiaire.  Au  Congrès  de  Buda- 
peslh  M.  Capellini  nous  a  montré  des  ossements  d'une  ba- 
leine fossile  tertiaire  avec  des  incisions,  qui  avaient  l'appa- 
rence d'être  faites  par  la  main  de  l'homme.  J'en  ai  douté 
et  j'en  doute  encore.  Je  ne  connais  pas  l'instrument  de  l'hom- 
me préhistorique  qui  aurait  pu  faire  de  telles  incisions  ai- 
guës et  semilunaires.  A  l'exposition  de  Berlin  pour  la  pisci- 
culture il  y  avait  un  morceau  de  bois  d'un  navire  avec  la 
pointe  d'une  dent  de  narval,  qui  y  était  enfoncée.  Blu- 
menbach  a  fait  déjà  la  remarque,  qu'un  tel  cas  n'est  pas 
rare.  II  me  semble,  qu'un  narval  avec  une  dent  brisée  pou- 
vait faire  de  telles  impressions  sur  les  ossements  d'une  ba- 
leine. 

En  1871,  M.  Ribeiro  a  publié  ses  observations  sur  des 
silex  taillés  des  vallées  du  Tage  et  du  Sado,  trouvés  dans 
des  couches  pliocènes  et  miocènes,  qui  sont  couvertes  par 
des  dépôts  d'une  hauteur  de  mille  deux  cents  pieds.  L'homme 
doit  avoir  été  le  témoin  des  derniers  événements  volcaniques 
dans  cette  contrée!  Je  me  permets  de  demander,  si  ces  évé- 
nements ne  peuvent  avoir  encore  eu  lieu  au  commencement 
du  temps  quaternaire  ? 

Considérons  maintenant  les  fouilles  qui  ont  donné  des 
restes  humains  et  qui  peuvent  éclaircir  notre  question. 

Le  crâne  et  quelques  ossements  de  l'homme  de  Néan- 


^ 


„Google 


derthal  ont  été  trouvés  dans  une  caverne  de  la  Westphalie 
dans  les  mêmes  circonstances,  dans  lesquelles  on  y  trouve  les 
restes  des  animaux  quaternaires.  Le  nord  de  TAUemagne  était 
au  commencement  de  cette  période,  dans  sa  partie  orientale, 
couvert  de  glaciers,  et  dans  la  partie  occidentale  existait  en- 
core la  mer,  dans  laquelle  les  bancs  de  glace  ont  dispersé 
les  blocs  erratiques,  que  nous  trouvons  aujourd'hui  dans  les 
plaines  de  cette  contrée  et  dans  la  Hollande.  Dans  les  caver- 
nes de  la  Westphalie  ainsi  que  de  la  Belgique,  nous  trouvons 
les  restes  des  animaux,  qui  habitent  aujourd'hui  le  nord;  le 
lemming,  la  poule  de  neige,  le  renne.  Je  regarde  par  con- 
séquent l'homme  de  Néanderthai  comme  contemporain  de 
la  dernière  période  glaciaire.  J'ai  remarqué  déjà,  que  la  proé- 
minence colossale  des  arcades  sourciliéres  de  ce  crâne  est 
produite  par  la  grandeur  des  sinus  frontaux  et  que  cette 
conformation  prouve  une  grande  énergie  de  la  respiration. 
C'est  là  une  fonction,  qui  doit  être  bien  développée  chez  un 
homme  qui  vit  dans  un  climat  froid,  où  une  vive  combus- 
tion des  éléments  du  corps  doit  conserver  la  chaleur  ani- 
male. Chez  les  anthropoïdes  et  chez  quelques  peuples  sau- 
vages, que  habitent  des  pays  chauds,  comme  les  Australiens, 
il  se  trouve  aussi  une  grande  proéminence  du  bord  supé- 
rieur des  orbites  ou  des  arcades  sourcilières,  mais  elle  est 
principalement  produite  par  une  grande  épaisseur  de  l'os 
frontal  dans  cette  région;  les  sinus  frontaux  sont  peu  déve- 
loppés. Je  crois,  que  cette  différence  dépend  du  climat.  Les 
parois  des  sinus  frontaux  du  crâne  de  Néandenhal  sont 
minces  et  les  os  de  la  voûte  du  crâne  ne  sont  pas  aussi 
épais  qu'on  les  trouve  dans  la  plupart  des  crânes  des  indi- 
vidus appartenant  aux  tribus  les  plus  sauvages.  C'est  une 
singularité  du  crâne  des  Esquimaux  que  d'être  ordinairement 
très  léger  à  cause  de  la  ténuité  des  os  qui  le  forment.  Ce  fai- 
cft.  i3 


,ï  Google 


■44 


1 


ble  développement  du  tissu  osseux  doit  être  attribué  à  la 
froideur  excessive  du  climat 

Le  crâne  de  Néanderthal  reste  le  plus  bestial  que  nous 
connaissions,  il  n'est  pas  le  produit  d'une  conformation  ar- 
tificielle, il  n'est  pas  le  crâne  d'un  idiot,  sa  grandeur  seule 
réfute  cette  opinion,  et  il  n'est  pas  l'effet  d'une  affection  mor- 
bide. Nous  ne  connaissons  aucune  maladie  qui  pût  produire 
une  telle  altération  de  la  forme  ordinaire  du  crâne  humain. 
Ce  crâne  est  typique  et  il  s'approche  dans  quelques  carac- 
tères du  crâne  du  singe  anthropoïde,  maïs  il  est  humain. 
Qu'on  examine  la  photographie  du  crâne  et  la  photographie 
du  moule  de  l'intérieur  du  crâne:  la  forme  du  cerveau  res- 
semble à  celle  d'un  homme  sauvage,  par  exemple  d'un  Aus- 
tralien. 

On  dit  souvent,  que  l'on  n'auraitpas  trouvé  jusqu'à  pré- 
sent une  conformation  de  l'homme  fossile  plus  inférieure 
que  celle  des  sauvages  vivants.  Ce  n'est  pas  vrai.  Un  crâne 
comme  celui  de  Néanderthal,  et  une  mandibule  pareille  à 
celle  de  La  Naulette  ne  se  trouvent  chez  aucune  race  vi- 
vante. 

On  a  dit  aussi:  un  seul  crâne  ne  prouve  rien.  Mais  un 
naturaliste,  qui  trouve  dans  un  pays  étranger  une  nouvelle 
plante,  ta  place  dans  la  série  des  plantes  connues.  U  serait 
ridicule,  s'il  disait:  je  ne  peux  rien  dire  là-dessus,  jusqu'à  ce 
que  j'en  aie  trouvé  plusieurs  exemplaires.  L'individu  a  son 
droit  d'Être  reconnu  dans  la  nature,  comme  dans  le  monde 
social. 

Une  observation  Importante  et  concernant  notre  sujet 
je  l'ai  faite  dans  la  vallée  de  la  Moselle,  près  de  Coblentz. 
Dans  une  profondeur  de  vingt-deux  pieds  on  a  trouvé  un 
crâne  de  Bos  moschatus^  le  plus  complet  qui  existe.  Il  gi- 
sait dans  une  terre  ar^leuse  diluvienne,  qui  est  couverte 


,ï  Google 


_I45_ 
dans  cette  contrée  par  une  lave  d'un  ancien  volcan  du  Rhin. 
Ce  crâne  niontre  à  sa  surface  plusieurs  incisions  anciennes, 
faites  par  la  main  de  l'homme  avec  un  instrument  tranchant 
de  pierre.  Beaucoup  de  naturalistes  ont  reconnu  l'authenti- 
cité de  ces  impressions.  J'avais  présenté  ce  crâne  au  Con- 
grès des  anthropologis  tes  allemands  à  Strasbourg.  Donc, 
l'homme  a  vécu  dans  la  vallée  de  la  Moselle  pendant  la  pé- 
riode glaciaire,  faisant  usage  déjà  des  instruments  de  pierre, 
et  il  a  vu  les  dernières  éruptions  des  volcans  de  cette  contrée. 

Encore  une  autre  observation.  Dans  le  printemps  de 
cette  atinée  on  a  trouvé  dans  le  diluvium  du  Neckar,  près 
de  Manheim,  à  une  profondeur  de  vingt  pieds,  un  crâne  hu- 
main à  côté  de  plusieurs  dents  molaires  de  mammouth.  Ces 
restes  se  ressemblent  dans  l'apparence  extérieure  aussi  bien 
que  dans  la  constitution  chimique,  il  n'y  a  pas  à  douter 
qu'ils  ne  soient  contemporains.  Un  deuxième  crâne  humain 
était  si  mou,  qu'xin  n'a  pas  pu  le  conserver.  Il  avait  les  ar- 
cades sourcilières  énormes.  Le  crâne  conservé  appartient  à 
un  individu  féminin;  il  montre  beaucoup  de  traits  d'une 
conformation  inférieure,  mais  tous  ces  caractères  se  trou- 
vent aussi  chez  les  sauvages  vivants.  Le  front  de  ce  petit 
crûne  n'est  pas  mal  développé,  mais  il  a  la  forme  de  celui 
d'un  enfant.  Ce  crâne  prouve  que  l'homme,  qui  coexista 
avec  le  mammouth  dans  cette  contrée  dans  les  temps  qua- 
ternaires, n'était  pas  très  différent  de  la  race  humaine  vi- 
vante. En  voici  les  photographies. 

Voyons  encore  le  dessin  du  fameux  crâne  de  Calaveras  pu- 
blié par  M.  Whimey  l'année  dernière  '.  Il  a  été  trouvé  sous 
quatre  couches  volcaniques.  Je  ne  peux  le  regarder  comme 

'  J.  D.  Whitney  :  The  auriferous  gravels  of  ihe  Sierra  Nevada  of  Ca- 
lifornia,  Memoirs  of  the  Mus.  of  comp.  Zool.  M  Harvard  Collège,  Cam- 
bridge,  iSTg,  vol.  vi,  n.°  i,  p.  ï58. 

i3» 


-^^; 


.gic 


tertiaire,  parce  que  sa  forme  ne  diffère  pas  beaucoup  du  sau- 
vage vivant  en  Californie;  une  coquille,  qui  est  attachée  au 
crâne,  est  d'une  espèce  vivante.  Dans  les  trtêmes  couches 
d''un  sable  aurifère  on  a  trouvé  beaucoup  de  mortiers  en 
pierre,  que  nous  ne  pouvons  attribuer  à  ITiomme  tertiaire, 
et  à  côté  des  espèces  disparues,  les  restes  d'un  tapir  et  d'un 
cheval  qui  ne  diffèrent  pas  des  espèces  vivantes.  J'ai  parlé 
de  cette  fouille  au  Congrès  de  Bruxelles. 

M.  Ramsay  a  démontré  cette  année  devant  l'Associa- 
tion Britannique,  que  les  événements  géologiques  sur  la  ter- 
re sont  restés  les  tnèmes  depuis  les  temps  les  plus  reculés 
jusqu'à  la  période  pliocène,  et  même  post-pliocène;  qu'il  y 
eut  toujours  depuis  la  période  silurienne  des  éruptions  vol- 
caniques, des  glaciers,  des  formations  d'eau  douce,  des  élé- 
vations et  des  submersions,  des  plaines  et  des  montagnes. 
Donc,  les  forces  qui  ont  altéré  la  surface  de  la  terre,  sont 
restées  les  mêmes  depuis  les  périodes  les  plus  anciennes, 
dont  la  science  ait  connaissance,  jusqu'à  ce  jour. 

L'aspect  de  la  nature  ne  paraît  plus  si  uniforme  et  si 
invariable  si  nous  regardons  l'évolution  de  la  vie  oi^anique. 
Les  organismes  sont  diiîérents  dans  les  périodes  miocène, 
pliocène  et  diluvienne. 

On  peut  conclure,  que  les  mammifères  ne  pouvaient 
pas  exister  avant  que  Pair  ne  fût  purifié  et  que  le  sol  ne 
donnât  la  nourriture  pour  les  herbivores,  qui  devaient  entre- 
tenir la  vie  des  carnivores. 

Les  besoins  de  l'homme,  les  conditions  pour  son  exis- 
tence étaient  les  mêmes  que  pour  les  autres  mammifères 
et  spécialement  pour  ceux  qui  ont  le  plus  d'afBnité  avec  lui. 
Les  vertébrés  les  plus  parfaits,  les  singes  anthropoïdes, 
ne  vivent  aujourd'hui,  que  dans  les  climats  chauds,  et  sup- 
portent difficilement  l'air  de  l'Europe  centrale  et  septentrio- 


,ï  Google 


'47 
nale;  mais  ils  vécurent  dans  Pancien  monde  même  pendant  le 
temps  tertiaire.  Le  Dryopithecus  vivait  en  France,  et  un 
Hylobates  dans  la  vallée  du  Rhin.  Il  paraît  que  l'homme  seul 
a  survécu  par  son  intelligence,  tandis  que  la  froideur  du 
temps  glaciaire  a  détruit  les  anthropoïdes  en  Europe,  com- 
me elle  a  expulsé  d'autres  mammifères. 

La  division  du  temps  tertiaire  en  eocène,  miocène  et 
pliocène  a  été  faite  par  Charles  Lyell  en  raison  des  différen- 
tes espèces  de  coquilles  marines  dans  les  diverses  couches.  Il 
n'y  a  pas  de  coquille  qui  puisse  nous  aider  à  distinguer  l'ai- 
luvium  du  diluvium,  et  le  quaternaire  d'une  formation  pliocè- 
ne. Faisons  usage  des  restes  humains  pour  déterminer,  quelle 
couche  est  tertiaire  ou  quaternaire  !  Ces  débris  nous  doivent 
indiquer  par  le  degré  de  leur  organisation  l'âge  des  couches, 
dans  lesquelles  ils  ont  été  ensevelis  par  la  nature  même  ! 

J^arrive  aux  conclusions  suivantes: 

1°  L'homme  tertiaire  n'est  pas  encore  trouvé  mais  aon 
existence  pendant  le  temps  pliocène  est  très  vraisemblable. 

2"  L'homme  qui  a  vécu  en  Europe  et  en  Amérique  avec 
le  mammouth  n'était  pas  plus  rude,  que  te  sauvage  vivant. 

3"  Malgré  cela,  nous  connaissons  déjà  quelques  traits 
dans  la  conformation  de  l'homme  préhistorique,  qui  prouvent 
une  organisation  inférieure  à  celle  d'une  race  vivante  quel- 
conque. Nous  devons  regarder  ces  traits  comme  des  indica- 
tions, des  reliques  de  la  conformation  de  Thomme  tertiaire. 

4"  L'homme  a  vécu  en  Europe  et  en  Amérique  pen- 
dant la  période  glaciaire,  pendant  la  fonnation  des  grandes 
coudies  diluviennes,  pendant  les  éruptions  volcaniques,  qui 
n'ont  plus  lieu  dans  ces  mêmes  contrées,  quoique  elles  sem- 
blent avoir  duré  pendant  l'époque  quaternaire. 

5°  L'homme  doit  être  apparu  sur  la  terre  entrela  pé- 
riode miocène  et  post-pliocène. 


hy^WK'^lc 


148 


Dlaonsalon 

M,  DE  QvATREFAGEs:  J'oi  tTop  souvciit  exprîmé  mon 
opinion  sur  la  question  actuelle  pour  avoir  besoin  d'insister 
longtemps  sur  ce  sujet.  On  sait  qu'il  m'est  impossible  d'ad- 
mettre dans  le  passé  l'existence  d'un  être  imtermédiaire  en- 
tre l'homme  et  les  singes  anthropomorphes,  fils  de  ces  der- 
niers et  notre  ancêtre  direct.  Le  crâne  de  Néanderthal,  que 
l'on  cite  toujours  chaque  fois  que  l'on  aborde  cet  ordre 
d'idées,  n'a  en  réalité  que  bien  peu  de  ces  caractères  excep- 
tionnels qu'on  lui  anrîbue  et  que  l'on  exagère  outre  mesu- 
re. Il  n'est  autre  chose  que  le  type  le  plus  accusé  d'une  for- 
me céphalique  dont  nous  avons  montré,  M.  Hamy  et  moi, 
qu'il  existe  des  degrés  très  divers.  M.  Vogt  avait  déjà  fait 
voir  que  ce  type  s'est  produit  de  nos  jours  encore  et  qu'il 
est  très  compatible  avec  un  développement  intellectuel  des 
plus  accusés. 

Au  reste,  les  origines  humaines  ne  sont  qu'un  cas  de 
la  grande  question  des  origines  des  espèces  animales  et  vé- 
gétales.  On  comprend  que  je  ne  voudrais  pas  la  soulever 
ici;  elle  m'entraînerait  trop  loin  et  soulèverait  vite  de  trop 
longues  discussions.  Je  me  borne  à  rappeler  que  les  con- 
sidérations morphologiques  ne  suffisent  pas  pour  aborder 
et  résoudre  ce  problème  et  qu'il  faut  tenir  compte  des  lois 
physiologiques  communes  aux  animaux  comme  aux  végé- 
taux. 

M.  DE  Mortillet:  Ce  n'est  pas  toutefois  l'anthropolo- 
gie seule  qui  prouve  le  transformisme,  mais  toute  l'histoire 
naturelle. 


,ï  Google 


'49 
M,  DE  QuATREFAGES:  Jc  n'aî  pas  voulu  dire  que  le  trans- 
formisme ait  pour  seule  base  Panthropologie,  mais  bien  qu'il 
se  base  seulement  sur  la  morphologie.  Or  cela  ne  suffit  pas, 
et  il  faut,  à  côté  des  faits  morphologiques  faire  intervenir 
les  faits  physiologiques.  L'erreur  de  Darwin  et  de  ses  disci- 
ples est  d'avoir  oublié  ces  derniers,  ce  qui  tient  à  ce  qu'ils 
ne  se  sont  jamais  demandé  ce  que  c'est  qu'une  espèce  et 
ont  par  suite  confondu  l'espèce  avec  la  race. 

M.  ScHAAFFHAUSEN  ;  En  répondant  aux  paroles  de  M.  de 
Quatrefages,  je  ne  veux  pas  entrer  dans  une  ample  discus- 
sion sur  une  question  grave,  qui  a  etïrayé  le  monde,  et  que 
l'on  a  débattu  à  l'excès.  Une  langue  étrangère  m'impose  déjà 
une  certaine  restreinte.  Je  me  borne  à  une  seule  remarque. 
M.  de  Quatrefages  m'accordera  bien,  qu'il  y  a  une  grande 
différence  d'intelligence  et  de  degré  de  conformation  du  cr3- 
ne  entre  les  sauvages  et  les  peuples  civilisés.  Les  traits  de 
la  conformation  plus  inférieure  sont  évidemment  les  traits 
bestiaux  ou  ptthécoïdes:  il  y  a  eu  donc  une  évolution  telle, 
qu'elle  a  développé  les  formes  primitives  et  changé  Torganisa- 
tion  et  l'extérieur  du  corps.  Le  volume  du  cerveau  s'est  agran- 
di et  les  circonvolutions  sont  devenues  plus  compliquées. 
Le  nez  et  la  bouche,  le  pied  et  la  main  ont  changé  de  forme. 
Il  est  impossible,  que  M.  Vogt  ait  jugé  sur  le  crâne  de 
Néanderthal  ainsi  que  le  suppose  M.  de  Quatrefages.  Il  s'est 
demandé  au  contraire,  si  ce  crâne  ne  serait  pas  celui  d'un 
idiot. 

II  n'est  pas  douteux  que  les  peuples  civilisés  de  l'Eu- 
rope ne  fussent  autrefois  des  sauvages;  nos  fouilles  le  dé- 
montrent. Qui  est  ce  qui  veut  restreindre  la  nature,  qui  dé- 
veloppe ainsi  les  formes  organisées,  entre  des  limites  insur- 
montables ? 


,G*«»|le 


i5o 

Quels  changements  peuvent  s^être  accomplis  dans  fé- 
coulement  des  siècles? 

Quel  autre  moyen  avons-nous  pour  déclarer  la  pre- 
mière apparition  de  l'homme  sur  la  terre,  que  cette  évolu- 
tion générale  des  êtres  organisés,  dont  Phomme  seul,  com- 
me je  l'ait  dit  tout  à  l'heure,  ne  pouvait  pas  être  exclu  ! 


,ï  Google 


ÉPOQUE  QUATERNAIRE 


LES  ANCIENS  OLAGIEHS  DU  BASSIN  DU  RHONE 


M.  Ernest  Chantre 

J'ai  l'honneur  de  présenter  au  Congrès  l'ouvrage  que 
je  viens  de  publier  en  collaboration  avec  M.  Faisan  :  Mo- 
nographie géologique  du  terrain  erratique  et  des  anciens 
glaciers  du  bassin  du  Rhône  '.  Sans  vouloir  entrer  dans  les 
détails  relatifs  à  l'historique  de  la  question,  je  désire  seule- 
ment attirer  votre  attention  sur  l'intérêt  qui  s'attache  à 
l'étude  des  anciens  glaciers  quaternaires,  pour  les  recher- 
ches relatives  à  l'antiquité  de  l'homme.  Mais  avant  je  vou- 
drais vous  donner  quelques  explications  sur  la  distribution 
des  dépôts  erratiques  dans  les  régions  que  nous  avons  étu- 
diées, et  sur  la  marche  qu'ont  suivie  ces  grandes  masses 
glacées  qui  se  sont  étendues  depuis  les  Alpes  jusqu'à  Lyon. 
Tous  ces  renseignements  sont  consignés  sur  la  carte  que 
vous  avez  sous  les  yeux. 

'  Deux  volumes  in  S"  avec  cartes,  coupes  et  nombreuses  figures 
intercalées  et  un  atlas  de  6  feuilles  de  l'état  major  français  à  l'échelle 
de  1/80000.  Lyon,  1880.  Masson  éditeur  a  Paris  et  Georf;  éditeur  a  Bâle, 
Genève  et  Lyon. 


..^BV^Ic 


i5a 

Pour  faire  comprendre  le  sens  de  la  progression  des 
anciens  courants  de  glace,  pendant  leur  plus  grande  exten- 
sion, ainsi  que  leur  entre-croîsement,  les  teintes  plates  em- 
ployées dans  les  cartes  géologiques  ordinaires  ne  devaient 
pas  suffire;  nous  avons  dû  adopter  les  procédés  usités  dans 
certaines  cartes  hydrographiques  pour  indiquer  les  courants 
marins. 

C'est  la  représentation  exacte  de  ce  qui  est  sur  le  ter- 
rain, car  on  sait  que  les  glaciers  usent,  polissent  et  rayent 
les  rochers  sur  lesquels  ils  cheminent,  entraînant  avec  eux 
des  roches  plus  ou  moins  dures  capables  d'inciser  les  ro- 
chers sous-jacents. 

La  marche  des  glaciers  est  donc  ainsi  indiquée  par  des 
lignes  de  diverses  couleurs,  suivant  la  provenance  des  ro- 
ches constituant  les  moraines,  et  les  directions  sont  rigou- 
reusement exactes,  puisque  nous  les  avons  tracées  d'après 
relevés  nombreux  des  stries  sur  les  rochers. 

Des  lignes  transversales,  coupant  les  lignes  qui  se  pro- 
longent de  Test  à  l'ouest  en  éventail,  depuis  les  pieds  des 
Alpes  jusqu'à  Bourg,  Lyon  et  Valence,  indiquent  les  mo- 
raines frontales. 

Les  dernières  moraines  frontales  couronnent  les  hau- 
teurs qui  dominent  la  Saône,  en  Bresse,  en  face  de  la  Bour- 
gogne, et  couvrent  les  collines  lyonnaises  et  viennoises  plus 
au  sud  sur  le  bord  du  Rhône. 

Plusieurs  coupes  montrent  les  détails  relatifs  à  la  su- 
perposition des  dépôts  quaternaires  aux  terrains  tertiaires, 
qu'ils  recouvrent  presque  partout  dans  cette  région. 

Au  point  de  vue  anthropologique,  l'étude  de  la  distri- 
bution des  moraines  a  une  très  grande  importance. 

L'homme,  arrivé  dans  le  bassin  du  Rhône  pendant  l'ex- 
tension des  glaciers,  ne  pouvait  vivre  d'abord  que  sur  les 


,ï  Google 


i53 

points  privilégiés  par  la  température,  comme  tes  pentes 
abritées  de  la  vallée  de  la  Saône,  par  exempte  ;  puis,  à  me- 
sure que  ta  nappe  de  glace  se  retirait  vers  son  point  de  dé- 
part, il  suivit  à  peu  près  la  même  marche  vers  t'est,  s'avan- 
çant  peu  à  peu  à  mesure  que  la  vie  reparaissait  sur  ce  sol 
nouvellement  déposé. 

Cest  ainsi  que  successivement  les  grottes  du  Ûauphiné 
et  de  la  Savoie  ont  donné  asile  à  des  populations  de  moins 
en  moins  anciennes,  à  mesure  que  l'on  s'approche  vers  les 
Alpes.  En  effet,  tandis  que  l'on  trouve  à  Germolles  et  à 
Solutré,  en  Bourgogne,  ainsi  que  dans  les  grottes  de  l'Ar- 
dèche  les  vestiges  les  plus  anciens  de  l'homme  quaternaire, 
on  ne  rencontre  plus  dans  les  grottes  du  Dauphiné  et  de 
la  Savoie,  que  tes  restes  des  populations  de  l'époque  de  la 
Madeleine,  c'est-à-dire  de  la  fin  de  l'époque  quaternaire. 
Ces  faits  démontrent  bien  tes  corrélations  qui  existent  entre 
le  développement  des  populations  préhistoriques  du  bassin 
du  Rhône  et  la  répartition  des  éléments  glaciaires  qui  ont 
recouvert  si  longtemps  la  plus  grande  partie  de  cette  belle 
contrée. 

Ce  fait  anthropologique  est  confirmé  par  l'étude  de  la 
distribution  géographique  de  la  faune  quaternaire.  C'est 
également  dans  la  région  que  les  glaciers  ont  atteinte,  au 
moment  de  leur  plus  grand  développement  que  se  trouvent 
les  plus  anciens  vestiges  de  la  faune  quaternaire;  dans  les 
parties  voisines  des  Alpes,  on  ne  rencontre  plus,  au  con- 
traire, que  des  restes  d'animaux  indiquant  la  fin  de  cette 
grande  période  géologique  qui  a  immédiatement  précédé 
la  nôtre. 

Les  collections  du  muséum  de  Lyon  dont  les  séries  pa- 
léontotogiques  sont  fort  riches  démontrent,  par  leur  classe- 
ment même,  la  réalité  de  ces  faits  scientifiquement  observés. 


"f^ 


ogie 


J'espère  que  de  semblables  études  pourront  être  faites 
en  Portugal,  où  la  faune  quaternaire  paraît  offrir  un  très 
grand  intérêt.  Il  serait  bien  utile  de  rechercher  les  rappons 
qui  peuvent  exister  entre  elle  et  les  dépôts  quaternaires  du 
pays  et  de  tes  comparer  à  ceux  des  autres  contrées. 

Diaonasion 

M.  Evans:  Je  reconnais  Pimportance  des  études  que 
M.  Chantre  a  faites  sur  ce  sujet.  Je  dois,  cependant,  décla- 
rer qu'en  Angleterre  on  ne  rencontre  aucun  vestige  de  l'exis- 
tence de  l'homme  pendant  la  période  glaciaire;  donc,  cette 
période  y  doit  être  antérieure  à  celle  de  Solutré. 

M.  DE  Mortillet:  J'ai  rencontré  des  instruments  de  la 
forme  de  Saint-Acheul  dans  le  bassin  de  la  Tamise;  ils  n'y 
étaient  pas,  cependant,  accompagnés  de  la  faune  caracté- 
ristique. Les  glaciers  des  Alpes  sont  différents  de  ceux  de 
l'Angleterre,  car  ces  derniers  étaient  flottants.  Ailleurs  ils 
sont  tombés  des  montagnes  et  ils  sont  postérieurs.  Dans  le 
bassin  du  Rhône  il  y  a  un  grand  nombre  de  stations  qui  sont 
demeurées  hors  de  la  portée  des  glaciers.  Toutes  les  sta- 
tions rencontrées  dans  cette  région  sont  magdaléniennes. 


,ï  Google 


RÉSUMÉ  D'UNE  ÉTUDE 
SUR  QUELQUES  DÉPÔTS  SUPERFICIELS 

DO 

BASSIN  DU  DOURO 

PRÉSENCE  DE  L'Honni:.  VESTIGES  D'ACTION  GLACIAIRE 
M.  Fbed.  de  Vasconcellos  Peheira  Cabral 


M.  Vilanova:  Je  me  trouve  dans  le  plus  grand  em- 
barras motivé  par  l'excessive  modestie  de  mon  ami,  M.  Fre- 
derico  de  Vasconcellos,  lequel,  ayant  fait  de  très  intéres- 
santes observations  sur  les  dépôts  superficiels  du  bassin  du 
Douro,  n'ose  pas  communiquer  directement  à  la  docte  as- 
semblée le  résumé  de  ses  propres  observations.  J'ai  eu 
l'avantage  d'examiner  les  objets  que  M.  Vasconcellos  a 
recueillis,  et  qui  sont  réellement  d'un  grand  intérêt.  L'ayant 
poussé  à  les  faire  connaître,  il  a  bien  voulu  me  charger 
de  donner  une  idée  du  travail  qu'il  a  très  habilement  ré- 
digé. Je  n'ai  pas  eu  le  temps  d'étudier  ce  sujet;  fose  donc 
l'inviter  à  laisser  de  côté  la  méfiance  qu'il  a  de  ses  pro- 
pres forces,  et  à  lire  lui-même  son  intéressant  mémoire. 


"rs. 


i56 

M.  Fred.  de  Vasconcellos:  L'exploration  de  quelques 
dépôts  superficiels  d'une  partie  très  restreinte  du  bassin 
du  Douro,  quoique  fort  incomplète,  a  permis  cependant  de 
constater  quelques  faits,  qui  peuvent  concourir  à  élucider 
la  question  de  l'existence  de  l'homme  à  l'époque  paléolithi- 
que dans  la  partie  nord  du  pays,  où  l'on  a  déjà  trouvé  des 
preuves  si  décisives  de  sa  présence  dans  une  période,  qui, 
quoique  plus  récente,  n'en  est  pas  moins  comprise  dans  les 
temps  préhistoriques,  et  n'offre  pas  moins  d'intérêt  pour 
l'étude  des  modifications  progressives,  qu'a  subies  la  société 
humaine. 

Les  recherches  faites  dans  la  panie  du  bassin  du  Douro, 
qui  comprend  son  embouchure,  se  sont  limitées  a  une  sur- 
face de  8  kilomètres  de  longueur,  en  comptant  de  la  côte 
de  la  mer  vers  l'est,  avec  une  laideur  de  près  de  6  kilomè- 
tres. Elle  est  sillonnée  par  le  lit  du  fleuve,  qui  la  coupe 
à  peu  près  par  son  milieu  dans  la  direction  moyenne  de 
l'ouest. 

Le  fleuve,  dans  cette  partie  de  son  bassin,  coule  entre 
des  collines  granitiques  et  gneissiques  coupées  par  de  pe- 
tits vallons,  et  des  ravins,  qui  lui  amènent  leurs  eaux. 

Ces  collines  atteignent  les  altitudes  de  70  mètres,  tant 
au  nord  qu'au  sud  du  fleuve,  dans  deux  endroits,  où  elles 
sont  constituées  par  des  massifs  granitiques,  qui  présentent 
du  côté  du  fleuve  des  escarpements  abrupts,  et  réduisent 
son  lit  à  des  largeurs  de  120  à  200  mètres. 

A  l'est  et  à  l'ouest  des  deux  goi^es,  là  où  les  collines 
en  baissant  de  niveau  sont  aussi  coupées  par  les  vallons 
et  les  ravins,  le  lit  du  fleuve  s'élargit  un  peu  plus,  atteignant 
400  et  45o  mètres  et  enfin  près  de  700  avant  son  embou- 
chure, en  dedans  d'un  cordon  littoral,  formé  par  des  sables, 
qui  va  se  souder  aux  dernières  collines  de  la  rive  du  sud. 


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PII 


'h  lies  al  lu  '  '""*''  ''"  tramway  à  Erfilfta 


nord. 


;rh#U«  an  hauleurt  t  :  5O0. 

hlBoa.  "l.  ^'ti  ilnlifirrmr  ir  galtlt. 

lartsiinoïKi.  ^  Onriu. 

aroi  étune  rcofine^  au  sud  du  Castello  do  Queijo 
Altiludei 


Érhrilf  dfê  hautruis  1  :  600 


I.  SoWci  tfgUmtrit  ftr  If  ftr 


I.  Attuvwns  rimttt 


arénacéo-argileuses  au  sud  du  Castello  do  Queijo 


If  ^^i-«i  il  çaliii  arei  ct^uillrt. 


I,  3,  t  «1  i.  Sine  rfci  »iu*« 


Ulh.  C<l(ldl  et  h]Dl«  3(1 


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PholMypie  de  J.  LoÎFolJ  —  LiEbonne 

DKizpdby  Google 


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Frederico  de  Vasconcellos. 


Fragment  de  gneiss  poli  et  strié  in  siiu  par  l'action  glaciaire,  au  sud  dt 
Castello  do  Queijo  sur  la  côte  de  la  mer,  près  de  Porto. 


Pli.it5.  n  Pkl:i.  deK  D.  3aiil:s. 


1 


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■57 
et  vers  te  nord  rétrécit  Pembouchure  du  fleuve  en  la  rédui- 
sant à  moins  de  120  mètres  à  l'étiage. 

Entre  ces  deux  gorges  s'étendent,  dès  le  bord  du  fleuve, 
sur  la  rive  droite,  la  ville  de  Porto  et  sur  la  rive  gauche 
Villa  Nova  de  Gaia.  Les  collines,  qui  bordent  le  fleuve  au 
nord  et  au  sud^  s'élèvent  très  doucement,  et  à  courte  dis- 
tance vont  se  confondre  dans  des  plateaux,  où  disparais- 
sent par  conséquent  les  vallons  et  les  ravins  qui  les  sé- 
paraient. 

Ces  plateaux  constituent  le  caractère  le  plus  remarqua- 
ble et  prédominant  du  relief  du  terrain.  Ils  s'élèvent,  dans  la 
partie  est  des  deux  zones  de  nord  et  de  sud  à  des  altitudes 
de  80  à  100  mètres,  en  se  raccordant  avec  les  terrains  plus 
élevés  de  l'est;  tandis  que  vers  l'ouest  ils  baissent  très  len- 
tement, de  façon  à  se  maintenir  à  des  altitudes  de  60  mè- 
tres à  moins  de  i.5oo  mètres  de  la  côte.  Ils  descendent  après 
plus  rapidement  vers  le  niveau  de  la  mer,  en  présentant 
des  accidents,  qui  attirent  l'attention,  mais  dont,  au  moins 
pour  le  moment,  il  n'est  pas  essentiel  de  parler. 

Les  deux  plateaux  offrent  cependant  d'autres  condi- 
tions, qu'il  convient  de  faire  connaître  tout  de  suite. 

Cette  pente  vers  l'ouest,  qui  est  assez  prononcée  dans 
les  deux  plateaux,  n'est  pas  leur  plus  grande  pente.  Ils  bais- 
sent aussi  un  peu  vers  le  lit  du  fleuve,  c'est-à-dire,  celui  du 
nord  vers  le  sud,  et  celui  du  sud  vers  le  nord,  et  ceci  avec 
une  certaine  conformité,  de  façon  qu'à  des  distances  éga- 
les du  fleuve  ils  atteignent  sensiblement  les  mêmes  alti- 
tudes. 

Es  peuvent  donc  être  représentés  par  deux  plans  syn- 
cliniques,  qui  se  couperaient  par  une  ligne  droite  un  peu  in- 
clinée à  l'horizon  vers  l'ouest,  et  sensiblement  équidistantç 
des  deux  rives  du  fleuve. 


,Gooa 


'ife 


158 

La  symétrie  et  la  convergence  des  deux  plateaux,  par 
rapport  au  Ht  actuel  du  fleuve,  doivent  concourir  à  jeter 
quelque  lumière  sur  les  causes,  qui  ont  donné  au  sol  son 
relief  actuel. 

Les  surfaces  des  plateaux  montrent  quelques  inégalités, 
mais  si  peu  prononcées,  qu'elles  n'altèrent  pas  sensiblement 
le  faciès  caractéristique  des  deux  zones  de  nord,  et  de  sud. 

On  ne  connaît  pas  dans  cette  partie  du  bassin  du  Douro, 
ni  même  à  plusieurs  kilomètres  vers  l'est,  des  formations  sé- 
dimentaîres,  ou  de  transport,  plus  modernes  que  le  terrain 
houiller,  autres,  que  les  dépôts,  dits  superficiels,  qui  sont 
compris  dans  les  dernières  périodes  géologiques,  et  dont  nous 
allons  donner  une  esquisse. 

Les  plateaux  au  nord  et  au  sud  du  fleuve  sont  couron- 
nés, dans  de  très  grandes  étendues,  par  des  dépôts  de  trans- 
port, composés  de  cailloux  roulés  de  grosseurs  variables,  de 
quanzite,  de  grès  fins  siliceux,  de  schistes  durs  de  couleurs 
foncées,  ainsi  que  de  roches  ignées  plus  ou  moins  décom- 
posées, le  tout  mélangé  avec  des  sables,  et  d'autres  détri- 
tus à  l'état  terreux. 

Nous  nommerons  ces  dépôts  alluvions  anciennes, 
non  seulement  parce  qu'ils  sont  antérieurs  à  ceux  de  nature 
semblable,  que  les  fleuves  actuels  ont  formés,  mais  aussi 
pour  les  distinguer  d'autres  dépôts  analogues,  dont  nous  au- 
rons à  parler,  et  que  nous  tenons  comme  d'époque  plus 
moderne. 

Nous  ne  voulons  pas,  cependant,  par  cette  dénomination 
les  identifier  avec  des  dépôts  semblables,  et  semblablement 
distribués,  auxquels  on  a  donne  le  même  nom  dans  d'autres 
pays,  en  leur  attribuant  une  position  définie  dans  l'échelle 
géologique. 

L'épaisseur  de  ces  dépôts  ne  dépasse  pas  5  mètres, 


,ï  Google 


_i59 

et   se  réduit  même  parfois  à  quelques  décimètres  dans  les 
endroits,  où  l'on  a  pu  la  vérifier. 

Leur  plus  grande  épaisseur  ne  coïncide  pas  toujours 
avec  leur  plus  grande  altitude.  Ils  se  montrent  quelquefois 
accolés  à  de  légères  protubérances  du  sol  sous-jaceot,  très 
peu  apparentes,  et  à  surfaces  planes  ou  légèrement  bom- 
bées, qu'ils  couronnent  encore  d'une  mince  couche. 

La  couleur  prédominante  dans  ces  alluvions  est  le  jau- 
ne-rougeâtre  présentant  des  nuances  variées,  et  s'évanouis- 
sant  même  au  point  de  laisser  prévaloir  la  couleur  blanchâ- 
tre des  cailloux  de  quartzite,  qui  sont  ceux  qui  abondent 
le  plus  dans  ces  dépôts. 

La  distribution  des  matériaux  qui  les  constituent  est 
très  capricieuse.  Dans  quelques  endroits  on  remarque  des 
vestiges  de  stratification,  dénoncée  par  un  classement  plus 
ou  moins  prononcé  de  leurs  éléments,  ainsi  que  par  la  dis- 
position des  couleurs  en  bandes,  dans  la  plupart  des  cas 
sensiblement  horizontales. 

Ces  indices  sont  loin,  cependant,  de  se  montrer  partout. 
Quelquefois  à  une  petite  distance  de  l'endroit,  où  ils  se  ma- 
nifestent, les  alluvions  prennent  le  caractère  d'un  dépôt  tu- 
multueux, où  l'on  voit  les  matériaux  qui  les  composent, 
confondus  pêle-mêle,  les  gros  cailloux  étant  distribués  sans 
ordre  entre  le  menu  gravier  et  les  sables  plus  ou  moins 
terreux.  D'autres  fois  ces  sables  mélangés  de  menu  gra- 
vier et  d'un  peu  de  terre  jaune-rougeâtre,  qui  paraît  repré- 
senter les  détritus  les  plus  fins  de  ces  dépôts  fragmentai- 
res, constituent  presque  exclusivement  la  masse  alluviale 
dans  des  étendues  considérables,  sans  que,  cependant,  les  in- 
dices de  stratification  soient  apparents.  Ici  se  montre  un 
amas  très  aplati  de  gros  cailloux  roulés  de  1 5  et  20  cen- 
timètres de  diamètre  moyen,  sans  mélange  de  détritus  plus 


'«SL 


i6o 

fins,  et  couronnant  une  légère  protubérance  du  plateau.  Plus 
loin  les  alluvions  prennent  l'apparence  de  dépôts  stratifiés 
de  très  menu  gravier,  ou  de  couches  assez  régulières  de 
cailloux  roulés. 

Dans  tous  les  lieux,  où  l'on  a  pu  yoir  le  contact  de 
ces  alluvions  avec  le  terrain  sous-jacent,  on  a  vérifié,  qu'el- 
les reposent  immédiatement  sur  les  roches  cristallines,  gra- 
nités et  gneiss,  qui,  dans  certains  endroits,  ont  la  dureté  et 
Papparcnce  des  roches  saines,  ou  à  peine  décomposées,  tan- 
dis que  dans  d'autres  places  elles  se  montrent  à  l'état  ter- 
reux, déterminé  par  une  décomposition  très  avancée,  qui  a 
pénétré  à  une  profondeur  considérable. 

Au  contact  des  alluvions  avec  les  roches  cristallines 
on  voit  quelquefois  un  dépôt  très  limité,  composé  de  sables 
grossiers  non  roulés,  de  quelques  petits  fragments  anguleux 
de  quartz,  de  grains  de  feldspath,  et  de  lames  de  mica,  c'est- 
à-dire,  de  détritus,  qui  doivent  provenir  des  mêmes  roches, 
auxquelles  sont  venus  se  mélanger  parfois  quelques  rares 
cailloux  roulés. 

La  différence  d'état  des  roches  cristallines,  à  laquelle 
nous  avons  fait  allusion,  ne  s'annonce  pas  à  leur  surface 
par  des  inégalités  qu'on  puisse  attribuer  à  la  moindre  ré- 
sistance aux  actions  extérieures,  qu'offraient  les  roches,  qui 
sont  plus  décomposées.  Ainsi,  quelquefois  la  roche  cristalline 
presque  saine  se  montre  côté  à  côté  de  la  roche  très  décom- 
posée, formant  toutes  les  deux  une  surface  continue  plane, 
ou  légèrement  arrondie,  ce  qui  paraît  prouver,  que  les  cau- 
ses, qui  ont  agi  sur  les  roches  cristallines  de  façon  à  leur  don- 
ner leur  relief  actuel,  ont  entamé  uniformément  les  roches 
dures  et  celles  qui  étaient  moins  résistantes  à  cause  du  de- 
gré avancé  de  leur  décomposition.  On  voit  un  exemple  frap- 
paiit  de  ce  phénomène  dans  l'extrémité  ouest  du  plateau  du 


,ï  Google 


i6i 

sud,  près  du  hameau  de  Lavadôres,  où  le  massif  de  gra- 
nité, que  supporte  des  lambeaux  des  alluvions  anciennes, 
présente  une  surface  sensiblement  plane,  et  presque  hori- 
zontale, quoiqu'une  partie  de  la  masse  ne  montre  pas  de 
signes  apréciables  de  décomposition,  tandis  qu'une  autre 
partie  laisse  voir  des  plaques  concentriques,  superposées, 
dues  à  la  décomposition  sphéroïdale,  qui  caractérise  cette 
roche. 

On  a  essayé  de  donner  une  idée  de  cet  état  de  choses 
dans  la  coupe  fig.  4  de  la  planche  I.  Ces  cas  particuliers 
paraissent  être  le  reflet  de  la  forme,  en  plateaux,  des  deux 
zones. 

Quoique  les  roches  cristallines  montrent  presque  par- 
tout une  surface  plate,  ou  légèrement  bombée,  elles  ont  ce- 
pendant subi  dans  quelques  endroits  des  érosions,  qui  ont 
produit  à  leur  surface  des  dépressions,  des  cavités,  et  des 
sillons  assez  profonds  et  nettement  définis.  Dans  le  profil 
fig.  3  de  ta  planche  I  on  a  reproduit  deux  de  ces  cas  d'éro- 
sion, antérieure,  ou  contemporaine  de  la  formation  des  al- 
luvions anciennes,  et  qu'on  peut  observer  dans  une  tran- 
chée de  la  route  de  Almeara  à  Lavadôres  dans  la  zone  du 
sud.  La  roche  cristalline  est  un  gneiss  dans  un  état  de  décom- 
position très  avancée.  Le  trou  de  gauche  a  été  rempli,  à  ce 
qu'il  paraît,  d'un  seul  jet,  et  d'une  façon  tumultueuse,  par  ces 
alluvions,  sans  qu'elles  montrent  le  moindre  indice  de  clas- 
sement par  l'action  de  l'eau.  Dans  la  cavité  de  droite,  qui 
paraît  plutôt  un  sillon  profond  et  assez  large,  ouvert  dans 
le  gneiss,  les  alluvions,  qui  le  remplissent,  ont  été  déposées 
par  couches  successives  assez  bien  accusées,  et  montrant 
des  vestiges  de  classement  par  des  eaux  courantes.  Ce  pro- 
fil a  une  direction  est-ouest,  et  par  conséquent  le  sillon  court 
du  nord  au  sud,  c'est-à-dire,  dans  une  direction  sensible- 


Al 


ment  perpendiculaire  à  la  moyenne  du  bassin  du  Douro, 
circonstance,  qui  n'est  pas  à  dédaigner. 

Il  résulte  de  tout  cela,  que,  si  quelquefois  ces  allu- 
vions  concourent  à  exagérer  les  petites  différences  de  niveau, 
qu'on  remarque  dans  les  deux  plateaux,  d'un  autre  côté  el- 
les ont  rempli  quelques  dépressions  de  la  surface  des  roches 
cristallines,  de  façon  que  la  forme  actuelle  des  plateaux  est 
très  semblable  à  celle  de  cette  surface,  qui  ne  se  trouve,  que 
partiellement  couverte  par  ces  alluvions. 

On  observe  encore  sur  ces  plateaux  un  dépôt  d'appa- 
rence argileuse,  présentant  une  grande  conformité  de  carac- 
tères, et  s'étendant  sur  d'assez  grandes  surfaces. 

On  le  voit  dans  deux  conditions  diverses,  ou  couvrant 
des  alluvions  anciennes,  comme  au  sud  du  hameau  de 
Furada  dans  le  plateau  du  sud,  à  une  altitude  de  près  de  70 
mètres;  ou  reposant  immédiatement  sur  les  roches  cristal- 
lines à  une  altitude  moyenne  de  65  mètres,  comme  dans  la 
rue  de  Boa  Vista,  l'une  des  routes  de  la  ville  de  Porto  au 
village  de  Foz,  situé  à  l'embouchure  du  fleuve  sur  sa  rive 
droite. 

Ce  dépôt  consiste  essentiellement  en  une  terre  plus  ou 
moins  sableuse,  de  couleur  jaune-rougcâtre,  ou  plutôt  miel- 
lée, qui  est  la  prédominante,  sans  exclure  des  nuances  jau- 
nes plus  claires,  qui  se  montrent  rarement. 

Par  concision  nous  nommerons  ce  dépôt  argiles  miel- 
lées, leur  couleur  étant  un  caractère  peu  variable,  et  qui  les 
dénonce  même  à  distance. 

Dans  les  endroits  où  l'on  a  pu  vérifier  leur  épaisseur, 
elle  varie  entre  o",3o  et  2  mètres. 

Ces  terres  contiennent  presque  toujours  du  sable  plus 
ou  moins  grossier,  quelques  petits  cailloux  sous-angulaires 
de  quartz,  dont  le  volume  ne  dépasse  pas  généralement 


,ï  Google 


i63 

celui  d'une  noix;  ainsi  que  des  cailloux  roulés  de  diamètres 
moyens  de  o'',03  à  o",o8;  et  enfin  de  très  rares  fragments 
angulaires,  et  sous- angulaires  de  granité,  dont  les  plus  gran- 
des dimensions  varient  entre  o",o4  et  o",i2.  Les  cailloux 
roulés,  ainsi  que  les  fragments  angulaires  de  roche  se  mon- 
trent irrégulièrement  éparpillés  dans  la  masse  d'argile,  pres- 
que toujours  isolés  et  dans  des  positions  comme  instables, 
qui  paraissent  incompatibles  avec  leur  transport  par  l'eau. 
On  voit  cependant,  quoique  très  rarement,  une  petite  traî- 
née de  quelques  décimètres  de  longueur,  de  cailloux  roulés 
de  o^ioa  à  o",o5  de  diamètres  moyens,  formant  comme 
une  couche  sensiblement  parallèle  à  l'horizon,  et  d'une  épais- 
seur, qui  généralement  ne  dépasse  pas  le  diamètre  des  plus 
gros  cailloux: 

Dans  les  endroits,  où  l'on  a  pu  voir  le  contact  des  ar- 
giles miellées  avec  les  roches  cristallines,  comme  à  rue  da 
Boa  Vista,  on  vérifie,  que  parfois  il  s'interpose  entre  elles  et 
le  dépôt  argileux  une  mince  couche,  plus  ou  moins  conti- 
nue, composée  ou  seulement  de  petits  cailloux  roulés,  ou 
de  fragments  angulaires  de  quartz,  et  même  de  granité,  mé- 
langés de  sable  grossier  non  roulé,  avec  quelques  grains  de 
feldspath  et  des  lamelles  de  mica,  ou  enfin  d'un  mélange  des 
cailloux  roulés  avec  les  fragments  angulaires  des  autres  ro- 
ches et  avec  les  sables  micacés. 

Cette  couche,  plus  ou  moins  définie,  selon  l'abondance 
des  fragments  de  roches,  angulaires,  ou  roulés,  qui  parfois 
se  sont  accumulés  jusqu'à  l'épaisseur  de  o'",20,  paraîtrait  pas- 
ser dans  quelques  endroits  aux  argiles  miellées,  qui  dans 
ce  cas  sont  surchargées  de  sable  grossier  dans  leur  partie 
inférieure,  si  toutefois  ces  argles  n'ont  pas  pénétré  par  per- 
colation  dans  le  dépôt  inférieur. 

D'autres  fois  les  argiles  miellées  reposent  immédia* 


"Ct'^S'V 


_i64 

tement  sur  la  surface  lisse  des  roches  cristallines,  sans  qu'il 
sinterpose  aucun  vestige  de  cette  couche  de  sables  et  de 
cailloux. 

Ces  argiles  ne  se  montrent  pas  stratifiées  en  couches 
distinctes.  Dans  quelques  endroits,  cependant,  un  morceau 
détaché  des  argiles,  et  desséché  par  la  seule  action  de  l'air, 
manifeste  de  la  tendance  à  se  diviser  en  feuillets  de  i  à  2 
millimètres  d'épaisseur. 

Quoique  les  argiles  miellées  se  trouvent  à  des  altitu- 
des, qui  permettent  de  les  considérer,  comme  un  dépôt  des 
plateaux,  il  faut  cependant  mettre  en  relief  des  circonstances, 
qui  peuvent  concourir  à  élucider  la  question  de  leur  ori^ne 
et  mode  de  formation. 

Dans  la  zone  de  sud,  on  voit,  sans  doute,  ces  argiles  su- 
perposées à  un  manteau  des  alluvions  anciennes,  à  une 
altitude  de  près  de  70  mètres.  Mais  celles-ci  atteignent  une 
plus  grande  altitude  vers  le  sud,  sans  qu'elles  soient  cou- 
vertes par  les  argiles,  qui  se  montrent  là  où  s'éteint  dans 
le  plateau  un  ravin  profond. 

Dans  le  plateau  du  nord  la  superposition  franche  des 
argiles  miellées  aux  manteaux  d'alluvions  ancien- 
ne s  n'a  pu  être  observée  nulle  part,  à  moins  qu'on  n'admette 
quelque  liaison  de  contemporanéité  entre  ces  alluvions  et  la 
couche  de  cailloux,  qui  se  montre  parfois  sous-jacente  aux 
argiles.  Mais  on  n'a  pu  voir  nulle  part,  ni  au  nord  ni  au 
sud  du  fleuve,  les  argilesmiellées  couvrant  les  surfaces 
culminantes  des  alluvions  anciennes.  On  n'a  pas  non 
plus  trouvé  d'autres  dépôts  couvrant  ces  argiles,  qui  passent 
graduellement,  vers  leur  partie  supérieure,  à  la  terre  végétale 
par  le  mélange  de  matières  organiques  provenant  de  raci- 
nes. 

Malgré  des  recherches  suivies,  on  n'a  pas  pu  découvrir 


,ï  Google 


i65 

jusqu'à  présent  des  restes  organiques,  enfouis  lors  de  la  for- 
mation de  ces  dépôts. 

Après  avoir  donné  une  idée  générale  des  deux  dépôts, 
qui  se  font  remarquer  à  la  surface  des  plateaux,  il  faut  faire 
connaître  plusieurs  faits  observés  dans  les  alluvions  an- 
ci  e  n  n  e  s,  et  qui  peuvent  jeter  quelque  lumière  sur  leur  mode 
de  formation,  ainsi  que  sur  leurs  rapports  avec  l'existence  de 
l'homme  dans  la  partie  nord  de  la  péninsule. 

Dans  le  plateau  du  nord,  à  l'ouest  de  la  ville  de  Porto, 
dans  l'endroit  nommé  Agromonte,  où  passe  la  rue  de  Boa 
Vista,  et  où  l'on  a  ménagé  une  place,  nommée  Rotunda, 
se  trouve  à  l'altitude  moyenne  de  85  mètres  un  manteau 
très  étendu  des  slluvions  anciennes,  qui  a  été  entamé 
en  plusieurs  points,  et  qui  offre  presque  toutes  les  variétés 
de  constitution,  que  nous  avons  attribuées  à  ces  dépôts.  Il  a  ' 
été  coupé  par  la  rue  de  Boa  Vista,  et  par  la  Rotunda,  de 
manière  à  présenter  deux  tranchées,  perpendiculaires  entre 
elles,  qui  sont  réprésentées  dans  les  profils  _/î^,  /  et  2  de  la 
planche  I,  ayant  le  point  commun  D. 

Dans  cet  endroit  on  peut  voir  le  contact  dps  alluvions 
avec  le  granité  très  décomposé,  sur  lequel  elles  reposent, 
en  s'adossant  à  une  légère  protubérance  de  cette  roche, 
qu'elles  recouvrent  encore  d'un  mince  manteau.  Leur  plus 
grande  épaisseur  ne  dépassait  pas  dans  ce  lieu  4",5o,  et  se 
réduit  à  quelques  décimètres  vers  l'ouest. 

Les  indices  de  stratification  n'y  sont  pas  très  pro- 
noncés, et  on  y  voit  par  places  ce  mélange  sans  ordre, 
comme  tumulmeux,  des  matériaux  qui  composent  les  allu- 
vions. 

On  remarque  tout  de  suite  dans  les  deux  tranchées  de 
gros  blocs,  ensevelis  dans  la  masse  alluviale,  et  entourés- 
de  toutes  parts  par  celle-ci,  de  façon,  qu'on  ne  peut  pas 


•f*L 


i66 

mettre  en  doute,  qu'ils  ont  été  enfouis,  quand  ces  alluvions 
se  déposaient. 

Outre  les  trois  blocs  coupés  dans  les  tranchées,  et  qui 
sont  figurés  par  des  traits  pleins,  les  alluvions  contiennent 
encore,  au  moins,  quatre  autres  gros  blocs  de  granité,  qu'on 
voit  enfoncés  à  leur  surface,  et  qui  ont  été  réprésentés  dans 
le  profil  ^g".  /,  par  des  traits  pointillés. 

Le  dépôt  est  assez  cohérent,  pour  avoir  permis  de  cou- 
per presque  verticalement  les  tranchées,  ainsi  que  les  blocs 
granitiques  qu'elles  ont  mis  à  jour. 

Les  deux  blocs  de  la  tranchée  fig.  i  sont  dans  un  tel 
état  de  décomposition,  qu'ils  ne  doivent  pas  avoir  exigé 
remploi  de  très  grandes  Ibrces  pour  être  coupés.  Celui  de 
la  tranchée  fig,  2,  étant  bien  moins  décomposé,  demandait 
des  efforts  plus  énergiques  pour  être  coupé  ras  avec  la  tran- 
chée, et  il  présente  une  seule  large  surface  de  cassure,  qui 
probablement  a  été  produite  par  des  coups  répétés  sur  un 
seul  point,  quoiqu'il  soit  couvert  par  une  bien  moindre  épais- 
seur des  alluvions,  ce  qui  prouve,  qu'il  est  très  fortement 
retenu  par  celles-ci. 

Le  granité  d'un  des  blocs  ensevelis  dans  ce  dépôt,  et 
duquel  on  a  pu  détacher  des  échantillons,  est  assez  sem- 
blable au  granité  sous-jacent.  Deux  autres  de  ces  blocs  sont, 
il  est  vrai,  de  granité  à  deux  micas,  comme  celui  ci;  mais 
ils  ont  un  grain  plus  fin,  et,  à  ce  qui  paraît,  ils  sont  plus 
riches  en  quartz.  Leur  apparence  est  du  reste  très  différente 
de  celle  du  premier  bloc,  mentionné  plus  haut.  On  n'a  pas 
pu  trouver  du  granité  comparable  à  celui  de  ces  deux  blocs, 
qu'aux  distances  de  5oo  et  800  mètres,  et  à  un  niveau  plus 
bas. 

Dans  les  alentours  on  ne  voit  pas  de  saillancc  graniti- 
que, de  laquelle  ces  blocs  eussent  pu  glisser  ou  rouler  vers 


.ïGoogle 


j67 

le  milieu  de  ces  alluvions,  qui  ont  laissé  des  témoins  dans 
presque  toute  la  surface  de  cette  partie  du  plateau;  de  ma- 
nière, qu^il  paraît  hors  de  doute,  que  quand  ces  dépôts  com- 
mencèrent à  s'accumuler,  le  sol  avait  un  relief  bien  peu  dif- 
férent de  celui  qu'il  a  aujourd'hui. 

Tous  ces  faits  et  toutes  ces  considérations  paraissent 
concourir  à  prouver,  que  ces  blocs  ont  été  ou  traînés,  ou 
transportés  d'une  plus  ou  moins  grande  distance  jusqu'au 
dépôt  alluvial,  quand  il  était  en  voie  de  formation. 

Le  volume  de  ces  blocs  contraste  d'une  manière  frap- 
pante avec  celui  des  cailloux  qui  les  entourent.  L'un  d'eux 
a  2° ,60  de  longueur,  i  mètre  de  largeur  moyenne,  et  plus 
de  i",io  d'épaisseur,  et  par  conséquent  un  volume  de  pres- 
que 3  mètres  cubes,  et  un-  poids  supérieur  à  7  tonnes.  Un 
autre,  de  forme  arrondie,  est  sensiblement  égal  à  une  sphère 
de  o'°,36  de  rayon,  avait  un  volume  de  o'",i95,  et  le  poids 
probable  de  plus  de  5oo  kilogrammes. 

Les  autres  sont,  ou  un  peu  plus  petits,  ou  un  peu  plus 
grands,  que  celui-ci. 

Ils  ont  les  arêtes  plus  ou  moins  arrondies,  quelques- 
unes  des  faces  convexes,  d'autres  presque  plates,  d'autres 
enfin  légèrement  concaves. 

La  plupart,  au  moins,  de  ces  surfaces  sont  lisses,  de 
façon  qu'on  ne  peut  s'empêcher  d'admettre  qu'elles  ont  été 
usées  par  frottement.  Les  trois  minéraux,  qui  constituent 
la  roche,  ont  été  entamés  également,  malgré  la  grande  diffé- 
rence de  leur  dureté,  de  manière  qu'ils  se  montrent  nette- 
ment coupés  à  la  surface  des  blocs.  Quand  celle-ci  a  été 
par  hasard  exposée  pendant  quelque  temps  à  l'action  atmos- 
phérique, elle  est  comme  tachetée  de  petites  cavités,  lais- 
sées sans  doute,  ou  par  la  complète  desaggrégation  du  feld- 
spath, ou  par  l'enlèvement  du  mica  ou  de  grains  de  quartz. 


,ïGoO' 


Mais  dans  ce  cas  même  les  minéraux,  qui  sont  restés  à  la 
surface  des  blocs,  se  montrent  usés  de  façon,  qu'ils  ne  ré- 
vèlent la  moindre  aspérité  au  toucher. 

On  ne  peut  pas  dire,  que  ces  blocs  sont  polis.  Les 
grains  de  quartz,  quoique  coupés  net,  malgré  leur  dureté, 
n'ont  pas  leur  surface  parfaitement  lisse,  ce  qu'on  vérifie  au 
moyen  de  la  loupe.  On  voit,  cependant,  à  la  surface  des  blocs 
des  vestiges  très  rares  et  très  circonscrits  de  polissage  avec 
miroitement.  Dirons-nous,  qu'on  y  voit  aussi  des  vestiges 
de  stries? 

Nous  n'csons  pas  l'affirmer,  quoique  nous  soyons  bien 
disposés  à  le  croire. 

On  voit  encore  adhérentes  à  la  surface  des  blocs  quel- 
ques petites  masses  d'un  jaune-rougeâtre  d'aspect  terreux, 
contenant  des  grains  de  sable,  et  tout-à-fait  semblables  au 
ciment  ferrugineux,  qui  agglomère  quelquefois  les  alluvions. 
En  enlevant  ces  masses,  on  vérifie,  que  la  surface  des  blocs, 
cachée  par  elles,  est  lisse,  comme  celle  qui  était  à  décou- 
vert. Du  reste,  ces  blocs  ont  sur  de  très  grandes  étendues 
de  leur  surface  cette  couleur  jaune-rougeâtre,  qu'on  voit  si 
fréquemment  dans  ces  alluvions. 

Il  paraît  hors  de  doute,  que  les  frottements,  qui  ont  usé 
les  surfaces  de  ces  blocs,  ont  eu  lieu  avant  que  ceux-ci  fus- 
sent restés  immobilisés  au  sein  des  alluvionsanciennes. 

On  peut  prévoir,  que  tous  les  faits  que  l'on  a  pu  vé- 
rifier par  l'exploration  de  ces  dépôts,  auront  concouru  à  faire 
soupçonner,  que  l'action  glaciaire  a  eu  une  influence  plus  ou 
moins  immédiate  sur  leur  formation. 

D  faut  nous  transporter  à  une  distance  de  plus  de  3  ki- 
lomètres vers  l'ouest  pour  trouver  des  alluvions  ancien- 
nes, qui  aient  permis  de  constater  d'autres  faits  dignes  de 
mention  spéciale. 


,ï  Google 


1% 

En  suivant  le  tramway,  qui  conduit  de  Porto  au  village 
de  Foz,  après  avoir  passé  le  petit  vallon,  baigné  par  le  ruis- 
seau de  Lordelio,  on  voit  que  le  terrain  s'élève  graduelle- 
ment jusqu'à  une  plaine  de  l'altitude  moyenne  de  60  mè- 
tres, et  qui  est  très  bien  définie  à  l'ouest  du  hameau  de 
Fonte  da  Moura,  et  se  trouve  couronnée  par  un  manteau 
des  alluvions  anciennes  bien  caractérisées  par  presque 
tous  les  accidents  de  constitution  et  de  couleur,  que  nous 
avons  déjà  fait  connaître,  quoiqu'on  n'y  ait  pas  encore  vu  en 
place  des  représentants  de  ces  gros  blocs,  qui  sont  contenus 
dans  les  alluvions  anciennes  de  Boa  Vista. 

On  a  trouvé,  cependant,  à  ia  surface  de  cette  plaine 
quelques  blocs  assez  rares,  de  granité  et  de  gneiss,  à  formes 
plus  ou  moins  arrondies,  de  dismètres  moyens  de  o°,3o  à 
o",4o,  reposant  sur  du  gravier,  ou  dans  le  voisinage  de  ce- 
lui-ci, et  qui  probablement  ont  fait  partie  de  ces  alluvions. 
Cette  plaine,  dont  le  centre  est  à  peine  à  i.5oo  mètres 
de  distance  de  la  côte,  représente  la  partie  ouest  du  plateau 
du  nord,  qui,  comme  celui  de  sud,  s'abaisse  graduellement 
vers  l'ouest;  et  elle  est  coupée  par  une  légère  dépression  qui 
s'ouvre  vers  ce  côté,  et  où  prend  sa  source  le  petit  ruisseau 
d'Ervilha.  Pour  faciliter  la  désignation  des  localités,  nous 
nommerons  cette  plaine — plateau  dePaços — ,qui  est  le  nom 
d'un  hameau  situé  à  sa  surface,  et  nous  nommerons — val- 
lon d'Ervilha  —  la  dépression  qui  coupe  cette  plaine,  et  qui 
est  en  partie  remplie  par  une  série  de  dépôts,  dont  nous 
parlerons  plus  loin. 

Les  alluvions  anciennes  se  voient  dans  ce  plateau  au 
nord  du  vallon,  près  du  hameau  de  Paços  dans  une  sabliè- 
re, et  au  sud  dans  les  fossés  de  la  redoute  Saldanha,  forti- 
fication passagère,  élevée  en  i832  lors  du  mémorable  siège  de 
Porto.  En  parcourant  ces  fossés,  qui  ont  été  coupés  dans 


j'h.CiOOgle 


T 


'70 
les  alluvions  jusqu'à  une  profondeur  de  plus  de  3  mètres, 
nous  avons  recueilli  parmi  des  cailloux  roulés,  éparpillés 
dans  leur  fond  et  sur  leurs  talus,  six  fragments  de  quartzite 
et  d'autres  roches,  qui  avaient  des  formes  angulaires,  et 
sous-angulaires,  contrastant  ainsi  beaucoup  avec  les  cailloux 
roulés,  qui  abondent  dans  ces  alluvions. 

Outre  ces  six  exemplwres  nous  avons  pu  trouver  une 
autre  quartzîte,  aussi  à  formes  angulaires,  enclavée  dans 
ces  alluvions  et  si  fortement  retenue  par  elles,  qu'il  a  fallu 
employer  le  ciseau  et  le  marteau  pour  les  désagréger.  En 
la  comparant  avec  les  autres  exemplaires,  trouvés  à  la  sur- 
face des  alluvions,  on  remarque  tout  de  suite  une  telle  res- 
semblance de  formes  entre  celle-ci  et  deux  autres  quartzi- 
tes,  que  l'idée  d'intention  dans  la  production  de  ces  for- 
mes vient  tout  naturellement  à  l'esprit;  et  une  comparaison 
plus  minucieuse  des  trois  quartzites  tend  à  confirmer  cette 
idée. 

Deux  de  ces  quartzites  sont  représentées  à  peu  près  de 
grandeur  naturelle  dans  la  planche  II;  \es^g.  /  et  /  a  étant 
la  quartzite  arrachée  de  la  masse  des  alluvions,  et  les  _pg. 
2  et  2  a  étant  l'une  des  quartzites  trouvées  à  leur  surface. 
Quoique  les  figures  permettent  de  reconnaître  quelques-unes, 
de  ces  ressemblances,  il  y  en  a  d'autres  qui  ne  sont  pas 
si  apparentes,  et  qu'on  ne  peut  vérifier,  que  sur  les  exem- 
plaires. 

Nous  ne  parlerons,  cependant,  que  d'une  similitude  de 
forme,  qui  paraît  avoir  une  certaine  valeur. 

On  voit,  sur  les  deux  surfaces  représentées  des  deux 
quartzites,  une  arête  saillante,  qui  se  tient  à  peu  près  au  mi- 
lieu de  la  face,  et  qui  s'efface  graduellement  vers  la  pointe. 
Sur  la  face  opposée,  s'il  y  a  une  arête  saillante,  elle  n'occupe 
pas  le  milieu  de  cette  face,  qui  paraît  avoir  été  produite  dans 


,ï  Google 


'7' 
le  but  principal  d'amincir  la  pierre.  On  pourrait  donc  attri- 
buer les  arêtes  médianes  produites  sur  les  faces  réprésen- 
tées dans  les  deux  figures  à  l'intention  de  renforcer  les  poin- 
tes des  deux  quanzites. 

La  quartzite^^.  2,  n'ayant  pas  été  trouvée  en  place  dans 
les  alluvions,  perdrait  par  le  fait  beaucoup  de  sa  valeur, 
comme  preuve,  si,  outre  sa  similitude  de  forme  avec  la 
quartzite  ^g*.  /,  elle  ne  présentait  d'autres  caractères,  qui 
paraissent  indiquer,  qu'elle  a  été  aussi  contenue  dans  ces 
alluvions.  Ces  deux  quartzites,  non  seulement  montrent  par 
places  cette  couleur  jaune-rougeâtre  de  la  pâte,  qui  parfois 
soude  les  alluvions,  mais  outre  cela  conservent  à  leur  sur- 
face quelques  restes  de  cette  pâte  argilo-sableuse  avec  sa 
couleur  caractéristique,  et  s)  adhérents,  qu'ils  résistent  au 
frottement  d'une  brosse  mouillée.  La  troisième  quartzite, 
ressemblant  à  ces  deux-ci  par  sa  forme  et  son  volume,  quoî- 
qu'ayant  été  trouvée  détachée  des  alluvions,  tout  comme  la 
quartzite  fig.  2,  conserve  encore,  non  seulement  à  sa  sur- 
face la  couleur  jaune-rougeâtre,  mais  aussi  dans  une  petite 
cavité  un  reste  de  la  pâte  alluviale. 

Ces  quartzites  ont-elles  des  formes  intentionnelles? 
Sont-elles  semblables  à  des  types  connus  d'outils  de  pierre 
de  l'âge  paléolithique? 

Quand  même  on  ne  voudrait  pas  admettre,  comme 
preuve  du  travail  de  l'homme  la  succession  des  fractures, 
qu'une  pierre  aurait  éprouvées,  parce  qu'elles  pouvaient  avoir 
été  déterminées  par  des  chocs  dus  à  des  causes  naturelles; 
il  y  a  d'autres  caractères,  qui  mettent  en  évidence  cette  in- 
tention, comme  par  exemple  la  formation  d'une  pointe  de 
forme  à  satisfaire  à  la  condition  de  résistance,  essentielle 
dans  un  instrument  percuteur.  On  ne  peut  en  effet  conce- 
voir, comment  la  partie  la  plus  fragile  d'une  pierre,  son  ex- 


'rv 


izL 

tremité  la  plus  amincie,  qui  par  des  fractures  successives  de- 
venait de  plus  en  plus  saillante  et  "pointue,  et  par  conséquent 
plus  exposée,  eut  échappé  à  une  série  de  chocs  accidentels, 
les  derniers  ayant  eu  lieu  justement  près  de  la  pointe. 

Or  les  deux  quarlzites,  Jig.  i  et  s,  pi.  Il,  ont  une  ex- 
trémité très  saillante,  en  forme  de  pointe,  mais  satisfaisant 
à  certaines  conditions  de  résistance,  et  produite  par  une 
série  de  chocs,  dont  les  derniers  ont  eu  lieu  tout  près  de 
cette  pointe,  qui  n'aurait  pas  pu  y  résister,  si  les  coups 
n'avaient  pas  été  appliqués  avec  de  grandes  précautions. 
On  ne  peut  pas  donc  s'empêcher  de  reconnaître  dans  la 
forme  de  ces  quartzites  le  résultat  d'un  travail  réfiéchi, 
qui  avait  un  but  manifeste,  et  exigeait  même  beaucoup  d'a- 
dresse. 

Du  reste,  mon  digne  Chef,  M.  Carlos  Ribeiro,  qui  a 
examiné  ces  quartzites,  ainsi  que  d'autres,  que  nous  avons 
recueillies,  est  très  incliné  à  les  considérer  comme  intention- 
nellement taillées. 

Une  autre  des  quartzites,  trouvées  détachées  â  la  sur- 
face des  alluvions  de  la  redoute  Saldanha,  est  représentée 
de  grandeur  naturelle  par  \t%fig.  i  et  J  a  de  la  planche  II, 
ce  qui  dispense  de  la  décrire  minucieusement.  Quelques-unes 
de  ses  arêtes  se  trouvent  très-arrondies  par  frottement,  tan- 
dis que  d'autres,  quoique  légèrement  émoussées,  contrastent 
beaucoup  avec  les  premières,  étant  bien  plus  vives.  Celles- 
ci  limitent  des  surfaces  produites  par  des  cassures,  qui  pa- 
raissent intentionnelles,  et  qui  auraient  donné  à  la  quartzite 
la  forme  d'un  coin,  ou  d'une  hache  avec  un  petit  tranchant 
très  obtus.  Non  seulement  elle  montre  par  places  la  couleur 
jaune-rougeâtre  des  autres  quartzites,  plus  foncée  à  cause  de 
la  couleur  propre  de  la  roche,  mais  elle  conserve  dans  des 
dépressions  considérables  de  sa  surface  une  quantité  nota- 


,ï  Google 


2Jl 

ble  de  la  pâte  argilo-sableuse  des  alluvions,  avec  sa  cou- 
leur caractéristique. 

On  voit  sur  cette  quartzite  des  vestiges  de  frottements 
énergiques,  qui  ont  produit  sur  quelques  points  des  sillons 
et  des  stries  parallèles,  accompagnées,  au  moins  dans 
un  cas,  du  poli  miroitant,  que  l'on  attribue  à  l'action  gla- 
cimre.  Ces  vestiges  se  voient  avec  plus  ou  moins  de  net- 
teté, non  seulement  sur  les  faces,  qu'on  peut  dire  primor- 
diales, mais  aussi  sur  celtes  qui  paraîtraient  produites  avec 
intention. 

Si  celles-ci  sont  effectivement  le  résultat  d'un  travail 
réfléchi,  et  si  elles  étaient  striées  par  l'action  glaciaire,  il 
faudrait  admettre,  que  la  quartzite,  après  avoir  été  taillée 
par  l'homme,  avait  été  abandonnée,  ou  perdue  par  lui,  et 
ensuite  transportée  par  les  glaces  dans  des  conditions,  qui 
auraient  donné  lieu  aux  frottements  énergiques,  qu'elle  a 
subis;  etqu'enfin  elle  est  restée  enfouie  dans  les  alluvions 
anciennes,  qui  pourraient  être,  elles-mêmes,  un  produit  de 
transport  glaciaire. 

La  partie  du  plateau  de  Paços,  qui  est  au  nord  du  val- 
lon d'Ervilha,  et  qui,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  s'y  mon- 
tre couronnée  par  les  alluvions  anciennes,  se  prolonge 
vers  l'ouest,  en  baissant  très  lentement  de  niveau,  et  en 
montrant  par  ci  par  là  des  dépôts  peu  épais  de  gravier  plus 
ou  moins  gros,  mélangé  de  sables,  avec  l'apparence  des  al- 
luvions anciennes,  et  qu'on  doit  considérer,  ou  comme 
les  représentants,  ou  comme  des  dérivations  immédiates  de 
celles-ci. 

En  sortant  du  hameau  de  Nevogilde,  contigu  à  celui  de 
Paços,  on  rencontre  à  l'ouest,  encore  sur  le  plateau,  dans  un 
chemin,  qui  conduit  à  la  mer,  une  strate  de  cailloux  roulés  . 
de  volumes  variables, ayant  des  diamètres  moyens  de  2  à  lo 


pgle 


'74 
cenlimÈtres,  et  mélangés  avec  des  sables.  Ce  dépôt  a  été 
évidemment  lavé  par  les  eaux  de  pluie,  qui  affluent  à  ce 
chemin. 

Entre  les  cailloux  nous  en  avons  trouvé  un  de  roche  ou 
de  minéral  siliceux,  très  dur,  à  texture  compacte,  de  cou- 
leur jaune-orange,  passant  au  jaune-brunâtre,  et  d'une  ap- 
parence particulière,  paraissant  plutôt  un  silex,  qu'un  jaspe. 
Il  a  toutes  les  arêtes  très  arrondies  par  frottement.  Ses  dia- 
mètres sont  compris  entre  38  et  5 1  millimètres.  Toutes  ses 
faces,  une  seule  exceptée,  sont  plus  ou  moins  convexes.  Celle 
qui  fait  exception,  est  légèrement  concave.  Mais  toutes  se 
raccordent  graduellement  avec  les  surfaces  arrondies,  qui 
ont  remplacé  les  arêtes. 

Toute  la  surface  du  caillou  est  luisante,  et  en  même 
temps  couverte  de  petits  sillons  et  de  stries,  qui  constituent 
divers  systèmes,  caractérisiis  par  le  parallélisme  des  traits. 
Ces  groupes  distincts  se  superposent  dans  quelques  cas,  en 
se  croisant,  de  façon  qu'on  peut  parfois  reconnaître  ceux 
qui  ont  été  produits  les  derniers,  parce  que  dans  ceux-ci  les 
stries  sont  plus  nombreuses  et  plus  fines. 

Ce  caillou  paraît  donc  présenter  tous  les  caractères,  qui 
se  trouvent  sur  ceux,  qui  ont  été  polis  et  striés  par  les  frot- 
tements produits  par  des  masses  de  glace  en  mouvement, 
dans  des  conditions  spéciales. 

Si  cependant  ces  vestiges  sont  dus  à  des  frottements 
glaciaires,  il  faudrait  reconnaître  que  la  forme  actuelle  du 
caillou  de  Nevogilde  a  été  produite  par  ces  mêmes  frotte- 
ments, qui  ont  couvert  de  sillons  et  de  stries  toute  sa  sur- 
face, ayant  enlevé  une  partie  considérable  de  sa  masse.  Et 
pour  que  le  caillou  ait  été  si  profondément  entamé  malgré 
sa  dureté,  H  a  fallu  que  ces  frottements  se  fiissent  produits 
sur  toute  sa  surface  sous  de  telles  pressions,  qu'ils  n'au- 


,ï  Google 


raient  pas  épai^né  les  angles,  ni  les  arêtes  de  la  pierre  sou- 
mise à  leur  action,  si  elle  les  conservait  encore. 

Les  vestiges  d'action  glaciaire,  que  les  alluvions  an- 
ci  e  n  n  e  s  des  plateaux  paraissent  présenter,  et  les  conditions 
de  gisement  de  ce  caillou  nous  mènent  à  présumer,  qu'il  pro- 
vient de  ces  dépôts,  très  probablement  entamés  par  les 
actions  sous -aériennes,  depuis  qu'ils  y  sont  restés  exposés. 

Il  faut  maintenant  passer  à  d'autres  faits,  qui  se  lient 
intimement  à  ceux,  qu'on  vient  de  décrire. 

Nous  avons  déjà  dit,  que  le  plateau  de  Paços  était  sil- 
loné  de  Test  à  l'ouest  par  une  dépression,  que,  pour  fa- 
ciliter la  description  des  lieux,  nous  avons  nommée  vallon 
d'Ervilha,  quoique  par  sa  petitesse  en  tous  sens  elle  ne  justi- 
fie pas  complètement  cette  désignation,  car  elle  est  plutôt 
un  ravin  peu  profond,  qui  prend  naissance  à  la  surface  du 
plateau,  et  doit  avoir  été  produit  par  l'érosion  de  celui- 
ci,  postérieurement  à  l'accumulation  des  alluvions  an- 
ciennes, comme  les  faits,  que  nous  allons  exposer,  parais- 
sent le  prouver. 

Le  tramway  qui  conduit  de  Porto  à  Foz  par  la  rue  de 
Boa  Vista,  après  avoir  franchi  le  viaduc  de  Fonte  da  Moura 
se  dirige  vers  le  vallon  d'Ervilha  en  coupant  un  tout  petit 
col,  qui  sépare  les  eaux  du  ruisseau  de  Queijo  de  celles  qui 
affluent  à  ce  vallon.  C'est  dans  ce  col,  que  l'on  commence  à 
voir  les  dépôts,  qui  se  développent  vers  l'ouest  dans  le 
vallon,  à  un  niveau  de  5  à  i5  mètres  inférieur  à  l'alti- 
tude de  60  mètres,  qu'atteignent  les  alluvions  ancien- 
nes au  nord  ei  au  sud  du  tramway,  et  dont  nous  avons  déjà 
parlé. 

La  coupe  transversale  du  vallon  d'Ervilha,^^^'.  6,  pi.  I, 
et  le  profil  de  la  tranchée  nord  du  tramway,  _fig.  5,  peuvent 
donner  une  idée,  non  seulement  de  la  position  des  dépôts 
c-  R.  i5 


,ï  Google 


d'Ervilha  par  rapport  aux  al  lu  v  ion  s  anciennes,  mais 
aussi  de  leur  distribution.  L'échelle  des  hauteurs  dans  \a^g.  S 
a  été  exagérée  par  rapport  à  celle  des  distances,  pour  permet- 
tre de  figurer  dans  un  petit  espace  tous  les  dépôts,  quelques- 
uns  très  minces,  mis  à  découvert  dans  une  très  grande  éten- 
due de  la  tranchée. 

Ils  commencent  par  une  mince  couche  de  cailloux  an- 
gulaires et  routés,  de  petit  volume,  mélangés  de  quelque  sa- 
ble grossier  micacé,  reposant  immédiatement  sur  la  roche 
cristalline,  et  prenant  sa  naissance  sur  le  versant  ouest  du 
col,  que  le  tramway  franchit.  Dans  ce  dépôt  prépondèrent 
au  commencement  les  cailloux  angulaires  quartzeux,  mélan- 
gés avec  les  sables  micacés,  et  ils  paraissent  provenir,  com- 
me ceux-ci,  des  roches  cristallines  sous-jacentes. 

Lorsque  cette  couche  atteint  une  épaisseur  de  près  de 
o'",3o,  on  remarque,  non  seulement  que  les  galets  prédomi- 
nent déjà  de  beaucoup  sur  les  cailloux  angulaires  quart- 
zeux, mais  aussi  que  sur  cette  couche  commence  à  se  défi- 
nir un  dépôt  d'argile  sableuse,  jaunâtre,  un  peu  micacée, 
contenant  de  rares  et  petits  fragments  sous-angulaires  de 
quartz,  ainsi  que  quelques  menus  cailloux  roulés. 

Dans  le  profil  de  la  tranchée  du  nord  (^g.  S,  pi.  1}  est 
représentée  une  partie  de  ces  deux  couches,  déjà  à  presque 
200  mètres  de  leur  origine.  La  couche  de  galets,  que  do- 
rénavant nous  nommerons  —  de  l'est — ,  est  désignée  par  le 
numéro  2,  et  la  couche  d'argîlle  sableuse,  que  nous  nom- 
merons tout  de  même  —  de  l'est — ,  pour  la  distinguer  de 
dépôts  semblables  qui  se  trouvent- à  l'ouest,  y  est  désignée 
par  le  numéro  3. 

Dans  la  tranchée  du  nord  cette  couche  de  galets  atteint 
une  épaisseur  moyenne  de  o'",3o  à  o"y4o,  et  la  couche  d'ar- 
gile sableuse  celle  de  o^jSo  à  o°,6o,  sans  compter  la  terre 


,ï  Google 


'77 
végétale,  à  laquelle  cette  couche  passe  graduellement,  vers  ■ 
sa  partie  supérieure,  par  l'introduction  de  matière  organi- 
que. 

Ces  deux  dépôts  se  voient  aussi  dans  la  tranchée  de 
sud,  et  même  avec  plus  d'épaisseur. 

Jusqu'au  point  a  de  la  tranchée  du  nord  ils  inclinent  très 
peu  vers  le  sud-ouest,  de  même  que  la  surface  des  roches 
cristallines,  et  conservent  une  puissance  assez  uniforme. 
Au  de  là  du  point  u,  vers  l'ouest,  leur  pente,  ainsi  que  celle 
de  la  surface  des  roches  sous-jacentes,  augmente  rapidement^ 
les  deux  couches  commencent  de  même  à  augmenter  d'épais- 
seur, et  les  roches  cristallines,  aussi  bien  que  ces  deux 
dépôts,  cessent  d'être  vues,  ce  qui  coïncide  avec  une  inter- 
ruption dans  la  tranchée.  Tous  ces  accidents  paraissent  être 
dus  à  l'existence  d'une  dépression  à  la  surface  des  roches 
cristallines,  avant  que  la  couche  de  galets  ne  se  fût  ré- 
pandue sur  cette  surface. 

Ces  deux  couches  paraissent  se  lier  à  une  série  de  dé- 
pôts, qui  s'étendent  à  l'ouest  du  point  d  du  profil,  _fig.  S, 
mais  dont  nous  ne  parlerons  pas  pour  le  moment,  à  fin  de 
faire  connaître  tout  de  suite  les  faits  intéressants,  que  la 
couche  de  galets  de  l'est  met  en  évidence. 

Les  deux  couches  (2  et  3  du  profil),  que  nous  venons 
de  décrire,  sont  bien  définies,  quoique  sur  quelques  points 
il  y  ait  une  apparence  de  transition  graduelle  entre  elles,  ce 
qui  paraît  dû  à  la  pénétration  postérieure  de  l'argile  sableu- 
se dans  la  couche  de  gravier.  Celle-ci,  lorsqu'elle  atteint  une 
certaine  épaisseur,  est  presque  exclusivement  composée  de 
cailloux  roulés  de  quartzite  de  volumes  variables  entre  ceux 
de  12  et  i5  centimètres  de  diamètres  moyens,  qui  sont  relati- 
vement rares,  et  ceux  du  menu  gravier;  les  cailloux  de  gros- 
seur moyenne  entre  ces  deux  extrêmes  étant  de  beaucoup 


.c.pv. 


■78 

les  prépondérants.  Le  gravier  a  une  couleur  blanchâtre,  qui 
lui  donne  l'apparence  de  gravier  lavé. 

Il  a  une  certaine  cohésion,  qui  paraît  due  autant  à  l'ar- 
rangement des  cailloux,  qu'à  une  pâte  argilo-sablcuse  assez 
lâche,  de  couleur  jaunâtre,  contenant  quelques  paillettes  de 
mica,  qu'on  voit  très  inégalement  réparties  dans  le  gravier; 
et  qui  est  très  semblable  à  l'argile. 

On  doit  encore  remarquer,  que  ni  les  cailloux  roulés, 
ni  la  pâte,  qui  est  très  semblable  à  l'argile  sableuse  de  ta 
couche  superposée,  et  qui  paraît  s'être  introduite  postérieu- 
rement entr'eux,  ne  montrent  cette  couleur  jaune-rougeâtre, 
qui  se  voit  dans  les  alluvions  anciennes,  et  que  le  con- 
traste entre  celles-ci  et  la  couche  de  gravier  est  très  frappant. 

Comme  nous  avons  déjà  vu,  la  couche  de  galets,  lors- 
qu'elle atteint  une  certaine  épaisseur,  est  presque  exclusive- 
ment composée  de  cailloux  roulés  de  quartzite;  maïs  on  y 
trouve  aussi,  par  ci  par  là,  quelques  rares  cailloux,  qui  se  font 
remarquer  par  leurs  formes  angulaires. 

En  les  examinant  de  plus  prés,  on  s'aperçoit,  qu'ils  ont 
des  formes  qui  ne  paraissent  pas  purement  casueîles;  et  dès 
que  cette  idée  se  présente  à  l'esprit,  elle  paraît  recevoir  une 
confirmation  éclatante. 

Les  deux  quartzites  {fig.  /  et  2  de  la  pi.  III)  ont  clé 
trouvées  le  même  jour  dans  la  tranchée  du  nord,  la  première 
3  mètres  a  l'est  du  point  a  du  profil,  et  la  seconde  ô^iSo  à 
l'est  du  même  point.  Toutes  les  deux  ont  été  anachées  du 
milieu  du  gravier,  qui  les  retenait  assez  fortement,  ainsi  que 
tous  les  autres  cailloux  et  quartzites,  dont  nous  aurons  à 
parler,  comme  recueillis  dans  les  dépôts  du  vallon  d'Er- 
vilha. 

Ces  deux  quartzites  ont  été  taillées  de  deux  cailloux 
roulés,  dont  elles  gardent  encore  une  bonne  partie  des  sur- 


,ï  Google 


'79 
faces  primitives.  Il  paraît,  que  le  but  qu'on  s'est  proposé 
était  celui  de  produire  une  pointe  aplatie,  un  peu  émoussée, 
et  assez  épaisse  pour  résister  au  choc,  en  cherchant  tout  au 
au  plus  à  rendre  la  pierre  plus  maniable.  La  quartzite,^^^.  /, 
paraîtrait  avoir  sa  pointe  cassée  par  accident.  Du  reste,  on 
n'aurait  rien  sacrifié  à  ta  beauté  des  deux  outils. 

Leurs  arêtes  à  ta  vue  paraissent  vives,  mais  te  toucher 
"révèle,  qu'elles  sont  très  légèrement  émoussées.  La  quar- 
tzite,  jig.  /,  montre  cependant  des  indices  d'au  moins  une 
cassure,  qui  paraîtrait  produite  intentionellement,  mais  dont 
les  arêtes  sont  très -émoussées. 

Ce  soupçon  pourrait  avoir  sa  confirmation  dans  d'au- 
tres faits,  que  nous  allons  exposer. 

Entre  les  quartzites  recueillies  dans  la  couche  de  gra- 
vier, et  ayant  des  formes  anguleuses  qui  font  penser  à  un 
travail  réfléchi,  on  remarque  au  moins  deux  de  quartzite 
rose,  dont  l'une  avec  toutes  ses  arêtes  émoussées  par  frot- 
tement, et  l'autre  ayant  la  plupart  des  arêtes  tout  de  même 
émoussées,  mais  d'autres  presque  vives,  limitant  des  surfa- 
ces de  cassure  plus  fraîche,  mais  produites  en  tout  cas 
avant  que  la  quartzite  fut  restée  immobilisée  dans  la  cou- 
che de  gravier.  Celle-ci  a  été  représentée  dans  X'ts.fig.  4  et 
^  j  de  ta  pi.  II. 

Elles  se  distinguent  à  première  vue  de  la  plupart  des 
autres  quartzites  taillées,  trouvées  dans  la  même  couche, 
par  cette  grande  usure  des  arêtes;  ce  qui  nous  mène  natu- 
rellement à  penser  aux  quartzites  qui  paraissent  taillées, 
trouvées  dans  les  alluvions  anciennes.  De  là  à  soupçon- 
ner, que  les  quartzites  à  arêtes  émoussées,  trouvées  dans  cette 
couche,  sont  dérivées,  déjà  avec  leurs  formes  actuelles,  des 
alluvions  anciennes  qui  couronnent  le  plateau  à  une  sî 
petite  distance,  il  n'y  a  qu'un  pas.  Ce  soupçon  paraît  être 


i8o 

complètement  confirmé  par  ce  fait,  que  l\uie,  au  moins,  des 
deux  quartzites,  étant  lavée  en  partie,  de  façon  à  conserver 
adhérents  quelques  vestiges  de  la  pâte  terreuse,  légèrement 
jaunâtre,  et  très  lâche,  qui  les  acompagne  dans  la  couche  de 
gravier,  garde  encore  dans  les  petites  dépressions  de  sa  sur- 
face des  restes  de  la  pâte  argilo- sableuse  jaune-rougeâtre, 
si  caractéristique  des  alluvions  anciennes,  et  qui  résiste 
au  lavage  à  la  brosse. 

Les  formes  des  deux  quartzites  sont  des  plus  grossiè- 
res, et  si  elles  sont  intentionnelles,  on  n'a  pas  eu  d'autre 
but,  que  celui  de  produire  une  pointe  renforcée. 

Ces  deux  quartzites  conservent-elles  encore,  même  dans 
les  faces  qui  paraissent  produites  avec  intention,  des  ves- 
tiges d'action  glaciaire?  Nous  le  soupçonnons,. sans  nous  ha- 
sarder à  l'affirmer,  parce  que  nous  craignons  de  nous  être 
fait  illusion  là-dessus. 

L«s  trouvailles  faites  dans  cette  couche  de  galets  ne  se 
limitent  pas  à  celles-ci. 

On  y  a  recueilli  de  gros  cailloux  angulaires  de  quar- 
tzite  rose,  qui  paraissent  avoir  servi  de  noyaux,  dont  on  au- 
rait détaché  par  percussion  des  éclats  de  roche  dans  le  but 
probable  d'en  faire  des  outils  de  pierre.  Un  de  ces  cailloux, 
le  plus  remarquable  par  son  volume,  et  par  la  circonstance  de 
se  trouver  entouré  d'un  grand  nombre  de  fragments  de  quar- 
tatede  même  nature,  a3ocentim.  de  longueur,  i6  de  largeur, 
et  ig  d'épaisseur  moyenne.  II  se  trouvait  un  peu  enfoncé  à 
la  surface  de  la  couche  d'argile  sableuse,  et  enclavé  de  façon, 
qu'il  a  fallu  employer  le  ciseau  pour  l'enlever,  ainsi  que  les  17 
éclats  de  quartate  et  un  gros  fragment  angulaire  de  quartz 
cristallin,  qui  l'entouraient.  Les  éclats  de  quartzite  ont,  com- 
me le  gros  caillou  de  la  même  roche,  les  arêtes  vives,  et  quel- 
ques-uns pourraient,  au  besoin,  avoir  servi  d'outils. 


,ï  Google 


i8i 

Le  caillou  angulaire  de  quartz  cristallin  aurait  eu  pri- 
mitivement au  moins  une  arête  de  1 1  centïm.  de  longueur, 
et  d'un  angle  très  obtus.  Il  paraîtrait  qu'elle  a  été  enlevée 
intentionnellement,  étant  remplacée  par  une  face  d'une  lar- 
geur moyenne  de  o",oi5.  Si  l'on  s'imagine  la  forme  de  l'éclat 
enlevé,  on  pense  naturellement  à  de  petits  couteaux  de 
quartz  de  l'âge  paléolithique,  bien  plus  difficiles  à  obtenir, 
que  ceux  de  silex,  en  vue  de  la  cassure  rébelle  du  quartz. 
Il  vient  à  point  de  dire,  que  nous  avons  recueilli  dans  cette 
couche  de  gravier  un  petit  éclat  de  quartz  cristallin,  qui  a 
une  très  grande  ressemblance  avec  un  couteau  cassé. 

Un  autre  gros  caillou  angulaire  dequartzite  rose,  trouvé 
dans  la  couche  de  gravier,  a  25  centim.  de  longueur,  i6  de 
largeur,  et  b  d'épaisseur  moyenne.  Il  parait  avoir  servi  tout 
de  même  de  noyau  pour  la  fabrication  d'outils  de  pierre, 
parce  qu'il  est  couvert  de  plusieurs  faces  de  fracture,  pro- 
duites successivement. 

Ce  caillou,  avant  d'être  cassé,  avait  été  roulé,  et  de- 
vait avoir  dans  cet  état  un  volume  bien  plus  grand,  parce 
qu'il  ne  garde  plus  de  sa  surface  roulée,  qu'une  petite  par- 
tie, de  tout  au  plus  60  centim.  carrés,  un  peu  convexe,  et 
conservant  encore  des  vestiges  de  groupes  de  sillons  et  mê- 
me de  stries,  semblables  à  ceux,  qu'on  attribue  à  l'action 
glaciaire. 

On  a  trouvé  encore  dans  cette  couche  un  autre  petit 
bloc  de  quartzite  rose,  de  forme  sous-angulaire,  de  1 5  centi- 
mètres de  longueur,  12  de  largeur,  et  9  d'épaisseur,  qui  a 
toutes  les  arêtes  émoussées,  mais  quelques-unes  bien  plus 
entamées,  que  les  autres.  Il  montre  aussi  sur  quelques-unes 
de  ses  faces,  et  même  sur  quelques  arêtes,  des  vestiges  de 
frottement,  qui  paraîtrait  glaciaire. 

On  a  ramassé  aussi  dans  le  même  gisement  un  petit 


,Got^|^^ 


éclat  de  quartzite,  jaune-rougeâtre,  à  forme  angulaire,  ayant 
l'apparence  de  ces  petits  outils  de  pierre,  qu'on  nomme  poin- 
tes de  flèches  ou  de  dards.  Cette  quartzite  provient  d'un 
caillou  roulé,  dont  une  partie  de  la  surface  à  forme  arron- 
die est  encore  conservée,  et  paraît  sillonée  et  striée  com- 
me d'autres  exemplaires  trouvés  dans  cette  couche. 

Les  deux  quartzites,  jig.  i  et  2,  pi.  Ul,  paraîtraient 
garder  encore  sur  les  surfaces  primitives  des  cailloux  routés 
dont  elles  proviennent,  les  vestiges  un  peu  effacés,  de  frot- 
tements énergiques,  qui  auraient  eu  heu  dans  des  directions 
diverses;  mais  on  ne  voit  pas  ces  vestiges  sur  tes  faces 
produites  par  cassure. 

Nous  tâcherons  de  résumer,  autant  que  possible,  ce 
qu'il  convient  de  faire  connaître  des  dépôts,  qui  se  suivent 
à  l'ouest  de  cette  couche  de  galets. 

On  commence  à  les  voir  assez  bien  définis  dans  le 
point  d  du  profil  Jig.  5,  pi.  I,  et  ils  constituent  une  petite 
séné  essentiellement  composée  de  couches  assez  distinctes 
d'argile  sableuse,  de  gravier,  et  de  sables  fins. 

Les  argiles  sableuses,  qui  parfois  mériterairent  plutôt 
le  nom  de  sables  argileux,  contiennent  à  deux  niveaux 
différents  des  restes  de  véi;étaux  avec  l'aspect  charbonneux, 
qui  paraît  indiquer  un  degré  assez  avancé  le  la  décomposi- 
tion de  la  matière  organique.  Quelquefois  ces  restes  ont 
l'apparence  de  petits  fragments  dont  la  plus  grande  dimen- 
sion est  de  quelques  millimètres,  et  ils  se  trouvent  mélangés 
avec  du  sable  grossier  et  quelque  terre,  que  nous  nomme- 
rons simplement  argile,  sans  pouvoir  entrer  dans  l'analyse 
de  sa  vraie  constitution.  D'autres  fois  la  matière  organi- 
que est  dans  un  état  de  très  grande  division,  se  dénonce 
par  sa  couleur  noire  et  est  mélangée,  ou  de  sable  extrê- 
mement (in,  et  alors  elle  est  distribuée  par  toute  sa  masse 


,ï  Google 


i83 

en  lui  donnant  une  couleur  noirâtre,  ou  d'un  peu  d'argile, 
et  dans  ce  cas  elle  se  montre  sous  la  forme  de  petits  traits 
noirs. 

Comme  le  caractère  le  plus  remarquable  des  deux  cou- 
ches argilo-sableuses,  qui  contiennent  des  restes  végétaux, 
est  la  présence  de  ceux-ci,  nous  les  nommerons  par  con- 
cision argiles  charbonneuses,  quoique  ta  matière  or- 
ganique ne  dépasse  pas  probablement  2  centièmes  de  l:i 
masse. 

On  n'a  pas  pu  découvrir  jusqu'à  présent  des  restes  or- 
ganiques à  formes  déHnies  et  caractéristiques  dans  ces  cou- 
ches. Les  débris  végétaux  qu'on  y  trouve,  paraissent  pro- 
venir d'une  végétation  terrestre,  chétive,  et  plutôt  herbacée 
que  ligneuse. 

Dans  la  couche  de  gravier,  6,  du  profil,  et  plus  loin  en- 
tre les  points  H,  et  A  on  a  trouvé  quelques  cailloux  de  moyen- 
ne grandeur,  de  quartzite,  à  formes  angulaires  et  sous-angulai- 
res, et  qui  peuvent  avoir  été.façonnés  par  la  main  âe  l'hom- 
me. Une  de  ces  quanzites  est  représentée  dans  \zsjig.  3  et 
3a  de  la  pi.  III. 

On  n'a  pas  pu  vérifier  la  continuité  des  deux  couches 
de  galets  et  d'argile  sableuse  de  l'est  avec  des  couches  de 
la  série  qui  se  développe  à  l'ouest  du  point  d. 

On  voit,  cependaiit,  près  du  point  u,  dans  l'argile  sa- 
bleuse, quelques  vestiges  de  ces  débris  à  couleur  charbon- 
neuse, qui  donnent  à  cette  couche  un  caractère  commun  avec 
deux  des  couches  de  l'ouest,  et  dans  le  point  ti,  inférieure- 
ment  à  l'argile  charbonneuse  et  reposant  sur  les  roches 
cristallines,  se  montre  un  dépôt,  composé  de  sable  très 
grossier,  micacé,  mélangé  de  quelques  cailloux  roulés. 

Il  est  donc  possible,  que  ce  dépôt  soit  le  représentant 
de  la  couche  de  galets  de  l'est,  et  que  ta  couche  charbon- 


.,Ct 


ûeuse  inférieure  soîl  le  prolongement  vers  l'ouest  de  la  cou- 
che d'argile  sableuse  de  l'est. 

La  couche  de  galets  de  l'est  a  l'apparence  d'une  plage 
formée  sous  l'action,  probablement  interminente,  de  la  mer. 
Celle-ci  aurait  entamé  les  alluvions  anciennes  à  un  ni- 
veau plus  bas  que  leur  plus  grande  altitude,  aurait  lavé  le 
gravier,  et  l'aurait  mélangé  avec  quelques  débris  des  roches 
cristallines  sous  jacentes.  Cette  plage  aurait  été  fréquentée 
par  l'homme,  qui  y  aurait  taillé  des  outils  de  pierre,  y  aurait 
trouvé  quelques-uns  dérivés  des  alluvions  anciennes  et 
finalement  y  aurait  perdu  d'autres. 

Pour  que  cette  plage  ait  été  couverte  par  la  couche 
d'argile  sableuse,  il  faut  admettre,  qu'il  s'est  donné  un  af- 
faissement qui  a  immerçé  la  couche  de  galets. 

L'altitude  du  point  d  du  profil  est  de  bo^jio.  On  peut 
prendre  cette  altitude,  comme  donnant  avec  assez  d'apror 
ximation  le  niveau  moyen  de  la  mer,  lors  de  la  formation 
de  la  couche  de  gravier  de  l'est,  et  il  s'ensuivrait,  que  de- 
puis que  le  gravier  a  été  stratifié  la  côte  s'est  élevée  d'au 
moins  5o  mètres. 

Nous  ne  pouvons  pas  nous  passer  de  donner  notice 
d'une  autre  plage  soulevée,  qui  se  trouve  à  une  altitude  de 
lo^jSo  au  dessus  du  niveau  moyen  sur  la  côte,  à  l'est  et  à 
sud-est  de  Castello  do  Queijo.  On  voit  dans  cet  endroit  un 
groupe  de  couches  d'argiles  sableuses  et  de  sable  argileux, 
s'élevant  jusqu'à  l'altitude  désignée,  et  ayant  une  épaisseur 
visible  de  8  mètres  à  peu  près.  Il  se  trouve  représenté  dans 
la  coupe,  _fig.  g  pi.  I.  Ces  couches  contiennent  des  restes 
plus  ou  moins  roulés  de  coquilles,  que  paraissent  récen- 
tes, ainsi  que,  par  endroits,  des  vestiges  de  restes  végé- 
taux, dans  un  état  analogue  à  celui  de  ceux  que  l'on  voit 
dans  les  couches  d'Ervilha. 


,ï  Google 


i85 

Les  couches  de  Castello  do  Queijo  ont  été  profondé- 
ment érodées  par  les  actions  marines  et  sous- aériennes,  et 
ce  qui  en  reste,  se  conserve  encore  grâce  à  sa  position  un 
peu  abritée  de  l'action  directe  de  la  mer,  ce  qui  a  ralenti 
Pœuvre  de  destruction.  Elles  contenaient  un  assez  grand 
nombre  de  quartzites  à  formes  sous-angulaires,  en  général 
de  petites  dimensions,  et  qui  paraissent  avoir  été  taillées. 
Le  plus  grand  nombre  de  ces  quartzites  ont  été  laissées  â  la 
surface  des  dépôts  par  les  eaux,  lesquelles  continuent  leur 
travail  de  démolition,  en  enlevant  l'argile  et  les  sables. 

On  a  pu  cependant  trouver  ensevelies  dans  les  couches 
quelques  quartzites  sous-angulaires  tout-à-fait  semblables  à 
celles,  que  les  eaux  n'ont  pas  pu  emporter,  ainsi  que  quel- 
ques cailloux  plus  ou  moins  roulés  de  gneiss  et  de  granitite, 
semblables  à  ceux  des  environs. 

La  plupart  des  quartzites  gui  paraissent  taillées,  ont 
la  dimension  maximum  de  4  à  7  centimètres.  La  plus  grande 
qu'on  a  trouvée,  a  10  '/>  centimètres  de  longueur,  6  '/j  de 
largeur,  et  trois  d'épaisseur.  Le  plus  grand  nombre  a  les 
arêtes  très  légèrement  émoussées  par  frottement,  ce  que  l'on 
cotmaît  plutôt  par  le  toucher,  que  par  la  vue.  D'autres  ce- 
pendant ont  les  arêtes  bien  plus  usées.  On  a  représenté  dans 
les  fig.  4  et  5,  pi.  in,  deux  de  ces  quartzites  de  grandeur 
naturelle. 

Elles  paraissent  avoir  été  apportées  aux  couches  par 
des  eaux,  qui  n'avaient  pas  assez  de  force  pour  transporter 
de  plus  gros  cailloux,  ce  qui  expliquerait  les  petites  dimen- 
sions des  quartzites  qui  paraissent  taillées. 

Nous  avons  encore  trouvé  à  la  surface  d'un  manteau  de 
gros  gravier,  au  sud  et  tout  près  de  Castello  do  Queijo,  une 
autre  quartzite,  qui  nous  a  parue  aussi  intentionnellement  tail- 
lée, parce  qu'elle  montre  des  fractures  successives,  ainsi  que 


,ïGo^^ 


des  indices  très,  clairs  de  percussion,  qu^on  ne  peut  pas  at< 
tribuer  à  des  chocs  dus  au  hasard,  et  qui  eussent  détermi- 
né la  formation  de  sa  pointe.  Elle  a  les  arêtes  légèrement 
émoussées,  et  sa  forme  est  très  grossière,  ne  montrant  ta 
moindre  symétrie.  On  la  voit  réproduite  dans  la_;f^.  tf,  pi. 
III,  comme  l'un  des  types  les  plus  rudimentaires  que  nous 
ayons  trouvés.  Il  ne  nous  a  pas  été  possible  de  vérifier  clai- 
rement le  rapport  d'âge  -entre  ce  manteau  de  gravier  et  les 
couches  argilo-sableuses  de  Gastello  do  Queijo.  Sa  position, 
cependant,  nous  porte  à  croire,  qu'il  a  été  déposé  posté- 
rieurement à  la  formation  de  ces  couches. 

Dans  quelques  endroits  du  littoral  on  observe,  que  la 
surface  des  roches  cristallines  ne  montre  pas  de  saillances 
remarquables,  paraissant  plutôt  dans  son  ensemble  sensi- 
blement parallèle  à  un  plan  légèrement  incliné  vers  l'ouest, 
ou  vers  la  mer.  Vue  en  détail,  elle  présente  des  formes  lé- 
gèrement mamillaires  et  paraît  avoir  été  usée,  quoiqu'elle  se 
trouve  encore  recouverte  d'un  dépôt  de  transport,  composé 
de  sable  grossier,  quelquefois  mélangé  d'un  peu  de  terre, 
et  contenant  quelques  cailloux  roulés  de  quartzite  de  prove- 
nance lointaine,  ainsi  que  des  blocs  de  i5  a  5o  centimètres 
de  diamètres  moyens,  quelques-uns  arrondis,  d'autres  an- 
gulaires, surtout  de  gneiss,  et  aussi  de  granitite,  semblables 
aux  roches  in  situ  des  environs. 

Ce  dépôt  grossier  passe  parfois,  vers  la  partie  supé- 
rieure, à  des  couches  de  sable  plus  ou  moins  argileux,  sem- 
blables à  celles  de  l'est  et  du  sud-est  de  Castello  do  Queijo. 

Dans  \3Ljig.  8^  pi,  I,  on  voit  encore  représenté  un  pe- 
tit escarpement,  qui  se  trouve  sur  la  plage  à  la  distance  de 
320  mètres  vers  le  sud  de  Castello  do  Queijo.  Dans  ce  pro- 
fil on  voit  une  série  de  couches  de  sable  plus  ou  moins  gros- 
sier et  argileux  contenant  quelques  cailloux,  qui  s'accumu- 


,ï  Google 


■87 
lent  surtout  vers  le  plan  de  contact  des  couches.  La  plus 
inférieure,  composée  de  sable  très  grossier,  contient  des  ga- 
lets quaitzeux,  ainsi  que  des  fragments  angulaires  de  gneiss 
de  même  nature,  que  celui  des  proximités,  tes  uns  et  les  au- 
tres distribués  sans  ordre  dans  les  sables.  Il  est  probable  que 
ces  couches  soient  contemporaines  de  celles  de  Castello  do 
Queijo.  La  plus  inférieure,  dont  la  base  est  cachée  par  les  sa- 
bles mobiles  de  la  plage,  se  rapproche  beaucoup,  par  la  dis- 
position de  ses  matériaux,  du  dépôt  grossier  de  transport 
que  nous  venons  de  mentionner,  et  qui  paraît  le  plus  ancien 
de  tous. 

La  surface  des  roches  cristallines  est  coupée  dans  quel- 
ques endroits  par  des  ravines  plus  ou  moins  larges  et  pro- 
fondes, dont  les  parois  se  montrent  usées. 

Une  de  ces  ravines,  située  près  de  3oo  mètres  au  sud 
de  Castello  do  Queijo,  et  se  dirigeant  vers  la  plage  ou  vers 
Fouest,  est  longue  de  près  de  36  mètres,  et  sa  largeur  va- 
rie entre  2'',5o  et  o^iSo.  L'une  de  ses  parois,  celle  du  sud, 
est  représentée  dans  le  profil,  y/g-.  7,  pi.  1. 

Cette  ravine  coupe  du  gneiss  très  dur,  et  vers  sa  par- 
tie supérieure  elle  est  encore  remplie  par  ce  dépôt  d'ailu- 
vion,  que  nous  avons  déjà  mentionné  comme  recouvrant 
immédiatement  les  roches  cristallines.  11  contient  là,  comme 
dans  d'autres  endroits,  de  gros  cailloux  roulés,  quelques- 
uns  de  plus  de  25  centimètres  de  diamètre  moyen.  Cette  al- 
luvion  est,  pour  ainsi  dire,  préservée  et  maintenue  par  un 
rétrécissement  de  la  ravine.  A  son  embouchui-e  celle-ci  for- 
me une  espèce  de  gorge  de  60  à  80  centim.  de  largeur.  Les 
parois  de  cette  coupure  sont  lisses  et  même  luisantes  dans 
quelques  endroits.  A  son  entrée,  là  où  le  gneiss  rétrécit  le 
canal  en  formant  une  bosse  un  peu  saillante,  celle-ci  est 
non  seulement  polie  et  luisante,  mais  aussi  couverte  de  sil- 


"V*^! 


Ions  et  de  stries,  dans  une  direction  un  peu  inclinée  à  l'ho- 
rizon vers  Pouest,  et  coupant  les  feuillets  de  la  roche. 

On  voit  encore,  comme  collée  à  la  paroi  du  sud,  une 
croûte,  de  quelques  décimètres  carrés  de  surface,  constituée 
par  le  ciment  sableux  jaune-rougeStre,  si  fréquent  dans  les 
alluvions  anciennes,  qui  y  est  restée  adhérente,  quand 
l'alluvion,  qui  doit  avoir  rempli  la  ravine,  a  été  enlevée, 

La  Jg.  7,  pi,  I,  met  en  évidence  non  seulement  ces 
faits,  mais  aussi  la  liaison  qu'il  y  a  entr'eux  et  qui,  à  ce  qu'il 
paraît,  ne  permet  pas  de  douter,  que  ces  effets  soient  dus  à 
des  frottements  glaciaires. 

Nous  avons  recueilli  une  douzaine  d'éclats  du  gneiss 
strié,  qui  ont  été  tous  déposés  à  la  Section  Géologique.  L'un 
d'eux  a  été  reproduit  par  la  photoiypie  dans  la  pi.  IV,  ou 
l'on  peut  reconnaître  des  sillons  et  des  stries,  quelques-unes 
même  croisées,  coupant  les  feuillets  de  la  roche,  qui  sont 
nettement  visibles. 

Si  les  faits  décrits  dans  ce  résumé,  ont  l'explication 
qui  nous  a  parue  la  plus  probable,  les  conclusions  auxquel- 
les on  arriverait,  seraient  celles-ci. 

1°  Action  glaciaire,  ayant  modifié  considérablement  la 
surface  des  roches  cristallines  jusqu'au  bord  de  la  mer,  et 
probablement  au  dessous  de  ce  niveau,  et  déposant  sur  elles 
des  alluvions  contenant  de  ^os  blocs  erratiques,  et  des 
cailloux  striés. 

2"  Existence  probable  de  l'homme,  avant  que  ces  al- 
luvions fussent  restées  immobilisées,  soupçonnée  vu  la  ren- 
contre au  milieu  d'elles  de  quartzites,  qui  paraissent  taillées 
et  striées, 

3°  Plage  soulevée  à  une  altitude  de  plus  de  5o",  avec 
conservation  partielle  de  dépôts  marins,  formés  à  une  épo- 
(fue  postérieure  à  celle  de  l'immobilisation  des  alluvions 


,ï  Google 


anciennes.  Quartzîtes  taillées,  probablement  de  deux  pro- 
venances, les  unes  dérivées  des  alluvions  anciennes  ou 
glaciaires  les  autres  fabriquées  sur  place,  ou  dans  d^au- 
tres  lieux. 

4.*  Plage  soulevée  à  une  altitude  de  plus  de  lo^iSo, 
avec  conservation  de  dépôts  marins,  contenant  des  restes 
de  coquilles,  qui  paraissent  récentes  ainsi  que  des  quar- 
tates  taillées,  de  formes  assez  petites.  Ces  dépôts  paraissent 
passer  inférieurement  à  des  alluvions,  probablement  contem- 
poraines de  celles  des  plateaux. 


,(^51^ 


L'ANCIENNETÉ  DE  L'HOMME 


DANS    LE    BASSIN    HOTEN    DU   RHONE 


VAI.LÉE    INFÉRIEURE    DE    LA    SAÔNE 


M.  Adrien  Arceun 

11  est  peu  de  régions  où  les  formations  tertiaires  et  qua- 
ternaires aient  été  plus  complètement  étudiées  que  dans  le 
bassin  moyen  du  Rhône  et  dans  la  vallée  inférieure  de  la 
Saône.  11  en  est  peu  par  conséquent,  où  le  problème  de 
l'âge  géologique  de  Phomme  puisse  être  posé  dans  de  meil- 
leures conditions. 

Je  vais  chercher  à  préciser  les  résultats  acquis  à  la  ques- 
tion, d'après  les  travaux  les  plus  récents. 

Aux  environs  de  Lyon,  les  terrains  tertiaires  supé- 
rieurs et  quaternaires  se  divisent  naturellement  en  trois  éta- 
ges; l'un  pré-glaciaire,  correspond  au  pliocène  moyen  et 
supérieur;  l'autre  glaciaire,  représente  le  quaternaire  infé- 
rieur, l'autre  post-glaciaire,  comprend  le  quaternaire  supé- 
rieur et  les  formations  modernes. 

Les  alluvions  pré-glaciaires  du  plateau  bressan,  du  Bas- 
Dauphiné,  et  du  Lyonnais  {conglomérat  bressan;  alluvions 


,ï  Google 


_i9i_ 
anciennes  de  la  Bresse)  sont  considérées  par  MM.  Faisan 
et  Chantre'  comme  dépendant  d'un  vaste  cône  de  remblai 
formé  en  majeure  partie  de  galets  et  de  graviers  alpins, 
roulés  par  les  fleuves  torrentiels  qui  s'écoulaient  en  avant 
des  glaciers  des  Alpes  pendant  leur  période  de  progression. 
Ces  alluvions  ont  atteint  aux  environs  de  Lyon  la  cote  de 
320  mètres  et  formé  un  barrage  transversal  en  aval  de  la  val- 
lée de  la  Saône.  Ils  ne  contiennent  qu'une  faune  malacologi- 
que,  composée  en  majeure  partie  de  fossiles  miocènes  et 
pliocènes  remaniés.  On  y  a  signalé  cependant,  à  la  base, 
une  petite  faune  en  place  caractérisée  par  la  Paludina  Dre- 
seli  (Toumouër)  et  la  Valvala  Vanctana  (Tournouër),  qui 
sont  pliocènes. 

Le  long  de  la  vallée  de  la  Saône,  en  dehors  des  limites 
du  cône  de  remblai  formé  par  les  alluvions  alpines,  il  existe 
des  alluvions  pliocènes  dont  les  niveaux  correspondent  aux 
précédentes.  Cependant  elles  ne  paraissent  pas  avoir  atteint, 
comme  celles  du  plateau  bressan,  la  cote  élevée  de  32o 
mètres.  Leur  niveau  supérieur  le  plus  remarquable,  le  long 
des  coteaux  du  Beaujolais  et  du  Maçonnais,  forme  terrasse 
à  environ  270  mètres  d'altitude. 

Une  grotte  (Poleymieux),  des  fentes  de  rocher,  (Mont 
de  Narcel  Chaintré;  Chagny)  et  quelques  dépôts  interca- 
lés dans  les  alluvions  anciennes  (Villevert;  Port-Maçon), 
ont  fait  connaître  la  faune  mammalogique  du  pliocène  su- 
périeur dans  le  bassin  moyen  du  Rhône  et  la  vallée  infé- 
rieure de  la  Saône*. 

■  Faisan  et  Chantre  :  Monographie  géologique  des  anciens  glaciers 
et  du  terrain  erratique  de  la  partie  moyenne  du  bassin  du  Rhône,  x  vol. 
in  8.°,  avec  atlas,  Lyon  1880. 

'  Lanei  et  Chantre:  Arclùves  du  Muséum  de  Lyon,  1. 1,  p.  102 


16 


r\ 


On  y  trouve: 


Elephas  meridionalis 

Elephas  antiquus 

Hippopotamus  major 

Rhinocéros  megarhinus  . 

Tapirùs 

Sus 

Antilope 

Bos  hngifrons 


Machaerodus 

Feîis 

Hyaena  antiqua 

Ursus  arvernensis 

Equus 

Lepus 

Testudo 


Par  dessus  les  alluvions  pré-glaciaires  s'étale  le  terrain 
glaciaire  proprement  dit,  à  blocs  erratiques  et  à  cailloux 
striés,  correspondant  au  maximum  de  développement  des 
glaciers  du  Rhône  et  de  l'Isère,  qui  vinrent,  comme  l'ont 
démontré  MM.  Faisan  et  Chantre,  former  leurs  moraines 
terminales  jusque  sur  les  collines  de  Lyon, 

Ce  terrain  erratique  ne  renferme  guère  que  des  fossi- 
les remaniés  empruntés  aux  formations  antérieures.  On  nY 
a  signalé  en  fait  de  vertébrés  que  deux  fragments  de  dents 
appartenant,  d'après  M.  Gaudry,  au  genre  Chamois  ou  Saïga. 

Les  collines  du  Maçonnais  et  du  Beaujolais  paraissent 
avoir  eu  aussi  leurs  petits  glaciers.  On  observe  dans  les 
principales  vallées  aboutissant  à  la  Saône  des  lambeaux  de 
terrain  erratique,  dont  l'origine  glaciaire  semble  très  proba- 
ble. Ce  terrain  erratique  ne  descend  pas  au-dessous  de  la 
cote  270  mètres,  où  commencent  les  alluvions  anciennes. 

On  n'a  jamais  encore  signalé  aucune  trace  de  l'hom- 
me ou  de  l'industrie  humaine  dans  les  terrains  que  je  viens 
d'énumérer. 

Le  lehm  est  la  formation  qui,  dans  l'ordre  stratigra- 
phique,  succède  au  terrain  erratique  des  environs  de  Lyon, 


,ï  Google 


:  j9i 

Le  lehm,  tel  que  l'entendent  MM.  Faisan  et  Chantre,  est 
dû,  soit  aux  eaux  de  fusion  des  glaciers,  soit  à  la  lévigation 
des  moraines  par  les  eaux  pluviales.  C'est  un  limon  argi- 
leux, renfermant  une  très  petite  proportion  de  calcaire,  et 
qui  se  développe  principalement  en  avant  des  moraines 
frontales  des  anciens  glaciers  du  Rhône  et  de  l'Isère. 

Toute  la  vallée  de  la  Saône,  jusqu'au  niveau  supérieur 
des  alluvions  anciennes  (270  mètres  environ)  est  tapissée 
d'un  limon  jaune  fort  analogue  au  lehm  des  géologues  lyon- 
nais. 

La  faune  du  lehm  est  assez  riche.  La  voici  telle  qu'elle 
a  été  publiée  par  MM.  Lartet  et  Chantre'. 


Homo 
Canis  lupus 
Urstis  spelaeus 
Ursus  arclos 
Elephas  primigenius 
Elephas  antiquus 
Elephas  intermedius 
Rhinocéros  tickorhinus 
Rhinocéros  Jourdanî 
Eqiius  caballus 


Sus  scrqfa,  var. 
Bos  primigenius 
Bison  prisais 
Megaceros  hibernicus 
Cervus  elaphus 
Cervus  tarandus 
Ceri'iis  capreolus 
Arctomfs  primigenia 
Sorex 


Je  ferai  deux  réserves  à  propos  de  ce  catalogue. 

L'homme  n'a  été  rencontré  qu'une  fois  dans  le  lehm 
et  dans  des  conditions  douteuses.  En  1868  M.  Chantre  a 
recueilli  a  Toussieux  (Isère)  un  crâne  entier  et  quelques  os- 
sements appartenant  à  plusieurs  individus.  Le  crâne  était 
dolichocéphale  Aucune  trace  d'industrie  n'accompagnait  ces 


'  Archives  du  Mu! 


n  de  Lyon,  t.  i,  p.  76. 


'«'^•^', 


oogle 


■94 
restes.  On  sait  combien  les  remaniements  sont  difficiles  à 
constater  dans  un  terrain  aussi  homogène  que  le  lehm  et 
non  stratifié.  Il  est  possible  que  ces  débris  se  rapportent  à 
une  inhumation  postérieure.  Aussi  MM.  Faisan  et  Chan- 
tre ont-ils  eux-mêmes  déclaré  tqu'il  peut  rester  quelque 
doute  sur  l'âge  de  ces  fossiles'»  La  trouvaille  de  Toussieux 
est  donc  un  fait  exceptionnel  qui  mérite  confirmation;  d'au- 
tant plus,  je  le  répète,  que  le  lehm  ne  renferme  aucune  trace 
d^industrie  humaine. 

Ma  seconde  observation  est  celle-ci:  VElepkas  anti- 
qutis  a  été  rencontré  à  la  limite  du  lehm  et  des  alluvions  an- 
ciennes préglaciaires,  dans  une  position  mal  déternninée. 
J'incline  à  penser  qu'il  appartient  plutôt  à  la  faune  des  al- 
luvions anciennes  qu'à  celle  du  lehm.  C'est  une  question  à 
étudier. 

L'éléphant  réellement  caractéristique  du  lehm  est  I'£ïe- 
phas  intermedms  (Jourdan)*,  très-abondant  aux  environs  de 
Lyon;  il  faut  y  joindre  comme  caractéristique  aussi  le  ^Ai- 
noceros  Jotirdani  (Lartet  et  Chantre)  trouvé  dans  le  lehm 
de  Saint-Germain,  au  Mont-d'Or. 

L'histoire  géologique  de  la  région,  aux  époques  que  je 
viens  d'examiner  peut  se  résumer  airfsi: 

Lorsque  les  alluvions  pré-glaciaires  formèrent  barrage 
à  Lyon,  à  l'issue  de  la  vallée  de  la  Saône,  les  eaux  de  cette 
rivière  refluèrent  en  amont  et  donnèrent  naissance  à  un  lac 
temporaire,  désigné  par  les  géologues  sous  le  nom  de  lac 
Bressan. 

Les  eaux  du  lac  Bressan  atteignirent  peut-être  un  ins- 

'  Monographie  des  anciens  glaciers,  etc.  t.  ii,  p,  430. 
'  D'après  quelques  auteurs  \'E.  intermedms  ne  serait  autre  que 
t'^.  antiqmis,  ce  qui  ne  changerait  rien  d'ailleurs  â  mes  concluàons. 


,ï  Google 


tant  les  hauts  niveaux  du  barrage  (3io-320  mètres),  mais 
elles  paraissent  s'être  maintenues  assez  longtemps  à  la  cote 
270  mètres  qui  correspond  à  une  terrasse  très  constante  au 
pied  des  coteaux  du  Beaujolais  et  du  Maçonnais  et  dont  j'ai 
eu  déjà  l'occasion  de  parler. 

Peu  à  peu  la  Saône  rouvrit  son  ancien  canal  au  milieu 
des  alluvions.  La  digue  de  Lyon  fut  rompue  et  le  lit  de  la 
rivière  descendit  à  une  cote  {190  mètres)  peu  supérieure  à 
celle  qu'il  occupe  aujourd'hui  à  Lyon  {265  mètres). 

Mais  la  vallée  fiit  barrée  une  second  fois  par  l'arrivée 
du  grand  glacier  Rbodano-Savoisien,  et  les  eaux  de  la  Saône 
durent  s'écouler  plus  k  l'ouest  par  le  seuil  de  la  demi-lune 
qui  est  à  la  cote  217  mètres. 

La  rivière  ne  reprit  son  cours  naturel  par  Lyon  qu'a- 
près le  retrait  du  glacier,  c'est-à-dire  lorsqu'il  eut  rétro- 
gradé des  collines  de  Fourvières  et  de  Saint-Just  sur  le  pla- 
teau de  Sathonay. 

Voilà  ce  qui  résulte  des  beaux  travaux  de  MM.  Fai- 
san et  Chantre  sur  les  anciens  glaciers.  Cela  posé,  voyons 
ce  que  nous  apprend  l'étude  des  plus  anciennes  stations 
humaines  connues  de  la  région,  la  grotte  de  Soyons,  celles 
de  Germolles,  de  Rully  et  de  Vergisson,  les  zones  inférieu- 
res de  Téboulis  de  Solutré:  le  gisement  de  la  Truchère. 

Soyons.  (V.  Lepic  et  de  Lubac  :  «Stations  préhistoriques 
du  Vivarais,  Chateaubourg  et  Soyonsn.  Chambéry  1872). 

Faune: 

Homo  Hyaena  spelaca 

Caiiis  lupus  Ursiis  spelaeus 

Canis  familiaris  Mêles  taxus 


Eiephas  primigenius 
Rhinocéros  iickorhinus 
Eqinis  cabalhis 
Sus  scro/a 
Cervus  daphus 
Cervus  canadensis 


Cervus  tarandus 
Cervus  capreolus 
Capra  ibex 
Bos  primigenius 
Bos  prisais 


Industrie:  type  du  Moustier,  sans  mélange  de  Saint- 
Acheul,  éclats  et  couteaux  abondants;  pas  d'os  travaillés. 

Germolles.  {Ch.  Meray,  dans  "Mémoires  de  la  Société 
d'Iiistoire  et  d'archéologie  de  Chalon-sur-Saône»,  t.  vi;  2" 
part»  p.  25t). 

Faune: 


Canis  lupus 
Canis  pulpes 
Hyaena  spelaea 
Felis  leo 
Ursus  spelaeus 
Mêles  taxiis 
Eiephas  primigenius 


Rhinocéros  tichorhinus 

Equus 

Sus 

Bos  primigenius 

Cervus  tarandus 

Cervus 


Industrie:  Type  de  Saint -Acheul,  mêlé  au  type  du 
Moustier  dans  la  proportion  de  19  sur  9;  nombreux  éclats; 
couteaux;  grattoirs,  des  types  connus  à  l'âge  du  renne  et 
de  la  pierre  polie;  os  travaillés  abondants;  poinçons;  lis- 
soirs; marques  de  chasse,  etc. 

Rtilly.  (Grotte  explorée  par  M.  Perrault,  décrite  par 


,ï  Google 


M  M.  Lartct  et  Ctiantre,  dans  «Archives  du  Muséum  de 
Lyon»,  I.  I,  p.  gi). 


Faune; 

Cam's  lupus 
Canis  pulpes 
Hyaena  spelaea 
Felis  spelaea 
Ursus  spelaeus 
Elephas  primigenius 


Sus  scrofa 

Eqiius 

Cerpus  tarandus 

Cert'us  elaphus 

Bos  primigenius 

Arctomys  primigenia 


Industrie:  Lances  et  pointes  du  type  du  Moustier. 

Vergisson.  (De    Ferry:  «Maçonnais    Préhistorique» 
1870,  p.  33). 


Homo 

Elephas 

Ursus  spelaeus 

Equus 

Canis  lupus 

Cervus  tarandus 

Canis  vulpes 

Bos  primigenius 

Hyaena  spelaea 

Tetrao 

Felis  spelaea 

Testudo 

Industrie:  Types  de  Moustier.  Pas  d'os  travaillés. 
Solutré  inférieur  (L'abbé  Ducrost  et  Arcelin). 
Faune: 


Canis  lupus 
Canis  vulpes 


Hyaena  spelaea 
Felis  lynx 


,ï  Google 


Felis  spelaea 
Ur^us  spelacus 
Ursus  arctos 
Elcphas  pvimigenius 
Equus  cabalhts 
Cervus  canadeusis 


Cervus  tarandiis 
Cervus  alces 
Antilope  saïga 
Bos  primigenius 
Arctomjs  primigenia 


Industrie:  types  du  Moustîer  et  de  Saint-Acheul  ;  cou- 
teaux; grattoirs  de  formes  variées:  radoirs  courbes;  os  tra- 
vaillés abondants;  marques  de  chasse  ;  poinçons,  lissoirs,  etc. 

La  TruoliôreCM.  de  Mercey,  dans  «Archives  du  Mu- 
séum de  Lyon»  t.  i.  p.  65.) 

Cette  localité  a  fourni  un  crâne  humain  enfoui  dans  les 
marnes  grises  de  la  vallée  de  la  Saône  qui  représentent  le 
quaternaire  le  plus  supérieur,  immédiatement  recouvert  par 
les  alluvions  modernes  de  la  rivière. 

La  faune  de  ces  marnes  comprend: 


Homo 

Elephas  primigenius 

Sus 

Equus  caballus 


Cervus  elaphus 
Cervus  tarandus 
Bos  longifrons 


En  résumé,  la  faune  de  toutes  ces  stations  paléolithi- 
ques est  analogue  à  celle  du  lehm.  Elle  en  est  la  continua- 
tion; mais  on  n'y  trouve  ni  VElephas  antiquus  ni  VE.  inter- 
medius,  ni  le  Rhinocéros  Jourdani.  N'est-on  pas  en  droit  de 
penser  que  Phomme,  dans  la  vallée  de  la  Saône  et  le  bas- 
sin du  Rhône,  n'est  venu  qu'après  l'extinction  de  ces  trois 
espèces  et  qu'il  y  est  par  conséquent  postérieur  à  la  forma- 
tion du  lehm  et  à  l'époque  glaciaire? 


,ï  Google 


'99 

Des  considérations  géologiques  et  slratlgraphiques  con- 
duisent au  même  résultat,  La  station  de  Germolles  n'est 
qu'à  cinq  mètres  au-dessus  de  POrbize,  qui  coule  au  pied  de 
la  grotte  et  à  vingt  mètres  au-dessus  de  la  Saône,  où  se  jette 
rOrbize.  Aucun  dépôt  d'alluvion  n'a  recouvert  le  gisement 
préhistorique.  Le  séjour  de  l'homme  sur  ce  point  date  donc 
d'une  époque  où  le  creusement  des  vallées  était  à  peu  près 
ce  qu'il  est  aujourd'hui. 

Il  existe  aux  environs  de  Mâcon,  à  Charbonnières,  un 
très  curieux  gisement  découvert  par  M.  de  Ferry,  où  les 
silex  taillés  abondent,  mais  où  il  n'y  a  pas  de  faune  asso- 
ciée. Le  style  des  silex  permet  d'assimiler  ce  gisement  à  ce- 
lui de  Germolles.  La  station  de  Charbonnières  occupe  la 
même  position  que  Germolles,  par  rapport  au  cours  d'eau' 
voisin  (la  Mouge)  et  par  rapport  à  la  Saône. 

Elle  appartient  donc  aussi  à  ta  dernière  phase  du  creu- 
sement des  vallées.  Le  gisement  des  silex  taillés  est  donc 
un  petit  pli  de  terrain,  recouvert  à  peine  par  quelques  cen- 
timètres de  limon  jaune,  produit  probable  de  la  lévigation 
des  coteaux  voisins  par  les  eaux  atmosphériques.  Rienn'indi- 
que  que  des  alluvions  fluviales  se  soient  déposées  par-dessus. 

En  résumé,  l'époque  géologique  des  alluvions  pré-gla- 
ciaires et  du  terrain  erratiqUe  glaciaire  correspond  à  une 
période  de  remplissage.  Nos  stations  archéologiques  les  plus 
anciennes  sont  au  contraire  postérieures  à  la  dernière  phase 
de  creusement  des  vallées.  Un  intervalle  considérable  a  donc 
pu  s'écouler  entre  la  première  période  et  la  seconde. 

On  a  suggéré,  il  est  vrai,  que  l'homme  avait  pu  habi- 
ter les  stations  de  Charbonnières  et  de  Germolles*,  lors  du 

'  Faisan  et  Chantre  :  Monographie  géologique  des  anciens  glaciers 
etc.,  t.  II,  p.  333  et  S64. 


lyGo^Çe 


premier  creusement  de  la  vallée  de  la  Saône,  antérieure- 
ment à  l'arrivée  des  grands  glaciers.  L'homme  aurait  donc 
été  contemporain  dans  nos  régions  de  la  grande  perturba- 
tion glaciaire;  mais  alors  nos  stations  auraient  dû  se  trouver 
immergées  et  enfouies  sous  des  sédiments,  alors  que  les 
glaciers  vinrent,  pour  la  seconde  fois,  former  un  barrage 
contre  les  collines  lyonnaises.  Or,  nous  avons  vu  que  ni  à 
Germolles,  ni  à  Charbonnières,  les  gisements  archéologi- 
ques n'ont  été  recouverts  par  aucun  dépôt  alluvial  posté- 
rieur. 

Malgré  l'autorité  qui  s'attache  à  l'opinion  des  savants 
géologues  pour  que  l'homme  daterait  de  l'époque  glaciaire 
dans  le  bassin  du  Rhône,  je  ne  puis  me  rallier  à  cette  con- 
clusion, qui  me  serait  inconciliable  avec  les  faits.  Je  crois 
même  l'homme  beaucoup  moins  ancien.  II  n'a  dû  arriver 
dans  notre  région  qu'après  un  assez  long  intervalle  qui  se 
mesure:  i"  par  une  érosion  de  près  de  cent  mètres  dans  la 
vallée  de  la  Saône;  2"  par  Pextinciion  des  espèces  caractéris- 
tiques des  formations  glaciaires  ou  immédiatement  post- 
glaciaires, VElepkas  antiquus,  \''Elephas  intermedius  et  le  Rhù 
noceros  Joiirdani. 

Quand  l'homme  quaternaire  vint  pour  la  première  fois 
s'établir  sur  les  rivages  du  Rhône  et  de  la  Saône,  les  plai- 
nes occupées  jadis  par  le  lac  Bressan  étaient  à  sec  depuis 
longtemps,  et  les  glaciers  en  retraite  avaient  probablement 
disparu  eux-mêmes  derrière  les  sommets  du  Jura. 


vn 


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JS  LE  BASSIN  INFÉRIEUR  DE  LA  SAÔNE 


CLASSinCATIOH    PALÉONTOLOCIQUE 


du  Renne 


"moyennes   de 
-  otutré. 


Age 
du  Cheval 


Age 
du  grand  Ours 


Charbonniè- 
molles. 


du  Rhinocéros 
tickorhimis 


Grande  abondance  du  Renne, 
sans  l'Ursus  ^latus  ni  VHyama 


Prédominance  du  Cheval. 


Avec  VUrats  spelaaa  et  VHyae- 
na  ^elaea  sans  le  Rhinocéros  ticho- 


L'Homme'  avec  le  Rhinocéros  ti- 
chorhima  sans  VElephas  antiquus  ni 
le  Rhinocéros  Jourdani. 


L'Elephas  intermedius  ei  le  Rhinocéros  Jourdani  sans 
l'Homme. 


Fossiles  remaniés. 


Me  l'industrie 


L'Elephas  antiquus  sans  l'Homme. 


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^1^ 


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LE  QUATERNAIRE  EN  POLOGNE 


LA  CAVERNE  DU  MAMMOUTH 


M.  Zawisza 

Je  demande  l'avis  de  l'assemblée  sur  les  pièces  curieu- 
ses en  dent  de  mammouth  qui  ont  été  exposées  à  Paris 
en  1878.  La  huitième  pièce  trouvée  dans  la  caverne  du 
Mammouth,  et  que  je  présente  au  Congrès,  a  prouvé  par 
sa  forme  qu'elle  n'a  pu  servir  comme  pointe  de  lance,  ainsi 
que  celles  trouvées  précédemment.  Sa  longueur  est  de  41 
centimètres,  épaisseur  5  millimètres,  largeur  24  centimè- 
tres. Je  crois  que  ces  pièces  étaient  probablement  des  signes 
de  commandement  ou  des  insignes  de  sorcellerie  ou  de  culte 
religieux.  Le  bout  du  côté  de  la  tête  porte  des  entailles  au 
milieu  desquelles  on  aperçoit  un  petit  œil. 

Je  présente,  aussi  des  ossements  de  mammouth  tra- 
vaillés, lesquels  à  mon  avis  et  à  celui  de  M.  Schaaffhausen, 
sont  une  des  meilleures  preuves  de  la  contemporanéité  de 
l'homme  avec  cet  animal,  vu  que  l'os  étant  poreux  et'fra- 
gile  par  sa  nature,  doit  avoir  été  travaille  à  Pétat  frais,  non 
comme  la  dent  de  mammouth  fossile  qu'on  emploie  très 
bien  de  nos  jours. 


,ï  Google 


Abordant  une  autre  question,  j'exposerai  que  selon 
mon  opinion  la  présence  du  bulbe  de  percussion  n'est  pas 
une  preuve  suffisante  pour  démontrer  qu'un  silex  ait  été  in- 
tentionellement  travaillé  par  Thomme.  Il  faut  qu'il  y  ait  l'ad- 
jonction d'une  fatette  plate  au  dessus  du  point  de  percus- 
sion. 

Slacasalon 

M.  Evans:  Je  déclare,  sur  le  sujet  de  la  proposition 
qui  vient  d'être  faite,  que  je  ne  considère  pas  comme  suffi- 
sant pour  attester  le  travail  de  l'homme  un  seul  bulbe  de 
percussion.  Il  faut  aussi  constater  des  facettes  au  côté 
opposé  au  bulbe  de  percussion.  Des  éclats  peuvent  se  pro- 
duire dans  les  grandes  commotions  géologiques  résultant 
des  tremblements  de  terre.  Il  n'est  pas  nécessaire  d'avoir 
recours  à  un  coup  porté  contre  le  silex  pour  obtenir  un 
bulbe  de  percussion;  la  pression  seule  suffit.  Il  faut  en  ou- 
tre que  les  objets  semblables  soient  en  nombre,  pour  au- 
toriser à  les  attribuer  au  travail  humain. 

M.  DE  MoBTiLLET,  après  avoir  rappelé  les  signes  indi- 
cateurs d'un  silex  travaillé  par  l'homme,  ajoute  : 

Outre  ces  indications,  on  doit  regarder  comme  signe 
caractéristique  le  cône  produit  par  l'écrasement  sous  le 
coup  qui  a  frappé  le  silex.  En  ce  qui  concerne  l'emploi  des 
ossements  travaillés  présentés  par  M.  Zawisza,  je  dirai  que 
je  les  considère  comme  des  pointes  de  lance,  des  lames  or- 
nées. 


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NOTE 

SUR  LES  DERNIÈRES  DÉCOUVERTES 
EFFBCTtTËES  par  AI.  Prunieres  DANS  LA  LOZÈRE 

M.   DE  QUATREFAGES 

Quelques  jours  avant  mon  départ  de  Paris,  je  reçus  de 
M.  le  Dr.  Prunières  une  nots  relative  aux  découvertes  re- 
marquables qu'il  venait  de  faire  dans  la  contrée  qu'il  ex- 
plore avec  tant  d'habilité.  Cette  note,  destinée  au  Congrès 
de  Reims,  a  été  présentée,  par  M.  Magitot,  à  la  section 
d'anthropologie  de  l'Association  française;  mais  les  faits  an- 
noncés par  M.  Prunières  me  semblent  avoir  trop  d'intérêt 
pour  que  je  n'en  dise  pas  quelques  mots  au  Congrès. 

On  sait  que  cet  infatigable  chercheur  avait  déjà  fait 
connaître  la  caverne  dé  l'Homme-Mort,  puis  celles  de  Bau- 
mes-Chaudes. Le  beau  travail  de  notre  regretté  collègue 
Broca  a  montré  la  première  habitée  par  les  hommes  doli- 
chocéphales de  Cro-Magnon,  croisés  avec  les  brachycépha- 
les  constructeurs  de  dolmens.  La  seconde  a  évidemment  servi 
de  refuge  à  des  Cro-Magnons  en  lutte  avec  les  constructeurs 
de  dolmens.  Ce  fmt  est  attesté  par  l'existence  d'os  dans  les- 
quels sont  enfoncées  encore  les  pointes  de  flèches  néolithi- 
ques qui  ont  tué  les  individus. 


204 

Maintenant  M.  Prunières  annonce  avoir  découvert: 

1°  Une  immense  caverne  avec  ossements  (TUrsus  spe- 
laeits  et  des  haches  de  Saint -Acheul-  La  présence  de  l'hom- 
me paléotithique  est  attestée  là  par  ses  œuvres,  mais  non 
par  des  restes  de  Touvrier. 

2°  Plusieurs  cavernes  sépulcrales  d'où  notre  collègue  a 
retiré  une  immense  quantité  d'ossements  et  des  crânes  très 
nombreux.  Plusieurs  de  ces  ossements  sont  percés  par  les 
flèches  néolithiques  des  hommes  des  dolmens.  Tous  les  crâ- 
nes sont  des  dolichocéphales  purs. 

3"  Plusieurs  dolmens,  lesquels  ont  donné  des  crânes 
brachycéphales  purs,  mêlés  à  un  certain  nombre  de  doli- 
chocéphales purs  et  à  des  crânes  de  métis.  Le  bronze  com- 
mence à  se  montrer  dans  ces  dolmens. 

4°  Les  crânes  extraits  d'un  vieux  cimetière  situé  au  cen- 
tre du  Causse  se  sont  montrés  brachycéphales  en  grande 
majorité;  mais  un  certain  nombre  étaient  encore  dolichocé- 
phales et  d'autres  accusaient  le  mélange  des  deux  races. 

Si  nous  embrassons  par  la  pensée  l'ensemble  de  ces 
découvertes,  toutes  dues  à  M.  Prunières,  nous  voyons  qu'el- 
les racontent  d'une  manière  complète  l'histoire  primitive  de 
ces  régions. 

i"  Au  début,  dès  les  temps  paléolithiques  de  Tours,  les 
dolichocéphales  sont  seuls,  et  à  en  juger  par  ce  que  nous 
montrent  les  localités  où  l'on  a  trouvé  des  restes  humains, 
ces  premiers  habitants  appartenaient  à  la  race  de  Cro-Ma- 
gnon.  On  peut  toutefois  se  demander,  jusqu'à  plus  ample 
informé,  si  les  hommes  de  Canstadt  n'entraient  pas  pour 
quelque  chose  dans  cette  population. 

2°  Les  brachycéphales  constructeurs  de  dolmens  sont 
arrivés  à  un  moment  donné,  et  la  guerre  a  été  d'abord  la 
suite  de  ce  contact.  C'est  ce  qu'attestent  ces  nombreux  sque- 


-^^ 


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205 

lettes  de  dolichocéphales  purs,  portant  encore  les  pointes  de 
flèche.  Le  même  fait  met  hors  de  doute  la  coexistence  des 
deux  races,  la  survivance  de  celle  de  Cro-Magnon. 

3"  La  guerre  n'a  pas  amené  l'extermination  des  doli- 
chocéphales; les  deux  races  se  sont  unies,  mais  la  race  bra- 
chycéphale  paraît  avoir  prévalu. 

La  fusion  des  races  primitives  qui  ont  habité  le  sol 
français  se  montre,  de  la  manière  la  plus  frappante,  dans  la 
magnifique  collection  ostéologique  formée  par  notre  collègue, 
M.  le  baron  de  Baye.  J'ai  eu  déjà  l^occasion  de  dire  à  la 
Société  d'Anthropologie  que  j'y  avais  trouvé  tous  les  types 
fossiles,  moins  celui  de  Canstadt,  et  peut-être  un  des  deux 
types  de  Furfooz  associés  à  un  type  spécial.  A  Baye,  tou- 
tes ces  races  apparaissent  comme  vivant  dans  les  meilleurs 
termes.  Le  temps  des  guerres  est  passé. 

Dans  la  Lozère  les  phénomènes  sont  bien  plus  simples. 
Nous  ne  voyons  que  deux  races  en  présence,  mais  nous 
suivons,  pour  ainsi  dire,  d'étape  en  étape  l'histoire  de  cha- 
cune d'elles  et  de  leurs  rapports  jusqu'à  l'époque  actuelle. 
Là  est  le  très  grand  intérêt  des  faits  mis  au  jour  par  M. 
Prunières. 


Dlsonsslon 

M.  Henri  Martin:  La  dolichocéphalie  cause  souvent 
de  grandes  confusions  historiques.  En  France  nous  avons 
eu  des  dolichocéphales  primitifs,  vaincus  et  assujétis  par 
des  brachycéphales,  puis  ceux-ci  ont  été,  à  leur  tour,  domi- 
nés par  de  nouveaux  dolichocéphales. 

Je  crois  qu'on  peut  assigner  à  ces  trots  races  des 
noms  historiques:  les  premiers  étaient  les  Berbères,  qui 


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2o6 

étaient  encore  à  la  pierre  éclatée;  les  deuxièmes  étaient  les 
Ligiires,  qui  arrivaient  avec  la  pierre  polie,  et  un  peu  plus 
tard,  le  bronze;  les  troisièmes  étaient  les  Celtes  avec  la 
pierre  polie,  puis  le  bronze,  mais  mieux  organisés,  mieux 
armés,  construisant  des  monuments  mégalithiques  bien  plus 
considérables,  imposant  aux  Ligures  leur  religion,  leur  lan- 
gue, leurs  mœurs  et  se  mêlant  aux  Ligures  comme  les  Ligu- 
res s'étaient  mêlés  aux  Berbères, 

M.  DE  QuATREFAGES.  Je  crois  que  les  hommes  dont  parle 
M.  Prunières  sont  de  beaucoup  antérieurs  aux  Aryans. 


IV. 


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LA  oaOTTE  DE  FURNINBÀ  A  PENIOHE  ' 


M,  JoAQULM  F.  N.  Delgauo 

La  presqu'île  de  Péniche,  située  à  quinze  lieues  au  nord 
de  Lisbonne  et  se  détachant  nettement  de  la  côte  maritime, 
présente  du  côté  sud  une  falaise  abrupte  formée  par  les  cal- 
caires sableux  très  grossiers  du  lias  supérieur.  Sur  cette  fa- 
laise se  trouve  une  grotte  connue  dans  la  localité  sous  le 
nom  de  Furninha  da  Desctda  do  Mar,  ou  tout  simplement 
Ftirninha  (petite  grotte),  creusée  dans  les  roches  sur  les- 
quelles est  bâti  le  village  de  Péniche  de  Baixo.  Ces  calcai- 
res s'étendent  dans  toute  la  longueur  de  la  presqu'île,  ils 
embrassent  à  peu  près  la  moitié  de  sa  superficie  jusqu'à 
Senkora  dos  Remédias. 

La  falaise  formée  par  ces  calcaires  est  verticale  dans 
•toute  son  extension,  et  parfaitement  inaccessible,  sauf  par 
quelques  découpures  perpendiculaires  à  la  direction  des  cou- 
ches.  Ce  sont  des  criques  profondes  et  étroites  que  l'on 


'  Pour  ne  pas  scinder  la  description  de  cette  grotte,  nous  l'avons 
mise  en  entier  dans  cette  section;  la  partie  se  rapportant  ùl'àge  néoli- 
thique y  est  donc  comprise. 


iïGooqIc 


208 

nomme  carreiros,  où  l'action  érosive  de  la  mer  s'est  exer- 
cée plus  fortement,  profitant  de  la  structure  spéciale  de  la 
roche  et  probablement  aussi  de  fentes  qui  la  traversaient. 

Une  profonde  érosion  dans  l'intérieur  des  couches,  due 
sans  doute  à  des  sources  hydrothermales  ou  minérales,  et 
vraisemblablement  antérieure  à  la  formation  des  plus  an- 
ciens dépôts  quaternaires,  a  corrodé  aussi  la  surface  de  ces 
couches,  laquelle  se  montre  hérissée  de  pointes  et  criblée  de 
trous  et  de  puisards,  que  les  sables  entraînés  par  les  cou- 
rants diluviens  vinrent  combler  depuis  lors. 

La  grotte  de  Furninha  est  une  de  ces  cavités  mise  à 
^iccouvert  par  l'action  destructive  des  vagues,  modifiée  et 
agrandie  ensuite  dans  ses  formes  par  cette  même  cause, 
avant  la  dernière  élévation  du  sol  qui  donna  à  notre  côte 
maritime  son  relief  actuel. 

En  effet,  la  forme  arrondie  des  différentes  chambres  qui 
la  composent,  lasurface  lisse  de  ses  parois  et  les  nombreuses 
coupoles  coniques,  qui  en  forment  le  toit,  s'élevant  à  une 
grande  hauteur  au-dessus  du  sol  primitif  de  la  grotte,  don- 
nent la  preuve  évidente  que  la  mer  y  a  pénétré  autrefois,  mais 
certainement  h  une  époque  très  reculée,  bien  avant  que  la  grot- 
te fût  habitée.  La  preuve  directe  de  cette  assertion  c'est  que 
la  mer  continue  encore  actuellement  la  même  œuvre  de  des- 
truction, minant  la  falaise  inférieurement  au  sol  de  la  grotte 
qui  court  grand  risque  de  s'effondrer,  la  communication  en- 
tre l'excavation  inférieure  et  la  grotte  supérieure  étant  déjà 
établie  en  deux  points,  ce  qui  nous  a  été  révélé  par  les  tra- 
vaux d'exploration. 

L'ouverture  de  la  grotte  regarde  le  sud-ouest;  elle  est 
très  pittoresquement  située  à  mi-hauteur  de  la  falaise,  en- 
viron 1 5  métrés  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  et  85o  mè- 
tres au  sud-est  du  cap  Carvoeiro,  l'un  des  points  de  notre  côte 


DigitizsdbvGOO'^le 


le  plus  avancé  dans  l'Océan,  et  par  conséquent  un  des  points 
les  plus  occidentaux  de  l'Europe. 

Le  sentier  qui  y  mène  est  extrêmement  difficile  et  pé- 
rilleux; avant  que  nous  le  fissions  réparer  il  ne  pourrait 
être  pratiqué  que  par  les  pêcheurs  et  les  personnes  très 
hardies.  Nous  devons  cependant  supposer  que  lorsque  la 
grotte  fut  habitée  pour  la  première  fois,  les  conditions  étaient 
bien  différentes,  la  falaise  s'avançant  alors  beaucoup  plus 
dans  l'Océan. 

Une  plateforme  qui  a  aujourd'hui  environ  6  mètres  de 
laideur,  mais  qui,  sans  doute,  au  commencement  de  l'époque 
quaternaire  s'avançait  beaucoup  plus  vers  le  sud,  formant 
peut-être  même  la  plage,  rend  cependant  facile  l'entrée  de 
la  grotte.  Cette  plateforme  étant  abritée  par  les  rochers  de 
la  partie  supérieure  de  la  falaise  offre  un  abri  sûr  une  fois 
que  l'on  y  est  arrivé,  sauf  lors  des  grandes  tempêtes,  quand 
les  vagues  viennent  se  briser  avec  violence  contre  les  rochers, 
et  s'élèvent  à  une  telle  hauteur,  qu'elles  empêchent  tempo- 
rairement l'entrée  de  la  grotte  en  y  pénétrant  elles-mêmes. 

Poursuivant  le  même  ordre  d'idées,  nous  pouvons  sup- 
poser que  la  grotte  actuelle  n'est  peut-être  qu'une  ramifica- 
tion d'une  caverne  de  plus  grandes  dimensions,  qui,  à  l'épo- 
que quaternaire,  avait  issue  à  la  surface  du  sol  et  était  plus 
accessible  qu'elle  ne  l'est  aujourd'hui. 

Il  est  encore  assez  probable  qu'à  la  même  époque  la 
grotte  se  trouvait  peu  au-dessus  du  niveau  de  la  plage,  puis- 
que la  mer  a  pu  y  pénétrer  dans  des  circonstances  spécia- 
les, et  qu'ensuite  elle  a  été  fréquentée  et  habitée  alternati- 
vement par  les  hommes  et  par  les  animaux. 

La  grotte  forme  une  sorte  de  corridor  tournant  deux  fois 
en  coude  ou  ayant  la  forme  de  fer  à  cheval,  plus  large  à  sa 
courbe,  où  se  trouve  la  salle  principale,  et  plus  étroit  aux 


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deux  branches,  avec  une  petite  chambre  contiguë  à  Pun  des 
angles,  et  auprès  de  l'autre  angle  un  trou  profond,  espèce 
de  puisard,  que  le  travail  d'exploration  a  mis  à  découvert. 

La  grotte  ne  reçoit  d'autre  lumière  que  celle  venant  de 
son  ouverture;  aussi,  tout  en  étant  bien  éclairée  dans  la  pre- 
mière branche,  ne  l'est-elle  que  très  faiblement  vers  le  mi- 
lieu, ou  dans  ce  que  nous  appellerons  salle  p'tttcipale,  tan- 
dis que  l'obscurité  est  complète  dans  la  dernière  partie  et 
dans  la  petite  chambre  attenante. 

Quant  il  pleut  l'eau  suinte  et  coule  abondamment  de 
la  voûte  et  des  parois  de  la  grotte;  cependant,  on  n'y  a  pas 
découvert  de  couche  stalagmitique,  sauf  une  petite  masse 
de  2  décimètres  d'épaisseur,  empâtant  des  ossements  hu- 
mains, laquelle  adhérait  à  la  paroi  de  l'est,  à  i'",3o  du  sol 
de  la  grotte,  laissant  ainsi  voir  clairement  que  dans  des 
temps  peu  reculés  ce  sol  était  arrivé  au  moins  à  cette  hau- 
teur. 

Comme  on  n'a  découvert  dans  aucun  autre  point  de 
vestiges  de  la  couche  stalagmitique,  il  est  évident  qu'elle  a 
été  enlevée;  mais  il  est  aussi  clair  qu'elle  ne  couvrait  pas 
tout  le  sol  de  la  grotte,  comme  c'était  le  cas  dans  les  grot- 
tes de  Cesareda,  par  exemple,  puisque  l'on  n'en  découvre 
plus  la  moindre  trace  sur  la  paroi  opposée  de  la  grotte.  Cet- 
te circonstance  est  d'autant  plus  remarquable  que,  comme 
nous  Pavons  dit,  il  y  tombe  beaucoup  d'eau  à  l'occasion  des 
grandes  pluies. 

On  n'y  a  pas  non  plus  découvert  de  blocs  de  calcaire 
tombés  de  la  voûte  ou  des  parois,  comme  il  arrive  ordinai- 
rement, et  comme  nous  l'avons  observé  généralement  dans 
les  grottes  de  Cesareda.  Le  dépôt  qui  la  remplissait  par- 
tiellement était  sableux,  plus  ou  moins  grossier  et  incohé- 
rent, ne  renfermant  .dans  toute  son  épaisseur,  que  quelques 


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cailloux  roulés  ou  galets  quartzeux,  et  les  objets  que  l'hom- 
me  y  a  introduits. 

L'ouverture  de  la  ^otte  forme  un  arc  peu  régulier,  de 
4  mètres  de  hauteur  à  la  clef  et  3  mètres  de  largeur  à  la 
base.  Environ  à  4  mètres  de  l'ouverture,  le  corridor  d'en- 
trée se  rétrécit  un  peu,  et  sa  hauteur  diminue  aussi,  par  suite 
de  la  saillie  de  la  roche  formant  le  sol,  laquelle  se  montrait 
à  découvert  jusqu'à  ce  point,  où  l'action  de  la  mer  se  fait 
sentir.  Au  delà  de  cette  barrière  naturelle,  qui  heureusement 
empêchait  le  passage  de  l'eau  de  la  mer  en  limitant  son 
action  destructive  (car  sans  cet  obstacle  elle  aurait  proba- 
blement entraîné  la  plus  grande  partie  des  dépôts  de  la  grot- 
te) commençait  le  dépôt  sablonneux  qui  en  recouvrait  le  sol. 
Après  avoir  exploré  ce  dépôt  sur  place,  nous  le  ffmes  ex- 
traire afin  de  le  passer  au  crible,  et  de  recueillir  tous  les 
petits  objets  qui  pourraient  avoir  échappé  aux  premières  re- 
cherches. 

Il  est  intéressant  de  remarquer  qu'un  certain  effort  étant 
nécessaire  pour  franchir  ce  gradin,  qui  peut  avoir  un  mètre 
de  hauteur,  les  pointes  saillantes  du  rocher  sur  la  paroi  droite 
du  corridor,  le  long  de  laquelle  le  passage  devait  se  faire,  se 
présentent  très  lisses  et  usées,  comme  si  en  effet  pour  sur- 
monter cet  obstacle  elles  eussent  servi  d'appui  aux  hommes 
qui  avaient  fréquenté  la  grotte. 

Le  corridor  d'entrée  se  prolonge  d'environ  5  mètres  de 
plus,  ce  qui  fait  9  mètres  de  longueur  jusqu'à  la  salle  prin- 
cipale. La  voûte  de  cette  salle  présente  les  formes  les  plus 
gracieuses^  elle  s'élève,  en  nombreuses  coupoles  de  plus  en 
plus  hautes,  vers  le  centre  de  la  grotte,  où  elle  forme  un 
large  dôme  qui  atteint  presque  la  surface  du  sol  à  l'exté- 
rieur. Cette  salle  se  prolonge  vers  le  sud,  puis  tourne  vers 
le  couchant  en  s'approchant  de  la  falaise.  La  grotte  entière 


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mesure  environ  3o  mètres  d'extension  totale  comptes  sur 
l'axe,  dont  1 1  mètres  appartiennent  à  la  salle  principale.  A 
rextrémité  nord  de  cette  salle  se  trouve  le  passage  vers  la 
petite  chambre  (nord-est)  par  un  corridor  étroit,  difficilement 
praticable  avant  l'extraction  du  dépôt  de  5o  centimètres 
d'épaisseur  qui  couvrait  le  sol. 

On  a  reconnu  dans  cette  grotte  deux  dépôts  différents, 
parfaitement  distincts,  tant  par  leurs  caractères  physiques, 
que  par  les  débris  qu'ils  renfermaient. 

Le  dépôt  supérieur,  appartenant  sans  doute  à  la  dernière 
phase  de  l'époque  néoUihique,  a  fourni  les  preuves  que  cette 
grotte  fut  pendant  longtemps  habitée  par  l'homme,  qui  y 
fabriquait  ses  armes  et  les  principaux  instruments  et  usten- 
siles dont  il  se  servait,  d'après  ce  que  l'on  peut  juger  par 
l'énorme  quantité  de  cailloux  roulés,  noyaux  et  éclats  de  si- 
lex, de  quartzite  et  de  quartz  que  nous  avons  recueillis, 
ainsi  que  par  nombre  d'instruments  fabriqués  de  ces  mê- 
mes substances. 

Ce  dépôt  consiste  en  une  terre  argilo- sablonneuse, 
meuble,  avec  de  Thumus,  de  couleur  noirâtre,  formant  une 
couche  d'épaisseur  très  inégale,  et  en  partie  positivement 
chargée  d'ossements  "humains  et  de  produits  de  l'art,  mêlés 
de  quelques  ossements  d'atùmaux.  Il  commence,  comme 
nous  l'avons  dit,  à  4  mètres  de  l'ouverture  dans  le  corridor 
d'entrée,  et  sur  les  premiers  3  mètres  suivant  l'axe  de  la 
grotte,  il  n'a  q\:e  quelques  décimètres  d'épaisseur;  mais 
bientôt  il  atteint  2"',5o  de  hauteur  à  l'extrémité  intérieure 
de  ce  corridor,  c'est-à-dire,  au  point  oîi  il  aboutit  à  la  salle 
principale. 

Poursuivant  notre  examen,  selon  l'axe  de  cette  salle, 
nous  voyons  l'épaisseur  du  dépôt  diminuer  d'abord,  puis 
s'accroître  graduellement  et  atteindre  un  maximum  de  7 


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mètres,  correspondant  précisément  au  milieu  de  la  grotte, 
c'est-à-dire  au-dessous  du  dôme  le  plus  élevé  que  forme  le 
toit.  Jusqu'à  ce  point,  |e  dépôt  supérieur  de  la  grotte  repose 
immédiatement  sur  le  calcaire  jurassique,  mais  en  s'avançant 
on  voit  des  sables  quaternaires  s'interposer  entre  ce  dépôt 
et  le  calcaire,  l'épaisseur  du  dépôt  s'abaissant  tout-à-coup  à 
un  mètre  et  continuant  ainsi,  à  peu  de  différence  près,  jusqu'à 
l'extrémité  sud-ouest  de  la  grotte.  Dans  la  petite  chambre 
nord-est  l'épaisseur  du  dépôt  supérieur  était  très  variable, 
mais  généralement  faible;  au  milieu  de  cette  chambre,  où 
il  avait  la  plus  grande  épaisseur,  il  se  trouvait  mêlé  avec  les 
sables  inférieurs,  par  l'effet  de  l'effondrement  qui  s'y  pro- 
duisit à  deux  reprises  pendant  le  travail  d'exploration  vers 
un  trou  d'une  profondeur  inconnue,  très  probablement  s'ou- 
vrant  sur  la  mer. 

Lors  du  commencement  des  travaux  le  sol  n'était  pas 
horizontal;  il  offrait  au  contraire,  depuis  la  petite  chambre 
nord-est,  une  incUnaison  douce  vers  l'ouverture  de  l'entrée 
et  le  milieu  de  la  salle  principale,  et  en  même  temps  de  l'ex- 
trémité opposée  de  la  grotte  vers  ce  dernier  point.  Mainte- 
nant il  faut  se  rappeler  que  c'était  là  que,  sur  la  paroi  du 
côté  de  l'est  et  à  ï"',So  de  hauteur,  se  trouvait  îe  lambeau 
stalagmitique,  et  que  c'était  précisément  sur  la  verticale  de 
ce  point  que  le  dépôt  offrait  la  plus  grande  épaisseur,  le  dé- 
pôt supérieur  descendant  jusqu'au  fond  de  la  grotte,  tandis 
que  les  sables  quaternaires  formaient  un  talus  très  abrupt, 
presque  vertical,  tourné  vers  le  nord,  contre  lequel  ce  dé- 
pôt s'adossait.  Il  faut  aussi  considérer  que,  sur  la  paroi  for- 
mée par  le  calcaire  jurassique,  i!  existait  encore,  près  du  fond 
de  la  grotte,  quelques  restes  de  sables  quaternaires,  formant 
comme  une  mince  couverture,  et  quelques  pierres  détachées 
du  calcaire,  avec  des  stalagmites  brisées,  et  finalement  qu'au 


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point  le  plus  bas  il  y  avait  un  trou  par  où  la  main  pouvait 
à  peine  passer,  mais  duquel  on  a  retiré  quelques  os  humains. 
De  tous  ces  faits  il  est  fadle  de  conclure  que  les  sables  qua- 
ternaires recouvraient  auparavant  tout  le  fond  de  la  salle 
principale  et  de  la  petite  chambre  attenante,  et  qu'ils  se  sont 
écoulés  peu  à  peu  par  cet  orifice  à  la  manière  d'un  sablier, 
peut-être  à  l'occasion  des  vibrations  produites  par  le  choc 
des  vagues,  qui  font  trembler  le  rocher  lorsqu'elles  s'y  bri- 
sent avec  fracas. 

Ainsi  donc,  contrairement  à  ce  qui  se  montrait  à  nos 
yeux  lors  des  fouilles,  nous  devons  supposer  que,  lorsque 
nos  troglodytes  abandonnèrent  la  grotte,  c'était  vers  sa  par- 
tie centrale  que  le  sol  devait  être  le  plus  élevé.  La  preuve 
en  est  non  seulement  dans  la  position  du  petit  lambeau  de 
stalagmites,  mais  encore  dans  l'accumulation  des  os  humains 
et  des  produits  de  l'industrie  humaine  dans  cet  endroit,  où 
ils  se  trouvaient  en  plus  grande  abondance  qu'en  tout  autre 
point  de  la  grotte. 

En  effet,  d'après  la  disposition  de  la  grotte  et  la  distribu- 
tion de  la  lumière  qui  y  pénètre,  c'est  en  ce  point  que  les 
hommes  ont  dû  siéger  de  préférence,  surtout  pendant  que 
les  vents  du  sud,  soufflant  avec"  violence  vers  l'intérieur, 
rendaient  incommode  le  séjour  vis-à-vis  du  corridor  d'en- 
trée. Au  contraire,  quant  il  faisait  beau  ou  lorsque  les  vents 
soufflaient  du  côté  du  nord,  les  troglodytes  venaient  tout 
naturellement  occuper  ce  dernier  point,  où,  en  effet,  nous 
avons  rencontré  une  autre  accumulation  d'ossements  humains, 
moins  importante  pourtant  que  la  première,  et  séparée  de 
celle-ci  par  un  petit  intervalle  où  nul  objet  n'a  été  trouvé. 
Comme  la  précédente,  cette  accumulation  était  presque  en- 
tièrement formée  de  débris  humains,  mêlés  à  quelques  instru- 
ments en  pierre  et  en  os  et  à  quelques  ossements  d'animaux. 


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Quant  à  l'origine  de  ce  dépôt  supérieur,  il  est  évident 
qu'il  provient  des  sabies  quaternaires  sous-jacents,  ou  qu'il 
n'est  autre  que  la  couche  supérieure  de  ces  sables,  qui  pri- 
rent un  aspect  différent  par  l'adjonction  d'une  grande  quan- 
tité de  matière  organique. 

Le  fait  le  plus  remarquable  qui  ressort  de  l'examen  des 
objets  trouvés  dans  le  dépôt  supérieur  de  cette  grotte,  c'est 
la  cassure  intentionnelle  qu'ont  subie  la  plupart  des  ossements 
humains  qu'on  y  a  trouvés,  tandis  que  ceux  des  animaux, 
d'ailleurs  assez  rares,  ne  montrent  nullement  ce  genre  de  cas- 
sure. Ce  fait  paraît  générai  pour  toutes  les  grottes  de  notre 
pays  hantées  par  l'homme  à  l'époque  néolithique,  et  montre 
que  nos  troglodytes  non  seulement  mangeaient  la  chair  hu- 
maine, mais  qu'ils  la  préféraient  dans  leurs  festins,  l'idée  des 
sacrifices  humains  ou  toute  autre  semblable  ne  pouvant  suf- 
fire, à  notre  avis,  pour  rallier  les  faits  observés. 

Tout  extraordinaire  que  puisse  paraître  cette  conclu- 
sion où  nous  sommes  conduits,  elle  est  pourtant  la  consé- 
quence logique,  rigoureuse,  des  observations  faites  non  seu- 
lement à  Fuminha,  mais  aussi  dans  les  grottes  de  Casa  da 
Moura,  Lapa  Furada,  et  autres  de  Cesareda,  que  nous  avons 
étudiées  pour  la  première  fois  en  1866,  et  dans  beaucoup 
d'autres  dont  nous  avons  eu  connaissance  plus  tard. 

Les  preuves  sont  si  irrécusables  qu'il  me  semble  que 
celui  qui  les  reçoit  sans  prévention,  ne  se  refusera  pas  à  se 
rendre  à  l'évidence  des  faits.  Des  preuves  de  ce  genre  sont 
plutôt  avoir,  toute  description  étant  insuffisante;  cependant 
il  est  indispensable  d'appeler  l'attention  des  savants  sur  ce 
point,  et  à  cet  effet  nous  présenterons  succintement  les  faits 
sur  lesquels  nous  établissons  notre  opinion. 

En  nous  rapportant  d'abord  au  nombre  des  os  hu- 
mains recueillis,  nous  trouvons  une  disproportion  extraor- 


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2l6 

dinaire  dans  les  différentes  pièces  composant  le  squelene, 
laquelle  ne  peut  s'expliquer  simplement  par  l'inhumation  suc- 
cessive de  cadavres  dans  le  même  endroit,  ni  par  les  ra- 
vages qu'auraient  pu  exercer  sur  eux  les  carnivores  pénétrant 
dans  la  grotte,  ni  par  la  destruction  due  à  des  causes  natu- 
relles, comme  l'humidité  et  autres. 

D  faut  avant  tout  savoir  que  le  dépôt  sapérieur  de  cette 
grotte  fut  entièrement  extrait,  et  la  grotte  elle-même  presque 
complètement  vidée;  tous  les  os  qu'elle  contenait  ayant  donc 
pu  être  pris  en  considération,  j'ai  pu  dresser  un  tableau  don- 
nant le  nombre  d'exemplaires  de  chacun  des  différents  os 
recueillis.  Dans  ce  tableau  on  peut  voir  la  prédominance  de 
certaines  pièces  relativement  à  d'autres,  et  en  même  temps- 
apprécier  leur  distribution  horizontale  dans  les  différents 
points  de  ta  grotte.  Comme  les  explorations  faites  antérieu- 
rement entamèrent  à  peine  la  surface  du  dépôt,  il  est  clair 
que  nous  pouvons  nous  former  une  idée  parfaite  de  tout  ce 
qu'il  recelait. 

Bien  que  les  résultats  fournis  par  ce  tableau  ne  puis- 
sent être  considérés  rigoureusement  exacts,  vu  les  pertes 
inévitables  de  quelques  os,  principalement  de  ceux  de  peti-  - 
tes  dimensions  et  des  os  spongieux  plus  facilement  destruc- 
tibles que  la  diaphyse  des  os  longs;  cependant  comme  la 
terre  a  été  soigneusement  fouillée,  et  puisque  la  grotte  ne 
paraît  pas  avoir  été  explorée  antérieurement  en  grand  (il 
n'est  pas  même  probable  qu'elle  l'ait  été  vu  la  difficulté 
d'accès)  nous  pouvons  regarder  comme  suffisamment  au- 
thentiques les  données  que  nous  avons  obtenues.  D'un  au- 
tre côté,  en  supposant  même  que  la  grotte  ait  été  autrefois 
explorée,  nous  ne  saurions  admettre  que  les  recherches  aient 
été  dirigées  à  de  certains  os  exclusivement  ou  à  des  por- 
tions de  ces  os,  en  négligeant  le  reste;  nous  devons  croire 


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au  contraire  que,  dans  l'état  de  confusion  et  de  fracture  où 
tous  les  os  se  trouvaient,  même  dans  les  plus  grandes  pro- 
fondeurs où  nous  les  avons  recueillis,  à  2,  3  et  même  4  mè- 
tres au  milieu  de  la  salle  principale,  si  quelqu'un  en  avait 
fait  disparaître  une  partie,  il  en  devrait  manquer  de  tous  à 
peu  près  dans  la  même  proportion  où  nous  les  avons  ren- 
contrés. 

Du  reste,  nous  ne  nous  sommes  pas  aperçus  que  le  dé- 
pôt, ait  été  fouillé  profondément  depuis  son  accumulation, 
nous  n'avons  non  plus  découvert  aucun  vestige  qui  nous 
fît  soupçonner  Penterrement  d'un  corps  entier  en  quelque 
point  de  la  grotte:  les  os,  ou  mieux  les  fragments  d'os  s'y 
rencontraient  dispersés  avec  la  même  irrégularité,  dans  le 
sens  horizontal  aussi  bien  que  dans  le  sens  vertical  ou  de 
l'épaisseur  du  dépôt. 

En  acceptant  donc  le  tableau  comme  l'expression  ap- 
proximative de  la  vérité,  voyons  à  quelles  conclusions  il 
nous  conduit. 

D'abord  on  reconnaît  que  les  os  humains  n'étaient  pas 
distribués  uniformément  dans  toute  la  grotte;  c'était  dans  le 
milieu  de  la  salle  principale,  très  mal  éclairée,  comme  nous 
l'avons  dit,  et  où  le  dépôt  avait  sa  plus  grande  épaisseur, 
que  les  os  humains  et  les  restes  de  l'industrie  se  trouvaient 
surtout  accumulés. 

Quant  à  ces  derniers,  on  doit  cependant  remarquer 
qu'il  y  avait  un  peu  plus  d'uniformité  dans  leur  distribution 
et  qu'on  en  a  trouvés  même  en  abondance  dans  la  partie  la 
plus  éclairée  de  la  grotte  (le  corridor  d'entrée  et  la  partie 
contiguë  de  la  salle  principale)  où  les  instruments  auraient 
été  surtout  fabriqués,  comme  l'on  peut  inférer  de  la  grande 
quantité  d'éclats,  de  nuctéus,  et  de  cailloux  recueillis  dans  la 
grotte,  et  encore  de  la  rencontre  de  quelques  instruments, 


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2l8 

éclats  et  nucléus,  se  ressemblant  si  intimement  entre  eux  par 
ia  nature  et  la  couleur  de  la  substance,  que  nous  n'hésitons 
pas  à  dire  qu'ils  provenaient  du  même  rognon  de  silex. 

Ce  fut  donc  la  partie  la  plus  spacieuse  de  la  grotte  et 
en  même  temps  ia  plus  abritée,  quoique  assez  obscure,  que 
les  troglodytes  de  Fuminha  choisirent  pour  établir  le  foyer 
et  pour  faire  leurs  repas.  Cependant,  il  ne  paraît  guère  pos- 
sible qu'on  y  pût  respirer  lorsqu'il  soufflait  des  vents  de 
mer  et  dès  qu'on  y  allumait  le  feu,  à  moins  que  la  fumée 
n'eût  une  issue  immédiate  vers  la  voûte  de  la  grotte  par 
quelque  fente  ou  orifice  actuellement  Invisible  ou  même  obs- 
trué, ce  qui  n'est  pas  inadmissible  vu  la  grande  élévation 
qu'atteint  la  voûte. 

On  peut  facilement  supposer  aussi  que,  quoique  ce  point 
ait  été  le  préféré,  les  troglodytes  l'abandonnaient  dans  des 
jours  sereins  ou  lorsque  la  direction  du  vent  le  leur  permet- 
tait, pour  venir  occuper  le  fond  du  corridor  d'entrée,  lieu 
où  il  y  avait  effectivement,  comme  nous  avons  dit,  une 
grande  accumulation  d'ossements  humains  entièrement  sé- 
parés de  l'amas  principal  que  nous  avons  indiqué,  par  un 
intervalle  de  i  à  2  mètres,  où  l'on  n'a  rien  trouvé. 

Un  fait  bien  intéressant  et  qu'il  ne  faut  pas  oublier, 
c'est  que  dans  la  chambre  nord-est,  compartiment  de  la 
grotte  à  peu  près  obscur,  Ton  a  aussi  rencontré  quantité 
d'os  humains  brûlés,  avec  divers  instruments  et  éclats  de  si- 
lex et  quelque  céramique,  ce  qui  indique  que  parfois  et  ac- 
cidentellement on  y  allumait  le  feu,  ce  qui  est  démontré 
par  l'abondance  des  petits  morceaux  de  charbon  qu'on  a  ren- 
contrés disséminés  dans  le  dépôt  supérieur,  presque  indis- 
tinctement dans  tous  les  points  de  la  grotte. 

II  faut  encore  se  rappeler  que  le  passage  pour  cette  pièce 
était  très  difficile,  un  homme  s'y  traînant  avec  peine  d'un 


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côté  à  l'autre  avant  le  déblaiement  du  dépôt  qui  couvrait  le 
sol,  ce  qui  doit  écarter  l'hypothèse  d'enterrements,  du  moins 
dans  cette  partie  de  la  grotte. 

Les  crânes  humains  entiers,  comme  on  peut  voir  par 
le  tableau,  font  absolument  défaut;  les  crânes  étaient  inva- 
riablement réduits  en  de  petits  fragments,  de  quelques  centi- 
mètres de  longueur  à  peine,  ce  qui  rend  impossible  l'étude 
de  leurs  formes.  Ces  fragments,  quoique  assez  nombreux, 
sont  très  loin  de  représenter  le  nombre  d'individus  révélé 
par  les  mâchoires  inférieures. 

Parmi  les  nombreux  fragments  de  crâne  recueillis  celui 
représenté  dans  la  fig.  68,  est  surtout  remarquable  par 
une  fossette  circulaire  de  20  millimètres  de  diamètre  et  5  milli- 
mètres de  profondeur  qu'il  offre  à  la  surface  externe.  A  notre 
avis  cette  fossette  a  été  produite  sur  l'individu  de  son  vivant, 
et  a  dû  être  suivie  de  la  mort  peu  de  temps  après.  Il  serait 
hasardé  de  spécifier  le  but  de  cette  opération  ;  peut-être  se 
raitache-t-elle  à  quelque  idée  superstitieuse,  ou  ne  repré- 
sente-t-elle  que  le  commencement  d'une  opération  chirurgi- 
cale analogue  à  la  trépanation,  comme  il  a  été  déjà  observé 
dans  d'autres  stations  de  l'époque  néolithique.  En  tout  cas, 
la  forme  arrondie  de  cette  dépression  indique  très  proba- 
blement l'action  d'un  instrument  tournant*. 

Les  os  longs  entiers  sont  très  rares;  à  peine  a-t-on 

'  Dans  une  groue  peu  éloignée,  celle  de  Casa  da  Moura  à  Cesa- 
reda,  la  même  opération  se  montre  sous  une  forme  différente.  Il  s'agis- 
sait ici,  non  pas  d'obtenir  un  trou  rond,  en  faisant  pivoter  rmstrument, 
mais  bien  d'enlever  un  assez  grand  morceau  ellipsoïdal  du  crâne,  en  le 
découpant  au  moyen  d'un  silex.  De  chaque  côté  des  deux  rainures 
courbes  qui  forment  l'ellipse,  se  trouvent  plusieurs  stries  montrant  que 
le  silex  qui  a  servi  à  l'opération  a  souvent  glissé  sur  le  crânCiS'écar-^ 
tant  de  la  direction  que  l'opérateur  voulait  lui  donner  (pi.  xv). 


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trouvé  4  os  dans  cet  état  (2  fémurs  d'enfants  et  2  humérus 
auxquels  il  manque  cependant  l'une  des  extrémités  qui  s'est 
brisée  lors  de  l'extraction),  tandis  que  les  éclats  longitudi- 
naux et  les  petits  fragments  de  ces  os  cassés  irrégulière- 
ment sont  en  si  grande  quantité,  que  leur  volume  dépasse  de 
beaucoup  la  moitié  du  volume  total  des  os  humains  obte- 
nus. Sur  quelques-ims  de  ces  fragments  on  remarque  que 
la  fracture  a  été  intentionnelle,  _;î^.  t4\  beaucoup  sont  ra-  . 
clés  à  l'intérieur,  vraisemblablement  pour  en  extraire  la 
moelle,  Jî^.  7^,  et  quelques-uns  le  sont  aussi  à  l'extérieur; 
d'autres  fragments  ou  éclats  ont  l'air  d'avoir  été  rongés  au 
milieu,  ou  aux  extrémités,  fig.  70,  7/,  72;  plusieurs  ont 
subi  l'action  du  feu;  enfin,  d'autres  montrent  à  la  surface 
la  marque  des  petits  éclats  qui  en  ont  été  enlevés.  La  fra- 
cture des  os  pour  l'extraction  de  la  moelle  a  dû  se  faire  sur 
les  extrémités  au  moyen  d'un  instrument  contondant;  l'ab- 
sence de  stries  sur  la  surface  de  ces  os  ne  prouve  donc 
rien  contre  l'hypothèse  de  l'anthropophagie  présumée.  Un 
cubitus  montre  la  callosité  d'une  fracture  ancienne,  qui  se 
souda  pendant  la  vie  de  l'individu.  Plusieurs  os  longs,  fé- 
murs et  tibias,  portent  à  ce  qu'il  parait  le  signe  des  cica- 
trices de  blessures,  fig.  52,  107,  108,  peut-être  produites 
par  des  flèches  en  silex  qui  auraient  pénétré  jusqu'à  l'os,  en 
l'entamant  plus  ou  moins  profondément,  et  qui  auront  été 
suivies  le  plus  souvent  de  la  mort  des  victimes. 

A  ces  ai^uments  qui  nous  paraissent  assez  concluants 
pour  prouver  que  la  présence  des  os  humains  dans  cette 
grotte  ne  représente  pas  un  lieu  de  sépulture,  nous  pouvons 
en  ajouter  d'autres  non  moins  valables,  qui  dérivent  de  l'exa- 
men du  tableau  que  nous  présentons. 

Ce  tableau  nous  montre  que  la  quantité  de  mâchoires 
inférieures  est  loin  de  toute  relation  avec  les  mâchoires  su- 


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périeures,  qui  ne  représentent  pas  le  sixième  des  individus 
dont  les  autres  nous  révèlent  l'existence  dans  le  dépôt.  Ef- 
fectivement, on  reconnaît  par  les  mâchoires  inférieures 
Pexistence  indubitable  de  140  individus  dans  le  dépôt,  tan- 
dis que  les  maxillaires  supérieurs  dénoteraient  tout  au  plus  z2 
individus.  Il  est  aussi  fort  intéressant  à  observer  que  les  ex- 
trémités inférieures  des  humérus  sont  en  bien  plus  grand 
nombre  (plus  du  quadruple)  que  les  extrémités  supérieures. 
Les  cubitus  et  les  radius,  au  contraire,  se  montrent  dans 
une  proportion  inverse,  les  extrémités  supérieures  étant 
beaucoup  plus  nombreuses  que  les  inférieures.  Les  os  des 
membres  inférieurs  offrent  des  différences  analogues.  En 
considérant  les  tibias  et  les  péronés,  qui  sont  presque  en 
nombre  égal,  on  voit  que  les  extrémités  inférieures  excè- 
dent les  supérieures  du  double.  Dans  les  fémurs  la  diffé- 
rence n'est  pas  très  sensible,  cependant  les  extrémités  su- 
périeures dépassent  le  nombre  des  inférieures.  En  compa- 
rant les  os  des  extrémités  supérieures  avec  ceux  des  extré- 
mités inférieures,  on  reconnaît  aussi  de  grandes  différences, 
les  os  du  tarse  et  ceux  du  métatarse  étant  respectivement 
en  bien  plus  grand  nombre  que  les  os  du  carpe  et  du  mé- 
tacarpe, tandis  que  les  phalanges  de  la  main  sont  au  con- 
traire bien  plus  nombreuses  que  celles  du  pied.  Il  faut  en- 
fin remarquer  que  la  totalité  des  pièces  obtenues  est  très 
loin  de  représenter  autant  de  squelettes  que  l'indiquent  les 
mâchoires  inférieures,  les  astragales,  malgré  leur  structure 
spongieuse,  étant  par  une  singulière  anomalie  les  pièces  re- 
lativement les  plus  nombreuses  après  les  mâchoires  infé- 
rieures et  les  cubitus  \  tandis  que  les  os  les  plus  résistants, 
comme  les  corps  des  fémurs  et  des  tibias,  sont  ceux  qui  se 
présentent  en  moindre  quantité,  bien  que  les  petits  frag- 
ments et  les  éclats  de  ces  os  soient  très  abondants. 


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Comment  expliquer  toutes  ces  anomalies?  Est-il  a 
sible  que  la  destruction  des  os  par  des  causes  nati 
puisse  amener  de  tels  résultats?  La  perte  casucUe  de 
ques  os  peut-elle  justifier  de  semblables  différences? 
ma  part,  je  ne  suis  pas  disposé  à  l'admettre,  d'autan 
que,  selon  ce  que  le  même  tableau  nous  révèle,  les  os 
gieux  qui  seraient  les  plus  facilement  détruits,  tels  q 
Ds  iliaques,  les  vertèbres  et  d'autres  encore,  sont  rep 
tés  par  un  bon  nombre  de  pièces,  et  que  les  petits  os 
me  les  rotules,  les  caicanéums,  les  astragales,  et  surtout 
les  métatarsiens,  appartenaient  à  de  nombreux  individus, 
tandis  que  les  dents  détachées,  les  pièces  qui  résistent  le 
plus  à  ta  destruction,  et  qui  sont  généralement  très  abon- 
dantes dans  nos  grottes',  se  trouvent  au  contraire  en  fort 
petit  nombre  et  hors  de  toute  proportion  avec  les  mâchoi- 
res qu'on  y  a  rencontrées. 

Tout  cela  porte  à  croire,  que  les  corps  ne  sont  pas  entrés 
mtiers  dans  cette  grotte,  mais  qu'ils  étaient  dépecés  avant 
i'y  être  introduits.  En  effet  un  corps  humain  serait  très 
ourd  pour  être  transporté  par  un  sentier  aussi  âpre  et  aussi 
iifficile  que  celui  qui  donnait  accès  à  la  grotte,  cette  difficulté 
le  l'accès  étant  même  un  fort  argument  contre  l'idée  des 
interremenls  dans  la  grotte. 

Eu  égard  aux  dimensions  extraordinaires  de  quelques 
)s,  surtout  d'une  extrémité  inférieure  et  d'une  tête  d'hu- 
nérus,  nous  serions  portés  à  croire  à  l'existence,  pendant 
'époque  néolithique,  dans  notre  pays  d'une  race  de  taille 
gigantesque,  ou  du  moins  peu  commune i  en  effet,  ces  pièces, 
jui  ne  sont  pas  uniques,  sont  beaucoup  plus  grosses  que  les 


'  Dans  ]a  seule  grotte  de  Casa  da  Mûura  (Cesareda)  nous  avons 
vé  pendant  nos  dernières  fouilles  environy|<iB^iits  détachées! 


jny|«i»rients  détact 


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223 

pièces  correspondantes  d'un  squelette  récent  d'un  homme 
de  grande  taille,  qui  m'a  servi  de  comparaison. 

Avant  de  passer  en  revue  les  produits  de  l'industrie 
humaine,  je  ferai  l'examen  rapide  des  animaux  qui  étaient 
contemporains  de  nos  troglodytes  et  dont  les  restes  ont  été 
trouvés  mélangés  aux  leurs.  Ds  sont  comparativement  en  très 
petit  nombre  et  ne  présentent  que  fort  rarement  la  fracture  ■ 
intentionnelle  observée  dans  les  os  humains.  Ils  appartien- 
nent aux  genres  Vespertilio,  Ursus,  Mêles,  Mus,  Lepus, 
Sus,  Cervus,  Capra,  Ovis,  Bos  et  Phoca,  les  restes  les  plus 
abondants  étant  ceux  des  petits  ruminants.  On  a  trouvé  en 
outre  quelques  rares  vertèbres  de  poissons,  divers  os  d'oi- 
seaux et  des  coquilles  de  mollusques  marins  des  genres 
Haliotis,  Patella,  Pectunculus,  MyiUus,  Pecten  et  Oslrea^ 
mais  représentant  une  partie  très  insignifiante  de  l'alimenta- 
tion de  nos  troglodytes,  si  leur  introduction  dans  la  grotte 
n'a  pas  plutôt  une  autre  signification  ethnographique. 

Parmi  les  restes  de  mammifères,  on  remarque  particuliè- 
rement deux  fragments  de  mâchoires  d'une  espèce  de  pho- 
que {pi.  xiv),  qui  n'habite  pas  actuellement  nos  côtes  mariti- 
mes, et  qui  n'existe  même  pas,  à  ce  qu'il  paraît,  dans  l'Océan 
Atlantique.  Ce  sont  les  seuls  restes  de  mammifères  marins 
découverts  jusqu'à  ce  jour  dans  nos  grottes,  et  encore  appar- 
tenaient-ils au  même  individu. 

Selon  l'estimable  avis  de  mon  ancien  maître  et  hono- 
-  rable  ami  M.  le  Dr.  Barbosa  du  Bocage,  qui  a  eu  la  com- 
plaisance d'examiner  ces  restes,  les  deux  fragments  de  mâ- 
choires (l'un  le  maxillaire  supérieur  droit  avec  l'os  interma- 
xillaJre  correspondant,  _/îg-.  /20,  et  l'autre  la  branche  gau- 
che incomplète  de  la  mâchoire  inférieure,_;î^.  121)  appar- 
tiennent à  l'espèce  de  la  Méditerranée  et  de  l'Adriatique 
{Pk.  monachus,  Hermann)  où  elle  se  rencontre  fréquemment. 


224 

surtout  sur  les  côtes  orientales  d'Espagne,  aux  Des  Baléa- 
res et  en  Corse,  étant  beaucoup  plus  rare  sur  le  littoral  fran- 
çais*. M.  le  Dr.  Barbosa  du  Bocage  a  cependant  remarqué 
quelques  différences  dans  notre  spécimen,  en  le  comparant 
avec  les  descriptions  et  les  figures  qui  ont  été  données  de 
cette  espèce  par  divers  naturalistes,  mais  ces  différences 
sont  trop  peu  importantes  pourqu^il  paraisse  devoir  être 
exclu  de  l'espèce. 

he  maxillaire  supérieur,  qui  est  le  plus  complet,  diflëre 
en  effet,  comme  le  Ph.  monachus  (représentant  le  sous-genre 
Pelagius  de  F,  Cuvier)  des  autres  espèces  connues  de  pho- 
ques, par  le  nombre  des  dents  incisives  {deux  paires)  et  par 
la  forme  des  dents  molaires,  qui  sont  biradiculées,  à  couronne 
sub-triangulaire,  et  sans  dentelures  semblables  à  celles  des 
Calocéphales  (dont  le  Ph.  vituUna  ou  Phoque  commun  de 
rOcéan  Atlantique  est  le  type).  Dans  notre  spécimen,  bien 
que  les  dents  soient  plus  grandes,  l'extension  occupée  par  la 
série  dentaire  est  moindre  que  dans  l'individu  de  l'Adriatique 
figuré  par  Cuvier,  car  elles  sont  placées  plus  obliquement 
par  rapport  au  bord  alvéolaire,  et  plus  fortement  imbriquées 
ne  laissant  entre  elles  aucun  intervalle,  la  racine  de  chaque 
molaire,  au  contraire,  envahissant  de  beaucoup  l'espace  oc- 
cupé par  la  dent  contiguë,  de  sorte  que  vue  de  profil  la 
première  molaire  est  entièrement  cachée  par  la  canine.  Peut- 
être  cette  disposition  des  dents  dépendrait-elle  en  partie  de 
l'âge  de  l'individu,  lequel  quoique  présentant  la  dentition 
complète  et  bien  développée  (montrant  par  cela  qu'il  était 
un  individu  adulte)  n'était  pas  cependant  très  âgé,  car  l'émail 
des  dents  montre  tous  les  détails  de  structure,  qui  auraient 

<  Voir  Gervais  :  Zoologie  et  paléontologie  françaises,  i,  p.  iSp,  et 
Cuvier  :  Ossements  fossiles,  vol.  vi,  page  îo8,  pi.  i7. 


,ï  Google 


225 

certainement  disparu  par  le  travail  de  la  mastication  chez 
les  individus  âgés.  Voict  du  reste  les  principales  dimen- 
sions que  nous  avons  pu  prendre  sur  cette  mâchoire  : 

Longueur  occupée  par  les  molaires o'',o57 

Longueur  prise  depuis  le  bord  antérieur  de 
l'os  incisif  jusqu'à  ta  racine  de  la  dernière 

molaire o°',o8i 

Largeur  de  l'os  prémaxillaire  ou  espace  oc- 
cupé par  les  deux  incisives o'°,oi6 

Hauteur  de  la  couronne  de  la  canine o",o26 

Hauteur  de  la  troiâème  molaire  (b),Jig.  120.  o^oix 

Les  restes  d'ours  offrent  également  un  grand  intérêt. 
Peut-être  appartiennent-ils  à  plus  d'un  individu  et  très  pro- 
bablement à  l'espèce  des  Asturies  (U.  arctos,  L.^U.  Pyre- 
naicus,  F.  Cuvier).  Le  genre  Ursus  n'existe  plus  en  Portu- 
gal. Ces  restes  sont  une  dent  canine,  une  dent  principale  de 
la  mâchoire  supérieure,  un  atlas,  un  fragment  d'axis,  un  hu- 
mérus complet  avec  les  epîphyses  non  encore  soudées,  7  mé- 
tacarpes et  métatarses,  et  9  phalanges.  Par  rapport  à  ces 
restes  on  doit  pourtant  observer  qu'ils  ont  été  aussi  décou- 
verts dans  le  dépôt  néolithique  d'autres  grottes,  notamment 
dans  la  grotte  de  Lapa  Furada,  à  Cesareda*. 

Presque  tous  les  restes  d'ours,  de  même  que  les  deux 
fragments  de  maxillaires  de  phoque,  ont  été  trouvés  sur  le 
passage  du  corridor  d'entrée  vers  le  petit  compartiment  ou 
chambre  nord-est;  et  comme  ce  fut  aussi  dans  ce  m€me 
corridor  et  à  l'extrémité  nord  de  la  salle  principale  de  la 

'  Voir  Dçlgado:  Notice  sur  les  grottes  de  Cesareda,  p.  119,  pL  m. 


,„^c 


226 

grotte,  que  s'est  trouvée  la  plus  grande  quantité  d'os  des 
autres  animaux,  il  est  permis  de  conjecturer  qu'il  y  eut  une 
modification  dans  les  habitudes  des  troglodytes  de  Fumi- 
nha,  la  tribu  qui  occupa  la  salle  principale  étant  peut-être 
différente  de  celle  qui  stationnait  de  préférence  dans  le  cor- 
ridor d'entrée  de  la  grotte  et  qui,  à  une  époque  différente, 
allait  s'abriter  temporairement  dans  la  chambre  contiguë. 
Nous  n'avons  pourtant  pas  d'autres  preuves  à  ajouter  pour 
appuyer  une  semblable  hypothèse. 

On  doit  cependant  remarquer,  qu'on  n'a  pas  rencontré 
de  restes  de  poissons  dans  cette  grotte,  sauf  dans  le  corri- 
dor d'entrée  où  ils  se  trouvaient  d'ailleurs  en  très  petite 
quantité,  à  peine  3  vertèbres  et  un  fragment  de  maxillaire, 
peut-être  appartenant  tous  à  une  seule  espèce,  et  même  à 
un  seul  individu.  Cette  tribu  troglodyte  ne  connaissatt-elle 
pas  l'industrie  de  la  pêche?  Cela  ne  paraît  pas  \Taisembla- 
ble,  puisqu'elle  vivait  au  bord  de  la  mer,  où  l'on  voit  au- 
jourd'hui pulluler  les  poissons.  Le  cannibalisme  était-il  si 
invétéré  chez  ces  sauvages  qu'ils  préféraient  la  chair  hu- 
maine à  tout  autre  genre  de  nourriture  à  leur  portée,  ou  bien 
la  réunion  accidentelle  de  la  tribu  dans  la  grotte  a-t-elle  dé- 
terminé ce  choix  exclusif!  Nous  ne  saurions  le  décider. 

Les  données  ethnographiques  au  sujet  de  cette  race 
de  troglodytes  de  Fuminha,  à  l'époque  néolithique,  et  qui 
nous  sont  fournies  par  les  produits  de  l'industrie  qui  y  ont 
été  rencontrés,  sont  en  vérité  très  intéressantes,  quoique  la 
quantité  des  objets  recueillis  ne  soit  point  comparable  à 
celle  des  objets  qui  ont  été  obtenus  dans  d'autres  grottes, 
celle  de  Casa  da  Moura,  par  exemple.  Pour  mieux  apprécier 
leur  valeur  et  connaître  en  même  temps  la  distribution  des 
différents  objets  trouvés  dans  la  grotte,  nous  avons  dressé 
le  tableau  suivant,  où  tous  ces  objets  sont  énumérés. 


A    i 


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DÉSIGNATION  DES  OBJETS 


'H= 


épingles 


Styleis  e 

Perçoirs  en  os 

Plaquesd 'os  polies  des  deux  côiéi 

(spatules,  etc.) 

Perles  de  grandes  dimensions, 

en  os 

Cylindres  en  os  (poignées  d 

stmmems?) 

Pointes  de  lances  et  de  flèches 

nsilex 

Couteaux  en  silex 

Grattoirs  en  silex  et  en  quartz 
Nucléus  de  silex,  de  quartz  et  d 

quartzite 

Éclats  de  silex,  de  quartz  et  d 

quartzite 

Rognons  de  silex 

Cailloux  de  quartz  et  de  quan^îi 
Cailloux    roulés   (marteaux  e 

quartzite  et  en  granité) 

Vases  en  terre  grossiûre  presque 

complets 
Tessons  de  poterie  grossière,  soit 

lisse  soit  ornée 

Haches  en  pierre  polie, 
Plaques  trapézoïdales  de  schiste 

avec  trou  de  suspension. 
Dents  de  carnivores  avec  trou 

de  suspension. 
Petites  perles  en  cailaïs  et  en 

serpentine 

Échantillons  d'hématite  et  de  !i- 

monite 

Divers  ustensiles  et  insirumcnt; 
non  spécifiés 


,ï  Google 


y 


228 

Beaucoup  de  ces  objets  méritent  une  mention  parti- 
culière et  nous  allons  les  faire  connaître. 

En  ce  qui  concerne  la  céramique,  outre  deux  petites 
écuelles  ou  tasses  de  forme  hémisphérique  et  à  surface  lisse, 
fig.  117^  et  d'un  autre  vase  incomplet,  de  forme  à  peu  près 
ovoïde,  avec  des  dessins  très  simples  sur  la  surface  et  un 
cordon  saillant  à  mi-hauteur,  dVù  naissent  deux  petites  ao- 
%t%^Jig.  p7;  nous  fûmes  assez  heureux  pour  obtenir  un  vase 
de  grandes  dimensions,  de  forme  ovoïde,  en  parfait  état  de 
conservation  {pi.  xi).  Près  du  bord  il  y  a  deux  petites  anses 
perforées  verticalement,  sans  doute  pour  suspendre  le  vase 
au-dessus  de  Pâtre,  sa  forme  ne  lui  permettant  pas  de  se 
maintenir  debout.  Ce  vase  a  25  centimètres  de  hauteur  et 
17  centimètres  dans  son  plus  grand  diamètre;  son  ouverture 
est  à  peu  près  circulaire  de  1 1  à  12  centimètres  de  diamètre. 
La  partie  inférieure  jusqu'à  mi-hauteur  de  ce  vase  est  lisse;  la 
partie  supérieure  est  ornée  de  bandes  parallèles,  composées 
de  deux  lignes  continues  et  d'une  ligne  médiane  formée  de 
traits  interrompus  et  irrégulièrement  espacés,  soit  obliques 
soit  parallèles  aux  deux  premières  lignes.  Ainsi  que  tous  les 
autres  restes  de  céramique,  que  nous  avons  trouvés  dans 
cette  grotte,  ce  vase  a  été  modelé  à  la  main;  la  pâte  en  est 
mal  cuite  et  très  grossière,  elle  renferme  beaucoup  de  grains 
de  sable,  et  montre  la  couleur  noire,  caractéristique  de  la 
poterie  de  cette  époque. 

Ce  vase  fut  rencontré  presqu'au  fond  du  corridor  d'en- 
trée, appuyé  contre  la  paroi  nord:  c'est  à  cette  heureuse  cir- 
constance que  l'on  doit  sa  conservation  presque  parfaite, 
car  il  y  manque  à  peine  un  petit  morceau  du  bord. 

Outre  ces  vases  dont  les  formes  peuvent  être  appré- 
ciées, il  a  été  rencontré  un  très  grand  nombre  de  fragments 
d'autres  vases,  toujours  à  pâte  plus  ou  moins  grossière,  de 


) 


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229 

couleur  noire  et  ayant  la  surface  soit  lisse,  soit  couverte 
de  dessins  simples,  au  trait  ou  à  points  en  creux  (pi.  xn 
et  xm).  Aucun  vestige  de  travail  au  tour  n'a  été  découvert 
sur  ces  fragments;  cependant  les  vases  étaient  de  formes 
diverses  et  appropriés  à  différents  usages,  faisant  voir  que 
la  tribu  qui  habita  cette  grotte,  à  l'époque  néolithique,  avait 
quelques  notions  de  bien-être. 

La  couleur  rougeâtre,  jaunâtre  ou  noirâtre  sur  la  sur- 
face extérieure  ou  intérieure  de  quelques-uns  de  ces  vases 
et  traversant  plus  ou  moins  l'épaisseur  de  la  pâte,  leur  a  été 
donnée  sans  doute  par  une  espèce  d'aquarelle  ou  de  badi- 
geon, appliqué  sur  cette  pâte  encore  fraîche.  La  rencontre 
de  plusieurs  morceaux  de  minerais  de  fer  (limonite  et  héma- 
tite) et  de  l'outillage  nécessaire  pour  les  réduire  en  poudre 
fine  (plaques  de  grès,  de  quartzite  et  de  schiste  siliceux,  sur 
lesquelles  on  voit  la  poussière  encore  adhérente)  pourrait  fai- 
re croire,  qu'il  y  a  eu  ici  un  atelier  de  fabrication  de  ces  po- 
teries, ou  du  moins  que  nos  troglodytes  y  fabriquaient  celles 
dont  ils  avaient  besoin;  de  même  que  la  rencontre  des  éclats 
et  des  nudéus  de  silex  et  autres  roches  quartzeuses  nous  ré- 
vèle que  c'était  là  qu'on  fabriquait,  du  moins  en  parde,  les  in- 
struments de  ce  genre.  On  peut,  cependant,  penser  aussi  que 
nos  troglodytes,  comme  les  sauvages  actuels,  avaient  l'habi- 
tude de  se  couvrir  la  peau  du  corps  et  le  visage  de  dessins, 
en  se  servant  à  cet  effet  de  la  poudre  rouge,  ou  jaune  des  oxy- 
des de  fer,  mêlée  à  une  graisse  quelconque.  Ce  qui  paraît  ap- 
puyer fortement  cette  supposition,  c'est  que  l'on  a  rencon- 
tré, sur  divers  points  de  la  grotte,  beaucoup  de  fragments  et 
d'éclats  d'os,  surtout  humains,  dispersés  dans  le  dépôt,  dont 
quelques-uns  sont  brûlés,  et  tous  très  usés  à  la  surface  et 
parfaitement  lisses,  comme  s'ils  avaient  été  soumis  à  un 
frottement  prolongé,  que  l'on  ne  peut  comparer  qu'à  l'usure 


.,Ct 


r 


23o 

que  présentent  les  coquilles  roulées  des  plages,  ^g-.  41.  43, 
44,  46,  4j^  65,  66,  ^7,  6p.  On  sait,  en  effet,  que  l'un  des 
procédés  employés,  il  y  a  peu  de  temps  encore,  pour  obte- 
nir Taquarelle  noire  dont  on  coloriait  un  objet  quelconque, 
consistait  à  mettre  dans  de  l'eau  du  noir  de  fumée  et  une 
boule  de  pain  pétrie,  en  agitant  le  tout  avec  une  spatule,  aâo 
d'obtenir  une  plus  grande  surface  et  de  mieux  distribuer  la 
poudre  dans  le  liquide.  Il  est  donc  vraisemblable,  ou  du 
moins  très  possible,  que  nos  troglodytes  de  Furninha,  pour 
faciliter  de  même  le  mélange  de  la  poudre  ferru^neuse  avec 
la  graisse  ou  l'eau,  pour  l'un  des  usages  que  nous  avons  ci- 
tés, prissent  au  hasard  quelques  fragments  d'os,  qu'ils  je- 
taient dans  le  mélange,  et  que  ce  soit  leur  frottement  pro- 
longé contre  les  parois  du  vase  où  se  faisait  l'opération,  qui 
en  ait  ainsi  arrondi  les  angles. 

Pour  donner  encore  plus  de  poids  à  cette  hypothèse,  nous 
devons  dire,  que  dans  le  milieu  de  la  salle  principale,  à  une 
faible  profondeur,  on  a  découvert  dans  le  dépôt  la  partie 
inférieure  d'un  humérus  humain  auquel  il  manquait  l'extré- 
mité articulaire,  et  qui  était  cassé  obliquement  à  l'autre  ex- 
trémité, pouvant  servir  de  cuillère  ou  de  spatule.  Cet  objet 
usé  à  la  surface,  surtout  à  l'extrémité  supérieure,  contenait 
dans  le  canal  médullaire  un  petit  fragment  d'os,^g-.  70,  de 
forme  amygdalaire  ou  ellipsoïdale  aplatie,  ayant  la  surface 
très  lisse,  paraissant  même  indiquer  que  l'usure  produite 
sur  l'un  et  l'autre  fragment  était  due  à  la  même  cause,  le 
petit  éclat  étant  resté  par  hasard  dans  l'os,  après  avoir  aidé 
à  détremper  le  mélange  dans  le  vase,  qui  aurait  servi  à  cet 
effet. 

Parmi  les  divers  produits  de  l'industrie  humaine  trouvés 
dans  le  dépôt  supérieur  de  cette  grotte  et  qui  fournissent 
des  données  ethnographiques  intéressantes  sur  la  tribu  qui 


vn 


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g3i 

Va  habitée  à  l'époque  néolithique,  l'attention  doit  se  porter 
sur  la  belle  série  de  haches  polies,  toutes  à  bord  tranchant  et 
dont  quelques-unes  présentent  un  état  de  conservation  aussi 
parfait  que  si  elles  venaient  d'être  fabriquées  (pi.  a  et  x) .  Ces 
haches,  au  nombre  de  28,  ont  été  faites  de  différentes  sub- 
stances, calcaire  métamorphique,  schiste  amphibolique,  ba- 
salte et  granité.  Comme  le  montre  le  tableau,  on  les  a  trou- 
vées en  plus  grand  nombre  dans  le  milieu  de  la  salle  prin- 
cipale; une  portion  considérable  cependant,  pas  moins  de 
sept,  se  trouvaient  dans  la  chambre  nord-est.  Il  est  impor- 
tant de  remarquer  que  ces  haches  ont  été  fabriquées  de  dif- 
férentes roches  qui  n'existent  pas  dans  la  localité,  ce  qui 
montre  que  les  troglodytes  de  Furninha  avaient  des  rela- 
tions commerciales  avec  des  régions  plus  ou  moins  éloignées, 
ou  qu'ils  étaient  en  contact  avec  d'autres  tribus  qui  entre- 
tenaient ces  relations  ou  qui  venaient  de  loin  commercer 
avec  eux. 

La  quantité  de  couteaux,  de  pointes  de  lances  et  de  flè- 
ches en  silex  est  très  considérable.  Nous  avons  obtenu  60 
couteaux  plus  ou  moins  parfaits  et  de  grands  fragments  de 
17  autres  de  toutes  les  grandeurs,  depuis  23  millimètres  jus- 
qu'à \6  centimètres  de  longueur. 

Ils  sont  de  différents  types,  la  plupart  ayant  un  tranchant 
de  chaque  côté,  et  ordinairement  la  section  transversale  tra- 
pézoïdale (pi.  m).  Quelques-uns  des  plus  épais  sont  dentelés 
d'un  côté,  ou  des  deux  côtés,  pour  servir  de  scie,  paraissant 
avoir  reçu  cette  destination  seulement  après  avoir  été  em- 
ployés à  couper  et  lorsqu'ils  se  sont  ébréchés  par  ce  pre- 
mier usage. 

Le  plus  grand  couteau  et  en  même  temps  le  plus  beau 
par  la  nature  de  la  substance  dont  il  est  fabriqué,  ^^.  10, 
a  été  trouvé  au  milieu  de  la  salle  principale,  à  4  mètres  de 


1 


a32 

profondeur;  il  s'est  cassé  en  deux  lors  de  l'extraction,  mais 
heureusement  les  deux  fragments  ont  pu  être  rajustés.  Il 
est  en  silex  translucide,  légèrement  rosé,  à  section  trapé- 
zoïdale aplatie,  ayant  23  millimètres  dans  sa  plus  grande 
largeur,  avec  bords  tranchants,  mais  ébréchés  par  l'usage  et 
formant  une  dentelure  irréguliére. 

Un  autre  couteau  très  parfait,jî^.  //,  trouvé  près  du 
précédent,  à  une  bien  moindre  profondeur  cependant  (i*,io)i 
est  en  silex  blanc,  à  section  trapézoïdale,  mesurant  i  J2  mil- 
limètres  de  longueur  et  21  millimètres  dans  sa  plus  grande 
largeur.  Un  autre,  jî^.  /a,  également  très  beau,  trouvé  dans 
le  corridor  d'entrée  près  de  la  saillie  du  rocher  où  commen- 
çait le  dépôt  sablonneux,  mesure  8omilimètres  de  longueur: 
il  est  en  silex  rougeâtre,  à  section  triangulaire,  ayant  l'un  des 
bords  dentelé  en  forme  de  scie,  et  it  montre  un  grand  usage 
à  l'une  de  ses  extrémités. 

Les  pointes  de  flèches,  ^^.  23  à  2p,  J/,  S2,  34  à  3"], 
ont  toutes  les  bords  dentelés  avec  une  perfection  remarqua- 
ble et  quelques-unes  ont  cette  dentelure  très  fine.  Quoiqu'en 
petite  quantité  il  y  en  a  des  types  les  plus  variés,  soit  de 
forme  amygdalaire,  rhomboïdale  ou  quadrangulaire,  soit  de 
forme  triangulaire  avec  les  angles  latéraux  prolongés  en  poin- 
te plus  ou  moins  saillante;  quelquefois  c'est  la  base  qui  s'al- 
longe en  queue,  établissant  ainsi  les  transitions  les  plus  gra- 
duelles entre  ces  formes  fondamentales. 

On  a  trouvé  ici,  comme  c'est  le  cas  dans  les  kioekken- 
moeddings  de  Cabeço  da  Arruda  et  dans  le  dépôt  néolithique 
d'autres  grottes  (Casa  da  Moura,  par  exemple),  quelques  si- 
lex a  forme  trapézoïdale,  à  tranchant  transversal,^^.  i5  et 
s/,  lesquels,  très  vraisemblablement  fixés  à  une  hampe  par 
leur  moindre  base,  étaient  employés  comme  des  armes  de 
jet.  Nos  troglodytes  utilisèrent,  sans  aucun  doute,  des  frag- 


,ï  Google 


233 

ments  des  couteaux  brisés  pour  ta  fabrication  de  ces  ar- 
mes. Sur  les  côtés  du  trapèze  on  voit  les  retouches  que  l'on 
y  a  faites  intentionnellement  pour  arriver  à  une  fonne  déter- 
minée, et  qu'on  ne  saurait  obtenir  que  par  hasard  d'un  seul 
coup. 

Dans  la  petite  collection  ethnographique  de  PAfrique 
occidentale  appartenant  à  la  Section  Géologique  il  se  trou- 
ve, parmi  les  objets  venus  de  Benguella,  une  flèche  en  fer, 
de  forme  semi-lunaire,  que  l'on  emploie  à  la  chasse  pour 
couper  le  jarret  de  l'animal.  Cette  flèche  rappelle  quelque 
peu  ta  forme  des  silex  dont  nous  venons  de  parler,  et  son 
emploi  pourrait  être  semblable.  Quoiqu'il  en  soit  on  recon- 
naît aisément  par  leur  forme,  que  ces  armes  étaient  destinées 
à  couper  et  non  pas  à  percer,  leur  légèreté  et  leurs  petites 
dimensions  nous  montrant  d'ailleurs  qu'elles  étaient  très 
propres  à  être  lancées. 

Les  deux  pointes  de  javelot,  trouvées  dans  la  salle  prin- 
cipale auprès  de  la  paroi  ouest,  sont  de  formes  différentes, 
l'une  et  l'autre  mesurant  lo  centimètres  de  longueur.  L'une 
de  ces  pointes,  fig.  3o,  trouvée  entière  mais  étant  moins 
parfaite  que  l'autre,  est  en  silex  gris-noirStre,  de  forme  sub- 
triangulaire et  mesure  26  millimètres  de  largeur  à  la  base. 
L'autre,jî^.  3J,  de  forme  pentagonale,  plus  élégante  mais 
cassée  à  la  pointe,  est  en  silex  brunâtre  et  mesure  41  mil- 
limètres de  largeur  entre  les  deux  angles  latéraux. 

Nous  devons  encore  citer  parmi  les  plus  notables  in- 
struments de  pierre,  un  grand  éclat  de  calcédoine  qui  s'est 
malheureusement  cassé  lors  de  l'extraction;  il  est  de  forme 
presque  demi-circulaire,  de  80  millimètres  de  diamètre,  et 
présente  un  tranchant  de  chaque  côté;  il  a  été  lustré  et  usé 
par  les  eaux.  C'était  sans  doute  un  radoir  de  l'époque  pa- 
léolithique, dont  nos  troglodytes  de  Furninha  avaient  pro- 


,ï  Google 


234 

fité  postérieurement,  ou  qu'ils  avaient  conservé  uniquement 
à  cause  de  la  beauté  de  la  matière  dont  il  est  fait.  Il  faut 
citer  également  un  beau  couteau  ou  grattoir  de  Ja  même 
substance,  de  forme  allongée  et  de  section  triangulaire,  ayant 
l'un  des  bords  curviligne  et  mesurant  88  millimètres  de  lon- 
gueur et  42  millimètres  de  largeur.  Cette  pièce  a  aussi  été  très 
roulé;  elle  appartient  donc  à  l'époque  paléolithique,  ayant  été 
taillée  du  même  fragment  de  calcédoine  que  le  spécimen  pré- 
cédent. 

Nous  avons  trouvé  de  plus,  dans  la  salle  principale,  deux 
plaques  trapézoïdales  de  schiste  l'une  au  bout  du  corridor 
d'entrée,  et  l'autre  au  milieu  de  la  salle.  La  première, 
fig.  3g^  est  d'ardoise  ordinaire;  elle  a  une  face  ornée  de 
bandes  en  chevrons  alternativement  unies  et  couvertes  de 
traits  croisés.  L'autre  plaque  est  de  schiste  très  micacé, 
luisant,  et  par  cette  raison  peut-être  n'aurait  pas  nécessité 
de  dessins  sur  la  surface.  Toutes  les  deux  ont  les  angles 
arrondis  et  un  trou  circulaire  de  suspension  du  côté  de  la 
moindre  base,  pour  être  portées  comme  enseigne  ou  comme 
amulette. 

Parmi  les  objets  d'ornement  il  est  surtout  à  remarquer 
une  épingle  en  os,  incomplète,  _;î^.  40^  dont  la  tête  est  un 
petit  cylindre  orné  de  stries  parallèles  à  la  base,  dans  le- 
quel on  a  introduit  par  pression  un  stylet  également  en  os, 
et  qui  en  formait  la  pointe.  Deux  grosses  perles  en  os,  Jig:  4S 
et  4ff,  d'autres  plus  petites  en  callaïs  ou  en  serpentine, 
fig.  61  à  64,  une  défense  de  sanglier  façonnée,  très  usée  à  la 
surface  et  percée  d'un  trou  du  côté  de  la  racine,^^.  5p, 
et  une  dent  canine  de  chien,  trouée  aussi  à  la  racine  pour  être 
enfilée  en  colUer,7î^.  54,  complètent  l'inventaire  des  arti- 
cles de  parure  rencontrés  dans  le  dépôt  supérieur  de  Fur- 
ninha,  et  qui  à  la  vérité,  n'indiquent  pas  un  goût  aussi  raf- 


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235 

fine,  chez  cette  tribu  troglodjte,  que  celui  qui  a  été  observé 
dans  d'autres  tribus  habitant  aussi  nos  grottes  pendant 
l'époque  néolithique. 


Sous  la  couche  de  terre  noire  composant  le  dépôt  su- 
périeur, se  trouvait  te  dépôt  des  sables  quaternaires  généra- 
lement tins  et  en  majeure  partie  meubles,  de  couleur  jau- 
nâtre, contenant  des  cailloux  roulés,  de  petits  galets  quart- 
zeux,  plusieurs  instruments  et  éclats  de  silex,  et  quantité  d'os 
d'animaux  distribués  en  divers  niveaux. 

Dans  le  corridor  qui  donne  accès  à  la  salle  principale  et 
dans  le  petit  corridor  qui  communique  avec  la  chambre  nord- 
est,  ce  dépôt  n'existait  pas;  on  passait  immédiatement  de 
la  terre  noire  supérieure  au  calcaire  jurassique  du  fond  de 
la  grotte. 

Dans  la  salle  principale,  sous  la  grande  coupole,  le  dé- 
pôt, comme  nous  l'avons  dît,  avait  très  peu  de  profondeur; 
la  terre  supérieure  en  formait  presque  toute  l'épaisseur. 
L'excavation  du  terrain  supérieur  fit  cependant  découvrir 
dans  la  branche  méridionale  de  la  grotte,  où  les  sables  sous- 
jacents  avaient  au  contraire  une  très  grande  épaisseur,un  trou 
vertical  ou  puits  naturel  de  3  à  4  mètres  de  diamètre  à  l'ou- 
verture, lequel  allait  en  se  rétrécissant  vers  le  fond  et  était 
entièrement  rempli  par  les  sables  quaternaires.  Ce  fut  dans 
ce  puits  et  près  de  son  ouverture  au  fond  de  la  grotte, 
que  l'on  a  rencontré  les  dépouilles  de  la  faune  quaternaire, 
représentées  par  des  pièces  provenant  de  squelettes  de  dif- 
férents animaux  et  aussi  par  d'abondants  coprolithes,  les  os 
se  montrant  accumulés  en  diverses  strates  séparées  par 


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236 

d'autres  beaucoup  plus  épaisses,  qui  en  étaient  totalement 
dépourvus. 

L'état  fragmentaire  dans  lequel  se  trouve  une  grande 
partie  des  ossements,  nous  montre  que  les  animaux  auxquels 
ils  appartenaient  ont  servi  de  nourriture  à  l'homme.  D'un 
autre  côté  les  nombreux  coprolithes  d'hyène,  ainsi  qu'un 
crâne  d'ours  et  d'autres  ossements  portant  la  trace  de  leurs 
dents,  nous  font  voir  que  la  grotte  a  aussi  servi  de  repaire 
à  ces  animaux.  En  outre,  les  conditions  où  se  sont  trouvés 
ces  os,  dont  beaucoup  existaient  dans  le  dépôt,  non  seule- 
ment brisés  mais  roulés,  fait  voir  qu'ils  avaient  subi  l'action 
des  courants  diluviens,  qui  ont  pénétré  dans  la  grotte  à  di- 
verses reprises,  celle-ci  ayant  été  alternativement  occupée 
par  l'homme  et  par  les  hyènes,  à  différents  intervalles:  mais 
on  ne  peut  pas  connaître  par  ces  pièces  détachées,  si  quel- 
ques animaux  auraient  été  surpris  dans  la  grotte  lorsque 
les  courants  quaternaires  y  pénétrèrent,  car  il  ne  s'y  est 
rencontré  aucun  squelette  entier;  au  contraire  le  nombre 
des  individus  dont  l'existence  est  révélée  par  certaines  piè- 
ces, comme  les  mâchoires,  par  exemple,  est  de  beaucoup 
supérieur  à  celui  que  les  autres  os  révèlent.  Cependant 
l'abondance  des  coprolithes  et  la  quantité  d'os  longs  d'hyène 
qui  ont  été  rencontrés  entiers,  surtout  dans  la  partie  supé- 
rieure du  3''"  niveau,  à  la  profondeiu-  de  6  mètres,  fait  ac- 
cepter l'hypothèse,  car  une  grande  quantité  de  ces  os  au- 
raient pu  être  entraînés  hors  de  la  grotte  par  ces  mêmes 
courants. 

Comme  il  arrive,  cependant,  que  le  manque  d'ossements 
a  lieu  principalement  pour  les  animaux  de  plus  grande  taille, 
comme  le  cheval,  le  bœuf  et  l'ours,  il  est  assez  naturel  de 
supposer  que  ces  animaux  aient  été  dépecés  dans  le  lieu  même 
Pti  ils  oi)t  été  tués,  nos  troglodytes  y  ayant  fait  le  choix 


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237 

des  parties  qu'ils  préféraient  et  abandonnant  le  reste.  C'est 
l'hypothèse  à  laquelle  nous  avons  eu  déjà  recours  pour  ex- 
pliquer la  disproportion  des  pièces  du  squelette  humain  dans 
le  dépôt  supérieur,  en  nous  basant  sur  des  faits  analogues. 

Une  observation  intéressante  et  qui,  selon  nous,  vient 
corroborer  l'hypothèse  que  nous  venons  de  présenter — que 
les  os  d'animaux  rencontrés  sont  en  grande  partie  les  res- 
tes de  la  nourriture  de  nos  troglodytes,  c'est  que  le  nombre 
des  éclats  d'os  est  vraiment  remarquable,  et  que  dans  le 
puits,  la  plus  grande  quantité  de  ces  os  se  trouvait  appuyée 
contre  la  paroi  intérieure  ou  du  côté  de  la  galerie,  c'est-à- 
dire  du  côté  d'où  les  sables  seraient  tombées  dans  le  puits, 
comme  du  reste  il  était  naturel  d'arriver,  les  eaux  se  pré- 
cipitant sur  la  paroi  opposée. 

L'existence  de  l'homme  à  l'époque  quaternaire  dans  cette 
grotte  est  d'ailleurs  prouvée  directement  par  la  découverte 
d'un  petit  fragment  de  maxillaire  inférieur,  de  très  petites 
dimensions,  paraissant  avoir  appartenu  à  un  enfant  (pt.  i  a, 
fig.  I  »).  Cette  pièce  est  trop  incomplète  pour  que  l'on  en 
déduise  quelques  caractères  anatomiques;  elle  a  cependant 
l'inestimable  valeur  de  prouver  indubitablement  la  coexis- 
tence du  genre  humain  avec  les  différentes  espèces  de  mam- 
mifères renfermés  dans  la  même  couche. 

Parmi  les  instruments  découverts  je  ferai  surtout  re- 
marquer une  belle  hache  de  silex  en  forme  d'amande  du 
type  de  Saint-Acheul  (pi.  i),  un  petit  couteau  de  même  ma- 
tière (pi.  n,fig.  5)  et  quelques  pointes  tant  en  silex  qu'en 
quartz,jîg-.  3,  4,  6,  7.  Je' mentionnerai  aussi  quelques  os 
incisés,Jî^.  2. 

La  faune  quaternaire  que  nous  avons  découverte  dans 
cette  grotte  est  riche  en  espèces,  et  beaucoup  d'entre  elles 
sont  représentées  par  de  nombreux  individus;  mais  outre 


^P^ 


238 

que  ces  espèces  ne  sont  pas  également  bien  représentées 
dans  tous  les  niveaux,  nous  ne  possédons  pas  les  moyens 
de  comparaison  indispensables  pour  les  déterminer  toutes 
avec  sûreté.  Cependant,  je  crois  qu^il  est  de  quelque  utilité 
de  donner  dans  un  tableau,  avec  les  réserves  nécessaires 
quant  à  leur  détermination,  la  distribution  de  ces  restes  se- 
Ion  les  profondeurs  où  ils  ont  été  trouvés,  avant  de  faire  les 
considérations  que  la  distribution  de  ces  os  dans  les  divers 
niveaux  nous  a  suggérées. 

Avant  de  présenter  ce  tableau,  je  tiens  à  faire  remar- 
quer qu'il  ne  peut  y  avoir  eu  mélange  -entre  les  restes  de 
l'époque  quaternaire  et  ceux  des  périodes  plus  récentes.  Le 
puits  qui  m'a  fourni  les  différentes  espèces  d^animaux  compo- 
sant la  faune  quaternaire  de  cette  grotte,  contenait  sept  ni- 
veaux fossilifères  séparés  les  uns  des  autres  par  d'épais  bancs 
de  sable  absolument  dépourvus  de  fossiles,  et  indiquant 
diverses  irruptions  des  eaux  qui  séparent  les  différentes 
phases  d'habitation  de  la  grone. 

On  doit  encore  remarquer  l'association  dans  la  même 
strate  d'éclats  d'os  très  roulés  par  les  eaux  joints  à  d'autres 
qui  ne  le  sont  point  du  tout,  et  avec  des  os  entiers  qui  n'ont 
pas  souffert  le  moindre  dégât,  ce  qui  prouve  que  les  pre- 
miers y  furent  introduits  par  l'homme  et  ont  été  exposés  en- 
suite à  l'action  des  courants  de  l'époque  quaternaire,  qui  au- 
raient amené  des  sables  dans  la  grotte  à  diverses  reprises. 


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23g 

L'inspection  de  ce  tableau  démontre  qu'à  l'exception  des 
coquilles  marines,  qui  occupent  uniquement  la  base  du  dépôt 
et  qui  furent  introduites  les  premières  dans  la  grotte,  et  des 
chéloniens  et  des  poissons,  dont  les  restes,  d'ailleurs  très 
rares,  apparaissent  sporadiquement  à  diverses  hauteurs,  la 
distribution  des  différents  types  génériques  est,  à  peu  de  dif- 
férence près,  la  même  dans  toute  l'épaisseur  du  dépôt.  Quel- 
ques espèces  même  ont  été  rencontrées  k  travers  toute  l'épais- 
seur des  sables,  quoique  l'introduction  de  ces  sables  dans 
ta  grotte  ait  été  successive,  c'est-à-dire  que  le  remplissage 
soit  dû  à  l'action  des  courants  qui  y  pénétrèrent  autant  de 
fois  du  moins  qu'il  y  avait  de  strates  ossifères  différentes. 

Parmi  toutes  les  espèces  du  tableau  celle  que  nous  pos- 
sédons du  genre  Lepus,  d'une  taille  un  peu  plus  grande,  mais 
très  voisine  du  lapin  sauvage  commun  (L.  cuniculus)^  est 
la  plus  généralement  répandue,  et  elle  est  en  même  temps 
une  de  celles  dont  les  restes  sont  les  plus  abondants;  ils  oc- 
cupent toute  l'épaisseur  du  dépôt,  depuis  la  base  jusqu'au 
niveau  culminant,  ce  qui  prouve  que  durant  l'époque  qua- 
ternaire dans  notre  pays  cette  espèce  a  toujours  fait  une 
partie  très  notable  de  la  nourriture  de  nos  troglodytes,  sur- 
tout vers  la  fin  de  cette  époque,  comme  le  montre  le  dépôt 
inférieur  de  Casa  da  Moura  {Cesareda),  où  par  le  nombre 
des  mâchoires  inférieures  on  reconnaît  les  restes  de  bien 
plus  de  1000  individus  de  cette  espèce! 

Viennent  ensuite  par  ordre  de  leur  abondance  les  res- 
tes des  carnivores:  Hjaena,  Ursus,  puis  diverses  espèces 
de  Felis  et  de  Cams\  comparées.à  ces  carnivores  et  au  ron- 
geur ci-dessus  désigné,  toutes  les  autres  espèces  peuvent  être 
considérées  comme  rares. 

Parmi  les  restes  d'hyène,  on  peut  facilement  distin- 
guer deux  espèces;  l'une  plus  fréquente, mtimement  liée  avec 
CR.  19 


,ïGo(^|l^ 


H.  pulgaris,  qui  habite  actuellement  le  nord  de  l'Afrique, 
et  l'autre,  beaucoup  plus  rare  et  de  plus  grande  taille,  que 
nous  supposons  être  le  H.  prisca  (Marcel  de  Serres}. 

La  présence  de  la  première  espèce  dans  la  grotte  de 
Furninha  est  un  fait  très  intéressant,  car  dans  une  autre 
grotte,  près  de  Cercal,  récemment  explorée  par  mon  illustre 
chef  M.  Carlos  Ribeiro,  grotte  qui  n'est  qu'à  une  faible  dis- 
tance de  celle  de  Furninha  {environ  Sy  kilomètres),  cette  es- 
pèce paraît  manquer,  et  à  sa  place  on  y  a  découvert  le 
H.  spelaea  qui  a,  comme  l'on  sait,  les  plus  intimes  relations 
d'affinité  avec  le  H.  croctita,  qui  habite  actuellement  le  sud 
de  l'Afrique.  Nous  avons  par  conséquent  la  certitude  que 
dans  l'époque  quaternaire,  ou  de  la  formation  du  dépôt  in- 
férieur de  nos  grottes,  il  a  existé  dans  notre  pays  et  pres- 
que réunies,  deux  espèces  qui  actuellement  habitent  des 
points  géographiques  si  distants,  quoique  dans  la  même  La- 
titude à  peu  près,  l'une  dans  l'hémisphère  boréal  et  Tautre 
dans  l'hémisphère  austral. 

Si,  à  l'exemple  de  Schmerlïng,  nous  nous  guidons  par 
ta  taille  des  individus,  c'est-à-dire  par  la  grandeur  des  di- 
verses pièces  du  squelette,  nous  sommes  amenés  à  recon- 
naître, dans  notre  grotte,  l'existence  de  4  ou  même  de 
5  formes  différentes  du  genre  Ursus.  Blainville  a  cepen- 
dant rapporté  toutes  ces  formes  à  une  seule  espèce,  l'ours 
actuel  d'Europe,  et  il  suppose,  que  les  5  espèces  et  les  3 
variétés  fossiles  indiquées  par  Schmerling  représentent  à 
peine  des  différences  de  sexe  et  de  taille  de  cette  unique  es- 
pèce, qui  dans  l'époque  quaternaire  a  aneint  une  taille  gigan- 
tesque {Ostéogr.,  t.  II,  genre  Ursus,  p.  87).  Dans  les  diver- 
ses variétés  trouvées  dans  notre  grotte,  nous  avons  cru  re- 
connaître, cependant,  les  deux  espèces  généralement  admi- 
ses, U.  spelaeus  et  U.  priscus. 


,ï  Google 


En  adoptant,  pour  plus  de  clarté,  la  nomenclature  du 
savant  paléontologiste  belge,  nous  dirons  que  la  plus  grande 
espèce  (U.  giganteus)  est  représentée  seulement  dans  un 
des  niveaux  supérieurs  par  la  moitié  supérieure  d'un  tibia 
et  par  l'extrémité  supérieure  d'un  cubitus,  la  première  pièce 
surpassant  peut-être  en  dimensions  le  plus  grand  tibia  re- 
présenté par  Schmerling.  Les  autres  espèces  occupent  les  ni- 
veaux plus  inférieurs,  mais  il  reste  à  dénommer  un  grand 
nombre  de  fragments,  pour  la  plupart,  il  est  vrai,  indé- 
terminables, représentant  ce  genre  de  Carnivore  jusqu^au 
niveau  le  plus  supérieur,  maïs  parmi  lesquels  VU.  giganteus 
ne  se  trouve  pas  compris. 

La  plus  grande  partie  de  ces  ossements,  surtout  les  os 
longs,  se  trouvent  brisés,  témoignant  que  ce  Carnivore  en- 
trait aussi  en  partie  notable  dans  la  nourriture  de  nos  tro- 
glodytes quaternaires. 

Dans  le  genre  Felis  il  est  à  remarquer,  d'un  côté,  le 
nombre  d'espèces  distinctes,  pas  moins  de  5,  et  qui  presque 
toutes  ont  disparu  de  notre  pays,  et  d'un  autre  côté,  l'ab- 
sence de  F.  spelaea,  dont  aucun  vestige  ne  permet  de  soup- 
çonner l'existence  dans  nos  cavernes,  mais  qui  accompagne  si 
fréquemment  VU.  spelaeus  exVHyaena  spelaea,  dans  d'autres 
pays  plus  septentrionaux.  Ne  pouvant  pas  désigner  par  leurs 
noms  spécifiques  la  plus  grande  partie  des  formes  de  ce 
genre,  je  me  suis  servi  des  lettres  de  Palphabet  grec  qui  ont 
rapport  aux  figures  déjà  données  des  mêmes  espèces  dans 
mon  mémoire  sur  les  grottes  de  Cesareda  (1867). 

Les  restes  de  Canis  appartiennent  peut-être  à  4  espè- 
ces diflcrentes,  2  desquelles  sont  évidemment  le  loup  et  le 
renard  actuels  de  l'Europe.  Une  troisième  espèce,  de  taille 
beaucoup  plus  grande  que  te  loup,  est  représentée  seule- 
ment à  mi-hauteur  du  dépôt,  et  par  une  singulière  anoma- 


„Gooi^ 


24^ 

lie,  nous  n'en  avons  obtenu  qu'un  certain  nombre  de  radius; 
il  manque  toutes  les  autres  pièces  du  squelene  ainsi  que 
celles  du  système  dentaire. 

Les  ruminants  qui  occupent  plusieurs  niveaux  sucessîfs, 
et  qui  sont  représentés  par  diverses  formes  que  nous  avons 
désignées  collectivement  sous  les  noms  génériques  de  Cer- 
PUS  et  de  Bos,  n'ayant  pas  pu  en  déterminer  les  espèces, 
sont  très  loin,  surtout  les  derniers,  de  se  présenter  aussi 
abondamment  que  les  restes  de  carnivores.  Le  motif  de 
cette  différence  consiste  peut-être  en  ce  que  ces  animaux 
vivaient  alors  les  uns  et  les  autres  à  l'état  sauvage  ne  pou- 
vant pas  subsister  dans  ces  lieux  mêmes,  faute  de  pâtura- 
ges abondants. 

Les  solipèdes  ne  sont  guère  représentés  dans  notre 
grotte;  les  restes  d'Equus  se  réduisent  à  un  astragale  et 
une  seconde  phalange  rencontrés  à  des  hauteurs  très  diver- 
ses, et  en  des  points  différents  de  la  grotte,  le  premier  dans 
la  galerie  principale,  le  second  dans  le  puits. 

Enfin,  l'attention  doit  se  porter  sur  la  rencontre  d'une 
dent  molaire,  et  de  fragments  d'autres  dents  d'un  individu 
très  jeune,  ruminant,  différent  de  tous  les  autres  rencontrés 
dans  la  grotte,  très  probablement  appartenant  au  genre 
Rhinocéros  et  que  nous  rapportons,  avec  la  plus  grande  ré- 
serve au  Rhinocéros  tichorhinus.  Si  cette  détermination  se 
confirme,  ce  sera  l'unique  vestige  découvert  jusqu'ici  en  Por- 
tugal de  l'existence  de  cette  espèce,  qui  est  si  générale- 
ment répandue  dans  d'autres  régions  quaternaires  de  l'Eu- 
rope. 

Pour  compléter  l'énumération  des  espèces  indiquées  dans 
le  tableau  il  ne  manque  plus  qu'un  mot  au  sujet  des  oiseaux, 
dont  les  restes  sont  très  abondants  et  appartiennent  à  plu- 
sieurs espèces,  dont  l'une  de  très  grande  taille.  Par  contre,  les 


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243 

batraciens  et  les  poissons,  cofhme  nous  l'avons  déjà  dit,  sont 
à  peine  représentés,  de  même  que  les  testacés,  dont  nous 
n'avons  trouvé  qu'une  petite  espèce  d'//e//x,  le  Patella  vul- 
gata  et  un  seul  exemplaire  de  Litîorina  littorea^  ces  deux 
derniers  occupant  la  base  du  dépôt. 

1""  Niveat^  ossifôre.— La  partie  la  plus  profonde  des 
dépôts  de  notre  grotte,  à  g^iSo  en  contre-bas  de  la  surface 
des  sables,  ou  io"',3o  au-dessous  de  l'ancien  sol  de  la  grotte, 
près  de  l'ouverture  du  puits,  consistait  en  une  couche  de  gros 
cailloux,  ou  mieux  de  petites  masses  roulées,  dont  les  plus  vo- 
lumineuses atteignent  la  grosseur  du  poing.  Ces  cailloux  très 
arrondis,  la  majeure  partie  de  silex,  et  une  moindre  partie  de 
granité  rougeâtre  de  Berlenga',  de  quartz  blanc  et  de  quar- 
tzite  gris,  sont  empâtés  dans  du  calcaire  stalagmitique  [kaïk- 
sinter)  formant  un  conglomérat  très  grossier.  Ce  dépôt  ne 
s'est  trouvé  qu'au  fond  du  puits,  où  il  formait  une  couche 
de  plus  d'un  mètre  d'épaisseur,  les  cailloux  étant  si  intime- 
ment liés  ensemble,  que  très  souvent  il  était  plus  facile  de 
les  briser  que  de  les  séparer  les  uns  des  autres,  et  plus  dif- 
ficile encore  de  les  arracher  à  la  roche  des  parois.  Là  où 
les  gros  cailloux  font  défaut  ce  dépôt  passe  en  partie  à  un 
grès  poreux  et  grossier,  contenant  beaucoup  de  détritus  de 
coquilles  et  montrant  bien  l'aspect  d'une  formation  littorale. 
L'origine  de  ces  cailloux  révèle  un  fait  géologique  im- 
portant, la  dénudation  contemporaine  des  couches  calcai- 
res du  Dogger  que  l'on  voit  à  Baleal  et  à  Cesareda,  où  el- 
les se  montrent  au  jour,  renfermant  une  grande  quantité  de 
concrétions  ou  de  rognons  siliceux,  qui  se  détachant  des 

'  Petite  île  granitique  en  face  de  la  péninsule  de  Péniche,  éloignée 
de  1 1  kilomètres  vers  le  nord-ouest  de  notre  grotte. 


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244_ 
couches  par  la  puissante  actîofi  des  courants  de  d<inudatioii 
à  Tépoque  quaternaire,  avaient  naturellement  offert  plus  de 
résistance  à  leur  destraction  que  les  couches  calcaires  qui 
les  contenaient. 

En  cassant  ces  masses  concrétionnées  ou  rognons,  on 
voit  que  dans  la  partie  intérieure  elles  présentent  la  couleur 
grise  ordinaire  du  silex  pyromaque,  mais  environné  d'une 
épaisse  croûte  blanche,  d'aspect  terreux,  que  je  suppose  être 
due  plutôt  à  l'altération  du  silex  qu'à  la  manière  même  de 
formation  de  ces  rognons  qui,  ayant  une  origine  chimique 
ou  étant  formés  par  attraction  moléculaire  au  sein  de  la  cou- 
che déjà  déposée,  ont  dû  se  fondre  graduellement  dans  la 
masse  du  calcaire,  ayant  pour  limite  dç  grandeur  la  sphère 
d'action  où  les  forces  moléculaires  ont  pu  s'exercer. 

Quelques-uns  de  ces  cailloux  présentent  des  fossettes 
semblables  à  celles  des  cailloux  impressionnés;  mais  ces 
impressions  ont  été  peut-être  produites  lors  de  la  formation 
de  ces  rognons.  D'autres  masses  montrent  une  ou  plusieurs 
surfaces  lisses,  ou  d'usure  par  le  frottement  que  les  cailloux 
ont  souffert  dans  la  grotte  les  uns  contre  les  autres.  Enfin 
quelques-unes  présentent  des  dépressions  conchoïdales  à  sur- 
face lisse,  qui  ont  été  vraisemblablement  produites  par  la  sé- 
paration d'éclats,  due  au  choc  des  unes  contre  les  autres; 
je  n'oserais  pas  attribuer  à  une  autre  origine  un  petit  nucléus 
de  silex  de  forme  polyédrique  irrégulière,  qu'on  voit  encore 
encroûté  dans  le  dépôt  calcaire. 

II  ne  peut  donc  y  avoir  de  doute  que  les  cailloux  du 
conglomérat  ne  proviennent  tous  des  roches  de  la  localité, 
ceux  de  quartz  pouvant  provenir  des  couches  de  grès  gros- 
siers crétacés,  ou  de  filons  coupant  la  roche  granitique;  et 
nous  pouvons  ajouter  qu'il  est  aussi  très  probable  que  le 
matériel  dont  les  troglodytes  de  cette  grotte  et  de  celles  de 


,ï  Google 


2É. 

Cesareda  se  servaient  pour  la  fabrication  des  instruments 
en  silex,  du  moins  dans  l'époque  paléolithique,  avait  la  mê- 
me provenance,  sans  qu'il  y  eut  besoin  d'aller  le  chercher 
plus  loin. 

Les  restes  d'animaux  que  l'on  a  rencontrés  dans  cette 
partie  la  plus  profonde  des  dépôts  de  la  grotte,  sont  en  vé- 
rité peu  nombreux  et  l'on  comprend  qu'ils  n'ont  pu  être 
conservés  que  dans  des  conditions  exceptionnelles,  ayant 
été  sans  doute  enlevés  du  sol  de  la  grotte,  où  ils  se  trou- 
vaient, et  entraînés  jusque  là  par  les  courants  diluviens,  qui 
à  divers  intervalles  ont  balayé  le  sol  de  la  grotte.  On  a  re- 
cueilli toutefois  assez  de  coquilles  de  Palella  (environ  une 
vingtaine  d'exemplaires,  presque  tous  brisés  et  très  roulés) 
de  l'espèce  P.  vulgata,  encore  vivante  dans  la  localité;  un 
exemplaire  de  Liltorina  littorea,  qui  offre  la  singularité  d'être 
fossilisée  et  encroûtée  dans  le  grès,  la  coquille  étant  rem- 
placée par  du  spath  calcaire  et  conservant  l'intérieur  par- 
faitement vide;  4  omoplates  et  l'extrémité  inférieure  d'un 
tibia  d'oiseau,  probablement  palmipède;  un  maxillaire  infé- 
rieur, un  humérus  et  un  fémur  de  grand  lapin  (Leptts  aini- 
culus);  2  métatarses  d'ours,  et  finalement  des  fragments  et 
de  petits  éclats  d'os  longs  de  carnivores,  dont  un  très  roulé, 
et  qui  représentent  sans  doute,  aussi  bien  que  les  autres 
os,  les  restes  de  l'alimentation  de  nos  troglodytes,  dans  cette 
période  très  reculée  d'habitation  de  la  grotte. 

Immédiatement  au-dessus  du  niveau  précédent  il  y  avait 
une  strate  de  quelques  décimètres  d'épaisseur  de  calcaire 
stalagmitique,  que  l'on  doit  considérer  comme  formant  partie 
de  la  même  couche  ossifère.  Ce  calcaire  renferme  en  forte 
proportion  des  grains  de  sable  et  quelques  gros  cailloux  très 
roulés  du  granité  de  Berlenga  et  de  quartz,  et  encore  une 
grande  quantité  de  masses  arrondies,  et  aussi  très  usées 


,ï  Google 


à  la  surface,  de  silex  concrétionné,  montrant  dans  la  croûte 
extérieure  et  quelquefois  dans  toute  leur  épaisseur  la  cou- 
leur blanche  du  silex  terreux.  Un  grand  nombre  des  cail- 
loux de  silex  sont  fissurés,  et  de  beaucoup  d'entre  eux  on  a 
détaché  des  éclats  sur  lesquels  le  travail  humain  peut  se 
reconnaître.  Il  est  évident  que  ce  calcaire  stalagmitique  n'est 
pas  une  formation  contemporaine  de  l'introduction  du  dépôt 
sableux  dans  la  grotte,  mais  qu'il  est  de  date  postérieure, 
les  eaux  qui  tombaient  de  la  voûte  ou  qui  ruisselaient  le  long 
des  parois,  s'étant  infiltrées  à  travers  les  sables  et  s'accumu- 
lant  dans  la  partie  la  plus  profonde  de  la  grotte  où  elles 
laissaient  précipiter  le  calcaire.  C'est  pourquoi  celui-ci  man- 
que presque  absolument  dans  les  niveaux  supérieurs  où  les 
sables  sont  meubles,  sauf  dans  quelques  points  prés  des  pa- 
rois, où  ils  se  montrent  au  contraire  fonement  cimentés. 

Les  restes  d'animaux  rencontrés  dans  cette  partie  su- 
périeure du  i"  niveau  sont  en  petit  nombre  et  peuvent  se 
rapporter  aux  espèces  suivantes: 

Hjaena:  fragments  de  mâchoire  et  dents  détaches. 

Lepus  cuniculus,  maxillaires  supérieurs  et  inférieurs  et  dif- 
férents os  du  squelette,  appartenant  h  4  individus  au 
moins. 

Oiseau  ind.,  un  cubitus. 

Patella,  moule  interne  empâté  dans  la  roche. 

Coprolithe,  très  probablement  d'hyène. 

Cette  dernière  trouvaille  me  paraît  importante  pour  dé- 
montrer que  dès  les  premiers  temps  où  cette  grotte  fut  ha- 
bitée ou  plutôt  fréquentée  par  l'homme,  l'hyène  aussi  y 
pénétrait.  Nous  pouvons  conjecturer  que  ce  fut  dans  la 
grotte  même  que  nos  troglodytes  en  lutte  constante  avec  ces 


^ 


„Google 


_ï47_ 
animaux,  s'emparèrent  parfois  de  quelques-uns  d'entre  eux, 
en'se  servant  peut-être  de  la  ruse  employée  par  les  sauvages 
actuels  et  que  M.  Edouard  Dupont  nous  indique  dans  sa 
description  magistrale  des  cavernes  de  la  Belgique*.  Cette 
ruse,  à  laquelle  la  grotte  se  prêtait  à  merveille,  consistait 
dans  Tobstruction  de  l'entrée  de  la  grotte  avec  des  fagots 
de  broussailles,  auxquels  on  mettait  le  feu  dès  que  l'on 
s'apercevait  que  les  animaux  y  étaient  renfermés'. 

2*""  Niveau  osslfére. — La  couche  ossifère  dont  nous 
avons  parlé  était  séparée  de  la  couche  immédiatement  su- 
périeure par  un  intervalle  de  plus  d'un  mètre  de  sables 
meubles  très  fins  où  l'on  ne  rencontra  aucun  vestige  d'osse- 
ments. Cette  couche  dénuée  de  restes  d'animaux  représente 
la  première  irruption  des  courants  diluviens  dans  la  grotte 
depuis  qu'elle  fût  habitée.  En  effet,  l'existence  de  différents 
niveaux  ossiftres  séparés  par  des  nappes  de  sable  où  les  res- 
tes d'animaux  manquent  absolument,  prouve  selon  nous,  que 
l'introduction  de  ces  restes  n'a  pas  été  simultanée,  c'est-à- 
dire  faite  tout  d'un  coup,  mais  bien  par  intervalles,  chaque 
couche  devant  alternativement  représenter  une  période  dis- 
tincte d'occupation  de  la  grotte  et  de  l'irruption  des  cou- 
rants quaternaires. 

Nous  ne  pouvons  pas  présumer,  vu  la  situation  parti- 
culière de  la  grotte  au  bord  de  la  mer,  que  ce  furent  les 
crues  considérables  de  quelque  cours  d'eau  régulier  qui  ont 

'  L'homme  pendant  les  âges  de  la  pierre  dans  les  environs  de  Di- 
nant-sur-Meuse.  Bruxelles,  i872. 

*  Les  paysans  de  Cesareda  emploient  encore  aujourd'hui  la  m£me 
méthode  pour  la  chasse  de  la  genette  et  du  blaireau,  i 
moins  à  craindre  pourtant  que  quelques  autres  espèces  qui  e 
pendant  l'époque  quaternaire  dans  les  environs  de  Furninha. 


1^ 


848 
produit  ce  résultat,  comme  ce  fut  le  cas  dans  les  cavernes 
de  la  Meuse,  par  exemple. 

Ce  phénomène,  tant  de  fois  répété,  et  à  ce  qu'U  paraît 
avec  une  si  grande  irrégularité,  ne  peut  être  dû  qu'à  l'action 
même  de  la  mer,  qui  à  l''occasion  des  grandes  marées  rendait 
la  grotte  inhabitable  et  y  jetait  de  grands  amas  de  sable 
(ce  qui  expliquerait  l'occupation  alternative  de  la  grotte  par 
l'homme  et  par  les  hyènes);  ou,  en  supposant,  comme  l'on 
ne  peut  pas  s'empêcher  de  le  faire,  qu'à  l'époque  quater- 
naire l'entrée  de  la  grotte  était  très  différente  de  ce  qu'elle 
est  aujourd'hui  et  qu'il  existait  alors  une  barrière  de  rochers 
que  la  mer  dans  des  circonstances  ordinaires  ne  pouvait  pas 
franchir,  mais  qu''elle  a  détruit  successivement,  dans  ce  cas 
les  sables  pourraient  avoir  été  amenés  pas  des  courants  ve- 
nant de  la  surface.  En  tout  cas,  on  doit  remarquer  l'asso- 
ciation, dans  la  même  strate,  d'éclats  d'os  très  roulés  par 
les  eaux,  joints  à  d'autres  qui  ne  le  sont  point  du  tout  et 
avec  des  os  entiers,  qui  n'ont  pas  souffert  le  moindre  dé- 
gât; ce  fait  prouve  que  les  premiers  y  furent  introduits  par 
l'homme,  et  ont  été  exposés  ensuite  à  l'action  des  eaux,  qui, 
comme  nous  Pavons  vu,  auraient  amené  à  diverses  reprises 
les  sables  dans  la  grotte. 

Dans  ce  deuxième  niveau  ossifère  la  faune  mammalogi- 
que  est  mieux  représentée  que  dans  le  niveau  précédent, 
tant  par  le  nombre  d'espèces,  que  par  l'abondance  des  os- 
sements qu'on  y  a  rencontrés.  Nous  pouvons  constater  l'exis- 
tence des  espèces  suivantes: 

Ërinaceus  europaeus^  fragments  de  mâchoires  et  i  humérus. 

Ursus,  3  ou  4  espèces  de  différente  taille,  probablement: 
U.  spelaeus  mi'nor,  U.  Leodiensis  et  U.  priscus  (de 
Schmerling)  et  peut-être  aussi  U.  arctos,  juv. 


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249 
Ce  genre  est  représenté  par  des  fragments  de  maxil- 
laires, dents  détachées,  vertèbres,  fragments  de  côtes, 
plusieurs  os  longs,  la  plupart  incomplets:  humérus, 
cubitus,  radius,  fémurs,  tibias;  os  du  carpe,  du  tarse, 
du  métacarpe,  du  métatarse  et  une  vingtaine  de  pha- 
langes, dont  9  onguéales. 

Mêles  taxuSf  2  fragments  de  maxillaire  supérieur  avec 
quelques  dents  et  un  cubitus. 

Canis  lupus,  crâne  incomplet,  maxillfùres,  dents  détachées 
et  différents  os. 

Canis  sp.,  fémur,  tibia  et  d'autres  os. 

Hyaena  vulgarts^  crâne  incomplet,  maxillaires  supérieurs, 
dents  séparées  et  différents  os  d'individus  adultes  et 
d'autres  encore  très  jeunes,  ceux-ci  prédominant. 

Felis^  2  espèces,  l'une  de  grande  taille  approchant  du 
F.  lynx,  l'autre  beaucoup  plus  petite,  peut-être  F.  ca- 
tus,  ou  Felis  sp,  £';Ies  deux  représentées  par  beaucoup 
d'os  différents,  parmi  lesquels  un  tibia  rot^é. 

Arvicola  ampki'bius,  un  seul  maxillaire  inférieur  gauche. 

Lepus  cuniculus,  restes  de  16  individus  au  moins,  d'après 
ce  que  l'on  peut  juger  par  les  maxillaires  inférieurs. 

Eqitus  caballus,  une  seule  phalange  (la  deuxième). 

Cervus?,  dent  molaire  et  un  os  métacarpien. 

Oiseaux  ind.,  2  ou  3  espèces,  représentées  par  une  grande 
quantité  d'os. 

Il  faut  encore  ajouter  comme  vestiges  de  l'existence 
contemporaine  de  l'homme,  la  rencontre  de  beaucoup  d'éclats 
d'os  longs,  brisés  longïtudinalement,  dont  un  grand  nombre 
ont  été  postérieurement  roulés  ;  la  rencontre  du  nucléus  d'un 

<  V.  Notice  sur  les  grottes  de  Cesareda,  pag.  94,  pi.  11,  fîg.  10. 


..Gexfcî^ 


25o 

rognon  de  silex  blanc  et  d'un  petit  éclat  de  forme  allongée 
qui  peut-être  en  avait  été  détaché  et  ne  paraît  pas  avoir  été 
produit  accidentellement;  enfin  le  travail  évidemment  prati- 
qué sur  quelques  os,  notamment  sur  un  cubitus  de  Feh's. 

Beaucoup  de  ces  os  d'animaux  et  de  ces  éclats  d'os, 
exception  faite  de  ceux  de  l'hyÈne,  ont  été  rongés;  c'est-là 
une  preuve  évidente  que  ce  Carnivore  hantait  la  grotte  et 
profitait  des  restes  des  repas  que  l'homme  y  avait  laissés. 

Ce  qui  est  surtout  remarquable  c'est  la  rencontre  dans 
ce  niveau  ossifère,  de  la  moitié  d'un  radius  d''un  grand  Ca- 
iiis  (très  probablement  C.  lupus  spelaetis)  qui  n'accusait  pas 
un  long  transport  et  dont  l'autre  moitié  a  été  rencontrée 
dans  le  niveau  ossifère  supérieur,  à  i'°,'io  au-dessus  de  celle- 
là.  Les  deux  fragments  ont  pu  parfaitement  s'ajuster,  et  par 
la  différence  de  couleur  de  la  surface  on  reconnaît  qu'il  ont 
été  soumis  à  des  conditions  différentes.  La  fracture  trans- 
versale ne  dénote  pas  l'intervention  humaine;  au  contraire, 
il  est  plus  simple  de  supposer  que  cet  os  ait  été  brisé  acci- 
dentellement, et  que  les  courants  qui  ont  balayé  le  sol  de 
la  grotte,  aient  d'abord  lancé  l'un  des  fragments  dans  le  puits, 
en  même  temps  que  les  autres  restes  d'animaux  qui  se 
trouvaient  à  ce  niveau,  et  y  aient  ensuite  lancé  les  sables 
en  laissant  l'autre  fragment  qui  y  fût  introduit  plus  tard. 
Ce  fait  n'est  pas  cependant  unique:  beaucoup  d'os  d'un 
même  niveau  étaient  brisés  et  leurs  fragments  se  trouvaient 
sépares  de  i°,o  voire  même  de  î",©  dans  le  sens  horizontal. 

36=.  niveau  ossifère. — Au-dessus  du  niveau  que  nous 
venons  de  décrire  succédait,  comme  nous  l'avons  dit,  une  nap- 
pe de  sable  meuble,  de  i°',3o  d'épaisseur,  où  les  os  étaient 
extrêmement  rares,  ce  qui  doit  indiquer,  à  ce  qu'il  paraît, 
la  séparation  de  deux  périodes  distinctes  d'occupation  de 


,ï  Google 


a5i 

la  grotte.  Cette  couche  ossifère  a  l'épaisseur  de  o^i^o  com- 
prise entre  6"",o  et  6",5o  de  profondeur;  cependant  les  os 
n'étaient  pas  distribués  au  hasard  à  cette  hauteur;  ils  y 
formaient  trois  petites  couches  distinctes  séparées  par  de 
minces  lits  de  sable;  nous  avons  cru,  cependant,  convena- 
ble de  les  réunir  dans  un  niveau  unique. 

Dans  ce  3*"*  niveau,  le  plus  riche  par  l'abondance  et 
l'état  plus  parfait  de  conservation  des  exemplaires,  de  même 
que  par  le  nombre  des  espèces  représentées,  les  restes  des 
squelettes  de  l'ours  et  de  l'hyène  étaient  surtout  abondants. 
Il  faut  mentionner  spécialement  un  crâne  presque  complet, 
que  nous  croyons  appartenir  à  l'espèce  U.  pn'scus,  Cuv., 
la  meilleure  pièce  de  ce  genre  que  nous  ayons  obtenue  et 
qui  offre  la  singularité  d'avoir  été  rongée  profondément  dans 
la  région  pariétale  droite  et  aussi  sur  la  crête  sagittale. 

Ce  fait  vient  clairement  prouver  que  la  grotte  servait 
temporairement  de  retraite  aux  hyènes,  ou  au  moins  qu'el- 
les y  pénétraient  pour  profiter  des  restes  des  repas  que  nos 
troglodytes  y  laissaient. 

Mais  ce  qui  est  encore  plus  important,  c'est  la  rencon- 
tre dans  la  partie  supérieure  de  la  couche  ossifère,  à  6  mè- 
tres de  profondeur  de  la  surface  des  sables,  d'un  fragment 
de  maxillaire  inférieur  humain,  de  très  petites  dimensions, 
très  probablement  d'un  enfant,  et  qui  est  représenté  seule- 
ment par  ie  condyle  et  une  partie  de  la  branche  ascendante 
droite  (pi.  i  a,  fig.  i  •). 

Voici  la  liste  des  espèces,  que  nous  avons  pu  détermi- 
ner avec  plus  ou  moins  de  certitude,  trouvées  dans  les  trois 
strates  fossilifères  comprises  dans  cette  couche: 

Vesperttlto,  2  espèces  de  taille  différente. 

Erinaceus  europaeus,  restes  appartenant  à  plusieurs  indivî- 


fl 


gi'-' 


252 

dus;  maxillaires  supérieurs  et  inférieurs,  humérus,  cubi- 
tus, radius,  fémur  et  tibia. 
Ursus.  Grane  incomplet  rongé,  auquel  manquaient  tous 
les  os  de  la  face;  en  outre,  des  maxillaires  inférieurs, 
des  dents  détachées  nombreuses  et  beaucoup  de  piè- 
ces des  différentes  parties  du  squelette,  la  plupart 
cassées,  et  une  énorme  quantité  d'éclats  d'os,  pres- 
que tous  roulés  et  quelques-uns  rongés.  On  doit  surtout 
signaler  un  péroné  entier,  qui  a  été  brisé  et  resoudé 
pendant  la  vie  de  l'individu,  montrant  une  grande  cal- 
losité; ainsi  qu'une  patte  antérieure  droite,  dont  on  a 
trouvé  presque  tous  les  os  réunis  et  qui  a  pu  être  re- 
construite. Les  restes  de  ce  genre  témoignent  de  l'exis- 
tence dans  le  dépôt  d'un  grand  nombre  d'individus; 
on  ne  pourrait  cependant  pas  former  avec  eux  un  seul 
squelette,  ils  ne  représentent  même  pas  toutes  les  diffé- 
rentes parties  qui  le  composent. 

Nous  avons  cru  pouvoir  rapporter  ces  restes  aux  es- 
pèces suivantes: 

U.  spelaeus  minor,  Blum. 

U,  priscus,  Cuv, 

U.  Leodiensis,  Schmerl. 

U.  Arctoideus,  Blum.  (==£/.  planus,  Olien). 

Mêles  taxus,  2  dents  détachées  et  un  humérus  incomplet. 

Canis  lupus,  maxillaires  inférieurs,  dents  détachées,  hu- 
mérus, radius,  fémur,  os  iliaque,  phalanges. 

Canis  pulpes,  maxillaire  inférieur,  canine  détachée,  humé- 
rus incomplet,  fémur,  tibia. 

Canis  sp,  de  grande  taille,  plusieurs  radius  et  une  omo- 
plate et  des  fragments  du  tibia  appartenant  probable- 
ment à  la  mime  espèce.  Il  mérite  d'attirer  l'attention 


,ï  Google 


253 

que  cette  espèce  de  camivore,  peut-être  la  même  dont 
nous  avons  soupçonné  l'existence  dans  le  dépôt  infé- 
rieur de  Casa  da  Moura*,  ne  soit  représentée  que  par 
quelques  radius  entiers,  les  autres  pièces  du  squelette 
faisant  presque  absolument  défaut. 

Mustela  vulgaris,  maxillaire  inférieur  droit. 

Mustela  ou  VivetTo,  3  maxillaires  inférieurs,  incomplets, 
et  une  dent  principale  détachée. 

Hyaena,  restes  abondants  appartenant  probablement  à  3 
espèces  distinctes.  On  a  trouvé  un  crâne  entier  avec 
la  mâchoire  inférieure  correspondante;  en  outre  3  crâ- 
nes, 9  maxillaires  inférieurs  en  parfait  état  de  conser- 
vation, et  fragments  d'autres,  en  partie  d'individus  très 
jeunes  ou  montrant  encore  la  deuxième  évolution  den- 
taire. On  a  de  même  rencontré  beaucoup  de  dents  dé- 
tachées, ainsi  que  des  pièces  de  toutes  les  parties  du 
squelette:  vertèbres,  côtes,  sternum,  omoplates,  humé- 
rus, cubitus,  radius,  os  iliaques,  fémurs,  rotule,  tibias, 
péroné,  os  du  carpe,  du  métacarpe,  du  tarse,  du  méta- 
tarse et  phalanges,  dont  plusieurs  onguéales. 

Les  crânes  et  la  plus  grande  partie  de  ces  os  nous 
paraissent  appartenir  à  l'espèce  H.  vtdgaris  qui  habite 
actuellement  le  nord  de  l'Afrique.  Par  contre  un  ma- 
xillaire inférieur  et  plusieurs  os  longs  pourraient  être 
rapportés  à  VH.prisca  figuré  par  Blainville,(Ostéogr., 
pi.  vni),  qui  a  d'ailleurs  les  plus  grands  rapports  avec  l'es- 
pèce précédente  par  la  disposition  Carnivore  du  système 
dentaire.  Enfin,  un  fragment  de  maxillaire  supérieur  d'un 
individu  très  jeune,  ressemble  à  VH.  crocuta  par  la  dis- 
position du  talon  placé  au  mUieu  de  la  dent  principale. 

'  V.  Nonce  sur  les  grottes  de  Cesareda,  pag,  98,  pi.  111,  fig.  5, 


ogie 


254 
Bien  que  nos  exemplaires  soient  d'une  espèce  de  plus 
grandes  dimensions  que  celle  découverte  dans  l'Au- 
vergne {H.  Perricri^  Croizct  et  Jobert)  qui,  d'après  Blain- 
ville,  se  rapproche  aussi  beaucoup  de  Thyène  de  l'Afri- 
que (H.  vulgaris),  on  arrivera  peut-être  à  établir  qu'ils 
appartiennent  bien  à  cette  espèce. 

Dans  la  plus  grande  mâchoire  les  dents  ne  sont  pas 
aussi  imbriquées  que  dans  les  autres,  ce  caractère  pour- 
tant pourra  dépendre  de  l'âge  de  l'individu. 

Felis,  restes  appartenant  à  4  espèces  différentes  du  moins, 
savoir:  Felis  catus,  Felis  sp.  a,  Felis  sp.  ô,  Felis  sp.  e, 
qui  ont  été  séparées  d'après  l'étude  des  maxillaires  in- 
férieurs et  des  dents  .détachées.  On  a  trouvé  aussi  des 
pièces  des  différentes  parties  du  squelette:  vertèbres, 
sternum  (pièces  séparées),  omoplate  (fragment),  humé- 
rus, radius,  cubitus,  os  iliaque,  fémurs,  rotule,  tibia 
(extrémité  inférieure),  péronés,  os  du  métacarpe,  du 
tarse,  du  métatarse,  et  phalanges. 

Lepus  cuniculus,  ossements  très  nombreux,  des  maxillai- 
res inférieurs  surtout. 

La  taille  de  cette  espèce  fossile  paraît  dépasser  celle 
du  lapin  sauvage  actuel;  parmi  les  fémurs  il  y  en  a  de 
plus  grandes  dimensions  encore,  qui  semblent  approcher 
de  ceux  du  lièvre  (L.  timidusj,  tandis  que  la  plupart  ap- 
partiennent très  probablement  à  l'espèce  nommée. 

Insectivores  ind.,  fémurs  de  3  espèces  différentes. 

Rhinocéros  tichorhinus?,  une  dent  molaire  avec  la  racine 
incomplète  et  qui  probablement  n'aurait  pas  encore 
percé  l'alvéole,  et  fragments  d'autres  dents  qui  nous 
semblent  appartenir  aussi  au  genre  Rhinocéros. 

Cerviis^  restes  appartenant  à  plus  d'une  espèce.  Dents  in- 
cisives et  molaires,  vertèbres  caudales,  humérus  (frag- 


,ï  Google 


ments),  fémurs  (id.),  tibia,  calcanéum,  astragale,  mé- 
tatarsiens (a  extrémités  inférieures  et  a  éclats  longi- 
tudinaux roulés)  et  phalanges. 

'Bos,  4  dents  molaires  appartenant  peut-être  à  deux  espèces 
de  petite  taille,  2  astragales  et  fragments  de  métatarsien. 

Oiseaux  ind.,  ossements  nombreux  appartenant  à  plu- 
sieurs espèces,  dont  l'une  serait  de  très  grande  taille, 
d'après  ce  que  l'on  peut  juger  de  la  longueur  d'un  hu- 
mérus incomplet,  mesurant  o'",277  quoique  l'extrémité 
supérieure  manque. 

Poissons,  5  vertèbres  séparées. 

Ces  os  étaient  enfouis  dans  un  sable  fin,  meuble,  et 
comme  il  arrive  ordinairement  dans  les  autres  niveaux,  ils 
ont  la  surface  couverte  par  des  dendrites  manganésifères. 

Avec  ces  os  il  se  trouvait  quelques  éclats  de  cailloux 
de  quartz,  des  rognons  de  silex  entiers  ou  cassés,  et  des 
éclats  séparés  de  ces  silex,  montrant  clairement  que  nos  tro- 
glodytes fabriquaient  eux-mêmes  dans  la  grotte  les  instru- 
ments dont  ils  se  servaient. 

Dans  toute  l'épaisseur  de  la  couche,  surtout  à  la  partie 
inférieure,  on  a  aussi  trouvé,  en  grande  quantité,  des  cailloux 
roulés  de  quartzite,  de  quartz  et  de  silex,  entiers  ou  cassés, 
dont  on  a  détaché  quelquefois  intentionnellement  des  éclats; 
d'autres  fois,  au  contraire,  on  ne  saurait  affirmer  que  la  cas- 
sure n'ait  pas  été  produite  par  une  cause  naturelle,  comme 
le  serait,  par  exemple,  le  choc,  les  uns  contre  les  autres,  des 
cailloux  entraînés  dans  la  grotte;  il  se  peut  aussi  qu'ils  aient 
éclatés  à  la  surface  du  sol  avant  d'être  introduits  dans  la 
grotte. 

Dans  la  partie  supérieure  de  cette  couche  il  a  été  trouvé 
un  petit  couteau  de  silex  avec  les  bords  ébréchés  par  l'usage; 


,ïGo(|qW 


256 

ce  couteau  (pi.  ii,  fig.  5)  était  de  section  triangulaire  très 
aplatie,  il  avait  bj  millimètres  de  longueur  et  i8  millimè- 
tres de  largeur.  On  y  a  trouvé  encore  5  éclats  de  silex  et  un 
de  quartzite  se  terminant  en  pointe;  ces  objets  peuvent  avoir 
servi  de  flèches.  On  y  a  rencontré  également  un  éclat  de 
quartz  blanc  et  un  autre  de  silex,  qui  probablement  ont  servi 
de  grattoirs. 

Suivant  l'ordre  des  profondeurs,  qui  n'est  pas  Tor- 
dre chronologique,  que  Ton  ne  saurait  déterminer,  nous 
devons  maintenant  indiquer  la  rencontre  d'un  grand  silex  à 
5°',8o  au-dessous  de  la  surface  des  sables,  mais  dans  le  mi- 
lieu de  la  galerie  principale  et  avant  d'atteindre  l'ouverture 
du  puits,  c'est-à-dire,  en  amont  de  ce  puits,  eu  égard  à  la  di- 
rection unique  que  les  courants  pouvaient  suivre  au  dedans 
de  la  grotte.  Ce  silex,  ainsi  que  deux  autres  objets  qui 
l'accompagnaient — un  petit  nucléus  ou  rognon  de  silex  blanc, 
ébréché  sur  différentes  faces,  et  un  éclat  de  l'intérieur  d'un 
autre  rognon,  où  l'intervention  du  travail  humain  est  évi- 
dente—  ont  été  trouvés  à  o",!  ou  o"',3  au-dessus  de  la  ro- 
che du  fond  de  la  grotte,  ayant  été  certainement  entraînés 
jusques  là  par  les  courants  quaternaires,  ainsi  que  les  os 
et  les  silex  ont  été  entraînés  vers  le  fond  du  puits  contigu. 

Le  grand  silex  (pi.  i)  a  la  forme  amygdalaîre  du  type 
de  Saint-Acheul;  il  est  formé  d'un  rognon,  éclaté  des  deux 
côtés,  et  se  terminant  en  pointe  obtuse  aux  deux  extrémi- 
tés, avec  les  angles  vifs.  Il  a  i68  millimètres  de  longueur,  8i 
de  largeur  et  Sa  d'épaisseur;  on  voit  encore  sur  une  partie 
de  sa  surface  les  restes  de  la  croûte  terreuse  qui  recouvrait 
primitivement  le  rognon. 

4*m«  Niveau  ossifére.— A  &",5o  au-dessous  de  la 
surface  des  sables  quaternaires,  ou  O^^bo  au-dessous  de  l'an- 


-\ 


„Google 


257 

cien  sol  de  la  grotte,  il  y  avait,  dans  le  trou  ou  puits,  une 
autre  accumulation  d'ossements,  formant  une  strate  mince, 
mais  qui  par  son  isolement  au  milieu  des  sables,  et  par  la 
présence  d'une  petite  espèce  de  Hélix,  qui  s'est  seulement 
trouvée  dans  ce  niveau,  paraissait  marquer  une  période  dis- 
tincte d'occupgtion  de  la  grotte,  pendant  laquelle  celle-ci 
était  parfaitement  à  sec. 

Le  sable,  qui  renfermait  ces  os  était,  comme  dans  les 
autres  niveaux,  fin,  jaunâtre,  meuble,  et  auprès  des  parois 
de  la  grotte,  en  partie  cimenté  par  le  tuf  calcaire  et  par 
l'oxyde  de  manganèse,  qui  couvrait  la  surface  des  os  de  ta- 
ches noires  dendritiques. 

Les  restes  d'animaux  obtenus  dans  ce  niveau  sont  très 
peu  nombreux  et  la  liste  des  espèces  très  restreinte;  elle 
comprend  seulement  les  espèces  suivantes  : 

Urstis,  fragments  de  côtes,  vertèbre,  fémur  (la  moitié  in- 
férieure), 

Felis  sp.  aff.  F.  lynx,  humérus  (moitié  inférieure),  fémur 
gauche  entier. 

Cerviis,  fragment  de  maxillaire  inférieur  et  une  dent  mo- 
laire supérieure  détachée. 

'BoSy  espèce  de  petite  taille  représentée  par  une  dent  mo- 
laire détachée  de  la  mâchoire  supérieure,  l'extrémité 
inférieure  d'un  radius,  et  un  os  métatarsien. 

Nous  ferons  encore  mention  d'un  éclat  d'un  grand  os 
long  de  bœuf  ou  de  quelque  animal  de  plus  grande  taille, 
et  un  fragment  d'os  long,  maïs  de  moindre  dimension,  écrasé 
ou  cassé  intentionnellement  et  conservant  encore  les  éclats 
dans  leurs  positions  relatives. 


.,Ci 


2J8 

5*"  Niveau  ossifôre. — Au-dessus  du  niveau  precé- 
dcnt,  séparé  par  un  banc  de  sable  stérile  de  5o  centime-  I 
très  d'épaisseur,  il  y  avait  dans  le  puits  une  autre  strate  os-  ' 
sifère,  où  les  os  étaient  plus  abondants,  et  les  espèces  plus 
nombreuses.  Dans  cet  endroit  on  a  recueilli  des  débrià  des 
espèces  suivantes:  ' 

Erinaceus  etiropaeus,  maxillaires  inférieur  et  supérieur, 
vertèbre  lombaire,  humérus,  cubitus,  radius,  fémur, 
tibias  (3). 
Ursus,  une  dent  incisive,  humérus  (epîphyses  des  deui 
extrémités),  cubitus  (fragments),  vertèbres,  métacar- 
pien, phalange. 

Canis,  2  espèces  indéterminées,  l'une  de  taille  inférieure 
à  celle  du  loup,  réprésentée  par  une  dent  principale  ei 
la  première  molaire  supérieure  droite,  et  l'autre  espèce 
de  taille  beaucoup  plus  petite  dont  on  a  trouvé  seule- 
ment l'extrémité  supérieure  d'un  cubitus. 

Mustela,  fragment  de  maxillaire  inférieur  droit  avec  les 
3  prémolaires. 

Hj'aena  vtilgaris  et  une  autre  espèce,  fragments  du  crâne 
et  des  maxillaires,  dents  détachées,  vertèbres,  côtes, 
humérus  (de  2  espèces  différentes),  radius,  cubitus,  fé- 
mur, péroné  (fragments),  3  calcanéums  (de  2  espèces 
différentes),  phalanges  onguéales. 

Felt's,  vertèbre  caudale,  cubitus,  os  iliaque,  métacarpien, 
phalanges. 

Lepus  cunkultts,  maxillaires  supérieurs  et  inférieurs,  ver- 
tèbres, omoplate,  humérus,  cubitus,  os  iliaques,  fémurs, 
tibias,  calcanéum,  métatarsiens. 

CervuSy  dents  molaires,  métatarsien  (fragment),  astraga- 
les, phalanges. 


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25g 

'Bos^  un  os  du  carpe  et  fragments  d'omoplate  et  d'une 
phalange. 

Oiseaux,  restes  de  3  espèces  différentes  du  moins:  omo- 
plates, humérus,  cubitus,  métacarpien,  fémur  et  tibia. 

Poissons,  5  vertèbres,  dont  deux  ont  été  sciées  dans  le 
sens  transversal. 

Nous  avons  à  ajouter  à  cette  liste  l'indication  d'une 
quantité  extraordinaire  de  coprolithes,  les  uns  plus  grands  et 
d'autres  plus  petits,  mais  tous  de  même  forme  et  très  pro- 
bablement appartenant  à  l'hyène;  il  semble  donc  qu'à  cette 
époque  ce  Carnivore  a  tranquillement  habité  la  grotte  pen- 
dant une  longue  période. 

On  y  a  aussi  rencontré  2  éclats  de  silex  blanc  sur  les- 
quels l'action  humaine  est  évidente,  et  des  éclats  d'os  en 
quantité,  quelques-uns  roulés  ou  ayant  les  arêtes  arrondies. 
Un  de  ces  éclats,  très  épais,  d'Ursiis  ou  de  Bos,  était  fa- 
çonné et  avait  un  trou  cylindrique  très  parfait,  peut-être 
pour  être  suspendu  et  employé  comme  ornement  (pi.  i  a, 
fig.  4.). 

Au  niveau  ossifère  précédent  succédait  un  banc  épais 
de  i'",5o  de  sable  meuble,  qui  pouvait  être  creusé  à  la 
main,  où.  il  n'y.  avait  point  d'ossements;  au-dessus  de 
cette  couche,  à  3"',5o  de  profondeur  de  la  surface  des  sa- 
bles, tout  près  de  l'ouverture  du  puits  et  à  l'extérieur, 
se  trouvait  une  remarquable  accumulation  d'ossements  gi- 
sant immédiatement  sur  le  calcaire  jurassique  du  fond  de 
la  grotte.  Ces  os  étaient  en  grande  partie  fortement  cimen- 
tés avec  les  sables,  de  sorte  qu'il  n'a  pas  été  possible,  sans 
les  endommager,  de  les  dégager  du  calcaire  qui  les  couvrait; 
et  leur  situation  en  cet  endroit  doit  s'expliquer  de  la  même 
manière  que  nous  la  comprenons  dans  les  niveaux  inférieurs 


-'^ 


200 

dans  le  puits:  ces  os  ont  été  entraînés  par  les  courants  qui 
sont  entrés  dans  la  grotte  et,  par  des  circonstances  parti- 
culières, n'ont  pu  franchir  la  protubérance  de  la  roche  for- 
mant le  bord  du  puits,  pour  s'y  précipiter.  • 

Ainsi,  on  ne  saurait  affirmer  que  ces  os  représentent  un 
niveau  distinct,  c'est-à-dire  une  période  spéciale  d'habitation 
de  ta  grotte;  on  devrait  plutôt  dire  qu'ils  appartiennent  à 
la  même  époque  qu'un  des  niveaux  décrits,  ayant  échappé 
à  un  nouveau  transport,  comme  il  est  arrivé  pendant  quel- 
que temps  à  la  moitié  du  radius  de  loup,  que  nous  avons 
trouvé  à  la  panic  inférieure  du  3*'"°  niveau,  et  qui  en  réa- 
lité appartenait  à  un  niveau  inférieur  à  celui-ci. 

Les  restes  des  animaux  n'étaient  pas  rares  dans  ce  point 
de  la  grotte  et  la  liste  que  nous  en  donnons  offi-e  quelque 
intérêt  par  rapport  aux  listes  précédentes. 

Ursus,  3  espèces,  dont  l'une,  U.  gtganteus,  est  représen- 
tée par  la  moitié  supérieure  d'un  tibia  et  l'extrémité 
supérieure  d'un  cubitus.  En  outre  on  a  trouvé  des  res- 
tes de  2  autres  espèces  indéterminées:  plusieurs  ver- 
tèbres, côtes  (fragments),  humérus  et  cubitus  (-extrémi- 
tés supérieures  d'une  espèce  de  petite  taille),  radius,  os 
iliaque,  fémur  et  péroné  (fragments),  calcanéum,  méta- 
carpien, métatarsien  et  2  phalanges. 

Canis  lupus,  maxillaire  inférieur  droit  incomplet  d'un  in- 
dividu de  cette  espèce  avec  la  première  série  dentaire 
et  radius  (extrémités  supérieure  et  inférieure).     , 

Hyaena,  2  dents  incisives,  une  canine  et  2  molaires,  une 
vertèbre  dorsale  et  un  os  iliaque. 

Felis,  2  espèces  :  humérus  (2  extrémités  supérieures  dif- 
férentes),   cubitus  (fragment),  fémur  (extrémité  infé- 


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26l 

Lepiis  cuniciilus,  maxillaire  inférieur  incomplet  et  beau- 
coup d'os  différents  aussi  incomplets. 

Cervtis.  Nous  réunissons  sous  ce  titre  les  restes  des  ru- 
minants s'approchani  beaucoup  de  ce  genre,  et  peut- 
être  appartenant  à  3  espèces  différentes.  Ces  restes 
consistent  en  trois  dents  molaires  détachées,  omoplate, 
humérus,  radius  incomplet,  fémur  id.,  fragments  de  mé- 
tacarpien et  de  métatarsien. 

Eqmis,  un  astragale  seulement. 

Oiseaux,  restes  de  trois  espèces  indéterminées:  omoplate, 
2  humérus,  cubitus  et  3  métacarpiens.  ' 

Chéloniens,  2  fragments  de  la  carapace  de  deux  espèces 
distinctes. 

Hélix,  un  petit  spécimen  engagé  dans  les  sables  cimen- 
tés par  le  calcaire  stalagmitiquc. 

Pour  compléter  cette  liste  il  faut  considérer  aussi  divers 
ossements  indéterminés,  des  fragments  d'os  longs  et  beau- 
coup d'éclats,  dont  un  grand  nombre  roulés,  et  de  nombreux 
coprolithes,  pour  la  plus  grande  partie  ou  tous  se  rappor- 
tant très  probablement  à  l'hyène. 

Comme  indice  de  l'existence  de  l'homme  dans  cette  pé- 
riode, on  a  encore  trouvé,  à  côte  des  os  d'animaux,  un  éclat 
de  silex  blanc,  façonné,  ayant  servi  probablement  de  grat- 
toir; et  un  caillou  roulé,  de  silex  également  blanc,  de  forme 
ellipsoïdale  très  aplatie,  usé  d'un  côté  comme  s'il  avait  servi 
de  brunissoir  ou  de  lissoir. 

6*""  Niveau  ossifére. — Nous  considérons  ce  niveau 
ossifère  constitue  principalement  par  une  strate  qui  fut  dé- 
couvene  à  S^iSO  de  profondeur  de  la  surface  des  sables,  et 
par  conséquent  séparée  du  niveau  inférieur  par  un  intervalle 


,ï  Google 


262 

de  i",8o  de  sables  stériles.  On  ne  saurait  cependant  sépa- 
rer de  cène  strate  une  autre  qui  se  trouvait  o'°,20  au-des- 
sus et  dans  laquelle  étaient  enfouis  plusieurs  os  et  quel- 
ques dents  d'animau.\.  Dans  la  liste  suivante  sont  réunis  les 
restes  d''aniinaux  rencontrés  dans  les  deux  strates  et  les 
vestiges  qu'on  y  a  trouvés  de  l'existence  simultanée  de 
l'homme. 

Ursus,  "il  dents  molaires  d'un  jeune  individu,  2  vertèbres, 
fragment  de  côte,  astragale,  3  métatarsiens,  2  phalan- 
ges. 

Canis  lupus,  maxillaire  inférieur  droit  incomplet  avec  les 
2  premières  postéro-molaires, 

Hyaena  vulgaris.  vertèbre,  phalange  ;  coprolithes,  très 
probablement  de  cette  espèce. 

Feîis,  cubitus  (extrémité  supérieure)  et  fragment  de  tibia. 

Lepus  cuniailus,  maxillaire  supérieur  incomplet,  radius, 
os  iliaques,  fémurs,  tibia,  métatarsien. 

CervHS?,  dent  molaire,  vertèbre  cervicale,  phalange. 

"Bos,  fragment  de  l'extrémité  inférieure  d'un  métacarpien 
fendu  longitudinalement  et  une  phalange. 

Oiseau  ind.,  crâne,  humérus,  cubitus,  métacarpien. 

Ghélonien,  fragment  du  bord  de  la  carapace. 

Éclats  d'os  longs,  quelques-uns  roulés,  ayant  les  arêtes 
arrondies. 

Éclat  d'un  grand  os  long,  avec  des  incisions  sur  la 
surface  intérieure,  produites  par  un  instrument  tran- 
chant. 

Fragment  d'os  long  écrasé,  ayant  encore  les  éclats  dans 
leur  position  relative. 

Éclat  de  silex  jaunâtre,  avec  des  taches  brun-foncé  et 
rougeâtre,  du  type  des  couteaux. 


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J.  Delgado. 


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J.  Delgado. 


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J.  Delcado. 


Litli  Fini  Rui  do  Hointio  dt  Ticto.  BO. 


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J.  Delgado 


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Un  autre  éclat  de  silex,  séparé  probablement  du  même 

rognon  que  l'instrument  précédent. 
Éclats  de  quartzite  et  de  quartz,  et  cailloux  éclatés  de  ces 

substances. 

7*""  Niveau  ossifôre. — Le  niveau  le  plus  élevé  où  se 
trouvaient  des  restes  d'animaux,  d'ailleurs  en  petite  quan- 
tité, était  à  i",5o  au-dessous  de  la  surface  des  sables  qua- 
ternaires, c'est-à-dire  2'",5o  de  l'ancien  sol  de  la  grotte.  Les 
sables,  dans  cet  endroit,  avaient  un  aspect  différent  de  ce- 
lui qu'ils  ont  dans  les  niveaux  inférieurs;  ces  sables  étaient 
fins,  très  micacés,  blancs,  et  plus  ou  moins  cimentés  par  le 
tuf  ou  calcaire  stalagmitique  à  l'état  terreux.  On  y  a  obtenu 
des  restes  d'animaux  et  autres  objets,  dont  voici  la  liste; 

Ursus,  apophyse  épineuse  d'une  vertèbre  dorsale,  dont  le 
corps  s'est  perdu  lors  de  l'extraction. 

Lepus,  quelques  dents  détachées  et  fémur. 

Coprolithe,  très  probablement  d'hyène. 

Éclats  de  silex  (6)  ;  deux  de  ces  éclats  peuvent  avoir  servi 
comme  instruments  ou  armes  de  trait,  et  un  autre  com- 
me grattoir. 

Caillou  roulé  de  quartz  blanc  de  forme  ellipsoïdale,  éclaté 
aux  deux  extrémités,  et  des  fragments  de  cailloux  plus 
petits. 

Tels  sont  les  premiers  indices  de  la  faune  quaternaire 
et  les  preuves  simultanées  de  la  présence  de  l'homme  que 
nous  avons  découvert  dans  cette  grotte;  indices  qui  nous 
ont  encouragé  à  poursuivre  les  explorations,  dont  la  réus- 
site a  couronné  nos  efforts. 


■M 


264 

L'ensemble  des  faits  présentés  prouve  indubitablement 
que  la  grotte  fut  habitée  par  l'homme  dans  tes  premières 
phases  de  l'époque  quaternaire,  c'est-à-dire,  pendant  la  for- 
mation des  plus  anciens  dépôts  de  cenc  époque  dans  notre 
pays,  lorsque  les  conditions  climatologiques  et  le  relief  du 
sol  étaient  certainement  autres  qu"'ils  ne  le  sont  aujourd'hui. 

D'après  ce  que  nous  avons  dit  il  reste  aussi  sous-en- 
tendu que  le  dépôt,  qui  a  rempli  paniellement  la  grotte,  doit 
être  considéré  contemporain  du  dépôt  sableux  qui  couvre 
le  plateau  de  Cesareda,  et  y  remplit  les  cavités  du  calcaire 
jurassique,  ainsi  que  dans  la  péninsule  de  Péniche;  dans  ce 
dépôt  nous  avons  rencontré  de  même  quelques  silex  du  type 
paléolithique. 

Les  preuves  qui  ont  été  fournies  par  cette  grotte,  de 
l'existence  de  l'homme  contemporain  des  espèces  d'animaux 
éteintes,  ou  depuis  longtemps  disparues  de  notre  pays, 
sont  toul-à-fait  convaincantes.  Ces  preuves  dérivent  de  la 
rencontre  des  silex  réunis  aux  ossements  dans  la  même 
strate,  aussi  bien  que  de  la  fracture  et  du  dommage  qu'ils 
ont  subis,  et  finalement  de  la  rencontre  du  petit  fragment  de 
maxillaire  humain  trouvé  à  peu  près  à  mi-hauteur  du  dépôt; 
cette  pièce,  quelque  exiguës  que  soient  ses  dimensions,  n'en 
a  pas  moins  une  haute  signification  ethnographique. 


BisonsslOQ 

M.  DE  Baye  :  Le  cr3ne  qui  porte  les  marques  éviden- 
tes d'un  commencement  de  trépanation  (pi.  xv)  est  une  pièce 
nouvelle,  unique  en  ce  moment,  qui  corrobore  puissamment 
les  observations  faites  en  France,  dans  la  Marne  et  dans 
la  Lozère.  L'opération  déjà  avancée  a  été  suspendue;  elle 


,ï  Google 


265 

affirme  sous  une  forme  indiscutable,  la  coutume  de  la  trépa- 
nation pendant  la  période  néolithique.  C'est  un  trait  de  res- 
semblance de  plus  entre  des  stations  situées  il  des  distances 
considérables. 

Il  existe  des  exemptes  qui  démontrent  que  l'individu  a 
survécu  à  la  perforation  de  la  table  crânienne.  L'examen 
du  crâne  signalé  par  M.  Delgado,  constate  que  le  sujet  n'a 
pas  survécu.  Les  cellules  diploïques  sont  restées  béantes 
partout  où  elles  ont  été  incisées.  L'action  de  l'instrument 
en  silex  se  reconnaît  aisément  Les  coups  mal  assurés  qui 
apparaissent  en  dehors  des  sillons  déjà  bien  formés,  con- 
courent à  la  même  démonstration.  Effectivement,  les  traces 
des  déviations  de  l'instrument  sont,  les  premières  que  la  ré- 
paration cicatricielle  fait  disparaître,  lorsque  le  sujet  survit. 
Oes  subsistent  au  contraire  sur  les  crânes  qui  ont  subi  la 
trépanation  posthume. 

Le  crâne  à  moitié  trépane  répond  victorieusement  aux 
objections  qui  ont  été  formulées,  car  les  causes  accidentel- 
les alléguées  seraient  impuissantes,  pour  produire  de  tels  ef- 
fets. 

L'importance  du  fait  est  très  grande.  J'en  produis  la 
mention  afin  qu'un  document  si  précieux  ne  reste  pas  ou- 
blié et  inutile.  D'autres  plus  autorisés,  je  l'espère,  en  feront 
ressortir  la  valeur. 

M.  Cartailhac:  Il  faut  d'abord  que  je  rende  hommage 
aux  grands  services  rendus  par  M.  Delgado.  Les  fouilles 
faites  sous  sa  direction,  par  leur  précision  et  leur  méthode, 
rappellent  celles  si  célèbres  de  M.  Dupont. 

Mais  le  géologue  portugais,  comme  son  savant  collègue 
de  Belgique,  n'a-t-il  pas  été,  à  certains  égards,  entraîné  à  pro- 
poser des  conclusions  qu'il  n'est  pas  possible  d'accepter? 


fV. 


i66 

La  question  de  l'anthropophagie  n'est  pas  nouvelle.  En 

1842  Spring  découvrait  à  Chauvaux,  dans  une  brèche  os- 
sifère,  des  ossements  d'homme,  de  bœuf,  cerf,  mouton, 
sanglier,  tous  traités  de  la  même  manière,  c'est-à-dire  bri- 
sés lorsqu'ils  étaient  longs,  lorsqu'ils  avaient  contenu  de  la 
moelle.  Les  uns  et  les  autres  en  partie  calcinés;  enfin,  il  n'y 
avait  que  des  os  d'adolescents,  femmes  ou  jeunes  enfants. 
L'accusation  de  cannibalisme  raffiné  eut  un  immense  succès. 
Mais  en  1872  M.  Soreil  reprit  ces  fouilles;  il  trouva 
sous  la  stalagmite  explorée  par  Spring  de  nombreux  osse- 
ments d'autant  plus  entiers  qu'on  se  rapprochait  des  parois 
de  l'abri;  deux  squelettes  intacts  et  complets  étaient  ados- 
sés au  rocher,  et  il  y  avait  des  restes  d'hommes — des  adul- 
tes, des  vieillards — associés  à  de  nombreux  silev  taillés  de 
l'âge  de  la  pierre  polie,  et  bouleversés  çii  et  là  par  le  pas- 
sage des  renards  et  des  blaireaux. 

En  Danemark,  à  Borreby,  une  chambne  mégalithique 
était  remplie  d'ossements  humains  non  brûlés  et  brûlés; 
ceux-ci  étaient  plus  rares,  répandus  partout,  et  générale- 
ment cassés.  Malgré  les  prudentes  réserves  de  l'inventeur, 
on  ne  mit  pas  en  doute  le  fait  d'anthropophagie. 

Or,  l'étude  des  tombeaux  néolithiques  de  la  Scandina- 
vie a  prouvé  que  le  feu  allumé  dans  un  but  de  purification, 
les  enterrements  successifs,  etc.,  suffisaient  à  expliquer  les 
faits  du  dolmen  de  Borreby  et  de  bien  d'autres,  et  que  l'hy- 
pothèse de  cannibalisme  ne  pouvait  plus  être  admise. 

En  France  ont  eut  bien  vite  renoncé  à  elle  et  vojci 
pourquoi  : 

Dans  les  foyers  de  l'âge  du  renne  on  rencontre  quel- 
quefois des  os  humains;  il  ne  faut  pas  oublier  que  les  foyers 
ne  renferçient  pas  uniquement  des  débris  de  repas,  mais 
aussi  des  rejets  d'industrie  ;t)r,  la  matière  première  est  l'os, 


,ï  Google 


267 

et  un  os  humain  apporté  là  par  hasard  ne  prouve  pas  plus 
le  cannibalisme  que  les  flûtes  en  tibia  humain  de  Pompci. 
Les  os  longs  trouvés  dans  ces  gisements  ne  sont  pas  trai- 
tés comme  ceux  des  animaux,  et  les  entailles  qu'ils  offrent 
parfois  s'expliquent  par  le  fait  qu'on  a  voulu  les  utiliser. 

Souvent  ces  os  humains  peuvent  provenir  de  cadavres 
abandonnés  près  des  foyers  par  ces  populations  qui  ne  pla- 
çaient leur  morts  ni  dans  les  grottes  ni  dans  la  terre,  et  qui 
devaient  fort  ressembler,  à  cet  égard  comme  à  d'autres,  aux 
habitants  actuels  les  plus  sauvages  de  la  Sibérie  orientale. 
Quelquefois,  enfin,  ils  constituent  des  traces  de  sépultures 
néolithiques  ou  plus  récentes,  enfouies  dans  un  sol  riche  en 
débris  de  tout  genre,  mutilés,  remanies. 

Celle  dernière  explication  est  la  plus  plausible  lorsque 
l'on  rencontre  des  portions  de  squelettes  humains  dans  les 
gisements  néolithiques:  à  l'âge  de  la  pierre  polie,  un  grand 
nombre  de  cadavres  trouvaient  dans  les  grottes  naturelles, 
plus  ou  moins  fréquentées  jusques  là,  leur  demeure  dernière; 
quelques-uns  de  ces  abris  funéraires  ont  été  respectés,  mais 
la  plupart  ont  été  rouverts  et  bouleversés,  soit  par  l'homme, 
soit  par  certains  animaux.  Il  est  arrivé  plusieurs  fois  à  So- 
lutré,  à  L'Herm,  etc.,  que  des  fouilles  postérieures,  plus 
étendues,  ont,  comme  à  Chauvaux,  mis  au  jour  la  majeure 
partie  du  cimetière  méconnu  par  les  premiers  explorateurs. 
Il  est  incontestable  que  l'anthropophagie  a  été  pratiquée 
par  bon  nombre  de  sauvages  modernes,  mais  pas  par  tous. 
De  même  il  faut  faire  exception  pour  les  sauvages  de  l'Eu- 
rope occidentale  préhistorique.  Nous  n'avons  pas,  en  effet, 
un  seul  foyer  semblable  à  ceux  des  peuples  cannibales. 

Sans  entrer  dans  l'histoire  bien  connue  aujourd'hui  du 
cannibalisme,  nous  pouvons  dire  que  nos  ancêtres  de  l'âge 
du  renne  ou  de  l'âge  de  la  pierre  polie  ne  paraissent  pas 


"ff. 


être  dans  les  conditions  ordinaires  des  races  anthropopha- 
ges, au  point  de  vue  soit  de  la  civilisation,  soit  des  idées  re- 
ligieuses, soit  des  nécessités  de  la  vie. 

Un  mot  maintenant  sur  le  cas  spécial  des  grottes  du 
Ponugal.  Ce  n'est  pas  seulement  dans  celle  de  Péniche  que 
les  os  humains  se  présentent  dans  la  situation  et  dans  l'état 
que  M.  Delgado  invoque  en  faveur  de  l'anthropophagie. 
Dans  tous  les  autres  gîtes,  cavernes  naturelles,  grottes  arti- 
ficielles, antas,  on  trouve  des  faits  identiques  !  De  sorte  que 
l'on  aurait  creusé  des  cryptes  souterraines,  on  aurait  élevé 
des  mégalithes  pour  abriter  les  restes  des  repas  d'anthropo- 
phages! C'est  inadmissible! 

Pourquoi  aurait-on  laissé,  avec  les  débris  d'individus 
dévorés,  les  armes,  les  outils,  les  parures,  les  amulettes,  les 
poteries  entières? 

Ce  sont  en  réalité  des  mobiliers  funéraires,  il  s'agit  uni- 
quement de  sépultures  dans  lesquelles  les  morts  ont  été  dé- 
posés à  l'état  de  cadavres  ou  de  squelettes,  en  général  non 
incinérés;  ces  débris  se  sont  trouvés,  depuis  le  décès,  sou- 
mis à  des  influences,  à  des  actions  bien  diverses! 

Les  os  se  conservent  très  différemment  selon  l'humidité 
et  la  nature  chimique  du  sol,  selon  qu'ils  sont  plus  ou  moins 
soustraits  aux  agents  atmosphériques. 

Les  os  humains  ne  se  comportent  pas.comme  ceux  des 
animaux;  il  y  a  pour  eux,  comme  pour  ceux  des  carnivores 
ou  des  herbivores,  des  fractures  spéciales  et  caractéristi- 
ques. 

Enfin,  l'action  de  l'homme  aboutit  à  des  résultats  diffé- 
rents selon  que  l'os  est  frappé  ou  que  l'on  frappe  avec  l'os- 

C'est  armé  de  tous  ces  renseignements  que  je  nie,  sans 
aucune  réserve,  toutes  les  soi-disant  preuves  du  canniba- 
lisme préhistorique. 


,ï  Google 


269 

Il  faut  louer,  je  le  répète,  le  soin  avec  lequel  M.  Del- 
gado  a  fait  ses  fouilles,  et  grâce  à  cela  même  on  peut  par- 
ler comme  si  l'on  avait  assisté  aux  recherches,  on  a  sous 
les  yeux  tous  les  éléments  d'information.  Les  os  qui  man- 
quent sont  ceux  que  l'on  est  habitué  à  ne  pas  rencontrer 
toutes  les  fois  qu'on  fouille  une  sépulture  multiple;  ce  sont 
ceux  qui  dans  les  tombeaux  simples  se  détruisent  les  pre- 
miers. Lorsque  le  squelette  est  seul,  isolé,  par  exemple,  dans 
un  cercueil,  il  n'est  pas  rare  de  trouver  que  la  pression  des 
terres  et  l'action  des  milieux  l'ont  traité  comme  ceux  des 
grottes  du  Portugal  :  même  aspect,  mêmes  cassures,  même 
élargissement  du  canal  médullaire. 

Les  incisions  également  invoquées  par  M.  Delgado,  sont 
dues  aux  dents  des  carnassiers  de  petite  taille  et  surtout 
des  rongeurs. 

Enfin  si  la  grotte  de  Péniche  est  d'un  accès  très  diffi- 
cile, on  comprend  mieux  encore  pourquoi  elle  avait  été 
choisie  pour  garder  les  dépouilles  des  morts  aimés  ! 

M.  DE  Mortillet:  Je  ne  saurais  admettre  l'hypothèse 
de  l'anthropophagie.  Nul  animal  ne  dévore  l'animal  de  son 
espèce  si  ce  n'est  pressé  par  la  faim.  Ces  grottes  sont  des 
sépultures:  la  place  choisie  pour  des  festins  ne  serait  pas  as- 
surément d'un  accès  aussi  difficile;  tandis  qu'il  faut  admet- 
tre qu'en  général  on  a  dû  chercher  pour  des  sépultures  un 
lieu  écarté  et  caché.  J'ajouterai  que  souvent  les  os  longs 
prétendus  cassés  par  l'homme  pour  l'extraction  de  ta  moelle 
ne  renferment  pas  de  moelle!  En  particulier  la  quantité  de 
moelle  contenue  dans  tels  os  humains  est  proportionnelle- 
ment moindre  que  dans  les  os  longs  des  animaux  de  taille 
analogue. 


M.  ViRCHOw:  C'est  bien  le  contraire,  la  moelle  que  ces 
os  renferment  est  très  abondante. 

M.  Vasconcellos  Abreu:  Il  me  semble  qu'une  autre 
hypothèse  pourrait  bien  être  admise.  On  faisait  des  sacrifi- 
ces humons  ;  on  offrait  aux  dieux  la  partie  des  individus  tués, 
qui  était  la  meilleure,  et  on  dévorait  le  reste.  L'anthropo- 
phagie à  la  suite  de  sacrifices  humains  se  retrouve  chez  plu- 
sieurs peuples. 

M.  HitDEBRAND:  Jc  trouvc  une  explication  très  plausi- 
ble pour  le  fait  qui  a  frappé  M.  Delgado,  la  disproportion 
des  os  par  rapport  aux  dents.  On  chercha  une  nouvelle  sé- 
pulture, sans  se  soucier  de  ce  que  cette  grotte  contenait 
déjà. 


La  commission  nommée  sous  la  proposition  de  M. 
ScHAAFFHAUsEN,  et  composée  de  MM.  Bakbosa  du  Bocage, 
Capei-uni,  Cartailhac,  Delgado,  Hildebrand,  de  Mortil- 
LET,  Schaaffhalsen,  Virchow  et  Vasconcellos  Abreu,  pré- 
senta le  rapport  suivant; 

Rapport  de  la  oommisslon  obargée  d'étadlfir  la  question 
de  l'anthropopliagle  ft  Faminba 

La  réunion  a  eu  Heu  à  une  heure  de  l'après-midi,  au  mu- 
sée d'anthropologie  de  la  Section  Géologique.  Tous  les  mem- 
bres étaient  présents.  On  élut  M.  Virchow  président  et 
M.  Vasconcellos  Abreu  rapporteur. 

M.  Virchow,  voyant  que  tous  les  membres  de  la  com- 
mission étaient  d'accord  sur  ce  que  quelques-uns  des  os  longs 


,ï  Google 


portaient  des  vestiges  d'un  rongeur  et  plusieurs  même  ceux 
d'un  carnassier,  proposa  quatre  questions: 

/"  Sur  les  os  qui  nous  sont  présentés  trouve-t-on  des 
traces  de  travail  humain  avant  l'action  du  feu  et  avant  celle 
»  des  animaux? 

2"  [f  après  les  différentes  proportions  dans  lesquelles  on 
trouve  les  diverses  parties  des  os  des  squelettes  et  d'après 
les  ossements  des  adultes  et  des  enfants  peut-on  conclure  à 
r  anthropophagie? 

3'  I^s  os  cassés  porlent-ils  l'empreinte  d'une  cassure 
intentionnelle? 

4"^  /ja  coexistence  des  silex  taillés  et  d'autres  pièces  tra- 
vaillées, des  hématites  et  de  la  poterie,  avec  des  os  brisés,  est- 
elle  la  preuve  d'un  lieu  ^habitation,  ou  d'un  lieu  de  sépulture? 

Ces  questions  ont  été  débattues,  l'une  après  l'autre  et 
votées  par  tous  les  membres  de  la  commission,  excepté 
M.  Delgado.  Les  conclusions  générales  sont  les  suivantes: 

M.  Mortillet:  Pour  le  cas  en  question  il  n'accepte  pas 
l'anthropophagie. 

M.  Capellini:  Il  l'accepte;  elle  lui  semble  évidente. 

M.  Cartailhac:  Nullement  évidente;  elle  est  inaccepia: 
ble. 

M.  Barbosa  nu  Bocage:  Elle  lui  semble  très  probable. 

M.  Schaaffhausen  :  Pour  le  cas  en  question  l'anthro- 
pophagie est  prouvée. 

M.  Hildebrand:  11  n'est  pas  de  l'avis  de  ceux  qui  voient 
dans  le  cas  en  question  les  preuves  de  l'anthropophagie. 


r 


M.  Vasconcellos  Abreu;  L'anthropophage  lui  semble 
très  probable  pour  le  cas  en  question;  pourtant  il  ne  xioavt 
pas  de  preuve  scientifique  suffisante  pour  la  démonstration. 

M.  ViRCHowiCest  un  cas  douteux,  peut-être  il  y  eut  de 
l'anthropophagie,  mais  elle  n'est  pas  prouvée  pour  ce  cas-ci. 

Ainsi  il  y  a  eu: 

2  voix,  oui. 

2  voix,  probable. 
1  voix,  douteux. 

3  voix,  non. 

Tous  les  membres  de  la  commission  ont  fait  justice  aux 
soins  méthodiques  et  rigoureux  dont  témoignent  les  travaux 
de  M.  Delgado,  leur  statîstiqiue  et  la  disposition  des  spéci- 
mens. 

Vasconcellos  Abreû,  rapporteur. 


M.  Delgado:  Messieurs  les  membres  du  Congrès  vien- 
nent d'entendre  la  lecture  des  conclusions  de  ta  commission 
nommée  pour  l'examen  des  vestiges  d'anthropophagie  chez 
les  habitants  de  Furninha.  L'arrêt  qu'elle  vient  de  pronon- 
cer n'est  pas  décisif;  je  puis,  cependant,  assurer  au  Congrès 
que  dans  le  cas  même  où  cet  arrêt  eut  été  défavorable  à 
mon  hypothèse,  je  ne  serais  pas  convaincu. 

Tout  en  respectant  profondément  l'opinion  de  mes  il- 
lustres contradicteurs,  qu'il  me  soit  permis  de  dire,  qu'il  y 
a  des  faits  dont  on  ne  saurait  trouver  l'explication  d'après 
l'ordre  d'idées  qui  ont  été  émises  ici  à  propos  de  cette 
question. 


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M.  ScHAAFFHAUSEN.  En  visitant  le  musée  de  la  Section 
des  travaux  géologiques  en  Portugal  je  fus  frappé  de  voir  ce 
grand  nombre  d'ossements  humains  cassés  et  brûles,  qui  ont 
été  retirés  de  plusieurs  cavernes  du  pays  et  décrits  par 
M.  Delgado*.  Cette  trouvaille  m'a  paru  d'une  si  grande  impor- 
tance, que  j'ai  proposé  pour  cette  raison  au  Congres,  de 
nommer  une  commission,  qui  devait  soumettre  cet  objet  à 
un  examen  rigoureux. 

Ces  ossements  sont  cassés  et  fendus  de  la  même  ma- 
lùère  que  l'homme  préhistorique  autrefois  et  certains  peu- 
ples du  nord  encore  aujourd'hui  cassent  les  os  des  animaux, 
pour  en  tirer  ta  moelle. 

Tous  les  crânes  sont  brisés  avec  intention.  Mais  plus 
encore,  les  ossements  sont  brûles,  mais  ils  ne  sont  pas  cal- 
cinés entièrement,  ils  sont  calcinés  ou  carbonisés  en  partie 
par  l'action  du  feu.  Si  l'on  rôtit  la  chair  d'un  animal  à  un 
foyer  ouvert,  les  os  prendront  cette  apparence.  Les  carnas- 
siers ne  brisent  pas  ainsi  les  os  et  ils  ne  peuvent  pas  les 
exposer  au  feu.  Ce  ne  sont  pas  quelques  os  isolés,  qui  par 
hasard  pouvaient  avoir  été  exposés  à  un  foyer  allumé  par 
l'homme;  ce  sont  des  amas,  qui  apparaissent  dispersés  sur 
le  sol  des  cavernes,  comme  les  débris  d'un  repas.  Dans  une 
seule  caverne  on  a  compté  les  restes  de  45  individus  et  ce 
même  fait  se  retrouve  en  plusieurs  autres  cavernes  du  Por- 
tugal. Si  cet  état  des  ossements  dépendait  d'une  circonstance 
naturelle,  il  se  trouverait  partout  dans  les  cavernes,  qui  ont 
une  si  grande  ressemblance  d'ailleurs  dans  tous  les  pays. 
Mais  une  telle  observation  n'a  pas  été  faite  dans  les  caver- 
nes de  l'Allemagne,  iii  de  la  France,  ni  de  l'Angleterre.  Donc 

'  Estudos  geologîcos.  Op.  I.  Noticia  âcerca  das  grutas  dt  CesareUa. 
Lbboa,  i867. 


,ï  Google 


274 
cet  aspect  étrange  doit  avoir  eu  une  raison  spéciale.  Le  can- 
nibalisme seul  peut  l'expliquer  ! 

Le  rapport  de  M.  Spring  sur  la  caverne  de  Chauvaux 
reste  très  douteux.  Pour  l'Italie  M.  Capellini'  cite  la  Grotte 
dei  Colombi  dans  l'île  de  Palmaria  comme  un  lieu  de  l'an- 
thropophagie préhistorique.  M.  Mac-Pherson  est  convaincu 
aussi,  que  les  habitants  des  grottes  de  La  Mujer,  près  de 
Cadix,  étaient  des  anthropophages.  Si  les  epiphyses  de  beau- 
coup d'os  longs  manquent,  c'est  parce  que  les  chiens  les  ont 
rongées.  L'homme  ne  mange  pas  les  parties  cartilagineuses 
d'un  os,  c'est  le  chien  qui  le  fait,  et  on  a  trouvé  dans  les 
mêmes  cavernes  les  restes  d'un  Canis.  M.  Steenstrup  a  pré- 
sumé, d'après  l'aspect  des  os  rongés  dans  les  kioekkenmoed- 
dings  du  Danemark,  l'existence  du  chien,  et  après  on  y  a 
trouvé  réellement  ses  débris.  On  a  observé  dans  les  caver- 
nes, que  les  ossements  d'enfants  sont  intacts.  Cela  prouve, 
que  ces  cannibales  ont  mangé  leurs  ennemis,  mais  non  pas 
les  enfants. 

Il  y  a  une  dizaine  d'années  que  j'ai  montré  dans  un 
mémoire*  sur  le  cannibalisme  et  le  sacrifice ■  humain,  que 
cette  coutume  horrible  se  trouve  dans  l'histoire  de  tous  les 
peuples,  de  toutes  les  races.  Charles  Vogt'  a  donné  un  rap- 
port de  ce  travail  au  Congrès  de  Bologne  en  ajoutant  quel- 
ques faits  et  quelques  réflexions.Il  est  d'accord  avec  moî  lors- 
qu'il regarde  l'anthropophagie  comme  un  usage  répandu  chez 
tous  les  peuples,  et  il  admet  avec  moi,  qu'elle  n'est  pas  un 
état  primitif,  mais  qu'elle  forme  une  phase  générale  dans 
le  développement  de  la  civilisation  humaine.  Il  voit  avec 


'  Compte  Rendu  du  Congrès  de  Bologne,  5*°"  Sess.  iSTi, 
'  Archiv  fur  Anthropologie,  vol,  iv,  i87o,  p.  245. 
^  Compte  Rendu  du  Congrès  de  Bologne,  p.  agS. 


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Waitz  même  dans  les  symboles  de  la  religion  chrétienne  les 
anciennes  idées  de  Panthropophagie  et  du  sacrifice  humain! 
En  mangeant  ta  chair  et  en  buvant  le  sang  d'un  dieu  ou 
d'un  être  innocent,  on  se  rend  semblable  à  lui,  et  le  dieu 
accepte  le  sacrifice  d'une  personne  innocente,  qui  est  immo- 
lée à  la  place  des  coupables,  auxquels  il  pardonne  leurs  pé- 
chés. Ces  deux  croyances  se  trouvent  dans  le  culte  des  an- 
ciens Mexicains.  Il  faut  ajouter,  que  l'agneau  offert  en  sacri- 
fice par  les  Israélites  n'est  que  l'équivalent  de  l'homme  im- 
molé auparavant. 

li  y  a  plusieurs  raisons  pour  le  cannibalisme:  la  féro- 
cité, la  gourmandise,  le  manque  de  nourriture,  le  sacrifice. 
Dans  ce  cas  les  deux  premières  suffisent  pour  expliquer 
cette  perversité. 

M,  Morliliet  est  dans  l'erreur  s'il  croit  que  le  can- 
nibalisme soit  toujours  une  fête,  que  l'on  ne  peut  pas  cé- 
lébrer dans  une  caverne,  et  d'autres  savants  se  trompent 
en  liant  étroitement  le  cannibalisme  avec  le  sacrifice  hu- 
main. Je  doute,  que  les  habitants  des  cavernes  aient  ja- 
mais fait  des  sacrifices  humains,  parce  que  ce  culte  affreux 
suppose  un  certain  développement  des  idées  religieuses.  Il 
est  bien  connu  que  tous  les  peuples  de  l'antiquité  ont  pra- 
tiqué ces  sacrifices,  et  il  n'est  pas  moins  certain,  que  plus 
tard  les  sacrifices  d'animaux  ont  remplacé  les  sacrifices  hu- 
mains. 

Chez  les  peuples  civilisés  ce  changement  du  culte  re- 
ligieux eut  lieu,  aussitôt  que  des  sentiments  d'humanité  se 
sont  développés. 

La  discussion  de  la  commission  s'est  fixée  sur  les  ques- 
tions suivantes: 

Y-a-t-il  des  traces  d'un  travail  de  l'homme  sur  ces  os- 
sements? Les  incisions  sont-elles  faites  à  l'état  de  fraîcheur 


,C'l 


276 

sur  ces  ossements?  Le  différent  nombre  des  parties  qui  res- 
tent des  squelettes  est-il  une  preuve  de  l'anthropophagie? 
Les  os  sont-ils  brûlés  a  l'intérieur  ou  à  la  surface?  Les  os 
sont-ils  cassés  avec  intention?  Les  cavernes  étaient-elles 
des  lieux  de  sépulture  ou  des  habitations  humaines?  En  gé-. 
néral,  des  amas  d'os  humains  cassés,  fendus  et  brûlés  sont- 
ils  des  restes  du  cannibalisme? 

Moi,  je  réponds  ainsi  h  ces  questions: 

!l  y  a  quelques  stries  sur  ces  os,  qui  paraissent  être 
faites  par  l'homme;  d'autres  sont  faites  par  les  dents  de 
carnivores  ou  de  rongeurs,  il  y  a  des  incisions,  qui  sont 
faites  à  l'état  frais  des  os,  et  ceux-ci  ont  été  cassés  indu- 
bitablement il  l'état  frais.  Le  différent  nombre  des  parties 
qui  restent  des  squelettes  dépend  de  plusieurs  circonstan- 
ces. On  observe  toujours  dans  les  amas  d'ossements,  que 
les  mandibules  sont  en  abondance,  les  carnassiers  mêmes 
laissent  ces  parties  dures  intactes.  Les  vertèbres,  les  cô- 
tes, les  petites  phalanges  se  détruisent  même  dans  nos 
tombeaux  après  vingt-cinq  ans.  Beaucoup  d'os  paraissent 
être  cassés  avec  intention.  M.  Dclgado  a  dessiné  une  man- 
dibule, dont  ta  paroi  antérieure  est  détachée  par  un  coup, 
qui  a  dénudé  la  moelle.  Les  cavernes  étaient  des  habita- 
tions, mais  en  même  temps  elles  peuvent  avoir  servi  com-' 
me  lieux  de  sépulture.  Dans  les  mêmes  grottes,  où  Ton  a 
pratiqué  le  cannibalisme,  on  a  pu  enterrer  des  morts  avant 
ou  après.  Les  objets  de  parure,  que  l'on  a  trouvés  tout 
près  des  restes  humains,  n'indiquent  pas  d'une  manière 
convaincante  la  sépulture.  Ils  peuvent  provenir  des  hommes 
tués  ou  des  cannibales  eux-mêmes,  qui  les  ont  perdus,  ou 
des  sépultures,  que  l'on  y  ait  pratiquées. 

Les  pièces,  que  la  commission  a  examinées,  avaient 
ctc  choisies  par  moi  et  par  M.  Delgado  peu  de  temps  avant 


,ï  Google 


277_ 
la  discussion.  La  collecrion  en  contient  peut-être  d'autres, 
qui  sont  plus  concluantes  encore'. 

Il  ne  manque  pas  d'autres  témoins  pour  confirmer  no- 
tre opinion.  Les  anciens  auteurs  font  mention  de  canni- 
bales, qui  sont  troglodytes,  tel  que  Polyphème  cité  par  Ho- 
mère. Des  voyageurs  modernes  ont  trouvé  en  Afrique  chez 
les  Basutos  des  troglodytes  anthropophages.  Et  spéciale- 
ment, le  cannibalisme  des  anciens  Ibères  est  rapporte  par 
Strabon  {L.  iv,  5).  Il  cite  comme  cannibales  par  famine  les 
Scythes,  les  Ibères,  les  Gaulois  et  d^autres  peuples.  Les  Ibè- 
res sont  décrits  coqime  très  sauvages.  Le  peuple  ancien  le 
plus  accuse  de  cannibalisme  ce  sont  les  Massagètes,  qui  ha- 
bitaient l'Est  de  la  mère  Caspienne.  Horace  parle  (Odes,  ni, 
4,34)  de  la  rudesse  des  Co;iCiïHienCantabrie,etSilius(L.  m, 
36o)  dit,  que  cette  rudesse  rappelait  celle  de  leurs  ancêtres, 
les  Massagètes! 

'  M.  Schaaffhausen,  aprC-s  la  clôture  du  Congrus,  envoya  au  Secré- 
tariat les  observations  suivantes: 

«M.  Delgado  a  eu  la  complaisance  de  m 'envoyer  après  le  Congrès 
quelques  échantillons  de  ces  os  humains  cassés  et  brûlés.  Les  parties 
noires  sont  vraiment  brûlées,  l'analyse  chimique  n'a  donne  que  des 
traces  minimes  de  manganèse,  lequel  noircit  quelquefois  les  os  des 
cavernes  d'une  manière  semblable.  L'examen  microscopique  a  démon- 
tré, que  dans  les  parties  brûlées,  qui  sont  dans  ces  échantillons  toujours 
les  panies  eitté'rieures  des  ossements,  te  tissu  organique  est  détruit. 
Il  y  a  des  ossements,  qui  sont  jaunes  clairs  à  l'extérieur,  mais  dont 
intérieur  est  noirci.  Dans  ce  cas  il  faut  conclure,  que  reitéricur  des 
os  s'est  calciné,  pendant  que  le  charbon  est  resté  Jans  l'intérieur.  Les 
parties  calcinées  ne  sont  pas  blanches  comme  il  l'ordinaire,  parce 
qu'elles  sont  colorées  par  des  éléments  du  sol.  Je  remarque  encore,  que 
des  ossements,  qui  ne  sont  pas  brûlés  par  le  feu,  peuvent  provenir  pour- 
tant de  ces  affreux  repas.  Il  y  a  des  cannibales,  tels  que  les  Fidjiens, 
qui  ne  rôtissent  pas  ks  cadavres,  mais  qui  les  font  cuire.» 


Il  me  semble,  que  les  trouvailles  faites  par  M.  Delgado 
sont  la  preuve  évidente  du  cannibalisme  des  anciens  habi- 
tants des  cavernes  du  Portugal.  M.  Delgado  a  le  mérite 
d'avoir  fait  cette  recherche  avec  la  plus  grande  sagacité  et 
circonspection,  en  rassemblant  consciencieusement  tous  les 
détails  qui  s'offraient  à  l'observation. 


,ï  Google 


III 

ÉPOQUE   NÉOLITHIQUE 


LES  KIOEEEENXOEDDINGS  DE  LA.  YALLÈE  DU  TAGE 


M.  Carlos  Ribeiro 

Les  kioekkenmoeddings  bien  caractérisés  que  l'on  con- 
naît jusqu'à  présent  en  Portugal,  sont  ceux  du  voisinage  des 
villages  de  Salvaterra  et  de  Mugem,  à  peu  de  distance  de 
la  rive  gauche  du  Tage  et  près  du  débouché  de  deux  val- 
lées secondaires  où  coulent  les  rivières  de  Magos  et  de 
Mugem.  Ces  vallées  sont  en  général  spacieuses:  près  du 
Tage  elles  présentent  des  largeurs  de  looo  à  i5oo  mètres; 
les  coteaux  qui  les  limitent  sont  peu  élevés,  soit  de  4  à  1 5 
mètres  de  hauteur  relative;  dans  quelques  parties  ils  sont 
coupés  verticalement,  et  dans  d'autres  ils  sont  en  pente 
douce. 

Ces  kioekkenmoeddings  se  trouvent  éloignés  de  60  ou 
70  kilomètres  des  côtes  maritimes  de  l'embouchure  du  Tage, 
et  à  une  hauteur  de  20  à  25  mètres  au-dessus  du  niveau 
de  la  mer.  Les  marées  d'étîage  sont  encore  sensibles  près 
de  Mugem,  mais  l'eau  de  l'Océan  atteint  à  peine  Villa- 
franca,  à  3o  kilomètres  en  amont  de  Lisbonne,  et  son  mé- 
lange avec  l'eau  de  rivière  ne  fait  que  rendre  celle-ci  salée 
pendant  quelques  heures. 


,ï  Google 


28o 

Nous  ne"Connais3ons  pas  précisément  le  nombre  des 
kioekkenmoeddings  de  toute  cette  région;  nous  croyons  ce- 
pendant qu'il  y  en  a  encore  à  découvrir,  et  que  d'autres  ont 
disparu  dans  le  cours  du  temps,  non  seulement  par  l'action 
des  causes  naturelles,  mais  aussi  parce  que  l'agriculture  les 
aura  détruits.  Ce  que  nous  savons  et  pouvons  affirmer  c'est 
qu'ils  occupaient  une  zone  de  terrain,  qui  n'avait  pas  moins 
de  20  kilomètres  de  longueur  sur  5  de  largeur. 

Le  premier  de  ces  monticules  que  nous  avons  décou- 
vert, en  avril  i863,  se  trouve  dans  Quinta  da  Sardinha, 
entre  les  villages  de  Salvaterra  et  de  Mugem.  Il  nous  fut 
dénoncé  par  l'abondance  des  coquilles  marines  qui  couvraient 
une  partie  de  la  surface  du  sol,  y  formant  comme  une  bande 
blanchâtre  d'environ  3oo  mètres  de  longueur.  Cette  bande 
nous  révéla  l'existence  d'un  dépôt  artificiel  de  coquilles  ma- 
rines, parmi  lesquelles  nous  avons  reconnu  les  genres  Bucci- 
num,  Lutraria,  Nticula,  Cardium,  Tapes,  Pecteti,  Soîen  et 
Ostrea.  Avec  ces  restes  il  y  avait  des  pinces  d'écrevisses, 
des  vertèbres  de  poissons,  des  fragments  d'os  de  mammi- 
fères, surtout  de  ruminants;  une  phalange  d'orteil  humain, 
et  une  partie  d'os  coronal  également  humain. 

Nous  avons  tenté  à  plusieurs  reprises  de  faire  l'explo- 
ration de  ce  monticule,  mais  les  objections  présentées  par 
le  propriétaire  nous  ont  empêché  jusqu'à  présent  d'y  faire 
commencer  des  travaux. 

Les  kioekkenmoeddings  que  nous  avons  reconnus  dans 
la  vallée  de  la  rivière  de  Mugem  sont  ceux  de:  Fonte  do 
Padre  Pedro — Cabeço  da  Arruda — Cabeço  da  Amoreira 
— Moita  do  Sebasdao. 


,ï  Google 


Fonte  do  Padre  Pedro 

Presque  à  l'extrémité  occidentale  du  flanc  droit  de  la 
vallée  de  Mugem,  on  voit  le  sol  couvert  d'innombrables 
fragments  de  coquilles,  qui  forment  une  bande  de  90  k  100 
mètres  de  longueur  dans  le  sens  E.-0.,  sur  40  à  5o  mè- 
tres de  largeur  N.-S.  Ces  coquilles  appartiennent  en  géné- 
ral à  des  bivalves  des  genres  Cardium,  Ostrea,  Tapes  et  Lu- 
traria,  celles  du  dernier  genre  prédominant.  Avec  ces  coquil- 
les nous  avons  rencontré  des  os  de  ruminants,  Cervus^  Bos, 
Oris,  etc.,  et  un  fémur  humain;  adhérant  à  tous  ces  os  on 
voit  des  fragments  de  Lutraria,  ce  qui  est  une  preuve  de  la 
contemporanéité  de  tous  ces  restes  dans  le  gisement. 

Les  fouilles  n'ont  été  faites  qu'à  la  surface,  et  par  con- 
séquent nous  n'avons  pu  rencontrer  que  peu  de  restes  hu- 
mains originaires  de  ce  dépôt.  Notre  but,  lorsque  nous  avons 
fait  faire  ces  recherches,  a  été  de  vérifier  s'il  y  a  eu,  ou  non, 
deux  époques  d'ensevelissement.  A  la  vérité,  les  faits  ré- 
vélés nous  ont  démontré  que,  dans  la  partie  pour  ainsi  dire 
intacte  du  kioekkenmoedding,  les  coquilles  et  autres  dépouil- 
les d'animaux  étaient  mêlées  de  sable  et  de  limon,  et  qu'el- 
les entrent  dans  la  composition  du  monticule  sans  aucun 
mélange  d'humus,  tandis  qu'en  d'autres  points  le  sol  est  un 
mélange  de  ces  matières  avec  de  la  terre  végétale.  C'est 
dans  ce  sol,  et  presque  à  la  surface,  que  nous  avons  rencon- 
tré quatre  squelettes  humains  couchés  et  avec  eux  des  pro- 
duits d'industrie  romaine,  tels  que  des  fragments  de  mortier, 
des  vases  en  poterie,  etc.  Il  y  eut  donc  deux  époques  d'en- 
sevelissement, la  dernière  étant  probablement  l'époque  ro- 
maine. 


,ïGex^J 


282 

Sur  ie  même  versant  droit  de  la  vallée  de  Mugem  et 
environ  3  kilomètres  en  amont  de  Fonte  do  Padre  Pedro, 
se  trouve  le  kioekkenmoedding  de 


Gabeqo  da  Arrada 

Il  occupe  une  surface  a  peu  près  elliptique,  de  loo  et 
de  60  mètres  d'extension  sur  ses  deux  axes,  et  présentant 
une  épaisseur  maximum  d'environ  7  mètres.  C'est  le  monti- 
cule le  plus  important  parmi  ceux  explorés.  Il  se  compose 
de  coquilles  dont  la  plupart  brisées  ou  même  réduites  en  de 
petits  fragments,  et  mêlées  avec  du  limon  desséché,  du  sa- 
ble, et  du  gravier. 

Le  charbon,  et  le  bois  en  partie  carbonisé,  disper- 
sés dans  toute  la  masse,  constituent  aussi  par  leur  abon- 
dance un  des  matériaux  qui  composent  le  kioekkenmoedding. 
La  structure  est  celle  d'un  dépôt  qui  serait  résulté  d'un  en- 
tassement de  détritus  abandonnés;  il  y  a  des  couches  d'ex- 
tensions très  irrégulières,  discontinues,  d'épaisseurs  variées; 
dans  quelques-unes  prédominent  les  coquilles,  avec  ou  sans 
mélange  de  limon,  de  sable,  ou  de  charbon  en  menus  frag- 
ments, et  la  proportion  de  toutes  ces  matières  est  très  va- 
riable. On  y  trouve  aussi  des  morceaux  plats  de  terre  cuite, 
d'épaisseur  et  de  grandeur  inégales,  associés  au  charbon,  et 
souvent  disposés  horizontalement  à  la  limite  des  couches. 
On  les  rencontre  successivement  dans  toute  l'épaisseur  du 
dépôt,  et  ils  nous  paraissent  être  les  restes  des  foyers  où 
se  faisait  le  feu  pour  la  préparation  des  aliments. 

Les  objets  d'industrie  humaine  rencontrés  sont  nom- 
breux, et  s'ils  n'attirent  pas  Pattention  par  leur  fini,  ou  par 
la  variété  des  formes  ou  des  matières  dont  ils  sont  fabri- 


,ï  Google 


283 

qucs,  ils  portent  l'observateur  à  une  étude  longue  et  ré- 
fléchie sur  ia  signification  de  leurs  formes  et  le  degré  d'apti- 
tude de  l'ouvrier. 

Nous  avons  cherché  en  vain  des  restes  de  poterie  dans 
ce  dépôt  et  dans  d'autres  analogues;  aucun  fragment  n'a 
été  obtenu  ni  par  l'observation  directe  pendant  les  fouilles 
ni  par  le  criblage  des  terres:  Part  céramique  aurait  donc 
été  totalement  inconnu  aux  hommes  qui  élevèrent  ces  mon- 
ticules. Nous  n'y  avons  pas  non  plus  rencontré  des  haches 
polies. 

On  observe  cependant  ici  que  les  hommes  de  nos  kioek- 
kenmoeddings  faisaient  usage  d'instruments  en  pierre  gros- 
sière, dont  les  formes  et  le  travail  indiquent  un  état  bien 
au-dessous  de  celui  révélé  par  quelques  instruments  en 
pierre  de  l'âge  paléolithique  même.  Et  que  l'on  ne  dise  pas 
que  les  éclats  de  quartzice  de  toutes  les  formes  et  dimen- 
sions qui  font  partie  de  la  masse  du  monticule,  soient  un 
produit  naturel  que  le  hasard  y  ait  jeté;  non,  assurément: 
le  sol  tertiaire  sur  lequel  reposent  les  kioekkenmoeddings,  est 
constitué  par  des  grès  fins,  sans  cailloux,  et  les  morceaux 
de  quartzite  en  question  ont  été  apportés  par  les  mêmes 
agents  qui  transportèrent  les  coquilles,  le  combustible,  les 
animaux,  les  éclats  et  les  couteaux  en  silex  que  nous  y  trou- 
vons; c'est-à-dire,  l'homme  des  kioeklcenmoeddings  de  la  val- 
lée du  Tage  alla  chercher  loin  de  cet  endroit  des  cailloux  de 
quartzite,  qu'il  cassa  ensuite  pour  en  utiliser  les  fragments 
et  les  nucléus. 

Le  silex  n'était  pas  abondant  chez  ces  hommes;  néan- 
moins on  trouve  dans  le  monticule  de  nombreux  couteaux, 
nucléus  et  éclats  de  cette  substance.  On  doit  remarquer 
que  le  silex  ne  se  rencontre  pas  dans  cette  région,  et  que 
pour  l'obtenir,  l'homme  a  du  être  obligé  de  passer  le  Tage 


,ïGeX^' 


1% 


284 

ou  de  le  recevoir  par  le  trafic  avec  des  tribus  d'autres  con- 
trées. 

Mais  un  poiat  sur  lequel  nous  croyons  devoir  insister, 
c'est  l'extrême  ressemblance  que  nous  trouvons  entre  les 
éclats  de  quartzite  de  ces  kîockkenmoeddings  et  les  éclats, 
aussi  de  quartzite,  des  premiers  temps  de  la  période  quater- 
naire et  même  des  couches  pliocénes.  SI  nous  nous  portons 
vers  les  couches  de  grès  grossier  et  de  cailloux  qui  couronnent 
le  flanc  droit  de  la  vallée  du  Tage,  dans  les  alentours  de  Villa 
Nova  da  Rainha,  entre  Carregado  et  Azambuja,  ou  si  nous 
explorons  les  couches  de  grès  pliocènes  (?)  entre  les  villages 
de  Barquinha  et  de  Tancos,  nous  rencontrons  la  quartzite 
en  éclats  et  fragments  analogues  aux  formes  provenant  des 
kioekkenmoeddings  et  tellement,  que  le  travail  que  ces  subs- 
tances révèlent  paraît  provenir  du  même  ouvrier. 

Un  autre  fait  également  remarquable,  c'est  que  l'hom- 
me des  kioekkenmoeddings  de  la  vallée  du  Tage  employait 
assez  abondamment  l'os  pour  son  outillage. 

L'attention  de  l'archéologue  doit  donc  se  porter  sur  le 
fait  du  travail  humain  des  pièces  de  quartzite  contenues  dans 
la  masse  de  ces  kioekkenmoeddings,  travail  du  reste  très 
grossier,  mais  dont  l'origine  intentionnelle  nous  paraît  hors 
de  doute  et  de  controverse  sérieuse.  Il  est  vrai  que  les  mar- 
ques de  ce  travail  ne  sont  pas  aussi  évidentes  que  l'auraient 
désiré  les  esprits  théoriques;  mais  pour  celui  qui  étudie  de- 
puis longtemps  le  travail  de  l'homme  sur  les  pierres  taillées 
rencontrées  dans  les  dépôts  et  les  gisements  préhistoriques 
du  Portugal,  il  ne  saurait  être  douteux  que  la  plupart  des 
éclats  de  quartzite  renfermés  dans  les  kioekkenmoeddings  de 
la  vallée  du  Tage,  sont  le  produit  du  travail  intentionnel  de 
l'homme  qui  a  entassé  ces  monticules. 

Si  l'on  ne  saurait  douter  du  travail  intentionnel  révélé 


,ï  Google 


par  les  silex  qui,  dans  ce  kioekkenmoedding,  accompagnent 
les  éclats  de  quartzite,  aurait-on  le  droit  de  nier  l'interven- 
tion humaine  dans  ceux-ci,  seulement  parce  que  le  travail 
s'y  montre  plus  imparfait? 

Dans  ces  stations  nous  avons  aussi  rencontré  des  pla- 
ques de  grès  fin  micacé,  assez  dur,  de  3  à  4  décimètres 
de  longueur,  ayant  des  dépressions  courbes  et  uniformes 
sur  les  deux  faces,  comme  si  elles  avaient  été  produites  par 
l'effet  de  la  trituration  de  substances  dures.  Pour  nous  prou- 
ver que  celui-ci  a  été  en  effet  l'usage  de  ces  plaques,  nous 
avons  trouvé  tout  près  un  pilon  ou  pierre  de  forme  prisma- 
tique, usée  à  l'une  de  ses  extrémités,  vraisemblablement 
par  le  travail  d'écraser  et  de  triturer. 

Les  hommes  qui  ont  accumulé  ces  monticules  n'aban- 
donnèrent par  leur  station:  ils  se  firent  des  sépultures  dans  la 
masse  même  des  détritus  qu'ils  avaient  entassés,  et  ainsi  il 
nous  a  été  permis  de  reconnaître  les  représentants  de  cette 
civilisation  primitive  et  d'apprécier  les  caractères  morpho- 
logiques de  leurs  squelettes. 

Dans  la  première  exploration  que  nous  y  avons  fait  faire 
it  y  a  quinze  ans,  les  ossements  découverts  appartenaient 
'  à  une  quarantaine  de  squelettes  humains.  Par  les  explo* 
rations  de  cette  année,  le  résultat  a  indiqué  un  nombre  au- 
dessus  de  120,  en  y  réunissant  le  produit  des  deux  kioekken- 
moeddings  d'Arruda  et  de  Moita  do  Sebastiâo.  Ce  qui  est 
certainement  remarquable,  c'est  la  présence  d'un  si  grand 
nombre  de  squelettes  dans  la  partie  explorée  de  Cabeço  da 
Arruda  et  de  Moita  do  Sebastiâo.  A  mon  avis,  c'est  là  un 
fait  unique  dans  des  gisements  de  ce  genre.  Mais  quelle  le- 
çon et  quelles  inductions  pouvons-nous  tirer  des  conditions 
particulières  où  ces  squelettes  ont  été  rencontrés  ?  Auprès 
d'aucun  d'eux  nul  instrument  en  pierre  ou  en  os  n'a  été 


,ï  Google 


286 

trouvé,  exception  faite  de  plusieurs  petits  couteaux  en  silex 
près  de  quelques  squelettes;  nous  n'avons  vu  non  plus  aucun 
indice  que  dénonçât  l'existence  d'une  cérémonie,  d^un  hom- 
mage aux  morts  que  Ton  y  ensevelissait,  tels  qu'on  en  voit 
dans  les  dolmens,  les  tumuli,  et  autres  lieux  de  sépulture  de 
l'époque  de  la  pierre  polie;  on  n'y  trouva  non  plus  nul  orne- 
ment, nulle  amulette,  nul  petit  objet  de  ce  genre,  même  en 
passant  les  terres  au  crible. 

En  voyant  des  foyers  à  différents  niveaux  dans  la  pa- 
roi de  la  tranchée  que  nous  avons  fait  creuser,  foyers  au- 
tour desquels  ces  hommes  se  groupaient  pour  faire  leur  re- 
pas quotidiens,  il  n'y  a  pas  Heu  de  croire  qu'ils  fissent  les  in- 
humations près  de  ces  endroits;  probablement  ils  choisis- 
saient dans  le  kioekkenmoedding  un  endroit  éloigné  de  20 
ou  40  mètres  pour  y  enterrer  les  morts,  et  lorsqu'ils  croyaient 
que  les  cadavres  étaient  consumés,  ils  allaient  occuper  de 
nouveau  la  surface  du  sol  au-dessus  des  sépultures,  en  des- 
tinant les  endroits  abandonnés  pour  servir  à  leur  tour  aux 
irihumations.  Le  fait  de  ce  que  les  squelettes  se  trouvent 
ainsi  peu  dispersés,  celui  de  l'observation  d'une  certaine  orien- 
tion  dans  leur  disposition,  leur  aligncmen  t  approximatif  nous 
fait  supposer  qu'il  existait  un  certain  système  dans  le  mode 
d'ensevelir  leurs  morts.  En  outre  il  parait  aussi  que  quelques- 
uns  des  morts  étaient  placés  accroupis,  et  d'autres  étendus 
de  leur  long;  au  moins  la  disposition  des  membres  relative- 
ment au  tronc  permet  de  supposer  ces  deux  modes  d'en- 
terrement. En  tout  cas  il  ne  faut  pas  oublier  que  les  mou- 
vements du  sol  après  ces  ensevelissements  et  d'autres  cau- 
ses encore,  ont  dû  troubler  la  disposition  particulière  des 
squelettes  et  altérer  dans  un  grand  nombre  de  cas  la  dis- 
position de  leurs  diverses  parties. 

Les  coquilles  du  monticule  de  Cabeço  da  Arruda  ap- 


,ï  Google 


28? 

partiennent  en  général  aux  mêmes  espèces  rencontrées  dans 
le  kioekkenmoedding  de  Quinta  da  Sardinha,  dont  les  genres 
ont  été  énumérés.  En  ce  qui  concerne  les  mammifères  re- 
présentés par  les  restes  d'animaux  obtenus  de  ce  monticule, 
nous  avons  trouvé  les  genres  suivants:  Bos,  Cerviis,  Ouis, 
Eqtius,  Sus,  Canis,  Felis,  Mêles,  Viverra,,  Lepus.  Nous  avons 
aussi  rencontré  des  os  d'oiseaux  et  des  restes  de  poissons. 

Tels  sont,  les  genres  d'animaux,  que  l'homme  de  ces 
stations  paraît  s'être  appropriés  pour  sa  nourriture,  dont  en 
tout  cas  la  base  consistait  en  Liitraria  compressa  et  Cardium 
eduîe. 

Voyons  maintenant  de  quels  ustensiles  il  seservaitpour 
la  préparation  des  aliments,  vu  l'emploi  des  âtres  et  du  grand 
usage  qu'on  faisait  du  feu.  D'après  l'état  des  coquilles  ren- 
contrées, les  mollusques  devaient  être  mangés  crus  ou  bien 
à  peine  échauffés,  car  on  a  trouvé  beaucoup  de  valves  non 
séparées,  et  la  plupart  non  altérées  par  te  feu.  Quant  à  la 
chair  des  vertébrés,  on  la  préparait  par  l'exposition  directe 
au  feu,  comme  il  paraît  être  démontré  par  une  grande  par- 
tie des  os  de  bœuf,  cerf,  cheval,  etc.  que  l'on  rencontre  brû- 
lés. Quoiqu'il  en  soit,  dans  le  kioekkenmoedding  que  nous 
avons  exploré  sur  une  si  large  étendue,  nous  n'avons  pas  en- 
core rencontré,  comme  nous  venons  de  le  dire,  un  seul  frag- 
ment appartenant  à  quelque  vase  en  terre.  Dans  son  indus- 
trie encore  si  arriérée,  l'homme  de  nos  kioekkenmoeddings 
ignorait  complètement  les  rudiments  les  plus  grossiers  de 
l'art  du  potier,  quoique  l'argile  plus  ou  moins  cuite  de  leurs 
foyers  eût  dû  éveiller  leur  attention  sur  les  propriétés  de 
cette  substance  et  suggérer  son  emploi  pour  en  faire  des 
vases. 

Dans  une  communication  faite  au  Congrès  par  M.  Paula 
e  Oliveira,  dans  la  7*""  séance,  touchant  les  crânes  des  sta- 


,ï  Google 


a88 

lions  préhistoriques  du  Ponugal,  l'opinion  a  été  exprimée, 
que  les  hommes  des  kiockkenmoeddings  de  la  vallée  du  Tagc 
étaient  des  dolichocéphales  et  des  brachycéphales,  repré- 
sentant donc,  par  là,  deux  races  distinctes. 

Celte  question  est  assez  importante  et  assez  difficile  à  ré- 
soudre pourqu'on  ne  la  traite  pas  avec  toute  la  circonspec- 
tion nécessaire.  En  effet  il  faut  s'abstenir'de  hasarder  là-des- 
sus des  opinions,  sans  les  réserves  faites  par  M.  Pauls  e  Oli- 
veira.  Nous  espérons,  cependant,  qu'après  avoir  obtenu  un 
plus  grand  nombre  d'e.templaires,  on  pourra  arriver  à  for- 
muler un  jugement  à  l'égard  des  races  auxquelles  on  doit  les 
kioekkcnmoeddings  de  Mugem  et  de  Salvaterra. 

Mais  quelles  que  soient  les  races  auxquelles  on  puisse 
rapporter  ces  hommes,  il  me  semble  que  leur  apparition 
dans  nos  régions,  correspond  au  commencement  de  l'épo- 
que néolithique,  où,  géologiquement  parlant,  à  la  fin  du 
dernier  mouvement  ascentionnel  de  la  partie  occidentale  de 
notre  pays.  Ce  fait,  une  fois  prouvé,  suffirait  pour  détermi- 
ner l'âge  de  nos  kioekkenmoeddings. 

Enfin,  n'étant  pas  possible  de  donner  maintenant  une 
notice  de  tous  les  kioekkcnmoeddings  de  la  vallée  du  Tage, 
nous  terminerons  cette  communication  par  les  renseigne- 
ment suivants: 

i"  Les  couches  tertiaires  sur  lesquelles  reposent  les 
kioekkenmoeddings,  ne  contiennent  pas  de  cailloux  d'un  vo- 
lume supérieur  à  celui  d'une  olive,  et  par  conséquent  tous 
les  cailloux  et  toutes  les  pierres  taillées,  qui  se  trouvent 
dans  ces  monticules,  ont  été  transportés  d'autres  localités  et 
façonnés  par  les  hommes  des  kioekkenmoeddings. 

2°  Les  éclats  de  quartzite,  qui  ont  servi  à  ces  hommes 
sont  absolument  semblables  à  ceux  qui  se  trouvent  dans 
une  partie  des  couches  pliocènes  et  quaternaires  du  pays. 


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sSg 

3*  Les  petits  couteaux  de  sUex  trouvés  dans  ces  dépôts, 
et  les  plaques  de  grès  fin  micacé  ont  été  très  probablement 
transportés  du  nord  du  Tage;  le  silex  provient  peut-être  des 
couches  tertiaires  miocènes  de  Santo  Antao  do  Tojal  et  de 
Runa,  qui  contiennent  une  grande  quantité  de  cailloux  de 
cette  substance,  et  les  grès,  des  couches  des  étages  supé- 
rieurs du  terrain  jurassique  des  environs  d'Arruda. 

4"  Les  couteaux  de  silex  sont  petits,  d'un  travail  im- 
parfait et,  en  général,  n'ont  aucune  ressemblance  avec  ceux 
qui  se  trouvent  dans  les  cavernes  et  dans  les  dolmens  de 
l'époque  de  la  pierre  polie,  que  j'ai  explorés. 

5°  On  n'a  encore  trouvé  dans  aucun  des  kioekkenmoed- 
dings  une  seule  hache  ou  outre  objet  analogue  en  pierre  po- 
lie, qui  puisse  rappeler  ceux  des  dolmens  et  des  stations 
humaines  qui  appartiennent  à  l'époque  néolithique. 

6°  On  n^a  jamais  rencontre  dans  ces  kioekkenmoeddings 
le  moindre  indice  de  poterie  qui  puisse  être  attribuée  à  l'épo- 
que de  leur  formation. 

7°  On  n'y  a  pas  non  plus  rencontré  un  seul  objet  qui 
puisse  être  considéré  comme  ornement. 

8°  D'après  l'examen  fait  des  squelettes  à  l'occasion  de 
l'exumation  on  n'a  pas  rencontré  le  moindre  indice  d'an- 
thropophagie. 

g"  Enfin,  on  n'a  trouvé  aucun  os  qui  puisse  dénoncer 
la  présence  d'animaux  domestiques,  exception  faite  de  quel- 
ques mandibules  de  chien. 


M.  Cartailhac:  J'appelle  l'attention  du  Congrès  sur 
un  fait  bien  curieux!  En  Danemark  on  a  discuté  longtemps 
pour  établir  si  les  kioekkenmoeddings  étaient  contemporains 
des  dolmens  ou  plus  anciens.  La  question  est  singulièrement 


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difficile,  puisq 


u  Tage,  aussi  bien  que  dans  les  stations  néo- 
t  la  Section  Géologique  possède  le  contenu. 


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EXPUGATIOK  DES  FLANOHEB 


Vue  des  squelettes  mis  â  découien  par  les  fouilles  faites  dans  le 
kioekkenmoedding  de  Cabeço  da  Arruda. 


PLANCHE  m 


I.  Fragment  d'un  instrument  en  pierre  polie  (dîorite)  avec  un 
Ion  de  sciage  fait  avec  une  scie  de  silex.  (Cette  pièce  ne  | 
vient  pas  des  kioekkenmoeddîngs,  elle  a  élé  trouvé  dan 
environs  de  Sacavem). 

1.  Plaque  de  gris  fin  micacé  très  usée  par  le  frottement  a; 
servi  de  meuie  sur  ses  deux  faces,  et  un  pilon  ou  mol 
formée  par  un  caillou  roulé  de  quartzite,  de  forme  st 
ellipsoïdale  aplatie ^  tronqué  et  aussi  très  usé  â  l'un  des  d 
bouts.  (Ces  deux  pièces  ont  été  trouvées  séparées  dan 
kioekkenmoedding  de  Moi  ta  do  Sebasiiâo). 

3.  Fragment  de  bois  de  cerf  scié  en  biseau  _el  cassé  à  la  poi 
(Cabeço  da  Arruda). 

4  et  6.  Spatules  en  os.  (Même  provenance). 

S,  Portion  de  ramure  de  bois  de  cerf  dont  on  a  scié  un  andou 
près  de  la  base;  elle  est  perpendiculairement  sciée  à  I' 
de  ses  extrémités  et  sciée  et  usée  obliquement  à  l'an 
(Même  provenance). 


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PLANCHE  IV 

Fig.    7,  Nucléus  en  siles,  dont  on  a  enlevé  une  succession  de  lames  en 
frappant  toujours  du  côté  de  la  base. 
8.  Poinçon  en  os. 

g.  Caillou  plat  de  roche  amphiboltque  arrondi  et  usé  par  l'eau, 
avec  trou  de  suspension;  probablement  porté  comme  orne- 
ment. (Il  a  été  trouvé  détaché  à  la  surface  du  dépôt). 

lo.  Portion  d'un  métacarpien  d'oiseau  façonné  à  l'une  des  extré* 
mités. 

1 1  a  14.  Petits  couteaux  en  silex. 

i5.  Éclat  d'os  façonné  en  pointe. 

16  à  26.  Pointes  de  flèches  en  silex  de  forme  rhomboïdale  de  diffé- 
rents types,  a  tranchant  transversal.  (Tous  les  objets  repré- 
sentés par  les  fig.  7  a  26  proviennent  du  kioekkenmoed- 
ding  de  Cabeço  da  Arruda). 

a7.  Scie  en  silex  retouchée  sur  tout  le  pourtour  du  côté  élevé. 
(Cette  pièce  unique  provient  de  Paul,  près  de  Cabeço  da 
Arruda,  Elle  a  été  trouvé  à  la  surface  du  sol). 


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Uiï.  PiTia.TnT<su  do  Condt  d«  Smin  4. 

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NOTES 

SUR  LES  OSSEMENTS  HUMAINS 

QUI  SE  TROUVENT  DANS  LE  MUSÉE  DE  L.\  SECTION  GÉOLOGIQUE  DE  LISBONNE 
M.    F.   DE  PaULA  E  OOVEIRA 

Profitant  de  l'autorisation  que  M.  Carlos  Ribeiro,  l'ex- 
cellent directeur  de  la  Section  Géologique,  m'avait  accordée 
il  y  a  environ  un  mois,  de  la  façon  la  plus  gracieuse,  pour 
étudier  les  ossements  humains  du  musée  d'anthropologie 
de  la  Section  Géologique,  j'ai  pris  à  tâche  de  faire  ce  tra- 
vail, en  m'appliquant  principalement  à  l'examen  et  à  la 
mensuration  des  crânes,  le  temps  m'ayant  manqué  pour 
mener  à  bout  une  étude  minutieuse  des  autres  débris  qui  fi- 
gurent dans  notre  collection  anthropologique. 

En  présentant  au  Congres  le  résultat  de  mes  observa- 
tions, je  m'occuperai  principalement  de  décrire  les  différen- 
tes races  qui  se  trouvent  réprésentées  dans  les  séries  du 
■  musée;  je  ne  traiterai  en  détail  que  des  crânes  intéressants 
sous  ce  point  de  vue,  c'est-à-dire,  de  ceux  qui  peuvent  servir 
comme  des  spécimens  des  dites  races.  Ceux-ci  je  les  décrirai 
suivant  l'ordre  de  leur  ancienneté  ;  autant  du  moins  qu'on  peut 


.ïGooqle 


2g2 

leur  assigner  un  âge  probable,  d'après  les  indices  fournis 
par  la  nature  du  sol  où  ils  ont  été  trouvés,  ou  par  les  ob- 
jets d'industrie  qui  les  accompagnaient. 

Parmi  les  crânes  dont  je  parle,  il  en  est  un  qui  a  été 
trouvé  à  Valle  do  Areeiro,  près  Villa  Nova  da  Rainha,  dans 
un  terrain  alluvial  dont  la  formation,  selon  M.  Carlos  Ri- 
beiro,  remonte  probablement  à  l'époque  quaternaire.  D'après 
les  indications  fournies  par  les  personnes  auxquelles  la  dé- 
couverte de  ce  crâne  est  due,  il  y  a  toute  raison  pour  croire 
qu'il  est  contemporain  du  dépôt  qui  le  recelait.  Cette  cir- 
constance, qui  du  reste  n'a  rien  d'improbable,  puisqu'on  a 
déjà  trouvé  en  Portugal  des  débris  d'industrie  de  l'homme 
quaternaire,  parmis  lesquels  quelques  spécimens  parfaite- 
ment marqués  des  plus  anciens  types  paléolithiques,  cette 
circonstance,  dis-je,  redouble  l'intérêt  qui  s'attache  à  l'étude 
de  cette  curieuse  pièce,  et  lui  vaut  la  première  place  dans 
la  description  des  exemplaires  similaires  de  la  collection. 

De  ce  crâne  (PI.  i,  i  (i,è,c.)il  reste  à  peine  l'os  frontal, les 
pariétaux  et  l'occipital,  et  même  ces  derniers  os  sont  brisés  et 
assez  incomplets.  Les  sinus  frontaux  sont  peu  développés,  les 
bosses  sourcilières  peu  proéminentes,  le  front  est  saillant  mais 
assez  étroit,  et  son  peu  de  largeur  se  trouve  en  dispropor- 
tion avec  la  dilatation  transversale  des  pariétaux  (ind.  front. 
66,42).  La  voûte  crânienne  a  une  conformation  arrondie, 
avec  cette  particularité  toutefois,  que  les  pariétaux  et  l'occi- 
pital se  trouvent  aplatis  autour  du  lambda.  On  observe  une 
légère  dépression  au-dessus  de  l'angle  externe  de  l'occipital. 

On  peut  aussi  mentionner,  comme  des  caractères  dignes 
de  remarque,  la  simplicité  des  sutures,  la  déviation  en  ar- 
rière des  bosses  pariétales  et  la  petite  saillie  de  l'inion. 

L'indice  céphalique  est  80,1 1  ;  c'est  donc  un  crâne  sous- 
brachycéphale  d'après  la  nomenclature  de  Broca.  A  son  peu 


,ï  Google 


293 

d'épaisseur,  à  ta  proéminence  de  sa  région  frontale,  aux  for- 
mes suaves  de  son  contour,  on  reconnait  qu'il  a  appartenu 
à  un  individu  du  sexe  féminin. 

Une  mâchoire  qui  a  été  trouvée  dans  le  même  dépôt, 
auprès  du  fragment  que  je  viens  de  décrire,  devait  appar- 
tenir, selon  toutes  les  probabilités,  au  même  individu. 

Dans  cette  mâchoire  la  branche  montante  gauche  man- 
que totalement,  ainsi  qu'une  partie  de  la  droite.  L'oblitéra- 
tion de  quelques-uns  des  alvéoles  et  l'ouverture  de  l'angle 
mandibulaire  présentent  des  indices  de  sénilité.  Le  menton 
est  saillant,  les  apophyses  géni  bien  visibles,  la  ligne  my- 
loïdéenne  nettement  dessinée.  La  légère  introversion  du  go- 
nion  est,  elle  aussi,  digne  de  remarque. 

Le  crûne  dont  je  viens  de  traiter  ressemble  par  plu- 
sieurs de  ses  caractères  au  crâne  n."  2  de  Furfooz,  décrit 
par  MM,  de  Quatrefages  et  Hamy  {Cratiia  Ethnies,  p.  108). 
Comme  celui-ci,  le  crâne  de  Valle  do  Areeiro  est  sous-bra- 
chycéphale,  et  il  présente  entre  autres  traits  communs  une 
dépression  caractéristique  au  dessus  de  l'angle  externe  de 
l'occipital,  quoique  probablement  cette  dépression  y  soit 
moins  prononcée  que  celle  qui  s'observe  sur  la  même  région 
dans  la  pièce  de  Furfooz. 

En  superposant  les  contours  des  deux  cnlnes  vus  de 
face,  on  voit  que  ces  contours  s'ajustent  très  exactement. 
Pour  les  contours  antéro-postérieurs  l'ajustement  toutefois 
ne  se  fait  plus  d'une  manière  aussi  parfaite.  Le  profil  du 
crâne  de  Valle  do  Areeiro  s'élève  un  peu  plus  en  avant;  sa 
courbe  aussi  est  plus  régulière  que  celle  du  crâne  de  Furfooz. 

En  comparant  les  mesures  du  crâne  belge  et  celles  que 
j'ai  pu  prendre  sur  le  crâne  portugais,  j'ai  trouvé  que  les 
deux  séries  numériques  ne  différaient  que  de  très  peu  entre 
elles,  et  en  présence  de  ces  analogies,  il  m'a  semblé  qu'il 


1,(Mè^ 


n'y  aurait  de  ma  part  aucune  témérité  de  quatiSer  ce  der- 
nier crâne  comme  appartenant  à  la  même  race  brachycé- 
phale  ou  sous-brachycéphale,  dont  le  crâne  de  Furfooz  n."  2, 
à  ce  qu'il  semble,  passe  pour  être  le  spécimen  le  plus  parfait. 

Si  ce  rapprochement  a  autant  de  raison  d'être  que  je 
!e  suppose,  le  sol  portugais  d'aujourd'hui  a  été  habité  dans 
les  temps  préhistoriques  les  plus  reculés  par  dts  hommes 
de  la  race  de  Furfooz,  Cette  occurrence  vient  confirmer 
pour  moi  l'opinion  des  auteurs  des  Cranta  Ethnka,  qui, 
-dans  les  particularités  morphologiques  d'un  crâne  masculin 
brachycéphale  provenant  du  kioekkenmocddings  deCabeço 
da  Arruda  •,  près  Mugem,  voient  l'indice  de  la  fusion  de  deux 
races,  et  l'une  de  ces  races  est  précisément  celle  dont  je 
traite.  Lekioekkenmocdding  de  Cabeço  da  Arruda  appartient, 
selon  toute  vraisemblance,  au  commencement  de  l'âge  néo- 
lithique; il  ne  faut  donc  pas  s'étonner  qu'on  ait  découvert 
dans  cette  station  les  vestiges  d'une  race  qui  aurait  vécu  à 
l'époque  quaternaire  sur  les  bords  du  Tage,  ainsi  que  cela 
est  arrivé  plus  tard  aux  hommes  de  Cabeço  da  Arruda. 

Après  la  description  de  la  pièce  de  Valle  do  Areeiro, 
celle  des  crânes  des  kioekkenmocddings  de  Mugem  s'ensuit 


'  Ce  crâne,  dùposé  au  musée  de  l'École  Polyiechnique  de  Lisbon- 
ne, provient  d'une  premÎÈre  exploration  exécutée  il  y  a  environ  quinze 
ans  ;  il  a  étii  décrit  par  M.  Pereira  Ja  Costa  dans  un  mémoire  intitulé  : 
Noticia  sobre  os  esqueletos  humanos  descobertos  no  Cabeço  da  Arruda. 
Lcsfig.5a,b,c,  (PI.  m),  qui  Je  représentent,  ont  été  obtenues  en  réduisant 
â  Vi  '*;5  lithO!^raptiies  qui  accompa(;ncnt  la  monographie  de  M.  Costa.  !.a 
fig.  5c  ne  reproduit  pas  la  norma  verlicalis  du  même  crâne  telle  qu'elle 
se  trouve  dans  le  mémoire  citéi  le  plan  glahello-lambdoïdien  s'y  trou- 
vant évidemment  incliné  relativement  au  plan  de  projeciion,  j'ai  recti- 
fié le  dessin  en  traçant  au  stéréographe  le  contour  du  modèle  en  plâtre 
que  le  musée  possède. 


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naturellement  dans  ce  travail.  Ces  crânes  remontent  évi- 
demment à  une  époque  bien  plus  reculée  que  celle  des  os- 
sements humains  qu'ont  livré  les  fouilles  des  cavernes  et  des 
sépultures  mégalithiques.  Outre  cette  circonstance,  ils  mé- 
ritent aussi  le  plus  grand  intérêt  à  cause  de  la  notable  va- 
riété de  formes  qu'ils  présentent,  parmis  lesquelles  il  y  en  a 
qui  se  sont  conservées  dans  notre  sol  jusqu'à  la  fin  de  l'âge 
néolithique,  comme  je  le  ferai  remarquer. 

J'ai  dit  que  les  auteurs  des  Crania  Ethnica  ont  trouvé 
dans  les  formes  d'un  cr3ne  de  Cabeço  da  Arruda  le  vestige 
de  deux  types,  dont  l'un  serait  le  sous-brachycéphale  de 
Furfooz.  L'autre  type,  d'après  les  mêmes  anthropologistcs, 
est  celui  de  Canstadt,  qui  se  révèle  principalement  par  la 
proéminence  des  bosses  sourcilières. 

Le  caractère  que  je  viens  de  mentionner  ne  s'observe  que 
rarement  sur  les  crânes  complets  de  la  série  de  Mugem; 
cette  circonstance,  pourtant,  ne  doit  être  attribuée  qu'au  petit 
nombre  des  crânes  masculins.  Contrairement  à  ce  qu'il  ar- 
rive d'ordinaire,  les  crânes  féminins  figurent  en  grande  ma- 
jorité dans  cette  série. 

La  brachycéphalie  est  rare  aussi  chez  les  crânes  de  Mu- 
gem. Outre  le  crâne  dont  je  viens  de  parler,  il  n'y  a  qu'un 
autre  crâne  brachycéphale  de  la  même  provenance.  Ce  crâne 
(PI.  IV,  7  d!,  b.)  a  beaucoup  d'analogie  avec  celui  qui  a  été  dé- 
crit par  M.  Costa;  toutefois  il  présente  relativement  à  celui-ci 
quelques  diH'érences,  dont  les  plus  refnarquables  consistent 
dans  l'effacement  des  bosses  sourcilières,  et  dans  l'exagéra- 
tion de  la  brachycéphalie,  qui  est  vraiment  extraordinaire 
(ind,  cépli.  97,3/),  quaique  probablement  elle  ait  été  un  peu 
augmentée  par  la  déformation  posthume.  La  première  de 
ces  différences  est  d'ailleurs  e\pliquable  par  l'influence  du 
sexe,  le  sujet  étant  féminin,  L'étroitesse  du  front,  coexistant 


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39^ 

avec  réiargissement  transversal  des  pariétaux,  et  avec  un 
vaste  aplati^ement  dans  ta  région  postérieure  de  ta  voûte, 
sont  tes  caractères  les  plus  frappants  qu'on  peut  observer  suu" 
nos  deux  crânes  brachycéphates  :  je  rappellerai  ici,  que  des  ca- 
ractères analogues  ont  été  signalés  par  Broca  sur  les  crânes 
brachycéphales  de  la  série  d'Orrouy,  que  MM.  de  Quatrefages 
et  Hamy  rattachent  au  groupe  de  Furfooz.  D'après  la  descrip- 
tion de  Broca,  il  me  semble  que  les  crânes  brachycépha- 
les de  Mugem  se  rapprochent  notablement  de  ceux  d'Or- 
rouy. 

Un  autre  crâne  de  Mugem,  très  remarquable  aussi,  se 
trouve  représenté  dans  les^g.  S  a,b^c  (PI.  i).  Ce  crâne  est 
sous-brachycéphale  (Jnd.  céph.  82,56);  ses  arcades  sourciliè- 
res  sont  modérément  développées  et  il  présente  une  légère 
dépression  à  l'endroit  de  la  glabelle.  La  partie  antérieure  de 
son  os  frontal,  au  lieu  d'être  proéminente  et  arrondie  comme 
chez  les  deux  crânes  brachycéphates  de  la  même  série,  est, 
au  contraire,  aplatie  et  fuyante,  formant  inclinaison  en  ar- 
rière immédiatement  après  la  région  soiircilière.  Les  parié- 
taux sont  peu  dilatés  transversalement  dans  leur  région  pos- 
térieure, leur  convexité  est  tout-à-fait  régulière,  la  courbe 
antéro-postérieure  est,  elle  aussi,  très-douce  le  long  de  la 
suture  sagittale,  et  se  prolonge  de  même  dans  la  partie  su- 
périeure de  l'occipital.  La  portion  sous-iniaque  de  ce  der- 
nier os  est  plate,  et  sa  superficie  est  très  peu  inclinée  par 
rapport  au  plan  alvéolo-condylien.  Les  apophyses  mastoïdes 
sont  peu  volumineuses. 

La  face  est  solide  et  épaisse,  très  prognathe,  et  elle  a 
une  largeur  considérable  (ind.  fac.  59,58).  Les  os  malaires 
sont  projetés  latéralement,  inclinés  d'arrière  en  avant,  les 
orbites  présentent  un  contour  arrondi,  les  fosses  canines 
sont  effacées. 


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297 

Dans  la  mâchoire  inférieure,  épaisse  et  robuste,  on  re- 
marque, la  saillie  du  menton,  la  convexité  du  bord  inférieur 
des  branches  horizontales,  la  petite  excavation  de  la  courbe 
sigmoïde,  le  volume  considérabla  des  condyles,  l'introver- 
sion de  l'angle  mandibulaire. 

Les  caractères  que  je  viens  de  mentionner  ne  s'obser- 
vent réunis  sur  aucun  autre  des  crânes  préhistoriques  du 
musée.  Ces  caractères  sont  en  opposition  avec  ceux  du  type 
européen;  mais  ils  rappellent  en  quelque  sorte  les  traits  pri- 
vatifs de  quelques  races  asiatiques  appartenant  au  groupe 
mongolique. 

Tous  les  autres  crânes  de  Mugem  qui  jusqu'à  présent 
ont  été  déposés  au  musée,  et  se  trouvent  en  état  d'être  me- 
surés, sont  franchement  dolichocéphales.  Ceux  qui  portent 
les  n,"*  2,  3,  4  et  5  sont  très  peu  volumineux,  leurs  sutures 
sont  simples,  leurs  bosses  sourcilières  à  peu  près  effacées. 
Ils  ont  encore  de  commun  les  caractères  suivants:  élévation 
de  la  voûte,  peu  d'inclinaison  du  frontal  dans  sa  partie  an- 
térieure, courbure  régulière  du  même  os  au-dessus  des  bos- 
ses frontales  et  dans  la  direction  de  la  suture  coronale, 
courbe  antéro-postérieure  des  pariétaux  très  peu  accentuée 
dans  les  deux  tiers  antérieurs  de  la  suture  sagittale,  cour- 
bure brusque  de  ces  os  de  haut  en  bas  au  commencement  du 
tiers  postérieur  de  la  même  suture,  aplatissement  de  la  ré- 
gion postérieure  des  pariétaux  et  supérieure  de  l'occipital, 
bosses  pariétales  élevées,  écaille  temporale  circulaire,  apo- 
physes mastoïdes  peu  développées.  Ces  caractères  s'obser- 
vent plus  nettement  sur  le  crâne  n."  3,  {Jîg.  3  a,  b.,  c.  PI.  ii). 

Les  faces  sont  longues,  prognathes,  les  orbites  quadran- 
gulaires.  Dans  la  mâchoire  il  faut  noter  la  saillie  du  menton, 
qui  est  triangulaire,  et  l'extro version  du  gonion.  Les  différen- 
ces qu'on  observe  entre  ces  crânes  sont  peu  considérables. 


Après  l'excursion  à  Mugem,  on  a  reçu  à  la  Section  une 
portion  considérable  de  débris  de  squelettes,  que  les  fouilles 
récemment  pratiquées  dans  les  kioekkenmoeddings  avaient 
mis  en  lumière,  et  qui  y  avaient  été  conservés  jusqu'au  jour 
de  l'excursion,  pour  que  les  membres  du  Congrès  pussent 
les  examiner  en  place.  Des  crânes  nouvellement  arrivés  la 
plupart  se  trouvent  en  très  mauvais  état,  et  je  n'ai  pas  disposé 
du  temps  nécessaire  pour  en  faire  Pétude  complète  ;  toute- 
fois, sur  les  pièces  les  moins  détériorées,  j'ai  reconnu  des 
caractères  analogues  à  ceux  des  quatre  crânes  dont  je  viens 
de  traiter,  quoique  chez  quelques-uns  les  arcades  sourciliè- 
res  soient  assez  développées.  On  a  reçu  une  grande  portion 
d'os  longs,  quelques  fragments  d'os  iliaques  et  de  côtes.  Le 
rapide  examen  que  j'ai  fait  de  ces  débris  m'a  permis  de  re- 
connaître que  plusieurs  des  humérus  sont  perforés,  que  les 
fémurs  affectent  souvent  la  forme  dite  à  colonne,  et  que  les 
tibias  sont  fréquemment  platycnémiques,  ces  deux  derniers 
caractères  coexistant  parfois  avec  le  premier  sur  le  même 
squelette. 

Tous  ces  os,  par  l'exiguïté  de  leurs  dimensions,  indi- 
quent que  les  hommes  de  Mugem  étaient  de  très  petite 
taille. 

Parmi  les  crânes  il  y  en  a  un  qui,  par  sa  conformation 
singulière,  mérite  que  j'en  fasse  une  mention  spéciale.  Ce 
crâne  (PI.  II.  4  a,  è,  c),  le  seul  complet  parmi  ceux  qui  ont 
été  reçus  dernièrement,  ne  figure  que  depuis  hier  dans  la 
série  de  Mugem,  ou  il  porte  maintenant  le  n."  6.  Il  est  do- 
lichocéphale; sa  voûte,  cependant,  s'élargit  considérable- 
ment en  arrière,  les  pariétaux,  se  courbant  brusquement 
au  milieu  de  leur  longueur,  descendent  ensuite  verticale- 
ment en  formant  une  surface  aplatie,  et  l'aplatissement  se 
prolonge  encore  sur  une  assez  grande  extension  de  l'écaillé 


,ï  Google 


299 
occipitale.  On  retrouve  donc  chez  ce  crâne  dolichocéphale 
la  même  particularité  morphologique  relevée  sur  les  deux 
crânes  brachycéphales  de  la  même  provenance.  Néanmoins 
malgré  ces  indices,  qui  paraissent  révéler  le  type  de  Fur- 
fooz,  les  traits  qui  prL\l'  minent  chez  ce  crâne  sont  analo- 
gues à  ceu'i  qu'on  observe  sur  les  n."  2,  3  et  5  de  la  même 
série:  il  se  rapproJic  de  ceux-ci  non  seulement  par  sa  do- 
licocéphalie,  mais  surtout  par  la  conformation  de  sa  face. 
Finalement,  des  caractères  privatifs  d'une  autre  race,  celle 
de  Canstadt,  viennent  compliquer  encore  la  morphologie  de 
cette  remarquable  pièce;  ces  caractères  sont  le  développe- 
ment considérable  des  arcades  sourcilières,  la  forme  fuyante 
du  front  et  l'aplatissement  de  la  région  supérieure  de  la 
voûte. 

Les  autres  crânes  que  l'on  conserve  dans  la  Section 
appartiennent  à  l'âge  néolithique,  la  plupart  probablement  à 
la  tin  de  cet  âge. 

On  retrouve  chez  ces  crânes  les  deux  formes  brachycé- 
phale  et  dolichocéphale,  qui  sont  les  prédominantes  dans  la 
série  de  Mugem.  Ces  formes  s'y  observent  encore  assez  pu- 
res, surtout  chez  les  crânes  de  Casa  da  Moura  (Cesareda) 
et  de  Monte-Junto,  la  principale  différence  consistant  en  ce 
que  le  volume  de  ceux-ci  se  trouve  être  bien  plus  considé- 
rable. Cette  circonstance  est  très  digne  de  remarque. 

C'est  dans  un  crâne  de  la  station  préhistorique  de  Licêa 
(PI.  IV,  9a,é),  que  l'on  observe  la  forme  brachycéphale  en 
plus  grande  pureté.  Ce  crâne  est  celui  d'un  individu  du  sexe 
féminin. 

Le  type  masculin  peut  être  étudié  sur  un  crâne  prove- 
nant de  la  caverne  de  Carvalhal,  près  de  la  Serra  de  Turquel. 
Ce  crâne  réprésenté  par  les  figures  G  a,  i,  c,  (PI.  m)  est 
très  semblable  par  sa  conformation  générale  au  crâne  bra- 


^(^1^ 


3oo 

chycéphale  masculin  de  Mugem;  il  est  toutefois  bien  plus 
volumineux.  L'étroitesse  de  la  région  antérieure  de  la  voûte, 
l'élargissement  des  pariétaux,  le  vaste  aplatissement  posté- 
rieur embrassant  une  grande  extension  des  pariétaux  et 
de  l'occipital,  tous  ces  caractères,  que  j'ai  relevés  en  trai- 
tant des  crânes  brachycéphales  de  Mugem,  se  retrouvent 
chez  les  crSues  de  Garvalhal  et  de  Licéa,  Seulement  la  dé- 
pression sus-mastoïdéenne,  considérée  comme  privative  du 
type  de  Furfooz,  ne  s'observe  pas  sur  le  crâne  de  Garva- 
lhal; quant  à  celui  de  Licèa,  si  ce  caractère  y  existait  pri- 
mitivement, Pétat  actuel  de  la  pièce  ne  permet  pas  de  le 
constater. 

La  même  forme  crânienne  se  retrouve  assez  pure  dans 
le  crâne  n.°  2 1  de  Casa  da  Moura  (PI.  iv,  8<a,  b),  et  dans 
le  n."  4  de  MonteJunto,  tous  les  deux  féminins.  Des  ca- 
ractères semblables,  quoique  moins  accentués,  s'observent 
encore  sur  quelques  autres  crânes  de  ces  deux  séries. 

La  forme  dolichocéphale  est  toutefois  celle  que  l'on  ob- 
serve plus  fréquemment  chez  les  crânes  de  l'âge  néolithique. 
On  la  retrouve  bien  accentuée,  entre  autres,  dans  le  crâne 
n.*  2  de  Casa  da  Moura.  (PI.  v,  loa,  i,  c.)  Il  est  inutile  que 
je  fasse  une  description  détaillée  de  ces  crânes;  je  me  borne- 
rai à  dire  qu'ils  présentent  une  conformation  très  semblable 
à  celle  des  dolichocéphales  de  Mugem,  tout  en  étant  beau- 
coup plus  volumineux.  Ce  caractère  seul  suffit  pour  les  faire 
bien  distinguer. 

Il  est  bon  de  dire  à  ce  propos  que  les  particularités 
anatomiques  signalées  par  MM.  de  Quatrefages  et  Hamy 
sur  deux  ou  trois  maxillaires  de  Casa  da  Moura,  dont  la 
description  et  les  dessins  se  trouvent  dans  le  mémoire  de 
M.  Delgado  intitulé  Noticia  dcerca  das  grutas  de  Cesa- 
reda,  ne  s'observent  pas  sur  les  pièces  similaires  qui  ont 


'^ 


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3oi 

été  exhumées  de  la  même  caverne  dans  une  fouille  plus  ré- 
cente. Les  caractères  dont  je  parle  consistent  dans  l'exagé- 
ration de  la  proclivité  symphysaire  et  dans  l'effacement  du 
menton,  d'où  il  résulte  que  la  perpendiculaire  abaissée  de  la 
partie  antérieure  du  bord  alvéolaire  tombe  en  dehors  du  corps 
de  la  mâchoire.  Parmi  les  nombreux  maxillaires  de  Casa  da 
Moura  que  l'on  conserve  à  la  Section,  il  n'y  en  a  pas  un  seul 
qui  présente  cette  disposition. 

Les  cavernes  de  Cesareda  et  de  Monte-Junto  ont  fourni 
une  ponion  considérable  d'os  longs.  Malheureusement  ces 
os  ont  été  trouvés  mêlés,  et  pour  la  plupart  fracturés,  en 
sorte  qu'il  devient  impossible  d'en  déterminer  les  proportions; 
on  reconnaît  toutefois  qu'ils  ont  appartenu  a  des  individus 
plus  hauts  de  taille  que  ceux  de  Mugem.  Les  fémurs  et 
les  tibias  présentent  fréquemment  les  détails  de  conforma- 
tion que  j'ai  signalés  en  traitant  des  squelettes  des  kioekken- 
moeddings;  les  humérus  perforés  sont  proportionnellement 
moins  nombreux. 

Je  dois  insister  sur  une  circonstance  que  je  crois  im- 
portante, surtout  après  ce  que  j'ai  entendu  dire  dans  une 
des  séances  antérieures  à  quelques  membres  du  Congrès,  à 
propos  de  la  ressemblance  qu'ils  ont  remarquée  entre  nos 
objets  archéologiques  de  l'âge  néolithique,  et  ceux  du  mê- 
me âge  trouvés  en  Ecosse  et  en  Irlande. 

D'après  la  description  de  quelques  crânes  préhistori- 
ques écossais  et  irlandais,  faite  par  le  professeur  Huxley 
dans  le  remarquable  ouvrage  Prehistortc  remains  of  Caith- 
ness,  il  me  semble  que  la  plupart  de  ces  crânes,  par  leurs 
formes  et  par  leurs  dimensions,  ont  des  analogies  très  in- 
times avec  plusieurs  des  crânes  de  nos  cavernes,  surtout 
avec  ceux  de  Monte-Junto,  chez  lesquels  s'observe  avec 
plus  de  fréquence  l'indice  du  mélange  des  dciuc  races,  bra- 


pogle 


302 

chycéphale  et  dolichocéphale,  dont  je  me  suis  plus  panicu- 
licrcment  occupe. 

Les  caractères  mixtes  des  deux  types  mentionnés  se 
manifestent  encore  chez  les  crânes  de  la  série  de  Palmella. 
Chez  la  plupart  de  ceux-ci  l'indice  céphalique  se  maintient 
assez  élevé,  sans  toutefois  dépasser  jamais  la  limite  de  la 
sous-brachycéphalîe. 

Pour  terminer  cette  rapide  description  des  crânes  de 
notre  collection  il  me  reste  à  parler  des  crânes  des  cavernes 
de  Cascaes. 

*  On  ne  retrouve  pas  parmi  les  crânes  de  Cascaes  le 
type  brachycéphaie  qui  figure  dans  quelques-unes  des  au- 
tres séries  de  la  Section.  Ces  crânes  sont  dolichocéphales, 
rarement  sous-dolichocéphales,  volumineux;  ils  ont  un  front 
spacieux,  une  voûte  régulièrement  contournée  (PI.  v,  1 1  ii, 
i,  c).  Les  faèes  sont  larges  et  prognathes,  les  orbites  qua- 
drangulaires.  Leur  type  est  très  uniforme:  les  différences 
qu'ils  présentent  entre  eux  peuvent  être  considérées  comme 
de  simples  variations  individuelles. 

Dans  les  maxillaires,  il  y  a  à  noter  principalement  la 
saillie  du  menton,  la  forme  arrondie  et  l'cxtrovcrsion  du 
gonion. 

En  essayant  d'assigner  à  ces  crânes  une  place  dans 
la  classification,  je  ferai  remarquer  que  les  caractères  qui 
les  distinguent  s'observent  en  grande  partie  dans  la  race 
de  Cro-Magnon.  J'en  dirai  autant  au  sujet  de  quelques  au- 
tres crânes  dolichocéphales  du  musée  qui,  par  leur  morpho- 
logie, se  rapprochent  de  ceux  de  Cascaes. 

Les  crânes  dont  je  parle  ne  reproduisent  pas,  il  est 
vrai,  d'une  manière  parfaite  tous  les  caractères  qu'on  attri- 
bue à  cette  race.  Leur  prognathisme  sous-nasal  est  plus 
considérable;  les  orbites,  par  l'abaissement  de  leur  angle 


,ï  Google 


3o3 

externe  inférieur,  présentent  un  contour  trapezoïdc;  jamais 
aussi  on  n'observe  chez  eux  l'enfoncement  profond  de  la 
racine  du  nez.  Mais,  malgré  ces  différences,  par  leur  con- 
formation générale  ils  se  rapprochent  notablement  de  la  race 
mentionnée,  et  je  crois  qu'on  doit  les  y  rattacher. 

A  ce  propos,  je  dirai  que  les  os  longs  de  la  même  pro- 
venance présentent  des  caractères  analogues  à  ceux  qui  se 
rencontrent  chez  les  squelettes  de  Cro-Magnon  :  ainsi  on  y 
remarque  fréquemment  la  platycnémie  du  tibia,  Pépaississe- 
ment  de  la  ligne  âpre  du  fémur  et  la  torsion  de  l'humérus, 
ce  dernier  os  n'étant  jamais  perforé. 

Je  rappellerai  aussi,  comme  une  circonstance  qui  donne 
un  certain  appui  à  ma  supposition,  que  le  type  de  cette  race 
a  déjà  été  signale  par  quelques  anthropotogistes  sur  des 
crSnes  provenant  de  différentes  stations  préhistoriques  de 
l'Espagne.  Selon  MM.  de  Quatrefages  et  Hamy,  la  même 
forme  crânienne  s'observe  encore  aujourd'hui,  quoique  non 
pas  d'une  façon  générale,  chez  les  Basques;  or  si  quelque 
part  le  type  des  anciens  habitants  de  l'ouest  de  l'Europe  a 
pu  se  maintenir  tant  soit  peu  à  l'état  de  pureté  jusqu'à  nos 
jours,  c'est  parmi  les  Basques  qu'il  est  raisonnable  de  le 
chercher. 

Rien  que  par  ces  témoignages,  il  y  aurait  lieu  de  pré- 
sumer que  la  race  de  Cro-Magnon  eût  eu  de  ses  représen- 
tants aussi,  aux  temps  préhistoriques,  dans  le  sol  occidetv 
tal  de  la  Péninsule  ibérique. 

Cette  considération  vient  donc  confirmer  ma  manière 
de  voir.  D'ailleurs,  les  particularités  secondaires  qui  diffé- 
rencient les  deiix  formes  crâniennes  sont,  à  ce  que  je  pense, 
parfaitement  expliquables  comme  étant  des  modifications 
produites  dans  la  race  primitive  par  les  croisements,  ou  par 
les  influences  du  milieu. 


.,C' 


3o4 
On  voit  dans  le  tableau  ci-joint  les  mesures  de  quel- 
ques crânes,  qui  représentent  assez  purs  les  différents  types 
dont  il  a  été  question  dans  cette  étude. 


M.  ï)E  Qlatrefages:  M,  Paula  e  Olivcira  est  dans  le 
vrai  lorsqu'il  rapproche  certaines  populations  ibériques  de 
la  race  de  Cro-Magnon.  Nous  avons  montré  depuis  long- 
temps, M.  Hamy  et  moi,  que  cette  race  était  plus  ou  moins 
représentée  dans  le  pays  Basque,  en  Algérie,  aux  Canaries, 
oij  M.  Verncau  l'a  retrouvée  encore  vivante.  La  Péninsule 
ibérique  ne  peut  guère  qu'avoir  reçu  sa  part  de  ce  sang  sur 
divers  points  de  son  territoire. 

Toutefois,  on  ne  saurait  attribuer  à  cette  race  seule 
tous  les  éléments  dolichocéphales  qui  ont  contribué  à  former 
les  populations  actuelles,  celles  du  Portugal  en  particulier. 
En  étudiant  les  crânes  retirés  des  kioekkenmoeddings,  j'y  ai 
trouvé  un  type  dolichocéphale,  absolument  distinct  de  celui 
de  Cro-Magnon.  La  plupart  de  ces  crânes  sont  malheureu- 
sement déformés;  mais  l'un  deux,  placé  dans  la  vitrine  n°  i, 
est  presque  intact  et  permet  d'apprécier  facilement  certains 
traits  que  l'on  reconnaît  ensuite  sans  trop  de  peine  sur  les 
spécimens  qui  ne  sont  pas  trop  altérés.  Le  caractère  géné- 
ral le  plus  frappant  de  ce  crâne,  c'est  qu'il  est  très  franche- 
ment harmonique;  il  est  dolichopse  autant  que  dolichocé- 
phale. La  tète  osseuse  de  Cro-Magnon,  au  contraire,  est  es- 
sentiellement disharmonique;  si  elle  est  dolichocéphale,  elle 
est  brachyopse.  Chez  elle  la  face  est  dilatée  transversale- 
ment outre  mesure.  Dans  la  tête  portugaise  dont  je  parle, 
elle  semble,  au  contraire,  presque  comprimée  tant  les  pom- 


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PaULA  E  OuVEIRi  PI.  L 


I  a,  b,  c.  Crâne  de  Voile  do  Arietro. 
a  a,  b,  c.  Crâne  ».'  /  de  Mugem. 

Liih.  PiTia  Rua  do  Hsiib  itt  Vema.  SO. 

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Padla  e  ÛuvBmA. 


3  a,  b,  c.  Crâne  n."  3  de  Mugem. 

4  a,  b,  c.  Crâne  n."  6  de  Mugan. 

LiUi.  FiTÎi  Kui  dD  loinbo  d«  7nlo.  DO. 

dl  ..  , C.ooqIc 


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PàBU.  B  OuVEIBi. 


S  a.  b,  c.  Crâne  brachycéphale  masculin  de  Mugem. 
S  a,  b,  c.  Crâne  brachycéphale  masculin  de  Carvalhal 

'  '""  "  Uib  Pana  Rna  da  Miiita  di  îajai,  10. 

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PI.  m. 


^  ».  *.  c     Cran,  àrachjrc^^,,,^^ 

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Pauu  e  Oliveira. 


7  d,  b.  Crâne  brach/céphale  féminin  de  Mugem. 
S  a,  b.  Crâne  n."  21  de  Casa  da  Motira. 
g  a,  b.  Crâne  de  Ltcêa. 

l  Cnuiio  lilh  LiUi.  dt  l  Liipold.  Liibonnc 

DigitizedbyGOOgle 


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Paula  e  Ouvbira. 


10  a,  b,  c.  Crâne  n."  a  de  Casa  da  Moura. 

11  a,  b,  c.  Crâne  n."  i  de  Cascaes. 

Uù  Fit»  Rua  do  Kajil»  de  Tud,  U- 


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3o5 

mettes  sont  effacées.  De  plus,  chez  cette  dernière,  l'orbite 
présente  des  caractères  opposés  à  ceux  de  Porbite  de  Cro- 
Magnon.  Celui-ci  est  très  allongé  horizontalement,  le  diamè- 
tre transverse  étant  de  be^uconp  plus  grand  que  le  diamè- 
tre vertical.  Dans  la  tête  dont  je  parle,  les  diamètres  orbi- 
taires  sont  presque  égaux. 

Ces  traits  différentiels  sont  trop  importants  et  trop  bien 
accusés  pour  que  l'on  puisse  réunir  à  la  race  de  Cro-Ma- 
gnon  les  hommes  qui  les  présentent.  Ceux-ci  appartiennent 
à  une  race  distincte. 

Ces  têtes  à  crâne  et  à  face  également  allongés,  m'ont 
vivement  rappelé  l'un  des  quatre  types  basques  que  j'ai  eu 
occasion  d'observer  dans  les  environs  de  Cambo  et  sur  les- 
quels j'ai  donné,  il  y  a  longtemps,  quelques  détails  à  la  So- 
ciété d'Anthropologie.  Il  me  paraît  évident  que  ces  monta- 
gnards du  versant  pyrénéen  français  se  rattachent  à  l'an- 
cienne race  qui  a  laissé  ses  débris  de  cuisine  et  ses  squelet- 
tes sur  les  bords  du  Tage. 

M.  Henri  Martin:  J'ai  noté  dans  laCastille  la  présence 
d'hommes  grands,  élancés,  forts,  musculeux,  osseux,  au  nez 
souvent  aquilin,  qui  ne  sont  pas  sans  analogie  avec  un  type 
sémitique  exagéré,  bien  que  sans  rapport  avec  les  Arabes. 

Peut-être  ce  sont  là  des  représentants  d'une  race  anti- 
que préhistorique*. 


'  V.  sur  ce  même  sujet  la  communication  de  M.  Henri  Martin,  «Du 
type  ethnique  et  anthropologique  des  Ibères»  et  aussi  p.  ao5  et  ao6. 


""^ 


LES  TRAITS  CARACTÉRISTIQUES 
DE   L'ÉPOQUE   NÉOLITHIQUE   EH  FRANCE 

TU^  qu'ils  sont  KÉUNIS  DANS  LES  STATIONS  DE  LA  CHAMP  ACNE 


M.  LE  u,\RON  J.  DE  Baye 

Le  grand  nombre  de  gisements  où  l'époque  de  la  pierre 
polie  a  été  étudiée  et  reconnue  forme  un  vaste  ensemble  dé- 
signé sous  ia  même  dénomination.  Les  éléments  qui  com- 
posent la  civilisation  néolithique,  examinés  séparément,  pré- 
sentent un  travail  d'analyse  attendant  une  synthèse  qui  per- 
mette de  juger  les  rapports  existant  entre  les  différentes  sta- 
tions attribuées  à  la  période  de  la  pierre  polie.  Nous  possé- 
dons dans  les  groupes  de  la  Vallée  du  Petil-Morin,  une 
source  abondante  de  documents  propres  à  faire  connaître 
un  des  aspects  les  plus  importants  de  la  période  néolithique. 
La  région  a  été  le  théâtre  du  développement  d'un  centre 
intéressant  de  la  famille  humaine. 

Si  on  en  juge  par  le  nombre  des  grottes  artificielles,  par 
la  quantité  des  débris  humains,  par  le  travail  recherché  des 
instruments,  par  le  soin  des  aménagements,  les  habitants 
primitifs  de  la  Champagne  ont  longtemps  séjourne  dans  la 
contrée.  Il  est  très  probable  qu'ils  ne  l'abandonnèrent  jamais 
dans  la  suite,  d'une  manière  absolue. 


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3o7 

Le  premier  trait  distinclif  de  la  civilisation  néolithique, 
ce  sont  les  grottes  artificielles  pratiquées  dans  le  banc  de 
craie  naturel  au  pays.  Ces  grottes  réunies  en  grande  nom- 
bre, habilement  préparées,  d'un  accès  avantageusement  mé- 
nagé, impriment  un  caractère  bien  tranché  à  ces  intéressan- 
tes stations.  La  physionomie  de  la  vie  troglodytique  présente 
en  Champagne  un  aspect  franchement  dessiné  qui  ne  se  re- 
trouve point  dans  les  monuments  néolithiques  qui  offrent  le 
plus  de  ressemblance  avec  elle.  La  nuance  du  troglodytisme 
offre  ici  une  perfection  qui  ne  permet  pas  de  le  comparera 
l'ère  des  cavernes,  telle  que  la  période  quaternaire  nous  les 
fait  connaître.  Les  grottes  bien  retaillées,  soigneusement 
disposées,  solidement  fermées,  ne  sont  plus  ici  de  simples 
abris,  mais  de  véritables  demeures,  malgré  leur  simplicité. 
Il  n'y  a  pas  lieu  de  s'étonner  du  choix  de  pareilles  habita- 
tions même  en  pensant  au  progrès  considérable  accompli  à 
l'époque  de  la  pierre  polie.  Nous  voyons  en  effet  que  les  ca- 
vernes naturelles,  primitivement  habitées  à  l'époque  paléo- 
lithique, ont  été  elles-mêmes  fréquentées  par  l'homme  de  la 
pierre  polie,  qui  a  laissé  des  traces  évidentes  de  son  passage 
au-dessus  des  couches  géologiques  anciennes. 

Au  point  de  vue  anthropologique  la  population  qui  ha- 
bitait les  grottes  artificielles  de  la  Champagne  ne  représente 
plus  déjà  une  race  pure.  Il  y  a  un  grand  mélange  et  plu- 
sieurs types  anciens  s'y  retrouvent  mélangés  intimement  à 
un  élément  nouveau.  Ces  caractères  variés  ont  été  recon- 
nus par  M.  Broca  et  par  M.  de  Quatrefages. 

Les  sépultures  sont  généralement  pratiquées  avec  une 
méthode  régulière  qui  revêt  par  sa  persistance  soutenue  la 
dignité  d'un  rite  funéraire;  partout  les  restes  de  l'homme 
sont  traités  avec  un  attentif  respect.  Le  plus  ordinairement 
les  sépultures  ont  lieu  dans  des  grottes  spéciales  dont  la  des- 


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3o8 

tination  était  purement  funéraire.  Dans  d'autres  cas,  une 
vaste  caverne  qui  avait  primitivement  servi  d'habitation  re- 
cevait un  sujet  unique  ou  deux.  Cette  exception  paraît  un 
privilège  réservé  à  des  personnalités  en  honneur.  Le  mode 
de  sépulture  était  Tinhumation. 

L'habitude  de  donner  la  sépulture  dans  un  endroit  spé- 
cialement affecté  aux  inhumations  caractérise  aussi  la  pierre 
polie.  Le  mobilier  funéraire  régulièrement  disposé,  composé 
d'objets  de  choix  d'une  catégorie  spécialement  adoptée  qui 
se  retrouve  constamment,  caractérise  également  la  période 
néolithique.  Cette  innovation  bien  évidente  constitue  une 
dilTérence  notable  avec  la  pratique  de  Pépoque  quaternaire 
qui  ensevelissait  ses  morts  dans  la  grotte  habitée. 

Il  est  à  peine  nécessaire  de  mentionner  la  hache  polie, 
puisqu'elle  est,  par  sa  nature,  l'instrument  distinctif  de  Pépo- 
que  néolithique.  Nous  dirons  cependant  que  nulle  part,  elle 
ne  justifie  aussi  bien  sont  rôle  caractéristique  que  datis  la 
période  qu'elle  a  servi  à  désigner.  La  hache  polie,  emman- 
chée, disposée  pour  l'usage  ne  remplit  dans  aucune  contrée 
un  rôle  aussi  grand,  aussi  varié,  aussi  privilégié,  que  dans 
les  stations  de  la  Champagne.  Les  haches  ont  même  été 
fréquemment  sculptées  sur  les  parois  des  grottes. 

La  sculpture  est  aussi  un  des  traits  caractéristique  des 
stations  de  la  Vallée  du  Petit-Morin.  Il  ne  s'agit  pas  ici  de 
ce  genre  de  sculpture  si  remarquable  que  l'on  trouve  dans 
les  gisements  quaternaires.  Ce  sont  des  reliefs  exécutés  dans 
la  craie  vive,  comme  ornements  des  grottes  et  représentant 
des  sujets  variés.  Les  sculptures  sont  peu  connues  à  l'épo- 
que néolithique.  Celles  de  nos  stations  sont  encore  uniques 
en  ce  moment.  Ces  essais  de  sculpture,  bien  que  d'une  nuance 
très  primitive  et  dépourvus  d'art,  ne  révèlent  pas  moins  une 
inspiration  et  un  certain  degré  de  civilisation. 


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3o9 

Les  roches  étrangères  employées  dans  le  confectionne- 
ment  des  haches,  distinguent  les  stations  de  la  Champagne. 
Les  haches  en  matières  exotiques  sont  en  assez  grand  nom- 
bre, bien  qu'il  y  air  tout  lieu  de  croire  qu'elles  ont  été  im- 
portées à  l'ctat  parfait,  elles  ne  sont  pas  moins  une  partie 
importante  de  l'outillage  néolithique  de  la  Vallée  du  Petit- 
Morin. 

Les  parures  occupent  une  large  place  dans  le  mobilier 
des  grottes  de  la  Champagne.  La  grande  quantité  de  bijoux 
n'est  certainement  pas  exclusive  à  ces  stations,  mais  néan- 
moins l'abondance  et  la  variété  des  objets  est  caractéristi- 
que et  dénote  un  progrès  incontestable.  Les  pendeloques  en 
schiste  sont  multipliées.  Les  colliers  en  craie  se  retrouvent 
dans  chaque  grotte. 

La  flèche  à  tranchant  transversal  dont  la  présence  a  été 
remarquée  depuis  un  certain  temps  dans  plusieurs  localités, 
se  rencontre  très-fréquemment  dans  les  grottes.  La  popula- 
tion paraît  en  avoir  fait  un  usage  considérable.  C'est  peut- 
être  à  l'emploi  de  ces  silex  faciles  à  préparer,  qu'il  faut 
attribuer  la  rareté  relative  des  flèches  pointues  finement  re- 
taillées. L'emploi  de  ces  projectiles  s'affirme  chaque  année 
de  plus  en  plus  par  de  nouvelles  observations.  Il  ne  fau- 
drait pas  juger  ces  instruments  sur  les  données  qui  résul- 
tent des  fouilles  exécutées  dans  le  Midi  par  exemple.  Elles 
sont  en  elfet  très  rares  dans  le  Midi  de  la  France.  Aucune 
contrée  néolithique  n'a  donné  de  ces  flèches  en  aussi  grand 
nombre.  Quelle  que  soit  la  manière  dont  on  les  considère, 
elles  donnent  aux  tribus  de  la  Vallée  du  Pctit-Morin  une 
nuance  particulière.  L'usage  de  ces  projectiles  est  bien  affirmé 
par  les  exemplaires  que  Ton  trouve  disséminés  ça  et  là  dans 
les  plaines  environnantes. 

Un  instrument  généralement  désigné  sous  le  nom  de 


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3io 

^attoir  du  Grand-Pressigny  a  été  rencontré  dans  les  grottes. 
Cet  instrument  y  est  rare,  mais  les  conditions  dans  lesquelles 
il  a  été  trouvé,  ne  s'étant  rencontrées  encore  dans  aucun  au- 
tre gisement,  nous  paraissent  dignes  d'en  faire  une  mention 
particulière  qui  pourra  devenir  un  point  de  ralliement  pour 
les  autres  contrées  où  il  serait  remarqué.  Le  même  instru- 
ment n'est  pas  rare  à  la  surface  du  sol  dans  les  régions  voi- 
sines des  stations. 

La  céramique  grossière,  mais  en  quotité  notable,  dis- 
tingue les  stations  néolithiques  de  la  Champagne.  Les  vases 
y  sont  de  formes,  de  dimensions,  de  capacité  très  variées. 
Mais  ils  portent  tous,  à  peu  d'exception  près,  les  nuances  ty- 
piques de  la  même  fabrication.  Ces  vases,  formés  d'une 
terre  peu  homogène  mélangée  de  graviers  et  peu  travaillée, 
sont  à  peine  lissés  et  toujours  dépourvus  d'anses.  La  cuis- 
son fort  imparfaite  a  été  opérée  à  l'air  libre.  Bien  que  ces 
vases  soient  loin  d'être  des  objets  d'art,  ils  sont  très  pré- 
cieux au  point  de  vue  de  l'art  céramique.  Ce  sont  très  vrai- 
semblablement les  plus  anciens  vases  authentiquement  clas- 
sés. La  possession  d'un  vase  en  terre  à  cette  époque,  pa- 
raît avoir  été  fort  appréciée.  Les  soins  que  l'homme  de  la 
pierre  polie  apportait  à  la  restauration  et  à  la  conservation 
de  ces  vases,  atteste  en  outre  des  habitudes  d'ordre. 

Ces  renseignements  d'une  origine  sûre  et  bien  étudiés 
sont,  par  leur  nature  appelés  à  rendre  d'incontestables  ser- 
vices. Dans  l'ordre  des  faits,  rien  ne  saurait  être  négligé. 
Tout  a  son  importance.  Je  suis  heureux  de  me  rencontrer 
sur  un  terrain  commun  avec  ces  infatigables  chercheurs  Por- 
tugais qui  ont  en  si  peu  de  temps  apporté  aux  études  ar- 
chéologiques un  contingent  tout  à  la  fois  riche  et  varié.  J'es- 
père que  dans  le  calme  des  études  on  trouvera  dans  les  re- 
marquables observations  de  M.  Delgado  des  points  de  rap- 


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prochement  entre  les  gisements  néolithiques  qu'il  vient  de 
faire  connaître  et  nos  stations  déjà  connues. 


M.  Henri  Martin.  II  n'y  a  jamais  de  figures  humaines 
sculptées  à  l'intérieur  des  dolmens.  H  y  a  quelquefois,  très 
rarement,  des  serpents;  une  seule  fois,  un  cheval,  sous  la 
table  du  célèbre  dolmen  appelé  vulgairement  la  Table  des 
Marchands,  par  une  fausse  interprétation  du  nom  populaire 
celtique  Dot-  Varchant,  qui  veut  dire  la  Table  du  cheval. 
Sur  un  seul  dolmen,  celui  du  Petit-Mont,  à  l'entrée,  on  voit 
deux  pieds  humains  sculptés,  signe  du  voyage,  du  départ 
pour  l'autre  monde.  Une  seule  fois,  on  voit  un  groupe  de 
figures  sur  des  monuments  mégalithiques  de  Bretagne;  mais 
ce  sont  des  menhirs  et  non  des  dolmens. 

Les  trois  premiers  menhirs  de  Saint-Kerre  en  Quibe- 
ron  sont  façonnés,  l'un,  en  vieillard  à  grande  barbe;  l'autre, 
en  une  forme  de  cheval;  le  troisième  présente  une  forme 
humaine  creusée  dans  le  bloc;  il  existe  ou  il  a  existé  en 
Bretagne  plusieurs  de  ces  figures  sculptées  en  creux. 

Dans  une  des  grottes  de  la  Marne  découvertes  par 
M.  le  baron  de  Baye,  on  voit  une  figure  de  femme  gros- 
sièrement sculptée. 


,cp^ 


SILEX  ET  OSSEMENTS  HUMAINS 


PEINTS  EN  ROUGE  TROUVÉS  DANS  UNE  SÉPULTURE 


DANS  Ij\  province  DE  ROME 


M-  L.  PlGORlNI 

Une  tombe  de  l'âge  de  la  pierre,  près  de  la  station  de 
Sgurgola,  dans  le  territoire  d'Anagni,  a  livré  une  portion 
faciale  de  crâne  humain  et  deux  pointes  de  flèche  de  silex 
colorées  en  rouge  vif  par  du  cinabre.  Il  faut  éliminer  tout 
doute  quant  à  l'ancienneté  de  cette  coloration,  car  elle  se 
retrouve  au-dessous  de  la  croûte  calcaire  qui  enveloppe  aussi 
bien  ces  deux  flèches  que  la  plus  grande  partie  des  autres 
trouvées  dans  la  même  sépulture.  La  question  est  donc  de 
savoir  si  ce  dépôt  de  matière  colorante  est  dû  à  une  infil- 
tation  naturelle  ou  à  la  'piété  des  parents  et  des  amis  du 
mort. 

La  circonstance  qu'il  est  limité  aux  trois  objets  cités, 
qu'il  recouvre  également  les  deux  faces  des  flèches  et  ne 
s'étend  pas  au  sol  environnant,  ne  permet  pas  d'accueil- 
lir la  première  hypothèse.  La  seconde  reste  donc  jusqu'à 
présent  la  seule  qui  puisse  donner  l'explication  des  faits  ob- 
servés. 

Pour  élucider  la  question  soulevée  par  les  faits  que  je 


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3i3_ 

signale,  je  rappellerai  au  Congrès  divers  exemples,  assez 
rares  d'ailleurs,  de  coloration  d'objets  citée  dans  des  tra- 
vaux relatifs  à  des  sépultures  préhistoriques,  prouvant  que 
les  hommes  de  l'âge  de  la  pierre  avaient  l'habitude  de  se 
colorer,  de  leur  vivant,  généralement  en  rouge*,  et  de  dé- 
poser dans  la  tombe  une  certaine  portion  de  matière  co- 
lorante pour  permettre  sans  doute  au  mort  de  s'en  orner 
dans  le  monde  des  esprits.  A  côté  de  ces  faits,  je  citerai 
la  coutume  des  Nouveaux-Zélandais  de  n'enterrer  les  sque- 
lettes de  leurs  morts  qu'après  que  les  os  sont  complète- 
ment dépouillés  de  leurs  chairs  et  après  les  avoir  ornés 
comme  de  leur  vivant,  et  celles  des  Papous  de  peindre  les 
crânes  de  leurs  morts  de  diverses  couleurs  et  plus  particu- 
lièrement de  rouge. 


■  '  V.,  p.  229,  les  observations  de  M.  Dclgado  à  propos  d'un  usage 
analogue  chez  les  troglodytes  de  Furninha  et  aussi,  'Congrus  Internatio- 
nal d'anthropologie  et  d'archéologie  préhistoriques.  Rapport  sur  la 
Session  de  Lisbonne',  par  M,  E.  Cartailhac.  1880.  p,  91,  no/e,  où  on  lit: 

fOn  sait  que  divers  squelettes  des  grottes  de  Menton  sont  comme 
s'aupoudrés  de  fer  oligistc.  Un  fait  analogue  a  été  note  dans  la  grotte 
d  Arène  Candide,  près  Finalmarina. 


.,Ct 


DE  L'EMPLOI  DE  LA  CALLAÏS 


L'EOROFï:  OCCIOENTALE  aux  TEUFS  PRËHISTORIQItES 


M.  CAZAtlS  DE  FONDOUCE 

Pendant  la  Session  de  Budapesth,  M.  Capellîni  entre- 
tînt le  Congrès  de  quelques  substances  d'origine  minérale 
ou  animale  employées  par  l'industrie  des  temps  préhistori- 
ques. Je  viens  ajouter  à  cette  liste  une  nouvelle  substance 
dont  l'usage  paraît  avoir  été  considérable  en  Portugal. 

Cette  espèce  minérale,  bleue  ou  verte,  très  voisine  de 
la  turquoise  orientale,  dont  elle  se  rapproche  par  certains  de 
ses  caractères  extérieurs  et  par  sa  composition  chimique, 
qui  n'en  diffère  que  par  un  équivalent  d'alumine,  a  été  étu- 
diée et  décrite  en  1864  par  M.  Damour',  sur  les  premiers 
spécimens  rencontrés  à  Mané-er-H'roek,  en  Lockmar laquer, 
dans  le  Morbihan.  Voici  en  quels  termes  M.  Damour  la  dé- 
crit: 

«La  couleur  de  cette  matière,  dit-il,  est  le  vert  pom- 
me, se  rapprochant  du  vert  de  l'émeraude.  Quelques  échan- 
tillons sont  comme  marbrés  de  parties  blanches  et  de  par- 
ties bleuâtres;  d'autres  sont  maculés  de  veines  et  de  taches 


'  Comptes-rendus  hebdomadaires  de  l'Académie  des  Sciences  de 
Paris,  V.  Lix,  p.  936—940. 


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3i5 

brunes  ou  noires,  par  suite  d'un  mélange  accidentel  de  ma- 
tières argileuses. 

*La  substance  minérale  est  translucide,  à  peu  près  au- 
tant que  la  chrysoprase.  Sa  cassure  est  compacte  comme 
celle  de  la  cire.  Elle  raye  le  calcaire,  mais  elle  est  facile- 
ment rayée  par  une  pointe  d'acier.  Sa  poussière  est  blan- 
che, sa  densité  égale  2,5o  à  2,52. 

fChaulTée  dans  un  tube  de  verre,  à  une  température 
un  peu  inférieure  à  celle  du  rouge  naissant,  clic  laisse  dé- 
gager beaucoup  d'eau,  qui  n'exerce  pas  de  réaction  sur  le 
papier  de  tournesol;  elle  décrépite,  perd  sa  couleur,  devient 
opaque  et  prend  une  teinte  brun-chocolat.  A  cet  état  elle 
est  devenue  très  friable. • 

L'analyse  chimique  a  montré  que  la  composition  de  ce 
minéral  est  très  voisine  de  celle  de  la  turquoise  d'Orient. 
Elle  en  diffère  toutefois  légèrement  par  la  proportion  des 
éléments  qui  les  composent  l'un  et  l'autre.  Tandis  que  la 
turquoise  contient  deux  équivalents  d'alumine  pour  un  d'aci- 
de phosphorique  et  cinq  d'eau,  l'autre  minéral  ne  contien- 
drait qu'un  seul  élément  d'alumine  pour  la  même  proportion 
d'acide  phosphorique  et  d'eau.  Cesdeux  substances  diffèrent 
en  outre  par  leurs  caractères  extérieurs.  «La  turquoise,  en 
effet,  dit  toujours  M.  Damour,  est  plutôt  opaque  que  trans- 
lucide, sa  couleur  habituelle  est  le  bleu  céleste  plus  ou  moins 
foncé;  sa  dureté,  sa  densité  sont  supérieures  à  celles  du 
nouveau  minéral.  J'ajouterai  que  la  turquoise  orientale  doit 
sa  couleur  à  l'oxyde  de  cuivre,  tandis  que  la  teinte  verte  de 
la  nouvelle  matière  me  parait  due  à  l'oxyde  de  fer.i 

D'après  ces  différences  bien  appréciables,  M.  Damour 
était  d'avis,  à  l'époque  où  il  publia  cette  note,  de  séparer 
CCS  deux  substances  dans  la  classification  des  espèces  et, 
reprenant  le  nom  de  Caldile  que  plusieurs  minéralogistes 


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3i6 

ont  donné  à  la  turquoise,  il  proposa  de  désigner  la  ma- 
tière fournie  par  les  tombeaux  préhistoriques  du  Morbihan 
sous  le  nom  de  CalLiïs,  nom  que  Pline  donne  à  une  ma- 
tière précieuse  qu'il  décrit  en  ces  termes: 

«La  Callaïs  est  d'un  vert  pâle:  elle  se  trouve  en  mor- 
ceaux volumineux,  mais  souvent  perforés  de  cavités  et  souil- 
lés de  matières  étrangères.  On  taille  ces  pierres  qui,  du 
reste,  ont  peu  de  dureté.  Les  plus  estimées  ont  la  teinte  de 
l'émeraude  (Optimus  color  smaragdi).  Plus  elles  sont  belles, 
plus  aisément  elles  perdent  leur  couleur  par  l'action  de 
l'huile,  des  onguents  ou  du  vin;  les  moins  belles  se  conser- 
vent mieux.  Il  n'est  pas  de  pierre  plus  facile  à  contrefaire 
au  moyen  des  matières  vitreuses.» 

•Ce  peu  de  caractères,  ajoute  M.  Damour,  serait  au- 
jourd'hui bien  insuffisant  pour  décrire  une  espèce  en  miné- 
ralogie. Us  me  paraissent  toutefois  indiquer  certains  rap- 
ports avec  la  substance  verte  dont  il  est  ici  question,  mieux 
qu'avec  la  turquoise  qui  est  bleue:  On  voit  que  Pline  in- 
siste sur  la  couleur  de  la  Callaïs  qu'il  range  parmi  les  pier- 
res vertes.» 

Nous  donnerons  donc,  avec  M.  Damour,  le  nom  de 
Callaïs  à  la  matière  précieuse,  le  plus  souvent  verte,  qui 
fut  employée  dans  la  joaillerie  primitive  des  temps  préhis- 
toriques et  qui  paraît  l'avoir  été  encore  du  temps  de  Pline, 
mais  en  faisant  observer  que  c'était  plutôt  une  variété  de 
la  turquoise  qu'une  espèce  minérale  parfaitement  distincte. 
En  effet,  si  la  matière  qui  constituait  les  perles  trouvées  au 
Mané-er-H'roek  présente  au  plus  haut  degré  la  coloration 
verte  et  oflrc  une  composition  chimique  qui  parait  sensi- 
blement différente  de  celle  de  la  turquoise  orientale  par  un 
équivalent  d'alumine,  il  faut  remarquer  qu'entre  ces  deux 
extrêmçs  se  retrouvent  les  variétés  intermédiaires  les  plus 


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lu 

nombreuses.  Déjà  en  1864,  M.  Damour  faisait  remarquer, 
à  la  fin  de  son  mémoire,  que  nie  musée  archéologique  fondé 
à  Vannes  par  la  Société  polymathiquc  du  Morbihan  renfer- 
me, avec  les  Callaïs,  beaucoup  d'autres  pierres,  qui  se  trou- 
vaient péle-méle  avec  elles  dans  le  même  tombeau  celtique  et 
dont  la  teinte  bleuâtre,  plus  ou  moins  pâle,  rappelle  exacte- 
ment celle  de  certaines  turquoises  de  la  variété  la  plus  com- 
mune. »Un  essai  m'a  montré,  ajoutait  il,  que  ces  pierres 
bleues  sont,  comme  la  turquoise  et  la  Callaïs,  composées 
d'acide  phosphorique,  d'alumine  et  d'eau,  t. 

Depuis  lors,  j'ai  eu  l'occasion  d'examiner  un  grand 
nombre  d'objets  préhistoriques  formés  de  cette  matière  et 
partout  j'ai  pu  constater  l'existence  de  ces  nombreux  inter- 
médiaires entre  la  variété  verte  et  la  bleue,  qui  rendent  im- 
possible d'établir  une  démarcation  entre  elles.  Quant  à  la 
composition  chimique,  celle  d'un  grain  de  collier,  pris  au 
hasard  entre  un  grand  nombre  d'autres  provenant  de  la 
Provence,  qui  a  été  soumis  à  M.  Damour  tout  récemment,  ne 
lui  a  pas  paru  s'éloigner  de  celle  de  la  turquoise.  «Je  viens 
de  m'assurer,  écrivait-il  à  la  personne  qui  le  tuî  avait  en- 
voyé sur  ma  demande,  que  la  matière  minérale  qui  le  cons- 
titue se  rapporte  bien  à  la  turquoise,  essentiellement  for- 
mée de  phosphate  d'alumine  hydraté,  coloré  en  bleu  pâle 
par  du  phosphate  de  cuivre.  Cette  turquoise,  à  raison  de  sa 
très  faible  teinte  bleue,  n'a  aucune  valeur  commerciale'. s 

M.  Dufrénoy  dit  d'ailleurs  que  des  analyses  de  turquoi- 
ses ont  donné  des  résultats  fort  différents  les  uns  des  au- 
tres'. 

C'est  aussi  l'opinion  du  professeur  américain   Dana, 

'  Lettre  du  3o  avril  1880. 

'  Traité  des  Minéralogie,  t.  11,  p.  55^  et  î6o. 


•^■r 


3i8 

qui  pense  que  la  Callaïs  de  Pline  est  probablement  la  tur- 
quoise', et  de  M.  le  comte  de  Limur  qui  dit  qu'il  y  a  certai- 
nement dans  les  analyses  de  ces  deux  minéraux  des  diffé- 
rences dont  on  doit  tenir  compte,  mais  que  cependant  on 
ne  doit  pas  exagérer:  tH  ne  faut  pas  oublier,  ajoute-t-il,  qu'on 
a  affaire,  dans  la  turquoise  et  dans  la  Callaïs,  à  des  minéraux 
amorphes,  et  qui,  par  conséquent,  peuvent  facilement  con- 
tenir quelques  corps  étrangers,  peu  importants  sans  doute, 
mais  en  assez  grande  quantité  pourtant  pour  changer  les 
résultats  des  analyses;  et  l'on  sait  qu'en  minéralogie,  tou- 
tes les  fois  qu'on  n'opère  pas  sur  des  minéraux  cristal- 
lisés, on  ne  saurait  s'attendre  à  des  identités  d'analyse*.  D 
se  pourrait  d'ailleurs  que  la  composition  des  spécimens  ren- 
contrés dans  les  tombeaux  préhistoriques  ait  été  sensible- 
ment modifiée  par  leur  séjour  dans  ce  milieu  humide  et  très 
phosphaté  '. 

On  est  donc  contraint  de  reconnaître  que  l'on  n'a  pas 
affaire  à  deux  espèces  minérales  distinctes,  mais  à  une  es- 
pèce qui  n'est  pas  bien  exactement  définie,  qui  peut  varier 
dans  une  certaine  mesure  quant  à  la  proportion  de  ses  élé- 
ments constitutifs  et  à  sa  couleur.  D'un  autre  côté  ta  ré- 
union dans  les  mêmes  gisements  archéologiques  de  frag- 
ments présentant  toutes  les  innombrales  variations  de  cou- 
leur et  de  composition,  doit  faire  admettre  que  l'on  a  bien 
affaire  à  des  fragments  d'une  même  roche. 

Ainsi  que  je  l'ai  dit  en  commençant,  cette  substance  a 

'  Manual of  Mineralogy,  p.  i3i 

*  Note  sur  les  gisements  nouvellement  reconnus  de  certaines  subs- 
tances minérales  rares  employées  comme  ornements  ou  comme  outils  par 
les  tribus  préhistoriques  ou  les  tribus  sauvages.  Dans  Mém.  Soc.  Émul.  des 
Côtes  du  Nord,  tom.  xii  (1874). 

3  Opinion  de  M.  Dçlesse,  citée  par  M.  de  Limur,  loc.  cit.  p.  (». 


,ï  Google 


3ic) 

été  trouvée  pour  la  promicre  fois  dans  un  tombeau  du  Lok- 
mariaquer,  dans  le  Morbihan  (5o  forains).  Elle  s'y  présentait 
«façonnée  en  forme  de  pendeloques  ovoïdes  et  en  grains  de 
collier  de  diverses  grosseurs,  depuis  celle  d'une  lentille  jus- 
qu'à celle  d'un  œuf  de  pigeon.  Ces  grains  arrondis  et  polis 
sur  leurs  contours,  présentent  pour  la  plupart  deux  surfa- 
ces planes  opposées  et  perforées  plus  ou  moins  symétrique- 
ment vers  le  centre'.» 

Il  est  facile  de  reconnaître  dans  cette  description  les 
formes  habituelles  des  pendeloques  et  des  grains  de  collier 
des  temps  préhistoriques. 

On  a  retrouvé  encore  de  la  Callaïs,  en  Breiagnc,  dans 
le  dolmen  de  la  Trinité-sur- Mer,  canton  de  Quiberon  (i 
grain),  dans  celui  de  Keriaval  {2  grains),  dans  les  dolmens 
sous  tumulus  du  Mont-Saint-Michel  (107  grains),  de  Tumiac 
(147  grains),  du  Moustier  Carnac  ii  grain),  et  dans  le  dol- 
men allée  couverte  de  Kercado,  Carnac  (7  grains). 

Dans  l'intérieur  de  la  France  elle  est  bien  plus  rare. 
M.  le  baron  de  Baye  en  a  recueilli  un  seul  grain  dans  les 
grottes  de  la  Marne.  M.  le  Dr.  Prunières  en  aurait  rencon- 
tré deux  perles  dans  un  dolmen  de  la  Lozère  et  M.  Car- 
tailhac  une  dans  un  autre  dolmen  du  même  département, 
au  Recoux,  et  une  seconde  dans  un  dolmen  de  Caussanus, 
Aveyron,  et  encore  y  a-t-il  du  doute  sur  la  détermination  de 
la  substance  des  ces  quatre  perles. 

Dans  les  grottes  artificielles  du  Midi  de  la  France  elle 
reparait,  au  contraire,  en  assez  grande  abondance.  J'ai  re- 
cueilli 1 14  perles  de  celte  substance  dans  l'allée  couverte  du 
Castellct,  près  d'Arles,  en  Provence.  Ce  grand  nombre  rend 
celte  trouvaille  tout-à  fait  remarquable,  bien  qu'elle  ne  ren- 

'  Matériaux  pour  l'histoire  de  l'homme,  ju,  p.  229. 


.ïGoOt^l; 


?>^ 


320 

ferme  pas  de  spécimens  aussi  gros  que  certains  de  ceux  ren- 
contrés au  Mané-er-HYoek'. 

Les  antiquités  envoyées  du  Portugal  à  l'Exposition  des 
sciences  anthropologiques,  en  1878,  nous  permirent  de  re- 
connaître que  dans  cette  portion  de  la  Péninsule  ibérique, 
les  objets  de  callaïs  devaient  se  rencontrer  en  quantité  en- 
core plus  considérable.  En  venant  à  Lisbonne  nous  avons 
retrouvé  ces  objets  dans  les  vitrines  de  la  Section  Géologique. 

Parmi  les  dolmens,  un  seul,  celui  de  Monte  Abrahao, 
a  donné  quelques  perles  de  cette  substance.  Parmi  les  grot-' 
tes  naturelles,  celle  de  Furninha  a  donné  une  perle  de  cal- 
laïs, dans  la  partie  néolithique,  d'après  un  renseignement  que 
je  dois  à  M.  Delgado.  Celle  de  Casa  da  Moura  en  a  don- 
ne aussi  quelques-unes.  Mais  les  trois  grottes  artificielles  de 
Palmella,  fcrtjillées  par  M.  Carlos  Ribeiro,  n'ont  pas  fourni 
à  elles  seules  moins  de  214  perles  de  toutes  dimensions  et 
de  formes  diverses,  dont  quelques-unes  sont  aussi  grosses 
que  celles  du  Morbihan. 

Après  l'exposé  que  nous  venons  de  faire  des  localités 
où  l'on  a  rencontré  jusqu'à  ce  jour  des  objets  de  callaïs  de 
l'époque  préhistorique,  trois  questions  se  présentent  à  nous, 
également  intéressantes  à  résoudre  au  point  de  vue  de  l'ar- 
chéologie: Quels  sont  les  gîtes  naturels  de  cette  substance? 
A  quelle  époque  appartiennent  les  tombeaux  qui  la  recèlent? 
Quels  sont  les  peuples  qui  s'en  sont  parés?  Nous  allons  les 
examiner  successivement. 

'  M.  Piettc  a  trouve  d'autre  part  une  poignée  de  perles  en  Callaïs 
dans  une  allce  couverte  du  plateau  d'Ossun,  près  Lourdes,  dans  les 
Haules-Pyrénées.  Il  y  avait  avec  elles  une  perle  d'or  du  type  de  celle 
trouvée  dans  l'allée  du  Castellet.  Ce  fait  a  été  signalé  par  M.  Cartailhac 
dans  la  discussion  qui  a  suivi  la  lecture  de  mon  mémoire  devant  le 
Congrès. 


,ï  Google 


En  premier  lieu,  de  quelle  contrée  a  tic  apportée  la 
callaVs  avant  d'être  enfouie  dans  les  tombeaux  antiques  de 
l'Europe  occidentale? 

M.  Damour  déclare  qu'il  ne  connaît  ni  en  Bretagne,  ni 
dans  les  autres  parties  de  la  France  aucune  matière  sembla- 
ble, et  j'ai  recueilli  la  même  déclaration  de  MM.  Ribeiro, 
Delgado  et  Vilanova  en  ce  qui  concerne  le  Portugal  et  l'Es- 
pagne. C'est  donc  en  dehors  des  pays  où  nous  la  retrou- 
vons travaillée  et  utilisée,  qu'il  faut  en  rechercher  l'origine. 
Elle  représente,  par  conséquent,  un  produit  du  commerce 
antique.  Mais  faut-il  aller  en  rechercher  l'origine  dans  des 
régions  très  éloignées?  Voici  dans  quels  termes  M.  Damour 
répond  à  cette  question: 

ill  existe  bien  en  Saxe,  en  Silésie  et  dans  les  Monts  Du- 
rais divers  minéraux  analogues  qu'on  a  décrits  sons  les  noms 
de  Péganite,  de  Variscite  et  de  Fischérite;  mais  aucun  d'eux 
ne  se  rapporte  exactement,  ni  par  les  caractères  extérieurs 
ni  par  la  composition,  à  la  callaïs  que  je  viens  de  décrire. 
Pline,  qu'il  est  encore  permis  de  consulter  sur  ce  point,  nous 
dit:  «La  Callaïs  se  trouve  au  delà  des  Indes,  chez  les  Phy- 
cares,  qui  habitent  le  mont  Caucase,  et  aussi  chez  les  Saces 
et  les  Daces.  Celle  qui  vient  de  la  Caramanie  est  la  plus 
pure  et  la  plus  agréable  à  la  vue. . .  b 

«La  provenance  indiquée  par  Pline  se  rapporte  assez 
bien  à  celle  de  la  turquoise  orientale,  dont  on  connaît  actuel- 
lement des  gîtes  dans  quelques  parties  de  la  Perse,  et  no- 
tamment près  Michabour,  dans  le  Khorassan.  Il  n'est  pa: 
improbable  que  la  callaïs  verte  et  la  turquoise,  formées  des 
mêmes  éléments,  se  soient  rencontrées  dans  un  même  gîte 

A  l'appui  de  cette  opinion,  M.  Damour  fait  remarquer 
le  mélange,  dans  les  mêmes  gisements  archéologiques, 
d'échantillons  présentant  des  teintes  variant  du  vert  de  la 


(^ 


322 

calhiïs  au  bleu  pâle  des  turquoises  communes.  Nous  sommes 
dune  amtincs  à  admcuri;  que  les  innombrables  variétés  de 
callaïs  et  de  turquoise  sont  probablement  des  fragments 
d'une  même  ruche,  d'origine  exotique,  apportée  par  le  com- 
merce des  U-'mps  anciens,  de  TOrient  asiatique  dans  l'Eu- 
rope occidentale.  Il  est  vrai  que  depuis  l'époque  où  M-  D'a- 
mour écrivait  les  lignes  sur  lesquelles  nous  venons  de  nous 
appuyer,  on  a  trouvé  la  turquoise,  iwnc  quelques  autres  ra- 
retés minéralogiques,  à  la  mine  d'étain  de  Montcbras  (Creu- 
se), où  existent  des  traces  d'anciennes  fouilles  qui  parais- 
sent préhistoriques.  Cette  turquoise  de  Montebras  semble 
bien  voisine  de  la  callaïs  du  musée  de  Vannes,  de  sorte 
qu'il  ne  serait  peut-être  pas  besoin,  d'après  quelques  ar- 
chéologues, que  les  tribus  du  Morbihan  aient  été  chercher 
leur  callaïs  hors  de  France'.  On  a  ajouté  que  le  Morbihan 
lui-même  renferme  des  filons  d'étain  qui  semblent  avoir  été 
l'objet  d'exploitations  préhistoriques  et  qu'il  ne  serait  pas  im- 
possible qu'on  y  rencontrât  un  jour  te  gisement  de  callaïs 
des  peuples  des  dolmens. 

Nous  ferons  observer,  en  réponse  à  ces  considérations 
que,  .s'il  est  possible  que  l'on  trouve  un  jour  la  turquoise 
dans  le  Morbihan,  il  n'est  pas  probable  qu'on  la  trouve  dans 
la  Provence,  où  il  n'y  a  pas  de  filons  d'étain.  Elle  a  donc 
dû  être  importée  ici,  et,  d'après  le  système  que  nous  ve- 
nons d'exposer,  probablement  de  la  Creuse  ;  mais  alors  com- 
ment se  fait-il  qu'elle  soit  si  abondante  en  Provence  et  si 
rare  dans  le  centre  de  la  France,  aux  environs  même  du 
gisement  présumé?  Nous  pen.sons  donc  que,  ju.squ'à  nou- 
vel ordre,  on  doit  considérer  l'origine  de  la  callaïs  préhis- 
torique comme  exotique. 


■  ^ 


„Google 


323 

Ceci  admis,  la  seconde  question  qui  se  pose  devant  nous 
est  celle  de  savoir  à  quelle  période  des  temps  anciens  doit 
être  rapportée  l'importation  et  l'emploi  de  cette  substance. 

Outre  les  objets  de  callaïs,  la  sépuliure  du  Mané-er- 
H'roek  renfermait  un  grand  nombre  de  haches  de  pierres 
dures  polies,  ce  qui  l'a  fait  classer  dans  l'époque  néolithi- 
que; mais  les  objets  trouvés  dans  les  grottes  du  Casteliet, 
en  Provence,  et  de  Palmella,  en  Portugal,  où  la  callaïs  a 
été  rencontrée  avec  la  plus  grande  abondance,  nous  obli- 
gent à  reporter  l'importation  de  celle-ci  à  une  époque  un 
peu  plus  récente.  Nous  avons,  en  eflet,  recueilli  dans  les 
allées  couvertes  de  la  Provence  des  perles  d'or,  des  pote- 
ries avec  ornements  en  dents  de  loup,  des  lames  de  poi- 
gnard de  bronze,  qui  nous  les  ont  l'ait  classer  dans  l'âge  du 
bronze;  mais  il  y  avait  aussi  des  pointes  de  silex,  et  des 
haches  en  pierres  polies,  armes  ou  instruments  qui  étaient 
encore  en  usage  au  début  de  cette  période.  En  Portugal, 
M.  Ribeiro  a  recueilli  dans  les  grottes  de  Palmella  des  poin- 
tes de  silex  en  même  temps  que  des  pointes  de  lance  et 
autres  objets  de  bronze. 

La  présence  des  haches  en  pierre  polie,  malgré  l'absence 
des  instruments  de  bronze,  n'est  donc  pas  surtisante  pour 
faire  reporter  absolument  la  sépulture  du  Mané-er-H 'roek  a 
l'époque  néolithique  et  il  est  probable  que,  comme  celles  de 
la  Provence  et  du  Portugal,  elle  doit  être  du  commence- 
ment de  l'âge  du  bronze. 

Les  dolirens  de  la  Lozère,  où  M\L  Cartailhac  et  Pru- 
nières  ont  rencontré  trois  ou  quatre  perles  de  callaïs,  ne  con- 
tredisent pas  cette  manière  de  voir,  car  on  sait  que  Ton  trou- 
ve un  peu  de  bronze  dans  tous  les  dolmens  du  Midi  de  la 
France  et  qu'on  doit  les  classer  dans  cette  période  qui  fait 
la  transition  de  l'époque  néolithique  â  celle  du  bronze. 


,ï  Google 
j 


324 

Reste  la  perle  trou\ée  par  M.  de  Baye  dans  une  des 
grottes  artificielles  de  la  Marne.  Ici  encore  nous  nous  trou- 
vons en  présence  de  sépultures  qui  se  présentent,  au  milieu 
de  la  civilisation  néolithique,  avec  des  caractères  si  particu- 
liers et  si  avancés,  qu'on  est  naturellement  porté  à  les  con- 
sidérer comme  appartenant  lout-à-fait  aux  derniers  temps 
de  cette  civilisation. 

Nous  nous  résumerons  donc  en  disant  que  la  callaïs  a 
peut-être  fait  son  apparition  dans  l'Europe  occidentale  iila 
fin  de  l'époque  néolithique,  mais  qu'elle  y  a  surtout  été  im- 
portée et  utilisée  dans  les  premiers  temps  de  l'ûge  du  bronze. 

Est-il  possible  de  savoir  à  quel  peuple  peuvent  être  at- 
tribués l'importation  et  l'emploi  de  la  callaïs?  C'est  ce  qu'il 
nous  reste  maintenant  à  examiner. 

Nous  remarquerons  d'abord  que  cette  substance  ne  se 
montre  pas  indistinctement  dans  toutes  les  sépuhures  de  ta 
fin  de  l'époque  néolithique  ou  du  commencement  de  l'âge  du 
bronze,  mais  seulement  dans,celles  d'une  certaine  catégorie. 
Nous  la  trouvons,  en  effet,  dans  quelques  dolmens,  mais 
exceptionnellement  et  en  très  petite  quantité,  et  puis,  plus 
ou  moins  abondamment,  dans  quatre  sépultures  qui  appar- 
tiennent à  des  périodes  postérieures,  pendant  lesquelles  l'ar- 
chitecture dolménique  s'est  développée  et  modifiée  dans  les 
formes  et  les  procédés  mais  en  conservant  ses  dispositions 
principales. 

De  ces  quatre  groupes  de  sépultures,  celui  du  Morbihan, 
est  celui  qui  s'écarte  le  moins  du  dolmen.  Ce  n'est  pourtant 
déjà  plus  la  forme  simple  et  à  dimension  restreinte  de  ce 
tombeau  mais  un  véritable  hypogée  logé  dans  un  tumulus 
dont  te  grand  axe,  au  Mané-cr-HVock  n'a  pas  moins  de  loo 
mètres.  La  crypte,  dans  laquelle  on  arrive  par  une  galerie 
d'accès,  a  4  mètres  de  long  sur  3  mètres  de  large  et  i"',73 


,ï  Google 


325 

de  hauteur.  Une  des  dalles  porte  des  signes  gravés,  comme 
celles  d'autres  monuments  semblables  de  la  même  région'. 

Le  dolmen  de  Monte  Abrahâo,  en  Portugal*,  présente  a 
peu  près  la  même  disposition:  une  galerie  d'accès  d'environ 
8  mètres  de  longueur  sur  2  mètres  de  largeur,  et  une  cham- 
bre polygonale  dont  le  grand  diamètre  a  S^fôo', 

Dans  les  allées  couvertes  des  environs  d^Arles,  en  Pro- 
vence, qui  s'écartent  déjà  davantage  du  type  primitif,  nous 
retrouvons,  comme  au  Mané-er-H'roek,  le  tumulus  à  grand 
diamètre  (41  mètres),  la  galerie  d'accès,  la  crypte  à  grandes 
dimensions  {24  mètres  de  longueur  sur  S^.So  de  largeur  et 
autant  de  Hauteur  à  la  grotte  des  Fées;  1 1  mètres  de  lon- 
gueur sur  2",20  de  largeur  et  autant  de  hauteur  à  la  grotte 
du  Castellet).  Seulement  ici  cette  crypte  n'est  pas  formée 
avec  des  dalles,  elle  est  creusée  dans  le  rocher,  ce  qui  en 
constitue  le  caractère  particulier  et  en  fait  en  quelque  sorte 
une  grotte  artificielle.  Toutefois  on  a  conservé  du  dolmen 
l'inclinaison  des  parois  vers  l'intérieur  et  la  toiture  en  gran- 
des dalles*. 

Les  grottes  artificielles  de  Palmella,  dans  le  Portugal,  se 
relient  intimement  à  celles  de  la  Provence  et,  par  elles,  aux 
grands  dolmens  de  la  Bretagne  et  du  Portugal  lui-même, 


I  R.  Galles:  Le  Mané-er-H'roek.  Vannes,  i8f>3. 

*Carlos  Ribeiro:  Notieia  de  algumas  csiaçôese  monumentos prc- 
historicos,  ii.  Lisbonne,  1S80. 

3  Ce  iîemier  type  amûne  à  celui  de  l'allée  couverte  du  plateau  d'Os- 
sun,  dans  les  Hautes -Pyrénées,  dans  laquelle  a  été  trouvée,  outre  la  cal- 
laïs,  une  perle  d'or,  qui  la  relie  aux  sépultures  du  type  suivant. 

*  Voir  la  description  que  j'ai  donnée  de  ces  curieuses  sépultures 
dans  les  deux  mémoires  intitules:  Les  allées  couvertes  de  la  Provence 
i  et  II,  Montpellier,— Paris,  i873  et  i87S. 


„Coct 


326 

mais  elles  n'ont  plus  pour  ainsi  dire  conservé  de  ceux-ci  que 
\a  disposition  générale.  Comme  cglics  de  la  Provence,  elles 
sont  creusées  dans  le  sol  ;  une  galerie  à  plan  incline  permet  de 
descendre  prcsqu'au  niveau  inférieur  de  î'evcavation  et  con- 
duit dans  la  crjpte,  à  travers  un  passage  rétréci.  II  y  a  jus- 
que là  une  véritable  analogie,  une  presque  identité.  La  dif- 
férence, se  montre  dans  la  forme  de  la  crypte,  qui  est  cir- 
culaire au  lieu  d'être  allongée.  La  même  disposition  se  re- 
trouve dans  d'autre^  sépultures  artificielles  du  Portugal,  qui 
appartiennent  évidemment  à  la  même  famille,  telles  que 
celles  de  Mniifi;e  et  de  Follia  da.t  liarradas  dans  les  envi- 
rons de  Cintra'. 

Nous  pouvons  donc  affirmer  que  les  peuples  qui  se  sont 
parés  de  la  callaïs  sont  peut-être  de  ceux  qui  ont  construit 
les  dolmens,  et  certainement  de  ceux  qui  oit  hérité  des  ha- 
bitudes de  ceux-ci  ou  les  ont  adoptées,  et  qu'ils  se  sont  mon- 
trés dans  la  Bretagne,  le  long  des  Pvrénées,  dans  la  Pro- 
vence et  dans  le  Portugal. 

Si  maintenant  nous  jetons  un  rapide  coup  d'œil  .sur  les 
objets  qui  sont  restés  dans  leurs  sépultures  comme  des  té- 
moins de  leur  industrie  ou  de  leurs  usages,  nous  y  trouve- 
rons des  indices  qui  nous  confirmeront  les  rapports  de  ces 
stations  entre  elles  et  nous  décèleront  des  aihnités  avec  les 
populations  d'autres  pays  de  l'Europe  occidentale. 

Nous  indiquerons,  parmi  ces  objets,  les  celts  en  pierre 
polie  qui  se  rencontrent  indistinctement  dans  toutes  ces  sépul- 
tures; les  boutons  en  os,  percés  de  deux  trous  convergents 


'  Carlos  Ribciro:  Noiicia  dt.'  algumas  esui^Ôt-s  c  monumcnias  pro- 
hisiori».-os,  Lisbonne.  iS.So.— .\1.  Cartailhac,  qui  a  Oit  vi.siterles  grouos 
Ji.-  l'jlni^;lla,  apit-'i  ij  Ses-iion'  du  Congrès,  m'a  contirm.,-  leur  analogie 
u^KkiUoav^...-  cclUs  J.-  la  Piov...ncc. 


,ï  Google 


327 

sur  une  de  leurs  faces,  qui  ont  été  trouvés  au  Castellet  en 
Provence,  et  au  Monte  Abrahao  en  Portugal;  les  cailloux 
de  quart/ite,  qui  recouvraient  comme  d'^un  manteau  les  os- 
sements humains  dans  les  sépultures  provençales,  aussi  bien 
que  dans  le  dolmen  de  Monte  Abrahâo  et  dans  la  sépulture 
de  Monge,  en  Portugal;  les  ornements  en  chevrons  et  en 
dents  de  loup,  qui  se  retrouvent  sur  divers  objets  des  unes 
et  des  autres;  les  gros  marteaux  ou  casse-téte  en  quartzite, 
avec  rainure  circulaire,  trouvés  dans  les  grottes  artificielles 
de  la  Provence  et  qui  sont  si  abondants  dans  toute  la  Pé- 
ninsule ibérique;  les  lames  et  pointes  de  bron;îe,  rencontrées 
aussi  bien  dans  les  grottes  de  Paimclia  que  dans  celles  des 
environs  d'Arles;  enfin  les  pendeloques  de  diverses  formes, 
qui  sont  identiques  ici  et  là,  et  les  tlèches  de  silex  à  bords 
droits  et  à  angles  vifs,  qui  se  montrent  au  Castellet  et  au 
Monte  Abrahiïo,  et  dont  il  faut  aller  chercher  les  analogues 
en  Irlande. 

C'est  aussi  dans  ce  dernier  pays,  que  nous  devons  al- 
ler chercher,  ainsi  que  je  l'aï  montré  ailleurs,  des  sépultu- 
res sous  tumulus,  qui  semblent  présenter  une  certaine  ana- 
logie de  forme  et  de  disposition  générale  avec  certaines  de 
nos  sépultures  provençales,  notamment  avec  celles  de  la  Mon- 
tagne de  Cordes.  C'est  encore  en  Irlande  que  Ton  trouve 
de  grands  marteaux  de  quartzite  semblables  à  ceux  de  l'Es- 
pagne et  de  la  Provence,  et  des  boutons  dont  la  forme  rap- 
pelle celle  des  boutons  en  os  mentionnés  ci-dessus,  seule- 
ment je  ne  sache  pas  que  la  callaïs  ait  été  encore  signalée 
dans  cette  partie  des  lies  Britanniques. 

Voilà  les  faits  et  les  rapprochements  auxquels  ils  don- 
nent lieu.  Quelles  conclusions  en  tircrr 

Je  serai  ici  très  circonspect,  car  ces  faits  et  ces  rap- 
prochements sont  il  peine  sullisants  pour  permettre  de  tou- 


.ïGoorl» 


328 

cher  d'une  main  discrète  au  voile  qui  recouvre  l'histoire  de 
ces  époques  lointaines.  Pourtant,  je  ne  puis  m'empêcher  de 
penser  que  la  terre  îbérienne  arrivait  presque  jusqu'au  Rhô- 
ne; que  les  allées  couvertes  de  la  Provence  sont  situées  sur 
la  rive  droite  de  ce  fleuve,  là  où  commençait  la  terre  des 
Ligures,  au  temps  d'Aviénus;  que  ce  poëte  géographe  place 
la  résidence  primitive  de  ces  Ligures  au  sud-ouest  de  l'Es- 
pagne, d'où  ils  furent  chassés  parles  Celtes  conquérants,  en- 
viron 1600  ans  av.  J.  C;  que  Thucydide,  Euphore  et  Phi- 
liste  de  Syracuse  constatent  le  même  fait  dans  leurs  écrits. 

Ainsi  les  auteurs  anciens  nous  montrent  tes  Ligures 
venant  de  l'Espagne,  du  sud-ouest  de  la  Péninsule  ibérique 
pour  occuper  ensuite  le  territoire  et  la  rive  gauche  du  Rhône, 
tandis  que,  de  notre  côté,  nous  constatons  des  analogies 
frappantes  entre  des  sépultures  de  la  Provence  et  d'autres 
du  Portugal.  Faudrait-il  en  conclure  que  c'est  à  l'époque 
des  invasions  Ligures,  et  à  ces  peuples,  qu'il  faut  rappor- 
ter ces  tombeaux  ? 

Les  travaux  de  M,  d'Arbois  de  Jubainville,  de  M.  E. 
Desjardins  et  autres  semblent  établir  d'une  façon  tout-à- 
fait  probable  l'origine  Indo- Européenne  des  Ligures.  Ces 
avant-coureurs  de  l'invasion  celtique  ne  seraient-ils  pas  pas- 
sés par  la  Bretagne  et  la  côte  de  l'Océan  pour  arriver  dans 
le  sud-ouest  de  l'Hispanie  et  de  là,  sur  les  bords  du  grand 
golfe  méditerranéen  qui  porte  encore  leur  nom  '!  N'auraient- 
ils  pas  enseveli  leurs  morts  dans  des  dolmens,  puis  dans 
des  grones  artificielles  dont  nous  avons  montré  l'intime  liai- 
son avec  ceux-ci?  M,  Henri  Martin  n'a-t-il  pas  parlé  dans 
ime  communication  à  ce  Congrès  de  relations  reculées  entre 
le  Portugal  et  l'Irlande,  et  M.  Cartailhac  ne  pense-t-il  pas 

'  Le  golfe  de  Lyon  :— AijoJ&iv  kôXito;. 


,ï  Google 


32g 

également  que  cette  forme  de  flèches,  à  bords  droits,  à  an- 
gles "vifs,  que  l'on  trouve  en  Irlande,  sur  le  littoral  océanien 
français,  en  Portugal,  en  Provence,  est  extrêmement  rare 
dans  le  centre  de  ta  France? 

Toutes  ces  questions  se  posent  à  mon  esprit.  Je  me 
borne  à  les  poser  à  mon  tour  au  Congrès,  sans  avoir  la  pré- 
tention d'y- répondre. 


Olsonssion 

M.  Cartailhac:  Je  dois  ajouter  à  propos  de  ce  que 
vient  de  dire  M.  Cazalis  de  Fondouce  touchant  la  Callaïs, 
que  M.  Edouard  Piette  vient  de  trouver  une  poignée  de  per- 
les de  cette  substance  dans  un  dolmen  sous  tumulus  des 
Pyrénées.  Je  noterai  en  passant  la  grande  ressemblance  des 
petites  pointes  de  flèches  en  silex  des  tombeaux  du  Portu- 
gal avec  celles  du  nord  Scandinave  et  de  l'Irlande. 

M.  Evans;  Je  ferai  ressortir  l'analogie  surprenante  entre 
certaines  flèches  du  type  triangulaire  et  grandes  pointes  de 
lance  portugaises  et  les  armes  semblables  trouvées  en  Irlan- 
de. Ce  fait  pourrait  trouver  une  explication  dans  cette  hy- 
pothèse, que  quelques  races  venues  de  la  Péninsule  hispa- 
nique se  soient  établies  en  Irlande.  Je  puis  ajouter  que  le 
type  de  la  hallebarde  à  trois  grands  rivetssi  bien  connu  en 
Irlande  se  rencontre  aussi  en  Espagne. 


=(%.. 


LES  INDICES  DE  LA  TRANSITION 


LA  PIERRE  POLIE  A  L'ÉPOQUE  DU  BRONZE 


M.  i.E  Baron  J.  de  Baï[; 

De  remarquables  études  ont  élé  publiées  sur  l'origine 
de  l'industrie  du  bronze,  les  documents  qu'elles  renferment 
sont  du  domaine  Je  Phistoire.  La  source  se  trouve  dans  les 
annales  des  temps  anciens.  La  question,  dans  ces  conditions 
revêt  un  caractère  classique.  DVminents  archéologues,  de 
leur  côte,  ont  recherche  partout  les  traces  du  bronze  dans 
les  diverses  contrées  et  suivi  les  routes  qu'il  a  parcourues. 
Le  classement  des  produits  de  IMge  du  bronze  a  été  le  ré- 
sultat de  ces  vastes  travaux. 

Les  enseignements  reposent  dans  la  partie  classique, 
sur  des  faits  inscrits  dans  l'histoire,  nous  l'avons  dit.  Les 
voies  suivies  par  l'industrie  du  bronze,  ses  caractères  dif- 
férents, les  formes  exclusives  qu'il  affecte,  dans  diverses  ré- 
gions, sont  des  données  qui  ressorteni  nécessairement  de 
l'examen  d'une  industrie  déjà  constituée  et  développée. 

Quelques  détails  succints  sur  la  phase  qui  se  place  il 
la  lin  de  la  pierre  poîie  et  au  commencement  du  bron/e  dans 
les  contrées  où  les  deux  industries  ont  laissé  des  traces  au- 
thentiques sont  un  appoint  utile  aux  études  archéologiques. 


,ï  Google 


33 1 

Dans  une  de  nos  précédentes  séances,  M.  Pigorini  attri- 
buait légitimement  une  autorité  prédominante  aux  bronzes 
provenant  des  habitations  ou  des  tombeaux.  En  eliét,  dans 
ces  milieux  caractérisés  ils  sont  datés  et  se  rattachent  à  une 
civilisation  déterminée.  M.  de  Mortillet  de  son  côté,  atfir- 
mait  avec  autant  de  raison  que  les  sépultures  du  bronze 
étaient  rares  et  d'une  intermittence  irréguliére  dans  leurs 
fortuites  apparitions.  Rien  n'est  donc  à  négliger  dans  une 
telle  situation. 

Dans  la  contrée  néolithique  que  j'ai  explorée,  j'ai  été 
frappé  de  la  perfection  avec  laquelle  certaines  grottes  avaient 
été  taillées  dans  le  banc  de  craie.  Ces  mêmes  grottes  ren- 
fermaient des  colliers  dont  les  grains  en  craie  ou  en  os, 
avaient  une  forme  plus  nette,  des  arêtes  vives,  une  perfo- 
ration régulière,  en  un  mot  une  perfection  relative  très  su- 
périeure à  ceux  des  autres  grottes.  Le  groupe  qui  donna  ces 
produits  d'un  travail  plus  parfait  était  isolé.  Quelques  grains 
de  collier  en  bronze  proviennent  d'une  grotte  de  ce  groupe, 
la  seule  qui  contint  des  traces  de  métal.  l,es  grains  sont 
formés  d'une  plaque  mince  ou  bien  ils  sont  en  spirale.  Ces 
rares  témoins  de  l'ùge  du  bronze,  sont  les  preuves  les  plus 
infimes  de  l'industrie  naissante.  Il  en  sont  comme  l'aurore 
dans  le  pays  et  se  trouvaient  ainsi  avec  le  travail  le  plus 
fini  de  la  pierre  polie.  I.a  première  apparition  du  bronze 
coïncide  donc  avec  un  mouvement  de  progrès  dans  l'indus- 
trie néolithique.  Ce  trait  est  tout-à-fait  digne  de  mention. 

L'invasion  du  bronze  est  timide,  on  le  voit;  il  y  a  lieu 
de  croire  que  la  nouvelle  évolution  dans  l'industrie  a  eu  un 
prélude  où  le  métal  était  un  objet  de  luxe,  une  rareté, 
avant  d'être  la  matière  première  de  ces  utiles  instruments 
que  nous  connaissons  et  de  ces  parures  ouvragées  qui  font 
notre  admiration.  Dans  le  fait  présent,  le  bronze  ne  cons- 


,ï  Google 


332 

tituc  qu'une  exception  sans  importance,  il  coudoie  un  voi- 
sin puissant  qui  Pécrase,  Poutillage  en  pierre,  seul  encore 
employé.  Le  groupe  qui  a  vu  poindre  le  bronze  a  donné 
une  perle  en  callaïs;  c'est  encore  un  caractère  de  ta  transi- 
tion. Je  me  félicite  d'avoir  une  pensée  commune  avec  M.  Ca- 
zalis  qui  considère  la  callaïs  comme  étant  un  prodrome  oU 
même  un  contemporain  de  l'industrie  du  bronze.  Ces  pre- 
mières traces  du  métal  se  trouvaient  dans  un  groupe  déta- 
ché à  Oyes  (Marne). 

A  deux  myriamëtres  de  là  dans  les  plaines  de  la  Cham- 
pagne, une  sépulture  m'a  donné  des  fragments  de  poteries, 
deux  petites  flèches  en  silex,  une  lance  à  douille  en  bronze. 
Le  rôle  privilégié  est  pour  le  bronze,  la  lance  est  la  pièce 
importante.  Nous  pouvons  encore  ajouter  qu'en  se  rappro- 
chant de  la  rive  droite  de  la  Seine,  il  a  été  trouve  une  sé- 
pulture où  le  bronze  seul  et  exclusivement  composait  le  mo- 
bilier funéraire.  Les  conséquences  qui  résultent  de  ces  faits 
apparaissent  d'elles-mêmes.  J'ai  seulement  voulu  vous  four- 
nir la  matière  de  quelques  lignes  pour  l'histoire  des  époques 
que  nous  cherchons  à  reconstruire  par  de  communs  efforts. 


,ï  Google 


ARCHÉOLOGIE  PRÉHISTORIQUE 


PROVINOK    SE   UINHO 


M.  José  Caldas 


I— Raisons  bistorlqaes 

Les  civilisations  anciennes  ne  nous  ont  transmis,  en  ce 
qui  concerne  la  présence  de  l'homme  sur  le  globe  terrestre, 
que  des  souvenirs  vagues  et  confus,  basés  pour  la  plupart 
sur  l'anthropomorphisme  de  leurs  dieux  et  les  traditions 
ethniques  de  leurs  cultes  naturels. 

L'homme,  par  la  perfection  de  sa  structure  physiolo- 
gico-anatomique  et  par  la  tendance  toujours  égoïste  de  son 
activité  progressive,  nous  apparaît  dans  les  souvenirs  théo- 
goniques  des  premiers  temps  comme  la  manifestation  la  plus 
éloquente  d'une  conception  surnaturelle.  Subordonnés  à  cette 
anthropodicée  fantastique  surgissent  avec  les  âges,  comme 
le  cortège  d'une  origine  si  élevée,  les  légendes  théogoniques 
et  mystiques,  d'après  lesquelles  l'homme,  seul  et  désarmé, 
lutte  face  à  face  contre  les  cléments,  dompte  les  esprits  en- 
nemis et  crée  les  premiers  rudiments  de  son  autonomie  mo- 
rale. 

Ainsi  dans  les  théogonies  primitives,  tant  aryennes  que 
sémitiques,  nous  avons  vu  passer  le  fantôme  humain  à  tra- 


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334 

vers  les  évolutions  de  l'histoire  comme  une  incarnation  vi- 
vante de  PEsprit  divin.  Traversant  les  gigantesques  con- 
vulsions de  la  terre,  il  suit  toujours  avec  la  fatalité  de  sa 
puissance,  comme  force  initiale,  comme  impulsion  comme 
OpsTTTiî'-T,  |-j//,,  le  souffle  vivifiant — le  Dieu  Eternel. 

Néanmoins,  comme  toutes  les  origines,  Torigine  de 
l'homme  nous  sera  toujours  inconnue.  Cependant  le  désir 
indomptable  qu'il  a  toujours  manifesté  de  connaître  la  vé- 
rité, en  la  cherchant  à  travers  l'imperfection  de  son  esprit, 
le  porte  à  s'interrosïer  sur  sa  propre  essence,  sur  celle  de 
la  nature  du  milieu  cosmique  oij  il  apparaît,  sur  son  avenir 
enfin.  En  cherchant  son  principe  dans  l'imposante  majesté 
des  révolutions  météorologiques  et  dans  la  loi  grandiose  qui 
modifie  successivement  les  conditions  géologiques  de  notre 
globe,  paraissent  les  premiers  cultes,  sorte  d'explication  que 
la  peur  ou  l'ignorance  prétend  donner  des  phénomènes  ob- 
servés par  l'expérience. 

C'est  ainsi  que  dans  les  livres  hébreux,  dans  les  tradi- 
tions kouwéniennes  de  la  Chine  et  dan.s  les  hymnes  baby- 
loniennes, dans  les  cultes  prévédiques  de  l'Inde  et  dans  lc< 
religions  des  Phéniciens,  des  Égyptiens  et  des  Persans,  Photn- 
me  prend  toujours  une  origine  divine,  parce  que,  ni  sur  la 
terre  ni  dans  les  lois  qui  la  régissent,  il  ne  peut  trouver  l'ex- 
plication de  son  secret,  c'est-à-dire  de  son  origine. 

En  expliquant,  dans  la  mesure  de  ces  connaissances,  ta 
constitution  primitive  du  monde,  en  nous  donnant  l'idée  d'un 
cahos,  dans  lequel  Pair,  la  terre  et  les  mers  étaient  encore 
confondus,  ne  formant  qu'un  tout  informe',  le  scepticisme 

'  Antij  mari.'  i;t  U-llus  et  quod  tegit  omnia  coclum 


,ï  Google 


335 

romain,  c'est-à-dire  le  paganisme  ancien,  ne  peut  trouver, 
par  rapport  à  l'homme,  que  ces  mots:  nattis  homo  est*. 

D'où  cst-il  donc  venu? 

De  la  nature  divine  dont  on  forme  les  dieux?  demande 
l'antiquité.  De  la  terre? 

Mais  de  la  terre,  dans  le  sein  de  laquelle  il  y  avait  en- 
core quelque  germe  de  nature  céleste?  Aujourd'hui,  comme 
alors,  rien  n'y  répond. 

Cependant  le  panthéisme  hellénique  salue  dans  l'homme 
la  brillante  métamorphose  de  la  matière,  la  concrétion  du 
To  itôv',  du  summa  Iota,  de  la  grande  Nature  enfin  dans 
l'extraordinaire  phénomène  de  la  vie. 

Sic  modo  quae  fitei'at  riidt's  et  sine  imagine  telliis 
Induit  ignotos  hominum  conversa  figuras^. 

Plus  tard,  quand  la  civilisation  chrétienne  instiguéc  par 
iii  culture  scientifique  des  Arabes  de  Cordoue,  déjà  très  éle- 


'  Natus  homo  est.  Sive  hune  divino  semine  fecït 
nie  opifex  rcrum,  mundi  tnelioris  origo; 
Sive  recens  tellus,  seductaque  nuper  ab  alto 
Aethere,  cognati  retînebat  scmina  coeli, 
Quam  satus  lapeto,  mîxtam  Huvialîbus  undis, 
Finxit  in  effigiem  moderalum  cuncta  deorum  ; 
Pronaquc  quum  specient  animalia  caetera  terrant. 
Os  homini  sublime  dédit,  coelumque  tueri 
lussit,  et  erectus  ad  sidéra  toUere  vultus. 

Ov.  Mélam.  i,  78-86. 
s  formules  atomistes  de  la  Nature,  selon  l'expression  d'Rpicure 
ùisiv,  Twv  5)mv  cpùiJiv,  TûW  SvT6)V  çùffiv)  traduites  en  omm  ini- 
nalura  renatt,  sirnima  Ma,  siimmai  lotius  summa  par  Lucrèce. 
le  xiwwv  àxivDTOW  d'Aristote. 
Ovide,  Mélam.  i,  87-88. 


.,Goo< 


B6_ 

vée  à  cette  époque,  se  vit  forcée  d'imposer  à  ses  écoles  l'étu- 
de des  langues  orientales,  il  ne  manqua  pas  de  savants  qui, 
entraînés  dans  le  courant  impétueux  d'une  profonde  préoc- 
cupation théologique,  cherchèrent  à  détruire  tous  les  doutes 
sur  l'origine  et  l'antiquité  de  l'homme.  Survinrent  alors  les 
chronologies  bibliques;  on  trouva  que  la  science  de  la  phi- 
lologie tirait  son  origine  de  la  langue  hébraïque,  dont  l'étude 
se  revêtit  des  formules  d'une  initiation  religieuse  et  (ut  pré- 
sentée comme  la  première  et  la  plus  ancienne  accentuation 
morphologique  de  la  pensée  humaine.  De  son  côté,  la  pa- 
tristique,  en  confondant  avec  ses  commentaires  le  texte  sé- 
mitique des  livres  judaïques,  trouve  dans  le  sensible  déve- 
loppement littéraire  de  cette  langue,  comparée  avec  les  idio- 
mes araméens  et  arabes,  une  preuve  en  faveur  de  ses  affir- 
mations linguistiques,  qu'elle  croit  irréfutables.  C'est,  aidé 
de  ces  faibles  preuves  scientifiques,  que  le  moyen-âge  affir- 
me par  devant  l'histoire  la  raison  de  sa  prédominance  in- 
tellectuelle. 

Lorsque  plus  tard,  à  l'époque  de  la  Renaissance,  les 
nouvelles  découvertes,  tant  scientifiques  que  géographiques, 
et  la  meilleure  compréhension  des  lois  cosmiques  vinrent 
condamner  non  seulement  la  Tomyftxfix  XpuTiovcoi  de  l'In- 
dicopleusie,  mais  aussi  la  théorie  géocentrique  de  l'Univers 
proclamée  par  l'Almageste  de  Ptolémée,  la  science  de  l'his- 
toire, délivrée  des  bornes  étroites  de  la  préparation  reli- 
gieuse où  elle  se  trouvait*,  allongea  ses  premiers  regards 
sur  de  plus  larges  horizons.  Newton,  par  l'application  aux 

'  Au  moyen-âge  on  donnait  le  nom  de  relation  de  préparation  et 
consommation  (uroiyîîa  toû  xoaftoù)  au  principe  divin,  au  moyen  du- 
quel la  Providence  déterminait  à  travers  les  siècles  les  événements  hu- 
mains. C'était  la  partie  indispensable  de  toute  histoire  ecclésiastique 
Apocj^i-S.   Èpiph.  Haeres.  j,  i.   S.  Aug.  CiV.  Ifei  ivni,  c.  5i. 


,ï  Google 


corps  célestes,  des  formules  abstraites  de  la  mécanique  ra- 
tionelle,  découvre  la  loi  de  l'attraction  de  la  matière  et  im- 
prime à  l'étude  météorologique  de  la  terre,  par  l'analyse 
comparative  de  toutes  les  sections  coniques,  le  caractère 
authentique  et  positivement  scientifique  qu'elle  conserve 
encore  aujourd'hui.  Après  cette  découverte  on  en  fait 
bien  d'autres,  et  en  peu  de  temps  l'intelligence  humaine 
trouve,  par  l'observation  et  par  le  calcul,  des  espaces  im- 
menses, dans  lesquels,  maintenant,  elle  peut  s'élancer  li- 
brement. 

Les  recherches  géologiques  faites  dans  les  couches  qua- 
ternaires de  notre  globe  devaient,  plus  tard,  préparer  l'es- 
prit humain  pour  la  création  de  la  Paléontologie.  Et  si  l'ex- 
cessive préoccupation  anthropologique  de  Scheuchzer  le  porta 
à  regarder  la  Salamandre  fossile  (TOeningen  comme  un  exem- 
plaire préadamitique  de  l'homme  témoin  du  déluge  (Homo 
dilitvii  testis)  et  à  retarder,  en  raison  de  ce  désastre,  le  pro- 
grès des  sciences  préhistoriques;  la  hache  de  silex,  décou- 
verte et  dessinée  en  lyiS  par  Kemp,  força  les  naturalistes 
à  entreprendre  de  nouvelles  investigations  avec  plus  d'ardeur 
et  de  confiance  dans  leurs  travaux. 

Il  serait  difficile,  sinon  impossible,  de  rapporter  les  pro- 
grès que  la  paléontologie  a  faits  partout  depuis  cette  épo- 
que. La  haute  antiquité  de  l'homme  paraît  déjà  prouvée  par 
les  grossiers  instruments  en  pierre  de  la  période  paléolithi- 
que trouvés  en  Italie,  en  Scandinavie,  en  Angleterre,  en 
France.  La  science  des  races  éteintes,  aidée  de  l'étude  de 
l'influence  des  lois  cosmiques  sur  la  climatologie  et  la  géo- 
lo^e,  peut  déjà  asseoir  les  bases,  d'un  caractère  positif,  de 
ses  affirmations,  et  poursuivre,  animée  d'une  forte  convic- 
tion scientifique,  la  résolution  de  ses  problèmes. 

D'un  autre  côté,  un  historien  allemand,  J.  G.  Eichhorn, 


^'C 


x^^ 


338 

préoccupe  de  l'étude  des  prophètes  hébreux  S  range  la  lan- 
gue hébraïque  dans  le  groupe  des  idiomes  sémitiques,  à  côté 
du  syriaque,  du  chaldéen,  du  phénicien,  de  l'arabe  et  de 
l'éthiopien.  Et,  quoique  cette  classification  n'ait  pas  eu,  plus 
tard,  l'agrément  des  philologues  en  général  et  des  linguistes 
modernes,  en  vertu  de  la  meilleure  compréhension  des  prin- 
cipes ethniques  qui  ont  déterminé  les  migrations  orientales 
citées  dans  le  Berëskiih;  quoiqu'ils  aient  préféré  la  grande 
division  des  langues  arabiques,  selon  Leibnitz,  ou  de  sjro- 
arabes  comme  l'entend  M.  Renan,  cette  classification  a  eu 
cependant  le  grand  avantage  d'arracher  au  domaine  exclusif 
des  sciences  théologiques  l'étude  d'un  idiome  si  nécessaire 
à  l'homme  pour  bien  comprendre  l'antiquité.  Comnw  con- 
séquence de  ce  fait  paraissent  alors  les  premiers  travaux 
d'investigation  sur  la  chronologie  des  livres  hébreux*,  et  l'on 
voit  accourir  plusieurs  des  illustres  ornements  du  clergé  latin  '^ 
pour  prendre  part  à  cet  important  mouvement  scientifique. 
C'est  donc  dans  ces  conditions,  que  les  sciences  pré- 
historiques, c'est-à-dire,  l'anthropologie  et  la  paléontologie, 
aidées  du  développement  progressif  de  la  géologie,  ont  pré- 
paré pour  les  siècles  à  venir  la  notion  la  plus  complète  et 
la  plus  authentique  que  la  raison  humaine  pourra  donner  de 
la  généalogie  du  globe  et  de  ses  habitants  les  plus  anciens. 

'  Die  Hebrâischen  Propheten.  Gotttingen  1816-1820,  3  vol.  in  ».° 
'  Ed.  Lartet.  'Nouvelles  recherches  sur  la  coexistence  de  l'homme 
cl  des  grands  mammifères  fossiles  réputés  caractéristiques  de  la  der- 
nière période  géologique',  m  Annales  des  Sciences  Naturelles,  4*"  sé- 
rie, l.  XV,  p.  256. 

■  'Le  monde  et  l'homme  primitif  selon  la  Bible',  i  vol.  in  S»  Paris 
r86g,  chez  V.  Palmé.  On  y  développe  la  thèse  de  Marcelle  de  Serres 
dans  son  livre  'Cosmogonie  de  Moïse  comparée  aux  faits  géologiques', 
V.  aussi  les  travaux  des  Abbés  Bourgeois  et  Delaunay. 


,ï  Google 


339 


n.— Honnments  mégrallttilques 
dans  le  bassin  h7drograpblqne  de  l'Anoora 


Le  spectacle  imposant,  et  majestueux  que  présentent 
les  monuments  mégalithiques  devait  sans  doute  inspirer, 
dan«  les  temps  historiques,  à  ceux  qui  en  furent  les  pre- 
miers observateurs,  un  sentiment  religieux  et  grave  em- 
preint de  superstitions  et  de  crainte.  L'aspect  colossal  et 
fantastique  dé  ces  masses,  la  disposition  de  leurs  lignes,  et 
l'absence  de  presque  tout  sentiment  architectonique,  devaient 
agir  nécessairemenr  sur  ces  êtres  naturellement  enclins  au 
merveilleux,  comme  une  affirmation  évidente  du  passage  des 
esprits  supérieurs  sur  la  terre. 

Ainsi,  nous  voyons  que  le  cromlech  monumental  de 
Stonehenge,  près  Salisbury,  avait  pris  le  nom  fantastique 
de  Côr-gatur  «danse  des  Géants»  tandis  que  les  dolmens  de 
l'intérieur  de  la  Bretagne  y  sont  encore  désignés  sous  le  ti- 
tre merveilleux  de  Alikorrigan^  c'est-à-dire  a  la  maison  des 
Fées». 

Les  noms  génériques  donnés  encore  aujourd'hui  à  cette 
sorte  de  monuments  sont  dérivés  de  termes  franco-bretons' 
et  anglo-celtiques^.  Une  étude  moins  approfondie  des  scien- 
ces de  l'antiquité  les  a  fait  prendre,  pendant  longtemps,  pour 
des  constructions  druidiques,  contemporaines  de  la  domi- 
nation gauloise. 

Ce  qui  est  naturel,  c'est  que  ces  peuples,  dont  le  carac- 
tère superstitieux  avait  déjà  paru  remarquable  aux  Romains 

'  Men-hir  "pierre  longue,  pierre  dressée»  ou  peulvœns. 
*  Tol-mert  ou  Dolmen  {toi,  table  et  men,  pierre). 


.,Co. , 


340 

eux-mêmes,  à  l'époque  de  la  conquête,  les  aient  pris  pour 
des  monuments  religieux  et  y  aient  exercé  toutes  les  cruau- 
tés de  leurs  sacrifices  publics*. 

C'est  sur  ces  dolmens,  dit-on,  que  les  anciens  prêtres 
druidiques  faisaient  les  rites  funéraires  de  leurs  cultes  bar- 
bares et  sanguinaires. 

C'était  au  fond  des  forêts,  dit  Lucain',  que  ces  minis- 
tres horribles  allaient  répandre,  en  l'honneur  des  dieux  Teu- 
tatès,  Taranis  et  Hésus,  le  sang  de  leurs  victimes. 

On  a  cru  aussi  que  ces  monticules  artificiels  que  l'on  ren- 
contrait parfois  (les  tiimiili)  dans  les  lieux  les  plus  écartés  et 
loin  du  passage  commun,  et  sur  plusieurs  desquels  on  a  dé- 
couvert plus  tard  des  traces  d'industrie  humaine,  étaient  les 
débris  des  autels  graminés  (arae  gramineae)  des  anciens 
sacrificateurs,  quoique  l'on  dût  savoir  que  de  tels  autels 


'  Natio  est  omnium  Gallorum  admodum  dedita  reliponibus:  atque 
ob  eam  causam,  qui  sunt  afiectt  gravioribus  morbîs,  qutqtie  in  proelîis 
periculisque  versanrur,  aut  pro  victimis  homines  immolant,  aut  se  im- 
molaturos  vovent,  administrisque  ad  ea  sacrificia  Dniidibus  utuntur; 
'  quod,  pro  vita  hominis  nisi  hominis  vita  reddatur,  non  posse  aliter  deo- 
nim  immonaiium  numen  placari  arbîtrantur:  publiceque  eiusdcm  ^- 
neris  habent  insticuta  sacrificia. 

César,  De  bello  Gatt.  vi,  i6. 
*  Et  quibus  immitis  placatur  sanguïae  dire 
Teutates,  horrensque  ferts  altaribus  Hesus; 
Et  Taranis  scythtcae  non  mitior  ara  Dianae. . . 


Et  vos  barbaricos  ritus,  moremque  sinistrum 
Sacrorum,  Druldae,  positis  repetistis  ab  armis. 

Luc.  Phars.  i 
TeutatÈs,  Taautès,  Theut,Thôys,  Thoyt,  Theutus  ou  Tuot  étaient 
des  surnoms  de  Mercure,  le  dieu  principal  des  Gaulois  (Deum  maxime 
Mercurium  colunt.—  De  bell.  Gall.  vi,  1 7)  auquel  ils  sacriSaîent  leurs  pri- 
rs.  Son  culte  était  originaire  de  l'Egypte. 


,ï  Google 


passagers  et  temporaires  {arae  temporales)  n'étaient  élevés 
qu'en  temps  de  guerre,  au  centre  des  campements  avec  des 
mottes  de  terre  prises  dans  les  vallées  environnantes*  par- 
ce que  les  guerriers  avaient  besoin  de  la  compagnie  de  leurs 
divinités  pour  marcher  au  combat  avec  plus  de  hardiesse. 

Ces  monuments  ont  dû  aussi  recevoir  des  Grecs  le  nom 
de  ^itii,  mot  qui  dans  leur  idiome  désignait  une  proémi- 
nence ou  élévation  quelconque  et  auquel  a  toujours  été  liée 
dans  l'histoire  de  leurs  rites  l'idée  d'autel*.  Apollonius  de 
Rhodes  semble  confirmer  ce  sentiment^,  en  écrivant  que  la 
plupart  des  autels  primitifs  étaient  des  monticules  de  pierres 
détachées,  et  le  plus  souvent  une  seule  pierre.  L'autel  de 
Zeus,au  sommet  du  mont  Lycée,  en  Arcadie,  n'a  été,  d'après 
Pausanias\  qu'un  simple  monticule. 

Cependant,  à  cause  du  peu  de  sûreté  que  présentaient 
de  telles  opinions,  les  savants  ne  pouvaient  pas  rester  long- 
temps d'accord  sur  la  destination  de  ces  monuments,  cons- 
truits sous  terre  ou  à  découvert,  à  l'usage  des  autels  primitifs, 
tant  des  dieux  champêtres  que  des  forces  naturelles  panthéis- 
tes, vénérés  dans  les  'Apyoi  Xiflot,  ou  pierres  brutes  des  plus  an- 
ciens habitants  de  la  Grèce  et  des  peuples  qui  les  suivirent. 
Car,  à  mesure  que  ces  monticules  et  la  distribution  de  ces 
pierres  permettaient  de  désigner,  par  pure  fantaisie,  tout 

<  In  medioque  focos  ei  diis  communibus  aras 

Gramineas 

Aen.  MI,  118. 
Ovid.  Métnm.  vu,  241  ;  xv,  573.  Trîsl.  v,  Snj.  Fasi.  11,  C>a^.  Hor. 
Od.  I,  19,  i3  ;  iir,  S,  4.  Apul.  Met.  vu,  10.  Teriul.  Apol  aj.  Mart.  x,  yi. 
l  Eusi.  Ad  II.  viu,  441.  Ed.  SagUo  in  Dkt.  des  antiq.  Gr.  et  Rom. 
ytrh.  Ara  (altare, /ocus,  poifws,  étjyâ^x,  korix). 

*  'Afyowoi^TixsÈ,  1, 1 133  ;  11,  695. 

*  Paus.  viii,  38,  7. 


,ïGex:)Qlc 


cela  comme  des  constructions  exclusivement  appliquées  aux 
rites,  tantôt  simples  et  inoflensifs,  tantôt  barbares  cl  san- 
glants, des  premiers  hommes,  Pétude  des  géographes  et  des 
poètes,  les  plus  anciens,  n'autorisait  pas  toujours  un  avis 
aussi  téméraire. 

On  savait,  par  exemple,  que  Sémiramis,  reine  de  Ni- 
nive,  avait  fait  élever  un  monticule  sur  le  tombeau  de  Ni- 
nus,  son  mari;  que  Tlliade  parlait  des  collines  élevées  par 
Achille  en  h(-nneur  d'Hector  et  de  Patrocle;  que  les  restes 
de  Laius,  père  d'Oedipe  furent  couverts  de  pierres  brutes 
et  grossières:  enfin,  que  ces  monticules  ne  seraient  pas  seu- 
lement des  autels  pour  le  culte,  et  que,  pourtant,  il  serait 
pour  le  moins  prudent  de  les  considérer  aussi  comme  des 
tombeaux- 

L'aspect  des  Cippus  ou  autels,  tombeaux  ou  tables  ei 
cercles  fantastiques,  émerveilla,  non  seulement  les  premiers 
poètes,  mais  il  surprît  les  géographes  les  plus  anciens.  Ar- 
rien  dans  son  'Avâëoffi;  'AXf^âvJp™  ou  l'Expédition  d'Alexan- 
dre, parle  des  pierres  brutes  qu'il  a  vues  dans  l'Asie  Mi- 
neure; et  Strabon,  en  parcourant  l'Egypte,  raconte  qu'il  a 
rencontré  sur  les  chemins  quelques  temples  de  Mercure. 
composés  de  deux  pierres  grossières  surmontées  d'une  troi- 
sième en  forme  de  table;  c'est  à  peu  près  ce  que  l'on  doit 
conclure  des  vers  de  Calpurne,  lorsque  dans  la  troisième  de 
ses  éclogues'  il  fait  dire  à  Lycidas: 

Ipse  procul  siabo,  vel  acuta  carice  teclns, 
Vel  propiiis  latitans  vicina  est  saepe  stib  ara. 

Chez  nous,  cependant,  ces  monuments  passèrent  long- 

'  Calpurn.  Ecl.  m.  Exor.  loi.  I.vc.  v.  94  et  gS. 


.ïGoogle 


H5. 
temps  pour  l'ouvrage  des  peuples  d'origine  asiatique  qui, 
avec  les  éitïments  ibériens,  formèrent  à  l'occident  de  la  Pé- 
ninsule, le  groupe  lusitanien  dont  nous  descendons. 

Lorsque,  plus  tard,  la  domination  romaine  vint  étendre 
sa  prépondérance  guerrière  jusque  dans  cette  région,  nos 
dominateurs  ont  dû  rencontrer  un  grand  nombre  de  ces 
monuments,  parce  que,  partout,  et  plus  encore  dans  les  con- 
trées du  nord  du  Portugal,  on  trouve  encore  aujourd'hui  un 
grand  nombre  de  lieux  appelés  Attlas'. 

Plus  tard,  au  moyen-âge  nous  voyons  ce  même  nom 
donné  à  toute  sorte  de  pierre  qui,  dressée  au  bord  des  che- 
mins ou  à  l'entrée  des  villes,  attirait  l'attention  des  pas- 
sants. On  les  a  appelées  aussi  Aras  et  l'on  a  affirmé 
que  c'est  sur  ces  pierres  que  «les  premiers  chrétiens  ont 
brûlé  leur  prémices  et  les  gentils  fait  leurs  horribles  sacri- 
fices*». Cette  dernière  explication  semble  se  rapporter  déjà 
aux  dolmens  à  cause  de  la  particularité  que  présente  leur 
pierre  horizontale. 

Depuis  le  neuvième  siècle  jusqu'au  treizième  paraît 
aussi  le  mot  Mamoas  ou  Mamuas,  que  le  latin  barbare 
de  ces  âges  grossiers  traduit  par  M  amol  la  s,  expression  ser- 


I  Lès  anies  étaient  emînenliores  lapides  vel colutnnae  ullimae,  gui- 
bus /abrka  sustitjetur  (Servius,  ad  Gcorg.)  Temples  ù  anies  {aedes  in 
antis,  vas;  tv  irapatotsïfli)  c'est  le  nom  donné  par  Vitruvc  aux  tem- 
ples les  plus  antiques. 

'  Viterbo,  Elvcid.  verb.  Anlas.  La  même  chose  que  Aras.  Dans  la 
dissertation  de  Martinho  de  Mendonça  e  Pina  {Collée,  da  Academia  da 
Hisl.  Port.  [734,  vol.  xiv)  les  mots  anta  et  dolmen  sont  confonJus.  On 
arrive  à  la  même  conclusion  par  rexcelleot  travail  de  M.  le  dr.  F,  A. 
Pereira  da  Costa,  Monumentos  prehistorîcos  em  Portugal  (Descripçâo 
de  algtins  dolmins  ou  antax  de  Portugal),  Lisboa,  Academia  Real  das 
Scicncias,  iBfiS,  i  vol. 


lyGoogle 


344 
\ant  a  représenter  toute  proéminence  ou  petite  colline  de 
forme  arrondie,  semblable  au  sein  de  la  femme*,  et  dont 
on  se  servait  pour  borner  les  champs,  quelques  routes  et 
certains  villages*.  Cet  usage  eut  lieu  en  Espagne  aussi  bien 
qu'en  Portugal. 

Dans  ces  proéminences  et  dans  celles  qui,  à  cette  épo- 
que, sont  designées  sous  le  nom  de  Aras,  mot  auquel  Bul- 
let  attribue  une  origine  celtique' — nous  devons  voir  ces  mo- 
numents, que  les  études  archéologiques  modernes  nous  ap- 
prennent à  reconnaître  pour  les  tumtiîi  ou  limites  des  peu- 
ples gallo-romains. 

Telle  fut  enfin  l'idée  qui,  jusqu'au  siècle  dernier,  s'y 
trouvait  invariablement  liée,  tant  chez  nous  qu'à  l'étranger. 
Les  Celtes,  les  Gaulois  ou  les  Celtes  de  l'occident  en  étaient 
toujours  les  constructeurs  primitifs. 

Plus  tard,  quand  on  commença  à  s'occuper  de  l'in\'es- 

'  Viierb.  Elucid.  verb.  Mamoa. 

'  oQue  fossetn  na  Matnoa  de  par  da  carreîra  de  sobre  Aiuega, 
que  chamam  Mamoa-Negra».  Doc.  de  l'Université,  de  1198,  ciré  par 
Viterbo.  «E  parte  pela  Mamoa  que  esta  a  par  da  estrada».  Doc.  de 
Pendurada  de  i3i5,  tbid.  Dans  un  document  de  S.  Thyrso  on  lit  Ma- 
mua  (in  eod.  loc.) 

'  J.  B.  Bullet,  Mémoires  sur  la  langue  celtique,  Besançon,  i7i4 — 1 770. 
3  vol.  in  fol.  Revue  Archéologique,  vot  ivi,  a  10. 

Je  ne  puis  me  conformer  â  l'opinion  de  quelques-um  de  nos  ar- 
chéologues  qui  disent  que  chez  nous  on  a  appelé  antas  les  dolmens 
placés  sur  le  sol,  en  affirmant  que  les  mamuas  étaient  ces  mêmes  mo- 
numents élevés  sur  des  monticules  factices  {lumuli  ou  limites),  La 
meilleure  interprétation  du  vocable  latin  aiua,  aniae,  n'autorise  certai- 
nement pas  cette  explication.  V.  les  travaux  du  grammairien  Nonnius 
Marcellus  -De  compendiosa  doctrina  per  Hueras  adjîlium.  i.  De  pro- 
prietate  sermonts,  124.  C.  Thierry  cite  a  cet  égard  et  bien  ù  propos  les 
mots  d'Hésychius:  UctfaoTÔ^ç  oî  itpij  t;Ï;.  . .  (V.  le  Dict  des  Aniig 
Grecques  et  Romaines,  fasc.  2.  p.  381. 


,ï  Google 


343 
ligation  des  faits  préhistoriques,  à  Paide  de  l'examen  géolo- 
gique des  zones  où  ils  se  révélaient,  ainsi  que  des  découver- 
tes paléontologiques  et  des  progrès  de  la  géologie  et  de  l'an- 
thropologie, on  trouva  que  ces  monuments,  datant  d'une 
époque  beaucoup  plus  reculée  que  celle  qu'on  leur  avait 
attribuée  jusqu'alors  dans  les  domaines  de  la  science,  ap- 
partenaient à  la  période  néolithique  ou  de  la  pierre  polie  et 
étaient,  pour  la  plupart,  destinés  à  servir  de  chambres  fu- 
néraires. 

Martinho  de  Mendonça  e  Pina  est  le  premier  écrivain 
portugais  qui  ait  parlé  de  ces  monuments,  et  quoique  ses 
travaux  soient  faits  avec  un  critérium  très  élevé,  il  tombe 
parfois  dans  des  erreurs  auxquelles  le  temps  où  il  vivait 
semble  l'avoir  fatalement  condamné.  Il  fut  cependant  le  pre- 
mier Portugais  qui  les  ait  observés,  en  savant  ofhciel.  Je 
crois  cependant  qu'il  n'a  pas  fait  mention  d'un  grand  nom- 
bre de  ceux  que  cette  province,  en  raison  de  sa  population, 
aurait  dû  posséder;  c'est  sans  doute  ce  qui  en  a  rendu  la 
destruction  plus  complète. 

Plus  tard,  M.  Ignacio  de  Vilhena  Barbosa*,  en  indi- 
quant ceux  dont  il  a  connaissance  dans  la  province  de  Minho, 
cite  à  peine  celui  de  Monte  da  Polvoeira,  près  Caldas  de 
Vizella  et  celui  de  Monte  da  Pedreira  à  peu  de  distance  de 
Pombeiro, 

■  Il  y  a  ici  évidemment  ignorance  corhplète  de  l'existence 

■  «Foi  a  provincia  do  Minho,  em  razâo  de  ser  mais  populosa,  onde 
aquella  desiniiçâo  (ceik  des  monuments  mégalithiques)  Toi  maior  e 
mais  compléta".  I.  de  Vilhena  Barbosa,  Arch.  Pict.  xi,  378.  F.  A.  Pe- 
reira  da  Costa  op.  cit.  Manuel  BemarUes  Branco,  Supp.  ao  mappa  de 
Port,  de  Joâo  Baptista  de  Castro.  Lisboa,  i87o,  p,  i36  et  i37.  Mart.  de 
Mendonça  e  Pina,  Diseriaçâo,  in  Collée,  da  Acad.  da  Hist.  Port.  1734, 


„GoQiilc 


3Q2IC 


346 

des  dolmens  du  bassin  hydrf^raphique  de  l'Ancora,  dont  la 
ruine,  certes,  est  inévitable,  vu  l'état  où  se  trouve  le  dol- 
men du  hameau  de  Santo,  dans  la  paroisse  de  Ville,  à  peu 
de  distance  de  Gontinhâes,  cottcelho  de  Caminha,  qui  était 
encore  debout  il  n'y  a  pas  longtemps. 

Dans  cette  zone  on  trouve  le  dolmen  de  Barrosa,  dont 
l'exploration  a  été  faite  a  diverses  époques  par  des  amateurs, 
et  dont  aujourd'hui  il  n'y  a  presque  plus  rien  à  explorer,  vu 
l'état  de  véritable  dévastation  que  présente  le  tumidiis  ou 
monticule  sur  lequel  il  est  assis. 

Il  est  connu  par  le  nom  de 

DOLMEN   DE   [lAKROSA 

Ce  monument  {pi.  I  fig.  i,  2)  se  trouve  placé  auprès  de 
la  lisière  orientale  d'un  petit  bois  de  sapins  sur  une  espèce 
de  plateau  de  courtes  dimensions,  auquel  donne  accès  le  che- 
min qui  conduit  de  Gontinhâes  à  Ville,  à  1 5oo  mètres  à  peu 
près  de  cette  paroisse,  dans  la  ligne  de  sud-est.  11  est  d'une 
grande  élégance  et  se  trouve  assis  sur  un  petit  monticule 
de  terre  ou  iumulus,  dont  la  base  est  entourée  de  quel- 
ques pierres  grossières  pour  défendre  l'enceinte  occupée 
par  le  monument.  Au  sud  et  au  nord  la  table  ou  ara  re- 
pose sur  trois  pierres  de  chaque  côté;  outre  celles-ci  il  y 
en  a  encore  deux  autres  en  dehors  de  l'entrée  de  la  cham- 
bre. La  hauteur  moyenne  de  toutes  les  pierres  sur  lesquel- 
les la  table  repose  est  de  i^iSS,  la  largeur  moyenne  de  cel- 
les du  côté  sud,  à  partir  du  fond  du  monument,  est  pour 
la  première  i  ",05,  pour  la  deuxième  i"',26  et  pour  la  troi- 
sième i°,5o,  formant  toutes  une  courbe  dont  la  branche 
orientale  se  rétrécit  sensiblement  vers  l'entrée.  Les  pierres  du 
côté  nord,  disposées  en  ligne  droite,  ont  de  largeur  moyen- 


,ï  Google 


347 
ne:  la  première  84  cent.,  la  deuxième  et  la  troisième  i"',4i 
chacune.  Elles  forment  rentrée  du  dolmen,  mais  après  elles 
il  y  en  a  encore  deux  autres,  dont  la  première  large  de  i™,56 
et  la  seconde  de  i'",38.  La  longueur  de  la  pierre  formant 
le  fond,  est  de  a^iSo;  l'épaisseur  moyenne  de  toutes  ces 
pierres  est  de  25  cent.  La  table  affecte  sensiblement  la  for- 
me d'un  trapèze,  ayant  pour  bases  i"',5o  et  3  mètres;  la 
hauteur  en  est  de  $"',bo.  L'entrée  qui,  comme  nous  l'avons 
déjà  dit,  est  tournée  vers  l'est,  mesure  à  son  ouverture  ho- 
rizontale 2",5o.  La  chambre  a  2",5o,  environ,  de  longueur 
sur  3  mètres  de  largeur. 

A  la  texture  extérieure  du  granité  on  reconnaît  aisément 
que  ce  monument  a  été,  pendant  longtemps,  couvert  de 
terre,  presque  jusqu'à  la  table  ou  à  peu  près. 

DOLMEN  DE  VJLLE 

Ce  dolmen  est  situé  dans  la  paroisse  de  Ville,  conce- 
Iho  de  Caminha,  hameau  de  Santo.  Il  en  reste  à  peine  deux 
pierres  qui  ont  dû  en  former  le  fond.  Il  est  à  700  mètres  à 
l'est  de  celui  de  Barrosa.  L'une  de  ses  pierres  est  rectan- 
gulaire et  mesure  i"',i5  sur  i'",8o,  l'autre  affecte  sensible- 
ment la  forme  d'un  prisme  rectangulaire  dont  la  hauteur 
est  de  2"',4o  et  la  largeur  de  o",4o  à  chaque  face. 

Ce  dolmen  était  recouvert  par  un  monticule,  au  centre 
duquel  a  été  commencée  la  fouille  qui  l'a  mis  découvert.  Je 
n'y  ai  fait  aucune  fouille. 

L'ouverture  aujourd'hui  n'est  plus  qu'un  fossé. 


348 

DOLMEN  DE  FRAIÂO 

Dans  le  hameau  appelé  Fraiao,  paroisse  d'Ancora,  et 
au  sud  de  la  rivière  de  ce  nom,  il  y  a  eu  autrefois  un  dol- 
men. Des  fouilles  répétées  ont  contribué  à  sa  ruine  com- 
plète. Il  en  reste  à  peine  le  trou  qui  représente  la  chambre 
et  une  légère  accidentation  dans  le  terrain  qui  était  le  tumii- 
lus.  Une  hache  fabriquée  de  schiste  amphiboliquc,  fut  trou- 
vée à  Pendroit  où  la  chambre  de  ce  monument  a  dû  exis- 


ni. — station  da  mont  Santa  Lnzla 

L'étude  des  grottes  et  des  cavernes,  des  abris  sous  ro- 
che, des  kioekkenmoeddings  et  des  dolmens  fut  pour  la  clas- 
sification, dans  les  domaines  de  la  science,  des  diverses  gra- 
dations par  lesquelles  l'homme  a  passé  depuis  la  période 
paléolithique  et  mésolithique  jusqu'à  la  période  néolithique, 
ce  que,  plus  tard,  l'analyse  des  cités  lacustres  et  palustres 
a  été  pour  catégoriser  mieux  et  avec  plus  de  rigueur,  l'in- 
dustrie humaine  à  l'âge  de  la  découverte  des  métaux  et  de 
leur  application.  Le  hasard  qui  a  fait  découvrir  les  palafit- 
tes  des  lacs  de  la  Suisse,  l'analyse  à  laquelle  le  dr.  Keller, 

'  Cette  hache  a  été  envoyée  à  la  Section  des  Travaux  Géologi- 
ques où  elle  se  trouve. 

M.  Martins  Sarmento  dans  ses  études  archéologiques  cite,  dans  la 
vallée  de  l'Ancora,  le  dolmen  de  Barrosa  et  quatre  autres  encore  dont 
il  ne  reste  que  des  vestiges.  Dans  ces  vestiges  sont  compris  par  111- 
lustre  explorateur  ceux  de  deux  autres  dolmens  qui  se  trouvent  en  de- 
hors du  cercle  auquel  nous  circonscrivons  ce  mémoire.  L'un  se  trouve 
situé  dan  l&portella  de  Venade. 


,ï  Google 


349 
de  Zurich,  a  fait  soumettre  les  instruments  trouvés  dans  ces 
stations*,  ont  déterminé  dans  l'étude  des  sciences  préhisto- 
riques cette  période  qui,  en  phUosophie,  est  caractérisée  par 
révolution  psycholof^ique  transformant  en  loi  rationnelle  et 
positive  ce  qui  en  lui-même  n'était  qu'une  loi  empyrique. 

Les  stations  de  l'âge  du  bronze,  grâce  à  leur  profusion, 
sont  aujourd'hui  un  champ  très  vaste  pour  l'étude  des  der- 
niers temps  préhistoriques. 

En  Portugal,  surtout  dans  la  province  de  Minho,  (à  en 
juger  par  le  grand  résultat  que  l'on  a  retiré  du  peu  d'in- 
vestigations que  l'on  y  a  faites),  ces  stations  sont  très  nom- 
breuses, sans  doute,  et  elles  doivent  exciter  l'ardeur  des  in- 
vestigateurs. 

Les  travaux  dans  la  Citam'a  de  Brileiros  et  à  Sabroso 
sont  ceux  que  l'on  a  faits'  d'une  manière  plus  méthodique 
dans  cette  partie  du  pays. 

A  la  station  de  Santa  Luzia,  où  aucune  exploration  mé- 
thodique et  consciencieuse  n'a  encore  été  entreprise,  on  a 
déjà  fait  beaucoup  de  découvertes  (PI.  2)  et  on  a  l'espoir 
d'en  faire  encore  davantage. 

L'espace  occupé  par  cette  station  est  de  960  mètres  au 
nord  du  mont  Santa  Luzia,  et  de  210  mètres  de  la  chapelle 
de  même  invocation  (PI.  2  a). 

La  rencontre  de  pierres  avec  des  dépressions  artifi- 
cielles en  forme  de  cuvette  y  est  vulgaire,  {PI.  2  B  A).  Au 
N.-N.-E.  se  trouve  Voppidum^  occupant  une  étendue  de  1400 
mètres  carrés,  contenant  douze  maisons  à  découvert  (PI.  2  B) 

'  Pfahlbauten.  in  8.'  Zurich,  i854-i856. 
V.  les  travaux  de  Mr.  F.  Martîns  Sarmento  dans  VInstituto  de 
Coïmbre.  II.  'Cîtania'du  prof.  Ém.  Hîibner,  irad.  de  J.  V.,  Porto  1879. 
II.  'Observaç5es  à  Citania  do  dr.  Emilio  Hîibner',  por  F.  Martîns  Sqr^ 
mento,  Porto,  1879,  in  4.',  avec  planches, 


-Cattijl. 


35o 

dont  les  fondements  ont  une  forme  elliptique,  rectangulaire 
ou  circulaire. 

Il  y  en  a  encore  quelques-unes  à  déterrer,  dont  les 
arêtes  des  fondements  se  montrent  d'une  manière  très  vi- 
sible à  la  surface  du  sol. 

Le  siège  de  cette  station  est  une  espèce  de  plateau  irré- 
gulier, présentant  dans  la  direction  N.-O.  une  accidentation 
plus  distincte.  Elle  est  défendue  par  une  muraille  générale 
de  deux  mètres  de  laideur,  que  Ton  aperçoit  facilement  sur 
plusieurs  points.  Le  revêtement  extérieur  des  murs  des  mai- 
sons (PI.  2  CD)  est  en  pierre  peu  lourde.  Dans  quelques- 
uns  de  ces  revêtements  la  disposition  diagonale  est  forte- 
ment accentuée  et  dénonce  un  travail  soigneux  et  des  con- 
naissances assez  avancés  dans  l'art  du  constructeur.  La 
disposition  verticale  des  fondements,  nous  porte  à  croire 
que  la  hutte  ne  devait  pas  terminer  en  forme  de  four,  ce 
qui  a  lieu  dans  quelques-unes  de  celles  de  Citania'. 

M.  Joaquim  Possidonio  Narcîso  da  Silva,  président  de 
l'Association  des  architectes  civils  et  des  archéologues  por- 
tugais et  directeur  du  Boletîm  de  Architectura  e  de  Archeo- 
logia,  a  fait  des  recherches  dans  cette  station,  dont  la  des- 
cription et  les  dessins  respectifs  se  trouvent  publiés  dans 
le  n."  4  du  dit  Boletîm,  ii  série,  tome  u,  1877. 

Quelque  temps  après,  il  s'est  agi  de  poursuivre  ces  tra- 
vaux et  on  a  tâché  d'établir  sur  des  bases  sûres  l'histoire 


'  "As  escavaçôes  do  sr.  Mariins  Sarmento  pozeram  a  dcscobcrio 
no  plateau  umas  trinta  ou  quarenta  habitaçôcs,  redondas  etn  gérai,  c 
algumas  elliplicas;  a  sua  altura  c  de  2-3  métros.  Algumas  diminuem 
para  cima  em  forma  de  cône,  em  vîmide  da  disposiçâo  reintrante  das 
camadas  de  pedra.-  Cîtanîa,  por  E.  Hubrier,  trad.  de  J.  V.  Porto,  1870. 


,ï  Google 


J.  Caloas. 


Lilb  PiTii  Rua  in  loinhj  de  Tcdio.  G 


DigitizsdbyGOOgle 


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J.  Caldas 


^ 


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35 1 

de  cette  station.  C'est  un  travail  qui  appanient  aux  temps 
historiques  et  qui,  par  conséquent,  est  étranger  au  but  de 
ce  mémoire.  Les  stations  à  Pair  libre  dans  ces  contrées, 
quelle  qu'ait  été  leur  origine  à  l'époque  de  la  découverte 
des  métaux,  furent  sans  doute  occupées  plus  tard  par  des 
tribus  de  Vettoties,  Carpetani,  Vaccaei  et  Callaici,  qui  vin- 
rent établir  leurs  camps  sur  la  panie  occidentale  de  la  Pé- 
ninsule ibérienne. 

C'est  de  l'étude  de  ces  peuples  et  de  leurs  lûtes  où  de 
leur  association  avec  les  Euscaldunac,  d'origine  asiatique, 
qu'il  paraît  naturellement  résulter  quelques  vérités  sûres 
pour  l'histoire  ethnique  de  nos  ancêtres  les  plus  anciens. 
Les  Vetlones^  Carpetani,  Vaccaei,  et  Callaid  étaient,  d'après 
Strabon,  (c.  m)  gens  insignes,  nobiles  génies  (rà  yvwfipa  t&m . . .), 
mais  dont  le  géographe  grec  n'entend  pas  devoir  s'occuper 
spécialement,  vu  leur  petit  nombre,  reliquiae  vero  ob  par- 
vitiUem  non  sunt  dignae  mentione.  C'est  un  sujet  très  im- 
portant. M.  F.  Martins  Sarmento  a  consacré  à  cette  ma- 
tière un  mémoire  intitulé:  Les  Lusitaniens^. 


'  V.  plus  loin  dans  ce  Compte  •  rendu  :  V—  Sujets  divers. 


'r^^ 


IV 
ÉPOQUE  DU  BRONZE 


DU  OUIVBE  ET  DU  BRONZE  EN  ESPAGNE 


LA  PÉRIODE  QUI  LES  A  PRÉCÉDÉS 


M.  ViLANOVA 

Je  viens  soumettre  à  votre  supérieure  illustration  ics 
rcsLihats  de  mes  études  et  de  mes  recherches  en  Espa- 
<;iic,  relativement  ù  la  première  époque  des  métaux.  Vous 
savez,  Messieurs,  beaucoup  mieux  que  moi,  combien  est 
!>énérale  Pldée,  indiquée  pour  la  première  fois  par  Niisson 
et  Morlot,  si  je  ne  me  trompe  pas,  que  l'homme  après  la 
période  néolithique,  a  commence  par  se  servir  de  Palliage 
du  cuivre  et  de  Tétain,  dans  la  fabrication  de  ses  outils  et 
de  ses  armes,  et  de  là  aussi  la  dénomination  d'âge  du  bronze 
que  tous  les  archéologues  donnent  à  cette  période.  La 
croyance  est  aussi  générale  que  le  bronze,  et  jusqu'à  un  cer- 
tain point  aussi  l'usage  de  la  pierre  polie  ont  été  introduits 
en  Europe  par  des  races  asiatiques  conquérantes  ou  com- 
merçantes. Eh  bien!  je  viens  apporter  des  matériaux  qui 
me  semblent  n'être  pas  toul-à-fait  d'accord  avec  ces  idées 


,ï  Google 


353 

généralement  reçues;  mais  pour  cela  il  faudra  vous  indi- 
quer les  résultats  des  mes  investigations  dans  mon  pays. 

D'abord  nous  avons  dans  plusieurs  localités  des  re- 
présentants de  toutes  les  périodes  préhistoriques,  depuis  le 
diluvium  de  San  Isidro  à  Madrid  même,  d'où  vient  cette 
belle  hache  amygdaloïde  de  silex  du  type  de  Saint-Acheul,  qui 
est  le  plus  ancien,  jusqu'aux  dolmens  de  Valence,  Andalou- 
sie, Estramadoure,  qui  appartiennent  à  rage  de  la  pierre 
polie,  du  cuivre,  du  bronze,  etc.  Mais  parmi  ces  localités, 
celle  qui  offre  le  plus  d'intérêt  est  celle  d'Argecilla,  province 
de  Guadalajara,  car  j'ai  trouve  des  couteaux  magnifiques 
en  silex,  avec  de  la  céramique  grossière,  et  en  même  temps 
et  dans  le  même  gisement,  des  flèches,  des  pointes  de  lance, 
et  un  grand  nombre  de  haches  polies,  avec  cette  particu- 
larité, que  quelques-unes  sont  bien  achevées,  tandis  que  d'au- 
tres ne  le  sont  pas.  J'ai  trouvé  aussi  une  autre  céramique 
plus  parfaite;  cette  station  représente  donc  un  vrai  atelier, 
dans  lequel  Thomme  séjourna  pendant  un  temps  très  long, 
représenté  par  la  fin  de  l'époque  archéolithique  ou  des  cou- 
teaux, Cl  le  commencement  de  celle  caractérisée  par  la  hache 
polie,  les  flèches  et  les  pointes  de  lance.  On  voit  par  con- 
séquent que  le  passage  de  l'une  de  ces  époques  à  l'autre  a 
été  insensible,  et  qu'il  n'y  a  pas  besoin  d'appeler  des  races 
asiatiques  pour  l'introduction  de  la  nouvelle  industrie,  qui 
est  tout-à-fait  indigène,  car  les  génécaiions  se  succédant  dans 
le  même  endroit  pendant  un  temps  très  long,  ont  su  fabriquer 
le  couteau  en  silex  et  la  hache  polie  en  même  temps  que  la  cé- 
ramique correspondante.  Il  fallait  citer  ce  fait  très  signilicatif 
pour  confirmer  ma  thèse,  car  par  le  même  procédé  nos  an- 
cêtres ont  apris  l'usage  des  métaux  sans  avoir  besoin  de  maî- 
tres, et  a  l'appui  de  cette  idée  je  peux  vous  indiquer  la  coexis- 
tence dans  la  même  station  des  haches  polies  en  diorite,  en 


^■f* 


»4 
serpentine,  fibrolithe,  etc.  et  des  haches  en  cuivre.  Voilà  ces 
spécimens,  que  j'ai  Thonncur  de  mettre  sous  vos  yeux,  en 
cunlirmation  de  la  thèse.  Cette  hache  en  diorite  à  été  trou- 
vée avec  cette  autre  en  cuivre  dans  ut\  dolmen  à  l'Olleria, 
village  de  la  province  de  Valence;  ces  autres  pièces  provien- 
nent d'Alcoy.  dans  la  province  d'Alicante,  de  l'Estramadoure 
près  de  Valencia  de  D.  Juan,  dans  un  dolmen  appelle  Ga- 
rila.  Ainsi  on  voit  sans  te  moindre  doute  qu'en  Espagne,  et 
je  crois  qu'il  est  arrivé  la  même  chose  dans  bien  d'autres 
pays,  l'homme  a  fabrique  dans  le  même  endroit  les  instru- 
ments en  métal  et  les  objets  en  pierre  polie,  dont  l'industrie 
est  vraiment  indigène,  car  on  peut  faire  h  l'appui  l'obser- 
vation que  les  haches  métalliques  ont  tout-à-fait  la  même 
forme  que  celles  qu'il  fabriquait  avec  la  pierre.  Ainsi  ces 
exemptes,  et  beaucoup  d'autres  que  j'aurais  pu  citer,  viennent 
à  l'appui  de  la  fabrication  indigène  des  premiers  instruments 
en  métal. 

Maintenant  ce  métal  n'est  pas  le  bronze,  mais  toujours 
le  cuivre,  et  le  cuivre  dans  le  commencement  martelé,  plus 
tard  fondu.  Cette  indication  se  trouve  d'abord  confirmée 
par  l'aspect  et  la  couleur  rougeâtre  caractéristique  de  ce 
métal,  et  surtout  par  l'analyse  faite  dans  le  laboratoire  de 
Saez,  Utor  et  Compagnie  à  Madrid,  rue  de  Carrelas.  Ils 
déclarent  dans  cette  lettre-ci,  que  la  hache  analysée  ne 
contient  pas  de  vestiges  d'étain,  ni  d'autre  métal  que  du 
cuivre  pur..  Et  sur  ce  sujet  je  me  rappelle  qu'en  visitant 
le  Musée  archéologique  à  Madrid  avec  quelques-uns  des 
membres  du  Congrès,  mon  ami  le  très  distingué  profes- 
seur M.  de  Quatrefages  m'engagea  à  faire  analyser  les  ha- 
ches que  nous  voyons,  et  que  je  lui  disais  être  de  cuivre 
pur,  car  d'après  lui  se  serait  rendre  un  grand  ser\ice  à  l'ar- 
chéologie   préhistorique   si   on   démontrait  par  la  chimie 


,ï  Google 


355 

l'existence  en  Europe  d'une  époque  du  cuivre,  analogue  ou 
égale  à  celle  qu'on  observe  en  Amérique.  Eh  bien  1  les  vctux 
de  cet  éminent  anthropologiste  ont  commencé  à  se  réaliser, 
et  je  m'engage  à  les  compléter  en  analj'sant  toutes  les  ha- 
ches qui  se  trouvent  dans  le  Musée  de  Madrid,  celles  de 
mes  collections  et  bien  d'autres  que  je  connais.  Au  reste 
dans  un  paj's  dans  lequel  le  cuivre  natif  abonde  considéra- 
blement, et  on  peut  citer  à  l'appui  le  grand  nombre  de  mi- 
nes en  exploitation  depuis  les  temps  les  plus  reculés,  je 
trouve  bien  plus  naturel  que  l'homme  ait  commencé  à  se 
ser\'ir  d'abord  du  métal  simple,  et  que  seulement  après  de 
longs  et  pénibles  essais  il  ait  appris  à  mêler  le  cuivre  avec 
l'étain,  dans  des  proportions  convenables  pour  obtenir  le 
bronze.  Cela  ne  veut  pas  dire.  Messieurs,  que  dans  des 
temps  bien  postérieurs  TEurope  n'ait  pas  reçu  dans  la  fa- 
brication du  bronze  l'influence  des  races  asiatiques;  ce  que 
je  voulais  soumettre  à  votre  discrétion  c'était  seulement  que 
le  cuivre  en  Espagne  a  précédé  le  bronze,  et  que  cette  bran- 
che de  l'industrie  a  été  tout-à-faii  indigène. 


M,  Chantre:  Je  n'ai  pas  de  raison  pour  refuser  aprioti 
un  âge  du  cuivre  en  Espagne;  je  serais,  au  contraire,  tout 
disposé  à  l'admettre  si  le  fait  est  démontré  scientifiquement. 

J'ai  beaucoup  étudié  cette  question  en  France  et  dans 
toutes  les  autres  parties  de  l'Europe,  dont  j'ai  visité  pres- 
que toutes  les  collections,  et  je  me  crois  en  droit  de  faire 
des  réserves  lorsque  l'on  parle  d'objets  en  cuivre  alléctant 
les  formes  de  l'âge  du  bronze. 


-'fl 


356 

La  plupart,  en  effet,  des  objet! 

comme  (iiant  en  cuivre,  sont  en  bro 
montre  les  analyses. 

Dans  presque  tous  les  pays  o 
métallurgie  un  produit  du  développ 
trie,  une  invention  indigène.  Comme  I 
par  les  hommes  di;  l'époque  néolithiq 
blabîc,  on  a  voulu  avoir  dans  chaq 
vre  faisant  transition  entre  l'âge  d 
broriiîe.  On  a  été  d'autant  plus  port 
la  région  était  plus  riche  en  mines 
est  arrivé  en  Hongrie:  or,  dans  ce  f 
d'objets  en  cuivre,  l'existence  d'un 
encore  un  fait  acquis.  Telle  a  été  la 
It  est  naturel  de  voir  surgir  cette  mi 
et  en  Portugal;  mais  ici  comme  sui 
au  nord  et  au  centre  de  l'Europe,  ( 
devront  aider  surtout  à  la  solution  i 

Partout  en  Europe  il  paraît  déi 
gie  a  commencé  par  le  bronze,  et 
Occident  est  le  fait  d'importations  o 
dant  l'époque  néolithique.  Partout, 
couvert  de  ces  objets  métalliques  di 
primitives  associés  à  des  objets  en^] 
qu'ils  sont  en  bronze. 

Des  découvertes  du  même  gen 
pagne  et  en  Portugal,  et  il  n'est  p; 
vation  viendra  prouver,  dans  un  ave 
ninsule  ibérique  n'est  pas  restée  en 
général  de  la  civilisation  dans  ces  te 

M.  Vn.ANOVA:  Je  soutiens  que 


,ï  Google 


35? 
tes  sur  une  de  ces  haches  et  que  les  résultats  se  trouvent 
à  la  disposition  des  membres  du  Congres. 

M.  Chantre:  En  présence  d'un  fait  je  n'ai  qu'a  m'in- 
cliner,  mais  il  faut  se  rappeler  qu'une  analyse  isolée  ne  per- 
met pas  d'établir  Texistence  d'un  âge  du  cuivre. 

Au  reste,  comment  a  été  faite  cette  analyse?  Sou\ent 
c'est  sur  une  petite  parcelle  de  substance  arrachée  à  l'une 
des  extrémités  de  la  hache,  qui  ne  peut  bien  être  qu'un  peu 
de  patine  ou  de  carbonate  de  cuivre,  que  sont  pris  le  plus 
souvent  les  échantillons.  Alors  il  est  naturel  que  l'analyse 
montre  du  cuivre  pur.  Pour  moi,  une  anal3-se  doit  être  faite 
sur  un  fragment  de  métal  pris  au  centre  de  la  pièce,  là  où 
il  n'y  a  pas  d'oxydation,  et  où  l'on  est  certain  dès  lors  d'avoir 
du  métal  pur  ou  un  alliage  normal. 

M.  RoRRiGUES;  J'ai  quelques  doutes  sur  la  valeur  qu'on 
prétend  tirer  de  l'analyse  minutieuse  des  petites  pièces,  le 
mélange  des  métaux  ne  s'y  trouvant  pas  partout  égal.  L'étain 
en  faible  proportion  ne  modifie  pas  les  qualités  du  cuivre 
et  a  pu  être  introduit  par  hasard. 

M.  DE  Mortillet:  L'âge  du  bronze  dépend  exclusive- 
ment des  gisements  d'étain:  on  ne  peut  faire  du  bronze  que 
là  où  il  y  a  de  l'étain.  Le  bronze  doit  être  venu  de  l'Asie. 
Les  haches  plates,  qui  sont,  souvent  en  cuivre,  il  faut  l'avouer, 
paraissent  bien  plus  récentes  que  les  haches  de  bronze  af- 
fectant d'autres  formes.  Je  ne  peux  donc  accepter  Thvpo- 
ihèse  de  M.  Vilanova. 


,ïGoO' 


'^_ 


SDR  LUS  HACHES  EN  BRONZE  TROUVÉES  EN  PORTUGAL 


M.  J.   POSSIDONIO   DA  SlLVA 


On  suppose  généralement  que  la  Péninsule  ibérique 
n'a  pas  connu  l'âge  du  bronze,  et  cette  hj-pothèse  a  sa  rai- 
son d'être,  puisque,  jusqu'à  présent,  on  n'a  trouvé  ni  en 
Espagne  ni  en  Portugal  aucun  atelier  ou  station  de  cette  in- 
dustrie. Le  très  petit  nombre  d'instruments  de  métal  dé- 
couverts dans  ces  deux  pays  fait  croire  que  l'usage  en  était 
fort  restreint;  peut-être  même  qu'il  n'y  a  pas  eu  dans  la 
Péninsule  ibérique  une  époque  de  transition  entre  l'âge  néo- 
lithique et  l'âge  du  fer,  comme  cela  est  arrivé  en  Norvège, 
où  il  semble  que  l'usage  du  bronze  n'a  pas  existé,  puisque 
dans  les  tumuîus  fouillés  on  n'a  trouvé  aucune  trace  d'ins- 
truments de  métal. 

Cependant,  il  est  bon  de  dire,  que  dans  les  dolmens 
découverts  en  Portugal  sur  le  territoire  de  la  province 
d'Alemtejo,  on  a  trouvé  quelques  haches  de  bronze  du  tj'pe  le 
plus  primitif,  fig.  S,  et  en  tout  semblables  à  celles  qu'on  a 
recueillies  en  France,  dans  le  Jura,  ainsi  qu'en  Grèce,  Ces 
instruments  auraient  peut-être  été  apportés  dans  la  Pénin- 


ly  Google 


359 

suie  par  quelque  tribu  que  vint  y  séjourner.  Mais  on  ne 
peut  pas  faire  la  même  supposition  pour  les  haches  de  bronze 
à  deux  anses,  découvertes  dans  les  provinces  de  PExtrema- 
dura,  du  Minho,  et  de  Beira  Alta.  Ces  instruments  sont 
d'un  type  essentiellement  distinct  de  tous  ceux  rencontrés 
jusqu'ici  dans  les  autres  contrées  de  l'Europe,  et  cela  don- 
nerait à  penser  que  ces  celts  seraient  le  produit  d'une  in- 
dustrie péninsulaire.  Et  en  effet,  s'ils  n'étaient  qu'une  imi- 
tation des  instruments  en  usage  chez  les  autres  populations 
préhistoriques,  comment  se  ferait-il  que  dans  les  nombreu- 
ses fouilles  faites  dans  tous  les  pays,  on  n'en  eût  pas  trouvé 
de  semblables?  Les  haches  à  deux  anses  que  possèdent  les 
musées  d'archéologie  de  l'Europe — et  elles  sont  en  très  petit 
nombre — ne  sont  pas  de  dimensions  aussi  grandes  que  les 
nôtres,  leurs  formes  ne  sont  pas  les  mêmes,  et  de  plus  elles 
n'ont  pas  le  talon  plein. 

La  hache  découverte  à  Abrigada,  dans  la  province  de 
rExtremadura,_;î^.  /,  a  la  douille  carrée,  et  deux  anneaux  sur 
le  bord  de  cette  douille;  son  tranchant  est  large  et  sa  lon- 
gueur est  de  i5  centimètres. 

Parmi  les  haches  trouvées  à  Rodriz,  dans  le  Minho, 
ûg.  3  et  4,  il  en  est  une  dont  la  douille  est  ronde  et  fort 
lai^e,  et  l'autre  dont  le  tranchant  est  très  développé,  avec  le 
talon  plein;  elles  ont  deux  anneaux  et  leur  longueur  est  de  i8 
et  24  centimètres. 

Celles  qui  ont  été  recueillies  à  Ferreira  d'Aves,  dans 
la  Beira  Alta,  sont  au  nombre  de  19.  Quelques-unes  d'entre 
elles  étaient  déjà  brisées,  d'autres  usées,  mais  toutes  avec 
deux  anses  de  suspension.  Ces  instruments  sont  les  plus 
grands  connus  jusqu'à  ce  jour,  car  ils  mesurent  26  cen- 
timètres de  longueur.  Fig.  2. 

La  forme  essentiellement  caractéristique  de  ces  instru- 


.,Ct 


C^ 


3Go 

ments  de  bronze  dans  ce  pays,  me  fait  supposer  qu'il  y  a 
eu  une  industrie  locale  de  ce  genre  en  Portugal;  sa  durée 
n'a  peut-être  pas  été  très  longue,  parce  que  Tusage  du 
fer  apporté  par  les  Romains  a  fait  abandonner  l'usage  du 
bronze,  mais  enfin  tout  porte  à  croire  qu'elle  a  existé. 

Ji  ne  m'appartient  pas  de  rechercher  les  origines  du 
bronze;  les  maftres  de  la  science  ici  présents  sont  plus  com- 
pétents que  moi  pour  résoudre  cette  question  difticile;  je 
n'ai  d'autre  but  que  d'appeler  l'attention  des  membres  du 
Congrès  sur  ce  fait  remarquable,  que  les  haches  préhisto- 
riques trouvées  dernièrement  en  Portugal  son  uniques  dans 
leur  genre.  Puisqu'on  a  découvert  sur  notre  sol  des  instru- 
ments de  bronze  d'un  type  spécial,  tout  à  fait  difl'érents  de 
ceux  qu'on  rencontre  dans  les  autres  régions,  comment 
pourrait-on  expliquer  que  l'industrie  des  haches  à  deux  anses 
ne  serait  pas  née  chez  nous?  Quoiqu'on  ait  trouvé  dans  nos 
dolmens  des  bronzes  aux  formes  primitives,  admettons  que 
des  fondeurs  nomades  aient  importé  en  Portugal  le  type 
nouveau,  ou  qu'il  ait  été  fourni  aux  populations  néolithiques 
de  la  Péninsule  par  des  voyageurs  de  cette  époque  reculée. 
Mais  alors,  comment  se  fait-il,  que  dans  les  autres  contrées 
de  l'Europe  qui  devaient  être  fréquentées  par  ces  mêmes 
nomades,  on  ne  retrouve  pas  des  haches  semblables  au  type 
dont  nous  nous  occupons? 

Il  est  donc  pius  que  probable,  que  ces  industriels  voya- 
geurs ont  amené  un  développement  de  l'industrie  du  bron- 
ze chez  nous,  et  qu'un  tjpe  spécial  est  né  de  ce  développe- 
ment. 

Quoique  les  investigations  archéologiques  soient  faites 
en  Portugal  cette  année  avec  un  peu  plus  d'activité,  que 
par  le  passé,  toutefois,  il  faut  espérer  qu'en  poursuivant  les 
fouilles  avec  persévérance  et  en  divers  endroits  du  pays,  on 


,ï  Google 


36i 

trouvera  des  instruments  de  l'âge  du  bronze  qui  pourront 
nous  éclairer  plus  nettement  sur  le  sujet  que  je  soumets  à 
la  critique  des  membres  du  Congrès.  Peut-être  arriverons- 
nous  alors  à  la  conviction  que  l'industrie  typique  des  haches 
à  deux  anses  avait  été  fondée  sur  notre  sol,  en  imitant,  il 
est  vrai,  la  forme  générale  de  ces  instruments,  mais  aussi  en 
altérant  leurs  dimensions,  en  les  garnissant  de  deux  anneaux 
et  en  leur  laissant  le  talon  plein.  Et  ces  modifications,  en  ou- 
tre d'une  forme  caractéristique,  marquent  une  provenance 
distincte  de  notre  contrée,  un  type  nouveau  adopté  sans 
doute  parce  que  son  usage  avait  été  reconnu  plus  commode. 

On  n'a  retrouvé  aucun  moule  de  pierre  ou  de  terre 
cuite  qui  puisse  prouver  l'existence  d'une  fonderie;  mais, 
tout  le  monde  sait,  que  les  moules  de  ce  genre  ne  sont  pas 
indispensables  pour  couler  le  bronze. 

Si  on  compare  les  haches  qui  ont  été  découvertes  dans 
le  nord  ou  le  centre  de  l'Europe,  et  même  celles  qu'on  a 
trouvées  dans  les  autres  régions,  avec  celles  qui  ont  été  re- 
cueillies en  Portugal,  on  voit  tout  de  suite  que  les  formes 
et  les  dimensions  des  premières  sont  différentes  de  celles 
des  secondes.  Ainsi  au  musée  de  Dublin  on  trouve  des  spé- 
cimens de  ces  instruments  à  formes  courtes,  avec  une  douille 
ronde  et  un  seul  anneau,  ayant  tout  au  plus  ne  if  centimètres 
de  longueur.  Les  haches  préhistoriques  du  musée  de  Stock- 
holm ont  a  peu  près  la  même  forme,  à  une  seule  anse,  mais 
avec  un  bourrelet  autour  de  la  douille;  leur  longueur  est  de 
dix  à  onze  centimètres. 

En  Allemagne  et  dans  le  Danemark  on  trouve  des  for- 
mes analogues  à  celles  qu'on  rencontre  en  France,  c'est-à- 
dire  avec  une  douille  ronde  un  peu  profonde  et  un  tranchant 
très  développé,  mais  toujours  avec  un  seul  anneau,  et  d'une 
longueur  qui  varie  de  i5  à  17  centimètres. 


.,Ct 


362 

Celles  du  musée  de  Genève,  qui  ont  été  découvertes 
dans  le  lac  de  Léman  et  dans  le  lac  de  Neuchâtel,  ressem- 
blent aux  haches  trouvées  dans  le  Jura,  avec  cette  légère 
différence,  que  la  douille  ronde  arrive  presque  jusqu'au  tran- 
chant; elles  n'ont  qu'une  seule  anse  et  leur  longueur  ne  dé- 
passe pas  19  centimètres. 

Dans  les  palafittes  du  lac  du  Bourget,  on  a  trouvé  des 
haches  qui  ne  sont  ni  complètement  circulaires  ni  exacte- 
ment carrées,  mais  toujours  avec  un  seul  anneau  et  d'une 
longueur  de  1 8  centimètres.  Les  musées  de  Saint-Germain- 
en-Laye  et  de  Lyon  possèdent,  chacun,  une  très  belle  colle- 
ction de  ce  genre  découverte  en  France.  Le  Musée  Britanni- 
que, à  Londres,  montre  aussi  quelques  haches  de  ce  tj'pe. 

Cependant  on  a  trouvé  en  Russie  une  seule  petite  ha- 
che à  douille  ronde,  avec  bourrelet  et  ayant  deux  anneaux; 
mais  ces  anneaux  sont  forts  petits  et  tout  à  fait  différents 
des  nôtres.  Ajoutons  de  plus  que  ce  n'est  qu'une  rencontre 
fortuite,  un  fait  isolé  qui  ne  peut  pas  servir  de  point  d'ap- 
pui pour  détruire  notre  hypothèse,  et  qu'on  n'en  peut  pas 
conclure  qu'il  y  ait  eu  en  Russie  une  industrie  du  même  genre 
que  celle  que  nous  supposons  avoir  existé  en  Portugal. 

Ce  résumé  rapide  nous  fait  apprécier  les  différences 
qui  existent  entre  les  divers  spécimens  qui  sont  les  types 
locaux  de  chaque  contrée;  c'est  ce  que  M.  Chantre  a  fort 
bien  expliqué  en  disant: 

«Que  peu  ù  peu  l'industrie  du  métal  s'implante  dans 
chaque  pays  avec  l'aide  d'ouvriers  étrangers,  et  lorsque  les 
indigènes  y  ont  été  complètement  initiés,  les  formes  primor- 
diales se  modifient,  des  types  locaux  sont  créés,  tout  se  spé- 
cialise de  plus  en  plus  dans  un  périmètre  donné,  et  on  ar- 
rive a  se  trouver  en  face  de  ces  groupes  distincts,  que  M. 
Hildebrand  a  proposé  d'appeler  des  provinces.* 


,ï  Google 


Le  même  développement  a  donc  existé  dans  la  Pénin- 
sule ibérique,  et  les  haches  qui  ont  été  découvertes  dans 
trois  provinces  du  Portugal,  sont  le  produit  local  d'une  in- 
dustrie indigène.  La  découverte  de  ces  instruments  nouveaux 
et  d'un  caractère  tout  spécial,  apporte  une  pierre  de  plus 
à  l'édifice  de  la  science  archéologique;  elle  apporte  une  cer- 
titude à  ce  fait  important,  que  l'industrie  du  bronze  avait 
subi  dans  chaque  contrée  un  développement  distinct,  en 
créant  des  instruments  d'une  forme  nouvelle,  comme  cela 
eut  lieu  en  Portugal,  et  d'un  type  particulier,  c'est-à-dire 
avec  deux  anses  et  talon  plein. 

Jusqu'à  présent  on  n'a  pas  trouvé  dans  nos  contrées 
des  haches  à  ailerons  et  à  douilles  rappelant  (es  types  an- 
ciens d'origine  italienne. 

Comme  je  l'aï  déjà  dit,  je  crois  que  l'àge  du  bronze  n'a 
pas  été  de  longue  durée  en  Portugal,  et  mon  opinion  s'ap- 
pme  non  seulement  sur  la  quantité  excessivement  restreinte 
des  instruments  trouvés  dans  ce  pays,  mais  aussi  sur  ce 
fait  connu,  que  dans  le  commencement  de  l'usage  du  bronze 
dans  les  autres  contrées,  ce  métal  servit  d'abord  de  parure. 
Toutefois,  jusqu'à  ce  jour,  on  n'a  pas  trouvé  dans  la  Pé- 
ninsule ibérique  aucun  ornement  de  bronze  à  cet  usage. 

On  peut  donc  supposer  que  l'époque  de  transition  de 
l'âge  néolithique  à  l'âge  du  fer  n'a  pas  été  d'une  grande  du- 
rée, comme  cela  est  arrivé  dans  le  nord  et  le  centre  de 
l'Europe,  parce  que  la  matière  première,  le  métal,  étant  rare 
et  difficile  à  obtenir,  l'industrie  de  la  fabrication  des  instru- 
ments de  bronze  n'eut  pas  une  grande  extension  pour  nos 
populations  préhistoriques. 

J'ai  pris  la  parole.  Messieurs,  pour  vous  mettre  au  cou- 
rant de  la  particularité  archéologique  qui  nous  a  fait  ren- 
contrer, dans  ce  pays,  des  haches  de  bronze  d'tine  forme 


lyGooWe 


366 

existent  entre  les  types  des  régions  méditerranéennes  de 
l''Espagne  et  du  midi  de  la  France.  11  résulte  des  recherches 
de  M.  Emile  Cartailhac  que  dans  cène  dernière  contrée, 
où  les  haches  plates  abondent,  on  en  a  trouvé  une  dixaine 
d'exemplaires  à  deux  anneaux.  M.  Evans  a  signalé  cette 
forme  en  Cornouailles.  On  sait  qu'elle  se  retrouve  dans  le 
nord  de  l'Asie.  Je  l'ai  rencontrée  aussi  dans  le  Caucase. 

M.  Hildebrand:  M.  da  Silva  nous  a  fait  connaître  tfois 
types  de  haches  en  bronze,  trouvés  en  Portugal.  Mais  l'ex- 
périence faite  dans  les  autres  parties  de  l'Europe  démontre 
qu'il  y  a  un  développement  des  types.  Ainsi  au  commence- 
ment des  séries  des  haches  il  faut  mettre  un  tj'pe  plat  et 
simple  comme  celui  de  l'Alemtejo.  On  a  donné  à  ce  type  des 
rebords  qui  sont  devenus  de  plus  en  plus  agrandis.  Guidés 
par  l'expérience  les  ouvriers  ont  développé  encore  d'autres 
parties  de  la  hache,  jusqu'à  ce  que  l'on  est  arrivé  au  type 
du  Minho.  Il  y  a  des  types  intermédiaires  qui  rattachent 
aux  haches  de  ce  type  celle  qui  a  un  trou  d'emmanchure. 

Il  est  donc  intéressant  de  voir  ici  trois  haches  appat- 
tenant  à  trois  différents  degrés  de  développement.  Les  deux 
dernières  supposent  de  nécessité  d'autres  types  moins  dé- 
veloppés, qui  nous  manquent  encore,  et  que  les  archéolo- 
gues portugais  et  espagnols  doivent  bientôt  se  trouver  en 
état  de  nous  montrer,  si  les  fouilles  déjà  commencées  sont 
continuées.  Dans  la  Péninsule  ibérique  l'âge  du  bronze  n'a 
pu  faire  défaut. 

M.  DE  Mortillet:  La  hache  platte  n'est  pas  la  hache 
primitive  ;  on  ne  la  retrouve  jamais  à  cette  époque.  Ces  ha- 
ches sont  généralement  en  cuivre  et  elles  appartiennent  à  la 
fin  de  l'époque  du  bronze. 


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J.  PoSSIUÛiMO  UA  SiLVA. 


PùoW  SI  fu:i:l.  de  H.  I 


D,S^f^îlSW»«"'- 


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L'AGE  DU  BKONZE  EN  ITALIE 


M,  Chantre  appelle  l'attenrion  du  Congrès  non  pas 
sur  l'existence  de  cette  première  époque  des  métaux  actuel- 
lement indiscutable  dans  rEurope  occidentale,  mais  sur  les 
caractères  avec  lesquels  elle  s'y  est  répandue  et  développée. 

Après  avoir  fait  un  rapide  exposé  des  principales  dé- 
couvertes appattenant  vraiment  à  l'âge  du  bronze  et  mon- 
tré leur  répartition  sur  une  grande  carte,  l'auteur  insiste 
sur  la  distribution  géographique  des  types  caractérisant  les 
diverses  phases  du  développement  de  cette  civilisation  en 
Italie. 

Appuyant  ses  démonstrations  par  un  grand  nombre  de 
dessins,  M.  Chantre  fait  remarquer  que  c'est  surtout  dans  la 
région  méditerranéenne  que  se  trouvent  le  plus  fréquemment, 
de  même  que  cela  a  Heu  pour  la  France,  la  plus  grande  par- 
tie des  types  primitifs,  spéciaux  aux  îles  de  la  Méditerra- 
née, à  la  Grèce,  à  l'Asie  Mineure,  et  ai  caractéristiques  de 
l'époque  de  transition  entre  l'âge  de  la  pierre  et  celui  du 
bronze. 

Puis  il  reprend: 

Les  types,  au  contraire,  que  l'on  observe  dans  la  plu- 
CR.  27 


part  des  terramares  et  dans  les  palafittes  du  lac  de  Garde, 
comme  dans  quelques  stations  françaises  ou  suisses,  dans 
lesquelles  la  civilisation  du  bronze  a  atteint  son  maximum 
de  développement,  appartiennent  à  l'époque  de  transition 
entre  t'âge  du  bronze  et  l'âge  du  fer.  Us  deviennent  de  plus 
en  plus  fréquents  dans  les  découvertes  des  régions  danu- 
biennes, lesquelles  sont  incontestablement  postérieures,  pour 
une  partie  au  moins,  à  celles  des  régions  méditerranéennes. 

On  trouve,  au  reste,  un  grand  nombre  de  ces  types 
associés  à  des  objets  caractéristiques  du  premier  âge  du  fer, 
comme,  par  exemple,  dans  la  fonderie  de  San  Francesco  à 
Bologne,  et  à  Piediluco  près  Terni. 

Les  types  primitifs  forment  donc  le  groupe  méditerra- 
néen, qui  recouvre  en  Italie  toute  la  partie  méridionale  de  ta 
Péninsule,  la  Toscane  et  le  revers  sud  des  Apennins,  et  le 
Piémont.  Les  types  secondaires,  constituant  le  groupe  da- 
nubien, s'observent  au  contraire  sur  une  partie  des  côtes  de 
PAdriatique  et  jusques  auprès  de  Rome,  puis  dans  toute  la 
région  des  terramares;  la  liaison  se  fait  au  nord  par  le  lac 
de  Garde  et  le  Tyrol. 

Les  types  primitifs,  tels  que  les  haches  plates  à  rebords 
droits  et  les  petits  poignards  à  rivet,  caractéristiques  du 
groupe  méditerranéen,  se  rencontrent  assurément  en  dehors 
des  limites  que  j'indique  sur  ma  carte  des  provinces  de  1  âge 
du  bronze  en  Europe;  mais  alors  ils  s'y  trouvent  en  petit 
nombre  et  mêlés  aux  types  secondaires  danubiens  dans  des 
conditions  qui  permettent  d'entrevoir  souvent  leur  antériorité. 
Mais  ces  formes  danubiennes,  représentées  surtout  par  les 
haches  à  ailerons  élevés  ou  à  douille,  le  rasoir,  ta  spirale, 
etc.,  sont  beaucoup  plus  rares.  11  est  bon  d'insister  aussi  sur 
ce  fait  que  la  plupart  de  ces  types  se  rencontrent  associés 
à  des  objets  caractéristiques  du  premier  âge  du  fer  en  Italie 


,ï  Google 


369 

et  même  du  Caucase,  tels  que  les  fibules  arquées,  les  re- 
présentations animales  et  les  ornements  en  spirales. 

De  la  présence  de  ces  dernières  représentations  pour- 
rait-on conclure  que  c'est  vers  le  Caucase  qu'il  faut  cher- 
cher la  principale  voie  par  où  est  arrivée  chez  nous  la  mé- 
tallurgie primitive?  Évidemment  non,  et  ceux  même  qui, 
bien  que  combattant  l'existence  de  l'âge  du  bronze  dans  l'Eu- 
rope centrale  et  méridionale,  ont  soutenu  cette  théorie,  qui 
n'est  du  reste  basée  sur  aucun  fait,  seront  obligés  d'y  re- 
noncer. 

Tout  récemment,  en  effet,  j'ai  eu  l'occasion  d'étudier 
en  Russie  les  rares  objets  de  bronze  découverts  au  Caucase 
et  pouvant  se  rapporter  à  la  première  époque  de  la  métal- 
lurgie, et  je  puis  affirmer  qu'aucun  ne  présente  le  moindre 
rapport  avec  nos  formes  occidentales. 

S'il  a  existé  des  relations  apparentes  entre  le  Caucase 
et  les  régions  méridionales  de  l'Europe  pendant  les  temps 
préhistoriques,  se  n'est  donc  pas  à  l'âge  du  bronze,  mais 
bien  à  l'âge  du  fer,  c'est-à-dire,  à  l'époque  où  s'est  dévelop- 
pée cette  civilisation  remarquable  qui  a  laissée  les  nécropo- 
les de  Villanova,  d'Esté,  etc. 

M.  MoRTiLLET  se  conforme  à  l'opinion  de  M.  Chantre. 


M.  PiGOBiNi:  Voici  les  dessins  des  objets  tirés  des  tom- 
beaux découverts  par  M.  le  professeur  G.  Peilegrinj  à  Gam- 
baloni,  près  de  Povegliano  Veronese,  province  de  Vérone.  • 

Les  objets  mêmes  sont  de  formes  et  matières  bien  dif- 
férentes. Il  y  a  des  épées  à  soie  plate,  des  couteaux,  des 
poignards  et  des  épingles  à  cheveux  en  bronze;  des  grains 
en  ambre  ;  une  scie  et  quelques  éclats  en  silex.  Les  tombeaux 

17» 


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37° 
dans  lesquels  gisait  le  mobilier  funéraire,  consistaient  en 
fosses  simplement  creusées  dans  le  gravier,  couvertes  par 
c  gravier  même. 

Ces  armes  et  ces  ornements  en  bronze,  sont  les  mêmes 
qu'on  rencontre  en  Italie  dans  les  terramares  de  l'Emilie  et 
dans  les  habitations  lacustres  du  lac  de  Garde,  et  ils  remontent, 
par  conséquent,  à  l'âge  du  bronze  de  l'Italie  septentrionale, 

La  découverte  faite  par  M.  le  professeur  Pellegrini  est 
de  la  plus  haute  importance: 

i"  Elle  nous  révèle  de  véritables  tombeaux  d'un  peuple 
qui  paraît  être  celui  des  terramares  et  des  habitations  la- 
custres susdites,  tombeaux  vainement  recherchés  jusqu'ici. 

z°  L'association  des  objets  en  ambre  et  des  silex  à  ceux 
de  bronze,  qu'on  a  constatés  dans  cette  nécropole,  con- 
firme les  conclusions  tirées  des  études  sur  les  terramares, 
c'est-à-dire  que  dans  l'Italie  septentrionale,  pendant  l'âge  du 
bronze,  on  connaissait  déjà  l'ambre,  et  on  continuait  encore 
à  fabriquer  quelque  peu  des  instruments  en  silex. 

Dans  les  terramares  de  l'Emilie,  ainsi  que  dans  les  tom- 
beaux dont  je  viens  de  parler,  on  n'a  rencontré  ni  la  fibule 
ni  te  bracelet  en  bronze,  ni  aucune  trace  ^objets  en  fer. 

M.  ViRCHOw:  Je  conseillerais  un  peu  de  patience.  Je 
maintiens  la  croyance  à  l'âge  pure  du  bronze,  malgré  Popi- 
nion  contraire  de  la  plupart  de  mes  compatriotes. 

M.  Chanire:  Je  suis  convaincu  que  partout  on  arrive- 
ra à  la  conclusion  qu'il  y  a  un  âge  de  transition  de  l'époque 
de  la  pierre  à  celle  du  bronze,  et  un  autre  âge  de  transition 
entre  l'époque  du  bronze  et  celle  du  fer. 

M.  ViRCHow;  J'ajouterai  que  l'on  a  déjà  trouvé  des 


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objets  presque  en  cuivre  pur,  et  que  te  nombre  de  ces  objets 
grandit  tous  les  jours. 

M.  Henri  Martin:  Les  anciens  poèmes  des  bardes  ir- 
landais racontent  que  l'Irlande,  longtemps  avant  l'arrivée 
des  Gaëls  scottiques,  des  héros  ossianiques,  avait  été  con- 
quise sur  de  petits  hommes  bruns,  les  Firbolgs,  par  de  grands 
hommes  blonds,  aux  yeux  bleus,  poètes,  magiciens  et  for- 
gerons, des  druides  primitifs  appelés  ia  race  des  dieux  de 
Danann.  Les  bardes  rapportent  que  les  combattants  avaient, 
de  part  et  d'autre,  des  armes  en  bronze;  mais  les  épées  des 
Firbolgs  étaient  larges,  courtes  et  mal  affilées,  tandis  que 
celles  des  Dananniens  étaient  longues,  fines  et  aiguës.  Or 
on  retrouve  précisément  ces  deux  espèces  d'armes  dans  le 
musée  de  ['Irish  Royal  Academy  parmi  les  découvertes  fai- 
tes dans  les  bogs  ou  marais  et  ailleurs  en  Irlande.  La  tra- 
dition qui  s'était  perpétuée  jusqu'au  moyen-âge  est  donc 
confirmée  par  l'archéologie. 


V 
SUJETS  DIVERS 


LES  mSTRUUENTS  SN  PIERRE  A  L'iËPOQUE  DES  UÉTAUX 


M.  LE  Baron  J.  de  Baïe 

Lorsque  les  découvertes  relatives  aux  époques  préhis- 
toriques furent  parfaitement  étudiées,  les  archéologues  de 
tous  les  pays,  se  prononcèrent  avec  l'autorité  d'une  science 
éprouvée,  reconnue,  et  affirmèrent  l'existence  des  âges  de  la 
pierre.  Les  gisements  les  plus  authentiques  servirent  à  ca- 
ractériser les  diverses  époques;  les  instruments  isolés,  dis- 
séminés furent  naturellement  attribués  à  leurs  époques  res- 
pectives sans  égard  pour  les  milieux  dans  lesquels  ils  avaient 
été  rencontrés.  Ils  étaient  restitués  à  l'industrie  dont  ils  res- 
sortissaient,  comme  on  rend  à  la  période  romaine  les  mé- 
dailles des  Empereurs  trouvées  dans  la  monnaie  courante 
des  nations  modernes.  En  effet,  ces  instruments  dispersés 
partout  ne  réunissaient  aucune  des  conditions  nécessaires 
pour  les  rattacher  à  la  civilisation  avec  laquelle  ils  se  trou- 
vaient en  contact.  Leur  présence  s'expliquait  aisément  par 
le  concours  de  ces  milliers  de  circonstances  qui  avaient  dû 
nécessairement  se  produire  dans  le  cour  des  siècles. 


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i2l 

L'industrie  de  la  pierre  imposée  par  la  triomphante  dé- 
monstration des  faits,  admise  par  les  savants,  chaque  Jour 
enrichie  par  de  nouvelles  découvertes,  planait  dans  une  ré- 
gion calme  qui  ne  connaissait  point  de  discussions  sur  les 
points  essentiels.  Les  époques  de  la  pierre  partageaient  le 
temps  comme  les  autres  périodes  archéologiques  plus  an- 
ciennement adoptées  et  reconnaissaient  des  limites  détermi- 
nées généralement  admises.  Effectivement,  l'industrie  lithi- 
que  termine  ces  évolutions  à  Tapparition  du  bronze  et  les 
monuments  de  la  transition,  nous  présentent  un  mélange  où 
la  pierre  et  le  bronze  sont  associés  et  ne  laissent  plus  à  l'élé- 
ment néolithique  qu'un  rôle  amoindri  et  sans  importance. 
Alors,  non  seulement  le  travail  de  la  pierre  ne  fait  plus  de 
progrès  comme  dans  la  période  néolithique,  mais  il  dispa- 
raît sensiblement.  L'industrie  de  la  pierre  est  simplement 
alors  une  réminiscence  et  dès  le  premier  âge  du  fer,  dans 
les  splendeurs  de  l'industrie  gauloise,  les  centres  habités,  les 
sépultures  si  abondantes  en  produits  contemporains  ignorent 
la  pierre  comme  matière  utilisée  par  le  travail  humain.  Le 
métal  est  exclusivement  employé.  Les  instruments  en  silex 
sont  souvent  alors  comme  des  témoins  muets,  inconscients, 
d'autres  fois  comme  des  objets  de  curiosité,  le  plus  ordinai- 
rement ils  assistent  avec  passivité  aux  développements  des 
industries  des  temps  historiques.  Ils  apparaissent  comme  le 
résultat  fortuit  de  l'action  capricieuse  des  forces  multiples 
qui  s'exercent  dans  leur  voisinage. 

Les  âges  de  la  pierre  étaient  séparés  des  autres  épo- 
ques par  les  faits,  par  les  enseignements  de  ta  science  ar- 
chéologique, puissamment  fortifiée  par  le  double  concours 
de  la  géologie  et  de  la  paléontologie. 

Cependant,  dans  ces  derniers  temps,  en  1874,  un  ar- 
chéologue avança  qu'à  une  époque  relativement  récente. 


jogle 


374 
c'est-à-dire  à  l'époque  mérovingienne,  au  5*""  siècle  on  devait 
connaître  et  pratiquer  encore  l'art  de  laitier  le  silex  *.  L'in- 
dustrie de  la  pierre  aurait  pénétré  parmi  les  populations 
franques,  sans  laisser  toutefois  la  moindre  trace  de  ces  pas 
sur  la  route  qu'elle  avait  parcourue,  pour  arriver  jusqu'à 
elles.  Voici  à  quelle  occasion  M.  MiJlescamps  insinua  d'abord 
devant  la  Société  d'Anthropologie  de  Paris,  que  la  pratique 
de  la  taille  du  silex  était  encore  usitée  sur  certains  points 
de  la  Gaule  à  l'époque  mérovingienne. 

M.  Frédéric  Moreau  entreprit  en  1873  les  fouilles  si  fé- 
condes de  Caraoda,  et  il  continua  avec  un  rare  succès  ses  per- 
sévérantes recherches  dans  la  contrée  voisine.  Les  travaux 
qui  avaient  primitivement  pour  objet  des  sépultures  gauloi- 
ses, romaines  et  franques  réunies  dans  un  même  champ, 
amenèrent  au  jour  une  quantité  de  silex  ouvrés,  de  lames 
et  d'éclats  qui  furent  soigneusement  recueillis. 

Le  zélé  explorateur  ne  préconisa  aucune  interprétation. 
Il  s'abstint  de  tout  jugement  personnel.  Il  se  bornait  à  con- 
server les  fruits  précieux  de  ses  découvertes  pour  les  étu- 
des, en  attendant  que  la  science  bien  renseignée  prononçât 
son  verdict. 

Cependant  les  intéressantes  découvertes  de  Caranda  at- 
tiraient l'attention  des  archéologues.  M.  Millescamps,  dans 
la  séance  du  18  juin  1874,  entretint  la  Société  d'Anthropo- 
logie de  Paris  de  la  présence  des  silex  dans  les  sépultures 
franques  de!  Caranda.  Le  nombre  des  pierres  travaillées 
était  considérable.  La  quantité  de  silex  paraît  néanmoins 
avoir  été  exagérée  dans  la  première  mention.  L'auteur  se 
résuma  ainsi  dans  le  principe:  tLa  seule  conclusion  à  tirer 


'Millescamps:  Le  cimetière  de  Caranda.  Bul.  de  la  Soc.  d'Anthropo- 
logie de  Paris,  1874,  P-  Si3. 


,ï  Google 


M 

■est  que  ces  silex  ont  été  jetés  ou  pour  parler  plus  exacte- 
ment, semés  inientionellement  dans  les  tombes  *.» 

Puis,  tout  en  paraissant  reserver  pour  l'avenir  les  conclu- 
sions pratiques,  l'auteur  de  la  communication  concluait  que 
l'examen  du  contenu  des  tombes  de  Caranda  était  de  n:,- 
ture  à  faire  descendre  jusqu'au  mérovingiens,  c'est-à-dire 
plus  bas  qu'on  ne  l'admet  généralement,  l'époque  de  la  co- 
existence de  l'usage  des  instruments  de  pierre  avec  ceux  de 
bronze  et  de  fer.  Puis  pour  préciser,  deux  points  principaux 
furent  signalés  à  l'attention  des  archéologues:  i"  Le  cara- 
ctère votif  des  silex  intentionellcment  répandus  dans  les  tom- 
bes. 2"  La  pratique  de  la  taille  du  silex  encore  usitée  sur 
certains  points  de  le  Gaule  à  l'époque  mérovingienne.  Cette 
seconde  proposition  n'était  avancée  que  sous  la  garde  de 
nombreuses  réserves. 

Dans  une  séance  suivante,  tenue  le  4  février  1873,  M. 
de  Mortillet  combattit  les  propositions  émises  précédem- 
ment. sNotre  collègue  M.  Millescamps,  dit  il,  le  premier  qui 
vous  a  signalé  ce  fait  est  disposé  à  en  conclure  qu'à  l'épo- 
que franque,  qu'a  l'époque  mérovingienne  on  taillait  encore 
le  silex;  je  ne  suis  pas  du  tout  de  son  avis.*  Cette  asser- 
tion était  motivée  par  des  raisons  qui  conservent  encore  au- 
jourd'hui toutes  leurs  forces  démonstratives. 

A  peu  près  vers  la  même  époque,  le  10  février  1875, 
M.  Quicherat,  interprète  de  M.  Frédéric  Moreau,  présenta 
à  la  Société  des  Antiquaires  de  France  des  instruments  en 
silex  provenant  de  Caranda.  J'assistais  à  la  séance  et  je  fis 
mes  observations  dans  le  but  d'établir  que  les  découvertes 
de  Caranda  n'autorisaient  nullement  à  nier  l'existence  de 
l'époque  où  l'homme  se  servait  exclusivement  de  pierre.Les 

'Bul.  de  la  Soc.  d'Anthrop.  de  Paris,  1874,  pag.  Su. 


by  Google 


376 

motifs  de  mon  assertion  ont  été  consignés  dans  le  Bulletin 
de  la  Société  des  Antiquaires  et  n'ont  point  été  repoussés. 

Bientôt,  le  4  mars  1 875,  M.  Millescamps  revint  à  la  char- 
ge pour  atténuer  les  objections  présentées  par  M.  de  Mortil- 
let;  sa  conclusion  identique  à  celle  de  sa  précédente  commu- 
nication a  été  formulée  dans  les  termes  suivants:  f  aujourd'hui 
comme  alors,  je  pense  que  les  silex  taillés  recueillis  dans 
les  cimetières  mérovingiens  autorisent  à  supposer  que  l'usa- 
ge et  la  taille  des  instruments  de  pierre  ont  persisté  en 
Gaule  tout  au  moins  pendant  les  premiers  siècles  qui  ont 
suivi  l'invasion  des  Francs.» 

La  question  s'accentuait  de  plus  en  plus,  en  présence 
des  difficultés.  Le  sujet  ne  manquait  pas  d'intérêt.  Nous  pos- 
sédions de  nombreux  éléments  de  solution  puisés  dans  les 
stations  néolithiques  que  nous  avions  explorées  et  dans  les 
nécropoles  franques  que  nous  avions  découvertes;  il  nous 
parut  utile  de  présenter  aux  réunions  des  sociétés  savantes 
de  la  Sorbonne  un  mémoire  ayant  pour  titre: 

Les  instruments  en  silex  mélangés  aux  produits  de  l'in- 
dustrie franque. 

Le  mémoire  donna  lieu  à  de  sérieux  débats  et  les  opi- 
nions restèrent  partagées;  le  partage  était  toutefois  très  iné- 
gal. Les  archéologues  étrangers  à  l'étude  des  époques  pré- 
historiques, accueillirent  surtout  avec  une  faveur  particulière 
l'idée  de  prolonger  la  durée  de  l'industrie  de  la  pierre  jus- 
qu'à l'invasion  des  Francs. 

Plus  récemment,  dans  la  séance  de  la  Société  d'Anthro- 
pologie de  Paris,  tenue  le  1 7  décembre  1 879,  M-  Millescamps 
ramena  ta  question  au  sujet  de  deux  silex  trouvés  à  Hermès 
(Oise)  dans  une  sépulture  mérovingienne.  Ces  deux  silex  lui 
parurent  dignes  d'être  remarqués  comme  coopérant  à  la  mê- 
me démonstration  que  les  vingt  mille  silex  préconisés  en 


,ï  Google 


iZL 

1874.  Les  conjectures  dont  ces  silex  furent  le  prétexte,  se 
résument  principalement  dans  les  lignes  suivantes;  taujour- 
d'hui  plus  que  jamais  nous  pensons  que  les  instruments  en 
silex  étaient  encore  en  usage  à  l'époque  mérovingienne  et 
que,  se  servant  de  la  pierre,  les  Francs  savaient  la  tailler  et 
l'approprier  à  leurs  besoins.»  Malgré  les  atténuations  qui 
suivaient,  c'est  là  le  dernier  jugement  formulé  par  M.  Mil- 
lescamps. 

Des  constatations  nombreuses  faites  dans  les  hypogées 
de  la  pierre  polie  et  dans  les  nécropoles  franques  ne  per- 
mettent pas  de  partager  l'opinion  qui  reconnaît  l'existence 
et  la  pratique  de  l'industrie  de  ia  pierre  à  l'époque  fran- 
que. 

Nous  avons  saisi  l'occasion  présentée  par  le  Congrès 
pour  l'avancement  des  sciences  tenu  dernièrement  à  Reims, 
pour  parler  de  l'existence  indépendante  et  de  la  durée  de 
l'industrie  néolithique  proprement  dite.  Nos  conclusions  li- 
mitaient, selon  les  plus  solides  preuves,  l'âge  de  la  pierre 
par  l'industrie  du  bronze.  Nos  propositions  ont  été  applau- 
dies. Néanmoins,  il  nous  a  paru  nécessaire  de  porter  la  ques- 
tion devant  notre  Congrès  International,  car  jusqu'à  ce  jour 
elle  n'a  pas  eu  de  retentissement  devant  ces  grandes  assi- 
ses de  l'archéologie  préhistorique.  Nous  avons  besoin  d'une 
décision  puissamment  autorisée.  La  marche  des  études  est 
entravée  par  les  assertions  insuffisamment  établies  par  les 
partisans  de  la  prolongation  de  l'industrie  néolithique  dans 
les  temps  modernes.  Les  conséquences  logiques  de  l'existen- 
ce des  âges  de  ia  pierre  sont  atténuées  ou  suspendues,  la  vul- 
garisation des  connaissances  préhistoriques  est  sérieusement 
empêchée  et  certainement  ajournée.  En  un  mot,  le  résultat 
scientifique  n'est  pas  atteint  parmi  les  masses.  Il  s'agit  donc 
de  conserver  par  l'influence  d'une  science  solide  et  loyale, 


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M 

le  terrain  laborieusement  conquis  et  d'arrêter  un  mouvement 
rétrograde  peu  autorisd. 

Les  silex  travaillés,  retaillés,  ont  été  trouvés  dans  quel- 
ques nécropoles  franques  du  même  groupe,  à  Caranda,  à  Sa- 
blonnière,  à  Sainte  Restitue  etc.  ■ . .  autant  de  localités  située  s 
dans  le  même  rayon.  La  moyenne  des  silex,  est  huit  par  sé- 
pulture. Leur  présence  est  un  fait  patent  qui  n'admet  pas 
de  discussion.  Mais  ces  silex  mélangés  à  des  instruments  en 
fer  ont-ils  une  origine  franque  comme  les  tombes  qui  les  ren- 
ferment dans  leur  périmètre? 

Dans  le  nombre  des  silex  rétaillés  de  Caranda,  il  en  est 
qui  proviennent  d'une  allée-couverte  où  ils  accompagnaient 
des  ossements  humains.  Les  objets  funéraires  étaient  exclu- 
sivement en  silex.  Il  est  évident  qu'ils  appartiennent  à  l'in- 
dustrie néolithique.  Une  autre  catégorie  considérable  contient 
un  nombre  très  grand  de  silex  d'un  travail  grossier.  Les  al- 
térations du  silex,  les  marques  d'oxyde  de  fer,  les  cryptoga- 
mes adhérents  à  leurs  surfaces  révèlent  un  long  stationne- 
ment sur  la  terre.  Ces  objets  qui  du  reste  ne  sauraient  cons- 
tituer une  industrie,  ressemblent  aux  instruments  des  âges 
de  la  pierre  qui  ont  été  longtemps  exposés  à  l'influence  du 
temps  sur  la  surface  du  sol.  Il  n'y  a  point  de  raison  pour 
les  considérer  comme  fabriqués  à  l'époque  franque,  mais  il 
faut  admettre  qu'ils  ont  été  ramassés  alors.  Ces  lames  im- 
parfaites, brisées,  ces  éclats  grossièrement  ébauchés  sont 
évidemment  les  restes  abandonnés  dans  un  atelier  de  l'âge 
de  la  pierre.  L'admission  d'un  atelier  devient  une  nécessité 
lorsqu'on  examine  la  multitude  des  éclats,  des  objets  impar- 
faits, des  nucléus  et  des  percuteurs.  Les  ateliers  reconnus  ne 
se  caractérisent  pas  autrement. 

Une  troisième  catégorie  se  compose  d'objets  soigneu- 
sement travaillés.  En  les  comparant  avec  l'outillage  néoli- 


,ï  Google 


i79. 
thique,  la  ressemblance  est  très  frappante.  Nous  donnon 
ici  le  dessin  d'une  flèche  du  dolmen  de  Caranda,  pi.  i-,Jîg- 
P,  en  parallèle  avec  une  flèche  provenant  du  cimetière  franc 
de  Sablonnière.  On  remarque  les  mêmes  formes,  l'aspect  est 
identique,  pi.  i^fig.  il.  Personne  n'a  songé  à  contester  l'ori- 
gine préhistorique  du  dolmen  de  Caranda.  Les  flèches  du 
cimetière  franc  sont  l'œuvre  du  peuple  qui  a  construit  l'allée 
couverte.  Comment  supposer  qu'une  industrie  pratiquée  par 
un  peuple  complètement  étranger  aux  tribus  néolithiques 
aurait  pu  réussir  des  formes  si  ressemblantes  et  adopter  des 
instruments  tellement  disparates  dans  son  industrie  propre? 
Ce  n'est  pas  seulement  à  Caranda  que  les  flèches  trouvées 
dans  les  sépultures  franques  affectent  une  grande  ressem- 
blance avec  les  mêmes  instruments  remontant  à  l'époque  de 
la  pierre  polie.  Dans  une  nécropole  franque  située  à  Oyes, 
nous  avons  visité  deux  mille  tombes  et  nous  y  avons  trouvé 
une  seule  flèche,  pi.  i-,fig.  /,  dont  le  type  est  le  même  que 
celui  de  l'atelier  de  Vieille-Andecy,  pi.  \tjig.  2,  situé  envi- 
ron a  quatre  kilomètres.  Ce  ne  sont  pas  seulement  les  flè- 
ches provenant  des  tombes  mérovingiennes,  qui  offrent  des 
traits  de  ressemblance  avec  les  mêmes  projectiles  rencon  ■ 
très  dans  les  stations  néolithiques.  Nous  avons  un  grattoir 
discoïdal  trouvé  a  Oyes  (Marne)  dans  une  tombe  franque, 
pi.  I,  Jig,  (f,  il  présente  la  plus  grande  similitude  avec  un 
pareil  instrument  de  même  nom  trouvé  dans  l'atelier  de  la 
Vieille-Andecy.  {PI.  i,Jig.  10).  Ces  instruments  pourvus  de 
nombreuses  retailles  dépendent  certainement  de  la  même 
industrie. 

Comment  expliquer  la  présence  des  instruments  en  pier- 
re dans  les  tombes  franques?  Pour  les  objets  grossiers,  pour 
les  ébauches,  et  les  instruments  brisés,  il  n'y  a  là  qu'un  pur 
accident.  Dès  les  premiers  moments  de  la  découverte  de  Ca- 


,ï  Google 


38o 

randa,  M.  Pabbé  Bourgeois,  dans  un  entretien  particulier, 
me  déclara  que  la  présence  des  silex  était  accidentelle,  et 
il  ajoutait  avec  ce  calme  éclairé  qui  le  distinguait:  tJe  connais 
certaines  localités  dans  les  environs  de  Pont-Levoy  où  il 
serait  impossible  d'ouvrir  une  fosse  et  de  la  refermer  sans 
enfouir  un  nombre  plus  considérable  de  silex.»  M.  l'abbé 
Bourgeois,  avant  que  la  question  ait  atteint  l'importance 
qu'elle  revêt  aujourd'hui,  n'hésitait  pas  à  considérer  les  si- 
lex dont  il  est  question  comme  de  provenance  néolithique. 
Plusieurs  d'entre  vous  ont  visité  l'atelier  de  Spiennes, 
lors  du  Congrès  de  Bruxelles  en  1872.  La  jonchée  de  silex 
plus  ou  moins  travaillés  qu'ils  ont  foulé  aux  pieds,  permet- 
tait-elle de  pratiquer  la  moindre  excavation  sans  y  précipi- 
ter une  quantité  énorme  de  ces  silex?  La  présence  de  ces 
pierres  est  donc  accidentelle.  On  ne  voit  pas  du  reste  pour- 
quoi on  aurait  déposé  des  objets  ébauchés,  informes  dans 
une  tombe.  Souvent  les  silex  portent  des  traces  d'oxyde  de 
fer  qui  proviennent  du  passage  des  instruments  aratoires. 
Les  taches  ferrugineuses  aitribuables  au  contact  des  objets 
en  fer  des  tombes  sont  faciles  à  distinguer,  elles  s'étendent 
et  ne  laissent  pas  les  marques  d'érosion  dues  à  un  frotte- 
ment énergique.  La  disposition  des  silex  dans  les  tombes 
aurait  été  plus  méthodique  si  elle  avait  été  intentionnelle. 
Le  désordre  des  objets  en  silex  s'explique  mal  avec  les  po- 
sitions régulières,  fixes,  habituelles  aux  objets  francs.  Pour- 
quoi ces  dispositions  disparates?  Peut-on  les  attribuer  à  la 
même  main?  En  examinant  une  tombe  franque  à  Fèrebrian- 
ges  (Marne)  nous  avons  remarqué  un  grattoir  sis  entre  le 
squelette  et  le  niveau  du  sol  mais  sans  rapport  avec  le 
corps.  Il  était  là  accidentellement,  car  le  sol  dans  la  con- 
trée recèle  des  instruments  néolithiques.  Les  silex  qui  avaient 
un  emploi  à  l'époque  franque  occupaient  une  place  en  con- 


,ï  Google 


38i 

tact  avec  le  corps  :  témoin  le  briquet,  provenant  de  ta  né- 
cropole franque  d'Oyes.  Le  briquet  n'était  cependant  pas 
même  un  écho  fidèle  de  l'industrie  de  la  pierre. 

Au  contraire,  les  silex  sont,  pour  nous  servir  de  l'ex- 
pression même  des  partisans  de  l'industrie  de  la  pierre  à 
l'époque  franque,  jetés  ou  pour  parler  plus  exactement  se- 
més intentionnellement  dans  les  tombes'.  Ce  désordre  sera 
difficilement  admis  comme  un  résultat  prévu  et  intention- 
nel. Nous  l'avons  déjà  insinué,  il  n'y  avait  pas  de  raisons 
pour  déposer  des  objets  incomplets,  à  peine  ébauchés. 

Hâtons-nous  maintenant  de  parler  de  la  catégorie  des 
objets  soigneusement  retaillés  qui  provoquent  l'attention  par 
la  perfection  du  travail.  Ces  instruments  en  pierre  ont  été 
probablement  déposés  volontairement  et  on  peut  leur  re- 
connaître un  caractère  votif.  Les  remarques  qui  ont  été  fai- 
tes par  tous  les  archéologues  dans  les  contrées  où  les  âges 
de  la  pierre  ont  été  retrouvés,  établissent  que  les  silex  ou- 
vrés ont  été  l'objet  d'une  grande  attention  et  de  croyances 
superstitieuses.-  Les  Francs  partageaient  ces  idées  et  attri- 
buaient ainsi  à  ces  pierres  mystérieuses  un  grand  rôle  dans 
leurs  habitudes  et  le  leur  conservaient  jusque  dans  la  tombe. 
M.  de  Mortillet  c'est  ainsi  prononcé  sur  cène  question:  «Les 
silex  enfouis  dans  les  tombes  mérovingiennes  de  Caranda, 
ne  prouvent  donc  qu'une  chose,  c'est  que  les  Francs  atta- 
chaient une  idée  superstitieuse  aux  silex  taillés  de  l'époque 
Robenhausienne'  > 

Jetons  maintenant  un  coup  d'ceil  sur  les  raisons  invo- 
quées pour  considérer  les  silex  comme  fabriqués  à  l'époque 
franque.  La  rareté  des  monuments  mégalithiques  n'explique- 

'  Bul.  Soc.  d'Anthrop.  de  Paris,  i874,  p.  5i2. 

'  Bul.  Soc.  d'Anthrop.  de  Paris,  séance  du  4  février,  i875. 


382 

rait  pas  la  grande  quantité  de  silex.  Mais  combien  de  mo- 
numents de  cette  époque  ont  disparu  dans  le  cours  du  temps! 
Cette  absence,  cette  preuve  négative  sont  absolument  sans 
valeur.  La  grande  quantité  de  silex  provoque  l'idée  de  les 
considérer  comme  de  fabrication  contemporaine  des  tombes. 
On  indique  en  etfet  que  le  nombre  est  de  vingt  à  trente  par 
tombe*.  M.  Moreau  dit:  «La  moyenne  est  de  huit  par  sé- 
pulture'.» La  raison  du  nombre  est  donc  singulièrement  at- 
ténuée. La  difficulté  plus  apparente  que  réelle  d'expliquer 
l'origine  des  silex  n'autorise  pas  à  les  considérer  comme  des 
produits  de  l'industrie  franque. 

Les  motifs  les  plus  sérieux  exigent  que  les  instruments 
en  silex  restent  attribués  aux  âges  de  la  pierre.  Après  la 
vulgarisation  du  fer  le  rôle  de  l'instrument  en  silex  n'existe 
plus.  Dans  cet  outillage  si  varié  qui  se  trouvait  à  Caranda 
il  est  difficile  de  donner  un  emploi  utile,  avantageux,  mé- 
thodique aux  silex-  Ils  n'avaient  plus  leur  place  naturelle, 
normale  dans  l'outillage  métallique.  Les  mains  accoutumées 
à  manier  les  lames  de  formes  sî  multipliées  de  l'époque  fran- 
que auraient  été  fon  embarassées  pour  manier  utilement  ie 
silex.  Comment  se  fait-il  de  plus  que  les  silex  soient  si  ra- 
res dans  d'autres  nécropoles  mérovingiennes? 

Si  l'industrie  de  la  pierre  avait  encore  été  en  vigueur  à 
l'époque  franque,  nous  la  retrouverions  partout  et  jusqu'à 
présent  on  ne  cite  que  le  groupe  de  Caranda,  et  la  nécro- 
pole du  mont  de  Hermès  qui  a  donné  un  grattoir  et  une 
lame  en  silex.  II  faut  reconnaître  que  deux  silex  trouvés  dans 
une  vaste  nécropole  ne  revêtent  pas  une  autorité  démons- 
trative imposante. 


'  Bull.  Soc.  d'Anthrop.  de  Paris,  séance  du  i8  juin  1874. 
'  tCoUcction  Caranda».  Liigende  de  la  PI.  21. 


,ï  Google 


383 

Enfin,  les  rares  stations  mérovingiennes  de  la  France 
qui  contiennent  des  silex  ne  nous  paraissent  pas  fournir  le 
prétexte  de  prolonger  la  durée  de  l'industrie  de  la  pierre 
jusqu'à  l'époque  franque.  En  admettant  cette  conclusion  en 
effet,  il  résulterait  que  Page  de  la  pierre  aurait  duré  plus 
longtemps  en  France  qu'en  Scandinavie.  Cependant,  loin  d'at- 
teindre cette  perfection  qu'elle  revêt  dans  les  pays  Scandi- 
naves, elle  aurait  conservé  tous  les  caractères  de  l'industrie 
néolithique  telle  qu'elle  apparaît  dans  les  stations  les  plus 
authentiques  de  la  pierre  polie.  Pourquoi  ce  stationnement? 
L'art  de  tailler  le  silex  au  lieu  de  progresser  aurait  perdu 
avec  le  temps  et  la  pratique.  (PI.  ii,  fig.  i  à  g).  Les  autres 
contrées  de  l'Europe  où  les  recherches  archéologiques  sont 
depuis  longtemps  en  si  grand  honneur,  ont-elles  trouvé  des 
traces  de  l'industrie  de  la  pierre  dans  des  temps  aussi  rap- 
prochés? Les  pays  qui  ont  été  traversés  par  les  populations 
qui  envahissaient  la  Gaule  retrouvent-ils  les  silex  associés 
aux  restes  de  ces  peuples  en  migration,  venus  du  nord?  Si 
des  observations  de  cette  nature  ont  été  faites,  les  archéo- 
logues ont-ils  considéré  ce  mélange  des  silex  avec  les  mé- 
taux comme  un  motif  de  prolonger  la  durée  de  l'industrie 
de  la  pierre?  La  question  est  digne  de  l'attention  du  Con- 
grès, car  il  n'est  pas  possible  que  l'âge  de  la  pierre  ait  pu 
se  prolonger  exceptionnellement  en  France.  La  dominatiou 
romaine  avait  opéré  dans  l'industrie  une  révolution  qui  ne 
laissait  plus  de  place  au  travail  si  rudimenlaire  de  la  pierre. 
D'un  autre  côté,  il  est  peu  présumable  que  des  populations 
sorties  d'un  pays  où  le  bronze  était  en  usage  et  parfaite- 
ment armées  de  fer  aient  importé  l'industrie  de  la  pierre. 
Dans  cette  hypothèse  au  moins  leur  industrie  aurait  revêtu 
la  nuance  de  perfection  qui  la  caractérise  dans  la  Scandi- 
navie. Dans  la  solution  de  la  question  qui  nous  occupe, 


,.^„.. 


l'élément  fourni  par  un  groupe  de  sépultures  franques  sem- 
ble exclusivement  appelé  à  trancher  la  discussion.  Cepen- 
dant, pour  prononcer  avec  les  garanties  nécessaires  l'iden- 
tité de  l'industrie  de  la  pierre  à  l'époque  franque  et  à  l'épo- 
que préhistorique,  il  est  nécessaire  de  faire  intervenir  les  élé- 
ments qui  se  trouvent  réunis  dans  les  stations  les  mieux 
étudiées  et  les  plus  authentiques.  Cette  partie  du  travail  a 
été  négligée.  La  confrontation  a  été  omise. 

Il  faut  reconnaître  que  l'attention  qui  a  été  accordée  à 
la  supposition  que  l'industrie  de  la  pierre  s'exerçait  encore 
à  l'époque  franque,  doit  particulièrement  son  succès  à  l'idée 
de  diminuer  l'ancienneté  de  l'homme.  Le  moyen  est  peu 
propre  à  atteindre  le  but  désiré,  car  il  n'est  pas  capable 
d'amoindrir  la  signification  et  la  valeur  démonstrative  des 
stations,  des  gisements  où  l'âge  de  la  pierre  s'afiirme  dans 
toute  sa  pureté. 

M.  Mortillet:  La  présence  des  silex  taillés  dans  les 
tombes  mérovingiennes  est  une  affaire  de  distribution  géo- 
graphique. On  ne  trouve  des  silex  taillés  dans  ces  conditions 
que  dans  les  pays  où  il  y  en  avait  auparavant.  Il  en  est  de 
même  des  marbres  romains,  qui  se  retrouvent  dans  des 
tombes  postérieures.  C'est  toujours  l'amour  du  merveilleux, 
de  l'amulette.  Dans  le  livre  que  M.  Cartaîllac  a  publié  il  y 
a  trois  ans,  ces  faits  et  bien  d'autres  se  trouvent  méthodi- 
quement discutés. 


,ï  Google 


EXPLICATION  DE  LA  FLANCHE  I 


ig.  1.  Flèche  en  silex  provenant  du  ciroetiâre  franc  d'Oyes,  (Marne). 
3  Flèche  en  ûlex  de  l'atelier  néolithique  de  la  Vieille- And ecy, 

(Marne). 

3.  Flèche  en  silex  du  cimetière  franc  de  Joches  (Marne). 

4.  Flèche  en  silex  de  l'atelier  néolithique  de  la  Vieille -Andecy, 

(Marne). 

5.  Silex  travaillé  des  sépultures  franques  de  Caranda,  (Aisne). 

6.  Grattoir  des  sépulrures  franques  de  Caranda,  (Aisne). 

7    Silex  travaillé  des  sépultures  banques  de  Caranda,  (Aisne). 

8.  Grattoir  du  cimetière  franc  d'Oyes,  (Marne). 
.  9.  Flèche  en  silex  du  dolmen  de  Caranda,  (Aisne). 
10.  Grattoir  de  l'aielier  de  la  Vieille-Andecy. 
■  t.  Flèche  en  silex  des  sépultures  franques  de  Sablonnière,  (Aisne). 


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EXFUGATION  SE  lA  FLANCHE  H 


1.  Silex  travaillés  des  sépuliures  franques  de  Caranda,  (Atsn«}. 

2.  Silex  iravaiUés — (même  provenance). 

3.  Silex  travaiUés^(même  provenance). 

4.  Flèche  en  silex — (même  provenance). 

5.  Flèche  en  silex— (même  provenance). 
(y.  Flèche  en  silex— (même  provenance). 

7.  Lame  en  silex— (même  provenance). 

8.  Pointe  en  silex — (même  provenance). 

9.  Lame  en  silex — (même  provenance). 


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B"  J.  DE  Baïe. 


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L  Couctiic  Hth.  d'après  des  dusiiit  de  Vauteut. 


iùh  de  I,  Leipald.  lialonne. 


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B""  J.  OK  Uaïe. 


l.  Cmcsùo  lui,  d'après  dt^  deisios  is  I  iMe 


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SDR  DES  SILEX  TAILLES  ET  EHUANCHÉS 
DE  L'ÉPOQUE  MÉROVINGIENNE 


M.  Gustave  Millescamps 

La  présence  de  silex  taillés  dans  des  sépultures  de  l'épo- 
que mérovingienne  avait  été  depuis  longtemps  signalée,  en 
Bourgogne  par  M.  Henri  Baudot;  en  Normandie,  par  M.  l'ab- 
bé Cochet,  Toutefois,  le  petit  nombre  de  pièces  recueillies 
n'avait  éveillé  qu'une  curiosité  passagère;  le  fait  était  géné- 
ralement resté  inaperçu  ou  ignoré.  11  était  réservé  aux  bel- 
les fouilles  de  Caranda,  commencées  en  1873  par  M.  Fré- 
déric Moreau  père,  de  fixer  sur  ce  point  l'attention  du  monde 
savant:  en  moins  de  deux  ans,  ces  fouilles  ramenaient  k  la 
surface  du  sol  20000  silex  exhumés  de  2600  tombes,  pour 
la  plupart  mérovingiennes. 

Cette  prodigieuse  accumulation  de  pierres  taillées  dans 
un  cimetière  franc  était-elle  simplement  l'œuvre  du  hasard? 
On  l'a  supposé  d'abord,  mais  cette  supposition  ne  pouvait 
tenir  devant  un  sérieux  examen. 

Il  a  fallu  reconnaître  que  ces  silex  avaient  été  inten- 
tionnellement déposés  près  du  mort,  qu'ils  faisaient  partie 
du  mobilier  funéraire  de  la  tombe.  On  les  retrouve,  en  effet, 


388 

mêlés  aux  armes,  aux  ustensiles,  aux  bijoux,  aux  vases,  à 
tous  ces  objets  dont  le  défunt  faisait  journellement  usage 
et  dont  on  l'a  fait  suivre  dans  sa  dernière  demeure.  La  pierre 
taillée  occupait  donc,  dans  les  mœurs  de  ces  populations, 
une  place  encore  importante;  elle  répondait  à  des  besoins, 
elle  était  employée  à  des  usages  qui  nous  sont  inconnus, 
mais  dont  l'existence  est  révélée,  constatée  par  la  concomi- 
tance de  silex  taillés  avec  des  instruments  de  bronze  et  de  fer. 

C'est,  du  moins,  l'opinion  que  je  me  suis  cru  fondé  à 
émettre  après  une  étude  attentive  des  fouilles  de  Caranda, 
opinion  que  devait  bientôt  confirmer  l'exploration  successive 
des  nécropoles  franques  de  Sablonnière  et  d'Arcy-Sainte- 
Restitue  (Aisne),  dont  la  richesse  en  silex  taillés,  pour  être 
moindre  qu'à  Caranda,  ne  laisse  pas  d'être  aussi  singulière 
que  caractéristique.  La  communication,  que  j'ai  faite  à  ce 
sujet  et  reproduite  en  1874  au  Congrès  international  d'an- 
thropologie et  d'archéologie  préhistoriques  tenu  à  Stockholm  ' 
a,  depuis  lors,  donné  lieu  en  France  à  des  discussions  dont 
le  principal  résultat  a  été  d'attirer  l'attention  des  explorateurs, 
en  provoquant  leurs  recherches  et  leurs  observations  sur  un 
point  demeuré  jusqu'ici  aussi  obscur  que  négligé. 

Ainsi,  un  éminent  archéologue,  dont  je  m'estime  heu- 
reux de  pouvoir  invoquer  le  témoignage,  M.  Jules  Quiche- 
rat,  faisait  récemment  les  remarques  suivantes  à  propos 
des  fouilles  d'Arcy-Sainte-Restitue  : 

fM.  F.  Moreau  s'est  appliqué  à  constater  qu'au  fond 
de  presque  tous  les  sarcophages  se  trouvait  soit  une  pointe 
de  flèche,  soit  un  grattoir  en  silex  éclaté,  par  conséquent 
non  poli,  quoique  d'une  forme  extrêmement  régulière.  L'état 

*  Voir  le  Compte-rendu  de  ccne  session,  pages  65o  à  658,  Stock- 
holm 1874. 


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de  fraîcheur,  dans  lequel  ces  pièces  se  sont  toujours  pré- 
sentées, s'oppose  à  ce  qu'on  en  rapporte  le  travail  aux 
époques  préhistoriques.  Tout  concourt  à  les  faire  considé- 
rer comme  des  objets  confectionnés  dans  le  temps  où  a  eu 
lieu  la  cérémonie  funèbre.» 

Le  soin  extrême  avec  lequel  M.  F.  Moreau  a  classé 
les  nombreux  silex  taillés  recueillis  dans  ces  fouilles,  la  place 
d'honneur  qu'il  a  réservée  à  certaines  pièces  hors  ligne  dans 
les  vitrines  de  son  riche  cabinet  de  Paris  ne  manquent  pas 
de  frapper  vivement  l'attention  des  archéologues  qui  visitent 
cette  magnifique  collection.  C'est  à  l'impression  produite 
par  la  vue  de  ces  silex  sur  un  des  visiteurs,  M.  l'abbé  Ha- 
mard,  à  Pétude  plus  patiente  encore,  à  l'examen  plus  mi- 
nutieux fait  par  cet  archéologue  des  objets  de  ce  genre  jour- 
nellement retirés  des  sépultures  franques  qu'il  était  alors 
occupé  à  fouiller,  que  je  dois  les  éléments  de  la  courte  no- 
tice — Sur  deux  silex  taillés  et  emmanchés  de  r époque  méro- 
pingiemte. 

Les  fouilles  de  M.  l'abbé  Hamard,  à  Hermès  (Oise) 
ont  eu,  entre  autres  résultats,  celui  de  révéler,  grâce  à  la 
découverte  d'une  inscription,  l'existence  d'un  vtcus  dont  le 
nom  ne  figure  ni  sur  les  itinéraires  anciens  ni  dans  les  écrits 
des  géographes  et  des  historiens  de  la  Gaule,  le  vicus 
RATVMA.GVS.  Le  déchiffrement  et  la  restitution  de  cette 
inscription  ont  fait  l'objet  de  communications  à  la  Société 
des  Antiquaires  de  France  et  à  l'Académie  des  InscripQons 
et  Belles-Lettres.  Quant  à  la  pierre  sur  laquelle  était  gravée 
cette  inscription,  elle  avait  été  retaillée  et  évîdée,  puis  uti- 
lisée pour  former  l'extrémité  d'un  sarcophage  retrouvé  au 
milieu  d'un  grand  nombre  de  sépultures,  quelques-unes 
gallo-romaines,  mérovingiennes  pour  la  majeure  partie. 

Au  mois  d'avril  1879,  M.  l'abbé  Hamard,  poursuivant 


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C'est  le  i8  août  1879  qu'à  été  fouillée  la  sépulture  dans 
laquelle  ont  été  trouvés  ces  deux  couteaux  en  silex;  elle  était 
occupée  par  un  corps  bien  conservé.  A  ta  hauteur  de  la 
ceinture  on  a  recueilli  les  objets  suivants:  une  grosse  bou- 
cle en  bronze  fortement  étamé;  un  couteau  de  fer,  long  de 
i5  centimètres;  cinq  fragments  de  bronze  ou  tiges  très  min- 
ces dont  chaque  extrémité  était  recourbée;  leur  longueur, 
inégale,  variait  de  45  à  60  millimètres;  on  ignore  quel  en 
pouvait  être  l'usage.  Tout  à  côté  se  trouvaient  deux  orne- 
ments en  bronze  dits  terminaisons  de  ceinturon,  munis  à  la 
face  inférieure  d'un  bouton  analogue  à  nos  boutons  doubles; 
enfin,  un  objet  en  fer,  long  de  1 1  centimètres,  dans  lequel 
je  vois  un  fermoir  d'escarcelle.  Cette  nomenclature  suffît  à 
caractériser  une  sépulture  incontestablement  mérovingienne. 
Ainsi  qu'on  a  pu  le  remarquer  plus  haut,  j'ai  tenu  ù 
laisser  la  parole  à  M.  Tabbé  Hamard  pour  la  description 
des  silex  emmanchés  qu'il  a  eu  le  bonheur  de  découvrir  et 
le  mérite  d'apprécier  à  leur  valeur.  L'intérêt  personnel,  que 
j'ai  dans  la  question,  me  faisait  un  devoir  de  reproduire  in- 
tégralement un  témoignage  dont  on  ne  saurait  suspecter 
l'exactitude  et  l'impartialité. 

Je  me  suis  rendu  à  deux  reprises  à  Hermès  pour  voir 
ces  pièces  intéressantes,  les  examiner  à  loisir;  de  cet  exa- 
men est  résulté  pour  moi  la  conviction  que  les  silex  en  ques- 
tion avaient  dû  être  emmanchés  à  l'époque  de  leur  enfouis- 
sement dans  les  sépultures  franques. 

Les  conclusions  que  je  m'étais  permis  de  formuler  dès 
1874,  à  la  suite  des  fouilles  de  Caranda,  viennent  donc  de 
recevoir,  à  ce  qu'il  me  semble,  une  nouvelle  confirmation, 
grâce  aux  découvertes  récentes  du  cimetière  franc  de  Her- 
mès. Aujourd'hui  plus  que  jamais,  je  pense  que  les  instru- 
ments en  silex  étaient  encore  en  usage  à  l'époque  mérovin- 


.,Ci 


392 

gienne  et  que,  se  servant  de  la  pierre,  les  Francs  savaient 
la  tailler  et  l'approprier  à  leurs  besoins.  Quelle  était  la  des- 
tination de  ces  instruments?  Étaient-ils  consacrés  par  la  tra- 
dition à  quelque  opération  chirurgicale  analogue  à  Pouver- 
ture  du  corps,  préalablement  à  l'enlèvement  des  viscères, 
comme  en  Egypte,  ou  à  ta  pratique  de  la  circoncision, 
comme  chez  les  Juifs?  Quelque  idée  religieuse,  quelque  an- 
tique superstition  s'attachaient-elles  également  au  silex  chez 
les  Francs  et  prescrivaient-elles  l'emploi  de  la  pierre  pour 
l'accomplissement  de  certains  rites,  de  certaines  cérémonies, 
à  l'exclusion  du  métal  écarté  comme  profane  et  impur? 

Le  silence  de  l'histoire  autorise  toutes  les  conjectures. 
Jusqu'à  plus  ample  informé,  j'adopterai  la  plus  simple,  je  me 
contenterai  de  l'explication  qui  me  paraît  la  plus  légitime, 
la  plus  naturelle.  M'appuyant  donc  sur  l'immense  quantité 
de  silex  taillés  recueillis,  durant  ces  six  dernières  années, 
'  dans  des  nécropoles  mérovingiennes,  je  maintiens  cette  opi- 
nion:— que  les  outils  en  silex,  d'une  pratique  facile,  et  peu 
coûteuse,  aisément  retaillés  ou  remplacés  là  oij  abonde  la 
matière  première,  avaient  dû,  chez  certaines  populations 
firanques,  être  fréquemment  et  concurremment  employés 
avec  les  outils  de  fer,  et  peut-être  utilisés  de  préférence,  par 
économie  ou  pour  tout  autre  cause,  dans  certains  cas  et 
pour  certains  usages  journaliers  que,  dans  l'étal  actuel  de 
la  science,  je  ne  saurais  avoir  la  prétention  de  connaître  et 
moins  encore  la  témérité  d'indiquer. 


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LES  LUSITANIENS 


M.  F.  Martins  Sarmento 

Dans  la  Lusitanie,  de  même  que  dans  une  grande  par- 
tie de  l'Europe,  l'archéologie  se  heurte  à  la  question,  diffi- 
cile à  résoudre,  du  celticisme;  cette  question  s'y  trouve, 
cependant,  simplifiée  et  caractérisée  d'une  manière  spé- 
ciale. 

Tout  ce  que  nous  connaissons  des  Celtes  et  de  l'inva- 
sion celtique  en  Espagne,  nous  montre  cette  partie  de  la 
Péninsule  tout-à-fait  étrangère  à  l'occupation  et  à  l'influence 
celtiques.  Tout  ce  que  les  anciens  nous  raccontent  des  usa- 
ges et  des  mœurs  des  Lusitaniens  n'a  aucun  rapport  avec 
les  usages  et  les  mœurs  des  Celtes,  et  rappelle  plutôt  ceux 
d'autres  peuples  bien  différents.  Diodore  nous  dit  non  seu- 
lement que  tes  Lusitaniens  étaient  Ibères,  mais  encore  que 
leur  caractère  était  entièrement  opposé  à  celui  des  Celtibè- 
res*:  ce  qui  veut  dire  qu'ils  n'avaient  aucun  mélange  du 
sang  des  Celtes. 

<  Diodore.  Sic.  v,  34. 


]^(^|^ 


394 

Néanmoins  leurs  noms  ethniques  et  locaux,  les  noms 
mêmes  des  individus'  des  dieux,  qui  nous  ont  été  transmis 
par  les  historiens  et  par  les  géographes,  ainsi  que  ceux  que 
les  monuments  épigraphiques  nous  ont  conservés,  ont  pour 
la  plupart  une  physionomie  celtique  si  prononcée,  qu'une 
certaine  partie  de  la  Lusitanie,  la  Galice^  a  été  appelée  le 
berceau  des  Celtes. 

Nous  étudierons  les  termes  de  cette  contradiction;  et 
quoique  nous  ne  nous  attendions  pas  à  la  résoudre  complè- 
tement, nous  avons  du  moins  l'espoir  d'attirer  sur  cet  inté- 
ressant problème  Panention  des  savants. 

Le  plus  ancien  document  où  les  Celtes  soient  mention- 
nés est  un  périple  phénicien  du  quatrième  siècle',  dont 
Aviénus  s'est  servi  pour  la  composition  de  son  ouvrage 
Ora  maritima,  et  auquel  nous  aurons  souvent  recours  dans 
cet  écrit. 

Dans  ce  périple,  qui  comprend  le  voyage  entre  l'ile  de 
Tartesse,  aux  embouchures  du  Bétis,  et  les  Iles  Britanni- 
ques, on  parle  des  peuplades  qui  occupaient  alors  le  sud- 
ouest  et  l'occident  de  PEspagne,  l'Angleterre  et  l'Irlande. 

Dans  le  sud  de  l'Angleterre  notre  document  cite  des 
Ligures,  qui  avaient  primitivement  habité  les  régions  glacées 
de  l'Ourse,  d'où,  ils  avaient  été  chassés  par  les  Celtes,  après 
une  résistance  inutile. 

'  Le  nom  même  de  Viriate  est  considéré  celtique.  Rev.  Celt. 
vol.  ilj,  p.  3ii. 

*  La  Lusitanie  ancienne  de  Strabon  s'iftendait  depuis  le  Tage  jus- 
qu'à la  mer  C  an  ta  brique,  el  comprenait  les  deux  Galices,  Bracaria  et 
Lucensis.  C'est  dans  ce  sens  que  nous  prenons  la  Lusitanie. 

*  Avant  notre  ère.  Toutes  les  dates  citées  dans  cet  écrit  doivent 
Être  comprises  dans  ce  sens. 


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L'invasion  celtique  avait  été  conduite  par  mer,  puisque, 
longtemps  après,  les  Ligures  réfugiés  en  Angleterre  vivaient 
dans  les  montagnes,  craignant  de  descendre  jusqu'aux  riva- 
ges, iparce  que  leur  ancien  désastre  les  faisait  regarder  la 
mer  avec  épouvante.»  Ils  craignaient  donc  une  seconde  in- 
vasion maritime,  qui  cette  fois  ne  pourrait  venir  que  de  la 
Morinie. 

L'ancienne  patrie  des  Ligures,  dans  les  régions  glacées 
de  l'Ourse  et  dans  une  position  exposée  aux  attaques  par 
mer,  devrait  être  sur  les  rivages  de  la  Baltique,  vis-à-vis  la 
Scandinavie,  car  c'est  bien  de  la  Scandinavie,  cette  vagina 
nationum  de  Jomandès,  que  descendent,  selon  ce  vieux  do- 
cument, les  émigrants  celtes,  qui  paraissent  pour  la  pre- 
mière fois  dans  le  monde  connu  des  anciens. 

La  véracité  de  cette  notice  reçoit  une  confirmation  in- 
directe, lorsque  nous  nous  rappelons  les  anciennes  légendes 
des  Grecs  sur  les  Ligures  du  pays  de  l'ambre,  dans  le  voisi- 
nage de  l'Éridan,  ces  célèbres  Ligures  gouvernés  par  Cy- 
cnus,  l'ami  de  Phaéton,  qui,  sans  que  l'on  sache  pourquoi,. 
disparaissent  entièrement  de  ces  régions. 

Le  périple  phénicien  nous  donne  l'explication  de  ce  fait. 
Chassés  du  nord-ouest  de  l'Europe  par  l'invasion  celtique, 
lesLJgures  s'enfuient  vers  la  Morinie,  et  faisant  la  traversée 
du  canal,  ils  vont  chercher  un  refuge  dans  le  sud  de  l'An- 
gleterre, auprès  de  leurs  frères  d'Albion. 

C'est  sans  doute  par  la  crainte  d'être  apperçus  par 
leurs  persécuteurs  qu'ils  n'osent  se  montrer  sur  les  rivages 
de  leur  nouvelle  patrie;  ils  ne  descendent  des  montagnes 
que  longtemps  après,  quand  leurs  appréhensions  et  leur  ter- 
reur disparaissent  devant  le  calme  où  ils  trouvent  le  pays 
de  l'autre  côté  du  canal. 

Il  en  résulte  que  les  Celtes  dédaignèrent  l'ocupation  de 


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396 

Toccident  des  Gaules,  et  des  Iles  Britanniques,  comme  ils 
avaient  dédaigné  celle  de  la  vieille  Ltgurie  de  la  mer  Balti- 
que, puisqu'elle  demeura  lentièrement  dépeuplée! '. 

Nous  verrons  bientôt  quelle  direction  ils  prirent. 

Entre  l'émi^ation  forcée  des  Ligures  et  la  composition 
du  périple  il  s'écoula  un  espace  de  temps  indéterminé,  qui 
fut  rempli  par  les  combats  entre  les  Ligures  et  les  Celtes,  et 
en  outre  tout  le  temps  pendant  lequel  (diu)  les  émigrants 
d'Albion  attendirent  la  répétition  de  leurs  premiers  désas- 
tres, qui,  heureusement  pour  eux,  ne  se  renouvelèrent  point. 

Or,  le  périple  ayant  été  composé  pendant  le  vi  siècle, 
scion  l'opinion  de  M.  Karl  MUllenhof,  la  première  appa- 
rition des  Celtes  sur  la  scène  de  l'histoire  peut  être  placée 
au  VII  siècle  sans  crainte  d'une  grande  erreur. 

Consultons  maintenant  les  renseignements  que  les  écri- 
vains latins  et  grecs  ont  recueillis  sur  les  Celtes.  Selon  Tite- 
Live,  l'émigration  celtique  eut  lieu  sous  Tarquin  l'Ancien, 
dans  le  vu  siècle'.  En  ce  qui  concerne  le  point  de  départ 
de  l'émigration,  quoique  l'historien  paraisse  désigner  d'abord 
la  Celtique  de  César,  ce  qui  est  tout-à-fait  insoutenable,  il 
nous  dit  ailleurs  que  les  Celtes  venaient  tab  oceano  terrar- 
runtque  ultimis  oris»,  ce  qui  semble  n'être  que  l'écho  de  la 
tradition*  Plutarque,  de  son  côté,  ne  sait  rien  de  certain 

'  V.  Aviënus,  Ora  maritima,  surtout  v.  r3o-i4fi.  LTmerprétaiion 
que  nous  donnons  à  ce  passage  du  poème  d'Aviénus,  ain»  qu'à  d'au- 
très,  est  le  sujet  d'une  autre  étude  qu'il  serait  hors  de  propos  de  repro- 
duire ici. 

>  Dans  son  ouvrage  Dtutscht  Alterthmtskuttde,  p.  73  et  suiv. 

*  Tiie-Live,  v,  34. 

*  Tite-Live,  v,  37.  Sur  les  doutes  qu'ont  soulevés  ces  affirmatives 
de  Tite-Live  touchant  les  Celtes,  voy.  Alex.  Bertrand,  Archéologie  cet' 
lifue  et  gmloisey  p.  411-433. 


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397 
sur  la  patrie  primitive  des  Celtes;  tous  les  témoignages,  ce- 
pendant, qu'il  put  obtenir  touchant  la  Celtique,  d^où  il  fait 
sortir  les  Celtes  et  les  Ombres,  indiquent,  si  nous  le  com- 
prenons bien,  la  mer  hyperboréennc,  les  extrémités  de  la 
terre,  les  répons  où  les  jours  se  prolongent  six  mois'. 

Cette  opinion  est  également  exprimée  par  Hellanicus  du 
Pont  qui  faisait  descendre  les  Celtes  du  pays  des  Hyperbo- 
réens'. 

Les  traditions  druidiques  étaient  un  peu  plus  positives; 
une  partie  des  peuples  de  ta  Gaule  étaient  venus  tab  insu- 
lis  extremis  et  tractibus  trattsrhenam's^.' 

On  voit  que  toutes  ces  informations,  malgré  leur  peu 
de  clarté,  s'accordent  avec  l'écrivain  du  vi  siècle,  lequel  doit 
avoir  autant  plus  d'autorité,  qu'il  était  un  témoin  presque 
contemporain  des  faits  qu'il  racconte,  les  ayant  peut-être 
reçus  de  la  bouche  même  des  victimes  des  Celtes,  de  ces 
Ligures  qu'il  fréquentait. 

Si  nous  admettons  cela,  il  résultera  de  la  combinaison 
des  notices  du  périple  et  de  celles  qui  nous  sont  fournies 
par  Tite-Live,  une  lumière  suffisante  pour  éclaircir  ce  pro- 
blème historique.  Sortant  du  fond  des  régions  d'au-delà 
de  la  Baltique,  par  des  motifs  que  nous  ignorons,  et  après 
avoir  défait  et  chassé  les  Ligures  qui  les  premiers  se  trou- 
vent devant  elles,  les  hordes  celtiques  marchent  sur  le  Rhin 
et  paraissent  s'arrêter  au  cceur  même  de  la  Gaule.  Là,  cette 
masse  énorme  de  peuples  se  sépare.  Les  uns  se  fixent  dans 
la  Celtique,  ou  dans  une  partie  de  la  Celtique  de  César; 

'  Plutarquc,  Mar.  xi. 
'  Id.  Camill.  xxvu, 

»  Amm.  Marcell.  xv,  9.  L'opinion  de  ceux  qui  voient  dans  ces  îles 
les  Iles  Britanniques  ne  saurait  être  défendue. 


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398 

une  grande  multitude  cependant,  sous  les  ordres  de  Sigo- 
vèse,  prend  !a  direction  de  l'est,  vers  la  forêt  hercynienne, 
tandis  que  d'autres  hordes  descendent  le  long  du  Rhône, 
conduites  par  Bellovèse  et  d'autres  chefs. 

On  ne  saurait  nier  que  l'invasion  des  Celtes  a  tout  le 
caractère  d'une  irruption  de  barbares  étrangers  à  l'Europe 
des  anciens,  telle  que  serait  l'invasion  des  Cimbres,  si  elle 
était  venue  quelques  siècles  auparavant  et  n'avait  rencon- 
tré devant  elle  la  science  militaire  et  la  forte  organisation 
politique  des  Romains.  A  peine  arrivé,  ce  peuple  anéantit  la 
Ligurie  de  la  Baltique  et  fait  un  carnage  épouvantable  par- 
tout où  il  passe*. 

Quelques-unes  des  hordes  qui  avaient  pris  le  chemin 
de  l'est,  traversent  plus  tard  la  Pannonie,  dévastent  la 
Macédoine  et  la  Grèce,  et  passent  dans  l'Asie  Mineure,  où 
elles  sont  la  terreur  de  ces  régions  pendant  une  longue  pé- 
riode de  temps*. 

Une  partie  de  celles  qui  suivent  le  cours  du  Rhône  s'em- 
parent de  plusieurs  contrées  de  l'Italie,  où  elles  portent  le 
coup  de  grâce  à  la  civihsation  étrusque'  et  mettent  les  Ro- 
mains a  deux  doigts  de  leur  perte;  d'autres  se  répandent 
dans  le  sud  de  la  Gaule  et  pénètrent  en  Espagne,  où  la  moi- 
tié de  la  Péninsule  se  soulève  contre  les  envahisseurs  et  fi- 
nit par  transiger  avec  eux*. 

Un  peuple  qui  s'annonce  de  la  sorte  ne  saurait  vivre 
deux  siècles  dans  l'Europe  des  écrivains  anciens  sans  faire 
parler  de  lui.  On  dirait  que  les  Celtes  ne  sont  que  l'avant- 


'' D'Arbois  de  ivbainvUle,  Les  premiers  kabitanis  de  l'Europe,  II.  io(5. 
'  Diod.  Sic.  V,  33. 


,ï  Google 


399 
garde  de  cette  infinité  de  peuples  barbares  que  le  nord  de- 
vait vomir  sur  le  sud,  jusqu'à  l'anéantissement  des  civili- 
sations méditerranéennes.  Suivons-les  en  Espagne.  Les  pre- 
mières hordes  qui  se  montrent  dans  le  sud  de  l'Europe  ren- 
contrent, selon  Tite-Live,  les  Phocéens  en  lute  avec  les  Li- 
gures salyens,  sur  le  territoire  desquels  les  Grecs  voulaient 
s'établir.  Voyant  que  ces  étrangers  cherchaient  comme  eux 
des  terres  pour  y  vivre,  les  Celtes  en  tirent  un  auspice  fa- 
vorable et  vieniient  au  secours  des  fondateurs  de  Marseille. 
Puis  ils  rebroussent  chemin  vers  l'Étrurie,  D'autres  hordes 
s'ensuivent  et  se  fixent  dans  cette  contrée  '.  Ce  sont  là,  sans 
doute,  de  nouveaux  flots  de  barbares  qui,  suivant  toujours 
le  cours  du  Rhône,  se  dirigent  vers  l'occident,  se  répandent 
dans  tout  le  littoral  du  sud  de  la  Gaule,  et  pénètrent  cn6n 
en  Espagne. 

Ainsi,  on  ne  doit  point  parler  de  l'invasion  des  Celtes 
en  Espagne  comme  ayant  eu  lieu  à  une  époque  très  reculée; 
elle  est  postérieure  à  la  fondation  de  Marseille  et  se  passe, 
pour  ainsi  dire,  sous  les  yeux  des  habitants  de  cette  ville, 
et  devant  les  Carthaginois  qui  faisaient  te  commerce  avec 
la  Péninsule. 

Que  cette  invasion  est  postérieure  au  périple  du  vi  siè- 
cle, dont  nous  avons  déjà  parlé,  ou  tout  au  moins  que  les 
Celtes  n'étaient  pas  encore  arrivés  à  l'occident  de  l'Espagne 
du  temps  de  la  rédaction  de  ce  document,  voilà  ce  qui  nous 
semble  hors  de  doute,  puisque  le  périple  n'y  connaît  point 
de  peuplades  celtiques.  Hérodote  les  y  connaît  déjà,  à  côté 
de  Cynàtes,  dans  l'année  445-443*;  de  sorte  que  l'on  peut 


'  Tiie-Live,  v,  34,  3S. 

'  Sur  cette  date  voyez  D'Arbois  de  Jubainville,  ouvrage  citd, 
p.x8i. 

c  R.  39 


tv. 


400 

fixer  comme  certain  que  l'invasion  des  Celtes  eut  lieu  entre 
le  VI  et  V  siècles*. 

Diodore  nous  raconte  en  peu  de  mots  cette  invasion,  et 
probablement  elle  ne  méritait  pas  une  description  plus  lon- 
gue. Les  Celtes  rencontrèrent  de  la  part  des  Ibères  une  ré- 
sistance formidable;  cependant,  après  plusieurs  combats 
acharnés,  les  deux  peuples  belligérants  fraternisèrent,  et  une 
nation  mixte  se  forma  sous  le  nom  de  Celtibères^ 

Le  théâtre  de  cette  lutte  et  de  cette  fusion  se  reserra 
dans  une  région  géographique  qui  garda  longtemps  le  nom 
de  Celtibérie. 

Les  envahisseurs  s'établirent  dans  des  demeures  Hxes 
et  se  créèrent  une  vraie  patrie  dans  cette  partie  de  l'Espa- 
gne, que  plus  tard  ils  durent  défendre  contre  les  Romains 
conjointement  avec  les  autres  peuples  ibériens. 

Nous  ne  voyons  nulle  part  qu'ils  eussent  un  plan  suivi 
de  conquête,  dont  le  sens  précis  de  ce  mot.  En  Espagne, 
du  moins,  ces  étrangers  se  crurent  heureux  de  vivre  dans 
les  villes  ibériennes  de  l'orient  qui  les  reçurent  dans  leurs 
murs,  sans  se  soucier  de  faire  valoir  leur  individualité,  et 
sans  révéler  par  aucun  acte  la  moindre  unité  polidque  '. 

Entre  la  Celtibérie  et  la  Lusitanie  nous  trouvons  les 
puissantes  tribus  des  Orétains,  des  Carpétains  des  Vettons, 
etc.  *  Les  Lusitaniens  demeurèrent  donc  parfaitement  étran- 

<  M.  de  Jubainville,  dont  nous  nous  écartons  en  pluueurs  points, 
place  nnvasion  celtique  en  Espagne  au  commencement  du  v  siècle. 
Ouvr.  cit.  p.  38,  379.  Comp.  Miillenhoff,  ouvr,  cit.  p.  108  et  suiv. 

*Diod.  Sic.  loc.  cit. 

*  Ea  effet,  à  l'époque  de  la  conquête  romaine  nous  voyons  les  peu- 
ples de  la  Celtibérie  aussi  séparés  les  uns  des  autres  que  partout  ail- 
leurs en  Espagne. 

•  «Qretani  yui  el  Germani  cognominanlwt  Pline  m,  4,  Si  le  mot  ger- 


,ï  Google 


A 


401 
gers  à  l'invasion  celtique.  Leur  ignorance  de  ce  qui  se  pas- 
sait du  côté  de  rÈbre  est  bien  naturelle,  protégés  qu'ils 
étaient  par  leurs  voisins  orientaux,  que  les  Celtes  devraient 
assujétir  avant  de  mettre  le  pied  sur  leur  territoire. 

Il  est  vrai  qu'une  horde  de  Celtes  dépassa  la  lisière  de 
la  Celtibérie  et  s'étendit  vers  l'ouest,  poursuivant  sa  mar- 
che entre  le  Tage  et  l'Ana,  et  qu'elle  vint  se  fixer  près  des 
rives  de  ce  dernier  fleuve  dans  le  sud  de  la  Lusitanie.  Hé- 
rodote en  parle.  Néanmoins,  ces  Celtes,  aussi  bien  que  leurs 
frères  orientaux,  sY  choisirent  des  demeures  fixes,  puisque 
Pline  les  reconnaît  dans  les  endroits  mêmes  où  Hérodote 
les  connut  '. 

Quelques  bandes  de  ces  CelticidA  l'Ana,  déjà  mêlés  aux 
Turdules,  qui  n'étaient  pas  des  Celtes,  firent  une  excursion 
dans  le  nord.  En  arrivant  à  la  rivière  Lima  les  deux  armées 
en  viennent  aux  mains  et  se  détruisent  mutuellement,  et  les 
Celtes  qui  survivent  vont  se  fixer  dans  les  proximités  du  cap 
Nérium*. 

Voici  les  seuls  Celtes  dont  l'histoire  fasse  mention  dans 
la  Lusitanie  et  qui  ont  dû  être  bientôt  absorbés  par  les  peu- 
plades qui  les  avaient  devancés. 

Comment  donc  expliquer  la  toponymie  celtique  dans  ce 
vaste  territoire  qui  s'étend  depuis  le  Tage  jusqu'à  la  mer 
Cantrabique  ?  La  seule  hypothèse  possible  serait  d'admettre 
l'infiltration  insensible  de  tribus  celtiques,  qui  eussent  échap- 
pé à  l'attention  des  observateurs  ;  cette  hypothèse,  cependant, 
serait  fondée  sur  deux  faits  également  extraordinaires: — une 


mani  a  dans  les  langues  celtiques  la  signification  de  'Voisins>  qu'on  lui 
attribue,  ce  surnom  des  'Oréiains*,  serait  expressif 

>  PUne,  lu,  3. 

*  Strabon,  m,  m,  5. 

29* 


ly  Google 


402 

monomanie,  vraiment  singulière,  de  la  part  de  ces  étran- 
gers, celle  de  changer  les  noms  des  rivières,  des  montagnes 
et  des  villes,  ce  qui  a  rarement  lieu,  même  de  la  part  d'un 
véritable  conquérant;  et  la  condescendance  surprenante  des 
indigènes,  d'échanger  leur  tangue  contre  celle  des  étran- 
gers et  d'adopter  les  nouveaux  noms  qui  leur  étaient  impo- 
sés, après  avoir  abandonné  les  dénominations  topographi- 
ques traditionnelles,  qui  sont  toujours  d'une  prodigieuse  té- 
nacité. 

Ce  fait,  étrange  même  dans  la  Geltibérie,  devient  in- 
croyable dans  les  parties  de  l'Espagne  qui  demeurèrent  en 
dehors  de  l'influence  des  Celtes.  Dans  la  Lusttanie,  où  nous 
trouvons  des  noms  celtiques,  les  habitants  ne  nous  sont  que 
peu  connus  :  les  populations  pré-celtiques,  cependant,  y  ont 
une  individualité  bien  caractérisée,  des  usages,  des  mœurs, 
une  religion  en  propre,  qui  méritent  à  Strabon  une  page 
séparée-,  ces  peuplades,  au  temps  de  la  conquête  romaine, 
montrent  encore  une  puissante  vitalité,  comme  on  le  voit 
dans  leur  longue  lutte  pour  Pindépendance. 

Un  tel  fait  dépasse,  donc,  toutes  les  limites  du  possible. 
Un  peuple  dans  de  pareilles  conditions  n'abandonne  pas  sa 
langue,  n'oublie  point  les  noms  auxquels  une  longue  tradi- 
tion l'a  accoutumé. 

C'est  l'occasion  maintenant  d'examiner  de  plus  près 
les  fondements  sur  lesquels  s'appuie  l'opinion  de  ceux  qui 
supposent  celtique  la  toponymie  de  la  Lusitanie,  et  de  rap- 
peler ce  qui  s'est  passé  à  l'égard  de  la  celticité  des  dolmens. 
On  sait  que  ces  monuments  furent  longtemps  attribués  aux 
Celtes,  parce  qu'on  les  trouvait  dans  des  pays  que  les  Celtes 
avaient  habités.  Cependant,  aussitôt  que  le  domaine  des 
recherches  devint  plus  vaste,  et  que  les  dolmens  se  firent 


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4o3 

voir  dans  des  régions  où  les  Celtes  ne  s'étaient  jamais  mon- 
trés, et  qu'on  chercha  d'ailleurs  en  vain  ces  monuments  dans 
des  lieux  où  ils  avaient  dominé,  la  celticité  des  dolmens  ne 
fut  plus  un  fait  que  dans  l'opinion  de  quelques  personnes 
obstinées  •. 

Avec  les  Celtes  de  la  Lusitanie  nous  nous  trouvons  de- 
vant un  problème  qui  est  lout-à-fait  l'opposé  de  celui-là. 
L'occupation  celtique  ne  saurait  être  prouvée  directement  ^ 
on  la  déduit  de  la  toponymie,  et  cette  toponymie  est  celti- 
que, parce  qu'il  est  impossible  de  ne  pas  y  découvrir  une 
étroite  parenté  avec  les  langues  appelées  néo-celtiques,  par- 
lées encore  aujourd'hui  dans  l'Armorique  et  sur  quelques 
points  des  lies  Britanniques,  lesquelles,  selon  l'opinion  des 
linguistes,  sont  le  vieil  idiome  celtique  transformé  par  le 
temps. 

La  celticité  des  langues  britanniques  et  hibemiques, 
cependant,  est-elle  mieux  prouvée  que  la  celticité  des  dol- 
mens? Voilà  la  question.  Si  l'on  ne  regardait  pas  comme 
prouvé  que  les  Celtes  ont  habité  la  Bretagne,  l'Angleterre 
et  l'Irlande,  personne  ne  s'aviserait  certainement  d'appeler 
celtiques  les  vieilles  langues  qui  s'y  sont  maintenues  jus- 
qu'à ce  jour;  et  cette  fois  on  ne  saurait  douter  que  des  peu- 
ples d'origine  celtique  n'aient  pénétré  dans  ces  pays. 

Toutefois,  il  est  presque  certain  que  cette  occupation 
ne  date  que  du  v  siècle*,  et  il  est  étrange  que  ces  envahis- 
seurs, qui  respectent  les  usages  et  les  mœurs  des  peuples 
pré-celtiques,  ce  dont  témoignent  de  nombreux  monuments, 
n'aient  montré  leur  acharnement  que  contre  les  noms  eth- 


'  V.  l'ouvrage  ciïé  de  M.  Alex.  Bertrand,  p.  bi  et  suiv. 
*  V.  plus  loin  Belloguet,  Éfhogénie  Gauloise — Le  Génie  gaulois, 
p.  ï39. 


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404 
niques  et  locaux  qu''ils  rencontrèrent,  les  remplaçant  par 
d'autres  noms,  dont  un  grand  nombre  sont  parfaitement 
identiques  à  ceux  de  la  Lusitanie,  de  ce  pays  sur  lequel, 
comme  l'histoire  nous  l'apprend,  ils  n'ont  pas  dominé. 

Et  les  linguistes  que  savent-ils,  après  tout,  de  la  lan- 
gue parlée  par  les  Celtes,  que  savent-ils  de  la  tangue  parlée 
par  les  peuples  pré-celtes  de  l'occident,  pour  qu'ils  établis- 
sent avec  certitude  que  l'erse,  le  gaélique,  le  cambrique  et 
le  breton  sont  des  langues  celtiques  et  non  pas  autre  chose? 

Tout  ce  que  nous  en  savons,  c'est  que  quelques  noms  que 
les  écrivains  anciens  nous  donnent  comme  celtiques  ont  une 
analogie  évidente  avec  les  langues  qui  ont  survécu  jusqu'à 
nos  jours  dans  la  Bretagne  et  dans  les  Iles  Britanniques  ; 
ceci  n'est  pas  suffisant,  toutefois,  pour  décider  une  question 
aussi  importante.  Tout  en  admettant  que  dans  les  temps 
où  ces  noms  nous  ont  été  transmis — des  temps  où  les  Cel- 
tes s'étaient  déjà  confondus  intimement  avec  les  peuples 
pré-celtiques— les  anciens  écrivains  fussent  en  mesare  de 
séparer  les  noms  purement  celtiques  de  ceux  qui  ne  l'étaient 
pas;  si  l'on  parvient  à  démontrer  que  ces  peuples  pré-celti- 
ques étaient  d'origine  indo-européenne,  devant  parler  une 
langue  du  groupe  gréco-italo-celtique  de  Schleicher;  cette 
analogie  qui  à  la  vérité  résume  toute  l'argumentation  n'est 
pas  l'ombre  d'un  argument  :  il  est  donc  évident  que  la  lin- 
guistique dans  son  domaine  exclusif  se  trouve  incapable  de 
résoudre  la  question  de  nom  et  qu'elle  doit  avoir  recours  à 
des  recherches  historiques,  aux  découvertes  de  l'archéologie, 
de  l'anthropologie,  à  tous  les  renseignements  enfin  qui  puis- 
sent lui  fournir  les  moyens  de  résoudre  cette  énigme,  que 
par  ces  propres  moyens  elle  ne  parviendra  jamais  à  déchif- 
frer. 

Pour  le  problème  qui  nous  intéresse  spécialement,  il 


,ï  Google 


faut  chercher,  comme  on  vient  de  voir,  les  traces  des  peu- 
ples pré-celtiques  qui  occupèrent  l'occident,  afin  que  nous 
puissions  obtenir  quelques  indices  de  la  langue  qu'ils  ont  dû 
parler. 

Partons  de  la  Lusitanie.  Strabon  qui  nous  dit  que  les 
Lusitaniens,  les  Galiciens,  les  Asturiens  et  les  Cantabres 
avaient  tous  les  mêmes  usages  et  les  mêmes  mœurs',  ne 
trouve  aucune  analogie  entre  ces  usages  et  ceux  des  Celtes. 
Toutes  les  analogies  sont  au  contraire  avec  des  Ligures  ou  des 
Grecs.  C'est  ainsi  que,  pariant  des  mœurs  des  femmes  de 
cette  partie  de  la  Péninsule,  le  géographe  passe  sans  au- 
cune transition  aux  mœurs  des  femmes  liguriennes  de  la 
Méditerranée,  et  il  faut  lire  deux  fois  les  textes  pour  que 
Ton  sache  quelles  sont  celles  dont  il  veut  parier*.  Les  ana- 
logies les  plus  frappantes,  cependant,  celles  qu'il  fait  res- 
sortir lui  même,  rapellent  les  Grecs.  Les  mariages  se  font 
more  graeco,  les  hécatombes  ritu  graeco;  il  y  a  des  usages 
semblables  à  ceux  de  Sparte  chez  quelques  Lusitaniens  des 
rives  du  Douro',  et  pour  le  géographe  il  n'y  a  point  de 
doute  que  des  colonies  grecques  parvinrent  dans  ces  régions, 
ce  qui  d'ailleurs  lui  est  témoigné  par  des  noms  tels  que 
Hellènes,  Amphiloques,  et  plusieurs  autres.  Justin  va  même 
jusqu'à  prétendre  que,  selon  la  tradition  des  Galiciens,  la 

»  Strab.  III,  111,6,7. 

*  Idem  m,  iv,  i7.  Plusieurs  écrivains,  et  parmi  eux  Betloguet,  (ouv. 
cil.  p.  46),  ont  remarqué  que  les  traits  que  les  anciens  prêtent  aux  Li- 
gures de  !a  Méditerranée,  sont  les  mêmes  qu'ils  attribuent  â  quelques- 
uns  des  peuples  ibériens.  C'est  ce  qui  arrive  surtout  chez  les  Lusita- 
niens. Même  de  nos  jours  on  a  observé  avec  surprise  l'étroite  analogie, 
qu'il  y  a  entre  le  dialecte  de  Gênes  et  les  langues  portugaise  et  gali- 
cienne. Diefenbach.  Celtica,  u,  p.  3g. 

a  Strab.  ni,  m,  6,  7. 


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'f~ 


4o6 

parenté  entre  ce  peuple  et  les  Grecs  ét^t  une  chose  connue  '. 
Pline  avance  également  que  les  Hellènes  et  les  Graii  étaient 
d'origine  grecque*. 

Il  ne  serait  pas  difficile  de  réunir  d'autres  citations. 

L'itinéraire  que  les  anciens  prêtaient  à  ces  colonies, 
que  les  chefs  de  la  guerre  de  Troie  auraient  conduit  ici  par 
la  Méditerranée,  ne  saurait  être  admis.  Ce  qui,  toutefois, 
nous  semble  mériter  encore  aujourd'hui  une  attention  sé- 
rieuse, c'est  que  le  nom  d'Hellènes  et  de  Graici  que  ces 
observateurs  rencontrent  dans  cette  extrémité  de  la  terre  à 
côté  de  Grecs  barbarisés,  appartient  aux  temps  archaïques 
de  la  Grèce  ';  et  un  fait  aussi  remarquable  c'est  que  les  tra- 
ditions sur  les  Grecs  et  les  moeurs  des  Grecs  se  retrouvent 
surtout  dans  une  certaine  direction.  Dans  I^le  Ogygie,  la- 
quelle doit  être  l'Irlande,  si  un  tel  nom  répond  à  un  lieu 
quelconque,  nous  avons  des  Grecs  barbarisés*.  Dans  l'île, 
vis-à-vis  la  Celtique,  sans  doute  l'Angleterre,  nous  trouvons 
des  Grecs  qui  y  étaient  venus  mêlés  à  des  Hyperboréens, 
lesquels  avaient  un  grand  penchant  pour  les  Grecs,  pour  les 
Athéniens  et  les  Déliens  surtout*.» 

Près  du  Rhin,  peut-être  dans  l'ancienne  Ligurie  de  la 
Baltique,  on  rencontrait  des  noms  grecs  et  même  des  ins- 
criptions grecques  *.  Nous  voici  près  de  l'Éridan  des  anciens. 

*  JuSt.  ILIV,  3. 

*  Pline,  IV,  34. 

3  Aristote,  Météorol.  1,  14.  Comp.  Marntora  Parium,  5;  d'Artaois 
de  Jubainville,  ouv.  cit.  p.  247.  Il  se  peut  que  CHenî  et  Hellènes,  mal- 
gré la  distinction  faite  par  Pline,  ne  soient  qu'un  peuple,  et  que  la  for- 
me rigoureuse  de  ce  nom  soit  Selleni. 

*  Plut.  De  Fac,  Lunae. 

^  Hecatei  Abderitae,  frag.  1,  éd.  Didot. 
"  Tacite.  De  Mor.  German.  m. 


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4^7 
Hérodote  croyait  médiocrement  à  cet  Éridan,  par  une  raison 
qu'il  convient  de  citer  ici:  c'était  là  un  nom  grec'.  Par  des 
motifs  semblables  te  père  de  l'histoire  aurait  dû  ne  pas 
croire  à  l'existence  des  Ligures  du  pays  de  l'ambre,  puisque 
les  noms  de  Cycnus,  roi  des  Ligures,  et  surtout  son  père 
Sthénélus  sont  parfaitement  grecs.  Timée  n'était  pas  aussi 
incrédule;  il  ne  se  refusait  point  à  accepter  les  traditions  et 
les  noms  grecs  dans  le  nord-ouest  de  l'Europe,  et,  comme 
d'autres  écrivains,  il  les  attribuait  à  l'influence  des  Argonau- 
tes qui  avaient  découvert  un  passage  du  Pont-Euxin  à  la  mer 
du  nord*.  Selon  les  traditions  de  la  Gaule  une  partie  de  la 
population  de  ce  pays  descendait  des  colonies  doriennes  et 
de.  celles  des  Troyens'. 

Est-ce  là  une  fantaisie  des  anciens  ? 

Il  est  impossible  de  ne  pas  comparer  les  traditions  de 
ces  célèbres  Hyperboréens  avec  ces  Grecs  égarés  sur  des  pla- 
ges aussi  lointaines.  MM.  Alex,  Bertrand  et  d'Arbois  de 
Jubainville  n'hésitent  point  à  attribuer  une  réalité  historique 
à  ce  peuple,  qui  pour  certains  auteurs  anciens  n'était  qu'ima- 
ginaire, et  que  quelques  écrivains  modernes  regardent  com- 
me un  mythe*.  Nous  y  voyons,  de  même,  une  réalité  his- 
torique, mais  nous  ne  saurions  penser  aux  Celtes,  car  cette 
hypothèse  nous  paraît  inadmissible  '. 

Les  détails  qu'Hérodote  nous  racconte  sur  les  rapports 
religieux  des  Hyperboréens  avec  les  peuples  du  centre  de  ta 

*  Hérod.  III,  Il 5. 

*  Timaei  frag.  6,  éd.  Didot. 

*  Amm.  Marcell.  xv,  9. 

*Preller,  Griechische  Mythologie,  h,  p.  196. 

*  Alex.  Bercrand,  ouvr.  cil.  p.  16t.  D'Arb.  de  Jub.  ouvr.  cit.  p.  14?. 
Et,  considérant  les  Hyperboréens  comme  des  peuples  pré-celtiques, 

.  BeUoguet,  ouvr.  cit  p.  238. 


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Grèce;  l'itinéraire  qu'ils  faisaient  suivre  à  leurs  offrandes 
sacrées;  les  noms  de  leurs  envoyés  (des  noms  qui  ont  une 
physionomie  grecque)  sont  si  peu  mythiques  et  ont  un  ca- 
ractère tellement  historique  et  positif,  que  l'incrédulité  ne 
saurait  y  trouver  des  fondements  raisonnables;  l'aveu  mê- 
me d'Hérodote,  qui  d'ailleurs  se  montre  déjà  un  peu  scep- 
tique à  Pégard  de  l'existence  de  ce  peuple,  nous  semble  pré- 
cieux, lorsqu'il  assure  que  la  croyance  aux  Hyperboréens 
était  encore  vivante  du  temps  d'Homère'. 

L'oblitération  progressive  de  ces  traditions  chez  les  Grecs 
se  produit  dans  la  raison  directe  des  difficultés,  plus  grandes 
tous  les  jours,  que  rencontrent  les  Hyperboréens  à  envoyer 
leurs  offrandes  religieuses,  difficultés  qui  les  forcent  de  met- 
tre un  terme  à  leur  dévotion.  Tout  cela  nous  rappelle  cette 
dégénération  des  anciens  Grecs  occidentaux,  que  les  obser- 
vateurs modernes  ont  remarquée,  et  qu'on  expliquerait  mieux 
par  la  stagnation  des  mœurs  antiques,  par  opposition  à  cel- 
les des  Grecs  proprement  dits,  dont  la  civilisation,  due  à  des 
causes  complexes,  s'approcha  de  plus  en  plus  de  ce  raffine- 
ment que  nous  connaissons. 

La  légende  des  Hyperboréens  ne  comprend-elle  pas  le 
souvenir  de  tribus  aryennes  de  la  même  origine  que  les  Thra- 
ces,  les  Selloï,  Gnà'ci  etc.  qui  s'écartent  lentement  de  leurs 
frères,  et  dont  les  relations  deviennent  de  plus  en  plus  dif- 
ficiles et  cessent  enfin,  tandis  que  leurs  migrations  les  éloi- 
gnent graduellement  d'autres  tribus  qui  n'eurent  pas  besoin 
de  dépasser  le  sud-est  de  l'Europe  pour  trouver  une  nou- 
velle patrie  ? 

Voilà  ce  qui  nous  paraît  assez  probable;  et  dans  ce  cas 
le  nom  d'Hyperboréens  nous  montre  le  chemin  qu'ils  prl- 

'  Herod.  IV,  3i  et  suiv. 


,ï  Google 


409 
reni — le  nord;  et  entre  les  positions  que  leur  assigne  Héro- 
dote ou  Hécatée  d'Abdère  nous  croyons  qu'il  n'y  a  pas  à  hé- 
siter. D'après  Hérodote,  les  Hyperboréens  demeuraient  dans 
le  haut  nord,  à  une  grande  distance  occidentale  du  méridien 
du  golphe  Adriatique,  puisque  pour  aneindre  ce  golphe,  leurs 
^offrandes  à  Apollon  délien  traversaient  la  Scythie,  se  diri- 
geant le  plus  possible  vers  le  couchant,  et  prenaient  ensuite 
la  direction  opposée,  de  l'occident  à  l'orient,  traversant  la  Do- 
donc,  l'Eubée  et  la  Tênos. 

Cette  route  est  assez  étrange;  mais  il  est  plus  étrange 
encore  que  les  Scythes  aient  ignoré,  d'après  Hérodote,  ce 
que  c'étaient  ces  Hyperboréens  qui  traversaient  leur  pays  et 
qui  avaient  obtenu  que  les  Scythes  mêmes  transportassent 
les  offrandes  jusqu'aux  frontières  de  leur  pays,  pour  les  re- 
mettre aux  peuples  limitrophes,  qui  les  transmettaient  à  d'au- 
tres. 

D'après  la  version  d'Hécatée,  les  Hyperboréens  occupe- 
raient la  nord-ouest  de  l'Europe,  les  Iles  Britanniques  y  com- 
prises. La  route  de  ces  émigrants  serait  doac  celle  du  Rhin, 
et  l'itinéraire  des  adorateurs  d'Apollon,  depuis  le  pays  des 
Hyperboréens  jusqu'au  golphe  Adriatique  et  de  là  jusqu'à 
Délos,  traverserait  une  zone  étendue,  précisément  la  zone 
que  nous  voyons  occupée  par  les  vieux  peuples  indo-euro- 
péens, qui  précédèrent  les  Celtes*.  La  condescendance  et  la 
dévotion  avec  lesquelles  toutes  ces  peuplades,  étroitement 
liées  para  une  origine  commune,  se  prêtent  à  recevoir  et  à 

'Une  tradition,  dont  nous  ne  discuterons  pas  la  valeur,  admettait 
une  étroite  parenté  entre  les  Vcnèies  de  l'Armorique  et  ceux  de  l'Adria- 
tique (Sirab.  IV,  4).  Les  raisons  qui  portèrent  les  écrivains  grecs  à  don- 
nerau  P6  le  nom  d'Éridan  (Rhin),  en  une  certaine  époque,  auraient  peut- 
être  un  fondement  qui  nous  échappe,  et  qui  modifierait  sans  doute  cette 
absurdifé. 


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410 

transmettre  les  dons  destinés  à  Apollon,  un  dieu  qu'elles 
adorent,  ou  qu'elles  doivent  connaître  du  moins,  perdent 
îiinsi  tout  ce  qu'elles  offraient  d'étrange  par  la  narration 
d'Hérodote,  lorsqu'il  attribuait  cette  piété  touchante  à  des 
peuples  barbares,  ayant  des  mœurs  et  des  religions  diffé- 
rentes. 

On  verra  par  ce  que  l'on  va  lire  que  l'existence  de  peu- 
ples d'origine  aryenne  dans  le  nord-ouest  de  l'Europe,  au 
temps  d'Homère,  ne  saurait  être  révoquée  en  doute.  Il  est 
impossible,  cependant,  d'admettre  que  ces  peuples  hyperbo- 
réens  ou  d'autres,  aient  été  des  Celtes,  puisque  Hésiode  mê- 
me ne  connaît  que  des  Ligures  dans  ces  régions.  Ce  n'est 
que  bien  longtemps  après  que  nous  voyons  les  Celtes  paraî- 
tre sur  la  scène  de  l'histoire. 

Est-ce  la  civilisation  des  Hyperboréens  que  l'archéolo- 
^e  surprend  dans  le  nord-ouest  et  l'occident  de  l'Europe? 

Quoique  cette  question  ne  puisse  avoir  une  solution 
définitive,  il  est  hors  de  doute  que  la  civilisation  dont  les 
archéologues  nous  révèlent  l'existence  dans  ces  régions,  dé- 
montrée par  ses  monuments  mégalithiques,  l'importation  de 
l'agriculture  et  les  perfectionnements  corrélatifs,  civilisation 
qui  se  succède  immédiatement  à  celle  de  l'homme  des  ca- 
vernes, est  d'origine  aryenne.  La  connaissance  des  procédés 
agricoles  et  le  caractère  symbolique  des  gravures  de  ses 
monuments  le  prouvent  assez.  Quand  même  nous  accor- 
dions que  l'arrivée  dans  le  nord  du  peuple  célèbre  des  dol- 
mens soit  antérieure  à  celle  des  Hyperboréens  de  la  tradition 
grecque,  tous  les  deux  n'en  appartiendraient  pas  moins  in- , 
dubitablement  à  la  grande  masse  d'émigrants  indo-europé- 
ens, qui,  par  des  causes  que  nous  ignorons,  traversèrent  l'Asie 
et  entrèrent  en  Europe,  et  dont  les  Thraces  ne  seraient  que 


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4" 
l'avanl-garde,  selon  l'opinion  de  quelques-uns';  et  il  n'est 
pas  moins  vrai  qu'il  devait  exister  chez  ces  deux  peuples  un 
fond  commun  de  croyances,  de  mœurs  et  de  langue. 

Par  des  motifs  semblables,  tout  en  supposant  que  les 
Hyperboréens  ne  furent  point  les  premiers  occupants  aryens 
du  nord-ouest  de  l'Europe,  et  qu^ils  suivirent  à  peine  la 
route  que  d'autres  peuples  congénères  avaient  frayée  avant 
eux,  leur  légende  indiquerait  encore  ce  vieux  chemin  du  Rhin*, 
et  viendrait  à  l'appui  de  la  distribution  géographique  des 
dolmenSf  qui  nous  montre  de  quelle  manière  les  uns  et  les 
autres  se  répandirent  depuis  le  nord  jusqu'à  l'extrémité  mé- 
ridionale de  rEurope. 

En  effet,  par  des  moyens  indépendants  de  tout  témoi- 
gnage historique,  l'archéolc^ie  a  démontré  que  le  peuple  des 
dolmens  vint  de  l'orient;  qu'il  paraît  sur  les  rivages  de  la 
Baltique,  descend  graduellement  la  côte  occidentale  de  la  Gau- 
le, occupe  les  îles  opposées  à  cette  côte,  c'est-à-dire  l'Angle- 
terre et  l'Irlande,  et  va  toujours  en  se  répandant  sur  le 
littoral  du  nord  de  l'Espagne,  sur  le  littoral  de  l'occident  et 
sur  celui  du  sud,  jusqu'aux  limites  de  l'Andalousie  actuelle, 
où  il  s'arrête';  et,  chose  étrange,  c'est  précisément  sur  cette 

'  D'Arb.  de  Jub.,  ouvr.  cit.,  p.  274  et  suiv. 

*  Les  traditions  de  l'Irlande,  dit  M.  H.  Martin  (Revue  d'Anthropoh- 
gie,  »*■•  série,  voL  n.  p.  199),  font  venir  ses  habitants  de  là  Thrace,  de 
la  Grèce  et  de  l'Asie  Mineure.  D'après  les  traditions  cambriques,  Hu 
Gadara  et  son  peuple  partirent  du  pays  de  Haf,— où  Constantinople  se 
trouve  aujourd'hui,  ajoute  une  glose. 

'  Voy.  Fergusson,  Rude  Slone  Monuments,  carte  à  la  fin  du  volume; 
Philippe  Simôes,  Introjucçâo  d  Archeologia  da.  Peninsula  iberica  p.  98 
et  suiv.  La  limite  des  dolmens  dans  le  littoral  du  sud  se  trouve  dans  le 
territoire  des  Tartessîens  {Aviénus,  Ora  maritima  v.  463-64),  peuples 
dont  les  Massiens  ou  Mastiens  étaient  un  rameau,  d'après  d'autres  écri- 
vains. 


1^ 


41^ 
zone,  que  nous  retrouvons  l'enchaînement  de  traditions  et 
de  noms  grecs  !  ' 

Cest  donc  un  fait  hors  de  toute  discussion,  qu''à  des  épo- 
ques reculées,  postérieures  cependant  à  Toccupation  sud-est 
de  l'Europe  par  les  Thraces,  une  grande  masse  de  peuples 
aryens  firent  leur  apparition  dans  le  nord  et  se  répandirent 
jusqu'au  sud  de  l'Europe,  choississant  de  préférence  le  lit- 
toral pour  s'y  établir.  On  ne  saurait,  toutefois,  décider  en 
conscience,  si  cette  marche  fut  précédée  par  des  tribus  an- 

Pour  suivre  la  marche  de  ce  peuple  célèbre  dei  dolmens  il  faut  tra- 
verser la  Méditerraoée  et  parcourir  le  nord  de  l'Afrique,  jusqu'à  Coas- 
tantine.  Ces  monumeuis  appartiennent-ils  à  quelques-uns  des  peuples 
qui  s'étaient  liés  contre  les  Égyptiens  (voy.  Ci^abis,  Études  sur  P antiquité 
historique,  p.  1 73  et  suiv.)  parmi  lesquels  nous  trouvons  les  Masbaoushas, 
Maxyesd'Hérodote,peuple  agriculteur?  C'est  l'opinion  de  M. Heori  Mar- 
tin (Études  d'archéologie  celtique,  p.  sSS  et  suiv.),  opinion  qui  nous  pa- 
raît aussi  juste  que  l'origine  celtique  qu'il  pr€te  à  ces  peuples  nous  sem- 
ble âtre  inacceptable.  Adolphe  Piciet,  cependant,  retrouvait  des  noms 
celtiques  parmi  les  noms  de  rivières  en  Afrique.  (Revue  celtique,  a,  p. 
437  et  suiv.;  voy.  toutefois  ibid.  iti,  p.  568  et  suiv.)  ;  et  Diefenbach  nous 
racconte  qu'une  dame  du  pays  de  Galles  rencontra  dans  un  bazar  en 
Algérie  des  gens  de  l'intérieur  de  l'Afrique,  dont  elle  put  comprendre 
la  langue  avec  le  secours  du  cambrique  (Celtica  n,  s.  partie,  p.  136). 

Pictet  donne  pour  titre  â  son  travail  -Une  énigme:  C'est  aussi 
une  énigme  que  nous  étudions  dans  cet  écrit.  Nous  ne  poserons  main- 
tenant d'autre  question  que  celle-ci:  les  Massiens  de  l'Espagne  sont-ils 
étrangers  aux  ^faxyes  d'Hérodote,  aux  Mashaousbas  des  inscriptions 
égyptiennes? 

'  Nous  avons  suivi  les  traditions  grecques  depuis  la  Baltique  jus- 
qu'à la  Lusitanie.  Continuant  ces  recherches  jusqu'à  la  limite  des  Tar- 
tessiens,  pour  ne  pas  citer  la  fondation  dlllysippo  par  Ulysse,  nous  les 
retrouvons — dans  le  port  de  Ménesthée:  Ménesthée  serait  un  roi  grec 
(Strab.  ni,  II,  i3)  auquel  les  habitants  de  Gadès  sacrifiaient  (Philostr. 
Vita  Âpoll.v,  iv);  à  Gadès:  les  Gaditains  étaient  d'origine  grecque,  se- 
lop  phîlostrate  (ibid);  à  Menace:  par  l'aspect  de  ses  rwnes  on  rg- 


,ï  Google 


4i3 

térieures  aux  Hyperboréens,  ou  si  ces  tribus  en  faisaient 
partie;  cela  n'a,  cependant,  aucune  influence  sur  le  problème 
ethnique,  puisqu'elles  ont  dû  avoir  une  même  origine.  En  e£fet, 
que  sous  le  nom  d'Hyperboréens  soient  compris  des  peuples 
de  la  même  famille  des  Sellot  et  des  Graïct  etc,  et  que  ces 
peuples  aient  suivi  la  même  route,  indiquée  aujourd'hui  par 
les  bornes  milliaires  des  dolmens,  c'est  là  une  circonstance 
aussi  peu  surprenante,  que  la  marche  d'autres  émigrants  quel- 
conques, qui  firent  ce  long  voyage,  partant  du  même  point, 
ce  que  nous  laisseraient  entrevoir  les  vestiges  des  traditions 
grecques. 

Les  documents  phéniciens  pourraient  répandre  une  gran- 
de clarté  sur  ce  monde  mystérieux  que  les  sciences  archéo- 
logiques s'efforcent  de  ressusciter. 

C'est  sans  doute  avec  des  populations  préceltiques,  do- 
minantes dans  la  vaste  zone  des  dolmens,  que  les  Tyriens 
commencent  à  avoir  des  rapports  dès  le  xii  siècle,  dans  leur 
commerce  avec  le  pays  de  l'étain  et  de  i'ambre. 

connaissait  une  ville  grecque  (Strab.  ici,  iv,  2)  ;  à  Abdère,  ou  l'on  voyait 
des  monuments  du  voyage  d'Ulysse.  (Id.  m,  iv,  3). 

De  la  rivière  qui  baignait  les  frontières  des  Tarteisiens,  dit  Aviénus, 
reproduisant  des  auteurs  d'une  grande  antiquité  : 

Theodona  illic  (nec  slupore  sil  tibi 
Quod  in  feroci  barbaraque  sat  loco 
Cognomen  hujus  Graeciae  accipis  sono) 
Prorepil  amnis. 

Ora  marititna,  v.  4S7-60. 

II  nous  semble  convenable  d'avertir  que  ces  traditions  remontent 
à  des  temps  préhistoriques,  et  sont  complètement  séparées  deltiistoire 
de  Marseille  et  de  ses  colonies  dans  l^spagne  orientale. 


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414 

Ce  peuple,  malheureusement,  est  le  moins  communica- 
tif  du  monde  et  sa  réserve  semble  en  outre  obéir  à  un  cal- 
cul de  marchant,  qui  gagne  à  cacher  sous  le  plus  profond 
mystère  la  source  des  richesses  énormes  dont  il  veut  faire 
le  monopole  '. 

Outre  le  document  du  vt  siècle,  qui  nous  a  été  conservé 
par  un  vrai  miracle,  les  renseignements  que  nous  devons 
aux  Phéniciens  sur  l'Occident  se  trouvent  répandus  et  dé- 
figurés dans  les  mythographes  et  d'autres  écrivains  anciens, 
et  le  déchiffrement  et  la  collection  de  ces  matériaux  attend 
encore  le  contrôle  d'une  critique  sévère. 

Pour  quelques  savants,  par  exemple,  Albion  et  Dercy- 
nus,  fils  de  Neptune,  Ligus  et  Bergion,  adversaires  d'Her- 
cule, ne  sont  que  les  insulaires  de  la  mer  du  nord  et  d'au- 
tres peuples  du  nord-ouest  de  l'Europe,  qui  reçurent  peu 
hospitalièrement  les  enfants  de  Meikart'. 

Cette  interprétation  paraît  être  tout-à-fait  justifiée  par 
le  périple  du  vi  siècle,  lequel  connaît  encore  cenains  Albions 
et  Dranganes  et  plus  d'un  peuple  ligurien,  dans  les  régions 
où  le  théâtre  de  ces  scènes  peut  mieux  se  placer'. 

Ce  qui  est,  toutefois,  incontestable  c'est  que  le  nom 
collectif  des  peuples  occidentaux  dans  la  géographie  ancienne 


'  On  pourrait  citer  un  grand  nombre  de  preuves.  Un  seul  fait  doit 
suffire.  Dans  des  temps  relativement  récents,  un  commerçant  phénicien 
se  voyant  suivi  par  un  navire  romain  qui  voulait  connaître  ce  secret, 
sacrifia  dans  un  naufrage  prémédité  son  bâtiment  avec  l'équipage,  sûr 
de  ce  aue  ses  persécuteurs  auraient  le  même  sort,  ce  qui  arriva,  en  ef- 
fet. Le  propriétaire  du  navire  phénicien  fui  le  seul  qui  échappa,  et  il 
fut  dédommagé  par  le  trésor  public  de  toutes  les  pertes  qu'il  avait  fai- 
tes. (Strab.  m,  v,  M.) 

*  D'Arb.  de  Jub.  ouvr,  cit.  p.  3o8, 

* Comp.  Aviénus,  Ora  mar.  V.  ii3;  i3oetsuiv.;  igT-g. 


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4'3 

était  celui  de  Ligures,  comme  on  le  voit  encore  dans  un  frag- 
ment d'Hésiode,  où  nous  voyons  le  nord  occupé  par  les 
Scythes,  le  sud  par  les  Éthiopiens  et  l'occident  par  les  Ligu- 
res '.  Or  cette  géographie  ne  saurait  être  que  phénicienne, 
car  dans  le  temps  d'Hésiode,  et  même  quelques  siècles  plus 
tard,  les  Grecs  ne  pouvaient  avoir  sur  l'occident  et  les  peu- 
ples occidentaux  d'autres  renseignements,  que  ceux  que  les 
Phéniciens  voudraient  bien  leur  communiquer. 

C'étaient  donc  des  Ligures  les  peuples  que  les  Phéniciens 
regardaient  comme  les  représentants  de  la  civilisation  de 
l'occident;  et  les  Albions  et  les  Oestrymnides,  que  le  docu- 
ment du  VI  siècle  nous  cite  en  Angleterre,  les  Hiberniens  en 
Irlande,  les  Cempses,  les  Cynètes  et  les  Tanessiens  à  l'ouest 
et  au  sud-ouest  de  l'Espagne,  ne  sont  à  coup  sûr  que  ditlé- 
rentes  branches  de  cette  grande  collectivité  de  peuples,  les- 
quels, par  l'affinité  frappante  de  leurs  mœurs  et  de  leur  race, 
avaient  droit  à  une  dénomination  commune  devant  la  théo- 
rie géographique,  mais  qui,  probablement,  recevaient  des 
appellations  ethniques  plus  ou  moins  spéciales  dans  la  no- 
menclature d'un  observateur  qui  les  passait  particulièrement 
en  revue. 

Ceci  est  d'autant  plus  vraisemblable  que  le  périple  con- 
naît encore  deux  peuples  portant  le  nom  spécial  de  Ligures, 
l'un  dans  le  sud  de  l'Angleterre,  les  célèbres  Ligures  de  la 
Baltique,  qui  s'étaient  enfuis  devant  les  Celtes,  l'autre  dans  1  e 
nord-ouest  de  l'Espagne,  aux  nord  des  Cempses  et  qui,  se- 
lon nous,  est  identique  au.\  Lusitaniens  des  écrivains  posté- 
rieurs*. 


'Hesiodi  frag.,  i32,  éd.  Didot. 

'Les  personnes  compétentes  diront  si  le  nom  de  Ligures,  ou  plutôt 
Liguses,  selon  les  démonstrations  de  M.  de  Jubainville  (ouvr.  cit.  p.  22  i-ï) 


ngic 


416 

Le  nom  de  Ligures  et  les  traditions  qui  ne  peuvent  se 
rapporter  qu'à  ce  peuple  se  répètent,  d'ailleurs,  dans  le  sud- 
ouest  de  l'Espagne  d'une  manière  toute  spéciale.  Un  promon- 
toire des  Tartessiens  avait  le  nom  de  Ligustique*.  Le  Tar- 
tessus,  Bétis,  avait  sa  source  dans  un  lac  ligustique%et  près 
de  celui-ci  il  y  avait  une  ville  Ligystine,  dont  les  habitants 
étaient  appelés  Ligures  '.  Dans  le  vii  siècle  un  roi  des  Tartes- 
siens  pone  le  nom  d'Arganthonius  *,  nom  arj'cn  sans  dou- 
te, et  que  M.  de  JubainvUle  croit  être  ligurique  ^.  Un  roi 
des  Cynètes,  Habis,  introduisit  l'agriculture  dans  le  sud-ouest 
de  l'Espagne*,  et  ce  grand  bienfait  ne  saurait  être  attribué 
qu'aux  Ligures,  selon  le  sentiment  de  M.  de  Jubainville. 

L'invasion  ligurienne,  d'après  ce  savant,  avait  eu  Heu 
un  peu  plus  tôt  que  celle  des  Celtes,  au  vi  siècle  envi- 
ron, et  dans  la  direction  de  l'orient  à  l'occident.  Ces  deux 
affirmatives  nous  paraissent,  toutefois,  insoutenables.  Les 
traditions  relatives  à  Habis,  celui  qui  introduisit  l'agriculture 
dans  le  sud-ouest  de  la  Péninsule  et  qui  distribua  son  peu- 
ple dans  sept  villes  ',  sont  de  celles  qui  appartiennent  au  pre- 

et  le  nom  dt:  Lusiiani  ne  sonc  pas  identiques.  Le  sufHxe  -ttani  est  rela- 
tivement moderne,  puisque  nul  écrivain  vraiment  ancien  ne  le  connaît, 
etLustVuitipnraitêtreà/j'^^^ceque  Turiefani  est  à  Tarlessii.  Il  fau- 
drait admettre,  il  est  vrai,  une  forme  ligusilani  et  sa  contraction  liusi- 
lani,  iusitaiti  par  la  chute  du  g  et  l'assimilation  des  voyelles;  mais  la 
chute  du  g  dans  les  langues  appelées  néo-celttques  est  un  fait  st  com- 
mun, que  l'objection  qui  aurait  un  tel  fondement  nous  paraît  peu  im- 
portante. 

<  Ëratosthàne,  dans  Strabon  {ii,  i,  40;  11.  iv,  8.) 

'  Aviénus,  Ora  mar.  v.  i85. 

'  Stéphanus,  De  urbibus.  v.  Ligystine. 

*Hérod.  I,  i63. 

■*  D'Arb.  de  Jub.  ouvr.  ciL  p.  344. 

•-'Justin,  ïLiv,  4. 


ly  Google 


4' 7 
mier  cycle  de  la  civilisation  d'un  peuple,  et  ne  peuvent  se 
créer  des  racines  que  dans  un  monde  encore  barbare'. 

On  ne  saurait  en  détacher  celles  qui  font  allusion  à  la 
guerre  des  dieux  avec  les  titans  dans  le  bois  des  Tartessiens  ', 
ainsi  que  les  prëtensions  des  Tartessiens  à  une  littérature  qui 
aurait  plus  de  six  mille  années  d'existence^.  Ce  serait  défen- 
dre, à  notre  avis,  une  cause  insoutenable  que  d'admettre 
qu'une  civilisation,  dont  Gardons  et  Habis  seraient  les  chefs 
historiques  ou  mythiques,  fût  devenue  célèbre  dans  le  sud- 
ouest  de  l'Espagne,  surtout  par  l'innovation  de  l'agricultu- 
re, et  cela  au  vi  siècle,  c'est-à-dire  plusieurs  siècles  après  que 
les  Tyriens  avaient  exploré  ces  régions  et  y  avaient  répan- 
du leur  civilisation. 

Selon  nous,  les  affirmatives  de  Tliucydide  viennent  ajou- 
ter à  ce  groupe  de  faits  autant  de  certitude  qu'elles  en  re- 
çoivent. 

D'après  cet  écrivain,  les  Sicanes  étaient  des  Ibères  que  les 
Ligures  chassèrent  des  bords  du  fleuve  Sicanus,  dans  l'Ibérie*. 
L'apparition  des  Ligures  dans  l'ibérie  serait  donc  antérieure 

■  Justin  fait  une  remarque  presque  semblable  lorsqu'il  rapproche 
Habis  des  fondateurs  de  Rome. 

»  Id.  ibid. 

^Strab.  m,  1,  5. 

*  Thucyd.  VI,  3.  M.  de  Jubainville  (ouvr.  cit.  p.  ao  et  suiv.)  prétend 
démontrer  que  le  Sicanus  de  Thucydide  n'est  point  le  Xucar  de  l'Es- 
pagne, mais  bien  le  Sequana  des  Gaules.  Cette  opinion,  que  Disfenbach 
croyait  déjà  avoir  peu  de  probabilité  {Origines  Europaeae,  p.  gS),  est 
tout-a-fait  conjecturale  ;  ce  qui  est  certain,  c'est  que  le  Sicanus  de  l'Es- 
pagne était  connu  d'autres  écrivains  avant  Thucydide,  tandis  que  ce 
n'est  que  bien  plus  tard  que  l'on  entend  parler  du  Sequana;  et  il  est 
même  douteux  si,  à  l'époque  dont  il  s'agit,  !e  fleuve  avait  déjà  ce  nom, 
ou  bien  un  autre  tout-à-fait  différent,  comme  il  est  arrivé  à  rArar,par 
exemple,  selon  quelques  écrivains. M.  Mîillenhoff  (ouvr.  cit-  p.  i6S)  veut 

3o« 


,ï  Google 


au  XV  siècle  ',  de  beaucoup  antérieure  à  l'arrivée  des  Tyriens 
à  Gadès,  et  en  réunissant  les  éléments  épars  que  ces  sour- 
ces nous  fournissent,  nous  voyons  paraître  avant  le  xv  siè- 
cle dans  le  sud-ouest  de  l'Espagne  un  peuple  agricole,  et 
partant  arj'en,  ligurien  d'après  les  traditions  de  la  Sicile  re- 
cueillies par  Thucydide  et  selon  les  observations  des  Phéni- 
cicns,iequel  par  le  plus  grand  développement  de  sa  civili- 
sation et  de  son  organisation  politique,  par  la  supériorité  de 
ses  armes  ou  de  sa  stratégie,  sut  dompter  les  Ibères  qui  ne 
prirent  pas  la  résolution  des  Sicanes,  et  établir  dans  cette 
partie  de  l'Espagne  un  domaine,  dont  il  est  demeuré  un 
souvenir  durable.  A  notre  avis,  un  grand  nombre  de  faits 
de  Phistuirc  ancienne,  considérés  dogmatiques,  sont  bien 
loin  de  réunir  à  leur  appui  autant  de  présomptions  légiti- 
mes. 

En  ce  qui  concerne  la  marche  de  ces  envahisseurs,  on 
dirait,  se  fondant  sur  les  renseignements  que  Thucydide  nous 
fournit,  que  la  pression  exercée  par  les  Ligures  sur  les  Ibè- 
res eut  lieu  dans  une  direction  opposée  à  celle  admise  par 

que  la  notice  du  Thucydide  soJt  fondée  sur  un  passage  d'Hécatée  de 
Milet,  le  quel  nous  a  clé  conservé  (Hec.  frag.  14,  éd.  Didot.);  mais  cette 
opinion  est  aussi,  elle-même,  une  conjecture. 

En  bit  de  conjectures,  celle  qui  suppose  qu'Aviénus  {Ora  mariti- 
tna,  V.  4S0-1)  eût  recours  à  ce  passage  d'Hécatée  nous  semble  la  mieux 
fondée,  puisque  le  poète  nous  dit  clairement  que  cet  ancien  auteur  fut 
l'un  de  ses  informateurs  (v.  ^3)  :  et,  vu  que  la  notice  de  Thucydide  con- 
tient une  particularité  remarquable,  dont  Avîénus  aurait  profilé  sans 
doute,  s^il  l'avait  lue  dans  Hécatée,  il  nous  semble  probable  que  Thu- 
cydide ait  puisé  dans  une  autre  source  ses  informations. 

'  L'occupation  de  la  Sicile  par  les  Sicanes  est  antérieure  â  celle  des 
Sicules  (Ligures),  et  on  place  celle-ci  en  l'année  1400,  cette  date  étant 
regardée  comme  la  première  donnée  chronologique  poative  de  l'his- 
toire de  l'occident. 


ly  Google 


4".) 

M.  D'Arbois  de  Jubainville,  c'est-à-dire  de  l'occident  à 
l'orient',  et  avec  ces  renseignements  coïncide  cette  circons- 
tance, qu'on  ne  retrouve  des  souvenirs  vivants  des  Ligures 
et  des  traditions  liguriennes  que  dans  le  sud-ouest  et  l'onest 
de  l'Espagne,  reliés  à  ceux  des  Ligures  d'Albion  et  de  ta 
Baltique. 

C'est  comme  si  les  Ligures  avaient  suivi  ta  marche  du  peu- 
ple des  dolmens.  Que  ceux  qui  se  piquent  d'upe  plus  grande 
sagacité,  s'efforcent  de  séparer  ces  deu\  peuples.  Quand  ù 
la  chronologie,  le  peuple  mystérieux  des  dolmens  est  le  pre- 
mier représentant  de  la  civilisation  aryenne  dans  l'occident 
et  il  occupe  lentement  et  successivement  le  littoral  de  PEu- 
rope,  depuis  la  Baltique  jusqu'aux  Tanessiens-. 

>  Si  nous  en  croyons  un  des  auteurs  suivis  par  Aviénu^  le  tieuve 
qui  donna  son  nom  aux  Ibères  no  fut  poini  i'Ébre  connu,  mais  bien  un 
autre  qui  coulait  à  l'occident  du  détroit  (Ora  mar.  v.  249-52).  Les  dou- 
tes soulevés  par  les  textes  de  Thucydide,  Philiste,  etc.  viennent  princi- 
paletneni,  selon  nous,  de  la  surprise  causée  par  la  singulière  destinée 
de  ces  Rigiiifs  de  l'Espagne,  qui  ne  s'arrêtent  que  dans  la  Sicile.  Mais 
nous  ne  connaissons  rien  des  péripéties  de  cette  migration,  et  la  criti- 
que n'a  pas  plus  de  droit  de  rejeter  ce  fait,  seulement  parce  qu'il  est  obs- 
cur et  peu  vraisemblable,  qu'elle  ne  rejette  tant  d'autres  qui  ne  le  sont 
pas  moins  et  qu'elle  laisse  passer  sans  objection. 

De  notre  part,  nous  sommes  forcés  par  l'évidence  à  reconnaître  la 
présence  d'un  peuple  agricole  et  constructeur  des  dolmen^,  deux  fois 
donc  différent  des  Ibères  (dans  le  sens  restreint  de  ce  mot)  lequel  domina 
depuis  l'extrémité  occidentale  de  la  Péninsule  jusques  près  du  Sicanus; 
et  les  textes  qui  nous  occupent,  s'ils  n'existaient  pas, devraient  être  in- 
ventés, qu'on  nous  permette  cette  exagération.'  La  direction  qu'ils  prê- 
tent à  la  fuite  des  Ibères,  tout  en  omettant  les  aventures  de  leur  marche 
jusqu'à  la  Sicile,  est  inévitable,  et  rend  impossible  l'hypothèse  d'un  cou- 
rant d^nvasion  par  l'orient. 

'  Les  limites  des  Tanessiens  étaient  près  du  tieuve  Sicanus  (Avié- 
nus,  Ora  Mar.  v.  46$  et  suiv.) 


.yGogflk 


l.es  Ligures  de  la  géographie  phénicienne,  considérés 
par  les  Phéniciens  comme  les  représentants  de  la  civilisa- 
tion occidentale,  et  dont  nous  retrouvons  les  traces  depuis 
la  Baltique  jusqu'aux  Tartessiens,  se  montrent  déjà  avant  le 
XV  siècle  dans  le  sud-ouest  de  l'Espagne. 

11  est  impossible  d'admettre  la  priorité  du  peuple  des  dol- 
mçns  et  une  seconde  migration,  celle  des  Ligures,  qui  réduit 
la  première  ù  une  position  secondaire  et  subordonnée,  parce 
que,  d'après  les  observations  de  M.  Alex.  Bertrand,  l'exa- 
men des  monuments  de  cette  époque  démontre  évidemment 
une  forte  organisation  communale,  une  autonomie,  enfin*. 
Et  la  difficulté  s'accroît  lorsque,  après  avoir  cherché  les  res- 
tes- de  la  civilisation  de  ces  fameux  Ligures  de  l'occident, 
dans  l'opinion  auctorisée  des  Phéniciens  qui  les  connais- 
saient si  bien,  nous  rencontrons  ù  peine  les  restes  de  la  ci- 
vilisation du  peuple  des  dolmens,  qui  paraît  avoir  pris  la 
précaution  de  marquer  d'autant  de  cachets  les  monuments 
et  Içs  villes  qu'il  éleva,  afin  qu'on  ne  pût  les  confondre  avec 
les  travaux  d'aucun  autre  peuple^. 

Quand  à  nous,  il  nous  est  impossible  de  résister  à  l'évi- 
dence que  nous  impose  cette  série  de  coïncidences.  II  nous 
semble  tout-à-fait  probable  que  les  révélations  de  l'archéo- 
logie et  les  renseignements  historiques  d'origine  phénicienne 
sur  les  anciens  Ligures  occidentaux  se  rapportent  ensemble 
à  un-  B«i4  fsit  ethnologique,  auquel  le  subside  des  traditions 
sur  les  Hyperboréens  n'est  pas  étranger*. 

<  Alex.  Bertrand,  ouvr.  cité,  préface,  xii. 

'  Nous  voulons  parler  des  cercles,  des  spirales,  etc.  qui  se  trouvent 
graviis  sur  les  dolmens  et  les  mines  de  nos  vilks  mortes. 

^  Plusieurs  écrivains  ont  vu  dans  les  temples  circulaires  des  Hyper- 
boréens, cités  par  Hécatée  d 'Abdère,  les  célèbres  monuments  de  Stone- 
henge  et  d'Avebury.  (Voy.  Belloguet,  ouvr.  cit.  p.  Si8). 


ly  Google 


4a  I 

Personne  ne  pourra  démontrer  que  tous  ces  renseigne- 
ments aient  trait  à  un  seul  peuple.  Il  est  plutôt  probable  que 
les  populations  arj^ennes  qui  occupèrent  le  nord-ouest  et 
puis  l'occident  de  l'Europe,  aient  appartenu  îi  des  migra- 
tions différentes*,  suivant  toutes  la  même  route,  mais  le  plus 
souvent  respectant  le  territoire  déjà  occupé  par  des  peuples 
de  leur  race,  ce  qui  explique  leur  rapide  propagation  le  long 
du  littoral*.  Nous  ne  pouvons  voir  dans  le  peuple  des  dol- 
mens, ou  ligurien  suivant  les  renseignements  des  Phéni- 
ciens, qu'une  foule  de  tribus,  plus  ou  moins  étendues,  cha- 
cune jouissant  de  son  autonomie,  telles  que  nous  les  voyons, 
par  exemple,  en  Espagne,  à  Pépoque  deâ  Romains,  ou  en 
Angleterre  du  temps  d^Agricole;  et  quoique  leur  fond  eth- 
nique et  moral  ait  dû  être  identique,  on  ne  saurait  leur  prê- 
ter une  véritable  unité,  condition  que  les  Grecs,  maigre  leurs 
rêves  de  panhellénisme,  ni  les  autres  tribus  aryennes  du 
sud-ouest  n'atteignirent  jamais. 

Ce  qui,  cependant,  est  plus  important  dans  notre  ques- 
tion, c'est  de  consigner  que,  bien  avant  l'apparition  des  Cel- 
tes en  occident,  toute  la  région  où  nous  voyons  les  dolmens 
s'étendre,  était  occupée  et  dominée  par  une  chaîne  de  peu- 
ples d'origine  atyenne,  des  Ligures,  des  Selloï,  des  Grdid, 
etc.,  peu  importe  le  nom,  qui  y  avaient  implanté  une  civili- 
sation à  eux,  c!evant  partout  dans  cette  région  des  monu- 
ments, et  y  laissant  des  traditions,  et  par  conséquent  des 
noms  ethniques  et  locaux. 

La  solidité  de  ce  fait  nous  paraît  inébranlable. 

'  l.cs  anciennes  traditions  des  tics  Britannique):  l'assurent  e;;alc- 

'  La  préférence  donnée  au  littoral  n'est  point  particulière  â  ec.t 
mystérieux  peuples  occidentaux,  c'est  ce  qu'on  peur  voir  dans  TKucvdi- 


,ï  Google 


Si  nous  voulons  maintenant  déterminer  le  langage  parlé 
par  ces  peuples,  nous  pouvons  affirmer  à  priori  qu'il  de- 
vait appartenir,  nous  le  répétons,  au  groupe  gréco-italo-cel- 
tique  de  Schleicher',  et  si  l'élément  ligurien  y  prédominait 
réellement,  ce  que  plusieurs  pensent  à  l'égard  de  la  langue 
des  Ligures  donne  une  nouvelle  solution  à  la  toponymie  cel- 
tique de  la  Lusitanie,  solution  qui  peut  mettre  en  danger 
la  celticité  des  langues  hlberniennes  et  britanniques. 

Diefenbach  admettait  déjà  que  les  Ligures  étaient  l'un 
des  plus  anciens  peuples  de  l'Europe,  nommément  de  l'Es- 
pagne, et  il  croyait  même  possible  qu'ils  y  eussent  précédé 
les  Ibères,  et  soupçonnait  que  leur  langue  avait  des  rap- 
ports avec  celles  des  Celtes-. 

Celesia  attaqua  résolument  la  question.  Pour  lui  les 
Latins  étaient,  de  langue  et  d'origine,  une  branche  des  Li- 
gures^. 

M.  de  Jubainville  soutient  que  les  Ligures  étaient  un 
peuple  aryen  et  que  leur  langue  avait  des  rapports  si  inti- 
mes avec  le  celtique,  qu'il  est  impossible  de  distinguer  si 
les  noms  des  villes,  par  exemple,  appartiennent  à  l'une  ou  à 
l'autre  de  ces  deux  langues*. 

Les  noms,  malheureusement  peu  nombreux,  que  nous 
a  conservé  le  périple  phénicien,  lequel,  comme  nous  avons 
vu,  s'occupe  de  peuples  pré-celtiques,  hors  de  toute  influence 
des  Celtes,  méritent  une  attention  spéciale,  et  c'est  à  causé 
de  cela  que  nous  allons  les  reproduire: 

•  Compendimn  der  vergleicfiendea  Grammattk,  p.  9.  M.  de  Jubain- 
ville admet  un  groupe  antérieur  thraco-lllyro-ligure.  Nous  ne  sommes 
pas  complètent  s  pour  traiter  ces  questions  délicates. 

*  Ceitica,  11,  p.  24-41. 

"  Em.  Celesia,  Dell  'antichissimo  idioma  de'  Liguri. 
DArb.  de  Jub-  ouvr.  cit^  p.  aaS  et  suiv.  Dans  l'opinion  de  ce  sa- 


,ï  Google 


Albions,  - 

Ocstrymnides, 

Hiberniens, 

Dranganes, 

Cempses, 

Cynètes, 

Tartessiens, 

Ile  Pélagienne, 

lie  Achale, 

lie  Agonide, 

Fleuve  Ana'. 

Ces  noms,  dont  quelques-uns  seraient  considérés  sans 
hésitation  comme  celtiques  par  un  celtiste*,  ne  le  sont  nul- 
lement, ce  qui  prouve  que  la  toponymie  d'une  région,  mal- 
gré ses  étroites  affinités  avec  te  celtique,  peut  se  trouver 
absolument  en  dehors  de  l'influence  des  Celtes,  et  que  pour 
dissiper  le  doute  il  faut  aller  chercher  la  lumière  dans  un 


n  briga,  si  commune  en  Espagne,  n'est  pas  nécessaire- 
ment celtique.  G.  Humboldt  étaii  déjà  de  ce  sentiment  {Recherches  sur  les 
habitants  primitifs  de  l'Espagne,  p.  i  ïfi),  quoiqu'il  ait  voulu  par  là  faire 
la  distinction  entre  les  populations  celtiques  et  ibériennes  de  la  Pénin- 

'  Nous  nous  bornons  à  citer  ces  noms,  parce  qu'ils  appartiennent 
indubitablement  ù  l'auteur  du  périple,  ce  qui  peut  ne  pas  être  vrai 
pour  les  noms  qui  viennent  après  Ana,  dans  lesquels  il  peut  déjà  se 
trouver  un  mélange  de  renseignements  empruntés  à  d'autres  sources. 

<  Selon  M.  MiillenhofT  (ouvr.  cit.  p.  96)  le  nom  d'Albions  est  celti- 
que; mais  Albion  et  Dercynus  (Dranganes,  Jub.  ouv.  cit.  p.  3o8)  sont 
déjà  les  ennemis  de  Meikart,  c'est-à-dire,  ils  sont  déjà  mentionnés  quel- 
ques siècles  avant  l'arrivée  des  Celles  en  Angleterre.  Albion  peut  bien 
être  ligurique  (Jub.  ouvr.  cit.  p.  228).  Le  nom  Hiberni  est  également 
celtique,  selon  M.  Mullenhoff  (ibid.)  mais  il  pourrait  être  aussi  précelti- 


'fs 


4^4 
autre  ordre  de  recherches  étrangères  au  domaine  de  la  lin- 
guistique. 

Maintenant  toutes  les  recherches  auxquelles  on  peut 
avoir  recours  dans  ces  matières,  nous  montrent  que  la  Lu- 
sitanie  demeura  étrangère  à  Tinvasion  et  à  l'occupation  cel- 
tiques; qu'aucun  écrivain  ne  cite  la  moindre  analo^e  entre 
les  moeurs  et  les  usages  de  ses  habitants  et  ceux  des  Celtes, 
et  qu'une  telle  analogie  se  rencontre  plutôt  entre  eux  et 
d'autres  peuples  d'un  caractère  tout-à-fait  différent  de  celui 
des  Celtes;  que  dans  ce  qui  nous  reste  de  la  civilisation  de 
ses  habitants  on  découvre  le  caractère  de  celle  du  peuple 
des  dolmens  qui  y  demtura  jusqu'à  des  époques  relative- 
ment modernes  *:  si  tout  cela  est  hors  de  doute,  nous  ne  sa- 
vons pas  où  l'opinion  de  ceux  qui  soutiennent  ta  celticité 
des  Lusitaniens,  pourra  trouver  une  base  scientifique. 

Encore  une  fois,  pour  nous,  les  Lusitaniens,  de  mime 

que.  M.  W.  Stokes  (Revue  celtique,  ii,  p.  357)  le  dérive  du  sanskrit 
avtira,  occidenial.  M.  Saulcy  (Élude  topographique  sur  l'Ora  mariti- 
ma,  p.  8)  voit  dans  le  nom  Cyneticum  {Uitus)  un  nom  grec  Par  les 
mSmes  raisons  le  nom  de  Çynètes  et  çyneiicum  iupan  se  trouveraient 
dans  le  même  cas;  mais  ce  que  l'on  est  convenu  d'appeler  néo-celti- 
que a  atm,  qui  expliquerait  aussi  bien  le  fait.  Ana  est  un  nom  celtique- 
(A.  Pictet,  Revue  celtique,  ii,  p.  443). 

'  Les  explorations  que  nous  avons  faites  dans  quelques  dolmens 
de  la  vallée  d'Ancora,  où  il  y  a,  outre  un  dolmen  parfait,  quelques  ves- 
tiges de  quatre  autres  dolmens,  prouvent  que  ces  monuments  furent 
utilisés  même  après  la  conquête  romaine.  Les  lieux  entourés  de  rem- 
parts qtii  abritaient  la  population  de  cette  vallée  sont  toutefois  anté- 
rieurs aux  Romains,  ce  qui  est  démontré  par  leur  ressemblance  avec 
ceux  de  Sabroso.  A  Sabroso  on  trouve  les  mêmes  gravures  que  nous 
rencontrons  dans  les  dolmens  du  nord  de  l'Europe,  et  vu  le  caractère 
des  nombreuses  ruines  que  nous  avons  observées  dans  le  Minho,  leur 
population  a  dû  avoir  sans  doute  les  mêmes  usages  que  celle  Je  la 
vallée  de  l'Ave  et  de  l'Ancora. 


,ï  Google 


iîi 

que  les  Albions,  les  Oestrymnides,  les  Hiberniens,  les  Cem- 
pses,  les  Cynètes  et  les  Tartessiens  ',  sont  autant  de  rameaux 
de  la  vieille  migration  aryenne,  dont  on  ne  saurait  contes- 
ter Taffinité  de  moeurs  et  de  langage  avec  les  Ligures,  les 
Selloï,  les  Graîci,  etc.,  devant  les  affirmatives  des  anciens 
écrivains  et  les  raisons  que  d'autres  sources  nous  fournis- 
sent; et  nous  considérons  les  subsides  archéologiques  et  lit- 
téraires que  nous  venons  de  parcourir  comme  autant  de 
fragments  du  même  livre,  qui  nous  aident,  dans  les  limites 
du  possible,  à  étudier  cet  ancien  monde  pré-celtique. 

Les  légendes  grecques  comparées  à  celles  des  Iles  Bri- 
tanniques nous  indiquent  la- route  qu'ont  suivie  ces  émigrants 
dans  leur  marche  du  sud-est  vers  le  nord-ouest  de  l'Europe; 
l'archéologie  nous  démontre  qu'ils  se  sont  répandus  jusqu'au 
sud-ouest  de  l'Espagne,  où  l'histoire  a  recueilli  quelques-unes 
de  leurs  curieuses  traditions'. 

Quant  t  la  manière  dont  cette  diffusion  eut  lieu,  peut- 
être  l'histoire  n'est-elle  pas  aussi  muette  qu'on  le  croit  gé- 
néralement. Les  antiquaires  soupçonnaient  par  leurs  recher- 
ches que  la  préférence  donnée  par  le  peuple  des  dolmens  au 
littoral  et  l'occupation  des  terres  situées  à  l'intérieur  en  re- 
montant le  cours  des  fleuves,  suppose  une  connaissance 
quelconque  de  la  navigation. 

Le  périple  du  vi  siècle,  que  nous  avons  cité  plusieurs 

<  Comme  on  Toii,  nous  ne  nous  occupons  que  des  peuples  de  l'ouest 
et  du  sud-ouesi  du  littoral  de  l'Espagne;  nous  n'avons  pas  la  préten- 
tion d'affirmer,  cependant,  que  d 'autres  tribus  «liguriennes»  ne  se  soient 
répandues  dans  l'intérieur  de  la  péninsule,  ou  que  plusieurs  d'entre  elles 
n'aient  fraternisé  avec  les  populations  préexistantes. 

)  Les  traditions  relatives  à  Habis,  etc.  Dans  un  promontoire  des  Cy- 
nètes quelques  monuments  mégalithiques  paraissent  avoir  existé  fStrab. 
"i,',4)- 


X-'OQ 


426 

fois,  appelle  notre  attention  sur  l'audace  des  insulaires  d'Al- 
bion, les  Oestrymides,  qui  bravaient  la  mer  dans  leur  bar- 
ques de  cuir*,  barques  également  employées  par  les  Lusita 
niens  dans  la  navigation  de  leurs  rivières^.  Et  puisque  ces 
bateaux  sut  generis  ne  devaient  rien  à  l'imitation  de  ceux 
des  Phéniciens,  toutes  les  probabilités  sont  en  faveur  de  la 
conjecture,  que  cette  invention  est  antérieure  à  l'arrivée  de 
ces  navigateurs  célèbres^,  et  que  ce  fut  par  un  tel  moyen  que 
ces  peuples,  dans  des  navigations  peu  lointaines,  se  frayè- 
rent la  route  maritime,  qui  plus  tard  devint  si  célèbre  et 
si  fréquentée  grâce  aux  eiTorts  des  commerçants  phéni- 
ciens. 

A  des  époques  reculées,  avant  la  rédaction  du  périple, 
quoique  déjà  comprises  dans  la  période  phénicienne,  ces 
Oestrymnides  passent  du  nord  de  l'Espagne  dans  le  sud  de 
l'Angleterre*;  et  si  ce  fait^  ne  prouve  pas  que  ce  vieux  peu- 
ple s'était  familiarisé  avec  l'Atlantique  avant  les  Tyriens,  il 

'  Aviénus,  Ora  mar.  v.  iOï-8, 

'  Strab.  m,  m,  7. 

'  Du  temps  de  César  les  Vénùtes  de  l'Armorique  avaient  une  mari- 
ne remarquable  et  également  xui^renerù  (César,  De  BW/.  Gall.  III,  i3, 8.) 

*Aviénus,  Ora  mar.  v.  i55-8. 

=  Nous  ajouterons  que  si  Albion,  ennemi  de  Melkan,  représente  les 
insulaires  de  l'Angleierre  comme  il  semble  f  tre  certain,  ces  peuples 
t  déjà,  avant  les  Tyriens,  des  transports  maritinies,  bons 
;,  puisqu'ils  firent  la  traversée  du  continent  à  l'île.  Mais  il  y 
a  un  fait  qui  mérite  d'âtre  cité.  La  légende  confuse  d'Hercule  à  l'égard 
des  Hespéridcs,  du  pays  des  Hyperboréens,  sans  doute  les  Iles  Britanni- 
ques, présente  un  point  asse?  clair:  le  dieu  à  besoin  de  chercher  des 
renseignements  sur  la  position  des  Hespérides,  ce  qui  veut  dire  que  la 
connaissance  des  Cassitérides,  et  par  conséquent  de  la  route  maritime 
qui  devait  les  y  conduire,  fut  révélée  aux  Phéniciens  par  un  peuple  qui 
la  connaissait  déjà.  C'est  presque  nommer  les  Tartessicns. 


,ï  Google 


4^7 
est  du  moins  un  témoignage  de  ses  dispositions  remarqua- 
bles à  la  vie  maritime. 

Il  en  était  de  même  en  ce  qui  concerne  les  Tartcssiens 
qui  luttaient  de  témérité  avec  les  Phéniciens,  faisant  comme 
eux  ta  traversée  de  Tartessus  aux  Iles  Britanniques'. 

Il  est  incontestable,  nous  ne  devons  pas  Poublier,  que 
dès  un  temps  immémorial  ces  rivages,  le  long  desquels  s'éta- 
blit le  peuple  des  dolmens,  eurent  leurs  entrepôts  pour  le 
commerce,  et  que  ces  entrepôts  étaient  visités  par  des  mar- 
chants tartessiens  et  phéniciens  *i,  qui  s'entrecroisaient  dans 
cette  route  maritime  des  vieilles  migrations,  et  favorisaient 
la  civilisation  en  rendant  les  communications  plus  faciles', 
et  en  arrachant  les  populations  voisines  de  la  mer  à  la  vie 
sauvage  où  l'isolement  pourrait  les  faire  retomber. 

Si  les  considérations  qui  viennent  d'être  faites  ont  quel- 
que fondement,  les  Lusitaniens,  au  contraire  de  ce  que  Ton 
croit  généralement,  ont,  grâce  k  leur  position  géographique 


'  Aviénus,  Ora  mctr.  V.  114-115 

*  Ces  stations  étaient,  comme  nous  avons  chercha  à  démontrer  dans 
l'étude  sur  le  poëmed'Aviénus,dontnausavans  parlé  plus  haut:  la  baie 
de  Lagos,  la  baiedu  Sado,la  bâte  du  Tage,  Aveiro,  Lima,  la  baie  d'Arosa 
(Padron),  la  Corogne,  d'où  la  navigation  se  faisait  directement  vers  le 
sud  de  l'Angleterre. 

'  Les  rapports  intimes  qu'il  y  avait,  du  temps  de  César  entre  les 
Bretons  insulaires  et  ceux  du  continent  sont  bien  connus.  La  fuite  des 
Ligures  de  la  Baltique  et  leur  débarquement  sur  les  rivages  méridionaux 
de  l'Angleterre,  dans  le  voisinage  des  Albions,  autorise  la  supposition 
de  relations  identiques.  Les  communications  entre  les  Iles  Britanniques 
et  la  Lusilanie  se  trouvent  confirmée»  par  l'identité  des  noms  ethniques 
et  locaux,  qu1l  serait  trop  long  de  comparer  ici.  Nous  dirons,  toutefois, 
que  Pline  (/fùf.  iV(iMv,34)  nous  parle  de  certains  Albions  dans  le  nord- 
ouest  de  la  Péninsule. 


,ï  Google 


428 

un  arbre  généalogique  des  plus  purs  parmi  les  peuples  de 
l'antiquité. 

Formé  par  un  groupe  de  tribus,  appartenant  à  la  mi- 
gration aryenne  qui  pénétra  la  première  dans  l'Europe,  com- 
plètement libres  du  contact  des  Celtes,  qui  troublèrent  si  dé- 
plorablement  l'ethnographie  de  l'occident,  ce  peuple  sut  se 
maintenir  dans  le  nord-ouest  de  l'Espagne  avec  sa  vieille 
langue,  ses  vieilles  maurs  et  sa  civilisation  antique  enfin, 
jusqu^à  la  conquête  romaine  '. 

Les  différentes  révolutions  que  subit  la  Lusitanie  m'al- 
térèrent point  le  caractère  de  ses  habitants. 

Voici  ce  que  nous  pouvons  entrevoir  à  travers  ces  ré- 
volutions. 

Au  VI  siècle  les  Lusitaniens,  qui  pour  nous  sont  les  Li- 
gures du  document  phénicien,  occupaient  le  nord-ouest  de 


I  Nous  dirions  presque— même  longtemps  après  la  conquête  romai- 
ne. La  comparaison  de  Citania  et  de  Sabroso  nous  permet  d'espérer 
que  la  vieille  civilisation  prÉ-romaine  pourra  être  reconstruite  un  jour 
dans  de  certaines  limites,  quand  les  études  et  les  explorations  archéo- 
logiques s'occuperont  sérieusement  de  ce  problème.  Tout  nous  porte 
à  croire  que  Sabroso  s'éteignit  sans  que  l'influence  romaine  s'y  fit 
sentir.  Citania  subit  cette  itifluence,  du  moins  jusques  sous  Constantin, 
comme  on  peut  conclure  d'une  pièce  de  monnaie  qui  y  a  été  trouvée 
dernièrement.  Malgré  cela,  hormis  quelques  objets  de  l'industrie  romaine 
et  quelques  inscriptions,  on  dirait  que  ces  deux  stations  sont  contempo- 
raines: la  m£me  architecture,  le  même  style  de  décoration,  les  mêmes 
gravures,  les  mêmes  signes  symboliques,  etc.  Il  est  presque  certain  que 
l'exploration  de  toutes  les  autres  ruines  que  nous  avons  visitées  don- 
nerait des  résultats  identiques,  d'où  l'on  peut  inférer  que  la  civilisation 
romaine  n'a  pu,  ou  n'a  pas  voulu  détruire  la  routine  de  la  civilisation 
antérieure,  et  que  si  la  Lusitanie  est  ethnologiquemem  un  sol  privilégié, 
elle  ne  l'est  pas  moins  dans  le  domaine  de  l'archéolo^e,  surtout  dans 
le  nord. 


,ï  Google 


439 

TEspagne,  limités  au  sud  par  les  Cempses  qui  s'étendaient 
jusqu'à  la  baie  du  Sado'. 

Les  plus  anciens  renseignements  de  Strabon  nous  les 
présentent  occupant  une  surface  bien  plus  étendue.  Les  li- 
mites de  l'ancienne  Lusitanie,  déjà  ancienne  pour  Strabon, 
étaient  au  sud  le  Tage,  à  l'ouest  et  au  nord  l'Océan,  à  l'orient 
les  Girpétains,  les  Vettons,  les  Vaccéens,  les  Galiciens,  et 
d'autres  peuples  qu'il  ne  nomme  point*. 

Ainsi,  à  des  époques  postérieures  au  vi  siècle,  les  Ligu- 
res du  nord-ouest  se  sont  emparés  du  pays  des  Cempses, 
qu'ils  ont  ou  absorbés  ou  chassés  vers  l'orient. 

Si  l'occupation  du  territoire  des  Cempses  est  due  à  un 
accroissement  excessif  dans  la  population  lusitanienne,  ou 
bien  à  l'arrivée  de  nouvelles  tribus  liguriennes  venues  d'un 
autre  point,  c'est  là  une  question  qui  probablement  ne  sera 
jamais  résolue.  Il  est  très  vraisemblable,  cependant,  que  ce 
fait  coïncide  avec  l'invasion  des  Iles  Britanniques  par  les  Cel- 
tes. Ce  nom  de  iBritanniques»,  inconnu  au  périple  phénicien, 
mais  que  Pythéas  n'ignorait  pas  et  qu'il  a  rendu  vulgaire, 
passe  pour  être  une  innovation  de  provenance  celtique*;  et 
puisque  le  périple  ignore  ce  nom,  ainsi  que  l'existence  de 
tribus  celtiques  en  Angleterre,  en  Irlande  et  même  dans  l'oc- 
cident des  Gaules,  l'arrivée  d'un  tel  peuple  dans  ce  pays 
ne  saurait  être  que  postérieure,  et  on  doit  la  placer  entre  le 
voyage  du  Phénicien  et  celui  du  Marseillais. 

Il  est  à  croire  que  l'invasion  celtique  en  Angleterre  y 
fut  annoncée,  comme  ailleurs,  par  une  suite  de  guerres  et 
de  dévastations  qui  eurent  pour  résultat  te  déplacement  et 


'  Aviénus,  Ora  mar.  v.  aoi-i. 

>Strab.  uini,  3. 

*p'Arb.  de  Jub.  ouvr.  cit.  pag.  3i, 


,ï  Google 


43o 

Immigration  de  quelques  peuples,  et  Ton  peut  supposer  que 
quelques-uns  de  ces  ^migrants  cherchèrent  un  reftige  en  Es- 
pagne en  suivant  la  route  maritime,  alors  si  fréquentée.  On 
ne  doit  pas  s^tonner  si  un  grand  nombre  parmi  les  descen- 
dants de  ces  Ligures,  chassés  de  la  Baltique  par  les  premiers 
Celtes  et  forcés  de  chercher  un  abri  dans  les  Iles  Britanni- 
ques, et  bien  informes  d'ailleurs  par  la  tradition  de  la  cruauté 
des  Celtes,  furent  les  premiers  k  abandonner  leur  seconde 
patrie.  Les  vieux  enfants  de  Cycnus  s'arrêtèrent  enfin  dans 
la  Lusitanie,  où  plus  tard  les  anendait  l'asservissement  iné- 
vitable imposé  par  les  Romains. 

Avant  la  conquête  romaine  l'ethnographie  de  la  Lusi- 
tanie subit  une  autre  modification.  Les  Callàïciy  que  plus  haut 
nous  avons  \u  être  les  voisins  des  Lusitaniens  du  côté  du 
nord,  s'emparent  d'une  vaste  contrée  entre  le  Douro  et  la 
mer  Cantabrique  '- 

Il  est  difficile  de  savoir  si  cette  occupation  fut  paisible 
ou  violente,  et  à  quelle  époque  elle  eut  lieu.  On  ne  saurait 
nier,  cependant,  qu'elle  était  un  fait  avant  l'incursion  de  Bru- 
tus  dans  les  terres  d'Entre- Douro-e-Minho,  puisqu'on  dit 
de  ce  guerrier  qu'il  triompha  des  Lusitaniens  et  des  Galiciens, 
et  le  Douro  était  déjà  à  cette  époque  la  limite  des  deux  peu- 
ples. Un  coup  d'oeil  sur  les  événements  qui  eurent  lieu  en 
Espagne  avant  ce  temps,  nous  expliquera  peut-être  ce  nou- 
veau déplacement  ethnographique. 

Les  Romains,  arrivés  dans  la  péninsule  comme  d'hum- 
bles suppliants,  aussitôt  quHs  en  eurent  chassé  les  Cartha- 
ginois, 8*en  déclarent  les  maîtres,  et  ils  employent  tous  leurs 
efforts  à  étouffer  la  résistance  que  les  peuples  ibériens  op- 
posent à  leur  domination. 

'  Gomp.  Strab.  m,  ir,  30. 


r^^. 


jL  ,..,cL^j#* 


La  conquête  s^avance  lentement  dans  le  sud  et  Podent, 
et,  comme  à  l'époque  des  Arabes,  le  nord-ouest  de  l'Espagne 
devient  le  dernier  rempart  de  ses  défenseurs. 

X^  mouvement  des  Galiciens  sur  les  Lusitaniens  du 
nord-ouest  peut  avoir  pour  cause  la  pression  exercée  par 
les  peuples  de  la  zone  septentrionale,  qui  reculaient  tou- 
jours devant  les  inexorables  conquérants. 

Quoiqu'il  en  soit,  cependant,  la  migration  ligurienne  ve- 
nant des  Iles  Britanniques  et  le  mélange  de  Galiciens  et  de  , 
Lusitaniens  n'altérèrent  point  l'ethnologie  de  la  Lusttanie 
ancienne,  puisque  les  Lusitaniens,  les  Galiciens,  les  Astu- 
riens,  les  Cantabres  sont  des  peuples  d'une  même  race, 
ayant  les  mêmes  usages  et  les  mêmes  mœurs;  Strabon 
l'assure  positivement'. 


■  Strab.  111,  III,  6, 7.  Nous  possédons  une  des  célèbres  •staEuescallaï- 
ques>,  rencontrée  près  du  mont  Sanio  Ovidio  (Fa/e),  ou  l'on  voit  encore 
les  vestiges  d'un  ancien  bourg,  entouré  de  remparts.  L'armure  de  cette 
statue  est  précisémeni  celte  que  Strabon  assigne  aux  Lusitaniens  :  eapide 
utiparva  aijus  diameler  duum  pedum,  cava/oris...  ad  haec  sica  (ibîd.) 
Comp.  ce  que  dit  M.  H.  Martin  (Revue  d'anthropologie,  num.  déjà  cit.  p. 
198)  sur  l'armure  des  Firboigs  des  [les  Britanniques,  qu'il  suppose  être 
des  Ligures,  et  sur  l'écu  allongé  et  la  grande  épée  des  Gaulois. 


.,Cm^\ 


UYTHOLOGIE  GAULOISE 


SPÉCIALEMENT  QUANT  AUX  REPRÉSENTATIONS  D 
ne,  DIVINE  ET  QUESTION  RELATIVE  A  LA  RECHERCHE  DES  UIÎUES  TYPES 
DANS  LA  PÉNtKSULE  IBÉRIQUE 


M.  Henri  Martin 

J'ai  l'honneur  de  présenter  au  Congrès,  de  la  part  de 
M.  Alexandre  Bertrand,  conservateur  du  Musée  national 
de  Saint-Germain,  dix-sept  photographies  représentant  la 
Triade  ou  Trinité  druidique  sous  les  diverses  formes  re- 
trouvées iusou'ici.  Je  reerette  au*une  erreur  m'ait  emnê- 


,ï  Google 


auparavant  dans  les  poëmes  sacrés,  on  ne  l'a  sculpté  que 
sotis  les  Romains.  Il  n^  a  guère  d'exception  que  sur  les 
médailles  où  apparaissent  Bélénos  et  Teutatès-Ogmios, 

La  Triade  gauloise  se  montre  sous  deux  formes  prin- 
cipales: tantôt  trois  têtes  réunies  en  une  seule;  tantôt  trois 
figures  distinctes  et  associées,  auxquelles  se  joint  quelque- 
fois une  quatrième;  les  personnages  divers  paraissent  tan- 
tôt égaux,  tantôt  inégaux;  ainsi  le  grand  dieu  de  Reims, 
que  M,  Bertrand  et  moi-même  croyons  être  Ésus,  est  assis," 
avec  ses  attributs  celtiques,  entre  Apollon  et  Mercure  de- 
bout, qui  semblent  ses  lieutenants:  ailleurs,  une  grande 
déesse,  appelée  Oerecura,  une  sorte  de  Cybèle-Cérès,  est 
associée  au  grand  dieu,  à  ce  qu'il  semble,  sur  le  pied  de 
l'égalité,  et  une  déesse  plus  petite  semble  leur  fille  et  jouer 
là  le  rôle  d'Horus  dans  la  Trinité  égyptienne.  Sur  un  au- 
tre autel,  un  dieu  à  trois  têtes  siège  entre  deux  autres  divi- 
nités: la  Triade  est  ici,  pour  ainsi  dire,  redoublée.  Nous 
sommes  aussi  d'accord  dans  cette  opinion:  que  les  trois 
principales  divinités  gauloises  signalées  par  Lucain,  Ésus, 
Taranis  et  Teutatès,  rentrent  l'une  dans  l'autre  par  leurs 
attributs  et  se  résolvent  dans  une  unité  dont  Ésus  est  le 
type  essentiel  :  les  Romains,  frappés  de  la  supériorité  d'Ésus, 
l'identifiaient  à  Jupiter,  comme  l'atteste  l'autel  de  Paris.  Sur 
l'autel  de  Paris,  Ésus  célèbre  en  personne  le  grand  rite,  la 
cueillette  du  gui;  sur  l'autel  de  Reims  il  apparaît  comme  père' 
nourricier  des  êtres;  la  déesse  Oerecura  paraît  être  son  pa- 
rèdre  féminin,  ce  qu'est  Isis  à  Osiris. 

Ces  représentations  fournissent  un  élément  important 
et  nouveau  à  la  mythologie  comparée  et  à  l'étude  des  idées 
qu'enveloppaient  les  mythes;  il  n'est  pas  douteux  qu'on  n'en 
retrouve  de  nouvelles  maintenant  que  tes  recherches  se  di- 
rigent de  ce  côté.  J'engage  les  savants  de  la  Péninsule  à 


.,Ci 


434 
s'enquérir  s'il  se  rencontrerait  quelque  chose  d'analogue  en 
Espagne  et  en  Portugal. 

M.  Guimet:  Dans  les  photographies  de  dieux  gaulois 
présentées  par  M.  Henri  Martin,  on  peut  remarquer  un  dieu 
à  trois  têtes  qui  figure  tantôt  seul,  tantôt  comme  faisant 
partie  d'une  triade. 

Aux  Indes,  avant  que  les  prêtres  aient  essayé  de  fai- 
re l'unité  brahmanique  sous  la  formule  Brahma,  Vishnou, 
Siva,  ces  deux  dernières  divinités  étaient  souvent  représen- 
tées comme  formant  à  elles  seules  une  trinité,  il  y  avait 
le  triple  Vishnou  et  le  triple  Siva.  On  peut  citer  comme 
exemple  la  superbe  triade  sivaïque  des  grottes  d'Éléphanta. 
Puis  ces  dieux  triples  figurèrent  comme  unités  dans  une 
nouvelle  triade. 

Il  semble  que  les  représentations  gauloises,  que  nous 
avons  sous  les  yeux,  nous  révèlent  une  évolution  religieuse 
analogue  à  celle  qui  eut  lieu  aux  Indes. 

La  statue  gauloise  trouvée  à  Amiens  nous  présente  un 
autre  rapport  avec  l'iconographie  indienne.  On  l'a  tout  de 
suite  comparée  à  un  Bouddha,  à  cause  de  son  attitude.  Mais 
les  croix  et  les  tozanges  qui  ornent  ses  vêtements  détermi- 
neraient de  préférence  un  dieu  Jaïna,  Ce  sont  donc  plutôt 


,ï  Google 


on  TYPE  ETHNIQTJE  ET  ANTHROPOLOGIQUE  DES  IBËRE8 


COHHEKT  DISTINGUER  LES  IBÈRES,  DONT  LA  LANGUE  SUBSISTE 

CHEZ  LES  BASQUES,  DES  AUTRES  POPULATIONS  ANCIENNES  DE  L'IBÉRIE, 

(berbères,  UGURES,  celtes)  ?  QUI  EST  LE  VÉRITABLE  IBÈRE  > 


M.  Henri  Martin 

Chacun  sait  les  difficultés  que  l'on  rencontre  lorsqu'on 
touche  aux  questions  ethniques,  d'autant  plus  qu'il  ne  faut 
pas  les  confondre  avec  les  questions  linguistiques.  Les  gens 
qui  partent  la  langue  ibérique  au  nord  de  l'Espagne  et  au 
sud  de  la  France,  sont-ils  descendants  des  anciens  Ibères? 
Ce  peuple  présente  au  moins  quatre  types  différents,  et 
nous  ignorons  lequel  est  le  type  des  Ibères. 

Quelle  est  la  plus  ancienne  population  de  la  Péninsule? 
Quel  nom  faut-il  donner,  en  Portugal,  à  cette  race  que  M.  de 
Quatrefages  y  retrouve  tout  aussi  bien  qu'ailleurs  en  Eu- 
rope? En  tout  cas,  et  quel  qu'ait  été  le  type  des  Ibères,  il 
ne  faut  pas  les  identifier  avec  les  Berbères,  car  la  langue 
que  parlent  ceux-ci  et  qu'Us  paraissent  avoir  parlé  dès  les 
plus  anciens  âges  n'a  point  de  rapports  avec  la  langue  ibé- 
rique. 


p 


?8l'-' 


436 

Il  en  est  de  même  des  Ligures.  Il  n'y  a  aucun  indice 
qu'ils  aient  jamais  parlé  la  langue  ibérique.  Dans  les  temps 
historiques  ils  parlaient  le  celtique;  on  croit  qu'ils  ont  parlé 
auparavant  un  dialecte  aryen  peu  éloigné  du  celtique.  Sur 
les  Ligures,  cependant,  il  n'y  a  pas  la  même  difficulté  que 
sur  les  Ibères,  leur  type  étant  parfaitement  cormu. 

M.  Sarmento  a  été  frappé  du  contraste  entre  les  asser- 
tions d'historiens  et  de  géographes  anciens,  nous  disant  que 
les  Lusitaniens  étaient  Ibères  et  qu'ils  différaient  entièrement 
des  Celtibères;  et  d'autre  part  de  ce  que  les  noms  ethniques 
individuels  où  collectifs,  tout  le  vocabulaire  historique,  pour 
ainsi  dire,  soit  celtique  dans  cette  région.  Il  cherche  à  expli- 
quer ce  contraste  par  l'origine  aryenne  des  premières  popula- 
tions lusitaniennes,  qu'il  considère  comme  en  affinité  avec  les 
LJgures.  Dans  ce  cas,  ces  premiers  Lusitaniens  n'auraient  pas 
été  Ibères.  D'autre  part  il  semble  impossible  de  douter  qu'il 
y  ait  eu  en  Portugal  un  élément  berbère  considérable.  Mais, 
en  tout  cas  il  n'est  pas  douteux  que  les  Celtes  n'aient  do- 
miné la  Lusitanie,  et  n'y  aient  laissé  partout  des  traces  pro- 
fondes. Les  découvertes  mêmes  de  M.  Sarmento  nous  en 
donnent  les  preuves  les  plus  remarquables.  Dans  les  collec- 
tions du  musée  de  la  Section  Géologique  on  remarque  aussi 
des  plaques  en  ardoise,  ornées  de  chevrons  et  de  dents  de 
loup,  ainsi  que  des  crosses  en  ardoise,  ornées  comme  les 
plaques.  Ces  dessins  sont  tout  celtiques,  et  les  crosses  sont 
'un  symbole  essentiellement  armoricain,  qu'on  trouve  fré- 
quemment dans  nos  dolmens  bretons  et  jusque  sur  des  mo- 
naies  armoricaines,  celles  des  Namnètes.  Même  observation 
quant  aux  perles  en  turquoise  et  à  l'ornementation  des  va- 


M,  Adolpko  Coelho:  En  ce  qui  concerne  les  Ibères  il 


|C.OOgle 


^tique  que  des  questions,' nous  ne  pou- 
certain.  Il  y  a  trop  peu  de  temps  que  l'on 
rtance  de  la  phonétique  dans  la  linguistique 
r  profit  des  anciens  travaux.  II  faut  encore 
que  l'on  peut  affirmer  se  réduit  à  ceci  :  tou- 
supposées  du  basque  avec  quelque  autre 
valeur. 


,ïGex^j^^ 


SUR  LES  CULTES  PËNINSintAIRES 
ANTÉRIEURS  A  LA  DOMINATION  ROMAINE 


M.  F.  Adolpho  Coelho 

Les  docutnents  qu^on  doit  étudier  pour  connaître  les 
cultes  des  habitants  de  la  Péninsule  ibérique  avant  la  do- 
mination romaine  sont  de  deux  espèces:  contemporains  et 
postérieurs. 

Les  monuments  sépulcraux,  les  statues,  les  signes  gra- 
vés sur  des  roches  et  encore  d'autres  produits  artistiques  ou 
industriels  sont  les  témoignages  contemporains. 

H  y  a  quatre  espèces  de  témoignages  postérieurs  à  Pépo- 
que  où  la  domination  romaine  s'étendit  sur  notre  péninsu- 
le; ce  sont: 

1°  Les  passages  des  écrivains  grecs  et  latins  se  rap- 
portant à  la  religion  des  peuples  ibériens. 

2°  Les  inscriptions  latines,  surtout  celles  qui  contien- 
nent des  noms  de  divinités  inconnus  à  l'Olympe  grec  ou  ro- 
main. 

3*  Les  usages  et  croyances  populaires  modernes  de  la 
Péninsule  qui  peuvent  être  regardés  comme  implantés  ici 
avant  la  domination  romaine. 

4"  Les  noms  de  lieu  se  rapportant  à  Pexistence  d'un 


,ï  Google 


439 

monument  religieux  ou  funéraire,  d'un  bois,  d'une  source  sa- 
crée, etc. 

Tout  ce  que  les  anciens  nous  disent  des  croyances  et 
des  usages  religieux  des  peuples  ibériens  se  réduit  malheu- 
reusement à  fort  peu  de  chose,  et  est  d'ailleurs  quelquefois 
peu  clair  et  ne  peut  être  employé  qu'avec  une  grande  cri- 
tique. 

Un  fait  paraît  se  détacher  réellement  de  ce  que  nous 
dit  Sirabon  de  la  religion  des  peuples  ibériens:  c'est  que 
quelques-uns  de  ces  peuples  avaient  un  cuite  polythéis  tique 
et  d'autres  avaient  un  culte  différent  du  polythéisme,  lequel 
les  Grecs  et  les  Romains  ne  comprenaient  pas  ausssi  bien, 
supposant  en  conséquence  qu'ils  n'avaient  pas  de  dieux  ou 
que  leurs  dieux  n'avaient  pas  de  nom. 

(Les  Lusitains,  nous  dit  le  grand  géographe  grec^  font 
de  fréquents  sacrifices  aux  dieux,  et  examinent  les  entrail- 
les, sans  les  arracher  du  corps  de  la  victime;  ils  observent 
aussi  les  veines  de  la  poitrine  et  tirent  en  outre  certaines 
indications  du  simple  toucher.  Ils  consultent  même  dans  cer- 
tains cas  les  entrailles  humaines,  se  servant  à  cet  effet  de 
leurs  prisonniers  de  guerre,  et  quand  la  victime  tombe  even- 
trée  de  la  main  de  l'haruspice,  ils  tirent  un  premier  avertis- 
sement de  la  chute  même  du  corps.  Souvent  aussi  ils  cou- 
pent la  main  droite  à  leurs  captifs  et  en  font  offrande  aux 
dieux.» 

«Suivant  quelques  auteurs,  nous  dit  encore  Strabon, 
les  Callaïques  sont  athées;  mais  les  Celtibères  et  les  peu- 
ples qui  les  limitent  au  nord  ont  une  divinité  sans  nom,  à 
laquelle  ils  rendent  hommage  en  formant  tous  les  mois,  à 
l'époque  de  la  pleine  lune,  la  nuit,  devant  la  porte  de  leurs 
maisons,  et  chaque  famille  bien  au  complet,  des  chœurs  de 
danse  qui  se  prolongent  jusqu'au  matin.  » 


^ 


„Co<i 


Ce  que  Strabon  nous  dit  sur  la  religion  des  Lusitaîns 
peut  être  parfaitement  vrai;  ce  peuple,  où  il  faut  reconnaî- 
tre évidemment  beaucoup  d'éléments  aryens,  c'est-à-dire 
celtiques,  nous  ne  craignons  pas  de  l'afRriner,  avait  donc 
une  religion  qui  s'accordait  dans  ses  traits  généraux  avec 
celles  des  anciens  peuples  aryens,  toujours  polythéistes  et 
ayant  l'usage  de  sacrifier  des  victimes  humaines,  sunout  des 
prisonniers,  et  d'en  consulter  les  entrailles.  L'athéisme  des 
Callaïques  a  été  mis  en  doute  avec  raison  par  plusieurs  au- 
teurs. Justin  nous  racconte  de  ce  peuple:  «Ils  ont  une  mon- 
tagne sacrée  qu'il  est  défendu  de  violer  par  le  fer,  mats  si 
la  foudre  y  tombe,  ce  qui  arrive  souvent,  l'or  qu'elle  met  au 
jour  peut  être  recueilli  comme  im  présent  des  dieux.» 

Ce  que  Strabon  nous  dit,  de  la  religion  des  Celribères 
ne  doit  pas  être  accepté  comme  s'étendant  à  tout  ce  peuple 
ou  mieux  au  groupe  de  peuples  que  comprend  ce  nom.  Au 
reste,  il  faut  se  garder  d'accepter  en  toute  sa  généralité  ce  que 
les  anciens  nous  raccontent  des  moeurs  des  peuples:  on  at- 
tribuait facilement  à  un  peuple,  à  une  région  entière  ce  qui 
n'appartenait  qu'à  une  partie  de  ce  peuple  ou  de  cène  région. 

On  connaît  bien  le  passage  où  Pline  nous  dit  que  les 
Celtes  de  la  Bétique  étaient  venus  de  la  Celtlbérie  et  de  ta 
Lusitanie,  comme  on  voit  par  la  religion,  la  langue  et  les 
noms  de  villes.  Ce  qu'il  y  a  de  plus  important  dans  le  pas- 
sage de  Strabon  est  la  danse  nocturne  au  clair  de  lune.  Ces 
danses,  avec  une  signification  cultuelle,  sont,  je  crois,  tout- 
à-fait  étrangères  aux  peuples  aryens.  Leur  existence  chez 
un  peuple  ibcrien  (je  prends  ce  nom  au  sens  géographique) 
est  pour  nous  une  caractéristique  ethnique  de  la  plus  haute 
importance.  Bien  loin  de  penser,  comme  quelques  auteurs 
l'on  fait,  que  les  Celtibères,  dont  il  est  parlé  dans  le  passage 
de  Strabon,  avaient  un  culte  spiritualiste,  il  nous  faut  ad- 


,ï  Google 


441 
menre  qu'ils  se  trouvaient  dans  la  phase  rudimentaire  de 
l'adoration  fétichiste  des  corps  célestes,  particulièrement  de 
la  lune;  ce  peuple  n'était  pas  donc  aryen. 

La  religion  aryenne  se  base  surtout  sur  le  culte  des  di- 
vinités solaires,  de  la  clarté;  les  divinités  de  la  nuit,  des  té- 
nèbres y  jouent  un  rôle  surtout  par  leur  opposition.  Mais 
nous  voyons  un  nombre  considérable  de  peuples  rendre  à 
la  lune  un  culte  exclusif  ou  beaucoup  plus  accentué  qu'au 
soleil,  culte  tout  fétichiste.  C'est  en  Afrique  que  ce  culte  de 
la  lune  a  le  plus  d'importance  et  d'étendue.  C'est  là  surtout 
que  nous  rencontrons  les  danses  mystiques  à  la  nouvelle 
lune  et  à  la  pleine  lune,  dont  nous  parlent  ceux  qui  ont  sé- 
journé chez  les  Cafres  et  les  Hottentots.  Nous  savons  par- 
faitement que  les  Cafres  ont  marché  du  nord  vers  le  sud. 
Dans  leur  ancienne  demeure,  au  nord  de  l'équateur  peut- 
être  se  sont-ils  trouvés  longtemps  en  contact  avec  des  peu- 
ples blancs  ayant  le  même  culte  fétichiste,  qu'ils  abandon- 
nèrent plus  tard  pour  adopter  le  musulmanisme.  Il  est  im- 
possible de  ne  pas  admettre  l'existence  d'éléments  africains 
dans  les  anciennes  populations  péninsulaires;  mais  je  me 
borne  à  indiquer  le  fait  sans  élever  aucune  théorie  sur  une 
si  frète  base.  Il  faut  avoir  toujours  bien  présent  à  l'esprit 
que  le  basque  n'a  rien  de  commun  avec  les  langues  africai- 
nes. Or  un  fait  curieux  a  été  signalé  dans  la  langue  basque, 
qui  paraît  nous  permettre  de  conclure  que  ceux  qui  ont  lé- 
gué aux  Basques  leur  langue,  eurent  un  culte  de  la  lune. 

En  basque  Yaungoikoa  signifie  sdieui;  or  d'après  ceux 
qui  connaissent  le  mieux  cette  langue,  c'est  là  un  mot  com- 
posé qui  signifie  ou  le.  seigneur  de  la  lune  ou  le  seigneur- 
lune.  La  dernière  interprétation,  celle  de  M.  Vinson,  nous 
dispense  d'admettre  que  la  forme  parfaite  du  mot  soit  Yaun- 
goikokoa,  comme  le  veut  le  prince  Bonaparte,  sans  avoir 


K 


,Cj?^e 


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44? 
un  nombre  assez  considérable  de  noms  de  divinités,  qui  ne 
sont  ni  grecs  ni  latins.  Il  n^est  pas  difficile  de  démontrer  la 
celticité  de  quelques-uns  de  ces  noms;  par  exemple  le  dieu 
Bormanicus  des  sources  thermales  de  Galdas  de  Vizella, 
porte  un  nom  celtique;  on  y  reconnaît  le  thème  bormo  ou 
borvo,  bouillant,  yb";'e«s,  le  même  qu'on  retrouve  au  fond 
du  latin /èrfeo,  car  a  un /"latin  répond  dans  certains  cas 
un  b  celtique.  Ce  thème  nous  apparaît  encore  dans  le  nom 
de  lieu  et  de  divinité  de  la  Gaule  Bormo  ou  Borvo,  dans 
le  nom  de  divinité  du  même  pays  Bormonia.  Il  y  a  beau- 
coup de  dérivés  romans  du  même  thème  celtique,  par  exem- 
ple, français  bourbe,  bourbier,  portugais  borbulha,  borbu- 
Ihar,  borboîar,  dialectes  de  la  Suisse  allemande  barbota. 

Tameobrigus  est  aussi  un  nom  de  divinité  péninsulaire 
dont  la  celticité  me  semble  aussi  évidente,  qu'en  quelques  au- 
tres. C'est  un  mot  composé  de  tameo,  tamaïo  e  brigo.  Ce  bri- 
go  n'est  pas  le  même  que  br'iga,  avec  un  i  bref,  des  noms 
de  lieu,  comme  Conembriga,  Caitobriga,  etc.;  il  a  dû  avoir 
un  ï  long,  étant  le  même  que  l'irlandais  brig,  qui  signifie 
fort,  vertueux.  Le  premier  élément  du  composé  est  dérivé 
de  tama,  qui  servait  à  désigner  dans  l'onomatologie  celti- 
que un  grand  nombre  de  rivières:  en  Espagne  Tamaca,  . 
affluent  du  Douro,  notre  Tamega,  Tamara  dans  la  Tarra- 
connaise;  dans  la  Grand-Bretagne  Tamaris,  en  Comouailles, 
Tamësis,  la  Tamise,  etc.  L'inscription  qui  nous  fournit  ce 
nom  a  été  trouvée  sur  le  rivage  du  Douro  non  loin  du  7a- 
mega.  Tameobrigus  était  donc  bien  probablement  la  divi- 
nité du  fleuve,  c'est-à-dire  celui  qui  est  fort,  puissant  sur 
le  fleuve,  sur  le  Tamaca.  Tamaios  se  rapporte  à  Tamaca 
à  peu  près  comme  Munda  à  Mundècus,  d'où  le  Mondego 
moderne. 

Les  inscriptions  contiennent  aussi  des  noms  de  dtvini- 


'pi 


.gle 


444 
tés  que  ne  paraissent  pas  être  celtiques,  ou  qui  du  moins 
ne  trouvent  pas  une  explication  méthodique  dans  ronoma- 
tologie  celtique.  Il  se  peut  qu'il  n'y  ait  dans  ces  noms  que 
d'imparfaites  leçons,  que  nous  arrivions  encore  à  expliquer 
presque  tous  assez  bien  et  que  l'on  prouve  à  la  fin  que  ce 
sont  là  des  mots  aryens.  Mon  opinion  se  fonde  sur  des 
faits. 

Les  inscriptions  nous  fournissent  par  exempte  les  noms  : 

Bartderaeicus. 
Bandiae — apoh — segus 
Bandiarbariaicus. 
Banduaetobricus. 

et  la  forme  plus  simple 

Banduae. 

Dans  le  nom  Bandiae-apolo-segus  nous  séparons  le 
thème  sego  celtique,  qui  est  bien  connu  et  qui  signifiait 
vainqueur;  ce  thème  se  rencontre,  par  exemple  en  Segove- 
.  SOS,  Segoma,  la  ville  d'Espagne,  dont  le  nom  signifie  vic- 
toire^ etc.;  apolo  qui  forme  une  ligne  de  l'inscription,  tout 
comme  Bandiae^  n'est  peut-être  que  le  nom  classique  Apol- 
lon,  l'inscription  étant  probablement  mal  copiée;  il  faudrait  y 
lire  Apoli  c'est-à-dire  Apoîlini,  les  noms  du  dieu  se  trou- 
vant au  datif.  Band.  bandiae  se  rencontre  comme  premier 
élément  dans  les  autres  noms  que  je  viens  de  vous  citer  et 
isolé  dans  Banduae.  En  Banduaetobricus,  bricus  est  évidem- 
ment pour  brigus,  de  même  que  Ton  retrouve  aussi  plusieurs 
fois  brica  pour  briga,  etc.;  nous  connaissons  déjà  briga 
par  le  nom  TamaeobriguSy  nous  avons  donc  ici  des  noms 


,ï  Google 


445 
celtiques,  quoique  nous  ne  puissions  pas  expliquer  l'élément 
band,  bandu.  M.  Fidel  Fita  à  déjà  tenté  une  interprétation 
de  Bandiatapolosego  par  le  celtique,  mais  il  n'y  a  pas  plus 
de  méthode,  que  dans  les  autres  recherches  linguistiques  de 
ce  savant.  D'après  lui  bandiae  serait  le  vieux  irlandais  ban- 
dea^  féminin  de  dia^  dieu;  mais  nous  savons  parfaitemeut 
qu'il  y  a  en  bandeo.,  deux  mots:  ban  et  dia\  ban  est  le  mê- 
me que  le  grec  jw>i,  femme,  l'anglais  quean,  femme,  ou  fueen 
reine,  etc,  et  signifie  aussi  «femmet;  c'est  un  mot  employé 
à  exprimer  le  féminin  de  certains  substantifs  irlandais  à 
peu  près  dès  le  septième  siècle  de  notre  ère,  la  chute  des 
finales  ayant  obscurci  vers  cette  époque  le  suffixe  caracté- 
ristique du  féminin. 

Nous  ne  désespérons  pas  de  résoudre  d'après  la  bonne 
méthode  une  partie  des  difficultés  que  ces  noms  nous  offrent. 
Bientôt  nons  verrons  réunis  dans  le  Corpus  inscriptionum 
latinarum,  de  l'Académie  des  Sciences  de  Berlin  les  ins- 
criptions de  la  Gaule  transalpine  (cisalpine  pour  nous)  et  de 
la  Germanie.  M.  Ascoli  publie  les  glosses  irlandaises  de  Mi- 
lan avec  la  haute  compétence  qui  le  distingue  et  nous  four- 
nit un  glossaire  très  riche  et  bien  commenté  du  vieux  irlan- 
dais; un  index  complet  de  la  Grammaire  celtique  de  Zeuss, 
ce  grand  monument  de  la  science  allemande  va  paraître;  nos 
ressources  augmentent,  et  petit  à  petit  nous  arriverons  à 
faire  disparaître  bien  des  obscurités  dans  l'ethnologie  de 
l'Espagne  ancienne.  Il  faut  aussi  pour  cela  que  le  côté  ar- 
chéologique de  notre  question  s'éclaircisse.  Il  y  a  beaucoup 
à  faire  dans  ce  domaine.  Quand  on  aura  recueilli  et  repro- 
duit par  la  photographie,  ou  quelque  autre  moyen,  le  plus 
grand  nombre  possible  des  produits  anistiques  et  indus- 
triels qui  nous  restent  des  anciens  habitants  de  la  Péninsule, 
l'ethnologie  y  trouvera  des  ressources  de  première  impor- 


,ï  Google 


446 

tance.  Je  ne  vais  que  confirmer  par  un  exemple  ce  que  vous 
savez  là-dessus. 

M.  Martins  Sarmento  a  trouvé  dans  ses  fouilles  à  Sa- 
broso  les  restes  de  deux  statues  de  porcs.  Des  découvertes 
semblables  ont  été  faites  sur  différents  endroits  de  la  Pé- 
ninsule, par  exemple  à  Ségovie;  on  a  découvert  aussi  des 
statues  de  sangliers  et  de  truies.  L'importance  de  ces  ani- 
maux dans  les  cultes  aryens  nous  fait  admettre,  ou  du  moins 
fortement  soupçonner,  partout  où  on  les  trouve,  la  présence 
d'un  peuple  aryen  au  temps  dont  elles  datent.  En  Portugal, 
outre  la  statue  du  pilori  de  Bragança,  dont  a  parlé  M.  Sar- 
mento, il  y  a  encore  une  grande  statue  à  Murça,  dans  la 
même  province,  Trâs-os-Montes,  laquelle  est  connue  popu- 
lairement sous  le  nom  de  porca  de  Murça.  J'appelle  l'atten- 
tion des  archéologues  sur  ce  monument  où  Ton  a  vu  un 
produit  du  moyen  âge,  mais  que  je  crois  bien  plus  ancien. 
Le  porc  était  pour  les  aryens  un  symbole  de  la  fécon- 
dité. On  sacrifiait  des  porcs;  des  statues  de  porcs  étaient 
consacrées  au  divinités  et  surtout  au  divinités  protectrices 
de  la  maternité,  des  animaux  et  de  leur  fécondité.  Le  culte 
du  Mars  latin,  qui,  vous  le  savez,  fut  le  dieu  des  laboureurs 
avant  d'être  le  dieu  de  la  guerre,  nous  présente  le  sacrifice 
du  porc,  de  la  brebis  et  du  taureau,  connu  sous  le  nom  de 
sttovetaurilia.  En  Espagne  le  sacrifice  d'une  vache,  d'une 
brebis,  et  d'une  iruie  était  fait  en  honneur  de  Diane,  la 
déesse  protectrice  de  la  grossesse  et  de  l'enfantement,  d'après 
une  inscription  : 

DIANAE  MAXIMAE 

VACCAM  OVEM,  ALBAM  PORCAM 

Hubner.  a.  38io 

Une  autre  inscription  d'Espagne  nous  fait  connaître  le 


,ï  Google 


447 
:r  et  trente  porcs  au  génie  du  Munici- 
;  nom  moderne  de  Porcuna  paraît  se 
où  le  porc  avait  beaucoup  d'importan- 
industrie  locale,  si  l'on  ne  préfère  pas 
de  Obolcona,  Bolcona,  due  à  une  fausse 

nportance  cultuelle  du  porc  que  l'usage 
i  de  tuer  des  porcs  à  l'occasion  de  cer- 
ée.  Il  y  a  dans  cet  usage,  comme  en 
e  telle  concordance  entre  quelques  peu- 
1  est  impossible  de  ne  pas  admettre  une 
.  Le  proverbe  français  «A  chaque  porc 
:in»  et  le  proverbe  portugais  «Cada 
[artinhoï,  combinés  avec  les  données 
[uer,  paraissent  démontrer  l'existence 
;s  celtiques  à  l'époque  de  la  Saint-Mar- 
que Yepuliim  Topis  se  célébrait  à  la 
deux  jours  seulement  de  différence; 
onfirmalion  de  mon  hypothèse  dans  le 
ais  d'O'Davoien,  publié  par  M.  Stokes. 
est  le  nom  du  cochon  qu'on  tue  à  la 
et  je  crois  que  c'est  au  Seigneur  qu'il 

s  porcs  à  la  Saint-Thomas,  à  Not 
jgal  un  proverbe  assez  singulier 
jsage.  «A  la  Saint-Thomas  qui  n 


Ti  nao  lem  porco 
i  a  mulher. 


,ï  Google 


448 

Les  personnes  qui  ont  une  imagination  fertile  peuvent 
y  voir  une  allusion  à  des  sacrifices  humains  Je  n'y  vois 
qu\in  avis  à  l'adresse  des  mauvaises  ménagères,  qui  lais- 
sent venir  la  fête  sans  avoir  élevé  un  porc. 

L'importance  de  l'étude  des  fêtes,  des  usages  et  des 
croj'ances  populaires  modernes  est  aujourd'hui  reconnue  par 
tous  les  savants;  mais  il  n'est  pas  facile  de  distinguer  les 
diverses  couches  ethniques  superposées  les  unes  aux  autres 
dans  ces  traditions.  La  difficulté  principale  pour  la  Pénin- 
sule consiste  en  ce  que  divers  peuples  aryens  sont  venus 
se  mêler  ici  à  différentes  périodes,  et  quelques-uns  de  ces 
usages,  de  ces  fêtes  et  de  ces  croyances  peuvent  avoir  émi- 
gré vers  nous  indépendamment  de  toute  invasion  étrangère; 
mais  quand  on  trouve  un  point  d'appui  dans  Pantiquité, 
comme  dans  te  cas  du  sacrifice  du  porc,  nous  pouvons  ar- 
river à  de  solides  conclusions. 

Les  pierres  branlantes,  les  pierres  du  Promontoire  Sa- 
cré, dont  nous  parle  Strabon  d'après  Artémidore,  nous  rap- 
pellent un  usage  qu'on  a  constaté  il  y  a  quelques  années  à 
Villa  Nova  de  Foscoa.  En  temps  de  sécheresse,  neuf  jeu- 
nes filles,  qui  doivent  toutes  avoir  le  nom  de  Marie,  vont 
avec  quelques  jeunes  gens  à  un  endroit  où  l'on  trouve  une 
grande  auge  de  pierre  et  la  font  tourner  de  bas  en  haut. 
Cette  opération,  ils  le  croient,  fait  venir  la  pluie. 

Les  noms  de  lieu  d'origine  romaine  ou  romane,  que 
nous  ne  connaissons  que  sous  une  forme  moderne,  nous 
fournissent  de  précieuses  données  pour  compléter  la  carte 
de  la  distribution  des  monuments  mégalithiques  dans  la  Pé- 
ninsule, des  anciens  sanctuaires,  des  sources  et  des  bois  sa- 
crés. Le  nom  de  A}ita  ou  Antas  nous  indique  l'ancienne  pré- 
sence de  dolmens,  le  nom  de  Perajita,  Pcrajisa,  Pa-ahnga 


ly  Google 


449 
l'existence  de  menhirs;  Falperra,  c'est-à-dire  fausse  pierre, 
PeroJ'ana^  etc.,  l'existence  d'une  pierre  branlante;  Aguas- 
sanlas  (eaux-saintes),  Monsanto,  Monsao,  Monchique,  Fon- 
te-santa  nous  rappellent  le  culte  des  eaux,  des  monts  ou  des 
bois  sacrés.  Mais  il  faut  remarquer  que  ces  dénominations 
sont  quelquefois  arbitraires. 

Vous  voyez,  Messieurs,  ma  note  n'est  qu'un  program- 
me, n'est  qu'un  échantillon.  Je  crois  qu'il  est  temps  de  com- 
mencer à  étudier  sérieusement,  méthodiquement,  de  la  ma- 
nière la  plus  complète  possible  ces  questions  si  intéressantes 
avant  de  faire  des  théories,  si  flatteuses  qu'elles  soient 
pour  notre  amour  propre. 


Dlaousslon 

M.  Henri  Martin:  On  sait  que  lés  Celtes  comptaient 
par  lunes,  ce  qui  prouve  un  cuite  nocturne.  A  propos  de  la 
découverte  faite  par  M.  Martins  Sarmento  de  deux  statues 
de  porcs  à  Sabroso,  je  rappellerai  les  fameux  toros  de  Gui- 
sando  qui  sont  presque  tous  des  sangliers  et  non  pas  des 
taureaux.  J'en  ait  vu  trois  à  Avila  et  autant  au  musée  ar- 
chéologique à  Madrid.  Je  les  considère  comme  celtiques. 

M.  Vasconcellos  Abreu:  M.  Chabas  dans  ses  Études 
sur  Pantiquité  historique,  nous  dit  que  l'art  égyptien  s'est 
implanté  en  Sardaigne,  et  qiie  là  il  s'est  modifié  par  son 
contact  avec  un  art  tout  différent.  D'après  cet  écrivain  la 
preuve  est  l'abondance  des  scarabées  portant  des  figures 
de  truies  ou  de  porcs,  de  telle  façon  qu'on  trouve  même 
des  amulettes  de  ce  genre  où  le  porc  remplace  le  scarabée. 
Et  ce  qu'il  y  a  encore  de  bien  important  c'est  que  ce  porc 


,ï  Google 


45o 

ou  sanglier  a  des  rapports  fort  curieux  avec  le  sanglier  de 
l'enseigne  gauloise. 

En  Thessalie  et  ailleurs  on  offrait  des  porcs  à  Aphro- 
dite, à  Athènes  on  lui  sacrlUait  des  truies. 

M,  Adolpho  Coelho:  M.  Henri  Martin  vient  de  faire 
tion  de  cultes  nocturnes  chez  les  Celtes.  Je  sais  très  bien 
le  culte  de  la  lune,  ainsi  que  celui  du  soleil  se  trouvent 
ni  les  cultes  fétichistes,  ce  qui  n'empêche  pas  de  les  dis- 
iier  du  culte  anthropomorphique  de  ces  astres. 
Ce  que  j'ai  dit  par  rapport  au  culte  fétichiste  ibérique 
Dnde  sur  l'existence  de  danses  à  l'occasion  de  la  pleine 
;,  dont  parle  Strabon.  Or  je  ne  crois  pas  que  Ton  trouve 
ige  de  ces  danses  chez  les  Indo-Européens, 

M.  Henri  Martin:  U  se  peut  que  ces  danses  aient  existé 
ni  les  Gaulois;  cependant  je  ne  saurais  me  rappeler  les 
i  qui  viennent  à  l'appui  de  cette  supposition. 

M.  Vasconcellos  Abreo:  Les  Indo-Européens  comp- 
rit par  lunes,  mais  rien  ne  prouve  qu'ils  eussent  eu  le 
e  de  la  lune,  La  lune  aussi  bien  que  les  étoiles  ne  joue 
in  rôle  très  restreint  dans  le  système  général  de  la  my- 
ogie  védique.  Les  richis  ne  s'en  préoccupent  pas  assez 
r  que  nous  puissions  tirer  des  textes  quelque  conclusion 

Je  crois  avec  mon  maître  M.  A.  Bergaigne  que  l'iden- 
ation  particulière  et  définitive  du  Soma  à  la  lune  appar-" 
t  à  une  formation  mythologique  secondaire.  Néanmoins 

a  quelque  chose  de  remarquable:  c'est  que  le  Soma  vé- 
ae  est  le  rot  des  herbes,  et  Variemist'a  ou  armoise  est 
si  la  reine  des  herbes. 


,ï  Google 


45i_ 

Messieurs,  vous  savez  quels  rapports 
e  Artémis,  Diane  et  Lucina.  Vous  n'ignt 
ue  les  prêtres  égyptiens  rendaient  hon: 
■is  en  portant  en  procession  une  branch 
s  est  la  déesse  de  la  fertilité  comme  Li, 
V  les  accouchements;  Isis  était  ie  synr 
é.  En  outre  la  tête  d'/iw  qu'Horos,  die 
:st  la  lune  reparaissant  en  croissant  aprè 
,  le  deus  luiius  {et  remarquez  que  lune  e 
lu  genre  masculin)  des  Égyptiens,  donn 
été  de  vache  avec  ses  deux  cornes  quan 
:nne. 
Messieurs,  de  vous  entretenir  d'iconc 
et  du  Jils  de  la  vierge  qui  grâce  à  Indr 
jin  dieu  après  avoir  été  dévoré  par  le 
nsectes,  c'est-à-dire  par  des  voleurs  d 

je  ne  peux  rien  vous  dire  du  culte  d 
mciens  Aryas,  je  peux,  du  moins,  vou 
tance  pour  l'histoire  des  croyances  de 


,ï  Google 


L'AOE  DES  STËOBOPOLES  PRÉHISTORIQUES  DU  OAUOASE 


RENFERMANT  DES  CRANES  MACROCÉPKAl.ES 


M.  Ernest  Chantre 

Les  découvertes  opérées  dans  les  nécropoles  des  envi- 
rons de  Tiflis  et  surtout  dans  celle  de  Samthavro  près  de 
Mtskheth,  avaient  depuis  1872  attiré  l'attention  des  archéc- 
Ic^es  et  des  anthropologistes,  mais  on  ne  possédait  l'an- 
née dernière  encore  aucun  renseignement  sur  l'époque  de 
:onstruction  et  par  conséquent  sur  l'ancienneté  des  crâ- 
nacrocéphales  que  l'on  y  avait  recueillis. 
Les  uns  les  attribuent  aux  Grecs,  les  autres  aux  Ro- 
s,  d'autres  enfin  aux  populations  de  l'âge  du  bronze. 
Ayant  eu  l'occasion  de  signaler  plusieurs  crânes  ma- 
Sphales  découverts  dans  un  tumulus  du  Jura  français, 
î  caractères  des  objets  qui  les  accompagnaient  m'ayant 
lis  de  rapporter  ces  crânes  au  premier  âge  du  fer,  il 
paru  intéressant  de  rechercher  à  quelle  époque  pou- 
il  remonter  ceux  du  Caucase  et  quels  rapports  il  pou- 
exister  entre  les  découvertes  de  ces  deux  régions. 
A  l'exposition  de  Moscou  se  trouvaient  plusieurs  spé- 
ns  des  tombeaux  de  la  Géorgie  ainsi  que  les  résultats 


.1         L-fc. 


453 

lorations  faites  en  Ossétie  dans  des  né- 
;s  à  celles  de  !a  Géorgie. 

s  ce  moment  comparer  sommairement  ces 
rtes,  il  ne  me  restait  plus  qu'à  tenter  des 
régions  et  à  étudier  les  collections  réunies 


NÉCROPOLE  DE   SAMTHAVRO 

en  1871,  par  l'ouverture  d'une  tranchée 
ruction  d'une  grande  route,  la  nécropole 
es  de  Mtskheth,  ancienne  capitale  de  la 
Fouillée  par  M.  Bayem  de  1872  à  1S76. 
aux  de  terrassement  aient  détruit  près  de 
aux  environ,  ce  savant  géologue  a  pu  en 
i  de  six  cents  à  peu  près  intacts.  Le  champ 
;  établie  cette  nécropole  est  situé  sur  ht 
'Aragua  et  les  tombeaux  s'y  rencontrent 

iDoo  sur  5oo  mètres  environ. 
les  de  1872  ont  été  réunies  au  Musée  de 
;  1873  ont  été  expédiées  à  l'Ermitage  de 

époque,  la  Société  des  amateurs  d'archéo- 
lyern  est  le  secrétaire,  ayant  été  fondée, 
é  et  c'est  dans  ce  musée  que  sont  mainte- 
les  produits  des  fouilles  archéologiques 
)ays. 

blicalîons  ont  été  faites  au  sujet  des  dé- 
iihavro  soit  par  M.  Bayem,  soit  par  M 
e  comité  dj  la  Société  Archéologique 


,ï  Google 


454 
Tiflis'.  C'est  surtout  M.  Smimow  qui  a  fait  connaître  cette 
station.  En  1873  ce  savant  naturaliste  envoyait  à  Broca  trois 
crânes  déformés  de  Samthavro  accompagnés  d'un  album  de 
photographies  et  de  dessins  représentant  d'autres  crânes  et 
divers  objets  archéologiques*, 

A  la  suite  d'une  communication  que  fit  Broca  à  la  So- 
ciété d'Anthropologie  sur  cet  envoi  à  l'époque,  on  déclara 
que  cette  nécropole  datait  de  l'âge  du  bronze.  Plus  tard, 
en  1877,  M.  Smimow,  dont  les  recherches  avaient  été  en- 
couragées par  Broca,  faisait  à  la  Société  un'  nouvel  envoi  : 
c'était  im  excellent  travail  sur  Samthavro.  Dans  ce  mémoi- 
re, M,  Smimow  résume  les  explorations  de  M.  Bayem  et 
donne  les  résultats  des  mensurations  qu'il  a  pu  opérer  sur 
les  crânes  de  cène  nécropole.  Quant  à  son  ancienneté  tl  croit 
pouvoir  la  faire  remonter  jusqu'à  l'âge  du  bronze*. 

Les  fouilles  n'ayant  pas  été  opérées  et  réunies  dans  le 
principe  avec  tous  les  soins  désirables,  on  n'a  que  très  peu 
de  renseignements  sur  l'association  des  objets  recueillis  dans 
ces  tombeaux. 

M.  Bayem  a  reconnu  dans  cette  nécropole,  dont  il  n'a 
encore  étudié  qu'une  partie,  quatre  types  de  constructions. 
La  plupart  de  ces  tombeaux  sont  faits  de  dalles  brutes,  un 
grand  nombre  affectent  une  forme  presque  cubique  et  ont 
été  pris  dans  le  principe  pour  des  dolmens. 

'  Zeitschri/tjîir  Ethnologie  (Bastian  et  Artmann,  Berlin,  1872).  Afi(- 
teiluiigen  der  Ânthropologischen  Gesellschaft,  in  Wien  1874. — Dr.  Sce- 
pura:  Essai  sur  ies  macrocéphales  du  cimetière  de  Samthavro,  Tîflis, 
1875. — Annales  de  la  commission  archéologique  de  Saint-Pétersbourg, 
i875. — Mémoire  de  la  société  des  amateurs  d'archéologie  du  Caucase, 
Tîflis,  1877. 

*  Bull.  Soc.  Autkrop.  t.  vin,  a"  série, p.  572, séance  du  19  juin  i873. 

*  Bull.  Soc.  Anthrop.  t.  ui,  a,™  série,  p.  S41,  séance  du  18  octobre 
1877. 


,ï  Google 


455 

Vus  surtout  en  coupe  dans  la  tranchée  de  la  route  de 
Géorgie,  l'erreur  était  possible. 

A  côté  de  ces  tombeaux  s'en  trouvent  quelques-uns 
du  même  genre,  mais  de  dimensions  moindres  et  plus  sim- 
ples; d'autres,  enfin,  sont  faits  en-  briques  on  en  grandes 
tmles,  ces  derniers  sont  incontestablement  bien  postérieurs 
à  ceux  qui  sont  faits  en  dalles;  les  mobiliers  funéraires  que 
l'on  y  trouve  le  démontrent  au  reste. 

Dans  la  série  la  plus  ancienne,  celle  qui  doit  fixer  ici 
l'anention,  l'inhumation  paraît  avoir  été  exclusivement  usi- 
tée. 

La  plupart  des  tombeaux  de  Mtskheth  ont  donné  des 
poteries  variées,  plats  et  vases  divers,  puis  de  très  nombreux 
ornements,  spirales,  pendeloques,  bracelets,  colliers,  perles, 
fibules  en  fer  et  en  bronze,  enfin  de  loin  en  loin,  quelques 
flèches  et  poignards  en  bronze.  Quelques-uns  de  ces  objets, 
principalement  les  pendeloques  à  spirales,  à  représentations 
animales  et  certames  fibules  sont  identiques  à  celles  de  Kaz- 
bek  et  de  Koban. 

Le  nombre  des  individus  inhumés  dans  le  même  tom- 
beau est  de  deux  ou  trois,  dans  ceux  qui  n'ont  pas  été  re- 
maniés. 

Peu  de  squelettes  ont  pu  être  retirés  complets  et  les 
crânes  sont  généralement  en  très  mauvais  état,  ceux  qui  pa- 
raissent les  plus  anciens  sont  généralement  dolichocéphales; 
quant  aux  macrocéphales  ils  ont  été  trouvés  au  milieu  des 
autres  dans  la  proportion  de  2070,  de  même  que  cela  a  eu 
lieu  dans  le  tumulus  de  Corveissiat  (Jura). 

Les  fouilles  méthodiques  de  M.  Bayern  et  celles  que 
j'ai  pu  opérer  pendant  quelques  jours,  grâce  aux  renseigne- 
ments obligeants  de  M.  Smirnow,  montrent  que  la  plupart 
de  ces  tombeaux  ont  été  violés  anciennement.  On  remarque 


f^ 


456 

.  de  plus  que  des  mobiliers  funéraires  présentant  des  carac- 
tères divers  ont  été  déposés  dans  le  nitême  tombeau  et  à 
plusieurs  époques,  et  que  ces  différents  mobiliers  funéraires 
se  trouvent  actuellement  mélangés.  Le  plus  grand  désordre 
règne  partout,  et  il  est  fort  difficile  de  tirer  des  conclusions 
certaines  relativement  à  Porigine  de  cette  nécropole  et  aux 
populations  qui  Pont  construite. 

De  l'étude  cependant  de  quelques  rares  sépultures  ob- 
servées en  place,  il  paraît  résulter  ce  fait  capital,  à  savoir, 
que  c'est  dans  les  couches  inférieures  que  se  trouvent  les 
crânes  macrocéphales  et  que  les  mobiliers  funéraires  qui  les 
accompagnent  présentent  les  plus  grands  rapports  avec  ceux 
des  nécropoles  de  l'Ossétie,  lesquels  ne  renferment  aucuns 
de  ces  objets  d'une  époque  relativement  bien  plus  mo- 
derne, comme  cela  a  eu  lieu  dans  plusieurs  tombeaux  de 
Mtskheth. 

Les  sépultures  renfermant  ces  objets  et  offrant  des  ca- 
ractères artistiques  greco-phéniciens  ou  même  romains,  doi- 
vent être  écartées  de  l'ensemble  de  la  nécropole,  dans  l'étu- 
de que  nous  poursuivons.  J'ai  rapporté  de  nombreuses  pho- 
thographies  montrant  des  spécimens  des  mobiliers  funérai- 
res et  des  crânes  humains  que  j'ai  pu  recueillir  ou  que  j'ai 
étudié  dans  le  musée  de  Tiflis. 

En  étudiant  tes  divers  objets  composant  les  mobiliers 
funéraires  de  ces  nécropoles  (il  n'est  question  bien  entendu 
que  des  plus  anciennes)  il  paraît  ressortir  qu'elles  appartien- 
nent dans  leur  ensemble  au  premier  âge  du  fer  et  non  à 
l'âge  du  bronze  comme  on  l'a  dit  autrefois. 

Les  tombeaux  de  Samthavro  ne  sont  pas  les  seuls  qui 
ont  attiré  l'attention  de  M.  Bayem. 

On  connaît  d'autres  nécropoles  à  Dilijane,  à  Marienfeld 
et  à  Sartatchalo;  elles  ont  eu  pour  explorateur  comme  celle 


,ï  Google 


iiz. 

de  Mtskheth,  M.  Bayern.  Elles  ont  été  à  peine  fouillées  jus-: 
qu'à  ce  jour;  on  sait  cependant  que  les  tombeaux  que  l'on 
y  a  découverts  sont  du  même  genre  que  ceux  de  Mtskheth. 
Les  mobiliers  funéraires  que  l'on  en  a  retirés  présentent  les 
plus  grandes  analogies  avec  ceux  des  autres  groupes;  on  y 
trouve  également  des  crânes  macrocéphales. 

Ces  nécropoles  méritent  d'autant  plus  d'attirer  l'atten- 
tion que  les  cas  de  remaniements  et  de  mélanges  n'y  sont 
rencontrés  qu'exceptionnellement. 

Il  ne  m'a  pas  été  possible  dans  ce  premier  voyage 
d'étudier  ces  dernières  localités,  mais  je  suis  fort  disposé  à 
repartir  dans  le  Caucase  et  j'espère  pouvoir  y  entreprendre 
de  nouvelles  fouilles,  dont  les  résultats  viendront  sans  doute 
confirmer  ces  premières  observations  ou  devront  du  moins 
jeter  un  jour  nouveau  sur  cette  question  si  pleine  d'intérêt. 

NÉCROPOLES  DE  l'oSSÉTIE.  —  KOBAN  ET  KAZBEC 

La  connaissance  de  ces  deux  nécropoles  est  due  à  M. 
Felimonow,  conservateur  du  Musée  archéologique  de  Mos- 
cou, qui  en  a  donné  une  description  en  1878  dans  les  an- 
nales de  la  Société  des  amis  des  sciences  nanirelles  et  d'an- 
thropologie de  Moscou. 

En  1874,  deux  fibules,  trouvées  près  de  la  station  de 
Kazbek  par  un  ouvrier  de  la  route  de  Géorgie,  ayant  été 
apportées  au  musée,  l'attention  de  M.  Felimonow  fut  éveil- 
lée et  il  conçut  bientôt  le  projet  d'aller  visiter  les  localités 
où  avait  été  faite  cette  découverte. 

Dans  le  premier  voyage  qu'il  fit  au  Caucase,  M.  Feli- 
monow vit  à  Tiflis,  dans  le  musée  archéologique,  plusieurs 
objets  analogues  venant  de  Koban  dans  les  monts  Tagaour. 


In 


458 

De  retour  dans  l'intérieur  du  Caucase  cet  archéologue  se 
mit  en  devoir  de  fouiller  les  tombeaux  de  Kazbek  et  de 
Koban. 

NÉCROPOLE  DE  KOBAN. — Lcs  sépulturcs  dccouvcrtes  dans 
cette  nécropole  se  trouvent  sur  la  berge  de  la  rivière  Ko- 
banka,  non  loin  du  village  de  Haut-Koban  et  prés  de  la 
route  de  Vladikavkaz,  A  peine  indiqués  par  quelques  amas 
de  pierres,  la  plupart  des  tombeaux  étaient  faits  de  dalles 
brutes  et  avaient  i  mètre  environ  sur  0,60  de  largeur  et  0,70 
de  profondeur. 

Dans  chaque  tombe  il  ne  se  trouvait  qu'un  seul  indivi- 
du, accompagné  souvent  de  poteries  du  genre  de  celles  de 
Mtskheth  et  de  nombreux  objets  en  bronze,  des  fibules  à 
arc  simple  plus  ou  moins  ornées;  des  perles  de  verre,  de 
cornaline  et  de  bronze;  des  chaînettes;  des  bracelets  et  des 
bagues  à  tiges  plates  et  à  tîges  rondes  avec  des  spirales;  des 
appliques  de  divers  types;  des  pendeloques  en  spirale;  puis 
quelques  rares  armes  en  bronze;  épées  et  poignards  à  soie, 
quelquefois  avec  lame  de  fer;  les  rares  haches  trouvées  dans 
ces  tombeaux  sont  courbes  et  sont  à  douille  ;  elles  sont  or- 
nées de  gravures  représentant  des  zig-zag,  des  cercles  con- 
centriques, des  quadrupèdes  et  des  poissons. 

Le  plus  grand  désordre  régnait  dans  les  tombeaux  et 
il  a  été  fort  difficile  de  se  rendre  compte  de  la  position  de' 
chacun  des  objets  auprès  des  cadavres;  les  ossements  hu- 
mains étaient  en  si  mauvais  état  qu'il  n'a  été  possible  d'en 
rapporter  qu'une  très  petite  quantité. 

M.  Felimonow  n'a  donc  pas  pu  donner  des  détails  sur 
les  caractères  anatomiques  de  la  population  inhumée  à  Ko- 
ban. J'ai  appris  cependant  de  M.  Antonovitch  qui  a  fait  de 
nouvelles  fouilles  dans  ce  pays,  que  parmi  les  crânes  décou- 


,ï  Google 


4^9 
cropole,  plusieurs  présentaient  la  défer- 
le signalés  de  l'autre  côté  du  Caucase  *. 

[AZBEK. — Les  tombeaux  découverts  dans 
ient  un  assez  grand  espace  près  de  l'égii- 
Les  fouilles  furent  entreprises  dans  la 
des  Kazbek  et  au  milieu  de  cette  popu- 
xessante  du  reste,  mais  que  M.  Felimo- 
de  qualifier,  avec  quelque  raison,  de  de- 
:herches  furent  quelque  peu  accidentées, 
ouverts  et  non  complètement  explorés 
pendant  la  nuit,  il  fut  très  difficile  à  M. 
endre  compte  de  la  position  en  place  de 
s  contenus  dans  chaque  sépulture. 
!ts  recueillis  par  le  savant  conservateur 
ique  de  Moscou,  on  doit  citer  tout  d'abord 
jles  a  arc  simple  généralement  à  côtes, 
sont  fort  grandes  et  atteignent  jusqu'à 
ur  deux  des  fibules  se  trouvent  représen- 
"eau  et  un  svastika  ou  croix  gammée. 
;  ceintures,  des  bracelets  ou  ornements 
inces  de  bronze,  ornées  sur  les  bords  de 
i  garnies  de  points;  leurs  extrémités  sont 
;t  de  svastika. 

de  bracelets  en  fils  de  bronze,  des  pen- 
pendeloques  en  of  garnies  de  perles  de 
ibstances. 
,  plus  ou  moins  massives,  en  forme  de 

note  a  été  rédigée  j'ai  fait  un  nouveau  i 
^  des  fouilles  considérables  dans  la  Née 
raphie  des  nécropoles  préhistoriques  du  C 


,ï  Google 


460 

cheval  ou  bien  de  tête  de  cet  animal  et  des  boutons  omés 
de  tête  de  cheval,  puis  d'autres  avec  le  cavalier. 

Une  série  de  pendeloques  avec  chaînes,  représentant 
grossièrement  des  hommes  et  des  femmes,  rappelant  les 
baba  en  pierre  de  la  Russie  méridionale;  puis  des  têtes  de 
cerfs  et  de  bœufs  et  des  clochettes  ou  crotales.  Enfin  des 
poignées  et  bouieroUes  d'épées  et  quelques  lames  de  ces  mê- 
mes armes  en  fer. 

De  l'ensemble  des  observations  que  M,  Felimonow  a 
pu  faire  dans  les  deux  nécropoles  qu'il  a  fouillées,  il  conclut 
que  ces  sépultures  appartiennent  à  des  populations  certai- 
nement préhistoriques  et  que  l'on  peut  les  faire  remonter  au 
commencement  de  l'âge  du  fer,  conclusions  auxquelles  j'adhè- 
re pleinement. 

Il  pense  également  que  la  fabrication  des  objets  qu'il  a 
découverts,  est  toute  locale  et  qu'elle  appartient  en  propre 
à  l'Ossétie  ou  du  moins  au  bassin  du  Térek,  car  on  a  trouvé 
des  objets  semblables  en  Kabarda  et  en  Tchetchéna,  mais 
on  n'en  a  jamais  rencontré  plus  au  sud,  suivant  lui. 

D'après  les  renseignements  qui  viennent  d'être  donnés 
sur  les  nécropoles  de  l'Ossétie  et  sur  celles  de  Géorgie,  il 
ressort  quelques  faits  intéressants  que  je  résumerai  dans  les 
propositions  suivantes: 

i"  Les  tombeaux  de  Koban  et  de  Kazbek,  de  Samtha- 
vro  et  probablement  ceux  des  autres  nécropoles  analogues 
découvertes  dans  les  mêmes  pays,  paraissent  appartenir  à 
une  même  population  ou  du  moins  à  des  populations  d'ori- 
gine commune  et  ayant  atteint  le  même  degré  de  civilisation, 
c'est-ù-dirc  celle  qui  a  reçu  le  nom  de  premier  âge  du  fer. 

2"  La  civilisation  à  laquelle  semblent  appartenir  ces  né- 
cropoles, paraît  pouvoir  être  assimilée  à  celle  dont  on  a  trou- 
ve des  vestiges  si  remarquables  à  Bologne,  à  Este,  à  Cor- 


,ï  Google 


neto,  à  Bismentova,  à  Halstatt,  Watch,  etc.,  puis  en  Suisse 
et  dans  le  Jura.  Bien  que  le  développement  de  ces  diverses 
nécropoles  ne  soit  pas  synchronique,  suivant  toute  probabi- 
lité, la  coexistence  dans  ces  diverses  localités,  de  plusieurs 
types  d'objets  et  d'ornementations,  tels  que  les  fibules  à  arc 
simple  et  à  côtes,  ainsi  que  les  représentations  animales,  la 
spirale  et  le  svastika,  paraît  affirmer  entre  elle  une  parenté 
incontestable. 

3"  Ce  fait  démontré  d'après  les  caractères  archéologi- 
ques est  confirmé  encore  par  les  caractères  anthropologiques, 
car  à  Samthavro  les  macrocéphales  se  retrouvent  comme 
dans  le  Jura  dans  les  proportions  de  20  "/o  au  milieu  d'une 
population  dolichocéphale. 

En  résumé,  s'il  n'est  pas  possible  de  prouver  que  les 
populations  qui  ont  laissé  des  macrocéphales  dans  le  Jura 
sont  originaires  du  Caucase  aussi  bien  que  celles  qui  ont 
déposé  des  fibules  à  arc  et  à  côtes  dans  les  nécropoles  de 
l'Étrurie,  de  la  Lombardie  et  des  Alpes  autrichiens,  il  est 
indiscutable  tout  au  moins  qu'elles  ont  eu  entre  elles  des 
relations  commerciales  ou  autres  de  plus  ou  moins  lo 
durée. 

Étant  prouvé  que  les  crânes  macrocéphales  ont  et 
cueillis  à  Samthavro  associés  à  des  mobiliers  funéraire; 
tant  de  l'époque  du  fer,  il  n'est  plus  possible  de  les 
buer  aux  temps  historiques. 


DisousBlon 

M.  ViRCHOw:  Les  divers  faits  exposés  par  M,  Chi 
sont  de  la  plus  grande  importance  quant  à  la  démonstr 
des  relations  entre  l'Asie  et  l'Europe.  Mais  il  me  paraî 


lyGoogle 


462 

la  formule  qu'il  propose  pour  la  détermination  chronologi- 
que de  la  macrocéphalie  est  trop  exclusive.  En  Europe,  on 
connaît  des  crânes  vraiment  macrocéphales  des  temps  his- 
toriques ;  je  citerai  particulièrement  le  cas  décrit  n^r  M.  Thur- 
nam  {crâne  d'un  tombeau  anglo-saxon  en  Angleterre),  et 
l'autre  dessiné  et  décrit  par  M.  Ecker  (crâne  d'un  tombeau 
mérovingien  de  Niederolm,  Hesse).  En  Asie,'  nous  avons 
les  macrocéphales  de  la  Colchide,  décrits  si  bien  par  Hippo- 
crate,  un  écrivain  qu'on  ne  placera  pas  dans  la  période  du 
premier  âge  de  fer.  On  trouve  aussi  fréquemment,  sur  le 
littoral  de  l'Asie  Mineure,  des  petites  figures  en  terre  culte 
qui  imitent  très  fidèlement  les  têtes  macrocéphaliques  et  qui 
doivent  être  assimilées  aux  temps  helléniques.  On  devra 
donc  avouer  que  la  mode  de  déformer  les  têtes  dans  le  sens 
dit  macrocéphalique  était  très  répandue  dans  le  monde  an- 
tique. 

M.  Chantre:  Je  n'ai  pas  prétendu  démontrer  que  tous 
les  crânes  macrocéphales  appartiennent  au  premier  âge  du 
fer,  comme  paraît  le  croire  M.  Virchow.  J'ai  insisté  seule- 
ment sur  ce  fait  important  à  noter,  c'est  que  les  macrocé- 
phales du  Jura  ont  été  recueillis,  ainsi  que  ceux  de  Géoi^ie, 
associés  à  des  objets  archéologiques  reconnus  comme  ca- 
ractéristiques du  premier  âge  du  fer.  Je  ne  crois  pas  que  l'on 
puisse  se  prononcer  sur  l'ancienneté  des  autres  crânes  macro- 
céphales qui  ont  été  signalés  dans  les  autres  pays,  car  on 
ignore  généralement  dans  quelles  conditions  ils  ont  été  trou- 
vés. 

Je  ne  pense  donc  pas,  par  conséquent,  que  cette  cou- 
tume de  déformer  les  crânes  n'appartient  qu'à  cette  période 
qui  a  suivi  l'âge  du  bronze;  je  suis  porté,  au  contraire,  à 
considérer  que  cet  usage  a  pu  exister  à  plusieiu-s  époques; 


ly  Google 


463 

il  existe  même  actueLement  encore  dans  certains  pays,  chez 
les  Arméniens,  par  exemple.  Je  connais  même  plusieurs  ha- 
bitants de  Tiflis  dont  les  crânes  présentent  la  déformation 
macrocéphale  d'une  façon  très  remarquable'. 

M.  Antonovitch:  J'ai  trouvé  des  crânes  macrocépha- 
les  dans  les  défilés  du  haut  Caucase  avec  des  monnaies  by- 
zantines de  l'empereur  Anastase.  Également  au  pied  du 
Caucase  j'ai  rencontré  six  crânes  macrocéphales  dans  des 
tumulus  du  14*""  siècle.  D'un  autre  côté,  je  ferai  observer 
que  l'âge  du  fer  préhistorique  dans  le  Caucase  arrive  peut- 
être  jusqu'au  moyen-âge  de  l'Europe. 

M.  Chantre:  Ces  gisements  dont  ont  vient  de  parier 
ne  peuvent  être  confondus  avec  celui  de  Samthavro.  En  ou- 
tre, les  macrocéphales  dont  parle  aussi  M.  Antonovitch  n'ont 
pas  du  tout  le  type  de  ceux  que  j'ai  signalés. 

M.  HiLDEBRAND  après  avoir  relevé  l'importance  exces- 
sive de  la  communication  de  M.  Chantre  dit: 

Il  y  a  sunout  un  fait  à  noter:  si  M.  Chantre  avait  pu 
nous  montrer  des  objets  provenant  des  cimetières  caucasiens 
analogues  à  ceux  de  l'Europe  méridionale,  c'eut  été  fort  im- 
ponant; or  il  a  fait  mieux:  il  présente  des  types  identiques. 
Et  cependant  quelle  grande  distance  entre  le  Caucase  et 
l'Italie!  Le  fait  est  inexplicable  dans  l'état  actuel  de  la  scïen- 

'  J'ai  constaté  depuis  le  Congrès  l'existence  de  crânes  macrocé- 
phales dans  des  tombeaux  Grecs  soit  à  Kertch,  soit  à  Marseille,  puis 
dans  des  sépultures  romaines  en  Alsace  et  dans  de  nouvelles  nécropo- 
les caucasiennes  probablement  du  vi*"*  siècle.  J'ai  également  retrouvé 
l'usage  de  déformer  le  crâne  chez  les  Anshariés  et  les  Kurdes  actuels. 

c.  K.  33 


ce.  II  est  nécessaire  d'opérer  de  nouvelles  recherches,  des 
fouilles  systhématiques.  Tous  ceux  qui  s'intéressent  au  dé- 
veloppement de  nos  études  ne  peuvent  que  désirer  que 
M.  Chantre  soit  mis  en  état  de  continuer  ces  investigations 
qui,  dés  leur  début,  ont  donné  de  tels  résultats. 


EXPLICATION   DE   LA   PLANCHE 


CHÀNES  DéFORMÉS  ARTIFiaELLEUENT 

Fig.  I  et  2.  Si-pukures  Grecques  de  Marseille. 
3.  Nécropole  de  Samihavro  (Caucase). 
4  et  5.  Tumulus  de  Corveissiat  (Jura). 
6.  Nécropoles  de  Samihavro  (Caucase). 
7  et  8.  Tumulus  de  Voïteur  (Jura). 


r„i,..#fli^^.oogle 


E.  Ohantke 


Pholog.  et  Photcl.  k  H.  D  Sanlos. 


er  de  la  Secucn  Géologique. 


DigitizsdbyGOOgle 


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sus  QUELQUES  JNSCHIFTIOHS  EN  ËCRirURE  OOHAM: 


M.  George  M.  Atkjnson* 

A  la  troisième  session  du  Congrès  Préhistorique,  tenue 
k  Norwich,  un  mémoire  sur  une  sorte  d^écriture  ancienne 
appelée  Ogham  fut  présenté,  et  cette  écriture  fut  décrite  par 
M.  Richard  Rolt  Brash,  mort  depuis. 

Dans  Pceuvre  posthume  «'Die  Ogham  Inscribed  Monu- 
ments of  the  Gaedhil  in  the  British  Islands  etc.,»  éditée  par 
votre  humble  correspondant,  il  prétend  que  ces  caractères 
furent  apportés  dans  les  lies  Britanniques  par  une  colonie  de 
marins  dans  les  temps  préhistoriques.  Il  soutient  ses  argu- 
ments par  un  plus  grand  nombre  de  monuments  trouvés  au 
bord  de  la  mer,  et  il  cite  les  traditions  de  peuples  qui  avaient 
des  relations  avec  un  établissement  espagnol. 

Il  y  a  une  ressemblance  frappante  entre  plusieurs  des 
noms  propres  en  Espagne,  en  Portugal,  dans  le  pays  des 
Gaëls,  et  il  cite  Strabon  pour  confirmer  les  traditions  ibé- 


■  Lettre  adressée  au  Secrétaire  général  du  Congrès,  le  i5  scptem- 
bre  iS8o. 


,ï  Google 


466 

Tiennes  dans  sa  description  du  plan  de  l'Andalousie  (Baetica) 
et  des  pays  voisins,  Turdetania,  et  TurduH. 

Je  prie  les  savants  d'étudier  cette  question,  et  je  désire 
savoir  si  nuls  monuments  écrits  en  de  tels  caractères  n'ont 
été  remarqués  dans  Tlbérie. 

On  constate  qu'il  y  a  à  peu  près  deux  cents  de  ces 
monuments  mégalithiques.  Ils  varient  en  hauteur  d'un  à 
cinq  mètres,  et  font  seulement  mention  du  nom,  et  du 
nom  patronymique  du  défunt,  au  génitif.  On  les  trouve  sur 
des  tumulus  et  dans  des  souterrains  (rath,  lios),,  dans  des 
cimetières  chrétiens  où  l'on  n'enterre  plus.  On  les  retrouve 
encore  dans  les  églises  primitives  et  dans  des  endroits  où  ils 
sont  souvent  consacrés  et  portent  la  marque  d'une  croix*. 

Agllsh  comté  de  Kerry,  Irlande.  Ce  monument  est 
imparfait.  L'inscription  est: 

AEA    I       L    O    G        DO 

La  croix  a  été  ajoutée  sur  la  base  de  la  pierre.  II  y  a 
aussi  des  svastikas.  Il  se  trouve  dans  le  Musée  de  l'Aca- 
démie Royale  d'Irlande,  Dublin. 

Saint  Olan's  Well. 

mn'>/t'"">iin'im/n 

N  OMAQ  IDEGO     {tAA(il=^lius). 

'  Voir  la  planche  ci-jointe. 


,ï  Google 


467 

llyorovane.  Ce  grand  monolithe  est  élevé  sur  un  tu- 
ans  un  lieu  désert,  auprès  de  Kenmare  dans  le  sud- 
:  l'Irlande.  On  doit  lire  l'inscription ^e  bas  en  haut: 


»<"m"i'»""""'-»""'mj'm::.n 

Q         I        D    E        C        C 


DE        C        C  EDDASAF 


Datoggart.  On  l'a  trouvée  couvrant  un  kistpaen,  ou 
in.  L'inscription  est: 


^^Umljltmjum'"ul 


TEGG        ELN       ULG 


'rrrf-ff'"" ff/  '"nif^//  "•••rmjfi 

lOQOMQER  QEF  q.   e. 

lEQ        MOQOl        GLUNLEGCET. 


lynesteening.  Colonne  cylindrique  élevée  autre- 
nilieu  du  village.  Voici  l'inscription: 

1       N      (e)n      AMAQ        I      OLACON 


f         i 


Ballyn  Tagart.  N.°  î.  Une  belle  pierre  à  secrion  ova- 
le, avec  une  très  longue  légende: 

MAQ       Q       I         lAR  lEAIHAQ 

"'^m/H  '*""'/ W/  %//iii  "ll'iiw  """tui 

Q       I    M    O      C      C    O    E     DOF    F       IN         I    A    S 

Ballyn  Tagart.  N."  6. 


T      R  I     AMA      QAM      E    OLAG      N  I 

Cette  pierre-ci,  ainsi  que  le  N,'  2  et  sept  autres  pierres 
furent  trouvées  dans  un  cileen,  cimetière  où  l'on  n'enterre 
plus,  près  de  Dingle,  comté  de  Kerry,  Irlande. 

Trallong.  On  la  trouve  dans  un  endroit  d'une  église  an- 
cienne à  Trallong,  Brecknockshire,  dans  le  pays  de  Galles. 
Inscription  bilingue,  écriture  latine  et  Ogham  :  plusieurs  des 
monuments  dans  le  pays  de  Galles  ont  de  ces  inscriptions 
bilingues. 

Logie.  Cette  pierre  faisait  partie  d'un  cercle  de  pier- 
res semblables,  sur  le  marais  de  Cardcn,  dans  le  Garîoch, 
Aberdeenshire.  Elle  a  une  inscription  en  Ogham  et  des  or- 
nements qui  appartiennent  à  l'Ecosse  seule. 


1,  Google 


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469 

Lxumastlng:.  Petite  pierre  portant  une  inscription  en  ca- 
ractères Ogham  très  serrés,  dont  la  transcription  est: 

Xtt(oi)chuh(o)tts:ah(o)h,  httmnnn:hccf: 
fstff:  nehht.  onn. 

Elle  (ut  trouvée  dans  un  marais  à  Lunnasting,  et  dépo- 
sée au  Musée  National  des  Antiquités  d'Edimbourg. 

Ces  caractères  furent  usités  .jusqu'au  10*  siècle. 

Nous  en  trouvons  des  variations  différentes  expliquées 
dans  un  manuscrit  nommé  «The  book  of  Ballymotei,  con- 
servé dans  la  bibliothèque  de  l'Académie  Royale  d'Irlande. 


,ï  G  00 1^  le 


DU  OUL'n:  DE  LA  PŒRRE 


M.  J.  Bellucci 


Voici  une  série  de  cartons  contenant  une  collection 
d'amulettes  modernes  que  j'ai  recueillies  en  diverses  par- 
ties de  rOmbrie,  et  principalement  dans  les  habitations  ru- 
rales et  montagnardes  de  cette  région.  Je  ferai  remarquer 
que  les  pièces  recueillies  peuvent  être  divisées  en  deux  ca- 
tégories: amulettes  efficaces  contre  les  maladies  de  Thomme 
et  des  animaux  ;  celles  qui  ont  efficacité  par  rapport  aux 
croyances  et  superstitions  particulières,  par  exemple,  la  fou- 
dre, les  sorcières,  le  mauvais  œil,  la  mauvaise  fortune.  Ce 
carton  contenant  vingt-six  amulettes  est  surtout  important 
au  point  de  vue  des  études  préhistoriques,  car  ces  amulettes 
sont  considérées  comme  des  préservatifs  contre  la  foudre;  ils 
consistent,  comme  on  peut  voir,  en  des  pointes  de  flèches, 
des  couteaux,  des  grattoirs  en  silex,  des  hachettes  polies  en 
serpentine  et  en  jadéite.  Quelques-unes  de  ces  amulettes 
sont  enchâssées  dans  des  Agnus-Dei,  d'autres  sont  gar- 
dées dans  des  sachets  de  cuir,  d'autres  encadrées  en  argent 
ou  en  laiton. 


,ï  Google 


471 
Parmi  les  amulettes  efficaces  contre  les  maladies,  je  si- 
gnalerai un  fragment  de  crâne  humain,  une  espèce  de  ron- 
delle crânienne,  prise  dans  un  crâne  après  la  mort,  et  gardée 
comme  efficace  contre  Tépilepsie  ou  mal  caduc,  et  contre 
les  convulsions  chez  les  enfants.  J'ajouterai  que  cette  singu- 
lière amulette  démontre  combien  vraie  était  Pingénieuse  hy- 
pothèse du  regretté  professeur  Broca  sur  ta  vertu  des  amu- 
lettes crâniennes  de  l'époque  préhistorique,  et  sur  la  trépa- 
nation usitée  alors.  Je  terminerai  en  disant  que  je  poursuis 
à  présent  ces  recherches  et  que  sur  la  question  des  amulettes 
contemporaines  je  publierai  sous  peu  le  résultat  de  mes  in- 
vestigations. 

M.  Magitot:  Parmi  les  pièces  que  M.  Bellucci  fait  pas- 
ser sous  nos  yeux,  je  remarque  la  présence  d'une  rondelle 
crânienne  de  tous  points  comparable  ù  celles  qui  ont  été 
observées  dans  la  Lozère  par  le  Dr.  Prunières  et  dans  la 
Marne  par  M.  Joseph  de  Baye.  C'est  là  un  fait  très  inté- 
ressant en  raison  de  sa  nouvelle  provenance  et  qui  fait  pré- 
voir d'autres  découvertes  du  même  ordre  relativement  à  la 
pratique  de  la  trépanation  préhistorique. 


,ï  Google 


HOTE  SDR  LES  PKÊTENDUES  KBLATI0N3 


MACROCÉPHALES  D'HIPPOCRATE  AVEC  I,ES  CIMBRES 


M.    F.   ADOtPHO  COELHO 

Au  congrès  de  Budapesth  {1876)  M:  Lenhossék  pré- 
senta un  de  sept  crânes  macrocéphales  qui  ont  été  décou- 
verts sur  le  bord  de  la  Tisza  en  Hongrie,  L'attribution  de 
ce  crâne  à  une  race  particulière  pratiquant  la  déformation  ar- 
tificielle qu'on  y  remarquait,  donna  lieu  à  une  discussion  à 
laquelle  prirent  part  beaucoup  de  savants  et  entre  eux  M. 
Broca.  Cet  éminent  anthropologue,  dont  la  science  déplore 
la  perte  récente,  ne  voulut  pas  y  voir  un  crâne  tartare  da- 
tant, ou  de  rinvasion  des  Tartares  en  Hongrie  en  1341  ou  de  ' 
ta  conquête  turque  en  1326,  où  les  Tartares  faisaient  partie 
intégrante  de  l'armée  turque.  M.  Broca  allait  chercher  plus 
haut  l'origine  de  ce  crâne,  en  le  mettant  en  rapport  avec  cer- 
tains faits  de  déformation  crânienne  artificielle,  connus  soit 
par  les  notices  des  anciens  auteurs,  soit  par  l'observation 
moderne,  c'est-à-dire  avec  les  macrocéphales  d'Hippocrate, 
la  déformation  toulousaine  et  celle  qu'on  retrouve  dans  le 
département  de  Deux-Sèvres,  etc. 

Ma  note  ne  regarde  que  la  théorie  ethnique  énoncée  par 
Broca  à  propos  de  ces  faits. 


,ï  Google 


D'après  lui  tous  ces  crânes  macrocéphaies  proviennent 
d'un  seul  peuple,  le  peuple  qu'Hippocrate  et  d'autres  anciens 
écrivains  nous  font  connaître  sous  le  nom  de  Macrocépha- 
ies; c'est  à  ce  peuple  qu'on  doit  l'implantation  de  l'usage 
de  la  déformation  artificielle  du  ci^ne,  qui  s'est  maintenu 
jusqu'à  nos  jours  en  diverses  parties  de  la  France.  Ce  peu- 
ple, qui  habitait  près  du  Palus-Maeotides,  devait  être  un  des 
peuples  Cimmériens,  à  tous  lesquels  cet  usage  ne  serait  peut- 
être  pas  commun.  Les  Cimmériens  auraient  parcouru  l'Eu- 
rope en  toute  sa  largeur  à  l'âge  du  bronze.  Une  partie  de 
ce  peuple,  qui  après  l'invasion  scythique  (63 1  avant  notre 
ère)  n'avait  pas  passé  en  Asie,  s'est  dirigé  probablement 
vers  l'ouest  et  le  nord  de  l'Europe. 

On  les  retrouve,  moins  de  5o  ans  après  sous  le  nom 
de  Kimris  ou  de  Ifymris  que  se  donnent  encore  aujourd'hui 
les  Gallois  de  la  Grande-Bretagne,  et  plus  tard  sous  le  nom 
de  Cimbri^  adouci  par  la  prononciation  latine.  C'est  à  eux 
que  le  Jutland  dût  d'être  appelé  par  les  Romains  \s-  pénin- 
sule cimbrique,  et  c'est  de  leur  nom  que  les  modernes  ont 
fait  dériver  celui  de  race  kpnrigue.  Tune  des  deux  grandes  ra- 
ces celtiques.  Ils  pénétrèrent  en  Gaule  à  travers  le  Rhin;  ils  y 
poussèrent  à  plusieurs  reprises  leurs  invasions  presque  dans 
le  sud,  et  après  des  luttes  violentes  qui  provoquèrent  de 
grands  mouvements  de  peuples,  ils  restèrent  définitivement 
maîtres  de  toute  la  Gaule  bcjgique,  comprise  entre  la  Seine, 
la  Marne  et  le  Rhin,  De  là  ils  passèrent  dans  la  Grande- 
Bretagne  dont  ils  occupèrent  la  partie  méridionale;  d'autres 
peuples  kymriques  traversant  l'Helvétie  et  les  Alpes  péni- 
nes,  allèrent  s'établir  dans  la  Haute-Italie;  de  ce  nombre 
étaient  les  Boïens,  dont  les  nombreuses  tribus  se  répandirent 
en  outre  dans  toute  la  région  comprise  entre  le  Mein  et  le 
Danube  et  jusque  dans  la  Bohême  (qui  a  conservé  leur  nom). 


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„Google 


475 
pas,  que  deux  celtistcs  vraiment  sérieux   en  Allemagne, 
deux  en  France,  deux  ou  trois  en  Angleterre,  deux  encore 
en  Italie. 

Je  serai  heureux  si,  en  n'apportant  que  trop  peu  de 
nouveau  sur  cette  question,  maïs  résumant  ce  que  les  maî- 
tres de  la  science  que  je  viens  de  nommer  et  d'autres  en- 
core ont  écrit  sur  la  question  des  Gimbres,  je  contribue  pour 
quelque  chose  à  rayer  des  livres  d'anihropologie,  d'ethno- 
logie et  d'histoire  quelques  équations  ethniques  qui  sont  évi- 
demment fausses  et  la  nomenclature  qui  est  basée  sur  elles. 
Je  vais  résumer  la  question. 

Le  plus  ancien  témoignage  au  sujet  des  Cimmériens 
nous  est  fourni  par  l'Odyssée,  dont  la  géographie  a  des  ca- 
ractères généralement  fantastiques,  aujourd'hui  bien  recon- 
nus, malgré  quelques  enthousiastes. 

Dans  ce  poème  les  Cimmériens  sont  un  peuple  auquel 
ne  se  rattachent  que  des  fables.  Nous  trouvons  chez  Héro- 
dote les  plus  anciennes  notices  historiques  sur  ce  peuple.  Je 
ne  vous  répéterai  ni  ce  que  le  vieux  historien  nous  racconte 
de  son  expulsion  de  la  Crimée  par  les  invasions  scythiques, 
ni  ce  que  nous  savons  de  sa  destinée  dans  l'Asie  Mineure, 
par  les  autres  historiens  grecs,  l'élégie  jonienne  et  les  inscrip- 
tions cunéiformes.  A  juger  par  l'ensemble  de  ces  rensei- 
gnements, on  conclurait  que  les  Cimmériens  étaient  un  peu- 
ple tout  à  fait  disparu  du  théâtre  de  l'histoire  au  temps  d'Hé- 
rodote, sans  avoir  laissé  un  seul  représentant. 

Strabon  nous  fourni  trois  équations  ethniques  à  propos 
des  Cimmériens  et  des  Thraces: 

Les  Cimmériens  sont  aussi  appelés  des  Trêres: 

Les  Tréres  sont  une  nation  Ctmmérienne: 

Les  Trêres  sont  des  Thraces. 


ly  Google 


lOogle 


47^ 

M.  d'Arbois  de  Jubainville  n'hésite  pas  à  en  conclure 
que  les  Cimmériens  étaient  des  Thraces;  mais  les  textes 
classiques  ne  sont  nullement  pour  moi  quelque  chose  de  sa- 
cré sur  laquelle  on  puisse  jurer.  Ce  qu'il  y  a  de  vrai  c'est 
qu'aucun  témoignage  ne  nous  permet  d'affirmer  qu'une  par- 
tie des  Cimmériens  aient  émigré  vers  la  Chersonèse  cimbri- 
que  ou  vers  quelque  autre  partie  de  l'Europe  occidentale  ou 
centrale.  Ce  ne  fut  qu'àla  un  du  deuxième  siècle  avant  notre 
ère,  au  moment  de  la  grande  invasion  cimbrique,  que  l'his- 
torien grec  Posidonius  émit  l'hypothèse,  mais  au  seul  titre 
d'hypothèse,  que  les  Cimbres  fussent  des  Cimmériens,  ne 
se  basant  que  sur  la  ressemblance  des  noms  et  le  caractère 
envahisseur  des  deux  peuples.  Ce  rapprochement  a  été  ré- 
pété, mais  toujours  comme  une  simple  hypothèse,  par  Stra- 
bon,  Diodore  de  Sicile  et  Plutarque.  Moins  exigeants  que 
les  savants  de  l'antiquité,  ceux  de  notre  temps  ont  regardé 
l'hypothèse  comme  un  fait  prouvé. 

Les  formes  des  deux  noms  sont  toujours  bien  fixées  dans 
les  anciens  auteurs.  Le  nom  des  Cimmériens  est  assez  fidè- 
lement transcrit  dans  les  inscriptions  assyriennes  par  Gimi- 
rai,  l'adoucissement  d'un  c  en  ^  étant  très  fréquent  dans  les 
mots  étrangers  admis  dans  une  langue  ou  dans  les  noms 
propres  étrangers:  en  latin,  par  exemple,  Sagunîum  pour 
Zakynthos,  etc. 

Si  nous  savons  fort  peu  sur  les  Cimmériens,  de  bonne 
heure  disparus  de  l'histoire,  nous  possédons  sur  les  Qmbres 
assez  de  données  positives  pour  nous  permettre  de  les  clas- 
sifier  ethnologiquement. 

Il  faut  remarquer  d'abord  que  la  seule  forme  de  leur 
nom  que  nous  connaissions  par  les  auteurs  grecs  et  latins  est 
KifiPpoi,  Cimbri. 

Le  manque  de  critique  avec  lequel  beaucoup  d'écrivains 


,ï  Google 


477 
ont  traité  dans  ces  derniers  temps  la  question  des  Cimbres 
explique  seul  qu'on  ait  mis  en  doute  qu'ils  fussent  des  Ger- 
mains. 

Dans  les  anciens  écrivains,  abstraction  faite  de  l'hypo- 
thèse de  leur  origine  cimmérienne,  nous  les  voyons  être  ap- 
pelés tantôt  des  Galates  ou  des  Celtes,  tantôt  des  Germains. 

11  faut  bien  distinguer  les  époques  auxquelles  appar- 
tiennent ces  différents  témoignages  et  les  écrivains  qui  nous 
les  offrent. 

Les  anciens  confondirent  longtemps  les  Germains  avec 
les  Celtes;  ils  ne  les  ont  bien  distingué  qu'après  l'époque 
où  les  Romains  furent  amenés  à  avoir  un  contact  plus  in- 
time avec  les  deux  groupes.  Jules  César  est  le  premier  écri- 
vain qui  emploie  ce  nom  ethnique  de  Germains;  il  l'avait 
appris  des  Celtes  de  la  Gaule  transalpine  {cisalpine  pour 
nous),  à  la  langue  desquels  ce  mot  appartient,  bien  proba- 
blement. 

La  confusion  des  Cimbres  et  des  Galates,  se  trouve  chez 
Diodore  de  Sicile  (v,  Sa)  et  chez  Appien  (Illyr.  4);  par  cette 
confusion  ces  deux  historiens  font  venir  les  Cimbres  jusqu'à 
Rome  et  à  Delphes,  contre  tout  ce  que  nous  savons  de  leur 
histoire.  Une  confusion  semblable  se  trouve  à  l'égard  d'une 
autre  branche  des  Germains,  les  Bastames,  également  appe- 
lés des  Galates. 

Nous  ne  devons  pas  nous  en  étonner  lorsque  nous  voyons 
encore  Salluste  (Jug.  1 14)  nommer  les  Cimbres  Galli,  Gau- 
lois. Quelques  écrivains  postérieurs,  comme  Flonis,  ont  con- 
tinué la  confusion,  car  ils  se  servaient  des  renseignements 
des  vieux  auteurs;  ceux  qui  avaient  le  moins  de  critique  sup- 
posaient que  l'ancienneté  donnait  à  ces  renseignements  une 
valeur  particulière. 

Dans  l'inscription  d'Ancyre,  Iç  célébra  testament  d'Aii- 


,^ 


478 

guste,  les  Cimbres  sont  considérés  comme  des  Germains, 
de  même  que  dans  les  meilleurs  écrivains  latins  postérieurs 
à  César,  tels  que  Pline,  Tacite,  et  dans  les  écrivains  grecs 
de  la  même  période,  qui  puisèrent  aux  sources  latines,  Stra- 
bon  et  Plutarque.  Mais  j'observerai  que  l'on  continua  à  nom- 
mer populairement  les  Germains  des  Gaulois,  comme  nous 
savons  par  deux  anecdotes  dans  Pline  (35,  4)  et  Gicéron 
{de  Oratore  3,  66),  où  il  est  question  des  images  des  Cim- 
bres, ayant  la  langue  étendue. 

Le  nom  des  Cimbres  est,  d'après  Grimm  et  Zeuss,  bien 
probablement  germanique.  Festus  nous  dit  que  c'est  un 
mot  gaulois  signifiant  larrons  {Cimbri  Hngua  gallica  latro 
nés  dicuntur)^  mais  «gauloisi  ici  peut  signifier  «germanique», 
d'après  ce  que  je  viens  de  dire.  La  même  explication  se  ren- 
contre chez  Plutarque:  KîftjSpous  lirovs^owri  Vt^^anni  tojî 
XiiuTâç  (Mar,  cap.  11).  Arirni^  signifie  spécialement  pirate. 
Grimm  a  montré  dans  ses  Antiquités  du  droit  germanique 
et  nous  le  savons  encore  d'autres  sources,  que  la  piraterie, 
le  vol  était  primitivement  bien  loin  d'être  regardés  comme 
des  professions  malhonnêtes.  Vous  vous  rappelez  sans  doute 
ce  passage  où  Jules  César  nous  dit  que  les  Germains  ne 
considéraient  pas  le  vol  comme  une  infamie  quand  il  était 
exercé  sur  une  tribu,  une  ville  voisine.  Le  nom  de  voleurs, 
de  pirates  par  excellence  n'était  donc  qu'honorable.  Mais  la 
question  d'un  nom  de  peuple  n'a  jamais  une  importance  ca- 
pitale en  ethnologie,  car  ce  nom  peut  appartenir  à  une  lan- 
gue étrangère. 

Zeuss  a  montré  que  les  noms  des  chefs  cimbres  chez 
Orosius — Lugius^  Claodicus,,  Caesorix  sont  des  noms  ger- 
maniques, ce  qui  est  bien  plus  important  que  l'origine  du 
nom  même  de  ce  peuple;  il  n'y  a  que  le  nom  de  chef  fîoiorix 
qui  ait  une  forme  celtique:  nous  trouvons  même  ce  nom 


,ï  Google 


479 
comme  celtique  dans  Tite-Live;  mais  Zeuss  remarque  que 
ce  nom  pourrait  être  altéré  par  les  étrangers  et  qu'on  le 
peut  aussi  regarder  comme  germanique,  car  nous  avons  les 
noms  germaniques  Bojo,  Bojocalus.  Grimm  pense  à  une 
forme  Baugareiks.  On  connaît  plusieurs  noms  propres  cel- 
tiques qui  ressemblent  à  des  noms  propres  germaniques, 
tout  en  ayant  une  étymologie  bien  différente,  que  le  Ihr 
guiste  arrive  à  bien  démêler.  Les  traits  ethnographiques 
des  Cimbres,  leurs  usages  et  leurs  mœurs,  où  l'on  a  vu 
une  preuve  de  leur  celticité,  n'oiîrent  rien  qui  nous  force 
à  les  faire  considérer  comme  des  Celtes.  Les  plumes  et  les 
figures  d^animaux  de  leurs  heaumes  nous  rappellent  la  pas- 
sion que  les  Germains,  décrits  par  Tacite,  avaient  pour 
les  armures,  les  caparaçons,  les  colliers.  Ce  que  nons  sa- 
vons de  leurs  mœurs  n'offre  rien  de  particulièrement  celti- 
que; mais  il  y  a  un  détail  qui  est  parfaitement  germanique. 

Nous  savons  par  Strabon  que  Pambassade  cimbrique 
envoyée  à  Auguste  fit  présent  à  cet  empereur  d'un  chaudron 
sacré. 

Or  le  chaudron  jouait  un  rôle  important  dans  le  culte 
des  anciens  Germains  C'était  dans  le  chaudron  du  sacrifice 
qu'on  faisait  tomber  le  sang  de  la  victime.  On  peut  lire  lâ- 
dessus  les  textes  réunis  pat  J.  Grimm  dans  sa  Mythologie 
allemande^  p.  49. 

Rien  ne  nous  prouve  que  les  Gmbres,  qui  sont  évidem- 
ment, du  moins  pour  nous,  un  peuple  germanique,  prati- 
quassent jamais  la  déformation  macrocéphalique;  je  ne  crois 
pas  qu'on  ait  jusqu'à  présent  trouvé  des  crânes  macrocé- 
phales  dans  le  Jutland;  et  quand  même  on  y  en  trouverait, 
rien  ne  nous  permettrait  d'y  voir  les  traces  de  la  présence 
des  Cimmériens. 

Il  n'y  pas  longtemps  il  régnait  en  Portugal,  du  moins 
CR.  34 


,ï  Google 


4^0 
dans  quelques-unes  de  ses  provinces,  un  usage,  que  je  con- 
nais par  la  description  de  vieilles  sages-femmes  et  où  je 
vois  le  dernier  adoucissement  de  la  déformation  macrocé- 
phaliquc.  C'était  Pusage  de  Vesiopada,  l'étoupage.  On  en- 
tourait la  tète  des  nouveaux-nés,  en  la  pressant  assez  dure- 
ment, avec  de  l'étoupe  trempée  dans  du  blanc  d'œuf. 

Doit-on  y  voir  aussi  une  trace  de  la  présence  des  Gm- 
mériens  en  ces  lieux  dans  l'antiquité? 

Nous  examinerons  maintenant  l'équation  des  Cimbres 
et  des  Kymris;  cette  équation  ne  se  base  que  sur  la  ressem- 
blance des  noms. 

Zeuss  et  Gluck  ont  démontré  en  toute  évidence  que,  si 
le  mot  que  nous  connaissons  sous  la  forme  K^mri  avait  existé 
h  l'époque  où  les  Cimbres  apparaissent  dans  Thistoire,  il  au- 
rait la  forme  Combroges:  cela  est  aussi  bien  prouvé  que  le 
mouvement  de  la  terre. 

Combroges  est  un  mot  composé  de  corn  et  broges;  corn 
est  adverbe  et  préposition  celtique,  identique  au  latin  cum, 
corn:  broges  se  retrouve  dans  Ande-brogius^  Brogi-tarus, 
Brogi-maruSf  AUobroges.  D'après  les  lois  phonétiques  du 
bas-breton  et  du  kymrique,  si  le  singulier  brox  de  broges^ 
brogis  au  génitif,  s'y  était  conservé,  il  y  aurait  pris  la  forme 
brog,  pour  perdre  ensuite  le  g  final;  or  dans  ces  deux  dia- 
lectes nous  rencontrons  bro,  ancien  brog,  dans  le  sens  de 
fterre,  régiona.  Combroges  signifierait  donc  compatriotes. 
Le  nom  Allo-broges  est  composé  de  allô  et  broges.  Le  pre- 
mier élément  se  retrouve  en  kymrique  sous  la  forme  ail; 
c'est  le  même  que  le  latin  alius.  AUobroges  signifiait  donc 
alienigenac. 

Voilà  les  points  de  repère  dans  l'histoire  du  mot  Com- 
broges, supposant  qu'il  eut  été  formé  avant  l'invasion  des 
Saxons  dans  la  Grande-Bretagne: 


,ï  Google 


/ 


Kymrique 

Com-brog. 

Cym-brog. 

Cymmro  (mb='mm),  perte  du  g. 

Cymro  plur.  cymry. 


kon-brog. 

ken-brog. 

ken-bro. 

ken-vro  appellatîf^con/erriiwewj. 

Toutes  ses  altérations  sont  démontrées  par  d'autres 
exemples;  o  est  changé  en^,  par  exemple  en  escyb  de  epis- 
copus  (escob);  kyrn  de  corn  (cornua). 

Zeuss  nous  fournit  encore  les  formes  anciennes. 

m.  kemro  kemry. 

f.  camraes,  camaraes  {cambra). 

11  faut  effacer  pour  toujours  de  Pethnologie,  dans  le 
sens  qu'on  lui  donne  généralement,  cette  malheureuse  déno- 
mination de  Kymris,  qui  ne  peut  que  désigner  les  habitants 
du  pays  de  Galles;  il  faut  en  rayer  aussi  les  théories  qui  se 
basent  sur  la  ridicule  identification  de  ce  nom  avec  celui  des 
Cimbres,  ou  alors  il  faut  considérer  la  glottologie,  dont  la 
méthode  semble  si  rigoureuse,  comme  un  vain  rêve  de  quel- 
ques cerveaux  désœuvrés;  il  faut  jeter  au  feu  ces  travaux, 
dont  s'honore  notre  siècle,  de  Bopp,  de  Grimm,  de  Zeuss, 
de  Diez  et  de  ceux  de  leurs  élèves  qui  restent  fidèles  à  leur 
méthode,  tout  en  s'efforçant  encore  de  la  perfectionner. 

34» 


,ï  Google 


482 

D'où  viennent  donc  les  crânes  macrocéphales,  les  dé- 
formations crâniennes  dont  l'existence  est  constatée  en  Eu- 
rope? Faut-il  y  voir  les  documents  du  passage,  ou  de  la  fi- 
xation sur  le  sol  où  l'on  les  retrouve,  d'une  seule  race  prati- 
quant la  déformation  macrocéphalique?  Cette  race  traver- 
sa-t-elle  l'Europe  aux  temps  préhistoriques  ou  aux  temps 
historiques  ? 

M.  Lagneau  pense  qu'on  devrait  peut-être  attribuer  aux 
Théiphales  et  aux  Alains  immigrés  du  Sud-Ouest  et  dont  on 
a  constaté  la  présence  en  France,  l'importation  de  la  défor- 
mation crânienne  artificielle  de  Deux-Sèvres. 

Il  faut  attendre  de  nouvelles  découvertes  .archéolo^- 
ques,  de  nouveaux  faits  ethnographiques  avant  d^élever  une 
théorie  sur  ce  sujet. 

Ce  qu'il  y  a  de  plus  probable  c'est  que  les  crânes  ma- 
crocéphales qu'on  a  découverts  déjà,  que  les  usages  de  dé- 
formation plus  ou  moins  adoucie  qu'on  a  constatés  en  Eu- 
rope, doivent  être  attribués  à  divers  peuples  et  appartenir 
à  différentes  périodes'. 

M.  Vilanova:  A  propos  de  la  communication  que  vous 
venez  d'entendre,  je  dois  vous  dire.  Messieurs,  que  la  fatale 
pratique  de  façonner  la  tête  des  nouveaux-nés  existe  aussi 
malheureusement  en  Espagne,  et  en  confirmation  je  me  rap- 
pelle dans  ce  moment  que  mon  fils  cadet  étant  assez  doli- 
chocéphale, par  opposition  à  l'aîné  qui  est  brachycéphalc, 
des  personnes  de  position  sociale  très  distinguée  m'ont  ac- 
cusé de  ne  pas  lui  avoir  fait  façonner  la  tête  à  sa  naissance. 


'  Voir  l'Appendice 


,ï  Google 


LES  aiTANOS  D'DSFAaNE  ET  LES  GIGAIfOS  DE  PORTUGAL 


À  PROPOS  DS  LA  QUESTION  DE  L'IMPOKTATIOH  DES  UÉTAUX 
EN  EUROPE  PAR  LES  TSIGANES 


M.  Paul  Bataillard 


I 


Ceux  qui  ont  assisté,  soit  à  la  session  de  Budapesth 
(1876)  du  présent  Congrès,  soit  au  Congrès  des  sciences  an- 
thrnnnln0ini»>e  niiï  <i'(>«t  tcHU  à  Paris  à  l'occaslon  de  l'Ex- 
ie  1878,  ou  qui  ont  lu  les  comptes- 
nions  scientifiques,  connaissent  mes 
ies  Tsiganes  en  Europe  et  sur  la 
race  de  métallurges  nomades  a  dû 
à  la  diffusion  des  métaux  dans  cette 
ma  longue  communication  au  Con- 
exposé  VÉtat  de  la  question  de  l'an- 
tn  Europe,  précisément  comme  in- 
archéologique  que  j'y  rattache';  et 
courte  que  j'ai  faite  au  Congrès  de 

>  l'ancienneté  des  Tsiganes  en  Europe  pour 
stion  de  l'importation  du  bronje. . .  par  les 
«•rendu  du  Congrès. . .  de  Budapest.  Paris, 
8.%64p. 


.ïGoogIt 


r 


484 
Paris,  sous  le  titre  Historique  et  préliminaires  de  la  ques- 
tion de  Vimporlation  du  bronze  dans  le  nord  et  roccident  de 
r Europe  par  les  Tsiganes',  contient  un  résume  de  la  pré- 
cédente, avec  un  aperçu  de  mes  travaux  antérieurs  sur  une 
race  que  j'étudie  depuis  plus  de  trente-cinq  ans. 

Je  ne  reviendrai  sur  tout  cela,  que  dans  la  mesure  stric- 
tement nécessaire  pour  motiver  l'évocation  des  Tsiganes  ou 
Gitanos  devant  un  Congrès  voué  aux  études  préhistoriques. 

Lorsque  j'ai  abordé,  en  1844,  l'histoire  des  Tsiganes 
par  un  premier  mémoire  sur  Papparitiott  et  la  dispersion  des 
Bohémiens  en  Europe',  on  admettait  généralement,  avec 
Grellmann,  que  cette  race  n'avait  fait  sa  première  apparition 
en  Europe  qu'au  commencement  du  xv*  siècle  de  notre  ère, 
el  qu'elle  était  sortie  de  l'Inde  très  peu  de  temps  aupara- 
vant, probablement  à  la  suite  des  guerres  de  Tamerlan;  et 
c'est  là  encore  aujourd'hui  une  idée  ressassée  par  les  auteurs 
qui  s'occupent  des  Tsiganes  sans  être  au  courant  des  tra- 
vaux publiés  sur  eux  depuis  cette  époque;  tel  est  en  parti- 
culier le  cas  du  dernier  petit  livre  sur  la  matière  qui  ait  paru 
à  ma  connaissance,  dans  la  Péninsule  ibérique:  El  Gitanis- 
moy  etc.,  par  M.  Francisco  de  Sales  Mayo  (Madrid,  1870). 

Idée  complètement  erronée,  et  que  j'ai  commencé  à  dé- 
truire dès  1844  et  1849'.  Sans  marquer  ici  les  étapes  suc- 

'  Tiré  à  part,  in  8.",  16  p. — Se  trouve  aussi  à  la  librairie  Emest 

'  Voir  la  note  suivante, 

•  Mon  premier  mémoire  sur  L'apparition  el  la  dispersion  des  Bohé- 
miaa  en  Europe,  publié  en  1^44  daasla  Bibliothèque  de  l'École  des  Char- 
les (et  dont  le  tiré  à  part  forme  60  p.  gr.  in  8.°),  fut  suivi  en  [849,  dans 
le  même  recueil,  de  Nouvelles  recherches  sur  le  même  sujet  (in  8 '■  de 
48  p.).  Le  premier  de  ces  deux  mémoires  est  depuislongtemps  épuisé; 
mais  la  bibliothèque  de  l'Académie  des  Sciences  de  Lisbonne  les  pos- 


,ï  Google 


485 

cessives  et  progressives  par  lesquelles  ma  pensée  a  passé, 
je  dirai  en  quelques  mots  l'état  présent  des  choses  : 

Il  reste  certain  qu'il  y  a  eu,  au  xv"  siècle  de  notre  ère, 
une  immigration  considérable  de  Tsiganes  de  PEurope  orien- 
tale dans  l'Europe  occidentale;  cette  migration,  que  j'ai  ra- 
contée en  1 844,  est  la  seule  dont  l'histoire  ait  conservé  des 
traces  précises,  et  c'est  d'elle  principalement  que  dérivent 
les  Tsiganes  qui  sont  aujourd'hui  répandus  dans  l'Europe 
occidentale. 

Mais,  d'abord,  les  Tsiganes  qui  émigrèrent  alors  de  l'Eu- 
rope orientale  et  aussi  de  l'Asie  antérieure  vers  l'Occident, 
étaient  établis  dans  ces  deux  régions,  sans  parler  de  l'Egyp- 
te et  de  l'Afrique  septentrionale,  depuis  un  temps  impos- 
sible a  déterminer,  car  nulle  part  on  n'a  pu  y  constater  leur 
apparition.  Tout  ce  qu'on  a  pu  faire  a  été  d'y  constater  leur 
existence  à  dés  époques  qui  vont  toujours  reculant  dans  le 
passé.  Si,  comme  je  n'en  doute  pas,  et  comme  M.  Mikiosich 
le  reconnaît  avec  moi',  les  Athingans  du  moyen-Sge  byzan- 
tin sont  des  Tsiganes,  on  remonte  ainsi  déjà  d'une  manière 
certaine  jusqu'au  vn'  siècle  de  notre  ère,  car  c'est  vers  cette 
époque  que  commencent  à  être  signalés  les  Athingans  dans 

sédait  tous  les  deux  en  i85o,  et  j'apprends  qu'elle  les  possède  encore 
aujourd'hui.— Quant  à  mes  publications  plus  récentes  (dont  on  trouvera 
la  liste,  les  deux  dernières  exceptées,  sur  la  couverture  des  Zlotars),  je 
les  envoie  toutes,  toutes  celles  du  moins  qui  ont  été  tirées  à  part,  au 
Congrès  de  Lisbonne. 

'  Mikiosich,  Ueber  die  Mundarlen  unddie  Wanderungén  der  Zigeu- 
ner  Europa's,  vi'  mémoire,  Wien,  1878,  in-4  '■  Anhang  (Appendice),  La 
série  des  importants  mémoires  in  4.°  de  M.  Mikiosich,  publiés  de  1871 
à  iSSo,  se  compose  de  12  fascicules  formant  un  total  de  plus  de  S3o  pa- 
ges. Il  faut  y  joindre  trois  autres  brochures  (in  8.*)  publiées  en  1874, 
1876  et  1878  sous  le  titre  de  Beilrâge  ^ur  Kenniniss  der  Zigeunermim- 
darten,  la  i''">  portant  les  n"  i-u. 


„Gqi 


QOjjlc 


486 

l'Asie  Mineure,  sans  qu'on  sache  rien  d'ailleurs  de  leur  arri- 
vée dans  cette  contrée,  ni  du  passage  d'Asie  en  Europe  des 
Tsiganes  qu'on  trouvera  plus  tard  dans  l'Europe  orientale, 
passage  qui  n'aurait  pu  s'effectuer  sous  les  yeux  de  Byzance 
à  des  époques  pleinement  historiques,  sans  que  l'histoire  eût 
gardé  quelque  trace  de  cette  migration  singulière. 

Aussi  ne  m'arrêié-je  point  au  vn'  siècle  de  notre  ère. 
Guidé  par  des  considérations  historiques  et  ethnographiques 
dans  le  détail  desquelles  je  ne  puis  entrer  ici,  je  suis  amené 
a  la  conviction  que  les  Tsiganes  se  rattachent  aux  Sigynes 
qu'Hérodote  signale  sur  le  Danube,  aux  Sinties  qu'Homère 
place  dans  l'île  de  Lemnos,  et  finalement  aux  peuplades  ca- 
biriques  que  l'antiquité  grecque  a  connues  en  Asie  Mineure, 
dans  les  îles  de  la  Méditerranée  orientale  et  dans  la  pénin- 
sule des  Balkans. 

Je  ne  donne  point  cette  opinion  pour  un  fait  dès  à  pré- 
sent établi,  il  me  reste  beaucoup  à  faire  pour  obtenir  l'adhé- 
sion formelle  des  quelques  savants  compétents  dans  une 
question  si  complexe;  mais  je  crois  au  succès  final  de  cette 
thèse  hardie,  et  il  me  semble  que  c'est  déjà  beaucoup  à 
l'heure  actuelle,  quand  je  n'ai  fait  encore  qu'en  effleurer  la 
démonstration,  de  pouvoir  dire  que,  des  deux  maîtres  india- 
nistes et  tsiganologues  qui  s'appellent  Pott  et  Ascoli,  le  pre- 
mier suspend  son  jugement  définitif,  tandis  que  le  second 
incline  déjà  de  mon  côté  et  m'encourage  à  poursuivre. 

Avant  d'aller  plus  loin,  je  dois  mentionner  un  corollaire 
important  de  ma  thèse  principale.  J'ai  constaté  que  la  mi- 
gration qui  a  répandu  les  Tsiganes  dans  l'Europe  occiden- 
tale datait  seulement  du  xv*  siècle.  Ce  fait  constant  gardera 
toujours  sa  valeur.  Mais,  s'il  est  une  fois  bien  établi  que  cette 
race  existait  dans  l'Europe  orientale  (et  conséquemment  en 
Asie  Mineure)  dès  les  temps  préhistoriques  ou  proto-histo- 


,ï  Google 


4^7 
riques,  personne  ne  doutera  que  des  bandes  de  ces  noma- 
des n'aient  pu  et  dû  faire  des  excursions  industrielles  en  Occi- 
dent à  des  époques  bien  antérieures  au  xv°  siècle,  tout  comme, 
aujourd'hui,  les  Tsiganes  CnWijrafi  (chaudronniers)  de  Hon- 
grie ou  du  Banat  de  Temeswar  et  les  Tsiganes  Oursari 
(conducteurs  d'Ours)  de  la  Bulgarie  font  sous  nos  yeux  des 
tournées  dans  toute  l'Europe,  qui  se  terminent  par  leur  re- 
tour dans  leurs  pays.  Il  est  même  très  possible  que  quelques 
groupes  de  ces  nomades  aient  jadis  établi  des  stations  fixes 
sur  divers  points  de  l'Occident,  et  que  finalement  il  y  ait  eu, 
à  différentes  époques  antérieures  au  xv*  siècle,  de  petites  im- 
migrations tsiganes  dans  telles  ou  telles  répons  du  Nord,  de 
l'Ouest  ou  du  Sud-Ouest.  Une  fois  reconnu  que  les  Tsiga- 
nes habitaient  le  sud-est  de  l'Europe  de  temps  immémo- 
rial, ce  sont  là  des  faits  subsidiaires,  qui  ont  dû  se  produire 
sans  que  l'histoire  les  ait  généralement  mentionnés  (je  crois 
que  j'en  retrouverai  cependant  quelques  curieuses  traces); 
et  ces  faits,  dénués  en  apparence  de  toute  importance  his- 
torique, peuvent  avoir  cependant  une  importance  archéolo- 
gique qu'il  ne  faudra  pas  perdre  de  vue. 

Je  ne  m'en  suis  pas  tenu,  en  effet,  à  reculer  indéfini- 
ment l'existence  des  Tsiganes  dans  le  sud-est  de  l'Europe, 
dans  l'Asie  Mineure  et  dans  les  îles  de  la  Méditerranée  orien- 
tale. Une  fois  ma  conviction  formée  à  cet  égard,  je  me  suis 
dit  que  ce  n'était  certainement  pas  sans  cause  et  par  pur 
hasard,  que  cette  race,  dont  la  grande  majorité  en  Orient  est 
encore  adonnée  aujourd'hui  au  travail  des  métaux,  se  trou- 
vait ainsi  répandue  si  anciennement  dans  le  monde,  que  les 
étranges  pérégrinations  de  cette  race  de  métallurges  aux 
procédés  primitifs  et  barbares  devaient  avoir  leur  raison 
d'être;  et  c'est  ainsi  que  je  me  suis  demandé,  d'abord,  si  les 
ancêtres  des  Tsiganes  ne  seraient  pas  précisément  les  arti- 


V 


..GooqIc 


K 


sans  nomades  auxquel 
logues  avaient  été  déjà 
bronze  en  Europe. 

J'ai  porté  d'abord 
cident  et  surtout  du  N 
encore  de  la  Scandina\ 
fait  secondaire  de  Pin 
l'Europe  dans  ces  régit 
Scandinaves  où  cette  in 
y  pourrait  être  plus  fa 
tsigane,  que  dans  le  ba 
ter  S  des  époques  bier 
fluences  de  civilisation 
reste  que  montrer  la  \ 
mant  dans  mon  doma 
du  moins  la  bonne  for 
m'ont  prêté  M.  M.  Ko| 
ajouter  aux  Caldarari 
et  du  Banat,  qui  avaier 
les  Zlotars^  de  Galicie 
ganes  fondeurs  de  bro 
apportent  une  nouvelli 
deux  ou  trois  mille  an 
le  fer,  a  cessé  d'être  ur 

Est-ce  à  dire  que 
et  aux  métaux  contempi 
te  qu'au  fait  secondaii 
du  sud-est  à  l'ouest  et 


'  Les  Zlotars. . .  Tsigc 
Galicie  orientale  et  la  Bul 
d'Anthr.,  1878,  in-8%  de  79 


ly  Google 


demniem  non.  Si  les  Tsiganes  qui  travaillent  le  cuivre  et 
surtout  ceux  qui  fondent  le  bronze  sont  aujourd'hui  rela- 
tivement peu  nombreux,  ce  qui  n'est  pas  surprenant,  il 
n'en  est  pas  de  même  des  forgerons.  Tout  le  monde  sait 
que  la  grande  majorité  des  Tsiganes  d'Orient  travaillent  le 
fer*.  Certaines  des  peuplades  cabiriques  le  travaillaient  aussi; 
et  lorsque  je  tirerai  du  rapprochement  que  j'ai  indiqué  plus 
haut  entre  ces  peuplades  et  les  Tsiganes  tout  ce  qu'il  com- 
porte, je  crois  que  l'importance  archéologique  des  Tsiganes 
forgerons  sautera  aux  yeux.  Je  suis  précisément  sur  la  voie 
d'informations  nouvelles  qui  me  sont  promises  de  l'Asie 
Mineure,  et  qui,  si  elles  confirment  les  premiers  renseigne- 
ments venus  de  cette  région,  fourniront  à  ma  thèse  ainsi 
généralisée  de  bien  forts  arguments. 

Je  ne  mentionne  que  pour  mémoire  la  dernière  petite 
communication  que  j'ai  faite  à  la  Société  d'Anthropologie 
de  Paris  sur  les  anciens  métallurges  en  Grèce*;  car  cet 
opuscule  de  circonstance' n'est  qu'une  préface  à  une  étude 

'  Voir,  du  reste,  dans  mes  Tsiganes  de  l'âge  du  bronze,  1876,  l'aper- 
çu que  j'ai  donné  des  diverses  industries  métallurgiques  des  Tsiganes 
en  Orient. 

*  Bulletin  de  la  Société  d'Anthr.,  séance  du  17  juillet  1879;  tiré  à 
part  de  3o  p.  Cette  petite  communication  est  venue  en  réponse  à  quel- 
ques objections  qui  m'avaient  été  faites  sur  certains  points  d'une  lon- 
gue communication  qui  avait  pour  titre  :  La  question  du  bronze  et  du 
fer  aryens.  Les  Indo-Européens  étaient-ils  à  l'origine  des  métallurges? 
et  dont  les  Bulletins  du  i"  mai  précédent  contiennent  un  court  résumé. 
Ce  travail  lui  même,  à  cause  de  son  étendue,  avait  été  renvoyé  auï  Mé- 
moires de  la  Société;  mais  je  préviens  qu'on  ne  l'y  trouvera  point: 
la  lenteur  avec  laquelle  se  publient  les  Mémoires  m'a  laissé  le  temps  de 
la  réflexion,  et  j'ai  reconnu  qu'un  travail  improvisé  sur  un  sujet  si  vaste 
et  qui  exigerait  une  érudition  générale  que  je  n'ai  point,  était  v 
trop  insuffisant. 


,ï  Google 


49° 
un  peu  plus  approfondie  qui,  comme  je  viens  de  l'indiquer, 
aura  pour  principal  objet  les  peuplades  cabirïques  et  les 
afSnités  de  la  race  tsigane  avec  elles.  Ceci  est  forcément 
de  mon  domaine;  ce  qui  ne  l'est  guère,  c'est  l'archéologie 
proprement  dite,  dont  l'intervention  est  pourtant  si  néces- 
saire dans  les  questions  que  soulève  ma  thèse.  Heureuse- 
ment je  puis  dire  que  cette  partie  essentielle  de  la  tâche  est 
aujourd'hui  en  bonnes  mains.  Un  archéologue  éminent,  M. 
Charles  de  Linas,  est  entré  pleinement  dans  mes  vues;  et 
le  3*  volume  de  son  grand  ouvrage  intitulé  au  début  Les 
origines  de  l'orfèvrerie  cloisonnée.,  volume  dont  l'impression 
se  poursuit  depuis  quatorze  mois  et  dont  les  feuilles  me 
sont  amicalement  communiquées  au  cours  du  tirage,  éta- 
blira, je  n'en  doute  guère,  la  grande  valeur  archéologique 
de  la  thèse  qui  nous  est  maintenant  commune'. 


Il 


Les  explications  qui  précèdent,  et  qui  ne  sont  peut-être 
pas  dénuées  de  tout  intérêt,  étaient,  dans  tous  les  cas,  né- 
cessaires pour  m'autoriser  à  vous  parler  des  Gganos  ou 
Gitanos  des  contrées  où  siège  le  Congrès.  Car  c'est  à  eux 
que  j'en  veux  venir,  non  pour  vous  apporter  sur  eux  des 


'  M.  J.  G.  Bulliot,  entre  autres  travaux  importants  sur  l'ancienne 
Bibracte  (Auiun),  a  publié  dans  les  Mémoires  de  la  Société  Éduenne, 
t.  va  d'une  nouvelle  série,  1878,  une  bien  curieuse  dtude  sur  les  loges 
des  fondeurs  nomades  à  la  foire  de  Bibracte.  Il  y  avait  là  la  matière 
d'un  des  principaux  paragraphes  de  ma  communication  supprimée 
(voir  la  note  précédente);  mais  M.  de  Linas,  quand  il  arrivera  à  la 
Gaule,  tirera  certainement  de  ce  travail  de  M.  Bulliot  meilleur  pani 
que  je  n'aurais  su  le  faire. 


,ï  Google 


49' 
notions  nouvelles,  mais  au  contraire  pour  en  demander  aux 
membres  portugais  et  espagnols  de  cette  savante  réunion. 

Ils  me  permetront  de  constater  d'abord  que  cette  race, 
nombreuse  pourtant  sur  le  sol  ibérique',  y  a  été  bien  peu 
étudiée. 

Parmi  les  vieux  auteurs  espagnols,  Fernandez  de  Gôr- 
dova  {Didascalia  multiplex,  Lugduni,  i6i5,  p.  4o5  et  suiv.) 
est  presque  le  seul,  si  je  ne  me  trompe,  qui  mérite  d'être 
cité;  encore  sa  courte  notice,  comme  presque  toutes  celles 
qui  ont  paru  en  Europe  jusqu'au  commencement  du  siècle 
actuel  et  souvent  encore  depuis,  vîse-t-elle  les  Tsiganes  en 
général  et  non  ceux  du  pays  en  particulier,  Côrdova  croit 
leur  langue  slave;  mais  en  parcourant  sa  notice,  je  remar- 
que qu^l  avait  pensé  déjà'  à  rapprocher  les  Tsiganes  des 
Sigynes  d'Hérodote  et  de  Strabon,  rapprochement  que  je 
retrouverais  du  reste  chez  quelques  autres  auteurs  euro- 
péens de  son  temps. 

Quant  aux  réquisitoires  de  Don  Sancho  de  Moncada, 
professeur  de  la  Sainte  Écriture  en  l'université  de  Tolède', 

'Voir  les  chiffres  éleviïs  que  donne  Grellmann,  1787,  p.  26-27. 
Borrow  de  son  côté,  The  Zincali,  1841,  t.  1,  p.  274,  évalue  le  nombre 
actuel  des  Gïtanos  en  Espace  à  40.000  au  plus,  Jont  le  tiers  environ 
dans  l'Andalousie  seule;  mais  il  croit  que  leur  nombre  avait  pu  être 
plus  élevé  autrefois. 

•  A  la  vérité  il  ne  s'y  arrête  pas,  maïs  pour  une  raison  géographi- 
que qui  lui  appartient,  et  qui  est  de  nulle  valeur. 

'  Expulsion  de  tos  Gilanos,  discurso  etc.,  factum  d'une  vingtaine  de 
pages.  J'en  ai  sous  les  yeux  le  texte  réimprimé  à  Madrid,  en  1789,  dans 
Romances  de  Germania,  et  la  traduction  anglaise  presque  complète  dans 
les  Zincali  de  Borrow,  où  elle  fonne,  suivant  les  éditions,  le  ch.  xi  ou 
X  de  la  I*"  partie.  Cependant,  ni  l'éditeur,  ni  le  traducteur,  ne  donnent  la 
date  du  morceau  nillndication  de  l'endroit  d'où  ils  l'ont  tiré.  Mais  je  le 
retrouve  dans  Resiauracion  poUtica  de  Espana,  en  ocho  discursos  de  San- 


V 


)inJ^B^_i 


oogle 


49^ 
et  de  Don  Juan  de  Quinonez  (dont  j'ignore  les  qualités)  * 
contre  les  pauvres  Gitanes,  dont  ils  demandaient  l'expul- 
sion après  celle  des  Maures,  s'ils  contiennent,  le  second  sur- 
tout, quelques  détails  sur  le  genre  de  vie  des  Gitanos,  ils 
ne  peuvent  certainement  pas  passer  pour  des  études  pro- 
prement dites,  et  encore  moins  pour  des  études  impartiales. 

Ces  auteurs  des  siècles  derniers  ne  sont  certainement 
pas  les  seuls  en  Espagne  (ni  sans  doute  en  Portugal)  qui  aient 
consacré  quelques  pages  aux  Gitanos  ou  Ciganos;  peut-être 
aurais-je  dû  nommer  Martin  del  Rio  (qui  toutefois  n'était 
pas  natif  de  l'Espagne)  et  plusieurs  autres  dont  j'ai  rencontré 
les  noms  dans  les  quelques  écrits  que  je  viens  de  citer,  mais 
il  me  semble  que  tout  cela  est  vraiment  trop  secondaire. 

On  me  permettra  de  considérer  comme  secondaire  aussi 
au  point  de  vue  où  je  me  place,  malgré  le  fondement  his- 
torique qu'on  lui  attribue  à  tort  ou  à  raison,  le  célèbre  opus- 

cho  de  Moncada,  Madrid,  i7-)6,  large  in  8.°  IX Expulsion  de  los  Gitanos  for- 
me la  i""  partie  du  7*  discours);  et  j'y  vois— parle  Dîctdmen  de  El  docior 
Thomas  Tamayo  de  Vargas,  çiaté  de  Tolède,  28  mai  1619,  lequel  se 
trouve  parmi  les  pages  préliminaires  et  non  numérotées  du  recueil,  et 
est  apparemment  reproduit  de  la  précédente  édition,  que  ce  recueil  a 
dû  paraître,  pour  la  1*"  fois,  à  Tolède,  en  1619,  et  qu'ainsi  ces  huit  dis- 
cours, adressés  en  1746  «al  Rey  D.  Fernando  vi»,  ont  dû  l'être  d'abord 
(comme  l'indiquent  d'ailleurs  Borrow  et  l'éditeur  des  Romances  de  Ger- 
mania)  à  Philippe  m,  â  l'esprit  duquel  Ils  s'adaptaient  beaucoup  mieux, 
et  qui  paraît  en  avoir  tenu  plus  de  compte,  car  il  rendit,  â  Bclem,  près 
de  Lisbonne,  en  1619,  un  édit  qui  expulsait  les  Gitanos  sous  peine  de 
mort  (The  Zincali,  1841, 1. 1,  p.  igô-igS).— Sancho  de  Moncada  dît  que 
•  algunos  ios  tienen  pordescendiemesdeChus,  hijo  de  Cban.,  (iîoman- 
ces  da  Germania,  p.  19.1).  Je  note  en  passant  cette  opinion,  quoique  la 
place  me  manque  pour  la  justifier. 

'  Discurso  contra  Ios  Gitanos.  Madrid,  i63i,  in  4."  de  1  et  î3  feuil- 
lets. Borrow  en  a  donné  quelques  extraits  dans  The  ZiTtcalif  1S41,  L  i, 
p,  55  et  16C.168. 


,ï  Google 


493 

nie,  la  Gitanilla  de  Cervantes  ',  aussi 
ano  qui  se  trouve  dans  le  roman,  in- 
teur  Geronimo,  natif  de  Ségovie,  qui 
ent  du  xvii"  siècle', 
mt  aux  publications  contemporaines 
e  dirai  que  je  ne  connai'*,  et  qu'on  ne 
à  l'étranger,  que  les  petits  dictionnaî- 
î  de  Enrique  Trujillo  (Madrid,  1844), 
:z  (Sevilla,  1846  et  i833), — et  gitanos- 
puzano  (Madrid,  1848)^  et  de  D.  A. 

1).  Un  petit  volume,  intitulé  avec  plus 
inismo:  historia,  costumbresy  diaîecto 
),  Francisco  de  Sales  Mayo;  con  un 
I  gitaiia^  y  un  diccionario  calôcastel- 
incisco  Quindalé',  novfssima  edicion, 

série. 

lis,  qu'en  fait  de  nouvelle  ^ttiina,  je  préfère 
,  Carmen. 

iif  1S41,  t.  1,  p.  86-94)  donne  la  traduction 
épisode,  en  en  faisant  un  éloge  qui  me  sem* 


wres  om  reçu  un  nouveau  iiire,  qui  porte  :  2.' 
s  l'édition  est  la  mÉme.  Le  titre  exact  du  vol. 
ibres  de  los  Jîiams^y  Diccionario  de  su  dta- 
ten  effet  précédé  d'une  notice  de  17p.;  mais 
précédés  de  quelques  pages  de  notice;  et  je 
aire  l'analyse  comparative, 
pparenls  n'en  font  qu'un,  comme  semblent 
lots  de  ia  p.  48,  et  comme  le  prouve  le  vocab. 
la  traduction  littérale  en  dialecte  gitano  du 
ai).  Je  remarque  que  le  mot  Quindale  flgure 
nenez  avec  le  même  sens,  maïs  que,  d'après 
!  A.  de  T.,  il  signi^erait  le  mois  dç  mars  (et 


.ïGex^^^K 


404 

Je  n'ai  pas  comparé  d'assez  près  ces  cinq  vocabula 
pour  les  juger  sommairement  *.  Mais  il  est  clair  qu'ils  se  ; 
pris  beaucoup  les  uns  aux  autres,  et  que  le  plus  méritan 
tous  ces  auteurs  est  le  premier,  c'est-à  dire  Trujillo,  s'il 
pas  eu  de  prédécesseur  espagnol  ou  portugais;  j'ajoute  < 
ne  me  paraît  pas  s'être  servi  de  Borrow  qui  l'a  précédé  de  i 
ans.  En  somme  ce  sont  des  petits  livres  utiles  pour  la  i 
naissance  du  dialecte  des  Gitanos  d'Espagne,  et  les  qu; 
premiers  sont  des  opuscules  sans  grande  prétention. 

On  n'en  saurait  dire  autant  du  dernier,  et  c'est  p 
quoi  il  est  permis  d'être  plus  sévère  à  son  égard.  Pour  r 
tenir  à  la  notice  historique  et  ethnographique  qui  form 
première  des  trois  parties  du  volume  (p.  1-48),  M.  Fr 
Sales  Mayo  ne  sait  rien  des  importants  travaux  pul 
en  Europe  depuis  quarante  ans;  et,  ce  qui  est  plus 
ve,  c'est  qu'il  pille  continuellement  Borrow  (le  seul  au; 
contemporain  étranger  qu'il  paraisse  connaître)  sans  en  a 
tir  le  moins  du  monde  le  lecteur;  je  ne  puis  entrer  ici  d 
le  détail  de  ces  fréquents  emprunts;  je  me  contenterai  de  1 
voyer  à  la  comparaison  de  sa  Gilana  de  Sevilla,  en  1 
(pourquoi  cette  date  précise?),  p.  14-18,  et  du  chapitre 
Borrow  se  représente  et  décrit  la  Gitana  de  Séville  au  tei 
de  Ferdinand  et  d'Isabelle  {The  Zincali,  éd.  de  1841, 
p.  i3o-i37).  Et  M.  de  Sales  Mayo  ose  terminer  sa  ne 
(p.  48)  par  ce  mot  de  Montaigne:  Cest  icy  un  livre  de  bc 
fqy,  lecteur! — Je  dois  ajouter  toutefois  que  sa  petite  Gr 
maire  du  dialecte  gitano  (p.  49-76)  est,  à  ma  connaïssa 
la, première  qu'on  ait  publiée. 

Je  ne  puis  clore  cette  courte  liste  sans  mentionne! 

'  Les  comparaisons  seraient  plus  faciles,  s'ils  étaient  tous  espagi 
gitanos  ou  gitanos-espagnols. 


1 


„Geiogle 


495 

pttit  livre  publié  en  i832,  à  Barcelone,  sous  ce  titre;  Ht'S' 
ioria  de  los  GitOJios  por  J.  M.,  (in  18°  de  94  p.)  et  qui  a 
toutes  les  apparences  d'une  œuvre  originale'.  C'est  la  tra- 
duction,un  peu  abrégée,  mais  généralement  littérale,  du  tra- 
vail qu'un  Français  du  Midi,  M.  Jaubert  de  Passa,  corres- 
pondant de  PAcadémie  des  sciences  de  Paris,  a  publié  en 
1827  dans  les  Nouvelles  Annales  des  Voyages,  et  dont  il 
existe  un  tiré  à  part  aujourd'hui  très  rare*.  Le  traducteur 
peu  scrupuleux  a  même  joint  à  sa  brochure  la  reproduction 
de  la  lithographie  qui  accompagnait  la  publication  française. 

En  résumé,  l'Espagne  n'est  pas  riche  en  publications 
nationales  surlesGitanos.  Mais  le  Portugal  l'est  encore  moins 
si  je  ne  me  trompe;  car,  pour  mon  compte,  je  ne  connais 
n'en  à  porter  ici  à  son  actif.  Je  ne  prétends  pas  que  le  Por- 
tugal n'ait  rien  produit  sur  ce  sujet,  et  je  serai  heureux  d'être 
renseigné  sur  les  omissions  dont  je  puis  être  coupable  à  son 
égard  comme  à  l'égard  de  l'Espagne;  mais  je  crains  qu'el- 
les ne  soient  pas  très  graves. 

Les  étrangers  se  sont  plus  occupés  des  Bohémiens  de 
ta  Péninsule  que  les  indigènes,  et  si  je  voulais  relever  tou- 
tes les  pages  de  quelque  intérêt  que  peuvent  fournir  les  voya- 
geurs, j'aurais  à  dresser  une  trop  longue  liste'.  Je  me  con- 

■  Borrow  s'y  est  tout  naturellement  laisse  prendre,  et  il  en  a  donné 
de  longs  extraitscommed'uneœuvreespagnole,  dans  7%fiZi>tca/t,  1841 
t.  I,  p.  3o8-3i3. 

*  Essai  sur  les  Gitanos,  p.  189-362,  in  8",  travail  estimable  et  qu'il 
faut  consulter,  malgré  la  grosse  erreur  que  commet  l'auteur  (voy.  p. 
33o  et  suiv.  et  surtout  p.  356),  en  faisant  des  Gitanos  les  descendants 
des  Arabes  et  des  Maures  qui  avaient  conquis  l'Espagne,  et  en  se  refu- 
sant i  les  identifier  avec  les  Gipsies,  Zigeuner,  Zingari  et  Bohémiens. 

^Je  signalerai  pourtant  la  notice  de  38  p.  in  40  que  Richard  Bright 
a  donné  sous  le  dire  State  0/  the  Gipsies  in  Spain,  à  la  suite  de  ses 
Travels . . .  through  Lower  Hungary,  Edinb.  1818,  in  4*.  Cette  notice 

c  R.  35 


.ïGoogle 


496 
tenterai  de  rappeler  le  livre  de  George  Borrow,  The  Zin- 
cali  or  Gipsies  of  Spain,  publié  en  1841  en  deux  vol.  in  8° 
et  qui  a  eu,  depuis,  d'assez  nombreuses  éditions*.  Ce  tîvre 
a  été  écrit  du  point  de  vue  pittoresque  pour  le  grand  pu- 
blic, auprès  duquel  il  a  eu  beaucoup  de  succès;  on  n'y  trouve 
ni  l'esprit  d'investigation  ni  la  précision  que  réclame  l'ethno- 
graphie, et  il  contient  bien  des  inexactitudes.  Mais  l'auteur 
a  vu  de  près  les  Gitanos,  il  parlait  aisément  leur  langue,  et 
finalement  son  ouvrage,  qui  contient  d'ailleurs  un  vocabu- 
laire étendu  (gitano-anglais)  et  que  je  crois  parfaitement  ori- 
ginal puisqu'il  est  antérieur  à  tous  ceux  que  l'Espagne  a  pro- 

qui  n'esl  pas  de  Bright  lui-même,  mais  d'un  de  ses  amis,  comme  ill'ex- 
plique  au  commencement  du  vol.  p.  ix,  se  termine  par  une  liste  com- 
parée de  mots  de  la  langue  des  Tsigunes  d'Angleterre,  d'Espagne  et  de 
Hongrie,  qui  est  bien  fautive,  mais  qui  contient,  si  je  ne  me  trompe,  ta 
première  série  de  mots  gitanos  qu'on  ait  recueillie. — Sur  les  Bohémiens 
du  midi  de  la  France,  qui  ont  tant  d'affinités  avec  ceux  d'Espagne,  il 
faut  mentionner  aussi  le  ch.  de  Francisque  Michel  sur  les  Bohémiens 
du  Bays  basque,  dans  son  livre  intitulé  Le  Pays  Basque.  Paris,  i857,  in 
8.°;  et  la  1'  partie  du  vol.  de  feu  V.  de  Rochas,  Les  Parias  de  France 
et  d'Espagne  (Cagols  et  Bohémiens).  Paris,  1876,  in  8." 

'  Je  ne  possède  que  la  1',  indiquée  plus  haut,  et  ta  4*  en  i  vol. 
Rr.  in  ]8"  compact,  LonJ.  1846,  et  ne  puis  parler  des  autres.  Je  cite 
habitudlement  la  1%  parce  qu'eUe  contient  le  vocabulaire  et  diverses 
pages  qui  ont  été  supprimés  dons  les  éditions  plus  populaires,  comme 
la4'.  Pourtant,  celle-ci  même  offre  quelques  pages  nouvelles  (j'aurai  plus 
loin  à  la  citer  pour  un  passage  que  ne  contient  pas  la  1°)  et  d'assez 
nombreuses  variantes.  Mais  il  y  a  une  ou  deux  autres  éditions  en  z  vol. 
qui  sont  sans  doute  plus  complètes.  A  cet  ouvrage  il  convient  d'ajouter 
The  Bible  in  Spain,  du  même  auteur  (dont  la  i'  édition  en  2  ou  3  voL 
in  8.°  est,  je  crois,  de  1843:  j'ai  celle  de  1S44,  en  \  vol.  gr.  in  18°  com- 
pact) ;  car  les  Gitanos  y  figurent  en  plusieurs  endroits,  à  commencer  par 
ceux  de  Badajoz.  Précédemment  Borrow  avait  publié  l'Évangile  de  S. 
Luc  en  gitano  :  Embeâ  e  Majoré  Lucas,  (Badajoz)  i837,  in  lô"  de  177 
pages. 


,ï  Google 


497 
duits  à  ma  connaissance,  demeure  le  plus  important  qui  ait 
été  écrit  jusqu'à  présent  sur  les  Gilanos  d'Espagne. 

Ma  conclusion,  c'est  qu'il  reste  beaucoup  à  faire  pour 
l'étude  exacte  des  Tsiganes  de  la  Péninsule  ibérique,  et  qu'il 
est  bien  temps  que  ce  sujet  intéressant  appelle  sérieusement 
l'attention  de  quelques  Espagnols  et  Portugais  ;  car  sans  doute 
dans  ces  contrées  comme  partout,  les  vieilles  traditions  s'ou- 
blient, les  vieilles  coutumes  s'effacent,  et  la  race  des  Gila- 
nos elle-même,  maigre  sa  persistance,  va  perdant  de  géné- 
ration en  génération  quelques-uns  des  traits  qui  font  son 
originalité.  Ce  qui  importe  sunout,  c'est  que  les  nouveaux 
investigateurs,  tout  en  se  mettant  au  courant  des  travaux 
publiés  à  l'étranger  et  des  questions  nouvelles  qu'ils  soulè- 
vent, ne  se  perdent  pas  dans  les  généralités,  mais  s'appli- 
quent surtout  à  l'étude  topique  des  Tsiganes  du  pays. 


III 


Une  question  qui  passe  pour  vidée,  mais  qui  à  mes  yeux 
ne  l'est  pas,  est  celle  des  commaicements  des  Gitanos  dans 
la  Péninsule.  On  admet  généralement  que  cette  race  est  en- 
trée en  Espagne  par  les  Pyrénées  vers  le  milieu  du  xv°  siè- 
cle. Ceux  qui  voudront  bien  tenir  quelque  compte  des  idées 
que  j'ai  sommairement  exposées  plus  haut,  comprendront 
que  la  question  est  beaucoup  plus  complexe. 

D'abord,  il  est  possible  que  la  Péninsule  ibérique  ait 
connu,  sous  des  noms  quelconques,  les  Tsiganes  dès  l'anti- 
quité, dès  les  temps  préhistoriques  *  ;  et  il  est  possible,  à  plus 

'Je  me  suis  métnt  demandé  si  les  Sicanesâe  Sicile,  qu'on  fait  gé- 
néralement venir  d'Ibérie,  n'auraient  pas  été  des  Tsiganes.  M.  d'Arbois 
de  Jubainville  {Les  premiers  habitants  de  l'Europe^  liv.  i,  ch.  m)  les  fait 

35* 


r 


Google 


forte  raison,  que  ce  ; 
Tsiganes  chaudronnic 
par  les  Pyrénées,  soi 
la  Méditerranée  par 
faire  connaître  aiileu 
drc  assez  vraissemb 
Espagne  au  moyen-â 
suadé,  les  Tsiganes  i 
septentrionale,  il  ser 
en  Espagne  à  la  sui 
première  invasion  re 

Mais,  sans  perd 
gration  des  Tsiganes 
être  le  premier  obje 
y  eût  ou  non  des  Tsij 
que, — Tsiganes  dont 
assez  différentes  de  ( 
identité  ne  fut  nuller 
cle, — il  est  presque 
tanos  actuels  dérive 

Qu'il  en  soit  aie 
bre  par  les  Pyrénées 
même  possible  que  1 
cette  voie;  mais  qua 

A  l'appui  de  l'op 
sont  pas  sans  connex 
Gitanos  par  les  Pyrei 
recherches  de  M.  M 

venir  de  Gaule,  mais  là 
serait  de  savoir  si  c'étaii 
appartenu  plutôt  à  la  rai 
Tsiganes  font  partie. 


,ï  Google 


499 
tano  des  éléments  grecs,  slaves  et  roumains*;  évidemment 
ces  éléments  avaient  été  importés  par  des  Tsiganes  établis 
de  longue  date  dans  te  sud-est  de  l'Europe,  et  qui,  fuyant 
rinvasion  musulmane,  n'ont  pas  dû  prendre  le  chemin  de 
l'Afrique  pour  gagner  l'Espagne.  Soit;  mais,  de  ce  que  beau- 
coup de  Tsiganes  d'Espagne  ont  cette  provenance  et  ont  pris 
ce  chemin,  il  ne  s'en  suit  nullement  que  ceux  que  l'invasion 
musulmane  mit  d'abord  en  mouvement  dans  l'Asie  Mineure 
et  en  Sjrie  n'aient  pas  suivi  les  rives  méridionales  de  la  Mé- 
diterranée, entraînant  peut-être  avec  eux  des  bandes  tsiga- 
nes établies  de  longue  date  en  Egypte  et  en  Barbarie,  pour 
aboutir  à  l'Espagne  par  Gibraltar.  Les  observations  philo- 
logiques de  M.  Miklosich  ne  prouvent  absolument  rien  con- 
tre cette  éventualité,  pas  plus  que  contre  la  présence  anté- 
rieure de  Tsiganes  sur  le  sol  ibérique;  car  il  suffit  qu'une 
portion  notable  de  cette  population  nomade  ait  apporté  dans 
sa  langue  des  éléments  grecs,  slaves  et  roumains,  pour  que 
CCS  éléments  se  retrouvent  aujourd'hui  dans  le  dialecte  gi- 

*  Miklosich,  Ueber  die  Mundarten  etc.  ni,  Wien,  1873,  in  4°  p.  42-46. 
La  même  remarque  s'applique  au  dialecte  des  Tsiganes  du  Pays  bas- 
que, iiiii,  p.  38-3g. — Sans  être  aussi  scientifiquement  établie,  la  présence 
importante  de  ces  éléments  étrangers  dans  les  divers  dialectes  des  Tsi- 
ganes d'Europe  avait  été  déjà  très  bien  remarquée  par  plusieurs  auteurs, 
notamment  parBorrow,  The  Zincali,  1841,  t.  n,  p,  109-11  i.Borrow  cite 
même,  à  cet  endroit,  un  curieux  passage  d'un  savant  livre  du  xvi*  siècle, 
El  Estudioso  Cortesano  de  Lorenzo  Palmireno  (Alcalà  de  Henares,  iSS;, 
pet.  in  8°  de  8  feuillets  prélim.  et  i5o  f.  chiffrés:  Borrow  croît  que  ce 
n'est  pas  la  i'  édition),  duquel  il  résulterait  qu'en  l'année  1540  il  y 
avait  encore  des  Giianos  d'Espagne  qui  comprenaient  le  grec  moderne. 
Le  fait  est  remarquable,  mais  non  très  surprenant,  car  on  vit  arriver  en 
Occident  dans  le  cours  du  xV  siècle  quelques  Tsiganes  qui  se  donnaient 
pour  Grecs,  et  qui  sans  doute  venaient  de  la  Grèce  ou  des  contrées  voi- 
sines. 


ly  Google 


5oo 

tano,  où  ont  dû  se  fondre  dans  tous  les  cas  des  dialectes 
tsiganes  de  diverses  provenances.  Je  n^ai  pas  besoin  de  re- 
marquer ici  que  des  observations  savantes  et  délicates  sur 
le  dialecte  gitano  et  les  traces  qui  pourraient  s'y  trouver  des 
dialectes  tsiganes  d'Egypte  et  de  Syrie,  jetteraient  peut-être 
quelque  jour  sur  la  question. 

Il  serait  important  dans  tous  les  cas  de  recueillir  tout 
ce  qui  peut  rester  de  documents  relatifs  à  l'apparition  des 
Tsiganes  en  Espagne.  Pour  mon  compte,  je  n'en  connais 
qu'un,  déjà  cité  par  moi  dans  mon  mémoire  de  1844.*  Il 
constate  l'arrivée  à  Barcelone,  le  11  juin  1447,  d'une  amul- 
titud  de  E^pcios»,  qui,  de  là,  dit  le  chroniqueur,  se  répan- 
dirent en  Espagne.  Il  est  très  probable  qu'en  cherchant 
bien,  on  en  trouverait  d'autres.  Beaucoup  de  documents 
analogues  ne  prouveraient  pas  que  des  Tsiganes  ne  soient 
pas  arrivés  en  Espagne  aussi  par  Gibraltar,  ni  même  qu'il 
n'en  existât  pas  antérieurement  dans  les  provinces  méridio- 
nales de  la  Péninsule.  Mais,  outre  leur  grand  intérêt  intrin- 
sèque, ils  fourniraient  des  éléments  nouveaux  à  la  discus- 
sion sur  ce  point  important. 

Je  ne  quitterai  pas  ce  sujet  sans  noter  deux  ou  trois 
faits,  qui  me  paraissent  venir  à  l'appui  de  la  conjecture  que 
des  Tsiganes  ont  dû  arriver  en  Espagne  de  PÉgyple,  en 
suivant  naturellement  le  littoral  africain. 

'  Voy.  De  l'apparition  et  de  la  dispersion  des  Boliémietu  en  Europe; 
dans  Bibliothèque  de  l'École  des  Chartes,  1844,  p.  Sïçj,  ou  tiré  à  part,  p. 
49.  Ce  document  esl  extrait  des  Anales  de  Calaluna  de  Feliu  de  la  Petla, 
Barcel.  1709,  t.  n,  p.  483. — Un  document  presque  identique,  mais  qui 
présente  pourtant  quelques  variantes,  est  cité  par  M.  Francisque  Mi- 
chel, dans  le  Moyenrâge  et  la  Renaissance  de  Paul  Lacroix,  in  4*,  m, 
1848,  f.  IT  de  l'art.  Bohémiens,  comme  tiré  d'un  manuscrit  des  arcluTes 
municipales  de  Barcelone. 


^, 


Soi 

irmi  les  Gitanos  une  coutume  qui,  autant 
woir,  ne  se  retrouve  point  parmi  les  autres 
ïpe,  parmi  ceux,  du  moins,  qui  n'ont  pas  eu 
ifticulières  avec  leurs  frères  d'Espagne  :  Im- 
ant  sa  première  nuit  de  noces,  la  jeune  fille 
des  matrones  qui  attestent  sa  virginité,  etc. 
me  d'ailleurs  répandue  chez  les  Musulmans, 
tourée  chez  les  Gitanos  de  beaucoup  de  so- 
choir  sanglant  qui  a  servi  à  l'opération  mys- 
■ntré  à  tous  les  gens  de  la  noce  et  précieu- 
i  dans  la  famille.  Borrow,  qui  n'a  guère  pu 
utume,  mais  qui,  écrivant  pour  le  grand  pu- 
videmment  craint  de  blesser  sa  pudeur,  ne 
ion  obscure  (p.  23g)  à  la  défloration  par  les 
3prime  conséquemment  les  marques  de  sang 
louchoir,  qu'il  mentionne  pourtant  en  le  dis- 
einture  de  chasteté  (dont  je  parlerai  tout  à 
Borrow  ne  nous  renseigne  pas  sur  le  point 
'ant  une  noce  gitana  à  laquelle  il  avait  as- 
Sme  {p.  240)  d'un  mouchoir  sans  lâche  «sans 
lit  pas  eu  de  noce»,  et  qu'on  avait  arboré, 
ture  de  chasteté  elle-même,  comme  drapeau 
[ui  serait  tout  à  fait  de  nature  à  induire  en 
puis  affirmer  que  la  coutume  que  j'ai  tout 
:  est  certaine:  bien  avant  Borrow,  un  autre 
écrite*  avec  des  détails  accessoires  qui  ont 

û  concerne  le  mariage  et  panicuIiÈrement  les  deux 
que  je  suis  obligé  ici  de  distinguer,  et  qui  se  mêlent 
;s  noms  de  lâcha  et  de  diclé,  voir  tout  le  ch.  vu  (p. 
rhe  Zincali,  dans  la  i"  édition,  1841,  qui  est  ici  bien 
a  4'. 
anonyme  que  j'ai  déjà  recommandée,  surles  Gipsies 


,Cs 


502 

leur  intérêt;  et  moi,  j'ai  rencontré  bien  des  fois  en  France 
des  Bohémiens  plus  ou  moins  affiliés  à  ceux  d'Espagne,  près 
desquels  j'ai  pu  m'assurer  de  sa  réalité;  plusieurs  me  l'ont 
décrite  en  détail.  J'ai  appris  ainsi  que  cette  coutume,  na- 
turellement pratiquée  aussi  par  la  plupart  des  Bohémiens 
du  sud-est  de  la  France  qui  se  rattachent  étroitement  à 
ceux  d'Espagne,  avait  en  quelque  façon  pénétré  chez  les  Bo- 
hémiens du  Piémont  et  même  de  la  Suisse,  mais  avec  des 
modifications  importantes  et  qui  lui  ôtent  une  partie  de  son 
cachet  oriental  ';  et  comme  cette  coutume  ne  se  rencontre  à 
ma  connaissance,  chez  les  Bohémiens  d'aucune  autre  con- 
trée d'Europe',  j'ai  tout  lieu  de  croire  qu'elle  est  propre  à 

m  Spain,  i  la  suite  des  Travels  thraigh  Lower  Hutigary  de  Richard 
Bright,  Edinb  ,  i8i3,  in  4°,  p.  lisii-lxxiii.  L'auteur,  qui  donne  en  latin 
les  détails  les  plas  scabreux,  ne  désigne  le  mouchoir  en  question  que 
par  le  mot  de  linteolum,  que  devient  un paSiuelito  dans  le  couplet 
espagnol  chanté  par  les  Gitanos. 

■  Je  noterai  seulement  les  principales  difTérences,  pour  abréger.  En 
Piémont  et  en  Suisse,  la  coastatation  matérielle  et  préalable  serait 
remplacée  par  un  serment  solennel  de  la  jeune  fille.  Puis,  c'est  la  che- 
mise elle-même  de  la  mariée,  qui,  après  la  nuit  de  noces,  est  montrée 
aux  assistants.  Cette  chemise,  tachée  de  sang,  est  hissée  sur  un  arbre 
de  joie.  Tous  forment  une  ronde  à  l'entour;  puis,  on  tire  des  coups  de 
fusil  sur  la  chemise;  et,  comme  ou  a  eu  soin  d'y  mettre  quelques  piè- 
ces d'artifice,  elle  est  bientôt  consumée. — En  Espagne,  au  contraire, 
d'après  mes  informations,  le  mouchoir  sanglant  est  précieusement  con- 
servé dans  la  famille.— Je  n'ai  guère  besoin  d'ajouter  que  les  vieilles 
coutumes  vont  s'effaçant  presque  partout,  même  parmi  les  Tsiganes: 
peut-être  celles  dont  je  viens  de  m'occuper,  et  qui  me  reportent  à  des 
notes  prises  surtout  en  1848,  1849,  i85o,  sont.elies  beaucoup  moins 
pratiquées  aujourd'hui  qu'il  y  a  trente  ans. 

*  D'après  quelques  mots  de  Walter  Simson  (History  o/lhe  Gipsies, 
Lood.  et  Edinb..,  1 86i,  p.  s6i  )  qui  me  tombent  tardivement  sous  les  yeux 
il  faudrait  pourtant  faire  une  exception  pour  les  Tsiganes  d'Ecosse, 


,ï  Google 


5o3 

ceux  de  la  Péninsule  ibérique,  et  que  ce  sont  des  Gitanos 
d'Espagne  qui  l'ont  importée  en  Piémont  et  en  Suisse,  où 
elle  n'est  probablement  pratiquée  que  par  quelques-uns,  et 
où  elle  s'est  d'ailleurs  modifiée,  simplifiée. 

Mais  ce  qui  paraît  encore  plus  particulier  aux  Bohé- 
miens d'Espagne  (et  ici  je  me  réfère  entièrement  à  Borrow, 
n'ayant  rencontré  moi-même  aucune  information  sur  ce  dé- 
tail spécial,  auquel,  à  vrai  dire,  )e  n'ai  pas  songé  dans  les 
occasions  assez  fréquentes  que  j'ai  eues  autrefois  de  m'en 
enquérir  auprès  des  Bohémiens  qui  m'ont  renseigné  sur  la 
coutume  précédente),  c'est  une  certaine  ceinture  de  chas- 
teté que  portent  les  jeunes  Gitanasjique  leur  mère  elle-même 
noue  d'une  façon  particulière,  qu'elle  visite  et  surveille  con- 
tinuellement jusqu'au  jour  du  mariage*!. 

Or  cette  coutume,  qui  se  lie  si  étroitement  à  la  précé- 
dente, et  qu'on  chercherait  vainement,  je  pense,  parmi  les 
autres  Tsiganes  d'Europe,  se  retrouve  parmi  les  Tsiganes 
d'Egypte,  et  même,  semble-t-il,  dans  toutes  les  subdivi- 
sions que  cette  race  présente  en  Egypte  :  d'abord,  dans 
la  classe  de  ceux  qu'on  appelle  les  Helebis^,  et  dont  les 
femmes  sont  connues  sous  le  nom  de  Fehemi,  (littéralement 

chez  qui  une  coutume  analogue,  ce  semble,  s'ajouterait  quelquefois  à 
une  autre  cérémonie  nuptiale  encore  plus  déplaisante,  et  que  j'ai,  d'ail- 
leurs, lieu  de  croire  fort  peu  usitée  même  chez  les  Gipstes  des  Iles  Bri- 
tanniques en  général  et  de  l'Ecosse  en  particulier.  Je  n'ai  pas  à  m'ar- 
réter  sur  celle-ci.  Quant  à  la  coutume  qui  nous  intéresse  en  ce  moment 
je  crois  que,  si  elle  existe  réellement  chez  ceux  d'Ecosse,  elle  a  dû  y 
Stre  importée  par  des  Gitanos  d'Espagne  ou  par  quelque  détachement 
tsigane  venant  directement  d'Egypte  ou  des  contrées  voisines;  mais  le 
temps  et  la  place  me  manquent  pour  rechercher  les  preuves  ou  les  in  ■ 
dices  qui  viendraient  à  l'appui  de  cette  double  explication. 

'  Borrow,  ouvr.  cit.  p.  333. 

*Newbold,  The  Gypsies  of  Egypt,  etc.  dans  Journal  of  tbe  R. 


r 


,,CjPoJ;l( 


5o4 

sages,  non  à  cause  de  leur  chasteté,  maïs  parce  que  ce 
sont  elles  qui  disent  la  bonne  aventure), —  puis,  chez  les 
Ghagar,  qui  sont  une  autre  branche  de  Tsiganes  en  Egyp- 
te', ayant  pourtant  des  mœurs  plus  relâchées, — et  proba- 
blement même  jusque  chez  les  Natver,  troisième  division 
des  Tsiganes  d'Egypte*.  Elle  se  retrouve  aussi  parmi  les 
Kurbat  de  Syrie,  autre  branche  tsigane',  qui,  suivant  la  re-' 
marque  de  Newbold,  par^'t  avoir  des  affinités  particulières 
avec  les  Helebis  d'Egypte. 

Asialic  Society  of  Great  Brilain  and  Irelandy  vol.  ïvi,  Part,  s,  Lon- 
don,  i856,  p.  389  et  193. 

'  C'est  ce  qui  résulte  du  passage  déjà  cité  de  Newbold,  p.  29?  (où 
la  ceinture  de  chasteté  est  appelée  hUg  ou  dilk),  rapproché  du  voca- 
bulaire comparé  des  Helebis,  des  Gbagaret  des  Nawer,  où  l'on  voit 
(p.  39S)  que  Mg  est  le  nom  helebl,  et  dilk  le  nom  ghagar,  de  cette  cein- 
ture spéciale. 

*En  effet,  en  regard  des  deux  noms  cités  dans  ma  note  précédente 
je  trouve  chez  Newbold  (même  p.  agS),  dans  la  colonne  de  la  langue 
des  Nawer,  le  mot  /owi,  qui  parait  bien  indiquer  que  les  Nawer  eux- 
mêmes,  ayant  un  mot  spécial  pour  désigner  la  ceinture  de  chasteté,  se 
servent  conséquemment  de  cette  ceinture. 

*Newbold,  p.  3oa.— Newbold  est  malheureusement  trop  bref  sur 
cette  coutume;  mais  en  rapprochant  tous  les  passages  que  j'ai  cités,  on 
se  convaincra  de  sa  singulitee  conformité  avec  celle  décrite  par  Borrow. 
On  remarquera  aussi  l'identité  du  nom  de  la  ceinture  en  question  chez 
les  Ghagar,  dilk,  et  chez  Borrow,  dielé  :  je  note  en  passant  que  didâ  ou 
diklô,  qui  signifie  'linge,  mouchoir,  fichu,  serviette.,  chez  tous  les  Tsi- 
ganes d'Europe,  serait  sans  douce  plus  correct  au  nominatif  singulier, 
même  dans  le  sens  spécial  qu'il  prend  chez  Borrow.  Quant  aux  Bohé- 
miens avec  qui  je  me  suis  entretenu  de  la  coutume  précédemment  in- 
diquée, laquelle  est  comme  le  couronnement  de  l'autre,  c'est  le  linge 
teint  de  sang  qu'ils  appellaient  latchà  diclôi—latcho  ayant  le  sens  bien 
connu  de  >bon>  et  pouvant  peut-Ëlre  aussi,  par  rapport  au  substantif 
ladj,  latch  (chez  Borrow  lâcha)  que  je  retrouve  dans  les  divers  dialectes 
tsiganes  d'Europe  avec  des  acceptions  un  peu  variées,  signifier  'virgî* 


,ï  Google 


Il  me  paraît  assez  présumable  que,  si  nous  étions  mieux 
renseignés  sur  tout  ce  qui  se  rattache  au  mariage  chez  les 
Tsiganes  d'Egypte  et  de  Syrie,  nous  y  retrouverions  égale- 
ment la  coutume  qui  a  été  indiquée  auparavant,  qui  vient 
incontestablement  d'Orient,  et  avec  laquelle  la  fameuse  cein- 
ture est  évidemment  en  connexité  plus  ou  moins  étroite. 
Mais,  pour  nous  en  tenir  à  l'usage,  bien  constaté  des  deux 
parts,  de  la  ceinture  de  chasteté,  comment  expliquer  son 
existence  en  Espagne,  autrement  que  par  une  immigration 
de  Tsiganes  d'Egypte  dans  ce  pays  ?  et  comment  ne  pas  re- 
marquer que  cette  immigration  a  dû  se  faire  directement 
par  la  Barbarie  et  Gibraltar,  puisque  la  coutume  en  ques- 
tion n'existe  pas,  autant  qu'on  a  pu  le  savoir  jusqu'ici,  parmi 
les  Tsiganes  du  midi  ou  du  centre  européens,  où  il  en  se- 
rait au  moins  resté  des  traces,  si  les  Tsiganes  qui  la  prati- 
quaient avaient  fait,  comme  beaucoup  d'autres,  un  long  cir- 
cuit par  l'Europe  *? 

Les  Gitanos  ont  aussi,  pour  désigner  les  gens  étran- 

nal>  :  le  latchô  diclà  peut  Être  ainsi,  ou  le  •bon  mouchoir',  le  linge  qui 
porte  un  bon  témoignage,  ou  le  •mouchoir  de  la  lâcha»,  le  linge  de  la 
vir^nité. 

<  Quelques  iaformations  postérieures  à  la  présentation  de  mon  mé- 
moire au  Congrès  me  donnent  i  penser  que  ta  ceinture  de  chasteté 
n'existe  pas  parmi  les  Tsiganes  du  nord  de  l'Espagne;  il  faut  dont  que 
cette  coutume  appartienne  à  ceux  de  l'Espagne  méridionale:  circons* 
tance  qui  mériterait  confirmation,  car  ce  serait  un  indice  de  plus  de 
la  provenance  égyptienne  d'une  partie  des  Tsiganes  de  la  Péninsule 
ibérique.  L'usage  de  la  constatation  matérielle  de  la  ^rginité  au  mo- 
ment du  mariage,  qui  doit  avoir  la  même  provenance,  se  serait  répan- 
du parmi  tous  les  Gitanos  d'Espagne,  et  mgme  un  peu  au  delà,  tandis 
que  l'usage  de  la  ceinture  de  chasteté  —  précaution  plus  délicate  et  plus 
incertaine — serait  resté  confiné  dans  la  région  de  l'Espagne  où  durent 
r  les  Tsiganes  venant  d'Afrique. 


,ïGooa 


5o6 

gers  à  leur  race,  un  mot  qui  ne  se  retrouve  pas  chez  les 
autres  Tsiganes  d'Europe;  c'est  le  mot  Busnô^  dont  Bor- 
row  me  paraît  même  abuser,  car  il  s'en  sert  toujours,  quoi- 
que un  autre  nom  en  usage  aussi  parmi  les  Gitanos,  comme 
parmi  les  autres  Tsiganes  d'Europe,  pour  désigner  les  étran- 
gers, soit  gadjo,  pluriel  gadjé  fqu'il  donne  d'ailleurs  dans 
son  vocabulaire  sous  la  forme  gâché);  ma.is  il  n'a  certaine- 
ment pas  inventé  le  mot  busnô,,  bustiiy  auquel  il  a  consacré 
une  page  d'explication  '.  Suivant  lui,  busnô  est  un  mot  hon- 
grois, en  usage  dans  le  bas  peuple  et  parmi  les  gens  grossiers, 
et  qui  aurait  à  peu  près  la  signification  du  juron  espagnol 
Carajo.  Les  Tsiganes  de  Hongrie  auraient  adopté  ce  mot 
busnô  pour  désigner  les  Hongrois,  c'est-à-dire  ceux  qui  ont 
constamment  ce  mot  à  la  bouche;  puis  ce  mot  aurait  été 
transporté  par  les  Tsiganes  de  Hongrie  en  Espagne,  où  il 
aurait  pris  dans  le  dialecte  gitano  le  sens  général  à^éiranger 
(non  Gitano)-—  Des  informations  que  j'ai  prises  auprès  d'un 
Hongrois,  il  résulte  que  les  Hongrois  ont  effectivement  un 
mot  grossier  qui  par  le  son  rappelle  le  précédent,  c''est  le 
verbe  bas^m\  qui  se  prononce  à  peu  près  bosnt\  et  qui  a  le 
même  sens  que  notre  mot  français,  très  grossier  aussi,  mais 
très  expressif^". ....  ;  celui-ci  toutefois  s'emploie  à  la  fois 
comme  verbe  et  comme  juron  exclamatif,  tandis  que  le  mot 
hongrois  ne  s'emploie,  paraît-il,  que  comme  verbe;  mais, 
cette  réserve  faîte,  les  Hongrois,  m'assure-t-on,  se  servent  du 
mot  baspii  exactement  de  la  même  manière  et  non  moins 
fréquemment.  Il  ne  serait  donc  pas  surprenant  que  les  Tsi- 
ganes eussent  fait  de  ce  verbe  un  mot  pour  désigner  les 

*Non  dans  la  i*  édition  de  The  Zincali  (1841),  où  le  mot  figure 
au  vocabulaire  avec  une  étymologie  sanskrite  (à  laquelle  il  parait  que 
l'auteur  a  ensuite  renoncé),  mais  dans  la  4%  en  un  seul  volume  (qui  ne 
it  pas  le  vocabulaire),  London,  1846,  p.  256-i57. 


,ï  Google 


_507 
Hongrois;  des  faits  analogues  sont  fréquents  chez  tous  les 
peuples  et  dans  toutes  les  langues.  Mais  il  ne  suffît  pas  que 
la  chose  soit  théoriquement  possible,  il  faudrait  la  consta- 
ter. Or  je  n'ai  vu  nulle  part  que  les  Tsiganes  de  Hongrie 
aient  un  pareil  mot  pour  désigner  les  Hongrois'.  Il  m'est 
donc  permis  d'écarter  l'explication  de  Borrow,  comme  man- 
quant de  base,  au  moins  jusqu'à  présenta 

<  Ed  fait  de  vocabulaires  spéciaux  du  dialecte  tsigane  de  Hongrie, 
la  principale  source  actuelle  est  le  vocabulaire  v  de  Miklosich  dans  le 
fascicule  ti  de  ses  Mémoires  in.  4.°  Ueber  die  Mundarten  und  die  Wan~ 
derungen  der  Ztgeuner  Europa's.  (ce  voc a b. contient  1684  mots;  il  faut 
y  ajouter  les  vocab.  vi  et  vu,  qui  sont  très  courts).  J'y  vois  (p.  44)  que 
tes  Tsiganes  de  Hongrie  désignent  ordinairement  les  Hongrois,  comme 
les  étrangers  en  général,  par  le  mot  gad\o. — Je  trouve,  toutefois,  dans 
le  vol.  de  168  p.  in.  8°  (en  allemand)  que  le  comte  Rudolf  Wratislav- 
Mitrovic  a  fait  imprimer  à  Prague  en  1868,  et  qui  concerne  les  Tsiga* 
nés  particulièrement  en  Autriche  (p.  161),  un  nom  tsigane  pour  désigner 
les  Hongrois,  c'est  Tchivalo;  mais  ce  nom,  qui  du  reste  n'est  pas  aussi 
spécial  qu'il  semble  (voyez  Liebich,  p.  i65,  et  Paspati  au  mot  Tchibalo) 
n'a  aucun  rapport  avec  busnà. 

'  De  son  coté,  H.  Poti  {Die  Zigeuner,  1. 11,  1845,  p.  34),  sans  s'ar- 
rêter à  l'étymologie  sanscrite  donnée  d'abord  par  Borrow  dans  son 
Vocab.  de  [841,  a  proposé  avec  doute  une  étymologie  indienne  du 
mot  busno,  qui  me  paraît  improbable.  Quant  à  M.  Miklosich,  /.  c.  fasc. 
VH,  p.  z6,  il  rattache  le  mot  han6  des  Gilanos  signifiant  étranger,  au 
mot  bujno,  bu^ni,  qui,  dans  les  divers  dialectes  tsiganes  d'Europe,  signi- 
fie bouc,  chèvre.  Comme  le  bouc  est  un  animal,  non  seulement  assez  sau- 
vage,  mais  puant  et  reprouvé,  celte  origine  du  busnà  des  Gitanos  n'au- 
rait nen  d'i  m  vraisemblable;  et  l'on  pourrait  même  remarquer  à  ce  su- 
jet que  le  mot  bujno,  avec  la  signification  primitive  de  bouc,  ne  paraît 
plus  exister  dans  le  dialecte  gitano,  par  exception  à  tous  les  autres  dia- 
lectes tsiganes. —On  pourrait  encore  rapprocheriiund  de  £fUno  ou  frttcAno 
qui  signifie  coq  dans  le  dialecte  gitano  comme  dans  les  autres  dialectes 
tsiganes  d'Europe.— Mais  aucune  de  ces  explications  ne  rendrait  comp- 
te de  l'existence  exclusive  des  mots  busnô  et  hiatto,  signifiant  l'un  et 


,ï  Google 


5o8 

Ce  qui  est  certain,  c'est  que  le  mot  busnô  est  employé 
sous  la  forme  husno,  avec  le  même  sens  d'étranger  (non 
Tsigane}  par  les  Helebïs,  une  des  principales  divisions  des 
Tsiganes  de  l'Egypte  '.  Il  paraît  clair,  d'après  cela,  qu'un 
certain  nombre  de  Tsiganes  d'^ypte  l'ont  importé  en  Es- 
pagne. 

Parlerai-je,  maintenant,  des  noms  des  Tsiganes  en  Es- 
pagne et  en  Portugal?  Celui  de  Gttanos,  primitivement  Eg^- 
pcianos,  est  le  même  que  celui  d'Ég^yptien,  l'un  des  premiers 
qui  eurent  cours  en  France,  et  que  celui  de  Gipstes  qui 
est  leur  principal  nom  en  Angleterre.  Bien  que  ce  nom, 
qui  existe  aussi  en  Hongrie  et  en  Roumanie  sous  une  autre 
forme  [Pharaonttes  ou  peuple  de  Pharaon),  paraisse  avoir 
été  appliqué  en  Grèce  aux  Tsiganes  dès  avant  leur  im- 
migration du  XV*  siècle  dans  l'Europe  occidentale*,  il  est 
prouvé  d'une  manière  générale  que  ce  sont  les  Tsiganes  de 
cette  immigration  que  l'ont  eux-mêmes  accrédité  chez  nous'. 
Ce  nom  semble  donc  rattacher  tout  particulièrement  les  Gi- 
tanos  à  cette  immigration.  Si,  pourtant,  le  nom  à'Egypcia- 
nos  fut  appliqué  en  Espagne  aux  Arabes  conquérants  bien 
avant  le  xv*  siècle  et  depuis,  comme  l'indique  M.  Jaubert 
de  Passa  *,  la  question  se  complique  en  Espagne.  11  y  aurait 
là  matière  à  une  étude,  où  il  s'agirait  de  bien  préciser  l'em- 
ploi et  la  valeur  du  mot  Egypctanos  dans  les  documents  es- 
pagnols des  époques  en  question,  et  de  constater  tous  les 

l'autre  étranger,  dans  le  dialecte  des  GJtanos  et  dans  celui  des  Helebis 
d'Egypte. 

<  Voir  le  travail  déjà  cité  de  Newbold,  p.  290,  igS  et  39S. 

*  Voir  Étal  de  la  question,  p.  t6. 

■Voir  mon  1"  mémoire  sut  l'Apparition  des  BtAémiera  1844,  p. 
îo,  3o-32,  34,  37,  sunout  40  et  encore  p.  43. 

*  Ouvr.  cité  plus  haut,  p.  33o  et  suiv. 


,ï  Google 


5o9 

noms  qui  ont  pu  être  donnés  alors  aux  Tsiganes  dans  la  Pé- 
ninsule*. Peut-être  en  même  temps,  arriverait-on  à  y  trou- 
ver ceux-ci,  non  seulement  avant  1447,  mais  même  avant 
le  xv"  siècle.  Je  répète,  que,  si,  comme  j'en  suis  convaincu, 
et  comme  j'en  ai  déjà  la  preuve  pour  l'Egypte,  les  Tsiganes 
existaient  dans  l'Afrique  septentrionale  bien  avant  le  xv'  siè- 
cle, les  invasions  arabes  et  mauresques  ont  bien  pu  en  ame- 
ner à  leur  suite  ou  leur  frayer  le  chemin. 

Quant  au  nom  de  Ciganos,  qui  est  resté  le  nom  usité 
en  Portugal,  il  serait  particulièrement  intéressant  d'en  cons- 
tater les  premiers  emplois  dans  les  documeuts  de  ce  pays' 
et  d'en  rechercher  la  provenance.  En  thèse  générale,  ce  nom 
de  Tsiganes  (diversement  moditîé)  n'est  répandu  que  dans 
l'Europe  orientale  (d'où  il  s'est  propagé  cependant  jusqu'à 


<  En  France  même  les  Tsiganes  ont  porté  des  noms  divers,  notam- 
ment celui  de  Sarrasins  dans  le  midi  :  je  les  trouve  déjà  sous  ce  nom  à 
Sisteron  en  141g  (v.  mon  mém,  de  1844  p.  36). — D'un  autre  côté,  j'ai 
montré  ailleurs  (Érii(  Je /a  ^«(ion...  p.  ï5-2g)  que  les  Tsiganes  étaient 
connus,  dès  iizi,en  Autriche  sous  les  noms  de  Kaltschmide  (chaudron- 
niers) et  d'Ismaélites;  et  j'appelle  particuliêremend  l'attention  sur  les 
•  CaJdereros  estrangeroS'  qui  figurent  dansl'éditdeFerdinand  et  d'Isa- 
belle rendu  à  Médina  del  Campo,  en  1499  {The  ZincaU,  t.  i,  p.  igS-igô) 
et  qu'on  pourra  retrouver  dans  des  documents  bien  plus  anciens. 

*  Le  premier  document  portugais  que  je  connaisse  conceriiant  les 
Tsiganes  est  l'ordonnance  donnée  à  Lisbonne,  en  i538,  parDom  Joâo 
m,  pour  leur  expulsion  et  leur  châtiment  (voir  l'article  Bohémiens  de 
Francisque  Michel  dans  Le  Moyen  Age  et  la  Renaissance  publié  par 
Paul  Lacroix,  in  4'',  t.  i,  1848,  fol.  vi,  v.»  de  l'article).  Ils  y  sont  déjà  dé- 
signés sousl'unique  nom  de  Ci^'onos  et  seulement  comme  des  vagabonds. 
—Cette  ordonnance,  dont  l'observation,  dit  Fran.  Michel,  fut  réclamée 
par  les  prélats  du  royaume  dans  les  coriès  de  décembre  1 562,  prêterait 
à  quelques  rçmarques^  dont  je  m'abstiens  pour  ne  pas  alloager  cettQ 
note, 


,ïGoogl^^ 


5io 

l'Allemagne  occidentale  et  dans  toute  l'Italie),  et  la  limite  de 
son  usage  correspond  presque  à  la  limite  de  cette  grande 
zone  orientale  où  je  prétends  que  les  Tsiganes  étaient  éta- 
blis depuis  des  temps  plus  ou  moins  anciens.  Comment  ce 
nom  se  retrouve-t  it  en  Portugal,  c'est-à-dire  à  une  extrémité 
occidentale  de  l'Europe?  L'histoire  des  rapports  maritimes 
du  Portugal  avec  l'Orient  explique  peut-être  suffisamment 
celte  anomalie;  on  peut  se  demander,  pourtant,  si  ce  nom 
n'aurait  pas  été  apponé  en  Portugal  par  une  immigration 
tsigane  de  l'Afrique,  peut-être  antérieure  au  xv*  siècle?  Je 
rappelle  à  ce  propos,  que  le  nom  des  Tsiganes  en  Algérie 
est  Guesâni  ou  Gued^âni^  qui  se  prononce  Gsâni,  D^âni, 
Tsâni,  et  qui  est  une  corruption  presque  certaine  du  nom 
Tsigam*. 

En  fait  de  noms  ethniques,  je  voudrais  voir  soumis  aussi 
à  une  révision  rigoureuse  tous  ceux  que  les  Gitanos  ou  G- 
ganos  se  donnent  eux-mêmes.  Je  ne  suis  pas  certain,  par 
exemple,  que  celui  de  Zin-calo  que  M.  Borrow  a  adopté,  et 
qu'il  traduit  par  homme  noir  de  titide,  nom  qu'on  ne  ren- 
contre pas  hors  de  l'Espagne,  soit  d'une  authenticité  parfai- 
te. Le  nom  de  Calo^  noir,  est  bien  connu  comme  nom  ethni- 
que employé  par  les  Tsiganes;  mais  Zincalo,  ou  quelqu'au- 
tre  qui  s'en  rapprocherait,  ne  serait-il  pas  tout  simplement 
le  nom  de  Cigano  ou  Tingano  altéré  ?  C'est  ce  que  Pott  paraît 
présumer'.  Le  nom  de  Chai,  donné  par  Borrow'  comme  nom 
ethnique,  et  qu'il  rattache  au  nom  par  lequel  les  Gitanos  de 
l'Estramadure  désignent  l'Egypte,  me  paraît  aussi  plus  que 
suspect;  ce  n'est  sans  doute  qu'une  mauvaise  entente  des 

'  Voy.  mes  Noies  et  questions  sur  les  Bohémiens  en  Algérie,  extrai- 
tes du  Bull,  de  la  Soc.  d'Anthr.  du  17  juillet  1873. 
*  Die  Zigeuner,  t.  1,  p.  35  er  44;  1. 11,  p.  aïg. 
^Ouvr.  cit,  1. 1.  p.  38. 


,ï  Google 


5ii 

mots  chavo  ou  tckavo,  garçon,  chat  ou  tcha't\  fille,  que  les  Tsi- 
ganes employent  quelquefois  comme  noms  ethniques*. 

Mais  je  me  suis  laissé  entraîner,  et  je  crains  d'avoir 
déjà  dépassé  la  mesure  convenable,  surtout  pour  une  com- 
munication qui  sort  un  peu  du  cadre  que  s'est  tracé  le  Con- 
grès. 

Je  tiens  à  ajouter,  cependant,  qui  si  l'histoire  des  ori- 
gines particulières  des  Gitanos  de  ia  Péninsule  et  l'étude  de 
toutes  les  questions  qui  s'y  rattachent,  présente  un  grand 
intérêt,  c'est  l'ethnographie,  topique  aussi,  de  cette  grande 
fraction  de  la  race  tsigane,  qui  appelle  surtout  les  recher- 
ches, et  qui  promet  d'être  le  plus  féconde.  Ici  la  matière  est 
infinie;  et  j'aurais  trop  de  questions  à  poser.  Mais  les  per- 
sonnes que  le  sujet  pourrait  intéresser  en  trouveront  un  as- 
sez grand  nombre  disséminées  dans  les  divers  écrits  que 
j'adresse  au  Congrès.  Je  me  bornerai  à  remarquer  que  l'eth- 
nologie des  Gitanos  ou  Ciganos  en  Espagne  et  en  Portugal, 
comme  en  tout  pays  ou  en  toute  province  (car  chacun  peut 
restreindre  son  sujet,  et  les  monographies  les  plus  resser- 
rées ne  sont  pas  toujours  les  moins  intéressantes),  comprend 
deux  parties,  qui  se  touchent  et  se  pénètrent  souvent,  mais 
qui  n'en  sont  pas  moins  différentes. 

La  première  pourrait  s'appeler  Statistique  ethnographi- 
que, et  comprendrait  tous  les  détails  extérieurs  de  la  vie 
des  Gitanos.  J'appelle  ici  particulièrement  l'attention  sur 
leurs  métiers  divers,  qui  devraient  être  tous  énumérés  dans 
l'ordre  de  leur  importance,  et  dont  on  décrirait  minutieuse- 

'  Alors  ils  y  joignent  ordinairement  l'adjectif  n)m(ino(tstgane).  Ainsi 
les  Tsiganes  d'Alsace  disent  assez  souvent  romane  tchavé  (les  gars  tsi- 
ganes), au  lieu  de  Roma  tout  court.  Mais  on  comprend  que  l'adjectif  puisse 
quelquefois  disparaître,  et  que,  dans  un  dialecte  corrompu,  les  formes 
du  substantif  soient  mal  employées. 

CR.  36 


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5l2 

ment  ceux  qui  le  méritent,  à  commencer  par  les  occupa- 
tions métallurgiques,  sur  Pintérêt  particulier  desquelles  je 
n'ai  pas  à  insister  ici.  Tout  le  monde  sait,  par  exemple,  qu'il 
y  a  beaucoup  de  forgerons  parmi  les  Gitanes  de  Grenade 
ou  plutôt  du  Sacro  Monte,  et  qu'il  y  en  a  aussi  parmi  ceux 
du  faubourg  Triana  à  Sévillc;  mais  on  manque  de  détails  sur 
eux,  sur  l'origine  du  fer  qu'ils  emploient,  sur  leurs  outils, 
sur  leurs  procédés  de  travail  et  sur  leurs  divers  produits. 
On  voudrait  savoir  aussi  la  proportion  des  forgerons  parmi 
les  Gitanos  de  l'Espagne  en  général  et  de  l'Andalousie  en 
particulier,  connaître  leurs  habitudes  nomades  ou  sédentai- 
res, etc.,  comme  celles  de  tous  les  autres  métiers.  Et  puis, 
l'industrie  du  forgeron  n'est  sans  doute  pas  la  seule  industrie 
métallurgique  des  Gitanos  et  des  Ciganos?  Y  a-t-il  parmi 
eux  en  Espagne  et  en  Portugal  des  chaudronniers,  des  fer- 
blantiers, des  étameurs?  Y  a-t-il  des  fondeurs  en  bronze  et 
en  laiton,  des  orfèvres  même  et  des  bijoutiers?  Enfin  y  a-t-il 
des  orpailleurs?' 

Et  des  industries  si  intéressantes  ne  demandent  pas 
seulement  à  être  minutieusement  décrites;  il  faudrait,  d'une 
part,  tacher  de  saisir  au  moins  quelques  indices  de  leur 
progrés  ou  de  leur  décadence,  qui  permettent  de  conjectu- 
rer ce  qu'elles  ont  pu  être  dans  un  passé  plus  ou  moins 
lointain*;  et  il  faudrait,  d'autre  part,  s'attacher  à  saisir  les 

'  Pour  ce  qui  me  regarde,  ces  questions  sont  les  premières  qui 
m'intéressent;  et  je  serais  fort  reconnaissant  ù  quiconque  voudrait  bien 
m 'envoyer  quelques  informations  ù  cet  égard.  Je  sais,  d'ailleurs,  qu'on 
doit  trouver  des  chaudronniers,  des  orpailleurs  et  même  des  fabricants 
de  certains  objeets  d'orftvrerie;  mais  ce  sont  les  détails  précis  qui  nie 
font  défaut. 

*  Dans  le  Voyage  en  Espagne  de  MM,  Gustave  Doré  et  Ch.  Da- 
villier  qu'a  publié  le  Tour  dit  Monde,  ei  qui  contient  quelques  détails 


^„,Co(J^lc 


5i3 

connexités  qui  peuvent  exister  entre  ces  industries  primiti- 
ves et  entre  ceux  qui  les  exercent,  de  manière  à  reconnaître 
et  peut-être  à  recomposer  certains  groupes,  certains  corps  de 
métiers,  plus  ou  moins  complexes.  L'ethnographie  comparée 
des  Tsiganes  pourrait  fournir  à  cet  égard  des  points  de  com- 
paraison utiles  :  par  exemple,  dans  les  régions  du  bas  Danube, 
le  métier  des  Aurari  ou  orpailleurs  et  celui  des  Lxngurari  ou 
fabricants  d'ustensiles  de  bois  (deux  industries  bien  différen- 
tes, mais  toutes  les  deux  très  primitives)  sont  toujours  réu- 
nis, et  ceux  qui  les  exercent  forment  une  classe  à  part.  Les 


intéressants  sur  les  Gîtanos,  je  lis  (n."  260,  dëcemb,  1864,  p.  408,  2'  col.) 
■qu'il  existait  autrefois  une  loi  qui  défendait  sévèrement  aux  Gitanes 
de  travailler  le  fer*.  Il  s'agit,  je  suppose,  de  l'édit  de  Charles  11,  du  12 
juin  169J,  qui  -leur  interdisait  les  métiers  de  maquignon  et  At  forge- 
ron, en  un  mot  tout  autre  exercice  et  genre  de  tIc  que  celui  de  culti- 
vateur de  la  terre-  (voir  De  Rochas,  p.  287,  qui  date,  par  erreur  sans 
doute,  cette  loi  de  1693;  et  surtout  Borrow,  1841, 1. 1,  p.  202-204).  Du 
reste,  le  plus  ancien  édit  connu  qui  concerne  ces  étrangers  en  Espagne, 
celui  de  1499  contre  les  Egipcianosy  caliereros  extrangeros,  que  j'ai 
déjà  cité  (en  noie  quelques  p.  plus  haut)  proscrit  indirectement  les  mê- 
mes métiers,  puisqu'il  leur  enjoint  de  se  fixer  dans  les  villes  et  les  villa- 
ges et  d 'y  chercher  des  maîtres  sous  lesquels  ils  auront  â  servir  pour  leur 
subsistance,  faute  de  quoi  ils  devront  vider  le  royaume  dans  le  délai  de 
60  jours  (Borrow,  1. 1,  p.  195-196;  De  Rochas,  p.  2i5  et  288).  Ces  éiîits  et 
beaucoup  d'autres  du  mÊme  genre,  qui  interdisaient  aux  Gitanos  les 
seuls  métiers  qui  soient  dans  leurs  aptitudes,  durent  avoir  tout  particu- 
lièrement pour  effet  de  diminuer  beaucoup  parmi  eux  les  forgerons  et 
chaudronniers;  car  ce  sont  là  des  métiers  qui  exigent  un  petit  matériel 
difficile  à  dissimuler,  et  surtout  un  apprentissage  traditionnel,  qui  ne 
se  retrouve  pas  aisément,  une  fois  perdu. — On  peut,  ce  semble,  induire 
de  ce  qui  précède,  que  les  ouvriers  en  métaux  furent  autrefois  beau- 
coup plus  nombreux  qu'aujourd'hui  parmi  les  Bohémiens  d'Espagne; 
mais  l'étude  des  documents  fournirait  sans  doute  des  données  plus  pré- 
cises sur  ce  point  comme  sur  plusieurs  autres. 

36* 


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5i4 
Caldarari  (chaudronniers)  et  les  Spoïtori,  (étameurs)  quoi- 
qu'ayant  des  occupations  bien  voisines,  forment,  au  contraire, 
deux  corps  de  métiers  différents,  deux  classes  distinctes. 
L'importance  de  ces  classiBcations  peut  être  inégale^  mais  il 
faut  commencer  par  bien  constater  celles  qu'on  peut  aper- 
cevoir. 

La  Statistique  ethnographique  pourra  toucher  ainsi  à 
des  points  délicats,  que  VEthnologie  intime  de  la  race  per- 
mettra quelquefois  d'éclaircir.  Sous  ce  dernier  titre,  je  com- 
prends la  connaissance  de  toute  la  vie  intime  des  Gitanos, 
de  leurs  traditions,  de  leurs  coutumes,  de  leurs  superstitions, 
de  leur  caractère  et  de  leurs  mœurs.  Cette  seconde  partie 
de  la  tâche  n'est  pas  à  la  portée  de  tout  le  monde,  et,  à 
moins  de  relations  très  suivies  avec  des  gens  qu'il  n'est  pas 
toujours  agréable  de  fréquenter,  elle  sera  souvent  ingrate  et 
assez  stérile.  C'est  pourquoi  elle  ne  méritera  pas  toujours 
une  place  à  part.  Mais,  dans  tous  les  cas,  les  traits  par- 
ticuliers qu'on  pourra  y  recueillir  gagneront  souvent  à  être 
rattachés  à  tel  groupe  qu'on  aura  su  distinguer  préalablement 
de  tel  autre,  car  il  se  peut  que  tous  les  groupes  n'aient  pas 
des  traditions  et  des  coutumes  identiques;  et  c'est  pour- 
quoi il  importera  toujours  d'éclairer  d'abord  sa  route  en 
commençant  par  recueillir  les  éléments  de  cette  statistique 
ethnographique  que  j'ai  placée  en  première  ligne,  qui  con- 
tient déjà  tant  de  données  essentielles,  et  qui  risque  fort  de 
rester  la  partie  la  mieux  remplie  du  programme. 

Par  bien  des  poin 
diqué,  la  vie  extérieurt 
chent  et  se  pénètrent, 
treinte,  plus  ou  moins 
dans  certains  groupes  i 
points  mixtes  qui  ont  tn 


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5i5 

cis.  Tels  chefs  étaient  autrefois  reconnus  par  l'autorité  espa- 
gnole ou  portugaise  et  le  sont  peut-être  encore  aujourd'hui, 
comme  répondant  plus  ou  moins  de  leurs  subordonnés:  l'his- 
toire de  cette  institution  singulière  (qui  se  retrouve  dans  bien 
d'autres  pays)  ne  serait  pas  à  négliger;  et  il  faudrait  tâcher 
de  démêler  ici  la  part  de  raction  extérieure  et  celle  de  la 
propre  tendance  des  Gitanos  à  se  donner  des  chefs. 

Les  habitudes  de  pérégrination  des  Gitanos  de  tels  ou 
tels  groupes,  leurs  relations  avec  des  Tsiganes  étrangers,  la 
question  de  savoir  si  des  Tsiganes  passent  d'Espagne  en 
Afrique,  et  d'Afrique  en  Espagne*,  voilà  encore  autant  de 
points  mixtes,  qui  ont  leur  grand  intérêt. 

Les  émigrations  et  les  transportations  de  Gitanos  dans 
les  colonies  espagnoles  ou  portugaises,  notamment  au  Bré- 
sil, formeraient  un  chapitre  d'un  autre  genre. 

Je  n'ai  rien  dit  des  études  anthropométriques  et  pres- 
que rien  des  études  philologiques.  Je  ne  les  oublie  pas;  mais 

<  La  GaïettedeMagdebourg{en  allemand),  n.°  16  de  janvier  1846, 
donnait  la  nouvelle  suivante  (reproduite  par  M.  Pot t  dans  la  Zeilschrifi 
der  Deuischen  morgenlanJ.  Geseilschaft,  t.  iir,  1849,  p.  SiS)  ;  iDepuJs  quel- 
que temps,  on  remarque  parmi  les  Bohémiens  d'Espagne  un  mouve- 
ment et  une  agitation  extraordinaires:  beaucoup  d'entre  eus  semblent 
se  préparer  à  quitter  le  pays,  et  l'on  assure  qu'ils  veulent  tous  émigrcr 
en  Afrique,  parti  cul  ièremem  en  Maroc  ;  le  nom  d'Abd-el-Kader  est  dans 
toutes  les  bouches.-  li  serait  intéressant  de  savoir  s'il  y  a  eu  quelque 
chose  de  vrai  dans  cette  étrange  nouvelle. — Pour  ce  qui  regarde  un 
passé  plus  lointain,  ii  est  bien  probable  que,  à  la  suite  des  édits  de 
proscription,  on  a  dû  souvent  transporter  des  Gitanos  en  Afrique.  Le 
Portugal  avait  dans  cette  partie  du  monde  des  lieux  de  déportation, 
auxquels  l'ordonnance  de  i538  (mentionnée  en  note  dans  une  page 
précédente)  destinait  les  nationaux  vivant  â  la  manière  des  Ciganos, 
mais  qui  ont  bien  pu,  ainsi  que  les  présides  espagnols,  s'ouvrir  aux  Bo- 
hémiens eux-mêmes. 


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5i6 

je  les  considère  comme  trop  spéciales  pour  figurer  dans  ce 
petit  programme.  Les  remarques  qu'on  pourrait  faire  sur 
certaines  différences  de  type,  et  notamment  les  données  qu'on 
pourrait  recueillir  sur  des  croisements  de  sang  tsigane  et  de 
sang  maure,  ou  arabe,  ou  kabylf,  auraient  d'ailleurs  plus 
d'intérêt  que  des  mensurations  anthropologiques  faites  au 
hasard:  l'anthropométrie  n'interviendrait  utilement  que  pour 
les  contrôler. 

Quant  au  dialecte  gitano,  il  est  passablement  connu,  et 
ce  n'est  qu'une  philologie  savante  et  raffinée  qui  pourrait  ti- 
rer de  son  lexique  et  de  sa  grammaire  fort  altérée  des  con- 
tributions nouvelles  et  importantes  à  la  connaissance  géné- 
rale de  la  langue  tsigane.  Ce  qui  importerait  davantage,  com- 
me je  l'ai  déjà  indiqué,  c'est  l'étude  des  éléments  étrangers 
qu'elle  peut  contenir  et  particulièrement  des  éléments  que 
les  dialectes  tsiganes  d'Afrique  ou  de  l'Asie  antérieure  au- 
raient pu  lui  fournir;  mais  ceci  encore  n'est  pas  à  ta  portée 
de  tout  le  monde. 

Ce  qui  est  à  la  portée  de  tout  chercheur  attentif,  c'est 
de  recueillir  exactement  tous  les  noms  ethniques  que  les  Gi- 
tanos  se  donnent  et  de  contrôler  ceux  qu'on  leur  a  attribués, 
et  de  recueillir  également  tous  les  mots  qui  peuvent  avoir 
un  intérêt  ethnologique  ou  archéologique,  à  commencer  par 
les  noms  des  métaux,  des  outils  employés  en  métallurgie, 
des  armes  primitives,  des  ustensiles  essentiels,  et  de  tout 
ce  qui  se  rapporte  aux  usages  et  aux  coutumes  de  la  race. 
Les  acquisitions  linguistiques  ainsi  considérées  ne  sont  qu'un 
complément,  maïs  un  complément  très  utile,  de  l'ethnolo- 
gie. On  voudrait  pouvoir  y  joindre,  à  l'occasion,  des  contes, 
des  légendes,  des  chants;  et  je  suppose  que  le  chercheur  en 
question,  sans  être  tout  à  fait  étranger  à  la  langue  gitam, 
n'est  pas  très  familier  avec  elle.  Mais  les  contes  et  les  lé- 


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in 

les  traditions,  qui  ont  encore  plus  d'îtnpor- 
[ue  autant  d'intérêt  en  espagnol  qu'en  gita- 
Irait  toujours  les  traduire:  tout  ce  qui  im- 
.  soient  fidèlement  recueillis.  Pour  les  chants, 
férent,  mais  il  n'y  en  a  guère  qui  aient  un 
quant  à  ceux  qui  en  auraient,  on  fera  son 
e  les  approprier,  dans  la  langue  originale, 
;n  entendu  de  se  les  faire  traduire. 
de  tout  ce  qui  précède,  j'appellerai  l'atten- 
anes  chaudronniers  qui  depuis  une  douzaine 
iennent  de  Hongrie  ou  des  contrées  voisi- 
"siganes  conducteurs  d'ours,  venant  la  plu- 
■,  qui  se  sont  mis  un  peu  plus  tard  ù  faire 
;rinations  européennes.  Je  sais  que  des  ban- 
dronniers,  après  avoir  passé  par  la  France, 
t'en  Espagne,  jusqu'en  Algérie.  Je  n'ai  pas 
ximbien  ils  sont  intéressants  à  étudier  ;  les 
et  les  itinéraires  de  ces  caldaran,  ainsi  que 
,  doivent  être  notés  aussi  exactement  que 
rais  reconnaissant  aux  personnes  qui  vou- 
fournir  ces  renseignements. 

s  achever  cette  communication  un  peu  anor- 
avouer,  Messieurs,  qu'en  l'écrivant,  j'ai  été 
lié  de  m'arrêter,  et  que  je  ne  vous  l'envoie 
:nsion.  Il  me  faut  bien  reconnaître,  en  effet, 
idirectement  préhistorique,  puisque  je  vous 
les  Gitanos  ou  Ciganos  actuels.  N'est-il  pas 
que  le  préhistorique  a  souvent  des  lien; 
choses  modernes  et  actuelles?  On  a  trouvi 
exemple,  d'étudier  les  déformations  tou 
le  comme  restes  d'usages  très  anciens,  e 


,ï  Google 


5i8 

on  étudie  avec  le  même  empressement  les  trépanations  po- 
pulaires partout  où  l'on  peut  en  trouver  la  trace  actuelle. 
Si  l'on  venait  vous  dire  aujourd'hui  qu'on  a  découvert  en 
Portugal  une  mine  d'étain  importante,  ne  courriez-vous  pas 
l'étudier  ?  Je  pourrais  multiplier  ces  exemples.  Hé  bien,  l'exis- 
tence actuelle,  et  au  milieu  de  nous,  d'une  race  qui,  on  peut 
l'affirmer,  quelles  qu'aient  été  ses  destinées,  est  restée  à 
peu  prés  identique  à  elle-mSme  depuis  plusieurs  milliers  d'an- 
nées, et  qui  a  pu  être  le  principal  agent  de  la  diffijsïon  des 
métaux  en  Europe,  n'est-ce  pas  là  un  fait  bien  plus  curieux 
encore  et  bien  plus  digne  de  nos  études? — Ce  dernier  point 
est  loin  d'être  certain,  me  dira-t-on. — Je  l'accorde;  mais  ne 
suffit-il  pas  qu'il  soit  possible  pour  mériter  notre  attention? 
Possible,  il  l'est  certainement;  personne  aujourd'hui  ne  peut 
affirmer  le  contraire;  et  dès  lors,  cette  race  tsigane,  qui,  dans 
tous  les  cas,  je  le  répète,  est  une  race  préhistorique  mer- 
veilleusement conservée,  doit  être  étudiée  ici,  non  pas  seu- 
lement dans  un  passé  très  lointain  et  bien  difficile  à  ressai- 
sir, mais  d'abord  dans  son  présent,  dans  son  état  actuel. 

Voilà  ce  que  je  me  suis  dit,  et  j'ai  poursuivi  ma  petite 
tâche.  Tout  mon  regret  est  de  ne  l'avoir  pas  mieux  rem- 
plie. Je  ne  vous  ai  guère  apporté  que  des  questions,  et  j'ai 
osé  proposer  un  petit  plan  d'études,  dans  l'espoir  d'éveiller, 
au  midi  des  Pyrénées,  les  idées  de  quelque  jeune  chercheur, 
et  dans  la  pensée  que  ma  vieille  expérience  pourrah  lui  être 
de  quelque  utilité. 

Rien  n'est  si  difficile  que  de  faire  un  bon  questionnaire, 
et  il  y  aurait  fallu  beaucoup  plus  de  place.  Mais  je  sais  que 
j'ai  été  déjà  trop  long  et  je  m'arrête. 


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DE  L'ORiaiNE  PROBABLE  DES  TOUEHASES 


LEURS  MIGRATIONS  A  TRAVERS  L'ASIE 


M.  G.  DE  Vasconcellos  Abreu 


L — Le  FroUAme 

Les  considérations  que  je  vais  vous  présenter  ne  sont  pas 
de  l'ordre  de  celles  que  l'auteur  croit  être  l'apport  d'un  résul- 
tat définitif  pour  la  science.  Je  me  présente  sachant  d'avance 
que  mes  recherches  ne  méritent  point  l'honneur  du  nom  de 
contributions.  Je  ne  viens  pas  vous  soumettre  un  travail, 
mais  tout  simplement  des  doutes.  Mon  but  est  d'appeler 
l'attention  des  ethnologistes,  des  géographes  et  des  on 
talistes,  sur  un  problème  qui,  je  crois,  est  encore  à  rés< 
dre. 

Il  a  été  le  sujet  de  doctes  recherches  de  la  part 
quelques  savants  de  premier  rang,  entre  autres,  den 
rement,  de  la  part  de  M.  le  baron  de  Richthofen  dans 
i"  volume  de  son  grand  ouvrage  sur  la  Chine.  Aussi  ce 
partie  introductoire  déjà  publiée*,  écrite  avec  autant  de 
lent  que  de  vraie  science,  fait  désirer  ardemment  la  cent 
sien  de  ce  monument  littéraire  et  scientifique. 

■  Le  1*"  volume  a  paru  dans  le  comnaencemeni  de  1883.  Il 
extraordinairement  intéressant  pour  le  géolc^e. 


T 


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520 

Dans  une  note,  vraie  dissertation  qu'on  lit  p.  439-44[, 
le  savant  auteur  dit:  «La  question  relative  aux  Toukhâres, 
à  leur  patrie  originaire,  à  leurs  caractères  ethnologiques,  à 
leurs  migrations,  et  aux  pays  qu'ils  ont  habités  aux  ditfërentes 
époques,  est  du  plus  grand  intérêt.  Des  combinaisons  mul- 
tiples ont  donné  naissance  à  une  série  singulière  de  syno- 
nymes qui  a  fait  du  nom  de  Toukhârt  la  désignation  la  plus 
usuelle  de  différents  peuples  voisins  et  à  des  époques  diver- 
ses de  l'antiquité.  Nous  en  avons  un  témoignage  important 
dans  la  savante  investigation  de  M.  Vivien  de  Saint-Martin, 
Mémoire  sur  les  Huns  blancs  ou  Ephthaîites  des  historiens 
byzantins.  Études  de  géographie  ancienne.  Paris  i85o  p. 
233-351.. 

C'est  précisément  ce  problème  gros  de  résultats  et  rela- 
tif, je  ne  dis  pas,  et  pour  cause,  à  la  patrie  primitive,  mais 
à  la  filiation  ethnologique  des  Toukhâres,  leurs  migrations, 
leurs  rapports  historiques  avec  les  peuples  des  anciens  em- 
pires, et  leur  part  dans  les  luttes  des  peuplades  et  tribus  de 
la  Grèce  pré-hellène  et  de  l'Asie-Mineure,  dans  les  civilisa- 
tions et  dans  les  relations  commerciales  avec  les  peuples  de 
l'Orient,  que  je  crois  être  encore  sans  résolution. 

M.  de  Richthofen  n'a  pas  atteint  le  but  qu'il  s'était 
proposé  en  s'efforçant  de  démontrer  que  les  désignations  de 
Toukhâres  et  de  Yuë-tchî  appartiennent  à  un  seul  peuple, 
qui  depuis  son  origine  aurait  habité  les  environs  de  Kho- 
tan,  iAux  ToukhâreSy  dit  le  savant  professeur  de  Bonn — 
correspondent  les  Yuë-tchî  de  la  dynastie  des  Han,  les  Yeta 
de  la  dynastie  des  Wêi,  les  Haiathaîah  ou  Haithal  des  Per- 
ses, les  'EfBaXiTai  et  les  Hum  blancs  des  auteurs  byzantins, 
les  Thedal  des  Arméniens,  les  Kouchan  de  ceux-ci  et  des 
Arabes,  les  Djates  actuels  de  l'Inde,  selon  M.  de  Saint-Martin 
et  de  plus  les  Indo-Scythes  des  auteurs  grecs,  selon  d'autres 


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5a  I 

résultats  plus  anciens.  Tout  récemment  M.  le  colonel  Yule 
(Notes  on  Hueti-TTtsang's  accounl  of  ihe  principaîities  of 
Tokhdristdn,  Jout-nal  ofthe  Royal  Asiatic  Society  n.  s.  vi, 
1 873,  p.  92-1 20),  est  venu  confirmer  par  de  pénétrantes  inves- 
tigations, et  mettre  hors  de  doute,  les  conjectures  élaborées 
depuis  Rémusat  par  exemple  àAns— Remarques  sur  l'exten- 
siondel'EmpireehinoisducôléderOcddent(penodedeT&ng)^ 
sur  l'identité  des  To^apoi  des  Grecs,  des  Tou-ho-lo  des  Chi- 
nois, des  Tokhares  des  Arabes  (de  ce  nom  on  a  formé  To- 
kharistan)  et  très  probablement  des  Toukhâras  de  la  littéra- 
ture hindoue,  avec  les  anciens  Yuë-tchî.* 

Je  ne  puis  pas  accepter  cette  conclusion  ;  je  crois  tout 
au  contraire  pouvoir  démontrer  une  différence,  au  point  de 
vue  ethnique,  bien  tranchée  entre  les  Toukhâres  et  les  Yuë- 
tchî.  Qu'il  me  soit  permis  de  dire  que  ce^-hors  de  doute  est 
un  peu  hors  de  temps;  car  M.  le  colonel  Yule  liù-même  ma- 
nifeste quelques  doutes  (p.  95  de  l'ouvrage  cité)  à  ce  pro- 
pos. J'en  parlerai  au  §  iv. 

Dans  ce  mémoire  je  tâcherai  de  démontrer  la  fausseté 
de  l'identité  établie  entre  les  Toukhâres,  le  peuple  désigné 
par  Strabon  '  sous  le  nom  de  Toxapoi,  les  Tou-ho-lo  et  les  Yu'é- 
tchi.  Je  ne  me  laisserai  pas  toutefois  entraîner  par  le  désir 
d^itudier  les  rapports  ethnologiques  existant  entre  les  Toukhâ- 
res et  les  Djates  du  nord-ouest  de  l'Inde.  Ceux  qui  désireront 
approfondir  cette  question,  pourront  consulter,  outre  l'ouvra- 
ge de  M.  de  Saint-Martin  (cité  par  M.  de  Richthofen),  ceux 
de  M.  EUiot'  et  ropinion  de  M.  le  général  Cunningham^. 

<  L.  XI,  oap.  VIII,  2;  p,  438,  L  33.  Muller-Diibner.  Didoi. 

*  Memoirs  on  the  History,  Folklore  and  Distribution  0/  the  Races 
0/  ihe  North-western  provinces  of  India.  Elliot-Beames.  London.  1869. 
vol.  I,  p.  i3o-i37,  Ç9-102. 

*  Archœological  Swvtty  0/ India,  vol.  11  (Etknology),  p.  43-81. 


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52Î 

Je  ne  conteste  pas  que  les  ToukhSres,  Tukhâra  des 
Hindous  et  Tôxixpoi  de  Strabon,  ne  soient  un  seul  et  même 
peuple — à. de  difftrentes  époques,  cela  va  sans  dire.  Je  ne 
conteste  pas  non  plus  que  la  dénomination  de  Yuë-tcht,  au 
temps  des  Hans,  n'ait  pu  comprendre  avec  les  Yuë-tchî 
une  ou  plusieurs  tribus  des  Toukhâres,  surtout  à  partir  de  la 
seconde  moitié  de  ta  première  période  de  cette  dynastie  (îoS 
av.  J.-C— 58ap.  J.-C.}. 

L'opinion  que  je  combats  est  celle  qui  affirme  quç  les 
Yuë-tchî  et  les  Toukhâres  ont  été  un  seul  et  même  peuple, 
et  ma  conclusion  sera  que  la  dénomination  de  Toukhâres  a 
fait  disparaître  en  Occident,  où  elle  était  plus  ancienne,  la  dé- 
nomination de  Yue-tchî^  plus  familière  aux  Chinois. 


n. — Les  argnmenta  d«  M.  de  Rlobttiofen 

On  sait  aujourd'hui,  et  M.  le  baron  de  Richthofen  l'ex- 
plique en  détail  '  que  les  Yuë-tchî,  habitants  de  la  partie 
orientale  du  bassin  de  Tarym,  sont  arrivés  l'an  laS  avant 
J.-C.  par  des  marches  successives  faites  depuis  !'an  iSy,  à 
travers  la  Tsoungarie,  à  la  Transoxiane  et  à  la  Bactriane. 
Ils  y  ont  anéanti  le  royaume  grec  de  la  Bactriane*  et  ^y 
sont  établis  d'une  manière  définitive.  Strabon  qui  nous  a 
laissé  une  relation  importante  de  cet  événement,  rapporte 
le  fait  à  ditférents  peuples  venus  d'au-delà  de  l'iaxarte.  Ces 
peuples  sont  les  'Avist  xcci  IIccaKcvst  -xai  Tô^^apot  x;^!  2a;(ctp»uXoi. 

Ptolémée  parle  d'un  grand  peuple,  habitant  la  Bactriane 

■  Comp.  note  5,  p.  43ç^44i  avec  p.  446  et  suiv. 
*  Spiegel,  Eranische  AUerthwnskunde,  m  vol.  p.  64.  Ràwlinson,  The 
Sixtk  Oriental  Monarchy,  p.  i55  et  suiv.  M.  de  Richthofen,  uf  supra. 


et  qu'il  appelle  les  Tokhari\  aussi  les  Thagori,  habitants 
d'une  région  que  M.  de  Rtchthofen  identifie  (p.  440,  489) 
avec  l'ancienne  ville  Tou-ho-îo  dont  parle  le  pèlerin  chinois 
Hiouen-Thsang'  au  vu"  siècle  de  notre  ère. 

La  différence  de  prononciation  étant  un  fait  purement 
local,  est  due  à  la  séparation  des  différentes  tribus;  prolongée 
pendant  plusieurs  siècles,  elle  n'empêche  pas  M.  de  Richt- 
hofen  d'identifier  l'ancienne  Tou-ho-lo  avec  la  région  des 
Thagori.  J'accepte  comme  vraie  l'identification  des  deux  noms 
dans  les  ripes  de  tOxus  et  les  versants  septentrionaux  du 
Kuen-hun.  Le  nom  de  Tou-holoen  chinois  est  le  correspon- 
dent phonologique  dusanskritTukhâra.  On  voit  donc  que 
les  Tokhari  ou  Tokharot  de  Strabon  venus  d'au-delà  de 
l'Iaxarte  sont  identiques,  au  moins  pour  le  nom,  à  ces  Tou- 
khâres  de  la  littérature  hindoue.  Mais  pouvons-nous  en  con- 
clure avec  M.  de  Richthofen  que  ce  soient  les  mêmes  peu- 
ples que  les  Yuë-tckV  Je  ne  le  crois  pas. 

Un  seul  fait  est  incontestable  :  le  nom  de  Yuë-tckî  se 
rencontre  à  une  certaine  époque  et  sur  le  même  lieu  géo- 
graphique que  celui  d'un  peuple  désigné  par  Strabon  par 
le  nom  grec  Tokharot;  quelques  siècles  plus  tard,  Hiouen- 
Thsajqg  désigne  ce  peuple  par  le  nome  hinois  de  Tou-ho-lo, 
corresirandant  phonologique  du  vocable  sanskrit  tukhâra, 
de  même  que  celui-ci  l'est  encore  du  grec  Tokharot  (Comp. 
l'exposé  du  fait  tel  que  je  viens  de  l'énoncer  avec  l'exposé 
que  M.  de  Richthofen  nous  donne  p.  489  n,  b.). 

A  ce  fait  viennent  s'en  ajouter  d'autres,  qui  à  première 
vue  semblent  appuyer  l'hypothèse  de  M.  de  Richthofen. 

Les  voici: 

Le  Tokhâristàn  fut  une  des  capitales  du  Bouddhisme 

'  Stanislas  Julien,  Mém.  sur  les  contrées  occidentales^  11  vol,  p.  147. 


,ï  Google 


524 

sur  l^Oxus,  et  ses  habitants  y  gardaient  k  côté  de  la  religion 
nouvelle  un  grand  nombre  des  usages  propres  aux  habitants 
de  Khoian;  ce  dont  les  Chinois  se  sont  aperçus  au  vu"  siècle 
de  notre  ère.  Or  la  patrie  originaire  des  Yue-tchî  fut,  d'après 
ce  que  présume  M.  de  Richthofen,  près  de  Khotan.  Je  revien- 
drai sur  ce  fait  hypothétique  {§  iv). 

M.  de  Richthofen  admet  encore  une  hypothèse  que 
je  ne  crois  pas  suffisamment  fondée:  c'est  que  les  Yue-tclû 
furent  les  premiers  convertis  au  Bouddhisme.  Celte  hypo- 
thèse a  pour  base  la  tradition  rapportée  par  De  Guignes 
(Mémoires  de  l'Académie  Royale  des  Inscr.,  vol.  xl,  1780. 
p.  31 5).  D'après  cela  il  y  aurait  eu,  déjà  en  l'année  288  av. 
J.-C,  une  pyramide  ou  pagode  de  Fo  (Bouddha)  chez  les 
Petits  YuS-tchî.  Malheureusement  nous  ne  connaissons  rien 
de  positif  sur  les  Yue-tcht  qu'à  partir  de  l'an  iSy  av.  J.-C.' 
et  en  outre  De  Guignes  ne  rire  pas  de  la  tradition  qu'il 
rapporte  la  même  conclusion  que  M.  de  Richthofen;  bien 
au  contraire — De  Guignes  dit:  «De  là  nous  devons  conclure 
que  dès  lors  la  religion  indienne,  même  avant  le  passage  des 
Yuë-tchî,  était  établie  dans  cette  partie  (occupée  par  les  Pe- 
tits Yiië-tchî)  de  la  Tartarie.». 

La  différence  entre  les  deux  noms  chinois,  YuS-tchî  et 
7b«-Ao-/o,  est  certes  assez  grande  pour  qu'on  accepte  de  pri- 
me-saut que  l'un  et  l'autre  désignent  un  seul  peuple.  M-  de 
Richthofen  cherche  à  expliquer  cette  différence  :  Sous  la  dy- 
nastie Han  les  Chinois  donnaient  des  noms  tirés  de  leur  pro- 
pre langue  aux  différents  peuples  qu'ils  voulaient  citer;  plus 
tard  ils  remplacèrent  ces  noms  par  d'autres  qui  n'étaient  que 
les  noms  mêmes  de  ces  peuples  accommodés  à  la  pronon- 

'  Richthofen,  Op.  cit.  440. 

'  Loc.  cil.  Comp.  sur  ce  sujet  $  m. 


lyGOOt 


525 

dation  chinobe.  Conséquemment,  si  l^identité  des  YuS-tchî 
er  des  Tou-ho-lo  venait  à  être  démontrée,  (ce  qui  n'est  point 
encore),  la  raison  de  la  différence  de  ces  noms  serait  suffi- 
samment connue. 

M.  de  Richthofen,  s'appuyant  sur  certains  renseigne- 
ments qu'il  puise  dans  le  travail  de  M.  le  colonel  Yule,  con- 
clut à  une  synonymie  exacte  des  vocables  Yu'é-tcht  et  Tou- 
ho-lo  qui  aurait  été  déjà  connue  des  Chinois.  Les  empereurs 
Tang,  dès  l'année  660  se  sont  mis  à  introduire  l'organisa- 
tion civile  de  leur  empire  dans  le  Touran,  et  ils  ont  chois' 
comme  chef-lieu  une  ville  que  M.  te  colonel  Yule  identifie 
avec  la  moderne  Koundouz,  et  qu'ils  ont  nommée  Tuë-tcht-fu, 
quoiqu'en  pays  toukhâre.  Le  colonel  Yule  en  avait  conclu 
déjà  avant  M.  le  baron  de  Richthofen  que  les  Chinois  con- 
sidéraient les  deux  noms  Yuë-tchî  et  Tou-ho-lo  comme  iden- 
tiques. 

La  conclusion  que  je  tire  de  ce  fait  est  tout  à  fait  diffé- 
rente: Les  empereurs  Tang  ont  donné  le  nom  de  YuS-tcht-fu 
à  la  capitale  du  pays  toukhâre,  par  eux  choisie,  parce  que 
cette  dénomination  de  Yue-lchî,  familière  aux  Chinois  sous 
les  Han,  affirmait  en  quelque  sort  leur  droit  de  conquête 
sur  ces  pays. 

Le  mot  Toukhâre  (tukhâra,  sk.)  se  trouve  dans  le  Ma- 
hâbhârata.  Lassen  le  premier  signale  le  passage  qui  le  con- 
tient. M.  de  Richthofen  y  trouve  tous  les  éléments  à  l'appui 
de  son  hypothèse  sur  l'identité  des  Yu'é-tchî  et  des  Toukhâ- 
res.  D'après  le  passage  de  l'épopée  hindoue,  les  Toukhâres 
apportèrent  «des  peaux,  du  fer  et  de  la  soie»  au  roi  Panda- 
va*.  Ces  produits  étant  caractéristiques  des  Sères,  il  faut 
que  les  Toukhâres  qui  vinrent  les  offrir  au  roi  hindou,  di- 

'  Lassen,  Indische  Alterihumskunde  P,  661. 


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sent  MM.  Yul 
de  Khotan. — i 
continue  le  sa^ 
présentèrent  d 
avec  assez  de 
maîtres  de  la  i 
Ladâk.  Ils  ont 
l'occident  à  un 
qui  du  temps  d 
mâlaya  des  p< 
bleus  et  des  c\ 
Ces  donni 
Yue-îcht,  avec 
khâresy  notre  ; 
ces  derniers  d( 

Pour  état 
nous  le  répète 
trois  ordres  di 
géographique, 

Je  suivrai 


En  deçà  c 
Bouddhisme  se 
peuples  de  ces 

<  Noies  on  H 

'  China,  i,  n< 

^  Al-Biruni.  1 

rians.  EIliot-Dow: 


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5^7 
longtemps.  De  l'autre  côté  du  Pamir  et  au  nord  de  Plaxar- 
te,  le  Bouddhisme  pouvait  se  développer  avec  une  certaine 
facilité.  Mais,  quand  même  les  prédicateurs  bouddhistes 
eussent  propagé  leur  religion  à  l'occident  du  Pamir,  ce  se- 
rait en  vain  que  l'on  espérerait  trouver  quelque  notice  bien 
précise  de  leur  conversion  partielle.  Il  n'en  est  pas  de  même 
de  l'orient. 

Le  peuple  mongolique,  vu  son  caractère,  s'accommode 
facilement  de  la  religion  bouddhique.  La  religion  de  l'ancien 
empire  chinois  s'était  formée  avant  qu'une  mythologie  régu- 
lière eût  pu  en  sortir,  et  bien  que  le  culte  fût  réglé  jusque 
dans  ces  moindres  détails*,  il  n'y  avait  point  une  caste  sa- 
cerdotale. Gonfucius,  le  réformateur  de  cette  religion  au  vi* 
siècle  avant  notre  ère,  ne  s'occupa  que  des  doctrines  mora- 
les* et  enseigna  un  naturalisme  éthique  fondé  sur  la  religion 
politique  des  Tchâou  (établie  depuis  le  xii'  siècle  av.  J-C.) 
Le  Confucianisme  ne  pouvait  convenir  qu'à  une  certaine 
classe,  à  la  majorité  des  Chinois  lettrés,  ou  du  moins  à  la 
majorité  des  esprits  cultivés.  Le  Bouddhisme  trouva  donc 
un  accè.s  facile  et  beaucoup  de  prise  parmi  les  Mongols  et 
même  en  Chine,  où  d'un  autre  côté  il  ne  trouva  que  le  Tao- 
ïsme, doctrine  qui  avait  de  grands  rapports  avec  le  Boud- 
dhisme. 

D'après  le  Ma-touan-Iiti,  nous  dit  De  Guignes  déjà  cité 
(Mém.  de  l'Acad.  R.  des  Inscr.y  vol.  xl,  1780, p.  iib).  «les 
Chinois  rapportent  que,  dans  le  pays  occupé  par  les  petits 
YuMchî  on  suivait  la  religion  de  Fo  (Bouddha)  et  qu'il  y 
avait  une  pyramide  ou  pagode  de  Fo  qui  avait  35o  pas 


'  Consulter  J.  Legge,  The  She  King,  London.  1876.  p.  49  et  suivan- 
tes: édit.  min.  Comp.  p.  253,  lign.  :;2-i4. 

'  J.  Lcgge,  The  Life  and  Teachingso/Con/ucius,  London.  1875.  p.  99. 
CR.  37 


,ï  Google 


528 

de  circonférence  et  80  tchang  de  hauteur.  On  comptait,  de- 
pms  que  cette  pagode  avait  été  bâtie  jusqu'à  l'an  bbo  de 
l'ère  chrétienne,  842  ans;  ainsi  l'époque  de  la  construction 
doit  remonter  vers  l'an  288  av.  J.-C».  «De  là — continue 
De  Guignes — nous  devons  conduis  <\\i^  dès  lors  la  religion 
indienne^  même  avant  le  passage  des  Yuë'tchi,  était  établie 
dans  cette  partie  de  la  Tartarie.* 

L'hypothèse  de  M.  de  Richthofen  appuyée  sur  cette 
tradition  est  donc  erronée,  car  ce  ne  seraient  pas  les  YuH- 
tclîî  les  premiers  convertis  au  Bouddhisme,  mais  au  con- 
traire ils  auraient  connu  la  religion  du  Bouddha  par  d^au- 
tres  peuples  déjà  bouddhistes  au  temps  du  passage  des  Yuc- 
tchî. 

Nous  avons  notice  d'une  première  tentative  d'aposto- 
lat bouddhique  dans  la  Chine,  l'année  2 1 7  avant  l'ère  chré- 
tienne'. Dans  la  Tartarie  le  Bouddhisme  fut  établi  avant  le 
passage  des  YiiMchî.  Cependant  11  n'entra  point  définitive- 
ment dans  la  Chine  proprement  dite  que  l'an  64  après  J.-C.^ 

A  l'ouest  de  l'Yarkand  le  général  chinois  Hioukkiou- 
ping^  trouva  l'an  122  une  statue  du  Bouddha.  A  l'occident 
de  rindus  la  marche  du  Bouddhisme  est  retardée.  Néanmoins, 
si  on  ne  le  trouve  bien  établi  sur  la  région  du  Caboul  que 
5o  ans  environ  avant  notre  ère,  on  le  trouve  introduit  dans 
le  Jiord  de  la  Perse  avant  le  deuxième  siècle  av.  J.-C.  Haug* 
croit,  d'après  un  passage  de  l'Avesta,  où  il  lut  le  nom  "de 
GSutama  (G  a  o  t  e  m  a),  que  la  doctrine  du  Bouddha  était  déjà 

•  Rémusac,  Fo'é-Koue-Ki,  p.  44.  V.  Richthofi;n,  China  1,  p.  Sot. 
Edkins,  Cftirtese  Buddhism,  p.  88. 

'  Richthofen,  China  1,  p.  Soi.  Edkins,  Chinese  Buddhism,  p.  i5. 
'  Lassen,  Ind.  Allerth.  11,  1052.  Comp,  Richthofen,  op.  cit.  p.  5oi. 

*  Essays  on  the  Sacred  Language,  Writings  and  Religion  o/the 
Parsis.  ï""  édit.,  p.  208,  i63. 


,.gi^;. 


529 

connue  en  Bactriane  depuis  le  quatrième  siècle'.  Cest  peut- 
être  trop  tôt. 

La  tradition  conservée  soigneusement  par  les  Bouddhis- 
tes prouve  l'existence  et  de  leurs  prédications  lointaines  ci 
des  relations  que  les  peuples  de  l'Inde  entretenaient  avec 
ceux  d'au  delà  de  i'Iaxarte,  auxquels  les  premiers  appor- 
taient les  enseignements  de  la  doctrine  bouddhique. 

Le  Djâtaka  xxi,  i,  4,  (17,  18),  d'après  MinayeP,  fait 
mention  de  dix  mille  prêtres  qui  dans  l'antiquité  vivaient  sur 
les  montagnes  du  nord  où  coule  la  rivière  Sîdâ. 

Cette  rivière  quîserait  le  Tjrf-m-jÇ-ow/ d'après  Klaproth, 
et  le  Sihoun  d'après  Bumouf,  peut  être  encore  d'après  M. 
le  colonel  Yule'  le  Sirikol  l'un  des  affluents  de  la  rivière 
de  l'Yarkand  ou  cette  rivière  elle-même.  Le  Sihoun  des 
Arabes  est  le  fleuve  connu  aujourd'hui  dans  l'Asie  centrale 

■  Comp.  cequ'endiiMgr.  deHt]rIe2,^v»(aiir,pag.  18.  Je  possède  au- 
jourd'hui la  i*~  édition  du  beau  travail  du  savant  professeur  de  Lou- 
vain.  Il  écrit,  pag  ÔSç:  «Quoique  l'on  puisse  dire,  l'explication  la  plus 
naturelle  de  ce  mot  (gaotetna)  et  la  plus  satisfaisante  est  celle  qui  y 
voit  le  nom  du  gSutama  bouddha  et  une  allusion  à  la  lutte  soutenue  par 
les  mazdéens  contre  les  bouddhistes;  que  la  forme  gaotetna  ne  corres- 
ponde pas  phonéiiquemeni  d'une  manière  exacte  au  mot  indien  cela 
ne  fait  rien  à  l'atTaire.  Il  ne  s'agit  pas  ici  d'un  mot  dérivé  par  voie  na- 
turelle, mais  d'un  terme  emprunté  ei  transféré  avant  même  d'avoir  été 
écrit.  Les  Ëranicns  ont  dit  gaotetna,  comme  ils  le  prononçaient,  et 
c'était  tris  naturel  chex  eux  vu  qu'ils  n'avaient  pas  de  diphthongue 
médiale  au  ou  n'en  usaient  que  rarement.  Il  s'agit  donc  ici  des  luttes, 
des  controverses  contre  les  bouddhistes  répandus  à  l'est  de  l'tran.' 

Les  abstinences  contre  lesquelles  s'élève  avec  force  l'auteur  du  Fnr- 
gard  IV  sont  des  pratiques  bouddhiques.  Comp.  de  Haûez^Avesta,  i*"  édi- 
tion, p.  48.  J.  Darmesteiter,  The  Zend-Avcsta,  in  The  S.  B,  0/  the  Easi, 
vol.  IV,  p.  46. 

*  Grammaire  pâlie,  tr.  de  Sianislas-Guyard.  1S74,  i\. 

'  Journal  of  the  Royal  Asialic  Society,  n.  s.  vi,  p.  116,  119,  iîo. 


„Google 


53o 

par  le  nom  de  Syr-darya^  l'Iaxarte  de  l'histoire,  lequel  était 
appelé  suis  par  les  Scythes,  d'après  Pline  *. 

Le  Tarym-goul,  ou  fleuve  Tarym,  résulte  de  la  réunion 
de  toutes  les  rivières  qui  descendent  de  ce  merveilleux  nœud 
de  montagnes  formé  par  l'entrecroisement  des  systèmes 
du  Kuen-loun,  de  PHimàtaya  et  du  Tian-chan.  La  rivière 
de  Yarkand,  celle  de  Khotan  et  celle  de  Kachgar  en  sont 
les  plus  remarquables.  Le  Tarym  coule  dans  la  direction  de 
l'orient,  traversant  le  désert  de  Gobi,  et  entre,  après  un 
détour  vers  le  sud,  dans  le  lac  Kara-bouran  qu'il  forme 
avec  le  Tchertchan-darya  qui  y  descend  du  sud-ouest.  De 
là  le  Tarym  se  prolonge  jusqu'au  lac  Lob,  d'où  il  sort  pour 
se  perdre  dans  les  jungles  ou  roseaux  épais  qui  couvrent 
les  plaines  du  côté  de  l'esté 

Minayef  voit  dans  cette  tradition  un  souvenir  confus 
d'une  origine  extra-indienne*.  Le  fait  est  que  cette  rivière 
Silâ,  Sidâ,  Ckîdâ  ou  Silis  était  connue  dans  l'Inde  bouddhi- 
que. C'était  une  rivière  ou  un  fleuve  de  la  région  entre  l'Oxus 
et  l'Iaxarte,  de  l'extrême  nord  et  cette  région  était  pour  le 
Djâlaka  une  contrée  sacrée. 

Cela  suffît  pour  que  je  pose  le  fait  des  relations  entre 
la  patrie  du  Bouddhisme  et  la  région  de  l'Oxus  et  de  l'Ia- 
xarte. Nous  n'avons  pas  besoin,  par  conséquent,  d'attribuer 
le  Bouddhisme  du  Tokhâristàn  aux  YuU-tchi,  arrivés  seule- 
ment là  à  une  date  bien  postérieure  à  celle  donnée  par  ta 
tradition  et  les  textes  avestiques,  et  par  la  tradition  et  les 
textes  bouddhiques. 


'  VI,  i8.  édit.  Littré. 

*PrejevaIsky,(trad.  Delmar  Morgan),  f>-omAu//a  across  ihe  Tia» 
Shart  to  Lob-itor,  p.  55  et  suiv.  98,  loi,  passim.  Loiulon.  1879. 
*  Op.  cit.,  viu. 


byCoo'^le 


y 


> 


53 1 

Je  n'oublie  pas  que  dans  les  anciens  monuments  litté- 
raires hindous  on  compte  les  années  par  hivers.  Le  souvenir 
de  fémigration  des  Aryas  descendant  du  nord  vers  le  Pan- 
djab  s'est  perpétué,  dans  une  certaine  mesure,  dans  les  hym- 
nes védiques. 

Mais  le  nom  du  fleuve  qu'on  y  trouve  est  la  RasS^ 
Pavestique  Raha.  Spîcgel  *  identifie  la  Rasa,  c'est-à-dire  le 
fleuve  Râha,  à  l'Iaxartc.  De  Harlez'  croit  que  le  fleuve 
Râha  est  l'Oxus;  Zimmer'  accepte  néanmoins  que  le  fleuve 
Rasa  correspond  à  l'Iaxarte.  Haug*  a  montré  que  dans  un 
certain  nombre  de  passages  avestiques  ce  nom  Raba  con- 
serve sa  signification  primitive  de  mei',  et  que  dans  le  Ven- 
dîdâd  il  désigne  ta  Caspienne. 

La  conclusion  à  laquelle  nous  nous  arrêtons  est:  Que 
ce  nom  Râsa=Râkatat  donné  par  les  émigrants  aryens  à  un 
fleuve  depuis  le  littoral  du  Tabaristân  jusqu'au  Pamir.  Il 
s'agit  donc  précisément  des  régions  de  ce  n<£ud  gigantesque 
auquel  les  géographes  ont  donné  par  méprise  le  nom  de 
Belourtagh  ou  Bolor,  et  d'où  Lassen"  a  fait  descendre  les 
Toukhâres^  tukhâra  de  la  littérature  hindoue. 

M.  le  colonel  Yule*  et  M.  le  baron  de  Richthofen' 
n'opposent  â  cette  idée  du  grand  orientaliste  qu'un  seul  ar- 
gument: c'est  que  les  Toukhâres  ont  dû  habiter  tout  au  moins 
à  proximité  du  Khotan. 

Je  ne  contesterai  pas  le  bien-fondé  de  cette  objection. 

*  Avesta,  m.  p.  96,  n. 

*  Avesta,  i*"  édit.  1,  p.  87,  n.  7, 

*  AUindisches  Leben,  p.  16, 

*  In&v.xasn  Aegyptens  Stelle  ind.  \VeltgeschichtetV,'p.  i36  et  suiv 

*  Op.  cil.,'i,  p.  1023. 
"  Op.  cit.,  p.  gS. 

'  Op.  cit.,  p.  440,  n. 


.,Cc 


r 


532 

Malgré  cela,  si  je  parviens  à  démontrer  l'existence  d'un 
peuple  nomade,  réunissant  tes  conditions  et  les  caractères 
assignés  aux  Toukhâres  de  Lassen,  ayant  la  possibilité  de 
descendre  jusqu'à  Khotan,  la  solution  à  laquelle  Lassen  est 
arrivé,  acquerra  une  valeur  scientifique  incontestable. 

Toutefois,  cela  ne  serait  point  nécessaire  à  ma  thèse, 
si  l'existence  d'une  ancienne  ville  du  nom  de  Tou-hO'lo  ou 
Tonkhâra,  près  Khotan,  pouvait  être  positivement  reconnue. 
Mais  je  remets  ce  sujet  à  une  autre  paragraphe,  préférant 
démontrer  d'abord  que  la  race  des  Toukhâres  fut  différente 
de  celle  des  YuS-tcht. 


IV.  Renoontre  des  Ynë-tohi  et  des  Tonkb&res 

Nous  ne  connaissons  absolument  rien  des  Yu'é-tchî  en 
Occident  avant  leur  invasion  du  Fei^hâna,  143  ou  128  ans 
avant  l'ère  chrétienne.  En  Orient  même,  on  ne  connaît  d'une 
manière  sûre  que  leur  arrivée  au  delà  du  Lob-nor,  au  pays 
des  Usiins,  l'année  iSy  avant  J.-C.  '  Là,  ils  rencontrèrent 
la  race  blonde  aux  yeux  bleus  des  Usuns,  et  alors  YuS-tcht 
et  Usuns  traversèrent  le  Tian-chan  du  c&té  de  Tourfan,  en 
passant  par  la  Tsoungarie  jusqu'à  Balkh. 

Ici  se  pose  une  question.  D'où  venaient  les  YuS-tchî? 
Etait-ce  du  côté  de  Khotan,  à  l'orient? 

M.  de  Richthofen  est  loin  de  l'avoir  démontré;  il  le 
suppose*.  L'unique  base  sur  laquelle  il  asseoit  son  hypo- 
thèse c'est  la  mention,  que  l'on  trouve  dans  l'ouvrage  de 
Hiouen-Thsang,  d'une  ancienne  villenommée  Tou-ho-lo,  nom 


'  Richthofen,  Op.  cil.,  p.  440  note,  p.  447. 
*  Op.  cit.,  p.  447.  Comp.  p.  440,  n. 


,ï  Google 


533 

que  M.  de  Richthofen  croit  être  celui  d'un  peuple  identi- 
que au  peuple  Yu'é-îchî.  Cette  base  n'est  rien  moins  que 
scientifique,  puisque  M,  le  baron  de  Richthofen  donne  pour 
preuve  la  supposition  même  d'où  il  est  parti. 

Le  nom  tukhâra  en  sanskrit  se  trouve  dans  le  Mahâ- 
bhSrata  et  dans  le  Ràmâyana.  Ce  nom  désigne  les  peuples 
qui  portèrent  «des  peaux,  du  fer  et  de  la  soiei  au  roi  Pân- 
dava.  Plus  à  l'occident  et  au  nord,  en  Asie,  700  ans  avant 
J-C,  on  trouve  le  nom  d'un  peuple  qu'on  peut  identifier, 
comme  celui  de  tukhâra  (du  moins  phonologiquement},aux 
Toukhâres.  Cela  vient  confirmer  la  tradition  relative  au  roi 
Pùndava. 

Dans  les  annales  de  Sennakhérib ',  ce  roi  fait  mention 
des  Tokharri  des  E:(ames  et  des  Kipsous,  peuples  qu'il  mit 
en  déroute  pendant  sa  5^*  campagne.  Ils  avaient  bâti  leurs 
habitations  comme  des  nids  d'aigles  sur  les  plus  hauts  som- 
mets des  montagnes  et  pics  incultes  des  rochers  de  NipourK 

Sennakhérib  avança  et  mit  encore  en  déroute  d'autres 
peuples,  les  Dahae^.  A  la  fin  de  cette  5*°'  campagne  le  roi  as- 
syrien campa  aux  portes  d''Anara^. 

Les  Toukhâres  s'étendirent  encore  à  l'occident  et  exer- 
cèrent leur  action  en  dehors  de  l'Asie.  On  les  trouve  repré- 
sentés dans  les  peintures  murales  égyptiennes.  Ils  furent 
tantôt  les  ennemis,  tantôt  les  alliés  de  Ramsés  ni,  au  xiii^ 
siècle  avant  J.-C 

'  Taylor,  Cylinder  of  Sennachertb  in  Records  0/ tke  Past.  vol.  1, 
p.  35-43,  trad.  de  Fols  Talbot. 

*  Inscription,  col.  m,  I.  6&-70.  Comp.  Maspero,  Histoire  ancienne 
despeuples  de  l'Orient,  3'  ëdît.,  p.4i3. 

^  Inscription,  col  iv,  I.  3.  Comp.  Maspero,  op.  cit.,  p.  414. 

•  Inscription,  col-  iv,  1. 7-8, 

^  Chabas,  Birch,  etc.  La  copie  que  nous  reproduisons  ici  d'une  de 


,ï  Google 


534 
La  lecture  de  Tinscription  assyrienne  de  Sennakhérib 
nous  révèle  quelques  noms  géographiques  entièrement  incon- 
nus jusqu'alors.  Celui  de  Dahae  était  déjà  répandu.  On  Pavait 
déjà  identifié  avec  celui  de  Daotàts  Grecs,  de  ces  mêmes  Daiit 
qui  cinq  siècles  plus  tard  furent  poussés  par  les  Yuë-tch! 
contre  la  mer  Caspienne'.  Il  reste,  cependant,  à  déterminer 
Tendroit  de  la  capitale  des  Dahae  nommée  Oukkou  dans  Tins- 
cription.  Nipotir,  pays  montagneux,  n''est  pas  non  plus  bien 
déterminé;  on  peut  néanmoins  l'identifier  avec  les  monts  Aï- 
baros  dont  parle  Strabon*.  Ils  se  prolongeaient  dès  le  lac 
Thospîtes  jusques  dans  la  Médte.  Au  temps  de  l'empire  as- 
syrien toute  la  chaîne  de  montagnes  comprise  entre  le  Tau- 
ros  et  le  Zagros  était  désignée  sous  le  nom  de  Nipoiir'.  Du 
reste,  les  assyriologues  sont  d'accord  à  reconnaître  que  les 
luttes  que  Sennakhérib  soutint  si  glorieusement  et  qui  se 
terminèrent  pas  la  déroute  des  Tokharn\  des  Etantes  etc. 
eurent  lieu  à  l'orient  sur  les  montagnes,  qui  forment  la  fron- 
tière de  la  Médie  et  de  la  Suzïane*.  Après  avoir  châtié  la 
Suziane,  Sennakhérib  rebroussant  chemin,  se  porta  contre 
Maniah  ^,  roi  de  Oukkou  et  chef  des  rebelles  Dahae.  Ces 
peuples  occupaient  tout  le  territoire  à  partir  du  Caucase 
jusqu'aux  bords  du  Golphe  Persique'.  La  ville  de  Oukkou 

ces  peintures  murales  (PI.  i),est  empruntée  à  l'ouvrage  de  Wilkinson, 
A  popular  account  o/Ancienl  Egyptians^  vol,  i,  p.  391,  On  la  voit  aussi 
in  Bawlinson's  Herodolus,  vol.  iv,  p.  56. 

'  Richthofen,  China.  1,  p.  4^2  o. 

'  L.  M,  c.  14.  edii.  Mîiller-Didot,  p,  ^Si,  33 

"  George  Smith,  Assyria,  p.  118. 

*  Comp.  Finzi,  Ricerche  per  h  studio  dell'Anlichilà  Assira,  p.  So, 
.  avec  Rawlinson,  77ie  five  great  Monarchies,  of  ihe  Easteni  World,  iii, 
p.  170. 

^  Inscription,  col.  iv,  1.  3. 

"  RawUnson's  Herodolus.  t.  Essay  iv,  4. 


,ï  Google 


535 

était  donc  la  capitale  d'un  pays  plus  au  nord  et  à  l'est  que 
la  région  montagneuse  du  Nipour,  comprise  entre  la  Su- 
ziàne  et  la  Médie.  Maniah,  renfermé  dans  Oukkou,  ne  put 
pas  soutenir  le  siège;  il  s'enfuit  vers  les  régions  lointaines. 
La  ville  de  sa  royauté  fut  prise  par  les  Assyriens*.  Alors 
Sennakhérib  établit  son  camp  en  face  d!'Anara. 

Talbot  identifie  Anara  avec  VAornQS  des  Grecs.  Je  ne 
puis  souscrire  à  cette  opinion,  et  même  en  l'acceptant,  le  pro- 
blème n'en  resterait  pas  moins  tout  entier,  puisqu^on  pour- 
rait lui  donner  encore  plusieurs  solutions.  La  question  de  la 
position  d'Aornos  est  elle  même  une  much  vexed  question^ 
comme  l'a  dit  le  général  Cunningham^ 

Dans  l'impossibilité  de  détei-miner  le  lieu  où  se  trou- 
vait Anara,  je  me  contente  d'en  désigner  la  dtrecliott. 

Le  roi  des  Dahae  s'enfuit  naturellement  par  le  chemin 
qui  était  ouvert  devant  lui.  Ce  chemin  n'était  pas,  certes, 
du  côté  de  l'ouest,  puisque  Sennakhérib  lui  même  nous  dit 
qu'il  pénétra  dans  ces  régions  plus  avant  qu'aucun  autre  roi 
ne  l'avait  fait  avant  lui^.  La  nouveauté  des  noms  géogra- 
phiques confirme  son  dire  ;  en  outre  les  batailles  que  Sen- 
nakhérib venait  de  terminer  pour  établir  la  paix  en  Chaldée 
et  toutes  les  expéditions  faites  dans  l'extrême  occident  de 
l'Asie,  en  Phénicie,  en  Palestine,  sont  des  faits  qui  nous  di- 
sent assez  qu'il  ne  s'agit  pas  ici  de  ces  régions  bien  con- 
nues, mais  d'autres  qui  étaient  encore  ignorées  des  ancêtres 
de  Sennakhérib  et  de  ce  prince  lui-même.  Je  conclus  en  con- 
séquence que  la  marche  de  Sennakhérib  fut  dirigée  vers  le 
nord-est  pendant  qu'il  poursuivait  Maniah,  et  que  c'est  de  là 


'  Inscription,  co!.  iv,  1.  i3,  14. 

*  The  Ancieni  Geography  o/India,  1 

'  Inscription,  col.  iv,  1.  4-6. 


,ï  Google 


536 

en  revenant  vers  le  sud,  que  le  roi  assyrien  aura  traversé 
l'ancienne  Bactriane. 

Les  Tokharri  et  les  Dakae  n'avaient  d'autre  retraite 
qu'aux  montagnes  à  l'orient  de  la  mer  Caspienne.  Les  Dakae 
devraient  naturellement  avancer  plus  au  nord  que  les  To- 
kharri. Les  faits  postérieurs  viennent  confirmer  cette  con- 
clusion: cinq  cents  ans  plus  tard  les  Yue-tchî  rechassent  les 
Dahae  contre  la  mer  Caspienne.  Ce  fait  prouve  encore  que 
les  Tokharri  se  trouvaient  à  l'abri  de  cette  invasion  venue 
à  travers  la  région  des  sept  rivières  et  suivant  le  nordnauest 
des  montagnes  qui  descendent  jusqu'à  Khotan.  Ils  habitaient, 
par  conséquent,  aux  temps  de  l'invasion  des  Yiië-tclii^  les 
montagnes  de  Ferghâna  par  où  s'ouvrait  la  voie  commerciale 
avec  la  Serica. 

Ce  fut  après  que  les  Yuë-icht  arrivèrent  au  Tokhâiis- 
tân  qu'une  partie  des  YuS-lchî  pénétrèrent  dans  l'Inde.  Des 
lors  Yuë-tckt  et  Tokharri  se  confondent. 

Richthofen  n'ignorait  pas  l'existence  de  l'inscription  de 
de  Sennakhérib.  Il  termine  la  note,  objet  de  ces  considéra- 
tions par  ces  mots:  «Nous  ne  pouvons  pas  finir  ces  remar- 
ques sur  le  siège  probable  et  les  migrations  des  Tokhan'i, 
sans  rappeler  ce  fait  mis  en  relief  par  le  colonel  Yule  quoi- 
qu'il fût  opposé  a  sont  point  de  vue — que  700  ans  avant 
l'ère  chrétienne  il  est  fait  mention  dans  les  annales  cunéi- 
formes de  Sennakhérib,  d'un  peuple  montagnard  vaincu  par 
lui  et  dont  le  nom  était  Tokharri  (H.  F.  Talboi,  Assy-rian 
Texts  îranslated.,  in  Journal ofthe Roj-al  Asiatic  Sociely,  vol. 
XIX,  1862,  p.  i5i).  Ce  peuple  avait  ses  demeures,  comme 
les  oiseaux  leurs  nids,  sur  les  plus  hauts  sommets  et  les  ro- 
ches les  plus  escarpées  des  montagnes  du  Nipour.  Le  roi 
les  battit,  et  se  portant  contre  les  Dahae  qui  habitaient  des 


,ï  Google 


ssibles,  il  détruisit  trente  trois  de  leurs 
de  la  traduction  de  Talbot  m'a  été  con- 
professeur  Schrader>. 
notre  auteur  méprise  complètement  ces 
tes.  Le  nom  des  Dahae,  bien  qu'il  fût  ce- 
oisin  des  Tokharri^  n'attire  point  son  at- 

nel  Yule*  embarrassé  par  ces  circonstan- 
s  «Si  la  lecture  de  rinscription  est  exacte, 
roire  que  les  vrais  Tokharri  occupaient, 
vant  le  royaume  grec  de  la  Bactriane,  les 
>ccident  de  l'Imatis;  mais  alors  il  n^est  pas 
que  te  nom  de  Tokharri  ait  pu  être  donné 

rien  d'embarrassant.  L'histoire  offre  plus 
:es  faits.  Plus  d'une  fois  le  nom  d'un  peu- 
i  à  un  autre  peuple  ;  plus  d'un  peuple  est 
n  qui  lui  ont  Imposé  ses  voisins  bien  qu'il 
on  propre'. 

ination  de  Toukhâres  s'étendit  sur  toute 
:  pénétra  dans  l'Inde;  mais  avant  cela  et 
u  passage  du  peuple  qui  l'a  portée  traçant 
trouvons  ce  nom  en  Asie-Mineure  et  en 
lom  d'un  peuple  essentiellement  errant  et 
Tips  des  dernières  immigrations  aryennes 
orientales  méditerranéennes,  il  occupe  déjà 
tes  commerciales,  et  prend  part  aux  luttes. 

Royal  Asiatic  Society,  a.  s.  vi,  p.  gS,  96. 

il  d'après  Yulc  et  d'autres  orientalistes.  Cependant 

s  l'identification. 

lu'un  seul  exemple:  les  Chamavi,  les  Sigambesi, 

it  réunis  sous  le  nom  de  Francs. 


:,clgie 


538 

aux  incursions,  aux  batailles,  et  s^allie  avec  d^utres  peuples 
de  la  Méditerranée  dans  des  guerres  d'invasion  et  des  atta- 
ques par  mer. 

Les  Toukkares  ne  sont  pas  des  peuples  du  Tibet,  com- 
me les  YiiU-tcht.  Ils  proviennent  plutôt  des  îles  de  la  Médi- 
terranée, de  l'Europe  orientale,  des  côtes  de  la  mer  Noire, 
des  environs  du  Caucase,  et  aussi  de  l'Asie-Mineure  où 
ils  se  trouvaient  déjà  à  la  fin  des  temps  préhistoriques  de  la 
Grèce  (V.  §  v). 

M.  Yule  raisonne  de  la  sorte  «st  la  lecture  de  l'inscription 
de  Sennakhérib  est  exacte. . .  »  Elle  est  exacte;  on  ne  peut 
plus  en  douter.  Schrader  l'a  confirmée  à  Richthofen.  Talbot 
l'a  reproduite  encore  à  une  autre  occasion,  comme  on  peut 
voir  dans  Records  oftkePast  (ut  rétro).  D'autres  assyrio- 
logues  l'ont  travaillée,  revue  et  contrôlée.  Les  doutes  du 
colonel  Yule  n'ont  donc  plus  de  raison  d'être. 


V.— Iiea  Toakbftres  ne  sont  point  des  TlDétalns 

Comparons  maintenant  les  figures  de  p.  286,  3io,  3i2, 
3i3  du  livre  de  M.  Chabas,  Études  sur  tantiquitê  historique 
d après  las  sources  égyptiennes,  &.  (2*"'  édition),  avec  les  fi- 
gures citées  de  l'ouvrage  de  Rawlinson  et  de  celui  de  Wil- 
kinson  (Voir  la  pi.).  Nous  y  voyons  que  Içs  peintures  murales 
égyptiennes  représentent  les  ToukHâres  avec  des  traits  d'une 
race  qui  aurait  peut-être  les  yeux  bleus,  comme  les  Sères 
dont  parle  Rachias.  Ils  y  sont  représentés  tout  au  moins  avec 
les  traits  de  la  race  aryenne. 

Les  faits  concourent  donc  à  l'appui  de  mon  hypothèse  : 
les  Toukhâres  ou  quelques  tribus  Toukhàres  dominaient  la 
route  commerciale  du  côté  de  l'occident  au  Khotan  et  au 


^V^ 


539 
Pandjab,  ce  qui  explique  et  l'existence  d'une  vilie  Toukhâra 
près  de  Khotan  et  au  point  de  vue  géographique  les  re- 
lations des  Tûukhâres  ou,  comme  on  l'écrit  généralement 
en  français,  des  Tochâres^  des  Dardes  et  des  Seres  entre 
eux. 

Voici  la  manière  dont  Wilkinson  nous  décrit  les  7b- 
kkârt\  les  Toukhâres  ou  Tochâres  •.  «Les  Tokkârt  portaient 
un  casque  très  semblable  pour  la  forme  et  l'aspect  aux  cas- 
ques qu'on  voit  représentés  sur  les  sculptures  de  Persépo- 
poUs.  Ces  casques,  à  ce  qu'il  paraît,  étaient  faits  d'une  étoffe 
aux  raies  de  couleur;  ils  avaient  les  bords  ornés  de  dessins 
ou  d^une  rangée  de  grains  assez  gros,  et  étaient  assurés  sous 
le  menton  par  une  courroie  ou  un  ruban.  Les  Tokhâri  por- 
taient un  bouclier  rond  et  un  vêtement  court  ordinairement 
recouvert  d'une  cotte  d'armes  semblable  à  celle  des  ScHaï- 
retanes.  Leurs  armes  offensives  étalent  principalement  une 
lance  et  un  poignard  large  et  pointu  ou  épée  droite.  Ils  ne 
laissaient  pas  pousser  leur  barbe,  du  moins  ce  n'était  pas 
l'usage  général,  surtout  pour  les  chefs.  Les  traits  de  leur  vi- 
sage étaient  réguliers,  le  nez  légèrement  aquîlin;  et  chaque 
fois  que  les  artistes  égyptiens  les  ont  représentés  sur  une 
lai^e  échelle,  leur  profil  est  plus  beau  que  celui  des  Asiati- 
ques en  général.  Ils  entraient  en  combat  montés  sur  des 
chariots  comme  les  Égyptiens,  et  avaient  des  charrettes  à 
deux  roues  solides,  tirées  par  deux  pairs  de  bœufs.  Il  semble 
que  ces  chars  étaient  placés  en  arrière  de  l'armée,  comme 
il  était  d'usage  chez  les  Scythes  et  les  Tartares,  et  qu'on 
les  employaient  pour  le  transport  des  femmes,  des  vieillards 
et  des  enfants  en  cas  de  défaite,  i 


'  A  popular  Account  of  Andenl  Egyptians,  London.  1871,  vol.  i, 

391, 393. 


,ï  G  00  t^ltf 


540 

L'étroite  relation  entre  les  Tokhârt  et  les  Scharéttaïut 
ou  Schàïrotanes,  les  Scharutiniens  de  Layard  ',  ou  Schcr- 
daiias*,  les  Sardim'etts  et  les  Pouloucktas  ou  Pélatat,  les 
Pélasges\  est  vraiment  remarquable. 

Au  temps  de  Ramsès  m  les  Tsekkartou  (TochSres,  7on- 
khâres  &.  V.  plus  loin),  comme  les  PéUstas  arrivaient  du 
Nord  *.  Les  deux  peuples  alliés  prenaient  l'initiative  de  la 
guerre  contre  l'Egypte*  tL'artiste  égyptien — nous  ditCha- 
bas — les  a  figurés  avec  plus  de  soin  parmi  les  prisonniers 
conduits  au  temple  d'Ammon  par  le  pharaon  vainqueur.» 
«On  voit  qu'ils  portent  la  coiffure  caractéristique  des  an- 
ciennes nations  helléniques  ainsi  que  la  courte  tunique  à 
quadrilles»  (à  rayures  et  à  franges  des  peuples  de  la  Gr&e 
et  des  Des).  iPresque  tous  sont  imberbes;  un  seul  porte  un 
peu  de  barbe  à  l'extrémité  du  menton»  «Les  Tsekkartou 
étaient  de  race  européenne  comme  les  Pélestas*»  «Sous 
Ramsès  m  les  Péiestas  et  les  Tsekkartou  sont  seuls  nom- 
més comme  ayant  excité  les  nations  du  Nord'»  «Frémis- 
santes d'enthousiasme,  CCS  nations  qui  venaient  de  leurs  iles, 
attaquèrent  et  dispersèrent  les  populations  syriennes,  alors 
tributaires  ou  alliées  des  Égyptiens,  puis  elles  vinrent  cam- 
per au  sud  de  la  Palestine,  dans  le  pays  d'Amaor*.» 

«Le  cadre  des  événements  étant  ainsi  tracé —continue 


'  Discoveries  in  tke  ruins  of  Nineveh  and  Babylon,  LondoD- 1853, 
p.  355. 

*  Chabas,  Ant.  hist.,  p.  198. 

=  Ibid-,  p.  Ï84. 

'  Ibid.  p.  285. 

^  Ibid.,  p.  284. 

"ibid.,  p.  285-287. 

'  p.  Ibid.  287  aifinem. 

Mbid.,p.a88. 


,ï  Google 


54' 
M.  Chabas — nous  sommes  naturellement  amenés  a  rccon- 


La  transcription  du  mot  est  irréprochable. . .  De  7>k- 
kroi  les  Égyptiens  ont  fait  Tekkri  (la  finale  ou  est  le  pluriel 
égyptien.— Nous  pouvons  lire  Takkerri,  M.  Chabas  a  lu 
encore  Tsekkart'-ou).  La  ressemblance  ne  peut  guère  être 
plus  exacte.  Hérodote  donne  au  pays  troyen  le  nom  de 
Teucrie.  D'après  le  même  auteur',  c'était  la  dénomination  dont 
se  servaient  les  Égyptiens  de  l'époque  de  la  guerre  de  Troie, 
car  le  gouverneur  égyptien  de  la  bouche  canopique  du  Nil, 
Thônis,  appelle  Pârîs^  un  Teucrien  dans  le  rapport  par  le- 
quel il  informe  de  roi  de  l'arrivée  du  prince  troyen  après  le 
rapt  d'Hélène.» 

«Quant  aux  Pélestas,  ce  sont  les  Pélasges,  ces  peuples 
qui  nous  ont  laissé  tant  de  souvenirs  et  si  peu  d'histoire,  et 
qui  ont  précédé  les  Hellènes  dans  presque  tous  leurs  établis- 
sements»   «Sortis  de  la  Samothrace,  les  Pélasges  s'éta- 
blirent fortement  sur  les  côtes  asiatiques  de  PHellespont 
ainsi  que  dans  les  îles  de  Scyros,  d'Imbros,  de  Lemnos,  de 
Lesbos,  de  Chlo,  de  Samos  et  des  Cyclades,  ils  occupèrent 
aussi  la  Crète,  les  rivages  de  l'Asie-Mineure  jusqu'en  Carie. 
Les  Teucriens  étaient  ainsi  enclavés  entre  les  Pélasges  de  l'Io- 
nie  et  ceux  de  l'Hellespont.  L'histoire  ne  nous  montre  pas  dis- 
tinctement les  Pélasges  réunis  en  corps  de  nation,  cepen- 
dant nie  de  Lesbos  avait  reçu  d'eux  le  nom  de  Pelasgia.  En- 
viron deux  siècles  après  Ramsès  ni,  diverses  populations 
pélasgiques  accoururent  à  l'appel  de  Priam:  c'étaient  les 
Paeones  de  l'Axius,  les  Pélasges  de  l'Hellespont  et  ceux  de 

'  Hérodote,  ii,  114,  ii5. 

*  V.  l'étymologie  de  Paris  au  S  vu. 


,ï  Google 


54» 
la  Méonie,  armés  de  l'antique  javelot.»  «Nous  rencontrons 
donc  des  indices  bien  suffisants  de  la  puissance  des  Pelas- 
ges  et  de  leur  connexion  avec  les  Teucriens  pour  nous  ex- 
pliquer le  rôle  actif  que  ces  deux  nations  (je  préférerais  dire 
peuples)  avaient  pris  de  concert  dans  la  guerre  des  peuples 
du  nord  contre  PÉgypte.  Les  Teucriem  durent  avoir  la  pré- 
pondérance dans  l'expédition  par  terre  {je  souligne  car  le 
fait  est  d'une  grande  importance),  tandis  que  la  direction 
de  la  campagne  maritime  appartint  naturellement  aux  Pé- 
lasges,  qui  étaient  en  relations  intimes  avec  toutes  les  popu- 
lations des  rivages  et  des  îles  de  la  Méditerranée*.» 

Comme  je  l'ai  dît,  pourtant,  les  Takkerri  ou  Tekkri, 
les  Tochâres^  les  Teucriens  figuraient  aussi  dans  la  cohorte 
des  alliés  des  Égyptiens.  Champotlion'  cite  les  Teucriens 
comme  des  alliés  des  Egyptiens  contre  les  Libyens. 

Les  Tochâres  ou  Toitkkâres  furent  donc  un  peuple  er- 
rant qui  ne  constitua  jamais  de  nation  et  dont  le  mouve- 
ment sinueux  si  fit  de  l'occident  en  orient  jusqu'au  a*  siècle 
avant  l'ère  chrétienne. 


VI.— Le  moarement  fltimiqafl  &  travers  le  bassin  da  Tarym 

Après  avoir  déterminé  le  type  des  Toukhâres  ou 
Tochâres  comme  je  viens  de  le  faire,  je  dois  maintenant 
chercher  à  éclaircir  au  moyen  des  données  fournies  par  M. 
de  Richthofen,  un  point  que  j'ai  laissé  de  côté  ù  dessein.  Je 
veux  parler  de  l'existence  d'un  peuple,  dont  les  caractères 
ethnologiques,  dans  leur  ensemble,  s'accordent  avec  ceux 

•  Chabas,  Op.  cit.,  p.  ï88,  189 

'  Lettres,  p.  i63.  V.  Chabas^  op.  cit.,  p.  3o8. 


^^  Di 


,.,c„t,^ 


543 
;s  inscriptions  assyriennes,  Takerri,  Tokhâri 
iscriptions  égyptiennes,  qui  a  également  mené 
à  travers  l'Asie  centrale,  et  parcouru,  selon 
quîse,  le  Ferghâna  et  le  bassin  du  Tarym 
enfin  jusqu'à  Khotan. 

le  Richlhofen  dans  la  région  située  à  l'occi- 
u  Tarym  et  s'étendant  jusqu'au  nord-est  près 
bitait,  au  deuxième  siècle  avant  J.-C-,  une 
inois  désignaient  par  mépris  sous  le  nom  de 
;  de  cheval  —  die  Stamme  mit  den  langen 
t  (i.  48-49).  La  physionomie  de  ces  hom- 
te  de  la  physionomie  des  Chinois.  Us  avaient 
les  yeux  enfoncés  et  le  nez  saillant,  tandis 
là,  les  habitants  de  Khotan  étaient  consi- 
inois  comme  appartenant  à  leur  race.  Peut- 
Richlhofen — doit-on  les  rattacher  à  ces  peu- 
nne  dont  les  restes,  encore  aujourd'hui  épars, 
nité  occidentale  de  l'Yarkand  et  du  Pamir, 
ir  exemple  (comme  M.  de  Richthofen  le 
irès  Spiegel,  Eranîsche  Art.  1,  33g)  parcou- 
nsion  depuis  le  Pamir  jusqu'à  Uschi,  Aksu, 
mi.  Us  descendent  aussi  jusqu'à  Khotan, 
trcourent,  à  l'occident  et  au  nord  du  bassin 
les  contrées  que  parcouraient  jadis  les — 
cheval. 

vie  errante  à  travers  toute  cette  extension 
rym,  depuis  l'occident  jusqu'à  Tourfan,  les 
ie  cheval  avaient  soin  d'occuper  partout  Ics- 
i  pourrait  le  plus  facilement  traverser  le 
ivant  les  chemins  naturels  qui  conduisent 
'au  pays  des  sept  rivières  près  de  la  mer 
:  de  Balkach,  et  jusqu'au  lac  Issy-kol,  et 


..Gocfiic 


544 
d'un  autre  côté  jusqu'au  Ferghâna;  ils  se  réservaient  ainsi 
la  faculté  de  descendre  comnje  les  Tidjiks  jusqu'à  Khotan. 

J'ai  fait  voir,  au  §  iv  que  selon  toute  probabilité  les 
Toukkâres,,  les  Tokharri  des  inscriptions  cunéiformes,  habi- 
taient au  ii'siècle  av.  J.-C.  les  montagnes  du  Ferghâna.  Je 
puis  maintenant  rapprocher  cette  conclusion  du  fait  que 
nous  venons  de  constnier;  la  présence  des — longues  têtes  de 
cheval,  aa  deuxième  siècle  avant  J.-C.  aux  abords  de  cette 
contrée  sur  les  montagnes  qui  y  aboutissent. 

Je  ne  veux  pas  encore  affirmer  que  les — longues  têtes 
de  cheval  formaient  une  ou  plusieurs  des  tribus  des  To- 
kharri. Mais  ce  que  l'on  peut  soutenir  sans  hésitation,  c'est 
que  leur  caractères  ethniques  s'accordent  avec  ceux  des  To- 
kharri. Ainsi  sans  contredire  en  rien  la  loi  de  migration  des 
peuples  •  on  peut  admettre  que  les  Toukkâres  sont  venus 
des  régions  de  l'Iaxarte  jusqu'à  Khotan 


TII,~-Ëranieiia  et  Tookli&res.— Gonolnsion 

Le  nom  de  Tou-ho-lOy  eût-il  même  été  connu  en  Orient 
au  delà  de  Khotan,  cela  ne  diminuerait  en  rien  la  valeur 
des  arguments  que  je  viens  d'exposer  et  de  développer. 
L'existence  de  cette  ville,  pourtant,  est  problématique. 
Hiouen-Thsang  n'en  parle  que  par  tradition.  C'est  à  Kho- 
tan que  se  termine  le  voyage  du  pèlerin  bouddhiste.  La  ville 
de  Tou-ho-lo  sur  le  versant  septentrional  du  Kuen-loun,  si  ja- 

'  M.  de  Etichthofena  dit  coiitre  l'hypothèse  de  Lassen:  «wurde 
es  den  Gesetzen  der  Wiilkerbewegung  gani  widersprechen,  wenn  das- 
selbe  Volk  von  don  (Belur-tagh)  nach  der  Gegend  des  Lop-Secs  ge- 
zogen,  und  dann  um  den  Tien.Shan  herum  nach  dem  Yaxaries  und 
Oïus  zuriJckgekehrt  ware.» 


.,n,tî?SSTrGoOQ]c 


mais  elle  exista,  avait  disparu  depuis  longtemps*.  Ce  qu'on 
lit  des  Thagori  dans  Ptolémée  ne  servirait  guère  non  plus 
à  éclaicir  la  question. 

Admettons  cependant  que  cette  ville  eut  une  existence 
réelle.  Elle  devait  être  alors  à  une  petite  distance  de  Kho- 
tan,  à  400  li  seulement  ou  4  jours  de  voyage,  si  l'on  s'en 
rapporte  au  calcul  fait  par  Yule'.  L»  civilisation  avait  pris 
un  assez  grand  développement  sur  tout  le  versant  septen- 
trional du  Kuen-loun.  Cette  contrée  vit  s'élever  des  villes 
très  populeuses  qui  disparurent*  ensevelies  dans  les  mers  de 
sable ''qui  s'étendirent  depuis  le  Kara-bouran  jusqu'à  Kina. 
Le  peuple  qui  les  habitait  était  probablement,  pour  la 
plupart,  de  race  tibétaine,  mais  la  civilisation  était  crânienne 
comme  tout  nous  porte  à  le  conjecturer. 

On  trouve  encore  aujourd'hui  au  Tibet  les  usages  bi- 
zarres relatifs  à  l'exposition  des  cadavres',  et  la  grande  vé- 
nération pour  le  chien,  cet  ensevelisseur  ou  fossoyeur  des 
Bactriens  comme  disait  Strabon*.  Ces  usages  distinguent 


'  Mém.  sur  les  contrées  occidentales  par  Hiouen-Thsang,  irad.  par 
Stan.  Julien,  i[,  p.  247. — Comp.  Vivien  de  Saint-Manin,Mem.  dna/fd'jue 
sur  la  carte  de  l'Asie  Centrale  et  de  l'Inde,  les  dernières  lignes. 

''Hiouen-Thsang,  édit.  Slan.- Julien,  11,  247.  Yule,  in /ounw/ o/"//nf 
Royal  Asiatic  Society,  n.  s.  vi,  p.  93. 

■'  Richthofen,  Remarks,  in  Prejevalsky  (irad,  Delmar  Morgan),  Fram 
Kulja  across  the  Tian  Shan  to  Lob-nor,  p.  1 56.  Yule,  in  Marco  Polo,  i,  p. 
198,  i9fi. 

*  Ch.  Home,  On  thc  Meihods  of  Disposing  0/  the  Dead  at  Lhassa, 
Thibet  etc.,  in  Journal  of  the  Royal  Asiatic  Society,  n.  s.,  vi,  p.  ï8-3i' 
Comp.  Markham,  Narratives  of  the  Mission  of  George  Boyle  to  Tibet 
and  ofthe  Journey  of  Thomas  Manning  to  Lhassa.  London,  1876,  p* 
68,  111,  338-340.  V.  la  note  suivante. 

'  Comp.  Horace  délia  Penna,  in  Markham,  op.  cit.,  p.  339  avec 
Strabott,  L.  xi,  c.  xi,  3.  Miiller-Didot,  p.  443, 29.  On  peut  voir  sur  ce  su- 


.ïGex^tp^^ 


546 

une  partie  des  Éraniens  de  toute  la  race  aryenne  et  en  gé- 
néral de  leurs  voisins  occidentaux. 

Tiele  en  a  conclu  que  les  Tibétains  avaient  emprunté 
ces  pratiques  aux  habitants  primitifs  de  l'Éran  méridio- 
nal*. Mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  ces  pratiques  n'étaient 
pas  celles  de  tout  l'Éran;  elles  étaient  vraiment  avestiques 
et  pas  éraniennes  de  scfti  origine,  c'est  à  dire  qu'elles  n'étaient 
pas  aryennes,  ou  des  Aryas  de  l'Éran,  elles  ne  l'étaient  que 
d'une  partie  des  peuples  de  l'Éran,  de  ceux  qui  suivaient 
les  prescriptions  et  acceptaient  la  doctrine  de  l'Avesta.  C'est 
plutôt  aux  Éraniens  septentrionaux  et  à  ceux  de  la  tribu  de 
Bactriane  qu'on  doit' rattacher  les  pratiques  si  singulière- 
ment avestiques  des  Tibétains.  Le  mode  de  traitement  du 
cadavre  adopté  au  Tibet  doit  être  comparé  non  pas  aux 
pratiques  d'ensevelissement  des  Éraniens  méridionaux,  maïs 
aux  pratiques  exécutées  dans  les  dakhmas,  ou  cimetières 
mazdéens  qu'on  ne  rencontrait  pas  en  Perse,  et  aux  prati- 
ques semblables  des  peuples  de  l'Hyrcanie  et  des  rives  de 
la  mer  Caspienne,  au  dire  de  Strabon,  de  Cicéron  et  de 
Justin*.  A  l'est  de  la  Bactriane  se  trouvaient  les  Tokharri. 
Et  si  l'on  suit  le  cours  de  l'influence  éranienne  hors  du 
centre  principal  de  la  race  éranienne,  on  trouvera  partout 
les  Toukhâres. 

La  brillante  culture  qui  précéda  la  civilisation  grecque 
proprement  dite  et  s'étendit  sur  toute  la  côte  occidentale 
de  l'Asie-Mineure  et  de  la  Crète,  fut  le  résultat  du  mélange 

jet  De  Harlez,  Avesta^  l' passim.  De  Harlez  en  a  donné  une  i*~  éd.  en- 
richie d'une  magnifique  introduction.  Consulter. 

'  Geschiedenis  van  den  Godsdienst  etc.,  Amsterdam,  1S76,  p.  190. 

*  Comp.  le  Travail  âté  de  Ch.  Home  in  Journal  0/ the  R.  Asiatic  So- 
cieiy.îe  peux  aujourd'hui  citer  à  l'appui  de  mes  idées  l'opinion  de  l'êra- 
niste  be^c  Mgr.  de  Harlez  in  Avesta,  2°  éd.  intr.  xvi,  xvu,  clxxu,  ccuu- 


W' Wi 


d'éléments  phéniciens,  phrygiens,  et  helléniques,  encore  très 
visibles  dans  la  légende  troyenne.  Paris,  Dareios  sont  des 
noms  probablement  phrygiens  (/ar^combatre)  avec  des  for- 
mes éraniennes  '.  Le  nom  À^Assaracos  a  été  retrouvé  sur 
les  monuments  de  Ninive'.  Celui  de  son  fils  Capys^  est  un 
nom  phrygien,  aussi  bien  que  les  noms  de  Dpnas^  gendre 
de  Priam,  et  les  noms  dMicun/oî,  de  Cassandra^. . .  &.  Hé- 
rodote, nous  l'avons  dit,  donne  au  pays  troyen  le  nom  de  7e«- 
crie  et  Pân'S'Alexandre  était  un  Teucrien.  Tpota  signifie  peut- 
être  même  «terre  de  la  traversêe^i. 

D'après  quelques  auteurs,  aux  Toukhâres  correspon- 
dent les  Indo-S<ythes.  C'est  un  fait  acquis  pour  la  science 
que  les  Scythes  du  Pont-Euxin  étaient  de  race  aryenne,  et 
probablement  de  la  branche  éranîenne'. 

Je  dois  faire  remarquer  une  coïncidence  bien  significa- 
tive: les  assyriologues  ne  trouvent  aucun  élément  ethnique 
aryen  en  Arménie,  antérieur  au  viu*  siècle  avant  J.-C.  *  Cet 
élément  ethnique  était  éranien  et,  à  ce  qu'il  paraît,  un  résul- 
tat du  mouvement  qui  fit  venir  les  AryaS'Alèdes  dans  la  Mé- 
die  et  les  Aryas-Peises  dans  la  Suziane'.  Ce  fut  après  cet 
événement  que  les  Tokharri,  vivant  comme  des  aigles  sur 
les  hauts  sommets  des  montagnes  de  Nipour,  émigrèrcnt  vers 
le  nord,  battus  pas  Sennakhérib.  Notons  encore  que  i'armé- 


'  Tiele,  Op.  cit.,  p.  ii5,  n.»  iz5. 

*-*^Em.Curtius  (Boucha  Lcc le rcq ), //wWiVe  Greejue,  1. 1,  p.89. 

*  Comp.  l'étude  de  Sir  H.  RawUnson  in  vol.  m',  p.  187  et  suiv.  de 
Rawlinson's  Herodolus. —  Kiepert,  Lehrbuck  d.  Allen  Géographie,  n°  3o5. 
—  D'ktbm&ic  ia\i»\av\\\e.  Les  premiers  habitants  de  l'Europe,  p.  i37et 
i\ûv.—Rtvue  Critique,  14  décembre  1878,  p.  375. 

*  A. H. Sayce,  Assyrian  Lectures,  p.  44. — liis Herodotus,i^,  677. 
'  Sayce,  ioc.  cit. 


,ï  Google 


548 

nicn  wagr  itigre*  n'a  de  correspondant  nulle  part  ailleurs 
que  dans  le  sanskrit  vjâghra  itigre  royal»'. 

Lassen^  croyait  que  le  vocable  xamixifcç  en  sanskrit 
kastira,  fétain»,  fut  introduit  en  Grèce,  avant  Homëref 
par  l'intermédiaire  des  Phéniciens.  Ce  mot  a  été  retrouvé  de- 
puis dans  les  inscriptions  assyriennes.  Il  n'est  ni  aryen  ni 
sémitique.  L'opinion  de  Lassen  doit  être  modifiée.  Le  fait 
est,  néanmoins,  une  preuve  des  relations  entre  l'Inde  au  sud- 
est,  l'Assyrie  au  centre  et  la  Grèce  au  nord-ouest. 

Il  y  a  des  peuples  qui  sont,  comme  le  plasme  charriant 
les  globules  sanguins,  et  les  rhéophores  portant  k  courant 
électrique,  les  porteurs  de  civilisations  qui  sans  cela  reste, 
raient  isolées  et  condensées  en  un  point  sans  influence  utile 
sur  le  dehors. 

A  ce  titre  et  comme  tels  on  peut  certainement  citer  les 
Tottkhâres  qui,  semblables  aux  électrodes,  transmirent  en 
différents  sens  et  à  de  différents  peuples  la  civilisation  con- 
densée dans  les  grands  centres  de  l'Egypte,  de  PAsie-Mi- 
neure,  de  la  Syrie  et  de  l'Inde. 

'  Fick,  Vergi.  Wtb.  der  Indo-germanischen  Sprachcn,  i',  43i. 
*  Indische  Alierifmmskunde,  n*,  63». 


EXPLICATION  DE   LA  PLANCHE 

Fig.  I.  Les  Tokkari,  d'après  une  peinture  murale  à  Thèbes  {apud  Wil- 
kinson). 
3.  Les  charriots  des  Tokkâri,  d'aprùs  une  peinture  murale  à  Thè- 
bes  (apud  Wilkinson). 


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Vasconxei.los  Abreu 


Lilb.  de  J  Leipold  Listioonï 


DigitizsdbyGOOgle 


„Google 


ESSAI   STJK   LES   UUTILATIONS   ETHNIQUES 


M.  LE   DR.    E.    MACrTOT 


•Tout  est  bien  au  sonir  des  muns 
•  de  l'auteur  des  choses,  tout  dégé- 
'nère  encre  les  mains  de  l'homme; 
■  il  aime  les  difformités,  les  mons- 
•ires;  il  ne  veut  rien  tel  que  l'a  fait 
•la  nature,  pas  même  l'homme.* 
J.  J.  Rousseau. 


Considérées  d'une  manière  générale,  les  mutilations  eth- 
niques devraient  comprendre  toutes  les  modifications  ou  al- 
térations que  l'homme  se  fait  subir  à  lui-même,  sous  l'in- 
fluence de  la  mode,  des  habitudes,  des  idées  mystiques  ou 
religieuses,  des  sentiments  de  vanité  ou  d'orgueil,  des  aber- 
rations des  sens,  etc. 

Un  tel  sujet  est  inépuisable  car  ses  limites  sont  indé- 
finies. Pour  envisager  dans  son  ensemble  et  dans  ses  dé- 
tails un  aussi  vaste  problème  il  faudrait  commencer  par  les 


,ï  Google 


550 

plus  simples  et  les  plus  innocentes  pratiques,  comme  rem- 
ploi des  fards  et  des  cosmétiques;  ensuite  étudier  les  mo- 
difications que  les  vêtements  font  éprouver  à  la  forme  gé- 
nérale du  corps  et  arriver  enfin  aux  véritables  mutilations 
qui  laissent  après  elles  une  trace  indélébile. 

Ce  serait  une  tache  au-dessus  de  nos  forces  et  en  tous 
cas  hors  de  proportion  avec  les  travaux  ordinaires  d'un 
congrès.  Nous  avons  cependant  depuis  un  certain  temps 
entrepris  de  rechercher  et  de  rassembler  les  documents  épars 
sur  cette  intéressante  question  et  nous  les  réunirons  sans 
doute  ultérieurement  dans  une  étude  d'ensemble. 

Notre  but  aujourd'hui  est  beaucoup  plus  modeste,  et 
nous  demandons  simplement  au  Congrès  la  permission  de 
lui  exposer  très  brièvement:  i"  Quels  sont  les  caractères  es- 
sentiels des  diverses  mutilations  ethniques:  2"  Les  différents 
points  de  leur  répartition  géographique  dans  l'état  actuel  de 
nos  connaissances  en  ethnographie  générale. 

Or,  la  pratique  des  mutilations  ethniques  paraît  sou- 
mise dans  la  série  des  temps  et  sur  les  parties  diverses  du 
globe,  à  certaines  lois  générales. 

Ainsi,  le  plus  grand  nombre  d'entre  elles  après  être  nées 
de  l'initiative  d'un  peuple  ou  d'une  tribu,  se  sont  ultérieu- 
rement propagées  par  voie  de  migration  ou  de  conquête, 
soit  que  le  peuple  lui-même  se  substituant  à  un  autre  ait 
gardé  ses  pratiques  particulières,  soit  qu'il  les  ait  imposées 
aux  vaincus.  Telle  est  en  particulier  l'habitude  de  déformer 
le  crâne  qui  parait  s'être  répandue  en  Europe,  et  en  France 
par  l'envahissement  d'un  peuple  particulier,  les  Cimmériens 
macr  acéphales. 

D'autre  part,  on  observe  que  certains  groupes  de  po- 
pulations séparés  par  de  grands  espaces  marins  ou  terres- 
tres et  qui  n'ont  eu  à  aucune  période  de  l'histoire  de  rela- 


,ï  Google 


tions  entre  elles,  s'infligent  la  même  mutilation.  Telle  est  par 
exemple,  cette  pratique  de  l'amputation  d'une  phalange  qui 
s'observe  à  la  fois  sur  la  côte  occidentale  de  l'Afrique  et 
au  Paraguay.  Tel  est  encore  un  certain  mode  de  déforma- 
tion céphalique  qui  se  retrouve  à  la  fois  en  Europe  et  chez 
les  Patagons. 

Deux  explications  se  présentent:  d'une  part,  la  théorie 
de  la  similitude  des  instincts  humains,  d'autre  part  l'hypo- 
thèse de  la  jonction  aux  premiers  temps  quaternaires  ou 
tertiaires  de  continents  aujourd'hui  séparés. 

Certains  observateurs  parmi  lesquels  il  faut  citer  Bro- 
ca,  se  sont,  comme  on  sait,  prononcés  formellement  pour 
cette  dernière  supposition. 

Une  autre  loi  tend  à  établir  que  la  pratique  des  mu- 
tilations est  en  raison  inverse  de  l'état  de  civilisation.  En 
Europe  par  exemple,  elles  sont  presque  entièrement  aban- 
données et  celles  que  nous  mentionnerons,  appartiennent 
aux  premiers  temps  de  notre  histoire  ou  aux  âges  préhisto- 
riques. Au  contraire,  les  peuplades  sauvages  et  primitives 
des  continents  africains,  de  l'Amérique  et  de  la  Polynésie 
constituent  les  centres  actuels  de  la  plupart  des  mutilations. 

Enfin,  il  est  une  dernière  loi  générale  fort  importante  à 
préciser  dans  la  question  qui  nous  occupe,  c'est  là  non  hé- 
rédité des  mutilations  volontaires.  Nous  ne  discuterons  pas 
ce  point  qui  nous  semble  jugé  définitivement  aujourd'hui: 
Toute  disposition  physique  acquise  accidentellement  pen- 
dant la  vie,  n'est  pas  transmissible  héréditairement.  Nous 
pourrions  en  citer  maintes  preuves;  ainsi  par  exemple:  tes 
Aymaras,  les  Chinooks  modernes  ne  présentent  plus  la  dé- 
formation crânienne  si  spéciale  de  leurs  ancêtres,  telle  qu'elle 
se  retrouve  dans  les  anciennes  sépultures,  et  la  circoncision, 
la  plus  ancienne  peut-être  et  la  plus  répandue  des  mutila- 


i^ 


ib.GPogk 


552 

lions  volontaires,  n'a  point  empêché  la  disposition  anato- 
mique  qu'elle  corrige  de  se  perpétuer  indéfiniment. 

Quoi'qu'il  en  soit,  de  ces  courtes  considérations  géné- 
rales, nous  allons  aborder  notre  étude  dans  les  divisions 
suivantes  : 

I.  Les  mutilations  de  la  peau. 

II.  Les  mutilations  de  la  face. 

III.  Les  mutilations  de  la  tête. 

IV.  Les  mutilations  des  membres  et  du  tronc. 
V.  Les  mutilations  des  dents. 

VI.  Les  mutilations  des  organes  génitaux. 


KntllationB  oatanéfiS 

Les  mutilations  qui  se  pratiquent  sur  la  peau  sont  in- 
nombrables et  leur  histoire,  pour  être  complète,  justifierait 
à  elle  seule  un  long  et  volumineux  travail. 

Nous  devrons  donc  nous  borner  pour  elles  ainsi  que 
pour  les  autres  parties  de  ces  études,  à  un  aperçu  rapide. 

Les  mutilations  cutanées  peuvent  en  effet  se  diviser  en 
trois  groupes; 

i"  Les  fards  et  peintures. 

2"  L'épilation. 

3"  Le  tatouage. 

L'idée  de  se  couvrir  la  peau  soit  d'un  enduit  de  cou- 
leur uniforme,  5oit  de  dessins  ou  ornements  divers,  remonte 
a  la  plus  haute  aîîtiquité  et  s'est  du  reste  conservée  jusqu'à 
nos  jours  où  elle  reiçte  très  en  faveur  chez  certains  peuples 
de  l'Afrique  et  de  l'OJcéanie.  Dans  l'ancien  continent.  l'usage 


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553 

des  fards  était  également  fort  répandu.  Il  a  certainement 
précédé  le  tatouage  proprement  dit,  lequel  est  devenu  le 
moyen  de  rendre  définitifs  et  indélébiles  les  dessins  effectués 
à  l'aide  de  la  peinture. 

L'épilation  était  un  complément  de  la  coutume  précé- 
dente ;  elle  se  pratiquait  d'une  part  par  l'arrachement  des 
poils  sur  le  cuir  chevelu,  sur  les  sourcils,  le  mont  de  Vénus 
ou  d'autres  régions,  soit  au  moyen  du  rasoir.  L'usage  de  ce 
dernier  instrument  appartient  à  tous  tes  âges  de  l'humanité 
et  à  tous  les  peuples.  Aux  temps  de  la  pierre  taillée,  on  fa- 
briquait déjà  de  minces  couteaux  de  silex  ou  d'obsidienne 
très  aiguisés  et  qui  n'étaient  autres  que  des  rasoirs.  Quel- 
ques peuples  sauvages,  comme  les  Botocudos  utilisent  même 
pour  se  raser  des  éclats  de  roseaux  à  bords  très  tranchants. 
Enfin,  de  nos  jours  l'emploi  du  rasoir  métallique  n'a  pas  be- 
soin d'être  décrit. 

Quoi  qu'il  en  soit,  nous  ne  pensons  pas  qu'on  doive 
rigoureusement  accepter  comme  mutilations  aussi  bien  l'ap- 
plication sur  la  peau  des  fards  ou  peintures  que  l'épilation 
elle-même,  ces  deux  pratiques  ne  produisant  en  somme  au- 
cune lésion  cutanée  définitive. 

Les  véritables  mutilations  de  la  peau  nous  semblent 
commencer  avec  le  tatouage.  C'est  donc  de  cène  question 
que  nous  devons  nous  occuper  en  nous  bornant  toutefois  a 
indiquer  les  difiérents  caractères  du  tatouage  ethnique  et  à 
tenter  d'en  tracer  la  répartition  géographique  d'après  les  va- 
riétés qu'il  présente. 

Le  tatouage  se  divise  ainsi  en  cinq  catégories  qui  sont: 

1°  Le  tatouage  par  piqûre. 

2"  Le  tatouage  par  incisions  simples. 

3"  Le  tatouage  par  ulcération  ou  brûlures. 

4"  Le  tatouage  sous-épidermîque. 


„C.oogle 


554 
5'  Le  tatouage  mixte  dans  lequel  il  y  a  mélange  de  plu- 
sieurs des  procédés  précédents. 


1°  TATOUAGE  PAB  PIQURES 

C'est  le  plus  répandu  de  tous.  On  le  retrouve  dans 
toutes  les  parties  du  monde  et  particulièrement  en  Europe 
où  il  s'est  perpétué  depuis  les  temps  protohistoriques  jusqu'à 
nos  jours.  Autrefois  il  était  le  privilège  de  certains  groupes 
ethniques,  tandis  qu'aujourd'hui  il  ne  se  montre  que  sous 
forme  errative  et  à  titre  de  souvenir  d'une  tradition  ancien- 
ne. C'est  avec  ce  caractère  qu'il  persiste  chez  quelques  peu- 
ples de  l'Italie  et  dans  diverses  classes  inférieures  de  nos 
sociétés,  certains  corps  de  métiers,  etc. 

En  dehors  de  l'Europe,  le  tatouage  par  piqûres  se  re- 
trouve d'abord  chez  les  Arabes,  les  Kabyles  où  les  femmes 
reproduisent  de  la  sorte  sur  le  visage  des  enfants  les  des- 
sins qu'elles  tracent  dans  ces  broderies  bien  connues  de 
laine  ou  de  soie  '. 

Aux  îles  Marquises  le  même  procédé  s'emploie  pour 
caractériser  non  seulement  certaines  tribus,  mais  encore  les 
castes  et  les  divisions  sociales.  C'est  ainsi  qu'il  y  a  un  ta- 
touage particulier  pour  les  esclaves  et  les  domestiques;  un 
autre  pour  les  veuves;  un  autre  pour  les  guerriers.  Ce  der- 
nier pratiqué  après  un  combat  ou  une  conquête  devient  si- 
gne de  noblesse*,  et  la  forme  ou  les  dessins  adoptés  se 


'  Gillebcrt  d'Hercourt,  Anthropologie  de  F  Algérie,  in  Mémoires  de 
la  Société  d'Anthropologie  de  Paris,  t.  m  p.  17. 

*  Foley,  Quatre  années  en  Océanie,  Paris  1875.  ' 


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555 

transmettent  aux  descendants  qui  se  font  gloire  de  porter 
ainsi  sur  la  peau  le  blason  de  leur  aïeux. 

En  Chine,  à  l^le  de  Haïnan,  les  5eng-Ii  se  tatouent  le 
visage  par  la  même  méthode*  et  au  Japon  les  plongeurs  se 
couvrent  tout  le  corps  d'un  tatouage  très  serré  destiné  à  ef- 
frayer les  poissons  carnassiers  qui  s*atlaquent  à  Phomme  '. 
On  peut  ajouter  que  chez  certaines  peuplades,  le  tatouage 
ne  reste  pas  exclusif  à  la  peau,  car  les  femmes  de  Sénégam- 
bie  se  dessinent  aussi  sur  les  lèvres  et  les  gencives  des  des- 
sins colorés  par  Pindigo. 

D'autres  applications  du  tatouage  ont  été  signalées  par 
les  auteurs:  ainsi  d'après  M.  Miklucho-Maèlay,  les  femmes 
de  l'archipel  Peiew  se  font  tatouer  le  mont  de  Vénus  et  dans 
les  peuplades  de  l'Arizona,  de  l'Amérique  du  Sud,  le  tatouage 
est  appliqué  à  titre  de  châtiment  pour  marquer  un  coupa- 
ble'. 

Le  mode  opératoire,  très  bien  étudié  par  le  docteur 
Berchon  *,  consiste  tantôt  dans  l'emploi  d'aiguilles,  et  c'est  le 
procédé  usité  en  Europe;  tantôt  au  moyen  d'arêtes  de  pois- 
sons, de  parcelles  d'os,  de  dents  de  requins,  d'épines  végé- 
tales, ainsi  que  cela  se  pratique  en  Afrique  et  dans  le  Nou- 
veau Monde. 

Les  substances  colorantes  sont  très  nombreuses:  !e 
charbon  pulvérisé  et  mélangé  à  des  matières  grasses,  les 
sucs  rouges  de  certaines  plantes  et,  dans  les  temps  plus  ré- 
cents, l'encre  de  Chine,  l'indigo  et  les  diverses  couleurs  du 
commerce. 

<  D'Hervey  de  Saint-Denys.  Extrait  de  V Ethnographie  des  peuples 
étrangers,  de  l'écrivain  chinois  Ma-Touan-lin,  i.  ii,  p.  4or. 

*  Dr.  E.  Martin,  Histoire  des  Monstres,  Paris  1879,  p.  1  ti. 
^Zeilschriftjîir  Ethnologie,  1879,  p.  334. 

*  Histoire  médicale  du  tatouage^  Paris  1S69, 


,ï  Google 


556 

Quant  aux  dessins  et  ornements  fixés  ainsi  sur  la  peau, 
ils  représentent  tout  ce  que  la  fantaisie  hamaine  peut  ima- 
giner: lignes  parallèles,  arabesques,  vermiculations,  croix, 
ondulations  diverses,  portraits  grossiers  d'animaux,  de  plan- 
tes, dessins  erotiques,  etc. 

2°  TATOUAGE  PAR  INQSrOSS 

Ce  mode  de  tatouage  se  présente  sous  deux  variétés: 
l'une  consistant  dans  de  simples  scarifications  assez  analo- 
gues à  celles  qui  résultent  de  l'application  de  nos  ventouses 
(tatouage  par  mouchetures)  ;Pautre  comprend  une  série  d'in- 
cisions plus  étendues  dont  on  éloigne  soigneusement  les  bords, 
de  façon  que  la  cicatrisation  laisse  sur  les  téguments  des 
plaques  blanches  et  décolorées  comme  le  sont  les  entailles 
sur  un  jeune  arbre.  C'est  un  tatouage  par  cicatrice. 

Le  procédé  par  mouchetures  est  très  répandu  chez  les 
Nègres  qui  s'en  couvrent  le  visage  et  parfois  toute  la  surface 
du  corps.  Il  sert  chez  eux  à  différencier  les  tribus,  et  comme 
il  arrive  parfois  qu'un  nègre  émigré  d'une  tribu  dans  une 
autre,  on  peut  observer  sur  son  visage  deux  systèmes  de 
mouchetures  superposées.  11  est  également  en  usage  sur  cer- 
tains points  du  continent  asiatique  (Laos)  et  dans  la  Matai- 
sie  (Mlndanao). 

Le  procédé  par  larges  incisions  est  particulier  à  la  Mé- 
lanésie.  Quelques  historiens  rapportent  aussi  qu'il  était  en 
usage  chez  certains  peuples  qui  envahirent  l'Europe.  C'est 
ainsi  que,  d'après  Ammien  Marceliln  ',  les  cavaliers  d'Attila 
avaient  le  visage  couvert  de  cicatrices. 

'  Ciié  par  Lagneau,  Anthropologie  de  la  France,  Dictionnaire  En- 
(prclopédi^,  article  France. 


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EL 

3"  TATOUAGE  PAR  ULCÉRATION  OU  BRULURE 

Ce  procédé,  qui  est  le  plus  barbare  et  le  plus  doulou- 
reux de  tous,  consiste  tantôt  à  irriter,  à  ulcérer  une  incision 
préalable  en  appliquant  à  sa  surface  des  sucs  caustiques  de 
certaines  plantes,  tantôt  à  pratiquer  de  véritables  brûlures 
à  la  manière  de  nos  anciens  moxas. 

Le  but  est  dans  ce  dernier  mode,  d'obtenir  une  végé- 
tation de  la  peau,  une  sorte  de  bourgeon  ou  de  champi- 
gnon, et  le  grand  art  consiste  à  les  disposer  en  une  série 
tantôt  graduée,  tantôt  de  volume  égal  dans  une  certaine  ré- 
gion du  corps;  le  plus  souvent  la  face. 

Parfois  encore  ce  résultat  est  obtenu  par  un  mécanisme 
de  torsion  de  la  peau  au  moyen  d'une  aiguille,  ainsi  que  le 
docteur  Tavano  l'a  rencontré  chez  quelques  peuplades  des 
côtés  d'Afrique*. 

Les  brûlures  s'obtiennent  par  l'application  sur  la  peau 
de  morceaux  de  charbon  inflammés,  ou,  comme  en  Nouvelle- 
Calédonie,  de  nervures  des  feuilles  du  cocotier  qu'on  appli- 
que suivant  certains  dessins,  qu'on  allume  sur  place  et  dont 
on  active  la  combustion  en  soufflant  avec  la  bouche.  Dès 
que  la  tendance  à  la  cicatrisation  se  manifeste,  on  arrache 
les  croûtes  qui  se  forment  sur  la  plaie,  on  en  irrite  la  sur- 
face et  il  se  produit  bientôt  des  boui^eonnements  dont  on 
favorise  le  développement  par  les  mêmes  moyens.  Ces  bour- 
geons sont  disposés  soit  en  groupe  soit  en  ligne  continue. 
Aussitôt  formés  au  gré  de  l'opérateur,  on  lave  à  l'eau  froide, 
et  ces  étranges  ornements  conservent  indéfiniment  leur  forme 
ainsi  que  la  couleur  blanchâtre  ordinaire  des  cicatrices. 

'  Bulletin  de  la  Société  d'Anthropologie,  1877,  p.  333. 


,ï  Google 


558 

Ce  sont  ces  bizarres  productions  qui  ornent  le  front  des 
Tasmaniens,  les  épaules  des  Australiens  et  qui  s'observent 
chez  les  Papous,  les  Néo-Guinéens.  En  Afrique  elles  se  trou- 
vent au  Soudan  d'après  Castelnau,  en  Mozambique  où  el- 
les affectent  la  forme  d'étoiles  et  chez  les  Zoulous  qui  se 
décorent  de  cette  manière  les  reins,  le  dos  et  les  cuisses. 


4"  TATOUAGE-SOUS-ÉPIDERMIQUE 

Il  consiste  à  passer  entre  l'épiderme  et  le  derme  des 
aiguilles  armées  d'un  fil  lequel  est  enduit  de  graisse  mélan- 
gée avec  de  la  suie  de  lampe  '. 

Ce  tatouage  est  plus  employé  chez  les  femmes  que  chez 
les  hommes  et  il  ne  s'applique  qu'au  visage,  aux  mains  et 
aux  pieds,  c'est-à-dire  aux  parties  découvertes.  Il  a  été  re- 
trouvé dernièrement  chez  les  Tchouktchis,  lors  de  l'expédi- 
tion du  professeur  Nordenskjôld.  Il  paraît  donc  spécial  et 
exclusif  aux  peuplades  qui  habitent  le  voisinage  des  régions 
polaires. 

5"  TATOUAGE   MIXTE 

Enfin  sous  le  nom  de  tatouages  mixtes,  nous  compre- 
nons les  mélanges  sur  un  même  groupe  ethnique  de  plusieurs 
des  tatouages  précédents.  Ainsi  en  Nouvelle-Zélande  et  chez 
beaucoup  de  tribus  nègres,  on  rencontre  à  la  fols  la  prati- 
que par  incisions  qui  donne  les  cicatrices  blanchâtres  et  celle 
des  piqûres  qui  viennent  compléter  autour  des  points  înci- 

'  Paw,  Recherches  sur  les  Américains,  1. 1,  p.  263. 


,ï  Google 


659^ 

ses  un  système  complexe  d'ornementation.  On  observe  aussi 
sur  divers  points  de  l'Europe  un  autre  mélange  du  tatouage 
par  simple  piqûre  avec  le  procédé  sous  éptdermique.  C'est  le 
cas,  en  particulier,  pour  l'Italie. 

Si  maintenant  nous  tentons  de  résumer,  au  point  de 
vue  de  la  répartition  géographique,  ces  notions  générales  sur 
le  tatouage,  nous  arrivons  aux  résultats  suivants: 

1° Tatouage  par  piqîàres:  LaPoIynéste,c'est-à-dire 
tous  les  archipels  à  l'exception  de  la  Nouvelle-Zélande.  Les 
îles  Marquises,  excepté  les  îles  de  Râpa  et  quelques  au- 
tres du  groupe  Pomotou;  l'île  de  Pâques,  la  Micronésie.  La 
Nouvelle-Guinée;  le  groupe  Papou.  A  Bornéo  le  groupe  des 
Dayaks. 

En  Amérique  méridionale:  les  Charmas,  les  tribus  du 
Grand  Chaco;  au  Brésil  les  Guaranis;  les  Pampéens  et  les 
Patagons. 

En  Amérique  du  Nord:  les  Peaux-Rouges. 

En  Afrique:  les  Kabyles,  les  Arabes,  les  Egyptiens;  les 
Niam-Niam,  les  Sénégambiens  et  les  peuplades  des  rives  du 
Sénégal. 

EnAsie:lesSeng-li  de  l'île  de  Haï-nam;  lesChin-Ham, 
anciens  peuples  de  la  Corée;  les  Baitos  et  les  Ouen<hin  du 
Japon,  des  îles  Kouriles  et  Aléoutiennes;  les  habitants  de 
Formose;  les  anciens  Annamites;  les  Ouen-mien-po,  peuple 
barbare  du  sud-ouest  de  l'Empire  chinois. 

ir  incision  simple:  Mélanésie-Tri- 
Loango,  Makondé,  Mangandja,  Ma- 
ann);les  rives  orientale  et  méridionale 
'après  Cameron);  la  Guinée;  la  Nou- 

.rulcérationou  brûlure:  Tribus 
smanie  et  Australie;  Guyane;  les  Pa- 


i,moog\c 


56o 

pous,  Néo-Guinéens,  Mincopies  et  Negritos;  les  Alfourous; 
la  Nouvelle-Calédonie;  le  Soudan,  Mozambique  et  les  Zou- 
lous. 

4"  Tatouage  sous  épidermique:  Esquimaux, 
Tchouktchis,  Groënlandais;  une  partie  de  l'Europe  (Italie). 

5"  Tatouages  mistes:  a  mélange  des  procédés  par 
piqûres  et  sous  épidermiques;  Europe. 

b  Mélange  d'incisions  et  piqûres  combinées:  Nouvelle- 
Zéiaude;  beaucoup  de  tribus  nègres  d'Afrique. 

c  Mélange  du  tatouage  par  bourgeonnement  et  par  pi- 
qûre. Ce  dernier  système  se  surajoutant  d'ailleurs  au  pre- 
mier et  variant  de  dessin  suivant  les  incidents  principaux 
de  ta  vie:  Iles  Marquises. 

II 

HntUatlons  fodnleB 

Les  mutilations  ethniques  qui  se  pratiquent  sur  la  face 
sont  très  diverses  et  portent  tantôt  sur  les  lèvres,  sur  le  nez 
sur  les  paupières  et  enfin  sur  l'oreille.  Nous  éliminons  tou- 
tefois de  cette  catégorie,  deux  classes  de  lésions  volontaires: 
les  tatouages  de  la  face  qui  appartiennent  à  la  catégorie  des 
mutilations  du  tégument  et  les  lésions  des  dents  qui  seront 
étudiées  dans  un  paragraphe  spécial. 


1°  MUTILATIONS  DES  LÈVRES 

Elles  consistent  dans  des  perforations  simples  ou  mul- 
tiples qui  traversent  de  part  en  part,  dans  le  sens  vertical, 
la  lèvre  inférieure  ou  la  supérieure. 


,ï  Google 


56i 

La  plaie  est  destinée  à  loger  après  sa  cicatrisation  un 
corps  étranger,  un  ornement  fait  de  matières  variées  :  tantôt 
c'est  une  sorte  de  clou  en  os  ou  en  métal  destiné  à  élar- 
gir progressivement  la  perforation  jusqu'à  ce  qu'elle  puisse 
contenir  l'objet  qu'on  veut  y  installer  définitivement:  les 
Kolochs,  voisins  de  la  Colombie,  etc.  Certaines  peuplades 
d'Esquimaux  du  Port-CIarence  où  les  a  rencontrés  le  profes- 
seur Nordenskjôld,  ont  l'habitude  de  loger  dans  cette  ou- 
verture une  grosse  perle  de  verre  bleu.  Ce  sont  encore  les 
Esquimaux  qui  se  perforent  les  Joues pouryinstaller un  bou- 
ton analogue  à  celui  de  nos  manchettes,  de  sorte  qu'au  mo- 
ment des  repas  une  partie  des  matières  et  des  liquides  s'écoule 
par  ces  ouvertures  et  tombent  sur  le  cou*. 

D'autres  fois  l'objet  enchâssé  dans  la  lèvre  a  la  forme 
d'un  disque  en  bois  ou  en  os  et  est  placé  suivant  son  grand 
diamètte  dans  la  fente  labiale.  Les  Botocudos  du  Brésil  doi- 
vent leur  nom  au  Botoque,  rondelle  de  bois  aplatie  assez  sem  - 
blable  à  une  grosse  pièce  de  nos  jeux  de  tric-trac,  ou  à  une 
bonde  de  tonneau;  son  diamètre  a  parfois  jusqu'à  6  centi- 
mètres'. 

Une  pratique  semblable  a  été  observée  par  Livingstonc 
chez  certaines  peuplades  nègres  d'Afrique,  les  Bongos  et  les 
Mangandjas,  seulement  la  mutilation  porte  sur  la  lèvre  supé- 
rieure, qui  après  avoir  été  perforée  verticalement  de  haut  en 
bas,  est  garnie  d'un  clou  d'abord  assez  fin  puis  remplacé  par 
une  série  de  grosseurs  variées,  jusqu'à  ce  que  la  perforation 
puisse  loger  un  volumineux  disque  de  bambou,  d'ivoire  ou 
de  métal,  le  pelélé.  Les  Mangandjas  sont  d'ailleurs  cxtrcme- 

*  Sur  les  Esquimaux  d'Asie  m  Bulletin  de  la  Société  d'Anthropnlopie, 
1877,  p.  598. 
*Voir  Rey  et  Hamy,  Bulletin  de  la  Société  d'Anthrapolo/^îe,  ifijn,  f>. 

39Î. 

39. 


„Google 


56a 

ment  coquets  et  ils  couvrent  en  outre  leurs  bras  et  leurs 
jambes  de  bracelets  et  d'anneaux  de  toute  espèce  dont  l'en- 
semble acquiert  un  poids  considérable. 

Parfois,  la  perforation  de  la  lèvre  au  lieu  d'occuper  le 
centre  se  pratique  sous  forme  de  petits  trous  siégeant  sur 
les  cotés  au  voisinage  des  commissures.  Par  ces  trous,  les 
nègres  d'Afrique  s'introduisent  des  chaînettes  auxquelles 
pendent  des  breloques  en  nombre  indéfini,  en  ivoire,  en 
verre  ou  en  métal.  On  en  voit  de  curieux  exemples  dans 
la  collection  de  Mr.  Pinarl. 

Enfin,  il  existe  une  autre  mutilation  de  la  lèvre  qui  con- 
siste à  obtenir  au  moyen  de  piqûres  répétées  avec  l'épine 
du  gommier  un  tel  gonflement  qu'elle  prend  lourdement  de- 
vant la  face.  Cette  praitique  est  commune  aux  femmes  du 


Des  mutilations  des  lèvres,  nous  pouvons  rapprocher 
celles  que  les  faquirs  a'inâigent  en  se  perforant  la  langue  ou 
en  se  coupant  les  paupières  en  manière  de  mortification. 


a"  MUTILATION  DU  NEZ 

Les  peuples  qui  se  perforaient  les  lèvres,  devaient  avoir 
l'idée  de  se  mutiler  le  nez,  soit  la  cloison,  soit  les  ailes  dont 
la  forme  invitait  sans  doute  à  des  perforations  nouvelles. 
C'est  ainsi  que  les  indigènes  de  la  Nouvelle-Zélande,  de  la 
Nouvelle-Guinée,  de  l'Australie,  de  l'Ile  Saint-Michel  au  dé- 
troit de  Behring,  s'introduisent  au  travers  du  visage,  dans 
la  cloison  du  nez,  une  barre  de  bois  ou  d'os,  que  nos  ma- 
telots appelaient  plaisamment  la  vergue  de  beaupré. 

C'est  par  cette  même  ouverture  que  d'autres  peupla- 
des s'introduisent  des  anneaux  que  portent  particuEèrement 


,ï  Google 


563 

les  femmes.  Les  Péruviennes  s'ornaient  ainsi  de  cercles  de 
volume  et  de  valeur  proportionnels  à  la  fortune  de  leurs 
maris.  De  même  les  Hindous  et  les  Arabes.  Les  Caraites 
et  les  Mexicains  substituaient  à  Panneau  des  perles  de  verre 
ou  de  métal.  Enfin  quelques  tribus  de  la  Nouvelle-Zélande 
pratiquent  la  perforation  du  nez  pour  y  introduire  une  plu- 
me qui  s'étend  de  chaque  côté  sur  les  joues. 


3°  MUTILATION  DES  OREILLES 

L'oreille  est  peut-être  la  partie  du  visage  qui  se  prête 
le  mieux  aux  mutilations.  Car  des  peuples  les  plus  civilisés 
aux  plus  sauvages  la  perforation  du  lobule  chez  l'homme 
mais  surtout  chez  la  femme  est  en  usage  de  temps  immé- 
morial. Toutefois  cette  perforation,  qui  chez  nous  se  borne 
à  recevoir  un  anneau  fin  et  léger,  prend  chez  certaines  peu- 
plades des  proportions  inouies;  ainsi:  les  anciens  Péruviens 
obtenaient  peu  à  peu  par  des  poids  de  plus  en  plus  lourds 
un  allongement  tel  du  lobule  que  celui-ci  tombait  littérale- 
ment sur  les  épaules.  Dans  ces  trous  on  introduisait  ensuite 
les  ornements  les  plus  divers:  barres  de  bois  ou  d'écaillés 
de  tortue,  rouleaux  de  feuilles  ou  d'étoffes,  clous,  cordons 
auxquels  on  attachait  des  chapelets  de  dents  d'animaux  et 
jusqu'à  des  objets  de  voyage.  Certaines  négresses  d'Afrique, 
les  femmes  mongoles,  les  Dayaks  de  Bornéo,  les  peuplades 
barbares  du  Yun-nam  y  introduisaient  des  anneaux  de  mé- 
tal dont  le  poids  atteignait  parfois  i3o  grammes. 

Sous  l'influence  de  ces  diverses  manœuvres  le  lobule  de 
l'oreille,  outre  qu'il  s'allonge  démesurément,  parvient  à  pré- 
senter une  ouverture  dans  laquelle  on  pourrait  passer  le 
poing  fermé.  C'est  surtout  au  Zambèse  que  Livingstone 


V 


„Googl' 


f 


564 

mentionne  cette  mutilation  portée  à  son  plus  grand  excès 
et  a  laquelle  s'ajoute  une  accumulation  de  bracelets  et  d'an- 
neaux telle  aux  bras  et  aux  jambes  que  la  marche  devient 
très  difficile. 

Nous  devous  dire  toutefois  que  ces  diverses  mutilations 
faciales  ne  nous  ont  pas  semblé  assez  nettement  définies  et 
groupées  assez  régulièrement  par  race  pour  se  prêter  à  une 
représentation  par  cartes  de  répartition.  Il  n'en  est  pas  de 
môme  de  la  variété  qui  suit. 


m 

Uat;lIatloii8  oéphalIçiTies 

Les  mutilations  volontaires  qui  se  pratiquent  sur  la  tête 
comprennent  deux  divisions  fondamentales:  les  mutilations 
par  déformation^  les  mutilations  par  trépanation. 


l"  MtrrlLATION  PAR  DÉFORMATION 

Les  déformations  ethniques  du  crâne  dont  il  est  ques- 
tion ici  sont  exclusivement  celles  pratiquées  sur  l'homme  soit 
volontairement  soit  à  son  insu. 

Elles  diffèrent  essentiellement  des  déformations  posthu- 
mes et  pathologiques  qui  ne  rentrent  pas  dans  le  sujet  actuel. 

La  déformation  volontaire  est  une  mutilation  qui  s'ob- 
serve à  peu  près  sur  tous  les  points  du  globe.  Elle  s'effectue 
exclusivement  sur  les  enfants  depuis  l'âge  de  six  mois  à  peu 
près,  jusqu'à  l'âge  de  trois,  quatre  et  six  ans.  Elle  est  due, 


ly  Google 


565 

soit  à  l'emploi  d^appareils  spéciaux  fixés  sur  certains  points 
du  crâne,  soit  à  l'usage  de  pressions  directes  intentionnelle- 
ment dirigées  dans  ce  but,  soit  enfin  à  des  liens  ou  des  mo- 
des de  coiffures  particulières. 

Les  variétés  de  déformation  ont  été  diversement  clas- 
sées par  les  auteurs  :  on  sait  que  Gosse,  dans  .un  travail  resté 
célèbre  *,  en  a  décrit  seize  formes  principales,  division  que 
Mr.  Dalty  a  conservée*.  D'autre  part,  Mr.  Topinard^  les 
réduit  à  quatre  types  dans  lesquels  rentreraient  en  outre 
les  variétés  décrites  par  Morton,  Foville,  etc. 

Voici  cette  classification: 

i"  Déformation  occipitale  simple:  Turcs,  Maronites, 
Vancouver. 

2"  Déformation  frontale  simple  qui  se  subdivise  en: 

Frontale  simple  proprement  dite:  (Haute- Garonne),  en 
bregmatique  ou  annulaire  (Haute-Garonne,  Deux-Sèvres). 

Bilohée:  (Seine- Inférieure,  Deux-Sèvres,  Nouvelles-Hé- 
brides). 

3°  Déformation  fronto-occipîtale  et  variétés,  saillie  des 
côtés  et  asymétrie:  (Chinooks,  Cara'iTjes,  Ancon,  Sacrificios, 
Nahuas,  Natchez). 

4°  Déformation /ro«/o-5;'ttcyîjïo-occi/'iïc'  latérale.  Com- 
pression sur  les  côtés  et  symétrique:  (Aymaras  et  Macrocé- 
phales). 

Entre  ces  classifications,  celle  de  Gosse  peut  être  un 
peu  diffuse  et  celle  de  Topinard  un  peu  trop  réduite,  se  pla- 
cent diverses  tentatives  du  même  genre  que  nous  devons 
mentioner;  ce  sont: 


y 


'  Essai  sur  les  déformations  artificielles  du  crâne.  Paris,  i855. 

*  Dictionnaire  encyclopédique  des  sciences  médicales^  article  crine. 

'Revue  d'Anthropologie,  1879,  p.  Soi. 


r 


566 

Le  travail  de  Lagneau*,  remarquable  par  sa  grande 
érudition  et  celui  de  M.  de  Lenhossék  de  Budapesth*.  En- 
fin celui  de  M,  Lunïer*.  C'est  cette  dernière  classification 
que  nous  avons  cru  devoir  adopter  ici  en  raison  de  la  pré- 
cision des  déterminations  et  de  la  métliode  rigoureuse  qui 
la  caractérisent. 


'  Des  déformations  cépkaliques  en  France  in  Ga^.  hebi.  de  Médec. 
et  de  Chir.,  1879.  n*  5  et  6. 

'  Des  di/ormaiions  artificielles  du  crâne  en  gênerai  etc.,  ïn  4*.  Bu- 
dapest, 1878. 

'  Dictionnaire  de  Médecine  et  de  Chir.  pratiq.,  Baîlliëre,  article 
crâne  (défonnalion  du).  1879. 


,ï  Google 


567 


LIEUX 

TYPIS 

CAMCTÈRIS 

MOYENS  EMPLOYÉS 

d'observa- 

1" 

Front  aplati  de  haut 

Compresses,   ban- 

Ancîen con- 

Défor- 

en bas  et  d'avant  en 

deaux  ou  serre-têtes 

tinent.  Deux- 

mation 

arrière;  tantôt  os  fron- 

appliqués sur  le  front 

Sèvres,    Car- 

frontale 

tal  seul  déprimé  dans 

et  maintenus  par  des 

cassone.Nar- 

sa  totalité,  comme  je 

lacs  qui  passent  sur 

bonne,    Cas- 

l'ai observé  dans  les 

ou  derrière  le  pavil- 

tres et  envi- 

Deux-Sèvres,   et    se 

lon  de  l'oreille  et  sous 

rons    de    la 

tenninant  en  haut  et 

ta  nuque. 

Montagne 

en    arrière    par    un 

Notre;  Haute 

bourrelet  transversal; 

Garonne. 

tantôt  la  dépression 

s'étend  aux  angles  an- 

térieurs et  supérieurs 

des    pariétaux;    elle 

est  pratiquée  sur  les 

deux  sexes. 

2» 

Aplatissementdela 

Tantôt       pression 

Allemagne 

Défor- 

partie  inférieure  ou 

non   calculée  de  la 

centrale;  Taï- 

mation 

supérieure  de  l'occi- 

planchette qui  forme 

ti   (les  hom- 

occipi- 

pital, soit  des  deux 

le  fond  du  berceau; 

mes      seule- 

tale 

Côtés  à  la  fois,  soit 

tantôt       application 

ment);  îles  de 

d'un  seul  c6té;refou- 

systématique     d'une 

Nicobar,    de 

ement  de  l'encéphale 

compresse  sur  le  der- 

Sumatra    et 

en  avant;  front  rele- 

rière de  la  tête. 

de  Java;  Yg- 

vé,  occiput  se  rappro- 

neris d'Haïti; 

chant  plus  ou  moins 

caste  des  In- 

de  la  verticale;  de  là 

cas,  côtes  du 

deux  variétés  obser- 

Pérou. 

vées      généralement 

chez  les  individus  des 

deux  sexes. 

„Google 


TYPBS 

CARACTÈRIS 

MOYBNs  oinjovis 

d'observa- 

TIOH 

5- 

Aplatissement     si- 

Planchettes,   terre 

Tribus  des 

Défor- 

multané du  front  et 

glaise,  sacs  de  sable 

Natchez      et 

mation 

de    l'occiput,    tantôt 

OU  fortes  compresses 

des  Chactaws 

fronto- 

également  tantôt  iné- 

maintenues    solide- 

dans l'Améri- 

occipi- 

galement:    dans    ce 

ment  et  avec  une  éga- 

que duNOTd; 

tale 

dernier  cas,  la  pres- 

le force  sur  le  front 

des  Caraguas 

sion  porte  surtout  sur 

et     l'occiput;     quel- 

et des  Conni- 

le  frontal  qui  se  trou- 

quefois simple  pres- 

vos   au    Pé- 

ve alors  fortement  re- 

sion des  mains  (tête 

rou;  des  Ocna- 

jeté  enarrière  et  for- 

cunéiforme relevée). 

guas,  au  Bré- 

me  même  parfois  un 

L'enfant  étant  cou- 

sU; les  Tai- 

bourrelet  transversal 

ché  sur  la  planchene 

tiens. 

en  avant  de  ta  suture 

qui  forme  le  berceau, 

CÔle  N.-0. 

coronale:    cette    dé- 

on lui  en  applique  sur 

de     l'Améri- 

formation n'était  guè- 

le front  une  seconde 

que  du  Nord, 

re  pratiquée  que  sur 

phis  petite  que  l'on 

les  Covalilsk, 

les  enfants  mâles. 

fixe  sur  la  première 

les  Wagsaws, 

avec  des  lacs,  et  cela 

les  Kataubas, 

généralement  jusqu'à 

les  Attacapas; 

l'âge  de  trois  ans;  ou 

les   Cara'ibe» 

bien  encore  (Antilles) 

des  Antilles. 

l'enfant  étant  couché 

en  travers  sur  les  ge- 

nouxdelamère.cellc- 

ci  pose  sa  main  droite 

sur  la  tête  de  l'enfant, 

son    coude    gauche 

sur  sa  main,   appuie 

sa  tête  sur  la    main 

droite  et  dort   dans 

cette    position   (tête 

cunéiforme  couchée). 

„Google 


1569 


naso- 

pari  éta- 
le ou 

mongo* 
loïde 


Aplatissement  des 
os  du  nez  et  dépres- 
sion oblique  de  haut 
en  bas  et  de  dedans 
en  dehors  des  parié- 
taux et  de  la  partie 
supérieure  du  frontal; 
résultent  l'écar- 

mt  et  l 'obliquité 
des  orbites,  l'élargis- 

:nt    de    l'arcade 
zygomalique,  ta   dé- 
viation en  avant 
maxillaire    supérii 
et  enfin  le  développe- 

t  exagéré  de  la 
partie    inférieure 
postérieure  du  crâne 

i  retrécissemeni 
de  la  partie  supérieure 
et  antérieure.  Cette 
déformation  n'étût 
pratiquée  que  sur  les 
enfants  mâles. 


UOVENS  EMPLOYÉS 


Pétrissage  prolon- 
gé et  application  de 
bandes  de  linge  for- 
tement serrées  sur  le 
nez  et  les  parties  an- 
téro-latérales  et  supé- 
rieures du  criine. 


Les  anci. 
Huns,  des 
virons 
Caucase; 
Kirghis 
Turkestan; 
les  Caraïbes 
de    l'Oréno- 


,ï  Google 


570 


LICUI 

TYPM 

CARACTÈRES 

MOYENS  XHPLOTK 

D 'observa  • 

;• 

Aplatissement  laté- 

Pétrissage avec  les 

Macrocé- 

Défor- 

ral  du  crâne,  soit  en 

mains  ei  application 

phales  décrits 

maiion 

avant  soit  en  arrière, 

de  bandages  et  d'ap- 

par     Hippo- 

latérale 

soii  même  sur  toute 

pareils  appropriés. 

crate;Abases 

ou  lem- 

la  longueur  du  crâne 

du  N.-O.  du 

poro- 

et  cela  obliquement 

Caucase; 

pariétale 

de  bas  en  haut  et  de 

quelques  tri- 

haut en  bas;  ce  qui 

bus  arabes  du 

produit  la  saillie  tan- 

nord de  l'Afri- 

tôt du  front  et  de  l'oc- 

que et  de  la 

ciput  (macrocéphales 

Mauritanie; 

d-Hippocrate)  tantôt 

les     anciens 

de  l'un  ou  de  l'autre 

Belges,    Fla- 

seulement, tantôt  en- 

mands, Pari- 

fin  le  rétrécissement 

uensetHam- 

en  arête  de  la  partie 

bourgeois. 

supérieure  du  crâne 

et  l'élargissement  de 

la  base.  Cette  défor- 

mation n'était  guère 

pratiquée  que  sur  les 

enfants  mâles. 

„Google 


571 


TïPK 

CARACTÈRES 

UOYZHS  EHFLOVéS 

UKUX 

d'obsbrva- 

TION 

6- 

Aplatissement    du 

Compression     du 

Les  anciens 

Défor- 

front  du  haut  en  bas 

Aymaras   du 

maiion 

rétrécissement       du 

et  d'avant  en  arrière. 

plateau     des 

fronto- 

crâne  dans  son  em- 

à  l'aide  d'une  com- 

Andes, en  Bo- 

sinci- 

sembie;       bourrelet 

presse  médiane  et  de 

lirie. 

pito- pa- 

transversal formé  par 

deux  compresses  la- 

riétale 

le  rebord  postérieur 

térales      maintenues 

ou  têie 

du  frontal  dont  la  sur- 

par  une  large  bande 

symé- 

fece est  plane  et  mê- 

faisant plusieurs  fois 

trique 

me  légèrement  con- 

le tour  de  la  tête  (tite 

allon- 

cave BU  centre  ou  il 

allongée  en  cylindre). 

gée. 

prése  nte  deux  dépres- 

Même  procédé  dif- 

Religieux 

aons  latérales  super- 

mendiants en 

ficielles,  avec  des  or- 

le mode  d'application 

Chine. 

bites  dirigés  obUque- 

de  la  bande  à  la  par- 

ment en  haut;  aug- 

tie postérieure  de  la 

mentation  considéra- 

tête (allongée  en  cô- 

ble du  diamètre  anié- 

ne). 

ro-postérieur  et  dimi- 

nution du  diamètre  in- 

terpariéial,  quelque- 

fois au  lieu  de  la  forme 

longée  en  cylindre)  la 

tête  affecte  celle  d'un 

cône  (tête  allongée  en 

cône)  cene  déforma- 

tion était  sunout,  si- 

non uniquement,  pra- 

tiquée sur  les  enfants 

mâles. 

„Google 


572 


LIEUX 

TYPES 

CARACTÈRES 

MOYENS  XUPLOVéS 

D 'observa- 
tion 

T 

Front  peu  étendu, 

Procédés  inconnus 

Les  Totona- 

Défor- 

mais relevé,  se  termi- 

mais faciles  à  conce- 

ques de  nie 

mation 

nant  en  haut  par  une 

voir. 

de  LosSacri- 

fronto- 

saillie      transversale 

ficios  dans  le 

sinci- 

obtuse. En  arrière.sur 

golfe  du  Me- 

piio-oc- 

la  ligne  médiane,  lar- 

xique. 

cipitale 

ge       gouttière      qui 

ou  têie 

s'étend  du  trou  occi- 

trilobée 

pital  au  bourrelet  for- 
mé par  le  coronal,  se 

bifurque  et  descend 

que   côté  jusqu'aux 
fosses  temporales,  où 
eUe  se  perd.  SaiUie 
considérable  des  bos- 
ses pariétales.  Cette 
déformation  n'a  été 
observée  que  chez  les 
hommes. 

%' 

Aplatissement    si- 

Procédés inconnus. 

Indiens 

Défor- 

multané  du  front,  du 

des  rives  du 

mation 

sinciput,  de  l'occiput 

Maragnon 

qua- 

ei  des  parties  latéra- 

(Equateur). 

drangu- 

les  de  la  tête. 

Quelques  tri- 

laire 

bus  des    an- 
ciens      Ger- 
mains et  des 

Kalmoucks. 

573 


Uie  presque  glo- 
x;  aucune  saillie 


li  de 


locciput 

otubéranc 
re;  front  large, 
fUs  occipitaux 
Is  et  arqués,  troi: 
ital  placé  tout' 

malion  était  suT' 
pratiquée  sur  le: 


Forte  compression 
du  crâne  par  une  ban- 
de faisant  le  tour  de 
la  tête,  du  front  à 
l'occiput. 


MOYENS  EMPLOYÉS 


Les  Turcs 
osmanlis;  les 
Arabes  an- 
ciens;  les  In- 
diens, tête  de 
boule  à  l'ouest 
de  la  baie  de 
Hudson,  au 
Canada. 


0  ObSEKVA- 
TION 


,ï  Google 


574 


LIEUX 

TYPES 

CARACTÈRES 

MOYENS  EUrLOYÉS 

D 'observa- 
non 

10' 

Dépresjion    circu- 

Application sur  la 

La  Seine-In- 

Défor- 

laire qui  de  la  partie 

tête  de  l'enfant  nou- 

férieure, et  la 

mation 

supérieure  du  front, 

veau-né  d'un  serre- 

partie    méri- 

aonu- 

où  elle  offre  sa  plus 

tête  ou  bandeau  qui, 

dionale    des 

laire 

grande  largeur,  se  di- 

panant de  la  fonta- 

Deux-Sèvres; 

rige  obliquement  en 

nelle   antérieure,  va 

la  Paitgonie- 

bas  et  en  arrière,  pas- 

se   au-dessus  de  la 

l'occiput   et   revient 

conque  de  l'oreille  et 

s'attacher  sur  le  de- 

va gagner  la  nuque. 

vant  de  la  tête.  Ce 

Augmenution    de 

bandeau  qui  est  porté 

la  courbure  antéro- 

beaucoup  plus  long- 

poitérieure du  fron- 

temps par  les  Biles 

tal  et  de  l'occipital  et 

que  par  les  garçons, 

est  souvent  remplacé, 

vers  le  troisième  ou 

du  crâne  en  arrière. 

quatrième  mois,  par 

Cette  déformation  est 

une  espèce  de  calotte 

généralement      plus 

en  carton. 

marquée     chez    les 

femmes,  quand  la  dé- 

formation   est    très 

prononcée,  la  tête  est 

pour  ainw  dire  bilo- 

bée. 

„Google 


Quoiqu'il  en  soit  de  ces  diverses  classifications  dans  le 
détail  et  là  discussion  desquelles  nous  ne  saurions  entrer, 
notre  intention  actuelle  doit  se  borner  à  donner  d'une  façon 
g<inérale  les  points  de  répartition  géographique. 

En  les  localisant  ainsi  sur  une  carte,  on  constate  d'abord 
deux  faits:  le  premier,  c'est  que  la  différence  des  races  n'im- 
plique par  nécessairement  une  différence  correspondante 
dans  les  modes  de  déformations  employés,  et  le  second  c'est 
qu'à  des  groupes  ethniques  similaires  peuvent  appartenir  des 
pratiques  dissemblables. 

Envisageons  d'abord  l'Amérique.  Pour  l'Amérique  du 
Nord,  c'est  presque  exclusivement  la  côte  occidentale  qui 
fournit  les  exemples  de  déformation  céphalique,  et  le  pro- 
cédé employé  consiste  dans  des  machines  spéciales  compo- 
sées de  planches  articulées  entre  lesquelles  la  tête  de  l'en- 
fant subit  une  pression  continue.  L'appareil  a  été  décrit  par 
Gosse  *. 

En  suivant  cette  côte,  du  nord  au  sud,  on  trouve  d'abord 
l'archipel  des  Aléoutes,  dans  lesquelles  la  déformation  cou- 
chée est  du  même  type  que  celle  des  Aymaras.  Plus  bas, 
l'archipel  Kodiak  est  un  centre  de  déformation  par  aplatis- 
sement ^nnV/o-occ/^iWi  à  Barkiay  Sound,  c'est  la  déforma- 
tion couchée  allongée  et  pointue  chez  les  Shimmesyans, 
couchée  simple  chez  les  Kos-Kïemos.  Le  muséum  d'histoire 
naturelle  de  Paris  en  possède  deux  exemples  caractéristi- 
ques. 

A  Vancouver,  d'après  Morton',  on  observe  à  la  fois 
trois  types  ethniques,  trois  groupes  de  langues  et  trois  for- 
mes de  mutilations  céphaliqucs: 

'  Loc.  cil.  PI.  S,  lig.  7  et  8. 

*  Crania  americana.  Philaiielphii;,  iS2<i. 


,ï  Google 


M 

Au  nord,  celle  des  Kos-Ksemos;  à  Pouest,  la  déforma- 
lion  couchée  et  étalée;  au  sud  celle  de  Koowitch. 

Au  cap  Flattery  c^est  la  forme  aplatie  ainsi  que  le  Mu- 
séum en  possède  plusieurs  types. 

Dans  la  Californie  du  Sud,  on  nV  signalé  aucune  dé- 
formation. 

Dans  la  Sonora,  on  trouve  la  déformation  verticale  des 
Natchez  '. 

Au  Mexique,  sur  les  points  anciennement  habités,  la  f<H'- 
me  observée  est  le  type  couché  et  étalé  dont  on  a  reconnu 
à  Durango  des  milliers  d'exemplaires.  Toutefois,  on  n'a  si- 
gnalé aucune  déformation  chez  les  Peaux-rouges  de  la  Prai- 
rie. 

Chez  les  Natchez  la  déformation  est  verticale. 

A  Sacrjficios  nous  rencontrons  dans  les  abondants  ^se- 
ments  de  cène  île,  qui  n'était  qu'un  lieu  de  sépulture,  une 
déformation  tout  à  fait  typique;  c'est  le  crâne  trilobé:  apla- 
tissement postérieur  sur  un  plan  ri^de  et  saillies  latérales 
doubles.  Elle  se  retrouve  sans  doute  avec  une  origine  corn- 
mune,  malgré  certaines  nuances,  aux  Carailies,  à  Cuba, 
Puerto-Rico,  Saint-Vincent  et  Haïti. 

Aux  Toltèques  font  suite  les  Nahuas  du  IVlexique  et 
les  Lacandons  du  Yucatan.  Deux  crânes  d'enfants  chinooks 
de  la  collection  du  Muséum  portent  cette  déformation  très 
évidente. 

Pour  l'Amérique  du  Sud,  nous  signalerons  d'abord  Bo- 
gota où  s'observe  la  déformation  toltèque,  puis  le  Pérou, 
où  la  déformation  dite  péruvienne  fronto-occtpi'tale  s'observe 
de  Guayaquil  à  Rica,  avec  le  crâne  bien  connu  d'Ancon  com- 
me type, 

'  Monon,  History  o/the  North  American  Indians.  Londres,  1775, 


,ï  Google 


^77 

Le  groupe  des  Aymaras,  déformation  par  compression 
latérale  et  symétrique,  termine  sur  la  côte  occidentale  cette 
série  de  déformations,  car  au-dessous  d'eux,  on  n'en  ob- 
serve plus  d'exemple  '. 

Enfin,  en  Patagonie  Retzius*  et  Moreno*  ont  signalé 
les  pratiques  de  déformation  crânienne  jusqu'au  détroit  de 
Magellan  et  elle  a  pour  caractère,  dans  cette  région,  la  dé- 
pression pariéto-occipitale. 

En  Afrique,  elle  n^a  été  rencontrée  sur  aucune  des  par- 
ties de  la  côte  occidentale  ou  dans  les  régions  explorées  du 
centre  qui  sont  si  riches  en  mutilations  ethniques  de  divers 
genres,  mais  elle  s'observe  au  nord  chez  certaines  popula- 
tions musulmanes.  C'est  le  type  turc  déjà  signalé  par  Ve- 
sale:  déformation  latérale  ou  temporo-pariétale.  Elle  s'étend 
de  Suez  vers  le  nord  et  se  propage  en  Algérie,  où  elle  est 
d'ailleurs  d'importation  turque  chez  les  mendiants  religieux 
et  les  tribus  arabes  en  contact  avec  les  Berbères.  Gosse 
l'a  également  signalé  chez  les  Kabyles  où  elle  s'effectue  par 
des  manœuvres  directes  et  manuelles;  on  la  retrouve  en 
Egypte,  en  Syrie  chez  les  Maronites  et  les  Druses;  son  ma- 
ximum d'intensité  est  dans  le  Louristan,  le  Daghestan,  le 
Turkestan  indépendant  au  sud  de  la  Caspienne.  On  l'observe 
encore  chez  les  Nogaïs  de  Constantinople  ainsi  que  l'atteste 
le  crâne  retrouvé  dans  un  cimetière  de  Scutari,  par  M. 
Wiesbach. 

Ce  même  type  turc  se  prolonge  encore  sur  certains  peu- 
ples de  la  Russie,  d'où  le  docteur  Pokrowski  en  avait  ras- 


'  Voir  A.  d'Orbigny.  Voyage  dans  l'Amérique  méridionale.  L'kom- 
e  américain.  Paris,  iSBç,  in.  4° 

*  Arch.  fur  Anat.  und  Physiot.  de  J.  Millier.  1848-49. 

'  Bulletin  de  la  Société  d'Anthropologie,  1880.  Séance  du  6  mai. 


,ïGeX)' 


r 


M 

semblé  de  nombreux  échantillons  à  l'exposition  anihropolo 
gîque  de  Moscou,  que  nous  visitâmes  en  1879. 

Eji  Asie  elle  s'observe  chez  les  Annamites  où,  d'après 
MoudiÈres  ',  elle  aurait  pour  caractère  la  déformation  trans- 
versale;  en  Birmanie,  où  elle  affecte  la  forme  occipitale  sim- 
ple. La  déformation  frontale  se  serait  retrouvée  chez  les  an- 
ciens peuples  de  la  Corée,  les  Chin-ham', 

En  Mélanésie,  sur  les  côtes  de  Bornéo,  à  Java,  à  Su- 
matra, où  les  auteurs  des  Cranta  Ethnica  la  considèrent 
comme  une  habitude  familière  aux  Négrito- Papous.  A  ces 
divisions  se  rattachent  quelques  populations  groupées  sui- 
vant une  ligne  ondulée  qui  partirait  des  Nouvelles-Hébri- 
des, remonterait  par  le  détroit  de  Torres  et  l'île  de  Tourde 
(buste  de  la  Société  d'Anthropologie),  et  çà  et  là  quelques 
points  de  la  Nouvelle-Guinée,  Papous,  Néo-Guinéens  d'après 
MM.  Virchow  et  Meyer  de  Dresde'  et  de  l'archipel  des 
Philippines. 

Au\  Nouvelles-Hébrides,  la  déformation  est  couchée 
simple  et  elle  serait,  d'après  Forster,  produite  par  un  lien, 
mais  il  existe  au  musée  de  la  Société  d'Anihropolo^e  et  au 
Htmteriau  Muséum,  h  Londres,  plusieurs  crânes  ofiraot  la 
déformation  occipitale  simple. 

Au  centre  du  continent  asiatique,  elle  n'aurait  été  si- 
gnalée, îi  notre  connaissance,  qu'en  Chine  où  elle  serait  une 
habitude  constante  chez  les  religieux  mendiants.  Elle  aurait 
la  forme  allongée  et  symétrique.  (Lunîer), 

En  Polynésie,  son  aire  géographique  est  très  variée: 

'  Butletin  de  la  Société  d'Anthropologie,  1874,  p.  1 18. 

'  Ma-touan-Iin,  Ethnographie  des  peuples  étrangers  de  la  Ot'it, 
{xuf  siècle).  Traduction  communiquée  par  le  marquis  dHerïey  àt 
Saint-Denys. 

»  Mitthiel  des  Kgl.  Zoo/.  Afusaum  jt/  Dresden,  1R75-7S.. 


,ï  Google 


2w 

on  n^en  a  signalé  aucun  exemple  à  la  Nouvelk-Zclande  nî 
en  Australie,  mais  aux  îles  Mariannes  et  Sandwich  elle  est 
manifeste.  A  Taïti  elle  est  double,  tantôt  fronlaie,  tantôt 
occipitale,  suivant  quVn  voulait  obtenir  une  exagération 
ou  un  affaiblissement  des  facultés  intellectuelles  ;  la  première 
étant  la  déformation  du  courage,  la  seconde  la  dcfomulion 
de  la  prudence. 

Enfin,  c'est  en  Europe  où  elle  présente  peut-être  le  plus 
de  variétés  et  où  du  moins  elle  a  été  le  mieux  étudiée. 

Au  Caucase  et  en  Crimée,  c'est  par  centaines  que  les 
crânes  déformés  du  type  macrocéphale  d'Hippocrate,  de  Xc- 
nophon  et  de  Strabon  ont  été  rencontrés  dans  les  patientes 
recherches  de  MM.  Sodiitz,  Scepura,  Bayertz  et  Smirnow- 

De  là,  la  trace  de  déformation  caucasîque  se  propage 
sur  le  Bas-Danube  et  sur  la  Tisza  où  M.  de  Lenhossék  en 
■a  recueilli  divers  exemples. 

Au  delà  de  ce  point  et  en  remontant  vers  le  nord  de 
l'Europe,  la  série  des  déformations  crâniennes  reste  inter- 
rompue; jusqu'à  présent  on  ne  les  a  pas  rencontrées  dans 
le  Jutland,  cette  Chersonèse  cimbrique  où  les  Cimmériens 
macrocéphales  ont  fait  cependant,  suivant  Worsaae,  une  si 
longue  station.  Mais  sur  le  Rhin,  un  crâne  déformé  a  été 
trouvé  auprès  de  Mayence  par  M.  Ecker;  un  autre  à  Co- 
logne par  M.  Schaaffhausen.  Trois  crânes  déformés  auraient 
aussi  été  trouvés,  d'après  M.  Topinard,  en  Autriche,  sur  un 
point  cependant  indéterminé.  En  Angleterre,  Barnard  Davis 
en  décrit  un  spécimen  trouvé  près  de  Salisbury. 

Un  crâne  trouvé  à  Padoue  par  M.  le  professeur  Andréa 
Gloria'  a  présenté  une  déformation  à  la  fois  relevée  et  an- 


■  Sopra  un  cranio  iejormato  scavalo  in  piajja  capitaneato  a  Pa- 
Jova.  1880. 


,ï  Google 


58o 

Ruiaire  du  type  macroctiphale,  ce  qui  tend  à  établir  que  les 
Cimmériens  dans  leur  marche  envahissante  vers  l'Est,  sont 
parvenus  jusqu'en  Italie  septentrionale.  Ils  auraient  aussi 
pénétré  en  Savoie,  ainsi  que  Taneste  le  crâne  trouvé  par 
Gosse  fits,  et  au  delà  du  lac  de  Genève.  (Crâne  de  Voiteur 
près  de  Lausanne). 

Nous  arrivon»  maintenant  à  la  France  où  les  pomts 
d'observation  de  déformation  céphalique  affectent  une  di- 
rection assez  nettement  déterminée. 

De  la  Belgique  cette  mutilation  passe  par  la  Seine-In- 
férieui-e,  FTle-de-France,  non  loin  de  la  Champagne^  pour 
se  diriger  vers  le  sud  en  coupant  la  Loire  pour  descendre 
vers  la  Garonne  jusqu'au  Limousin. 

Or  cette  direction  générale  est  précisément  celle  qui 
correspond  ft  la  marche  des  invasions  cîmmériennes  parties 
du  Pont-Euxin  et  si  bien  étudîcc  par  Amédée  Thierrj',  Henri 
Martin,  Lagneau,  etc. 

Dans  cette  énumération  de  points  où  ont  été  recueillis 
des  crânes  déformés,  il  faut  mentionner  les  Parisiens  qui 
présentent  à  eux  seuls  la  plus  grande  variété  de  déforma- 
tion, ainsi  qu'on  peut  s'en  convaincre  par  la  collection  du 
musée  de  la  Société  d'Anthropologie  de  Paris.  Mais  si  nous 
groupons  les  différents  ^sements  observés  en  France,  nous 
trouvons  que  les  formes  peuvent  se  résumer  en  quatre  ty'pes- 

i"  Déformation  frontale  simple.  Deux-Sèpres, 
Toulouse. 

2°  Frontale  et  relevée  par  derrière.  C'est  la 
déformation  toulousaine  par  excellence. 

3"  Annulaire  simple.  Très  répandue  sur  les  points 
observés  et  en  particulier  la  Seine-Inférieure. 

4"  Enfin  l'annulaire  bilobée.  Scine-Tnférieure  el 
DciiX'Scvrcs. 


,ï  Google 


58i 

Dans  le  Midi,  la  déformation  s^étend  jusqu^à  Cartha- 
gène  et  aux  Baléares, 

Dans  l'Est,  il  faut  ajouter  les  crânes  trouvés  dans  le 
Jura,  un  aux  environs  de  Lons-Ie-Saulnier,  Jeux  à  Corveis- 
siat. 

Enfin,  on  retrouve  la  déformation  crânienne  à  Saint- 
Gaudens,  et  à  Lozerres  (Seine-et-Oise).  Un  crâne  de  cette 
provenance,  donné  par  Barnard  Davîs  au  Muséum,  présente 
cette  mutilation. 

Tel  est  l'état  actuel  de  la  question  des  déformations 
crâniennes  en  France  où  elle  a  été  si  puissamment  éclairée 
par  tes  travaux  de  Lunier,  Foville,  Broca,  etc. 


2"   MUTILATION   PAR   TBEPANATION 

La  trépanation  du  crâne  consiste  à  pratiquer  à  ta  boîte 
crânienne  et  sur  un  point  variable  de  sa  surface,  une  ou- 
verture ordinairement  ronde  ou  elliptique. 

Le  but  de  cette  opération  ne  présente  aucune  analogie 
avec  celui  que  poursuivent  nos  chirurgiens  actuels.  Elle 
semble  avoir  pour  objet,  suivant  une  idée  superstitieuse  et 
mystique,  de  guérir  certaines  maladies  convulsives,  l'épUepsie 
ou  ï'éclampsie.  C'est  surtout  chez  les  enfants  qu'elle  était 
effectuée  et  l'état  cicatrisé  des  ouvertures  prouve  que  le  plus 
grand  nombre  des  sujets  survivaient  à  cette  mutilation. 

Elle  comprend  dans  le  temps,  deux  époques,  l'une  j7r^- 
historique  à  peu  prés  bornée,  d'après  les  documents  recueil- 
lis, à  notre  continent;  l'autre  actuelle  car  cette  pratique 
s'est  perpétuée  de  nos  jours  dans  certaines  régions  du  globe. 

Pour  le  groupe  préhistorique,  la  découverte  de  cette 
mutilation  est  due  à  un  médecin  de  !a  Lozère,  le  docteur 


.yCeX^t^lii 


Prunicres  (de  Marvcjols)  qui  dès  1873,  en  a  recudlii  à  lui 
seul  une  vingtaine  d'échantillons  dans  les  cavernes  de  ce 
département'. 

Depuis  lors,  elle  a  été  magistralement  étudiée  et  décrite 
par  Broca*  qui  n'a  laissé  subsister  aucun  doute  sur  les  ca- 
ractères de  cette  mutilation,  sur  son  mode  opératoire  et  sur 
son  but  probable. 

Aujourd'hui  le  nombre  des  crânes  trépanés  appartenant 
à  l'époque  néolithique  s'élève  à  40  ou  60  pièces  environ, 
rassemblées  par  divers  obser\'ateurs  qui,  à  rexen:^le  de  M. 
Prunières,  ont  heureusement  exploré  les  cavernes  et  les  dol- 
mens de  la  France  et  des  pays  voisins. 

Citons  par  exemple  le  crâne  trouvé  dans  un  dolmen  de 
Bougon  (Deux-Sèvres)  par  M  M.  Babert  de  Juillé  et  Sauzé*, 
celui  d'Enteroche  près  Angouléme,  (Charente)  par  MM. 
Chauvet  et  Gassies',  un  autre  dans  le  même  département 
près  Bouillac  par  M.  le  docteur  Lecler;  d'autres  découver- 
tes ont  été  faites  par  M  M.  Chaptain  et  Lartet  dans  la  grotte 
de  Sordes,  (Basses-Pyrénées^),  par  M.  Chouquet  à  Moret, 
(Seine-et-Marne^),  dans  la  Marne,  où  M.  Joseph  de  Baye 
en  a  rassemblé  cinq  exemples  des  plus  remarquables'. 

A  ces  pièces  il  faut  encore  ajouter  un  crâne  trouvé  dans 

'  Association  française  pour  l'avancement  des  sciences-  Lyon,  187Î, 
p.  704. 

»  Bulletin  de  la  Société  d'Anthropologie  de  Paris,  1874  ei  1876.— 
Revue  d' Anthropologie,  1877. 

'  Rapport  de  la  Commission  des  lumulus  de  Boujois,in8*,fiion,  iS-jb. 

*  Association  française  pour  l'avancement  des  sciences.  Nantes,  1875 
p.  854  «t  888. 

*  Revtie  d'Anthropologie,  1877,  P'  *'9' 

'  Bulletin  de  la  Société  d'Anthropologie,  1876,  p.  276. 
'  La  Trépanation  préhistorique.  Paris  1876,  gr.  /nS"— GroM«  elsi- 
pultures  de  la  vallée  du  Petit-Morin.  Tours,  iSjS. 


,ï  Google 


583 

Pyrénées  par  M.  Cazalis  de  Fondouce,  un  autre 
Seine,  un  autre  au  Puy-de-Dôme  et  étudié  par 
d  :  un  autre  encore  dans  ta  caverne  de  Maurennes. 
les-uns  de  ces  crânes  ne  présentent  pas  une  ou- 
iplète,  inais  seulement  un  simple  grattage  corn- 
ie  restée  inachevée;  telle  est  la  pièce  de  M.  Ca- 
ndouce. 

lors  de  la  France,  les  exemples  recueillis  de  tré- 
éhistorique,  appartiennent  à  divers  observateurs: 
Gardner  en  signale  plusieurs  faits  dans  une  ca- 
vallée  de  la  Saale,  aux  environs  de  Halle*.  Ces 
té  étudiés  par  M.  Virchow;  deux  autres  ont  été 
i  Prague  par  M.  Ingoald  Cludset*. 
es  temps  actuels  cette  pratique  s'est  perpétuée 
:  encore  de  nos  jours.  C'est  contre  les  attaques 
qu'elle  paraît  exclusivement  dirigée,  circonstance 
ine  grande  valeur  à  l'hypothèse  de  Broca  sur  le 
ration  préhistorique'. 

:n  Kabylie,  elle  a  été  observée  par  M.  H.  Lar- 
décrit  le  procédé  et  il  est  manifeste  que  chez  les 
bères,  elle  s'effectuait  de  la  même  manière.  Le 
.  Société  d'Anthropologie  de  Paris  possède  une 
aquelle  une  trépanation  incomplète  par  grattage 
ces  évidentes  de  cicatrisation.  C'est  sans  doute 
erbère  qu'il  convient  de  rattacher  une  pièce  trou- 
is  (Grande  Canarie)  par  le  docteur  Chil. 

GeseUschafi  fur  Anthropologie^  18  janvier  1879. 
de  la  Société  d'Anthropologie,  1877,  p.  10, 
Anthropologie,  1877,  et  Bulletin  de  la  Société  d'Anthropo- 
i5. 

ir  la  trépanation  chej  les  Arabes  in  Bulletin  de  l'Acad. 
866-67  I-  ""'"'  p.  87- 


DigitizsdbyGe^OL^fc 


r 


584 
D'autre  part  MM.  Feuvrier  et  Boulongne  ont  retrouvé 
la  même  pratique  au  Monténégro'. 

Si  nous  passons  au  Nouveau  Monde,  il  nous  faut  signa- 
ler la  trépanation  chez  les  Incas  où  l'ouverture  pratiquée 
au  crâne  était  quadrangulaire  et  non  circulaire  comme  en 
France'. 

En  Polynésie  orientale,  aux  îles  Pomotou,  elle  s'effectue 
:  comme  traitement  ordinaire  de  l'épilepsie,  nouvelle 
nation  du  but  invariable  de  cette  opération  que  con- 
:  d'ailleurs  dès  le  commencement  du  xvii*  siècle'  Jehan 
pour  faire  sortir  du  crâne  le  malin  esprit  et  les  dé- 

jifin  à  Taïti,  si  l'on  s'en  rapporte  à  Lesson  *  la  iré- 

on  du  crâne  est  une  pratique  qui  est  à  la  fois  préhis- 

e  et  actuelle  et  est  appliquée  à  la  même  idée  théra- 

ue. 

n  Asie,  aucune  recherche  n'est  venue  jusqu'à  présent 

éler  l'existence. 


IV 

Untilation  du  trono  et  des  membres 

n  dehors  des  tatouages  qui  se  rencontrent  fréquem- 
>ur  la  poitrine,  les  seins  et  tes  épaules,  les  mutilations 
me  sont  assez  rares  chez  tes  peuples  sauvages  par 

e  Monténégro  et  ses  habitants,  Paris  1844,  p.  44. 
oir  Sqaier,  Journal  ofthe  Antkropological  Instilute  0/  New  Yorh, 
7i- 

railéete  l'Épilepsie,  i6o3.  Paris,  liv.  1,  S  vu. 
iilletin  de  la  Société  ttAnlhn^ogU,  iS-jS,  p-  6iq. 


^^-^^K„„z.db,  Google 


585 

e  raison  que,  ne  portant  que  peu  ou  pas  de 
nVnt  pas  Pocca.sion  de  déformer  la  taille  ainsi 
iratique  universellement  dans  les  nations  les 

et  chez  les  dernières,  on  constate  l'abandon 
let  de  toutes  ces  mutilations  barbares  et  dou- 
s'infligent  les  peuples  primitifs,  on  est  forcé 
;  que  par  une  étrange  compensation  les  mu- 
taille  se  sont  indéfiniment  perpétuées, 
es  caprices  de  la  mode,  nos  femmes  s'impo- 
mations  les  plus  variées,  les  plus  extrêmes  et 
mbiables  entre  elles.  Tantôt  le  vêtement  fait 
taille  au-dessous  des  ses  bornes  naturelles 
;  dans  cette  direction  qu'à  la  limite  încom- 
aassin;  tantôt  elle  remonte  par  un  lien  circu- 
isse  supérieurement  les  seins  jusqu'au  niveau 
et  des  épaules.  Parfois  même  les  femmes  ont 
:  prétention  d'établir  la  taille  au-dessus  même 
niveau  des  aisselles,  ainsi  que  cela  s'observe 
peuples  du  nord  de  l'Europe. 
Tendra  toutefois  que  nous  ne  puissions  nous 
r  ces  variétés  de  déformations,  ce  qui  nous 
tracer  l'histoire  ethnographique  du  corset  chez 
i  mutilations  ont  été  du  reste  longuement  étu- 
s  points  de  vue  des  complications  et  des  dé- 
santé qu'elles  occasionnent.  C'est  là  leur  as- 
intéressant  et  elles  doivent  être  conséquem- 
es  bien  plus  sous  le  rapport  de  l'hygiène  qu'au 
;thnique. 

mutilations  plus  sérieuses  se  rencontrent  d'aïl- 
nc:  on  connaît  déjà  la  légende  des  Amazones 
;nt  le  sein  droit  afin  de  tirer  plus  aisément 


,ï  Google 


386 

de  l'arc.  Nous  retrouverons  cette  mutilation  sous  le  ca- 
ractère religieux  chez  les  femmes  Skoptsy,  de  Russie,  qui 
s'amputent  les  deux  seins,  réalisant  ainsi  avec  une  autre  mu- 
tilation non  moins  barbare  une  sorte  de  suicide  de  la  ma- 
ternité. 

Telles  sont  du  reste  les  seules  mutilations  spéciales  sur 
te  tronc, 

Celles  des  membres  sont  plus  répandues: 

Pour  les  membres  supérieurs,  on  a  depuis  fort  long- 
temps signalé  chez  beaucoup  de  peuples  une  pratique  qui 
consiste  à  s'amputer  une  phalange  à  la  mort  d'un  parent  et 
ici  se  rencontre  précisément  cette  particularité  curieuse  que 
le  même  mode  de  mutilation  se  retrouve  chez  les  peuples  les 
plus  distants  l'un  de  l'autre,  et  les  mieux  séparés  géographi- 
quement.  Ainsi  les  anciennes  populations  du  Darien  *  s'infli- 
geaient constamment  cette  mutilation  que  se  retrouve  iden- 
tique chez  les  Indiens  de  l'île  d'Amsterdam  d'après  Cook, 
Chez  les  Cafres  et  les  Hottentots  suivant  La  Loubère*,  dans 
les  îles  Wallis  de  l'archipel  des  Amis  d'après  Bataillon*  et 
chez  les  Néo -Calédoniens  ou  Penard  l'a  rencontrée*. 

Cette  mutUation  consiste  d'ailleurs  dans  une  simple 
amputation  de  la  phalange  en  signe  de  deuil  et  qui  se  con- 
tinue sur  les  autres  phalanges  à  la  mort  de  chaque  parent  : 
de  telle  sorte  que  chez  certains  individus  qui  ont  perdu  toute 
leur  famille  il  ne  reste  guère  que  deux  ou  trois  doigts  à 
chaque  main. 

'  Paw,  Recherches  philosophiques  sur  les  Américains.  Berlin,  1870, 

t.  II,  p.  225. 

'  Voyage  de  Siam,  1690, 1. 11,  p.  1C7. 

^  'Tifvue  d'Orient,  1844,  t.  m,  p.  1. 

•  Gabelle  Médicale  de  Paris,  i856,  p.  171. 


—         uimtizpribïv-ioogle 


587 
les  mutilations  de  la  main,  il  faut  parler  de  celles 

égard,  nous  rappellerons  d'abord  cette  pratique 
es  Panhout-t-choux,  indigènes  de  la  partie  aus- 
mpire  chinois,  qui  brûlent  avec  un  fer  rouge  la 
pieds  des  jeunes  garçons,  afin  de  les  habituer  à 
r  les  épines  et  les  cailloux*. 
il  nous  reste  à  mentionner  la  mutilation  spéciale 
les  femmes  chinoises. 

i  été  dit  sur  la  mutilation  des  pieds  de  la  femme 
nous  ne  saurions  rien  ajouter  aux  renseignements 
jumis  par  Morache',  Fuzier',  E.  Manin*.  Le 
iployé,  les  désordres  et  complications  qui  en  ré- 
été  soigneusement  décrits.  Quant  à  l'origine  de 
me  elle  a  été  diversement  interprétée;  mais  voici 
mseignement  historique  emprunté  à  une  source 
.ée  (Annales  de  l'Empire  Chinois''.} 
lit,  qu'en  l'année  583  de  notre  ère,  le  dernier 
le  la  dynastie  des  Tchin  fit  rechercher  pour  son 
eunes  filles  ayant  les  plus  petits  pieds;  à  panir 
oque  la  petitesse  des  pieds  fut  considérée  c 
le  de  grande  beauté,  et  sur  tous  les  point 

in-lin,  Ethnographie  des  peuples  étrangers  de  la  C 
iduction  communiquée  par  le  marquis  d'Hervey  de  S 

tgede  la  déformation  des  pieds  chej  les  femmes  chim 
iém.  de  médecine  militaire,  3*  série,  i,  xii,  1844.  Voir 
yp.  des  scien.  méd.,  i."  série,  t.  xvi,  article  Chine,  p.  i: 
de  la  Société  d'Anthropologie,  1861,  p.  5oS. 

de  la  Société  de  Géographie,  janvier  1873,  et  Buliet 
nihropologie,  1871,  p.  201. 

4o5.  Communiqué  par  le  marquis  d'Hervey  de  S 


ly  Google 


588 

l'empire,  on  s'cfiorca,  par  des  moyens  de  compression  de 
réaliser  ce  caractère.  Les  petits  pieds  furent  chantés  par 
les  poètes  et  cette  mutilation  s'est  ainsi  propagée  et  peqsé- 
tuée.  Gène  coutume  est  donc  relativement  récente,  aussi  ne 
la  trouve-t-on  mentionnée  dans  aucun  rituel  ancien.  Elle 
appartient  d'ailleurs  exclusivement  à  la  race  chinoise  et  les 
ïartares  mantchoux  qui  régnent  sur  la  Chine  depuis  le  com- 
mencement du  xvii"  siècle,  ne  l'ont  jamais  adoptée.  Les  prin- 
cesses régnantes  ont  donc  toutes  les  pieds  naturels. 


.MUTILATIONS    DENTAIRES 

Nous  diviserons  les  mutilations  dentaires,  suivant  leur 
e  et  le  mode  opératoire  employé  en  un  certain  nombre 
ariétés  qui  sont  d'après  les  documents  actuels  au  nom- 
ie  sept.  Ce  sont: 

i"  Les  mutilations  par  fracture,  dans  lesquelles 
rateur  armé  d'une  sorte  de  ciseau  et  d'un  marteau, 
:  par  un  coup  violent  les  angles  des  incisives. 
2*  Les  mutilations  par  arrachement,  c'est-à-dire 
nple  avulsion  de  certaines  dents,  les  incisives  par  exem- 
;t  plus  fréquemment  les  centrales  supérieures, 
3°  Les  mutilations  par  limage.  Celles-ct  présentent 
r  tour  des  variétés  de  forme  assez  nombreuses.  Elles  se 
quent  soit  au  moyen  d'instruments  en  pierre  ou  en 
I  qui  agissent  par  frottement,  soit  au  moyen  de  limes 
ïbles.  Elles  se  subdivisent  en:  limage  transversal  des 
ves  et  des  canines  ayant  pour  effet  d'amincir  le  bord 


/^.. 


.„./iax-.gie    jà 


589 

tranchant  de  cclies-ci;  limage  vertical  des  mêmes  dents 
et  produisant  soit  au  centre  un  angle  formant  un  V  ren- 
versé, soit  deux  encoches  triangulaires  séparées  par  trois 
pointes  aiguës,  soit  encore  i'ablation  des  deux  angles  de 
manière  à  produire  un  angie  central. 

C'est  dans  cette  subdivision  que  se  trouvent  les  formes 
les  plus  compliquées,  celles  qui  dénotent  une  grande  per- 
fection opératoire  et  une  certaine  recherche  de  dessin. 

4"  Les  mutilations  par  inscrustation.  Elles  con- 
sistent dans  l'introduction  après  limage  d'un  petit  cylindre 
de  métal  ou  d'une  pierre  précieuse  dans  une  cavité  creusée 
à  la  face  antérieure  des  incisives  et  des  canines  supérieures 
et  inférieures. 

5"  Les  mutilations  par  abrasion.  C'est  une  des 
opérations  les  plus  simples,  car  elle  consiste  à  fracturer  la 
couronne  des  incisives.  Le  résultat  est  analogue  à  celui  de 
l'arrachement. 

6"  Mutilations  par  prognathisme  artificiel.  Elles 
résultent  de  manœuvres  longues  et  patientes  qui  par  des  trac- 
tions sur  les  deux  mâchoires  produisent  leur  projection  en 
avant. 

Suivant  cette  division,  nous  allons  essayer  de  déterminer 
la  répartition  géographique  de  chacune  de  ces  mutilations 
dentaires. 


I"  MUTILATIONS  PAR  FRACTURE 

La  mutilation  par  fracture  a  son  centre  géographique  prin- 
cipal sur  les  côtes  occidentales  d'Afrique.  On  la  retrouve 
aussi  sur  les  rives  du  Haut-Nil  et  sur  la  côte  de  Mozambi- 
que, et  au-dessus  chez  les  Unya-Muesi. 


r 


"f* 


5yo 

En  dehors  de  l'Afrique,  on  ne  l'observe  que  sur  la  côte 
occidentale  de  ia  Nouvelle-Guinée'. 

Sur  la  côte  ouest  de  l'Afrique,  on  la  rencontre  d'abord 
chez  quelques  peuplades  de  la  côte  de  Sénégambie  et  dans 
toute  l'étendue  du  golfe  de  Guinée  jusqu'au  Congo,  où  la 
mutilation  par  arrachement  fait  place  à  celle-ci. 

Dans  le  golfe  de  Guinée,  il  faudrait  citer  le  plus  grand 
nombre  des  tribus  qui  peuplent  la  côte  des  Esclaves,  le  delta 
du  Niger,  le  Gabon  et  le  Loango,  Au  Gabon,  où  cette  prali-  , 
que  a  été  surtout  étudiée  et  décrite,  elle  s'étend  depuis  les 
tribus  de  la  côte  comme  les  Batanga,  les  Benga,  les  Pon- 
gwé  jusqu'aux  Bakalis,  atix  Fans  et  aux  Osyebas'.  C'est 
dans  ces  dernières  tribus  que  Marche  a  assisté  à  l'opéra- 
tion de  la  taille  des  dents*. 

La  même  opération  s'effectue  sur  quelques  populations  de* 
Haut-Nil,  les  Niam-niam  par  exemple,  d'après  les  documents 
de  l'expédition  Peney  et  chez  d'autres  tribus  des  rives  du 
Nil  Bleu  suivant  Schweinfunh'. 

Sur  la  côte  orientale  de  l'Afrique  on  la  retrouve  encore 
chez  les  Macuas  des  montagnes  de  Mozambique. 


'  Cependant  un  texte  de  l'ancien  historien  chinois  Ma-touan-lin 
(ïiii*  siècle),  traduit  par  le  marquis  d'Hervey  de  Saint-Denys,  parle  d'un 
peuple  du  sud-ouest  de  l'empire  chinois,  les  Ouen-mien-po  qui  avait  la 
coutume  de  se  briser  les  dents. 

^  Voir  Barnard  Davis,  TTiesaurus  cranionmt.  Londres,  1867. 

*A.  Marche,  Voyage  au  Gabon  et  sur  le  fleuve  Ogouéin  Tour  du 
Monde,  1877. 

^Proceedings  of  ihe  Royal  Physical  Society  0/  Edimburg.  1864, 


,ï  Google 


69. 


î'  MUTILATION   PAR   ARRACHEMENT 

Cette  pratique  qui  consiste  à  enlever  les  deux  incisives 
centrales,  soit  les  supérieures,  soit  les  inférieures,  est  répar- 
tie sur  les  points  les  plus  distants  des  deux  hémisphères. 
Suivant  ■  Zarate,  Garcilaso  et  Paw,  elle  serait  en  usage 
de  temps  immémorial  au  Pérou  où  elle  aurait  été  appliquée 
comme  marque  d'infamie  aux  tribus  rebelles  et  vaincues. 

En  Afrique  elle  s'observe  au  Congo,  chez  les  Hottentots, 
chez  certaines  peuplades  de  l'intérieur,  les  Batoka,  sur  les 
côtes  de  Mozambique  et  chez  les  Unya-Muesi  où  elle  coïn- 
cide avec  la  pratique  de  la  fracture.  Plus  haut,  on  l'observe 
dans  les  mêmes  conditions  chez  les  peuplades  du  Haut-Nil. 
Une  autre  tribu  nègre  située  au  nord-est  de  l'Albert-Nyanza, 
les  Ungoro,  enlève  aux  enfants  des  deux  sexes  tes  quatre 
incisives  inférieures.  L'opération  se  fait  avec  un  fer  plat 
manœuvré  en  forme  de  levier'. 

En  Australie,  elle  occupe  au  nord  ta  côte  de  Tasman  et 
de  la  Terre  d'Arnhem  jusqu'à  la  côte  occidentale  du  golfe 
de  Carpentarie.  Au  sud  elle  comprend  une  vaste  région  qui 
répond  à  la  Nouvelle-Galles  et  une  partie  de  l'Australie  mé- 
ridionale. On  ne  l'a  observée  ni  au  cap  York  ni  sur  aucun 
autre  point  exploré  des  côtes. 


I  Eni\  Bey,  Viya-^e  de  .WRuli  à  la  capitale  de  VUngoro  in  BuUe- 
dc  la  Société  normande  de  Géographie,  mai-juin  i88o,  p.  i65. 

C.  Et.  41 


,ï  Google 


592 


3'  MUTILATION  PAR  UMAGE 

La  mutilation  par  limage  a  pour  centre  exclusif  l'ar- 
chipei  Malais.  Pratiquée  d'abord  dans  la  race  malaise,  elle 
s'est  répandue  aux  autres  groupes  ethniques  désignés  dans 
leur  ensemble  par  M.  Hamy,  sous  le  nom  de  race  Indo- 
nésienne et  jusqu'aux  Papous,  à  l'est  de  l'archipel.  On  l'ob- 
serve â  l'état  constant  à  Java,  plus  rare  à  Sumatra  et  sur 
un  grand  nombre  de  points  de  Bornéo,  des  Célèbes,  des 
Moluques,  de  Solo,  de  Macassar,  à  Mindanao  d'après  Mon- 
tano,  etc.  Elle  existe  aussi  à  la  pointe  de  la  presqu'île  de 
Malacca. 

A  Bornéo  toutefois,  elle  ne  s'observe  pas  au  centre  de 
l'île  avec  les  mêmes  caractères  que  sur  les  côtes,  et  en  ou- 
tre le  limage  se  complique  de  la  pratique  de  l'incrusta- 
tion. 

Le  limage  des  dents  en  Malaisie  est  un  acte  religieux 
qui  s'accomplit  avec  solemnité  à  l'âge  de  la  puberté.  Les 
Mahométans  le  pratiquent  seuls;  mais  la  première  initiation 
consiste  en  un  léger  raccourcissement  du  bord  libre  des  in- 
cisives. Plus  tard,  l'individu  ainsi  initié  ajoute  à  cette  pre- 
mière mutilation  certaine  opération  plus  compliquée  et  va- 
riée d'après  les  habitudes  de  sa  famille,  de  sa  tribu  ou  sui- 
vant son  goût  individuel.  C'est  ainsi  que  sur  aucun  point 
de  la  Malaisie  on  n'observe  un  mode  unique  de  limage  :  on 
peut  cependant  localiser  un  certain  nombre  de  variétés. 

A  Java,  le  limage  se  pratique  horizontalement,  c'est-à- 
dire  en  amincissant  le  bord  libre  et  en  le  raccourcissant  en 
même  temps.  L'instrument  qui  sert  à  cette  opération,  est 
tantôt  une  lime,  tantôt  une  pierre  employée  aussi  à  Tépreu- 


;,cooa)t 


593 
icore  un  simple  bambou  manoeuvrant 

vertical  se  retrouve  à  Sumatra,  à  Bor- 

il  en  pointes  .variées  ainsi  que  nous 
iquerait  pas  chez  les  peuplades  maho- 

Si  l'on  s'en  rapporte  à  Meyer  *  il  ne 
s  les  tribus  plus  sauvages  et  qui  veu- 

un  air  terrible  ou  une  ressemblance 

Nias  que  cette  pratique  est  courante, 
les  crânes  de  nos  musées  d'Europe 
tilation  en  pointe  sont  exclusivement 

nte  appaniendrait  donc  à  une  région 
ndrait  ni  aux  autres  îles  de  l'archipel, 
hilippines,  ni  aux  Papous  de  la  Nou- 


UTION  PAR  INCRUSTATION 

incrustation  ne  s'est  rencontrée  que 
éo,  Sumatra  et  le  Mexique, 
ît  sur  deux  crânes  dayaks  de  la  col- 
i  Paris  que  nous  avons  pu  l'étudier. 
;nalée  déjà  par  Bamard  Davis  et  plus 
jntano*. 

tété  d'Anthropologie  de  Vienne,  t.  ui,  p.  114, 
w  iiber  den  Werth  in  Mitiheilungen,  l.  iv.  Voir 
me  philosophique,  mars,  1878. 
ayaks  du  muséum  d'histoire  naturelle  de  Pa- 


lyGe^^^ 


594 

L'opération  consiste  d'abord  dans  le  limage  transver- 
sal de  la  face  antérieure  des  incisives  et  des  canines  supé- 
rieures seules,  de  manière  à  enlever  la  couche  d'émail;  puis 
on  pratique  dans  l'ivoire  une  petite  perforation  qui  pénètre 
assez  profondément  sans  atteindre  cependant  la  cavité  cen- 
trale. Dans  cette  perforation  qui  a  une  forme  cylindrique, 
on  introduit  une  petite  cheville  de  laiton  faite  d'un  fil  ordi- 
naire du  diamètre  de  un  à  deux  millimètres  environ.  La  pe- 
tite cheville  est  alors  coupée  au  ras  de  la  dent  puis  mar- 
telée en  façon  de  tête  de  clou. 

Des  preuves  incontestables  établissent  que  cette  cou- 
tume s'effectue  chez  les  Dayaks  sur  le  vivant  et  non,  com- 
me on  pouiTait  le  supposer,  après  la  mort.  L'une  des  mâ- 
choires de  Dayak  du  Muséum  porte  en  effet  ta  trace  de 
phénomènes  morbides  sérieux  qui  se  sont  développés  dans 
les  mâchoires  consécutivement  &  cette  mutilation  '. 

Au  Mexique,  au  contraire,  on  ne  saurait  affirmer  que  la 
pratique  de  l'incrustation  des  dents  ne  rentre  pas  dans  la 
classe  des  pratiques  funéraires  si  connues  des  musées  ethno- 
graphiques. La  matière  incrustée,  en  effet,  n'est  pas  du  mé- 
tal, mais  une  pierre  précieuse,  et  dans  une  pièce  remarqua- 
ble rapportée  par  le  docteur  Fuzier,  où  l'on  avait  enchâssé 
des  turquoises,  aucune  réaction  inflammatoire  ne  s'obseirait. 

N«us  pensons  en  conséquence  que  la  dite  mutilation 
par  incrustation,  n'a,  d'après  nos  connaissances  actuelles, 
de  caractère  ethnique  que  chez  les  Dayaks  de  Bornéo  et  les 
Battaks  de  Sumatra. 

'  A  Sumatra,  M.  Brau  de  Saint-Pol  Lias  a  observé  un  mode  spé- 
cial d'incrustation:  Un  fil  de  laiton  était  fine  transversalement  d'une 
canine  a  l'autre  et  passait  dans  une  série  de  gouttières  creusées  sous 
les  incisives  préalablement  abrasées  presqu'au  niveau  des  gencives.  Coin 
isdeM.Hamy.V.  Bull.de  la  SoccPAnthrop.,  17  février  1881. 


,ï  Google 


595 


b"  MUTILATION  PAR  ABRASION 

Cette  mutilation  qui  consiste  dans  la  fracture  transver- 
sale complète  de  la  couronne  des  incisives  supérieures,  s^est 
rencontrée  chez  les  Esquimaux  où  elle  a  été  signalée  par 
l'abbé  Petitot,  sur  les  bords  du  Mackenzie  '.  Son  but,  d'après 
la  légende  locale,  serait  d'éviter  que  la  mâchoire  des  hom- 
mes puisse  ressembler  à  celle  des  chiens. 


Ô*  MUTILATION  PAR  PROGNATHISMB  ARTIFICIEL 

Cette  variété  de  mutilation  dentaire  est  localisée  aux 
peuplades  qui  occupent  la  rive  droite  du  Sénégal.  Elle  a  été 
signalée  pour  la  première  fois  par  le  général  Faidherbe  '  et 
étudiée  ensuite  par  le  docteur  Bancal  et  M.  Hamy', 

Elle  se  pratique  à  titre  de  mode  chez  les  femmes  mau- 
resques. Pendant  l'enfance  on  enlève  aux  petites  filles  les 
incisives  supérieures  temporaires  et  aussitôt  que  les  autres 
sortent,  ou  exerce  sur  elles  des  tractions  qui  avancent  en 
même  temps  la  mâchoire  et  produisent  ainsi  une  projection 
des  dents  supérieures  qui  viennent  tomber  sur  la  lèvre  hors 
de  la  bouche. 

On  n'a  pas  observé  ce  mode  de  mutilation  sur  aucun 
autre  point  du  littoral  africain  et  le  faible  degré  de  progna- 
thisme ethnique  que  présentent  les  populations  du  Sénégal 


*  Bulletin  dt  la  Société  d'Anthropologie,  1880. 
^Bulletin  de  la  Société  d^ Anthropologie.  1871,  p.  766. 
^  Revue  d'Anthropologie,  1879,  p.  11. 


,ïG00' 


3Qi* 


596 

prouve,  en  dehors  des  renseignements  précis  qui  ont  été 
recueillis,  que  ce  prognathisme  est  évidemment  artificiel. 

Pour  terminer  l'histoire  très  succinte  des  mutilations 
ethniques  qm  se  pratiquent  sur  les  dents,  nous  dirons  qu'en 
dehors  des  points  géographiques  signalés  elles  n'ont  été  ob- 
servées nulle  part.  Elles  n'existent  ni  en  Europe  aux  temps 
préhistoriques,  ni  sur  le  continent  asiatique  à  aucune  épo- 
que. En  outre,  beaucoup  de  peuples  d'Afrique  ne  se  mutilent 
pas;  ainsi,  les  Cafres,  les  Boschimans,  les  Maures  du  Séné- 
gal, les  peuples  de  Madagascar,  etc. 

En  Océanie,  on  ne  les  observe  ni  dans  la  plus  grande 
partie  de  l'Australie,  ni  en  Tasmanie,  ni  en  Nouvelle-Ca- 
lédonie, ni  aux  Philippines  ni  en  Polynésie. 

Quant  aux  conséquences  de  ces  mutilations,  elles  nous 
ont  été  révélées  par  les  lésions  retrouvées  sur  plusieurs  piè- 
ces de  nos  musées.  Parmi  ces  pièces,  la  plus  remarquable 
peut-être  est  ce  crâne  de  femme  Papel  (Sénégambie  portu- 
gaise) qui  nous  a  été  obligeamment  communiqué  par  M. 
Hamy  et  qui  présente  à  la  suite  d'un  limage  en  pointes  ai- 
guës, des  désordres  graves  dans  le.s  mâchoires,  abcès,  né- 
crose, et  autres  lésions  consécutives.  Cette  curieuse  pièce 
porte  dans  les  galeries  du  Muséum  le  n."  4972  de  la  collec- 
tion Schoelcher. 


VI 

Uotllatlon  dea  organea  génltanz 

La  série  des  mutilations  ethniques  qui  portent  sur  les 
organes  génitaux  de  l'homme  et  de  la  femme  est  en  quel- 
que sorte  indéfinie.  Il  n'est  pas  de  pratiques  grotesques  ou 


,ï  Google 


597 

barbares  qui  n'aient  été  imaginées  à  toutes  les  époques  de 
rhistoire  de  l'homme  et  jusqu'à  nos  jours. 

Parmi  ces  pratiques,  it  en  est  qui  sont  restées  des  ri- 
tes religieux,  telle  est  la  circoncision,  telle  est  aussi  la  cas- 
tration chez  certains  peuples.  D'autres  sont  instituées  pour 
satisfaire  à  des  préoccupations  de  jalousie,  l'infibulation  des 
femmes  par  exemple  et  l'industrie  des  eunuques  dans  les 
pays  orientaux.  D'autres  ont  pour  conséquence  la  suppres- 
sion volontaire  des  fonctions  génitales,  c'est  la  castration 
complète  ou  incomplète.  Enfin,  un  certain  nombre  de  prati- 
ques ont  un  but  tout  opposé  et  qui  consiste  à  exciter  par  des 
procédés  divers  les  sens  erotiques. 

On  voit  combien  sont  nombreux  et  variés  les  points 
de  vue  auxquels  se  sont  placés  les  peuples  dans  l'invention 
et  l'application  des  mutilations  génitales,  lesquelles  sont  as- 
surément les  plus  extraordinaires  et  souvent  aussi  les  plus 
cruelles  de  toutes. 

li  paraît  dès  lors  nécessaire  d'établir  dans  cette  partie 
de  notre  travail  une  sorte  de  classification  artificielle  et  voici 
dans  quel  ordre  nous  décrirons  brièvement  les  divers  modes 
de  mutilation  dont  il  s'agit: 

i"  De  la  circoncision. 

2°  De  l^nfibulation. 

3°  De  l'eunuchisme. 

4°  De  la  castration  volontaire. 

5°  De  certaines  pratiques  diverses. 


ly  Google 


398 


1°  DE  LA  CIBCONCISIOK 

L'opération  de  la  circoncision  a  de  tout  temps  suscité 
de  nombreuses  études,  suivant  que  les  tuteurs  se  sont  pla- 
cés au  point  de  vue  religieux,  ou  sur  le  terrain  chirurgical 
et  hygiénique  *. 

Nous  ne  saurions  traiter  la  question  sous  ces  derniers 
aspects,  suffisamment  élucidés  d'ailleurs.  Notre  intention  est 
de  nous  borner  à  présenter  sur  la  question  quelques  consi- 
dérations historiques  et  géographiques. 

'  Voir:  Thévenoi,  Relation  du  voyage  en  Orient,  Paris,  1664, in-4» 
chap.  xxïU,  p.  79.— Wedel  (J.  W.)  Propemptkon  anatamkum  de  épis- 
pasmo  Judœorum, SeniE  i69o,in-4*— Grapius,  Dissertatio  ati  ciraimci- 
sio  Aegyptiis  ab  Abraham  fuerit  derivata,  Rosiochii,  1699,  in-4*— Du- 
io\iT,  Hygiène  des  Hébreux.  ThÈse  de  Montpellier,  1809. — Cohen,  Dis- 
sertation sur  la  circoncision.  Thèse  de  Paris,  n."  a,  1816.— Terquem  (L), 
Guide  du  posihétomiste,  Metz,  1843,  in-8» — Friedrich  {J.  B.)  Ueber  die 
Judaische  Beschneidung,  in  hislorischer ,  operativer  und  samtats-poHjei- 
licher  Bejiekung,  Ansbach,  1844,  in-8* — Salomon  {Mor-gust),  Die  Be- 
schneidung histor.  und  med.  betrachtei.  Braunschweig,  1844,  in-8* — Bei^- 
son  (J.).  Die  Beschneidung  vont  histor.  krit.  und  mediifinischen  Stand- 
punkt  mit  Bejug  au/ die  neuesten  Debatten  und  Re/ormvorschtdge,  Ber- 
lin, 1844,  in-8'*  avec  1  planche. — Brecher  (Gid.),  Die  Beschneidung  der 
Israéliten  von  der  historischen,  praktischen,  operativen  und  rituellen 
Seite  junâchst  /Ur  den  Seibstunterrickt  dargestellt,  Wiea,  1845,  in-8* — 
Marchant  (Louis),  De  la  circoncision  au  point  de  vue  historique,  hygiini- 
(pie  et  chirurgical.  Thèse  de  Montpellier,  i855,  in-4%44p. — Claparède, 
La  circoncision.  De  son  importance  dans  la  famille  et  dans  l'État,  avec 
trois  dessins  iithogr.,  Paris,  1661,  in-4''. — Martin  (H.  G.),  Historique  et 
bibliographie  de  la  circoncision,  p,  i3  et  81 — {De  la  circoncision),  Thèse 
de  Paris,  1870,  n»  90.— Aïasa  Hamdy,  De  la  circoncision.  Parts,  1873, 
avec  planches. 


.ïGoogle 


^99 

Envisagée  dans  le  temps,  la  pratique  de  la  circoncision 
chez  I*homme  est  aussi  vieille  que  l'humanité.  Si  Ton  re- 
monte la  série  des  documents  historiques  on  remarque,  en 
ce  qui  concerne  l'ancien  continent,  qu'elle  fut  importée  en 
Egypte,  à  une  époque  indéterminée  par  des  invasions  éthio- 
piennes qui  pénétrèrent  dans  le  pays.  Les  voyageurs  qui 
ont  exploré  les  régions  centrales  africaines  ont  d'ailleurs  re- 
trouvé cette  tradition  qui  se  perd  dans  les  âges  les  plus  re- 
culés. On  a  même  recueilH  d'anciens  textes  égyptiens  qui 
témoignent  que  Topéradon  s'effectuait  avec  un  couteau  en 
pierre  dit;  la  pierre  à  circoncision.  Peut-être  serait-on  au- 
torisé à  conclure  de  là  que  cette  pratique  a  son  origine  aux 
temps  préhistoriques  ?  Il  y  a  toutefois  ici  désaccord,  comme 
on  voit,  entre  la  légende  bibUque  qui  attribue  la  première 
circoncision  à  Abraham  et  les  documents  historiques  em- 
pruntés par  exemple  à  Hérodote,  Strabon,  Ammien  Mar- 
cellin,  Philon  etc.,  qui  lui  assignent  une  origine  africaine. 

11  convient  d'ajouter  que  la  circoncision  ne  s'est  retrou- 
vée à  titre  de  pratique  courante,  sur  aucun  peuple  d'Asie 
si  ce  n'est  au  Thîbet,  et  si  les  Mahométans  l'ont  adoptée 
c'est  comme  précepte  d'hygiène  et  non  comme  dogme  reli- 
gieux. Mahomet,  qui  était  circoncis,  n'a  formulé  dans  le  Ko- 
ran  aucune  loi  à  cet  égard. 

Suivant  Paw,  la  circoncision  était  inconnue  en  Amé- 
rique avant  la  conquête  •,  car  on  ne  saurait  assimiler  à  cette 
opération  la  simple  incision  que  pratiquaient  sur  les  enfants, 
d'après  le  père  Acosta,  les  anciens  prêtres  mexicains  qui  se 
bornaient  à  rompre  le  frein  du  gland. 

A  la  Nouvelle-Zélande,  à  Tailî  et  chez  la  plupart  des 
peuplades  océaniennes,  la  circoncision  se  pratique  aussi  en 

•  Recktrtkts  sur  les  Am&icains,  t.  tu,  p.  134. 


'■f 


6oo 

dehors  de  tout  caractère  religieux  et  sans  qu'on  puisse  en 
indiquer  Porîgîne. 

Dans  les  tribus  d'Afrique  et  en  particulier  à  Madagas- 
car, les  prêtres  effectuent  l'opération  avec  leurs  ongles  al- 
longés et  tranchants.  Ils  brisent  ainsi  les  adhérences  prépu- 
ciates  et  enlèvent  un  lambeau  cutané  par  un  procédé  de  dé- 
chirure qui  évite  l'hémorrhagie.  Le  Mohel  a  de  plus  l'habi- 
tude d'appliquer  la  bouche  sur  la  plaie  et  le  sang  qu'il  cra- 
che dans  un  vase  devient  liquide  sacré.  A  Madagascar,  l'opé- 
rateur avale  le  morceau  de  prépuce. 

Quoiqu'il  en  soit,  si  l'on  voulait  établir  la  répartition 
géographique  de  la  circoncision,  on  devrait  y  comprendre 
les  peuples  divers  chez  lesquels  l'opération  se  pratique  à 
des  points  de  vue  différents.  Ainsi,  il  faudrait,  d'une  part 
citer:  les  Égyptiens,  les  Éthiopiens,  les  Abyssiniens,  les 
Persans  et  en  général  tous  les  peuples  mahométans,  et  d'au- 
tre part  indiquer  les  localisations  principales  de  la  race  juive, 
malgré  la  dispersion  extrême  qu'elle  présente  aujourd'hui 
sur  tous  les  points  du  globe. 

Voici  par  exemple,  un  document  qui  fixe  la  répartition 
des  Israélites  en  Europe,  ce  qui  équivaut  à  un  tableau  de 
distribution  géographique  de  la  circoncision  '  dans  cette  race  : 

Ainsi,  on  compte  en: 

Autriche-Hongrie 1,375,000  Israélites 

Allemagne 5i2,ooo         > 

Russie 270,000         » 

France 1 18,000        » 

Pays-Bas 64,000        > 

'  Tableau  rabitiçue  de  Hiibner  in  Univers  Israélite.  1  Kvrier  1780, 
p.  3oa,  et  Revue  Internationale  des  Sciences,  i5  mars,  1879. 


/      J 


6oi 

Angleterre 46,000  Israélites 

Italie 36,ooo         > 

Belgique 3,ooo         > 

Suède 2,000         > 

Dans  ces  quelques  remarques  sur  la  circoncision,  il  n'est 
question  que  de  l'opération  pratiquée  chez  l'homme.  Or  elle 
est  également  appliquée  chez  la  femme  où  elle  consiste  dans 
l'excision  des  nymphes.  C'est  une  opération -en  usage  cons- 
tant en  Orient,  et  elle  s'effectuait  également  chez  les  an- 
ciens Juifs  si  l'on  s'en  rapporte  aux  assertions  de  Strabon, 
Aëtius  et  Paul  d'Égine. 

Nous  la  retrouverons  d'ailleurs  plus  loin,  car  elle  se  com- 
plique souvent  chez  certaines  populations  d'une  autre  muti- 
lation qui  consiste  dans  une  véritable  castration  de  la  femme. 


1°  DE  l'iNFIBULATION 

L'infibulation  est  une  opération  qui  consiste  à  fermer 
ou  à  boucler,  suivant  le  sens  du  mot  Jîbula  {boucle),  les  or- 
ganes génitaux  de  la  femme  ou  le  prépuce  de  l'homme. 

Les  Romainsqui  la  pratiquaient,  l'avaient  reçue  de  Grèce, 
où  elle  avait  été  importée  d'Orient. 

Chez  la  femme,  l'iaSbulation  s'effectue  par  trois  procé- 
dés différents: 

i"  Par  suture. 

■  un  armeau. 

•  une  ceinture. 

emier  procédé,  la  suture  se  pratique  en  avi 

\  lèvres  et  en  plaçant  le  sujet,  les  cuisses  rap 

s  une  immobilité  absolue  pendant  6  à  9  je 


lyGoogle 


6o2 

L'opération  a  lieu  de  la  sorte  en  Ethiopie,  en  Nubie  et  chez 
les  Arabes.  Elle  se  pratique  ordinairement  chez  les  petites 
filles  à  l'âge  de  4  à  5  ans  et  elle  se  maintient  jusqu'au  ma- 
riage, de  telle  sorte  que  c'est  le  mari  qui  déboucle  sa  fem- 
me. Cette  nouvelle  virginité  est  jugée  si  difficile  à  rompre, 
qu'il  faut  employer  des  moyens  violents  qui  coûtent,  dit-on, 
assez  souvent  la  vie  aux  jeunes  mariées.  Les  choses  se  pas- 
sent ainsi  dans  les  tribus  Kabyles.  De  plus,  il  arrive  sou- 
vent qu'un  mari,  partant  pour  un  long  voyage,  fait  de  nou- 
veau infibuler  sa  femme  par  les  mains  de  matrones  spécia- 
les et  la  désinâbule  à  son  retour. 

Le  second  procédé  d'infibulation  par  un  anneau  était 
surtout  en  usage  dans  l'ancienne  Rome:  la  boucle  passait  à 
la  fois  dans  les  deux  grandes  lèvres  et  ne  pouvait  s'ouvrir 
qu'au  moyen  de  la  lime. 

Enfin,  ie  troisième  procédé,  qui  consiste  dans  l'appli- 
cation d'une  ceinture  dite  ceinture  de  chasteté.  C'est  un  ap- 
pareil qui  ne  produit  à  proprement  parler  aucune  mutilation 
véritable  et  qui  se  borne  à  entourer  les  organes  génitaux 
d'une  cape  fermée. 

L'infibulation  chez  les  garçons  a  été  décrite  par  Celse, 
qui  en  conseille  l'emploi  par  raisons  de  santé  pour  combat- 
tre l'onanisme.  Elle  a  été  ensuite  appliquée  chez  les  escla- 
ves et  chez  les  chanteurs  afin  de  leur  imposer  la  chasteté. 
L'infibulation  dans  cette  dernière  application  représente  un 
acheminement  vers  la  castration  des  chanteurs  de  ta  Cha- 
pelle Sixtine.  L'anneau  était  toujours  en  métal,  or  ou  argent, 
et  fermé  par  soudure. 

Les  moines  grecs,  les  faquirs  et  les  bonzes  assurent 
de  la  même  façon  leur  chasteté  et  portent  ainsi  des  anneaux 
qui  ont  parfois  un  poids  considérable  et  pendent  lourde- 
ment entre  les  cuisses. 


6o3 

Si  l'on  en  croit  Martial,  l'infibulation  chez  les  garçons 
était  souvent  remplacée  par  un  étui  en  métal,  ayant  un  but 
analogue  à  celui  de  la  ceinture  de  chasteté  chez  les  femmes, 
et  Paw  racconte  que  chez  les  populations  de  l'isthme  de  Da- 
rien,  la  même  pratique  s'est  retrouvée  avec  substitution  au 
cylindre  de  métal  d'un  étui  en  bambou  ou  en  jonc. 


3'  DE  l'eunuchisme 

L'eunuchisme  ou  émasculation  consiste  dans  la  sup- 
pression des  organes  génitaux  de  l'homme,  imposée  soit 
pendant  l'enfance  soit  chez  l'adulte,  mais  toujours  involon- 
tairement de  la  part  de  la  victime. 

La  fabrication  des  eunuques  pour  les  harems  d'Orient 
est  une  industrie  propre  au  Soudan  et  plus  spécialement  au 
Siouat.  Elle  a  été  très  soigneusement  étudiée  par  divers  ob- 
servateurs et  en  particulier  par  notre  ami  regretté  Godard  '. 
L'opération  a  pour  résultat  l'ablation  complète  des  parties 
génitales,  au  lieu  et  place  desquelles  il  reste  une  cicatrice 
présentant  sur  un  point  l'orifice  du  canal  urétral,  dont  la 
perméabilité  est  maintenue  par  un  clou  de  plomb  pendu  à 
la  ceinture  ou  à  une  pièce  du  vêtement. 

L'opération  pratiquée  chez  l'enfant  dans  le  cours  de  la 
deuxième  année,  n'est  pas  ordinairement  suivie  d'accidents 
immédiats;  mais  elle  a  pour  conséquence  de  produire  chez 
l'individu,  au  moment  de  l'adolescence,  des  modifications  pro- 
fondes qui  portent  sur  l'économie  générale,  sur  la  forme  du 
corps,  sur  le  timbre  de  la  voix  et  jusque  sur  les  instincts, 
aptitudes.  C'est  en  particulier  l'élévation 

'alestine.  Paris,  1867,  p.  i3o. 


lyGoogle 


6o4 

du  re^stre  vocal  qui  a  fait  entrer  la  castration  jusque  dans 
les  écoles  de  chanteurs  destinés  aux  chœurs  de  la  Chapelle 
Sixtine. 

L'eunuchisme  pratiqué  dans  la  Haute-Egypte  est  une 
industrie  toujours  florissante,  car  les  eunuques  s'achètent  à 
des  prix  fort  élevés,  qui  varient  cependant  suivant  que  l'opé- 
ration a  été  plus  ou  moins  habilement  exécutée  et  qu'elle  n'a 
laissé  à  sa  suite  aucune  incommodité  ou  infirmité  quelcon- 
ques. 

Les  mutilés  sont  ainsi  employés  sur  toutes  les  parties  de 
l'Orient,  à  la  garde  des  harems  et  sans  doute  jusqu'en  Chine  ; 
car  on  raconte  que,  dans  la  prise  de  Pékin,  l'armée  anglo- 
française  a  trouvé  au  palais  d'été  deux  eunuques  qui  ont 
été  faits  prisonniers. 

Miiis  la  castration  pratiquée  ainsi  pour  les  besoins  du 
monde  oriental,  n'est  pas  la  seule  qui  ait  le  caractère  ethni- 
que- Ainsi  Paw  racconte  que  les  peuples  anthropophages 
de  Cumana,  à  la  Nouvelle-Grenade,  châtraient  dès  le  bas 
âge  les  enfants  destinés  à  la  boucherie*.  C'est  le  procédé 
des  éleveurs  de  bétail  en  général. 

En  outre,  la  cour  du  cacique  de  Puna  renfermait,  sui- 
vant Zarate,  des  eunuques  chargés  de  la  garde  des  femmes. 

Enfin  la  castration  devient  parfois  un  supplice  qui  s'im- 
pose à  un  peuple  vaincu.  C'est  ainsi  que  M.M.  d'Abbadie 
l'on  observé  chez  certaines  tribus  d'Afrique,  qui  mettent  ain- 
si les  peuplades  conquises  dans  l'impossibilité  de  se  perpé- 
tuer. 


'  Paw.  pp.  cit.  1. 1,  p.  324. 


DÏ^I^bv  \^i  i. 


4    DE  LA  CASTRATION  VOLONTAIRE 

La  castration  volontaire  est  une  mutilation  qui  se  pra- 
nque  chez  les  peuples  dans  un  but  variable. 

Ainsi,  on  a  signalé  depuis  longtemps  chez  les  Hotten- 
tots  l'habitude  de  se  couper  un  testicule.  Quelques  voyageurs 
assurent  que  c'est  pour  être  plus  légers  à  la  course  et  à  la 
chasse;  d'autres  prétendent  que  c'est  afin  d'éviter  les  gros- 
sesses gémellaires  que  cette  opération  n'empêche  nullement 
d'ailleurs. 

Les  Cafres  avaient  adopté  la  même  pratique  •  ;  mais 
c'est  surtout  le  fanatisme  religieux  qui  a  poussé  des  groupes 
d'individus  à  pratiquer  sur  eux  mêmes  et  à  imposer  à  leurs 
prosélytes  la  castratiom  complète  ou  incomplète,  qui  devient 
dès  lors  une  véritable  cérémonie  d'initiation. 

Déjà  dans  la  Rome  impériale,  il  s'était  rencontré  des 
sectes  religieuses  chez  lesquelles  la  castration  était  un  dogme 
et  qui  se  livraient  à  une  propagande  très  ardente,  suivant 
les  traditions  des  prêtres  de  Cybèle. 

. . .  Somni  posi  vina  petuntur. 
Continuo  ferrum  noxia  lurba  rapit, 

Excidimtque  seiiem 

UARTIAL,  UB.  VI. 

Plus  récemment  Origène  s'était,  comme  on  sait,  châtré 
de  ses  propres  mains  dans  un  élan  de  fanatisme,  et  cet  exem- 
ple, resté  célèbre,  n'a  pas  peu  contribué  sans  doute  à  pro- 

'  Paw.  Op.  cit.  t  m,  p.  137. 


6o6 

pager  jusqu^à  nos  jours  cette  absurde  et  abominable  prati- 
que. 

C'est  ainsi  que  nous  arrivons  jusqu'à  l'époque  actuelle, 
en  plein  xix*  siècle,  pour  assister  au  développement  de  cer- 
taines sectes  religieuses  qui  ont  pour  dogme  fondamental  la 
castration  volontaire.  La  plus  célèbre  de  ces  sectes  est  celle 
des  Skoptsyy  qui  représente  l'un  des  si  nombreux  schismes 
dissidents  de  la  Russie. 

Ces  schismes,  dont  le  nombre  est  évalué  à  plus  d'une 
centaine,  portent  en  Russie  le  nom  génétique  de  Raskol- 
niks  '. 

Les  pratiques  religieuses  des  Raskolniks,  sont  les  unes 
purement  mystiques  et  inoffensives,  d'autres  sont  terribles, 
car  leur  résultat  n'est  rien  moins  qu'un  véritable  suicide  de 
race.  Tels  sont  précisément  les  Skoptsy  '.  ■ 

Les  Skoptsy  ou  châtrés  de  Russie  composent  aujour- 
d'hui une  société  puissante  par  le  nombre  de  leurs  adhérents 
et  les  richesses  considérables  dont  ils  disposent.  Malgré  les 
poursuites  incessantes  dont  ils  sont  l'objet  de  la  part  de  la 
police  impériale,  malgré  les  pénalités  les  plus  sévères  qui 
ont  été  édictées  contre  eux,  leur  association  s'étend  sans 
cesse  et  leur  influence,  tout  occulte  qu'elle  soit,  gagne  de 
proche  en  proche  toutes  les  classes  de  la  société  russe  *. 

'  Voir  Statistique  des  Raskolniks,  Rousky  Vesinik,  1868, 11. 

*  Voir  Filipov,  Histoire  de  l'hermitage  de  la  rivière  Vig-Nilskij: — 
Vie  de  famille  dans  le  Raskol. — Mackenzie  Wallace,  iîwî5ia.— Varin- 
tzow,  Les  chants  pieux  de  la  Russie. 

*  Barrow,  Le  mysticisme  populaire  en  Russie.—  Melinkov,  Les  sec- 
tes secrètes,  les  Colombes  blanches.— Rjcoutsky,  Les  kommes  de  Dieu 
elles  Skoptsy, —  Pelikan,  GerichtUche-medicinische  Untersuchmgeniiber 
das  Skop^enthum  in  Russland.Sainx-VéKTibavT^.  1876. — Teinturier,  t«s 
Skoptjy,  Paris  1877.  Extrait  du  Progrès  Médical. — F.  von  Stein,  Die 


D,„,i,.,db,Good^ 


6o7 

La  secte  est  née  vers  le  commencement  du  xviii'  siècle, 
mais  elle  ne  commença  à  se  développer  que  sous  les  règnes 
de  Catherine  et  d'Alexandre  i".  Le  nombre  des  fidèles  at- 
teignit à  cette  époque  le  chiffre  d'environ  20,000. 

Son  chef  Schelivanov,  véritable  Christ  suivant  la  lé- 
gende, et  enfanté  par  l'amour  mystique  du  Saint-Esprit  et 
de  l'impératrice  Elisabeth  Petrowna,  avait  été  banni  d'abord 
par  Paul  i""  puis  enfermé  ensuite  comme  aliéné  dans  un 
couvent,  d'où  les  sectaires  s'attendent  à  le  voir  sortir  en- 
touré de  gloires,  comme  un  véritable  Messie,  lorsque  leur 
nombre  aura  atteint  le  chiffre  apocalyptique  de  144,000.  Il 
apparaîtra  alors  du  tombeau  pour  subjuguer  le  monde  et 
briser  l'empire  des  Czars,  Cette  tâche  accomplie,  il  mourra 
et  la  terre  se  transformera  en  paradis,  comme  avant  le  pre- 
mier péché.  La  mort  sera  supprimée  et  l'humanité  se  repro- 
duira par  des  baisers. 

Le  fameux  chiffre  attendu  et  rêvé  n'est  pas  toutefois 
encore  atteint  aujourd'hui;  aussi  les  Skoptsy,  s'acharnent- 
ils  dans  leur  œuvre  de  prosélytisme  jusqu'à  attirer  des  vic- 
times dans  des  pièges  et  des  guet-apens. 

Cette  étrange  association  qui  se  donne  le  nom  de  Co- 
lombes-blanches, a  ses  lieux  occultes  de  réunion  et  des  céré- 
monies si  secrètes  qu'elle  devait  être  assez  difficile  à  étudier. 

Grâce  cependant  aux  recherches  deM.M.  F.  von  Slein, 
Pelikan,  Melinkov,  etc.  on  est  parvenu  à  connaître  son  or- 
ganisation dans  tous  ses  détails. 

La  cérémonie  d'initiation  comprend  chez  l'homme  trois 
degrés: 

Skopt%ensekte.~Russland,  in  ihrcr  Enistehung,  Organisation  und  Lelire. 
Zeitschrifi  fur  Ethnologie,  fasc.  v,  i&yS.—  lîetve  d'Anthropologie,  1876, 


tr 


„Gooai 


1*  Suppression  d'un  seul  testicule  soit  par  la  ligature 
du  cordon,  soit  destruction  par  le  feu  ou  par  l'amputation. 
C'est  la  mutilation  des  moins  fervents. 

2'  Amputation  des  deux  testicules  et  du  scrotum.  Ceux- 
là  ont  perdu  les  clefs  de  l'enfer  mais  ils  ont  conservé  les 
clefs  de  Fabîme.  On  devine  ce  qu'on  entend  ici  par  fabime. 
Les  initiés  de  cette  sorte  sont  marqués  du  petit  sceau  et 
Us  ont  le  droit  de  'monter  le  cheval  pie.t 

y  Amputation  totale  des  testicules  et  du  pénis.  C'est 
le  grand  sceau,  l'initiation  complète  qui  donne  le  droit  de 
tmonter  le  cheval  blanc* 

Chez  les  femmes  les  premières  opérations  de  castration 
eurent  lieu  en  plein  palais  impérial  de  Michaïlov  chez  la 
femme  du  colonel  Tatarînov,  sous  le  règne  de  Paul  i**. 
Elle  fut  dès  lors  régulièrement  constituée  et  comprend  aussi 
trois  degrés: 

1°  Amputation  des  mamelons. 

2°  Amputation  totale  des  seins. 

3°  Amputation  des  grandes  lèvres  et  du  clitoris. 

Les  conséquences  de  ces  mutilations  sont,  suivant  les 
degrés,  celles  qu'on  observe  d'ordinaire  dans  la  pratique  de 
la  castration. 

Chez  l'homme^  voix  grêle,  teint  pâle,  tournure  et  ma- 
nières efféminées.  Ces  caractères  cependant  sont  bien  moins 
accusés  que  chez  les  eunuques  d'Orient,  mutilés  dès  l'en- 
fance; mais  ils  ont  avec  eux  une  certaine  similitude  d'ins- 
tints;  comme  par  exemple  un  désir  immodéré  des  richesses, 
ce  qu'on  pourrait  appeler  une  passion  de  compensation. 

Chez  la  femme,  le  teint  est  pale  et  flétri  et  en  ce  qui 
concerne  les  conséquences  locales,  elles  consistent  dans  une 
retraction  des  cicatrices  de  la  vulve  et  un  rétrécissement 
progressif  de  cet  orifice. 


,ï  Google 


6og 

Grâce  aux  documents  que  nous  avons  recueillis  aux  di- 
verses sources  citées  plus  haut  nous  avons  tenté  une  étude 
statistique  des  Skoptsy. 

C'est  en  Russie,  avons  nous  dit,  que  la  secte  prit  naissan- 
ce et  s'est  développée.  En  dehors  de  l'empire,  la  Roumanie 
et  la  Moldavie  en  renferment  seules  un  certain  nombre,  ve- 
nus sans  doute  de  la  Bessarabie  qui  représente  l'un  des 
foyers  russes  les  plus  actifs. 

La  première  statistique  publiée  sur  le  nombre  de  Skop- 
tsy russes  date  de  1733.  A  cette  époque  on  n'en  comp- 
tait guère  que  70  à  80  environ.  Depuis  lors,  leur  propa- 
gande a  été  assez  active  pour  qu'en  [875,  un  travail  alle- 
mand estime  leur  nombre  de  20  'a.  3o  mille,  chiffre  qui  s'est 
encore  accru  depuis  lors  *. 

Si  l'on  considère  d'abord  leur  groupement  par  contrées, 
on  arrive  au  résultat  suivant: 

La  proportion  par  habitant  sur  100,000  est: 

Pour  St-Pétersbourg,Orel,KostrDma,Riazan,de. ..  5  à  10 
ï     Koursk,  Kalouga,  Tauride,  Perm,  Moscou, 

Samara,  Saratov,  Bessarabie,  de 2  à    5 

t  laroslav,  Tver,  Smolensk,  Toula,  Tambov, 
Simbirsk,  Arkhangel,  Novgorod,  Pskov, 
Esthonie,Tchernigov,Voronej,Nijnî-Novgo- 

rod,  Wiatka,  Oufa,  de 1  à    2 

r     Livonie,  Vilna,   Minsk,  Kazan,   Penza,  Eka- 

terinostav,  au-dessous  de 1  "/„ 

Si  Ton  compose  avec  ces  chiffres  une  carte  de  réparti- 
tion on  observe  que  les  gouvernements  de  la  Russie  qui 

'  Zeiischrift  JUr  Ethnologie,  iSyS,  p.  37-69. 


rr 


„GooiJ 


6io 

renferment  des  Skoptsy,  forment  un  groupe  géographique 
dont  le  centre  répKïnd  à  peu  près  à  Moscou  et  qui  s'étend 
à  la  presque  totalité  de  la^Russie  d'Europe.  La  région  est 
située  à  l'ouest  de  l'Oural  et  ne  se  propage  point  en  Asie. 

A  l'égard  des  conditions  sociales  qu'occupent  les  adep- 
tes de  cette  nouvelle  religion,  nons  trouvons  une  réparti- 
tion dressée  en  1866. 

A  cette  époque  la  Russie  renfermait  5,467  Skoptsy  qui 
se  subdivisaient  de  la  manière  suivante  : 

Hommes 2,617 

Femmes i,85o 

Total 5,467 


^  ^        (hommes 2,077 

Paysans 2,907... J,  '  " 

■'  '^  '       jlerames 890 


Nobles 

Officiers 

Fonctionnaires 
Ecclésiastiques 

Marchands.... 

Divers 


'  I  femm 


Totaux.. 


2,421. 

23. 

5^67 


14 


(hommes ii465 

'  I  femmes 956 

23 

5,467 


En  1869,  la  secte  possédait  une  grande  fortune  et  son 
chef  Plotizyn  était  à  lui  seul  à  la  tête  de  48  millions  de  rou- 
bles. Ces  ressources  se  sont  encore  accrues  et  aujourd'hui  la 
secte,  malgré  l'activité  des  poursuites  dont  elle  est  l'objet,  est 
devenue  une  puissance  financière  à  laquelle  se  rattachent  des 
banquiers  et  des  industriels,  des  marchands  et  plus  spécia- 


,ï  Google 


6ii 

lement  des  agents  de  commerce  et  des  changeurs,  comme 
cela  s'observe  particulièrement  à  Moscou  et  à  Saint-Péters- 
bourg. 

b"  De  certaines  pratiques  diverses 

Sous  ce  titre  nous  rangerons  un  certain  nombre  de  ma- 
nœuvres ou  d'opérations  n'ayant  pas  un  caractère  aussi 
précis  que  les  précédentes  et  portant  encore,  suivant  des 
points  de  vue  divers,  sur  les  organes  génitaux. 

Ainsi,  nous  mentionnerons  tout  d'abord  une  certaine 
mutikiion  qui  se  rapproche  par  ses  effets  de  la  castration 
proprement  dite.  Il  s'agit  de  cette  pratique  commune  chez 
les  Australiens  de  la  province  Adélaïde  et  par  laquelle  les 
hommes  s'ouvrent  au  périnée  le  canal  de  l'urètre,  de  ma- 
nière à  établir  une  fistule  qui  supprime  absolument  la  fé- 
condation. 

Quelques  explorateurs  affirment  que  cette  mutilation  a 
été  inspirée  par  la  haine  de  l'esclavage  et  la  révolte  contre 
la  domination  envahissante  du  peuple  conquérant.  Ce  serait 
ainsi  une  variante  de  l'opération  dans  l'idée  de  suicide  de 
race. 

Mais  il  faut  convenir  que  si  tel  est  le  but  des  Austra- 
liens, il  n'en  saurait  être  de  même  des  autres  mutilations 
que  nous  avons  à  mentionner  et  qui  ont  un  objet  tout  dif- 
férent, celui  d'exalter  les  instincts  erotiques. 

Ainsi,  la  relation  des  voyages  d'Améric  Vespuce'  ren- 
ferme déjà  quelques  documents  relatifs  à  une  habitude 
qu'avaient  les  femmes  des  populations  primitives  du  Pérou 
et  Mexique,  d'enfler  le  membre  viril  de  l'homme  en  appli- 

'  Strasbourg,  i5o5. 


lyGoogle 


6l2 

quant  à  sa  surface  des  sucs  irritants  ou  en  le  faisant  piquer 
par  des  insectes  venimeux*. 

Toutefois  des  accidents  graves  et  parfois  mortels  étant 
survenus  à  la  suite  de  ces  tentatives,  les  mêmes  populations 
eurent  l'idée  d'entourer,  dans  le  même  but,  le  pénis  d'un 
étui  de  résine  élastique  (caoutchouc). 

De  là  aux  instruments  de  métal  ou  de  bois  que  s'intro- 
duisent dans  la  verge  les  Dayaks  de  Bornéo  et  les  Canaques 
de  la  Nouvelle-Calédonie,  il  n'y  a  qu'un  pas. 

Or  le  Kalang  des  Dayaks  consiste  en  une  tige  de  cui- 
vre ou  d'argent  long  de  6  à  lo  centimètres  et  large  comme 
trois  doigts  pressés  l'un  sur  l'autre.  Cette  tige  est  introduite 
dans  la  verge  par  une  plaie  située  au-dessous  du  canal  uré- 
tral  et  parallèle  à  celui-ci.  Elle  traverse  ainsi  cette  région  de 
manière  à  présenter  ses  deux  extrémités  libres,  l'une  en 
avant,  l'autre  en  arrière  regardant  le  pubis.  Le  docteur 
Meyer  de  Dresde*  en  a  constaté  la  présence  chez  les  tribus 
qui  portent  les  noms  de  Bohan,  Longwaï,  Ambalan,  Men- 
dalan,  Siban,  Taman,  Movang,  etc. 

Au  moment  de  l'érection,  cette  tige  est  garnie  d'orne- 
ments les  plus  bizarres  et  les  plus  divers:  boules  de  bois 
ou  de  métal,  de  pierre,  de  corne,  ou  bien  des  nœuds  d'étof- 
fes, des  houppes,  des  plumes  ou  du  corail  fin.  M.  Mayer 
cite  le  cas  d'un  Longwaï  qui  portait  aux  deux  bouts  de  son 
kalang  une  pièce  de  monnaie  percée  à  son  centre. 

Le  kalang  est  d'ailleurs  un  objet  de  famille  dont  on  se 
fait  présent  pour  établir  des  alliances  et  entretenir  de  bons 
rapports. 

L'application  du  kalang  est  faite  par  de  vieilles  femmes 

'  Paw,  Op.  cit..  t.  m,  p.  63. 

*  Recueil  hollandais  de  Batavia,  i855  et  iSfp. 


,ïGoo^ 


-^ 


6i3 

ou  matrones:  mais  aucun  homme  ne  peut  en  porter  s'il  n'a 
été  h  la  «chasse  aux  têtes.* 

L'introduction  d'un  semblable  appareil  dans  le  corps 
de  la  verge  pourrait  passer  pour  amplement  sufhssant.  11 
n'en  est  rien,  et  le  plus  ordinairement  les  Dayaks  en  por- 
tent deux,  le  premier  d'avant  en  arrière,  le  second  transver- 
sal. Le  nec  plus  ultra,  le  grand  luxe  est  d'en  porter  trois^ 
le  dernier  traversant  superficiellement  la  partie  dorsale  de 
la  verge. 

Le  côté  curieux  d'une  telle  invention  c'est  que  ce  sont 
les  femmes  qui  l'imposent  aux  hommes  sous  peine  d'être 
absolument  abandonnés  par  elles.  Ainsi,  les  femmes  de  ces 
tribus  ne  recherchent  et  n'acceptent  que  les  hommes  qui 
portent  le  kalang.  C'est  une  condition  sine  qua  non  pour  ob- 
tenir leurs  faveurs;  et  cependant,  il  émousse,  dit-on,  si  ra- 
pidement leurs  sens,  qu'elles  deviennent  souvent  dès  la  jeu- 
nesse, toul-à-fait  infécondes. 

Nous  terminerons  ici  notre  courte  étude  sur  les  muti- 
lations ethniques,  en  répétant  ce  que  nous  disions  au  début 
de  ce  travail,  c'est-à-dire,  que  notre  intentior 
saurait  être  que  d'en  tracer  un  rapide  aperçu  se 
premier  et  simple  essai,  réservant  ultérieuremi 
complète  et  détaillée  de  cette  vaste  question. 

M.  Cazaus  de  Fondouce.  Le  crâne  portan 
d'abrasion,  auquel  M.  Magitot  a  fait  allusion  c( 
été  signalé  par  moi,  n'a  pas  été  trouvé  dans  le  i 
des  Basses-Pyrénées,  mais  bien  dans  celui  des  ] 
Rhône.  Je  puis  ajouter  à  la  liste  des  mutïlatior 
sion  qu'a  donnée  notre  collègue  un  fait  de  plus 
d'un  crâne  provenant  de  la  grotte  du  Col-de-G 
le  département  de  l'Hérault,  sur  le  quel  j'ai  rec( 


,ï  Google 


6i4 

rement  les  marques  de  cette  opération.  Ainsi,  sur  le  littoral 
Méditerranéen,  nous  n'avons  encore  observé  que  deux  crâ- 
nes mutilés  et  tous  deux  par  abrasion.  Je  ne  crois  pas  qu'on 
ait,  jusqu'à  ce  jour,  observé  sur  les  crânes  préhistoriques 
de  la  même  région  de  fait  de  trépanation  complète  par  en- 
lèvement d'une  rondelle. 


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SUR  UN  CAS  DE  MICROCÉPHAUE  EN  PORTUOAL 


M.  F-A.  d'Ouveira  FEtjXo 


Parmi  les  types  anormaux  qui,  à  présent,  peuvent  nous 
donner  une  idée  plus  ou  moins  lointaine  de  Paspect  géné- 
ral des  hommes  primitifs,  les  microcéphales  sont,  sans  aucun 
doute,  des  plus  curieux  et  méritent  toujours  de  fixer  notre 
attention.  C'est  pourquoi  je  présente  une  microcéphale,  qui 
est,  je  crois,  un  des  plus  beaux  exemplaires  connus  jusqu'à 
présent  et  dont  je  vais  faire  tout  de  suite  la  description. 

La  nommée  Bemvinda  est  une  femme  âgée  de  34  ans. 
Elle  a  été,  immédiatement  après  sa  naissance,  reçue  à  l'hos- 
pice des  enfants  trouvés  de  la  petite  ville  d'Abrantes  dans 
l'Extremadura;  circonstance  malheureuse  qui  m'empêche  de 
pouvoir  vous  fournir  des  renseignements  relatifs  à  ses  pa- 
rents, renseignements  qui  pourraient  jeter  une  intéressante 
lumière  sur  ce  sujet. 

Sa  tête  et  son  corps  présentent  les  mesures  suivantes: 


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r 


6i6 

Diamètre  antéro-postérieur  maximum, 
du  point  inter-sourcilier  au  point  oc- 
cipital maximum i3' 

Diamètre  transverse  maximum 8,5 

Longueur  simple  de  la  face,  du  point 
inier-sourcilier  au  point  alvéolaire,  en- 
tre les  dents  incisives  médianes  su- 
périeures et  à  leur  racine 7,  i 

Diamètre  bi-zygomatique 10 

Distance  du  trou  auditif  au  plan  posté- 
rieur        6 

Distance  du  point  sus-orbitaire i3,6 

•  »  point  alvéolaire  supérieur  au 

plan  postérieur i6,5 

Hauteur  du   vertex  au-dessus    du  sol 

(taille) 140 

Hauteur  du  trou  auditif  au-dessus  du 

sol i32,5 

Hauteur  du  menton  au-dessus  du  sol..  122,5 

Diamètre  frontal  minimum 8 

Indice  céphalique 65,3 

>      facial 71 

»      général  de  la  tête 1 ,76 

Angle  facial  de  Camper 60° 

Diamètre  fronto-sincipital 1 1%5 

1         fronto-nasal  (à  l'épine  nasale 

antérieure  et  inférieure) 5,5 

Diamètre  mento-occipital  maximum...  17,0 

•  bimastoïdien io,5 

>         entreiesanglesdelamandibule  9 

•  entre  les  trous  auditifs  exté- 
rieurs        9 


,-;& 


6i7 
Diamètre  entre  les  apophyses  orbitaires 

externes 8° 

»  »       •  rebords      orbitaires 

internes 2 

Circonférence  horizontale  (fronto-occipi- 

tale) 36 

Arc  inter-auriculaire  passant  par  la  par- 
tie la  plus  élevée  de  la  tête 24 

Mesure  de  l'angle  de  la  mâchoire tSo" 

Distance  de  l'extrémité  d'une  main  à 
l'extrémité  de  l'autre,  les  bras  étant 

ouverts 1 42^ 

Longueur  du  membre  supérieur,  de  l'a- 

cromion  à  l'extrémité  des  doigts 61 

Longueur  du  membre  inférieur,  du  grand 
trochanter  au  sol 73 

Chez  cette  microcéphale  comme  chez  d'autres  le  progna- 
tisme  est  accentué  ;  la  mâchoire  inférieure  est  plus  petite 
que  la  supérieure  et  l'arcade  alvéolaire  est  en  retrait  de  la 
supérieure  de  d^^oz.  Le  nez  long  et  saillant  est  très  proémi- 
nent sur  la  face,  dont  le  développement  ne  s'est  pas  arrêté 
comme  celui  du  crâne.  Le  cuir  chevelu,  épais,  se  laisse  fa- 
cilement rider. 

Par  ce  que  je  viens  de  dire  on  peut  voir  que  l'arrêt  de 
développement  du  cerveau,  étant  général,  il  est  plus  remar- 
quable dans  la  partie  antérieure,  la  région  frontale;  les  fonc- 
tions cérébrales  en  subissent  les  conséquences,  et  les  actes 
de  l'intelligence  sont  très  restreints  chez  cette  microcéphale. 
it  de  s'approcher  de  quelqu'un  qu'on  lui 
in,  elle  obéit  avec  lenteur  et  alors  elle  passe 
Jtour  de  la  personne  désignée,  ou  prend  le 


.,Goo|\ 


main,  qu'on  lui  présent,  mais  elle  ne  la  serre  pas.  Elle  sait 
se  servir  d'un  verre  pour  boire,  d'une  cuillère  pour  manger, 
mais  elle  ne  connaît  pas  l'usage  du  couteau  ou  de  la  four- 
chette. C'est  là  tout  ce  qu'on  a  pu  lui  apprendre;  on  a  es- 
sayé de  la  faire  ouvrir  une  porte  avec  une  clef:  ce  fut  im- 
possible. 

Elle  ne  parle  pas.  On  m'a  dit  qu'on  lui  avait  déjà  en- 
tendu prononcer  les  mots  femme,  diable,  je  ne  veux  pas, 
(mulher,  dt'abo,  nao  qtiero),  ou  des  sons  articulés  se  rappro- 
chant de  ces  mots,  qu'elle  doit  entendre  souvent  aux  alié- 
nées avec  lesquelles  elle  vit  toujours;  mais  ces  mots  mê- 
mes, il  est  excessivement  rare  qu'elle  les  prononce  et  elle 
n'y  attache  aucun  sens.  Toute  expression  du  langage  se  ré- 
duit chez  Bemvinda  à  un  cri  aigu  et  perçant  semblable  à 
celui  de  certains  singes. 

Sur  sa  figure  on  ne  remarque  que  l'expression  de  l'hé- 
bétude, de  L'indifférence  pour  tout  ce  qui  l'entoure.  Elle  se 
met  facilement  en  colère,  surtout  si  on  veut  lui  6ter  un  châle 
qu'elle  porte  d'ordinaire,  ou  si  on  la  menace  de  la  mettre 
dans  la  salle  des  idiotes  immondes,  désignée  à  l'hôpital  des 
aliénées,  par  les  employées,  sous  le  nom  de  California.  Alors 
elle  lève  la  tête,  pousse  un  cri  aigu,  fait  de  successives  ex- 
pirations forcées  et  rapides  par  le  nez,  et  avec  l'un  des  mem- 
bres supérieurs  elle  exécute  un  mouvement  en  tournant  en 
dehors  la  paume  de  sa  main,  comme  pour  chercher  à  éloi- 
gner d'elle  celui  qui  la  menace.  C'est  seulement  alors  que  - 
sa  figure  prend  quelque  animation,  elle  ride  les  lèvres  et 
dans  le  regard  de  Bemvinda  on  peut  remarquer  un  éclat 
de  lumière.  Puis,  si  on  la  caresse,  elle  fait  une  grimace 
sans  expression  et  se  calme. 

Elle  témoigne  un  peu  d'affection  pour  une  des  em- 
ployées de  l'hôpital  (celle  qui  est  là  depuis  plus  longtemps); 


,;„„.. ,^glc    P 


6i9 

mais  celte  affection  ne  se  traduit  chez  Bemvînda,  que  par 
une  obéissance  plus  prompte  aux  ordres  qu'elle  lui  donne  et 
par  une  grimace  particulière. 

Les  sens  sont  tous  un  peu  émoussés,  excepté,  peut-être, 
le  sens  de  ta  vue;  tout  dernièrement  je  l'ai  vu  regarder  avec 
attention  et  curiosité,  à  ce  qu'il  semblait,  un  portrait  à  l'huile 
qui  se  trouvait  dans  un  appartement,  où  elle  n'était  jamais 
entrée.  Ses  yeux  sont  strabiques.  L'odorat  n'est  point  fin  :  elle 
semble  si  peu  sensible  à  Podeur  de  Popoponax,  qu'à  celui 
qui  se  répand  d'un  flacon  de  sels,  qu'on  lui  présente  à  six 
ceiitimètres  des  narines,  mais  si  on  l'approche  trop,  alors 
elle  détourne  la  tête.  Les  muscles  de  l'aile  du  nez  sont  as- 
sez développés;  elle  ouvre  souvent  les  narines  et,  très  fré- 
quemment, elle  fait  des  expirations  forcées  et  rapides  pous- 
sant les  mucosités  nasales. 

Son  tact,  aussi  bien  que  son  goijt,  n'est  point  délicat 
et,  chose  remarquable,  elle  ne  témoigne  aucune  avidité  pour 
les  aliments;  il  arrive  souvent  qu'on  les  lui  présente  et  qu'elle 
ne  les  prend  pas,  mais  alors  si  on  les  lui  met  dans  la  bou- 
che, elle  mange  comme  à  l'ordinaire  ;  par  conséquence  on 
ne  peut  dire  qu'elle  ne  prend  pas  les  aliments,  faute  d'ap- 
pétit. Quand  elle  mange  elle  prend  ses  mets  avec  les  doigts, 
dans  le  creux  de  sa  main  ou  avec  une  cuillère  et  les  porte 
à  la  bouche.  L'audition  semble  ne  pas  être  exquise;  elle  ne 
fait  pas  attention  à  la  musique;  les  oreilles  sont  grandes. 

Aucun  sentiment  de  pudeur  ne  se  remarque  en  elle;  elle 
se  laisse  déshabiller  sans  résistance  et  sans  y  faire  attention. 

Si,  sous  l'influence  de  l'atrophie  de  l'encéphale  les  ac- 
tes psychiques  ne  sont,  presque,  qu'ébauchés,  les  mouve- 
ments aussi  sont  loin  d'être  parfaits. 

Bemvinda  se  tient  presque  toujours  assise  sur  le  soi,  les 
membres  inférieurs  fléchis  et  embrassés  par  les  membres  su- 


,ï  Google 


620 

périeurs  :  c'est  celle-là  sa  position  ordinaire,  qu'elle  maintient 
longtemps,  balançant  en  même  temps  sa  tête  et  même  tout 
son  corps  de  droite  à  gauche.  Quelquefois  aussi  elle  se  lève 
va  à  la  fenêtre,  appuie  les  mains  sur  les  barreaux,  et  là  elle 
continue  son  éternel  mouvement  de  pendule,  se  tenant  tour- 
à-tour  sur  un  pied  ou  sur  l'autre. 

La  position  des  membres  supérieurs,  quand  ils  n'en- 
tourent pas  les  genoux  est  celle  ci  :  les  bras  pendants.  Pavant- 
bras  ramené  sur  ta  poitrine  et  les  mains  pendantes  et  rap- 
prochées. Le  tronc  et  la  tête  sont  penchés  en  avant,  qu'elle 
soit  assise  ou  debout,  et  si  elle  entend  quelque  bruit,  alors 
elle  redresse  le  tronc,  ouvre  les  yeux,  lève  la  tête,  la  tourne 
à  droite  et  à  gauche  en  faisant  en  même  temps  des  mouve- 
ments de  haut  en  bas.  L'aspect  de  ces  mouvements  est  très 
simien. 

Sa  marche  est  lourde;  ses  pieds  se  posent  àplat  sur  le 
sol.  Elle  tombe  facilement,  et  quand  elle  marche  ou  se  tient 
debout  le  tronc  est  courbé  en  avant,  un  peu  6échi  sur  le  bas- 
sin, et  les  cuisses  un  peu  fléchies  de  même  sur  les  jambes  : 
son  corps  ne  se  redresse  jamais. 

De  tout  ceci  il  résulte  que  l'attitude  et  les  mouvements 
de  cette  femme  ont  bien  des  caractères  qui  sont  habituels 
chez  les  singes. 

Les  fonctions  de  la  vie  organique  s'exercent  toutes  as- 
sez régulièrement.  Elle  a  été  réglée  à  l'âge  ordinaire  et  l'est 
encore.  Elle  n'a  jamais  été  malade;  enfin  tout  cela  démon- 
tre que  les  lobes  cérébraux  sont  plus  profondément  atteints 
que  le  cervelet,  et  que  les  centres  végétatifs  sont  ceux  qui 
ont  échappés  le  plus  aux  conséquences  de  l'atrophie  de  l'en- 
céphale. 

Voici  la  description  de  cette  femme,  qui  me  semble  as- 
$éz  curieuse.  La  tête  est  une  des  plus  petites  que  Ton  con- 


,ï  Google 


621 

naisse,  à  en  juger  par  les  dimensions  extérieures,  que  j'ai 
présentées  et  dont  on  doit  retrancher  l'épaisseur  des  tissus 
mous,  pour  se  faire  à  peu  près  une  idée  des  mesures  du  crâne. 

En  effet,  la  moyenne  de  la  circonférence  horizontale  des 
crânes  microcéphales  étant  de  349  millimètres  et  celle  de 
la  tête  de  Bemvinda  étant  de  36o  millimètres,  on  peut  esti- 
mer à  bien  moins  de  340  la  circonférence  horizontale  de  son 
crâne,  ce  qui  est  encore  moins  que  dans  les  cas  de  Bastia- 
nelli  {340  et  36o). 

La  capacité  de  la  cavité  crânienne  ne  doit  pas  dépas- 
ser probablement  410  centimètres  cubes,  le  poids  de  l'en- 
céphale ne  doit  pas  être  supérieur  à  423  grammes.  Or,  la 
moyenne  de  !a  capacité  crânienne  des  microcéphales  étant 
de  440  centimètres  cubes,  et  les  moindres  chiffres  obtenus 
par  Broca  étant  414  centimètres  cubes,  on  voit  que  le  crâne 
de  Bemvinda  est  un  des  plus  petits  que  l'on  connaisse. 

Il  est  excessivement  rare  que  les  microcéphales  attei- 
gnent un  âge  avancé.  Ils  meurent  presque  tous  dans  leur 
jeunesse,  ou  même  bien  avant  la  jeunesse.  La  microcéphale 
dont  je  parle  est  encore  remarquable  sur  ce  point  de  vue, 
car  elle  a  aujourd'hui  34  ans  et  jouit  d'une  santé  parfaite.  M, 
Vilanova  connaît  un  microcéphale  âgé  de  60  ans,  c'est  le 
seul  exemplaire,  à  ma  connaissance,  plus  âgé  que  le  mien. 

En  examinant,  autant  que  possible,  la  surface  extérieure 
du  crâne  de  Bemvinda,  on  n'y  trouve  pas  de  lésion  osseuse, 
ou  quelque  autre  chose,  qui  mérite  de  fixer  l'attention;  il 
est  parfaitement  symétrique  sans  aucun  applatissement  re- 
marquable. On  doit  regarder  ce  cas  comme  de  microcépha- 
lie  proprement  dite,  selon  la  classification  que  Broca  a  faite 
des  microcéphales. 

L'absence,  on  peut  le  dire,  absolue  du  langage  rappelle  les 
pithécoïdcs.  Le  petit  développement  des  lobes  frontaux  du 


ly  Google 


622 

cerveau  explique  suffisamment  que  ma  microcéphale  ne  puisse 
que  pousser  des  cris  et  que  l^articulation  de  la  parole  lui 
soit  presque  impossible;  c^est  tout-à-fait  ce  qui  se  passe  chez 
les  singes  au  cerveau  desquels  le  cerveau  des  microcépha- 
les ressemble  beaucoup  selon  Wagner  et  Sander. 

L'arrêt  de  développement  du  crâne,  cause  possible  de 
la  microcéphalie,  si  étudiée  par  M.  Virchow,  considérée  com- 
me règle  par  M.  Vogt,  et  rejetée  à  présent  après  les  travaux 
de  Broca,  ou  bien  une  cause  extérieure  et  pathologique,  se- 
lon le  sentiment  de  M.  de  Quatrefages,  nous  expliqueraient 
suffisamment  l'arrêt  de  croissance  du  cerveau;  mais  il  est 
bien  possible  que  celui-ci  ne  possédant  pas  assez  d'irritabi- 
lité pour  continuer  à  croître,  sa  croissance  se  soit  arrêtée 
à  une  certaine  période  de  la  vie  embryonnaire.  Le  cerveau, 
après  avoir  traversé  pendant  la  vie  embryonnaire  des  pha- 
ses diverses,  qui  reproduisent  en  quelque  sorte  des  types 
appartenant  à  des  animaux  inférieurs,  rudimentaire  au  com- 
mencement et  se  perfectionnant  d'une  manière  successive 
et  graduelle,  est  arrêté  dans  son  développement  à  un  moment 
donné  et  la  microcéphalie  se  produit.  En  pensant  ainsi  on 
suit  Popinion  de  MM.  Marshall,  Vilanova  et  tant  d'autres  qui 
ont  émis  la  théorie  de  la  microcéphalie  par  arrêt  de  déve- 
loppement, par  atavisme,  théorie  séduisante  et  en  rapport 
avec  les  modernes  études  d'embryologie  et  vers  laquelle  je 
m'incline,  quoique  je  sois  le  premier  à  déclarer  qu'il  y  a  en- 
core trop  de  problèmes  à  résoudre. 


EXFUOATION  D£  LA.  PIANOHE 


l-a  microcéphale  Bemvinda. — Fig.  i.  Vue  de  face-  Fig.  a.  Vue  de  profil. 


,ï  Google 


„Google 


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Dlsonsslon 

M.  Vilanova:  L'explication  si  intéressante  de  M.  le  doc- 
teur Oliveira  Feijao,  que  nous  venons  d'entendre  avec  tant 
de  plaisir,  sur  la  microcéphale  d'Abrantes,  me  rappelle  le  cas 
de  microcéphalie  que  j'ai  fait  connaître  en  1869  dans  le  Con- 
grès de  Copenhague,  et  que  je  considère  comme  le  plus  ex- 
traordinaire à  cause  de  l'âge  de  l'individu,  encore  vivant 
dans  le  manicome  de  Valencia  en  Espagne,  lequel  doit  avoir 
au  moins  60  ans.  Ce  microcéphale  s'appelle  Vicente  Orts. 
Il  est  né  dans  un  village  près  de  Jativa,  Gastellon  del  Du- 
que. 

Je  n'ai  pu  me  procurer  de  renseignements  relativement 
à  son  ascendance;  il  est  complètement  idiot  et  ne  prononce 
que  des  monosyllabes.  Sa  tête  est  excessivement  petite;  son 
front  très  déprimé,  ses  bras  très  longs,  avec  six  doigts  a  cha- 
que main,  et  des  rudiments  d'un  sixième  aux  pieds. 

M.  ViRCHOw:  Je  ne  parlerai  ici  que  sur  la  microcépha- 
lie comme  une  preuve  de  l'atavisme,  car  toutes  les  autres 
questions  qui  se  rattachent  à  la  microcéphalie  ne  touchent  pas 
la  science  préhistorique. 

Vous  savez,  Messieurs,  que  la  microcéphalie  représente 
selon  mon  opinion  un  phénomène  pathologique  pur  et  que 
j'ai  fait  dès  le  commencement  opposition  à  la  théorie  pro- 
posée par  notre  ami,  M.  Charles  Vogt.  Dernièrement  j'ai 
poursuivi  les  recherches  sur  les  analogies  du  cerveau  et  de 
la  tête  des  microcéphales  avec  le  cerveau  et  la  tête  des  sin- 
ges anthropoïdes.  Quant  au  cerveau,  je  trouve  que  la  par- 
ticularité si  souvent  mentionnée  du  cerveau  microcéphalique 
c.  R.  43 


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624 
de  présenter  un  défaut  d'évolution  dans  la  région  de  la  fosse 
de  Sylvius  et  particulièrement  de  laisser  ouverte  cette  fosse 
et  de  montrer  VInsula  Reilii  sans  couverture,  ne  se  trouve 
régulièremeut  pas  dans  les  cerveaux  des  anthropoïdes,  par 
exemple  du  jeune  gorilla  et  du  jeune  orang-outang.  Quant  à 
la  tête,  vous  voyez  dans  la  microcéphale  très  intéressante 
qui  nous  a  été  présentée  par  M.  le  docteur  Feijâo  combien 
l'ensemble  de  l'apparence  extérieure  se  rapproche  de  celui 
d'un  singe.  Mais  en  examinant  le  crâne  nous  trouvons  aus- 
sitôt un  caractère  tranchant.  Le  crâne  des  anthropoïdes,  les 
plus  hautement  placés  a  un  caractère  spécifique,  qui  exis- 
te dans  la  même  région  où,  intérieurement,  la  fosse  de  Syl- 
vius est  placée,  c'est-à  dire  le  processus  frontalis  squamae 
temporalis.  C'est  un  prolongement  de  l'écaillé  temporale  qui 
s'avance  jusqu'à  l'os  frontal  et  qui  sépare  par  cela  le  parié- 
tal de  l'aile  sphénoïdale. 

Chez  l'homme,  au  contraire,  Paile  sphénoïdale  se  joint 
par  une  suture  au  pariétal,  et  un  interstice  plus  ou  moins 
lai^e  sépare  le  frontal  et  le  temporal.  Quelquefois  le  pro- 
cessus frontalis  manque  chez  les  anthropoïdes,  tandis  qu'il 
se  trouve  chez  l'homme.  Donc,  ce  n'est  pas  un  caractère 
absolu,  mais  seulement  un  caractère  proportionnel.  En  effet 
il  est  presque  absolu  chez  le  gorilla,  il  existe  dans  le  plus 
grand  nombre  de  chimpansés,  il  fait  défaut  dans  beaucoup 
d'orang-outangs  et  dans  un  nombre  encore  plus  grand  de 
gibbons. 

Il  y  a  pour  cela  une  échelle  de  fréquence,  ainsi  que  les 
anthropoïdes  les  plus  supérieurs  diffèrent  le  plus  de  l'homme. 

Chez  l'homme  c'est  l'inverse.  Comme  j'ai  prouvé  par 
plusieurs  travaux  particuliers,  la  race  aryenne  donne  le  mi- 
nimum de  cas  de  processus  frontalis  (à  peu  près  2  ^f)»  '^s 
races  noires,  soit  australiennes,  soit  africaines  donnent  le  . 


vT* 


625 

maximum  (20  à  25  "/«).  Donc,  on  pourrait  dire  que  les  ra- 
ces les  plus  inférieures  sont  les  plus  pithécoïdes. 

Entre  les  races  blanches  et  les  races  noires  les  races 
touraniennes  tiennent  une  place  intermédiaire,  montrant  plus 
de  cas  de  processus  frontalis  et  en  outre  fréquemment  un 
rétrécissement  de  Paile  sphénoïdale  et  une  dépression  de  la 
/égion  temporale,  déviation  à  laquelle  J'ai  donné  le  nom  de 
slénocrotaphie. 

Par  hasard  j'ai  trouvé  dans  le  cabinet  anatomique  de 
Lisbonne  un  nombre  de  crânes  qui  montrent  ces  diverses 
particularités.  Le  processus  frontalis  est  bien  visible  dans 
le  crâne  d'une  négresse,  la  sténocrotaphie  la  plus  pronon- 
cée dans  le  crâne  d'une  femme  âgée,  dans  lequel  la  suture 
coronale  (frontale)  et  sagittale  sont  oblitérées  entièrement, 
la  suture  lambdoïde  en  partie.  Ces  deux  crânes  se  trouvent 
sur  notre  table.  J'y  ai  ajouté  quelques  crânes  humains  d'adul- 
tes, dans  lesquels  on  voit  dans  la  même  région  des  os  in- 
tercalaires. Ils  sont  d'autant  plus  dignes  de  votre  attention 
qu'ils  démontrent  clairement  une  conformation  dont  plu- 
sieurs anatomistes  ont  crû  devoir  dériver  le  processus  fron- 
talis: ils  supposaient  que  \e  processus  frontalis  commença 
par  un  point  d'ossification  isolé,  qui  se  souderait  plus  tard 
à  l'écaillé  temporale. 

En  outre,  je  mets  devant  vous  deux  crânes  de  chim- 
pansés  (mâle  et  femelle],  et  un  de  gorilla  (femelle),  remar- 
quables par  la  belle  évolution  du  processus  frontalis.  Le 
quatrième  crâne,  aussi  d'un  gorilla  mâle  adulte,  ne  laisse 
pas  reconnaître  \e processus^  parce  que,  comme  de  coutumi;, 
les  trois  os  crâniens  sont  soudés  entre  eux.  Ils  appartien- 
nent tous  à  l'excellent  musée  zoologique  de  l'École  Poly- 
technique. 

Enfin,  voilà  un  beau  crâne  de  microcéphale 


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626 

tiré  du  cabinet  anatomique.  Pas  de  traces  dMn  processus 
frontal  ou  de  siénocrotaphie.  La  région  temporale  est  bien 
développée  comme  chez  l'homme  sain.  Ainsi  la  tête  micro- 
céphalique  a  le  type  humain  justement  dans  cette  région 
curieuse  où  les  anthropoïdes  montrent  la  plus  grande  dé- 
viation du  type  humain.  Et  comme  je  ne  connais  aucun 
crâne  microcéphalique  possédant  un  processus  frontal  tan- 
dis que  plusieurs  races  humaines  présentent  dans  cette  ré- 
gion le  type  pithecoïde,  il  faut  conclure  que  la  tète  inicro- 
céphalique  n'est  pas  pithecoïde,  tandis  que  la  tête  austra- 
lienne et  nègre  est  fréquemment  et  d'une  manière  très  assu- 
rée pithecoïde. 

Avant  de  finir  je  présenterai  un  petit  mémoire  publié 
dans  les  bulletins  de  PAcadémie  des  Sciences  de  Berlin,  sur 
l'évolution  du  crâne  du  gorilla  dans  la  jeunesse.  J'ai  essayé 
d'y  prouver  qu'il  y  a  aussi  chez  le  gorilla  des  os  interca- 
laires temporaux,  mais  qu'ils  se  développent  au-dessous  du 
processus  frontalis  et  que  s'ils  se  soudaient  à  Pécaille  tempo- 
rale, il  en  résulterait  un  rapprochement  de  Pécaille  tempo- 
rale vers  Pos  zygomatique  ou  malaire,  et  non  pas  vers  l'os 
frontal.  C'est  pour  cela  que  je  tiens  à  considérer  \& processus 
temporaiis  chez  l'homme  comme  un  pithécomorphisme,  peut- 
être  atavique,  et  les  os  intercalaires  temporaux  comme  pa- 
thologiques et  indépendants  du  processus  temporaiis,  et  que 
je  rejette  Pidée  que  la  microcéphalie  soit  pithecoïde  dans  le 
sens  scientifique  et  zoologique. 

Le  défont  de  développement  dans  la  tête  du  gorilla 
n'est  moins  sensible  que  dans  la  tête  des  microcéphales.  Par 
exemple,  le  crâne  de  la  microcéphale  du  cabinet  de  Lis- 
bonne possède  une  capacité  qui  est  de  3o  centimètres  plus 
grande  que  celle  du  crâne  du  gorilla  mâle  le  plus  développé 
que  je  connais.  L'apparente  grandeur  du  crâne  du  gorilla 


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627 

réside  dans  le  développement  extraordinaire  des  crêtes  qui 
forment  une  espèce  d'ornement  extérieur,  mais  qui  n'agran- 
dissent pas  te  volume  du  cerveau.  Chez  les  microcéph 
cette  particularité  manque  aussi.  De  cette  manière  je  p 
qu'il  faut  renoncer  pour  l'avenir  à  la  théorie  de  la  na 
atavistique  de  la  microcéphalie. 


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SUR  QUELQUES  FORMES  SU  MARIAGE  POPULAIRE 
EN  PORTUGAL 


CONTRIBOTIOK  À  LA   CONNAISSANCE  DE   l.'ÉTAT    SOCIAL 

S  DE  LA  PÉNINSULE 


M.  GONSICLIERI   PeDROSO 

Le  résultat  peut-être  le  plus  inattendu  de  la  nouvelle 
école  historique  a  été  l^itnportance  que  tout  à  coup  a  prise 
l'étude  des  superstitions,  des  croyances  et  des  usages  popu- 
laires de  Pactualité,  pour  la  connaissance  de  Tétat  social 
de  cette  phase  du  développement  humain  qu'on  a  surnom- 
mée la  t préhistoire»,  et  encore  tl'histoire  de  nos  origines*, 
Urgeschichte  comme  les  Allemands  l'appellent. 

On  peut  presque  affirmer  aujourd'hui  que  l'étude  des 
superstitions  et  des  usages  des  peuples  constitue  à  elle  seule 
une  véritable  archéologie,  qui  doit  être  cultivée  soigneuse- 
ment par  tous  ceux  qui  font  de  la  première  période  de  la  vie 
de  l'humanité  l'objet  de  leurs  travaux  et  de  leurs  médita- 
tions. 

Il  est  vrai  que  les  matériaux  des  deux  sciences  sont 
d'une  nature  toute  différente;  mais  que  l'on  cherche  à  con- 


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629 
naître  au  moyen  des  rudes  outils  en  silex  Tétat  embryon- 
naire de  rindustrie  de  nos  ancêtres  quaternaires^  ou  que 
Ton  fouille  sous  la  superstition  ridicule  et  sous  le  symbole  in- 
compréhensible, pétrifié,  pour  ainsi  dire,  à  la  dernière  cou- 
che de  notre  société  actuelle,  la  pensée  et  Porganisation  so- 
ciale de  nos  aïeux  les  plus  lointains,  le  but  en  est  toujours 
le  même,  ou  plutôt  Tobjet  des  deux  sciences  se  complète 
mutuellement,  car  il  a  trait  à  Thomme  primitif,  envisagé 
dans  sa  double  vie  —  matérielle  et  morale.  C'est  pour  cela. 
Messieurs,  que  j'ose  vous  demander  pour  ma  note  une  place 
modeste  à  côté  de  vos  savants  travaux,  et  que  je  ne  crois 
pas  être  tout  à  fait  déplacée,  au  milieu  de  vos  importantes 
recherches,  une  exposition  sommaire,  cela  va  sans  dire,  de 
quelques  formes  du  mariage  populaire  en  Portugal,  pour 
servir  de  contribution  à  la  connaissance  de  Tétat  social  des 
anciens  habitants  de  la  Péninsule,  antérieurs  à  la  domina- 
tion romaine. 

On  regarde  aujourd'hui  les  superstitions,  les  mythes  et 
quelques  usages  et  croyances  populaires  comme  les  débris 
d'une  phase  sociale  primitive  qui  se  sont  continués  jusqu'à 
nous  en  vertu  de  la  loi  de  tpersistance*,  triomphant  de 
tous  les  obstacles  et  résistant  avec  succès  à  toutes  les  assi- 
milations qui  ont  toujours  fini  par  être  impuissantes  à  les 
déraciner. 

Cette  façon  d'envisager  les  superstitions  et  les  usages 
du  peuple,  est,  on  peut  le  dire,  à  l'heure  qu'il  est,  univer- 
sellement admise  par  tous  les  savants,  et  jusque  dans  le  do- 
maine de  l'archéologie  préhistorique  il  y  a  quelques  années 
que  l'illustre  Sven  Nilsson  en  a  fait  l'application.  On  peut 
voir  de  même  ce  que  la  mythologie  comparée  et  l'histoire 
des  religions  nous  apprend  sur  l'homme  primitif  dans  un 
chapitre  du  récent  et  magnifique  ouvrage  de  mon  émi- 


,ï  Google 


63o 

neni  confrère  M.  H.  Hildebrand  sur  les  peuples  préhistori- 
ques. 

Or  de  toutes  ces  superstitions,  de  tous  ces  usages, 
les  plus  persistants  sont  ceux  qui  ont  trait  à  la  famille, 
à  sa  constitution  et  aux  relations  mutuelles  entre  ses  mem- 
bres. 

Avant  l'invasion  romaine,  à  vrai  dire  il  n'existe  pas 
d'histoire  de  la  Péninsule  ibérique.  Ce  qu'on  sait  à  l'égard 
des  Carthaginois,  des  Phéniciens,  des  Grecs  et  encore  des 
populations  des  Celtes  et  des  Ibères  est  bien  peu  de  chose. 
Ce  seront  seulement  les  efforts  combinés  de  l'archéologie,  de 
l'anthropologie,  de  la  linguistique,  de  l'ethnographie,  de  la 
mythologie,  de  l'épigraphie,  de  l'onomastique,  etc.,  etc,  qui 
permettront  de  grouper  les  éléments  indispensables  pour  la 
connaissance  des  différentes  phases  de  la  civilisation  de  la 
Péninsule,  jusqu'au  moment  où  les  Romains  y  mirent  le  pied. 
Des  trois  conquêtes  historiques  du  territoire  de  ce  côté  des 
Pyrénées,  la  romaine,  la  gothique  et  l'arabe,  la  première 
est  celle  qui  a  assimilé  le  plus  intimement  les  habitants,  à 
tel  point  que  les  deux  autres,  bien  que  postérieures,  n'ont 
pas  pu  en  effacer  les  traces.  Voyons  toutefois  ce  que  fit 
la  conquête  romaine. 

Elle  imposa  sa  langue,  en  faisant  du  latin  l'idiome  d'usa- 
ge officiel  et  le  moyen  de  communication  avec  les  autres 
provinces  de  l'empire.  Elle  imposa  les  institutions  adminis- 
tratives de  Rome  en  créant  dans  la  Péninsule  autant  de  pe- 
tites images  de  la  ville  éternelle,  qu'il  y  avait  de  lieux  de 
quelque  importance.  Les  anciens  usages,  cependant,  les 
mœurs  des  populations  pré-romaines  se  sont  continués  com- 
me auparavant.  Ni  la  conquête  romaine,  ni  à  plus  forte  rai- 
son aucune  des  dominations  postérieures  n'ont  changé  d'une 


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.  D,a,i,„db,Google 


•  63 1 

manière  durable  les  conditions  ethnographiques  de  la  Pé- 
ninsule. 

En  ce  qui  concerne  la  conquête  romaine,  ce  n'était  pas 
la  petite  population  du  Latium,  ni  même  la  population  de 
ritalie  entière  qui  seraient  en  mesure  d"'envoyer  dans  toute 
TEurope  connue  alors,  dans  une  grande  partie  de  l'Asie 
jusqu'à  PEuphrate  et  dans  l'Afrique  baignée  par  la  Méditer- 
ranée des  contingents  assez  importants  pour  changer  à  jamais 
la  carte  ethnographique  des  différentes  provinces  de  l'cm- 


lyGoogle 


632 

Celui  qui  connaît  les  beaux  travaux  de  Sir  John  Lub- 
bock  et  de  Tylor  sur  la  civilisation  des  sauvages,  et  rim- 
portant  ouvrage  de  Mac-Lennan  sur  le  mariage  primitif  et 
les  formes  les  plus  rudimentaires  de  la  famille,  sera  étonné, 
sans  doute,  de  rencontrer,  parmi  les  usages  et  coutumes  du 
peuple  portugais,  et  comme  réalité  existante,  et  sous  la  for- 
me de  symbole  {le  symbole  étant  le  dernier  vestige  de  la 
coutume),  des  traces  non  équivoques  de  tous  ou  presque 
tous  les  usages  qu^on  a  rencontrés  ailleurs,  constituant  Pes- 
sence  de  la  famille  au  plus  bas  de  l'échelle  de  l'humanité. 
Ainsi,  j'ai  découvert  le  rapt,  dans  nos  mariages  populaires, 
parfaitement  caractérisé.  A  Jerumello,  par  exemple,  dans 
la  province  de  notre  Extremadura,  les  mariages  s'accom- 
plissent de  la  manière  suivante:  Le  jour  des  noces,  la  fian- 
cée entourée  de  ses  proches  reste  à  la  maison,  tandis  que 
le  fiancé  au  milieu  de  ses  parents  et  de  ses  amis  se  rend 
il  l'endroit  où  est  celle  qui  doit  devenir  sa  femme.  Arrivé 
là,  une  espèce  de  lutte  s'engage,  et  il  fait  semblant  d'arra- 
cher violemment  la  jeune  fille  à  la  maison  paternelle.  La  suite 
de  la  fiancée  oppose  une  résistance  simulée  et  feint  de  cé- 
der seulement  à  la  force,  après  quoi  tout  le  monde  s'en  va 
a  l'église  où  tout  finit  par  la  bénédiction  du  prêtre  A  Mi- 
randa  do  Douro  on  observe  encore  aujourd'hui  la  coutume 
d'un  combat  entre  le  jeune  couple  qui  est  prêt  à  se  marier. 
Du  moment  qu'une  jeune  fille  est  engagée  et  quelque  temps 
avant  le  jour  des  noces,  a  lieu  un  rendez-vous  où  les  deux 
se  renvoient  mutuellement  des  coups  de  poing,  à  qui  mieux 
mieux.  Personne  n'a  le  droit  d'intervenir  pour  faire  cesser 
cette  lutte  singulière.  On  peut  reconnaître  encore  la  même 
coutume,  plus  ou  moins  modifiée,  dans  les  cas  suivants:  A 
Sindim,  aux  environs  de  Regua,  lorsqu'un  garçon  de  quel- 
que village  limitrophe  y  va  pour  demander  en  mariage  une 


ihyG^TP^Ic" 


633. 

jeune  fille,  il  est  reçu  à  coups  de  pierre  par  les  gens  du  pays, 
qui  cherchent  à  empêcher  la  réalisation  de  son  dessein.  Si, 
en  effet,  le  mariage  se  conclut,  le  jour  des  noces,  à  la  sor- 
tie de  l'église,  on  barricade  tous  les  chemins  par  où  les 
nouveaux  mariés  doivent  passer  pour  se  rendre  à  la  maison, 
et  s'ils  veulent  passer  outre,  il  faut  que  le  mari  dépose  quel- 
que pièce  de  monnaie.  Cette  coutume,  si  curieuse  du  reste, 
puisqu'elle  présente  des  vestiges  du  mariage  au  moyen  du 
rapt,  nous  met  aussi  sur  tes  traces  d'une  ancienne  exoga- 
mie,  modifiée  déjà  par  le  rachat  symbolique  de  l'épouse, 
représenté'  dans  ce  cas  par  le  payement  de  la  monnaie,  qui 
doit  être  fait  par  le  mari  s'il  veut  avoir  la  faculté  de  se  re- 
tirer en  paix.  A  Thomar,  le  jour  des  noces,  le  fiancé,  ac- 
compagné des  témoins,  va  chercher  la  fiancée  qui  l'attend 
chez  la  marraine.  Aussitôt  qu'il  y  arrive,  la  jeune  fille  se 
cache  derrière  la  porte  et  la  marraine  ne  lui  permet  de  sor- 
tir de  là,  qu'après  avoir  obtenu  un  certain  nombre  de  répon- 
ses aux  questions  qu'elle  fait  au  jeune  homme.  Â  Barroso, 
on  observe  une  coutume  à  peu  près  identique. 

Dans  un  village  tout  près  de  Guarda,  cette  coutume 
présente  encore  les  circonstances  suivantes  :  La  fiancée,  avant 
de  sortir  de  la  maison  paternelle  pour  se  rendre  à  l'église, 
s'enferme  dans  une  chambre,  accompagnée  de  toutes  ses 
amies  non  mariées.  Lorsque  le  fiancé  arrive,  il  frappe  à  la 
porte,  qu'on  ne  lui  ouvre  pas  sans  qu'il  réponde  à  un  cer- 
tain nombre  de  questions  qu'on  lui  fait  à  l'intérieur.  Ce  dia- 
logue fini,  la  fiancée  se  cache,  et  le  jeune  homme  doit  la 
chercher  partout,  jusqu'à  ce  qu'il  la  trouve  et  l'emporte  en 
triomphe,  se  rendant  ensuite  à  l'église.  Dans  quelques  vil- 
lages des  deux  Beiras,  on  rencontre  la  variante  qui  suit:  Jus- 
qu'au moment  de  l'acte  religieux  il  n'y  a  rien  de  remarquble, 
mais  aussitôt  que  celui-ci  est  conclu,  la  scène  la  plus  étrange 


,J^ 


Coogle 


634 

a  lieu.  Les  invites,  qui  composent  le  cortège  de  la  noce,  se 
présentent,  chacun  pourvu  de  grands  morceaux  de  pain 
bis,  qu'ils  jettent  aux  spectateurs,  faisant  semblant  de  se 
défendre  contre  la  persécution  du  peuple,  qui  veut  enlever 
la  fiancée.  C'est  un  désordre  adVeuv,  simulant  un  vrai 
combat. 

H  serait  facile  de  décrire  quelques  variantes  encore,  que 
j'ai  recueillies  dans  notre  pays,  particulièrement  dans  les 
deux  Beiras,  et  qui  doivent  paraître  systématiquement  or- 
données dans  un  travail  complet  que  je  prépare  sur  ce  sujet. 
Cependant  les  traces  que  nous  avons  découvertes  d'une  an- 
cienne organisation  familiale  chez  notre  peuple  ne  se  bornent 
pas  à  celles  qui  se  rapportent  îi  l'enlèvement  de  l'épouse, 
bien  que  celles-ci  ne  soient  pas  des  moins  intéressantes. 
Nous  en  avons  encore  d'autres,  que  je  passe  à  décrire  très- 
sommairement. 

En  faisant  des  études  sur  les  superstitions  populaires 
portugaises  au  moyen-âge,  j'ai  eu  besoin  de  lire  un  grand 
nombre  de  Coiislitiitioiis  épiscopales^  et  à  cette  occasion  j'ai 
rencontré  une  prescription  qui  est  restée  pour  moi,  jusqu'à 
ce  moment,  à  peu  près  incompréhensible,  je  l'avoue.  I!  s'agit 
de  défendre,  sous  les  peines  les  plus  rigoureuses,  aux  fian- 
cés la  cohabitation  avant  le  mariage.  La  prohibition  se  rap- 
porte à  un  usage  persistant  et  non  pas  à  une  simple  infrac- 
tion individuelle  aux  lois  qui  président  aux  relations  des 
sexes,  comme  on  pourra  s'en  convaincre,  du  reste,  en  re- 
marquant que  cette  défense  se  répète  un  siècle  durant,  la 
Constitution  la  plus  ancienne  qui  en  fait  mention  datant  de 
la  première  moitié  du  xvi''  siècle,  et  la  plus  moderne  étant 
des  dernières  années  du  xvii"  siècle.  L'usage  était  commun, 
d'ailleurs,  h  tout  le  pays,  puisqu'il  nous  apparaît  invariable- 
ment dans  toutes  ou  presque  toutes  les  Constitutions.,  de- 


oogle 


a\ 


635 

puis  celles  de  Braga  et  de  Guarda  jusqu'à  celles  de  l'Ai- 
garve,  au  sud  du  royaume.  Quelle  était  donc  cette  cou- 
tume, contre  laquelle  le  cierge  catholique  lançait  son  ana- 
thème,  et  qu'il  était  cependant  impuissant  à  déraciner?  Ce 
n'est  pas  évidemment  un  fait  isolé,  ainsi  que  le  prouve  du 
reste  la  permanence  de  l'usage.  On  ne  peut  songer  non  plus 
à  une  protestation  de  la  part  du  peuple  contre  le  mariage 
religieux,  dans  un  pays  aussi  catholique  que  le  nôtre,  sur- 
tout à  cette  époque.  Quelle  était  donc  la  signification  de  la 
coutume,  dont  on  ne  peut  désormais  mettre  en  doute  l'exis- 
tence? Pour  ma  part,  j'avoue  que  j'ai  été  longtemps  indécis, 
et  c'est  avec  quelque  réserve  encore  que  je  présente  l'hypo- 
thèse suivante:  La  coutume  me  semble  être  le  dernier  ves- 
tige d'une  organisation  familiale  où  il  régnait  une  grande 
liberté  entre  les  sexes  avant  le  mariage,  une  organisation 
familiale  enfin  plus  ou  moins  polyandriqae.  Cette  façon 
d'interpréter  Pusage  en  question  reçoit,  quant  à  moi,  une 
certaine  confirmation  en  le  rapprochaht  des  deux  curieuses 
coutumes  encore  en  vigueur  dans  quelques  points  de  notre 
pays,  surtout  de  la  dernière,  vraiment  notable,  et  qui  doit 
être  regardée  comme  le  commentaire  de  l'usage  que  nous 
venons  de  rencontrer  dans  notre  législation  religieuse.  On 
m'a  assuré  que  dans  un  endroit  appelé  «Magdalena»,  dans 
les  environs  de  Porto,  quelques  fiancés  observent  encore 
l'usage  de  cohabiter  avant  le  mariage.  Mais  où  la  coutume 
se  présente  sous  une  forme  parfaitement  caractéristique,  à 
ne  laisser  point  de  doute,  quant  â  son  importance  tradition- 
nelle, c'est  dans  un  petit  village  aux  environs  de  Lisbonne. 
Ce  village  est  compris  dans  la  zone  ethnographique  connue 
sous  le  nom  de  Sa/oios,  dont  la  population  conserve  un 
grand  nombre  d'usages  antiques  et  intéressants  au  plus  haut 
degré;  Les  jeunes  filles  qui  arrivent  â  l'âge  de  seize  ans  en- 


f 


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636 

viron,  étant  encore  vierges,  y  sont  l'objet  d'une  continuelle 
raillerie,à  tel  point  que  pour  échapper  à  cette  honle  elles  se 
livrent  avec  la  plus  grande  facilité  au  premier  venu  qui  leur 
fait  la  cour,  et  ces  unions  éphémères  et  peu  recommenda- 
bles  par  le  côté  de  la  pureté  des  mœurs,  continuent  d'ordi- 
naire jusqu'au  moment  où  la  jeune  fille  devient  enceinte. 
Alors,  un  nouveau  genre  de  vie  commence  pour  elle.  Ce- 
lui qui  se  croit  le  père  l'épouse,  oubliant  son  passé.  De  son 
côté  elle  devient  en  général  honnête  et  dès  ce  moment  rien 
ne  la  distingue  d'une  honnête  femme.  Ceci  ne  rappelle-t-il 
pas  d'une  manière  frappante  ce  qu'Hérodote  nous  racconte 
des  femmes  babylonniennes,  qui  devaient,  au  moins  une 
fois  dans  leur  vie,  se  livrer,  dans  le  temple  de  Vénus,  à  un 
étranger,  moyennant  une  pièce  de  monnaie,  après  quoi  elles 
ne  se  prostituaient  plus,  à  quelque  prix  que  ce  fût?  En  tout 
cas,  nous  avons  des  motifs  sérieux  pour  attendre  des  investi- 
gations, auxquelles  nous  nous  adonnons  à  présent,  de  nou- 
veaux faits  qui  viennent  sous  peu  confirmer  l'existence  de 
traces  d'une  ancienne  polyandrie  péninsulaire,  dans  la  der- 
nière couche  de  la  population  du  Portugal. 

Il  y  a  encore  un  usage,  que  j'ai  rencontré  dans  quelques 
endroits  de  notre  pays,  d'une  grande  importance  tradition- 
nelle aussi,  comme  on  peut  s'en  assurer  en  lisant  le  livre  de 
Mac-Lennan  (op.  cit.,  p.  3i6,  3i7).  A  Manteigas,  par  exem- 
ple, petit  village  dans  les  environs  de  Porto,  on  observe 
dans  les  mariages  populaires  la  coutume  suivante:  Les  fian- 
cés ne  peuvent  coucher  ensemble  que  quatre  jours  après  le 
mariage.  Aussitôt  que  la  cérémonie  religieuse  est  finie,  le 
fiancé  se  retire  dans  la  maison  paternelle  et  la  fiancée  s''en 
va  de  même  chez  ses  parents,  où  elle  est  sous  la  vigilance 
de  sa  mère  jusqu'à  ce  que  les  jours  défendus  soient  passés- 
Dans  les  environs  de  G>vilhâ  le  nombre  des  jours  défendus 


..^jj^ooole 


637 

est  réduit  à  trois,  et  ce  nombre  on  le  retrouve  aussi  à  La- 
vos,  près  de  Fîgueira.  A  Peral,  village  situé  à  quelques  ki- 
lomètres de  Caldas  da  Rainha,  la  coutume  se  retrouve  à 
Pétat  de  symbole.  Lorsqu'une  jeune  fille  se  marie,  les  autres 
jeunes  filles  et  garçons  du  village  vont  la  nuit  frapper  à  la 
porte,  afin  qu'elle  ne  puisse  coucher  avec  son  mari.  Ceci  se 
répète  pendant  les  trois  premières  nuits;  ce  n'est  qu'après 
la  troisième  nuit  que  les  nouveaux  mariés  peuvent  dormir 
en  paix. 

Il  y  a  encore  beaucoup  à  étudier  dans  les  coutumes 
qui  se  rapportent  aux  mariages  populaires  dans  notre  pays, 
et  sous  la  forme  de  symbole,  et  comme  usages  jusqu'à  ce 
jour  en  vigueur.  J'ai  même  des  raisons  pour  croire  que  dans 
le  centre  du  royaume  il  existe  des  traces  d'une  parenté  par 
les  femmes.  On  sait  que  l'histoire  des  peuples  qui  n'ont  pas 
d'histoire  se  reconstruit  avec  leurs  traditions,  avec  leurs 
superstitions,  leurs  coutumes,  leur  industrie,  avec  les  restes 
inconscients  et  incompris  d'anciens  usages,  qui  ont  eu  leur 
raison  d'être,  et  que  l'étude  approfondie  de  toutes  ces  ma- 
nifestations de  la  vie  primitive  de  l'humanité  est  indispensa- 
ble, même  pour  ceux  de  ces  peuples  qui,  plus  tard,  ont  eu 
leurs  historiens. 

Dans  cette  courte  note,  je  n'ai  voulu  que  décrire  quel- 
ques usages  curieux  que  j'ai  recueillis  pendant  mes  inves- 
tigarions  et  études  sur  hfolklore  portugais  et  qui  me  pa- 
raissent éclairer  une  période  de  la  vie  de  notre  péninsule, 
pour  laquelle  nous  n'avons  pas  d'histoire.  Mon  but  a  été 
donc,  Messieurs,  d'appeler  votre  attention  sur  l'importance 
réelle,  que  jusque  dans  le  domaine  de  vos  études  ont  ces 
recherches  sur  les  coutumes  et  les  usages  populaires  de 
la  région,  a  coup  sûr,  la  plus  curieuse  à  étudier  de  la  Pé- 
ninsule ibérique.  A  côté  de  la  science  dont  les  plus  illus- 


,ï  Google 


638 

trcs  promoteurs  et  les  maîtres  les  plus  écoutés  sont  as- 
semblés ici  en  ce  moment,  la  science  qui  s'occupe  des  ori- 
gines préhistoriques  de  notre  monde  moral  demande  une 
place:  or,  ces  origines,  Messieurs,  et  ce  seront  mes  derniers 
mots,  sont  peut-être  comtemporaines  de  ces  premières  so- 
ciétés humaines  dont  l'étude  a  rendu  vos  noms,  chers  maî- 
tres! impérissables  dans  l'histoire  de  la  science,  c'est-à-dire, 
dans  la  plus  belle  page  de  l'histoire  de  la  civilisation. 


,  Aprùs  la  clôlureiiu  Congrès  l'auteur  a  eu  l'occasion  de  réunir  de 
nouveaux  documents  qui  confirmcni  plusieurs  des  hypothèses  formu- 
lées dans  ce  mémoire,  ei  qui  doivent  faire  partie  d'une  publication  spé- 
ciale. 


,ï  Google 


LA    OORDILL&BE    D£8   ANDES 


L'HOMME  AMÉRICAIN 


M.  P. -G.  Mesnier 

Je  me  propose  de  résumer  brièvement  et  de  soumettre 
à  votre  appréciation,  quelques  observations  concernant  Porî- 
gine  des  races  humaines  indigènes  qui  habitent  l'Amérique. 
Mes  conclusions  sont  basées  sur  des  arguments  géologiques 
aussi  bien  que  sur  quelques  considérations  ethnologiques. 

Je  commencerai  par  traiter  de  la  partie  géologique  de 
mon  sujet. 

On  peut  affirmer  avec  raison  que,  des  continents  exis- 
tants, celui  qui  présente  actuellement  le  plus  d'activité  vol- 
canique c''est  la  moitié  australe  du  Nouveau-Monde.  Tandis 
que  les  zones  septentrionales  du  continent  ne  font  pas  preuve 
(au  moins  pour  l'époque  moderne),  d'avoir  subi  l'influen- 
ce énergique  des  actions  volcaniques,  on  n'a  qu'à  fouler  le 
sol  de  l'Amérique  andine  pour  avoir  la  preuve  de  l'influence 
que  le  volcanisme  a  exercé,  surtout  dans  la  direction  qui 
se  propage  le  long  de  la  grande  Cordillère  qui  a  mérité  à 
juste  titre  le  nom  de  colonne  vertébrale  du  monde.  Le  sou- 
lèvement des  régions  couronnées  par  ce  système  de  monta- 


,ï  Google 


640 

gnes  s'est  produit  par  des  secousses  périodiques,  et  Ton  sait 
qu'elles  se  sont  répétées  encore  dans  des  temps  historiques. 
Ceci  s'applique  surtout  pour  la  région  comprise  entre  Chi- 
loé  et  Callao.  Tous  les  géologues  sont  d'accord  à  anribuer 
ces  phénomènes  à  l'action  volcanique,  et  en  effet  le  grand 
nombre  de  volcans  qui  couronnent  les  cimes  de  la  chaîne 
andine  fournissent  un  ai^;ument  bien  éloquent  en  faveur  de 
l'hypothèse  qui  attribue  le  soulèvement  de  ces  vastes  répons 
à  l'action  du  volcanisme.  Cependant,  les  informations  géné- 
ralement répandues  sur  ces  régions  peu  accessibles  ne  sont 
pas  tout  à  fait  correctes  et  l'on  admet  généralement,  et  peut- 
être  sans  avoir  les  preuves  positives,  que  les  montagnes  les 
plus  élevées  sont  toujours  de  véritables  volcans.  Je  crois 
cependant  cette  règle  soumise  à  des* exceptions.  Ainsi  l'Acon- 
cagua,  montagne  de  6835  mètres,  la  plus  haute  cime  des 
Andes,  ne  semble  pas  être  un  volcan,  et  le  Misti,  au  voist- 
rtage  duquel  tant  de  terribles  tremblements  de  terre  ont. eu 
lieu,  doit  être  éteint  depuis  plus  longtemps  que  Ton  ne  pense 
généralement.  Il  est  intéressant,  je  crois,  de  citer  à  ce  pro- 
pos une  information  remarquable  qui  me  fut  donnée  par 
un  vieux  pâtre  indien  à  qui  le  sommet  du  Misti  était  fami- 
lier, lorsque  je  lui  demandais  des .  renseignements  sur  cette 
montagne.  Il  y  a,  me  disaît-il,  sur  la  crête  du  Misti,  un 
grand  creux  plein  de  sable  ténu,  lequel  lorsque  le  grand 
vent  soufRe,  s'échappe  en  colonne  et  fait  croire  aux  habi- 
tants de  la  plaine  que  la  montagne  vomit  de  la  fumée. 

Avant  d'arriver  à  Arequipa  on  trouve  une  immense 
plaine  élevée,  sur  laquelle  on  voit  de  singuliers  monticu- 
les de  sable  disposés  en  formé  de  demi-lune.  Ces  monti- 
cules sDnt  façonnés  par  l'action  des  vents  qui  les  soulèvent 
et  les  entraînent  en  leur  donnant  la  forme  d'un  cylindre  ani- 
mé des  mouvements  de  translation  et  autour  de  l'axe. 


ly  Google 


64» 

Lorsque  l'effort  qui  les  conduit  vient  à  diminuer,  la  partie 
du  cylindre  en  rotation  qui  touche  la  terre  prend  une  vélo- 
cité moindre  que  celle  de  la  partie  supérieure,  et,  quand 
le  tout  revient  en  repos  le  monticule  produit  cette  forme 
semi-circulaire  si  remarquable  dans  le  désert  péruvien* 

Sur  le  littoral  du  Chile,  surtout  près  de  Vina  del  Mar, 
on  observe  des  cailloux  roulés  à  une  hauteur  de,  à  peu  près, 
dix  mètres  du  niveau  de  la  mer,  ce  qui  met  hors  de  doute 
un  soulèvement  de  cette  région  dans  une  époque  relative- 
ment moderne.  A  Coquimbo  aussi  on  rencontre  des  calcai- 
res coquilliers  contenant  les  genres  Pecten,  Ostrea,  Arca, 
Conchoîepas,  Oliva,  Fissureïîa,  Turriteîla^  etc.,  soulevées  à 
^  mètres  au-dessus  du  niveau  de  l'Océan.  J'y  ai  aussi  ren- 
contré un  exemplaire  d'un  bivalve  très  commun  dans  les 
eaux  de  la  baie  qui  sépare  Coquimbo  de  Serena,  le  Meao- 
desma  donacium. 

Je  mentionnerai  encore  un  autre  fait  géologique  bien 
intéressant  qui  s'est  accompli  postérieiu-ement  à  l'apparition 
de  l'homme  dans  ces  régions. 

A  plusieurs  centaines  de  lieues  de  Coquimbo  vers  l'ouest, 
dans  l'Océan  Pacifique,  est  située  la  petite  Se  de  Pâques,  iso- 
lée et  loin  de  tout  centre  de  population.  On  y  trouve  de 
nombreuses  statues  d'un  remarquable  travail,  dont  quel- 
ques-unes sont  plus  grandes  que  nature;  elles  sont  placées 
le  long  du  versant  d'une  colline  et  descendent  graduellement 
au-dessous  du  niveau  océanique,  indiquant  ainsi,  que  ce 
haut  lieu  où  tme  race  disparue  avait  peut-être  placé  ses 
dieux,  s'est  baissé  peu  à  peu  dans  l'Océan.  Ces  figures  ont 

<  D'après  la  remarque  qui  m'a  été  faite  par  un  des  savants  mem- 
bre du  Congru  qui  avait  examina  dans  le  Sahara  les  dunes  de  sable, 
le  mouvement  que  je  décrit  ne  serait  qu'un  cas  exceptionnel  et  les  du- 
nés  ne  s'avancpraicnt  que,  sotisJ 'action  régultire  des  vents  contunts. 


,ï  Google 


642 

le  type  dolichocéphale  et  orthognate,  et  leurs  traits  généraux 
sont  assez  ressemblants  aux  types  des  tribus  araucanéen- 
nes. 

La  pierre  dans  laquelle  ces  statues  ont  été  taillées  ne 
se  trouve  pas  probablement  dans  l'île,  tandis  qu'il  existe  une 
ressemblance  assez  marquée  entre  les  trachytes  poreuses 
des  environs  de  Coquimbo  et  la  pierre  qui  a  été  appliquée 
â  la  fabrication  des  statues  de  l'île  de  Pâques. 

Il  est  évident  que  cette  île  n'est  que  le  reste  d'une  terre 
submergée  d'une  grandeur  inconnue  et  qui  viendra  peut- 
être  à  disparaître  tout  à  fait  dans  une  époque  géologique 
plus  ou  moins  rapprochée  de  l'époque  moderne. 

Près  d'Antuco  on  observe  de  nombreuses  bombes 
volcaniques  ayant  la  forme  sphérofdale  caractéristique  assez 
bien  définie.  Une  section  transversale  d'une  de  ces  bombes 
présente  une  disposition  curieuse  de  la  substance.  La  cou- 
che extérieure  assez  compacte  et  peu  cristalline  est  dispo- 
sée en  feuillets  superposés  enveloppant  un  noyau  moins 
compact.  Ce  centre,  comme  c'est  généralement  le  cas,  res- 
semble un  peu  à  une  éponge.  Il  n'est  pas  difficile  de  trou- 
ver dans  ces  bombes  les  indices  d'aplatissement  dus,  soit 
à  la  rotation  pendant  leur  trajet  aérien,  soit  à  la  chute  de 
la  bombe  avant  son  refroidissement  complet.  Les  premiè- 
res présentent  naturellement  une  surface  de  même  nature 
que  celle  du  globe  terrestre,  et  sa  ressemblance  avec  la 
terre  a  dû  être  encore  plus  considérable  lorsque  la  matière 
volcanique  était  encore  incandescente. 

J'ajouterai  encore  qu'une  coupe  géologique  de  la  baie 
de  Bahia  Blanca  sur  l'Atlantique  jusqu'à  la  baie  de  Valpa- 
raîso  sur  le  Paci'ique  présente  successivement  les  terrains 
suivants,  en^  partant  de  l'est  vers  l'ouest:  dépôt  pampéen 
de  d'Orbi'ny,  conglomérats,  schistes,  porphyres,  roches 


,ï Google  - 


643 

calcaires,  formations  lacustres,  granités  contenant  des  veines 
puissantes  d^orthose  et  oligoclase,  formation  permienne,  ro- 
ches phon^lithiques,  et,  aux  environs  de  Valparaiso,  le  gneiss 
ferrugineux  contenant  des  crisiaux  d'hyper^thène. 

Ces  quelques  faits  géologiques  que  je  viens  de  rappor- 
ter me  semblent  suffisants  pour  faire  paraître  probable  que 
des  affaissements  ont  eu  lieu  dans  la  région  occupée  aujour- 
d'hui par  le  Pacifique.  Ll-s  diverses  manifestations  volcani- 
ques qu'on  remarque  en  large  échelle  dans  l'Amérique  du 
Sud  en  donnent  beaucoup  de  vraisemblance,  tandis  que 
l'affaissement  de  l'île  de  Pâques,  dont  je  viens  de  parler,  en 
fournît  une  preuve  directe. 

Ci!  continent  austral  hypothétique  occupait  probable- 
ment une  grande  partie  de  l'emplacement  actuel  des  océans 
Pacifique  et  Indien,  et  des  faits  ethnologiques  nous  font  pa- 
raître probable  que  ce  continent  ait  fait  partie  de  l'Afrique 
et  de  l'Australie.  C'est  dans  la  partie  aujourd'hui  disparue 
que  je  crois  avoir  été  la  patrie  originaire  d^s  Touranitns 
de  l'Orient  asiatique  et  des  indigènes  de  l'Amérique. 


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-^ 


APPENDICE 


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'^ 


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1 


EXCURSION  DANS  LE  NORD  DU  PAYS 


BRAGA   ET    GITANIA    DE   BRITEIROS 


Le  lendemain  de  la  clôture  du  Congrès  une  trentaine 
de  congressistes  quittèrent  Libbonne.  Un  train  spécial  avait 
été  pris  pour  eux.  On  partt  à  6  heures  du  matin  et  à  n 
heures  on  arriva  à  Cuïmbre  où  Ton  déjeûna.  Le  train  par- 
tit de  nouveau,  après  une  heure  de  retard,  et  à  7  htures 
du  soir  on  descendait  à  Braga,  la  troisième  ville  du  Portu- 
gal, non  seulement  par  sa  population  (environ  20.000  habi- 
tants), mais  aussi  par  son  importance  archéologique  et  mu- 
nicipale. Elle  est  située  au  milieu  d'une  riche  contrée,  à  392 
kilomètres  au  nord  de  Lisbonne.  C'est  là  qu'on  passa  la  nuit 
après  avoir  goûté  un  dîner,  presque  tout  composé  de  mets 
nationaux,  caractéristiques  de  cette  contrée. 

Nous  laissons  la  parole  à  M.  Virchow,  qui  a  fait  la  des- 
cription de  cette  excursion  dans  un  rapport*,  dont  nous  tra- 

'  Verhandlungen  der  Berlintr  Anthropologisdten  Gtseilschaft.  Sit- 
zung  am  ïosien  November  1880,  p.  ii^i-'iii.{ZeitschriJt  fiir  Ethnologie, 
voLxu). 


,ï  Google 


64& 
duisons  presque  en  entier  la  partie  qui  a  trait  au  siège  d'une 
ancienne  civilisation,  à  la  station  préhistorique  de  Citania 
de  Bnteiros,  la  plus  remarquable  que  le  Congrès  ait  eu  l'oc- 
casion de  visiter,  et  où,  grâce  aux  soins  de  son  propriétaire, 
M.  Martins  Sarmento,  se  trouvaient  réunis  tous  les  moyens 
propres  à  en  faciliter  l'étude. 

•J'aborde  maintenant  un  sujet,  qui  m'a  intéressé  outre 
mesure;  je  veux  parler  d'une  série  de  restes  de  stations  hu- 
maines, que  nous  avons  eu  l'occasion  de  visiter,  immédia- 
tement après  la  clôture  du  Congrès,  lors  d'une  excursion  as- 
sez étendue  dans  le  nord  du  pays.  Il  existe  une  petite  pu- 
blication de  notre  collègue  Hiibner,  qui  a  traité  de  cet  ob- 
jet dans  le  i5*"'  volume  du //ermcs.  M.  Hiibner  s'est  trouvé 
dans  des  circonstances  favorables  pour  faire  une  description 
animée  de  ces  stations,  quoiqu'il  n'ait  pas  vu,  lui-même,  les 
fouilles.  Non  seulement  il  avait  sous  les  yeux  les  publications 
qui  ont  été  faites  sur  ces  stations,  mais  aussi  il  pouvait  con- 
sulter un  grand  nombre  de  photographies;  sa  description  est, 
en  effet,  assez  complète  jusqu'à  cette  période,  je  dirai  même 
très  correcte. 

Après  cette  publication,  les  fouilles  ont  été  poursuivies 
avec  beaucoup  de  zèle,  ce  qui  permet  d'ajouter  quelques 
détails  à  sa  communication. 

11  se  trouve  dans  ces  lieux,  un  homme,  M.  Sarmento, 
résidant  à  GuimarSes,  lequel,  semblable  à  Schliemann,  dé- 
pense depuis  des  années  de  grosses  sommes  dans  ces  fouil- 
les. Il  a  fait  l'acquisition  des  lieux  mêmes  pour  les  ga- 
rantir contre  des  mains  inhabiles.  Chaque  année  il  fait 
fouiller  une  partie  de  la  surface  du  terrain  et  rassembler 
soigneusement  tous  les  objets  recueillis,  de  sorte  quHl  se 
trouve  à  présent  en  possession  d'un  si  grand  nombre  de 


f^Goot^lcj 


649 

pièces,  qu'elles  peuvent  former,  à  elles  seules,  un  petit  mu- 
sée. 

Nous  fimes  notre  excursion  sous  la  direction  du  prési- 
dent du  Congrès,  M.  Andrade  Corvo.  Nous  allâmes  de  Lis- 
bonne à  Braga,  en  passant  par  Porto.  Braga  est  une  très 
ancienne  ville  de  la  province  de  Minho,  qui,  plus  que  toute 
autre,  m'intéressait  extrêmement,  parce  qu'elle  fut  pendant 
plusieurs  siècles  la  capitale  des  Suèves 

Je  dois  avouer  que  je  n'ai  pas  pu  reconnaître  en  an- 
thropclogue  des  parents  dans  les  habitants  actuels  de  cette 
contrée;  ils  doivent  cependant  avoir  beaucoup  changé.  Au- 
jourd'hui ils  sont  presque  tous  bruns,  et  quoiqu'on  puisse 
signaler  ça  et  là  des  individus  blonds,  des  enfants  et  même 
quelques  adultes,  je  ne  saurais  affirmer  que  j'aie  trouvé  des 
indices  de  ce  que  l'influence  de  l'invasion  germanique  s'y 
fasse  encore  sentir. 

A  Braga,  le  comte  de  Sâo  Mamede,  qui  venait  de  faire 
ses  études  en  Allemagne,  a  eu  la  complaisance  de  me  pro- 
curer une  petite  collection  de  cheveux  des  habitants,  aussi 
bien  de  Briteiros  que  des  environs;  exception  faite  de  quel- 
ques échantillons  d'un  brun  de  châtaigne,  ils  sont  tous  d'un 
noir  luisant. 

D'un  autre  côté  je  puis  assurer  à  ceux  qui  voudront  en- 
treprendre un  voyage  à  Braga,  que,  sous  le  point  de  vue 
architectonique,  cette  ville  mérite  la  plus  grande  attention. 
Elle  est  une  des  plus  anciennes  villes  du  Portugal;  on  y  trouve 
un  mélange  des  restes  d'architecture  romaine,  visigotique  et 
mauresque  avec  des  édifications  des  derniers  temps  de  la  re- 
naissance, tels  que  je  n'en  ai  vu  ailleurs  d'aussi  beaux  et 
d'aussi  complets  Braga  se  trouve  au  nord  de  Porto;  on  y  va 
p  ar  le  chemin  de  fer  qui  part  de  cette  dernière  ville.  La  con- 


63o 

trée  est  extrêmement  fertile  et  le  sol  très  accidente.  Celui 
qui  vient  de  parcourir  pendant  des  semaines  des  plaines  biû- 
lées  et  des  montagnes  nues,  presque  sans  aucun  vestige  de 
végétation,  éprouve  un  vrai  ravissement  de  se  trouver  tout 
à  coup  dans  une  contrée  aussi  charmante,  aussi  riche,  aussi 
fraîche  et  verdoyante. 

L'explication  de  ce  contraste  se  trouve  dans  le  voisi- 
nage de  la  mer,  et  dans  les  courants  d'air  saturé  d'eau  qui 
vont  se  décharger  sur  cette  région.  Il  y  a  une  telle  exubé- 
rance de  végétation  dans  cette  province,  que  je  ne  pour- 
rais en  citer  de  semblable  dans  aucun  des  pays  de  l'Eu- 
rope que  j'ai  visités. 

A  Braga,  nous  montons  sur  des  voitures,  et  nous  di- 
rigeant vers  le  suJ-cst,  nous  nous  engageons  de  plus  en  plus 
dans  la  campagne;  nous  touchons  presque  Guimariîes,  ville 
ancienne  et  fameuse  à  Tégal  de  Braga.  Le  chemin  nous  mène 
par  dessus  une  haute  colline  dans  une  Viillée  lai^e  et  pro- 
fonde, orientée  du  S.-E.  au  N.-O.  On  y  voit  des  sources 
chaudes  et  un  pet.t  bain  (Caldas  das  Taipas). 

Plus  loin  se  dresse  d^ns  la  vallée  une  série  de  colli- 
nes isolées  et  abruptes  qui  se  rattachent  à  la  montagne  par 
des  cols  peu  profondi.  Presque  sur  chaque  sommet  il  y  a 
une  station  préhistorique. 

Celle  qui  a  été  le  mieux  explorée  s'appelle  Citania  de 
Brùetros.  M,  Hùbner  en  a  fait  l'objet  principal  de  sa  no- 
tice. Le  licL  qui  l'avoisine  s'appelle  Briteiros  el  Citania  rap- 
pelle cHé^  city,  civitas:  quelques  philologues  ont  voulu  faire 
dériver  cette  dénomination  d'un  radical  celtique.  Je  ne  m'en 
mêlerai  point;  je  d.rai  seulement  que  l'on  peut  constater 
l'existence  de  ce  nom  depuis  des  siècles;  ce  dont  on  peut 
conclure  qu'il  doit  être  très  ancien.  Je  ne  saurais  dire  non 
plus,  si  l'on  peut  affirmer,  comme  M.  Htibner  prétend  le 


ly  Google 


lutes  ces  stations  soient  connues  par  le  peuple 
nom*. 

■nento  nous  avait  fait  attendre  à  Briteiros  par 
jeunes  filles  toutes  parées,  qui  répandaient  des 
3US,  II  avait  fait  mettre  à  nu  sur  les  flancs  de 
isine  de  nombreux  fondements  des  édifications 
ibord  on  voyait  un  triple  retrnnchement,  ou  plu- 
entrurait  la  colline.  Nous  gravîmes  la  montagne 
i  sous  un  soleil  brûlant.  Le  sol  en  était  dur,  ari- 
,  peine  par  quelques  herbes  chétîves  et  brûlées. 
:vait  cependant  le  Colchicum  autiimnale^  'a  Scilla 
;n  floraison;  çà  et  là  on  voyait  aussi  les  fleurs  de 
gonensis,  du  Leucoium  aulumnale  et  d'autres 
ietîte  taille. 

luteur  nous  découvrons  des  rangées  horizontales 
le  moellons  bloqués  qui  font  le  tour  de  la  mon- 
Tessîon  que  j'en  reçois,  je  dois  l'avouer,  est  celle 
iciensramparts.  Au  d' la,  près  du  sommet,  on  par-' 
ues  étnites,  pavées  de  pierres  plates:  le  déblai- 
été  conduit  si  bien  qu'on  pou' 
:e  de  l'emplacement  de  la  G 
itôt  directement,  tantôt  par  i 
n  voit  les  fondements  de  peti 
u  à  coins  arrondis,  dont  quel 
le  plusieurs  pieds.  Ils  sont  < 
ièrement  taillés  et  quelquefi 

Zitania  paraît  Stre  une  dési^atior 
ennes  stations  il  n'y  en  a  que  qui 
est  un,  soit  attribué,  ei  Sabroso 
lur  les  autres  mê:ne,  cette  déni 
t.  Note  de  M.  Martins  SarmetUo. 


,ï  Google 


652 

sis,  que  les  différentes  rangées  de  pierres  forment  des  spi- 
rales qui  montant  lentement  font  le  tour  de  l'édifice. 

Cette  remarquable  construction  devait  assurer  à  Tédi- 
fîce  une  solidité  bien  plus  grande  que  ne  Peut  fait  ta  simple 
superposition  des  matériaux.  M.  Sarmento  a  fait  bâtir  sur 
le  sommet  de  la  montagne  des  huttes  dont  la  base  est  for- 
mée par  d'anciens  fondements.  Ces  huttes  offrent  en  outre 
une  grande  ressemblance  avec  les  petits  moulins  à  vent,  or- 
dinairement ronds  et  peut  élevés,  qui  sont  distribués  partout 
dans  le  pays,  formant  autant  de  petites  maisonnettes  en 
pierres. 

A  l'intérieur  aussi  bien  qu'à  l'extérieur  des  murs  de  fon- 
dement on  trouve  les  objets  de  toute  espèce,  que  M.  Sarmento 
a  rassemblés  sur  de  longues  tables  placées  au  sommet  de 
la  colline.  Seuleqient,  tandis  que  l'on  a  recueilli  à  Sabroso 
un  grand  nombre  d'instruments  de  pierre  appartenant  à 
l'âge  de  la  pierre  polie,  ici,  à  Citania  de  Briteiros,  on  n'a 
trouvé  jusqu'à  présent  qu'un  nombre  assez  restreint  de  ces 
objets.  On  a  rencontré,  du  reste,  à  Sabroso  aussi  bien  qu'à 
Citania  de  Briteiros,  des  objets  de  métal — du  bronze  et  du 
fer.  Ces  deux  stations  appartiennent  donc,  sans  aucun  dou- 
te, à  l'âge  du  fer;  la  Citania  de  Briteiros  paraît  toutefois 
avoir  été  plus  longtemps  habitée,  puisque  l'on  y  trouve 
aussi,  assez  souvent,  des  objets  d'art  romain,  ce  qui  n'est 
pas  le  cas  pour  Sabroso,  où  ils  sont  rares,  ou  nuls  en  un 
certain  sens. 

Parmi  les  trouvailles  de  Citania  de  Briteiros  il  faut  si- 
gnaler avant  tout  un  grand  nombre  de  blocs  de  pierre  taillée, 
portant,  pour  ia  plupart,  des  sculptures  et  des  bas-reliefs.  Les 
dessins  rappellent  en  partie  les  ornements  que  l'on  trouve 
sur  les  dolmens  irlandais  et  les  rochers  en  Suède,  ou  bien 
des  formes  semblables  à  cejles  que  l'on  a  reocontrées  t  My- 


° .*i!!ooglG      y 


653 

cènes  et  dans  les  îles  grecques.  Ce  sont  des  dessins  tan- 
tôt très  réguliers,  tantôt  très  bizarres.  J'en  ai  esquissé  quel- 
ques-uns, qui  se  trouvent  reproduits  ici  (PI.  n,J>g- 1,  3,  Sy 
4,  5,  p).  Tels  sont,  par  exemple,  les^^.  /  et  S,  consistant 
en  deux  lignes  parallèles,  qui  se  recourbent  en  dedans  ou 
en  dehors  à  l'extrémité,  tout  à  fait  comme  dans  les  dessins 
que  l'on  voit  sur  des  roches  suédoises  (Brunius,  FÔrsok 
til  Jorklaringar  ofver  halîristningar.  Lund  i868,  PI.  i, 
fig.  lo).  Les  cercles  entourant  des  dessins  sont  surtout  fré- 
quents. Ces  dessins  sont  le  triquetrum,Jig.  2,  aussi  à  qua- 
tre hTBSrJig.  S,  ou  les  raïs  d'une  roue,_/îg-.  4,  ou  enfin  une 
sorte  de  tteur^^g.  p,  formes  connues  surtout  par  les  feuilles 
d'or  trouvées  à  Mycèncs  (Schlicmann,  Mykenae^  p.  igS, 
n"  241,  p.  3o4,  n°  416)  et  à  Hissarlik. 

On  remarque  aussi  d'autres  dessins,  consistant  en  de 
grandes  lignes  courbes  et  enroulées,  qui  se  répètent  plu- 
sieurs fois,  formant  des  bandes  parallètes,_;î^.  5,  ou  des  sys- 
tèmes de  tours  concentriques  ou  en  spirales,  comme  on  les 
voit  sur  les  stèles  funéraires  de  Mycènes  (Schliemann,  p.  91, 
n'  140,  p.  97,  n*  141,  p.  108,  n"  149),  ou  sur  les  dalles  de 
New  Grange  (Nilsson,  Skandinaviska  Nordens  Ur-Invhtare. 
Lund  1872.  II.  Bronsaldem,  p.  23,  fig.  8,  p.  26,  fig,  11). 
Ces  spécimens,  d'ailleurs  assez  grossiers,  sont  très  caracté- 
ristiques. 

Parmi  ces  pièces,  une  grosse  pierre  laquelle  se  trouvait 
sur  le  petit  plateau  qui  couronne  la  colline,  a  été  depuis  long- 
temps Tobjet  d'une  attention  particulière.  On  la  désignait 
dans  la  contrée,  par  le  nom  de  Pedra  Formosa,  «belle  pier- 
re». Elle  fut  apportée,  vers  le  commencement  du  siècle  der- 
nier, dans  le  porche  de  l'église  de  Santo  Estevlo  de  Bri- 
teiros,  mais  M.  Sarmento  l'a  fait  replacer  horizontalement 
sur  la  montagne,  abritée  par  l'une  des  deux  huttes  qu'il  y 


,ï  Google 


654 
a  fait  construire.  C'est  une  pierre  de  grandes  dimensions, 
2",2S  sur  2",9o  (P!.  i),  pour  le  transport  de  laquelle  il  a  fallu 
employer  vingt-quatre  attelages  de  bœufs.  Elle  a  l'aspect 
général  d'un  fronton  lorsqu'on  la  suppose  debout.  De  là  est 
venue  de  bonne  heure  la  pensée  de  lui  attribuer  le  rôle  d'un 
ornement  antique  qui  surmonterait  quelque  porte,  surtout 
parce  que,  à  l'occasion  du  transport,  on  a  retrouvé  des  pierres 
qui  pourraient  bien  lui  avoir  servi  de  soutien.  M.  Htibner, 
lut-aussi,  incline  à  croire  que  la  position  verticale  ait  été  la 
vraie,  d'autant  plus,  qu'un  examen  attentif  a  démontré  qu'il 
ne  faudrait  pas  grand  chose  pour  la  maintenir  dans  cette  po- 
sition. Outre  cela,  on  trouvait  sur  le  revers  de  la  pierre  des 
vestiges  d'une  figure,  asse?,  insignifiants  du  reste,  et  peut- 
être  dus  à  Pintervention  accidentelle  d'un  tail'eur  de  pierre. 
Ce  revers  est  d'ailleurs  entièrement  en  brut.  La  face  de  la 
pierre,  au  contraire,  présente  une  suite  d'ornements  assez 
bizarres,  profondément  gravés  et  ciselés,  qui  la  recouvrent 
complètement. 

Voici  une  description  plus  détaillée  de  ce  monument 
extraordinaire: 

Dans  le  bord  le  plus  long  de  la  pierre  il  y  a  une  échan- 
crure  semi-lunaire,  assez  grande  pour  qu'un  homme  puisse 
s'y  placer  à  l'nise.  Immédiatement  au-dessus  se  trouve  une 
cavité  profonde  et  triangulaire,  qui  aboutit  à  l'échancrure 
par  un  canal  caché:  l'eau  qu'on  y  verse  s'écoule  au  dehors. 
La  cavité  est  placée  à  l'extrémité  d'un  sillon,  qui  se  pro- 
longe à  travers  la  pierre,  à  une  égale  distance  des  deux 
côtés,  et  se  termine  par  une  espèce  de  cuvette  plus  ample. 
De  ce  point  se  dirigent  obliquement  vers  chaque  côté  de  la 
pierre  deux  sillons.  C'est  de  cette  disposition  que  provient 
la  configuration  de  fronton  qu'affecte  la  partie  ornementée, 
laquelle  ne  répond  qu'imparfaitement  à  la  forme  de  la  pier- 


Digitizsd  bïGOOgÎc  ^^^ 


655 

re.  En  effet,  la  seule  sculpture  de  la  partie  inférieure  où  se 
trouve  Péchancrure  est  complète.  Elle  est  limitée  par  une 
ligne  droite;  tandis  que  la  panie  opposée  qui  devrait  former 
le  sommet  du  fronton  et  qui  se  trouve  inachevée,  a  une  forme 
à  peu  près  semi  circulaire.  Outre  les  deux  cavités  que  nous 
venons  de  décrire,  il  y  a  encore  un  creux  de  chaque  côté  de 
ta  dépression  triangulaire;  ils  sont  également  triangulaires  et 
ne  communiquent  pas  avec  cette  dépression. 

Presque  toute  la  surface  du  tympan,  divisée  en  deux 
parties  égales  par  le  sillon  médian,  est  couverte  d'ornements 
en  forme  de  grillage  ;  ce  qui  reste  en  dehors  de  cette  espèce 
d^échiquier  est  revêtu  d'ornements  laides,  mais  incomplets, 
en  spirale  et  en  ziguezague.  Une  autre  décoration  plus  com- 
pliquée occupe  la  surface  de  la  pierre  au-dessus  du  triangle 
échiqueté.  Quelques  détails  de  cette  ornementation  rappel- 
lent les  dessins  de  la  partie  inférieure  de  la  troisième  stèle 
funéraire  de  Mycènes  (Schliemann,  ojp.  cit.  p.  97,  n.**  141); 
d'autres,  cependant,  présentent  des  combinaisons  de  lignes 
plus  entortillées.  On  doit  aussi  remarquer  que  ces  ornements, 
étant  coupés  par  la  ligne  terminale  sur  le  côté  droit  de  la 
pierre,  doivent  être  antérieurs  à  cette  coupe  même*. 

Voilà  en  peu  de  mots  ce  que  c'est  que  la  Pedra/oT' 
mosa.  Des  débats  qui,  sur  place,  ont  eu  lieu  touchant  la  si- 

■  L'ornementation  n'est  pas  coupée  par  la  ligne  terminale,  mais 
plutôt  par  un  sillon  grossier  placé  entre  cette  ligne  et  l'un  des  sillons 
obliques  mentionnés  dans  le  texte.  En  examinant  la  PI.  1  on  arrive  à 
l'une  de  ces  deux  hypothèses:  l'ornementation  a  été  faite  avant  ou 
après  que  l'ont  eût  creusé  le  sillon.  Si  elle  l'avait  été  auparavant,  l'une 
des  sections  de  la  figure  ainsi  coupée  aurait  dû  disparaître  dans  la 
large  solution  de  continuité  que  nous  y  voyons;  les  deux  sections,  au 
contraire,  sont  au  complet,  ce  qui  porte  à  croire  que  le  sculpteur  les  a 
gravées  après  l'ouverture  du  sillon  qui  les  sépare.  Note  de  M.  Martini 
Sarmtrao. 

c.  R.  45 


,ï  Google 


656 

gnification  de  cette  pierre,  il  ressortit  à  mon  avis  Popînîon 
qu'elle  a  dû  être  une  pierre  à  sacrifices.  Cette  opinion  qui 
avait  déjà  été  soutenue,  par  M.  Sarmento  surtout,  n'en  ac- 
quit qu'une  plus  grande  plausibilité,  après  l'examen  de  l'ob- 
jet même,  fait  par  un  connaisseur  tel  que  M.  Guimet,  qui 
est  au  courant  des  pratiques  religieuses  de  différentes  na- 
tions parce  qu'il  a  formé  un  grand  musée  à  Lyon  pour  l'ex- 
position et  l'étude  de  telles  pratiques  chez  tous  les  peuples 
et  dans  tous  les  âges,  institution  qui  lui  a  déjà  coûté  des 
millions.  M.  Guimet  fit  lui-même  l'expérience  de  se  placer 
sur  la  pierre,  le  ventre  en  bas  et  les  pieds  dans  les  deux 
creux  latéraux,  penché,  les  genoux  fléchis  appuyés  contre 
la  table  et  la  tête  touchant  la  cuvette.  Nous  devons  re- 
connaître que  cette  disposition  de  la  pierre  serait  la  plus 
convenable  pour  un  sacrifice  humain,  pourvu,  cependant, 
que  la  victime,  fortement  assujétie,  eût  les  genoux  plies.  M. 
Hubner  s'est  prononcé  contre  l'hypothèse  de  pierre  à  sa- 
crifices^ et  par  des  arguments  qui,  je  dois  l'avouer,  ont  un 
grand  poids;  il  n'a  pas,  cependant,  pris  en  considération  que 
ces  sacrifices  pourraient  bien  exiger  une  victime  humaine. 

Les  preuves  d'un  tel  emploi  de  la  pierre  ne  sont  pas 
encore,  en  effet,  assez  convaincantes;  quoiqu'il  en  soit,  ce- 
pendant, cet  objet,  avec  une  ornementation  aussi  bizarre, 
n'en  restera  pas  moins  une  des  trouvailles  les  plus  remar- 
quables qu'on  ait  faites,  et  j'espère  que  l'on  parviendra, 
après  que  des  dessins  corrects  en  auront  été  divulgués,  à  y 
découvrir  des  analogies  plus  décisives  que  nous  n'en  pou- 
vions apercevoir  dans  un  examen  aussi  rapide. 

Si  l'on  se  demande  quelle  a  été  l'époque  où  cette  sta- 
tion fut  établie,  on  reconnaîtra  qu'il  se  trouve  à  Gtania  de 
Briteiros  des  données  très  importantes  pour  résoudre  cette 
question.  En  effet,  dans  plusieurs  endroits  on  peut  obser- 


DinitizerlCGaÇl^lC 


^ 


L 


65? 

ver  un  mélange  avec  des  objets,  sans  aucun  doute  datant 
du  temps  de  Thabitation  de  la  station  même,  et  ces  objets 
sont  romains^  des  vestiges  de  coutumes  romaines  peuvent 
aussi  être  signalés.  Parmi  ces  objets  d'art  romains  on  trou- 
ve, outre  quantité  de  bronzes,  qui  ont  du  être  importés  et 
dont  les  types  sont  tout  à  fait  italiques,  des  débris  de  beaux 
vases  de  terra  sigillata,  d'un  rouge  luisant,  et  des  inscrip- 
tions réellement  latines.  M.  Hubner  a  déjà  communiqué  une 
partie  de  ces  inscriptions;  d'autres  ont  été  découvertes  après. 
Les  unes  et  les  autres  sont  gravées  sur  des  pierres  travail- 
lées. Elles  sont  d'ailleurs  assez  maigres;  les  noms  propres 
qui  s'y  trouvent  sont  barbares,  en  partie  déjà  connus,  com- 
me, par  exemple,  le  nom  celtique  Camalus.  M.  Hubner  a 
fait  ressortir  avec  raison  cette  circonstance,  que  nous  voyons 
là  une  civilisation  nationale  qui  a  subi  une  grande  influence 
romaine.  II  est  donc  positivement  démontré  que  la  dernière 
période,  du  moins,  pendant  laquelle  la  station  de  Citania  de 
Briteiros  fut  habitée,  coïncide  avec  le  temps  de  la  domina- 
tion romaine,  c'est-à-dire  avec  les  premiers  empereurs. 

Il  semble  que  pour  la  première  fois  nous  avons  là,  de- 
vant nous,  la  preuve  de  Pexistence  d'une  cité  en  grande  par- 
tie préhistorique,  qui  s'est  maintenue  sous  la  domination  ro- 
maine. M.  Hubner  fait  encore  mention  d'une  autre  localité 
analogue  à  celle-ci,  laquelle  ne  nous  est  connue  que  par  des 
relations  qui  datent  du  commencement  du  siècle  dernier: 
c'est  celle  de  Panoias  dans  la  province  de  Tràs-os-Montes  '. 

A  Sabroso,  au  contraire,  on  n'a  trouvé  aucune  inscrip- 
tion, aucun  objet,  lesquels  puissent  dénoncer  la  présence 
des  Romains,  comme  ayant  habité  cette  station.  Les  indi- 

'  Nous  pouvons  assurer  que  les  ruines  du  type  de  celles  île  <;iianiii 
de  Briteiros  sont  assez  communes  dans  le  pays.  Noie  de  M.  Martins  Sar- 

45. 


V 


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658 

ces  de  l'infiltration  de  la  civilisation  italique  n'y  font  pas  ce- 
pendant défaut.  Je  citerai  spécialement  une  grande  quantité 
d'objets  de  métal,  nommément  des  fibules  en  bronze.  Ci- 
joint  se  trouvent  des  dessins  des  types  principaux,  parmi 
lesquels  on  reconnaît  des  modèles  italiques  bien  connus. 

ha.^g.  (?,  PI-  II,  représente  une  fibule  en  fil  de  bronze, 
dont  la  barre  transversale  est  elle-même  torducet  l'arc  élar- 
gi et  fortement  recourbé  se  termine  par  un  gros  bouton*. 
Dans  une  autre  fibule  la  barre  est  solide  et  Parc,  court  et 
large,  a  un  étui  à  son  extrémité  pour  recevoir  l'aiguille  {fig.  7). 

Une  autre  fibule  a  déjà  la  forme  générale  de  la  boucle 
{/ig.  8). 

On  remarque  non  seulement  une  grande  variété  de  ty- 
pes, mais  aussi  un  grand  nombre  d'exemplaires.  11  y  a  éga- 
lement de  nombreuses  perles  de  verre  bleu  et  des  fusaïoles 
en  argile,  mais  dépourvus  d'inscriptions.  Une  grande  hache 
de  {tr^fig.  10-,  est  aussi  parfaite  que  si  elle  venait  de  sortir 
d'une  fabrique  de  ces  objets. 

Ces  pièces  sont  aussi  caractéristiques  que  bien  d'au- 
tres trouvées  à  Citania  de  Briteiros.  J'ai  remarqué,  parmi 
les  objets  appartenant  à  cette  dernière  station,  une  fibule 
en  forme  de  boucle,  tout  à  fait  semblable  à  celle  que  je  viens 
de  citer  [Jîg.  8). 

Une  autre  ressemble  assez  à  ce  type  connu  chez  nous 
sous  le  nom  de  fibules  romaines  provinciales;  l'arc  en  est 
très  ample,  légèrement  orné,  s'élargissant  vers  la  barre  {Jîg. 
u).  Une  autre  est  unie  à  la  barre  par  un  fil  épais  et  l'arc  ar- 

'  Une  description  plus  parfaite  de  cet  objet  serait  celle-ci:  La  tig. 
6  représente  une  fibule  en  bronze  dont  l'aiguille  est  comprimée  par  un 
ressort  en  fil  de  bronze  tordu,  enroulé  autour  de  la  barre  transversale 
et  dont  l'arc,  fortement  recourbé,  se  termine  par  un  gros  bouton.  Noie 
de  M.  Manias  Sarmento. 


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1 


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659 
idi,  deux  fois  replié  à  l'angle  droit,  se  termine  par  une  pla- 
e  discoïdale  [fig.  12). 

En  général,  on  rencontre  à  Briteiros  un  plus  grand 
mbre  d'objets  précieux  et  artistement  travaillés  qu'on  ne 
irait  mentionner  de  Sabroso,  Je  citerai,  par  exemple,  une 
ique  de  bronze  estampé  {peut-être  le  fragment  d'une  cein- 
e)  recouverte  de  cercles  concentriques,  de  points,  de  li- 
es tordues  {fig.  /J);  et  aussi  une  petite  plaque  ronde,  en 
ayant  au  centre  une  étoile  entourée  de  tout  petits  grains 
rsemés  entre  les  rayons  de  l'astérisque  {fig.  14)*. 

On  y  remarque  également  des  pièces  en  argent  et  en 
>nze,  par  exemple  une  espèce  de  bande,  aussi  en  argent, 
lée  de  méandres;  beaucoup  d'épingles  en  bronze,  surmon- 
;s  de  grosses  têtes  {épingles  à  cheveux);  le  fragment  d'un 
nce  anneau  tordu  en  bronze  (collier?);  de  grosses  per- 
de bronze  ornées  de  ziguezagues:  des  perles  de  verre 
u,  plusieurs  objets  en  fer  enfin,  le  tout  témoignant  un  état 
ez  avancée  de  civilisation,  ou  du  moins  un  vaste  com- 
rce  bien  organisé. 

Je  ne  prétends  nullement  dire  que  cette  civilisation,  dans 
I  ensemble,  soit  italique;  il  me  semble,  au  contraire,  que 
jr  certains  produits,  surtout  céramiques,  les  modèles  y 
:  été  apportés  de  plus  loin,  de  l'Orient.  Les  deux  spéci- 
ns  les  plus  parfaits,  que  j'ai  remportés  avec  moi,  ont 
?antage  d'offrir  les  indices  d'une  influence  identique,  exer- 

'  La  description  exacte  de  cette  ornementation  la  voici  ;  La  [ikquc 
recouverte  de  cordons  et  de  plusieurs  rangées  de  points,  tantôt  sim- 
:,  tantôt  entourés  de  trois  lignes  qui  s'entrecroisent  dans  l'inlervalie 
:hacun  d'eux.  Cette  ornementation  qui  se  retrouve  sur  une  plaque 
bronze  provenant  de  Sabroso,  est  assez  commune  dans  les  deux 
ions  préhistoriques,  où  on  peut  la  voir  sur  des  vases  en  terre  cuite> 
li  bien  que  sur  des  pierres.  Note  de  M.  Martins  Sarmenlo. 


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66o 

cée  sur  les  deux  stations,  tant  ils  sont  ressemblants.  Le 
fragment  provenant  de  Sabroso  {fig.  i5)  m'a  été  donné  par 
M.  Sarmenro  et  il  appartenait  à  sa  collection;  j'ai,  moi- 
même,  ramassé  l'autre  dans  les  ruines  de  Citania  de  Bri- 
teiros  (  ûg.  i6). 

Ils  sont  tous  les  deux  d'argile  micacée,  bien  fine,  lui- 
sante, d'une  couleur  brun-jaunâtre,  et  si  imparfaitement 
cuite,  que  les  surfaces  de  cassure  présentent  une  teinte  gri- 
se, presque  noirâtre,  surtout  celles  de  la  pièce  que  j'ai  re- 
cueillie à  Briteiros,  On  ne  saurait  décider  si  l'on  a  em- 
ployé la  roue  à  potier.  Ces  deux  fragments  sont  ornés  près 
du  bord.  Celui  de  Briteiros  laisse  voir,  entre  plusieurs  sil- 
lons transversaux  simples,  une  guirlande  de  feuilles  surmon- 
tée d'une  bande  contournée  en  spirales,  ou  plutôt  un  cer- 
cle formé  par  des  ss,  se  tenant  les  uns  les  autres. 

L'échantillon  de  Sabroso  (fig.  i5)  a  ces  ornements  en  s 
dans  une  double  rangée,  et  ils  sont  bien  plus  artistement  en- 
trelacés. Cette  ornementation  appartient  à  un  type  assez 
répandu  en  Orient.  Je  renvois  le  lecteur  à  l'ouvrage  de 
Schliemann  sur  Mycènes  où  l'on  peut  voir,  p.  i63,  ces  deux 
espèces  d'ornements  sur  des  frises  de  marbre,  appartenant 
au  Trésor^  près  de  la  Porte  aux  lions.  L'ornementation  en 
spirales  est,  à  peu  près,  la  plus  fréquente  qu'on  ait  obser- 
vée à  Mycènes  (Schliemann,  p.  91,  1 10,  176,  365).  De  cette 
ornementation  dérive  parfois  la  ligne  simplement  ondulée, 
telle  qu'on  peut  la  voir  sur  un  rebord,  provenant  de  Bri- 
teiros (fig.  18),  mais  surtout,  et 
nîères,  sur  le  fragment  d'un  va 
mica  et  recouvert  d'ornements  (^ 
fragment,  sur  lequel  des  lignes  01 
talement  et  Interrompues  de  tei 
chent  par  les  bouts  superposés. 


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66i 

D'autres  échantillons  nous  montrent  ces  éléments  de 
la  spirale,  entièrement  séparés  et  disposés  en  une  zone  de  ss 
redressés  qui  se  touchent  presque  (Jig-  ij)-  Je  n'ai  trouvé 
qu'exceptionellement  des  fragments  de  vases  peints  en  brun 
{fig-  no.) 

Je  ferai  remarquer  également,  que  j'ai  vu  des  lesserae^ 
provenant  de  Sabroso  et  de  Cîtania  de  Briteiros,  semblables 
a  celles  rencontrées  dans  les  anciens  retranchements  d'Alle- 
magne, à  Hissarlik  et  ailleurs,  polies  sur  leur  contour;  elles 
sont  en  partie  assez  petites,  percées  du  non.  Plusieurs  de 
ces  pièces  laissent  voir  encore  les  mêmes  ornements  qui 
couvraient  les  vases  dont  les  fragments  ont  servi  à  les  fa- 
briquer. 

Devant  ces  objets  il  me  semble  impossible  que  l'on  se 
refuse  à  admettre  que  la  civilisation  des  antiques  oppidums 
lusitaniens  ait  reçu  de  bonne  heure  l'influence  de  l'Orient. 

Je  ne  passerai  pas  sous  silence,  quoique  je  n'y  ajoute 
pas  une  grande  importance,  qu'à  Citania  de  Briteiros  on 
a  trouvé  aussi  deux  petites  haches  polies,  tout  à  fait  sem- 
blables par  leur  forme  à  celles  qui  se  rencontrent  commu- 
nément en  Grèce  et  dans  l'Asie-Mineure;  l'une  de  ces  ha- 
ches est  en  fibrolithe  et  elle  est  plus  décidément  cunéiforme 
que  l'autre,  laquelle  est  plutôt  large  et  courte. 

Des  formes  analogues  sont  assez  nombreuses  dans  la 
région  méditerranéenne;  il  est  donc  seulement  nécessaire 
de  déterminer  qu'elle  a  été  la  chaîne  qui  relie  de  telles  trou- 
vailles. Il  se  peut  aussi  que  ces  instruments  de  pierre  soient 
plus  anciens  que  les  vases  en  argile.  A  Sabroso,  du  moins, 
outre  des  haches  en  pierre  polie  et  un  grand  nombre  d'au- 
tres objets  de  granité,  polis  de  même,  on  a  recueilli  une 
certaine  quantité  de  fragments  taillés  de  silex  rubané. 

En  tout  cas,  laissant  même  de  côté  ces  objets  en  pier 


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662 

faut  convenir  que  l'ornementation  des  blocs  et  celle  des  va- 
ses indique  une  souche  orientale  commune,  laquelle  doit 
avoir  été  plus  ancienne  qu'aucune  influence  romaine,  qui  ait 
pu  atteindre  cette  contrée.  Cette  autre  influence  peut  avoir 
été  grecque.  Si  l'on  songe,  cependant,  que  la  civilisation 
qui  nous  a  délivré  de  tels  objets,  en  Grèce  même,  appar- 
tient aux  temps  les  plus  anciens,  et  que  selon  toute  proba- 
bilité elle  y  a  été  importée  de  l'Orient,  on  ne  sera  pas 
très  loin  de  croire  que  la  civilisation  phénicienne  ait  pu  trou- 
ver moyen  d'arriver  Jusqu'à  ces  oppidums,  bâtis  sur  les 
collines  de  ces  vaUées  écartées  de  la  région  lusitanienne.* 


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Lettre  de  M.  Henri  Martin 


A  propos  de  la  note  de  M.  Coelho  —  Sur  les  prétendues 
relations  des  M acrocéphales  if  Hippocrate  avec  les  Cimbres^. 

Je  prends  contre  M.  Coelho  la  défense  des  anthropolo- 
gistes,  et  je  combats  absolument  la  théorie  de  l'origine  ger- 
manique des  Gmbres.  Il  y  a  bien  des  historiens  latins  qui 
font  des  Cimbres  un  peuple  germanique;  mais  ces  histo- 
riens vivaient  cent  cinquante  ou  deux  cents  ans  après  Ma- 
rins et  n'avaient  jamais  vu  de  Cimbres;  ils  avaient  entendu 
parler  de  quelques  débris  de  ce  grand  peuple  qui  subsis- 
taient mêlés  aux  Germains  du  nord.  Les  historiens  corn- 
temporains  de  Marius,  au  contraire,  qui  avaient  vu  les  pri- 
sonniers Cimbres  dans  les  rues  de  Rome,  les  distinguaient 
parfaitement  des  Teutons  et  les  qualifiaient  de  Gaulois. 

Les  savants  Scandinaves  ne  croient  pas  à  l'origine  ger- 
manique des  Gmbres.  Quand  on  a  étudié  sur  place  l'archéo- 
logie du  nord  Scandinave,  il  ne  semble  pas  possible  de  ne 

'  Cette  lettre  a  été  envoyée  après  la  clôture  du  Congrès  par  M. 
Henri  Martin,  qui  n'était  pas  présent  à  la  9^<°"  séance,  dans  laquelle  le 
mémoire  de  M.  F.  A.  Coelho  fut  lu  par  son  auteur. 


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664 

pas  reconnaître  les  Cimbres  dans  ce  peuple  de  Tâge  du 
bronze  qui  paraît  être  arrivé  dans  le  Nord  huit  à  neuf  siècles 
avant  l'ère  chrétienne  et  qui  a  succédé  en  Scandinavie  au 
peuple  des  dolmens. 

EJitre  ce  peuple  de  l'âge  du  bronze,  si  bien  caractéri- 
sé par  ses  armes,  ses  ornements  d'or  et  de  bronze,  ses  im- 
menses trompettes  de  bronze  etc.,  et  le  peuple  aux  armes 
de  fer  et  aux  ornements  d'ai^ent,  c'est-à-dire  les  Scandina- 
ves, il  n'y  a  point  de  place  pour  autre  chose.  Les  Cimbres 
étaient  des  Celtes,  des  Gmmériens,  arrivés  dans  le  Nord  en 
même  temps  que  les  Bretons  dans  l'ouest.  Les  Gimmériens 
ne  sont  pas  un  peuple  imaginaire  et  tout  ce  que  dit  Héro- 
dote est  digne  de  foi. 

Strabon  ajoute  un  fait  important  à  Hérodote,  en  nous 
disant  que  les  Gimmériens  ont  émigré  du  Pont-Euxin  avec 
leurs  voisins  ou  alliés  les  Vénètes,  Or  on  retrouve  les  Vé- 
nètes  à  côté  des  Cimbres  dans  le  Nord;  à  côté  des  Gaulois 
Cisalpins  en  Italie;  parmi  les  Gaulois  Armoricains  en  Bre- 
tagne; à  côté  de  Kymris  en  Galles  et  en  Basse-Écosse. 

Le  nom  de  Kymris  paraît  avoir  été  une  dénomination 
que  les  peuples  Celtiques  ont  prise  et  reprise  à  diverses  fois, 
et  il  y  a  toute  apparence  que  notre  historien  Amédée  Thier- 
ry a  eu  raison  de  l'identifier  à  ceux  de  Cimbres  et  de  Gim- 
mériens. i07;iri' paraît  signifier  «compagnon,  compatriote.* 


Communication  de  M.  F.  A.  Coelho  à  propos  de  la  let- 
tre précédente. 

M.  Henri  Martin  n^a  ni  lu  ni  entendu  lire  ma  com- 
munication sur  les  Gimmériens,  les  Cimbres,  etc.;  il  n'en 
connaît  que  l'extrait  très  imparfait  donné  par  M.  Cartailhac 


665: 

dans  son  rapport  sur  le  Congrès.  Je  ne  m'explique  pas  com- 
ment ce  dernier  savant,  qui  avait  sous  les  yeux  le  manuscrit 
de  ma  communication,  a  pu  m'attribuer  l'affirmation  qu'on 
ne  sait  sur  les  Qmmériens  rien  que  «des  fables  répétées  de- 
puis Homère  et  Hérodote.»  La  réponse  de  M.  H.  Martin 
aurait  pris  une  forme  bien  différente,  s'il  connaissait  mes  ar- 
guments; je  crois  que  le  savant  historien  ne  répéterait  pas 
comme  une  preuve  que  les  historiens  contemporains  de  Ma- 
rius  qualifiaient  les  Cimbres  de  Gaulois;  dans  ce  temps  là 
on  ne  distinguait  pas  encore  les  Germains  des  Gaulois,  com- 
me j'ai  dit  dans  ma  note. 


,ï  Google 


666 

lira  en  France  avec  profil  l'excellent  livre  de  M.  d'Arbois 
de  Jubainville  que  je  cire  ci-dessus  et  la  belle  Revue  celtique; 
alors  on  ne  répétera  plus  que  les  noms  des  Gimmériens, 
des  Cimbres  et  des  Kymris  ont  une  même  origine. 

En  ce  qui  regarde  les  anthropologistes,  je  remarquerai 
qu^il  y  en  a  qui  ne  seront  pas  disposés  à  accepter  la  défense 
que  leur  offre  M.  Henri  Martin.  Je  lis,  par  exemple,  dans 
la  Revue  Anthropologique,  (vi°,  p.  729)  le  passage  suivant, 
signé  de  la  main  du  docteur  E.  Daily;  «11  nous  est  impos- 
sible de  faire  de  ces  Cimbres  aux  cheveux  jaune-filasse,  pres- 
que blancs  chez  les  enfants,  au  front  haut,  à  la  figure  al- 
longée, aux  membres  flexibles,  autre  chose  que  des  Scan- 
dinaves, des  Germains,  ou  plus  probablement  encore,  des 
Finnois.  • 

Il  y  a  dans  le  même  volume  de  la  Revue  un  article  où 
M.  G.  Lagneau  fai  remonter  la  déformation  crânienne  des 
Deux-Sèvres,  non  aux  Cimbres = Gimmériens  de  M.  Broca, 
mais  aux  Theiphales  et  aux  Alains. 

Je  compte  revenir  encore  une  fois  sur  ce  sujet  et  le 
traiter  avec  plus  de  développement. 


rcoot^ii 


LES    CIOAÏIOS 
A  PROPOS  DE  LA  COMMUNICATION  DE  M.  I».  Batalllard 


£  GITANOS  D  ESPAGNE  ET  LES  CIGANOS  D 


M.  F.  Adolpho  Coelho 

I 


Je  n'ai  aucunement  l'intention  de  m'engager  dans  une 
discussion  avec  M.  P.  Bataillard  sur  Pancienneté  des  Tsi- 
ganes (j'emploie  volontiers  cette  forme)  en  Europe  et  par- 
ticulièrement dans  la  Péninsule  ibérique.  Une  telle  discus- 
sion ne  porterait  que  d'insignifiants  fruits  de  ma  part;  je 
ne  pourrais  faire  à  peu  près  que  répéter  les  conclusions 
auxquelles  M.  Miklosich  est  arrrivé  dans  ses  Abhandlun- 
gen  et  Beitrage.  Pour  la  Péninsule  ibérique  je  ne  crois 
pas  tomber  en  erreur  si  j'affirme  qu'aucun  fait  positif  ne 
nous  permet  de  supposer  que  les  Tsiganes  y  soient  par- 
venus avant  le  xv'  siècle  de  notre  ère.  Il  est  possible  de 
faire  bien  des  combinaisons  avec  des  noms  ethniques  an- 
ciens et  modernes,  avec  quelques  bribes  de  "^-''♦"='—  ■*~ 
peuples  disparus;  mais  il  faut  accepter  la  rè| 
M.  Miklosich:  *La  ressemblance  du  nom  et  ( 


ir. 


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668 

de  vie  ne  suffit  pas  pour  prouver  la  parenté.»'  Mais  j'évite 
une  question  qui  doit  être  vidée  plus  tard  sans  doute  et  je 
vais  m'occuper  de  faits  qui  ne  soulèvent  aucune  tempête 
d^opinions. 

M.  P.  Bataillard  n'a  trouvé  dans  ses  vastes  recherches 
aucun  ouvrage  portugais  sur  les  Tsiganes;  la  chose  est  très 
facile  d'expliquer:  c'est  qu'il  n'y  en  a  point.  L'histoire  des 
Ciganos  ou  Tsiganes  du  Portugal,  l'étude  de  leurs  condi- 
tions actuelles  sont  encore  à  faire.  Les  écrivains  portugais 
ne  s'en  sont  occupés  que  très  rarement,  en  se  bornant  tou- 
jours à  quelques  observations  d'occasion.  Dans  ces  derniers 
temps  un  professeur  a  publié  un  article  sur  l'origine  des  Ci- 
ganos; mais,  ignorant  à  peu  près  tout  ce  qu'il  y  a  de  sérieux 
sur  le  sujet  et  ne  tâchant  pas  d'étudier  spécialement  les  Ci- 
ganos, il  s'est  perdu  dans  une  épaisse  forêt  de  combinaisons 
fantaisistes  sur  les  Tsiganes  et  les  Hyksos,  les  Pasteurs  qui 
envahirent  l'Egypte  sous  la  xv"  dynastie*. 

«Ce  qui  importe  surtout,  dit  M.  P.  Bataillard,  c'est  que 
les  nouveaux  investigateurs,  tout  en  se  mettant  au  courant 
des  travaux  publiés  i  l'étranger  et  des  questions  nouvelles 
qu'ils  soulèvent,  ne  se  perdent  pas  dans  les  généralités,  mais 
s'appliquent  surtout  k  l'étude  topique  des  Tsiganes  du  pays.  » 

C'est-là  un  excellent  conseil,  que  j'ai  tâché  de  suivre 
d'avance.  J'ai  réuni  quelques  matériaux  pour  l'étude  des 
Ciganos  de  Portugal  et  je  compte  publier  bientôt  un  mé- 

*  Ueber  die  Mundarlen,  etc.  iir,  a.  Je  cite  les  trois  premiers  mémoi- 
res avec  la  pagination  du  tirage  à  part;  les  autres  avec  la  pagination 
des  Denkschri/len. 

*  W.OPosit'm$mo  i,  Porto,  1878,  in 8*.  Plus  récemment  un  écrivain 
espagnol  a  découvert  les  Gitanos  dans  la  Bible  {Gen.,  chap.  23)  !  V,  El 
Folk-Lore  andalu^  i,  ïSS-ïSg.  11  est  bien  plus  facile  de  faire  de  ces  in- 
ventions e^ue  d'étudier  patiemment  les  faits. 


669 

moire  sur  ce  sujet  dans  le  Boletim  da  Sociedaàe  de  Geogr 
phia  de  Lhboa.  Cependant  je  pense  qu^il  ne  sera  pas  in 
tile  de  donner  dans  le  Compte  rendu  du  Congrès  un  extn 
de  ce  mémoire  pour  prouver  du  moins  que  l'intéressan 
communication  de  M.  Bataillard  ne  sera  pas  oubliée  dai 
mon  pays.  ' 

A  la  vérité,  les  faits  que  je  vais  rapporter  n'ont  p. 
un  intérêt  particulier  et  surtout  n'apportent  rien  qui  puis 
éclaircir  les  questions  générales  qui  se  rattachent  aujourd'h 
aux  Tsiganes.  Peut-être  d'autres  investigateurs  seront-i 
plus  heureux  que  moi;  mais  les  résultats  négatifs  même  so 
nécessaires  à  la  science.  Du  reste  j'avoue  que  je  n'ai  entr 
pris  ces  recherches  sur  les  Ciganos  que  dans  l'intérêt  ( 
mes  études  générales  sur  l'ethnologie  de  la  Péninsule  ib 
rique. 


II 


La  plus  ancienne  allusion  aux  Ciganos  en  Portugal  : 
trouve,  si  mon  interprétation  est  exacte,  dans  une  pièce  < 
Cancioneiro  gérai  de  Garcia  de  Resende,  imprimé  à  Li 
bonne  et  Almeirim  en  i5i6-i5i6.  C'est  une  compositic 
satyrique,  une  espèce  de  tendon,  dirigée  par  Aiîonso  Valen 
à  Garcia  de  Resende,  et  accompagnée  de  la  réponse  de  c 
lui-ci.  Le  collecteur  du  Cancioneiro  y  est  grotesquemei 
comparé  à  une  grecque  ivrogne  qui  enfante  entre  les  toi 
neaux  d'un  cabaret; 


Parecejrs  hum  pouco  o  farto 
preguador  da  ryda  etema, 
Grega  bebada,  de  parto, 
antre  cubas  cm  tauema- 


,ï  Google 


670 

Les  Tsiganes  furent  nommés  Grecs  dans  la  Péninsule 
ibérique',  leur  goût  pour  l'ivrognerie  est  connu*;  ils  vivent 
beaucoup  dans  les  cabarets:  je  crois  donc  que  grega  signi- 
fie cigana  dans  ce  passage  du  Cancioneiro  geral^.  GÏI  Vi- 
cente  nous  présente  les  Ciganos  comme  originaires  de  la 
Grèce  dans  sa  Força  dos  ciganos,  représentée  à  Evora,  de- 
vant la  cour  de  Dom  JoSo  iii,  en  iMi: 


Mantenga  scnhoras  y  rosaz  y  ricaz 
De  Grecia  simnij  hîdalgaz  pior  Duz.  - 
Nuestra  ventura  que  fiie  contra  nui, 
Por  tieiras  estraSas  nuz  ttene  perdidaz. 

Cette  farce  est  un  petit  tableau  de  la  vie  des  Gganos, 
aussi  fidèle  que  tous  ceux  que  dessinait  Gil  Vicente. 

Les  Ciganos  y  demandent  l'aumône  et  diverses  pièces 
de  toilette: 

La  Virgen  Maria  uz  hapa  dichucus, 
Dadnuz  limuzna,  seÇuniz  pudruzuz, 
Tantico  de  pan,  hard  la  tnezura- 


Dadme  una  camiza  azucal  colada 

Nieve  de  cira,  firmal  preciuzo. 

Dadme  una  saya,  seflur  graciuzo, 
Lirio  de  Grecia,  mi  cielo  esirellado. 

Sefiura,  seîiura,  dadme  un  tocado, 
Antucha  del  cielo,  sin  cera  y  pavilo. 

'  V.  le  passage  de  Passa  cite  par  Miklosîch,  Abhandl,mt  4S> 

'  V.  Fr.  Michel,  Le  Pays  bas^M^  p.  iSg  etc. 

'  J'ai  déjà  fait  connaître  cette  interprétation  en  1877. 


,ï  Google 


671 

Elles  enseignent  à  faire  des  sortilèges  et  disent  la  b 
ne-aventure: 

Seffuraz,  quereiz  aprender  i  hechizo, 
Que  sepais  hacer  para  muchaz  cozaz  ! 

Otro  hechizo,que  pozaiz  mudar 
Ëa  voloniad  de  hombre  cualquiero, 
Por  firme  que  esté  con  fe  verdadeîra, 
Y  Tuz  )o  mudeiz  i  vuestro  mandar. 


Muztra  la  mano,  rucifla, 
Lirio  de  hermosura, 
Dîne  he  la  buena  ventura. 
Muitra  ca,  sefiura  mia, 
Ora  mustra  acitia,  adRa. 

Qu^  mano,  que,  sîffo,  que  Aurez  I 
Que  dama,  qui  roza,  que  perlai 
Por  mi  vida  que  por  verla 
Olvidë  I02  miz  amurez. 
Veamoz  que  dice  el  sino, 
El  recado  que  te  vino 
No  lo  créas,  aima  mîa, 
Que  otra  raas  alegria 
Te  viene  ya  por  camino. 
Dunniendo  tu,  fresca  ruza, 
Te  viene  el  bien  por  la  mar, 
Luego  tienez  el  mirar 
De  doocella  muy  dichuza*. 

Dans  la  farce  figurent  aussi  quatre  ciganos  qui  pro] 

<  Comjk  les  buenaventwat  publiées  par  Demàfilo  dans  La  Encii 
pedia,aîlov,n."i-jel3i.  Sevilla,  [881,  in  4\  On  verra  par  là  que 
Vicente  reste  bien  pris  de  ta  réalité. 

C.R.  4S 


,ï  Google 


673 

sent  l'échange  des  bêtes  de  somme  contre  d'autres,  en  re- 
cevant de  Fargeiit  par  dessus  le  marché,  ce  qui  est  un  trait 
caractéristique  des  Ciganos. 


Cual  de  voz  otroz,  sefiures, 
Trocarâ  un  rocîn  tnio, 
Rocin  que  hubo  de  un  judfo 
Ahora  en  pâscua  de  florez, 
Y  tengo  dos  especialez 
Caballoz  buenoz  que  talez. 


Sefiures,  yo  trocaré  un  potro 
Que  tengo,  por  cualquîer  otro, 
Si  me  volvteis  mil  realez. 


Enfin  les  Ciganos  et  les  Ciganas  de  Gil  Vicenie  dansent 
et  chantent. 

Il  y  a  encore  d'autres  allusions  aux  Ciganos  dans  les 
écrivains  portugais  du  xvi*  siècle.  L'historien  JoSo  de  Bar- 
ros  nous  en  parie  à  propos  des  Calandares  de  l'Inde'. 

Malgré  les  lois  qui  au  xvi  siècle  ordonnèrent  l'expulsion 
des  Ciganos  du  sol  portugais',  ils  y  persistèrent,  surtout 
dans  la  province  d'Alemtejo.  Les  Constitutions  s}'ttodales 
de  la  diocèse  d'Elvas,  de  i633,  prouvent  leur  existence  dans 

<  •N5o  entrâo  (os  calandares)  nas  cidades,  mas  ao  modo  dos  Cy- 
ganos  que  andam  nesta  parce  de  Europa,  pousâo  fora  do  pouoado,  e 
alli  Ihe  traz  a  gente  do  pouo  sua  esmola.  E  quando  assi  anda  grande 
nutnero  d'elles,  elegem  hum  a  que  obedecera  A  maneira  que  os  Cyga- 
nos  fazem  à  seu  Conde.  Décoda  vi,  5,  5,  éd.  161  j.» 

*  Alvard  du  i3  mars  i5a6,  loi  des  Cônes  du  26  novembre  i538, 
Orden.  nov.  liv.  v,  rit.  69;  loi  du  i7aoQt  iSi?;  Aivarddjx  14  mars  iSyS; 
loi  du  i3  septembre  i6i3;  loi  du  aS  août  iSga,  etc. 


,ï  Google 


6tÎ_ 

cette  partie  du  Porii^al  qu'ils  habitent  de  préférence  encore 
aujourd'hui.  Mais  ils  allaient  sans  doute  jusqu''aux  provin- 
ces du  nord.  Les  Constitutions  de  l'archevêché  de  Braga, 
de  1639,  déclarent  que  ceux  qui  prient  les  Egypcios  de  leur 
dire  la  bonne-aventure  pèchent  très  gravemenL 

Je  passe  sur  d'autres  mentions  des  Cïganos  qu'on  lit 
dans  les  écrivains  et  dans  les  lois  du  xvu'  et  du  xvin'  siè- 
cles, époque  où  nous  les  voyons  employés  dans  les  tra- 
vaux de  la  reconstruction  de  Lisbonne',  et  j'arrive  aux  Ci- 
ganos  contemporains,  que  l'on  rencontre  en  masse  seule- 
ment dans  la  province  d'Alemtejo,  d'où  ils  sortent  pour 
faire  des  excursions  dans  les  autres  provinces  du  royaume, 
surtout  dans  l'Extremadura.  Il  n'y  a  pas  encore  longtemps 
qu'un  groupe  de  Ciganos  portugais  vivaient  à  Lisbonne,  d'où 
ils  sont  disparus. 

Je  n'ai  pas  encore  pu  étudier  sur  place  les  Ciganos 
d'Alemtejo,  dont  j'ai  rencontré  souvent  quelques-uns,  par 
ci,  par  là;  mais  un  ami  intelligent  et  zélé  à  recueilli  pour 
moi  à  Elvas  beaucoup  d'informations  qui  les  regardent,  y 
compris  un  vocabulaire  de  220  mots  de  leur  langue. 

Les  Ciganos  d'Alemtejo  ressemblent  beaucoup  à  ceux  de 
Gil  Vicente;  ils  ne  sont  pas  des  métallurges  et  s'occupent 
surtout  à  acheter,  vendre  et  échanger  des  bêtes  de  somme. 
Ils  vivent  généralement  dans  des  conditions  très  misérables; 
ils  ne  possèdent  ni  tentes,  ni  chars,  quoiqu'ils  n'aient  pas 
de  demeure  fixe.  Cependant,  j'ai  rencontré  un  petit  groupe 
(deux  hommes,  deux  femmes  et  trois  enfants)  à  Almada, 
près  de  Lisbonne,  lesquels  s'étaient  improvisé  une  tente  avec 
une  pièce  de  toile  contre  un  mur. 

Aujourd'hui  la  buena-dicha  est  tombée  beaucoup  de  son 

*  Aviso  de  i5  mai  1756. 


-,cp^. 


674 
ancienne  importance  dans  l'esprit  des  paysans;  mais  les 
'  sortilèges  rapportent  encore  quel^^ue  chose  aux  Ciganas. 
Celles-ci,  cependant,  s'occupent  surtout  à  voler  des  mou- 
choirs, des  pièces  de  toile,  etc.,  dans  les  magasins  et  les 
boutiques.  Les  Ciganos,  de  leur  part,  volent  surtout  des  piè- 
ces de  bétail,  des  volailles  et  des  bêtes  de  somme.  Ils  ne 
sont  pas  bons  éleveurs  d'animaux;  mais  ils  sont  regardés 
comme  d'excellents  connaisseurs.  Ils  ne  se  distinguent  par- 
ticulièrement ni  par  le  chant,  ni  par  la  musique.  Ils  ne  font 
généralement  que  répéter  les  chants  populaires  du  pays  ou 
ceux  de  TEspagne.  Ils  prouvent  leur  indifférentîsme  religieux 
en  baptisant  plusieurs  fois  les  mêmes  enfants;  ce  n'est  pas 
faire  leurs  enfants  des  chrétiens,  mais  plutôt  recevoir  les 
cadeaux  des  parrains  qu'ils  ont  en  vue. 

Le  mariage  a  encore  la  forme  du  rapt  et  n'est  pas 
confirmé  d'après  les  lois  du  pays.  On  parle  des  cérémonies 
particulières  qui  s'y  rattachent;  mais  je  n'ai  pu  découvrir 
s'ils  ont  encore  la  coutume  décrite  par  M.  P.  Bataillard, 
p.  bo  I . 

Ils  parlent  le  portugais,  Tespagnol  et  le  rumanoy  qui  n'est 
qu'un  mauvais  espagnol  parsemé  de  mots  particuliers,  pour 
la  plupart  d'origine  tsigane.  A  juger  par  quelques  textes  de  ce 
langage,  recueillis  par  M.  Pires,  ils  ont  perdu  même  les  pro- 
noms et  la  plupart  des  particules  tsiganes,  que  l'on  rencontre 
encore  dans  le  langage  des  Gitanos.  J'ignore  aussi  s'ils  ont 
également  oublié  les  numéraux  tsiganes.  Le  langage  des  Ci- 
ganos représente  donc  un  étage  encore  plus  avancé  de  la 
ruine  de  la  langue  tsigane  primitive,  que  le  gitano. 

Ils  se  désignent  eux-mêmes  par  les  noms  de  cala,  calé, 
m.,  cfl///,  f.,  rom  (M.  Pires  n'a  recueilli  que  le  fém.  rom(). 

Les  étrangers,  les  non-Cîganos  sont  désignés  par  le  mot 
jambo. 


,ï  Google 


675 

Les  220  termes  de  leur  langage  que  j^aî  étudiés  se  ré- 
partent de  la  manière  suivante: 

142  se  retrouvent  dans  le  gitano,  en  général  sans  difté- 
rence  considérable  de  sens  ou  de  forme'; 

3i  sont  dérivés  de  mots  espagnols  ou  portugais; 

3  sont  des  mots  portugais  dont  le  sens  s'est  modifié; 

44  sont  d'origine  inconnue  ou  incertaine  pour  moi  jus- 
qu'à présent. 

Pour  être  moins  incomplet  en  ce  qui  regarde  la  lan- 
gue, j'ai  étudié  une  source  indirecte.  On  sait  que  dans  l'ar- 
got de  beaucoup  de  pays  européens  se  sont  introduits  plu- 
sieur  mots  d'origine  tsigane.  Pott  et  Miklosich  ont  traité 
scientifiquement  ce  sujet.  J'ai  recueilli  un  assez  considéra- 
ble vocabulaire  de  l'argot  portugais  et  j'y  ai  reconnu  une 
vingtaine  de  mots  tsiganes.  Ces  mots  se  retrouvent  pour 
la  plupart  dans  le  gitano,  et  à  peu  près  dans  la  même  for- 
me. Le  nom  même  de  l'argot  portugais  est  d'origine  tsiga- 
ne: c'est  calao,  git.,  calô,  calli,  igitano,  gitana»,  ca/o',  la  lan- 
gue des  Gitanos. 

Les  faits  linguistiques  permettent  donc  de  conclure  que 
les  Ciganos  sont  une  branche  des  gitanos,  peut-être  alimen- 
tée par  des  migrations  plus  ou  moins  nombreuses  à  diver- 
ses époques. 

J'aurais  encore  à  dire  quelque  chose  sur  les  Tsigane 
chaudronniers  et  les  Tsiganes  conducteurs  d'ours  qui  vier 
nent  jusqu'en  Portugal;  mais  je  préfère  présenter  en  déta 
quelques-uns  des  faits  linguistiques  dont  je  viens  de  parlei 


•  Je  me  fonde  seulement  sur  les  vocabulaires  de  'Mavo  fi  de  Bo 


,ï  Google 


676 


A..  Mots  da  mmanlio  d'origine  Inoertalne 


Ackaran,  ad).  Fâché. 
Achochinar,  v.  a.  Louer. 
Alsiplesis,  s.  m.  pi.  Boutonnières. 
Aricankas,  s.  m.  pi.  Boutons. 
Ascuno,  s.  m.  Abyme. 
Baheri,  adj.  Arabe. 
Bea,  s.  f.  Aide. 
Cajuqai^  s.  f.  Lune'. 
Callardi,  s.  f.  Saucisse  faite  avec 

de  la  farine. 
CamelU,  s.  f.  Boutique. 
Chicubelar,  v.  a.  Voler, 
Choriar,  v,  Significa 


Chubelar^  v.  a.  Donner. 

Chuga.  Signifie  ai 

Churon,  s.  m.  Arbre.  En  port.  cAo- 

râo  signifie  saule  pleureur. 
Colisarar,  v.  n.  Passar. 
Combisarar,  v.  a.  Recommander. 
Cralia,  s.  f.  Orange. 
Curajai,  s.  m.  Prêtre. 
Emd,  s.  f.  Ânesse. 
Furata,  Signification  incertaine. 


Gallardi,  s.  f.  Poudre  à  canon' 
Gorobon,  s.  m.  Cordon. 
Gui'f,  s.  m.  Lard. 
Gustipeni,  s.  f  Vol. 
Jambo,  s.  m.  Homme,  celui  c 

n'est  pas  Cigano. 
Magrena,  s,  f.  Jument. 
Maniscobar,  v.  a.  Décompter. 
Mitlen,  s.  m.  Orange. 
Morchada,  s.  f.  Anesse. 
Mulla,  s.  f.  Battage  du  blé. 
Niscobelar,  v.  a-  Décompter^. 
Ojaca,  adj.  Joli^  beau. 
lOlipanda,  s,  m.  Soleil. 
Patuque,  s.  m.  Bât. 
Péri,  s.  f.  Béte  de  somme. 
Pirar,  Voler. 
Pirabaor,  s.  m.  Larron. 
Posottô,  s.  m.  Noria. 
Pusca,  s.  f.  Jaquette. 
Rebrandini,  s.  î.  Liqueur. 
Satalla,  s.  f.  Olive. 
Taripeha,  s.  f.  Prison. 


'  Git,  cajuqui,  sourde.  Mayo. 

*  Git.  gallardi,  noire  ? 

'  Ce  mot  se  rattache  peut-être  au  git.  nicoietar,  sicobelar. 


677 


B.  Hota  dn  ramanlio  derlvéa  de  mots  eapa^ola  on  portngala 


:.  Dérivés  avec  le  suffixe  sarh 


2.  Dérivés  avec  le  suffixe  me, 
men': 


Choùmi,  hutte,  port,  choça,  esp. 
Abaixisarelar  (nabaixisar),  abais-  choja. 

ser,  port,  abaixar.  S(»M6ri>n^,arbre,port.elesp.som- 

Ajustisarar,  ajuster,  port,  et  esp.  bra,  ombre. 

ajustar.  Tardimen,  tard,  après-midi,  port. 

Desawanarisar,  démarrer,  port.  et  esp.  tarde. 

et  esp.  desamarrar. 
Ladrisarelar,{<tladrisarar),  port,       3.  Dérivés  avec  le  suffixe  uncAo*: 

et  esp.  ladrar. 
Seguisarar,  motsonner,  port,  et        Coniraruncho,  contraire,  port,  et 
esp.  segar.  esp.  contrario. 

Habuncha,  fève,  esp.  haba,  port. 
b)  suBSTAm-iPS  :  /ava. 

Mandiluncbo,     tablier     grossier, 

port,  et  esp.  mandil. 
Mesimcho,  mois,  port,  tnej,  esp. 

mes. 
Montuncho,  port  et  esp.  monte. 
Pastorchuncho,  pasteur,  port,  et 

esp.  pastor. 
Segabrimcho,  moîsonneur,  port, 
et  esp.  segar. 


Abertisara, 

ta,  esp.  abieria. 

Basisaro,  coupe,  port,  et  esp.  ba- 
cia. 

Huertisara,  jardin  potager,  esp. 
fiuerta. 

Labraoresa,    laboureur,  esp.  la- 
brador, port,  lavrador. 

Raisaro,  (•rrr'Mro),  rivière,  port        Abriluncho,   avril,    pon.    et  esp. 


et  esp.  no. 


abril. 


Tempisaro,  temps,  port,  tempo,       Jwuîuncho,  juin,  esp,  jutiio,  port 
esp.  tiempo.  junko. 

'  Sur  ce  suffise  v.  Miklosich,  Abhandl,  x,  480-481. 
»  Id.  X,  445. 
'  Ce  suffixe  est  d'origine  romaine;  il  se  retrouve  dans  le  cal<S  ou 


.ïGoOgICj 


']r 


Juliuncho,  juiUet,  esp.  julio,  port. 

julho. 
Agosiuncho,  a6ut,  port,  et  esp. 

agosto. 
Stttmbruncho,   septembre,  port. 

setembro,  esp.  seliembre. 
Octubruncho,  octobre,  port,  outu- 

bro,  esp.  octubre. 
Novembruncho,  novembre,  port, 

novemltro,  esp,  ttoviembre. 
Decembruncho,   décembre,  port. 

de^embro,  esp.  dUitmbre. 


5.  Mots  dont  le  sens  est  modifié. 

Èicha,  couleuvre,  port,  et  esp.  bi- 

cho,  port,  bicha. 
Currar,  donner  asile,  port  curral, 

esp.  corral,  port,  curro. 
Grupo,  volume,  port,  et  esp.  gru- 

po. 


4,  Dérivés  avec  le  suffise  uno,un: 

Ferbruno,  février,  pon. /evereiro, 

esp.  febrero. 
Airun,  air,  esp.  aire,  port.  ar. 


Les  noms  de  mois  qui  complètent  la  liste  ci-dessus 
sont: 

Eneruno  (git.  inerin),  março  (port,  março)  et  maio  (port. 
maio,  esp.  mayo).  Les  Ciganos  ont  donc  perdu  tout  à  fait 
les  noms  particuliers  des  mois  que  les  Gitanos  conservent 
encore  pour  la  plupart,  comme  quirdaré,  mars,  alpatidy, 
quiglé,  avril,  quindaîé  mai,  etc.  Les  nouvelles  formes  sont 
dérivées  en  partie  de  l'espagnol,  en  partie  du  portugais. 


679 


C  Moto  tolganas  de  l'argot  portoffals 


Adicar,  v.  a.  voir.  Gitano:  dicar, 
V.  a.  ver,  percibir,  acechar. 
Mayo.Miklosich,^A(iniJ/.vu, 
301.  Origine  indienne. 

Artdo,  s.  m.  pain.  Arti/e  au  itiii* 
siècle.  Giiano  harton,  m.  pain, 
arti/ero,  m.BouIaoger.Miklo- 
sicli,  Abhandl.  m,  41.  Origine 
grecque. 

Avelar,  aveifar,  v,  a.  avoir,  tenir. 
Gitano:  abelar,  v.  a.  tener, 
poseer. Probablement  du  cas- 
till.  haber,  port,  haver.  Cp. 
cependant  gît.  abillar,  v.  n. 
venir,  aeudir;  racine  sanscri- 
te ap  obtenir.  Miktosich,  Ab- 
handl. VII,  170-171. 

'iBani{a,  s.  f.  guitarre.  Gitano: 
basnôy  s.  m.  gallo,  Bachani, 
s.  f.  guitarra.  Miklosich,  Ab- 
handl. VII,  176.  Origine  in- 
dienne. 

Basta,  bâta,  s.  f.  main.  Gitano: 
balt,  baste,  s.  f.  mano.  Mayo. 
Miklosich,  Abhandl.  vin,  92. 
Origine  indienne. 

Calcorrear,  v.  n.  courir.  Calcos, 
s.  m.  pi.  Souliers.  Gitano: 
calcà,  calcorro,  s.  m.  lapato, 
calzado.  Mayo.  «Die  Oxytoni- 
rung  weiset  auf  niclit-span. 
Urspning.»  Cp.  gr.  xc£)t^. 


Miklosich,  Abhandl.  iii,  41  (se- 
parata). 

Churinar,  v.  a.  Donner  des  coups 
de  couteau.  Gitano:  churi, 
s.  f.  cuchillo,  putlal.  Mayo. 
Miklosich,  Abhandl.  vu,  197. 
Origine  indienne. 

Clises,  s.  m.  pi.  Yeux.  Gitano  :  di- 
se, s.  m.  ojo,  aguiero.  O  dise 
ya  pandureri,  el  ojo  de  la 
cerradura  ;  edisar,  ojetear, 
agujerear;  herir  los  ojos. 
Mayo,  Du  grec moderneuXitât 
Miklosich,  Abhandl.  vu,  241. 

Dabo,  s.  m.  Père.  Gitano:  dadâ, 
5.  m.  padre.  Miklosich,  Ab- 
handl. vit,  198.  Origine  in- 
dienne. 

IGajo,  s.  m.  Homme,  bon  vivant, 
sujet,  libertin,  espiègle.  Gita- 
no: gâché,  gachô.  Varon, 
mancebo.  Mayo.  Miklosich, 
Abhandl.  vu,  111-212.  Origine 
indienne.  Mais  cp.  l'iez,  Ety- 
mologisches  Worterbuch,  i, 
195.  Baist,  Zeitschri/l  /Or 
rom.  Philologie  v,  247. 

Grane,  s.  m.  cheval.  Gitano  :  gras- 
té,  s.  m.  caballo,  grasti,  s.  f. 
jaca,  grasni,  s.  f.  yegua.^rii, 
s.  m.  bestia.  Mayo.  Bohém. 
grec  :  grasini,  grasni,  gram. 


-pi" 


jument  Miklosich,  Abkandl. 
vii,3i6.  Origine  arménienne. 

ImIo,  s.  m.  or,  argent.  Bohém. 
grec:  lova,  monnaie;  lové, 
argent.  Miklosich,  Abhandl. 
VI",  7- 

Mane\,  s.  m.  homme,  maneja,  s.  f. 
femme.  Gitano  :  manu,  s.  m. 
hombre,  varon.  Miklosich.  vlfr- 
kaiiJl.  riii,  lo.  Orig.  indienne. 

Mistico,  adj.  bon,  excellent,  beau, 
Gitano  :  misiô,  s.  m.  bien,  bé- 
néficie, conveniencia,  adv. 
bien,  bueno,  conveniente- 
mente.  Miklosich.  Abhandl. 
viu,  >S.  Origine  indienne.  Le 
mot  de  l'argot  port,  fait  pen- 
ser tout  naturellement  au 
mot  littéraire  myslico,  fr. 
mystique. 

Packacha,  i.  f.  terme  bas,  vulva. 
Gitano:  packi,  s.  f.  virginidad, 
virgo.  Mayo.  pachibar,  hon- 
rar,  espackilar,  desflorar.  Mi- 
klosich, Abhandl.  vui,  33-34. 
Origine  indienne. 

Pâme,  s.  m.  argent.  Gitano:  ;»ar- 
nâ,  adj.  blanco,  parné,  s.  m. 
dinero.Mayo.  Miklosich, ..4^- 
handl,  VIII,  3i.  Origine  îd- 
dienne. 

Piar,  V.  a.  boire,  piela,  s.  f.  ivres- 
se, pio,  adj.  ivre.  Gitano: 
piyar,  V.  a,  beber.  Mayo.pilé, 
pilli,  adf.  e brio,  ib.  Miklosich, 
II,  4,  24,  36,  54,  61,  65,  (sep.) 
VIII,  44-45.  Origine  indienne. 


Pirar-se,  v.  refl.  S'en  aller,  s'en- 
fuir. Gitano  :  pirar,  pirelar, 
V.  n.  andar,  caminar,  pisar. 
Mayo.  Miklosich,  Abhandl. 
viu,  40-41. 

Pocachim,  s.  m.  mousquet.  Gita- 
no :  pusca,  s.  f.  escopeta,^nu. 
câ,  pruscatiné,  i.  m.  pistola, 
cachorillo.  Miklosich,  vin,  5 
52.  De  l'allemand ^chse,  an 
haut-allem.,    par    l'intermé- 
diaire des  langues  slaves  (: 
be  puska). 

Raso,  s.  m,  prftre.  Gitano:  ara- 
jay,  s.  m.  fraite,  erajay, 
sacerdote.  Mayo.  Ce  mot  de 
l'argot  port,  se  rapproche 
plus  de  la  forme  du  bohémien 
Scandinave  (rajAo)que de  cel- 
le du  gitano.  Miklosich,  Ab- 
handl. VIII,  54.  Origine  indien- 
ne douteuse. 

Ratanhi,  s.  f.  Passe -partout,  faus- 
se-clef. Gitano  :  retuhi,  s.  f. 
boca,  abertura,  agujero.  Mayo 
bohém.  grec  rutuni,  f.  nez. 
grec  mod.  pouâoùvi,  grec  anc. 
fw&ftiv.  Miklosich,  Abhandl.  1. 

Rupim,  rupino,  adj.  riche.  On  ne 
rencontre  pas  ce  mot  dans 
le  gitano;  mais  les  formes  des 
autres  dialectes  nous  font 
croire  à  son  origine  tsigane, 
malgré  les  différences  de 
sens;  grec  rup,  argent;  rou- 
main, rup,  rupino,  adj.  d'ar- 
gent; hongrois  nipti,  rupuno. 


iïGoo'2 


adj.;    allem.    rupp,    argent,  vantes  rae  font  encore  penser 

thaler,  ruppino,  adj.  etc.  Mi>  ici  à  l'origine  tûgane:  rou- 

klosich,  Abhanàl.  ym,  5S.  main  ruf$,  être  méchant;  hon- 

Rustir,  V.  a.  devorar,  corner.  Je  groisruse/,  être  colère,  scand. 

ne  trouve  aucune  forme  cor-  roshto,  ad),  colère,  etc.  Miklo- 

respondante  dans  le  gitano;  sich,^frA£ini/.viii,58.0rigine 

mais  les  formes  tsiganes  sui-  indienne. 


,ï  Google 


f 


NOTE  SUR  LA  HATUBE  HINÂRALOaiQUi: 


DE  MERRE  TROUVÉS  EN  PORTUGAL 


M.  A.  Ben-Saude 

Par  rinvitation  de  M.  Delgado  nous  avons  examiné  les 
principaux  instruments  et  autres  objets  de  pierre  qui  font 
partie  de  la  galerie  d'anthropologie  de  la  Section  Géologique, 
dans  le  but  de  déterminer  la  nature  des  substances  dont  ils 
sont  fabriqués. 

Pour  obtenir  un  élément  de  plus  qui  puisse  aider  l'ar- 
chéologue à  juger  des  relations  commerciales  des  peuples 
primitifs  du  pays,  outre  la  nature  de  la  matière  première, 
nous  avons  cherché  à  déterminer,  autant  que  possible  la 
provenance  probable  des  matériaux  employés  pour  la  fa- 
brication de  ces  outils  et  ornements. 

Malheureusement  des  difficultés  sérieuses  nous  ont  em- 
pêché très  souvent  de  donner  à  nos  déterminations  l'exacti- 
tude désirée.  D'abord  l'impossibilité  de  mutiler  des  objets 
précieux  et  quelquefois  uniques,  pour  obtenir  le  matériel 
nécessaire  à  Pétude,  nous  force  souvent  de  baser  la  déter- 
mination seulement  sur  l'inspection  à  simple  vue..  En  se- 
cond lieu,  la  connaissance  très  imparfaite  que  nous  avons 


,^-^^    1 


683 

de  la  pétrographie  et  de  la  minéralogie  du  pays  nous  em- 
pêchent de  fixer  la  provenance  de  leur  matière  première. 

Il  nous  est  donc  impossible  de  résoudre  complètement 
les  problèmes  et  nous  nous  limiterons  à  l'exposé  de  quel- 
ques observations  qui  puissent  nous  mener  de  quelques  pas 
vers  leur  résolution. 

Amphibolites. — Parmi  les  roches  qui  ont  été  le  plus 
souvent  appliquées  à  la  fabrication  des  haches,  prédominent 
de  beaucoup  les  amphibolites.  Ces  roches  ont  généralement 
une  couleur  vert  foncé.  On  peut  distinguer  des  variétés  où 
les  éléments  sont  grenus  et  dans  lesquels  on  observe  à  la 
simple  vue  des  aiguilles  d'amphibole  jusqu'à  3"""  de  lon- 
gueur ou  plus  rarement  des  grains  de  grenat  rouge  entouré 
par  une  matière  d'aspect  homogène  de  couleur  verte.  D'au- 
tres variétés  de  la  roche  deviennent  parfaitement  crypto- 
crystallines,  sans  qu'on  y  puisse  observer  aucun  des  éléments 
ni  à  l'œil  nu  ni  à  la  loupe;  l'étude  microscopique  a  cepen- 
dant montré  que  ces  roches,  qui  par  leur  couleur  rappellent 
des  serpentines  si  communes  dans  le  nord  du  Portugal,  doi- 
vent être  considérés  comme  des  amphibdites. 

Une  lame  mince  prise  dans  une  hache  trouvée  à  Cas- 
caes,  d'aspect  apparemment  aphanitique,  se  montra  compo- 
sée de  petites  aiguilles  d'amphibole  verdâtre,  quartz,  apa- 
tite,  ilménite,  titanite  (tîtanomorphite),  hématite  et  chlorite 
en  abondance.  Pour  bien  reconnaître  les  éléments  il  faut 
travailler  avec  des  objectifs  d'un  grossissement  assez  fort. 

L'amphibole  en  de  minces  cristallites  forme  des  grou- 
pements stellaires,  tandis  que  les  individus  de  grandeur  plus 
apréciable  et  quelquefois  isolés  présentent  des  traces  du  cli- 
vage prismatique. 

Le  quartz,  dans  une  quantité  relativement  considéra- 


Google 


ble,  remplit  les  vides  laissés  par  les  cristaux  d'amphibole, 
n'étant  remarquable  qu'à  cause  de  l'absence  presque  abso- 
lue d'inclusions.  Parmi  les  particules  de  quartz  peut-être  se 
trouve-t-il  quelques  petites  quantités  d"orthose,  ce  que  nous 
ne  saurions  décider  par  l'étude  optique,  à  cause  de  l'extrême 
petitesse  des  éléments  de  la  roche. 

Un  des  éléments  qui  au  point  de  vue  microminéralo- 
gique  attire  le  plus  l'attention  est  sans  doute  l'ilménite.  Sa 
grandeur  est  de  o^^ioa  à  o^^iOÔ.  Les  sections  représentent 
souvent  soit  des  hexagones  soit  des  figures  triangulaires  ou 
allongées,  polygones  dus  aux  sections  de  formes  du  système 
rhomboèdriques.  Autour  de  l'ilménite  se  trouve  une  matière 
jaunâtre  à  laquelle  M.  von  Lasaulx  donna  le  nom  de  Titano- 
morphite,  mais  qui  étant  un  produit  de  transformation  de 
l'ilménite,  doit  d'après  des  études  plus  récentes  être  rap- 
porté à  la  titanite. 

La  chlorite  d'un  vert  sale  est  formée  probablement  par 
la  transformation  de  l'amphibole  \  elle  montre  dans  la  lumière 
polarisée  des  phénomènes  de  polarisation  d'aggrégat. 

L'hématite,  substance  aussi  de  formation  secondaire, 
s'est  déposée  dans  les  vénules  de  la  roche  en  de  petites  la- 
melles quelquefois  hexagonales. 

Les  localités  qui  nous  ont  fourni  des  haches  d'amphi- 
bolite  sont:  Lapa  Furada,  Porto  Covo  (Gascaes),  Furninha 
(Péniche),  Casa  da  Moura,  Licea,  Palmella,  Carvalhal,  Monte 
Abrahao  et  Niza. 

Il  est  aujourd'hui  impossible  de  déterminer  exactement 
la  provenance  de  ces  roches;  je  connais  des  échantillons  de 
divers  endroits  du  pays,  de  Bragança  et  de  différentes  lo- 
calités dans  l'Alemtejo,  où  les  schistes  cristallins  se  trouvent 
laidement  représentés,  se  rapprochant  beaucoup  de  ces  ro- 
ches, 


zPcMl^i»0'^IC 


685 

Quoiqu'il  ne  soit  pas  possible,  de  fixer  exactement  les 
localités,  il  me  semble  hors  de  doute  que  ces  matériaux  pro- 
viennent du  pays. 

Micaschiste. — Nous  possédons  seulement  une  plaque 
de  cette  substance,  de  forme  trapézoïdale  et  perforée  à  l'une 
de  ces  extrémités. 

La  roche  est  composée  de  petits  feuillets  de  mica 
noir  et  de  mica  blanc  et  de  granules  de  quartz  presque  im- 
perceptibles à  la  simple  vue.  Ce  micaschiste  se  trouve  dans 
un  état  avancé  de  décomposition  et  présente  une  schistosité 
bien  prononcée.  On  l'a  recueilli  dans  la  grotte  de  Furmnha 
(Péniche). 

Il  me  semble  très  probable  que  cette  roche  provienne 
du  pays,  quoiqu'il  ne  soit  pas  possible  de  déterminer  la  lo- 
calité avec  précision. 

Ardoise. — Il  se  trouve  dans  notre  galerie  préhistorique 
quelques  plaques  d'ardoise  noire  de  forme  analogue  à  la  pré- 
cédente, percées  aussi  de  trous  de  suspension  à  leurs  extré- 
mités et  couvertes  de  dessins  exécutés  avec  un  instrument 
pointu.  Les  caractères  macroscopiques  sont  absolument  ana- 
logues à  ceux  de  quelques  ardoises  qui  se  trouvent  dans  di- 
verses régions  du  pays.  Les  fouilles  de  Casa  da  Moura  les 
ont  mises  au  jour. 

Granités. — Les  instruments  de  granité  sont  assez  ra- 
res. Une  hache  de  cette  roche  de  grain  moyen,  trouvée  dans 
une  des  grottes  de  Cascaes,  montre  la  composition  suivante: 
orthose,  quartz,  quelques  grains  d'albite,  peu  d'apatite  et 
magnétite. 

Tandis  que  la  plupart  des  roches  employées  pour  fa- 


r 


logle 


686 

briquer  les  instruments  trouvés  dans  les  grottes  de  Cascaes 
proviennent,  probablement,  de  la  Serra  de  Cintra,  ce  gra- 
nité montre  plutôt  des  ressemblances  avec  les  granités  an- 
ciens du  nord  du  pays,  quoique  le  mica  y  fasse  défaut. 

La  collection  possède  une  hache,  trouvée  aux  environs 
de  Viseu,  fabriquée  d'une  granitite  de  grain  fin  et  une  autre 
de  la  même  roche  plus  grenue,  trouvée  dans  la  grotte  de 
Furninha  (Péniche).  Il  nous  est  impossible  d'en  déterminer 
la  provenance. 

Diorites. — Parmi  les  haches  de  Barcarena  on  trouve 
quelques  unes  qui  sont  fabriquées  d'une  roche  dioritique. 

La  roche  est  principalement  composée  de  nombreux 
individus  de  plagioclase  de  très  petites  dimensions,  conte- 
nant des  aiguilles  d'amphibole  plus  grandes,  atteignant  jus- 
qu'à 8°"°,  qui  donnent  à  la  roche  un  aspect  porphyrique. 
L'amphibole  est  généralement  bien  limité. 

L'analyse  microscopique  d'un  petit  fragment  m'a  mon- 
tré que  le  plagioclase  se  rapproche  par  ses  extinctions  de 
la  labradorite. 

L'amphibole  est  assez  transparent  dans  des  sections 
minces.  Il  présente  une  couleur  brune  de  tabac  et  étudié  à 
l'aide  du  nicol  inférieur  nous  a  montré  l'absorption  caracté- 
ristique dans  l'ordre  commun    de 

c>b>a 

Les  couleurs  de  polarisation  sont  assez  vives  et  les  sec- 
tions se  présentent  quelquefois  composées  de  deux  indivi- 
dus différents  liés  par  l'orthopinacoïde  selon  la  loi  commune 
de  l'hémitropie.  La  magnétite  en  petits  octaèdres  entre  aussi 
dans  la  composition  de  la  roche.  Nous  regardons  comme 
des  produits  secondaires  de  petites  particules  irrégulières 


y-V 


D,oiiiz,db,Goo<^le 


d'épidote  ayant  le  polychroïstne  caractéristique,  la  chlorite 
d'un  vert  sale  donnant  la  polarisation  d'aggrégat  et  les  oxy- 
dations de  la  magnétite. 

Cette  roche  par  son  aspect  extérieur  aussi  bien  que 
par  sa  composition  minéralogique  ressemble  beaucoup  à  cer- 
taines diorites  ou  porphyrites  dïoritiques  qui  se  trouvent 
dans  la  Serra  de  Qntra. 

Basalte.— Les  variétés  compactes  de  cette  roche  ont  été 
souvent  appliqués  à  la  fabrication  des  haches,  lesquelles  sont 
généralement  couvertes  d'une  croûte  cendrée  due  à  la  dé- 
composition du  basalte.  Au-dessous  de  cette  substance  su- 
perficielle se  trouve  le  basalte,  de  couleur  noire  bleuâtre,  à 
l'état  de  fraîcheur. 

Dans  deux  lames  minces  que  j'ai  fait  faire  de  deux  frag- 
ments de  ces  haches  j'ai  constaté  qu'on  avait  affaire  à  des 
basaltes  feldspathiques  typiques.  Elles  se  composent  d'un 
plagioclase,  d'augite  et  de  magnétite,  contenant  aussi  quel- 
ques produits  ferrifères  résultant  de  l'altération  de  la  ma- 
gnétite. Le  plagioclase  semble  devoir  se  rapporter  au  la- 
brador. 

Quelques  sections  de  l'augite  se  présentent  régulièrement 
limitées  par  le  prisme  et  le  clinopinacoïde  ;  il  montre  de  vives 
couleurs  de  polarisation  et  contient  quelques  inclusions  de 
verre  brunâtre.  Ni  l'une  ni  l'autre  de  ces  lames  n'a  permis 
de  constater  l'existence  d'une  base  amorphe,  à  l'exception  de 
ces  inclusions  dans  l'augite.  Ces  haches  de  basalte  ont  été 
trouvées  à  Licea  et  Pedra  da  Moura  (près  de  Bellas).  Dans 
la  dernière  localité  on  a  trouvé  aussi  de  nombreux  cailloux 
roulés  de  la  même  substance. 

Il  ne  saurait  y  avoir  de  doute  que  ces  morceaux  de 
basalte  ont  été  apportés  des  proximités  même  des  endroits 
CR.  47 


,.p|o 


oogle 


688 

où  ils  ont  été  trouvés,  puisque  le  basalte  y  abonde,  ayant 
des  variétés  qu'on  ne  saurait  distinguer  de  celles  qui  ont 
fourni  le  matériel  pour  ces  haches. 

Calcaire  métamorphique, — Des  roches  provenant 
par  métamorphisme  de  certains  calcaires  ont  été  souvent  ap- 
pliquées à  la  fabrication  d'instruments  néolithiques.  Leur  cou- 
leur est  généralement  cendrée,  plus  ou  moins  foncée,  et  quel- 
quefois même  noire  La  roche  fraîche  est  assez  dure  (dureté 
du  feldspath,  à  peu  près),  généralement  très  compacte,  ne 
laissant  apercevoir,  à  la  simple  vue  ni  à  la  loupe,  aucun  des 
éléments  cristallins  qui  la  composent.  Quelquefois  on  y  ob- 
serve des  parties  formées  de  bandes  diversement  colorées 
qui  lui  donnent  un  aspect  schistoïde. 

C'est  seulement  dans  de  rares  exemplaires  qu'on  re- 
connaît à  la  loupe  quelques  petits  grains  d'un  vert  clair  par- 
fois un  peu  saillants,  parce  qu'ils  résistent  mieux  à  la  dé- 
composition: d'autres  fois  ils  montrent,  mais  rarement,  la 
forme  d'un  dodécaèdre  régulier.  L'étude  des  lames  minces 
de  ces  roches  m'a  montré  qu'elles  se  composent  principa- 
lement, outre  le  carbonate  de  chaux  dans  des  quantités  ttés 
diverses  jusqu'à  faire  défaut,  d'une  substance  incolore  ou 
un  peu  verdâtre.  Ces  éléments,  lorsqu'ils  sont  individuali- 
sés extérieurement,  donnent  souvent  des  sections  hexago- 
nales ou  carrées  du  dodécaèdre.  Cette  substance  se  pré- 
sente isotrope  dans  la  lumière  polarisée.  Sa  forme  et  ses 
propriétés  optiques  nous  portent  à  la  considérer  comme 
appartenant  aux  grenats. 

Un  autre  élément  d'une  couleur  verte  plus  accentuée, 
aux  sections  rectangulaires  et  montrant  une  biréfringence 
assez  accentuée,  des  extinctions  parallèles  aux  limites  régu- 
lières, laisse  voir  dans  quelques  rectangles,  sans  action  sur 


,ï  Google 


/ 


la  lumière  parallèle,  la  croix  noire  des  cristaux  uniaxiaux 
lorsqu'on  les  observe  à  la  lumière  convergeante.  Observés 
à  l'aide  du  mica  */i  d'onde,  j'ai  pu  déterminer  que  la  biré- 
fringence était  négative.  Ces  propriétés  nous  ont  fait  rap- 
porter cette  substance  à  la  vésuvianite.  Entre  ces  éléments 
on  trouve  assez  régulièrement  de  petits  grains  de  quartz 
dans  la  roche,  et  assez  irrégulièrement  distribué  un  miné- 
ral fibreux  incolore  présentant  de  vives  couleurs  de  pola- 
risation, avec  des  angles  d'extinction  considérables  que  je 
crois  devoir  rapporter  à  la  wollastonite. 

Il  y  a  encore  deux  substances  qui  donnent  à  la  roche 
la  couleur  sombre.  L'une  se  volatilise  par  l'action  de  la  cha- 
leur et  appartient  par  conséquence  à  quelque  matière  or- 
ganique. L'autre,  par  sa  couleur  dans  la  lumière  réfléchie, 
aussi  bien  que  par  sa  forme  cristallographique,  doit  être 
rapportée  à  la  pyrite  de  fer. 

Les  fouilles  qui  ont  fourni  les  nombreux  instruments 
fabriqu(is  de  ces  roches  sont  celles  de  Porto  Covo,  Cas- 
caes,  Licea,  Palmella,  Serra  de  Monte-Junto,  Carvalhal, 
Columbeira,  Niza  et  Casa  da  Moura. 

L'analogie  absolue  qui  existe  entre  cette  matière  premiè- 
re et  certains  calcaires  métamorphiques  de  Cintra  nous  donne 
la  certitude  qu'elle  a  été  apportée  de  ces  montagnes.  On  y 
trouve  les  assises  de  calcaire  jurassique,  dont  la  classifica- 
tion stratigraphique  a  été  récemment  vérifiée  par  notre  sa- 
vant collègue  M.  Choffat,  Ces  calcaires  sont  métamorphosés 
par  l'action  des  roches  intrusives  qui  les  traversent  en  nom- 
breux filons  parfaitement  caractérisés. 

J'ai  été  convaincu  par  l'observation,  que  dans  quelques 
endroits  ces  calcaires  silicifiés  passent  plus  ou  moins  abrup- 
tement  au  calcaire  non  altéré,  lequel  renferme  des  fossiles 
qui  ont  servi  à  l'ancien  chef  des  travaux  géologiques  du 


r 


jDgIe 


690 

royaume  le  général  Carlos  Ribeiro,  et  récemment  à  M.  Chof- 
fat,  pour  déterminer  son  âge  géologique. 

J'ai  été  heureux  de  constater  que  beaucoup  de  ces  fi- 
lons, et  justement  ceux  qui  ont  produit  le  métamorphisme 
de  ces  calcaires  jurassiques,  sont  constitués  par  des  granités 
parfaitement  caractérisés  ou  par  des  variétés  porphyroïdes 
de  la  même  roche  '. 

Calcaire. — Notre  collection  possède  encore  une  hache 
de  calcaire  jurassique  sans  altération,  contenant  de  nom- 
breux restes  de  fossiles,  analogue  aux  calcaires  de  Cintra, 
Outre  des  haches  nous  possédons  aussi  quelques  cylindres 
de  dimensions  diverses  fabriqués  de  calcaire  jurassique  que 
M.  Emile  Cartailhac  a  considéré  comme  des  symboles  reli- 
gieux. 

Comme  rareté  nous  avons  encore  à  mentionner  une  ha- 
che de  marbre  cristallin  et  une  sphère  de  la  même  substance, 
trouvées  à  Bellas.  Le  calcaire  qui  a  servi  à  la  fabrication 
de  ces  deux  objets  est  parfaitement  analogue  au  marbre 
grossièrement  cristallin  de  Sao  Pedro,  dans  la  Serra  de 
Cintra. 

Quartzite. — La  collection  anthropologique  possède,  de 
la  Serra  de  Monte-Junto  et  de  Palmella,  quelques  objets  de 
quartzite  blanche  ou  légèrement  rougeâtre.  Monte  AbrahSo 
a  aussi  fourni  de  nombreux  cailloux  roulés  de  cette  substance. 
Ces  caractères  n'ont  rien  de  remarquable  et  ces  quartales 


'  Je  garde  pour  une  autre  occasion  l'exposé  des  remarquables  faits 
que  j'ai  observé  dans  la  Serra  de  Cintra  ;  j'ajouterai  seulement  que  mes 
observations,  basées  sur  les  déterminations  stratigraphiques  de  M.  Chof- 
fat,  me  portent  à  considérer  ce  granité  comme  un  des  plus  récents 
dont  on  ait  connaissance  en  Europe. 


^xigle 


691 

ressemblent  donc  absolument  à  celles  qui  se  trouvent  ne 
divers  endroits  du  royaume.  Il  n'est  pas  possible  d'en  dé- 
terminer la  provenance. 

Silex. — Le  silex  a  été  exclusivement  appliqué  à  la  fa- 
brication des  instruments  de  fine  tranche.  Ces  roches  sont 
souvent  colorées  en  rouge  plus  ou  moins  foncé,  en  jaune 
etc.,  et  il  semble  qu'on  ait  cherché  de  préférence  les  mor- 
ceaux colorés  principalement  pour  fabriquer  des  pointes  de 
flèche.  Ces  roches  ne  se  distinguent  en  rien  des  silex  qui 
abondent  dans  nos  assises  crétacées  presque  partout  où  on 
les  a  constatées. 

Quartz  hyalin. — Parmi  les  pointes  de  flèche  et  les 
couteaux  se  trouvent  des  exemplaires  d'une  grande  beauté, 
fabriqués  de  quartz  incolore,  d'autres  de  quartz  rose  et  de 
quartz  enfumé.  On  a  trouvé  aussi  quelques  noyaux  qui  con- 
servent encore  leurs  faces  naturelles  du  prisme,  par  lesquelles 
on  peut  juger  de  la  grandeur  des  cristaux,  qui  doivent  avoir 
eu  une  épaisseur  de  3  à  4  centimètres,  dimensions  rarement 
atteintes  par  les  cristaux  de  quartz  du  pays  dont  j''ai  con- 
naissance. 

Fibrolithe. — Les  objets  de  cette  substance  sont  assez 
rares  et  généralement  de  petites  dimensions.  Les  haches 
ont  été  souvent  tellement  usées,  qu'on  pourrait  difficilement 
les  prendre.  La  couleur  varie  depuis  un  gris  perle  clair  jus- 
qu'à une  teinte  brunâtre. 

Dureté  entre  6  et  7;  poids  spécifique  3,24  —  3,25. 

De  petits  morceaux  traités  au  chalumeau  avec  la  so- 
lution de  cobalt  prennent  une  coloration  bleue  comme  la 
sillimanite.  Dans  la  perle  de  sel  de  phosphore  ils  donnent 


,ï  Google 


692 

un  résidu  de  silice.  Les  sections  transparentes  sont  presque 
absolument  incolores  et  vues  au  microscope  se  présentent 
composées  de  nombreux  individus  allongés  disposés  radiai- 
rement,  ce  qui  donne  à  Timage  microscopique  une  certaine 
ressemblance  avec  les  dessins  parfois  formés  par  la  congé- 
lation de  l'humidité  sur  les  carreaux  des  fenêtres. 

Étudiés  à  la  lumière  polarisée  on  observe  des  couleurs 
très  vives  de  polarisation  et  l'extinction  des  aiguilles  se  fait 
selon  la  direction  d'allongement  des  individus.  A  ta  lumière 
polarisée  convergente  on  observe  dans  quelques  sections 
suttisamment  développées  l'image  des  axes  optiques  des 
substances  bia\iales.  Ces  faits  nous  portent  donc  à  conclure 
que  celte  substance  doit  être  rapportée  à  la  variété  micro- 
cristLilline  de  la  sillimanite  connue  par  le  nom  de  fibrolithe. 
Les  localités  qui  ont  fourni  des  instruments  de  cette  subs- 
tance sont  Carnaxide,  Porto  Covo  et  Casa  aa  Moura. 

On  ne  possède  des  échantillons  que  provenant  indubita- 
blement du  pays.  On  sait  cependant  que  cette  substance 
se  trouve  généralement  intercalée  dans  les  schistes  cristal- 
lins si  largement  développés  dans  le  Portugal,  et  ii  ne  pa- 
raît pas  impossible  que  la  fibrolithe  se  trouve  chez  nous.  En 
tout  cas  clic  ne  devait  pas  être  abondante  puisqu'un  a  mê- 
me profité  des  plus  petits  morceaux,  ce  qui  n'arrive  pas 
pour  les  autres  substances. 

Fluorite. —  Nous  avons  trouvé  parmi  les  objects  de 
parure  un  grain  de  collier  de  27  milimètres  de  longueur  et 
23  de  diamètre.  Il  présente  une  forme  biconique,  étant  per- 
foré dans  le  sens  de  sa  longueur.  Il  est  parfaitement  trans- 
parent et  d'une  couleur  très  légèrement  violacée  et  on  y 
voit  des  fentes  internes  qui  indiquent  un  clivage  très  par- 
fait. 


ibvGoogle 


M. 

Nous  avons  détaché  un  petit  fragment  d'un  demi  milU- 
mèire  de  grandeur,  lequel  se  présente  sans  action  sur  la  lu- 
mière polarisée.  A  la  flamme  de  Bunsen  j'ai  obtenu  la  co- 
loration du  calcium,  et  fondu  avec  le  sel  de  phosphore  la 
réaction  du  fluor.  Ces  caractères  sont  plus  que  suflisants 
pour  reconnaître  que  la  matière  première  de  ce  grain  de 
collier  est  la  fluorite, 

il  est  curieux  de  voir  que  le  trou  coïncide  avec  Pun  des 
axes  principaux  de  l'individu.  En  le  fabriquant  on  a  obtenu 
un  octaèdre  assez  régulier  par  le  clivage  et  on  est  parvenu 
à  obtenir  sa  forme  actuelle  par  Parrondissement  des  arê- 
tes. 

Cet  échantillon  a  été  trouvé  à  Cova  da  Moura;  sa  pro- 
venance originaire  me  paraît  très  douteuse. 

Ribeirite, —  Nouvelle  variété  de  la  Caiaïte. 

Dans  son  intéressant  mémoire  De  l'emploi  de  la  Caîlàis 
dans  l'Europe  occidentale  aux  temps  préhistoriques,  M.  Ca- 
zalis  de  Fondouce  fait  mention'  de  quelques  grains  de  col- 
lier polis  fabriqués  d'une  substance  verdâtre,  lesquels  se 
trouvent  en  abondance  dans  notre  collection  préhistorique, 
en  les  identifiant  avec  les  grains  de  calla'is  trouvés  au-delà 
des  Pyrénées.  Les  perles  des  monuments  préhistoriques  de 
France  ont  été  l'objet  d'investigations  de  la  part  de  Titlus- 
tre  chimiste,  M.  Damour.  D'abord  M.  Damour  a  cru  avoir 
découvert  une  nouvelle  espèce  minérale  qu'il  a  nommée  cal- 
laïs;  plus  tard  cependant  il  l'a  considérée  comme  une  variété 
de  la  caiaïte  passant  peu  à  peu  à  la  caiaïte  typique.  M.  Ca- 
zalis  de  Fondouce  conserve  toutefois  le  nom  de  Catlaïs  et 
l'applique  non  seulement  au  minéral  trouvé  dans  les  mo- 

'  P.  320  de  ce  volume. 


,„^lc 


694 
numents  préhistoriques  au-delà  des  Pyrénées,  mais  aussi  à 
ceux  trouvés  dans  les  monuments  portugais.  Lorsque,  sans 
avoir  connaissance  de  l'opinion  de  M.  Cazalis  de  Fondouce, 
j'ai  regardé  cette  substance,  dont  la  couleur  vert  pomme 
est  si  différente  du  bleu  céleste  de  la  calaïte,  j'ai  hésité  dès 
le  premier  moment  à  la  considérer  comme  étant  identique 
à  ce  minéral. 

Heureusement  nous  possédions  alors  quelques  petits 
fragments  pour  en  faire  l'étude.  Son  poids  spécifique  est 
de  2,Si,  L'analyse  de  lames  minces  au  microscope  nous  a 
montré  que  la  structure  de  notre  minéral  ressemble  beau- 
coup à  celle  de  la  calaïte  typique  étudiée  avec  soin  par 
M.  Bucking.  Dans  la  lumière  ordinaire  la  lame  mince  se 
présente  presque  incolore,  tandis  que  dans  la  lumière  po- 
larisée elle  prend  une  coloration  bleuâtre  peu  uniforme,  A 
l'aide  des  objectifs  de  forts  grossissements  on  observe  que 
cette  substance  cryptocristalline  est  formée  d'innombrables 
fibres  courtes,  souvent  disposées  radiairement. 

Outre  ces  individus  cryptocristallins  qui  constituent 
la  masse,  il  y  a  aussi  des  inclusions  accidentelles.  On 
trouve  dans  les  préparations  peu  nombreuses  dont  je  dis- 
pose quelques  petites  aiguilles  incolores  du  système  mono- 
clinique, montrant  de  vives  couleurs  dans  la  lumière  polari- 
sée et  qui  semblent  référables  à  l'orthose.  Il  y  a  aussi  quel- 
ques petits  grains  de  quartz  et  des  vénules  d'oxyde  de  fer 
hydraté.  Je  n'ai  rien  observé  d'amorphe  et  notre  minéral  est 
tout  à  fait  cryptocristallin,  comme  la  calaïte. 

L'étude  microscopique  ne  nous  révèle  aucun  caractère 
bien  décisif  qui  puisse  justifier  sa  séparation  de  la  calaïte. 

Nos  essais  au  chalumeau  nous  ont  cependant  montré 
l'absence  absolue  du  cuivre  qui  donne  la  couleur  bleu  cé- 
leste ou  bleu  verdâtre  à  la  calaïte.  La  couleur  vert  pomme 


lyGÔ^K^IC 


'M 


695 

me  fit  présentir  dès  le  premier  moment  que  l'oxyde  de 
chrome  était  probablement  la  matière  colorante. 

J'ai  fondu  le  minéral  trituré  avec  le  nitre  et  j'y  ai  ajouté 
quelques  goûtes  d'eau  distillée.  En  joignant  à  la  solution 
quelques  goûtes  d'acétat  de  plomb  j'ai  obtenu  le  précipitât 
caractéristique  du  chromate  de  plomb,  couleur  de  citron. 

Le  précipitât  séché  et  traité  avec  du  borax  dans  le  fil 
de  platine  me  donna  une  perle  vert  d'émeraude'. 

Ces  simples  faits  m'ont  indiqué  que  le  minéral  en  ques- 
tion, tout  en  se  rapprochant  de  la  calaïte,  n'est  pas  identi- 
que ni  avec  les  calaïtes  dans  lesquelles  on  n'a  jamais  décou- 
vert l'oxyde  de  chrome  comme  matière  colorante,  ni  avec 
la  callaïs  comme  l'a  cru  M.  Ca/alis  de  Fondouce,  ce  qui 
me  porte  à  proposer  pour  la  nouvelle  substance  le  nom  de 
Ribeirile^  dédié  à  la  mémoire  de  l'illustre  géologue  Carlos 
Ribeiro,  qui  plus  que  tout  autre  a  contribué  à  l'initiation 
et  aux  progrès  des  études  géologiques  dans  le  Portugal. 

Je  m'abstiendrai  de  faire  des  hypothèses  arbitraires  sur 
la  provenance  de  cette  substance,  me  limitant  simplement 
à  dire  que  nous  ne  connaissons  du  Portugal  ni  des  pays  voi- 
sins, soit  de  la  calaïte  soit  d'autres  substances  rapprochées, 
et  qu'il  me  semble  probable  que  la  Ribeirite  ait  été  introduite 
dans  le  pays  par  le  commerce. 

'  Après  avoir  gbtenu  ces  résultats  j'ai  prié  M.  von  Bonhorst,  chi- 
miste à  VInstituto  Industrial  de  vouloir  bien  exécuter  une  analyse  quan- 
titative du  minéral  en  question;  malheureusement  la  quantité  dont  il 
disposait  était  trop  petite  pour  donner  un  résultat  assez  exact.  Il  a  ce- 
pendant obtenu  des  résultats  approximatifs  quant  â  l'alumine  et  à  l'ad- 
de  phosphorique,  qui  paraissent  mettre  hors  de  doute  que  la  propor- 
tion quantitative  de  ces  composants  est  la  même  pour  la  Ribeirite  que 
pour  la  calaïte;  il  y  a  trouvé  encore  l'oxyde  de  chrotne,  quoiqu'il  n'ait 
pu  en  déterminer  la  quantité  ni  l'eau  de  constitution. 


X|^c 


696 

On  a  trouvé  ces  grains  de  colliers  dans  les  fouilles  faî-  ■ 
tes  il  Monie  Abraliao,  Furninha,  Ca^a  da  Moura  et  Pal- 
mella. 

Microcline. —  Nous  possédons  aussi  dans  notre  col- 
lection un  morceau  de  microcline  de  17  millimètres  de  dia- 
mètre qui  mérite  bien  notre  attention  au  point  de  vue  mî- 
néralogique.  Il  est  cassé  et  ne  paraît  pas  avoir  été  perforé. 
La  substance  d'un  vert  clair  dont  il  a  été  fabriqué,  est  cette 
variété  de  la  microcline  ordinairement  connue  sous  le  nom 
d''aina:{0?ttle.  La  cassure  qui  a  séparé  ce  morceau  du  reste 
du  grain  de  collier,  auquel  il  semble  avoir  appartenu,  s'est 
faite  suivant  le  plan  de  clivage  de  la  base.  Un  petit  frag- 
ment que  j'ai  détaché  suivant  ce  plan  m'a  tout  de  suite  laissé 
voir  dans  la  lumière  polarisée,  cette  structure  belle  et  com- 
pliquée, décrite  par  M.  Des  Cloiseaux.  Ce  petit  morceau 
m'a  permis  de  reconnaître,  suivant  la  méthode  de  Szabô, 
les  réactions  du  feldspath  potassique.  Cet  objet  a  été  trou- 
vé à  Casa  da  Moura. 

Quant  à  sa  provenance  nous  ne  pouvons  rien  dire  de 
sûr  et  nous  ferons  seulement  observer  que  l'amazonite  n'a 
été  trouvée,  que  nous  le  sachions,  en  Portugal. 

Nous  dirons  en  conclusion  que  les  matériaux  employés 
dans  la  fabrication  des  instruments  et  objets  de  parure  qui  se 
trouvent  dans  la  galerie  d'anthropologie  de  la  Section  Géo- 
logique, sont  l'amphibolite,  le  micaschiste,  l'ardoise,  le  gra- 
nité, la  dioriie.  le  basalte,  le  calcaire  métamorphique,  le 
calcaire,  la  quartzite,  le  silex,  le  quartz  hyalin,  la  fibrolithe, 
la  fluorite,  la  ribeirite  et  l'amazonite. 

Les  dix  premières  substances  sont  vulgaires  dans  le 
pays,  et  on  trouve  qu'il  existe  une  analogie  plus  ou  moins 


697 
absolue  entre  les  matériaux  utiHsés  dans  l'industrie  préhis- 
torique et   les  échantillons  recueillis  dans  les  gisements  de 
ces  matériaux  connus  chez  nous. 

:e  qui  concerne  les  quatre  derniers  minéraux — la 
,  la  fluorile,  la  ribeirite  et  Taninzonite,  nous  ne 
présenter  une  opinion  décisive  par  rapport  à  leur 
ice;  il  se  peut  cependant  que  la  fibrolithe,  la  fluo- 
imazonitc  proviennent  du  pays,  et  que  la  ribeirite 
apportée  de  l'étranger. 


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1 


1 


r,o(*!le 


TABLE  DES  AUTEURS 


AndradeCorvo..  4,a3,43,Î2,54 

Antonovitch 49,  463 

Arceun igo 

Atunson 465 

Batao-larc 483 

Bayb  (le  B"  de)  Î64,  3o7, 33o,  Sy» 

Bellucq 68,  101,  i38,  470 

Ben-Saude 682 

Broca 26 

Caldas 333 

Capellini..  18,17,41,43,52,53 

97,  '37,  '38 

Cartailhac  33, 100,  î65,  289,  Sig 

Cazaus  de  Foni>ouce.  .   108,  3i4 

364,  61 3 

Chamtre,  .  39,  iSi,  355,  357,  365 

367,  370,  453,  462,  463 

Choffat 61,  92 

GoELHO  (Ad.) 436,  438,  450 

471,  664,  667 

CoHsiGLiERi  Pedroso 628 

cotteau  (g.) 76,  104 

Deloado 108,  107,  372 

Evans 96,  1 54,  30î,  329 

FicALHO  (le  C"  da) 119 

GuiMET 434 

Hber 1 19 

HiLDEBRAND  (H.). . .  270,  366,  463 
Lauriers  (J.  de) ag 


Magitot 45,  471,  549 

Martin  (Henri)...  2o5,  3o5,  3ii 
371,  432,  435,  449,  450,  663 

Martins  Saruento SgS 

Mesnier 63g 

MnxESCAMPS 387 

MoRTiLLET{de)..  41,  5o,  94,  148 
154,  203,  36g,  357,  366,  369,  384 

Ouveira  FeuÂo 6i5 

Oppert 47)  5 1 

Paula  e  Ouveira 291 

Pawinski Si 

PiGORXNi 46,  3ia,  369 

Plo« 3i 

PossiDONto  da  Silva 358 

Quatrefages  (de) . .  41,  114,  148 
149,  3o3,  306,  304 

Rseiro  (C.) 11,81,279 

RoDRiGUES  (J.  J.) 357 

ROMER 53 

SCHAAFFHAUSEN.  .  33,  I4O,  149,373 

Vascohcellos  (Fred.  de). ...  i55 
VAScoNCELLOsABR£u(G.de)..  370 

173,  449,  450,  519 

ViLANOVA. .  47,  g8,  i55,  35a,  356 

481,  633 

ViRCHOw..  41,  5o,  106,  118,  370 

370,  461,  633,  648 
Zawisza  (le  C  J.) 42,  20 1 

Note. — Les  manuscrits  des  mémoires  annoncés  dans  le  résumé  des 
séances  et  qui  ne  se  trouveni  pas  imprimés  dans  ce  Compte-rendu  ne 
nous  sont  point  parvenus. 


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TABLE  DES  MATIÈRES 


PAGES 

Avant-propos » 

Liste  des  membres  du  Comité  d'organisation m 

Règlement  général vu 

Questions  à  discuter xi 

Liste  des  fondateurs,  anciens  présidents  ei  vice-présidents  ho- 
noraires    xai 

Liste  des  délégations xv 

Liste  des  mcn-bres  souscripteurs  étrangers  et  nationaux xvii 

Ouvrages  olferts  au  Congrès xxxix 

Dons  et  faveurs xlvu 


ORDRES  DU  JOUR  DES  SEANCES 

EXCURSIONS 

DÉLIBÉRATIONS    DU    CONSEIL 

Séance  d'ouverture 3 

Discours  d'ouverture  de  M.  le  président  du  Congrès 4 

Discours  de  M.  le  secrétaire  du  Comité  d'organisation 12 

Discours  de  M.  Capellini,  délégué  de  S.  M.  le  Roi  d'Italie 18 

Ratification  de  la  nomination  de  M.  Carlos  Ribeîro  comme  secré- 
taire général  et  nomination  du  Bureau  et  du  Conseil 10 

Bureau  définitif ï  i 


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702 

PAGES 

Rapport  du  Conseil  de  la  8*  ses^on  sur  la  proposition  d'un  arti- 
cle complémentaire  du  Règlement  et  son  adoption 24 

Résumé  des  travaux  du  CongrËs  par  séances 37 

Séance  de  ciôEurc 5i 

Voiaiion  des  remerciments  proposés  au  Congrès it 

Discours  de  clôture  du  Congrès  par  M.  le  Président 54 


COMPTE  RENDU  DES  EXCURSIONS 

Excursion  à  Otta  (avec  i  planche) 61 

Excursion  à  Mugem.  Moiia  do  Sebastiâo  et  Cabefo  d'Arruda. ...  68 

Excursion  à  Cascaes  et  Cintra  (avec  t  planche) 73 


COMMUNICATIONS  ET  DISCUSSIONS 


ËFOQUE  TERTIAIRE 

L'homme  tertiaire  en  Portugal,  par  M.  Carlos  Ribeiro 8r 

Conclusions  de  la  Commission  chargée  de  l'examen  des  silex  trou- 
vés à  Otta 92 

Discussion  de  la  communication  de  M.  Carlos  Ribeiro,  par  MM.  de 
MoRTiLLET,  Evans,  Capeluki,  Vilanova,  Cartailjiac,  Bel- 
Luca,  CoTTEAu,  ViRCHow,  Delgado,  Cazaus  i>e  FoNDotjCE 

et  DE  QuATRErAGES 94 

Aperçu  sur  lafiore  tertiaire  du  Portugal,  par  M.  Oswald  Heer.  ..119 
Considérations  de  M.  le  Comte  de  Ficalho,  au  sujet  du  mémoire 

précédent 139 

Sur  l'homme  tertiaire  en  Italie.  Considérations  à  propos  de  ce  su- 
jet présentées  par  MM.  Bellucq  et  Capeluni t38 

L' homme  préhistorique,  par  M.  Schaaffhausen 140 

Discussion  par  MM.  de  QtiATRCPAGES,  de  Mortillct  et  Schaapf- 


,ï  Google 


7o3 


ÉPOQUE  QUATERNAIIΣ 


Les  anciens  glaciers  du  bassin  du  IHiône.pAiM.  Ernest  Chantre.  -   i5i 

Discussion,  par  MM.  Evans  et  de  Mortillet i54 

Résumé  d'une  étude  sur  quelques  dépôts  superficiels  du  bassin  du 
Douro.  Présence  de  l'homme.  Vestiges  d'action  glaciaire,  par 
M.  Fred.  de  Vasconcellos  Pereira  Cabral.  Observations 

préliminaires  de  M.  Vilanova  (avec 4 planches) i5S-i56 

L'ancienneté  de  l'homme  dans  le  bassin  moyen  du  Rhône  et  la  vallée 

inférieure  de  la  Saône,  par  M.  Adrlen  Arcelin 190 

Le  quaternaire  en  Pologne  dans  la  caverne  du  Mammouth,  par 

M.  Zaw[5za zoi 

Discussion,  par  MM.  Evans  et  de  Mortillet 20ï 

Note  sur  les  dernières  découvertes  effectuées  par  M.  Prunières  dans 

la  Lojère,  par  M.  de  Quatrefages 2o3 

Discussion  par  MM.  Henri  Martin  et  de  Quatrefages io5 

La  grotte  de  Furninha  à  Péniche,  par  M.  Joaquim  F.  N.  Delgado 

(avec  19  planches) ao? 

Discussion  par  MM.  de  Baye,  Cartailhac,  de  Mortillet,  Virchow, 

Vasconcellos  Abreu  et  Hildebrand 164 

Rapport  de  la  Commission  chargée  d'étudier  la  question  de  l'an- 
thropophagie à  Furninha 170 

Observations  de  MM.  Delgado  et  Schaaffhausen 372 


ÉPOQUE  NËOLITHIQUi; 

Les  JSoekkenmoeddings  de  ta  vallée  du  Tage,  par  M.  Carlos  Ri- 

BEiRO  (avec  4  planches) 

Observations  de  M.  Cartailhac 


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cgic 


Notes  sur  les  ossements  humains  que  se  trouvent  dans  le  musée  de 
la  Section  géologique  de  Lisbonne,  par  M.  F.  de  Paula  e 

OuvEiRA  (avec  5  planches) 191 

Discussion  par  MM.  de  Quatrefaues  et  Henri  Martin 3o4 

Les  traits  caractéristiques  de  l'époque  néolithique  en  France  tels 
qu'ils  sont  réunis  dans  tes  stations  de  la  Champagne,  par  M. 

LE  Baron  J.  de  Baye 3o6 

Observations  de  H.Henri  Martin 3ii 

Silex  et  ossements  humains  peints  en  rouge  trouvés  dans  une  sépul- 
ture dans  la  province  de  Rome,  par  M.  L.  Picorini 3i2 

De  l'emploi  de  la  calla'is  dans  l'Europe  occidentale  aux  temps  pré- 
historiques, par  M.  Cazaus  de  Fondouce 314 

Discussion  par  MM.  Cjvrtailhac  et  Evans 329 

Les  indices  de  la  transition  de  la  pierre  polie  à  l'époque  du  bronze, 

par  M.  LE  Baroh  J.  de  Bave 33o 

Archéologie  préhistorique  dans  la  province  de  Minbo,  par  M.  José 

Caldas  (avec  2  planches) 333 


ËPOQUE  DU  BRONZE 

Du  cuivre  et  du  bronze  en  Espagne  et  de  la  période  qui  les  a  précé- 
dés, par  M.  V1LANOVA 3i2 

Discussion  par  MM.  Chantre,  Vilanova,  Rodrigues  et  de  Mor- 

tillet 355 

Sur  les  haches  en  tronje  trouvées  en  Portugal,  par  M.  J,  Possidonio 

OA  SiLVA  (avec  i  planche) 358 

Discussion  par  MM.  Cazalis  de  Fondoijce,  Chantre,  Hildebrand 

et  DE  MoRTiLLET 364 

L'âge  du  bronze  en  Italie.  Considérations  à  propos  de  ce  sujet  pré- 
sentées par  MM.  Chantre  et  Picorini 367 

Discussion  par  MM.  de  Mortillet,  Virchow,  Chantre  et  Henri 

Martin 369 


1 


/■*s 


i.eiogle 


7o5 


SUJETS  DIVERS 

Les  instruments  en  pierre  à  l'époque  des  métaux,  par  M.  le  Baron 

J,  DE  Bave  {avec  2  planches) 372 

Observations  de  M.  de  Mortillet 384 

Sur  des  silex  taillés  et  emmanchés  de  l'époque  mérovingienne,  par 

M.  Gustave  Millescamps 387 

Les  Lusitaniens,  par  M.  F,  Martins  Sarmento SgS 

Mythologie  gauloise,  spécialement  quant  aux  représentations  diver- 
ses de  la  triade  divine  et  question  relative  à  la  recherche  des 
mêmes  types  dans  ta  Péninsule  ibérique,  par  M.  Hekiu 

Martjk 432 

Observations  de  M.  Guiuet 434 

Du  type  ethnique  et  anthropologique  des  Ibères;  comment  distin- 
guer les  Ibères,  dont  la  langue  subsiste  che^  les  Basques,  des 
autres  populations  anciennes  de  l'Ibérie,  (Berbères,  Ligures, 
Celtes)?  Qui  est  le  véritable  Ibère?,  par  M.  Heuri  Martin.,  435 

Observations  de  M.  Adolpho  Coclho 436 

Sur  les  cultes  péninsulaires  antérieures  à  la  domination  romaine, 

par  M.  F.  Adolpho  Coelho 438 

Discussion  par  MM.  Henri  Martin,  Vasconcellos  Abreu  et  Adol- 
pho Coelho 449 

L'dge  des  nécropoles  préhistoriques  du  Caucase  renfermant  des  crd- 

wsmacroctyAa/es,  par  M.  Ernest  Chantre  (avec  1  planche).  4S2 
Discussion  par  MM.  Virchow,  Chantre,  Aj^tokovitch  et  Hilde- 

BRAND 461 

Sur  quelques  inscriptions  en  écriture  'Ogham-,  par  M.  George 

Atkinson  (avec  1  planche) 465 

Du  culte  de  la  pierre,  par  M.  J.  Bsn-uca 470 

Observations  de  M.  Macitot ■.,..■ 471 

Note  sur  les  prétendues  relations  des  Macrocéphales  d'Hippocrate 

avec  les  Cimbres,  par  M.  F.  Adolpho  Coelho 47a 

4S. 


,ï  Google 


7o6 

PAGES 

Observations  de  M.  Vilanova 482 

Les  Gîlanos  d'Espagne  et  les  Ciganos  de  Portugal;  à  propos  de  la 

queslion  de  l'importation  des  métaux  en  Europe  par  les  Tsi' 

gaves,  par  -M.  Paul  Bataillard 483 

De  l'origine  probable  des  Tûukhâres  et  leurs  migrations  à  travers 

l'Asie,  par  M.  G.  de  Vasconcellos  Abreu  (avec  1  planche).  Sig 

Essai  sur  les  niuiiUtians  ethniques,  par  M.  E.  Magitot 549 

Observations  de  M.  Cazaus  de  Fondouce 6i3 

Sur  un  cas  de  microcéphalie  en  Portugal,  par  M.  F.-A.  d'Olcveira 

Feijâo  (avec  1  planche) 61 5 

DiscusMon  par  MM.  Vil 
Sur  quelques  fonnes  du 

tion  à  la  connais 

de  la  Péninsule,  ] 
La  Cordillère  des  Andes 


Excursion  dans  le  nart 
(avec  2  (planches 

Lelire  de  M.  Henr[  Mar 
les  prétendues  reli 
les  Cimbres 

Communication  de  M.  F. 
cédente 

Les  Ciganos-  A  propos  1 
LesGitanos  d'Es^ 
Abolpho  Coelho 

jVote  sur  la  nature  mina 
trouvés  en  Poriusj 

Table  des  auteurs 

Table  des  matiiires 

Table  des  planches 


,ï  Google 


TABLE  DES  PLANCHES 


(Les  diliiircnts  objets  figurés  dont  les  dimensions  ne  sont  pas  ci- 
tées sont  censés  être  de  grandeur  naturcUe). 


EXCURSION  A  OTTA 

Profil  n"  1,  Coupe  géologique  depuis  la  colline  de  Campo  jusqu'il  Ca- 
sinha  Branea. 
■      n°  2.  Coupe  géologique  de  Monte  Redondo  jusqu'à  Archino. 
F!g.    I.  Silex  taillé  trouvé  par  M.  Bellucci. 


EXCURSION  A  OASCAES 

Perspective  de  la  falaise,  plans  et  coupes  des  grottes  de  Poço  Velho  A 

l'échelle  de  nsSo. 
(Cette  planche  a  été  copiée  par  les  procédés  de  la  phototypie  d'une 

aquarelle  existant  à  la  Section  Géologique). 


,ï  Google 


7o8 


SUB  QUELQUES  DÉPÔTS  SUPERFICIELS 
DU  BASSIN  DU  DOURO 

PLANCHE  I 

Fig.    I,  2.  Profils  des  alluvions  anciennes  dans  la  Rotunda  da  Boa 

Vista. 

3.  Tranchée  dans  la  route  d'Almeara  à  Lavadûres. 

4.  Coupe  dans  la  granitJte  de  Lavadores. 

5.  Profil  de  la  tranchée  nord  du  tramway  à  Ervilha. 

6.  Coupe  transversale  du  vallon  d'Ervilha. 

7.  Profil  de  la  paroi  d'une  ravine  au  sud  de  Casiello  do  Queijo. 

8.  Petite  falaise  sur  la  côte  de  la  mer  au  sud  de  Casiello  do  Queiio. 
g.  Série  de  couches  arénacéo-argileuses  au  sud  de  Castello  do 

PLANCHE  II 

I  et  I  a,  1  et  a  a.  Deux  quartzites  vues  de  face  et  de  côté,  qui 
paraissent  taillées  :  alluvions  anciennes  du  plateau  de  Paços 
(p.  170  à  171}. 

3  et  3  d.  Quartzitc  vue  de  face  et  de  côté,  trouvée  dans  les  mê- 

mes alluvions,  paraissant  taillée,  et  gardant  des  vestiges  de 
frottement  glaciaire  (p.  171). 

4  et  4  a.  Quartzite  vue  de  face  et  de  côté,  paraissant  taillée,  trou- 

vée dans  la  couche  de  gravier  de  l'est  des  dépôts  d'Ervilha, 
et  qui  paraît  provenir  des  alluvions  anciennes,  sans  que  sa 
forme  ait  subi  de  changement  (p.  179  i  180). 


t  2.  Quartzites  taillées,  du  type  de  Saint-Acheul,  provenant  de 

la  couche  de  gravier  de  l'est  des  dépôts  d'Ervilha. 
t  3  a.  Quartzite  vue  de  face  et  de  côté,  trouvée  dans  la  cou- 


,ï  Google 


709 
amer  de  l'ouest  de  la  série  d'Ervilha,  et  qui,  pa- 
'oir  été  façonnée  par  la  main  de  l'homme  (p.  i83). 
[uartzites  taillées  de  la  série  de  couches  sableuses 
lo  do  Queijo  {p.  184  à  i85). 


PLANCHE  IV 


poli  et  strié  m  silu  par  l'action  glaciaire,  au  sud 
Queijo  sur  la  côte  de  la  mer,  prés  de  Porto. 


A  GROTTE  DE  FOBHINHÂ. 

>giques  de  la  grotte  de  Furninha.  Échelle  i:ï5o 
;lle,  existant  à  la  Section  Géologique,  fatle  par  le: 
phototypie). 


PLANCHE  I 

ï  amygdalaire  du  type  de  Saint-Acheul,  trouvé  en 
<  prés  du  fond  de  la  grotte  au  milieu  de  la  galerie 
le  profil  et  par  ses  deux  faces. 


PLANCHE  l-A 

maxillaire  inférieur  humain  représenté  par  le  con- 

me  partie  de  la  branche  ascendante  droite,  vue 

positions,  de  face  et  de  profil.  3'™  niveau. 

Felis  raclé  près  de  l'apophyse  coronoïde,  2*"'  ni- 

,80  métrés  de  profondeur. 

silex  taillé  d'un  côté.  Base  du  C*""  niveau. 

perforé  artificiellement.  S'"  niveau. 


„z/!!Œ>ogle 


710 
Fig.    5*  Caillou  roulé  de  quanzite,  très  aplati,  usé  d'un  côté,  ayant 
probablement  servi  de  lissoir.  Base  du  6*™  niveau. 
6»  Éclat  d'os  long,  fort  épais,  de  Carnivore,  très  roulé.  Base  du 

I"  niveau. 
7#  Éclat  de  silex  d'une  teinte  jaunâtre,  avec  des  taches  brun- 
foncé  et  rougeâtre,  conservant  encore  aux  deux  bouts  la 
surface  naturelle  du  rognon.  &''  niveau,  à  3  mètres  de  pro- 
fondeur. 


I.  Pointe  de  silex  à  section  triangulaire,  un  peu  retouchée  sur 

les  bords. 
a.  Phalange  d'Ours  avec  deux  entailles  produites  artificiellement. 
3, 4,  6,  7  et  9.  Pointes  de  silex  taillées  d'un  seul  côté. 
5.  Éclat  de  silex  à  forme  allongée,  du  type  des  couteaux,  ébréché 

sur  les  bords. 
8,  Éclat  cunéiforme  enlevé  d'un  rognon  de  silex,  avec  la  surface 

couverte  de  dendritcs  manganésifères,  ayant  probablement 

servi  de  grattoir. 
Tous  les  objets  figurés  sur  cette  planche  ont  été  retirés  du 

î*™  niveau  à  6  métrés  de  profondeur. 


10  et  II.  Couteaux  en  silex  à  section  trapézoïdale. 

13.  Couteau  en  silex  rougeâtre,  dentelé  en  scie  siu-  l'un  de  ses 

tranchants. 
i3,  14  et  19.  Couteaux  en  silex  retouchés  sur  tout  leur  pourtour 

pour  servir  comme  grattoirs. 
[5  et  21.  Pointes  de  flècbes  en  silex  de  forme  trapézoïdale,  à 

tranchant  transversal. 
t6.  Lame  ou  perçoir  en  silex. 
17.  Couteau  en  silex  â  section  triangulaire. 


,ï  Google 


7" 
Fig.     (8,  zo  et  22.  Toute  petites  lames  en  siiex  du  type  des  couteaux. 
Les  pitces  figurées  sur  cette  planche  ainsi  que  sur  les  plan- 
ches suivantes,  iv  à  xiv,  appartenaient  au  dépôt  supérieur  de 
la  grotte. 

PLANCHE  IV 

23-29,  3i<  3ï)  34-37.  Pointes  en  silex  de  différents  types  et  cou- 
leurs diverses,  toutes  plus  ou  moins  finement  dentelées  sur 
les  bords. 

3o  et  33.  Pointes  de  javelot  en  silex,  dentelées  aussi  sur  les  bords. 


PLANCHE  V 


38.  Poinçon  en  os,  canon  de  ruminant  refendu  et  aiguisé  à  la 

partie  supérieure. 

39.  Plaque  d'ardoise  avec  trou  de  suspension,  ornée  de  dessins 

en  chevron  sur  l'une  de  ses  faces. 

40.  Epingle  en  os. 

41.  Poinçon,  éclat  d'os  de  ruminant. 

41  et  43.  Fragments  d'os  long  très  épais,  à  surface  lisse  devenue 
brillante  par  un  frottement  réitéré, 

44.  Petit  fragment  d'humérus  humain,  id. 

46.  Petit  fragment  de  crâne  humain,  id. 

47,  Petit  fragment  de  cubitus  humain,  id. 

45.  Grosse  perle  en  os  faite  d'un  canon  de  r 


PLANCHE  VI 

48.  Plaque  en  os  très  mince,  dentelée  sur  l'un  des  t 

49.  Grosse  perle  en  os  faite  d'un  canon  de  ruminar 

50.  Plaque  en  os  avec  des  dessins  au  trait  gravés  su 

faces  qui  est  un  peu  convexe,  l'autre  étant  plai 
il.  Plaque  en  os,  très  mince. 
il.  Fragment  d'un  tibia  humain,  avec  des  marques  t 

ont  l'air  d'avoir  été  produites  par  un  insirume 


r 


„Google 


7'^ 

peut-être  la  pointe  de  flÈche  en  silex,  le  cal  ne  s'y  étant  pas 
formé  complètement. 

53.  Fragment  d'un  tibia  de  ruminant  (?)  scié  et  façonné  aux  deux 

extrémités. 

54.  Canine  d'un  chien  percée  à  la  racine  d'un  trou  de  suspension. 

55.  Poinçon  en  os;  éclat  de  canon  de  ruminant. 

56.  Épingle  en  os. 

57.  Poinçon  fait  de  la  partie  inférieure  d'un  canon  de  ruminant 

58.  Plaquu  de  schiste  usée  ù  la  surface,  et  aux  bords  arrondis. 
5g.  Fragment  d'une  défense  de  sanglier  travaillée,  avec  trou  de 

60.  Pointe  d'aiguille  ou  d'épingle  en  os. 

61.  Petite  perle  en  serpentine,  de  forme  aplatie, 

62.  C3,  64.  Perles  de  callaïs  de  forme  arrondie. 

65.  Petit  éclat  d'os  plat,  trOs  usé  et  poli  par  le  frottement. 


PLANCHE  VU 

66.  Éclat  d'os,  usé  par  un  froaement  prolongé,  dont  la  surface 

est  très  lisse  et  polie,  étant  noircie  par  l'action  du  feu. 

67.  Éclat  d'os  long  humain,  (tibia  ou  fémur)  très  usé  par  le  frot- 

tement, présentant  le  même  aspect  que  celui  de  la  flg,  66. 

68.  Fragment  de  crâne  humain,  partant  une  dépression  circulaire 

artificiellement  produite  en  tournant  un  silex. 

69.  Clavicule  humaine  incomplète  d'un  jeune  individu,  tr£s  usée 

et  polie. 

70.  Portion  inférieure  d'humérus  humain,  auquel  manque  l'extré- 

mité articulaire,  obliquement  cassée  à  l'une  de  ses  extrémi- 
tés, puis  rongée  et  usée  ensuite  par  le  frottement;  dans  la 
cavité  médullaire  se  trouvait  le  petit  fragment  d'os  usé,  poli 
et  luisant  représenté  à  côté. 

7t.  Portion  supérieure  d'un  radius  humain  rongée  à  l'extrémité 
inférieure,  ayant  la  surface  un  peu  usée. 

7a.  Portion  d'humérus  humain  paraissant  avoir  été  obliquement 
cassé  â  l'extrémité  inférieure. 


,ï  Google 


ili 

Fîg.    73.  Partie  supérieure  du  corp  d'un  humérus  humain,  cassé  ni- 

tention  elle  ment,  et  ayant  la  surface  osée  par  le  frottement. 

74.  Extrémité  inférieure  d'un  humérus  humain,  cassé  ii 

nellement,  et  ayant  la  surface  usée  par  le  frottement. 


PLANCHE  VIII 

73.  Nucléus  de  silex  vu  dans  deux  positions  difTérentes. 

76.  Éclat  de  silex  gris,  avec  un  gros  bulbe  de  percussion  â  la  face 

opposée  â  celle  représentée. 

77.  Instrument  en  silex  fort  5  la  base  et  aminci  vers  la  pointe. 

78.  Grattoir  de  silex  translucide,  usé  et  lustré  par  l'eau.  Par  mé- 

prise il  a  été  désigné  dans  le  texte  comme  étant  fait  de  cal- 
cédoine. 

79.  Éclat  de  silex  usé  à  la  pointe,  retouché  et  ébréché  à  l'un  des 

bords. 
80  et  80  «r.  Grattoir  de  silex  gris  vu  des  deux  côtés. 
81.  Grattoir  de  silex  rougeâtre. 


PLANCHE  IX 

82.  Nucléus  de  silex  dont  on  a  enlevé  une  succession  de  petites 

83.  Hache  polie  en  schiste  amphibolique.  Iras  épaisse,  à  côtés  plats 

et  à  tranchant  légÈrement  oblique,  ayant  la  section  à  peu 
près  rectangulaire. 

84.  Hache  polie  en  basalte,  il  section  polygonale  irréguliére,  plate 

sur  l'une  des  faces  qui  est  coupée  en  biseau  pour  former  le 
tranchant  dans  le  plan  de  l'autre  face.  EUe  paraît  par  sa  for- 
me et  son  tranchant  courbe  parfaitement  adaptée  à  servir 
d'hermi  nette. 

85.  Petite  hache  polie  en  schiste  amphibolique,  peu  épaisse,  h  sec- 

tion piano-convexe,  ayant  comme  la  précédente  une  face 
plate  coupée  en  biseau  pour  former  le  tranchant,  qui  est  droit 
et  tris  légÈrement  oblique. 


,ï  Google 


7'4 

Fig.  86.  Hache  parfaiiemeni  polie,  tris  belle,  en  schiste  amphibolique 
vert-noirâtre,  ù  côtés  ptais  et  à  section  plano-convcxe,  ayant 
l'une  des  faces  courbe  et  l'autre  plane,  coupée  en  biseau 
pour  former  le  tranchant  avec  ia  première. 
87.  Hache  fort  belle  en  schiste  métamorphique,  parfaitement 
polie  sur  toute  la  surface,  de  forme  presque  symétrique  et 
à  section  elliptique. 


PLANCHE  X 

88.  Hache  polie  en  calcaire  métamorphique,  de  forme  aplatie  à 

section  elliptique,  l'une  des  faces  étant  coupée  en  biseau 
pour  former  le  tranchant  avec  le  plan  de  l'autre  face. 

89.  Pièce  en  grès  quanzeui  de  forme  cylindrique  ayant  peut-être 

servi  comme  polissoir. 

90.  Hache  polie  en  calcaire  métamorphique,  ayant  l'une  des  fa- 

ces très  légèrement  convexe  et  l'autre  plane  et  coupée  en 
biseau  pour  former  le  tranchant  avec  la  précédente. 

91.  Herminctie  en  granité  ou  gneiss  très  fin,  polie  et  très  usée, 

à  côtés  arrondis  et  avec  un  sillon  longitudinal  sur  l'une  des 
faces. 

91.  Herminetie  en  calcaire  métamorphique  à  section  subellipti- 
que, cassée  A  la  crosse. 

93.  Hache  parfaitement  polie,  en  schiste  amphibolique,  à  côtés 
arrondis,  ayant  une  des  faces  convexes  et  l'autre  plate,  cou- 
pée en  biseau  pour  former  un  tranchant  oblique  avec  l 'autre 
face. 


PLANCHE  XI 


94.  Vase  en  terre  grossière  façonné  â  la  n 
pour  suspension.  Échelle  '/i  8''-  i'^'- 


,ï  Google 


7i5 


PLANCHE  XII 

97.  Vase  incomplet  de  forme  ovoïde,  ei  fragments  d'autres  vases 
en  terre  grossière  à  formes  et  grandeurs  diverses,  fig.  gi,  96, 
98  a  107. 

PLANCHE  XIII 

117.  Petice  écuelle  à  surface  lisse,  et  fragments  d'autres  vases  en 
terre  grossière  de  formes  et  grandeurs  diverses,  lïg.  loS  à 
116,  118  et  119. 

PLANCHE  XIV 

lîo.  Maxillaire  supérieur  droit  de  Phoque  vu  de  profil.  Le  même 

vu  en  dessous. 
lîoa.  b.  La  troisième  molaire  de  cette  mâchoire  vue  par  la  face 

interne. 
121.  Maxillaire  inférieur  gauche  du  même  individu,  vu  de  profil. 


PLANCHE  XV 


;.  Crâne  humain  vu  d'en  haut  et  de  profil,  n 

mencement  de  trépanation  sur  le  pariétal  gauche.  Échelle 
'/,gr.nai. 
(Ce  crâne  provient  du  dépôt  supérieur  de  Casa  da  Moura  à 
Cesareda,  où  il  a  été  trouvé  lors  des  fouilles  faites  en  1880 
sous  la  direction  de  M.  Delgado,  les  premières  datant  de 


PLANCHE  XVI 

1 23.  Tibia  humain  excavé  à  llntérieur  et  rongé  à  la  surface.  (Grotte 

de  Malgasta,  Cesareda). 

124.  Fémur  cassé  aus  extrémités,  dont  l'une  coupée  obliquement 


r,<tJK^ooQle 


7i6 

a  une  entaille  barbelée  assez  profonde.  La  surface  porte  les 
traces  des  dents  d'un  rongeur.  (Casa  da  Moura,  Cesareda). 
tsS.  Eclat  d'os  long  évidemment  humain,  percé  dje  trois  trous  dis- 
posés en  série  et  à  égale  distance.  (Casa  da  Moura,  Cesa- 
reda). 

126.  Fémur  excavé,  cassé  obliquement  à  l'une  des  extrémités  en 

partant  de  la  ligne  âpre.  Cette  extrémité  porte  sur  le  côté 
gauche  une  entaille  profonde  à  laquelle  répond  de  l'autre 
côté,  mais  un  peu  au-dessus,  u rie  autre  entaille,  le  tout  indi- 
quant l'intention  d'enlever  obliquement  cette  partie  de  l'os. 
Il  porte  aussi  sur  toute  la  surface  l'empreinte  des  dents  d'un 
rongeur.  (Casa  da  Moura,  Cesareda). 

127.  Tibia  humain,  excavé,  trâs  rongé  sur  toute  la  surface.  (Casa 

da  Moura,  Cesareda). 

128.  Éclat  d'os  humain,  usé  à  la  surface,  scié  perpendiculairement, 

et  dont  il  reste  une  pointe  sur  l'un  des  côtés,  longue  de  6  mil- 
limètres. (Furninha). 

ixget  i3o.  Fragments  d'os  long  (tibia?)  humain,  portant  sur  la 
surface  des  incisions  peu  profondes  qui  peuvent  bien  avoir 
été  produites  par  des  blessures.  (Furninha). 

i3i.  Humérus  rongé  d'enfant,  peut-être  par  un  Carnivore,  dont  la 
dent  l'a  percé  sur  un  point.  (Casa  da  Moura). 

i32.  Fragment  de  crâne  humain  dont  on  a  détaché  quelques  pe- 
tits éclats,  à  ce  qull  paraît,  avec  une  pointe  aiguë,  agissant 
tantôt  dans  un  sens,  tantôt  dans  un  autre.  (Casa  da  Moura). 

i33.  Portion  supérieure  d'un  fémur  humain,  dont  on  a  détaché  à 
l'état  frais  un  large  éclat,  après  quoi  il  a  été  effleuré  par  les 
dents  d'un  rongeur.  (Casa  da  Moura). 

134.  Éclat  d'os  long,  dont  la  surface  est  tachetée  de  dcndritcs  man- 
ganésifËres.  (Furninha). 


PLANCHE  XVII 

i35.  Éclat  d'un  tibia  humain  portant  l'impression  assez  profonde 

des  dents  d'un  rongeur.  (Casa  da  Moura). 
i36.  Tibia  humain  appartenant  à  un  jeune  individu,  portant  deux 


7'7 

encoches  évidemment  produites  par  un  instrument  tranchant 

dansle  butdecoupenransversalement  l'os.  (Casa  da  Moura). 
137.  Portion  de  tibia  humain  excavé  où  ii  manque,  sur  toute  la 

longueur,  la  face  externe  correspondante  à  la  crête.  (Casa 

da  Moura). 
i38.  Fragment  d'os  long  humain  façonné  (?)  (Casa  da  Moura). 


LES  KIOEEEIiNMOEDDiaS  DE  LA,  VALLÉE  DU  TAGE 


Vue  des  squelettes  mis  à  découvert  par  les  fouilles  faites  dans  le 
kioekkenmoedding  de  Cabeço  da  Arruda. 


PLANCHE  III 

Fig.  I.  Fragment  d'un  instrument  en  pierre  polie  (diorite)  avec  un  sil- 
lon de  sciage  fait  avec  une  scie  de  silex. 
(Cette  pièce  ne  provient  pas  des  Idoekkenmoeddings,  elle  a 
été  trouvé  dans  les  environs  de  Sacavcm). 
ï.  Plaque  de  grés  (in  micacé  très  usée  par  le  frottement,  ayant 
servi  de  meule  sur  ses  deux  faces,  et  un  pilon  ou  molette 
formée  par  un  caillou  roulé  de  quartzite,  de  forme  semi- 
ellipsoïdale  aplatie,  tronqué  et  aussi  très  usé  ù  l'un  des  deux 

(Ces  deux  pièces  ont  été  trouvées  séparées  dans  le  kioekken> 

moedding  de  Moita  do  Sebastiâo). 
3.  Fragment  de  bois  de  cerf  scié  en  biseau  et  cassé  à  la  pointe. 

(Cabeço  da  Arruda). 
4  et  6.  Spatules  en  os,  (Même  provenance). 
S.  Portion  de  ramure  de  bois  de  cerf  dont  on  a  scié  un  andouiller 

près  de  la  base;  elle  est  perpendiculairement  sciée  à  l'une 

de  ses  extrémités  et  sciée  et  usée  obliquement  à  l'autre, 

(Même  provenance). 


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7i8 


PLANCHE  IV 

Fig.   7.  Nucldus  en  silex,  dont  on  a  enleva  une  succesûon  de  lames  en 
frappant  touiours  du  côté  de  la  base. 

8.  Poinçon  en  os. 

9.  Caillou  plat  de  roche  amphïbolique  arrondi  et  usé  par  l'eau 

avec  trou  de  suspension;  probablement  porté  comme  orne- 
ment. (Il  a  élé  trouvé  détaché  à  la  surface  du  dépôt). 

to.  Portion  d'un  métacarpien  d'oiseau  façonné  à  l'une  des  extré- 
mités. 

1 1  à  14.  Petits  couteaux  en  silex. 

i5.  Éclat  d'os  façonné  en  pointe. 

16  à  a6.  Pointes  de  flèches  en  silex  de  forme  rhomboïdale  de  diffé- 
rents types,  à  tranchant  transversal. 
(Tous  les  objets  représentés  par  les  fig.  7  à  16  provienneat 
du  kioekkenmoedding  de  Cabeço  da  Amida). 

i7.  Scie  en  silex  retouchée  sur  tout  le  pounour  du  côté  élevé. 
(Celle  piixa  unique  provient  de  Paul,  près  de  Cabcço  da 
Amida.  Elle  a  été  trouvée  à  la  surface  du  sol). 


OSSEMENTS  HnMA.INS  DANS  LE  MUSÉE 
DE  LA  SECTION  OÉOLOOIQUE 


Fig.    I  a,  b,  c.  Crâne  de  Valle  do  Areeiro, 
3  a,  b,  c.  Crâne  n*  i  de  Mugem. 


3  a,  b,  c.  Crâne  n*  3  de  Mugem, 

4  n,  b,  c.  Crâne  n*  6  de  Mugem, 


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PLANCHE  III 


5  a,  i,  c.  Crâne  brachycéphale  masculin  de  Mugem. 

6  a,  b,  c.  Crâne  brachycéphale  féminin  de  Carvalbal. 


PLANCHE  IV 

7  a,  b.  Crâne  brachycéphale  féminin  de  Mugem. 

8  a,  b.  Crâne  n'  ii  de  Casa  da  Moura. 

9  d,  (.  Crâne  de  LJcéa. 


lo  a,  b,  c.  Crâne  n*  2  de  Casa  da  Moura. 
\\  a^b,  c.  Crâne  n*  i  de  Cascaes. 


ARGHËOLOaiE  PRÉHISTORIQUE  DANS  LE  MINHO 
PLANCHE  I 
Vue  et  plan  du  dolmen  de  Barrosa. 

PLANCHE  II 
Plan  de  la  Station  du  Mont  Santa  Luzia. 


SUR  LES  HA.CHES  ZN  BBONZE  TROUVÏES  EN  PORTDaAL 

I^g.    t.  Type  de  haches  en  bronze  trouvées  dans  l'Extremadura. 
3.  Id.  dans  la  Beira  Alta. 
3  et  4.  Id.  dans  le  Minba 
5.  Id.  dam  l'Alemtejo. 


IN8TRD1IENT8  EN  PIEKBE  A  L'ÉPOQUE  DES  HËTADX 

PLANCHE  I 

I.  Flèche  en  silex  provenant  du  cimetière  franc  d'Oyes. 

2  et  4.  Flèches  en  silex  de  l'atelier  néolithique  de  la  ViciUe-An- 

decy. 
3.  Flèche  en  silex  du  cimetière  franc  de  Joches. 
5  et  7.  Silex  travaillés  des  sépultures  franques  de  Caranda. 
6.  Grattoir,  même  provenance. 

8.  Grattoir  du  cimetière  franc  d'Oyes. 

9.  Flèche  en  silex  du  dolmen  de  Caranda. 
ro.  Grattoir  de  l'atelier  de  la  Vieille- Andecy. 

11.  Flèche  en  silex  des  sépultures  franques  de  Sablonnière. 

PLANCHE  II 

I  à  3.  Silex  travaillés  des  sépultures  franques  de  Caranda. 
4  à  6.  Flèches  en  silex,  même  provenance. 
7  et  9.  Lames  en  silex,  même  provenance. 
8.  Pointe  en  ùlex,  même  provenance. 


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NÉCROPOLES  PRÉHI8TOKIQTTES  DU  CAUCASE 

I  et  3.  Sépultures  grecques  de  Marseille. 

3  et  6.  Nécropole  de  Satnthavro  (Caucase). 

4  et  5.  Tumulus  de  Corveissiai  (Jura). 
7  et  8.  Tumulus  de  Voiteur  (Jura). 


INSCBIPTIOHB  EN  ÈCBiniBE  .OGEAK. 


Onze  figures  portant  des  inscriptions  de  ce  genre  trouvées  d 
Iles  Britanniques. 


LES  T0DEHARE8 

1.  Les  Tokliari,  d'après  une  peinture  murale  à  Thèbes. 

2.  Les  cbaniots  des  Tokkari,  d'après  une  peinture  murale 

bes. 


suit  Xm  CAS  DE  mCROOËPHALIE  EN  FORTUQAl 


I.  La  microcéphale  Bemvindavue  de  face. 
3.  La  mSme  vue  de  protîl. 


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