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I D,n,i„.db,Gex")gle
Dioiiizidb.Gooi^le
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CONGRÈS
INTERNATIONAL
D'ANTHROPOLOGIE ET D'ARCHÉOLOGIE
PRÉHISTORIQUES
V^EUV lÈffdE SE SS lOV^
1880
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D,„i,„db,Google
CONGRES
INTERNATIONAL
D'ANTHROPOLOGIE ET D'ARCHEOLOGIE
PRÉHISTORIQUES
COMPTE RENDU
DE LA
NEUVIÈME SESSION À LISBONNE
1880
LISBONNE
TyPOGRAPtOE DK L'Aca1>ÉM[E RoVALZ des SaENCES
1884
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AVANT-PROPOS
En livrant au public ce Compte rendu de la 9* session
du Congrès d'anthropologie et d'archéologie préhistoriques
qui s'est réuni à Lisbonne au mois de septembre de 1880,
je dois commencer par demander à nos honorables confrè-
res de bien vouloir "excuser le long délai qu'il y a eu dans
cette publication.
Divers obstacles indépendants de notre volonté nous
ont empêché de présenter ce volume plus tôt. Il serait su-
perflu d'énumérer toutes ces difficultés: il suffira de rappe-
ler à nos collègues qu'à l'occasion du Congrès le secrétaire
général, le regretté général Carlos Ribelro, était déjà sous
le coup de la grave maladie qui l'a malheureusement enlevé
à la science qu'il cultivait avec tant de dévouement et à la-
quelle il pouvait encore rendre des services importants. Cette
389324
À
longue maladie l'a empêché, malgré sa grande activité et
son amour du travail, de surveiller cette publication, de
sorte qu'en réalité ce ne fut qu'après sa mort, survenue
deux ans après le Congrès (le i3 novembre 1882) que les
travaux de publication du Compte rendu ont été commen-
cés.
La Section des travaux géolo^ques ayant préparé le
Congrès, c'était naturellement à celui qui a succédé à M. Ri-
beiro dans l'accomplissement des graves fonctions de chef
de ces travaux qu'incombait la direction de la publication du
Compte rendu ; et c'est sans doute par ce motif que M. le
conseiller Hîntze Ribeiro, alors ministre des travaux pu-
blics, m'ayant nommé à cette place vacante, m'a aussi char-
gé de diriger cette publication. Je me fais un devoir de té-
moigner Ici toute ma reconnaissance envers ceux qui m'ont
si puissamment aidé dans l'accomplissement de ce devoir,
et spécialement M. Gonçalves Vianna, l'un des secrétaires
du Congrès qui, bien qu'étranger à la Section géologique, a
pris à sa charge le travail de rédaction, la compilation et la
coordination des matières. La révision du texte et la correc-
tion des épreuves ont été faites avec le soin le plus scru-
puleux par M. Gonçalves Vianna et M. Berkeley Cotter,
adjoint de la Section géologique, qui, lors de la session du
Congrès, se trouvait à Londres au service de l'état. L'exé-
cution des dessins a été en majeure partie confiée à M. Luiz
,ï Google
Couceiro; j'ai lieu de croire que les auteurs des mémoires
auxquels ils se rapportent en seront satisfaits; pour ma part
je tiens à lui exprimer mes remercîments pour les soins qu'il
a apportés à l'exécution des planches qui accompagnent la
description de la grotte de Furninha.
Je ne saurais passer. sous silence que nous avons été
guidés dans la coordination de ce volume par les avis ju-
dicieux de notre estimable collègue M. Choffat, ainsi que
par le Compte rendu publié en 1881 par M, Cartailhac, qui
a eu Pamabilité d'envoyer au secrétariat un exemplaire en-
richi de notes manuscrites.
Nos lecteurs remarqueront peut-être l'absence de des-
sins des silex qui ont servi de base à la discussion sur l'exis-
tence de l'homme tertiaire. Je n'ai pas cru indispensable de
les faire figurer, puisque la plupart de ces silex, du moins
les plus concluants, ont déjà été reproduits dans différentes
publications par MM. Ribeiro, de Mortitlet, Cartailhac et par
d'autres savants, ainsi que dans le Compte rendu du Congrès
de Bruxelles; et en outre parce que M. Ribeiro n'ayant pas
séparé de sa propre main ceux qui devraient être représen-
tés, je n'ai pas voulu faire ce choix moi-même, craignant de
supprimer quelque pièce importante à l'appui des idées sou-
tenues par notre regrettable confrère.
Nous avons ajouté à l'inévitable appendice, l'étude que
M. Alfredo Ben Saude a faite des roches qui ont servi à la
,Gex^»^
fabrication des différents instruments en pierre existant
dans les collections de la Section géologique. J^aime à croire
que ce travail sera bien reçu par nos lecteurs et je saisis
avec plaisir l'occasion de présenter à mon estimable collè-
gue l'expression de reconnaissance qui lui est due pour cette
intéressante contribution, qui est venue enrichir le volume
que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui.
Lisbonne le lo septembre i
Joaquim FUippe Nery De'lgado
L'un des vice-présidents du Congrès
,ï Google
PEOTEOTEUE
SA MAJESTÉ LE ROI DE PORTUGAL
PBËSISENT D'HONKEXIS
SA MAJESTÉ LE ROI DOM FERNANDO II
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COMITE D'ORGANISATION
POUR LA SESSION UE 1 88o
PRÉSIDENT
MM. Andrade Corvo {J- de), conseiller d'éiai, ministre honoraire, mem-
bre de l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne, directeur
de l'École Polytechnique. Lisbonne.
SECRÉTAIRE
RmEiRO (Caklos), colonel d'artillerie, membre de l'Académie
Royale des Sciences de Lisbonne, chef de la Section des Tra-
vaux Géologiques. Lisbonne.
TRÉSORIER
Teiieira de Aragâo (A. C), membre de l'Académie Royale des
Sciences de Lisbonne, professeur d'hygiène militaire. Lisbonm
MEMBRES DU COMITÉ
AcuiAR (A. A. de), conseiller honoraire, membre de l'Académi
Royale des Sciences de Lisbonne, professeur â l'École Poly
technique. Lisbonne.
,ï Google
MM. AiXEN (E. A.), correspondant de l'Académie Royale des Sciences
de [.isbonne, directeur du Musée municipal de Porto. Porto.
Barbosa du Bocage (J. V.), membre de l'Académie Royale des
Sciences de 1-isbonne, professeur à l'Ecole Polytechnique, pré-
sident de la Société de Géographie de Lisbonne. Lisbonne.
Bahbosa (Antonio Maria), conseiller honoraire, membre de l'Aca-
démie Royale des Sciences de Lisbonne, professeur à l'École
de Médecine. Lisbonne.
Carvalho (le ur. Thomaz de), membre de l'Académie Royale des
Sciences de Lisbonne, directeur de l'École de Médecine. Lis-
Costa I.eite (M. M. da), conseiller honoraire, directeur de l'Aca-
démie de Médecine. Porto.
Delgado (J. F. Nerv), major du (jénie, correspondant de l'Aca-
démie Rovjle des Sciences de Lisbonne, ingénieur adjoint de
la Section des Travaux Géologiques. Lisbonne.
Ennes (Antonio), licencié-ès-le»res. Lisbonne.
FicALHO (le comte de), membre de l'Académie Royale des
Sciences de Lisbonne, professeur il l'École Polytechnique. Lis-
Latiko Coeij)o(J. m.), ministre ei conseiller honoraire, secrétaire
général de l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne, profes-
seur il l'École Polytechnique. Lisbonne.
M.\nTiNs Sarmsnto (F.), correspondant de l'Académie Royale
des Sciences de Lisbonne, bachelier en droit. Guimarâes.
Mendes Leal (J. HA Silva), ministre et conseiller honoraire, mem-
bre de l'Académie Royale des Sciences de I^isbonne, ministre
plénipotentiaire de Portugal en France. Paris.
Pere[ra da Costa (F. A.), bachelier en médecine et en philoso-
phie, professeur â l'École Polytechnique. Lisbonne.
Pereira da Silva (F. M.), conseiller honoraire, contre-amiral. Lis-
PossiDONio DA Silva (J.), architecte de S. M, le Roi, président de
la Société Royale des architectes et archéologues portugais.
Lisbonne.
Silva Leal (J. M. da), correspondant de l'Académie Royale des
Sciences de Lisbonne. Lisbonne.
,ï Google
MM. SiLVESTRE RjBEiKO (/.), ministre et conseiller honoraire, membre
de l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne. Lisbonne.
Vasconcellos (F. A. db), bachelier en philosophie, ingénieur adjoini
de la Section des Travaux Géologiques. Lisbonne.
ViLHENA BxKBosA (I. de), membre de l'Académie Royale des Scien-
ces de Lisbonne. Betem.
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REGLEMENT GÉNÉRAL
Art 1. Un Congrus intLTnaiional d'Anthropologie cl d'Archéologie
préhistoriques, faisant suite aux réunions qui ont eu lieu en i865 ù la
Spezia et en 1866 à Neuchâid, a cti^ définitivement constitué à Paris
en i867.~A partir de 1871 les sessions auront lieu tous les deux ans:
(voté a Bruïtelles en 1872).
Art. 11. [,e Congrès ne pourra avoir lieu deux fois de suite dans
le même pays.
Art. m. Font partie du Confjrùs et ont droit à toutes ses publica-
tions les personnes qui en ont fait la demande et ont acquitté la coti-
Art. IV. A la fin de chaque session, le Congrès désigne le lieu où
se tiendra la session suivante; il choisit en outre, parmi les savants
rendant dans le pays désigné: i." le Président de la session future,
2.' plusieurs autres savants chargés de constituer, sous la direction du
Président, un Comité d'organisation.
Art. V, Le Comité d'organisation peut s'adjoindre, suivant ses be-
soins, d'autres savants nationaux. Il demande en outre le concours
des savants étrangers qui lui paraissent pouvoir recueillir le plus grand
nombre d'adhésions en faveur du Congrès. Ceux-ci prennent le titre
de Membres correspondants du Comité.
Art. VI. Le Comité fixe l'époque de la session, le nombre des
. séances, le taux de la cotisation; il envoie les lettres de convocation,
recueille et concentre les adhésions et délivre les cartes des membres.
Il se charge de tous les soins matériels qui conccrnem l'installation
du Congrès et la tenue de
Art. Vil, Il prépare, publie et distribue, plusieurs mois ù l'avance,
le programme dus séances; il peut lixer un certain nombre de ques-
tions; mais il devra toujours réserver une partie des séances pour tou-
tes autres questions non comprises dans le programme, proposées par
un membre du Congrès et approuvées par le Conseil.
Art. vdi. Le Bureau du Comité remplit les fonctions de Bureau
provisoire dans la première séance de la session. Les membres du Bu-
reau définitif sont nommés dans cette première séance, à la majorité
relative. Cl l'exception du Président, qui est élu depuis l'année précé-
dente, et du Trésorier déjà institué par le Comité d'oi^anisation.
Art. IX. Le Bureau se compose: i.° d'un Président; 2." de six
Vice-Présidents, dont deux au moins doivent êlre résidents; 3.° d'un
Secrétaire général; 4.' de quatre Secrétaires; 5.* d'un Trésorier.
Art. X. Le Conseil se compose: i.° des membres du Bureau dé-
tinitif; 1.° de six membres nommés au scrutin de liste. Font en outre,
de droit, partie du Conseil: i.'les quatre membres fondateurs du Con-
grès de la Spezia ; i.° tous les anciens Présidents, qui conservent le ti-
tre de Présidents honoraires. — Les membres du Comité d'organisation
qui ne rentreraient pas dans l'une des catégories précédentes, assistent ■
aux séances du Conseil avec voix consultative.
Art. x[. Toutes les demandes de communication survenues pen-
dant la session et toutes les réclamations sont soumises au Conseil, qui
statue définitivement. Le Conseil est en outre chargé de proposer au
vote du Congrès, conformément à l'article iv: i.° la désignation du
lieu oti se tiendra la session suivante : 2.° la nomination du Président
ei des membres du Comité d'organisation du futur Congrès.
Art. XII. Dans sa seconde séance, le Congrès nomme, sur la pro-
position du Conseil, une Commission de publication dont le'Secrétatre
général est président de droit, et dont le Trésorier fait également par-
tie. Cette Commission, entièrement composée de membres n:
sera en outre chargée d'apurer les comptes.
Art. XIII. S'il y a un reliquat, il sera reporté à l'actif de
Art. XIV. Les objets offerts au Congrès pendant la session, ainsi que
. toutes les pièces de la correspondance, sont acquis au pays où la ses*
sion a lieu. Leur destination est déterminée par le Conseil.
Art. XV. Le Comité de chaque session établit un règlement pard-
,ï Google
culier concernant toutes les dispositions sur lesquelles il n'est pas
statué dans le présent règlement général.
Art. XVI. Toute proposition tendant à modifier le règlement géné-
ral devra être signée de dix membres au moins, déposée sur le bureau
pendant le courant de la session, et soumise â l'examen du Conseil.
Celui-ci, après en avoir délibéré, prépare un rapport qui est inséré,
ainsi que la proposition, dans les publications du Congrès, et qui est
mis aux voix sans discussion, par oui ou par non, dans la première
séance de la session suivante.
t ." Art. additionnel voté pendant la session de Bologne (i87i).
La langue française est seule admise pour les communications Tcr-
bates pendant les séances et dans la publication du compte-rendu du '
Congrès. et des mémoires qui y sont joints.
a.ème Art, additionnel voté pendant la session deBudapesth(i876).
Les membres du Congrès qui auront été nommés Vice-Présidents
pendant quatre sessions, deviendront de droit Vice -Présidents hono-
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QUESTIONS À DISCUTER
Conformément à l'article vu du Règlement général, le
Comité d'organisation a proposé les questions suivantes pour
être spécialement discutées pendant le Congrès:
I. Y a-t-il des preuves de l'existence de l'homme en Portugal pen-
dant l'époque tertiaire?
II. Comment se caractérise l'âge paléolithique en Portugal pendant
l'époque quaternaire?
ui. Comment se caractérise l'âge néolithique en Portugal?
I." Dans les Kioekkenmoeddings de la vallée du Tage;
1." Dans les cavernes, soit naturelles, soit artificielles, contenant
des restes humains et des produits de l'art;
3.° Dans les monuments mégalithiques et dans d'autres stations.
IV. Quelles sont les notions acquises sur les caractères anatomiques
des habitants du Portugal dans les temps préhistoriques?
V. D'aprCs quels faits peut-on reconnaître la transition de l'âge de
la pierre polie à celui du cuivre ou des métaux en Portugal ?
VI. Quels sont les faits constatés sur la civilisation des peuples
qui habitèrent le Portugal antérieurement à la domination romaine?
Le Congrus visitera des grottes,des camps et des stations dans diffé-
rentes localités aux envirotis de la capitale, ainsi que les couches ter-
tiaires entre Alemquer, Otta et Azambuja.
Après la clôture du Congrès on visitera les stations préhistoriques des
deux Citamas de Britetros et de Sabroso, dans la province de Minho.
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FONDATEURS, ANCIENS PRESIDENTS
ET VICE-PRÉSIDENTS HONORAIRES
MM Capeluni (le prof. Je-^n), président du CoagrÈs de la Spezîa ; fon-
dateur. Bologne.
CoKNAUA (le prof. Ehile), directeur du Musée de Milan; fun-
dateur. Milan.
Desor (le prof. E.), président du Congrès de Neuchâtel. Neu-
châtel.
Dupont (Ed.), directeur du Musée Royal d'Histoire Naturelle
■ de Bruxelles- Bnure/to.
Franss (A. W.), conservateur des andquirés nationales et des col-
lections ethnographiques au «Biutish Muséum». Londres.
GozzADiNi (lb comte g.), sénateur, pré^dent du Congrès de Bo-
logne. Bologne.
HAMU.TON (le comte H.), tncmbre de l'Académie Royale d'Archéo*
logie, président du Congrès de Stockholm. Stockholm.
LuBBOCK (sm John), Bart., F. R. S., président du Congrès de Nor-
wich. Higk Elms, Farnbormigh (Kent).
M0RTILI.ET (Gabriel de), professeur à l'École d'Anthropologie,
attaché au Musée de Saint-Germain-en-Laye; fondateur. Satnt-
Oermain (Seine-et-Oisej.
PuLszEY (F. de), directeur du Musée National, président du Con- ■
grès de Budapesth. Budapesth.
NiLssoN (Sven), membre de l'Académie Royale d'Archéologie.
QuATRKFAGEs de Bréaux (A. de), membre de l'instiiut. Paris.
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MM. Stoppani (l'abbé Antonio), professeur; fondateur. Florence.
VmcHow (le t>R, Rudolph), professeur A l'Université de Berlin.
Berlin.
VoGT (le prof. Cabl). Genève.
WoRSAAE (J. J. A.), directeur du Musée Archéologique de Copen-
hague, président du Congrès de Copenhague. Copenhague.
,ï Google
LISTE DES DÉLÉGATIONS
ALLEMAGNE
MxM. LissAUER (A.), délégué de ta Société Anthropologique âe Danizig.
ScHAAFFHAUSEN (H.), délégué de la Société Anthropologique d'Al-
lemagne.
ViRCHOw (R.), délégué de ta Société d Anthropologie de Berlin.
BELGIQUE
BoRMANS (S.), représentant du Gouvernement Belge.
ESPAGNE
ViLANOVA (J.), délégué du Gouvernement Espagnol.
FRANCE
Alclave(E.), représentant du Ministère de l'Instruction Publique.
Bave (le baron J. de), délégué de la Société Française d'Archéo-
logie.
Cartailhac (E.), représentant du Ministère de l'Instruction Pu-
blique.
Magitot (E.), représentant du Ministère de l'Instruction Publique.
Ploix (Ch.), représentant de la Société d'Anthropol^ie de Paris.
„Goo'
^
MM. Possji>oNto DA SiLVA (J.), rtpréïtniam de la SocJéié Académique
Indo-ChinoÎM: de Paris.
QuATfŒFAGEs (A. Dt), détégué de l'Associaiion Française pour
l'avancement des sciences.
SiFiÈRB (C), délégué de la Société Académique Hispa no -Portu-
gaise de Toulouse.
GRANDE-BRETAGNE
Evans (J,), représentant de la Société des antiquaires de Londres,
délégué de l'Institut Anthropologique de la Grande-Bretagne.
BELLtJca (J.), délégué des Sociétés Italiennes d'Anthropologie et de
Géographie.
Capelmni (J.), délégué de S. M. le Roi d'Italie, représentant de
l'Université Royale et de la ville de Bologne.
PiGORiNi (L.), représentant du Gouveraement de l'Italie.
LUXEUBOURG
BoRUANS (S.), représentant de l'Institut Royal Grand Ducal du
Luxcmhourf;.
RDSSIE
Antonovitch (V.), délégué de la Société d'Archéologie de Moscou
et de l'Université de S. Vladimir à Kiev.
Pawinski (A.), représentant de l'Université de Varsovie.
SUÈDE
HiLDEBRAND (H.), représentant du Gouvernement de Suède.
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,ï Google
LISTE DES MEMBRES SOUSCRIPTEURS
ÉTRANGERS ET NATIONAUX
Session de iSSo à Lisbonne'
ALLEUAONE
MM. AuEGG (le DR. H.), conseiller intime, directeur de la Maternité à
Dantzig. Dantpg.
DiERCKs (tx DR. Gustave). Liittïchaustrassc. Dresde.
• Dreuve (le prof. C), membre de la Chambft des Députés. Sas-
kocji», Danl^if;.
DOcKER (le daron de), conseiller des mines de Prusse. Bucke-
«Handeluann (le prop.), directeur du Musée d'Archéologie de
Kiel. KUl.
• Helm (O.), chimiste, membre de la Société Anthropologique
d'Allemagne. Danljîg.
• Hesse (M"e c.), née De Herwarth. Bonn.
KvHn (le DR. Max), secrétaire de la Société d'Anthropologie de
Berlin. Berlin.
• KOsTER (le DR. E.), professeur en chirurgie. Berlin.
• KùsTER { Mme Marie). Berlin.
• Langerhans (le DR, Paul). Fribourg, Bade.
' Le uom des membres pi^Hnu e>t ivii-édi d'un uljri^qua.
„Googlc I
MM. # LissAutK (le DR. A.)j président de la Société d'Anthropolo^e de
Daatzig. Darttjig.
Mestorp (m<"° J.), conservateur du Musée d'Archéolc^ie de Kiel.
Kiel.
«MUNSTERBERC (M.). Datfljtg.
Paetsch (le DR. I.), médecin. Berlin.
Paetsch (M"ie I,). Berlin.
#ScHAAFFHAusEN (le db. Hermann), conseîllcr intime, professeur a
l'Université de Bonn. Bonn.
* ScHAAFFHAusEN {m*"" Anne). Bonn.
* Schaaffhausen (msI'« Elisabeth), Bonn.
* ScHAAFFHAUSEN (mcHb Marie). BoKn.
«Schaaffhausen (m">i« Mathildg). Bonn.
#Stbin (Albert). £oHn.
TiscHLER (le DR, O.), directeur du Musée d'Archéologie Préhis-
torique de la Société Physico- économique de Koenigsberg.
Koenigsberg.
* ViRCHow (le DR. Rudolph), conseiller intitne, professeur à l'Uni-
versité de Berlin. Berlin.
Wekbeker (J.). Dusseldorf.
AUTRICHE
* Cornu (le dr. Jules), professeur de langues et littératures roma-
niques à l'Université de Prague. Prague.
Doelter(ledr. Charles), professeurs l'Université de Gratz, di-
recteur du Musée Minéralogique Universitaire, ancien géologue
de l'Institut Géologique de Vienne. Gratj, Styrie.
Kalur (Jules). Kallenentgehen près Vienne.
Lepkowski (le prof, J.), directeur du Musée d'Archéologie de
l'Université de Cracovie. Cracovie.
WuRMBKAND (le comte Gundak£r de). Ankensteitt près Petiau.
,ï Google
BELGIQUE
MM. Bamps (Anatole). Bruxelles.
*Beneden (P. J. van), professeur à l'Université de Louvain. Lou-
«Blomme (le DR. A.), secrétaire du Cercle Archéologique de Ter-
monde. Termonde.
«Blomme (m"*). Termonde.
• BoRMANS (Stanislas), archiviste de l'État, membre de l'Académie
Royale de Belgique. Namur.
«BoRMANs (u™). Namur.
*Ceuleneer(ledr. Adolphe de), professeur à l'Université deLié-
ge. Liège.
Dupont (Ed.), directeur du Musée Royal d'Histoire Naturelle.
Bruxelles.
Janson (Paul), membre de la Chambre des Représentants de
Belgique. Bruxelles.
#OuN (Xavikr), membre de la Chambre des Représentants de
Belgique, recteur de l'Université Libre de Bruxelles. Bnixel'
les.
Poydt (Marcel de). Liège.
• Vanlaik (le prof.). Louvain.
«Washer (Gustave), membre de la Chambre des Représentants
de Belgique, administrateur des Hospices et des Hôpitaux de
Bruxelles. Bruxelles-
• Washer (m"). Bruxelles.
WiLMART (Léopold). Blankenberghe.
DANEHABE
» Adseksen (le capitaine Frédéric). Copenhague.
Archives du Musée des Antiquités du Nord. Copenhague.
* Dannemand (m™ la comtesse), née comtesse de Schulin. Copen-
.,Goog
ri
Enoklhakdt (le prof. Conrad), secrétaire de la Sociéié Royale
des Antiquaires du Nord. Copenhague.
HERnsT (C. F.), inspecteur au Mtisée des Antiquités du Nord.
Copenhague.
MuLu^R (SoPHus), archéologue adjoint au Musée des Antiquités
du Nord. Copenhague.
PETERSErf^LE iiR. Hëhri), archcologuî; adjoint au Musée des An-
tiquités du Nord. Copenhague.
ScHMiDT (i.E FROF. Vaij)emar). Copcnhague.
Sehf.sted (F.), chatnbellan. Broholm, près Svendborg, Fionie.
Steinkauer (C), inspecteur au Musée d'Ethnographie. Copen-
hague.
Stephëns (Georoe), professeur à l'Université de Copenhague.
Copenhague.
Strunk (A.), inspecteur au Musée des Antiquités du Nord. Co-
penhague.
Worsaae (J. J. a.), chambellan, directeur de plusieurs musées
et des monuments archéologiques du Danemark, ancien pré-
sident du Congrès de Copenhague. Copenhague.
ESPAQNE
Pherson (GuiLi-ERMo). 12, Salon del Prado, Madrid.
Pherson (José), iî, Salon del Prado, Madrid.
es (Mancel), professeur à l'Université Littéraire de SévUle.
iéville.
(DRAs V Burin (Antonio), avocat. 17, Cervantes, Séville.
BiNO (Francisco M.), secrétaire de la Société d 'Anthropologie.
o, Huenas, Madrid.
ANOVA (Jt'^n), professeur de paléontologie au Muséum dHis-
oirc Naturelle de Madrid, 12, S. Vicente Alta, Madrid.
.ANovA (Josi^), ingénieur en chef au Corps des mines. PJaza
-ommunion Santo Estévan, Valence.
,ï Google
FINLANDE
AsPELiv (le prof. J. R.), conservateur du Musée Historique, se-
crétiiire de la Société d'Archéologie de Finlande. Helsing/ois.
BiBMuTHÈQUE dc l'Unlversîté. Helsîn^nrs.
Donner (le prof. O.), viee-présidetit de la Société d'Archéologie
de Finlande. Hehingfors.
Mc;s^:e historique de l'Université. Hehinijfors.
-Bancken (ledr.J.O.I.), ancien recteur du Lycée de Vasa. Vasa.
FRANCE
Acv (Ernest i>'). 40, Boulevard Malesherbes, Paris.
#Ar.GLAVE (Emile), professeur i la Faculté de Droit de Paris, an-
cien directeur de la Revue Scientifique. 91, rue du Point du
Jour, Paris.
Ameghino (Florentino). (36, rue Lebrun, Paris-
Arcelin (Adrien), secrétaire perpétuel de l'Académie de HScon.
Mâcon (Saône-et-Loire).
Bataillard (Paul), archiviste à la Faculté de Médecine de Paris.
6, rue Cassini, Paris.
«Baye (le baron Joseph de). Château de Baye, Baye (Marne}.
«Baye (m™ la baronne de). Château de Baye, Haye (Marne).
«Bëausacq (m"' la comtesse de). 35, rue d'Amsterdam, Paris.
Beauvois (Eugène). Corberon {Côte-d'O'').
«Berthot (M.). Paris.
RoNZOM (C), pharmacien. Monein (Basses- Pyrénées).
«Bordé (l'arbé). Château de Baye, Baye (Marne).
Boucher (Henri du), président de la Société de Borda. Dax
(Landes).
Boutelli.er (de), ancien député. 8, rue des Saints-Péres, Paris.
• Cartailhac (Emile), directeur de la revue: Matériaux pour
l'histoire primitive de l'homme. 5, rue de la Chaîne, Toulouse
(Hauie-Garonne).
,ïGoo'
.glej%
I. «Cazaus dk Fondouce (P.), secrétaire général de l'Académie des
Sciences et Lettres de Montpellier. i8, rue des Ëtuves,
Monipellier {Hérault).
• Chantre (Ernest), sous-directeur du Muséum d'Histoire Natu-
relle de Lyon. 37, Cours Morand, Lyon (Rhône).
Chasteicner (le comte Alexis), ancien officier des Haras. 3, rue
Duplessis, Bordeaux (Gironde).
Chatellier (Paul du). Château de Kemuz, Pont-VAbbé (Finis-
terre).
Chautet (M.), notaire à Ruffec {Charente).
Claudon (Édouaiid). Jardin des Plantes, Paris.
• Cotteau (Edmond), membre de la Société de Géographie de Pa-
ris. 4, rue Sédaine, Paris.
• Cotteau (Gustave), ancien président de la Société Géologique
de France. Auxerre (Yonne).
Croizibr (le marquis de), président de la Société Académique
Indo- Chinoise. Parts.
Dai-eau (François), membre de la Société d'Anthropologie de
Paris. Bourg-sur-Gironde (Gironde).
Davy de Cussé (L.), conservateur du Musée Archéologique.
Vannes {Morbihan).
DucRosT (A), curé à Solutri (Saône-et-Loire).
«EsCHENAUER (Auguste), administrateur du Bureau de Bienfai-
sance. 149, Boulevard Saint-Germain, Paris.
• Espous (le comte d'). Bois-Bonnard par Ville-Perdue (Indre-et-
Loire).
Falsan (Albert), géologue. Collonges-sur- Saône près Lyon
(Rhône).
Faucheux (Jules), percepteur. 12, rue Brocherie, Grenoble
(Isère).
Février (le oÉNiRAL). 34, Quai de la Charité, Lyon (Rhône).
Fière (Paul), archéologue. Voiron (Isère).
FoNTENiLLE (Paul de), membre inspecteur de la Société Fran-
çaise d'Archéologie. Cahors (Lot).
Garhigou (le DR. F.). 38, rue Valade, Toulouse (Haute -Garonne).
Gassies (H), directeur du Musée Préhistorique de Bordeaux.
Bordeaux.
,ï Google
l. Gaudrv (Albert), professeur de palëontotogie au Muséum. 7 bis,
rue des Saints-Pères, Paris.
* GuRD (Alfred), professeur à la Faculté de Sciences et à la
Faculté de Médecine de Lille. 3j, rue Colbert, Lille {Nord).
# GmoD, contrôleur principal. 3o bis, Boulevard Contrescarpe,
Paris.
GouRDON (Maurice), membre de la Société Géologique de
France. Villa Maurice à Luchon {Haute-Garonne).
*Gu[MET (Emile), r, Place de la Miséricorde, Lyon (Rhône).
Hamy (T, E.), aide-naturaliste d'anthropologie au Muséum. 129,
Boulevard Saint-Michel, Paris.
Jacquinot (le DR.). Sawigny-les-Bois {Nièvre).
# JoHANNOT (Henri). Anrtonay {Ardèche).
JoRDELL (le DR.). 112, rue Je Rivoli, Paris.
JouRNÉ (Ca-mille). 5, Mail des Taujtelles, Troyes. {Aube).
Lair (le comte Charles de). 18, rue Las-Casas, Paris.
Lamm (P. A.). 12, rue Sainl-Roch, Paris.
Laktet (Louis), professeur à la Faculté des Sciences de Tou-
louse. 14, rue du Poni de Tounis, Toulouse (Haule-Garon-
ne).
* Lauriëre {Jules de), secrétaire général de la Société Française
d'Archéologie. i5, Rue des Saints-Pères, Paris.
Leguay (Louis), trésorier de la Société d'Anthropologie. 3, rue
de la Sainte-Chapelle, Paris.
Lemaire (le prof,). 8, rue des Saints-Pères, Paris.
Lemiëre (P. L.), membre de la Société d'Émulation des Côtes-
du-Nord. Saint-Brieuc {Côles-du-Nord).
Lortet(i.e DR. L.), directeur du Muséum d'Histoire Naturelle
de Lyon, i, quai de la Guillotière, Lyon {Rhône).
Lucas (Charles), architecte de la Ville de Paris. 8, Boulevard
De nain, Paris.
#Macitot {le DR. Emile), secrétaire général adjoint de la Société
d'Anthropologie. 8, rue des Saints-Pères, Paris.
Maret (Arthur de), membre de la Société Française d'Archéo-
logie. Château du Menieux, Montambœuf {Charente).
Marsy (le comte de), conservateur du Musée Vivenel. Compiè-
gne {Oise).
.,Ci
^V.
, «Martin (Henri), sénateur, membre de l'Institut. 38, rue Vital,
Passy, Paris.
MicouLs (V.), membre de la Société d'Émulation des Côtes-du-
Nord. Saint-Brieuc {Câte-du-Nord).
MiLLEscAMPS (Gustave), membre de la Société d'Anthropologie
de Paris. 19, Boulevard Malcsherbes, Paris.
MoREL, archéologue, receveur des finances. Nyons (Drôme).
»MoRiN (Adolphe). Dieulefit (Drôme).
MoRiN (Henri). Dieulefit (Drame).
*MoRTiLLET (Gabbiei, de), professcuf a l'École d'Anthropologie,
attaché au Musée des Antiquités Nationales. Saint-Germain-
en-Laye (Seine-et-Oise).
Nadaillac (le marquis de), iî, rue d'Anjou-Saint -Honoré, Pa-
ris.
NiLSSON (Knut), libraire- éditeur. 212, rue de Rivoli, Paris.
*NoDET (Henri), membre de la Société Française d'Archéolofiie.
20, quai do la Mégisserie, Paris.
Ou-iER (le DR.), professeur à la Faculté de Médecine a Lyon.
5, quai de la Charité, Lj^n (Rhône).
Oluer de Marichard (J.), archéologue. Vallon (Ardèche).
• Oppert (J.), professeur au Collège. de France. Paris.
• Offert (m""»). Paris.
Palustre (Léon), directeur de la Société Française d'Archéolo-
gie. Rue de la Tranchée, Tours (Indre-et-Loire).
Pabdo de Tavera (T. H.). 43, rue de Maubeuge, Paris.
Perrin (André), éditeur. Chambéry (Savoie).
Perrot (E.). 7, rue du Lycée, Laval (Mayenne).
«Ploix (Charles), ingénieur en chef de la marine, président de
la Société d'Anthropologie de Paris. 23, rue de l'Université,
Paris.
PoMHEROL (B.), avocat, rédacteur de la revue : Matériaux pour
l'histoire primitive de l'homme. 36, rue des Écoles, Paris ou
Veyre-Mouiou (Puy-de-Dôme).
*PoucHET (le DR. G.), professeur au Muséum. 5, rue de Médicis,
Paris.
• QuATREFAGEs DE Bréau (A. de), mcmbrc de l'Institut, professeur
au Muséum. Jardin des Plantes, Paris.
Dipit.zPdhïGopglc
MM. • QuATREFAGEs DE Bréau {I.éonce be), îngéiiieur. Jardin des Plan-
tes, Paris.
Rav (Jules), conservateur du Musée d'Histoire Naturelle de
Troyes. Troyes (Aube).
Rétif (pRÉutHii.), directeur des contributions directes. Besançon
{Doubs}.
RcviËRE (Emile), rédacteur de la Galette des Hôpitaux, membre
de la Société d'Anthropologie de Paris. iSg, rue de Sèvres,
Paris.
«RoKiNEAU (Cyrille). ï5, rue de Marignan, Paris.
• RoWNEAtJ (Théophile). 78, rue Lafayetie, Paris.
• Roman (E.). Dieulefil (Drùtnei-
Sabatier (Armand), professeur à la Faculté des Sciences de
Montpellier, Montpellier {Hérault).
SAlNT-^LDEPHONT(LEBARo^ de). 1 o, rue des Marans,A/ifcon (Siïi5«e-
ei- Loire).
Saint- Ildephont (m™ la baronne de). 10, rue des Marans, Md-
con (Saône-et- Loire).
Seidler (Charles), négociant. i3, rue Dobrée, JVatH/ej {io("re-/n-
férieure).
• SiPiËRE(CLÉMEKT),présidentdela Société Académique Hispano-
Portugaise de Toulouse. 45, rue des Tourneurs, Toulouse.
«SiPzÈRE (Henri). 4S, rue des Tourneurs, Toulouse.
SoaÉTÉ Archéologique du Midi de la France. Toulouse.
SociÉTÉ b'tIuuLATioN des Côtes-du-Nord. S. Brieuc (Côtes-du-
Nord).
Société d'histoire naturelle de Toulouse. Toulouse.
Stirrup (Mark). Toulouse.
Taillebois (E.), archiviste de la Société de Borda. Dax (Landes).
TouRNiER (Benjamin). Toulouse.
TouRNouËR (Raoul), ancien président de la Société Géologique
de France. 43, rue de Lille, Paris.
Travers (Emile). Caen (Calvados).
Valentin (Florian), substitut du Procureur de la République.
Monlélimar (Drame).
VoGÎJÉ (le comte Melchior de), membre de Tlnstitut. 1, rue
Fabert, Paris.
,ï Google
GRANDE BRUTAONE ET IRLAUSE
[. Académie Royale d'Irlande. Dublin.
Allen (J, Romillï). Edimbourg.
Anderson (J.), conservateur du Musée d'Antiquités. Edimbourg.
Athen^um Club. Pall Mail, Londres.
Atkinson, (C. m.). aS, St. Oswald's Road, West Bromplon.
Beck (le révérend j.). Btldeslon Rectory, tpswich.
BiBLiOTHÈQtjE du «British Muséum». Londres.
BiBLioTHÈcjuE et Musée publiques de la ville de Liverpool.
Bibliothèque de l'Université de Cambridge.
BoULASE (W. C), M. P., F. S. A. University Club, Londres.
Brabrook (E. W.), F. S. A. 28, Abingdon Street, Londres.
Brent (John), F. S. A. Canlerbury.
BuRTON (F. W,), F. S. A., directeur de la Galerie Nationale.
Londres.
BusK (George), F. R. S. Si, Harley Street, Londres.
Carprae (R.). Edimbourg.
Carnarvon (le comte de), président de la Société des Antiquai-
res de Londres. Burlington House, Londres.
Clarke (Hvde). 3a, St. Geor^e's Square, Londres.
Cochran-Patrick (R. W.), M. P., F, S. A. House of Gommons,
Londres.
Collection Christï. io3, Victoria Street, Londres.
Collège de l'Université. Gower Street, Londres.
CooK (Francis), vicomte de Monserrate. Richmond, Surrey.
CooTE (H. C), F. S- A. i3, Westgate Terrace, Redcliffe Square,
Londres.
Darbishire (R. D), F. S. A. Victoria Park, Manchester.
Dawkins (le prok. w. Boyd), F. R. S. Owens Collège, Man-
chester.
Day (Robert), F. S. A. Rochview, Montenotte, Cork, Irlande.
Eu.iOT (sir Walter), K. C. S. I. Woljlee, Howîch, Ecosse.
#EvANs (John), D. C. L., LL. D., F. R. S. Nash Mills, Hemel,
Hempsted.
^
„Google
MM. *EvANs (Min>). Hempsted.
• EvAHS {m«ii«). Hempsfed.
Fergusson (Jaues), F. R. S. ao, Langham Place, Londres.
FiTCH (Robirt), F. S. A. Nonvich.
Franks (A. W.), F. R. S. BriiUb Muséum, Londres.
Freshfield (Edwin), F. S. A. 5, Bank Buildings, Londres.
GouDiE (Gilbert). 3g, Northumberland Street, Edimbourg.
Greenwell (le chanoine W.), F. R. S. Durham.
Grote (AnTHUR). Athenxum Club, Londres.
Hailstone (Edward), F. S. A. Wallon Hall, Wakefield.
• Harrison (Charles), F. S. A. to, Lancasier Gâte, Londres.
HooKER (sir J. D.), F. R. S. Royal Gardens, Kew.
HoVoRTH (H. H.), F. S. A. Ecdes, Manchester.
«HuBBARD (Meii* Frances). Londres.
Hughes (le prof. T. W K.), F. S. A. Trinily Collège, Cambridge.
Institut Anthropologique de la Grande-Bretagne et d'Irlande.
4, St. Martins Place, Trafalgar Square, Londres.
Jones (le prof. T. Rupert), F. R. S. Powis Villa, Camberley.
Lee (E. J.), F. S. A. Villa Syraatsa, Torquay.
Long (Wiluam), F. S. A. Weslhay, Wringlon, Somerset.
Lu&BOCK (sir John), Bart. M. P., F. R. S., ancien président du
Congrès de Norwich. fligh Elms, Famborough, Kent.
LuKis (le révérend w. C). Wath, Ripon.
Mackenzie (J. Whiteford). t6, Royal Circus, Edimbourg.
Major, (R. H.), F. S. A. 5i, Holland Road, Kensington, Londres.
Maskelyne (le prof. N. S.), M. P., F. R. S. Salthrop, Wraughton,
Swindon.
Milman (H. s.), directeur de la Société des Antiquaires de Lon-
dres. Lcmdres.
MiTCHELU (Arthur), M. D., secrétaire de la Société des Antiquai-
res d'Ecosse. Edimbourg.
Morgan (Octavius), F. S. A. The Friars, Nemporl, Monmouth-
stùre.
MosELEY (le prof. h. N.), F. R. S. Oxford.
Musée de Géolo^e Pratique. Jermyn Street, Londres.
Newton (C. T.), C. B., F. S. A. British Muséum, Londres.
,ï Google
NiGHTiNGALE (J. E.), F. S. A. The Mmttt, WiUon, Wilts.
NoRTHËSK (le comte de), F. s. A. St. George's Square, Londres.
OuvRï (Fkédéric), F. S. A. la, Queen Anne Sireet, Londres.
OwEN (le prof. Richard), F. R. S. British Muséum, Londres.
Pekceval (C. s.), F. S. A. C4, Kccleston Square, Londres.
Prestwich (le pRor. J.), F. R. S. Ox/ord.
Pbicë (F. G. H.), F. S. A, 29, Weymouth Street, Londres.
Price (J. E.), F. S. A. 60, Albion Road, Sloke, Newinglon.
Read (C. h.), F. S. A. io3, Victoria Street, Londres.
Reeves {F. W.). Londres.
RivERs (le général a. Pitt), F. R. S. 4, Grosvenor Gardens,
Londres.
RoBiNSON (J. C), F. S. A. 10, Vork Place, Portman Square, Lon-
dres.
RoBiNsoN{T.W.U.),F.S.A.HatfieldHouse,iîoM^A/on-/?-Spm=',
Durham.
RoLLESTON {le prop. George), F. R. S. Oxford.
RoTTON (J. F.), 3, Boitons, Brompion, Londres.
RuDLER (F. W.), Royal School of Mines. aS, Jermyn Street, Lon-
dres.
Russell{lobd Arthur),M. P. 10, South Audley Streei, Londres.
Simpson (le révérend W. Sparrow), D. D., F. S. A. 1 19, Kensiog-
ton Park Road, Lambcth, Londres
Smith {J. A.), M. D., secrétaire de la Société des Antiquaires
d'Ecosse. Edimbourg.
Smith (R. H. Soden), F. S. A., conservateur au Musée de South
Kensington. Londres.
Société des Antiquaires d'Ecosse. Edimbourg.
Société des Antiquaires de Londres. Burlington House, Lon-
dres.
Société Royale. Burlington House, Londres.
Spottiswoode (William), président de la Société Royale. 5o,
Grosvenor Place, Londres.
Sphatt (le contre-amiral), c. B., F. R. S. Tunbridge Wells.
Spurrell (F. C, J.). Belvédère, Frith, KeiU.
Stanley (l'honorable W. O.), F. S. A. Penrhos, Holyhead.
Taliiot de Malahide (lord), Athena;um Club, Londres.
r\
„Google
The Art Librakv. Musée de South KunsingTon, Londres.
TiMMiNS (S.)- Elvctham Lodge, Birmingham.
TvLOR (E. B.), F. R. S. Linden, Wellington, Somerset.
» Ward Beauclerk. Bryanston Square, Londres.
Watson, (C. K.), secrétaire Je la Société des Antiquairt
Londres. Burlington House, Londres.
WiLLETT (Henry). Arnold House, Bnghlon.
WvLiE (W. M.), F. S. A. Headington Villa, Ox/ord.
GRÈCE
Zaviziano (le prof. Constantin). Cor/ou.
HONGRIE
Ljuhic (l'abbé Siméon), directeur du Musée National. Zagrab.
PuLszKv (François de), inspecteur général des Musées et des
Bibliothèques de Hongrie, directeur du Musée National, an-
cien président du Congrus de Budapesth. Budapesth.
• RoMER (le DR. F, F.), abbé mitre, couseiller royal, professeur à
l'Université Royale, conservateur de la Section Archéologique
au Musée National. Budapesth.
ITALIE
Angelucci (le major Ancëlo), directeur du Musée d'Artillerie.
ARorri (le chev. Jacques). Presicce, Terra d'Oiranto.
«Bellucci (le DR. Giuseppe), professeur à l'Université de Pérouse.
Pérouse.
BoTTi (le chev. Ulderigo). Lecce, Terra d'Oiranto.
#Bbunialti (Attilio), Pérouse.
«Capeluni (Giovanni), professeur de géoI<^ie à l'Université
Royale de Bologne. Bologne.
.,Ci
r
1. Castelfranco {le prof. Pompeo). Milan.
Chieriq {l'abbé g.), directeur du Musée de Re^o. Emilie.
CoRNAUA {le pro?. Éimjo), directeur du Musée de Milan. Mi-
lan.
Deo Gratias (l'abbé Perrando). Stella Santa Giustina, Ligurie.
Fabretti (le prof. Ariodante), conservateur du Musée d'Ar-
chéologie à l'Université de Turin. Turin.
FiDLER (Basile), Florence.
FoRESTi {le DR. LuiGi),aide au Musée de Géolo^e. Bologne.
GiAœMETTi (le DR. ViNCENzo), conservatcur du Musée Civique.
Manloue.
GozzADiHi {le comte g.), sénateur, ancien président du Congrès
de Bologne. Bologne.
* Incisa {le marquis Emmanuel Beccaria de). Rome.
• Krauss (le prof. Alexandre). Florence.
Marinoni (le chev. Camillo], professeur à l'institut Technique
d'Udine. Udine.
Narvegna (GitJSEPPE), pré^dent de ta Chambre du Commerce.
Brindisi.
*PiGORiNi (le DR. LuiGi), directeur des fouilles et du Musée Pré-
historique Je Rome. Rome.
Strobel (le prof. Pelleorino). Rome.
Tarantini (Arc. Giovanni), directeur des fouilles à Brindisi.
LUXEUBOUEIO
ScHOETTEH {le DR. J.), professcur à l'Athénée de Luxembourg.
iMxembourg.
HOBVËQE
Musée Archéologique de Christiania.
RvGH (le prof. O.). Christiania.
Undset {Ingvalc), gentilhomme de la Chambre, attaché au
Musée Archéologique. Christiania.
,ï Google
PAYS-BAS
MM. DiRKs (le DR. J.), président de la Société Frisonne d'Archéologie.
Leeutvarden.
GoDEFRoi (le DR. J.), secrétaire de la Société des Beaux-Arts
et des Sciences de Nord-Brabant. Bois-le-Duc.
Leemans (le DR. Conrad), directeur du Musée Royal Néerlandais
d'Anthropologie et du Musée Royal d'Ethnographie. I^yde.
Leemans (mœ» C. m.). Leyde.
Urechia (Al
Buckarest.
BOUUANIE
;), professeur â l'Université de Bucharest.
RUSSIE
*ANTOHoviTCH(VLADiMiK), professeurà l'Université deKiev. ^iev.
LiKHATCHEFi' (le PROF. Amdré), conservateur à l'Université de
Kasan. Kasan.
Merjkowsky (Constantin). S.-Pétersbourg.
MiERZYNSKi (le prof. A.), doyeu de l'Univer^té Impériale de Var-
sovie. Varsovie.
* Pawinski (le DR. Adolphe), professeur à l'Université Impériale de
Varsovie. Varsovie.
pRZEZDZiEtKi (le comte Contantin). Varsovie.
«Zawisza (le comte Jean). Varsovie.
SUÈDE
Académie Royale des Belles-Lettres, d'Histoire et des Antiqui-
tés de Sockkolm.
AHLqvisT (ledr. a. g.). Vexio.
.,Ct
r^-
BuiMBEUG (le dk. A. B.), attache au Muscc Royal d'Archéo-
logie. Stockholm.
Ekhoff (E.), attaché au Musée Royal d'Archéologie, Stockholm.
Hamilton (le comte H.), grand chancelier des Universités sué-
doises, ancien président du congrès de Stockholm. Stockholm.
HiLDEBKAND (le dk. 6. E.), ancien secrétaire du Musée Royal
d'Archéologie, ancien antiquaire du Royaume. Stockholm.
• Hi[j>EBRAND (le DK. Hans), Secrétaire du Musée Royal d'Ar-
chéologie, antiquaire du Royaume. Stockholm:
Kbamer (le prof. J. h.), Stockholm.
Klingspor (C. a.). Upsal.
LuNDBERo (i^ DR. R, N. K.). Vexi'o.
MoNTEuus (lc DR, Oscar), premier conservateur du Musée Royal
d'Archéologie, Stockholm.
OuvECKONA (K.), conseiller à la Cour Suprême du Royaume.
Stockholm.
Reventlov (le comte C, T>.). Harfva.
• Roos (Gustaf). Sockholm.
Stolpe (le DR. Hulmak), second conservateur du Musée Royal
d'Archéologie. Stockholm.
ToKiN (K.). Skara.
WiDERG (le Di). Ch.4hlj!s F.), professcur au Lycée de Gctle. Gefle.
WiTTLocK (le DR. J. A.), médecin, Vexio.
SUISSE
»Choff.*t (Paul), professeur à l'Université de Zurich. Zurich.
• Choffat (Mlle). Zurich.
Gkos (le dk. V.). Neuveville.
Heek (le DR. OswAi.n), professeur a l'Université et nu Polytechni-
eu m de Zurich. Zurich.
MoKEL Fatio (A.), directeur du Musée Archéologique de Lau-
sanne. Lausanne.
,ï Google
PORTUGAL
MM. Aguiah (Antonio Aogusto de), conseiller honoraire, membre
l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne, professeï
l'École Polytechnique. Lisbonne.
Alemquer (le vicomte de), trésorier de la Société Royale
architectes et archéologues portugais. Lisbonne.
Allen (Eduardo Augusto), correspondant de l'Académie Ro;
des Sciences de Lisbonne, directeur du Musée Municipal
Pono. Porto.
Alueida(Franciso José de), membre de la Société Royale
architectes et archéologues portugais. Lisbonne.
Almeida Carvalho (Joâo Carlos de). Lisbonne.
Andrade Corvo (Joâo de), conseiller d'état, ministre honors
membre de l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne
recteur de l'École Polytechnique. Lisbonne.
Arbués Moreira (Carlos Ernesto de), conseiller honoraire,
■ néral de brigade, directeur général des travaux géodésiq
topographiques, hydrographiques et géologiques du Royau
Lisbonne.
AzEVEDo (Fernando de), correspondant de l'Académie Ro;
des Sciences de Lisbonne. Lisbonne.
Barbosa (le DR. Antonio Maria), conseiller honoraire, merr
de l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne, profesi
a l'École de Médecine. Lisbonne.
ly Google
Bakhosa nu Bocage(ledr. José Vicente), membre de l'Académii'
Royale des Sciences de Lisbonne, professeur à l'École Poly-
technique, président de la Société de Géographie de Lis-
bonne. Lisbonne.
Benalcanfoh (le vicomte i)ë), membre de l'Académie Royak-
dcs Sciences de Lisbonne. Lisbonne.
Berkeley Cotter (Jorgë Candido), adjoint de la Section deï
travaux géologiques. Lisbonne.
Bernaroes Bkanco (Manuel), associé provinciel de l'Académie
Royale des Sciences de Lisbonne. Lisbonne.
Bettencourt Raposo (Pedro Antonio), professeur ù l'École de
Médecine de Lisbonne. Lisbonne.
Bocage (Carlos Roma du), capitaine du génie, correspondam
de l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne. Lisbonne.
BuRNAV (Eduamdo), médecin. Lisbonne.
Carvalho (le DR. Thomaz de), membre de l'Académie Royale
des Sciences de Lisbonne, directeur de rE:x:ole de Médecine.
Lisbonne.
Carvalho (Tito Aucusto de), chef de bureau au Ministère de
la marine. Lisbonne.
CoELiio (Eduabdo), rédacteur en chef et co-propriétaire du jour-
nal "Diario de Noiicias». Lisbonne.
CoELHo (!•'. Adot.pho), professeur A l'École Supérieure des Let-
tres. Lisbonne.
CoNtEiçÂo (Alexandre da), ingénieur civil. Figueira.da Foj.
CoNsiGUERi Pedroso (Zofiho), professeur à l'École Supérieure
des Lettres. Lisbonne.
CoRDBiRO (LucLANo), secrétaire de la Société de Géographie de
Lisbonne. Lisbonne.
CoHREiA Barata (le DR. FRANCISCO AuGusTo), profcsscor à la
Faculté de Philosophie de l'Université de Coïmbre. Cam-
bre.
Costa Basto (Joâo Pedro d a), correspondant de l'Académie
Royale des Sciences de Lisbonne. Lisbonne.
CuMANo (JusTiNo), médecin. Faro.
CuNHA Seihas (Antonio da). Lisbonne.
CuNHA Skixas (José Maria da), avocat, Lisbonne.
ly Google
Daveau (Jules), conservateur du jardin botanique de l'École Po-
lytechnique de Lisbonne. Lisbonne.
Delgado (Joaquim Philippe Nery), major du génie, adjoint de
la Section des travaux géologiques, correspondant de l'Aca-
démie Royale des Sciences de Lisbonne. Lionne.
Ennes (Antonio), licencié -ès-leitre s. Lisbonne.
EspREGUEiRA (Manuel Affonso de), directeur de la Compagnie
Royale des chemins de fer portugais. Lisbonne.
EsTACio DA VciGA (Sebastjâo Philippes Martins), correspondant
de l'Académie Royale des Sciences de Lbbonne. Lisbonne.
Feuô (Joâo Maria), conseiller honoraire, vice-président de la
Société Royale des architectes et archéologues portugais. Lis-
Ferreira de LouREiRo (AooLPHo), major de l'état-major. Co'im-
Ferrewa Pinto (IsinoRo). Selubal.
FicALHo (le comte de), membre de l'Académie Royale des Scien-
ces de Lisbonne, professeur â l'École Polytechnique. Lisbonne.
Figanière (Jorge César de), correspondant de l'Académie Roya-
le des Sciences de Lisbonne, sous-directeur du Ministiïre des
Affaires Étrangères. Lisbonne.
FoNSECA GouvEiA (Abiuo Guedes da). Lisbonne.
Gaspar Gomes (le DR. Joaquim Eleutherio), correspondant de
l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne, professeur à
l'Institut généra] d'agriculture. Lisbonne.
Geraldes (le DR. Albino), professeur à la Faculté de Philoso-
phie de l'Université de Coïmbre. Ofimbre.
Girard (Alberto). Lisbonne.
Gomes (Joaquim da Conceiçâo), membre de la Société Royale
des architectes et archéologues portugais. Lisbonne.
Gonçalves Vianna (Amceto dos Reis), chef de Section à la Di-
rection Générale des Douanes. Lisbonne.
Henriques (le DR. Juuo Aucusto), professeur à la Faculté de
Philosophie de l'Université de Coïmbre. Cdxmbre.
HiRSCH (le DR. loNAcio DE Almeida), médecin. Lisbonne.
LABOtJLAYE (Paul de), ministre plénipotentiaire de France à Lis-
bonne. Lisbonne.
..GoiilT"*^
I-OPEs (JoÂo CaklosI, professeur à l'École de Médecine de Porto.
Porlo.
Malheiro (l^URENço), ingénieur des mines. Lisbonne.
Martins Sarmento (Francisco), correspondant de l'Académie
Royale desSciences de Lisbonne, bachelier en dvon.Guimarâes-
Mattos {Antonio Joaquim de), officier de bureau à la Douane.
Lisbonne.
Mendonça Cortez (le DR. JoÂo José), professeur â la Faculté
de Droit de l'Université de Coïtnbre. Coimbre.
Mesnier (Pedro Gastâo). Lisbonne.
MoNCOKVo (E. DE Athaide). Lisbonne.
MuNRo (Carlos A.), trésorier de la Société Royale des archi-
tectes et archéologues portugais. Lisbonne.
Nevës Cabral (José Augusto Cesah das), correspondant de
l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne, ingénieur des
mines. Lisbonne.
Olivf.iba FeuÂo (Francisco Augusto de), professeur à l'École
de Médicine de Lisbonne. Lisbonne.
Oliveira Martins (J. p.). Povoa de Varpm.
Palmeiriu (Augusto Xavier), conseiller honoraire, général de di-.
vision. Lisbonne.
Paula e OuvEiRA (Francisco de), lieutenant d'artillerie. Lisbonne.
pEQurro (Rodrigo Affonso), professeur â l'Institut Industriel et
Commercial de Lisbonne, secrétaire de la Société de Géogra-
phie de Lisbonne. Lisbonne.
Pessoa (Olïmpio Juuo), médecin. Lisbonne.
PossmoNio DA SiLVA (Joaquim), architecte de S. M. le Roi, pré-
sident de la Société Royale des architectes et archéologues
portugais. Campotide de Baixo près Lisbonne.
Rakalho OkticÂo (José Duarte), chef du bureau de l'Académie
Royale des Sciences de Lisbonne. Lisbonne.
RiBEiRo (Carlos), colonel d'artillerie, membre de l'Académie
Royale des Sciences de Lisbonne, chef de la Section des tra-
vaux géologiques. Lisbonne.
RooRiQUEs (José Juuo), correspondant de l'Académie Royale
des Sciences de Lisbonne, professeur à l'École Polytechnique.
Lisbonne.
ly Google
RoDRiGUEs Ferreira (Sihâo). Peiofiel.
Roquette (Francisco Ferreiha), ingénieur des mines, professeur
â l'Institut Industriel et Commercial de Lisbonne. Lisbonne-
Saldanha d'Oliveira e Sousa (dom José de), secrétaire de la So-
ciété Royale des architectes et archéojogues portugais. Lis-
Salzbero (t.E BARON Emmanuel be), secrétaire de la légation
J 'Autriche-Hongrie a Lisbonne. Lisbonne.
Sanches de Baeha (l^ vicomte de), membre de la Société Royale
des architectes et archéologues portugais. Lisbonne.
ScHiAPPA d'Azevedo (Joâo Baptista), chef du bureau des mines,
professeur à l'Institut Industriel et Commercial de Lisbonae.
Lisbonne.
SiLVA (Carlos Bento da), conseiller d'état, ministre honoraire.
Lisbonne.
SiLVA Amado {le DR. Jos£ JoAQoiM da), correspondant de l'Aca-
démie Royale des Sciences de Lisbonne, professeur à l'École
de Médecine. Lisbonne.
SiLVESTRE Ribeiro (José), conseiller et ministre honoraire, mem-
bre de l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne. Lis-
bonne.
SiMÔES (le DR.AU0USTO Phiuppe), correspondant de l'Académie
Royale des Sciences de Lisbonne, professeur à la Faculté de
Médecine de l'Université de Coïmbre. Cdïmbre.
SouzA ViTERBO (Francisco Marques de), médecin. Lisbonne.
Teixeira de Aragâo (Aucusto Carlos), membre de l'Académie
Royale des Sciences de Lisbonne, professeur d'hygiène mili-
taire. Lisbonne.
Toledo (Joaquim Garcia de). Lisbonne.
TouRETTE (Aiwtj'HE). Seiubal.
Valle (Illidio Avres Pereira do), professeur à l'École de Mé-
decine de Porto. Porlo.
Vasconcellos (Frederico Augusto de), bachelier en philosophie,
ingénieur des mines, adjoint de la Section des travaux géolo-
giques. Lisbonne.
Vasconcellos (Joaquim de), archéologue, membre de la Société
d'Instruction Publique de Porto. Porlo.
Vasconcelxos Abreu (Guilhekme de), professeur â l'École Su-
périeure des Lettres. Lisbonne.
Vasconcellos Abreu (m"™ de). Lisbonne.
ViLHENA Barbosa (Ignacjo t>E), membre de Académie Royale des
Sciences de Lisbonne. Belem.
WiTTNicH (RicARDO Henriqxjë), adjoint lie la Section des travaux
géologiques. Lisbonne.
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et P. Strobel, anno 11, Parma i876.
Bulletino di paletnologia italiana, diretto da G. Chierici, L. Pigorini
et P. Strobel, anno m, Reggto dell'EmUia 1877.
Butlclino di paletnologia italiana, diretto da G. Chierici, L. Pigorini
et P. Strobel, anno iv, Reggio deirEmitia i878.
Bulletino di paletnologia italiana, diretto da G. Chierici, L. Pigorini
et P. Strobel, anno v, Reggio delVEmUta 1879.
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•'•'"^
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xr J=i Uoo^^xnaei ec îe» fwmrr
; ».%ic--iJi::c ?^;"t;--j— ■-■ — -^ S-ssay Je SMckbofaiiL,
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DigitizsdbyGOOgle
DONS ET FAVEURS
Sur la demande faite par le Bureau, les compagnies des chemins
de fer du Portugal et de l'Espagne ont bien voulu accorder aux mem-
bres du Congrès, se rendant à Lisbonne, une réduction de 5o pour cent
sur le prix des places.
Dans les chemins de fer de l'Etat le transit était gratis pour tous
les membres du Congrès.
Tous les membres du Congrès reçurent des invitations pour assis-
ter au spectacle du aS septembre dans Je théâtre Recreios Whitioyne,
le seul qui se trouvait ouvert à Lisbonne, pendant la saison.
La rédaction du Jornal de Noticias envoya â chacun des membres
du Congrès un exemplaire, fac-similé du frontispice et de trois lignes
de XaGa^eta de Lisboa,le premier journal imprimé en Portugal (1641),
accompagné d'une notice sur cette publication et sur les progrès de la
presse politique dans le pays. (Ces, exemplaires furent composés exprès
pour le Congrès Littéraire International, qui se réunit à Lisbonne à
celte occasion).
L'Académie Royale des Sciences de Lisbonne fit également dis-
tribuer à chacun des membres du Congrès des exemplaires de trois
de ses publications, savoir: la traduction du Discours de la couronne
de Démosthènes, précédée d'une longue étude sur la civilisation grec-
que, par le secrétaire général de l'Académie, M. Latino Coelho
Éloge de Camôes, id.; Table de bronje d'AIjustrel (romaine) par li
directeur du Musée de l'Algarve, M. Estacio da Veiga; Compte-rendt
de la séance publique de ) 'Académie Royale des Sciences de Lisbonne
le 9 juin 1880, à l'occasion de la célébration du tricentenaire de Ca
,ï Google
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septembre. Dîner à r«Hôtel Victor» (Cintra), le 28 septembre. Dîner à
Braga, le 3o septembre.
Le CoMfTÉ d'Orcanisation se chargea aussi du logement à Braga,
et des iransports des différents membres du Congrès, par les chemins
de fer aussi bien que dans les voitures ordinaires, pendant les quatre
excurMOOS qui faisaient partie du programme, Otia, Mugem, Cascaes
et Cintra, ei Citania de Briteiros.
ÉtabllBBoments pablios et privés
onrerts au membres du Congres pendant la Sessloii
Musée numismatique, bibliothèque royale, au Palais d'Ajuda.
Observatoire astronomique, Parc d'Ajuda.
Parc de Necessîdades, palais du Roi Dom Fernando.
Galerie de tableaux de M. le vicomte de Daupias.
École de Médecine et Hôpital Royal de S. losé.
Musées de zoologie, de minéralogie. Jardin botanique et Observatoire
météorologique de l'École Polytechnique.
Acadéoiie Royale des Beaux-Arts, Bibliothèque Nationale et Musée ar-
chéologique de l'Algarve (ancien couvent de Saint-François).
Musée archéolo^que de Carmo.
Musée colonial, près de l'Arsenal de la Marine.
Chapelle de Saint-Jean^aptiste dans l'Église de Saint-Roch.
Église du Sacré Cœur-de-Jésus (Estrela).
Ë^ise de Sainte- Marie de Bêle m.
Tour de Belem.
Arsenal Militaire.
Abattoir Municipal.
Aqueduc et réservoir d'Aguas Livres, etc.
,ï Google
Réoeptione aolensellsH, fâtsa et banquets
offerts aux memDrea du Oongrèa, pendant et après la Session
Par S. M. LE ROI DOM LUIZ, dîner au Palais d'Ajuda, le ï6 sep-
tembre.
Bal au Château Royal de Cascaes, le 18 septembre.
Par S. M. LE ROI DOM FERNANDO, réception au Palais de Neces-
sidades le 26; réception et lunch au Château de Pena (Cintra), le zS
septembre.
Par M. F. Martins Sarmento, réception et lunch dans la Citania
de Briteiros (Minho), le 1 octobre.
Réceptions par les dames à Cintra, le 28 septembre.
Par I 'Académie Royale des Sciences de Lisbonne, dîner le 29 sep-
tembre, dans le grand salon de l'Arsenal de la Marine.
Par la Société d'Instruction de Porto, dîner à T'Hôtel do Porto-,
séance extraordinaire dans le grand salon, feu d'artifice et concert
aux jardins du Palais de Cristal, le 1 octobre.
Par le maestro, M. Breton, directeur de la Société Union Artislîco-
Musical de Madrid, et au nom de la même Société, grand concert au
Colisée de Lisbonne, le 16 septembre.
Par le commandant du 8*"" régiment d'infanterie, concerts de la
bande martiale du régiment, pendant le dîner, et le soir au jardin de
Sant'Anna (Braga), le 3o septembre.
Par la Municipauté de la ville de Lisbonne, dîner dans le grand
salon de l'Arsenal de la Marine, le a? septembre.
Par la Municipauté de la ville de Porto, réception à la gare des
chemins de fer de CampanhS, le i octobre. Des appartements ont été
destinés aux membres du Congrès dans les hôtels "do Porto» et «Franc-
fon>. Des voitures furent aussi mises à leur disposition.
Par le Gouverneur Civil du district de Santarem et par les Muni-
cipaljtés de Santarem, Almeirim et Salvaterra de Magos, réceptions et
fêtes le 24 septembre.
Par le Comité d'Organisation. Déjeuners â Olia, le 21, à Mugem
le 24, a bord du transport de guerre VA/rica, devant Cascaes, le 28
^
D,„i,„db,Goo<^le
i
septembre. Dîner à i'^HÔtel Victor* (Cintra), le 28 septembre. Dîner à
Braga, le 3o septembre.
Le CoHrrË d'Organisation se chargea aussi du logement à Braga,
et des transports des diSercnts membres du Congrès, par les chemins
de fer aussi bien que dans les voitures ordinaires, pendant les quatre
excursions qui faisaient partie du programme, Otta, Mugem, Cascaes
et Cintra, et'Citaaia de Briteiros.
ÉtabllBsements publics et privés
ozLverta attx memDres du Oougrèa pendant la Session
Musée numismatique, bibliothèque royale, au Palais d'Ajuda.
Observatoire astronomique, Parc d'Ajuda.
Parc de Necessidades, palais du Roi Dom Fernando.
Galerie de tableaux de M. le vicomte de Daupias.
École de Médecine et Hâpiul Royal de S. José.
Musées de zoologie, de minéralogie. Jardin botanique et Observatoire
météorologique de l'École Polytechnique.
Académie Royale des Beaux-Arts, Bibliothèque Nationale el Musée ar-
chéologique de l'Algarye (ancien couvent de Saint-François).
Musée archéologique de Carmo.
Musée colonial, près de l'Arsenal de la Marine.
Chapelle de Saint-Jean-Baptiste dans l'Église de Saint-Roch.
Église du Sacré Cœur-de-Jésus (Estrela).
Église de Sainte-Marie de Belem.
Tour de Belem.
Arsenal Militaire.
Abattoir Municipal.
Aqueduc et réservoir d'Aguas Livres, etc.
,ï Google
„Google
ORDRES DU JOUR DES SEANCES
EXCURSIONS
DÉLIBÉRATIONS DU CONSEIL
„Goo'
„Google
ORDRES DU JOUR DES SÉANCES
EXCURSIONS
DÉLIBÉRATIONS DU CONSEIL
Dimanolie, 19 septembre
La réception des membres du Congrès eut lieu au Se-
crétariat (Section des Travaux Géologiques du Portugal),
dans l'édifice de l'Académie Royale des Sciences de Lis-
bonne.
SÉANCE D'OUVERTURE
Lundi, 20 septembre
Présidence de M, Andrade Corvo, président.
La séance est ouverte à une heure, en présence de
S. M. le Roi Dom Luiz, Protecteur de la g*"* session du
Congrès, et de S. M. le Roi Dom Fernando, Président
d'honneur.
La grande salle de la bibliothèque de l'Académie Royale
des Sciences de Lisbonne, richement décorée, est divbée en
deux parties. Dans la première, où se trouve le trône ré-
servé à Leurs Majestés, prennent place les ministres, de l'In-
térieur M. Braamcamp, des Finances M. Barros Gomes, des
4
Travaux Publics M. Saraîva de Carvalho, de la Justice
M. Adriano Machado, de la Marine M. le Vicomte de
S- Januario, de la Guerre M, J. Ghrysostomo d'Abreu e
Sousa. Cette enceinte est aussi réservée aux membres du
Corps diplomatique, à ceux de l'Académie, aux hauts fonc-
tionnaires, aux représentants de la presse, aux membres
du Congrès enfin. L'autre partie de la salle, ainsi que les
galeries spécialement réservées aux dames, sont occupées
par le public, qui les remplit entièrement.
Un orchestre joue d'abord l'hymne royal et l'hymne
national, puis quelques pièces de choix.
M. LE Président du Congrès, prononce le discours sui-
vant;
SIRE,
Sa Majesté i,e Roi Dom Fernando,
Mesdames et Messieurs.
Je dois à un acte de pure bienveillance, que je ne sau-
rais justifier, l'honneur d'ouvrir aujourd'hui les séances du
Congrès international d'Anthropologie et d'Archéologie pré-
historiques.
J'ai reçu avec la plus vive reconnaissance cette haute dis-
tinction, et je l'estime d'autant plus, qu'elle me permet d'in-
terpréter les sentiments de gratitude de mes compatriotes
envers les savants qui sont venus honorer Lisbonne de leur
présence, et poursuivre parmi nous leur lumineuses études
et leurs intéressantes discussions. J'espère que parmi les
monuments préhistoriques trouvés en Portugal, quelques-uns
pourront servir à éclaircir de difSciles et nombreuses ques-
tions soulevées, et résolues seulement en partie, par la nou-
velle science archéologique.
,ï Google
L'archéologie préhistorique, science née d'hier, a su par
ses immenses progrès, prendre place au premier rang par-
mi les sciences qui s'occupent de l'homme. Elle est ve-
nue remplir une immense lacune dans l'histoire de l'huma-
nité.
Autrefois on ne voyait au delà de l'histoire proprement
dite, de l'histoire basée sur les documents écrits, rien qui
pût mériter l'étude sérieuse de l'archéologie, et on ignorait
presque absolument les premières origines de l'espèce hu-
maine. Les traditions conservées par les anciennes civilisa-
tions, qui possédaient l'écriture, suffisaient aux recherches
de l'immense érudition de savants archéologues.
En se fixant sur les nombreux monuments qui, de tous
les côtés, sont venus enrichir les musées d'archéologie pré-
historique, en tâchant d'interpréter les énigmes qui se ca-
chaient sous leur modeste apparence et en cherchant à éta-
blir des rapports entre ces monuments et les terrains géo-
logiques où ils se trouvent enfouis, la science a su établir
les jalons de l'histoire de l'homme, dans ses relations avec
l'histoire des développements organiques à la surface de no-
tre planète. Cette étude devenait d'autant plus nécessaire
dans ce moment que de grands naturalistes, de savants phi-
losophes établissaient d'une manière incontestable la grande
loi de l'évolution des espèces.
Cette loi une fois établie, il est devenu de la plus haute
importance scientifique de savoir quand l'homme tel qu'il
est actuellement, avec ses caractères essentiels, a paru sur
la terre et a pris rang parmi les autres animaux. Une telle
découverte, quand elle pourra se dire affermie sur des ba-
ses incontestables, peut nous mener à la connaissance des
lob d'évolution organique et morale de l'espèce humaine
aux périodes primitives du monde. La cause essentielle de
,ï Google
llntérêt qui s'attache à la fixation de l'époque géologique à
laquelle se montrent tes premiers vestiges de Part humain,
les [H'euves premières de Pexistence de l'homme, est, à mon
avis, celle que je viens d'indiquer.
Pendant des siècles on a dépensé une érudition immense
pour dévoiler, au moyen des documents écrits qui nous ont
été légués par les anciennes civilisations, l'origine des peu-
ples et les vestiges de leur dispersion sur la terre; peut-
être on a réussi souvent par rapport aux peuples. L^origine de
l'homme et ses développements primitifs restaient cependant
dans une profonde obscurité.
L'archéologie préhistorique, en venant nous apprendre
que des documents précieux étaient enfouis dans les impé-
rissables archives de la terre, a élargi d'une manière inat-
tendue le champ des investigations scientifiques, et a démon-
tré la longue existence sur notre globe de l'homme, possé-
dant déjà des industries primitives et bien caractérisées. Le
cadre de l'histoire humaine s'est ainsi trouvé agrandi dans
l'immensité du temps. Les plus ancieimes civilisations, dont
nous possédions des monuments écrits et autres, nous rap-
portent à quelques milliers d'années avant notre ère; mais
ces civilisations sont le fruit d'une longue élaboration des
facultés et du travail de l'homme, élaboration pour laquelle
il a fallu des milliers de siècles.
De la même manière que les admirables découvertes
de la géologie ont déchiré le voile qui couvrait les phases
mystérieuses de l'histoire de la terre, ainsi que de l'appa-
rition et du développement de la vie; de la même manière
nous voyons maintenant les efforts persistants et énergiques
de l'archéologie préhistorique soulever, de jour en jour, le
voile qui nous a longtemps caché l'histoire vraie de l'hom-
me sur la terre.
^
„Google
7
Quel est l'âge géologique qu^on doit admettre comme
étant celui qui représente l'époque 4a plus reculée de l'ap-
paritioji de l'homme? Les documents nous font encore dé-
faut pour répondre à cette question dif&cile, la plus difB-
cile de toutes. A la session du Congrès en 1876, le regretté
professeur Paul Broca, que ta mort nous a enlevé au mo-
ment où il se préparait à venir prendre part aux travaux
du Congrès, disait:
•La découverte de l'homme quaternaire a été le plus
fgrand événement de l'anthropologie moderne. EUe a ou-
■vert tout à coup un champ immense à nos investigations,
«et nul ici n'en méconnaîtra l'importance, car c'est elle, on
■peut le dire, qui a të plus contribué à provoquer le grand
«mouvement d'idées, d'où est résulté la fondation de notre
«Congrès.
«La découverte de l'homme tertiaire serait un événe-
«ment plus grand encore, car la période qu'elle ajouterait
«à la vie de l'humanité a été incomparablement plus longue
«que celle que nous lui connaissons déjà. •
Et après, le docteur Broca ajoutait:
«Aujourd'hui (M. Capellinivenaitdefaire une intéressante
«communication sur l'homme pliocène en Toscane) pour la pre-
•mière fois je sens mes doutes se dissiper. Je me déclarerais
«même entièrement convaincu, si je ne m'en rapportab qu'à
«mon propre jugement: mais je dois tenir compte aussi du
(jugement de mes collègues, et jt dois craindre de me trom-
«per Je ne me dissimule pas qu'une question
«aussi grave que celle de l'homme tertiaire exige beaucoup
(de prudence; un seul fait, une série de faits ne suffit peut-
«être pas pour la résoudre définitivement, mais je dois re-
«connaître que jamais cette question n'a été aussi près de
•sa solution.»
,ï Google
8
Quelques années ont suffit pour donner à ce fait sur-
prenant une plausibiliié, qu'il était loin d'avoir à l'époque
des célèbres découvertes de M. l'abbé Bourgeois. .
Notre esprit recule comme effrayé en face de l'immen-
sité du temps où se sont formés ces terrains tertiaires dans
lesquels on trouve, selon plusieurs savants, des traces cer-
taines de l'existence de rhomme. Cependant il est temps
qu'une pareille et si intéressante question trouve une solu-
tion définitive; et peut-être Phonorable et savant Congrès
pourra y arriver en présence des faits que M. Carlos Ri-
beiro, notre estimable et laborieux secrétaire, a pu obser-
ver en Portugal.
Si l'homme a été le contemporain de l'époque où le
monde était en grande partie enveloppé d'une puissante
couche de glace, il est naturel de croire que les premiè-
res contrées qu'il a habitées ont été celles où l'âpreté du
climat était moindre. Dans pareil cas c'est, pour ce qui
se rapporte à l'Europe, dans la région méridionale, aux
bords de la Méditerranée et de l'Océan Atlantique qu'on
doit trouver les plus anciens vestiges de l'homme.
Peut-être nous est-il permis d'espérer que le savant
Congrès trouvera dans les faits auxquels je viens de faire
allusion les moyens d'éclaircir ce point controversé de l'his-
toire de l'homme primitif.
L'existence en Portugal de ces amas de coquilles, re-
jets de cuisine, comparabfes à ceux qui ont été si profon-
dément étudiés au nord de l'Europe, ne peut manquer d'at-
tirer l'attention du Congrès. La position qu'occupent ces
restes curieux de stations humaines,- leur composition ainsi
que rage qu'ils représentent, peuvent, si je ne me trompe
pas, nous renseigner sur les migrations des peuplades pré-
historiques et peut-être même, conjointement avec les obser-
ly Google
valions géologiques, nous donner une idée exacte de la géo-
graphie et d» climat aux temps où l'homme a laissé les pre-
mières traces de son industrie en Europe.
Permettez-moi encore, Messieurs, de faire appel à vo-
ire bienveillance, en vous priant de prêter votre attention à
des faits qui, à mon avis, méritent bien d'être pris en con-
sidération par la docte assemblée. Les faits dont je vous
parie sont ceux qui peuvent nous renseigner sur l'existence,
au sein des peuplades qui occupèrent PEurope aux âges pré-
historiques, de ï'ammi$me, mot adopté par un savant qui,
par ses recherches, a jeté une vive lumière sur la civilisa-
tion primitive.
L'assertion tqu'il existe de grossières peuplades, n'ayant
taucune relijpon, quoique possible en théorie, et peut-être
«vraie en fait, ne repose pas jusqu'à présent sur des preu-
■ves aussi palpables que nous aurions le droit de les de-
cmander, quand il s'agit dVne chose si extraordinaire*, af-
firme M. Edward Tylor, en accumulant des preuves de
son assertion, qui me semblent suffisantes à effacer les dou-
tes dans les esprits qui n'ont pas des opinions préconçues
à ce sujet.
Il y a dans les conditions fondamentales de l'humanité
une conscience, une lueur religieuse, une puissance virtuelle
— passez-moi le mot — qui fait d'incessants efforts pour pé-
nétrer au delà des sens. Voici la cause de l'animisme, qui
se manifeste, à des degrés différents, dans le sauvage et
dans l'homme civilisé.
Le sentiment religieux, dans sa plus large acception,
existait-il dans le monde préhistorique? A quel âge et sous
quelle forme s'esi-il montré primitivement? Quels sont les
monuments — tombeaux, amulettes ou autres— qui peuvent
mieux guider la science dans des recherches si difficiles et
,ï Google
si importantes? Voilà un sujet qui, j'ose le dire, mérite bien
d'occuper l'étude des savants.
L'homme se complète par l'action simultanée de tou-
tes ses facultés, primitives et essentielies. Nous devons né-
cessairement trouver des vestiges de l'existence de ces fa-
cultés dans les œuvres grossières de l'homme préhistorique.
Sans cela il ne serait, nous pouvons le dire, que l'ébauche
de l'homme — moins que le sauvage des temps historiques.
Parmi les monuments archéolo^ques, rencontrés en
Portugal, le Congrès trouvera, je l'espère, plus d'un, qui
sous ce rapport l'intéressera.
L'humanité est bien jeune. Messieurs; on peut dire
que presque partout elle se trouve encore dans son enfan-
ce; et cependant la nouvelle science est venue prouver
que l'homme existe sur la terre probablement depuis des
milliers de siècles. Cène idée, faite pour nous effrayer, se
trouve cependant d'accord avec les faits auxquels nous as-
sistons nous mêmes.
L'homme, nous le voyons bien, est encore loin d'être
arrivé partout à l'état de civilisation, telle que nous la com-
prenons et la voyons autour de nous. Plus de la moitié du
monde est encore plongée dans les ténèbres; et malgré les
merveilleux progrès faits, et par ta pensée et par le travail
humain, aux derniers siècles, on trouve, même au cœur de
la civilisation, des peuples écrasés par l'ignorance, sans avoir
la conscience ni de leurs droits ni de leurs devoirs, privés,
enfin, du sentiment moral, qui seul doit soutenir les pas du
véritable progrès.
La nouvelle science de l'archéologie est venue nous
prouver que le développement de l'homme s'est réalisé par-
tout et dans tous les temps, au moyen d'une lente évolu-
';ment il s'est trouvé, et il se trouve maintenant
,ï Google
encore^ inégalement arriéré dans son développement moral,
industriel et physique.
Le devoir des peuples qui ont devancé les autres dans
l'heureuse voie du progrès «st de venir en aide, de leurs lu-
mières et de leurs efforts, à ceux qui se trouvent arrêtés
aux premiers échelons de Timmense évolution qui est le glo-
rieux partage de l'humanité.
Tous les hommes sont frères, tous sont égaux devant
les grandes lois de la nature. Malheureusement de profonds
abîmes s'ouvrent encore entre ceux qui ont eu le bonheur
d'être les héritiers et les continuateurs des anciennes civili-
sations, et ceux qui sont privés de ce précieux héritage.
Notre devoir à nous est de travailler incessament à éle-
ver le niveau moral et intellectuel de tous les peuples.
Vous êtes là, Messieurs, pour aider à cette grande œu-
vre par vos lumières et votre expérience. Au nom du Por-
tugal je vous souhaite la bienvenue, et je vous remercie
encore une fois d'avoir choisi notre pays pour célébrer cette
année votre neuvième session.
Mesdames et Messieurs. En daignant accepter le titre
de Protecteurs du Congrès, et en honorant notre séance de
leur auguste présence, S. M. le Roi Dom Luiz et S. M. le
Roi Dom Fernando nous montrent d'une manière éclatante
l'intérêt qu'ils prennent aux travaux de cette assemblée. Per-
mettez-moi, Messieurs, d'avoir l'honneur de remercier res-
pectueusement, au nom du Congrès d' Anthropologie, Leurs
Majestés des preuves de gracieuse bienveillance qu'elles
ont daigné nous accorder. (Applaudissements)-
Le Secrétaire, M. Carlos' Ribeiro, prend ensuite la pa-
role.
,ïGoogl
r
SIRE,
Sa Majesté le Roi Dom Fernando,
Mesdames et Messieurs.
Dans la session du Congrès International des Sciences
Anthropologiques qui eut lieu à Paris en 1878, ta ville de
Lisbonne fut désignée pour que la session actuelle du Con-
grès y fût célébrée. Notre capitale a eu ainsi la bonne for-
tune et l'honneur de pouvoir offrir rhospitalité aux émïnents
savants, qui viennent nous honorer de leur visite et éclairer
les discussions par leurs lumières.
C'est la première fois, Messieurs, que l'on enregistre
dans tes annales de notre patrie un si heureux événement,
la réunion dans nos murs de tant de savants des principa-
les nations de l'Europe, pour discuter des questions scien-
tifiques qui nous intéressent particulièrement. En effet, à la
solution des problèmes préhistoriques qui vont être exa-
minés est liée la connaissance des générations qui nous ont
précédés, et qui ont habité ce coin de l'Europe depuis les
temps géologiques jusqu'à ceux auxquels l'histoire propre-
ment dite rapporte l'existence de notre espèce. Le Portugal
ne peut que se féliciter et s'avouer hautement reconnaissant
d'une distinction aussi flatteuse, et moi, Messieurs, je m'es-
time très heureux de pouvoir être auprès d'hôtes si illustres
l'interprète de ce sentiment national.
Toutefois, avant d'exposer en peu de mots les sujets
principaux sur lesquels nous croyons devoir appeler l'at-
tention de l'honorable assemblée, qu'il me soit permis. Mes-
sieurs, d'exprimer que le plaisir de nous voir réunis pour
commencer nos travaux, n'est pas complet. Vous tous, Mes-
sieurs, vous devez sentir avec un profond regret le vide
que laisse un de nos plus illustres collègues, un de nos plus
vigoureux travailleurs qui luttait pour le progrès des scien-
ly Google
ces anthropologiques, et dont la voix sonore, vibrante, plei-
ne d'autorité, se faisait toujours entendre dans la discussion
des problèmes les plus compliqués. Vous devinez que je fais
allusion à l'éminent professeur Paul Broca, dont la France
déplore la perte récente, et avec cette noble nation tout le
monde scientifique dont il était l'un des ornements. Le Con-
grès, se réunissant pour la première fois après sa mort, ne
peut manquer de voter à sa mémoire l'expression de son
plus vif regret.
Vous savez tous. Messieurs, que ce n'est pas seulement
dans l'étude dès collections d'archéologie et d'anthropologie
préhistoriques qui remplissent les grands musées, qu'on doit
chercher la solution des principales questions concernant un
pays en particulier ou une région quelconque limitée; mais
que cette solution on la trouvera plutôt dans l'examen, l'étu-
de et la comparaison des collections des musées plus mo-
destes, où se trouvent rassemblés les faits concernant cha-
que région, et se rapportant à une époque donnée. Cepen-
dant, il n'est pas possible à tous les studieux d'examiner et
de comparer les faits dispersés en divers pays; d'un autre
côté il est indispensable au rapide développement de la
science, non seulement de connaître ces faits, mais de met-
tre aussi tes savants en contact les uns avec les autres, pour
se prêter un aide mutuel en transmettant réciproquement
leurs connaissances et leurs idées. C'est du sentiment de
cette nécessité qu'est venue la pensée de la création des
Congrès; et leurs résultats ont été si féconds, que l'archéolo-
gie préhistorique, comptant tout au plus quarante années
d'existence, et l'anthropologie à peine vingt années, ont obte-
nu par là un degré de splendeur inattendu. Que le zèle des
savants se maintienne, et ces sciences atteindront sous peu
un développement tel qu'aucune autre science ne l'obtien-
..GoogK
H
drait, dans une égale période, par les procédés suivis jus-
qu'ici
L'existence de l'homme dans nos latitudes, à l'époque
miocène, est un sujet des plus intéressants, sur lesquels
on puisse appeler l'attention du Congrès. Cette question,
discutée en diverses sessions antérieures, est à résoudre;
cependant les faits recueillis en Portugal s'ofFrent sous un
tel aspect qu'ils aideront, nous osons le croire, à l'élucider;
et nous sommes convaincus qu'après un meilleur examen
des localités et après les discussions que l'importance du
sujet réclame, le Congrès arrivera à formuler ses idées à
cet égard. Dans notre musée naissant, organisé dans la
Section des Travaux Géologiques, se trouvent pour l'in-
formation des savants des documents déjà nombreux qui
les prépareront à l'examen qu'on fera dans les lieux mê-
mes où ils ont été recueillis.
Une grande formation sablonneuse qui couvre une par-
tie de nos provinces d'AIemtejo et d'Estremadura, et que
nous avons classée dans l'époque pliocène, renferme aussi
des documents qui attestent l'existence de l'homme à cette
époque. Dans les couches de cette formation on rencontre
des éclats de quartzite, sinon aussi fréquents qu'on les ob-
serve dans les couches miocènes, du moins assez nombreux
pour ne pas laisser le moindre doute qu'il a aussi existé un
être intelligent dans la période où ces couches se sont dé-
posées.
Comme celui qui l'avait précédé, cet être intelligent
taillait la pierre et fabriquait des instruments à. son usage,
quoique d'un travail assez imparfait et grossier. Il y a dans
nos collections un certain nombre de ces éclats que le Con-
grès pourra examiner; malheureusement il n'est pas possible
de vérifier l'authenticité du gisement, faute du temps néces-
,ï Google
saire pour une excursion de plus outre celles qui sont dé-
signées dans le programme.
Près de Mealhada au nord de Coïmbre il y a encore
un autre dépôt, que nous croyons appartenir également à la
formation pliocène (partie supérieure), renfermant aussi des
instruments de pierre taillée.
Différentes espèces des genres Equus, Elephas^ Cervus^
et le fossile végétal que M. Oswald Heer a nommé Trapa
natam, var. tuberculata, caractérisent ce dépôt. Immédia-
tement au-dessus de ces couches, on trouve une formation
de grès de couleur rougeâtre ou ocreuse, contenant quel-
ques quartzites et des silex taillés qui paraissent appartenir
au type de Saint-Acheul.
Les vestiges de l'existence de l'homme pendant l'époque
quaternaire sont représentés dans notre pays par la série
suivante:
i" — De nombreux exemplaires de quartzite taillés, ren-
contrés dans les couches recouvrant les plaines qui couron-
nent les flancs de ta vallée du Tage, et sur les versants de
quelques collines de différents âges géologiques.
2° — Les alluvions anciennes de ces vallées principales.
3° — Le dépôt inférieur de quelques-unes de nos ca-
vernes.
D serait à désirer que le Congrès pût visiter quelques-
unes des localités où l'on rencontre ces dépôts avec un
plus grand développement, ou mieux caractérisés; mais cela
n'étant pas possible, les membres du Congrès pourront
examiner dans notre musée les éclats de quartzite des dé-
pôts qui occupent les plateaux couronnant les flancs de la
vallée du Tage, les instruments recueillis dans le diluvium
ancien de nos montagnes au sud-est de Coïmbre, ainsi que
ceux des dépôts qui recouvrent les formations pliocènes
c. R. 5
,ï Google
i6
d*AIemtejo. On y peut examiner la faune quaternaire de
nos cavernes, aussi bien qu'une mandibule humaine et un
crâne des alluvions du Tage, que nous croyons appartenir
à la partie supérieure de la période quaternaire.
Il est aussi hors de doute qu'à l'époque quaternaire
quelques-unes de nos grottes furent habitées, comme l'at-
testent les vestiges de l'industrie humaine qui y ont été
trouvés, associés aux restes de certaines espèces éteintes.
En abordant l'indication très sommaire des principaux
faits qui doivent être rapportés à l'âge néolithique, nous
nous trouvons en face des monticules de coquilles de la
v^ée du Tage, lesquels représentent dans l'ordre d'ancien-
neté relative le premier terme de la série des faits de cet
âge.
Ces monticules, situés dans les environs de Salvaterra
et de Mugem et éloignés de lo à 17 lieues de l'Océan, occu-
pent les bords des rivières afHuentes du Tage, à quelques ki-
lomètres de distance de la rive gauche de ce fleuve. Ces
monticules sont principalement formés de coquilles marines
{Lutraria compressa, Cardium edule, etc.): nous les con-
sidérons comme très-semblables en tout aux kioekkenmoed-
dings du Danemark, ce que le Congrès pourra vérifier sous
peu quand il visitera ces localités.
En ce qui concerne les produits de l'industrie et les res-
tes d'animaux rencontrés dans ces dépôts, le Congrès pourra
en fdre l'examen dans le musée de la Section Géologique.
Ce qui est surtout notable dans ces singuliers dépôts, c'est
la grande quantité de dépouilles humaines rencontrées, et
la ressemblance extrême entre le travail des éclats de quar-
t^te taillée par l'homme de ces stations et le travail des éclats
de quartûte des hommes tertiaires et quaternaires. Le Con-
grès, en rapprochant ces faits et en les examinant avec sa
ly Google
'7
critique éclairée, tirera de leur comparaison les conséquen-
ces qu'il jugera convenable, relativement aux évolutions par
lesquelles l'industrie de la pierre travaillée passa dans ces
régions pendant un laps de temps incommensurable.
Les dolmens et autres monuments congénères, si nom-
breux en Portugal, paraissent avoir appartenu à différents
peuples ou races, qui coexistèrent ou qui se sont succédés
à l'époque de la pierre polie. On compte un grand nombre
de dolmens, les uns couverts et sans galeries, d'autres dé- .
couverts et avec ou sans galeries, principalement dans les
provinces de Beira, Extremadura et Alemtejo. Parmi ceux
que nous avons explorés nul n'offre l'indice de l'usage des
métaux; et cependant il est très possible que quelques-uns
de ces monuments aient servi de sépulture pendent l'âge
de la pierre polie, et postérieurement durant l'époque du
bronze ou celle du fer.
Quoiqu'il en soit, l'observation de ces nombreux monu-
ments préhistoriques dont nous avons déjà connaissance
parait annoncer une série de civilisations, se rattachant les
unes aux autres depuis le commencement de l'âge de la
pierre polie jusqu'aux temps historiques. Lorsque les études
archéologiques atteindront parmi nous le développement
qu'exige l'abondance des vest^es de ces civilisations pri-
mitives, on connaîtra leur extension et leur plénitude à des
époques que ni l'histoire ni la tradition ne peuvent atteindre.
C'est de cette période que l'anthropologie préhistorique
pourra recevoir un important secours pour la connaissance
des races qui élevèrent nos kioekkenmoeddings, qui habitè-
rent nos grottes naturelles, et qui creusèrent dans le roc les
grottes de Palmeila. A l'exception de ces spécimens et de
quelques autres obtenus par les explorations faites dans les
sépultures, dont nous ne saurions fixer l'époque, mais qui
.,Ci
r
i8
Dous paraissent être pré-romaioes, nous ne possédons rien
de plus.
Quelques exemplaires trouvés dans les cavernes répan-
dent une clarté précieuse, soit sur la trépanation employée
par nos troglodytes à l'époque néolithique, soit sur beaucoup
de cas pathologiques, de déformations, de fractures, etc., et
encore sur l'anthropophagie certainement pratiquée par ces
mêmes troglodytes.
Tels sont, Messieurs, les principaux sujets soumis à
votre considération éclairée, et nous sommes certains qu'à
l'aide de vos connaissances, tous ces sujets, peu étudiés en-
core, recevront la lumière nécessaire pour prêter à la science
les services qui lui sont dûs. Nous sommes certains aussi
que le Congrès de Lisbonne, en même temps qu^il répandra
la lumière sur beaucoup de questions douteuses et qu^il don-
nera la solution d'importants problèmes relatifs aux civill-
sations préhistoriques de nos régions, contribuera puissam-
ment à développer parmi nous Pintérêt pour les études de
la paléontologie humaine, de Parchéologie préhistorique et
des sciences auxiliaires, dans la partie vraiment applicable
aux questions ethnographiques et ethnologiques. (Applau-
dissements).
M. GvpELLiNi prononce l'allocution suivante:
SIRE,
Sa Majesté le Roi dom Fernando,
Monsieur le Président,
Messieurs les membres du Comité d'organisation oc
NEUVIÈME Congrès préhistorique international.
Mon Auguste Souverain le Roi d'Italie, le Haut Pro-
,ï Google
'9
lecteur de la cinquième session de notre Congrès préhistori-
que à Bologne, a daigné m'honorer d'une mission tout-à-fait
gracieuse et personnelle à l'occasion de l'inauguration de ta
neuvième session du Congrès à Lisbonne, sous les auspices
et le haut protectorat de Sa Majesté Très-Fidèle.
Sa Majesté Humbert i" se souvient avec la plus vive
satisfaction d'avoir assisté à l'une de nos séances en 1871 â
Bologne, et d'avoir pris part à l'excursion faite à la nécro-
pole étrusque de Marzabotto.
Tout récemment Elle a eu l'extrême amabilité de me rap-
peler aussi que, à cette occasion, Elle avait souhaité de voir
se réunir en Italie un Congrès géologique international. Cet
événement va s'accomplir l'année prochaine à Bologne, et
le Roi d'Italie a daigné en accepter le haut protectorat.
Ayant appris que je me rendais à Lisbonne pour étu-
dier la question de l'homme tertiaire. Sa Majesté m'a fait
l'honneur de me charger de saluer en son nom les membres
du Congrès international d'Anthropologie et d'Archéologie
préhistoriques. Elle n'a pas oublié que notre association,
après quinze années d'une vie vigoureuse et pleine d'intérêt
pour la science de l'homme, ouvre aujourd'hui sa neuvième
session sous un ciel et sur les bords d'un fleuve qui rap-
pellent le ciel d'Italie et le beau golphe de Spezia, où notre
Congrès a eu son modeste berceau en 1865.
Le Roi d'Italie a voulu s'associer au Roi de Portugal,
qui daigne ouvrir en personne notre session, honorée aussi
de l'auguste présence de Sa Majesté le Roi Dom Fernando;
il m'a chargé d'exprimer â notre assemblée ses vœux pour
la pleine réussite de la nouvelle session et pour l'avenir de
notre science.
Nous avons la certitude que ces vœux seront accom-
plis et que le Congrès de Lisbonne présentera te plus haut
.,Ct
r
intérêt, au point de vue des rapports de la géologie et de
la paléontologie avec l'anthropologie et Parchéologie préhis-
toriques.
Puisque j'ai la parole, qu'il me soit encore permis de
saluer le Congrès au nom de l'ancienne Université à laquelle
j'ai l'honneur d'appartenir, et aussi au nom de Bologne, qui
sera heureuse de recevoir, l'année prochaine, tous ceux
d'entre vous qui voudront bien prendre pan au deuxième
Congrès géologique international sous le haut protectorat
de Sa Majesté le Roi d'Italie. (Applaudissements).
M. Capeluni propose ensuite à l'assemblée de ratifier
la nomination de M. Carlos Ribeiro comme secrétaire gé-
néral.
Cette proposition est acceptée et l'élection est faite par
acclamation.
M. Capellini présente aussi une liste imprimée de mem-
bres du Congrès pour remplir les fonctions de vice-prési-
dents, de membres du conseil et de secrétaires.
Cette liste, qui avait été préparée par le Comité d'oi^a-
nisation, est distribuée aux membres du Congrès. Elle est
approuvée sans altération.
,ï Google
PRÉSIDENT
M. Andrade Corvo.
PRÉSIDENTS HONORAIRES
MM. Capeluni.
DE MORTILLET.
VIOE-PRÉKDENT HONORAIRE
M. A. DE QUATREFAGES.
VICE-PRËBIDENT8
MM. A. M. Barbosa, Portugal.
B. DU Bocage, Portugal.
Delgado, Portugal.
Evans, Grande Bretagne.
HiLDEBRAND, Sukde.
H. Martin, France.
PiGORfNi, Itcdie.
RoMER, Hongrie.
Van Beneden, Belgique.
i. ViLANOvA, Espagne.
ViRCHOw, Allemagne.
Zawisza, Russie.
,ï Google
SECRÉTAIRE G-ËNÊRAL
M. Carlos Ribeiro.
SECRÉTAIRES
MM. Cazalis de Fondouce, France.
Chantre, France.
GONÇALVES VlANNA, POTtUgOl.
Vasconcellos Abreu, Portugal,
BEOSËTAIREa ADJOINTS
MM. DE Baye, France.
Adolpho Coelho, Portugal.
EsTAao DA Veiga, Portugal.
Ramalho OfiTifiÂo, Portugal.
HEHBRES DU CONSEIL
MM. Antonovitch, Russie.
BELLUcct, Italie.
Cartailhac, France.
Choffat, Suisse.
CoTTEAO, France.
CoNSiGUERi Pedroso, Portugal.
Prrr-RivERS, Grande Bretagne •.
Ploix, France.
' On avait assuré au bureau permanent que M. Prrr-RtvBRs assis-
terait au Congràs.
ly Google
MM. PossiDONio DA SiLVA, Portugal.
ScHAAFFHAUSEN, Allemagne.
TRÉSORIER
M. A. C. TEKEffiA d'Abacâo.
M. LE Président du Congrès. Conformément à l'article
ivi du Règlement, je soumets au Congrès la proposition pré-
sentée par dix membres, pendant la 8*"' session, à Buda-
pesth, tendante à modifier par un article complémentaire le
même règlement. Je ferai lecture de cette proposition, ainsi
que du rapport qui Paccompagne, signé par le regretté pro-
fesseur Paul Broca.
«Article complémentaire. Les fondateurs du Congrès,
les anciens présidents et les vice-présidents honoraires
nommés en vertu du deuxième article additionnel du Règle-
ment générât constituent un conseil permanent, chargé de
maintenir la tradition du Congrès, de veiller à la bonne
exécution du Règlement, de faire les études préparatoires
relatives au siège des sessions futures, et de faire face aux
difficultés imprévues qui pourraient surgir dans l'intervalle
de deux sessions.!
.,Ct
r-
BAFPOHT Dtr CONSEIL
snr la propoaltlon préoAdente
La pensée qui a dicté cet article s^est présentée dès
Porigine aux commissaires qui eurent l^onneur de rédiger
en 1867 le Règlement général du Congrès. Une association
internationale qui n'a pas de siège fixe, dont les sessions
se tiennent chaque année dans un nouveau pays, au milieu
de conditions très variables, a besoin plus que toute autre
d^un conseil permanent, chargé d'assurer sa stabilité et de
maintenir sa tradition. Mais quelque évidente que fût cette
nécessité, les commissaires de 1867 ne purent y satisfaire,
parce que rien ne désignait encore les personnes qui devaient
plus tard, par leur zèle pour le Congrès, par leur assiduité,
par leur expérience, mériter d'être investies de la mission
de confiance conférée à un conseil permanent.
Ce personnel d'hommes dévoués, expérimentés et au-
torisés, existe aujourd'hui. Le moment est donc venu de
compléter l'organisation du Congrès par l'institution du con-
seil permanent.
Nous pensons qu'il convient d'appeler dans ce conseil
les membres qui font déjà de droit partie du conseil de cha-
que session, savoir:
1° les quatre membres fondateurs de la Spezia;
1" les anciens présidents du Congrès et le président
désigné de ta session suivante;
3" les membres qui, après avoir rempli pendant qua-
tre sessions les fonctions de vice-présidents, sont devenus
ibyGoogle
_%s_
vice-présidents honoraires, en vertu de i^article complémen-
taire voté par rassemblée au début de la présente session
de Budapesth.
Les attributions du conseil permanent, telles qu^elles
sont définies dans l'article proposé, ne portent aucune at-
teinte à l'initiative des commissions d'organisation instituées
pour chaque session par le président désigné; elles n'em-
piètent pas davantage sur les droits conférés par le Règle-
ment à l'assemblée générale du Congrès. EHles ne concernent
que les circonstances qui surviennent dans l'intervalle de
deux sessions, et sur lesquelles, par conséquent, l'assemblée
générale ne peut être consultée. Il peut se faire, par exem-
ple, que les événements viennent s'opposer à la réunion du
Congrès dans la ville et à la date fixée par l'assemblée et
qu'il faille dès lors choisir une autre ville et une autre date.
n peut se faire encore que la mort ou la démission du pré-
sident désigné rende nécessaire la nomination d'un autre
président.
Dans les deux cas qui viennent d'être indiqués, l'inter-
vention du conseil permanent est absolument indispensable,
et il en est d'autres sans doute où elle pourra devenir utile.
Une expérience toute récente nous a appris que le choix du
siège de la future session peut donner lieu à de sérieuses
difficultés, et exiger des négociations préalables qui ne peu-
vent pas toujours aboutir pendant la durée de la session.
Le conseil permanent aura seul l'autorité suffisante pour étu-
dier la question à l'avance et pour préparer les voies. En-
fin, le président désigné, jusqu'ici seul responsable de l'or-
ganisation de la session, pourra rencontrer des obstacles
imprévus et éprouver le besoin d'abriter sa responsabilité
derrière celte du conseil permanent.
Le conseil de la session de Budapesth approuve donc à
■'GoR^»
runanimité Partide complémentaire qui fait Pobjet de ce
rapport.
y. *Broca, rapporteur.
C'est sur ce rapport, entièrement conforme à la pro-
position, que je consulte rassemblée.
Les conclusions du rapport sont mises aux voix et ap-
prouvées à l'unanimité.
Après la proclamation des noms des délégués des dif-
férents pays et sociétés savantes, la séance est levée à 2 heu-
res et demie.
ly Google
DEUXIÈME SÉANCE
Hardi, 21 BeptemDre
Présidence de M. G^peluni, fondateur.
La séance est ouverte à g heures.
M. OswALD Hebk. Aperçu sur la flore tertiaire du
Portugal (communication lue par M. le comte de Ficalho).
M. le comte de Ficalho. Quelques remarques sur le
climat du Portugal à l'époque tertiaire.
Discussion: M. Capellini.
M. Carlos Ribeiro. L'homme tertiaire en Portugal.
Discussion: MM. de Mortillet, Evans et Capellinl
' M. ScMAAFFHAUSEN. L'homme préhistorique.
Discussion: MM. de Quatrefages, de Mortillet, et
SCHAAFFHAUSEN.
M. Capellini propose la nomination d'une commission
pour examiner les silex présentés par M. Carlos Ribeiro,
et les couches où ils ont été recueillis, ainsi que les pièces qui
pourront être trouvées sur place.
^O^t^CV
\
28
Le Président du Congrès nomme les membres suivants
pour formw cette commission: MM. Capellini, Carlos Ri-
BEIRO, CaRTAILHAC, CaZALIS DE FONDOUCE, ChoffAT, Cot-
TEAU, Evans, de Mortillet, Vilanova, Virchow.
La séance est levée à midi et demi.
,ï Google
TROISIÈME SÉANCE
Hardi, 21 septemDre
Présidence de M. Evans.
La séance est ouverte à 2 heures,
M. DE Laurière. Au nom de la Société Française d'Ar-
chéologie, dirigée par M. Léon Palustre, j'm l'honneur d'of-
frir au Congrès d'Anthropologie et d'Archéologie préhisto-
riques réuni à Lisbonne, le Compte-rendu du 46*"* Congrès
Archéolo^que tenu par cette Société en 1879 à Vienne
(France).
Ce volume contient quelques mémoires particulièrement
relatifs à l'ordre d'idées des travaux du Congrès de Lis-
bonne. J'indiquerai seulement les suivants : Rapport sur les
fouilles exécutées dans les grottes de la vallée du Rhône, etc.,
par M. H. Nicolas d'Avignon; Les troglodytes de VArdk-
che, par M. OUier de Marichard; Stations préhistoriques de
la grotte du Placard, près de Rochebertier (Charente), par
A. de Maret; L'époque préhistorique et gauloise dans le dé-
partement des Hautes-Alpes, par M. J. Roman; De Vancien-
neté de l'homme en Dauphiné, par M. Florian Vallentin.
.^
3o
C'est en raison du caractère spécial de ees divers tra-
vaux que la Société Française d'Archéologie a rhonneur
d'offrir l'hommage respectueux et sympathique de sa der-
nière publication annuelle au Congrès de Lisbonne.
M. DE Baye présente différents mémoires.
M. DE QuATBEFAGES dépose soH ouvFage L'espèce hu-
maine.
Le Président remercie au noxf^ du Congrès. -
M. Delgado. Description de la grotte de Fuminha, à
Péniche: Époque quaternaire.
Discussion: MM. Evans, Delgado et de Morttllet.
M. Zawisza. Sur le quaternaire de la Pologne et la
grotte du Mammouth.
Discussion: MM. Evans et de Mortei^t.
M. Bellucci. L'homme tertiaire en Ombrie.
Discussion: MM. Capellini et de Quatrefages.
La séance est levée à 5 heures.
ithropologie de la Section des Travaux
.yCoogle
Sôanoe dn CkmseU, le 21 aeptembre
Présidence de M. Andrade Corvo.
M. Ch. Ploix présente au nom de la Société d'Anthro-
pologie de Paris la proposition suivante, signée par dix mem-
bres de cette Sodété.
PROPOSITION
Au nom de la Société d'Anthropologie de Paris, j'ai
l'honneur, comme son président, et appuyé par l'assenti-
ment de tous les membres de cette Société soussignés, pré-
sents au Congrès, de demander au Conseil, de vouloir bien
proposer au Coi^rès d'émetre un vœu en faveur de la créa-
tion d'une Sodété d'Anthropologie à Lisbonne.
Le 21 septembre 1886.
Ch. Ploix
E. Magitot
G. de Mortillet
H. Martin
De Quatrefages
Emile Cartailhac
Ca^alis de Fondouce
Ernest Chantre
G. Cotteau
Baron J. de Baye
,ï Google
Le Conseil d'un commun accord n'a pas délibéré sur
cette proposition.
Le Président lève la Séance.
Mercredi, 22 aeptemtire
Excursion à Otta. Environs de Monte-Redondo: ter-
rains tertiaires: silex taillés.
DigitizsdbyGOOgie
QUATRIÈME SÉANCE
Jendi, 23 septembre
Présidence de M. de Mortillet, fondateur.
La séance est ouverte i 9 heures.
M. Delgado. Les dépôts de Pépoque néolithique for-
mant le sol de la grotte de Fuminha. Vesdges d^anthro-
pophagie.
Discussion: MM. de Baye, CARTAtLHAC, Evans, Schaaff-
HAusEN, Delgado, de Mortillet, Virchow, Vasconcellos
Abreu, HiLDEBRAND, H. Martin; Spécialement sur l'hypo-
thèse de Panthropophagie des habitants de Fuminha.
M. ScHAAFPHAUSEN proposc qu'une commission soit
nommée pour Texainen des vestiges d'anthropophagie signa-
lés par M. Delgado.
Plusieurs brochures sont présentées au Congrès. On
décide qu'elles reâtent à l'Académie Royale des Sciences.
M. Cartailhac propose qu'on prie ceux des oQi-ants
qui auraient des doubles, de vouloir bien déposer un exem-
plaire à la Section Géologique.
■f^i
-h.
Cette proposition est approuvée.
M. Ckantke. Monographie sur les anciens glaciers du
bassin du Rhône.
Discussion : MM. Evans et de Mortillet.
M. Carlos Ribeirô fait part de la réception de deux let-
tres accompagnant les mémoires suivants, de M. Adrien
Arcelin : L'ancienneté de l'homme dans le bassin moyen
du Rhône et la vallée inférieure de la Saône, et de M.
George Atkinson : Sur l'écriture appelée Ogam, que l'on
trouve dans les Iles Britanniques.
M. ViLANOvA appelle l'attention du Congrès sur les
études faites par M. Frederico de Vasconcellos dans les
dépôts superficiels du bassin du Douro, et invite ce géolo-
gue à lire lui-même son mémoire.
M. Frederico de Vasconcellos donne ensuite lecture
du Résumé d'une étude faite sur quelques dépôts superfi-
ciels du bassin du Douro — Présence de l'homme — Vesti-
ges d'action glaciaire.
Le Président du Congrès nonune une commission,
composée de MM. Barbosa du Bocage, Capellini, Cartai-
LHAc, Delgado, Hildebrand, Mortillet, Schaaffhausen,
Vasconcellos Abred et Virchow, pour l'examen des vesti-
ges d'anthropophagie révélés par les ossements trouvés à
Pintérieur de la grotte de Fuminha.
La séance est levée à i heure.
,ï Google
CINQUIÈME SÉANCE
Jeudi, 23 septembre
Présidence de M. de Quatrefages.
La séance est ouverte à 2 heures.
M. DE Bâte. Les traits caractéristiques de l'époque
néolithique en France, tels qu'ils sont réunis dans les sta-
tions de la Champagne.
Discussion: M. H. Martin.
M. DE Quatrefages. Note sur les dernières découver-
tes effectuées dans la Lozère par M. Prunières.
■Discussion: MM. H. Martin et de Quatrefages.
M. Gazaus de Fondouce. De l'emploi de la callaïs
dans l'Europe occidentale aux temps préhistoriques.
Discussion: MM. Cartailhac et Evans.
M. Chqffat présente les conclusions de la commission
nommée pour l'examen des silex trouvés à Otta et des cou-
ches où ils ont été recueillis. -
Le Président fixe le samedi pour la discussion de léon-
ine tertiaire.
M. Chantre. L^âge du brotue en Italie.
Discussion: MM. de Mortillet, Pigorini, Virchow,
H. Martin et Chantre.
Observations de M. H. Martin. Sur deux espèces
d'épées en bronze trouvées en Irlande.
M. Pigorini. Objets en silex et squelette peints en
rouge, trouvés dans une caverne près de Rome.
La séance est levée à 5 heures.
Vendredi, 24 septembre
Excursion à Mugem: Kioekkenmoeddings de Moita do
Sebastiâo et de Cabetjo da Arnida.
,ï Google
SIXIÈME SÉANCE
Samedi, SB septembre
Présidence de M. Virchow.
Sa Majesté le ROI Dom Luiz, protecteur de la g*"*
Session, et Sa Majesté le ROI Dom Fernando, président
d'honneur, assistent à la Séance, laquelle est ouverte à 9
heures.
M. Choffat fait la lecture du rapport de la commis-
sion nommée pour Texamen des silex trouvés à Otia et
Tétude de leurs condiiions de gisement.
Discussion: Sur les vestiges de Texistence de l'homme en
Portugal, i la période miocène: MM. de Mortillet, Evams,
Capeluni, Vilanova, Cartailhac, Bellocci, Cotteau, Vir-
chow, Delgado, Cazaus de Fondouce et de Quatrefages.
L'inscription étant épuisée, le Président M. Vjrchow re-
met la décision à un autre congrès, ces questions ne devant
pas être décidées à la majorité des voix.
,ï Google
38
Le Secrétaire Général présente au Congrès, un mé-
moire sur ^Les Lusitaniens*, au nom de son auteur, M. Mas-
tins Sabmento.
La séance est levée i i heure.
,ï Google
SEPTIÈME SÉANCE
Samedi, 26 septembre
Présidence de M. Vilanova.
La séance est ouverte à 2 heures.
M. Cartailhac déclare que la liste des membres du
Congrès qui désirent prendre part à l'excursion à Citania
va être close, et que le départ aura lieu dans la matinée du
3o septembre.
M. Magitot. Essai sur les mutilations ethniques.
Observations de M. Cazalis de Fohdocce.
M. Chantre présente au Congrès son grand ouvrage
Le premier âge du fer dans le bassin du Rhône.
M. OuvBiRA Feuao. Sur un cas de microcéphalie en
Portugal.
Après avoir lu son mémoire, M. Oliyeira FeijÂd fait
entrer dans la salle du Congrès la microcéphale Bemvin-
da, conduite par sa garde-malade.
40
Elle est examinée avec le plus grand intérêt par plu-
sieurs membres du Congrès.
Discussion sur la lecture précédente: MM. Vilanova et
ViRCHOW.
M. Paula e Oliveira. Notes sur les ossements humains
qui se trouvent dans le musée de la Section Géologique de
Lisbonne.
Discussion: MM. de Quatrefages et H. Martin.
La séance est levée à 5 heures et demie.
ly Google
Séance du Oonseil, le 26 septembre
Présidence de M. Andrade Corvo.
M. Capellini exprime la nécessité de faire réunir le
prochain Congrès dans un pays où il n^ait pas encore siégé;
il invite les membres du conseil des différentes nationalités
à donner leur avis là-dessus.
M. DE QuATREFAGEs propose que le Conseil permanent
soit consulté sur ce sujet; il ajoute qu'il faut penser aux
frais que le gouvernement d'un pays doit faire pour rece-
voir le Congrès.
M. DE MoRTiLLET appuîc la proposition de M. de Qua-
trefages.
M. ViBCHOw appuie la proposition de M. Capellini et
celle de M. de Quatrefages; il fait aussi remarquer que le choix
du pays présente encore d'autres difficultés, celle d^une lan-
gue officielle du Congrès, par exemple. Il s'abstient de pro-
poser que la lo*"" session ait lieu à Berlin, et fait voir qu'il
serait mieux de penser à une autre capitale.
ff>s^
4»
M. Zawisza donne des renseignements sur des explo-
rations faites dans quelques cavernes et sur les travaux exé-
cutés en Cracovie.
M. Capellimi donne lecture delà proposition suivante:
PROPOSITION
Les membres du Congrès qui auront été cinq fois se-
crétaires passeront de droit secrétaires honoraires, et feront
partie du Conseil permanent.
S^ils assistent à deux nouveaux Congrès ils deviendront
vice-présidents honoraires.
G. de Mortiîlet
Hans Hildebratid
G. Capellini
Emile Carlailhac
J. Zams:ia
Ch. Ploix
G. de Vasconcellos Abreu
Z. Consiglieri Pedroso
Virchow
Joaquim Philippe Nery Delgado
G. Coiteau
H. Martin
Le conseil décide que le sujet de cette proposition soit
présenté à TAssemblée générale du prochain Congrès com-
me un 4*"" article additionnel.
MM. DE MoRTiLLET et CAPEU.INI foHt quelques obser-
vations concernant les membres correspondants.
,ï Google
M. LE Président résume la question, et propose qu'une
liste des membres correspondants soit présentée i chacun
des représentants des différents pays en leur signalant les
individus qui n'ont pas adhéré aux Congrès pour les trois
dernières Sessions; et qu\ine liste soit faite, en ajoutant aux
noms des membres correspondants les noms de ceux qui
par leurs travaux ont contribué au développement du Con-
grès et à la bonne réussite des sessions.
Approta>ie.
Le Préâdent lève la Séance.
Dlmonohfl, 28 septembre
Réception par Sa Majesté le Roi Dom Fernando au
Palais de Necessidades.
Visites aux Musées et autres établissements publics de
Lisbonne.
Réception par S. Majesté le Roi Dom Luiz, et ban-
quet au Palais d'Ajuda.
,Ci,
HUITIÈME SÉANCE
Londl, 27 septembre
Présidence de M. Hildebrand.
La séance est ouverte à g heures.
M. Chantre présente différents mémoires au Congrès.
Le Président du Congrès communique l'invitation faite
par l'Académie Royale des Sciences aux membres des deux
Congrès, préhistorique et littéraire, pour un dîner, le 29 à 7
heures, dans la grande salle de l'Arsenal de la Marine.
M. H. Martin. Du type ethnique et anthropologique
des Ibères.
Observations de M. Adolpho Coelho.
M. Adolpho Coelho. Sur les cultes péninsulaires an-
térieurs à la domination romaine.
Observations de MM. H. Martin et Vasconcellos
,ï Google
45
M. CoNSiGLiERi Pedroso. Sut quelques formes du ma-
riage populaire en Portugal. Contributions pour la connais-
sance de l'état sodal des anciens habitants de la Péninsule.
M. DE Baye. Les instruments en pierre à l'âge des mé-
taux.
Observations de M. de Mortillet.
M. Magitot donne lecture du mémoire de M. Gustave
MiLLEscAMPS: Sur les siiex emmanchés de l'époque méro-
vingienne.
M. Vasconcellos Abreu présente son mémoire: De
l'origine probable des Toukhâres et leurs migrations à tra-
vers l'Asie.
Le Président du Congrès communique l'invitation faite
par la Sodété d'Instruction de Porto, pour une fête au Pa-
lais de Cristal, dans cette ville, lorsque les membres du
Congrès y passeront en revenant de Citant'a de Briteiros.
La séance est levée à i heure.
..Goc^l^ ,
NEUVIÈME SÉANCE
Lnndi, 27 septembre
Présidence de M. Zawisza.
. La séance est ouverte à 2 heures et demie.
M. le Président du Congeiès fait part de la réception
de plusieurs brochures et mémoires offerts au Congrès.
M. Henri Martin présente au Congrès de la part de
M. Alexandre Bertrand, directeur du Musée de Saint-Ger-
niain, dix-sept photographies représentant des divinités gau-
loises; il fait suivre cette présentation de quelques remar-
ques sur la mythologie gauloise, et invite les savants portu-
gais et espagnols à faire des recherches de ce genre dans la
Péninsule.
Observations de M. Goihet sur les rapports delà trinité
gauloise avec la trimté dans l*Inde.
M. PiGOWNi communique un télégramme qu'il vient de
recevoir du Prof. Uzielli sur la découverte de quelques tom-
,ï Google
bes dans le terramare de Casinalbo, el fait ressortir l'im-
ponance de cette découverte.
M. Belluccc. Du culte de la pierre.
Observations de M. Magitot.
M. ViLANOVA. Du cuivre et du bronze en Espagne, et
de la période qui les a précédés.
Discussion: MM. Chantre, Vilanova, J. J. Rodricues
et DE MORTILLET.
M. Vilanova invite les membres du Congrès à visiter
avec lui les cavernes de Santillana, près Santander, dont
les parois et le plafond oITrent des gravures coloriées où
l'on reconnait l'aurochs. Cette découverte est due à M. Mar-
celine de Santuola.
M. PossiDONio DA SILVA. Sur les haches en bronze
trouvées en Portugal.
Z)«cus«b«.- MM. Cazaus de Fondouce, Chantre, Hil-
DEBRAND et DE MoRTILLET.
M. PiGORiNi. Nécropole de l'âge du bronze en Italie.
M. DE Baye. Les indices de la transition de la pierre
polie à l'époque du bronze.
M. Oppert. Sur Pambre jaune dans la haute antiquité
asiatique.
La séance est levée à 3 heures et demie.
..Cotfjlc
Hardi, 28 Beptemtire
Excursion à Cascaes et Qntra; grottes néolithiques.
Visite au Château de Pena; réception par Sa Majesté
le Roi Dom Fernando.
Dîner à l'hôtel «Victor».
Bal au château Royal de Cascaes.
,ï Google
DIXIÈME SÉANCE
Heroredl, 29 septembre
Présidence de M. Delgado.
La séance est ouverte à lo heures.
M. Mesnieb. Les formations géologiques de la Cordil-
lère des Andes et l^omme américain.
M. ViLANOVA. Quelques détails ajoutés à sa commu-
nication précédente sur l'âge du cuivre en Espagne.
M. Chantre. L^s nécropoles du premier âge du fer
du Caucase contenant des crânes macrocéphaics.
Discussion: MM. Virchow, Chantre, Antonovitch et
HlLDEBRAND,
M. Antonovitch. Les tumuli de la vallée du Borys-
thène.
M. Adolpho Coelho. Sur les prétendues relations des
macrocéphaics d'Hippocrate avec les Qmbres.
Discussion: MM. Vilanova et H. Martin.
7»
ly Google
5o
M. ViHCHOw présente au Congrès plusieurs exemplai-
res du prospectus et des planches d'un grand ouvrage de
MM. Reiss et Stubel sur les Ruines d'Ancon; il ajoute plu-
sieurs renseignements.
Observations de M, oe Mortillet,
Le Secrétaire Général présente le mémoire envoyé par
M. Bataillard: Les Gitanos d'Espagne et les Ciganos de
Portugal.
M. Vasconcellos Abreu fait la lecture du rapport de
la commission nommée pour l'examen des vestiges d'anthro-
pophagie des habitants de la grotte de Furninha.
Réponse de M. Delgado et observations de M. Schaaff-
MAUSEN.
La séance est levée à i heure.
,ï Google
ONZIÈME SÉANCE
(Clôture de la Session)
Heroredi, 2B septembre
Présidence de M. Romer.
La séance est ouverte à 2 heures.
M. Pawinski présente, au nom des auteurs absents, une
magnifique carte archéolo^que de là Prusse occidentale et
des parties contiguës du grand-duché de Posen.
M, le Président, remercie au nom du Congrès.
M. Pawinski. Sur les cimetières de l'âge du fer en Po-
logne, avec ou sans incinération.
M. Oppert. Sur la chronologie préhistorique.
M. Carlos Ribeiro. Les kioekkenmoeddings de la val-
lée du Tage. (La lecture de ce mémoire est faite par M.
Cartailhac qui ajoute quelques observations).
,ï Google
_5z_
M. RoMER dépose différents mémoires et donne quel-
ques renseignements sur les fouilles qu'il fait exécuter dans
les quarante-cinq grands tumuiî de Nagy Falu.
M. CapelliN! propose que le Comité permanent soit
chargé de s'occuper du choix de l'endroit où aura lieu la
10*"" Session du Congrès.
M. RoMER fait part au Congrès que les mémoires en-
voyés par les membres absents se trouvent au Secrétariat
et qu'ils seront publiés dans le Compte-Rendu de la Ses-
sion.
Le Président du Congrès, M. Andrade Corvo, prend
place au fauteuil.
Puis il propose à l'Assemblée de remercier Sa Majesté le
Roi Dom Luiz et Sa Majesté le Roi Dom Fernando de Phon-
neur qu' Elles ont daigné faire au Congrès en acceptant le
haut protectorat ainsi que la présidence de la 9*°" Session, Sa
Majesté la Reine Dona Maria Pia de la réception gracieuse
qu'Elle a bien voulu réserver aux membres du Congrès et
Sa Majesté le Roi d'Italie pour l'intérêt qu'Elle a daigné
prendre aux travaux de cette session.
Ces propositions sont reçues par l'assemblée avec ap-
plaudissements et votées par acclamation.
Le Président du Congrès propose ensuite au Congrès
de voter des remercîments à l'École Polytechnique, au Gre-
mio Litterario, à l'Association des Architectes, au directeur
de l'Observatoire Météorologique, à l'Académie des Beaux-
Arts, à la Bibliothèque Nationale, à la Direction de l'Obser-
vatoire Astronomique, à celle du Musée Numismatique.
^
„Google
53
Ces propositions sont votées de même par acclamation.
M. GiPELLiNi prononce l'allocution suivante :
Après les remercîments qui nous ont été proposés par
notre Président il nous reste encore bien des dettes à payer.
J'ai donc l'honneur de proposer à PAssemblée de voter des
remercîments bien sincères:
Au Gouvernement portugais et à la Municipalité de la
ville de Lisbonne, qui ont tant contribué à la réussite de la
^èm» session de notre Congrès;
A notre illustre Président, M. Andrade Corvo, au Se-
crétaire Général, M. Carlos Ribeiro, et à tous les membres
du Comité d'organisation;
Aux Municipalités de Santarem, Salvaterra, Almeirim,
et aux populations des localités que nous avons visitées dans
nos excursions;
A la Section des Travaux géologiques à laquelle on
doit la réalisation du Congrès de Lisbonne;
A l'Académie Royale des Sciences qui nous a reçus, et
à tous les établissements scientifiques et artistiques qui nous
ont ouvert leurs portes pendant notre séjour à Lisbonne;
A la Société d'Instruction de Porto pour l'aimable in-
vitation qu'elle a faite aux membres du Congrès pour une
fête au Palais de Cristal, lorsqu'ils passeront dans cette ville;
A M. Martins Sarmento, pour l'intéressante excursion
qu'il nous prépare aux Citanias;
Aux officiers de VA/rica, qui se sont donnés tant de
peines pour notre excursion à Cascaes.
Messieurs. Je pense que nous allons tous rentrer chez
nous avec le vif désir de revoir ce beau et intéressant pays,
oii de nouveaux trésors seront rapidement accumulés par
nos habiles confrères, qui nous ont surpris par les merveil-
..Goollc
leuses trouvailles faites dans un temps relativement restreint.
{Applaudissements répétés).
Des remeromems sont aussi votés aux différentes au-
torités, spécialement au Govemeur Civil du district de San-
tarem; à M"" la Duchesse de Cadaval et à MM. Gabriel de
Freitas et Dom José Belmonte pour la permission qu'ils
ont bien voulu accorder de faire des fouilles dans leurs pro-
priétés, à Mugem, à Porto Covo, à Otta.
Le Président M. Andbade Corvo.
Mesdames et Messieurs.
Nous voilà malheureusement arrivés au terme désigné
d'avance pour la clôture de la neuvième Session du Con-
grès anthropologique.
C'est pour moi un triste devoir celui de prononcer la
clôture de notre session, laquelle, outre ses magnifiques ré-
sultats par rapport à la science préhistorique, a aussi eu le
pouvoir magique de nous unir tous par des liens de la plus
sympathique fraternité.
Ce Congrès, qui restera un des plus beaux souvenirs
de ma vie, a été pour le Portugal une occasion unique
d'écouter les lumineuses leçons des maîtres de la science.
Pour moi, ce Congrès est venu aussi me permettre d'admirer
les hautes qualités d'esprit et de cœur dont vous m'avez
donné des preuves incessantes. Croyez-moi, Messieurs: par
mes sentiments de vive reconnaissance, et — permettez-moi
de vous le dire aussi — d'amitié sincère, je saurai toujours
correspondre à cette bienveillance, qui ne s'est pas une seule
fois démentie.
Mesdames et Messieurs. Je crois que le Congrès peut
,ï Google
55
Être fier des résultats de ses études. Plusieurs questions
ont été largement discutées; et, si nous ne pouvons pas
dire que tous les membres de la savante assemblée sont en-
tièrement d'accord sur les sujets controversés, nous pou-
vons dire au moins que plusieurs difficultés se trouvent
vaincues, plusieurs dissentiments se sont effacés, et des
doutes à peine viennent encore ternir l'éclat de vérités qui
bientôt seront entièrement acquises à la science.
Ce que nous venons de voir se dérouler devant nous
n'est que l'histoire toute vivante des grandes découvertes
de la science. Ce qui un jour est négation devient doute à
peine le lendemain; puis le doute se change en simple ré-
serve, et à la fin la vérité éclate, appuyée par des milliers
de faits incontestables. Alors la conquête scientifique est
réalisée aux applaudissements des tous les savants sincères,
qui, même par leurs négations, leurs doutes et leurs réser-
ves ont contribué puissamment à la rendre plus solide et
plus brillante.
Telle est l'histoire de la science préhistorique toute en-
tière, plus peut-être que de toute autre science. Réjouissons-
nous de cela, Messieurs, car c'est à ces difficultés mêmes
qu'elle doit ses triomphes les plus éclatants. Sous ce point
de vue, la Session du Congrès anthropologique à Lisbonne
restera mémorable. L'histoire de l'homme, notre histoire à
nous, a été reculée, n'en doutons pas, de plusieurs milliers
de siècles, même pour ceux qui n'admettent pas encore sans
hésitation l'homme tertiaire.
L'avenir, un avenir prochain, j'en suis convaincu, tran-
chera définitivement cette importante question, qui a été
pendant la session actuelle du Congrès la question ma-
jeure.
Le Congrès a fait faire à la science préhistorique un
o
56
pas immense, en ouvrant de larges horizons aux nouvelles
découvertes.
Pour nous, les Portugais, la brillante Session du Con-
grès, à laquelle nous venons d'assister, restera mémorable,
et par ses résultats et par l'impulsion qu'elle ne manquera
pas de donner parmi nous aux études de la science préhis-
torique et de toutes celles qui viennent lui apporter à cha-
que instant l'aide puissante de leurs lumières. Séparés de-
puis longtemps du reste de l'Europe, un peu par notre si-
tuation géographique, beaucoup par la longue élaboration
de notre organisation politique et économique qui a duré
un demi-siècle, nous travaillons dans une modeste obscu-
rité à nous mettre au niveau de la science moderne. Le
Congrès est venu nous montrer que nous avons autre chose
3 faire, bien plus profitable pour la science et pour nous-
mêmes: ce Congrès est venu nous faire entrer dans le cou-
rant qui emporte la science dans les splendides clartés des
grandes vérités de la nature.
Nous saurons, j'espère, Messieurs, vous accompagner
dans votre glorieux pèlerinage. Que les hommes de scien-
ce continuent à nous aider de leurs conseils et à nous en-
courager par leur bienveillance!
Nous avons occupé une grande place dans l'histoire de
la civilisation moderne au temps de nos vastes découvertes
maritimes. De ces découvertes la civilisation et la science
ont su tirer un immense profit. Ni l'une ni l'autre ne l'ou-
blieront jamais, croyons-le, et elles recevront, par cela même,
avec une complaisance persistante tout ce que nous ferons
pour elles.
Mesdames et Messieurs. Nous vous avons reçus avec
cette cordialité qui est un des caractères distinctifs du peu-
,ï Google
J7_
pie portugais: nous ne pouvions pas vous prouver autre-
ment notre gratitude et notre estime pour vous. Nous
en avons été bien récompensés por vos aimables bontés et
encore plus par les belles discussions que nous avons tous
suivies avec le plus vif intérêt.
Nous prions le Congrès d'agréer encore une fois l'as-
surance de notre gratitude. Et — permettez-moi de parler en
mon nom dans ce moment — j'ose prier aussi les membres
étrangers du Congrès de croire que je serai toujours recon-
naissant pour l'indulgence dont ils m'ont donné les témoi-
gnages les moins équivoques. Ce sont là des faits trop pro-
fondément gravés dans mon cœur pour que je puisse ja-
mais les oublier. (Apflaudissements répétés).
La neuvième Session du Congrès International d'An- '
thropologie et d'Archéologie préhistoriques est close.
,ï Google
Excursion dans le nord du pays'
JendJ, 30 septembre
Départ pour Braga.
Hardi, 1" octobre
Visite à Gitania de Briieiros. Retour à Porto.
Heroredl, 2 octobre
Porto: Bibliothèque Municipale, musée.
Coïmbre: Université, musée.
* Pour la description de c«te excursion voir VAppendk
,ï Google
COMPTE RENDU
EXCURSIONS
D,„i,„db,Google
„Google
EXCURSION A OTTA
La journée du 22 septembre avait été >
miner sur le terrain les conditions de ^sèment
du miocène. A 6 heures du matin, une centa
nés prenaient place dans le train spécial qui d'
porter à la gare de Cairegado. Au sortir de ]
purent examiner une belle coupe des terrains
à découvert par les tranchées de la voie; f
roulait le charmant panorama de ta ligne des
dra, permettant de saisir d'un seul coup d'o
des terrains tertiaires, crétacés et jurassique:
tie du pays. De l'autre côté de la voie se tro
ses riches exploitations de sel, et au-delà d
vaste plaine qui le borde et la chaîne de l'Ar
de fond à ce magnifique tableau.
Une vingtaine de voitures attendaient le
à la station de Carregado, d'où l'on quitta les
pour se diriger vers le Nord à travers les col
ly Google
6a
en se tenant à peu de distance à l'ouest des chaînons pitto-
resques formés par les terrains jurassiques.
Au village de Carrcgado, la Commission chargée d''étu-
dicr la question à Tordre du jour' mit pied à terre, et M.
Carlos Ribeiro lui fit voir une coupe d'ensemble du terrain
tertiaire.
La caravane continua ensuite à suivre la route royale,
passant au-dessus de la riante et industrieuse vallée d'AJem-
quer, dont la verdure et la fraîcheur sont rehaussées par
l'aridité et la nudité des flancs des collines qui l'entourent.
Vers g heures on arrivait au village d'Otta, où les at-
telages furent doublés avant de pénétrer dans la charneca
(lande) but de Texcursion. La charneca d'Otta est un vaste
plateau formé par le conglomérat et les sables du tertiaire
lacustre inférieur, qui vers l'Ouest s'appuient en stratification
discordante sur les terrains jurassiques; vers l'Est il est ca-
ché par un gradin un peu plus élevé formé, non pas par la
molasse marine comme c'est le cas dans les environs de
Lisbonne, mais par des assises de marne et de conglomé-
rats contenant une faune et une flore terrestres et fluviati-
les.
Vers le bord occidental de la charneca se trouve im
petit îlot de jurassique, le Monte-Redondo, dont l'altitude
atteint 212 mètres; il est situé à 2 kilomètres d'Otta,
Arrivés au pied de cette colline, les excursionistes se
dispersèrent dans les divers ravins, en quête de silex taillés.
' Dans la 1'" séance du ai, fut nommée une Commission composée
de MM. Capellini, Carlos Ribeiro, Cartailhac, Cazalis de Fondouce
Choffat, Cotteau, Evans, de Mortiilet, Vilanova et Virchow, chargée
d'examiner les silex présentés par M. Carlos Ribeiro, ainsi que les cou-
ches oti ils ont été recueillis.
,ï Google
De nombreuses pièces provenant d'éclats, d'autres paraissant
êlre des nucléus, furent enlevées de l'intérieur des couches,
sous les yeux desniembres delà Commission; cependant une
seule de celles-ci fur jugée ne pas laisser subsister de dou-
tes sur la taille intentionnelle. (Voyez fig. i). Elle fut trou-
vée par M. Bellucci, en présence de MM. Cartailhac, Caza-
lis de Fondouce, Vilanova, et d'autres membres du Con-
grès. Il fut en outre trouvé, à la surface du sol, plusieurs.
pièces incontestablement taillées; quelques personnes les
considérèrent comme dégagées du conglomérat par les agents
atmosphériques; un plus grand nombre les regardèrent com-
me d'un âge moins ancien.
Un lunch servi sous une vaste tente dressée en face du
Monte-Redondo attendait les excursionistes, qui firent le plus
grand honneur à l'hospitalité luxueuse qu'on leur offrait. Une
trentaine de toasts furent successivement échangés entre les
membres portugais et les représentants des différentes na-
tions prenant part au Congrès.
A une heure, la caravane se remit en route, traversant
obliquement la Chameca pour se rendre à la colline d'Ar-
chino, où une profonde tranchée permettait d'étudier les cou-
ches d'eau douce mentionnées plus haut.
En présence d'une vingtaine de membres du Congrès, on
dégagea des restes d'animaux, vertébrés et invertébrés:
parmi les premiers se trouvait une mâchoire assez bien
conservée paraissant appartenir à un hipparion.
La superposition de ces couches sur les conglomérats
miocènes est incontestable; on peut facilement s'en convain-
cre en examinant les ravins latéraux; tandis que les quel-
ques membres qui s'étaient bornés à voir la face de la
tranchée pouvaient croire que les marnes à Hipparion
avaient formé récif pendant le dépôt du conglomérat.
ly Google
_64_
Cette fausse interprétation provenait de ce que les mar-
nes ne forment qu'un ou deux bancs intercalés dans des cou-
ches de conglomérats et de sables, présentant les mêmes ca-
ractères au-dessus qu'au-dessous, et de ce qu'une partie des
sables supérieurs ayant anciennement glissé sur les couches
de marne et ayant été entamée par la tranchée, on pouvait au
premier coup-d'œil la considérer comme appartenant aux
couches inférieures; ce qui avait fait dire à un des membres
du Congrès que les conglomérats i grimpaient contre la fa-
laise i.
La localité d'Azambuja, comprise au programme dans
le titre de l'excursion, n'a pas été visitée. Elle estsimée sur
le prolongement des couches d'Archino, à 7 kilomètres de
cette localité, au bord de la vallée du Tage.
Il était près de 6 heures lorque nous reprîmes le che-
min de Carregado, où nous attendait le train qui nous avait
conduits le matin; il nous ramena à Lisbonne, un peu fati-
gués par la poussière et la chaleur, mais enchantés des si-
tes pittoresques que nous avions eu l'occasion de voir et de
l'hospitalité qui nous avait été réservée.
EXPLICATION DE LA FLANCHE
Nous reproduisons ici deux coupes qui ont été publiées
en 1880' et reproduites par M. Bellucci*, et nous copions en
outre la figure du silex taillé qu'a trouvé ce dernier auteur.
' L'Homme tertiaire en Portugal par M. P. Choffat. Archives des
sciences physiques et naturelles. Genève, décembre 1880, p. 537, pi. m.
' L'Uomoter^iario m Portogallo. Archîvio per l'Antropologia e la
Etnologia. Firenze, vol. m, fascicolo 3.°, p. la et tav. iv. 1881.
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Excursion à Otta
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Profil, r'z
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L'rt.ft.i» RdtHomhûdiïtn'îfiù
DigitizsdbyGOOgle
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L'éloignement nous ayant empêché de corriger le des-
sin de la planche, il s'y est glissé deux erreurs qui ont été
reproduites par M. Bellucci; nous rétablissons le dessin
original.
Le profil u." i relevé à quelques kilomètres au nord de
Lisbonne, nous montre au nord-ouest le calcaire à Rudis-
tes R, formant la colline de Gampo. On sait que ce calcaire
a été rangé dans le Turonien, classification qui vient d'être
confirmée par les déterminations de MM. Cotteau et de
Lorioi, qui y ont retrouvé des formes connues du Turo-
nien de l'Algérie. Ces strates ont un plongeraient de 25°
vers le sud-est.
Au-dessus se trouve la formation basaltique B, compo-
sée de basalte compacte divisé en gros prismes irréguliers,
et contenant en outre des cendres et des marnes.
Dans les lits de marne, intercalés au milieu des cen-
dres basaltiques, se trouvent quelques nids de fossiles par-
fois très-nombreux, mais appartenant à un petit nombre
d'espèces.
M, Tournouër en a publié une étude dans le Journal de
Conchyliologie (1879, page 172, pi. vi). Il y reconnaît trois
espèces différentes de coquilles terrestres, toutes trois nou-
velles, ne permettant par conséquent pas de fixer l'Sge des
couches qui les renferment. M. Tournouër fait pourtant re-
marquer qu'elles ont des rapports avec les formes vivant
actuellement dans l'Amérique du Sud.
Les lits supérieurs des ma^es basaltiques présentent
une stratification bien visible au bord de la route de Presa,
à quelques pas de notre coupe. Ils plongent d'environ i3°
vers le sud-est et supportent des marnes rouges {c') conte-
nant des grains de quartz et de silex roulés, et ayant la
même inclinaison; ils forment la base des grès miocènes
,ï Google
66
(c^àc% Ces grès, qui sont parfois très fins, présentent gé-
néralement de nombreux cailloux de silex et de quartzîte,
soit arrondis, soit anguleux, mélangés à des cailloux calcai-
res arrondis; ils ne présentent souvent qu'un sable désagré-
gé, accidentellement relié par une pâte calcaire, plus rare-
ment siliceuse.
Des bancs de ce calcaire blanc, empâtant des silex, se
remarquent en c*; ils forment une colline qui supporte la
chapelle d'Azenhas Velhas. Un deuxième niveau (c*) forme
une falaise fort étendue et d'une élévation assez notable.
L'inclinaison des strates y est de 8"; pétrographique-
ment ce niveau se distingue du premier par la grosseur des
éléments qui ie composent.
Il suffit de s'avancer de aoo à 3oo mètres dans la direc-
tion de notre coupe pour rencontrer la molasse marine pré-
sentant une richesse de fossiles remarquable:
Nous nous bornerons à citer: Turritella terebralis L.,
Pynila condita Br., Voîuta spoliata Sow., Lutraria latissima
Desh., Pecten convexo-costatus Mich-, et enfin Ostrea cras-
sissima Lamk-, qui s'y trouve en quantité considérable.
Au-dessus de la molasse se trouvent une vingtaine de
mètres de sables très fins, micacés, contenant quelques pe-
tites lentilles de marnes ou de grains de quaru.
A i5 mètres de la base se trouve un banc de marne
d'un mètre d'épaisseur (p). Cette marne contient de nombreu-
ses empreintes de plantes terrestres et quelques mollusques
marins ou d'eau saumâtre.*
Ces plantes appartiennent à la même flore que celles
trouvées à Azambuja sur le prolongement des couches
d'Archino. (Voyez à ce sujet le mémoire de M. Heer, pu-
blié dans ce volume).
Le profil ti." 2 s'étend du Monte-Redondo aux fouilles
1
„Google
d'Archino, il a une longueur de 4 '/a km. Il est important de
remarquer qu'il coupe la vallée en biais et qu'il aurait un
kilomètre de moins s'il avait été relevé directement en tra-
vers de la vallée.
/, calcaires jurassiques; c, conglomérats miocènes; p,
couche de marne avec Hipparion, etc.
Les deux erreurs se trouvant dans la "
en 1880, portent sur les conglomérats mioc
sinateur a fait passer sous les calcaires du I
tandis qu'ils les recouvrent au contraire jus
La deuxième erreur est la terminfûson S.
sables supérieurs aux marnes à Hipparion
au contraire sous forme de plateau. Ce son
téraux qui permettent d'examiner Archino
mais il n'est pas possible de le faire au suc
,ï Google
EXCURSION A MUGEM
MOITA DO SEBASTIAO ET CABEÇO DA ARRUDA
Le 24 septembre, à six heures du matin, un train spé-
cial conduisit les excursionistes à Santarem, ville très an-
cienne, bâtie sur la rive droite du Tage, occupant la base
et le sommet d'une colline où l'on voit les ruines d'ancien-
nes fortifications.
Là les congressistes sont reçus par le gouverneur civil
du district et le conseil municipal de Santarem. Des dis-
cours sont échangés. En sortant de la gare on trouve toute
la population de la ville et des alentours revêtue de ses cos-
tumes nationaux, célébrant l'arrivée des visiteurs par des
acclamations enthousiastes.
Nous laissons la parole à M. Bellucci'.
■La route était toute pavoisée, la musique militaire jouait
' Congresso Internationale dt Antropoiogia ed Archeologia Preisto-
riche. Reîa^ione deî Dr. Giuseppe Bellucci. Eslratto JaZ/'Archivio per
l 'Antropoiogia e la Etnologia di Firenze, vol. si, fasc. 3.", p. 17-29.
ly Google
6g_
des hymnes portugais. Des centaines de fusées volantes lan-
cées de tout côté et pendant longtemps font retentir l'air de
leurs crépitations stridentes, le tout contribuant à rendre no-
tre réception plus singulière et plus festive. Au milieu de la
foule on voyait les pittoresques costumes de la population
campagnarde, parmi lesquels se distinguaient ceux des cam-
pinos, gardiens des troupeaux de taureaux, costumes que
plusieurs jeunes propriétaires de la contrée avait aussi endos-
sés. Montés sur de superbes mules et sur des chevaux fou-
gueux les campinos faisaient la haie sur notre passage, tenant
à la main le pau ferrado, long bâton caractéristique aux
bouts de cuivre ouvragé. Nous traversons la ville, tout en
fête, puis le grand pont en construction sur le Tage, ouvrage
à la fois hardi et grandiose.
Le pont aura iïoo mètres de longueur et 6 mètres de
largeur. Le jour de notre passage les travaux encore inache-
vés étaient cependant en état de permettre qu'on touchât
la rive opposée du fteuve ; pour descendre on avait fait cons-
truire exprès un escalier très commode, à plusieurs étages,
haut de trente mètres, lié à un échafaudage qui rempla-
çait la partie du pont encore à construire. Pendant que
nous traversions le pont et que nous descendions, les cam-
pinos montés sur leurs chevaux passaient le fleuve à gué.
Au pied de l'escalier, les voitures qui devaient nous con-
duire à Mugem nous attendaient. Elles formaient une lon-
gue file, flanquée toujours par de nombreux cavaliers. Nous
traversâmes les villages de Almeirim, Bemfica et Mugem.
Partout nous fûmes reçus par les autorités; partout des dra-
peaux, des arcs de triomphe, des girandes de fusées votan-
tes; partout des populations en fête accourant sur notre pas-
sage pour nous saluer. Où, cependant, les démonstrations
de cet accueil gracieux et enthousiaste atteignirent le com-
,ï Google
70
ble ce ftjt aux confins des communes d'Almeirim et de Sal-
vaterra: outre les autorités il y avait des centaines de nou-
veaux campînos, en costume, représentés par les riches pro-
priétaires de ces lieux et par leurs gens.
Après notre passage la scène devient très animée, in-
descriptible; nos voitures en deux, trois files, à l'aventure,
suivaient des chemins indéterminés que les conducteurs, les
uns après les autres, se frayaient dans cette campagne ou-
verte. Les cavaliers qui flanquaient les files de voitures,
tantôt se livraient à des courses effrénées perçant les files,
tantôt prenaient des altitudes pleines de grâce et d'agilité, si-
mulant une véritable fantasia arabe, que non seulement
la nature et l'aspect du terrain, mais aussi l'ardeur du so-
leil rendaient encore plus vraisemblable.
Il était presque midi lorsque nous arrivâmes au mon-
ticule, Moita do Sébastian, où l'on avait pratiqué une large
et profonde tranchée afin que nous pussions examiner la
structure du Itioekkenmoedding et tous ses détails. Au fond
de la tranchée, et sur des mottes de terre qu'on avait lais-
sées iH situ, on voyait, ça et là, plusieurs squelettes humains
rencontrés dans l'excavation. Le tumulus ou monticule au-
dessous d'une strate de terre végétale, était entièrement for-
mé par les débris de coquilles comestibles atteignant la hau-
teur de presque deux mètres, mêlés à quelques galets, à de
menus et nombreux fragments de charbon, à de rares éclats
de silex et à des ossements également rares. L'importance
du monument préhistorique se montrait dans toute son évi-
dence et nous avons eu l'occasion de faire sur place bon
nombre d'observations.
Plus tard, sous la même tente qui nous avait abrités à
Otta, on nous servit un lunch magnifique; et tandis que
cela se passait sous la tente, on avait improvisé des repas
,ï Google
7'
frugaux sur le sol même, à Pombre des hauts chênes, autour
desquels se groupaient plusieurs de ceux qui nous avaient
suivi à jVIugem ainsi que les personnes qui en grand nombre
nous avaient attendus au lieu même des explorations.
Tandis que la plupart des congressistes prenaient plai-
sir à contempler cette scène et jouissaient de la fraîcheur
relative que nous procurait la tente, un certain nombre, gui-
dés par M. Delgado, se rendirent à un autre tumulus sem-
blable, que l'on connaît par le nom de Cabeço da Arruda.
On y avait aussi fait faire des excavations spéciales i
cause de notre visite, et il faut ajouter que ce tumulus était
en lui-même plus important, plus riche en objets remarqua-
bles et en données scientifiques que celui qu''on avait précé-
demment examiné.
L'excavation avait plus d'étendue, et elle se prêtait fort
bien à faire connaître la manière dont le tumulus avait été
sucessivement formé, et à démontrer que les squelettes hu-
mains qui s'y trouvaient, apartenaient à des individus con-
temporains des mangeurs de mollusques qui ont vécu sur
la tombe de leurs parents ou de leurs compagnons, et y ont
laissé une quantité énorme de valves de mollusques sem-
blables, généralement réduites à des fragments très menus.
Gomme produit des fouilles faites avant notre arrrivée
on voyait un grand nombre d'objets vers la partie centrale
de l'excavation, lesquels on été mis gracieusement à notre
disposition. Après que chacun de nous eut fait une ample
provision d'os, de silex et de coquilles, nous reprîmes le che-
min pour rejoindre nos confrères. Ayant retrouvé nos voi-
tures nous passâmes par la route que nous avions suivie le
matin. Vers 7 heures du soir nous nous trouvions à San-
tarem, et à 9 heures nous rentrions à Lisbonne rapportant
le souvenir de Tune des plus belles journées que nous ayons
,ï Google
passées, embellie par un accueil si plein de courtoisie et de
démonstrations de sympathie, et rendue si intéressante par
les monuments préhistoriques examinés, lesquels, malgré
leur analogie avec les kioekkenmoeddings du Danemark,
n'en sont pas moins une spécialité bien marquée de la vallée
du Tage.»
,ï Google
EXCURSION A CASCAES ET CINTRA
Le 28 septembre, à 7 heures du matin, les membres du
Congrès furent conduits à bord du transport de guerre
YAfrica dans des chaloupes de la marine royale.
Pendant le trajet de Lisbonne à Cascaes, les congres-
sistes purent admirer le magnifique panorama qu'offre l'es-
tuaire du Tage illuminé par un soleil splendide. On voyait
au sud, les falaises d'Alfeite, d'une cinquantaine de mètres de
hauteur, constituées par les sables tertiaires, à teintes rou-
ges et jaunes qui s'étendent jusqu'aux contreforts de l'Ar-
rabida. A la suite se dessinait la pointe de Cacilhas avec
ses grands magazins de vins et de liége, puis on signalait le
fort d'Almada et la série de collines, plus ou moins abruptes,
constituées par la molasse marine et qui, s'étendant jusqu'à
l'Océan, forment vers le sud la côte maritime.
Le long de la rive droite la ville de Lisbonne s'étalait
sur des pentes tantôt douces, tantôt rapides, formées aussi
par la molasse marine. On voyait la vallée d'Alcantara, qui
présente des sections très intéressantes du crétacé supérieur
,Goo|!!^Vy
ou calcaire à Rudistes. On remarquait en haut le vaste pa-
lais d'Ajuda, où deux jours auparavant le Roi Dom Louis
avait reçu les congressistes. En bas, de nombreux palais
entourés de jardins présentent une luxuriante végétation en
grande partie exotique. Les collines rougeâtrcs et brunâtres
qui donnent un aspect si caractéristique à cette partie de
la rive droite du Tage, doivent leur existence à des déi>ôts
qui précédèrent et qui accompagnèrent les épanchements
basaltiques, qui ont eu un si grand développement aux en-
virons de Lisbonne, surtout dans la contrée qu^on avait de-
vant les yeux. Ces basaltes, se faisant jour à travers les
grès et les calcaires crétacés, forment un lambeau de terrain
très irrégulier, ayant une longueur de 25 kilomètres et une
largeur atteignant une dizaine de kilomètres.
Cette formation basaltique est, par exemple à Bemfica,
à 5 kilomètres de la mer, recouverte par des conglomérats
miocènes identiques à ceux de la charneca d'Otta, que
le Congrès avait déjà examinés; ces conglomérats sont à
leur tour recouverts en stratification concordante par la
molasse marine. Celle-ci, enfin, supporte des couches la-
custres contenant la flore d'Azambuja et de Quinta do
Bacalhao. Par contre, aux bords du Tage, la molasse ma-
rine repose directement sur la formation basaltique', sans
qu'il y ait interposition des conglomérats miocènes.
On passe devant la grande fabrique de cordes et de voiles
pour la marine {Cordoaria), fondée par la reine Dona Ma-
ria I. Puis on voit le monument grandiose qui rapellc les na-
vigations et les découvertes des portugais au xv et xvi siè-
cles. C'est le majestueux monastère — Os Jeronymos^ élevé
par le Roi Dom Manuel, édifice remarquable surtout par son
architecture dite Manuelina. Aujourd'hui il est, en partie,
occupé par un orphelinat portant le nom de Casa Pia, dans
^
„Google
lequel un grand nombre d'enfants reçoivent une éducation
soignée.
On est près de l'embouchure du Tage. Devant les yeux
des congressistes se dresse la gracieuse tour de Belem, que'
la mer entourait complètement il y a deux siècles,
A mesure qu'on s'avance, on continue d'observer les
basaltes et quelques lambeaux de la molasse marine jusqu'à
l'embouchure du fleuve, où les calcaires du crétacé supé-
rieur et inférieur forment les falaises devant lesquelles
passa VAfrica avant de mouiller dans la rade de Cascaes,
petite ville avec citadelle où la famille royale a l'habitude
de séjourner une partie de l'automne.
La ville était tout en fête. L'escadre cuirassée fran-
çaise, qui venait de passer quelques jours dans le port de
Lisbonne, s'y était arrêtée pour prendre part à la fête de
l'anniversaire du Prince royal Dom Carlos. Elle salua VAfri-
ca^tt tandis que l'on jouait la Marseillaise abord du vaisseau
portugais, on entendait l'hymne royal portugais résonner sur
l'escadre française, qui, ainsi que VA/rica, était entièrement
pavoisée.
On descend à terre et, traversant la ville, on va visi-
ter les grottes de Poço Velho. C'est là que le secrétaire gé-
néral, M. Carlos Rîbeiro, a fait d'importantes et fructueuses
découvertes. Il y a recueilli en abondance des squelettes hu-
mains, des os d'animaux, des coquilles marines, et une gran-
de quantité de magnifiques objets d'industrie de l'âge de la
pierre polie, tels que : vases en terre de grandeurs et de formes
diverses, des couteaux et des pointes de flèches en silex, des
plaques de schiste ornées de dessins, des perles et d'autres
pièces d'ornement, en jais, en callaïs et en serpentine ; des
couteaux et des nucléus de quartz hyalin et enfumé ; des os
longs fendus et travaillés, des stylets, des plaques, des pen-
,ïGoO'
«1^^
deloques et d'autres pièces en os; des haches en pierre po-
lie, des cailloux roules et usés; des plaques et d'autres ob-
jets sculptés de calcaire, etc.
Après un rapide examen de ces grottes, les membres
du Congrès se rendirent à bord de VAfrica pour déjeûner,
après quoi ils débarquèrent pour prendre les voitures qui
devaient les conduire à Cintra.
Ici nous ne pouvons mieux faire que de reproduire la
description qu'a donné M. Cotteau'.
« Pendant longtemps la route est difficile et mon-
tueuse; bordée d'opuntias et d'agaves gigantesques, elle tra-
verse une contrée aride, desséchée, à peine cultivée. Aux
approches de Cintra l'aspect du sol change;' la verdure re-
paraît, et bientôt devant nous s'élève une haute montagne,
couverte d'une végétation luxuriante, au milieu de laquelle
se montre çà et là d'énormes roches de granité grisâtre et
que domine le château royal de Pcna.
«Nous franchissons en voiture les premiers contreforts
de la montagne; chemin faisant, j'examine les blocs de gra-
nité qui jonchent de tous côtés le sol, d'autant plus intéres-
sants à étudier qu'ils sont d'origine relativement récente et
appartiennent à l'époque tertiaire. Au premier aspect, on
croirait que ces roches ont été entassées ainsi pêle-mêle, à
la suite de quelque violent cataclysme ; mais il n'en est rien;
leurs formes bizarres et leur dispositions variées sont dues
simplement aux influences atmosphériques.
«A mi-côte à peu près, nous laissons nos voitures et
nous traversons à pted des jardins remplis de fleurs qui at-
' G. Cortcau. Congrès International d'Anthropologie et d'Archéologie
préhistoriques. Session de Lisbonne. Notes de voyage, p. ï3, 24. Auseire,
,ï Google
77
teignent des dimensions que je n'avais vues nulle part; les
hortensias bleus et roses forment de véritables buissons; les
héliotropes, les fuchsias sont grands comme des arbres;
puis nous entrons dans le parc royal; pendant près de deux
heures, toujours en montant, nous marchons au milieu d'ui —
végétation splendide. Les arbres les plus rares croissentav
une vigueur extraordinaire. Ici ce sont des groupes (ï'Ara
caria imbricata, excelsa et brasiliensis gigantesques, d
Eucalyptus énormes, des pins de toute espèce; là ce so
des Leucûdeniiron qui font briller au soleil leurs feuilles d'i
aspect métallique; plus loin c'est un véritable bois de c
mélias, dont la hauteur dépasse plusieurs mètres; au milji
de tout cela circulent des eaux vives et tombent des ca
cades qu'on franchit sur des ponts d'un aspect des plus p
toresques. Les pentes deviennent plus rapides, et avant d'à
river au château, nous grimpons sur des ânes, préparés poi
faire cette dernière partie de l'ascension.
«Le château de Pena fait corps pour ainsi dire av'
le rocher de granité qui termine la montagne. Ses tours cr
nelées, son architecture appartenant à tous les styles, s
portes garnies de sculptures, ses murailles revêtues de ca
reaux émaillés, ses terrasses d'où l'on découvre une vue m
gnifique sur le parc, les roches de granité et au loin sur
mer, lui donnent un caractère étrange et séduisant à la fo
Le roi D. Fernando en a fait sa résidence d'été et l'a rei
plie d'objets d'art, de meubles anciens, de tableaux, de faïe
ces précieuses. Nous n'oublierons jamais l'amabilité parfai
avec laquelle il nous en fit les honneurs.
iLa journée avançait; nous rejoignons nos voitures qi
après un long circuit, étaient venues nous attendre, et p.
une avenue qu'ombragent des arbres séculaires, nous an
vons à Cintra. La ville était en fête, et attendait le Congre
.ïGoogle
78
Sous une tente construite exprès pour nous*, un splendide
festin était préparé. Les dames de la ville avaient mis au
pillage tous les jardins de Cintra. La salle était littéralement
tapissée de fleurs les plus éclatantes et les plus rares; le
coup-d'œil était saisissant. Aussi, lorsqu'à la fin du ban-
quet, l'un de nous porta un toast aux dames de Cintra, ce
toast fut-il accueilli par d''enthousiastes applaudissements !>
Les autorités locales, la noblesse, en un mot toute la
bonne société a fait honneur aux congressistes en rivali-
sant de zèle et d^amabilités, qui étaient comme un éclatant
hommage rendu à la science.
A neuf heures on retourna à Cascaes pour assister au
bal offert par Leurs Majestés et pour lequel on avait reçu
des invitations personnelles.
«La fête était fort belle et très animée. De la terrasse
qui domine la mer on apercevait les vaisseaux portugais et
français illuminés, pavoises et lançant par intervalles des
jets de lumière électrique qui sillonnaient au loin les flots;
c'était féerique. A trois heures du matin nous quittons le
bal et à sept heures VAfrica nous ramenait à Lisbonne*.»
' Sur la terrasse de l'Hôtel Victor.
» G. Cotteau. Loc. Cit. p. î5.
,ï Google
I
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:0MMUNICATIONS
ISCUSSIONS
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COMMUNICATIONS ET DISCUSSIONS
I
ÉPOQUE TERTIAIRE
L'HOMME TERTUIBE EH PORTUQAL
M. Carlos Ribeiro
On se rappelle la manière dont furent reçues dans la
première moitié de ce siècle, les découvertes faites par di-
vers naturalistes et géologues sur certains points de l'Eu-
rope, relatives à l'existence de l'homme fossile.
Une école dogmatique et intransigeante, comme celle
qui avait condamné la loi du mouvement de translation de
la terre, les repoussa, nonobstant la lumière des faits qui
les démontrait brillamment.
Tout le monde sait que la découverte faite dans le
comté de Suffolk (Angleterre) en 1797, de silex travaillés
de la main de l'homme, associés à des ossements d'animaux
d'espèces disparues et dont John Frère a donné une rela-
tion dans un mémoire publié en 1801, est un fait qui, mal-
gré son importance, demeura inaperçu pendant plus d'un
demi-siècle. Il le serait peut-être encore aujourd'hui si M.
Evans n'en avait pas donné connaissance au monde scien-
tifique, en 1869, dans le 4*"" volume des Proceedingsoflhe
Society of Auitquaries.
82
Le squelette fossile de l'homme, découvert par l'habUe
géologue A. Boue, en i823, dans les dépôts alluviens du
Rhin, associé aux restes d'animaux d'espèces éteintes, fut
condamné de même par les naturalistes à un oubli lamenta-
ble.
Le dr. Schmerling n'a pas été plus heureux avec ses
admirables découvertes dans les cavernes de la Belgique,
qu'il a explorées avec tant de science et de si beaux résul-
tats. Ces découvertes, et d'autres faites depuis, ont rendu
évidente l'existence de l'homme préhistorique.
Toutefois, dans les Hautes régions scientifiques la sanc-
tion officielle continua d'être refusée à cette vérité déjà ac-
quise pour la science. Cependant, malgré l'opposition de
quelques personnes plus ou moins autorisées et l'indiffé-
rence de beaucoup d'autres, il y eut des naturalistes qui
non seulement accueillirent l'idée de l'existence de l'homme
antédiluvien comme une vérité, laquelle s'accordait avec les
lois de la paléontologie, mais qui, exempts d'idées précon-
çues, ne connaissant d'autre autorité que celle qui dérive
des faits bien confirmés et n'ayant pour but que la recher-
che de la vérité, ont repris ces travaux, jusqu'à ce que,
ayant obtenu des preuves nombreuses, ils triomphèrent de
tous les doutes et de toutes les oppositions. En 1860 l'exis-
tence de l'homme antédiluvien fut enfin proclamée.
A l'occasion oij ce triomphe venait d'être obtenu, on
avait déjà constaté d'autres faits d'une grande importance
pour la paléontologie des mammifères, et qui, tôt ou tard,
devaient rendre absolument nécessaire l'existence de l'hom-
me à l'époque quaternaire, et frayer le chemin à l'admission
de celle d'un être intelligent existant à l'époque tertiaire.
M. Desor dans son opuscule sur l'homme pliocène de
la Californie écrivait:
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- oAinsi se réalisèrent les prévisions de notre ami Qui-
net, qui ne pouvait admettre que l'humanité, la plus belle
fleur de la création, fut éclose au milieu des marécages et
brouillards de l'époque glaciaire; elle devait remonter plus
haut à une époque où le climat était plus propice et le ciel
plus clément.i
Du moment où l'étude de la flore fossile miocène, faite
par les plus grandes autorités dans la science, nous dit
que le climat de cette époque dans les régions de l'Eu-
rope était approprié à la vie d'un grand nombre de mam-
mifères des principales divisions de la faune actuelle; dès
que les quadrumanes anthropomorphes se montrèrent, pen-
,dant cette période, si franchement caractérisés; des qu^il
est certain que ce climat était plus doux et plus propice au
développement de la vie que les climats nébuleux de la pé-
riode diluviale, où, du reste, l'homme se retrouve dans tou-
tes les manifestations de son existence; dès que nous voyons
l'homme fossile de l'Amérique, enfin, y coexister avec les
mastodontes; il ne nous semble pas qu'il y ait des objections
sérieuses à opposer à ce que, dans toutes les régions du
globe, l'on entreprenne des recherches dans le terrain ter-
tiaire moyen, afin de découvrir les vestiges de l'homme.
Le profond paléontologiste Edouard Lartet le pensait ainsi
il y a plus de quarante ans.
Effectivement, nous savons tous qu'en i836, ce savant
avait découvert dans les couches du terrain miocène de San-
san, département du Gers, le Pliopithecus atitiqiius représenté
par une mandibule avec la denture complète consistant en
i6 dents en série continue, c'est-à-dire, la même formule
dentaire de l'homme et de quelques singes supérieurs.
Il faut remarquer que, jusqu'à cette époque, on avait nié
-^^rv,
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simultanément l'existence du singe fossile, avec les mêmes
fondements que celle de l'homme fossile.
Et ce n'est pas seulement cette espèce d'anthropomor-
phe qui a été découverte; le Diyopilhecus Fontam\ espèce
qui a été de même rencontrée dans les couches miocènes de
la France, est un singe d'une organisation encore supérieure
à celle du Plioptlhecus antiquus.
Lartet, parlant de l'homme fossile, n'excluait pas l'idée
de la possibilité de son apparition à l'âge miocène. En effet
se rapportant aux explorations faites à Sansan, où avec
tant de savoir et de succès il obtint des collections magni-
fiques de mammifères fossiles de l'âge miocène, il fait ob-
server que 4dans une faune oii dominent encore des espè-
ces animales qui lui étaient hostiles, l'espèce humaine de-
vait être très gênée dans son développement.» «Ce n'est—
disait-il encore — qu'après la disparition successive de tant
d'ennemis redoutables, que l'homme aura pu acquérir une
prépondérance décisive sur les restes de cette création qu'il
a ensuite modifiée, soit par l'extermination des espèces nui-
sibles, soit par ta propagation de celles réduites à la do-
mesticité.*
Et il ajoutait encore :
«Un type supérieur, celui du genre humain, ne s'y est
pas rencontré; mais de ce que sa place manque dans les
formations anciennes, il ne faudrait pas se hâter de conclure
qu'il n'existait pas. »
Les découvertes des deux espèces d'anthropoïdes dtées,
malgré leur importance, resteraient sans effet immédiat sur
le développement de l'histoire naturelle de l'homme, si la
gie n'était pas venue se placer à côté de la paléonto-
\
„Google
85
logie pour en démontrer l'authenticité et la haute valeur
scientifique.
En effet, les explorations géologiques faites en Auvergne
ont conduit à la découverte d'un document important pour
la démonstration de l'existence de l'homme miocène dans
cette région; ce fut un silex taillé intentionnellement, extrait
en 1870 par M. Tardy d'un conglomérat près d'Auriliac, et
dont l'âge est caractérisé par les restes fossiles du Dino-
therium giganleiim^ Machaerodus latidens et d'autres es-
pèces.
La découverte du crâne humain de Calcaveras dans la
Sierra Nevada (Californie) n'a pas été de moindre impor-
tance: M. Desor en a donné dernièrement une notice. Ce
crâne fut rencontré, à 40 mètres de profondeur, dans un puits
ouvert pour l'exploitation des couches aurifères dans cette
localité, et il était associé à des restes de mastodonte, d'hip-
parion et d'autres mammifères fossiles.
Les explorations paléontologiques de l'illustre abbé Bour-
geois conduisirent cet habile géologue, non seulement à la
découverte des silex taillés dans les couches de VElephas
meridionalis de Saînt-Prest, mais encore, dans les couches
qui font partie de la série des calcaires de la Beauce, for-
mation caractérisée par les restes de diverses espèces de
mammifères, parmi lesquelles figuraient le Pliopithecus anli-
quus^ le Dinotherium Cupt'eri, le Mastodon angustidens et
d'autres.
Des explorations entreprises en Portugal depuis environ
dix-huit ans amenèrent à des résultats pareils, comme j'ai
déjà eu l'honneur de communiquer au Congrès, pendant sa
gime session à Bruxelles. C'est donc la deuxième fois que je
m'adresse aux illustres savants qui m'écoutent dans ce mo-
ment, sur le sujet de la question de l'homme tertiaire.
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Malheureusement, je ne peux soumettre à l'examen du
Congrès une pièce quelconque du squelette humain, retirée
des couches tertiaires que nous avons explorées; nous savons
tous combien il est, et sera toujours difficile d^obtenir de tels
documents.
Sur ce point, nous n'avons été ni plus ni moins heu-
reux que les autres géologues qui se sont occupés de ces
investigations dans les couches tertiaires. Nous pouvons,
cependant, ofirir à Pexamen du Congrès un certain nombre
de silex où le travail intentionnel est plus ou moins appa-
rent, et qui ont été extraits des couches miocènes, comme
les membres du Congrès pourront vérifier facilement sur les
nombreux exemplaires mis à leur disposition dans le musée
de la Section des Travaux géologiques, ou sur les lieux mê-
mes. Les marques de percussion ne manquent pas sur la
plupart de ces exemplaires, mais les percuteurs rencontrés
sont assez rares ou peu reconnaissables. Quelques-uns de
ces percuteurs, cependant, ne permettent aucun doute sur
leur destination, et paraissent avoir servi en différentes pé-
riodes de rage miocène, s'il est permis de tirer une telle in-
férence des restes de la patine qui recouvrait la pièce avant
qu'elle fût taillée.
Dans ces âges reculés, la tendance était déjà dominante
de donner aux instruments en pierre la forme, d'ailleurs rude,
de couteaux, de grattoirs, de haches et de pointes de lance,
le tout exécuté très-imparfaitement, outre plusieurs formes
encore plus mal déterminées, que Pexamen attentif de no-
tre collection vous fera connaître.
Passant à un autre ordre de considérations, nous di-
rons que l'examen géologique de cette partie du pays nous
a appris que les mers de la période éocène ne Pont jamais
couverte, mais que dans la période immédiate, elle fut alter-
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nativement occupée par les eaux des lacs et par celles de
la mer.
La même étude nous a révélé également que la formation
des dépôts de la période miocène fut accompagnée de per-
turbations, locales il est vrai, mais violentes, et qui tout na-
turellement étaient contraires au développement et à la con-
servation de la vie.
Effectivement, les émissions basaltiques qui se mani-'
festèrent aux alentours de Lisbonne, traversant les forma-
tions crétacées, se déversant principalement sur les couches
de l'étage à Rudistes. les disloquant profondément et pro-
duisant dans le sol de grandes inégalités, ont préludé à la
formation des dépôts de Page miocène. Ce fut à travers les
eaux d'un grand lac que ce phénomène s'accomplit; mais
durant la période de ces émissions il y eut des intervalles de
calme relatif dans cette partie du sol, ébranlée par les con-
vulsions souterraines. Ce calme se produisit dans des con-
ditions telles, qu'il permit l'apparition de quelques espèces
de testacés dans cette région. On les retrouve aujourd'hui
dans certaines parties des couches argileuses rouges, inter-
stratifîées au milieu des nappes de basalte. Ces espèces ont
été examinées par M. Tournouër, qui les a décrites et dé'
terminées de la manière suivante:
Bidimits Ribeirot.
Bulimus? Oiisiponensis.
Pupa Lusitanica.
Lorsque l'intensité de l'action volcanique diminua, les
couches de conglomérats, de grès et d'argile miocènes se
précipitèrent au fond du lac; mais l'action volcanique ne
s'arrêta pas soudainement; au contraire elle continua de se
manifester durant la déposition de ces couches, comme on
peut le voir sur toute la surface qu'elles occupent depuis
rv
Bemfica, près de Lisbonne, jusqu^à Santo Antao do Tojal.
Voici, à notre avis, la raison pourquoi les silex taillés sont
très rares dans cette bande de terrain miocène, où nous
avons recueilli à peine deux fragments de silex, qui se trou-
vent dans notre collection et que nous croyons dénoncer
quelque travaB intentionnel.
Les commotions et les ébranlements du sol, inhérents
à ces émissions, ne se firent pas sentir à de grandes distan-
ces, et conséquemment les ouvriers de cette époque, s'éloi-
gnant de ces parages, établirent leurs stations au bord du
lac, sur le versant de la chaîne qui passe à Alemquer. En
effet, c'est sur la ligne des couches miocènes qui s^étend du
gud au nord depuis Carregado jusqu'à Cercal, non loin de
ces versants, que l'on rencontre le plus grand nombre de
silex taillés.
Les conditions dans lesquelles se rencontrent ces silex
au milieu des couches, sont les suivantes:
1." Faisant partie intégrante de la couche- même.
2." Ayant les arêtes vives ou bien conservées, montrant
qu'ils n'ont pas subi de transport à de grandes distances.
3." Ayant une patine plus ou moins épaisse de la cou-
leur de la roche dont ils font partie.
Il reste encore à dire quelques mots sur l'âge des cou-
ches où l'on a rencontré ces silex taillés.
Les caractères que ces couches présentent sont de deux
ordres, l'un géologique proprement dit, l'autre paléontôlo-
gique.
Parmi les caractères géologiques nous avons à consi-
dérer, la composition générale de la formation, sa puissance
et ses accidents.
La formation qui contient les silex taillés commence
par des couches de calcaire blanc sablonneux, lesquelles se
,ï Google
montrent surtout aux environs de Carnide (voisinage de
Lisbonne), et depuis le pont de Carregado jusqu'à Abri-
gada.
Ces couches occupent une bande de largeur variable
de 2 à 20 mètres, interrompue çà-et là, disparaissant même
sur quelques points. Dans l'ordre ascendant on voit se suc-
céder un étage de couches arénacéo-argileuses, rougeàtres,
d'épaisseur variable entre 5o et 100 mètres, quelquefois
davantage, qui contiennent les silex taillés.
Recouvrant cet étage on voit la série fossilifère qui
plonge sous un étage remarquable de couches de calcaire
avec Planorbes et Limnées et dont la stratification et l'as-
pect minéral et pétrographique ressemblent plus aux cal-
caires secondaires crétacés ou jurassiques, qu'aux formations
plus modernes. Cet étage supérieur montre son plus grand
développement entre Thomar, Sanlarem et Almoster.
Ces trois séries de couches ont plus de 200 mètres
d'épaisseur.
Les sables pliocènes ont couvert la formation précé-
dente, ils forment de grandes étendues se développant sur-
tout au sud de la vallée du Tage.
Outre les caractères que présentent les couches miocè-^
nés et qui ne se rencontrent pas dans les dépôts post-ter-
tiaires, it faut remarquer que ces couches, surtout les plus
anciennes, se trouvent en quelques endroits déplacées de
leur position horizontale, comme si elles avaient été en-
traînées par le soulèvement des calcaires secondaires des
bords primitifs du bassin, et leurs plans de stratification
forment des angles de lo" à 40' au-dessus de l'horizon. On
constate ce fsEît près du pont de Carregado, à l'entrée de la
ville d'Alemquer et en d'autres parties de cet affleurement
jusqu'au village d'Abrïgada.
,ïGeX)'
t\_
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Les phénomènes les plus remarquables dus à Paction
dynamique, postérieurs à cène formation, sont les failles
qui ont produit la vallée principale et les vallées secondai-
res de Sacavem, de l'Alviella et de PAlmonda, et les énor-
mes dénudations de la plus grande partie des sables plio-
cènes déposés sur le sol adjacent, du côté droit du Tage, et
d^une partie des couches miocènes, ainsi que le dépôt pos-
térieur des grès grossiers avec des quartzites taillés, qui
vinréht couvrir partiellement le haut des flancs de ces val-
lées.
Nous ferons à peine mention des calcaires concrétion-
nés quaternaires qui couvrent les calcaires lacustres miocè-
nes dans les vallées de l'Alviella et de TAlmonda, formant
de grands dépôts et remplissant les cavernes.
Le fait géologique le plus important qui caractérise
cette formation miocène, c'est qu'elle se trouve resserrée en-
tre les formations secondaires etia formation sableuse plio-
cène, représentée, sur la rive droite du Tage, par le grand
lambeau sableux qui s'étend entre Azambuja et Cartaxo et
qui à son tour est recouvert par les dépôts diluviens an-
ciens.
Si les caractères donnés de cette formation, et qui lui
assignent sa place dans la série des temps géologiques, ne
suffisaient pas, nous aurions les caractères paléontologiques,
qui mettent tout-à-faii hors de doute l'âge de cette forma-
tion. Ces caractères se manifestent dans une série de cou-
ches qui occupent la partie supérieure de cette formation
entre les villages d'Otta et d'Azambuja; cette série est cons-
tituée par des couches de grès et d'argiles, qui dans quel-
ques endroits passent à des marnes et à des calcaires, et
dont l'épaisseur ne dépasse pas 8 mètres. Leur position est
sensiblement horizontale, de sorte que les affleurements res-
,ï Google
9'
pectifs suivent à peu près des courbes de niveau, dont la
moyenne a une élévation d'environ 70 mètres.
Cette série se compose de deux parties très distinctes :
rinférieure renferme des plantes Fossiles, et la supérieure
des restes d'animaux fossiles.
Ces plantes ont été déterminées par M. Oswald Heer,
qui a bien voulu en étudier une collection que nous lui
avons envoyée. Ce savant naturaliste à reconnu les genres
et les espèces suivants:
. Podocarpiis eocenka, Ung.
Glyptostrobus europaeus, Brgn.
Pinus sp.
Carex sp.
Populus mutabilis, Hr.
Popultis balsamoides, Goepp. ''
Populus glandiiiifera, Hr.
Juglans bilinica, Ung.
Cinnamommum polymorphim, A. Braun, sp.
Pimelea octiingensis, A. Braun, sp.
Fraxinus praedicta, Hr.
Panax circularis, Hr.
Nissidium australe, Hr.
Trapa sileSi'aca, Goepp.
Phjrllites serriilatus, Hr.
Quant aux restes d'animaux que nous avons reconnus
dans les couches de cette série, nous avons obtenu les espè-
ces ci-dessous énumérées et qui ont été déterminées par
M. Gaudry:
Mastodon sp.
Sus provincial is, Gcrv.
,ïGot>
9^
Sus choeroides, Pomel.
Sus sp.
Listriodon ?
Rhinocéros minulus, Guv.
Antilope rectiœrnis, Serr.
Hyoemoschus'i
Hipparion gracile^ Kaup.
Eusmilus perarmatus, Gerv.
Ils se trouvent sur différents points de la courbe de
niveau comprise entre les landes à l'est d'Otta et au nord
d'Azanibu)a.
Ce fut après la lecture de cette communication que le
Congrès visita le gisement.
Au retour de Pexcursion à Otta, la commission nommée,
sous la proposition de M. Capellini, pour l'examen des silex
présentés par M. Ribeiro, et composée de MM. Capellini,
CaZALIS de FoNDOUCE, CotTEAL', EvANS, DE MoRTILLET, Rl-
BEiKo, ViLANOVA, ViRCHOw et Choffat, rappoFteuF, adopta
les conclusions suivantes, rédigées par M. Choffat.
Oonolnaiona dâ la oommisalon ohorgée de 1'
dQB Bllez tronTâa a Otta
La commission a trouvé que les différents points se
rapportant à ce sujet peuvent être élucidés par quatre ques-
tions:
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i." Ya-l-H des conchoïdes de percussion sur les st'lex
exposés et sur ceux qui ont été trouvés pendant l'excursion?
La commission déclara à runanîmité qu'il existe des con-
choïdes de percussion, et que quelques pièces en présentent
même plusieurs.
2." Le conchoîde de percussion prouve-til la taille in-
tentionnelle?
Avis différents, que l'on peut résumer en ce que M. de
Mortillet considère un seul conchoîde de percussion comme
suffisant pour prouver la taille intentionnelle, tandis que M.
Evans croit que plusieurs conchoïdes présentés par une
même pièce ne donnent pas la certimde d'une cassure in-
tentionelle, mais seulement une grande probabilité.
3." Les silex taillés trouvés à Otta, proviennent-Us de
la surface ou de l'intérieur des couches?
Avis divers : M, Cotteau les croit tous de la surface,
en ce sens que "ceux qui ont été recueillis à l'intérieur y au-
raient été introduits par suite de crevassements des couches.
M. Capellini croit, au contraire, que les pièces recueil-
lies à la surface proviennent de l'intérieur des couches, dont
elles auraient été extraites par l'érosion.
MM. de Mortillet, Evans, Cartailhac en admettent de
deux provenances, les unes tertiaires, tes autres paléolithi-
ques ou néolithiques:' il serait facUe de les distinguer par
leur forme et leur patine.
4." Quel est rage du gisement des silex dOtta?
Après une discussion de quelques instants, les membres
de la commission se déclarèrent en parfait accord avec les
faits observés par les géologues portugais.
,ï Google
Disoassion
M. DE MoRTiLLET. .\1. CaHos Ribeiro a présenté en 1871,
à l'Académie Royale des Sciences de Lisbonne, des silex et
des qiiartzites tailles provenant des assises tertiaires de la
vallée du Tagc, L'année suivante il a soumis les mêmes si-
lex à la réunion du Congrès international d'anthropologie
et d'archéologie préhistoriques de Bruxelles. Ces silex n'obtin-
rent pas un grand succès. L'abbé Bourgeois, lui-même, ne
reconnut tout d'abord aucune trace de travail intentionnel.
Un nouvel examen des divers échantillons lui fit pourtant
remarquer un silex évidemment taillé; malheureusement, ce
silex n'avait pas été trouvé en place. Il suspendit donc son
jugement. M. Franks seul déclara qu'à son avis plusieurs
des silex des environs de Lisbonne, présentés par M. Ri-
beiro, étaient taillés intentionnellement.
Profitant de l'Exposition internationale de Paris, en
1878, M. Ribeiro exposa, dans la galerie des sciences anthro-
pologiques, une série de silex et de quartzites tertiaires.
Les ayant tous examinés avec le plus grand soin, ■j'ai recon-
nu qu'il y en avait vingt-deux portant des traces indubita-
bles de travail. Tous les paléoethnologues, auxquels mon
collègue et ami Emile Cartailhac et moi avons montré ces
échantillons, ont été du même avis. M. Cartailhac les a fait
photographier en majeure partie et en a figuré huit dans les
Matériaux de l'année dernière. Le travail intentionnel de
es silex et quartzites est très bien établi, non seulement par
;ur forme générale, caractère qui peut être trompeur, mais
ncore et surtout, ce qui est plus concluant, par des plans
le frappe très nets et par des conchoïdes de percussion fort
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95
développés, parfois doubles, en relief sur une face, en creux
sur la face opposée. Il ne saurait donc y avoir de doutes.
Ces divers échantillons sont taillés à grands éclats; presque
tous affectent une forme triangulaire sans retouches, qu'ils
soient en quartzite ou en silex. Plusieurs montrent encore
sur les plats et même dans les conchoïdes de percussion en
creux, des traces et fragments de grès, ce qui établit qu'ils
proviennent bien des couches en place. Or, ces couches
de grès, intercalées avec des argiles et des calcûres, consti-
tuent dans la vallée du Tage une vaste formation qui, sur
quelques points, atteint 400 mètres de puissance. Les cou-
ches sont souvent disloquées, et soulevées parfois presque
jusqu'à la verticale. C'est bien là évidemment un terrain
tertiaire. Telle est du reste la détermination qu'en donne M.
Ribeiro, directeur du relevé géolt^ique de Portugal, par con-
séquent l'homme le plus compétent en cette matière.
Les membres du Congrès ont pu constater par eux-
mêmes de la manière la plus positive, non-seulement la
vérité de la découverte de M. Ribeiro, mais aussi la posi-
tion géologique précise de certains silex travaillés. Ils se
sont rendus à Otta, au milieu d'une formation d'eau douce
très puissante et très étendue. C'est un grand bassin lacus-
tre, sablo-argileux dans le centre, sablo-caillouteux sur les
bords. L'être intelligent qui taillait le silex ne pouvait lais-
ser des traces de son industrie que sur les rives du lac;
aussi est-ce sur les bords du lac qui baignait la base de
Monte Redondo qu'ont eu lieu les recherches. Elles ont été
couronnées de succès. M. Bellucci, l'habile chercheur de l'Om-
brie, a découvert en place un silex incontestablement taillé.
Avant de le détacher, il l'a montré à bon nombre de nos
collègues. Ce silex tenait fortement à la roche. Il fallut em-
ployer le marteau pour l'extraire. Sa position datait bien de
.,Ci
l'époque du dépôt. En effet, au lieu d'être à plat sur une
surface qui aurait pu se colmater et se consolider plus tard,
il était fixé à la partie inférieure de la lèvre supérieure d'une
excavation d'érosion atmosphérique. Il est donc impossible
de désirer une démonstration plus complète en ce qui tou-
che la présence des silex dans le gisement.
Reste à déterminer l'âge de ce gisement?
Si les silex taillés demeuraient près du bord, il n'en était
pas de même des débris de végétaux et des corps d'animaux
qui flottaient sur l'eau. Ils étaient poussés plus avant dans
le lac et finissaient par se déposer au milieu du sable et du
limon. Ce sont surtout les limons qui nous ont conservé ces
divers fossiles. Eh bien, dans une couche limono-sablcuse,
à 3 kilomètres et demi au sud-est de Monte Redondo, cou-
che appanenant, sans aucun doute, au lac dont nous nous
occupons, nous avons pu voir, en place, des ossements et
surtout des mâchoires d'hipparion, animal éminemment ter-
tiaire. La flore des couches de ce grand lac tertiaire, étudiée
par M. Oswald Heer, et la faune par M, Albert Gaudry,
montrent que ce lac appartient au tortonien ou miocène su-
périeur.
Grâce aux patientes et savantes recherches de M. Car-
los Ribeiro, le Congrès a donc pu constater qu'à l'époque
tortonienne, il existait dans le Portugal un être intelligent
éclatant le silex, tout comme l'homme quaternaire.
M. Evans: Il y a probablement dans les couches ter-
tiaires quelques éclats offrant des bulbes de percussion. Il
y a aussi à la surface du sol des silex appartenant au pa-
léolithique ou au néolithique, mais, dans tous les cas, pos-
térieurs à l'âge des couches. Mais les silex de ce genre qui
ont séjourné si longtemps à la surface du sol, pourquoi ne
,ï Google
97
seraient-ils pas colores au contact du grès rouge, imprègnes
par du sable et de l'argile? Si on les lavait on verrait dis-
paraître ces traces superficielles.
Quant à la provenance des silex qui sont là sous nos
yeux, que peut-on penser? On nous a dit: voilà dix ans que
l'on recueille de ces silex, mais on ne sait pas d'où ils vien-
nent, de quel point précis, de quelle hauteur dans la couche!
En outre ils n'ont pas de trace d'usure, d'utilisation. Ce
sont, peut-être, des éclats, des rebuts de fabrication; mais
alors où sont les instruments? Je pense, enfin, que ces si-
lex ne sont pas tous des bords du lac.
Quant au côté géologique, ce serait une impertinence
que de venir contester les conclusions des géologues du pays.
Sur place j'ai observé un grand plateau; de la carrière
où l'on a trouvé la faune, on pouvait juger de la hauteur
relative des couches, on pouvait se demander comment une
dénudation purement aérienne aurait pu produire une telle
action, un tel résultat. Non, il faut faire intervenir les cou-
rants d'eau douce ou les courants marins; et alors on peut
très-bien trouver dans les couches superficielles des vestiges
des époques où la dénudation du plateau s'est ainsi pro-
duite.
Combien de milliers de siècles se sont écoulés depuis
ces temps; l'homme devait être assez différent de ce qu'il
est aujourd'hui; M. Dawkins prétend l'établir. Si l'homme
existait à l'époque tertiaire, il faut des preuves plus sérieu-
ses qu'un fragment de silex. Je suis bien fier de" l'antiquité
de ma famille, mais il faut qUe cette antiquité s'appuie sur
des fondements plus solides qu'un seul bulbe de percus-
sion.
M. Capellini: Je crois que les silex sont taillés; si vous
ne l'admettez pas, il vous faudra douter aussi de tous les
silex de l'âge de la pierre. Je dis cela pour le petit saint
Thomas qui vient de parler.
Mais d'où viennent ces silex? Je regrette qu'ont n'ait
point pratiqué des tranchées;' mais j'ai vu en place le silex
aperçu par M. Bellucct. C'est là un fait, il me suffît.
La question géologique n'est pas discutable; la coupe
était parfaitement nette ; les grés passent sous les couches fos-
silifères; d'après la flore et la faune si bien étudiées, il n'est
pas douteux pour moi que nous avons là le miocène supé-
rieur. Ces terrains par leurs animaux fossiles ressemblent
à plusieurs terrains tertiaires de l'Italie, tels que celui de
Casino, près Sienne, étant peut-être un peu plus anciens,
vu que l'on n'y trouve point le tapir.
M. Vilanova: Vous venez d'entendre un beau mot
de la part de M. Capellini en appelant M. Evans le petit
saint Thomas, parce qu'il ne croit pas encore à l'homme
tertiaire. Eh bien, à présent se lève le grand saint Tho-
mas, permettez-moi la phrase, qui a besoin d'être expli-
quée. Le très honorable Evans peut être un petit saint
Thomas parce que, sachant beaucoup, il doute très peu;
mais moi, ne sachant rien, j'ai le devoir de douter de tout,
à moins que les choses ne se présentent d'une façon si
claire que le doute ne soit plus possible. Mais la ques-
tion de l'homme tertiaire en général, et celle du Portugal
en particulier ne s'offre pas à mon esprit comme je l'au-
rais désiré, sans doute à cause de la limitation de mon
intelligence. Je dois, pourtant, déclarer avec loyauté que,
relativement à l'authenticité des silex qui ont été ramassés
par les infatigables MM. Ribeiro et Delgado, je n'ai pres-
que rien à dire, car la plupart me semblent vrais, c'est-à-dire
^
„Google
99
travaillés par l'homme. Mais quant à leur ^sèment, la chose
change complètement, car d^abord je n'ai pas pu voir un seul
instrument formant partie du dépôt, tous ayant été trouvés,
au moins ceux que j'ai vu ramasser, à la surface, même ce-
lui rencontré par mon ami Bellucci en ma présence. Quant
â l'époque à laquelle on doit rapporter la formation sableuse
dans la surface de laquelle j'ai vu les instruments, sans oser
contredire l'opinion très respectable des géologues distingués
auxquels on doit la belle carte de Portugal, je dois dire que
le faciès et même la composition du dépôt qui couvre le
terrain jurassique à la base de Monte Redondo, ne sont pas
ceux qui caractérisent le terrain tertiaire du territoire espa-
gnol. L'analogie, et même je peux dire l'identité d'aspect, de
nature et des fossiles avec celui des environs de Madrid, de
Concud près de Teruel et de bien d'autres endroits en Espa-
gne, je l'ai vu au premier coup d'oeil dans la coupe d'Archino,
au moins dans la partie supérieure composée de couches de
calcaire marneux, blanchâtre, alternant avec des couches de
marnes et d'argile parfaitement horizontales. J'avoue, Mes-
sieurs, que tous les doutes relativement à l'existence de l'hom-
me tertiaire en Portugal se seraient évanouis, si nous avions
eu le bonheur de trouver des instruments en silex, travaillés
par une main intelligente, dans le vrai terrain miocène et
dans l'intérieur de quelque couche de calcaire ou des mar-
nes, à côté des fossiles caractéristiques; une coupe dans
le dépôt renfermant des silex travaillés par l'homme aurait
été décisive à ma grande complaisance. Sans le moindre
préjugé relativement à cette question dans le sens affirmatif
ou négatif, j'ai cru de mon devoir exprimer les doutes qui
confirment, ou au moins, qui sont la raison fondamentale du
qualificatif, que dans le commencement de mon discoiu's .
j'ai cru devoir m'appliquer.
,ï Google
M. Cabtaii.hac : Ce n'est pas chose commode que d'ex-
primer son opinion sur un ensemble de faits que M. Ribei-
ro et les géologues ses compatriotes ont étudié pendant des
aryiées; nous avons entrevu, nous avons passé, et mainte-
nant il faut conclure. Pour ma part, je retiendrai seulement
dans le débat les faits qui me paraissent acquis tout au
moins dans les limites de nos connaissances actuelles. Je
me suis rendu plusieurs fois dans des régions où abonde le
silex en place, et plus ou moins fracturé. Je n'ai jamais
trouvé dans ces circonstances un bulbe de percussion avec
Tensemble de ses caractères tel que M. de Mortillet vient
encore de le décrire, tel que M. Evans lui-même le présen-
tait dans ses ouvrages comme une preuve de l'action vou-
lue, intelligente, humaine. Mais j'admets que par grand ha-
sard un choc naturel, dans des circonstances d'ailleurs ra-
rissimes, a pu produire un bulbe de percussion sur un silex;
que la même pièce vienne à être une seconde fois l'objet
de la même opération naturelle, alors c'est un vrai miracle
et je n'y crois plus.
Or, voilà une pièce que je trouve dans les cartons de
M. Ribeiro, dans le choix fait par la Commission; je l'avais
déjà remarquée à l'Exposition anthropologique de Paris et
je l'avais moulée parce qu'elle a deux bulbes de percussion,
un troisième douteux, et une forme en pointe qui semble
vraiment intentionnelle. Or, cette pièce présente à sa sur-
face non pas une coloration que le lavage ferait disparaître,
elle a été lavée, mais des plaques de grès toutà-fait
adhérentes.
Je ne crois pas qu'un chimiste nous permettrait de dire
que de pareils dépôts peuvent se former et s'attacher au
. .silex qui séjourne, le temps que l'on voudra, à la surface
■ -d'un grès siliceux !
,ï Google
Cette seule pièce me suffit, à présent surtout que j^ai
vu les lieuK. Mais H y en a d'autres beaucoup mieux taillées,
et je crois bien que fa plupart, recueillies à la surface d'un
sol où manquent absolument la terre arable et toute trace
d'autre dépôt, sont réellement extraites du dépôt tertiaire
par l'érosion.
Je l'avoue, on pourrait considérer que la question est
encore douteuse tant qu'elle n'a pas l'adhésion d'un Evans;
je comprends les hésitations parce que ces petits silex mio-
cènes sont, à certains égards, bien embarrassants. Mais M.
Evans lui-même a reconnu que probablement plusieurs d'en-
tre eux, avec un ou plusieurs bulbes de percussion, prove-
naient du grès sous-jaccnt! Dans l'état actuel de la science,
je crois la question tranchée dans le sens de l'alhrmative.
M. Bellucci: La flore d'Azambuja et celle de Quinta
do Bacalhao, Campo Grande et Portelia, la faune d'Archi-
no, laquelle appartient au même niveau géologique que les
terrains qui contenaient les 35 espèces végétales étudiées
par M. Heer, nous portent à considérer que ces terrains
font partie du miocène supérieur. Par conséquent les con-
glomérats miocènes qui reposent, soit sur les terrains mé-
sozoïques, soit sur la formation basaltique, et qui, à leur
tour, 3e trouvent recouverts par la iïore d'Azambuja et des
environs de Lisbonne, ainsi que par la faune terrestre
d'Archino ou la faune maritime d'Alhandra et de Lisbonne,
appartiennent au miocène supérieur, et représentent, réu-
nis aux strates de calcaire et de marne avec lesquelles
ils sont en rapport, les dépôts qui se sont formés au fond
d'un bassin lacustre qui occupait à l'époque miocène supé-
rieure le centre du Portugal, à droite du cours inférieur
du Tage. Eh bien! les silex et les quartzites éclatés, qui
portent les caractères d'un travail intentionnel, provien-
nent positivement de ce conglomérat miocène -et doivent
par conséquent être regardés comme contemporains; quel-
ques silex éclatés ont été trouvés par M. Ribeiro jusques
dans les strates de grès à ciment calcaire qui se trouvent
à la baee des conglomérats près de Monte Redondo.
Voici un silex, que j'ai trouvé sur place. Avant d'extraire
le silex du terrain où il était engagé, j'ai eu le soin de le faire
examiner par plusieurs membres du Congrès, qui ont reconnu
qu'il fdsait partie de la couche même. Cet éclat de silex
était si bien dans le grès, que mon outil en bois n'a pu
l'en détacher. Il m'a fallu employer la piochette en fer de
M. Cartailhac pour briser le grès.
La position que cette pièce occupait dans la couche était
si bien contemporaine de l'époque du dépôt, qu'elle fut trou-
vée solidement fixée à la partie inférieure de la lèvre d'une
excavation due à l'érosion atmosphérique. Elle se trouvait
engagée dans le sens horizontal, la surface taUlée tournée en
bas, le bord coiu-be et coupant en dehors de fa paroi du bord
de la fissure. Cette partie du silex a une teinte plus foncée
parce qu'elle est recouverte de petits lichens desséchés et
noircis, ce qui démontre que l'éclat de silex est demeuré long-
temps dans ces conditions, exposé aux agents atmosphé-
riques, et la forte cohésion qui existait entre cette pièce et
les autres matériaux formant le conglomérat, explique pour-
quoi elle ne s'en est pas détachée.
Les parties des surfaces du silex qui se trouvaient fi-
xées dans le grès, non seulement présentent une couleur rou-
geâtre qui dépend de la teinte générale du conglomérat, mais
elles font voir encore plusieurs incrustations de petits grains
de quartzite, fortement adhérents aux surfaces et que l'im-
mersion dans l'eau n'en a pu détacher.
,ï Google
io3
Par ces détails et i>ar quelques observations qui ont
été faites pendant que la pièce en question était encore m
situ, je n'hésite pas à soutenir qu'elle faisait partie du con- '
glomérat miocène et que, par conséquent, on doit la regar-
der comme contemporaine de ce conglomérat.
Maintenant, si nous observons tes parois des petits ra-
vins plus ou moins profonds qui sillonnent le terrain en dif-
férentes directions, nous y remarquerons une constitution
parfaitement analogue à celle de la surface, seulement les
cailloux et les galets du conglomérat, au lieu d'être détachés,
se trouvent cimentés assez fortement par une pâte argilo-cal-
caire d'une couleur rougeâtre, contenant de nombreux grains
arrondis de sable siliceux. Au milieu de ce conglomérat il n'est
pas difficile de trouver des éclats de silex et de quartzite
empâtés avec des matériaux du conglomérat lui-même.
Il nous est indifférent pour le moment, que ces silex
portent ou non des traces de travail intentionnel. Ce qu'il
importe de constater c'est que les matériaux qui constituent
le conglomérat intact, correspondent parfaitement à ceux
qu'on trouve à la surface du sol. La conclusion que logi-
quement on peut en tirer, c'est que tous les matériaux dés-
agrégés qui se trouvent à la surface de la chameca d'Otta
proviennent de la désagrégation du conglomérat sous-ja-
cent.
Maintenant le silex que j'ai recueilli offre-t-il des ves-
tiges de travail intentionnel. M. Evans a dit qu'on doit cher-
cher les cônes de percussion : voici l'éclat, il a été détaché
de la surface d'un rognon de silex et il non seulement offre
un cône magnifique, mais sur une de ses surfaces il présente
aussi les marques des éclats détachés précédemment, et
dans la même direction, lorsque le silex faisait partie d'un
nucléus. Que veut-on de plus? On peut dire à la vérité que
104
cette pièce est trop grossière pour être attribuée à un tra-
vail intentionnel. Maïs on serait bien heureux en eiTet de
trouver à l'âge miocène des pièces régulières et bien faites;
cela n'est pas possible. On oublie trop que nous ne pouvons
avoir déjà le travail et les objets de l'époque quaternaire.
Vous ne croyez plus au bulbe !
Que l'on ait alors la bonté de nous dire pourquoi ces
silex -ci ne sont pas taillés; pourquoi ceux-ci qui sont qua-
ternaires, le sont A quels caractères faut-il s'arrêter?
La question de l'homme tertiaire passe par les phases
traversées déjà par la question de l'homme quaternaire.
Pour moi, j'arrive aux conclusions générales déjà for-
mulées par M. Ribeiro, en ce qui regarde les preuves qui
démontrent Pexistence de l'homme dans quelques terrains
tertiaires du Portugal.
M. GoTTEAu: Le gisement tertiaire n'est pas douteux;
les observations de MM. Ribeiro, Delgado et Choffat ont par-
faitement établi ta stratigraphie de cette région, et les cou-
ches à poudingues surmontées, en certains points, par les
marnes à ossements et à végétaux, appartiennent au terrain
miocène. Parmi les silex provenant de ces couches et que
la Commission a examinés, plusieurs présentent certainement
les marques du travail de l'homme; mais la véritable ques-
tion est de connaître le gisement stratigraphique de ces si-
lex et de savoir s'ils ont été recueillis à la surface ou s'ils
proviennent de rintérieur du dépôt. J'éprouve à ce sujet
une grande incertitude. Rien ne me démontre que les silex
taillés soient contemporains du dépôt tertiaire, et dans l'état
actuel des observations, il me semble plus naturel de les
considérer comme appartenant à la surface, et par consé-
quent comme quaternaires. Ce ne sont que des haches à
.^^ DigitizsdbyGOOgle
io5
peine ébauchées, des grattoirs informes et par conséquent
des déchets d'atelier, ne paraissant pas avoir servi, et dont
en tout cas il est dithcile de préciser l'usage. Les rares si-
lex qui ont été trouvés engagés dans la roche, ne diffèrent
en rien des autres, et ne sont pas suffisants pour démontrer
leur communauté d'origine avec le dépôt tertiaire. Il ne faut
pas oublier quHl sVgît d'un terrain de sables et de poudin-
gues qui a subi, à diverses époques, de puissantes dénuda-
tions, d'un sol inégal, meuble, raviné chaque année par des
pluies torrentielles. Quand on se reporte au laps de temps
considérable qui s'est écoulé dépuis la période quaternaire,
ne peut-on supposer qu'à une époque plus au moins recu-
lée, quelques-uns de ces silex ont été entraînés dans les fis-
sures et qu'en y séjournant pendant des milliers d'années
peut-être, ils ont fait pour ainsi dire corps avec la roche,
qu'ils ont pris cette teinte rougeâtre qui les caractérise et
se sont couverts sur certains points de grains de sable ag-
glutinés. Ne voit-on pas des faits de cette nature se pro-
duire tous les jours sous nos yeux ?
C'est à titre de géologue, que vous m'avez appelé à faire
partie de la Commission, et c'est comme géologue que j'exa-
mine la question. Lorsque je visite une carrière et que j'étu-
die les différentes couches du soi, je ne tiens que bien peu
de compte des fossiles qu'on rencontre roulés et mélangés
à la base. Pour qu'une coquille ait de la valeur au point de
vue stratigraphique, il faut qu'elle soit trouvée en place et
retirée de la zone même qu'elle caractérise; il en est de
même des silex : si vous voulez que leur gisement soit hors
de conteste, ne les prenez pas près de la surface, dans des
fissures plus ou moins récentes où ils auront pu glisser. Pra-
tiquez au milieu du dépôt une coupe bien nette et bien tran-
chée, et si vous trouvez un silex dans ta masse compacte
,yQ|^le
io6
et non remaniée du terraÏD, vous n'aurez plus de doute sur
son âge. Malheureusement, aucun des silex que nous avons
eu à examiner n'a été recueilli dans de pareilles conditions.
Rien ne s'oppose assurément à l'existence de l^omme
tertiaire; mais cependant, dans une question de cette im-
portance, il ne faut rien décider sans une preuve positive
et matérielle; et quant à présent, tout en reconnaissant que
l'opinion de MM. Ribeiro, de Mortillet, Capellini, etc., est
infiniment respectable, et qu'elle sera peut-être la vérité
demain, )e voudrais, comme géologue, pour me ranger à
leur avis, des faits plus précis.
M. VrRCHow: Je ne suis pas géologue; je m'en rapporte
aux spécialistes pour l'âge du gisement. C'est la question
principale que je veux mettre plus en lumière qu'on ne l'a
fait encore. Je me pose depuis dix ans la question: peut-on
reconnaître dans la forme d'un éclat de silex si l'opération
qui Va produite est intentionnelle?
11 y a des percussions qui se font naturellement dans
un courant d'eau, sur des pentes. Il faut donc renoncer au
bulbe de percussion. Le mot conchoïde, proposé par M. de
Mortillet, est très-bon; chaque substance qui s'éclate a de
ces conchoïdes, le verre, la calcédoine, l'obsidienne, le si-
lex. Aussi toutes ont-elles été utilisées dans le même but,
on connaît les pointes de flèches en verre de bouteille des
fles Andaman et de la Terre de Feu.
On sait depuis longtemps que toutes ces substances
présentent une fracture conchoïdale, même lorsqu'elles n'ont
subi aucune impressioh violente (cassure par l'action de la
chaleur solaire qui dilate assez brusquement les parties su-
perficielles et amène ainsi leur séparation des couches infé-
rieures); il y a des éclats naturels qui ont aussi une bosse.
,ï Google
'07
Alors comment décider si le concho'tde a été causé par un
choc violent ou par un mouvement moléculaire? La facette
plate, comme dit M. Zawisza, intervient dans le premier
cas par une coïncidence fort remarquable. Mais comment
a eu lieu ce contact? Est-ce la main de l'homme qui en est
l'auteur, ou bien une cause naturelle?
II y a dans le terrain d'Otta de grands blocs anguleux de
silex. J'en ai moi-même détaché un qui était en partie aplati,
roulé par Peau. Voilà ce que tout le monde peut voir; et
alors comment admettre que tes pièces qu'on dit taillées par
l'homme, qui était loin de là, n'aient pas été roulées. Les
plus nettes sont les plus vives, les meilleures, dira-t-on. Je
préférerais, moi, qu'elles fussent avec arêtes émoussées.
Je crois que les échantillons sont de la couche même,
mais ils ne peuvent venir de loin; ils se sont fracturés, for-
més sur place; l'homme ne vivait pas dans le lac: ce n'est
pas lui, c'est l'eau sans doute qui a fait ces éclats.
Au reste, cette question est de nature à alimenter en-
core les discussions de plusieurs Congrès, et je soumettrai
au prochain une série d'échantillons avec tous les caractè-
res réclamés par quelques personnes et recueillis dans de
tclies conditions que l'homme n'y aura été pour rien.
Voyez l'état des choses! J'ai moi-même, dans le kioek-
kenmoedding de Mugem, recueilli une petite pièce de silex,
elle n'avait presqu'aucun des caractères soît-disant néces-
saires ou décisifs, et personne n'a douté de l'action humaine.
Ici nous sommes en désaccord et beaucoup nient. On
cherche avec sagacité des preuves, mais il n'y a pas une
pièce qui laisse à notre esprit une impression définitive.
La discussion actuelle portera ses fruits; dans un pro-
chab Congrès on aura étudié de toutes parts, on sera bien
mieux préparé pour juger.
,ïGoOgl'
1^
io8
Pour moi, Je n'ai aucune hostilité contre Phomme ter-
tiaire, je crois à son existence, mais pour d'autres raisons;
ainsi, la pièce présentée par M. Capellini m'a fait une très
bonne impression.
M. Delcado: Je commence par déclarer que je n'ai
point préparé les explorations; les éloges, mérités, qu'on
vient de faire à M. Ribeiro n'en reviennent donc qu'à lui
seul, qui a fouillé, qui étudie depuis de longues années ces
gisements; je n'ai fait que i'aider.
Le sujet comprend deux questions: l'une purement ar-
chéologique, l'autre géologique. Je ne me reconnais pas as-
sez de compétence pour émettre une opinion consciencieuse
et sûre sur la première de ces questions, laquelle, d'ailleurs,
vient d'être si bien éclaircie. Je ne parlerais donc qu'en géo-
logue et tout spécialement pour répondre à M. Evans.
Dans la région aux silex U n'y a qu'une formation géo-
logique. La plupart, on pourrait même dire la totalité des
silex trouvés à la surface proviennent de l'intérieur des cou-
ches, ils sont les restes de la dénudatîon; la forme horizon-
tale du plateau dépend de l'horizontalité des couches : les
silex indiqués par M. Ribeiro étant à un niveau inférieur
à celui des espèces fossiles d'Archino, qui ont été détermi-
nées par M. Gaudry comme du tertiaire, il n'y a pas à dou-
ter qu'ils ne soient tertiaires aussi.
Un autre de mes illustres collègues a parlé de quater-
naire; mais tout le quaternaire du Portugal n'a aucun rap-
port avec le terrain d'Otta.
M, Cazaus de Fondouce: J'ai hésité longtemps à de-
mander la parole parce que je suis un de ces timides dont
parlait tantôt M. de Mortillet, de ceux qui pensent que,
,ï Google
lorsqu'il s'agit d'introduire dans la circulation scientifique
des idées nouvelles, un peu de réserve vaut peut-être autant
que trop de hardiesse, qui hésitent lorsque les preuves qui
leur sont fournies ne répondent pas absolument aux exigen-
ces de leur esprit et restent sur les anciennes positions en
attendant mieux. Pourtant, comme le Congrès m'a fait l'hon-
neur de me mettre au nombre de ses commissaires pour la
question spéciale qui l'occupe dans cette séance, je crois lui
devoir compte des causes de ma timidité. Elles sont un peu
géologiques et beaucoup archéologiques.
Pour ce qui concerne le côté géologique de la question
je dois dire, comme tous ceux de mes confrères qui m'ont
précédé, que les géologues portugais ne nous ont rien laissé
à relever après eux. Les terrains que nous avons vus sont
bien tertiaires et appartiennent à un ensemble miopliocène
bien certain. Mais il me reste encore des doutes sur l'ori-
gine des silex qui nous ont été présentés. Viennent-ils bien
de l'intérieur des couches? Il me paraît plutôt qu'ils provien-
nent tous de la surface, ou des couches superficielles qui,
ainsi que l'ont montré MM. Evans et Gotteau, ont pu être
remaniées. Voilà une première cause de doute sur laquelle
je ne veux pas m'étendre.
Je ne m'étendrai pas non plus sur une seconde cause
de doute qui provient de ce que ces éclats, perdus au milieu
de cailloux roulés et d'éclats à arêtes émoussées, ne sont pas
eux mêmes roulés et ont conservé leurs arêtes vives, et j'en
viens immédiatement à la troisième cause de ma timidité, la
seule que je vous demande la permission de développer.
La question se pose en ces termes, au point de vue ar-
chéologique: Peut-on reconnaître dans la forme d'un éclat
de silex, si l'opération qui l'a produit est intentionnelle?
M. de Mortillet y a répondu très afifirmativement et M. Vir-
,ï G OOQ le
R,
1
chow a déclaré au contraire que pour sa part il ne croyût
pas que cela fut possible. L'argument de M. de Mortillet me
paraît pouvoir se résumer ainsi : Les silex éclatés incontesta-
blement par rhonune, au moyen de la percussion, présen-
tent certabs caractères, donc tous les silex qui présentent
ces caractères sont des silex éclatés par percussion. Cette
forme de raisonnement par induction n'est peut-être pas
tout-à-fait correcte. On pourrait demander que la rigueur de
la conclusion fût tempérée par quelque mot restrictif, car enfin
on peut très bien concevoir que des effets semblables puis-
sent être obtenus par des procédés différents. Mais ce que
je ne puis pas absolument accepter c'est que l'on ajoute à
cette conclusion, comme en glissant, les mots par l'homme^
intentionnellement , car les effets que produit ici la main de
l'homme, une cause naturelle peut aussi les produire. Cest
la proposition principale que l'on ajoute ainsi en passant,
celle qui aurait surtout besoin d'être démontrée et que l'on
ne démontre pas.
Je n'ai pas besoin de vous refaire la démonstration de
la taille du silex que vous a si bien faite M. de Mortillet;
je me borne à formuler les principes suivants qui en dé-
coulent, ainsi que des observations que vous a présentées
M. Virchow:
I ." Un conckoïde isolé n'implique pas la percussion et
peut être dû à un éclatement produit par une autre cause.
2." Un plan de frappe et un conckoïde indiquent le con-
cours de deux opérations, mais sans intervention nécessaire
de la percussion pour le second.
3.° Un plan de frappe avec un conchoide et ses érail'
lures paraît impliquer une double percussion.
4.° Les mêmes caractères, avec un conckoïde en creux
sur la face opposée au conckoïde en reliefs indiquent qu'un
,ï Google
éclat avait été détaché du noyau avant l'enlèvement de celui
qu'on a sous les yeux et témoigne par conséquent d'une tri-
ple attaque subie par le rognon primitif.
5°. Un nombre plus considérable d'impressions conchoï-
dales sur un éclat indique un nombre égal d'actions subies
par lui avant d'être arrivé à son état actuel.
Par l'application de ces principes à l'examen des éclats
de silex, on peut reconnaître ceux qui ont été produits par
percussion, ceux qui peuvent l'avoir été et ceux qui ne l'ont
certainement pas été. Mais cet examen ne permet pas de
pousser plus loin les déductions et de glisser, comme on le
fait le plus souvent, à la suite du mot percussion, la qua-
lification d'intentionnelle. On comprend très bien que dans
la nature, des silex heurtés les uns contre les autres par le
mouvement des eaux qui recouvraient les terrains où ils se
trouvent, entraînés sur les pentes des collines, soumis à des
pressions dues aux mouvements qui ont agité aux époques
géologiques l'écorce terrestre, foulés par les pieds des ani-
maux ou des hommes, exposés aux influences diverses des
agents atmosphériques, on comprend très bien que quelques-
uns de ces silex aient pu être brisés ou éclatés de façon à
présenter justement les caractères ci-dessus, un choc natu-
rel devant aussi bien qu'une percussion intentionnelle pro-
duire un plan de frappe, des conchoïdes et des éraillures.
Il est évident toutefois que, plus ces divers caractères
s'accumuleront sur la même pièce, plus il faudra faire in-
tervenir, pour expliquer la production de celle-ci, le con-
cours de chocs multipliés. Aussi ces éclats se rencontreront-
ils moins fréquemment dans la nature. On rencontre beau-
coup de rognons décapités et présentant le plan de frappe.
On rencontre aussi beaucoup d'éclats conchoïdaux. Il ne
faut, en effet, qu'une opération pour produire les uns ou
,ï Google
/-^.
les autres. Mais on rencontrera bien plus rarement des éclats
présentant simultanément le plan de frappe et le conchoïde,
car il faut le concours de deux opérations successives pour
les produire ; encore plus rarement rencontrera-t-on ces éclats
avec les éraillures du conchoïde. Enfin des éclats portant
la trace de deux ou plusieurs conchoïdes seront encore plus
rares.
On m'a dit, dans la Commission, qu^à la rigueur un choc
naturel pourrait produire des éclats à un seul bulbe, mais
qu''il serait impossible que la même pièce vînt à être une
seconde fois l'objet de la même opération naturelle, et que
par conséquent les silex à deux conchoïdes ne sont pas des
éclats naturels. J'avoue ne pas comprendre pourquoi ce qui
peut être produit une fois, serait impossible une seconde.
La seconde opération naturelle est aussi possible que la pre-
mière, seulement le concours des deux se produira plus rare-
ment. Or ces caractères de rareté absolue ou relative, qui doi-
vent, au milieu des nombreux éclats produits naturellement,
distinguer ceux qui ont été soumis à ces opérations, se re-
trouvent justement dans les récoltes faites par M. Ribeiro.
C'est par des nombres qu'il est impossible d'exprimer
que se chiffrent les éclats de silex dont la bande de terrain
qui s'étend au pied du Monte Redondo est recouverte. C'est
depuis 1 860, c'est-à-dire depuis vingt ans que M. Ribeiro re-
cueille ces éclats avec le désir d'y trouver les marques de
l'action humaine. Eh bien ! dans ce grand nombre d'éclats,
durant ce long espace de temps, notre collègue n'en a re-
cueilli que vingt-deux présentant d'une façon plus ou moins
distincte le plan de frappe et le conchoïde. Sur ce nom-
bre, trois ou quatre seulement portent sur le conchoïde des
éraillures caractéristiques du choc qui l'a produit, et un aussi
petit nombre présentent plus d'un conchoïde.
,ï Google
ii3
Comment ne pas voir avec évidence dans cet infiniment
petit nombre l'effet de cet accident possible qui peut et doit
être, dans cette très faible proportion^ celui du jeu des forces
naturelles? Vingt-deux éclats trouvés en vingt ans au milieu
de millions de millions, c'est bien l'accident et cette propor-
tion le démontre victorieusement. Et même ce nombre de
vingt-deux est encore trop fort, car un certain nombre de
ceux-ci ont été trouvés ailleurs qu'au pied de Monte Re-
dondo. Il y en a d'E^pinhaço de Cao, de Barquinha, d'En-
Costa do Girvo, de Carregado, etc.
Si, sur un point déterminé, ces éclats se montraient en
grand nombre, dans une proportion telle que cette Idée d'ac-
cident en dût être forcément écartée, alors il faudrait bien
recourir pour expliquer cette production à une force inten-
tionnelle, à l'action de l'homme, et c'est ce qui arrive pour
les gisements quaternaires. Je réponds ainsi à M. Capel-
lini, qui disait que si Ton rejetait les silex de M. Ribeiro,
il faudrait rejeter tous les silex quaternaires. Non, car pour
eux, j'ajoute aux caractères que nous avons énumérés ci-des-
sus celui qui démontre l'intention, le nombre, tandis que
dans les gisements tertiaires du Portugal, non seulement
ce caractère fait défaut, mais il est remplacé par son con-
traire, l'extrême rareté.
Je voudrais encore répondre un mot à une observation
de M. de Mortillet. Notre savant collègue a dit: L'être intel-
ligent qui taillait le silex ne pouvait laisser des traces de son
industrie que sur les rives du lac; aussi est-ce sur les bords
du lac qu'ont eu lieu les recherches et qu'ont été rencontrés
les éclats travaillés. — Cette observation est plus spécieuse
que solide. On sait en effet que c'est sur les bords des lacs
que les cours d'eau qui s'y jettent déposent les plus gros
matmaux. C'est là en effet que sont les cailloux de silex,
-'f*
plus loin, dans l'intérieur, on ne trouve que des sables et
du limon. C'est donc là seulement que l'on pouvait espérer
de rencontrer des éclais de silex, parce que c'est là que sont
les cailloux siliceux. Je n'insiste pas, pour ne pas abuser de
vos instants, et je conclue.
On pourra peut-être établir plus tard la réalité de l'exis-
tence d'un être intelligent en Portugal à l'époque tertiaire,
mais la preuve en est encore à faire.
M. DE QuATREFAGEs: La qucstlon de l'homme tertiaire
se pose encore, pour certaines personnes, d'une manière gé-
nérale; pour moi, elle n'est plus que locale.
Les objections opposées à l'existence de cet homme me
semblent aujourd'hui relever de la théorie plus que de l'ob-
servation. Ainsi, quelques paléontologistes déclarent qu'il
est bien difficile d'admettre que l'homme ait survécu depuis
une époque dont la faune mammalogique différait en tout
de la nôtre. Comment aurait-il pu durer, disent-ils, quand
tous les animaux dont il se rapproche le plus par son oi^a-
nisation disparaissaient?— Je crois avoir répondu depuis
longtemps à cette question. L'homme n'était pas placé dans
les mêmes conditions que les bêtes. A son organisation de
mammifère ii joignait son intelligence, et c'est grâce à elle
qu'il a pu franchir les changements de milieu qui sans doute
ont amené l'exùnctîon des populations animales.
J'ai dit ailleurs et ne crains pas de le répéter ici: le plus
ou moins d'antiquité de l'homme est une question de fait
et d'observation. Quant aux indications de la théorie, elles
nous conduisent bien au-delà des temps miocènes. L'homme
par son corps n'est qu'un mammifère, rien de plus et rien
de moins; à ne tenir compte que du corps, il a pu vivre sur
le globe dès que celui-ci a pu nourrir des mammifères; et
•^
„Google
Ii5
comme nous connaissons des mammifères qui ont vécu aux
temps secondaires, l'honune a pu être leur contemporain.
D Pa pu d^autant mieux, qu^aux aptitudes physiologiques
communes, à une faculté d^adaptation dont il donne chaque
jour la preuve, il joignait une intelligence infiniment supé-
rieure à celle de n'importe quel animal, l'intelligence hu-
maine.
Mais on n'a pas eu jusqu'ici à s'occuper de l'homme
secondaire. L'homme tertiaire est le seul dont il s'agisse ici.
Cet homme à-t-îl existé et avons-nous trouvé des preuves
de son existence? Je n'hésite pas à répondre par l'affirma-
tive en ce qui touche la question générale. Mais celle-ci se
décompose en un certain nombre de questions locales. La
question de l'homme tertiaire portugais est une de ces der-
nières, et ce qui se passe à son sujet me rappelle ce qui
s'est déjà passé à propos de quelques-uns de ses frères,
comme l'histoire de ceux-ci a rappelé à certains égards celle
de l'homme quaternaire.
Je me rappelle l'incrédulité que soulevèrent les premiè-
res communications de M. Desnoyers relatives à l'homme
de Saint-Prest. Je ne puis oublier la physionomie de l'illus-
tre Lyell en présence des ossements que mon confrère pla-
çait sous ses yeux. C'était celle d'un homme qui ne peut se
refuser à l'évidence, mais que cette évidence révolte. U se
refusait d'ailleurs à admettre l'existence de l'homme à Saint-
Prest, jusqu'à ce qu'on eût trouvé les armes, les outils qui
avait tué les animaux, qui avaient fait les entailles. — Pen-
dant quelque temps on put recourir à cette objection; puis
M. Bourgeois la réfuta comme on sait en répondant au de-
sideratum formulé par Lyell. Depuis lors tout le monde a
accepté l'homme de Saint-Prest; mais est-il tertiaire supé-
rieur ou quaternaire inférieur? J'ai entendu soutenir les deux
,ï Google
ii6
doctrines. Incompétent pour décider par moi-même cette
question, je la renvoie aux géolc^es.
L'tiîstoire de Tbomme tertiaire de la Beauce ressemble
fort à la précédente. Je sais que l'existence de cet homme
est encore révoquée en doute par quelques-uns de nos plus
éminents collègues. Mais elle est prouvée pour moi et
c'est en mon nom seul que je parle. Lorsque l'abbé Bour-
geois me communiqua les premières pièces qui lui parais-
saient démontrer que l'homme avait vu les temps miocènes,
je ne lut cachai pas que ces preuves étaient à mes yeux
absolument insuffisantes et peut-être de nature à témoigner
plutôt contre qu'en faveur de son opinion. Plus tard, au
Congrès de Bruxelles, je fus de ceux qui, en présence de
certains silex et surtout des peri;oirs, crurent qu'ils pour-
raient bien avoir été façonnés par une main humaine. Mais
je réservai néanmoins mon opinion. Plus tard encore,
lorsque l'abbé Bourgeois m'apporta de nouveaux perçoirs,
toujours du même modèle, mats mieux travaillés, et surtout
une hachette ou râcloir avec retouches, je me déclarai con-
vaincu.—Je suis de ceux qui croient à l'homme tertiaire de
ta Beauce.
Si j'ai hésité à accepter l'homme tertiaire de l'abbé Bour-
geois, il en a été autrement de celui que M. Capellinî a dé-
couvert au Monte Aperto. Ici, les premiers dessins que
m'adressa notre collègue ne me laissèrent aucun doute. A
moins d'avoir été inventés de toute pièce, ils étaient abso-
lument démonstratifs. Les moules, les pièces originales ont
de plus en plus confirmé ma première impression. Les em-
preintes laissées sur ces os de Cétacé ne peuvent être at-
tribuées qu'à un instrument tranchant; seul un instrument
de ce geive peut faire des entailles semblables à celles que
nous trouvons id, lisses sur im bord et rugueuses sur l'au-
,ï Google
"7
tre (Ici M. de Quatbefages dessine sur le tableau noir une
sorte de schéma de la coupe de ces entailles). Or, l'homme
seul fabrique et manie des instruments tranchants. Je crois
donc à l'homme tertiaire de Toscane.
El maintenant, que penser de l'homme tertiaire du Por-
tugal? Je le dis franchement: je ne saurais me prononcer
encore. Je comprends toute la valeur des arguments sur
lesquels s'appuient MM. Capellini, Cariailhac, de Mortiilet,
sans parler de nos éminents collègues portugais que l'on
pourrait récuser comme étant juges et parties. Mais, d'au-
tre part, les objections qu'on leur a faites ne me paraissent
pas être sans valeur.
S'il me fallait absolument formuler mon appréciation
actuelle, je dirais que la question de l'homme d'Otta me
semble en être aujourd'hui à peu près au point où se trou-
vait à Bruxelles la question de l'homme de Thenay. Je viens
de rappeler quel a été, à mes yeux du moins, le résultat fi-
nal d'une instruction que je regardais encore alors comme
incomplète. Je suis bien près de croire qu'il en sera de même
de celle à laquelle nous nous livrons aujourd'hui. La ques-
tion géologique est définitivement résolue. La question an-
thropologique le sera sans doute bientôt. L'existence de
l'homme d'Otta est dès à présent presque probable; elle
sera peut-être démontrée au premier jour. Mais je reste en-
core dans le doute, estimant qu'en pareille matière on ne
risque rien en se renvoyant soi-même à plus ample informé.
L'auteur du mémoire sur l'existence de l'homme ter-
tiaire en Portugal^ M. Carlos RiBEreo, se trouvant griève'
ment indisposé, n'a point pris part à la discussion.
■r?
M. ViRCHow, président; Personne ne deiiflandant la paro-
le, la séance va être levée. Ce n'est pas une méthode scienti-
fique que de trancher les questions à la majorité des votants.
Il faut donc remettre la décision à un autre Congrès.
-^
„Google
^^^
APERÇU SUR lA FLORE TERTIAIRE DU PORTUGAL
M. OSWALD HeER
Les plantes tenîaires du Portugal, que M. Rîbeiro m'a
envoyces, proviennent de quatre localités différentes, savoir:
1° d'Azambuja dans le bassin du Tage, à environ Sg" de
latitude nord, à 45 kilomètres au nord-est de Lisbonne; 2"
de Quinta do Bacalhao; 3" de Areeiro da Quinta da Cruz,
chemin de Portella; 4° de Campo Grande. Ces trois der-
nières localités sont situées à quelques kilomètres au nord-
est et au nord de Lisbonne.
Je n''ai reçu qu'une espèce de Quinta da Cruz {My-
rica salicina)-^ cette localité est tellement voisine de Quinta
do Bacalhao, que nous pouvons réunir cette espèce avec
celles de cette dernière localité.
Nous connaissons 1 3 espèces d'Azambuja, 16 de Quinta
do Bacalhao, 14 de Campo Grande, en tout 37 espèces*.
Ces plantes se trouvent dans une argile molle, grise ou jau-
nâtre et sont passablement bien conservées. Les feuilles sont
en partie seules, en partie entremêlées sur les mêmes pla-
' Postérieurement à cette notice, on a découvert deux nouvelles
espèces, ce qui porte le nombre total à 39. Elles figurent au tableau,
ce sont : Nyssidium australe et Trapa sîlesiaca.
,ï Google
i
quettes. La formation lacustre de Quinta do Bacathao oc-
cupe un horizon supérieur à celui des couches miocènes ma-
rines de Lisbonne. Celles-ci (Almada beds de Smith) contien-
nent un grand nombre de mollusques marins. Il y a bien des
années que M. James Smith, de Jordan-hill*, a recueilli 1 5o
espèces dans ces couches: 28 % de ces espèces sont encore
vivantes; dans la molasse marine suisse les espèces vivan-
tes forment 25 %» ^^^ns le bassin de Vienne 2 1-26 "/o-
Il paraît donc que ces couches marines de Lisbonne
appartiennent à peu près au même horizon que la molasse
marine suisse. Au-dessous de ces couches marines {couches
d'Almada), il y a des conglomérats miocènes; au-dessus,
les sables et les marnes qui à Quinta do Bacalhao contiennent
les plantes fossiles. Les conglomérats miocènes se trouvent
aussi à Azambuja et sont surmontés immédiatement par les
marnes avec les plantes; la molasse marine d'Almada man-
que à cette localité, mais la flore a le même caractère que
celle de Quinta do Bacalhao et Gampo Grande.
Les conglomérats miocènes d^Azambuja contiennent
les silex dont s'occupe en ce moment le Congrès. Comme
couches avec ces conglomérats sont sans doute miocè-
, la question si ces silex sont taillés par l'homme ou s'ils
it des produits naturels, est de la plus grande importance;
érons que le Congrès pourra émettre une décision à cet
trd.
Dans ce mémoire nous ne nous occuperons que des
ntes. Nous voulons les examiner séparément d'après les
alités.
' James Smith, of Jordan-hiii. On the Age of the Teniary Beds of
Tagus. Quart. Joura. III. 184?. p, 410.
,ï Google
Nous rencontrons ici le plus souvent des feuilles de
peuplier. Ce sont trois espèces fort répandues dans le pays
tertiaire, savoir: Populus mutabilis, P. balsamoides et P.
gîandulifera.
Nous les voyons déjà dans le miocène inférieur où ce-
pendant elles sont très rares; mais dans le miocène supé-
rieur de la Suisse et de l'Allemagne du Sud elles forment
des arbres très répandus. «
"Populus mutabilis ne diffère guère de notre Populus
euphralica, 01-, arbre à feuilles coriaces, qui à présent est
étranger à l'Europe, mais se trouve en Egypte, en Algérie
sur le bord des ruisseaux et des fleuves, près du Jourdain,
de l'Euphrate et en Turcomanie. L'apparition de P. muta-
bilis à Azambuja nous dit qu'à l'époque miocène l'aïeul de
P. euphralica s'étendait jusqu'au sud-ouest de l'Europe.
Nous la connaissons aussi du nord de l'Allemagne (Samland)
et même du Groenland.
La seconde espèce de Populus d'Azambuja, Populus
balsamoides, Goepp. , présente la même analogie avec P. bal'
samoides, espèce américaine, que P. mutabilis avec P. eu-
phralica. Cette espèce se trouve non seulement dans le mio-
cène supérieur, mais aussi dans le pliocène dii Val d'Arno.
P. gîandulifera est un peu plus rare. Ce peuplier est le
plus proche parent de P. laurtfolia, Led., de l'Asie.
Une espèce de Jugions (Juglatis bilinica, Ung.) a la
même distribution. Les ailles blanches d^Azambuja nous
en ont conservé les feuilles. Elle s'étend du miocène inférieur
jusqu'au pliocène dans le Val d'Amo (Montajone).
,ï Google
Une feuille du camphrier tertiaire {Cinnamomum poly-
morphum. A. Braun sp.) nous prouve que cette arbre ca-
ractéristique de répoque miocène, qui se trouvait partout
dans l^Europe méridionale et l'Europe centrale, ne manquait
pas au Portugal.
Les feuilles d'un frêne {Fraxinus praedicta, Hr.) et
d'un Pimeiea {P. oeningensis, Hr.) et le fruit d'un Panax
{P. circularis, Hr.) appartiennent à des espèces qu'on n'a
trouvées jusqu'à présent qu'à Oeningen.
On n'a trouvé que quelques fragments de Conifères à
Azambuja. Une petite branche et une écaille détachée et
mal conservée de Glyptostrobus europaeus. Brongt. sp., ar-
bre, qui à l'époque miocène s'étendait jusqu'aux régions po-
laires; une feuille de Podocarpus eocaiica, Ung. qui se trou-
ve spécialement dans le miocène inférieur (Oligocène), et
enfin des fragments de Pinus qu'il est impossible de déter-
miner.
Sur les i3 espèces trouvées jusqu'à présent à Azam-
buja, 10 sont connues du miocène et toutes se trouvent
dans le miocène supérieur (molasse supérieure ou formation
d'Oeningen); 7 espèces sont connues du miocène moyen et
inférieur et appartiennent à des espèces répandues dans
tout le pays miocène; 5 espèces s'étendent jusqu'au plio-
cène. Quoique le nombre de plantes trouvées jusqu'à pré-
sent à Azambuja soit petit, il nous est permis d'en tirer la
conclusion que ces couches appartiennent au miocène supé-
rieur et se sont formées à la même époque que les marnes
calcaires d'Oeningen et les formations du gypse de l'Italie
supérieure, de Guarene, Stradella et Senegaglia. L'apparition
du Rhinocéros mtnutus et de VHipparion gracile à Azam-
buja, animaux foM répandus dans le miocène supérieur, con-
firme cette conclusion.
,ï Google
2. QUINTA DO BACALHAO
Les peupliers qui abondent à Azambuja et nous font
croire à l'existence d'un lac ou d'une rivière, manquent à
Quinta do Bacalhao, mais les ormes y sont très répandus. Un
orme {Ulmus plurinervia, Ung.), qui par ses feuilles simple-
ment dentées, se distingue de toutes les espèces vivantes de
l'Europe, habitait une grande partie de ce continent à l'épo-
que miocène. Il apparaît en Italie à l'époque pliocène, de
même que Ulmus minuta* Goepp. et Planera Ungeri, Ett.,
dont nous avons reçu les feuilles de Quinta do Bacalhao.
Nous pouvons y ajouter un charme (Carptnus pyramtdalis,
Goepp. sp.) que nous connaissons du miocène supérieur de
la Suisse, de la Siiésie et du pliocène de PItalie.
A la place du camphrier que nous avons rencontré à
Azambuja, nous avons à Quinta do Bacalhao une espèce de
cannellier (Cinnamotnum Scheuch'{eri, Hr.) Il est très-voisin
du cannellier japonais, (C pedunculatum, Thbg.), arbre re-
marquable par son feuillage brillant et toujours vert.
Les Asclépiadées {Acerates veterana, Hr. et A. longi-
pes, Hr.) et les Apocynées {Apocynophyllum obovatum, Hr.
et A. occidentale, Hr.) sont relativement assez bien repré-
sentées. L'apparition d'un Eucalyptus (£. oceanica, Ung.)
est très intéressante. On a trouvé à Quinta do Bacalhao des
feuilles très bien conservées et caractéristiques de ce genre.
Cette espèce se trouve surtout dans le miocène inférieur
de la Suisse, de l'Allemagne, de l'Autriche et de l'Italie:
' Cette espace n'a pas ctc trouvée à Quinta do Bacalhao, nuais i :
Campo Grande,
"W
■_ J
Massatongo Ta décrite de Senegaglia; sa détermination ce-
pendant est très douteuse.
Quinia do Bacalhao a deux espèces de Cerisiers en com-
mun avec Oeningen: Prunus acuminata, A. Braun, et P. no-
nodes, Ung. Prunus nanodes n'a été trouvé ailleurs qu'à l'épo-
que miocène supérieure (au Locle, à Gleichenbei^ et dans le
Val d'Amo), tandis que P. acuminata apparaît déjà dans
l'Atlemagne du Nord (Samland), lors du miocène inférieur.
Le Podogonium Knorrii formait des arbres chajmanls
et fort remarquables. Nous en avons recueilli à Oeningen
non seulement les rameaux feuilles, mais aussi les fleurs,
les fruits et les graines. Il représente un genre complète-
ment éteint qui se rapproche des Tamarins.
Le Podogonium Knorrii devait avoir une aire très con-
sidérable, car on le rencontre non-seulement à Oeningen et
partout dans notre molasse supérieure, mais aussi en Alle-
magne, en Autriche et en Bohême, dans les couches du mio-
cène supérieur. Par conséquent j'ai été très agréablement sur-
pris de trouver des feuilles charmantes et bien conservées
dans l'argile de Quinta do Bacalhao et de Campo Grande.
Quinta do Bacalhao n'a qu'une espèce {Fraxinus prae-
dicta) identique avec Azambuja; cependant la flore a le
même caractère, parce qu'elle présente avec la flore tertiaire
de l'Europe la même analogie que celle d'Azambuja. Elle a
] I espèces en commun avec cette flore et toutes ces espèces
appartiennent au miocène supérieur (à l'exception de l'Eu-
calyptus). Cinq de ces espèces sont répandues dans le mio-
cène moyen et inférieur, et quatre dans le pliocène. Il me
paraît donc que Quinta do Bacalhao appartient à la fin du
miocène supérieur, c'est-à-dire à l'âge ambigu qui relie le
I kniocène et le pliocène et auquel on donne parfois la déno-
"mination de Mio-pliocène.
,ï Google
3. PORTELLA
On a trouvé plusieurs feuilles bien conservées àAreeiro
da Quinta da Cruz, chemin de Portella, à peu de distance
de Quinta do Bacalhao. Elles appartiennent à Myrica sali-
ci'tta, Ung., qui était très répandu à l'époque miocène infé-
rieure, moyenne et supérieure.
4. CAMPO GRANDE
On a recueilli à Campo Grande un assez grand nom-
bre de plantes qui cependant n'appartiennent qu'à 14 espè-
ces. L'espèce la plus commune est une Skimmia {S. Oedi-
pus. Ht.) proche voisine d'une espèce du Japon. C'était
probablement un arbre à feuilles coriaces et brillantes, qui
se distinguaient par leur pétiole épais et court et par leur
nervure médiane remarquablement forte à la base et amin-
cie plus haut. Les feuilles de l'espèce fossile ainsi que cel-
les de l'espèce vivante montrent çà et là de petites taches
rondes, provenant probablement d'insectes. Le genre Skim-
mia ne se trouve vivant qu'au Japon et sur l'Himalaya, il
n'a pas été trouvé fossile jusqu'à présent. Ce n'est pas, ce-
pendant, très surprenant de le rencontrer ici, puisque le
camphrier d'Azambuja et le cannellier de Quinta do Baca-
lhao se rattachent aussi à des types japonais.
Outre le genre Skimmia, les genres Celastrus, Berberis
et Myrica apparaissent en nouvelles espèces à Campo Gran-
de, tandis que les genres Populus, Ulmus, Sapindus, Sapo'
tacites et Cassia montrent des espèces communes et très^
répandues à l'époque miocène {Populus mutabilis, Ulmus
,iroog^
126
minuta, Sapindus falcifoUus^ A. Braun, Sapotaciies miuor et
Cassia ambigua, Uhr.} : de même que le Podogonium Knor-
rii, qui est représenté par un certain nombre de petites feuil-
les à Campo Grande.
Campo Grande n'a qu'une espèce en commun avec
Azambuja {Populus mutabilis) et trois avec Quinta do Ba-
calhao {Planera Uiigeri, Acerales longipes et Podogonium
Knorrii). Huit espèces de cette localité sont identiques à cel-
les des dépôts tertiaires de l'Europe, 7 appartiennent au
miocène supérieur et 6 au pliocène: une d'entre elles {Ai-
nus stenophylla, Sap.) appartient exclusivement au pliocène.
Campo Grande appartient donc au même horizon que Quinta
do Bacalhao et doit être placé â la fin du miocène.
Nous connaissons jusqu'à présent 37 plantes tertiaires
du Portugal, dont 25 se trouvent aussi dans les autres par-
ties de l'Europe, et nous en rencontrons 24 dans les dépôts
miocènes supérieurs.
Le Portugal a 22 espèces en commun avec la flore de
la molasse supérieure de la Suisse, et nous en rencontrons
18 à Oeningen; 14 espèces se trouvent parmi les plantes
des argiles bleues et brûlées du Val d'Arno, qui sont de la
fin du miocène et 12 dans les gypses de Scnegaglia. D'un
autre côté ifi espèces sont répandues dans les dépôts mio-
cène moyen et miocène inférieur et appartiennent au nom-
bre assez considérable de plantes miocènes, qui ont persis-
té jusqu'au commencement du pliocène: plusieurs d'entre
elles apparaissent dans cette formation.
En tout, le Portugal a i3 espèces en commun avec le
pliocène de l'Italie et de la France, dont 1 1 appartiennent
au Val d'Arno (Montajonc); une espèce cependant (Alnus
islenopkylla, Sap.) n'a été trouvée jusqu'à présent qu'à Va-
• quières (en France).
,ï Google
Il paraît singulier que le Portugal n'ait que 8 espèces
en commun avec la France. La raison n'en est pas difficile
à trouver. Les riches flores tertiaires de la France, que nous
connaissons par les beaux ouvrages de M. le marquis de
Saporta, appartiennent pour la plupart aux époques éocène,
miocène Inférieure et pliocène. La tlore du miocène supérieur
(la flore d'Oeningen) manque à la France ou bien n'y a pas
été trouvée jusqu'à présent.
La flore tertiaire du Portugal remplit la lacune entre
le miocène moyen et le pliocène, et il n'y a pas à douter
que toutes les espèces que le Portugal a en commun avec
la molasse supérieure de la Suisse, se trouveront aussi en
France et en Espagne dans les étages supérieurs de l'épo-
que miocène, et probablement elles y seront découvertes plus
tard.
A cette époque, la mer s'étendait encore jusqu'au Val
d'Arno et couvrait le bassin du Pô, mais elle avait disparu
de l'Europe centrale, et la France et l'Espagne formaient
alors une partie du continent européen, sans doute recou-
vert de végétation. Les plantes fossiles du Portugal nous
indiquent les premières traces de cette flore.
Beaucoup de types tropicaux et subtropicaux avaient
alors disparu de l'Europe, et il y avait moins d'arbres à feuil-
lage toujours vert qu'à l'époque éooène et miocène inférieure,
ce qui nous indique un abaissement graduel de la tempéra-
ture. Cependant, à l'époque miocène supérieure, même lors
de la formation d'Oeningen, une riche végétation doit avoir
recouvert tout le pays. Les lauriers, les camphriers, les chê-
nes toujours verts, les figuiers, les Podogonium, les sapin-
dacées, les palmiers et les plantes grimpantes toujours ver-
tes, répandus dans l'Europe centrale, donnaient au paysage
un aspect subtropical. Tel était aussi le cas en Portugal, et
ia8
même à un plus haut degré encore par suite de sa situation
australe.
Bien des plantes y auront subsisté plus longtemps que
dans l'Europe centrale, l'Eucalyptus de Quinta do Bacalhao
en est la preuve. A l'époque où se formaient les dépôts
d' Azambuja, de Quinta do Bacalhao et de Campo Grande, ces
contrées doivent avoir eu un climat pareil à celui d'aujour-
d'hui et même probablement un peu plus doux.
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„Geiogle
Après avoir fait la lecture du mémoire précédent, M. le
Comte de Ficalho ajoute ies considérations suivantes:
Il est généralement admis que la température de l'Eu-
rope, très élevée au début des temps tertiaires a successi-
vement baissé, de manière à se rencontrer avec le climat
actuel, et à descendre même de quelques degrés au-dessous
pendant l'époque glaciaire.
En se fondant sur des considérations scientifiques de
la plus haute valeur, M. Oswald Heer est arrivé à con-
clure, que, à l'époque du miocène supérieur, la température
de la Suisse devait être à peu près de 18" (moyenne an-
nuelle). D'un autre côté, le savant professeur admet que la
moyenne actuelle serait dans ce pays de 11", en supposant
l'élévation des terres au-dessus du niveau de la mer ré-
duite à 200 ou 3oo pieds, et les Alpes ne formant plus que
des collines basses, c'est-à-dire, en faisant abstraction de
quelques causes locales pour rendre les climats des deux
époques plus comparables. La température de la Suisse, et
en général de l'Europe moyenne, aurait donc été, à l'époque
des formations d'Oeningen, de 7 degrés environ supérieure
.ïGot^lc
i3o
à l'actuelle. Si nous adoptons sans les discuter ces opinions,
en nous rapportant à l'exposition détaillée et admirablement
déduite du savant professeur', nous serons conduits à ad-
mettre, que la température était en Portugal, à l'époque où
se déposaient les ar^les à plantes d'Âzambuja et de Campo
Grande, plus élevée que l'actuelle. Mais on peut se deman-
der si la différence en plus était en Portugal, comme en
Suisse, de 7 degrés, ce qui porterait la température du
miocène portugais à un peu plus de 22°. -
II est assez difficile de se rendre compte da la distri-
bution des températures à la surface de l'Europe, à ia fin
du miocène. La forme comme le relief des terres et la dis-
tribution des mers étaient bien différents de ce que nous
voyons de nos jours, et ceci devait influer sur le climat
d'une manière difficile à préciser. Un fait est cependant
avéré, c'est que les températures décroissaient en passant
des basses aux hautes latitudes. Un système dHsothermes
dont les courbes nous sont inconnues, traversaient alors
comme aujourd'hui toute l'Europe. Ceci doit non seulement
être admis à priori y et résultait de l'action de causes phy-
siques semblables aux actuelles, mais est aussi démontré
par l'examen des flores fossiles. Les lignites de l'Islande,
tout en nous faisant voir que le climat de cette île était
alors incomparablement plus doux qu'il ne l'est actuellement,
nous montrent cependant une végétation d'un cachet tout
septentrional, et bien différente de celle de l'Europe moyen-
ne et australe. On peut dire la même chose de la flore de
l'ambre. Quand au Portugal, l'examen des plantes, récem-
ment déterminées par M. Heer, va nous prouver, que son
' Recherches sur le Climat et la Viîgétation Ju Pays teniaire, trad.
Gaudin, Winterthur, 1861, p. 186 el suiv.
,ï Google
i3i
climat devait être sensiblement plus doux que celui de l'Eu-
rope centrale.
Sur 37 espèces trouvées en Portugal, ou plutôt sur 35,
en déduisant le Ptnus et le Carex, dont les échantillons
étaient trop imparfaits pour que l'espèce ait pu être fixée —
sur 35 espèces, disons-nous, M. Heer a créé 9 espèces nou-
velles, nombre très considérable. Cette abondance de for-
mes nouvelles s'^explique par le fait, que les flores de l'Eu-
rope australe, synchroniques avec la nôtre, sont relative-
ment peu connues. On ne sait rien de la flore miocène
de l'Espagne. Les flores tertiaires du midi de la France, que
les beaux travaux de M. de Saporta nous ont fait connaî-
tre, appartiennent à l'éocène, au miocène inférieur et au
pliocène, c'est-à-dire à des époques antérieures ou posté-
rieur£s à nos formations. Ceci explique qu'on ne trouve,
comme le remarque M. Heer, que 8 espèces communes au
Portugal et à la France; et une seule, VAlnus stetiopkylla,
qui jusqu'à présent n'ait été trouvée que dans ces deux pays;
et que, d'un autre côté, un certain nombre d'espèces com-
munes au Portugal et à la molasse suisse inférieure, man-
quent en France, où certainement elles devaient exister pen-
dant l'époque correspondante. Les rapports entre la flore
portugaise et celles des argiles du Val d'Arno et des gyp-
ses de Senegaglia sont remarquables. Sur 35 espèces por-
tugaises 14 sont communes avec la première, et 12 avec ta
seconde. Mais il y a en même temps des différences con-
sidérables, qui s'expliquent par quelques différences d'épo-
que et par l'éloignement et la position orientale de l'Italie,
et qui, du reste, peuvent paraître d'autant plus sensibles,
qu'un plus petit nombre d'espèces a été étudié. Quant au
rapprochement entre le miocène portugais et la molasse
suisse, il est frappant; sur 35 espèces, nous avons 22 com-
l32
munes avec la molasse, i8 avec la seule fonnarion d'Oenin-
gen, si riche, et si bien connue. Mais à côté de ces formes
communes nous trouvons quelques fonnes spéciales. Elles
appartieruicnt, déduction faite d'une espèce de Skimmia^ à
des genres bien connus et quelques-uns très répandus dans
le pays teniaire; ce sont les genres Mj-rica, Acerates. Apo-
cynophyllum, Berberis, Celastrus et PhylUies. Alors, com-
me dans le monde actuel, à côté d'espèces à aires très vas-
tes, se trouvaient d'autres à habitation plus restreinte, plus
propres par cela même à caractériser les régions. Les mê-
mes genres étaient représentés dans les différents climats
par des espèces dissemblables. Et les espèces ncuvetlèment
créés par M. Heer, étaient peut-être des formes australes
de celles qui habitaient l'Europe moyenne, comme nous en
trouvons aujourd'hui. L'abondance de formes nouvelles,
lo sur 35, nous prouve que le climat portugais devait être
différent et certainement plus chaud que celui d'Oeningen.
Entre les arbres, qui habitaient le Portugal, il y en avait
un, qui présente un intérêt tout particulier sous le point de
vue qui nous occupe; c'est VEucalj'ptus oceanica. Cet arbre
a été très répandu en Europe. Il existait en Suisse pendant
PAquitanien et le Mayencîen, mais il manque à l'Helvétien
et à Oeningen. De même, en d'autres contrées de l'Europe,
il existait dans le miocène inférieur et moyen, mais non
pas dans le supérieur, car il est douteux qu'on l'ait trouvé
à Senegaglia. On voit donc que cette plante, chassée de
presque toute l'Europe, qu'elle avait habitée, par le refroi-
dissement dû climat, se trouvait encore en Portugal. De
même nous voyons de nos jours des formes comme le Lau-
rus le Myrtus ou le Chamaerops, représentants de types
anciennement nombreux et répandus, et qui aujourd'hui sont
isolées, et reléguées aux extrémités australes de notre con-
A
„Google
j33
tinent. La persistance de l'Eucalyptus en Portugal, à un
moment où il avait disparu des autres contrées européen-
nes, nous semble indiquer une douceur exceptionelie du cli-
mat de notre région.
Dans les ai^ïles de Campo Grande on a trouvé les
feuilles d'une plante très remarquable, que M. Heer a rap-
portée au genre Sktmmia en lui donnant le nom de Skimmia
Oedipus. Ce genre, dont on n'avait trouvé jusqu'à présent
aucune espèce fossile, est représenté dans la flore vivante
par un petit nombre d'espèces, dont une habite les versants
de l'Himalaya et les autres le Japon. Ce fait, qui établit un
rapprochement entre la flore tertiaire et celle du Japon,
n'est nullement isolé. Il est bien connu qu'à une certaine
époque des temps tertiaires, les types japonais abondaient.
Cet élément avait une grande importance, même en ne
prenant en considération que le nombre des espèces, et une
importance plus grande encore si Ton remarque la fréquence
des individus, leur taille et leur aspect. Ne citant que les
plantes les plus remarquables et qui habitaient le Portugal :
le Glj'ptostrobits europaeus si répandu dans l'Europe ter-
tiaire, et qui se trouve à Azambuja, est très voisin du Glyp-
lostrobus heterophyllus du nord de la Chine et du Japon:
le Cinnamomum polymorphum d'Azambuja est analogue au
C. camphora du Japon : et le C. Scheuch\eri de Quinta do
Bacalhao est analogue au C. peduncuîatum, du Japon aussi.
Ces arbres très répandus,et à feuillage brillant, toujours vert,
devaient contribuer adonner à la végétation un aspect spécial.
En présence de ces faits il n'est nullement surprenant, que
l'existence d'une Skimmia vienne confirmer les relations
bien connues entre la flore tertiaire de l'Europe, et la végé-
tation actuelle du nord-est de l'Asie.
Si l'on cherche à reconnaître, autant qu'on peut le faire.
i34
en présence de données imparfaites, et dans l'état de nos
connaissances actuelles, quel a été le chemin suivi par les
formes de l'extrême Orient, qui a un moment donné, et
mêlées à de nombreuses formes américaines, viennent s'ajou-
ter aux formes australes des premiers temps tertiaires, la
présence du Skimmia en Portugal prend un certain intérêt.
On serait tout d'abord porté à croire que les fonnes
orientales, ont pénétré en Europe par l'est; mais les vastes
mers qui alors séparaient l'Asie de l'Europe, devaient pré-
senter de grandes difficultés à l'extension d'est à l'ouest.
D'un autre côté, il est assez généralement admis que l'Eu-
rope a été reliée à l'Amérique par un vaste continent, non
seulement dans la région septentrionale, mais aussi dans
la moyenne; et M. Heer avec sa grande autorité, est aussi
porté à admettre que de son côté le Japon se reliait à l'Amé-
rique. On peut donc supposer que quelques formes japo-
naises se sont répandues sur l'Amérique et le continent
Atlantide, et mêlées à des formes américaines ont pénétré
en Europe par l'ouest. Le Skimmia aurait suivi ce chemin,
et ne rencontrant pas en Europe des conditions de dévelop-
pement favorables, y aurait pénétré peu profondément et
se serait localisé dans son extrémité austro-occidentale. Il
est évident que cette opinion — une simple hypothèse, ne
s'appuie sur aucune preuve. On ne sait pas si le Skim-
mia habitait l'Amérique et la France méridionale, et quant
à son absence des autres flores fossiles de l'Europe, c'est
tout au plus une preuve négative, qui dans l'état de nos
connaissances n'a qu'une valeur bien restreinte.
En rapprochant tous ces faits, surtout l'abondance re-
lative de formes spéciales au miocène portugais et la pré-
sence si significative de V Eucalyptus oceatiica^ à un moment
où la rigueur du climat l'avait chassé du reste de l'Europe,
^
„Google
i35
on peut en conclure que le climat du Portugal était sensi-
blement plus doux que celui de la Suisse.
Doit-on admettre, que ia différence fijt alors ce quelle
est aujourd'hui? en d'autres termes, doit -on admettre que
la marche du refroidissement se soît faite uniformément de
manière à ce que les rapports entre les climats soient restés
les mêmes? Il me semble que non. On peut croire que le
climat tertiaire était, non seulement plus chaud, mais plus
uniforme; et que, à une élévation de température de 7 de-
grés en Suisse, pouvait correspondre une différence en Por-
tugal un peu moindre.
Sans toucher au fond de la question et à la cause prin-
cipale, encore inexpliquée, de la grande chaleur tertiaire, on
peut cependant remarquer que quelques-unes des causes
secondaires, invoquées pour expliquer l'ancienne chaleur et
le refroidissement postérieur, ont dû se faire sentir en Por-
tugal moins que dans d'autres contrées.
Ces causes sont: 1" l'élévation de quelques contrées
au-dessus du niveau de la mer; 2° le soulèvement de hau-
tes chaînes de montagnes; 3" la disparition de mers qui
pénétraient profondément dans l'Europe centrale et orientale,
et qui, en "communication avec la Méditerranée et la mer
des Indes, pouvaient avoir des courants, exerçant sur le
climat une influence semblable à l'action actuelle du Gulf
slream. Ces causes touchent peu le Portugal. Sa situation
géographique ressemblait assez à l'actuelle. La mer baignait
ses côtes, car même en admettant l'existence de l'Atlantide,
et en supposant que ses prolongements méridionaux englo-
baient les archipels atlantiques, on sait qu'un grand bras
de mer longent les côtes du Portugal et du nord-ouest de
l'Espagne, et mettait la mer australe en communication avec
ta baie de Biscaye.
..Co^N.
i36
Un courant semblable au courant du golfe pouvait lon-
ger de très près les côtes portugaises et élever la tempéra-
ture hibernale; d'un autre côté, le voisinage d'un grand con-
tinent, occupant une partie de l'emplacement actuel de
l'Atlantique, pouvait tendre à élever la moyenne estivale;
mais on ne peut guère admettre, que l'élévation de tempé-
rature due à ces causes et le refroidissement résultant de
leur disparition ftjssent aussi marqués que ceux qui, dans
l'Europe moyenne et orientale, résultaient de changements
autrement importants.
On peut donc croire que le climat de la péninsule ibé-
rique a moins changé dans la série des temps que celui d'au-
tres contrées de l'Europe. Mais les faits présentés plus haut,
c'est-à-dire la moyenne probable de 18' pendant la forma-
tion de la molasse suisse, et la différence entre ce climat
et celui du Portugal, qu'on ne peut guère évaluer à moins
de 2', nous forcent à admettre une moyenne en Portugal,
pendant le miocène supérieur, de 20° environ, soit supé-
rieure de 5° a l'actuelle. C'est la température que M. Heer
admet avoir dû exister à la même époque dans l'Italie su-
périeure.
Ce climat admet parfaitement l'existence des plantes
qui habitaient alors le Portugal. Comme le fait remarquer
M. Heer, l'aspect de la végétation est subtropical. Les ty-
pes purement des tropiques ont disparus. Le camphrier et
le cannellier tertiaires, le Podogonium, VEucalyptus existent
encore. Les arbres et arbustes à feuillage toujours vert
abondent, comme c'est le cas encore aujourd'hui. D'un au-
tre côté des Populus, un Carpinus, des Ulmus, fréquents
dans les miocènes supérieurs de l'Europe centrale et dans
le pliocène de l'Italie, accusent par leur présence un climat
tempéré,
,ï Google
M. Capeluni fait ressortir l'intérêt du mémoire de
M. Heer, ainsi que des considérations que M. le Comte de
FicALHo vient de faire devant le Congrès, car ces deux com-
munications fixent parfaitement la position des couches d'oiJ
proviennent les végétaux, dans la partie supérieure des cou-
ches à Congéries.
,ï Google
L'HOHHE tertiaire: EN ITALIE
M. Bellucci : J'appelle ^attention du Congrès sur la trou-
vaille faite récemment à San Valentîno et Castello délie For-
me, près de Pérouse, d'ossements de différents animaux qui
portent des incisions droites et entrecoupés, des empreintes
fûtes probablement avec des cailloux en vue de les casser,
de deux échantillons d'ossements carbonisés, et enfin de si-
lex éclatés; tout cela recueilli dans les dépôts argileux du
pliocène lacustre, caractérisé par une faune tout-à-fait cor-
respondante à celle classique du Val d'Amo. Ces objets don-
nent la preuve de l'existence de l'homme à l'époque tertiaire
dans l'Ombrie. Je reviendrai sur cet argument dans un mé-
moire que je publierai bientôt.
M. Capellini; Depuis 1875 j'ai eu l'occasion d'attirer
l'attention des savants sur la découverte d'ossements d'un
Balaenotus près de Sienne, en Toscane, portant des entail-
les qui par leur forme et la place à laquelle elles se trou-
vent, témoignent de l'action d'un être qui maniait un instru-
ment.
Plus tard, des ossements d'une Bcdaenuîa. avec des
,ï Google
Jls.
entailles analogues à celles du Balamotus de Sienne, ont
été recueillis dans la vallée de la Fine dans ta province de
Rse.
Je tiens a constater que ces ossements se trouvaient
ensevelis dans des dépôts pliocéniques correspondant au
Crag gris des environs d'Anvers.
Au Congrès de Budapesth et après à Paris, j'ai fait voir
la plupart des pièces recueillies jusqu'alors et j^ai essayé
de répondre aux objections soulevées par mes adversaires.
Maintenant je présente encore une omoplate de Balae-
nula trouvée dans la vallée de la Fine, au même endroit ou
l'on avait avait recueilli quelques-unes des pièces ci-dessus
mentioimées.
Sur cette omoplate il y a des incisions très nettes, pro-
fondes, quelques-unes presque circulaires sans aucune cor-
respondance sur les deux faces. Ces incisions sont identi-
ques à celles que nous pourrions faire avec une lame de
silex, ou autre outil bien tranchant, sur l'os à l'état frais.
Je pense que, d'après l'inspection de la pièce, l'on doit
se convaincre que de telles incisions n'ont pu être faites
que par une main armée d'un outil '.
' V, sur ce même sujet les observations de MM. Virchow ei de
QuATREFAGEs daHs la discussion sur l'aHomme tertiaire en Pcrtuf^al-,
pp. io8 et 1 16,
,ï Google
L'BOHHB FHtHISTOBIQUE
M. SCHAAPFHAUSEN
J'avais choisi l'homme préhistorique comme objet d'une
communication dans cette Session, parceque pendant les tren-
te-six ans, que je me suis occupé des études anthropologi-
ques, il s'est présenté à mes yeux plusieurs observations im-
portantes, qui sont intimement liées à la question : A quelle
époque l'homme tertiaire a-t-ilfait son apparition en Europe?
Et j'avais encore une autre raison: la discussion sur l'homme
tertiaire m'a paru être la grande affaire [>our ce Congrès, vu
le résultat des fouilles faites en Portugal par M. Ribeiro.
On ne se contente plus de parler d'un homme préhis-
torique, d'un homme fossile qui a vécu avec les animaux
quaternaires, disparus dans les mêmes contrées, l'ours des
cavernes te renne, le rhinocéros et le mammouth; on éta-
blit maintenant l'homme tertiaire, ou plus précisément
l'homme pliocène. M. de Mortillet regarde comme le fon-
dement de toute recherche à cet égard la considération,
que l'homme doit avoir eu son précurseur comme tous
les animaux de la faune moderne, qui ne sont que les des-
cendants de ceux des anciennes couches tertiaires. Ainsi
M- Marsh nous a montré le développement du cheval
,ï Google
'4'
par une longue série de formes, qui se sont succédées de-
puis le temps éocène jusqu'au temps post-pliocène. Ce se-
rait une exception singulière et inexplicable, si Phomme seul
était resté le même depuis les temps tertiaires jusqu'à pré-
sent, tandis que les mammifères ont subi les plus grandes
altérations. On doit conclure, que l'homme a changé plus en-
core que tes animaux, non seulement parce qu'il était exposé
aux changements du climat et de la nourriture, mais aussi
parce qu'il se développait dans sa nature même une nouvelle
force qui exerçait la plus grande influence sur sa configura-
tion— son intelligence. Si nous distinguons en général le temps
tertiaire du temps post-pliocène ou quaternaire, nous dési-
gnons le premier par une plus grande étendue de la mer,
par une plus haute température, et par des organismes, qui
sont différents de ceux qui vivent aujourd'hui. Dans la pé-
riode quaternaire eut lieu un grand abaissement de tempé-
rature, et en même temps la déposition des grandes couches
diluviennes contenant les restes des grands animaux qiû
n'ont pas disparus mais qui ont changé leur habitat.
Ce fut à Bruxelles, que l'abbé Bourgeois soumit au
jugement du Congrès les silex de Thenay comme preuves
de l'existence de l'homme dans la période pliocène. J'ai vu
ces silex à Bruxelles et je les ai examinés plus tard à Saint-
Germain avec d'autres, provenant de nouvelles fouilles du
même endroit, et je ne peux qu'assurer, que parmi ces si-
lex il y en a quelques-uns, qui sont indubitablement fabri'
qués par la main de l'homme. Mais, je demande, est-il pos-
sible de séparer avec une complète exactitude, entre des li-
mites bien précises, les formations pliocènes des formations
post-pliocènes, ou quaternaires ? On a l'habitude de regarder
les trois périodes du temps tertiaire, l'éocène, le miocène et
le pliocène établis par Charles Lyell, comme des sections,
142
qui n^ont pas de transition entre elles ni avec les couches
voisines; mais jamais il n'exista dans Pévolutîon de la sur-
face de notre globe et dans le développement des organis-
mes qui l'habitent, une telle séparation. Les périodes se
sont au contraire succédées avec une certaine continuité,
et les organismes changèrent peu à peu selon le changement
des conditions de leur vie.
Il y a une autre observation de laquelle on avait con-
clu l'existence de l'homme tertiaire. Au Congrès de Buda-
peslh M. Capellini nous a montré des ossements d'une ba-
leine fossile tertiaire avec des incisions, qui avaient l'appa-
rence d'être faites par la main de l'homme. J'en ai douté
et j'en doute encore. Je ne connais pas l'instrument de l'hom-
me préhistorique qui aurait pu faire de telles incisions ai-
guës et semilunaires. A l'exposition de Berlin pour la pisci-
culture il y avait un morceau de bois d'un navire avec la
pointe d'une dent de narval, qui y était enfoncée. Blu-
menbach a fait déjà la remarque, qu'un tel cas n'est pas
rare. II me semble, qu'un narval avec une dent brisée pou-
vait faire de telles impressions sur les ossements d'une ba-
leine.
En 1871, M. Ribeiro a publié ses observations sur des
silex taillés des vallées du Tage et du Sado, trouvés dans
des couches pliocènes et miocènes, qui sont couvertes par
des dépôts d'une hauteur de mille deux cents pieds. L'homme
doit avoir été le témoin des derniers événements volcaniques
dans cette contrée! Je me permets de demander, si ces évé-
nements ne peuvent avoir encore eu lieu au commencement
du temps quaternaire ?
Considérons maintenant les fouilles qui ont donné des
restes humains et qui peuvent éclaircir notre question.
Le crâne et quelques ossements de l'homme de Néan-
^
„Google
derthal ont été trouvés dans une caverne de la Westphalie
dans les mêmes circonstances, dans lesquelles on y trouve les
restes des animaux quaternaires. Le nord de TAUemagne était
au commencement de cette période, dans sa partie orientale,
couvert de glaciers, et dans la partie occidentale existait en-
core la mer, dans laquelle les bancs de glace ont dispersé
les blocs erratiques, que nous trouvons aujourd'hui dans les
plaines de cette contrée et dans la Hollande. Dans les caver-
nes de la Westphalie ainsi que de la Belgique, nous trouvons
les restes des animaux, qui habitent aujourd'hui le nord; le
lemming, la poule de neige, le renne. Je regarde par con-
séquent l'homme de Néanderthai comme contemporain de
la dernière période glaciaire. J'ai remarqué déjà, que la proé-
minence colossale des arcades sourciliéres de ce crâne est
produite par la grandeur des sinus frontaux et que cette
conformation prouve une grande énergie de la respiration.
C'est là une fonction, qui doit être bien développée chez un
homme qui vit dans un climat froid, où une vive combus-
tion des éléments du corps doit conserver la chaleur ani-
male. Chez les anthropoïdes et chez quelques peuples sau-
vages, que habitent des pays chauds, comme les Australiens,
il se trouve aussi une grande proéminence du bord supé-
rieur des orbites ou des arcades sourcilières, mais elle est
principalement produite par une grande épaisseur de l'os
frontal dans cette région; les sinus frontaux sont peu déve-
loppés. Je crois, que cette différence dépend du climat. Les
parois des sinus frontaux du crâne de Néandenhal sont
minces et les os de la voûte du crâne ne sont pas aussi
épais qu'on les trouve dans la plupart des crânes des indi-
vidus appartenant aux tribus les plus sauvages. C'est une
singularité du crâne des Esquimaux que d'être ordinairement
très léger à cause de la ténuité des os qui le forment. Ce fai-
cft. i3
,ï Google
■44
1
ble développement du tissu osseux doit être attribué à la
froideur excessive du climat
Le crâne de Néanderthal reste le plus bestial que nous
connaissions, il n'est pas le produit d'une conformation ar-
tificielle, il n'est pas le crâne d'un idiot, sa grandeur seule
réfute cette opinion, et il n'est pas l'effet d'une affection mor-
bide. Nous ne connaissons aucune maladie qui pût produire
une telle altération de la forme ordinaire du crâne humain.
Ce crâne est typique et il s'approche dans quelques carac-
tères du crâne du singe anthropoïde, maïs il est humain.
Qu'on examine la photographie du crâne et la photographie
du moule de l'intérieur du crâne: la forme du cerveau res-
semble à celle d'un homme sauvage, par exemple d'un Aus-
tralien.
On dit souvent, que l'on n'auraitpas trouvé jusqu'à pré-
sent une conformation de l'homme fossile plus inférieure
que celle des sauvages vivants. Ce n'est pas vrai. Un crâne
comme celui de Néanderthal, et une mandibule pareille à
celle de La Naulette ne se trouvent chez aucune race vi-
vante.
On a dit aussi: un seul crâne ne prouve rien. Mais un
naturaliste, qui trouve dans un pays étranger une nouvelle
plante, ta place dans la série des plantes connues. U serait
ridicule, s'il disait: je ne peux rien dire là-dessus, jusqu'à ce
que j'en aie trouvé plusieurs exemplaires. L'individu a son
droit d'Être reconnu dans la nature, comme dans le monde
social.
Une observation Importante et concernant notre sujet
je l'ai faite dans la vallée de la Moselle, près de Coblentz.
Dans une profondeur de vingt-deux pieds on a trouvé un
crâne de Bos moschatus^ le plus complet qui existe. Il gi-
sait dans une terre ar^leuse diluvienne, qui est couverte
,ï Google
_I45_
dans cette contrée par une lave d'un ancien volcan du Rhin.
Ce crâne niontre à sa surface plusieurs incisions anciennes,
faites par la main de l'homme avec un instrument tranchant
de pierre. Beaucoup de naturalistes ont reconnu l'authenti-
cité de ces impressions. J'avais présenté ce crâne au Con-
grès des anthropologis tes allemands à Strasbourg. Donc,
l'homme a vécu dans la vallée de la Moselle pendant la pé-
riode glaciaire, faisant usage déjà des instruments de pierre,
et il a vu les dernières éruptions des volcans de cette contrée.
Encore une autre observation. Dans le printemps de
cette atinée on a trouvé dans le diluvium du Neckar, près
de Manheim, à une profondeur de vingt pieds, un crâne hu-
main à côté de plusieurs dents molaires de mammouth. Ces
restes se ressemblent dans l'apparence extérieure aussi bien
que dans la constitution chimique, il n'y a pas à douter
qu'ils ne soient contemporains. Un deuxième crâne humain
était si mou, qu'xin n'a pas pu le conserver. Il avait les ar-
cades sourcilières énormes. Le crâne conservé appartient à
un individu féminin; il montre beaucoup de traits d'une
conformation inférieure, mais tous ces caractères se trou-
vent aussi chez les sauvages vivants. Le front de ce petit
crûne n'est pas mal développé, mais il a la forme de celui
d'un enfant. Ce crâne prouve que l'homme, qui coexista
avec le mammouth dans cette contrée dans les temps qua-
ternaires, n'était pas très différent de la race humaine vi-
vante. En voici les photographies.
Voyons encore le dessin du fameux crâne de Calaveras pu-
blié par M. Whimey l'année dernière '. Il a été trouvé sous
quatre couches volcaniques. Je ne peux le regarder comme
' J. D. Whitney : The auriferous gravels of ihe Sierra Nevada of Ca-
lifornia, Memoirs of the Mus. of comp. Zool. M Harvard Collège, Cam-
bridge, iSTg, vol. vi, n.° i, p. ï58.
i3»
-^^;
.gic
tertiaire, parce que sa forme ne diffère pas beaucoup du sau-
vage vivant en Californie; une coquille, qui est attachée au
crâne, est d'une espèce vivante. Dans les trtêmes couches
d''un sable aurifère on a trouvé beaucoup de mortiers en
pierre, que nous ne pouvons attribuer à ITiomme tertiaire,
et à côté des espèces disparues, les restes d'un tapir et d'un
cheval qui ne diffèrent pas des espèces vivantes. J'ai parlé
de cette fouille au Congrès de Bruxelles.
M. Ramsay a démontré cette année devant l'Associa-
tion Britannique, que les événements géologiques sur la ter-
re sont restés les tnèmes depuis les temps les plus reculés
jusqu'à la période pliocène, et même post-pliocène; qu'il y
eut toujours depuis la période silurienne des éruptions vol-
caniques, des glaciers, des formations d'eau douce, des élé-
vations et des submersions, des plaines et des montagnes.
Donc, les forces qui ont altéré la surface de la terre, sont
restées les mêmes depuis les périodes les plus anciennes,
dont la science ait connaissance, jusqu'à ce jour.
L'aspect de la nature ne paraît plus si uniforme et si
invariable si nous regardons l'évolution de la vie oi^anique.
Les organismes sont diiîérents dans les périodes miocène,
pliocène et diluvienne.
On peut conclure, que les mammifères ne pouvaient
pas exister avant que Pair ne fût purifié et que le sol ne
donnât la nourriture pour les herbivores, qui devaient entre-
tenir la vie des carnivores.
Les besoins de l'homme, les conditions pour son exis-
tence étaient les mêmes que pour les autres mammifères
et spécialement pour ceux qui ont le plus d'afBnité avec lui.
Les vertébrés les plus parfaits, les singes anthropoïdes,
ne vivent aujourd'hui, que dans les climats chauds, et sup-
portent difficilement l'air de l'Europe centrale et septentrio-
,ï Google
'47
nale; mais ils vécurent dans Pancien monde même pendant le
temps tertiaire. Le Dryopithecus vivait en France, et un
Hylobates dans la vallée du Rhin. Il paraît que l'homme seul
a survécu par son intelligence, tandis que la froideur du
temps glaciaire a détruit les anthropoïdes en Europe, com-
me elle a expulsé d'autres mammifères.
La division du temps tertiaire en eocène, miocène et
pliocène a été faite par Charles Lyell en raison des différen-
tes espèces de coquilles marines dans les diverses couches. Il
n'y a pas de coquille qui puisse nous aider à distinguer l'ai-
luvium du diluvium, et le quaternaire d'une formation pliocè-
ne. Faisons usage des restes humains pour déterminer, quelle
couche est tertiaire ou quaternaire ! Ces débris nous doivent
indiquer par le degré de leur organisation l'âge des couches,
dans lesquelles ils ont été ensevelis par la nature même !
J^arrive aux conclusions suivantes:
1° L'homme tertiaire n'est pas encore trouvé mais aon
existence pendant le temps pliocène est très vraisemblable.
2" L'homme qui a vécu en Europe et en Amérique avec
le mammouth n'était pas plus rude, que te sauvage vivant.
3" Malgré cela, nous connaissons déjà quelques traits
dans la conformation de l'homme préhistorique, qui prouvent
une organisation inférieure à celle d'une race vivante quel-
conque. Nous devons regarder ces traits comme des indica-
tions, des reliques de la conformation de Thomme tertiaire.
4" L'homme a vécu en Europe et en Amérique pen-
dant la période glaciaire, pendant la fonnation des grandes
coudies diluviennes, pendant les éruptions volcaniques, qui
n'ont plus lieu dans ces mêmes contrées, quoique elles sem-
blent avoir duré pendant l'époque quaternaire.
5° L'homme doit être apparu sur la terre entrela pé-
riode miocène et post-pliocène.
hy^WK'^lc
148
Dlaonsalon
M, DE QvATREFAGEs: J'oi tTop souvciit exprîmé mon
opinion sur la question actuelle pour avoir besoin d'insister
longtemps sur ce sujet. On sait qu'il m'est impossible d'ad-
mettre dans le passé l'existence d'un être imtermédiaire en-
tre l'homme et les singes anthropomorphes, fils de ces der-
niers et notre ancêtre direct. Le crâne de Néanderthal, que
l'on cite toujours chaque fois que l'on aborde cet ordre
d'idées, n'a en réalité que bien peu de ces caractères excep-
tionnels qu'on lui anrîbue et que l'on exagère outre mesu-
re. Il n'est autre chose que le type le plus accusé d'une for-
me céphalique dont nous avons montré, M. Hamy et moi,
qu'il existe des degrés très divers. M. Vogt avait déjà fait
voir que ce type s'est produit de nos jours encore et qu'il
est très compatible avec un développement intellectuel des
plus accusés.
Au reste, les origines humaines ne sont qu'un cas de
la grande question des origines des espèces animales et vé-
gétales. On comprend que je ne voudrais pas la soulever
ici; elle m'entraînerait trop loin et soulèverait vite de trop
longues discussions. Je me borne à rappeler que les con-
sidérations morphologiques ne suffisent pas pour aborder
et résoudre ce problème et qu'il faut tenir compte des lois
physiologiques communes aux animaux comme aux végé-
taux.
M. DE Mortillet: Ce n'est pas toutefois l'anthropolo-
gie seule qui prouve le transformisme, mais toute l'histoire
naturelle.
,ï Google
'49
M, DE QuATREFAGES: Jc n'aî pas voulu dire que le trans-
formisme ait pour seule base Panthropologie, mais bien qu'il
se base seulement sur la morphologie. Or cela ne suffit pas,
et il faut, à côté des faits morphologiques faire intervenir
les faits physiologiques. L'erreur de Darwin et de ses disci-
ples est d'avoir oublié ces derniers, ce qui tient à ce qu'ils
ne se sont jamais demandé ce que c'est qu'une espèce et
ont par suite confondu l'espèce avec la race.
M. ScHAAFFHAUSEN ; En répondant aux paroles de M. de
Quatrefages, je ne veux pas entrer dans une ample discus-
sion sur une question grave, qui a etïrayé le monde, et que
l'on a débattu à l'excès. Une langue étrangère m'impose déjà
une certaine restreinte. Je me borne à une seule remarque.
M. de Quatrefages m'accordera bien, qu'il y a une grande
différence d'intelligence et de degré de conformation du cr3-
ne entre les sauvages et les peuples civilisés. Les traits de
la conformation plus inférieure sont évidemment les traits
bestiaux ou ptthécoïdes: il y a eu donc une évolution telle,
qu'elle a développé les formes primitives et changé Torganisa-
tion et l'extérieur du corps. Le volume du cerveau s'est agran-
di et les circonvolutions sont devenues plus compliquées.
Le nez et la bouche, le pied et la main ont changé de forme.
Il est impossible, que M. Vogt ait jugé sur le crâne de
Néanderthal ainsi que le suppose M. de Quatrefages. Il s'est
demandé au contraire, si ce crâne ne serait pas celui d'un
idiot.
II n'est pas douteux que les peuples civilisés de l'Eu-
rope ne fussent autrefois des sauvages; nos fouilles le dé-
montrent. Qui est ce qui veut restreindre la nature, qui dé-
veloppe ainsi les formes organisées, entre des limites insur-
montables ?
,G*«»|le
i5o
Quels changements peuvent s^être accomplis dans fé-
coulement des siècles?
Quel autre moyen avons-nous pour déclarer la pre-
mière apparition de l'homme sur la terre, que cette évolu-
tion générale des êtres organisés, dont Phomme seul, com-
me je l'ait dit tout à l'heure, ne pouvait pas être exclu !
,ï Google
ÉPOQUE QUATERNAIRE
LES ANCIENS OLAGIEHS DU BASSIN DU RHONE
M. Ernest Chantre
J'ai l'honneur de présenter au Congrès l'ouvrage que
je viens de publier en collaboration avec M. Faisan : Mo-
nographie géologique du terrain erratique et des anciens
glaciers du bassin du Rhône '. Sans vouloir entrer dans les
détails relatifs à l'historique de la question, je désire seule-
ment attirer votre attention sur l'intérêt qui s'attache à
l'étude des anciens glaciers quaternaires, pour les recher-
ches relatives à l'antiquité de l'homme. Mais avant je vou-
drais vous donner quelques explications sur la distribution
des dépôts erratiques dans les régions que nous avons étu-
diées, et sur la marche qu'ont suivie ces grandes masses
glacées qui se sont étendues depuis les Alpes jusqu'à Lyon.
Tous ces renseignements sont consignés sur la carte que
vous avez sous les yeux.
' Deux volumes in S" avec cartes, coupes et nombreuses figures
intercalées et un atlas de 6 feuilles de l'état major français à l'échelle
de 1/80000. Lyon, 1880. Masson éditeur a Paris et Georf; éditeur a Bâle,
Genève et Lyon.
..^BV^Ic
i5a
Pour faire comprendre le sens de la progression des
anciens courants de glace, pendant leur plus grande exten-
sion, ainsi que leur entre-croîsement, les teintes plates em-
ployées dans les cartes géologiques ordinaires ne devaient
pas suffire; nous avons dû adopter les procédés usités dans
certaines cartes hydrographiques pour indiquer les courants
marins.
C'est la représentation exacte de ce qui est sur le ter-
rain, car on sait que les glaciers usent, polissent et rayent
les rochers sur lesquels ils cheminent, entraînant avec eux
des roches plus ou moins dures capables d'inciser les ro-
chers sous-jacents.
La marche des glaciers est donc ainsi indiquée par des
lignes de diverses couleurs, suivant la provenance des ro-
ches constituant les moraines, et les directions sont rigou-
reusement exactes, puisque nous les avons tracées d'après
relevés nombreux des stries sur les rochers.
Des lignes transversales, coupant les lignes qui se pro-
longent de Test à l'ouest en éventail, depuis les pieds des
Alpes jusqu'à Bourg, Lyon et Valence, indiquent les mo-
raines frontales.
Les dernières moraines frontales couronnent les hau-
teurs qui dominent la Saône, en Bresse, en face de la Bour-
gogne, et couvrent les collines lyonnaises et viennoises plus
au sud sur le bord du Rhône.
Plusieurs coupes montrent les détails relatifs à la su-
perposition des dépôts quaternaires aux terrains tertiaires,
qu'ils recouvrent presque partout dans cette région.
Au point de vue anthropologique, l'étude de la distri-
bution des moraines a une très grande importance.
L'homme, arrivé dans le bassin du Rhône pendant l'ex-
tension des glaciers, ne pouvait vivre d'abord que sur les
,ï Google
i53
points privilégiés par la température, comme tes pentes
abritées de la vallée de la Saône, par exempte ; puis, à me-
sure que ta nappe de glace se retirait vers son point de dé-
part, il suivit à peu près la même marche vers t'est, s'avan-
çant peu à peu à mesure que la vie reparaissait sur ce sol
nouvellement déposé.
Cest ainsi que successivement les grottes du Ûauphiné
et de la Savoie ont donné asile à des populations de moins
en moins anciennes, à mesure que l'on s'approche vers les
Alpes. En effet, tandis que l'on trouve à Germolles et à
Solutré, en Bourgogne, ainsi que dans les grottes de l'Ar-
dèche les vestiges les plus anciens de l'homme quaternaire,
on ne rencontre plus dans les grottes du Dauphiné et de
la Savoie, que tes restes des populations de l'époque de la
Madeleine, c'est-à-dire de la fin de l'époque quaternaire.
Ces faits démontrent bien tes corrélations qui existent entre
le développement des populations préhistoriques du bassin
du Rhône et la répartition des éléments glaciaires qui ont
recouvert si longtemps la plus grande partie de cette belle
contrée.
Ce fait anthropologique est confirmé par l'étude de la
distribution géographique de la faune quaternaire. C'est
également dans la région que les glaciers ont atteinte, au
moment de leur plus grand développement que se trouvent
les plus anciens vestiges de la faune quaternaire; dans les
parties voisines des Alpes, on ne rencontre plus, au con-
traire, que des restes d'animaux indiquant la fin de cette
grande période géologique qui a immédiatement précédé
la nôtre.
Les collections du muséum de Lyon dont les séries pa-
léontotogiques sont fort riches démontrent, par leur classe-
ment même, la réalité de ces faits scientifiquement observés.
"f^
ogie
J'espère que de semblables études pourront être faites
en Portugal, où la faune quaternaire paraît offrir un très
grand intérêt. Il serait bien utile de rechercher les rappons
qui peuvent exister entre elle et les dépôts quaternaires du
pays et de tes comparer à ceux des autres contrées.
Diaonasion
M. Evans: Je reconnais Pimportance des études que
M. Chantre a faites sur ce sujet. Je dois, cependant, décla-
rer qu'en Angleterre on ne rencontre aucun vestige de l'exis-
tence de l'homme pendant la période glaciaire; donc, cette
période y doit être antérieure à celle de Solutré.
M. DE Mortillet: J'ai rencontré des instruments de la
forme de Saint-Acheul dans le bassin de la Tamise; ils n'y
étaient pas, cependant, accompagnés de la faune caracté-
ristique. Les glaciers des Alpes sont différents de ceux de
l'Angleterre, car ces derniers étaient flottants. Ailleurs ils
sont tombés des montagnes et ils sont postérieurs. Dans le
bassin du Rhône il y a un grand nombre de stations qui sont
demeurées hors de la portée des glaciers. Toutes les sta-
tions rencontrées dans cette région sont magdaléniennes.
,ï Google
RÉSUMÉ D'UNE ÉTUDE
SUR QUELQUES DÉPÔTS SUPERFICIELS
DO
BASSIN DU DOURO
PRÉSENCE DE L'Honni:. VESTIGES D'ACTION GLACIAIRE
M. Fbed. de Vasconcellos Peheira Cabral
M. Vilanova: Je me trouve dans le plus grand em-
barras motivé par l'excessive modestie de mon ami, M. Fre-
derico de Vasconcellos, lequel, ayant fait de très intéres-
santes observations sur les dépôts superficiels du bassin du
Douro, n'ose pas communiquer directement à la docte as-
semblée le résumé de ses propres observations. J'ai eu
l'avantage d'examiner les objets que M. Vasconcellos a
recueillis, et qui sont réellement d'un grand intérêt. L'ayant
poussé à les faire connaître, il a bien voulu me charger
de donner une idée du travail qu'il a très habilement ré-
digé. Je n'ai pas eu le temps d'étudier ce sujet; fose donc
l'inviter à laisser de côté la méfiance qu'il a de ses pro-
pres forces, et à lire lui-même son intéressant mémoire.
"rs.
i56
M. Fred. de Vasconcellos: L'exploration de quelques
dépôts superficiels d'une partie très restreinte du bassin
du Douro, quoique fort incomplète, a permis cependant de
constater quelques faits, qui peuvent concourir à élucider
la question de l'existence de l'homme à l'époque paléolithi-
que dans la partie nord du pays, où l'on a déjà trouvé des
preuves si décisives de sa présence dans une période, qui,
quoique plus récente, n'en est pas moins comprise dans les
temps préhistoriques, et n'offre pas moins d'intérêt pour
l'étude des modifications progressives, qu'a subies la société
humaine.
Les recherches faites dans la panie du bassin du Douro,
qui comprend son embouchure, se sont limitées a une sur-
face de 8 kilomètres de longueur, en comptant de la côte
de la mer vers l'est, avec une laideur de près de 6 kilomè-
tres. Elle est sillonnée par le lit du fleuve, qui la coupe
à peu près par son milieu dans la direction moyenne de
l'ouest.
Le fleuve, dans cette partie de son bassin, coule entre
des collines granitiques et gneissiques coupées par de pe-
tits vallons, et des ravins, qui lui amènent leurs eaux.
Ces collines atteignent les altitudes de 70 mètres, tant
au nord qu'au sud du fleuve, dans deux endroits, où elles
sont constituées par des massifs granitiques, qui présentent
du côté du fleuve des escarpements abrupts, et réduisent
son lit à des largeurs de 120 à 200 mètres.
A l'est et à l'ouest des deux goi^es, là où les collines
en baissant de niveau sont aussi coupées par les vallons
et les ravins, le lit du fleuve s'élargit un peu plus, atteignant
400 et 45o mètres et enfin près de 700 avant son embou-
chure, en dedans d'un cordon littoral, formé par des sables,
qui va se souder aux dernières collines de la rive du sud.
,ï Google
PII
'h lies al lu ' '""*'' ''" tramway à Erfilfta
nord.
;rh#U« an hauleurt t : 5O0.
hlBoa. "l. ^'ti ilnlifirrmr ir galtlt.
lartsiinoïKi. ^ Onriu.
aroi étune rcofine^ au sud du Castello do Queijo
Altiludei
Érhrilf dfê hautruis 1 : 600
I. SoWci tfgUmtrit ftr If ftr
I. Attuvwns rimttt
arénacéo-argileuses au sud du Castello do Queijo
If ^^i-«i il çaliii arei ct^uillrt.
I, 3, t «1 i. Sine rfci »iu*«
Ulh. C<l(ldl et h]Dl« 3(1
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PholMypie de J. LoÎFolJ — LiEbonne
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Frederico de Vasconcellos.
Fragment de gneiss poli et strié in siiu par l'action glaciaire, au sud dt
Castello do Queijo sur la côte de la mer, près de Porto.
Pli.it5. n Pkl:i. deK D. 3aiil:s.
1
„Google
■57
et vers te nord rétrécit Pembouchure du fleuve en la rédui-
sant à moins de 120 mètres à l'étiage.
Entre ces deux gorges s'étendent, dès le bord du fleuve,
sur la rive droite, la ville de Porto et sur la rive gauche
Villa Nova de Gaia. Les collines, qui bordent le fleuve au
nord et au sud^ s'élèvent très doucement, et à courte dis-
tance vont se confondre dans des plateaux, où disparais-
sent par conséquent les vallons et les ravins qui les sé-
paraient.
Ces plateaux constituent le caractère le plus remarqua-
ble et prédominant du relief du terrain. Ils s'élèvent, dans la
partie est des deux zones de nord et de sud à des altitudes
de 80 à 100 mètres, en se raccordant avec les terrains plus
élevés de l'est; tandis que vers l'ouest ils baissent très len-
tement, de façon à se maintenir à des altitudes de 60 mè-
tres à moins de i.5oo mètres de la côte. Ils descendent après
plus rapidement vers le niveau de la mer, en présentant
des accidents, qui attirent l'attention, mais dont, au moins
pour le moment, il n'est pas essentiel de parler.
Les deux plateaux offrent cependant d'autres condi-
tions, qu'il convient de faire connaître tout de suite.
Cette pente vers l'ouest, qui est assez prononcée dans
les deux plateaux, n'est pas leur plus grande pente. Ils bais-
sent aussi un peu vers le lit du fleuve, c'est-à-dire, celui du
nord vers le sud, et celui du sud vers le nord, et ceci avec
une certaine conformité, de façon qu'à des distances éga-
les du fleuve ils atteignent sensiblement les mêmes alti-
tudes.
Es peuvent donc être représentés par deux plans syn-
cliniques, qui se couperaient par une ligne droite un peu in-
clinée à l'horizon vers l'ouest, et sensiblement équidistantç
des deux rives du fleuve.
,Gooa
'ife
158
La symétrie et la convergence des deux plateaux, par
rapport au Ht actuel du fleuve, doivent concourir à jeter
quelque lumière sur les causes, qui ont donné au sol son
relief actuel.
Les surfaces des plateaux montrent quelques inégalités,
mais si peu prononcées, qu'elles n'altèrent pas sensiblement
le faciès caractéristique des deux zones de nord, et de sud.
On ne connaît pas dans cette partie du bassin du Douro,
ni même à plusieurs kilomètres vers l'est, des formations sé-
dimentaîres, ou de transport, plus modernes que le terrain
houiller, autres, que les dépôts, dits superficiels, qui sont
compris dans les dernières périodes géologiques, et dont nous
allons donner une esquisse.
Les plateaux au nord et au sud du fleuve sont couron-
nés, dans de très grandes étendues, par des dépôts de trans-
port, composés de cailloux roulés de grosseurs variables, de
quanzite, de grès fins siliceux, de schistes durs de couleurs
foncées, ainsi que de roches ignées plus ou moins décom-
posées, le tout mélangé avec des sables, et d'autres détri-
tus à l'état terreux.
Nous nommerons ces dépôts alluvions anciennes,
non seulement parce qu'ils sont antérieurs à ceux de nature
semblable, que les fleuves actuels ont formés, mais aussi
pour les distinguer d'autres dépôts analogues, dont nous au-
rons à parler, et que nous tenons comme d'époque plus
moderne.
Nous ne voulons pas, cependant, par cette dénomination
les identifier avec des dépôts semblables, et semblablement
distribués, auxquels on a donne le même nom dans d'autres
pays, en leur attribuant une position définie dans l'échelle
géologique.
L'épaisseur de ces dépôts ne dépasse pas 5 mètres,
,ï Google
_i59
et se réduit même parfois à quelques décimètres dans les
endroits, où l'on a pu la vérifier.
Leur plus grande épaisseur ne coïncide pas toujours
avec leur plus grande altitude. Ils se montrent quelquefois
accolés à de légères protubérances du sol sous-jaceot, très
peu apparentes, et à surfaces planes ou légèrement bom-
bées, qu'ils couronnent encore d'une mince couche.
La couleur prédominante dans ces alluvions est le jau-
ne-rougeâtre présentant des nuances variées, et s'évanouis-
sant même au point de laisser prévaloir la couleur blanchâ-
tre des cailloux de quartzite, qui sont ceux qui abondent
le plus dans ces dépôts.
La distribution des matériaux qui les constituent est
très capricieuse. Dans quelques endroits on remarque des
vestiges de stratification, dénoncée par un classement plus
ou moins prononcé de leurs éléments, ainsi que par la dis-
position des couleurs en bandes, dans la plupart des cas
sensiblement horizontales.
Ces indices sont loin, cependant, de se montrer partout.
Quelquefois à une petite distance de l'endroit, où ils se ma-
nifestent, les alluvions prennent le caractère d'un dépôt tu-
multueux, où l'on voit les matériaux qui les composent,
confondus pêle-mêle, les gros cailloux étant distribués sans
ordre entre le menu gravier et les sables plus ou moins
terreux. D'autres fois ces sables mélangés de menu gra-
vier et d'un peu de terre jaune-rougeâtre, qui paraît repré-
senter les détritus les plus fins de ces dépôts fragmentai-
res, constituent presque exclusivement la masse alluviale
dans des étendues considérables, sans que, cependant, les in-
dices de stratification soient apparents. Ici se montre un
amas très aplati de gros cailloux roulés de 1 5 et 20 cen-
timètres de diamètre moyen, sans mélange de détritus plus
'«SL
i6o
fins, et couronnant une légère protubérance du plateau. Plus
loin les alluvions prennent l'apparence de dépôts stratifiés
de très menu gravier, ou de couches assez régulières de
cailloux roulés.
Dans tous les lieux, où l'on a pu yoir le contact de
ces alluvions avec le terrain sous-jacent, on a vérifié, qu'el-
les reposent immédiatement sur les roches cristallines, gra-
nités et gneiss, qui, dans certains endroits, ont la dureté et
Papparcnce des roches saines, ou à peine décomposées, tan-
dis que dans d'autres places elles se montrent à l'état ter-
reux, déterminé par une décomposition très avancée, qui a
pénétré à une profondeur considérable.
Au contact des alluvions avec les roches cristallines
on voit quelquefois un dépôt très limité, composé de sables
grossiers non roulés, de quelques petits fragments anguleux
de quartz, de grains de feldspath, et de lames de mica, c'est-
à-dire, de détritus, qui doivent provenir des mêmes roches,
auxquelles sont venus se mélanger parfois quelques rares
cailloux roulés.
La différence d'état des roches cristallines, à laquelle
nous avons fait allusion, ne s'annonce pas à leur surface
par des inégalités qu'on puisse attribuer à la moindre ré-
sistance aux actions extérieures, qu'offraient les roches, qui
sont plus décomposées. Ainsi, quelquefois la roche cristalline
presque saine se montre côté à côté de la roche très décom-
posée, formant toutes les deux une surface continue plane,
ou légèrement arrondie, ce qui paraît prouver, que les cau-
ses, qui ont agi sur les roches cristallines de façon à leur don-
ner leur relief actuel, ont entamé uniformément les roches
dures et celles qui étaient moins résistantes à cause du de-
gré avancé de leur décomposition. On voit un exemple frap-
paiit de ce phénomène dans l'extrémité ouest du plateau du
,ï Google
i6i
sud, près du hameau de Lavadôres, où le massif de gra-
nité, que supporte des lambeaux des alluvions anciennes,
présente une surface sensiblement plane, et presque hori-
zontale, quoiqu'une partie de la masse ne montre pas de
signes apréciables de décomposition, tandis qu'une autre
partie laisse voir des plaques concentriques, superposées,
dues à la décomposition sphéroïdale, qui caractérise cette
roche.
On a essayé de donner une idée de cet état de choses
dans la coupe fig. 4 de la planche I. Ces cas particuliers
paraissent être le reflet de la forme, en plateaux, des deux
zones.
Quoique les roches cristallines montrent presque par-
tout une surface plate, ou légèrement bombée, elles ont ce-
pendant subi dans quelques endroits des érosions, qui ont
produit à leur surface des dépressions, des cavités, et des
sillons assez profonds et nettement définis. Dans le profil
fig. 3 de ta planche I on a reproduit deux de ces cas d'éro-
sion, antérieure, ou contemporaine de la formation des al-
luvions anciennes, et qu'on peut observer dans une tran-
chée de la route de Almeara à Lavadôres dans la zone du
sud. La roche cristalline est un gneiss dans un état de décom-
position très avancée. Le trou de gauche a été rempli, à ce
qu'il paraît, d'un seul jet, et d'une façon tumultueuse, par ces
alluvions, sans qu'elles montrent le moindre indice de clas-
sement par l'action de l'eau. Dans la cavité de droite, qui
paraît plutôt un sillon profond et assez large, ouvert dans
le gneiss, les alluvions, qui le remplissent, ont été déposées
par couches successives assez bien accusées, et montrant
des vestiges de classement par des eaux courantes. Ce pro-
fil a une direction est-ouest, et par conséquent le sillon court
du nord au sud, c'est-à-dire, dans une direction sensible-
Al
ment perpendiculaire à la moyenne du bassin du Douro,
circonstance, qui n'est pas à dédaigner.
Il résulte de tout cela, que, si quelquefois ces allu-
vions concourent à exagérer les petites différences de niveau,
qu'on remarque dans les deux plateaux, d'un autre côté el-
les ont rempli quelques dépressions de la surface des roches
cristallines, de façon que la forme actuelle des plateaux est
très semblable à celle de cette surface, qui ne se trouve, que
partiellement couverte par ces alluvions.
On observe encore sur ces plateaux un dépôt d'appa-
rence argileuse, présentant une grande conformité de carac-
tères, et s'étendant sur d'assez grandes surfaces.
On le voit dans deux conditions diverses, ou couvrant
des alluvions anciennes, comme au sud du hameau de
Furada dans le plateau du sud, à une altitude de près de 70
mètres; ou reposant immédiatement sur les roches cristal-
lines à une altitude moyenne de 65 mètres, comme dans la
rue de Boa Vista, l'une des routes de la ville de Porto au
village de Foz, situé à l'embouchure du fleuve sur sa rive
droite.
Ce dépôt consiste essentiellement en une terre plus ou
moins sableuse, de couleur jaune-rougcâtre, ou plutôt miel-
lée, qui est la prédominante, sans exclure des nuances jau-
nes plus claires, qui se montrent rarement.
Par concision nous nommerons ce dépôt argiles miel-
lées, leur couleur étant un caractère peu variable, et qui les
dénonce même à distance.
Dans les endroits où l'on a pu vérifier leur épaisseur,
elle varie entre o",3o et 2 mètres.
Ces terres contiennent presque toujours du sable plus
ou moins grossier, quelques petits cailloux sous-angulaires
de quartz, dont le volume ne dépasse pas généralement
,ï Google
i63
celui d'une noix; ainsi que des cailloux roulés de diamètres
moyens de o'',03 à o",o8; et enfin de très rares fragments
angulaires, et sous- angulaires de granité, dont les plus gran-
des dimensions varient entre o",o4 et o",i2. Les cailloux
roulés, ainsi que les fragments angulaires de roche se mon-
trent irrégulièrement éparpillés dans la masse d'argile, pres-
que toujours isolés et dans des positions comme instables,
qui paraissent incompatibles avec leur transport par l'eau.
On voit cependant, quoique très rarement, une petite traî-
née de quelques décimètres de longueur, de cailloux roulés
de o^ioa à o",o5 de diamètres moyens, formant comme
une couche sensiblement parallèle à l'horizon, et d'une épais-
seur, qui généralement ne dépasse pas le diamètre des plus
gros cailloux:
Dans les endroits, où l'on a pu voir le contact des ar-
giles miellées avec les roches cristallines, comme à rue da
Boa Vista, on vérifie, que parfois il s'interpose entre elles et
le dépôt argileux une mince couche, plus ou moins conti-
nue, composée ou seulement de petits cailloux roulés, ou
de fragments angulaires de quartz, et même de granité, mé-
langés de sable grossier non roulé, avec quelques grains de
feldspath et des lamelles de mica, ou enfin d'un mélange des
cailloux roulés avec les fragments angulaires des autres ro-
ches et avec les sables micacés.
Cette couche, plus ou moins définie, selon l'abondance
des fragments de roches, angulaires, ou roulés, qui parfois
se sont accumulés jusqu'à l'épaisseur de o'",20, paraîtrait pas-
ser dans quelques endroits aux argiles miellées, qui dans
ce cas sont surchargées de sable grossier dans leur partie
inférieure, si toutefois ces argles n'ont pas pénétré par per-
colation dans le dépôt inférieur.
D'autres fois les argiles miellées reposent immédia*
"Ct'^S'V
_i64
tement sur la surface lisse des roches cristallines, sans qu'il
sinterpose aucun vestige de cette couche de sables et de
cailloux.
Ces argiles ne se montrent pas stratifiées en couches
distinctes. Dans quelques endroits, cependant, un morceau
détaché des argiles, et desséché par la seule action de l'air,
manifeste de la tendance à se diviser en feuillets de i à 2
millimètres d'épaisseur.
Quoique les argiles miellées se trouvent à des altitu-
des, qui permettent de les considérer, comme un dépôt des
plateaux, il faut cependant mettre en relief des circonstances,
qui peuvent concourir à élucider la question de leur ori^ne
et mode de formation.
Dans la zone de sud, on voit, sans doute, ces argiles su-
perposées à un manteau des alluvions anciennes, à une
altitude de près de 70 mètres. Mais celles-ci atteignent une
plus grande altitude vers le sud, sans qu'elles soient cou-
vertes par les argiles, qui se montrent là où s'éteint dans
le plateau un ravin profond.
Dans le plateau du nord la superposition franche des
argiles miellées aux manteaux d'alluvions ancien-
ne s n'a pu être observée nulle part, à moins qu'on n'admette
quelque liaison de contemporanéité entre ces alluvions et la
couche de cailloux, qui se montre parfois sous-jacente aux
argiles. Mais on n'a pu voir nulle part, ni au nord ni au
sud du fleuve, les argilesmiellées couvrant les surfaces
culminantes des alluvions anciennes. On n'a pas non
plus trouvé d'autres dépôts couvrant ces argiles, qui passent
graduellement, vers leur partie supérieure, à la terre végétale
par le mélange de matières organiques provenant de raci-
nes.
Malgré des recherches suivies, on n'a pas pu découvrir
,ï Google
i65
jusqu'à présent des restes organiques, enfouis lors de la for-
mation de ces dépôts.
Après avoir donné une idée générale des deux dépôts,
qui se font remarquer à la surface des plateaux, il faut faire
connaître plusieurs faits observés dans les alluvions an-
ci e n n e s, et qui peuvent jeter quelque lumière sur leur mode
de formation, ainsi que sur leurs rapports avec l'existence de
l'homme dans la partie nord de la péninsule.
Dans le plateau du nord, à l'ouest de la ville de Porto,
dans l'endroit nommé Agromonte, où passe la rue de Boa
Vista, et où l'on a ménagé une place, nommée Rotunda,
se trouve à l'altitude moyenne de 85 mètres un manteau
très étendu des slluvions anciennes, qui a été entamé
en plusieurs points, et qui offre presque toutes les variétés
de constitution, que nous avons attribuées à ces dépôts. Il a '
été coupé par la rue de Boa Vista, et par la Rotunda, de
manière à présenter deux tranchées, perpendiculaires entre
elles, qui sont réprésentées dans les profils _/î^, / et 2 de la
planche I, ayant le point commun D.
Dans cet endroit on peut voir le contact dps alluvions
avec le granité très décomposé, sur lequel elles reposent,
en s'adossant à une légère protubérance de cette roche,
qu'elles recouvrent encore d'un mince manteau. Leur plus
grande épaisseur ne dépassait pas dans ce lieu 4",5o, et se
réduit à quelques décimètres vers l'ouest.
Les indices de stratification n'y sont pas très pro-
noncés, et on y voit par places ce mélange sans ordre,
comme tumulmeux, des matériaux qui composent les allu-
vions.
On remarque tout de suite dans les deux tranchées de
gros blocs, ensevelis dans la masse alluviale, et entourés-
de toutes parts par celle-ci, de façon, qu'on ne peut pas
•f*L
i66
mettre en doute, qu'ils ont été enfouis, quand ces alluvions
se déposaient.
Outre les trois blocs coupés dans les tranchées, et qui
sont figurés par des traits pleins, les alluvions contiennent
encore, au moins, quatre autres gros blocs de granité, qu'on
voit enfoncés à leur surface, et qui ont été réprésentés dans
le profil ^g". /, par des traits pointillés.
Le dépôt est assez cohérent, pour avoir permis de cou-
per presque verticalement les tranchées, ainsi que les blocs
granitiques qu'elles ont mis à jour.
Les deux blocs de la tranchée fig. i sont dans un tel
état de décomposition, qu'ils ne doivent pas avoir exigé
remploi de très grandes Ibrces pour être coupés. Celui de
la tranchée fig, 2, étant bien moins décomposé, demandait
des efforts plus énergiques pour être coupé ras avec la tran-
chée, et il présente une seule large surface de cassure, qui
probablement a été produite par des coups répétés sur un
seul point, quoiqu'il soit couvert par une bien moindre épais-
seur des alluvions, ce qui prouve, qu'il est très fortement
retenu par celles-ci.
Le granité d'un des blocs ensevelis dans ce dépôt, et
duquel on a pu détacher des échantillons, est assez sem-
blable au granité sous-jacent. Deux autres de ces blocs sont,
il est vrai, de granité à deux micas, comme celui ci; mais
ils ont un grain plus fin, et, à ce qui paraît, ils sont plus
riches en quartz. Leur apparence est du reste très différente
de celle du premier bloc, mentionné plus haut. On n'a pas
pu trouver du granité comparable à celui de ces deux blocs,
qu'aux distances de 5oo et 800 mètres, et à un niveau plus
bas.
Dans les alentours on ne voit pas de saillancc graniti-
que, de laquelle ces blocs eussent pu glisser ou rouler vers
.ïGoogle
j67
le milieu de ces alluvions, qui ont laissé des témoins dans
presque toute la surface de cette partie du plateau; de ma-
nière, qu^il paraît hors de doute, que quand ces dépôts com-
mencèrent à s'accumuler, le sol avait un relief bien peu dif-
férent de celui qu'il a aujourd'hui.
Tous ces faits et toutes ces considérations paraissent
concourir à prouver, que ces blocs ont été ou traînés, ou
transportés d'une plus ou moins grande distance jusqu'au
dépôt alluvial, quand il était en voie de formation.
Le volume de ces blocs contraste d'une manière frap-
pante avec celui des cailloux qui les entourent. L'un d'eux
a 2° ,60 de longueur, i mètre de largeur moyenne, et plus
de i",io d'épaisseur, et par conséquent un volume de pres-
que 3 mètres cubes, et un- poids supérieur à 7 tonnes. Un
autre, de forme arrondie, est sensiblement égal à une sphère
de o'°,36 de rayon, avait un volume de o'",i95, et le poids
probable de plus de 5oo kilogrammes.
Les autres sont, ou un peu plus petits, ou un peu plus
grands, que celui-ci.
Ils ont les arêtes plus ou moins arrondies, quelques-
unes des faces convexes, d'autres presque plates, d'autres
enfin légèrement concaves.
La plupart, au moins, de ces surfaces sont lisses, de
façon qu'on ne peut s'empêcher d'admettre qu'elles ont été
usées par frottement. Les trois minéraux, qui constituent
la roche, ont été entamés également, malgré la grande diffé-
rence de leur dureté, de manière qu'ils se montrent nette-
ment coupés à la surface des blocs. Quand celle-ci a été
par hasard exposée pendant quelque temps à l'action atmos-
phérique, elle est comme tachetée de petites cavités, lais-
sées sans doute, ou par la complète desaggrégation du feld-
spath, ou par l'enlèvement du mica ou de grains de quartz.
,ïGoO'
Mais dans ce cas même les minéraux, qui sont restés à la
surface des blocs, se montrent usés de façon, qu'ils ne ré-
vèlent la moindre aspérité au toucher.
On ne peut pas dire, que ces blocs sont polis. Les
grains de quartz, quoique coupés net, malgré leur dureté,
n'ont pas leur surface parfaitement lisse, ce qu'on vérifie au
moyen de la loupe. On voit, cependant, à la surface des blocs
des vestiges très rares et très circonscrits de polissage avec
miroitement. Dirons-nous, qu'on y voit aussi des vestiges
de stries?
Nous n'csons pas l'affirmer, quoique nous soyons bien
disposés à le croire.
On voit encore adhérentes à la surface des blocs quel-
ques petites masses d'un jaune-rougeâtre d'aspect terreux,
contenant des grains de sable, et tout-à-fait semblables au
ciment ferrugineux, qui agglomère quelquefois les alluvions.
En enlevant ces masses, on vérifie, que la surface des blocs,
cachée par elles, est lisse, comme celle qui était à décou-
vert. Du reste, ces blocs ont sur de très grandes étendues
de leur surface cette couleur jaune-rougeâtre, qu'on voit si
fréquemment dans ces alluvions.
Il paraît hors de doute, que les frottements, qui ont usé
les surfaces de ces blocs, ont eu lieu avant que ceux-ci fus-
sent restés immobilisés au sein des alluvionsanciennes.
On peut prévoir, que tous les faits que l'on a pu vé-
rifier par l'exploration de ces dépôts, auront concouru à faire
soupçonner, que l'action glaciaire a eu une influence plus ou
moins immédiate sur leur formation.
D faut nous transporter à une distance de plus de 3 ki-
lomètres vers l'ouest pour trouver des alluvions ancien-
nes, qui aient permis de constater d'autres faits dignes de
mention spéciale.
,ï Google
1%
En suivant le tramway, qui conduit de Porto au village
de Foz, après avoir passé le petit vallon, baigné par le ruis-
seau de Lordelio, on voit que le terrain s'élève graduelle-
ment jusqu'à une plaine de l'altitude moyenne de 60 mè-
tres, et qui est très bien définie à l'ouest du hameau de
Fonte da Moura, et se trouve couronnée par un manteau
des alluvions anciennes bien caractérisées par presque
tous les accidents de constitution et de couleur, que nous
avons déjà fait connaître, quoiqu'on n'y ait pas encore vu en
place des représentants de ces gros blocs, qui sont contenus
dans les alluvions anciennes de Boa Vista.
On a trouvé, cependant, à ia surface de cette plaine
quelques blocs assez rares, de granité et de gneiss, à formes
plus ou moins arrondies, de dismètres moyens de o°,3o à
o",4o, reposant sur du gravier, ou dans le voisinage de ce-
lui-ci, et qui probablement ont fait partie de ces alluvions.
Cette plaine, dont le centre est à peine à i.5oo mètres
de distance de la côte, représente la partie ouest du plateau
du nord, qui, comme celui de sud, s'abaisse graduellement
vers l'ouest; et elle est coupée par une légère dépression qui
s'ouvre vers ce côté, et où prend sa source le petit ruisseau
d'Ervilha. Pour faciliter la désignation des localités, nous
nommerons cette plaine — plateau dePaços — ,qui est le nom
d'un hameau situé à sa surface, et nous nommerons — val-
lon d'Ervilha — la dépression qui coupe cette plaine, et qui
est en partie remplie par une série de dépôts, dont nous
parlerons plus loin.
Les alluvions anciennes se voient dans ce plateau au
nord du vallon, près du hameau de Paços dans une sabliè-
re, et au sud dans les fossés de la redoute Saldanha, forti-
fication passagère, élevée en i832 lors du mémorable siège de
Porto. En parcourant ces fossés, qui ont été coupés dans
j'h.CiOOgle
T
'70
les alluvions jusqu'à une profondeur de plus de 3 mètres,
nous avons recueilli parmi des cailloux roulés, éparpillés
dans leur fond et sur leurs talus, six fragments de quartzite
et d'autres roches, qui avaient des formes angulaires, et
sous-angulaires, contrastant ainsi beaucoup avec les cailloux
roulés, qui abondent dans ces alluvions.
Outre ces six exemplwres nous avons pu trouver une
autre quartzîte, aussi à formes angulaires, enclavée dans
ces alluvions et si fortement retenue par elles, qu'il a fallu
employer le ciseau et le marteau pour les désagréger. En
la comparant avec les autres exemplaires, trouvés à la sur-
face des alluvions, on remarque tout de suite une telle res-
semblance de formes entre celle-ci et deux autres quartzi-
tes, que l'idée d'intention dans la production de ces for-
mes vient tout naturellement à l'esprit; et une comparaison
plus minucieuse des trois quartzites tend à confirmer cette
idée.
Deux de ces quartzites sont représentées à peu près de
grandeur naturelle dans la planche II; \es^g. / et / a étant
la quartzite arrachée de la masse des alluvions, et les _pg.
2 et 2 a étant l'une des quartzites trouvées à leur surface.
Quoique les figures permettent de reconnaître quelques-unes,
de ces ressemblances, il y en a d'autres qui ne sont pas
si apparentes, et qu'on ne peut vérifier, que sur les exem-
plaires.
Nous ne parlerons, cependant, que d'une similitude de
forme, qui paraît avoir une certaine valeur.
On voit, sur les deux surfaces représentées des deux
quartzites, une arête saillante, qui se tient à peu près au mi-
lieu de la face, et qui s'efface graduellement vers la pointe.
Sur la face opposée, s'il y a une arête saillante, elle n'occupe
pas le milieu de cette face, qui paraît avoir été produite dans
,ï Google
'7'
le but principal d'amincir la pierre. On pourrait donc attri-
buer les arêtes médianes produites sur les faces réprésen-
tées dans les deux figures à l'intention de renforcer les poin-
tes des deux quanzites.
La quartzite^^. 2, n'ayant pas été trouvée en place dans
les alluvions, perdrait par le fait beaucoup de sa valeur,
comme preuve, si, outre sa similitude de forme avec la
quartzite ^g*. /, elle ne présentait d'autres caractères, qui
paraissent indiquer, qu'elle a été aussi contenue dans ces
alluvions. Ces deux quartzites, non seulement montrent par
places cette couleur jaune-rougeâtre de la pâte, qui parfois
soude les alluvions, mais outre cela conservent à leur sur-
face quelques restes de cette pâte argilo-sableuse avec sa
couleur caractéristique, et s) adhérents, qu'ils résistent au
frottement d'une brosse mouillée. La troisième quartzite,
ressemblant à ces deux-ci par sa forme et son volume, quoî-
qu'ayant été trouvée détachée des alluvions, tout comme la
quartzite fig. 2, conserve encore, non seulement à sa sur-
face la couleur jaune-rougeâtre, mais aussi dans une petite
cavité un reste de la pâte alluviale.
Ces quartzites ont-elles des formes intentionnelles?
Sont-elles semblables à des types connus d'outils de pierre
de l'âge paléolithique?
Quand même on ne voudrait pas admettre, comme
preuve du travail de l'homme la succession des fractures,
qu'une pierre aurait éprouvées, parce qu'elles pouvaient avoir
été déterminées par des chocs dus à des causes naturelles;
il y a d'autres caractères, qui mettent en évidence cette in-
tention, comme par exemple la formation d'une pointe de
forme à satisfaire à la condition de résistance, essentielle
dans un instrument percuteur. On ne peut en effet conce-
voir, comment la partie la plus fragile d'une pierre, son ex-
'rv
izL
tremité la plus amincie, qui par des fractures successives de-
venait de plus en plus saillante et "pointue, et par conséquent
plus exposée, eut échappé à une série de chocs accidentels,
les derniers ayant eu lieu justement près de la pointe.
Or les deux quarlzites, Jig. i et s, pi. Il, ont une ex-
trémité très saillante, en forme de pointe, mais satisfaisant
à certaines conditions de résistance, et produite par une
série de chocs, dont les derniers ont eu lieu tout près de
cette pointe, qui n'aurait pas pu y résister, si les coups
n'avaient pas été appliqués avec de grandes précautions.
On ne peut pas donc s'empêcher de reconnaître dans la
forme de ces quartzites le résultat d'un travail réfiéchi,
qui avait un but manifeste, et exigeait même beaucoup d'a-
dresse.
Du reste, mon digne Chef, M. Carlos Ribeiro, qui a
examiné ces quartzites, ainsi que d'autres, que nous avons
recueillies, est très incliné à les considérer comme intention-
nellement taillées.
Une autre des quartzites, trouvées détachées â la sur-
face des alluvions de la redoute Saldanha, est représentée
de grandeur naturelle par \t%fig. i et J a de la planche II,
ce qui dispense de la décrire minucieusement. Quelques-unes
de ses arêtes se trouvent très-arrondies par frottement, tan-
dis que d'autres, quoique légèrement émoussées, contrastent
beaucoup avec les premières, étant bien plus vives. Celles-
ci limitent des surfaces produites par des cassures, qui pa-
raissent intentionnelles, et qui auraient donné à la quartzite
la forme d'un coin, ou d'une hache avec un petit tranchant
très obtus. Non seulement elle montre par places la couleur
jaune-rougeâtre des autres quartzites, plus foncée à cause de
la couleur propre de la roche, mais elle conserve dans des
dépressions considérables de sa surface une quantité nota-
,ï Google
2Jl
ble de la pâte argilo-sableuse des alluvions, avec sa cou-
leur caractéristique.
On voit sur cette quartzite des vestiges de frottements
énergiques, qui ont produit sur quelques points des sillons
et des stries parallèles, accompagnées, au moins dans
un cas, du poli miroitant, que l'on attribue à l'action gla-
cimre. Ces vestiges se voient avec plus ou moins de net-
teté, non seulement sur les faces, qu'on peut dire primor-
diales, mais aussi sur celtes qui paraîtraient produites avec
intention.
Si celles-ci sont effectivement le résultat d'un travail
réfléchi, et si elles étaient striées par l'action glaciaire, il
faudrait admettre, que la quartzite, après avoir été taillée
par l'homme, avait été abandonnée, ou perdue par lui, et
ensuite transportée par les glaces dans des conditions, qui
auraient donné lieu aux frottements énergiques, qu'elle a
subis; etqu'enfin elle est restée enfouie dans les alluvions
anciennes, qui pourraient être, elles-mêmes, un produit de
transport glaciaire.
La partie du plateau de Paços, qui est au nord du val-
lon d'Ervilha, et qui, comme nous l'avons déjà dit, s'y mon-
tre couronnée par les alluvions anciennes, se prolonge
vers l'ouest, en baissant très lentement de niveau, et en
montrant par ci par là des dépôts peu épais de gravier plus
ou moins gros, mélangé de sables, avec l'apparence des al-
luvions anciennes, et qu'on doit considérer, ou comme
les représentants, ou comme des dérivations immédiates de
celles-ci.
En sortant du hameau de Nevogilde, contigu à celui de
Paços, on rencontre à l'ouest, encore sur le plateau, dans un
chemin, qui conduit à la mer, une strate de cailloux roulés .
de volumes variables, ayant des diamètres moyens de 2 à lo
pgle
'74
cenlimÈtres, et mélangés avec des sables. Ce dépôt a été
évidemment lavé par les eaux de pluie, qui affluent à ce
chemin.
Entre les cailloux nous en avons trouvé un de roche ou
de minéral siliceux, très dur, à texture compacte, de cou-
leur jaune-orange, passant au jaune-brunâtre, et d'une ap-
parence particulière, paraissant plutôt un silex, qu'un jaspe.
Il a toutes les arêtes très arrondies par frottement. Ses dia-
mètres sont compris entre 38 et 5 1 millimètres. Toutes ses
faces, une seule exceptée, sont plus ou moins convexes. Celle
qui fait exception, est légèrement concave. Mais toutes se
raccordent graduellement avec les surfaces arrondies, qui
ont remplacé les arêtes.
Toute la surface du caillou est luisante, et en même
temps couverte de petits sillons et de stries, qui constituent
divers systèmes, caractérisiis par le parallélisme des traits.
Ces groupes distincts se superposent dans quelques cas, en
se croisant, de façon qu'on peut parfois reconnaître ceux
qui ont été produits les derniers, parce que dans ceux-ci les
stries sont plus nombreuses et plus fines.
Ce caillou paraît donc présenter tous les caractères, qui
se trouvent sur ceux, qui ont été polis et striés par les frot-
tements produits par des masses de glace en mouvement,
dans des conditions spéciales.
Si cependant ces vestiges sont dus à des frottements
glaciaires, il faudrait reconnaître que la forme actuelle du
caillou de Nevogilde a été produite par ces mêmes frotte-
ments, qui ont couvert de sillons et de stries toute sa sur-
face, ayant enlevé une partie considérable de sa masse. Et
pour que le caillou ait été si profondément entamé malgré
sa dureté, H a fallu que ces frottements se fiissent produits
sur toute sa surface sous de telles pressions, qu'ils n'au-
,ï Google
raient pas épai^né les angles, ni les arêtes de la pierre sou-
mise à leur action, si elle les conservait encore.
Les vestiges d'action glaciaire, que les alluvions an-
ci e n n e s des plateaux paraissent présenter, et les conditions
de gisement de ce caillou nous mènent à présumer, qu'il pro-
vient de ces dépôts, très probablement entamés par les
actions sous -aériennes, depuis qu'ils y sont restés exposés.
Il faut maintenant passer à d'autres faits, qui se lient
intimement à ceux, qu'on vient de décrire.
Nous avons déjà dit, que le plateau de Paços était sil-
loné de Test à l'ouest par une dépression, que, pour fa-
ciliter la description des lieux, nous avons nommée vallon
d'Ervilha, quoique par sa petitesse en tous sens elle ne justi-
fie pas complètement cette désignation, car elle est plutôt
un ravin peu profond, qui prend naissance à la surface du
plateau, et doit avoir été produit par l'érosion de celui-
ci, postérieurement à l'accumulation des alluvions an-
ciennes, comme les faits, que nous allons exposer, parais-
sent le prouver.
Le tramway qui conduit de Porto à Foz par la rue de
Boa Vista, après avoir franchi le viaduc de Fonte da Moura
se dirige vers le vallon d'Ervilha en coupant un tout petit
col, qui sépare les eaux du ruisseau de Queijo de celles qui
affluent à ce vallon. C'est dans ce col, que l'on commence à
voir les dépôts, qui se développent vers l'ouest dans le
vallon, à un niveau de 5 à i5 mètres inférieur à l'alti-
tude de 60 mètres, qu'atteignent les alluvions ancien-
nes au nord ei au sud du tramway, et dont nous avons déjà
parlé.
La coupe transversale du vallon d'Ervilha,^^^'. 6, pi. I,
et le profil de la tranchée nord du tramway, _fig. 5, peuvent
donner une idée, non seulement de la position des dépôts
c- R. i5
,ï Google
d'Ervilha par rapport aux al lu v ion s anciennes, mais
aussi de leur distribution. L'échelle des hauteurs dans \a^g. S
a été exagérée par rapport à celle des distances, pour permet-
tre de figurer dans un petit espace tous les dépôts, quelques-
uns très minces, mis à découvert dans une très grande éten-
due de la tranchée.
Ils commencent par une mince couche de cailloux an-
gulaires et routés, de petit volume, mélangés de quelque sa-
ble grossier micacé, reposant immédiatement sur la roche
cristalline, et prenant sa naissance sur le versant ouest du
col, que le tramway franchit. Dans ce dépôt prépondèrent
au commencement les cailloux angulaires quartzeux, mélan-
gés avec les sables micacés, et ils paraissent provenir, com-
me ceux-ci, des roches cristallines sous-jacentes.
Lorsque cette couche atteint une épaisseur de près de
o'",3o, on remarque, non seulement que les galets prédomi-
nent déjà de beaucoup sur les cailloux angulaires quart-
zeux, mais aussi que sur cette couche commence à se défi-
nir un dépôt d'argile sableuse, jaunâtre, un peu micacée,
contenant de rares et petits fragments sous-angulaires de
quartz, ainsi que quelques menus cailloux roulés.
Dans le profil de la tranchée du nord (^g. S, pi. 1} est
représentée une partie de ces deux couches, déjà à presque
200 mètres de leur origine. La couche de galets, que do-
rénavant nous nommerons — de l'est — , est désignée par le
numéro 2, et la couche d'argîlle sableuse, que nous nom-
merons tout de même — de l'est — , pour la distinguer de
dépôts semblables qui se trouvent- à l'ouest, y est désignée
par le numéro 3.
Dans la tranchée du nord cette couche de galets atteint
une épaisseur moyenne de o'",3o à o"y4o, et la couche d'ar-
gile sableuse celle de o^jSo à o°,6o, sans compter la terre
,ï Google
'77
végétale, à laquelle cette couche passe graduellement, vers ■
sa partie supérieure, par l'introduction de matière organi-
que.
Ces deux dépôts se voient aussi dans la tranchée de
sud, et même avec plus d'épaisseur.
Jusqu'au point a de la tranchée du nord ils inclinent très
peu vers le sud-ouest, de même que la surface des roches
cristallines, et conservent une puissance assez uniforme.
Au de là du point u, vers l'ouest, leur pente, ainsi que celle
de la surface des roches sous-jacentes, augmente rapidement^
les deux couches commencent de même à augmenter d'épais-
seur, et les roches cristallines, aussi bien que ces deux
dépôts, cessent d'être vues, ce qui coïncide avec une inter-
ruption dans la tranchée. Tous ces accidents paraissent être
dus à l'existence d'une dépression à la surface des roches
cristallines, avant que la couche de galets ne se fût ré-
pandue sur cette surface.
Ces deux couches paraissent se lier à une série de dé-
pôts, qui s'étendent à l'ouest du point d du profil, _fig. S,
mais dont nous ne parlerons pas pour le moment, à fin de
faire connaître tout de suite les faits intéressants, que la
couche de galets de l'est met en évidence.
Les deux couches (2 et 3 du profil), que nous venons
de décrire, sont bien définies, quoique sur quelques points
il y ait une apparence de transition graduelle entre elles, ce
qui paraît dû à la pénétration postérieure de l'argile sableu-
se dans la couche de gravier. Celle-ci, lorsqu'elle atteint une
certaine épaisseur, est presque exclusivement composée de
cailloux roulés de quartzite de volumes variables entre ceux
de 12 et i5 centimètres de diamètres moyens, qui sont relati-
vement rares, et ceux du menu gravier; les cailloux de gros-
seur moyenne entre ces deux extrêmes étant de beaucoup
.c.pv.
■78
les prépondérants. Le gravier a une couleur blanchâtre, qui
lui donne l'apparence de gravier lavé.
Il a une certaine cohésion, qui paraît due autant à l'ar-
rangement des cailloux, qu'à une pâte argilo-sablcuse assez
lâche, de couleur jaunâtre, contenant quelques paillettes de
mica, qu'on voit très inégalement réparties dans le gravier;
et qui est très semblable à l'argile.
On doit encore remarquer, que ni les cailloux roulés,
ni la pâte, qui est très semblable à l'argile sableuse de ta
couche superposée, et qui paraît s'être introduite postérieu-
rement entr'eux, ne montrent cette couleur jaune-rougeâtre,
qui se voit dans les alluvions anciennes, et que le con-
traste entre celles-ci et la couche de gravier est très frappant.
Comme nous avons déjà vu, la couche de galets, lors-
qu'elle atteint une certaine épaisseur, est presque exclusive-
ment composée de cailloux roulés de quartzite; maïs on y
trouve aussi, par ci par là, quelques rares cailloux, qui se font
remarquer par leurs formes angulaires.
En les examinant de plus prés, on s'aperçoit, qu'ils ont
des formes qui ne paraissent pas purement casueîles; et dès
que cette idée se présente à l'esprit, elle paraît recevoir une
confirmation éclatante.
Les deux quartzites {fig. / et 2 de la pi. III) ont clé
trouvées le même jour dans la tranchée du nord, la première
3 mètres a l'est du point a du profil, et la seconde ô^iSo à
l'est du même point. Toutes les deux ont été anachées du
milieu du gravier, qui les retenait assez fortement, ainsi que
tous les autres cailloux et quartzites, dont nous aurons à
parler, comme recueillis dans les dépôts du vallon d'Er-
vilha.
Ces deux quartzites ont été taillées de deux cailloux
roulés, dont elles gardent encore une bonne partie des sur-
,ï Google
'79
faces primitives. Il paraît, que le but qu'on s'est proposé
était celui de produire une pointe aplatie, un peu émoussée,
et assez épaisse pour résister au choc, en cherchant tout au
au plus à rendre la pierre plus maniable. La quartzite,^^^. /,
paraîtrait avoir sa pointe cassée par accident. Du reste, on
n'aurait rien sacrifié à ta beauté des deux outils.
Leurs arêtes à ta vue paraissent vives, mais te toucher
"révèle, qu'elles sont très légèrement émoussées. La quar-
tzite, jig. /, montre cependant des indices d'au moins une
cassure, qui paraîtrait produite intentionellement, mais dont
les arêtes sont très -émoussées.
Ce soupçon pourrait avoir sa confirmation dans d'au-
tres faits, que nous allons exposer.
Entre les quartzites recueillies dans la couche de gra-
vier, et ayant des formes anguleuses qui font penser à un
travail réfléchi, on remarque au moins deux de quartzite
rose, dont l'une avec toutes ses arêtes émoussées par frot-
tement, et l'autre ayant la plupart des arêtes tout de même
émoussées, mais d'autres presque vives, limitant des surfa-
ces de cassure plus fraîche, mais produites en tout cas
avant que la quartzite fut restée immobilisée dans la cou-
che de gravier. Celle-ci a été représentée dans X'ts.fig. 4 et
^ j de ta pi. II.
Elles se distinguent à première vue de la plupart des
autres quartzites taillées, trouvées dans la même couche,
par cette grande usure des arêtes; ce qui nous mène natu-
rellement à penser aux quartzites qui paraissent taillées,
trouvées dans les alluvions anciennes. De là à soupçon-
ner, que les quartzites à arêtes émoussées, trouvées dans cette
couche, sont dérivées, déjà avec leurs formes actuelles, des
alluvions anciennes qui couronnent le plateau à une sî
petite distance, il n'y a qu'un pas. Ce soupçon paraît être
i8o
complètement confirmé par ce fait, que l\uie, au moins, des
deux quartzites, étant lavée en partie, de façon à conserver
adhérents quelques vestiges de la pâte terreuse, légèrement
jaunâtre, et très lâche, qui les acompagne dans la couche de
gravier, garde encore dans les petites dépressions de sa sur-
face des restes de la pâte argilo- sableuse jaune-rougeâtre,
si caractéristique des alluvions anciennes, et qui résiste
au lavage à la brosse.
Les formes des deux quartzites sont des plus grossiè-
res, et si elles sont intentionnelles, on n'a pas eu d'autre
but, que celui de produire une pointe renforcée.
Ces deux quartzites conservent-elles encore, même dans
les faces qui paraissent produites avec intention, des ves-
tiges d'action glaciaire? Nous le soupçonnons,. sans nous ha-
sarder à l'affirmer, parce que nous craignons de nous être
fait illusion là-dessus.
L«s trouvailles faites dans cette couche de galets ne se
limitent pas à celles-ci.
On y a recueilli de gros cailloux angulaires de quar-
tzite rose, qui paraissent avoir servi de noyaux, dont on au-
rait détaché par percussion des éclats de roche dans le but
probable d'en faire des outils de pierre. Un de ces cailloux,
le plus remarquable par son volume, et par la circonstance de
se trouver entouré d'un grand nombre de fragments de quar-
tatede même nature, a3ocentim. de longueur, i6 de largeur,
et ig d'épaisseur moyenne. II se trouvait un peu enfoncé à
la surface de la couche d'argile sableuse, et enclavé de façon,
qu'il a fallu employer le ciseau pour l'enlever, ainsi que les 17
éclats de quartate et un gros fragment angulaire de quartz
cristallin, qui l'entouraient. Les éclats de quartzite ont, com-
me le gros caillou de la même roche, les arêtes vives, et quel-
ques-uns pourraient, au besoin, avoir servi d'outils.
,ï Google
i8i
Le caillou angulaire de quartz cristallin aurait eu pri-
mitivement au moins une arête de 1 1 centïm. de longueur,
et d'un angle très obtus. Il paraîtrait qu'elle a été enlevée
intentionnellement, étant remplacée par une face d'une lar-
geur moyenne de o",oi5. Si l'on s'imagine la forme de l'éclat
enlevé, on pense naturellement à de petits couteaux de
quartz de l'âge paléolithique, bien plus difficiles à obtenir,
que ceux de silex, en vue de la cassure rébelle du quartz.
Il vient à point de dire, que nous avons recueilli dans cette
couche de gravier un petit éclat de quartz cristallin, qui a
une très grande ressemblance avec un couteau cassé.
Un autre gros caillou angulaire dequartzite rose, trouvé
dans la couche de gravier, a 25 centim. de longueur, i6 de
largeur, et b d'épaisseur moyenne. Il parait avoir servi tout
de même de noyau pour la fabrication d'outils de pierre,
parce qu'il est couvert de plusieurs faces de fracture, pro-
duites successivement.
Ce caillou, avant d'être cassé, avait été roulé, et de-
vait avoir dans cet état un volume bien plus grand, parce
qu'il ne garde plus de sa surface roulée, qu'une petite par-
tie, de tout au plus 60 centim. carrés, un peu convexe, et
conservant encore des vestiges de groupes de sillons et mê-
me de stries, semblables à ceux, qu'on attribue à l'action
glaciaire.
On a trouvé encore dans cette couche un autre petit
bloc de quartzite rose, de forme sous-angulaire, de 1 5 centi-
mètres de longueur, 12 de largeur, et 9 d'épaisseur, qui a
toutes les arêtes émoussées, mais quelques-unes bien plus
entamées, que les autres. Il montre aussi sur quelques-unes
de ses faces, et même sur quelques arêtes, des vestiges de
frottement, qui paraîtrait glaciaire.
On a ramassé aussi dans le même gisement un petit
,Got^|^^
éclat de quartzite, jaune-rougeâtre, à forme angulaire, ayant
l'apparence de ces petits outils de pierre, qu'on nomme poin-
tes de flèches ou de dards. Cette quartzite provient d'un
caillou roulé, dont une partie de la surface à forme arron-
die est encore conservée, et paraît sillonée et striée com-
me d'autres exemplaires trouvés dans cette couche.
Les deux quartzites, jig. i et 2, pi. Ul, paraîtraient
garder encore sur les surfaces primitives des cailloux routés
dont elles proviennent, les vestiges un peu effacés, de frot-
tements énergiques, qui auraient eu heu dans des directions
diverses; mais on ne voit pas ces vestiges sur tes faces
produites par cassure.
Nous tâcherons de résumer, autant que possible, ce
qu'il convient de faire connaître des dépôts, qui se suivent
à l'ouest de cette couche de galets.
On commence à les voir assez bien définis dans le
point d du profil Jig. 5, pi. I, et ils constituent une petite
séné essentiellement composée de couches assez distinctes
d'argile sableuse, de gravier, et de sables fins.
Les argiles sableuses, qui parfois mériterairent plutôt
le nom de sables argileux, contiennent à deux niveaux
différents des restes de véi;étaux avec l'aspect charbonneux,
qui paraît indiquer un degré assez avancé le la décomposi-
tion de la matière organique. Quelquefois ces restes ont
l'apparence de petits fragments dont la plus grande dimen-
sion est de quelques millimètres, et ils se trouvent mélangés
avec du sable grossier et quelque terre, que nous nomme-
rons simplement argile, sans pouvoir entrer dans l'analyse
de sa vraie constitution. D'autres fois la matière organi-
que est dans un état de très grande division, se dénonce
par sa couleur noire et est mélangée, ou de sable extrê-
mement (in, et alors elle est distribuée par toute sa masse
,ï Google
i83
en lui donnant une couleur noirâtre, ou d'un peu d'argile,
et dans ce cas elle se montre sous la forme de petits traits
noirs.
Comme le caractère le plus remarquable des deux cou-
ches argilo-sableuses, qui contiennent des restes végétaux,
est la présence de ceux-ci, nous les nommerons par con-
cision argiles charbonneuses, quoique ta matière or-
ganique ne dépasse pas probablement 2 centièmes de l:i
masse.
On n'a pas pu découvrir jusqu'à présent des restes or-
ganiques à formes déHnies et caractéristiques dans ces cou-
ches. Les débris végétaux qu'on y trouve, paraissent pro-
venir d'une végétation terrestre, chétive, et plutôt herbacée
que ligneuse.
Dans la couche de gravier, 6, du profil, et plus loin en-
tre les points H, et A on a trouvé quelques cailloux de moyen-
ne grandeur, de quartzite, à formes angulaires et sous-angulai-
res, et qui peuvent avoir été.façonnés par la main âe l'hom-
me. Une de ces quanzites est représentée dans \zsjig. 3 et
3a de la pi. III.
On n'a pas pu vérifier la continuité des deux couches
de galets et d'argile sableuse de l'est avec des couches de
la série qui se développe à l'ouest du point d.
On voit, cependaiit, près du point u, dans l'argile sa-
bleuse, quelques vestiges de ces débris à couleur charbon-
neuse, qui donnent à cette couche un caractère commun avec
deux des couches de l'ouest, et dans le point ti, inférieure-
ment à l'argile charbonneuse et reposant sur les roches
cristallines, se montre un dépôt, composé de sable très
grossier, micacé, mélangé de quelques cailloux roulés.
Il est donc possible, que ce dépôt soit le représentant
de la couche de galets de l'est, et que ta couche charbon-
.,Ct
ûeuse inférieure soîl le prolongement vers l'ouest de la cou-
che d'argile sableuse de l'est.
La couche de galets de l'est a l'apparence d'une plage
formée sous l'action, probablement interminente, de la mer.
Celle-ci aurait entamé les alluvions anciennes à un ni-
veau plus bas que leur plus grande altitude, aurait lavé le
gravier, et l'aurait mélangé avec quelques débris des roches
cristallines sous jacentes. Cette plage aurait été fréquentée
par l'homme, qui y aurait taillé des outils de pierre, y aurait
trouvé quelques-uns dérivés des alluvions anciennes et
finalement y aurait perdu d'autres.
Pour que cette plage ait été couverte par la couche
d'argile sableuse, il faut admettre, qu'il s'est donné un af-
faissement qui a immerçé la couche de galets.
L'altitude du point d du profil est de bo^jio. On peut
prendre cette altitude, comme donnant avec assez d'apror
ximation le niveau moyen de la mer, lors de la formation
de la couche de gravier de l'est, et il s'ensuivrait, que de-
puis que le gravier a été stratifié la côte s'est élevée d'au
moins 5o mètres.
Nous ne pouvons pas nous passer de donner notice
d'une autre plage soulevée, qui se trouve à une altitude de
lo^jSo au dessus du niveau moyen sur la côte, à l'est et à
sud-est de Castello do Queijo. On voit dans cet endroit un
groupe de couches d'argiles sableuses et de sable argileux,
s'élevant jusqu'à l'altitude désignée, et ayant une épaisseur
visible de 8 mètres à peu près. Il se trouve représenté dans
la coupe, _fig. g pi. I. Ces couches contiennent des restes
plus ou moins roulés de coquilles, que paraissent récen-
tes, ainsi que, par endroits, des vestiges de restes végé-
taux, dans un état analogue à celui de ceux que l'on voit
dans les couches d'Ervilha.
,ï Google
i85
Les couches de Castello do Queijo ont été profondé-
ment érodées par les actions marines et sous- aériennes, et
ce qui en reste, se conserve encore grâce à sa position un
peu abritée de l'action directe de la mer, ce qui a ralenti
Pœuvre de destruction. Elles contenaient un assez grand
nombre de quartzites à formes sous-angulaires, en général
de petites dimensions, et qui paraissent avoir été taillées.
Le plus grand nombre de ces quartzites ont été laissées â la
surface des dépôts par les eaux, lesquelles continuent leur
travail de démolition, en enlevant l'argile et les sables.
On a pu cependant trouver ensevelies dans les couches
quelques quartzites sous-angulaires tout-à-fait semblables à
celles, que les eaux n'ont pas pu emporter, ainsi que quel-
ques cailloux plus ou moins roulés de gneiss et de granitite,
semblables à ceux des environs.
La plupart des quartzites gui paraissent taillées, ont
la dimension maximum de 4 à 7 centimètres. La plus grande
qu'on a trouvée, a 10 '/> centimètres de longueur, 6 '/j de
largeur, et trois d'épaisseur. Le plus grand nombre a les
arêtes très légèrement émoussées par frottement, ce que l'on
cotmaît plutôt par le toucher, que par la vue. D'autres ce-
pendant ont les arêtes bien plus usées. On a représenté dans
les fig. 4 et 5, pi. in, deux de ces quartzites de grandeur
naturelle.
Elles paraissent avoir été apportées aux couches par
des eaux, qui n'avaient pas assez de force pour transporter
de plus gros cailloux, ce qui expliquerait les petites dimen-
sions des quartzites qui paraissent taillées.
Nous avons encore trouvé à la surface d'un manteau de
gros gravier, au sud et tout près de Castello do Queijo, une
autre quartzite, qui nous a parue aussi intentionnellement tail-
lée, parce qu'elle montre des fractures successives, ainsi que
,ïGo^^
des indices très, clairs de percussion, qu^on ne peut pas at<
tribuer à des chocs dus au hasard, et qui eussent détermi-
né la formation de sa pointe. Elle a les arêtes légèrement
émoussées, et sa forme est très grossière, ne montrant ta
moindre symétrie. On la voit réproduite dans la_;f^. tf, pi.
III, comme l'un des types les plus rudimentaires que nous
ayons trouvés. Il ne nous a pas été possible de vérifier clai-
rement le rapport d'âge -entre ce manteau de gravier et les
couches argilo-sableuses de Gastello do Queijo. Sa position,
cependant, nous porte à croire, qu'il a été déposé posté-
rieurement à la formation de ces couches.
Dans quelques endroits du littoral on observe, que la
surface des roches cristallines ne montre pas de saillances
remarquables, paraissant plutôt dans son ensemble sensi-
blement parallèle à un plan légèrement incliné vers l'ouest,
ou vers la mer. Vue en détail, elle présente des formes lé-
gèrement mamillaires et paraît avoir été usée, quoiqu'elle se
trouve encore recouverte d'un dépôt de transport, composé
de sable grossier, quelquefois mélangé d'un peu de terre,
et contenant quelques cailloux roulés de quartzite de prove-
nance lointaine, ainsi que des blocs de i5 a 5o centimètres
de diamètres moyens, quelques-uns arrondis, d'autres an-
gulaires, surtout de gneiss, et aussi de granitite, semblables
aux roches in situ des environs.
Ce dépôt grossier passe parfois, vers la partie supé-
rieure, à des couches de sable plus ou moins argileux, sem-
blables à celles de l'est et du sud-est de Castello do Queijo.
Dans \3Ljig. 8^ pi, I, on voit encore représenté un pe-
tit escarpement, qui se trouve sur la plage à la distance de
320 mètres vers le sud de Castello do Queijo. Dans ce pro-
fil on voit une série de couches de sable plus ou moins gros-
sier et argileux contenant quelques cailloux, qui s'accumu-
,ï Google
■87
lent surtout vers le plan de contact des couches. La plus
inférieure, composée de sable très grossier, contient des ga-
lets quaitzeux, ainsi que des fragments angulaires de gneiss
de même nature, que celui des proximités, tes uns et les au-
tres distribués sans ordre dans les sables. Il est probable que
ces couches soient contemporaines de celles de Castello do
Queijo. La plus inférieure, dont la base est cachée par les sa-
bles mobiles de la plage, se rapproche beaucoup, par la dis-
position de ses matériaux, du dépôt grossier de transport
que nous venons de mentionner, et qui paraît le plus ancien
de tous.
La surface des roches cristallines est coupée dans quel-
ques endroits par des ravines plus ou moins larges et pro-
fondes, dont les parois se montrent usées.
Une de ces ravines, située près de 3oo mètres au sud
de Castello do Queijo, et se dirigeant vers la plage ou vers
Fouest, est longue de près de 36 mètres, et sa largeur va-
rie entre 2'',5o et o^iSo. L'une de ses parois, celle du sud,
est représentée dans le profil, y/g-. 7, pi. 1.
Cette ravine coupe du gneiss très dur, et vers sa par-
tie supérieure elle est encore remplie par ce dépôt d'ailu-
vion, que nous avons déjà mentionné comme recouvrant
immédiatement les roches cristallines. 11 contient là, comme
dans d'autres endroits, de gros cailloux roulés, quelques-
uns de plus de 25 centimètres de diamètre moyen. Cette al-
luvion est, pour ainsi dire, préservée et maintenue par un
rétrécissement de la ravine. A son embouchui-e celle-ci for-
me une espèce de gorge de 60 à 80 centim. de largeur. Les
parois de cette coupure sont lisses et même luisantes dans
quelques endroits. A son entrée, là où le gneiss rétrécit le
canal en formant une bosse un peu saillante, celle-ci est
non seulement polie et luisante, mais aussi couverte de sil-
"V*^!
Ions et de stries, dans une direction un peu inclinée à l'ho-
rizon vers Pouest, et coupant les feuillets de la roche.
On voit encore, comme collée à la paroi du sud, une
croûte, de quelques décimètres carrés de surface, constituée
par le ciment sableux jaune-rougeStre, si fréquent dans les
alluvions anciennes, qui y est restée adhérente, quand
l'alluvion, qui doit avoir rempli la ravine, a été enlevée,
La Jg. 7, pi, I, met en évidence non seulement ces
faits, mais aussi la liaison qu'il y a entr'eux et qui, à ce qu'il
paraît, ne permet pas de douter, que ces effets soient dus à
des frottements glaciaires.
Nous avons recueilli une douzaine d'éclats du gneiss
strié, qui ont été tous déposés à la Section Géologique. L'un
d'eux a été reproduit par la photoiypie dans la pi. IV, ou
l'on peut reconnaître des sillons et des stries, quelques-unes
même croisées, coupant les feuillets de la roche, qui sont
nettement visibles.
Si les faits décrits dans ce résumé, ont l'explication
qui nous a parue la plus probable, les conclusions auxquel-
les on arriverait, seraient celles-ci.
1° Action glaciaire, ayant modifié considérablement la
surface des roches cristallines jusqu'au bord de la mer, et
probablement au dessous de ce niveau, et déposant sur elles
des alluvions contenant de ^os blocs erratiques, et des
cailloux striés.
2" Existence probable de l'homme, avant que ces al-
luvions fussent restées immobilisées, soupçonnée vu la ren-
contre au milieu d'elles de quartzites, qui paraissent taillées
et striées,
3° Plage soulevée à une altitude de plus de 5o", avec
conservation partielle de dépôts marins, formés à une épo-
(fue postérieure à celle de l'immobilisation des alluvions
,ï Google
anciennes. Quartzîtes taillées, probablement de deux pro-
venances, les unes dérivées des alluvions anciennes ou
glaciaires les autres fabriquées sur place, ou dans d^au-
tres lieux.
4.* Plage soulevée à une altitude de plus de lo^iSo,
avec conservation de dépôts marins, contenant des restes
de coquilles, qui paraissent récentes ainsi que des quar-
tates taillées, de formes assez petites. Ces dépôts paraissent
passer inférieurement à des alluvions, probablement contem-
poraines de celles des plateaux.
,(^51^
L'ANCIENNETÉ DE L'HOMME
DANS LE BASSIN HOTEN DU RHONE
VAI.LÉE INFÉRIEURE DE LA SAÔNE
M. Adrien Arceun
11 est peu de régions où les formations tertiaires et qua-
ternaires aient été plus complètement étudiées que dans le
bassin moyen du Rhône et dans la vallée inférieure de la
Saône. 11 en est peu par conséquent, où le problème de
l'âge géologique de Phomme puisse être posé dans de meil-
leures conditions.
Je vais chercher à préciser les résultats acquis à la ques-
tion, d'après les travaux les plus récents.
Aux environs de Lyon, les terrains tertiaires supé-
rieurs et quaternaires se divisent naturellement en trois éta-
ges; l'un pré-glaciaire, correspond au pliocène moyen et
supérieur; l'autre glaciaire, représente le quaternaire infé-
rieur, l'autre post-glaciaire, comprend le quaternaire supé-
rieur et les formations modernes.
Les alluvions pré-glaciaires du plateau bressan, du Bas-
Dauphiné, et du Lyonnais {conglomérat bressan; alluvions
,ï Google
_i9i_
anciennes de la Bresse) sont considérées par MM. Faisan
et Chantre' comme dépendant d'un vaste cône de remblai
formé en majeure partie de galets et de graviers alpins,
roulés par les fleuves torrentiels qui s'écoulaient en avant
des glaciers des Alpes pendant leur période de progression.
Ces alluvions ont atteint aux environs de Lyon la cote de
320 mètres et formé un barrage transversal en aval de la val-
lée de la Saône. Ils ne contiennent qu'une faune malacologi-
que, composée en majeure partie de fossiles miocènes et
pliocènes remaniés. On y a signalé cependant, à la base,
une petite faune en place caractérisée par la Paludina Dre-
seli (Toumouër) et la Valvala Vanctana (Tournouër), qui
sont pliocènes.
Le long de la vallée de la Saône, en dehors des limites
du cône de remblai formé par les alluvions alpines, il existe
des alluvions pliocènes dont les niveaux correspondent aux
précédentes. Cependant elles ne paraissent pas avoir atteint,
comme celles du plateau bressan, la cote élevée de 32o
mètres. Leur niveau supérieur le plus remarquable, le long
des coteaux du Beaujolais et du Maçonnais, forme terrasse
à environ 270 mètres d'altitude.
Une grotte (Poleymieux), des fentes de rocher, (Mont
de Narcel Chaintré; Chagny) et quelques dépôts interca-
lés dans les alluvions anciennes (Villevert; Port-Maçon),
ont fait connaître la faune mammalogique du pliocène su-
périeur dans le bassin moyen du Rhône et la vallée infé-
rieure de la Saône*.
■ Faisan et Chantre : Monographie géologique des anciens glaciers
et du terrain erratique de la partie moyenne du bassin du Rhône, x vol.
in 8.°, avec atlas, Lyon 1880.
' Lanei et Chantre: Arclùves du Muséum de Lyon, 1. 1, p. 102
16
r\
On y trouve:
Elephas meridionalis
Elephas antiquus
Hippopotamus major
Rhinocéros megarhinus .
Tapirùs
Sus
Antilope
Bos hngifrons
Machaerodus
Feîis
Hyaena antiqua
Ursus arvernensis
Equus
Lepus
Testudo
Par dessus les alluvions pré-glaciaires s'étale le terrain
glaciaire proprement dit, à blocs erratiques et à cailloux
striés, correspondant au maximum de développement des
glaciers du Rhône et de l'Isère, qui vinrent, comme l'ont
démontré MM. Faisan et Chantre, former leurs moraines
terminales jusque sur les collines de Lyon,
Ce terrain erratique ne renferme guère que des fossi-
les remaniés empruntés aux formations antérieures. On nY
a signalé en fait de vertébrés que deux fragments de dents
appartenant, d'après M. Gaudry, au genre Chamois ou Saïga.
Les collines du Maçonnais et du Beaujolais paraissent
avoir eu aussi leurs petits glaciers. On observe dans les
principales vallées aboutissant à la Saône des lambeaux de
terrain erratique, dont l'origine glaciaire semble très proba-
ble. Ce terrain erratique ne descend pas au-dessous de la
cote 270 mètres, où commencent les alluvions anciennes.
On n'a jamais encore signalé aucune trace de l'hom-
me ou de l'industrie humaine dans les terrains que je viens
d'énumérer.
Le lehm est la formation qui, dans l'ordre stratigra-
phique, succède au terrain erratique des environs de Lyon,
,ï Google
: j9i
Le lehm, tel que l'entendent MM. Faisan et Chantre, est
dû, soit aux eaux de fusion des glaciers, soit à la lévigation
des moraines par les eaux pluviales. C'est un limon argi-
leux, renfermant une très petite proportion de calcaire, et
qui se développe principalement en avant des moraines
frontales des anciens glaciers du Rhône et de l'Isère.
Toute la vallée de la Saône, jusqu'au niveau supérieur
des alluvions anciennes (270 mètres environ) est tapissée
d'un limon jaune fort analogue au lehm des géologues lyon-
nais.
La faune du lehm est assez riche. La voici telle qu'elle
a été publiée par MM. Lartet et Chantre'.
Homo
Canis lupus
Urstis spelaeus
Ursus arclos
Elephas primigenius
Elephas antiquus
Elephas intermedius
Rhinocéros tickorhinus
Rhinocéros Jourdanî
Eqiius caballus
Sus scrqfa, var.
Bos primigenius
Bison prisais
Megaceros hibernicus
Cervus elaphus
Cervus tarandus
Ceri'iis capreolus
Arctomfs primigenia
Sorex
Je ferai deux réserves à propos de ce catalogue.
L'homme n'a été rencontré qu'une fois dans le lehm
et dans des conditions douteuses. En 1868 M. Chantre a
recueilli a Toussieux (Isère) un crâne entier et quelques os-
sements appartenant à plusieurs individus. Le crâne était
dolichocéphale Aucune trace d'industrie n'accompagnait ces
' Archives du Mu!
n de Lyon, t. i, p. 76.
'«'^•^',
oogle
■94
restes. On sait combien les remaniements sont difficiles à
constater dans un terrain aussi homogène que le lehm et
non stratifié. Il est possible que ces débris se rapportent à
une inhumation postérieure. Aussi MM. Faisan et Chan-
tre ont-ils eux-mêmes déclaré tqu'il peut rester quelque
doute sur l'âge de ces fossiles'» La trouvaille de Toussieux
est donc un fait exceptionnel qui mérite confirmation; d'au-
tant plus, je le répète, que le lehm ne renferme aucune trace
d^industrie humaine.
Ma seconde observation est celle-ci: VElepkas anti-
qutis a été rencontré à la limite du lehm et des alluvions an-
ciennes préglaciaires, dans une position mal déternninée.
J'incline à penser qu'il appartient plutôt à la faune des al-
luvions anciennes qu'à celle du lehm. C'est une question à
étudier.
L'éléphant réellement caractéristique du lehm est I'£ïe-
phas intermedms (Jourdan)*, très-abondant aux environs de
Lyon; il faut y joindre comme caractéristique aussi le ^Ai-
noceros Jotirdani (Lartet et Chantre) trouvé dans le lehm
de Saint-Germain, au Mont-d'Or.
L'histoire géologique de la région, aux époques que je
viens d'examiner peut se résumer airfsi:
Lorsque les alluvions pré-glaciaires formèrent barrage
à Lyon, à l'issue de la vallée de la Saône, les eaux de cette
rivière refluèrent en amont et donnèrent naissance à un lac
temporaire, désigné par les géologues sous le nom de lac
Bressan.
Les eaux du lac Bressan atteignirent peut-être un ins-
' Monographie des anciens glaciers, etc. t. ii, p, 430.
' D'après quelques auteurs \'E. intermedms ne serait autre que
t'^. antiqmis, ce qui ne changerait rien d'ailleurs â mes concluàons.
,ï Google
tant les hauts niveaux du barrage (3io-320 mètres), mais
elles paraissent s'être maintenues assez longtemps à la cote
270 mètres qui correspond à une terrasse très constante au
pied des coteaux du Beaujolais et du Maçonnais et dont j'ai
eu déjà l'occasion de parler.
Peu à peu la Saône rouvrit son ancien canal au milieu
des alluvions. La digue de Lyon fut rompue et le lit de la
rivière descendit à une cote {190 mètres) peu supérieure à
celle qu'il occupe aujourd'hui à Lyon {265 mètres).
Mais la vallée fiit barrée une second fois par l'arrivée
du grand glacier Rbodano-Savoisien, et les eaux de la Saône
durent s'écouler plus k l'ouest par le seuil de la demi-lune
qui est à la cote 217 mètres.
La rivière ne reprit son cours naturel par Lyon qu'a-
près le retrait du glacier, c'est-à-dire lorsqu'il eut rétro-
gradé des collines de Fourvières et de Saint-Just sur le pla-
teau de Sathonay.
Voilà ce qui résulte des beaux travaux de MM. Fai-
san et Chantre sur les anciens glaciers. Cela posé, voyons
ce que nous apprend l'étude des plus anciennes stations
humaines connues de la région, la grotte de Soyons, celles
de Germolles, de Rully et de Vergisson, les zones inférieu-
res de Téboulis de Solutré: le gisement de la Truchère.
Soyons. (V. Lepic et de Lubac : «Stations préhistoriques
du Vivarais, Chateaubourg et Soyonsn. Chambéry 1872).
Faune:
Homo Hyaena spelaca
Caiiis lupus Ursiis spelaeus
Canis familiaris Mêles taxus
Eiephas primigenius
Rhinocéros iickorhinus
Eqinis cabalhis
Sus scro/a
Cervus daphus
Cervus canadensis
Cervus tarandus
Cervus capreolus
Capra ibex
Bos primigenius
Bos prisais
Industrie: type du Moustier, sans mélange de Saint-
Acheul, éclats et couteaux abondants; pas d'os travaillés.
Germolles. {Ch. Meray, dans "Mémoires de la Société
d'Iiistoire et d'archéologie de Chalon-sur-Saône», t. vi; 2"
part» p. 25t).
Faune:
Canis lupus
Canis pulpes
Hyaena spelaea
Felis leo
Ursus spelaeus
Mêles taxiis
Eiephas primigenius
Rhinocéros tichorhinus
Equus
Sus
Bos primigenius
Cervus tarandus
Cervus
Industrie: Type de Saint -Acheul, mêlé au type du
Moustier dans la proportion de 19 sur 9; nombreux éclats;
couteaux; grattoirs, des types connus à l'âge du renne et
de la pierre polie; os travaillés abondants; poinçons; lis-
soirs; marques de chasse, etc.
Rtilly. (Grotte explorée par M. Perrault, décrite par
,ï Google
M M. Lartct et Ctiantre, dans «Archives du Muséum de
Lyon», I. I, p. gi).
Faune;
Cam's lupus
Canis pulpes
Hyaena spelaea
Felis spelaea
Ursus spelaeus
Elephas primigenius
Sus scrofa
Eqiius
Cerpus tarandus
Cert'us elaphus
Bos primigenius
Arctomys primigenia
Industrie: Lances et pointes du type du Moustier.
Vergisson. (De Ferry: «Maçonnais Préhistorique»
1870, p. 33).
Homo
Elephas
Ursus spelaeus
Equus
Canis lupus
Cervus tarandus
Canis vulpes
Bos primigenius
Hyaena spelaea
Tetrao
Felis spelaea
Testudo
Industrie: Types de Moustier. Pas d'os travaillés.
Solutré inférieur (L'abbé Ducrost et Arcelin).
Faune:
Canis lupus
Canis vulpes
Hyaena spelaea
Felis lynx
,ï Google
Felis spelaea
Ur^us spelacus
Ursus arctos
Elcphas pvimigenius
Equus cabalhts
Cervus canadeusis
Cervus tarandiis
Cervus alces
Antilope saïga
Bos primigenius
Arctomjs primigenia
Industrie: types du Moustîer et de Saint-Acheul ; cou-
teaux; grattoirs de formes variées: radoirs courbes; os tra-
vaillés abondants; marques de chasse ; poinçons, lissoirs, etc.
La TruoliôreCM. de Mercey, dans «Archives du Mu-
séum de Lyon» t. i. p. 65.)
Cette localité a fourni un crâne humain enfoui dans les
marnes grises de la vallée de la Saône qui représentent le
quaternaire le plus supérieur, immédiatement recouvert par
les alluvions modernes de la rivière.
La faune de ces marnes comprend:
Homo
Elephas primigenius
Sus
Equus caballus
Cervus elaphus
Cervus tarandus
Bos longifrons
En résumé, la faune de toutes ces stations paléolithi-
ques est analogue à celle du lehm. Elle en est la continua-
tion; mais on n'y trouve ni VElephas antiquus ni VE. inter-
medius, ni le Rhinocéros Jourdani. N'est-on pas en droit de
penser que Phomme, dans la vallée de la Saône et le bas-
sin du Rhône, n'est venu qu'après l'extinction de ces trois
espèces et qu'il y est par conséquent postérieur à la forma-
tion du lehm et à l'époque glaciaire?
,ï Google
'99
Des considérations géologiques et slratlgraphiques con-
duisent au même résultat, La station de Germolles n'est
qu'à cinq mètres au-dessus de POrbize, qui coule au pied de
la grotte et à vingt mètres au-dessus de la Saône, où se jette
rOrbize. Aucun dépôt d'alluvion n'a recouvert le gisement
préhistorique. Le séjour de l'homme sur ce point date donc
d'une époque où le creusement des vallées était à peu près
ce qu'il est aujourd'hui.
Il existe aux environs de Mâcon, à Charbonnières, un
très curieux gisement découvert par M. de Ferry, où les
silex taillés abondent, mais où il n'y a pas de faune asso-
ciée. Le style des silex permet d'assimiler ce gisement à ce-
lui de Germolles. La station de Charbonnières occupe la
même position que Germolles, par rapport au cours d'eau'
voisin (la Mouge) et par rapport à la Saône.
Elle appartient donc aussi à ta dernière phase du creu-
sement des vallées. Le gisement des silex taillés est donc
un petit pli de terrain, recouvert à peine par quelques cen-
timètres de limon jaune, produit probable de la lévigation
des coteaux voisins par les eaux atmosphériques. Rienn'indi-
que que des alluvions fluviales se soient déposées par-dessus.
En résumé, l'époque géologique des alluvions pré-gla-
ciaires et du terrain erratiqUe glaciaire correspond à une
période de remplissage. Nos stations archéologiques les plus
anciennes sont au contraire postérieures à la dernière phase
de creusement des vallées. Un intervalle considérable a donc
pu s'écouler entre la première période et la seconde.
On a suggéré, il est vrai, que l'homme avait pu habi-
ter les stations de Charbonnières et de Germolles*, lors du
' Faisan et Chantre : Monographie géologique des anciens glaciers
etc., t. II, p. 333 et S64.
lyGo^Çe
premier creusement de la vallée de la Saône, antérieure-
ment à l'arrivée des grands glaciers. L'homme aurait donc
été contemporain dans nos régions de la grande perturba-
tion glaciaire; mais alors nos stations auraient dû se trouver
immergées et enfouies sous des sédiments, alors que les
glaciers vinrent, pour la seconde fois, former un barrage
contre les collines lyonnaises. Or, nous avons vu que ni à
Germolles, ni à Charbonnières, les gisements archéologi-
ques n'ont été recouverts par aucun dépôt alluvial posté-
rieur.
Malgré l'autorité qui s'attache à l'opinion des savants
géologues pour que l'homme daterait de l'époque glaciaire
dans le bassin du Rhône, je ne puis me rallier à cette con-
clusion, qui me serait inconciliable avec les faits. Je crois
même l'homme beaucoup moins ancien. II n'a dû arriver
dans notre région qu'après un assez long intervalle qui se
mesure: i" par une érosion de près de cent mètres dans la
vallée de la Saône; 2" par Pextinciion des espèces caractéris-
tiques des formations glaciaires ou immédiatement post-
glaciaires, VElepkas antiquus, \''Elephas intermedius et le Rhù
noceros Joiirdani.
Quand l'homme quaternaire vint pour la première fois
s'établir sur les rivages du Rhône et de la Saône, les plai-
nes occupées jadis par le lac Bressan étaient à sec depuis
longtemps, et les glaciers en retraite avaient probablement
disparu eux-mêmes derrière les sommets du Jura.
vn
„Google
JS LE BASSIN INFÉRIEUR DE LA SAÔNE
CLASSinCATIOH PALÉONTOLOCIQUE
du Renne
"moyennes de
- otutré.
Age
du Cheval
Age
du grand Ours
Charbonniè-
molles.
du Rhinocéros
tickorhimis
Grande abondance du Renne,
sans l'Ursus ^latus ni VHyama
Prédominance du Cheval.
Avec VUrats spelaaa et VHyae-
na ^elaea sans le Rhinocéros ticho-
L'Homme' avec le Rhinocéros ti-
chorhima sans VElephas antiquus ni
le Rhinocéros Jourdani.
L'Elephas intermedius ei le Rhinocéros Jourdani sans
l'Homme.
Fossiles remaniés.
Me l'industrie
L'Elephas antiquus sans l'Homme.
,ï Google
^1^
„Google
LE QUATERNAIRE EN POLOGNE
LA CAVERNE DU MAMMOUTH
M. Zawisza
Je demande l'avis de l'assemblée sur les pièces curieu-
ses en dent de mammouth qui ont été exposées à Paris
en 1878. La huitième pièce trouvée dans la caverne du
Mammouth, et que je présente au Congrès, a prouvé par
sa forme qu'elle n'a pu servir comme pointe de lance, ainsi
que celles trouvées précédemment. Sa longueur est de 41
centimètres, épaisseur 5 millimètres, largeur 24 centimè-
tres. Je crois que ces pièces étaient probablement des signes
de commandement ou des insignes de sorcellerie ou de culte
religieux. Le bout du côté de la tête porte des entailles au
milieu desquelles on aperçoit un petit œil.
Je présente, aussi des ossements de mammouth tra-
vaillés, lesquels à mon avis et à celui de M. Schaaffhausen,
sont une des meilleures preuves de la contemporanéité de
l'homme avec cet animal, vu que l'os étant poreux et'fra-
gile par sa nature, doit avoir été travaille à Pétat frais, non
comme la dent de mammouth fossile qu'on emploie très
bien de nos jours.
,ï Google
Abordant une autre question, j'exposerai que selon
mon opinion la présence du bulbe de percussion n'est pas
une preuve suffisante pour démontrer qu'un silex ait été in-
tentionellement travaillé par Thomme. Il faut qu'il y ait l'ad-
jonction d'une fatette plate au dessus du point de percus-
sion.
Slacasalon
M. Evans: Je déclare, sur le sujet de la proposition
qui vient d'être faite, que je ne considère pas comme suffi-
sant pour attester le travail de l'homme un seul bulbe de
percussion. Il faut aussi constater des facettes au côté
opposé au bulbe de percussion. Des éclats peuvent se pro-
duire dans les grandes commotions géologiques résultant
des tremblements de terre. Il n'est pas nécessaire d'avoir
recours à un coup porté contre le silex pour obtenir un
bulbe de percussion; la pression seule suffit. Il faut en ou-
tre que les objets semblables soient en nombre, pour au-
toriser à les attribuer au travail humain.
M. DE MoBTiLLET, après avoir rappelé les signes indi-
cateurs d'un silex travaillé par l'homme, ajoute :
Outre ces indications, on doit regarder comme signe
caractéristique le cône produit par l'écrasement sous le
coup qui a frappé le silex. En ce qui concerne l'emploi des
ossements travaillés présentés par M. Zawisza, je dirai que
je les considère comme des pointes de lance, des lames or-
nées.
,ï Google
NOTE
SUR LES DERNIÈRES DÉCOUVERTES
EFFBCTtTËES par AI. Prunieres DANS LA LOZÈRE
M. DE QUATREFAGES
Quelques jours avant mon départ de Paris, je reçus de
M. le Dr. Prunières une nots relative aux découvertes re-
marquables qu'il venait de faire dans la contrée qu'il ex-
plore avec tant d'habilité. Cette note, destinée au Congrès
de Reims, a été présentée, par M. Magitot, à la section
d'anthropologie de l'Association française; mais les faits an-
noncés par M. Prunières me semblent avoir trop d'intérêt
pour que je n'en dise pas quelques mots au Congrès.
On sait que cet infatigable chercheur avait déjà fait
connaître la caverne dé l'Homme-Mort, puis celles de Bau-
mes-Chaudes. Le beau travail de notre regretté collègue
Broca a montré la première habitée par les hommes doli-
chocéphales de Cro-Magnon, croisés avec les brachycépha-
les constructeurs de dolmens. La seconde a évidemment servi
de refuge à des Cro-Magnons en lutte avec les constructeurs
de dolmens. Ce fmt est attesté par l'existence d'os dans les-
quels sont enfoncées encore les pointes de flèches néolithi-
ques qui ont tué les individus.
204
Maintenant M. Prunières annonce avoir découvert:
1° Une immense caverne avec ossements (TUrsus spe-
laeits et des haches de Saint -Acheul- La présence de l'hom-
me paléotithique est attestée là par ses œuvres, mais non
par des restes de Touvrier.
2° Plusieurs cavernes sépulcrales d'où notre collègue a
retiré une immense quantité d'ossements et des crânes très
nombreux. Plusieurs de ces ossements sont percés par les
flèches néolithiques des hommes des dolmens. Tous les crâ-
nes sont des dolichocéphales purs.
3" Plusieurs dolmens, lesquels ont donné des crânes
brachycéphales purs, mêlés à un certain nombre de doli-
chocéphales purs et à des crânes de métis. Le bronze com-
mence à se montrer dans ces dolmens.
4° Les crânes extraits d'un vieux cimetière situé au cen-
tre du Causse se sont montrés brachycéphales en grande
majorité; mais un certain nombre étaient encore dolichocé-
phales et d'autres accusaient le mélange des deux races.
Si nous embrassons par la pensée l'ensemble de ces
découvertes, toutes dues à M. Prunières, nous voyons qu'el-
les racontent d'une manière complète l'histoire primitive de
ces régions.
i" Au début, dès les temps paléolithiques de Tours, les
dolichocéphales sont seuls, et à en juger par ce que nous
montrent les localités où l'on a trouvé des restes humains,
ces premiers habitants appartenaient à la race de Cro-Ma-
gnon. On peut toutefois se demander, jusqu'à plus ample
informé, si les hommes de Canstadt n'entraient pas pour
quelque chose dans cette population.
2° Les brachycéphales constructeurs de dolmens sont
arrivés à un moment donné, et la guerre a été d'abord la
suite de ce contact. C'est ce qu'attestent ces nombreux sque-
-^^
„Google
205
lettes de dolichocéphales purs, portant encore les pointes de
flèche. Le même fait met hors de doute la coexistence des
deux races, la survivance de celle de Cro-Magnon.
3" La guerre n'a pas amené l'extermination des doli-
chocéphales; les deux races se sont unies, mais la race bra-
chycéphale paraît avoir prévalu.
La fusion des races primitives qui ont habité le sol
français se montre, de la manière la plus frappante, dans la
magnifique collection ostéologique formée par notre collègue,
M. le baron de Baye. J'ai eu déjà l^occasion de dire à la
Société d'Anthropologie que j'y avais trouvé tous les types
fossiles, moins celui de Canstadt, et peut-être un des deux
types de Furfooz associés à un type spécial. A Baye, tou-
tes ces races apparaissent comme vivant dans les meilleurs
termes. Le temps des guerres est passé.
Dans la Lozère les phénomènes sont bien plus simples.
Nous ne voyons que deux races en présence, mais nous
suivons, pour ainsi dire, d'étape en étape l'histoire de cha-
cune d'elles et de leurs rapports jusqu'à l'époque actuelle.
Là est le très grand intérêt des faits mis au jour par M.
Prunières.
Dlsonsslon
M. Henri Martin: La dolichocéphalie cause souvent
de grandes confusions historiques. En France nous avons
eu des dolichocéphales primitifs, vaincus et assujétis par
des brachycéphales, puis ceux-ci ont été, à leur tour, domi-
nés par de nouveaux dolichocéphales.
Je crois qu'on peut assigner à ces trots races des
noms historiques: les premiers étaient les Berbères, qui
.ïGoogle
2o6
étaient encore à la pierre éclatée; les deuxièmes étaient les
Ligiires, qui arrivaient avec la pierre polie, et un peu plus
tard, le bronze; les troisièmes étaient les Celtes avec la
pierre polie, puis le bronze, mais mieux organisés, mieux
armés, construisant des monuments mégalithiques bien plus
considérables, imposant aux Ligures leur religion, leur lan-
gue, leurs mœurs et se mêlant aux Ligures comme les Ligu-
res s'étaient mêlés aux Berbères,
M. DE QuATREFAGES. Je crois que les hommes dont parle
M. Prunières sont de beaucoup antérieurs aux Aryans.
IV.
ib.Google
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Ikoogle
„Google
LA oaOTTE DE FURNINBÀ A PENIOHE '
M, JoAQULM F. N. Delgauo
La presqu'île de Péniche, située à quinze lieues au nord
de Lisbonne et se détachant nettement de la côte maritime,
présente du côté sud une falaise abrupte formée par les cal-
caires sableux très grossiers du lias supérieur. Sur cette fa-
laise se trouve une grotte connue dans la localité sous le
nom de Furninha da Desctda do Mar, ou tout simplement
Ftirninha (petite grotte), creusée dans les roches sur les-
quelles est bâti le village de Péniche de Baixo. Ces calcai-
res s'étendent dans toute la longueur de la presqu'île, ils
embrassent à peu près la moitié de sa superficie jusqu'à
Senkora dos Remédias.
La falaise formée par ces calcaires est verticale dans
•toute son extension, et parfaitement inaccessible, sauf par
quelques découpures perpendiculaires à la direction des cou-
ches. Ce sont des criques profondes et étroites que l'on
' Pour ne pas scinder la description de cette grotte, nous l'avons
mise en entier dans cette section; la partie se rapportant ùl'àge néoli-
thique y est donc comprise.
iïGooqIc
208
nomme carreiros, où l'action érosive de la mer s'est exer-
cée plus fortement, profitant de la structure spéciale de la
roche et probablement aussi de fentes qui la traversaient.
Une profonde érosion dans l'intérieur des couches, due
sans doute à des sources hydrothermales ou minérales, et
vraisemblablement antérieure à la formation des plus an-
ciens dépôts quaternaires, a corrodé aussi la surface de ces
couches, laquelle se montre hérissée de pointes et criblée de
trous et de puisards, que les sables entraînés par les cou-
rants diluviens vinrent combler depuis lors.
La grotte de Furninha est une de ces cavités mise à
^iccouvert par l'action destructive des vagues, modifiée et
agrandie ensuite dans ses formes par cette même cause,
avant la dernière élévation du sol qui donna à notre côte
maritime son relief actuel.
En effet, la forme arrondie des différentes chambres qui
la composent, lasurface lisse de ses parois et les nombreuses
coupoles coniques, qui en forment le toit, s'élevant à une
grande hauteur au-dessus du sol primitif de la grotte, don-
nent la preuve évidente que la mer y a pénétré autrefois, mais
certainement h une époque très reculée, bien avant que la grot-
te fût habitée. La preuve directe de cette assertion c'est que
la mer continue encore actuellement la même œuvre de des-
truction, minant la falaise inférieurement au sol de la grotte
qui court grand risque de s'effondrer, la communication en-
tre l'excavation inférieure et la grotte supérieure étant déjà
établie en deux points, ce qui nous a été révélé par les tra-
vaux d'exploration.
L'ouverture de la grotte regarde le sud-ouest; elle est
très pittoresquement située à mi-hauteur de la falaise, en-
viron 1 5 métrés au-dessus du niveau de la mer, et 85o mè-
tres au sud-est du cap Carvoeiro, l'un des points de notre côte
DigitizsdbvGOO'^le
le plus avancé dans l'Océan, et par conséquent un des points
les plus occidentaux de l'Europe.
Le sentier qui y mène est extrêmement difficile et pé-
rilleux; avant que nous le fissions réparer il ne pourrait
être pratiqué que par les pêcheurs et les personnes très
hardies. Nous devons cependant supposer que lorsque la
grotte fut habitée pour la première fois, les conditions étaient
bien différentes, la falaise s'avançant alors beaucoup plus
dans l'Océan.
Une plateforme qui a aujourd'hui environ 6 mètres de
laideur, mais qui, sans doute, au commencement de l'époque
quaternaire s'avançait beaucoup plus vers le sud, formant
peut-être même la plage, rend cependant facile l'entrée de
la grotte. Cette plateforme étant abritée par les rochers de
la partie supérieure de la falaise offre un abri sûr une fois
que l'on y est arrivé, sauf lors des grandes tempêtes, quand
les vagues viennent se briser avec violence contre les rochers,
et s'élèvent à une telle hauteur, qu'elles empêchent tempo-
rairement l'entrée de la grotte en y pénétrant elles-mêmes.
Poursuivant le même ordre d'idées, nous pouvons sup-
poser que la grotte actuelle n'est peut-être qu'une ramifica-
tion d'une caverne de plus grandes dimensions, qui, à l'épo-
que quaternaire, avait issue à la surface du sol et était plus
accessible qu'elle ne l'est aujourd'hui.
Il est encore assez probable qu'à la même époque la
grotte se trouvait peu au-dessus du niveau de la plage, puis-
que la mer a pu y pénétrer dans des circonstances spécia-
les, et qu'ensuite elle a été fréquentée et habitée alternati-
vement par les hommes et par les animaux.
La grotte forme une sorte de corridor tournant deux fois
en coude ou ayant la forme de fer à cheval, plus large à sa
courbe, où se trouve la salle principale, et plus étroit aux
,ï Google
deux branches, avec une petite chambre contiguë à Pun des
angles, et auprès de l'autre angle un trou profond, espèce
de puisard, que le travail d'exploration a mis à découvert.
La grotte ne reçoit d'autre lumière que celle venant de
son ouverture; aussi, tout en étant bien éclairée dans la pre-
mière branche, ne l'est-elle que très faiblement vers le mi-
lieu, ou dans ce que nous appellerons salle p'tttcipale, tan-
dis que l'obscurité est complète dans la dernière partie et
dans la petite chambre attenante.
Quant il pleut l'eau suinte et coule abondamment de
la voûte et des parois de la grotte; cependant, on n'y a pas
découvert de couche stalagmitique, sauf une petite masse
de 2 décimètres d'épaisseur, empâtant des ossements hu-
mains, laquelle adhérait à la paroi de l'est, à i'",3o du sol
de la grotte, laissant ainsi voir clairement que dans des
temps peu reculés ce sol était arrivé au moins à cette hau-
teur.
Comme on n'a découvert dans aucun autre point de
vestiges de la couche stalagmitique, il est évident qu'elle a
été enlevée; mais il est aussi clair qu'elle ne couvrait pas
tout le sol de la grotte, comme c'était le cas dans les grot-
tes de Cesareda, par exemple, puisque l'on n'en découvre
plus la moindre trace sur la paroi opposée de la grotte. Cet-
te circonstance est d'autant plus remarquable que, comme
nous Pavons dit, il y tombe beaucoup d'eau à l'occasion des
grandes pluies.
On n'y a pas non plus découvert de blocs de calcaire
tombés de la voûte ou des parois, comme il arrive ordinai-
rement, et comme nous l'avons observé généralement dans
les grottes de Cesareda. Le dépôt qui la remplissait par-
tiellement était sableux, plus ou moins grossier et incohé-
rent, ne renfermant .dans toute son épaisseur, que quelques
,ï Google
cailloux roulés ou galets quartzeux, et les objets que l'hom-
me y a introduits.
L'ouverture de la ^otte forme un arc peu régulier, de
4 mètres de hauteur à la clef et 3 mètres de largeur à la
base. Environ à 4 mètres de l'ouverture, le corridor d'en-
trée se rétrécit un peu, et sa hauteur diminue aussi, par suite
de la saillie de la roche formant le sol, laquelle se montrait
à découvert jusqu'à ce point, où l'action de la mer se fait
sentir. Au delà de cette barrière naturelle, qui heureusement
empêchait le passage de l'eau de la mer en limitant son
action destructive (car sans cet obstacle elle aurait proba-
blement entraîné la plus grande partie des dépôts de la grot-
te) commençait le dépôt sablonneux qui en recouvrait le sol.
Après avoir exploré ce dépôt sur place, nous le ffmes ex-
traire afin de le passer au crible, et de recueillir tous les
petits objets qui pourraient avoir échappé aux premières re-
cherches.
Il est intéressant de remarquer qu'un certain effort étant
nécessaire pour franchir ce gradin, qui peut avoir un mètre
de hauteur, les pointes saillantes du rocher sur la paroi droite
du corridor, le long de laquelle le passage devait se faire, se
présentent très lisses et usées, comme si en effet pour sur-
monter cet obstacle elles eussent servi d'appui aux hommes
qui avaient fréquenté la grotte.
Le corridor d'entrée se prolonge d'environ 5 mètres de
plus, ce qui fait 9 mètres de longueur jusqu'à la salle prin-
cipale. La voûte de cette salle présente les formes les plus
gracieuses^ elle s'élève, en nombreuses coupoles de plus en
plus hautes, vers le centre de la grotte, où elle forme un
large dôme qui atteint presque la surface du sol à l'exté-
rieur. Cette salle se prolonge vers le sud, puis tourne vers
le couchant en s'approchant de la falaise. La grotte entière
,ïGeX^'
Ts
mesure environ 3o mètres d'extension totale comptes sur
l'axe, dont 1 1 mètres appartiennent à la salle principale. A
rextrémité nord de cette salle se trouve le passage vers la
petite chambre (nord-est) par un corridor étroit, difficilement
praticable avant l'extraction du dépôt de 5o centimètres
d'épaisseur qui couvrait le sol.
On a reconnu dans cette grotte deux dépôts différents,
parfaitement distincts, tant par leurs caractères physiques,
que par les débris qu'ils renfermaient.
Le dépôt supérieur, appartenant sans doute à la dernière
phase de l'époque néoUihique, a fourni les preuves que cette
grotte fut pendant longtemps habitée par l'homme, qui y
fabriquait ses armes et les principaux instruments et usten-
siles dont il se servait, d'après ce que l'on peut juger par
l'énorme quantité de cailloux roulés, noyaux et éclats de si-
lex, de quartzite et de quartz que nous avons recueillis,
ainsi que par nombre d'instruments fabriqués de ces mê-
mes substances.
Ce dépôt consiste en une terre argilo- sablonneuse,
meuble, avec de Thumus, de couleur noirâtre, formant une
couche d'épaisseur très inégale, et en partie positivement
chargée d'ossements "humains et de produits de l'art, mêlés
de quelques ossements d'atùmaux. Il commence, comme
nous l'avons dit, à 4 mètres de l'ouverture dans le corridor
d'entrée, et sur les premiers 3 mètres suivant l'axe de la
grotte, il n'a q\:e quelques décimètres d'épaisseur; mais
bientôt il atteint 2"',5o de hauteur à l'extrémité intérieure
de ce corridor, c'est-à-dire, au point oîi il aboutit à la salle
principale.
Poursuivant notre examen, selon l'axe de cette salle,
nous voyons l'épaisseur du dépôt diminuer d'abord, puis
s'accroître graduellement et atteindre un maximum de 7
,ï Google
mètres, correspondant précisément au milieu de la grotte,
c'est-à-dire au-dessous du dôme le plus élevé que forme le
toit. Jusqu'à ce point, |e dépôt supérieur de la grotte repose
immédiatement sur le calcaire jurassique, mais en s'avançant
on voit des sables quaternaires s'interposer entre ce dépôt
et le calcaire, l'épaisseur du dépôt s'abaissant tout-à-coup à
un mètre et continuant ainsi, à peu de différence près, jusqu'à
l'extrémité sud-ouest de la grotte. Dans la petite chambre
nord-est l'épaisseur du dépôt supérieur était très variable,
mais généralement faible; au milieu de cette chambre, où
il avait la plus grande épaisseur, il se trouvait mêlé avec les
sables inférieurs, par l'effet de l'effondrement qui s'y pro-
duisit à deux reprises pendant le travail d'exploration vers
un trou d'une profondeur inconnue, très probablement s'ou-
vrant sur la mer.
Lors du commencement des travaux le sol n'était pas
horizontal; il offrait au contraire, depuis la petite chambre
nord-est, une incUnaison douce vers l'ouverture de l'entrée
et le milieu de la salle principale, et en même temps de l'ex-
trémité opposée de la grotte vers ce dernier point. Mainte-
nant il faut se rappeler que c'était là que, sur la paroi du
côté de l'est et à ï"',So de hauteur, se trouvait îe lambeau
stalagmitique, et que c'était précisément sur la verticale de
ce point que le dépôt offrait la plus grande épaisseur, le dé-
pôt supérieur descendant jusqu'au fond de la grotte, tandis
que les sables quaternaires formaient un talus très abrupt,
presque vertical, tourné vers le nord, contre lequel ce dé-
pôt s'adossait. Il faut aussi considérer que, sur la paroi for-
mée par le calcaire jurassique, i! existait encore, près du fond
de la grotte, quelques restes de sables quaternaires, formant
comme une mince couverture, et quelques pierres détachées
du calcaire, avec des stalagmites brisées, et finalement qu'au
,ï Google
point le plus bas il y avait un trou par où la main pouvait
à peine passer, mais duquel on a retiré quelques os humains.
De tous ces faits il est fadle de conclure que les sables qua-
ternaires recouvraient auparavant tout le fond de la salle
principale et de la petite chambre attenante, et qu'ils se sont
écoulés peu à peu par cet orifice à la manière d'un sablier,
peut-être à l'occasion des vibrations produites par le choc
des vagues, qui font trembler le rocher lorsqu'elles s'y bri-
sent avec fracas.
Ainsi donc, contrairement à ce qui se montrait à nos
yeux lors des fouilles, nous devons supposer que, lorsque
nos troglodytes abandonnèrent la grotte, c'était vers sa par-
tie centrale que le sol devait être le plus élevé. La preuve
en est non seulement dans la position du petit lambeau de
stalagmites, mais encore dans l'accumulation des os humains
et des produits de l'industrie humaine dans cet endroit, où
ils se trouvaient en plus grande abondance qu'en tout autre
point de la grotte.
En effet, d'après la disposition de la grotte et la distribu-
tion de la lumière qui y pénètre, c'est en ce point que les
hommes ont dû siéger de préférence, surtout pendant que
les vents du sud, soufflant avec" violence vers l'intérieur,
rendaient incommode le séjour vis-à-vis du corridor d'en-
trée. Au contraire, quant il faisait beau ou lorsque les vents
soufflaient du côté du nord, les troglodytes venaient tout
naturellement occuper ce dernier point, où, en effet, nous
avons rencontré une autre accumulation d'ossements humains,
moins importante pourtant que la première, et séparée de
celle-ci par un petit intervalle où nul objet n'a été trouvé.
Comme la précédente, cette accumulation était presque en-
tièrement formée de débris humains, mêlés à quelques instru-
ments en pierre et en os et à quelques ossements d'animaux.
'y~\
„Googlc
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Quant à l'origine de ce dépôt supérieur, il est évident
qu'il provient des sabies quaternaires sous-jacents, ou qu'il
n'est autre que la couche supérieure de ces sables, qui pri-
rent un aspect différent par l'adjonction d'une grande quan-
tité de matière organique.
Le fait le plus remarquable qui ressort de l'examen des
objets trouvés dans le dépôt supérieur de cette grotte, c'est
la cassure intentionnelle qu'ont subie la plupart des ossements
humains qu'on y a trouvés, tandis que ceux des animaux,
d'ailleurs assez rares, ne montrent nullement ce genre de cas-
sure. Ce fait paraît générai pour toutes les grottes de notre
pays hantées par l'homme à l'époque néolithique, et montre
que nos troglodytes non seulement mangeaient la chair hu-
maine, mais qu'ils la préféraient dans leurs festins, l'idée des
sacrifices humains ou toute autre semblable ne pouvant suf-
fire, à notre avis, pour rallier les faits observés.
Tout extraordinaire que puisse paraître cette conclu-
sion où nous sommes conduits, elle est pourtant la consé-
quence logique, rigoureuse, des observations faites non seu-
lement à Fuminha, mais aussi dans les grottes de Casa da
Moura, Lapa Furada, et autres de Cesareda, que nous avons
étudiées pour la première fois en 1866, et dans beaucoup
d'autres dont nous avons eu connaissance plus tard.
Les preuves sont si irrécusables qu'il me semble que
celui qui les reçoit sans prévention, ne se refusera pas à se
rendre à l'évidence des faits. Des preuves de ce genre sont
plutôt avoir, toute description étant insuffisante; cependant
il est indispensable d'appeler l'attention des savants sur ce
point, et à cet effet nous présenterons succintement les faits
sur lesquels nous établissons notre opinion.
En nous rapportant d'abord au nombre des os hu-
mains recueillis, nous trouvons une disproportion extraor-
,ïGe>QJ
i^^'
2l6
dinaire dans les différentes pièces composant le squelene,
laquelle ne peut s'expliquer simplement par l'inhumation suc-
cessive de cadavres dans le même endroit, ni par les ra-
vages qu'auraient pu exercer sur eux les carnivores pénétrant
dans la grotte, ni par la destruction due à des causes natu-
relles, comme l'humidité et autres.
D faut avant tout savoir que le dépôt sapérieur de cette
grotte fut entièrement extrait, et la grotte elle-même presque
complètement vidée; tous les os qu'elle contenait ayant donc
pu être pris en considération, j'ai pu dresser un tableau don-
nant le nombre d'exemplaires de chacun des différents os
recueillis. Dans ce tableau on peut voir la prédominance de
certaines pièces relativement à d'autres, et en même temps-
apprécier leur distribution horizontale dans les différents
points de ta grotte. Comme les explorations faites antérieu-
rement entamèrent à peine la surface du dépôt, il est clair
que nous pouvons nous former une idée parfaite de tout ce
qu'il recelait.
Bien que les résultats fournis par ce tableau ne puis-
sent être considérés rigoureusement exacts, vu les pertes
inévitables de quelques os, principalement de ceux de peti- -
tes dimensions et des os spongieux plus facilement destruc-
tibles que la diaphyse des os longs; cependant comme la
terre a été soigneusement fouillée, et puisque la grotte ne
paraît pas avoir été explorée antérieurement en grand (il
n'est pas même probable qu'elle l'ait été vu la difficulté
d'accès) nous pouvons regarder comme suffisamment au-
thentiques les données que nous avons obtenues. D'un au-
tre côté, en supposant même que la grotte ait été autrefois
explorée, nous ne saurions admettre que les recherches aient
été dirigées à de certains os exclusivement ou à des por-
tions de ces os, en négligeant le reste; nous devons croire
,ï Google
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au contraire que, dans l'état de confusion et de fracture où
tous les os se trouvaient, même dans les plus grandes pro-
fondeurs où nous les avons recueillis, à 2, 3 et même 4 mè-
tres au milieu de la salle principale, si quelqu'un en avait
fait disparaître une partie, il en devrait manquer de tous à
peu près dans la même proportion où nous les avons ren-
contrés.
Du reste, nous ne nous sommes pas aperçus que le dé-
pôt, ait été fouillé profondément depuis son accumulation,
nous n'avons non plus découvert aucun vestige qui nous
fît soupçonner Penterrement d'un corps entier en quelque
point de la grotte: les os, ou mieux les fragments d'os s'y
rencontraient dispersés avec la même irrégularité, dans le
sens horizontal aussi bien que dans le sens vertical ou de
l'épaisseur du dépôt.
En acceptant donc le tableau comme l'expression ap-
proximative de la vérité, voyons à quelles conclusions il
nous conduit.
D'abord on reconnaît que les os humains n'étaient pas
distribués uniformément dans toute la grotte; c'était dans le
milieu de la salle principale, très mal éclairée, comme nous
l'avons dit, et où le dépôt avait sa plus grande épaisseur,
que les os humains et les restes de l'industrie se trouvaient
surtout accumulés.
Quant à ces derniers, on doit cependant remarquer
qu'il y avait un peu plus d'uniformité dans leur distribution
et qu'on en a trouvés même en abondance dans la partie la
plus éclairée de la grotte (le corridor d'entrée et la partie
contiguë de la salle principale) où les instruments auraient
été surtout fabriqués, comme l'on peut inférer de la grande
quantité d'éclats, de nuctéus, et de cailloux recueillis dans la
grotte, et encore de la rencontre de quelques instruments,
,ï Google
2l8
éclats et nucléus, se ressemblant si intimement entre eux par
ia nature et la couleur de la substance, que nous n'hésitons
pas à dire qu'ils provenaient du même rognon de silex.
Ce fut donc la partie la plus spacieuse de la grotte et
en même temps ia plus abritée, quoique assez obscure, que
les troglodytes de Fuminha choisirent pour établir le foyer
et pour faire leurs repas. Cependant, il ne paraît guère pos-
sible qu'on y pût respirer lorsqu'il soufflait des vents de
mer et dès qu'on y allumait le feu, à moins que la fumée
n'eût une issue immédiate vers la voûte de la grotte par
quelque fente ou orifice actuellement Invisible ou même obs-
trué, ce qui n'est pas inadmissible vu la grande élévation
qu'atteint la voûte.
On peut facilement supposer aussi que, quoique ce point
ait été le préféré, les troglodytes l'abandonnaient dans des
jours sereins ou lorsque la direction du vent le leur permet-
tait, pour venir occuper le fond du corridor d'entrée, lieu
où il y avait effectivement, comme nous avons dit, une
grande accumulation d'ossements humains entièrement sé-
parés de l'amas principal que nous avons indiqué, par un
intervalle de i à 2 mètres, où l'on n'a rien trouvé.
Un fait bien intéressant et qu'il ne faut pas oublier,
c'est que dans la chambre nord-est, compartiment de la
grotte à peu près obscur, Ton a aussi rencontré quantité
d'os humains brûlés, avec divers instruments et éclats de si-
lex et quelque céramique, ce qui indique que parfois et ac-
cidentellement on y allumait le feu, ce qui est démontré
par l'abondance des petits morceaux de charbon qu'on a ren-
contrés disséminés dans le dépôt supérieur, presque indis-
tinctement dans tous les points de la grotte.
II faut encore se rappeler que le passage pour cette pièce
était très difficile, un homme s'y traînant avec peine d'un
,ï Google
g'9
côté à l'autre avant le déblaiement du dépôt qui couvrait le
sol, ce qui doit écarter l'hypothèse d'enterrements, du moins
dans cette partie de la grotte.
Les crânes humains entiers, comme on peut voir par
le tableau, font absolument défaut; les crânes étaient inva-
riablement réduits en de petits fragments, de quelques centi-
mètres de longueur à peine, ce qui rend impossible l'étude
de leurs formes. Ces fragments, quoique assez nombreux,
sont très loin de représenter le nombre d'individus révélé
par les mâchoires inférieures.
Parmi les nombreux fragments de crâne recueillis celui
représenté dans la fig. 68, est surtout remarquable par
une fossette circulaire de 20 millimètres de diamètre et 5 milli-
mètres de profondeur qu'il offre à la surface externe. A notre
avis cette fossette a été produite sur l'individu de son vivant,
et a dû être suivie de la mort peu de temps après. Il serait
hasardé de spécifier le but de cette opération ; peut-être se
raitache-t-elle à quelque idée superstitieuse, ou ne repré-
sente-t-elle que le commencement d'une opération chirurgi-
cale analogue à la trépanation, comme il a été déjà observé
dans d'autres stations de l'époque néolithique. En tout cas,
la forme arrondie de cette dépression indique très proba-
blement l'action d'un instrument tournant*.
Les os longs entiers sont très rares; à peine a-t-on
' Dans une groue peu éloignée, celle de Casa da Moura à Cesa-
reda, la même opération se montre sous une forme différente. Il s'agis-
sait ici, non pas d'obtenir un trou rond, en faisant pivoter rmstrument,
mais bien d'enlever un assez grand morceau ellipsoïdal du crâne, en le
découpant au moyen d'un silex. De chaque côté des deux rainures
courbes qui forment l'ellipse, se trouvent plusieurs stries montrant que
le silex qui a servi à l'opération a souvent glissé sur le crânCiS'écar-^
tant de la direction que l'opérateur voulait lui donner (pi. xv).
,ï Google
trouvé 4 os dans cet état (2 fémurs d'enfants et 2 humérus
auxquels il manque cependant l'une des extrémités qui s'est
brisée lors de l'extraction), tandis que les éclats longitudi-
naux et les petits fragments de ces os cassés irrégulière-
ment sont en si grande quantité, que leur volume dépasse de
beaucoup la moitié du volume total des os humains obte-
nus. Sur quelques-ims de ces fragments on remarque que
la fracture a été intentionnelle, _;î^. t4\ beaucoup sont ra- .
clés à l'intérieur, vraisemblablement pour en extraire la
moelle, Jî^. 7^, et quelques-uns le sont aussi à l'extérieur;
d'autres fragments ou éclats ont l'air d'avoir été rongés au
milieu, ou aux extrémités, fig. 70, 7/, 72; plusieurs ont
subi l'action du feu; enfin, d'autres montrent à la surface
la marque des petits éclats qui en ont été enlevés. La fra-
cture des os pour l'extraction de la moelle a dû se faire sur
les extrémités au moyen d'un instrument contondant; l'ab-
sence de stries sur la surface de ces os ne prouve donc
rien contre l'hypothèse de l'anthropophagie présumée. Un
cubitus montre la callosité d'une fracture ancienne, qui se
souda pendant la vie de l'individu. Plusieurs os longs, fé-
murs et tibias, portent à ce qu'il parait le signe des cica-
trices de blessures, fig. 52, 107, 108, peut-être produites
par des flèches en silex qui auraient pénétré jusqu'à l'os, en
l'entamant plus ou moins profondément, et qui auront été
suivies le plus souvent de la mort des victimes.
A ces ai^uments qui nous paraissent assez concluants
pour prouver que la présence des os humains dans cette
grotte ne représente pas un lieu de sépulture, nous pouvons
en ajouter d'autres non moins valables, qui dérivent de l'exa-
men du tableau que nous présentons.
Ce tableau nous montre que la quantité de mâchoires
inférieures est loin de toute relation avec les mâchoires su-
,ï Google
périeures, qui ne représentent pas le sixième des individus
dont les autres nous révèlent l'existence dans le dépôt. Ef-
fectivement, on reconnaît par les mâchoires inférieures
Pexistence indubitable de 140 individus dans le dépôt, tan-
dis que les maxillaires supérieurs dénoteraient tout au plus z2
individus. Il est aussi fort intéressant à observer que les ex-
trémités inférieures des humérus sont en bien plus grand
nombre (plus du quadruple) que les extrémités supérieures.
Les cubitus et les radius, au contraire, se montrent dans
une proportion inverse, les extrémités supérieures étant
beaucoup plus nombreuses que les inférieures. Les os des
membres inférieurs offrent des différences analogues. En
considérant les tibias et les péronés, qui sont presque en
nombre égal, on voit que les extrémités inférieures excè-
dent les supérieures du double. Dans les fémurs la diffé-
rence n'est pas très sensible, cependant les extrémités su-
périeures dépassent le nombre des inférieures. En compa-
rant les os des extrémités supérieures avec ceux des extré-
mités inférieures, on reconnaît aussi de grandes différences,
les os du tarse et ceux du métatarse étant respectivement
en bien plus grand nombre que les os du carpe et du mé-
tacarpe, tandis que les phalanges de la main sont au con-
traire bien plus nombreuses que celles du pied. Il faut en-
fin remarquer que la totalité des pièces obtenues est très
loin de représenter autant de squelettes que l'indiquent les
mâchoires inférieures, les astragales, malgré leur structure
spongieuse, étant par une singulière anomalie les pièces re-
lativement les plus nombreuses après les mâchoires infé-
rieures et les cubitus \ tandis que les os les plus résistants,
comme les corps des fémurs et des tibias, sont ceux qui se
présentent en moindre quantité, bien que les petits frag-
ments et les éclats de ces os soient très abondants.
,ï Google
Comment expliquer toutes ces anomalies? Est-il a
sible que la destruction des os par des causes nati
puisse amener de tels résultats? La perte casucUe de
ques os peut-elle justifier de semblables différences?
ma part, je ne suis pas disposé à l'admettre, d'autan
que, selon ce que le même tableau nous révèle, les os
gieux qui seraient les plus facilement détruits, tels q
Ds iliaques, les vertèbres et d'autres encore, sont rep
tés par un bon nombre de pièces, et que les petits os
me les rotules, les caicanéums, les astragales, et surtout
les métatarsiens, appartenaient à de nombreux individus,
tandis que les dents détachées, les pièces qui résistent le
plus à ta destruction, et qui sont généralement très abon-
dantes dans nos grottes', se trouvent au contraire en fort
petit nombre et hors de toute proportion avec les mâchoi-
res qu'on y a rencontrées.
Tout cela porte à croire, que les corps ne sont pas entrés
mtiers dans cette grotte, mais qu'ils étaient dépecés avant
i'y être introduits. En effet un corps humain serait très
ourd pour être transporté par un sentier aussi âpre et aussi
iifficile que celui qui donnait accès à la grotte, cette difficulté
le l'accès étant même un fort argument contre l'idée des
interremenls dans la grotte.
Eu égard aux dimensions extraordinaires de quelques
)s, surtout d'une extrémité inférieure et d'une tête d'hu-
nérus, nous serions portés à croire à l'existence, pendant
'époque néolithique, dans notre pays d'une race de taille
gigantesque, ou du moins peu commune i en effet, ces pièces,
jui ne sont pas uniques, sont beaucoup plus grosses que les
' Dans ]a seule grotte de Casa da Mûura (Cesareda) nous avons
vé pendant nos dernières fouilles environy|<iB^iits détachées!
jny|«i»rients détact
,Ccxi(
223
pièces correspondantes d'un squelette récent d'un homme
de grande taille, qui m'a servi de comparaison.
Avant de passer en revue les produits de l'industrie
humaine, je ferai l'examen rapide des animaux qui étaient
contemporains de nos troglodytes et dont les restes ont été
trouvés mélangés aux leurs. Ds sont comparativement en très
petit nombre et ne présentent que fort rarement la fracture ■
intentionnelle observée dans les os humains. Ils appartien-
nent aux genres Vespertilio, Ursus, Mêles, Mus, Lepus,
Sus, Cervus, Capra, Ovis, Bos et Phoca, les restes les plus
abondants étant ceux des petits ruminants. On a trouvé en
outre quelques rares vertèbres de poissons, divers os d'oi-
seaux et des coquilles de mollusques marins des genres
Haliotis, Patella, Pectunculus, MyiUus, Pecten et Oslrea^
mais représentant une partie très insignifiante de l'alimenta-
tion de nos troglodytes, si leur introduction dans la grotte
n'a pas plutôt une autre signification ethnographique.
Parmi les restes de mammifères, on remarque particuliè-
rement deux fragments de mâchoires d'une espèce de pho-
que {pi. xiv), qui n'habite pas actuellement nos côtes mariti-
mes, et qui n'existe même pas, à ce qu'il paraît, dans l'Océan
Atlantique. Ce sont les seuls restes de mammifères marins
découverts jusqu'à ce jour dans nos grottes, et encore appar-
tenaient-ils au même individu.
Selon l'estimable avis de mon ancien maître et hono-
- rable ami M. le Dr. Barbosa du Bocage, qui a eu la com-
plaisance d'examiner ces restes, les deux fragments de mâ-
choires (l'un le maxillaire supérieur droit avec l'os interma-
xillaJre correspondant, _/îg-. /20, et l'autre la branche gau-
che incomplète de la mâchoire inférieure,_;î^. 121) appar-
tiennent à l'espèce de la Méditerranée et de l'Adriatique
{Pk. monachus, Hermann) où elle se rencontre fréquemment.
224
surtout sur les côtes orientales d'Espagne, aux Des Baléa-
res et en Corse, étant beaucoup plus rare sur le littoral fran-
çais*. M. le Dr. Barbosa du Bocage a cependant remarqué
quelques différences dans notre spécimen, en le comparant
avec les descriptions et les figures qui ont été données de
cette espèce par divers naturalistes, mais ces différences
sont trop peu importantes pourqu^il paraisse devoir être
exclu de l'espèce.
he maxillaire supérieur, qui est le plus complet, diflëre
en effet, comme le Ph. monachus (représentant le sous-genre
Pelagius de F, Cuvier) des autres espèces connues de pho-
ques, par le nombre des dents incisives {deux paires) et par
la forme des dents molaires, qui sont biradiculées, à couronne
sub-triangulaire, et sans dentelures semblables à celles des
Calocéphales (dont le Ph. vituUna ou Phoque commun de
rOcéan Atlantique est le type). Dans notre spécimen, bien
que les dents soient plus grandes, l'extension occupée par la
série dentaire est moindre que dans l'individu de l'Adriatique
figuré par Cuvier, car elles sont placées plus obliquement
par rapport au bord alvéolaire, et plus fortement imbriquées
ne laissant entre elles aucun intervalle, la racine de chaque
molaire, au contraire, envahissant de beaucoup l'espace oc-
cupé par la dent contiguë, de sorte que vue de profil la
première molaire est entièrement cachée par la canine. Peut-
être cette disposition des dents dépendrait-elle en partie de
l'âge de l'individu, lequel quoique présentant la dentition
complète et bien développée (montrant par cela qu'il était
un individu adulte) n'était pas cependant très âgé, car l'émail
des dents montre tous les détails de structure, qui auraient
< Voir Gervais : Zoologie et paléontologie françaises, i, p. iSp, et
Cuvier : Ossements fossiles, vol. vi, page îo8, pi. i7.
,ï Google
225
certainement disparu par le travail de la mastication chez
les individus âgés. Voict du reste les principales dimen-
sions que nous avons pu prendre sur cette mâchoire :
Longueur occupée par les molaires o'',o57
Longueur prise depuis le bord antérieur de
l'os incisif jusqu'à ta racine de la dernière
molaire o°',o8i
Largeur de l'os prémaxillaire ou espace oc-
cupé par les deux incisives o'°,oi6
Hauteur de la couronne de la canine o",o26
Hauteur de la troiâème molaire (b),Jig. 120. o^oix
Les restes d'ours offrent également un grand intérêt.
Peut-être appartiennent-ils à plus d'un individu et très pro-
bablement à l'espèce des Asturies (U. arctos, L.^U. Pyre-
naicus, F. Cuvier). Le genre Ursus n'existe plus en Portu-
gal. Ces restes sont une dent canine, une dent principale de
la mâchoire supérieure, un atlas, un fragment d'axis, un hu-
mérus complet avec les epîphyses non encore soudées, 7 mé-
tacarpes et métatarses, et 9 phalanges. Par rapport à ces
restes on doit pourtant observer qu'ils ont été aussi décou-
verts dans le dépôt néolithique d'autres grottes, notamment
dans la grotte de Lapa Furada, à Cesareda*.
Presque tous les restes d'ours, de même que les deux
fragments de maxillaires de phoque, ont été trouvés sur le
passage du corridor d'entrée vers le petit compartiment ou
chambre nord-est; et comme ce fut aussi dans ce m€me
corridor et à l'extrémité nord de la salle principale de la
' Voir Dçlgado: Notice sur les grottes de Cesareda, p. 119, pL m.
,„^c
226
grotte, que s'est trouvée la plus grande quantité d'os des
autres animaux, il est permis de conjecturer qu'il y eut une
modification dans les habitudes des troglodytes de Fumi-
nha, la tribu qui occupa la salle principale étant peut-être
différente de celle qui stationnait de préférence dans le cor-
ridor d'entrée de la grotte et qui, à une époque différente,
allait s'abriter temporairement dans la chambre contiguë.
Nous n'avons pourtant pas d'autres preuves à ajouter pour
appuyer une semblable hypothèse.
On doit cependant remarquer, qu'on n'a pas rencontré
de restes de poissons dans cette grotte, sauf dans le corri-
dor d'entrée où ils se trouvaient d'ailleurs en très petite
quantité, à peine 3 vertèbres et un fragment de maxillaire,
peut-être appartenant tous à une seule espèce, et même à
un seul individu. Cette tribu troglodyte ne connaissatt-elle
pas l'industrie de la pêche? Cela ne paraît pas \Taisembla-
ble, puisqu'elle vivait au bord de la mer, où l'on voit au-
jourd'hui pulluler les poissons. Le cannibalisme était-il si
invétéré chez ces sauvages qu'ils préféraient la chair hu-
maine à tout autre genre de nourriture à leur portée, ou bien
la réunion accidentelle de la tribu dans la grotte a-t-elle dé-
terminé ce choix exclusif! Nous ne saurions le décider.
Les données ethnographiques au sujet de cette race
de troglodytes de Fuminha, à l'époque néolithique, et qui
nous sont fournies par les produits de l'industrie qui y ont
été rencontrés, sont en vérité très intéressantes, quoique la
quantité des objets recueillis ne soit point comparable à
celle des objets qui ont été obtenus dans d'autres grottes,
celle de Casa da Moura, par exemple. Pour mieux apprécier
leur valeur et connaître en même temps la distribution des
différents objets trouvés dans la grotte, nous avons dressé
le tableau suivant, où tous ces objets sont énumérés.
A i
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DÉSIGNATION DES OBJETS
'H=
épingles
Styleis e
Perçoirs en os
Plaquesd 'os polies des deux côiéi
(spatules, etc.)
Perles de grandes dimensions,
en os
Cylindres en os (poignées d
stmmems?)
Pointes de lances et de flèches
nsilex
Couteaux en silex
Grattoirs en silex et en quartz
Nucléus de silex, de quartz et d
quartzite
Éclats de silex, de quartz et d
quartzite
Rognons de silex
Cailloux de quartz et de quan^îi
Cailloux roulés (marteaux e
quartzite et en granité)
Vases en terre grossiûre presque
complets
Tessons de poterie grossière, soit
lisse soit ornée
Haches en pierre polie,
Plaques trapézoïdales de schiste
avec trou de suspension.
Dents de carnivores avec trou
de suspension.
Petites perles en cailaïs et en
serpentine
Échantillons d'hématite et de !i-
monite
Divers ustensiles et insirumcnt;
non spécifiés
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y
228
Beaucoup de ces objets méritent une mention parti-
culière et nous allons les faire connaître.
En ce qui concerne la céramique, outre deux petites
écuelles ou tasses de forme hémisphérique et à surface lisse,
fig. 117^ et d'un autre vase incomplet, de forme à peu près
ovoïde, avec des dessins très simples sur la surface et un
cordon saillant à mi-hauteur, dVù naissent deux petites ao-
%t%^Jig. p7; nous fûmes assez heureux pour obtenir un vase
de grandes dimensions, de forme ovoïde, en parfait état de
conservation {pi. xi). Près du bord il y a deux petites anses
perforées verticalement, sans doute pour suspendre le vase
au-dessus de Pâtre, sa forme ne lui permettant pas de se
maintenir debout. Ce vase a 25 centimètres de hauteur et
17 centimètres dans son plus grand diamètre; son ouverture
est à peu près circulaire de 1 1 à 12 centimètres de diamètre.
La partie inférieure jusqu'à mi-hauteur de ce vase est lisse; la
partie supérieure est ornée de bandes parallèles, composées
de deux lignes continues et d'une ligne médiane formée de
traits interrompus et irrégulièrement espacés, soit obliques
soit parallèles aux deux premières lignes. Ainsi que tous les
autres restes de céramique, que nous avons trouvés dans
cette grotte, ce vase a été modelé à la main; la pâte en est
mal cuite et très grossière, elle renferme beaucoup de grains
de sable, et montre la couleur noire, caractéristique de la
poterie de cette époque.
Ce vase fut rencontré presqu'au fond du corridor d'en-
trée, appuyé contre la paroi nord: c'est à cette heureuse cir-
constance que l'on doit sa conservation presque parfaite,
car il y manque à peine un petit morceau du bord.
Outre ces vases dont les formes peuvent être appré-
ciées, il a été rencontré un très grand nombre de fragments
d'autres vases, toujours à pâte plus ou moins grossière, de
)
„Google
229
couleur noire et ayant la surface soit lisse, soit couverte
de dessins simples, au trait ou à points en creux (pi. xn
et xm). Aucun vestige de travail au tour n'a été découvert
sur ces fragments; cependant les vases étaient de formes
diverses et appropriés à différents usages, faisant voir que
la tribu qui habita cette grotte, à l'époque néolithique, avait
quelques notions de bien-être.
La couleur rougeâtre, jaunâtre ou noirâtre sur la sur-
face extérieure ou intérieure de quelques-uns de ces vases
et traversant plus ou moins l'épaisseur de la pâte, leur a été
donnée sans doute par une espèce d'aquarelle ou de badi-
geon, appliqué sur cette pâte encore fraîche. La rencontre
de plusieurs morceaux de minerais de fer (limonite et héma-
tite) et de l'outillage nécessaire pour les réduire en poudre
fine (plaques de grès, de quartzite et de schiste siliceux, sur
lesquelles on voit la poussière encore adhérente) pourrait fai-
re croire, qu'il y a eu ici un atelier de fabrication de ces po-
teries, ou du moins que nos troglodytes y fabriquaient celles
dont ils avaient besoin; de même que la rencontre des éclats
et des nudéus de silex et autres roches quartzeuses nous ré-
vèle que c'était là qu'on fabriquait, du moins en parde, les in-
struments de ce genre. On peut, cependant, penser aussi que
nos troglodytes, comme les sauvages actuels, avaient l'habi-
tude de se couvrir la peau du corps et le visage de dessins,
en se servant à cet effet de la poudre rouge, ou jaune des oxy-
des de fer, mêlée à une graisse quelconque. Ce qui paraît ap-
puyer fortement cette supposition, c'est que l'on a rencon-
tré, sur divers points de la grotte, beaucoup de fragments et
d'éclats d'os, surtout humains, dispersés dans le dépôt, dont
quelques-uns sont brûlés, et tous très usés à la surface et
parfaitement lisses, comme s'ils avaient été soumis à un
frottement prolongé, que l'on ne peut comparer qu'à l'usure
.,Ct
r
23o
que présentent les coquilles roulées des plages, ^g-. 41. 43,
44, 46, 4j^ 65, 66, ^7, 6p. On sait, en effet, que l'un des
procédés employés, il y a peu de temps encore, pour obte-
nir Taquarelle noire dont on coloriait un objet quelconque,
consistait à mettre dans de l'eau du noir de fumée et une
boule de pain pétrie, en agitant le tout avec une spatule, aâo
d'obtenir une plus grande surface et de mieux distribuer la
poudre dans le liquide. Il est donc vraisemblable, ou du
moins très possible, que nos troglodytes de Furninha, pour
faciliter de même le mélange de la poudre ferru^neuse avec
la graisse ou l'eau, pour l'un des usages que nous avons ci-
tés, prissent au hasard quelques fragments d'os, qu'ils je-
taient dans le mélange, et que ce soit leur frottement pro-
longé contre les parois du vase où se faisait l'opération, qui
en ait ainsi arrondi les angles.
Pour donner encore plus de poids à cette hypothèse, nous
devons dire, que dans le milieu de la salle principale, à une
faible profondeur, on a découvert dans le dépôt la partie
inférieure d'un humérus humain auquel il manquait l'extré-
mité articulaire, et qui était cassé obliquement à l'autre ex-
trémité, pouvant servir de cuillère ou de spatule. Cet objet
usé à la surface, surtout à l'extrémité supérieure, contenait
dans le canal médullaire un petit fragment d'os,^g-. 70, de
forme amygdalaire ou ellipsoïdale aplatie, ayant la surface
très lisse, paraissant même indiquer que l'usure produite
sur l'un et l'autre fragment était due à la même cause, le
petit éclat étant resté par hasard dans l'os, après avoir aidé
à détremper le mélange dans le vase, qui aurait servi à cet
effet.
Parmi les divers produits de l'industrie humaine trouvés
dans le dépôt supérieur de cette grotte et qui fournissent
des données ethnographiques intéressantes sur la tribu qui
vn
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g3i
Va habitée à l'époque néolithique, l'attention doit se porter
sur la belle série de haches polies, toutes à bord tranchant et
dont quelques-unes présentent un état de conservation aussi
parfait que si elles venaient d'être fabriquées (pi. a et x) . Ces
haches, au nombre de 28, ont été faites de différentes sub-
stances, calcaire métamorphique, schiste amphibolique, ba-
salte et granité. Comme le montre le tableau, on les a trou-
vées en plus grand nombre dans le milieu de la salle prin-
cipale; une portion considérable cependant, pas moins de
sept, se trouvaient dans la chambre nord-est. Il est impor-
tant de remarquer que ces haches ont été fabriquées de dif-
férentes roches qui n'existent pas dans la localité, ce qui
montre que les troglodytes de Furninha avaient des rela-
tions commerciales avec des régions plus ou moins éloignées,
ou qu'ils étaient en contact avec d'autres tribus qui entre-
tenaient ces relations ou qui venaient de loin commercer
avec eux.
La quantité de couteaux, de pointes de lances et de flè-
ches en silex est très considérable. Nous avons obtenu 60
couteaux plus ou moins parfaits et de grands fragments de
17 autres de toutes les grandeurs, depuis 23 millimètres jus-
qu'à \6 centimètres de longueur.
Ils sont de différents types, la plupart ayant un tranchant
de chaque côté, et ordinairement la section transversale tra-
pézoïdale (pi. m). Quelques-uns des plus épais sont dentelés
d'un côté, ou des deux côtés, pour servir de scie, paraissant
avoir reçu cette destination seulement après avoir été em-
ployés à couper et lorsqu'ils se sont ébréchés par ce pre-
mier usage.
Le plus grand couteau et en même temps le plus beau
par la nature de la substance dont il est fabriqué, ^^. 10,
a été trouvé au milieu de la salle principale, à 4 mètres de
1
a32
profondeur; il s'est cassé en deux lors de l'extraction, mais
heureusement les deux fragments ont pu être rajustés. Il
est en silex translucide, légèrement rosé, à section trapé-
zoïdale aplatie, ayant 23 millimètres dans sa plus grande
largeur, avec bords tranchants, mais ébréchés par l'usage et
formant une dentelure irréguliére.
Un autre couteau très parfait,jî^. //, trouvé près du
précédent, à une bien moindre profondeur cependant (i*,io)i
est en silex blanc, à section trapézoïdale, mesurant i J2 mil-
limètres de longueur et 21 millimètres dans sa plus grande
largeur. Un autre, jî^. /a, également très beau, trouvé dans
le corridor d'entrée près de la saillie du rocher où commen-
çait le dépôt sablonneux, mesure 8omilimètres de longueur:
il est en silex rougeâtre, à section triangulaire, ayant l'un des
bords dentelé en forme de scie, et it montre un grand usage
à l'une de ses extrémités.
Les pointes de flèches, ^^. 23 à 2p, J/, S2, 34 à 3"],
ont toutes les bords dentelés avec une perfection remarqua-
ble et quelques-unes ont cette dentelure très fine. Quoiqu'en
petite quantité il y en a des types les plus variés, soit de
forme amygdalaire, rhomboïdale ou quadrangulaire, soit de
forme triangulaire avec les angles latéraux prolongés en poin-
te plus ou moins saillante; quelquefois c'est la base qui s'al-
longe en queue, établissant ainsi les transitions les plus gra-
duelles entre ces formes fondamentales.
On a trouvé ici, comme c'est le cas dans les kioekken-
moeddings de Cabeço da Arruda et dans le dépôt néolithique
d'autres grottes (Casa da Moura, par exemple), quelques si-
lex a forme trapézoïdale, à tranchant transversal,^^. i5 et
s/, lesquels, très vraisemblablement fixés à une hampe par
leur moindre base, étaient employés comme des armes de
jet. Nos troglodytes utilisèrent, sans aucun doute, des frag-
,ï Google
233
ments des couteaux brisés pour ta fabrication de ces ar-
mes. Sur les côtés du trapèze on voit les retouches que l'on
y a faites intentionnellement pour arriver à une fonne déter-
minée, et qu'on ne saurait obtenir que par hasard d'un seul
coup.
Dans la petite collection ethnographique de PAfrique
occidentale appartenant à la Section Géologique il se trou-
ve, parmi les objets venus de Benguella, une flèche en fer,
de forme semi-lunaire, que l'on emploie à la chasse pour
couper le jarret de l'animal. Cette flèche rappelle quelque
peu ta forme des silex dont nous venons de parler, et son
emploi pourrait être semblable. Quoiqu'il en soit on recon-
naît aisément par leur forme, que ces armes étaient destinées
à couper et non pas à percer, leur légèreté et leurs petites
dimensions nous montrant d'ailleurs qu'elles étaient très
propres à être lancées.
Les deux pointes de javelot, trouvées dans la salle prin-
cipale auprès de la paroi ouest, sont de formes différentes,
l'une et l'autre mesurant lo centimètres de longueur. L'une
de ces pointes, fig. 3o, trouvée entière mais étant moins
parfaite que l'autre, est en silex gris-noirStre, de forme sub-
triangulaire et mesure 26 millimètres de largeur à la base.
L'autre,jî^. 3J, de forme pentagonale, plus élégante mais
cassée à la pointe, est en silex brunâtre et mesure 41 mil-
limètres de largeur entre les deux angles latéraux.
Nous devons encore citer parmi les plus notables in-
struments de pierre, un grand éclat de calcédoine qui s'est
malheureusement cassé lors de l'extraction; il est de forme
presque demi-circulaire, de 80 millimètres de diamètre, et
présente un tranchant de chaque côté; il a été lustré et usé
par les eaux. C'était sans doute un radoir de l'époque pa-
léolithique, dont nos troglodytes de Furninha avaient pro-
,ï Google
234
fité postérieurement, ou qu'ils avaient conservé uniquement
à cause de la beauté de la matière dont il est fait. Il faut
citer également un beau couteau ou grattoir de Ja même
substance, de forme allongée et de section triangulaire, ayant
l'un des bords curviligne et mesurant 88 millimètres de lon-
gueur et 42 millimètres de largeur. Cette pièce a aussi été très
roulé; elle appartient donc à l'époque paléolithique, ayant été
taillée du même fragment de calcédoine que le spécimen pré-
cédent.
Nous avons trouvé de plus, dans la salle principale, deux
plaques trapézoïdales de schiste l'une au bout du corridor
d'entrée, et l'autre au milieu de la salle. La première,
fig. 3g^ est d'ardoise ordinaire; elle a une face ornée de
bandes en chevrons alternativement unies et couvertes de
traits croisés. L'autre plaque est de schiste très micacé,
luisant, et par cette raison peut-être n'aurait pas nécessité
de dessins sur la surface. Toutes les deux ont les angles
arrondis et un trou circulaire de suspension du côté de la
moindre base, pour être portées comme enseigne ou comme
amulette.
Parmi les objets d'ornement il est surtout à remarquer
une épingle en os, incomplète, _;î^. 40^ dont la tête est un
petit cylindre orné de stries parallèles à la base, dans le-
quel on a introduit par pression un stylet également en os,
et qui en formait la pointe. Deux grosses perles en os, Jig: 4S
et 4ff, d'autres plus petites en callaïs ou en serpentine,
fig. 61 à 64, une défense de sanglier façonnée, très usée à la
surface et percée d'un trou du côté de la racine,^^. 5p,
et une dent canine de chien, trouée aussi à la racine pour être
enfilée en colUer,7î^. 54, complètent l'inventaire des arti-
cles de parure rencontrés dans le dépôt supérieur de Fur-
ninha, et qui à la vérité, n'indiquent pas un goût aussi raf-
,ï Google
235
fine, chez cette tribu troglodjte, que celui qui a été observé
dans d'autres tribus habitant aussi nos grottes pendant
l'époque néolithique.
Sous la couche de terre noire composant le dépôt su-
périeur, se trouvait te dépôt des sables quaternaires généra-
lement tins et en majeure partie meubles, de couleur jau-
nâtre, contenant des cailloux roulés, de petits galets quart-
zeux, plusieurs instruments et éclats de silex, et quantité d'os
d'animaux distribués en divers niveaux.
Dans le corridor qui donne accès à la salle principale et
dans le petit corridor qui communique avec la chambre nord-
est, ce dépôt n'existait pas; on passait immédiatement de
la terre noire supérieure au calcaire jurassique du fond de
la grotte.
Dans la salle principale, sous la grande coupole, le dé-
pôt, comme nous l'avons dît, avait très peu de profondeur;
la terre supérieure en formait presque toute l'épaisseur.
L'excavation du terrain supérieur fit cependant découvrir
dans la branche méridionale de la grotte, où les sables sous-
jacents avaient au contraire une très grande épaisseur,un trou
vertical ou puits naturel de 3 à 4 mètres de diamètre à l'ou-
verture, lequel allait en se rétrécissant vers le fond et était
entièrement rempli par les sables quaternaires. Ce fut dans
ce puits et près de son ouverture au fond de la grotte,
que l'on a rencontré les dépouilles de la faune quaternaire,
représentées par des pièces provenant de squelettes de dif-
férents animaux et aussi par d'abondants coprolithes, les os
se montrant accumulés en diverses strates séparées par
,ï Google
236
d'autres beaucoup plus épaisses, qui en étaient totalement
dépourvus.
L'état fragmentaire dans lequel se trouve une grande
partie des ossements, nous montre que les animaux auxquels
ils appartenaient ont servi de nourriture à l'homme. D'un
autre côté les nombreux coprolithes d'hyène, ainsi qu'un
crâne d'ours et d'autres ossements portant la trace de leurs
dents, nous font voir que la grotte a aussi servi de repaire
à ces animaux. En outre, les conditions où se sont trouvés
ces os, dont beaucoup existaient dans le dépôt, non seule-
ment brisés mais roulés, fait voir qu'ils avaient subi l'action
des courants diluviens, qui ont pénétré dans la grotte à di-
verses reprises, celle-ci ayant été alternativement occupée
par l'homme et par les hyènes, à différents intervalles: mais
on ne peut pas connaître par ces pièces détachées, si quel-
ques animaux auraient été surpris dans la grotte lorsque
les courants quaternaires y pénétrèrent, car il ne s'y est
rencontré aucun squelette entier; au contraire le nombre
des individus dont l'existence est révélée par certaines piè-
ces, comme les mâchoires, par exemple, est de beaucoup
supérieur à celui que les autres os révèlent. Cependant
l'abondance des coprolithes et la quantité d'os longs d'hyène
qui ont été rencontrés entiers, surtout dans la partie supé-
rieure du 3''" niveau, à la profondeiu- de 6 mètres, fait ac-
cepter l'hypothèse, car une grande quantité de ces os au-
raient pu être entraînés hors de la grotte par ces mêmes
courants.
Comme il arrive, cependant, que le manque d'ossements
a lieu principalement pour les animaux de plus grande taille,
comme le cheval, le bœuf et l'ours, il est assez naturel de
supposer que ces animaux aient été dépecés dans le lieu même
Pti ils oi)t été tués, nos troglodytes y ayant fait le choix
,ï Google
237
des parties qu'ils préféraient et abandonnant le reste. C'est
l'hypothèse à laquelle nous avons eu déjà recours pour ex-
pliquer la disproportion des pièces du squelette humain dans
le dépôt supérieur, en nous basant sur des faits analogues.
Une observation intéressante et qui, selon nous, vient
corroborer l'hypothèse que nous venons de présenter — que
les os d'animaux rencontrés sont en grande partie les res-
tes de la nourriture de nos troglodytes, c'est que le nombre
des éclats d'os est vraiment remarquable, et que dans le
puits, la plus grande quantité de ces os se trouvait appuyée
contre la paroi intérieure ou du côté de la galerie, c'est-à-
dire du côté d'où les sables seraient tombées dans le puits,
comme du reste il était naturel d'arriver, les eaux se pré-
cipitant sur la paroi opposée.
L'existence de l'homme à l'époque quaternaire dans cette
grotte est d'ailleurs prouvée directement par la découverte
d'un petit fragment de maxillaire inférieur, de très petites
dimensions, paraissant avoir appartenu à un enfant (pt. i a,
fig. I »). Cette pièce est trop incomplète pour que l'on en
déduise quelques caractères anatomiques; elle a cependant
l'inestimable valeur de prouver indubitablement la coexis-
tence du genre humain avec les différentes espèces de mam-
mifères renfermés dans la même couche.
Parmi les instruments découverts je ferai surtout re-
marquer une belle hache de silex en forme d'amande du
type de Saint-Acheul (pi. i), un petit couteau de même ma-
tière (pi. n,fig. 5) et quelques pointes tant en silex qu'en
quartz,jîg-. 3, 4, 6, 7. Je' mentionnerai aussi quelques os
incisés,Jî^. 2.
La faune quaternaire que nous avons découverte dans
cette grotte est riche en espèces, et beaucoup d'entre elles
sont représentées par de nombreux individus; mais outre
^P^
238
que ces espèces ne sont pas également bien représentées
dans tous les niveaux, nous ne possédons pas les moyens
de comparaison indispensables pour les déterminer toutes
avec sûreté. Cependant, je crois qu^il est de quelque utilité
de donner dans un tableau, avec les réserves nécessaires
quant à leur détermination, la distribution de ces restes se-
Ion les profondeurs où ils ont été trouvés, avant de faire les
considérations que la distribution de ces os dans les divers
niveaux nous a suggérées.
Avant de présenter ce tableau, je tiens à faire remar-
quer qu'il ne peut y avoir eu mélange -entre les restes de
l'époque quaternaire et ceux des périodes plus récentes. Le
puits qui m'a fourni les différentes espèces d^animaux compo-
sant la faune quaternaire de cette grotte, contenait sept ni-
veaux fossilifères séparés les uns des autres par d'épais bancs
de sable absolument dépourvus de fossiles, et indiquant
diverses irruptions des eaux qui séparent les différentes
phases d'habitation de la grone.
On doit encore remarquer l'association dans la même
strate d'éclats d'os très roulés par les eaux joints à d'autres
qui ne le sont point du tout, et avec des os entiers qui n'ont
pas souffert le moindre dégât, ce qui prouve que les pre-
miers y furent introduits par l'homme et ont été exposés en-
suite à l'action des courants de l'époque quaternaire, qui au-
raient amené des sables dans la grotte à diverses reprises.
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23g
L'inspection de ce tableau démontre qu'à l'exception des
coquilles marines, qui occupent uniquement la base du dépôt
et qui furent introduites les premières dans la grotte, et des
chéloniens et des poissons, dont les restes, d'ailleurs très
rares, apparaissent sporadiquement à diverses hauteurs, la
distribution des différents types génériques est, à peu de dif-
férence près, la même dans toute l'épaisseur du dépôt. Quel-
ques espèces même ont été rencontrées k travers toute l'épais-
seur des sables, quoique l'introduction de ces sables dans
ta grotte ait été successive, c'est-à-dire que le remplissage
soit dû à l'action des courants qui y pénétrèrent autant de
fois du moins qu'il y avait de strates ossifères différentes.
Parmi toutes les espèces du tableau celle que nous pos-
sédons du genre Lepus, d'une taille un peu plus grande, mais
très voisine du lapin sauvage commun (L. cuniculus)^ est
la plus généralement répandue, et elle est en même temps
une de celles dont les restes sont les plus abondants; ils oc-
cupent toute l'épaisseur du dépôt, depuis la base jusqu'au
niveau culminant, ce qui prouve que durant l'époque qua-
ternaire dans notre pays cette espèce a toujours fait une
partie très notable de la nourriture de nos troglodytes, sur-
tout vers la fin de cette époque, comme le montre le dépôt
inférieur de Casa da Moura {Cesareda), où par le nombre
des mâchoires inférieures on reconnaît les restes de bien
plus de 1000 individus de cette espèce!
Viennent ensuite par ordre de leur abondance les res-
tes des carnivores: Hjaena, Ursus, puis diverses espèces
de Felis et de Cams\ comparées.à ces carnivores et au ron-
geur ci-dessus désigné, toutes les autres espèces peuvent être
considérées comme rares.
Parmi les restes d'hyène, on peut facilement distin-
guer deux espèces; l'une plus fréquente, mtimement liée avec
CR. 19
,ïGo(^|l^
H. pulgaris, qui habite actuellement le nord de l'Afrique,
et l'autre, beaucoup plus rare et de plus grande taille, que
nous supposons être le H. prisca (Marcel de Serres}.
La présence de la première espèce dans la grotte de
Furninha est un fait très intéressant, car dans une autre
grotte, près de Cercal, récemment explorée par mon illustre
chef M. Carlos Ribeiro, grotte qui n'est qu'à une faible dis-
tance de celle de Furninha {environ Sy kilomètres), cette es-
pèce paraît manquer, et à sa place on y a découvert le
H. spelaea qui a, comme l'on sait, les plus intimes relations
d'affinité avec le H. croctita, qui habite actuellement le sud
de l'Afrique. Nous avons par conséquent la certitude que
dans l'époque quaternaire, ou de la formation du dépôt in-
férieur de nos grottes, il a existé dans notre pays et pres-
que réunies, deux espèces qui actuellement habitent des
points géographiques si distants, quoique dans la même La-
titude à peu près, l'une dans l'hémisphère boréal et Tautre
dans l'hémisphère austral.
Si, à l'exemple de Schmerlïng, nous nous guidons par
ta taille des individus, c'est-à-dire par la grandeur des di-
verses pièces du squelette, nous sommes amenés à recon-
naître, dans notre grotte, l'existence de 4 ou même de
5 formes différentes du genre Ursus. Blainville a cepen-
dant rapporté toutes ces formes à une seule espèce, l'ours
actuel d'Europe, et il suppose, que les 5 espèces et les 3
variétés fossiles indiquées par Schmerling représentent à
peine des différences de sexe et de taille de cette unique es-
pèce, qui dans l'époque quaternaire a aneint une taille gigan-
tesque {Ostéogr., t. II, genre Ursus, p. 87). Dans les diver-
ses variétés trouvées dans notre grotte, nous avons cru re-
connaître, cependant, les deux espèces généralement admi-
ses, U. spelaeus et U. priscus.
,ï Google
En adoptant, pour plus de clarté, la nomenclature du
savant paléontologiste belge, nous dirons que la plus grande
espèce (U. giganteus) est représentée seulement dans un
des niveaux supérieurs par la moitié supérieure d'un tibia
et par l'extrémité supérieure d'un cubitus, la première pièce
surpassant peut-être en dimensions le plus grand tibia re-
présenté par Schmerling. Les autres espèces occupent les ni-
veaux plus inférieurs, mais il reste à dénommer un grand
nombre de fragments, pour la plupart, il est vrai, indé-
terminables, représentant ce genre de Carnivore jusqu^au
niveau le plus supérieur, maïs parmi lesquels VU. giganteus
ne se trouve pas compris.
La plus grande partie de ces ossements, surtout les os
longs, se trouvent brisés, témoignant que ce Carnivore en-
trait aussi en partie notable dans la nourriture de nos tro-
glodytes quaternaires.
Dans le genre Felis il est à remarquer, d'un côté, le
nombre d'espèces distinctes, pas moins de 5, et qui presque
toutes ont disparu de notre pays, et d'un autre côté, l'ab-
sence de F. spelaea, dont aucun vestige ne permet de soup-
çonner l'existence dans nos cavernes, mais qui accompagne si
fréquemment VU. spelaeus exVHyaena spelaea, dans d'autres
pays plus septentrionaux. Ne pouvant pas désigner par leurs
noms spécifiques la plus grande partie des formes de ce
genre, je me suis servi des lettres de Palphabet grec qui ont
rapport aux figures déjà données des mêmes espèces dans
mon mémoire sur les grottes de Cesareda (1867).
Les restes de Canis appartiennent peut-être à 4 espè-
ces diflcrentes, 2 desquelles sont évidemment le loup et le
renard actuels de l'Europe. Une troisième espèce, de taille
beaucoup plus grande que te loup, est représentée seule-
ment à mi-hauteur du dépôt, et par une singulière anoma-
„Gooi^
24^
lie, nous n'en avons obtenu qu'un certain nombre de radius;
il manque toutes les autres pièces du squelene ainsi que
celles du système dentaire.
Les ruminants qui occupent plusieurs niveaux sucessîfs,
et qui sont représentés par diverses formes que nous avons
désignées collectivement sous les noms génériques de Cer-
PUS et de Bos, n'ayant pas pu en déterminer les espèces,
sont très loin, surtout les derniers, de se présenter aussi
abondamment que les restes de carnivores. Le motif de
cette différence consiste peut-être en ce que ces animaux
vivaient alors les uns et les autres à l'état sauvage ne pou-
vant pas subsister dans ces lieux mêmes, faute de pâtura-
ges abondants.
Les solipèdes ne sont guère représentés dans notre
grotte; les restes d'Equus se réduisent à un astragale et
une seconde phalange rencontrés à des hauteurs très diver-
ses, et en des points différents de la grotte, le premier dans
la galerie principale, le second dans le puits.
Enfin, l'attention doit se porter sur la rencontre d'une
dent molaire, et de fragments d'autres dents d'un individu
très jeune, ruminant, différent de tous les autres rencontrés
dans la grotte, très probablement appartenant au genre
Rhinocéros et que nous rapportons, avec la plus grande ré-
serve au Rhinocéros tichorhinus. Si cette détermination se
confirme, ce sera l'unique vestige découvert jusqu'ici en Por-
tugal de l'existence de cette espèce, qui est si générale-
ment répandue dans d'autres régions quaternaires de l'Eu-
rope.
Pour compléter l'énumération des espèces indiquées dans
le tableau il ne manque plus qu'un mot au sujet des oiseaux,
dont les restes sont très abondants et appartiennent à plu-
sieurs espèces, dont l'une de très grande taille. Par contre, les
,ï Google
243
batraciens et les poissons, cofhme nous l'avons déjà dit, sont
à peine représentés, de même que les testacés, dont nous
n'avons trouvé qu'une petite espèce d'//e//x, le Patella vul-
gata et un seul exemplaire de Litîorina littorea^ ces deux
derniers occupant la base du dépôt.
1"" Niveat^ ossifôre.— La partie la plus profonde des
dépôts de notre grotte, à g^iSo en contre-bas de la surface
des sables, ou io"',3o au-dessous de l'ancien sol de la grotte,
près de l'ouverture du puits, consistait en une couche de gros
cailloux, ou mieux de petites masses roulées, dont les plus vo-
lumineuses atteignent la grosseur du poing. Ces cailloux très
arrondis, la majeure partie de silex, et une moindre partie de
granité rougeâtre de Berlenga', de quartz blanc et de quar-
tzite gris, sont empâtés dans du calcaire stalagmitique [kaïk-
sinter) formant un conglomérat très grossier. Ce dépôt ne
s'est trouvé qu'au fond du puits, où il formait une couche
de plus d'un mètre d'épaisseur, les cailloux étant si intime-
ment liés ensemble, que très souvent il était plus facile de
les briser que de les séparer les uns des autres, et plus dif-
ficile encore de les arracher à la roche des parois. Là où
les gros cailloux font défaut ce dépôt passe en partie à un
grès poreux et grossier, contenant beaucoup de détritus de
coquilles et montrant bien l'aspect d'une formation littorale.
L'origine de ces cailloux révèle un fait géologique im-
portant, la dénudation contemporaine des couches calcai-
res du Dogger que l'on voit à Baleal et à Cesareda, où el-
les se montrent au jour, renfermant une grande quantité de
concrétions ou de rognons siliceux, qui se détachant des
' Petite île granitique en face de la péninsule de Péniche, éloignée
de 1 1 kilomètres vers le nord-ouest de notre grotte.
,ï Google
244_
couches par la puissante actîofi des courants de d<inudatioii
à Tépoque quaternaire, avaient naturellement offert plus de
résistance à leur destraction que les couches calcaires qui
les contenaient.
En cassant ces masses concrétionnées ou rognons, on
voit que dans la partie intérieure elles présentent la couleur
grise ordinaire du silex pyromaque, mais environné d'une
épaisse croûte blanche, d'aspect terreux, que je suppose être
due plutôt à l'altération du silex qu'à la manière même de
formation de ces rognons qui, ayant une origine chimique
ou étant formés par attraction moléculaire au sein de la cou-
che déjà déposée, ont dû se fondre graduellement dans la
masse du calcaire, ayant pour limite dç grandeur la sphère
d'action où les forces moléculaires ont pu s'exercer.
Quelques-uns de ces cailloux présentent des fossettes
semblables à celles des cailloux impressionnés; mais ces
impressions ont été peut-être produites lors de la formation
de ces rognons. D'autres masses montrent une ou plusieurs
surfaces lisses, ou d'usure par le frottement que les cailloux
ont souffert dans la grotte les uns contre les autres. Enfin
quelques-unes présentent des dépressions conchoïdales à sur-
face lisse, qui ont été vraisemblablement produites par la sé-
paration d'éclats, due au choc des unes contre les autres;
je n'oserais pas attribuer à une autre origine un petit nucléus
de silex de forme polyédrique irrégulière, qu'on voit encore
encroûté dans le dépôt calcaire.
II ne peut donc y avoir de doute que les cailloux du
conglomérat ne proviennent tous des roches de la localité,
ceux de quartz pouvant provenir des couches de grès gros-
siers crétacés, ou de filons coupant la roche granitique; et
nous pouvons ajouter qu'il est aussi très probable que le
matériel dont les troglodytes de cette grotte et de celles de
,ï Google
2É.
Cesareda se servaient pour la fabrication des instruments
en silex, du moins dans l'époque paléolithique, avait la mê-
me provenance, sans qu'il y eut besoin d'aller le chercher
plus loin.
Les restes d'animaux que l'on a rencontrés dans cette
partie la plus profonde des dépôts de la grotte, sont en vé-
rité peu nombreux et l'on comprend qu'ils n'ont pu être
conservés que dans des conditions exceptionnelles, ayant
été sans doute enlevés du sol de la grotte, où ils se trou-
vaient, et entraînés jusque là par les courants diluviens, qui
à divers intervalles ont balayé le sol de la grotte. On a re-
cueilli toutefois assez de coquilles de Palella (environ une
vingtaine d'exemplaires, presque tous brisés et très roulés)
de l'espèce P. vulgata, encore vivante dans la localité; un
exemplaire de Liltorina littorea, qui offre la singularité d'être
fossilisée et encroûtée dans le grès, la coquille étant rem-
placée par du spath calcaire et conservant l'intérieur par-
faitement vide; 4 omoplates et l'extrémité inférieure d'un
tibia d'oiseau, probablement palmipède; un maxillaire infé-
rieur, un humérus et un fémur de grand lapin (Leptts aini-
culus); 2 métatarses d'ours, et finalement des fragments et
de petits éclats d'os longs de carnivores, dont un très roulé,
et qui représentent sans doute, aussi bien que les autres
os, les restes de l'alimentation de nos troglodytes, dans cette
période très reculée d'habitation de la grotte.
Immédiatement au-dessus du niveau précédent il y avait
une strate de quelques décimètres d'épaisseur de calcaire
stalagmitique, que l'on doit considérer comme formant partie
de la même couche ossifère. Ce calcaire renferme en forte
proportion des grains de sable et quelques gros cailloux très
roulés du granité de Berlenga et de quartz, et encore une
grande quantité de masses arrondies, et aussi très usées
,ï Google
à la surface, de silex concrétionné, montrant dans la croûte
extérieure et quelquefois dans toute leur épaisseur la cou-
leur blanche du silex terreux. Un grand nombre des cail-
loux de silex sont fissurés, et de beaucoup d'entre eux on a
détaché des éclats sur lesquels le travail humain peut se
reconnaître. Il est évident que ce calcaire stalagmitique n'est
pas une formation contemporaine de l'introduction du dépôt
sableux dans la grotte, mais qu'il est de date postérieure,
les eaux qui tombaient de la voûte ou qui ruisselaient le long
des parois, s'étant infiltrées à travers les sables et s'accumu-
lant dans la partie la plus profonde de la grotte où elles
laissaient précipiter le calcaire. C'est pourquoi celui-ci man-
que presque absolument dans les niveaux supérieurs où les
sables sont meubles, sauf dans quelques points prés des pa-
rois, où ils se montrent au contraire fonement cimentés.
Les restes d'animaux rencontrés dans cette partie su-
périeure du i" niveau sont en petit nombre et peuvent se
rapporter aux espèces suivantes:
Hjaena: fragments de mâchoire et dents détaches.
Lepus cuniculus, maxillaires supérieurs et inférieurs et dif-
férents os du squelette, appartenant h 4 individus au
moins.
Oiseau ind., un cubitus.
Patella, moule interne empâté dans la roche.
Coprolithe, très probablement d'hyène.
Cette dernière trouvaille me paraît importante pour dé-
montrer que dès les premiers temps où cette grotte fut ha-
bitée ou plutôt fréquentée par l'homme, l'hyène aussi y
pénétrait. Nous pouvons conjecturer que ce fut dans la
grotte même que nos troglodytes en lutte constante avec ces
^
„Google
_ï47_
animaux, s'emparèrent parfois de quelques-uns d'entre eux,
en'se servant peut-être de la ruse employée par les sauvages
actuels et que M. Edouard Dupont nous indique dans sa
description magistrale des cavernes de la Belgique*. Cette
ruse, à laquelle la grotte se prêtait à merveille, consistait
dans Tobstruction de l'entrée de la grotte avec des fagots
de broussailles, auxquels on mettait le feu dès que l'on
s'apercevait que les animaux y étaient renfermés'.
2*"" Niveau osslfére. — La couche ossifère dont nous
avons parlé était séparée de la couche immédiatement su-
périeure par un intervalle de plus d'un mètre de sables
meubles très fins où l'on ne rencontra aucun vestige d'osse-
ments. Cette couche dénuée de restes d'animaux représente
la première irruption des courants diluviens dans la grotte
depuis qu'elle fût habitée. En effet, l'existence de différents
niveaux ossiftres séparés par des nappes de sable où les res-
tes d'animaux manquent absolument, prouve selon nous, que
l'introduction de ces restes n'a pas été simultanée, c'est-à-
dire faite tout d'un coup, mais bien par intervalles, chaque
couche devant alternativement représenter une période dis-
tincte d'occupation de la grotte et de l'irruption des cou-
rants quaternaires.
Nous ne pouvons pas présumer, vu la situation parti-
culière de la grotte au bord de la mer, que ce furent les
crues considérables de quelque cours d'eau régulier qui ont
' L'homme pendant les âges de la pierre dans les environs de Di-
nant-sur-Meuse. Bruxelles, i872.
* Les paysans de Cesareda emploient encore aujourd'hui la m£me
méthode pour la chasse de la genette et du blaireau, i
moins à craindre pourtant que quelques autres espèces qui e
pendant l'époque quaternaire dans les environs de Furninha.
1^
848
produit ce résultat, comme ce fut le cas dans les cavernes
de la Meuse, par exemple.
Ce phénomène, tant de fois répété, et à ce qu'U paraît
avec une si grande irrégularité, ne peut être dû qu'à l'action
même de la mer, qui à l''occasion des grandes marées rendait
la grotte inhabitable et y jetait de grands amas de sable
(ce qui expliquerait l'occupation alternative de la grotte par
l'homme et par les hyènes); ou, en supposant, comme l'on
ne peut pas s'empêcher de le faire, qu'à l'époque quater-
naire l'entrée de la grotte était très différente de ce qu'elle
est aujourd'hui et qu'il existait alors une barrière de rochers
que la mer dans des circonstances ordinaires ne pouvait pas
franchir, mais qu''elle a détruit successivement, dans ce cas
les sables pourraient avoir été amenés pas des courants ve-
nant de la surface. En tout cas, on doit remarquer l'asso-
ciation, dans la même strate, d'éclats d'os très roulés par
les eaux, joints à d'autres qui ne le sont point du tout et
avec des os entiers, qui n'ont pas souffert le moindre dé-
gât; ce fait prouve que les premiers y furent introduits par
l'homme, et ont été exposés ensuite à l'action des eaux, qui,
comme nous Pavons vu, auraient amené à diverses reprises
les sables dans la grotte.
Dans ce deuxième niveau ossifère la faune mammalogi-
que est mieux représentée que dans le niveau précédent,
tant par le nombre d'espèces, que par l'abondance des os-
sements qu'on y a rencontrés. Nous pouvons constater l'exis-
tence des espèces suivantes:
Ërinaceus europaeus^ fragments de mâchoires et i humérus.
Ursus, 3 ou 4 espèces de différente taille, probablement:
U. spelaeus mi'nor, U. Leodiensis et U. priscus (de
Schmerling) et peut-être aussi U. arctos, juv.
,ï Google
249
Ce genre est représenté par des fragments de maxil-
laires, dents détachées, vertèbres, fragments de côtes,
plusieurs os longs, la plupart incomplets: humérus,
cubitus, radius, fémurs, tibias; os du carpe, du tarse,
du métacarpe, du métatarse et une vingtaine de pha-
langes, dont 9 onguéales.
Mêles taxuSf 2 fragments de maxillaire supérieur avec
quelques dents et un cubitus.
Canis lupus, crâne incomplet, maxillfùres, dents détachées
et différents os.
Canis sp., fémur, tibia et d'autres os.
Hyaena vulgarts^ crâne incomplet, maxillaires supérieurs,
dents séparées et différents os d'individus adultes et
d'autres encore très jeunes, ceux-ci prédominant.
Felis^ 2 espèces, l'une de grande taille approchant du
F. lynx, l'autre beaucoup plus petite, peut-être F. ca-
tus, ou Felis sp, £';Ies deux représentées par beaucoup
d'os différents, parmi lesquels un tibia rot^é.
Arvicola ampki'bius, un seul maxillaire inférieur gauche.
Lepus cuniculus, restes de 16 individus au moins, d'après
ce que l'on peut juger par les maxillaires inférieurs.
Eqitus caballus, une seule phalange (la deuxième).
Cervus?, dent molaire et un os métacarpien.
Oiseaux ind., 2 ou 3 espèces, représentées par une grande
quantité d'os.
Il faut encore ajouter comme vestiges de l'existence
contemporaine de l'homme, la rencontre de beaucoup d'éclats
d'os longs, brisés longïtudinalement, dont un grand nombre
ont été postérieurement roulés ; la rencontre du nucléus d'un
< V. Notice sur les grottes de Cesareda, pag. 94, pi. 11, fîg. 10.
..Gexfcî^
25o
rognon de silex blanc et d'un petit éclat de forme allongée
qui peut-être en avait été détaché et ne paraît pas avoir été
produit accidentellement; enfin le travail évidemment prati-
qué sur quelques os, notamment sur un cubitus de Feh's.
Beaucoup de ces os d'animaux et de ces éclats d'os,
exception faite de ceux de l'hyÈne, ont été rongés; c'est-là
une preuve évidente que ce Carnivore hantait la grotte et
profitait des restes des repas que l'homme y avait laissés.
Ce qui est surtout remarquable c'est la rencontre dans
ce niveau ossifère, de la moitié d'un radius d''un grand Ca-
iiis (très probablement C. lupus spelaetis) qui n'accusait pas
un long transport et dont l'autre moitié a été rencontrée
dans le niveau ossifère supérieur, à i'°,'io au-dessus de celle-
là. Les deux fragments ont pu parfaitement s'ajuster, et par
la différence de couleur de la surface on reconnaît qu'il ont
été soumis à des conditions différentes. La fracture trans-
versale ne dénote pas l'intervention humaine; au contraire,
il est plus simple de supposer que cet os ait été brisé acci-
dentellement, et que les courants qui ont balayé le sol de
la grotte, aient d'abord lancé l'un des fragments dans le puits,
en même temps que les autres restes d'animaux qui se
trouvaient à ce niveau, et y aient ensuite lancé les sables
en laissant l'autre fragment qui y fût introduit plus tard.
Ce fait n'est pas cependant unique: beaucoup d'os d'un
même niveau étaient brisés et leurs fragments se trouvaient
sépares de i°,o voire même de î",© dans le sens horizontal.
36=. niveau ossifère. — Au-dessus du niveau que nous
venons de décrire succédait, comme nous l'avons dit, une nap-
pe de sable meuble, de i°',3o d'épaisseur, où les os étaient
extrêmement rares, ce qui doit indiquer, à ce qu'il paraît,
la séparation de deux périodes distinctes d'occupation de
,ï Google
a5i
la grotte. Cette couche ossifère a l'épaisseur de o^i^o com-
prise entre 6"",o et 6",5o de profondeur; cependant les os
n'étaient pas distribués au hasard à cette hauteur; ils y
formaient trois petites couches distinctes séparées par de
minces lits de sable; nous avons cru, cependant, convena-
ble de les réunir dans un niveau unique.
Dans ce 3*"* niveau, le plus riche par l'abondance et
l'état plus parfait de conservation des exemplaires, de même
que par le nombre des espèces représentées, les restes des
squelettes de l'ours et de l'hyène étaient surtout abondants.
Il faut mentionner spécialement un crâne presque complet,
que nous croyons appartenir à l'espèce U. pn'scus, Cuv.,
la meilleure pièce de ce genre que nous ayons obtenue et
qui offre la singularité d'avoir été rongée profondément dans
la région pariétale droite et aussi sur la crête sagittale.
Ce fait vient clairement prouver que la grotte servait
temporairement de retraite aux hyènes, ou au moins qu'el-
les y pénétraient pour profiter des restes des repas que nos
troglodytes y laissaient.
Mais ce qui est encore plus important, c'est la rencon-
tre dans la partie supérieure de la couche ossifère, à 6 mè-
tres de profondeur de la surface des sables, d'un fragment
de maxillaire inférieur humain, de très petites dimensions,
très probablement d'un enfant, et qui est représenté seule-
ment par ie condyle et une partie de la branche ascendante
droite (pi. i a, fig. i •).
Voici la liste des espèces, que nous avons pu détermi-
ner avec plus ou moins de certitude, trouvées dans les trois
strates fossilifères comprises dans cette couche:
Vesperttlto, 2 espèces de taille différente.
Erinaceus europaeus, restes appartenant à plusieurs indivî-
fl
gi'-'
252
dus; maxillaires supérieurs et inférieurs, humérus, cubi-
tus, radius, fémur et tibia.
Ursus. Grane incomplet rongé, auquel manquaient tous
les os de la face; en outre, des maxillaires inférieurs,
des dents détachées nombreuses et beaucoup de piè-
ces des différentes parties du squelette, la plupart
cassées, et une énorme quantité d'éclats d'os, pres-
que tous roulés et quelques-uns rongés. On doit surtout
signaler un péroné entier, qui a été brisé et resoudé
pendant la vie de l'individu, montrant une grande cal-
losité; ainsi qu'une patte antérieure droite, dont on a
trouvé presque tous les os réunis et qui a pu être re-
construite. Les restes de ce genre témoignent de l'exis-
tence dans le dépôt d'un grand nombre d'individus;
on ne pourrait cependant pas former avec eux un seul
squelette, ils ne représentent même pas toutes les diffé-
rentes parties qui le composent.
Nous avons cru pouvoir rapporter ces restes aux es-
pèces suivantes:
U. spelaeus minor, Blum.
U, priscus, Cuv,
U. Leodiensis, Schmerl.
U. Arctoideus, Blum. (==£/. planus, Olien).
Mêles taxus, 2 dents détachées et un humérus incomplet.
Canis lupus, maxillaires inférieurs, dents détachées, hu-
mérus, radius, fémur, os iliaque, phalanges.
Canis pulpes, maxillaire inférieur, canine détachée, humé-
rus incomplet, fémur, tibia.
Canis sp, de grande taille, plusieurs radius et une omo-
plate et des fragments du tibia appartenant probable-
ment à la mime espèce. Il mérite d'attirer l'attention
,ï Google
253
que cette espèce de camivore, peut-être la même dont
nous avons soupçonné l'existence dans le dépôt infé-
rieur de Casa da Moura*, ne soit représentée que par
quelques radius entiers, les autres pièces du squelette
faisant presque absolument défaut.
Mustela vulgaris, maxillaire inférieur droit.
Mustela ou VivetTo, 3 maxillaires inférieurs, incomplets,
et une dent principale détachée.
Hyaena, restes abondants appartenant probablement à 3
espèces distinctes. On a trouvé un crâne entier avec
la mâchoire inférieure correspondante; en outre 3 crâ-
nes, 9 maxillaires inférieurs en parfait état de conser-
vation, et fragments d'autres, en partie d'individus très
jeunes ou montrant encore la deuxième évolution den-
taire. On a de même rencontré beaucoup de dents dé-
tachées, ainsi que des pièces de toutes les parties du
squelette: vertèbres, côtes, sternum, omoplates, humé-
rus, cubitus, radius, os iliaques, fémurs, rotule, tibias,
péroné, os du carpe, du métacarpe, du tarse, du méta-
tarse et phalanges, dont plusieurs onguéales.
Les crânes et la plus grande partie de ces os nous
paraissent appartenir à l'espèce H. vtdgaris qui habite
actuellement le nord de l'Afrique. Par contre un ma-
xillaire inférieur et plusieurs os longs pourraient être
rapportés à VH.prisca figuré par Blainville,(Ostéogr.,
pi. vni), qui a d'ailleurs les plus grands rapports avec l'es-
pèce précédente par la disposition Carnivore du système
dentaire. Enfin, un fragment de maxillaire supérieur d'un
individu très jeune, ressemble à VH. crocuta par la dis-
position du talon placé au mUieu de la dent principale.
' V. Nonce sur les grottes de Cesareda, pag, 98, pi. 111, fig. 5,
ogie
254
Bien que nos exemplaires soient d'une espèce de plus
grandes dimensions que celle découverte dans l'Au-
vergne {H. Perricri^ Croizct et Jobert) qui, d'après Blain-
ville, se rapproche aussi beaucoup de Thyène de l'Afri-
que (H. vulgaris), on arrivera peut-être à établir qu'ils
appartiennent bien à cette espèce.
Dans la plus grande mâchoire les dents ne sont pas
aussi imbriquées que dans les autres, ce caractère pour-
tant pourra dépendre de l'âge de l'individu.
Felis, restes appartenant à 4 espèces différentes du moins,
savoir: Felis catus, Felis sp. a, Felis sp. ô, Felis sp. e,
qui ont été séparées d'après l'étude des maxillaires in-
férieurs et des dents .détachées. On a trouvé aussi des
pièces des différentes parties du squelette: vertèbres,
sternum (pièces séparées), omoplate (fragment), humé-
rus, radius, cubitus, os iliaque, fémurs, rotule, tibia
(extrémité inférieure), péronés, os du métacarpe, du
tarse, du métatarse, et phalanges.
Lepus cuniculus, ossements très nombreux, des maxillai-
res inférieurs surtout.
La taille de cette espèce fossile paraît dépasser celle
du lapin sauvage actuel; parmi les fémurs il y en a de
plus grandes dimensions encore, qui semblent approcher
de ceux du lièvre (L. timidusj, tandis que la plupart ap-
partiennent très probablement à l'espèce nommée.
Insectivores ind., fémurs de 3 espèces différentes.
Rhinocéros tichorhinus?, une dent molaire avec la racine
incomplète et qui probablement n'aurait pas encore
percé l'alvéole, et fragments d'autres dents qui nous
semblent appartenir aussi au genre Rhinocéros.
Cerviis^ restes appartenant à plus d'une espèce. Dents in-
cisives et molaires, vertèbres caudales, humérus (frag-
,ï Google
ments), fémurs (id.), tibia, calcanéum, astragale, mé-
tatarsiens (a extrémités inférieures et a éclats longi-
tudinaux roulés) et phalanges.
'Bos, 4 dents molaires appartenant peut-être à deux espèces
de petite taille, 2 astragales et fragments de métatarsien.
Oiseaux ind., ossements nombreux appartenant à plu-
sieurs espèces, dont l'une serait de très grande taille,
d'après ce que l'on peut juger de la longueur d'un hu-
mérus incomplet, mesurant o'",277 quoique l'extrémité
supérieure manque.
Poissons, 5 vertèbres séparées.
Ces os étaient enfouis dans un sable fin, meuble, et
comme il arrive ordinairement dans les autres niveaux, ils
ont la surface couverte par des dendrites manganésifères.
Avec ces os il se trouvait quelques éclats de cailloux
de quartz, des rognons de silex entiers ou cassés, et des
éclats séparés de ces silex, montrant clairement que nos tro-
glodytes fabriquaient eux-mêmes dans la grotte les instru-
ments dont ils se servaient.
Dans toute l'épaisseur de la couche, surtout à la partie
inférieure, on a aussi trouvé, en grande quantité, des cailloux
roulés de quartzite, de quartz et de silex, entiers ou cassés,
dont on a détaché quelquefois intentionnellement des éclats;
d'autres fois, au contraire, on ne saurait affirmer que la cas-
sure n'ait pas été produite par une cause naturelle, comme
le serait, par exemple, le choc, les uns contre les autres, des
cailloux entraînés dans la grotte; il se peut aussi qu'ils aient
éclatés à la surface du sol avant d'être introduits dans la
grotte.
Dans la partie supérieure de cette couche il a été trouvé
un petit couteau de silex avec les bords ébréchés par l'usage;
,ïGo(|qW
256
ce couteau (pi. ii, fig. 5) était de section triangulaire très
aplatie, il avait bj millimètres de longueur et i8 millimè-
tres de largeur. On y a trouvé encore 5 éclats de silex et un
de quartzite se terminant en pointe; ces objets peuvent avoir
servi de flèches. On y a rencontré également un éclat de
quartz blanc et un autre de silex, qui probablement ont servi
de grattoirs.
Suivant l'ordre des profondeurs, qui n'est pas Tor-
dre chronologique, que Ton ne saurait déterminer, nous
devons maintenant indiquer la rencontre d'un grand silex à
5°',8o au-dessous de la surface des sables, mais dans le mi-
lieu de la galerie principale et avant d'atteindre l'ouverture
du puits, c'est-à-dire, en amont de ce puits, eu égard à la di-
rection unique que les courants pouvaient suivre au dedans
de la grotte. Ce silex, ainsi que deux autres objets qui
l'accompagnaient — un petit nucléus ou rognon de silex blanc,
ébréché sur différentes faces, et un éclat de l'intérieur d'un
autre rognon, où l'intervention du travail humain est évi-
dente— ont été trouvés à o",! ou o"',3 au-dessus de la ro-
che du fond de la grotte, ayant été certainement entraînés
jusques là par les courants quaternaires, ainsi que les os
et les silex ont été entraînés vers le fond du puits contigu.
Le grand silex (pi. i) a la forme amygdalaîre du type
de Saint-Acheul; il est formé d'un rognon, éclaté des deux
côtés, et se terminant en pointe obtuse aux deux extrémi-
tés, avec les angles vifs. Il a i68 millimètres de longueur, 8i
de largeur et Sa d'épaisseur; on voit encore sur une partie
de sa surface les restes de la croûte terreuse qui recouvrait
primitivement le rognon.
4*m« Niveau ossifére.— A &",5o au-dessous de la
surface des sables quaternaires, ou O^^bo au-dessous de l'an-
-\
„Google
257
cien sol de la grotte, il y avait, dans le trou ou puits, une
autre accumulation d'ossements, formant une strate mince,
mais qui par son isolement au milieu des sables, et par la
présence d'une petite espèce de Hélix, qui s'est seulement
trouvée dans ce niveau, paraissait marquer une période dis-
tincte d'occupgtion de la grotte, pendant laquelle celle-ci
était parfaitement à sec.
Le sable, qui renfermait ces os était, comme dans les
autres niveaux, fin, jaunâtre, meuble, et auprès des parois
de la grotte, en partie cimenté par le tuf calcaire et par
l'oxyde de manganèse, qui couvrait la surface des os de ta-
ches noires dendritiques.
Les restes d'animaux obtenus dans ce niveau sont très
peu nombreux et la liste des espèces très restreinte; elle
comprend seulement les espèces suivantes :
Urstis, fragments de côtes, vertèbre, fémur (la moitié in-
férieure),
Felis sp. aff. F. lynx, humérus (moitié inférieure), fémur
gauche entier.
Cerviis, fragment de maxillaire inférieur et une dent mo-
laire supérieure détachée.
'BoSy espèce de petite taille représentée par une dent mo-
laire détachée de la mâchoire supérieure, l'extrémité
inférieure d'un radius, et un os métatarsien.
Nous ferons encore mention d'un éclat d'un grand os
long de bœuf ou de quelque animal de plus grande taille,
et un fragment d'os long, maïs de moindre dimension, écrasé
ou cassé intentionnellement et conservant encore les éclats
dans leurs positions relatives.
.,Ci
2J8
5*" Niveau ossifôre. — Au-dessus du niveau precé-
dcnt, séparé par un banc de sable stérile de 5o centime- I
très d'épaisseur, il y avait dans le puits une autre strate os- '
sifère, où les os étaient plus abondants, et les espèces plus
nombreuses. Dans cet endroit on a recueilli des débrià des
espèces suivantes: '
Erinaceus etiropaeus, maxillaires inférieur et supérieur,
vertèbre lombaire, humérus, cubitus, radius, fémur,
tibias (3).
Ursus, une dent incisive, humérus (epîphyses des deui
extrémités), cubitus (fragments), vertèbres, métacar-
pien, phalange.
Canis, 2 espèces indéterminées, l'une de taille inférieure
à celle du loup, réprésentée par une dent principale ei
la première molaire supérieure droite, et l'autre espèce
de taille beaucoup plus petite dont on a trouvé seule-
ment l'extrémité supérieure d'un cubitus.
Mustela, fragment de maxillaire inférieur droit avec les
3 prémolaires.
Hj'aena vtilgaris et une autre espèce, fragments du crâne
et des maxillaires, dents détachées, vertèbres, côtes,
humérus (de 2 espèces différentes), radius, cubitus, fé-
mur, péroné (fragments), 3 calcanéums (de 2 espèces
différentes), phalanges onguéales.
Felt's, vertèbre caudale, cubitus, os iliaque, métacarpien,
phalanges.
Lepus cunkultts, maxillaires supérieurs et inférieurs, ver-
tèbres, omoplate, humérus, cubitus, os iliaques, fémurs,
tibias, calcanéum, métatarsiens.
CervuSy dents molaires, métatarsien (fragment), astraga-
les, phalanges.
,ï Google
25g
'Bos^ un os du carpe et fragments d'omoplate et d'une
phalange.
Oiseaux, restes de 3 espèces différentes du moins: omo-
plates, humérus, cubitus, métacarpien, fémur et tibia.
Poissons, 5 vertèbres, dont deux ont été sciées dans le
sens transversal.
Nous avons à ajouter à cette liste l'indication d'une
quantité extraordinaire de coprolithes, les uns plus grands et
d'autres plus petits, mais tous de même forme et très pro-
bablement appartenant à l'hyène; il semble donc qu'à cette
époque ce Carnivore a tranquillement habité la grotte pen-
dant une longue période.
On y a aussi rencontré 2 éclats de silex blanc sur les-
quels l'action humaine est évidente, et des éclats d'os en
quantité, quelques-uns roulés ou ayant les arêtes arrondies.
Un de ces éclats, très épais, d'Ursiis ou de Bos, était fa-
çonné et avait un trou cylindrique très parfait, peut-être
pour être suspendu et employé comme ornement (pi. i a,
fig. 4.).
Au niveau ossifère précédent succédait un banc épais
de i'",5o de sable meuble, qui pouvait être creusé à la
main, où. il n'y. avait point d'ossements; au-dessus de
cette couche, à 3"',5o de profondeur de la surface des sa-
bles, tout près de l'ouverture du puits et à l'extérieur,
se trouvait une remarquable accumulation d'ossements gi-
sant immédiatement sur le calcaire jurassique du fond de
la grotte. Ces os étaient en grande partie fortement cimen-
tés avec les sables, de sorte qu'il n'a pas été possible, sans
les endommager, de les dégager du calcaire qui les couvrait;
et leur situation en cet endroit doit s'expliquer de la même
manière que nous la comprenons dans les niveaux inférieurs
-'^
200
dans le puits: ces os ont été entraînés par les courants qui
sont entrés dans la grotte et, par des circonstances parti-
culières, n'ont pu franchir la protubérance de la roche for-
mant le bord du puits, pour s'y précipiter. •
Ainsi, on ne saurait affirmer que ces os représentent un
niveau distinct, c'est-à-dire une période spéciale d'habitation
de ta grotte; on devrait plutôt dire qu'ils appartiennent à
la même époque qu'un des niveaux décrits, ayant échappé
à un nouveau transport, comme il est arrivé pendant quel-
que temps à la moitié du radius de loup, que nous avons
trouvé à la panic inférieure du 3*'"° niveau, et qui en réa-
lité appartenait à un niveau inférieur à celui-ci.
Les restes des animaux n'étaient pas rares dans ce point
de la grotte et la liste que nous en donnons offi-e quelque
intérêt par rapport aux listes précédentes.
Ursus, 3 espèces, dont l'une, U. gtganteus, est représen-
tée par la moitié supérieure d'un tibia et l'extrémité
supérieure d'un cubitus. En outre on a trouvé des res-
tes de 2 autres espèces indéterminées: plusieurs ver-
tèbres, côtes (fragments), humérus et cubitus (-extrémi-
tés supérieures d'une espèce de petite taille), radius, os
iliaque, fémur et péroné (fragments), calcanéum, méta-
carpien, métatarsien et 2 phalanges.
Canis lupus, maxillaire inférieur droit incomplet d'un in-
dividu de cette espèce avec la première série dentaire
et radius (extrémités supérieure et inférieure). ,
Hyaena, 2 dents incisives, une canine et 2 molaires, une
vertèbre dorsale et un os iliaque.
Felis, 2 espèces : humérus (2 extrémités supérieures dif-
férentes), cubitus (fragment), fémur (extrémité infé-
ly Google
26l
Lepiis cuniciilus, maxillaire inférieur incomplet et beau-
coup d'os différents aussi incomplets.
Cervtis. Nous réunissons sous ce titre les restes des ru-
minants s'approchani beaucoup de ce genre, et peut-
être appartenant à 3 espèces différentes. Ces restes
consistent en trois dents molaires détachées, omoplate,
humérus, radius incomplet, fémur id., fragments de mé-
tacarpien et de métatarsien.
Eqmis, un astragale seulement.
Oiseaux, restes de trois espèces indéterminées: omoplate,
2 humérus, cubitus et 3 métacarpiens. '
Chéloniens, 2 fragments de la carapace de deux espèces
distinctes.
Hélix, un petit spécimen engagé dans les sables cimen-
tés par le calcaire stalagmitiquc.
Pour compléter cette liste il faut considérer aussi divers
ossements indéterminés, des fragments d'os longs et beau-
coup d'éclats, dont un grand nombre roulés, et de nombreux
coprolithes, pour la plus grande partie ou tous se rappor-
tant très probablement à l'hyène.
Comme indice de l'existence de l'homme dans cette pé-
riode, on a encore trouvé, à côte des os d'animaux, un éclat
de silex blanc, façonné, ayant servi probablement de grat-
toir; et un caillou roulé, de silex également blanc, de forme
ellipsoïdale très aplatie, usé d'un côté comme s'il avait servi
de brunissoir ou de lissoir.
6*"" Niveau ossifére. — Nous considérons ce niveau
ossifère constitue principalement par une strate qui fut dé-
couvene à S^iSO de profondeur de la surface des sables, et
par conséquent séparée du niveau inférieur par un intervalle
,ï Google
262
de i",8o de sables stériles. On ne saurait cependant sépa-
rer de cène strate une autre qui se trouvait o'°,20 au-des-
sus et dans laquelle étaient enfouis plusieurs os et quel-
ques dents d'animau.\. Dans la liste suivante sont réunis les
restes d''aniinaux rencontrés dans les deux strates et les
vestiges qu'on y a trouvés de l'existence simultanée de
l'homme.
Ursus, "il dents molaires d'un jeune individu, 2 vertèbres,
fragment de côte, astragale, 3 métatarsiens, 2 phalan-
ges.
Canis lupus, maxillaire inférieur droit incomplet avec les
2 premières postéro-molaires,
Hyaena vulgaris. vertèbre, phalange ; coprolithes, très
probablement de cette espèce.
Feîis, cubitus (extrémité supérieure) et fragment de tibia.
Lepus cuniailus, maxillaire supérieur incomplet, radius,
os iliaques, fémurs, tibia, métatarsien.
CervHS?, dent molaire, vertèbre cervicale, phalange.
"Bos, fragment de l'extrémité inférieure d'un métacarpien
fendu longitudinalement et une phalange.
Oiseau ind., crâne, humérus, cubitus, métacarpien.
Ghélonien, fragment du bord de la carapace.
Éclats d'os longs, quelques-uns roulés, ayant les arêtes
arrondies.
Éclat d'un grand os long, avec des incisions sur la
surface intérieure, produites par un instrument tran-
chant.
Fragment d'os long écrasé, ayant encore les éclats dans
leur position relative.
Éclat de silex jaunâtre, avec des taches brun-foncé et
rougeâtre, du type des couteaux.
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i6S
Un autre éclat de silex, séparé probablement du même
rognon que l'instrument précédent.
Éclats de quartzite et de quartz, et cailloux éclatés de ces
substances.
7*"" Niveau ossifôre. — Le niveau le plus élevé où se
trouvaient des restes d'animaux, d'ailleurs en petite quan-
tité, était à i",5o au-dessous de la surface des sables qua-
ternaires, c'est-à-dire 2'",5o de l'ancien sol de la grotte. Les
sables, dans cet endroit, avaient un aspect différent de ce-
lui qu'ils ont dans les niveaux inférieurs; ces sables étaient
fins, très micacés, blancs, et plus ou moins cimentés par le
tuf ou calcaire stalagmitique à l'état terreux. On y a obtenu
des restes d'animaux et autres objets, dont voici la liste;
Ursus, apophyse épineuse d'une vertèbre dorsale, dont le
corps s'est perdu lors de l'extraction.
Lepus, quelques dents détachées et fémur.
Coprolithe, très probablement d'hyène.
Éclats de silex (6) ; deux de ces éclats peuvent avoir servi
comme instruments ou armes de trait, et un autre com-
me grattoir.
Caillou roulé de quartz blanc de forme ellipsoïdale, éclaté
aux deux extrémités, et des fragments de cailloux plus
petits.
Tels sont les premiers indices de la faune quaternaire
et les preuves simultanées de la présence de l'homme que
nous avons découvert dans cette grotte; indices qui nous
ont encouragé à poursuivre les explorations, dont la réus-
site a couronné nos efforts.
■M
264
L'ensemble des faits présentés prouve indubitablement
que la grotte fut habitée par l'homme dans tes premières
phases de l'époque quaternaire, c'est-à-dire, pendant la for-
mation des plus anciens dépôts de cenc époque dans notre
pays, lorsque les conditions climatologiques et le relief du
sol étaient certainement autres qu"'ils ne le sont aujourd'hui.
D'après ce que nous avons dit il reste aussi sous-en-
tendu que le dépôt, qui a rempli paniellement la grotte, doit
être considéré contemporain du dépôt sableux qui couvre
le plateau de Cesareda, et y remplit les cavités du calcaire
jurassique, ainsi que dans la péninsule de Péniche; dans ce
dépôt nous avons rencontré de même quelques silex du type
paléolithique.
Les preuves qui ont été fournies par cette grotte, de
l'existence de l'homme contemporain des espèces d'animaux
éteintes, ou depuis longtemps disparues de notre pays,
sont toul-à-fait convaincantes. Ces preuves dérivent de la
rencontre des silex réunis aux ossements dans la même
strate, aussi bien que de la fracture et du dommage qu'ils
ont subis, et finalement de la rencontre du petit fragment de
maxillaire humain trouvé à peu près à mi-hauteur du dépôt;
cette pièce, quelque exiguës que soient ses dimensions, n'en
a pas moins une haute signification ethnographique.
BisonsslOQ
M. DE Baye : Le cr3ne qui porte les marques éviden-
tes d'un commencement de trépanation (pi. xv) est une pièce
nouvelle, unique en ce moment, qui corrobore puissamment
les observations faites en France, dans la Marne et dans
la Lozère. L'opération déjà avancée a été suspendue; elle
,ï Google
265
affirme sous une forme indiscutable, la coutume de la trépa-
nation pendant la période néolithique. C'est un trait de res-
semblance de plus entre des stations situées il des distances
considérables.
Il existe des exemptes qui démontrent que l'individu a
survécu à la perforation de la table crânienne. L'examen
du crâne signalé par M. Delgado, constate que le sujet n'a
pas survécu. Les cellules diploïques sont restées béantes
partout où elles ont été incisées. L'action de l'instrument
en silex se reconnaît aisément Les coups mal assurés qui
apparaissent en dehors des sillons déjà bien formés, con-
courent à la même démonstration. Effectivement, les traces
des déviations de l'instrument sont, les premières que la ré-
paration cicatricielle fait disparaître, lorsque le sujet survit.
Oes subsistent au contraire sur les crânes qui ont subi la
trépanation posthume.
Le crâne à moitié trépane répond victorieusement aux
objections qui ont été formulées, car les causes accidentel-
les alléguées seraient impuissantes, pour produire de tels ef-
fets.
L'importance du fait est très grande. J'en produis la
mention afin qu'un document si précieux ne reste pas ou-
blié et inutile. D'autres plus autorisés, je l'espère, en feront
ressortir la valeur.
M. Cartailhac: Il faut d'abord que je rende hommage
aux grands services rendus par M. Delgado. Les fouilles
faites sous sa direction, par leur précision et leur méthode,
rappellent celles si célèbres de M. Dupont.
Mais le géologue portugais, comme son savant collègue
de Belgique, n'a-t-il pas été, à certains égards, entraîné à pro-
poser des conclusions qu'il n'est pas possible d'accepter?
fV.
i66
La question de l'anthropophagie n'est pas nouvelle. En
1842 Spring découvrait à Chauvaux, dans une brèche os-
sifère, des ossements d'homme, de bœuf, cerf, mouton,
sanglier, tous traités de la même manière, c'est-à-dire bri-
sés lorsqu'ils étaient longs, lorsqu'ils avaient contenu de la
moelle. Les uns et les autres en partie calcinés; enfin, il n'y
avait que des os d'adolescents, femmes ou jeunes enfants.
L'accusation de cannibalisme raffiné eut un immense succès.
Mais en 1872 M. Soreil reprit ces fouilles; il trouva
sous la stalagmite explorée par Spring de nombreux osse-
ments d'autant plus entiers qu'on se rapprochait des parois
de l'abri; deux squelettes intacts et complets étaient ados-
sés au rocher, et il y avait des restes d'hommes — des adul-
tes, des vieillards — associés à de nombreux silev taillés de
l'âge de la pierre polie, et bouleversés çii et là par le pas-
sage des renards et des blaireaux.
En Danemark, à Borreby, une chambne mégalithique
était remplie d'ossements humains non brûlés et brûlés;
ceux-ci étaient plus rares, répandus partout, et générale-
ment cassés. Malgré les prudentes réserves de l'inventeur,
on ne mit pas en doute le fait d'anthropophagie.
Or, l'étude des tombeaux néolithiques de la Scandina-
vie a prouvé que le feu allumé dans un but de purification,
les enterrements successifs, etc., suffisaient à expliquer les
faits du dolmen de Borreby et de bien d'autres, et que l'hy-
pothèse de cannibalisme ne pouvait plus être admise.
En France ont eut bien vite renoncé à elle et vojci
pourquoi :
Dans les foyers de l'âge du renne on rencontre quel-
quefois des os humains; il ne faut pas oublier que les foyers
ne renferçient pas uniquement des débris de repas, mais
aussi des rejets d'industrie ;t)r, la matière première est l'os,
,ï Google
267
et un os humain apporté là par hasard ne prouve pas plus
le cannibalisme que les flûtes en tibia humain de Pompci.
Les os longs trouvés dans ces gisements ne sont pas trai-
tés comme ceux des animaux, et les entailles qu'ils offrent
parfois s'expliquent par le fait qu'on a voulu les utiliser.
Souvent ces os humains peuvent provenir de cadavres
abandonnés près des foyers par ces populations qui ne pla-
çaient leur morts ni dans les grottes ni dans la terre, et qui
devaient fort ressembler, à cet égard comme à d'autres, aux
habitants actuels les plus sauvages de la Sibérie orientale.
Quelquefois, enfin, ils constituent des traces de sépultures
néolithiques ou plus récentes, enfouies dans un sol riche en
débris de tout genre, mutilés, remanies.
Celle dernière explication est la plus plausible lorsque
l'on rencontre des portions de squelettes humains dans les
gisements néolithiques: à l'âge de la pierre polie, un grand
nombre de cadavres trouvaient dans les grottes naturelles,
plus ou moins fréquentées jusques là, leur demeure dernière;
quelques-uns de ces abris funéraires ont été respectés, mais
la plupart ont été rouverts et bouleversés, soit par l'homme,
soit par certains animaux. Il est arrivé plusieurs fois à So-
lutré, à L'Herm, etc., que des fouilles postérieures, plus
étendues, ont, comme à Chauvaux, mis au jour la majeure
partie du cimetière méconnu par les premiers explorateurs.
Il est incontestable que l'anthropophagie a été pratiquée
par bon nombre de sauvages modernes, mais pas par tous.
De même il faut faire exception pour les sauvages de l'Eu-
rope occidentale préhistorique. Nous n'avons pas, en effet,
un seul foyer semblable à ceux des peuples cannibales.
Sans entrer dans l'histoire bien connue aujourd'hui du
cannibalisme, nous pouvons dire que nos ancêtres de l'âge
du renne ou de l'âge de la pierre polie ne paraissent pas
"ff.
être dans les conditions ordinaires des races anthropopha-
ges, au point de vue soit de la civilisation, soit des idées re-
ligieuses, soit des nécessités de la vie.
Un mot maintenant sur le cas spécial des grottes du
Ponugal. Ce n'est pas seulement dans celle de Péniche que
les os humains se présentent dans la situation et dans l'état
que M. Delgado invoque en faveur de l'anthropophagie.
Dans tous les autres gîtes, cavernes naturelles, grottes arti-
ficielles, antas, on trouve des faits identiques ! De sorte que
l'on aurait creusé des cryptes souterraines, on aurait élevé
des mégalithes pour abriter les restes des repas d'anthropo-
phages! C'est inadmissible!
Pourquoi aurait-on laissé, avec les débris d'individus
dévorés, les armes, les outils, les parures, les amulettes, les
poteries entières?
Ce sont en réalité des mobiliers funéraires, il s'agit uni-
quement de sépultures dans lesquelles les morts ont été dé-
posés à l'état de cadavres ou de squelettes, en général non
incinérés; ces débris se sont trouvés, depuis le décès, sou-
mis à des influences, à des actions bien diverses!
Les os se conservent très différemment selon l'humidité
et la nature chimique du sol, selon qu'ils sont plus ou moins
soustraits aux agents atmosphériques.
Les os humains ne se comportent pas.comme ceux des
animaux; il y a pour eux, comme pour ceux des carnivores
ou des herbivores, des fractures spéciales et caractéristi-
ques.
Enfin, l'action de l'homme aboutit à des résultats diffé-
rents selon que l'os est frappé ou que l'on frappe avec l'os-
C'est armé de tous ces renseignements que je nie, sans
aucune réserve, toutes les soi-disant preuves du canniba-
lisme préhistorique.
,ï Google
269
Il faut louer, je le répète, le soin avec lequel M. Del-
gado a fait ses fouilles, et grâce à cela même on peut par-
ler comme si l'on avait assisté aux recherches, on a sous
les yeux tous les éléments d'information. Les os qui man-
quent sont ceux que l'on est habitué à ne pas rencontrer
toutes les fois qu'on fouille une sépulture multiple; ce sont
ceux qui dans les tombeaux simples se détruisent les pre-
miers. Lorsque le squelette est seul, isolé, par exemple, dans
un cercueil, il n'est pas rare de trouver que la pression des
terres et l'action des milieux l'ont traité comme ceux des
grottes du Portugal : même aspect, mêmes cassures, même
élargissement du canal médullaire.
Les incisions également invoquées par M. Delgado, sont
dues aux dents des carnassiers de petite taille et surtout
des rongeurs.
Enfin si la grotte de Péniche est d'un accès très diffi-
cile, on comprend mieux encore pourquoi elle avait été
choisie pour garder les dépouilles des morts aimés !
M. DE Mortillet: Je ne saurais admettre l'hypothèse
de l'anthropophagie. Nul animal ne dévore l'animal de son
espèce si ce n'est pressé par la faim. Ces grottes sont des
sépultures: la place choisie pour des festins ne serait pas as-
surément d'un accès aussi difficile; tandis qu'il faut admet-
tre qu'en général on a dû chercher pour des sépultures un
lieu écarté et caché. J'ajouterai que souvent les os longs
prétendus cassés par l'homme pour l'extraction de ta moelle
ne renferment pas de moelle! En particulier la quantité de
moelle contenue dans tels os humains est proportionnelle-
ment moindre que dans les os longs des animaux de taille
analogue.
M. ViRCHOw: C'est bien le contraire, la moelle que ces
os renferment est très abondante.
M. Vasconcellos Abreu: Il me semble qu'une autre
hypothèse pourrait bien être admise. On faisait des sacrifi-
ces humons ; on offrait aux dieux la partie des individus tués,
qui était la meilleure, et on dévorait le reste. L'anthropo-
phagie à la suite de sacrifices humains se retrouve chez plu-
sieurs peuples.
M. HitDEBRAND: Jc trouvc une explication très plausi-
ble pour le fait qui a frappé M. Delgado, la disproportion
des os par rapport aux dents. On chercha une nouvelle sé-
pulture, sans se soucier de ce que cette grotte contenait
déjà.
La commission nommée sous la proposition de M.
ScHAAFFHAUsEN, et composée de MM. Bakbosa du Bocage,
Capei-uni, Cartailhac, Delgado, Hildebrand, de Mortil-
LET, Schaaffhalsen, Virchow et Vasconcellos Abreu, pré-
senta le rapport suivant;
Rapport de la oommisslon obargée d'étadlfir la question
de l'anthropopliagle ft Faminba
La réunion a eu Heu à une heure de l'après-midi, au mu-
sée d'anthropologie de la Section Géologique. Tous les mem-
bres étaient présents. On élut M. Virchow président et
M. Vasconcellos Abreu rapporteur.
M. Virchow, voyant que tous les membres de la com-
mission étaient d'accord sur ce que quelques-uns des os longs
,ï Google
portaient des vestiges d'un rongeur et plusieurs même ceux
d'un carnassier, proposa quatre questions:
/" Sur les os qui nous sont présentés trouve-t-on des
traces de travail humain avant l'action du feu et avant celle
» des animaux?
2" [f après les différentes proportions dans lesquelles on
trouve les diverses parties des os des squelettes et d'après
les ossements des adultes et des enfants peut-on conclure à
r anthropophagie?
3' I^s os cassés porlent-ils l'empreinte d'une cassure
intentionnelle?
4"^ /ja coexistence des silex taillés et d'autres pièces tra-
vaillées, des hématites et de la poterie, avec des os brisés, est-
elle la preuve d'un lieu ^habitation, ou d'un lieu de sépulture?
Ces questions ont été débattues, l'une après l'autre et
votées par tous les membres de la commission, excepté
M. Delgado. Les conclusions générales sont les suivantes:
M. Mortillet: Pour le cas en question il n'accepte pas
l'anthropophagie.
M. Capellini: Il l'accepte; elle lui semble évidente.
M. Cartailhac: Nullement évidente; elle est inaccepia:
ble.
M. Barbosa nu Bocage: Elle lui semble très probable.
M. Schaaffhausen : Pour le cas en question l'anthro-
pophagie est prouvée.
M. Hildebrand: 11 n'est pas de l'avis de ceux qui voient
dans le cas en question les preuves de l'anthropophagie.
r
M. Vasconcellos Abreu; L'anthropophage lui semble
très probable pour le cas en question; pourtant il ne xioavt
pas de preuve scientifique suffisante pour la démonstration.
M. ViRCHowiCest un cas douteux, peut-être il y eut de
l'anthropophagie, mais elle n'est pas prouvée pour ce cas-ci.
Ainsi il y a eu:
2 voix, oui.
2 voix, probable.
1 voix, douteux.
3 voix, non.
Tous les membres de la commission ont fait justice aux
soins méthodiques et rigoureux dont témoignent les travaux
de M. Delgado, leur statîstiqiue et la disposition des spéci-
mens.
Vasconcellos Abreû, rapporteur.
M. Delgado: Messieurs les membres du Congrès vien-
nent d'entendre la lecture des conclusions de ta commission
nommée pour l'examen des vestiges d'anthropophagie chez
les habitants de Furninha. L'arrêt qu'elle vient de pronon-
cer n'est pas décisif; je puis, cependant, assurer au Congrès
que dans le cas même où cet arrêt eut été défavorable à
mon hypothèse, je ne serais pas convaincu.
Tout en respectant profondément l'opinion de mes il-
lustres contradicteurs, qu'il me soit permis de dire, qu'il y
a des faits dont on ne saurait trouver l'explication d'après
l'ordre d'idées qui ont été émises ici à propos de cette
question.
,ï Google
M. ScHAAFFHAUSEN. En visitant le musée de la Section
des travaux géologiques en Portugal je fus frappé de voir ce
grand nombre d'ossements humains cassés et brûles, qui ont
été retirés de plusieurs cavernes du pays et décrits par
M. Delgado*. Cette trouvaille m'a paru d'une si grande impor-
tance, que j'ai proposé pour cette raison au Congres, de
nommer une commission, qui devait soumettre cet objet à
un examen rigoureux.
Ces ossements sont cassés et fendus de la même ma-
lùère que l'homme préhistorique autrefois et certains peu-
ples du nord encore aujourd'hui cassent les os des animaux,
pour en tirer ta moelle.
Tous les crânes sont brisés avec intention. Mais plus
encore, les ossements sont brûles, mais ils ne sont pas cal-
cinés entièrement, ils sont calcinés ou carbonisés en partie
par l'action du feu. Si l'on rôtit la chair d'un animal à un
foyer ouvert, les os prendront cette apparence. Les carnas-
siers ne brisent pas ainsi les os et ils ne peuvent pas les
exposer au feu. Ce ne sont pas quelques os isolés, qui par
hasard pouvaient avoir été exposés à un foyer allumé par
l'homme; ce sont des amas, qui apparaissent dispersés sur
le sol des cavernes, comme les débris d'un repas. Dans une
seule caverne on a compté les restes de 45 individus et ce
même fait se retrouve en plusieurs autres cavernes du Por-
tugal. Si cet état des ossements dépendait d'une circonstance
naturelle, il se trouverait partout dans les cavernes, qui ont
une si grande ressemblance d'ailleurs dans tous les pays.
Mais une telle observation n'a pas été faite dans les caver-
nes de l'Allemagne, iii de la France, ni de l'Angleterre. Donc
' Estudos geologîcos. Op. I. Noticia âcerca das grutas dt CesareUa.
Lbboa, i867.
,ï Google
274
cet aspect étrange doit avoir eu une raison spéciale. Le can-
nibalisme seul peut l'expliquer !
Le rapport de M. Spring sur la caverne de Chauvaux
reste très douteux. Pour l'Italie M. Capellini' cite la Grotte
dei Colombi dans l'île de Palmaria comme un lieu de l'an-
thropophagie préhistorique. M. Mac-Pherson est convaincu
aussi, que les habitants des grottes de La Mujer, près de
Cadix, étaient des anthropophages. Si les epiphyses de beau-
coup d'os longs manquent, c'est parce que les chiens les ont
rongées. L'homme ne mange pas les parties cartilagineuses
d'un os, c'est le chien qui le fait, et on a trouvé dans les
mêmes cavernes les restes d'un Canis. M. Steenstrup a pré-
sumé, d'après l'aspect des os rongés dans les kioekkenmoed-
dings du Danemark, l'existence du chien, et après on y a
trouvé réellement ses débris. On a observé dans les caver-
nes, que les ossements d'enfants sont intacts. Cela prouve,
que ces cannibales ont mangé leurs ennemis, mais non pas
les enfants.
Il y a une dizaine d'années que j'ai montré dans un
mémoire* sur le cannibalisme et le sacrifice ■ humain, que
cette coutume horrible se trouve dans l'histoire de tous les
peuples, de toutes les races. Charles Vogt' a donné un rap-
port de ce travail au Congrès de Bologne en ajoutant quel-
ques faits et quelques réflexions.Il est d'accord avec moî lors-
qu'il regarde l'anthropophagie comme un usage répandu chez
tous les peuples, et il admet avec moi, qu'elle n'est pas un
état primitif, mais qu'elle forme une phase générale dans
le développement de la civilisation humaine. Il voit avec
' Compte Rendu du Congrès de Bologne, 5*°" Sess. iSTi,
' Archiv fur Anthropologie, vol, iv, i87o, p. 245.
^ Compte Rendu du Congrès de Bologne, p. agS.
,ï Google
Waitz même dans les symboles de la religion chrétienne les
anciennes idées de Panthropophagie et du sacrifice humain!
En mangeant ta chair et en buvant le sang d'un dieu ou
d'un être innocent, on se rend semblable à lui, et le dieu
accepte le sacrifice d'une personne innocente, qui est immo-
lée à la place des coupables, auxquels il pardonne leurs pé-
chés. Ces deux croyances se trouvent dans le culte des an-
ciens Mexicains. Il faut ajouter, que l'agneau offert en sacri-
fice par les Israélites n'est que l'équivalent de l'homme im-
molé auparavant.
li y a plusieurs raisons pour le cannibalisme: la féro-
cité, la gourmandise, le manque de nourriture, le sacrifice.
Dans ce cas les deux premières suffisent pour expliquer
cette perversité.
M, Morliliet est dans l'erreur s'il croit que le can-
nibalisme soit toujours une fête, que l'on ne peut pas cé-
lébrer dans une caverne, et d'autres savants se trompent
en liant étroitement le cannibalisme avec le sacrifice hu-
main. Je doute, que les habitants des cavernes aient ja-
mais fait des sacrifices humains, parce que ce culte affreux
suppose un certain développement des idées religieuses. Il
est bien connu que tous les peuples de l'antiquité ont pra-
tiqué ces sacrifices, et il n'est pas moins certain, que plus
tard les sacrifices d'animaux ont remplacé les sacrifices hu-
mains.
Chez les peuples civilisés ce changement du culte re-
ligieux eut lieu, aussitôt que des sentiments d'humanité se
sont développés.
La discussion de la commission s'est fixée sur les ques-
tions suivantes:
Y-a-t-il des traces d'un travail de l'homme sur ces os-
sements? Les incisions sont-elles faites à l'état de fraîcheur
,C'l
276
sur ces ossements? Le différent nombre des parties qui res-
tent des squelettes est-il une preuve de l'anthropophagie?
Les os sont-ils brûlés a l'intérieur ou à la surface? Les os
sont-ils cassés avec intention? Les cavernes étaient-elles
des lieux de sépulture ou des habitations humaines? En gé-.
néral, des amas d'os humains cassés, fendus et brûlés sont-
ils des restes du cannibalisme?
Moi, je réponds ainsi h ces questions:
!l y a quelques stries sur ces os, qui paraissent être
faites par l'homme; d'autres sont faites par les dents de
carnivores ou de rongeurs, il y a des incisions, qui sont
faites à l'état frais des os, et ceux-ci ont été cassés indu-
bitablement il l'état frais. Le différent nombre des parties
qui restent des squelettes dépend de plusieurs circonstan-
ces. On observe toujours dans les amas d'ossements, que
les mandibules sont en abondance, les carnassiers mêmes
laissent ces parties dures intactes. Les vertèbres, les cô-
tes, les petites phalanges se détruisent même dans nos
tombeaux après vingt-cinq ans. Beaucoup d'os paraissent
être cassés avec intention. M. Dclgado a dessiné une man-
dibule, dont ta paroi antérieure est détachée par un coup,
qui a dénudé la moelle. Les cavernes étaient des habita-
tions, mais en même temps elles peuvent avoir servi com-'
me lieux de sépulture. Dans les mêmes grottes, où Ton a
pratiqué le cannibalisme, on a pu enterrer des morts avant
ou après. Les objets de parure, que l'on a trouvés tout
près des restes humains, n'indiquent pas d'une manière
convaincante la sépulture. Ils peuvent provenir des hommes
tués ou des cannibales eux-mêmes, qui les ont perdus, ou
des sépultures, que l'on y ait pratiquées.
Les pièces, que la commission a examinées, avaient
ctc choisies par moi et par M. Delgado peu de temps avant
,ï Google
277_
la discussion. La collecrion en contient peut-être d'autres,
qui sont plus concluantes encore'.
Il ne manque pas d'autres témoins pour confirmer no-
tre opinion. Les anciens auteurs font mention de canni-
bales, qui sont troglodytes, tel que Polyphème cité par Ho-
mère. Des voyageurs modernes ont trouvé en Afrique chez
les Basutos des troglodytes anthropophages. Et spéciale-
ment, le cannibalisme des anciens Ibères est rapporte par
Strabon {L. iv, 5). Il cite comme cannibales par famine les
Scythes, les Ibères, les Gaulois et d^autres peuples. Les Ibè-
res sont décrits coqime très sauvages. Le peuple ancien le
plus accuse de cannibalisme ce sont les Massagètes, qui ha-
bitaient l'Est de la mère Caspienne. Horace parle (Odes, ni,
4,34) de la rudesse des Co;iCiïHienCantabrie,etSilius(L. m,
36o) dit, que cette rudesse rappelait celle de leurs ancêtres,
les Massagètes!
' M. Schaaffhausen, aprC-s la clôture du Congrus, envoya au Secré-
tariat les observations suivantes:
«M. Delgado a eu la complaisance de m 'envoyer après le Congrès
quelques échantillons de ces os humains cassés et brûlés. Les parties
noires sont vraiment brûlées, l'analyse chimique n'a donne que des
traces minimes de manganèse, lequel noircit quelquefois les os des
cavernes d'une manière semblable. L'examen microscopique a démon-
tré, que dans les parties brûlées, qui sont dans ces échantillons toujours
les panies eitté'rieures des ossements, te tissu organique est détruit.
Il y a des ossements, qui sont jaunes clairs à l'extérieur, mais dont
intérieur est noirci. Dans ce cas il faut conclure, que reitéricur des
os s'est calciné, pendant que le charbon est resté Jans l'intérieur. Les
parties calcinées ne sont pas blanches comme il l'ordinaire, parce
qu'elles sont colorées par des éléments du sol. Je remarque encore, que
des ossements, qui ne sont pas brûlés par le feu, peuvent provenir pour-
tant de ces affreux repas. Il y a des cannibales, tels que les Fidjiens,
qui ne rôtissent pas ks cadavres, mais qui les font cuire.»
Il me semble, que les trouvailles faites par M. Delgado
sont la preuve évidente du cannibalisme des anciens habi-
tants des cavernes du Portugal. M. Delgado a le mérite
d'avoir fait cette recherche avec la plus grande sagacité et
circonspection, en rassemblant consciencieusement tous les
détails qui s'offraient à l'observation.
,ï Google
III
ÉPOQUE NÉOLITHIQUE
LES KIOEEEENXOEDDINGS DE LA. YALLÈE DU TAGE
M. Carlos Ribeiro
Les kioekkenmoeddings bien caractérisés que l'on con-
naît jusqu'à présent en Portugal, sont ceux du voisinage des
villages de Salvaterra et de Mugem, à peu de distance de
la rive gauche du Tage et près du débouché de deux val-
lées secondaires où coulent les rivières de Magos et de
Mugem. Ces vallées sont en général spacieuses: près du
Tage elles présentent des largeurs de looo à i5oo mètres;
les coteaux qui les limitent sont peu élevés, soit de 4 à 1 5
mètres de hauteur relative; dans quelques parties ils sont
coupés verticalement, et dans d'autres ils sont en pente
douce.
Ces kioekkenmoeddings se trouvent éloignés de 60 ou
70 kilomètres des côtes maritimes de l'embouchure du Tage,
et à une hauteur de 20 à 25 mètres au-dessus du niveau
de la mer. Les marées d'étîage sont encore sensibles près
de Mugem, mais l'eau de l'Océan atteint à peine Villa-
franca, à 3o kilomètres en amont de Lisbonne, et son mé-
lange avec l'eau de rivière ne fait que rendre celle-ci salée
pendant quelques heures.
,ï Google
28o
Nous ne"Connais3ons pas précisément le nombre des
kioekkenmoeddings de toute cette région; nous croyons ce-
pendant qu'il y en a encore à découvrir, et que d'autres ont
disparu dans le cours du temps, non seulement par l'action
des causes naturelles, mais aussi parce que l'agriculture les
aura détruits. Ce que nous savons et pouvons affirmer c'est
qu'ils occupaient une zone de terrain, qui n'avait pas moins
de 20 kilomètres de longueur sur 5 de largeur.
Le premier de ces monticules que nous avons décou-
vert, en avril i863, se trouve dans Quinta da Sardinha,
entre les villages de Salvaterra et de Mugem. Il nous fut
dénoncé par l'abondance des coquilles marines qui couvraient
une partie de la surface du sol, y formant comme une bande
blanchâtre d'environ 3oo mètres de longueur. Cette bande
nous révéla l'existence d'un dépôt artificiel de coquilles ma-
rines, parmi lesquelles nous avons reconnu les genres Bucci-
num, Lutraria, Nticula, Cardium, Tapes, Pecteti, Soîen et
Ostrea. Avec ces restes il y avait des pinces d'écrevisses,
des vertèbres de poissons, des fragments d'os de mammi-
fères, surtout de ruminants; une phalange d'orteil humain,
et une partie d'os coronal également humain.
Nous avons tenté à plusieurs reprises de faire l'explo-
ration de ce monticule, mais les objections présentées par
le propriétaire nous ont empêché jusqu'à présent d'y faire
commencer des travaux.
Les kioekkenmoeddings que nous avons reconnus dans
la vallée de la rivière de Mugem sont ceux de: Fonte do
Padre Pedro — Cabeço da Arruda — Cabeço da Amoreira
— Moita do Sebasdao.
,ï Google
Fonte do Padre Pedro
Presque à l'extrémité occidentale du flanc droit de la
vallée de Mugem, on voit le sol couvert d'innombrables
fragments de coquilles, qui forment une bande de 90 k 100
mètres de longueur dans le sens E.-0., sur 40 à 5o mè-
tres de largeur N.-S. Ces coquilles appartiennent en géné-
ral à des bivalves des genres Cardium, Ostrea, Tapes et Lu-
traria, celles du dernier genre prédominant. Avec ces coquil-
les nous avons rencontré des os de ruminants, Cervus^ Bos,
Oris, etc., et un fémur humain; adhérant à tous ces os on
voit des fragments de Lutraria, ce qui est une preuve de la
contemporanéité de tous ces restes dans le gisement.
Les fouilles n'ont été faites qu'à la surface, et par con-
séquent nous n'avons pu rencontrer que peu de restes hu-
mains originaires de ce dépôt. Notre but, lorsque nous avons
fait faire ces recherches, a été de vérifier s'il y a eu, ou non,
deux époques d'ensevelissement. A la vérité, les faits ré-
vélés nous ont démontré que, dans la partie pour ainsi dire
intacte du kioekkenmoedding, les coquilles et autres dépouil-
les d'animaux étaient mêlées de sable et de limon, et qu'el-
les entrent dans la composition du monticule sans aucun
mélange d'humus, tandis qu'en d'autres points le sol est un
mélange de ces matières avec de la terre végétale. C'est
dans ce sol, et presque à la surface, que nous avons rencon-
tré quatre squelettes humains couchés et avec eux des pro-
duits d'industrie romaine, tels que des fragments de mortier,
des vases en poterie, etc. Il y eut donc deux époques d'en-
sevelissement, la dernière étant probablement l'époque ro-
maine.
,ïGex^J
282
Sur ie même versant droit de la vallée de Mugem et
environ 3 kilomètres en amont de Fonte do Padre Pedro,
se trouve le kioekkenmoedding de
Gabeqo da Arrada
Il occupe une surface a peu près elliptique, de loo et
de 60 mètres d'extension sur ses deux axes, et présentant
une épaisseur maximum d'environ 7 mètres. C'est le monti-
cule le plus important parmi ceux explorés. Il se compose
de coquilles dont la plupart brisées ou même réduites en de
petits fragments, et mêlées avec du limon desséché, du sa-
ble, et du gravier.
Le charbon, et le bois en partie carbonisé, disper-
sés dans toute la masse, constituent aussi par leur abon-
dance un des matériaux qui composent le kioekkenmoedding.
La structure est celle d'un dépôt qui serait résulté d'un en-
tassement de détritus abandonnés; il y a des couches d'ex-
tensions très irrégulières, discontinues, d'épaisseurs variées;
dans quelques-unes prédominent les coquilles, avec ou sans
mélange de limon, de sable, ou de charbon en menus frag-
ments, et la proportion de toutes ces matières est très va-
riable. On y trouve aussi des morceaux plats de terre cuite,
d'épaisseur et de grandeur inégales, associés au charbon, et
souvent disposés horizontalement à la limite des couches.
On les rencontre successivement dans toute l'épaisseur du
dépôt, et ils nous paraissent être les restes des foyers où
se faisait le feu pour la préparation des aliments.
Les objets d'industrie humaine rencontrés sont nom-
breux, et s'ils n'attirent pas Pattention par leur fini, ou par
la variété des formes ou des matières dont ils sont fabri-
,ï Google
283
qucs, ils portent l'observateur à une étude longue et ré-
fléchie sur ia signification de leurs formes et le degré d'apti-
tude de l'ouvrier.
Nous avons cherché en vain des restes de poterie dans
ce dépôt et dans d'autres analogues; aucun fragment n'a
été obtenu ni par l'observation directe pendant les fouilles
ni par le criblage des terres: Part céramique aurait donc
été totalement inconnu aux hommes qui élevèrent ces mon-
ticules. Nous n'y avons pas non plus rencontré des haches
polies.
On observe cependant ici que les hommes de nos kioek-
kenmoeddings faisaient usage d'instruments en pierre gros-
sière, dont les formes et le travail indiquent un état bien
au-dessous de celui révélé par quelques instruments en
pierre de l'âge paléolithique même. Et que l'on ne dise pas
que les éclats de quartzice de toutes les formes et dimen-
sions qui font partie de la masse du monticule, soient un
produit naturel que le hasard y ait jeté; non, assurément:
le sol tertiaire sur lequel reposent les kioekkenmoeddings, est
constitué par des grès fins, sans cailloux, et les morceaux
de quartzite en question ont été apportés par les mêmes
agents qui transportèrent les coquilles, le combustible, les
animaux, les éclats et les couteaux en silex que nous y trou-
vons; c'est-à-dire, l'homme des kioeklcenmoeddings de la val-
lée du Tage alla chercher loin de cet endroit des cailloux de
quartzite, qu'il cassa ensuite pour en utiliser les fragments
et les nucléus.
Le silex n'était pas abondant chez ces hommes; néan-
moins on trouve dans le monticule de nombreux couteaux,
nucléus et éclats de cette substance. On doit remarquer
que le silex ne se rencontre pas dans cette région, et que
pour l'obtenir, l'homme a du être obligé de passer le Tage
,ïGeX^'
1%
284
ou de le recevoir par le trafic avec des tribus d'autres con-
trées.
Mais un poiat sur lequel nous croyons devoir insister,
c'est l'extrême ressemblance que nous trouvons entre les
éclats de quartzite de ces kîockkenmoeddings et les éclats,
aussi de quartzite, des premiers temps de la période quater-
naire et même des couches pliocénes. SI nous nous portons
vers les couches de grès grossier et de cailloux qui couronnent
le flanc droit de la vallée du Tage, dans les alentours de Villa
Nova da Rainha, entre Carregado et Azambuja, ou si nous
explorons les couches de grès pliocènes (?) entre les villages
de Barquinha et de Tancos, nous rencontrons la quartzite
en éclats et fragments analogues aux formes provenant des
kioekkenmoeddings et tellement, que le travail que ces subs-
tances révèlent paraît provenir du même ouvrier.
Un autre fait également remarquable, c'est que l'hom-
me des kioekkenmoeddings de la vallée du Tage employait
assez abondamment l'os pour son outillage.
L'attention de l'archéologue doit donc se porter sur le
fait du travail humain des pièces de quartzite contenues dans
la masse de ces kioekkenmoeddings, travail du reste très
grossier, mais dont l'origine intentionnelle nous paraît hors
de doute et de controverse sérieuse. Il est vrai que les mar-
ques de ce travail ne sont pas aussi évidentes que l'auraient
désiré les esprits théoriques; mais pour celui qui étudie de-
puis longtemps le travail de l'homme sur les pierres taillées
rencontrées dans les dépôts et les gisements préhistoriques
du Portugal, il ne saurait être douteux que la plupart des
éclats de quartzite renfermés dans les kioekkenmoeddings de
la vallée du Tage, sont le produit du travail intentionnel de
l'homme qui a entassé ces monticules.
Si l'on ne saurait douter du travail intentionnel révélé
,ï Google
par les silex qui, dans ce kioekkenmoedding, accompagnent
les éclats de quartzite, aurait-on le droit de nier l'interven-
tion humaine dans ceux-ci, seulement parce que le travail
s'y montre plus imparfait?
Dans ces stations nous avons aussi rencontré des pla-
ques de grès fin micacé, assez dur, de 3 à 4 décimètres
de longueur, ayant des dépressions courbes et uniformes
sur les deux faces, comme si elles avaient été produites par
l'effet de la trituration de substances dures. Pour nous prou-
ver que celui-ci a été en effet l'usage de ces plaques, nous
avons trouvé tout près un pilon ou pierre de forme prisma-
tique, usée à l'une de ses extrémités, vraisemblablement
par le travail d'écraser et de triturer.
Les hommes qui ont accumulé ces monticules n'aban-
donnèrent par leur station: ils se firent des sépultures dans la
masse même des détritus qu'ils avaient entassés, et ainsi il
nous a été permis de reconnaître les représentants de cette
civilisation primitive et d'apprécier les caractères morpho-
logiques de leurs squelettes.
Dans la première exploration que nous y avons fait faire
it y a quinze ans, les ossements découverts appartenaient
' à une quarantaine de squelettes humains. Par les explo*
rations de cette année, le résultat a indiqué un nombre au-
dessus de 120, en y réunissant le produit des deux kioekken-
moeddings d'Arruda et de Moita do Sebastiâo. Ce qui est
certainement remarquable, c'est la présence d'un si grand
nombre de squelettes dans la partie explorée de Cabeço da
Arruda et de Moita do Sebastiâo. A mon avis, c'est là un
fait unique dans des gisements de ce genre. Mais quelle le-
çon et quelles inductions pouvons-nous tirer des conditions
particulières où ces squelettes ont été rencontrés ? Auprès
d'aucun d'eux nul instrument en pierre ou en os n'a été
,ï Google
286
trouvé, exception faite de plusieurs petits couteaux en silex
près de quelques squelettes; nous n'avons vu non plus aucun
indice que dénonçât l'existence d'une cérémonie, d^un hom-
mage aux morts que Ton y ensevelissait, tels qu'on en voit
dans les dolmens, les tumuli, et autres lieux de sépulture de
l'époque de la pierre polie; on n'y trouva non plus nul orne-
ment, nulle amulette, nul petit objet de ce genre, même en
passant les terres au crible.
En voyant des foyers à différents niveaux dans la pa-
roi de la tranchée que nous avons fait creuser, foyers au-
tour desquels ces hommes se groupaient pour faire leur re-
pas quotidiens, il n'y a pas Heu de croire qu'ils fissent les in-
humations près de ces endroits; probablement ils choisis-
saient dans le kioekkenmoedding un endroit éloigné de 20
ou 40 mètres pour y enterrer les morts, et lorsqu'ils croyaient
que les cadavres étaient consumés, ils allaient occuper de
nouveau la surface du sol au-dessus des sépultures, en des-
tinant les endroits abandonnés pour servir à leur tour aux
irihumations. Le fait de ce que les squelettes se trouvent
ainsi peu dispersés, celui de l'observation d'une certaine orien-
tion dans leur disposition, leur aligncmen t approximatif nous
fait supposer qu'il existait un certain système dans le mode
d'ensevelir leurs morts. En outre il parait aussi que quelques-
uns des morts étaient placés accroupis, et d'autres étendus
de leur long; au moins la disposition des membres relative-
ment au tronc permet de supposer ces deux modes d'en-
terrement. En tout cas il ne faut pas oublier que les mou-
vements du sol après ces ensevelissements et d'autres cau-
ses encore, ont dû troubler la disposition particulière des
squelettes et altérer dans un grand nombre de cas la dis-
position de leurs diverses parties.
Les coquilles du monticule de Cabeço da Arruda ap-
,ï Google
28?
partiennent en général aux mêmes espèces rencontrées dans
le kioekkenmoedding de Quinta da Sardinha, dont les genres
ont été énumérés. En ce qui concerne les mammifères re-
présentés par les restes d'animaux obtenus de ce monticule,
nous avons trouvé les genres suivants: Bos, Cerviis, Ouis,
Eqtius, Sus, Canis, Felis, Mêles, Viverra,, Lepus. Nous avons
aussi rencontré des os d'oiseaux et des restes de poissons.
Tels sont, les genres d'animaux, que l'homme de ces
stations paraît s'être appropriés pour sa nourriture, dont en
tout cas la base consistait en Liitraria compressa et Cardium
eduîe.
Voyons maintenant de quels ustensiles il seservaitpour
la préparation des aliments, vu l'emploi des âtres et du grand
usage qu'on faisait du feu. D'après l'état des coquilles ren-
contrées, les mollusques devaient être mangés crus ou bien
à peine échauffés, car on a trouvé beaucoup de valves non
séparées, et la plupart non altérées par te feu. Quant à la
chair des vertébrés, on la préparait par l'exposition directe
au feu, comme il paraît être démontré par une grande par-
tie des os de bœuf, cerf, cheval, etc. que l'on rencontre brû-
lés. Quoiqu'il en soit, dans le kioekkenmoedding que nous
avons exploré sur une si large étendue, nous n'avons pas en-
core rencontré, comme nous venons de le dire, un seul frag-
ment appartenant à quelque vase en terre. Dans son indus-
trie encore si arriérée, l'homme de nos kioekkenmoeddings
ignorait complètement les rudiments les plus grossiers de
l'art du potier, quoique l'argile plus ou moins cuite de leurs
foyers eût dû éveiller leur attention sur les propriétés de
cette substance et suggérer son emploi pour en faire des
vases.
Dans une communication faite au Congrès par M. Paula
e Oliveira, dans la 7*"" séance, touchant les crânes des sta-
,ï Google
a88
lions préhistoriques du Ponugal, l'opinion a été exprimée,
que les hommes des kiockkenmoeddings de la vallée du Tagc
étaient des dolichocéphales et des brachycéphales, repré-
sentant donc, par là, deux races distinctes.
Celte question est assez importante et assez difficile à ré-
soudre pourqu'on ne la traite pas avec toute la circonspec-
tion nécessaire. En effet il faut s'abstenir'de hasarder là-des-
sus des opinions, sans les réserves faites par M. Pauls e Oli-
veira. Nous espérons, cependant, qu'après avoir obtenu un
plus grand nombre d'e.templaires, on pourra arriver à for-
muler un jugement à l'égard des races auxquelles on doit les
kioekkcnmoeddings de Mugem et de Salvaterra.
Mais quelles que soient les races auxquelles on puisse
rapporter ces hommes, il me semble que leur apparition
dans nos régions, correspond au commencement de l'épo-
que néolithique, où, géologiquement parlant, à la fin du
dernier mouvement ascentionnel de la partie occidentale de
notre pays. Ce fait, une fois prouvé, suffirait pour détermi-
ner l'âge de nos kioekkenmoeddings.
Enfin, n'étant pas possible de donner maintenant une
notice de tous les kioekkcnmoeddings de la vallée du Tage,
nous terminerons cette communication par les renseigne-
ment suivants:
i" Les couches tertiaires sur lesquelles reposent les
kioekkenmoeddings, ne contiennent pas de cailloux d'un vo-
lume supérieur à celui d'une olive, et par conséquent tous
les cailloux et toutes les pierres taillées, qui se trouvent
dans ces monticules, ont été transportés d'autres localités et
façonnés par les hommes des kioekkenmoeddings.
2° Les éclats de quartzite, qui ont servi à ces hommes
sont absolument semblables à ceux qui se trouvent dans
une partie des couches pliocènes et quaternaires du pays.
,ï Google
sSg
3* Les petits couteaux de sUex trouvés dans ces dépôts,
et les plaques de grès fin micacé ont été très probablement
transportés du nord du Tage; le silex provient peut-être des
couches tertiaires miocènes de Santo Antao do Tojal et de
Runa, qui contiennent une grande quantité de cailloux de
cette substance, et les grès, des couches des étages supé-
rieurs du terrain jurassique des environs d'Arruda.
4" Les couteaux de silex sont petits, d'un travail im-
parfait et, en général, n'ont aucune ressemblance avec ceux
qui se trouvent dans les cavernes et dans les dolmens de
l'époque de la pierre polie, que j'ai explorés.
5° On n'a encore trouvé dans aucun des kioekkenmoed-
dings une seule hache ou outre objet analogue en pierre po-
lie, qui puisse rappeler ceux des dolmens et des stations
humaines qui appartiennent à l'époque néolithique.
6° On n^a jamais rencontre dans ces kioekkenmoeddings
le moindre indice de poterie qui puisse être attribuée à l'épo-
que de leur formation.
7° On n'y a pas non plus rencontré un seul objet qui
puisse être considéré comme ornement.
8° D'après l'examen fait des squelettes à l'occasion de
l'exumation on n'a pas rencontré le moindre indice d'an-
thropophagie.
g" Enfin, on n'a trouvé aucun os qui puisse dénoncer
la présence d'animaux domestiques, exception faite de quel-
ques mandibules de chien.
M. Cartailhac: J'appelle l'attention du Congrès sur
un fait bien curieux! En Danemark on a discuté longtemps
pour établir si les kioekkenmoeddings étaient contemporains
des dolmens ou plus anciens. La question est singulièrement
,ï Google
difficile, puisq
u Tage, aussi bien que dans les stations néo-
t la Section Géologique possède le contenu.
,ï Google
EXPUGATIOK DES FLANOHEB
Vue des squelettes mis â découien par les fouilles faites dans le
kioekkenmoedding de Cabeço da Arruda.
PLANCHE m
I. Fragment d'un instrument en pierre polie (dîorite) avec un
Ion de sciage fait avec une scie de silex. (Cette pièce ne |
vient pas des kioekkenmoeddîngs, elle a élé trouvé dan
environs de Sacavem).
1. Plaque de gris fin micacé très usée par le frottement a;
servi de meuie sur ses deux faces, et un pilon ou mol
formée par un caillou roulé de quartzite, de forme st
ellipsoïdale aplatie ^ tronqué et aussi très usé â l'un des d
bouts. (Ces deux pièces ont été trouvées séparées dan
kioekkenmoedding de Moi ta do Sebasiiâo).
3. Fragment de bois de cerf scié en biseau _el cassé à la poi
(Cabeço da Arruda).
4 et 6. Spatules en os. (Même provenance).
S, Portion de ramure de bois de cerf dont on a scié un andou
près de la base; elle est perpendiculairement sciée à I'
de ses extrémités et sciée et usée obliquement à l'an
(Même provenance).
.ïGoogle
PLANCHE IV
Fig. 7, Nucléus en siles, dont on a enlevé une succession de lames en
frappant toujours du côté de la base.
8. Poinçon en os.
g. Caillou plat de roche amphiboltque arrondi et usé par l'eau,
avec trou de suspension; probablement porté comme orne-
ment. (Il a été trouvé détaché à la surface du dépôt).
lo. Portion d'un métacarpien d'oiseau façonné à l'une des extré*
mités.
1 1 a 14. Petits couteaux en silex.
i5. Éclat d'os façonné en pointe.
16 à 26. Pointes de flèches en silex de forme rhomboïdale de diffé-
rents types, a tranchant transversal. (Tous les objets repré-
sentés par les fig. 7 a 26 proviennent du kioekkenmoed-
ding de Cabeço da Arruda).
a7. Scie en silex retouchée sur tout le pourtour du côté élevé.
(Cette pièce unique provient de Paul, près de Cabeço da
Arruda, Elle a été trouvé à la surface du sol).
,ï Google
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D,„i,„db,Google
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D,„i,„db,Google
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C, BiBEino.
l»Mfe^
Uiï. PiTia.TnT<su do Condt d« Smin 4.
DigitizsdbyGOOgle
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NOTES
SUR LES OSSEMENTS HUMAINS
QUI SE TROUVENT DANS LE MUSÉE DE L.\ SECTION GÉOLOGIQUE DE LISBONNE
M. F. DE PaULA E OOVEIRA
Profitant de l'autorisation que M. Carlos Ribeiro, l'ex-
cellent directeur de la Section Géologique, m'avait accordée
il y a environ un mois, de la façon la plus gracieuse, pour
étudier les ossements humains du musée d'anthropologie
de la Section Géologique, j'ai pris à tâche de faire ce tra-
vail, en m'appliquant principalement à l'examen et à la
mensuration des crânes, le temps m'ayant manqué pour
mener à bout une étude minutieuse des autres débris qui fi-
gurent dans notre collection anthropologique.
En présentant au Congres le résultat de mes observa-
tions, je m'occuperai principalement de décrire les différen-
tes races qui se trouvent réprésentées dans les séries du
■ musée; je ne traiterai en détail que des crânes intéressants
sous ce point de vue, c'est-à-dire, de ceux qui peuvent servir
comme des spécimens des dites races. Ceux-ci je les décrirai
suivant l'ordre de leur ancienneté ; autant du moins qu'on peut
.ïGooqle
2g2
leur assigner un âge probable, d'après les indices fournis
par la nature du sol où ils ont été trouvés, ou par les ob-
jets d'industrie qui les accompagnaient.
Parmi les crânes dont je parle, il en est un qui a été
trouvé à Valle do Areeiro, près Villa Nova da Rainha, dans
un terrain alluvial dont la formation, selon M. Carlos Ri-
beiro, remonte probablement à l'époque quaternaire. D'après
les indications fournies par les personnes auxquelles la dé-
couverte de ce crâne est due, il y a toute raison pour croire
qu'il est contemporain du dépôt qui le recelait. Cette cir-
constance, qui du reste n'a rien d'improbable, puisqu'on a
déjà trouvé en Portugal des débris d'industrie de l'homme
quaternaire, parmis lesquels quelques spécimens parfaite-
ment marqués des plus anciens types paléolithiques, cette
circonstance, dis-je, redouble l'intérêt qui s'attache à l'étude
de cette curieuse pièce, et lui vaut la première place dans
la description des exemplaires similaires de la collection.
De ce crâne (PI. i, i (i,è,c.)il reste à peine l'os frontal, les
pariétaux et l'occipital, et même ces derniers os sont brisés et
assez incomplets. Les sinus frontaux sont peu développés, les
bosses sourcilières peu proéminentes, le front est saillant mais
assez étroit, et son peu de largeur se trouve en dispropor-
tion avec la dilatation transversale des pariétaux (ind. front.
66,42). La voûte crânienne a une conformation arrondie,
avec cette particularité toutefois, que les pariétaux et l'occi-
pital se trouvent aplatis autour du lambda. On observe une
légère dépression au-dessus de l'angle externe de l'occipital.
On peut aussi mentionner, comme des caractères dignes
de remarque, la simplicité des sutures, la déviation en ar-
rière des bosses pariétales et la petite saillie de l'inion.
L'indice céphalique est 80,1 1 ; c'est donc un crâne sous-
brachycéphale d'après la nomenclature de Broca. A son peu
,ï Google
293
d'épaisseur, à ta proéminence de sa région frontale, aux for-
mes suaves de son contour, on reconnait qu'il a appartenu
à un individu du sexe féminin.
Une mâchoire qui a été trouvée dans le même dépôt,
auprès du fragment que je viens de décrire, devait appar-
tenir, selon toutes les probabilités, au même individu.
Dans cette mâchoire la branche montante gauche man-
que totalement, ainsi qu'une partie de la droite. L'oblitéra-
tion de quelques-uns des alvéoles et l'ouverture de l'angle
mandibulaire présentent des indices de sénilité. Le menton
est saillant, les apophyses géni bien visibles, la ligne my-
loïdéenne nettement dessinée. La légère introversion du go-
nion est, elle aussi, digne de remarque.
Le crûne dont je viens de traiter ressemble par plu-
sieurs de ses caractères au crâne n." 2 de Furfooz, décrit
par MM, de Quatrefages et Hamy {Cratiia Ethnies, p. 108).
Comme celui-ci, le crâne de Valle do Areeiro est sous-bra-
chycéphale, et il présente entre autres traits communs une
dépression caractéristique au dessus de l'angle externe de
l'occipital, quoique probablement cette dépression y soit
moins prononcée que celle qui s'observe sur la même région
dans la pièce de Furfooz.
En superposant les contours des deux cnlnes vus de
face, on voit que ces contours s'ajustent très exactement.
Pour les contours antéro-postérieurs l'ajustement toutefois
ne se fait plus d'une manière aussi parfaite. Le profil du
crâne de Valle do Areeiro s'élève un peu plus en avant; sa
courbe aussi est plus régulière que celle du crâne de Furfooz.
En comparant les mesures du crâne belge et celles que
j'ai pu prendre sur le crâne portugais, j'ai trouvé que les
deux séries numériques ne différaient que de très peu entre
elles, et en présence de ces analogies, il m'a semblé qu'il
1,(Mè^
n'y aurait de ma part aucune témérité de quatiSer ce der-
nier crâne comme appartenant à la même race brachycé-
phale ou sous-brachycéphale, dont le crâne de Furfooz n." 2,
à ce qu'il semble, passe pour être le spécimen le plus parfait.
Si ce rapprochement a autant de raison d'être que je
!e suppose, le sol portugais d'aujourd'hui a été habité dans
les temps préhistoriques les plus reculés par dts hommes
de la race de Furfooz, Cette occurrence vient confirmer
pour moi l'opinion des auteurs des Cranta Ethnka, qui,
-dans les particularités morphologiques d'un crâne masculin
brachycéphale provenant du kioekkenmocddings deCabeço
da Arruda •, près Mugem, voient l'indice de la fusion de deux
races, et l'une de ces races est précisément celle dont je
traite. Lekioekkenmocdding de Cabeço da Arruda appartient,
selon toute vraisemblance, au commencement de l'âge néo-
lithique; il ne faut donc pas s'étonner qu'on ait découvert
dans cette station les vestiges d'une race qui aurait vécu à
l'époque quaternaire sur les bords du Tage, ainsi que cela
est arrivé plus tard aux hommes de Cabeço da Arruda.
Après la description de la pièce de Valle do Areeiro,
celle des crânes des kioekkenmocddings de Mugem s'ensuit
' Ce crâne, dùposé au musée de l'École Polyiechnique de Lisbon-
ne, provient d'une premÎÈre exploration exécutée il y a environ quinze
ans ; il a étii décrit par M. Pereira Ja Costa dans un mémoire intitulé :
Noticia sobre os esqueletos humanos descobertos no Cabeço da Arruda.
Lcsfig.5a,b,c, (PI. m), qui Je représentent, ont été obtenues en réduisant
â Vi '*;5 lithO!^raptiies qui accompa(;ncnt la monographie de M. Costa. !.a
fig. 5c ne reproduit pas la norma verlicalis du même crâne telle qu'elle
se trouve dans le mémoire citéi le plan glahello-lambdoïdien s'y trou-
vant évidemment incliné relativement au plan de projeciion, j'ai recti-
fié le dessin en traçant au stéréographe le contour du modèle en plâtre
que le musée possède.
^
„Google
naturellement dans ce travail. Ces crânes remontent évi-
demment à une époque bien plus reculée que celle des os-
sements humains qu'ont livré les fouilles des cavernes et des
sépultures mégalithiques. Outre cette circonstance, ils mé-
ritent aussi le plus grand intérêt à cause de la notable va-
riété de formes qu'ils présentent, parmis lesquelles il y en a
qui se sont conservées dans notre sol jusqu'à la fin de l'âge
néolithique, comme je le ferai remarquer.
J'ai dit que les auteurs des Crania Ethnica ont trouvé
dans les formes d'un cr3ne de Cabeço da Arruda le vestige
de deux types, dont l'un serait le sous-brachycéphale de
Furfooz. L'autre type, d'après les mêmes anthropologistcs,
est celui de Canstadt, qui se révèle principalement par la
proéminence des bosses sourcilières.
Le caractère que je viens de mentionner ne s'observe que
rarement sur les crânes complets de la série de Mugem;
cette circonstance, pourtant, ne doit être attribuée qu'au petit
nombre des crânes masculins. Contrairement à ce qu'il ar-
rive d'ordinaire, les crânes féminins figurent en grande ma-
jorité dans cette série.
La brachycéphalie est rare aussi chez les crânes de Mu-
gem. Outre le crâne dont je viens de parler, il n'y a qu'un
autre crâne brachycéphale de la même provenance. Ce crâne
(PI. IV, 7 d!, b.) a beaucoup d'analogie avec celui qui a été dé-
crit par M. Costa; toutefois il présente relativement à celui-ci
quelques diH'érences, dont les plus refnarquables consistent
dans l'effacement des bosses sourcilières, et dans l'exagéra-
tion de la brachycéphalie, qui est vraiment extraordinaire
(ind, cépli. 97,3/), quaique probablement elle ait été un peu
augmentée par la déformation posthume. La première de
ces différences est d'ailleurs e\pliquable par l'influence du
sexe, le sujet étant féminin, L'étroitesse du front, coexistant
,ï Google
39^
avec réiargissement transversal des pariétaux, et avec un
vaste aplati^ement dans ta région postérieure de ta voûte,
sont tes caractères les plus frappants qu'on peut observer suu"
nos deux crânes brachycéphates : je rappellerai ici, que des ca-
ractères analogues ont été signalés par Broca sur les crânes
brachycéphales de la série d'Orrouy, que MM. de Quatrefages
et Hamy rattachent au groupe de Furfooz. D'après la descrip-
tion de Broca, il me semble que les crânes brachycépha-
les de Mugem se rapprochent notablement de ceux d'Or-
rouy.
Un autre crâne de Mugem, très remarquable aussi, se
trouve représenté dans les^g. S a,b^c (PI. i). Ce crâne est
sous-brachycéphale (Jnd. céph. 82,56); ses arcades sourciliè-
res sont modérément développées et il présente une légère
dépression à l'endroit de la glabelle. La partie antérieure de
son os frontal, au lieu d'être proéminente et arrondie comme
chez les deux crânes brachycéphates de la même série, est,
au contraire, aplatie et fuyante, formant inclinaison en ar-
rière immédiatement après la région soiircilière. Les parié-
taux sont peu dilatés transversalement dans leur région pos-
térieure, leur convexité est tout-à-fait régulière, la courbe
antéro-postérieure est, elle aussi, très-douce le long de la
suture sagittale, et se prolonge de même dans la partie su-
périeure de l'occipital. La portion sous-iniaque de ce der-
nier os est plate, et sa superficie est très peu inclinée par
rapport au plan alvéolo-condylien. Les apophyses mastoïdes
sont peu volumineuses.
La face est solide et épaisse, très prognathe, et elle a
une largeur considérable (ind. fac. 59,58). Les os malaires
sont projetés latéralement, inclinés d'arrière en avant, les
orbites présentent un contour arrondi, les fosses canines
sont effacées.
^r\
„Google
297
Dans la mâchoire inférieure, épaisse et robuste, on re-
marque, la saillie du menton, la convexité du bord inférieur
des branches horizontales, la petite excavation de la courbe
sigmoïde, le volume considérabla des condyles, l'introver-
sion de l'angle mandibulaire.
Les caractères que je viens de mentionner ne s'obser-
vent réunis sur aucun autre des crânes préhistoriques du
musée. Ces caractères sont en opposition avec ceux du type
européen; mais ils rappellent en quelque sorte les traits pri-
vatifs de quelques races asiatiques appartenant au groupe
mongolique.
Tous les autres crânes de Mugem qui jusqu'à présent
ont été déposés au musée, et se trouvent en état d'être me-
surés, sont franchement dolichocéphales. Ceux qui portent
les n,"* 2, 3, 4 et 5 sont très peu volumineux, leurs sutures
sont simples, leurs bosses sourcilières à peu près effacées.
Ils ont encore de commun les caractères suivants: élévation
de la voûte, peu d'inclinaison du frontal dans sa partie an-
térieure, courbure régulière du même os au-dessus des bos-
ses frontales et dans la direction de la suture coronale,
courbe antéro-postérieure des pariétaux très peu accentuée
dans les deux tiers antérieurs de la suture sagittale, cour-
bure brusque de ces os de haut en bas au commencement du
tiers postérieur de la même suture, aplatissement de la ré-
gion postérieure des pariétaux et supérieure de l'occipital,
bosses pariétales élevées, écaille temporale circulaire, apo-
physes mastoïdes peu développées. Ces caractères s'obser-
vent plus nettement sur le crâne n." 3, {Jîg. 3 a, b., c. PI. ii).
Les faces sont longues, prognathes, les orbites quadran-
gulaires. Dans la mâchoire il faut noter la saillie du menton,
qui est triangulaire, et l'extro version du gonion. Les différen-
ces qu'on observe entre ces crânes sont peu considérables.
Après l'excursion à Mugem, on a reçu à la Section une
portion considérable de débris de squelettes, que les fouilles
récemment pratiquées dans les kioekkenmoeddings avaient
mis en lumière, et qui y avaient été conservés jusqu'au jour
de l'excursion, pour que les membres du Congrès pussent
les examiner en place. Des crânes nouvellement arrivés la
plupart se trouvent en très mauvais état, et je n'ai pas disposé
du temps nécessaire pour en faire Pétude complète ; toute-
fois, sur les pièces les moins détériorées, j'ai reconnu des
caractères analogues à ceux des quatre crânes dont je viens
de traiter, quoique chez quelques-uns les arcades sourciliè-
res soient assez développées. On a reçu une grande portion
d'os longs, quelques fragments d'os iliaques et de côtes. Le
rapide examen que j'ai fait de ces débris m'a permis de re-
connaître que plusieurs des humérus sont perforés, que les
fémurs affectent souvent la forme dite à colonne, et que les
tibias sont fréquemment platycnémiques, ces deux derniers
caractères coexistant parfois avec le premier sur le même
squelette.
Tous ces os, par l'exiguïté de leurs dimensions, indi-
quent que les hommes de Mugem étaient de très petite
taille.
Parmi les crânes il y en a un qui, par sa conformation
singulière, mérite que j'en fasse une mention spéciale. Ce
crâne (PI. II. 4 a, è, c), le seul complet parmi ceux qui ont
été reçus dernièrement, ne figure que depuis hier dans la
série de Mugem, ou il porte maintenant le n." 6. Il est do-
lichocéphale; sa voûte, cependant, s'élargit considérable-
ment en arrière, les pariétaux, se courbant brusquement
au milieu de leur longueur, descendent ensuite verticale-
ment en formant une surface aplatie, et l'aplatissement se
prolonge encore sur une assez grande extension de l'écaillé
,ï Google
299
occipitale. On retrouve donc chez ce crâne dolichocéphale
la même particularité morphologique relevée sur les deux
crânes brachycéphales de la même provenance. Néanmoins
malgré ces indices, qui paraissent révéler le type de Fur-
fooz, les traits qui prL\l' minent chez ce crâne sont analo-
gues à ceu'i qu'on observe sur les n." 2, 3 et 5 de la même
série: il se rapproJic de ceux-ci non seulement par sa do-
licocéphalie, mais surtout par la conformation de sa face.
Finalement, des caractères privatifs d'une autre race, celle
de Canstadt, viennent compliquer encore la morphologie de
cette remarquable pièce; ces caractères sont le développe-
ment considérable des arcades sourcilières, la forme fuyante
du front et l'aplatissement de la région supérieure de la
voûte.
Les autres crânes que l'on conserve dans la Section
appartiennent à l'âge néolithique, la plupart probablement à
la tin de cet âge.
On retrouve chez ces crânes les deux formes brachycé-
phale et dolichocéphale, qui sont les prédominantes dans la
série de Mugem. Ces formes s'y observent encore assez pu-
res, surtout chez les crânes de Casa da Moura (Cesareda)
et de Monte-Junto, la principale différence consistant en ce
que le volume de ceux-ci se trouve être bien plus considé-
rable. Cette circonstance est très digne de remarque.
C'est dans un crâne de la station préhistorique de Licêa
(PI. IV, 9a,é), que l'on observe la forme brachycéphale en
plus grande pureté. Ce crâne est celui d'un individu du sexe
féminin.
Le type masculin peut être étudié sur un crâne prove-
nant de la caverne de Carvalhal, près de la Serra de Turquel.
Ce crâne réprésenté par les figures G a, i, c, (PI. m) est
très semblable par sa conformation générale au crâne bra-
^(^1^
3oo
chycéphale masculin de Mugem; il est toutefois bien plus
volumineux. L'étroitesse de la région antérieure de la voûte,
l'élargissement des pariétaux, le vaste aplatissement posté-
rieur embrassant une grande extension des pariétaux et
de l'occipital, tous ces caractères, que j'ai relevés en trai-
tant des crânes brachycéphales de Mugem, se retrouvent
chez les crSues de Garvalhal et de Licéa, Seulement la dé-
pression sus-mastoïdéenne, considérée comme privative du
type de Furfooz, ne s'observe pas sur le crâne de Garva-
lhal; quant à celui de Licèa, si ce caractère y existait pri-
mitivement, Pétat actuel de la pièce ne permet pas de le
constater.
La même forme crânienne se retrouve assez pure dans
le crâne n.° 2 1 de Casa da Moura (PI. iv, 8<a, b), et dans
le n." 4 de MonteJunto, tous les deux féminins. Des ca-
ractères semblables, quoique moins accentués, s'observent
encore sur quelques autres crânes de ces deux séries.
La forme dolichocéphale est toutefois celle que l'on ob-
serve plus fréquemment chez les crânes de l'âge néolithique.
On la retrouve bien accentuée, entre autres, dans le crâne
n.* 2 de Casa da Moura. (PI. v, loa, i, c.) Il est inutile que
je fasse une description détaillée de ces crânes; je me borne-
rai à dire qu'ils présentent une conformation très semblable
à celle des dolichocéphales de Mugem, tout en étant beau-
coup plus volumineux. Ce caractère seul suffit pour les faire
bien distinguer.
Il est bon de dire à ce propos que les particularités
anatomiques signalées par MM. de Quatrefages et Hamy
sur deux ou trois maxillaires de Casa da Moura, dont la
description et les dessins se trouvent dans le mémoire de
M. Delgado intitulé Noticia dcerca das grutas de Cesa-
reda, ne s'observent pas sur les pièces similaires qui ont
'^
„Google
3oi
été exhumées de la même caverne dans une fouille plus ré-
cente. Les caractères dont je parle consistent dans l'exagé-
ration de la proclivité symphysaire et dans l'effacement du
menton, d'où il résulte que la perpendiculaire abaissée de la
partie antérieure du bord alvéolaire tombe en dehors du corps
de la mâchoire. Parmi les nombreux maxillaires de Casa da
Moura que l'on conserve à la Section, il n'y en a pas un seul
qui présente cette disposition.
Les cavernes de Cesareda et de Monte-Junto ont fourni
une ponion considérable d'os longs. Malheureusement ces
os ont été trouvés mêlés, et pour la plupart fracturés, en
sorte qu'il devient impossible d'en déterminer les proportions;
on reconnaît toutefois qu'ils ont appartenu a des individus
plus hauts de taille que ceux de Mugem. Les fémurs et
les tibias présentent fréquemment les détails de conforma-
tion que j'ai signalés en traitant des squelettes des kioekken-
moeddings; les humérus perforés sont proportionnellement
moins nombreux.
Je dois insister sur une circonstance que je crois im-
portante, surtout après ce que j'ai entendu dire dans une
des séances antérieures à quelques membres du Congrès, à
propos de la ressemblance qu'ils ont remarquée entre nos
objets archéologiques de l'âge néolithique, et ceux du mê-
me âge trouvés en Ecosse et en Irlande.
D'après la description de quelques crânes préhistori-
ques écossais et irlandais, faite par le professeur Huxley
dans le remarquable ouvrage Prehistortc remains of Caith-
ness, il me semble que la plupart de ces crânes, par leurs
formes et par leurs dimensions, ont des analogies très in-
times avec plusieurs des crânes de nos cavernes, surtout
avec ceux de Monte-Junto, chez lesquels s'observe avec
plus de fréquence l'indice du mélange des dciuc races, bra-
pogle
302
chycéphale et dolichocéphale, dont je me suis plus panicu-
licrcment occupe.
Les caractères mixtes des deux types mentionnés se
manifestent encore chez les crânes de la série de Palmella.
Chez la plupart de ceux-ci l'indice céphalique se maintient
assez élevé, sans toutefois dépasser jamais la limite de la
sous-brachycéphalîe.
Pour terminer cette rapide description des crânes de
notre collection il me reste à parler des crânes des cavernes
de Cascaes.
* On ne retrouve pas parmi les crânes de Cascaes le
type brachycéphaie qui figure dans quelques-unes des au-
tres séries de la Section. Ces crânes sont dolichocéphales,
rarement sous-dolichocéphales, volumineux; ils ont un front
spacieux, une voûte régulièrement contournée (PI. v, 1 1 ii,
i, c). Les faèes sont larges et prognathes, les orbites qua-
drangulaires. Leur type est très uniforme: les différences
qu'ils présentent entre eux peuvent être considérées comme
de simples variations individuelles.
Dans les maxillaires, il y a à noter principalement la
saillie du menton, la forme arrondie et l'cxtrovcrsion du
gonion.
En essayant d'assigner à ces crânes une place dans
la classification, je ferai remarquer que les caractères qui
les distinguent s'observent en grande partie dans la race
de Cro-Magnon. J'en dirai autant au sujet de quelques au-
tres crânes dolichocéphales du musée qui, par leur morpho-
logie, se rapprochent de ceux de Cascaes.
Les crânes dont je parle ne reproduisent pas, il est
vrai, d'une manière parfaite tous les caractères qu'on attri-
bue à cette race. Leur prognathisme sous-nasal est plus
considérable; les orbites, par l'abaissement de leur angle
,ï Google
3o3
externe inférieur, présentent un contour trapezoïdc; jamais
aussi on n'observe chez eux l'enfoncement profond de la
racine du nez. Mais, malgré ces différences, par leur con-
formation générale ils se rapprochent notablement de la race
mentionnée, et je crois qu'on doit les y rattacher.
A ce propos, je dirai que les os longs de la même pro-
venance présentent des caractères analogues à ceux qui se
rencontrent chez les squelettes de Cro-Magnon : ainsi on y
remarque fréquemment la platycnémie du tibia, Pépaississe-
ment de la ligne âpre du fémur et la torsion de l'humérus,
ce dernier os n'étant jamais perforé.
Je rappellerai aussi, comme une circonstance qui donne
un certain appui à ma supposition, que le type de cette race
a déjà été signale par quelques anthropotogistes sur des
crSnes provenant de différentes stations préhistoriques de
l'Espagne. Selon MM. de Quatrefages et Hamy, la même
forme crânienne s'observe encore aujourd'hui, quoique non
pas d'une façon générale, chez les Basques; or si quelque
part le type des anciens habitants de l'ouest de l'Europe a
pu se maintenir tant soit peu à l'état de pureté jusqu'à nos
jours, c'est parmi les Basques qu'il est raisonnable de le
chercher.
Rien que par ces témoignages, il y aurait lieu de pré-
sumer que la race de Cro-Magnon eût eu de ses représen-
tants aussi, aux temps préhistoriques, dans le sol occidetv
tal de la Péninsule ibérique.
Cette considération vient donc confirmer ma manière
de voir. D'ailleurs, les particularités secondaires qui diffé-
rencient les deiix formes crâniennes sont, à ce que je pense,
parfaitement expliquables comme étant des modifications
produites dans la race primitive par les croisements, ou par
les influences du milieu.
.,C'
3o4
On voit dans le tableau ci-joint les mesures de quel-
ques crânes, qui représentent assez purs les différents types
dont il a été question dans cette étude.
M. ï)E Qlatrefages: M, Paula e Olivcira est dans le
vrai lorsqu'il rapproche certaines populations ibériques de
la race de Cro-Magnon. Nous avons montré depuis long-
temps, M. Hamy et moi, que cette race était plus ou moins
représentée dans le pays Basque, en Algérie, aux Canaries,
oij M. Verncau l'a retrouvée encore vivante. La Péninsule
ibérique ne peut guère qu'avoir reçu sa part de ce sang sur
divers points de son territoire.
Toutefois, on ne saurait attribuer à cette race seule
tous les éléments dolichocéphales qui ont contribué à former
les populations actuelles, celles du Portugal en particulier.
En étudiant les crânes retirés des kioekkenmoeddings, j'y ai
trouvé un type dolichocéphale, absolument distinct de celui
de Cro-Magnon. La plupart de ces crânes sont malheureu-
sement déformés; mais l'un deux, placé dans la vitrine n° i,
est presque intact et permet d'apprécier facilement certains
traits que l'on reconnaît ensuite sans trop de peine sur les
spécimens qui ne sont pas trop altérés. Le caractère géné-
ral le plus frappant de ce crâne, c'est qu'il est très franche-
ment harmonique; il est dolichopse autant que dolichocé-
phale. La tète osseuse de Cro-Magnon, au contraire, est es-
sentiellement disharmonique; si elle est dolichocéphale, elle
est brachyopse. Chez elle la face est dilatée transversale-
ment outre mesure. Dans la tête portugaise dont je parle,
elle semble, au contraire, presque comprimée tant les pom-
,ï Google
: : : : : .g : : : : ; : : ; ; : : ;
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PaULA E OuVEIRi PI. L
I a, b, c. Crâne de Voile do Arietro.
a a, b, c. Crâne ».' / de Mugem.
Liih. PiTia Rua do Hsiib itt Vema. SO.
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Padla e ÛuvBmA.
3 a, b, c. Crâne n." 3 de Mugem.
4 a, b, c. Crâne n." 6 de Mugan.
LiUi. FiTÎi Kui dD loinbo d« 7nlo. DO.
dl .. , C.ooqIc
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PàBU. B OuVEIBi.
S a. b, c. Crâne brachycéphale masculin de Mugem.
S a, b, c. Crâne brachycéphale masculin de Carvalhal
' '"" " Uib Pana Rna da Miiita di îajai, 10.
.D,„i,„db,GoOgle
„Google
PI. m.
^ ». *. c Cran, àrachjrc^^,,,^^
D,„i,„db,Google
„Google
Pauu e Oliveira.
7 d, b. Crâne brach/céphale féminin de Mugem.
S a, b. Crâne n." 21 de Casa da Motira.
g a, b. Crâne de Ltcêa.
l Cnuiio lilh LiUi. dt l Liipold. Liibonnc
DigitizedbyGOOgle
„Google
Paula e Ouvbira.
10 a, b, c. Crâne n." a de Casa da Moura.
11 a, b, c. Crâne n." i de Cascaes.
Uù Fit» Rua do Kajil» de Tud, U-
,, Google
r
D,„i,„db,Goo<^le
3o5
mettes sont effacées. De plus, chez cette dernière, l'orbite
présente des caractères opposés à ceux de Porbite de Cro-
Magnon. Celui-ci est très allongé horizontalement, le diamè-
tre transverse étant de be^uconp plus grand que le diamè-
tre vertical. Dans la tête dont je parle, les diamètres orbi-
taires sont presque égaux.
Ces traits différentiels sont trop importants et trop bien
accusés pour que l'on puisse réunir à la race de Cro-Ma-
gnon les hommes qui les présentent. Ceux-ci appartiennent
à une race distincte.
Ces têtes à crâne et à face également allongés, m'ont
vivement rappelé l'un des quatre types basques que j'ai eu
occasion d'observer dans les environs de Cambo et sur les-
quels j'ai donné, il y a longtemps, quelques détails à la So-
ciété d'Anthropologie. Il me paraît évident que ces monta-
gnards du versant pyrénéen français se rattachent à l'an-
cienne race qui a laissé ses débris de cuisine et ses squelet-
tes sur les bords du Tage.
M. Henri Martin: J'ai noté dans laCastille la présence
d'hommes grands, élancés, forts, musculeux, osseux, au nez
souvent aquilin, qui ne sont pas sans analogie avec un type
sémitique exagéré, bien que sans rapport avec les Arabes.
Peut-être ce sont là des représentants d'une race anti-
que préhistorique*.
' V. sur ce même sujet la communication de M. Henri Martin, «Du
type ethnique et anthropologique des Ibères» et aussi p. ao5 et ao6.
""^
LES TRAITS CARACTÉRISTIQUES
DE L'ÉPOQUE NÉOLITHIQUE EH FRANCE
TU^ qu'ils sont KÉUNIS DANS LES STATIONS DE LA CHAMP ACNE
M. LE u,\RON J. DE Baye
Le grand nombre de gisements où l'époque de la pierre
polie a été étudiée et reconnue forme un vaste ensemble dé-
signé sous ia même dénomination. Les éléments qui com-
posent la civilisation néolithique, examinés séparément, pré-
sentent un travail d'analyse attendant une synthèse qui per-
mette de juger les rapports existant entre les différentes sta-
tions attribuées à la période de la pierre polie. Nous possé-
dons dans les groupes de la Vallée du Petil-Morin, une
source abondante de documents propres à faire connaître
un des aspects les plus importants de la période néolithique.
La région a été le théâtre du développement d'un centre
intéressant de la famille humaine.
Si on en juge par le nombre des grottes artificielles, par
la quantité des débris humains, par le travail recherché des
instruments, par le soin des aménagements, les habitants
primitifs de la Champagne ont longtemps séjourne dans la
contrée. Il est très probable qu'ils ne l'abandonnèrent jamais
dans la suite, d'une manière absolue.
,ï Google
3o7
Le premier trait distinclif de la civilisation néolithique,
ce sont les grottes artificielles pratiquées dans le banc de
craie naturel au pays. Ces grottes réunies en grande nom-
bre, habilement préparées, d'un accès avantageusement mé-
nagé, impriment un caractère bien tranché à ces intéressan-
tes stations. La physionomie de la vie troglodytique présente
en Champagne un aspect franchement dessiné qui ne se re-
trouve point dans les monuments néolithiques qui offrent le
plus de ressemblance avec elle. La nuance du troglodytisme
offre ici une perfection qui ne permet pas de le comparera
l'ère des cavernes, telle que la période quaternaire nous les
fait connaître. Les grottes bien retaillées, soigneusement
disposées, solidement fermées, ne sont plus ici de simples
abris, mais de véritables demeures, malgré leur simplicité.
Il n'y a pas lieu de s'étonner du choix de pareilles habita-
tions même en pensant au progrès considérable accompli à
l'époque de la pierre polie. Nous voyons en effet que les ca-
vernes naturelles, primitivement habitées à l'époque paléo-
lithique, ont été elles-mêmes fréquentées par l'homme de la
pierre polie, qui a laissé des traces évidentes de son passage
au-dessus des couches géologiques anciennes.
Au point de vue anthropologique la population qui ha-
bitait les grottes artificielles de la Champagne ne représente
plus déjà une race pure. Il y a un grand mélange et plu-
sieurs types anciens s'y retrouvent mélangés intimement à
un élément nouveau. Ces caractères variés ont été recon-
nus par M. Broca et par M. de Quatrefages.
Les sépultures sont généralement pratiquées avec une
méthode régulière qui revêt par sa persistance soutenue la
dignité d'un rite funéraire; partout les restes de l'homme
sont traités avec un attentif respect. Le plus ordinairement
les sépultures ont lieu dans des grottes spéciales dont la des-
,ï Google
3o8
tination était purement funéraire. Dans d'autres cas, une
vaste caverne qui avait primitivement servi d'habitation re-
cevait un sujet unique ou deux. Cette exception paraît un
privilège réservé à des personnalités en honneur. Le mode
de sépulture était Tinhumation.
L'habitude de donner la sépulture dans un endroit spé-
cialement affecté aux inhumations caractérise aussi la pierre
polie. Le mobilier funéraire régulièrement disposé, composé
d'objets de choix d'une catégorie spécialement adoptée qui
se retrouve constamment, caractérise également la période
néolithique. Cette innovation bien évidente constitue une
dilTérence notable avec la pratique de Pépoque quaternaire
qui ensevelissait ses morts dans la grotte habitée.
Il est à peine nécessaire de mentionner la hache polie,
puisqu'elle est, par sa nature, l'instrument distinctif de Pépo-
que néolithique. Nous dirons cependant que nulle part, elle
ne justifie aussi bien sont rôle caractéristique que datis la
période qu'elle a servi à désigner. La hache polie, emman-
chée, disposée pour l'usage ne remplit dans aucune contrée
un rôle aussi grand, aussi varié, aussi privilégié, que dans
les stations de la Champagne. Les haches ont même été
fréquemment sculptées sur les parois des grottes.
La sculpture est aussi un des traits caractéristique des
stations de la Vallée du Petit-Morin. Il ne s'agit pas ici de
ce genre de sculpture si remarquable que l'on trouve dans
les gisements quaternaires. Ce sont des reliefs exécutés dans
la craie vive, comme ornements des grottes et représentant
des sujets variés. Les sculptures sont peu connues à l'épo-
que néolithique. Celles de nos stations sont encore uniques
en ce moment. Ces essais de sculpture, bien que d'une nuance
très primitive et dépourvus d'art, ne révèlent pas moins une
inspiration et un certain degré de civilisation.
,ï Google
3o9
Les roches étrangères employées dans le confectionne-
ment des haches, distinguent les stations de la Champagne.
Les haches en matières exotiques sont en assez grand nom-
bre, bien qu'il y air tout lieu de croire qu'elles ont été im-
portées à l'ctat parfait, elles ne sont pas moins une partie
importante de l'outillage néolithique de la Vallée du Petit-
Morin.
Les parures occupent une large place dans le mobilier
des grottes de la Champagne. La grande quantité de bijoux
n'est certainement pas exclusive à ces stations, mais néan-
moins l'abondance et la variété des objets est caractéristi-
que et dénote un progrès incontestable. Les pendeloques en
schiste sont multipliées. Les colliers en craie se retrouvent
dans chaque grotte.
La flèche à tranchant transversal dont la présence a été
remarquée depuis un certain temps dans plusieurs localités,
se rencontre très-fréquemment dans les grottes. La popula-
tion paraît en avoir fait un usage considérable. C'est peut-
être à l'emploi de ces silex faciles à préparer, qu'il faut
attribuer la rareté relative des flèches pointues finement re-
taillées. L'emploi de ces projectiles s'affirme chaque année
de plus en plus par de nouvelles observations. Il ne fau-
drait pas juger ces instruments sur les données qui résul-
tent des fouilles exécutées dans le Midi par exemple. Elles
sont en elfet très rares dans le Midi de la France. Aucune
contrée néolithique n'a donné de ces flèches en aussi grand
nombre. Quelle que soit la manière dont on les considère,
elles donnent aux tribus de la Vallée du Pctit-Morin une
nuance particulière. L'usage de ces projectiles est bien affirmé
par les exemplaires que Ton trouve disséminés ça et là dans
les plaines environnantes.
Un instrument généralement désigné sous le nom de
by Google
3io
^attoir du Grand-Pressigny a été rencontré dans les grottes.
Cet instrument y est rare, mais les conditions dans lesquelles
il a été trouvé, ne s'étant rencontrées encore dans aucun au-
tre gisement, nous paraissent dignes d'en faire une mention
particulière qui pourra devenir un point de ralliement pour
les autres contrées où il serait remarqué. Le même instru-
ment n'est pas rare à la surface du sol dans les régions voi-
sines des stations.
La céramique grossière, mais en quotité notable, dis-
tingue les stations néolithiques de la Champagne. Les vases
y sont de formes, de dimensions, de capacité très variées.
Mais ils portent tous, à peu d'exception près, les nuances ty-
piques de la même fabrication. Ces vases, formés d'une
terre peu homogène mélangée de graviers et peu travaillée,
sont à peine lissés et toujours dépourvus d'anses. La cuis-
son fort imparfaite a été opérée à l'air libre. Bien que ces
vases soient loin d'être des objets d'art, ils sont très pré-
cieux au point de vue de l'art céramique. Ce sont très vrai-
semblablement les plus anciens vases authentiquement clas-
sés. La possession d'un vase en terre à cette époque, pa-
raît avoir été fort appréciée. Les soins que l'homme de la
pierre polie apportait à la restauration et à la conservation
de ces vases, atteste en outre des habitudes d'ordre.
Ces renseignements d'une origine sûre et bien étudiés
sont, par leur nature appelés à rendre d'incontestables ser-
vices. Dans l'ordre des faits, rien ne saurait être négligé.
Tout a son importance. Je suis heureux de me rencontrer
sur un terrain commun avec ces infatigables chercheurs Por-
tugais qui ont en si peu de temps apporté aux études ar-
chéologiques un contingent tout à la fois riche et varié. J'es-
père que dans le calme des études on trouvera dans les re-
marquables observations de M. Delgado des points de rap-
,ï Google
prochement entre les gisements néolithiques qu'il vient de
faire connaître et nos stations déjà connues.
M. Henri Martin. II n'y a jamais de figures humaines
sculptées à l'intérieur des dolmens. H y a quelquefois, très
rarement, des serpents; une seule fois, un cheval, sous la
table du célèbre dolmen appelé vulgairement la Table des
Marchands, par une fausse interprétation du nom populaire
celtique Dot- Varchant, qui veut dire la Table du cheval.
Sur un seul dolmen, celui du Petit-Mont, à l'entrée, on voit
deux pieds humains sculptés, signe du voyage, du départ
pour l'autre monde. Une seule fois, on voit un groupe de
figures sur des monuments mégalithiques de Bretagne; mais
ce sont des menhirs et non des dolmens.
Les trois premiers menhirs de Saint-Kerre en Quibe-
ron sont façonnés, l'un, en vieillard à grande barbe; l'autre,
en une forme de cheval; le troisième présente une forme
humaine creusée dans le bloc; il existe ou il a existé en
Bretagne plusieurs de ces figures sculptées en creux.
Dans une des grottes de la Marne découvertes par
M. le baron de Baye, on voit une figure de femme gros-
sièrement sculptée.
,cp^
SILEX ET OSSEMENTS HUMAINS
PEINTS EN ROUGE TROUVÉS DANS UNE SÉPULTURE
DANS Ij\ province DE ROME
M- L. PlGORlNI
Une tombe de l'âge de la pierre, près de la station de
Sgurgola, dans le territoire d'Anagni, a livré une portion
faciale de crâne humain et deux pointes de flèche de silex
colorées en rouge vif par du cinabre. Il faut éliminer tout
doute quant à l'ancienneté de cette coloration, car elle se
retrouve au-dessous de la croûte calcaire qui enveloppe aussi
bien ces deux flèches que la plus grande partie des autres
trouvées dans la même sépulture. La question est donc de
savoir si ce dépôt de matière colorante est dû à une infil-
tation naturelle ou à la 'piété des parents et des amis du
mort.
La circonstance qu'il est limité aux trois objets cités,
qu'il recouvre également les deux faces des flèches et ne
s'étend pas au sol environnant, ne permet pas d'accueil-
lir la première hypothèse. La seconde reste donc jusqu'à
présent la seule qui puisse donner l'explication des faits ob-
servés.
Pour élucider la question soulevée par les faits que je
,ï Google
3i3_
signale, je rappellerai au Congrès divers exemples, assez
rares d'ailleurs, de coloration d'objets citée dans des tra-
vaux relatifs à des sépultures préhistoriques, prouvant que
les hommes de l'âge de la pierre avaient l'habitude de se
colorer, de leur vivant, généralement en rouge*, et de dé-
poser dans la tombe une certaine portion de matière co-
lorante pour permettre sans doute au mort de s'en orner
dans le monde des esprits. A côté de ces faits, je citerai
la coutume des Nouveaux-Zélandais de n'enterrer les sque-
lettes de leurs morts qu'après que les os sont complète-
ment dépouillés de leurs chairs et après les avoir ornés
comme de leur vivant, et celles des Papous de peindre les
crânes de leurs morts de diverses couleurs et plus particu-
lièrement de rouge.
■ ' V., p. 229, les observations de M. Dclgado à propos d'un usage
analogue chez les troglodytes de Furninha et aussi, 'Congrus Internatio-
nal d'anthropologie et d'archéologie préhistoriques. Rapport sur la
Session de Lisbonne', par M, E. Cartailhac. 1880. p, 91, no/e, où on lit:
fOn sait que divers squelettes des grottes de Menton sont comme
s'aupoudrés de fer oligistc. Un fait analogue a été note dans la grotte
d Arène Candide, près Finalmarina.
.,Ct
DE L'EMPLOI DE LA CALLAÏS
L'EOROFï: OCCIOENTALE aux TEUFS PRËHISTORIQItES
M. CAZAtlS DE FONDOUCE
Pendant la Session de Budapesth, M. Capellîni entre-
tînt le Congrès de quelques substances d'origine minérale
ou animale employées par l'industrie des temps préhistori-
ques. Je viens ajouter à cette liste une nouvelle substance
dont l'usage paraît avoir été considérable en Portugal.
Cette espèce minérale, bleue ou verte, très voisine de
la turquoise orientale, dont elle se rapproche par certains de
ses caractères extérieurs et par sa composition chimique,
qui n'en diffère que par un équivalent d'alumine, a été étu-
diée et décrite en 1864 par M. Damour', sur les premiers
spécimens rencontrés à Mané-er-H'roek, en Lockmar laquer,
dans le Morbihan. Voici en quels termes M. Damour la dé-
crit:
«La couleur de cette matière, dit-il, est le vert pom-
me, se rapprochant du vert de l'émeraude. Quelques échan-
tillons sont comme marbrés de parties blanches et de par-
ties bleuâtres; d'autres sont maculés de veines et de taches
' Comptes-rendus hebdomadaires de l'Académie des Sciences de
Paris, V. Lix, p. 936—940.
ly Google
3i5
brunes ou noires, par suite d'un mélange accidentel de ma-
tières argileuses.
*La substance minérale est translucide, à peu près au-
tant que la chrysoprase. Sa cassure est compacte comme
celle de la cire. Elle raye le calcaire, mais elle est facile-
ment rayée par une pointe d'acier. Sa poussière est blan-
che, sa densité égale 2,5o à 2,52.
fChaulTée dans un tube de verre, à une température
un peu inférieure à celle du rouge naissant, clic laisse dé-
gager beaucoup d'eau, qui n'exerce pas de réaction sur le
papier de tournesol; elle décrépite, perd sa couleur, devient
opaque et prend une teinte brun-chocolat. A cet état elle
est devenue très friable. •
L'analyse chimique a montré que la composition de ce
minéral est très voisine de celle de la turquoise d'Orient.
Elle en diffère toutefois légèrement par la proportion des
éléments qui les composent l'un et l'autre. Tandis que la
turquoise contient deux équivalents d'alumine pour un d'aci-
de phosphorique et cinq d'eau, l'autre minéral ne contien-
drait qu'un seul élément d'alumine pour la même proportion
d'acide phosphorique et d'eau. Cesdeux substances diffèrent
en outre par leurs caractères extérieurs. «La turquoise, en
effet, dit toujours M. Damour, est plutôt opaque que trans-
lucide, sa couleur habituelle est le bleu céleste plus ou moins
foncé; sa dureté, sa densité sont supérieures à celles du
nouveau minéral. J'ajouterai que la turquoise orientale doit
sa couleur à l'oxyde de cuivre, tandis que la teinte verte de
la nouvelle matière me parait due à l'oxyde de fer.i
D'après ces différences bien appréciables, M. Damour
était d'avis, à l'époque où il publia cette note, de séparer
CCS deux substances dans la classification des espèces et,
reprenant le nom de Caldile que plusieurs minéralogistes
ly Google
3i6
ont donné à la turquoise, il proposa de désigner la ma-
tière fournie par les tombeaux préhistoriques du Morbihan
sous le nom de CalLiïs, nom que Pline donne à une ma-
tière précieuse qu'il décrit en ces termes:
«La Callaïs est d'un vert pâle: elle se trouve en mor-
ceaux volumineux, mais souvent perforés de cavités et souil-
lés de matières étrangères. On taille ces pierres qui, du
reste, ont peu de dureté. Les plus estimées ont la teinte de
l'émeraude (Optimus color smaragdi). Plus elles sont belles,
plus aisément elles perdent leur couleur par l'action de
l'huile, des onguents ou du vin; les moins belles se conser-
vent mieux. Il n'est pas de pierre plus facile à contrefaire
au moyen des matières vitreuses.»
•Ce peu de caractères, ajoute M. Damour, serait au-
jourd'hui bien insuffisant pour décrire une espèce en miné-
ralogie. Us me paraissent toutefois indiquer certains rap-
ports avec la substance verte dont il est ici question, mieux
qu'avec la turquoise qui est bleue: On voit que Pline in-
siste sur la couleur de la Callaïs qu'il range parmi les pier-
res vertes.»
Nous donnerons donc, avec M. Damour, le nom de
Callaïs à la matière précieuse, le plus souvent verte, qui
fut employée dans la joaillerie primitive des temps préhis-
toriques et qui paraît l'avoir été encore du temps de Pline,
mais en faisant observer que c'était plutôt une variété de
la turquoise qu'une espèce minérale parfaitement distincte.
En effet, si la matière qui constituait les perles trouvées au
Mané-er-H'roek présente au plus haut degré la coloration
verte et oflrc une composition chimique qui parait sensi-
blement différente de celle de la turquoise orientale par un
équivalent d'alumine, il faut remarquer qu'entre ces deux
extrêmçs se retrouvent les variétés intermédiaires les plus
,ï Google
lu
nombreuses. Déjà en 1864, M. Damour faisait remarquer,
à la fin de son mémoire, que nie musée archéologique fondé
à Vannes par la Société polymathiquc du Morbihan renfer-
me, avec les Callaïs, beaucoup d'autres pierres, qui se trou-
vaient péle-méle avec elles dans le même tombeau celtique et
dont la teinte bleuâtre, plus ou moins pâle, rappelle exacte-
ment celle de certaines turquoises de la variété la plus com-
mune. »Un essai m'a montré, ajoutait il, que ces pierres
bleues sont, comme la turquoise et la Callaïs, composées
d'acide phosphorique, d'alumine et d'eau, t.
Depuis lors, j'ai eu l'occasion d'examiner un grand
nombre d'objets préhistoriques formés de cette matière et
partout j'ai pu constater l'existence de ces nombreux inter-
médiaires entre la variété verte et la bleue, qui rendent im-
possible d'établir une démarcation entre elles. Quant à la
composition chimique, celle d'un grain de collier, pris au
hasard entre un grand nombre d'autres provenant de la
Provence, qui a été soumis à M. Damour tout récemment, ne
lui a pas paru s'éloigner de celle de la turquoise. «Je viens
de m'assurer, écrivait-il à la personne qui le tuî avait en-
voyé sur ma demande, que la matière minérale qui le cons-
titue se rapporte bien à la turquoise, essentiellement for-
mée de phosphate d'alumine hydraté, coloré en bleu pâle
par du phosphate de cuivre. Cette turquoise, à raison de sa
très faible teinte bleue, n'a aucune valeur commerciale'. s
M. Dufrénoy dit d'ailleurs que des analyses de turquoi-
ses ont donné des résultats fort différents les uns des au-
tres'.
C'est aussi l'opinion du professeur américain Dana,
' Lettre du 3o avril 1880.
' Traité des Minéralogie, t. 11, p. 55^ et î6o.
•^■r
3i8
qui pense que la Callaïs de Pline est probablement la tur-
quoise', et de M. le comte de Limur qui dit qu'il y a certai-
nement dans les analyses de ces deux minéraux des diffé-
rences dont on doit tenir compte, mais que cependant on
ne doit pas exagérer: tH ne faut pas oublier, ajoute-t-il, qu'on
a affaire, dans la turquoise et dans la Callaïs, à des minéraux
amorphes, et qui, par conséquent, peuvent facilement con-
tenir quelques corps étrangers, peu importants sans doute,
mais en assez grande quantité pourtant pour changer les
résultats des analyses; et l'on sait qu'en minéralogie, tou-
tes les fois qu'on n'opère pas sur des minéraux cristal-
lisés, on ne saurait s'attendre à des identités d'analyse*. D
se pourrait d'ailleurs que la composition des spécimens ren-
contrés dans les tombeaux préhistoriques ait été sensible-
ment modifiée par leur séjour dans ce milieu humide et très
phosphaté '.
On est donc contraint de reconnaître que l'on n'a pas
affaire à deux espèces minérales distinctes, mais à une es-
pèce qui n'est pas bien exactement définie, qui peut varier
dans une certaine mesure quant à la proportion de ses élé-
ments constitutifs et à sa couleur. D'un autre côté ta ré-
union dans les mêmes gisements archéologiques de frag-
ments présentant toutes les innombrales variations de cou-
leur et de composition, doit faire admettre que l'on a bien
affaire à des fragments d'une même roche.
Ainsi que je l'ai dit en commençant, cette substance a
' Manual of Mineralogy, p. i3i
* Note sur les gisements nouvellement reconnus de certaines subs-
tances minérales rares employées comme ornements ou comme outils par
les tribus préhistoriques ou les tribus sauvages. Dans Mém. Soc. Émul. des
Côtes du Nord, tom. xii (1874).
3 Opinion de M. Dçlesse, citée par M. de Limur, loc. cit. p. (».
,ï Google
3ic)
été trouvée pour la promicre fois dans un tombeau du Lok-
mariaquer, dans le Morbihan (5o forains). Elle s'y présentait
«façonnée en forme de pendeloques ovoïdes et en grains de
collier de diverses grosseurs, depuis celle d'une lentille jus-
qu'à celle d'un œuf de pigeon. Ces grains arrondis et polis
sur leurs contours, présentent pour la plupart deux surfa-
ces planes opposées et perforées plus ou moins symétrique-
ment vers le centre'.»
Il est facile de reconnaître dans cette description les
formes habituelles des pendeloques et des grains de collier
des temps préhistoriques.
On a retrouvé encore de la Callaïs, en Breiagnc, dans
le dolmen de la Trinité-sur- Mer, canton de Quiberon (i
grain), dans celui de Keriaval {2 grains), dans les dolmens
sous tumulus du Mont-Saint-Michel (107 grains), de Tumiac
(147 grains), du Moustier Carnac ii grain), et dans le dol-
men allée couverte de Kercado, Carnac (7 grains).
Dans l'intérieur de la France elle est bien plus rare.
M. le baron de Baye en a recueilli un seul grain dans les
grottes de la Marne. M. le Dr. Prunières en aurait rencon-
tré deux perles dans un dolmen de la Lozère et M. Car-
tailhac une dans un autre dolmen du même département,
au Recoux, et une seconde dans un dolmen de Caussanus,
Aveyron, et encore y a-t-il du doute sur la détermination de
la substance des ces quatre perles.
Dans les grottes artificielles du Midi de la France elle
reparait, au contraire, en assez grande abondance. J'ai re-
cueilli 1 14 perles de celte substance dans l'allée couverte du
Castellct, près d'Arles, en Provence. Ce grand nombre rend
celte trouvaille tout-à fait remarquable, bien qu'elle ne ren-
' Matériaux pour l'histoire de l'homme, ju, p. 229.
.ïGoOt^l;
?>^
320
ferme pas de spécimens aussi gros que certains de ceux ren-
contrés au Mané-er-HYoek'.
Les antiquités envoyées du Portugal à l'Exposition des
sciences anthropologiques, en 1878, nous permirent de re-
connaître que dans cette portion de la Péninsule ibérique,
les objets de callaïs devaient se rencontrer en quantité en-
core plus considérable. En venant à Lisbonne nous avons
retrouvé ces objets dans les vitrines de la Section Géologique.
Parmi les dolmens, un seul, celui de Monte Abrahao,
a donné quelques perles de cette substance. Parmi les grot-'
tes naturelles, celle de Furninha a donné une perle de cal-
laïs, dans la partie néolithique, d'après un renseignement que
je dois à M. Delgado. Celle de Casa da Moura en a don-
ne aussi quelques-unes. Mais les trois grottes artificielles de
Palmella, fcrtjillées par M. Carlos Ribeiro, n'ont pas fourni
à elles seules moins de 214 perles de toutes dimensions et
de formes diverses, dont quelques-unes sont aussi grosses
que celles du Morbihan.
Après l'exposé que nous venons de faire des localités
où l'on a rencontré jusqu'à ce jour des objets de callaïs de
l'époque préhistorique, trois questions se présentent à nous,
également intéressantes à résoudre au point de vue de l'ar-
chéologie: Quels sont les gîtes naturels de cette substance?
A quelle époque appartiennent les tombeaux qui la recèlent?
Quels sont les peuples qui s'en sont parés? Nous allons les
examiner successivement.
' M. Piettc a trouve d'autre part une poignée de perles en Callaïs
dans une allce couverte du plateau d'Ossun, près Lourdes, dans les
Haules-Pyrénées. Il y avait avec elles une perle d'or du type de celle
trouvée dans l'allée du Castellet. Ce fait a été signalé par M. Cartailhac
dans la discussion qui a suivi la lecture de mon mémoire devant le
Congrès.
,ï Google
En premier lieu, de quelle contrée a tic apportée la
callaVs avant d'être enfouie dans les tombeaux antiques de
l'Europe occidentale?
M. Damour déclare qu'il ne connaît ni en Bretagne, ni
dans les autres parties de la France aucune matière sembla-
ble, et j'ai recueilli la même déclaration de MM. Ribeiro,
Delgado et Vilanova en ce qui concerne le Portugal et l'Es-
pagne. C'est donc en dehors des pays où nous la retrou-
vons travaillée et utilisée, qu'il faut en rechercher l'origine.
Elle représente, par conséquent, un produit du commerce
antique. Mais faut-il aller en rechercher l'origine dans des
régions très éloignées? Voici dans quels termes M. Damour
répond à cette question:
ill existe bien en Saxe, en Silésie et dans les Monts Du-
rais divers minéraux analogues qu'on a décrits sons les noms
de Péganite, de Variscite et de Fischérite; mais aucun d'eux
ne se rapporte exactement, ni par les caractères extérieurs
ni par la composition, à la callaïs que je viens de décrire.
Pline, qu'il est encore permis de consulter sur ce point, nous
dit: «La Callaïs se trouve au delà des Indes, chez les Phy-
cares, qui habitent le mont Caucase, et aussi chez les Saces
et les Daces. Celle qui vient de la Caramanie est la plus
pure et la plus agréable à la vue. . . b
«La provenance indiquée par Pline se rapporte assez
bien à celle de la turquoise orientale, dont on connaît actuel-
lement des gîtes dans quelques parties de la Perse, et no-
tamment près Michabour, dans le Khorassan. Il n'est pa:
improbable que la callaïs verte et la turquoise, formées des
mêmes éléments, se soient rencontrées dans un même gîte
A l'appui de cette opinion, M. Damour fait remarquer
le mélange, dans les mêmes gisements archéologiques,
d'échantillons présentant des teintes variant du vert de la
(^
322
calhiïs au bleu pâle des turquoises communes. Nous sommes
dune amtincs à admcuri; que les innombrables variétés de
callaïs et de turquoise sont probablement des fragments
d'une même ruche, d'origine exotique, apportée par le com-
merce des U-'mps anciens, de TOrient asiatique dans l'Eu-
rope occidentale. Il est vrai que depuis l'époque où M- D'a-
mour écrivait les lignes sur lesquelles nous venons de nous
appuyer, on a trouvé la turquoise, iwnc quelques autres ra-
retés minéralogiques, à la mine d'étain de Montcbras (Creu-
se), où existent des traces d'anciennes fouilles qui parais-
sent préhistoriques. Cette turquoise de Montebras semble
bien voisine de la callaïs du musée de Vannes, de sorte
qu'il ne serait peut-être pas besoin, d'après quelques ar-
chéologues, que les tribus du Morbihan aient été chercher
leur callaïs hors de France'. On a ajouté que le Morbihan
lui-même renferme des filons d'étain qui semblent avoir été
l'objet d'exploitations préhistoriques et qu'il ne serait pas im-
possible qu'on y rencontrât un jour te gisement de callaïs
des peuples des dolmens.
Nous ferons observer, en réponse à ces considérations
que, .s'il est possible que l'on trouve un jour la turquoise
dans le Morbihan, il n'est pas probable qu'on la trouve dans
la Provence, où il n'y a pas de filons d'étain. Elle a donc
dû être importée ici, et, d'après le système que nous ve-
nons d'exposer, probablement de la Creuse ; mais alors com-
ment se fait-il qu'elle soit si abondante en Provence et si
rare dans le centre de la France, aux environs même du
gisement présumé? Nous pen.sons donc que, ju.squ'à nou-
vel ordre, on doit considérer l'origine de la callaïs préhis-
torique comme exotique.
■ ^
„Google
323
Ceci admis, la seconde question qui se pose devant nous
est celle de savoir à quelle période des temps anciens doit
être rapportée l'importation et l'emploi de cette substance.
Outre les objets de callaïs, la sépuliure du Mané-er-
H'roek renfermait un grand nombre de haches de pierres
dures polies, ce qui l'a fait classer dans l'époque néolithi-
que; mais les objets trouvés dans les grottes du Casteliet,
en Provence, et de Palmella, en Portugal, où la callaïs a
été rencontrée avec la plus grande abondance, nous obli-
gent à reporter l'importation de celle-ci à une époque un
peu plus récente. Nous avons, en eflet, recueilli dans les
allées couvertes de la Provence des perles d'or, des pote-
ries avec ornements en dents de loup, des lames de poi-
gnard de bronze, qui nous les ont l'ait classer dans l'âge du
bronze; mais il y avait aussi des pointes de silex, et des
haches en pierres polies, armes ou instruments qui étaient
encore en usage au début de cette période. En Portugal,
M. Ribeiro a recueilli dans les grottes de Palmella des poin-
tes de silex en même temps que des pointes de lance et
autres objets de bronze.
La présence des haches en pierre polie, malgré l'absence
des instruments de bronze, n'est donc pas surtisante pour
faire reporter absolument la sépulture du Mané-er-H 'roek a
l'époque néolithique et il est probable que, comme celles de
la Provence et du Portugal, elle doit être du commence-
ment de l'âge du bronze.
Les dolirens de la Lozère, où M\L Cartailhac et Pru-
nières ont rencontré trois ou quatre perles de callaïs, ne con-
tredisent pas cette manière de voir, car on sait que Ton trou-
ve un peu de bronze dans tous les dolmens du Midi de la
France et qu'on doit les classer dans cette période qui fait
la transition de l'époque néolithique â celle du bronze.
,ï Google
j
324
Reste la perle trou\ée par M. de Baye dans une des
grottes artificielles de la Marne. Ici encore nous nous trou-
vons en présence de sépultures qui se présentent, au milieu
de la civilisation néolithique, avec des caractères si particu-
liers et si avancés, qu'on est naturellement porté à les con-
sidérer comme appartenant lout-à-fait aux derniers temps
de cette civilisation.
Nous nous résumerons donc en disant que la callaïs a
peut-être fait son apparition dans l'Europe occidentale iila
fin de l'époque néolithique, mais qu'elle y a surtout été im-
portée et utilisée dans les premiers temps de l'ûge du bronze.
Est-il possible de savoir à quel peuple peuvent être at-
tribués l'importation et l'emploi de la callaïs? C'est ce qu'il
nous reste maintenant à examiner.
Nous remarquerons d'abord que cette substance ne se
montre pas indistinctement dans toutes les sépuhures de ta
fin de l'époque néolithique ou du commencement de l'âge du
bronze, mais seulement dans,celles d'une certaine catégorie.
Nous la trouvons, en effet, dans quelques dolmens, mais
exceptionnellement et en très petite quantité, et puis, plus
ou moins abondamment, dans quatre sépultures qui appar-
tiennent à des périodes postérieures, pendant lesquelles l'ar-
chitecture dolménique s'est développée et modifiée dans les
formes et les procédés mais en conservant ses dispositions
principales.
De ces quatre groupes de sépultures, celui du Morbihan,
est celui qui s'écarte le moins du dolmen. Ce n'est pourtant
déjà plus la forme simple et à dimension restreinte de ce
tombeau mais un véritable hypogée logé dans un tumulus
dont te grand axe, au Mané-cr-HVock n'a pas moins de loo
mètres. La crypte, dans laquelle on arrive par une galerie
d'accès, a 4 mètres de long sur 3 mètres de large et i"',73
,ï Google
325
de hauteur. Une des dalles porte des signes gravés, comme
celles d'autres monuments semblables de la même région'.
Le dolmen de Monte Abrahâo, en Portugal*, présente a
peu près la même disposition: une galerie d'accès d'environ
8 mètres de longueur sur 2 mètres de largeur, et une cham-
bre polygonale dont le grand diamètre a S^fôo',
Dans les allées couvertes des environs d^Arles, en Pro-
vence, qui s'écartent déjà davantage du type primitif, nous
retrouvons, comme au Mané-er-H'roek, le tumulus à grand
diamètre (41 mètres), la galerie d'accès, la crypte à grandes
dimensions {24 mètres de longueur sur S^.So de largeur et
autant de Hauteur à la grotte des Fées; 1 1 mètres de lon-
gueur sur 2",20 de largeur et autant de hauteur à la grotte
du Castellet). Seulement ici cette crypte n'est pas formée
avec des dalles, elle est creusée dans le rocher, ce qui en
constitue le caractère particulier et en fait en quelque sorte
une grotte artificielle. Toutefois on a conservé du dolmen
l'inclinaison des parois vers l'intérieur et la toiture en gran-
des dalles*.
Les grottes artificielles de Palmella, dans le Portugal, se
relient intimement à celles de la Provence et, par elles, aux
grands dolmens de la Bretagne et du Portugal lui-même,
I R. Galles: Le Mané-er-H'roek. Vannes, i8f>3.
*Carlos Ribeiro: Notieia de algumas csiaçôese monumentos prc-
historicos, ii. Lisbonne, 1S80.
3 Ce iîemier type amûne à celui de l'allée couverte du plateau d'Os-
sun, dans les Hautes -Pyrénées, dans laquelle a été trouvée, outre la cal-
laïs, une perle d'or, qui la relie aux sépultures du type suivant.
* Voir la description que j'ai donnée de ces curieuses sépultures
dans les deux mémoires intitules: Les allées couvertes de la Provence
i et II, Montpellier,— Paris, i873 et i87S.
„Coct
326
mais elles n'ont plus pour ainsi dire conservé de ceux-ci que
\a disposition générale. Comme cglics de la Provence, elles
sont creusées dans le sol ; une galerie à plan incline permet de
descendre prcsqu'au niveau inférieur de î'evcavation et con-
duit dans la crjpte, à travers un passage rétréci. II y a jus-
que là une véritable analogie, une presque identité. La dif-
férence, se montre dans la forme de la crypte, qui est cir-
culaire au lieu d'être allongée. La même disposition se re-
trouve dans d'autre^ sépultures artificielles du Portugal, qui
appartiennent évidemment à la même famille, telles que
celles de Mniifi;e et de Follia da.t liarradas dans les envi-
rons de Cintra'.
Nous pouvons donc affirmer que les peuples qui se sont
parés de la callaïs sont peut-être de ceux qui ont construit
les dolmens, et certainement de ceux qui oit hérité des ha-
bitudes de ceux-ci ou les ont adoptées, et qu'ils se sont mon-
trés dans la Bretagne, le long des Pvrénées, dans la Pro-
vence et dans le Portugal.
Si maintenant nous jetons un rapide coup d'œil .sur les
objets qui sont restés dans leurs sépultures comme des té-
moins de leur industrie ou de leurs usages, nous y trouve-
rons des indices qui nous confirmeront les rapports de ces
stations entre elles et nous décèleront des aihnités avec les
populations d'autres pays de l'Europe occidentale.
Nous indiquerons, parmi ces objets, les celts en pierre
polie qui se rencontrent indistinctement dans toutes ces sépul-
tures; les boutons en os, percés de deux trous convergents
' Carlos Ribciro: Noiicia dt.' algumas esui^Ôt-s c monumcnias pro-
hisiori».-os, Lisbonne. iS.So.— .\1. Cartailhac, qui a Oit vi.siterles grouos
Ji.- l'jlni^;lla, apit-'i ij Ses-iion' du Congrès, m'a contirm.,- leur analogie
u^KkiUoav^...- cclUs J.- la Piov...ncc.
,ï Google
327
sur une de leurs faces, qui ont été trouvés au Castellet en
Provence, et au Monte Abrahao en Portugal; les cailloux
de quart/ite, qui recouvraient comme d'^un manteau les os-
sements humains dans les sépultures provençales, aussi bien
que dans le dolmen de Monte Abrahâo et dans la sépulture
de Monge, en Portugal; les ornements en chevrons et en
dents de loup, qui se retrouvent sur divers objets des unes
et des autres; les gros marteaux ou casse-téte en quartzite,
avec rainure circulaire, trouvés dans les grottes artificielles
de la Provence et qui sont si abondants dans toute la Pé-
ninsule ibérique; les lames et pointes de bron;îe, rencontrées
aussi bien dans les grottes de Paimclia que dans celles des
environs d'Arles; enfin les pendeloques de diverses formes,
qui sont identiques ici et là, et les tlèches de silex à bords
droits et à angles vifs, qui se montrent au Castellet et au
Monte Abrahiïo, et dont il faut aller chercher les analogues
en Irlande.
C'est aussi dans ce dernier pays, que nous devons al-
ler chercher, ainsi que je l'aï montré ailleurs, des sépultu-
res sous tumulus, qui semblent présenter une certaine ana-
logie de forme et de disposition générale avec certaines de
nos sépultures provençales, notamment avec celles de la Mon-
tagne de Cordes. C'est encore en Irlande que Ton trouve
de grands marteaux de quartzite semblables à ceux de l'Es-
pagne et de la Provence, et des boutons dont la forme rap-
pelle celle des boutons en os mentionnés ci-dessus, seule-
ment je ne sache pas que la callaïs ait été encore signalée
dans cette partie des lies Britanniques.
Voilà les faits et les rapprochements auxquels ils don-
nent lieu. Quelles conclusions en tircrr
Je serai ici très circonspect, car ces faits et ces rap-
prochements sont il peine sullisants pour permettre de tou-
.ïGoorl»
328
cher d'une main discrète au voile qui recouvre l'histoire de
ces époques lointaines. Pourtant, je ne puis m'empêcher de
penser que la terre îbérienne arrivait presque jusqu'au Rhô-
ne; que les allées couvertes de la Provence sont situées sur
la rive droite de ce fleuve, là où commençait la terre des
Ligures, au temps d'Aviénus; que ce poëte géographe place
la résidence primitive de ces Ligures au sud-ouest de l'Es-
pagne, d'où ils furent chassés parles Celtes conquérants, en-
viron 1600 ans av. J. C; que Thucydide, Euphore et Phi-
liste de Syracuse constatent le même fait dans leurs écrits.
Ainsi les auteurs anciens nous montrent tes Ligures
venant de l'Espagne, du sud-ouest de la Péninsule ibérique
pour occuper ensuite le territoire et la rive gauche du Rhône,
tandis que, de notre côté, nous constatons des analogies
frappantes entre des sépultures de la Provence et d'autres
du Portugal. Faudrait-il en conclure que c'est à l'époque
des invasions Ligures, et à ces peuples, qu'il faut rappor-
ter ces tombeaux ?
Les travaux de M, d'Arbois de Jubainville, de M. E.
Desjardins et autres semblent établir d'une façon tout-à-
fait probable l'origine Indo- Européenne des Ligures. Ces
avant-coureurs de l'invasion celtique ne seraient-ils pas pas-
sés par la Bretagne et la côte de l'Océan pour arriver dans
le sud-ouest de l'Hispanie et de là, sur les bords du grand
golfe méditerranéen qui porte encore leur nom '! N'auraient-
ils pas enseveli leurs morts dans des dolmens, puis dans
des grones artificielles dont nous avons montré l'intime liai-
son avec ceux-ci? M, Henri Martin n'a-t-il pas parlé dans
ime communication à ce Congrès de relations reculées entre
le Portugal et l'Irlande, et M. Cartailhac ne pense-t-il pas
' Le golfe de Lyon :— AijoJ&iv kôXito;.
,ï Google
32g
également que cette forme de flèches, à bords droits, à an-
gles "vifs, que l'on trouve en Irlande, sur le littoral océanien
français, en Portugal, en Provence, est extrêmement rare
dans le centre de ta France?
Toutes ces questions se posent à mon esprit. Je me
borne à les poser à mon tour au Congrès, sans avoir la pré-
tention d'y- répondre.
Olsonssion
M. Cartailhac: Je dois ajouter à propos de ce que
vient de dire M. Cazalis de Fondouce touchant la Callaïs,
que M. Edouard Piette vient de trouver une poignée de per-
les de cette substance dans un dolmen sous tumulus des
Pyrénées. Je noterai en passant la grande ressemblance des
petites pointes de flèches en silex des tombeaux du Portu-
gal avec celles du nord Scandinave et de l'Irlande.
M. Evans; Je ferai ressortir l'analogie surprenante entre
certaines flèches du type triangulaire et grandes pointes de
lance portugaises et les armes semblables trouvées en Irlan-
de. Ce fait pourrait trouver une explication dans cette hy-
pothèse, que quelques races venues de la Péninsule hispa-
nique se soient établies en Irlande. Je puis ajouter que le
type de la hallebarde à trois grands rivetssi bien connu en
Irlande se rencontre aussi en Espagne.
=(%..
LES INDICES DE LA TRANSITION
LA PIERRE POLIE A L'ÉPOQUE DU BRONZE
M. i.E Baron J. de Baï[;
De remarquables études ont élé publiées sur l'origine
de l'industrie du bronze, les documents qu'elles renferment
sont du domaine Je Phistoire. La source se trouve dans les
annales des temps anciens. La question, dans ces conditions
revêt un caractère classique. DVminents archéologues, de
leur côte, ont recherche partout les traces du bronze dans
les diverses contrées et suivi les routes qu'il a parcourues.
Le classement des produits de IMge du bronze a été le ré-
sultat de ces vastes travaux.
Les enseignements reposent dans la partie classique,
sur des faits inscrits dans l'histoire, nous l'avons dit. Les
voies suivies par l'industrie du bronze, ses caractères dif-
férents, les formes exclusives qu'il affecte, dans diverses ré-
gions, sont des données qui ressorteni nécessairement de
l'examen d'une industrie déjà constituée et développée.
Quelques détails succints sur la phase qui se place il
la lin de la pierre poîie et au commencement du bron/e dans
les contrées où les deux industries ont laissé des traces au-
thentiques sont un appoint utile aux études archéologiques.
,ï Google
33 1
Dans une de nos précédentes séances, M. Pigorini attri-
buait légitimement une autorité prédominante aux bronzes
provenant des habitations ou des tombeaux. En eliét, dans
ces milieux caractérisés ils sont datés et se rattachent à une
civilisation déterminée. M. de Mortillet de son côté, atfir-
mait avec autant de raison que les sépultures du bronze
étaient rares et d'une intermittence irréguliére dans leurs
fortuites apparitions. Rien n'est donc à négliger dans une
telle situation.
Dans la contrée néolithique que j'ai explorée, j'ai été
frappé de la perfection avec laquelle certaines grottes avaient
été taillées dans le banc de craie. Ces mêmes grottes ren-
fermaient des colliers dont les grains en craie ou en os,
avaient une forme plus nette, des arêtes vives, une perfo-
ration régulière, en un mot une perfection relative très su-
périeure à ceux des autres grottes. Le groupe qui donna ces
produits d'un travail plus parfait était isolé. Quelques grains
de collier en bronze proviennent d'une grotte de ce groupe,
la seule qui contint des traces de métal. l,es grains sont
formés d'une plaque mince ou bien ils sont en spirale. Ces
rares témoins de l'ùge du bronze, sont les preuves les plus
infimes de l'industrie naissante. Il en sont comme l'aurore
dans le pays et se trouvaient ainsi avec le travail le plus
fini de la pierre polie. I.a première apparition du bronze
coïncide donc avec un mouvement de progrès dans l'indus-
trie néolithique. Ce trait est tout-à-fait digne de mention.
L'invasion du bronze est timide, on le voit; il y a lieu
de croire que la nouvelle évolution dans l'industrie a eu un
prélude où le métal était un objet de luxe, une rareté,
avant d'être la matière première de ces utiles instruments
que nous connaissons et de ces parures ouvragées qui font
notre admiration. Dans le fait présent, le bronze ne cons-
,ï Google
332
tituc qu'une exception sans importance, il coudoie un voi-
sin puissant qui Pécrase, Poutillage en pierre, seul encore
employé. Le groupe qui a vu poindre le bronze a donné
une perle en callaïs; c'est encore un caractère de ta transi-
tion. Je me félicite d'avoir une pensée commune avec M. Ca-
zalis qui considère la callaïs comme étant un prodrome oU
même un contemporain de l'industrie du bronze. Ces pre-
mières traces du métal se trouvaient dans un groupe déta-
ché à Oyes (Marne).
A deux myriamëtres de là dans les plaines de la Cham-
pagne, une sépulture m'a donné des fragments de poteries,
deux petites flèches en silex, une lance à douille en bronze.
Le rôle privilégié est pour le bronze, la lance est la pièce
importante. Nous pouvons encore ajouter qu'en se rappro-
chant de la rive droite de la Seine, il a été trouve une sé-
pulture où le bronze seul et exclusivement composait le mo-
bilier funéraire. Les conséquences qui résultent de ces faits
apparaissent d'elles-mêmes. J'ai seulement voulu vous four-
nir la matière de quelques lignes pour l'histoire des époques
que nous cherchons à reconstruire par de communs efforts.
,ï Google
ARCHÉOLOGIE PRÉHISTORIQUE
PROVINOK SE UINHO
M. José Caldas
I— Raisons bistorlqaes
Les civilisations anciennes ne nous ont transmis, en ce
qui concerne la présence de l'homme sur le globe terrestre,
que des souvenirs vagues et confus, basés pour la plupart
sur l'anthropomorphisme de leurs dieux et les traditions
ethniques de leurs cultes naturels.
L'homme, par la perfection de sa structure physiolo-
gico-anatomique et par la tendance toujours égoïste de son
activité progressive, nous apparaît dans les souvenirs théo-
goniques des premiers temps comme la manifestation la plus
éloquente d'une conception surnaturelle. Subordonnés à cette
anthropodicée fantastique surgissent avec les âges, comme
le cortège d'une origine si élevée, les légendes théogoniques
et mystiques, d'après lesquelles l'homme, seul et désarmé,
lutte face à face contre les cléments, dompte les esprits en-
nemis et crée les premiers rudiments de son autonomie mo-
rale.
Ainsi dans les théogonies primitives, tant aryennes que
sémitiques, nous avons vu passer le fantôme humain à tra-
,ï Google
334
vers les évolutions de l'histoire comme une incarnation vi-
vante de PEsprit divin. Traversant les gigantesques con-
vulsions de la terre, il suit toujours avec la fatalité de sa
puissance, comme force initiale, comme impulsion comme
OpsTTTiî'-T, |-j//,, le souffle vivifiant — le Dieu Eternel.
Néanmoins, comme toutes les origines, Torigine de
l'homme nous sera toujours inconnue. Cependant le désir
indomptable qu'il a toujours manifesté de connaître la vé-
rité, en la cherchant à travers l'imperfection de son esprit,
le porte à s'interrosïer sur sa propre essence, sur celle de
la nature du milieu cosmique oij il apparaît, sur son avenir
enfin. En cherchant son principe dans l'imposante majesté
des révolutions météorologiques et dans la loi grandiose qui
modifie successivement les conditions géologiques de notre
globe, paraissent les premiers cultes, sorte d'explication que
la peur ou l'ignorance prétend donner des phénomènes ob-
servés par l'expérience.
C'est ainsi que dans les livres hébreux, dans les tradi-
tions kouwéniennes de la Chine et dan.s les hymnes baby-
loniennes, dans les cultes prévédiques de l'Inde et dans lc<
religions des Phéniciens, des Égyptiens et des Persans, Photn-
me prend toujours une origine divine, parce que, ni sur la
terre ni dans les lois qui la régissent, il ne peut trouver l'ex-
plication de son secret, c'est-à-dire de son origine.
En expliquant, dans la mesure de ces connaissances, ta
constitution primitive du monde, en nous donnant l'idée d'un
cahos, dans lequel Pair, la terre et les mers étaient encore
confondus, ne formant qu'un tout informe', le scepticisme
' Antij mari.' i;t U-llus et quod tegit omnia coclum
,ï Google
335
romain, c'est-à-dire le paganisme ancien, ne peut trouver,
par rapport à l'homme, que ces mots: nattis homo est*.
D'où cst-il donc venu?
De la nature divine dont on forme les dieux? demande
l'antiquité. De la terre?
Mais de la terre, dans le sein de laquelle il y avait en-
core quelque germe de nature céleste? Aujourd'hui, comme
alors, rien n'y répond.
Cependant le panthéisme hellénique salue dans l'homme
la brillante métamorphose de la matière, la concrétion du
To itôv', du summa Iota, de la grande Nature enfin dans
l'extraordinaire phénomène de la vie.
Sic modo quae fitei'at riidt's et sine imagine telliis
Induit ignotos hominum conversa figuras^.
Plus tard, quand la civilisation chrétienne instiguéc par
iii culture scientifique des Arabes de Cordoue, déjà très éle-
' Natus homo est. Sive hune divino semine fecït
nie opifex rcrum, mundi tnelioris origo;
Sive recens tellus, seductaque nuper ab alto
Aethere, cognati retînebat scmina coeli,
Quam satus lapeto, mîxtam Huvialîbus undis,
Finxit in effigiem moderalum cuncta deorum ;
Pronaquc quum specient animalia caetera terrant.
Os homini sublime dédit, coelumque tueri
lussit, et erectus ad sidéra toUere vultus.
Ov. Mélam. i, 78-86.
s formules atomistes de la Nature, selon l'expression d'Rpicure
ùisiv, Twv 5)mv cpùiJiv, TûW SvT6)V çùffiv) traduites en omm ini-
nalura renatt, sirnima Ma, siimmai lotius summa par Lucrèce.
le xiwwv àxivDTOW d'Aristote.
Ovide, Mélam. i, 87-88.
.,Goo<
B6_
vée à cette époque, se vit forcée d'imposer à ses écoles l'étu-
de des langues orientales, il ne manqua pas de savants qui,
entraînés dans le courant impétueux d'une profonde préoc-
cupation théologique, cherchèrent à détruire tous les doutes
sur l'origine et l'antiquité de l'homme. Survinrent alors les
chronologies bibliques; on trouva que la science de la phi-
lologie tirait son origine de la langue hébraïque, dont l'étude
se revêtit des formules d'une initiation religieuse et (ut pré-
sentée comme la première et la plus ancienne accentuation
morphologique de la pensée humaine. De son côté, la pa-
tristique, en confondant avec ses commentaires le texte sé-
mitique des livres judaïques, trouve dans le sensible déve-
loppement littéraire de cette langue, comparée avec les idio-
mes araméens et arabes, une preuve en faveur de ses affir-
mations linguistiques, qu'elle croit irréfutables. C'est, aidé
de ces faibles preuves scientifiques, que le moyen-âge affir-
me par devant l'histoire la raison de sa prédominance in-
tellectuelle.
Lorsque plus tard, à l'époque de la Renaissance, les
nouvelles découvertes, tant scientifiques que géographiques,
et la meilleure compréhension des lois cosmiques vinrent
condamner non seulement la Tomyftxfix XpuTiovcoi de l'In-
dicopleusie, mais aussi la théorie géocentrique de l'Univers
proclamée par l'Almageste de Ptolémée, la science de l'his-
toire, délivrée des bornes étroites de la préparation reli-
gieuse où elle se trouvait*, allongea ses premiers regards
sur de plus larges horizons. Newton, par l'application aux
' Au moyen-âge on donnait le nom de relation de préparation et
consommation (uroiyîîa toû xoaftoù) au principe divin, au moyen du-
quel la Providence déterminait à travers les siècles les événements hu-
mains. C'était la partie indispensable de toute histoire ecclésiastique
Apocj^i-S. Èpiph. Haeres. j, i. S. Aug. CiV. Ifei ivni, c. 5i.
,ï Google
corps célestes, des formules abstraites de la mécanique ra-
tionelle, découvre la loi de l'attraction de la matière et im-
prime à l'étude météorologique de la terre, par l'analyse
comparative de toutes les sections coniques, le caractère
authentique et positivement scientifique qu'elle conserve
encore aujourd'hui. Après cette découverte on en fait
bien d'autres, et en peu de temps l'intelligence humaine
trouve, par l'observation et par le calcul, des espaces im-
menses, dans lesquels, maintenant, elle peut s'élancer li-
brement.
Les recherches géologiques faites dans les couches qua-
ternaires de notre globe devaient, plus tard, préparer l'es-
prit humain pour la création de la Paléontologie. Et si l'ex-
cessive préoccupation anthropologique de Scheuchzer le porta
à regarder la Salamandre fossile (TOeningen comme un exem-
plaire préadamitique de l'homme témoin du déluge (Homo
dilitvii testis) et à retarder, en raison de ce désastre, le pro-
grès des sciences préhistoriques; la hache de silex, décou-
verte et dessinée en lyiS par Kemp, força les naturalistes
à entreprendre de nouvelles investigations avec plus d'ardeur
et de confiance dans leurs travaux.
Il serait difficile, sinon impossible, de rapporter les pro-
grès que la paléontologie a faits partout depuis cette épo-
que. La haute antiquité de l'homme paraît déjà prouvée par
les grossiers instruments en pierre de la période paléolithi-
que trouvés en Italie, en Scandinavie, en Angleterre, en
France. La science des races éteintes, aidée de l'étude de
l'influence des lois cosmiques sur la climatologie et la géo-
lo^e, peut déjà asseoir les bases, d'un caractère positif, de
ses affirmations, et poursuivre, animée d'une forte convic-
tion scientifique, la résolution de ses problèmes.
D'un autre côté, un historien allemand, J. G. Eichhorn,
^'C
x^^
338
préoccupe de l'étude des prophètes hébreux S range la lan-
gue hébraïque dans le groupe des idiomes sémitiques, à côté
du syriaque, du chaldéen, du phénicien, de l'arabe et de
l'éthiopien. Et, quoique cette classification n'ait pas eu, plus
tard, l'agrément des philologues en général et des linguistes
modernes, en vertu de la meilleure compréhension des prin-
cipes ethniques qui ont déterminé les migrations orientales
citées dans le Berëskiih; quoiqu'ils aient préféré la grande
division des langues arabiques, selon Leibnitz, ou de sjro-
arabes comme l'entend M. Renan, cette classification a eu
cependant le grand avantage d'arracher au domaine exclusif
des sciences théologiques l'étude d'un idiome si nécessaire
à l'homme pour bien comprendre l'antiquité. Comnw con-
séquence de ce fait paraissent alors les premiers travaux
d'investigation sur la chronologie des livres hébreux*, et l'on
voit accourir plusieurs des illustres ornements du clergé latin '^
pour prendre part à cet important mouvement scientifique.
C'est donc dans ces conditions, que les sciences pré-
historiques, c'est-à-dire, l'anthropologie et la paléontologie,
aidées du développement progressif de la géologie, ont pré-
paré pour les siècles à venir la notion la plus complète et
la plus authentique que la raison humaine pourra donner de
la généalogie du globe et de ses habitants les plus anciens.
' Die Hebrâischen Propheten. Gotttingen 1816-1820, 3 vol. in ».°
' Ed. Lartet. 'Nouvelles recherches sur la coexistence de l'homme
cl des grands mammifères fossiles réputés caractéristiques de la der-
nière période géologique', m Annales des Sciences Naturelles, 4*" sé-
rie, l. XV, p. 256.
■ 'Le monde et l'homme primitif selon la Bible', i vol. in S» Paris
r86g, chez V. Palmé. On y développe la thèse de Marcelle de Serres
dans son livre 'Cosmogonie de Moïse comparée aux faits géologiques',
V. aussi les travaux des Abbés Bourgeois et Delaunay.
,ï Google
339
n.— Honnments mégrallttilques
dans le bassin h7drograpblqne de l'Anoora
Le spectacle imposant, et majestueux que présentent
les monuments mégalithiques devait sans doute inspirer,
dan« les temps historiques, à ceux qui en furent les pre-
miers observateurs, un sentiment religieux et grave em-
preint de superstitions et de crainte. L'aspect colossal et
fantastique dé ces masses, la disposition de leurs lignes, et
l'absence de presque tout sentiment architectonique, devaient
agir nécessairemenr sur ces êtres naturellement enclins au
merveilleux, comme une affirmation évidente du passage des
esprits supérieurs sur la terre.
Ainsi, nous voyons que le cromlech monumental de
Stonehenge, près Salisbury, avait pris le nom fantastique
de Côr-gatur «danse des Géants» tandis que les dolmens de
l'intérieur de la Bretagne y sont encore désignés sous le ti-
tre merveilleux de Alikorrigan^ c'est-à-dire a la maison des
Fées».
Les noms génériques donnés encore aujourd'hui à cette
sorte de monuments sont dérivés de termes franco-bretons'
et anglo-celtiques^. Une étude moins approfondie des scien-
ces de l'antiquité les a fait prendre, pendant longtemps, pour
des constructions druidiques, contemporaines de la domi-
nation gauloise.
Ce qui est naturel, c'est que ces peuples, dont le carac-
tère superstitieux avait déjà paru remarquable aux Romains
' Men-hir "pierre longue, pierre dressée» ou peulvœns.
* Tol-mert ou Dolmen {toi, table et men, pierre).
.,Co. ,
340
eux-mêmes, à l'époque de la conquête, les aient pris pour
des monuments religieux et y aient exercé toutes les cruau-
tés de leurs sacrifices publics*.
C'est sur ces dolmens, dit-on, que les anciens prêtres
druidiques faisaient les rites funéraires de leurs cultes bar-
bares et sanguinaires.
C'était au fond des forêts, dit Lucain', que ces minis-
tres horribles allaient répandre, en l'honneur des dieux Teu-
tatès, Taranis et Hésus, le sang de leurs victimes.
On a cru aussi que ces monticules artificiels que l'on ren-
contrait parfois (les tiimiili) dans les lieux les plus écartés et
loin du passage commun, et sur plusieurs desquels on a dé-
couvert plus tard des traces d'industrie humaine, étaient les
débris des autels graminés (arae gramineae) des anciens
sacrificateurs, quoique l'on dût savoir que de tels autels
' Natio est omnium Gallorum admodum dedita reliponibus: atque
ob eam causam, qui sunt afiectt gravioribus morbîs, qutqtie in proelîis
periculisque versanrur, aut pro victimis homines immolant, aut se im-
molaturos vovent, administrisque ad ea sacrificia Dniidibus utuntur;
' quod, pro vita hominis nisi hominis vita reddatur, non posse aliter deo-
nim immonaiium numen placari arbîtrantur: publiceque eiusdcm ^-
neris habent insticuta sacrificia.
César, De bello Gatt. vi, i6.
* Et quibus immitis placatur sanguïae dire
Teutates, horrensque ferts altaribus Hesus;
Et Taranis scythtcae non mitior ara Dianae. . .
Et vos barbaricos ritus, moremque sinistrum
Sacrorum, Druldae, positis repetistis ab armis.
Luc. Phars. i
TeutatÈs, Taautès, Theut,Thôys, Thoyt, Theutus ou Tuot étaient
des surnoms de Mercure, le dieu principal des Gaulois (Deum maxime
Mercurium colunt.— De bell. Gall. vi, 1 7) auquel ils sacriSaîent leurs pri-
rs. Son culte était originaire de l'Egypte.
,ï Google
passagers et temporaires {arae temporales) n'étaient élevés
qu'en temps de guerre, au centre des campements avec des
mottes de terre prises dans les vallées environnantes* par-
ce que les guerriers avaient besoin de la compagnie de leurs
divinités pour marcher au combat avec plus de hardiesse.
Ces monuments ont dû aussi recevoir des Grecs le nom
de ^itii, mot qui dans leur idiome désignait une proémi-
nence ou élévation quelconque et auquel a toujours été liée
dans l'histoire de leurs rites l'idée d'autel*. Apollonius de
Rhodes semble confirmer ce sentiment^, en écrivant que la
plupart des autels primitifs étaient des monticules de pierres
détachées, et le plus souvent une seule pierre. L'autel de
Zeus,au sommet du mont Lycée, en Arcadie, n'a été, d'après
Pausanias\ qu'un simple monticule.
Cependant, à cause du peu de sûreté que présentaient
de telles opinions, les savants ne pouvaient pas rester long-
temps d'accord sur la destination de ces monuments, cons-
truits sous terre ou à découvert, à l'usage des autels primitifs,
tant des dieux champêtres que des forces naturelles panthéis-
tes, vénérés dans les 'Apyoi Xiflot, ou pierres brutes des plus an-
ciens habitants de la Grèce et des peuples qui les suivirent.
Car, à mesure que ces monticules et la distribution de ces
pierres permettaient de désigner, par pure fantaisie, tout
< In medioque focos ei diis communibus aras
Gramineas
Aen. MI, 118.
Ovid. Métnm. vu, 241 ; xv, 573. Trîsl. v, Snj. Fasi. 11, C>a^. Hor.
Od. I, 19, i3 ; iir, S, 4. Apul. Met. vu, 10. Teriul. Apol aj. Mart. x, yi.
l Eusi. Ad II. viu, 441. Ed. SagUo in Dkt. des antiq. Gr. et Rom.
ytrh. Ara (altare, /ocus, poifws, étjyâ^x, korix).
* 'Afyowoi^TixsÈ, 1, 1 133 ; 11, 695.
* Paus. viii, 38, 7.
,ïGex:)Qlc
cela comme des constructions exclusivement appliquées aux
rites, tantôt simples et inoflensifs, tantôt barbares cl san-
glants, des premiers hommes, Pétude des géographes et des
poètes, les plus anciens, n'autorisait pas toujours un avis
aussi téméraire.
On savait, par exemple, que Sémiramis, reine de Ni-
nive, avait fait élever un monticule sur le tombeau de Ni-
nus, son mari; que Tlliade parlait des collines élevées par
Achille en h(-nneur d'Hector et de Patrocle; que les restes
de Laius, père d'Oedipe furent couverts de pierres brutes
et grossières: enfin, que ces monticules ne seraient pas seu-
lement des autels pour le culte, et que, pourtant, il serait
pour le moins prudent de les considérer aussi comme des
tombeaux-
L'aspect des Cippus ou autels, tombeaux ou tables ei
cercles fantastiques, émerveilla, non seulement les premiers
poètes, mais il surprît les géographes les plus anciens. Ar-
rien dans son 'Avâëoffi; 'AXf^âvJp™ ou l'Expédition d'Alexan-
dre, parle des pierres brutes qu'il a vues dans l'Asie Mi-
neure; et Strabon, en parcourant l'Egypte, raconte qu'il a
rencontré sur les chemins quelques temples de Mercure.
composés de deux pierres grossières surmontées d'une troi-
sième en forme de table; c'est à peu près ce que l'on doit
conclure des vers de Calpurne, lorsque dans la troisième de
ses éclogues' il fait dire à Lycidas:
Ipse procul siabo, vel acuta carice teclns,
Vel propiiis latitans vicina est saepe stib ara.
Chez nous, cependant, ces monuments passèrent long-
' Calpurn. Ecl. m. Exor. loi. I.vc. v. 94 et gS.
.ïGoogle
H5.
temps pour l'ouvrage des peuples d'origine asiatique qui,
avec les éitïments ibériens, formèrent à l'occident de la Pé-
ninsule, le groupe lusitanien dont nous descendons.
Lorsque, plus tard, la domination romaine vint étendre
sa prépondérance guerrière jusque dans cette région, nos
dominateurs ont dû rencontrer un grand nombre de ces
monuments, parce que, partout, et plus encore dans les con-
trées du nord du Portugal, on trouve encore aujourd'hui un
grand nombre de lieux appelés Attlas'.
Plus tard, au moyen-âge nous voyons ce même nom
donné à toute sorte de pierre qui, dressée au bord des che-
mins ou à l'entrée des villes, attirait l'attention des pas-
sants. On les a appelées aussi Aras et l'on a affirmé
que c'est sur ces pierres que «les premiers chrétiens ont
brûlé leur prémices et les gentils fait leurs horribles sacri-
fices*». Cette dernière explication semble se rapporter déjà
aux dolmens à cause de la particularité que présente leur
pierre horizontale.
Depuis le neuvième siècle jusqu'au treizième paraît
aussi le mot Mamoas ou Mamuas, que le latin barbare
de ces âges grossiers traduit par M amol la s, expression ser-
I Lès anies étaient emînenliores lapides vel colutnnae ullimae, gui-
bus /abrka sustitjetur (Servius, ad Gcorg.) Temples ù anies {aedes in
antis, vas; tv irapatotsïfli) c'est le nom donné par Vitruvc aux tem-
ples les plus antiques.
' Viterbo, Elvcid. verb. Anlas. La même chose que Aras. Dans la
dissertation de Martinho de Mendonça e Pina {Collée, da Academia da
Hisl. Port. [734, vol. xiv) les mots anta et dolmen sont confonJus. On
arrive à la même conclusion par rexcelleot travail de M. le dr. F, A.
Pereira da Costa, Monumentos prehistorîcos em Portugal (Descripçâo
de algtins dolmins ou antax de Portugal), Lisboa, Academia Real das
Scicncias, iBfiS, i vol.
lyGoogle
344
\ant a représenter toute proéminence ou petite colline de
forme arrondie, semblable au sein de la femme*, et dont
on se servait pour borner les champs, quelques routes et
certains villages*. Cet usage eut lieu en Espagne aussi bien
qu'en Portugal.
Dans ces proéminences et dans celles qui, à cette épo-
que, sont designées sous le nom de Aras, mot auquel Bul-
let attribue une origine celtique' — nous devons voir ces mo-
numents, que les études archéologiques modernes nous ap-
prennent à reconnaître pour les tumtiîi ou limites des peu-
ples gallo-romains.
Telle fut enfin l'idée qui, jusqu'au siècle dernier, s'y
trouvait invariablement liée, tant chez nous qu'à l'étranger.
Les Celtes, les Gaulois ou les Celtes de l'occident en étaient
toujours les constructeurs primitifs.
Plus tard, quand on commença à s'occuper de l'in\'es-
' Viierb. Elucid. verb. Mamoa.
' oQue fossetn na Matnoa de par da carreîra de sobre Aiuega,
que chamam Mamoa-Negra». Doc. de l'Université, de 1198, ciré par
Viterbo. «E parte pela Mamoa que esta a par da estrada». Doc. de
Pendurada de i3i5, tbid. Dans un document de S. Thyrso on lit Ma-
mua (in eod. loc.)
' J. B. Bullet, Mémoires sur la langue celtique, Besançon, i7i4 — 1 770.
3 vol. in fol. Revue Archéologique, vot ivi, a 10.
Je ne puis me conformer â l'opinion de quelques-um de nos ar-
chéologues qui disent que chez nous on a appelé antas les dolmens
placés sur le sol, en affirmant que les mamuas étaient ces mêmes mo-
numents élevés sur des monticules factices {lumuli ou limites), La
meilleure interprétation du vocable latin aiua, aniae, n'autorise certai-
nement pas cette explication. V. les travaux du grammairien Nonnius
Marcellus -De compendiosa doctrina per Hueras adjîlium. i. De pro-
prietate sermonts, 124. C. Thierry cite a cet égard et bien ù propos les
mots d'Hésychius: UctfaoTÔ^ç oî itpij t;Ï;. . . (V. le Dict des Aniig
Grecques et Romaines, fasc. 2. p. 381.
,ï Google
343
ligation des faits préhistoriques, à Paide de l'examen géolo-
gique des zones où ils se révélaient, ainsi que des découver-
tes paléontologiques et des progrès de la géologie et de l'an-
thropologie, on trouva que ces monuments, datant d'une
époque beaucoup plus reculée que celle qu'on leur avait
attribuée jusqu'alors dans les domaines de la science, ap-
partenaient à la période néolithique ou de la pierre polie et
étaient, pour la plupart, destinés à servir de chambres fu-
néraires.
Martinho de Mendonça e Pina est le premier écrivain
portugais qui ait parlé de ces monuments, et quoique ses
travaux soient faits avec un critérium très élevé, il tombe
parfois dans des erreurs auxquelles le temps où il vivait
semble l'avoir fatalement condamné. Il fut cependant le pre-
mier Portugais qui les ait observés, en savant ofhciel. Je
crois cependant qu'il n'a pas fait mention d'un grand nom-
bre de ceux que cette province, en raison de sa population,
aurait dû posséder; c'est sans doute ce qui en a rendu la
destruction plus complète.
Plus tard, M. Ignacio de Vilhena Barbosa*, en indi-
quant ceux dont il a connaissance dans la province de Minho,
cite à peine celui de Monte da Polvoeira, près Caldas de
Vizella et celui de Monte da Pedreira à peu de distance de
Pombeiro,
■ Il y a ici évidemment ignorance corhplète de l'existence
■ «Foi a provincia do Minho, em razâo de ser mais populosa, onde
aquella desiniiçâo (ceik des monuments mégalithiques) Toi maior e
mais compléta". I. de Vilhena Barbosa, Arch. Pict. xi, 378. F. A. Pe-
reira da Costa op. cit. Manuel BemarUes Branco, Supp. ao mappa de
Port, de Joâo Baptista de Castro. Lisboa, i87o, p, i36 et i37. Mart. de
Mendonça e Pina, Diseriaçâo, in Collée, da Acad. da Hist. Port. 1734,
„GoQiilc
3Q2IC
346
des dolmens du bassin hydrf^raphique de l'Ancora, dont la
ruine, certes, est inévitable, vu l'état où se trouve le dol-
men du hameau de Santo, dans la paroisse de Ville, à peu
de distance de Gontinhâes, cottcelho de Caminha, qui était
encore debout il n'y a pas longtemps.
Dans cette zone on trouve le dolmen de Barrosa, dont
l'exploration a été faite a diverses époques par des amateurs,
et dont aujourd'hui il n'y a presque plus rien à explorer, vu
l'état de véritable dévastation que présente le tumidiis ou
monticule sur lequel il est assis.
Il est connu par le nom de
DOLMEN DE [lAKROSA
Ce monument {pi. I fig. i, 2) se trouve placé auprès de
la lisière orientale d'un petit bois de sapins sur une espèce
de plateau de courtes dimensions, auquel donne accès le che-
min qui conduit de Gontinhâes à Ville, à 1 5oo mètres à peu
près de cette paroisse, dans la ligne de sud-est. 11 est d'une
grande élégance et se trouve assis sur un petit monticule
de terre ou iumulus, dont la base est entourée de quel-
ques pierres grossières pour défendre l'enceinte occupée
par le monument. Au sud et au nord la table ou ara re-
pose sur trois pierres de chaque côté; outre celles-ci il y
en a encore deux autres en dehors de l'entrée de la cham-
bre. La hauteur moyenne de toutes les pierres sur lesquel-
les la table repose est de i^iSS, la largeur moyenne de cel-
les du côté sud, à partir du fond du monument, est pour
la première i ",05, pour la deuxième i"',26 et pour la troi-
sième i°,5o, formant toutes une courbe dont la branche
orientale se rétrécit sensiblement vers l'entrée. Les pierres du
côté nord, disposées en ligne droite, ont de largeur moyen-
,ï Google
347
ne: la première 84 cent., la deuxième et la troisième i"',4i
chacune. Elles forment rentrée du dolmen, mais après elles
il y en a encore deux autres, dont la première large de i™,56
et la seconde de i'",38. La longueur de la pierre formant
le fond, est de a^iSo; l'épaisseur moyenne de toutes ces
pierres est de 25 cent. La table affecte sensiblement la for-
me d'un trapèze, ayant pour bases i"',5o et 3 mètres; la
hauteur en est de $"',bo. L'entrée qui, comme nous l'avons
déjà dit, est tournée vers l'est, mesure à son ouverture ho-
rizontale 2",5o. La chambre a 2",5o, environ, de longueur
sur 3 mètres de largeur.
A la texture extérieure du granité on reconnaît aisément
que ce monument a été, pendant longtemps, couvert de
terre, presque jusqu'à la table ou à peu près.
DOLMEN DE VJLLE
Ce dolmen est situé dans la paroisse de Ville, conce-
Iho de Caminha, hameau de Santo. Il en reste à peine deux
pierres qui ont dû en former le fond. Il est à 700 mètres à
l'est de celui de Barrosa. L'une de ses pierres est rectan-
gulaire et mesure i"',i5 sur i'",8o, l'autre affecte sensible-
ment la forme d'un prisme rectangulaire dont la hauteur
est de 2"',4o et la largeur de o",4o à chaque face.
Ce dolmen était recouvert par un monticule, au centre
duquel a été commencée la fouille qui l'a mis découvert. Je
n'y ai fait aucune fouille.
L'ouverture aujourd'hui n'est plus qu'un fossé.
348
DOLMEN DE FRAIÂO
Dans le hameau appelé Fraiao, paroisse d'Ancora, et
au sud de la rivière de ce nom, il y a eu autrefois un dol-
men. Des fouilles répétées ont contribué à sa ruine com-
plète. Il en reste à peine le trou qui représente la chambre
et une légère accidentation dans le terrain qui était le tumii-
lus. Une hache fabriquée de schiste amphiboliquc, fut trou-
vée à Pendroit où la chambre de ce monument a dû exis-
ni. — station da mont Santa Lnzla
L'étude des grottes et des cavernes, des abris sous ro-
che, des kioekkenmoeddings et des dolmens fut pour la clas-
sification, dans les domaines de la science, des diverses gra-
dations par lesquelles l'homme a passé depuis la période
paléolithique et mésolithique jusqu'à la période néolithique,
ce que, plus tard, l'analyse des cités lacustres et palustres
a été pour catégoriser mieux et avec plus de rigueur, l'in-
dustrie humaine à l'âge de la découverte des métaux et de
leur application. Le hasard qui a fait découvrir les palafit-
tes des lacs de la Suisse, l'analyse à laquelle le dr. Keller,
' Cette hache a été envoyée à la Section des Travaux Géologi-
ques où elle se trouve.
M. Martins Sarmento dans ses études archéologiques cite, dans la
vallée de l'Ancora, le dolmen de Barrosa et quatre autres encore dont
il ne reste que des vestiges. Dans ces vestiges sont compris par 111-
lustre explorateur ceux de deux autres dolmens qui se trouvent en de-
hors du cercle auquel nous circonscrivons ce mémoire. L'un se trouve
situé dan l&portella de Venade.
,ï Google
349
de Zurich, a fait soumettre les instruments trouvés dans ces
stations*, ont déterminé dans l'étude des sciences préhisto-
riques cette période qui, en phUosophie, est caractérisée par
révolution psycholof^ique transformant en loi rationnelle et
positive ce qui en lui-même n'était qu'une loi empyrique.
Les stations de l'âge du bronze, grâce à leur profusion,
sont aujourd'hui un champ très vaste pour l'étude des der-
niers temps préhistoriques.
En Portugal, surtout dans la province de Minho, (à en
juger par le grand résultat que l'on a retiré du peu d'in-
vestigations que l'on y a faites), ces stations sont très nom-
breuses, sans doute, et elles doivent exciter l'ardeur des in-
vestigateurs.
Les travaux dans la Citam'a de Brileiros et à Sabroso
sont ceux que l'on a faits' d'une manière plus méthodique
dans cette partie du pays.
A la station de Santa Luzia, où aucune exploration mé-
thodique et consciencieuse n'a encore été entreprise, on a
déjà fait beaucoup de découvertes (PI. 2) et on a l'espoir
d'en faire encore davantage.
L'espace occupé par cette station est de 960 mètres au
nord du mont Santa Luzia, et de 210 mètres de la chapelle
de même invocation (PI. 2 a).
La rencontre de pierres avec des dépressions artifi-
cielles en forme de cuvette y est vulgaire, {PI. 2 B A). Au
N.-N.-E. se trouve Voppidum^ occupant une étendue de 1400
mètres carrés, contenant douze maisons à découvert (PI. 2 B)
' Pfahlbauten. in 8.' Zurich, i854-i856.
V. les travaux de Mr. F. Martîns Sarmento dans VInstituto de
Coïmbre. II. 'Cîtania'du prof. Ém. Hîibner, irad. de J. V., Porto 1879.
II. 'Observaç5es à Citania do dr. Emilio Hîibner', por F. Martîns Sqr^
mento, Porto, 1879, in 4.', avec planches,
-Cattijl.
35o
dont les fondements ont une forme elliptique, rectangulaire
ou circulaire.
Il y en a encore quelques-unes à déterrer, dont les
arêtes des fondements se montrent d'une manière très vi-
sible à la surface du sol.
Le siège de cette station est une espèce de plateau irré-
gulier, présentant dans la direction N.-O. une accidentation
plus distincte. Elle est défendue par une muraille générale
de deux mètres de laideur, que Ton aperçoit facilement sur
plusieurs points. Le revêtement extérieur des murs des mai-
sons (PI. 2 CD) est en pierre peu lourde. Dans quelques-
uns de ces revêtements la disposition diagonale est forte-
ment accentuée et dénonce un travail soigneux et des con-
naissances assez avancés dans l'art du constructeur. La
disposition verticale des fondements, nous porte à croire
que la hutte ne devait pas terminer en forme de four, ce
qui a lieu dans quelques-unes de celles de Citania'.
M. Joaquim Possidonio Narcîso da Silva, président de
l'Association des architectes civils et des archéologues por-
tugais et directeur du Boletîm de Architectura e de Archeo-
logia, a fait des recherches dans cette station, dont la des-
cription et les dessins respectifs se trouvent publiés dans
le n." 4 du dit Boletîm, ii série, tome u, 1877.
Quelque temps après, il s'est agi de poursuivre ces tra-
vaux et on a tâché d'établir sur des bases sûres l'histoire
' "As escavaçôes do sr. Mariins Sarmento pozeram a dcscobcrio
no plateau umas trinta ou quarenta habitaçôcs, redondas etn gérai, c
algumas elliplicas; a sua altura c de 2-3 métros. Algumas diminuem
para cima em forma de cône, em vîmide da disposiçâo reintrante das
camadas de pedra.- Cîtanîa, por E. Hubrier, trad. de J. V. Porto, 1870.
,ï Google
J. Caloas.
Lilb PiTii Rua in loinhj de Tcdio. G
DigitizsdbyGOOgle
„Google
J. Caldas
^
„Google
35 1
de cette station. C'est un travail qui appanient aux temps
historiques et qui, par conséquent, est étranger au but de
ce mémoire. Les stations à Pair libre dans ces contrées,
quelle qu'ait été leur origine à l'époque de la découverte
des métaux, furent sans doute occupées plus tard par des
tribus de Vettoties, Carpetani, Vaccaei et Callaici, qui vin-
rent établir leurs camps sur la panie occidentale de la Pé-
ninsule ibérienne.
C'est de l'étude de ces peuples et de leurs lûtes où de
leur association avec les Euscaldunac, d'origine asiatique,
qu'il paraît naturellement résulter quelques vérités sûres
pour l'histoire ethnique de nos ancêtres les plus anciens.
Les Vetlones^ Carpetani, Vaccaei, et Callaid étaient, d'après
Strabon, (c. m) gens insignes, nobiles génies (rà yvwfipa t&m . . .),
mais dont le géographe grec n'entend pas devoir s'occuper
spécialement, vu leur petit nombre, reliquiae vero ob par-
vitiUem non sunt dignae mentione. C'est un sujet très im-
portant. M. F. Martins Sarmento a consacré à cette ma-
tière un mémoire intitulé: Les Lusitaniens^.
' V. plus loin dans ce Compte • rendu : V— Sujets divers.
'r^^
IV
ÉPOQUE DU BRONZE
DU OUIVBE ET DU BRONZE EN ESPAGNE
LA PÉRIODE QUI LES A PRÉCÉDÉS
M. ViLANOVA
Je viens soumettre à votre supérieure illustration ics
rcsLihats de mes études et de mes recherches en Espa-
<;iic, relativement ù la première époque des métaux. Vous
savez, Messieurs, beaucoup mieux que moi, combien est
!>énérale Pldée, indiquée pour la première fois par Niisson
et Morlot, si je ne me trompe pas, que l'homme après la
période néolithique, a commence par se servir de Palliage
du cuivre et de Tétain, dans la fabrication de ses outils et
de ses armes, et de là aussi la dénomination d'âge du bronze
que tous les archéologues donnent à cette période. La
croyance est aussi générale que le bronze, et jusqu'à un cer-
tain point aussi l'usage de la pierre polie ont été introduits
en Europe par des races asiatiques conquérantes ou com-
merçantes. Eh bien! je viens apporter des matériaux qui
me semblent n'être pas toul-à-fait d'accord avec ces idées
,ï Google
353
généralement reçues; mais pour cela il faudra vous indi-
quer les résultats des mes investigations dans mon pays.
D'abord nous avons dans plusieurs localités des re-
présentants de toutes les périodes préhistoriques, depuis le
diluvium de San Isidro à Madrid même, d'où vient cette
belle hache amygdaloïde de silex du type de Saint-Acheul, qui
est le plus ancien, jusqu'aux dolmens de Valence, Andalou-
sie, Estramadoure, qui appartiennent à rage de la pierre
polie, du cuivre, du bronze, etc. Mais parmi ces localités,
celle qui offre le plus d'intérêt est celle d'Argecilla, province
de Guadalajara, car j'ai trouve des couteaux magnifiques
en silex, avec de la céramique grossière, et en même temps
et dans le même gisement, des flèches, des pointes de lance,
et un grand nombre de haches polies, avec cette particu-
larité, que quelques-unes sont bien achevées, tandis que d'au-
tres ne le sont pas. J'ai trouvé aussi une autre céramique
plus parfaite; cette station représente donc un vrai atelier,
dans lequel Thomme séjourna pendant un temps très long,
représenté par la fin de l'époque archéolithique ou des cou-
teaux, Cl le commencement de celle caractérisée par la hache
polie, les flèches et les pointes de lance. On voit par con-
séquent que le passage de l'une de ces époques à l'autre a
été insensible, et qu'il n'y a pas besoin d'appeler des races
asiatiques pour l'introduction de la nouvelle industrie, qui
est tout-à-fait indigène, car les génécaiions se succédant dans
le même endroit pendant un temps très long, ont su fabriquer
le couteau en silex et la hache polie en même temps que la cé-
ramique correspondante. Il fallait citer ce fait très signilicatif
pour confirmer ma thèse, car par le même procédé nos an-
cêtres ont apris l'usage des métaux sans avoir besoin de maî-
tres, et a l'appui de cette idée je peux vous indiquer la coexis-
tence dans la même station des haches polies en diorite, en
^■f*
»4
serpentine, fibrolithe, etc. et des haches en cuivre. Voilà ces
spécimens, que j'ai Thonncur de mettre sous vos yeux, en
cunlirmation de la thèse. Cette hache en diorite à été trou-
vée avec cette autre en cuivre dans ut\ dolmen à l'Olleria,
village de la province de Valence; ces autres pièces provien-
nent d'Alcoy. dans la province d'Alicante, de l'Estramadoure
près de Valencia de D. Juan, dans un dolmen appelle Ga-
rila. Ainsi on voit sans te moindre doute qu'en Espagne, et
je crois qu'il est arrivé la même chose dans bien d'autres
pays, l'homme a fabrique dans le même endroit les instru-
ments en métal et les objets en pierre polie, dont l'industrie
est vraiment indigène, car on peut faire h l'appui l'obser-
vation que les haches métalliques ont tout-à-fait la même
forme que celles qu'il fabriquait avec la pierre. Ainsi ces
exemptes, et beaucoup d'autres que j'aurais pu citer, viennent
à l'appui de la fabrication indigène des premiers instruments
en métal.
Maintenant ce métal n'est pas le bronze, mais toujours
le cuivre, et le cuivre dans le commencement martelé, plus
tard fondu. Cette indication se trouve d'abord confirmée
par l'aspect et la couleur rougeâtre caractéristique de ce
métal, et surtout par l'analyse faite dans le laboratoire de
Saez, Utor et Compagnie à Madrid, rue de Carrelas. Ils
déclarent dans cette lettre-ci, que la hache analysée ne
contient pas de vestiges d'étain, ni d'autre métal que du
cuivre pur.. Et sur ce sujet je me rappelle qu'en visitant
le Musée archéologique à Madrid avec quelques-uns des
membres du Congrès, mon ami le très distingué profes-
seur M. de Quatrefages m'engagea à faire analyser les ha-
ches que nous voyons, et que je lui disais être de cuivre
pur, car d'après lui se serait rendre un grand ser\ice à l'ar-
chéologie préhistorique si on démontrait par la chimie
,ï Google
355
l'existence en Europe d'une époque du cuivre, analogue ou
égale à celle qu'on observe en Amérique. Eh bien 1 les vctux
de cet éminent anthropologiste ont commencé à se réaliser,
et je m'engage à les compléter en analj'sant toutes les ha-
ches qui se trouvent dans le Musée de Madrid, celles de
mes collections et bien d'autres que je connais. Au reste
dans un paj's dans lequel le cuivre natif abonde considéra-
blement, et on peut citer à l'appui le grand nombre de mi-
nes en exploitation depuis les temps les plus reculés, je
trouve bien plus naturel que l'homme ait commencé à se
ser\'ir d'abord du métal simple, et que seulement après de
longs et pénibles essais il ait appris à mêler le cuivre avec
l'étain, dans des proportions convenables pour obtenir le
bronze. Cela ne veut pas dire. Messieurs, que dans des
temps bien postérieurs TEurope n'ait pas reçu dans la fa-
brication du bronze l'influence des races asiatiques; ce que
je voulais soumettre à votre discrétion c'était seulement que
le cuivre en Espagne a précédé le bronze, et que cette bran-
che de l'industrie a été tout-à-faii indigène.
M, Chantre: Je n'ai pas de raison pour refuser aprioti
un âge du cuivre en Espagne; je serais, au contraire, tout
disposé à l'admettre si le fait est démontré scientifiquement.
J'ai beaucoup étudié cette question en France et dans
toutes les autres parties de l'Europe, dont j'ai visité pres-
que toutes les collections, et je me crois en droit de faire
des réserves lorsque l'on parle d'objets en cuivre alléctant
les formes de l'âge du bronze.
-'fl
356
La plupart, en effet, des objet!
comme (iiant en cuivre, sont en bro
montre les analyses.
Dans presque tous les pays o
métallurgie un produit du développ
trie, une invention indigène. Comme I
par les hommes di; l'époque néolithiq
blabîc, on a voulu avoir dans chaq
vre faisant transition entre l'âge d
broriiîe. On a été d'autant plus port
la région était plus riche en mines
est arrivé en Hongrie: or, dans ce f
d'objets en cuivre, l'existence d'un
encore un fait acquis. Telle a été la
It est naturel de voir surgir cette mi
et en Portugal; mais ici comme sui
au nord et au centre de l'Europe, (
devront aider surtout à la solution i
Partout en Europe il paraît déi
gie a commencé par le bronze, et
Occident est le fait d'importations o
dant l'époque néolithique. Partout,
couvert de ces objets métalliques di
primitives associés à des objets en^]
qu'ils sont en bronze.
Des découvertes du même gen
pagne et en Portugal, et il n'est p;
vation viendra prouver, dans un ave
ninsule ibérique n'est pas restée en
général de la civilisation dans ces te
M. Vn.ANOVA: Je soutiens que
,ï Google
35?
tes sur une de ces haches et que les résultats se trouvent
à la disposition des membres du Congres.
M. Chantre: En présence d'un fait je n'ai qu'a m'in-
cliner, mais il faut se rappeler qu'une analyse isolée ne per-
met pas d'établir Texistence d'un âge du cuivre.
Au reste, comment a été faite cette analyse? Sou\ent
c'est sur une petite parcelle de substance arrachée à l'une
des extrémités de la hache, qui ne peut bien être qu'un peu
de patine ou de carbonate de cuivre, que sont pris le plus
souvent les échantillons. Alors il est naturel que l'analyse
montre du cuivre pur. Pour moi, une anal3-se doit être faite
sur un fragment de métal pris au centre de la pièce, là où
il n'y a pas d'oxydation, et où l'on est certain dès lors d'avoir
du métal pur ou un alliage normal.
M. RoRRiGUES; J'ai quelques doutes sur la valeur qu'on
prétend tirer de l'analyse minutieuse des petites pièces, le
mélange des métaux ne s'y trouvant pas partout égal. L'étain
en faible proportion ne modifie pas les qualités du cuivre
et a pu être introduit par hasard.
M. DE Mortillet: L'âge du bronze dépend exclusive-
ment des gisements d'étain: on ne peut faire du bronze que
là où il y a de l'étain. Le bronze doit être venu de l'Asie.
Les haches plates, qui sont, souvent en cuivre, il faut l'avouer,
paraissent bien plus récentes que les haches de bronze af-
fectant d'autres formes. Je ne peux donc accepter Thvpo-
ihèse de M. Vilanova.
,ïGoO'
'^_
SDR LUS HACHES EN BRONZE TROUVÉES EN PORTUGAL
M. J. POSSIDONIO DA SlLVA
On suppose généralement que la Péninsule ibérique
n'a pas connu l'âge du bronze, et cette hj-pothèse a sa rai-
son d'être, puisque, jusqu'à présent, on n'a trouvé ni en
Espagne ni en Portugal aucun atelier ou station de cette in-
dustrie. Le très petit nombre d'instruments de métal dé-
couverts dans ces deux pays fait croire que l'usage en était
fort restreint; peut-être même qu'il n'y a pas eu dans la
Péninsule ibérique une époque de transition entre l'âge néo-
lithique et l'âge du fer, comme cela est arrivé en Norvège,
où il semble que l'usage du bronze n'a pas existé, puisque
dans les tumuîus fouillés on n'a trouvé aucune trace d'ins-
truments de métal.
Cependant, il est bon de dire, que dans les dolmens
découverts en Portugal sur le territoire de la province
d'Alemtejo, on a trouvé quelques haches de bronze du tj'pe le
plus primitif, fig. S, et en tout semblables à celles qu'on a
recueillies en France, dans le Jura, ainsi qu'en Grèce, Ces
instruments auraient peut-être été apportés dans la Pénin-
ly Google
359
suie par quelque tribu que vint y séjourner. Mais on ne
peut pas faire la même supposition pour les haches de bronze
à deux anses, découvertes dans les provinces de PExtrema-
dura, du Minho, et de Beira Alta. Ces instruments sont
d'un type essentiellement distinct de tous ceux rencontrés
jusqu'ici dans les autres contrées de l'Europe, et cela don-
nerait à penser que ces celts seraient le produit d'une in-
dustrie péninsulaire. Et en effet, s'ils n'étaient qu'une imi-
tation des instruments en usage chez les autres populations
préhistoriques, comment se ferait-il que dans les nombreu-
ses fouilles faites dans tous les pays, on n'en eût pas trouvé
de semblables? Les haches à deux anses que possèdent les
musées d'archéologie de l'Europe — et elles sont en très petit
nombre — ne sont pas de dimensions aussi grandes que les
nôtres, leurs formes ne sont pas les mêmes, et de plus elles
n'ont pas le talon plein.
La hache découverte à Abrigada, dans la province de
rExtremadura,_;î^. /, a la douille carrée, et deux anneaux sur
le bord de cette douille; son tranchant est large et sa lon-
gueur est de i5 centimètres.
Parmi les haches trouvées à Rodriz, dans le Minho,
ûg. 3 et 4, il en est une dont la douille est ronde et fort
lai^e, et l'autre dont le tranchant est très développé, avec le
talon plein; elles ont deux anneaux et leur longueur est de i8
et 24 centimètres.
Celles qui ont été recueillies à Ferreira d'Aves, dans
la Beira Alta, sont au nombre de 19. Quelques-unes d'entre
elles étaient déjà brisées, d'autres usées, mais toutes avec
deux anses de suspension. Ces instruments sont les plus
grands connus jusqu'à ce jour, car ils mesurent 26 cen-
timètres de longueur. Fig. 2.
La forme essentiellement caractéristique de ces instru-
.,Ct
C^
3Go
ments de bronze dans ce pays, me fait supposer qu'il y a
eu une industrie locale de ce genre en Portugal; sa durée
n'a peut-être pas été très longue, parce que Tusage du
fer apporté par les Romains a fait abandonner l'usage du
bronze, mais enfin tout porte à croire qu'elle a existé.
Ji ne m'appartient pas de rechercher les origines du
bronze; les maftres de la science ici présents sont plus com-
pétents que moi pour résoudre cette question difticile; je
n'ai d'autre but que d'appeler l'attention des membres du
Congrès sur ce fait remarquable, que les haches préhisto-
riques trouvées dernièrement en Portugal son uniques dans
leur genre. Puisqu'on a découvert sur notre sol des instru-
ments de bronze d'un type spécial, tout à fait difl'érents de
ceux qu'on rencontre dans les autres régions, comment
pourrait-on expliquer que l'industrie des haches à deux anses
ne serait pas née chez nous? Quoiqu'on ait trouvé dans nos
dolmens des bronzes aux formes primitives, admettons que
des fondeurs nomades aient importé en Portugal le type
nouveau, ou qu'il ait été fourni aux populations néolithiques
de la Péninsule par des voyageurs de cette époque reculée.
Mais alors, comment se fait-il, que dans les autres contrées
de l'Europe qui devaient être fréquentées par ces mêmes
nomades, on ne retrouve pas des haches semblables au type
dont nous nous occupons?
Il est donc pius que probable, que ces industriels voya-
geurs ont amené un développement de l'industrie du bron-
ze chez nous, et qu'un tjpe spécial est né de ce développe-
ment.
Quoique les investigations archéologiques soient faites
en Portugal cette année avec un peu plus d'activité, que
par le passé, toutefois, il faut espérer qu'en poursuivant les
fouilles avec persévérance et en divers endroits du pays, on
,ï Google
36i
trouvera des instruments de l'âge du bronze qui pourront
nous éclairer plus nettement sur le sujet que je soumets à
la critique des membres du Congrès. Peut-être arriverons-
nous alors à la conviction que l'industrie typique des haches
à deux anses avait été fondée sur notre sol, en imitant, il
est vrai, la forme générale de ces instruments, mais aussi en
altérant leurs dimensions, en les garnissant de deux anneaux
et en leur laissant le talon plein. Et ces modifications, en ou-
tre d'une forme caractéristique, marquent une provenance
distincte de notre contrée, un type nouveau adopté sans
doute parce que son usage avait été reconnu plus commode.
On n'a retrouvé aucun moule de pierre ou de terre
cuite qui puisse prouver l'existence d'une fonderie; mais,
tout le monde sait, que les moules de ce genre ne sont pas
indispensables pour couler le bronze.
Si on compare les haches qui ont été découvertes dans
le nord ou le centre de l'Europe, et même celles qu'on a
trouvées dans les autres régions, avec celles qui ont été re-
cueillies en Portugal, on voit tout de suite que les formes
et les dimensions des premières sont différentes de celles
des secondes. Ainsi au musée de Dublin on trouve des spé-
cimens de ces instruments à formes courtes, avec une douille
ronde et un seul anneau, ayant tout au plus ne if centimètres
de longueur. Les haches préhistoriques du musée de Stock-
holm ont a peu près la même forme, à une seule anse, mais
avec un bourrelet autour de la douille; leur longueur est de
dix à onze centimètres.
En Allemagne et dans le Danemark on trouve des for-
mes analogues à celles qu'on rencontre en France, c'est-à-
dire avec une douille ronde un peu profonde et un tranchant
très développé, mais toujours avec un seul anneau, et d'une
longueur qui varie de i5 à 17 centimètres.
.,Ct
362
Celles du musée de Genève, qui ont été découvertes
dans le lac de Léman et dans le lac de Neuchâtel, ressem-
blent aux haches trouvées dans le Jura, avec cette légère
différence, que la douille ronde arrive presque jusqu'au tran-
chant; elles n'ont qu'une seule anse et leur longueur ne dé-
passe pas 19 centimètres.
Dans les palafittes du lac du Bourget, on a trouvé des
haches qui ne sont ni complètement circulaires ni exacte-
ment carrées, mais toujours avec un seul anneau et d'une
longueur de 1 8 centimètres. Les musées de Saint-Germain-
en-Laye et de Lyon possèdent, chacun, une très belle colle-
ction de ce genre découverte en France. Le Musée Britanni-
que, à Londres, montre aussi quelques haches de ce tj'pe.
Cependant on a trouvé en Russie une seule petite ha-
che à douille ronde, avec bourrelet et ayant deux anneaux;
mais ces anneaux sont forts petits et tout à fait différents
des nôtres. Ajoutons de plus que ce n'est qu'une rencontre
fortuite, un fait isolé qui ne peut pas servir de point d'ap-
pui pour détruire notre hypothèse, et qu'on n'en peut pas
conclure qu'il y ait eu en Russie une industrie du même genre
que celle que nous supposons avoir existé en Portugal.
Ce résumé rapide nous fait apprécier les différences
qui existent entre les divers spécimens qui sont les types
locaux de chaque contrée; c'est ce que M. Chantre a fort
bien expliqué en disant:
«Que peu ù peu l'industrie du métal s'implante dans
chaque pays avec l'aide d'ouvriers étrangers, et lorsque les
indigènes y ont été complètement initiés, les formes primor-
diales se modifient, des types locaux sont créés, tout se spé-
cialise de plus en plus dans un périmètre donné, et on ar-
rive a se trouver en face de ces groupes distincts, que M.
Hildebrand a proposé d'appeler des provinces.*
,ï Google
Le même développement a donc existé dans la Pénin-
sule ibérique, et les haches qui ont été découvertes dans
trois provinces du Portugal, sont le produit local d'une in-
dustrie indigène. La découverte de ces instruments nouveaux
et d'un caractère tout spécial, apporte une pierre de plus
à l'édifice de la science archéologique; elle apporte une cer-
titude à ce fait important, que l'industrie du bronze avait
subi dans chaque contrée un développement distinct, en
créant des instruments d'une forme nouvelle, comme cela
eut lieu en Portugal, et d'un type particulier, c'est-à-dire
avec deux anses et talon plein.
Jusqu'à présent on n'a pas trouvé dans nos contrées
des haches à ailerons et à douilles rappelant (es types an-
ciens d'origine italienne.
Comme je l'aï déjà dit, je crois que l'àge du bronze n'a
pas été de longue durée en Portugal, et mon opinion s'ap-
pme non seulement sur la quantité excessivement restreinte
des instruments trouvés dans ce pays, mais aussi sur ce
fait connu, que dans le commencement de l'usage du bronze
dans les autres contrées, ce métal servit d'abord de parure.
Toutefois, jusqu'à ce jour, on n'a pas trouvé dans la Pé-
ninsule ibérique aucun ornement de bronze à cet usage.
On peut donc supposer que l'époque de transition de
l'âge néolithique à l'âge du fer n'a pas été d'une grande du-
rée, comme cela est arrivé dans le nord et le centre de
l'Europe, parce que la matière première, le métal, étant rare
et difficile à obtenir, l'industrie de la fabrication des instru-
ments de bronze n'eut pas une grande extension pour nos
populations préhistoriques.
J'ai pris la parole. Messieurs, pour vous mettre au cou-
rant de la particularité archéologique qui nous a fait ren-
contrer, dans ce pays, des haches de bronze d'tine forme
lyGooWe
366
existent entre les types des régions méditerranéennes de
l''Espagne et du midi de la France. 11 résulte des recherches
de M. Emile Cartailhac que dans cène dernière contrée,
où les haches plates abondent, on en a trouvé une dixaine
d'exemplaires à deux anneaux. M. Evans a signalé cette
forme en Cornouailles. On sait qu'elle se retrouve dans le
nord de l'Asie. Je l'ai rencontrée aussi dans le Caucase.
M. Hildebrand: M. da Silva nous a fait connaître tfois
types de haches en bronze, trouvés en Portugal. Mais l'ex-
périence faite dans les autres parties de l'Europe démontre
qu'il y a un développement des types. Ainsi au commence-
ment des séries des haches il faut mettre un tj'pe plat et
simple comme celui de l'Alemtejo. On a donné à ce type des
rebords qui sont devenus de plus en plus agrandis. Guidés
par l'expérience les ouvriers ont développé encore d'autres
parties de la hache, jusqu'à ce que l'on est arrivé au type
du Minho. Il y a des types intermédiaires qui rattachent
aux haches de ce type celle qui a un trou d'emmanchure.
Il est donc intéressant de voir ici trois haches appat-
tenant à trois différents degrés de développement. Les deux
dernières supposent de nécessité d'autres types moins dé-
veloppés, qui nous manquent encore, et que les archéolo-
gues portugais et espagnols doivent bientôt se trouver en
état de nous montrer, si les fouilles déjà commencées sont
continuées. Dans la Péninsule ibérique l'âge du bronze n'a
pu faire défaut.
M. DE Mortillet: La hache platte n'est pas la hache
primitive ; on ne la retrouve jamais à cette époque. Ces ha-
ches sont généralement en cuivre et elles appartiennent à la
fin de l'époque du bronze.
,ï Google
J. PoSSIUÛiMO UA SiLVA.
PùoW SI fu:i:l. de H. I
D,S^f^îlSW»«"'-
r,)b,Google
L'AGE DU BKONZE EN ITALIE
M, Chantre appelle l'attenrion du Congrès non pas
sur l'existence de cette première époque des métaux actuel-
lement indiscutable dans rEurope occidentale, mais sur les
caractères avec lesquels elle s'y est répandue et développée.
Après avoir fait un rapide exposé des principales dé-
couvertes appattenant vraiment à l'âge du bronze et mon-
tré leur répartition sur une grande carte, l'auteur insiste
sur la distribution géographique des types caractérisant les
diverses phases du développement de cette civilisation en
Italie.
Appuyant ses démonstrations par un grand nombre de
dessins, M. Chantre fait remarquer que c'est surtout dans la
région méditerranéenne que se trouvent le plus fréquemment,
de même que cela a Heu pour la France, la plus grande par-
tie des types primitifs, spéciaux aux îles de la Méditerra-
née, à la Grèce, à l'Asie Mineure, et ai caractéristiques de
l'époque de transition entre l'âge de la pierre et celui du
bronze.
Puis il reprend:
Les types, au contraire, que l'on observe dans la plu-
CR. 27
part des terramares et dans les palafittes du lac de Garde,
comme dans quelques stations françaises ou suisses, dans
lesquelles la civilisation du bronze a atteint son maximum
de développement, appartiennent à l'époque de transition
entre t'âge du bronze et l'âge du fer. Us deviennent de plus
en plus fréquents dans les découvertes des régions danu-
biennes, lesquelles sont incontestablement postérieures, pour
une partie au moins, à celles des régions méditerranéennes.
On trouve, au reste, un grand nombre de ces types
associés à des objets caractéristiques du premier âge du fer,
comme, par exemple, dans la fonderie de San Francesco à
Bologne, et à Piediluco près Terni.
Les types primitifs forment donc le groupe méditerra-
néen, qui recouvre en Italie toute la partie méridionale de ta
Péninsule, la Toscane et le revers sud des Apennins, et le
Piémont. Les types secondaires, constituant le groupe da-
nubien, s'observent au contraire sur une partie des côtes de
PAdriatique et jusques auprès de Rome, puis dans toute la
région des terramares; la liaison se fait au nord par le lac
de Garde et le Tyrol.
Les types primitifs, tels que les haches plates à rebords
droits et les petits poignards à rivet, caractéristiques du
groupe méditerranéen, se rencontrent assurément en dehors
des limites que j'indique sur ma carte des provinces de 1 âge
du bronze en Europe; mais alors ils s'y trouvent en petit
nombre et mêlés aux types secondaires danubiens dans des
conditions qui permettent d'entrevoir souvent leur antériorité.
Mais ces formes danubiennes, représentées surtout par les
haches à ailerons élevés ou à douille, le rasoir, ta spirale,
etc., sont beaucoup plus rares. 11 est bon d'insister aussi sur
ce fait que la plupart de ces types se rencontrent associés
à des objets caractéristiques du premier âge du fer en Italie
,ï Google
369
et même du Caucase, tels que les fibules arquées, les re-
présentations animales et les ornements en spirales.
De la présence de ces dernières représentations pour-
rait-on conclure que c'est vers le Caucase qu'il faut cher-
cher la principale voie par où est arrivée chez nous la mé-
tallurgie primitive? Évidemment non, et ceux même qui,
bien que combattant l'existence de l'âge du bronze dans l'Eu-
rope centrale et méridionale, ont soutenu cette théorie, qui
n'est du reste basée sur aucun fait, seront obligés d'y re-
noncer.
Tout récemment, en effet, j'ai eu l'occasion d'étudier
en Russie les rares objets de bronze découverts au Caucase
et pouvant se rapporter à la première époque de la métal-
lurgie, et je puis affirmer qu'aucun ne présente le moindre
rapport avec nos formes occidentales.
S'il a existé des relations apparentes entre le Caucase
et les régions méridionales de l'Europe pendant les temps
préhistoriques, se n'est donc pas à l'âge du bronze, mais
bien à l'âge du fer, c'est-à-dire, à l'époque où s'est dévelop-
pée cette civilisation remarquable qui a laissée les nécropo-
les de Villanova, d'Esté, etc.
M. MoRTiLLET se conforme à l'opinion de M. Chantre.
M. PiGOBiNi: Voici les dessins des objets tirés des tom-
beaux découverts par M. le professeur G. Peilegrinj à Gam-
baloni, près de Povegliano Veronese, province de Vérone. •
Les objets mêmes sont de formes et matières bien dif-
férentes. Il y a des épées à soie plate, des couteaux, des
poignards et des épingles à cheveux en bronze; des grains
en ambre ; une scie et quelques éclats en silex. Les tombeaux
17»
,ïGoogl'
/^
37°
dans lesquels gisait le mobilier funéraire, consistaient en
fosses simplement creusées dans le gravier, couvertes par
c gravier même.
Ces armes et ces ornements en bronze, sont les mêmes
qu'on rencontre en Italie dans les terramares de l'Emilie et
dans les habitations lacustres du lac de Garde, et ils remontent,
par conséquent, à l'âge du bronze de l'Italie septentrionale,
La découverte faite par M. le professeur Pellegrini est
de la plus haute importance:
i" Elle nous révèle de véritables tombeaux d'un peuple
qui paraît être celui des terramares et des habitations la-
custres susdites, tombeaux vainement recherchés jusqu'ici.
z° L'association des objets en ambre et des silex à ceux
de bronze, qu'on a constatés dans cette nécropole, con-
firme les conclusions tirées des études sur les terramares,
c'est-à-dire que dans l'Italie septentrionale, pendant l'âge du
bronze, on connaissait déjà l'ambre, et on continuait encore
à fabriquer quelque peu des instruments en silex.
Dans les terramares de l'Emilie, ainsi que dans les tom-
beaux dont je viens de parler, on n'a rencontré ni la fibule
ni te bracelet en bronze, ni aucune trace ^objets en fer.
M. ViRCHOw: Je conseillerais un peu de patience. Je
maintiens la croyance à l'âge pure du bronze, malgré Popi-
nion contraire de la plupart de mes compatriotes.
M. Chanire: Je suis convaincu que partout on arrive-
ra à la conclusion qu'il y a un âge de transition de l'époque
de la pierre à celle du bronze, et un autre âge de transition
entre l'époque du bronze et celle du fer.
M. ViRCHow; J'ajouterai que l'on a déjà trouvé des
,ï Google
objets presque en cuivre pur, et que te nombre de ces objets
grandit tous les jours.
M. Henri Martin: Les anciens poèmes des bardes ir-
landais racontent que l'Irlande, longtemps avant l'arrivée
des Gaëls scottiques, des héros ossianiques, avait été con-
quise sur de petits hommes bruns, les Firbolgs, par de grands
hommes blonds, aux yeux bleus, poètes, magiciens et for-
gerons, des druides primitifs appelés ia race des dieux de
Danann. Les bardes rapportent que les combattants avaient,
de part et d'autre, des armes en bronze; mais les épées des
Firbolgs étaient larges, courtes et mal affilées, tandis que
celles des Dananniens étaient longues, fines et aiguës. Or
on retrouve précisément ces deux espèces d'armes dans le
musée de ['Irish Royal Academy parmi les découvertes fai-
tes dans les bogs ou marais et ailleurs en Irlande. La tra-
dition qui s'était perpétuée jusqu'au moyen-âge est donc
confirmée par l'archéologie.
V
SUJETS DIVERS
LES mSTRUUENTS SN PIERRE A L'iËPOQUE DES UÉTAUX
M. LE Baron J. de Baïe
Lorsque les découvertes relatives aux époques préhis-
toriques furent parfaitement étudiées, les archéologues de
tous les pays, se prononcèrent avec l'autorité d'une science
éprouvée, reconnue, et affirmèrent l'existence des âges de la
pierre. Les gisements les plus authentiques servirent à ca-
ractériser les diverses époques; les instruments isolés, dis-
séminés furent naturellement attribués à leurs époques res-
pectives sans égard pour les milieux dans lesquels ils avaient
été rencontrés. Ils étaient restitués à l'industrie dont ils res-
sortissaient, comme on rend à la période romaine les mé-
dailles des Empereurs trouvées dans la monnaie courante
des nations modernes. En effet, ces instruments dispersés
partout ne réunissaient aucune des conditions nécessaires
pour les rattacher à la civilisation avec laquelle ils se trou-
vaient en contact. Leur présence s'expliquait aisément par
le concours de ces milliers de circonstances qui avaient dû
nécessairement se produire dans le cour des siècles.
,ï Google
i2l
L'industrie de la pierre imposée par la triomphante dé-
monstration des faits, admise par les savants, chaque Jour
enrichie par de nouvelles découvertes, planait dans une ré-
gion calme qui ne connaissait point de discussions sur les
points essentiels. Les époques de la pierre partageaient le
temps comme les autres périodes archéologiques plus an-
ciennement adoptées et reconnaissaient des limites détermi-
nées généralement admises. Effectivement, l'industrie lithi-
que termine ces évolutions à Tapparition du bronze et les
monuments de la transition, nous présentent un mélange où
la pierre et le bronze sont associés et ne laissent plus à l'élé-
ment néolithique qu'un rôle amoindri et sans importance.
Alors, non seulement le travail de la pierre ne fait plus de
progrès comme dans la période néolithique, mais il dispa-
raît sensiblement. L'industrie de la pierre est simplement
alors une réminiscence et dès le premier âge du fer, dans
les splendeurs de l'industrie gauloise, les centres habités, les
sépultures si abondantes en produits contemporains ignorent
la pierre comme matière utilisée par le travail humain. Le
métal est exclusivement employé. Les instruments en silex
sont souvent alors comme des témoins muets, inconscients,
d'autres fois comme des objets de curiosité, le plus ordinai-
rement ils assistent avec passivité aux développements des
industries des temps historiques. Ils apparaissent comme le
résultat fortuit de l'action capricieuse des forces multiples
qui s'exercent dans leur voisinage.
Les âges de la pierre étaient séparés des autres épo-
ques par les faits, par les enseignements de ta science ar-
chéologique, puissamment fortifiée par le double concours
de la géologie et de la paléontologie.
Cependant, dans ces derniers temps, en 1874, un ar-
chéologue avança qu'à une époque relativement récente.
jogle
374
c'est-à-dire à l'époque mérovingienne, au 5*"" siècle on devait
connaître et pratiquer encore l'art de laitier le silex *. L'in-
dustrie de la pierre aurait pénétré parmi les populations
franques, sans laisser toutefois la moindre trace de ces pas
sur la route qu'elle avait parcourue, pour arriver jusqu'à
elles. Voici à quelle occasion M. MiJlescamps insinua d'abord
devant la Société d'Anthropologie de Paris, que la pratique
de la taille du silex était encore usitée sur certains points
de la Gaule à l'époque mérovingienne.
M. Frédéric Moreau entreprit en 1873 les fouilles si fé-
condes de Caraoda, et il continua avec un rare succès ses per-
sévérantes recherches dans la contrée voisine. Les travaux
qui avaient primitivement pour objet des sépultures gauloi-
ses, romaines et franques réunies dans un même champ,
amenèrent au jour une quantité de silex ouvrés, de lames
et d'éclats qui furent soigneusement recueillis.
Le zélé explorateur ne préconisa aucune interprétation.
Il s'abstint de tout jugement personnel. Il se bornait à con-
server les fruits précieux de ses découvertes pour les étu-
des, en attendant que la science bien renseignée prononçât
son verdict.
Cependant les intéressantes découvertes de Caranda at-
tiraient l'attention des archéologues. M. Millescamps, dans
la séance du 18 juin 1874, entretint la Société d'Anthropo-
logie de Paris de la présence des silex dans les sépultures
franques de! Caranda. Le nombre des pierres travaillées
était considérable. La quantité de silex paraît néanmoins
avoir été exagérée dans la première mention. L'auteur se
résuma ainsi dans le principe: tLa seule conclusion à tirer
'Millescamps: Le cimetière de Caranda. Bul. de la Soc. d'Anthropo-
logie de Paris, 1874, P- Si3.
,ï Google
M
■est que ces silex ont été jetés ou pour parler plus exacte-
ment, semés inientionellement dans les tombes *.»
Puis, tout en paraissant reserver pour l'avenir les conclu-
sions pratiques, l'auteur de la communication concluait que
l'examen du contenu des tombes de Caranda était de n:,-
ture à faire descendre jusqu'au mérovingiens, c'est-à-dire
plus bas qu'on ne l'admet généralement, l'époque de la co-
existence de l'usage des instruments de pierre avec ceux de
bronze et de fer. Puis pour préciser, deux points principaux
furent signalés à l'attention des archéologues: i" Le cara-
ctère votif des silex intentionellcment répandus dans les tom-
bes. 2" La pratique de la taille du silex encore usitée sur
certains points de le Gaule à l'époque mérovingienne. Cette
seconde proposition n'était avancée que sous la garde de
nombreuses réserves.
Dans une séance suivante, tenue le 4 février 1873, M.
de Mortillet combattit les propositions émises précédem-
ment. sNotre collègue M. Millescamps, dit il, le premier qui
vous a signalé ce fait est disposé à en conclure qu'à l'épo-
que franque, qu'a l'époque mérovingienne on taillait encore
le silex; je ne suis pas du tout de son avis.* Cette asser-
tion était motivée par des raisons qui conservent encore au-
jourd'hui toutes leurs forces démonstratives.
A peu près vers la même époque, le 10 février 1875,
M. Quicherat, interprète de M. Frédéric Moreau, présenta
à la Société des Antiquaires de France des instruments en
silex provenant de Caranda. J'assistais à la séance et je fis
mes observations dans le but d'établir que les découvertes
de Caranda n'autorisaient nullement à nier l'existence de
l'époque où l'homme se servait exclusivement de pierre.Les
'Bul. de la Soc. d'Anthrop. de Paris, 1874, pag. Su.
by Google
376
motifs de mon assertion ont été consignés dans le Bulletin
de la Société des Antiquaires et n'ont point été repoussés.
Bientôt, le 4 mars 1 875, M. Millescamps revint à la char-
ge pour atténuer les objections présentées par M. de Mortil-
let; sa conclusion identique à celle de sa précédente commu-
nication a été formulée dans les termes suivants: f aujourd'hui
comme alors, je pense que les silex taillés recueillis dans
les cimetières mérovingiens autorisent à supposer que l'usa-
ge et la taille des instruments de pierre ont persisté en
Gaule tout au moins pendant les premiers siècles qui ont
suivi l'invasion des Francs.»
La question s'accentuait de plus en plus, en présence
des difficultés. Le sujet ne manquait pas d'intérêt. Nous pos-
sédions de nombreux éléments de solution puisés dans les
stations néolithiques que nous avions explorées et dans les
nécropoles franques que nous avions découvertes; il nous
parut utile de présenter aux réunions des sociétés savantes
de la Sorbonne un mémoire ayant pour titre:
Les instruments en silex mélangés aux produits de l'in-
dustrie franque.
Le mémoire donna lieu à de sérieux débats et les opi-
nions restèrent partagées; le partage était toutefois très iné-
gal. Les archéologues étrangers à l'étude des époques pré-
historiques, accueillirent surtout avec une faveur particulière
l'idée de prolonger la durée de l'industrie de la pierre jus-
qu'à l'invasion des Francs.
Plus récemment, dans la séance de la Société d'Anthro-
pologie de Paris, tenue le 1 7 décembre 1 879, M- Millescamps
ramena ta question au sujet de deux silex trouvés à Hermès
(Oise) dans une sépulture mérovingienne. Ces deux silex lui
parurent dignes d'être remarqués comme coopérant à la mê-
me démonstration que les vingt mille silex préconisés en
,ï Google
iZL
1874. Les conjectures dont ces silex furent le prétexte, se
résument principalement dans les lignes suivantes; taujour-
d'hui plus que jamais nous pensons que les instruments en
silex étaient encore en usage à l'époque mérovingienne et
que, se servant de la pierre, les Francs savaient la tailler et
l'approprier à leurs besoins.» Malgré les atténuations qui
suivaient, c'est là le dernier jugement formulé par M. Mil-
lescamps.
Des constatations nombreuses faites dans les hypogées
de la pierre polie et dans les nécropoles franques ne per-
mettent pas de partager l'opinion qui reconnaît l'existence
et la pratique de l'industrie de ia pierre à l'époque fran-
que.
Nous avons saisi l'occasion présentée par le Congrès
pour l'avancement des sciences tenu dernièrement à Reims,
pour parler de l'existence indépendante et de la durée de
l'industrie néolithique proprement dite. Nos conclusions li-
mitaient, selon les plus solides preuves, l'âge de la pierre
par l'industrie du bronze. Nos propositions ont été applau-
dies. Néanmoins, il nous a paru nécessaire de porter la ques-
tion devant notre Congrès International, car jusqu'à ce jour
elle n'a pas eu de retentissement devant ces grandes assi-
ses de l'archéologie préhistorique. Nous avons besoin d'une
décision puissamment autorisée. La marche des études est
entravée par les assertions insuffisamment établies par les
partisans de la prolongation de l'industrie néolithique dans
les temps modernes. Les conséquences logiques de l'existen-
ce des âges de ia pierre sont atténuées ou suspendues, la vul-
garisation des connaissances préhistoriques est sérieusement
empêchée et certainement ajournée. En un mot, le résultat
scientifique n'est pas atteint parmi les masses. Il s'agit donc
de conserver par l'influence d'une science solide et loyale,
ly Google
M
le terrain laborieusement conquis et d'arrêter un mouvement
rétrograde peu autorisd.
Les silex travaillés, retaillés, ont été trouvés dans quel-
ques nécropoles franques du même groupe, à Caranda, à Sa-
blonnière, à Sainte Restitue etc. ■ . . autant de localités située s
dans le même rayon. La moyenne des silex, est huit par sé-
pulture. Leur présence est un fait patent qui n'admet pas
de discussion. Mais ces silex mélangés à des instruments en
fer ont-ils une origine franque comme les tombes qui les ren-
ferment dans leur périmètre?
Dans le nombre des silex rétaillés de Caranda, il en est
qui proviennent d'une allée-couverte où ils accompagnaient
des ossements humains. Les objets funéraires étaient exclu-
sivement en silex. Il est évident qu'ils appartiennent à l'in-
dustrie néolithique. Une autre catégorie considérable contient
un nombre très grand de silex d'un travail grossier. Les al-
térations du silex, les marques d'oxyde de fer, les cryptoga-
mes adhérents à leurs surfaces révèlent un long stationne-
ment sur la terre. Ces objets qui du reste ne sauraient cons-
tituer une industrie, ressemblent aux instruments des âges
de la pierre qui ont été longtemps exposés à l'influence du
temps sur la surface du sol. Il n'y a point de raison pour
les considérer comme fabriqués à l'époque franque, mais il
faut admettre qu'ils ont été ramassés alors. Ces lames im-
parfaites, brisées, ces éclats grossièrement ébauchés sont
évidemment les restes abandonnés dans un atelier de l'âge
de la pierre. L'admission d'un atelier devient une nécessité
lorsqu'on examine la multitude des éclats, des objets impar-
faits, des nucléus et des percuteurs. Les ateliers reconnus ne
se caractérisent pas autrement.
Une troisième catégorie se compose d'objets soigneu-
sement travaillés. En les comparant avec l'outillage néoli-
,ï Google
i79.
thique, la ressemblance est très frappante. Nous donnon
ici le dessin d'une flèche du dolmen de Caranda, pi. i-,Jîg-
P, en parallèle avec une flèche provenant du cimetière franc
de Sablonnière. On remarque les mêmes formes, l'aspect est
identique, pi. i^fig. il. Personne n'a songé à contester l'ori-
gine préhistorique du dolmen de Caranda. Les flèches du
cimetière franc sont l'œuvre du peuple qui a construit l'allée
couverte. Comment supposer qu'une industrie pratiquée par
un peuple complètement étranger aux tribus néolithiques
aurait pu réussir des formes si ressemblantes et adopter des
instruments tellement disparates dans son industrie propre?
Ce n'est pas seulement à Caranda que les flèches trouvées
dans les sépultures franques affectent une grande ressem-
blance avec les mêmes instruments remontant à l'époque de
la pierre polie. Dans une nécropole franque située à Oyes,
nous avons visité deux mille tombes et nous y avons trouvé
une seule flèche, pi. i-,fig. /, dont le type est le même que
celui de l'atelier de Vieille-Andecy, pi. \tjig. 2, situé envi-
ron a quatre kilomètres. Ce ne sont pas seulement les flè-
ches provenant des tombes mérovingiennes, qui offrent des
traits de ressemblance avec les mêmes projectiles rencon ■
très dans les stations néolithiques. Nous avons un grattoir
discoïdal trouvé a Oyes (Marne) dans une tombe franque,
pi. I, Jig, (f, il présente la plus grande similitude avec un
pareil instrument de même nom trouvé dans l'atelier de la
Vieille-Andecy. {PI. i,Jig. 10). Ces instruments pourvus de
nombreuses retailles dépendent certainement de la même
industrie.
Comment expliquer la présence des instruments en pier-
re dans les tombes franques? Pour les objets grossiers, pour
les ébauches, et les instruments brisés, il n'y a là qu'un pur
accident. Dès les premiers moments de la découverte de Ca-
,ï Google
38o
randa, M. Pabbé Bourgeois, dans un entretien particulier,
me déclara que la présence des silex était accidentelle, et
il ajoutait avec ce calme éclairé qui le distinguait: tJe connais
certaines localités dans les environs de Pont-Levoy où il
serait impossible d'ouvrir une fosse et de la refermer sans
enfouir un nombre plus considérable de silex.» M. l'abbé
Bourgeois, avant que la question ait atteint l'importance
qu'elle revêt aujourd'hui, n'hésitait pas à considérer les si-
lex dont il est question comme de provenance néolithique.
Plusieurs d'entre vous ont visité l'atelier de Spiennes,
lors du Congrès de Bruxelles en 1872. La jonchée de silex
plus ou moins travaillés qu'ils ont foulé aux pieds, permet-
tait-elle de pratiquer la moindre excavation sans y précipi-
ter une quantité énorme de ces silex? La présence de ces
pierres est donc accidentelle. On ne voit pas du reste pour-
quoi on aurait déposé des objets ébauchés, informes dans
une tombe. Souvent les silex portent des traces d'oxyde de
fer qui proviennent du passage des instruments aratoires.
Les taches ferrugineuses aitribuables au contact des objets
en fer des tombes sont faciles à distinguer, elles s'étendent
et ne laissent pas les marques d'érosion dues à un frotte-
ment énergique. La disposition des silex dans les tombes
aurait été plus méthodique si elle avait été intentionnelle.
Le désordre des objets en silex s'explique mal avec les po-
sitions régulières, fixes, habituelles aux objets francs. Pour-
quoi ces dispositions disparates? Peut-on les attribuer à la
même main? En examinant une tombe franque à Fèrebrian-
ges (Marne) nous avons remarqué un grattoir sis entre le
squelette et le niveau du sol mais sans rapport avec le
corps. Il était là accidentellement, car le sol dans la con-
trée recèle des instruments néolithiques. Les silex qui avaient
un emploi à l'époque franque occupaient une place en con-
,ï Google
38i
tact avec le corps : témoin le briquet, provenant de ta né-
cropole franque d'Oyes. Le briquet n'était cependant pas
même un écho fidèle de l'industrie de la pierre.
Au contraire, les silex sont, pour nous servir de l'ex-
pression même des partisans de l'industrie de la pierre à
l'époque franque, jetés ou pour parler plus exactement se-
més intentionnellement dans les tombes'. Ce désordre sera
difficilement admis comme un résultat prévu et intention-
nel. Nous l'avons déjà insinué, il n'y avait pas de raisons
pour déposer des objets incomplets, à peine ébauchés.
Hâtons-nous maintenant de parler de la catégorie des
objets soigneusement retaillés qui provoquent l'attention par
la perfection du travail. Ces instruments en pierre ont été
probablement déposés volontairement et on peut leur re-
connaître un caractère votif. Les remarques qui ont été fai-
tes par tous les archéologues dans les contrées où les âges
de la pierre ont été retrouvés, établissent que les silex ou-
vrés ont été l'objet d'une grande attention et de croyances
superstitieuses.- Les Francs partageaient ces idées et attri-
buaient ainsi à ces pierres mystérieuses un grand rôle dans
leurs habitudes et le leur conservaient jusque dans la tombe.
M. de Mortillet c'est ainsi prononcé sur cène question: «Les
silex enfouis dans les tombes mérovingiennes de Caranda,
ne prouvent donc qu'une chose, c'est que les Francs atta-
chaient une idée superstitieuse aux silex taillés de l'époque
Robenhausienne' >
Jetons maintenant un coup d'ceil sur les raisons invo-
quées pour considérer les silex comme fabriqués à l'époque
franque. La rareté des monuments mégalithiques n'explique-
' Bul. Soc. d'Anthrop. de Paris, i874, p. 5i2.
' Bul. Soc. d'Anthrop. de Paris, séance du 4 février, i875.
382
rait pas la grande quantité de silex. Mais combien de mo-
numents de cette époque ont disparu dans le cours du temps!
Cette absence, cette preuve négative sont absolument sans
valeur. La grande quantité de silex provoque l'idée de les
considérer comme de fabrication contemporaine des tombes.
On indique en etfet que le nombre est de vingt à trente par
tombe*. M. Moreau dit: «La moyenne est de huit par sé-
pulture'.» La raison du nombre est donc singulièrement at-
ténuée. La difficulté plus apparente que réelle d'expliquer
l'origine des silex n'autorise pas à les considérer comme des
produits de l'industrie franque.
Les motifs les plus sérieux exigent que les instruments
en silex restent attribués aux âges de la pierre. Après la
vulgarisation du fer le rôle de l'instrument en silex n'existe
plus. Dans cet outillage si varié qui se trouvait à Caranda
il est difficile de donner un emploi utile, avantageux, mé-
thodique aux silex- Ils n'avaient plus leur place naturelle,
normale dans l'outillage métallique. Les mains accoutumées
à manier les lames de formes sî multipliées de l'époque fran-
que auraient été fon embarassées pour manier utilement ie
silex. Comment se fait-il de plus que les silex soient si ra-
res dans d'autres nécropoles mérovingiennes?
Si l'industrie de la pierre avait encore été en vigueur à
l'époque franque, nous la retrouverions partout et jusqu'à
présent on ne cite que le groupe de Caranda, et la nécro-
pole du mont de Hermès qui a donné un grattoir et une
lame en silex. II faut reconnaître que deux silex trouvés dans
une vaste nécropole ne revêtent pas une autorité démons-
trative imposante.
' Bull. Soc. d'Anthrop. de Paris, séance du i8 juin 1874.
' tCoUcction Caranda». Liigende de la PI. 21.
,ï Google
383
Enfin, les rares stations mérovingiennes de la France
qui contiennent des silex ne nous paraissent pas fournir le
prétexte de prolonger la durée de l'industrie de la pierre
jusqu'à l'époque franque. En admettant cette conclusion en
effet, il résulterait que Page de la pierre aurait duré plus
longtemps en France qu'en Scandinavie. Cependant, loin d'at-
teindre cette perfection qu'elle revêt dans les pays Scandi-
naves, elle aurait conservé tous les caractères de l'industrie
néolithique telle qu'elle apparaît dans les stations les plus
authentiques de la pierre polie. Pourquoi ce stationnement?
L'art de tailler le silex au lieu de progresser aurait perdu
avec le temps et la pratique. (PI. ii, fig. i à g). Les autres
contrées de l'Europe où les recherches archéologiques sont
depuis longtemps en si grand honneur, ont-elles trouvé des
traces de l'industrie de la pierre dans des temps aussi rap-
prochés? Les pays qui ont été traversés par les populations
qui envahissaient la Gaule retrouvent-ils les silex associés
aux restes de ces peuples en migration, venus du nord? Si
des observations de cette nature ont été faites, les archéo-
logues ont-ils considéré ce mélange des silex avec les mé-
taux comme un motif de prolonger la durée de l'industrie
de la pierre? La question est digne de l'attention du Con-
grès, car il n'est pas possible que l'âge de la pierre ait pu
se prolonger exceptionnellement en France. La dominatiou
romaine avait opéré dans l'industrie une révolution qui ne
laissait plus de place au travail si rudimenlaire de la pierre.
D'un autre côté, il est peu présumable que des populations
sorties d'un pays où le bronze était en usage et parfaite-
ment armées de fer aient importé l'industrie de la pierre.
Dans cette hypothèse au moins leur industrie aurait revêtu
la nuance de perfection qui la caractérise dans la Scandi-
navie. Dans la solution de la question qui nous occupe,
,.^„..
l'élément fourni par un groupe de sépultures franques sem-
ble exclusivement appelé à trancher la discussion. Cepen-
dant, pour prononcer avec les garanties nécessaires l'iden-
tité de l'industrie de la pierre à l'époque franque et à l'épo-
que préhistorique, il est nécessaire de faire intervenir les élé-
ments qui se trouvent réunis dans les stations les mieux
étudiées et les plus authentiques. Cette partie du travail a
été négligée. La confrontation a été omise.
Il faut reconnaître que l'attention qui a été accordée à
la supposition que l'industrie de la pierre s'exerçait encore
à l'époque franque, doit particulièrement son succès à l'idée
de diminuer l'ancienneté de l'homme. Le moyen est peu
propre à atteindre le but désiré, car il n'est pas capable
d'amoindrir la signification et la valeur démonstrative des
stations, des gisements où l'âge de la pierre s'afiirme dans
toute sa pureté.
M. Mortillet: La présence des silex taillés dans les
tombes mérovingiennes est une affaire de distribution géo-
graphique. On ne trouve des silex taillés dans ces conditions
que dans les pays où il y en avait auparavant. Il en est de
même des marbres romains, qui se retrouvent dans des
tombes postérieures. C'est toujours l'amour du merveilleux,
de l'amulette. Dans le livre que M. Cartaîllac a publié il y
a trois ans, ces faits et bien d'autres se trouvent méthodi-
quement discutés.
,ï Google
EXPLICATION DE LA FLANCHE I
ig. 1. Flèche en silex provenant du ciroetiâre franc d'Oyes, (Marne).
3 Flèche en ûlex de l'atelier néolithique de la Vieille- And ecy,
(Marne).
3. Flèche en silex du cimetière franc de Joches (Marne).
4. Flèche en silex de l'atelier néolithique de la Vieille -Andecy,
(Marne).
5. Silex travaillé des sépultures franques de Caranda, (Aisne).
6. Grattoir des sépulrures franques de Caranda, (Aisne).
7 Silex travaillé des sépultures banques de Caranda, (Aisne).
8. Grattoir du cimetière franc d'Oyes, (Marne).
. 9. Flèche en silex du dolmen de Caranda, (Aisne).
10. Grattoir de l'aielier de la Vieille-Andecy.
■ t. Flèche en silex des sépultures franques de Sablonnière, (Aisne).
,ï Google
EXFUGATION SE lA FLANCHE H
1. Silex travaillés des sépuliures franques de Caranda, (Atsn«}.
2. Silex iravaiUés — (même provenance).
3. Silex travaiUés^(même provenance).
4. Flèche en silex — (même provenance).
5. Flèche en silex— (même provenance).
(y. Flèche en silex— (même provenance).
7. Lame en silex— (même provenance).
8. Pointe en silex — (même provenance).
9. Lame en silex — (même provenance).
,ï Google
B" J. DE Baïe.
^/^.*
L Couctiic Hth. d'après des dusiiit de Vauteut.
iùh de I, Leipald. lialonne.
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B"" J. OK Uaïe.
l. Cmcsùo lui, d'après dt^ deisios is I iMe
„Google
„Google
SDR DES SILEX TAILLES ET EHUANCHÉS
DE L'ÉPOQUE MÉROVINGIENNE
M. Gustave Millescamps
La présence de silex taillés dans des sépultures de l'épo-
que mérovingienne avait été depuis longtemps signalée, en
Bourgogne par M. Henri Baudot; en Normandie, par M. l'ab-
bé Cochet, Toutefois, le petit nombre de pièces recueillies
n'avait éveillé qu'une curiosité passagère; le fait était géné-
ralement resté inaperçu ou ignoré. 11 était réservé aux bel-
les fouilles de Caranda, commencées en 1873 par M. Fré-
déric Moreau père, de fixer sur ce point l'attention du monde
savant: en moins de deux ans, ces fouilles ramenaient k la
surface du sol 20000 silex exhumés de 2600 tombes, pour
la plupart mérovingiennes.
Cette prodigieuse accumulation de pierres taillées dans
un cimetière franc était-elle simplement l'œuvre du hasard?
On l'a supposé d'abord, mais cette supposition ne pouvait
tenir devant un sérieux examen.
Il a fallu reconnaître que ces silex avaient été inten-
tionnellement déposés près du mort, qu'ils faisaient partie
du mobilier funéraire de la tombe. On les retrouve, en effet,
388
mêlés aux armes, aux ustensiles, aux bijoux, aux vases, à
tous ces objets dont le défunt faisait journellement usage
et dont on l'a fait suivre dans sa dernière demeure. La pierre
taillée occupait donc, dans les mœurs de ces populations,
une place encore importante; elle répondait à des besoins,
elle était employée à des usages qui nous sont inconnus,
mais dont l'existence est révélée, constatée par la concomi-
tance de silex taillés avec des instruments de bronze et de fer.
C'est, du moins, l'opinion que je me suis cru fondé à
émettre après une étude attentive des fouilles de Caranda,
opinion que devait bientôt confirmer l'exploration successive
des nécropoles franques de Sablonnière et d'Arcy-Sainte-
Restitue (Aisne), dont la richesse en silex taillés, pour être
moindre qu'à Caranda, ne laisse pas d'être aussi singulière
que caractéristique. La communication, que j'ai faite à ce
sujet et reproduite en 1874 au Congrès international d'an-
thropologie et d'archéologie préhistoriques tenu à Stockholm '
a, depuis lors, donné lieu en France à des discussions dont
le principal résultat a été d'attirer l'attention des explorateurs,
en provoquant leurs recherches et leurs observations sur un
point demeuré jusqu'ici aussi obscur que négligé.
Ainsi, un éminent archéologue, dont je m'estime heu-
reux de pouvoir invoquer le témoignage, M. Jules Quiche-
rat, faisait récemment les remarques suivantes à propos
des fouilles d'Arcy-Sainte-Restitue :
fM. F. Moreau s'est appliqué à constater qu'au fond
de presque tous les sarcophages se trouvait soit une pointe
de flèche, soit un grattoir en silex éclaté, par conséquent
non poli, quoique d'une forme extrêmement régulière. L'état
* Voir le Compte-rendu de ccne session, pages 65o à 658, Stock-
holm 1874.
,ï Google
de fraîcheur, dans lequel ces pièces se sont toujours pré-
sentées, s'oppose à ce qu'on en rapporte le travail aux
époques préhistoriques. Tout concourt à les faire considé-
rer comme des objets confectionnés dans le temps où a eu
lieu la cérémonie funèbre.»
Le soin extrême avec lequel M. F. Moreau a classé
les nombreux silex taillés recueillis dans ces fouilles, la place
d'honneur qu'il a réservée à certaines pièces hors ligne dans
les vitrines de son riche cabinet de Paris ne manquent pas
de frapper vivement l'attention des archéologues qui visitent
cette magnifique collection. C'est à l'impression produite
par la vue de ces silex sur un des visiteurs, M. l'abbé Ha-
mard, à Pétude plus patiente encore, à l'examen plus mi-
nutieux fait par cet archéologue des objets de ce genre jour-
nellement retirés des sépultures franques qu'il était alors
occupé à fouiller, que je dois les éléments de la courte no-
tice — Sur deux silex taillés et emmanchés de r époque méro-
pingiemte.
Les fouilles de M. l'abbé Hamard, à Hermès (Oise)
ont eu, entre autres résultats, celui de révéler, grâce à la
découverte d'une inscription, l'existence d'un vtcus dont le
nom ne figure ni sur les itinéraires anciens ni dans les écrits
des géographes et des historiens de la Gaule, le vicus
RATVMA.GVS. Le déchiffrement et la restitution de cette
inscription ont fait l'objet de communications à la Société
des Antiquaires de France et à l'Académie des InscripQons
et Belles-Lettres. Quant à la pierre sur laquelle était gravée
cette inscription, elle avait été retaillée et évîdée, puis uti-
lisée pour former l'extrémité d'un sarcophage retrouvé au
milieu d'un grand nombre de sépultures, quelques-unes
gallo-romaines, mérovingiennes pour la majeure partie.
Au mois d'avril 1879, M. l'abbé Hamard, poursuivant
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C'est le i8 août 1879 qu'à été fouillée la sépulture dans
laquelle ont été trouvés ces deux couteaux en silex; elle était
occupée par un corps bien conservé. A ta hauteur de la
ceinture on a recueilli les objets suivants: une grosse bou-
cle en bronze fortement étamé; un couteau de fer, long de
i5 centimètres; cinq fragments de bronze ou tiges très min-
ces dont chaque extrémité était recourbée; leur longueur,
inégale, variait de 45 à 60 millimètres; on ignore quel en
pouvait être l'usage. Tout à côté se trouvaient deux orne-
ments en bronze dits terminaisons de ceinturon, munis à la
face inférieure d'un bouton analogue à nos boutons doubles;
enfin, un objet en fer, long de 1 1 centimètres, dans lequel
je vois un fermoir d'escarcelle. Cette nomenclature suffît à
caractériser une sépulture incontestablement mérovingienne.
Ainsi qu'on a pu le remarquer plus haut, j'ai tenu ù
laisser la parole à M. Tabbé Hamard pour la description
des silex emmanchés qu'il a eu le bonheur de découvrir et
le mérite d'apprécier à leur valeur. L'intérêt personnel, que
j'ai dans la question, me faisait un devoir de reproduire in-
tégralement un témoignage dont on ne saurait suspecter
l'exactitude et l'impartialité.
Je me suis rendu à deux reprises à Hermès pour voir
ces pièces intéressantes, les examiner à loisir; de cet exa-
men est résulté pour moi la conviction que les silex en ques-
tion avaient dû être emmanchés à l'époque de leur enfouis-
sement dans les sépultures franques.
Les conclusions que je m'étais permis de formuler dès
1874, à la suite des fouilles de Caranda, viennent donc de
recevoir, à ce qu'il me semble, une nouvelle confirmation,
grâce aux découvertes récentes du cimetière franc de Her-
mès. Aujourd'hui plus que jamais, je pense que les instru-
ments en silex étaient encore en usage à l'époque mérovin-
.,Ci
392
gienne et que, se servant de la pierre, les Francs savaient
la tailler et l'approprier à leurs besoins. Quelle était la des-
tination de ces instruments? Étaient-ils consacrés par la tra-
dition à quelque opération chirurgicale analogue à Pouver-
ture du corps, préalablement à l'enlèvement des viscères,
comme en Egypte, ou à ta pratique de la circoncision,
comme chez les Juifs? Quelque idée religieuse, quelque an-
tique superstition s'attachaient-elles également au silex chez
les Francs et prescrivaient-elles l'emploi de la pierre pour
l'accomplissement de certains rites, de certaines cérémonies,
à l'exclusion du métal écarté comme profane et impur?
Le silence de l'histoire autorise toutes les conjectures.
Jusqu'à plus ample informé, j'adopterai la plus simple, je me
contenterai de l'explication qui me paraît la plus légitime,
la plus naturelle. M'appuyant donc sur l'immense quantité
de silex taillés recueillis, durant ces six dernières années,
' dans des nécropoles mérovingiennes, je maintiens cette opi-
nion:— que les outils en silex, d'une pratique facile, et peu
coûteuse, aisément retaillés ou remplacés là oij abonde la
matière première, avaient dû, chez certaines populations
firanques, être fréquemment et concurremment employés
avec les outils de fer, et peut-être utilisés de préférence, par
économie ou pour tout autre cause, dans certains cas et
pour certains usages journaliers que, dans l'étal actuel de
la science, je ne saurais avoir la prétention de connaître et
moins encore la témérité d'indiquer.
,ï Google
LES LUSITANIENS
M. F. Martins Sarmento
Dans la Lusitanie, de même que dans une grande par-
tie de l'Europe, l'archéologie se heurte à la question, diffi-
cile à résoudre, du celticisme; cette question s'y trouve,
cependant, simplifiée et caractérisée d'une manière spé-
ciale.
Tout ce que nous connaissons des Celtes et de l'inva-
sion celtique en Espagne, nous montre cette partie de la
Péninsule tout-à-fait étrangère à l'occupation et à l'influence
celtiques. Tout ce que les anciens nous raccontent des usa-
ges et des mœurs des Lusitaniens n'a aucun rapport avec
les usages et les mœurs des Celtes, et rappelle plutôt ceux
d'autres peuples bien différents. Diodore nous dit non seu-
lement que tes Lusitaniens étaient Ibères, mais encore que
leur caractère était entièrement opposé à celui des Celtibè-
res*: ce qui veut dire qu'ils n'avaient aucun mélange du
sang des Celtes.
< Diodore. Sic. v, 34.
]^(^|^
394
Néanmoins leurs noms ethniques et locaux, les noms
mêmes des individus' des dieux, qui nous ont été transmis
par les historiens et par les géographes, ainsi que ceux que
les monuments épigraphiques nous ont conservés, ont pour
la plupart une physionomie celtique si prononcée, qu'une
certaine partie de la Lusitanie, la Galice^ a été appelée le
berceau des Celtes.
Nous étudierons les termes de cette contradiction; et
quoique nous ne nous attendions pas à la résoudre complè-
tement, nous avons du moins l'espoir d'attirer sur cet inté-
ressant problème Panention des savants.
Le plus ancien document où les Celtes soient mention-
nés est un périple phénicien du quatrième siècle', dont
Aviénus s'est servi pour la composition de son ouvrage
Ora maritima, et auquel nous aurons souvent recours dans
cet écrit.
Dans ce périple, qui comprend le voyage entre l'ile de
Tartesse, aux embouchures du Bétis, et les Iles Britanni-
ques, on parle des peuplades qui occupaient alors le sud-
ouest et l'occident de PEspagne, l'Angleterre et l'Irlande.
Dans le sud de l'Angleterre notre document cite des
Ligures, qui avaient primitivement habité les régions glacées
de l'Ourse, d'où, ils avaient été chassés par les Celtes, après
une résistance inutile.
' Le nom même de Viriate est considéré celtique. Rev. Celt.
vol. ilj, p. 3ii.
* La Lusitanie ancienne de Strabon s'iftendait depuis le Tage jus-
qu'à la mer C an ta brique, el comprenait les deux Galices, Bracaria et
Lucensis. C'est dans ce sens que nous prenons la Lusitanie.
* Avant notre ère. Toutes les dates citées dans cet écrit doivent
Être comprises dans ce sens.
,ï Google
L'invasion celtique avait été conduite par mer, puisque,
longtemps après, les Ligures réfugiés en Angleterre vivaient
dans les montagnes, craignant de descendre jusqu'aux riva-
ges, iparce que leur ancien désastre les faisait regarder la
mer avec épouvante.» Ils craignaient donc une seconde in-
vasion maritime, qui cette fois ne pourrait venir que de la
Morinie.
L'ancienne patrie des Ligures, dans les régions glacées
de l'Ourse et dans une position exposée aux attaques par
mer, devrait être sur les rivages de la Baltique, vis-à-vis la
Scandinavie, car c'est bien de la Scandinavie, cette vagina
nationum de Jomandès, que descendent, selon ce vieux do-
cument, les émigrants celtes, qui paraissent pour la pre-
mière fois dans le monde connu des anciens.
La véracité de cette notice reçoit une confirmation in-
directe, lorsque nous nous rappelons les anciennes légendes
des Grecs sur les Ligures du pays de l'ambre, dans le voisi-
nage de l'Éridan, ces célèbres Ligures gouvernés par Cy-
cnus, l'ami de Phaéton, qui, sans que l'on sache pourquoi,.
disparaissent entièrement de ces régions.
Le périple phénicien nous donne l'explication de ce fait.
Chassés du nord-ouest de l'Europe par l'invasion celtique,
lesLJgures s'enfuient vers la Morinie, et faisant la traversée
du canal, ils vont chercher un refuge dans le sud de l'An-
gleterre, auprès de leurs frères d'Albion.
C'est sans doute par la crainte d'être apperçus par
leurs persécuteurs qu'ils n'osent se montrer sur les rivages
de leur nouvelle patrie; ils ne descendent des montagnes
que longtemps après, quand leurs appréhensions et leur ter-
reur disparaissent devant le calme où ils trouvent le pays
de l'autre côté du canal.
Il en résulte que les Celtes dédaignèrent l'ocupation de
,ï Google
396
Toccident des Gaules, et des Iles Britanniques, comme ils
avaient dédaigné celle de la vieille Ltgurie de la mer Balti-
que, puisqu'elle demeura lentièrement dépeuplée! '.
Nous verrons bientôt quelle direction ils prirent.
Entre l'émi^ation forcée des Ligures et la composition
du périple il s'écoula un espace de temps indéterminé, qui
fut rempli par les combats entre les Ligures et les Celtes, et
en outre tout le temps pendant lequel (diu) les émigrants
d'Albion attendirent la répétition de leurs premiers désas-
tres, qui, heureusement pour eux, ne se renouvelèrent point.
Or, le périple ayant été composé pendant le vi siècle,
scion l'opinion de M. Karl MUllenhof, la première appa-
rition des Celtes sur la scène de l'histoire peut être placée
au VII siècle sans crainte d'une grande erreur.
Consultons maintenant les renseignements que les écri-
vains latins et grecs ont recueillis sur les Celtes. Selon Tite-
Live, l'émigration celtique eut lieu sous Tarquin l'Ancien,
dans le vu siècle'. En ce qui concerne le point de départ
de l'émigration, quoique l'historien paraisse désigner d'abord
la Celtique de César, ce qui est tout-à-fait insoutenable, il
nous dit ailleurs que les Celtes venaient tab oceano terrar-
runtque ultimis oris», ce qui semble n'être que l'écho de la
tradition* Plutarque, de son côté, ne sait rien de certain
' V. Aviënus, Ora maritima, surtout v. r3o-i4fi. LTmerprétaiion
que nous donnons à ce passage du poème d'Aviénus, ain» qu'à d'au-
très, est le sujet d'une autre étude qu'il serait hors de propos de repro-
duire ici.
> Dans son ouvrage Dtutscht Alterthmtskuttde, p. 73 et suiv.
* Tiie-Live, v, 34.
* Tite-Live, v, 37. Sur les doutes qu'ont soulevés ces affirmatives
de Tite-Live touchant les Celtes, voy. Alex. Bertrand, Archéologie cet'
lifue et gmloisey p. 411-433.
lyGoogle
397
sur la patrie primitive des Celtes; tous les témoignages, ce-
pendant, qu'il put obtenir touchant la Celtique, d^où il fait
sortir les Celtes et les Ombres, indiquent, si nous le com-
prenons bien, la mer hyperboréennc, les extrémités de la
terre, les répons où les jours se prolongent six mois'.
Cette opinion est également exprimée par Hellanicus du
Pont qui faisait descendre les Celtes du pays des Hyperbo-
réens'.
Les traditions druidiques étaient un peu plus positives;
une partie des peuples de ta Gaule étaient venus tab insu-
lis extremis et tractibus trattsrhenam's^.'
On voit que toutes ces informations, malgré leur peu
de clarté, s'accordent avec l'écrivain du vi siècle, lequel doit
avoir autant plus d'autorité, qu'il était un témoin presque
contemporain des faits qu'il racconte, les ayant peut-être
reçus de la bouche même des victimes des Celtes, de ces
Ligures qu'il fréquentait.
Si nous admettons cela, il résultera de la combinaison
des notices du périple et de celles qui nous sont fournies
par Tite-Live, une lumière suffisante pour éclaircir ce pro-
blème historique. Sortant du fond des régions d'au-delà
de la Baltique, par des motifs que nous ignorons, et après
avoir défait et chassé les Ligures qui les premiers se trou-
vent devant elles, les hordes celtiques marchent sur le Rhin
et paraissent s'arrêter au cceur même de la Gaule. Là, cette
masse énorme de peuples se sépare. Les uns se fixent dans
la Celtique, ou dans une partie de la Celtique de César;
' Plutarquc, Mar. xi.
' Id. Camill. xxvu,
» Amm. Marcell. xv, 9. L'opinion de ceux qui voient dans ces îles
les Iles Britanniques ne saurait être défendue.
,ïG00'
r-i
398
une grande multitude cependant, sous les ordres de Sigo-
vèse, prend !a direction de l'est, vers la forêt hercynienne,
tandis que d'autres hordes descendent le long du Rhône,
conduites par Bellovèse et d'autres chefs.
On ne saurait nier que l'invasion des Celtes a tout le
caractère d'une irruption de barbares étrangers à l'Europe
des anciens, telle que serait l'invasion des Cimbres, si elle
était venue quelques siècles auparavant et n'avait rencon-
tré devant elle la science militaire et la forte organisation
politique des Romains. A peine arrivé, ce peuple anéantit la
Ligurie de la Baltique et fait un carnage épouvantable par-
tout où il passe*.
Quelques-unes des hordes qui avaient pris le chemin
de l'est, traversent plus tard la Pannonie, dévastent la
Macédoine et la Grèce, et passent dans l'Asie Mineure, où
elles sont la terreur de ces régions pendant une longue pé-
riode de temps*.
Une partie de celles qui suivent le cours du Rhône s'em-
parent de plusieurs contrées de l'Italie, où elles portent le
coup de grâce à la civihsation étrusque' et mettent les Ro-
mains a deux doigts de leur perte; d'autres se répandent
dans le sud de la Gaule et pénètrent en Espagne, où la moi-
tié de la Péninsule se soulève contre les envahisseurs et fi-
nit par transiger avec eux*.
Un peuple qui s'annonce de la sorte ne saurait vivre
deux siècles dans l'Europe des écrivains anciens sans faire
parler de lui. On dirait que les Celtes ne sont que l'avant-
'' D'Arbois de ivbainvUle, Les premiers kabitanis de l'Europe, II. io(5.
' Diod. Sic. V, 33.
,ï Google
399
garde de cette infinité de peuples barbares que le nord de-
vait vomir sur le sud, jusqu'à l'anéantissement des civili-
sations méditerranéennes. Suivons-les en Espagne. Les pre-
mières hordes qui se montrent dans le sud de l'Europe ren-
contrent, selon Tite-Live, les Phocéens en lute avec les Li-
gures salyens, sur le territoire desquels les Grecs voulaient
s'établir. Voyant que ces étrangers cherchaient comme eux
des terres pour y vivre, les Celtes en tirent un auspice fa-
vorable et vieniient au secours des fondateurs de Marseille.
Puis ils rebroussent chemin vers l'Étrurie, D'autres hordes
s'ensuivent et se fixent dans cette contrée '. Ce sont là, sans
doute, de nouveaux flots de barbares qui, suivant toujours
le cours du Rhône, se dirigent vers l'occident, se répandent
dans tout le littoral du sud de la Gaule, et pénètrent cn6n
en Espagne.
Ainsi, on ne doit point parler de l'invasion des Celtes
en Espagne comme ayant eu lieu à une époque très reculée;
elle est postérieure à la fondation de Marseille et se passe,
pour ainsi dire, sous les yeux des habitants de cette ville,
et devant les Carthaginois qui faisaient te commerce avec
la Péninsule.
Que cette invasion est postérieure au périple du vi siè-
cle, dont nous avons déjà parlé, ou tout au moins que les
Celtes n'étaient pas encore arrivés à l'occident de l'Espagne
du temps de la rédaction de ce document, voilà ce qui nous
semble hors de doute, puisque le périple n'y connaît point
de peuplades celtiques. Hérodote les y connaît déjà, à côté
de Cynàtes, dans l'année 445-443*; de sorte que l'on peut
' Tiie-Live, v, 34, 3S.
' Sur cette date voyez D'Arbois de Jubainville, ouvrage citd,
p.x8i.
c R. 39
tv.
400
fixer comme certain que l'invasion des Celtes eut lieu entre
le VI et V siècles*.
Diodore nous raconte en peu de mots cette invasion, et
probablement elle ne méritait pas une description plus lon-
gue. Les Celtes rencontrèrent de la part des Ibères une ré-
sistance formidable; cependant, après plusieurs combats
acharnés, les deux peuples belligérants fraternisèrent, et une
nation mixte se forma sous le nom de Celtibères^
Le théâtre de cette lutte et de cette fusion se reserra
dans une région géographique qui garda longtemps le nom
de Celtibérie.
Les envahisseurs s'établirent dans des demeures Hxes
et se créèrent une vraie patrie dans cette partie de l'Espa-
gne, que plus tard ils durent défendre contre les Romains
conjointement avec les autres peuples ibériens.
Nous ne voyons nulle part qu'ils eussent un plan suivi
de conquête, dont le sens précis de ce mot. En Espagne,
du moins, ces étrangers se crurent heureux de vivre dans
les villes ibériennes de l'orient qui les reçurent dans leurs
murs, sans se soucier de faire valoir leur individualité, et
sans révéler par aucun acte la moindre unité polidque '.
Entre la Celtibérie et la Lusitanie nous trouvons les
puissantes tribus des Orétains, des Carpétains des Vettons,
etc. * Les Lusitaniens demeurèrent donc parfaitement étran-
< M. de Jubainville, dont nous nous écartons en pluueurs points,
place nnvasion celtique en Espagne au commencement du v siècle.
Ouvr. cit. p. 38, 379. Comp. Miillenhoff, ouvr, cit. p. 108 et suiv.
*Diod. Sic. loc. cit.
* Ea effet, à l'époque de la conquête romaine nous voyons les peu-
ples de la Celtibérie aussi séparés les uns des autres que partout ail-
leurs en Espagne.
• «Qretani yui el Germani cognominanlwt Pline m, 4, Si le mot ger-
,ï Google
A
401
gers à l'invasion celtique. Leur ignorance de ce qui se pas-
sait du côté de rÈbre est bien naturelle, protégés qu'ils
étaient par leurs voisins orientaux, que les Celtes devraient
assujétir avant de mettre le pied sur leur territoire.
Il est vrai qu'une horde de Celtes dépassa la lisière de
la Celtibérie et s'étendit vers l'ouest, poursuivant sa mar-
che entre le Tage et l'Ana, et qu'elle vint se fixer près des
rives de ce dernier fleuve dans le sud de la Lusitanie. Hé-
rodote en parle. Néanmoins, ces Celtes, aussi bien que leurs
frères orientaux, sY choisirent des demeures fixes, puisque
Pline les reconnaît dans les endroits mêmes où Hérodote
les connut '.
Quelques bandes de ces CelticidA l'Ana, déjà mêlés aux
Turdules, qui n'étaient pas des Celtes, firent une excursion
dans le nord. En arrivant à la rivière Lima les deux armées
en viennent aux mains et se détruisent mutuellement, et les
Celtes qui survivent vont se fixer dans les proximités du cap
Nérium*.
Voici les seuls Celtes dont l'histoire fasse mention dans
la Lusitanie et qui ont dû être bientôt absorbés par les peu-
plades qui les avaient devancés.
Comment donc expliquer la toponymie celtique dans ce
vaste territoire qui s'étend depuis le Tage jusqu'à la mer
Cantrabique ? La seule hypothèse possible serait d'admettre
l'infiltration insensible de tribus celtiques, qui eussent échap-
pé à l'attention des observateurs ; cette hypothèse, cependant,
serait fondée sur deux faits également extraordinaires: — une
mani a dans les langues celtiques la signification de 'Voisins> qu'on lui
attribue, ce surnom des 'Oréiains*, serait expressif
> PUne, lu, 3.
* Strabon, m, m, 5.
29*
ly Google
402
monomanie, vraiment singulière, de la part de ces étran-
gers, celle de changer les noms des rivières, des montagnes
et des villes, ce qui a rarement lieu, même de la part d'un
véritable conquérant; et la condescendance surprenante des
indigènes, d'échanger leur tangue contre celle des étran-
gers et d'adopter les nouveaux noms qui leur étaient impo-
sés, après avoir abandonné les dénominations topographi-
ques traditionnelles, qui sont toujours d'une prodigieuse té-
nacité.
Ce fait, étrange même dans la Geltibérie, devient in-
croyable dans les parties de l'Espagne qui demeurèrent en
dehors de l'influence des Celtes. Dans la Lusttanie, où nous
trouvons des noms celtiques, les habitants ne nous sont que
peu connus : les populations pré-celtiques, cependant, y ont
une individualité bien caractérisée, des usages, des mœurs,
une religion en propre, qui méritent à Strabon une page
séparée-, ces peuplades, au temps de la conquête romaine,
montrent encore une puissante vitalité, comme on le voit
dans leur longue lutte pour Pindépendance.
Un tel fait dépasse, donc, toutes les limites du possible.
Un peuple dans de pareilles conditions n'abandonne pas sa
langue, n'oublie point les noms auxquels une longue tradi-
tion l'a accoutumé.
C'est l'occasion maintenant d'examiner de plus près
les fondements sur lesquels s'appuie l'opinion de ceux qui
supposent celtique la toponymie de la Lusitanie, et de rap-
peler ce qui s'est passé à l'égard de la celticité des dolmens.
On sait que ces monuments furent longtemps attribués aux
Celtes, parce qu'on les trouvait dans des pays que les Celtes
avaient habités. Cependant, aussitôt que le domaine des
recherches devint plus vaste, et que les dolmens se firent
,ï Google
4o3
voir dans des régions où les Celtes ne s'étaient jamais mon-
trés, et qu'on chercha d'ailleurs en vain ces monuments dans
des lieux où ils avaient dominé, la celticité des dolmens ne
fut plus un fait que dans l'opinion de quelques personnes
obstinées •.
Avec les Celtes de la Lusitanie nous nous trouvons de-
vant un problème qui est lout-à-fait l'opposé de celui-là.
L'occupation celtique ne saurait être prouvée directement ^
on la déduit de la toponymie, et cette toponymie est celti-
que, parce qu'il est impossible de ne pas y découvrir une
étroite parenté avec les langues appelées néo-celtiques, par-
lées encore aujourd'hui dans l'Armorique et sur quelques
points des lies Britanniques, lesquelles, selon l'opinion des
linguistes, sont le vieil idiome celtique transformé par le
temps.
La celticité des langues britanniques et hibemiques,
cependant, est-elle mieux prouvée que la celticité des dol-
mens? Voilà la question. Si l'on ne regardait pas comme
prouvé que les Celtes ont habité la Bretagne, l'Angleterre
et l'Irlande, personne ne s'aviserait certainement d'appeler
celtiques les vieilles langues qui s'y sont maintenues jus-
qu'à ce jour; et cette fois on ne saurait douter que des peu-
ples d'origine celtique n'aient pénétré dans ces pays.
Toutefois, il est presque certain que cette occupation
ne date que du v siècle*, et il est étrange que ces envahis-
seurs, qui respectent les usages et les mœurs des peuples
pré-celtiques, ce dont témoignent de nombreux monuments,
n'aient montré leur acharnement que contre les noms eth-
' V. l'ouvrage ciïé de M. Alex. Bertrand, p. bi et suiv.
* V. plus loin Belloguet, Éfhogénie Gauloise — Le Génie gaulois,
p. ï39.
,ï Google
404
niques et locaux qu''ils rencontrèrent, les remplaçant par
d'autres noms, dont un grand nombre sont parfaitement
identiques à ceux de la Lusitanie, de ce pays sur lequel,
comme l'histoire nous l'apprend, ils n'ont pas dominé.
Et les linguistes que savent-ils, après tout, de la lan-
gue parlée par les Celtes, que savent-ils de la tangue parlée
par les peuples pré-celtes de l'occident, pour qu'ils établis-
sent avec certitude que l'erse, le gaélique, le cambrique et
le breton sont des langues celtiques et non pas autre chose?
Tout ce que nous en savons, c'est que quelques noms que
les écrivains anciens nous donnent comme celtiques ont une
analogie évidente avec les langues qui ont survécu jusqu'à
nos jours dans la Bretagne et dans les Iles Britanniques ;
ceci n'est pas suffisant, toutefois, pour décider une question
aussi importante. Tout en admettant que dans les temps
où ces noms nous ont été transmis — des temps où les Cel-
tes s'étaient déjà confondus intimement avec les peuples
pré-celtiques— les anciens écrivains fussent en mesare de
séparer les noms purement celtiques de ceux qui ne l'étaient
pas; si l'on parvient à démontrer que ces peuples pré-celti-
ques étaient d'origine indo-européenne, devant parler une
langue du groupe gréco-italo-celtique de Schleicher; cette
analogie qui à la vérité résume toute l'argumentation n'est
pas l'ombre d'un argument : il est donc évident que la lin-
guistique dans son domaine exclusif se trouve incapable de
résoudre la question de nom et qu'elle doit avoir recours à
des recherches historiques, aux découvertes de l'archéologie,
de l'anthropologie, à tous les renseignements enfin qui puis-
sent lui fournir les moyens de résoudre cette énigme, que
par ces propres moyens elle ne parviendra jamais à déchif-
frer.
Pour le problème qui nous intéresse spécialement, il
,ï Google
faut chercher, comme on vient de voir, les traces des peu-
ples pré-celtiques qui occupèrent l'occident, afin que nous
puissions obtenir quelques indices de la langue qu'ils ont dû
parler.
Partons de la Lusitanie. Strabon qui nous dit que les
Lusitaniens, les Galiciens, les Asturiens et les Cantabres
avaient tous les mêmes usages et les mêmes mœurs', ne
trouve aucune analogie entre ces usages et ceux des Celtes.
Toutes les analogies sont au contraire avec des Ligures ou des
Grecs. C'est ainsi que, pariant des mœurs des femmes de
cette partie de la Péninsule, le géographe passe sans au-
cune transition aux mœurs des femmes liguriennes de la
Méditerranée, et il faut lire deux fois les textes pour que
Ton sache quelles sont celles dont il veut parier*. Les ana-
logies les plus frappantes, cependant, celles qu'il fait res-
sortir lui même, rapellent les Grecs. Les mariages se font
more graeco, les hécatombes ritu graeco; il y a des usages
semblables à ceux de Sparte chez quelques Lusitaniens des
rives du Douro', et pour le géographe il n'y a point de
doute que des colonies grecques parvinrent dans ces régions,
ce qui d'ailleurs lui est témoigné par des noms tels que
Hellènes, Amphiloques, et plusieurs autres. Justin va même
jusqu'à prétendre que, selon la tradition des Galiciens, la
» Strab. III, 111,6,7.
* Idem m, iv, i7. Plusieurs écrivains, et parmi eux Betloguet, (ouv.
cil. p. 46), ont remarqué que les traits que les anciens prêtent aux Li-
gures de !a Méditerranée, sont les mêmes qu'ils attribuent â quelques-
uns des peuples ibériens. C'est ce qui arrive surtout chez les Lusita-
niens. Même de nos jours on a observé avec surprise l'étroite analogie,
qu'il y a entre le dialecte de Gênes et les langues portugaise et gali-
cienne. Diefenbach. Celtica, u, p. 3g.
a Strab. ni, m, 6, 7.
,ïGoo'
'f~
4o6
parenté entre ce peuple et les Grecs ét^t une chose connue '.
Pline avance également que les Hellènes et les Graii étaient
d'origine grecque*.
Il ne serait pas difficile de réunir d'autres citations.
L'itinéraire que les anciens prêtaient à ces colonies,
que les chefs de la guerre de Troie auraient conduit ici par
la Méditerranée, ne saurait être admis. Ce qui, toutefois,
nous semble mériter encore aujourd'hui une attention sé-
rieuse, c'est que le nom d'Hellènes et de Graici que ces
observateurs rencontrent dans cette extrémité de la terre à
côté de Grecs barbarisés, appartient aux temps archaïques
de la Grèce '; et un fait aussi remarquable c'est que les tra-
ditions sur les Grecs et les moeurs des Grecs se retrouvent
surtout dans une certaine direction. Dans I^le Ogygie, la-
quelle doit être l'Irlande, si un tel nom répond à un lieu
quelconque, nous avons des Grecs barbarisés*. Dans l'île,
vis-à-vis la Celtique, sans doute l'Angleterre, nous trouvons
des Grecs qui y étaient venus mêlés à des Hyperboréens,
lesquels avaient un grand penchant pour les Grecs, pour les
Athéniens et les Déliens surtout*.»
Près du Rhin, peut-être dans l'ancienne Ligurie de la
Baltique, on rencontrait des noms grecs et même des ins-
criptions grecques *. Nous voici près de l'Éridan des anciens.
* JuSt. ILIV, 3.
* Pline, IV, 34.
3 Aristote, Météorol. 1, 14. Comp. Marntora Parium, 5; d'Artaois
de Jubainville, ouv. cit. p. 247. Il se peut que CHenî et Hellènes, mal-
gré la distinction faite par Pline, ne soient qu'un peuple, et que la for-
me rigoureuse de ce nom soit Selleni.
* Plut. De Fac, Lunae.
^ Hecatei Abderitae, frag. 1, éd. Didot.
" Tacite. De Mor. German. m.
ibvGoogle
4^7
Hérodote croyait médiocrement à cet Éridan, par une raison
qu'il convient de citer ici: c'était là un nom grec'. Par des
motifs semblables te père de l'histoire aurait dû ne pas
croire à l'existence des Ligures du pays de l'ambre, puisque
les noms de Cycnus, roi des Ligures, et surtout son père
Sthénélus sont parfaitement grecs. Timée n'était pas aussi
incrédule; il ne se refusait point à accepter les traditions et
les noms grecs dans le nord-ouest de l'Europe, et, comme
d'autres écrivains, il les attribuait à l'influence des Argonau-
tes qui avaient découvert un passage du Pont-Euxin à la mer
du nord*. Selon les traditions de la Gaule une partie de la
population de ce pays descendait des colonies doriennes et
de. celles des Troyens'.
Est-ce là une fantaisie des anciens ?
Il est impossible de ne pas comparer les traditions de
ces célèbres Hyperboréens avec ces Grecs égarés sur des pla-
ges aussi lointaines. MM. Alex, Bertrand et d'Arbois de
Jubainville n'hésitent point à attribuer une réalité historique
à ce peuple, qui pour certains auteurs anciens n'était qu'ima-
ginaire, et que quelques écrivains modernes regardent com-
me un mythe*. Nous y voyons, de même, une réalité his-
torique, mais nous ne saurions penser aux Celtes, car cette
hypothèse nous paraît inadmissible '.
Les détails qu'Hérodote nous racconte sur les rapports
religieux des Hyperboréens avec les peuples du centre de ta
* Hérod. III, Il 5.
* Timaei frag. 6, éd. Didot.
* Amm. Marcell. xv, 9.
*Preller, Griechische Mythologie, h, p. 196.
* Alex. Bercrand, ouvr. cil. p. 16t. D'Arb. de Jub. ouvr. cit. p. 14?.
Et, considérant les Hyperboréens comme des peuples pré-celtiques,
. BeUoguet, ouvr. cit p. 238.
,ï Google
Grèce; l'itinéraire qu'ils faisaient suivre à leurs offrandes
sacrées; les noms de leurs envoyés (des noms qui ont une
physionomie grecque) sont si peu mythiques et ont un ca-
ractère tellement historique et positif, que l'incrédulité ne
saurait y trouver des fondements raisonnables; l'aveu mê-
me d'Hérodote, qui d'ailleurs se montre déjà un peu scep-
tique à Pégard de l'existence de ce peuple, nous semble pré-
cieux, lorsqu'il assure que la croyance aux Hyperboréens
était encore vivante du temps d'Homère'.
L'oblitération progressive de ces traditions chez les Grecs
se produit dans la raison directe des difficultés, plus grandes
tous les jours, que rencontrent les Hyperboréens à envoyer
leurs offrandes religieuses, difficultés qui les forcent de met-
tre un terme à leur dévotion. Tout cela nous rappelle cette
dégénération des anciens Grecs occidentaux, que les obser-
vateurs modernes ont remarquée, et qu'on expliquerait mieux
par la stagnation des mœurs antiques, par opposition à cel-
les des Grecs proprement dits, dont la civilisation, due à des
causes complexes, s'approcha de plus en plus de ce raffine-
ment que nous connaissons.
La légende des Hyperboréens ne comprend-elle pas le
souvenir de tribus aryennes de la même origine que les Thra-
ces, les Selloï, Gnà'ci etc. qui s'écartent lentement de leurs
frères, et dont les relations deviennent de plus en plus dif-
ficiles et cessent enfin, tandis que leurs migrations les éloi-
gnent graduellement d'autres tribus qui n'eurent pas besoin
de dépasser le sud-est de l'Europe pour trouver une nou-
velle patrie ?
Voilà ce qui nous paraît assez probable; et dans ce cas
le nom d'Hyperboréens nous montre le chemin qu'ils prl-
' Herod. IV, 3i et suiv.
,ï Google
409
reni — le nord; et entre les positions que leur assigne Héro-
dote ou Hécatée d'Abdère nous croyons qu'il n'y a pas à hé-
siter. D'après Hérodote, les Hyperboréens demeuraient dans
le haut nord, à une grande distance occidentale du méridien
du golphe Adriatique, puisque pour aneindre ce golphe, leurs
^offrandes à Apollon délien traversaient la Scythie, se diri-
geant le plus possible vers le couchant, et prenaient ensuite
la direction opposée, de l'occident à l'orient, traversant la Do-
donc, l'Eubée et la Tênos.
Cette route est assez étrange; mais il est plus étrange
encore que les Scythes aient ignoré, d'après Hérodote, ce
que c'étaient ces Hyperboréens qui traversaient leur pays et
qui avaient obtenu que les Scythes mêmes transportassent
les offrandes jusqu'aux frontières de leur pays, pour les re-
mettre aux peuples limitrophes, qui les transmettaient à d'au-
tres.
D'après la version d'Hécatée, les Hyperboréens occupe-
raient la nord-ouest de l'Europe, les Iles Britanniques y com-
prises. La route de ces émigrants serait doac celle du Rhin,
et l'itinéraire des adorateurs d'Apollon, depuis le pays des
Hyperboréens jusqu'au golphe Adriatique et de là jusqu'à
Délos, traverserait une zone étendue, précisément la zone
que nous voyons occupée par les vieux peuples indo-euro-
péens, qui précédèrent les Celtes*. La condescendance et la
dévotion avec lesquelles toutes ces peuplades, étroitement
liées para une origine commune, se prêtent à recevoir et à
'Une tradition, dont nous ne discuterons pas la valeur, admettait
une étroite parenté entre les Vcnèies de l'Armorique et ceux de l'Adria-
tique (Sirab. IV, 4). Les raisons qui portèrent les écrivains grecs à don-
nerau P6 le nom d'Éridan (Rhin), en une certaine époque, auraient peut-
être un fondement qui nous échappe, et qui modifierait sans doute cette
absurdifé.
,ï Google
410
transmettre les dons destinés à Apollon, un dieu qu'elles
adorent, ou qu'elles doivent connaître du moins, perdent
îiinsi tout ce qu'elles offraient d'étrange par la narration
d'Hérodote, lorsqu'il attribuait cette piété touchante à des
peuples barbares, ayant des mœurs et des religions diffé-
rentes.
On verra par ce que l'on va lire que l'existence de peu-
ples d'origine aryenne dans le nord-ouest de l'Europe, au
temps d'Homère, ne saurait être révoquée en doute. Il est
impossible, cependant, d'admettre que ces peuples hyperbo-
réens ou d'autres, aient été des Celtes, puisque Hésiode mê-
me ne connaît que des Ligures dans ces régions. Ce n'est
que bien longtemps après que nous voyons les Celtes paraî-
tre sur la scène de l'histoire.
Est-ce la civilisation des Hyperboréens que l'archéolo-
^e surprend dans le nord-ouest et l'occident de l'Europe?
Quoique cette question ne puisse avoir une solution
définitive, il est hors de doute que la civilisation dont les
archéologues nous révèlent l'existence dans ces régions, dé-
montrée par ses monuments mégalithiques, l'importation de
l'agriculture et les perfectionnements corrélatifs, civilisation
qui se succède immédiatement à celle de l'homme des ca-
vernes, est d'origine aryenne. La connaissance des procédés
agricoles et le caractère symbolique des gravures de ses
monuments le prouvent assez. Quand même nous accor-
dions que l'arrivée dans le nord du peuple célèbre des dol-
mens soit antérieure à celle des Hyperboréens de la tradition
grecque, tous les deux n'en appartiendraient pas moins in- ,
dubitablement à la grande masse d'émigrants indo-europé-
ens, qui, par des causes que nous ignorons, traversèrent l'Asie
et entrèrent en Europe, et dont les Thraces ne seraient que
,ï Google
4"
l'avanl-garde, selon l'opinion de quelques-uns'; et il n'est
pas moins vrai qu'il devait exister chez ces deux peuples un
fond commun de croyances, de mœurs et de langue.
Par des motifs semblables, tout en supposant que les
Hyperboréens ne furent point les premiers occupants aryens
du nord-ouest de l'Europe, et qu^ils suivirent à peine la
route que d'autres peuples congénères avaient frayée avant
eux, leur légende indiquerait encore ce vieux chemin du Rhin*,
et viendrait à l'appui de la distribution géographique des
dolmenSf qui nous montre de quelle manière les uns et les
autres se répandirent depuis le nord jusqu'à l'extrémité mé-
ridionale de rEurope.
En effet, par des moyens indépendants de tout témoi-
gnage historique, l'archéolc^ie a démontré que le peuple des
dolmens vint de l'orient; qu'il paraît sur les rivages de la
Baltique, descend graduellement la côte occidentale de la Gau-
le, occupe les îles opposées à cette côte, c'est-à-dire l'Angle-
terre et l'Irlande, et va toujours en se répandant sur le
littoral du nord de l'Espagne, sur le littoral de l'occident et
sur celui du sud, jusqu'aux limites de l'Andalousie actuelle,
où il s'arrête'; et, chose étrange, c'est précisément sur cette
' D'Arb. de Jub., ouvr. cit., p. 274 et suiv.
* Les traditions de l'Irlande, dit M. H. Martin (Revue d'Anthropoh-
gie, »*■• série, voL n. p. 199), font venir ses habitants de là Thrace, de
la Grèce et de l'Asie Mineure. D'après les traditions cambriques, Hu
Gadara et son peuple partirent du pays de Haf,— où Constantinople se
trouve aujourd'hui, ajoute une glose.
' Voy. Fergusson, Rude Slone Monuments, carte à la fin du volume;
Philippe Simôes, Introjucçâo d Archeologia da. Peninsula iberica p. 98
et suiv. La limite des dolmens dans le littoral du sud se trouve dans le
territoire des Tartessîens {Aviénus, Ora maritima v. 463-64), peuples
dont les Massiens ou Mastiens étaient un rameau, d'après d'autres écri-
vains.
1^
41^
zone, que nous retrouvons l'enchaînement de traditions et
de noms grecs ! '
Cest donc un fait hors de toute discussion, qu''à des épo-
ques reculées, postérieures cependant à Toccupation sud-est
de l'Europe par les Thraces, une grande masse de peuples
aryens firent leur apparition dans le nord et se répandirent
jusqu'au sud de l'Europe, choississant de préférence le lit-
toral pour s'y établir. On ne saurait, toutefois, décider en
conscience, si cette marche fut précédée par des tribus an-
Pour suivre la marche de ce peuple célèbre dei dolmens il faut tra-
verser la Méditerraoée et parcourir le nord de l'Afrique, jusqu'à Coas-
tantine. Ces monumeuis appartiennent-ils à quelques-uns des peuples
qui s'étaient liés contre les Égyptiens (voy. Ci^abis, Études sur P antiquité
historique, p. 1 73 et suiv.) parmi lesquels nous trouvons les Masbaoushas,
Maxyesd'Hérodote,peuple agriculteur? C'est l'opinion de M. Heori Mar-
tin (Études d'archéologie celtique, p. sSS et suiv.), opinion qui nous pa-
raît aussi juste que l'origine celtique qu'il pr€te à ces peuples nous sem-
ble âtre inacceptable. Adolphe Piciet, cependant, retrouvait des noms
celtiques parmi les noms de rivières en Afrique. (Revue celtique, a, p.
437 et suiv.; voy. toutefois ibid. iti, p. 568 et suiv.) ; et Diefenbach nous
racconte qu'une dame du pays de Galles rencontra dans un bazar en
Algérie des gens de l'intérieur de l'Afrique, dont elle put comprendre
la langue avec le secours du cambrique (Celtica n, s. partie, p. 136).
Pictet donne pour titre â son travail -Une énigme: C'est aussi
une énigme que nous étudions dans cet écrit. Nous ne poserons main-
tenant d'autre question que celle-ci: les Massiens de l'Espagne sont-ils
étrangers aux ^faxyes d'Hérodote, aux Mashaousbas des inscriptions
égyptiennes?
' Nous avons suivi les traditions grecques depuis la Baltique jus-
qu'à la Lusitanie. Continuant ces recherches jusqu'à la limite des Tar-
tessiens, pour ne pas citer la fondation dlllysippo par Ulysse, nous les
retrouvons — dans le port de Ménesthée: Ménesthée serait un roi grec
(Strab. ni, II, i3) auquel les habitants de Gadès sacrifiaient (Philostr.
Vita Âpoll.v, iv); à Gadès: les Gaditains étaient d'origine grecque, se-
lop phîlostrate (ibid); à Menace: par l'aspect de ses rwnes on rg-
,ï Google
4i3
térieures aux Hyperboréens, ou si ces tribus en faisaient
partie; cela n'a, cependant, aucune influence sur le problème
ethnique, puisqu'elles ont dû avoir une même origine. En e£fet,
que sous le nom d'Hyperboréens soient compris des peuples
de la même famille des Sellot et des Graïct etc, et que ces
peuples aient suivi la même route, indiquée aujourd'hui par
les bornes milliaires des dolmens, c'est là une circonstance
aussi peu surprenante, que la marche d'autres émigrants quel-
conques, qui firent ce long voyage, partant du même point,
ce que nous laisseraient entrevoir les vestiges des traditions
grecques.
Les documents phéniciens pourraient répandre une gran-
de clarté sur ce monde mystérieux que les sciences archéo-
logiques s'efforcent de ressusciter.
C'est sans doute avec des populations préceltiques, do-
minantes dans la vaste zone des dolmens, que les Tyriens
commencent à avoir des rapports dès le xii siècle, dans leur
commerce avec le pays de l'étain et de i'ambre.
connaissait une ville grecque (Strab. ici, iv, 2) ; à Abdère, ou l'on voyait
des monuments du voyage d'Ulysse. (Id. m, iv, 3).
De la rivière qui baignait les frontières des Tarteisiens, dit Aviénus,
reproduisant des auteurs d'une grande antiquité :
Theodona illic (nec slupore sil tibi
Quod in feroci barbaraque sat loco
Cognomen hujus Graeciae accipis sono)
Prorepil amnis.
Ora marititna, v. 4S7-60.
II nous semble convenable d'avertir que ces traditions remontent
à des temps préhistoriques, et sont complètement séparées deltiistoire
de Marseille et de ses colonies dans l^spagne orientale.
,ï Google
414
Ce peuple, malheureusement, est le moins communica-
tif du monde et sa réserve semble en outre obéir à un cal-
cul de marchant, qui gagne à cacher sous le plus profond
mystère la source des richesses énormes dont il veut faire
le monopole '.
Outre le document du vt siècle, qui nous a été conservé
par un vrai miracle, les renseignements que nous devons
aux Phéniciens sur l'Occident se trouvent répandus et dé-
figurés dans les mythographes et d'autres écrivains anciens,
et le déchiffrement et la collection de ces matériaux attend
encore le contrôle d'une critique sévère.
Pour quelques savants, par exemple, Albion et Dercy-
nus, fils de Neptune, Ligus et Bergion, adversaires d'Her-
cule, ne sont que les insulaires de la mer du nord et d'au-
tres peuples du nord-ouest de l'Europe, qui reçurent peu
hospitalièrement les enfants de Meikart'.
Cette interprétation paraît être tout-à-fait justifiée par
le périple du vi siècle, lequel connaît encore cenains Albions
et Dranganes et plus d'un peuple ligurien, dans les régions
où le théâtre de ces scènes peut mieux se placer'.
Ce qui est, toutefois, incontestable c'est que le nom
collectif des peuples occidentaux dans la géographie ancienne
' On pourrait citer un grand nombre de preuves. Un seul fait doit
suffire. Dans des temps relativement récents, un commerçant phénicien
se voyant suivi par un navire romain qui voulait connaître ce secret,
sacrifia dans un naufrage prémédité son bâtiment avec l'équipage, sûr
de ce aue ses persécuteurs auraient le même sort, ce qui arriva, en ef-
fet. Le propriétaire du navire phénicien fui le seul qui échappa, et il
fut dédommagé par le trésor public de toutes les pertes qu'il avait fai-
tes. (Strab. m, v, M.)
* D'Arb. de Jub. ouvr, cit. p. 3o8,
* Comp. Aviénus, Ora mar. V. ii3; i3oetsuiv.; igT-g.
ly Google
4'3
était celui de Ligures, comme on le voit encore dans un frag-
ment d'Hésiode, où nous voyons le nord occupé par les
Scythes, le sud par les Éthiopiens et l'occident par les Ligu-
res '. Or cette géographie ne saurait être que phénicienne,
car dans le temps d'Hésiode, et même quelques siècles plus
tard, les Grecs ne pouvaient avoir sur l'occident et les peu-
ples occidentaux d'autres renseignements, que ceux que les
Phéniciens voudraient bien leur communiquer.
C'étaient donc des Ligures les peuples que les Phéniciens
regardaient comme les représentants de la civilisation de
l'occident; et les Albions et les Oestrymnides, que le docu-
ment du VI siècle nous cite en Angleterre, les Hiberniens en
Irlande, les Cempses, les Cynètes et les Tanessiens à l'ouest
et au sud-ouest de l'Espagne, ne sont à coup sûr que ditlé-
rentes branches de cette grande collectivité de peuples, les-
quels, par l'affinité frappante de leurs mœurs et de leur race,
avaient droit à une dénomination commune devant la théo-
rie géographique, mais qui, probablement, recevaient des
appellations ethniques plus ou moins spéciales dans la no-
menclature d'un observateur qui les passait particulièrement
en revue.
Ceci est d'autant plus vraisemblable que le périple con-
naît encore deux peuples portant le nom spécial de Ligures,
l'un dans le sud de l'Angleterre, les célèbres Ligures de la
Baltique, qui s'étaient enfuis devant les Celtes, l'autre dans 1 e
nord-ouest de l'Espagne, aux nord des Cempses et qui, se-
lon nous, est identique au.\ Lusitaniens des écrivains posté-
rieurs*.
'Hesiodi frag., i32, éd. Didot.
'Les personnes compétentes diront si le nom de Ligures, ou plutôt
Liguses, selon les démonstrations de M. de Jubainville (ouvr. cit. p. 22 i-ï)
ngic
416
Le nom de Ligures et les traditions qui ne peuvent se
rapporter qu'à ce peuple se répètent, d'ailleurs, dans le sud-
ouest de l'Espagne d'une manière toute spéciale. Un promon-
toire des Tartessiens avait le nom de Ligustique*. Le Tar-
tessus, Bétis, avait sa source dans un lac ligustique%et près
de celui-ci il y avait une ville Ligystine, dont les habitants
étaient appelés Ligures '. Dans le vii siècle un roi des Tartes-
siens pone le nom d'Arganthonius *, nom arj'cn sans dou-
te, et que M. de JubainvUle croit être ligurique ^. Un roi
des Cynètes, Habis, introduisit l'agriculture dans le sud-ouest
de l'Espagne*, et ce grand bienfait ne saurait être attribué
qu'aux Ligures, selon le sentiment de M. de Jubainville.
L'invasion ligurienne, d'après ce savant, avait eu Heu
un peu plus tôt que celle des Celtes, au vi siècle envi-
ron, et dans la direction de l'orient à l'occident. Ces deux
affirmatives nous paraissent, toutefois, insoutenables. Les
traditions relatives à Habis, celui qui introduisit l'agriculture
dans le sud-ouest de la Péninsule et qui distribua son peu-
ple dans sept villes ', sont de celles qui appartiennent au pre-
et le nom dt: Lusiiani ne sonc pas identiques. Le sufHxe -ttani est rela-
tivement moderne, puisque nul écrivain vraiment ancien ne le connaît,
etLustVuitipnraitêtreà/j'^^^ceque Turiefani est à Tarlessii. Il fau-
drait admettre, il est vrai, une forme ligusilani et sa contraction liusi-
lani, iusitaiti par la chute du g et l'assimilation des voyelles; mais la
chute du g dans les langues appelées néo-celttques est un fait st com-
mun, que l'objection qui aurait un tel fondement nous paraît peu im-
portante.
< Ëratosthàne, dans Strabon {ii, i, 40; 11. iv, 8.)
' Aviénus, Ora mar. v. i85.
' Stéphanus, De urbibus. v. Ligystine.
*Hérod. I, i63.
■* D'Arb. de Jub. ouvr. ciL p. 344.
•-'Justin, ïLiv, 4.
ly Google
4' 7
mier cycle de la civilisation d'un peuple, et ne peuvent se
créer des racines que dans un monde encore barbare'.
On ne saurait en détacher celles qui font allusion à la
guerre des dieux avec les titans dans le bois des Tartessiens ',
ainsi que les prëtensions des Tartessiens à une littérature qui
aurait plus de six mille années d'existence^. Ce serait défen-
dre, à notre avis, une cause insoutenable que d'admettre
qu'une civilisation, dont Gardons et Habis seraient les chefs
historiques ou mythiques, fût devenue célèbre dans le sud-
ouest de l'Espagne, surtout par l'innovation de l'agricultu-
re, et cela au vi siècle, c'est-à-dire plusieurs siècles après que
les Tyriens avaient exploré ces régions et y avaient répan-
du leur civilisation.
Selon nous, les affirmatives de Tliucydide viennent ajou-
ter à ce groupe de faits autant de certitude qu'elles en re-
çoivent.
D'après cet écrivain, les Sicanes étaient des Ibères que les
Ligures chassèrent des bords du fleuve Sicanus, dans l'Ibérie*.
L'apparition des Ligures dans l'ibérie serait donc antérieure
■ Justin fait une remarque presque semblable lorsqu'il rapproche
Habis des fondateurs de Rome.
» Id. ibid.
^Strab. m, 1, 5.
* Thucyd. VI, 3. M. de Jubainville (ouvr. cit. p. ao et suiv.) prétend
démontrer que le Sicanus de Thucydide n'est point le Xucar de l'Es-
pagne, mais bien le Sequana des Gaules. Cette opinion, que Disfenbach
croyait déjà avoir peu de probabilité {Origines Europaeae, p. gS), est
tout-a-fait conjecturale ; ce qui est certain, c'est que le Sicanus de l'Es-
pagne était connu d'autres écrivains avant Thucydide, tandis que ce
n'est que bien plus tard que l'on entend parler du Sequana; et il est
même douteux si, à l'époque dont il s'agit, !e fleuve avait déjà ce nom,
ou bien un autre tout-à-fait différent, comme il est arrivé à rArar,par
exemple, selon quelques écrivains. M. Mîillenhoff (ouvr. cit- p. i6S) veut
3o«
,ï Google
au XV siècle ', de beaucoup antérieure à l'arrivée des Tyriens
à Gadès, et en réunissant les éléments épars que ces sour-
ces nous fournissent, nous voyons paraître avant le xv siè-
cle dans le sud-ouest de l'Espagne un peuple agricole, et
partant arj'en, ligurien d'après les traditions de la Sicile re-
cueillies par Thucydide et selon les observations des Phéni-
cicns,iequel par le plus grand développement de sa civili-
sation et de son organisation politique, par la supériorité de
ses armes ou de sa stratégie, sut dompter les Ibères qui ne
prirent pas la résolution des Sicanes, et établir dans cette
partie de l'Espagne un domaine, dont il est demeuré un
souvenir durable. A notre avis, un grand nombre de faits
de Phistuirc ancienne, considérés dogmatiques, sont bien
loin de réunir à leur appui autant de présomptions légiti-
mes.
En ce qui concerne la marche de ces envahisseurs, on
dirait, se fondant sur les renseignements que Thucydide nous
fournit, que la pression exercée par les Ligures sur les Ibè-
res eut lieu dans une direction opposée à celle admise par
que la notice du Thucydide soJt fondée sur un passage d'Hécatée de
Milet, le quel nous a clé conservé (Hec. frag. 14, éd. Didot.); mais cette
opinion est aussi, elle-même, une conjecture.
En bit de conjectures, celle qui suppose qu'Aviénus {Ora mariti-
tna, V. 4S0-1) eût recours à ce passage d'Hécatée nous semble la mieux
fondée, puisque le poète nous dit clairement que cet ancien auteur fut
l'un de ses informateurs (v. ^3) : et, vu que la notice de Thucydide con-
tient une particularité remarquable, dont Avîénus aurait profilé sans
doute, s^il l'avait lue dans Hécatée, il nous semble probable que Thu-
cydide ait puisé dans une autre source ses informations.
' L'occupation de la Sicile par les Sicanes est antérieure â celle des
Sicules (Ligures), et on place celle-ci en l'année 1400, cette date étant
regardée comme la première donnée chronologique poative de l'his-
toire de l'occident.
ly Google
4".)
M. D'Arbois de Jubainville, c'est-à-dire de l'occident à
l'orient', et avec ces renseignements coïncide cette circons-
tance, qu'on ne retrouve des souvenirs vivants des Ligures
et des traditions liguriennes que dans le sud-ouest et l'onest
de l'Espagne, reliés à ceux des Ligures d'Albion et de ta
Baltique.
C'est comme si les Ligures avaient suivi ta marche du peu-
ple des dolmens. Que ceux qui se piquent d'upe plus grande
sagacité, s'efforcent de séparer ces deu\ peuples. Quand ù
la chronologie, le peuple mystérieux des dolmens est le pre-
mier représentant de la civilisation aryenne dans l'occident
et il occupe lentement et successivement le littoral de PEu-
rope, depuis la Baltique jusqu'aux Tanessiens-.
> Si nous en croyons un des auteurs suivis par Aviénu^ le tieuve
qui donna son nom aux Ibères no fut poini i'Ébre connu, mais bien un
autre qui coulait à l'occident du détroit (Ora mar. v. 249-52). Les dou-
tes soulevés par les textes de Thucydide, Philiste, etc. viennent princi-
paletneni, selon nous, de la surprise causée par la singulière destinée
de ces Rigiiifs de l'Espagne, qui ne s'arrêtent que dans la Sicile. Mais
nous ne connaissons rien des péripéties de cette migration, et la criti-
que n'a pas plus de droit de rejeter ce fait, seulement parce qu'il est obs-
cur et peu vraisemblable, qu'elle ne rejette tant d'autres qui ne le sont
pas moins et qu'elle laisse passer sans objection.
De notre part, nous sommes forcés par l'évidence à reconnaître la
présence d'un peuple agricole et constructeur des dolmen^, deux fois
donc différent des Ibères (dans le sens restreint de ce mot) lequel domina
depuis l'extrémité occidentale de la Péninsule jusques près du Sicanus;
et les textes qui nous occupent, s'ils n'existaient pas, devraient être in-
ventés, qu'on nous permette cette exagération.' La direction qu'ils prê-
tent à la fuite des Ibères, tout en omettant les aventures de leur marche
jusqu'à la Sicile, est inévitable, et rend impossible l'hypothèse d'un cou-
rant d^nvasion par l'orient.
' Les limites des Tanessiens étaient près du tieuve Sicanus (Avié-
nus, Ora Mar. v. 46$ et suiv.)
.yGogflk
l.es Ligures de la géographie phénicienne, considérés
par les Phéniciens comme les représentants de la civilisa-
tion occidentale, et dont nous retrouvons les traces depuis
la Baltique jusqu'aux Tartessiens, se montrent déjà avant le
XV siècle dans le sud-ouest de l'Espagne.
11 est impossible d'admettre la priorité du peuple des dol-
mçns et une seconde migration, celle des Ligures, qui réduit
la première ù une position secondaire et subordonnée, parce
que, d'après les observations de M. Alex. Bertrand, l'exa-
men des monuments de cette époque démontre évidemment
une forte organisation communale, une autonomie, enfin*.
Et la difficulté s'accroît lorsque, après avoir cherché les res-
tes- de la civilisation de ces fameux Ligures de l'occident,
dans l'opinion auctorisée des Phéniciens qui les connais-
saient si bien, nous rencontrons ù peine les restes de la ci-
vilisation du peuple des dolmens, qui paraît avoir pris la
précaution de marquer d'autant de cachets les monuments
et Içs villes qu'il éleva, afin qu'on ne pût les confondre avec
les travaux d'aucun autre peuple^.
Quand à nous, il nous est impossible de résister à l'évi-
dence que nous impose cette série de coïncidences. II nous
semble tout-à-fait probable que les révélations de l'archéo-
logie et les renseignements historiques d'origine phénicienne
sur les anciens Ligures occidentaux se rapportent ensemble
à un- B«i4 fsit ethnologique, auquel le subside des traditions
sur les Hyperboréens n'est pas étranger*.
< Alex. Bertrand, ouvr. cité, préface, xii.
' Nous voulons parler des cercles, des spirales, etc. qui se trouvent
graviis sur les dolmens et les mines de nos vilks mortes.
^ Plusieurs écrivains ont vu dans les temples circulaires des Hyper-
boréens, cités par Hécatée d 'Abdère, les célèbres monuments de Stone-
henge et d'Avebury. (Voy. Belloguet, ouvr. cit. p. Si8).
ly Google
4a I
Personne ne pourra démontrer que tous ces renseigne-
ments aient trait à un seul peuple. Il est plutôt probable que
les populations arj^ennes qui occupèrent le nord-ouest et
puis l'occident de l'Europe, aient appartenu îi des migra-
tions différentes*, suivant toutes la même route, mais le plus
souvent respectant le territoire déjà occupé par des peuples
de leur race, ce qui explique leur rapide propagation le long
du littoral*. Nous ne pouvons voir dans le peuple des dol-
mens, ou ligurien suivant les renseignements des Phéni-
ciens, qu'une foule de tribus, plus ou moins étendues, cha-
cune jouissant de son autonomie, telles que nous les voyons,
par exemple, en Espagne, à Pépoque deâ Romains, ou en
Angleterre du temps d^Agricole; et quoique leur fond eth-
nique et moral ait dû être identique, on ne saurait leur prê-
ter une véritable unité, condition que les Grecs, maigre leurs
rêves de panhellénisme, ni les autres tribus aryennes du
sud-ouest n'atteignirent jamais.
Ce qui, cependant, est plus important dans notre ques-
tion, c'est de consigner que, bien avant l'apparition des Cel-
tes en occident, toute la région où nous voyons les dolmens
s'étendre, était occupée et dominée par une chaîne de peu-
ples d'origine atyenne, des Ligures, des Selloï, des Grdid,
etc., peu importe le nom, qui y avaient implanté une civili-
sation à eux, c!evant partout dans cette région des monu-
ments, et y laissant des traditions, et par conséquent des
noms ethniques et locaux.
La solidité de ce fait nous paraît inébranlable.
' l.cs anciennes traditions des tics Britannique): l'assurent e;;alc-
' La préférence donnée au littoral n'est point particulière â ec.t
mystérieux peuples occidentaux, c'est ce qu'on peur voir dans TKucvdi-
,ï Google
Si nous voulons maintenant déterminer le langage parlé
par ces peuples, nous pouvons affirmer à priori qu'il de-
vait appartenir, nous le répétons, au groupe gréco-italo-cel-
tique de Schleicher', et si l'élément ligurien y prédominait
réellement, ce que plusieurs pensent à l'égard de la langue
des Ligures donne une nouvelle solution à la toponymie cel-
tique de la Lusitanie, solution qui peut mettre en danger
la celticité des langues hlberniennes et britanniques.
Diefenbach admettait déjà que les Ligures étaient l'un
des plus anciens peuples de l'Europe, nommément de l'Es-
pagne, et il croyait même possible qu'ils y eussent précédé
les Ibères, et soupçonnait que leur langue avait des rap-
ports avec celles des Celtes-.
Celesia attaqua résolument la question. Pour lui les
Latins étaient, de langue et d'origine, une branche des Li-
gures^.
M. de Jubainville soutient que les Ligures étaient un
peuple aryen et que leur langue avait des rapports si inti-
mes avec le celtique, qu'il est impossible de distinguer si
les noms des villes, par exemple, appartiennent à l'une ou à
l'autre de ces deux langues*.
Les noms, malheureusement peu nombreux, que nous
a conservé le périple phénicien, lequel, comme nous avons
vu, s'occupe de peuples pré-celtiques, hors de toute influence
des Celtes, méritent une attention spéciale, et c'est à causé
de cela que nous allons les reproduire:
• Compendimn der vergleicfiendea Grammattk, p. 9. M. de Jubain-
ville admet un groupe antérieur thraco-lllyro-ligure. Nous ne sommes
pas complètent s pour traiter ces questions délicates.
* Ceitica, 11, p. 24-41.
" Em. Celesia, Dell 'antichissimo idioma de' Liguri.
DArb. de Jub- ouvr. cit^ p. aaS et suiv. Dans l'opinion de ce sa-
,ï Google
Albions, -
Ocstrymnides,
Hiberniens,
Dranganes,
Cempses,
Cynètes,
Tartessiens,
Ile Pélagienne,
lie Achale,
lie Agonide,
Fleuve Ana'.
Ces noms, dont quelques-uns seraient considérés sans
hésitation comme celtiques par un celtiste*, ne le sont nul-
lement, ce qui prouve que la toponymie d'une région, mal-
gré ses étroites affinités avec te celtique, peut se trouver
absolument en dehors de l'influence des Celtes, et que pour
dissiper le doute il faut aller chercher la lumière dans un
n briga, si commune en Espagne, n'est pas nécessaire-
ment celtique. G. Humboldt étaii déjà de ce sentiment {Recherches sur les
habitants primitifs de l'Espagne, p. i ïfi), quoiqu'il ait voulu par là faire
la distinction entre les populations celtiques et ibériennes de la Pénin-
' Nous nous bornons à citer ces noms, parce qu'ils appartiennent
indubitablement ù l'auteur du périple, ce qui peut ne pas être vrai
pour les noms qui viennent après Ana, dans lesquels il peut déjà se
trouver un mélange de renseignements empruntés à d'autres sources.
< Selon M. MiillenhofT (ouvr. cit. p. 96) le nom d'Albions est celti-
que; mais Albion et Dercynus (Dranganes, Jub. ouv. cit. p. 3o8) sont
déjà les ennemis de Meikart, c'est-à-dire, ils sont déjà mentionnés quel-
ques siècles avant l'arrivée des Celles en Angleterre. Albion peut bien
être ligurique (Jub. ouvr. cit. p. 228). Le nom Hiberni est également
celtique, selon M. Mullenhoff (ibid.) mais il pourrait être aussi précelti-
'fs
4^4
autre ordre de recherches étrangères au domaine de la lin-
guistique.
Maintenant toutes les recherches auxquelles on peut
avoir recours dans ces matières, nous montrent que la Lu-
sitanie demeura étrangère à Tinvasion et à l'occupation cel-
tiques; qu'aucun écrivain ne cite la moindre analo^e entre
les moeurs et les usages de ses habitants et ceux des Celtes,
et qu'une telle analogie se rencontre plutôt entre eux et
d'autres peuples d'un caractère tout-à-fait différent de celui
des Celtes; que dans ce qui nous reste de la civilisation de
ses habitants on découvre le caractère de celle du peuple
des dolmens qui y demtura jusqu'à des époques relative-
ment modernes *: si tout cela est hors de doute, nous ne sa-
vons pas où l'opinion de ceux qui soutiennent ta celticité
des Lusitaniens, pourra trouver une base scientifique.
Encore une fois, pour nous, les Lusitaniens, de mime
que. M. W. Stokes (Revue celtique, ii, p. 357) le dérive du sanskrit
avtira, occidenial. M. Saulcy (Élude topographique sur l'Ora mariti-
ma, p. 8) voit dans le nom Cyneticum {Uitus) un nom grec Par les
mSmes raisons le nom de Çynètes et çyneiicum iupan se trouveraient
dans le même cas; mais ce que l'on est convenu d'appeler néo-celti-
que a atm, qui expliquerait aussi bien le fait. Ana est un nom celtique-
(A. Pictet, Revue celtique, ii, p. 443).
' Les explorations que nous avons faites dans quelques dolmens
de la vallée d'Ancora, où il y a, outre un dolmen parfait, quelques ves-
tiges de quatre autres dolmens, prouvent que ces monuments furent
utilisés même après la conquête romaine. Les lieux entourés de rem-
parts qtii abritaient la population de cette vallée sont toutefois anté-
rieurs aux Romains, ce qui est démontré par leur ressemblance avec
ceux de Sabroso. A Sabroso on trouve les mêmes gravures que nous
rencontrons dans les dolmens du nord de l'Europe, et vu le caractère
des nombreuses ruines que nous avons observées dans le Minho, leur
population a dû avoir sans doute les mêmes usages que celle Je la
vallée de l'Ave et de l'Ancora.
,ï Google
iîi
que les Albions, les Oestrymnides, les Hiberniens, les Cem-
pses, les Cynètes et les Tartessiens ', sont autant de rameaux
de la vieille migration aryenne, dont on ne saurait contes-
ter Taffinité de moeurs et de langage avec les Ligures, les
Selloï, les Graîci, etc., devant les affirmatives des anciens
écrivains et les raisons que d'autres sources nous fournis-
sent; et nous considérons les subsides archéologiques et lit-
téraires que nous venons de parcourir comme autant de
fragments du même livre, qui nous aident, dans les limites
du possible, à étudier cet ancien monde pré-celtique.
Les légendes grecques comparées à celles des Iles Bri-
tanniques nous indiquent la- route qu'ont suivie ces émigrants
dans leur marche du sud-est vers le nord-ouest de l'Europe;
l'archéologie nous démontre qu'ils se sont répandus jusqu'au
sud-ouest de l'Espagne, où l'histoire a recueilli quelques-unes
de leurs curieuses traditions'.
Quant t la manière dont cette diffusion eut lieu, peut-
être l'histoire n'est-elle pas aussi muette qu'on le croit gé-
néralement. Les antiquaires soupçonnaient par leurs recher-
ches que la préférence donnée par le peuple des dolmens au
littoral et l'occupation des terres situées à l'intérieur en re-
montant le cours des fleuves, suppose une connaissance
quelconque de la navigation.
Le périple du vi siècle, que nous avons cité plusieurs
< Comme on Toii, nous ne nous occupons que des peuples de l'ouest
et du sud-ouesi du littoral de l'Espagne; nous n'avons pas la préten-
tion d'affirmer, cependant, que d 'autres tribus «liguriennes» ne se soient
répandues dans l'intérieur de la péninsule, ou que plusieurs d'entre elles
n'aient fraternisé avec les populations préexistantes.
) Les traditions relatives à Habis, etc. Dans un promontoire des Cy-
nètes quelques monuments mégalithiques paraissent avoir existé fStrab.
"i,',4)-
X-'OQ
426
fois, appelle notre attention sur l'audace des insulaires d'Al-
bion, les Oestrymides, qui bravaient la mer dans leur bar-
ques de cuir*, barques également employées par les Lusita
niens dans la navigation de leurs rivières^. Et puisque ces
bateaux sut generis ne devaient rien à l'imitation de ceux
des Phéniciens, toutes les probabilités sont en faveur de la
conjecture, que cette invention est antérieure à l'arrivée de
ces navigateurs célèbres^, et que ce fut par un tel moyen que
ces peuples, dans des navigations peu lointaines, se frayè-
rent la route maritime, qui plus tard devint si célèbre et
si fréquentée grâce aux eiTorts des commerçants phéni-
ciens.
A des époques reculées, avant la rédaction du périple,
quoique déjà comprises dans la période phénicienne, ces
Oestrymnides passent du nord de l'Espagne dans le sud de
l'Angleterre*; et si ce fait^ ne prouve pas que ce vieux peu-
ple s'était familiarisé avec l'Atlantique avant les Tyriens, il
' Aviénus, Ora mar. v. iOï-8,
' Strab. m, m, 7.
' Du temps de César les Vénùtes de l'Armorique avaient une mari-
ne remarquable et également xui^renerù (César, De BW/. Gall. III, i3, 8.)
*Aviénus, Ora mar. v. i55-8.
= Nous ajouterons que si Albion, ennemi de Melkan, représente les
insulaires de l'Angleierre comme il semble f tre certain, ces peuples
t déjà, avant les Tyriens, des transports maritinies, bons
;, puisqu'ils firent la traversée du continent à l'île. Mais il y
a un fait qui mérite d'âtre cité. La légende confuse d'Hercule à l'égard
des Hespéridcs, du pays des Hyperboréens, sans doute les Iles Britanni-
ques, présente un point asse? clair: le dieu à besoin de chercher des
renseignements sur la position des Hespérides, ce qui veut dire que la
connaissance des Cassitérides, et par conséquent de la route maritime
qui devait les y conduire, fut révélée aux Phéniciens par un peuple qui
la connaissait déjà. C'est presque nommer les Tartessicns.
,ï Google
4^7
est du moins un témoignage de ses dispositions remarqua-
bles à la vie maritime.
Il en était de même en ce qui concerne les Tartcssiens
qui luttaient de témérité avec les Phéniciens, faisant comme
eux ta traversée de Tartessus aux Iles Britanniques'.
Il est incontestable, nous ne devons pas Poublier, que
dès un temps immémorial ces rivages, le long desquels s'éta-
blit le peuple des dolmens, eurent leurs entrepôts pour le
commerce, et que ces entrepôts étaient visités par des mar-
chants tartessiens et phéniciens *i, qui s'entrecroisaient dans
cette route maritime des vieilles migrations, et favorisaient
la civilisation en rendant les communications plus faciles',
et en arrachant les populations voisines de la mer à la vie
sauvage où l'isolement pourrait les faire retomber.
Si les considérations qui viennent d'être faites ont quel-
que fondement, les Lusitaniens, au contraire de ce que Ton
croit généralement, ont, grâce k leur position géographique
' Aviénus, Ora mctr. V. 114-115
* Ces stations étaient, comme nous avons chercha à démontrer dans
l'étude sur le poëmed'Aviénus,dontnausavans parlé plus haut: la baie
de Lagos, la baiedu Sado,la bâte du Tage, Aveiro, Lima, la baie d'Arosa
(Padron), la Corogne, d'où la navigation se faisait directement vers le
sud de l'Angleterre.
' Les rapports intimes qu'il y avait, du temps de César entre les
Bretons insulaires et ceux du continent sont bien connus. La fuite des
Ligures de la Baltique et leur débarquement sur les rivages méridionaux
de l'Angleterre, dans le voisinage des Albions, autorise la supposition
de relations identiques. Les communications entre les Iles Britanniques
et la Lusilanie se trouvent confirmée» par l'identité des noms ethniques
et locaux, qu1l serait trop long de comparer ici. Nous dirons, toutefois,
que Pline (/fùf. iV(iMv,34) nous parle de certains Albions dans le nord-
ouest de la Péninsule.
,ï Google
428
un arbre généalogique des plus purs parmi les peuples de
l'antiquité.
Formé par un groupe de tribus, appartenant à la mi-
gration aryenne qui pénétra la première dans l'Europe, com-
plètement libres du contact des Celtes, qui troublèrent si dé-
plorablement l'ethnographie de l'occident, ce peuple sut se
maintenir dans le nord-ouest de l'Espagne avec sa vieille
langue, ses vieilles maurs et sa civilisation antique enfin,
jusqu^à la conquête romaine '.
Les différentes révolutions que subit la Lusitanie m'al-
térèrent point le caractère de ses habitants.
Voici ce que nous pouvons entrevoir à travers ces ré-
volutions.
Au VI siècle les Lusitaniens, qui pour nous sont les Li-
gures du document phénicien, occupaient le nord-ouest de
I Nous dirions presque— même longtemps après la conquête romai-
ne. La comparaison de Citania et de Sabroso nous permet d'espérer
que la vieille civilisation prÉ-romaine pourra être reconstruite un jour
dans de certaines limites, quand les études et les explorations archéo-
logiques s'occuperont sérieusement de ce problème. Tout nous porte
à croire que Sabroso s'éteignit sans que l'influence romaine s'y fit
sentir. Citania subit cette itifluence, du moins jusques sous Constantin,
comme on peut conclure d'une pièce de monnaie qui y a été trouvée
dernièrement. Malgré cela, hormis quelques objets de l'industrie romaine
et quelques inscriptions, on dirait que ces deux stations sont contempo-
raines: la m£me architecture, le même style de décoration, les mêmes
gravures, les mêmes signes symboliques, etc. Il est presque certain que
l'exploration de toutes les autres ruines que nous avons visitées don-
nerait des résultats identiques, d'où l'on peut inférer que la civilisation
romaine n'a pu, ou n'a pas voulu détruire la routine de la civilisation
antérieure, et que si la Lusitanie est ethnologiquemem un sol privilégié,
elle ne l'est pas moins dans le domaine de l'archéolo^e, surtout dans
le nord.
,ï Google
439
TEspagne, limités au sud par les Cempses qui s'étendaient
jusqu'à la baie du Sado'.
Les plus anciens renseignements de Strabon nous les
présentent occupant une surface bien plus étendue. Les li-
mites de l'ancienne Lusitanie, déjà ancienne pour Strabon,
étaient au sud le Tage, à l'ouest et au nord l'Océan, à l'orient
les Girpétains, les Vettons, les Vaccéens, les Galiciens, et
d'autres peuples qu'il ne nomme point*.
Ainsi, à des époques postérieures au vi siècle, les Ligu-
res du nord-ouest se sont emparés du pays des Cempses,
qu'ils ont ou absorbés ou chassés vers l'orient.
Si l'occupation du territoire des Cempses est due à un
accroissement excessif dans la population lusitanienne, ou
bien à l'arrivée de nouvelles tribus liguriennes venues d'un
autre point, c'est là une question qui probablement ne sera
jamais résolue. Il est très vraisemblable, cependant, que ce
fait coïncide avec l'invasion des Iles Britanniques par les Cel-
tes. Ce nom de iBritanniques», inconnu au périple phénicien,
mais que Pythéas n'ignorait pas et qu'il a rendu vulgaire,
passe pour être une innovation de provenance celtique*; et
puisque le périple ignore ce nom, ainsi que l'existence de
tribus celtiques en Angleterre, en Irlande et même dans l'oc-
cident des Gaules, l'arrivée d'un tel peuple dans ce pays
ne saurait être que postérieure, et on doit la placer entre le
voyage du Phénicien et celui du Marseillais.
Il est à croire que l'invasion celtique en Angleterre y
fut annoncée, comme ailleurs, par une suite de guerres et
de dévastations qui eurent pour résultat te déplacement et
' Aviénus, Ora mar. v. aoi-i.
>Strab. uini, 3.
*p'Arb. de Jub. ouvr. cit. pag. 3i,
,ï Google
43o
Immigration de quelques peuples, et Ton peut supposer que
quelques-uns de ces ^migrants cherchèrent un reftige en Es-
pagne en suivant la route maritime, alors si fréquentée. On
ne doit pas s^tonner si un grand nombre parmi les descen-
dants de ces Ligures, chassés de la Baltique par les premiers
Celtes et forcés de chercher un abri dans les Iles Britanni-
ques, et bien informes d'ailleurs par la tradition de la cruauté
des Celtes, furent les premiers k abandonner leur seconde
patrie. Les vieux enfants de Cycnus s'arrêtèrent enfin dans
la Lusitanie, où plus tard les anendait l'asservissement iné-
vitable imposé par les Romains.
Avant la conquête romaine l'ethnographie de la Lusi-
tanie subit une autre modification. Les Callàïciy que plus haut
nous avons \u être les voisins des Lusitaniens du côté du
nord, s'emparent d'une vaste contrée entre le Douro et la
mer Cantabrique '-
Il est difficile de savoir si cette occupation fut paisible
ou violente, et à quelle époque elle eut lieu. On ne saurait
nier, cependant, qu'elle était un fait avant l'incursion de Bru-
tus dans les terres d'Entre- Douro-e-Minho, puisqu'on dit
de ce guerrier qu'il triompha des Lusitaniens et des Galiciens,
et le Douro était déjà à cette époque la limite des deux peu-
ples. Un coup d'oeil sur les événements qui eurent lieu en
Espagne avant ce temps, nous expliquera peut-être ce nou-
veau déplacement ethnographique.
Les Romains, arrivés dans la péninsule comme d'hum-
bles suppliants, aussitôt quHs en eurent chassé les Cartha-
ginois, 8*en déclarent les maîtres, et ils employent tous leurs
efforts à étouffer la résistance que les peuples ibériens op-
posent à leur domination.
' Gomp. Strab. m, ir, 30.
r^^.
jL ,..,cL^j#*
La conquête s^avance lentement dans le sud et Podent,
et, comme à l'époque des Arabes, le nord-ouest de l'Espagne
devient le dernier rempart de ses défenseurs.
X^ mouvement des Galiciens sur les Lusitaniens du
nord-ouest peut avoir pour cause la pression exercée par
les peuples de la zone septentrionale, qui reculaient tou-
jours devant les inexorables conquérants.
Quoiqu'il en soit, cependant, la migration ligurienne ve-
nant des Iles Britanniques et le mélange de Galiciens et de ,
Lusitaniens n'altérèrent point l'ethnologie de la Lusttanie
ancienne, puisque les Lusitaniens, les Galiciens, les Astu-
riens, les Cantabres sont des peuples d'une même race,
ayant les mêmes usages et les mêmes mœurs; Strabon
l'assure positivement'.
■ Strab. 111, III, 6, 7. Nous possédons une des célèbres •staEuescallaï-
ques>, rencontrée près du mont Sanio Ovidio (Fa/e), ou l'on voit encore
les vestiges d'un ancien bourg, entouré de remparts. L'armure de cette
statue est précisémeni celte que Strabon assigne aux Lusitaniens : eapide
utiparva aijus diameler duum pedum, cava/oris... ad haec sica (ibîd.)
Comp. ce que dit M. H. Martin (Revue d'anthropologie, num. déjà cit. p.
198) sur l'armure des Firboigs des [les Britanniques, qu'il suppose être
des Ligures, et sur l'écu allongé et la grande épée des Gaulois.
.,Cm^\
UYTHOLOGIE GAULOISE
SPÉCIALEMENT QUANT AUX REPRÉSENTATIONS D
ne, DIVINE ET QUESTION RELATIVE A LA RECHERCHE DES UIÎUES TYPES
DANS LA PÉNtKSULE IBÉRIQUE
M. Henri Martin
J'ai l'honneur de présenter au Congrès, de la part de
M. Alexandre Bertrand, conservateur du Musée national
de Saint-Germain, dix-sept photographies représentant la
Triade ou Trinité druidique sous les diverses formes re-
trouvées iusou'ici. Je reerette au*une erreur m'ait emnê-
,ï Google
auparavant dans les poëmes sacrés, on ne l'a sculpté que
sotis les Romains. Il n^ a guère d'exception que sur les
médailles où apparaissent Bélénos et Teutatès-Ogmios,
La Triade gauloise se montre sous deux formes prin-
cipales: tantôt trois têtes réunies en une seule; tantôt trois
figures distinctes et associées, auxquelles se joint quelque-
fois une quatrième; les personnages divers paraissent tan-
tôt égaux, tantôt inégaux; ainsi le grand dieu de Reims,
que M, Bertrand et moi-même croyons être Ésus, est assis,"
avec ses attributs celtiques, entre Apollon et Mercure de-
bout, qui semblent ses lieutenants: ailleurs, une grande
déesse, appelée Oerecura, une sorte de Cybèle-Cérès, est
associée au grand dieu, à ce qu'il semble, sur le pied de
l'égalité, et une déesse plus petite semble leur fille et jouer
là le rôle d'Horus dans la Trinité égyptienne. Sur un au-
tre autel, un dieu à trois têtes siège entre deux autres divi-
nités: la Triade est ici, pour ainsi dire, redoublée. Nous
sommes aussi d'accord dans cette opinion: que les trois
principales divinités gauloises signalées par Lucain, Ésus,
Taranis et Teutatès, rentrent l'une dans l'autre par leurs
attributs et se résolvent dans une unité dont Ésus est le
type essentiel : les Romains, frappés de la supériorité d'Ésus,
l'identifiaient à Jupiter, comme l'atteste l'autel de Paris. Sur
l'autel de Paris, Ésus célèbre en personne le grand rite, la
cueillette du gui; sur l'autel de Reims il apparaît comme père'
nourricier des êtres; la déesse Oerecura paraît être son pa-
rèdre féminin, ce qu'est Isis à Osiris.
Ces représentations fournissent un élément important
et nouveau à la mythologie comparée et à l'étude des idées
qu'enveloppaient les mythes; il n'est pas douteux qu'on n'en
retrouve de nouvelles maintenant que tes recherches se di-
rigent de ce côté. J'engage les savants de la Péninsule à
.,Ci
434
s'enquérir s'il se rencontrerait quelque chose d'analogue en
Espagne et en Portugal.
M. Guimet: Dans les photographies de dieux gaulois
présentées par M. Henri Martin, on peut remarquer un dieu
à trois têtes qui figure tantôt seul, tantôt comme faisant
partie d'une triade.
Aux Indes, avant que les prêtres aient essayé de fai-
re l'unité brahmanique sous la formule Brahma, Vishnou,
Siva, ces deux dernières divinités étaient souvent représen-
tées comme formant à elles seules une trinité, il y avait
le triple Vishnou et le triple Siva. On peut citer comme
exemple la superbe triade sivaïque des grottes d'Éléphanta.
Puis ces dieux triples figurèrent comme unités dans une
nouvelle triade.
Il semble que les représentations gauloises, que nous
avons sous les yeux, nous révèlent une évolution religieuse
analogue à celle qui eut lieu aux Indes.
La statue gauloise trouvée à Amiens nous présente un
autre rapport avec l'iconographie indienne. On l'a tout de
suite comparée à un Bouddha, à cause de son attitude. Mais
les croix et les tozanges qui ornent ses vêtements détermi-
neraient de préférence un dieu Jaïna, Ce sont donc plutôt
,ï Google
on TYPE ETHNIQTJE ET ANTHROPOLOGIQUE DES IBËRE8
COHHEKT DISTINGUER LES IBÈRES, DONT LA LANGUE SUBSISTE
CHEZ LES BASQUES, DES AUTRES POPULATIONS ANCIENNES DE L'IBÉRIE,
(berbères, UGURES, celtes) ? QUI EST LE VÉRITABLE IBÈRE >
M. Henri Martin
Chacun sait les difficultés que l'on rencontre lorsqu'on
touche aux questions ethniques, d'autant plus qu'il ne faut
pas les confondre avec les questions linguistiques. Les gens
qui partent la langue ibérique au nord de l'Espagne et au
sud de la France, sont-ils descendants des anciens Ibères?
Ce peuple présente au moins quatre types différents, et
nous ignorons lequel est le type des Ibères.
Quelle est la plus ancienne population de la Péninsule?
Quel nom faut-il donner, en Portugal, à cette race que M. de
Quatrefages y retrouve tout aussi bien qu'ailleurs en Eu-
rope? En tout cas, et quel qu'ait été le type des Ibères, il
ne faut pas les identifier avec les Berbères, car la langue
que parlent ceux-ci et qu'Us paraissent avoir parlé dès les
plus anciens âges n'a point de rapports avec la langue ibé-
rique.
p
?8l'-'
436
Il en est de même des Ligures. Il n'y a aucun indice
qu'ils aient jamais parlé la langue ibérique. Dans les temps
historiques ils parlaient le celtique; on croit qu'ils ont parlé
auparavant un dialecte aryen peu éloigné du celtique. Sur
les Ligures, cependant, il n'y a pas la même difficulté que
sur les Ibères, leur type étant parfaitement cormu.
M. Sarmento a été frappé du contraste entre les asser-
tions d'historiens et de géographes anciens, nous disant que
les Lusitaniens étaient Ibères et qu'ils différaient entièrement
des Celtibères; et d'autre part de ce que les noms ethniques
individuels où collectifs, tout le vocabulaire historique, pour
ainsi dire, soit celtique dans cette région. Il cherche à expli-
quer ce contraste par l'origine aryenne des premières popula-
tions lusitaniennes, qu'il considère comme en affinité avec les
LJgures. Dans ce cas, ces premiers Lusitaniens n'auraient pas
été Ibères. D'autre part il semble impossible de douter qu'il
y ait eu en Portugal un élément berbère considérable. Mais,
en tout cas il n'est pas douteux que les Celtes n'aient do-
miné la Lusitanie, et n'y aient laissé partout des traces pro-
fondes. Les découvertes mêmes de M. Sarmento nous en
donnent les preuves les plus remarquables. Dans les collec-
tions du musée de la Section Géologique on remarque aussi
des plaques en ardoise, ornées de chevrons et de dents de
loup, ainsi que des crosses en ardoise, ornées comme les
plaques. Ces dessins sont tout celtiques, et les crosses sont
'un symbole essentiellement armoricain, qu'on trouve fré-
quemment dans nos dolmens bretons et jusque sur des mo-
naies armoricaines, celles des Namnètes. Même observation
quant aux perles en turquoise et à l'ornementation des va-
M, Adolpko Coelho: En ce qui concerne les Ibères il
|C.OOgle
^tique que des questions,' nous ne pou-
certain. Il y a trop peu de temps que l'on
rtance de la phonétique dans la linguistique
r profit des anciens travaux. II faut encore
que l'on peut affirmer se réduit à ceci : tou-
supposées du basque avec quelque autre
valeur.
,ïGex^j^^
SUR LES CULTES PËNINSintAIRES
ANTÉRIEURS A LA DOMINATION ROMAINE
M. F. Adolpho Coelho
Les docutnents qu^on doit étudier pour connaître les
cultes des habitants de la Péninsule ibérique avant la do-
mination romaine sont de deux espèces: contemporains et
postérieurs.
Les monuments sépulcraux, les statues, les signes gra-
vés sur des roches et encore d'autres produits artistiques ou
industriels sont les témoignages contemporains.
H y a quatre espèces de témoignages postérieurs à Pépo-
que où la domination romaine s'étendit sur notre péninsu-
le; ce sont:
1° Les passages des écrivains grecs et latins se rap-
portant à la religion des peuples ibériens.
2° Les inscriptions latines, surtout celles qui contien-
nent des noms de divinités inconnus à l'Olympe grec ou ro-
main.
3* Les usages et croyances populaires modernes de la
Péninsule qui peuvent être regardés comme implantés ici
avant la domination romaine.
4" Les noms de lieu se rapportant à Pexistence d'un
,ï Google
439
monument religieux ou funéraire, d'un bois, d'une source sa-
crée, etc.
Tout ce que les anciens nous disent des croyances et
des usages religieux des peuples ibériens se réduit malheu-
reusement à fort peu de chose, et est d'ailleurs quelquefois
peu clair et ne peut être employé qu'avec une grande cri-
tique.
Un fait paraît se détacher réellement de ce que nous
dit Sirabon de la religion des peuples ibériens: c'est que
quelques-uns de ces peuples avaient un cuite polythéis tique
et d'autres avaient un culte différent du polythéisme, lequel
les Grecs et les Romains ne comprenaient pas ausssi bien,
supposant en conséquence qu'ils n'avaient pas de dieux ou
que leurs dieux n'avaient pas de nom.
(Les Lusitains, nous dit le grand géographe grec^ font
de fréquents sacrifices aux dieux, et examinent les entrail-
les, sans les arracher du corps de la victime; ils observent
aussi les veines de la poitrine et tirent en outre certaines
indications du simple toucher. Ils consultent même dans cer-
tains cas les entrailles humaines, se servant à cet effet de
leurs prisonniers de guerre, et quand la victime tombe even-
trée de la main de l'haruspice, ils tirent un premier avertis-
sement de la chute même du corps. Souvent aussi ils cou-
pent la main droite à leurs captifs et en font offrande aux
dieux.»
«Suivant quelques auteurs, nous dit encore Strabon,
les Callaïques sont athées; mais les Celtibères et les peu-
ples qui les limitent au nord ont une divinité sans nom, à
laquelle ils rendent hommage en formant tous les mois, à
l'époque de la pleine lune, la nuit, devant la porte de leurs
maisons, et chaque famille bien au complet, des chœurs de
danse qui se prolongent jusqu'au matin. »
^
„Co<i
Ce que Strabon nous dit sur la religion des Lusitaîns
peut être parfaitement vrai; ce peuple, où il faut reconnaî-
tre évidemment beaucoup d'éléments aryens, c'est-à-dire
celtiques, nous ne craignons pas de l'afRriner, avait donc
une religion qui s'accordait dans ses traits généraux avec
celles des anciens peuples aryens, toujours polythéistes et
ayant l'usage de sacrifier des victimes humaines, sunout des
prisonniers, et d'en consulter les entrailles. L'athéisme des
Callaïques a été mis en doute avec raison par plusieurs au-
teurs. Justin nous racconte de ce peuple: «Ils ont une mon-
tagne sacrée qu'il est défendu de violer par le fer, mats si
la foudre y tombe, ce qui arrive souvent, l'or qu'elle met au
jour peut être recueilli comme im présent des dieux.»
Ce que Strabon nous dit, de la religion des Celribères
ne doit pas être accepté comme s'étendant à tout ce peuple
ou mieux au groupe de peuples que comprend ce nom. Au
reste, il faut se garder d'accepter en toute sa généralité ce que
les anciens nous raccontent des moeurs des peuples: on at-
tribuait facilement à un peuple, à une région entière ce qui
n'appartenait qu'à une partie de ce peuple ou de cène région.
On connaît bien le passage où Pline nous dit que les
Celtes de la Bétique étaient venus de la Celtlbérie et de ta
Lusitanie, comme on voit par la religion, la langue et les
noms de villes. Ce qu'il y a de plus important dans le pas-
sage de Strabon est la danse nocturne au clair de lune. Ces
danses, avec une signification cultuelle, sont, je crois, tout-
à-fait étrangères aux peuples aryens. Leur existence chez
un peuple ibcrien (je prends ce nom au sens géographique)
est pour nous une caractéristique ethnique de la plus haute
importance. Bien loin de penser, comme quelques auteurs
l'on fait, que les Celtibères, dont il est parlé dans le passage
de Strabon, avaient un culte spiritualiste, il nous faut ad-
,ï Google
441
menre qu'ils se trouvaient dans la phase rudimentaire de
l'adoration fétichiste des corps célestes, particulièrement de
la lune; ce peuple n'était pas donc aryen.
La religion aryenne se base surtout sur le culte des di-
vinités solaires, de la clarté; les divinités de la nuit, des té-
nèbres y jouent un rôle surtout par leur opposition. Mais
nous voyons un nombre considérable de peuples rendre à
la lune un culte exclusif ou beaucoup plus accentué qu'au
soleil, culte tout fétichiste. C'est en Afrique que ce culte de
la lune a le plus d'importance et d'étendue. C'est là surtout
que nous rencontrons les danses mystiques à la nouvelle
lune et à la pleine lune, dont nous parlent ceux qui ont sé-
journé chez les Cafres et les Hottentots. Nous savons par-
faitement que les Cafres ont marché du nord vers le sud.
Dans leur ancienne demeure, au nord de l'équateur peut-
être se sont-ils trouvés longtemps en contact avec des peu-
ples blancs ayant le même culte fétichiste, qu'ils abandon-
nèrent plus tard pour adopter le musulmanisme. Il est im-
possible de ne pas admettre l'existence d'éléments africains
dans les anciennes populations péninsulaires; mais je me
borne à indiquer le fait sans élever aucune théorie sur une
si frète base. Il faut avoir toujours bien présent à l'esprit
que le basque n'a rien de commun avec les langues africai-
nes. Or un fait curieux a été signalé dans la langue basque,
qui paraît nous permettre de conclure que ceux qui ont lé-
gué aux Basques leur langue, eurent un culte de la lune.
En basque Yaungoikoa signifie sdieui; or d'après ceux
qui connaissent le mieux cette langue, c'est là un mot com-
posé qui signifie ou le. seigneur de la lune ou le seigneur-
lune. La dernière interprétation, celle de M. Vinson, nous
dispense d'admettre que la forme parfaite du mot soit Yaun-
goikokoa, comme le veut le prince Bonaparte, sans avoir
K
,Cj?^e
„Google
44?
un nombre assez considérable de noms de divinités, qui ne
sont ni grecs ni latins. Il n^est pas difficile de démontrer la
celticité de quelques-uns de ces noms; par exemple le dieu
Bormanicus des sources thermales de Galdas de Vizella,
porte un nom celtique; on y reconnaît le thème bormo ou
borvo, bouillant, yb";'e«s, le même qu'on retrouve au fond
du latin /èrfeo, car a un /"latin répond dans certains cas
un b celtique. Ce thème nous apparaît encore dans le nom
de lieu et de divinité de la Gaule Bormo ou Borvo, dans
le nom de divinité du même pays Bormonia. Il y a beau-
coup de dérivés romans du même thème celtique, par exem-
ple, français bourbe, bourbier, portugais borbulha, borbu-
Ihar, borboîar, dialectes de la Suisse allemande barbota.
Tameobrigus est aussi un nom de divinité péninsulaire
dont la celticité me semble aussi évidente, qu'en quelques au-
tres. C'est un mot composé de tameo, tamaïo e brigo. Ce bri-
go n'est pas le même que br'iga, avec un i bref, des noms
de lieu, comme Conembriga, Caitobriga, etc.; il a dû avoir
un ï long, étant le même que l'irlandais brig, qui signifie
fort, vertueux. Le premier élément du composé est dérivé
de tama, qui servait à désigner dans l'onomatologie celti-
que un grand nombre de rivières: en Espagne Tamaca, .
affluent du Douro, notre Tamega, Tamara dans la Tarra-
connaise; dans la Grand-Bretagne Tamaris, en Comouailles,
Tamësis, la Tamise, etc. L'inscription qui nous fournit ce
nom a été trouvée sur le rivage du Douro non loin du 7a-
mega. Tameobrigus était donc bien probablement la divi-
nité du fleuve, c'est-à-dire celui qui est fort, puissant sur
le fleuve, sur le Tamaca. Tamaios se rapporte à Tamaca
à peu près comme Munda à Mundècus, d'où le Mondego
moderne.
Les inscriptions contiennent aussi des noms de dtvini-
'pi
.gle
444
tés que ne paraissent pas être celtiques, ou qui du moins
ne trouvent pas une explication méthodique dans ronoma-
tologie celtique. Il se peut qu'il n'y ait dans ces noms que
d'imparfaites leçons, que nous arrivions encore à expliquer
presque tous assez bien et que l'on prouve à la fin que ce
sont là des mots aryens. Mon opinion se fonde sur des
faits.
Les inscriptions nous fournissent par exempte les noms :
Bartderaeicus.
Bandiae — apoh — segus
Bandiarbariaicus.
Banduaetobricus.
et la forme plus simple
Banduae.
Dans le nom Bandiae-apolo-segus nous séparons le
thème sego celtique, qui est bien connu et qui signifiait
vainqueur; ce thème se rencontre, par exemple en Segove-
. SOS, Segoma, la ville d'Espagne, dont le nom signifie vic-
toire^ etc.; apolo qui forme une ligne de l'inscription, tout
comme Bandiae^ n'est peut-être que le nom classique Apol-
lon, l'inscription étant probablement mal copiée; il faudrait y
lire Apoli c'est-à-dire Apoîlini, les noms du dieu se trou-
vant au datif. Band. bandiae se rencontre comme premier
élément dans les autres noms que je viens de vous citer et
isolé dans Banduae. En Banduaetobricus, bricus est évidem-
ment pour brigus, de même que Ton retrouve aussi plusieurs
fois brica pour briga, etc.; nous connaissons déjà briga
par le nom TamaeobriguSy nous avons donc ici des noms
,ï Google
445
celtiques, quoique nous ne puissions pas expliquer l'élément
band, bandu. M. Fidel Fita à déjà tenté une interprétation
de Bandiatapolosego par le celtique, mais il n'y a pas plus
de méthode, que dans les autres recherches linguistiques de
ce savant. D'après lui bandiae serait le vieux irlandais ban-
dea^ féminin de dia^ dieu; mais nous savons parfaitemeut
qu'il y a en bandeo., deux mots: ban et dia\ ban est le mê-
me que le grec jw>i, femme, l'anglais quean, femme, ou fueen
reine, etc, et signifie aussi «femmet; c'est un mot employé
à exprimer le féminin de certains substantifs irlandais à
peu près dès le septième siècle de notre ère, la chute des
finales ayant obscurci vers cette époque le suffixe caracté-
ristique du féminin.
Nous ne désespérons pas de résoudre d'après la bonne
méthode une partie des difficultés que ces noms nous offrent.
Bientôt nons verrons réunis dans le Corpus inscriptionum
latinarum, de l'Académie des Sciences de Berlin les ins-
criptions de la Gaule transalpine (cisalpine pour nous) et de
la Germanie. M. Ascoli publie les glosses irlandaises de Mi-
lan avec la haute compétence qui le distingue et nous four-
nit un glossaire très riche et bien commenté du vieux irlan-
dais; un index complet de la Grammaire celtique de Zeuss,
ce grand monument de la science allemande va paraître; nos
ressources augmentent, et petit à petit nous arriverons à
faire disparaître bien des obscurités dans l'ethnologie de
l'Espagne ancienne. Il faut aussi pour cela que le côté ar-
chéologique de notre question s'éclaircisse. Il y a beaucoup
à faire dans ce domaine. Quand on aura recueilli et repro-
duit par la photographie, ou quelque autre moyen, le plus
grand nombre possible des produits anistiques et indus-
triels qui nous restent des anciens habitants de la Péninsule,
l'ethnologie y trouvera des ressources de première impor-
,ï Google
446
tance. Je ne vais que confirmer par un exemple ce que vous
savez là-dessus.
M. Martins Sarmento a trouvé dans ses fouilles à Sa-
broso les restes de deux statues de porcs. Des découvertes
semblables ont été faites sur différents endroits de la Pé-
ninsule, par exemple à Ségovie; on a découvert aussi des
statues de sangliers et de truies. L'importance de ces ani-
maux dans les cultes aryens nous fait admettre, ou du moins
fortement soupçonner, partout où on les trouve, la présence
d'un peuple aryen au temps dont elles datent. En Portugal,
outre la statue du pilori de Bragança, dont a parlé M. Sar-
mento, il y a encore une grande statue à Murça, dans la
même province, Trâs-os-Montes, laquelle est connue popu-
lairement sous le nom de porca de Murça. J'appelle l'atten-
tion des archéologues sur ce monument où Ton a vu un
produit du moyen âge, mais que je crois bien plus ancien.
Le porc était pour les aryens un symbole de la fécon-
dité. On sacrifiait des porcs; des statues de porcs étaient
consacrées au divinités et surtout au divinités protectrices
de la maternité, des animaux et de leur fécondité. Le culte
du Mars latin, qui, vous le savez, fut le dieu des laboureurs
avant d'être le dieu de la guerre, nous présente le sacrifice
du porc, de la brebis et du taureau, connu sous le nom de
sttovetaurilia. En Espagne le sacrifice d'une vache, d'une
brebis, et d'une iruie était fait en honneur de Diane, la
déesse protectrice de la grossesse et de l'enfantement, d'après
une inscription :
DIANAE MAXIMAE
VACCAM OVEM, ALBAM PORCAM
Hubner. a. 38io
Une autre inscription d'Espagne nous fait connaître le
,ï Google
447
:r et trente porcs au génie du Munici-
; nom moderne de Porcuna paraît se
où le porc avait beaucoup d'importan-
industrie locale, si l'on ne préfère pas
de Obolcona, Bolcona, due à une fausse
nportance cultuelle du porc que l'usage
i de tuer des porcs à l'occasion de cer-
ée. Il y a dans cet usage, comme en
e telle concordance entre quelques peu-
1 est impossible de ne pas admettre une
. Le proverbe français «A chaque porc
:in» et le proverbe portugais «Cada
[artinhoï, combinés avec les données
[uer, paraissent démontrer l'existence
;s celtiques à l'époque de la Saint-Mar-
que Yepuliim Topis se célébrait à la
deux jours seulement de différence;
onfirmalion de mon hypothèse dans le
ais d'O'Davoien, publié par M. Stokes.
est le nom du cochon qu'on tue à la
et je crois que c'est au Seigneur qu'il
s porcs à la Saint-Thomas, à Not
jgal un proverbe assez singulier
jsage. «A la Saint-Thomas qui n
Ti nao lem porco
i a mulher.
,ï Google
448
Les personnes qui ont une imagination fertile peuvent
y voir une allusion à des sacrifices humains Je n'y vois
qu\in avis à l'adresse des mauvaises ménagères, qui lais-
sent venir la fête sans avoir élevé un porc.
L'importance de l'étude des fêtes, des usages et des
croj'ances populaires modernes est aujourd'hui reconnue par
tous les savants; mais il n'est pas facile de distinguer les
diverses couches ethniques superposées les unes aux autres
dans ces traditions. La difficulté principale pour la Pénin-
sule consiste en ce que divers peuples aryens sont venus
se mêler ici à différentes périodes, et quelques-uns de ces
usages, de ces fêtes et de ces croyances peuvent avoir émi-
gré vers nous indépendamment de toute invasion étrangère;
mais quand on trouve un point d'appui dans Pantiquité,
comme dans te cas du sacrifice du porc, nous pouvons ar-
river à de solides conclusions.
Les pierres branlantes, les pierres du Promontoire Sa-
cré, dont nous parle Strabon d'après Artémidore, nous rap-
pellent un usage qu'on a constaté il y a quelques années à
Villa Nova de Foscoa. En temps de sécheresse, neuf jeu-
nes filles, qui doivent toutes avoir le nom de Marie, vont
avec quelques jeunes gens à un endroit où l'on trouve une
grande auge de pierre et la font tourner de bas en haut.
Cette opération, ils le croient, fait venir la pluie.
Les noms de lieu d'origine romaine ou romane, que
nous ne connaissons que sous une forme moderne, nous
fournissent de précieuses données pour compléter la carte
de la distribution des monuments mégalithiques dans la Pé-
ninsule, des anciens sanctuaires, des sources et des bois sa-
crés. Le nom de A}ita ou Antas nous indique l'ancienne pré-
sence de dolmens, le nom de Perajita, Pcrajisa, Pa-ahnga
ly Google
449
l'existence de menhirs; Falperra, c'est-à-dire fausse pierre,
PeroJ'ana^ etc., l'existence d'une pierre branlante; Aguas-
sanlas (eaux-saintes), Monsanto, Monsao, Monchique, Fon-
te-santa nous rappellent le culte des eaux, des monts ou des
bois sacrés. Mais il faut remarquer que ces dénominations
sont quelquefois arbitraires.
Vous voyez, Messieurs, ma note n'est qu'un program-
me, n'est qu'un échantillon. Je crois qu'il est temps de com-
mencer à étudier sérieusement, méthodiquement, de la ma-
nière la plus complète possible ces questions si intéressantes
avant de faire des théories, si flatteuses qu'elles soient
pour notre amour propre.
Dlaousslon
M. Henri Martin: On sait que lés Celtes comptaient
par lunes, ce qui prouve un cuite nocturne. A propos de la
découverte faite par M. Martins Sarmento de deux statues
de porcs à Sabroso, je rappellerai les fameux toros de Gui-
sando qui sont presque tous des sangliers et non pas des
taureaux. J'en ait vu trois à Avila et autant au musée ar-
chéologique à Madrid. Je les considère comme celtiques.
M. Vasconcellos Abreu: M. Chabas dans ses Études
sur Pantiquité historique, nous dit que l'art égyptien s'est
implanté en Sardaigne, et qiie là il s'est modifié par son
contact avec un art tout différent. D'après cet écrivain la
preuve est l'abondance des scarabées portant des figures
de truies ou de porcs, de telle façon qu'on trouve même
des amulettes de ce genre où le porc remplace le scarabée.
Et ce qu'il y a encore de bien important c'est que ce porc
,ï Google
45o
ou sanglier a des rapports fort curieux avec le sanglier de
l'enseigne gauloise.
En Thessalie et ailleurs on offrait des porcs à Aphro-
dite, à Athènes on lui sacrlUait des truies.
M, Adolpho Coelho: M. Henri Martin vient de faire
tion de cultes nocturnes chez les Celtes. Je sais très bien
le culte de la lune, ainsi que celui du soleil se trouvent
ni les cultes fétichistes, ce qui n'empêche pas de les dis-
iier du culte anthropomorphique de ces astres.
Ce que j'ai dit par rapport au culte fétichiste ibérique
Dnde sur l'existence de danses à l'occasion de la pleine
;, dont parle Strabon. Or je ne crois pas que Ton trouve
ige de ces danses chez les Indo-Européens,
M. Henri Martin: U se peut que ces danses aient existé
ni les Gaulois; cependant je ne saurais me rappeler les
i qui viennent à l'appui de cette supposition.
M. Vasconcellos Abreo: Les Indo-Européens comp-
rit par lunes, mais rien ne prouve qu'ils eussent eu le
e de la lune, La lune aussi bien que les étoiles ne joue
in rôle très restreint dans le système général de la my-
ogie védique. Les richis ne s'en préoccupent pas assez
r que nous puissions tirer des textes quelque conclusion
Je crois avec mon maître M. A. Bergaigne que l'iden-
ation particulière et définitive du Soma à la lune appar-"
t à une formation mythologique secondaire. Néanmoins
a quelque chose de remarquable: c'est que le Soma vé-
ae est le rot des herbes, et Variemist'a ou armoise est
si la reine des herbes.
,ï Google
45i_
Messieurs, vous savez quels rapports
e Artémis, Diane et Lucina. Vous n'ignt
ue les prêtres égyptiens rendaient hon:
■is en portant en procession une branch
s est la déesse de la fertilité comme Li,
V les accouchements; Isis était ie synr
é. En outre la tête d'/iw qu'Horos, die
:st la lune reparaissant en croissant aprè
, le deus luiius {et remarquez que lune e
lu genre masculin) des Égyptiens, donn
été de vache avec ses deux cornes quan
:nne.
Messieurs, de vous entretenir d'iconc
et du Jils de la vierge qui grâce à Indr
jin dieu après avoir été dévoré par le
nsectes, c'est-à-dire par des voleurs d
je ne peux rien vous dire du culte d
mciens Aryas, je peux, du moins, vou
tance pour l'histoire des croyances de
,ï Google
L'AOE DES STËOBOPOLES PRÉHISTORIQUES DU OAUOASE
RENFERMANT DES CRANES MACROCÉPKAl.ES
M. Ernest Chantre
Les découvertes opérées dans les nécropoles des envi-
rons de Tiflis et surtout dans celle de Samthavro près de
Mtskheth, avaient depuis 1872 attiré l'attention des archéc-
Ic^es et des anthropologistes, mais on ne possédait l'an-
née dernière encore aucun renseignement sur l'époque de
:onstruction et par conséquent sur l'ancienneté des crâ-
nacrocéphales que l'on y avait recueillis.
Les uns les attribuent aux Grecs, les autres aux Ro-
s, d'autres enfin aux populations de l'âge du bronze.
Ayant eu l'occasion de signaler plusieurs crânes ma-
Sphales découverts dans un tumulus du Jura français,
î caractères des objets qui les accompagnaient m'ayant
lis de rapporter ces crânes au premier âge du fer, il
paru intéressant de rechercher à quelle époque pou-
il remonter ceux du Caucase et quels rapports il pou-
exister entre les découvertes de ces deux régions.
A l'exposition de Moscou se trouvaient plusieurs spé-
ns des tombeaux de la Géorgie ainsi que les résultats
.1 L-fc.
453
lorations faites en Ossétie dans des né-
;s à celles de !a Géorgie.
s ce moment comparer sommairement ces
rtes, il ne me restait plus qu'à tenter des
régions et à étudier les collections réunies
NÉCROPOLE DE SAMTHAVRO
en 1871, par l'ouverture d'une tranchée
ruction d'une grande route, la nécropole
es de Mtskheth, ancienne capitale de la
Fouillée par M. Bayem de 1872 à 1S76.
aux de terrassement aient détruit près de
aux environ, ce savant géologue a pu en
i de six cents à peu près intacts. Le champ
; établie cette nécropole est situé sur ht
'Aragua et les tombeaux s'y rencontrent
iDoo sur 5oo mètres environ.
les de 1872 ont été réunies au Musée de
; 1873 ont été expédiées à l'Ermitage de
époque, la Société des amateurs d'archéo-
lyern est le secrétaire, ayant été fondée,
é et c'est dans ce musée que sont mainte-
les produits des fouilles archéologiques
)ays.
blicalîons ont été faites au sujet des dé-
iihavro soit par M. Bayem, soit par M
e comité dj la Société Archéologique
,ï Google
454
Tiflis'. C'est surtout M. Smimow qui a fait connaître cette
station. En 1873 ce savant naturaliste envoyait à Broca trois
crânes déformés de Samthavro accompagnés d'un album de
photographies et de dessins représentant d'autres crânes et
divers objets archéologiques*,
A la suite d'une communication que fit Broca à la So-
ciété d'Anthropologie sur cet envoi à l'époque, on déclara
que cette nécropole datait de l'âge du bronze. Plus tard,
en 1877, M. Smimow, dont les recherches avaient été en-
couragées par Broca, faisait à la Société un' nouvel envoi :
c'était im excellent travail sur Samthavro. Dans ce mémoi-
re, M, Smimow résume les explorations de M. Bayem et
donne les résultats des mensurations qu'il a pu opérer sur
les crânes de cène nécropole. Quant à son ancienneté tl croit
pouvoir la faire remonter jusqu'à l'âge du bronze*.
Les fouilles n'ayant pas été opérées et réunies dans le
principe avec tous les soins désirables, on n'a que très peu
de renseignements sur l'association des objets recueillis dans
ces tombeaux.
M. Bayem a reconnu dans cette nécropole, dont il n'a
encore étudié qu'une partie, quatre types de constructions.
La plupart de ces tombeaux sont faits de dalles brutes, un
grand nombre affectent une forme presque cubique et ont
été pris dans le principe pour des dolmens.
' Zeitschri/tjîir Ethnologie (Bastian et Artmann, Berlin, 1872). Afi(-
teiluiigen der Ânthropologischen Gesellschaft, in Wien 1874. — Dr. Sce-
pura: Essai sur ies macrocéphales du cimetière de Samthavro, Tîflis,
1875. — Annales de la commission archéologique de Saint-Pétersbourg,
i875. — Mémoire de la société des amateurs d'archéologie du Caucase,
Tîflis, 1877.
* Bull. Soc. Autkrop. t. vin, a" série, p. 572, séance du 19 juin i873.
* Bull. Soc. Anthrop. t. ui, a,™ série, p. S41, séance du 18 octobre
1877.
,ï Google
455
Vus surtout en coupe dans la tranchée de la route de
Géorgie, l'erreur était possible.
A côté de ces tombeaux s'en trouvent quelques-uns
du même genre, mais de dimensions moindres et plus sim-
ples; d'autres, enfin, sont faits en- briques on en grandes
tmles, ces derniers sont incontestablement bien postérieurs
à ceux qui sont faits en dalles; les mobiliers funéraires que
l'on y trouve le démontrent au reste.
Dans la série la plus ancienne, celle qui doit fixer ici
l'anention, l'inhumation paraît avoir été exclusivement usi-
tée.
La plupart des tombeaux de Mtskheth ont donné des
poteries variées, plats et vases divers, puis de très nombreux
ornements, spirales, pendeloques, bracelets, colliers, perles,
fibules en fer et en bronze, enfin de loin en loin, quelques
flèches et poignards en bronze. Quelques-uns de ces objets,
principalement les pendeloques à spirales, à représentations
animales et certames fibules sont identiques à celles de Kaz-
bek et de Koban.
Le nombre des individus inhumés dans le même tom-
beau est de deux ou trois, dans ceux qui n'ont pas été re-
maniés.
Peu de squelettes ont pu être retirés complets et les
crânes sont généralement en très mauvais état, ceux qui pa-
raissent les plus anciens sont généralement dolichocéphales;
quant aux macrocéphales ils ont été trouvés au milieu des
autres dans la proportion de 2070, de même que cela a eu
lieu dans le tumulus de Corveissiat (Jura).
Les fouilles méthodiques de M. Bayern et celles que
j'ai pu opérer pendant quelques jours, grâce aux renseigne-
ments obligeants de M. Smirnow, montrent que la plupart
de ces tombeaux ont été violés anciennement. On remarque
f^
456
. de plus que des mobiliers funéraires présentant des carac-
tères divers ont été déposés dans le nitême tombeau et à
plusieurs époques, et que ces différents mobiliers funéraires
se trouvent actuellement mélangés. Le plus grand désordre
règne partout, et il est fort difficile de tirer des conclusions
certaines relativement à Porigine de cette nécropole et aux
populations qui Pont construite.
De l'étude cependant de quelques rares sépultures ob-
servées en place, il paraît résulter ce fait capital, à savoir,
que c'est dans les couches inférieures que se trouvent les
crânes macrocéphales et que les mobiliers funéraires qui les
accompagnent présentent les plus grands rapports avec ceux
des nécropoles de l'Ossétie, lesquels ne renferment aucuns
de ces objets d'une époque relativement bien plus mo-
derne, comme cela a eu lieu dans plusieurs tombeaux de
Mtskheth.
Les sépultures renfermant ces objets et offrant des ca-
ractères artistiques greco-phéniciens ou même romains, doi-
vent être écartées de l'ensemble de la nécropole, dans l'étu-
de que nous poursuivons. J'ai rapporté de nombreuses pho-
thographies montrant des spécimens des mobiliers funérai-
res et des crânes humains que j'ai pu recueillir ou que j'ai
étudié dans le musée de Tiflis.
En étudiant tes divers objets composant les mobiliers
funéraires de ces nécropoles (il n'est question bien entendu
que des plus anciennes) il paraît ressortir qu'elles appartien-
nent dans leur ensemble au premier âge du fer et non à
l'âge du bronze comme on l'a dit autrefois.
Les tombeaux de Samthavro ne sont pas les seuls qui
ont attiré l'attention de M. Bayem.
On connaît d'autres nécropoles à Dilijane, à Marienfeld
et à Sartatchalo; elles ont eu pour explorateur comme celle
,ï Google
iiz.
de Mtskheth, M. Bayern. Elles ont été à peine fouillées jus-:
qu'à ce jour; on sait cependant que les tombeaux que l'on
y a découverts sont du même genre que ceux de Mtskheth.
Les mobiliers funéraires que l'on en a retirés présentent les
plus grandes analogies avec ceux des autres groupes; on y
trouve également des crânes macrocéphales.
Ces nécropoles méritent d'autant plus d'attirer l'atten-
tion que les cas de remaniements et de mélanges n'y sont
rencontrés qu'exceptionnellement.
Il ne m'a pas été possible dans ce premier voyage
d'étudier ces dernières localités, mais je suis fort disposé à
repartir dans le Caucase et j'espère pouvoir y entreprendre
de nouvelles fouilles, dont les résultats viendront sans doute
confirmer ces premières observations ou devront du moins
jeter un jour nouveau sur cette question si pleine d'intérêt.
NÉCROPOLES DE l'oSSÉTIE. — KOBAN ET KAZBEC
La connaissance de ces deux nécropoles est due à M.
Felimonow, conservateur du Musée archéologique de Mos-
cou, qui en a donné une description en 1878 dans les an-
nales de la Société des amis des sciences nanirelles et d'an-
thropologie de Moscou.
En 1874, deux fibules, trouvées près de la station de
Kazbek par un ouvrier de la route de Géorgie, ayant été
apportées au musée, l'attention de M. Felimonow fut éveil-
lée et il conçut bientôt le projet d'aller visiter les localités
où avait été faite cette découverte.
Dans le premier voyage qu'il fit au Caucase, M. Feli-
monow vit à Tiflis, dans le musée archéologique, plusieurs
objets analogues venant de Koban dans les monts Tagaour.
In
458
De retour dans l'intérieur du Caucase cet archéologue se
mit en devoir de fouiller les tombeaux de Kazbek et de
Koban.
NÉCROPOLE DE KOBAN. — Lcs sépulturcs dccouvcrtes dans
cette nécropole se trouvent sur la berge de la rivière Ko-
banka, non loin du village de Haut-Koban et prés de la
route de Vladikavkaz, A peine indiqués par quelques amas
de pierres, la plupart des tombeaux étaient faits de dalles
brutes et avaient i mètre environ sur 0,60 de largeur et 0,70
de profondeur.
Dans chaque tombe il ne se trouvait qu'un seul indivi-
du, accompagné souvent de poteries du genre de celles de
Mtskheth et de nombreux objets en bronze, des fibules à
arc simple plus ou moins ornées; des perles de verre, de
cornaline et de bronze; des chaînettes; des bracelets et des
bagues à tiges plates et à tîges rondes avec des spirales; des
appliques de divers types; des pendeloques en spirale; puis
quelques rares armes en bronze; épées et poignards à soie,
quelquefois avec lame de fer; les rares haches trouvées dans
ces tombeaux sont courbes et sont à douille ; elles sont or-
nées de gravures représentant des zig-zag, des cercles con-
centriques, des quadrupèdes et des poissons.
Le plus grand désordre régnait dans les tombeaux et
il a été fort difficile de se rendre compte de la position de'
chacun des objets auprès des cadavres; les ossements hu-
mains étaient en si mauvais état qu'il n'a été possible d'en
rapporter qu'une très petite quantité.
M. Felimonow n'a donc pas pu donner des détails sur
les caractères anatomiques de la population inhumée à Ko-
ban. J'ai appris cependant de M. Antonovitch qui a fait de
nouvelles fouilles dans ce pays, que parmi les crânes décou-
,ï Google
4^9
cropole, plusieurs présentaient la défer-
le signalés de l'autre côté du Caucase *.
[AZBEK. — Les tombeaux découverts dans
ient un assez grand espace près de l'égii-
Les fouilles furent entreprises dans la
des Kazbek et au milieu de cette popu-
xessante du reste, mais que M. Felimo-
de qualifier, avec quelque raison, de de-
:herches furent quelque peu accidentées,
ouverts et non complètement explorés
pendant la nuit, il fut très difficile à M.
endre compte de la position en place de
s contenus dans chaque sépulture.
!ts recueillis par le savant conservateur
ique de Moscou, on doit citer tout d'abord
jles a arc simple généralement à côtes,
sont fort grandes et atteignent jusqu'à
ur deux des fibules se trouvent représen-
"eau et un svastika ou croix gammée.
; ceintures, des bracelets ou ornements
inces de bronze, ornées sur les bords de
i garnies de points; leurs extrémités sont
;t de svastika.
de bracelets en fils de bronze, des pen-
pendeloques en of garnies de perles de
ibstances.
, plus ou moins massives, en forme de
note a été rédigée j'ai fait un nouveau i
^ des fouilles considérables dans la Née
raphie des nécropoles préhistoriques du C
,ï Google
460
cheval ou bien de tête de cet animal et des boutons omés
de tête de cheval, puis d'autres avec le cavalier.
Une série de pendeloques avec chaînes, représentant
grossièrement des hommes et des femmes, rappelant les
baba en pierre de la Russie méridionale; puis des têtes de
cerfs et de bœufs et des clochettes ou crotales. Enfin des
poignées et bouieroUes d'épées et quelques lames de ces mê-
mes armes en fer.
De l'ensemble des observations que M, Felimonow a
pu faire dans les deux nécropoles qu'il a fouillées, il conclut
que ces sépultures appartiennent à des populations certai-
nement préhistoriques et que l'on peut les faire remonter au
commencement de l'âge du fer, conclusions auxquelles j'adhè-
re pleinement.
Il pense également que la fabrication des objets qu'il a
découverts, est toute locale et qu'elle appartient en propre
à l'Ossétie ou du moins au bassin du Térek, car on a trouvé
des objets semblables en Kabarda et en Tchetchéna, mais
on n'en a jamais rencontré plus au sud, suivant lui.
D'après les renseignements qui viennent d'être donnés
sur les nécropoles de l'Ossétie et sur celles de Géorgie, il
ressort quelques faits intéressants que je résumerai dans les
propositions suivantes:
i" Les tombeaux de Koban et de Kazbek, de Samtha-
vro et probablement ceux des autres nécropoles analogues
découvertes dans les mêmes pays, paraissent appartenir à
une même population ou du moins à des populations d'ori-
gine commune et ayant atteint le même degré de civilisation,
c'est-ù-dirc celle qui a reçu le nom de premier âge du fer.
2" La civilisation à laquelle semblent appartenir ces né-
cropoles, paraît pouvoir être assimilée à celle dont on a trou-
ve des vestiges si remarquables à Bologne, à Este, à Cor-
,ï Google
neto, à Bismentova, à Halstatt, Watch, etc., puis en Suisse
et dans le Jura. Bien que le développement de ces diverses
nécropoles ne soit pas synchronique, suivant toute probabi-
lité, la coexistence dans ces diverses localités, de plusieurs
types d'objets et d'ornementations, tels que les fibules à arc
simple et à côtes, ainsi que les représentations animales, la
spirale et le svastika, paraît affirmer entre elle une parenté
incontestable.
3" Ce fait démontré d'après les caractères archéologi-
ques est confirmé encore par les caractères anthropologiques,
car à Samthavro les macrocéphales se retrouvent comme
dans le Jura dans les proportions de 20 "/o au milieu d'une
population dolichocéphale.
En résumé, s'il n'est pas possible de prouver que les
populations qui ont laissé des macrocéphales dans le Jura
sont originaires du Caucase aussi bien que celles qui ont
déposé des fibules à arc et à côtes dans les nécropoles de
l'Étrurie, de la Lombardie et des Alpes autrichiens, il est
indiscutable tout au moins qu'elles ont eu entre elles des
relations commerciales ou autres de plus ou moins lo
durée.
Étant prouvé que les crânes macrocéphales ont et
cueillis à Samthavro associés à des mobiliers funéraire;
tant de l'époque du fer, il n'est plus possible de les
buer aux temps historiques.
DisousBlon
M. ViRCHOw: Les divers faits exposés par M, Chi
sont de la plus grande importance quant à la démonstr
des relations entre l'Asie et l'Europe. Mais il me paraî
lyGoogle
462
la formule qu'il propose pour la détermination chronologi-
que de la macrocéphalie est trop exclusive. En Europe, on
connaît des crânes vraiment macrocéphales des temps his-
toriques ; je citerai particulièrement le cas décrit n^r M. Thur-
nam {crâne d'un tombeau anglo-saxon en Angleterre), et
l'autre dessiné et décrit par M. Ecker (crâne d'un tombeau
mérovingien de Niederolm, Hesse). En Asie,' nous avons
les macrocéphales de la Colchide, décrits si bien par Hippo-
crate, un écrivain qu'on ne placera pas dans la période du
premier âge de fer. On trouve aussi fréquemment, sur le
littoral de l'Asie Mineure, des petites figures en terre culte
qui imitent très fidèlement les têtes macrocéphaliques et qui
doivent être assimilées aux temps helléniques. On devra
donc avouer que la mode de déformer les têtes dans le sens
dit macrocéphalique était très répandue dans le monde an-
tique.
M. Chantre: Je n'ai pas prétendu démontrer que tous
les crânes macrocéphales appartiennent au premier âge du
fer, comme paraît le croire M. Virchow. J'ai insisté seule-
ment sur ce fait important à noter, c'est que les macrocé-
phales du Jura ont été recueillis, ainsi que ceux de Géoi^ie,
associés à des objets archéologiques reconnus comme ca-
ractéristiques du premier âge du fer. Je ne crois pas que l'on
puisse se prononcer sur l'ancienneté des autres crânes macro-
céphales qui ont été signalés dans les autres pays, car on
ignore généralement dans quelles conditions ils ont été trou-
vés.
Je ne pense donc pas, par conséquent, que cette cou-
tume de déformer les crânes n'appartient qu'à cette période
qui a suivi l'âge du bronze; je suis porté, au contraire, à
considérer que cet usage a pu exister à plusieiu-s époques;
ly Google
463
il existe même actueLement encore dans certains pays, chez
les Arméniens, par exemple. Je connais même plusieurs ha-
bitants de Tiflis dont les crânes présentent la déformation
macrocéphale d'une façon très remarquable'.
M. Antonovitch: J'ai trouvé des crânes macrocépha-
les dans les défilés du haut Caucase avec des monnaies by-
zantines de l'empereur Anastase. Également au pied du
Caucase j'ai rencontré six crânes macrocéphales dans des
tumulus du 14*"" siècle. D'un autre côté, je ferai observer
que l'âge du fer préhistorique dans le Caucase arrive peut-
être jusqu'au moyen-âge de l'Europe.
M. Chantre: Ces gisements dont ont vient de parier
ne peuvent être confondus avec celui de Samthavro. En ou-
tre, les macrocéphales dont parle aussi M. Antonovitch n'ont
pas du tout le type de ceux que j'ai signalés.
M. HiLDEBRAND après avoir relevé l'importance exces-
sive de la communication de M. Chantre dit:
Il y a sunout un fait à noter: si M. Chantre avait pu
nous montrer des objets provenant des cimetières caucasiens
analogues à ceux de l'Europe méridionale, c'eut été fort im-
ponant; or il a fait mieux: il présente des types identiques.
Et cependant quelle grande distance entre le Caucase et
l'Italie! Le fait est inexplicable dans l'état actuel de la scïen-
' J'ai constaté depuis le Congrès l'existence de crânes macrocé-
phales dans des tombeaux Grecs soit à Kertch, soit à Marseille, puis
dans des sépultures romaines en Alsace et dans de nouvelles nécropo-
les caucasiennes probablement du vi*"* siècle. J'ai également retrouvé
l'usage de déformer le crâne chez les Anshariés et les Kurdes actuels.
c. K. 33
ce. II est nécessaire d'opérer de nouvelles recherches, des
fouilles systhématiques. Tous ceux qui s'intéressent au dé-
veloppement de nos études ne peuvent que désirer que
M. Chantre soit mis en état de continuer ces investigations
qui, dés leur début, ont donné de tels résultats.
EXPLICATION DE LA PLANCHE
CHÀNES DéFORMÉS ARTIFiaELLEUENT
Fig. I et 2. Si-pukures Grecques de Marseille.
3. Nécropole de Samihavro (Caucase).
4 et 5. Tumulus de Corveissiat (Jura).
6. Nécropoles de Samihavro (Caucase).
7 et 8. Tumulus de Voïteur (Jura).
r„i,..#fli^^.oogle
E. Ohantke
Pholog. et Photcl. k H. D Sanlos.
er de la Secucn Géologique.
DigitizsdbyGOOgle
„Google
sus QUELQUES JNSCHIFTIOHS EN ËCRirURE OOHAM:
M. George M. Atkjnson*
A la troisième session du Congrès Préhistorique, tenue
k Norwich, un mémoire sur une sorte d^écriture ancienne
appelée Ogham fut présenté, et cette écriture fut décrite par
M. Richard Rolt Brash, mort depuis.
Dans Pceuvre posthume «'Die Ogham Inscribed Monu-
ments of the Gaedhil in the British Islands etc.,» éditée par
votre humble correspondant, il prétend que ces caractères
furent apportés dans les lies Britanniques par une colonie de
marins dans les temps préhistoriques. Il soutient ses argu-
ments par un plus grand nombre de monuments trouvés au
bord de la mer, et il cite les traditions de peuples qui avaient
des relations avec un établissement espagnol.
Il y a une ressemblance frappante entre plusieurs des
noms propres en Espagne, en Portugal, dans le pays des
Gaëls, et il cite Strabon pour confirmer les traditions ibé-
■ Lettre adressée au Secrétaire général du Congrès, le i5 scptem-
bre iS8o.
,ï Google
466
Tiennes dans sa description du plan de l'Andalousie (Baetica)
et des pays voisins, Turdetania, et TurduH.
Je prie les savants d'étudier cette question, et je désire
savoir si nuls monuments écrits en de tels caractères n'ont
été remarqués dans Tlbérie.
On constate qu'il y a à peu près deux cents de ces
monuments mégalithiques. Ils varient en hauteur d'un à
cinq mètres, et font seulement mention du nom, et du
nom patronymique du défunt, au génitif. On les trouve sur
des tumulus et dans des souterrains (rath, lios),, dans des
cimetières chrétiens où l'on n'enterre plus. On les retrouve
encore dans les églises primitives et dans des endroits où ils
sont souvent consacrés et portent la marque d'une croix*.
Agllsh comté de Kerry, Irlande. Ce monument est
imparfait. L'inscription est:
AEA I L O G DO
La croix a été ajoutée sur la base de la pierre. II y a
aussi des svastikas. Il se trouve dans le Musée de l'Aca-
démie Royale d'Irlande, Dublin.
Saint Olan's Well.
mn'>/t'"">iin'im/n
N OMAQ IDEGO {tAA(il=^lius).
' Voir la planche ci-jointe.
,ï Google
467
llyorovane. Ce grand monolithe est élevé sur un tu-
ans un lieu désert, auprès de Kenmare dans le sud-
: l'Irlande. On doit lire l'inscription ^e bas en haut:
»<"m"i'»""""'-»""'mj'm::.n
Q I D E C C
DE C C EDDASAF
Datoggart. On l'a trouvée couvrant un kistpaen, ou
in. L'inscription est:
^^Umljltmjum'"ul
TEGG ELN ULG
'rrrf-ff'"" ff/ '"nif^// "•••rmjfi
lOQOMQER QEF q. e.
lEQ MOQOl GLUNLEGCET.
lynesteening. Colonne cylindrique élevée autre-
nilieu du village. Voici l'inscription:
1 N (e)n AMAQ I OLACON
f i
Ballyn Tagart. N.° î. Une belle pierre à secrion ova-
le, avec une très longue légende:
MAQ Q I lAR lEAIHAQ
"'^m/H '*""'/ W/ %//iii "ll'iiw """tui
Q I M O C C O E DOF F IN I A S
Ballyn Tagart. N." 6.
T R I AMA QAM E OLAG N I
Cette pierre-ci, ainsi que le N,' 2 et sept autres pierres
furent trouvées dans un cileen, cimetière où l'on n'enterre
plus, près de Dingle, comté de Kerry, Irlande.
Trallong. On la trouve dans un endroit d'une église an-
cienne à Trallong, Brecknockshire, dans le pays de Galles.
Inscription bilingue, écriture latine et Ogham : plusieurs des
monuments dans le pays de Galles ont de ces inscriptions
bilingues.
Logie. Cette pierre faisait partie d'un cercle de pier-
res semblables, sur le marais de Cardcn, dans le Garîoch,
Aberdeenshire. Elle a une inscription en Ogham et des or-
nements qui appartiennent à l'Ecosse seule.
1, Google
„ Google
„Google
469
Lxumastlng:. Petite pierre portant une inscription en ca-
ractères Ogham très serrés, dont la transcription est:
Xtt(oi)chuh(o)tts:ah(o)h, httmnnn:hccf:
fstff: nehht. onn.
Elle (ut trouvée dans un marais à Lunnasting, et dépo-
sée au Musée National des Antiquités d'Edimbourg.
Ces caractères furent usités .jusqu'au 10* siècle.
Nous en trouvons des variations différentes expliquées
dans un manuscrit nommé «The book of Ballymotei, con-
servé dans la bibliothèque de l'Académie Royale d'Irlande.
,ï G 00 1^ le
DU OUL'n: DE LA PŒRRE
M. J. Bellucci
Voici une série de cartons contenant une collection
d'amulettes modernes que j'ai recueillies en diverses par-
ties de rOmbrie, et principalement dans les habitations ru-
rales et montagnardes de cette région. Je ferai remarquer
que les pièces recueillies peuvent être divisées en deux ca-
tégories: amulettes efficaces contre les maladies de Thomme
et des animaux ; celles qui ont efficacité par rapport aux
croyances et superstitions particulières, par exemple, la fou-
dre, les sorcières, le mauvais œil, la mauvaise fortune. Ce
carton contenant vingt-six amulettes est surtout important
au point de vue des études préhistoriques, car ces amulettes
sont considérées comme des préservatifs contre la foudre; ils
consistent, comme on peut voir, en des pointes de flèches,
des couteaux, des grattoirs en silex, des hachettes polies en
serpentine et en jadéite. Quelques-unes de ces amulettes
sont enchâssées dans des Agnus-Dei, d'autres sont gar-
dées dans des sachets de cuir, d'autres encadrées en argent
ou en laiton.
,ï Google
471
Parmi les amulettes efficaces contre les maladies, je si-
gnalerai un fragment de crâne humain, une espèce de ron-
delle crânienne, prise dans un crâne après la mort, et gardée
comme efficace contre Tépilepsie ou mal caduc, et contre
les convulsions chez les enfants. J'ajouterai que cette singu-
lière amulette démontre combien vraie était Pingénieuse hy-
pothèse du regretté professeur Broca sur ta vertu des amu-
lettes crâniennes de l'époque préhistorique, et sur la trépa-
nation usitée alors. Je terminerai en disant que je poursuis
à présent ces recherches et que sur la question des amulettes
contemporaines je publierai sous peu le résultat de mes in-
vestigations.
M. Magitot: Parmi les pièces que M. Bellucci fait pas-
ser sous nos yeux, je remarque la présence d'une rondelle
crânienne de tous points comparable ù celles qui ont été
observées dans la Lozère par le Dr. Prunières et dans la
Marne par M. Joseph de Baye. C'est là un fait très inté-
ressant en raison de sa nouvelle provenance et qui fait pré-
voir d'autres découvertes du même ordre relativement à la
pratique de la trépanation préhistorique.
,ï Google
HOTE SDR LES PKÊTENDUES KBLATI0N3
MACROCÉPHALES D'HIPPOCRATE AVEC I,ES CIMBRES
M. F. ADOtPHO COELHO
Au congrès de Budapesth {1876) M: Lenhossék pré-
senta un de sept crânes macrocéphales qui ont été décou-
verts sur le bord de la Tisza en Hongrie, L'attribution de
ce crâne à une race particulière pratiquant la déformation ar-
tificielle qu'on y remarquait, donna lieu à une discussion à
laquelle prirent part beaucoup de savants et entre eux M.
Broca. Cet éminent anthropologue, dont la science déplore
la perte récente, ne voulut pas y voir un crâne tartare da-
tant, ou de rinvasion des Tartares en Hongrie en 1341 ou de '
ta conquête turque en 1326, où les Tartares faisaient partie
intégrante de l'armée turque. M. Broca allait chercher plus
haut l'origine de ce crâne, en le mettant en rapport avec cer-
tains faits de déformation crânienne artificielle, connus soit
par les notices des anciens auteurs, soit par l'observation
moderne, c'est-à-dire avec les macrocéphales d'Hippocrate,
la déformation toulousaine et celle qu'on retrouve dans le
département de Deux-Sèvres, etc.
Ma note ne regarde que la théorie ethnique énoncée par
Broca à propos de ces faits.
,ï Google
D'après lui tous ces crânes macrocéphaies proviennent
d'un seul peuple, le peuple qu'Hippocrate et d'autres anciens
écrivains nous font connaître sous le nom de Macrocépha-
ies; c'est à ce peuple qu'on doit l'implantation de l'usage
de la déformation artificielle du ci^ne, qui s'est maintenu
jusqu'à nos jours en diverses parties de la France. Ce peu-
ple, qui habitait près du Palus-Maeotides, devait être un des
peuples Cimmériens, à tous lesquels cet usage ne serait peut-
être pas commun. Les Cimmériens auraient parcouru l'Eu-
rope en toute sa largeur à l'âge du bronze. Une partie de
ce peuple, qui après l'invasion scythique (63 1 avant notre
ère) n'avait pas passé en Asie, s'est dirigé probablement
vers l'ouest et le nord de l'Europe.
On les retrouve, moins de 5o ans après sous le nom
de Kimris ou de Ifymris que se donnent encore aujourd'hui
les Gallois de la Grande-Bretagne, et plus tard sous le nom
de Cimbri^ adouci par la prononciation latine. C'est à eux
que le Jutland dût d'être appelé par les Romains \s- pénin-
sule cimbrique, et c'est de leur nom que les modernes ont
fait dériver celui de race kpnrigue. Tune des deux grandes ra-
ces celtiques. Ils pénétrèrent en Gaule à travers le Rhin; ils y
poussèrent à plusieurs reprises leurs invasions presque dans
le sud, et après des luttes violentes qui provoquèrent de
grands mouvements de peuples, ils restèrent définitivement
maîtres de toute la Gaule bcjgique, comprise entre la Seine,
la Marne et le Rhin, De là ils passèrent dans la Grande-
Bretagne dont ils occupèrent la partie méridionale; d'autres
peuples kymriques traversant l'Helvétie et les Alpes péni-
nes, allèrent s'établir dans la Haute-Italie; de ce nombre
étaient les Boïens, dont les nombreuses tribus se répandirent
en outre dans toute la région comprise entre le Mein et le
Danube et jusque dans la Bohême (qui a conservé leur nom).
,ï Google
„Google
475
pas, que deux celtistcs vraiment sérieux en Allemagne,
deux en France, deux ou trois en Angleterre, deux encore
en Italie.
Je serai heureux si, en n'apportant que trop peu de
nouveau sur cette question, maïs résumant ce que les maî-
tres de la science que je viens de nommer et d'autres en-
core ont écrit sur la question des Gimbres, je contribue pour
quelque chose à rayer des livres d'anihropologie, d'ethno-
logie et d'histoire quelques équations ethniques qui sont évi-
demment fausses et la nomenclature qui est basée sur elles.
Je vais résumer la question.
Le plus ancien témoignage au sujet des Cimmériens
nous est fourni par l'Odyssée, dont la géographie a des ca-
ractères généralement fantastiques, aujourd'hui bien recon-
nus, malgré quelques enthousiastes.
Dans ce poème les Cimmériens sont un peuple auquel
ne se rattachent que des fables. Nous trouvons chez Héro-
dote les plus anciennes notices historiques sur ce peuple. Je
ne vous répéterai ni ce que le vieux historien nous racconte
de son expulsion de la Crimée par les invasions scythiques,
ni ce que nous savons de sa destinée dans l'Asie Mineure,
par les autres historiens grecs, l'élégie jonienne et les inscrip-
tions cunéiformes. A juger par l'ensemble de ces rensei-
gnements, on conclurait que les Cimmériens étaient un peu-
ple tout à fait disparu du théâtre de l'histoire au temps d'Hé-
rodote, sans avoir laissé un seul représentant.
Strabon nous fourni trois équations ethniques à propos
des Cimmériens et des Thraces:
Les Cimmériens sont aussi appelés des Trêres:
Les Tréres sont une nation Ctmmérienne:
Les Trêres sont des Thraces.
ly Google
lOogle
47^
M. d'Arbois de Jubainville n'hésite pas à en conclure
que les Cimmériens étaient des Thraces; mais les textes
classiques ne sont nullement pour moi quelque chose de sa-
cré sur laquelle on puisse jurer. Ce qu'il y a de vrai c'est
qu'aucun témoignage ne nous permet d'affirmer qu'une par-
tie des Cimmériens aient émigré vers la Chersonèse cimbri-
que ou vers quelque autre partie de l'Europe occidentale ou
centrale. Ce ne fut qu'àla un du deuxième siècle avant notre
ère, au moment de la grande invasion cimbrique, que l'his-
torien grec Posidonius émit l'hypothèse, mais au seul titre
d'hypothèse, que les Cimbres fussent des Cimmériens, ne
se basant que sur la ressemblance des noms et le caractère
envahisseur des deux peuples. Ce rapprochement a été ré-
pété, mais toujours comme une simple hypothèse, par Stra-
bon, Diodore de Sicile et Plutarque. Moins exigeants que
les savants de l'antiquité, ceux de notre temps ont regardé
l'hypothèse comme un fait prouvé.
Les formes des deux noms sont toujours bien fixées dans
les anciens auteurs. Le nom des Cimmériens est assez fidè-
lement transcrit dans les inscriptions assyriennes par Gimi-
rai, l'adoucissement d'un c en ^ étant très fréquent dans les
mots étrangers admis dans une langue ou dans les noms
propres étrangers: en latin, par exemple, Sagunîum pour
Zakynthos, etc.
Si nous savons fort peu sur les Cimmériens, de bonne
heure disparus de l'histoire, nous possédons sur les Qmbres
assez de données positives pour nous permettre de les clas-
sifier ethnologiquement.
Il faut remarquer d'abord que la seule forme de leur
nom que nous connaissions par les auteurs grecs et latins est
KifiPpoi, Cimbri.
Le manque de critique avec lequel beaucoup d'écrivains
,ï Google
477
ont traité dans ces derniers temps la question des Cimbres
explique seul qu'on ait mis en doute qu'ils fussent des Ger-
mains.
Dans les anciens écrivains, abstraction faite de l'hypo-
thèse de leur origine cimmérienne, nous les voyons être ap-
pelés tantôt des Galates ou des Celtes, tantôt des Germains.
11 faut bien distinguer les époques auxquelles appar-
tiennent ces différents témoignages et les écrivains qui nous
les offrent.
Les anciens confondirent longtemps les Germains avec
les Celtes; ils ne les ont bien distingué qu'après l'époque
où les Romains furent amenés à avoir un contact plus in-
time avec les deux groupes. Jules César est le premier écri-
vain qui emploie ce nom ethnique de Germains; il l'avait
appris des Celtes de la Gaule transalpine {cisalpine pour
nous), à la langue desquels ce mot appartient, bien proba-
blement.
La confusion des Cimbres et des Galates, se trouve chez
Diodore de Sicile (v, Sa) et chez Appien (Illyr. 4); par cette
confusion ces deux historiens font venir les Cimbres jusqu'à
Rome et à Delphes, contre tout ce que nous savons de leur
histoire. Une confusion semblable se trouve à l'égard d'une
autre branche des Germains, les Bastames, également appe-
lés des Galates.
Nous ne devons pas nous en étonner lorsque nous voyons
encore Salluste (Jug. 1 14) nommer les Cimbres Galli, Gau-
lois. Quelques écrivains postérieurs, comme Flonis, ont con-
tinué la confusion, car ils se servaient des renseignements
des vieux auteurs; ceux qui avaient le moins de critique sup-
posaient que l'ancienneté donnait à ces renseignements une
valeur particulière.
Dans l'inscription d'Ancyre, Iç célébra testament d'Aii-
,^
478
guste, les Cimbres sont considérés comme des Germains,
de même que dans les meilleurs écrivains latins postérieurs
à César, tels que Pline, Tacite, et dans les écrivains grecs
de la même période, qui puisèrent aux sources latines, Stra-
bon et Plutarque. Mais j'observerai que l'on continua à nom-
mer populairement les Germains des Gaulois, comme nous
savons par deux anecdotes dans Pline (35, 4) et Gicéron
{de Oratore 3, 66), où il est question des images des Cim-
bres, ayant la langue étendue.
Le nom des Cimbres est, d'après Grimm et Zeuss, bien
probablement germanique. Festus nous dit que c'est un
mot gaulois signifiant larrons {Cimbri Hngua gallica latro
nés dicuntur)^ mais «gauloisi ici peut signifier «germanique»,
d'après ce que je viens de dire. La même explication se ren-
contre chez Plutarque: KîftjSpous lirovs^owri Vt^^anni tojî
XiiuTâç (Mar, cap. 11). Arirni^ signifie spécialement pirate.
Grimm a montré dans ses Antiquités du droit germanique
et nous le savons encore d'autres sources, que la piraterie,
le vol était primitivement bien loin d'être regardés comme
des professions malhonnêtes. Vous vous rappelez sans doute
ce passage où Jules César nous dit que les Germains ne
considéraient pas le vol comme une infamie quand il était
exercé sur une tribu, une ville voisine. Le nom de voleurs,
de pirates par excellence n'était donc qu'honorable. Mais la
question d'un nom de peuple n'a jamais une importance ca-
pitale en ethnologie, car ce nom peut appartenir à une lan-
gue étrangère.
Zeuss a montré que les noms des chefs cimbres chez
Orosius — Lugius^ Claodicus,, Caesorix sont des noms ger-
maniques, ce qui est bien plus important que l'origine du
nom même de ce peuple; il n'y a que le nom de chef fîoiorix
qui ait une forme celtique: nous trouvons même ce nom
,ï Google
479
comme celtique dans Tite-Live; mais Zeuss remarque que
ce nom pourrait être altéré par les étrangers et qu'on le
peut aussi regarder comme germanique, car nous avons les
noms germaniques Bojo, Bojocalus. Grimm pense à une
forme Baugareiks. On connaît plusieurs noms propres cel-
tiques qui ressemblent à des noms propres germaniques,
tout en ayant une étymologie bien différente, que le Ihr
guiste arrive à bien démêler. Les traits ethnographiques
des Cimbres, leurs usages et leurs mœurs, où l'on a vu
une preuve de leur celticité, n'oiîrent rien qui nous force
à les faire considérer comme des Celtes. Les plumes et les
figures d^animaux de leurs heaumes nous rappellent la pas-
sion que les Germains, décrits par Tacite, avaient pour
les armures, les caparaçons, les colliers. Ce que nons sa-
vons de leurs mœurs n'offre rien de particulièrement celti-
que; mais il y a un détail qui est parfaitement germanique.
Nous savons par Strabon que Pambassade cimbrique
envoyée à Auguste fit présent à cet empereur d'un chaudron
sacré.
Or le chaudron jouait un rôle important dans le culte
des anciens Germains C'était dans le chaudron du sacrifice
qu'on faisait tomber le sang de la victime. On peut lire lâ-
dessus les textes réunis pat J. Grimm dans sa Mythologie
allemande^ p. 49.
Rien ne nous prouve que les Gmbres, qui sont évidem-
ment, du moins pour nous, un peuple germanique, prati-
quassent jamais la déformation macrocéphalique; je ne crois
pas qu'on ait jusqu'à présent trouvé des crânes macrocé-
phales dans le Jutland; et quand même on y en trouverait,
rien ne nous permettrait d'y voir les traces de la présence
des Cimmériens.
Il n'y pas longtemps il régnait en Portugal, du moins
CR. 34
,ï Google
4^0
dans quelques-unes de ses provinces, un usage, que je con-
nais par la description de vieilles sages-femmes et où je
vois le dernier adoucissement de la déformation macrocé-
phaliquc. C'était Pusage de Vesiopada, l'étoupage. On en-
tourait la tète des nouveaux-nés, en la pressant assez dure-
ment, avec de l'étoupe trempée dans du blanc d'œuf.
Doit-on y voir aussi une trace de la présence des Gm-
mériens en ces lieux dans l'antiquité?
Nous examinerons maintenant l'équation des Cimbres
et des Kymris; cette équation ne se base que sur la ressem-
blance des noms.
Zeuss et Gluck ont démontré en toute évidence que, si
le mot que nous connaissons sous la forme K^mri avait existé
h l'époque où les Cimbres apparaissent dans Thistoire, il au-
rait la forme Combroges: cela est aussi bien prouvé que le
mouvement de la terre.
Combroges est un mot composé de corn et broges; corn
est adverbe et préposition celtique, identique au latin cum,
corn: broges se retrouve dans Ande-brogius^ Brogi-tarus,
Brogi-maruSf AUobroges. D'après les lois phonétiques du
bas-breton et du kymrique, si le singulier brox de broges^
brogis au génitif, s'y était conservé, il y aurait pris la forme
brog, pour perdre ensuite le g final; or dans ces deux dia-
lectes nous rencontrons bro, ancien brog, dans le sens de
fterre, régiona. Combroges signifierait donc compatriotes.
Le nom Allo-broges est composé de allô et broges. Le pre-
mier élément se retrouve en kymrique sous la forme ail;
c'est le même que le latin alius. AUobroges signifiait donc
alienigenac.
Voilà les points de repère dans l'histoire du mot Com-
broges, supposant qu'il eut été formé avant l'invasion des
Saxons dans la Grande-Bretagne:
,ï Google
/
Kymrique
Com-brog.
Cym-brog.
Cymmro (mb='mm), perte du g.
Cymro plur. cymry.
kon-brog.
ken-brog.
ken-bro.
ken-vro appellatîf^con/erriiwewj.
Toutes ses altérations sont démontrées par d'autres
exemples; o est changé en^, par exemple en escyb de epis-
copus (escob); kyrn de corn (cornua).
Zeuss nous fournit encore les formes anciennes.
m. kemro kemry.
f. camraes, camaraes {cambra).
11 faut effacer pour toujours de Pethnologie, dans le
sens qu'on lui donne généralement, cette malheureuse déno-
mination de Kymris, qui ne peut que désigner les habitants
du pays de Galles; il faut en rayer aussi les théories qui se
basent sur la ridicule identification de ce nom avec celui des
Cimbres, ou alors il faut considérer la glottologie, dont la
méthode semble si rigoureuse, comme un vain rêve de quel-
ques cerveaux désœuvrés; il faut jeter au feu ces travaux,
dont s'honore notre siècle, de Bopp, de Grimm, de Zeuss,
de Diez et de ceux de leurs élèves qui restent fidèles à leur
méthode, tout en s'efforçant encore de la perfectionner.
34»
,ï Google
482
D'où viennent donc les crânes macrocéphales, les dé-
formations crâniennes dont l'existence est constatée en Eu-
rope? Faut-il y voir les documents du passage, ou de la fi-
xation sur le sol où l'on les retrouve, d'une seule race prati-
quant la déformation macrocéphalique? Cette race traver-
sa-t-elle l'Europe aux temps préhistoriques ou aux temps
historiques ?
M. Lagneau pense qu'on devrait peut-être attribuer aux
Théiphales et aux Alains immigrés du Sud-Ouest et dont on
a constaté la présence en France, l'importation de la défor-
mation crânienne artificielle de Deux-Sèvres.
Il faut attendre de nouvelles découvertes .archéolo^-
ques, de nouveaux faits ethnographiques avant d^élever une
théorie sur ce sujet.
Ce qu'il y a de plus probable c'est que les crânes ma-
crocéphales qu'on a découverts déjà, que les usages de dé-
formation plus ou moins adoucie qu'on a constatés en Eu-
rope, doivent être attribués à divers peuples et appartenir
à différentes périodes'.
M. Vilanova: A propos de la communication que vous
venez d'entendre, je dois vous dire. Messieurs, que la fatale
pratique de façonner la tête des nouveaux-nés existe aussi
malheureusement en Espagne, et en confirmation je me rap-
pelle dans ce moment que mon fils cadet étant assez doli-
chocéphale, par opposition à l'aîné qui est brachycéphalc,
des personnes de position sociale très distinguée m'ont ac-
cusé de ne pas lui avoir fait façonner la tête à sa naissance.
' Voir l'Appendice
,ï Google
LES aiTANOS D'DSFAaNE ET LES GIGAIfOS DE PORTUGAL
À PROPOS DS LA QUESTION DE L'IMPOKTATIOH DES UÉTAUX
EN EUROPE PAR LES TSIGANES
M. Paul Bataillard
I
Ceux qui ont assisté, soit à la session de Budapesth
(1876) du présent Congrès, soit au Congrès des sciences an-
thrnnnln0ini»>e niiï <i'(>«t tcHU à Paris à l'occaslon de l'Ex-
ie 1878, ou qui ont lu les comptes-
nions scientifiques, connaissent mes
ies Tsiganes en Europe et sur la
race de métallurges nomades a dû
à la diffusion des métaux dans cette
ma longue communication au Con-
exposé VÉtat de la question de l'an-
tn Europe, précisément comme in-
archéologique que j'y rattache'; et
courte que j'ai faite au Congrès de
> l'ancienneté des Tsiganes en Europe pour
stion de l'importation du bronje. . . par les
«•rendu du Congrès. . . de Budapest. Paris,
8.%64p.
.ïGoogIt
r
484
Paris, sous le titre Historique et préliminaires de la ques-
tion de Vimporlation du bronze dans le nord et roccident de
r Europe par les Tsiganes', contient un résume de la pré-
cédente, avec un aperçu de mes travaux antérieurs sur une
race que j'étudie depuis plus de trente-cinq ans.
Je ne reviendrai sur tout cela, que dans la mesure stric-
tement nécessaire pour motiver l'évocation des Tsiganes ou
Gitanos devant un Congrès voué aux études préhistoriques.
Lorsque j'ai abordé, en 1844, l'histoire des Tsiganes
par un premier mémoire sur Papparitiott et la dispersion des
Bohémiens en Europe', on admettait généralement, avec
Grellmann, que cette race n'avait fait sa première apparition
en Europe qu'au commencement du xv* siècle de notre ère,
el qu'elle était sortie de l'Inde très peu de temps aupara-
vant, probablement à la suite des guerres de Tamerlan; et
c'est là encore aujourd'hui une idée ressassée par les auteurs
qui s'occupent des Tsiganes sans être au courant des tra-
vaux publiés sur eux depuis cette époque; tel est en parti-
culier le cas du dernier petit livre sur la matière qui ait paru
à ma connaissance, dans la Péninsule ibérique: El Gitanis-
moy etc., par M. Francisco de Sales Mayo (Madrid, 1870).
Idée complètement erronée, et que j'ai commencé à dé-
truire dès 1844 et 1849'. Sans marquer ici les étapes suc-
' Tiré à part, in 8.", 16 p. — Se trouve aussi à la librairie Emest
' Voir la note suivante,
• Mon premier mémoire sur L'apparition el la dispersion des Bohé-
miaa en Europe, publié en 1^44 daasla Bibliothèque de l'École des Char-
les (et dont le tiré à part forme 60 p. gr. in 8.°), fut suivi en [849, dans
le même recueil, de Nouvelles recherches sur le même sujet (in 8 '■ de
48 p.). Le premier de ces deux mémoires est depuislongtemps épuisé;
mais la bibliothèque de l'Académie des Sciences de Lisbonne les pos-
,ï Google
485
cessives et progressives par lesquelles ma pensée a passé,
je dirai en quelques mots l'état présent des choses :
Il reste certain qu'il y a eu, au xv" siècle de notre ère,
une immigration considérable de Tsiganes de PEurope orien-
tale dans l'Europe occidentale; cette migration, que j'ai ra-
contée en 1 844, est la seule dont l'histoire ait conservé des
traces précises, et c'est d'elle principalement que dérivent
les Tsiganes qui sont aujourd'hui répandus dans l'Europe
occidentale.
Mais, d'abord, les Tsiganes qui émigrèrent alors de l'Eu-
rope orientale et aussi de l'Asie antérieure vers l'Occident,
étaient établis dans ces deux régions, sans parler de l'Egyp-
te et de l'Afrique septentrionale, depuis un temps impos-
sible a déterminer, car nulle part on n'a pu y constater leur
apparition. Tout ce qu'on a pu faire a été d'y constater leur
existence à dés époques qui vont toujours reculant dans le
passé. Si, comme je n'en doute pas, et comme M. Mikiosich
le reconnaît avec moi', les Athingans du moyen-Sge byzan-
tin sont des Tsiganes, on remonte ainsi déjà d'une manière
certaine jusqu'au vn' siècle de notre ère, car c'est vers cette
époque que commencent à être signalés les Athingans dans
sédait tous les deux en i85o, et j'apprends qu'elle les possède encore
aujourd'hui.— Quant à mes publications plus récentes (dont on trouvera
la liste, les deux dernières exceptées, sur la couverture des Zlotars), je
les envoie toutes, toutes celles du moins qui ont été tirées à part, au
Congrès de Lisbonne.
' Mikiosich, Ueber die Mundarlen unddie Wanderungén der Zigeu-
ner Europa's, vi' mémoire, Wien, 1878, in-4 '■ Anhang (Appendice), La
série des importants mémoires in 4.° de M. Mikiosich, publiés de 1871
à iSSo, se compose de 12 fascicules formant un total de plus de S3o pa-
ges. Il faut y joindre trois autres brochures (in 8.*) publiées en 1874,
1876 et 1878 sous le titre de Beilrâge ^ur Kenniniss der Zigeunermim-
darten, la i''"> portant les n" i-u.
„Gqi
QOjjlc
486
l'Asie Mineure, sans qu'on sache rien d'ailleurs de leur arri-
vée dans cette contrée, ni du passage d'Asie en Europe des
Tsiganes qu'on trouvera plus tard dans l'Europe orientale,
passage qui n'aurait pu s'effectuer sous les yeux de Byzance
à des époques pleinement historiques, sans que l'histoire eût
gardé quelque trace de cette migration singulière.
Aussi ne m'arrêié-je point au vn' siècle de notre ère.
Guidé par des considérations historiques et ethnographiques
dans le détail desquelles je ne puis entrer ici, je suis amené
a la conviction que les Tsiganes se rattachent aux Sigynes
qu'Hérodote signale sur le Danube, aux Sinties qu'Homère
place dans l'île de Lemnos, et finalement aux peuplades ca-
biriques que l'antiquité grecque a connues en Asie Mineure,
dans les îles de la Méditerranée orientale et dans la pénin-
sule des Balkans.
Je ne donne point cette opinion pour un fait dès à pré-
sent établi, il me reste beaucoup à faire pour obtenir l'adhé-
sion formelle des quelques savants compétents dans une
question si complexe; mais je crois au succès final de cette
thèse hardie, et il me semble que c'est déjà beaucoup à
l'heure actuelle, quand je n'ai fait encore qu'en effleurer la
démonstration, de pouvoir dire que, des deux maîtres india-
nistes et tsiganologues qui s'appellent Pott et Ascoli, le pre-
mier suspend son jugement définitif, tandis que le second
incline déjà de mon côté et m'encourage à poursuivre.
Avant d'aller plus loin, je dois mentionner un corollaire
important de ma thèse principale. J'ai constaté que la mi-
gration qui a répandu les Tsiganes dans l'Europe occiden-
tale datait seulement du xv* siècle. Ce fait constant gardera
toujours sa valeur. Mais, s'il est une fois bien établi que cette
race existait dans l'Europe orientale (et conséquemment en
Asie Mineure) dès les temps préhistoriques ou proto-histo-
,ï Google
4^7
riques, personne ne doutera que des bandes de ces noma-
des n'aient pu et dû faire des excursions industrielles en Occi-
dent à des époques bien antérieures au xv° siècle, tout comme,
aujourd'hui, les Tsiganes CnWijrafi (chaudronniers) de Hon-
grie ou du Banat de Temeswar et les Tsiganes Oursari
(conducteurs d'Ours) de la Bulgarie font sous nos yeux des
tournées dans toute l'Europe, qui se terminent par leur re-
tour dans leurs pays. Il est même très possible que quelques
groupes de ces nomades aient jadis établi des stations fixes
sur divers points de l'Occident, et que finalement il y ait eu,
à différentes époques antérieures au xv* siècle, de petites im-
migrations tsiganes dans telles ou telles répons du Nord, de
l'Ouest ou du Sud-Ouest. Une fois reconnu que les Tsiga-
nes habitaient le sud-est de l'Europe de temps immémo-
rial, ce sont là des faits subsidiaires, qui ont dû se produire
sans que l'histoire les ait généralement mentionnés (je crois
que j'en retrouverai cependant quelques curieuses traces);
et ces faits, dénués en apparence de toute importance his-
torique, peuvent avoir cependant une importance archéolo-
gique qu'il ne faudra pas perdre de vue.
Je ne m'en suis pas tenu, en effet, à reculer indéfini-
ment l'existence des Tsiganes dans le sud-est de l'Europe,
dans l'Asie Mineure et dans les îles de la Méditerranée orien-
tale. Une fois ma conviction formée à cet égard, je me suis
dit que ce n'était certainement pas sans cause et par pur
hasard, que cette race, dont la grande majorité en Orient est
encore adonnée aujourd'hui au travail des métaux, se trou-
vait ainsi répandue si anciennement dans le monde, que les
étranges pérégrinations de cette race de métallurges aux
procédés primitifs et barbares devaient avoir leur raison
d'être; et c'est ainsi que je me suis demandé, d'abord, si les
ancêtres des Tsiganes ne seraient pas précisément les arti-
V
..GooqIc
K
sans nomades auxquel
logues avaient été déjà
bronze en Europe.
J'ai porté d'abord
cident et surtout du N
encore de la Scandina\
fait secondaire de Pin
l'Europe dans ces régit
Scandinaves où cette in
y pourrait être plus fa
tsigane, que dans le ba
ter S des époques bier
fluences de civilisation
reste que montrer la \
mant dans mon doma
du moins la bonne for
m'ont prêté M. M. Ko|
ajouter aux Caldarari
et du Banat, qui avaier
les Zlotars^ de Galicie
ganes fondeurs de bro
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deux ou trois mille an
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Est-ce à dire que
et aux métaux contempi
te qu'au fait secondaii
du sud-est à l'ouest et
' Les Zlotars. . . Tsigc
Galicie orientale et la Bul
d'Anthr., 1878, in-8% de 79
ly Google
demniem non. Si les Tsiganes qui travaillent le cuivre et
surtout ceux qui fondent le bronze sont aujourd'hui rela-
tivement peu nombreux, ce qui n'est pas surprenant, il
n'en est pas de même des forgerons. Tout le monde sait
que la grande majorité des Tsiganes d'Orient travaillent le
fer*. Certaines des peuplades cabiriques le travaillaient aussi;
et lorsque je tirerai du rapprochement que j'ai indiqué plus
haut entre ces peuplades et les Tsiganes tout ce qu'il com-
porte, je crois que l'importance archéologique des Tsiganes
forgerons sautera aux yeux. Je suis précisément sur la voie
d'informations nouvelles qui me sont promises de l'Asie
Mineure, et qui, si elles confirment les premiers renseigne-
ments venus de cette région, fourniront à ma thèse ainsi
généralisée de bien forts arguments.
Je ne mentionne que pour mémoire la dernière petite
communication que j'ai faite à la Société d'Anthropologie
de Paris sur les anciens métallurges en Grèce*; car cet
opuscule de circonstance' n'est qu'une préface à une étude
' Voir, du reste, dans mes Tsiganes de l'âge du bronze, 1876, l'aper-
çu que j'ai donné des diverses industries métallurgiques des Tsiganes
en Orient.
* Bulletin de la Société d'Anthr., séance du 17 juillet 1879; tiré à
part de 3o p. Cette petite communication est venue en réponse à quel-
ques objections qui m'avaient été faites sur certains points d'une lon-
gue communication qui avait pour titre : La question du bronze et du
fer aryens. Les Indo-Européens étaient-ils à l'origine des métallurges?
et dont les Bulletins du i" mai précédent contiennent un court résumé.
Ce travail lui même, à cause de son étendue, avait été renvoyé auï Mé-
moires de la Société; mais je préviens qu'on ne l'y trouvera point:
la lenteur avec laquelle se publient les Mémoires m'a laissé le temps de
la réflexion, et j'ai reconnu qu'un travail improvisé sur un sujet si vaste
et qui exigerait une érudition générale que je n'ai point, était v
trop insuffisant.
,ï Google
49°
un peu plus approfondie qui, comme je viens de l'indiquer,
aura pour principal objet les peuplades cabirïques et les
afSnités de la race tsigane avec elles. Ceci est forcément
de mon domaine; ce qui ne l'est guère, c'est l'archéologie
proprement dite, dont l'intervention est pourtant si néces-
saire dans les questions que soulève ma thèse. Heureuse-
ment je puis dire que cette partie essentielle de la tâche est
aujourd'hui en bonnes mains. Un archéologue éminent, M.
Charles de Linas, est entré pleinement dans mes vues; et
le 3* volume de son grand ouvrage intitulé au début Les
origines de l'orfèvrerie cloisonnée., volume dont l'impression
se poursuit depuis quatorze mois et dont les feuilles me
sont amicalement communiquées au cours du tirage, éta-
blira, je n'en doute guère, la grande valeur archéologique
de la thèse qui nous est maintenant commune'.
Il
Les explications qui précèdent, et qui ne sont peut-être
pas dénuées de tout intérêt, étaient, dans tous les cas, né-
cessaires pour m'autoriser à vous parler des Gganos ou
Gitanos des contrées où siège le Congrès. Car c'est à eux
que j'en veux venir, non pour vous apporter sur eux des
' M. J. G. Bulliot, entre autres travaux importants sur l'ancienne
Bibracte (Auiun), a publié dans les Mémoires de la Société Éduenne,
t. va d'une nouvelle série, 1878, une bien curieuse dtude sur les loges
des fondeurs nomades à la foire de Bibracte. Il y avait là la matière
d'un des principaux paragraphes de ma communication supprimée
(voir la note précédente); mais M. de Linas, quand il arrivera à la
Gaule, tirera certainement de ce travail de M. Bulliot meilleur pani
que je n'aurais su le faire.
,ï Google
49'
notions nouvelles, mais au contraire pour en demander aux
membres portugais et espagnols de cette savante réunion.
Ils me permetront de constater d'abord que cette race,
nombreuse pourtant sur le sol ibérique', y a été bien peu
étudiée.
Parmi les vieux auteurs espagnols, Fernandez de Gôr-
dova {Didascalia multiplex, Lugduni, i6i5, p. 4o5 et suiv.)
est presque le seul, si je ne me trompe, qui mérite d'être
cité; encore sa courte notice, comme presque toutes celles
qui ont paru en Europe jusqu'au commencement du siècle
actuel et souvent encore depuis, vîse-t-elle les Tsiganes en
général et non ceux du pays en particulier, Côrdova croit
leur langue slave; mais en parcourant sa notice, je remar-
que qu^l avait pensé déjà' à rapprocher les Tsiganes des
Sigynes d'Hérodote et de Strabon, rapprochement que je
retrouverais du reste chez quelques autres auteurs euro-
péens de son temps.
Quant aux réquisitoires de Don Sancho de Moncada,
professeur de la Sainte Écriture en l'université de Tolède',
'Voir les chiffres éleviïs que donne Grellmann, 1787, p. 26-27.
Borrow de son côté, The Zincali, 1841, t. 1, p. 274, évalue le nombre
actuel des Gïtanos en Espace à 40.000 au plus, Jont le tiers environ
dans l'Andalousie seule; mais il croit que leur nombre avait pu être
plus élevé autrefois.
• A la vérité il ne s'y arrête pas, maïs pour une raison géographi-
que qui lui appartient, et qui est de nulle valeur.
' Expulsion de tos Gilanos, discurso etc., factum d'une vingtaine de
pages. J'en ai sous les yeux le texte réimprimé à Madrid, en 1789, dans
Romances de Germania, et la traduction anglaise presque complète dans
les Zincali de Borrow, où elle fonne, suivant les éditions, le ch. xi ou
X de la I*" partie. Cependant, ni l'éditeur, ni le traducteur, ne donnent la
date du morceau nillndication de l'endroit d'où ils l'ont tiré. Mais je le
retrouve dans Resiauracion poUtica de Espana, en ocho discursos de San-
V
)inJ^B^_i
oogle
49^
et de Don Juan de Quinonez (dont j'ignore les qualités) *
contre les pauvres Gitanes, dont ils demandaient l'expul-
sion après celle des Maures, s'ils contiennent, le second sur-
tout, quelques détails sur le genre de vie des Gitanos, ils
ne peuvent certainement pas passer pour des études pro-
prement dites, et encore moins pour des études impartiales.
Ces auteurs des siècles derniers ne sont certainement
pas les seuls en Espagne (ni sans doute en Portugal) qui aient
consacré quelques pages aux Gitanos ou Ciganos; peut-être
aurais-je dû nommer Martin del Rio (qui toutefois n'était
pas natif de l'Espagne) et plusieurs autres dont j'ai rencontré
les noms dans les quelques écrits que je viens de citer, mais
il me semble que tout cela est vraiment trop secondaire.
On me permettra de considérer comme secondaire aussi
au point de vue où je me place, malgré le fondement his-
torique qu'on lui attribue à tort ou à raison, le célèbre opus-
cho de Moncada, Madrid, i7-)6, large in 8.° IX Expulsion de los Gitanos for-
me la i"" partie du 7* discours); et j'y vois— parle Dîctdmen de El docior
Thomas Tamayo de Vargas, çiaté de Tolède, 28 mai 1619, lequel se
trouve parmi les pages préliminaires et non numérotées du recueil, et
est apparemment reproduit de la précédente édition, que ce recueil a
dû paraître, pour la 1*" fois, à Tolède, en 1619, et qu'ainsi ces huit dis-
cours, adressés en 1746 «al Rey D. Fernando vi», ont dû l'être d'abord
(comme l'indiquent d'ailleurs Borrow et l'éditeur des Romances de Ger-
mania) à Philippe m, â l'esprit duquel Ils s'adaptaient beaucoup mieux,
et qui paraît en avoir tenu plus de compte, car il rendit, â Bclem, près
de Lisbonne, en 1619, un édit qui expulsait les Gitanos sous peine de
mort (The Zincali, 1841, 1. 1, p. igô-igS).— Sancho de Moncada dît que
• algunos ios tienen pordescendiemesdeChus, hijo de Cban., (iîoman-
ces da Germania, p. 19.1). Je note en passant cette opinion, quoique la
place me manque pour la justifier.
' Discurso contra Ios Gitanos. Madrid, i63i, in 4." de 1 et î3 feuil-
lets. Borrow en a donné quelques extraits dans The ZiTtcalif 1S41, L i,
p, 55 et 16C.168.
,ï Google
493
nie, la Gitanilla de Cervantes ', aussi
ano qui se trouve dans le roman, in-
teur Geronimo, natif de Ségovie, qui
ent du xvii" siècle',
mt aux publications contemporaines
e dirai que je ne connai'*, et qu'on ne
à l'étranger, que les petits dictionnaî-
î de Enrique Trujillo (Madrid, 1844),
:z (Sevilla, 1846 et i833), — et gitanos-
puzano (Madrid, 1848)^ et de D. A.
1). Un petit volume, intitulé avec plus
inismo: historia, costumbresy diaîecto
), Francisco de Sales Mayo; con un
I gitaiia^ y un diccionario calôcastel-
incisco Quindalé', novfssima edicion,
série.
lis, qu'en fait de nouvelle ^ttiina, je préfère
, Carmen.
iif 1S41, t. 1, p. 86-94) donne la traduction
épisode, en en faisant un éloge qui me sem*
wres om reçu un nouveau iiire, qui porte : 2.'
s l'édition est la mÉme. Le titre exact du vol.
ibres de los Jîiams^y Diccionario de su dta-
ten effet précédé d'une notice de 17p.; mais
précédés de quelques pages de notice; et je
aire l'analyse comparative,
pparenls n'en font qu'un, comme semblent
lots de ia p. 48, et comme le prouve le vocab.
la traduction littérale en dialecte gitano du
ai). Je remarque que le mot Quindale flgure
nenez avec le même sens, maïs que, d'après
! A. de T., il signi^erait le mois dç mars (et
.ïGex^^^K
404
Je n'ai pas comparé d'assez près ces cinq vocabula
pour les juger sommairement *. Mais il est clair qu'ils se ;
pris beaucoup les uns aux autres, et que le plus méritan
tous ces auteurs est le premier, c'est-à dire Trujillo, s'il
pas eu de prédécesseur espagnol ou portugais; j'ajoute <
ne me paraît pas s'être servi de Borrow qui l'a précédé de i
ans. En somme ce sont des petits livres utiles pour la i
naissance du dialecte des Gitanos d'Espagne, et les qu;
premiers sont des opuscules sans grande prétention.
On n'en saurait dire autant du dernier, et c'est p
quoi il est permis d'être plus sévère à son égard. Pour r
tenir à la notice historique et ethnographique qui form
première des trois parties du volume (p. 1-48), M. Fr
Sales Mayo ne sait rien des importants travaux pul
en Europe depuis quarante ans; et, ce qui est plus
ve, c'est qu'il pille continuellement Borrow (le seul au;
contemporain étranger qu'il paraisse connaître) sans en a
tir le moins du monde le lecteur; je ne puis entrer ici d
le détail de ces fréquents emprunts; je me contenterai de 1
voyer à la comparaison de sa Gilana de Sevilla, en 1
(pourquoi cette date précise?), p. 14-18, et du chapitre
Borrow se représente et décrit la Gitana de Séville au tei
de Ferdinand et d'Isabelle {The Zincali, éd. de 1841,
p. i3o-i37). Et M. de Sales Mayo ose terminer sa ne
(p. 48) par ce mot de Montaigne: Cest icy un livre de bc
fqy, lecteur! — Je dois ajouter toutefois que sa petite Gr
maire du dialecte gitano (p. 49-76) est, à ma connaïssa
la, première qu'on ait publiée.
Je ne puis clore cette courte liste sans mentionne!
' Les comparaisons seraient plus faciles, s'ils étaient tous espagi
gitanos ou gitanos-espagnols.
1
„Geiogle
495
pttit livre publié en i832, à Barcelone, sous ce titre; Ht'S'
ioria de los GitOJios por J. M., (in 18° de 94 p.) et qui a
toutes les apparences d'une œuvre originale'. C'est la tra-
duction,un peu abrégée, mais généralement littérale, du tra-
vail qu'un Français du Midi, M. Jaubert de Passa, corres-
pondant de PAcadémie des sciences de Paris, a publié en
1827 dans les Nouvelles Annales des Voyages, et dont il
existe un tiré à part aujourd'hui très rare*. Le traducteur
peu scrupuleux a même joint à sa brochure la reproduction
de la lithographie qui accompagnait la publication française.
En résumé, l'Espagne n'est pas riche en publications
nationales surlesGitanos. Mais le Portugal l'est encore moins
si je ne me trompe; car, pour mon compte, je ne connais
n'en à porter ici à son actif. Je ne prétends pas que le Por-
tugal n'ait rien produit sur ce sujet, et je serai heureux d'être
renseigné sur les omissions dont je puis être coupable à son
égard comme à l'égard de l'Espagne; mais je crains qu'el-
les ne soient pas très graves.
Les étrangers se sont plus occupés des Bohémiens de
ta Péninsule que les indigènes, et si je voulais relever tou-
tes les pages de quelque intérêt que peuvent fournir les voya-
geurs, j'aurais à dresser une trop longue liste'. Je me con-
■ Borrow s'y est tout naturellement laisse prendre, et il en a donné
de longs extraitscommed'uneœuvreespagnole, dans 7%fiZi>tca/t, 1841
t. I, p. 3o8-3i3.
* Essai sur les Gitanos, p. 189-362, in 8", travail estimable et qu'il
faut consulter, malgré la grosse erreur que commet l'auteur (voy. p.
33o et suiv. et surtout p. 356), en faisant des Gitanos les descendants
des Arabes et des Maures qui avaient conquis l'Espagne, et en se refu-
sant i les identifier avec les Gipsies, Zigeuner, Zingari et Bohémiens.
^Je signalerai pourtant la notice de 38 p. in 40 que Richard Bright
a donné sous le dire State 0/ the Gipsies in Spain, à la suite de ses
Travels . . . through Lower Hungary, Edinb. 1818, in 4*. Cette notice
c R. 35
.ïGoogle
496
tenterai de rappeler le livre de George Borrow, The Zin-
cali or Gipsies of Spain, publié en 1841 en deux vol. in 8°
et qui a eu, depuis, d'assez nombreuses éditions*. Ce tîvre
a été écrit du point de vue pittoresque pour le grand pu-
blic, auprès duquel il a eu beaucoup de succès; on n'y trouve
ni l'esprit d'investigation ni la précision que réclame l'ethno-
graphie, et il contient bien des inexactitudes. Mais l'auteur
a vu de près les Gitanos, il parlait aisément leur langue, et
finalement son ouvrage, qui contient d'ailleurs un vocabu-
laire étendu (gitano-anglais) et que je crois parfaitement ori-
ginal puisqu'il est antérieur à tous ceux que l'Espagne a pro-
qui n'esl pas de Bright lui-même, mais d'un de ses amis, comme ill'ex-
plique au commencement du vol. p. ix, se termine par une liste com-
parée de mots de la langue des Tsigunes d'Angleterre, d'Espagne et de
Hongrie, qui est bien fautive, mais qui contient, si je ne me trompe, ta
première série de mots gitanos qu'on ait recueillie. — Sur les Bohémiens
du midi de la France, qui ont tant d'affinités avec ceux d'Espagne, il
faut mentionner aussi le ch. de Francisque Michel sur les Bohémiens
du Bays basque, dans son livre intitulé Le Pays Basque. Paris, i857, in
8.°; et la 1' partie du vol. de feu V. de Rochas, Les Parias de France
et d'Espagne (Cagols et Bohémiens). Paris, 1876, in 8."
' Je ne possède que la 1', indiquée plus haut, et ta 4* en i vol.
Rr. in ]8" compact, LonJ. 1846, et ne puis parler des autres. Je cite
habitudlement la 1% parce qu'eUe contient le vocabulaire et diverses
pages qui ont été supprimés dons les éditions plus populaires, comme
la4'. Pourtant, celle-ci même offre quelques pages nouvelles (j'aurai plus
loin à la citer pour un passage que ne contient pas la 1°) et d'assez
nombreuses variantes. Mais il y a une ou deux autres éditions en z vol.
qui sont sans doute plus complètes. A cet ouvrage il convient d'ajouter
The Bible in Spain, du même auteur (dont la i' édition en 2 ou 3 voL
in 8.° est, je crois, de 1843: j'ai celle de 1S44, en \ vol. gr. in 18° com-
pact) ; car les Gitanos y figurent en plusieurs endroits, à commencer par
ceux de Badajoz. Précédemment Borrow avait publié l'Évangile de S.
Luc en gitano : Embeâ e Majoré Lucas, (Badajoz) i837, in lô" de 177
pages.
,ï Google
497
duits à ma connaissance, demeure le plus important qui ait
été écrit jusqu'à présent sur les Gilanos d'Espagne.
Ma conclusion, c'est qu'il reste beaucoup à faire pour
l'étude exacte des Tsiganes de la Péninsule ibérique, et qu'il
est bien temps que ce sujet intéressant appelle sérieusement
l'attention de quelques Espagnols et Portugais ; car sans doute
dans ces contrées comme partout, les vieilles traditions s'ou-
blient, les vieilles coutumes s'effacent, et la race des Gila-
nos elle-même, maigre sa persistance, va perdant de géné-
ration en génération quelques-uns des traits qui font son
originalité. Ce qui importe sunout, c'est que les nouveaux
investigateurs, tout en se mettant au courant des travaux
publiés à l'étranger et des questions nouvelles qu'ils soulè-
vent, ne se perdent pas dans les généralités, mais s'appli-
quent surtout à l'étude topique des Tsiganes du pays.
III
Une question qui passe pour vidée, mais qui à mes yeux
ne l'est pas, est celle des commaicements des Gitanos dans
la Péninsule. On admet généralement que cette race est en-
trée en Espagne par les Pyrénées vers le milieu du xv° siè-
cle. Ceux qui voudront bien tenir quelque compte des idées
que j'ai sommairement exposées plus haut, comprendront
que la question est beaucoup plus complexe.
D'abord, il est possible que la Péninsule ibérique ait
connu, sous des noms quelconques, les Tsiganes dès l'anti-
quité, dès les temps préhistoriques * ; et il est possible, à plus
'Je me suis métnt demandé si les Sicanesâe Sicile, qu'on fait gé-
néralement venir d'Ibérie, n'auraient pas été des Tsiganes. M. d'Arbois
de Jubainville {Les premiers habitants de l'Europe^ liv. i, ch. m) les fait
35*
r
Google
forte raison, que ce ;
Tsiganes chaudronnic
par les Pyrénées, soi
la Méditerranée par
faire connaître aiileu
drc assez vraissemb
Espagne au moyen-â
suadé, les Tsiganes i
septentrionale, il ser
en Espagne à la sui
première invasion re
Mais, sans perd
gration des Tsiganes
être le premier obje
y eût ou non des Tsij
que, — Tsiganes dont
assez différentes de (
identité ne fut nuller
cle, — il est presque
tanos actuels dérive
Qu'il en soit aie
bre par les Pyrénées
même possible que 1
cette voie; mais qua
A l'appui de l'op
sont pas sans connex
Gitanos par les Pyrei
recherches de M. M
venir de Gaule, mais là
serait de savoir si c'étaii
appartenu plutôt à la rai
Tsiganes font partie.
,ï Google
499
tano des éléments grecs, slaves et roumains*; évidemment
ces éléments avaient été importés par des Tsiganes établis
de longue date dans te sud-est de l'Europe, et qui, fuyant
rinvasion musulmane, n'ont pas dû prendre le chemin de
l'Afrique pour gagner l'Espagne. Soit; mais, de ce que beau-
coup de Tsiganes d'Espagne ont cette provenance et ont pris
ce chemin, il ne s'en suit nullement que ceux que l'invasion
musulmane mit d'abord en mouvement dans l'Asie Mineure
et en Sjrie n'aient pas suivi les rives méridionales de la Mé-
diterranée, entraînant peut-être avec eux des bandes tsiga-
nes établies de longue date en Egypte et en Barbarie, pour
aboutir à l'Espagne par Gibraltar. Les observations philo-
logiques de M. Miklosich ne prouvent absolument rien con-
tre cette éventualité, pas plus que contre la présence anté-
rieure de Tsiganes sur le sol ibérique; car il suffit qu'une
portion notable de cette population nomade ait apporté dans
sa langue des éléments grecs, slaves et roumains, pour que
CCS éléments se retrouvent aujourd'hui dans le dialecte gi-
* Miklosich, Ueber die Mundarten etc. ni, Wien, 1873, in 4° p. 42-46.
La même remarque s'applique au dialecte des Tsiganes du Pays bas-
que, iiiii, p. 38-3g. — Sans être aussi scientifiquement établie, la présence
importante de ces éléments étrangers dans les divers dialectes des Tsi-
ganes d'Europe avait été déjà très bien remarquée par plusieurs auteurs,
notamment parBorrow, The Zincali, 1841, t. n, p, 109-11 i.Borrow cite
même, à cet endroit, un curieux passage d'un savant livre du xvi* siècle,
El Estudioso Cortesano de Lorenzo Palmireno (Alcalà de Henares, iSS;,
pet. in 8° de 8 feuillets prélim. et i5o f. chiffrés: Borrow croît que ce
n'est pas la i' édition), duquel il résulterait qu'en l'année 1540 il y
avait encore des Giianos d'Espagne qui comprenaient le grec moderne.
Le fait est remarquable, mais non très surprenant, car on vit arriver en
Occident dans le cours du xV siècle quelques Tsiganes qui se donnaient
pour Grecs, et qui sans doute venaient de la Grèce ou des contrées voi-
sines.
ly Google
5oo
tano, où ont dû se fondre dans tous les cas des dialectes
tsiganes de diverses provenances. Je n^ai pas besoin de re-
marquer ici que des observations savantes et délicates sur
le dialecte gitano et les traces qui pourraient s'y trouver des
dialectes tsiganes d'Egypte et de Syrie, jetteraient peut-être
quelque jour sur la question.
Il serait important dans tous les cas de recueillir tout
ce qui peut rester de documents relatifs à l'apparition des
Tsiganes en Espagne. Pour mon compte, je n'en connais
qu'un, déjà cité par moi dans mon mémoire de 1844.* Il
constate l'arrivée à Barcelone, le 11 juin 1447, d'une amul-
titud de E^pcios», qui, de là, dit le chroniqueur, se répan-
dirent en Espagne. Il est très probable qu'en cherchant
bien, on en trouverait d'autres. Beaucoup de documents
analogues ne prouveraient pas que des Tsiganes ne soient
pas arrivés en Espagne aussi par Gibraltar, ni même qu'il
n'en existât pas antérieurement dans les provinces méridio-
nales de la Péninsule. Mais, outre leur grand intérêt intrin-
sèque, ils fourniraient des éléments nouveaux à la discus-
sion sur ce point important.
Je ne quitterai pas ce sujet sans noter deux ou trois
faits, qui me paraissent venir à l'appui de la conjecture que
des Tsiganes ont dû arriver en Espagne de PÉgyple, en
suivant naturellement le littoral africain.
' Voy. De l'apparition et de la dispersion des Boliémietu en Europe;
dans Bibliothèque de l'École des Chartes, 1844, p. Sïçj, ou tiré à part, p.
49. Ce document esl extrait des Anales de Calaluna de Feliu de la Petla,
Barcel. 1709, t. n, p. 483. — Un document presque identique, mais qui
présente pourtant quelques variantes, est cité par M. Francisque Mi-
chel, dans le Moyenrâge et la Renaissance de Paul Lacroix, in 4*, m,
1848, f. IT de l'art. Bohémiens, comme tiré d'un manuscrit des arcluTes
municipales de Barcelone.
^,
Soi
irmi les Gitanos une coutume qui, autant
woir, ne se retrouve point parmi les autres
ïpe, parmi ceux, du moins, qui n'ont pas eu
ifticulières avec leurs frères d'Espagne : Im-
ant sa première nuit de noces, la jeune fille
des matrones qui attestent sa virginité, etc.
me d'ailleurs répandue chez les Musulmans,
tourée chez les Gitanos de beaucoup de so-
choir sanglant qui a servi à l'opération mys-
■ntré à tous les gens de la noce et précieu-
i dans la famille. Borrow, qui n'a guère pu
utume, mais qui, écrivant pour le grand pu-
videmment craint de blesser sa pudeur, ne
ion obscure (p. 23g) à la défloration par les
3prime conséquemment les marques de sang
louchoir, qu'il mentionne pourtant en le dis-
einture de chasteté (dont je parlerai tout à
Borrow ne nous renseigne pas sur le point
'ant une noce gitana à laquelle il avait as-
Sme {p. 240) d'un mouchoir sans lâche «sans
lit pas eu de noce», et qu'on avait arboré,
ture de chasteté elle-même, comme drapeau
[ui serait tout à fait de nature à induire en
puis affirmer que la coutume que j'ai tout
: est certaine: bien avant Borrow, un autre
écrite* avec des détails accessoires qui ont
û concerne le mariage et panicuIiÈrement les deux
que je suis obligé ici de distinguer, et qui se mêlent
;s noms de lâcha et de diclé, voir tout le ch. vu (p.
rhe Zincali, dans la i" édition, 1841, qui est ici bien
a 4'.
anonyme que j'ai déjà recommandée, surles Gipsies
,Cs
502
leur intérêt; et moi, j'ai rencontré bien des fois en France
des Bohémiens plus ou moins affiliés à ceux d'Espagne, près
desquels j'ai pu m'assurer de sa réalité; plusieurs me l'ont
décrite en détail. J'ai appris ainsi que cette coutume, na-
turellement pratiquée aussi par la plupart des Bohémiens
du sud-est de la France qui se rattachent étroitement à
ceux d'Espagne, avait en quelque façon pénétré chez les Bo-
hémiens du Piémont et même de la Suisse, mais avec des
modifications importantes et qui lui ôtent une partie de son
cachet oriental '; et comme cette coutume ne se rencontre à
ma connaissance, chez les Bohémiens d'aucune autre con-
trée d'Europe', j'ai tout lieu de croire qu'elle est propre à
m Spain, i la suite des Travels thraigh Lower Hutigary de Richard
Bright, Edinb , i8i3, in 4°, p. lisii-lxxiii. L'auteur, qui donne en latin
les détails les plas scabreux, ne désigne le mouchoir en question que
par le mot de linteolum, que devient un paSiuelito dans le couplet
espagnol chanté par les Gitanos.
■ Je noterai seulement les principales difTérences, pour abréger. En
Piémont et en Suisse, la coastatation matérielle et préalable serait
remplacée par un serment solennel de la jeune fille. Puis, c'est la che-
mise elle-même de la mariée, qui, après la nuit de noces, est montrée
aux assistants. Cette chemise, tachée de sang, est hissée sur un arbre
de joie. Tous forment une ronde à l'entour; puis, on tire des coups de
fusil sur la chemise; et, comme ou a eu soin d'y mettre quelques piè-
ces d'artifice, elle est bientôt consumée. — En Espagne, au contraire,
d'après mes informations, le mouchoir sanglant est précieusement con-
servé dans la famille.— Je n'ai guère besoin d'ajouter que les vieilles
coutumes vont s'effaçant presque partout, même parmi les Tsiganes:
peut-être celles dont je viens de m'occuper, et qui me reportent à des
notes prises surtout en 1848, 1849, i85o, sont.elies beaucoup moins
pratiquées aujourd'hui qu'il y a trente ans.
* D'après quelques mots de Walter Simson (History o/lhe Gipsies,
Lood. et Edinb.., 1 86i, p. s6i ) qui me tombent tardivement sous les yeux
il faudrait pourtant faire une exception pour les Tsiganes d'Ecosse,
,ï Google
5o3
ceux de la Péninsule ibérique, et que ce sont des Gitanos
d'Espagne qui l'ont importée en Piémont et en Suisse, où
elle n'est probablement pratiquée que par quelques-uns, et
où elle s'est d'ailleurs modifiée, simplifiée.
Mais ce qui paraît encore plus particulier aux Bohé-
miens d'Espagne (et ici je me réfère entièrement à Borrow,
n'ayant rencontré moi-même aucune information sur ce dé-
tail spécial, auquel, à vrai dire, )e n'ai pas songé dans les
occasions assez fréquentes que j'ai eues autrefois de m'en
enquérir auprès des Bohémiens qui m'ont renseigné sur la
coutume précédente), c'est une certaine ceinture de chas-
teté que portent les jeunes Gitanasjique leur mère elle-même
noue d'une façon particulière, qu'elle visite et surveille con-
tinuellement jusqu'au jour du mariage*!.
Or cette coutume, qui se lie si étroitement à la précé-
dente, et qu'on chercherait vainement, je pense, parmi les
autres Tsiganes d'Europe, se retrouve parmi les Tsiganes
d'Egypte, et même, semble-t-il, dans toutes les subdivi-
sions que cette race présente en Egypte : d'abord, dans
la classe de ceux qu'on appelle les Helebis^, et dont les
femmes sont connues sous le nom de Fehemi, (littéralement
chez qui une coutume analogue, ce semble, s'ajouterait quelquefois à
une autre cérémonie nuptiale encore plus déplaisante, et que j'ai, d'ail-
leurs, lieu de croire fort peu usitée même chez les Gipstes des Iles Bri-
tanniques en général et de l'Ecosse en particulier. Je n'ai pas à m'ar-
réter sur celle-ci. Quant à la coutume qui nous intéresse en ce moment
je crois que, si elle existe réellement chez ceux d'Ecosse, elle a dû y
Stre importée par des Gitanos d'Espagne ou par quelque détachement
tsigane venant directement d'Egypte ou des contrées voisines; mais le
temps et la place me manquent pour rechercher les preuves ou les in ■
dices qui viendraient à l'appui de cette double explication.
' Borrow, ouvr. cit. p. 333.
*Newbold, The Gypsies of Egypt, etc. dans Journal of tbe R.
r
,,CjPoJ;l(
5o4
sages, non à cause de leur chasteté, maïs parce que ce
sont elles qui disent la bonne aventure), — puis, chez les
Ghagar, qui sont une autre branche de Tsiganes en Egyp-
te', ayant pourtant des mœurs plus relâchées, — et proba-
blement même jusque chez les Natver, troisième division
des Tsiganes d'Egypte*. Elle se retrouve aussi parmi les
Kurbat de Syrie, autre branche tsigane', qui, suivant la re-'
marque de Newbold, par^'t avoir des affinités particulières
avec les Helebis d'Egypte.
Asialic Society of Great Brilain and Irelandy vol. ïvi, Part, s, Lon-
don, i856, p. 389 et 193.
' C'est ce qui résulte du passage déjà cité de Newbold, p. 29? (où
la ceinture de chasteté est appelée hUg ou dilk), rapproché du voca-
bulaire comparé des Helebis, des Gbagaret des Nawer, où l'on voit
(p. 39S) que Mg est le nom helebl, et dilk le nom ghagar, de cette cein-
ture spéciale.
*En effet, en regard des deux noms cités dans ma note précédente
je trouve chez Newbold (même p. agS), dans la colonne de la langue
des Nawer, le mot /owi, qui parait bien indiquer que les Nawer eux-
mêmes, ayant un mot spécial pour désigner la ceinture de chasteté, se
servent conséquemment de cette ceinture.
*Newbold, p. 3oa.— Newbold est malheureusement trop bref sur
cette coutume; mais en rapprochant tous les passages que j'ai cités, on
se convaincra de sa singulitee conformité avec celle décrite par Borrow.
On remarquera aussi l'identité du nom de la ceinture en question chez
les Ghagar, dilk, et chez Borrow, dielé : je note en passant que didâ ou
diklô, qui signifie 'linge, mouchoir, fichu, serviette., chez tous les Tsi-
ganes d'Europe, serait sans douce plus correct au nominatif singulier,
même dans le sens spécial qu'il prend chez Borrow. Quant aux Bohé-
miens avec qui je me suis entretenu de la coutume précédemment in-
diquée, laquelle est comme le couronnement de l'autre, c'est le linge
teint de sang qu'ils appellaient latchà diclôi—latcho ayant le sens bien
connu de >bon> et pouvant peut-Ëlre aussi, par rapport au substantif
ladj, latch (chez Borrow lâcha) que je retrouve dans les divers dialectes
tsiganes d'Europe avec des acceptions un peu variées, signifier 'virgî*
,ï Google
Il me paraît assez présumable que, si nous étions mieux
renseignés sur tout ce qui se rattache au mariage chez les
Tsiganes d'Egypte et de Syrie, nous y retrouverions égale-
ment la coutume qui a été indiquée auparavant, qui vient
incontestablement d'Orient, et avec laquelle la fameuse cein-
ture est évidemment en connexité plus ou moins étroite.
Mais, pour nous en tenir à l'usage, bien constaté des deux
parts, de la ceinture de chasteté, comment expliquer son
existence en Espagne, autrement que par une immigration
de Tsiganes d'Egypte dans ce pays ? et comment ne pas re-
marquer que cette immigration a dû se faire directement
par la Barbarie et Gibraltar, puisque la coutume en ques-
tion n'existe pas, autant qu'on a pu le savoir jusqu'ici, parmi
les Tsiganes du midi ou du centre européens, où il en se-
rait au moins resté des traces, si les Tsiganes qui la prati-
quaient avaient fait, comme beaucoup d'autres, un long cir-
cuit par l'Europe *?
Les Gitanos ont aussi, pour désigner les gens étran-
nal> : le latchô diclà peut Être ainsi, ou le •bon mouchoir', le linge qui
porte un bon témoignage, ou le •mouchoir de la lâcha», le linge de la
vir^nité.
< Quelques iaformations postérieures à la présentation de mon mé-
moire au Congrès me donnent i penser que ta ceinture de chasteté
n'existe pas parmi les Tsiganes du nord de l'Espagne; il faut dont que
cette coutume appartienne à ceux de l'Espagne méridionale: circons*
tance qui mériterait confirmation, car ce serait un indice de plus de
la provenance égyptienne d'une partie des Tsiganes de la Péninsule
ibérique. L'usage de la constatation matérielle de la ^rginité au mo-
ment du mariage, qui doit avoir la même provenance, se serait répan-
du parmi tous les Gitanos d'Espagne, et mgme un peu au delà, tandis
que l'usage de la ceinture de chasteté — précaution plus délicate et plus
incertaine — serait resté confiné dans la région de l'Espagne où durent
r les Tsiganes venant d'Afrique.
,ïGooa
5o6
gers à leur race, un mot qui ne se retrouve pas chez les
autres Tsiganes d'Europe; c'est le mot Busnô^ dont Bor-
row me paraît même abuser, car il s'en sert toujours, quoi-
que un autre nom en usage aussi parmi les Gitanos, comme
parmi les autres Tsiganes d'Europe, pour désigner les étran-
gers, soit gadjo, pluriel gadjé fqu'il donne d'ailleurs dans
son vocabulaire sous la forme gâché); ma.is il n'a certaine-
ment pas inventé le mot busnô,, bustiiy auquel il a consacré
une page d'explication '. Suivant lui, busnô est un mot hon-
grois, en usage dans le bas peuple et parmi les gens grossiers,
et qui aurait à peu près la signification du juron espagnol
Carajo. Les Tsiganes de Hongrie auraient adopté ce mot
busnô pour désigner les Hongrois, c'est-à-dire ceux qui ont
constamment ce mot à la bouche; puis ce mot aurait été
transporté par les Tsiganes de Hongrie en Espagne, où il
aurait pris dans le dialecte gitano le sens général à^éiranger
(non Gitano)-— Des informations que j'ai prises auprès d'un
Hongrois, il résulte que les Hongrois ont effectivement un
mot grossier qui par le son rappelle le précédent, c''est le
verbe bas^m\ qui se prononce à peu près bosnt\ et qui a le
même sens que notre mot français, très grossier aussi, mais
très expressif^". .... ; celui-ci toutefois s'emploie à la fois
comme verbe et comme juron exclamatif, tandis que le mot
hongrois ne s'emploie, paraît-il, que comme verbe; mais,
cette réserve faîte, les Hongrois, m'assure-t-on, se servent du
mot baspii exactement de la même manière et non moins
fréquemment. Il ne serait donc pas surprenant que les Tsi-
ganes eussent fait de ce verbe un mot pour désigner les
*Non dans la i* édition de The Zincali (1841), où le mot figure
au vocabulaire avec une étymologie sanskrite (à laquelle il parait que
l'auteur a ensuite renoncé), mais dans la 4% en un seul volume (qui ne
it pas le vocabulaire), London, 1846, p. 256-i57.
,ï Google
_507
Hongrois; des faits analogues sont fréquents chez tous les
peuples et dans toutes les langues. Mais il ne suffît pas que
la chose soit théoriquement possible, il faudrait la consta-
ter. Or je n'ai vu nulle part que les Tsiganes de Hongrie
aient un pareil mot pour désigner les Hongrois'. Il m'est
donc permis d'écarter l'explication de Borrow, comme man-
quant de base, au moins jusqu'à présenta
< Ed fait de vocabulaires spéciaux du dialecte tsigane de Hongrie,
la principale source actuelle est le vocabulaire v de Miklosich dans le
fascicule ti de ses Mémoires in. 4.° Ueber die Mundarten und die Wan~
derungen der Ztgeuner Europa's. (ce voc a b. contient 1684 mots; il faut
y ajouter les vocab. vi et vu, qui sont très courts). J'y vois (p. 44) que
tes Tsiganes de Hongrie désignent ordinairement les Hongrois, comme
les étrangers en général, par le mot gad\o. — Je trouve, toutefois, dans
le vol. de 168 p. in. 8° (en allemand) que le comte Rudolf Wratislav-
Mitrovic a fait imprimer à Prague en 1868, et qui concerne les Tsiga*
nés particulièrement en Autriche (p. 161), un nom tsigane pour désigner
les Hongrois, c'est Tchivalo; mais ce nom, qui du reste n'est pas aussi
spécial qu'il semble (voyez Liebich, p. i65, et Paspati au mot Tchibalo)
n'a aucun rapport avec busnà.
' De son coté, H. Poti {Die Zigeuner, 1. 11, 1845, p. 34), sans s'ar-
rêter à l'étymologie sanscrite donnée d'abord par Borrow dans son
Vocab. de [841, a proposé avec doute une étymologie indienne du
mot busno, qui me paraît improbable. Quant à M. Miklosich, /. c. fasc.
VH, p. z6, il rattache le mot han6 des Gilanos signifiant étranger, au
mot bujno, bu^ni, qui, dans les divers dialectes tsiganes d'Europe, signi-
fie bouc, chèvre. Comme le bouc est un animal, non seulement assez sau-
vage, mais puant et reprouvé, celte origine du busnà des Gitanos n'au-
rait nen d'i m vraisemblable; et l'on pourrait même remarquer à ce su-
jet que le mot bujno, avec la signification primitive de bouc, ne paraît
plus exister dans le dialecte gitano, par exception à tous les autres dia-
lectes tsiganes. —On pourrait encore rapprocheriiund de £fUno ou frttcAno
qui signifie coq dans le dialecte gitano comme dans les autres dialectes
tsiganes d'Europe.— Mais aucune de ces explications ne rendrait comp-
te de l'existence exclusive des mots busnô et hiatto, signifiant l'un et
,ï Google
5o8
Ce qui est certain, c'est que le mot busnô est employé
sous la forme husno, avec le même sens d'étranger (non
Tsigane} par les Helebïs, une des principales divisions des
Tsiganes de l'Egypte '. Il paraît clair, d'après cela, qu'un
certain nombre de Tsiganes d'^ypte l'ont importé en Es-
pagne.
Parlerai-je, maintenant, des noms des Tsiganes en Es-
pagne et en Portugal? Celui de Gttanos, primitivement Eg^-
pcianos, est le même que celui d'Ég^yptien, l'un des premiers
qui eurent cours en France, et que celui de Gipstes qui
est leur principal nom en Angleterre. Bien que ce nom,
qui existe aussi en Hongrie et en Roumanie sous une autre
forme [Pharaonttes ou peuple de Pharaon), paraisse avoir
été appliqué en Grèce aux Tsiganes dès avant leur im-
migration du XV* siècle dans l'Europe occidentale*, il est
prouvé d'une manière générale que ce sont les Tsiganes de
cette immigration que l'ont eux-mêmes accrédité chez nous'.
Ce nom semble donc rattacher tout particulièrement les Gi-
tanos à cette immigration. Si, pourtant, le nom à'Egypcia-
nos fut appliqué en Espagne aux Arabes conquérants bien
avant le xv* siècle et depuis, comme l'indique M. Jaubert
de Passa *, la question se complique en Espagne. 11 y aurait
là matière à une étude, où il s'agirait de bien préciser l'em-
ploi et la valeur du mot Egypctanos dans les documents es-
pagnols des époques en question, et de constater tous les
l'autre étranger, dans le dialecte des GJtanos et dans celui des Helebis
d'Egypte.
< Voir le travail déjà cité de Newbold, p. 290, igS et 39S.
* Voir Étal de la question, p. t6.
■Voir mon 1" mémoire sut l'Apparition des BtAémiera 1844, p.
îo, 3o-32, 34, 37, sunout 40 et encore p. 43.
* Ouvr. cité plus haut, p. 33o et suiv.
,ï Google
5o9
noms qui ont pu être donnés alors aux Tsiganes dans la Pé-
ninsule*. Peut-être en même temps, arriverait-on à y trou-
ver ceux-ci, non seulement avant 1447, mais même avant
le xv" siècle. Je répète, que, si, comme j'en suis convaincu,
et comme j'en ai déjà la preuve pour l'Egypte, les Tsiganes
existaient dans l'Afrique septentrionale bien avant le xv' siè-
cle, les invasions arabes et mauresques ont bien pu en ame-
ner à leur suite ou leur frayer le chemin.
Quant au nom de Ciganos, qui est resté le nom usité
en Portugal, il serait particulièrement intéressant d'en cons-
tater les premiers emplois dans les documeuts de ce pays'
et d'en rechercher la provenance. En thèse générale, ce nom
de Tsiganes (diversement moditîé) n'est répandu que dans
l'Europe orientale (d'où il s'est propagé cependant jusqu'à
< En France même les Tsiganes ont porté des noms divers, notam-
ment celui de Sarrasins dans le midi : je les trouve déjà sous ce nom à
Sisteron en 141g (v. mon mém, de 1844 p. 36). — D'un autre côté, j'ai
montré ailleurs (Érii( Je /a ^«(ion... p. ï5-2g) que les Tsiganes étaient
connus, dès iizi,en Autriche sous les noms de Kaltschmide (chaudron-
niers) et d'Ismaélites; et j'appelle particuliêremend l'attention sur les
• CaJdereros estrangeroS' qui figurent dansl'éditdeFerdinand et d'Isa-
belle rendu à Médina del Campo, en 1499 {The ZincaU, t. i, p. igS-igô)
et qu'on pourra retrouver dans des documents bien plus anciens.
* Le premier document portugais que je connaisse conceriiant les
Tsiganes est l'ordonnance donnée à Lisbonne, en i538, parDom Joâo
m, pour leur expulsion et leur châtiment (voir l'article Bohémiens de
Francisque Michel dans Le Moyen Age et la Renaissance publié par
Paul Lacroix, in 4'', t. i, 1848, fol. vi, v.» de l'article). Ils y sont déjà dé-
signés sousl'unique nom de Ci^'onos et seulement comme des vagabonds.
—Cette ordonnance, dont l'observation, dit Fran. Michel, fut réclamée
par les prélats du royaume dans les coriès de décembre 1 562, prêterait
à quelques rçmarques^ dont je m'abstiens pour ne pas alloager cettQ
note,
,ïGoogl^^
5io
l'Allemagne occidentale et dans toute l'Italie), et la limite de
son usage correspond presque à la limite de cette grande
zone orientale où je prétends que les Tsiganes étaient éta-
blis depuis des temps plus ou moins anciens. Comment ce
nom se retrouve-t it en Portugal, c'est-à-dire à une extrémité
occidentale de l'Europe? L'histoire des rapports maritimes
du Portugal avec l'Orient explique peut-être suffisamment
celte anomalie; on peut se demander, pourtant, si ce nom
n'aurait pas été apponé en Portugal par une immigration
tsigane de l'Afrique, peut-être antérieure au xv* siècle? Je
rappelle à ce propos, que le nom des Tsiganes en Algérie
est Guesâni ou Gued^âni^ qui se prononce Gsâni, D^âni,
Tsâni, et qui est une corruption presque certaine du nom
Tsigam*.
En fait de noms ethniques, je voudrais voir soumis aussi
à une révision rigoureuse tous ceux que les Gitanos ou G-
ganos se donnent eux-mêmes. Je ne suis pas certain, par
exemple, que celui de Zin-calo que M. Borrow a adopté, et
qu'il traduit par homme noir de titide, nom qu'on ne ren-
contre pas hors de l'Espagne, soit d'une authenticité parfai-
te. Le nom de Calo^ noir, est bien connu comme nom ethni-
que employé par les Tsiganes; mais Zincalo, ou quelqu'au-
tre qui s'en rapprocherait, ne serait-il pas tout simplement
le nom de Cigano ou Tingano altéré ? C'est ce que Pott paraît
présumer'. Le nom de Chai, donné par Borrow' comme nom
ethnique, et qu'il rattache au nom par lequel les Gitanos de
l'Estramadure désignent l'Egypte, me paraît aussi plus que
suspect; ce n'est sans doute qu'une mauvaise entente des
' Voy. mes Noies et questions sur les Bohémiens en Algérie, extrai-
tes du Bull, de la Soc. d'Anthr. du 17 juillet 1873.
* Die Zigeuner, t. 1, p. 35 er 44; 1. 11, p. aïg.
^Ouvr. cit, 1. 1. p. 38.
,ï Google
5ii
mots chavo ou tckavo, garçon, chat ou tcha't\ fille, que les Tsi-
ganes employent quelquefois comme noms ethniques*.
Mais je me suis laissé entraîner, et je crains d'avoir
déjà dépassé la mesure convenable, surtout pour une com-
munication qui sort un peu du cadre que s'est tracé le Con-
grès.
Je tiens à ajouter, cependant, qui si l'histoire des ori-
gines particulières des Gitanos de ia Péninsule et l'étude de
toutes les questions qui s'y rattachent, présente un grand
intérêt, c'est l'ethnographie, topique aussi, de cette grande
fraction de la race tsigane, qui appelle surtout les recher-
ches, et qui promet d'être le plus féconde. Ici la matière est
infinie; et j'aurais trop de questions à poser. Mais les per-
sonnes que le sujet pourrait intéresser en trouveront un as-
sez grand nombre disséminées dans les divers écrits que
j'adresse au Congrès. Je me bornerai à remarquer que l'eth-
nologie des Gitanos ou Ciganos en Espagne et en Portugal,
comme en tout pays ou en toute province (car chacun peut
restreindre son sujet, et les monographies les plus resser-
rées ne sont pas toujours les moins intéressantes), comprend
deux parties, qui se touchent et se pénètrent souvent, mais
qui n'en sont pas moins différentes.
La première pourrait s'appeler Statistique ethnographi-
que, et comprendrait tous les détails extérieurs de la vie
des Gitanos. J'appelle ici particulièrement l'attention sur
leurs métiers divers, qui devraient être tous énumérés dans
l'ordre de leur importance, et dont on décrirait minutieuse-
' Alors ils y joignent ordinairement l'adjectif n)m(ino(tstgane). Ainsi
les Tsiganes d'Alsace disent assez souvent romane tchavé (les gars tsi-
ganes), au lieu de Roma tout court. Mais on comprend que l'adjectif puisse
quelquefois disparaître, et que, dans un dialecte corrompu, les formes
du substantif soient mal employées.
CR. 36
,ï Google
5l2
ment ceux qui le méritent, à commencer par les occupa-
tions métallurgiques, sur Pintérêt particulier desquelles je
n'ai pas à insister ici. Tout le monde sait, par exemple, qu'il
y a beaucoup de forgerons parmi les Gitanes de Grenade
ou plutôt du Sacro Monte, et qu'il y en a aussi parmi ceux
du faubourg Triana à Sévillc; mais on manque de détails sur
eux, sur l'origine du fer qu'ils emploient, sur leurs outils,
sur leurs procédés de travail et sur leurs divers produits.
On voudrait savoir aussi la proportion des forgerons parmi
les Gitanos de l'Espagne en général et de l'Andalousie en
particulier, connaître leurs habitudes nomades ou sédentai-
res, etc., comme celles de tous les autres métiers. Et puis,
l'industrie du forgeron n'est sans doute pas la seule industrie
métallurgique des Gitanos et des Ciganos? Y a-t-il parmi
eux en Espagne et en Portugal des chaudronniers, des fer-
blantiers, des étameurs? Y a-t-il des fondeurs en bronze et
en laiton, des orfèvres même et des bijoutiers? Enfin y a-t-il
des orpailleurs?'
Et des industries si intéressantes ne demandent pas
seulement à être minutieusement décrites; il faudrait, d'une
part, tacher de saisir au moins quelques indices de leur
progrés ou de leur décadence, qui permettent de conjectu-
rer ce qu'elles ont pu être dans un passé plus ou moins
lointain*; et il faudrait, d'autre part, s'attacher à saisir les
' Pour ce qui me regarde, ces questions sont les premières qui
m'intéressent; et je serais fort reconnaissant ù quiconque voudrait bien
m 'envoyer quelques informations ù cet égard. Je sais, d'ailleurs, qu'on
doit trouver des chaudronniers, des orpailleurs et même des fabricants
de certains objeets d'orftvrerie; mais ce sont les détails précis qui nie
font défaut.
* Dans le Voyage en Espagne de MM, Gustave Doré et Ch. Da-
villier qu'a publié le Tour dit Monde, ei qui contient quelques détails
^„,Co(J^lc
5i3
connexités qui peuvent exister entre ces industries primiti-
ves et entre ceux qui les exercent, de manière à reconnaître
et peut-être à recomposer certains groupes, certains corps de
métiers, plus ou moins complexes. L'ethnographie comparée
des Tsiganes pourrait fournir à cet égard des points de com-
paraison utiles : par exemple, dans les régions du bas Danube,
le métier des Aurari ou orpailleurs et celui des Lxngurari ou
fabricants d'ustensiles de bois (deux industries bien différen-
tes, mais toutes les deux très primitives) sont toujours réu-
nis, et ceux qui les exercent forment une classe à part. Les
intéressants sur les Gîtanos, je lis (n." 260, dëcemb, 1864, p. 408, 2' col.)
■qu'il existait autrefois une loi qui défendait sévèrement aux Gitanes
de travailler le fer*. Il s'agit, je suppose, de l'édit de Charles 11, du 12
juin 169J, qui -leur interdisait les métiers de maquignon et At forge-
ron, en un mot tout autre exercice et genre de tIc que celui de culti-
vateur de la terre- (voir De Rochas, p. 287, qui date, par erreur sans
doute, cette loi de 1693; et surtout Borrow, 1841, 1. 1, p. 202-204). Du
reste, le plus ancien édit connu qui concerne ces étrangers en Espagne,
celui de 1499 contre les Egipcianosy caliereros extrangeros, que j'ai
déjà cité (en noie quelques p. plus haut) proscrit indirectement les mê-
mes métiers, puisqu'il leur enjoint de se fixer dans les villes et les villa-
ges et d 'y chercher des maîtres sous lesquels ils auront â servir pour leur
subsistance, faute de quoi ils devront vider le royaume dans le délai de
60 jours (Borrow, 1. 1, p. 195-196; De Rochas, p. 2i5 et 288). Ces éiîits et
beaucoup d'autres du mÊme genre, qui interdisaient aux Gitanos les
seuls métiers qui soient dans leurs aptitudes, durent avoir tout particu-
lièrement pour effet de diminuer beaucoup parmi eux les forgerons et
chaudronniers; car ce sont là des métiers qui exigent un petit matériel
difficile à dissimuler, et surtout un apprentissage traditionnel, qui ne
se retrouve pas aisément, une fois perdu. — On peut, ce semble, induire
de ce qui précède, que les ouvriers en métaux furent autrefois beau-
coup plus nombreux qu'aujourd'hui parmi les Bohémiens d'Espagne;
mais l'étude des documents fournirait sans doute des données plus pré-
cises sur ce point comme sur plusieurs autres.
36*
.yGoogU
r
5i4
Caldarari (chaudronniers) et les Spoïtori, (étameurs) quoi-
qu'ayant des occupations bien voisines, forment, au contraire,
deux corps de métiers différents, deux classes distinctes.
L'importance de ces classiBcations peut être inégale^ mais il
faut commencer par bien constater celles qu'on peut aper-
cevoir.
La Statistique ethnographique pourra toucher ainsi à
des points délicats, que VEthnologie intime de la race per-
mettra quelquefois d'éclaircir. Sous ce dernier titre, je com-
prends la connaissance de toute la vie intime des Gitanos,
de leurs traditions, de leurs coutumes, de leurs superstitions,
de leur caractère et de leurs mœurs. Cette seconde partie
de la tâche n'est pas à la portée de tout le monde, et, à
moins de relations très suivies avec des gens qu'il n'est pas
toujours agréable de fréquenter, elle sera souvent ingrate et
assez stérile. C'est pourquoi elle ne méritera pas toujours
une place à part. Mais, dans tous les cas, les traits par-
ticuliers qu'on pourra y recueillir gagneront souvent à être
rattachés à tel groupe qu'on aura su distinguer préalablement
de tel autre, car il se peut que tous les groupes n'aient pas
des traditions et des coutumes identiques; et c'est pour-
quoi il importera toujours d'éclairer d'abord sa route en
commençant par recueillir les éléments de cette statistique
ethnographique que j'ai placée en première ligne, qui con-
tient déjà tant de données essentielles, et qui risque fort de
rester la partie la mieux remplie du programme.
Par bien des poin
diqué, la vie extérieurt
chent et se pénètrent,
treinte, plus ou moins
dans certains groupes i
points mixtes qui ont tn
lyGoogle
5i5
cis. Tels chefs étaient autrefois reconnus par l'autorité espa-
gnole ou portugaise et le sont peut-être encore aujourd'hui,
comme répondant plus ou moins de leurs subordonnés: l'his-
toire de cette institution singulière (qui se retrouve dans bien
d'autres pays) ne serait pas à négliger; et il faudrait tâcher
de démêler ici la part de raction extérieure et celle de la
propre tendance des Gitanos à se donner des chefs.
Les habitudes de pérégrination des Gitanos de tels ou
tels groupes, leurs relations avec des Tsiganes étrangers, la
question de savoir si des Tsiganes passent d'Espagne en
Afrique, et d'Afrique en Espagne*, voilà encore autant de
points mixtes, qui ont leur grand intérêt.
Les émigrations et les transportations de Gitanos dans
les colonies espagnoles ou portugaises, notamment au Bré-
sil, formeraient un chapitre d'un autre genre.
Je n'ai rien dit des études anthropométriques et pres-
que rien des études philologiques. Je ne les oublie pas; mais
< La GaïettedeMagdebourg{en allemand), n.° 16 de janvier 1846,
donnait la nouvelle suivante (reproduite par M. Pot t dans la Zeilschrifi
der Deuischen morgenlanJ. Geseilschaft, t. iir, 1849, p. SiS) ; iDepuJs quel-
que temps, on remarque parmi les Bohémiens d'Espagne un mouve-
ment et une agitation extraordinaires: beaucoup d'entre eus semblent
se préparer à quitter le pays, et l'on assure qu'ils veulent tous émigrcr
en Afrique, parti cul ièremem en Maroc ; le nom d'Abd-el-Kader est dans
toutes les bouches.- li serait intéressant de savoir s'il y a eu quelque
chose de vrai dans cette étrange nouvelle. — Pour ce qui regarde un
passé plus lointain, ii est bien probable que, à la suite des édits de
proscription, on a dû souvent transporter des Gitanos en Afrique. Le
Portugal avait dans cette partie du monde des lieux de déportation,
auxquels l'ordonnance de i538 (mentionnée en note dans une page
précédente) destinait les nationaux vivant â la manière des Ciganos,
mais qui ont bien pu, ainsi que les présides espagnols, s'ouvrir aux Bo-
hémiens eux-mêmes.
,ï Google
5i6
je les considère comme trop spéciales pour figurer dans ce
petit programme. Les remarques qu'on pourrait faire sur
certaines différences de type, et notamment les données qu'on
pourrait recueillir sur des croisements de sang tsigane et de
sang maure, ou arabe, ou kabylf, auraient d'ailleurs plus
d'intérêt que des mensurations anthropologiques faites au
hasard: l'anthropométrie n'interviendrait utilement que pour
les contrôler.
Quant au dialecte gitano, il est passablement connu, et
ce n'est qu'une philologie savante et raffinée qui pourrait ti-
rer de son lexique et de sa grammaire fort altérée des con-
tributions nouvelles et importantes à la connaissance géné-
rale de la langue tsigane. Ce qui importerait davantage, com-
me je l'ai déjà indiqué, c'est l'étude des éléments étrangers
qu'elle peut contenir et particulièrement des éléments que
les dialectes tsiganes d'Afrique ou de l'Asie antérieure au-
raient pu lui fournir; mais ceci encore n'est pas à ta portée
de tout le monde.
Ce qui est à la portée de tout chercheur attentif, c'est
de recueillir exactement tous les noms ethniques que les Gi-
tanos se donnent et de contrôler ceux qu'on leur a attribués,
et de recueillir également tous les mots qui peuvent avoir
un intérêt ethnologique ou archéologique, à commencer par
les noms des métaux, des outils employés en métallurgie,
des armes primitives, des ustensiles essentiels, et de tout
ce qui se rapporte aux usages et aux coutumes de la race.
Les acquisitions linguistiques ainsi considérées ne sont qu'un
complément, maïs un complément très utile, de l'ethnolo-
gie. On voudrait pouvoir y joindre, à l'occasion, des contes,
des légendes, des chants; et je suppose que le chercheur en
question, sans être tout à fait étranger à la langue gitam,
n'est pas très familier avec elle. Mais les contes et les lé-
.ïGoogle
in
les traditions, qui ont encore plus d'îtnpor-
[ue autant d'intérêt en espagnol qu'en gita-
Irait toujours les traduire: tout ce qui im-
. soient fidèlement recueillis. Pour les chants,
férent, mais il n'y en a guère qui aient un
quant à ceux qui en auraient, on fera son
e les approprier, dans la langue originale,
;n entendu de se les faire traduire.
de tout ce qui précède, j'appellerai l'atten-
anes chaudronniers qui depuis une douzaine
iennent de Hongrie ou des contrées voisi-
"siganes conducteurs d'ours, venant la plu-
■, qui se sont mis un peu plus tard ù faire
;rinations européennes. Je sais que des ban-
dronniers, après avoir passé par la France,
t'en Espagne, jusqu'en Algérie. Je n'ai pas
ximbien ils sont intéressants à étudier ; les
et les itinéraires de ces caldaran, ainsi que
, doivent être notés aussi exactement que
rais reconnaissant aux personnes qui vou-
fournir ces renseignements.
s achever cette communication un peu anor-
avouer, Messieurs, qu'en l'écrivant, j'ai été
lié de m'arrêter, et que je ne vous l'envoie
:nsion. Il me faut bien reconnaître, en effet,
idirectement préhistorique, puisque je vous
les Gitanos ou Ciganos actuels. N'est-il pas
que le préhistorique a souvent des lien;
choses modernes et actuelles? On a trouvi
exemple, d'étudier les déformations tou
le comme restes d'usages très anciens, e
,ï Google
5i8
on étudie avec le même empressement les trépanations po-
pulaires partout où l'on peut en trouver la trace actuelle.
Si l'on venait vous dire aujourd'hui qu'on a découvert en
Portugal une mine d'étain importante, ne courriez-vous pas
l'étudier ? Je pourrais multiplier ces exemples. Hé bien, l'exis-
tence actuelle, et au milieu de nous, d'une race qui, on peut
l'affirmer, quelles qu'aient été ses destinées, est restée à
peu prés identique à elle-mSme depuis plusieurs milliers d'an-
nées, et qui a pu être le principal agent de la diffijsïon des
métaux en Europe, n'est-ce pas là un fait bien plus curieux
encore et bien plus digne de nos études? — Ce dernier point
est loin d'être certain, me dira-t-on. — Je l'accorde; mais ne
suffit-il pas qu'il soit possible pour mériter notre attention?
Possible, il l'est certainement; personne aujourd'hui ne peut
affirmer le contraire; et dès lors, cette race tsigane, qui, dans
tous les cas, je le répète, est une race préhistorique mer-
veilleusement conservée, doit être étudiée ici, non pas seu-
lement dans un passé très lointain et bien difficile à ressai-
sir, mais d'abord dans son présent, dans son état actuel.
Voilà ce que je me suis dit, et j'ai poursuivi ma petite
tâche. Tout mon regret est de ne l'avoir pas mieux rem-
plie. Je ne vous ai guère apporté que des questions, et j'ai
osé proposer un petit plan d'études, dans l'espoir d'éveiller,
au midi des Pyrénées, les idées de quelque jeune chercheur,
et dans la pensée que ma vieille expérience pourrah lui être
de quelque utilité.
Rien n'est si difficile que de faire un bon questionnaire,
et il y aurait fallu beaucoup plus de place. Mais je sais que
j'ai été déjà trop long et je m'arrête.
foogle
DE L'ORiaiNE PROBABLE DES TOUEHASES
LEURS MIGRATIONS A TRAVERS L'ASIE
M. G. DE Vasconcellos Abreu
L — Le FroUAme
Les considérations que je vais vous présenter ne sont pas
de l'ordre de celles que l'auteur croit être l'apport d'un résul-
tat définitif pour la science. Je me présente sachant d'avance
que mes recherches ne méritent point l'honneur du nom de
contributions. Je ne viens pas vous soumettre un travail,
mais tout simplement des doutes. Mon but est d'appeler
l'attention des ethnologistes, des géographes et des on
talistes, sur un problème qui, je crois, est encore à rés<
dre.
Il a été le sujet de doctes recherches de la part
quelques savants de premier rang, entre autres, den
rement, de la part de M. le baron de Richthofen dans
i" volume de son grand ouvrage sur la Chine. Aussi ce
partie introductoire déjà publiée*, écrite avec autant de
lent que de vraie science, fait désirer ardemment la cent
sien de ce monument littéraire et scientifique.
■ Le 1*" volume a paru dans le comnaencemeni de 1883. Il
extraordinairement intéressant pour le géolc^e.
T
„Google
520
Dans une note, vraie dissertation qu'on lit p. 439-44[,
le savant auteur dit: «La question relative aux Toukhâres,
à leur patrie originaire, à leurs caractères ethnologiques, à
leurs migrations, et aux pays qu'ils ont habités aux ditfërentes
époques, est du plus grand intérêt. Des combinaisons mul-
tiples ont donné naissance à une série singulière de syno-
nymes qui a fait du nom de Toukhârt la désignation la plus
usuelle de différents peuples voisins et à des époques diver-
ses de l'antiquité. Nous en avons un témoignage important
dans la savante investigation de M. Vivien de Saint-Martin,
Mémoire sur les Huns blancs ou Ephthaîites des historiens
byzantins. Études de géographie ancienne. Paris i85o p.
233-351..
C'est précisément ce problème gros de résultats et rela-
tif, je ne dis pas, et pour cause, à la patrie primitive, mais
à la filiation ethnologique des Toukhâres, leurs migrations,
leurs rapports historiques avec les peuples des anciens em-
pires, et leur part dans les luttes des peuplades et tribus de
la Grèce pré-hellène et de l'Asie-Mineure, dans les civilisa-
tions et dans les relations commerciales avec les peuples de
l'Orient, que je crois être encore sans résolution.
M. de Richthofen n'a pas atteint le but qu'il s'était
proposé en s'efforçant de démontrer que les désignations de
Toukhâres et de Yuë-tchî appartiennent à un seul peuple,
qui depuis son origine aurait habité les environs de Kho-
tan, iAux ToukhâreSy dit le savant professeur de Bonn —
correspondent les Yuë-tchî de la dynastie des Han, les Yeta
de la dynastie des Wêi, les Haiathaîah ou Haithal des Per-
ses, les 'EfBaXiTai et les Hum blancs des auteurs byzantins,
les Thedal des Arméniens, les Kouchan de ceux-ci et des
Arabes, les Djates actuels de l'Inde, selon M. de Saint-Martin
et de plus les Indo-Scythes des auteurs grecs, selon d'autres
ly Google
5a I
résultats plus anciens. Tout récemment M. le colonel Yule
(Notes on Hueti-TTtsang's accounl of ihe principaîities of
Tokhdristdn, Jout-nal ofthe Royal Asiatic Society n. s. vi,
1 873, p. 92-1 20), est venu confirmer par de pénétrantes inves-
tigations, et mettre hors de doute, les conjectures élaborées
depuis Rémusat par exemple àAns— Remarques sur l'exten-
siondel'EmpireehinoisducôléderOcddent(penodedeT&ng)^
sur l'identité des To^apoi des Grecs, des Tou-ho-lo des Chi-
nois, des Tokhares des Arabes (de ce nom on a formé To-
kharistan) et très probablement des Toukhâras de la littéra-
ture hindoue, avec les anciens Yuë-tchî.*
Je ne puis pas accepter cette conclusion ; je crois tout
au contraire pouvoir démontrer une différence, au point de
vue ethnique, bien tranchée entre les Toukhâres et les Yuë-
tchî. Qu'il me soit permis de dire que ce^-hors de doute est
un peu hors de temps; car M. le colonel Yule liù-même ma-
nifeste quelques doutes (p. 95 de l'ouvrage cité) à ce pro-
pos. J'en parlerai au § iv.
Dans ce mémoire je tâcherai de démontrer la fausseté
de l'identité établie entre les Toukhâres, le peuple désigné
par Strabon ' sous le nom de Toxapoi, les Tou-ho-lo et les Yu'é-
tchi. Je ne me laisserai pas toutefois entraîner par le désir
d^itudier les rapports ethnologiques existant entre les Toukhâ-
res et les Djates du nord-ouest de l'Inde. Ceux qui désireront
approfondir cette question, pourront consulter, outre l'ouvra-
ge de M. de Saint-Martin (cité par M. de Richthofen), ceux
de M. EUiot' et ropinion de M. le général Cunningham^.
< L. XI, oap. VIII, 2; p, 438, L 33. Muller-Diibner. Didoi.
* Memoirs on the History, Folklore and Distribution 0/ the Races
0/ ihe North-western provinces of India. Elliot-Beames. London. 1869.
vol. I, p. i3o-i37, Ç9-102.
* Archœological Swvtty 0/ India, vol. 11 (Etknology), p. 43-81.
,ï Google
52Î
Je ne conteste pas que les ToukhSres, Tukhâra des
Hindous et Tôxixpoi de Strabon, ne soient un seul et même
peuple — à. de difftrentes époques, cela va sans dire. Je ne
conteste pas non plus que la dénomination de Yuë-tcht, au
temps des Hans, n'ait pu comprendre avec les Yuë-tchî
une ou plusieurs tribus des Toukhâres, surtout à partir de la
seconde moitié de ta première période de cette dynastie (îoS
av. J.-C— 58ap. J.-C.}.
L'opinion que je combats est celle qui affirme quç les
Yuë-tchî et les Toukhâres ont été un seul et même peuple,
et ma conclusion sera que la dénomination de Toukhâres a
fait disparaître en Occident, où elle était plus ancienne, la dé-
nomination de Yue-tchî^ plus familière aux Chinois.
n. — Les argnmenta d« M. de Rlobttiofen
On sait aujourd'hui, et M. le baron de Richthofen l'ex-
plique en détail ' que les Yuë-tchî, habitants de la partie
orientale du bassin de Tarym, sont arrivés l'an laS avant
J.-C. par des marches successives faites depuis !'an iSy, à
travers la Tsoungarie, à la Transoxiane et à la Bactriane.
Ils y ont anéanti le royaume grec de la Bactriane* et ^y
sont établis d'une manière définitive. Strabon qui nous a
laissé une relation importante de cet événement, rapporte
le fait à ditférents peuples venus d'au-delà de l'iaxarte. Ces
peuples sont les 'Avist xcci IIccaKcvst -xai Tô^^apot x;^! 2a;(ctp»uXoi.
Ptolémée parle d'un grand peuple, habitant la Bactriane
■ Comp. note 5, p. 43ç^44i avec p. 446 et suiv.
* Spiegel, Eranische AUerthwnskunde, m vol. p. 64. Ràwlinson, The
Sixtk Oriental Monarchy, p. i55 et suiv. M. de Richthofen, uf supra.
et qu'il appelle les Tokhari\ aussi les Thagori, habitants
d'une région que M. de Rtchthofen identifie (p. 440, 489)
avec l'ancienne ville Tou-ho-îo dont parle le pèlerin chinois
Hiouen-Thsang' au vu" siècle de notre ère.
La différence de prononciation étant un fait purement
local, est due à la séparation des différentes tribus; prolongée
pendant plusieurs siècles, elle n'empêche pas M. de Richt-
hofen d'identifier l'ancienne Tou-ho-lo avec la région des
Thagori. J'accepte comme vraie l'identification des deux noms
dans les ripes de tOxus et les versants septentrionaux du
Kuen-hun. Le nom de Tou-holoen chinois est le correspon-
dent phonologique dusanskritTukhâra. On voit donc que
les Tokhari ou Tokharot de Strabon venus d'au-delà de
l'Iaxarte sont identiques, au moins pour le nom, à ces Tou-
khâres de la littérature hindoue. Mais pouvons-nous en con-
clure avec M. de Richthofen que ce soient les mêmes peu-
ples que les Yuë-tckV Je ne le crois pas.
Un seul fait est incontestable : le nom de Yuë-tckî se
rencontre à une certaine époque et sur le même lieu géo-
graphique que celui d'un peuple désigné par Strabon par
le nom grec Tokharot; quelques siècles plus tard, Hiouen-
Thsajqg désigne ce peuple par le nome hinois de Tou-ho-lo,
corresirandant phonologique du vocable sanskrit tukhâra,
de même que celui-ci l'est encore du grec Tokharot (Comp.
l'exposé du fait tel que je viens de l'énoncer avec l'exposé
que M. de Richthofen nous donne p. 489 n, b.).
A ce fait viennent s'en ajouter d'autres, qui à première
vue semblent appuyer l'hypothèse de M. de Richthofen.
Les voici:
Le Tokhâristàn fut une des capitales du Bouddhisme
' Stanislas Julien, Mém. sur les contrées occidentales^ 11 vol, p. 147.
,ï Google
524
sur l^Oxus, et ses habitants y gardaient k côté de la religion
nouvelle un grand nombre des usages propres aux habitants
de Khoian; ce dont les Chinois se sont aperçus au vu" siècle
de notre ère. Or la patrie originaire des Yue-tchî fut, d'après
ce que présume M. de Richthofen, près de Khotan. Je revien-
drai sur ce fait hypothétique {§ iv).
M. de Richthofen admet encore une hypothèse que
je ne crois pas suffisamment fondée: c'est que les Yue-tclû
furent les premiers convertis au Bouddhisme. Celte hypo-
thèse a pour base la tradition rapportée par De Guignes
(Mémoires de l'Académie Royale des Inscr., vol. xl, 1780.
p. 31 5). D'après cela il y aurait eu, déjà en l'année 288 av.
J.-C, une pyramide ou pagode de Fo (Bouddha) chez les
Petits YuS-tchî. Malheureusement nous ne connaissons rien
de positif sur les Yue-tcht qu'à partir de l'an iSy av. J.-C.'
et en outre De Guignes ne rire pas de la tradition qu'il
rapporte la même conclusion que M. de Richthofen; bien
au contraire — De Guignes dit: «De là nous devons conclure
que dès lors la religion indienne, même avant le passage des
Yuë-tchî, était établie dans cette partie (occupée par les Pe-
tits Yiië-tchî) de la Tartarie.».
La différence entre les deux noms chinois, YuS-tchî et
7b«-Ao-/o, est certes assez grande pour qu'on accepte de pri-
me-saut que l'un et l'autre désignent un seul peuple. M- de
Richthofen cherche à expliquer cette différence : Sous la dy-
nastie Han les Chinois donnaient des noms tirés de leur pro-
pre langue aux différents peuples qu'ils voulaient citer; plus
tard ils remplacèrent ces noms par d'autres qui n'étaient que
les noms mêmes de ces peuples accommodés à la pronon-
' Richthofen, Op. cit. 440.
' Loc. cil. Comp. sur ce sujet $ m.
lyGOOt
525
dation chinobe. Conséquemment, si l^identité des YuS-tchî
er des Tou-ho-lo venait à être démontrée, (ce qui n'est point
encore), la raison de la différence de ces noms serait suffi-
samment connue.
M. de Richthofen, s'appuyant sur certains renseigne-
ments qu'il puise dans le travail de M. le colonel Yule, con-
clut à une synonymie exacte des vocables Yu'é-tcht et Tou-
ho-lo qui aurait été déjà connue des Chinois. Les empereurs
Tang, dès l'année 660 se sont mis à introduire l'organisa-
tion civile de leur empire dans le Touran, et ils ont chois'
comme chef-lieu une ville que M. te colonel Yule identifie
avec la moderne Koundouz, et qu'ils ont nommée Tuë-tcht-fu,
quoiqu'en pays toukhâre. Le colonel Yule en avait conclu
déjà avant M. le baron de Richthofen que les Chinois con-
sidéraient les deux noms Yuë-tchî et Tou-ho-lo comme iden-
tiques.
La conclusion que je tire de ce fait est tout à fait diffé-
rente: Les empereurs Tang ont donné le nom de YuS-tcht-fu
à la capitale du pays toukhâre, par eux choisie, parce que
cette dénomination de Yue-lchî, familière aux Chinois sous
les Han, affirmait en quelque sort leur droit de conquête
sur ces pays.
Le mot Toukhâre (tukhâra, sk.) se trouve dans le Ma-
hâbhârata. Lassen le premier signale le passage qui le con-
tient. M. de Richthofen y trouve tous les éléments à l'appui
de son hypothèse sur l'identité des Yu'é-tchî et des Toukhâ-
res. D'après le passage de l'épopée hindoue, les Toukhâres
apportèrent «des peaux, du fer et de la soie» au roi Panda-
va*. Ces produits étant caractéristiques des Sères, il faut
que les Toukhâres qui vinrent les offrir au roi hindou, di-
' Lassen, Indische Alterihumskunde P, 661.
r
r.oogle
sent MM. Yul
de Khotan. — i
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' China, i, n<
^ Al-Biruni. 1
rians. EIliot-Dow:
ly Google
5^7
longtemps. De l'autre côté du Pamir et au nord de Plaxar-
te, le Bouddhisme pouvait se développer avec une certaine
facilité. Mais, quand même les prédicateurs bouddhistes
eussent propagé leur religion à l'occident du Pamir, ce se-
rait en vain que l'on espérerait trouver quelque notice bien
précise de leur conversion partielle. Il n'en est pas de même
de l'orient.
Le peuple mongolique, vu son caractère, s'accommode
facilement de la religion bouddhique. La religion de l'ancien
empire chinois s'était formée avant qu'une mythologie régu-
lière eût pu en sortir, et bien que le culte fût réglé jusque
dans ces moindres détails*, il n'y avait point une caste sa-
cerdotale. Gonfucius, le réformateur de cette religion au vi*
siècle avant notre ère, ne s'occupa que des doctrines mora-
les* et enseigna un naturalisme éthique fondé sur la religion
politique des Tchâou (établie depuis le xii' siècle av. J-C.)
Le Confucianisme ne pouvait convenir qu'à une certaine
classe, à la majorité des Chinois lettrés, ou du moins à la
majorité des esprits cultivés. Le Bouddhisme trouva donc
un accè.s facile et beaucoup de prise parmi les Mongols et
même en Chine, où d'un autre côté il ne trouva que le Tao-
ïsme, doctrine qui avait de grands rapports avec le Boud-
dhisme.
D'après le Ma-touan-Iiti, nous dit De Guignes déjà cité
(Mém. de l'Acad. R. des Inscr.y vol. xl, 1780, p. iib). «les
Chinois rapportent que, dans le pays occupé par les petits
YuMchî on suivait la religion de Fo (Bouddha) et qu'il y
avait une pyramide ou pagode de Fo qui avait 35o pas
' Consulter J. Legge, The She King, London. 1876. p. 49 et suivan-
tes: édit. min. Comp. p. 253, lign. :;2-i4.
' J. Lcgge, The Life and Teachingso/Con/ucius, London. 1875. p. 99.
CR. 37
,ï Google
528
de circonférence et 80 tchang de hauteur. On comptait, de-
pms que cette pagode avait été bâtie jusqu'à l'an bbo de
l'ère chrétienne, 842 ans; ainsi l'époque de la construction
doit remonter vers l'an 288 av. J.-C». «De là — continue
De Guignes — nous devons conduis <\\i^ dès lors la religion
indienne^ même avant le passage des Yuë'tchi, était établie
dans cette partie de la Tartarie.*
L'hypothèse de M. de Richthofen appuyée sur cette
tradition est donc erronée, car ce ne seraient pas les YuH-
tclîî les premiers convertis au Bouddhisme, mais au con-
traire ils auraient connu la religion du Bouddha par d^au-
tres peuples déjà bouddhistes au temps du passage des Yuc-
tchî.
Nous avons notice d'une première tentative d'aposto-
lat bouddhique dans la Chine, l'année 2 1 7 avant l'ère chré-
tienne'. Dans la Tartarie le Bouddhisme fut établi avant le
passage des YiiMchî. Cependant 11 n'entra point définitive-
ment dans la Chine proprement dite que l'an 64 après J.-C.^
A l'ouest de l'Yarkand le général chinois Hioukkiou-
ping^ trouva l'an 122 une statue du Bouddha. A l'occident
de rindus la marche du Bouddhisme est retardée. Néanmoins,
si on ne le trouve bien établi sur la région du Caboul que
5o ans environ avant notre ère, on le trouve introduit dans
le Jiord de la Perse avant le deuxième siècle av. J.-C. Haug*
croit, d'après un passage de l'Avesta, où il lut le nom "de
GSutama (G a o t e m a), que la doctrine du Bouddha était déjà
• Rémusac, Fo'é-Koue-Ki, p. 44. V. Richthofi;n, China 1, p. Sot.
Edkins, Cftirtese Buddhism, p. 88.
' Richthofen, China 1, p. Soi. Edkins, Chinese Buddhism, p. i5.
' Lassen, Ind. Allerth. 11, 1052. Comp, Richthofen, op. cit. p. 5oi.
* Essays on the Sacred Language, Writings and Religion o/the
Parsis. ï"" édit., p. 208, i63.
,.gi^;.
529
connue en Bactriane depuis le quatrième siècle'. Cest peut-
être trop tôt.
La tradition conservée soigneusement par les Bouddhis-
tes prouve l'existence et de leurs prédications lointaines ci
des relations que les peuples de l'Inde entretenaient avec
ceux d'au delà de i'Iaxarte, auxquels les premiers appor-
taient les enseignements de la doctrine bouddhique.
Le Djâtaka xxi, i, 4, (17, 18), d'après MinayeP, fait
mention de dix mille prêtres qui dans l'antiquité vivaient sur
les montagnes du nord où coule la rivière Sîdâ.
Cette rivière quîserait le Tjrf-m-jÇ-ow/ d'après Klaproth,
et le Sihoun d'après Bumouf, peut être encore d'après M.
le colonel Yule' le Sirikol l'un des affluents de la rivière
de l'Yarkand ou cette rivière elle-même. Le Sihoun des
Arabes est le fleuve connu aujourd'hui dans l'Asie centrale
■ Comp. cequ'endiiMgr. deHt]rIe2,^v»(aiir,pag. 18. Je possède au-
jourd'hui la i*~ édition du beau travail du savant professeur de Lou-
vain. Il écrit, pag ÔSç: «Quoique l'on puisse dire, l'explication la plus
naturelle de ce mot (gaotetna) et la plus satisfaisante est celle qui y
voit le nom du gSutama bouddha et une allusion à la lutte soutenue par
les mazdéens contre les bouddhistes; que la forme gaotetna ne corres-
ponde pas phonéiiquemeni d'une manière exacte au mot indien cela
ne fait rien à l'atTaire. Il ne s'agit pas ici d'un mot dérivé par voie na-
turelle, mais d'un terme emprunté ei transféré avant même d'avoir été
écrit. Les Ëranicns ont dit gaotetna, comme ils le prononçaient, et
c'était tris naturel chex eux vu qu'ils n'avaient pas de diphthongue
médiale au ou n'en usaient que rarement. Il s'agit donc ici des luttes,
des controverses contre les bouddhistes répandus à l'est de l'tran.'
Les abstinences contre lesquelles s'élève avec force l'auteur du Fnr-
gard IV sont des pratiques bouddhiques. Comp. de Haûez^Avesta, i*" édi-
tion, p. 48. J. Darmesteiter, The Zend-Avcsta, in The S. B, 0/ the Easi,
vol. IV, p. 46.
* Grammaire pâlie, tr. de Sianislas-Guyard. 1S74, i\.
' Journal of the Royal Asialic Society, n. s. vi, p. 116, 119, iîo.
„Google
53o
par le nom de Syr-darya^ l'Iaxarte de l'histoire, lequel était
appelé suis par les Scythes, d'après Pline *.
Le Tarym-goul, ou fleuve Tarym, résulte de la réunion
de toutes les rivières qui descendent de ce merveilleux nœud
de montagnes formé par l'entrecroisement des systèmes
du Kuen-loun, de PHimàtaya et du Tian-chan. La rivière
de Yarkand, celle de Khotan et celle de Kachgar en sont
les plus remarquables. Le Tarym coule dans la direction de
l'orient, traversant le désert de Gobi, et entre, après un
détour vers le sud, dans le lac Kara-bouran qu'il forme
avec le Tchertchan-darya qui y descend du sud-ouest. De
là le Tarym se prolonge jusqu'au lac Lob, d'où il sort pour
se perdre dans les jungles ou roseaux épais qui couvrent
les plaines du côté de l'esté
Minayef voit dans cette tradition un souvenir confus
d'une origine extra-indienne*. Le fait est que cette rivière
Silâ, Sidâ, Ckîdâ ou Silis était connue dans l'Inde bouddhi-
que. C'était une rivière ou un fleuve de la région entre l'Oxus
et l'Iaxarte, de l'extrême nord et cette région était pour le
Djâlaka une contrée sacrée.
Cela suffît pour que je pose le fait des relations entre
la patrie du Bouddhisme et la région de l'Oxus et de l'Ia-
xarte. Nous n'avons pas besoin, par conséquent, d'attribuer
le Bouddhisme du Tokhâristàn aux YuU-tchi, arrivés seule-
ment là à une date bien postérieure à celle donnée par ta
tradition et les textes avestiques, et par la tradition et les
textes bouddhiques.
' VI, i8. édit. Littré.
*PrejevaIsky,(trad. Delmar Morgan), f>-omAu//a across ihe Tia»
Shart to Lob-itor, p. 55 et suiv. 98, loi, passim. Loiulon. 1879.
* Op. cit., viu.
byCoo'^le
y
>
53 1
Je n'oublie pas que dans les anciens monuments litté-
raires hindous on compte les années par hivers. Le souvenir
de fémigration des Aryas descendant du nord vers le Pan-
djab s'est perpétué, dans une certaine mesure, dans les hym-
nes védiques.
Mais le nom du fleuve qu'on y trouve est la RasS^
Pavestique Raha. Spîcgel * identifie la Rasa, c'est-à-dire le
fleuve Râha, à l'Iaxartc. De Harlez' croit que le fleuve
Râha est l'Oxus; Zimmer' accepte néanmoins que le fleuve
Rasa correspond à l'Iaxarte. Haug* a montré que dans un
certain nombre de passages avestiques ce nom Raba con-
serve sa signification primitive de mei', et que dans le Ven-
dîdâd il désigne ta Caspienne.
La conclusion à laquelle nous nous arrêtons est: Que
ce nom Râsa=Râkatat donné par les émigrants aryens à un
fleuve depuis le littoral du Tabaristân jusqu'au Pamir. Il
s'agit donc précisément des régions de ce n<£ud gigantesque
auquel les géographes ont donné par méprise le nom de
Belourtagh ou Bolor, et d'où Lassen" a fait descendre les
Toukhâres^ tukhâra de la littérature hindoue.
M. le colonel Yule* et M. le baron de Richthofen'
n'opposent â cette idée du grand orientaliste qu'un seul ar-
gument: c'est que les Toukhâres ont dû habiter tout au moins
à proximité du Khotan.
Je ne contesterai pas le bien-fondé de cette objection.
* Avesta, m. p. 96, n.
* Avesta, i*" édit. 1, p. 87, n. 7,
* AUindisches Leben, p. 16,
* In&v.xasn Aegyptens Stelle ind. \VeltgeschichtetV,'p. i36 et suiv
* Op. cil.,'i, p. 1023.
" Op. cit., p. gS.
' Op. cit., p. 440, n.
.,Cc
r
532
Malgré cela, si je parviens à démontrer l'existence d'un
peuple nomade, réunissant tes conditions et les caractères
assignés aux Toukhâres de Lassen, ayant la possibilité de
descendre jusqu'à Khotan, la solution à laquelle Lassen est
arrivé, acquerra une valeur scientifique incontestable.
Toutefois, cela ne serait point nécessaire à ma thèse,
si l'existence d'une ancienne ville du nom de Tou-hO'lo ou
Tonkhâra, près Khotan, pouvait être positivement reconnue.
Mais je remets ce sujet à une autre paragraphe, préférant
démontrer d'abord que la race des Toukhâres fut différente
de celle des YuS-tcht.
IV. Renoontre des Ynë-tohi et des Tonkb&res
Nous ne connaissons absolument rien des Yu'é-tchî en
Occident avant leur invasion du Fei^hâna, 143 ou 128 ans
avant l'ère chrétienne. En Orient même, on ne connaît d'une
manière sûre que leur arrivée au delà du Lob-nor, au pays
des Usiins, l'année iSy avant J.-C. ' Là, ils rencontrèrent
la race blonde aux yeux bleus des Usuns, et alors YuS-tcht
et Usuns traversèrent le Tian-chan du c&té de Tourfan, en
passant par la Tsoungarie jusqu'à Balkh.
Ici se pose une question. D'où venaient les YuS-tchî?
Etait-ce du côté de Khotan, à l'orient?
M. de Richthofen est loin de l'avoir démontré; il le
suppose*. L'unique base sur laquelle il asseoit son hypo-
thèse c'est la mention, que l'on trouve dans l'ouvrage de
Hiouen-Thsang, d'une ancienne villenommée Tou-ho-lo, nom
' Richthofen, Op. cil., p. 440 note, p. 447.
* Op. cit., p. 447. Comp. p. 440, n.
,ï Google
533
que M. de Richthofen croit être celui d'un peuple identi-
que au peuple Yu'é-îchî. Cette base n'est rien moins que
scientifique, puisque M, le baron de Richthofen donne pour
preuve la supposition même d'où il est parti.
Le nom tukhâra en sanskrit se trouve dans le Mahâ-
bhSrata et dans le Ràmâyana. Ce nom désigne les peuples
qui portèrent «des peaux, du fer et de la soiei au roi Pân-
dava. Plus à l'occident et au nord, en Asie, 700 ans avant
J-C, on trouve le nom d'un peuple qu'on peut identifier,
comme celui de tukhâra (du moins phonologiquement},aux
Toukhâres. Cela vient confirmer la tradition relative au roi
Pùndava.
Dans les annales de Sennakhérib ', ce roi fait mention
des Tokharri des E:(ames et des Kipsous, peuples qu'il mit
en déroute pendant sa 5^* campagne. Ils avaient bâti leurs
habitations comme des nids d'aigles sur les plus hauts som-
mets des montagnes et pics incultes des rochers de NipourK
Sennakhérib avança et mit encore en déroute d'autres
peuples, les Dahae^. A la fin de cette 5*°' campagne le roi as-
syrien campa aux portes d''Anara^.
Les Toukhâres s'étendirent encore à l'occident et exer-
cèrent leur action en dehors de l'Asie. On les trouve repré-
sentés dans les peintures murales égyptiennes. Ils furent
tantôt les ennemis, tantôt les alliés de Ramsés ni, au xiii^
siècle avant J.-C
' Taylor, Cylinder of Sennachertb in Records 0/ tke Past. vol. 1,
p. 35-43, trad. de Fols Talbot.
* Inscription, col. m, I. 6&-70. Comp. Maspero, Histoire ancienne
despeuples de l'Orient, 3' ëdît., p.4i3.
^ Inscription, col iv, I. 3. Comp. Maspero, op. cit., p. 414.
• Inscription, col- iv, 1. 7-8,
^ Chabas, Birch, etc. La copie que nous reproduisons ici d'une de
,ï Google
534
La lecture de Tinscription assyrienne de Sennakhérib
nous révèle quelques noms géographiques entièrement incon-
nus jusqu'alors. Celui de Dahae était déjà répandu. On Pavait
déjà identifié avec celui de Daotàts Grecs, de ces mêmes Daiit
qui cinq siècles plus tard furent poussés par les Yuë-tch!
contre la mer Caspienne'. Il reste, cependant, à déterminer
Tendroit de la capitale des Dahae nommée Oukkou dans Tins-
cription. Nipotir, pays montagneux, n''est pas non plus bien
déterminé; on peut néanmoins l'identifier avec les monts Aï-
baros dont parle Strabon*. Ils se prolongeaient dès le lac
Thospîtes jusques dans la Médte. Au temps de l'empire as-
syrien toute la chaîne de montagnes comprise entre le Tau-
ros et le Zagros était désignée sous le nom de Nipoiir'. Du
reste, les assyriologues sont d'accord à reconnaître que les
luttes que Sennakhérib soutint si glorieusement et qui se
terminèrent pas la déroute des Tokharn\ des Etantes etc.
eurent lieu à l'orient sur les montagnes, qui forment la fron-
tière de la Médie et de la Suzïane*. Après avoir châtié la
Suziane, Sennakhérib rebroussant chemin, se porta contre
Maniah ^, roi de Oukkou et chef des rebelles Dahae. Ces
peuples occupaient tout le territoire à partir du Caucase
jusqu'aux bords du Golphe Persique'. La ville de Oukkou
ces peintures murales (PI. i),est empruntée à l'ouvrage de Wilkinson,
A popular account o/Ancienl Egyptians^ vol, i, p. 391, On la voit aussi
in Bawlinson's Herodolus, vol. iv, p. 56.
' Richthofen, China. 1, p. 4^2 o.
' L. M, c. 14. edii. Mîiller-Didot, p, ^Si, 33
" George Smith, Assyria, p. 118.
* Comp. Finzi, Ricerche per h studio dell'Anlichilà Assira, p. So,
. avec Rawlinson, 77ie five great Monarchies, of ihe Easteni World, iii,
p. 170.
^ Inscription, col. iv, 1. 3.
" RawUnson's Herodolus. t. Essay iv, 4.
,ï Google
535
était donc la capitale d'un pays plus au nord et à l'est que
la région montagneuse du Nipour, comprise entre la Su-
ziàne et la Médie. Maniah, renfermé dans Oukkou, ne put
pas soutenir le siège; il s'enfuit vers les régions lointaines.
La ville de sa royauté fut prise par les Assyriens*. Alors
Sennakhérib établit son camp en face d!'Anara.
Talbot identifie Anara avec VAornQS des Grecs. Je ne
puis souscrire à cette opinion, et même en l'acceptant, le pro-
blème n'en resterait pas moins tout entier, puisqu^on pour-
rait lui donner encore plusieurs solutions. La question de la
position d'Aornos est elle même une much vexed question^
comme l'a dit le général Cunningham^
Dans l'impossibilité de détei-miner le lieu où se trou-
vait Anara, je me contente d'en désigner la dtrecliott.
Le roi des Dahae s'enfuit naturellement par le chemin
qui était ouvert devant lui. Ce chemin n'était pas, certes,
du côté de l'ouest, puisque Sennakhérib lui même nous dit
qu'il pénétra dans ces régions plus avant qu'aucun autre roi
ne l'avait fait avant lui^. La nouveauté des noms géogra-
phiques confirme son dire ; en outre les batailles que Sen-
nakhérib venait de terminer pour établir la paix en Chaldée
et toutes les expéditions faites dans l'extrême occident de
l'Asie, en Phénicie, en Palestine, sont des faits qui nous di-
sent assez qu'il ne s'agit pas ici de ces régions bien con-
nues, mais d'autres qui étaient encore ignorées des ancêtres
de Sennakhérib et de ce prince lui-même. Je conclus en con-
séquence que la marche de Sennakhérib fut dirigée vers le
nord-est pendant qu'il poursuivait Maniah, et que c'est de là
' Inscription, co!. iv, 1. i3, 14.
* The Ancieni Geography o/India, 1
' Inscription, col. iv, 1. 4-6.
,ï Google
536
en revenant vers le sud, que le roi assyrien aura traversé
l'ancienne Bactriane.
Les Tokharri et les Dakae n'avaient d'autre retraite
qu'aux montagnes à l'orient de la mer Caspienne. Les Dakae
devraient naturellement avancer plus au nord que les To-
kharri. Les faits postérieurs viennent confirmer cette con-
clusion: cinq cents ans plus tard les Yue-tchî rechassent les
Dahae contre la mer Caspienne. Ce fait prouve encore que
les Tokharri se trouvaient à l'abri de cette invasion venue
à travers la région des sept rivières et suivant le nordnauest
des montagnes qui descendent jusqu'à Khotan. Ils habitaient,
par conséquent, aux temps de l'invasion des Yiië-tclii^ les
montagnes de Ferghâna par où s'ouvrait la voie commerciale
avec la Serica.
Ce fut après que les Yuë-icht arrivèrent au Tokhâiis-
tân qu'une partie des YuS-lchî pénétrèrent dans l'Inde. Des
lors Yuë-tckt et Tokharri se confondent.
Richthofen n'ignorait pas l'existence de l'inscription de
de Sennakhérib. Il termine la note, objet de ces considéra-
tions par ces mots: «Nous ne pouvons pas finir ces remar-
ques sur le siège probable et les migrations des Tokhan'i,
sans rappeler ce fait mis en relief par le colonel Yule quoi-
qu'il fût opposé a sont point de vue — que 700 ans avant
l'ère chrétienne il est fait mention dans les annales cunéi-
formes de Sennakhérib, d'un peuple montagnard vaincu par
lui et dont le nom était Tokharri (H. F. Talboi, Assy-rian
Texts îranslated., in Journal ofthe Roj-al Asiatic Sociely, vol.
XIX, 1862, p. i5i). Ce peuple avait ses demeures, comme
les oiseaux leurs nids, sur les plus hauts sommets et les ro-
ches les plus escarpées des montagnes du Nipour. Le roi
les battit, et se portant contre les Dahae qui habitaient des
,ï Google
ssibles, il détruisit trente trois de leurs
de la traduction de Talbot m'a été con-
professeur Schrader>.
notre auteur méprise complètement ces
tes. Le nom des Dahae, bien qu'il fût ce-
oisin des Tokharri^ n'attire point son at-
nel Yule* embarrassé par ces circonstan-
s «Si la lecture de rinscription est exacte,
roire que les vrais Tokharri occupaient,
vant le royaume grec de la Bactriane, les
>ccident de l'Imatis; mais alors il n^est pas
que te nom de Tokharri ait pu être donné
rien d'embarrassant. L'histoire offre plus
:es faits. Plus d'une fois le nom d'un peu-
i à un autre peuple ; plus d'un peuple est
n qui lui ont Imposé ses voisins bien qu'il
on propre'.
ination de Toukhâres s'étendit sur toute
: pénétra dans l'Inde; mais avant cela et
u passage du peuple qui l'a portée traçant
trouvons ce nom en Asie-Mineure et en
lom d'un peuple essentiellement errant et
Tips des dernières immigrations aryennes
orientales méditerranéennes, il occupe déjà
tes commerciales, et prend part aux luttes.
Royal Asiatic Society, a. s. vi, p. gS, 96.
il d'après Yulc et d'autres orientalistes. Cependant
s l'identification.
lu'un seul exemple: les Chamavi, les Sigambesi,
it réunis sous le nom de Francs.
:,clgie
538
aux incursions, aux batailles, et s^allie avec d^utres peuples
de la Méditerranée dans des guerres d'invasion et des atta-
ques par mer.
Les Toukkares ne sont pas des peuples du Tibet, com-
me les YiiU-tcht. Ils proviennent plutôt des îles de la Médi-
terranée, de l'Europe orientale, des côtes de la mer Noire,
des environs du Caucase, et aussi de l'Asie-Mineure où
ils se trouvaient déjà à la fin des temps préhistoriques de la
Grèce (V. § v).
M. Yule raisonne de la sorte «st la lecture de l'inscription
de Sennakhérib est exacte. . . » Elle est exacte; on ne peut
plus en douter. Schrader l'a confirmée à Richthofen. Talbot
l'a reproduite encore à une autre occasion, comme on peut
voir dans Records oftkePast (ut rétro). D'autres assyrio-
logues l'ont travaillée, revue et contrôlée. Les doutes du
colonel Yule n'ont donc plus de raison d'être.
V.— Iiea Toakbftres ne sont point des TlDétalns
Comparons maintenant les figures de p. 286, 3io, 3i2,
3i3 du livre de M. Chabas, Études sur tantiquitê historique
d après las sources égyptiennes, &. (2*"' édition), avec les fi-
gures citées de l'ouvrage de Rawlinson et de celui de Wil-
kinson (Voir la pi.). Nous y voyons que Içs peintures murales
égyptiennes représentent les ToukHâres avec des traits d'une
race qui aurait peut-être les yeux bleus, comme les Sères
dont parle Rachias. Ils y sont représentés tout au moins avec
les traits de la race aryenne.
Les faits concourent donc à l'appui de mon hypothèse :
les Toukhâres ou quelques tribus Toukhàres dominaient la
route commerciale du côté de l'occident au Khotan et au
^V^
539
Pandjab, ce qui explique et l'existence d'une vilie Toukhâra
près de Khotan et au point de vue géographique les re-
lations des Tûukhâres ou, comme on l'écrit généralement
en français, des Tochâres^ des Dardes et des Seres entre
eux.
Voici la manière dont Wilkinson nous décrit les 7b-
kkârt\ les Toukhâres ou Tochâres •. «Les Tokkârt portaient
un casque très semblable pour la forme et l'aspect aux cas-
ques qu'on voit représentés sur les sculptures de Persépo-
poUs. Ces casques, à ce qu'il paraît, étaient faits d'une étoffe
aux raies de couleur; ils avaient les bords ornés de dessins
ou d^une rangée de grains assez gros, et étaient assurés sous
le menton par une courroie ou un ruban. Les Tokhâri por-
taient un bouclier rond et un vêtement court ordinairement
recouvert d'une cotte d'armes semblable à celle des ScHaï-
retanes. Leurs armes offensives étalent principalement une
lance et un poignard large et pointu ou épée droite. Ils ne
laissaient pas pousser leur barbe, du moins ce n'était pas
l'usage général, surtout pour les chefs. Les traits de leur vi-
sage étaient réguliers, le nez légèrement aquîlin; et chaque
fois que les artistes égyptiens les ont représentés sur une
lai^e échelle, leur profil est plus beau que celui des Asiati-
ques en général. Ils entraient en combat montés sur des
chariots comme les Égyptiens, et avaient des charrettes à
deux roues solides, tirées par deux pairs de bœufs. Il semble
que ces chars étaient placés en arrière de l'armée, comme
il était d'usage chez les Scythes et les Tartares, et qu'on
les employaient pour le transport des femmes, des vieillards
et des enfants en cas de défaite, i
' A popular Account of Andenl Egyptians, London. 1871, vol. i,
391, 393.
,ï G 00 t^ltf
540
L'étroite relation entre les Tokhârt et les Scharéttaïut
ou Schàïrotanes, les Scharutiniens de Layard ', ou Schcr-
daiias*, les Sardim'etts et les Pouloucktas ou Pélatat, les
Pélasges\ est vraiment remarquable.
Au temps de Ramsès m les Tsekkartou (TochSres, 7on-
khâres &. V. plus loin), comme les PéUstas arrivaient du
Nord *. Les deux peuples alliés prenaient l'initiative de la
guerre contre l'Egypte* tL'artiste égyptien — nous ditCha-
bas — les a figurés avec plus de soin parmi les prisonniers
conduits au temple d'Ammon par le pharaon vainqueur.»
«On voit qu'ils portent la coiffure caractéristique des an-
ciennes nations helléniques ainsi que la courte tunique à
quadrilles» (à rayures et à franges des peuples de la Gr&e
et des Des). iPresque tous sont imberbes; un seul porte un
peu de barbe à l'extrémité du menton» «Les Tsekkartou
étaient de race européenne comme les Pélestas*» «Sous
Ramsès m les Péiestas et les Tsekkartou sont seuls nom-
més comme ayant excité les nations du Nord'» «Frémis-
santes d'enthousiasme, CCS nations qui venaient de leurs iles,
attaquèrent et dispersèrent les populations syriennes, alors
tributaires ou alliées des Égyptiens, puis elles vinrent cam-
per au sud de la Palestine, dans le pays d'Amaor*.»
«Le cadre des événements étant ainsi tracé —continue
' Discoveries in tke ruins of Nineveh and Babylon, LondoD- 1853,
p. 355.
* Chabas, Ant. hist., p. 198.
= Ibid-, p. Ï84.
' Ibid. p. 285.
^ Ibid., p. 284.
"ibid., p. 285-287.
' p. Ibid. 287 aifinem.
Mbid.,p.a88.
,ï Google
54'
M. Chabas — nous sommes naturellement amenés a rccon-
La transcription du mot est irréprochable. . . De 7>k-
kroi les Égyptiens ont fait Tekkri (la finale ou est le pluriel
égyptien.— Nous pouvons lire Takkerri, M. Chabas a lu
encore Tsekkart'-ou). La ressemblance ne peut guère être
plus exacte. Hérodote donne au pays troyen le nom de
Teucrie. D'après le même auteur', c'était la dénomination dont
se servaient les Égyptiens de l'époque de la guerre de Troie,
car le gouverneur égyptien de la bouche canopique du Nil,
Thônis, appelle Pârîs^ un Teucrien dans le rapport par le-
quel il informe de roi de l'arrivée du prince troyen après le
rapt d'Hélène.»
«Quant aux Pélestas, ce sont les Pélasges, ces peuples
qui nous ont laissé tant de souvenirs et si peu d'histoire, et
qui ont précédé les Hellènes dans presque tous leurs établis-
sements» «Sortis de la Samothrace, les Pélasges s'éta-
blirent fortement sur les côtes asiatiques de PHellespont
ainsi que dans les îles de Scyros, d'Imbros, de Lemnos, de
Lesbos, de Chlo, de Samos et des Cyclades, ils occupèrent
aussi la Crète, les rivages de l'Asie-Mineure jusqu'en Carie.
Les Teucriens étaient ainsi enclavés entre les Pélasges de l'Io-
nie et ceux de l'Hellespont. L'histoire ne nous montre pas dis-
tinctement les Pélasges réunis en corps de nation, cepen-
dant nie de Lesbos avait reçu d'eux le nom de Pelasgia. En-
viron deux siècles après Ramsès ni, diverses populations
pélasgiques accoururent à l'appel de Priam: c'étaient les
Paeones de l'Axius, les Pélasges de l'Hellespont et ceux de
' Hérodote, ii, 114, ii5.
* V. l'étymologie de Paris au S vu.
,ï Google
54»
la Méonie, armés de l'antique javelot.» «Nous rencontrons
donc des indices bien suffisants de la puissance des Pelas-
ges et de leur connexion avec les Teucriens pour nous ex-
pliquer le rôle actif que ces deux nations (je préférerais dire
peuples) avaient pris de concert dans la guerre des peuples
du nord contre PÉgypte. Les Teucriem durent avoir la pré-
pondérance dans l'expédition par terre {je souligne car le
fait est d'une grande importance), tandis que la direction
de la campagne maritime appartint naturellement aux Pé-
lasges, qui étaient en relations intimes avec toutes les popu-
lations des rivages et des îles de la Méditerranée*.»
Comme je l'ai dît, pourtant, les Takkerri ou Tekkri,
les Tochâres^ les Teucriens figuraient aussi dans la cohorte
des alliés des Égyptiens. Champotlion' cite les Teucriens
comme des alliés des Egyptiens contre les Libyens.
Les Tochâres ou Toitkkâres furent donc un peuple er-
rant qui ne constitua jamais de nation et dont le mouve-
ment sinueux si fit de l'occident en orient jusqu'au a* siècle
avant l'ère chrétienne.
VI.— Le moarement fltimiqafl & travers le bassin da Tarym
Après avoir déterminé le type des Toukhâres ou
Tochâres comme je viens de le faire, je dois maintenant
chercher à éclaircir au moyen des données fournies par M.
de Richthofen, un point que j'ai laissé de côté ù dessein. Je
veux parler de l'existence d'un peuple, dont les caractères
ethnologiques, dans leur ensemble, s'accordent avec ceux
• Chabas, Op. cit., p. ï88, 189
' Lettres, p. i63. V. Chabas^ op. cit., p. 3o8.
^^ Di
,.,c„t,^
543
;s inscriptions assyriennes, Takerri, Tokhâri
iscriptions égyptiennes, qui a également mené
à travers l'Asie centrale, et parcouru, selon
quîse, le Ferghâna et le bassin du Tarym
enfin jusqu'à Khotan.
le Richlhofen dans la région située à l'occi-
u Tarym et s'étendant jusqu'au nord-est près
bitait, au deuxième siècle avant J.-C-, une
inois désignaient par mépris sous le nom de
; de cheval — die Stamme mit den langen
t (i. 48-49). La physionomie de ces hom-
te de la physionomie des Chinois. Us avaient
les yeux enfoncés et le nez saillant, tandis
là, les habitants de Khotan étaient consi-
inois comme appartenant à leur race. Peut-
Richlhofen — doit-on les rattacher à ces peu-
nne dont les restes, encore aujourd'hui épars,
nité occidentale de l'Yarkand et du Pamir,
ir exemple (comme M. de Richthofen le
irès Spiegel, Eranîsche Art. 1, 33g) parcou-
nsion depuis le Pamir jusqu'à Uschi, Aksu,
mi. Us descendent aussi jusqu'à Khotan,
trcourent, à l'occident et au nord du bassin
les contrées que parcouraient jadis les —
cheval.
vie errante à travers toute cette extension
rym, depuis l'occident jusqu'à Tourfan, les
ie cheval avaient soin d'occuper partout Ics-
i pourrait le plus facilement traverser le
ivant les chemins naturels qui conduisent
'au pays des sept rivières près de la mer
: de Balkach, et jusqu'au lac Issy-kol, et
..Gocfiic
544
d'un autre côté jusqu'au Ferghâna; ils se réservaient ainsi
la faculté de descendre comnje les Tidjiks jusqu'à Khotan.
J'ai fait voir, au § iv que selon toute probabilité les
Toukkâres,, les Tokharri des inscriptions cunéiformes, habi-
taient au ii'siècle av. J.-C. les montagnes du Ferghâna. Je
puis maintenant rapprocher cette conclusion du fait que
nous venons de constnier; la présence des — longues têtes de
cheval, aa deuxième siècle avant J.-C. aux abords de cette
contrée sur les montagnes qui y aboutissent.
Je ne veux pas encore affirmer que les — longues têtes
de cheval formaient une ou plusieurs des tribus des To-
kharri. Mais ce que l'on peut soutenir sans hésitation, c'est
que leur caractères ethniques s'accordent avec ceux des To-
kharri. Ainsi sans contredire en rien la loi de migration des
peuples • on peut admettre que les Toukkâres sont venus
des régions de l'Iaxarte jusqu'à Khotan
TII,~-Ëranieiia et Tookli&res.— Gonolnsion
Le nom de Tou-ho-lOy eût-il même été connu en Orient
au delà de Khotan, cela ne diminuerait en rien la valeur
des arguments que je viens d'exposer et de développer.
L'existence de cette ville, pourtant, est problématique.
Hiouen-Thsang n'en parle que par tradition. C'est à Kho-
tan que se termine le voyage du pèlerin bouddhiste. La ville
de Tou-ho-lo sur le versant septentrional du Kuen-loun, si ja-
' M. de Etichthofena dit coiitre l'hypothèse de Lassen: «wurde
es den Gesetzen der Wiilkerbewegung gani widersprechen, wenn das-
selbe Volk von don (Belur-tagh) nach der Gegend des Lop-Secs ge-
zogen, und dann um den Tien.Shan herum nach dem Yaxaries und
Oïus zuriJckgekehrt ware.»
.,n,tî?SSTrGoOQ]c
mais elle exista, avait disparu depuis longtemps*. Ce qu'on
lit des Thagori dans Ptolémée ne servirait guère non plus
à éclaicir la question.
Admettons cependant que cette ville eut une existence
réelle. Elle devait être alors à une petite distance de Kho-
tan, à 400 li seulement ou 4 jours de voyage, si l'on s'en
rapporte au calcul fait par Yule'. L» civilisation avait pris
un assez grand développement sur tout le versant septen-
trional du Kuen-loun. Cette contrée vit s'élever des villes
très populeuses qui disparurent* ensevelies dans les mers de
sable ''qui s'étendirent depuis le Kara-bouran jusqu'à Kina.
Le peuple qui les habitait était probablement, pour la
plupart, de race tibétaine, mais la civilisation était crânienne
comme tout nous porte à le conjecturer.
On trouve encore aujourd'hui au Tibet les usages bi-
zarres relatifs à l'exposition des cadavres', et la grande vé-
nération pour le chien, cet ensevelisseur ou fossoyeur des
Bactriens comme disait Strabon*. Ces usages distinguent
' Mém. sur les contrées occidentales par Hiouen-Thsang, irad. par
Stan. Julien, i[, p. 247. — Comp. Vivien de Saint-Manin,Mem. dna/fd'jue
sur la carte de l'Asie Centrale et de l'Inde, les dernières lignes.
''Hiouen-Thsang, édit. Slan.- Julien, 11, 247. Yule, in /ounw/ o/"//nf
Royal Asiatic Society, n. s. vi, p. 93.
■' Richthofen, Remarks, in Prejevalsky (irad, Delmar Morgan), Fram
Kulja across the Tian Shan to Lob-nor, p. 1 56. Yule, in Marco Polo, i, p.
198, i9fi.
* Ch. Home, On thc Meihods of Disposing 0/ the Dead at Lhassa,
Thibet etc., in Journal of the Royal Asiatic Society, n. s., vi, p. ï8-3i'
Comp. Markham, Narratives of the Mission of George Boyle to Tibet
and ofthe Journey of Thomas Manning to Lhassa. London, 1876, p*
68, 111, 338-340. V. la note suivante.
' Comp. Horace délia Penna, in Markham, op. cit., p. 339 avec
Strabott, L. xi, c. xi, 3. Miiller-Didot, p. 443, 29. On peut voir sur ce su-
.ïGex^tp^^
546
une partie des Éraniens de toute la race aryenne et en gé-
néral de leurs voisins occidentaux.
Tiele en a conclu que les Tibétains avaient emprunté
ces pratiques aux habitants primitifs de l'Éran méridio-
nal*. Mais il ne faut pas oublier que ces pratiques n'étaient
pas celles de tout l'Éran; elles étaient vraiment avestiques
et pas éraniennes de scfti origine, c'est à dire qu'elles n'étaient
pas aryennes, ou des Aryas de l'Éran, elles ne l'étaient que
d'une partie des peuples de l'Éran, de ceux qui suivaient
les prescriptions et acceptaient la doctrine de l'Avesta. C'est
plutôt aux Éraniens septentrionaux et à ceux de la tribu de
Bactriane qu'on doit' rattacher les pratiques si singulière-
ment avestiques des Tibétains. Le mode de traitement du
cadavre adopté au Tibet doit être comparé non pas aux
pratiques d'ensevelissement des Éraniens méridionaux, maïs
aux pratiques exécutées dans les dakhmas, ou cimetières
mazdéens qu'on ne rencontrait pas en Perse, et aux prati-
ques semblables des peuples de l'Hyrcanie et des rives de
la mer Caspienne, au dire de Strabon, de Cicéron et de
Justin*. A l'est de la Bactriane se trouvaient les Tokharri.
Et si l'on suit le cours de l'influence éranienne hors du
centre principal de la race éranienne, on trouvera partout
les Toukhâres.
La brillante culture qui précéda la civilisation grecque
proprement dite et s'étendit sur toute la côte occidentale
de l'Asie-Mineure et de la Crète, fut le résultat du mélange
jet De Harlez, Avesta^ l' passim. De Harlez en a donné une i*~ éd. en-
richie d'une magnifique introduction. Consulter.
' Geschiedenis van den Godsdienst etc., Amsterdam, 1S76, p. 190.
* Comp. le Travail âté de Ch. Home in Journal 0/ the R. Asiatic So-
cieiy.îe peux aujourd'hui citer à l'appui de mes idées l'opinion de l'êra-
niste be^c Mgr. de Harlez in Avesta, 2° éd. intr. xvi, xvu, clxxu, ccuu-
W' Wi
d'éléments phéniciens, phrygiens, et helléniques, encore très
visibles dans la légende troyenne. Paris, Dareios sont des
noms probablement phrygiens (/ar^combatre) avec des for-
mes éraniennes '. Le nom À^Assaracos a été retrouvé sur
les monuments de Ninive'. Celui de son fils Capys^ est un
nom phrygien, aussi bien que les noms de Dpnas^ gendre
de Priam, et les noms dMicun/oî, de Cassandra^. . . &. Hé-
rodote, nous l'avons dit, donne au pays troyen le nom de 7e«-
crie et Pân'S'Alexandre était un Teucrien. Tpota signifie peut-
être même «terre de la traversêe^i.
D'après quelques auteurs, aux Toukhâres correspon-
dent les Indo-S<ythes. C'est un fait acquis pour la science
que les Scythes du Pont-Euxin étaient de race aryenne, et
probablement de la branche éranîenne'.
Je dois faire remarquer une coïncidence bien significa-
tive: les assyriologues ne trouvent aucun élément ethnique
aryen en Arménie, antérieur au viu* siècle avant J.-C. * Cet
élément ethnique était éranien et, à ce qu'il paraît, un résul-
tat du mouvement qui fit venir les AryaS'Alèdes dans la Mé-
die et les Aryas-Peises dans la Suziane'. Ce fut après cet
événement que les Tokharri, vivant comme des aigles sur
les hauts sommets des montagnes de Nipour, émigrèrcnt vers
le nord, battus pas Sennakhérib. Notons encore que i'armé-
' Tiele, Op. cit., p. ii5, n.» iz5.
*-*^Em.Curtius (Boucha Lcc le rcq ), //wWiVe Greejue, 1. 1, p.89.
* Comp. l'étude de Sir H. RawUnson in vol. m', p. 187 et suiv. de
Rawlinson's Herodolus. — Kiepert, Lehrbuck d. Allen Géographie, n° 3o5.
— D'ktbm&ic ia\i»\av\\\e. Les premiers habitants de l'Europe, p. i37et
i\ûv.—Rtvue Critique, 14 décembre 1878, p. 375.
* A. H. Sayce, Assyrian Lectures, p. 44. — liis Herodotus,i^, 677.
' Sayce, ioc. cit.
,ï Google
548
nicn wagr itigre* n'a de correspondant nulle part ailleurs
que dans le sanskrit vjâghra itigre royal»'.
Lassen^ croyait que le vocable xamixifcç en sanskrit
kastira, fétain», fut introduit en Grèce, avant Homëref
par l'intermédiaire des Phéniciens. Ce mot a été retrouvé de-
puis dans les inscriptions assyriennes. Il n'est ni aryen ni
sémitique. L'opinion de Lassen doit être modifiée. Le fait
est, néanmoins, une preuve des relations entre l'Inde au sud-
est, l'Assyrie au centre et la Grèce au nord-ouest.
Il y a des peuples qui sont, comme le plasme charriant
les globules sanguins, et les rhéophores portant k courant
électrique, les porteurs de civilisations qui sans cela reste,
raient isolées et condensées en un point sans influence utile
sur le dehors.
A ce titre et comme tels on peut certainement citer les
Tottkhâres qui, semblables aux électrodes, transmirent en
différents sens et à de différents peuples la civilisation con-
densée dans les grands centres de l'Egypte, de PAsie-Mi-
neure, de la Syrie et de l'Inde.
' Fick, Vergi. Wtb. der Indo-germanischen Sprachcn, i', 43i.
* Indische Alierifmmskunde, n*, 63».
EXPLICATION DE LA PLANCHE
Fig. I. Les Tokkari, d'après une peinture murale à Thèbes {apud Wil-
kinson).
3. Les charriots des Tokkâri, d'aprùs une peinture murale à Thè-
bes (apud Wilkinson).
ly Google
Vasconxei.los Abreu
Lilb. de J Leipold Listioonï
DigitizsdbyGOOgle
„Google
ESSAI STJK LES UUTILATIONS ETHNIQUES
M. LE DR. E. MACrTOT
•Tout est bien au sonir des muns
• de l'auteur des choses, tout dégé-
'nère encre les mains de l'homme;
■ il aime les difformités, les mons-
•ires; il ne veut rien tel que l'a fait
•la nature, pas même l'homme.*
J. J. Rousseau.
Considérées d'une manière générale, les mutilations eth-
niques devraient comprendre toutes les modifications ou al-
térations que l'homme se fait subir à lui-même, sous l'in-
fluence de la mode, des habitudes, des idées mystiques ou
religieuses, des sentiments de vanité ou d'orgueil, des aber-
rations des sens, etc.
Un tel sujet est inépuisable car ses limites sont indé-
finies. Pour envisager dans son ensemble et dans ses dé-
tails un aussi vaste problème il faudrait commencer par les
,ï Google
550
plus simples et les plus innocentes pratiques, comme rem-
ploi des fards et des cosmétiques; ensuite étudier les mo-
difications que les vêtements font éprouver à la forme gé-
nérale du corps et arriver enfin aux véritables mutilations
qui laissent après elles une trace indélébile.
Ce serait une tache au-dessus de nos forces et en tous
cas hors de proportion avec les travaux ordinaires d'un
congrès. Nous avons cependant depuis un certain temps
entrepris de rechercher et de rassembler les documents épars
sur cette intéressante question et nous les réunirons sans
doute ultérieurement dans une étude d'ensemble.
Notre but aujourd'hui est beaucoup plus modeste, et
nous demandons simplement au Congrès la permission de
lui exposer très brièvement: i" Quels sont les caractères es-
sentiels des diverses mutilations ethniques: 2" Les différents
points de leur répartition géographique dans l'état actuel de
nos connaissances en ethnographie générale.
Or, la pratique des mutilations ethniques paraît sou-
mise dans la série des temps et sur les parties diverses du
globe, à certaines lois générales.
Ainsi, le plus grand nombre d'entre elles après être nées
de l'initiative d'un peuple ou d'une tribu, se sont ultérieu-
rement propagées par voie de migration ou de conquête,
soit que le peuple lui-même se substituant à un autre ait
gardé ses pratiques particulières, soit qu'il les ait imposées
aux vaincus. Telle est en particulier l'habitude de déformer
le crâne qui parait s'être répandue en Europe, et en France
par l'envahissement d'un peuple particulier, les Cimmériens
macr acéphales.
D'autre part, on observe que certains groupes de po-
pulations séparés par de grands espaces marins ou terres-
tres et qui n'ont eu à aucune période de l'histoire de rela-
,ï Google
tions entre elles, s'infligent la même mutilation. Telle est par
exemple, cette pratique de l'amputation d'une phalange qui
s'observe à la fois sur la côte occidentale de l'Afrique et
au Paraguay. Tel est encore un certain mode de déforma-
tion céphalique qui se retrouve à la fois en Europe et chez
les Patagons.
Deux explications se présentent: d'une part, la théorie
de la similitude des instincts humains, d'autre part l'hypo-
thèse de la jonction aux premiers temps quaternaires ou
tertiaires de continents aujourd'hui séparés.
Certains observateurs parmi lesquels il faut citer Bro-
ca, se sont, comme on sait, prononcés formellement pour
cette dernière supposition.
Une autre loi tend à établir que la pratique des mu-
tilations est en raison inverse de l'état de civilisation. En
Europe par exemple, elles sont presque entièrement aban-
données et celles que nous mentionnerons, appartiennent
aux premiers temps de notre histoire ou aux âges préhisto-
riques. Au contraire, les peuplades sauvages et primitives
des continents africains, de l'Amérique et de la Polynésie
constituent les centres actuels de la plupart des mutilations.
Enfin, il est une dernière loi générale fort importante à
préciser dans la question qui nous occupe, c'est là non hé-
rédité des mutilations volontaires. Nous ne discuterons pas
ce point qui nous semble jugé définitivement aujourd'hui:
Toute disposition physique acquise accidentellement pen-
dant la vie, n'est pas transmissible héréditairement. Nous
pourrions en citer maintes preuves; ainsi par exemple: tes
Aymaras, les Chinooks modernes ne présentent plus la dé-
formation crânienne si spéciale de leurs ancêtres, telle qu'elle
se retrouve dans les anciennes sépultures, et la circoncision,
la plus ancienne peut-être et la plus répandue des mutila-
i^
ib.GPogk
552
lions volontaires, n'a point empêché la disposition anato-
mique qu'elle corrige de se perpétuer indéfiniment.
Quoi'qu'il en soit, de ces courtes considérations géné-
rales, nous allons aborder notre étude dans les divisions
suivantes :
I. Les mutilations de la peau.
II. Les mutilations de la face.
III. Les mutilations de la tête.
IV. Les mutilations des membres et du tronc.
V. Les mutilations des dents.
VI. Les mutilations des organes génitaux.
KntllationB oatanéfiS
Les mutilations qui se pratiquent sur la peau sont in-
nombrables et leur histoire, pour être complète, justifierait
à elle seule un long et volumineux travail.
Nous devrons donc nous borner pour elles ainsi que
pour les autres parties de ces études, à un aperçu rapide.
Les mutilations cutanées peuvent en effet se diviser en
trois groupes;
i" Les fards et peintures.
2" L'épilation.
3" Le tatouage.
L'idée de se couvrir la peau soit d'un enduit de cou-
leur uniforme, 5oit de dessins ou ornements divers, remonte
a la plus haute aîîtiquité et s'est du reste conservée jusqu'à
nos jours où elle reiçte très en faveur chez certains peuples
de l'Afrique et de l'OJcéanie. Dans l'ancien continent. l'usage
lyGoogle
553
des fards était également fort répandu. Il a certainement
précédé le tatouage proprement dit, lequel est devenu le
moyen de rendre définitifs et indélébiles les dessins effectués
à l'aide de la peinture.
L'épilation était un complément de la coutume précé-
dente ; elle se pratiquait d'une part par l'arrachement des
poils sur le cuir chevelu, sur les sourcils, le mont de Vénus
ou d'autres régions, soit au moyen du rasoir. L'usage de ce
dernier instrument appartient à tous tes âges de l'humanité
et à tous les peuples. Aux temps de la pierre taillée, on fa-
briquait déjà de minces couteaux de silex ou d'obsidienne
très aiguisés et qui n'étaient autres que des rasoirs. Quel-
ques peuples sauvages, comme les Botocudos utilisent même
pour se raser des éclats de roseaux à bords très tranchants.
Enfin, de nos jours l'emploi du rasoir métallique n'a pas be-
soin d'être décrit.
Quoi qu'il en soit, nous ne pensons pas qu'on doive
rigoureusement accepter comme mutilations aussi bien l'ap-
plication sur la peau des fards ou peintures que l'épilation
elle-même, ces deux pratiques ne produisant en somme au-
cune lésion cutanée définitive.
Les véritables mutilations de la peau nous semblent
commencer avec le tatouage. C'est donc de cène question
que nous devons nous occuper en nous bornant toutefois a
indiquer les difiérents caractères du tatouage ethnique et à
tenter d'en tracer la répartition géographique d'après les va-
riétés qu'il présente.
Le tatouage se divise ainsi en cinq catégories qui sont:
1° Le tatouage par piqûre.
2" Le tatouage par incisions simples.
3" Le tatouage par ulcération ou brûlures.
4" Le tatouage sous-épidermîque.
„C.oogle
554
5' Le tatouage mixte dans lequel il y a mélange de plu-
sieurs des procédés précédents.
1° TATOUAGE PAB PIQURES
C'est le plus répandu de tous. On le retrouve dans
toutes les parties du monde et particulièrement en Europe
où il s'est perpétué depuis les temps protohistoriques jusqu'à
nos jours. Autrefois il était le privilège de certains groupes
ethniques, tandis qu'aujourd'hui il ne se montre que sous
forme errative et à titre de souvenir d'une tradition ancien-
ne. C'est avec ce caractère qu'il persiste chez quelques peu-
ples de l'Italie et dans diverses classes inférieures de nos
sociétés, certains corps de métiers, etc.
En dehors de l'Europe, le tatouage par piqûres se re-
trouve d'abord chez les Arabes, les Kabyles où les femmes
reproduisent de la sorte sur le visage des enfants les des-
sins qu'elles tracent dans ces broderies bien connues de
laine ou de soie '.
Aux îles Marquises le même procédé s'emploie pour
caractériser non seulement certaines tribus, mais encore les
castes et les divisions sociales. C'est ainsi qu'il y a un ta-
touage particulier pour les esclaves et les domestiques; un
autre pour les veuves; un autre pour les guerriers. Ce der-
nier pratiqué après un combat ou une conquête devient si-
gne de noblesse*, et la forme ou les dessins adoptés se
' Gillebcrt d'Hercourt, Anthropologie de F Algérie, in Mémoires de
la Société d'Anthropologie de Paris, t. m p. 17.
* Foley, Quatre années en Océanie, Paris 1875. '
,ï Google
555
transmettent aux descendants qui se font gloire de porter
ainsi sur la peau le blason de leur aïeux.
En Chine, à l^le de Haïnan, les 5eng-Ii se tatouent le
visage par la même méthode* et au Japon les plongeurs se
couvrent tout le corps d'un tatouage très serré destiné à ef-
frayer les poissons carnassiers qui s*atlaquent à Phomme '.
On peut ajouter que chez certaines peuplades, le tatouage
ne reste pas exclusif à la peau, car les femmes de Sénégam-
bie se dessinent aussi sur les lèvres et les gencives des des-
sins colorés par Pindigo.
D'autres applications du tatouage ont été signalées par
les auteurs: ainsi d'après M. Miklucho-Maèlay, les femmes
de l'archipel Peiew se font tatouer le mont de Vénus et dans
les peuplades de l'Arizona, de l'Amérique du Sud, le tatouage
est appliqué à titre de châtiment pour marquer un coupa-
ble'.
Le mode opératoire, très bien étudié par le docteur
Berchon *, consiste tantôt dans l'emploi d'aiguilles, et c'est le
procédé usité en Europe; tantôt au moyen d'arêtes de pois-
sons, de parcelles d'os, de dents de requins, d'épines végé-
tales, ainsi que cela se pratique en Afrique et dans le Nou-
veau Monde.
Les substances colorantes sont très nombreuses: !e
charbon pulvérisé et mélangé à des matières grasses, les
sucs rouges de certaines plantes et, dans les temps plus ré-
cents, l'encre de Chine, l'indigo et les diverses couleurs du
commerce.
< D'Hervey de Saint-Denys. Extrait de V Ethnographie des peuples
étrangers, de l'écrivain chinois Ma-Touan-lin, i. ii, p. 4or.
* Dr. E. Martin, Histoire des Monstres, Paris 1879, p. 1 ti.
^Zeilschriftjîir Ethnologie, 1879, p. 334.
* Histoire médicale du tatouage^ Paris 1S69,
,ï Google
556
Quant aux dessins et ornements fixés ainsi sur la peau,
ils représentent tout ce que la fantaisie hamaine peut ima-
giner: lignes parallèles, arabesques, vermiculations, croix,
ondulations diverses, portraits grossiers d'animaux, de plan-
tes, dessins erotiques, etc.
2° TATOUAGE PAR INQSrOSS
Ce mode de tatouage se présente sous deux variétés:
l'une consistant dans de simples scarifications assez analo-
gues à celles qui résultent de l'application de nos ventouses
(tatouage par mouchetures) ;Pautre comprend une série d'in-
cisions plus étendues dont on éloigne soigneusement les bords,
de façon que la cicatrisation laisse sur les téguments des
plaques blanches et décolorées comme le sont les entailles
sur un jeune arbre. C'est un tatouage par cicatrice.
Le procédé par mouchetures est très répandu chez les
Nègres qui s'en couvrent le visage et parfois toute la surface
du corps. Il sert chez eux à différencier les tribus, et comme
il arrive parfois qu'un nègre émigré d'une tribu dans une
autre, on peut observer sur son visage deux systèmes de
mouchetures superposées. 11 est également en usage sur cer-
tains points du continent asiatique (Laos) et dans la Matai-
sie (Mlndanao).
Le procédé par larges incisions est particulier à la Mé-
lanésie. Quelques historiens rapportent aussi qu'il était en
usage chez certains peuples qui envahirent l'Europe. C'est
ainsi que, d'après Ammien Marceliln ', les cavaliers d'Attila
avaient le visage couvert de cicatrices.
' Ciié par Lagneau, Anthropologie de la France, Dictionnaire En-
(prclopédi^, article France.
ly Google
EL
3" TATOUAGE PAR ULCÉRATION OU BRULURE
Ce procédé, qui est le plus barbare et le plus doulou-
reux de tous, consiste tantôt à irriter, à ulcérer une incision
préalable en appliquant à sa surface des sucs caustiques de
certaines plantes, tantôt à pratiquer de véritables brûlures
à la manière de nos anciens moxas.
Le but est dans ce dernier mode, d'obtenir une végé-
tation de la peau, une sorte de bourgeon ou de champi-
gnon, et le grand art consiste à les disposer en une série
tantôt graduée, tantôt de volume égal dans une certaine ré-
gion du corps; le plus souvent la face.
Parfois encore ce résultat est obtenu par un mécanisme
de torsion de la peau au moyen d'une aiguille, ainsi que le
docteur Tavano l'a rencontré chez quelques peuplades des
côtés d'Afrique*.
Les brûlures s'obtiennent par l'application sur la peau
de morceaux de charbon inflammés, ou, comme en Nouvelle-
Calédonie, de nervures des feuilles du cocotier qu'on appli-
que suivant certains dessins, qu'on allume sur place et dont
on active la combustion en soufflant avec la bouche. Dès
que la tendance à la cicatrisation se manifeste, on arrache
les croûtes qui se forment sur la plaie, on en irrite la sur-
face et il se produit bientôt des boui^eonnements dont on
favorise le développement par les mêmes moyens. Ces bour-
geons sont disposés soit en groupe soit en ligne continue.
Aussitôt formés au gré de l'opérateur, on lave à l'eau froide,
et ces étranges ornements conservent indéfiniment leur forme
ainsi que la couleur blanchâtre ordinaire des cicatrices.
' Bulletin de la Société d'Anthropologie, 1877, p. 333.
,ï Google
558
Ce sont ces bizarres productions qui ornent le front des
Tasmaniens, les épaules des Australiens et qui s'observent
chez les Papous, les Néo-Guinéens. En Afrique elles se trou-
vent au Soudan d'après Castelnau, en Mozambique où el-
les affectent la forme d'étoiles et chez les Zoulous qui se
décorent de cette manière les reins, le dos et les cuisses.
4" TATOUAGE-SOUS-ÉPIDERMIQUE
Il consiste à passer entre l'épiderme et le derme des
aiguilles armées d'un fil lequel est enduit de graisse mélan-
gée avec de la suie de lampe '.
Ce tatouage est plus employé chez les femmes que chez
les hommes et il ne s'applique qu'au visage, aux mains et
aux pieds, c'est-à-dire aux parties découvertes. Il a été re-
trouvé dernièrement chez les Tchouktchis, lors de l'expédi-
tion du professeur Nordenskjôld. Il paraît donc spécial et
exclusif aux peuplades qui habitent le voisinage des régions
polaires.
5" TATOUAGE MIXTE
Enfin sous le nom de tatouages mixtes, nous compre-
nons les mélanges sur un même groupe ethnique de plusieurs
des tatouages précédents. Ainsi en Nouvelle-Zélande et chez
beaucoup de tribus nègres, on rencontre à la fols la prati-
que par incisions qui donne les cicatrices blanchâtres et celle
des piqûres qui viennent compléter autour des points înci-
' Paw, Recherches sur les Américains, 1. 1, p. 263.
,ï Google
659^
ses un système complexe d'ornementation. On observe aussi
sur divers points de l'Europe un autre mélange du tatouage
par simple piqûre avec le procédé sous éptdermique. C'est le
cas, en particulier, pour l'Italie.
Si maintenant nous tentons de résumer, au point de
vue de la répartition géographique, ces notions générales sur
le tatouage, nous arrivons aux résultats suivants:
1° Tatouage par piqîàres: LaPoIynéste,c'est-à-dire
tous les archipels à l'exception de la Nouvelle-Zélande. Les
îles Marquises, excepté les îles de Râpa et quelques au-
tres du groupe Pomotou; l'île de Pâques, la Micronésie. La
Nouvelle-Guinée; le groupe Papou. A Bornéo le groupe des
Dayaks.
En Amérique méridionale: les Charmas, les tribus du
Grand Chaco; au Brésil les Guaranis; les Pampéens et les
Patagons.
En Amérique du Nord: les Peaux-Rouges.
En Afrique: les Kabyles, les Arabes, les Egyptiens; les
Niam-Niam, les Sénégambiens et les peuplades des rives du
Sénégal.
EnAsie:lesSeng-li de l'île de Haï-nam; lesChin-Ham,
anciens peuples de la Corée; les Baitos et les Ouen<hin du
Japon, des îles Kouriles et Aléoutiennes; les habitants de
Formose; les anciens Annamites; les Ouen-mien-po, peuple
barbare du sud-ouest de l'Empire chinois.
ir incision simple: Mélanésie-Tri-
Loango, Makondé, Mangandja, Ma-
ann);les rives orientale et méridionale
'après Cameron); la Guinée; la Nou-
.rulcérationou brûlure: Tribus
smanie et Australie; Guyane; les Pa-
i,moog\c
56o
pous, Néo-Guinéens, Mincopies et Negritos; les Alfourous;
la Nouvelle-Calédonie; le Soudan, Mozambique et les Zou-
lous.
4" Tatouage sous épidermique: Esquimaux,
Tchouktchis, Groënlandais; une partie de l'Europe (Italie).
5" Tatouages mistes: a mélange des procédés par
piqûres et sous épidermiques; Europe.
b Mélange d'incisions et piqûres combinées: Nouvelle-
Zéiaude; beaucoup de tribus nègres d'Afrique.
c Mélange du tatouage par bourgeonnement et par pi-
qûre. Ce dernier système se surajoutant d'ailleurs au pre-
mier et variant de dessin suivant les incidents principaux
de ta vie: Iles Marquises.
II
HntUatlons fodnleB
Les mutilations ethniques qui se pratiquent sur la face
sont très diverses et portent tantôt sur les lèvres, sur le nez
sur les paupières et enfin sur l'oreille. Nous éliminons tou-
tefois de cette catégorie, deux classes de lésions volontaires:
les tatouages de la face qui appartiennent à la catégorie des
mutilations du tégument et les lésions des dents qui seront
étudiées dans un paragraphe spécial.
1° MUTILATIONS DES LÈVRES
Elles consistent dans des perforations simples ou mul-
tiples qui traversent de part en part, dans le sens vertical,
la lèvre inférieure ou la supérieure.
,ï Google
56i
La plaie est destinée à loger après sa cicatrisation un
corps étranger, un ornement fait de matières variées : tantôt
c'est une sorte de clou en os ou en métal destiné à élar-
gir progressivement la perforation jusqu'à ce qu'elle puisse
contenir l'objet qu'on veut y installer définitivement: les
Kolochs, voisins de la Colombie, etc. Certaines peuplades
d'Esquimaux du Port-CIarence où les a rencontrés le profes-
seur Nordenskjôld, ont l'habitude de loger dans cette ou-
verture une grosse perle de verre bleu. Ce sont encore les
Esquimaux qui se perforent les Joues pouryinstaller un bou-
ton analogue à celui de nos manchettes, de sorte qu'au mo-
ment des repas une partie des matières et des liquides s'écoule
par ces ouvertures et tombent sur le cou*.
D'autres fois l'objet enchâssé dans la lèvre a la forme
d'un disque en bois ou en os et est placé suivant son grand
diamètte dans la fente labiale. Les Botocudos du Brésil doi-
vent leur nom au Botoque, rondelle de bois aplatie assez sem -
blable à une grosse pièce de nos jeux de tric-trac, ou à une
bonde de tonneau; son diamètre a parfois jusqu'à 6 centi-
mètres'.
Une pratique semblable a été observée par Livingstonc
chez certaines peuplades nègres d'Afrique, les Bongos et les
Mangandjas, seulement la mutilation porte sur la lèvre supé-
rieure, qui après avoir été perforée verticalement de haut en
bas, est garnie d'un clou d'abord assez fin puis remplacé par
une série de grosseurs variées, jusqu'à ce que la perforation
puisse loger un volumineux disque de bambou, d'ivoire ou
de métal, le pelélé. Les Mangandjas sont d'ailleurs cxtrcme-
* Sur les Esquimaux d'Asie m Bulletin de la Société d'Anthropnlopie,
1877, p. 598.
*Voir Rey et Hamy, Bulletin de la Société d'Anthrapolo/^îe, ifijn, f>.
39Î.
39.
„Google
56a
ment coquets et ils couvrent en outre leurs bras et leurs
jambes de bracelets et d'anneaux de toute espèce dont l'en-
semble acquiert un poids considérable.
Parfois, la perforation de la lèvre au lieu d'occuper le
centre se pratique sous forme de petits trous siégeant sur
les cotés au voisinage des commissures. Par ces trous, les
nègres d'Afrique s'introduisent des chaînettes auxquelles
pendent des breloques en nombre indéfini, en ivoire, en
verre ou en métal. On en voit de curieux exemples dans
la collection de Mr. Pinarl.
Enfin, il existe une autre mutilation de la lèvre qui con-
siste à obtenir au moyen de piqûres répétées avec l'épine
du gommier un tel gonflement qu'elle prend lourdement de-
vant la face. Cette praitique est commune aux femmes du
Des mutilations des lèvres, nous pouvons rapprocher
celles que les faquirs a'inâigent en se perforant la langue ou
en se coupant les paupières en manière de mortification.
a" MUTILATION DU NEZ
Les peuples qui se perforaient les lèvres, devaient avoir
l'idée de se mutiler le nez, soit la cloison, soit les ailes dont
la forme invitait sans doute à des perforations nouvelles.
C'est ainsi que les indigènes de la Nouvelle-Zélande, de la
Nouvelle-Guinée, de l'Australie, de l'Ile Saint-Michel au dé-
troit de Behring, s'introduisent au travers du visage, dans
la cloison du nez, une barre de bois ou d'os, que nos ma-
telots appelaient plaisamment la vergue de beaupré.
C'est par cette même ouverture que d'autres peupla-
des s'introduisent des anneaux que portent particuEèrement
,ï Google
563
les femmes. Les Péruviennes s'ornaient ainsi de cercles de
volume et de valeur proportionnels à la fortune de leurs
maris. De même les Hindous et les Arabes. Les Caraites
et les Mexicains substituaient à Panneau des perles de verre
ou de métal. Enfin quelques tribus de la Nouvelle-Zélande
pratiquent la perforation du nez pour y introduire une plu-
me qui s'étend de chaque côté sur les joues.
3° MUTILATION DES OREILLES
L'oreille est peut-être la partie du visage qui se prête
le mieux aux mutilations. Car des peuples les plus civilisés
aux plus sauvages la perforation du lobule chez l'homme
mais surtout chez la femme est en usage de temps immé-
morial. Toutefois cette perforation, qui chez nous se borne
à recevoir un anneau fin et léger, prend chez certaines peu-
plades des proportions inouies; ainsi: les anciens Péruviens
obtenaient peu à peu par des poids de plus en plus lourds
un allongement tel du lobule que celui-ci tombait littérale-
ment sur les épaules. Dans ces trous on introduisait ensuite
les ornements les plus divers: barres de bois ou d'écaillés
de tortue, rouleaux de feuilles ou d'étoffes, clous, cordons
auxquels on attachait des chapelets de dents d'animaux et
jusqu'à des objets de voyage. Certaines négresses d'Afrique,
les femmes mongoles, les Dayaks de Bornéo, les peuplades
barbares du Yun-nam y introduisaient des anneaux de mé-
tal dont le poids atteignait parfois i3o grammes.
Sous l'influence de ces diverses manœuvres le lobule de
l'oreille, outre qu'il s'allonge démesurément, parvient à pré-
senter une ouverture dans laquelle on pourrait passer le
poing fermé. C'est surtout au Zambèse que Livingstone
V
„Googl'
f
564
mentionne cette mutilation portée à son plus grand excès
et a laquelle s'ajoute une accumulation de bracelets et d'an-
neaux telle aux bras et aux jambes que la marche devient
très difficile.
Nous devous dire toutefois que ces diverses mutilations
faciales ne nous ont pas semblé assez nettement définies et
groupées assez régulièrement par race pour se prêter à une
représentation par cartes de répartition. Il n'en est pas de
môme de la variété qui suit.
m
Uat;lIatloii8 oéphalIçiTies
Les mutilations volontaires qui se pratiquent sur la tête
comprennent deux divisions fondamentales: les mutilations
par déformation^ les mutilations par trépanation.
l" MtrrlLATION PAR DÉFORMATION
Les déformations ethniques du crâne dont il est ques-
tion ici sont exclusivement celles pratiquées sur l'homme soit
volontairement soit à son insu.
Elles diffèrent essentiellement des déformations posthu-
mes et pathologiques qui ne rentrent pas dans le sujet actuel.
La déformation volontaire est une mutilation qui s'ob-
serve à peu près sur tous les points du globe. Elle s'effectue
exclusivement sur les enfants depuis l'âge de six mois à peu
près, jusqu'à l'âge de trois, quatre et six ans. Elle est due,
ly Google
565
soit à l'emploi d^appareils spéciaux fixés sur certains points
du crâne, soit à l'usage de pressions directes intentionnelle-
ment dirigées dans ce but, soit enfin à des liens ou des mo-
des de coiffures particulières.
Les variétés de déformation ont été diversement clas-
sées par les auteurs : on sait que Gosse, dans .un travail resté
célèbre *, en a décrit seize formes principales, division que
Mr. Dalty a conservée*. D'autre part, Mr. Topinard^ les
réduit à quatre types dans lesquels rentreraient en outre
les variétés décrites par Morton, Foville, etc.
Voici cette classification:
i" Déformation occipitale simple: Turcs, Maronites,
Vancouver.
2" Déformation frontale simple qui se subdivise en:
Frontale simple proprement dite: (Haute- Garonne), en
bregmatique ou annulaire (Haute-Garonne, Deux-Sèvres).
Bilohée: (Seine- Inférieure, Deux-Sèvres, Nouvelles-Hé-
brides).
3° Déformation fronto-occipîtale et variétés, saillie des
côtés et asymétrie: (Chinooks, Cara'iTjes, Ancon, Sacrificios,
Nahuas, Natchez).
4° Déformation /ro«/o-5;'ttcyîjïo-occi/'iïc' latérale. Com-
pression sur les côtés et symétrique: (Aymaras et Macrocé-
phales).
Entre ces classifications, celle de Gosse peut être un
peu diffuse et celle de Topinard un peu trop réduite, se pla-
cent diverses tentatives du même genre que nous devons
mentioner; ce sont:
y
' Essai sur les déformations artificielles du crâne. Paris, i855.
* Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales^ article crine.
'Revue d'Anthropologie, 1879, p. Soi.
r
566
Le travail de Lagneau*, remarquable par sa grande
érudition et celui de M. de Lenhossék de Budapesth*. En-
fin celui de M, Lunïer*. C'est cette dernière classification
que nous avons cru devoir adopter ici en raison de la pré-
cision des déterminations et de la métliode rigoureuse qui
la caractérisent.
' Des déformations cépkaliques en France in Ga^. hebi. de Médec.
et de Chir., 1879. n* 5 et 6.
' Des di/ormaiions artificielles du crâne en gênerai etc., ïn 4*. Bu-
dapest, 1878.
' Dictionnaire de Médecine et de Chir. pratiq., Baîlliëre, article
crâne (défonnalion du). 1879.
,ï Google
567
LIEUX
TYPIS
CAMCTÈRIS
MOYENS EMPLOYÉS
d'observa-
1"
Front aplati de haut
Compresses, ban-
Ancîen con-
Défor-
en bas et d'avant en
deaux ou serre-têtes
tinent. Deux-
mation
arrière; tantôt os fron-
appliqués sur le front
Sèvres, Car-
frontale
tal seul déprimé dans
et maintenus par des
cassone.Nar-
sa totalité, comme je
lacs qui passent sur
bonne, Cas-
l'ai observé dans les
ou derrière le pavil-
tres et envi-
Deux-Sèvres, et se
lon de l'oreille et sous
rons de la
tenninant en haut et
ta nuque.
Montagne
en arrière par un
Notre; Haute
bourrelet transversal;
Garonne.
tantôt la dépression
s'étend aux angles an-
térieurs et supérieurs
des pariétaux; elle
est pratiquée sur les
deux sexes.
2»
Aplatissementdela
Tantôt pression
Allemagne
Défor-
partie inférieure ou
non calculée de la
centrale; Taï-
mation
supérieure de l'occi-
planchette qui forme
ti (les hom-
occipi-
pital, soit des deux
le fond du berceau;
mes seule-
tale
Côtés à la fois, soit
tantôt application
ment); îles de
d'un seul c6té;refou-
systématique d'une
Nicobar, de
ement de l'encéphale
compresse sur le der-
Sumatra et
en avant; front rele-
rière de la tête.
de Java; Yg-
vé, occiput se rappro-
neris d'Haïti;
chant plus ou moins
caste des In-
de la verticale; de là
cas, côtes du
deux variétés obser-
Pérou.
vées généralement
chez les individus des
deux sexes.
„Google
TYPBS
CARACTÈRIS
MOYBNs oinjovis
d'observa-
TIOH
5-
Aplatissement si-
Planchettes, terre
Tribus des
Défor-
multané du front et
glaise, sacs de sable
Natchez et
mation
de l'occiput, tantôt
OU fortes compresses
des Chactaws
fronto-
également tantôt iné-
maintenues solide-
dans l'Améri-
occipi-
galement: dans ce
ment et avec une éga-
que duNOTd;
tale
dernier cas, la pres-
le force sur le front
des Caraguas
sion porte surtout sur
et l'occiput; quel-
et des Conni-
le frontal qui se trou-
quefois simple pres-
vos au Pé-
ve alors fortement re-
sion des mains (tête
rou; des Ocna-
jeté enarrière et for-
cunéiforme relevée).
guas, au Bré-
me même parfois un
L'enfant étant cou-
sU; les Tai-
bourrelet transversal
ché sur la planchene
tiens.
en avant de ta suture
qui forme le berceau,
CÔle N.-0.
coronale: cette dé-
on lui en applique sur
de l'Améri-
formation n'était guè-
le front une seconde
que du Nord,
re pratiquée que sur
phis petite que l'on
les Covalilsk,
les enfants mâles.
fixe sur la première
les Wagsaws,
avec des lacs, et cela
les Kataubas,
généralement jusqu'à
les Attacapas;
l'âge de trois ans; ou
les Cara'ibe»
bien encore (Antilles)
des Antilles.
l'enfant étant couché
en travers sur les ge-
nouxdelamère.cellc-
ci pose sa main droite
sur la tête de l'enfant,
son coude gauche
sur sa main, appuie
sa tête sur la main
droite et dort dans
cette position (tête
cunéiforme couchée).
„Google
1569
naso-
pari éta-
le ou
mongo*
loïde
Aplatissement des
os du nez et dépres-
sion oblique de haut
en bas et de dedans
en dehors des parié-
taux et de la partie
supérieure du frontal;
résultent l'écar-
mt et l 'obliquité
des orbites, l'élargis-
:nt de l'arcade
zygomalique, ta dé-
viation en avant
maxillaire supérii
et enfin le développe-
t exagéré de la
partie inférieure
postérieure du crâne
i retrécissemeni
de la partie supérieure
et antérieure. Cette
déformation n'étût
pratiquée que sur les
enfants mâles.
UOVENS EMPLOYÉS
Pétrissage prolon-
gé et application de
bandes de linge for-
tement serrées sur le
nez et les parties an-
téro-latérales et supé-
rieures du criine.
Les anci.
Huns, des
virons
Caucase;
Kirghis
Turkestan;
les Caraïbes
de l'Oréno-
,ï Google
570
LICUI
TYPM
CARACTÈRES
MOYENS XHPLOTK
D 'observa •
;•
Aplatissement laté-
Pétrissage avec les
Macrocé-
Défor-
ral du crâne, soit en
mains ei application
phales décrits
maiion
avant soit en arrière,
de bandages et d'ap-
par Hippo-
latérale
soii même sur toute
pareils appropriés.
crate;Abases
ou lem-
la longueur du crâne
du N.-O. du
poro-
et cela obliquement
Caucase;
pariétale
de bas en haut et de
quelques tri-
haut en bas; ce qui
bus arabes du
produit la saillie tan-
nord de l'Afri-
tôt du front et de l'oc-
que et de la
ciput (macrocéphales
Mauritanie;
d-Hippocrate) tantôt
les anciens
de l'un ou de l'autre
Belges, Fla-
seulement, tantôt en-
mands, Pari-
fin le rétrécissement
uensetHam-
en arête de la partie
bourgeois.
supérieure du crâne
et l'élargissement de
la base. Cette défor-
mation n'était guère
pratiquée que sur les
enfants mâles.
„Google
571
TïPK
CARACTÈRES
UOYZHS EHFLOVéS
UKUX
d'obsbrva-
TION
6-
Aplatissement du
Compression du
Les anciens
Défor-
front du haut en bas
Aymaras du
maiion
rétrécissement du
et d'avant en arrière.
plateau des
fronto-
crâne dans son em-
à l'aide d'une com-
Andes, en Bo-
sinci-
sembie; bourrelet
presse médiane et de
lirie.
pito- pa-
transversal formé par
deux compresses la-
riétale
le rebord postérieur
térales maintenues
ou têie
du frontal dont la sur-
par une large bande
symé-
fece est plane et mê-
faisant plusieurs fois
trique
me légèrement con-
le tour de la tête (tite
allon-
cave BU centre ou il
allongée en cylindre).
gée.
prése nte deux dépres-
Même procédé dif-
Religieux
aons latérales super-
mendiants en
ficielles, avec des or-
le mode d'application
Chine.
bites dirigés obUque-
de la bande à la par-
ment en haut; aug-
tie postérieure de la
mentation considéra-
tête (allongée en cô-
ble du diamètre anié-
ne).
ro-postérieur et dimi-
nution du diamètre in-
terpariéial, quelque-
fois au lieu de la forme
longée en cylindre) la
tête affecte celle d'un
cône (tête allongée en
cône) cene déforma-
tion était sunout, si-
non uniquement, pra-
tiquée sur les enfants
mâles.
„Google
572
LIEUX
TYPES
CARACTÈRES
MOYENS XUPLOVéS
D 'observa-
tion
T
Front peu étendu,
Procédés inconnus
Les Totona-
Défor-
mais relevé, se termi-
mais faciles à conce-
ques de nie
mation
nant en haut par une
voir.
de LosSacri-
fronto-
saillie transversale
ficios dans le
sinci-
obtuse. En arrière.sur
golfe du Me-
piio-oc-
la ligne médiane, lar-
xique.
cipitale
ge gouttière qui
ou têie
s'étend du trou occi-
trilobée
pital au bourrelet for-
mé par le coronal, se
bifurque et descend
que côté jusqu'aux
fosses temporales, où
eUe se perd. SaiUie
considérable des bos-
ses pariétales. Cette
déformation n'a été
observée que chez les
hommes.
%'
Aplatissement si-
Procédés inconnus.
Indiens
Défor-
multané du front, du
des rives du
mation
sinciput, de l'occiput
Maragnon
qua-
ei des parties latéra-
(Equateur).
drangu-
les de la tête.
Quelques tri-
laire
bus des an-
ciens Ger-
mains et des
Kalmoucks.
573
Uie presque glo-
x; aucune saillie
li de
locciput
otubéranc
re; front large,
fUs occipitaux
Is et arqués, troi:
ital placé tout'
malion était suT'
pratiquée sur le:
Forte compression
du crâne par une ban-
de faisant le tour de
la tête, du front à
l'occiput.
MOYENS EMPLOYÉS
Les Turcs
osmanlis; les
Arabes an-
ciens; les In-
diens, tête de
boule à l'ouest
de la baie de
Hudson, au
Canada.
0 ObSEKVA-
TION
,ï Google
574
LIEUX
TYPES
CARACTÈRES
MOYENS EUrLOYÉS
D 'observa-
non
10'
Dépresjion circu-
Application sur la
La Seine-In-
Défor-
laire qui de la partie
tête de l'enfant nou-
férieure, et la
mation
supérieure du front,
veau-né d'un serre-
partie méri-
aonu-
où elle offre sa plus
tête ou bandeau qui,
dionale des
laire
grande largeur, se di-
panant de la fonta-
Deux-Sèvres;
rige obliquement en
nelle antérieure, va
la Paitgonie-
bas et en arrière, pas-
se au-dessus de la
l'occiput et revient
conque de l'oreille et
s'attacher sur le de-
va gagner la nuque.
vant de la tête. Ce
Augmenution de
bandeau qui est porté
la courbure antéro-
beaucoup plus long-
poitérieure du fron-
temps par les Biles
tal et de l'occipital et
que par les garçons,
est souvent remplacé,
vers le troisième ou
du crâne en arrière.
quatrième mois, par
Cette déformation est
une espèce de calotte
généralement plus
en carton.
marquée chez les
femmes, quand la dé-
formation est très
prononcée, la tête est
pour ainw dire bilo-
bée.
„Google
Quoiqu'il en soit de ces diverses classifications dans le
détail et là discussion desquelles nous ne saurions entrer,
notre intention actuelle doit se borner à donner d'une façon
g<inérale les points de répartition géographique.
En les localisant ainsi sur une carte, on constate d'abord
deux faits: le premier, c'est que la différence des races n'im-
plique par nécessairement une différence correspondante
dans les modes de déformations employés, et le second c'est
qu'à des groupes ethniques similaires peuvent appartenir des
pratiques dissemblables.
Envisageons d'abord l'Amérique. Pour l'Amérique du
Nord, c'est presque exclusivement la côte occidentale qui
fournit les exemples de déformation céphalique, et le pro-
cédé employé consiste dans des machines spéciales compo-
sées de planches articulées entre lesquelles la tête de l'en-
fant subit une pression continue. L'appareil a été décrit par
Gosse *.
En suivant cette côte, du nord au sud, on trouve d'abord
l'archipel des Aléoutes, dans lesquelles la déformation cou-
chée est du même type que celle des Aymaras. Plus bas,
l'archipel Kodiak est un centre de déformation par aplatis-
sement ^nnV/o-occ/^iWi à Barkiay Sound, c'est la déforma-
tion couchée allongée et pointue chez les Shimmesyans,
couchée simple chez les Kos-Kïemos. Le muséum d'histoire
naturelle de Paris en possède deux exemples caractéristi-
ques.
A Vancouver, d'après Morton', on observe à la fois
trois types ethniques, trois groupes de langues et trois for-
mes de mutilations céphaliqucs:
' Loc. cil. PI. S, lig. 7 et 8.
* Crania americana. Philaiielphii;, iS2<i.
,ï Google
M
Au nord, celle des Kos-Ksemos; à Pouest, la déforma-
lion couchée et étalée; au sud celle de Koowitch.
Au cap Flattery c^est la forme aplatie ainsi que le Mu-
séum en possède plusieurs types.
Dans la Californie du Sud, on nV signalé aucune dé-
formation.
Dans la Sonora, on trouve la déformation verticale des
Natchez '.
Au Mexique, sur les points anciennement habités, la f<H'-
me observée est le type couché et étalé dont on a reconnu
à Durango des milliers d'exemplaires. Toutefois, on n'a si-
gnalé aucune déformation chez les Peaux-rouges de la Prai-
rie.
Chez les Natchez la déformation est verticale.
A Sacrjficios nous rencontrons dans les abondants ^se-
ments de cène île, qui n'était qu'un lieu de sépulture, une
déformation tout à fait typique; c'est le crâne trilobé: apla-
tissement postérieur sur un plan ri^de et saillies latérales
doubles. Elle se retrouve sans doute avec une origine corn-
mune, malgré certaines nuances, aux Carailies, à Cuba,
Puerto-Rico, Saint-Vincent et Haïti.
Aux Toltèques font suite les Nahuas du IVlexique et
les Lacandons du Yucatan. Deux crânes d'enfants chinooks
de la collection du Muséum portent cette déformation très
évidente.
Pour l'Amérique du Sud, nous signalerons d'abord Bo-
gota où s'observe la déformation toltèque, puis le Pérou,
où la déformation dite péruvienne fronto-occtpi'tale s'observe
de Guayaquil à Rica, avec le crâne bien connu d'Ancon com-
me type,
' Monon, History o/the North American Indians. Londres, 1775,
,ï Google
^77
Le groupe des Aymaras, déformation par compression
latérale et symétrique, termine sur la côte occidentale cette
série de déformations, car au-dessous d'eux, on n'en ob-
serve plus d'exemple '.
Enfin, en Patagonie Retzius* et Moreno* ont signalé
les pratiques de déformation crânienne jusqu'au détroit de
Magellan et elle a pour caractère, dans cette région, la dé-
pression pariéto-occipitale.
En Afrique, elle n^a été rencontrée sur aucune des par-
ties de la côte occidentale ou dans les régions explorées du
centre qui sont si riches en mutilations ethniques de divers
genres, mais elle s'observe au nord chez certaines popula-
tions musulmanes. C'est le type turc déjà signalé par Ve-
sale: déformation latérale ou temporo-pariétale. Elle s'étend
de Suez vers le nord et se propage en Algérie, où elle est
d'ailleurs d'importation turque chez les mendiants religieux
et les tribus arabes en contact avec les Berbères. Gosse
l'a également signalé chez les Kabyles où elle s'effectue par
des manœuvres directes et manuelles; on la retrouve en
Egypte, en Syrie chez les Maronites et les Druses; son ma-
ximum d'intensité est dans le Louristan, le Daghestan, le
Turkestan indépendant au sud de la Caspienne. On l'observe
encore chez les Nogaïs de Constantinople ainsi que l'atteste
le crâne retrouvé dans un cimetière de Scutari, par M.
Wiesbach.
Ce même type turc se prolonge encore sur certains peu-
ples de la Russie, d'où le docteur Pokrowski en avait ras-
' Voir A. d'Orbigny. Voyage dans l'Amérique méridionale. L'kom-
e américain. Paris, iSBç, in. 4°
* Arch. fur Anat. und Physiot. de J. Millier. 1848-49.
' Bulletin de la Société d'Anthropologie, 1880. Séance du 6 mai.
,ïGeX)'
r
M
semblé de nombreux échantillons à l'exposition anihropolo
gîque de Moscou, que nous visitâmes en 1879.
Eji Asie elle s'observe chez les Annamites où, d'après
MoudiÈres ', elle aurait pour caractère la déformation trans-
versale; en Birmanie, où elle affecte la forme occipitale sim-
ple. La déformation frontale se serait retrouvée chez les an-
ciens peuples de la Corée, les Chin-ham',
En Mélanésie, sur les côtes de Bornéo, à Java, à Su-
matra, où les auteurs des Cranta Ethnica la considèrent
comme une habitude familière aux Négrito- Papous. A ces
divisions se rattachent quelques populations groupées sui-
vant une ligne ondulée qui partirait des Nouvelles-Hébri-
des, remonterait par le détroit de Torres et l'île de Tourde
(buste de la Société d'Anthropologie), et çà et là quelques
points de la Nouvelle-Guinée, Papous, Néo-Guinéens d'après
MM. Virchow et Meyer de Dresde' et de l'archipel des
Philippines.
Au\ Nouvelles-Hébrides, la déformation est couchée
simple et elle serait, d'après Forster, produite par un lien,
mais il existe au musée de la Société d'Anihropolo^e et au
Htmteriau Muséum, h Londres, plusieurs crânes ofiraot la
déformation occipitale simple.
Au centre du continent asiatique, elle n'aurait été si-
gnalée, îi notre connaissance, qu'en Chine où elle serait une
habitude constante chez les religieux mendiants. Elle aurait
la forme allongée et symétrique. (Lunîer),
En Polynésie, son aire géographique est très variée:
' Butletin de la Société d'Anthropologie, 1874, p. 1 18.
' Ma-touan-Iin, Ethnographie des peuples étrangers de la Ot'it,
{xuf siècle). Traduction communiquée par le marquis dHerïey àt
Saint-Denys.
» Mitthiel des Kgl. Zoo/. Afusaum jt/ Dresden, 1R75-7S..
,ï Google
2w
on n^en a signalé aucun exemple à la Nouvelk-Zclande nî
en Australie, mais aux îles Mariannes et Sandwich elle est
manifeste. A Taïti elle est double, tantôt fronlaie, tantôt
occipitale, suivant quVn voulait obtenir une exagération
ou un affaiblissement des facultés intellectuelles ; la première
étant la déformation du courage, la seconde la dcfomulion
de la prudence.
Enfin, c'est en Europe où elle présente peut-être le plus
de variétés et où du moins elle a été le mieux étudiée.
Au Caucase et en Crimée, c'est par centaines que les
crânes déformés du type macrocéphale d'Hippocrate, de Xc-
nophon et de Strabon ont été rencontrés dans les patientes
recherches de MM. Sodiitz, Scepura, Bayertz et Smirnow-
De là, la trace de déformation caucasîque se propage
sur le Bas-Danube et sur la Tisza où M. de Lenhossék en
■a recueilli divers exemples.
Au delà de ce point et en remontant vers le nord de
l'Europe, la série des déformations crâniennes reste inter-
rompue; jusqu'à présent on ne les a pas rencontrées dans
le Jutland, cette Chersonèse cimbrique où les Cimmériens
macrocéphales ont fait cependant, suivant Worsaae, une si
longue station. Mais sur le Rhin, un crâne déformé a été
trouvé auprès de Mayence par M. Ecker; un autre à Co-
logne par M. Schaaffhausen. Trois crânes déformés auraient
aussi été trouvés, d'après M. Topinard, en Autriche, sur un
point cependant indéterminé. En Angleterre, Barnard Davis
en décrit un spécimen trouvé près de Salisbury.
Un crâne trouvé à Padoue par M. le professeur Andréa
Gloria' a présenté une déformation à la fois relevée et an-
■ Sopra un cranio iejormato scavalo in piajja capitaneato a Pa-
Jova. 1880.
,ï Google
58o
Ruiaire du type macroctiphale, ce qui tend à établir que les
Cimmériens dans leur marche envahissante vers l'Est, sont
parvenus jusqu'en Italie septentrionale. Ils auraient aussi
pénétré en Savoie, ainsi que Taneste le crâne trouvé par
Gosse fits, et au delà du lac de Genève. (Crâne de Voiteur
près de Lausanne).
Nous arrivon» maintenant à la France où les pomts
d'observation de déformation céphalique affectent une di-
rection assez nettement déterminée.
De la Belgique cette mutilation passe par la Seine-In-
férieui-e, FTle-de-France, non loin de la Champagne^ pour
se diriger vers le sud en coupant la Loire pour descendre
vers la Garonne jusqu'au Limousin.
Or cette direction générale est précisément celle qui
correspond ft la marche des invasions cîmmériennes parties
du Pont-Euxin et si bien étudîcc par Amédée Thierrj', Henri
Martin, Lagneau, etc.
Dans cette énumération de points où ont été recueillis
des crânes déformés, il faut mentionner les Parisiens qui
présentent à eux seuls la plus grande variété de déforma-
tion, ainsi qu'on peut s'en convaincre par la collection du
musée de la Société d'Anthropologie de Paris. Mais si nous
groupons les différents ^sements observés en France, nous
trouvons que les formes peuvent se résumer en quatre ty'pes-
i" Déformation frontale simple. Deux-Sèpres,
Toulouse.
2° Frontale et relevée par derrière. C'est la
déformation toulousaine par excellence.
3" Annulaire simple. Très répandue sur les points
observés et en particulier la Seine-Inférieure.
4" Enfin l'annulaire bilobée. Scine-Tnférieure el
DciiX'Scvrcs.
,ï Google
58i
Dans le Midi, la déformation s^étend jusqu^à Cartha-
gène et aux Baléares,
Dans l'Est, il faut ajouter les crânes trouvés dans le
Jura, un aux environs de Lons-Ie-Saulnier, Jeux à Corveis-
siat.
Enfin, on retrouve la déformation crânienne à Saint-
Gaudens, et à Lozerres (Seine-et-Oise). Un crâne de cette
provenance, donné par Barnard Davîs au Muséum, présente
cette mutilation.
Tel est l'état actuel de la question des déformations
crâniennes en France où elle a été si puissamment éclairée
par tes travaux de Lunier, Foville, Broca, etc.
2" MUTILATION PAR TBEPANATION
La trépanation du crâne consiste à pratiquer à ta boîte
crânienne et sur un point variable de sa surface, une ou-
verture ordinairement ronde ou elliptique.
Le but de cette opération ne présente aucune analogie
avec celui que poursuivent nos chirurgiens actuels. Elle
semble avoir pour objet, suivant une idée superstitieuse et
mystique, de guérir certaines maladies convulsives, l'épUepsie
ou ï'éclampsie. C'est surtout chez les enfants qu'elle était
effectuée et l'état cicatrisé des ouvertures prouve que le plus
grand nombre des sujets survivaient à cette mutilation.
Elle comprend dans le temps, deux époques, l'une j7r^-
historique à peu prés bornée, d'après les documents recueil-
lis, à notre continent; l'autre actuelle car cette pratique
s'est perpétuée de nos jours dans certaines régions du globe.
Pour le groupe préhistorique, la découverte de cette
mutilation est due à un médecin de !a Lozère, le docteur
.yCeX^t^lii
Prunicres (de Marvcjols) qui dès 1873, en a recudlii à lui
seul une vingtaine d'échantillons dans les cavernes de ce
département'.
Depuis lors, elle a été magistralement étudiée et décrite
par Broca* qui n'a laissé subsister aucun doute sur les ca-
ractères de cette mutilation, sur son mode opératoire et sur
son but probable.
Aujourd'hui le nombre des crânes trépanés appartenant
à l'époque néolithique s'élève à 40 ou 60 pièces environ,
rassemblées par divers obser\'ateurs qui, à rexen:^le de M.
Prunières, ont heureusement exploré les cavernes et les dol-
mens de la France et des pays voisins.
Citons par exemple le crâne trouvé dans un dolmen de
Bougon (Deux-Sèvres) par M M. Babert de Juillé et Sauzé*,
celui d'Enteroche près Angouléme, (Charente) par MM.
Chauvet et Gassies', un autre dans le même département
près Bouillac par M. le docteur Lecler; d'autres découver-
tes ont été faites par M M. Chaptain et Lartet dans la grotte
de Sordes, (Basses-Pyrénées^), par M. Chouquet à Moret,
(Seine-et-Marne^), dans la Marne, où M. Joseph de Baye
en a rassemblé cinq exemples des plus remarquables'.
A ces pièces il faut encore ajouter un crâne trouvé dans
' Association française pour l'avancement des sciences- Lyon, 187Î,
p. 704.
» Bulletin de la Société d'Anthropologie de Paris, 1874 ei 1876.—
Revue d' Anthropologie, 1877.
' Rapport de la Commission des lumulus de Boujois,in8*,fiion, iS-jb.
* Association française pour l'avancement des sciences. Nantes, 1875
p. 854 «t 888.
* Revtie d'Anthropologie, 1877, P' *'9'
' Bulletin de la Société d'Anthropologie, 1876, p. 276.
' La Trépanation préhistorique. Paris 1876, gr. /nS"— GroM« elsi-
pultures de la vallée du Petit-Morin. Tours, iSjS.
,ï Google
583
Pyrénées par M. Cazalis de Fondouce, un autre
Seine, un autre au Puy-de-Dôme et étudié par
d : un autre encore dans ta caverne de Maurennes.
les-uns de ces crânes ne présentent pas une ou-
iplète, inais seulement un simple grattage corn-
ie restée inachevée; telle est la pièce de M. Ca-
ndouce.
lors de la France, les exemples recueillis de tré-
éhistorique, appartiennent à divers observateurs:
Gardner en signale plusieurs faits dans une ca-
vallée de la Saale, aux environs de Halle*. Ces
té étudiés par M. Virchow; deux autres ont été
i Prague par M. Ingoald Cludset*.
es temps actuels cette pratique s'est perpétuée
: encore de nos jours. C'est contre les attaques
qu'elle paraît exclusivement dirigée, circonstance
ine grande valeur à l'hypothèse de Broca sur le
ration préhistorique'.
:n Kabylie, elle a été observée par M. H. Lar-
décrit le procédé et il est manifeste que chez les
bères, elle s'effectuait de la même manière. Le
. Société d'Anthropologie de Paris possède une
aquelle une trépanation incomplète par grattage
ces évidentes de cicatrisation. C'est sans doute
erbère qu'il convient de rattacher une pièce trou-
is (Grande Canarie) par le docteur Chil.
GeseUschafi fur Anthropologie^ 18 janvier 1879.
de la Société d'Anthropologie, 1877, p. 10,
Anthropologie, 1877, et Bulletin de la Société d'Anthropo-
i5.
ir la trépanation chej les Arabes in Bulletin de l'Acad.
866-67 I- ""'"' p. 87-
DigitizsdbyGe^OL^fc
r
584
D'autre part MM. Feuvrier et Boulongne ont retrouvé
la même pratique au Monténégro'.
Si nous passons au Nouveau Monde, il nous faut signa-
ler la trépanation chez les Incas où l'ouverture pratiquée
au crâne était quadrangulaire et non circulaire comme en
France'.
En Polynésie orientale, aux îles Pomotou, elle s'effectue
: comme traitement ordinaire de l'épilepsie, nouvelle
nation du but invariable de cette opération que con-
: d'ailleurs dès le commencement du xvii* siècle' Jehan
pour faire sortir du crâne le malin esprit et les dé-
jifin à Taïti, si l'on s'en rapporte à Lesson * la iré-
on du crâne est une pratique qui est à la fois préhis-
e et actuelle et est appliquée à la même idée théra-
ue.
n Asie, aucune recherche n'est venue jusqu'à présent
éler l'existence.
IV
Untilation du trono et des membres
n dehors des tatouages qui se rencontrent fréquem-
>ur la poitrine, les seins et tes épaules, les mutilations
me sont assez rares chez tes peuples sauvages par
e Monténégro et ses habitants, Paris 1844, p. 44.
oir Sqaier, Journal ofthe Antkropological Instilute 0/ New Yorh,
7i-
railéete l'Épilepsie, i6o3. Paris, liv. 1, S vu.
iilletin de la Société ttAnlhn^ogU, iS-jS, p- 6iq.
^^-^^K„„z.db, Google
585
e raison que, ne portant que peu ou pas de
nVnt pas Pocca.sion de déformer la taille ainsi
iratique universellement dans les nations les
et chez les dernières, on constate l'abandon
let de toutes ces mutilations barbares et dou-
s'infligent les peuples primitifs, on est forcé
; que par une étrange compensation les mu-
taille se sont indéfiniment perpétuées,
es caprices de la mode, nos femmes s'impo-
mations les plus variées, les plus extrêmes et
mbiables entre elles. Tantôt le vêtement fait
taille au-dessous des ses bornes naturelles
; dans cette direction qu'à la limite încom-
aassin; tantôt elle remonte par un lien circu-
isse supérieurement les seins jusqu'au niveau
et des épaules. Parfois même les femmes ont
: prétention d'établir la taille au-dessus même
niveau des aisselles, ainsi que cela s'observe
peuples du nord de l'Europe.
Tendra toutefois que nous ne puissions nous
r ces variétés de déformations, ce qui nous
tracer l'histoire ethnographique du corset chez
i mutilations ont été du reste longuement étu-
s points de vue des complications et des dé-
santé qu'elles occasionnent. C'est là leur as-
intéressant et elles doivent être conséquem-
es bien plus sous le rapport de l'hygiène qu'au
;thnique.
mutilations plus sérieuses se rencontrent d'aïl-
nc: on connaît déjà la légende des Amazones
;nt le sein droit afin de tirer plus aisément
,ï Google
386
de l'arc. Nous retrouverons cette mutilation sous le ca-
ractère religieux chez les femmes Skoptsy, de Russie, qui
s'amputent les deux seins, réalisant ainsi avec une autre mu-
tilation non moins barbare une sorte de suicide de la ma-
ternité.
Telles sont du reste les seules mutilations spéciales sur
te tronc,
Celles des membres sont plus répandues:
Pour les membres supérieurs, on a depuis fort long-
temps signalé chez beaucoup de peuples une pratique qui
consiste à s'amputer une phalange à la mort d'un parent et
ici se rencontre précisément cette particularité curieuse que
le même mode de mutilation se retrouve chez les peuples les
plus distants l'un de l'autre, et les mieux séparés géographi-
quement. Ainsi les anciennes populations du Darien * s'infli-
geaient constamment cette mutilation que se retrouve iden-
tique chez les Indiens de l'île d'Amsterdam d'après Cook,
Chez les Cafres et les Hottentots suivant La Loubère*, dans
les îles Wallis de l'archipel des Amis d'après Bataillon* et
chez les Néo -Calédoniens ou Penard l'a rencontrée*.
Cette mutUation consiste d'ailleurs dans une simple
amputation de la phalange en signe de deuil et qui se con-
tinue sur les autres phalanges à la mort de chaque parent :
de telle sorte que chez certains individus qui ont perdu toute
leur famille il ne reste guère que deux ou trois doigts à
chaque main.
' Paw, Recherches philosophiques sur les Américains. Berlin, 1870,
t. II, p. 225.
' Voyage de Siam, 1690, 1. 11, p. 1C7.
^ 'Tifvue d'Orient, 1844, t. m, p. 1.
• Gabelle Médicale de Paris, i856, p. 171.
— uimtizpribïv-ioogle
587
les mutilations de la main, il faut parler de celles
égard, nous rappellerons d'abord cette pratique
es Panhout-t-choux, indigènes de la partie aus-
mpire chinois, qui brûlent avec un fer rouge la
pieds des jeunes garçons, afin de les habituer à
r les épines et les cailloux*.
il nous reste à mentionner la mutilation spéciale
les femmes chinoises.
i été dit sur la mutilation des pieds de la femme
nous ne saurions rien ajouter aux renseignements
jumis par Morache', Fuzier', E. Manin*. Le
iployé, les désordres et complications qui en ré-
été soigneusement décrits. Quant à l'origine de
me elle a été diversement interprétée; mais voici
mseignement historique emprunté à une source
.ée (Annales de l'Empire Chinois''.}
lit, qu'en l'année 583 de notre ère, le dernier
le la dynastie des Tchin fit rechercher pour son
eunes filles ayant les plus petits pieds; à panir
oque la petitesse des pieds fut considérée c
le de grande beauté, et sur tous les point
in-lin, Ethnographie des peuples étrangers de la C
iduction communiquée par le marquis d'Hervey de S
tgede la déformation des pieds chej les femmes chim
iém. de médecine militaire, 3* série, i, xii, 1844. Voir
yp. des scien. méd., i." série, t. xvi, article Chine, p. i:
de la Société d'Anthropologie, 1861, p. 5oS.
de la Société de Géographie, janvier 1873, et Buliet
nihropologie, 1871, p. 201.
4o5. Communiqué par le marquis d'Hervey de S
ly Google
588
l'empire, on s'cfiorca, par des moyens de compression de
réaliser ce caractère. Les petits pieds furent chantés par
les poètes et cette mutilation s'est ainsi propagée et peqsé-
tuée. Gène coutume est donc relativement récente, aussi ne
la trouve-t-on mentionnée dans aucun rituel ancien. Elle
appartient d'ailleurs exclusivement à la race chinoise et les
ïartares mantchoux qui régnent sur la Chine depuis le com-
mencement du xvii" siècle, ne l'ont jamais adoptée. Les prin-
cesses régnantes ont donc toutes les pieds naturels.
.MUTILATIONS DENTAIRES
Nous diviserons les mutilations dentaires, suivant leur
e et le mode opératoire employé en un certain nombre
ariétés qui sont d'après les documents actuels au nom-
ie sept. Ce sont:
i" Les mutilations par fracture, dans lesquelles
rateur armé d'une sorte de ciseau et d'un marteau,
: par un coup violent les angles des incisives.
2* Les mutilations par arrachement, c'est-à-dire
nple avulsion de certaines dents, les incisives par exem-
;t plus fréquemment les centrales supérieures,
3° Les mutilations par limage. Celles-ct présentent
r tour des variétés de forme assez nombreuses. Elles se
quent soit au moyen d'instruments en pierre ou en
I qui agissent par frottement, soit au moyen de limes
ïbles. Elles se subdivisent en: limage transversal des
ves et des canines ayant pour effet d'amincir le bord
/^..
.„./iax-.gie jà
589
tranchant de cclies-ci; limage vertical des mêmes dents
et produisant soit au centre un angle formant un V ren-
versé, soit deux encoches triangulaires séparées par trois
pointes aiguës, soit encore i'ablation des deux angles de
manière à produire un angie central.
C'est dans cette subdivision que se trouvent les formes
les plus compliquées, celles qui dénotent une grande per-
fection opératoire et une certaine recherche de dessin.
4" Les mutilations par inscrustation. Elles con-
sistent dans l'introduction après limage d'un petit cylindre
de métal ou d'une pierre précieuse dans une cavité creusée
à la face antérieure des incisives et des canines supérieures
et inférieures.
5" Les mutilations par abrasion. C'est une des
opérations les plus simples, car elle consiste à fracturer la
couronne des incisives. Le résultat est analogue à celui de
l'arrachement.
6" Mutilations par prognathisme artificiel. Elles
résultent de manœuvres longues et patientes qui par des trac-
tions sur les deux mâchoires produisent leur projection en
avant.
Suivant cette division, nous allons essayer de déterminer
la répartition géographique de chacune de ces mutilations
dentaires.
I" MUTILATIONS PAR FRACTURE
La mutilation par fracture a son centre géographique prin-
cipal sur les côtes occidentales d'Afrique. On la retrouve
aussi sur les rives du Haut-Nil et sur la côte de Mozambi-
que, et au-dessus chez les Unya-Muesi.
r
"f*
5yo
En dehors de l'Afrique, on ne l'observe que sur la côte
occidentale de ia Nouvelle-Guinée'.
Sur la côte ouest de l'Afrique, on la rencontre d'abord
chez quelques peuplades de la côte de Sénégambie et dans
toute l'étendue du golfe de Guinée jusqu'au Congo, où la
mutilation par arrachement fait place à celle-ci.
Dans le golfe de Guinée, il faudrait citer le plus grand
nombre des tribus qui peuplent la côte des Esclaves, le delta
du Niger, le Gabon et le Loango, Au Gabon, où cette prali- ,
que a été surtout étudiée et décrite, elle s'étend depuis les
tribus de la côte comme les Batanga, les Benga, les Pon-
gwé jusqu'aux Bakalis, atix Fans et aux Osyebas'. C'est
dans ces dernières tribus que Marche a assisté à l'opéra-
tion de la taille des dents*.
La même opération s'effectue sur quelques populations de*
Haut-Nil, les Niam-niam par exemple, d'après les documents
de l'expédition Peney et chez d'autres tribus des rives du
Nil Bleu suivant Schweinfunh'.
Sur la côte orientale de l'Afrique on la retrouve encore
chez les Macuas des montagnes de Mozambique.
' Cependant un texte de l'ancien historien chinois Ma-touan-lin
(ïiii* siècle), traduit par le marquis d'Hervey de Saint-Denys, parle d'un
peuple du sud-ouest de l'empire chinois, les Ouen-mien-po qui avait la
coutume de se briser les dents.
^ Voir Barnard Davis, TTiesaurus cranionmt. Londres, 1867.
*A. Marche, Voyage au Gabon et sur le fleuve Ogouéin Tour du
Monde, 1877.
^Proceedings of ihe Royal Physical Society 0/ Edimburg. 1864,
,ï Google
69.
î' MUTILATION PAR ARRACHEMENT
Cette pratique qui consiste à enlever les deux incisives
centrales, soit les supérieures, soit les inférieures, est répar-
tie sur les points les plus distants des deux hémisphères.
Suivant ■ Zarate, Garcilaso et Paw, elle serait en usage
de temps immémorial au Pérou où elle aurait été appliquée
comme marque d'infamie aux tribus rebelles et vaincues.
En Afrique elle s'observe au Congo, chez les Hottentots,
chez certaines peuplades de l'intérieur, les Batoka, sur les
côtes de Mozambique et chez les Unya-Muesi où elle coïn-
cide avec la pratique de la fracture. Plus haut, on l'observe
dans les mêmes conditions chez les peuplades du Haut-Nil.
Une autre tribu nègre située au nord-est de l'Albert-Nyanza,
les Ungoro, enlève aux enfants des deux sexes tes quatre
incisives inférieures. L'opération se fait avec un fer plat
manœuvré en forme de levier'.
En Australie, elle occupe au nord ta côte de Tasman et
de la Terre d'Arnhem jusqu'à la côte occidentale du golfe
de Carpentarie. Au sud elle comprend une vaste région qui
répond à la Nouvelle-Galles et une partie de l'Australie mé-
ridionale. On ne l'a observée ni au cap York ni sur aucun
autre point exploré des côtes.
I Eni\ Bey, Viya-^e de .WRuli à la capitale de VUngoro in BuUe-
dc la Société normande de Géographie, mai-juin i88o, p. i65.
C. Et. 41
,ï Google
592
3' MUTILATION PAR UMAGE
La mutilation par limage a pour centre exclusif l'ar-
chipei Malais. Pratiquée d'abord dans la race malaise, elle
s'est répandue aux autres groupes ethniques désignés dans
leur ensemble par M. Hamy, sous le nom de race Indo-
nésienne et jusqu'aux Papous, à l'est de l'archipel. On l'ob-
serve â l'état constant à Java, plus rare à Sumatra et sur
un grand nombre de points de Bornéo, des Célèbes, des
Moluques, de Solo, de Macassar, à Mindanao d'après Mon-
tano, etc. Elle existe aussi à la pointe de la presqu'île de
Malacca.
A Bornéo toutefois, elle ne s'observe pas au centre de
l'île avec les mêmes caractères que sur les côtes, et en ou-
tre le limage se complique de la pratique de l'incrusta-
tion.
Le limage des dents en Malaisie est un acte religieux
qui s'accomplit avec solemnité à l'âge de la puberté. Les
Mahométans le pratiquent seuls; mais la première initiation
consiste en un léger raccourcissement du bord libre des in-
cisives. Plus tard, l'individu ainsi initié ajoute à cette pre-
mière mutilation certaine opération plus compliquée et va-
riée d'après les habitudes de sa famille, de sa tribu ou sui-
vant son goût individuel. C'est ainsi que sur aucun point
de la Malaisie on n'observe un mode unique de limage : on
peut cependant localiser un certain nombre de variétés.
A Java, le limage se pratique horizontalement, c'est-à-
dire en amincissant le bord libre et en le raccourcissant en
même temps. L'instrument qui sert à cette opération, est
tantôt une lime, tantôt une pierre employée aussi à Tépreu-
;,cooa)t
593
icore un simple bambou manoeuvrant
vertical se retrouve à Sumatra, à Bor-
il en pointes .variées ainsi que nous
iquerait pas chez les peuplades maho-
Si l'on s'en rapporte à Meyer * il ne
s les tribus plus sauvages et qui veu-
un air terrible ou une ressemblance
Nias que cette pratique est courante,
les crânes de nos musées d'Europe
tilation en pointe sont exclusivement
nte appaniendrait donc à une région
ndrait ni aux autres îles de l'archipel,
hilippines, ni aux Papous de la Nou-
UTION PAR INCRUSTATION
incrustation ne s'est rencontrée que
éo, Sumatra et le Mexique,
ît sur deux crânes dayaks de la col-
i Paris que nous avons pu l'étudier.
;nalée déjà par Bamard Davis et plus
jntano*.
tété d'Anthropologie de Vienne, t. ui, p. 114,
w iiber den Werth in Mitiheilungen, l. iv. Voir
me philosophique, mars, 1878.
ayaks du muséum d'histoire naturelle de Pa-
lyGe^^^
594
L'opération consiste d'abord dans le limage transver-
sal de la face antérieure des incisives et des canines supé-
rieures seules, de manière à enlever la couche d'émail; puis
on pratique dans l'ivoire une petite perforation qui pénètre
assez profondément sans atteindre cependant la cavité cen-
trale. Dans cette perforation qui a une forme cylindrique,
on introduit une petite cheville de laiton faite d'un fil ordi-
naire du diamètre de un à deux millimètres environ. La pe-
tite cheville est alors coupée au ras de la dent puis mar-
telée en façon de tête de clou.
Des preuves incontestables établissent que cette cou-
tume s'effectue chez les Dayaks sur le vivant et non, com-
me on pouiTait le supposer, après la mort. L'une des mâ-
choires de Dayak du Muséum porte en effet ta trace de
phénomènes morbides sérieux qui se sont développés dans
les mâchoires consécutivement & cette mutilation '.
Au Mexique, au contraire, on ne saurait affirmer que la
pratique de l'incrustation des dents ne rentre pas dans la
classe des pratiques funéraires si connues des musées ethno-
graphiques. La matière incrustée, en effet, n'est pas du mé-
tal, mais une pierre précieuse, et dans une pièce remarqua-
ble rapportée par le docteur Fuzier, où l'on avait enchâssé
des turquoises, aucune réaction inflammatoire ne s'obseirait.
N«us pensons en conséquence que la dite mutilation
par incrustation, n'a, d'après nos connaissances actuelles,
de caractère ethnique que chez les Dayaks de Bornéo et les
Battaks de Sumatra.
' A Sumatra, M. Brau de Saint-Pol Lias a observé un mode spé-
cial d'incrustation: Un fil de laiton était fine transversalement d'une
canine a l'autre et passait dans une série de gouttières creusées sous
les incisives préalablement abrasées presqu'au niveau des gencives. Coin
isdeM.Hamy.V. Bull.de la SoccPAnthrop., 17 février 1881.
,ï Google
595
b" MUTILATION PAR ABRASION
Cette mutilation qui consiste dans la fracture transver-
sale complète de la couronne des incisives supérieures, s^est
rencontrée chez les Esquimaux où elle a été signalée par
l'abbé Petitot, sur les bords du Mackenzie '. Son but, d'après
la légende locale, serait d'éviter que la mâchoire des hom-
mes puisse ressembler à celle des chiens.
Ô* MUTILATION PAR PROGNATHISMB ARTIFICIEL
Cette variété de mutilation dentaire est localisée aux
peuplades qui occupent la rive droite du Sénégal. Elle a été
signalée pour la première fois par le général Faidherbe ' et
étudiée ensuite par le docteur Bancal et M. Hamy',
Elle se pratique à titre de mode chez les femmes mau-
resques. Pendant l'enfance on enlève aux petites filles les
incisives supérieures temporaires et aussitôt que les autres
sortent, ou exerce sur elles des tractions qui avancent en
même temps la mâchoire et produisent ainsi une projection
des dents supérieures qui viennent tomber sur la lèvre hors
de la bouche.
On n'a pas observé ce mode de mutilation sur aucun
autre point du littoral africain et le faible degré de progna-
thisme ethnique que présentent les populations du Sénégal
* Bulletin dt la Société d'Anthropologie, 1880.
^Bulletin de la Société d^ Anthropologie. 1871, p. 766.
^ Revue d'Anthropologie, 1879, p. 11.
,ïG00'
3Qi*
596
prouve, en dehors des renseignements précis qui ont été
recueillis, que ce prognathisme est évidemment artificiel.
Pour terminer l'histoire très succinte des mutilations
ethniques qm se pratiquent sur les dents, nous dirons qu'en
dehors des points géographiques signalés elles n'ont été ob-
servées nulle part. Elles n'existent ni en Europe aux temps
préhistoriques, ni sur le continent asiatique à aucune épo-
que. En outre, beaucoup de peuples d'Afrique ne se mutilent
pas; ainsi, les Cafres, les Boschimans, les Maures du Séné-
gal, les peuples de Madagascar, etc.
En Océanie, on ne les observe ni dans la plus grande
partie de l'Australie, ni en Tasmanie, ni en Nouvelle-Ca-
lédonie, ni aux Philippines ni en Polynésie.
Quant aux conséquences de ces mutilations, elles nous
ont été révélées par les lésions retrouvées sur plusieurs piè-
ces de nos musées. Parmi ces pièces, la plus remarquable
peut-être est ce crâne de femme Papel (Sénégambie portu-
gaise) qui nous a été obligeamment communiqué par M.
Hamy et qui présente à la suite d'un limage en pointes ai-
guës, des désordres graves dans le.s mâchoires, abcès, né-
crose, et autres lésions consécutives. Cette curieuse pièce
porte dans les galeries du Muséum le n." 4972 de la collec-
tion Schoelcher.
VI
Uotllatlon dea organea génltanz
La série des mutilations ethniques qui portent sur les
organes génitaux de l'homme et de la femme est en quel-
que sorte indéfinie. Il n'est pas de pratiques grotesques ou
,ï Google
597
barbares qui n'aient été imaginées à toutes les époques de
rhistoire de l'homme et jusqu'à nos jours.
Parmi ces pratiques, it en est qui sont restées des ri-
tes religieux, telle est la circoncision, telle est aussi la cas-
tration chez certains peuples. D'autres sont instituées pour
satisfaire à des préoccupations de jalousie, l'infibulation des
femmes par exemple et l'industrie des eunuques dans les
pays orientaux. D'autres ont pour conséquence la suppres-
sion volontaire des fonctions génitales, c'est la castration
complète ou incomplète. Enfin, un certain nombre de prati-
ques ont un but tout opposé et qui consiste à exciter par des
procédés divers les sens erotiques.
On voit combien sont nombreux et variés les points
de vue auxquels se sont placés les peuples dans l'invention
et l'application des mutilations génitales, lesquelles sont as-
surément les plus extraordinaires et souvent aussi les plus
cruelles de toutes.
li paraît dès lors nécessaire d'établir dans cette partie
de notre travail une sorte de classification artificielle et voici
dans quel ordre nous décrirons brièvement les divers modes
de mutilation dont il s'agit:
i" De la circoncision.
2° De l^nfibulation.
3° De l'eunuchisme.
4° De la castration volontaire.
5° De certaines pratiques diverses.
ly Google
398
1° DE LA CIBCONCISIOK
L'opération de la circoncision a de tout temps suscité
de nombreuses études, suivant que les tuteurs se sont pla-
cés au point de vue religieux, ou sur le terrain chirurgical
et hygiénique *.
Nous ne saurions traiter la question sous ces derniers
aspects, suffisamment élucidés d'ailleurs. Notre intention est
de nous borner à présenter sur la question quelques consi-
dérations historiques et géographiques.
' Voir: Thévenoi, Relation du voyage en Orient, Paris, 1664, in-4»
chap. xxïU, p. 79.— Wedel (J. W.) Propemptkon anatamkum de épis-
pasmo Judœorum, SeniE i69o,in-4*— Grapius, Dissertatio ati ciraimci-
sio Aegyptiis ab Abraham fuerit derivata, Rosiochii, 1699, in-4*— Du-
io\iT, Hygiène des Hébreux. ThÈse de Montpellier, 1809. — Cohen, Dis-
sertation sur la circoncision. Thèse de Paris, n." a, 1816.— Terquem (L),
Guide du posihétomiste, Metz, 1843, in-8» — Friedrich {J. B.) Ueber die
Judaische Beschneidung, in hislorischer , operativer und samtats-poHjei-
licher Bejiekung, Ansbach, 1844, in-8* — Salomon {Mor-gust), Die Be-
schneidung histor. und med. betrachtei. Braunschweig, 1844, in-8* — Bei^-
son (J.). Die Beschneidung vont histor. krit. und mediifinischen Stand-
punkt mit Bejug au/ die neuesten Debatten und Re/ormvorschtdge, Ber-
lin, 1844, in-8'* avec 1 planche. — Brecher (Gid.), Die Beschneidung der
Israéliten von der historischen, praktischen, operativen und rituellen
Seite junâchst /Ur den Seibstunterrickt dargestellt, Wiea, 1845, in-8* —
Marchant (Louis), De la circoncision au point de vue historique, hygiini-
(pie et chirurgical. Thèse de Montpellier, i855, in-4%44p. — Claparède,
La circoncision. De son importance dans la famille et dans l'État, avec
trois dessins iithogr., Paris, 1661, in-4''. — Martin (H. G.), Historique et
bibliographie de la circoncision, p, i3 et 81 — {De la circoncision), Thèse
de Paris, 1870, n» 90.— Aïasa Hamdy, De la circoncision. Parts, 1873,
avec planches.
.ïGoogle
^99
Envisagée dans le temps, la pratique de la circoncision
chez I*homme est aussi vieille que l'humanité. Si Ton re-
monte la série des documents historiques on remarque, en
ce qui concerne l'ancien continent, qu'elle fut importée en
Egypte, à une époque indéterminée par des invasions éthio-
piennes qui pénétrèrent dans le pays. Les voyageurs qui
ont exploré les régions centrales africaines ont d'ailleurs re-
trouvé cette tradition qui se perd dans les âges les plus re-
culés. On a même recueilH d'anciens textes égyptiens qui
témoignent que Topéradon s'effectuait avec un couteau en
pierre dit; la pierre à circoncision. Peut-être serait-on au-
torisé à conclure de là que cette pratique a son origine aux
temps préhistoriques ? Il y a toutefois ici désaccord, comme
on voit, entre la légende bibUque qui attribue la première
circoncision à Abraham et les documents historiques em-
pruntés par exemple à Hérodote, Strabon, Ammien Mar-
cellin, Philon etc., qui lui assignent une origine africaine.
11 convient d'ajouter que la circoncision ne s'est retrou-
vée à titre de pratique courante, sur aucun peuple d'Asie
si ce n'est au Thîbet, et si les Mahométans l'ont adoptée
c'est comme précepte d'hygiène et non comme dogme reli-
gieux. Mahomet, qui était circoncis, n'a formulé dans le Ko-
ran aucune loi à cet égard.
Suivant Paw, la circoncision était inconnue en Amé-
rique avant la conquête •, car on ne saurait assimiler à cette
opération la simple incision que pratiquaient sur les enfants,
d'après le père Acosta, les anciens prêtres mexicains qui se
bornaient à rompre le frein du gland.
A la Nouvelle-Zélande, à Tailî et chez la plupart des
peuplades océaniennes, la circoncision se pratique aussi en
• Recktrtkts sur les Am&icains, t. tu, p. 134.
'■f
6oo
dehors de tout caractère religieux et sans qu'on puisse en
indiquer Porîgîne.
Dans les tribus d'Afrique et en particulier à Madagas-
car, les prêtres effectuent l'opération avec leurs ongles al-
longés et tranchants. Ils brisent ainsi les adhérences prépu-
ciates et enlèvent un lambeau cutané par un procédé de dé-
chirure qui évite l'hémorrhagie. Le Mohel a de plus l'habi-
tude d'appliquer la bouche sur la plaie et le sang qu'il cra-
che dans un vase devient liquide sacré. A Madagascar, l'opé-
rateur avale le morceau de prépuce.
Quoiqu'il en soit, si l'on voulait établir la répartition
géographique de la circoncision, on devrait y comprendre
les peuples divers chez lesquels l'opération se pratique à
des points de vue différents. Ainsi, il faudrait, d'une part
citer: les Égyptiens, les Éthiopiens, les Abyssiniens, les
Persans et en général tous les peuples mahométans, et d'au-
tre part indiquer les localisations principales de la race juive,
malgré la dispersion extrême qu'elle présente aujourd'hui
sur tous les points du globe.
Voici par exemple, un document qui fixe la répartition
des Israélites en Europe, ce qui équivaut à un tableau de
distribution géographique de la circoncision ' dans cette race :
Ainsi, on compte en:
Autriche-Hongrie 1,375,000 Israélites
Allemagne 5i2,ooo >
Russie 270,000 »
France 1 18,000 »
Pays-Bas 64,000 >
' Tableau rabitiçue de Hiibner in Univers Israélite. 1 Kvrier 1780,
p. 3oa, et Revue Internationale des Sciences, i5 mars, 1879.
/ J
6oi
Angleterre 46,000 Israélites
Italie 36,ooo >
Belgique 3,ooo >
Suède 2,000 >
Dans ces quelques remarques sur la circoncision, il n'est
question que de l'opération pratiquée chez l'homme. Or elle
est également appliquée chez la femme où elle consiste dans
l'excision des nymphes. C'est une opération -en usage cons-
tant en Orient, et elle s'effectuait également chez les an-
ciens Juifs si l'on s'en rapporte aux assertions de Strabon,
Aëtius et Paul d'Égine.
Nous la retrouverons d'ailleurs plus loin, car elle se com-
plique souvent chez certaines populations d'une autre muti-
lation qui consiste dans une véritable castration de la femme.
1° DE l'iNFIBULATION
L'infibulation est une opération qui consiste à fermer
ou à boucler, suivant le sens du mot Jîbula {boucle), les or-
ganes génitaux de la femme ou le prépuce de l'homme.
Les Romainsqui la pratiquaient, l'avaient reçue de Grèce,
où elle avait été importée d'Orient.
Chez la femme, l'iaSbulation s'effectue par trois procé-
dés différents:
i" Par suture.
■ un armeau.
• une ceinture.
emier procédé, la suture se pratique en avi
\ lèvres et en plaçant le sujet, les cuisses rap
s une immobilité absolue pendant 6 à 9 je
lyGoogle
6o2
L'opération a lieu de la sorte en Ethiopie, en Nubie et chez
les Arabes. Elle se pratique ordinairement chez les petites
filles à l'âge de 4 à 5 ans et elle se maintient jusqu'au ma-
riage, de telle sorte que c'est le mari qui déboucle sa fem-
me. Cette nouvelle virginité est jugée si difficile à rompre,
qu'il faut employer des moyens violents qui coûtent, dit-on,
assez souvent la vie aux jeunes mariées. Les choses se pas-
sent ainsi dans les tribus Kabyles. De plus, il arrive sou-
vent qu'un mari, partant pour un long voyage, fait de nou-
veau infibuler sa femme par les mains de matrones spécia-
les et la désinâbule à son retour.
Le second procédé d'infibulation par un anneau était
surtout en usage dans l'ancienne Rome: la boucle passait à
la fois dans les deux grandes lèvres et ne pouvait s'ouvrir
qu'au moyen de la lime.
Enfin, ie troisième procédé, qui consiste dans l'appli-
cation d'une ceinture dite ceinture de chasteté. C'est un ap-
pareil qui ne produit à proprement parler aucune mutilation
véritable et qui se borne à entourer les organes génitaux
d'une cape fermée.
L'infibulation chez les garçons a été décrite par Celse,
qui en conseille l'emploi par raisons de santé pour combat-
tre l'onanisme. Elle a été ensuite appliquée chez les escla-
ves et chez les chanteurs afin de leur imposer la chasteté.
L'infibulation dans cette dernière application représente un
acheminement vers la castration des chanteurs de ta Cha-
pelle Sixtine. L'anneau était toujours en métal, or ou argent,
et fermé par soudure.
Les moines grecs, les faquirs et les bonzes assurent
de la même façon leur chasteté et portent ainsi des anneaux
qui ont parfois un poids considérable et pendent lourde-
ment entre les cuisses.
6o3
Si l'on en croit Martial, l'infibulation chez les garçons
était souvent remplacée par un étui en métal, ayant un but
analogue à celui de la ceinture de chasteté chez les femmes,
et Paw racconte que chez les populations de l'isthme de Da-
rien, la même pratique s'est retrouvée avec substitution au
cylindre de métal d'un étui en bambou ou en jonc.
3' DE l'eunuchisme
L'eunuchisme ou émasculation consiste dans la sup-
pression des organes génitaux de l'homme, imposée soit
pendant l'enfance soit chez l'adulte, mais toujours involon-
tairement de la part de la victime.
La fabrication des eunuques pour les harems d'Orient
est une industrie propre au Soudan et plus spécialement au
Siouat. Elle a été très soigneusement étudiée par divers ob-
servateurs et en particulier par notre ami regretté Godard '.
L'opération a pour résultat l'ablation complète des parties
génitales, au lieu et place desquelles il reste une cicatrice
présentant sur un point l'orifice du canal urétral, dont la
perméabilité est maintenue par un clou de plomb pendu à
la ceinture ou à une pièce du vêtement.
L'opération pratiquée chez l'enfant dans le cours de la
deuxième année, n'est pas ordinairement suivie d'accidents
immédiats; mais elle a pour conséquence de produire chez
l'individu, au moment de l'adolescence, des modifications pro-
fondes qui portent sur l'économie générale, sur la forme du
corps, sur le timbre de la voix et jusque sur les instincts,
aptitudes. C'est en particulier l'élévation
'alestine. Paris, 1867, p. i3o.
lyGoogle
6o4
du re^stre vocal qui a fait entrer la castration jusque dans
les écoles de chanteurs destinés aux chœurs de la Chapelle
Sixtine.
L'eunuchisme pratiqué dans la Haute-Egypte est une
industrie toujours florissante, car les eunuques s'achètent à
des prix fort élevés, qui varient cependant suivant que l'opé-
ration a été plus ou moins habilement exécutée et qu'elle n'a
laissé à sa suite aucune incommodité ou infirmité quelcon-
ques.
Les mutilés sont ainsi employés sur toutes les parties de
l'Orient, à la garde des harems et sans doute jusqu'en Chine ;
car on raconte que, dans la prise de Pékin, l'armée anglo-
française a trouvé au palais d'été deux eunuques qui ont
été faits prisonniers.
Miiis la castration pratiquée ainsi pour les besoins du
monde oriental, n'est pas la seule qui ait le caractère ethni-
que- Ainsi Paw racconte que les peuples anthropophages
de Cumana, à la Nouvelle-Grenade, châtraient dès le bas
âge les enfants destinés à la boucherie*. C'est le procédé
des éleveurs de bétail en général.
En outre, la cour du cacique de Puna renfermait, sui-
vant Zarate, des eunuques chargés de la garde des femmes.
Enfin la castration devient parfois un supplice qui s'im-
pose à un peuple vaincu. C'est ainsi que M.M. d'Abbadie
l'on observé chez certaines tribus d'Afrique, qui mettent ain-
si les peuplades conquises dans l'impossibilité de se perpé-
tuer.
' Paw. pp. cit. 1. 1, p. 324.
DÏ^I^bv \^i i.
4 DE LA CASTRATION VOLONTAIRE
La castration volontaire est une mutilation qui se pra-
nque chez les peuples dans un but variable.
Ainsi, on a signalé depuis longtemps chez les Hotten-
tots l'habitude de se couper un testicule. Quelques voyageurs
assurent que c'est pour être plus légers à la course et à la
chasse; d'autres prétendent que c'est afin d'éviter les gros-
sesses gémellaires que cette opération n'empêche nullement
d'ailleurs.
Les Cafres avaient adopté la même pratique • ; mais
c'est surtout le fanatisme religieux qui a poussé des groupes
d'individus à pratiquer sur eux mêmes et à imposer à leurs
prosélytes la castratiom complète ou incomplète, qui devient
dès lors une véritable cérémonie d'initiation.
Déjà dans la Rome impériale, il s'était rencontré des
sectes religieuses chez lesquelles la castration était un dogme
et qui se livraient à une propagande très ardente, suivant
les traditions des prêtres de Cybèle.
. . . Somni posi vina petuntur.
Continuo ferrum noxia lurba rapit,
Excidimtque seiiem
UARTIAL, UB. VI.
Plus récemment Origène s'était, comme on sait, châtré
de ses propres mains dans un élan de fanatisme, et cet exem-
ple, resté célèbre, n'a pas peu contribué sans doute à pro-
' Paw. Op. cit. t m, p. 137.
6o6
pager jusqu^à nos jours cette absurde et abominable prati-
que.
C'est ainsi que nous arrivons jusqu'à l'époque actuelle,
en plein xix* siècle, pour assister au développement de cer-
taines sectes religieuses qui ont pour dogme fondamental la
castration volontaire. La plus célèbre de ces sectes est celle
des Skoptsyy qui représente l'un des si nombreux schismes
dissidents de la Russie.
Ces schismes, dont le nombre est évalué à plus d'une
centaine, portent en Russie le nom génétique de Raskol-
niks '.
Les pratiques religieuses des Raskolniks, sont les unes
purement mystiques et inoffensives, d'autres sont terribles,
car leur résultat n'est rien moins qu'un véritable suicide de
race. Tels sont précisément les Skoptsy '. ■
Les Skoptsy ou châtrés de Russie composent aujour-
d'hui une société puissante par le nombre de leurs adhérents
et les richesses considérables dont ils disposent. Malgré les
poursuites incessantes dont ils sont l'objet de la part de la
police impériale, malgré les pénalités les plus sévères qui
ont été édictées contre eux, leur association s'étend sans
cesse et leur influence, tout occulte qu'elle soit, gagne de
proche en proche toutes les classes de la société russe *.
' Voir Statistique des Raskolniks, Rousky Vesinik, 1868, 11.
* Voir Filipov, Histoire de l'hermitage de la rivière Vig-Nilskij: —
Vie de famille dans le Raskol. — Mackenzie Wallace, iîwî5ia.— Varin-
tzow, Les chants pieux de la Russie.
* Barrow, Le mysticisme populaire en Russie.— Melinkov, Les sec-
tes secrètes, les Colombes blanches.— Rjcoutsky, Les kommes de Dieu
elles Skoptsy, — Pelikan, GerichtUche-medicinische Untersuchmgeniiber
das Skop^enthum in Russland.Sainx-VéKTibavT^. 1876. — Teinturier, t«s
Skoptjy, Paris 1877. Extrait du Progrès Médical. — F. von Stein, Die
D,„,i,.,db,Good^
6o7
La secte est née vers le commencement du xviii' siècle,
mais elle ne commença à se développer que sous les règnes
de Catherine et d'Alexandre i". Le nombre des fidèles at-
teignit à cette époque le chiffre d'environ 20,000.
Son chef Schelivanov, véritable Christ suivant la lé-
gende, et enfanté par l'amour mystique du Saint-Esprit et
de l'impératrice Elisabeth Petrowna, avait été banni d'abord
par Paul i"" puis enfermé ensuite comme aliéné dans un
couvent, d'où les sectaires s'attendent à le voir sortir en-
touré de gloires, comme un véritable Messie, lorsque leur
nombre aura atteint le chiffre apocalyptique de 144,000. Il
apparaîtra alors du tombeau pour subjuguer le monde et
briser l'empire des Czars, Cette tâche accomplie, il mourra
et la terre se transformera en paradis, comme avant le pre-
mier péché. La mort sera supprimée et l'humanité se repro-
duira par des baisers.
Le fameux chiffre attendu et rêvé n'est pas toutefois
encore atteint aujourd'hui; aussi les Skoptsy, s'acharnent-
ils dans leur œuvre de prosélytisme jusqu'à attirer des vic-
times dans des pièges et des guet-apens.
Cette étrange association qui se donne le nom de Co-
lombes-blanches, a ses lieux occultes de réunion et des céré-
monies si secrètes qu'elle devait être assez difficile à étudier.
Grâce cependant aux recherches deM.M. F. von Slein,
Pelikan, Melinkov, etc. on est parvenu à connaître son or-
ganisation dans tous ses détails.
La cérémonie d'initiation comprend chez l'homme trois
degrés:
Skopt%ensekte.~Russland, in ihrcr Enistehung, Organisation und Lelire.
Zeitschrifi fur Ethnologie, fasc. v, i&yS.— lîetve d'Anthropologie, 1876,
tr
„Gooai
1* Suppression d'un seul testicule soit par la ligature
du cordon, soit destruction par le feu ou par l'amputation.
C'est la mutilation des moins fervents.
2' Amputation des deux testicules et du scrotum. Ceux-
là ont perdu les clefs de l'enfer mais ils ont conservé les
clefs de Fabîme. On devine ce qu'on entend ici par fabime.
Les initiés de cette sorte sont marqués du petit sceau et
Us ont le droit de 'monter le cheval pie.t
y Amputation totale des testicules et du pénis. C'est
le grand sceau, l'initiation complète qui donne le droit de
tmonter le cheval blanc*
Chez les femmes les premières opérations de castration
eurent lieu en plein palais impérial de Michaïlov chez la
femme du colonel Tatarînov, sous le règne de Paul i**.
Elle fut dès lors régulièrement constituée et comprend aussi
trois degrés:
1° Amputation des mamelons.
2° Amputation totale des seins.
3° Amputation des grandes lèvres et du clitoris.
Les conséquences de ces mutilations sont, suivant les
degrés, celles qu'on observe d'ordinaire dans la pratique de
la castration.
Chez l'homme^ voix grêle, teint pâle, tournure et ma-
nières efféminées. Ces caractères cependant sont bien moins
accusés que chez les eunuques d'Orient, mutilés dès l'en-
fance; mais ils ont avec eux une certaine similitude d'ins-
tints; comme par exemple un désir immodéré des richesses,
ce qu'on pourrait appeler une passion de compensation.
Chez la femme, le teint est pale et flétri et en ce qui
concerne les conséquences locales, elles consistent dans une
retraction des cicatrices de la vulve et un rétrécissement
progressif de cet orifice.
,ï Google
6og
Grâce aux documents que nous avons recueillis aux di-
verses sources citées plus haut nous avons tenté une étude
statistique des Skoptsy.
C'est en Russie, avons nous dit, que la secte prit naissan-
ce et s'est développée. En dehors de l'empire, la Roumanie
et la Moldavie en renferment seules un certain nombre, ve-
nus sans doute de la Bessarabie qui représente l'un des
foyers russes les plus actifs.
La première statistique publiée sur le nombre de Skop-
tsy russes date de 1733. A cette époque on n'en comp-
tait guère que 70 à 80 environ. Depuis lors, leur propa-
gande a été assez active pour qu'en [875, un travail alle-
mand estime leur nombre de 20 'a. 3o mille, chiffre qui s'est
encore accru depuis lors *.
Si l'on considère d'abord leur groupement par contrées,
on arrive au résultat suivant:
La proportion par habitant sur 100,000 est:
Pour St-Pétersbourg,Orel,KostrDma,Riazan,de. .. 5 à 10
ï Koursk, Kalouga, Tauride, Perm, Moscou,
Samara, Saratov, Bessarabie, de 2 à 5
t laroslav, Tver, Smolensk, Toula, Tambov,
Simbirsk, Arkhangel, Novgorod, Pskov,
Esthonie,Tchernigov,Voronej,Nijnî-Novgo-
rod, Wiatka, Oufa, de 1 à 2
r Livonie, Vilna, Minsk, Kazan, Penza, Eka-
terinostav, au-dessous de 1 "/„
Si Ton compose avec ces chiffres une carte de réparti-
tion on observe que les gouvernements de la Russie qui
' Zeiischrift JUr Ethnologie, iSyS, p. 37-69.
rr
„GooiJ
6io
renferment des Skoptsy, forment un groupe géographique
dont le centre répKïnd à peu près à Moscou et qui s'étend
à la presque totalité de la^Russie d'Europe. La région est
située à l'ouest de l'Oural et ne se propage point en Asie.
A l'égard des conditions sociales qu'occupent les adep-
tes de cette nouvelle religion, nons trouvons une réparti-
tion dressée en 1866.
A cette époque la Russie renfermait 5,467 Skoptsy qui
se subdivisaient de la manière suivante :
Hommes 2,617
Femmes i,85o
Total 5,467
^ ^ (hommes 2,077
Paysans 2,907... J, ' "
■' '^ ' jlerames 890
Nobles
Officiers
Fonctionnaires
Ecclésiastiques
Marchands....
Divers
' I femm
Totaux..
2,421.
23.
5^67
14
(hommes ii465
' I femmes 956
23
5,467
En 1869, la secte possédait une grande fortune et son
chef Plotizyn était à lui seul à la tête de 48 millions de rou-
bles. Ces ressources se sont encore accrues et aujourd'hui la
secte, malgré l'activité des poursuites dont elle est l'objet, est
devenue une puissance financière à laquelle se rattachent des
banquiers et des industriels, des marchands et plus spécia-
,ï Google
6ii
lement des agents de commerce et des changeurs, comme
cela s'observe particulièrement à Moscou et à Saint-Péters-
bourg.
b" De certaines pratiques diverses
Sous ce titre nous rangerons un certain nombre de ma-
nœuvres ou d'opérations n'ayant pas un caractère aussi
précis que les précédentes et portant encore, suivant des
points de vue divers, sur les organes génitaux.
Ainsi, nous mentionnerons tout d'abord une certaine
mutikiion qui se rapproche par ses effets de la castration
proprement dite. Il s'agit de cette pratique commune chez
les Australiens de la province Adélaïde et par laquelle les
hommes s'ouvrent au périnée le canal de l'urètre, de ma-
nière à établir une fistule qui supprime absolument la fé-
condation.
Quelques explorateurs affirment que cette mutilation a
été inspirée par la haine de l'esclavage et la révolte contre
la domination envahissante du peuple conquérant. Ce serait
ainsi une variante de l'opération dans l'idée de suicide de
race.
Mais il faut convenir que si tel est le but des Austra-
liens, il n'en saurait être de même des autres mutilations
que nous avons à mentionner et qui ont un objet tout dif-
férent, celui d'exalter les instincts erotiques.
Ainsi, la relation des voyages d'Améric Vespuce' ren-
ferme déjà quelques documents relatifs à une habitude
qu'avaient les femmes des populations primitives du Pérou
et Mexique, d'enfler le membre viril de l'homme en appli-
' Strasbourg, i5o5.
lyGoogle
6l2
quant à sa surface des sucs irritants ou en le faisant piquer
par des insectes venimeux*.
Toutefois des accidents graves et parfois mortels étant
survenus à la suite de ces tentatives, les mêmes populations
eurent l'idée d'entourer, dans le même but, le pénis d'un
étui de résine élastique (caoutchouc).
De là aux instruments de métal ou de bois que s'intro-
duisent dans la verge les Dayaks de Bornéo et les Canaques
de la Nouvelle-Calédonie, il n'y a qu'un pas.
Or le Kalang des Dayaks consiste en une tige de cui-
vre ou d'argent long de 6 à lo centimètres et large comme
trois doigts pressés l'un sur l'autre. Cette tige est introduite
dans la verge par une plaie située au-dessous du canal uré-
tral et parallèle à celui-ci. Elle traverse ainsi cette région de
manière à présenter ses deux extrémités libres, l'une en
avant, l'autre en arrière regardant le pubis. Le docteur
Meyer de Dresde* en a constaté la présence chez les tribus
qui portent les noms de Bohan, Longwaï, Ambalan, Men-
dalan, Siban, Taman, Movang, etc.
Au moment de l'érection, cette tige est garnie d'orne-
ments les plus bizarres et les plus divers: boules de bois
ou de métal, de pierre, de corne, ou bien des nœuds d'étof-
fes, des houppes, des plumes ou du corail fin. M. Mayer
cite le cas d'un Longwaï qui portait aux deux bouts de son
kalang une pièce de monnaie percée à son centre.
Le kalang est d'ailleurs un objet de famille dont on se
fait présent pour établir des alliances et entretenir de bons
rapports.
L'application du kalang est faite par de vieilles femmes
' Paw, Op. cit.. t. m, p. 63.
* Recueil hollandais de Batavia, i855 et iSfp.
,ïGoo^
-^
6i3
ou matrones: mais aucun homme ne peut en porter s'il n'a
été h la «chasse aux têtes.*
L'introduction d'un semblable appareil dans le corps
de la verge pourrait passer pour amplement sufhssant. 11
n'en est rien, et le plus ordinairement les Dayaks en por-
tent deux, le premier d'avant en arrière, le second transver-
sal. Le nec plus ultra, le grand luxe est d'en porter trois^
le dernier traversant superficiellement la partie dorsale de
la verge.
Le côté curieux d'une telle invention c'est que ce sont
les femmes qui l'imposent aux hommes sous peine d'être
absolument abandonnés par elles. Ainsi, les femmes de ces
tribus ne recherchent et n'acceptent que les hommes qui
portent le kalang. C'est une condition sine qua non pour ob-
tenir leurs faveurs; et cependant, il émousse, dit-on, si ra-
pidement leurs sens, qu'elles deviennent souvent dès la jeu-
nesse, toul-à-fait infécondes.
Nous terminerons ici notre courte étude sur les muti-
lations ethniques, en répétant ce que nous disions au début
de ce travail, c'est-à-dire, que notre intentior
saurait être que d'en tracer un rapide aperçu se
premier et simple essai, réservant ultérieuremi
complète et détaillée de cette vaste question.
M. Cazaus de Fondouce. Le crâne portan
d'abrasion, auquel M. Magitot a fait allusion c(
été signalé par moi, n'a pas été trouvé dans le i
des Basses-Pyrénées, mais bien dans celui des ]
Rhône. Je puis ajouter à la liste des mutïlatior
sion qu'a donnée notre collègue un fait de plus
d'un crâne provenant de la grotte du Col-de-G
le département de l'Hérault, sur le quel j'ai rec(
,ï Google
6i4
rement les marques de cette opération. Ainsi, sur le littoral
Méditerranéen, nous n'avons encore observé que deux crâ-
nes mutilés et tous deux par abrasion. Je ne crois pas qu'on
ait, jusqu'à ce jour, observé sur les crânes préhistoriques
de la même région de fait de trépanation complète par en-
lèvement d'une rondelle.
,ï Google
SUR UN CAS DE MICROCÉPHAUE EN PORTUOAL
M. F-A. d'Ouveira FEtjXo
Parmi les types anormaux qui, à présent, peuvent nous
donner une idée plus ou moins lointaine de Paspect géné-
ral des hommes primitifs, les microcéphales sont, sans aucun
doute, des plus curieux et méritent toujours de fixer notre
attention. C'est pourquoi je présente une microcéphale, qui
est, je crois, un des plus beaux exemplaires connus jusqu'à
présent et dont je vais faire tout de suite la description.
La nommée Bemvinda est une femme âgée de 34 ans.
Elle a été, immédiatement après sa naissance, reçue à l'hos-
pice des enfants trouvés de la petite ville d'Abrantes dans
l'Extremadura; circonstance malheureuse qui m'empêche de
pouvoir vous fournir des renseignements relatifs à ses pa-
rents, renseignements qui pourraient jeter une intéressante
lumière sur ce sujet.
Sa tête et son corps présentent les mesures suivantes:
idby Google
r
6i6
Diamètre antéro-postérieur maximum,
du point inter-sourcilier au point oc-
cipital maximum i3'
Diamètre transverse maximum 8,5
Longueur simple de la face, du point
inier-sourcilier au point alvéolaire, en-
tre les dents incisives médianes su-
périeures et à leur racine 7, i
Diamètre bi-zygomatique 10
Distance du trou auditif au plan posté-
rieur 6
Distance du point sus-orbitaire i3,6
• » point alvéolaire supérieur au
plan postérieur i6,5
Hauteur du vertex au-dessus du sol
(taille) 140
Hauteur du trou auditif au-dessus du
sol i32,5
Hauteur du menton au-dessus du sol.. 122,5
Diamètre frontal minimum 8
Indice céphalique 65,3
> facial 71
» général de la tête 1 ,76
Angle facial de Camper 60°
Diamètre fronto-sincipital 1 1%5
1 fronto-nasal (à l'épine nasale
antérieure et inférieure) 5,5
Diamètre mento-occipital maximum... 17,0
• bimastoïdien io,5
> entreiesanglesdelamandibule 9
• entre les trous auditifs exté-
rieurs 9
,-;&
6i7
Diamètre entre les apophyses orbitaires
externes 8°
» » • rebords orbitaires
internes 2
Circonférence horizontale (fronto-occipi-
tale) 36
Arc inter-auriculaire passant par la par-
tie la plus élevée de la tête 24
Mesure de l'angle de la mâchoire tSo"
Distance de l'extrémité d'une main à
l'extrémité de l'autre, les bras étant
ouverts 1 42^
Longueur du membre supérieur, de l'a-
cromion à l'extrémité des doigts 61
Longueur du membre inférieur, du grand
trochanter au sol 73
Chez cette microcéphale comme chez d'autres le progna-
tisme est accentué ; la mâchoire inférieure est plus petite
que la supérieure et l'arcade alvéolaire est en retrait de la
supérieure de d^^oz. Le nez long et saillant est très proémi-
nent sur la face, dont le développement ne s'est pas arrêté
comme celui du crâne. Le cuir chevelu, épais, se laisse fa-
cilement rider.
Par ce que je viens de dire on peut voir que l'arrêt de
développement du cerveau, étant général, il est plus remar-
quable dans la partie antérieure, la région frontale; les fonc-
tions cérébrales en subissent les conséquences, et les actes
de l'intelligence sont très restreints chez cette microcéphale.
it de s'approcher de quelqu'un qu'on lui
in, elle obéit avec lenteur et alors elle passe
Jtour de la personne désignée, ou prend le
.,Goo|\
main, qu'on lui présent, mais elle ne la serre pas. Elle sait
se servir d'un verre pour boire, d'une cuillère pour manger,
mais elle ne connaît pas l'usage du couteau ou de la four-
chette. C'est là tout ce qu'on a pu lui apprendre; on a es-
sayé de la faire ouvrir une porte avec une clef: ce fut im-
possible.
Elle ne parle pas. On m'a dit qu'on lui avait déjà en-
tendu prononcer les mots femme, diable, je ne veux pas,
(mulher, dt'abo, nao qtiero), ou des sons articulés se rappro-
chant de ces mots, qu'elle doit entendre souvent aux alié-
nées avec lesquelles elle vit toujours; mais ces mots mê-
mes, il est excessivement rare qu'elle les prononce et elle
n'y attache aucun sens. Toute expression du langage se ré-
duit chez Bemvinda à un cri aigu et perçant semblable à
celui de certains singes.
Sur sa figure on ne remarque que l'expression de l'hé-
bétude, de L'indifférence pour tout ce qui l'entoure. Elle se
met facilement en colère, surtout si on veut lui 6ter un châle
qu'elle porte d'ordinaire, ou si on la menace de la mettre
dans la salle des idiotes immondes, désignée à l'hôpital des
aliénées, par les employées, sous le nom de California. Alors
elle lève la tête, pousse un cri aigu, fait de successives ex-
pirations forcées et rapides par le nez, et avec l'un des mem-
bres supérieurs elle exécute un mouvement en tournant en
dehors la paume de sa main, comme pour chercher à éloi-
gner d'elle celui qui la menace. C'est seulement alors que -
sa figure prend quelque animation, elle ride les lèvres et
dans le regard de Bemvinda on peut remarquer un éclat
de lumière. Puis, si on la caresse, elle fait une grimace
sans expression et se calme.
Elle témoigne un peu d'affection pour une des em-
ployées de l'hôpital (celle qui est là depuis plus longtemps);
,;„„.. ,^glc P
6i9
mais celte affection ne se traduit chez Bemvînda, que par
une obéissance plus prompte aux ordres qu'elle lui donne et
par une grimace particulière.
Les sens sont tous un peu émoussés, excepté, peut-être,
le sens de ta vue; tout dernièrement je l'ai vu regarder avec
attention et curiosité, à ce qu'il semblait, un portrait à l'huile
qui se trouvait dans un appartement, où elle n'était jamais
entrée. Ses yeux sont strabiques. L'odorat n'est point fin : elle
semble si peu sensible à Podeur de Popoponax, qu'à celui
qui se répand d'un flacon de sels, qu'on lui présente à six
ceiitimètres des narines, mais si on l'approche trop, alors
elle détourne la tête. Les muscles de l'aile du nez sont as-
sez développés; elle ouvre souvent les narines et, très fré-
quemment, elle fait des expirations forcées et rapides pous-
sant les mucosités nasales.
Son tact, aussi bien que son goijt, n'est point délicat
et, chose remarquable, elle ne témoigne aucune avidité pour
les aliments; il arrive souvent qu'on les lui présente et qu'elle
ne les prend pas, mais alors si on les lui met dans la bou-
che, elle mange comme à l'ordinaire ; par conséquence on
ne peut dire qu'elle ne prend pas les aliments, faute d'ap-
pétit. Quand elle mange elle prend ses mets avec les doigts,
dans le creux de sa main ou avec une cuillère et les porte
à la bouche. L'audition semble ne pas être exquise; elle ne
fait pas attention à la musique; les oreilles sont grandes.
Aucun sentiment de pudeur ne se remarque en elle; elle
se laisse déshabiller sans résistance et sans y faire attention.
Si, sous l'influence de l'atrophie de l'encéphale les ac-
tes psychiques ne sont, presque, qu'ébauchés, les mouve-
ments aussi sont loin d'être parfaits.
Bemvinda se tient presque toujours assise sur le soi, les
membres inférieurs fléchis et embrassés par les membres su-
,ï Google
620
périeurs : c'est celle-là sa position ordinaire, qu'elle maintient
longtemps, balançant en même temps sa tête et même tout
son corps de droite à gauche. Quelquefois aussi elle se lève
va à la fenêtre, appuie les mains sur les barreaux, et là elle
continue son éternel mouvement de pendule, se tenant tour-
à-tour sur un pied ou sur l'autre.
La position des membres supérieurs, quand ils n'en-
tourent pas les genoux est celle ci : les bras pendants. Pavant-
bras ramené sur ta poitrine et les mains pendantes et rap-
prochées. Le tronc et la tête sont penchés en avant, qu'elle
soit assise ou debout, et si elle entend quelque bruit, alors
elle redresse le tronc, ouvre les yeux, lève la tête, la tourne
à droite et à gauche en faisant en même temps des mouve-
ments de haut en bas. L'aspect de ces mouvements est très
simien.
Sa marche est lourde; ses pieds se posent àplat sur le
sol. Elle tombe facilement, et quand elle marche ou se tient
debout le tronc est courbé en avant, un peu 6échi sur le bas-
sin, et les cuisses un peu fléchies de même sur les jambes :
son corps ne se redresse jamais.
De tout ceci il résulte que l'attitude et les mouvements
de cette femme ont bien des caractères qui sont habituels
chez les singes.
Les fonctions de la vie organique s'exercent toutes as-
sez régulièrement. Elle a été réglée à l'âge ordinaire et l'est
encore. Elle n'a jamais été malade; enfin tout cela démon-
tre que les lobes cérébraux sont plus profondément atteints
que le cervelet, et que les centres végétatifs sont ceux qui
ont échappés le plus aux conséquences de l'atrophie de l'en-
céphale.
Voici la description de cette femme, qui me semble as-
$éz curieuse. La tête est une des plus petites que Ton con-
,ï Google
621
naisse, à en juger par les dimensions extérieures, que j'ai
présentées et dont on doit retrancher l'épaisseur des tissus
mous, pour se faire à peu près une idée des mesures du crâne.
En effet, la moyenne de la circonférence horizontale des
crânes microcéphales étant de 349 millimètres et celle de
la tête de Bemvinda étant de 36o millimètres, on peut esti-
mer à bien moins de 340 la circonférence horizontale de son
crâne, ce qui est encore moins que dans les cas de Bastia-
nelli {340 et 36o).
La capacité de la cavité crânienne ne doit pas dépas-
ser probablement 410 centimètres cubes, le poids de l'en-
céphale ne doit pas être supérieur à 423 grammes. Or, la
moyenne de !a capacité crânienne des microcéphales étant
de 440 centimètres cubes, et les moindres chiffres obtenus
par Broca étant 414 centimètres cubes, on voit que le crâne
de Bemvinda est un des plus petits que l'on connaisse.
Il est excessivement rare que les microcéphales attei-
gnent un âge avancé. Ils meurent presque tous dans leur
jeunesse, ou même bien avant la jeunesse. La microcéphale
dont je parle est encore remarquable sur ce point de vue,
car elle a aujourd'hui 34 ans et jouit d'une santé parfaite. M,
Vilanova connaît un microcéphale âgé de 60 ans, c'est le
seul exemplaire, à ma connaissance, plus âgé que le mien.
En examinant, autant que possible, la surface extérieure
du crâne de Bemvinda, on n'y trouve pas de lésion osseuse,
ou quelque autre chose, qui mérite de fixer l'attention; il
est parfaitement symétrique sans aucun applatissement re-
marquable. On doit regarder ce cas comme de microcépha-
lie proprement dite, selon la classification que Broca a faite
des microcéphales.
L'absence, on peut le dire, absolue du langage rappelle les
pithécoïdcs. Le petit développement des lobes frontaux du
ly Google
622
cerveau explique suffisamment que ma microcéphale ne puisse
que pousser des cris et que l^articulation de la parole lui
soit presque impossible; c^est tout-à-fait ce qui se passe chez
les singes au cerveau desquels le cerveau des microcépha-
les ressemble beaucoup selon Wagner et Sander.
L'arrêt de développement du crâne, cause possible de
la microcéphalie, si étudiée par M. Virchow, considérée com-
me règle par M. Vogt, et rejetée à présent après les travaux
de Broca, ou bien une cause extérieure et pathologique, se-
lon le sentiment de M. de Quatrefages, nous expliqueraient
suffisamment l'arrêt de croissance du cerveau; mais il est
bien possible que celui-ci ne possédant pas assez d'irritabi-
lité pour continuer à croître, sa croissance se soit arrêtée
à une certaine période de la vie embryonnaire. Le cerveau,
après avoir traversé pendant la vie embryonnaire des pha-
ses diverses, qui reproduisent en quelque sorte des types
appartenant à des animaux inférieurs, rudimentaire au com-
mencement et se perfectionnant d'une manière successive
et graduelle, est arrêté dans son développement à un moment
donné et la microcéphalie se produit. En pensant ainsi on
suit Popinion de MM. Marshall, Vilanova et tant d'autres qui
ont émis la théorie de la microcéphalie par arrêt de déve-
loppement, par atavisme, théorie séduisante et en rapport
avec les modernes études d'embryologie et vers laquelle je
m'incline, quoique je sois le premier à déclarer qu'il y a en-
core trop de problèmes à résoudre.
EXFUOATION D£ LA. PIANOHE
l-a microcéphale Bemvinda. — Fig. i. Vue de face- Fig. a. Vue de profil.
,ï Google
„Google
„Google
Dlsonsslon
M. Vilanova: L'explication si intéressante de M. le doc-
teur Oliveira Feijao, que nous venons d'entendre avec tant
de plaisir, sur la microcéphale d'Abrantes, me rappelle le cas
de microcéphalie que j'ai fait connaître en 1869 dans le Con-
grès de Copenhague, et que je considère comme le plus ex-
traordinaire à cause de l'âge de l'individu, encore vivant
dans le manicome de Valencia en Espagne, lequel doit avoir
au moins 60 ans. Ce microcéphale s'appelle Vicente Orts.
Il est né dans un village près de Jativa, Gastellon del Du-
que.
Je n'ai pu me procurer de renseignements relativement
à son ascendance; il est complètement idiot et ne prononce
que des monosyllabes. Sa tête est excessivement petite; son
front très déprimé, ses bras très longs, avec six doigts a cha-
que main, et des rudiments d'un sixième aux pieds.
M. ViRCHOw: Je ne parlerai ici que sur la microcépha-
lie comme une preuve de l'atavisme, car toutes les autres
questions qui se rattachent à la microcéphalie ne touchent pas
la science préhistorique.
Vous savez, Messieurs, que la microcéphalie représente
selon mon opinion un phénomène pathologique pur et que
j'ai fait dès le commencement opposition à la théorie pro-
posée par notre ami, M. Charles Vogt. Dernièrement j'ai
poursuivi les recherches sur les analogies du cerveau et de
la tête des microcéphales avec le cerveau et la tête des sin-
ges anthropoïdes. Quant au cerveau, je trouve que la par-
ticularité si souvent mentionnée du cerveau microcéphalique
c. R. 43
ly Google
624
de présenter un défaut d'évolution dans la région de la fosse
de Sylvius et particulièrement de laisser ouverte cette fosse
et de montrer VInsula Reilii sans couverture, ne se trouve
régulièremeut pas dans les cerveaux des anthropoïdes, par
exemple du jeune gorilla et du jeune orang-outang. Quant à
la tête, vous voyez dans la microcéphale très intéressante
qui nous a été présentée par M. le docteur Feijâo combien
l'ensemble de l'apparence extérieure se rapproche de celui
d'un singe. Mais en examinant le crâne nous trouvons aus-
sitôt un caractère tranchant. Le crâne des anthropoïdes, les
plus hautement placés a un caractère spécifique, qui exis-
te dans la même région où, intérieurement, la fosse de Syl-
vius est placée, c'est-à dire le processus frontalis squamae
temporalis. C'est un prolongement de l'écaillé temporale qui
s'avance jusqu'à l'os frontal et qui sépare par cela le parié-
tal de l'aile sphénoïdale.
Chez l'homme, au contraire, Paile sphénoïdale se joint
par une suture au pariétal, et un interstice plus ou moins
lai^e sépare le frontal et le temporal. Quelquefois le pro-
cessus frontalis manque chez les anthropoïdes, tandis qu'il
se trouve chez l'homme. Donc, ce n'est pas un caractère
absolu, mais seulement un caractère proportionnel. En effet
il est presque absolu chez le gorilla, il existe dans le plus
grand nombre de chimpansés, il fait défaut dans beaucoup
d'orang-outangs et dans un nombre encore plus grand de
gibbons.
Il y a pour cela une échelle de fréquence, ainsi que les
anthropoïdes les plus supérieurs diffèrent le plus de l'homme.
Chez l'homme c'est l'inverse. Comme j'ai prouvé par
plusieurs travaux particuliers, la race aryenne donne le mi-
nimum de cas de processus frontalis (à peu près 2 ^f)» '^s
races noires, soit australiennes, soit africaines donnent le .
vT*
625
maximum (20 à 25 "/«). Donc, on pourrait dire que les ra-
ces les plus inférieures sont les plus pithécoïdes.
Entre les races blanches et les races noires les races
touraniennes tiennent une place intermédiaire, montrant plus
de cas de processus frontalis et en outre fréquemment un
rétrécissement de Paile sphénoïdale et une dépression de la
/égion temporale, déviation à laquelle J'ai donné le nom de
slénocrotaphie.
Par hasard j'ai trouvé dans le cabinet anatomique de
Lisbonne un nombre de crânes qui montrent ces diverses
particularités. Le processus frontalis est bien visible dans
le crâne d'une négresse, la sténocrotaphie la plus pronon-
cée dans le crâne d'une femme âgée, dans lequel la suture
coronale (frontale) et sagittale sont oblitérées entièrement,
la suture lambdoïde en partie. Ces deux crânes se trouvent
sur notre table. J'y ai ajouté quelques crânes humains d'adul-
tes, dans lesquels on voit dans la même région des os in-
tercalaires. Ils sont d'autant plus dignes de votre attention
qu'ils démontrent clairement une conformation dont plu-
sieurs anatomistes ont crû devoir dériver le processus fron-
talis: ils supposaient que \e processus frontalis commença
par un point d'ossification isolé, qui se souderait plus tard
à l'écaillé temporale.
En outre, je mets devant vous deux crânes de chim-
pansés (mâle et femelle], et un de gorilla (femelle), remar-
quables par la belle évolution du processus frontalis. Le
quatrième crâne, aussi d'un gorilla mâle adulte, ne laisse
pas reconnaître \e processus^ parce que, comme de coutumi;,
les trois os crâniens sont soudés entre eux. Ils appartien-
nent tous à l'excellent musée zoologique de l'École Poly-
technique.
Enfin, voilà un beau crâne de microcéphale
lyGoogle
626
tiré du cabinet anatomique. Pas de traces dMn processus
frontal ou de siénocrotaphie. La région temporale est bien
développée comme chez l'homme sain. Ainsi la tête micro-
céphalique a le type humain justement dans cette région
curieuse où les anthropoïdes montrent la plus grande dé-
viation du type humain. Et comme je ne connais aucun
crâne microcéphalique possédant un processus frontal tan-
dis que plusieurs races humaines présentent dans cette ré-
gion le type pithecoïde, il faut conclure que la tète inicro-
céphalique n'est pas pithecoïde, tandis que la tête austra-
lienne et nègre est fréquemment et d'une manière très assu-
rée pithecoïde.
Avant de finir je présenterai un petit mémoire publié
dans les bulletins de PAcadémie des Sciences de Berlin, sur
l'évolution du crâne du gorilla dans la jeunesse. J'ai essayé
d'y prouver qu'il y a aussi chez le gorilla des os interca-
laires temporaux, mais qu'ils se développent au-dessous du
processus frontalis et que s'ils se soudaient à Pécaille tempo-
rale, il en résulterait un rapprochement de Pécaille tempo-
rale vers Pos zygomatique ou malaire, et non pas vers l'os
frontal. C'est pour cela que je tiens à considérer \& processus
temporaiis chez l'homme comme un pithécomorphisme, peut-
être atavique, et les os intercalaires temporaux comme pa-
thologiques et indépendants du processus temporaiis, et que
je rejette Pidée que la microcéphalie soit pithecoïde dans le
sens scientifique et zoologique.
Le défont de développement dans la tête du gorilla
n'est moins sensible que dans la tête des microcéphales. Par
exemple, le crâne de la microcéphale du cabinet de Lis-
bonne possède une capacité qui est de 3o centimètres plus
grande que celle du crâne du gorilla mâle le plus développé
que je connais. L'apparente grandeur du crâne du gorilla
ly Google
627
réside dans le développement extraordinaire des crêtes qui
forment une espèce d'ornement extérieur, mais qui n'agran-
dissent pas te volume du cerveau. Chez les microcéph
cette particularité manque aussi. De cette manière je p
qu'il faut renoncer pour l'avenir à la théorie de la na
atavistique de la microcéphalie.
,ï Google
SUR QUELQUES FORMES SU MARIAGE POPULAIRE
EN PORTUGAL
CONTRIBOTIOK À LA CONNAISSANCE DE l.'ÉTAT SOCIAL
S DE LA PÉNINSULE
M. GONSICLIERI PeDROSO
Le résultat peut-être le plus inattendu de la nouvelle
école historique a été l^itnportance que tout à coup a prise
l'étude des superstitions, des croyances et des usages popu-
laires de Pactualité, pour la connaissance de Tétat social
de cette phase du développement humain qu'on a surnom-
mée la t préhistoire», et encore tl'histoire de nos origines*,
Urgeschichte comme les Allemands l'appellent.
On peut presque affirmer aujourd'hui que l'étude des
superstitions et des usages des peuples constitue à elle seule
une véritable archéologie, qui doit être cultivée soigneuse-
ment par tous ceux qui font de la première période de la vie
de l'humanité l'objet de leurs travaux et de leurs médita-
tions.
Il est vrai que les matériaux des deux sciences sont
d'une nature toute différente; mais que l'on cherche à con-
lyGoogle
629
naître au moyen des rudes outils en silex Tétat embryon-
naire de rindustrie de nos ancêtres quaternaires^ ou que
Ton fouille sous la superstition ridicule et sous le symbole in-
compréhensible, pétrifié, pour ainsi dire, à la dernière cou-
che de notre société actuelle, la pensée et Porganisation so-
ciale de nos aïeux les plus lointains, le but en est toujours
le même, ou plutôt Tobjet des deux sciences se complète
mutuellement, car il a trait à Thomme primitif, envisagé
dans sa double vie — matérielle et morale. C'est pour cela.
Messieurs, que j'ose vous demander pour ma note une place
modeste à côté de vos savants travaux, et que je ne crois
pas être tout à fait déplacée, au milieu de vos importantes
recherches, une exposition sommaire, cela va sans dire, de
quelques formes du mariage populaire en Portugal, pour
servir de contribution à la connaissance de Tétat social des
anciens habitants de la Péninsule, antérieurs à la domina-
tion romaine.
On regarde aujourd'hui les superstitions, les mythes et
quelques usages et croyances populaires comme les débris
d'une phase sociale primitive qui se sont continués jusqu'à
nous en vertu de la loi de tpersistance*, triomphant de
tous les obstacles et résistant avec succès à toutes les assi-
milations qui ont toujours fini par être impuissantes à les
déraciner.
Cette façon d'envisager les superstitions et les usages
du peuple, est, on peut le dire, à l'heure qu'il est, univer-
sellement admise par tous les savants, et jusque dans le do-
maine de l'archéologie préhistorique il y a quelques années
que l'illustre Sven Nilsson en a fait l'application. On peut
voir de même ce que la mythologie comparée et l'histoire
des religions nous apprend sur l'homme primitif dans un
chapitre du récent et magnifique ouvrage de mon émi-
,ï Google
63o
neni confrère M. H. Hildebrand sur les peuples préhistori-
ques.
Or de toutes ces superstitions, de tous ces usages,
les plus persistants sont ceux qui ont trait à la famille,
à sa constitution et aux relations mutuelles entre ses mem-
bres.
Avant l'invasion romaine, à vrai dire il n'existe pas
d'histoire de la Péninsule ibérique. Ce qu'on sait à l'égard
des Carthaginois, des Phéniciens, des Grecs et encore des
populations des Celtes et des Ibères est bien peu de chose.
Ce seront seulement les efforts combinés de l'archéologie, de
l'anthropologie, de la linguistique, de l'ethnographie, de la
mythologie, de l'épigraphie, de l'onomastique, etc., etc, qui
permettront de grouper les éléments indispensables pour la
connaissance des différentes phases de la civilisation de la
Péninsule, jusqu'au moment où les Romains y mirent le pied.
Des trois conquêtes historiques du territoire de ce côté des
Pyrénées, la romaine, la gothique et l'arabe, la première
est celle qui a assimilé le plus intimement les habitants, à
tel point que les deux autres, bien que postérieures, n'ont
pas pu en effacer les traces. Voyons toutefois ce que fit
la conquête romaine.
Elle imposa sa langue, en faisant du latin l'idiome d'usa-
ge officiel et le moyen de communication avec les autres
provinces de l'empire. Elle imposa les institutions adminis-
tratives de Rome en créant dans la Péninsule autant de pe-
tites images de la ville éternelle, qu'il y avait de lieux de
quelque importance. Les anciens usages, cependant, les
mœurs des populations pré-romaines se sont continués com-
me auparavant. Ni la conquête romaine, ni à plus forte rai-
son aucune des dominations postérieures n'ont changé d'une
r\
. D,a,i,„db,Google
• 63 1
manière durable les conditions ethnographiques de la Pé-
ninsule.
En ce qui concerne la conquête romaine, ce n'était pas
la petite population du Latium, ni même la population de
ritalie entière qui seraient en mesure d"'envoyer dans toute
TEurope connue alors, dans une grande partie de l'Asie
jusqu'à PEuphrate et dans l'Afrique baignée par la Méditer-
ranée des contingents assez importants pour changer à jamais
la carte ethnographique des différentes provinces de l'cm-
lyGoogle
632
Celui qui connaît les beaux travaux de Sir John Lub-
bock et de Tylor sur la civilisation des sauvages, et rim-
portant ouvrage de Mac-Lennan sur le mariage primitif et
les formes les plus rudimentaires de la famille, sera étonné,
sans doute, de rencontrer, parmi les usages et coutumes du
peuple portugais, et comme réalité existante, et sous la for-
me de symbole {le symbole étant le dernier vestige de la
coutume), des traces non équivoques de tous ou presque
tous les usages qu^on a rencontrés ailleurs, constituant Pes-
sence de la famille au plus bas de l'échelle de l'humanité.
Ainsi, j'ai découvert le rapt, dans nos mariages populaires,
parfaitement caractérisé. A Jerumello, par exemple, dans
la province de notre Extremadura, les mariages s'accom-
plissent de la manière suivante: Le jour des noces, la fian-
cée entourée de ses proches reste à la maison, tandis que
le fiancé au milieu de ses parents et de ses amis se rend
il l'endroit où est celle qui doit devenir sa femme. Arrivé
là, une espèce de lutte s'engage, et il fait semblant d'arra-
cher violemment la jeune fille à la maison paternelle. La suite
de la fiancée oppose une résistance simulée et feint de cé-
der seulement à la force, après quoi tout le monde s'en va
a l'église où tout finit par la bénédiction du prêtre A Mi-
randa do Douro on observe encore aujourd'hui la coutume
d'un combat entre le jeune couple qui est prêt à se marier.
Du moment qu'une jeune fille est engagée et quelque temps
avant le jour des noces, a lieu un rendez-vous où les deux
se renvoient mutuellement des coups de poing, à qui mieux
mieux. Personne n'a le droit d'intervenir pour faire cesser
cette lutte singulière. On peut reconnaître encore la même
coutume, plus ou moins modifiée, dans les cas suivants: A
Sindim, aux environs de Regua, lorsqu'un garçon de quel-
que village limitrophe y va pour demander en mariage une
ihyG^TP^Ic"
633.
jeune fille, il est reçu à coups de pierre par les gens du pays,
qui cherchent à empêcher la réalisation de son dessein. Si,
en effet, le mariage se conclut, le jour des noces, à la sor-
tie de l'église, on barricade tous les chemins par où les
nouveaux mariés doivent passer pour se rendre à la maison,
et s'ils veulent passer outre, il faut que le mari dépose quel-
que pièce de monnaie. Cette coutume, si curieuse du reste,
puisqu'elle présente des vestiges du mariage au moyen du
rapt, nous met aussi sur tes traces d'une ancienne exoga-
mie, modifiée déjà par le rachat symbolique de l'épouse,
représenté' dans ce cas par le payement de la monnaie, qui
doit être fait par le mari s'il veut avoir la faculté de se re-
tirer en paix. A Thomar, le jour des noces, le fiancé, ac-
compagné des témoins, va chercher la fiancée qui l'attend
chez la marraine. Aussitôt qu'il y arrive, la jeune fille se
cache derrière la porte et la marraine ne lui permet de sor-
tir de là, qu'après avoir obtenu un certain nombre de répon-
ses aux questions qu'elle fait au jeune homme. Â Barroso,
on observe une coutume à peu près identique.
Dans un village tout près de Guarda, cette coutume
présente encore les circonstances suivantes : La fiancée, avant
de sortir de la maison paternelle pour se rendre à l'église,
s'enferme dans une chambre, accompagnée de toutes ses
amies non mariées. Lorsque le fiancé arrive, il frappe à la
porte, qu'on ne lui ouvre pas sans qu'il réponde à un cer-
tain nombre de questions qu'on lui fait à l'intérieur. Ce dia-
logue fini, la fiancée se cache, et le jeune homme doit la
chercher partout, jusqu'à ce qu'il la trouve et l'emporte en
triomphe, se rendant ensuite à l'église. Dans quelques vil-
lages des deux Beiras, on rencontre la variante qui suit: Jus-
qu'au moment de l'acte religieux il n'y a rien de remarquble,
mais aussitôt que celui-ci est conclu, la scène la plus étrange
,J^
Coogle
634
a lieu. Les invites, qui composent le cortège de la noce, se
présentent, chacun pourvu de grands morceaux de pain
bis, qu'ils jettent aux spectateurs, faisant semblant de se
défendre contre la persécution du peuple, qui veut enlever
la fiancée. C'est un désordre adVeuv, simulant un vrai
combat.
H serait facile de décrire quelques variantes encore, que
j'ai recueillies dans notre pays, particulièrement dans les
deux Beiras, et qui doivent paraître systématiquement or-
données dans un travail complet que je prépare sur ce sujet.
Cependant les traces que nous avons découvertes d'une an-
cienne organisation familiale chez notre peuple ne se bornent
pas à celles qui se rapportent îi l'enlèvement de l'épouse,
bien que celles-ci ne soient pas des moins intéressantes.
Nous en avons encore d'autres, que je passe à décrire très-
sommairement.
En faisant des études sur les superstitions populaires
portugaises au moyen-âge, j'ai eu besoin de lire un grand
nombre de Coiislitiitioiis épiscopales^ et à cette occasion j'ai
rencontré une prescription qui est restée pour moi, jusqu'à
ce moment, à peu près incompréhensible, je l'avoue. I! s'agit
de défendre, sous les peines les plus rigoureuses, aux fian-
cés la cohabitation avant le mariage. La prohibition se rap-
porte à un usage persistant et non pas à une simple infrac-
tion individuelle aux lois qui président aux relations des
sexes, comme on pourra s'en convaincre, du reste, en re-
marquant que cette défense se répète un siècle durant, la
Constitution la plus ancienne qui en fait mention datant de
la première moitié du xvi'' siècle, et la plus moderne étant
des dernières années du xvii" siècle. L'usage était commun,
d'ailleurs, h tout le pays, puisqu'il nous apparaît invariable-
ment dans toutes ou presque toutes les Constitutions., de-
oogle
a\
635
puis celles de Braga et de Guarda jusqu'à celles de l'Ai-
garve, au sud du royaume. Quelle était donc cette cou-
tume, contre laquelle le cierge catholique lançait son ana-
thème, et qu'il était cependant impuissant à déraciner? Ce
n'est pas évidemment un fait isolé, ainsi que le prouve du
reste la permanence de l'usage. On ne peut songer non plus
à une protestation de la part du peuple contre le mariage
religieux, dans un pays aussi catholique que le nôtre, sur-
tout à cette époque. Quelle était donc la signification de la
coutume, dont on ne peut désormais mettre en doute l'exis-
tence? Pour ma part, j'avoue que j'ai été longtemps indécis,
et c'est avec quelque réserve encore que je présente l'hypo-
thèse suivante: La coutume me semble être le dernier ves-
tige d'une organisation familiale où il régnait une grande
liberté entre les sexes avant le mariage, une organisation
familiale enfin plus ou moins polyandriqae. Cette façon
d'interpréter Pusage en question reçoit, quant à moi, une
certaine confirmation en le rapprochaht des deux curieuses
coutumes encore en vigueur dans quelques points de notre
pays, surtout de la dernière, vraiment notable, et qui doit
être regardée comme le commentaire de l'usage que nous
venons de rencontrer dans notre législation religieuse. On
m'a assuré que dans un endroit appelé «Magdalena», dans
les environs de Porto, quelques fiancés observent encore
l'usage de cohabiter avant le mariage. Mais où la coutume
se présente sous une forme parfaitement caractéristique, à
ne laisser point de doute, quant â son importance tradition-
nelle, c'est dans un petit village aux environs de Lisbonne.
Ce village est compris dans la zone ethnographique connue
sous le nom de Sa/oios, dont la population conserve un
grand nombre d'usages antiques et intéressants au plus haut
degré; Les jeunes filles qui arrivent â l'âge de seize ans en-
f
„Google
636
viron, étant encore vierges, y sont l'objet d'une continuelle
raillerie,à tel point que pour échapper à cette honle elles se
livrent avec la plus grande facilité au premier venu qui leur
fait la cour, et ces unions éphémères et peu recommenda-
bles par le côté de la pureté des mœurs, continuent d'ordi-
naire jusqu'au moment où la jeune fille devient enceinte.
Alors, un nouveau genre de vie commence pour elle. Ce-
lui qui se croit le père l'épouse, oubliant son passé. De son
côté elle devient en général honnête et dès ce moment rien
ne la distingue d'une honnête femme. Ceci ne rappelle-t-il
pas d'une manière frappante ce qu'Hérodote nous racconte
des femmes babylonniennes, qui devaient, au moins une
fois dans leur vie, se livrer, dans le temple de Vénus, à un
étranger, moyennant une pièce de monnaie, après quoi elles
ne se prostituaient plus, à quelque prix que ce fût? En tout
cas, nous avons des motifs sérieux pour attendre des investi-
gations, auxquelles nous nous adonnons à présent, de nou-
veaux faits qui viennent sous peu confirmer l'existence de
traces d'une ancienne polyandrie péninsulaire, dans la der-
nière couche de la population du Portugal.
Il y a encore un usage, que j'ai rencontré dans quelques
endroits de notre pays, d'une grande importance tradition-
nelle aussi, comme on peut s'en assurer en lisant le livre de
Mac-Lennan (op. cit., p. 3i6, 3i7). A Manteigas, par exem-
ple, petit village dans les environs de Porto, on observe
dans les mariages populaires la coutume suivante: Les fian-
cés ne peuvent coucher ensemble que quatre jours après le
mariage. Aussitôt que la cérémonie religieuse est finie, le
fiancé se retire dans la maison paternelle et la fiancée s''en
va de même chez ses parents, où elle est sous la vigilance
de sa mère jusqu'à ce que les jours défendus soient passés-
Dans les environs de G>vilhâ le nombre des jours défendus
..^jj^ooole
637
est réduit à trois, et ce nombre on le retrouve aussi à La-
vos, près de Fîgueira. A Peral, village situé à quelques ki-
lomètres de Caldas da Rainha, la coutume se retrouve à
Pétat de symbole. Lorsqu'une jeune fille se marie, les autres
jeunes filles et garçons du village vont la nuit frapper à la
porte, afin qu'elle ne puisse coucher avec son mari. Ceci se
répète pendant les trois premières nuits; ce n'est qu'après
la troisième nuit que les nouveaux mariés peuvent dormir
en paix.
Il y a encore beaucoup à étudier dans les coutumes
qui se rapportent aux mariages populaires dans notre pays,
et sous la forme de symbole, et comme usages jusqu'à ce
jour en vigueur. J'ai même des raisons pour croire que dans
le centre du royaume il existe des traces d'une parenté par
les femmes. On sait que l'histoire des peuples qui n'ont pas
d'histoire se reconstruit avec leurs traditions, avec leurs
superstitions, leurs coutumes, leur industrie, avec les restes
inconscients et incompris d'anciens usages, qui ont eu leur
raison d'être, et que l'étude approfondie de toutes ces ma-
nifestations de la vie primitive de l'humanité est indispensa-
ble, même pour ceux de ces peuples qui, plus tard, ont eu
leurs historiens.
Dans cette courte note, je n'ai voulu que décrire quel-
ques usages curieux que j'ai recueillis pendant mes inves-
tigarions et études sur hfolklore portugais et qui me pa-
raissent éclairer une période de la vie de notre péninsule,
pour laquelle nous n'avons pas d'histoire. Mon but a été
donc, Messieurs, d'appeler votre attention sur l'importance
réelle, que jusque dans le domaine de vos études ont ces
recherches sur les coutumes et les usages populaires de
la région, a coup sûr, la plus curieuse à étudier de la Pé-
ninsule ibérique. A côté de la science dont les plus illus-
,ï Google
638
trcs promoteurs et les maîtres les plus écoutés sont as-
semblés ici en ce moment, la science qui s'occupe des ori-
gines préhistoriques de notre monde moral demande une
place: or, ces origines, Messieurs, et ce seront mes derniers
mots, sont peut-être comtemporaines de ces premières so-
ciétés humaines dont l'étude a rendu vos noms, chers maî-
tres! impérissables dans l'histoire de la science, c'est-à-dire,
dans la plus belle page de l'histoire de la civilisation.
, Aprùs la clôlureiiu Congrès l'auteur a eu l'occasion de réunir de
nouveaux documents qui confirmcni plusieurs des hypothèses formu-
lées dans ce mémoire, ei qui doivent faire partie d'une publication spé-
ciale.
,ï Google
LA OORDILL&BE D£8 ANDES
L'HOMME AMÉRICAIN
M. P. -G. Mesnier
Je me propose de résumer brièvement et de soumettre
à votre appréciation, quelques observations concernant Porî-
gine des races humaines indigènes qui habitent l'Amérique.
Mes conclusions sont basées sur des arguments géologiques
aussi bien que sur quelques considérations ethnologiques.
Je commencerai par traiter de la partie géologique de
mon sujet.
On peut affirmer avec raison que, des continents exis-
tants, celui qui présente actuellement le plus d'activité vol-
canique c''est la moitié australe du Nouveau-Monde. Tandis
que les zones septentrionales du continent ne font pas preuve
(au moins pour l'époque moderne), d'avoir subi l'influen-
ce énergique des actions volcaniques, on n'a qu'à fouler le
sol de l'Amérique andine pour avoir la preuve de l'influence
que le volcanisme a exercé, surtout dans la direction qui
se propage le long de la grande Cordillère qui a mérité à
juste titre le nom de colonne vertébrale du monde. Le sou-
lèvement des régions couronnées par ce système de monta-
,ï Google
640
gnes s'est produit par des secousses périodiques, et Ton sait
qu'elles se sont répétées encore dans des temps historiques.
Ceci s'applique surtout pour la région comprise entre Chi-
loé et Callao. Tous les géologues sont d'accord à anribuer
ces phénomènes à l'action volcanique, et en effet le grand
nombre de volcans qui couronnent les cimes de la chaîne
andine fournissent un ai^;ument bien éloquent en faveur de
l'hypothèse qui attribue le soulèvement de ces vastes répons
à l'action du volcanisme. Cependant, les informations géné-
ralement répandues sur ces régions peu accessibles ne sont
pas tout à fait correctes et l'on admet généralement, et peut-
être sans avoir les preuves positives, que les montagnes les
plus élevées sont toujours de véritables volcans. Je crois
cependant cette règle soumise à des* exceptions. Ainsi l'Acon-
cagua, montagne de 6835 mètres, la plus haute cime des
Andes, ne semble pas être un volcan, et le Misti, au voist-
rtage duquel tant de terribles tremblements de terre ont. eu
lieu, doit être éteint depuis plus longtemps que Ton ne pense
généralement. Il est intéressant, je crois, de citer à ce pro-
pos une information remarquable qui me fut donnée par
un vieux pâtre indien à qui le sommet du Misti était fami-
lier, lorsque je lui demandais des . renseignements sur cette
montagne. Il y a, me disaît-il, sur la crête du Misti, un
grand creux plein de sable ténu, lequel lorsque le grand
vent soufRe, s'échappe en colonne et fait croire aux habi-
tants de la plaine que la montagne vomit de la fumée.
Avant d'arriver à Arequipa on trouve une immense
plaine élevée, sur laquelle on voit de singuliers monticu-
les de sable disposés en formé de demi-lune. Ces monti-
cules sDnt façonnés par l'action des vents qui les soulèvent
et les entraînent en leur donnant la forme d'un cylindre ani-
mé des mouvements de translation et autour de l'axe.
ly Google
64»
Lorsque l'effort qui les conduit vient à diminuer, la partie
du cylindre en rotation qui touche la terre prend une vélo-
cité moindre que celle de la partie supérieure, et, quand
le tout revient en repos le monticule produit cette forme
semi-circulaire si remarquable dans le désert péruvien*
Sur le littoral du Chile, surtout près de Vina del Mar,
on observe des cailloux roulés à une hauteur de, à peu près,
dix mètres du niveau de la mer, ce qui met hors de doute
un soulèvement de cette région dans une époque relative-
ment moderne. A Coquimbo aussi on rencontre des calcai-
res coquilliers contenant les genres Pecten, Ostrea, Arca,
Conchoîepas, Oliva, Fissureïîa, Turriteîla^ etc., soulevées à
^ mètres au-dessus du niveau de l'Océan. J'y ai aussi ren-
contré un exemplaire d'un bivalve très commun dans les
eaux de la baie qui sépare Coquimbo de Serena, le Meao-
desma donacium.
Je mentionnerai encore un autre fait géologique bien
intéressant qui s'est accompli postérieiu-ement à l'apparition
de l'homme dans ces régions.
A plusieurs centaines de lieues de Coquimbo vers l'ouest,
dans l'Océan Pacifique, est située la petite Se de Pâques, iso-
lée et loin de tout centre de population. On y trouve de
nombreuses statues d'un remarquable travail, dont quel-
ques-unes sont plus grandes que nature; elles sont placées
le long du versant d'une colline et descendent graduellement
au-dessous du niveau océanique, indiquant ainsi, que ce
haut lieu où tme race disparue avait peut-être placé ses
dieux, s'est baissé peu à peu dans l'Océan. Ces figures ont
< D'après la remarque qui m'a été faite par un des savants mem-
bre du Congru qui avait examina dans le Sahara les dunes de sable,
le mouvement que je décrit ne serait qu'un cas exceptionnel et les du-
nés ne s'avancpraicnt que, sotisJ 'action régultire des vents contunts.
,ï Google
642
le type dolichocéphale et orthognate, et leurs traits généraux
sont assez ressemblants aux types des tribus araucanéen-
nes.
La pierre dans laquelle ces statues ont été taillées ne
se trouve pas probablement dans l'île, tandis qu'il existe une
ressemblance assez marquée entre les trachytes poreuses
des environs de Coquimbo et la pierre qui a été appliquée
â la fabrication des statues de l'île de Pâques.
Il est évident que cette île n'est que le reste d'une terre
submergée d'une grandeur inconnue et qui viendra peut-
être à disparaître tout à fait dans une époque géologique
plus ou moins rapprochée de l'époque moderne.
Près d'Antuco on observe de nombreuses bombes
volcaniques ayant la forme sphérofdale caractéristique assez
bien définie. Une section transversale d'une de ces bombes
présente une disposition curieuse de la substance. La cou-
che extérieure assez compacte et peu cristalline est dispo-
sée en feuillets superposés enveloppant un noyau moins
compact. Ce centre, comme c'est généralement le cas, res-
semble un peu à une éponge. Il n'est pas difficile de trou-
ver dans ces bombes les indices d'aplatissement dus, soit
à la rotation pendant leur trajet aérien, soit à la chute de
la bombe avant son refroidissement complet. Les premiè-
res présentent naturellement une surface de même nature
que celle du globe terrestre, et sa ressemblance avec la
terre a dû être encore plus considérable lorsque la matière
volcanique était encore incandescente.
J'ajouterai encore qu'une coupe géologique de la baie
de Bahia Blanca sur l'Atlantique jusqu'à la baie de Valpa-
raîso sur le Paci'ique présente successivement les terrains
suivants, en^ partant de l'est vers l'ouest: dépôt pampéen
de d'Orbi'ny, conglomérats, schistes, porphyres, roches
,ï Google -
643
calcaires, formations lacustres, granités contenant des veines
puissantes d^orthose et oligoclase, formation permienne, ro-
ches phon^lithiques, et, aux environs de Valparaiso, le gneiss
ferrugineux contenant des crisiaux d'hyper^thène.
Ces quelques faits géologiques que je viens de rappor-
ter me semblent suffisants pour faire paraître probable que
des affaissements ont eu lieu dans la région occupée aujour-
d'hui par le Pacifique. Ll-s diverses manifestations volcani-
ques qu'on remarque en large échelle dans l'Amérique du
Sud en donnent beaucoup de vraisemblance, tandis que
l'affaissement de l'île de Pâques, dont je viens de parler, en
fournît une preuve directe.
Ci! continent austral hypothétique occupait probable-
ment une grande partie de l'emplacement actuel des océans
Pacifique et Indien, et des faits ethnologiques nous font pa-
raître probable que ce continent ait fait partie de l'Afrique
et de l'Australie. C'est dans la partie aujourd'hui disparue
que je crois avoir été la patrie originaire d^s Touranitns
de l'Orient asiatique et des indigènes de l'Amérique.
,ï Google
-^
APPENDICE
„Google
,^>
'^
k)b,Goo<sle
1
EXCURSION DANS LE NORD DU PAYS
BRAGA ET GITANIA DE BRITEIROS
Le lendemain de la clôture du Congrès une trentaine
de congressistes quittèrent Libbonne. Un train spécial avait
été pris pour eux. On partt à 6 heures du matin et à n
heures on arriva à Cuïmbre où Ton déjeûna. Le train par-
tit de nouveau, après une heure de retard, et à 7 htures
du soir on descendait à Braga, la troisième ville du Portu-
gal, non seulement par sa population (environ 20.000 habi-
tants), mais aussi par son importance archéologique et mu-
nicipale. Elle est située au milieu d'une riche contrée, à 392
kilomètres au nord de Lisbonne. C'est là qu'on passa la nuit
après avoir goûté un dîner, presque tout composé de mets
nationaux, caractéristiques de cette contrée.
Nous laissons la parole à M. Virchow, qui a fait la des-
cription de cette excursion dans un rapport*, dont nous tra-
' Verhandlungen der Berlintr Anthropologisdten Gtseilschaft. Sit-
zung am ïosien November 1880, p. ii^i-'iii.{ZeitschriJt fiir Ethnologie,
voLxu).
,ï Google
64&
duisons presque en entier la partie qui a trait au siège d'une
ancienne civilisation, à la station préhistorique de Citania
de Bnteiros, la plus remarquable que le Congrès ait eu l'oc-
casion de visiter, et où, grâce aux soins de son propriétaire,
M. Martins Sarmento, se trouvaient réunis tous les moyens
propres à en faciliter l'étude.
•J'aborde maintenant un sujet, qui m'a intéressé outre
mesure; je veux parler d'une série de restes de stations hu-
maines, que nous avons eu l'occasion de visiter, immédia-
tement après la clôture du Congrès, lors d'une excursion as-
sez étendue dans le nord du pays. Il existe une petite pu-
blication de notre collègue Hiibner, qui a traité de cet ob-
jet dans le i5*"' volume du //ermcs. M. Hiibner s'est trouvé
dans des circonstances favorables pour faire une description
animée de ces stations, quoiqu'il n'ait pas vu, lui-même, les
fouilles. Non seulement il avait sous les yeux les publications
qui ont été faites sur ces stations, mais aussi il pouvait con-
sulter un grand nombre de photographies; sa description est,
en effet, assez complète jusqu'à cette période, je dirai même
très correcte.
Après cette publication, les fouilles ont été poursuivies
avec beaucoup de zèle, ce qui permet d'ajouter quelques
détails à sa communication.
11 se trouve dans ces lieux, un homme, M. Sarmento,
résidant à GuimarSes, lequel, semblable à Schliemann, dé-
pense depuis des années de grosses sommes dans ces fouil-
les. Il a fait l'acquisition des lieux mêmes pour les ga-
rantir contre des mains inhabiles. Chaque année il fait
fouiller une partie de la surface du terrain et rassembler
soigneusement tous les objets recueillis, de sorte quHl se
trouve à présent en possession d'un si grand nombre de
f^Goot^lcj
649
pièces, qu'elles peuvent former, à elles seules, un petit mu-
sée.
Nous fimes notre excursion sous la direction du prési-
dent du Congrès, M. Andrade Corvo. Nous allâmes de Lis-
bonne à Braga, en passant par Porto. Braga est une très
ancienne ville de la province de Minho, qui, plus que toute
autre, m'intéressait extrêmement, parce qu'elle fut pendant
plusieurs siècles la capitale des Suèves
Je dois avouer que je n'ai pas pu reconnaître en an-
thropclogue des parents dans les habitants actuels de cette
contrée; ils doivent cependant avoir beaucoup changé. Au-
jourd'hui ils sont presque tous bruns, et quoiqu'on puisse
signaler ça et là des individus blonds, des enfants et même
quelques adultes, je ne saurais affirmer que j'aie trouvé des
indices de ce que l'influence de l'invasion germanique s'y
fasse encore sentir.
A Braga, le comte de Sâo Mamede, qui venait de faire
ses études en Allemagne, a eu la complaisance de me pro-
curer une petite collection de cheveux des habitants, aussi
bien de Briteiros que des environs; exception faite de quel-
ques échantillons d'un brun de châtaigne, ils sont tous d'un
noir luisant.
D'un autre côté je puis assurer à ceux qui voudront en-
treprendre un voyage à Braga, que, sous le point de vue
architectonique, cette ville mérite la plus grande attention.
Elle est une des plus anciennes villes du Portugal; on y trouve
un mélange des restes d'architecture romaine, visigotique et
mauresque avec des édifications des derniers temps de la re-
naissance, tels que je n'en ai vu ailleurs d'aussi beaux et
d'aussi complets Braga se trouve au nord de Porto; on y va
p ar le chemin de fer qui part de cette dernière ville. La con-
63o
trée est extrêmement fertile et le sol très accidente. Celui
qui vient de parcourir pendant des semaines des plaines biû-
lées et des montagnes nues, presque sans aucun vestige de
végétation, éprouve un vrai ravissement de se trouver tout
à coup dans une contrée aussi charmante, aussi riche, aussi
fraîche et verdoyante.
L'explication de ce contraste se trouve dans le voisi-
nage de la mer, et dans les courants d'air saturé d'eau qui
vont se décharger sur cette région. Il y a une telle exubé-
rance de végétation dans cette province, que je ne pour-
rais en citer de semblable dans aucun des pays de l'Eu-
rope que j'ai visités.
A Braga, nous montons sur des voitures, et nous di-
rigeant vers le suJ-cst, nous nous engageons de plus en plus
dans la campagne; nous touchons presque Guimariîes, ville
ancienne et fameuse à Tégal de Braga. Le chemin nous mène
par dessus une haute colline dans une Viillée lai^e et pro-
fonde, orientée du S.-E. au N.-O. On y voit des sources
chaudes et un pet.t bain (Caldas das Taipas).
Plus loin se dresse d^ns la vallée une série de colli-
nes isolées et abruptes qui se rattachent à la montagne par
des cols peu profondi. Presque sur chaque sommet il y a
une station préhistorique.
Celle qui a été le mieux explorée s'appelle Citania de
Brùetros. M, Hùbner en a fait l'objet principal de sa no-
tice. Le licL qui l'avoisine s'appelle Briteiros el Citania rap-
pelle cHé^ city, civitas: quelques philologues ont voulu faire
dériver cette dénomination d'un radical celtique. Je ne m'en
mêlerai point; je d.rai seulement que l'on peut constater
l'existence de ce nom depuis des siècles; ce dont on peut
conclure qu'il doit être très ancien. Je ne saurais dire non
plus, si l'on peut affirmer, comme M. Htibner prétend le
ly Google
lutes ces stations soient connues par le peuple
nom*.
■nento nous avait fait attendre à Briteiros par
jeunes filles toutes parées, qui répandaient des
3US, II avait fait mettre à nu sur les flancs de
isine de nombreux fondements des édifications
ibord on voyait un triple retrnnchement, ou plu-
entrurait la colline. Nous gravîmes la montagne
i sous un soleil brûlant. Le sol en était dur, ari-
, peine par quelques herbes chétîves et brûlées.
:vait cependant le Colchicum autiimnale^ 'a Scilla
;n floraison; çà et là on voyait aussi les fleurs de
gonensis, du Leucoium aulumnale et d'autres
ietîte taille.
luteur nous découvrons des rangées horizontales
le moellons bloqués qui font le tour de la mon-
Tessîon que j'en reçois, je dois l'avouer, est celle
iciensramparts. Au d' la, près du sommet, on par-'
ues étnites, pavées de pierres plates: le déblai-
été conduit si bien qu'on pou'
:e de l'emplacement de la G
itôt directement, tantôt par i
n voit les fondements de peti
u à coins arrondis, dont quel
le plusieurs pieds. Ils sont <
ièrement taillés et quelquefi
Zitania paraît Stre une dési^atior
ennes stations il n'y en a que qui
est un, soit attribué, ei Sabroso
lur les autres mê:ne, cette déni
t. Note de M. Martins SarmetUo.
,ï Google
652
sis, que les différentes rangées de pierres forment des spi-
rales qui montant lentement font le tour de l'édifice.
Cette remarquable construction devait assurer à Tédi-
fîce une solidité bien plus grande que ne Peut fait ta simple
superposition des matériaux. M. Sarmento a fait bâtir sur
le sommet de la montagne des huttes dont la base est for-
mée par d'anciens fondements. Ces huttes offrent en outre
une grande ressemblance avec les petits moulins à vent, or-
dinairement ronds et peut élevés, qui sont distribués partout
dans le pays, formant autant de petites maisonnettes en
pierres.
A l'intérieur aussi bien qu'à l'extérieur des murs de fon-
dement on trouve les objets de toute espèce, que M. Sarmento
a rassemblés sur de longues tables placées au sommet de
la colline. Seuleqient, tandis que l'on a recueilli à Sabroso
un grand nombre d'instruments de pierre appartenant à
l'âge de la pierre polie, ici, à Citania de Briteiros, on n'a
trouvé jusqu'à présent qu'un nombre assez restreint de ces
objets. On a rencontré, du reste, à Sabroso aussi bien qu'à
Citania de Briteiros, des objets de métal — du bronze et du
fer. Ces deux stations appartiennent donc, sans aucun dou-
te, à l'âge du fer; la Citania de Briteiros paraît toutefois
avoir été plus longtemps habitée, puisque l'on y trouve
aussi, assez souvent, des objets d'art romain, ce qui n'est
pas le cas pour Sabroso, où ils sont rares, ou nuls en un
certain sens.
Parmi les trouvailles de Citania de Briteiros il faut si-
gnaler avant tout un grand nombre de blocs de pierre taillée,
portant, pour ia plupart, des sculptures et des bas-reliefs. Les
dessins rappellent en partie les ornements que l'on trouve
sur les dolmens irlandais et les rochers en Suède, ou bien
des formes semblables à cejles que l'on a reocontrées t My-
° .*i!!ooglG y
653
cènes et dans les îles grecques. Ce sont des dessins tan-
tôt très réguliers, tantôt très bizarres. J'en ai esquissé quel-
ques-uns, qui se trouvent reproduits ici (PI. n,J>g- 1, 3, Sy
4, 5, p). Tels sont, par exemple, les^^. / et S, consistant
en deux lignes parallèles, qui se recourbent en dedans ou
en dehors à l'extrémité, tout à fait comme dans les dessins
que l'on voit sur des roches suédoises (Brunius, FÔrsok
til Jorklaringar ofver halîristningar. Lund i868, PI. i,
fig. lo). Les cercles entourant des dessins sont surtout fré-
quents. Ces dessins sont le triquetrum,Jig. 2, aussi à qua-
tre hTBSrJig. S, ou les raïs d'une roue,_/îg-. 4, ou enfin une
sorte de tteur^^g. p, formes connues surtout par les feuilles
d'or trouvées à Mycèncs (Schlicmann, Mykenae^ p. igS,
n" 241, p. 3o4, n° 416) et à Hissarlik.
On remarque aussi d'autres dessins, consistant en de
grandes lignes courbes et enroulées, qui se répètent plu-
sieurs fois, formant des bandes parallètes,_;î^. 5, ou des sys-
tèmes de tours concentriques ou en spirales, comme on les
voit sur les stèles funéraires de Mycènes (Schliemann, p. 91,
n' 140, p. 97, n* 141, p. 108, n" 149), ou sur les dalles de
New Grange (Nilsson, Skandinaviska Nordens Ur-Invhtare.
Lund 1872. II. Bronsaldem, p. 23, fig. 8, p. 26, fig, 11).
Ces spécimens, d'ailleurs assez grossiers, sont très caracté-
ristiques.
Parmi ces pièces, une grosse pierre laquelle se trouvait
sur le petit plateau qui couronne la colline, a été depuis long-
temps Tobjet d'une attention particulière. On la désignait
dans la contrée, par le nom de Pedra Formosa, «belle pier-
re». Elle fut apportée, vers le commencement du siècle der-
nier, dans le porche de l'église de Santo Estevlo de Bri-
teiros, mais M. Sarmento l'a fait replacer horizontalement
sur la montagne, abritée par l'une des deux huttes qu'il y
,ï Google
654
a fait construire. C'est une pierre de grandes dimensions,
2",2S sur 2",9o (P!. i), pour le transport de laquelle il a fallu
employer vingt-quatre attelages de bœufs. Elle a l'aspect
général d'un fronton lorsqu'on la suppose debout. De là est
venue de bonne heure la pensée de lui attribuer le rôle d'un
ornement antique qui surmonterait quelque porte, surtout
parce que, à l'occasion du transport, on a retrouvé des pierres
qui pourraient bien lui avoir servi de soutien. M. Htibner,
lut-aussi, incline à croire que la position verticale ait été la
vraie, d'autant plus, qu'un examen attentif a démontré qu'il
ne faudrait pas grand chose pour la maintenir dans cette po-
sition. Outre cela, on trouvait sur le revers de la pierre des
vestiges d'une figure, asse?, insignifiants du reste, et peut-
être dus à Pintervention accidentelle d'un tail'eur de pierre.
Ce revers est d'ailleurs entièrement en brut. La face de la
pierre, au contraire, présente une suite d'ornements assez
bizarres, profondément gravés et ciselés, qui la recouvrent
complètement.
Voici une description plus détaillée de ce monument
extraordinaire:
Dans le bord le plus long de la pierre il y a une échan-
crure semi-lunaire, assez grande pour qu'un homme puisse
s'y placer à l'nise. Immédiatement au-dessus se trouve une
cavité profonde et triangulaire, qui aboutit à l'échancrure
par un canal caché: l'eau qu'on y verse s'écoule au dehors.
La cavité est placée à l'extrémité d'un sillon, qui se pro-
longe à travers la pierre, à une égale distance des deux
côtés, et se termine par une espèce de cuvette plus ample.
De ce point se dirigent obliquement vers chaque côté de la
pierre deux sillons. C'est de cette disposition que provient
la configuration de fronton qu'affecte la partie ornementée,
laquelle ne répond qu'imparfaitement à la forme de la pier-
Digitizsd bïGOOgÎc ^^^
655
re. En effet, la seule sculpture de la partie inférieure où se
trouve Péchancrure est complète. Elle est limitée par une
ligne droite; tandis que la panie opposée qui devrait former
le sommet du fronton et qui se trouve inachevée, a une forme
à peu près semi circulaire. Outre les deux cavités que nous
venons de décrire, il y a encore un creux de chaque côté de
ta dépression triangulaire; ils sont également triangulaires et
ne communiquent pas avec cette dépression.
Presque toute la surface du tympan, divisée en deux
parties égales par le sillon médian, est couverte d'ornements
en forme de grillage ; ce qui reste en dehors de cette espèce
d^échiquier est revêtu d'ornements laides, mais incomplets,
en spirale et en ziguezague. Une autre décoration plus com-
pliquée occupe la surface de la pierre au-dessus du triangle
échiqueté. Quelques détails de cette ornementation rappel-
lent les dessins de la partie inférieure de la troisième stèle
funéraire de Mycènes (Schliemann, ojp. cit. p. 97, n.** 141);
d'autres, cependant, présentent des combinaisons de lignes
plus entortillées. On doit aussi remarquer que ces ornements,
étant coupés par la ligne terminale sur le côté droit de la
pierre, doivent être antérieurs à cette coupe même*.
Voilà en peu de mots ce que c'est que la Pedra/oT'
mosa. Des débats qui, sur place, ont eu lieu touchant la si-
■ L'ornementation n'est pas coupée par la ligne terminale, mais
plutôt par un sillon grossier placé entre cette ligne et l'un des sillons
obliques mentionnés dans le texte. En examinant la PI. 1 on arrive à
l'une de ces deux hypothèses: l'ornementation a été faite avant ou
après que l'ont eût creusé le sillon. Si elle l'avait été auparavant, l'une
des sections de la figure ainsi coupée aurait dû disparaître dans la
large solution de continuité que nous y voyons; les deux sections, au
contraire, sont au complet, ce qui porte à croire que le sculpteur les a
gravées après l'ouverture du sillon qui les sépare. Note de M. Martini
Sarmtrao.
c. R. 45
,ï Google
656
gnification de cette pierre, il ressortit à mon avis Popînîon
qu'elle a dû être une pierre à sacrifices. Cette opinion qui
avait déjà été soutenue, par M. Sarmento surtout, n'en ac-
quit qu'une plus grande plausibilité, après l'examen de l'ob-
jet même, fait par un connaisseur tel que M. Guimet, qui
est au courant des pratiques religieuses de différentes na-
tions parce qu'il a formé un grand musée à Lyon pour l'ex-
position et l'étude de telles pratiques chez tous les peuples
et dans tous les âges, institution qui lui a déjà coûté des
millions. M. Guimet fit lui-même l'expérience de se placer
sur la pierre, le ventre en bas et les pieds dans les deux
creux latéraux, penché, les genoux fléchis appuyés contre
la table et la tête touchant la cuvette. Nous devons re-
connaître que cette disposition de la pierre serait la plus
convenable pour un sacrifice humain, pourvu, cependant,
que la victime, fortement assujétie, eût les genoux plies. M.
Hubner s'est prononcé contre l'hypothèse de pierre à sa-
crifices^ et par des arguments qui, je dois l'avouer, ont un
grand poids; il n'a pas, cependant, pris en considération que
ces sacrifices pourraient bien exiger une victime humaine.
Les preuves d'un tel emploi de la pierre ne sont pas
encore, en effet, assez convaincantes; quoiqu'il en soit, ce-
pendant, cet objet, avec une ornementation aussi bizarre,
n'en restera pas moins une des trouvailles les plus remar-
quables qu'on ait faites, et j'espère que l'on parviendra,
après que des dessins corrects en auront été divulgués, à y
découvrir des analogies plus décisives que nous n'en pou-
vions apercevoir dans un examen aussi rapide.
Si l'on se demande quelle a été l'époque où cette sta-
tion fut établie, on reconnaîtra qu'il se trouve à Gtania de
Briteiros des données très importantes pour résoudre cette
question. En effet, dans plusieurs endroits on peut obser-
DinitizerlCGaÇl^lC
^
L
65?
ver un mélange avec des objets, sans aucun doute datant
du temps de Thabitation de la station même, et ces objets
sont romains^ des vestiges de coutumes romaines peuvent
aussi être signalés. Parmi ces objets d'art romains on trou-
ve, outre quantité de bronzes, qui ont du être importés et
dont les types sont tout à fait italiques, des débris de beaux
vases de terra sigillata, d'un rouge luisant, et des inscrip-
tions réellement latines. M. Hubner a déjà communiqué une
partie de ces inscriptions; d'autres ont été découvertes après.
Les unes et les autres sont gravées sur des pierres travail-
lées. Elles sont d'ailleurs assez maigres; les noms propres
qui s'y trouvent sont barbares, en partie déjà connus, com-
me, par exemple, le nom celtique Camalus. M. Hubner a
fait ressortir avec raison cette circonstance, que nous voyons
là une civilisation nationale qui a subi une grande influence
romaine. II est donc positivement démontré que la dernière
période, du moins, pendant laquelle la station de Citania de
Briteiros fut habitée, coïncide avec le temps de la domina-
tion romaine, c'est-à-dire avec les premiers empereurs.
Il semble que pour la première fois nous avons là, de-
vant nous, la preuve de Pexistence d'une cité en grande par-
tie préhistorique, qui s'est maintenue sous la domination ro-
maine. M. Hubner fait encore mention d'une autre localité
analogue à celle-ci, laquelle ne nous est connue que par des
relations qui datent du commencement du siècle dernier:
c'est celle de Panoias dans la province de Tràs-os-Montes '.
A Sabroso, au contraire, on n'a trouvé aucune inscrip-
tion, aucun objet, lesquels puissent dénoncer la présence
des Romains, comme ayant habité cette station. Les indi-
' Nous pouvons assurer que les ruines du type de celles île <;iianiii
de Briteiros sont assez communes dans le pays. Noie de M. Martins Sar-
45.
V
.«jÇcSfcogle
658
ces de l'infiltration de la civilisation italique n'y font pas ce-
pendant défaut. Je citerai spécialement une grande quantité
d'objets de métal, nommément des fibules en bronze. Ci-
joint se trouvent des dessins des types principaux, parmi
lesquels on reconnaît des modèles italiques bien connus.
ha.^g. (?, PI- II, représente une fibule en fil de bronze,
dont la barre transversale est elle-même torducet l'arc élar-
gi et fortement recourbé se termine par un gros bouton*.
Dans une autre fibule la barre est solide et Parc, court et
large, a un étui à son extrémité pour recevoir l'aiguille {fig. 7).
Une autre fibule a déjà la forme générale de la boucle
{/ig. 8).
On remarque non seulement une grande variété de ty-
pes, mais aussi un grand nombre d'exemplaires. 11 y a éga-
lement de nombreuses perles de verre bleu et des fusaïoles
en argile, mais dépourvus d'inscriptions. Une grande hache
de {tr^fig. 10-, est aussi parfaite que si elle venait de sortir
d'une fabrique de ces objets.
Ces pièces sont aussi caractéristiques que bien d'au-
tres trouvées à Citania de Briteiros. J'ai remarqué, parmi
les objets appartenant à cette dernière station, une fibule
en forme de boucle, tout à fait semblable à celle que je viens
de citer [Jîg. 8).
Une autre ressemble assez à ce type connu chez nous
sous le nom de fibules romaines provinciales; l'arc en est
très ample, légèrement orné, s'élargissant vers la barre {Jîg.
u). Une autre est unie à la barre par un fil épais et l'arc ar-
' Une description plus parfaite de cet objet serait celle-ci: La tig.
6 représente une fibule en bronze dont l'aiguille est comprimée par un
ressort en fil de bronze tordu, enroulé autour de la barre transversale
et dont l'arc, fortement recourbé, se termine par un gros bouton. Noie
de M. Manias Sarmento.
r^.
û
1
Google
659
idi, deux fois replié à l'angle droit, se termine par une pla-
e discoïdale [fig. 12).
En général, on rencontre à Briteiros un plus grand
mbre d'objets précieux et artistement travaillés qu'on ne
irait mentionner de Sabroso, Je citerai, par exemple, une
ique de bronze estampé {peut-être le fragment d'une cein-
e) recouverte de cercles concentriques, de points, de li-
es tordues {fig. /J); et aussi une petite plaque ronde, en
ayant au centre une étoile entourée de tout petits grains
rsemés entre les rayons de l'astérisque {fig. 14)*.
On y remarque également des pièces en argent et en
>nze, par exemple une espèce de bande, aussi en argent,
lée de méandres; beaucoup d'épingles en bronze, surmon-
;s de grosses têtes {épingles à cheveux); le fragment d'un
nce anneau tordu en bronze (collier?); de grosses per-
de bronze ornées de ziguezagues: des perles de verre
u, plusieurs objets en fer enfin, le tout témoignant un état
ez avancée de civilisation, ou du moins un vaste com-
rce bien organisé.
Je ne prétends nullement dire que cette civilisation, dans
I ensemble, soit italique; il me semble, au contraire, que
jr certains produits, surtout céramiques, les modèles y
: été apportés de plus loin, de l'Orient. Les deux spéci-
ns les plus parfaits, que j'ai remportés avec moi, ont
?antage d'offrir les indices d'une influence identique, exer-
' La description exacte de cette ornementation la voici ; La [ikquc
recouverte de cordons et de plusieurs rangées de points, tantôt sim-
:, tantôt entourés de trois lignes qui s'entrecroisent dans l'inlervalie
:hacun d'eux. Cette ornementation qui se retrouve sur une plaque
bronze provenant de Sabroso, est assez commune dans les deux
ions préhistoriques, où on peut la voir sur des vases en terre cuite>
li bien que sur des pierres. Note de M. Martins Sarmenlo.
lyGoogle
66o
cée sur les deux stations, tant ils sont ressemblants. Le
fragment provenant de Sabroso {fig. i5) m'a été donné par
M. Sarmenro et il appartenait à sa collection; j'ai, moi-
même, ramassé l'autre dans les ruines de Citania de Bri-
teiros ( ûg. i6).
Ils sont tous les deux d'argile micacée, bien fine, lui-
sante, d'une couleur brun-jaunâtre, et si imparfaitement
cuite, que les surfaces de cassure présentent une teinte gri-
se, presque noirâtre, surtout celles de la pièce que j'ai re-
cueillie à Briteiros, On ne saurait décider si l'on a em-
ployé la roue à potier. Ces deux fragments sont ornés près
du bord. Celui de Briteiros laisse voir, entre plusieurs sil-
lons transversaux simples, une guirlande de feuilles surmon-
tée d'une bande contournée en spirales, ou plutôt un cer-
cle formé par des ss, se tenant les uns les autres.
L'échantillon de Sabroso (fig. i5) a ces ornements en s
dans une double rangée, et ils sont bien plus artistement en-
trelacés. Cette ornementation appartient à un type assez
répandu en Orient. Je renvois le lecteur à l'ouvrage de
Schliemann sur Mycènes où l'on peut voir, p. i63, ces deux
espèces d'ornements sur des frises de marbre, appartenant
au Trésor^ près de la Porte aux lions. L'ornementation en
spirales est, à peu près, la plus fréquente qu'on ait obser-
vée à Mycènes (Schliemann, p. 91, 1 10, 176, 365). De cette
ornementation dérive parfois la ligne simplement ondulée,
telle qu'on peut la voir sur un rebord, provenant de Bri-
teiros (fig. 18), mais surtout, et
nîères, sur le fragment d'un va
mica et recouvert d'ornements (^
fragment, sur lequel des lignes 01
talement et Interrompues de tei
chent par les bouts superposés.
ly Google
66i
D'autres échantillons nous montrent ces éléments de
la spirale, entièrement séparés et disposés en une zone de ss
redressés qui se touchent presque (Jig- ij)- Je n'ai trouvé
qu'exceptionellement des fragments de vases peints en brun
{fig- no.)
Je ferai remarquer également, que j'ai vu des lesserae^
provenant de Sabroso et de Cîtania de Briteiros, semblables
a celles rencontrées dans les anciens retranchements d'Alle-
magne, à Hissarlik et ailleurs, polies sur leur contour; elles
sont en partie assez petites, percées du non. Plusieurs de
ces pièces laissent voir encore les mêmes ornements qui
couvraient les vases dont les fragments ont servi à les fa-
briquer.
Devant ces objets il me semble impossible que l'on se
refuse à admettre que la civilisation des antiques oppidums
lusitaniens ait reçu de bonne heure l'influence de l'Orient.
Je ne passerai pas sous silence, quoique je n'y ajoute
pas une grande importance, qu'à Citania de Briteiros on
a trouvé aussi deux petites haches polies, tout à fait sem-
blables par leur forme à celles qui se rencontrent commu-
nément en Grèce et dans l'Asie-Mineure; l'une de ces ha-
ches est en fibrolithe et elle est plus décidément cunéiforme
que l'autre, laquelle est plutôt large et courte.
Des formes analogues sont assez nombreuses dans la
région méditerranéenne; il est donc seulement nécessaire
de déterminer qu'elle a été la chaîne qui relie de telles trou-
vailles. Il se peut aussi que ces instruments de pierre soient
plus anciens que les vases en argile. A Sabroso, du moins,
outre des haches en pierre polie et un grand nombre d'au-
tres objets de granité, polis de même, on a recueilli une
certaine quantité de fragments taillés de silex rubané.
En tout cas, laissant même de côté ces objets en pier
,ï Google
662
faut convenir que l'ornementation des blocs et celle des va-
ses indique une souche orientale commune, laquelle doit
avoir été plus ancienne qu'aucune influence romaine, qui ait
pu atteindre cette contrée. Cette autre influence peut avoir
été grecque. Si l'on songe, cependant, que la civilisation
qui nous a délivré de tels objets, en Grèce même, appar-
tient aux temps les plus anciens, et que selon toute proba-
bilité elle y a été importée de l'Orient, on ne sera pas
très loin de croire que la civilisation phénicienne ait pu trou-
ver moyen d'arriver Jusqu'à ces oppidums, bâtis sur les
collines de ces vaUées écartées de la région lusitanienne.*
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Lettre de M. Henri Martin
A propos de la note de M. Coelho — Sur les prétendues
relations des M acrocéphales if Hippocrate avec les Cimbres^.
Je prends contre M. Coelho la défense des anthropolo-
gistes, et je combats absolument la théorie de l'origine ger-
manique des Gmbres. Il y a bien des historiens latins qui
font des Cimbres un peuple germanique; mais ces histo-
riens vivaient cent cinquante ou deux cents ans après Ma-
rins et n'avaient jamais vu de Cimbres; ils avaient entendu
parler de quelques débris de ce grand peuple qui subsis-
taient mêlés aux Germains du nord. Les historiens corn-
temporains de Marius, au contraire, qui avaient vu les pri-
sonniers Cimbres dans les rues de Rome, les distinguaient
parfaitement des Teutons et les qualifiaient de Gaulois.
Les savants Scandinaves ne croient pas à l'origine ger-
manique des Gmbres. Quand on a étudié sur place l'archéo-
logie du nord Scandinave, il ne semble pas possible de ne
' Cette lettre a été envoyée après la clôture du Congrès par M.
Henri Martin, qui n'était pas présent à la 9^<°" séance, dans laquelle le
mémoire de M. F. A. Coelho fut lu par son auteur.
ly Google
664
pas reconnaître les Cimbres dans ce peuple de Tâge du
bronze qui paraît être arrivé dans le Nord huit à neuf siècles
avant l'ère chrétienne et qui a succédé en Scandinavie au
peuple des dolmens.
EJitre ce peuple de l'âge du bronze, si bien caractéri-
sé par ses armes, ses ornements d'or et de bronze, ses im-
menses trompettes de bronze etc., et le peuple aux armes
de fer et aux ornements d'ai^ent, c'est-à-dire les Scandina-
ves, il n'y a point de place pour autre chose. Les Cimbres
étaient des Celtes, des Gmmériens, arrivés dans le Nord en
même temps que les Bretons dans l'ouest. Les Gimmériens
ne sont pas un peuple imaginaire et tout ce que dit Héro-
dote est digne de foi.
Strabon ajoute un fait important à Hérodote, en nous
disant que les Gimmériens ont émigré du Pont-Euxin avec
leurs voisins ou alliés les Vénètes, Or on retrouve les Vé-
nètes à côté des Cimbres dans le Nord; à côté des Gaulois
Cisalpins en Italie; parmi les Gaulois Armoricains en Bre-
tagne; à côté de Kymris en Galles et en Basse-Écosse.
Le nom de Kymris paraît avoir été une dénomination
que les peuples Celtiques ont prise et reprise à diverses fois,
et il y a toute apparence que notre historien Amédée Thier-
ry a eu raison de l'identifier à ceux de Cimbres et de Gim-
mériens. i07;iri' paraît signifier «compagnon, compatriote.*
Communication de M. F. A. Coelho à propos de la let-
tre précédente.
M. Henri Martin n^a ni lu ni entendu lire ma com-
munication sur les Gimmériens, les Cimbres, etc.; il n'en
connaît que l'extrait très imparfait donné par M. Cartailhac
665:
dans son rapport sur le Congrès. Je ne m'explique pas com-
ment ce dernier savant, qui avait sous les yeux le manuscrit
de ma communication, a pu m'attribuer l'affirmation qu'on
ne sait sur les Qmmériens rien que «des fables répétées de-
puis Homère et Hérodote.» La réponse de M. H. Martin
aurait pris une forme bien différente, s'il connaissait mes ar-
guments; je crois que le savant historien ne répéterait pas
comme une preuve que les historiens contemporains de Ma-
rius qualifiaient les Cimbres de Gaulois; dans ce temps là
on ne distinguait pas encore les Germains des Gaulois, com-
me j'ai dit dans ma note.
,ï Google
666
lira en France avec profil l'excellent livre de M. d'Arbois
de Jubainville que je cire ci-dessus et la belle Revue celtique;
alors on ne répétera plus que les noms des Gimmériens,
des Cimbres et des Kymris ont une même origine.
En ce qui regarde les anthropologistes, je remarquerai
qu^il y en a qui ne seront pas disposés à accepter la défense
que leur offre M. Henri Martin. Je lis, par exemple, dans
la Revue Anthropologique, (vi°, p. 729) le passage suivant,
signé de la main du docteur E. Daily; «11 nous est impos-
sible de faire de ces Cimbres aux cheveux jaune-filasse, pres-
que blancs chez les enfants, au front haut, à la figure al-
longée, aux membres flexibles, autre chose que des Scan-
dinaves, des Germains, ou plus probablement encore, des
Finnois. •
Il y a dans le même volume de la Revue un article où
M. G. Lagneau fai remonter la déformation crânienne des
Deux-Sèvres, non aux Cimbres = Gimmériens de M. Broca,
mais aux Theiphales et aux Alains.
Je compte revenir encore une fois sur ce sujet et le
traiter avec plus de développement.
rcoot^ii
LES CIOAÏIOS
A PROPOS DE LA COMMUNICATION DE M. I». Batalllard
£ GITANOS D ESPAGNE ET LES CIGANOS D
M. F. Adolpho Coelho
I
Je n'ai aucunement l'intention de m'engager dans une
discussion avec M. P. Bataillard sur Pancienneté des Tsi-
ganes (j'emploie volontiers cette forme) en Europe et par-
ticulièrement dans la Péninsule ibérique. Une telle discus-
sion ne porterait que d'insignifiants fruits de ma part; je
ne pourrais faire à peu près que répéter les conclusions
auxquelles M. Miklosich est arrrivé dans ses Abhandlun-
gen et Beitrage. Pour la Péninsule ibérique je ne crois
pas tomber en erreur si j'affirme qu'aucun fait positif ne
nous permet de supposer que les Tsiganes y soient par-
venus avant le xv' siècle de notre ère. Il est possible de
faire bien des combinaisons avec des noms ethniques an-
ciens et modernes, avec quelques bribes de "^-''♦"='— ■*~
peuples disparus; mais il faut accepter la rè|
M. Miklosich: *La ressemblance du nom et (
ir.
„Google
668
de vie ne suffit pas pour prouver la parenté.»' Mais j'évite
une question qui doit être vidée plus tard sans doute et je
vais m'occuper de faits qui ne soulèvent aucune tempête
d^opinions.
M. P. Bataillard n'a trouvé dans ses vastes recherches
aucun ouvrage portugais sur les Tsiganes; la chose est très
facile d'expliquer: c'est qu'il n'y en a point. L'histoire des
Ciganos ou Tsiganes du Portugal, l'étude de leurs condi-
tions actuelles sont encore à faire. Les écrivains portugais
ne s'en sont occupés que très rarement, en se bornant tou-
jours à quelques observations d'occasion. Dans ces derniers
temps un professeur a publié un article sur l'origine des Ci-
ganos; mais, ignorant à peu près tout ce qu'il y a de sérieux
sur le sujet et ne tâchant pas d'étudier spécialement les Ci-
ganos, il s'est perdu dans une épaisse forêt de combinaisons
fantaisistes sur les Tsiganes et les Hyksos, les Pasteurs qui
envahirent l'Egypte sous la xv" dynastie*.
«Ce qui importe surtout, dit M. P. Bataillard, c'est que
les nouveaux investigateurs, tout en se mettant au courant
des travaux publiés i l'étranger et des questions nouvelles
qu'ils soulèvent, ne se perdent pas dans les généralités, mais
s'appliquent surtout k l'étude topique des Tsiganes du pays. »
C'est-là un excellent conseil, que j'ai tâché de suivre
d'avance. J'ai réuni quelques matériaux pour l'étude des
Ciganos de Portugal et je compte publier bientôt un mé-
* Ueber die Mundarlen, etc. iir, a. Je cite les trois premiers mémoi-
res avec la pagination du tirage à part; les autres avec la pagination
des Denkschri/len.
* W.OPosit'm$mo i, Porto, 1878, in 8*. Plus récemment un écrivain
espagnol a découvert les Gitanos dans la Bible {Gen., chap. 23) ! V, El
Folk-Lore andalu^ i, ïSS-ïSg. 11 est bien plus facile de faire de ces in-
ventions e^ue d'étudier patiemment les faits.
669
moire sur ce sujet dans le Boletim da Sociedaàe de Geogr
phia de Lhboa. Cependant je pense qu^il ne sera pas in
tile de donner dans le Compte rendu du Congrès un extn
de ce mémoire pour prouver du moins que l'intéressan
communication de M. Bataillard ne sera pas oubliée dai
mon pays. '
A la vérité, les faits que je vais rapporter n'ont p.
un intérêt particulier et surtout n'apportent rien qui puis
éclaircir les questions générales qui se rattachent aujourd'h
aux Tsiganes. Peut-être d'autres investigateurs seront-i
plus heureux que moi; mais les résultats négatifs même so
nécessaires à la science. Du reste j'avoue que je n'ai entr
pris ces recherches sur les Ciganos que dans l'intérêt (
mes études générales sur l'ethnologie de la Péninsule ib
rique.
II
La plus ancienne allusion aux Ciganos en Portugal :
trouve, si mon interprétation est exacte, dans une pièce <
Cancioneiro gérai de Garcia de Resende, imprimé à Li
bonne et Almeirim en i5i6-i5i6. C'est une compositic
satyrique, une espèce de tendon, dirigée par Aiîonso Valen
à Garcia de Resende, et accompagnée de la réponse de c
lui-ci. Le collecteur du Cancioneiro y est grotesquemei
comparé à une grecque ivrogne qui enfante entre les toi
neaux d'un cabaret;
Parecejrs hum pouco o farto
preguador da ryda etema,
Grega bebada, de parto,
antre cubas cm tauema-
,ï Google
670
Les Tsiganes furent nommés Grecs dans la Péninsule
ibérique', leur goût pour l'ivrognerie est connu*; ils vivent
beaucoup dans les cabarets: je crois donc que grega signi-
fie cigana dans ce passage du Cancioneiro geral^. GÏI Vi-
cente nous présente les Ciganos comme originaires de la
Grèce dans sa Força dos ciganos, représentée à Evora, de-
vant la cour de Dom JoSo iii, en iMi:
Mantenga scnhoras y rosaz y ricaz
De Grecia simnij hîdalgaz pior Duz. -
Nuestra ventura que fiie contra nui,
Por tieiras estraSas nuz ttene perdidaz.
Cette farce est un petit tableau de la vie des Gganos,
aussi fidèle que tous ceux que dessinait Gil Vicente.
Les Ciganos y demandent l'aumône et diverses pièces
de toilette:
La Virgen Maria uz hapa dichucus,
Dadnuz limuzna, seÇuniz pudruzuz,
Tantico de pan, hard la tnezura-
Dadme una camiza azucal colada
Nieve de cira, firmal preciuzo.
Dadme una saya, seflur graciuzo,
Lirio de Grecia, mi cielo esirellado.
Sefiura, seîiura, dadme un tocado,
Antucha del cielo, sin cera y pavilo.
' V. le passage de Passa cite par Miklosîch, Abhandl,mt 4S>
' V. Fr. Michel, Le Pays bas^M^ p. iSg etc.
' J'ai déjà fait connaître cette interprétation en 1877.
,ï Google
671
Elles enseignent à faire des sortilèges et disent la b
ne-aventure:
Seffuraz, quereiz aprender i hechizo,
Que sepais hacer para muchaz cozaz !
Otro hechizo,que pozaiz mudar
Ëa voloniad de hombre cualquiero,
Por firme que esté con fe verdadeîra,
Y Tuz )o mudeiz i vuestro mandar.
Muztra la mano, rucifla,
Lirio de hermosura,
Dîne he la buena ventura.
Muitra ca, sefiura mia,
Ora mustra acitia, adRa.
Qu^ mano, que, sîffo, que Aurez I
Que dama, qui roza, que perlai
Por mi vida que por verla
Olvidë I02 miz amurez.
Veamoz que dice el sino,
El recado que te vino
No lo créas, aima mîa,
Que otra raas alegria
Te viene ya por camino.
Dunniendo tu, fresca ruza,
Te viene el bien por la mar,
Luego tienez el mirar
De doocella muy dichuza*.
Dans la farce figurent aussi quatre ciganos qui pro]
< Comjk les buenaventwat publiées par Demàfilo dans La Encii
pedia,aîlov,n."i-jel3i. Sevilla, [881, in 4\ On verra par là que
Vicente reste bien pris de ta réalité.
C.R. 4S
,ï Google
673
sent l'échange des bêtes de somme contre d'autres, en re-
cevant de Fargeiit par dessus le marché, ce qui est un trait
caractéristique des Ciganos.
Cual de voz otroz, sefiures,
Trocarâ un rocîn tnio,
Rocin que hubo de un judfo
Ahora en pâscua de florez,
Y tengo dos especialez
Caballoz buenoz que talez.
Sefiures, yo trocaré un potro
Que tengo, por cualquîer otro,
Si me volvteis mil realez.
Enfin les Ciganos et les Ciganas de Gil Vicenie dansent
et chantent.
Il y a encore d'autres allusions aux Ciganos dans les
écrivains portugais du xvi* siècle. L'historien JoSo de Bar-
ros nous en parie à propos des Calandares de l'Inde'.
Malgré les lois qui au xvi siècle ordonnèrent l'expulsion
des Ciganos du sol portugais', ils y persistèrent, surtout
dans la province d'Alemtejo. Les Constitutions s}'ttodales
de la diocèse d'Elvas, de i633, prouvent leur existence dans
< •N5o entrâo (os calandares) nas cidades, mas ao modo dos Cy-
ganos que andam nesta parce de Europa, pousâo fora do pouoado, e
alli Ihe traz a gente do pouo sua esmola. E quando assi anda grande
nutnero d'elles, elegem hum a que obedecera A maneira que os Cyga-
nos fazem à seu Conde. Décoda vi, 5, 5, éd. 161 j.»
* Alvard du i3 mars i5a6, loi des Cônes du 26 novembre i538,
Orden. nov. liv. v, rit. 69; loi du i7aoQt iSi?; Aivarddjx 14 mars iSyS;
loi du i3 septembre i6i3; loi du aS août iSga, etc.
,ï Google
6tÎ_
cette partie du Porii^al qu'ils habitent de préférence encore
aujourd'hui. Mais ils allaient sans doute jusqu''aux provin-
ces du nord. Les Constitutions de l'archevêché de Braga,
de 1639, déclarent que ceux qui prient les Egypcios de leur
dire la bonne-aventure pèchent très gravemenL
Je passe sur d'autres mentions des Cïganos qu'on lit
dans les écrivains et dans les lois du xvu' et du xvin' siè-
cles, époque où nous les voyons employés dans les tra-
vaux de la reconstruction de Lisbonne', et j'arrive aux Ci-
ganos contemporains, que l'on rencontre en masse seule-
ment dans la province d'Alemtejo, d'où ils sortent pour
faire des excursions dans les autres provinces du royaume,
surtout dans l'Extremadura. Il n'y a pas encore longtemps
qu'un groupe de Ciganos portugais vivaient à Lisbonne, d'où
ils sont disparus.
Je n'ai pas encore pu étudier sur place les Ciganos
d'Alemtejo, dont j'ai rencontré souvent quelques-uns, par
ci, par là; mais un ami intelligent et zélé à recueilli pour
moi à Elvas beaucoup d'informations qui les regardent, y
compris un vocabulaire de 220 mots de leur langue.
Les Ciganos d'Alemtejo ressemblent beaucoup à ceux de
Gil Vicente; ils ne sont pas des métallurges et s'occupent
surtout à acheter, vendre et échanger des bêtes de somme.
Ils vivent généralement dans des conditions très misérables;
ils ne possèdent ni tentes, ni chars, quoiqu'ils n'aient pas
de demeure fixe. Cependant, j'ai rencontré un petit groupe
(deux hommes, deux femmes et trois enfants) à Almada,
près de Lisbonne, lesquels s'étaient improvisé une tente avec
une pièce de toile contre un mur.
Aujourd'hui la buena-dicha est tombée beaucoup de son
* Aviso de i5 mai 1756.
-,cp^.
674
ancienne importance dans l'esprit des paysans; mais les
' sortilèges rapportent encore quel^^ue chose aux Ciganas.
Celles-ci, cependant, s'occupent surtout à voler des mou-
choirs, des pièces de toile, etc., dans les magasins et les
boutiques. Les Ciganos, de leur part, volent surtout des piè-
ces de bétail, des volailles et des bêtes de somme. Ils ne
sont pas bons éleveurs d'animaux; mais ils sont regardés
comme d'excellents connaisseurs. Ils ne se distinguent par-
ticulièrement ni par le chant, ni par la musique. Ils ne font
généralement que répéter les chants populaires du pays ou
ceux de TEspagne. Ils prouvent leur indifférentîsme religieux
en baptisant plusieurs fois les mêmes enfants; ce n'est pas
faire leurs enfants des chrétiens, mais plutôt recevoir les
cadeaux des parrains qu'ils ont en vue.
Le mariage a encore la forme du rapt et n'est pas
confirmé d'après les lois du pays. On parle des cérémonies
particulières qui s'y rattachent; mais je n'ai pu découvrir
s'ils ont encore la coutume décrite par M. P. Bataillard,
p. bo I .
Ils parlent le portugais, Tespagnol et le rumanoy qui n'est
qu'un mauvais espagnol parsemé de mots particuliers, pour
la plupart d'origine tsigane. A juger par quelques textes de ce
langage, recueillis par M. Pires, ils ont perdu même les pro-
noms et la plupart des particules tsiganes, que l'on rencontre
encore dans le langage des Gitanos. J'ignore aussi s'ils ont
également oublié les numéraux tsiganes. Le langage des Ci-
ganos représente donc un étage encore plus avancé de la
ruine de la langue tsigane primitive, que le gitano.
Ils se désignent eux-mêmes par les noms de cala, calé,
m., cfl///, f., rom (M. Pires n'a recueilli que le fém. rom().
Les étrangers, les non-Cîganos sont désignés par le mot
jambo.
,ï Google
675
Les 220 termes de leur langage que j^aî étudiés se ré-
partent de la manière suivante:
142 se retrouvent dans le gitano, en général sans difté-
rence considérable de sens ou de forme';
3i sont dérivés de mots espagnols ou portugais;
3 sont des mots portugais dont le sens s'est modifié;
44 sont d'origine inconnue ou incertaine pour moi jus-
qu'à présent.
Pour être moins incomplet en ce qui regarde la lan-
gue, j'ai étudié une source indirecte. On sait que dans l'ar-
got de beaucoup de pays européens se sont introduits plu-
sieur mots d'origine tsigane. Pott et Miklosich ont traité
scientifiquement ce sujet. J'ai recueilli un assez considéra-
ble vocabulaire de l'argot portugais et j'y ai reconnu une
vingtaine de mots tsiganes. Ces mots se retrouvent pour
la plupart dans le gitano, et à peu près dans la même for-
me. Le nom même de l'argot portugais est d'origine tsiga-
ne: c'est calao, git., calô, calli, igitano, gitana», ca/o', la lan-
gue des Gitanos.
Les faits linguistiques permettent donc de conclure que
les Ciganos sont une branche des gitanos, peut-être alimen-
tée par des migrations plus ou moins nombreuses à diver-
ses époques.
J'aurais encore à dire quelque chose sur les Tsigane
chaudronniers et les Tsiganes conducteurs d'ours qui vier
nent jusqu'en Portugal; mais je préfère présenter en déta
quelques-uns des faits linguistiques dont je viens de parlei
• Je me fonde seulement sur les vocabulaires de 'Mavo fi de Bo
,ï Google
676
A.. Mots da mmanlio d'origine Inoertalne
Ackaran, ad). Fâché.
Achochinar, v. a. Louer.
Alsiplesis, s. m. pi. Boutonnières.
Aricankas, s. m. pi. Boutons.
Ascuno, s. m. Abyme.
Baheri, adj. Arabe.
Bea, s. f. Aide.
Cajuqai^ s. f. Lune'.
Callardi, s. f. Saucisse faite avec
de la farine.
CamelU, s. f. Boutique.
Chicubelar, v. a. Voler,
Choriar, v, Significa
Chubelar^ v. a. Donner.
Chuga. Signifie ai
Churon, s. m. Arbre. En port. cAo-
râo signifie saule pleureur.
Colisarar, v. n. Passar.
Combisarar, v. a. Recommander.
Cralia, s. f. Orange.
Curajai, s. m. Prêtre.
Emd, s. f. Ânesse.
Furata, Signification incertaine.
Gallardi, s. f. Poudre à canon'
Gorobon, s. m. Cordon.
Gui'f, s. m. Lard.
Gustipeni, s. f Vol.
Jambo, s. m. Homme, celui c
n'est pas Cigano.
Magrena, s, f. Jument.
Maniscobar, v. a. Décompter.
Mitlen, s. m. Orange.
Morchada, s. f. Anesse.
Mulla, s. f. Battage du blé.
Niscobelar, v. a- Décompter^.
Ojaca, adj. Joli^ beau.
lOlipanda, s, m. Soleil.
Patuque, s. m. Bât.
Péri, s. f. Béte de somme.
Pirar, Voler.
Pirabaor, s. m. Larron.
Posottô, s. m. Noria.
Pusca, s. f. Jaquette.
Rebrandini, s. î. Liqueur.
Satalla, s. f. Olive.
Taripeha, s. f. Prison.
' Git, cajuqui, sourde. Mayo.
* Git. gallardi, noire ?
' Ce mot se rattache peut-être au git. nicoietar, sicobelar.
677
B. Hota dn ramanlio derlvéa de mots eapa^ola on portngala
:. Dérivés avec le suffixe sarh
2. Dérivés avec le suffixe me,
men':
Choùmi, hutte, port, choça, esp.
Abaixisarelar (nabaixisar), abais- choja.
ser, port, abaixar. S(»M6ri>n^,arbre,port.elesp.som-
Ajustisarar, ajuster, port, et esp. bra, ombre.
ajustar. Tardimen, tard, après-midi, port.
Desawanarisar, démarrer, port. et esp. tarde.
et esp. desamarrar.
Ladrisarelar,{<tladrisarar), port, 3. Dérivés avec le suffixe uncAo*:
et esp. ladrar.
Seguisarar, motsonner, port, et Coniraruncho, contraire, port, et
esp. segar. esp. contrario.
Habuncha, fève, esp. haba, port.
b) suBSTAm-iPS : /ava.
Mandiluncbo, tablier grossier,
port, et esp. mandil.
Mesimcho, mois, port, tnej, esp.
mes.
Montuncho, port et esp. monte.
Pastorchuncho, pasteur, port, et
esp. pastor.
Segabrimcho, moîsonneur, port,
et esp. segar.
Abertisara,
ta, esp. abieria.
Basisaro, coupe, port, et esp. ba-
cia.
Huertisara, jardin potager, esp.
fiuerta.
Labraoresa, laboureur, esp. la-
brador, port, lavrador.
Raisaro, (•rrr'Mro), rivière, port Abriluncho, avril, pon. et esp.
et esp. no.
abril.
Tempisaro, temps, port, tempo, Jwuîuncho, juin, esp, jutiio, port
esp. tiempo. junko.
' Sur ce suffise v. Miklosich, Abhandl, x, 480-481.
» Id. X, 445.
' Ce suffixe est d'origine romaine; il se retrouve dans le cal<S ou
.ïGoOgICj
']r
Juliuncho, juiUet, esp. julio, port.
julho.
Agosiuncho, a6ut, port, et esp.
agosto.
Stttmbruncho, septembre, port.
setembro, esp. seliembre.
Octubruncho, octobre, port, outu-
bro, esp. octubre.
Novembruncho, novembre, port,
novemltro, esp, ttoviembre.
Decembruncho, décembre, port.
de^embro, esp. dUitmbre.
5. Mots dont le sens est modifié.
Èicha, couleuvre, port, et esp. bi-
cho, port, bicha.
Currar, donner asile, port curral,
esp. corral, port, curro.
Grupo, volume, port, et esp. gru-
po.
4, Dérivés avec le suffise uno,un:
Ferbruno, février, pon. /evereiro,
esp. febrero.
Airun, air, esp. aire, port. ar.
Les noms de mois qui complètent la liste ci-dessus
sont:
Eneruno (git. inerin), março (port, março) et maio (port.
maio, esp. mayo). Les Ciganos ont donc perdu tout à fait
les noms particuliers des mois que les Gitanos conservent
encore pour la plupart, comme quirdaré, mars, alpatidy,
quiglé, avril, quindaîé mai, etc. Les nouvelles formes sont
dérivées en partie de l'espagnol, en partie du portugais.
679
C Moto tolganas de l'argot portoffals
Adicar, v. a. voir. Gitano: dicar,
V. a. ver, percibir, acechar.
Mayo.Miklosich,^A(iniJ/.vu,
301. Origine indienne.
Artdo, s. m. pain. Arti/e au itiii*
siècle. Giiano harton, m. pain,
arti/ero, m.BouIaoger.Miklo-
sicli, Abhandl. m, 41. Origine
grecque.
Avelar, aveifar, v, a. avoir, tenir.
Gitano: abelar, v. a. tener,
poseer. Probablement du cas-
till. haber, port, haver. Cp.
cependant gît. abillar, v. n.
venir, aeudir; racine sanscri-
te ap obtenir. Miktosich, Ab-
handl. VII, 170-171.
'iBani{a, s. f. guitarre. Gitano:
basnôy s. m. gallo, Bachani,
s. f. guitarra. Miklosich, Ab-
handl. VII, 176. Origine in-
dienne.
Basta, bâta, s. f. main. Gitano:
balt, baste, s. f. mano. Mayo.
Miklosich, Abhandl. vin, 92.
Origine indienne.
Calcorrear, v. n. courir. Calcos,
s. m. pi. Souliers. Gitano:
calcà, calcorro, s. m. lapato,
calzado. Mayo. «Die Oxytoni-
rung weiset auf niclit-span.
Urspning.» Cp. gr. xc£)t^.
Miklosich, Abhandl. iii, 41 (se-
parata).
Churinar, v. a. Donner des coups
de couteau. Gitano: churi,
s. f. cuchillo, putlal. Mayo.
Miklosich, Abhandl. vu, 197.
Origine indienne.
Clises, s. m. pi. Yeux. Gitano : di-
se, s. m. ojo, aguiero. O dise
ya pandureri, el ojo de la
cerradura ; edisar, ojetear,
agujerear; herir los ojos.
Mayo, Du grec moderneuXitât
Miklosich, Abhandl. vu, 241.
Dabo, s. m. Père. Gitano: dadâ,
5. m. padre. Miklosich, Ab-
handl. vit, 198. Origine in-
dienne.
IGajo, s. m. Homme, bon vivant,
sujet, libertin, espiègle. Gita-
no: gâché, gachô. Varon,
mancebo. Mayo. Miklosich,
Abhandl. vu, 111-212. Origine
indienne. Mais cp. l'iez, Ety-
mologisches Worterbuch, i,
195. Baist, Zeitschri/l /Or
rom. Philologie v, 247.
Grane, s. m. cheval. Gitano : gras-
té, s. m. caballo, grasti, s. f.
jaca, grasni, s. f. yegua.^rii,
s. m. bestia. Mayo. Bohém.
grec : grasini, grasni, gram.
-pi"
jument Miklosich, Abkandl.
vii,3i6. Origine arménienne.
ImIo, s. m. or, argent. Bohém.
grec: lova, monnaie; lové,
argent. Miklosich, Abhandl.
VI", 7-
Mane\, s. m. homme, maneja, s. f.
femme. Gitano : manu, s. m.
hombre, varon. Miklosich. vlfr-
kaiiJl. riii, lo. Orig. indienne.
Mistico, adj. bon, excellent, beau,
Gitano : misiô, s. m. bien, bé-
néficie, conveniencia, adv.
bien, bueno, conveniente-
mente. Miklosich. Abhandl.
viu, >S. Origine indienne. Le
mot de l'argot port, fait pen-
ser tout naturellement au
mot littéraire myslico, fr.
mystique.
Packacha, i. f. terme bas, vulva.
Gitano: packi, s. f. virginidad,
virgo. Mayo. pachibar, hon-
rar, espackilar, desflorar. Mi-
klosich, Abhandl. vui, 33-34.
Origine indienne.
Pâme, s. m. argent. Gitano: ;»ar-
nâ, adj. blanco, parné, s. m.
dinero.Mayo. Miklosich, ..4^-
handl, VIII, 3i. Origine îd-
dienne.
Piar, V. a. boire, piela, s. f. ivres-
se, pio, adj. ivre. Gitano:
piyar, V. a, beber. Mayo.pilé,
pilli, adf. e brio, ib. Miklosich,
II, 4, 24, 36, 54, 61, 65, (sep.)
VIII, 44-45. Origine indienne.
Pirar-se, v. refl. S'en aller, s'en-
fuir. Gitano : pirar, pirelar,
V. n. andar, caminar, pisar.
Mayo. Miklosich, Abhandl.
viu, 40-41.
Pocachim, s. m. mousquet. Gita-
no : pusca, s. f. escopeta,^nu.
câ, pruscatiné, i. m. pistola,
cachorillo. Miklosich, vin, 5
52. De l'allemand ^chse, an
haut-allem., par l'intermé-
diaire des langues slaves (:
be puska).
Raso, s. m, prftre. Gitano: ara-
jay, s. m. fraite, erajay,
sacerdote. Mayo. Ce mot de
l'argot port, se rapproche
plus de la forme du bohémien
Scandinave (rajAo)que de cel-
le du gitano. Miklosich, Ab-
handl. VIII, 54. Origine indien-
ne douteuse.
Ratanhi, s. f. Passe -partout, faus-
se-clef. Gitano : retuhi, s. f.
boca, abertura, agujero. Mayo
bohém. grec rutuni, f. nez.
grec mod. pouâoùvi, grec anc.
fw&ftiv. Miklosich, Abhandl. 1.
Rupim, rupino, adj. riche. On ne
rencontre pas ce mot dans
le gitano; mais les formes des
autres dialectes nous font
croire à son origine tsigane,
malgré les différences de
sens; grec rup, argent; rou-
main, rup, rupino, adj. d'ar-
gent; hongrois nipti, rupuno.
iïGoo'2
adj.; allem. rupp, argent, vantes rae font encore penser
thaler, ruppino, adj. etc. Mi> ici à l'origine tûgane: rou-
klosich, Abhanàl. ym, 5S. main ruf$, être méchant; hon-
Rustir, V. a. devorar, corner. Je groisruse/, être colère, scand.
ne trouve aucune forme cor- roshto, ad), colère, etc. Miklo-
respondante dans le gitano; sich,^frA£ini/.viii,58.0rigine
mais les formes tsiganes sui- indienne.
,ï Google
f
NOTE SUR LA HATUBE HINÂRALOaiQUi:
DE MERRE TROUVÉS EN PORTUGAL
M. A. Ben-Saude
Par rinvitation de M. Delgado nous avons examiné les
principaux instruments et autres objets de pierre qui font
partie de la galerie d'anthropologie de la Section Géologique,
dans le but de déterminer la nature des substances dont ils
sont fabriqués.
Pour obtenir un élément de plus qui puisse aider l'ar-
chéologue à juger des relations commerciales des peuples
primitifs du pays, outre la nature de la matière première,
nous avons cherché à déterminer, autant que possible la
provenance probable des matériaux employés pour la fa-
brication de ces outils et ornements.
Malheureusement des difficultés sérieuses nous ont em-
pêché très souvent de donner à nos déterminations l'exacti-
tude désirée. D'abord l'impossibilité de mutiler des objets
précieux et quelquefois uniques, pour obtenir le matériel
nécessaire à Pétude, nous force souvent de baser la déter-
mination seulement sur l'inspection à simple vue.. En se-
cond lieu, la connaissance très imparfaite que nous avons
,^-^^ 1
683
de la pétrographie et de la minéralogie du pays nous em-
pêchent de fixer la provenance de leur matière première.
Il nous est donc impossible de résoudre complètement
les problèmes et nous nous limiterons à l'exposé de quel-
ques observations qui puissent nous mener de quelques pas
vers leur résolution.
Amphibolites. — Parmi les roches qui ont été le plus
souvent appliquées à la fabrication des haches, prédominent
de beaucoup les amphibolites. Ces roches ont généralement
une couleur vert foncé. On peut distinguer des variétés où
les éléments sont grenus et dans lesquels on observe à la
simple vue des aiguilles d'amphibole jusqu'à 3""" de lon-
gueur ou plus rarement des grains de grenat rouge entouré
par une matière d'aspect homogène de couleur verte. D'au-
tres variétés de la roche deviennent parfaitement crypto-
crystallines, sans qu'on y puisse observer aucun des éléments
ni à l'œil nu ni à la loupe; l'étude microscopique a cepen-
dant montré que ces roches, qui par leur couleur rappellent
des serpentines si communes dans le nord du Portugal, doi-
vent être considérés comme des amphibdites.
Une lame mince prise dans une hache trouvée à Cas-
caes, d'aspect apparemment aphanitique, se montra compo-
sée de petites aiguilles d'amphibole verdâtre, quartz, apa-
tite, ilménite, titanite (tîtanomorphite), hématite et chlorite
en abondance. Pour bien reconnaître les éléments il faut
travailler avec des objectifs d'un grossissement assez fort.
L'amphibole en de minces cristallites forme des grou-
pements stellaires, tandis que les individus de grandeur plus
apréciable et quelquefois isolés présentent des traces du cli-
vage prismatique.
Le quartz, dans une quantité relativement considéra-
Google
ble, remplit les vides laissés par les cristaux d'amphibole,
n'étant remarquable qu'à cause de l'absence presque abso-
lue d'inclusions. Parmi les particules de quartz peut-être se
trouve-t-il quelques petites quantités d"orthose, ce que nous
ne saurions décider par l'étude optique, à cause de l'extrême
petitesse des éléments de la roche.
Un des éléments qui au point de vue microminéralo-
gique attire le plus l'attention est sans doute l'ilménite. Sa
grandeur est de o^^ioa à o^^iOÔ. Les sections représentent
souvent soit des hexagones soit des figures triangulaires ou
allongées, polygones dus aux sections de formes du système
rhomboèdriques. Autour de l'ilménite se trouve une matière
jaunâtre à laquelle M. von Lasaulx donna le nom de Titano-
morphite, mais qui étant un produit de transformation de
l'ilménite, doit d'après des études plus récentes être rap-
porté à la titanite.
La chlorite d'un vert sale est formée probablement par
la transformation de l'amphibole \ elle montre dans la lumière
polarisée des phénomènes de polarisation d'aggrégat.
L'hématite, substance aussi de formation secondaire,
s'est déposée dans les vénules de la roche en de petites la-
melles quelquefois hexagonales.
Les localités qui nous ont fourni des haches d'amphi-
bolite sont: Lapa Furada, Porto Covo (Gascaes), Furninha
(Péniche), Casa da Moura, Licea, Palmella, Carvalhal, Monte
Abrahao et Niza.
Il est aujourd'hui impossible de déterminer exactement
la provenance de ces roches; je connais des échantillons de
divers endroits du pays, de Bragança et de différentes lo-
calités dans l'Alemtejo, où les schistes cristallins se trouvent
laidement représentés, se rapprochant beaucoup de ces ro-
ches,
zPcMl^i»0'^IC
685
Quoiqu'il ne soit pas possible, de fixer exactement les
localités, il me semble hors de doute que ces matériaux pro-
viennent du pays.
Micaschiste. — Nous possédons seulement une plaque
de cette substance, de forme trapézoïdale et perforée à l'une
de ces extrémités.
La roche est composée de petits feuillets de mica
noir et de mica blanc et de granules de quartz presque im-
perceptibles à la simple vue. Ce micaschiste se trouve dans
un état avancé de décomposition et présente une schistosité
bien prononcée. On l'a recueilli dans la grotte de Furmnha
(Péniche).
Il me semble très probable que cette roche provienne
du pays, quoiqu'il ne soit pas possible de déterminer la lo-
calité avec précision.
Ardoise. — Il se trouve dans notre galerie préhistorique
quelques plaques d'ardoise noire de forme analogue à la pré-
cédente, percées aussi de trous de suspension à leurs extré-
mités et couvertes de dessins exécutés avec un instrument
pointu. Les caractères macroscopiques sont absolument ana-
logues à ceux de quelques ardoises qui se trouvent dans di-
verses régions du pays. Les fouilles de Casa da Moura les
ont mises au jour.
Granités. — Les instruments de granité sont assez ra-
res. Une hache de cette roche de grain moyen, trouvée dans
une des grottes de Cascaes, montre la composition suivante:
orthose, quartz, quelques grains d'albite, peu d'apatite et
magnétite.
Tandis que la plupart des roches employées pour fa-
r
logle
686
briquer les instruments trouvés dans les grottes de Cascaes
proviennent, probablement, de la Serra de Cintra, ce gra-
nité montre plutôt des ressemblances avec les granités an-
ciens du nord du pays, quoique le mica y fasse défaut.
La collection possède une hache, trouvée aux environs
de Viseu, fabriquée d'une granitite de grain fin et une autre
de la même roche plus grenue, trouvée dans la grotte de
Furninha (Péniche). Il nous est impossible d'en déterminer
la provenance.
Diorites. — Parmi les haches de Barcarena on trouve
quelques unes qui sont fabriquées d'une roche dioritique.
La roche est principalement composée de nombreux
individus de plagioclase de très petites dimensions, conte-
nant des aiguilles d'amphibole plus grandes, atteignant jus-
qu'à 8°"°, qui donnent à la roche un aspect porphyrique.
L'amphibole est généralement bien limité.
L'analyse microscopique d'un petit fragment m'a mon-
tré que le plagioclase se rapproche par ses extinctions de
la labradorite.
L'amphibole est assez transparent dans des sections
minces. Il présente une couleur brune de tabac et étudié à
l'aide du nicol inférieur nous a montré l'absorption caracté-
ristique dans l'ordre commun de
c>b>a
Les couleurs de polarisation sont assez vives et les sec-
tions se présentent quelquefois composées de deux indivi-
dus différents liés par l'orthopinacoïde selon la loi commune
de l'hémitropie. La magnétite en petits octaèdres entre aussi
dans la composition de la roche. Nous regardons comme
des produits secondaires de petites particules irrégulières
y-V
D,oiiiz,db,Goo<^le
d'épidote ayant le polychroïstne caractéristique, la chlorite
d'un vert sale donnant la polarisation d'aggrégat et les oxy-
dations de la magnétite.
Cette roche par son aspect extérieur aussi bien que
par sa composition minéralogique ressemble beaucoup à cer-
taines diorites ou porphyrites dïoritiques qui se trouvent
dans la Serra de Qntra.
Basalte.— Les variétés compactes de cette roche ont été
souvent appliqués à la fabrication des haches, lesquelles sont
généralement couvertes d'une croûte cendrée due à la dé-
composition du basalte. Au-dessous de cette substance su-
perficielle se trouve le basalte, de couleur noire bleuâtre, à
l'état de fraîcheur.
Dans deux lames minces que j'ai fait faire de deux frag-
ments de ces haches j'ai constaté qu'on avait affaire à des
basaltes feldspathiques typiques. Elles se composent d'un
plagioclase, d'augite et de magnétite, contenant aussi quel-
ques produits ferrifères résultant de l'altération de la ma-
gnétite. Le plagioclase semble devoir se rapporter au la-
brador.
Quelques sections de l'augite se présentent régulièrement
limitées par le prisme et le clinopinacoïde ; il montre de vives
couleurs de polarisation et contient quelques inclusions de
verre brunâtre. Ni l'une ni l'autre de ces lames n'a permis
de constater l'existence d'une base amorphe, à l'exception de
ces inclusions dans l'augite. Ces haches de basalte ont été
trouvées à Licea et Pedra da Moura (près de Bellas). Dans
la dernière localité on a trouvé aussi de nombreux cailloux
roulés de la même substance.
Il ne saurait y avoir de doute que ces morceaux de
basalte ont été apportés des proximités même des endroits
CR. 47
,.p|o
oogle
688
où ils ont été trouvés, puisque le basalte y abonde, ayant
des variétés qu'on ne saurait distinguer de celles qui ont
fourni le matériel pour ces haches.
Calcaire métamorphique, — Des roches provenant
par métamorphisme de certains calcaires ont été souvent ap-
pliquées à la fabrication d'instruments néolithiques. Leur cou-
leur est généralement cendrée, plus ou moins foncée, et quel-
quefois même noire La roche fraîche est assez dure (dureté
du feldspath, à peu près), généralement très compacte, ne
laissant apercevoir, à la simple vue ni à la loupe, aucun des
éléments cristallins qui la composent. Quelquefois on y ob-
serve des parties formées de bandes diversement colorées
qui lui donnent un aspect schistoïde.
C'est seulement dans de rares exemplaires qu'on re-
connaît à la loupe quelques petits grains d'un vert clair par-
fois un peu saillants, parce qu'ils résistent mieux à la dé-
composition: d'autres fois ils montrent, mais rarement, la
forme d'un dodécaèdre régulier. L'étude des lames minces
de ces roches m'a montré qu'elles se composent principa-
lement, outre le carbonate de chaux dans des quantités ttés
diverses jusqu'à faire défaut, d'une substance incolore ou
un peu verdâtre. Ces éléments, lorsqu'ils sont individuali-
sés extérieurement, donnent souvent des sections hexago-
nales ou carrées du dodécaèdre. Cette substance se pré-
sente isotrope dans la lumière polarisée. Sa forme et ses
propriétés optiques nous portent à la considérer comme
appartenant aux grenats.
Un autre élément d'une couleur verte plus accentuée,
aux sections rectangulaires et montrant une biréfringence
assez accentuée, des extinctions parallèles aux limites régu-
lières, laisse voir dans quelques rectangles, sans action sur
,ï Google
/
la lumière parallèle, la croix noire des cristaux uniaxiaux
lorsqu'on les observe à la lumière convergeante. Observés
à l'aide du mica */i d'onde, j'ai pu déterminer que la biré-
fringence était négative. Ces propriétés nous ont fait rap-
porter cette substance à la vésuvianite. Entre ces éléments
on trouve assez régulièrement de petits grains de quartz
dans la roche, et assez irrégulièrement distribué un miné-
ral fibreux incolore présentant de vives couleurs de pola-
risation, avec des angles d'extinction considérables que je
crois devoir rapporter à la wollastonite.
Il y a encore deux substances qui donnent à la roche
la couleur sombre. L'une se volatilise par l'action de la cha-
leur et appartient par conséquence à quelque matière or-
ganique. L'autre, par sa couleur dans la lumière réfléchie,
aussi bien que par sa forme cristallographique, doit être
rapportée à la pyrite de fer.
Les fouilles qui ont fourni les nombreux instruments
fabriqu(is de ces roches sont celles de Porto Covo, Cas-
caes, Licea, Palmella, Serra de Monte-Junto, Carvalhal,
Columbeira, Niza et Casa da Moura.
L'analogie absolue qui existe entre cette matière premiè-
re et certains calcaires métamorphiques de Cintra nous donne
la certitude qu'elle a été apportée de ces montagnes. On y
trouve les assises de calcaire jurassique, dont la classifica-
tion stratigraphique a été récemment vérifiée par notre sa-
vant collègue M. Choffat, Ces calcaires sont métamorphosés
par l'action des roches intrusives qui les traversent en nom-
breux filons parfaitement caractérisés.
J'ai été convaincu par l'observation, que dans quelques
endroits ces calcaires silicifiés passent plus ou moins abrup-
tement au calcaire non altéré, lequel renferme des fossiles
qui ont servi à l'ancien chef des travaux géologiques du
r
jDgIe
690
royaume le général Carlos Ribeiro, et récemment à M. Chof-
fat, pour déterminer son âge géologique.
J'ai été heureux de constater que beaucoup de ces fi-
lons, et justement ceux qui ont produit le métamorphisme
de ces calcaires jurassiques, sont constitués par des granités
parfaitement caractérisés ou par des variétés porphyroïdes
de la même roche '.
Calcaire. — Notre collection possède encore une hache
de calcaire jurassique sans altération, contenant de nom-
breux restes de fossiles, analogue aux calcaires de Cintra,
Outre des haches nous possédons aussi quelques cylindres
de dimensions diverses fabriqués de calcaire jurassique que
M. Emile Cartailhac a considéré comme des symboles reli-
gieux.
Comme rareté nous avons encore à mentionner une ha-
che de marbre cristallin et une sphère de la même substance,
trouvées à Bellas. Le calcaire qui a servi à la fabrication
de ces deux objets est parfaitement analogue au marbre
grossièrement cristallin de Sao Pedro, dans la Serra de
Cintra.
Quartzite. — La collection anthropologique possède, de
la Serra de Monte-Junto et de Palmella, quelques objets de
quartzite blanche ou légèrement rougeâtre. Monte AbrahSo
a aussi fourni de nombreux cailloux roulés de cette substance.
Ces caractères n'ont rien de remarquable et ces quartales
' Je garde pour une autre occasion l'exposé des remarquables faits
que j'ai observé dans la Serra de Cintra ; j'ajouterai seulement que mes
observations, basées sur les déterminations stratigraphiques de M. Chof-
fat, me portent à considérer ce granité comme un des plus récents
dont on ait connaissance en Europe.
^xigle
691
ressemblent donc absolument à celles qui se trouvent ne
divers endroits du royaume. Il n'est pas possible d'en dé-
terminer la provenance.
Silex. — Le silex a été exclusivement appliqué à la fa-
brication des instruments de fine tranche. Ces roches sont
souvent colorées en rouge plus ou moins foncé, en jaune
etc., et il semble qu'on ait cherché de préférence les mor-
ceaux colorés principalement pour fabriquer des pointes de
flèche. Ces roches ne se distinguent en rien des silex qui
abondent dans nos assises crétacées presque partout où on
les a constatées.
Quartz hyalin. — Parmi les pointes de flèche et les
couteaux se trouvent des exemplaires d'une grande beauté,
fabriqués de quartz incolore, d'autres de quartz rose et de
quartz enfumé. On a trouvé aussi quelques noyaux qui con-
servent encore leurs faces naturelles du prisme, par lesquelles
on peut juger de la grandeur des cristaux, qui doivent avoir
eu une épaisseur de 3 à 4 centimètres, dimensions rarement
atteintes par les cristaux de quartz du pays dont j''ai con-
naissance.
Fibrolithe. — Les objets de cette substance sont assez
rares et généralement de petites dimensions. Les haches
ont été souvent tellement usées, qu'on pourrait difficilement
les prendre. La couleur varie depuis un gris perle clair jus-
qu'à une teinte brunâtre.
Dureté entre 6 et 7; poids spécifique 3,24 — 3,25.
De petits morceaux traités au chalumeau avec la so-
lution de cobalt prennent une coloration bleue comme la
sillimanite. Dans la perle de sel de phosphore ils donnent
,ï Google
692
un résidu de silice. Les sections transparentes sont presque
absolument incolores et vues au microscope se présentent
composées de nombreux individus allongés disposés radiai-
rement, ce qui donne à Timage microscopique une certaine
ressemblance avec les dessins parfois formés par la congé-
lation de l'humidité sur les carreaux des fenêtres.
Étudiés à la lumière polarisée on observe des couleurs
très vives de polarisation et l'extinction des aiguilles se fait
selon la direction d'allongement des individus. A ta lumière
polarisée convergente on observe dans quelques sections
suttisamment développées l'image des axes optiques des
substances bia\iales. Ces faits nous portent donc à conclure
que celte substance doit être rapportée à la variété micro-
cristLilline de la sillimanite connue par le nom de fibrolithe.
Les localités qui ont fourni des instruments de cette subs-
tance sont Carnaxide, Porto Covo et Casa aa Moura.
On ne possède des échantillons que provenant indubita-
blement du pays. On sait cependant que cette substance
se trouve généralement intercalée dans les schistes cristal-
lins si largement développés dans le Portugal, et ii ne pa-
raît pas impossible que la fibrolithe se trouve chez nous. En
tout cas clic ne devait pas être abondante puisqu'un a mê-
me profité des plus petits morceaux, ce qui n'arrive pas
pour les autres substances.
Fluorite. — Nous avons trouvé parmi les objects de
parure un grain de collier de 27 milimètres de longueur et
23 de diamètre. Il présente une forme biconique, étant per-
foré dans le sens de sa longueur. Il est parfaitement trans-
parent et d'une couleur très légèrement violacée et on y
voit des fentes internes qui indiquent un clivage très par-
fait.
ibvGoogle
M.
Nous avons détaché un petit fragment d'un demi milU-
mèire de grandeur, lequel se présente sans action sur la lu-
mière polarisée. A la flamme de Bunsen j'ai obtenu la co-
loration du calcium, et fondu avec le sel de phosphore la
réaction du fluor. Ces caractères sont plus que suflisants
pour reconnaître que la matière première de ce grain de
collier est la fluorite,
il est curieux de voir que le trou coïncide avec Pun des
axes principaux de l'individu. En le fabriquant on a obtenu
un octaèdre assez régulier par le clivage et on est parvenu
à obtenir sa forme actuelle par Parrondissement des arê-
tes.
Cet échantillon a été trouvé à Cova da Moura; sa pro-
venance originaire me paraît très douteuse.
Ribeirite, — Nouvelle variété de la Caiaïte.
Dans son intéressant mémoire De l'emploi de la Caîlàis
dans l'Europe occidentale aux temps préhistoriques, M. Ca-
zalis de Fondouce fait mention' de quelques grains de col-
lier polis fabriqués d'une substance verdâtre, lesquels se
trouvent en abondance dans notre collection préhistorique,
en les identifiant avec les grains de calla'is trouvés au-delà
des Pyrénées. Les perles des monuments préhistoriques de
France ont été l'objet d'investigations de la part de Titlus-
tre chimiste, M. Damour. D'abord M. Damour a cru avoir
découvert une nouvelle espèce minérale qu'il a nommée cal-
laïs; plus tard cependant il l'a considérée comme une variété
de la caiaïte passant peu à peu à la caiaïte typique. M. Ca-
zalis de Fondouce conserve toutefois le nom de Catlaïs et
l'applique non seulement au minéral trouvé dans les mo-
' P. 320 de ce volume.
,„^lc
694
numents préhistoriques au-delà des Pyrénées, mais aussi à
ceux trouvés dans les monuments portugais. Lorsque, sans
avoir connaissance de l'opinion de M. Cazalis de Fondouce,
j'ai regardé cette substance, dont la couleur vert pomme
est si différente du bleu céleste de la calaïte, j'ai hésité dès
le premier moment à la considérer comme étant identique
à ce minéral.
Heureusement nous possédions alors quelques petits
fragments pour en faire l'étude. Son poids spécifique est
de 2,Si, L'analyse de lames minces au microscope nous a
montré que la structure de notre minéral ressemble beau-
coup à celle de la calaïte typique étudiée avec soin par
M. Bucking. Dans la lumière ordinaire la lame mince se
présente presque incolore, tandis que dans la lumière po-
larisée elle prend une coloration bleuâtre peu uniforme, A
l'aide des objectifs de forts grossissements on observe que
cette substance cryptocristalline est formée d'innombrables
fibres courtes, souvent disposées radiairement.
Outre ces individus cryptocristallins qui constituent
la masse, il y a aussi des inclusions accidentelles. On
trouve dans les préparations peu nombreuses dont je dis-
pose quelques petites aiguilles incolores du système mono-
clinique, montrant de vives couleurs dans la lumière polari-
sée et qui semblent référables à l'orthose. Il y a aussi quel-
ques petits grains de quartz et des vénules d'oxyde de fer
hydraté. Je n'ai rien observé d'amorphe et notre minéral est
tout à fait cryptocristallin, comme la calaïte.
L'étude microscopique ne nous révèle aucun caractère
bien décisif qui puisse justifier sa séparation de la calaïte.
Nos essais au chalumeau nous ont cependant montré
l'absence absolue du cuivre qui donne la couleur bleu cé-
leste ou bleu verdâtre à la calaïte. La couleur vert pomme
lyGÔ^K^IC
'M
695
me fit présentir dès le premier moment que l'oxyde de
chrome était probablement la matière colorante.
J'ai fondu le minéral trituré avec le nitre et j'y ai ajouté
quelques goûtes d'eau distillée. En joignant à la solution
quelques goûtes d'acétat de plomb j'ai obtenu le précipitât
caractéristique du chromate de plomb, couleur de citron.
Le précipitât séché et traité avec du borax dans le fil
de platine me donna une perle vert d'émeraude'.
Ces simples faits m'ont indiqué que le minéral en ques-
tion, tout en se rapprochant de la calaïte, n'est pas identi-
que ni avec les calaïtes dans lesquelles on n'a jamais décou-
vert l'oxyde de chrome comme matière colorante, ni avec
la callaïs comme l'a cru M. Ca/alis de Fondouce, ce qui
me porte à proposer pour la nouvelle substance le nom de
Ribeirile^ dédié à la mémoire de l'illustre géologue Carlos
Ribeiro, qui plus que tout autre a contribué à l'initiation
et aux progrès des études géologiques dans le Portugal.
Je m'abstiendrai de faire des hypothèses arbitraires sur
la provenance de cette substance, me limitant simplement
à dire que nous ne connaissons du Portugal ni des pays voi-
sins, soit de la calaïte soit d'autres substances rapprochées,
et qu'il me semble probable que la Ribeirite ait été introduite
dans le pays par le commerce.
' Après avoir gbtenu ces résultats j'ai prié M. von Bonhorst, chi-
miste à VInstituto Industrial de vouloir bien exécuter une analyse quan-
titative du minéral en question; malheureusement la quantité dont il
disposait était trop petite pour donner un résultat assez exact. Il a ce-
pendant obtenu des résultats approximatifs quant â l'alumine et à l'ad-
de phosphorique, qui paraissent mettre hors de doute que la propor-
tion quantitative de ces composants est la même pour la Ribeirite que
pour la calaïte; il y a trouvé encore l'oxyde de chrotne, quoiqu'il n'ait
pu en déterminer la quantité ni l'eau de constitution.
X|^c
696
On a trouvé ces grains de colliers dans les fouilles faî- ■
tes il Monie Abraliao, Furninha, Ca^a da Moura et Pal-
mella.
Microcline. — Nous possédons aussi dans notre col-
lection un morceau de microcline de 17 millimètres de dia-
mètre qui mérite bien notre attention au point de vue mî-
néralogique. Il est cassé et ne paraît pas avoir été perforé.
La substance d'un vert clair dont il a été fabriqué, est cette
variété de la microcline ordinairement connue sous le nom
d''aina:{0?ttle. La cassure qui a séparé ce morceau du reste
du grain de collier, auquel il semble avoir appartenu, s'est
faite suivant le plan de clivage de la base. Un petit frag-
ment que j'ai détaché suivant ce plan m'a tout de suite laissé
voir dans la lumière polarisée, cette structure belle et com-
pliquée, décrite par M. Des Cloiseaux. Ce petit morceau
m'a permis de reconnaître, suivant la méthode de Szabô,
les réactions du feldspath potassique. Cet objet a été trou-
vé à Casa da Moura.
Quant à sa provenance nous ne pouvons rien dire de
sûr et nous ferons seulement observer que l'amazonite n'a
été trouvée, que nous le sachions, en Portugal.
Nous dirons en conclusion que les matériaux employés
dans la fabrication des instruments et objets de parure qui se
trouvent dans la galerie d'anthropologie de la Section Géo-
logique, sont l'amphibolite, le micaschiste, l'ardoise, le gra-
nité, la dioriie. le basalte, le calcaire métamorphique, le
calcaire, la quartzite, le silex, le quartz hyalin, la fibrolithe,
la fluorite, la ribeirite et l'amazonite.
Les dix premières substances sont vulgaires dans le
pays, et on trouve qu'il existe une analogie plus ou moins
697
absolue entre les matériaux utiHsés dans l'industrie préhis-
torique et les échantillons recueillis dans les gisements de
ces matériaux connus chez nous.
:e qui concerne les quatre derniers minéraux — la
, la fluorile, la ribeirite et Taninzonite, nous ne
présenter une opinion décisive par rapport à leur
ice; il se peut cependant que la fibrolithe, la fluo-
imazonitc proviennent du pays, et que la ribeirite
apportée de l'étranger.
.d((^kogle
1
1
r,o(*!le
TABLE DES AUTEURS
AndradeCorvo.. 4,a3,43,Î2,54
Antonovitch 49, 463
Arceun igo
Atunson 465
Batao-larc 483
Bayb (le B" de) Î64, 3o7, 33o, Sy»
Bellucq 68, 101, i38, 470
Ben-Saude 682
Broca 26
Caldas 333
Capellini.. 18,17,41,43,52,53
97, '37, '38
Cartailhac 33, 100, î65, 289, Sig
Cazaus de Foni>ouce. . 108, 3i4
364, 61 3
Chamtre, . 39, iSi, 355, 357, 365
367, 370, 453, 462, 463
Choffat 61, 92
GoELHO (Ad.) 436, 438, 450
471, 664, 667
CoHsiGLiERi Pedroso 628
cotteau (g.) 76, 104
Deloado 108, 107, 372
Evans 96, 1 54, 30î, 329
FicALHO (le C" da) 119
GuiMET 434
Hber 1 19
HiLDEBRAND (H.). . . 270, 366, 463
Lauriers (J. de) ag
Magitot 45, 471, 549
Martin (Henri)... 2o5, 3o5, 3ii
371, 432, 435, 449, 450, 663
Martins Saruento SgS
Mesnier 63g
MnxESCAMPS 387
MoRTiLLET{de).. 41, 5o, 94, 148
154, 203, 36g, 357, 366, 369, 384
Ouveira FeuÂo 6i5
Oppert 47) 5 1
Paula e Ouveira 291
Pawinski Si
PiGORXNi 46, 3ia, 369
Plo« 3i
PossiDONto da Silva 358
Quatrefages (de) . . 41, 114, 148
149, 3o3, 306, 304
Rseiro (C.) 11,81,279
RoDRiGUES (J. J.) 357
ROMER 53
SCHAAFFHAUSEN. . 33, I4O, 149,373
Vascohcellos (Fred. de). ... i55
VAScoNCELLOsABR£u(G.de).. 370
173, 449, 450, 519
ViLANOVA. . 47, g8, i55, 35a, 356
481, 633
ViRCHOw.. 41, 5o, 106, 118, 370
370, 461, 633, 648
Zawisza (le C J.) 42, 20 1
Note. — Les manuscrits des mémoires annoncés dans le résumé des
séances et qui ne se trouveni pas imprimés dans ce Compte-rendu ne
nous sont point parvenus.
r
„Google
„Googl'
^J
TABLE DES MATIÈRES
PAGES
Avant-propos »
Liste des membres du Comité d'organisation m
Règlement général vu
Questions à discuter xi
Liste des fondateurs, anciens présidents ei vice-présidents ho-
noraires xai
Liste des délégations xv
Liste des mcn-bres souscripteurs étrangers et nationaux xvii
Ouvrages olferts au Congrès xxxix
Dons et faveurs xlvu
ORDRES DU JOUR DES SEANCES
EXCURSIONS
DÉLIBÉRATIONS DU CONSEIL
Séance d'ouverture 3
Discours d'ouverture de M. le président du Congrès 4
Discours de M. le secrétaire du Comité d'organisation 12
Discours de M. Capellini, délégué de S. M. le Roi d'Italie 18
Ratification de la nomination de M. Carlos Ribeîro comme secré-
taire général et nomination du Bureau et du Conseil 10
Bureau définitif ï i
Google
702
PAGES
Rapport du Conseil de la 8* ses^on sur la proposition d'un arti-
cle complémentaire du Règlement et son adoption 24
Résumé des travaux du CongrËs par séances 37
Séance de ciôEurc 5i
Voiaiion des remerciments proposés au Congrès it
Discours de clôture du Congrès par M. le Président 54
COMPTE RENDU DES EXCURSIONS
Excursion à Otta (avec i planche) 61
Excursion à Mugem. Moiia do Sebastiâo et Cabefo d'Arruda. ... 68
Excursion à Cascaes et Cintra (avec t planche) 73
COMMUNICATIONS ET DISCUSSIONS
ËFOQUE TERTIAIRE
L'homme tertiaire en Portugal, par M. Carlos Ribeiro 8r
Conclusions de la Commission chargée de l'examen des silex trou-
vés à Otta 92
Discussion de la communication de M. Carlos Ribeiro, par MM. de
MoRTiLLET, Evans, Capeluki, Vilanova, Cartailjiac, Bel-
Luca, CoTTEAu, ViRCHow, Delgado, Cazaus i>e FoNDotjCE
et DE QuATRErAGES 94
Aperçu sur lafiore tertiaire du Portugal, par M. Oswald Heer. ..119
Considérations de M. le Comte de Ficalho, au sujet du mémoire
précédent 139
Sur l'homme tertiaire en Italie. Considérations à propos de ce su-
jet présentées par MM. Bellucq et Capeluni t38
L' homme préhistorique, par M. Schaaffhausen 140
Discussion par MM. de QtiATRCPAGES, de Mortillct et Schaapf-
,ï Google
7o3
ÉPOQUE QUATERNAIIΣ
Les anciens glaciers du bassin du IHiône.pAiM. Ernest Chantre. - i5i
Discussion, par MM. Evans et de Mortillet i54
Résumé d'une étude sur quelques dépôts superficiels du bassin du
Douro. Présence de l'homme. Vestiges d'action glaciaire, par
M. Fred. de Vasconcellos Pereira Cabral. Observations
préliminaires de M. Vilanova (avec 4 planches) i5S-i56
L'ancienneté de l'homme dans le bassin moyen du Rhône et la vallée
inférieure de la Saône, par M. Adrlen Arcelin 190
Le quaternaire en Pologne dans la caverne du Mammouth, par
M. Zaw[5za zoi
Discussion, par MM. Evans et de Mortillet 20ï
Note sur les dernières découvertes effectuées par M. Prunières dans
la Lojère, par M. de Quatrefages 2o3
Discussion par MM. Henri Martin et de Quatrefages io5
La grotte de Furninha à Péniche, par M. Joaquim F. N. Delgado
(avec 19 planches) ao?
Discussion par MM. de Baye, Cartailhac, de Mortillet, Virchow,
Vasconcellos Abreu et Hildebrand 164
Rapport de la Commission chargée d'étudier la question de l'an-
thropophagie à Furninha 170
Observations de MM. Delgado et Schaaffhausen 372
ÉPOQUE NËOLITHIQUi;
Les JSoekkenmoeddings de ta vallée du Tage, par M. Carlos Ri-
BEiRO (avec 4 planches)
Observations de M. Cartailhac
r
cgic
Notes sur les ossements humains que se trouvent dans le musée de
la Section géologique de Lisbonne, par M. F. de Paula e
OuvEiRA (avec 5 planches) 191
Discussion par MM. de Quatrefaues et Henri Martin 3o4
Les traits caractéristiques de l'époque néolithique en France tels
qu'ils sont réunis dans tes stations de la Champagne, par M.
LE Baron J. de Baye 3o6
Observations de H.Henri Martin 3ii
Silex et ossements humains peints en rouge trouvés dans une sépul-
ture dans la province de Rome, par M. L. Picorini 3i2
De l'emploi de la calla'is dans l'Europe occidentale aux temps pré-
historiques, par M. Cazaus de Fondouce 314
Discussion par MM. Cjvrtailhac et Evans 329
Les indices de la transition de la pierre polie à l'époque du bronze,
par M. LE Baroh J. de Bave 33o
Archéologie préhistorique dans la province de Minbo, par M. José
Caldas (avec 2 planches) 333
ËPOQUE DU BRONZE
Du cuivre et du bronze en Espagne et de la période qui les a précé-
dés, par M. V1LANOVA 3i2
Discussion par MM. Chantre, Vilanova, Rodrigues et de Mor-
tillet 355
Sur les haches en tronje trouvées en Portugal, par M. J, Possidonio
OA SiLVA (avec i planche) 358
Discussion par MM. Cazalis de Fondoijce, Chantre, Hildebrand
et DE MoRTiLLET 364
L'âge du bronze en Italie. Considérations à propos de ce sujet pré-
sentées par MM. Chantre et Picorini 367
Discussion par MM. de Mortillet, Virchow, Chantre et Henri
Martin 369
1
/■*s
i.eiogle
7o5
SUJETS DIVERS
Les instruments en pierre à l'époque des métaux, par M. le Baron
J, DE Bave {avec 2 planches) 372
Observations de M. de Mortillet 384
Sur des silex taillés et emmanchés de l'époque mérovingienne, par
M. Gustave Millescamps 387
Les Lusitaniens, par M. F, Martins Sarmento SgS
Mythologie gauloise, spécialement quant aux représentations diver-
ses de la triade divine et question relative à la recherche des
mêmes types dans ta Péninsule ibérique, par M. Hekiu
Martjk 432
Observations de M. Guiuet 434
Du type ethnique et anthropologique des Ibères; comment distin-
guer les Ibères, dont la langue subsiste che^ les Basques, des
autres populations anciennes de l'Ibérie, (Berbères, Ligures,
Celtes)? Qui est le véritable Ibère?, par M. Heuri Martin., 435
Observations de M. Adolpho Coclho 436
Sur les cultes péninsulaires antérieures à la domination romaine,
par M. F. Adolpho Coelho 438
Discussion par MM. Henri Martin, Vasconcellos Abreu et Adol-
pho Coelho 449
L'dge des nécropoles préhistoriques du Caucase renfermant des crd-
wsmacroctyAa/es, par M. Ernest Chantre (avec 1 planche). 4S2
Discussion par MM. Virchow, Chantre, Aj^tokovitch et Hilde-
BRAND 461
Sur quelques inscriptions en écriture 'Ogham-, par M. George
Atkinson (avec 1 planche) 465
Du culte de la pierre, par M. J. Bsn-uca 470
Observations de M. Macitot ■.,..■ 471
Note sur les prétendues relations des Macrocéphales d'Hippocrate
avec les Cimbres, par M. F. Adolpho Coelho 47a
4S.
,ï Google
7o6
PAGES
Observations de M. Vilanova 482
Les Gîlanos d'Espagne et les Ciganos de Portugal; à propos de la
queslion de l'importation des métaux en Europe par les Tsi'
gaves, par -M. Paul Bataillard 483
De l'origine probable des Tûukhâres et leurs migrations à travers
l'Asie, par M. G. de Vasconcellos Abreu (avec 1 planche). Sig
Essai sur les niuiiUtians ethniques, par M. E. Magitot 549
Observations de M. Cazaus de Fondouce 6i3
Sur un cas de microcéphalie en Portugal, par M. F.-A. d'Olcveira
Feijâo (avec 1 planche) 61 5
DiscusMon par MM. Vil
Sur quelques fonnes du
tion à la connais
de la Péninsule, ]
La Cordillère des Andes
Excursion dans le nart
(avec 2 (planches
Lelire de M. Henr[ Mar
les prétendues reli
les Cimbres
Communication de M. F.
cédente
Les Ciganos- A propos 1
LesGitanos d'Es^
Abolpho Coelho
jVote sur la nature mina
trouvés en Poriusj
Table des auteurs
Table des matiiires
Table des planches
,ï Google
TABLE DES PLANCHES
(Les diliiircnts objets figurés dont les dimensions ne sont pas ci-
tées sont censés être de grandeur naturcUe).
EXCURSION A OTTA
Profil n" 1, Coupe géologique depuis la colline de Campo jusqu'il Ca-
sinha Branea.
■ n° 2. Coupe géologique de Monte Redondo jusqu'à Archino.
F!g. I. Silex taillé trouvé par M. Bellucci.
EXCURSION A OASCAES
Perspective de la falaise, plans et coupes des grottes de Poço Velho A
l'échelle de nsSo.
(Cette planche a été copiée par les procédés de la phototypie d'une
aquarelle existant à la Section Géologique).
,ï Google
7o8
SUB QUELQUES DÉPÔTS SUPERFICIELS
DU BASSIN DU DOURO
PLANCHE I
Fig. I, 2. Profils des alluvions anciennes dans la Rotunda da Boa
Vista.
3. Tranchée dans la route d'Almeara à Lavadûres.
4. Coupe dans la granitJte de Lavadores.
5. Profil de la tranchée nord du tramway à Ervilha.
6. Coupe transversale du vallon d'Ervilha.
7. Profil de la paroi d'une ravine au sud de Casiello do Queijo.
8. Petite falaise sur la côte de la mer au sud de Casiello do Queiio.
g. Série de couches arénacéo-argileuses au sud de Castello do
PLANCHE II
I et I a, 1 et a a. Deux quartzites vues de face et de côté, qui
paraissent taillées : alluvions anciennes du plateau de Paços
(p. 170 à 171}.
3 et 3 d. Quartzitc vue de face et de côté, trouvée dans les mê-
mes alluvions, paraissant taillée, et gardant des vestiges de
frottement glaciaire (p. 171).
4 et 4 a. Quartzite vue de face et de côté, paraissant taillée, trou-
vée dans la couche de gravier de l'est des dépôts d'Ervilha,
et qui paraît provenir des alluvions anciennes, sans que sa
forme ait subi de changement (p. 179 i 180).
t 2. Quartzites taillées, du type de Saint-Acheul, provenant de
la couche de gravier de l'est des dépôts d'Ervilha.
t 3 a. Quartzite vue de face et de côté, trouvée dans la cou-
,ï Google
709
amer de l'ouest de la série d'Ervilha, et qui, pa-
'oir été façonnée par la main de l'homme (p. i83).
[uartzites taillées de la série de couches sableuses
lo do Queijo {p. 184 à i85).
PLANCHE IV
poli et strié m silu par l'action glaciaire, au sud
Queijo sur la côte de la mer, prés de Porto.
A GROTTE DE FOBHINHÂ.
>giques de la grotte de Furninha. Échelle i:ï5o
;lle, existant à la Section Géologique, fatle par le:
phototypie).
PLANCHE I
ï amygdalaire du type de Saint-Acheul, trouvé en
< prés du fond de la grotte au milieu de la galerie
le profil et par ses deux faces.
PLANCHE l-A
maxillaire inférieur humain représenté par le con-
me partie de la branche ascendante droite, vue
positions, de face et de profil. 3'™ niveau.
Felis raclé près de l'apophyse coronoïde, 2*"' ni-
,80 métrés de profondeur.
silex taillé d'un côté. Base du C*"" niveau.
perforé artificiellement. S'" niveau.
„z/!!Œ>ogle
710
Fig. 5* Caillou roulé de quanzite, très aplati, usé d'un côté, ayant
probablement servi de lissoir. Base du 6*™ niveau.
6» Éclat d'os long, fort épais, de Carnivore, très roulé. Base du
I" niveau.
7# Éclat de silex d'une teinte jaunâtre, avec des taches brun-
foncé et rougeâtre, conservant encore aux deux bouts la
surface naturelle du rognon. &'' niveau, à 3 mètres de pro-
fondeur.
I. Pointe de silex à section triangulaire, un peu retouchée sur
les bords.
a. Phalange d'Ours avec deux entailles produites artificiellement.
3, 4, 6, 7 et 9. Pointes de silex taillées d'un seul côté.
5. Éclat de silex à forme allongée, du type des couteaux, ébréché
sur les bords.
8, Éclat cunéiforme enlevé d'un rognon de silex, avec la surface
couverte de dendritcs manganésifères, ayant probablement
servi de grattoir.
Tous les objets figurés sur cette planche ont été retirés du
î*™ niveau à 6 métrés de profondeur.
10 et II. Couteaux en silex à section trapézoïdale.
13. Couteau en silex rougeâtre, dentelé en scie siu- l'un de ses
tranchants.
i3, 14 et 19. Couteaux en silex retouchés sur tout leur pourtour
pour servir comme grattoirs.
[5 et 21. Pointes de flècbes en silex de forme trapézoïdale, à
tranchant transversal.
t6. Lame ou perçoir en silex.
17. Couteau en silex â section triangulaire.
,ï Google
7"
Fig. (8, zo et 22. Toute petites lames en siiex du type des couteaux.
Les pitces figurées sur cette planche ainsi que sur les plan-
ches suivantes, iv à xiv, appartenaient au dépôt supérieur de
la grotte.
PLANCHE IV
23-29, 3i< 3ï) 34-37. Pointes en silex de différents types et cou-
leurs diverses, toutes plus ou moins finement dentelées sur
les bords.
3o et 33. Pointes de javelot en silex, dentelées aussi sur les bords.
PLANCHE V
38. Poinçon en os, canon de ruminant refendu et aiguisé à la
partie supérieure.
39. Plaque d'ardoise avec trou de suspension, ornée de dessins
en chevron sur l'une de ses faces.
40. Epingle en os.
41. Poinçon, éclat d'os de ruminant.
41 et 43. Fragments d'os long très épais, à surface lisse devenue
brillante par un frottement réitéré,
44. Petit fragment d'humérus humain, id.
46. Petit fragment de crâne humain, id.
47, Petit fragment de cubitus humain, id.
45. Grosse perle en os faite d'un canon de r
PLANCHE VI
48. Plaque en os très mince, dentelée sur l'un des t
49. Grosse perle en os faite d'un canon de ruminar
50. Plaque en os avec des dessins au trait gravés su
faces qui est un peu convexe, l'autre étant plai
il. Plaque en os, très mince.
il. Fragment d'un tibia humain, avec des marques t
ont l'air d'avoir été produites par un insirume
r
„Google
7'^
peut-être la pointe de flÈche en silex, le cal ne s'y étant pas
formé complètement.
53. Fragment d'un tibia de ruminant (?) scié et façonné aux deux
extrémités.
54. Canine d'un chien percée à la racine d'un trou de suspension.
55. Poinçon en os; éclat de canon de ruminant.
56. Épingle en os.
57. Poinçon fait de la partie inférieure d'un canon de ruminant
58. Plaquu de schiste usée ù la surface, et aux bords arrondis.
5g. Fragment d'une défense de sanglier travaillée, avec trou de
60. Pointe d'aiguille ou d'épingle en os.
61. Petite perle en serpentine, de forme aplatie,
62. C3, 64. Perles de callaïs de forme arrondie.
65. Petit éclat d'os plat, trOs usé et poli par le frottement.
PLANCHE VU
66. Éclat d'os, usé par un froaement prolongé, dont la surface
est très lisse et polie, étant noircie par l'action du feu.
67. Éclat d'os long humain, (tibia ou fémur) très usé par le frot-
tement, présentant le même aspect que celui de la flg, 66.
68. Fragment de crâne humain, partant une dépression circulaire
artificiellement produite en tournant un silex.
69. Clavicule humaine incomplète d'un jeune individu, tr£s usée
et polie.
70. Portion inférieure d'humérus humain, auquel manque l'extré-
mité articulaire, obliquement cassée à l'une de ses extrémi-
tés, puis rongée et usée ensuite par le frottement; dans la
cavité médullaire se trouvait le petit fragment d'os usé, poli
et luisant représenté à côté.
7t. Portion supérieure d'un radius humain rongée à l'extrémité
inférieure, ayant la surface un peu usée.
7a. Portion d'humérus humain paraissant avoir été obliquement
cassé â l'extrémité inférieure.
,ï Google
ili
Fîg. 73. Partie supérieure du corp d'un humérus humain, cassé ni-
tention elle ment, et ayant la surface osée par le frottement.
74. Extrémité inférieure d'un humérus humain, cassé ii
nellement, et ayant la surface usée par le frottement.
PLANCHE VIII
73. Nucléus de silex vu dans deux positions difTérentes.
76. Éclat de silex gris, avec un gros bulbe de percussion â la face
opposée â celle représentée.
77. Instrument en silex fort 5 la base et aminci vers la pointe.
78. Grattoir de silex translucide, usé et lustré par l'eau. Par mé-
prise il a été désigné dans le texte comme étant fait de cal-
cédoine.
79. Éclat de silex usé à la pointe, retouché et ébréché à l'un des
bords.
80 et 80 «r. Grattoir de silex gris vu des deux côtés.
81. Grattoir de silex rougeâtre.
PLANCHE IX
82. Nucléus de silex dont on a enlevé une succession de petites
83. Hache polie en schiste amphibolique. Iras épaisse, à côtés plats
et à tranchant légÈrement oblique, ayant la section à peu
près rectangulaire.
84. Hache polie en basalte, il section polygonale irréguliére, plate
sur l'une des faces qui est coupée en biseau pour former le
tranchant dans le plan de l'autre face. EUe paraît par sa for-
me et son tranchant courbe parfaitement adaptée à servir
d'hermi nette.
85. Petite hache polie en schiste amphibolique, peu épaisse, h sec-
tion piano-convexe, ayant comme la précédente une face
plate coupée en biseau pour former le tranchant, qui est droit
et tris légÈrement oblique.
,ï Google
7'4
Fig. 86. Hache parfaiiemeni polie, tris belle, en schiste amphibolique
vert-noirâtre, ù côtés ptais et à section plano-convcxe, ayant
l'une des faces courbe et l'autre plane, coupée en biseau
pour former le tranchant avec ia première.
87. Hache fort belle en schiste métamorphique, parfaitement
polie sur toute la surface, de forme presque symétrique et
à section elliptique.
PLANCHE X
88. Hache polie en calcaire métamorphique, de forme aplatie à
section elliptique, l'une des faces étant coupée en biseau
pour former le tranchant avec le plan de l'autre face.
89. Pièce en grès quanzeui de forme cylindrique ayant peut-être
servi comme polissoir.
90. Hache polie en calcaire métamorphique, ayant l'une des fa-
ces très légèrement convexe et l'autre plane et coupée en
biseau pour former le tranchant avec la précédente.
91. Herminctie en granité ou gneiss très fin, polie et très usée,
à côtés arrondis et avec un sillon longitudinal sur l'une des
faces.
91. Herminetie en calcaire métamorphique à section subellipti-
que, cassée A la crosse.
93. Hache parfaitement polie, en schiste amphibolique, à côtés
arrondis, ayant une des faces convexes et l'autre plate, cou-
pée en biseau pour former un tranchant oblique avec l 'autre
face.
PLANCHE XI
94. Vase en terre grossière façonné â la n
pour suspension. Échelle '/i 8''- i'^'-
,ï Google
7i5
PLANCHE XII
97. Vase incomplet de forme ovoïde, ei fragments d'autres vases
en terre grossière à formes et grandeurs diverses, fig. gi, 96,
98 a 107.
PLANCHE XIII
117. Petice écuelle à surface lisse, et fragments d'autres vases en
terre grossière de formes et grandeurs diverses, lïg. loS à
116, 118 et 119.
PLANCHE XIV
lîo. Maxillaire supérieur droit de Phoque vu de profil. Le même
vu en dessous.
lîoa. b. La troisième molaire de cette mâchoire vue par la face
interne.
121. Maxillaire inférieur gauche du même individu, vu de profil.
PLANCHE XV
;. Crâne humain vu d'en haut et de profil, n
mencement de trépanation sur le pariétal gauche. Échelle
'/,gr.nai.
(Ce crâne provient du dépôt supérieur de Casa da Moura à
Cesareda, où il a été trouvé lors des fouilles faites en 1880
sous la direction de M. Delgado, les premières datant de
PLANCHE XVI
1 23. Tibia humain excavé à llntérieur et rongé à la surface. (Grotte
de Malgasta, Cesareda).
124. Fémur cassé aus extrémités, dont l'une coupée obliquement
r,<tJK^ooQle
7i6
a une entaille barbelée assez profonde. La surface porte les
traces des dents d'un rongeur. (Casa da Moura, Cesareda).
tsS. Eclat d'os long évidemment humain, percé dje trois trous dis-
posés en série et à égale distance. (Casa da Moura, Cesa-
reda).
126. Fémur excavé, cassé obliquement à l'une des extrémités en
partant de la ligne âpre. Cette extrémité porte sur le côté
gauche une entaille profonde à laquelle répond de l'autre
côté, mais un peu au-dessus, u rie autre entaille, le tout indi-
quant l'intention d'enlever obliquement cette partie de l'os.
Il porte aussi sur toute la surface l'empreinte des dents d'un
rongeur. (Casa da Moura, Cesareda).
127. Tibia humain, excavé, trâs rongé sur toute la surface. (Casa
da Moura, Cesareda).
128. Éclat d'os humain, usé à la surface, scié perpendiculairement,
et dont il reste une pointe sur l'un des côtés, longue de 6 mil-
limètres. (Furninha).
ixget i3o. Fragments d'os long (tibia?) humain, portant sur la
surface des incisions peu profondes qui peuvent bien avoir
été produites par des blessures. (Furninha).
i3i. Humérus rongé d'enfant, peut-être par un Carnivore, dont la
dent l'a percé sur un point. (Casa da Moura).
i32. Fragment de crâne humain dont on a détaché quelques pe-
tits éclats, à ce qull paraît, avec une pointe aiguë, agissant
tantôt dans un sens, tantôt dans un autre. (Casa da Moura).
i33. Portion supérieure d'un fémur humain, dont on a détaché à
l'état frais un large éclat, après quoi il a été effleuré par les
dents d'un rongeur. (Casa da Moura).
134. Éclat d'os long, dont la surface est tachetée de dcndritcs man-
ganésifËres. (Furninha).
PLANCHE XVII
i35. Éclat d'un tibia humain portant l'impression assez profonde
des dents d'un rongeur. (Casa da Moura).
i36. Tibia humain appartenant à un jeune individu, portant deux
7'7
encoches évidemment produites par un instrument tranchant
dansle butdecoupenransversalement l'os. (Casa da Moura).
137. Portion de tibia humain excavé où ii manque, sur toute la
longueur, la face externe correspondante à la crête. (Casa
da Moura).
i38. Fragment d'os long humain façonné (?) (Casa da Moura).
LES KIOEEEIiNMOEDDiaS DE LA, VALLÉE DU TAGE
Vue des squelettes mis à découvert par les fouilles faites dans le
kioekkenmoedding de Cabeço da Arruda.
PLANCHE III
Fig. I. Fragment d'un instrument en pierre polie (diorite) avec un sil-
lon de sciage fait avec une scie de silex.
(Cette pièce ne provient pas des Idoekkenmoeddings, elle a
été trouvé dans les environs de Sacavcm).
ï. Plaque de grés (in micacé très usée par le frottement, ayant
servi de meule sur ses deux faces, et un pilon ou molette
formée par un caillou roulé de quartzite, de forme semi-
ellipsoïdale aplatie, tronqué et aussi très usé ù l'un des deux
(Ces deux pièces ont été trouvées séparées dans le kioekken>
moedding de Moita do Sebastiâo).
3. Fragment de bois de cerf scié en biseau et cassé à la pointe.
(Cabeço da Arruda).
4 et 6. Spatules en os, (Même provenance).
S. Portion de ramure de bois de cerf dont on a scié un andouiller
près de la base; elle est perpendiculairement sciée à l'une
de ses extrémités et sciée et usée obliquement à l'autre,
(Même provenance).
,ï Google
7i8
PLANCHE IV
Fig. 7. Nucldus en silex, dont on a enleva une succesûon de lames en
frappant touiours du côté de la base.
8. Poinçon en os.
9. Caillou plat de roche amphïbolique arrondi et usé par l'eau
avec trou de suspension; probablement porté comme orne-
ment. (Il a élé trouvé détaché à la surface du dépôt).
to. Portion d'un métacarpien d'oiseau façonné à l'une des extré-
mités.
1 1 à 14. Petits couteaux en silex.
i5. Éclat d'os façonné en pointe.
16 à a6. Pointes de flèches en silex de forme rhomboïdale de diffé-
rents types, à tranchant transversal.
(Tous les objets représentés par les fig. 7 à 16 provienneat
du kioekkenmoedding de Cabeço da Amida).
i7. Scie en silex retouchée sur tout le pounour du côté élevé.
(Celle piixa unique provient de Paul, près de Cabcço da
Amida. Elle a été trouvée à la surface du sol).
OSSEMENTS HnMA.INS DANS LE MUSÉE
DE LA SECTION OÉOLOOIQUE
Fig. I a, b, c. Crâne de Valle do Areeiro,
3 a, b, c. Crâne n* i de Mugem.
3 a, b, c. Crâne n* 3 de Mugem,
4 n, b, c. Crâne n* 6 de Mugem,
,ï Google
PLANCHE III
5 a, i, c. Crâne brachycéphale masculin de Mugem.
6 a, b, c. Crâne brachycéphale féminin de Carvalbal.
PLANCHE IV
7 a, b. Crâne brachycéphale féminin de Mugem.
8 a, b. Crâne n' ii de Casa da Moura.
9 d, (. Crâne de LJcéa.
lo a, b, c. Crâne n* 2 de Casa da Moura.
\\ a^b, c. Crâne n* i de Cascaes.
ARGHËOLOaiE PRÉHISTORIQUE DANS LE MINHO
PLANCHE I
Vue et plan du dolmen de Barrosa.
PLANCHE II
Plan de la Station du Mont Santa Luzia.
SUR LES HA.CHES ZN BBONZE TROUVÏES EN PORTDaAL
I^g. t. Type de haches en bronze trouvées dans l'Extremadura.
3. Id. dans la Beira Alta.
3 et 4. Id. dans le Minba
5. Id. dam l'Alemtejo.
IN8TRD1IENT8 EN PIEKBE A L'ÉPOQUE DES HËTADX
PLANCHE I
I. Flèche en silex provenant du cimetière franc d'Oyes.
2 et 4. Flèches en silex de l'atelier néolithique de la ViciUe-An-
decy.
3. Flèche en silex du cimetière franc de Joches.
5 et 7. Silex travaillés des sépultures franques de Caranda.
6. Grattoir, même provenance.
8. Grattoir du cimetière franc d'Oyes.
9. Flèche en silex du dolmen de Caranda.
ro. Grattoir de l'atelier de la Vieille- Andecy.
11. Flèche en silex des sépultures franques de Sablonnière.
PLANCHE II
I à 3. Silex travaillés des sépultures franques de Caranda.
4 à 6. Flèches en silex, même provenance.
7 et 9. Lames en silex, même provenance.
8. Pointe en ùlex, même provenance.
,ï Google
NÉCROPOLES PRÉHI8TOKIQTTES DU CAUCASE
I et 3. Sépultures grecques de Marseille.
3 et 6. Nécropole de Satnthavro (Caucase).
4 et 5. Tumulus de Corveissiai (Jura).
7 et 8. Tumulus de Voiteur (Jura).
INSCBIPTIOHB EN ÈCBiniBE .OGEAK.
Onze figures portant des inscriptions de ce genre trouvées d
Iles Britanniques.
LES T0DEHARE8
1. Les Tokliari, d'après une peinture murale à Thèbes.
2. Les cbaniots des Tokkari, d'après une peinture murale
bes.
suit Xm CAS DE mCROOËPHALIE EN FORTUQAl
I. La microcéphale Bemvindavue de face.
3. La mSme vue de protîl.
,ï Google