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Full text of "Contes populaires inédits de la vallée du Nil"

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LITTÉRATURES POPULAIRES 



■TOUTES LES ?{AT10NS 



Él 



PBOVERBES, DeVlNETtES 



TOME XXXII 



I §3 



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utílizing the best means possible. 

PLEASE HANDLE WITH CARE 



LITTÉRATURES POPÜLAIRES 



rOUTES LES J^ATIONS 



TOME XXXII 



^ 



íl 



l'ARIS 
]. MAISONNEUVE. I.IBRAIRE-ÉDITEUR 

Í5, QUU TOLTJUM, !( 
189! 



1.6 
y. 3*^ 



« 



CONTES POPÜLAIRES 



VALLÉE DU NIL 



^t 






CHALON-SUR-SAONE 

IMPRIMERIB FRAN9AISE BT ORIÉNTALE DE L. MARCEAU 



CONTES POPULAIRES 

D^ la Vsllée Hn Hil 

TRADUITS DE l'aRABE PARLÉ 



S. E. VACOUB ARTIN PACHA 




parís 

^LMSl)NNi';r\t^, l.il;!íAlki;-KDilEüli 
a5, QUAl V 

■89! 



11 

•3 






•/Aie/ie^ tS^e£¿n' c^rívc/ta: 

¿t*i£été^ au^ trotí^o oiJs.Z' o-tiiC} a- 
iefO efiíen>c¿te. 



!.lcí2 






Le Caire, i5 ocíohre i8g3. 



í'^v^^^^v^^v' 



FOLK-LORES EN ÉGYPTE 



f 



LORSQUE i'at commencé i m'occupcr de la 
question dea Con les popula i res en vogue 
de no3 jours ea Egypte, j'ai d'abord íté frappé 
de la grande variété dís thimea sur lesquels 
conteurs et conteuses brodent á rinfini. 

]e n'ai pas tardé h m'apercevoir que les 
invagions auccessives de l'Egypte, depuia des 
tnilliers d'annéea, par des peuples de civili- 
sations et de provenances si différenles don- 
naient une explication tris rationnetle de 
cette fécondlté et de cette diversité dan3 
l'imaginfltion des enFants de la valles du Nil. 

j'fli suivi et répdté mes observations et je 
su¡3arrivc i étahlir la división suivanle qui 
ma paratt tout k fátt satisfaisante. 






k 



LES FOLK-LORB8 EN EGYPTE 



D'aprés cette división, tous les contes popu- 
laires en Égypte rentrent dans quatre 
groupes principaux. 

Dans le premier groupe se trouvent les 
contes qui ont été introduits en Égypte á 
la suite des immigrations des peuples de 
TAsie. 

On y releve Tinfluence syrienne, mésopo- 
tamienne, turque et surtout per sane, dont la 
civilisation, depuis Tantiquité, depuis Tere 
musulmane surtout et jusqu^á nos jours, a 
été constamment dominante dans toute cette 
partie de l'Orient. 

On peut rattacher á ce groupe les contes oü 
¡es dives, les djinns, Tesprit du mal et Tesprit 
du bien, Dieu et Satán, les anges et les 
démons, jouent un grand role. La croyance 
fondamentale de ees contes est la croyance 
manichéenne. 

Dans tous ees contes, les femmes sont 
blanches comme le lait et belles comme le 
soleil ou la lune : leurs noms sont choisis de 
préférence par mi des adjectifs persans indi- 
quant une qualité physique ou morale. 
D'un autre cóté, ees contes ne s'entendent 



LES F0LK-L0RE8 EN ÉGYPTE 



généralement que dans les villes, et, le plus 
souvent, ils sont narres par des personnes de 
provenance étrangére, ou ayant, k quelque 
degré que ce soit, des liaisons avec des 
familles asiatiques, ou bien encoré deseen- 
dant d'esclaves blancs des deux sexes d'ori- 
gine asiatique. 

L'influence grecque ou européenne, qui 
donne origine au deuxiéme groupe, se denote 
par rintroduction dans les contes, d'animaúx 
tels que la chévre, le bouc, le paon, etc., 
presque tous des animaux sacres du paga- 
nismo qui, chez les Chrétiens, et, par suite, 
chez les Musulmans, sont devenus des ani- 
maux immondes ou enchantés, voués h 
TEsprit du mal. Rarementces contes fínissent 
sans rintervention d'un animal dont on peut 
rattacher Torigine k celle de son congénere 
du Panthéon grec ou romain. 

Le troisiéme groupe est celui qui nous 
vient des Árabes nómades, des Juifs et méme 
des Berbéres des déserts de TOuest, c'est-á- 
dire des Sémites en general. lis sont toujours 
k tendance, en ce sens qu'ils se rapportent á 
une pratique qui est devenue religieuse. 



LES FOLK-LORBS EN EGYPTB 



Ainsi des contea entiers roulent sur 1^ 
oircoticisionv, sur la répudiation, sur le péi&ri- 
nag^, ele. 

En general aussi, lorsque, pour les besoins 
d^ la cause, quelqu'ün doit intervenir, c*est 
ttMJJours Dieu, TUnique, le Trés-Haut, lo 
Tout-Puissant, etc. 

II y a aussi des qualités et des^ défáuts, 
des vertus et des vices qui forment- la base- 
de ees conte8,ce sont: la patience, la bonté, la- 
douceur decaractére, etc.; lacolére, Tenvie, la- 
méchanceté... 

Le quatriéme groupe nous vient des Négres- 
de rAfrique céntrale. 

Ici, le rdle principal échoit á la Goule. 
Q\i'est*-ce que la Goule? II est bien difficilede 
le definir : c'est un étre complexe; elle est 
tout et n-est ríen. 

Le Nil, qui submerge tout un viilage et 
noie hommes et antmaux^ est la Goule< • 

Le chasseur d'esclaves, qui attaque- un 
viilage, en tue les- hommes et en enl6ve les' 
enfants, estla Goule* 

La Goule est le fleuve qui inonde, Tincendie 
qui devaste^ letorrent de pluie^ etc. 



LES FOLB-UHUV WM iSSm, 



L^ Goule est Húppopotaat -msiasís^iíSíviL m 
crocodile feroce. 

L.a Goule est TAnbe ct le Tisx m^Bgfc 
mais blaacs, volem -fraürm, ii«:im le 
femmes et de gmricn. 

EUleest teniMe. cfle est firrpTtinfcujt js^ 
contes oü elle fi^^iizie ae parksir :^pt ni, «iOi^ 
versé, de lapts, de vois ct ¿t saansfai^^sf: 

Eln general^ les eossltü ósism. ^-^ix^a. *\ac 
propagés par les esdáii^a itsq^t:^ i*^ íeivsí 
sexes. 

Outre oes qoatre ^roop» ¿í u\artss* -uinr ut 
peut retrouver ks Of^áo» ¿¿^^ e» liv»- 
sions que nous TCDosa ctSáíZ>l:r tí, i^u yítve 
TE^pte de nos yofox% sae iussix^jn:^^ í^t^íbOj/s:* 
il y a aussi cruz di» n Tsi.í:uv!ti'Jt 'Sti^ ív^mjí: 
et une Nuits átm ourds^ ¿ KytJiír. < >^w]^ 
Zeid El'Hílalí et d'&tttjv» x^uxos» >'jr> <«» vn 
écríts, qoi alors se nrfitaa Jtjjr v^vr^isk MtifUt^ 
et peuvent dércnjl£r j¿^ sñms^xi-.í^'w't it;t 
plus sagaces et ks p.i^ ^ocússxct. 

J'aí eoteodu d23» k» '&;IÁ3afi?t> {«¡.t -i^^fííM^ 
oü Alehemet Alj Fndbaí (X^^«' tmasti., ?^'it;>J4^ 
^t HanMín ' Erracjaaíd ^^ >.j' ^tísi:^,, é^tu 
quelque Padba cu q^iiir>^;tf: ^(«t^ ^w /vm^ 



LES FOLK-LORES EN EGYPTE 



était substitué au vizir Barnek et k Abou 
Nawas; il en était ainsi de tous les person- 
nages des Mille et une Nutts. 

Le conteur se posait en historien, on 
Técoutait avec une bonne foi absolue. Tout 
cela était si na'íf et si dénué d'artifíce qu'il 
m*a été impossible de pouvoir apprendre de 
i'individu lui-méme d'oü il avait tiré ce oonte 
et comment il Tavait appris. 

Ainsi, M. G. Maspero entend sur les borda 
du Nil un fellah répéter un conté qui luí 
parait étre une réminiscence d*un des contes 
pharaoniques qu^il a traduits. II note le conté 
du marinier, puis, á forcé de volonté et de 
patience, il remonte k sa source. Un enfant, 
qui avait lu le conté dans la traduction de 
Maspero, Tavait narré chez lui et, de bouche 
en bouche, ce méme conté, avec des variantes, 
était revenu k Maspero par un marinier des 
bords du Nil. 

D'ailleurs, je n'ai, quant á moi, jamáis 
entendu un conté populaire rappelant de prés 
ou de loin Tantique Egypte, á moins que ce 
ne fút une réminiscence des légendes de ees 
temps recules de la Haute-Égypte, oü les 



LES FOLK-LORES EN EOYPTE 



Afrites, sous forme d^animauz, chacals, 
chiens, singes, etc., vivent dans les Birba, 
anciens temples ou grottes funéraires en 
ruines. A 2^gazig, j'ai entendu un conté oü 
TAfrite était un chat : faut-il voir lá une 
réminiscence du cuite du chat á Tell-Basta, 
la Bubastis des anciens } 

Ce qui distingue certainement les contes 
égyptiens que je crois autochtones, c'est que 
la race conquérante y est toujours toumée en 
ridicule ; le Ture de nos jours joue toujours 
le role de bafoué ou d'épouvantail. Genérale* 
ment, c'est une femme ou un enfant qui se 
moquent de luí et le rendent la risée de Tau- 
ditoire. 

II est á remarquer que la ruse et la fourberie 
sont des preuves d'intelligence et de fécondité 
d'esprit. 

Dans les cas oü le Ture sert d'épouvantail, 
pour excuser la terreur qu'il cause aux 
Égyptiens on s'arrange de fa^on á ce que de 
hauts et puissants personnages aient eu peur 
de lui. 

Voici un spécimen de ce genre de contes : 

(( Dieu crea Adam et Eve et les pla^a dans 



8 L,ES ^0LK-L0aE6 JEN ibGYPTiE 

te Paradis, avec défease de manger du fruit 
défeQdu. 

» lU eja maQgére];i<t. 

» Dieu leur eavoya un expré^s pour leur 
diré 4e sortir du Paradie, aiasi qu'ü avait été 
conv^nu en cas de désohéifisance. 

)) — Bien, dit Adam. 

JD -r Bien, dit Eve. 

» Mais iU continuérent á jouir ^des .délic^ 
du ParadijB. 

)) Au bout d^un cef tain tempe, DLeu s'étant 
informé, apprit qu'il9 étjiient enoore daos le 
Paradis. 

)) T- Ne les a-^t-non pas ayertis qu'iU devjatfenit 
en sortir ? demanda Dieu á un de ses aidesr 

de-camp. 

» -^ Si fait, luí fut'il répondu, mais ils p/e 
sont point sortis. 

i¡> — Allez de nouveau, dit-il á un huiaeier, 
et dites-leur de déguerpir. 

» L'huissier part. 

» -:- O Adam et Éve, leur crie-t-il, Pieu you^ 
renvoie du Paradis, sor tez I 

» rr Eh bien I quoi, es^tril dpnc si pressé; 
laisse-nous faire nos préparatifs, lui dit Adam. 



.■,'■.' _ ' . ■ ■ ■» — — ^— ■ ■ ! ■ I ■ »■ ■ 1 1 —III 



e^i]^^K)írter nos e^fets I dit ^v:e. 
» Une querelle s^f^f^uívk. 
p L'huissi«.r rc^ourna vfrs JPá&u et luí 
raconta cp qm s'.^tait pasaré : rpppj^ijjkQO 
d'^am et d'£v^ atinsi que .l|i q^prejüle. 

» Dieu appela le ^^as t^rc Timour ^bn. 
>> -t- AUee, .dit-il, m^ nacetíre «e fígtapi^ á la 
porte du Paradis. 

» D^ áque 1^ c^wsks fult arrivé h Ijbl ó^t^pwrfi 
dia co]aple déspbéi§8ant, ü crjift : 
» — Oh lá I Adam ! 
» -r Me vpicj. 

» T~ Pre^^s ta Uv^fo^ f t SQrs d'ici. 
» Hadk, f pb^k. 

» Et Adam et Ey^ sprtir^n^ du ParadUt 
tout ñus, parce qu etant au bain, iU n'eureaí 
pas Ip temps de s'b^^bilkr. » 

Une autre marque caractéristique de ees 
Qontes, c'est que, de tous les personna^^es 
qui s'y m^uyent, c'^st touiours la femme qui 
p8t la plius int^JUig^te; füt-elle siinple ou 
naive, elle fínit touiours par avoir raison h la 
loDgue, d^ méme qqe pVst toujours á «He 
qu'échoit le beau role. 



/ 



10 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

Un dernier trait, enfin, c^est que, comme 
les étres humains, les bétes et les choses 
pensent, parlent et agissent. 

(( Le moustique se posa sur les hautes 
branches du dattier pour se reposer. 

» Une fois reposé, il dit au dattier : Tiens- 
toi bien, je vais m'envoler. 

» Le dattier lui répondit : Je ne t'ai pas 
senti te poser sur moi, et, si tu n'étais pas si 
prés de mes oreilles, je ne t^aurais méme pas 
entendu parler; tu peux prendre ton vol sana 
que je m'en aper^oive. 

» Le moustique s^en alia tout dépité. » 

II est plus que probable que ees contes se 
sont répétés de siécle en siécle, en se trans- 
formant ; selon Tesprit de la religión régnante 
et de la nationalité du conquérant. 

Cependant le fond méme n'a pas áü 
changer. 

Ce fond, comme je Tai déjá dit, me semble 
se restreindre aux trois catégories suivantes : 

I. — La critique du pouvoir constitué, quel 
qu'il soit. 

II. — L'admiration, le respect et Tamour 
de la femme. 



LES P0Z.K-LORES EX áGIWE II 

III. — Lacroyance cnTáme oniveneDe, se 
nanifestant dans toute la nature, ou la 
:royance au Panthéisme. 

11 arrive souvent que des coates rentrant 
ians les quatre premieres divisions que fai 
6tablies, et dont Taspect et rordoonanoe 
genérale indiquent la proveaanoe ctrangere, 
se trouvent étre transformes en coates ayant 
absolument le caractére de ceux que i*ai 
appelés autochtones, et méme de ceux écríts, 
tires des Mille et une Xutts^ ou d*aatres 
recueils analogues. 

II faut en chercher la cause dans la tour- 
nure d^esprit, le caractére et les penchants 
des É^ptiens et surtout dans Taptitude 
qu'ont tous les peuples á s'appropríer et á 
adapter á leur langue, á leurs moeurs et á 
\eurs usages tout ce qui leur plait chez les 
autres nations. 

G'est aussi dans les coates de ce genre qu'il 
faut rechercher les réminiscences de Tanti- 
quité. 

Ua peuple qui, de tout temps ou du moins / 
9LU3SÍ loin dans le passéqu'il nous soit permis 
de remonter, a été gouverné et tyrannisé par 



LES F0LK-L0RB8 EN ÉGYPTE 



Ainsi des contea entiers roulent sur la 
oircoticision, sur la répudiation, sur le pélet-i- 
nag^f etc. 

En general aus«i, lorsque, pour les besoins 
de la cause, quelqu'un doit intervenir, c'est 
toujours Dieu, rUhique, le Trés-Haut, le 
Tout-Puissant, etc. 

II y a aussi des qualités et des défáuts, 
des vertus et des vices qui forment la base 
de ees contes, ce sont : la patience, la bonté, la 
douceur decaractére, etc.; lacolére, Tenvíe, la 
méchanceté... 

Le quatriéme groupe nous vient des Négres 
de TAfrique céntrale. 

leí, le role principal échoit á la Goule. 
Q\i'e8t*-ce que la Goule } II est bien difficile de 
\t definir : c'est un étre complexe; elle est 
tout eC n*est ríen. 

Le Nil, qui submerge tout un village et 
noie hommes et animaux^ est la Goule< 

Le chasseur d'esclaves, qui attaque un 
village, en tue les^ hommes et en entéve les 
enfants, est la Goule. 

La Goule est le fleuve qui inonde, rinceadie 
qui devaste, lé torrent de pluie, etc. 



LES FOLK-LORSS EN EGYPTE 



La Goule est Thippopotame monetrueux., Itt 
crocodile feroce. 

La Goule est T Árabe et le Ture négriers, 
mais blancs, voleurs d^enfants, tueurs de 
fejntnes et de guerriers. 

Elle est terrible, elle est impitoyable : les 
contes oü elle figure ne parlent que du saqg 
versé, de rapts, de vols et de massacres. 

En general, les contes de ce groupe soot 
propagés par les esclaves négres des deux 
sexes. 

Outre ees quatre groupes de contes dont on 
peut retrouver les origines d'aprés les divi- 
sions que nous venons d'établir et qui pour 
TEgypte de nos jours me semblent exactes, 
il y a aussi ceux due k Tinfluence des Mille 
et une Nuits des contes d'Antar, d'Abou- 
Zeid El-Hilali et d^autres contes publiés ou 
écrits, qui alors se mélent aux contes inédita 
et peuvent dérouter les observateurs les 
plus sagaces et les plus patients. 

J^ai entendu dans les villages, des contes 
oú Mehemet Aly Pacha (XIX* siécle) rempla- 
gait Haroun - Errachid (VIII* siécle); ou 
quelque Pacha ou quelque poete du jour 



LES FOLK-LORES EN EGYPTE 



était substitué au vizir Barnek et á Abou 
Nawas; il en était ainsi de tous les person- 
nages des Mil le et une Nuits. 

Le conteur se posait en historien, on 
Técoutait avec une bonne foi absolue. Tout 
cela était si na'íf et si dénué d'artifíce qu'il 
m'a été impossible de pouvoir apprendre de 
i'individu lui-méme d'oü il avait tiré ce oonte 
ct comment il l'avait appris. 

Ainsi, M. G. Maspero entend sur les bords 
du Nil un fellah répéter un conté qui luí 
paralt étre une réminiscence d'un des contes 
pharaoniques qu'il a traduits. II note le conté 
du marinier, puis, á forcé de volonté et de 
patience, il remonte á sa source. Un enfant, 
qui avait lu le conté dans la traduction de 
Maspero, Tavait narré chez lui et, de bouche 
en bouche, ce méme conté, avec des variantes, 
était revenu á Maspero par un marinier des 
bords du Nil. 

D'ailleurs, je n'ai, quant á moi, jamáis 
entendu un conté populaire rappelant de prés 
ou de loin Tantique Egypte, á moins que ce 
ne fút une réminiscence des légendes de ees 
temps recules de la Haute-Egypte, oü les 



Afrites, sous forrae d'animauK, chacals, 
chiens, singcs, etc., viveot daoa lea Birba, 
aneiens temples ou grotces funérairea en 
ruines. A Zagazig, j'ai enteodu un conté oíi 
l'Afrite était un chat : fauC-¡l voir lii une 
e du cuite du chat á Tell-Basta, 



Ce qui distingue certainement lea cantea 
égyptiens que te crois autochtones, c'est que 
la race conquérante y est toujours tournée en 
ridicule; le Ture de nos jours joue toujours 
le rdle de bafoué ou d'ípouvantail. Générale- 
meat, c'est une femme ou un enfant qui se 
moquent de lui et le rendent la risée de l'au- 
diCoire. 

U est k remarquer que la mse et la fourberie 
sont des preuves d'intelligeace et de fécoaditó 
d'cBprit. 

3 oü le Ture sert d'épouvantail, 

la terreur qu'il cause aus 

s'arrange de fagon á ce que de 

lanta personoagea aient eu peur 



Dans Íes 

Egyptiens 
hauta et pi 
de lui. 



Voici un spécimen de ce genre de contes : 
« Dieu crea Adam et Eve et les pla^a dans 



I 






8 L,ES P0LK-L0RE6 £N £GYFT£ 

te Paradis, avec défease de manger du fruit 
diéfeQdu. 

» lia en maagérent. 

» Dieu leur eavoya un exprc^s pour leur 
diré de sortir du Paradla, ainsi qu'il avait été 
conv^nu en cas de désobéifisance. 

)) — Bien, dit Adam. 

JD TT Bien, dit Éve. 

D Mais ila continuérent á jouir ^ies .délices 
du Paradifi. 

» Au bout d'un certain tempe, Dieu a'étant 
informé, apprit qu'ila étaient enoore dans Le 
Paradis. 

» T- Ne les a-^t-on pas ayertis qu'ik devajient 
en sortir ? demanda Dieu á un de ses aidesr 
de-camp. 

» — Si fait, lui fut'il répondu, mais ils p^ 
sont point sortis. 

» — Allez de nouveau, dit-il á un huiasier, 
et dites-leur de diéguerpir. 

» L'huissier part. 

)) -:- O Adam et Éve, leur crie-t-il, Dieu you^ 
renvoie du Paradis, sortez I 

» -r £h bien I quoi, est-il done si presaé; 
laisse-nous faire nos préparatifs, lui dit Adam. 



ji -^ V«m-il doAC qw aous pariiose «ans 
emiporter nos efieta 1 dií Éve. 

n Une querelle B'<WBuÍvk. 

¡) L'huisaier retourna vprs Üi.eu -et lui 
raconta c.e qui B'.ótail paseé : l'pppoeitiqo 
d'Adam et d'iEve wnai que la qiíf reUe. 

» Dieu appela le cawaa t^rc Tímour Agí». 

V -r- Allee, dii-il, me mettre w couplp A la 
porte du Paradis. 

n Düa que ie tawae fut arriv¿ ¿ la d«Biei»r« 
4u couple désobé¡$eanT, i.l cri^ : 

» — Oh lá 1 Adam 1 

» -r Me Voici. 

» TT- Pf'ends ta fEmín^ et Gors d'ici. 

« Hadir, j'pb^is. 

» Et Adam et £vf sortirent du Paradü, 
tout ñus, pares qu'.étaot au bain, ils nVurent 
pas le temps de s'h^biller. f> 

Une autre marque caractéristique de ees 
contes, c'est que, de toua les personoagee 
qui s'y meuvenc, c'est toujours la íetame qui 
^ la plus intellig^te; füt-elle simple ou 
naive, elle finit toujours par avoir raison k la 
longue, de méme que c'est toujoure k «lie 
qu'échoit le beau role. 



CXI 

23 



10 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

XJn dernier trait, enfín, c^est que, comme 
Íes étres humains, les bétes et les choses 
pensent, parlent et agissent. 

(( Le moustique se posa sur les hautes 
branches du dattier pour se reposer. 

» Une fois reposé, il dit au dattier : Tiens- 
toi bien, je vais m'envoler. 

» Le dattier lui répondit : Je ne t'ai pas 
senti te poser sur moi, et, si tu n^étais pas si 
prés de mes oreilles, je ne t^aurais méme pas 
entendu parler; tu peux prendre ton vol sans 
que je m'en aper^oive. 

» Le moustique s^en alia tout dépité. )) 

II est plus que probable que ees contes se 
sont répétés de si6cle en siécle^ en se trtas- 
formant ; selon l'esprit de la religión régnante 
et de la nationalité du conquérant. 

Cependant le fond méme n'a pas dü 
changer. 

Ce fond, comme je Tai déjá dit, me semble 
se restreindre aux trois catégories suivantes : 

I. — La critique du pouvoir constitué, quel 
qu'il soit. 

II. — L'admiration, le respect et Tamour 
de la femme. 



in. — La croyance en'l'áme uaiverselle, ss 
manifestaQt dans toute la nature, ou U 
croyance au Panthéisme. 

II arrive souvent que des contea reatrant 
dans lea quatre premiares divisions que i'ai 
ítablies, et dont l'aapect et l'ordonnance 
genérale indiquent la provenance ítrangÉre, 
se trouvenc étre traaaformés sn contes ayant 
absolument le ca rae té re de ceux que j'ai 
appelés autoehtoaes, et méme de ceux ¿crits, 
tires des MtUe et une Xutls, ou d'autres 
recueils aaatogues. 

II faut en chercher la cause dans la tour- 
nure d'eaprit, le caractire et les penchants 
des Égyptiena et surtout dans l'aptitude 
qu'ont tous les peuples á s'appropríer et 6 
adapter á leur langue, ¿ leurs moeura et á 
leura usages tout ce qui leur plalt chez les 
autrea nationa. 

C'est aussi dans les cantes de cegenre qu'il 
faut rechercher les rémiaiscences de l'anti- 
quité. 

Un peuple qui, de tout temps ou du moina / 
aussi loin dans le passí qu'il nous soit permia 
de remoater, a été gouverné et tyrannisé par 



12 I.S6 F£>LK-I.eaiES EN áCYPTE 

des «étraogers^ «st naturellenient «nclin á 
]K>ircir see maltres, ainsi que ses iuges, et U 
tache de le faire aussi epirituidllement que 
poftsible. 

O a peut 8e rendre un compte exact du peu 
de f^spect que ce peupk a pour ses jiiges et 
ses admimstrateurs par ce fait que, méme de 
nos i^urs, les voleurs, les assassins et autres 
criminéis, sortis ou evades de prison cu du 
ba^ne, ne sont pas mis au ban de la société. 
Au üontraire, on les re^oit, on leur fait bon 
accueil, on s^allie méme avec eux, et, au 
besoin, onles prot^e. lis bénéfícient de Tidée, 
¿ort enracinée dans le peuple, que le Maitre, 
k Gouvernant, le Ju^ sont des tyrans qui 
condamnent, á tcrt et á travers, ianocents et 
coupables, et ees derniers profítent de la pitié 
du publ:^ envers les premier s. 

Quant aux femmes, il faut, je pense, 
chercher Torigine du respect dont elles sont 
entourées dans celui des anciens Egyptiens 
pour la Mater famtltce. 

L^origine du Panthéisme est facile á 
saisir. 

II faut bien se garder de confondre les 



eonisa oti l'oa parle de Pharaoa avec csax, 

provenant de L'aatique Égj^jite. 

Le Pbaraon est uae iatroducLÍan biblique. 
im.koranique ea Égypte; si on en parle, c'est 
toujourB dans le sens du' mauvais Pharaoni 
du tempa de Moise, et il n'a ríen de commun 
avec lesiPharaoiiB'de l'ancieaae Égjrpta. 

A ce propos, on raconte : 

o Pharaon traitait les Égyptieas- &vec. la 
irius grande ^rigueur. 

uMoisealla le voir et luidit : 

» — O Pharaon I pourquoi crraoiiiseMm 
aiasi le pwple ? 

u Pharaon ne répondit pas. II ordOiinai 
qu'oa prlt deuK fois quaranterats, qu'on les 
enferm&t dans deui saca en cuir et qu'on les 
appurtát devant Iu¡. 

» Lorsqu'on apporta les deux sacsde cuir 
conté nant chacua quarante rats, Pharaon < 
commanda qu'on déposát un dea saca k terre. 
It fit prendre l'autre par qustrc homraes- 
vigoureuK et leur dit de le secouer )usqu% 

» En quelques minutes le sac déposd' á- 
terre fut percé de quarante trou» et les 



U.-Í 



14 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

quarante rats en sortirent et se sauvérent, 
tandis que le sac qui était remué était intact 
dans toutes ses parties. » 

Ne sent'on pas dans ce conté l^influence 
biblique et koranique ? 

Et Pharaon ne traite-t-il pas le peuple 
comme ce peuple a été habitué d'étre traite 
depuis des milliers d^années ? 

Ne sent-on pas, en outre, Tinimitié du 
peuple contre ses gouvernants, dans ce trait 
que si Pharaon n'était pas puissant et par- 
tant intraitable, le peuple le détruirait, lui, 
Pharaon, le sac représentant Pharaon, et les 
rats le peuple ? 

Dans le méme genre, on raconte encoré - 

« Autrefois le peuple d'Egypte était spiri- 
tuel, léger et délié d'esprit, car le pays était 
couvert de pistachiers et le fond de la nourri- 
ture du peuple était la pistache. 

)) Pharaon vint ; il s'apergut qu'il ne pour- 
rait se rendre maitre des Égyptiens que 
s'il alourdissait leur esprit. 

» II ordonna d'abattre tous les pistachiers 
et fít remplacer la culture de la pistache par 
celle de la féve. 



\.m 



" Le peuple mangea des f¿ves, son esprit 
s'alourdit et Pharaon put alora le gouverner á 
son gré. » 

Ne voit-on paa ici le désir du peuple de se 
disculper des conquftes successíves de 
l'Égypte par lea Étrangers ? 

Y a-t-il lá une r¿min¡3cence du tempe oü 
l'Égypte était boiséc ou bien de Tintroduction 
de la culture de la f¿ve dans ce pays ? Ou 
encoré du terops OÜ l'Égypte était libre et 
prospere par elle-méme et au profit de sea 
ha bi tanta ? 

11 faut encoré que j'attire ici l'atteatioa sur 
la croyance généralement rípandue; que le 
lecteur des MilU et une Nuils éprouve un 
malheur personnel daña le courant de l'aaaée 
OÜ II a lu ce livre. Cette croyance est entre- 
tenue, et non aans succÉs.parles lettréset les 
gens religieux, Mais, malgré cette croyance, 
ou plutót cette superstition, les contes des 
i\fi7/e etune Nuits sont tres connua de tous ceux 
qui,parplaisir ou par métier,aiment á conter. 
Je suppose que c'est préciaément á cause 
de cette réprobatioD quasi religieuae qu'aucun 
: se pique d 'exactitud e lorsqu'il 






/ 



tÓ LES' Í-OIK-LOREV en EGYPTfe 

rép6te une de (íes histoifes; Cc^ sont dónc 
gféñéraienltent les contes'tiiréí de ce recúeil'qui- 
subissent les transformations áóút ndU^^ 
VénortS de parler et qü*il faut attribüéf á la 
toürnure d'espnt des Ég<^i«nst 

II serait impossible^ vu lUmportanee d^*' 
thémet^ qu'oü parvientie 4 reunir la coHection 
dMi cOñtesi popolftires* de^ TEg^te. Tant de* 
itibés' dififérentes y ont látase lee traces de 
léVirpasdagei tatít dé- race» dl£Blrdht^ y'dofttv 
dbpuiS' tant de- eiéeleer en cómitíunicatiohd' 
constantes et journaliéres de vie et d^ídéét- 
d^üne'rlvédb Ni! á l'autre; méme de Tutí á 
l^autrebord d'ün canal, les théhies déft'cdnted 
efe vo^'u^ peüvent changer. 

Au- Caire, méme les límites' des- quartief-sr- 
líteüVént sotlVéiit étre consideréis- comtne' 
HnüiteS'de tel ou tel thémé de conté. 

Les élres qui se meuveüt dans les contei* 
Ifctivetít'étreléís mémes et changer dé forme. 
Kiii^i le « Affité »\ le diable, le lutin, d¿ 

I i Je ne cofVfMiis q^ueles pabücattonssDivantbs 
des coates populaires égyptiens- en Europe : 

I* Cóntés árabes modernesi, recueillis et traduits 
píftí*GóíHaum€Si>itTA-BBYV Leyde, i88?; 



nos jours est d¿peint á l'lixbékieh habilH d'un 

pantalón nojr et coiffé d'un chapeau haut de 

forme de meme couleur, c'est-i-dire qu'il i,t_ j 

représente un Européen. O: : 

A Sayída Zénab, le diable sera un Ghüzz C2 f 

ou Ture; á Hassanyeh, ce pourra Stre un 5£ 2 

Arnaute (Épirote) habíllé de rouge; au vieuK ~~ 

Caire, ce aera un Ntgre; k Boukk, un ^ : 

Saldien; tandis qu'ailleurs ce aera peut-étre S¿ ; 

un Maugrabia v¿tu de blanc (Berb¿re des ^ £ 

Cotes de l'Afrique du Nord) '. ^ : 

On ne Ht guére parmi le peuple en Égypte, 

maÍB on 7 parle beaucoup; aussi les conteurs C 3 

t* Contts árabes ín dialecU ig/ptien, par M. Max , ^ . 

van Bbrchbm [Journal Asiati^ue), mdcccliiiix. ^ jj 

)• H. DULáC, Qaalre Cantes árabes en diaUcte Oc j- 

cairote. {Missioit archéologiqut franfaisí au Caire, ^ 

i8Si-84,ftisciciilepT6m\eT.] Paris. E. Lbrou^, 18S4. 2 " 

4* QutUjues Cantes nutitns, par le marquís de 3Z Z 

RacauMointix. [Mémoires de l'Instilut égrptien, — 3 

(. [I. Caire. 1889.) U. J 

í" A CoUeclion 0/ madern arable storles. etc., by 3 ~ 

lieul.-col. A. O. Grein. R. A. Cairo, 1886. — Le t— - 
méme, en árabe. Londres, Henry Frowdr, 189). 

I. Lorsque dans un conie un nom propre ou 
un subslantif est emplayé au diminulír. (res géaé- 
ralemenl ce cante peut ítre consideré comme 
originaire de la Hauíe-Égypie ou du Bédouin des 



l8 ¿tUDE 6UR LE8 



6ont-il8 ñombreux et fort íngénieux. Ceux 
qui écoutent eoiit aussi naífs et au«6i ingenua 
que les conteura eux-mémes. 

lis prennent un vif plaiéir á tntendre un 
conté, ils s^intéresseüt á Taction et rient ou 
pleurent, se réjouissent ou «e fáchent selon 
que le conté est plaiaant ou triste, moral ou 
immoral. 

II est merveilleux de voir combien, chez ce 
peuple fort doux et absolument pacifique, 1«6 
actes de courage á la guerre sont appréciéa. 

Petidant le moia de Ramadan, les conteurs 
publics, s^accompagnant «ur leur ribab, 
content et chantent des poémes héroíques ; les 
auditeura prennent parti pour ou contre U 
héros, et il n*est pas rare de Toir «urgir des 
combats á la fin de la soirée. 

Une partie de Tauditoireordonneauoonteur 
de tuer tel guerrier, Tautre partie le lui 
défend. On en vient aux mains. Le conteur 
profíte de la bagarre pour se sauver ; maia, 
comme il est soucieux de ménager les sentí- 
ments de son public, le lendemain aoir, gráce 
á son ingéniosité, les deux héroa sont de 
nouveau en présence, chacun bien en vie. 



FOLK-LORES EN ÉGYPTE I 9 

Ce 8ont \k de véritables représentations 
théátrales, sans costumes et sans action, dont %.^ :> 

les nombreuses pérípéties se déroülent au 
moycn de la, simple parole. Au lieu de lire, on 
écoutc ct on s'intéresse au román par l'oreille. c2 Í 

En genera!, le fond des contes est gai, sauf HZ J 

chez les ÉIgyptiens chrétíens, les Copies, dans s; z 

les récits desquels domine souvent une note ^ ^ 

triste et mélancolique ; produite sans doute ^ ^ 

par cet état d'áme que les théologiens ?t: B 

d' Alexandrie ont nommé la délectation moróse, -^ :: 

des les premlers síécles de notre ere. ^ - 

n est encoré h remarquer que, dans les contes 
de ees Égyptiens chrétiens, les saints tiennent ^ Z, 

un role assez important. C/ *> 

Autre fait également digne de remarque, Li 3 

c'est que, lorsqu'il s'agit de persécutions 2 ü 

religieuses, ees mémes Coptes ne se sou- 
viennent que de celles des Romains et des 
Byzantins chrétiens. Jamáis je n'ai entendu 3 2 

accuser les Musulmans de ees persécutions 
terribles et barbares, dans ees sortes de contes. 

Au contraire, je connaisméme une légende, 
tirée de la Vie des Saints, dans laquelle la 
disparition de l'illustre Hakim-bi-Tur-Illah, 



J 



U. J 



20 ¿TUDE SUR LES 



kalife fatimite d'Égypté, est expliquée par sa 
retraite dans un couvent copte oü il serait 
mort en odeur de sainteté\ 

De méme que les Égyptiens, les Coptes, 
dans leurs contes, essayent de se venger par 
Tesprit, de Tignorance et de la tyrannie de 
leurs maitres étrangers. 

En voici un exemple : 

(( Un Copte était employé en qualité de 
scribe chez un bey mameluk. 

» A la fin du mois, en lisant ses comptes au 
bey, il arrive á un passage oü il était dit : 

» — Pour ferrer les chameaux et pour 
tondre les chevaux : tant. 

» Le bey, étonné, Tarréte : 

» — Je ne savais pas, dit-il, qu^on ferrát 
les chameaux et qu'on tondit les chevaux. 

» Le scribe, déposant ses livres aux pieds 
du bey, lui dit : 

» Monseigneur est trop savant pour moi ; 
qu^il me donne mon congé, je ne suis pas 
digne de le servir. » 

Parmi les gens du peuple, méme entre 

I. Voir : Repue d'Égrpte, n« i, Caire. La con- 
versión du Calífe El-Hakém au Christianisme. 



hommee seuls, ct en public la dcccnce eat de 

Lea récits ne deviennent indécents, grave- 
leui et meme crapuleux que lorsqu'on conté 
pour gagner de l'argent, eC en particulier; 






iatií i 



semblablea, 1 


artiate, le düettanie, 


es 


différent du c 


nteur de profesaloo, 


car 


consoit pas un 


conté grossicr dans 1 


B 


l'indécence. 






Cea observ 


ationa s'appliquent 


an 


hommes qu'au 


I femraes qui ont 1 


ed 



4 i 



i? 




f 



I 



PREMIER GROUPE 

PERSANS, INDIENS 
(ariens di l'bst) 



ai 



Si 



PREMIER GROUPE 



SSL1\ 



•PEliS^U^S. IV^'DIEC^S 



3¡'l 



LES TROIS FEMMES ET LE KADl' 



c 



'était jour de Chemme-el-Nécime^. 

lieu des promeDcura d'un jardín, 
distinguait trois femmes que, malgré lea 
lies qui les couvraient, on devinait ítre 



I. Publié dans le Bulíetin de ¡'liulilul égyptUn, 
II' serie, ti" 4. 1884, p- 16. 

1. Aclion d'aspirer U léphyr bitnfaisaitt. Ce ¡our 
li lombe le lundi de Paques, selon le calendrier 
Julien (vieux siyle) ; i) esi le premier d'une serie 
decinquanie jours auxquels, en É|;ypte, an donne 
le nom de kliamtciai (cinquante). 



U.3 



^6 Les pQLK-LQRBa EN BQYPTE 

jeunes : tres provoquantes d'ailleurs, et 
habillées splendidement. 

Tout en se promenant, l'une de ees trois 
femmes s*arréta, se baissa et ramassa sous les 
pieds de sa compagne une belle piéce d^or. La 
troisiéme en age l'ayant aper9ue, Tavait 
lúontrée á la plus ágée qui Tavait ramassée 
tandis que la seconde marchait dessus. 

La plus jeune prétendit que la piéce dV 
devait lui revenir ; la seconde s'y opposa pré- 
textant qu^elle avait mis le pied dessus, et la 
plus ágée qui la tenait dans la main ne 
voulut á aucun prix la ceder « parce que, 
disait-elle, c'est moi qui Tai ramassée I » 

Cette aventure anima encoré plus les trois 
amies; elles s'assirent au bord d'un bassin, 
oü leurs esclaves leur aervirent une collation, 
tandis qu^elles causaient, riaient et faisaieat 
aaaaut d*esprit et de gaieté. Le soir venu, 
elles rentrérent chez elles, sans avoir pu 
décider á qui appartenait la piéce d'or. 

Elles convinrent done que la plus ágée des 
trois garderait la piéce, et que le lendemain 
matin elles iraient toutes trois chez le 
seigneur Kadi, qu'elles le prieraient de juger 



I 



PERSANS, INOIENS, ARIENS DE L^EST 27 



s^ 3 






r:; 






leur dififéread et de remettre la piéce d'or á 
celle d'entre elles qu'il daignerait désigner 
daña sa haute justice. i^ ^ 

Le lendemaiti done chacune d^ellea se leva 
avant le soleil et s'occupa á faire une toilette 
resplendissante, en se couvrant des parfums 
les plus exquis. 

Nos trois amies arrivérent en méme temps 
chez le seigneur Kadi, lui exposérent leur 
dispute, aprés Tavoir salué avec respect et 
pris Tautorisation de lui soumettre le sujet 
du différend qui les amenait á son tri- 
bunal. 

Le Kadi, homme grave, savant et respec- 
table, aimait cependant la jeunesse et la 
beauté; de plus, il s'intéressait vivement aux Oci 

romans de la vie réelle. Voyant done qü*il ;> m 

avait aíFaire á des dames enjouées, intelli- 
gentes, instruites, aimables, sentant bon, et 
parlant bien, outre qu'elles paraissaient jeunes 
et jolies, il lui vint á l'esprit de leur faire 
raconter ái chacune d'elles une anecdote de 
leur vie, et il decida de donner la piéce d'or éi 
celle qui raconterait l'histoire la plus spiri- 
tuelle et la mieux contée. 



ex 1 



3: 



28 LES FOLK'LORES EN ÉGYPTE 

Aprés avoir ainsi decide dans son for 
intérieur et sa sagesse, il posa sa pipe á cóté 
de luí, fít asseoir les trois dames, et cares- 
sant sa barbe de sa main droite, il prit la 
parole, et s^exprima en ees termes : 

— Mes chéres filies, l'heure de Taudience 
est encoré éloignée, et votre confíance en ma 
sagesse m^engage á ne pas repousser votre 
demande, et quoiqu'elle ne soit pas du ressort 
de mon ministére, je veux bien servir d'ar- 
bitre dans votre querelle. Or done, que la 
moins jeune de vous commence á parler et 
qu^elle nous raconte Tanecdote la plus 
curieuse de sa vie. Entiére liberté vous est 
octroyée parmoi. Ditestout, mais contez bien. 
Celle qui contera la meilleüre histoire et qui 
la contera le mieux, celle-lá sera digne d'avoir 
la piéce d'or. 

Le Kadi ayant ainsi fini de parler, reprit 
sa pipe, s^installa confortablement dans le 
coin de son diván, et attendit la premiére 
histoire. 

— Avec votre permission, monseigneur 
Kadi, je commence, étant la plus ágée, dit la 
premiére qui, confiante dans sa jeunesse, ne 



PERSANS, INDIENS, ARIEN8 DE L E9T 29 

craignait pas d^avouer qu^elle était la plua 
ágée. 
Elle se leva done et parla en ees termes : 



I 



(( Mes parents étaient des bourgeois 
honnétes, travaillant beaucoup et gagnant 
peu. lis me mariérent done avec empresse- 
ment á un marchand fort riche, mais fort 
laid, et qui aurait pu passer pour étre moa 
pére, tellement il était ágé. 

» Mon mariage améliora beaucoup leur 
position ; mais moi je m'aper9U8 bientót que, 
si la richesse, comme le disait mon pére, 
contribue puissamment au bonheur, elle n'en 
constitue pas le fond, comme avait coutume 
de le diré ma mere. 

» J'étais toute jeune, jolie, partant encune k 
goúter aux plaisirs de la vie, mais sans 
aucune expérience. 

» Mon mari, pour se faire pardonner sa 
vieillesse, me comblait de présents ; je luí en 
savais gré, mais cela ne luí sufBsait pas ap- 



*- 
^ 



30 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

paremment, car il se plaignait toujours de ce 
que je ne Taimáis pas assez. Moi, je ne savais 
pas comment faire pour le lui faire croire; 
n'ayant jamáis aimé, je ne pouvais méme pas 
simuler l'amour pour lui prouver ma recon- 
naissance !... 

)) II avait un jeune ami qu'il aimait 
beaucoup, et il m^en parlait toujours ; il me le 
montra une fois par la croisée. La beauté de 
ce jeune homme me captiva tout d*abord; 
toutes les fois que jt Tapercevais depuis, je 
sentáis pour lui un je ne sais quoi, que j*a1 
appris depuis étre lesefFets d'unviolent amour. 
II parait que mon mari entretenait aussi 
souvent son ami de moi, de ma beauté et de 
son amour, á tel point que ce jeune homme 
devint amoureux de moi, rien qu'en enten- 
dant faire mon élogé, en méme temps que 
moi je deveriais amoureuse de lui en le 
voyant, 

I) II est inutile de vous diré par quels 
moyens il parvint, aprés beaucoup de peines 
et de patience, á tromper la vi gi lance et á 
endormir la jaiousie de mon mari. Deux 
coeurs qui se cherchent se joignent toujours 



r 



malgré tous les obstacles. Sachez seulemenc 
qu'ií ¿tait beau et que je Taimáis plus que U 
pruneile de mes yeux, oú soa image ¿tait 
perpétuellement empreinte. 

» Je lui aTais donné mon ame, ¡e m'aban- 
donnai á lui :... 

» Pendant quelque temps tout alia bien; 
moa mari était eatisfait de me voir belle de 
jeunease, de fraicheur et de santé; monamant 
m'aimait tous les iours davantage ; i'étaie 
heureusel.,. 

D Hélaa t le bonheur n'es 
ce monde périssable! 

B 11 était convenu entre n 
C]ue lorsque le rideau d'unt 



t pas éternel dans 



ion amant et moi, 
! certaine fenétre, 
qui avait vue Eur son ¡ardia, ctaíc blanc il 
pouvait sansdanger venir me teñir compagnie, 
mais. que, si ce rideau était rouge, cela 
voulaítdire que mon mari se trouvant á la 
naieon, il a'abstint de venir chez moi. 

» Uo jour done, aprés le départ de moa 
mari, je venáis de déployer ie rideau btanc, et 
i'attendais mon amant : j'entends tout k coup 
frapper k la porte et je vois mon mari entrer, 
pále, d¿fait, appuyé sur le bras de l'euauque 1 



O :» 

S3 



32 



I.ES FOLK-LORES EN ¿GYPTE 



Pris d^un malaise subit, il avait quitté sea 
affaires et son magasin et était venu á la 
maison pour se reposer et se faire soigner. 11 
avait Tair si malheureux et si effrayé, que 
prise de pitié, malgré la contraríete quUl me 
causait, je me mis á lui prodiguer mes soins. 

)) Le lit étant prét, il s*y cducha et s'en- 
dormit, enmepriantde lélaisser seul. Je décidai 
alors d'aller au bain pour passer mon temps, 
mais la contrarióte oü j*étais me fít oublier de 
ployer le rideau blanc et de dóployer le rouge. 

» Pendant que j'étais absenté, mon amant 
entra comme de coutume par la terrasse; 
Yoyant quelqu^un au lit, et croyant que 
c*était moi, il s^approcha et m^appelant par 
mon nom, il voulut me réveiller. 

» Mon mari entendant la voix d^un homme 
dans le harem et reconnaissant son jeune ami, 
iut d^abord surpris, mais devinant tout son 
malheur, il sauta sur ses pieds et profítant 
du moment d^étonnement qui s^empara de 
mon amant qui, au lieu de me voir sortir de 
dessous les couvertures, voyait devant lui 
mon mari, il le saisit, le jeta dans une grande 
caisse qui se trouvait ouverte et vide á la 




PERSANS, INDIENS, ARIENS DE L EST 33 

* 

tete du lit \ abaissa le couvercle et ferma la 

caisse á clef. *-^ J 

)) II faut croire que cette excitation, en luí — : 

tournant le sang, produisit une réaction salu- "^ I 

taire; car ayant appris du jardinier que j'étais CC S 

allée au bain, il s'habilla á la háte, sortit de — J 

lamaison, en ferma la porte á clef et vint ¡2 1 

m'attendre devant l'entrée du bain. 

» Lá il arrétait toutes les femmes qui y 
entraient et leur disait : 

» — Dites á ma femme, une telle, de sortir 
sur l'heure, j'ai besoin d'elle. 

» Son air, sa voix et ses gestes étaient 



cj: a 



c :> 



ZZ .3 



I. Caisse dans laquelle on renferme les mate- ^ -^ 

las, draps, tra vers itts, couvertures, etc., pendant Qc :t 

le jour. Dans beaucoup de maisons ce sont des ti *^ 

armoires placards qui servent k cet usage. ^ ^ 

Les lits en fer ou en bois n'exisfent pas ou 
plutót n'existaient pas en Égypte. Le soir venu, 
on étend des mátelas á terre, au milieu de la Ijt J 

chambre, on les couvre des draps de lit, couver- 3 Z 

tures, etc., on s'y couche. Le jour, ees mátelas et ^ - 

íous leurs accessoires sont roulés et enfermes dans 
des armoires, des caisses ou déposés aínsí roulés 
dans un coin de la chambre. C'est aínsí qu'il n'y 
a pas, á proprement parler. dans tes maisons 
orientales, de chambre á coucher telle qu'on en 
voit en Europe. 



34 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

^■^^^^i.^^1^.^.— — ^— I ■ ■ ■■■^■■■■■» I ■ ■ IM ■■■■■■! I^P^-^^^W^M^^^M^^i^^^^^^— ^ 

empreints de tant de colére et de jalousie, 
qu'il se rendait ridicule: quelques-unes de 
ees femmes s'en eíFrayaient et se sauvaient le 
prenant pour un fou; d'autres l'excitaient á 
causer et toutes entraient au bain en riant et 
en se moquant de lui ! 

)) La premiére qui pronon^a mon nom et 
fit tout baut la commission de mon mari me 
fit souvenir du rideau blanc et de ma négli- 
gence. 

)) Les commissions se succédérent rapide- 
ment ; bientót mon mari devint le seul sujet 
de conversation des femmes réunies dans le 
bain. Heureusement qu'aucune d'elles ne me 
connaissait. Je m'imaginais aisément ce qui 
mettait en fureur mon mari, mais ne sachant 
pas les détails de l'afiFaire, je résolus de les 
connaitre tout d'abord. 

)) Faisant done semblant de ne point m'inté- 
resser á ce qui se disait au bain, comnie si 
cela ne me regardait pas, et cachant mon 
trouble, je »sortis dans Tantichambre oü je 
trouvai une pauvre marchande de pois- 
chiches. 

» — Ma bonne mere, lui dis-je, préte-moi 



1 



PERSANS, INDIENS, ARIENS DE L EST 35 



tes habits et ton panier, pour une demi- 

heure, au plus ; garde mes eflfets ici jusqu'á ^ ^ 

ce que je te rapporte tes eíFets et ton panier, 



Z 2 



:> 



ainsi que le prix de son cohtenu au double \ 

)) La vieille consentit sans vouloir en savoir C¿ i 

plus long; elle se dépouilla de ses guenilles — ^ 

dont je me revétis et, ainsi travestie, je sortis S Z 

dans la rué. 

)) J'aper^us mon mari qui écumait de rage 
et maudissait les bains et toutes celles qui y 
allaient. Je courus á la maison. 

» Dans sa précipitation, mon mari avait 
oublié la clef de la porte d'entrée dans la 
serrure. |i— — 

)) J'entre, je monte dans ma chambre, Cx % 

i'entends des gémissements ! Je savais qu'il Lx 3 

n'y avait personne dans la maison ; je pris — ü 

peur et je me disposais á envoyer le jardinier 
chez mon amant pour me tranquilliser et 
apprendre de lui ce qui s'était passé !... 
Mais, p surprise ! j'entends distinctement ! 
Je ne me trompe pas !... c'est de dedans 
la grande caisse que sortent ees gémisse- 
ments! ... 

» Au nom de Dieu clément et miséricor- 



u. j 



30 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

dieux 1 dis-je, en ouvrant la caisse, dont la 
clef n'avait pas été ealevée par moa mari. 

» Malgré mon émotion, j'éclatai de rire!..' 
c'était moa pauvre a mi, affaissé sur lui- 
méme, manquant d'air et prét á expirer !... 

)) L'ánesse de mon mari venait depuis la 
veille, de mettre bas un charmant petit ánon ; 
mon ami et moi nous transportons ce petit 
ánon dans ma chambre, le plagons dans la 
caisse oíi nous l'enfermons. 

)) Mon ami s'en retourna chez lui, pour y 
attendre mes ordres et moi-méme je retournai 
au bain aprés avoir fermé la porte de la 
maison. 

)) J'aper^us mon mari qui querellait mon 
eunuque ; en me voyant entrer au bain, il s'ap- 
procha de moi et sans me reconnaltre, me 
pria de diré a sa femme, une telle, de sortir 
sur l'heure, jurant Dieu et le Prophéte qu'il 
la tuerait avant le soir ! 

)) J 'entre au bain je me déshabille, reprcnds 
mes habits, regle la vieille marchande, et 
suivie de mon esclave, nous sorteas en- 
semble. 

» Des que moa mari m'aper^ut : 



ijL- J 



PERSANS, INDTENS, ARIENS DE l'eST 37 



)) — Oü es^tu ? s'écria-t-il en m'accablant 
d'injures, ix*as-tu pas entendu mes ordres ?... w^ j 

)) — Avez-vous perdu la tete ? lui dis-je, en 
I'interrompant, étes-vou8 devenu fou ? ou 
votre maladie vous a-t-elle enlevé votre juge- C¿ 5 

ment, pour m'injurier ainsi sur la voie — J 

publique ?... ^2Í Z 

)) — Tu me donneras des conseils quand tu ^^ ¡j 

te disculperas, si tu le peux. Allons á la mai- XT z 

son! s'écria-t-il. Et tout en marchant devant ?^ í 

moi, il criait, gesticulait et donnait cours á sa -— " 

fureur sans toutefois s'adresser a moi. ^ - 

)) Je le suivis en silence. 

» En arrivant á la maison, il m'y enferma ►— Z 

et alia quérir le cheik de la rué et plusieurs ^ J 

de ses voisins et amis. U. 3 

)) Tous arrivérent ensemble : ils allaient. ZS « 

suivant ce que leur disait mon mari, étre 31 5 

témoins de ma honte, de ma confusión et de 
mon divorce. 

)) La maison done se remplit d'hommes et 
tous montérent au harem. J'étais retirée dans 
un coin de ma chambre, couverte encoré de 
mes voiles et me parlant á moi-méme de 
maniere á étre entendue de tous. 



J 



38 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

» — Pauvre homme I disais-je, qui aurait 
cru qu'une indisposition si légere p^t fairc 
perdre la raison á un homme si sensé I Que 
me veut-il ? Pourquoi me maltraiter ainsi ? 
Je l'avais laissé se reposant. aprés l'avoir 
soigné; je vais au bain, il y vient pour m'en 
arracher ! pourquoi ? Pourquoi me couvrir 
d'injures et de honte ? Pourquoi me donner 
en spectacle aux hommes dans ma propre 
maison, dans mon harem ! Helas ! helas ! il 
faut qu'il soit devenu fou !... 

)) Mon mari était en un tel état de surex- 
citation qu'il paraissait réellement fou et 
atteint de la fiévre chaude. Quelques-uns de 
ses amis lui conseillaient de se calmer; cela 
le rendait encoré bien plus furieux. 

)) — Entrez ! entrez ! s'écriait-il, ne vous 
laissez pas attendrir et apitoyer par les 
doléances mensongéres de cette femme 
perfide ! Vous verrez, vous verrez si j'ai tort 
de vouloir répudier cette femme éhontée 1... 

)) Lorsque tout le monde fut dans la 
chambre, il ouvrit la caisse !... Le petit ánon 
leva la tete et agita les oreilles, respira 
bruyamment et commenga á braire.Quant á mon 




tnari, sa colére ne connut plus de bornes; il 
su precipita sur moi et m'auraic, par le 
Prophéte, étranglée. si je n'nvais crié de 
toutea mes forces : Arrétez ce fou ! au nom 
de Dieu. il va me tuer ! et si on n'était réelle- 
ment vcnu k mon secours poiir m'arracher 



» II paraissait pris d'un acc^s de folie 
furieuse: il écumait de rage, et articulait des 
mots iníntelligibles. 

)) On le garrotta solidement et on le déposa 

B — Gardez-le ainsi, me dii le cheikh de la 
rué; et s'il ne se calme pas d'ieí á demain, 
nous le m&nerons i la maiaon des foua 1 Que 
Dieu Ten preserve et nous aussi ! 

B — Pauvre homme ! pauvre frére I 
disaietit scs amis, quelle mauvaise maladie I 
Dieu veuilie qu'il a'en guérisse ! — Sa 
femme cst si ¡olie, disaient d'autres, qu'il 
n'eat pas étonnant qu'il soit ialoux mjme 
d'un ánon ! — Qui a pu mettrc cet 
átion dans cettc caisse > se demandaient les 
uns. — !1 devait avoir la herlue, et il a pris 
l'ánon pour un homme ! répondaient les 



> - 
oí 

23 



40 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

autres. — Pauvre ami ! un si excellent 
homme ! si sensé ! A quoi tient done la santé 
et la raison d'un homme ! 

)) — Que Dieu lui vienne en aide ainsi 
qu'á nous ! ajoutaient tous, en quittant les 
uns apres les autres le harem et notre 
maison. 

)) Aprés une légére maladie^ mon mari 
s'étant remis, ses amis supposérent qu'il 
croyait que toute celte aventure n'était qu'un 
cauchemar, un mauvais réve. suite de sa 
maladie. Comme il n'en parlait jamáis, 
personne ne luí en parla. 11 semblait avoir 
tout oublié. 

)) II mourut un an aprés. Je puis certifier 
cependant, qu'il savait fort bien á quoi s'en 
teñir sur la véracité de cette anecdote et de 
ses souvenirs, car je n^ai jamáis été si bien 
surveillce et gardée de si prés, choyée et 
honorée, que pendan t cette année-lá. 

)) Que Dieu lui pardonne et le recompense I 
Car la fortune qu'il me laissa.me permit de 
me marier avec un homme que j'aime et qui 
me rend mon amour ! )) 



- C-est a vous, dit 


le Kadi, e 


n s'adreasant 


gi 


cdle qui avait mia 1 


pied sur 


a piéce d'or, 


nous raconter votre 


anee dote 1 




2: 


— J'entenda et 


'obéis. m 


Dnseigneur 1 




épondil-elk, et elle parla ainsi 




Sai 


'( J'étais toui d'abord et des 


ma premiare 




eunesse raariée á un 


Ture, fort 


bel homme, 


3 = 


-nais qui a toujours e 


u le défau 


de me faire 




Deur. Sa vue aeule-m 


rempliss 


it d'effroi et 


ci 


orsqu'il rae parlait 


quoi qu 


;i fit pour 


>- 


doucir sa voix et son 


regard, 


-non aang se 




^iflíait daña mes vein 


es I 




Q!- 


» Encoré aujourd'h 


ui lorsqu 


¡e pense k 


¡J.3 


es moustaíhes, Jong 


es d'une a 


una, et i Ees 


3Z 



défendre d'uo sentiment de frayeur, qui me 
saisit malgré moÍ 1... 

u II passait lout son temps á la guerre, et 
lorsque la paix luí donnait des loisirs, il lea 
employait á la chasse des bétes feroces 1 

» Ges longues absences n'étaient pas faitea 



42 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

pour m'accoutumer á luí, et moins encoré 
pour me le faire aimer. Chaqué fois qu'il 
revenait d'une de ees longues expéditions, il 
me semblait voir en luí un étranger ! 

)) Vous devinez aisément que pendant une 
de ees absences je devins amoureuse d'un 
jeune homme qui me faisait depuis long- 
temps une cour assidue et muette, car j'étais 
bien gardée ! Les serviteurs et les esclaves de 
mon mattre et seigneur tremblaient tous 
devant lui, et lorsqu'il était absent, ses 
ordres ctaient exécutés a la lettre, son nom 
et ridée de son retour ayant la faculté de les 
teñir en respect comme s'ils étaient en sa 
présence. Malgré ce sentiment de terreur 
qu'il leur inspirait, ils lui étaient dévoués et 
fidéles jusqu'a la mort, parce qu'il était 
généreux et grand seigneur ! Ainsi done, 
tant qu'il était á la maison, je ne pouvais 
penser á encourager les flammes discrétes de 
mon amant, et lorsqu il s'íibsentait, j'étais 
moins encoré dans la possibilité de le faire, 
étant gardée par des gardiens dévoués á notre 
maitre commun ! 

)) Je me consumáis, cependant, d'envie de 



son de sa voix ! De quellea inventiors l'esprit 
d'une femme tourinentée par l'amour n'eat-il 
pas capable ?■■- 

u Je trouvai le moyen de lui faire savoir 

» Le lendemain, il se traveatit en mendíant, 
et passa sous mes fenétres en chantaat. Sa 
voix me le rendil encoré plus cher que sa 



.11 



1) TI prit l'habitude, tous les 
pasaer íi la méme heure devant mt 
et de chanter des vers brülants d'a 
composait en mon honneur. 



latins, da 
I fenétres 



oUnr 






mari, k la fenétre devant laquelle mon amant 
devait passer, et que ¡e lui serváis i déjeuner, 
j'enCendis !a voÍx du faux mendianl. Jesavais 
que mon mari étalt d'humeui agréable,)e me 
hasardai á tui parler sans avoir été inler- 
pellée. En rcprimant done les battements de 
mon cceur, qui battait b. se rompre daña ma 
poi trine : 

« La chanté de mon seigneur est connue de 
tous, dis-je; i. sa porte se nourrissent et 



44 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

vivent tous ceux qui s'y présentent. Faites 
que ce paüvre mendiant qui a Tair si mise- 
rable soit satisfait et vous doive la vie, tout 
en vous bénissant I 

» II regarda par la fenétre, vit le mendiant 
et m'ordonna de luí faire donner á manger; 
puis il s^habilla et sortit. 

)) En sortant, il ordonna á son majordome 
de nourrir ce pauvre, matin et soir, chaqué 
fois qu'il se présenterait á sa porte. 

)) Quelques jours aprés, mon amant averti 
de l'absence de mon mari, se presenta fort 
tard á la maison; on me prévint de Tarrivée 
du pauvre, que j'avais pris sous ma protec- 
tion spéciale. Je luí fis porter quelques mets 
et du pain comme decoutume. Comme j*avais 
envoyé ees mets de ma table, les plats étaient 
d 'argén t. 

)) En méme temps, j'envoyai le portier 
faire une commission á Tautre bout de la 
ville. Lorsqu'il rentra, il crut le pauvre partí, 
ferma la porte et se coucha. Vers minuit, 
mon mari rentra aussi, et me trouvant 
couchée passa dans ses appartements sans 
me réveiller. 



n Le matin ie me tevai svant lui; je n'avaia 
pas fermé l'ceil de la auit. La terreur oü 
j'élais d'avoir retenu le pauvre par des signeB 
et de l'avoir empÉché de partir, et le Benti- 
ment que morí amaat ¿tait si pr¿s de moi, 
m'avaient empéchée de dormir. 

n Je fus dans la chambre de moa mari et 
preaant un air e£Eray¿, qu'íl ro'était facile de 
coDtrefaire, tellement j'avais peur, je le 
réveillai et me plaigniB aro¿rement du por- 
tier qui avait, disais-je, laiseé le mendiant 
dans la cour de la maiaon durant toute la 

u Ce portier est ia6dMe et négligeat, ajou- 
tai-je, mais le mendiant eat heureusement 
honnéte; qu'il plaise k votre aeigneurie de 
V0U8 lever, vous le verrez endormi, et pour 
ne pas perdre lea plats d'argent, voyez comine 
il les a mis bous sa tete. C'est incontestabte- 
ment un honnéte homme qui a plus de aouci 
de vos biens que le portier, et comme 11 est 
dans le besoin, je vous prie et vous supplie 
de chasser le portier et de coofier sea fonc- 
tions á ce mendiant, toutefois si vous le 
jugez convenable. Je n'ai plus de conñance 



2 = 



C/1 

S3 



46 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

dans le portier, et j'aurai toujours peur, 
surtout lorsque vous ne serez pas ici pour 
me rassurer et me défendre au besoin !... 

» Tout mon discours était entrecoupé par 
des sanglots; je pleurais et me lamentáis si 
fort, que mon mari, soit qu'il crútque ce que 
je disais était sincere, soit qu'il fút touché de 
mes pleurs, me promit d'aviser. 

)) II fit une enquéte sévére, qui le persuada 
que le portier le trahissait ! II le chassa, et 
proposa au faux mendiant de le remplacer. 
Celui-ci accepta avec reconnaissance. 

)) Le soir du méme jour, mon mari devant 
sortir, le nouveau portier Tarréta respectueu- 
sement et aprés avoir obtenu la permission 
de parler, il s'exprima ainsi : 

» — O mon maitre ! la ville est pleine de 
gens mal intentionnés, et je suis nouveau 
dans votre palais; permettez á votre esclave 
de prendre un mot d'ordre pour qu'au milieu 
de la nuit, lorsque vous rentrerez, je puisse 
vous reconnaitre et ne point ouvrir la porte 
au premier venu qui imiterait votre maniere 
de frapper; car, sachant que je ne suis que 
d'aujourd'hui au service de monseigneur, on 



e manquera pas de vouloir me nuire 

I) -Mon raari parul trouver l'idée bonnt 
I) — Quel mot prendrons-nous ? dcm. 



II — Kischke', répondit 
ua mot difficile ct pas 

" — Soil, ¡dsckke ! repril moi 
LÍant, et 11 disparul dans Torabre di 

» Sous pretexte que le portier étai 
moi de mon cóté ¡'enferma! les filies de 
Service, excepté raa coafidíote, qui étaic ma 
sceur de lait, dans leur appartement. Je 
donnai les ordres les plus sévéres, au faux 
portier, d'enfermer de son c6té lea esclaves 
míiles, Qunnt au^ autres domestiques, les 
uns sortircnt pour aller chez eux, les autres 
furent enfermes dans los communs et avant 
que le Mouezzine n'eüt annoncé la priére du 
soir ' nous étions libres de nous voir !... 



2: 

«a: 



~3 

UJ 



I, Sorte de pain d'orge ou de froment Irempé 
dans du lait cailLé el durci dont on fait une 
soupeou pSle el que les Tures appellenlWicAííír. 

1. Une heure et demie aprés le coucher du 



48 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

)) Vers minuit le maitre frappa k la porte. 

)) — Qui va lá ? demanda le faux portier. 

» — Moi I répondit mon mari. 

)) — C'est bon; avez-vous le mot d'ordre ? 

» — C'est juste I dit mon mari; puis aprés 
un moment de silence : peste soit du mot 
d'ordre et de toi ; je Tai oublié, le mot d'ordre ! 
ouvre ! 

» — Passez votre chemin, répondit le 
portier tranquillement, et il yint me retrouver. 

» Nous le regardions par la fenétre; il 
paraissait fort en colére, mais fort empéché, 
ne sachant á qui s'en prendre. 

» En ce moment, un passant attardé vint 
á traverser la rué ; mon mari l'arrétant : 

)) — Hé, l'ami ? lui dit-il, en mauvais árabe 
et comme s'il lui cherchait querelle, íomment 
nommez-vous cette chose qui se mange, qui 
n'est ni du riz, ni de la farine !... on en fait 
une soupe !^.. 

)) L'homme interpellé si brusquement ne 
savait que repondré : mais... mais... de la 
farine... du riz... balbutia-t-il. — puis 
croyant avoir afifaire á un fou ou á un mal- 
faiteur, il prit ses jambes á son cou et se mit 



49 



k courir comme un dératé, sana regarder 
derriére !ui, malffré les impreca ti o oh et lea 
appcls da mon marr. 

n Celui-ci aurexcitá par la fureur, mala 
impuissant contra la solidité da lo porte et 
l'entétement du portier, craigoant d'aillaura 
de causer du scandaje tn faisant du bruit, 
attcndit bon gri mal grc jusqu'au petit ¡our. 
Eañn, á ce momcot un marchaod de kisckhe 
vint á passer. 

B Commant nommEs-tu ce que tu vcnds ? 

II — Kiackke I répondit le niarchand 
. eSrayé. 

u — Kisckkel kisc hice. 'a'écr'tB mon maii, en 
frappant á coup3 redoublés sur la porte. 

B Le fauK portier ouvrit aur le momcnt. 

II — Monaeigneur rentra bien tard, lui dit- 
il, aprís lui avoir sauhaité le bonjour Belon 
son rang; il serait prudaut,. une autre £013^ 
de voua faire accompagnei!' par un da vos 
esclavcs et d'une lanteme. 

» Quoique mon mari éaomát de rege, 
voyant la tranquillit¿ du portier, il ne lui 
parla pas et monta droit dans ma chambre. 



c > 



50 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

)) II me trouva réveillée, assise á causer 
avec ma soeur de lait. Des que je le vis 
paraitre, je me levai et me mis en devoir de 
le servir et de le déshabiller. Je lui racontai^ 
pendant ce temps, que toute la nuit, des 
voleurs, sans doute,... si ce n'est des 
assassins,... en tous cas, des bandes de 
vauriens avaient essayé de tromper la vigi- 
lance de son nouveau portier, mais que celui- 
ci avait fait son devoir ! Je lui contai ensuite 
toutes les précautions qu'il avait prises contre 
les accidents, tels que : vol h Tintérieur de la 
maison, incendie, etc. Je fus si aimable, je fis 
tant et si bien, qu'il se dérida, sa colére se 
calma, il convint méme qu'il avait un portier 
excellent I... 

)) Quant á moi je ne me reconnaissais plus, 
tellement ma frayeur m'avait enlevé le sen- 
timent de la peur que j'éprouvais naguére á 
la seule vue de mon mari I 

)) II eut la bonté de me diré qu'il me trou- 
vait fort á son goüt et de m'en donner des 
preuves certaines I 

» Tout avait si bien réussi que notre bon- 
heur nous paraissait devoir durer long- 



r 



tempsl... Mai6 pense-t-on, quand on esc 
heiireux, que tout a une ün daña ce monde 



1) Les esclaves et la domescicité. jaloux de 
l'ascendant que prenaít moa amant sur leur 
maltre, finirent par dícouvñr notre intrigue 
amoureuse, et vendirent ootre secret au 
maitre; celui-ci nous surprit I... tua moa 
amant!... Et partit pour faire la guerre aux 
mécréants 1 » 



La seconde femme alia reprendre sa place 
aprés avoir terminé son anecdote, croyant 
avoir plus intéressé le seigneur Kadi que la 
premiÉre. Celui-ci, sans laisser devíner les 
impressions qu'il reasentaic, se tournant vers 
la iroisitme femme : 

n A VOU3, ma filie, dit-il, de nous raconter 
la plus intéreasante anecdote de votre vie. » 

La plus jeune des trois amies se leva et 
prenaat la parole, commen;a son récit en ees 



> - 
^ 3 

LL J 



52 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

<( J'étais mariée á un Ture, collecteur des 
taxes dans une préfecture. Son service Tobli- 
geait k s'absenter tres souvent. Pendant oes 
absences, j'étais libre de recevoir mon amant. 

» C'était un jeune homme beau comme le 
jour, aimable, fort, bien fait, plein de condes- 
cendance pour moi et toujours prét á satis- 
faire mes moindres désirs! Pouvais-je ne pas 
Taimer ? 

)) Son seul défaut était qu'il dépensait 
beaucoup, sans savoir gagner de Targent 
pour subvenir á ses goúts. Mais qui n'a de 
défaut ici-bas I... d'ailleurs je Taimáis et il 
me le rendait au centuple. 

JD Un jour mon mari rentra de la préfecture, 
prepara son baudet, remplit sa be^ace de 
papiers de service et de vétements et me 
demanda si je pouvais lui donner du pain et 
quelques aliments pour la route. Je lui donnai 
tout excepté le pain, car ayant finí notre 
prpvision, la négresse était en train d'en 
pétrir pour une nouvelle semaine qui com- 
men^ait. 

)) Mon mari étant tres preasé de partir, et 
ne pouvant attendre que le pain fút en voy é 



53 



au four et cuit, a'en alia au marché pour s'en 
procurer. II laissa le^ baudet tout báté daña 
r&urie, devant la mangeoire. 

» J'étais 1á k attendre dans la cour le 
retour de mon mari, lorsque tout i coup je 



I) — 11 me faut, dit-il, de suice troia o 
quatre cents piastresl 

» — Par le Prophéte je n'en ai pas, lui dií 
je; oü veux-tu que je les premie t et sachat 
l'usagE qu'il en voulait faire, je pris un ai 
ide. 



I) — Hé bien, ma aceur, reprit-il, par Dieu, 
vais prendre. le baudet de ton mari et U 
¡ndre. J'en aurai ce qu'il me laut absolumentl 
O — Ne faia pas cela, par le Prophéte, 
'écriai-je en colére, ta ne le prendraa paa, 
ne le vendrás. Mon mari va partir k 
beaoin de son baudet I 



faire 



rinatant et 
»-Que 
a'écria-t-il. II 
pria si instamr 
toiremenC que, 



. de Dieu! 



air si malheureux, me 
le déraontra si péremp- 
it argent, i! étail perdu, 

qu'á bout d'arguments je ne résistai plus, et 

lui taiasai emmener le baudet. 



(=3 

>- 
t " 

Sí 



54 L.ES FOLK-LORES EN EGYPTE 

» Bientót aprés mon mari entra. 

» 11 alia á Tétable, il vit la tétiere pendue á 
un clou, le bát et le bissac á terre, mais de 
baudet, point!... 

» — Femme, qu^est devenu mon áne? 
s'écria-t-il. 

» — Mon ami, lui répondis-je tranquille- 
ipent, il vient de sortir et m^a dit qu'il allait 
teñir audience dans le Mehkémeh de tel 
village, et je lui nommai un village á 
environ une demi-heure de distance de la 
viile oü nous demeurions. 

» — Te moques-tu de moi!... commenga- 
t-il avec fureur, lorsque Tinterrompant : 

» — A Dieu ne plaise I repris-je, suis-je 
capable de te tromper I D'ailleurs, Toserais- 
je que ton esprit est trop éclairé pour se 
laisser prendre á mes grossiéres et falbles 
inventions; mais le fait est que je suis tres 
étonnée que tu ne te sois pas apergu, ou que 
tu ne saches pas que ton baudet est enchanté, 
qu'il se transforme de temps á autre en 
Kadi I 

» — AllahI... Allah! fit mon mari. 

)) Sans lui laisser le temps de parler ni 



r 



de réfléchir el rinCerrompant de i 

B — La preroiére foÍs que ¡e v¡a sortir un 
hommede notre maiaon, ¡'en ai eu unt peur 
effroyable, ne l'ayant pas vu entrcr d'abord. 
et ne le conaaisaant pas m¿me de vue, ¡'ai 
pensé perdre mea sensl... II me aoutint et 
m'empéchant de tomber, il me dit avec 
beaucoup de bonté : — N'aie paa de crainte, 
ma filie; je suis un malheureux Kadi, que de 
méchanta sordera, sans doute par vengeance, 
ont transformé en áne. Je o'ai aucun recoura 
contre mea ennemia, ne connaissant paa leur 
Science occultel Je doia ainsi vivre, tantót 
áne, tantdt Kadi, selon que je suis ea liberté 
ou occupé de moa ministtre, juaqu'á ce qu'il 
plaise k Dieu de me délivrer dea incaatations 
de mes enaemisi Au nom de Dieu, ne me 
maltraitez pas, et surtout n'en parlez h ■ 
personne; car si votre marí coanaiasait mon 
secret, comme c'est un homme d'une religión 
éclairée, il me vendrait pour ne ríen avoir de 
diabolique en sa poasessionl 

» Ce diaant, il panit, me laissant daña une 
grande perpleiité. Devaia-je te cacher le 



LES rOUe-LORE6 SN ¿GYPTX 

mystére de ton baudet, mói qui n'ai ríen de 
caché pour toi? ou devais-je te le dévoiler, 
comme c'était mon devoir de femme bonne 
musulmane? Par ie Prophéte, j'étais embar- 
rasséc! 

y> Je me décidái cepcndant k ne point t*en 
parler, pour ne pas t'obliger á vendré un 
baudet qui te convenait ; d'abord c*était un 
joli et bon animal, jeune et vigoureux, «t 
puis, le cas échéant, 51 aurait pu te donner un 
bon conseil legal ! D'ailleurs, il paraissait 
redouter que tu ne t'en défasses, et il avait 
raison, car oú aurait-il trouvé un meilleur 
maitre que toi?... 

» Pendant que je parláis ainsi sans désem- 
parer, mon mari ne pouvait cacher son éton- 
nement, lorsque je m'arrétai. Aprés un 
moment de silence et de reflexión : 

» — Que faire á présent, dit-'tl ; je ne puis 
cependant attendre que cet áne-kadi fínisse 
ses audi enees ; il me faut partir. 

l> — Voilá, repris-je, ce que je ferais, si 
j'étais de vous; cependant vous étes inconr 
testablement plus intelligent que moi, vous 
avez sans doute trouvé un moyen !... 




[NDtENS, AklíIíS t 



■íy 



» — Voyons ton avis, reprit faon mari avec 
impatience, comme j'avaís cessé de parler. 

» — He bien 1 dis-je, vous ¡rez au vilJaye 
oü siége ce Kadi; vous lui feraz, par signes, 
comprandre qua vous avez besoin da ses 
Services comme baudec. II vous comprendra 
et vous suivra, car ees sones de malheureuit 
sont touiours plus anes que tadis! 

« L'idée lui plut et il partit. Au moment oíi 
i! sortail de la maison, je lui criai de prendre 
avec lui une poignéc de fóvca, parce que. 
ajoutai-ie, s'il a l'air de na pas vous obéir 
vous luí montrercz aa nourrilure favorita, de 
telle sorte que si vous n'avez pu ramener par 
la persuasión, voub vous en randicz maicre 

natures de voLrc monture enchantée. Mais 
tfoi'idez-voua da.as toua les cas de le maltraiter ; 
áne et Kadi, il est doublement tétü et vin- 
dicatif I 

» Lá-dessus il pan, arrive au village, enire 
dans la salle d'audieoce du JVlehkémeh oú le 
Kadi siígeait. 

i> Le Kadi voyant qu'un Ture, qu'il recon- 
nut .sans doute pour appartenir íi la préfec- 



58 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

ture, luí faisait des signes qu^il ne comprenait 
pas, crut qu'il voulait lui parler en particulier, 
s'imaginant déjá que c^était une communi- 
catión importante que le préfet lui envoyait 
faire par ce Ture. II se leve et suít mon mari; 
celui-ci satisfait du succés marchait devant 
lui en lui montrant les féves pour mieux 
l'amorcer, pensait-il. 

» Des qu'ils furent dans le pas-perdu : 
» — C'est bien mon ami, lui dit mon mari, 
croyez que je suis bien fáché de la sorcellerie 
qui vous tient enchanté, et certes ce n'est pas 
pour vous contrarier; mais je dois partir 
pour service de l'Etat, et je ne puis vraiment 
attendre que tu finisses ta fournée ici. Trans- 
forme-toi done en baudet et partons. 

» Le Kadi, au comble de Tétonnement, ne 
comprenait ríen á ce que lui disait mon 
mari ; il crut le Ture atteint de folie, ou d'envie 
de lui soutirer quelque argent pour s'acheter 
un baudet. Quoiqu'il en soit, pour éviter un 
scandale devant ses justiciables, et plus 
•ncore pour ne pas exaspérer le Ture et le 
mettre en fureur, il résolut de se tirer le mieux 
qu'il pourrait de cette mauvaise rencontre. 







^^1 




1 








— — ---^ 


y 






■ 59 


1 


1 


1) — Vous paraiasez, 


mon makre, 


avoir 



perdu votre baudet, dit-il done h mon mari, 
et désireux de le remplacer; ricn de plus 
juste. Preñez ees trois cents piastres; c'est 
¡our de marché, vous en trouverez k acheter 
á la porte de la ville. Adieul 

n Ce disant, il remit dans la maia de mon 
mari les trois cents piastres et rentra dans la 
salle d'audiencG, prenant un air plus impoi^ 
tant que quand il eo était sorti. 

B Mon mari pensa que c'était par l'efiiet de 
mon indiscrétion, que le charme du Kadi 
s'était dissipé; et qu'il s'était racheté luí- 
méme; il s'en alia, satisfait d'étre débarrassí 
d'un áne cachante et plus ou moins en 
puissance du démon. 

» Le public erut que le Kadi venait d'avoir 
communication d'une afiaire importante, telle- 
ment il avait Tair grave et réfléchi lorsqu'il 
rentra dans son tribunal. 

B Quant au Kadi qui savaít bien avoir été 
joué, il pensait aux moyens qu'il eroptoierait 
pour se faire rembourser en exploitant ses 
plaideurs. 

D MoD mari, en arrivaot au marché, aper- 



>-. 
cx'i 



6d les folk-lores en égypte 

9ut ün baudet qui lui parut devoir lui 
convenir; aprés un léger examen il le reconnut 
pour áien; le repoussant avec mépris : 

» ^— J*ai bien besoin d'un baudet, s'écrfa- 
t^il, mais cela ne sera pas toi; car, tant5t 
Kadi, tantót baudet, tu ne peux faire mon 
affaire 1 

» II en acheta done un autre, vint me 
conter ses aventures, m'embrassa et partit. 

» Tout le monde fut done satisfait. 

» Mon amant eut Targent dont 11 avait 
besoin. 

» Mon mari se procura un meilleur baudet 
sans bourse délier. 

» Et le Kadi volé trouva un pretexte pour 
amener sa conscience á composítion et gagner 
sur ses administres le double de ce que ce 
damné Ture lui avait extorque! 

X> Et moi, seigneur Kadi, je duis aussi 
satisfaite parce que je vais avoir la piéce d?ür, 
en vous promettant de ne plus conter cette 
anecdote ; ce qui vous remplira, j^ose Tespérer, 
de fifltififaction. d 



r 



fl 



Le Kadi lui remil la p¡Éced'or, prit a 
a promeaae, et jura de ne plus doone 
emmes la liberté de la parole '. 



ex: 



dar Turkman dans son lívre Shamsah Kahkaha, 
ou Mahboub el kíloub. Ce come se trouve tra- 
duit en angiais daos Peniaa fartrails F. F. Arbu- 
Ifinot. M. R. A. Sv Bernard Quaritch Lon- 
don, 1887. 




ce» 



— 3 
3: 






LE POT ENCHANTÉ 



T" 



Elles tilaienc du lin 



t gagHient 1 



La plua ¡cune était aussí la plus adroite, 
elle filait toute seule plus que les dcus autrus 
ensemble, et de ttmps en tempa nchelait de 
son propre argent cjuelque choae povir elle- 

Un jour qu'elle revenait du marché avec un 
vieuxpol en albatre.sessceursaindea se mireot 
daña une violente colore et penséreot la mal- 
Ira i ter pour scs extravaiíances. 

Mais le pot était enchanté et la jeune filie 
a avait plus besoin de garder l'argent qu'elle 
gagnait, car, si elle voolait manger, son pot 
en albátre la nourrissait, si elle voulatt s'ha- 



i^ 



Si 

25 

si 

= 3 
U.4 



64. LES FOUÍ-UOItES EN ¿6YPTE 

biller, son pot luí foumissait des vétcracnls ; 
en un mot^ pas un voeu que le pot n^accom- 
plit. 

Craignant la íalousie de ses soeurs. elle 
faisait semblant de virre de ce que ses ainées 
luí donnaient : de leurs restes, et de s^habiller 
de leurs vieiUes nippes ; mais quand elle 
ctait seule, elle se dédommageait, en ayant 
recours au précieux talismán qu'elle possé- 
dait. 

Un jour qu'il y avait une grande réjouis- 
sance á la Cour, on invita les trois soeurs, 
car elles étaient des demoiselles de condition 
et fort presentables, quoique pauvres. 

Les deux sceurs ainées se parent de ce 
qu'elles ont de mieux et vont au palais, en 
laissant leur cadette á la maison pour la 
garder¿ 

Dé9 qu'elles sont partiese la troisiéme sotur 
demande á son pot en albitre un costume 
vert, rouge et blanc, desbÍ70ux étincelants et 
tout ce qu'il faut pour faire bonne figure á la 
féte. 

Ainsi attifée^ elle va au Palais; personne 
ne la rocoanait,. pas méme sea sceurs, telle- 



65 



ment elle est fclataate de beaut¿; elle fut, 
pour ainsí diré, la reine de la féte. 

Quand elle voit que la soirée tire & sa fin, 
elle se sauve, mais, dans sa précipitatioo, en 
traversant la cour du palais, elle laisse tomber 
un de ses bracelete en diamant dans I'auge 
remplie d'eau oü on menait s'abreuver les 
chevaux du roi. 

Le lendemain matin, lorsque les chevaux 
vont i. I'auge, aucun d'eux ne veut en appro- 
cher et touB reculent effrayés. Les palefreníera 
visitent I'auge et y découvrent le bracelet en 
diamant qui, par l'fclat de ses feux, effrayait 
les chevaux. 

Le fila du roi, qui ¿tait présent, considíre 
l'objet et declare á son pére qu'il veut se ma- 
rier avcc la femme k qui appartient ce bra- 
celet. 

Des huissiers parcourent ti 
trouver l'beureuae propriétai 

AprÉs quinze jours de vain 

on Bssaye le braceUt sur le poignet de chacune 
d'elles et on constate qu'il s'ajuste & ravir sur 
celui de la cadette. 



ute la ville pour 

e du bracelet. 
:s recherches, oa 
i trois sceuTs, 



S3 



66 LES P01.K-L0RES BN ¿GTPTC 



Le mariage est annoncé et lea noces com- 
mencent. 

Le demíer jour, aprés que la jeune filie eút 
pris son bain, ses soeurs la coiff^rent et lui 
enfoncérent dans la tete de grandes épingles 
en forme d'aigrette. 

Des que la coiffure magíque fiít terraínée et 
que la derniére épingle fut enfoncée, la jeune 
filie se transforma en tourterelle avec une 
houppe sur la tete et s^envola á tire d*ailes par 
la fenétre. 

Tous les jours elle venait se poser sur la 
fenétre de la cuisine du roí et roucoulait 
tristement. 

Le roí avait donné ordre de la faire prendre 
vivante. Enfin, un jour on parvint á Tattraper 
et un magicien qui se trouvait pour lora k la 
Cour pour soigner le jeune prince qui so 
mourait de consomption et d'amour, reconnut 
sur la tourterelle le talismán. 

II enleva délicatement les épingles et, 
lorsqu'il retira la derniére, la tourterelle 
redevint jeune filie. 

Le prince reconnaissant sa fiancée fut guéri 
aussitót et depuis íls vécurent heureux et 
contents. 









La princesae pardonna k ses si^urs ct les 
pourvut de dot et de marí '. 

I. Comparen avec le conté de Cendrillon. 

En Egyple. dans les appartemenls. les femmes 
voni nu-pieds. la paniouHe de Cendrillon esl rem- 
placée par le bracelet du poignel, et dans d'autres 
coates analogues par le bracelet k la cheville. 




i±3 



LA PRINCESSE TCHERKESSE' 



UN sultán avait une filie qui, lorsqu'elle 
riait, faisait paraítre le soleil dans toute 
sa splendeur; lorsqu'au contraire elle pleurait, 
il tonnait tr¿s fort et pleuvait abondamment. 
Un jour cette filie se mic á travailler au 
métier de tisserand. II luí apparut un oJseau 
qui luí dit : H Que tu travailles ou que tu ns 
travailles pas, tu n'auras jamáis pour mari 
qu'un mort. » La pauvre filie quitta aussitAt 
son métier et se mit k pleurer á chaudes 



larmes. Sa mire 
trouvant sa filie en pleí 
le motif. La ¡eune filie i 

un peu, maÍ3 ne crui 



dans la chambre et, 
rs, elle luí' en demanda 
out éplorée lui répéta 
dit. Sa mire s'attrista 
pas y attacher trop 



I. CircaisUnae. 



70 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

d'importance. La filie se remít au métier, et 
aussitót Toiseau reparut et rcpéta *sa phrase 
cruelle ; c'est alors que la malheureuse mere 
unit ses larmes á celles de sa filie. Tous ceux 
qui étaient dans le palais s'unirent également 
á la douleur de la mere et de la filie. 

11 tonna et plut á verse pendant tout ce 
temps. Le sultán qui était en promenade 
dans la ville s'iaquiéta fort et comprit que sa 
filie pleural t. II voulut en connaitre la raí son 
et s^adressa á son vizir pour lui demander 
couseÜ. Celui-ci lui proposa de rentrer. Us 
rebrou3s6rent aussitót chemin et se dirig^rent 
vers le palais, oü, en arrívant, ils trouvéreQt 
tout le monde ecv larmes et dans la plus pror 
fonde desoía tion. 11 entra chez sa filie et la 
questionna. Elle, pour toute réponse, reprit 
son métier, aussitót l'oiseau apparut et répéta 
d'un air solennel la phrase qu'il avait áéik 
prononcée deux fois. Le p^re pleura á. soxx 
tour et, pour ne plus rentrer dans cette ville» 
il rassembla sa mere, sa femme;, sa. filie et aoix 
vizir, et prenant quelques robes de ees daxnes. 
ainsi que leurs bijoux, ils partirent tous 
ensemble pour les mon tagnes. 



PERSAJlft, INDIJENS, ARIENS DE l'eST 7 1 



Un jour, ils trouvérent sur une monta^ne 
uae immetise porte de c^áteau» Le sultaa, sa 
femme et le vizir essayérent d'ouvrír la porte: 
ce fut ea vaia, ils n*j réussirent point. La 
filie du sultán essaya á son tx>ur de pousser ]a 
porte qui ceda aussit6t d'elle-mSme. La 
princeftse j entra, la porte se referma derriére 
eUe, sans que le sultán ni son TÍzireussent eu 
le temps de pénétrer dans le chá^au. Elk 
n*hésita paa k s^avancer. Elle trouva morts 
tous les étres vivants ou plutót toua ceux qui 
avaient eu vie : homxnes, femmes, chevaux et 
toutes bétes. Elle se trouva ensuite dans une 
belle piéce oú se trouvait un mort roulé daos 
uae riche couverture, tout prés duquel étaient 
utí éventail, un livre et un ciíasse-mouches. 

Elle jeta les yeux soir le livre et lut ce qui 
suit : a Le mort, qui est dans cette chambre, 
» ressuscitera si quelqu'un Tévente avec cet 
» éventail qui est prés de lui et s'il lit, tout en 
» chassant les mouches, dans ce livre pendant 
A trois ans, trois Ixeures et trois minutes. » 

La ieune princesae connaissant aon triste 
aort se mit á. Toeuvre aussitót. Quand elle 
était latiguee, elle se mfittait k la fenétre pour 



73 LES FOLK'LORES EN éCYPTE 

respirer un peu d*air et se donner quelque 
repos. Puis elle reprenait sa pieuse be- 
sogne. 

Un jour qu*elle se trouvait k la fenétre, elle 
vit passer une bohémienne avec sa fílle, elle 
les hela et proposa á la mere de luí prendre sa 
filie contre un superbe coUier qu*elle portait 
au cou. La bohémienne accepta 'et, k Taide 
d'une corde que la princesse descendit de la 
fenétre, la petite bohémienne se trouva dans 
le palais des morts. 

La princesse luí dit alors : « 11 y a trois ans 
que je suis exactement les instructions de ce 
livre; dans trois heures et trois minutes le 
mort ressuscitera ; mais, comme je suis 
fatiguée et que j^ai besoin de repos, je vais 
aller me coucher, et toi, tu me remplaceras 
auprés du cadavre. » Puis elle se retira apr68 
avoir donné les instructions nécessaires á la 
petite bohémienne qui s^exécuta avec bonne 
volonté. 

Les trois heures et les trois minutes 
écoulées, le mort ressuscita. 11 demanda á la 
bohémienne qui était la charmante personne 
qui se reposait lá. Elle répondit que c'était 



une filie qu'elle s'écuít procurée commeaide. 
maiis qui n'avait paa voulu l'aider du loui. 

Le resauscité alia visiter ses nombreux 
domestiques qui se réveillérent tous de leur 
profond sommeil. Puis il ñt enfermer dans une 
pnson souterraine la princesae qui, d'aprfes 
rinjuste accusaiion de la bohémienne, n'avait 
pas voulu l'aider. On ne donnail pour loute 
nourriture k I'infortLinée ñlle du sultán que 
les restes de la domesticíté, qui lai reprochait 
touiours de D'avoir pas aidé k réveiller le 
maitre. 

Le prince du cháteau se maria avec la jeune 
bohémienne. 

Quelque temps apr¿s il eut envié de fajre 
un petit voyage et voulut rapporter á chacun 
un petit cadeau; c'est pourquoi avanl de 
partir Íl demanda k tous ses gens ce qu'íls 
désiraient. II alia méme demander á la filie 
du sultán ce qu'elle souhaitaít. Qle répondít 
que son unique vosu était qu'il fút touiours en 
bonne santé. II la pressa pour luí faire 
decnaader quelque chose, maiS elle persista 
dans son refus. 

II luí dit alors : « Je sora et dans un instant 






74 LES FOLK-U>RES KM E6YPTE 

je reviendrai; si tu ne me demandes pas 
quelque chose, je aaurai ce qu^il me restera á 
faire. » 

U sortit et reviat au bout d'un iostant. Elle 
luí demanda alors : la Ixute de la patience, la 
boite de la douleur et le sabré du sang. Elle 
ajouta que s'il luí apportait ees choses-lk, son 
vaisseau marcherait bien, sinon son vaisseau 
s*immobiliserait. 

n consentit et partit en voya^^e. A son 
retour, il s'était tout procuré, mais il avait 
complétement oublié la commission de la 
pauvre prísonniére. 11 ne s'ensouvint que lors- 
qu^il aper^ut qu'il n'y avait pas moyen de £aire 
avancer son bateau. 11 retourna alors k terre 
et fit Tacquisition des boites et du sabré. 

Arrivé chez lui,il distribuatous les ];»'ésents 
et alia porter lui-méme celui de la prísonniére. 
11 se cacha ensuite derriére la porte de la 
prison pour se rendre compte par lut-méme de 
ce qu^elle voulait faire de ees ob)ets. 11 vit la 
filie du sultán qui pla^a devant elle ees boites 
et leur dit : « O boites de patience et de 
douleur, donnez-moi la patience nécessaire 
pour supporter ma douleur ¡ Puis elle raconta 



7! 



toute son histoire depuis l'appaHtion de 
Toiseau jusqu'a ce momenC-liV. QuanH elle eiit 

£n¡, la boíte de patieoce luí dit ': « O ma prin- 
cesse Tcherkesae, tu dis la v.érité, ton ptre est 
un roí régaant et chacune de tes paroles vaut 
mille dinars (piéces d'or). » 

Lalitledusultanrepnt : «O boltedepatience, 
donne-moi la patience 1 ó sabré avíde de san^, 
traache-moi la tete I m Le sabré se leva, le prínce 
comprenant tout, se precipita et s'emparant 
du sabré, l'empécha de tomber sur le chaste 
con de la noble princesse. 

11 s'empresss ensuite de mettre k la porte 
l'ignoble bohémienoe et prit pour femme celle 
qui 3ut supporter sea peines sans plaintes ni 
murmures, lis vécurent heureux et contents 
pour Ib reste de leur vie '. 



. Comparer a 



a Belle 



I bois dorment. 



LA PRINCESSETAG-EL-AGEM' 



UN roí avait udc GUe. 11 voulut cd íatre 
une savante. 11 prít k cet cfiFct ud maltre 
et donna k sa filie des compagnes de classe. 

Ce maltre lui enseignait tout, te Koran, la 
lecture, I'écriture, etc. 

Ua jour, en eatrant ea classe, la princesse 
vit que son maltre battait une de aes cama- 
rades, il la battait si fort que la pauvre filie 

La princesse ne pouvant pas l'arracher des 
malos du maltre, se sauva et courut jusqu'ft 
ce qu'elle füt hors de la líjlle, daña la cam- 
pagne. 

Etant fatiguée, elle s'assit pour se reposer 
et s'endormít au pied d'un arbre. 

I. Couronae des Persea. 






!±3 



jB I.E8 POLV-LORIS EN ¿GYFTB 

Le fíls d*un sultán voisin étant á la chasse 
passa par lá et vit la príncesse qu^il trouva 
admirable. 

II la réveilla et la conduisit chez le sultán 
son pére. 

La príncesse grandit et embellit dans ce 
sérail. Quand elle fut en age de se marier, le 
prince demanda au sultán, qui y consentit, la 
permission de Tépouser. 

L^ prince et la prinoesse se mariérent done, 
et leura noces se fírent avec le ceremonial 
d^usage, au milieu des réjouissances publiques 
qui durérent quarante jours et quarante nuits. 

Bientot le sultán devenu vieux, mourut, le 
priope et la príncesse devinrent alors roí et 
reine. 

Sur ees entrefaites, la jeune reine accoucha 
á'\xn garlón. 

Le septiéme jour des couches, avant que, 
selon Tusage, la visite des dames, venues pour 
féliciter la mere et voir Tenfant, ne comnaen- 
^t, le mur de la chambre de la reine se fendit; 
elle vit apparaitre son maitre, ce méchant 
magister qui lui avait tant fait peur et qui 
était si savant; elle le vit, dis-je, sortir de la 



79 



fente du mur, s'avancer vere son lit, prendre 
son enfant, la barbouíUer elle-méme de sang, 
et rentrer dans le mur par la mfime fente, 
pour disparattre. 

Lorsque lesdames entrérentdans la chambre 
el virent la reine ainsí couverte de sang, 
n'ayant plus son enfant auprÉs d'elle, elles 
pensérent toutes que la reine était une ogresse 
et qu'elle avait mangé son enfant. 

Aprts la visite, cette nouvelle se répandit 
dans la ville et bient&t toutes les femmes ne 
parl¿rent plus que de cet érénement. 

Cepeadant le roí, qui entendit ees bruits, 
n'j ajouta aucuoe foi, parce qu'il aimait sa 
feísme et il continua á. raimer. 

La deuxiétne annje de leur mar¡age,la reine 
eul un autre gar;oo qui fut enlevé de la méme 
fafon par le maltre d'école magicien. 

La troisiíme année, la reine eut une filie 
qui eut le meme sort que les deujt prínccs, sea 

Le rol, devant les accusatíons persiatantes 
et de jour en jour grandissantes des dames 
de la cour et de la ville, et voyant que sea trois 
enfants avaíent disparu de la méme fa^on. 



Sí 



8o LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

sans que la reine en pütdonner uneexplication 
raisonnable et plausible, il ordonna qu^on 
reléguát la reine dans les cuisines du palais et 
qu^elle y servit comme un souillon. 

La reine accepta son sort sans plaintes ni 
murmures et alia habiter les cuisines. 

Un jour le roi partit en voyage pour faire 
une tournée dans ses États. 

II demanda avant de partir, á toutes les 
dames de son palais ce qu^elles désiraient qu^il 
leur rapportát en cadeau. 

Les unes demandérent des éto£Pes,les autres 
des bijoux. Le roi en prit note. Au moment du 
départ, le roi se rappela de Tag-el-Agem 
(couronne de la Perse), la reine qu^il avait 
sauvée autrefois de Tabandon, et par suite, 
d'une mort certaine et qui á présent était 
reléguée dans les cuisines du palais, mais 
qu^l aimait encoré malgré sa disgráce. 

II lui demanda ce qu^elle souhaitait. 

Tag-el-Agem lui dit qu'elle désirait possé- 
der la boite de Tamertume et la coupe 
d'aloés ', et elle ajouta : a O mon maltre I 6 mon 
roi I si tu oublies ma commission, á ton retour 
une tempéte aflFreuse bouleversera Tair, ton 




y^ 3 






pERSAT^Sf íNDiEKfí, AHifcífd but l'est St 

türbati bfatic xíévicfldrtí n^ir ; cet étftf de choéW 
ne cessera que lorsque tu reidera» -ra^pelénfafl 
désir et que tü ramra'S: exéítfté. »■ *i J 

Le roi pafrtft. 

nparccnimt toüs' ^P^ Étatr^t flttoutes-led 
commissions, sauf celle de Tag-el-A|f«6i, hi 

Aü momento^ il ifiomak áichtvaá p&at s»'ea «^ Ü 

retoümef ^«rs U t4He, v!>iléb q«re látUntpéte ^ H 

prédít&pay la reine se^ déchftfda-sor Umt le c^ f¡ 

p&y». La pltóe, la gfMe, lévent et léctotm^Mtis "IS ü 

fireat rage' et 1¿ bttút ftit tei qu'ott ii*cíi: avttit ^^ 

jttmtw- emenda \dé parer^i Le rm, en <mi^ la»^ ^ :i 

ment, yoit'9on'iiA<sge réfiétéé dtttis' une^lSi^ue >- .. 

d*eatiet*s*aper?wtqtiesott turban ttaiíe était jj i 

dercna'noir. Qc •; 

11 se rappeüe Ir domeiiMkm d* la reíAe i::» ,. 

ec se» prédkd<»f0) et nuMume- á; la re^ 2 i* 

<^epci»fr'dt la? bottd' d^a»Mttttt« et de^sucourpe *"" *' 

d'alééft. ^ ¿ 

Dés-i^t euti'étt P^oquÉsicioB d¿ ceé détnr ^ * 
oilh(iet^, la^fettfséte^cdma'ec-BOtrtatbaKrtKkviat 

Le ret s'efi recbcnma datid wb. pakk ec «ofi 
v^syuge se" térmma * hevíreosefiMsit, coanae ^ il 

ó 



82 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

avait commencé, au milieu de Tallégresse 
genérale de ses sujets. 

Des qu'oQ eut déchargé les bétes de somme 
et qu'oQ eut ouvert les ballots, le roí remit á 
chacune de ses dames ce qu'elle avait 
souhaité. 

II envoya aussi á la sultane Tag-el-Agem 
ce qu^elle luí avait demandé comme cadeau. 

La nuit venue la curiosité prit le roi. II 
voulut savoir ce que la sultane Tag-el-Agem 
pouvait bien faire avec sa coupe et sa boíte. 11 
alia á la chambre qu^occupait la reine dans les 
cuisines et, regardant á travers une fente de 
la porte, il vit la reine assise par terre et 
parlant á la boite de Tamertume et á la coupe 
d*aloés qu'elle avait devant elle; elle leur 
raconta son histoired'un bout á rautre;quand 
elle eut finí, elle ajouta en maniere de demande: 
« N'est-ce pas que ce que je vous ai conté est 
la puré vérité ?... Ai-je rien ajouté, ou rien 
caché ?... N'est-ce point lá toute la vérité >... » 

Aprés ees troisquestions^la boite etla coi^pe 
se brisérent ; en méme temps le mur se fendit 
et son ancien magister, tenant par la main 
ses deux gar^ons et suivi de la filie, se pré- 



secta au milieu de la chambre, en face de la 



Son msttre la satua profondément et Iu¡ 
dit : « Tag-el-Agem, voili tes trois enfanta; 
i'en ai pris sgin et les ai inatruits. Je te les 
renda parce que tu as su garder man aecrec ec 
que tu as souífert pour le garder. J'ai voulu 
faire utie aavante de [oi| ¡'ai réussi ^ faire des 
savants de tes enfants. JouÍs en paix du fruit 
de tes vertuB. » 

11 dit et disparut par la feate du mur. La 
fente se referma sur lui et le mur redevínt uní 
comme s'il ne se füt jamáis fendu. 

Le roi voyant et eoteodant tout cela, ne 
savait quoi admirer le plus : la beauté de sa 
femme et de ses enfants ou la patience et la 
discrétion, la fidélité et la résignation, de sa 
femme daos ses malheurs. 

11 ouvrít la porte et se montra h sa femme 
et i ses enfants. 

11 les invita h le suivre dans les apparte- 
ments royaux et rendit h sa femme son amour 
et sa position á la Cour. 

It TÍcureat longtemps heureuz, juBqu'i 
leur mort qui arriva quand il plút á Dieu. 



% 1 



DEUXIÉME GROUPE 



ARIENS Dü NORD 

BUROPÍENS. GRBCS, ROtUIMS, ETC. 



>- 

B 

a; 
Sí' 




r 

•1 



«M 



DEUXIÉME GROUPE 



dílilEÜ^S 'DU T^O^'D 



UES QUARANTE BOUCS 

ET LE BOUC CHEVAUCHANT 

SUR LE BOUC ■ 

IL y avait une fois un sultán qui avait trois 
filies, Tune plus beUe que l'autre. 
Loraqu'elles grandirent et furent d'áge á ee 
marier, le sultán consulta son vizír sur ce 
qu'il convenait de faire pour les établir seloa 
leurrang. 






B» 



LSS rOLVP-LORE» EM l^YI^E 



Le résultat de Icur déü b ér a t í on tut que éH 
le lendemain on fit annoncer dans le pays, par 
des crieurs publics, que le sultán avait decide 
de marior see -^Issl En rconaéqitSQce, tous les 
jeunes gens étaient conviés á passer sous les 
fenétres du sérail au jour que le sultán faisait 
savoir. 

Au jour dit, les prétendants arrivérent en 
foule «t déilérent 'ttouft les fenétres du f>alais. 

La princesse atnée Jeta son mouchoir quj 
tomba sur un beau prince. 

La seconde princesse ayant jeté son mou- 
choir, le mouchoir alia se fixer sur la tete d'un 
autre emir, jeune, beau et pubs^ai:. 

Quand ce fut au tour de la troisiéme 
princesse, elle lan^a son ibulard qui alia accro- 
cher les cornes d^un bouc qui passait au 
milieu de la foule. 

Le sultán ordonna que la trói^éme prtncesgBe 
recommen9&^t Texpérienoe. BUe J9ta éone le 
íbulard, qu*on luí avait rapporté, une seeonde 
fois ; la destinée le Ht encoré s*aceroeher aux 
comes du méme bouc. 

Le sultajQ, furieux d'étr^ la risée du peuple, 
ordonna une troisiéme ¿pr^uv^ qui xi'eut paj& 




un aulte¡réaiUiatiLe faulard a'enaUait voltigcr 

daos <ks aira, tauruoyait et finalement allait ^ j 

s'accrQcher au» cornea du méme bouc. ^±l { 

Le Aullan du, en v.oyant caue -úbstinatútn ^ \ 

du Bort, qu'il ne ccaaenlixait íamaia k marier ^ j 

sa.fijle aii«c un bouc .el qu'elle xeaterail filie. ^ ] 

Meis^U jeuDepdncessepkace taat.et r^p^ta ^ . 

si obstinément qu'elle ecnsenUit á bé macür '^ T' 

avec ce bouc pui&gue telle ¿tait sa deatinée ; i.r : 

sea .soeutzs linees, quí la jatousaieot parce <... :> 

qu'elle ¿tail jilus jolie gu'ellee, l'aid^rent £i Z^ r. 

bieaaufti^e du Bullan, que celui-c¡ finit par u- ^ 

aceorder sen cansentement áxeque ce mariage ■— ■* 
extraordinaire s'aceamplit. U ordcnna dojac ^ '* 

gu« lee nocee se fecaient oelon k céréiiioDJal ^ tj 

Toute la-viUeíut enf^u peodant quaiaste 
Íour£ et quaraote .uuil£ ; oati'enieodait pactouc 
qu« fJukats M jnugiquaB.; on ne vayait gue 
¡eux, banquete et iltumiaationB, maú au 
KviUcu de |]3ute cette foule en liaesé et eo )oie, 
chacun ne pouvait s'empécherd'étre prénccuptf 
dee r^aultUf du mariage de la jeune et ialie 
priacesBe avae k bouc. 

1^ sultán, k TÍzir^ les femmes du palais 



til 



u. J 



90 LES FOLK-LORES EN EGVPTE 

essayerent chacun tour á tour de la dissuader 
de consommer ce mariage. Mais elle n'avait 
qu'une phrase pour toute réponse et á tout ce 
qu'on lui disait, elle répondait : (( Peut-on 
se soustraire k sa destinée ! )) 

La nuit du doukhoule étant arrivée, on para 
Ja princesse et bientót on introduisit le bouc 
dans la chambre núptiale. 

La porte était á peine fermée, que le bouc se 
secouant jeta sa peau á terre. Quel ne fut pas 
l'étonnement et la joie de la jeune princesse, 
en voyant devant elle un fort beau jeune 
homme, si beau, tel que personne, avant elle, 
n'en avait vu son pareil en beauté ! 

Ce jeune homme s'approcha d^elle,la caressa 
et lui dit : 

(( Je suis un emir puissant, mais enchanté 
par des sorciers; je vous aimais et me voilá 
uni á vous. II ne tient qu'á vous, princesse, 
que nous ne soyons jamáis separes !... 

— Et qué faut-il que je fasse ? interrompit 

la princesse. 

— Ne jamáis parler de ma métamorphose á 

qui que ce soit, répondit le malheureux emir 
enchanté. II faut que tout le monde me croie 



f: 



ua bouc. Le jour oú on se douterait seulement 
de mon enchantement, ce jour-l¿ méme, je 
disparaitrais et vous me perdriez pour tou- 

La jeuoe princease, plus énierveitlée qu'ef- 
Irayée, promit de garder le secreC de son beau 

En attendant, ils s'abandonnérent k leur 
bonheur. 

Ils s'aimaient beaucoup et la príncesse gar- 
dait si bien te secret de son mari, que tout le 
monde avait renoncé á comprendre I'amour 
qu'elle avait pour son mari le bouc. 

Le sultán á bout d'arguments disait : 

« Puisqu'elle ne se plaint pas, c'est qu'elle 
est heureuse. 






Dans ce temps-ld., un roí voisin declara la 
guerre au sultán qui fit ses préparatifs; mais 
comme il était trop vieux, ii pla^a son armée 
sous le commandement de ses deux beauí-file, 
et ils partirent. 

Le bouc aussi partit. 

Bientót apr¿9, l'armée du sultán i 



92 LES FOLK-LORES EN SGYPTE 

victjorkuse. Le sukaa ardoima qu'on ík <k6 
ügtes qui dujréreat trois jours et Uoi& luik^. 

Le premier jour, a4i momeot oü ks 4emi 
princes passaient sous les fenétres du pakúe, 
leucs fexDBies leur jetécent 4a8 £leur». 

La troisiéiue princesae jeta une frose é. un 
tres beau jeune homme qui marchait á edté 
des tprinr.es 

Le second jour, au méme ceremonial, elle 
jeta au méme jeune homme ,un JasffMu et 
pendant le déñlé de la Inroisi^me jouraáe, elle 
lui lan9a un tamarin» 

Ses soeurs ainées trouv¿rent mauvaia que la 
jeune princesse se comportát ainsi k Tégard 
d'un étraDger,tandis qu^elle ¿tait en puisQance 
de mari. EUes lui fírent d^abord des observa- 
tions,maÍ8 voyantqu'elle enriait et se moquait 
d^elles, elles allérent le diré au sultán. 

Le sultán entra dans une ¿elle fuMur, qu'il 
eüt aans doute tué sa ñUe, si x^Ue^^i épo4ivan- 
tée et affolée a'eut coníessé et expliqué que ce 
jenne homme n'était autre que son prc^pre 
mari. 

Le soir venu, le bouc ne reatr^ pae ! . . . 11 
avait ^paru. 







B 




oi 


lie désespoir dte la ieune princesac aug- 
menta avec les jours. 11 arriva qu'elle crut 
qu'il n'y avait pas au monde une plus mal- 
heureuse créatare qu'elle. On avait beau la 
raisonner, lui conter !es histoirea des plus 
illustres et des plus malheureux amant», tsut 



Mita, loin do la conaoln- augmentait enecre 

Un ioTjr, l'idée lui i-int di savoir par elle- 
méme, s'il exiatait au monde une femme aussi 
malheureuse qu'elle. 

Elle flt construiré un hainet fiC aoaoncer 
dans tous les quartiers de fa ville que touta 
femme qui voadrait venir s'y baigner était 
libre de le faire, á condition de ra conter á la 
prineesBe le plus grand malheur qu'elle avait 

e la ville et 



Toutes les fen 






t i» 



battait, l'autreque son mari lui préfóraif une 
affrevse vifilte ou une laidc négresse, uno 
iroisüme que son mari t'avait divorcée et qu« 
aen^ma'nt s'^tait marit^avec une autre femma 
qui, certeev nela valait pas I... 

Aucune de ees femmes n'Mit le talent'd'ÍR- 



ex» 



94 LES FOLK-LOREe KN ÉGVPTE 

t¿res9er,ni de captiver, méme pour ua instant, 
l'atteation de la princesse. 

Elle était toujours triste. 

Un ¡our, eañn, viat une pauvre vieille 
ferome. Elle o'avait sur elle qu'une chemise ea 
lambeauz. 

Cette vieille lui raconta uae histoire qui eut 
le don d'intéresser la princesse. Elle l'écouta 
done sane rioterrompre ¡usqu'au bout. 



HlSTOlRB DE LA VlBILLE 

La vieille commen^a en ees termes : 
« Avant-hier, le soir, j'étais allée au bord de 
la riviére pour laver la seule ebemise que je 
possfede, daos rintention de me présenter, ce 
matio, á votre bain, lorsque je vis non loin de 
moi une mulé ehargée de deuz outrea qu'elte 
rempliasait d'eau. 

n Une fois ees outres remplies, elle alls un 
peu plus loia et frappa la terre du sabot de 
Bon pied de devant. La terre s'eatr'ouvrit et je 
vis la mulé descendre par une pente dans 
rintírieur de la terre. 



í 



iiOubliantdelaver mi 


a chemise, ¡e suivie la 


mulé et ¡'entrai á sa sui 


tedansJe souterrain. 


n J'arrivai bientót dan 


s une grande salle qui 


paraissait étre la euisir 


ve d'un grand palais. 


Les marmitea étaient ra 


ngéea sur le feu; on 


Jes entendait chanter et 


on seniait une bonne 


odeur de cuisine en pleia 


e fonction. 


iJ N'y voyant personm 


:, ni chef, ni marmi- 


tons, je ra'approchoi d'ui 


le raarmite et voulus 


la découvrir. A peine 


avais-je touché au 


couvercle, que je regus i; 


ine tape sur ma raain 



» — Touche pas, iusqu'á ce que sa 

» Je recula! effi:ay¿e; j'entrai á l'ofiice oü je 
vis la buche ouverte et pleine de pains frais 
qui sentaient fort bon; l'envie me prit d'en 
goúter, mais lorsque étendaot la main, j étais 
préte k gaisir le paia, ma main regut uoe tape 
qui claqua sur sod dos, et la m£me voix invi- 
sible s'écría á mes oreilles : 

1) — Touche-pas, jusqu'á ce que sa maltresse 

» Ma frayeur s'accrut; ie marchai droit 
devaatmoi; ¡e passai dans tes appartements. 



ii 






í 



Ees salles en ¿taient pliiS richement dficorées 
fes nires que íes atures™, les' rtreobfe, les 
tentares ct Ics' tapisscnes' surpdssarent en 
richesBe et en beautó, en éclirt efen varíete; 
tout ce que Fon peot imagiherl Enrffh, farrrvai 
^bw une grainte salle a^i miliéndé laqnefte se 
trouvatt un grrand baiBBTTt; ffutoisT" du bff99m, 
ñ j amit quarwnte sf^s dcrnt Póa était plus 
gnni'et pliis beau que-les autKSw 

n Jene viad'abord personne' non plus dans 
cettB salte, maia, en raime lemps" que ¡"y 
entráis, j'entendís an bruit'setnblable it celui 
que font lea pieds d*urr troap«ü áe chtvres 
marcha Qt sur dea pierres. 

» Je-me-Hottis sous'undfvan; tíiwit&t je vis 
entrer desbcnica-qui- les ans ffprés les autres 
aitÉrent se placer ctlEtcun devant un sié^et se 
rangirent ainsi autour dii bassin. 

n lis étaient quarante, mais lé dérnier était 
monté sur l'avanl-dernier. 

» Le bouc qui chevauchait ainsi sur son 
compagQon descendit et se piafa devant te 
siége le plus elevé. 

H lis restirent ainsi sans bougerun moment, 
puis tous easemble se secouÉrent;... au méme 



07 



: séchés, celui 
in compagnon, ce 



instant leura peaux tombirent, et Íls se Irans- 
formírent tous ea autant de beauK jeunes gens 
dont le plus beau écait leur chef. II se jeta ie 
premier daña le basain et tous t'y suivírent, 
a'y baignéreot, puia ¡Is en sortirent et s'as- 
airent sur leura siiges, qui a'étai 

u Loraqu'iis se 
étail entré montd s 

sanglots : 
» — Oh ! princesse de grice e 
f Tous ses compagnons pteu 
glotaient. Les meiibles, lea mu 
lea plafonds, tout, enfin, jusqu'at 
aui parquets gémiaaaient et ai 
c'dtait á fendre Víma I... 

u Apr£s qu'ib eurent bien pleuré, le prince 
se leva \ ses compagnons en firent autant et 
chacuii se retira dans ses apparteroents oü 
tous se couchérent et dormirent. » 
la vi«ille. 



'■t de beauté I ' 



ra, les portes, 

t fenétres et 

: lamentaient.., 



98 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

A mesure qu'elle racontait son histoire, 
Sitt-el-Husna, de plus en plus intéressée, ne 
laissait pas échapper un mot, et lorsque la 
vieille eut terminé et qu'elle cessa de parler, 
la princesse ne douta plus que le bouc monté 
sur son compagnon et qui s'était transformé 
en un si beau jeune homme, ne fút son mari. 

Des ce moment, elle ne pensa plus qu'á aller 
le rejoindre. 

Elle dit done á la vieille qu'elle luí donnerait 
tout, vétements, bijoux, argent, tout ce qu'elle 
pouvait enfin désirer, á la condition qu'elle la 
conduirait dans le souterrain. 

La vieille consentit. 

Le lendemain done, de bonne heure, Sitt-el- 
Husna alia chez la vieille oü elle attendit 
jusqu'á la nuit tombante. A ce moment, la 
princesse tres impatiente lui demanda s'il 
n'était pas temps de partir. 

La vieille lui dit d'attendre encoré, attendu 
qu'elles ne pourraient partir que lorsque la 
lune se verrait sur la terrasse du four. 

Les yeux de la princesse, á partir de ce 
moment, ne quittérent plus le haut du four, 
et des que la lune y parut, elle réveilla la 




I 



vieille et toutes deox allérent au bord Uu 
(leu ve. 

La mulé était U qui remplísaait ses outres. 

Lorsqu'elle frappa du pied le sol. que la 
terre a'entr'ouvnt et qu'elle s'engagea dnns le 
souterrain, les deux femmes l'y suívirent et 
allérent jusque dans la cuisine. 

La vieille se dirigea vera les marmites, qui 
rangées sur le feu, chantaient joyeusement; 
elle diícouvrit une marmite, goüta au meta qui 

traisi¿me, puis toutes, sans que ses maíns 
n'eussent reíu aucune tape, et elle n'entendit 
aucune voix luí défendre de lea toucher. 

Elle vit aussi les mels les plus succulents, 
en goüta etforfa la princesseá en faire autant. 
Le pain également, dans la huche, se laissa 
prendre sans protestaron; tout était bon et 
bien meilleur que ce qu'on mange d'habitude. 

La vieille remarquait, cependant, que tout 
était changé depuis sa derniére visite. En 
effct, on sentait une ¡oie régncr partout dans 
ce palais enchanté. 

Conduite par la vieille, la princesse arriva 
enfin dans la grande salle du baasin ; les deux 






>-■■ 



femmes se 
boucs entr 


cachérent et vireot les quarante 
er dans le méme ordre qu'aveit 


indiqué la 


neille 


le dernier bouc monté sur 


son compagnon. 

lia se rangérent aulour du bassin, se 
dépouilUrent de leu r pea u, se tranaformérent 
en quarante ¡eunes gens, tr¿a beaui, prirem 
leur bain, el au moment oü ils en sortaient. 


la princesse reco 


ñut son mari !... Elle voulait 


paraitre ai 


lui, n 
figu 
si le 


ais n'ayant pas de voile pour 
re, la pudeur la retint de 

íisagt découvert devant tant 




d'hommes étrangers!... 

Cependant, le prince, s'étant assis sur son 
siíge comme á I'ordinaire, commenga ^ 
pleurer.á se lamenter et á appeler la princesse 
á travers sea sanglots. 

Tous ses compagnons, au lieu de rimíter, 
comme de coutume,se mirent á rire; les murs. 
les portes, les voütes, tout, enfin, au contraire 
du prince, paraissaient gais, con ten ts et 

Le prince surpris et inquiet se leva : ses 
compagnona le quittérent )03'eusement, et lui- 
~ m£me se dirigeait trietement vers son appar- 



tement, lorsque la princesse ae tenant plus et 
n'écoutant plus les conaeils timoréa de la 
víeille, sortit de sa cachette et se presenta 
devant le prince son époux. 

A sa vue, le prince, transporté de ¡oie, ne 
voulut pas écouter ses excuses pour n'avoir 
pas su garder son secret. 1! apprit ala prin- 
cesse qu'elle venait, par Son courage et sa 
pe rsé vé ranee, de rompre le charme qui le 
lenait enchanté. Le prince pul, d¿s lors, 
retourner sur terre sous sa forme humaine. 

La prtncesse le presenta au sultán, son 
pére, qui ful tres joyeux. Ses soeura, recon- 
naissant dans ce beaujeune hommele guerrier 
vaillant auquel la troisíéme princesse avait 
lancé des fleurs au retour de la guerre, ressen- 
tirent, pour leur sceur, une plus gf-ande 
¡alousie, mais durent faire serablant de se 
réconcilier avec elle et d'étre contentes. 

Le sultán ordonna de célébrer cet heureujt 
événeraenl par des fétes splendides qui duré- 
rent sept jours et eept nuits. 

Le prince et la princesse continuérent k 

lis vécurent longtemps et eurent beaucoup 
d'enfants. 




J. 



VI 



y ' 



LES TROIS FILS DU SULTÁN < 

IL y avait une fois un sultán qui avait trois 
fils d'áge á se marier. 

Le sultán se concerta avec son vizir sur les 
moyens á employer pour les marier selon leur 
rang. 

lis convinrent que les trois princes mon- 
teraient sur la terrasse du palais* d'oü chacun 
d'eux tirerait une fleche au hasard. Les 
maisons sur lesquelles ees fleches tomberaient 
seraient marquées, et le sultán demanderait 
au propriétaire de chaqué maison sa filie en 
mariage pour le prince á qui aurait appartenu 
la fleche tombée sur sa maison. 

1. Publié dans le BuUetin de I' Instituí égyptien^ 
2* serie, n» 5, 1884, p. 81. 

2. Toutes les maisons, ainsi que les palais et les 
monuments publícs en Egypte, sont couvertes de 
toits plats qui forment terrasse sur laquelle on 
peut monter et se promener á l'aise ou s'en servir 
pour les besoins du ménage ou pour Tagrément 
des habitants de la maison. 



•£2 



.-. •' 



,1 •• 



:> 






•4 



104 I-^S FOLK-LORES EN EGYPTE 

A la suite de cet arrangement, un jour, le 
sultán avec toute sa cour, accompagné de ses 
trois fils, qui portaient chacun son are et ses 
fleches, montérent sur la terrasse. 

Les princes lancérent chacun une fleche au 
hasard. 

La fleche du prince ainé tomba sur la 
maison d'un haut dignitaire de TEmpire. 

Celle du second tomba sur la maison d'un 
general. 

Quant á la fleche du prince cadet, elle alia 
tomber sur une maison ou il n'y avait qu'une 
grosse tortue. 

Le sultán ordonna á son fils de recom- 
mencer Texpérience. La fleche lancee par le 
prince tomba encoré sur la maison de la grosse 
tortue solitaire. 

Le sultán, qui était fort contrarié, ordonna 
une troisiéme épreuve qui amena le méme 
résultat ! 

Le sultán decida que son fils cadet ne se 
marierait pas du tout; mais le jeune prince 
insista, disant qu'il consentait á se marier 
avec la grosse tortue. 

Le sultán, pour ne pas le contrarier, re- 



r 



vJDt sur sa decisión et donna son consente- 

Les fétes pour les noces du prínce niai et du 
second prince commencírent; on les maria 
avec p-jmpe et éclat l'un aprés l'autre. 

Lorsqu'on e'occupa des noces du cadet des 
princes avec sa tortue, ses deux fréres alnés et 
leurs femnies refusÉrent otistinément d'y 
paraltre, ce qui fit que ees troisitmes noces 
furent beaucoup moins brillantes que les 

Bientót apr¿3 ees réjouisscnces et tant 
dcmotione, le sultán tomba malade; il perdit 
compl¿tenient l'appétit et presque enti¿rement 
la vue. 

Ses ñls, fort inquiets et espdrant lui rendre 
l'appétit, luí firent de grands éloges de leurs 
cuisines et luí conseillérent d'en essayer. 

Le sultán, aprés s'étre fait beaucoup prier, 
consentit á ce que chacun de ses ñls luí 
envoyát un labia' complet pour essayer et 
voir si viaiment son app¿tit lui reviendrait. 



Tous les princes se réjouirent á cette 
decisión du sultán. Mais comme le prínce 
cadet paraissait le plus contem, ses deux 
fréres ainés se moquéreni de luí et lu¡ deman- 
dérent ce que sa grosse tortue pouvf it bien 
envoyer pour exciter l'appétit du sultán et lui 
donner envíe de manger. 

Cependant les deux princes aiaés coururent 
chez eux, pour diré á leurs femmes la volonN 
du suhan. Chacun recommanda á sa princesse 
de veiller k ce que le Sultán fút induit, par 



range les mels qu¡ doiv 


ent éire servís sur la table. 


Tuus les plals sont coi 


jverts. Le tabla lui-méme 






de forme conique. Le 


toul est recouvert d'une 


éloffe. Le serviieur ma 


rmiton transporte le tabla 


sursa tete depuis la cu i 


sinejusqu'i la salle i man- 


ger des hommes oit k 


ía porte du harem, si le 


dlner est pour les fenii 




Unefoii danslasalli 




servent les plals sur li 


1 table les uns aprés les 




salades, les hors-d'CBUvrc, les 
)nfitiires sort servís sur la lable 



l'odorat e 



vue á prtiférer lea mete prepares 
X de l'autre princesse. 
deux princesne pensa k la grosse 
son mari faisait en méme tempa 
du sultán. 



La tortue se mit imn 


lédiatement á l'osuvre. 


Elle envoya asa belle- 


sceurainée sa servante 


de confiance avec lo mi: 


ssion de lui demander 


instamment toiit le crotí 


tin de rats eC de souris 


dont elle pouvait disposer, pour les mettre, 


devait-elle luidire. sur h 


:riz et ¡es autres mets, 


en guise de poivre ct d'a 


utres condimenta. 


De lá, la méme serví 


inle devale se rendre 


chez la seconde prinets; 


ic, et lui demándenle 


ta coló m bine pour assai 


isonner ses plats. Lea 


deux princesses refus¿ 


rent de ríen dunner. 


disant qu'elles-mémes i 


n'en avaíent paa assez 


pour pouvoir en donner 


á leur belle-soeur. La 


seconde princesse ajouta 


. m¿me que a Thorrible 


tortue devait réfléchir f 


ivant de " la déranger 


dans son coup de feu 


H, ainsi que d'autres 


propos désobligeants á 


l'adrease de aa belle- 



rentra chez aa maitresse la 
irpurapporter autrechose que 



I08 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

les discours malveillants de ses belles*- 
soeurs. 

La grosse tortue qui venait de finir son 
diner et qui était en train de ranger les plats 
sur le tabla^ riait de bon coeur en entendant 
sa servante lui rendre compte de ses commis- 
sions et de son insuccés. 

Les troisía¿>/aarrivérentau palaisdu Sultán 
á l'heure du diner. ^ 

On lui presenta d'abord les mets prepares 
par la princesse ainée. 

Au moment oü ondécouvrit le premier plat, 
une odeur fétide et nauséabonde de crottin de 
rat s'en échappa; le Sultán se trouva mal et 
s'cvanouit. On s'empressa autour de lui et on 
enleva le tabla tel qu'il était. Des que le sultán 
revint á lui-méme, il éclata en imprécations 
contre sa bru et ne voulut plus rien manger. 

On le decida cependant á essayer du second 
tabla. II consentit, mais lorsqu'on découvrit 
le premier plat, Todeur infecte de la colombine 
prit le sultán h la gorge ; ses yeux larmoyérent ; 

I. En general au coucher du soleil, c'est-á-díre 
ái2 heures, selon la mode oriéntale de connpter 
les heures. 




ARIENS DU NORD IO9 

il pensa qu'on en voulait k ses jours et qu'il 
devenait tout k fait aveugle. 

On se háta dedesaervirle seoondíaí'/a, et on 
brúla des parfums pour puriGer l'air. 

Quand on annon^a au sultán que la grosse 
tortue avait aussi envoyé un tabla, le suttan 
entra daas une nouvelle fureur; les deux 
princea ainés tirent des observations iniu- 
rieuses sur l'habüeté culinaire de la femme de 
leur cadet. Maís ce prince n'y faiaant aucune 
attention, et animé du désir de voir le sultán 
rétabli, insista avec tant de priires et sí 
humblement, que son pére, radouci, consentit 
k essayer du dernier tabla. 

Desque Ton découvrit le premier plat, le 
sultán sentit son appétit luí revenir, ses yeuK 
s'ouvrirent et it mantea comme it ne l'avait 
pas fait depuis des joure. 

Le sultán satiafait decida qu'á Tavamr la 
grosse tortue luí enverrait tous les jours son 
diaer. 

Bientdt il se rétablit complétement. 

Pour féter cet heureuit ¿vénement du réta- 
blissement de sa santé, il convia ses trois fiU 
et leurs femtnes ¿ un festín. 



Les crois princeseea se préparérent U paraí- 
tre dignement devant le sultán. 

La veille du jour du festín, la grosse tortue 
envoya prier sa beile-sceur ainée de luí prcter 
pour le lendemain une grosse oÍe qu'elle avait, 
« pour qu'elle puiase, faisait-elle dire, aller au 
palais montee sur cette belle béte ». 

La princesse fit repondré qu'elle n'avaít 
qu'une oie et qu'elle la gardail pour son usage 
personnel. 

La tortue envoya alors chez la seconde prin- 
cesse lui demander son bouc. Celle-ci se facha 



L 



et répondit qu'elle en i 

Le ¡our du festín, lou 

porte du palais, pour i 

s'élever au bout de la 

(urent au mílíeu de ce 

dandínant d'íci de li 

lorsqu'elle se fut rapprochée du palais, 

aperi;ut juchée sur son dos la femme 

Chater-Aly quí vjnt descendre sur le marc 

pied de la porte du palais. 

Le sultán étoit vexÉ de voir ainsi sa belle- 
iille a!n^ servir de ris6e á toute sa Cour. II 



^■aít besoin elle-mSme. 
i ceu\ qui étaient S la 

nuage de poussiére 
■ue; bientOt Íls aper- 
íourbillon une oie se 
;t battant des aíles ; 



he- 



ARIENS DU NORD III 






n'avait pas finí de morigéner cette princesse, 
que la femme de Chater-Husseyn apparut au 
bout de la rué, montee sur un bouc qui venait 
vers le palais tout en bélant. 

Le sultán éclata en réprimandes et en in jures 
contre ses deux brus. 

A peine le sultán était-il remisde sondéplai- 
sir, que des coureurs annoncérent Tarrivée 
d'une princesse. 

Dans un nuage de poussiére, le Sultán aper- 
9ut d'abord un superbe palanquín, precede par 
de fortset beaux saís^ habillés splendidement. 
Ce superbe équipage s'approcha du palais, 
une femme en descendit; personne ne la 
reconnaissait. 

Tandis que le sultán admirait Tordre et / \ 

la richesse de l'équipage et qu'il se demandait 
qui cela pouvait étre, on luí annon^a la femme , 

de Chater-Mouhammed ! II fut surpris de la •^:; 

surprise la plus grande. . 

II fut émerveillé de la beauté de la troisiéme ^í^^ 

princesse. II ne cessait de s''extasier devant sa 
gráce, son tact, et de louer son charme, au 



^-.3 



4- * 



i« Coureurs, palefreníers, valets d'écurie. 



no LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

Les trois princesses se préparérent á parai- 
tre dignement devant le sultán. 

La veille du jour du festín, la grosse tortue 
envoya prier sa belle-sceur ainée de luí préter 
pour le lendemain une grosse oie qu'elle avaít, 
(( pour qu'elle puisse, faisait-elle diré, aller au 
palais montee sur cette belle béte ». 

La princesse fit repondré qu'elle n'avait 
qu'une oie et qu'elle la gardait pour son usage 
personnel. 

La tortue envoya alors chez la seconde prin- 
cesse lui demander son bouc. Celle-ci se facha 
et répondit qu'elle en avait besoin elle-méme. 

Le jour du festin, tous ceux qui étaient á la 
porte du palais, pour recevoir les princesses, 
virent tout á coup un nuage de poussiére 
s'élever au bout de la rué ; bientót ils aper- 
9urent au milieu de ce tourbillon une oie se 
dandinant d'ici de lá et battant des ailes; 
lorsqu'elle se fut rapprochée du palais, on 
apergut juchée sur son dos la femme de 
Chater-Aly qui vint descendre sur le marche- 
pied de la porte du palais. 

Le sultán était vexé de voir ainsi sa belle- 
fille ainée servir de risée á toute sa Cour. II 



i"" 
i". 






ARIENS DU NORD III 

n'avait pas finí de morigéner cette princesse, 
que la femme de Chater-Husseyn apparut au 
bout de la rué, montee sur un bouc qui venait 
vers le palais tout en bélant. 

Le sultán éclata en répri mandes et eninjures 
contre ses deux brus. ^ 

A peine le sultán était-il remisde sondéplai- 
sir, que des coureurs annoncérent Tarrivée 
d'une princesse. 

Dans un nuage de poussiére,le Sultán aper- 'C'. 

9ut d'abord un superbe palanquín, precede par j;: 

de fortset beaux saís^ habillés splendidement. 
Ce superbe équipage s'approcha du palais, ^:: 

une femme en descendit; personne ne la 
reconnaissait. 

Tandis que le sultán admirait Tordre et 
la richesse de l'équipage et qu'il se demandait J-.* 

qui cela pouvait étre, on lui annon^a la femme ^¡; 

de Chater-Mouhammed ! II fut surpris de la :r:) 

surprise la plus grande. ^j 

II fut émerveillé de la beauté de la troisiéme Í;; 

princesse. II ne cessait de s^extasier devant sa 
gráce, son tact, et de louer son charme, au 

i« Coureurs, palefreniers, valets d'écurie. 



5*.» 



• 



113 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

poiat que ses deuxbelles*-soeurs enéprouvérent 
une grande jalousie et ne purent cacher leur 
dépit. 

Le sultán se pla^a á table et invita ses fíls 
et ses brus á prendre place. 

Des qu'on découvrít le plat de ríz\ la 
femme de Chater-Mouhammed prít le plat tel 
qu'il était et le versa sur sa propre tete. 
Chaqué grain de ríz se transforma en autant 
de perles fines, qui coulant le long de ses 
cheveuz et de ses habits, s'éparpillérent par 
terre sur le tapis, autour de la princesse. 

Le plat du mauloukhiéh * qu'elle se versa 
^alement sur la tete se transforma en une 
infinité d'émeraudes de toutes les grandeurs 
et des plus belles couleurs vertes. 

Tandis que le sultán admirait ees prodiges, 



1. Lepilauf, en árabe roiq:^ mouf alfil, est tou- 
jours serví á la fin du repas, souvent seul, quel- 
quefois avec du lait caíllé cu du mouloukliiéh . II 
indique que le dtner est terminé. 

2. Corckorus trilocularis, famille des tiliacées. 
Herbé dont oa fait une soupe verte et mucilagi- 
neuse au bouillon de poulet et á roignon. On le 
mange généralement en y trempant son pain et 
quelquefois en le mélaogeaat avec le riz. 




IIJ 



lea servantes avaienl apporté d'autres plats de 
riz et de mouloukhiék. 

Les deux princeases ainées voulurent ¡miter 
la princesse'cadette eC á leur tour étonner leur 
beau-pére. Mai3 le riz que la princesse ainée 
s'était versé sur la tete, se colla á sea cheveux, 
qui furenc graissés par le beurre, et le moulou- 
khiék tacha le visage et les vétements de la 
eecoade princesse de grandes marques vertes, 
gluaotes et horribles i voir. 

Le sultán, dégoüW, se leva de table, renvoya 
ees deus brus ainées et pria la troisiéme de 
rester pour luí teñir compagnie. 

Les deux princesses ainées, honteuses et 
dégoütanles, sortirem accompagnées des 
princes leurs époux. Chater-Mouhammed 
sortit également pour les reconduire. 

Ua moment apréa, la troisiéme princesse, 
tout en causant avec le sultán, fut prise d'uae 
grande inquiétude de ce que son mari ne 
rentrait pas. Tout á coup, elle sentit comme 
une odeur de peau et de coroe qui brúlait. 

Elle se leva précipitamment, courut de 
toutes ses forces, rentra'chei elle et vit avec 
chagrin que sa peau de toriu; brúlait 1 



114 



LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 



Le prínce Chater-Mouhammed qui y avait 
mis le feu lui-méme, la consola aisément et la 
decida á rester depuis tout simplement une 
bonne et belle princesse ! 

Elle consentit, ne pouvant faire autrement. 
lis s*aimérent et eurent beaucoup d*enfant9. 




va 

LE CHEVAL ENCHANTÉ 



U' 



n fiis qu'ii aimait beauconp, 
le ce prince étant morte, le 



Tout d'abord, la belle - mÉre du prínce, 
jalouse de Tamour que le roí avait pour soa 
Bis, le persécuta; mais ensuite, comme le 
prince dCait fort beau tt le roi fort vieux, la 

Cependant le jeune prince se lenait toujours 
cloigné de sa belie-mcre. 

CelJo-ci ráioluC de Jempuisunnür. 

Elle prepara á cet efiet un gáteau dont le 
prince raÉfolait et elle y mit du poison pour 
qu'il mourüt le matin, d¿s qu'il en aurait 
goúcé. 

Le prince avait un superbe cheval qu'il 



Il6 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

allait voir tous les matins á son réveil, avant 
déjeuner. 

Ce matin-lá, le cheval dit á son maitre de 
ne pas manger du gáteau. 

Le prince, en rentrant chez lui, mangea de 
tout, excepté du gáteau. 

La reine voyant cela, devina que c'était le 
cheval qui avait avisé le prince. Elle decida 
aussitót de tuer le cheval. 

Pour cela, elle fait semblant d'ietre malade ; 
elle dit que pour guérir il lui faut manger le 
foie du cheval du prince. 

Le sultán ordonne de tuer le cheval et de 
servir le foie róti á la reine pour qu'elle gué- 
risse de sa maladie. 

Le cheval voyant le prince en larmes et 
ayant appris le motif de son chagrin, lui dit 
de sécher ses larmes, d'aller chez le sultán et 
de lui diré : (( O mon sultán, 6 mon pére ! 
avant de faire égorger mon cheval, permets- 
moi de le monter encoré une fois et de faire 
une course avec lui. » 

Le prince suit le conseil de son cheval, va 
chez le roi et lui expose son envié de monter 
son cheval avant de le faire tuer. 



Le roi ne voyant aucun inconvénient i 
satisfaire le désir de son fils, lu¡ permel de 
monter sor cheval une demiére fois. 

Le cbeval ayaiit sur son dos le prince, 
galope sur la place du cháteau une fois á 
droite, une fois á gauche, puis tout d'un coup 
il prend sa course, part comme une fltehe, 
volé vers la campagne eC disparait en moins 
de temps qu'il n'ea faut pour ouvrir et fermer 
les ;eux. 

Arriví tres loin, dans le pays d'un autre 
roí, le cheval s'arréte, fait descendre le prince 
et lui donne trois brins de paille. 

« Chaqué fois que tu auras besoin de moi, 
iui dit-it, tu n'auras qu'á brúler un peu un de 
CCS brins de paille, et )t serai k tes cótÉs. » 
Puis il disparait. 

Le prince tout triste dans ce pays étranger 
cache ses brins de paille, se transforme en 
ja.rdinier et va chercher du service de par la 
ville. 

Le roi de ce pays avait justement besoin, k 
ce moment-lá, d'un jardinier habile; on lui 
parla de eet étranger. II le fit venir, le vit et, 
sur sa bonne mine. Tenga gea. 



\ 



Il8 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

Ge roi avait trois filies. Les deux ainées se 
couchaient de bonne heure, mai? la troisiéijie 
veillait tard et avait coutume de regarder par 
sa fenétre qui donnait sur le jardín. 

Depuis Tarrivée du nouveau jardiaier, elle 
remarquait que tous les soirs^ quaiid tout U 
monde était couché, un magnifique cavalier, 
monté sur un superbe cheval, galopait et faisait 
des tours et des détours dans le jardín royal. 

Un soir, au clair de la lune, elle reconnut 
dans ce cavalier le nouveau jardinier. 

Elle en devint amoureuse. 

A quelque temps de lá, le roi p^nsa á marier 
ses filies qui étaient d'áge. 
• Les deux ainées choisirent chacune un 
seigneur, qui tous deux étaient jeunes, beaux 
et riches. La troisiéme demanda á se marier 
avec le jardinier du roi. 

Le roi ne voulut pas contrarier le goüt de 
sa filie et Tautorisa á contracter ce mariage. 
Mais ne voulant pas avoir á sa cour un 
gendre jardinier, il les maria sans noces ni 
musique et les envoya demeurer dans la hutte 
4u jardinier, avec défense absolue de rentrer 
jamáis au palais. 



r 



il 



Pendanl ce terops, les mariages de ses deux 
filies aínées 8e faisaieniavec pompaet duraient 
quarante toura et quarante nults. et chacuae 

d'elles prit possession d'un dea deux magni- fc 

fiques palaís bátis pour elles et leurs maris, í> 

ea face méme du palais royal. *■] 

DÉ6 que les fetes furenC finies, le sultán ^„ 

voisin. aCtaqua les Etals de ce roí. Une guerre ¡" 

Lea deux gendres du roi l'aceompagoérent _'{i 

h la guerre. >:: 

A U premiare bataille, malgr£ la préseace , 

du roi et de ses deux gendres, «t malgré les ''> 

prodiges de valeur qu'ils firent, les eaaemis •■■- 

gagnérent du terraín, lorsque tout k coup, uq ^:j 

eavalier tout couvert d'une armure éelataüte, V.l 

en costume vert, rouge et blanc, apparut s" 

monté sur un superbe cheval. Z'l 

II entre au plus fort de la mélée et renverse 

tout sur son passage avec salaaeequ'il Ccnatit ^■- 
en arrét. 

Son apparitioo rendit le courage á l'armée 
du roi, elle se rúa sur l'ennemi avec tant 
d'élan que ce dernier se débanda, On en fit un 
grand mas sacre. 



120 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

Au moment oü la bataille était défíniti- 
vement gagnée, le cavalier inconnu regut une 
blessure au bras et s'arréta. Le roí qui était 
curieux de savoir qui pouvait étre ce brave, 
descendit de cheval et alia lui-méme panser 
sa blessure. 

En lui attachant une bande, le roi dérangea 
le masque du guerrier et reconnut aussitdt 
son jardinier, son troisiéme gendre. 

II comprend alors que c*est un prince 
déguisé, plus grand seigneur que ceux mariés 
á ses fíUes ainées. 

Le prince alors lui raconte son histoire. 

Le roi en rentrant en vi lie, le loge dans son 
propre palais, y fait venir sa troisiéme filie 
et la nomme maitresse de tout le pays et son 
mari devient levizir du roi. 

Le nouveau vizir construisit une écurie 
splendide pour son cheval et il vécut heureux 
entre son beau-pére, sa femme et son merveil- 
leux coursier^ 



I. Comparer avec la légende de Phédrc ct 
d'Hippolyte. 



TROISIEME GROUPE 



SEMITIQÜES 

ÁRABES, JUIF5, BERBÉRES 



TROISIEME GROUPE 



SEÍM I TIQUES 



UN MARIAGE AU PROFIT DU MARI 



Tl y ttvait une fois un marchand; il était sí 
I beau, que plus d'une cliente étaít attírée 

dans sa boutíque par sa beauté. 

II était jeune, il avait de grands yeux noirs 

«t s'habillait toujours avec luse et propreté; 

en un mot, il faiaait Tadmiration de tous ceux 

qui le voyaient. 



124 L^S rOLK-LORES EN EGYPTE 



Un jour, une dame fort belle s'approcha de 
sa boutique et sous pretexte de faire des 
emplettes entra en conversation avec lui. 

Les manieres de la dame et sa conversation 
mirent le marchand en bonne humeur, á tel 
point que la dame s'aper^ut qu'il devenait 
amoureux d'elle. 

Elle quitta la boutique et s'en alia. 

Le lendemain, elle revint á la méme heure, 
accompagnée d'une autre dame, plus jeune, 
plus jolie et encoré plus belle qu'elle-méme. 

En voyant la nouvelle venue le marchand 
n'eut de soins que pour elle. 

Lorsqu^il fut bien établi pour les deur 
dames que le beau marchand préférait la 
' plus ieune d'entre elles, la plus ágée prenant 
la parole lui dit : 

« Par le Prophéte, hier tu n'avais pas assez 
de tes yeux pour me regarder !... Aujourd'hui 
c'est ma filie qui captive ton attention!... Par 
le Prophéte, ce n'est pas pour t'en faire un 
reproche, car si tu désires Tépouser, tu n'as 
qu'á la demander et je te la donne en 
mariage. 

— Certes, dit le marchand, ce n'est pas le 





^^5 






M 




a¿M.TI,,U.S, 


GRABES 


125 




1 


désir qui m 


en manque, c 


ar je jure Die 


uque, 


méme en ré 
telk beauté 


ve. ¡e ne croi 
... MaÍ3.,. 


paa avoirv 


u une 


'1 


-Non! 


non I interrompit la m¿re 


n'aie 




aucun souci 


nous n'exigerons de mi r 


i dot, 




DÍ fraia de 


aoce, Nous te prenons tel 


que tu 




es ; ta beauté et ta jeunesse suffíseat á n 


a filie. 




Il3 convin 


rent alors qu 


i! n'y aurail r 


i fÉtea 




bruyantes, 


ni rausique 


□i invitationa, ni 




promenades 


de la mariée 


á travers la v 


lie, et 




qu'on 36 m 


arierait tout 


Ap 1» 1^; Q^nc r,:-,. 


i 


: > 



les preacriptio 

Qu'ils inviteraienl un cheikb pour écrire 
le contrat, enregistrer lea déclarations dea 
parties, consigner la deposición des témoína, 
etc., et que le soir mSme le piua beau garíon 
du Caire aurait pour compagoe la plus belle 
filie du monde. 

Ayant ainsi tout arrangé, la mere se tourna 
vers sa filie et luí du : 

« Allons, ma filie, rentrODS chez nous pré- 
parer tout pour recevoir dignement le mati, 
qu'il ftait ta deatínée d'avoir, » et elles s'en 
allérent. 



120 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

Le soir méme, comme on en était convenu^ 
les deux jeunes gens étaient maríés et daos 
les bras Tun de l'autre. 

Le lendemain, aprés avoir pris son bain, 
le marchand alia á sea afiEaires comme át 
coutume. 

A la tombée de la nuit, il rentra dans 8a 
nouvelle demeure et monta au harem. 

A peine fut-il dans la chambre, il vit le lit 
étendu et sous la moustiquaire, sa femme 
dans les bras d'un jeune et admirablement 
beau gargon. 

Sa belle-mére se trouvant derriére lui sur le 
pas de la porte, il se tourna vers ell& et lui dit : 

(( Qu'est ceci ? Je me refugie en Dieu ! 

— Priez pouT le Prophéte ! répondit la 
belle-mére. 

— Que la bénédiction de Dieu soit sur lui 
et sur sa famille et tous ses compagnons ! dit 
le ieune homme * . 



I. Quand dans le has peuple une discussion 
s'engage ou qu'elle s'échauffe, la partie quí a 
gardé son sang-froid dit la premiére phrase, Tad- 
versaire est obligé de repondré par la seconde ; il 
s'ensuit un répit, souvent la discussion prend une 



je t'ai donné j 
ftucune dot, ní 
púur que tu ti 
93 guise 






eindre ii aucune déptaae, 
I qu'elle a.BÍsse á 



uDis-moi encoré, penses- tu que ma filie Et 
moi no\i5 pourrions subvenir a nos beaoins 
et aux tiena si elle n'Était pas libre de choisir 
lea moyens f... Ah 1 vraiment tu es bien 
exigeant ! u 

Le íeune homme, pleia d'indignation, oa 
BÍgoe de ddgoíl: c racha i terre et dit : 

« Que Díeu me fasse miséricords ! Js ene 
mete sous la garde de Dieu !... 

— Par le Prophéte, calme-to¡, raon Cls, 
repric la belle-mere, et si ce genre de víe na 
peut te convenir, riea n'est plus facile pour 
tai que de répudier ma ñlíe et de nouB 

Le jeune homme exasperé s'écri a en s'adres- 
sant i sa femme : 

« Par Dieu et par ie Prophite, je divorce !... • 



:ude 



128 LES^ FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

Des qu*il eut formulé le divorce, avant 
qu'il ne sortit de la chambre, sa femme se 
leva et sortit de dessous la moustiquaire. Elle 
était tout habillée. Elle courut se couvrir le 
visage ^ 

Aussitót aprés, le jeune homme qui était 
couché auprés d'elle se leva. Le marchand fut 
bien surpris de voir que ce jeune homme 
était aussi une femme et qu'elle était égale- 
ment tout habillée. Gelle-ci en se levant 
avait dénoué ses cheveux qui lui tombérent 
jusqu'aux chevilles ; elle les avait arrangés 
comme la coifFure d'un homme pour le 
ti;omper plus aisément. 

Comme il restait lá, cloué par la surpríse 
et émerveillé de la beauté des deux jeunes 
femmes, la belle-mére, qui avait introduit les 
deux témoins du mariage et le cheikh, prit la 
parole et dit : 

« Témoignez, mes f reres que cet homme a 
repudié sa femme I AUons, mon íils, tu n*as 



I. Une fois divorcée, la femme ne doit plus se 
montrer le vísage á découvert á celui qui fut son 
mari, puísqu'elle luí devient étrangére. 



aÍMiriQUES, ARABEa 1^9 

plus que faire id, va-t-en cheztoí et k l'aveair 
garde-toi de juger sur les apparences ]... 

Celle-c¡, comma la ferome que tu viens de 
r¿pudier est ma íille, c'esC sa sceur cadette. 
Ma filie alnée va S prásent pouvoir se rema- 
rier avec son premier mari, qui dsns un 
moment de oolire l'avait répudiée par trois 
foia. Tu coEOprends le pourquoi ?... \'a-t-en 
done et que Dieu te conduise ! • 

Le marchand s'en fut coucher tout seut 
dans sa maisoa de garlón ' . 

I. La femme en divorcée des que le mari dit : 
Tu es dinorcét ; c'esl le dívorce appelé divarce paa- 
pant itn reioíirné ou reprU. II peul encoré divorccr 
une seconde Tois de la mime fa; on et reprendre 
sa femnie. Cependacit, il ne peut la reprendre que 
trois mois aprés chaqué divorce, au plus tñl. 

S'il désire done la reprendre, toule la cérá' 
moflía consiste k luí diré quelques mots consacrós 
doni te sens est : • Je reprenda ma femme. » el 
ell« se trouva remirláe. 

Mais a^il divorce une troisiérae fois, le divorce 
OSE dáñnitir. Si cependaní i> désire aprés ce iroi- 
siéne divorce la reprendre, 11 faul qu'elle con- 
soinin« uH vórilable mariage avec un tiers et que 
ce liers la repudie; dans ce cas seulement le 
remarlage avec le premier loari est legal. 

Sí un mari, la premiére Tais qu'íl divorce, dil : 
Tttes diuorcée par troiifois, alors la femme est con- 



130 LES FOLK- LORES EN EGYPTE 

sidérée comme si elle était réellement divorcée 
par trois fois. 

La Ibi qui régit le mariageet le dívorce est tres 
compliquée et nous n'avons pas la prétentíon de 
donner ici tous les cas; nous nous spmmes con- 
tenté de donner les principaux points qui 
expliquent le conté que nous avons rapporté. 

J'ajouterai á ees cas un cas oü le mariage aprés 
le divorce devient une impossibilité canonique; 
c'est lorsque Thomme dit á la femme : « Tu es 
comme ma mere, ma soeur ou ma filie» » etc., en 
un mot sMl luí dit qu*elte est comme si elle luí 
était apparentée á un degré tel que le droit canon 
ne pourrait Tautoriser á contracter un mariage 
legal avec elle. 

Le divorce, méme dans le bas peuple oü il est 
un fait presque coutumier, est consideré comme 
une action honteuse, surtout le diporce par trois 
fois; un des serments les plus solennels est le 
serment que Ton fait en invoquant comme preuve 
de bonne foi ou á Tappui de la véracité de ce que 
l*on avance le divorce par trois fois» car si on man- 
quait á sa parole ou si on avait menti, on se 
trouverait ipso facto diporcé par trois fois. Ce qui 
est une honte. Bien plus, méme dans la basse 
classe, c'est une injure grave que de provoquer 
ees sortes de serments. 

Dans les moyennes et «les hautes classes, en 
Egypte,'le divorce, et surtout le divorce par trois 
fois, est une chose rare et tres réprouvée par 
Topiníon publique. 






LA PATIENCE 

UN horamc avaic un fils beau, bien fait et 
fort studieux. qui altaít au Medressa 
(école) et apprenait tout ce qu'on lui enaei- 
gnait. Ce garíon voulait toujours apprendre 
davantage. 

Quand il arriva k Tfige viril, son pére lui 
choisit une femme el le maria. 

A peine les noces eurent-elles pria fin que 
le jeune homme düt porter le deuil de son 
pire. 

Aprés les funcrailles et les quarante jours 
de deuil, il reprit ses études. 

Un de ses camarades, qui venait d'un pays 
fort éloigné, lui dit qu'il eiistait daña le 
pays d'oi il venait un savant le plus con- 
sommé et le Saint le plus parfait, en un mot, 
le modele dea vertus dee temps prdsents. 

Notre jeune homme coa^ut aussitAC le 



132 LES FOLK-LQRBa BN ÉGYPTE 

projet d'aller suivre les cours de ce saint 
homme si renommé. 

II rentre chez lui, prend ses sandales et sa 
besace, son báton et quelques effets et part 
pour ce lointain pays, á Teffet d'étudier sous 
la direction du saint mattre. 

11 marche consécutivement pendant qua- 
r^nte jours et quarante nuits et arrive enfín 
4ans le pays si ardemment désiré. 

II se présente au maitre. 

a Que • veux-tu, lui dit celui-ei, qui était 
un simple forgeron. 

-*- Apprendre la science », lui dit le jeune 
éléve. 

Le forgeron lui met entre les mains la 
ohaine du soufflet et lui dit de tirer. L'éléve 
obéit, tire et reláche les cordons du soufflet 
pour activer le feu de la forge oü travaillait 
le maitre. 

Un iour, deux jours, une semaine et puis 
un mois; une année et encoore d'autres se 
passent sans que personne lui parle dans la 

forge. 

U volt des hommes venir, diré un mot au 

maitre, en recevoir une réponse et repartir. 



D'autres comme lui sonL assignés á un ser 
víee spécial et coDtinuent k faite ce servic 
(¡órame lui le sien sans désemparer, sans dir 
un moc, sane proférer une plainte ni un mUt 



ns se passent ! Un jour, á 
e jeune homme se hasarda 



bout de patie 
i diré r 
« Maitre I 

— La science... 

— Tire la ficelle n, lui répond le maitre, qui 
continué á e'occuper de sa forge. 

Le seul plaisir du ;eune éléve était lorsque, 
harassí de fatigue du travail de Is joumée, 
au coucher du soleil, il mangeait ss faible 
pitance et qu'il éCudiait dans sea livres ou les 
livres de ses camarades ou de son msltre. 

L« GÜence ¿tant de r¿gle soit á l'atelier, soic 
A la maison, personne ne lui parlait et il ne 
parlait á personne. Tout au plus, b'íI avaic 
besoin d'étre ¿clairé sur un point ou un cas 
de grammaire, d'eKdgíse, de commentaire ou 
de droit, en un mot, sur un point de la 
Bcience qu'il ne comprenait pas, alors ¡1 lui 



134 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

était permis d'écrire sa demande et de la pré- 
senter au maitre, le matia en entrant á la forge. 

Le maitre jetait Técrit au feu ou bien le 
mettait dans les plis de son turban. 

Lorsqu'il jetait Técrit au feu, c'est que la 
demande ne valait pas une réponse ; lorsque au 
contraire le papier était place dans le turban, 
le soir, en rentrant, le jeune homme trouvait 
la réponse du maitre écrite en lettres d*or sur 
son chevet. 

D'ailleurs, le maitre agissait ainsi avec tous 
ses eleves; sans jamáis lire aucun de ees 
écrits, il les brülait ou les gardait dans son 
turban. 

11 y avait exactement vingt ans que notre 
héros était á la forge, quand un jour le 
Maitre lui dit : (( Tu peux retourner dans ton 
pays, maintenant, mon cher garlón; la science 
que tu cherches tu Tas dans le mot (( Ratience ». 

Le jeune homme baisa la maindu maitre et 
retourna dans sa ville natale. 

Pendant tout le trajet qui dura encoré 
quarante jours, il réfléchit sur le mot 
patíence. 

Quand il arriva, il s'étonna de reconnaitre 









n 


SÉMÍTIQUES, ÁRABES 115 




j 


si peu de monde, lui qui avant de partir en 


conaaÍ3sait tant. 




1 


11 arrive, enfin, devant aa mniaon et se 


,3 


1 


réjouit di]k du bonheur que sa femme aura k 






le revoir. 


'■'' 




Avant de frapper á la porte, ¡1 regarde par 


¡S 





o horreur ! Que voít-il ? Qut 
Sa femme asaise aur un tapis, appuyée sur 
des cousains et, prés d'elle, un jeune homme 
de viugt ana, toua deux riant, cauaant et se 
donnant du bon lemps. 

Le voyageur prend dans son carquois une 
Héche, bande aon are et s'appréte i iranapercer 
le jeune homme et sa femme du mema coup , 
lorsque le mot palieitce lui revient a l'esprit, 

It frappe á la porte; on lui ouvre;c'est le 
raéme jeune homme qu'il a vu par la lucarQe. 
II entre, sa femme l'aperíoit, se precipite vara 
luiencriant: a O Ahmed, ó moa fila, voici 

Le mari ae jettc le viaage conlre Ierre en ae 
tournant du cdtó de la kibla ' et a'éerie : U O 

I. La direction de la Mosquee de la Mekke. 



Í-LORES EN ÍÍGVPTE 



grand Dieu, \'&í mievingt ans p 

la patience et ¡'ai failü tuer moa fila 1 Que U 

«t notre faiblesse incomiaensurable * I 



1. Les sept anníes de n 
peotianí ce noviciat éialeí 
mime de Straboa aux Inc 
l'abBtinence de la chair de 

VoyezaussidanslaBibI 
de Jacob, eic, ele. 



iir da lemps 
le le célibat, 




VA^ %^á Vm^ ^^d %^á ^M^ ^Ad ^^^ ^^^ 

■• 'V^^^ ^^^V ^^>^ V¡^^ V^^?' ^^V?* ^^VV V^VO '>^V^ í 






NE CONCLUEZ JAMÁIS ! 






IL y avait dans le plus grand MedreBsa de 
Bagdad un cheikh des plus savants ; ses 
cOurft' ótaient suivis par des centaines de 
ieunes éiéves, tous plus ixxtelligents lea ufis 
que lea autres. 

Parmi aea eleves^ le maitre en avait cepeop- 
dant distingue trois, qui luí paraÍBtaient étre 
lea plus intelligents. 

Un jour, il les réunit tous Ita troia che2 lui 
et leur dit : « Je vais vous enVoyer tous troia 
au Caire. L«s h^érétiques sont maitres de ce 
paya, jt veux que vous Tétudiiez k fond et 
que vous m^en rcndiez compte. » 

Le premier part de suite avec Ordre de ne 
reater au Caire que trois mois. 

Le second re^oit Tordre de partir lorsquele 



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138 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

professeur juge, d'apres son calcul, que le 
premier a déjá quitté le Caire. 

Enfin, le troísiéme arrive au Caire, lorsque 
le second lui-méme avait quitté la ville aprés 
un sé)our de trois mois comme le premier. Ce 
troisiéme et demier rentre enfín á Bagdad, 
aprés le méme laps de temps. 

Quand les trois eleves eurent remis au pro- 
fesseur leurs rapports respcctifs, il les réunit 
et on commen^a k lire le rapport du pre- 
mier. 

II y mentionnait d'abord les beautés des 
monuments et des jardins de la ville, 
Tagrément des environs et des campagaes ; 
puis il faisait une description tr¿s vive des 
lieux de plaisir, des bains, des bazars, des 
lieux de reunión oü des chanteurs et des 
danseurs des deux sexes amusaient le public 
nombreux qui fréquentait ees établissements. 

II parlait de la magnifícence des fétes 
publiques, telles que le départ de la caravane 
pour La Mecque, la coupure des dignes du 
Kalig, qui alimentait le canal qui unissait 
alors les deux mera. II décrivait les jeux 
publics et les jeux athlétiques, les courses de 



f 







SÉJI 


Tiyu 






1J9 


J 


chevaux e 

Obéjdite. 

EnBn, t 


utes a 


esob 


de 


'armíe du khalyfo 
ions porlaient sur 



les plaisirs que les habitants du Caire se 
donuenl toute leur \¡c durant. A entendre 
son rapport. on aurait cru que touie la popu- 
lation du Caire n'i-tait ojeupé^ d'un baut de 
l'an íi l'autrc qu'á s'amuser, et il conoluail en 
disant Que ce peuple était Icger ct immoral, 
et que le prince régnant profitait de ees dispo- 
sitioQS d'esprit poui' le gouverncr sclon son 
bon plaisir, sans lois et sana morale, en véri- 
tabte .hérÉtiqui; qu'il étaic. 

Le second rappoi-t ne montraii auasí qu'un 
des cótés de la vic de ce peuplc. 

II énumérait les moí^quées et les IÍeux de 
pr¡¿re. montrait que ce? mosquees, tres nom- 
breuses, élaient rcmplies d'une foule fcrvente, 
tres aHacbée á sa religión et & la doctrine de 
ses princes. 

Les vendredis, disail-il, a la pritre de midi, 
les rúes se vidalent et l'immense quantité de 
ñdeles accoui'us nc trouvait pas á se loger 
dans les mosquíes, quoique on en compt&t 
plus de trois cents. 



140 LES FOLK- LORES EN ÉGYPTE 

Partout oa s'iaYÍtait á aller etiteadre dans 
la soirée la lecture des Saints Livres, partóut 
et tous les jours on avait des réunions oü, 
aprés avoir priéDieueii commun, on diteutait 
sur les Livres sacres. 

Enfín, sa conclusión était qu^l trouvatt 
vraiment dommage de voir tant de ferveur 
chez un peuple hérétique, gouverné si pieu- 
sement et selon la parole divine par un princc 
si pieux, mais, helas I si aveuglé par Tesprlt 
du mal. 

Le troisiéme rapport roulait sur Íes sóiences 
et les arts. Son auteur était émerveillé des 
choses nouveiles et des découvertes recentes 
en astronomie, en physique^ en chimie et ea 
médecine. II parlait avec admiration des obser- 
vatoires, des hopitaux et des jardins bota*- 
ñiques. 

li parlait des fabriques d'étoffes, de verre, 
de cuivre, de fer, etc., c'est-á-dire de l'tndus^ 
trie en general. 

Son admiration n^avait plus de bornes 
iorsqu^il parlait des mathématiques et particu^- 
li^ement de la mécanique, des constructions 
grandioses et elegantes qut s'y élevaient, 






enfin des ponts et des digues faits avec tant 
d« goút et de jugement déücat. II expliquait, 
in-e«enso, le systéme merveilleuxd'irrigation 
adapté dans ce pays et sa péroraison, aprés 
un tel exorde, faisait ressortirqu'il n'était paa 
étonnant que ees hérétiqueíi fussent plus riches 
et plus puissants que lea khalyfes et les ortho- 
doxes de Bagdad, puisqu'JIs savaient cultiver 
les Sciences et les erts qui, seuls, développent 
t'industrie et le commerce, sourcea de la 
richesae, de la vie et de la forcé des nations. 

Quand la lecture des trois rapports fut 
achevée, le professeur prit la parole et leur 
dit ; ■ Avec ees Irois rapports, noua avons un 
ensemble qui nous donne une tris ¡usté idee 
de l'état actueldeladorissantevilledu Caire, 
cororoe aussi des nombreuses causes de ea 
grandeur et de la juste et belle réputation 
qu'elle a su s'acquérir depuis quelque temps. 

■ Voici done ma derniére lefocí pour voub 
tous, mes chers éltvea, comprenez-la bien et 

» Observei. notez, écrivi 
jamáis I 

o Allez en paix! • 






*> • * 



QUATRIEME GROUPE 



AFRICAINS-NÉGRES 



SOUDAN ORIENTAL 




r 



aUATRIÉME GROUPE 

^F-lilCaiI?^S-XÉG-1i.ES 



XI 

UN BRAVE 

DBPUis quelque temps na morfa'ínc', ia¡- 
saic dcgraada ravages daña unvillage. 
La ghoule enlevaic t 
elle tuait les hommes i 
gea.it les enfants. 

Un brave résolut d'ei 
C'était le plu3 bel hoi 
plus valeureux de la contrae. 



, Icj femmes et man- 



débarrasser le paye, 
le plus fort et le 



n éire malfaisanl. 



146 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

II dit á ses amis : (( Je veux attaquer le 
terrible cannibale dans sa retraite. J'y entrc- 
rai la tete la premiére. Vous me* pousserez 
.par les pieds, tant queje remueraiVous conti- 
nuerez, des que je cesserai de remuer vous me 
laisserez et attendrez. i¡> 

Ainsi dit, ainsi fait. 

Les amis attendirent en cercle autour de 
Touverture de la retraite de la ghoule, un 
jour, deux jours, trois jours. 

Ne voyant leur ami, ni reparaitre ni remuer, 
ils allérent trouver sa mere. 

Elle leur dit : « Peut-étre que la ghoule a 
pris sa place ; entrez dans la cáveme et sortez 
le corps que vous y trouverez. 

— Comment le reconnaitrons-nous ? 

— Mon fils, dit la mere, avait le cou long^ 
commele manche d'une pelle, les yeux comme 
un plat de cuivre et les dents comme le fer de 
la pelle. » 

Les hommes retournérent á Téntrée de la 
caverne et en sortirent le corps qui était sans 
tete. 

Aprés avoir cherché la tete pour reconnaitre 
rindividu, on la trouva au fond de la caverne 



AFRICAIN S-NEGRES 



147 



et on porta le tout á la pauvre mere qui dit 
avec chagrín : « C^est bien mon fíls, je le 
reconnais, sa valeur luí a coúté la vie; j'ai eu 
le malheur de perdre mon fíls qui était si 
beau, si fort; mais cela ne fait ríen; il vous a 
montré qu'il était vaillant; il vous a débar- 
rassé de la terrible ghoule; que Dieu lui 
donne le repos .éternel I » 




XII 

FRÉRE ETSCEUR 



IJfemra 



t deux enfants, 



e Slle. 



1 garíon el 



En mourant, Íl recommaada á sa femme 
son ñh qui était le cadet et lui dit : a Surtout 
ne )e contredisez jamáis et laissez-lui faire sea 
quatre volontéa. • 

Au bout de quelque temps la mire vint h 
mourir, elle dit ¿ sa filie qui était l'alníe : 
« Votre pire en mourant m'a fait jurer de ne 
)amaÍB contraríer lea volontéa de notre fila; 
¡ure-moi de suivre cette recommandation. » 

La ¡eune filie jura et la mire mourut 
heureuae. 

Un jour, quand le jeune garlón était déjá 
grand, il dit k aa soeur : « Ma sosur, je veux 
brüler tout ce qui nons appartient : maison, 



150 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

I — - -- mi ■ I ~lr T^ ■ ^1 

vaches, chévres et tout enfin, notre zariba* et 
notre avoir. 

— Mais, dit la soeur, que ferons-nous 
ensuite > 

— C'est ainsi », dit le garlón, et aprés avoir 
tout entassé, il y mit le feu. 

La soeur avait confié ¿l quelques voisins 
différents objeta pour les sauver du feu. Le 
frére s'ea aper^ut et trouva les maisoñs oú 
ees objets étaient déposés, en suivant sur le 
sable les traces des pieds de sa soeur, qui 
allaient de chez eux aux maisons voisines. 

Quand il fut arrivé á ees maisons, il y mit 
le feu. 

Les propriétaires sortirent en colére et 
voulurent tuer le frére et la soeur. 

Celle-ci dit alors : « Vois-tu, mon frére, ce 
que tu as fait ? Sauvons-noua tout de suite. » 

lis prirent la fuite et coururent pendant 
tout un iour et toute une nuit. 

lis arrivérent enfin á une grande zariba oü 
ils s'oflFrirent tous deux comme ouvriers; sur 
leur bonne mine ils furent engagés. 

I. Enclos. 



AFRIGAINS-NÉGRES 151 

Quelques jours aprés tous les habitants de 
la zariba allérent aux champs. Le chef laissa 
le jeune homme á la maison pour prendre soin 
des enfants, au nombre de trois. 

Des que le jeune homme resta seul, il dit 
aux enfants ? (( Allons sur l'aire et jouons au 
battage des grains. » 

Le jeune homme se fit grain et les enfants 
le battirent, puis le tour des enfants vint de 
faire le grain. 

Le jeune homme les battit si bien qu'il en 
fit une pátée. 

La soeur ayant pensé que son frére pouvait 
faire quelque mechante action, prit les devants 
et en entrant á la zariba vit qu^il avait tué les 
trois enfants confíes á ses soins. 

« Sauvons-nous, frére, di t-elle; tu as fait 
lá une belle action, ma foi ! Nous étions si 
bien dans cette zariba I... Ah ! sauvons-nous 1 
sauvons-nous ! » 

íls partí rent. 

Le maitre et ses serviteurs rentrérent et 
ti'ouvérent les trois enfants inánimes. 

« Courons sus ¿l ees méchants á qui nous 
avons donné Thospitalité et qui nous ont tué 
nos enfants. » 



152 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

Tous s^arment et suivent exactement les 
sentiers qu'avaient pris le frére et la soeur 
dans leur fui te. 

A la nuit tombante, ilsarrivent aupiedd^un 
arbre gigantesque sous Tabri duquel ils se 
couchent en attendant le jour. 

A Taube, le jeune homme dit á sa soeur : 
«Vois, sous Tarbre, ce grandqui dort, c'est le 
chef, je vais luí envoyer mes excréments sur 
le visage. 

— Ah ! dit la soeur, ne fais pas cela, ils ne 
savent pas que nous sommes ici et ne le 
sauront jamáis ; ils s'en iront et nous serons 
sauvés, 

— Non )), dit le frére, et il jette ses excré- 
ments sur le visage du chef. 

Celui-ci se réveille en sursaut, aper^oit sur 
Tarbre le frére et la soeur, réveille ses gen& 
et, comme l'arbre était tres grand et tres 
touffu et que les ñéches ne seraient jamáis 
parvenúes á les tuer, il ordonna d'abattre 
Tarbre. 

« Nous voilá bien, dit la soeur. 

— Nous nous sauverons, reprit le frére • 

— Comment ? » dit tristement la soeur. 



Ene 

au-desBUs de Vi 
sation du fr¿re 
se precipita sl 
daña une de se: 
aira I 

L'arbre a'abat 
gena n'y étaient 



L'oi 



ians l'espace. 
« Ma scEur, 



bre, il entendit la conveí^ 

: de la Bceur, ea eul pitié, 

ur l'arbre , les prit chacua 

i& serres fct remonta daña les 

[tit avec fracas, mais noa jeuDes 
t plus. 

t déjá fait monier le frere ct 
1 dos et continuait á s'élever 

iit le gargon, je veux chatouii- 

Due la queue. 

frtre, nous serons jetes á terre 

— Non ! », dii le íirére, eC il fit commc il 

L'oiseau chatouillé fit un eoubresaut et nos 
dcui jeunes gena furent lances dans Tea- 
pace. 

lis tombérent dans une plaine, sur le sable, 
et ne se fírent pas de mal ; mais ils oe voyaient 
rien, ítant dans le paye des téníbres. 

Le frére ramassa á tátons des pierres et en 
fit un tas, puis il en frotta deux Tune contre 



-Ahí 



154 



UBS POLK'LORES EN ¿6TPTE 



l^autre si víolemmeat qu^elles s^allumérent * ; 
avec ce feu, ü alluma les autres pierres; 
lorsque tout le tas fut ea fea, ils virent dair. 

Tout á coup. ils enteadirent un grand 
mugissement. c^était une béte enorme, une 
ghoule gigantesque, qui s^avan^ait vers euz 
en criant : a Qui ose faire de la lumiére dans 
un pays que f ai voué á robscuríté étemelle ^ » 

La soeur avait bien peur. 

a O mon frére, dit-elle, voici notre demiére 
heure arrivée. » 

Le frére courut vers le tas de braise, prit 
les pierres une á une et tout enflammées 
qu'eíles étaient il les jeta dans la gueule de la 
ghoule. 

Lorsque la derniére pierre enflammée fut 
lancee, la terrible ghoule éclata et le soleil 
¿cía ira de nouveau ce pays des ténébres. 



I. Ce serait curieux que dans le pays d'orígine 
(Afrique céntrale, Haut-Nil) de ce conté on connut 
le charbon de terre ? (charbon de pierre). 

Cela ne serait pas impossible deputs que 
SchweinfDhrt a tro uve le Lepidodendron mosaicum 
au Sínal,et constaté le devonian au Wady-Araba. 
Voir Bulletin de rinstitut Egyptien de 1885 et 
de 1887. 









1 

AFRICAIXS-NÉGREa I55 


Cette ghoule élait 
tourné aon derriÉre v 
93 luraüre d'éclairer c 

Le roi de ce pays 
par enchantemenl. le 
pagne pour trouver le 
miracle. 


ne sorciére qui, ayant 

rs le Boleil, erapéchait 
ette ierre, 
voyant reluire, comme 

soleil, se lait en cam- 1 
coiirageuxauceurdeee 



11 trouya la béle ei 
cóté une sandale de fe 

« Cherchez, dit-il, 
a fait ce prodige. » 



Le frére 
luivi de s( 






e réfugiirent dar 



implora le pnrdon di 
sandale appartenait 
relever et la rassi 
a tué cette béte f — 
eat-i!f - Volis ne 
Non.» 

Aprés ce dialogue la jeune 
la grotte el ramena son frért 

Le roi lui dit : 



ue, se jeta k terre et 
roi qui eompric que la 
i cette filie. !1 la fit 
rant. lui dit : B Qui 
C'est mon frtre. — Oü 
lui ferez pas de mal ? — 



filie r 



156 



LES FOLK-LORES EN EGYPTE 



(( Tu es plus digne que moi d*occuper mon 
tr6ne; viens, je te le donne, je te fais roi. 9 

Le jeune homme s^excusa et lui dit : (( Sire, 
si tu le permets, je serai ton vizir, mais k la 
condition que ma soeur ne me quitte jamáis. 

— Ainsi soit fait I )) dit le roi. 

Et íls vécurent de longues années et 
toujours heureux ! 




r 



U: 



XIII 

FONl ET FOTIA 

E veuve avait une tréa jolie filie qui 
'appelait Foni. 

Lorsqu'elle ful prÉs de mourír, elle fit venir 
BOn ami Gada et, devaot luí, elle dic á aa filie 
Foni : (t Ma filie, le vieust sorcier t'a demandée 
en mariage, i'ai refusc. Ne te marie jamáis 
avec Igi, quoi qu'il arrive. Mais, pour oc pas 
exciter Ba saüire, rcfuee de te maricr avcc qui 
que ce soit, sanscela ¡1 t'arriverait malheur.» 

Elle mourut. 

Foni avait plusieurs vaches et quelques 
chévres. 

Elle leB [aÍ3BÍt paítre sur la montagne de 
Ladoune, au pays de 6ari. 

Ces bcBtiaux étaieat gros et gras, lea 
femelles étaient toutes pleines. 

Le sorcier vint un jour luí demander aa 
main; elle refusa. 



158 LES FOLK-LORBS EN ÉGYPTE 



'•■ . A 



-Jt 



Toutes ses bétes mirent baa des petits mort- 
nés. 

Elle pleura et alia conter sa mésaventure á 
Gada. 

(( Que faire ! ne dis rien, fit celui-ci, peut- 
étre le sorcier sera-t-il satisíait avec cette 
vengeance. )) 

Quelques jours aprés, le soreier la rede- 
manda en mariage. 

((Non ! »dit la filie; et aussitdt uae de 8es 
vaches mourut. 

Foni se mit á pleurer. 

Pendant qu'elle pléurait, Fotia, un beau et 
brave garlón, passait par lá. 

(( Foni, dit-il, épouse-moi et je te défendrai 
contre ce méchant sorcier. )) 

Foni consentit. 

Le sorcier qui les avait entendus, les 
changea de suite, Fotia en lion et Foni en 
ourse. 

Tous deux allérent sur la montagne. 

Le lion alia chasser, il prit une antílope et 
Tapporta á Tourse. 

Foni lui dit : (( O mon ami, moi je ne peux 
manger que du miel ou des fruits. » 




159 



Le lion Folia mangea l'antilope tout seul et 
repartit á la chasse. 

II apporta une charogne. 

Foni recula d'horreur. 

n O Fotia, ne m'apporte plus de choses 
pareilles, je ne mange que des fruits et du 

Fotia mangea encoré seul la chair pourrie. 

Un jour le lion apporta un enfaol vivanl, 

n O Foni, voici de la chair fraiche et bonne, 
tu ne peux refuser cela, mange avec moi. 

— O Fotia, donne-moi cet enfant, ne le mange 
pas el va ehercher aulre chose pour loi ; quant 
k laoi ne l'ca occupe pas, je vivrai comme je 
Tentendrai, de fruits et de miel, u 

Fotia, le lion, eut de la peine á ae séparer 
de 3a proie; mais enSn, pour ne pas mécoa- 
tenter Foni, Toarse, il lui donna Teafant. 

L'ourse aortit et rappona du miel; un jour 
m¿me, elle attrapa une chívre et, de son lait, 
elle nourrit l'enfant. 

Le roi du paya voisia avait une aceur qu'il 
aimait beauconp. 

Chaqué fois que le roi avait un fila, sa 
8<eur le faieait étrangler ou tuer pour que le 



- .» 



l60 LES FOLK'LORES EN ÉGYPTE 

roí en aimant son fíls ne füt enclin á aimer la 
mere de ce fíls plus qu'elle, sa sceur. 

Un jour le roí eut un fíls d'une grande 
beauté, il Taima des sa naissance. La soeur 
du roi ne put arriver par ses artífices á tuer 
le nouveau-né. 

Mais des qu'il grandit elle Tenvoya pro- 
mener dans la forét avec un de ses favoris qui 
le perdit. 

X^^était ce jeune prince que le lion Fotia 
avait rapporté á Tourse Foni. 

Cependant le roi avait commandé une 
battue pour retrouver ce fíls chéri. 

Les archers arrivérent á la grotte oü demeu- 
raient Foni et Fotia. 

L'ourse tenant dans ses mains Tenfant, le 
déposa aux pieds du roi. 

Le roi ordonna de ne pas tuer Toarse ; 
mais il la fít conduire dans sa zariba\ 

L^ourse alia chercher le lion au fond de la 
grotte et tous deux furent amenes par le 
roi. 

Arrivés lá, un vieux reconnut que le lion et 

I. Ferme soudanaise. 



AFRICAINS-NÉGRES l6l 

IWrse étaient un homme et une femme 
changés en bétes. 

(( O roí, dit-il, c^est le sorcier de la montagne 
de Ladoune, du pays de Barí, qui a fait cette 
vilaine action. Fais venir ton sorcier qui est 
beaucoup plus puissant et il rendra á ees 
jeunes gens leur forme primitive. » 

Le roí obéit. 

Lorsque le sorcier arriva, il enferma le lion 
et Tourse dans une grotte et envoya une 
armée contre le sorcier de Ladoune. 

(( Ne tirez aucune fleche, ni n'essayez de le 
tuer avec la lance, dit le sorcier, il est invul- 
nerable; mais des que vous le rejoindrez, 
faites autour de lui un cercle de feu, il ne 
pourra en sortir et se tuera lui-méme. )) 

Les hommes partirent. 

(( O sire ! dit le sorcier en s^adressant au 
roi, ce lion et cette ourse seront renfermés 
dans cette grotte pendant quarante jours. 

» Si le méchant sorcier est tué avant, ils 
reprendront leur forme humaine au moment 
méme de sa mort, sinon ils ne redeviendront 
hommes que le quarantiéme jour et le sorcier 
mourra au méme moment. » 

IX 



Le roi le remercia. 

Le sorcier s'assit i. la porte dé la grotte et 
observa le feu qu'il avait allumé. Lorsque la 
Qamme mOntait, il Tabaiasait en jetant dessus 
de I 'eau, lorsque laflamme baissait JH'attisait 
en soufflant dessus. 

Le vingt-uníim'e }our, la flamme s'étdgnit. 
Foni et Fotia reprirent leur forme primitive, 
le roí comprit alora que le magicien, le 
méchant gboule ¿tait mort, il mária Poni i 
Fotia et tout ne fut quebonheur et prospérití. 



11 



CINQUIEME GROUPE 

ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 



ONOyiEME GROUPE 



EGY'PTIE?^S'z.A U-TOCHTOü^ES 



XIV 

MALICE DES FENIMES"" 



ki 



Hassan et Husaeyn ai 
les soirs, depuis quetque temps, dans 
un café du Caire. 
Hassan charmait son jeune et nouvet ami 

des récits de ses bonnes fortunes. 

Husseyn Técoutait sans Tinterrompre. 

Hassan racontait saos se fatiguer. Toutes 
ses anecdotes tendaient k prouver ¿ son ami 



l66 L8S FOLK-LORB» BM BAYVTE 



r 



qu'il connaissait á foní íes fenraieá et qn^l 
savait déjouer leurs malices. 

Husseyn était émerveillé de la science de 
son ami et était p&rsuadé qne pss une femme 
au monde ne serait capable de tromper un 
homme qui les connaissait si bien. 

Hassan flattéde Topinionque son ami avait 
de lui Tengagea á essayer et á se convaincre 
par lui~méme de la perversité et de Tastuce 
des femmes : (( Car, dit~il, selon Tadage popu- 
laire, demandez á celui qui a essayé et non 
aux médecins » voulant diré que la pratique 
enseigne mieuz que la théorie. 

(( C^est bien, lui répondit Husseyn, c*est 
bien, mon frére, mais tu sais que je suis 
timide. Dis-moi, mon frére, comment ferait- 
je pour entrer d^abord en relation avee uAe 
femme ? 

— Rien de plus simple, lui répondit Hassan, 
tu vas te promener dans un inewloud ^ ou aux 
environs d*un lieu de dévotion oü íes femmes 
abondent généralement. 



I. Foire qui se tteni en Thonneur d'un saint en 
general, le joar anniversaire de sa naissaace. 



ÉGYPTIENS-AUTQCHTONES 167 

(( Tu avises une femme accompagnée d^ua 
jeune enfant; si tu juges qu'elle est jolie et 
jeune, le moyen d'entrer en relation avec elle 
est fort simple. 

(( Tu achétes des dattes et des oranges, tu les 
montres h. Tenfant qui pleure et en demande, 
tu les lui ofiEres, et tu t^amuses avec lui sans 
t'occuper de sa mere. Des que celle-ci appel- 
lera son enfant, tu le choieras, Tembrasseras 
et le conduiras vers la mere; tu t'ofFriras 
^éme á le porter; si elle y consent, chemin 
fai^ant tu lui parleras; si elle te répond, le 
reste viendra tout seul. » 



Husseyn se répéta cette le^on toute la nuit. 
"Le matin de bonne heure, il alia au mewloud 
oü il répéta en action sa le^on. 

Le résultat fut qu'il accompagna chez elle 
une femme. 

Ne sachan t pás que Hassan füt marié, ni 
oü il demeurait, Husseyn ne se douta pas un 
instant que la femme dont il portait Tenfant 



1 68 



LES FOLK-LORES EN EGYPTE 



sur les épaules füt la propre femme de 
Hassan I 

Quant á la femme de Hassan, elle prenait 
d'autant plus de plaisir á cultiver la connais- 
sanee de Husseyn que son mari Tavait assuré 
qu'il était impossible qu'elle le trompát. 1} 
était, disait-il^ si au courant des malices des 
femmes, qu'il saurait aisément découvrir ses 
fautes, méme si elle n'avait fait que parler k 
un homme sans sa permission. 

Elle avait cru pendant longtemps a cette 
puissance de divination chez son mari, mais 
á forcé de se Tentendre répéter, Tenvie luí 
était venue de le mettre á Tépreuve ! 

Aprés cette premiére rencontre, son mari 
ne lui ayant fait aucune observation á ce sujet,. 
elle s'enhardit, chercha Husseyn, et bientót 
Hassan ne vit plus Husseyn venir au café 
aussi réguliérement que par le passé. 

(( Le coquin a dú profíter de mes le9ons ! » 
pensa-t-il. 




i 



EGYPTIENS-AUTOCHTONES 



169 



II 



Le vendredi suivant, il rencontra Husseyn 
á la priére de midi. En le saluant, Husseyn 
cTut reconnaitre sur son ami ses propres 
vétements. Ce kaftane vert et jaune, et ce 
gubbé couleur de café de Yemen, tout cela 
était bien á lui-méme I... Cependant Hassan 
pouvait bien avoir les mémes étoflFes, le tisse- 
rand n'avait sans doute pas travaillé pour lui 
tout seul !... 

Préoccupé de cette idee au sortir de la 
mosquee, il s^approcha de Husseyn et le fít 
causer I... 

Le doute n'était pas possible!.. Use promit 
de manoeuvrer de fagon á prouver á sa femme 
qu^elle n'était pas de forcé á lutter avec lui et 
á son ami que tout ce qu'il lui avait dit de son 
savoir n'était pas des inventions ! 

11 demanda done d'un air indifférent á 
Husseyn s'il comptait retourner chez sa pre- 
miére conquéte. 

«Je n'aurai garded'ymanquer, lui répondit 



170 LES FOLK-LORES EN ¿GYPTE 

Husseyn. Ah ! mon frére, elle est si joÜe, si 
grande, si grasse, si blanche I Ah ! mon frére, 
quelle cuisine succulente elle fait I on dirait 
que c^est du muse, et elle embaume le jasmin. » 

Ce soir4á, Hassan voyant que son ami ne 
venait pas au café á. Theure acooutumée, 
rentra de bonne heure chez lui. II trouva sa 
üe^mme occupée á faire les lits, aidée de sa 
négresse qui paraissait tomber de fatigue et 
de aommeil. 

« Es-tu done malade, lui demanda sa femme, 
que tu rentres de si bonne heure > 

— Non, répondit Hassan, c'est que j'ai 
envié de dormir. » 

Ayant tout bien examiné dans la maison 
et ne voyant ríen d'anormal, il se réjouit, 
croyant étre arrivé á temps I... Les lits étant 
prepares, il se coucha. 

La negrease ayant finí son service sortit. 

Mais au moment de sortir, elle renversa le 
fanal; la chandelle qui y brülait a'étei- 
gnit. 

a Peste soit de la maladroite, is> s^écria sa 
maítresse, tout en se levant pour rallumer le 
fanal. 



¿OYPTIBNS-AUTOGHTONBS I7I 

Tout ce bruit avait réveilló I'enfant qui 
dormait dans un coin du diván. Ellle le prit, 
le ber^a un moment et le remit á son mari 
pour le calmer. 

Elle se dirigea ensuite h tátons vers le fanal 
qui était á cote de la porte, ouvrit Tarmoire en 
placard, y prit une boite d^allumettes, alluma 
la bougie et alia se recoucher. 

A peine était-elle recouchée, que Hassan 
entendit distinctement la porte de la rué se 
refcrmer. 

« Quelqu'un vient de sortir, » dit-il en se 
levant. 

Sa femme se mit á rire á haute voix. 

(( Qui vient de sortir > dit Hassan presque 
en colére.. 

— Mais personne, je pense, répondit sa 
femme. Notre porte n'a pas bougé, puis 
comme effrayée : Au nom de Dieu, fais atten- 
tion, tu vas écraser l'eníant !... 

— Mais si vraiment, reprit le mari, cette 
maudite porte a bougé. 

— Mais non, répondit la femme, tu crois 
cela, c^est peut-étre aussi la porte du voisin 
qui s'est refermée. )) Ce disant, elle coucha 



172 



LES F0LK-L0RE8 EN ÉGYPTE 



*. j;-. 






Tenfant qu^elle avait endormi et s^installa 
tranquillement pour dormir aussi. 

Hassan s'était cependant dirige vers la 
fenétre et regardait á travers les barreaux de 
la jalousie. Tout était sombre et tranquille 
dans la rué ; un homme tenant un fanal en 
papier marchait et s'approchait de sa porte, 
puis il la dépassa et disparut dans Tombre; 
un voisin sans doute ! 

Hassan se recoucha sans rien diré. Parler 
c'était risquer de perdre son prestige aux 
yeux de sa femme, qui le croyait capable de 
déjouer toutes les malices des femmes ! 

L'astuce est innée chez les femmes ! admi- 
rez rhabileté et la présence d'esprit de celle-ci. 

Elle cacha son ami, le fít évader avec Taide 
de sa négresse, et trompa si bien son mari 
qu'il dormit d'un somme jusqu'au matin ! 



111 



A quelques jours de lá, Hassan s'informa 
auprés de son ami s'il continuait á revoir sa 
maitresse. 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES I73 

(( Mais, sans doute, répondit Husseyn; elle 
est, mon frére, ravissante et d'une intelli- 
gence supérieure ! Mais lé mari me paraít 
étre un sot ! » 

Hassan ne répondit pas, mais se promit de 
prouver á son ami qu41 n^était pas un sot. 

Le soir venu, il alia en visite chez son 
voisin, s'assitá cótéde la fenétredu mandara^ 
qui de dessous le porche á Tintérieur de la 
porte cochére regardait la rué. 

U guetta ainsi Tarrivée de Husseyn qui ne 
manqua pas d'arriver et d^entrer dans sa 
maison, sans méme frapper k la porte, ce 
qui était une preuve evidente qu'on Tatten- 
dait. 

II y avait dans la maison du voisin un puits 
dont la moitié appartenait á Hassan*. Préten- 
dant que le matin il avait laissé tomber sa 
bourse dans le puits, il demanda á son voisin 

1. Salle de réception des hommes ; equivalen! 
du mot ture, plus connu en Europe, de sélamlik. 

2. Ces puits cu ciíernes communs, sont seule- 
ment separes par le mur mitoyen jusqu'á une cer- 
taine hauteur, le mur se reposan! sinsi sur un are. 

Les puits au Caire ont tres peu d'eau k Pétiage 
^u Nil en été, les citernes égaíement. 



174 



LE6 f'OLK'LORBe EN ÉGYPTE 



d*y deecendre pour ia rctrouveret-deremonter 
chez lui par son cdté du puits. 

« Faitea, mon frére ! » lui dit le voisin qu¡ 
lui offrit méme de la lumiére. Hassan refusa 
la lumiére et descendit dans le puitB. 

Tout alia bien jusqu'au moment oü il 
eommenga á remonterde soncóté du puits. A 
peine avait-il commencé Tascension, que hi 
négresse qui y venait puiser de Teau^ enten- 
dant du bruit se pcncha et retarda ; ayant vu 
un homme dans le puits, saisíe par la peur 
elle se mit á crier de totrtes sce forccs : 
« Afrite i Afrite 1 le diable vient, mes fr^cs ! 
le diable vient !... í> et elle laissa tomber dans 
le puits le pot et la corde qu'elle tenait á la 
main. 

C^est ainsi du moins que pensa Hassan 
lorsqu'il faillit étre assommé par le pot ou 
étraliglé parla corde. II ne se douta pas que la 
négresse était de garde dans la cour pour 
surveiller la porte en face de laquelle se 
trouvait le puits sur la margelle duquei elle 
8*était assise pour attendre la sortie de 
Huseeyn. 

L'éveil étant éonné, Hueseyn et la dame 




ÉGYPTlfeNS-AÜTDCHTONES 175 

deécendirent ; la dame se pénchant sur la 
margelle demanda qui était dans le puits. 
Ayant reconnu la voix de sfon mari, ellfe 
congédia Husseyn et aida éoh mari á remontar. 

« Au nom de Dieu et de son prophéte, qufe 
fáisais-tu lá ? lui demanda sa femme. 

^^ J'y étais descendu pour chercher má 
boarse que fy avais laissé tomber ce matih, 
fépóndit Hassan. 

-^ Est-ce vrai, par le prophéte ? dbmánda 
la dame. 

^ Au nom de Di'eu, 'c*est vrai ! » répbndit te 
matí et ils montérent se coucher. 

Cette fois encoré, le hasard s'alliait avec lá 
prévoyance de la femine contre Te mari tró'p 
confiant en son savoir. 



iV 



Qüél¿iués jburs se passent, et Hás'san li 
forcé de réfléchir, crut avoir trouvé le taóyen 
de déjoüer les artífices dé sa femme et de lá 
surprendre sur le fait... 

11 alia au café comme d^liabituüe, y ren- 



176 LES FOLK- LORES EN ÉGYPTE 

contra ce soir-lái son ami, et luí dit quHl y 
restait judqu'éi minuit, sa femme étant allée á 
une noce et ne devant pas rentrer jusqu^au 
lendemain. II luí proposa une partie de dames 
pour passer agréablement le temps. 

(( Non ! dit Husseyn, je te dirai la raison, 
parce que tu es mon frére ; Tautre jour nous 
avons failliétre surpris par rimbécile de mari, 
qui s'est imaginé de rentrer chez lui par le 
puits, mais gráceáDieu, la dame de la maison 
avait pris se 3 précautions, je me suis sauvé á 
temps, et le benét de mari n'a vu que du feul 
Quel bon tour, eh } Depuis ce jour, je n'ai pas 
revu la dame jusqu'á cé matin, oü je Tai 
rencontrée avec son enfant du cóté de la 
mosquee. Elle m'a engagé á retourner ce soir, 
le danger d'étre surpris par le mari rassuré 
étant conjuré. Faut-il étre béte, pour selaisser 
rassurer par les paroles d^une femme ? Ce 
mari n'est pas comme toi au fait des malices 
des femmes ! Pourquoi ne ris-tu pas ?... 
Trouves-tu le tour mauvais ?... Par le pro- 
phéte, moi je le trouve admirable ! Bonsoir, 
frére ! 

Ce disant, Husseyn s'en alia tout en riant. 



I 



K 



EGYPTIENS-AÜTOCHTONES 1 77 

Hassan resta pensif et il commengait k avoir 
des doutes sur sa science des femmes, de leurs 
malices et de la maniere de les déjouer. 

a Cependant, se dit-il, en secouant sa tor- 
peur,allons vite pourne pas arriver enretard !» 

II se posta en face de sa porte dans Tobscu- 
rité, s'assura que Husseyn y entrait. 

A peine la porte fermée, il y frappait lui- 
méme á coups redoublés. 

Sa femme en personne lui ouvrit la porte ; 
il entra précipitamment. Sa femme le suivit 
en criant : 

«Oh ma mere ! ma mere I que t^est-il 
s^rrivé, au nom de Dieu ! est-il devenu fou cet 
homme I Oh ma soeur I Oh mes fréres ! que 
se passe-t-il, par le Prophéte !... » 

Hassan était déjá au haut de L'escalier lors- 
quUl se rappela, helas I trop tard, qu'en 
rentrant, il aurait dú tout d'abord regarder 
derriére la porte !... 

II était si furieux qu'il pensa, séance 
tenante, répudier sa femme. Mais la pen- 
sée de rembourser la moitié de son mehr ^ 
Tarréta et il résolut de la convaincre d^abord. 

I. Dot. 

12 



178 



LES FOLK-LORES EN EGYPTE 



Hassan saisit une occasion qui se presenta 
d^elle-méme des le lendemain. 

Son beau-pére, homme riche, puissant et 
jovial, donnait á l'occasion du sébou^ d'un 
enfant qui venait de lui naitre, une féte de 
khdttneh, 

Hassan et sa femme devaient passer la 
journée et lasoirée du lendemain chezle beau- 
pére de Hassan. 

Hassan chercha Husseyn et Tayant rencontré 
vers le soir il le decida á Taccompagner chez 
son beau-pére. 

On se mit k table chez Cheikh Ornar en 
nómbrense compagnie. La cour était illuminée 
ainsi que Tentrée; des fenétres du harem les 



f 



I. Septiéme jour. On observe des fétes les 
septiéme et quarantiéme jours, six mois aprés et 
le bout de Tan, pour les naissances et les décés 
qui surviennent dans chaqué famille. Ces fétes 
consistent k faire faire la lecture du Koran en 
entier ; alors ces fétes de famille s'appellent des 
khatmeh. 



EGYPTIENS-AUTOCHTONES I79 

" ■ ''^ ■ ■ ■ ■■ «^^M^M ■■III. — ■- ■ ^ ,. , 

dames pouvaient voir ce qui se passait dans 
la cour, et entendre les chants des lecteurs de 
Koran, et les conversations des hommes. 

Aprés le diner, Hassan pla7a Husseyn prés 
de son beau-pére et monta au harem diré á sa 
femme de se mettre á une fenétre qu'il luí 
indiqua, d'oü elle pouvait entendre les contes 
que ferait Husseyn, un conteur émérite qu'il 
avait amené exprés pour amuser son pére, luí 
expliqua-t-il. 

Des que la jéune femme regarda par la 
fenétre et vit Husseyn, elle le reconnut; on 
con^oit aisément qu'elle se soit si intéressée á 
lui, et áce qu'il avait ádire, qu'elle ne bougea 
plus de sa place et ne le quitta plus des 
yeux. 

Hassan qui était retourné vers les hommes, 
amena habilement la conversation sur les 
contes polissons et les anecdotes vraies arri- 
vées dans son entourage, qu'afiFectionnait par- 
dessus tout le beau-pére. 

(( Notre frére Husseyn, dit-il, en sait bon 
nombre, qu'il conté fort bien parce que ce 
sont des histoires dont il est lui-méme le 
héros ! 



— Ab, voyons cela ! dic Cheikh Ornar. 

— Oui, oui ! répéttrent tous les ass 



taats. 

- Conté! 

tournant 



frére, reprit Haasan, votre 
:: uoe femme 1 » Et se 
beau-p¿re : <t Jamáis, Cheikh 
ezeDtenduunehistoire aussi 
Dusante, et mon frfere Hus- 
seyn conté si bien I » 

Husseyn, flatté de ce que disait Hassan, 
BÍnsi que de son ¡ugement sur ses mérites 
comme conteur et comme héros du conté, 
apríi s'étre fait un peu prier, pour ne pas 
manquer aux biensíances, commenfs son 
histoire. 

Hassan insista pour que Husseyn ne man- 
quát pas de rapporter tous les détails, méme 
lea plus puérils, S tel point que lorsqvie 
Husseyn indiqua la maison, il precisa tellemenl 
et si clairement, que Cheikh Ornar recon- 
lUissant ¡a maiaon de aa filie, fronfait les 
sourcila et a'apprétaic déji i par 1er et i 
demander dea explícationa... lorsqu'un crí 
d'enfant, strident et plaintif fit pour un 
instant taire toot le monde. Tous les yeux se 



- i 



portérent vers la fenélre opposée á celle ovi 
Hassan avait place sa femme. 

A ce moment-lá, Husseyn loul en cDntBnl 
disait :... « La femrac poussa la porte. )ti 
voulus la suivre tout en portant l'enfant... u 

Le cr¡ de Tenfant l'avait arretiS sur ce mot. 
pendant un insianl. Une seconde aprés, lors- 
que r¿mation géncrale fut passée et que lous 
les yeux se porlÉrenl vers lui, sans se décon- 

• ...Mais ¡1 parait que j'étais tombé'sur une 
honnéte femme; que Dieu la confonde ! Elle 
m'arracha Tenfant plutót qu'ellc ne le prit de 
mes maÍD3, me donna un soufflel (donl je 
sena encoré la chaleur sor ma ¡oue; que DJeu 
la maudiase !) et me ferma la porte au 

Cheikh Ornar riait á 3e tordre. tout le 
moade riait á haute voix. Hassan scul dápité 
et mécODtent ne riait pas etcherchait la raison 
pourquoi Husseyn avaitainsi changé la linde 
son histoire. 

Lorsqu'ils sortirent ensemble de la maison 
de Cheikh Ornar, Hassan dit á Husseyn: 

ci Tu aa bien amusé le beau-pÉre, mais dis- 



1 82 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

moi, mon frére, pourquoi ne pas avoir raconté 
la chose comme elle est arrivée et comme tu 
me Tas racontée ? 

— Je vais te le diré, mon frére, répondit 
Hu3seyn d'un air mystérieux et entendu. II 
parait que le mari se trouvait dans le nombre 
de ceux qui m'écoutaient ! 

— Comment le savais-tu ? le connais-tu ? 
qui te l'a dit ? demanda Hassan. 

— N'as-tu done pas entendu, mon frére, le 
cri de cet enfant ? reprit Husseyn. 

— Oui! eh bien> 

— Eh bien, mon frére, c'est l'enfant de cette 
dame ! 11 a poussé son cri si á propos, que j'ai 
pensé en moi-méme : sans doute sa mere a dü 
le pincer pour m'avertir que je la compro- 
mettais de quelque faípn, et j'ai á Tinstant 
changé. Mais dis-moi, mon frére, mon histoire 
a eu' plus de succés de la sor te, n'est-ce 
pas? » 

Hassan ne répondit pas et s'éloigna rapide- 
ment sans saluer son ami. 

Husseyn ne le revit plus. 

Le lendemain, Hassan repudia sa femme 
et partit pour la Mekke. 




ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 



183 



Husseyn se maria trois mois apréa ^ avec 
la femme de Hassan dont il a toujours cru le 
mari mort. 

Hassan se consacra aux pratiques reli- 
^ieuses et ne se maria plus. II s'appliqua 
méme á ne plus prononcer, lorsqu'il pouvait 
Téviter, le mot de femme. 

Husseyn et sa femme vécurent heureux et 
eurent beaucoup d'enfants, car Husseyn 
n^avait nuiles prétentions á la connaissance 
des femmes et ne se croyait pas capable de 
déjouer leurs malices ! 

I . Quand une femme est répudiée ou qu'elle 
devient veuve á la suite de ia mort de son mari, 
elle ne peut contracter légalement un nouveau 
mariage que quatre mois et dix jours révolus 
aprés la mort de son premier mari ou la date de 
la répudiatíon. 




XV 

LES TROIS FILLES DU MARCHAND 
DE FÉVES^ 



IL y avait autrefois un marchand de féves 
qui avait trois filies. 

Tous les matins, les trois filies allaient chez 
leur maitresse en broderie. 

Elles passaient chaqué matin devant le 
palais du Sultán. 

Le Sultán assis á sa fenétre, les voyant 
passer, leur disait : 

(( Hé ! bonjour, les filies du marchand de 
féves I » 

L'ainée et la seconde répondaient courtoi- 
sement au salut du Sultán, mais la cadette, 
qui était la plus jolie, ne répondait jamáis 
ríen. 

Lorsque le Sultán demandait des nouvelles 

I. Publié dans le BuUetin de I' Instituí Égyptien^ 
deuxiéme serie, n° 5, 1884, p. 72. 



i86 



LES FOLK-LORES EN EGYPTE 



- — j 



des féves, sielles étaientbonnesoumauvaises, 
si le commerce du pére allait bien ou mal, 
c^était toujours la cadette qui prenait la parole 
pour lui repondré d'un ton bourru : 

(( Qu'est-ce tout cela peut te faire ? )) 

Le Sultán, qui aimait la cadette des fílles du 
marchand de féves, était desolé du peu 
d'empressement qu'elle mettait k lui étrc 
agréable. 

Un jour, il résolut de la punir dans la 
personne de'son pérc, qu'elle aimait beaucoup, 
beaucoup; le Sultán le savait. 

11 fit done venir le marchand de féves et lui 
dit : 

(( Dans trois jours tu viendras ici, en ma 
présence, riant et pleurant á la fois. Si tu ne 
m'obéis pas, je te ferai trancher la tete ! )) 

Le marchand de féves retourna chez lui 
tout pensif et fort inquiet sur son sort. 

Sa filie cadette s'étant aper^ue de son 
inquiétude, lui en demanda la raison. Le 
marchand de féves lui dit l'ordre du Sultán, 
la crainte qu'il avait de ne pouvoir lui obéir 
et, dans ce cas, le malheureux sort qui 
Tattendaif. 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 187 

(( Ne t^inquiéte plus, lui dit sa fíUe. Va 
chez le Sultán, joyeux et riant; seulement 
prends cet oignon et avant d'entrer en sa 
présence, frotte-t'en les yeux. Tu pleureras 
tout en riant ! )) 

Le marchand de féves fít ainsi que sa fíUe 
le lui avaitdit. Use presenta devant le Sultán, 
riant et pleurant á la fois, tandis que le 
troisiéme jour n'était pas encoré passé. 

Le Sultán fut tres vexé. Mais comme il ne 
pouvait tuer le marchand de féves, il lui 
ordonna de revenir dans trois jours, habillé 
et nu á la fois. 

Le marchand de féves toraba dans une 
nouvelle perplexité. II consulta sa fíUe cadette 
qui lui dit : 

(( N'est-ce que cela ? Va, mon pére, chez le 
pécheur, notre voisin, et achéte-lui un grand 
filet; je t'en ferai une guéllahieh^^ tu t'en 
habilleras et ainsi tu seras nu et habillé á la 
fois ! » 

Le marchand de féves ainsi affublé se 



I. Sorte de chemise ou de blouse longue 
jusqu'aux pieds. 



presenta, au troisitme jour, devant le Sultán. 
Celui-ci devina, en le voyant, que la troÍBÍ¿me 
filie du marchand de f^ves n'avait qu'une 
pensée, cetle de le 
son pire aña de le 



Ijur 






conseillant 
a. De d¿ptt, 
á de íévea. 



II lui ordonna done de revenir daas troÍ! 
jours, mais de ne se présenter devant lui que 
monté sur un animal et en méme teiupi 
marchant sur ses pieds. 

En ce temps-lá, le voiain du marchand di 
f¿ves avait une Sneeae qui avait mis bas 
depuis quelques jours seulement, d'un ánon 

La ñlle cadette du marchand de íhves., ei 
apprenaat le demier ordre du Sultán, dit i 

H N'aie nul souci, moa p¿re, va de ce pat 
chez le voisin, emprunte-lui son ánon 



né. Loreque tu monteras 


dessus, tes pieds 


toucheront le sol; de la se 


rte, tu marcheras 


lout en étant monié sur un 


animal ! 


Le Sultán furieui, mai 


ne pouvant rien 


coQtre le marchand de r¿ve 


3, ni lui couper le 


cou, jura de tuer sa filie 


11 r.im,it bien. 


cependant il voulait s'en venger á cause de son 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 189 

La troisiéme fílle du marchand de féves se 
douta bien de son cote que le Sultán voudrait 
se venger d'elle. 

Avant done qu'il n'agít, elle alia chez un 
armuriér et se fit faire, k sa taille, un costume 
tout en fer; ce costume une fois sur elle faisait, 
des qu^elle marchait, un bruit assourdissant 
et effrayant. Elle se déguisa en cheikh^ prit 
un gros báton á la main et se dirigea vers le 
palais. 

Le portier et les gardes, en voyant venir 
cet étrange personnage, prirent une si belle 
peur qu'ils se sauvérent. 

Dans rintérieur du palais, tous les domes- 
tiques et les esclaves, efirayés du bruit a£Freux 
que faisait le costume en fer de la fílle du 
marchand de féves, et du gros báton qu'elle 
tenait á la main, se cachérent tous de ci, de 
lá, sous les meubles, partout, tant et si bien, 
qu^elle parvint dans le salón oü se trouvait le 
Sultán, sans étre inquiétée, ni méme rencon- 
trer personne. 

Le Sultán, en voyant ce cheikh bardé de 
fer, fut saisi d'efiFroi ! U faillit perdre ses 
seas, mais Texcés de peur lui donnant du 



IQO LBS FOLK-LORES ES ÉCVPTE 

courage, il voulut crier pour avoir l'aide de 
ses hommes. 

La troisiéme ñl\e du marchand de féves 
l'arrétant d'un geste lui dit : 

n Je suis le diabU, fils du diable ! Tais-toi, 

Au méme moment, elle sortit de sa poche 
une trousse de barbier, en tira un graod 
rasoír, s'approcha du Sultán et lui rasa les 
sourcils, la moicíé de la barbe et la moitié des 
mouatachea, sans que celui-ci, plus laort que 
vif, osáC lui opposer lamoiodre résistance. 

Apr¿9 cela, elle iui fie manger une páte 
amere et dégoütante !... Le Sultán tomba eo 
défaÜlance!... 

Elle sortit alors du palais, rentra chez elle, 
se déshabillan reprit ses vétements ordinaires, 
en moins de temps que le Sultán el ses 
serviteurs, san portier et ses gardes n'en 
mirent pour se remettre de leur frayeur 

Le lendemain, les trois ñllfs du marchand 
de fbves, en allant chez leur i 
virent le Sultán, eomme tous lea jours, i 
fenetre; mais il était emmitouflii dans 




EGYPTIENS-AUTOCHTONES I91 

kouffieh^^ de fa^on qu'on ne yoyait, de toute 
la figure, que les yeux. 

<c Hé ! bonjour, les filies du marchand de 
féves I )) leur cria le Sultán, des qu'il les eut 
aper9ues. 

La cadette, prenant cette fois la parole, lui 
dit : . 

(( Bonjour, seigneur I que sont devenus tes 
sourcils, et la moitié de ta barbe oü est-elle } 
Qu*as-tu fait de la moitié de tes moustaches ?. . . 
As-tu trouvé bon ce que tu as mangé hier ?... 
J'espére que cela t'a fait du bien ! )) 

Le Sultán comprit tout de suite que celui 
qui s'était annoncé comme (( le diable, fils du 
diable » n'était autre que cette troisiéme filie 
du marchand de féves, et il jura de la perdre 
sans plus tarder. 

II fit done venir le marchand de féves en sa 



I. Sorte de serviette en soie, généralement 
jaune, rayée de couleurs vives. Les hommes s'en 
servent pour envelopper leur tete, leur nuque et 
leurs épaules, pour les garantir contre les ardeurs 
du soleil. Le nom est derivé du nom de la ville 
de Kouffa, dans la basse Mésopotamie, oü cette 
étoffe se travaillaít et d'oü la mode de s'en enve- 
lopper la tete se répandit dans les pays árabes. 



193 LES F0I.K-LORBS EN EOYPTE 

présence et luí dit qu'il vouUit se marier 
avec sa (ilte cadette; il ajouta qu'il ne souEFri- 
rait pas de refus. 

Le marchand de f¿vea rentra cbez lui tout 
bouleversé. 11 raconta t sa filie 1« désir du 
Sultán, et luí dit que sí elle refusait, lui, etie 
et ses sceurs auraient 1« cou tranché. li la 
aupplia done de consentir á ce mariage. 

Sa filie lui dit : 

« Tr¿3 bien ! » et elle consentit. 

On fit les préparatifs des noces, on les coni- 
men^a et la nuit du doukhoule ' étant proche, 
la fiancáe tit faire par un confíseur hablle, une 
Statue tout en sucre qui lui ressemblait enti¿- 

Elle renferma la poupée en sucre dans uae 
de ses caisses et la ñt porter ainsi, avec son 
trouBseau, au palais du Sultán. 

I. Nuil de l'entrée de la mariée dans la chambre 

1. J'ai entendu un conle grec qui ressemblait 
beaucoup k celui-ci, au moins en ce qui regarde 
le courroux du Suilan ou du Basilios, son idee de 
vengeance et de mariage. Dans ce conle, la staiue 
en sucre est remplicée par un gros pot remplide 



ÉOrPTtBNS-AUTOCHTONeS 193 

LorsqQ^elie-méme y arriva, qu'on l*eiitra 
da-ns la ^chambre nuptiale et qu'on la kissa 
seale, vite, éll« sortit la povLpée éc sa caíste, 
Thabilla de sea vétements de nuit, la coucha 
«ur «és mátelas ^ , la coüvrit de ses eoñver- 
ture», abi&^sa la moustiquiére ct alia elle- 
Hiéiíie se cadier dans un ooin obecur de la salle. 

Le Sultán, en eatrañt dans la champe 
Buptiate^ dégaina son grand sabré, «ik dtoit 
au lit et asséna un coüp formidable sur fci 
poupéc eti sucre, croyant tuer sa fian<íée. 

Lm pcmpée en sucre se cassa en milk mor- 
ceaux; un des éclats entra dans lá bouche 
entr'ouverte du Sultán. Sentant la douceur 
du sucre dans sa bouche, le Sultán tout 
surpris, s'écria : 

Depuis des siécles les confisetrrs du Caire sont 
rerrominés pour faire, avec du sucre, tofttes sortes 
d'objets et de figurines, tandts qu*eíi Grécé te 
sucre n'exíste ou n*exista¡t pas ; on le remplc^ait 
parle miel. 

I . L'usage des Hts en bois otx en fer est encoré 
trop peu répandu en Égypte. Le peuple ne 
connatt que des mátelas piacés á ierre au milieu 
d'une chambre sur un taipts ou une natte; plus on 
est riche, et plus il y a de mátelas, qui sont 
remplis de cotón cardé. 

I? 



194 



« Malbeur á moi ! tu me remplis ma bouche 
et ma vie d'amertume quaad tu étais en vie, 
et en mourant tu la remplia de la doueeur de 
ta chair* !... » 

Et de désespoir, croyant avoir réellement 
tué la femrne qu'il aimftU, le Sultán voulut 
se tuer auaai. La fiancíe sortant desa cachette 
luí retint le bras et luí dit : 

n Pardonnons-nous mutuellement et vivons 
heureux ! 

— Qu'il soit fait ainsi, » dit le Sultán. 

Persévérant et prospérant, ils laUsérent 
beaucoup d'enfanta. 



I. Le conté grec n 
rempli la bouche du r< 



dit pas que J 



elle-méme, puisque ¡ 



Le conté árabe fait ressembler le sucn 
cbair (erme et douce, et le conté grec le n 
sang. 



XVI 

LE TURC JALOUX ET SA FEMME 
C AI ROTE < 



AuTREFOis un Ture arriva au Caire avec 
rintention de s'y établir. 

11 avait beaucoup voyagé, beaucoup vu ct 
acquis une grande connaissance de la vie. 

Pensant qu'un homme ne peut vivre heureux 
sans étre marié, il se decida á prendre femme. 

Mais, ayant une grande expérience, il savait 
qu'on ne devait songer k prendre femme sans 
prendre toutes sortes de précautions pour 
prevenir les malheurs qui sont les suites de 
la légéreté de la nature féminine. 

Aprés de mures réflexions, il fit venir une 
laveuse. 

« Ma mere, lui dit-il, je désire me maricr. 

I. Publié dans le Bulletín de L'lnstitut Egypiien, 
2* serie, n» 6, i88$, p, 3ii. 



t-ES FOLK-LORES BM ¿CVFTB 



je une et 




J'ai beaucoup d'eipérience e 

femmes, il faut done que vous m'en trouviez 

une qui me coQvieone sous toua lea rapportB. U 

Puia il éauméra ses conditioaa : 

11 faut, diaait-il, qu'elte ( 
habik, n'ait ¡amaia quítté sa maisoí 
párenla; et, par-dessua tout, qu'elle c 
á vivre daña une maiaon composée d'une seule 
chambre, aans iamaia déairer etf aortir. C'eet 
Ik une condition exprease. Je n'ai p^e I^soin 
de voua en diré plus loag, il suffit, all^i I... 

La vietlle laveuse se mit ea campagne aaas 
ea demander plus long. 

Au bout de quetques ¡ours elle avíyt tronYÍ 
la c^nipagoe déairée. 

C'était, disait-elle, une jeune filie forte, ^rte 
et iolie ; iamais elle n'avait dápaasé le seuíl de 
sa tuaison. Lorsque sa mere luí fit part dea 
conditiona posees par le Ture, la ¡eujie fiUe 
avait répondu : 

« Ici, ouchezceTurc, n'est-ce point l^raeme 
chose ! » 

La deacription que fit la vieille de la beautá 
de la filie, et sa rdponae empreíate de na'iveté. 



áOYPTlENS-AÜTOCHTONES 1^7 

La xn6re et le pére consentants, la ñlle cofi- 
sentaate, on fít les noces. 

Le Ture avait trouvé une maimón á sa guidé ; 
elle étah composée d'une eeule chambre 6d 
Ton arrivait en montant un escalier donilant 
direetetnent sur la parte de ki rué. 

<( Bien habile Thomme qui s'introdüirait iti 
sAnd que je m^en aper90Íye o, pensait le Ture. 

Quand il sortait, il fermait la porte á clef, 
un seul regard hii suiEsait pour s'assurer 
qu'il n'y avait dans sa maison personne autre 
que sa femme. 

Ainsi il vivait heureux, dans une quiétude 
absolue. 

Cependant, en face des fenétres de la 
chambre, de Tautre cóté de la rué, il y avait 
une boutique de boucher. 

La jeune femme voyait tous les jours le 
boucher, un jeune homme fort et beau, actií 
et gai. II chantait tout en servant ses clients, 
sans désemparer, toute la journée. 

Elle devint amoureuse du jeune boucher... 

Un jour le Ture rentra á Timproviste. Des 
que sa femme entendit le grincement de la 
clef dans la serrure de la porte, vite elle 



poussa le boucher dans un coin de la chambre, 
dttrítre la carde oü étaient suspeadus les 
vétements de son mari* et feta par deseus un 
carré de toile*. Elle en prit un autre entre ses 
mains et s'avanga á la rencontre de son mari 
qui était dé'jk entré et commen^ait k monter 
les escatiers. 

. « Femme, dil le Ture, qu'y a-t-il derriére ce 
drap, dans le coin. 



— Viens 


mon seigneur, as 


ieds-toi'par ici. 


repoae-toi 


et ¿coute, lui dit 


sa femme, puis 


elle reprit 






I. Chei les Egyptiens et sur 


oui chei les Cai- 


roles de moyenne el de basse condilion, les nieu- 


bles & tiro 




■exislenl presque 


pas, méme 


de nos ¡ours. A pei 


e la femme pos- 


side-l-elle 


une caisse. En gen 


ral, on lend une 


corde dans 


un coin de la clian 


bre, sur laquelle 


on éiale le 


s habits. Lorsqu'un 


c corde n^est pas 


sufllsante. 




rois, etc. On dit 


d'un homm 


qui a beaucoup d 


habits : son porte 


habüs est pl 


in d-un mur i Vaulre 




2. Sorte 


de carré de toile 


ou de coionnade 


blanc ou 


de couleur bleue, 


avec lequel les 


femoies du 


peuple s'enveloppc 


nt de la (£te aux 


pieds lorsq 


'clles sorlent; le^ femmes d'une con- 


dition aisée 


portent ce carré 




carré a env 


ron i<°;o de cíkté. 





BGYPTIENS'AUTOCHTONES 1 99 

« II y avait une fois un homme fort jaloux, 
dont la femme avait un amant qu^elle recevaít 
chez elle en Tabsence de son mari. Un jour, 
le mari rentra avant Theure accoutumée. La 
femme cacha son amant derriére un drap et 
attendit que son mari fút dans la chambre, 
qu^il s'assit et qu^il prit haleine... Alors, 
comme elle tenait dans ses mains un autre 
drap, elle le lui passa sur la tete et le serra 
tres fort, comme ceci... » 

Ce disant, elle lui avait passé réellement le 
drap sur la tete et le serrait de toutes ses 
forces en riant aux éclats. 

Le Ture surpris, ne sachant pas s'il devait 
se fácher ou prendre la chose comme un jeu 
ou un badinage d'enfant, criait, se débattait 
et jurait, mais ne parvenait pas k dégager sa 
tete des plis du drap. 

Au milieu de ees rires, de ees cris et de ees 
jurons, la femme continuait Tbistoire en 
action qu*elle avait commencée. 

(( Ainsi done, disait-elle, lorsque le mari 
jaloux fut bien entortillé, de fa9on qu^il ne 
pouvait rien voir, ni rien entendre de ce qui 
pouvait se passer dans la chambre, elle 



200 



LES F0LK-L.0RB8 EN AOTPTE 



»« ■<! 



s'écria : Sauve^tot par o ü. tu es venu I par le 
proph^e, sauve-toi !... » 

Le boucber, plue mort que vif, sortit de se 
cachette i.ceUe injonetion iodirecte el; disparu^ 
do la chambre sans que le Ture ait pu 
entendre se» pas, ni le voir, occupé qu'il était 
á. faire du bruit lui-méme et aveugló par le 
drap qui couyrait sa tete. 

La femme, voyant soa amant ea aüreté et 
tout danger disparu, se renverea sur le dos, 
et étendue sur le dos, elle éclata de rire. 

Le xnari se débarrassa eofia de son drap e€ 
voyant sa femme rire de si bon cosur, ne 
savait k quoi attribuer celte hilarilé. 

Tandis qu'il peasait, sa feoime se i^elevaat 
luí dit : 

« Moa histoixe te pkit-elle? Maiateaaat, 
vas voir der riere le drap, tu a' y verras 
riea !... » 

Oa ae sait pourquoikTurc repudia sa feauae. 
Eut-il des soup^cms... ? TrouYa-l-il qu'eUe 
riait trop gaieaient á ses diépeas... ? Toujours 
est-il qu'il quitta le pays le leademaia mémet 
renoagaat k tout jamáis de mater uae 
Cairote. 






MOSi 



XVII 

SOUHEIM-EULEYL* 

IL y tf Vftk une fois un chasscur marié á une 
jeune femme qui n*avait jamáis con^u. li 
éCait tres marri de ce qu^rl n^avait pas d^hérif 

Un J4»ur il demanda á AUah le Tout^Puís^ 
sant et le Trés-Haut, un fíls ou una dUa, 
quitte ámourir aprés Tavoir vu. Dieu exauga 
sa priére et sa íemme devint aussilíót enceÍBte. 
Lorsqu^eüe fut prés d'accoucher, elle se souvin^ 
alors que son mari, le chasseur, mourraii 
aussitót qu^il aurait vu le nouveau-^iié^ Etts 
csaignit pour la vie de son bon mari et alia 
accouebcr d^un fíls daos un souterrain qa^ils 



I. Petite fleche de la nuil qui, lancee dans 
Tobscurité, frappe et blesse á tort et á travers. 
Ne seratt-ce pas la fleche que dans la mytholO'^* 
gie grecque on ^isait Uutce? par l'Amour ? 



30a LES FOLK-LORSS EN BOrPTE 

avaient sous leur maison; elle cacha ainsí 
aux yeux de son marí soa cher petit qu'elle 
appela Souheim-el-Leyl. 

Quand elle savaít que son fils avait faim, 
elle trouvait un pretexte auprís de soa mari 
pour aller l'allaiter. 

Or, un jouraon mari luí dic : aO ma chíre 
femme, dis-moi doncí ¡e t'en pric, comment il 
a pu se faire, que tu ne sois pas accouchée } e 
Elle lui répoodit résolumeat : o Helas I j'ai 
fait une fausse couchel — Allah nous l'a 
donné, concluí le mari, Allah nous l'a reprís; 
si nous devions eo jouir, 11 aurait vécu. Le 
créateur du jouret de la nuit nous le rempla- 



Bref, Souheim-el-Leyl continua á grandir 
de iour en jour jusqu'á ce qu'il commen^a á 
pouvoir courir líbrement. II devint d'une 
beauté rare. 

Un jour, pendant l'absence du mari, la 
femme alia rendre visite aux voisines. Le 
pire de Souheim-el'Leyl ne tarda pas á ren- 
trer, ¡I trouva I'enfant qui jouait tout seul 
dans la maison. A sa vue, il seatit son co:ur 
battre fort daña sa poitrine et comprit ausai- 



n 



¿GYPTIENS-AUTOCHTONES 20^ 

tót que celui qu'il avait sous les yeux n'était 
autre que son fíls et que sa femme le luí avait 
caché ! II couvrit ses joues de tendres baisers 
paternels et rendit Táme á ses cótés. 

l.*enfant continua á s^amuser autour du 
corps de son pére. Lorsque la mere rentra et 
qu^elle trouva son mari étendu sur le sol, 
elle se mit á crier de toutes ses forces. Les 
voísins s^assemblérent, consolérent la pauvre 
veuve et procédérent aux funérailles du mort. 

Dans la suite, la mere de Souheim-el-Leyl 
devint pauvre. Son fíls lui dit un jour : 
<( Mere, est-ce que mon pére n'avait aucun 
métier ? » Elle lui répondit qu'il était chas- 
seur. 11 demanda alors oü étaient ses instru- 
ments. Elle lui répondit qu*il ne restait plus 
qu^un bout de fílet qui était jeté sur la ter- 
rasse. II voulut le raccommoder, puis il dit á 
sa mere : (( J'irai^ ó ma mere, oü le sort me 
ménera, et avec Taide de Dieu je tácherai de 
t'apporter quelque chose. )) 

Sa premiére chasse fut assez heureuse, il 
prit deux oies et un petit oiseau. II en fut 
tout joyeux et se dirigeait vers chez lui quand 
une bande de voleurs Tarréta. Le cheikh le 






r^ 



pria fort poliment de luí remettre ka deux 
oies et l'fiaeBU. Le g«rfOD réposdit hardimeDI 
qu'il BC donnerait sa premiare ehasse á fwr- 
Bonne. Bref, le cheikh lea lui eakva de totee, 
tout en ie raillant. 

Ssuheicn-el'Leyl ae ¡ura alors de se ven- 
gor. 

Le cheikh des voleurs appela un da sea aer- 
viteurs et lui dit : (i Porte ceci k la maison et 
dis k la cuiainifere de lea bien cuire ; puis, 
lúraque quelqu'un ira chez moi et touchera 
le pedt doigt de l'esclave, qu'elle le charge du 
plateau qui sera déjíi prét. B 

Souheim-el-Leyl, qui s'était caché non loin 
d« U, avait lout enteodu. 11 attendit quelque 
temps, puia allá chez le chef dea baadits, 
pinva le petit doigt de l'esclave et s'en re- 
tourna chargé du plateau. II rentra et ñt un 
petit featJD avee aa méfe en remereiant le 
Trés-Haut. 

Avant de quicter la maiaon du voleur, il 
eut aoin d'écrire sur un morceau de papier ; 
<i Nui ne V0U8 a joué ce tour, si ce n'eat Sou- 



heim-el-Leyl, le I 



B des deux < 



t de 



¿6VPTI6NSr^UTQGHTOPfB9 «O 5 

Telle á étó sa prcmtére prouesse. La se- 
cofl'de advint bientót : 

Le cheikk des voleürs s^a-per^ut du fait, il 
chercha le coupable, mais en vain, il né put 
méme pas savoir quel chemin il avak pris. 

Sóuheím-el-Leyl dit k sa mere : (( O ma 
mere, procurez-moi, je vous en príe, un ka- 
bara^j un seble*, et un bourkou*^ c*é«t-á-éíre 
tóot ce qtiHl me faut poar me déguiser en 
femme, car je vais ce soÍ4r en travestí k la noce 
d^un de mes amis. » 

Eile hii procura te costume complet, il s^en 
affbbla, s^arrangea tres élógamment, se ma- 
quilla la figure, seteignh lescils etlessourcils 
et se transforma en un mot en une filie de 
grande beauté. 

II sortít avec la bonne intention de sa ren- 
dre au camp méme des voleurs. II y arriva 
enfin. 

Aprés s^étre longtemps a muse avec eux, il 
leur dit : « O braves, je vais k telle ville, puis- 
je y parvenir ce soir > » 

1. Manteau de sortie. 

2. Manteau de dessous de sortie. 
;. Voile pour la figure. 



206 LES FOLK- LORES EN ¿GYPTE 

Le cheikh des voleur^ la trouvant parfaitc, 
en eut grande envíe, il lui dit : «O ma bellc 
dame, reatez done avec nous cette nuit et 
demain de bon matin je vous emménerai Ik oü 
V0U8 voudrez... 

— Je vous dirai franchement, lui dit la 
jeune filie, que j*a¡ peur de rester avec vous 
tous reunís. 

— Nous serons seuls, lui répondit le chef 
de bande, et chez moi. D 

Elle consentít alors á le suivre. II ñt 
égorger en son honneur un mouton et ñt 
orner luxueusement sa maison, tellement il 
ne se sentaít plus de la joíe de posséder une 
perle pareille. II lui fít visiter toute la maison, 
princípalement le grand salón oü étaient 
dépúsés les objets volés. 

lis s'assirent enñn Tun á cdté de Tautre, i\ 
apporta du raki et en but, tout en en ofirant 
á la belle dame (Souheim-el-Leyl). 

Elle le versa i t tout le temps, mais le cheikh 
qui le buvaít pour de bon ne tarda pas k 
étre gris. 

La dame, ínspectant du regard autout 
d*elle, vit une potence tout prés d*eux. 




ÉGYPTIEN8-AÜTOCHTONES 207 

<( Qu'est ceci ? demanda- t-elle au cheikh. 

— Celui qui ne volé pas beaucoup est 
pendu ici. 

— O mon seigneur, faites-moi la gráce de 
m'y faire balancer un peu. 

— Miséricorde divine I C'est á moi que tu 
dis cela, á moi qui suis prét k me sacrifíer 
corps et ame pour toí ! Si tu as envié de voir 
balancer je me mettrai moi-méme, mais prenda 
garde de trop tirer la corde. 

— Oh ! seigneur, que dites-vous lá, ne 
savez-vous pas que cela me coüterait plus 
cher qu'á vous ?... )) 

Sur ce, il se pla^a sur la potence et elle 
prit la corde. (( Je suis á ta merci, lui dit-il. 

— M'as-tu épargnée, toi, )) lui dit-elle, et 
elle tira la corde bien fort, jusqu''á ce que les 
yeux du cheikh lui sortirent de la figure. 

Aprés cela, elle écrivit un papier qu^elle 
suspendit sur la poi trine du cadavre ; elle y 
disait : a Nul n^a fait cet acte audacieux, si ce 
n^est Souheim-el-Leyl, le maitre des deux 
oies et de Toiseau. d 

Telle a été sa deuxiéme prouesse ; la troi- 
siéme la voici : 



I POLI- LO BES B 



II diaiBit, daiM la hIqh iea ot^ett vodís, ce 
qu'il y avait da plus prfcieiu, ct a'en «Ha 

Lm voleurs qui ¿taiont soumia i leur 
chejkh, ne le voyant paa arñver, allírent i 
■B racherche; ila ne tardireat poa t te trouver, 
mma pendu et morí. Ca liaant le pikfiier, ils 
tvrcBt que lnuteur d« «lie actioa d'une 
ktrdteaM exoMaíve éUat Souhtim^-Lt^- 
lis juríreat de veagar la mott de leurcb^et 
ge minot auaaálát h d«aoendre le eorps ft 
ila le portirent chea la soeur du défuat, 
El-Daliieh el-Mouhtaleh, qui ¿tait réBonmée 
four aa aiqiercherie. 

Lortqu'elle vil aon frire mort et qu'elle sut 
quri était le coupable, eile dit aux voletirs : 
« Par Ctteu, }« yousdonnerai des Douvellcsdc 
ce dt«le-tí>. » 

Elle flt mettre dftna un panwr qtielqiies 
oiee et des ceufa et s'en alia demander dea 
«cmv«lle9 de la demeure de Souheim-el-LeyK 
9e faíaant pasaer pour sfl tanto patemelle. 

Elle íinit enfia par arriTer ¿ cette daneure 
tant cherchée. 

Elle le aalua et te aerra sur aa poitrtDe en 



EGYPTIENS-AUT0CHT0NE8 20g 

lui disant : (( Bonheur á vous, ó file de mon 
frére I Salut á vous, ó fils de mon frére. » 

Cependant Souheim-el-Leyl se douta de la 
tromperie fine de cette femme et dit á sa 
mere : (( Celle-ci n^est certainement pas ma 
tante paternelle, c'est une mauvaise femme 
qui veut nous jouer un mauvais tour. Fais 
semblant de cuisiner, mais ne jette que des 
píerres dans la casserole et fais comme si tu 
teñáis une oie; continué á allumer le feu et á 
souffler jusqu'á minuit. 

La mere suivit le conseil de Souheim-el- 
Leyl, á la lettre. Pendant que la mere était a 
la cuisine á souffler le feu, le fils tenait com- 
pagnie á sa prétendue tante et disait de temps 
en temps á sa mere : (( Ma mere, apportez 
done le souper á ma tante. — Les mets ne 
sont pas encoré cuits á point, d lui répondait 
sa mere. 

Sur le minuit, El-Dalileh el-Mouhtaleh 
dit : <( O Souheim-el-Leyl, léve-toi done et 
allons chercher le reste des choses qui sont 
dans le panier, en attendant que les mets 
soient cuits. — Avec plaisir, » lui répondit-il. 
II alia passer ses armes et sortit avec elle. 



210 LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

Arrivé pres d'un arbre, il luí dit : « Toumez- 
vous, ma tante, un instant, je vais faire mes 
besoins, car f ai eu honte de le faire pendant 
tout le temps que nous étions assis ensemble. )) 

Elle se retouma, il tira son sabré et lui fit 
sauter la tete. 11 la pendit ensuite a un arbre 
et écrivit sur un bout de papier : 

a Nul n'a fait ceci et n'a atteint son désir 
que Souheim-el-Leyl, le maltre des deux 
oies et de Toiseau. x> 

Ceci fait trois actes héroiques de la part de 
Souheim-el-Leyl, le quatriéme le voici : 

Les voleurs se mirent á la recherche d'El- 
Dalileh el-Mouhtaleh. lis la trouvérent pendue 
á Tarbre et lurent le papier. 

lis se dirent : <k Cela suffit, personne ne 
pourra venir á bout de celui qui a été plus fort 
que El- Dalileh el-Mouhtaleh, la plus rusée des 
femmes. II ne nous reste plus qu'á alier nous 
en plaindre au kadi. » 

lis s^en retoumérent chez eux, se vétirent 
de leurs plus beaux habits et aprés s'étre 
arrangés bien proprement ils allérent trouver 
le kadi. 

Souheim-el-Leyl qui Tavait appris se fit 



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.» T" 



une 







et alia les arrsrrff: 
II prit aTtc I::; 
Lors^-*:l* 



vous. voas a.:rrr3$. 



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■«*;— J'"^ 2' 11 Zl^ _5 I 



dircnt-íl?. 

gar^oa. nc 

roulés a pIusicTir* rí^riae* 2C xii i ric ritrs 

chef ct pris tc-L* a:* 
— Ainsí. Icor dit je 

roulés par un garrea et xi.j^s -r:»;-« ?r=g<i — -^ 
quand méme en présenoe ¿- kir en iir.ts 
propres? 11 est bisa r=ie.ix q^e t:^? qurrr-z 
tous vos habits ct me les d^cníez a rardc el 
que chacun de vou* prenne easjitc ua ~>f^ 
ceau de cette étoffs pour s*cn ceiadre le corps. 
Le kadi, vous voyant dans ce piteux accou- 
trement, presque ñus, prétera foi á ce que 
vous direz. » 

lis suivirent le conseil du vieillard et luí 
laissérent leurs habits á garder. 

Des qu'ils furent chez le kadi, Souheim-el- 
Leyl se sauva avec les habits des voleurs. 



ai2 LES FOLK-LORB8 EN E6YPTB 

Quand ils sortirent, ils trouvérent un mor- 
ceau de papier sur lequel était écrit : « C*est 
double plaisir de voler les voleurs. » 

lis retournérent derechef chez le kadi et lui 
racontérent ce qui s*était passé. 

a Quand i I vous retombera entre les mains, 
amenez-le-moi done. » 

lis s^en allérent la tete basse, humiliés 
d^aVoir essuyé une telle déception et plus 
encoré mortifíés de tout ce que leur avait fait 
Souheim-el-Ley I . 

Lorsque le kadi rentra chez lui, il raconta 
á sa filie les prouesses de Souheim-el-Leyl et 
son embarras sur la maniere d^agir en cette 
circonstance pour le faire arréter. 

La jeune filie du kadi dit á son pére : 
Nous avons une chamelle qui n^est jamáis 
sortie sur la terre d'Egypte, ornons-la et pro- 
menons-la en cérémonie dans les rúes de la 
ville, avec de la musique, du tambour et de 
la clarinette; peut-étre que Souheim-el-Leyl 
sortira, comme tout le monde, de chez lui 
pour la voir passer et alors nos gardes Tarré- 
teront. 

— Tu as une idee lumineuse, ma filie, lui 



ÉGYPTIENS-AÜTOCHTONES 2 1 J 

dít le kadi, et je vais la mettre de suite en 
exécution. )) 

C'est ce qui fut fait : le cortége partit de 
chez le kadi et suivit toutes les rúes de la 
ville pendant que Souheim-el-Leyl était assis 
tranquillement chez luí, le regardant passer de 
loin. 

11 y avait devant la maison de notre héros 
un gros arbre au pied duquel il mit une jarre 
d^eau pour que les passants pussent se désal- 
térer á leur aise. 

Lorsque, vers la fin du jour, les conducteurs 
de la chamelle furent extenúes de fatigue, ils 
s'assirent sous Tarbre de Souheim-el-Leyl 
pour y prendre quelque repos. Ils ne tardérent 
pas á s'endormir. 

L^un d'eux avait attaché, á Taide d'une 
corde, la chamelle á sa main. 

Quand tous furent endormis, Souheim-el- 
Leyl sortit et alia couper la corde, puis il 
conduisit la chamelle chez lui, Tabattit, en fít 
bouillir unepartie, sauter au beurre une autre 
et en conserva une aussi crue. 

Lorsque les conducteurs s'éveillérent et ne 
trouvérent point la chamelle, ils se désespé- 



214 LBS F0LK-L0RE8 EN ÉGYPTE 

rérent et se dirent : (( Qu^allons-nous diré aa 
kadi, quel mensonge allons-nous inventer? 

— Nous dirons au kadi, dit Tun d*eux, que 
la terre, excitée par la beauté de la chamelle, 
en fut jalouse et Tavala; peut-étre le croira- 
t-il. » 

lis allérent chez le kadi et lui contérent 
leur historiette. La filie du kadi était présente; 
elle ne tarda pas á s'apercevoir qu'un de 
ees gens-lá avait sur son turban un petit 
papier, elle le retira et lut : (( Nul n^a fait 
cette bonne action et n'est arrivé k ses fíns si 
ce n'est Souheim-el-Leyl, le maitre des deux 
oies et de Toiseau. » 

La filie du kadi dit : (( Laissez-moi faire, )e 
sortirai moi-méme et je trouverai ma cha- 
melle. » 

Dans la rué, elle disait á chaqué passant 
qu^elle rencontrait : « Je m'invite chez vous. 

— Soyez la bienvenue, lui répondait-on. 

— Mais vous me ferez goüter de la chamelle 
du kadi. 

— Nous n*en avons point. )) 

Elle fit ce manége jusqu'á ce qu'elle arrivát 
á un groupe oü se tenait Souheim-el-Leyl. 



¿GYPTIENS-AUTOCHTONBS 2 1 ^ 

Elle dit sa phrase et Souheim-el-Leyl luí dit 
aussitót : a Veuiilez me faire Thooneur de 
venir chez moi, je vous en ferai goüter. » Ce 
qui fut dit fut fait. 

En sortant, elle marqua la porte d^un signe 
rouge pour pouvoir la reconnaitre quand elle 
reviendrait avec des soldats pour Tarréter. 

Souheim-el-Leyl s'en aper^ut, il prit de la 

cochenille et marqua de rouge toutes les portes 

de sa rué pour les confoadre avec la sienne. 

Lorsque la filie du kadi revint avec les 

soldats, elle trouva toutes les portes marquées 

et ne put par conséquent pas trouver celle 

qu^elle cherchait. Elle en devint furieuse et 

s^en retourna avec sa nouvelle déception, 

pendant que Souheim-el-Leyl était, comme 

d'habitude, tranquillement assis chez lui. 

N'ayant pas de gaias, il devint bientót 
assez pauvre; il dit un jour á sa mere de lui 
donner les efifets des voleurs et qu'il irait les 
vendré au marché. Elle les lui donna. 

II alia les vendré, mais les voleurs étaient 
¡ustement au marché quand il y arriva; ils 
Tarrétérent et le menérent de forcé chez le 
kadi. 



í 



Celui-ci transmh Taífaire au sultán et au 

lis ordonnérent d'envoyer le vendredi le 
coupable k la potence. Le jour de son arres- 
ta t ion ¿tait un jeudi. 

Le kadi le ñt mettre en prison jusqu'á ce 
que le jour parüt, dans une cellule en fer avec 
un gardien pour le surveillcr. 

Souheim-el-Leyl reata coi jusqu'á trois 
beures du matia, puis il hela le gardien : ti Je 
suis Azra'il*, lui dit-il, le petit Azrai'l et je 
Buis envoyé par le Grand, laisse-moi sortir ou 
ie te prends l'áme á l'iastant. » 

Le gardien lui ouvrit et lui dit : e< Sors, si 
on me demande de to¡, je dirai que la terre 
t'a avalé. O 

U sortit, alia chez lui, se mit une fourrure 
toute blanche, il y eousit des chandelles qu'il 
alluma pour se donuer l'air d'un aitge, d'Az- 

11 alia trouver le eultan : « Je suis envoyé, 
dit-ii, par le grand Azra'il, ¡e suis moi-m£me 



EGYPTIENS-AUTOCHTONES 21 J 

le petit; je viens prendre ton ame, puis celle 
du vizír, á moins que tu ne fasses libérer á 
Tinstant Souheim-el-Leyl, que tu luí donnes 
ta filie en maríage et que tu lui fasses don 
d'une magnifique terre de rapport et d'un su- 
perbe sérail. )) 

Le sultán tout tremblant de peur le luí 
promit. 

Souheim-el-Leyl le quitta et alia trouver le 
vizir qui tout aussi effirayé que le sultán, lui 
promit ce qu'il demandait pour le matin 
méme. 

U alia ensuite trouver le kadi qui pro- 
mit comme les autres et tout aussi trem- 
blant. 

11 rentra alors chez lui, quitta sa fourrure 
et revint en prison, i I se fít ouvrir sa cellule 
par le gardien et y entra. 

De grand matin, le sultán, le vizir et le 
kadi vinrent le trouver et lui dirent : (( Sors, 
ó Souheim-el-Leyl I 
— Vous voulez me pendre, )) leur dit-il. 
lis lui jurérent que non; i! sortit, se maria 
avec la filie du sultán, devint propriétaire 
d'une belle abádieh et d^un superbe sérail 




Arrivé préa d'un arbre, il lui dit : • Toumer- 
rous, ma tante, un iostant, )e vais fajrc mes 
besoioE, car )'ai eu faonte de le faire pendant 
tout leteinps queuousétionsassiseRsemblc. s 

Elle se retouma, ¡1 tira son sabré et lui fit 
sauter la (¿te. 11 la pendil ensuite á un arbre 
et écrivit sur un bout de papier : 

a Nul n'a fait ceci et n'a atteint son désir 
que Souheim'cl-Leyl, le mattre des deux 
oles et de l'oieeau. n 

Ceci fait trois actes h¿raiques de la part de 
Souheim-el-Leyl, le quatníme le voici : 

Les voleurs se mirent á la recherche d'EI- 
Dalilehel-Mouhtateh. lisia trouv&rent pendue 
á l'arbre et lurent le papier. 

He se dirent : « Cela su£Qt, personne ne 
pourra venir á bout de celui qui a cté plus Ibrt 
que O-Dalileh el-Mouhtaleh, la plus rusée des 
femmes- 11 ne nous reste plus qu'á aller nous 
en plaindre au kadi. » 

lis s'en retoumérent chez cus, se vétirent 
de leurg plus beaui habita et aprís s'étre 
arrsDgés bien proprement lis allérent trouver 
le kadi. 

Souheim-el-Leyl qui Tavait appris se fit 



EGYPTIENS-AUTOCHTONES 2X1 

une barbe et des moustaches blanches, ainsi 
qu'une perruque, il se mit une bosse au dos 
et alia les attendre devant la maison du kadi, 

II prit avec lui une piéce d^éto£Fe. 

Lorsqu'ils arrivérent, il leur dit : (( Oü allez- 
vous, vous autres, ó braves ? 

— Tai sez- vous, bon vieux pére, lui répon- 
dirent-ils, flgurez-vous qu'il y a un jeune 
garlón, nommé Souheim-el-Leyl qui nous a 
roulés á plusieurs reprises et qui a tué notre 
chef et pris tous nos meilleurs effets. 

— Ainsi, leur dit le bon vieillard, vous étes 
roulés par un gargon et vous vous présentez 
quand méme en présence du kadi en habits 
propres ? II est bien mieux que vous quittiez 
tous vos habits et me les donniez á garder et 
que chacun de vous prenne ensuite un mor- 
ceau de cette éto£Fe pour s^en ceindre le corps. 
Le kadi, vous voyant dans ce piteux accou- 
trement, presque ñus, prétera foi á ce que 
vous direz. )) 

lis suivirent le conseil du vieillard et lui 
laissérent leurs habits k garder. 

Des qu'ils furent chez le kadi, Souheim-el- 
Leyl se sauva avec les habits des voleurs. 



á 



Quand Íls sortírent, ils trouTÍrent un mor- 
ceau de papier sur lequel éuit écrit: a C'est 
double plaisir de valer les voleurs. n 

lis retourn¿rent derechef chez le kadi et luí 
racontírent ce qui s'étaít passí. 

a Quand il vous retombera entre lea mains, 
amenez-le-moi done, n 

lis s'en all£:rent la tete basse, bumilíés 
d'arvoir essuyé une telle déception et plus 
encoré mortifiés de tout ce que leur avait fait 
Souheim-el-Ujl. 

Lorsque le kadí rentra chez lui, il raconta 
¿ sa filie les prouesses de Souheim-el-Leyl et 
son embarras sur la maniíre d'agir en cette 
circonstance pour le faire arr£ter. 

La jeune Glle du kadi dit k son pire : 
Noua avons une chamelle qui n'est iamais 
sortie sur la terre d'Egjpte, ornons-la et pro- 
menoDS-la en cérímonie dans les rúes de la 
ville, avec de la musique, du tambour et de 
la ctarinette; peut-étre que Souheim-el-Le;! 
sortira, comme tout le monde, de chez lui 
pour la votr passer et alora noB gardes l'arrÉ- 
teront. 

— Tu aa une idee lumineuse, ma filie, hii 



EGYPTIENS-AUTOCHTONES 3 1 ^ 

dit le kadi, et je vais la mettre de suite en 
exécution. )) 

C'est ce qui fut fait : le cortége partit de 
chez le kadi et suivit toutes les rúes de la 
ville pendant que Souheim-el-Leyl était assis 
tranquillement chez luí, le regardant passer de 
loín. 

II y avait devant la maison de notre héros 
un gros arbre au pied duquel il mit une jarre 
d^eau pour que les passants pussent se désal- 
térer á leur ai se. 

Lorsque, vers la fín du jour, les conducteurs 
de la chamelle furent extenúes de fatigue, ils 
s'assirent sous Tarbre de Souheim-el-Leyl 
pour y prendre quelque repos. Ils ne tardérent 
pas á s'endormir. 

L^un d'eux avait attaché, á Taide d'une 
corde, la chamelle á sa main. 

Quand tous furent endormis, Souheim-el- 
Leyl sortit et alia couper la corde, puis il 
conduisit la chamelle chez lui, Tabattit, en fít 
bouillir unepartie, sauter au beurre une autre 
et en conserva une aussi crue. 

Lorsque les conducteurs s^éveillérent et ne 
trouvérent point la chamelle, ils se désespé- 



réreat et se dirent : O Qu'allons-nous diré au 
kadi, quel mensonge alloDS-noua inveater ? 

— Nou8 diroas au kadi, dit l'un d'eux, que 
la terre, excitée par la beauté de la chamelle, 
en fut jalouse et l'avala; peut-étre le croira- 
t-il. B 

lis allÉrent chez le kadi et lui contírent 
leur historiette. La fíUe du kadi était présente ; 
elle ne tarda pas á a'apercevoir qu'uo de 
ees gens-ia avait sur son turban un petit 
papier, elle le retira et lut : a Nul n'a fatt 
cette bonne actiaa et n'est arrivé k ses fins si 
ce n'est Souheim-el-Leyl, le maitre dea deux 
oies et de l'oiseau. B 

La filie du kadi dit : a Laissez-moi faire, je 
sortirai moi-Eaeme et je trouverai ma cha- 
melle, u 

Dans la ruc, elle disait ii chaqué passant 
qu'elle rencontrait ; « je m'invite chez voua. 

— Soyez la bienvenue, lui répondait-on. 

— Mais vous me ferez goüler de la charaeüe 
du kadi. 

— Nous n'en avons point. » 

Elle fit ce manége jusqu'á ce qu'elle arrívát 
á un groupe oü se tenait Souheim-el-Leyl. 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 2 1 5 

Elle dit sa phrase et Souheim-el-Leyl luí dit 
aussitót : (( Veuillez me faire Thonneur de 
venir chez moi, je vous en ferai goúter. » Ce 
qui fut dit fut fait. 

En sortant, elle marqua la porte d^un signe 
rouge pour pouvoir la reconnaitre quand elle 
reviendrait avec des soldats pour Tarréter. 

Souheim-el-Leyl s'en apergut, il prit de la 
cochenille et marqua de rouge toutes les portes 
de sa rué pour les confondre avec la sienne. 

Lorsque la fílle du kadi revint avec les 
soldats, elle trouva toutes les portes marquées 
et ne put par conséquent pas trouver celle 
qu^elle cherchait. Elle en devint furieuse et 
8*en retourna avec sa nouvelle déception, 
pendant que Souheim-el-Leyl était, comme 
d^habitude, tranquillement assis chez lui. 

N^ayant pas de gains, il devint bientót 
assez pauvre; il dit un jour á sa mere de lui 
donner les e£Fets des voleurs et qu'il irait les 
vendré au marché. Elle les lui donna. 

II alia les vendré, mais les voleurs étaient 
¡ustement au marché quand il y arriva; ils 
l'arrétérent et le menérent de forcé chez le 
kadi. 




2l6 LES FOLK- LORES EN ÉGYPTE 

Celui-ci transmit TafiFaire au sultán et au 
vizir. 

lis ordonnérent d*envoyer le vendredi le 
coupable á la potence. Le jour de son arres- 
tation était un jeudi. 

Le kadi le fít mettre en prison jusqu^á ce 
que le jour parút, dans une cellule en fer avec 
un gardien pour le surveiller. 

Souheim-el-Leyl resta coi jusqu'á trois 
heures du matin, puis il hela le gardien : (( Je 
suis AztslíV, luí dit-il, le petit Azraíl et je 
suis envoyé par le Grand, laisse-moi sortir ou 
je te prends Táme á Tinstant. » 

Le gardien lui ouvrit et lui dit : « Sors, si 
on me demande de toi, je dirai que la terre 
t'a avalé. )) 

II sortit, alia chez lui, se mit une fourrure 
toute blanche, il y cousit des chandelles qu'il 
alluma pour se donuer Tair d'un ange, d'Az- 
ra'il. 

11 alia trouver le sultán : (( Je suis envoyé, 
dit-il, par le grand Azraíl, je suis moi-méme 



I. Azraíl veut diré Israel, c'est Tange qui est 
chargé de prendre les ames. 



ÉGVPTIENS-AUTOCHTONES 21 J 

le petit; je viens prendre ton ame, puis celle 
du vizir, á moins que tu ne fasses libérer á 
rinstant Souheim-el-Leyl, que tu luí donnes 
ta filie en maríage et que tu luí fasses don 
d'une magnifique terre de rapport et d'un su- 
perbe sérail. » 

Le sultán tout tremblant de peur le luí 
promit. 

Souheim-el-Leyl le quitta et alia trouver le 
vizir qui tout aussi effrayé que le sultán, luí 
promit ce qu'il demandait pour le matin 
méme. 

II alia ensuite trouver le kadi qui pro- 
mit comme les autres et tout aussi trem- 
blant. 

II rentra alors chez lui, quitta sa fourrurc 
et revint en prison, il se fit ouvrir sa cellule 
par le gardien et y entra. 

De grand matin, le sultán, le vizir et le 
kadi vinrent le trouver et lui dirent : « Sors, 
6 Souheim-el-Leyl I 

— Vous voulez me pendre, )) leur dit-il. 

lis lui jurérent que non; il sortit, se maria 
avec la filie du sultán, devint propriétaire 
d'une belle abádieh et d'un superbe sérail 



oü il v£cut daña la plus grande paix, entre 
aa. mire et sa femme pendaat de longues 
années'. 

t. Comparer avec Hírodotb, liv. 11, ciil, 
Conle de Pratée Rhampsinite. 









cd cd vd cd 



(y e($tc ) ^tc )( ?tc ) 



xvín 



LA BONNE OUM-ALY 



UN homme qui s'appelait Abou-Aly, avait 
une femme dont le nom était Oum- 
Aly ; il avait trois enfants et était d'une pau- 
vreté extreme. La nourriture de toute la famille 
ne se composait que de pain et de radis. 

Sa femme, Oum-Aly eut un jour envíe de 
lentilles, elle en fít la demande á sonmari qui 
lui promit de luí en apporter. 

Des qu'il sortit, elle prepara le feu et em- 
prunta á ses voisines tous les ustensiles de 
cuisine nécessaires pour faire cuire les len- 
tilles : une casserole, une tasse pour les faire 
sauter au beurre, une louche et une passoire. 

Au coucher du soleil son mari rentra; il 
rapportait comme tous les jours le pain et les 
radis, mais il n*apportait point les lentilles 
demandées. 



4 



Lorsque sa femme, Oum-Aly, lui en de- 
manda la raison, il lui répondit : « Apres 
avoir mürement réfl¿ch¡, j'ai trouvé que le 
mieux serait de t'acheter une chemise pour 
remplacer celle que tu portes et qui est en 
lambeaux. j). 

Elle s'en réiouit, et toute satisfaite elle ap' 
prouva l'avis de son mari. 

Le lendemaio matin Oum-Aly rendit á sea 
voisins tout ce qu'elle s'était fait prfiter h 
veille. 

Elle déchira sa chemise et en jeta, sur la 
terrasse de chaqué maison voisine, un petit 
morceau en disant que son mari allaít lui en 
rapporler une neuve. 

Lorsqu'il revint, ne rapportant, comme 
d'habitude, que du pain et des radia, elle lui 
demanda sa chemise. 11 lui répondit qu'il 
avait encoré bien réfléchi et qu'il trauvait 
préférable de lui acheter avec cet argent une 
belle paire de boucles d'oreilleé pour parer 

La ¡oie de la femme n'en fut que plus 
grande. Dfes que le jour parut, elle ramassa 
toutes les pi¿ces de sa chemise et les recousit 



EGYPTIENS-AÜTOCHTONES 221 

pour avoir de nouveau sa chemíse, puis elle 
communiqua á tout son voisinage le superbe 
proiet de son bon mari. Elle se dépécha en- 
suitc de percer ses oreilles ; mais elle se ser- 
vit d*un clou et elle eut une inñammation aux 
deux oreilles. 

Au coucher du soleil, son mari revint 
comme toujours avec le pain et les radis habi- 
tuéis. 

Lorsque sa femme, Oum-Aly, lui demanda 
ce qu'il en était de ses promesses, il lui ré- 
pondit que le plus utile serait une maison oü 
elle pourrait loger k Taise avec ses enfants. 
Aprés il lui achéterait les boucles d^oreilles. 
Elle fut tres heureuse de cette nouvelle pensée 
et la raconta á ses voisines. 

Lorsque Abou-Aly, son mari, s'en fut alié 
á ses occupations. un courtier passa sous les 
fenétres de Oum-Aly en criant qu'il avait une 
belle maison á louer. 

Elle crut que c'était son mari qui le lui en- 

voyait. 

Elle demanda au courtier de la conduire á 
cette maison. Elle prit ses enfants avec elle 
et s'en alia, aprés avoir indignement insulté 



i ÉGYPTE 



a se baaant sur 
le proverbe árabe qui dit : Si tu doia quítter le 
lieu oü tu vis, ne crains point de te conduire 
mal avec ceux qui y aont. 

DéB qu'elle visita la maison, elle lui pluí 
et lui coavint beaucoup. C'était un petii 
palais au milieu d'autres, appartenant tous k 
dea gens nobles et fort consideres. 

Lorsque le courtier lui dit que le prix était 
de 6o boursea, elle s'entendit avec lui et il 
fut convenu qu'il serait payí dix ¡ours aprfes ; 
en atteodant elle prit consignatjon de la raai- 
sonet a'yinstalla avec aes trois enfanta. 

Elle y trouva deui pairea de sabots, un 
balai et une grande époussette pour les 



Elle se chaussa d'une des paires de sabots 
et sa Qlle chaussa l'autre paire, et elle com- 
men;a k balayer la maison. 

Tous les voisins pensérent qu'elle ¿tait une 
grande dame de la haute noblesae. Une des 
dames du quartier suppoaa qu'étant occupée 
á nettoyer la maisonelle n'aurait pas le temps 
de préparer le dtner, elle prepara une table 
biea gamie et un plateau fort copieus qu'elle 



EGYPTIENS-AUTOCHTONES 23^ 

envoya á la nouvelle venue avec son domes- 
tique le plus fídéle. 

Lorsque le serviteur frappa á la porte, la 
filie de Oum-Aly alia luí ouvrir. 11 lui dit 
que sa maitresse envoyait ce plateau á la 
dame de la maison, en la priant de Taccepter. 
La jeune fílle prit alors le plateau en priant 
le domestique de repasser le lendemain pour 
le prendre. 

La fílle de Oum-Aly s^amusa alors á ap- 
préter la table et ensuiíe elle la pla^a devant 
sa mere qui, aprés Tavoir minutieusementexa- 
minée, constata que c'était une table on nepeut 
plus complete. II y avait méme une assiette 
plelne d^olives. 

Telle cst Taventure de Oum-Aly. Quant á 
son mari, lorsqu'il retourna comme d'habi- 
tude chez lui il n'y trouva personne. On lui 
dit que sa femme était partie avec le courtier, 
á la nouvelle maison. II se ñt alors accom- 
pagner par un enfant de leur quartier et alia 
rejoindre sa famille, tout tremblant de la 
crainte d*avoir été le jouet d'une farce. 

II arriva enfin, et trouvant Oum-Aly dans 
cette somptueuse maison, il lui demanda des 



334 



explications. Elle répoadit simplement : (i Mais, 
c'est toi qui m'aa envoyá le courCier. » 

[1 nia ¿nergiqueinenC et lui dic : n Comment 
peut-on acheter une maiaon pareille quaod on 
n'a pas le sou ! Si je t'ai dit que ¡e t'en aché- 
terais une, c'était tout bonnement pour te 
láire rester tranquille et par simple plaisan- 

— Boa I lui dit sa femme, calme-toi, quaad 
les dix ¡ours seront pasaés Dieu nous viendra 
en aide et tout finirá pour le mieux. » 

Elle ajouCa que les voisins, gena honorables, 
leur avaient envoyé une table superbe, qu'elle 
apporta et qu'elle mit entre eui deux. 

lis soupírent avec grand appítit et lais- 
aérent les olives pour leur déieuner. 

Le lendernain raatin Oum-Aly alia chcrcher 
les olives, elle ne les trouva point, mais 
s'aper;ut avec une ¡oie indicible que l'assiette 
¿taic remplie d'or. Elle courut alors & son 
mari et lui dit ; fl Sois en paix, tiens, regarde, 
Dieu nous est venu en aide, car celui qui sait 
supporter avec patience ses maux en est bien- 
t6t guéri. » 

Lorsque le serviteur des voiaíns revint cher- 



EGYPTIENS-AUTOCHTONES 225 

cher le plateau, Oum-Aly mit dans chaqué 
assiette une piéce d'or et elle en doxina deux au 
domestique qui, plein de joíe et de coaten - 
tement, remporta la table chez sa maitresse. 

Lorsque les esclaves 4evérent les couvercles 
des assiettes du plateau, elles trouvérent dans 
chaqué assiette une piéce d*or ; elles se réjoui- 
rcnt et dirent á leur maitresse : « Nous n'avons 
pas pris assez de peine pour servir la nouvelle 
voisine, car elle est de la plus grande noblesse ; 
elle a mis dans chaqué assiette une piéce d'or 
et en a donné deux á notre serviteur. » 

Leur maitresse ordonna alors de préparer 
un autre platean et recommanda qu'il fút 
encoré plus soigné que le premier. Les esclaves 
préparérent un superbe platean et y mirent 
deux assiettes de chaqué mets avec deux 
raviers d'olives. Leur serviteur le porta chez 
Oum-Aly qui Taccepta comme la veille, en 
mangea le contenu avec son mari et garda les 
deux raviers d'olives pour le déjeuner du len- 
demain. 

Oum-Aly était fort curieuse, elle voulait 
savoir quel était l'auteur de l'heureuse substi- 
tution des olives par de l'or. Elle passa ái cet 

15 



.. — J 






326 LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

eflfet une partíe de la nuit éveillée. Vers 
minuit, le mur se fendit en deux, un individu 
en sortit, prit les olives qu'il remplaza par de 
Tor, puis partit. Oum-Aly le suivit. II entra 
dans un magnifique palais et s*assit prés d'un 
grand jet d*eau. Oum-AIy en fit autant et s'assit 
de fagon á voir sans étre vue. 

L'homme retroussa la manche de son habit, 
prit une rose blanche et la jeta délicatement 
dans l'eau de la fontaine. 

II en sortit une reine resplendissante de 
beauté. Elle demanda les olives, Thomme les 
luí presenta, elle les prit, les mangea toutes, 
flirta quelque temps avec Tindividu, puis elle 
lui donna une dragée quMl mangea, aussitót 
aprés il s'endormit. 

La femme le quitta alors et se dirigea vers 
la cuisine. Oum-Aly la suivit. La reine 
appréta un joli plateau qu'elle emporta avec 
elle et alia á une ruine voisine. 

Un esclave noir Tappela de l'intérieur de la 
porte et lui dit qu'il ne lui ouvrirait pas parce 
qu*elle avait trop tardé. Ce n'est que lors- 
qu*elle Teút prié et supplié qu^il acceda á sa 
priére et lui ouvrit. 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 227 

Oum-Aly la suivait toujours. 
Le négre luí demanda pourquoi elle avait 
tant tardé. Elle répondit que cela n'avait pas 
été de sa faute, et tout en s^excusant elle dit 
qu'elle avait dú attendrc que i'autre s'endormtt. 
lis mangérent ensuite copieusement et com- 
mencérent á s'amuser de leur mieux et puis 
elle le quitta et sortit. 

Oum-Aly sortit aussi et se mit k ses 
trousses ; des que la porte se referma, indignée 
dans son konnéteté de ce qu'elle venait de voir, 
elle jeta á la reine une grosse pierre sur la tete, 
et s'en alia chez elle aussi vite qu^elle le put. 

La reine se mit á crier parce que la pierre 
luí avait fait grand mal, Tindividu qu'elle 
avait endormi s'éveilla aussi tdt et s'empressaut 
autour d^elle, lui demanda ce qu^elle avait. 
Elle le lui dit. 

II lui promit de la venger et se mit sur le 
champ á la recherche de Tauteur de cette 
audacieuse action. 

II prit á cet effet un baudet qu'il chargea 
d'étoíFes et de toiles, puis s^en alia dans les 
rúes en criant qu'il donn^rait gratis de Tétoffe 
á quiconque lui raconterait un conté. 



i BN écrpTE 



Toutes les femmes lui contirent de petites 
hiatoires qui oe lui plurent pas trop; il doona 
nfanmoias quelque chose á chaqué conteuse, 

Enfia, il arriva & Oum-Alj qui lui raconta 
la derniÉre Qouvelle qu'elle connaissait, d'uQ 
bout á l'autre, en commengant par la substi- 
tución des olives jusqu'á la pierre laacíe & la 




Le malheureux lui dit que c'¿tait lui qui 
avait été si indignement trompé par la reine 
ct qu'il voulait se rendre coropte par lui-mfime 
de la réalité du fait. II ajouta que 9Í les paroles 
de Oum-Aly étaient des calomnies, il s'en ven- 

A minuit finfortuné ¿pouz viat trouvcr 
Oum-Aly et lui dit de l'accompagner, puis il 
lui donna un breuvage, en lui disant : « Si la 
reine m'endort corome hier, tu me dooneras á 
boire de cette eau, je me réveillerai aussit6t et 
reprendrai mes sens. » Puis ils se dirigirent 
tous deux vers la fontaine. 

La reine parut, elle flirta comme la veille, 
lui donna une dragíe, Íl s'endormic et elle s'en 
alia. 

Oum-Aly abreuva l'homme de cette eau 



EGYPTIEN8-AUT0CHT0NES 



229 



enchantée; il retrouva ses sens et suivit avec 
Oum-AIy les traces de la reine jusque chez le 

négre. II entra, et que vit-il ? 

Sa colére fut si forte qu'il tua la reine et le 
négre sur le coup. 

Puis il raconta á Oum-Aly son histoirc : 
a Cette filie, lui dit-il, qui n'était pas digne 
de vivre sur la surface de la terre, était, helas ! 
filie d*un puissant monarque. Je m'en épris 
foUement; pendant sept ans, je souffris en 
silence, f arrivai enfin á Tenlever, et jaloux de 
ma conquéte je Tamenai ici pour la cacher h 
tous les yeux, croyant qu^il n^y avait ici ni 
hommes, ni esprits sataniques. II y a quinze 
ans que je méne cette vie délicieuse, et tout 
cela n^a pas empéché cette malheureuse crea- 
ture de me tromper si ignominieusement et, 
ce qui plus est, elle a su en garder le secret. 

)) Maintenant je vais partir et aller trcuver 
ma famille que je n'ai pas vue depuis quinze 
ans. Preñez, Madame, tous les trésors qui 
sont ici et que Dieu vous rende éternellement 
heureuse I » 




XIX 



LE KADI BIEN SERVÍ 



UN kadi avait été destitué de ses fonc- 
tions. 
Aprés un certain temps, se voyant á bout 
de ressources, il appela son domestique et luí 
dit : « 11 faut me trouver quelques personnes 
qui yiendraient me demander des consulta- 
tions juridiques. )) 

Le domestique, qui était fort rusé et homm« 
de bonne volonté, se met á roeuvre aussitdt 
pour plaire á son maitre. II sort, et, chemin 
faisant, il marche sur le pied d'un promeneur 
qui se trouvait d^vant lui; le bonhomme 
tombe sur la figure, ses vétements se salissent 
dans la boue et sa savate se déchire. II se 
releve furieux, mais des qu'il reconnait le 
domestique du kadi : « Que Dieu te pardonne» 
lui dit-il, en se retirant au plus vite. 



Sfí LES FOLK-LORES EN ÉGYPTE 

Le iendemain, le domestique s'en va au 
march¿ ; au milieu de la foule il avise un 
homme habill¿ de neuf, il a'accroche A s«s 
habits et tire sí fort qu'il lea déchire. 

Le malheureuK homme se retourne, voit 
et reconnatt le domestique du kadi et se 
sauve en luí disant : a Que Dieu te par- 
don ne. u 

Le domestique du kadi pensa : a Oa con- 
nalt trop mon maitre et on sait quí je suis; 
cela ne peut aller ainsi, il faut que je trouve 
moyen de régaler aujourd'hui lea invites de 
mon maitre. » 

Pendant. ees réfleiions _'ú rencontre un 
domestique portant sur un plateau une su- 
perbe oie farcie et artistiquement garnie ; 
l'heureux porteur s'en allait au four. 

Notre homme le euit. Le domestique laisse 
l'oie au four et va vaquer k ses autres afihires 
pour revenir chercher l'oie dis qu'elle sera 

Alors le domestique du kadi entre au four : 
« Que la b¿n<idiction de Dieu soit sur vous, 
dit-il au maitre du four... 

— Ainsi que sur vous, lui répond celui-cl ; 



EGYPTIENS-AUTOCHTONES 2'^J 

quel bon vent vous améne ici, mon frérc, il y 
a longtemps que je ne vous ai vu... 

— Voilá, je viens prendre l'oie qui est au 
four. 

— Mais, cette oie n'est pas á toi. 

— Ne dis pas cela, mon frére. 

— Je veux bien, mais que dirai-je á la 
personne qui me Ta apportée, lorsqu'elle 
reviendra me la réclamer? 

— Tu lui dirás : J'ai mis Toie au four, elle a 
fait, couac ! et elle s'est envolée. A présent Toie 
est cuite á point, donne-la moi, le seigneur 
kadi Tattend. )) 

II prend Toie et s'en va. Le kadi la mange 
avec ses amis et tout le monde s'en pourl6che 
les babouines. 

Pendant ce temps, le domestique revient au 
four. 

« Mon oie doit étre cuite, rends-la moi, dit- 
il au maitre. 

— Ton oie ? Eh bien ! elle a fait couac ! et 
elle s'est envolée. 

— Que dis-tu lá, malheureux !... )) et des 
paroles aux injures, on passe fort naturelle- 
ment aux coups. 



334 



La foulc se rassemUe et eneombre la route 
et le ibur. 

On disait qu'on se battaít k propoa d'une 
oie qui, étant au four, avait fait : couac I et 
a'était ea volee. 

Les uns prenaient fait et cause pour le 
maltre du four, qui était un fort honnfite 
homine, pratiquant zélé; lee autres doutaient 
de la réaurrectioQ de l'oie. 

Parmi les spectateurs Íl y avait une femine 
eaceinte qui, i. forcé de se pousaer se trouva 
juste derri¿re le mattre du four. En ce moment, 
celui-ci se recule pour porter un coup terrible 
¿ son adversaire et vían !... il atteiat en ptein 
ventre la malheureuse femnie eaceínte qu'il 
n'avait pas vue. Celle-ci pousse un cri atgu, 
tombe á terre et... avorte ! 

L'infortunó mari prívenu, accourt tenant 
un gros gourdin á la main et vociférant les in- 
¡ures les plus cyniques contre le maitredu four. 

Celui-ci ne pouvant plus teñir, se sauve 
dans la cour, escalade un pan de tnur, monte 
sur la terrasse d'une habitation voisine, et ne 
trouvant point d'esealier, se laisse tomber 
dans la cour de la maison oú il était. 



¿QYPTIBN8-AUTOGHT0NB8 8^5 

Par fatalité, il tombe sur un maghrabin 
malade qui était coucké lá, roulé daña sos 
cQuvertures. H lui défonce presque toutes les 
cotes ; te maghrabin pousse un cri strident 
et expire. 

Sa fanúlle accourt et le maitre du four.est 
arr¿|^. Dans la rué on rencontre le domestique 
du kadi. 

(( Oü allez-vous, braves geAS } 

— Chez le kadi. 

— Suivez-moi », et tous de le suivre. 

Le kadi, aprés avoir écouté les dépositions 
et mis de Tordre dans Taudience, s^adresse au 
domestique qui réclamait son oie au mattr^ 
du íbur. 

« Paye, avant tout. » Puis, s'adressant au 
maitre du four : « Que dis-tu de cela, ^ 
maitre } 

— Que Toie a fait couac et 9*9&t enyo^ 
pendant qu'elle était au four. » 

Le domestique se récria. 

(c Comment, mécréant, lui dit le kadi, tu 
ne crois pas que celui qui ressuscitera les 
hommes et tautes les créatures, en ramas- 
sant leurs os épars sur tpute la surf^ce de la 



2^6 LES FOLK'LORES EN ÉGYPTB 

terre, peut rendre la vie á une oie qui est 
entiére. )) 

La foule se mit á huer le domestique qui 
8*en alia content et satisfait, croyant au 
miracle. 

Le mari de la femme avortée s^avance alors 
et, aprés avoir payé la taxe, expose sa plainte. 

Le mattre du four avoue le fait et explique 
les circonstances atténuantes, qu*il croit plai- 
der en sa faveur. 

(( C^est tres bien, dit le kadi, ceci rentre dans 
la loi du talion. Toi, bonhomme, tu donneras 
ta femme au coupable qui te la rendra quand 
elle sera enceinte de six mois. 

— Mille mercis, dit le mari, je lui pardonne 
et que Dieu lui pardonne, je me desiste de ma 
plainte. 

— Et Yous, maghrabins, dit le kadi, en 
s^adressant á la famille éplorée du maiheureux 
qui n'existait plus, quelie plainte avez-vous á 
porter } Mais avant tout, n^oubliez pas que 
vous avez une taxe á payer. 

Les maghrabins s'exécutérent et exposérent 
ensuite leur plainte au kadi. Celui-ci ordonna 
que le maitre du four füt entortillé dans des 



F 



ÉOYPTIENS-AUTOCHTONES 237 

couvertures et place sous le bas minaret de 
la mosquee du sultán Hassan ^ ; ceci posé, que 
le frére du maghrabin monterait sur ce mina- 
ret et se laisserait tomber sur le maitre du 
four qu^il écraserait comme celui-ci avait 
écrasé son frére. 

On comprend facílement que le brave 
maghrabin se desista, comme les autres, de 
sa plainte et pardonna au maitre du four, 
comme les autres Tavaient fait. 

La foule spectatrice et curieuse se retira 
enfín, émerveillée de la science profonde et 
de Tesprit d'équité qui animaient le noble 
kadi déchu, et tous, indignes, critiquérent 
beaucoup le souverain qui avait eu Timpru- 
dence de remplacer un aussi digne et aussi 
brave homme par un kadi qui certainement 
n^avait aucune des ressources d'esprit de celui- 
lá. 

1. Le plus haut minaret au Caire. 




XX 



LA FILLE DU MENUISIER 



IL y avait autrefois un menuisier qui remcr- 
ciait continuellement le Trés-Haut de luí 
avoir donné une filie d'une beauté rarc. 

II demeurait en face du palais du sultán de 
leur ville. 

Un beau jour i! eut envié d*ailer en pélerí- 
nage á la Mecque. 

II prepara á cet eflet tout ce dont i! avait 
besoin et se mit en route, accompagné de sa 
femme et de son fíls, en laissant sa filie seule 
á la maison. 

De craínte qu'il ne lui arrívát malheur, il 
cloua toutes les portes avant de partir. 

Le lendemain la filie monta sur un arbre 
du jardín et dit : <c Bonjour, 6 mon arbre, 6 
mon bon jujubier I Saurais-tu quand mon 
pére et mon frére reviendront? » 






Le fils du Sultán Tente n di t et lui dit : (i Sí 
tu eat ausai adroite que bien faite, tu comp- 
teras ton arbre feuille par feuille. » 

Elle lui répoodjt ■ «Si tu es toi mema 
adroit et intetligent, tu compteras étoile par 
¿toite toutes celles du Srmament ainsi que 
t la surface des 



I 



Lorsque le jeune prince vit qu'il avait & 
foire á plus habile que lui, il résoíut de íui 
jouer des tours et de luí faire de mauvaises 
plaisaateries. 

Elle avait un chat qui e'appelait Boustane 
et qu'ellc aimait beaucoup. 

Le fila du Sultán réfléchisaait chemin fai- 
aant sur le taur i. ¡ouer i la jeune ñlle quand 
il rencontra un homme qui vendait des intea- 
lias de bceuf. 11 lui proposa de prendre ses 
habits crasseux et sales centre les siens qui 
¿taient princiers, mais en gardant l'assiette 
d'intestins. 

II va sana diré que le marchand accepta 
avec 'joie la proposition du jeune prince et 
l'échange fut fait. 

Día que le fils du Sulun ae fut affublé de 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 34I 

ses nouveaux habits, il se dirigea vers la 
maison de la jeune filie, en criant dans la rué 
qu'il vendait des intestina. 

Elle Tentendit et Tappela en lui disant : 
« Donnes-m^en pour cinq paras et mets-m'en 
beaucoup. )) Puis elle lui tendit une assiette. 
II y mit des intestins, elle en demanda de 
plus,il refusad'en donner, un échange de mots 
grossiers s'en suivit et lui, levant Tassiette, 
en asséna un coup á la jeune filie qui tomba 
par terre et Tassiette se brisa sur le parquet. 

Notre hcmme se sauva ensuite pour ne 
paraitre que le second jour, au moment oü la 
jeune filie montait sur son arbre et lui disait : 
« O mon arbre, ó mon bon jujubier, quand 
mon pére et mon frére reviendront-ils ? » 

Le fíls du Sultán Tentendit et lui dit : (( Tu 
a*a pas oublié que je t'ai fait perdre cinq 
paras, que je t'ai cassé une assiette, que je 
t'ai fait mal, enfín que je t'ai avilie. » 

EUecomprit alors que c'était lui qui avait joué 
le tour de la veille \ elle résolut alors de se 
venger. 

Le lendemain matin elle prepara le tour 
qu'elle devait lui jouer. 

16 



242 LES FOL.K- LORES 8N ÉGYPTE 

EUle alia chez un teinturier et iui dit : 
« Teignez-moi de noir et faites-moi négresse; 
puis emmenez-moi au marché et mettez-moi 
en vente. M'oflfrirait-on milK bourses que 
YQU8 ne devrez pas me vendré, mais si c'est 
le fíls du Sultán qui me demande, vendez- 
moi h Iui á n^importe quel prix. 

C'est ce qui fut íait; le prince ayant besoin 
d'une esclave noire en ce moment-lá, Tacheta 
pour trente bourses et la fít amener chez Iui 
par ses domestiques. 

Ceux-ci se mirent en route avec elle; puis, 
lorsqu^ils arrivérent á une porte cochére, elle 
s^arréta tout court et leur dit de Tattendre 
un instant , qu^elle allait faire ses besoins et 
qu^elle reviendrait tout de suite. 

lis s^assirent lá et Tattendirent jusqu'au 
coucher du soleil; quant á elle, elle s'était 
sauvée, elle était rentrée chez elle, s^était 
déshabillée, bien lavée et se reposait. 

Des que les serviteurs furent xentrés au 
palais, le prince leur demanda oü était Tes* 
clave qu'il avait achetée; lorsqu'ils Iui eurent 
dit la chose, il s'emporta tellement quHl les 
battit, et il était tellement irrité qu'il s'éva- 



r 



ÉOYln-IENS-AÜTOCHTONEá 24^ 

nouit et tomba sur le parquet en se tordañt 
le cou, ce qui luí donna une fof te douleur. 

Le lendemain matin la jeune filie monta suf 
son arbre eomme d'habitud^ et répéta sfté 
mémes questiofis. Le fils du Sultán Tentendit 
et lui dit 6e qu'il lui avait dit aprds luí avoir 
joué le toiir de l'assittte d'intestins. 

Elk lui répt^ndit aussitót : « Et moi je t*ai 
fáit perdre trente bourse*, je t'ai fáit abimef 
quatrc hommes á forcé de coups, je t'ai fait 
évanouir et presque te tordfe le cóu. )) 

Le píince comprit alors que e'étaít elle qttí 
ar^ait fait Fesclave noire. 

11 la quitta et s'en alia prépafer un secónd 
tour. 

II ne troüva ríen de mieux, póur lui jóuef 
son totir, que de la prendre póur femme. II 
patienta jusqu'au retonr da pére. Le menui* 
sier ne tarda pas á arriver, le pfincé alofs, 
eeeorté de ses gardes d'honneur, s'en alia át 
sa rencontre en grande cérémonie et Tinvita á 
passer trois jours choz lui. 

Cet excés de courtoisie de la part du prince 
donna beaucoup á réfléchir au bravé menuisier 
qui commen^ait á s'inquiéter en pensant que 



r 



peut-itre quelque chose s'était passé entre le 
prince et sa filie pendant son absence. U 
demanda alors la permission de rentrer chez 
lui un inaUnt; cette permíssion lui fut accor- 
dée. II reñirá, aniieui de savoir ce qui átait 
arrivé. II trouva sa demeure tout ausai barri- 
cadée que lorsqu'il I'avait quittée, pas le 
moindrcchangemeot, paalamoiodrcefiFraction. 
II entra, baiaa sa filie au front, puis s'aaait 
tout pensif, quand tout k coup on iVappa k la 
porte et on lui dit que le fils du sultán 
I'attendait. Notre menuisier se háta d'y aller, 
et le priacB lui annon^a saos fagon qu'il 
désirait devenir son geadre. 

d O mon seigneur, lui répondit-il, des per- 
Bonnes de la catégorie de ma filie ne con- 
viennent point h vos pareils I i) Lá-dessus, ¡1 
fit une révírence et se retira. 

Le ¡eune prince envoya un conseiller au 
menuisier qui, voyant l'insistance du filo du 
Maltre, conaentit á ce mariage, tant de crainte 
que de l'honneur que cela lui faisait et des 
richesses qui s'ensuivraient. 

Lea noces ge firent avec le ceremonia] 
d'usage et le eoir, quand le prince entra dans 



ÉGYPTIENS-AÜTOCHTONES 245 

la chambre nuptiale, il ne toucha point á sa 
fémme, ne luí adressa méme pas la parole, 
mais au contraire Téloigna avec mépris. 

Le lendemain il alia vers elle et luí dit : 
(( Bonjour, fíUe du nienuisier ! 

— Deux fois bonjour á toi, ó fils du Sultán I 
lui répondit-elle. 

— Que faut-il pour que la mariée soit con- 
sidérée comme puré ? ajouta-t-il. 

— II faut qu'elle soit d*une blancheur 
immaculée, dit-elle. 

— C'est parpe que je le sais que je ne t'ap- 
procherai jamáis, dit séchement le prince. 

— Que votre volonté soit faite, dit timide- 
ment la jeune filie, et que Dieu vous prolonge 
lavie. )) 

Cet état de choses dura un certain temps, 
puisy un beau jour, le prince eut envié de 
faire une promenade en dahabieh ; il donna, k 
cet e£Fet, les ordres nécessaires et s'embarqua, 
se promettant de se distraire. 

Sa femme s'en aper^ut; elle s^habilla avec 
un luxe étonnant, fít appréter une magnifique 
dahabieh ^ et s^y embarqua en grande pompe 

I. Bateau de voyage sur le Nil. 



f 



«o BBMiunt d«fl chanteusca et des danaouaae 
ranommíea. 

Elle fit amarrer sa dahabieb aas«z pr¿a de 
calle du prtace, son mari. 

It remarqua tout ce luxe et en fut frapp¿ i 
Ul point qu'il envoya un de ses eunuques 
demander k la maitresse de la dahabíeh ai 
elle voutait bien permettre au 6Ia du Sultán 
d'aller iui teñir compagnie. 

L'eunuquB obéit et re^ut l'autorísation 
qu'il demandait pour son maiire qui ae pau~ 
v&it en croira bu yeux, tellement l'aventure 
Iui pUigait. Enfin, il ae rendit aur cette 
fameuse dahabieh et, tranaporld de jiiie, il 
eonveraa av«c la fiíle du maiiuiaiar. lis got^ 
taient touB deux un plaisirindicibte ^ s'aimer. 

Ha cootinuéreet ainei bien avaat daña la 
nuit. Ed ae eép&raal elle demanda au prioee 
(Omraeat s'appekit le village oCi ils se trou- 
vaient. II Iui dit qu'il s'appelait Haroua. 

Sachant qu'elU avait cwi;u, elle na voulut 
pns oublier ce DOia pour le doaner k aoa pre- 
mier-né. 

La noce termina, cbacun se reti» da soa 
c6té. Le fila du Sultán reatra plus 



ÉOrPTIBNS-AUTOCHTONES 247 



que iamais, ne sachaat quoi penser de cette 
délicieuse aventure. 

Neuf moÍ8 plus tard elle accoucha d*uii 
garlón, qu*eile nomma Haroun, satis que le 
prince se doutát de ríen. 

La seconde année, le prínce retourna «a 
dahabieh et sa femme le suivit comme elle 
l'avait fait un an avant. 

Tout — sans ezception — ce qui s*était 
passé la premiére fois, se renouvela encoré et, 
une fois les voluptueux moments écoulés, elle 
luí demanda le nom de Tendroit oú ils se 
trouvaient; il lui répondit : Karoun. 

Chacun se retira de son cóté et neuf mois 
plus tard elle accouchait d*un second gar^ü 
qu'elte nommait Karoun. 

La troisiéme année tout se renouvela de 
méme. 

Elle lui demanda le nom du viltage qu*ils 
avaient devant eux, il lui dit : Jekh-el-oottr, 
(source de lumiére). 

Neuf mois aprés ees délicieuz momeats, elle 
accoucha d'une filie qu'elle nomma Fckb^* 
Nour. 

Quelque temps aprés, elle apprit que le 



prínce parta i t pour une des vi lies 
elle sortit alore en háte et bc rendit chez un 
marchand d'esclaves en lui disant de l'amener 
dans la viüe oü se rendait le fils du sultán et 
de tácher de la vendré au prirtce. lis furentsi 
prompts dans rezécution de leur pro)et qu'ils 
arrivírent dans la ville avant le priace et se 



equ 



1 deva 



Celui-ci ne tarda pae á venir et l'acheta une 
seconde fois; elle fut envoyée aupalaUcomme 
la premiére fois. 

Bientót le prince rentra dans sa ville qu'il 
avait quittée pour quelque tempa. La pre- 
miíre nuit il la passa dans sea appartements, 
tout seul; le lendemain matin il alia trouver 
sa femme et lui posa les mémes questions 
qu'il lui avait posees le lendemain de leur 
mariage : n Que faut^il pour que la mariíe 
soit considérée comme puré, etc. i>; il en eut 
les mimes réponsea et la quitta, croyant l'avóir 
encoré humiliée et mortifiée. 

Quelque temps aprfes il voulut se remaríer 
et prendre une nouvelle femme ; au moment 
des ríjouissances genérales, les trois enfants 
descendirent dans les cuisines pour déranger 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 249 

les domestiques, et ils leur disaient : (( Nous 
sommes les fíls du prince, votre maitre. » Les 
serví teurs, tout étonnés, allérent communiquer 
la chose á leur maitre qui, les ayant aper^us 
pendant qu^ils se sauvaient chez leur mere, 
pensait : (( Si j'avais 4^slussí beaux enfants je 
ne me remarierais jamáis, o 

II se mit á les attendre dans un corridor et 
bientót ils apparurent de nouveau : (( De qui 
étes-vous fils > leur dit-il. 

— Nous sommes tes enfants, )) répondirent- 
ils en se sauvant vers leur mere; le pére les 
suivit et arriva en face de sa femme : a D*oü 
sortent ees enfants », luí dit-il séchement. 

Elle répondit : « Ce sont tes fíls; as-tu 
oublié nos délices en dahabieh, quand nous 
étions ensemble } J^ai eu de toi ees enfants et 
leur ai donné les noms des villages oü nous 
nous arrétions. )) 

Le priñce en fut tres heureux et reconnut la 
supériorité de sa femme. On changea les 
réjouissances de la noce en celles de la triple 
circoncision des enfants. 

Depuis ils vécurent dans le bonheur et la 
prospérité jusqu^á leur derniére heure. 




XXI 

EL-SAID ALY 



OH racoQte qu*il y avait jadis un mar* 
ehand appelé El-Saíd Aly qui eomptait 
parmi les plus grand richards de son siéde. 
U a'était acquis une juste renommée par ses 
gé&éreuses libéralitéSf car il dépensait )our- 
aellement une forte somme pour les indigeots 
de la ville oü il était établi. 

Pour son malheur, il arriva qu'un jour, 
&otre liberal marchand oublia, en rentrant le 
9oir, la clef sur la porte de son vaste magaain 
oü était auasi son immense coíFre-fort. Le 
lendemaio, en y retournant, il le trouva litté- 
ralement vide ; tout avait été enlevé : mar- 
chandises, papiers, argent. Le richard était 
devexLu pauvre. 11 se aentit mal^ s^évanouit 
et fut transporté chez lui oü il garda le lit fort 
longtemps. 



II vendit pendant sa longue et pínible ma- 
ladie tout ce qu'il avait chez lui pour fourait 
tout l'argent nécessaire daña cetlc terrible 



Quand il releva de maladie, il était absolu- 
ment ruiné, il manquait méme de ee qui esi 
indispensable aux besoins d'une famille. 

Sa femme, ne prenant point en considírs- 
tion leur triste situation, ordonna un ¡ouri 
son mari de lui acheter en rentrant un gSte»" 
fait avec du beurre fondu. 

Le pauvre homme, qui redootait le courroüi 
de Ba fcmmc, se m¡t au travail de gran^ 
matin et ne cesaa qu'au coucher du aoteíl, M 
mettant de cóté cinq paras par cinq paras- 
Mais, helas 1 tout son gain ne suffisiit pa^ 
pour acheter le fameux gateau qui devait sul- 
, fire á toute la famille. II ne savait que faire, il 
se dirigea cependant vers le pátisEÍer et k 
pria de lui donner un gáteau au beurre pour 
la somme qu'il avait; le pátisaier cORSidíc* 
Targent et lui dit qu'il ne sullisait méme pas 
pour acheter un gáleau á l'huile, mais qw 
par amitié il lui en donnerait un pour ce 



éOYPTIENS-AXJTOCHTONES 253 

Notre homme accepta le gáteau á rhuile et 
alia chez lui, espérant que sa femme serait 
satisfaite. Au seuil de sa porte il la trouva et, 
avant de le faire entrer, elle lui demanda s^il 
avait apporté le gáteau ou non. Quand il eut 
répondu affirmativement, elle le fit monter 
avec elle et bient6t les enfants les entourérent ; 
alors i I montra á tout le monde le gáteau. Sa 
femme, qui était tout yeux, ne tarda pas h 
s*apercevoir que ce n'était pas cela. Elle fit 
un bond et de sa plus grosse voix elle dit k 
son mari : (( Qu'est ceci ? Ne t'ai-je pas dit 
qu*il me fallait un gáteau au beurre et non k 
rhuile > Pourquoi ne t'es-tu pas conformé á 
ma volonté? etc., etc.» Une forte querelle 
s*en suivit entre les deux époux, pendant la- 
quelle leur chat s^empressa d'enlever le gáteau 
etde se sauver. Tous les enfants se mirent k 
le poursuivre pour lui enlever le gáteau, mais 
en vain. 

Ce jour-lá l*infortuné mari re^ut de sa 
chére femme encoré plus de coups que de cou- 
turne, et ils se couchérent tous sans prendre 
aucune nourriturs. 

Le lendemain matin sa femme le somma de 



354 



Q le meoB^nt, 
llraiter eacore 



í 



lui apporter un autre £át«ai 
s'il ne le faisait pas, de le 
plus que le veille, 

11 p«rtit fort embarraeté et travailla sane 
tríve toute la iournce, voyant arriver avec 
terreur la fin du pur, c'est-t-dire les crie et 
lee coups de sa femnte. A la ña du jour il eut 
une cruelle ddceptioa, tout l'argent qu'il avait 
amassé n'égakit pas cclui de la ve¡ll«. II eut 
les larmes aux yeux, prit sa besaice sur eoa 
doa et a'en alia chez lui s'attendent á tout. 

Comme la veüle sa femme l'attendait á la 
porte et lui posa la ntérae question que la 
premiére foia. 11 lui répondit qu'il n'apporuii 
rien et que telle átait la volonté divine. Elle se 
rait á rinjurier et ne voulut pas le laisser en- 

II reprit sa besace et se mit á marcher )us- 
qu'á miauit daos les faubourgs de la ville; Ü 
arriva enfin dans' un cimetiere. II y entra, »e 
promena au milieu des tombes, en trouva une 
ouverte. et tout tremblant de peur y descendit 
et s'eadormit dans uncoin. Un moment apri* 
ti vit le mur s'entf'ouvrir et un bomme d'aa- 
p«ct sinistre en sortil et s'avanga vers lui. 



BGYPTIENS-AUTOCHTONES ¿55 

CeC homme avait une large face, un long aez» 
point d*oreilles et une seule main; il tenait 
de celle-ci une longue cravache et dans la 
bouche un fílet. II luí dit d'une voiz rauque } 
et Qui es-^u, toi? Qui t^a amené dans ce lieu : 
Pour quelle raí son y es-tu venu ? )> Le mal* 
heureuz, en entendant ees mots, trembla de 
tous ses membres et ne retrouva la parole et 
sa présence d^esprit qu'au bout d'un certain 
temps. 

II eut confiance dans le monstre et lui 
raconta son histoire d'un bout á Tautre, en 
lui exposant toutes les mecha ncetés de sa 
femme. Le tyran n'eut pas Tair de s'en sou- 
cier trop et de s^apitoyer sur son sort ; mais 
il lui dit : « Ferme-les yeux, puis ouvre-les.» 
C'est ce qu'il fit et il se trouva dans une 
vilie resplendissante de beauté, avec des habí- 
taats tout autres que lui quant á leur forme 
et á leur mode d'habillement. II en fut tres 
étonné et les autres le furent aussi en voyant 
parmi eux un étranger pareil. lis Tentourérent 
pour le contempler et lui demander qui il 
¿tait et d'oü il venait. Un d'eux le prit á 
Técart et voulut savoir le motif de sa présence 



ville. Le malheureux luí racoata 
tire d'un bout k 



jtiiK" 



scrupuieusemeot i 
l'autre. Quaad il eut Üai, l'autre lui dit : 
a Nous sommes de la méme ville, mon cber 
ami, et ¡e me suis trouvé dans ce milieu dans 
des conditions identiques aui liennes ; comme 
toi j'avaia une femme cruelle qui me maltrai- 
tait ; comme tai, pour lui échapper, je me sau- i 
vai dans le méme cimetiíre et comme toi je | 
me trouvai transporté dans cette belle ville, ' 
par le méme monatre, Ici, ¡'ai toujours tra- , 
t touiours tes ; 
I devoirs de la 

:t k devenir le 
chef de la Corporation des nombreux commer- 
gants de cecte ville. J'ai un assez grand crédjt ' 
aupréa du roí et maintenant je veui te rendre 
service ; je dirai que tu es mon frére et mon , 
associé en méme temps; je vais te donner un ¡ 
magnifique costume de commer^ant et tu iras i 
í la station la plus proche pour que je puisse ' 
annoncer ton arrivée. » 

Notre homme ne se possédant plus de joie ' 
s'habilla et ella á la station iadiquée 



observations rigoureuses des 
justice et de la morale et ji 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 2$'J 

attendjt, pendant que le riche commer^ant 
annon^it á tous ses collégues Tarrivée de son 
frere, personnage tres honorable, ayant des 
resBources surpassant méme celles du roí, et 
son futur associé dans le commerce. 

Tous se hátérent alors de mettre leurs plus 
beaux habits et formérent un cortége pour 
aller á la réception du grand personnage. II 
fut re^u avec les plus grands honneurset fut ac- 
compagné en grande pompe jusqu'ála demeure 
de son frére qui les luí presenta tous un á un; 
ileut pour chacun une parole ai mable, et avec la 
plus grande courtoisie il dit k tous qu'il était 
un grand comnier9ant et qu'il attendait un 
immense 3tock de marchandises de toutes 
sortes et des pierres précieuses de grand prix. 
Tous s'empressérent alors de luí donner d'assez 
fortes sommes pour avoir des marchandises á 
meilleur marché. 

Cependant il renvoya á plusieurs reprises 
la date de Tarrivée de sa caravane, tellement 
que tous perdirent patience et finirent par 
porter plainte devant le tribunal du roi. 

Celui-ci fit appeler le chef de la corporation 
et lui ordonna d'amener son frére le plus t6t 

17 



358 



posajble. Le brave commeríant se dípécha 
d'obéir, sans se douter le moins du moade de 
ce qui ae passatt. 

El-Said A!y arriva et quand le roí eut fini 
de luí poser des questions sur son commerce 
et sur tes sommes re^ues, il répondit : 
« Monaeigneur, comme on vous l'a dit, j'ai un 
tres riche commerce; d'aprés les derniíres 
nouvelles que faire^ues, tout m'arrivera dans 
deux mois et alors tout le monde sera con- 
tent. » 

Son prétendu fríre se facha bien un peu de 
ce qui arrivait, maia ÍI ne pouvait rien y 
faire. Quant au roí, l'avarice l'empoigna et il 
crut tout ce que El-Said Aly avait dit. II 
rembouraa aiix marchanda leura sommes rea- 
pectives et devint alora le seul créancier de ce 
si riche commeríant, espérant devenir ainai 
le seul propriétaire de toutes ees belles mai^ 



chandises, qui devaient arriver de 


ax mois plus 


tard. 




Le roi tint enauite conseil av 


ec tous ees 


vizirs et il eiposa tous les faits e 


n concluant 


qu'il devrait lui donner sa filie 


en mariage 


Tous furent de l'avis du roí; o 


celebra les 



ÉGYPTÍENS-AUTOCHTONES 259 

noces le plus pompeusement possible, et notre 
homme devint le mari de la filie du roí. 

Un mois et demi plus tard , aucun índice de 
Tarrivée des marchandises ne paráis sant, les 
principaux vizirs allérent trouver le roi et lui 
dirent qu'il était tres probable que son gendre 
ne fút qu'un chevalier d'industrie et qu'il l'eút 
trompé. Le mieux serait, d^aprés eux, que le 
roi priát sa filie de demander á son mari 
quelle était son origine et son état, car, en 
general, les hommes dévoilent toujours leurs 
secrets á leurs femmes. 

Le roi trouva fort bon ce conseil et le com- 
muniqua á sa filie, qui questionna, le soir 
méme, son mari en tete á tete. 11 lui raconta 
tout, comme il Tavait fait avec le chef de la 
Corporation des commer^ants. 

Des qu'elle eut tout appris, elle eut peur 
pour les jours de son mari qu^elle aimait; elle 
lui apporta une grande somme d'argent et un 
magnifique cheval, puis lui ouvrant la porte, 
elle lui dit : « Vas, monte et pars pendant la 
nuit, car si quelqu'un prenait vent de ce qui 
t'arrive et en prévenait le roi mon pére, tu 
aeráis un homme perdu. )) 



202 



LES FOLK-LORBS EN EGYPTE 



pour voir ce que c^était. Quand ils revinrent et 
annoncérent au roi que c'étaít son gendre qui 
arrivait avec ses marchandises, íl fut teilement 
content qu^ii fit pavoiser toute la ville et aila 
á sa rencontre en grande cérémonie. 

Notre homme fit don á son beau-pére d'un 
des costumes, se vétit de Tautre et le troi- 
8Íéme il roffrít h son épouse, qui accoucha 
quelque temps aprés d'un beau gargon que son 
pére nomma Abou-Seíf, parce qu'il portait 
un sabré depuis sa naissance. 

Le roi devint vieux et ne put plus gouver- 
ner la ville, il fít un testament oü il léguait le 
tróne á son gendre et mourut quelques jours 
aprés. 

El-Saíd Aly monta au pouvoir, mais il ne 
tarda pas á se donner au luxe et au plaisir ; il 
devint bientót insupportable avec ses gens, et 
son premier vizir le haít teilement qu'il forma 
le sinistre dessein de Tassassiner pour régner 
á. sa place et épouser la filie de son premier 
maitre, c'est-á-dire la femme du roi actuel. 
Cependant il ne le fít pas ; il invita simple- 
ment le roi á boire dans un établissement, il 
lui versa teilement du vin qu'il fínit par le 




¿GYPTIENS-AUTOCHTONES 263 

griser complétement. Quand El-Said Aly fut 
gris, le vizir luí enleva la bague, la frotta, le 
serviteur parut, il lui ordonna de porter le roi 
dans la montagne comme on ferait d^un animal 
sauvage. Le serviteur obéit. 

Le vizir s'eftipara alors du royaume et 
épousa de forcé la reine. Elle en fut tres 
affligée et detesta fort son nouveau mari, elle 
se promit méme de lui jouer un vilain tour, 
en attendant elle porta le deuil de son premier 
mari. 

Un soir que le vizir s'était grisé, elle lui 
enleva la bague, appela le serviteur, lui ordonna 
de ramener son mari et de prendre á sa place 
le yizir. Ses ordres furent suivis. Le roi fit 
amende honorable á sa femme et gouverna 
équitablement son pays, en s^attirant ainsi 
Testime et le respect de tous ses sujets. 

Revenons un peu á. sa premiare femme. 

Aprés la fuite de son mari elle s'était 
trouvée sans la moindre ressource, et un soir, 
elle prit ses enfants et sortit. Le hasard voulut 
qu^elle se rendit au fameux tombeau que nous 
connaissons déjá. et en un clin d^oeil elle se 
trouva á. la méme ville que son mari, sans que 



i l'u 



.il'a 



e se doutát de cette combínai- 



Le roí allait de temps en temps faire une 
promeoade dans ia campagne oü il rencontra 
un jour sa fenime ct ses enfants; elle le 
reconnut et se mit k crier de toutes ses forces 
i ses eniants : " Attrapez-le, arrétez-le, c'est 
votre pÉre. » II embrasaa ses enfants, par- 
donna á sa mechante femme et á l'aide de sa 
bague il fíi élever un splendjde cháteau oü il 
tes iogea. II passait alora une nuic chez l'unc 
de ses femmes et une autre nuit chez l'autre. 

II amena, un jour, son ñls Abou-Seif chez 
sa premiire femme eC s'endormit ayant á ses 
cOtés son fils. A minuit, sa femme, qui n'avaít 
point changé, pric la bague du doigt du marí 
et voulut appeler le serví te ur pour faire 
enlever le roi et rcgner á sa place. Abou-Seif 









: le\ 



et la 



II 




réveilla ( 
en semble. 

El-Said Aly continua, á regí 
jusqu'á ce qu'll mourüt, puis f 
lui succéda. 



et ils rentrérent 




XXII 

EL-SCHATBR< MOUHAMMED 

IL y avait une fois uii marchand de fóves qui 
avait trois filies. Sa recette journaliére était 
de deux dirhems ', avec Tun il achetait du pain 
et avec le eecond des íeves. 

Un jour, le roi de cette contrée donna ordre 
formel á tous les habitants de ne point allu- 
mer ]p feu. 

Au coucher du soleil, le roi et son vizir se 
déguisérent en derviches et allér^nt faire une 
tournée en ville pour se rendre compte d'eux- 
mémes de TefiFet de Tordre rey al. Arrivés á la 
demeurede notre marchand deféves, ils trou- 
verent le feu allumé et entendirent Tainée des 



1. Brave, actif, etc. Dans les contes surtout au 
Caire Schater correspond plus spécialement á 
rusé, plein de ressources, etc. 

2. Piéce d'argent. 




fiUee qui disait k son pire : a J'espére que le 
Foi me prendra pourípouse, et alors ie luí éta- 
lecai de la soie d'ici ¡usqu'áeon palais, tout le 
long du chemin. » 

La seconde disait : Et moi, s'il m'épouse, je 
tul ferai un gáteau assez grand pour qu'il 
puiase sufEre á luí et k tout son monde. 

— Quant á mai, dit la plusjeune, si ¡'avais 
crt honneur, je lui ferais un gar;on et une 
filie en une seule couche. La chevelure du 
garfon serait moitiiS en argent, moitíé en or, 
et d¿9 qu'il pleurerait, le ciel deviendraít 
sombre, la pluie tomberait et il ferait froid 
méme 9Í on était 



b'Ü r 
pieio hiv( 
AprÉs a 






en plein été; 

a temps spleadide, méme e 



tout entendu le roí dit k san 
vizir de le conseiller \ celui-ci lui répoadit que 
Dieu seul pouvait lui donaer un conseil. 
Alora le roi lui demanda s'il connaissait ees 
fille,9 et apprit ainsi qu'elles ¿taient filies d'un 
marchand de ffeves. Sur ce ils rentrirent tous 
deux et quand la nuit fut venue, et méme 
presque passíe, le roi donna ordre k deux de 
ses hommes d'aller et de lui amener le mai^ 



¿GYPTIBN8-AUTOCHTONES 267 

chand de fóves. Quand celui-ci arriva, 11 se 
prosterna á deux reprises aux pieds du sou- 
verain en baisant la terre. Le roí lui dit 
alors : « Je désirerais devenir ton beau-fils. » 

Le marchand de féves lui répondit : (( O 
sire, trouvez-vous qu'il convient á vos pareils 
de s^allier á. mes semblables } 

— Mes désirs sont des ordres, répliqua le 
roi, et si tu ne me donnes pas la main de ta 
filie ainée tu es un homme perdu. )) 

Le marchand dut se soumettre á la volonté 
royale et le contrat de mariage fut dressé 
devant le kádi, puis, aprés avoir promené en 
grande pompe la jeune mariée par toute la 
ville, on Tamena &u palais du roi. 

Dans la soirée, le roi entra dans la chambre 
nuptiale et passa fort galment toute la nuit 
avec sa jeune et belle femme. 

Le lendemain matin en se réveillant, il lui 
dit : « Ne vas-tu pas teñir ta promesse, c'est-á- 
dire, ne vas-tu pas m^étcindre de la soie depuis 
la maison de ton pére jusqu'á mon palais ? D 

Elle lui répondit : (( La parole dite la nuit 
est toute empreinte de beurre frais, lorsque le 
jour parait lá-dessus elle se fond. )) 



Le roi en fut tris froissé et ordonaá dfe Ih 
raettre avec les autres esclaves pout- SeWit 
comme elles. 

Le lendemain il épousa la deuxiéine ^tle dU 
marchand de ftves. II passa, comme avec la 
premiére, toute la nuic avec elle, et au matiit 
il lui demanda sa proroesse et obtint la méme 
réponse que celle de l'ainée Elle eut aussi le 
méme 9ort. 

Le troiai¿me jour, il épousa la plus jeune 
des trois sceurs. Aprés toute one iluit de 
d¿licee, il dit á aa femme : n Oü sont les deui 
enfants que tu as promis ? n 

Ella lui répondit : « Pardon, ó mon roi, 
mais aoua ne aommes enseifbk ni depuis un 
moia, ni depuis deux, pour que tu me poses 
cette question. 

u Attends que les neuf mois de groesesse 
í'Écoulent et tu verras si ¡'ai inenti. » 



Les neuf mois presque écoulés et le moment 
des couches ítant tout prís, les deuk sceurs , 
en disgráce en devinreni jalouses et se mirenl 
k forger leur imagination pour trouVer ún 
moyen quelconque pour perdre leur sceUr 



éfiYPTjtaNarAcUTOCHToriES 369 

QeUp;:^ du roi. Yoíqí ce. qu'ell^a décidqrent : 
q11^ i?Wm4^r^íit la sage-fetnm,Q, lui donn^rent 
quarante diñares^ et lui dirc^nt : (( Lojrsqi^ 
]jk,Q)tre so^jar accovicl^era, tu lui Qnléveraa les 
&jgtíant9 et les rejooplaceras par ce cluen ejt cette 

La méchaate sagerfexuxne reotra,, toulte satis- 
£l¿ie du marché;, avec h» daux cl^eas. 

Dans la quí^ on vip.t 1^. rév.eill^r et lui d^re 
q.il^l^ iTQine.s'accoucbuai.t. EUli^.se leva, s'h^billa, 
prit^ U9 deu;^ chíecis et ajla au palais. Lq, reip^ 
apcoucbaassQz.heureusement, etrinf^^ie sage? 
í^mme sq r^etira api*¿s avaijr. empp^té, d^ux 
petits jumeaux : un garlón &t uae fílle, et les 
ayoir remplaces par uQ.petit chien et une.petite 
chieofie. 

Quand la reine reprit ses seas, elle voulut 
vojr ses eofants mais ne vit, béla^ ! quq.dqux 
cbieiü3. Elle en f|it navrée, n^ais dit cep^ndaiit : 
(( Tout ce que Dieu fait est biea fait. )) 

Ei\^ lep» QÚt dans des langes en soie et leur 
fit préparer un superbe bqrceau. 

A la tombée d^ JQur, le roi rentra aupalais, 

I. Piéce d'or. 



2'JO LES FOLK-LORES EN EGYPTE 

et des qu'il sut que sa femme était accouchée 
— sans se douter de quoi — ¡1 demanda á 
voir ses enfants. 

Quand il les vit, plus navré encoré que son 
¿pouse, il dit : (( Que la volonté de Dieu soit 
faite. )) II aima cependant á la folie ees deux 
petits animaux, et soit k table, soit au pré- 
toire, il les avait toujours, Tun sur son genou 
droit, Tautre sur son genou gauche. 

Quant aux deux petits princes, la sage- 
femme les avait donnés aux deux cnielles 
tantes qui les enfermérent dans une caisse 
enduite de goudron et les jetérent ensuite en 
pleine mer au caprice des flots. 

Les vagues poussérent la caisse vers le bord 
du rivage, juste en présence d'un homme qui 
faisait sa priére sur le rivage. 

L'attention de celui-ci fut attirée, il prit la 
caisse et se dit : (( O mon Dieu, je ne désire 
ni richesses, ni autres choses ! Qu'est-ce que 
c'est que cette caisse et qu*y a-t-il dedans ? » 
Puis il ouvrit la caisse et en sortit les deux 
petites créatures qui su^aient leurs doigts 
mignons. 11 demanda á Dieu la forcé et la 
W permission de les élever et rentra fort heureux 

de pouvoir faire une bonne action. 



A l'heure du déjeuner une gazelle apparut 
et allaita les deux petits, l"un de aa mamelle 
droite, I'autrE de sa mamella gauche, ct ae 
cesaa que lorsqu'ils furent completement ras- 
sasiés; puis e!le disparut, Cette gazelle nour- 
riciére vint les trouver journellcment juaqu'íi 
ce qu'ila fureot sevréa et qu'ila purentmanger 
lout seuls. 

Le garlón el la filie reatÉrent auprÉs de Icur 
bon pire adoptif jusqu'S ce qu'ils devinrent 
adultea, et un ¡our l'honnéte homme leur 
dit : ít Dansdeux jours je mourrai, mes chcra 
enfanls; je vais done vous parler pour la 
deroiére foÍ3, écoutez-moi alCentivement : je 
désire d'abord que vous m'assistiez ¡uaqu'á 
raa dermiére heure, puis faites tout le néces- 
saire et enterrez-moi icí méme. Preñez auasi 
ce aac, mes enfants chéris, il est plein d'or, et 
ce mora que vous voyez, jetez-le dans la mer, 
il en sortira uo superbe chcval tout harnaché, 






is mort, les ¡euaes gens sui- 
ent les derniires volontés de 
ajt sauvís d'une n 



M 



272 



et q.ui s'£i:a¡t donné la peine de les élever ¡us- 
qfj'ácít age. Quaod iU l'eurent enseveli, iU 
Ipt^rent le njors á l'eau, le cheval ea aortit et 
leiir demanda oü il fallait les porter. lia 
d^m^ndírent i. aller h la ville la plus proche. 
Ifé% qu'iis y arrivérent, le cheval leur dit ■ 
Lá(;hez les rénes^et arracbee deux crine de ma 
queue; a'il vous arrive n'importe quoi d'em- 
bH-rraasant ou d'eniiuyeuE,, pre^at^s cea deui 
cfina et, je vouH apparaítrai pour voua venir 
«B-aide. » 

1(8 prirent lea dpux crios et a'eo aUirent par 
tioute la ville. lis rencont;:éreat un marcliaad 
(^ café fort pauvre qui ocvendait qu'un quait 
de.rotoli de café en poudre par jour. IU s'as- 
aireqt k sea cotes el en un clin d'oeil le mar- 
cjiand vendit deux rptolis. II les remercia fort 
chaleureusement et étaít émerveillé, eomme 
tout le monde, de leur beauté sana égale dans 
líiville. 

Un niarchand de bric-á-brac paasa devant 
eux, il tenait en main un paquet de quarante 
olcfs et criait qu'il lea veodait au prii qu'in- 
djquerait l'aaheteur. 

« A moi pour mille dinares u, cria El- 



ÉGYPTIENS-AüTOCHTONES 273 

Chater Mohammed (qui était le jeune fíls du 
roí dont nous racontons ici rhistoire). 

« Que Dieu te bénisse, mon fíls, et te donne 
grand gain; tu viens d'acheter un superbe 
palais ; va, entre avec ta soeur, ouvre les 
trente-neuf portes, mais laisse la quarantiéme 
fermée : c^est un conseil paternel que je te 
donne, suis-le. 

Entré dans le palais avec sa soeur, Et- 
Chater Mohammed se mit á ouvrir toutes les 
portes et trouva toutes les piéces pleines de 
bijouz; arrivé á la quarantiéme il hesita une 
minute, puis la curíosité le poussa k ouvrir. II 
ouvrit done et sa mere lui apparut, il la per^a 
de sa lance, sans se douter qui elle était, et la 
coupa en deux. Lui et sa soeur descendirent 
ensuite au jardin et pressérent les deux crins. 
Le cheval leur apparut et demanda ce qu'il 
devait faire. 

«Je veux que ce jardin porte des fruits hors 
de saison. » 

Aussitót les nombreux arbres desséchés se 
couvrirent de toutes sortes de fruits et le 
jardin offrit un magnifique spectacle, 

Le frére et la soeur en furent enchantés, et 

i8 



874 







l'hiver rigoureux se changea soudain en un 
bel ¿té. 

Leurs tantea se rappelérent alora du pasBí 
et tremblérent á l'idée que lea enfants étaient 
encoré en vie. Elles envoyirenl chercher l'in- 
fánie sage-femme d'autrefois et lui deman- 
dírent si elle savait qui derneurait dans la 
maison du vizir un tel. Elle leur répondit, un 
ur. II n'y avait píus de doute, 
liles donnírent cinq dinares á la 
lui dirent d'aller trouver le roi 
imprendre que Chater Moham- 
Sit-el-Hftsn oual Gamal étaient 
dans le pays pour enlever le royanme de leur 
souveraia et qu'il devrait lea faire arriter et 
leur trancher la t£te. 

Elle leur promit fidélité et obéissance puÍ3 
alia trouver le roi et lui communiqua lachóse, 
en chargeant iniquement des calomnies lea 
plus affreuses le frtre et la soeur qui, córame 
on ne l'a pas oublié, étaient les enfants de ce 
mime roi. Elle dit aussi au aouverain : II y a 
ua moyen bien simple devotisdéfaire dujeune 
prince, Altease; vous n'avez qu'á l'envoyer á 
la recherche de l'arbre de Sitti-Han, je garan- 



frire et un 
sage-femm 
tned et sa b 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 275 

tis qu'il n'en reviendra pas, caril sera mangé 
par les bétes feroces qui peuplent les environs 
et personne n^en est jamáis revenu. )) 

Le roi le fit appeler et lui dit : ft Si tu veux 
demeurer dans notre ville, il nous faut appor- 
ter Tarbre de Sitti*Han, autrement nous 
t'exil^ms. » 

El-Chater Mohammed obéit; ii rentra, em- 
brassa sa soeur et partit aprés lui avoir doxmé 
la bague qu'il portait au doigt, en luidisant : 
« Si je meurSi la bague te serrera íort le doigt, 
adieu ! » 

Arrivé hors de la ville, il pressa les deux 
crios et son che val apparut ; ¿1 le monta et luí 
dit : « Méne-moi á l'arbrc de Sitt i-Han. )) 

Quand ils se trouvérent en présence de la 
premiérc ghoule, le cheval s'arréta court et 
dit á son maitre : (( Je ne puis faire un pas de 
plus, car je craios les giioules. )) 

O-Chater Mohammed n^hésita pas une mi- 
nute; il descendit de cheval et continua sa 
route tout seul; arrivé á la premiare ghoule, 
il lui dit : « EH-Salam Ale'ikom, ó bonne 
ghoule. 

— Si tu ne m'avais pas salué en commen- 




9aDt je t'aurais avald; maintenant ae craiaa 
plus, & brave Mohammed; dis-moi ce que tu 
dóBÍres. 

— Je auÍ9 k la recherchede l'arbre de Sitti- 
Han. 

— O moa fils, ó malheureuz, oü vaa-tu ? 
Tu ae sais done pas que touB ceuK qui ont eu 
riatrépidicé d'aller lecherchern'ensont poiat 



Ccpcndant, écoute : « Sur la route se trouve 
ma soeur; elle a unjourde plus que moi etest 
d'uu au plus savaate que moi. Si tu la voia 
ea train de chauSer son four et de moudre du 
ael, eache-toi et ne rapproche pas ; si au con- 
trairc elle moud du ble, coufs k elle et suce du 
lait de son seio droit. Dis-lui aussi que tu es 
le nourrisson d'Abdel-Rahim, puís auee son 
sein gauche et dia-lui que tu es le nourrisson 
d'AbdeI~Raman, expose luí enfiata demande, n 

El-Chater Mohammed remercia la bonne 
ghoule et se mit en route. 

Arrívé devant la ghoule, il vit qu'elle était 
en train de moudre du sel; il ae cacha et 
attendit. Elle se leva, lava ses maioa et se mit 
á moudre du bié. 11 accourut et fit tout ce que 



EGYPTIENS-AUTOCHTONES 277 

luí avait recommandé la ghoule. Elle le laissa 
faire et luí demanda d'oü venait tant d^amour 
et ce qu*il désirait. II luí dit qu^il désirait 
Tarbre de Sitti-Han. 

Elle luí fít signe de s'asseoir et lui donna á 
manger, puis elle lui apporta un agneau 
coupé en quatre et lui dit : « Prends eet 
agneau et va tout droit devant toi ; tu trou- 
veras un superbe palais á quatre colonnes; 
des que tu y arriveras un gros aigle s'abattra 
sur toi pour te faire du mal ; devant le palais 
s'éléve un bel arbre, n'y touche pas tout de 
suite; donne d'abord un quartier de mouton 
á l'aigle, il le mettra dans son bec á droite, 
donne-lui ensuite un second quartier qu'il 
mettra á gauche, puis retire-toi. L'aigle se 
rapprochera encoré de toi, tu lui donneras 
alors le reste. Alors seulement prends Tarbre 
entre tes deux bras et secoue-le en lui disant : 
Le moment est venu, 6 arbre de Sitti-Han. 
Aussitót Sitti-Han, la maitresse de Tarbre, 
apparaitra k sa fenétre et te dirá : Salut, 6 
Chater Mohammed, ó mon chéri, ólumiére de 
mes yeux, dis-moi done deux mots et monte 
chez moi que je t^amuse I Prends bien garde 



de luí repondré, ne lui día pas un mot et tu 
auras l'arbre que tu désires. o 

EI-ChaterMohammed,eDchaht¿, s'enallaen 
emportant le mouton. Tout ce qu'avait dit la 
ghoule arriva et, de son cóté, il ne fií que 
comme elle le lui avaít ordonné. 

Sitti-Han voyant qu'il persistait íl ne pas 
diré un mot comprit que c'était lui qui d«vait 
posséder l'arbre et leluídonna. Tout radteux 
il l'enleva et se mit en route. Arrivé á la 
demeure des ghoules il pressa les deux erins, 
son cheval lu¡ parut, il monta eo selle et 
rentra en ville. II planta l'arbre dans son 
jardín et aussit&t planté, celui-ci se couvrit 
de fruits et devint d'un beau vert. 

El-Chater Mohammed se rendit ensuite au 
palais royal et dit au souveraia qu'ii avait 
rempli sa tache, puis ¡1 rentra chez lui. 

Ses tantes l'apprirent, elles fireat venir la 
sage-femme, lui donntrent cent diñares el lui 
dirent d'aller trouver le roi et de iui faire 
observer qu'il fallait, non seulement I'drbre, 
mais encoré Sitti-Han elle-mime, avec tout 
son monde et son palais. 

La sage-femme fit fldélement la commission 



ÉGYPTIENS-AUTOCHTONES 279 

au roí et ajouta méme que comme El-Chater 
Mohammed avait réussi á se procurer Tarbre 
en surmontant tant d^obstacles, il pourrait 
tres bien aussi lui ravir le royaume. 

Le roi fit venir El-Chater Mohammed et lui 
communiqua la chose en le mena^ant de lui 
faire trancher la tete s*il n^obéissait pas. 

Notre brave alia conter le fait á sa soeur, 
puis appela son fídéle coursier, le monta et se 
mit en route. Arrivé au gite des ghoules, le 
chcvals'arréta. El-Chater Mohammed descen- 
dit á terre et continua sa route, il échangea le 
salut avec la premiére ghoule qui lui demanda 
pourquoi il revenait dans ees lieux; quand 
elle l'apprit, elle lui dit : « Va trouver ma 
soeur, la reine des ghoules, et fais comme la 
premiére fois. » 

Tout se passa comme la premiére fois et 
quand Sitti-Han vit qu'il n'y avait moyen de 
le faire parler, ni de le persuader de monter, 
elle le suivit avec tout son palais. Arrivé á la 
retraite des ghoules, El-Chater Mohammed 
pressa les de.uzcrins, soncheval parut ettous 
se rendirent á la ville. 11 déposa le palais avec 
Sitti-Han dedans, dans son jardin, en face de 



LES FOL.K-LDRES 1 






I 



l'arbre de celle-ci; puÍ8 il se rendit chez le roi 
et luí dit qu'il avait encoré réusai. On était en 
ptein hiver, mais en vertu de la joie et du 
eontentement de notre brave, oa se trouva 
comme par enchantemenc en plein ét¿. Les 
tantee aurent alora qu'JI ¿taic \k et vivant et 
heureux; ellea firent venir la Bage-femme, lui 
donnírent cette fola-ci mille dinares et lui 
direot qu'il fallait chercher encoré un procede 
quelconque pour le perdre : « Va et dis au roi, 
finirent-elles par diré, qu'avantde lui donner 
sa liberté il doit exiger de lui qu'il trouve un 
tout petit garlón qui par un diacoura ¿loquent 
prenne sa défense; nouB croyons et espérona 
qu'il lui sera impossible de le trouver. u 

La sage-femme obéit. D-Chater Mohammed 
fut mandé et le roi lui ordonna ce qui precede. 
Sitti-Han, questionnée k cet effet par le pauvre 
mais brave persécutí, lui répondit que c'était 
chose facile mais qu'il devait demander troia 
¡ours de délai au roi. 

Cea trois ¡ours furent accordés par Sa 
Maiesté, mais á une condition : El-Chater 
Mohammed devait donaer un diaer qui püt 
suffire á tout le peuple, non-seulement do la 
Tille mais encoré des environs. 



É6YPTIENS-AUT0CHT0NE8 26 1 

£1-Chater Mohammed le dit á Sitti-Han qui 
lui répondit : « Va les inviter, tout sera prét 
á votre retour. X) 

Sitti-Han se mit á Toeuvre, elle découpa de 
la mélokhia^ qu*elle mit au feu dans une 
immense chaudiére avec du ble et quand le roi 
arriva avec ses innombrables sujets, tout 
était servi. lis en mangérent pendant diz 
jours sans pouvoir jamáis vider la chaudiére ; 
le roi en fut tres intrigué et demanda Tenfant 
qui devait plaider la défense de notre héros. 
Gelui-ci alia le demander á Sitti-Han qui lui 
dit : « Sors, fais deux pas et appelle Oumm 
Zérig en lui disant : Donne-moi ton fíls Zeid« 
que je Taméne voir sa tante. )) 

El-Chater Mohammed le fít et aussitdt la 
terre s^ouvrit et il en sortit un petit enfant. 11 
le prít et Tamena chez le roi. Celui-ci le fít 
asseoir et fut fort embarrassé pour lui poser 
une question; il ne pouvait en croire ses yeux. 



I . Sorte de légume corcharas alUorius dont les 
varietés sont ; C. trüocularís^ C. tridrás, Ulustration 
de la flore d^Égypte, p. $;, par Ashbrson et 
SchwbinfOhrt. Mémoires de l'Institui ¿gyptUn^ 
tome II . 



289 LES FOLK-L0RE3 EN éOYPTE 

L*enfacit lui dit alora : a Que me veux-tu, 
6 roí ! Demande et je te répondrai ! » 

Le roi tout étonné lui dit : « Mais qui done 
es-tu } 

— Je suis íZérigr ct tout á ton service, éooute- 
moi bien, mais d^abord donne-moi á manger 
car j*ai grand faim. ib 

Le roi lui fít donner de la nourríture et 
assista á son repas ; il vit que tous les mets 
qu*on mettait devant lui disparaissaient en un 
clin d'oeil, le petit enfant avalait tout et criait 
tout le temps qu^il avait encoré faim. Quand il 
eut avalé tous les mets du palais et que tous 
les assistants en furent stupéfaits le rol dit 
au petit enfant que c^étaient 1& des actions 
sataniques. 

L'autre lui répondit d*un air étonné : « Tu 
es roi et sultán, et tu ne peux pas manger 
autant que moi } 

— Tu es une merveille, mon enfant, lui dit 
le roi, et je n'ai jamáis ni vü, ni entendu ce 
que je vois en ce moment-ci. 

— Tu es plus merveilleux encoré, mon roi, 
car jen*ai jamáis vu ce qui se passe chez toieii 
ce moment-ci. 



I 



¿GYPTIKN&-AUT0CHTONBS fl83 

-^ Comment } Que yeux-tu diré > Expliqufr- 
toi done. 

— Voici, 6 roi, le su jet de mon étonnement : 
Tu mets á ta table avec toi deux chiens que tu 

crois étre tes enfants, quand tes vóritaUes 
enfants, ceux que ta feínme a con^us et qu*elle 
t'avait promis avant et le lendemain de ton 
mariage, quand ees enfants, dis-je, sont 
vivants comme toi et moi et se trouvent dans 
cette ville. )) 

Le roi ne comprenant plus ríen luí demanda 
qui ils étaient. 

« Ce sont, repritl'enfant, El-Chater Moham- 
med et Sit-el-Hósn oual Gamal, la merveille 
de notre temps. Leurs infames tantes, avec 
Taide de ton indigne sage-femme, te les ont 
enlevés et remplaces par des chiens. Et 
aujourd'hui encoré, ó roi, ees méchants te 
poussaient á tuer ton fíls, ton propre fíls. » 

Le roi en ce moment ne se possédait plus 
de joie, il était le plus heureux des hommes; 
il couvrit d'or le jeune mais éloquent orateur 
qui avait dévoilé toute la vérité et aprés avoir 
tendrement embrassé ses chers enfants, il fít 
élever un grand búcher et brüla vivantes ses 






284 



LES POLK' LORES EN lÉOYPTE 



deux belles-'Soeurs et la sage-femme. Chati- 
ment bien mérité. 

D*autre part, il y eut de grandes réjouis- 
sances et dans le palais il n'y eut que joie et 
bonheur continuéis. 



FIN 






'•-^ 



TABLE DES MATIÉRES 



Etude sur les Folk-Lores en Egypte 1 

PREMIER GROUPE 

PBRSANS, INDIBNS, ARIBNS DE L*BST. 

I. Les trois femmes et le kadi 25 

II. Le pot enchanté 6^ 

III . La princesse Tcherkesse 69 

IV. La princesse Tag-el-Agem 77 

DEUXIÉME GROUPE 

ARIBNS DU NORD, BUROP¿BNS, QRBCS, 
ROMAINS, BTC. 

V. Les quarante boucs et le bouc che- 

vauchant sur le bouc 87 

VI. Les trois fils du Sultán 10; 

VII« Le cheval enchanté 115 



TROISlfeME GROUPE 

thoTtQUBS, ARIBES, IVItS, BERBÉllBS 

VIH. Ud niaringe nu profil du man 

IX. La patience 

X. Ne concluez jamáis ■ 

QUATRIÉMB CROLIPE 

tVMCllMS-siQRBS, «OUD«n CHU8KT1L 

XI. Ufibrate ;. 

XII. Fréreetsceor 

XIII, Foniel Folia 

CINQyiÉME GROUPE 

XIV. Malice des femmes 

XV. Lestroii ñlles dumarchanddeféves. 

XVI. LeTurcjalouxetsa femme Cairotte. 

XVII. Souheim-el-Leyl 

XVIII. La bonne Oum-Aly 



TABLE DES MATIERES 



387 



XIX. Le kadi bien serví 2^1 

XX. La ñlle du menuisier 240 

XXL El-Sa!d Aly 251 

XXII . El-Schater Mouhammed 26$ 



FIN DB LA TABLB 



CHALON-SUR-SAONB, IMP. DB L. MARCBAU