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Full text of "Cour du banc de la reine en appeal John Kerry & al., demandeurs en Cour inférieure, appelants, et les Soeurs de l'Asile de la Providence de Montréal, défenderesses en Cour inférieure, intimées : factum des intimées"

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f 


COUR  DU  BANC  DE  LA  REINE 


ZEUST    APPEL 


JOHN  KERRY  &  AL., 


Demandeurs  en  (Jour  Inférieure, 


APPELANTS, 


ET 


Les  Sœurs  Je  l'Asile  Je  la  ProvMence  Je  Montréal. 


Défenderesses  en  Cour  Inférieure, 

INTIMÉES. 


Appel   d'un    Jugement    de   la   Cour   Supérieure   de    Montréal,  en   date  du 

24     Novembre     1876 


FACTUM'   DES  INTIMÉES 


TRUDEL,  TAILLON  &  VANASSE 


f 

fils  des  Intimées. 


1 


KHI 


:™edfdmo=eo'  i  coub  iïï  lâio  ii  u  uni.  l 


58.       JOHN  KERRY  &  Al., 


{Demandeurs  en  Courfytârfàwjêl'f  JU  U 

^**  '  î7.  c. -,  «r. r. ****** 


ET 


Les  Sœurs  de  F  Asile  de  la  Providence  de  Montréal, 

(Défenderesses  en  Cour  Inférieure,  ) 

INTIMEES. 


■Faetiam  des  Intimée' 


»• 


Le  Jugement  dont  il  est  interjeté  appel  en  cette  cause,  a  été  rendu 
par  la  Cour  Supérieure  de  Montréal,  présidée  par  Son  Honneur  M.  le  Juge 
Mackay,  le  24  novembre  1876,  et  se  lit  comme  suit  : 

kt  The  Court  having  heard  the  parties  by  their  Counsel  respectively,  as  well  upon 
"  the  Défense  en  Droit  of  Défendants  as  on  the  merits  of  the  principal  and  the  incidental 
"  demands  in  their  cause,  having  examined  the  proceedings  and  proofs  of  Record, 
"  heard  the  witnesses  of  said  parties  vivâ  voce  in  open  Court,  and  on  the  whole  maturely 
"  deliberated  ;  Doth  dismiss  the  Défense  en  Droit  first  pleaded,  with  costs  distraits  to 
"  Messieurs  Doutre,  Doutre,  Robidoux  and  Hutchinson,  Attorneys  for  Plaintiffs,  and 
"  doth  also  dismiss  the  Défense  en  Droit  secondly  pleaded  to  part  of  Plaintiffs'  Déclaration 
"  commencing  with  the  words  "  in  additiou  to  "  with  costs,  distraits  as  aforesaid." 

"  And  adjudging  upon  the  principal  demand, — Considering  that  the  Défendants 
11  hâve  not  violated  the  tiade-mark  alleged  property  of  the  Plaintiffs  ;  that  the  Plaintiffs 
M  allégations  charging  them  with  having  done  it  are  not  proved,  but  disproved  ; 

''  Considering,  further,  that  the  words  "  Syrup  of  red  Spruce  Gum  "  cannot  and 
"  could  not  properly  constitute  a  trade-mark,  involving,  as  they  do,  only  the  name  of  a 
*'  substance,  and  not  designating  particular  origin,  or  ownership,  of  it  ; 

"  Considering  that  Gray  never  had  nor  hâve  Plaintiffs'  right  to  the  monopoly  of 
"  those  words  : 


w 


u  Considering,  npon  the  othër  liead  of  Plaintiffs'  complaint,  that,  save  in  so  far  as 
"  complaining  of  private  damage  to  themselves,  personally,  through  Défendants1 
"  violation  of  tlieir  charter,  or  charter  rights,  or  cxceeding  their  powers  by  trading,  the 
"  Plaintiffs  had  and.  hâve  no  right  to  prosecnte,  it  being  for  the  crown  alone,  or  the 
'•'  Attorney  General  (for  the  crown  or  the  public)  to  prosecute  corporations  forexeeeding 
"  their  powers,  or  for  excesses  in  the  exercise  of  their  charter  rights  or  powers  ; 

"  Gonsidering  that  though  the  Défendants  hâve  been  competing  improperly  in  the 
"  market  with  Plaintiffs,  no  spécial  damages  are  proved,  and  that,  as  to  nominal 
11  damages,  Plaintiffs  show  no  right  to  any;  proving  no  license,  or  privilège  possessed 
"  by  themselves  to  trade  ; 

"  Considering  fmally  that  Plaintiffs  bave  not  right  to  judgment  for  any  thing 
(l  against  the  Défendants,  upon  the  proofs  of  Record,  doth  dismiss  Plaintiffs'  action  with 
"  costs  distraits  to  Messieurs  Trudel,  Taillon  and  Vanasse,  Attorneys  for  Défendants  ; — 

"And  adjudging  upon  the  Incidental  Demand — Gonsidering  that  the  Incidental 
"  Plaintiffs  hâve  proved  most  of  their  allégations  material,  and  particularly  that  the 
"  Incidental  Défendants  interfered  with  them  in  their  selling  Syrup  of  Spruce  Gum. 
"  and  threatened  them,  and  their  agents,  with  prosecutions,  and  damaged  Incidental 
"  Plaintiffs,  by  making  them  lose  commercial  gains,  as  alleged  ; 

"  Considering,  however,  that  the  Incidental  Plaintiffs,  being  a  corporation,  lay, 
"  fleemoysinary  corporation,  could  not  lawfully  enter  and  carry  on  trade  and 
"  commerce,  and  that  the  trouble  they  complain  of,  they  hâve  contributed  to  draw 
"  upon  themselves,  by  the  fact  of  trading  without  lawfully  warrant,  or  right,  but  in 
"  excess  of  their  charter  rights,  and  that,  theiefore,  Incidental  Plaintiffs  hâve  not  clear 
"  right,  or  title,  to  a  judgment  against  Incidental  Défendants,  for  any  damages,  doth 
"  dismiss  said  Incidental  demand;  but  without  costs;  as  Incidental  Défendants  only 
'■  pleaded  a  gênerai  déniai,  and  not  any  justification." 

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L'ACTION. 

L'action  des  AppeLants  était  appuyée  sur  deux  chefs  : 
lo  Ils  se  plaignaient  d'abord  de  ce  que  les  Intimées  avaient  porté 
atteinte  à  leurs  droits,  en  imitant  une  marque  de  commerce  dûment  enre- 
gistrée comme  leur  propriété,  et  en  fabriquant  un  sirop  qui,  d'après  eux,  ne 
serait  qu'une  imitation  ou  contrefaçon  tout-à-fait  inférieures  d'un  autre  sirop 
dont  un  nommé  Gray  était  l'inventeur,  et  dont  ils  étaient  les  propriétaires. 
le  nommé  Gray  leur  en  ayant  vendu  la  recette. 

2o  Ils  alléguaient  ensuite  que  les  Intimées,  en  fabriquant  ce  sirop  et 
l'offrant  en  vente,  violaient  la  charte  d'incorporation  de  leur  communauté, 
et  outrepassaient  les  pouvoirs  à  elles  conférés  par  cette  charte,  vu  qu'elles 
ne  sont  incorporées  que  pour  prendre  soin  des  pauvres,  des  vieilles  person- 
nes, des  malades  et  des  infirmes,  et  nullement  pour  exercer  des  industries, 
faire  le  commerce  et  venir  en  compétition,  sur  les  marchés,  avec  le  public 


industriel  et  commerçant  qui  paye  des  taxes  ;     elles  qui  sont  exemptées  du 
payement  des  taxes  municipales  en  leur  qualité  d'institution  de  charité. 

Remarquons  de  suite,  que  ce  que  les  Appelants  réclamaient  comme 
constituant  leur  marque  de  commerce,  était  le  nom  de  "Sirop  de  Gomme 
d'Epinette  Rouge"  dont  ils  prétendaient  avoir  la  propriété  et  l'usage 
exclusifs 


LES  PLAIDOYERS. 

Les  Intimées  ont  plaidé  plusieurs  défenses  en  droit  et  une  exception 
péramptoire.  L'exception  péramptoire,  qui  reproduit  les  raisons  de  droit 
énoncées  dans  les  défenses  en  droit,  établit  en  substance  : 

lo.  Que  le  Sirop  qu'elles  fabriquent  et  offrent  en  vente  a  été  conti- 
nuellement fabriqué  par  leur  maison  depuis  l'année  1843.  Qu'à  cette  date, 
une  sœur  Frigon,  pharmacienne  de  l' Hôtel-Dieu  de  Montréal,  en  donna  la 
recette  à  la  soeur  Caron,  Supérieure  actuelle  de  la  Providence  ;  que,  depuis 
cette  date,  elles  l'ont  toujours  régulièrement  fabriqué  en  grandes  quantités, 
sous  le  même  nom  et  d'après  la  même  recette,  jusqu'à  ce  jour,  dans  leur 
établissement,  pour  l'usage  de  leurs  malades  et  celui  du  public;  que  dès  ce 
temps,  et  toujours  depuis,  les  médecins  du  dispensaire  de  la  Providence  et 
grand  nombre  de  médecins  de  la  Cité,  l'ont  régulièrement  prescrit  dans  leur 
pratique,  ce  qui  constitue  une  propriété  d'usage  de  dix-sept  ans  antérieure 
à  la  date  que  Gray,  l'auteur  des  Appelants,  assigne  à  la  composition  de  son 
sirop,  et  exclut  toute  idée  d'imitation  ou  de  contrefaçon. 

2o.  Que  tout,  dans  ce  sirop,  tel  qu'offert  en  vente,  est  essentiellement 
différent  d'avec  celui  des  Appelants;  le  goût  et  l'apparence,  la  forme  des 
bouteilles,  la  qualité  du  verre,  l'enveloppe,  la  forme  du  paquet,  les  inscrip- 
tions, la  marque  de  commerce,  etc. 

3o.  Que  ce  que  les  Appelants  réclament  comme  caractéristique  de  leur 
marque  de  commerce,  savoir,  le  nom  de  "Sirop  de  Gomme d Ejoinette Rouge •■" 
outre  qu'il  n'est  pas  le  même  nom  que  celui  du  sirop  des  Intimés  ;  i( §jiv<m 
de  gomme  d '  épinette  composé,''''  qu'il  en  diffère  autant  que  le  genre  diffère  çfe, 
l'espèce,  ne  peut  constituer  la  partie  essentielle  ou  la  caractéristique  d'une 
marque  de  comme.ice,  vu  que  c'est  le  nom  d'une  substance  dont  l'usage 
appartient  à  tous,  une  appellation  nécessaire  pour  désigner  cette  substance 
et  ses  qualités  ;  et  que  les  Appelants  n'ont  pu  acquérir  un  droit  exclusif', 
l'usage  de  ce  nom. 

t<>    Que  les  Intimées  n'ont  fait  a  ue  se  servir  ^Y,^"■    fftar^ue  <l<:  •  ■■■>.. 


merce  qui  est  leur  propriété,  dont  elles  ont  obtenu  l'enregistrement  régulier 
au  bureau  des  "  Brevets  d'Inventions,"  au  siège  du  gouvernement  fédéral  ; 
que  cette  marque  de  commerce  des  Intimés,  telle  qu'enregistrée,  est 
essentiellement  différente  de  celle  des  Appelants. 

Et  pour  répondre  au  2e  chef  de  la  plainte,  il  est  allégué  à  l'exception  : 
Que  les  Intimés  ont  droit  d' exercer  toutes  les  industries  et  de  faire  tout  ce 
qui  est  nécessaire  pour  atteindre  le  but  de  leur  institution,  et  que,  de  droit 
commun,  elles  ont  droit  de  faire  tout  ce  que  la  loi  ne  leur  défend  pas  ; 
qu'elles  pourvoient  au  logement,  entretien,  nourriture,  éducation  et  panse- 
ment d'un  très  grand  nombre  de  pauvres,  malades,  infirmes,  vieillards, 
orphelins,  sourds-muets,  aliénés  :  en  un  mot,  qu'elles  viennent  au  soulage- 
ment de  toutes  les  misères  :  que  pour  se  procurer  les  moyens  de  substenter 
toutes  ces  oeuvres,  il  leur  faut,  vu  qu'elles  sont  pauvres  et  n'ont  aucun 
revenu  régulier,  user  de  toutes  les  ressources  que  leur  esprit  de  charité, 
leur  dévouement  infatiguable,  leur  travail  et  leur  industrie  peuvent  leur 
procurer  ;  que  d'après  le  droit  public  de  ce  pays,  les  institutions  de  charité 
ont  le  droit  d' exercer,  ainsi  toutes  les  industries  nécessaires  à  leur  subs- 
tance ;  que  si  elles  sont  exemptes  de  certaines  taxes,  en  retour,  elles  con- 
tribuent, par  leurs  œuvres,  plus  largement  que  tout  individu  ou  toutes 
autres  institutions,  au  soulagement  d' une  foule  de  misères  qui,  autrement, 
retomberaient  à  la  charge  de  la  municipalité  ou  de  l' état,  sous  forme  de  taxes 
très-lourdes. 

Enfin  que,  eussent-elles  de  fait,  outrepassé  les  pouvoirs  à  elles  conférés 
par  leur  charte,  ce  qu'elles  nient,  il  n'appartiendrait  pas  aux  Appelants  de 
poursuivre,  en  leur  nom,  le  redressement  de  tels  torts  ;  que,  d' après  une 
disposition  spéciale  de  notre  code  de  procédure  civile,  de  telles  infractions 
ne  peuvent  être  poursuivies  qu'au  nom  du  procureur-général  de  la  province 
de  Québec,  agissant  pour  Sa  Majesté  la  Reine. 

Il  suffit  d'énoncer  les  propositions  contenues  dans  les  plaidoy es- résumés 
ci-dessus,  et  de  les  mettre  en  regard  de  la  preuve  faite,  dans  la  cause,  pour 
voir  de  suite  que  les  Intimées  ont,  de  point  en  point,  établi  toutes  les  allé- 
gations de  leurs  plaidoyers. 


1ère  PARTIE 

1ère  Question  : 
Y  A-T-IL  EU  IMITATION? 

Et,  d'abord,  examinons  la  question  d'imitation.  Il  suffirait  sans  doute 
de  comparer  les  deux  produits  pour  voir  de  suite,  jusqu'à  quel  point  est 
ridicule  la  prétention  des  Appelants  que  le  sirop  des  Intimées  est  une  imi- 
tation du  leur.  D'un  autre  côté,  la  priorité  d'usage,  établie  par  au  moins 
six  témoins  du  plus  grand  poids,  et,  constatant  que  le  sirop  des  sœurs  exis- 
tait depuis  seize  ans,  à  la  Providence,  quand  Gray  originel  son  sirop  en  1859, 
Bans  compter  qu'auparavant,  il  avait  été  fabriqué  de  temps  immémorial  à 
l'Hôtel-Dieu,  suffirait  amplement  pour  disposer  de  cette  question  d'imitation, 
laquelle,  en  outre,  n'a  rien  à  faire  avec  une  question  de  marque  de  com- 
merce. 

Gray,  qui  a  dû  aller  à  l'Hôtel-Dieu,  n'a-t-il  pas  emprunté  lui-même  sa 
recette  à  cet  établissement  ? 

Quoiqu'il  en  soit,  comme  la  poursuite  n'a  pas  hésité  à  soulever  la 
question  d'imitation,  voyons  ce  qu'elle  vaut,  même  abstraction  faite  de  la 
question  de  priorité. 

lo.  Le  nom.  Il  est  constaté  par  la  preuve,  qu'il  existe  quatre  sortes 
d'épinettes:  la  blanche,  la  jaune,  la  noire  et  la  rouge. 

Voir  aussi  :  Flore  Canadienne,  p.  557  et  suiv. 

Les  Appelants,  en  prenant  le  nom  de  "  Sirop  de  gomme  d'épinette 
rouge,"  ont  donc  choisi  le  nom  d'une  espèce  particulière  d'épinette.  Les 
Intimées  ont,  au  contraire,  adopté  le  nom  général  de  "Sirop  dégomme 
d'épinette."  H  y  a  donc,  sous  ce  rapport,  entre  les  deux  noms,  différence 
du  genre  à  l' espèce.  D'un  autre  côté,  le  nom  choisi  par  les  Appelants 
indique  un  sirop  simple  :  celui  choisi  par  les  Intimées  indique  un  sirop 
composé.     Ici  encore,  différence  capitale  dans  le  nom. 

La  chimie  ne  reconnaît  que  deux  seules  classes  de  sirop  :  les  simples 
et  les  composés. 

Voir  Dupinay  de  Vorepierre,  Encyclopédie  universelle,  vo  sirop. 

Et  ces  classes  sont  bien  différentes  l'une  de  l'autre  :  Les  sirops  simples 
sont  ceux  qui  ne  contiennent  qu'  une  substance  unie  au  sucre  ;  les  sirops 
composés  sont  ceux  qui  en  contiennent  plusieurs.  Les  premiers  sont  surtout 


boissons  d'agréments;  peu  sont  médicamenteux.  Les  seconds  sont  en  très- 
grand  nombre,  et  ils  rentrent  dans  la  cathégorie  des  substances  médicamen- 
teuses. Inutile  de  dire  que  la  consonnance  des  noms  :  lo.  Sirop  de  gomme 
d'épinette  rouge  ;  2o.  Sirop  de  gomme  d'épinette  composé,  est  essentielle- 
ment différente.  Donc,  différence  essentielle  non-seulement  dans  le  nom, 
mais  encore  dans  la  consonnance  du  nom. 

Il  n'y  a  donc  pas  imitation  dans  le  nom. 

2o.  La  couleur  :  y  en  a-t-il  dans  la  couleur  et  le  goût  du  sirop  ?  Ce  serait 
insulter  au  sens  commun  que  de  le  prétendre  :  celui  des  Appelants  est 
épais,  de  couleur  rouge-noire,  ayant  l'apparence  de  la  mêlasse;  celui  des 
sœurs  est  blanc,  plus  liquide,  ayant  l'apparence  du  lait. 

3o.  Le  goût  :  Celui  des  Appelants  a  un  goût  piquant,  acre,  oh  domine 
le  goût  de  liqueur  de  noyaux,  mais  qui  ne  dénote  nullement  la  présence  de 
la  gomme  d' épinette  ;  celui  des  Intimées,  une  saveur  douce  et  agréable,  où 
domine  le  goût  de  la  gomme  d' épinette. 

4o.  Les  bouteilles  :  Le  sirop  des  Demandeurs  est  renfermé  dans  des 
bouteilles  plates,  avec  panaux  concaves  et  formées  d' un  verre  très-épais. 

Celui  des  Sœurs  est  renfermé  dans  des  bouteilles  rondes,  étant  plus 
longues  d'au  moins  un  pouce  que  celles  des  Appelants  et  faites  d'un  verre 
très  mince. 

5o.  Les  encelopi>e*  .-  Le  premier  a  pour  enveloppes  un  papier  bleu 
clair,  plié  aux  deux  bouts  en  quarré  et  formant  un  paquet  plat,  d'un 
pouce  et  demi  de  largeur,  sur  à-peu-près  un  pouce  d' épaisseur,  portant,  sur 
ses  faces  principales  et  ses  faces  lattérales,  des  parallélogrames  contenant 
des  inscriptions  en  caractères  assez  gros.  Le  nom  des  fabriquants  y  est  ins- 
crit sur  la  longueur  ;  surtout,  le  nom  du  produit  n'est  imprimé  que  sur  le 
travers  du  paquet.  Pour  le  second,  l'enveloppe  est  remplacée  par  une 
boîte  quarrée,  d' épaisseur  égale  sur  les  côtés.  Elle  n'enferme  la  bouteille 
qu'en  partie,  de  manière  à  laisser  voir  tout  le  goulot  et  partie  du  corps  de 
la  bouteille.  Les  inscriptions  qui  couvrent  cette  boîte  n'ont  rien  de  sem- 
blable à  celles  qui  garnissent  l'enveloppe  des  Appelants,  les  caractères  étant 
beaucoup  plus  petits  et  l'arrangement  en  étant  tellement  différent,  que  "  à 
moins  d' être  aveugle,  il  est  impossible  de  prendre  l'un  pour  Vautre,''''  ainsi  que  l'a 
admis  le  docteur  Picault,  l'un  des  témoins  des  Appelants.  La  plupart  des 
autres  témoins  des  Appelants,  et  Gray  lui-même,  ont  admis  que  les  deux 
paquets  étaient  différents  en  toutes  leurs  parties.  Et  leur  témoin  Picault, 
croit  pouvoir  dire  même,  <pi'  un  aveugle  les  distinguerait  nécessairement.  Impos- 
sible, en  effet,  de  ne  pas  distinguer  parfaitement  et  de  suite,  au  simple  tou- 
cher, une  boîte  de  carton  dur,  ne  cédant  nullement  sous  la  pression  des 
■ts,  de  laquelle  sort,  à  un  bout,  le  goulot  nu  d'une  bouteille  fermée  avec 


7 

un  cachet  en  cire,  d'avec  un  paquet  enveloppé  avec  un  papier  soyeux,  pliant 
sous  la  moindre  pression  des  doigts,  et  fermé  aux  deux  bouts. 

Voir,  sur  ce  point,  "Rendu"  u  marques  de  fabriques'''  où  il  est  établi 
qu'une  forme  vulgaire,  v.  g.  carrée,  ne  peut  entrer  comme  partie  de  la 
marque  de  commerce.   P.  36  et  37,  No.  50. 

Au  No.  56,  l'auteur  établit  même  que  la  couleur  de  l'enveloppe  n'est 
pour  rien  dans  la  marque  de  commerce.  P.  4. 

7o.  Le  cachet:  Nous  venons  de  mentionner  le  bouchon,  lequel,  dans  les 
bouteilles  des  Appelants,  est  de  liège  non  recouvert,  tandis  que,  dans  celles 
des  Intimés,  le  bouchon  de  liège  est  complètement  recouvert  d'un  cachet  de 
cire  bleue,  offrant  encore  une  différence  essentielle. 

8o.  L'Effigie,  la  marque  de  commerce:  Enfin,  la  différence  est  plus 
grande  encore,  s'il  est  possible,  entre  ce  qui  constitue  la,  partie  caractéristique 
de  la  marque  de  commerce.  L'effigie,  qui  occupe  la  principale  partie  du 
parallélograme  sur  l'une  des  faces  principales  des  paquets  des  Appelants, 
représente  un  indien  penché  sur  les  bords  d'une  cataracte,  au  milieu  d'une 
nature  sauvage  ;  celle  que  l'on  voit  sur  les  boîtes  des  Intimés,  qui  constitue 
\&  caractéristique  àeieur  marque  de  commerce  et  qui  n'est  que  le  sceau  de  leur 
communauté,  représente  un  autel  sur  lequel  est  une  Ste.  Vierge  le  coeur 
entouré  d'une  couronne  de  glaives  :  deux  saints  sont  agenouillés  au  pied  de 
l'autel.  En  cercle,  au-dessus  de  cet  autel,  est  l'inscriqtion  latine  "  Charitas 
Christi  urget  nos"  et  au-dessous  les  lettres  A.  P.  M.  (Asile  de  la  Providence, 
Montréal).  Le  tout  enfin  est  renfermé  dans  une  guirlande  de  fleurs  de  lys. 
Impossible  de  trouver  deux  marques  de  commerce  qui  différent  davantage. 
Non  seulement  elles  n'ont  rien  de  semblable  entre  elles,  mais  encore 
chacune  de  leurs  parties  comportent  des  oppositions  essentielles.  L'une 
porte  tous  les  caractères  de  la  plus  haute  civilisation  ;  l'autre,  tous  les 
indices  de  la  barbarie. 

Après  avoir  constaté  ces  différences,  il  suffit  de  référer  à  notre 
loi  sur  la  matière,  Acte  des  marques  de  commerce,  sect.  1  et  3,  et  sect.  5 
et  9  de  la  35e  Viot.  chap.  32,  statut  de  1868,  pour  constater  qu'il  est 
impossible  de  supposer  ici  môme  l'ombre  d'une  infraction  à  cette  loi.  Est-il 
possible,  en  effet,  de  trouver,  entre  deux  objets,  des  différences  plus  radi- 
cales, une  dissemblance  plus  complète  ?  Est-il  possible  surtout  qu'  il  ait  pu 
se  trouver  des  témoins  ayant  le  courage  de  dire  que  les  deux  articles 
pouvaient  se  confondre  l'un  pour  l'autre  ?  La  chose  est  à  peine  croyable; 
cependant,  les  Appelants  ont  trouvé  de  tels  témoins.  Aucun  d'eux  cepen- 
dant n'a  pu,  dans  les  réponses  aux  transquestions,  indiquer  quelques  points 
importants  de  similitude.  Quatre  d'entre  eux  ont  été  appelés  pour  établir 
qu'il  y  avait  eu,  dans  le  commerce,  confusion  entre  les  deux  produits.     Le 


plus  important  d'entre  eux  est  le  témoin  Devins.  Suivant  lui,  le  sirop  des 
Intimées  peut  être  donné  pour  celui  des  Appelants.  Lui  même,  affirme-t-il, 
a  souvent  donné  ce  sirop  quand  l' autre  lui  était  demandé.  Mais  il  s' empresse 
de  dire  que  c'est  intenthnndlement  qu'il  a  fait  cette  substitution  !  Certes!  un 
témoin  qui  vient  dire  de  telles  choses  donne  la  mesure  de  son  intelligence 
et  de  son  honnêteté.  D'abord,  son  affirmation  ne  prouve  rien  de  ce  qu'il 
veut  établir.  Bien  loin  de  démontrer  que  l' un  des  paquets  pouvait  être  pris 
pour  l'autre,  elle  n'établit  que  l'acte  frauduleux  de  celui  qui  a  substitué  l'un 
à  l'autre.  Il  eut  pu,  tout  aussi  bien,  donner  de  la  morphine  pour  de  la  rhu- 
barbe, de  l'arsenic  pour  du  sel.  Nous  sommes  habitués  à  considérer  le 
pharmacien  comme  un  homme  sérieux  et  réfléchi,  un  homme  en  qui  la 
société  a  placé  un  haut  degré  de  confiance.  Cet  homme  est  le  dépositaire  de 
mille  matières  qui  peuvent  donner  la  mort  ;  il  a  la  vie  de  ces  concitoyens 
entre  ses  mains.  Et  le  voici  qui  vient  déclarer,  en  face  de  la  justice,  que, 
pour  servir  un  misérable  intérêt,  que  pour  le  gain  insignifiant  de  cinq 
centins,  il  substitue  un  médicament  à  un  autre.  Et  cela,  dit-il,  se  fait  tous 
les  jours  dans  le  cours  des  affaires.  Or,  est-ce  à  lui  qu'il  appartient  de 
changer  la  prescription  du  médecin  ?  De  donner  un  remède  pour  un  autre 
sans  savoir  quel  usage  on  en  veut  faire  ? 

Nous  croyons  sincèrement  que  le  sirop  des  sœurs  est  infiniment  supé- 
rieur à  celui  des  Appelants.  Supposons  même  que  dans  neuf  cent  quatre- 
vingt  dix-neuf  cas  sur  mille,  il  doive  être  prescrit,  il  peut  arriver  un  cas 
cependant,  ne  serait-ce  qu'un  cas  sur  mille,  ou  le  sirop  des  Appelants,  vu 
certaines  propriétés  qu'un  médecin  lui  aurait  reconnu,  serait  nécessaire  pour 
sauver  la  vie  d'un  patient.  Le  médecin  le  prescrit;  la  vie  du  patient  dépend 
de  l'application  du  remède.  On  le  demande  chez  le  témoin  Devins,  qui  lui 
substitue  habilement  une  bouteille  d'un  autre  médicament.  Soit  pour  avoir 
pris  une  substance  qui  ne  lui  convenait  pas,  soit  pour  avoir  été  privé  de  la 
seule  substance  qui  pouvait  le  sauver,  le  malade  meurt  ! . . . 

Qui  est  responsable  de  la  mort  de  cet  homme  ? 

Vient  un  autre  témoin  amené  h  grands  frais  de  Londres,  province 
d'Ontario.  Que  prouve-t-il?  Qu'un  jour,  il  entre  dans  une  pharmacie,  et 
demande  le  sirop  de  gomme  d'épinette  de  Qray  ;  que  le  pharmacien  enve- 
loppe, derrière  le  comptoir,  sans  la  lui  montrer,  une  bouteille  qu'il  lui 
remet  ;  que  rendu  à  son  hôtel,  il  défait  le  paquet  et  reconnaît  de  suite  que 
ce  n'est  pas  le  sirop  de  Gray,  dont  il  ne  voit  pas  le  nom  sur  l'enveloppe, 
et  qu'il  sait  être  rouge  et  contenu  dans  une  bouteille  carrée,  tandis  qu'il 
voit  dans  sa  main,  sans  même  la  sortir  de  sa  boîte,  une  bouteille  ronde, 
dont  le  contenu  est  blanc.  Qu'  est-ce  que  cela  prouve  ?  lo  Qu'  il  est  impos- 
sible de  ne  pas  distinguer  les  deux  produits  dès  qu'on  y  regarde;  2o  Qu'il 


9 

peut  se  trouver  ailleurs  des  pharmaciens  qui  professent  les  mêmes  notions 
eu  affaires  que  le  témoin  Devins. 

Un  troisième  décide  d'acheter  le  sirop  de  Gray  sur  le  conseil  d'un  ami. 
Il  entre  chez  un  épicier  de  la  rue  St.  Laurent,  qui  lui  remet  une  bouteille 
du  sirop  des  Intimées.  En  sortant  du  magasin,  il  remarque  de  suite  que  ce 
n'est  pas  l'article  qu'il  a  demandé.  Le  marchand  lui  assure  que  c'est  bien 
là  l'article.  Encore  une  fois,  qu'est-ce  que  cela  prouve,  si  ce  n'est  que  le 
témoin  a  reconnu  la  différence  presque  sans  y  regarder,  et  que  le  marchand 
a  voulu  le  tromper,  mais  en  vain. 

Enfin  le  quatrième  est  un  employé  des  Demandeurs.  Il  entre  chez  un 
autre  épicier,  avec  l'intention  de  constater  si  on  n'y  vend  pas  le  sirop  des 
Sœurs  au  lieu  de  celui  de  Gray.  Il  demande  '•'  Gray  s  Syrup  ofSpruce  Gum" 
On  lui  présente  celui  des  Intimées,  qu'il  accepte  avec  empressement.  Qui 
dira  que  cet  homme  a  été  trompé,  qu'il  a  confondu  l'un  avec  l'autre? 
Evidemment,  cet  homme  allait  d'une  épicerie  à  l'autre,  répétant  en  cent 
endroits  son  expérience.  Il  a  réussi  à  trouver  un  épicier  qui,  soit  parce 
qu'il  n'aurait  pas  bien  saisi  le  nom  du  sirop  demandé,  vu  qu'il  ne  parlait 
peut-être  pas  l'anglais,  le  témoin  ne  parlant  pas  le  français,  soit  parce  qu'il 
aurait  agi  de  mauvaise  foi,  donne  l'un  pour  l'autre.  Encore  une  fois, 
qu'est-ce  que  cela  prouve  ?  Y  a-t-il  là  preuve  d'imitation,  de  contrefaçon  ? 
Qui  oserait  le  soutenir?  Voici  comme  Rendu,  "Des  marques  de  fabrique," 
p.  88,  No.  128,  définit  la  contrefaçon  :  "  La  reproduction  entière  du  signe 
"  déposé." 

Evidemment,  en  supposant  que  les  Soeurs  n'eussent  pas  la  priorité 
d'usage,  laquelle  est  cependant  parfaitement  prouvée,  il  serait  impossible 
de  prétendre  que  leur  sirop,  avec  ses  bouteilles,  enveloppes,  étiquettes, 
marques  de  commerce,  etc.,  fût  une  imitation  ou  contrefaçon  de  celui  des 
Appelants. 


2e  Question  : 

LE  NOM:  "SIROP DE  GOMME D'ÉPINETTE ROUGE"  PETJT-LL  ÊTRE 
LA  CARACTÉRISTIQUE  U  UNE  MARQUE  DE  COMMERCE? 

Venons-en  maintenant  à  la  question  de  savoir  si  le  nom  de  "Sirop  de 
Gomme  rf  Epinetie  Rouge  "  peut  former  la  caractéristique  d'une  marque  de 
commerce. 

C'est  là,  à  notre  sons,  le  point  culminant  du  litige. 


10 

Les  Appelants  réclament  ce  nom  comme  leur  marque  de  commerce,  et 
prétendent  en  avoir  l'usage  exclusif.  Ont-ils  pu  acquérir  un  tel  droit 
exclusif  à  l'usage  du  nom  de  "  Sirop  de  Gomme d 'Epinette Rouge,"  par  l'enre- 
gistrement, tel  qu'il  a  été  fait,  de  leur  marque  de  commerce  ?  Nous  mainte- 
nons que  non.  Sur  ce  point,  il  ne  nous  paraît  pas  y  avoir  de  doute  possible. 
Cette  proposition  légale  des  Appelants  ne  nous  paraît  pas  pouvoir  soutenir 
la  discussion.  L'adopter  serait  admettre  les  conséquences  absurdes  qu'il 
faut  en  déduire  infailliblement.  Aussi,  le  sens  commun,  les  auteurs  et  la 
jurisprudence  s'accordent-ils  à  repousser  une  telle  prétention.  Le  nom  de 
la  substance  est  ce  que  les  auteurs  appellent  "une  désignation  nécessaire  qui 
découle  forcément  de  la  nature  du  produit."  Soutenir  que  le  nom  d'une 
substance  connue,  dont  l'usage  appartient  à  tous,  peut  devenir  la  caractéris- 
tique d' une  marque  de  commerce  serait  soutenir  :  ou  que  le  propriétaire 
d'une  telle  marque  de  commerce  aurait  le  monopole  exclusif  de  l'usage  de 
cette  substance,  ou  qu'il  ne  serait  plus  permis  d'appeler  par  son  nom  cette 
substance  ou  les  produits  qui  en  seraient  tirés.  Dans  ce  cas,  l'enregistre- 
ment d'une  marque  de  commerce  aurait  un  effet  plus  absolu  que  l'obtention 
d'une  patente,  ou  brevet  d'invention.  Il  est  évident  que  l'enregistrement 
d'une  marque  de  commerce  ne  peut  avoir  cet  effet.  Les  Appelants  n'ayant 
pas  de  brevet  d'invention,  ne  peuvent  prétendre  avoir  l'usage  exclusif  de 
la  gomme  d' epinette,  ni  le  droit  exclusif  d'en  faire  un  sirop.  Dès  que  l'on 
admet,  pour  d'autres  parties,  le  droit  de  faire  du  sirop  de  gomme  d' epinette, 
il  faut  bien  leur  reconnaître  le  droit  de  se  servir  de  l'appellation  nécessaire, 
c'est-à-dire  de  l'appeler  de  son  nom:  "  Sirop  de  gomme  d' epinette."  Tout 
autre  nom  ne  conviendrait  pas  au  produit,  n'en  indiquerait  pas  exactement 
la  nature  et  les  qualités.  Ce  nom  "découle  donc  forcément  de  la  nature  du 
'produit"  S'il  en  était  autrement,  il  faudrait  donc  lui  donner  le  nom  d'une 
autre  substance  :  Sirop  de  rhubarbe  par  exemple.  Mais  je  suppose  qu'une 
autre  personne  compose  un  sirop  de  rhubarbe,  il  ne  pourra  donc  pas  l' appeler 
de  ce  nom  ;  il  lui  faudra  adopter  par  exemple  le  nom  de  sirop  de  carotte, 
pour  désigner  son  sirop  de  rhubarbe.  Et  l'auteur  d'un  sirop  de  carotte,  lui, 
appellera  le  sien  sirop  de  betterave,  je  suppose  !  Il  suffit  d'énoncer  une  telle 
prétention,  pour  en  faire  voir  l'absurdité.  Pourquoi,  disent  les  Appelants, 
ne  pas  appeler  le  sirop  des  Intimées:  "  sirop  pour  h  rhume?" — D'abord, 
parce  que  nous  voulons  l'appeler  par  son  nom  ;  ensuite,  parce  qu'il  n'appar- 
tient pas  plus  aux  Appelants  de  nous  imposer  un  nom,  qu'il  ne  nous 
appartient  de  leur  dicter  comment  ils  appelleront  leur  sirop.  Enfin,  parce 
que,  si  les  prétentions  des  Appelants  étaient  fondées,  si  nous  adoptions  ce 
nom,  tous  les  auteurs  de  sirop  pour  le  rhume  n'auraient  plus  le  droit  d'in- 
diquer que  leur  sirop  guérit  du  rhume  :  ce  serait  notre  marque  de  commerce  ' 


IL 

Dans  l'espèce  actuelle,  il  y  a  une  autre  raison  pour  laquelle  il  serait 
doublement  absurde  de  reconnaître  aux  Appelants  l'usage  exclusif  du  nom 
de  "sirop  de  gomme  d 'êpinette  :  "  quatre  espèces  d'épinettes  au  moins  existent 
dans  le  pays. — Or,  les  Appelants  ont  jugé  à  propos  de  choisir,  pour  nom  de 
leur  remède,  le  nom  d'une  espèce  spéciale  d' êpinette  :   l' êpinette  rouge. 

Mais,  si  nous  jugeons  à  propos,  nous,  de  faire  du  sirop  avec  de  la  gomme 
d'épinette  blanche  ?  ou  d'épinette  jaune  ?  si  la  science  médicale  vient  à 
découvrir,  dans  ces  deux  sortes  d'épinettes,  des  vertus  précieuses,  pouvant 
bénéficier  largement  à  l'humanité,  il  faudra  donc  renoncer  à  appeler  les 
sirops  qui  en  seront  composés  :  u  sirop  de  gomme  d 'êpinette !"  Et  tout  cela, 
parce  que  Monsieur  Gray  a  jugé  à  propos  d'inscrire,  dans  sa  marque  de 
commerce,  les  mots  de  "  sirop  de  gomme  d'épinette  rouge!  " 

C'est  donc  fort  à  propos  que  tous  les  auteurs  qui  ont  écrit  sur  la  matière 
se  sont  accordés  à  dire  que  les  appellations  nécessaires,  les  noms  des 
substances  connues,  ne  peuvent  être  la  caractéristique  d'une  marque  de  com- 
merce, et  que,  pour  faire  d' un  nom  une  telle  caractéristique,  il  faut  adopter 
un  nom  de  fantaisie,  ou  "  une  association  singulière  de  mots,"  lesquels,  en 
dehors  de  la  signification  de  convention  que  l'auteur  leur  a  donnée,  en  les 
appliquant  à  désigner  le  médicament  ou  le  produit  de  sa  composition,  n'ont 
plus  de  sens,  et  ne  s'appliquent  à  aucun  produit,  aucune  substance  :  Tels 
sont  les  mots  :  "  Pain-Killer"  "  Sozodont,"  "  PMlodont"  "  Reading  Sauce," 
"  encre  de  la  petite  vertu." 

Telle  est  la  doctrine  des  auteurs.  Il  en  est  un,  cependant,  "  Brown,'' 
cité  par  les  Appelants  en  Cour  Inférieure,  qui  ne  se  trouve  ni  à  la  bibli- 
othèque du  bureau,  ni  à  celle  du  parlement  fédéral,  et  que,  pour  cette 
raison,  nous  n'avons  pu  consulter.  Nous  sommes  convaincu  néanmoins  qu'il 
ne  soutient  pas  les  prétentions  des  Appelants.  Si  tel  était  le  cas,  ses  opinions 
seraient  discutées  par  des  auteurs  postérieurs,  tels  que  Adams,  par  exemple, 
dont  l'ouvrage  :  "  Treatise  or  trade  marks"  est  le  plus  récent  de  tous 
ceux  qui  ont  été  écrits  sur  cette  matière,  soit  en  Angleterre,  soit  aux  Etats- 
Unis. 

Nous  avons  résumé,  dans  la  proposition  légale  suivante,  l'opinion  corn- 
mune  de  tous  les  auteurs  qui  ont  écrit  sur  les  marques  de  commerce. 

Proposition  :  "  Un  nom  qui  est  en  usage  pour  désigner  un  article  et 
"  indiquer  sa  ou  ses  qualités,  est  une  désignation  nécessaire  et  ne  peut 
'•'  constituer  une  propriété  exclusive  :  par  conséquent,  ne  peut  être  la  carac- 
"  téristique  d'une  marque  de  commerce." 

Cette  proposition,  non  seulement  est  soutenue  par  toutes  les  autorités 
en  matière  de  marques  de  commerce,  mais  encore,  a  été  consacrée  par  une 


12 

jurisprudence  constante  et  à-peu-près  uniforme  dans  tous  les  pays,  ainsi  que 
l'on  pourra  en  juger  par  les  citations  suivantes  : 

"  Les  désignations  nécessaires  ne  peuvent  constituer  une  propriété 
exclusive." 

"  En  conséquence,  la  qualification  de  "parfumé  "  donné  à  un  produit 
"  aromatique  ne  peut  créer  un  droit  privatif  à  celui  qui  l'a  appliqué  le 
"  premier,  bien  qu'il  ait  fait  le  dépôt  de  ses  étiquettes  au  secrétariat  du 
"  conseil  des  Prud'hommes." — 6  Août  1858.  Tribunal  de  commerce  de  la 
Seine,  affaire  Thibierge. 

C.  Paton  (La  propriété  industrielle  No.  55). 

Huart,  marques  de  fabriques  No.  19,  p.  14. 

Le  même  auteur,  après  avoir  dit  que  personne  ne  peut  être  admis  à  se 
servir  d'une  désignation  dès  que  quelqu'un  l'a  choisie  pour  enseigne  (ou 
marque  de  commerce)  ajouté.  "  Au  contraire,  s'il  s'agit  d'une  désignation 
"nécessaire,  c'est-à-dire,  de  la  désignation  qui  découle  forcément  de  la 
"  nature  du  produit  ou  de  l'établissement,  cJiacun  peut  s'en  servir  sans 
"  s'occuper  de  la  question  de  priorité." 

"  Jugé  que  la  désignation  :  Corsets  sans  couture,  est  une  désignation 
<k  nécessaire. 

"  7  Juillet  1854,  Cour  de  Nancy,  affaire  Verly  (Ann.  de  la  Propriété 
"  industrielle,  1855,  p.  105). 

"  Jugé  de  même  pour  les  "  Toiles  de  Ménage." 

(t  16  Juin  1857,  Cour  de  Colmar,  affaire  Riser  vs.  Bernhim.  (Ann.  de 
"  la  Propriété  Industrielle,  1858,  p.  216). 

"  Le  titre  de  tl  Journal  des  Fiancés"  est  une  désignation  nécessaire 

"  En  conséquence,  il  est  permis  à  un  autre  directeur  de  journal,  s'a- 
"  dressant  au  même  public,  de  prendre  pour  titre   "  Moniteur  des  Fiant 

"  13  Octobre  1859,  Tribunal  de  comm.  de  la  Seine,  affaire  Dubedat 
"  C.  Ory  Lecamp,  (Ann.  de  la  Prop.  Indust,  1859  p.  401). 

Voir  Huart,  même  ouvrage,  Nos.  33  à  37,  p.  104  à  105. 

Voici  maintenant  ce  que  dit  Rendu  : 

"  Comme  nous  l'avons  expliqué  dans  notre  Traité  de  droit  industriel,  il  y 
"  a  des  dénominations  nécessaires  ou  vulgaires,  qui  ne  sont  autre  chose  que 
"  le  nom  générique  de  toute  vue  classe  de  produits,  le  mot  par  lequel  tout  le  monde 
"  désigne,  ces  produits,  qui  ne  peuvent  devenir,  en  eux-mêmes,  la  propriété 
"  de  personne." 

Rendu,  des  marques  de  fabriques  p.  26,  No.  37.   Aussi,  No.  407,  p.  303. 

Bédarride  est  encore  plus  formel,  s'il  est  possible  : 

"  La  dénomination  sous  laquelle  une  chose  est  communément  et  gêné- 


Là 

"  ralement  connue,"  dit-il,  "lorsque  cette  chose  est  dans  le  domaine  public, 
"  ne  saurait  jamais  devenir  la  propriété  d'un  seul." 

Bédarride,  Brevets  d'invention,  vol.  3,  No.  824,  p.  33. 

Ailleurs  il  dit  : 

"  On  ne  saurait  admettre  que  la  dénonciation,  ne  désignant  que  le 
"genre,  puisse  jamais  devenir  une  marque  de  commerce  ou  de  fabrique, 
"  susceptible  de  propriété  exclusive." 

Et  plus  loin  :  "Nous  admettons,  sans  balancer,  que  la  dénomination 
"  donnée  à  un  produit  nouveau  ne  saurait  appartenir  exclusivement  à  celui 
"  qui  l'a  déposée,  lorsque  le  produit  ne  peut-être  désigné  sous  une  autre 
"  dénomination.  " 

Voir  No.  822  et  823,  p.  30  et  31.  Nous  citons  encore,  au  soutien  de  la 
même  proposition  : 

Blanc,  Contrefaçon,  p.  105. 

Gastombide,  Contrefaçon,  No.  480. 

Gouget  et  Merger,  Vo.  "  Nom,"  No.  20  et  213,  vol.  4,Vo.  :  Propriété 
Industrielle. 

Colmels,  des  noms  et  des  marques,  p.  124. 

Ce  que  nous  venons  de  citer  des  auteurs  français,  résume  à-peu-près 
l'opinion  unanime  de  tous  les  auteurs  qui  ont  écrit  sur  cette  matière  sous 
l'empire  du  Droit  Français. 

Voyons  maintenant  les  auteurs  anglais  :  Parmis  ces  auteurs,  le  plus 
récent  est,  croyons-nous,  Adams  Treatise  ou  Trade  Marks,  publié  à  Londres 
en  1874.  On  y  retrouve  absolument  la  même  doctrine  que  celle  des  auteurs 
français  touchant  la  proposition  ci-dessus  énoncée  : 

"  Where  a  man  invokes  the  right  which  a  manufacture  has  to  the  use 
"  of  a  trade-mark  as  the  exclusive  right  to  use  it  for  the  purpose  of  indicating 
"where,  or  by  whom,  or  atfwhat  manufactory  the  article  to  which  it  is 
"  applied,  was  made,  and  patents  a  process  for  the  extraction  or  manufacture 
"of  a  natural  produce,  although  his  process  is  protected  by  virtue  of  the 
"  patent,  lie  cannot  prevent  other  persons  from  selling  the  same  product  under 
"  the  same  name,  unless  lie  adopts  some  original  or  fanciful  appellation  in 
"  addition  as  a  trade  mark."  P.  67  et  68. 

"  A  man  cannot  take  ont  a  patent  for  a  natural  substance,  but  lie  may 
"  take  out  a  patent  for  arriving  at  that  natural  substance,  and  lie  may 
"  christen  it,  putting  aside  ail  other  people  liaving  called  it  by  that  name. 

Take  the  case  of  beet-root  sugar  : 

"  Suppose  a  man  gets  a  patent,  which  lie  might  well  do  for  extracting 
"  sugar  from  beet-root  and  says  :  I  will  call  it  beet-root  sugar,  and  lie  goes 
"  on  manufacturing  it,  say,  during  ten  years,  nobody  else  having  found  out 


14 

"  another  way  of  extracting  sugar  from  beet-root;  of  course,  therefore, 
"  during  that  ten  years,  he  would  be  the  only  person  who  extracted  sugar 
"  from  beet-root  and  in  that  sensé,  you  may  say  tliat  the  term  "beet-root 
"sugar"  bas  been  used  by  him  ;  and  when  the  terni  "beet-root  sugar" 
"  was  used,  it  would  be  known  that  it  was  the  sugar  of  the  patentée.  It 
"  does  not  become  a  trade  mark,  but  it  gets  fixed  to  his  sugar,  because 
"  nobody  else  could  make  it.  Then,  another  man  discovers  a  second  process 
"  by  which  he  extracts  sugar  from  beet-root,  not  wishing  to  patent  it,  he 
"  calls  it  "  beet-root  sugar  "  may  he  not  call  it  "beet-root  sugar"  because 
"  the  other  gentleman,  for  ten  years,  has  been  the  manufacturer  of  it  and 
"  sold  it  as  such? 

"  It  is  just  as  if  a  man  discovered  an  oil  from  walhuts,  and  called  it 
"  walnut's  oil.  If  another  man  discovers  another  way  of  extracting  oil  from 
"  walnuts,  just  as  in  tin  case  I  put  of  beet-root  sugar,  he  must  called  it 
"  walnut  oil.     There  is  no  other  name  by  which  he  can  call  it." 

Adam's  Trade  Marks,  p.  68  et  09. 

Remarquons  de  suite  qu'il  s'agit  de  droits  acquis  par  brevets  d'inven- 
tion, droits  beaucoup  plus  favorable  aux  yeux  des  cours  que  celui  acquis  par 
l'enregistrement  d'une  simple  marque  de  commerce.  N'y  a-t-il  pas  ici  parité 
de  raison  entre  les  deux  cas  cités  par  l'auteur  et  celui  des  Intimées?  Sans 
parler  à  présent  de  la  question  de  priorité,  laquelle,  nous  le  maintenons  ne 
peut  être  décidée  qu'en  faveur  des  sœurs,  n'est-il  pas  évident  que,  même 
en  supposant  la  priorité  d'usage  en  faveur  des  Appelants,  les  Intimées 
devaient  appeler  leur  sirop  :  "  Sirop  de  Gomme  d'Epinette."  De  même  que, 
dans  les  exemples  ci-dessus,  le  2e  inventeur  a  le  droit  d'appeler  son  sucre 
"sucre  de  betterave,"  son  huile,  "huile  de  noix"  ? 

L'auteur  va  plus  loin,  et  d'accord  en  cela  avec  les  autres  auteurs,  il  établit 
que  certains  noms  tels  que  "Wheler  &  Wilsons  sewing  machines" 
"  Liebigs  Extract  of  méat,"  etc.,  etc.,  bien  que  constituant  primitivement 
des  marques  de  commerce,  ont  été  déclarés  n'en  plus  être,  après  l'expiration 
du  monopole  de  fabrication,  et  sont  devenues  publia  juris. 

Adam's,  p.  GO  et  suiv. 

Huart,  p.  81  et  82. 

Je  continue  les  citations  : 

Voici  maintenant  ce  que  dit  Rowland  Cox,  l'autorité  américaine  par 
excellence  sur  la  matière  qui  nous  occupe. 

"A  name  which  is  used  to  designate  an  article  and  dénote  its  quality, 
"is  never  the  subject  of  a  trade  mark." 

P.  318. 

Cette  doctrine  des  auteurs,  tant  français  que  anglais  et  américains  est 


15 

confirmée  par  une  jurisprudence  constante  et  unanime  tant  en  France  qu'on 
Angleterre  et  aux  Etats-Unis. 

Elle  a  été  soutenue  le  28  Novembre  1863  à  la  Cour  Impériale  de  Paris, 
affaire  Cohen  vs.  Morel  ;  le  24  et  28  Juillet  1835,  affaire  Larenaudière  vs. 
Perrine  Guyot. 

Tribunal  de  Commerce  et  Cour  Royale  de  Paris;  Gazette  des  Tribunaux 
29  Juillet,  1835  :  7  Juillet  1855,  Cour  de  Nancy,  affaire  Vallée  ;  16  Juin 
1857,  Tribunal  Comm.  de  Colmar  Riau  vs.  Reinhim  ;  13  Octobre  1859,  Tri- 
bunal de  Comm.  de  la  Seine,  affaire  Dudebat  vs.  Ory-Lecamp. 

Dans  la  cause  de  Yong  vs.  Macrae,  rapportée  par  Adams,  p.  68  :  "  The 
"  Plaintiff  had  obtained  letters  patent  for  a  process  for  obtaining,  by  the 
"  distillation  of  bituminus  coals,  paraffine,  and  also  an  oil  containing 
"  paraffine,  and  fyled  a  bill  to  prevent  the  Défendants  from  selling,  under 
"the  name  of  Paraffine  Oil  or  American  Paraffine  Oil,  any  oil  similar  product 
"that  had  not  been  manufactured  by  the  Plaintiffs  or  their  licences.  In- 
" jonction  refusée!  on  the  ground  that  the  term  "  paroftine  oil"  was  notanew 
"  name,  invented  by  the  Plaintiff,  and  which  could  be  used  by  them  as  a 
"  trade  mark,  but  was  a  natural  tiïle,  which  must  inevitably  be  applied  to 
(l  the  same  article,  by  whatever  process  it  was  produced." 

E.  Jurist,  p.  332.  Adam's  Treatise  on  Trade  Marks,  p.  68. 

L'auteur  cite  aussi  :  Ingram  vs.  Stiff  5  Jurist  (N.  S.  )  941.  Clément 
vs.  Maddrick  5  Jurist  (N.  S.  )  592. 

Voici  maintenant  de  nombreuses  décisions  prononcées  par  presque 
toutes  les  cours  des  différents  Etats  de  l'Union  Américaine.  Il  est  impos- 
sible de  trouver  de  plus  grandes  analogies  qu'entre  les  cas  qui  y  sont 
rapportés  et  le  cas  qui  nous  occupe. 

Dans  la  cause  de  Perry  &  Davis  vs.  Kendall.  la  Cour  Supérieure  du 
Rhode-Island  se  prononce  comme  suit  : 

"  The  inventor  of  an  unpatented  medicine  has  no  exclusive  right  to 
tl  make  and  vend  the  same,  but  if  others  make  and  vend  it,  they  hâve  no 
"  right  to  vend  it  as  the  manufacture  of  the  inventor,  nor  to  adopt  his 
"  label  or  trade  mark,  nor  one  so  like  his,  as  to  lead  the  public  to  suppose 
"  the  article  to  which  it  is  affixed  the  manufacture  of  the  inventor. 

Rapportée  par  Rowland  Cox,  on  American  Trade  Mark  cases  p.  312. 

Dans  une  cause  de  Phalon  vs.  Wright,  cour  des  "  Common  Pleas"  de 
Philadelphie,  jugée  en  1864,  le  Juge  Thompson  s'exprime  ainsi  :  "  The 
"  adoption  of  a  trade  mark  or  devise  to  indicate  the  manufacture  of  a 
"  certain  article  does  not  give  any  right  to  the  exclusive  production  of  the 
"  article  so  marked.  Any  article  of  manufacture,  unless  it  be  protected  by 
"  a  patent,  may  be  made  and  sold  by  any  person." 


. 


-' 


lu 

Puis  il  ajoute  : 

"  A  word  wliicli  is  tJie  name  of  (lie  article  or  indicate  its  qualifies,  cannât  be 
"  so  appropriatîd  (as  a  trade  mark).  Every  one  lias  the  right  to  manufacture 
"  the  same  article,  and  to  call  it  by  its  name  or  descriptive  character." 

11  The  name  of  an  article  cannot  become  the  exclusive  propeiiy  of  the  maîcer, 
"  especially  if  that  article  is  a  known  substance  or  production. 

"  In  the  présent  case,  the  Plaintiffs  claim  to  hâve  invented  a  new 
"  perfume,  and  to  hâve  invented  a  new  name  for  it,  to  witt  :  "  Extract  of 
"  Night  Blooming  Cereus."  They  do  not  claim  any  exclusive  right  in  the 
"  perfume  itself.  They  hâve  thus  chosen  the  name  of  a  rare,  though  well 
"  known  flower,  and  claim,  in  the  name  alone,  an  exclusive  right  as  their 
"  trade  mark." 

"  They  admit  that  the  name  is  a  déception  as  far  as  it  is  used  to  indicate 
"  the  real  character  of  the  compound  ;  that  the  perfume  is  no  extract  from 
"  the  flower  and  that  the  trade  mark  is,  in  that  respect,  a  pure  invention. 
"  The  "Night  Blooming  Cereus"  however  exists,  a  flower  well  known  by 
"  that  name,  which,  when  first  introduced  to  the  public,  excited  much 
"  attention.  An  extract  may  be  made  from  that  flower  ;  any  perfwner  lias 
"  the  right  to  make  such  an  extract,  and  to  call  it  what  it  is,  by  the  name  of  the 
«  flower  "~ Cox,  p.  307  et  suiv. 

Dans  la  cause  de  Falkinbury  &  Lucy,  la  Cour  Suprême  de  Californie  a 
jugé  comme  suit,  en  1868  : 

lo  "The  Statute  does  not  rest  in  the  manufacturer  or  vendor,  as  the 
case  may  be,  an  exclusive  property  in  the  "articles"  manufactured  or 
sold,  nor  in  their  name,  or  the  words  which  must  apply  and  properly 
describe  them  ;  and  even,  if  such  were  the  proper  construction  of  the 
statute,  it  would  be  voidfor  toant  of  povoer  in  the  législation  to  enacf  //." 

2o  "  By  the  terms  "peculiar  name  "  letters,  marks,  devices,  figures, 
or  other  trade  marks,  or  name,  as  used  in  the  statute  concerning  trade 
marks,  is  not  meant  the  established  and  proper  names  by  which  the  "  articles" 
t<>  which  they  are  aftached,  are  named  and  by  u-Jtir/i  they  are  known  in  the 
marJcet,  nor  something  indicating  their  actual  kind,  character  or  quality, 
but  by  them  is  meant  as  the  subjects  of  protection  against  infringement, 
something  new,  not  before  in  use,  something  of  the  manufacturer' 8  <>tm  inven- 
tion, or  first  put  to  use  by  him,  something  peculiar  to  him,  and  not 
coinnion  to  him  and  others,  something  which  is  intrinsically  foreign  to 
the  "  articles"  themselves,  and  only  serves  to  designate  them,  because 
it  lias  hcenfancifuUy  put  to  that  use  in  disregard  of  ail  natural  relations." 
Le  juge  Landerson  ajoute  : 
^  The  Plaintiffs  claim  the  entire  label  as  their  trade  mark,  and  ask  t- 


i? 

"  be  protected  in  the  use  of  it  as  a  whole  ;  but  it  is  clear  that  the  commort 
"  law  give  no  consistence  to  such  a  claim.  Only  so  much  of  their  label  as 
"  serves  to  indicate  that  they  are  the  manufacturera  or  vendors  of  the 
"  washing  powder  can  be  considered  as  constituting  the  legitimate  charac- 
"  terisûcs  of  a  common  law  trade  mark,  p.  460. 

"  The  Plaintiffs  having  no  patent  for  the  manufacture  and  sale  of  the 
"  compound  in  question,  the  Défendants  hâve  an  equal  right  to  manufacture 
"  and  sell  it,  and  by  parity  of  reason  and  of  necessity,  an  equal  right  to  use 
"  its  proper  name  and  designate  its  qualities  by  any  apt  and  proper  words, 
"  notwithstanding  the  Plaintiffs  may  be  using  the  same." — Cox,  p.  465. 

Est-il  possible  de  trouver  un  cas  d' une  application  plus  parfaite  à  celui 
qui  nous  occupe,  et  est-il  possible  de  trouver  un  jugement  plus  conforme,  à 
la  fois,  à  la  saine  logique  et  au  bon  sens  ? 

Je  continue  ces  citations  déjà  longues,  pour  montrer  qu'il  y  a  unifor- 
mité de  jurisprudence  sur  cette  matière,  dans  tous  les  Etats  de  l'Union 
Américaine. 

Dans  la  cause  "  Town  vs.  Stilson,"  le  Juge  Barrett,  de  la  Cour  Supé- 
rieure de  New- York,  s'exprime  ainsi  : 

"No  manufacturer  can  acquire  a  spécial  property  in  an  ordinary  term  or 
"  expression,  the  use  of  which,  as  an  entirety,  is  essential  to  the  correct  and 
"  truthful  désignation  of  a  particular  article  or  compound." 

"  Hère,  each  party  lias  as  much  right  to  dessicate  codfish  as  lie  lias  to 
"  dry  or  préserve  fruits,  or  to  pickle  or  spice  oysters  and  salmon  ;  and  it  is 
"  a  conséquence  of  this  right,  that  lie  may  sell  the  article  thus  produced, 
"  under  the  désignation  which  is  strictly  appropriate  to  the  allowed  or 
"  modified  condition  of  the  principal  ingrédient." — Cox,  p.  515. 

Dans  la  cause  de  Bowley  vs.  Houghton,  C.  S.  de  Philadelphie  (1868), 
le  Juge  Ludlow  a  décidé  que  : 

"  To  entitle  the  owner  of  a  trade  mark  to  an  injunction  to  prevent  its 
"  use  by  another  person,  there  must  be,  in  the  copy,  such  a  gênerai 
"  ressemblance  of  the  forms,  words  and  symbols  in  the  original  as  to 
"  mislead  the  public." — Cox,  p.  486. 

Dans  la  cause  de  Benninger  vs.  Watts,  le  Juge  Brady,  de  New- York, 
a  décidé  que  : 

"  A  name  which  is  used  to  designate  an  article  and  dénote  its  quality  is  ne  ver 
"  the  subject  of  a  trade  mark." 

Et  plus  loin  il  dit  :  "  No  title  can  be  acquired  to  the  words  :  "  Old 
London  Dock  Gin."— Cox,  p.  318. 

La  même  doctrine  a  aussi  été  énoncée  dans  les  causes  suivantes  : 

Cornstock  vs.  White.— Cox,  p.  232. 


u 

Williams  vs.  Johnson. — Cox,  p.  214. 

Thompson  vs.  Winchester. — Cox,  p.  7. 

Il  faut  ajouter  à  toutes  ces  autorités  celle  du  Ministre  d'Agriculture  ; 
le  témoin  J.  C.  Taché,  qui  certes,  n'est  pas  de  la  moindre  importance  dans 
ce  débat  ;  sa  déposition  est  là  pour  le  prouver.  '  '  Le  nom  de  Sirop  de 
Gomme  d'Epinette,  dit-il,  est  le  nom  générique  du  produit,  et  on  ne  peut 
pas  le  désigner  autrement."  Il  conclut  de  là  que  ces  mots  ne  peuvent  être 
la  caractéristique  de  la  marque  de  commerce  des  Appelants,  non  plus  que 
celle  des  Intimées.  Les  Appelants  ont  voulu,  lors  de  l'argument  en  Cour 
Inférieure,  diminuer  la  valeur  de  ce  témoignage  et  nier  toute  autorité 
à  ce  témoin  qui,  depuis  douze  ans,  préside  à  l'enregistrement  des  marques 
de  commerce,  et  prononce  journellement  sur  le»  questions  et  les  difficultés 
qui  s'élèvent  au  sujet  de  ces  marques.  De  son  côté,  le  témoin  Graj  croit 
que  le  député  Ministre  d'Agriculture  ne  sait  pas  ce  que  c'est  qu'une  marque 
de  commerce  !  n'a  jamais  lu  l'acte  des  marques  de  commerce  !  Cepen- 
dant il  se  trouve  que  c'est  lui  qui  l'a  rédigé  !  Et  la  Cour,  en  confrontant  la 
déposition  du  député  ministre  et  l'acte  des  marques  de  commerce  de  1868, 
pourra  juger  si  ce  dernier  comprend  bien  son  acte  et  sait  l'interpréter. 

Tous  les  auteurs  et  les  juges  qui  se  sont  occupés  de  cette  question  ne  se 
sont  pas  arrêtés  à  la  proposition  énoncée  ci-dessus.  Tous  vont  jusqu'à  dire  que, 
un  nom  qui  était  originairement  une  marque  de  commerce,  peut  devenir 
subséquemment  publiai  juria  et  ne  plus  être  susceptible  d'une  propriété 
exclusive;  tels  sont  les  noms:  "  Harvey's  Sauce,"  "  Wheeler  &  Wilson 
Sewing  Machines,"  "  Liebig's  Extract  of  Méat." 

Dans  ce  cas,  ces  noms  indiquent  non  l'origine  du  produit,  mais  le 
svstème  ou  le  mode  de  fabrication. 

Adams  Treatise  of  Trade  Marks,  p.  61  et  suiv. 

Lloyd  Law  of  Trade  Marks,  p.  52  et  suiv. 

Huart,  Marques  de  Fabrique,  p.  81  et  82. 

Thompson  vs.  Winchester,  Cour  Supérieure  de  Massachusetts.  Cox,  p.  7. 

Les  Appelants  ont  aussi,  lors  de  l'argument  en  Cour  Inférieure,  cité 
àii  long  et  avec  de  nombreux  commentaires,  les  rapports  d'une  cause  de 
Dixon  et  ail.  vs.  Ougenheim,  si  nous  avons  bien  saisi  le  nom,  dans  laquelle  il 
aurait  été  décidé  que  un  autre  Dixon,  dont  le  nom  s'écrit  de  la  même  ma- 
nière que  celui  du  premier,  avec  les  mêmes  initiales,  avait  été  empêché  de 
vendre  un  produit  similaire  sous  son  nom,  vu  que  le  premier  Dixon  avait 
inclu  son  nom  dans  sa  marque  de  commerce.  La  Cour  voudra  bien  remarquer 
de  suite  qu'il  s'agit  ici  d'un  nom  propre  d'individu  et  non  pas  celui  d'une 
substance. 

De  plus,  le  rapport  de  la  cause,  en  autant  que  nous  avons  pu  en  juger 


19 

par  les  citations  des  Appelants,  dit  que  la  forme  des  paquets  et  l'apparence 
générale  étaient  la  même,  et  qu'  il  était  très-facile,  pour  toute  personne,  de 
se  tromper  et  de  prendre  l'une  pour  l'autre. 

Cette  question  des  homonimes  n'est  pas  nouvelle,  et  tous  les  auteurs 
en  disposent  de  façon  a  ne  pas  affecter  du  tout  la  position  des  Intimés  dans 
la  présente  cause.  •''  Il  y  a,  dit  Rendu  :  dans  les  droits  respectifs  des  deux 
•'  homonymes,  deux  principes  également  respectables  et  fort  difficiles  à 
"  concilier.  La  jurisprudence  a  d'abord  penché  en  faveur  du  droit  inhérent 
"  à  la  propriété  civile  du  nom  que  l'on  tient  de  la  naissance." 

"Mais,"  dit  M.  Blanc,  cité  par  Rendu,  "l'interdiction  absolue  doit 
"  être  prononcée  toutes  les  fois  qu'il  est  démontré  qu'ils  (les  2ee  homonymes) 
*■  ne  sont  entrés  dans  une  industrie  que  pour  profiter,  à  l'aide  de  cette 
"  similitude  dans  les  noms,  de  la  réputation  acquise  par  leur  homonyme. 
"  Vaincus  dans  leurs  louables  scrupules  par  les  tentatives  incessantes  de  la 
"fraude,  les  magistrats  ont  enfin  compris  qu'il  n'y  a  aucun  danger,  et 
"qu'il  y  a,  au  contraire,  toute  justice  à  contrarier  ces  vocations  indus- 
"  trielles  que  l' appas  d'un  gain  illégitime  à  seule  décidées." 

Blanc,  contrefaçon,  p.  713. 

Rendu,  Nos.  403  à  407,  p.  251  à  254. 

La  règle  générale,  reconnue  par  tous,  est  qu'il  suffit  que  le  Défendeur 
il  ait  rien  fait  pour  induire  le  public  à  croire  que  sa  préparation  fut  la  même  que 
celle  du  réclamant,  ou  qu  elle  fut  manufacturée  par  lui. 

"  The  first  principle  upon  which  the  courts  of  law  and  equity  hâve 
"  interfered  for  the  protection  of  trade  marks,  appear  to  be  that  one  mon 
"  shall  not  be  allowed  to  sell  his  goods  for  that  of  an  other," 

Adams,  p.  11,  Lloyd,  p.  52  et  53. 

Or,  est-il  possible  de  trouver,  dans  le  remède  des  Intimées,  ou  ses  bou- 
teilles ou  son  enveloppe,  quelque  chose  Calculé  pour  induire  le  public  à 
croire  que  ce  sirop  est  manufacturé  par  MM.  Gray  ou  Kerry  &  Watson  ? 
Evidemment  non  !  Sur  ce  point,  la  preuve  est  à-peu-près  unanime  en  faveur 
des  Intimées.  L' uniformité  des  réponses  des  témoins,  constatant  que  toute 
méprise  est  impossible,  a  fatigué  l'avocat  des  Appelants  au  point  de  provo- 
quer ses  réclamations.  Il  n'aurait  dû  n'accuser  que  les  Appelants  d'avoir 
contesté  un  fait  d'une  telle  évidence.  Maintenant,  il  est  également  évident, 
d'après  la  doctrine  des  auteurs,  la  logique  et  le  sens  commun,  que  les  noms 
seuls  qui  peuvent  entrer  comme  partie  essentielle  ou  caractéristique  d'une 
marque  de  commerce,  sont  : 

lo.  Le  nom  propre  du  fabriquant  ou  de  sa  société  commerciale. 

2o,  Le  nom  du  lieu  de  fabrication. 


20 

3o.  Un  nom  de  fantaisie  inventé  exprès  et  qui,  par  lui-même,  n'a 
aucun  rapport  naturel  avec  le  produit. 

Rendu,  p.  242  et  27,  No.  36. 

Adams,  p.  60,  et  suiv.  à  68. 

Et  môme,  les  noms  propres  et  les  noms  de  fantaisie  peuvent  n'avoir  que 
la  valeur  d'un  nom  générique,  ainei  que  nous  l'avons  vu  plus  haut. 

Voir  en  outre,  sur  cette  question.    Adama,  p.  69  et  suiv, 

Lloyd,  p.  52. 

Il  est  aussi  un  autre  point  que  les  Appelants  ont  semblé  avoir  perdu 
de  vue;  c'est  que,  en  supposant  que  le  nom  qu'ils  reclament  puisse  faire 
partie  d'une  marque  de  commerce,  il  faudrait,  dans  tous  les  cas,  envisager 
cette  marque  dans  son  ensemble,  non  chaque  partie  prise  séparément.  C'est 
l'opinion  des  auteurs:  "Pour  apprécier  la  nouveauté  d'une  marque,"  dit 
Rendu,  "  il  faut  l'envisager  dans  son  ensemble  et  non  dans  chacun  des 
"  éléments  qui  le  composent."     P.  17,  No  23. 

Les  Appelants  prétendent-ils  que  leur  marque  de  commerce  consiste 
dans  le  nom  :  "  Sirop  de  gomme  d'épinette  rouge?"  Une  partie  de  leur 
argumentation  tend  à  le  faire  croire.  En  effet,  ils  invoquent,  comme  leur 
titre,  le  certificat  du  député  ministre  d'agriculture  qui  se  lit  comme  suit  : 
"  This  is  to  certify  that  this  trade  mark  which  consist  of  the  word  :  "  Syrup 
"  of  red  spruce  gum  "  lias  been  registered  in  the  trade  mark  register  No  3 
«  fol.  348." 

(Signed)  J.  C.  Taché, 

Deputy  Minister  of  Agriculture. 

Voilà,  disent  les  Appelants,  notre  marque  de  commerce.  Ils  l'affirment 
dans  leur  déclaration  ;  ils  le  jurent  dans  leurs  dépositions.  Le  témoin 
Gray,  le  compositeur  du  sirop,  celui  qui  a  fait  enregistrer  l'application, 
le  jure  aussi.  Et  les  Appelants,  dans  leur  argumentation  en  Cour  Infé- 
rieure, l'ont  prétendu  dix  fois. 

Mais  alors,  puisque  le  certificat  seul  est  leur  titre,  puisque  le  nom  seul, 
rien  autre  chose,  constitue  leur  marque  de  commerce,  qu'ont-ils  donc  à  par- 
ler tant  de  la  couleur,  de  la  forme  carrée  de  nos  boîtes  ?  Tout  cela  n'a  donc 
rien  à  faire  avec  leur  marque  de  commerce.  Ils  ne  peuvent  parler  de  la 
couleur  bleue  et  de  la  forme  carrée  pour  établir  une  infraction  à  la  loi.  Car 
enfin,  il  leur  faut  bien  adopter  l'un  ou  l'autre  système.  Ils  ne  peuvent 
changer  leur  prétentions  et  la  caractéristique  de  leur  marque  de  commerce 
suivant  les  besoins  du  moment,  et  les  caprices  de  l'argumentation.  Us  ne 
peuvent  invoquer  la  contrefaçon  de  la  couleur  et  de  la  forme  de  la  boîte  comme 
caractéristique,  lorsque  nous  leur  prouvons  que  le  nom  ne  peut  constituer 


21 

une  caractéristique  ;  puis  une  heure  après,  prétendre  que  le  nom  seul  est 
leur  caractéristique,  lorsque  nous  leur  prouvons  que  ni  la  couleur,  ni  la 
forme  de  la  boîte,  n'établissent  une  similitude  quelconque,  et  lorsqu'ils  voient 
que  leur  certificat  marque  ce  nom  seul  comme  caractéristique.  Ils  ne  peuvent 
être  reçus  à  dire,  au  commencement  du  procès  :  "  Notre  marque  de  com- 
merce, ce  sont  les  mots  "  Sirop  de  Gommes  d'Epinette  Rouge  "  et  à  la  fin 
du  procès:  "  Notre  marque  de  commerce,  c'est  la  couleur  bleue,  c'est  la 
forme  carrée  de  nos  enveloppes." 

La  signification  qu'il  faut  attacher  à  ce  certificat  est  parfaitement  expli- 
quée par  le  député-ministre  d'agriculture.  Le  but  du  certificat,  c'est  de 
certifier  qu'une  marque  de  commerce  a  été  déposée.  Quelle  est  cette  mar- 
que?    C'est  le  dépôt  lui-même  ou  l'échantillon  qui  l'établit. 

A  notre  sens,  il  y  a  une  grande  analogie  entre  ce  mode  d'enregistre- 
ment des  marques  de  commerce  par  le  dépôt  de  la  marque  elle-même  et 
l'enregistrement  qui  se  pratique  dans  les  bureaux  d'enregistrement  par  le 
dépôt  des  titres.  La  Cour  sait  mieux  que  nous  combien  les  certificats  des 
régistrateurs  dénaturent  souvent  le  sens  et  la  portée  d'un  acte. 

Supposons,  par  exemple,  qu'un  testament  ait  été  enregistré  par  dépôt 
de  la  pièce,  et  que  le  régistrateur  certifie  avoir  enregistré  un  acte  de  dona- 
tion entre  vifs.  Ce  certificat  changera-t-il  la  nature  du  titre  ?  Et  celui  qui 
voudra  connaître  quel  est  ce  titre,  ou  l'invoquer  dans  un  litige,  devra-t-il  se 
borner  au  certificat  d' enregistrement  et  soutenir  que  la  pièce  en  question 
n'est  pas  un  testament,  mais  une  donation,  parce  que  le  régistrateur  l'ap- 
pelle ainsi  dans  son  certificat  ?  Il  serait  ridicule  de  le  prétendre.  Il  en  est 
de  même  dans  le  cas  actuel.  Peu  importe  ce  que  disent  soit  les  Appelants 
dans  leur  application,  soit  le  député-ministre  dans  son  certificat.  S'ils  y  ont 
dit  que  le  nom  de  "  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  Rouge  "  était  la  marque 
de  commerce,  ils  se  sont  trompés  ;  ils  ont  écrit  une  inexactitude,  voilà  tout. 
Impossible  d'arriver  à  une  autre  conclusion,  surtout  après  avoir  lu  les  auto- 
rités ci-dessus  citées. 

Youlons-nous  connaître  en  quoi  consiste  la  marque  de  commerce  des 
Demandeurs?  Recourons  au  titre,  c'est-à-dire,  l'échantillon  ou  dépôt,  la 
marque  de  commerce  elle-même.  L'on  verra,  par  la  lecture  de  l'applica- 
tion, que  l'auteur  des  Appelants,  Gray  lui-même,  n'a  pas  prétendu  donner 
le  nom  seul  comme  caractéristique,  son  application  accompagnant  l'échan- 
tillon disant  :  "Thesaid  trade-mark  consists  of  the  words  :  SyrupofRed 
■  '  Spruce  Gum,  as  printed  and  arranged  on  the  accompanying  rapper." 
Alors,  nous  conclurons,  avec  tous  les  auteurs  cités  ci-dessus,  avec  tous  les 
juges  anglais,  français  et  américains  dont  nous  avons  rapporté  les  nombreuses 
décisions,  avec  le  statut  de  1868  et  le  député-ministre  d'agriculture  :  que  le 


22 

nom  de  "  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  Rouge,"  ne  pouvant  constituer  la 
caractéristique  de  la  marque  de  commerce  des  Appelants,  ce  qui  con- 
stitue la  caractéristique  de  cette  marque  de  commerce,  tel  qu'il  apparaît  à 
l'échantillon,  c'  est  l'ensemble,  tel  que  décrit  par  le  témoin  Taché,  député- 
ministre  d'agriculture  :  "Une  partie  moyenne  enfermée  dans  un  parai 16- 
"  logramme,  avec  lenom  du  produit  ;  en  tête,  la  figure  d'un  Sauvage,  et  au 
"  bas,  le  nom  du  producteur  et  l'arrangement  général  "  ;  tandis  que  celle  des 
Défenderesses,  c'est  :  "  Une  Vierge  assise  sur  un  trône  avec  deux  Saints 
"  agenouillés  à  ses  pieds  ;  en  demi-cercle  au-dessus,  l'exergue  latine  :  Gha- 
"  ritas  Ghristi  urget  nos  ;  aux  pieds,  les  lettres  majuscules  :  A.  P.  M.  ;  le  tout 
"  entouré  d'une  couronne  de  fleurs  de  lys." 

Impossible  donc  de  trouver  ici,  ni  contrefaçon,  ni  imitation,  ni  simili- 
tude quelconque. 

Il  est  à  remarquer  que  ni  dans  le  certificat,  ni  dans  l'application  de 
Gray,  ni  dans  la  description  de  la  marque  de  commerce  des  Appelants,  faite 
par  le  député  ministre  d' Agriculture,  il  n'est  question  ni  de  la  couleur  bleue 
ni  de  la  forme  des  boîtes  dont  on  a  fait  tant  de  bruit, 


3ème  Question. 

Qui,  des  Appelants  ou  des  Intimées,  à  la  priorité  à"  usage  de  la  gomme  d'épi?iettt, 
pour  en  fabriquer  un  sirop  du  nom  de  u  Sirop  de  Gomme  d Epinette" 

Jusqu'à  présent,  nous  avons  discuté  les  prétentions  des  Appelants 
comme  si  ils  eussent  eu  la  priorité  d'usage  du  Sirop  de  Gomme  d'Epinette, 
et  l'on  a  vu  ce  que  valent  leurs  prétentions,  même  en  leur  donnant  le 
bénéfice  de  la  priorité. 

Qu'en  sera-t-il,  lorsque  nous  aurons  établi  que,  bien  loin  que  les  Appe- 
lants aient  la  priorité,  ce  sont,  au  contraire,  les  Intimées  qui  ont,  sur  les 
Appelants,  une  priorité  d'usage  bien  établie,  certaine,  indubitable,  indiscu- 
table, d' au  moins  seize  ans  ! 

Gray,  l'auteur  des  Appelants  et  le  compositeur  de  leur  sirop,  affirme 
en  avoir  composé  la  recette  en  1859.  et  avoir  origine  son  sirop  à  cette 
époque  là. 

C'est  nécessairement  à  une  date  postérieure  qu'il  a  choisie  son  effigie 
de  sauvage  et  l'arrangement  de  son  étiquette. 

Or,  il  est  prouvé  au  delà  de  tout  doute,  que  dès  1843,  la  marque  de 
commerce  des  Intimées  existait;    elle  est  gravée  sur   un  sceau  de  leur 


23 

communauté  qui  a  été  fait  en  1813,  qui  en  porte  le  millésime  et  qui  est 
produit  en  la  présente  cause. 

En  outre,  la  Révérende  Sœur  Caron,  Supérieure  actuelle  des  Intimées, 
affirme  que,  dès  1843,  les  Intimées  ont  reçu  des  sœurs  de  l'Hôtel-Dieu  la 
recette  de  leur  sirop;  que  dès  cette  année  1843,  elles  en  ont  fabriqué 
plusieurs  gallons,  au  moins  dix  gallons  ;  que,  depuis  ce  temps  et  régulière- 
ment tous  les  ans,  elles  en  ont  toujours  fait  plusieurs  fois  l'année  ;  que  la 
quantité  fabriquée  a  toujours  augmentée  d'année  en  année  ;  que  toujours, 
depuis  1843,  ce  sirop  a  été  en  usage  continu,  dans  leur  maison;  qu'elles 
l'ont  toujours  administré  à  leurs  malades  ;  qu'elles  en  ont  donné  une  grande 
quantité  aux  bienfaiteurs  de  leur  maison  et  vendu  a  beaucoup  de  personnes 
de  l' extérieur  ;  qu'elles  le  donnaient  en  retour  de  dons  a  elles  faits,  etc.  ;  et 
que  ce  sirop  a  toujours  porté  le  nom  qu'il  porte  aujourd'hui  et  a  toujours  été, 
depuis  1843,  fabriqué  d'après  la  même  recette  que  celle  suivie  aujourd'hui. 

Il  est  aussi  prouvé  par  les  sœurs  "  Ste.  Joséphine  "  et  "  L'Ange  Gar- 
dien "  que  depuis  douze  à  quinze  ans  (La  première  de  ces  dames  à  la  direc- 
tion de  la  pharmacie  depuis  treize  ans),  le  sirop  a  été  fabriqué  régulièrement, 
employé  continuellement  dans  leur  maison,  vendu  et  donné  régulièrement 
et  continuellement  dans  le  public;  qu'elles  en  ont  toujours,  depuis  ce  temps, 
confectionnée  régulièrement  des  quantités  augmentant  d'années  en  années, 
depuis  50  gallons  par  années  qu'elles  ont  fabriqué  en  1863,  jusqu'à  250  à 
300  gallons  qu'elles  ont  fabriqué  ces  années  dernières.  Gray  indique  l'année 
1864  comme  celle  ou  il  a  commencé  à  donner  une  publicité  considérable  aux 
annonces  de  la  vente  de  son  sirop.  Remarquons  qu'à  cette  époque  les  Inti- 
mées fabriquaient  de  50  à  60  gallons  par  années,  lequel  sirop  était  tout 
employé  dans  le  public  et  dans  leurs  institutions. 

Pour  constater  si  la  recette  suivie  par  elle  était  bien  celle  reçue  de 
l'Hôtel-Dieu  en  1840,  les  dites  sœurs  sont  allées  demander  à  l'Hôtel-Dieu 
quelle  recette  on  avait  donné  à  leur  maison  en  1843.  Toutes  deux  jurent 
qu'elles  n'ont  pas  fait  connaître  aux  dites  sœurs  de  l'Hôtel-Dieu,  la  recette 
suivie  par  elles.  Les  sœurs  de  l' Hôtel-Dieu  leur  ont  donné  par  écrit  la 
recette  demandée,  et  elles  affirment  positivement  qu'elle  est  en  tout  point 
la  même  que  celle  qu'elles  suivent  aujourd'hui  et  qu'elles  ont  toujours  suivi 
depuis  douze  à  quinze  ans,  et  que  le  nom  écrit  en  tête  de  la  recette  est  le 
même.  Ces  deux  témoignages  confirment  donc,  en  tout  point,  celui  de  la 
Rév.  Sœur  Caron,  et  établit,  avec  ce  dernier,  que  le  sirop  des  Intimées  est 
fabriqué  sans  interruption,  sans  altération  aucune  dans  la  recette,  en  grande 
quantité  régulièrement,  mis  journellement  en  usage,  dans  leur  maison  et 
dans  le  public  depuis  1843,  et  vendu  dans  le  public  depuis  cette  date.  En 
faut-il  davantage  pour  prouver  la  priorité  d'usage  ? 


Les  Intimées  ont  cependant  prouvé  encore  davantage.  Trois  des  méde- 
cins les  plus  en  renom  dans  la  Cité  de  Montréal,  qui  tous  trois  y  pratiquent 
depuis  trente-deux  à  trente-cinq  ans,  qui  y  ont  toujours  eu  de  nombreuses 
clientèles,  qui  depuis  25  à  27  ans,  sont  professeurs  de  médecine,  témoignent 
qu'ils  connaissent  le  sirop  des  Intimées. 

Deux  d'entre  eux,  lesDrs.  Pelletier  et  Trudel,  disent  qu'ils  l'ont  pres- 
crit à  leurs  patients  très-souvent  depuis  vingt  à  vingt-cinq  ans,  qu'ils  sont 
bien  positifs  que,  il  y  a  au-delà  de  vingt  ans,  ils  le  prescrivaient  souvent  ; 
que  ce  Sirop  était  bien  connu  dans  toute  la  population  canadienne-française 
de  la  cité  de  Montréal.  Le  troisième,  le  Dr.  Coderre,  dit  qu'il  ne  l'a  pas 
prescrit,  parce  qu'il  ne  prescrivait  aucun  sirop  ainsi  offert  en  vente  ;  mais  il 
affirme  qu'il  y  a  au-delà  de  vingt-ans,  ce  Sirop  était  bien  connu  et  très- 
estimé,  qu'il  en  voyait  souvent  chez  ses  pratiques,  et  que  c'était  alors  un 
sirop  lapidaire.  Le  Dr.  Pelletier  ajoute  même  que  lorsque  Gray  offrit  son 
Sirop  au  public,  beaucoup  de  personnes  disaient,  dans  le  public,  que  c'était 
une  contrefaçon  du  Sirop  des  Intimées.  Esl-il  possible  de  prouver,  d'une 
manière  plus  formelle  et  plus  satisfaisante,  la  priorité  d'usage  des  Intimées? 

Mais,  disent  les  Appelants,  les  Intimées  n'en  déposaient  pas  alors  chez 
les  Pharmaciens. 

La  plupart  du  temps  elles  le  donnaient  ;  il  n'y  avait  guère  que  les  pau- 
vres à  qui  il  était  prescrit  ;  les  riches  ne  l'achetaient  pas,  on  ne  le  trouvait 
pas  alors  aux  pharmacies  ;  c'  est  Gray  qui  a  le  premier  offert  le  sien  en  vente 
dans  les  pharmacies,  et  il  l'a  annoncé  dans  tous  les  journaux.  La  plupart 
des  pharmaciens  parlant  l'anglais  ne  le  connaissaient  pas;  sept  à  huit  de 
ces  messieurs  qu'il  a  fait  entendre,  déclarent  n'en  avoir  entendu  parler  que 
en  1875. 

Eh  bien  !  qu'  est-ce  que  cela  prouve  ? 

La  loi  parle-t-elle  de  priorité  de  mise  en  vente  chez  les  pharmaciens  ? 
de  priorité  de  mise  en  vente  dans  le  commerce  ?  Nullement.  La  loi,  tous  les 
auteurs,  donnent  la  priorité  de  la  marque  de  commerce  à  celui  qui  a, priorité 
d'usage.  Que  cet  usage  soit  fait  par  les  pauvres,  qu'importe  !  Est-ce  que 
la  loi  exige  qu'il  y  ait  priorité  d'usage  chez  les  riches,  et  de  médicaments 
achetés  aux  pharmacies  ?  Il  suffit  d'énoncer  une  telle  proposition  pour  en 
faire  voir  tout  le  ridicule.  Il  semble  que  la  consommation  de  10  à  50,  100, 
150,  200,  250  gallons  par  année  de  ce  sirop,  lequel  ne  s'administre  que  par 
petites  cuillerées,  doit  constituer  un  usage,  quelle  que  soit  d'ailleurs  la  pro- 
portion donnée  et  la  proportion  vendue,  le  lieu  ou  il  est  donné  ou  acheté  et 
l'état  de  fortune  de  ceux  à  qui  il  a  été  administré  ! 

Mais  disent  encore  les  Appelants  :  tous  ces  pharmaciens  anglais  qui  ne 
le  connaissaient  pas  ! 


25 

Eli  ?  bien  !  Tous  ces  médecins  canadiens-français  qui  le  prescrivaient  ! 
Car  outre  les  médecins  déjà  nommés,  le  Dr.  Gauthier,  pharmacien,  le 
connaît  depuis  quinze  à  vingt  ans;  le  Dr.  Mount  le  prescrit  depuis  huit  ou 
dix  ans.  Cinq  autres  médecins  présents  eussent  prouvé  la  même  chose,  si  la 
Cour  n'eut  déclaré  inutile  cette  surabondance  de  preuve.  Tous  s'accordent 
à  dire  que  "  ë était  un  remède  populaire"  C'est-à-dire  d'un  usage  général, 
parfaitement  connu  et  apprécié. 

La  preuve  que  certains  pharmaciens  ne  le  connaissaient  pas,  est  une 
preuve  négative.  Elle  constate  d'ailleurs  un  état  de  chose  singulier,  mais 
qui  n'en  existe  pas  moins.  C'est  que,  dans  Montréal,  il  y  a  deux  populations 
de  nationalités  et  de  langues  différentes  qui,  bien  que  vivant  ensemble  en 
bons  termes,  ne  se  mêlent  pas,  ne  se  connaissent  presque  pas  et  qui  forme 
deux  sociétés,  deux  mondes  tellement  étrangers  l'un  à  l'autre  qu'une  chose 
peut-être  très-connue,  très  populaire  même  dans  l'un  de  ces  deux  mondes  et 
tellement  inconnue  dans  l'autre. 

Est-ce  là  dire  que  l'une  de  ces  sociétés  a  le  droit  de  prétendre  que  ce 
qu'elle  ne  connaît  pas  n'existe  pas  ?  que  ces  pharmaciens  appelés  ici  par  les 
Appelants,  ont  droit  de  dire  qu'un  remède  n'existait  pas,  n'était  pas  dans  le 
commerce,  n'était  pas  en  usage  parceque  eux  ne  le  connaissaient  pas? 
Sur  cette  question  de  priorité  d'usage,  je  cite  Lloyd,  p.  56. 
Huart,  p.  13  et  23. 

Les  Appelants  ont,  lors  de  l'argument  devant  la  Cour  Inférieure,  dé- 
couvert un  moyen  ingénieux  de  se  débarrasser  de  cette  priorité  d'usage  si 
bien  établie  par  les  Intimées.  Après  avoir  cité  le  cas,  rapporté  des  Cours 
Anglaises,  d'une  personne  qui,  après  avoir  fait  usage  privément,  dans  sa 
famille,  d'un  médicament,  n'avait  pu  réussir  à  faire  admettre  cet  usage 
comme  pêrwritê  d'usage  établissant  un  droit  exclusif  à  F  encontre  d'une  autre 
partie  qui  avait  fait  usage  du  même  remède  dans  le  public,  ils  disent  :  Les 
Intimées,  qui  ont  de  nombreuses  maisons  de  charité  en  cette  ville  et  dans 
toute  la  province,  qui  assistent  tant  de  pauvres,  ont  une  bien  grande  famille. 
Tout  ces  pauvres  et  ces  malades  sont  membres  de  leur  famille.  D' un  autre 
côté,  tous  les  médecins  entendus  comme  témoin  sont  ou  ont  été  médecins  du 
dispensaire  de  la  Providence  ;  par  conséquent,  eux  aussi  sont  de  la  famille 
des  Intimées;  par  conséquent,  ils  n'ont  fait  usage  de  leur  sirop  qu'en 
famille  ;    les  médecins  ne  l'ont  prescrit  qu'en  famille  ! 

Admirable  raisonnement  en  vérité  !  Ils  savent  très-bien  que,  à  ce  titre, 
près  de  cent  médecins  seraient  ainsi  de  la  famille  des  Intimées.  En  effet, 
tous  les  professeurs  de  l'Ecole  de  médecine  et  de  chirurgie  de  Montréal 
sont,  de  droit,  visiteurs  des  hôpitaux  et  de  maisons  de  charité,  qui  reçoivent 
des  malades,  et  bon  nombre  de  médecins  qui  s'y  succèdent  sont  médecins 


26 

du  Dispensaire.  D'après  ce  système,  supposons  que  le  Souverain  de  la 
Grande-Bretagne  aient  composé  un  remède  et  réclame  la  priorité  d'usage, 
en  raison  d'un  usage  général  dans  tout  l'Empire,  comme  le  Souverain  est 
en  quelque  sorte  le  père  de  son  peuple,  il  faudrait  dire  qu'il  n'a  pas  la  prio- 
rité d'usage  !   Il  n'en  a  fait  l'emploi  qu'en  famille  ! 

Cette  priorité  d'usage  étant  surabondamment  prouvée  en  faveur  des 
Intimées,  les  Appelants  se  trouvent  dans  ce  dilemme  : 

Ou  le  nom  de  "  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  "  est  la  caractéristique  de 
leur  marque  de  commerce  ou  il  ne  l'est  pas  ;  s'il  ne  l'est  pas,  leurs  préten- 
tions tombent  d'elles  mêmes  ;  s'il  l'est,  les  Intimées  ont  un  égal  droit  de 
le  considérer  comme  caractérisque  de  leur  marque  de  commerce.  Or,  d'après 
l'acte  des  marques  de  commerce  de  1868,  si  la  partie  qui  fait  application 
postérieurement  à  une  autre  pour  l'enregistrement  d'une  marque  de  com- 
merce, prouve  la  priorité  d'usage,  la  marque  de  commerce  du  premier  doit 
être  cancellée  et  celle  du  nouveau  venue  enregistrée  et  maintenue  comme 
un  droit  exclusif.  En  conséquence,  les  Intimées  ont  le  droit  de  demander 
la  cancellation  de  la  marque  de  commerce  des  Appelants,  et  le  droit  exclusif 
de  se  servir  de  la  leur  ! 

Et  comme  la  cour  est  appelée  ici  à  réformer  l'acte  administratif  par 
lequel  le  Député  Ministre  d'Agriculture  a  admises  deux  marques  à  l'enre- 
gistrement, et  à  rendre  la  décision  qu'il  aurait  dû  rendre.  La  Cour  devrait 
canceller  la  marque  de  commerce  des  Appelants  et  déclarer  que  les  Intimées 
ont  seules  le  droit  de  vendre  le  sirop  sous  le  nom  de  "  Sirop  de  Gomme 
d'Epinette." 

C'est  la  seule  conclusion  logique  que  la  Cour  puisse  tirer  des  prétentions 
et  des  propositions  légales  énoncées  par  les  Appelants. 


4e  Question  : 

Y  A-T-IL  EU  IMITATION  OU  TENTATIVE  U  IMITATION  DE  LA 
FORME  DE  LA  COULEUR  DE  L'ENVELOPPE? 

Avec  la  preuve  faite  dans  la  cause,  nous  étions  loin  de  nous  attendre 
que  la  poursuite  soulèverait,  au  sujet  de  cette  prétention  l' imitation  de  leur 
sirop,  une  question  de  bonne  foi  et  qu'elle  oserait  répéter  que  les  Intimées, 
agissant  de  mauvaise  foi,  ont  essayé  d'imiter  la  couleur  de  l'enveloppe  et  la 
forme  que  prend  la  bouteille  des  Appelants  une  fois  enveloppée. 

Un  simple  coup  d'oeil  jeté  sur  les  deux  paquets  peut  de  suite  convaim t.- 


27 

le  tribunal  qu'il  n'y  a  pas  même  l'ombre  de  plausibilité  clans  cette  préten- 
tion. 

Or,  sur  quelle  preuve  s'appuient-ils  pour  soulever  cette  question  de 
mauvaise  foi  ?  Les  Appelants  avaient  allégué  que  la  forme  carrée  de  la 
la  boîte  avait  été  choisie  pour  donner  au  produit  des  Intimées  une  certaine 
ressemblance  (très  éloignée  !  il  est  bien  obligé  de  l'avouer),  avec  celui  des 
Appelants.  Or,  voici  que  leur  propre  témoin,  Gellyman,  le  manufacturier 
des  boîtes,  vient  nous  dire  que  les  Intimées  lui  ont  d'abord  demandé  une  boîte 
ronde  ayant  la  forme  de  leur  bouteille,  et  que  c'est  lui  qui  les  a  dissuadées 
de  ce  choix,  leur  représentant  qu'une  telle  boîte  coûterait  plus  cher, 
paraîtrait  moins  bien,  ne  protégerait  pas  aussi  bien  les  bouteilles  et  serait 
très-difficile  à  emballer.  Avec  ce  témoignage,  le  savant  avocat  des  Appe- 
lants a  eu  le  courage  d'appeler  le  choix  de  la  boîte  carrée,  par  les  sœurs, 
"  an  évident  attempt  topush  their  syrup  and  defraud  the  Plaintiff!  Malgré  les 
excellentes  raisons  que  le  témoin  Gellyman  avait  lui-même  fait  valoir,  dit-il, 
les  Intimées  ne  renoncent  pas  encore  à  la  boîte  ronde  !  Alors  Gellyman  leur 
fait  deux  échantillons  ;  et  ce  n'est  qu'après  les  avoir  vus,  que  les  Défen- 
deresses adoptent  la  boîte  carrée.  Nous  voilà  bien  loin  d'un  projet  d'imi- 
tation frauduleuse  et  même  déloyale  ! 

Reste  donc  la  couleur  bleue. 

Les  deux  Sœurs  Ste.  Joséphine  et  L'Ange-Gardien  jurent  qu'elles  n'ont 
employé  qu'à-peu-près  une  rame  du  papier  qui  est  de  la  même  nuance  que  les 
enveloppes  des  Appelants,  et  que  pour  toutes  leurs  autres  boîtes,  elles  ont 
employé  cet  autre  bleu  terne,  lequel  diffère  autant  du  bleu  employé  par  les 
Appelants  que  ce  dernier  diffère  du  vert  ou  du  violet. 

Vient  maintenant  le  témoin  Devins,  le  seul  témoignage  au  moyen 
duquel  on  a  cherché  à  jeter  quelque  doute  sur  la  bonne  foi  des  Sœurs. 

Le  témoin  Devins  affirme  que,  avant  que  les  Intimées  eussent  fait  le 
choix  du  papier,  elles  l'ont  consulté  sur  la  couleur,  et  qu'il  leur  a  dit  que  le 
choix  de  la  couleur  bleue  serait  un  empiétement  sur  les  droits  de  M.  Gray 
ou  des  Appelants,  et  que  les  Sœurs  parurent  bien  indifférentes  et  ne  pas 
s'occuper  de  cet  empiétement.  Supposé  qu'il  en  fut  ainsi,  dira-t-on,  il  n'y 
aurait  pas  grand  mal,  vu  qu'  il  n'y  avait  pas  là  d'empiétement.  M.  Gray 
n'avait  pas  plus  le  monopole  de  la  couleur  bleue  que  celui  du  nom  de  la 
Gomme  d'Epinette.  Mais  il  y  a  plus,  cette  affirmation  de  Devins  est  con- 
traire à  la  vérité-  Les  deux  Sœurs  Ste.  Joséphine  et  L'Ange-Gardien,  à 
qui  il  dit  avoir  fait  cette  remarque,  jurent  positivement  qu'il  ne  la  leur  a 
jamais  faite,  et  qu'il  ne  leur  est  pas  alors  entré  dans  l'idée  que  le  choix  de 
la  couleur  bleue  eut  quelque  chose  à  faire  avec  les  Appelants  ou  Gray.  Le 
témoin   Bolton,   associé  de  Devins,   vient,  en  contre-preuve,  au  secours  de 


28 

son  .associé.  Que  dit-il  ?  qu'il  se  rappelle  qu'il  a  été  question  de  la  couleur, 
Comme  étant  celle  employée  par  les  Appelants,  mais  que,  sur  cette  objec- 
tion, les  Sœurs  ont  répondu  qu'il  était  trop  tard,  qu'il  était  impossible  de 
changer  la  couleur,  vu  que  les  boîtes  étaient  faites  et  couvertes  de  papier 
bleu  !  Cela  contredit  formellement  Devins,  qui  prétend  leur  avoir  parlé 
avant  le  choix  du  papier.  Et  que  vaut  ce  témoignage  de  Devins  ?  Nous  y 
avons  déjà  fait  allusion,  au  sujet  de  l'habile  substitution  d'un  sirop  à  l'autre 
par  Devins.  Maintenant,  que  dit-il  ?  Dans  son  examen-en-chef,  il  nous 
donne  à  entendre  qu'il  a  refusé  de  continuer  l'agence  des  Sœurs,  parce  qu'il 
croyait  qu'elles  n'agissaient  pas  loyalement  vis-à-vis  de  Kerry  Watson,  en 
choisissant  la  couleur  bleue.  Quant  au  nom,  il  dit  les  avoir  averti  de  la 
similitude,  et  que  c'est  alors  que  les  Sœurs  ont  ajouté  le  mot  :  Composé  ! 
C'est  en  1875  que,  suivant  lui,  elles  ajoutaient  ainsi  le  mot  Composé  à  leur 
nom,  et,  chose  remarquable,  elles  ont  produit,  dans  la  cause,  des  étiquettes, 
l'exhibit  P,  imprimé  en  1870,  et  qui  porte  le  mot  Composé!  !  !  Mais  il  se 
contredit  sans  s'en  apercevoir,  lorsqu'il  dit  que  c'est  dès  le  commencement 
des  préparatifs  qu'il  a  conseillé  de  ne  pas  prendre  la  couleur  bleue,  et  qu'il 
a  cependant  accepté  l'agence,  l'a  gardé  plus  d' un  mois  aprôsle  choix  de  la 
couleur  bleue,  et,  pédant  ce  temps,  a  substitué  frauduleusement  le  Sirop  des 
Intimées  à  celui  des  Appelants,  lorsque  les  acheteurs  lui  demandaient  ce 
dernier!  !  !  Et  c'est  cet  homme-là  qui,  après  avoir  ainsi  mis  en  pratique 
de  telles  substitutions  frauduleuses  au  détriment  des  Appelants,  de  son 
propre  aveu,  sans  le  consentement  et  hors  de  la  connaissance  des  Intimées,  se 
trouve  tout-à-coup  pris  de  scrupule,  et  refuse  de  continuer  l'agence,  parce 
que,  un  mois  auparavant,  elles  avaient  choisi  la  couleur  bleue,  et  qu'ainsi 
elles  n'agissaient  pas  légalement  vis-à-vis  les  Appelants  !  Mais  il  y  a  plus! 
En  transquestion,  il  oublie  que  c'est  sous  le  coup  de  ce  louable  scrupule  qu'il 
a  abandonné  l'agence,  et  admet  qu'il  l'a  abandonné  sous  le  coup  d'une 
menace  de  poursuite  en  dommages  de  MM.  Kerry  &  Watson  !  !  !  On  croit 
peut-être  que  la  lettre  d'avocat  lui  a  bien  vite  ouvert  les  yeux  sur  l' mjustict 
des  Intimées,  et  qu'il  s'est  empressé  de  remettre  l'agence.  Mais  non  !  Il 
demande  aux  Sœurs  une  lettre  lui  garantissant  qu'il  serait  tenu  indemne 
de  tous  frais  et  dommage.  Avec  une  telle  lettre,  il  continuera  !  Mais  vu 
que  la  lettre  n'arrive  pas,  il  remet  l'agence!  Dit-il  la  vérité  quand  il 
affirme  que  c'est  le  fait  que  les  Sœurs  empiétaient  sur  les  droits  des  Appe- 
lants qui  l'a  fait  remettre  l'agence  !  Evidemment  non  !  Il  est  évident  que 
pour  M.  Devins,  la  crainte  seule  du  procès  a  été  le  commenct  <<>< ni  d,  lu  sagesse! 
Les  Appelants  ont  fait  allusion  au  mode  employé  par  le  témoin  Devins 
pour  pousser  le  Sirop  des  Sœurs,  afin  de  démontrer  quel  détriment  il  pou- 
vait en   résulter  pour  eux.     Après  avoir  rappelé  les  habiles  substitutions 


29 

dont  M.  Devins  s'est  donné  le  crédit,  se  rappelant  sans  doute  cette  autre 
affirmation  de  Devins,  que  cela  était  fait  tous  les  jours  dans  les  affaires,  ils 
disaient,  en  Cour  Inférieure,  que  c'est  la  manière  de  pousser  une  marchandise 
dans  le  commerce  ! 

Un  autre  témoin,  M.  Henry  Lyman,  témoin  des  Intimées,  a  indiqué  une 
toute  autre  manière  de  pousser  une  marchandise  :  "  On  met"  dit-il  "  des 
échantillons  de  la  marchandise  entre  les  mains  de  nos  agents  et  commis- 
voyageurs,  et  ces  agents  l'offrent  en  vente  et  en  font  connaître  les  qualités 
dans  toutes  les  provinces  de  confédération." 

La  Cour  préférera  cette  définition  ;  et  nous  n'avons  pas  de  doute  que  les 
deux  procédés  étant  soumis  au  commerce  respectable  de  Montréal,  celui  du 
témoin  Lyman  ne  soit  le  seul  admis. 

Il  est  donc  évident  que,  en  autant  qu'il  s'agit  des  premiers  moyens 
d'action  des  Appelants,  le  jugement  de  la  Cour  Inférieure,  rejetant  ces 
moyens  d'action,  est  bien  fondé  et  doit  être  confirmé,  et  que  les  considérants 
qui  suivent  : 

"  Considering  that  the  Défendant  hâve  not  violated  the  trade  mark 
"  alleged  property  of  the  Plaintiffs  ;  that  the  Plaintif!' s  allégations,  charging 
11  them  with  having  done  it,  are  not  proved  ;  hut  disproved  ;" 

"  Considering  further  that  the  words  "  Sirup  of  Red  Spruce  Gum  " 
"  cannot  and  could  not  properly  constitute  a  trade  mark,  involving,  as  they 
"  do,  only  the  name  of  a  substence,  and  not  designating  particular  origin 
"  or  ownership  ;  " 

tl  Considering  that  Gray  ne  ver  had,  nor  hâve  Plaintiffs,  right  to  the 
"  monopoly  of  those  words  ;  " 

Son  tstrictement,  et,  en  tout  point,  conformes  à  la  loi,  à  la  jurisprudence, 
tant  anglaise  que  française  et  américaine,  ainsi  qu'au  bon  sens  et  à  la  saine 
logique. 


30 


2me  PARTIE 


LES    INTIMÉES    ONT-ELLES    OUTREPASSÉ    LEURS  DROITS  ET 
FORFAIT  À  LEUR  CHARTE? 

Passons  maintenant  au  deuxième  chef  de  la  plainte  des  Appelants 

En  supposant,  disent  ces  derniers,  que  vous  n'auriez  pas  contrefait  notre 
marque  de  commerce  ni  enfreint  les  droits  qui  en  découlent  en  notre 
faveur,  vous  n'avez  été  incorporées  que  pour  prendre  sojn  des  malades  et 
des  vieillards  pauvres  et  infirmes  et  vous  n'avez  pas  le  droit,  d'après  votre 
charte,  d'exercer  une  industrie  et  de  manufacturer  votre  sirop  pour  le 
commerce. 

Jusqu'à  présent,  les  Appelants  ont  combattu  dans  leur  intérêt  privé, 
prétendant  que  nous  avions  porté  atteinte  à  leurs  droits  privés  ;  voici  main- 
tenant qu'ils  assument  une  autre  position  et  font  valoir  des  raisons  de  droit 
public,  dans  un  but  d'intérêt  public.  "La  Corporation  des  Sœurs  de  la 
Providence,"  disent-ils,  "n'a  pas  droit  de  manufacturer  et  vendre  ce 
sirop  ;  "  et  ils  demandent  un  bref,  leur  prohibant  de  le  fabriquer  et  de 
l'offrir  en  vente.  S'ils  eussent  réussi  dans  cette  prétention,  quel  bénéfice  en 
eut-il  résulté  pour  eux  ?  Aucun  évidemment.  Les  sœurs  n'auraient  eu  qu'à 
donner  ou  vendre  leur  recette  au  premier  pharmacien  venu,  et  ce  dernier 
aurait  continué  à  fabriquer  et  vendre  le  même  sirop,  à  son  bénéfice  particu- 
lier. Les  Appelants  n'auraient  donc  réussi  qu'à  faire  passer  dans  la  caisse 
d'un  spéculateur,  tout  le  bénéfice  de  cette  vente,  et  d'en  priver  par  là  les 
malades,  les  pauvres,  les  infirmes  et  les  orphelins.  L'on  voit  de  suite 
jusqu'à  quel  point  ils  servent  ici  l'intérêt  public.  La  compétition  resterait 
la  même,  sinon  plus  forte  ;   ils  ne  retireraient  aucun  bénéfice  de  leur  succès. 

Il  n'y  a  donc  qu'un  motif  d'intérêt  publie  qui  les  autoriserait  à  invo- 
quer cette  prétendue  violation  de  la  Charte  des  Défenderesses. 

Ici  se  soulevèrent  deux  questions  : 

lo.  Les  Défenderesses  ont-elles  violé  leur  charte  et  outrepassé  leur 
pouvoirs,  en  fabriquant  et  vendant  le  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  ? 

2o.  Supposé  qu'elles  aient  ainsi  outrepassé  leurs  pouvoirs,  les  Deman- 
deurs sont-ils  recevables  à  s'en  plaindre,  dans  une  action  ainsi  intentée  à 
leur  nom,  sans  aucune  intervention  ni  autorisation  du  procureur  général. 

Le  vif  intérêt  qui  s'attachait  à  la  solution  de  cette  importante  question 


31 

au  point  de  vue  religieux,  philosophique,  humanitaire  et  d'économie  sociale, 
a  cessé,  ou  à-peu-près,  par  la  passation  du  Statut  de  la  Province  de  Québec, 
40  Vict.,  chap.  60.    (Statut  de  1876,  p.  268,  voir  Appendice  No.  3.) 

Par  ce  Statut,  les  Intimées  ont  reçu,  en  autant  qu'elles  pouvaient  en 
avoir  besoin,  de  la  Législature  provinciale,  les  pouvoirs  les  plus  amples  et 
l'autorisation  la  plus  complète  de  continuer  à  exercer  leurs  différentes  in- 
dustries, de  fabriquer  toutes  espèces  de  médicaments,  par  conséquent  le 
"Sirop  de  Gomme  d'Epinette  composé,"  de  les  vendre  dans  le  public,  et 
les  employer  dans  leurs  différents  établissements.  Il  ne  peut  donc  plus  être 
question  de  l'ordre  ou  de  la  défence  à  être  émanée  contre  les  Intimées,  leur 
faisant  défence  de  continuer  à  fabriquer  le  sirop  en  question  et  de  l'offrir 
en  vente  et  de  le  vendre  au  public. 

Il  ne  s'agit  plus  évidemment  que  d'une  simple  question  de  frais.  C'est 
pourquoi  nous  traiterons  aussi  brièvement  que  possible  les  deux  questions 
posées  ci-de«sus. 

A  LA  PREMIÈRE  QUESTION, 

Nous  répondons  d'abord  que  les  Défenderesses  n'ont  pas  violé  leur 
charte  ni  outrepassé  leurs  pouvoirs. 

Par  le  Statut  4  et  5  Vict.,  chap.  67,  la  Législature  du  Canada  a  incor- 
poré les  Défenderes  comme  institution  de  charité,  mais  leur  existence  était 
déjà  reconnue  par  le  droit  public  du  pays.  En  effet,  par  le  traité  de  Paris  et 
la  capitulation  de  Montréal,  toutes  nos  communautés  religieuses  reconnues 
par  l'Eglise  et  fondées  régulièrement  en  conformité  aux  règles  canoniques, 
ont  une  existence  légale  de  droit  public  et  de  droit  commun.  L'Etat,  en 
reconnaissant  l'existence  légale  à  cette  institution,  ne  l'a  pas  dotée.  L'orme 
voit  pas  non  plus  qu'aucune  personne  ait  pourvu  à  la  dotation  de  cette  ins- 
titution. Le  pouvoir  civil  a  donc  incorporé  une  institution  dénuée  de  tout 
moyen  pécuniaire  tout  en  approuvant  et  autorisant  son  but  à  l'accomplisse- 
ment de  sa  mission. 

Or,  il  est  évident  que,  puisque  V Etat  a  reconnu  et  approuvé  V  existence  de 
V 'institution,  sans  exiger  une  fondation  suffisante  pour  lui  donner  les  moyens  de  rem- 
plir son  but,  et  sans  la  doter  lui-même,  il  a  consenti  à  ce  que  cette  institution 
fît  usage  de  tous  les  moyens  légitimes  de  droit  naturel  et  de  droit  commun, 
à  sa  disposition,  pour  acquérir  les  moyens  de  remplir  ce  but.  Autrement, 
il  vaudrait  autant  dire  que  l'Etat,  en  approuvant  une  institution  et  lui  assi- 
gnant un  but,  lui  dénie  en  même  temps  le  droit  d'exister  et  de  remplir  le 
but  de  son  existence. 

Le  §  25  de  l'acte  d'interprétation  de  nos  Statuts  (31  Vict.  Chap.  I)  dit  • 
'•'•  Le  pouvoir  de  faire  une  chose  comporte  le  pouvoir  nécessaire  pour  la  faire," 


32 

Or,  il  est  constaté  que  cette  institution  ne  pouvait  exister  et,  de  fait,  n'a 
existé  et  rempli  son  but  qu'au  moyen  des  petites  industries  qu'elle  a  prati- 
quées depuis  sa  fondation. 

Dès  qu'une  corporation  a  acquis  l'existence,  c'est  un  être  moral  qui  a 
les  mêmes  droits  que  tous  les  autres  êtres,  c'est-à-dire,  de  faire  tout  ce  qui 
n'est  pas  défendu,  soit  par  le  droit  naturel,  soit  par  le  droit  public,  soit  par 
le  droit  privé,  à  moins  que  la  Législature  n'ait  mis  quelque  restriction  à  ces 
droits.  Car  si  la  Législature,  dans  l'acte  d'incorporation  a  dit  :  Nous  ne 
reconnaissons  votre  existence  qu'à  la  condition  que  vous  n'exerciez  pas  tel 
ou  tel  droit,  par  exemple  que  vous  n'  exerciez  pas  tel  ou  tel  négoce,  la  légis- 
lature n'a  alors  reconnu  l'existence  que  d'une  corporation  privée  du  droit 
d'exercer  ce  négoce. 

Autrement,  si  l'on  était  en  droit,  par  exemple,  d'empêcher  une  corpo- 
ration de  faire  tout  acte,  d'exercer  tout  droit  de  droit  commun  qui  n'est 
pas  spécifié  dans  sa  charte,  nulle  corporation  ne  saurait  exister.  Et  même, 
l'existence  des  communautés  religieuses  régulièrement  constituées  d'après 
le  droit  cononique  et  sous  l'autorité  de  l'Eglise  étant  reconnues  par  la  capi- 
tulation de  Montréal  et  le  traité  de  Paris,  lesquels  sont  la  base  du  droit 
public  en  ce  pays,  elles  existent  de  plein  droit  indépendamment  de  leur 
acte  d'incorporation. 

D'ailleurs,  là  où  il  n'y  a  pas  de  restrictions  formelles,  la  loi  ne  les  sup- 
pose pas.  Ces  restrictions  de  pouvoir,  tendant  à  priver  une  personne  naturelle 
ou  un  être  moral  de  la  faculté  d'user  de  tous  les  droits  et  pouvoirs  de  faire  ce 
que  tout  le  monde  a  droit  de  faire,  ce  qui,  par  conséquent,  est  de  droit  com- 
mun, sont  de  droit  irritant  et  ne  se  présument  pas.  C'est  là,  croyons-nous, 
un  principe  de  droit  public  que  la  Cour  admettra,  D'un  autre  côté,  les 
principes  qui  régissent  les  corporations  en  Angleterre  ne  s'appliquent  nulle- 
ment à  nos  corporations  religieuses,  dont  le  droit  à  l'existence,  existe  en 
vertu  d' un  ordre  de  chose  essentiellement  différent  de  celui  qui  a  été  con- 
sacré par  le  droit  public  Anglais,  depuis  trois  siècles,  ordre  de  chose, 
reconnu  et  conservé  en  ce  pays  par  les  traités,  tel  que  dit  ci-dessus.  On  aurait 
donc  tort  de  vouloir  appliquer  ici  les  principes  et  les  notions,  en  matières  de 
corporations,  que  nous  trouvons  énoncés  dans  les  auteurs  qui  ont  traité  la 
question  des  corporations  en  Angleterre  et  aux  Etats-Unis. 

Les  Appelants  ont,  en  Cour  Inférieure,  mentionnée  les  institutions  de 
banques  dont  les  pouvoirs  sont  restreints  à  faire  le  commerce  de  banques  ; 
ils  ont  aussi  cité  quelques  jugements  affectant  des  compagnies  de  chemins  de 
fer. 

Nous  maintenons  que  ces  jugements  ne  s'appliquent  pas  au  cas  actuel. 

D'abord,  les  pouvoirs  de  toutes  ces  compagnies  sont  restreints  par  leur 


33 

acte  d'incorporation.  Il  leur  y  est  spécialement  fait  défense  d'exercer  une 
autre  industrie,  de  faire  un  négoce  autre  que  celui  pour  lequel  elles  ont 
ete  créées. 

D'un  autre  coté,  il  y  a  un  motif  évident  d'intérêt  public  qu'il  en  soit 
ainsi.  Les  banques  accaparent  presque  tous  les  capitaux.  S'il  était  permis 
aux  banques  d'exercer  toutes  sortes  de  négoces  et  d'industries,  elles  absor- 
beraient nécessairement  presque  tout  le  commerce  et  en  auraient  le  monopole 
exclusif,  vu  qu'elles  ont  les  capitaux  et  qu'elles  pourraient  les  refuser  aux 
autres  commerçants. 

Une  compagnie  de  chemins  de  fer,  disent  les  Appelants,  a  reçu  défense 
de  faire  le  commerce  de  charbon.  Cela  est  parfait.  Sa  charte  lui  était  ce 
droit  et  avec  raison.  Imaginons  donc  une  compagnie  de  chemins  de  fer 
faisant  le  commerce  de  charbon,  surtout  celles  possédant  les  voies  conduisant 
aux  mines  de  charbon.  Elles  n'auraient  qu'à  refuser  de  transporter  du 
charbon  pour  d'autres  commerçants  ou  de  ne  le  transporter  qu'à  des  taux 
exorbitants,  et  elles  se  trouveraient  à  exercer  le  monopole  exclusif  de  ce 
commerce.  Bien  plus,  le  consommateur  se  trouverait  à  la  disposition  de  ces 
compagnies  qui  vendraient  à  des  prix  exorbitants,  nul  ne  pouvant  leur  faire 
compétition.  Non-seulement  ces  raisons  n'existent  pas  pour  les  institutions  de 
charité,  mais  encore  les  institutions  de  charité  n'  exercent  certaines  indus- 
tries que  dans  l'intérêt  public  et  pour  le  bien  de  la  société. 

L'état  est  nécessairement  supposé  n'avoir  pas  ôté  à  ces  institutions  le 
droit  de  travailler  pour  lui  et  pour  son  bénéfice.  Et  c'est  un  grand  principe 
que  nous  retrouvons  consacré  dans  tous  nos  statuts  dans  toute  notre  législation 
tant  ancienne  que  contemporaine, que  lorsqu'une  restriction  est  imposée  à  l'ex- 
ercice d'un  droit  ou  d'un  privilège,  cette  restriction  cesse  dès  que  le  droit  ou 
privilège  doit  être  exercé  au  bénéfice  de  l'Etat  ou  de  la  Couronne.  Or,  si  les 
prétentions  des  Appelants  étaient  admises,  il  faudrait  de  suite  fermer  toutes 
nos  maisons  de  charité,  et  jeter  sur  le  pavé  les  milliers  et  milliers  de  pau- 
vres, malades,  infirmes  et  d'orphelins  qu'  elles  soutiennent  de  leurs  indus- 
tries. Car,  remarquons  le  bien,  si  le  principe  était  admis  que  les  Intimées 
n'ont  pas  le  droit  de  fabriquer,  ni  vendre  ce  sirop,  il  ne  faut  pas  s'imaginer 
que  la  prohibition  serait  limitée  à  la  confection  et  à  la  vente  du  Sirop  de 
Gomme  d' Epinette.  Les  Sœurs  de  la  Providence,  pour  subvenir  aux  im- 
menses besoins  de  leurs  institutions,  et  pour  loger,  nourrir,  habiller, 
soigner  et  instruire  les  milliers  de  pauvres,  malades,  infirmes  et  orphelins, 
qu'  elles  ont  à  leur  charge,  exercent  une  multitude  de  petites  industries. 
Et  c'est  au  moyen  de  ces  industries  qu'elles  réussissent  à  opérer  ces  prodiges 
de  charité  qui  nous  étonnent,  car  tout  le  monde  sait  qu'elles  n'ont  aucun 
revenu. 


u 

Elles  ne  font  pas  seulement  du  sirop,  elles  font  des  ongants,  des  léni- 
inents,  des  emplâtres  ;  elles  préparent  des  pansements  de  toutes  sortes  ; 
elles  font  des  ornements  d'Eglise,  des  hosties,  des  cierges,  des  fleurs,  toutes 
espèces  d'ouvrages  en  cire,  des  tricots,  du  blanchissage,  du  repassage,  elles 
raccommodent  le  linge  pour  les  familles  ;  elles  font  de  la  couture,  des  habits 
de  toutes  sortes,  des  chaussures  ;  elles  impriment,  enseignent,  montent  des 
cartes  géographiques;  elles  font  de  l'élevage,  du  beurre,  du  fromage,  de 
l'agriculture,  de  l'horticulture  et  une  infinité  d'antres  choses.  Et  ces  indus- 
tries, elles  les  exercent  au  moyen  de  veilles  laborieuses  et  d'un  temps 
précieux  dérobé  aux  soins  des  malades  et  des  orphelins.  C'est  après  des 
nuits  passées  au  chevet  des  malades  qu'elles  trouvent  moyen  de  se  livrer  à 
ces  labeurs  fatiguants,  pour  gagner  quelques  deniers,  le  pain  de  ces  chers 
infirmes,  de  ces  pauvres  orphelins  qu'elles  ont  recueillis.  Et  ce  qui  précède 
on  peut  le  dire  également  de  la  plupart  de  nos  autres  maisons  de  charité  ! 

Les  Appelants  croient-ils  qu'il  n'y  aura  que  les  pharmaciens  qui 
auront  droit  de  crier  contre  la  concurrence  ? 

Serait-ce  parce  qu'ils  occupent  un  rang  élevé  dans  le  commerce,  ou 
qu'ils  exploitent  leur  sirop  sur  une  grande  échelle  qu'ils  auraient  eu  droit  à 
un  bref  de  prohibition  ?  Non,  évidemment.  S'ils  avaient  eu  ce  droit,  les  plus 
modestes  industriels  l'auraient  également  ;  la  blanchisseuse,  la  couturière, 
le  cordonnier,  la  garde-malade,  le  tailleur,  l'instituteur  viendraient  tour-à- 
tour  réclamer  la  prohibition  pour  protéger  leurs  industries  respectives.  Et 
encore  une  fois,  que  deviendraient  ces  milliers  de  déshérités  de  la  nature  et 
de  la  fortune,  ces  êtres  infortunés  au  profit  de  qui  nos  bonnes  sœurs  consa- 
crent leurs  veilles  et  leurs  labeurs  ? 

Il  faudrait  fermer  la  maison  de  réforme  ou  Hospice  St.  Vincent  de 
Paul,  qui  exerce  toutes  sortes  d'industries,  de  métiers  et  de  commerce,  tout 
en  ayant  un  contrat  avec  le  gouvernement.  Il  ne  lui  serait  plus  permis 
d'apprendre  à  ses  élèves,  les  métiers,  l'industrie  et  le  commerce. 

Je  vais  plus  loin  ;  s'il  faut  interpréter  la  charte  des  Intimées  comme  le 
font  les  Appelants,  c'est-à-dire,  s'il  faut  leur  interdire  tous  les  actes  de  droit 
naturel,  de  droit  commun  qui  n'y  sont  pas  mentionnés,  que  pourront-elles 
faire  ? 

Il  y  est  dit  qu'elles  pourront  recevoir  les  aumônes,  mais  il  n'y  est  pas 
dit  qu'elles  auront  le  droit  de  les  demander  !  Il  leur  est  permis  d'acheter  les 
immeubles  nécessaires  à  leurs  œuvres;  et  les  meubles  et  tous  les  objets  né- 
cessaires à  leur  vie  ?  Pas  un  mot  de  cela!  Encore  une  fois,  s'il  est  vrai 
qu'un  institut  de  sœurs  de  charité  est  un  être  corporatif  qui  ne  peut  exercer 
que  les  droits  qui  sont  nommément  énumérés  dans  sa  charte,  il  est  évident 
qu'il  ne  peut  vivre.     Par  exemple,  l'Asile  de  la  Providence  n'aurait  pas  le 


35 

droit  de  faire  circuler  sa  voiture  dans  nos  rues.  La  police  aurait  le  droit 
d'arrêter  les  sœurs  lorsqu'elles  font  des  bazards,  lorsqu'elles  passent  dans 
les  rues  pour  solliciter  des  secours  pour  leur  maison.  L'on  voit  de  suite 
quelles  conséquences  absurdes  l'on  déduit  du  principe  invoqué  par  les  Ap- 
pelants. D'un  autre  côté,  à  quel  titre  les  Appelants  peuvent-ils  se  prétendre 
lésés  de  ce  que  les  Intimées  fabriquaient  et  vendaient  illégalement  des 
médicaments  ?  Ont-ils  un  privilège  exclusif!  non  !  Le  droit  de  fabriquer  et 
vendre  des  remèdes  n'appartient,  en  ce  pays,  à  aucune  classe  privilégiée. 
C'est  un  droit  qui  appartient  à  tous.  Il  aurait  pu  en  être  autrement  si  nous 
étions  encore  sous  le  régime  des  anciennes  corporations  qui  tenaient  de 
l'Etat  le  privilège  exclusif  d'exercer  un  négoce  quelconque  ou  une  indus- 
trie. Le  possesseur  d' un  privilège  exclusif  pourrait  revendiquer  un  droit 
d' action  contre  tous  ceux  qui  enfreindraient  son  privilège  en  fabriquant  ou 
vendant  ce  que  lui  seul  a  le  droit  de  fabriquer  ou  de  vendre.  Les  Appelants 
n'invoquent  aucun  privilège  semblable,  ils  n'en  ont  aucun. 

Les  Appelants  ont  surtout  insisté  sur  le  point  que  les  Intimées  sont 
exemptes  de  certaines  taxes  municipales.  Comment  !  disent-ils,  on  per- 
mettra à  ces  communautés  de  venir  nous  faire  une  concurrence  déloyale  ! 
une  concurrence  que  nous  ne  pouvons  supporter,  vu  que  les  Soeurs  ne  sont 
pas  astreintes  aux  énormes  taxes  que  nous  payons  !  ! 

Nous  sommes  très-reconnaissants  envers  les  Appelants  d'avoir  soulevé 
cette  question  des  taxes.  Elle  nous  a  donné  l'occasion  de  faire,  dans  la 
cause,  une  preuve  de  faits  plus  concluants  que  tout  ce  que  l' on  pourrait  dire 
sur  cette  question  d'intérêt  public. 

"Nous  venons,  dit  la  poursuite,  au  nom  des  industriels  et  des  com- 
merçants qui  payent  des  taxes,  combattre  des  concurrents  qui  profitent  du 
fait  qu'ils  ne  payent  pas  de  taxes  pour  nous  faire  compétition  et  accaparer 
une  partie  des  profits  auxquels  nous  avons  droit.  Des  concurrents  qui 
vivent  à  nos  dépens  pour  nous  ruiner.  Cet  intérêt,  c'est  celui  de  tout  le 
commerce,  de  l'industrie  en  général  ;   c'est  par  conséquent  l'intérêt  public." 

Eli  bien  !  nous  acceptons  la  lutte  sur  ce  terrain. 

Vous,  Appelants,  vous  avez  prouvé  avoir  payé  au-delà  de  $900.00  de 
taxes  l'an  dernier. 

Or,  outre  les  taxes  de  V  aqueduc,  que  les  Intimées  payent  comme  vous, 
voici  ce  qu'elles  ont  fourni  au  trésor  public  durant  l'année  qui  vient  de 
s'écouler.  Si  ce  ne  sont  pas  des  taxes  payées  en  argent  au  comptoir  de  la 
Corporation,  ce  sont  des  misères  qu'elles  ont  soulagées,  des  obligations 
essentielles  qu'elles  ont  remplies  et  payées  à  l'acquit  de  l'état  et  de  la 
municipalité,  en  déchargeant  d'autant  ces  derniers,  et  leur  sauvant  des 
milliers  de  piastres.     Nous  prenons  les  chiffres  qui  sont  prouvés  dans  la 


36     • 

cause  concernant  les  œuvres  faites  par  les  Intimées,   durant  une  année 
seulement  ;  nous  ne  parlons  que  des  œuvres  purement  gratuites  : 

lo.  Elles  ont  fait  la  classe  à  3,257  enfants  pauvres  en  dehors  de  ceux 
qu'elles  logent.  En  estimant  à  $10.00  par  année,  la  valeur  de  l'enseigne- 
ment donné  à  chaque  enfant,  ce  qui  est  assurément  une  estimation  très- 
modeste,  nous  avons  la  somme  de  trente-deux  mille  cinq  cent  soixante-dix 
piastes  ($32,570.00). 

2o.  Elles  ont  logé,  nourri,  soigné,  vêtu,  instruit  553  orphelins.  Or, 
d'après  les  calculs  les  plus  économiques,  il  est  impossible  que  le  logement, 
l'habillement,  l'éducation  et  l'instruction  d'un  enfant,  avec  fourniture  des 
lives,  objets  de  classe,  papier,  etc.,  et  les  mille  choses  et  soins  que  requièrent 
les  enfants,  vaillent  moins  de  $100.00  par  année,  soit  cinquante-cinq  mille 
trois  cents  piastres  ($55,300.00). 

3o.  Elles  ont  donné,  durant  l'année,  trente  mille  trois  cent  quatre- 
vingt-cinq  repas  gratuits  aux  pauvres  du  dehors.  Ces  repas,  estimés  à  20 
centins  chacun,  forment  la  somme  de  six  mille  soixante-et-dix-sept  piastres 
courant  ($6,077.00). 

4o.  Elles  ont  fait  faire,  par  les  médecins  de  leur  dispensaire,  neuf  cent 
vingt-sept  visites  gratuites,  lesquelles,  à  une  piastre  chaque,  forme  neuf 
cent  vingt-sept  piastres  (927.00). 

5o.  Elles  ont  nourri,  logé,  vêtu,  soigné  et  pansé  deux  cent  treize  vieil- 
lards, infirmes  et  malades.  L'on  sait  quels  soins,  quelles  fatigues  et  quel 
dévouement  requièrent  ces  vieilles  personnes  ;  une  somme  de  cent  piastres 
est  certainement  fort  au-dessous  de  la  valeur  réelle  de  ces  soins.  A  ce  prix, 
nous  avons  celle  de  vingt  et  un  mille  trois  cents  piastres  (21,300.00). 

6o.  Elles  ont  rempli  gratuitement,  à  leur  dispensaire,  vingt-cinq  mille 
cinq  cent  quarante-sept  prescriptions  données  par  les  médecins  de  cette  ville, 
et  que  les  porteurs  étaient  trop  pauvres  pour  aller  acheter  aux  pharmacies. 
Ces  prescriptions  coûtent  rarement  moins  de  vingt-cinq  centins.  Très-sou- 
vent, elles  valent  au-delà  d'une  piastre.  Quels  que  soient  les  prix  des 
médicaments,  elles  sont  toujours  remplies  gratuitement.  Estimons-les  seule- 
ment à  $0.25  chacune,  ce  qui  est  le  wii/inuim  de  leur  valeur,  et  nous  avons  la 
somme  de  six  mille  trois  cent  quatre-vingt-six  piastres  ($6,386.00). 

Est-ce  là  la  compétition  que  redoutent  tant  les  Appelants  ?  Fermez  la 
Providence  :  qui  remplira  gratuitement  ces  vingt-cinq  mille  cinq  cents 
prescriptions  ?     Les  Appelants  sont-ils  prêts  à  en  assumer  leur  part  ? 

Continuons  : 

7o.  A  part  les  aliénés  de  l'Asile  St.  Jean  de  Dieu,  pour  lesquels  le 
gouvernement  paye,  les  Défenderesses  logent,  vêtissent,  nourrissent  et 
gardent  gratuitement  vingt-deux  aliénés,  ce  qui,  au  prix  de  cent  piastre* 


37 

par  tête,  prix  très-modéré,  surtout  en  raison  de  la  petite  quantité,  forme  la 
somme  de  deux  mille  deux  cents  piastres  ($2,200.00). 

80.  Elles  logent,  nourrissent,  vêtissent  et  instruisent  cent  soixante  et 
seize  sourdes-muettes.  Sur  ce  nombre,  il  n'y  en  a  pas  trois  qui  payent 
toutes  leurs  dépenses,  et  dix  à  peine  payent  quelque  chose.  Il  faut  visiter 
l'Asile  des  Sourdes-Muettes  pour  apprécier  à  sa  juste  valeur  l'œuvre  de 
dévouement,  les  prodiges  incroyables  d'abnégation  et  de  sacrifices  au  prix 
desquels  nos  Sœurs  réussissent  à  développer  l'intelligence  de  ces  pauvres 
infortunés,  à  les  mettre  en  état  de  communiquer  avec  leurs  semblables,  et 
surtout  connaître,  aimer  et  servir  leur  Créateur.  La  pension,  l'entretien 
et  l'éducation  de  chaque  sourd-muet  coûte  à  l'Etat,  dans  quelques  pays, 
au-dessus  de  $300.00.  A  cent  piastres  seulement  par  tête,  nous  avons  la 
somme  de  dix-sept  mille  six  cents  piastres  (17,000.00). 

Cette  institution  des  sourdes-muettes,  dont  les  dépenses  annuelles  dépas- 
sent $30,000,  ne  reçoit  que  quelques  milliers  de  piastres  du  gouvernement 
local,  à-peu-près  quatre  mille  piastres. 

9o.  Elles  ont  reçu,  nourri  et  soigné,  à  leur  hôpital,  quatre  cent  dix- 
huit  malades.  Or,  on  sait  ce  que  valent  les  soins  donnés,  durant  toute  une 
maladie,  quelque  longue  et  quelque  grave  qu'elle  soit,  en  comprenant 
l'usage  des  lits,  le  blanchissage,  la  nourriture  et  le  prix  des  médicaments. 
Ces  soins,  estimés  à  une  moyenne  de  $20.00  pour  chaque  malade,  donnent 
huit  mille  trois  cent  soixante  piastres  ($8,360.00). 

lOo.  Elles  ont  donné  leurs  soins  aux  malades  pauvres  de  l'extérieur 
durant  trois  mille  nuits.  Ces  veilles,  estimées  à  cinquante  centins  chacune, 
forment  la  somme  de  quinze  cents  piastres  (1500.00).  Nous  disons  cinquante 
centins  chacune,  non  pas  que  nous  voulions  estimer  à  cette  bagatelle,  les 
soins  si  dévoués,  si  intelligents  de  ces  bonnes  sœurs,  soins  qui,  la  plupart 
du  temps  ont  autant  de  valeur  que  ceux  de  nos  meilleurs  médecins,  vu  les 
grandes  connaissances  et  l'expérience  qu'ont  ces  dames,  dans  l'art  de  la 
médecine.  Mais  nous  savons  que  non-contentes  de  se  dévouer  aux  soins  des 
pauvres,  et,  en  outre  des  trois  mille  veilles  que  nous  venons  de  mentionner, 
elles  vont  assister  les  familles  à  l'aise  lorsqu'il  y  a  des  maladies  graves  à 
soigner.  Or  nous  savons  aussi  que  quand  on  leur  demande  quel  est  le  prix 
de  leur  dévouement  et  de  leurs  admirables  soins,  elles  répondent  constam- 
ment que  leurs  soins  sont  gratuits,  et  que,  bien  souvent  elles  reçoivent  à 
peine  une  rénumération  de  $0.50  par  veilles.  Trop  heureuses  encore  de 
pouvoir,  au  prix  d'une  nuit  de  fatigues  et  d'anxiété,  gagner  cette  modeste 
somme  pour  le  soutien  de  leurs  œuvres. 

Ho.  Elles  ont  fait,  en  outre,  dans  l'année,  quarante  deux  mille  huit 
cents  cinquante  cinq  visites  aux  malades  indigents  de  l'extérieur.     Il  faut 


38 

avoir  vu  les  sœurs  de  la  Providence,  dans  ces  visites  pour  en  apprécier  la 
valeur!  Nous  n' entendons  donc  pas  les  apprécier  en  les  évaluant  à  vingt 
cinq  centins  chacune,  ce  qui  forme  la  somme  de  dix  mille  sept  cents  treize 
piastres  (10,713.00).  Nous  ne  comptons  pas,  en  sus  de  ces  visites,  la  valeur 
des  aumônes  que  les  sœurs  apportent  chez  les  pauvres  qui  en  sont  l'objet, 
La  visite  n'est  que  l'occasion  d'oeuvres  encore  plus  précieuses,  et  dont  nous 
n'avons  pu  avoir,  a  l'enquête,  même  une  estimation  approximative.  Ces 
bonnes  sœurs  arrivent  dans  la  maison  d'un  pauvre  malade  :  elles  le  trouvent 
dans  le  dénuement  le  plus  complet  :  pas  de  pain,  pas  de  viande,  ni  rien  de 
ce  qui  est  nécessaire  pour  le  soulager  :  pas  de  bois,  pas  de  charbon,  avec  un 
froid  glacial,  quelque  fois,  pas  de  couverture.  Après  avoir  pourvu  aux 
besoins  les  plus  immédiats,  elles  vont  dans  le  voisinage  mendier  de  porte 
en  porte,  jusqu'à  ce  qu'elles  puissent  se  procurer  ce  dont  le  pauvre  malade 
à  besoin.  Quelle  est  la  valeur  moyenne  du  produit  de  ces  quêtes?  La  Révd. 
Sœur  qui  a  donné  ces  statistiques  à  la  Cour  Inférieure  n'a  pu  le  dire,  même 
approximativement.  Le  Tribunal  d'Appel  pourra  aisément  apprécier  la 
valeur  de  tels  soins,  s'il  juge  à  propos  d'apporter  quelqu'attention  à  cette 
partie  de  la  cause. 

Maintenant,  nous  l'avons  déjà  dit,  les  Intimées,  pour  subvenir  à  tous 
ces  besoins,  pour  faire  toutes  ces  œuvres,  n'ont  pas  un  seul  sou  de  revenu  ! 
Les  Appelants  ont,  en  Cour  Inférieure,  référé  aux  comptes  publics.  Ils  y 
ont  constaté  que  cinq  ou  six  de  leurs  asiles  reçoivent  chacun  $200,00  du 
gouvernement  local,  soit  un  millier  de  piastres.  La  maison  mère  reçoit 
environ  onze  cents  piastres.  Ajoutons  à  cela  environ  quatre  mille  piastres 
reçues  par  l'asile  des  Sourdes-Muettes,  et  nous  avons  environ  six  mille 
piastres.  Une  somme  de  sept  à  huit  cents  piastres  est  aussi  donnée  au  dépôt, 
par  le  Séminaire  St.  Sulpice.  Nous  ne  la  mentionnons  pas  dans  le  calcul 
ci-dessus,  vu  que  cette  somme,  et  une  foule  d'objets,  donnés  tant  par  le 
Séminaire  que  par  des  personnes  charitables,  sont  distribués  aux  pauvres  de 
l'extérieur,  durant  les  42,855  visites  que  nous  avons  ci-dessus  mentionnées. 

Nous  n'avons  pas  non  plus  inclu,  dans  les  calculs  ci-dessus,  une  œuvre 
des  plus  méritoires,  nous  voulons  parler  du  soin  de  l'Hôpital  des  varioles. 
Là,  cinq  Sœurs  de  la  Providence  prodiguent  leurs  soins  à  cette  espèce  de 
malades.  Mais  il  est  pourvu  aux  besoins  de  cet  Hôpital  par  la  Corporation. 
Il  en  est  de  même  de  l'Aile  de  St.  Jean-de-Dieu  pour  le  soin  des  aliénés, 
les  Sœurs  de  la  Providence  recevant,  pour  cette  institution,  cent  piastres 
par  tête  pour  chacun  des  aliénés  qui  y  sont  reçus.  Nous  devons  cependant 
faire  remarquer  à  la  Cour  que  le  gouvernement  de  Québec  a  cru  faire  un 
contrat  avantageux  avec  les  propriétaires  de  "l'Asile  de  Beauport,"  en 
contractant,  pour  dix  ans,  au  prix  de  cent  quarante  piastres  par  année  pour 


39 

chaque  aliéné.  Les  Intimées,  elles,  prenant  à  $100.00  par  tête,  les  cinq 
cents  aliénés  que  contient  leur  asile,  sauvent  donc  à  la  province  de  Québec 
une  somme  de  vingt  mille  piastres  par  année,  rien  que  sur  la  différence  de 
leur  contrat  d' avec  celui  de  Beauport. 

Eh  bien!  voilà  leurs  taxes!  Cent  soixante  et  deux  mille  neuf  cent 
trente-deux  piastres  d' œuvres  gratuites  dans  une  année,  sans  compter  le 
mérite  inappréciable  des  quêtes  faites  dans  les  42,855  visites  que  nous  avons 
mentionnées,  le  soin  de  V asile  des  variolées,  et  les  vingt  mille  piastres  sauvées 
au  gouvernement  de  Québec  ! 

$162,000.00  de  taxes  municipales! 
20,000.00  de  taxes  provinciales! 
en  outre,  les  énormes  taxes  de  l'aqueduc,  payées  par  toutes  leurs  institutions 
de  cette  ville  ! 

Ce  sont  de  telles  institutions  qui  nous  sauvent  du  paupérisme.  Ce  sont 
elles  qui  épargnent  aux  Appelants  la  taxe  des  pauvres  si  lourde  en  Angle- 
terre, et  que  nous  aurions  infailliblement,  si  nos  institutions  de  charité  ne 
se  chargeaient  de  soulager  tant  de  misères. 

Les  Appelants,  avec  leurs  $900.00  de  taxes,  ont-ils  le  droit  de  venir 
nous  dire  :  "  Nous  servons  l'intérêt  public  en  voulant  vous  ruiner,  en  vou- 
"  lant  arracher  le  pain  de  la  bouche  de  vos  pauvres  et  de  vos  orphelins, 
"  parce  que  vous  ne  payez  pas  de  taxes  ! 

Voilà  le  bilan  des  oeuvres  gratuites  faites,  dans  une  année,  par  de  pau- 
vres femmes  qui  n'ont  pas  un  sou  de  revenu  !  !  ! 

Avec  de  tels  faits  sous  les  yeux,  comment  les  Appelants  ont-ils  pu  venir 
dire,  en  Cour  Inférieure,  par  la  bouche  de  leur  conseil,  que  •'  nous  n'avons 
pas  besoin  de  ces  communautés  contemplatives,  qui  vivent  dans  la  paresse 
aux  frais  du  public. 

"The  public  is  not  bound  to  sustain  them!  "  s'écrie-t-il.  Eh  bien  ! 
nous  le  demandons  au  tribunal,  sont-elles  à  charge  au  public  ?  Le  public  les 
soutient-il  ! 

"  Mes  clients,  ajoute-t-il,  ont  droit  de  s'opposer  à  ce  que  notre  corpora- 
tion  et  le  gouvernement  prennent  l'argent  de  leur  poche  pour  enrichir  les 
Intimées." 

Que  répondre  à  de  telles  paroles  ? 

Les  chiffres  établis  par  la  preuve  sont  là  pour  en  démontrer  l'injustice. 

Comment  les  Appelants  peuvent-ils  avoir  le  courage  de  parler  ainsi  ? 
Ne  savent-ils  pas,  aussi  bien  que  qui  que  ce  soit,  que  la  vie  des  Intimées  est 
toute  d'abnégation  et  de  dévouement  ?  Ne  savent-ils  pas  que  le  plus  grand 
nombre  de  ces  dames  appartiennent  à  nos  meilleures  familles  ?  que  toutes 
ont  reçu  une  éducation  bien  soignée  ?  qu'elles  auraient  pu,  si  elles  l'eussent 


40 

voulu,  se  procurer  les  charmes  d'une  existence  aisée,  et  passer  leur  vie  à 
jouir  des  avantages  de  la  fortune  et  ne  travailler  qu'à  leur  propre  bonheur. 

Au  lieu  de  cela,  elles  ont  choisi  une  vie  de  sacrifices.  Elles  ont  préféré 
se  consacrer,  dans  l'intérêt  de  l'humanité  souffrante,  aux  oeuvres  admirables 
dont  nous  n'avons  donné  qu'une  idée  bien  imparfaite.  Et  pour  récompense 
de  ce  dévouement,  de  ces  services  inestimables  rendus  à  la  société,  on  les 
traîne  devant  les  tribunaux  ;  on  les  représente  comme  des  paresseuses  à 
charge  à  la  société  ! 

Les  Appelants  n'ont  pas  été  mieux  inspirés  en  représentant  les  dangers 
que  courait  la  société,  si  l'on  permettait  à  des  femmes  incompétentes  et  non 
licenciées  comme  pharmaciennes,  de  vendre  des  médicaments  et  pratiquer 
l'art  de  la  médecine.  Le  témoignage  des  médecins  a  démontré  quelle  con- 
fiance ils  ont  dans  les  capicités  et  la  science  médicale  des  sœurs  de  la  Provi- 
dence; et  les  deuxéditious  de  l'ouvrage  de  médecine  qu'elles  ont  publiées 
et  dont  les  Appelants  ont  produit  la  1ère  édition,  et  provoqué  la  production 
de  la  deuxième,  devra  rassurer  la  cour  sur  ce  point. 

Nous  croyons  avoir  démontré  jusqu'à  l'évidence  que  les  Appelants  sont 
mal  fondés  à  venir  soulever  ici  cette  question  de  droit  public,  et  alléguer,  dans 
l'intérêt  public,  que  les  Intimées  ont  violé  leur  charte  et  outrepassé  leurs 
pouvoirs. 

2ème  Question  : 

Le  Procureur  Général,  au  nom  de  Sa  Majesté,  a  seul  droit  d'action  pour 
violation  de  charte  par  une  corporation. 

Nous  maintenons,  en  second  lieu,  que  fut-il  vrai  que  les  Intimées 
eussent  outrepassé  leurs  pouvoirs,  ils  n'appartient  pas  aux  Appelants  de 
s'en  plaindre  par  une  action  de  la  nature  de  celle  qui  nous  occupe,  et  que 
l'exercice  d'un  droit  d'action,  en  supposant  qu'il  y  ait  eu  violation  de  la 
charte  des  Défenderesses,  appartient  au  procureur  général  seul. 

Il  n'y  a  pas  besoin  de  longs  commentaires  pour  démontrer  le  bien 
fondé  de  cette  proposition. 

Qu'adviendrait-il  si  le  premier  venu,  souvent  une  personne  non  res- 
ponsable, avait  le  droit  de  venir  ainsi  revendiquer  les  droits  du  public  et 
persécuter  les  corps  publics,  sociétés  de  bienfaisances  ou  autres,  sous  un 
prétexte  ou  sous  un  autre. 

Nos  législateurs  ont  prévenu  ces  abus  en  donnant  à  l'Etat  seul  le  droit 
de  poursuivre,  s'il  croyait  que  l'intérêt  public  était  compromis. 

C'est  l'article  997  de  notre  code  de  procédure  qui  pourvoit  à  ce  cas. 
On  y  lit  ce  qui  suit  :  "  Lorsqu'une  corporation assume 


41 

''quelque  pouvoir,  franchise  ou  privilège  qui  ne  lui  appartiennent  pas  ou 
"  ne  lui  sont  pas  conférés  par  la  loi  :  " 

"  Le  Procureur  Général  de  Sa  Majesté  pour  le  Bas-Canada  est  tenu  de 
•'  poursuivre  telle  infraction  au  nom  de  Sa  Majesté,  quand  il  y  a  lieu  de  croire 
que  ces  faits  peuvent  être  établis  dans  un  cas  d'intérêt  public  général. 

Nous  croyons  avoir  démontré  que  "  l 'intérêt  public  général"  n'est  pas  du 
côté  de  la  poursuite. 

Maintenant,  y  a-t-il  nécessité  qu'une  telle  action  soit  instituée  par  et 
au  nom  du  Procureur  Général  ? 

Pour  l'établir,  s'il  en  était  besoin,  nous  n'aurions  qu'à  invoquer  l'auto- 
rité des  savants  avocats  des  Appelants  eux-mêmes.  En  effet,  avant 
d'intenter  leur  action,  ils  ont  fait,  par  deux  fois,  c'est  l'un  des  Appelants 
qui  l'avoue  dans  sa  déposition,  des  instances  auprès  du  Procureur  Général, 
pour  obtenir  son  intervention  et  l'autorisation  de  prendre  l'action  en  son 
nom.  S'ils  eussent  cru  cette  autorisation  inutile,  il  est  évident  qu'ils  n'eussent 
pas  insisté  autant. 

D'ailleurs,  il  est  de  pratique  uniforme  qu'il  en  soit  ainsi.  On  se 
rappelle  la  cause  des  charretiers  contre  le  Grand  Tronc,  dans  laquelle  le 
Procureur  Général  d'alors,  a  du  permettre  l'usage  de  son  nom,  bien  fut 
l'avocat  du  Grand  Tronc.  Un  autre  cas  absolument  analogue  est  celui  des 
bouchers  contre  la  Corporation  de  la  cité.  "  Mais  disent  les  Appelants,  l'inter- 
vention du  Procureur  Général  n'est  requise  que  quand  il  s'agit  de  l'intérêt 
public.  Ici,  c'était  l'intérêt  privé  de  la  poursuite  d'intenter  cette  action,  et 
les  Appelants  l'ont  intentée  en  leur  nom."  Cette  prétention  n'est  pas  mieux 
fondée.  Il  est  évident,  et  d'après  la  jurisprudence  établie,  et  d'après  le 
code,  que,  même  quand  il  ne  s'agit  de  l'intérêt  privé,  la  poursuite  ne  peut 
se  prendre  qu'au  nom  de  Procureur  Général.  Autrement,  que  voudrait 
dire  cette  partie  de  l'article  1997,  ou,  après  avoir  parlé  de   "Vintêrêt  'public 

général,  "  l'article  continue  :  "mais    dans    tout 

"  autre  cas,  il  (le  Procureur  Général)  n'est  pas  tenu  de  procéder,  à  moins 
"  qu'il  ne  lui  soit  donné  un  cautionnement  suffisant  pour  indemniser  le 
"  gouvernement  des  frais  ncourir  sur  telle  procédure?  " 

Si  le  droit  d'action  existait  pour  le  particulier,  le  code  eut  dit  tout 
simplement  :  Dans  tout  autre  cas,  la  partie  intéressée  se  pourvoira  comme 
elle  l'entendra  en  son  nom  personnel.  Il  n'y  eut  pas  eu  lieu  de  parler  de 
cautionnement,  ni  de  toutes  les  formalités  mentionnées. 

Nous  référons  en  outre  aux  articles  998,  999,  1000,  1001,  1002,  1003, 
1004,  1005,  1006,  1007,  1008  de  notre  Code  de  Procédure. 

Une  telle  action  ne  pouvait  donc  être  intentée  qu'en  suivant  la  procé- 


42 

dure  indiquée  en  ces  articles.  Elle  ne  l'a  pas  été  !  Elle  devait  donc  être 
déboutée. 

La  poursuite  a  cité  une  opinion  anglaise  allant  à  dire  que  une  telle 
action  pouvait  être  intentée  au  nom  d'un  particulier;  et  l'honorable  juge 
qui  a  rendu  le  jugement  de  la  Cour  Inférieure  incline  vers  cettte  opinion. 
Il  est  possible  que  tel  eût  pu  être  le  cas  en  Angleterre,  où  il  n'y  a  pas  de 
législation  spéciale  sur  la  matière.  Mais  ici,  avec  une  législation  aussi 
claire  que  celle  que  nous  avons,  consignée  tant  au  Statut  Refondu  B.  C. 
qu'au  Code  de  Procédure,  il  ne  peut  y  avoir  de  doute  sur  la  question. 

D'ailleurs,  dans  la  cause  citée  par  la  Défense  et  rapportée  au  5e  Vol. 
English  Jurist,  p.  25,  année  1860,  la  poursuite  a  été  intentée  au  nom  du 
Procureur  Général,  bien  que  ce  fût  une  affaire  privée. 

Les  Intimées  concluent  donc  respectueusement  que  l'action  des  Dejnan* 
deurs  devait  être  déboutée  : 

lo.  Parce  qu'il  n'y  a  pas  eu  d'imitation  de  la  marque  de  commerce  des 
Appelants  ; 

2o.  Parce  que  le  nom  de  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  ne  peut  être  la 
caractéristique  d'une  marque  de  commerce  ; 

3o.  Parce  qu'il  n'y  a  pas  eu  d'imitation  même  éloignée,  ni  dans  le 
sirop,  ni  dans  les  bouteilles,  ni  dans  les  enveloppes  ; 

4o.  Parce  que  les  Intimées  ont  établie  clairement  qu'elles  avaient  en 
la  priorité  d'usage. 

5o.  Parce  qu'elles  n'ont  pas  outrepassé  leurs  pouvoirs  ni  violé  leur 
charte. 

6o.  Parce  que  une  telle  violation  ne  pouvait,  dans  tous  les  cas,  être 
poursuivie  qu'au  nom  du  Procureur  Général. 

Cette  cause  ne  laissant  de  place  pour  aucun  doute  raisonnable,  touchant 
son  résultat,  il  n'y  a  pas  lieu  évidemment  de  traiter  la  question  de  la 
quotité  des  dommages  et  de  démontrer  que,  dans  tous  les  cas,  les  Intimées 
ayant  agi  avec  la  plus  parfaite  bonne  foi,  et  ayant  offert  leur  sirop  en  vente 
sous  le  couvert  d'une  marque  de  commerce  régulièrement  enregistrée  et 
reconnue  par  l'Etat,  ont,  par  là  même,  exercé  cette  industrie  avec  la  sanction 
de  T  Etat  et  que,  munies  d' une  telle  sanction,  elles  étaient  parfaitement 


justifiables  de  le  faire.  Que,  par  conséquent,  il  ne  peut  se  trouver,  dans  le 
cas  présent,  aucune  des  circonstances  nécessaires  pour  constituer  les 
Intimées  en  mauvaise  foi  ou  pour  montrer  la  volonté  de  nuire.  D'ailleurs, 
il  n'y  a  pas  eu  de  dommages  de  prouvés. 

Par  conséquent,  cette  autre  partie  des  considérants  du  jugement  dont 
est  appel,  savoir  : 

"  Considering,  that  the  Plaintiffs  had  and  hâve  no  right  to  prosecute, 
"  it  being  for  the  crown  alone,  or  the  Attorney  General  (for  the  crown  or 
"  the  public),  to  prosecute  corporations  for  exceeding  their  powers,  or  for 
**  excesses  in  the  exercise  of  their  Charter,  right  and  powers  ; 

''Considering,  that  no  spécial  damages  are  proved  and  that  as  to 
"  nominal  damages,  Plaintiffs  show  no  right  to  any,  proving  no  licences, 
"or  privilège  possessed  by  themselves  to  trade." 

"  Considering  finally  that  Plaintiffs  hâve  not  right  to  judgement  for 
"  anything  against  the  Défendants,  upon  the  proofs  of  record,  doth  dismiss 
"  said  Plaintiff's  action  with  costs"  ; 

Sont  bien  fondés  et  doivent  être  confirmés. 

Les  Intimées,  acceptant  le  jugement  de  la  Cour  Inférieure,  et  en  n'ayant 
pas  interjeté  appel  de  cette  partie  du  jugement,  rejettant  leur  demande 
incidente,  il  est  inutile  d'insister  sur  les  questions  soulevées  par  cette  partie 
du  jugement,  et  d'établir  qu'elles  avaient  droit  à  un  jugement  en  leur  faveur 
sur  cette  demande  incidente.  Cependant,  il  n'est  pas  hors  de  propos  de  faire 
observer  que  si,  d'un  côté,  les  Appelants  n'ont  prouvé  aucun  dommage,  les 
Intimées  ont,  de  l'autre  côté,  prouvé  des  dommages  très-considérables  contre 
les  Appelants  ;  et  qu'il  ressort  de  la  preuve  que  les  Appelants  ont  agi 
de  la  manière  la  plus  odieuse  et  la  plus  injuste  vis-à-vis  les  Intimées.  C'est 
d'ailleurs  ce  que  reconnaît  le  jugement  de  la  Cour  Inférieure  :  "  J'aurais 
accordé  aux  Défenderesses  des  centaines  de  louis  de  dommages,  dit  le  juge 
président  de  la  Cour  Inférieure,  en  rendant  son  jugement.  Et  cette  partie 
du  jugement  démontre  tout  F  à-propos  de  la  législation  passée  à  la  dernière 
session  de  la  Législature  de  Québec,  et  imprimée  ci-après  comme  Appendice 
No.  3.  Les  Intimées  avaient  des  titres  bien  établis  à  cette  protection  de  la 
législature  ;  et  la  persécution  odieuse  organisée  contre  elle  par  les  Appelants, 
les  dommages  que  ces  derniers  lui  ont  causés,  sont  loin  de  présenter  leur  cause 
sous  un  jour  favorable,  devant  cette  honorable  Cour. 

En  effet,  il  est  prouvé,  par  trois  maisons  des  plus  importantes  dans  le 


u 

commerce  de  pharmacie,  qu'elles  ont,  soit  discontinué  la  vente,  soit  aban- 
donné les  moyens  ordinaires  de  répandre  dans  le  public  le  Sirop  des  Sœurs, 
au  moyen  de  leurs  agents  ou  autrement,  parce  qu'elles  avaient  reçu  des 
menaces  de  procès  de  la  part  des  Appelants.  Ces  menaces  ont  été  faites  par 
malice  et  avec  l'intention  évidente  d'empêcher  la  vente  du  Sirop  des  Inti- 
mées. L'une  de  ces  maisons,  "Laviolette  &  Nelson,"  a  même  discontinué 
des  annonces  sur  les  journaux  sous  le  coup  de  cette  menace. 

Cependant,  les  Intimées  n'ont  jamais  compté  sur  ces  dommages  pour 
continuer  leurs  œuvres  ;  et  nonobstant  le  sort  de  cette  demande  incidente, 
leurs  vieillards,  leurs  pauvres,  leurs  malades,  leurs  infirmes  et  leurs  orphe- 
lins trouveront  toujours,  dans  leur  dévouement  et  leur  travail  infatigables, 
une  ressource  assurée  contre  leurs  infortunes.  C'est  pourquoi,  elles  ont 
abandonné  volontiers  cette  partie  de  leurs  prétentions,  et  elles  se  contentent 
de  demander  la  confirmation  du  jugement  de  la  Cour  Inférieure. 


Montréal,  1er  Juin  1877. 


TRUDEL,  TAILLON  &  VANASSE, 

Avocats  des  Intimées. 


Appendice  No.  1  au  Factum  des  Intimés 


No.  58. 

JOHN  KERRY  &  AL  , 

Appelants, 
vs. 

LES  SŒURS  DE  L'ASILE  DE  LA  PROVIDENCE  DE  MONTREAL, 

Intimées. 


Remarques  de  Son  Honneur  M.  le  Juge  MacKay,  en  rendant  le  Jugement 
de  la  Cour  Supérieure,  le  24  Novembre  1876. 

The  Plaintiffs  are  the  firm  of  Kerry,  Watson  &  Co.,  the  Défendants,  a 
Corporation  under  the  Acts  4  and  5  Vie,  c.  67,  and  24  Vie.,  c.  115,  by 
which  last  Act  they  bave  given  to  them  their  présent  name.  Henry  R. 
Gray,  in  october,  1872,  obtained  a  trade  mark  to  be  registered,  which  con- 
sisted  of  the  words,  "  Sirup  of  Red  Spruce  Gum,"  and  so  obtained  the  exclu- 
sive right  to  the  said  trade  mark,  to  wit,  the  said  name  "Syrup  of  Red 
Spruce  Gum,"  or,  in  french,  "Sirop  de  Gomme  d'Epinelte  Rouge."  In 
february,  1875,  the  Plaintiffs  bought  from  Gray  the  recipe  for  his  Syrup  of 
Red  Spruce  Gum  and  his  said  trade  mark,  and  duly  registered  the  transfer. 
The  Défendants,  early  in  mardi,  1875,  obtained  a  trade  mark  to  be  regis- 
tered for  a  manufacture  of  theirs.  The  mark  consisted  of  the  seal  of  the 
Défendant'  s  corporation,  composed  of  a  virgin  on  a  throne,  at  the  foot  of 
which  are  two  saints,  and  the  legend  Charitas  Christi  urget  nos,  and  of  the 
letters  A.  P.  M.  underneath  the  throne,  the  whole  encircled  by  fleurs  de  lys, 
and  around  the  seal  the  words  :  "Sirop  de  Gomme  d'Epinette  Composé," 
and  "Compound  Syrup  of  Spruce  Gum,"  with  a  statement  of  the  source  of 
the  Syrup,  and  the  doses  to  be  taken  of  it.     Late  in  the  same  month,  the 


46 

Défendants  obtained  a  registration  of  another  like  trake  mark  ;  but  not  for 
Syrup.  Gray's  Syrup  seems  to  be  an  élégant  préparation,  and  commands 
an  extensive  sale.  Gray  was  manufacturing  three  to  five  thousand  gross  a 
year  of  it,  when  lie  sold  it  to  Plaintiffs.  The  Plaintiffs,  by  their  déclara- 
tion, accuse  the  Défendant  of  violation  of  their  trade  mark  right,  and  of 
fraudulently  selling  a  liquid  or  syrup,  under  the  name  of  "  Compound  Syrup 
of  Spruce  Gum,"  in  bottles  labelled  with  an  essential  portion  of  Plaintiff's 
trade  mark,  and  with  an  imitation  thereof  in  imitation  of  Plaintiff's  Syrup 
of  Red  Spruce  Gum,  with  intent  to  deceive  the  public  and  consumers  into 
believing  that  the  Défendant'  s  préparation  is  the  same  as  sold  by  Gray  for- 
merly,  and  now  by  Plaintiffs.  They  say  that  in  1875  the  Défendants  made 
and  sold  large  quantifies  of  syrup  in  imitation  of  the  Plaintiffs,  and  bave 
put  up  their  syrup  in  bottles  enclosed  in  stiff  pasteboard  and  case  or  cover, 
made  to  assume  the  same  shape  and  appearance  as  Plaintiff's  bottles,  sur- 
rounded  by  a  paper-wrapper  of  a  somewhat  similar  appearance  as  those 
around  Plaintiff's  bottles,  the  Defendant's  wrappers  also  having  printed 
thereon  a  label  infringing  on  their  trade  mark  by  the  adoption  of  essential 
portions  thereof,  to  wit,  the  name  and  words  in  english,  "Syruy  of  Spruce 
Gum,"  and  in  French,  "Sirop  de  Gomme  d'Epinette,"  which  words  are 
calculated  to  deceive  the  public  and  buyers  and  consumers  of  Plaintiff's 
Syrup  into  believing  that  Defendant's  Syrup  is  as  valuable  as  Grays's  or 
Plaintiffs'.  The  déclaration  goes  on  to  say  : — That  the  said  name  is  con- 
trived  and  used  by  Défendants  in  connection  with  the  said  article  in  order 
that,  by  the  similarity  of  sound  and  appearance,  buyers  may  be  deceived,  as 
they  are  in  fact,  into  buying  Défendants'  article  for  the  Plaintiffs'  ;  the 
déclaration  goes  on  to  say,  in  Mardi,  1875,  the  Défendants  fraudulently 
obtained  a  certificate  of  registration  of  their  trade  mark,  which  is  an  infrin- 
gement  of  Plaintiffs',  which  certificate  is  null  and  should  be  so  declared  ; 
that  thirty  thousand  dollars  damages  hâve  been  done  to  Plaintiffs,  by  Défen- 
dants' infringement  of  their  trade  mark,  and  Plaintiffs  bave  right  to  demain! 
the  nullity  of  Défendants'  trade  mark.  The  Plaintiffs  further  allège  that 
the  Défendants  were  originally  incorporated  by  4  and  5  Vie,  cap.  67,  under 
the  name  of  "  The  Montréal  Asylum  for  Aged  and  Infirm  Women,"  and 
it  was  provided  by  the  said  Act  that  nothing  therein  contained  should  affect 
the  rights  of  Her  Majesty  or  of  any  person,  or  of  any  body  corporate,  sucli 
only  excepted  as  are  mentioned  in  the  said  Act  ;  that  supposing  the  Défen- 
dants should  not  infringe  the  rights  of  the  Plaintiffs  as  above  mentioned, 
the  Défendants,  by  manufacturing  for  sale  and  by  selling  their  article,  the 
Compound  Syrup  of  Spruce  Gum  as  an  article  of  trade,  act  in  breach  of  their 
charter,  and  beyond  the  powers  granted  to  them  by  law.  and  alfeot   the 


47 

riglits  of  the  Plaintiffs  in  the  premises,  the  Défendants  causing  to  the 
Plaintiffs  damages  $30.000  by  their  unjust  compétition  on  the  market  and 
vending  the  said  article  ;  that  the  Plaintiffs,  to  carry  on  their  trade,  hâve 
to  pay  heavy  municipal  taxes  on  their  business,  and  on  the  property  by 
the  m  occupied  for  their  trade,  while  the  Défendants,  under  the  pretence 
that  they  are  a  religious  and  charitable  society,  are  granted  exemption 
from  ail  taxes  ;  therefore,  the  Plaintiffs,  for  the  cause  last  mentioned,  as 
well  as  for  the  causes  above  alleged,  are  well  founded  in  restraining 
the  Défendants  from  practising  a  trade  incompatible  with  the  objects  of 
their  incorporation  ;  conclusions  :  that  the  certificate  gotten  by  Défendants 
be  declared  null  ;  that  the  Défendants  be  restrained  from  preparing  or 
selling  the  compound  syrup  of  spruce  gum,  bearing  Plaintiffs'  trade  mark 
or  any  portion  of  it,  or  imitation  of  it  ;  that  the  Défendants  be  condemned 
to  account  for  ail  profits,  etc.,  and  be  enjoined  to  ddsist  from  inaking  or 
selling  "any  article  whatever,  for  want  of  authority  and  power  so  to  do  " 
and  that  Défendants  be  further  condemned  to  pay  to  Plaintiffs  $30,000 
damages,  &c.  The  Défendants  plead  : — That  they  are  an  institution  of 
charity,  and,  sustain  numbers  of  houses  of  charity  in  the  Province,  which 
are  taking  care  of  sick  people,  superannuated  and  deaf  and  dumb  ;  that  they 
do  tins  by  means  of  help  gotten  from  charitable  persons,  and  by  their  work 
and  industry  ;  that  in  1843  Défendants  got  the  receipt  for  their  syrup  from 
the  Hôtel  Dieu;  from  1831  it  lias  been  made  and  used  by  the  Hôtel  Dieu 
and  since  1843  by  Défendants,  and  sold  to  the  public  ;  that  it  is  false  that 
Gray,  before  any  Syrup  of  Spruce  Gum  was  known  and  sold,  had  composed 
the  syrup  of  which  Défendants  claim  the  property  ;  that  ail  profits  made  by 
Défendants  hâve  always  been  spent  in  the  sustentation  of  Défendants' 
institution  of  charity  ;  that  the  Défendants  hâve  never  imitated,  or 
attempted  to  îmitate  Plaintiffs'  trade  mark  or  any  essential  part  of  it  ;  that 
Défendants'  trade  mark  is  essentially  différent  from  Plaintiffs' — there  is  no 
ressemblance  between  the  two  ;  that  the  name  "Syrup  of  Red  Spruce 
Gum  '  '  could  never  form  a  trade  mark  ;  that  it  is  a  nom  générique  applicable 
to  ail  Syrup  of  Red  Spruce  Gum,  made  or  to  be  made  by  anybody  ;  that 
Gray  had  no  right  to  the  name  (Syrup  of  Red  Spruce  Gum),  as  a  trade 
mark.  That  Gray  never  obtained  any  patent  for  his  Syrup,  and  so  the 
Plaintiffs  cannot  claim  that  he  has,  or  they,  exclusively  hâve  right  to  make 
or  sell  it.  That  Plaintiff  is  unfounded  in  complaining  of  Défendants  selling 
their  Syrup,  seeing  that  Défendants  and  the  Hôtel  Dieu  hâve  made  and 
sold  it  for  years  before  Gray  made  any  ;  that  Défendants'  is  far  superior  to 
Gray's;  that  the  syrup  of  Défendants  does  not  imitate  Gray' s;  it  is 
différent  in  çolour?  taste,  composition,  package  and  labels,  and  name.    That 


48 

tlie  PJaintiffs  havc  been  persecuting  défendants  for  a  long  time,  running 
down  Défendant' s  syrup,  representing  it  as  of  no  value  and  threatening 
Défendants,  and  their  agents,  with  prosecutions  for  selling  it,  doing  them 
damage  of  over  $25,000.  Then,  tlie  plea  states  tlie  trade  marks  of  Dé- 
fendants and  the  registrations  obtained,  and  elaims  them  as  their  property  ; 
that  the  Plaintiffs  opposed  the  granting  of  said  registrations,  but  in  vain; 
eo  that  there  is  chose  jugée  in  favour  of  Défendant  ;  and  in  selling,  as  they 
hâve  donc,  Défendants  hâve  only  exercised  their  right  ;  that  the  Superior 
Court  cannot  annul  such  acts  as  those  granted  by  the  Minister  of  Agricul- 
ture and  his  Deputy  in  favour  of  Défendants;  that  it  is  false  that  the 
Défendants  hâve  violated  their  charter,  as  alleged  ;  that,  on  the  contrary, 
they  hâve  only  exercised  an  acfc  towards  the  maintenance  of  their  institu- 
tion, and  towards  accomplishing  the  ends,  or  object,  of  their  charter;  but 
though  this  were  not  so,  it  was  and  is  not  for  Plaintiffs  to  prosecute,  but 
only  for  Her  Majesty,  or  Her  Attorney-General.  Conclusion  for  dismissal 
of  the  action. 

tNCIDENTAL   DEMAND. 

The  Défendants  do  not  only  plead  defending  themselves  from  Plaintiffs' 
demand,  but  they  bring  an  insidental  demand  for  damages  against  the 
Plaintiffs.  They  commence  their  déclaration  by  reciting  ail  their  works  of 
charity  ;  then  they  say  that  in  1843  Sister  Frigon,  of  the  Hôtel  Dieu,  gave 
Sister  Caron,  of  incidental  plaintiffs'  corporation,  the  receipt  for  Compound 
Syrup  of  Spruce  Gum  That  this  Syrup,  since  1851,  has  been  prescribed  by 
the  physicians  attending  the  Hôtel  Dieu  and  the  incidental  Plaintiffs  in- 
stitution ;  and  in  fact,  since  1843,  the  incidental  Plaintiffs  hâve  made  it,  and 
been  in  the  habit  of  giving  it  away  gratuitously,  and  of  selling  it  in  large 
quantifies;  that  Spruce  Gum  always  entered  into  the  same  Syrup  with 
other  matters  and  hence  the  mime,  Compound  Syrup  of  Spruce  Gum,  and 
the  sales  of  it  hâve  constantly  increased  since  1843,  and  in  1875,  the 
incidental  plaintiffs  were  making  great  profits  by  it,  sustaining  their  poor, 
and  their  institution  in  great  part  by  such  profits  ;  that,  to  distinguish  their 
Syrup,  the  incidental  Plaintiffs,  hâve  for  years  past,  placed  on  ail  bottles 
containing  it  the  seal  of  their  corporation  or  community,  viz.,  a  Virgin  on 
a  throne,  &c.,  with  an  inscription,  or  motto,  "  Charitas  Christi  urget  nos," 
and  below  it  the  letters  A.  P.  M.,  the  incidental  Plaintiffs  adopting  so, 
their  seal  as  their  mark  of  commerce,  or  trade  mark,  and  their  Syrup 
attained  great  popularity  in  Canada  and  the  United  States  ;  that  their  said 
trade  maik  was  approved  by  the  Minister  of  Agriculture  and  registered  on 
9th  March,  1875;   that,   on  another  application;  dated  27th  Mardi  1875, 


49 

claiining  the  proprietorehip  of  thc  said  trade  mark,  registration  was  granted 
of  it  again  on  30th  Mardi,  1S75.  That  thc  incidental  Défendants  opposed 
those  regist  rations,  but  the  Minister  of  Agriculture  over-ruled  their  ob- 
jections, and  tins  ruling  is  chose  jugée  ;  that,  notwithstanding  the  incidental 
Plaintiffs'  rights,the  incidental  Défendants  hâve  maliciously  and  fraudulently, 
knowing  of  the  incidental  Plaintiffs'  rights  to  use  their  trade  mark  and  to 
sell  their  Syrup,  interfered  to  prevent  them  selling  it  by  menaces  against 
them  and  their  agents  and  by  lies,  to  the  damage  of  the  incidental  Plaintiffs. 
That  particularly  since  Mardi,  1875,  the  incidental  Défendants  by  them- 
selves  and  agents,  hâve  gone  about  in  shops  in  Québec,  Montréal  and 
elsewhere,  and  cried  down  the  incidental  Plaintiffs'  Syrup  as  being  of  no 
value,  at  the  same  time  falsely  and  fraudulently  representing  that  the 
incidental  Plaintiffs  were  violating  the  trade  mark  of  the  incidental  De- 
fendants,  and  had  no  right  to  make  or  sell  their,  the  incidental  Plaintiffs' 
said  Syrup,  and  proclaming  that  ail  who  would  buy  or  sell  it  would  incur 
forfeitures,  and  penalties,  thus  frightening  apothecaries  and  dealers  from 
buying  or  selling  the  syrup,  from  fear  of  prosecutions,  and  many  discon- 
tinued  buying  and  selling  in  conséquence  ;  that,  by  reason  of  the  incidental 
Défendants'  manœuvres  and  threatenings  alluded  to,  the  sale  of  the 
incidental  Plaintiffs'  Syrup  has  diniinished  at  least  one-half,  and  damages 
hâve  resulted  of  over  $25,000,  so  the  incidental  Plaintiffs  hâve  been 
deprived  of  a  great  part  of  the  means  neçessary  to  support  their  institution, 
lodge  their  poor,  and  nurse  the  sick,  &c. 

ccwclijskw  for  $25,000  damages. 

The  incidental  Défendants  only  defence  is  the  gênerai  issue.  Upon  the 
principal  demand,  the  first  question  is  as  to  whether  or  not  the  Défendants 
hâve  been  using  or  imitating  Gray'  s  trade  mark  ?  This  is  not  a  patent  case  ; 
it  is  not,  as  to  the  two  Syrups,  who  first  made  them,  as  from  much  of  the 
évidence  one  might  take  it  to  be.  It  can  not  be  pretended  that  the  Défend- 
ants make  a  Syrup  like  Gray's.  The  chief  question  is  about  a  trade  mark 
obtained  by  Gray  ;  it  is  said  that  the  Défendants  hâve  fraudently  imitated 
it.  They  were  free  to  imitate  the  Syrup  ;  both  Syrups,  even  now,  may  be 
imitated,  but  not  so  Gray's  trade  mark,  perhaps.  As  to  the  Syrups,  the 
Défendants  hâve  been  making  them  for  over  twenty  years.  Gray  swears 
that  lie  has  been  making  his  since  the  fall  of  1859.  So,  the  Défendants  hâve 
the  priority  of  date  of  manufacture,  as  proved  by  many  witnessess. 

Trade  marks  are  légal  possessions.  What  they  may  consist  of,  our 
Statute  31  Vie.  states  in  its  third  section.  The  better  to  protect  trade  mark 
property,  we  hâve  made  spécial  laws. 


50 

To  prove  this  branch  of  their  case  against  the  Dei'endantss  for  the  vio- 
lation of  Gray's  trade  mark,  tbe  Plaintiffs  havc  called  a  good  many 
witnesses.  One  of  them,  Devins,  was  agent  for  Défendants  for  a  time,  to 
sell  their  Syrup.  He  resigned,  because  Plaintiff  threatened  him  with  law 
proceedings.  He  says  the  Défendants  in  1875,  just  before  employing  him, 
spoke  to  him,  and  the  name  they  proposed  to  use  for  the  Syrup  was  : 
"Sirop  de  Gomme  d'Epinette,"  that  afterwards  the  word  "  composée  " 
was  added,  Devins  says  it  was  at  his  suggestion,  owing  to  Gray's  Syrup 
being  on  the  market.  He  says  that  there  was  conversation  as  to  the 
wrappers  for  the  bottles  ;  that  the  Défendants  proposed  blue  colour,  and  he 
told  them,  that  that  would  be  infringing  on  Gray's  rights,  as  his  wrapper 
was  blue  ;  yet  the  Défendants  adopted  the  blue  colour,  he  said.  Being 
asked  as  to  the  persons  being  deceived  into  buying  the  Défendants'  Syrup 
for  Gray's,  he  says  that  he  "  lias  often  sold  the  Nuns'  for  Grays.  "  People 
asked  for  Gray's,  and  I  gave  them  the  Nuns'."  Other  witnesses  say  that 
they,  asking  in  shops  for  Gray's  Syrup,  hâve  had  the  Défendants'  given  to 
them.  Other  witnesses  say  that  the  colour  of  the  wrapper  of  Défendants' 
Syrup  is  very  much,  ifnot  the  same,  as  Gray's;  another  says  that  the 
sound  of  the  name  of  the  Défendants'  trade  mark  is  the  same  as  the  sound 
of  the  name  of  Gray's  ;  another  says  that  it  would  be  easy  to  pass  one 
manufacture  for  the  other,  from  the  similarity  of  the  names.  The  Défend- 
ants bring  up  numerous  witnesses.  Thèse  prove  that  the  Défendants* 
Syrup  has  been  in  use  for  from  20  to  25  years,  and  lias  always  been  the 
same  préparation  ;  several  of  them  prove  thafc  the  trade  mark  of  Défend- 
ants is  differeut  from  Gray's,  and  not  an  imitation  of  it  ;  the  Court,  appre- 
ciating  the  proofs  made  pro  and  con,  cannot  say  otherwise  than  that  the 
évidence  is  overwhelming  in  favour  of  the  Défendants.  This  part  of  Plain- 
tiffs' case  is  weak,  although  they  hâve  brought  up  fourteen  witnesses. 
Some  of  their  witnesses  prove  in  favour  of  Défendants,  for  instance,  Dr, 
Picault,  who  says  that  unless  a  purchaser  were  blind  lie  could  not  take  the 
Défendants'  article  for  Gray's  ;  and  again,  "  si  l'on  peut  lire  on  ne  pren- 
drait pas  l'un  pour  l'autre."  Devins'  évidence  for  Plaintiffs  is  not  satis- 
factory,  and  surely  the  Défendants  cannot  be  held  for  his  misconduct  iii 
giving  their  Syrup  to  people  asking  for  Gray's.  Devins'  ethics,  it  is  plain, 
seemed  irregular,  even  to  Plaintiffs'  attorney,  who  was  shocked  a  little  at 
his  statement,  and,  smiling  said  to  Devins  :  ".I  suppose  you  reflectcd  at 
the  time  that  this  was  not  very  fair."  This  reproof  was  not  pleasant  to 
anybody  ;  Devins  upon  it  morely  said  :  -'I  looked  at  it  as  a  business  tran- 
saction." Plaintiffs'  witness,  Birks,  is  not  a  satisfactory  witncss.  After 
saying  ail  that  he  had  to  say,  the  Court  asked  him  a  question,  to  which  he 


51 

gave  a  poor  answer  ;  this  was  followed  by  another,  winch  he  again  did  not 
answer  ;  then  there  was  a  third  question  ;  "  Is  the  Syrup  so  marked  as  to 
import  that  it  is  manufactured  by  Kerry,  Watson  &  Co  ,  or  by  Gray  ?  "  To 
which  Birks  answers  :  "From  the  appearance,  it  would  almost  indicate 
that,  from  the  œlour  of  the  wrapper.' 

READ    TIÎE    TITREE    QUESTIONS. 

What  is  Gray' s  trade  mark — the  colour  of  the  wrapper  ?  No  ;  he  may 
use  any  colour.  He  states,  in  his  déclaration,  his  trade  mark  to  be  the  name 
and  words,  "Syrup  of  Red  Spruce  Gum,"  and  in  french,  "  Sirop  de  Gomme 
d'Epinette  Rouge."  The  trade  mark  of  the  Défendants  consists  of  a  ticket 
or  label  having  the  seal  of  the  corporation,  composed  of  a  virgin  sitting  on 
a  throne,  at  the  foot  of  which  are  two  saints  ;  and  a  legend  or  motto,  Ghari' 
tas  Chrlsti  urget  nos,  is  in  a  semicircle  over  the  virgin  and  throne,  the  whole 
encircled  by  fleurs  de  lys.  Around  the  seal  too,  inside,  in  a  kind  of  hoop 
semicircle,  are  printed  in  words  :  "  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  composé," 
and  words  "  Compound  Syrup  of  Spruce  Gum,"  with  Indication  of  the  source 
of  origin  of  the  Syrup,  and  of  the  doses  of  it.  The  Court  agrées  with  those 
of  the  witnesses  who  say  that  hère  is  not  imitation  of  Gray's  trade  mark. 
It  is  not  even  an  imitation  colourable  or  in  disguise.  Both  trade  marks  use 
the  word  " Syrup,"  also  the  words  "Spruce  Gum;  "  but  the  one  is  called 
Compound  Syrup,"  the  other  is  not.  One  is  syrup  of  red  spruce,  the  other 
is  not.  It  is  said  that  an  absolute  ressemblance  need  not  be,  and  yet  vio- 
lation of  trade  mark  may  be  seen.  True  ;  but  hère  is  no  ressemblance,  but 
qui  te  the  contrary.  The  al  ter,  the  virgin,  the  saints,  the  latin  motto,  and 
the  statement  of  whence  tlxe  syrup  cornes  from,  ail  of  which  must  always 
be  exhibited  as  essential  components  of  Défendants'  trade  mark,  go  to  make 
it  very  différent  from  Gray's.  Gray  is  free  to  omit  ail  figures  or  any,  or 
put  what  figure  he  pleases  on  his  labels  ;  not  so  the  Défendants.  It  cannot 
be  said  that  their  trade  mark  lias  a  gênerai  ressemblance  to  Gray'  s  ;  cer- 
tainly  it  does  not  ressemble  it  so  as  to  be  easily  confounded  with  it  ;  this 
was  found  so  by  the  Minister  of  Agriculture. 

The  Défendants'  force  upon  the  Court  another  question.  They  say — sup- 
posing  that,  in  their  trade  mark,  imitation  could  be  seen  of  Gray'  s,  this  would 
amount  to  nothing,  for  Gray's  name  or  words,  "  Syrup  of  Red  Spruce  Gum," 
could  ne  ver  properly  be  a  trade  mark  ;  that  they  involve  only  a  generic  term, 
do  not  designate  the  origin  of  the  goods,  but  the  mère  name  of  the  thing  ;  that 
they  are  the  words  commonly  used  for  indicating  the  thing  manufactured  to 
be  of  a  particular  kind  of  class  or  manufacture.    They  say  that  unless  a  fancy 


iiàtne  were  resorted  to,  the  product  had  naturally  to  be  called  Syrup  of  Red 
Spruce  Gum,  and  that,  under  the  circums tances,  that  name  could  not  be  appro- 
priated  by  Gray  to  or  for  liimself  alone.  Some  English  and  United  States 
authorities  support  the  Défendants,  and  it  ought  to  be  held  so  hère,  I  think. 
Our  33  Vict.,  c.  32,  sect.  9,  seems  framed  that  so  it  should  be  held.  Gray' s 
mark,  it  is  to  be  observed,  is  the  mère  name  of  the  substance  in  his  bottles  ; 
this  is  not  described  as  of  his  ownership  or  invention  to  distinguish  it  from 
others'  manufacture.  We  see  that  Gray,  or  Plaintiffs  as  his  substitutes,  are 
claiming  the  monopoly  of  that  name  of  substance,  but  this  ought  not  to  be 
allowed.     The  chief  part  of  Plaintiffs'  case  is  thus  disposed  of. 

But  their  complaint  is  compound  ;  their  second  charge  against  the  Défen- 
dants is  to  this  effect  :  "  Supposing  you  be  found  not  to  be  infringing  our  rights 
as  first  complained  of,  by  manufacturing  for  sale  and  selling  your  syrup  as  an 
article  of  trade,  you  act  in  breach  of  your  charter,  beyond  the  powers 
granted  to  you,  and  affect  our  rights  by  your  unjust  compétition  on  the 
market,  vending  the  said  article,  and  do  us  damage  $30,000."  The  Plain- 
tiffs add  that,  to  carry  »n  their  trade,  they  hâve  to  pay  heavy  taxes,  while 
Défendants,  under  pretence  that  they  are  a  religious  or  charitable  corpo- 
ration, are  granted  exemption  from  ail  taxes.  Therefore,  for  the  cause  last 
mentioned  as  well  as  for  the  causes  above  alleged,  Plaintiffs  are  well  founded 
(says  the  déclaration) in  restraining  the  Défendants  from  practising  a  trade 
incompatible  with  the  objects  of  their  corporation. 

To  this  part  of  the  case,  the  Défendants  plead  that  they  hâve  not 
violated  their  charter  ;  that  ail  that  they  hâve  done  has  been  towards  better 
accomplishing  the  objects  of  their  charter  ;  that  though  this  were  not  so,  it 
was  and  is  not  for  plaintiffs  to  sue  ;  but  only  for  lier  Majesty,  or  Her 
Attorney  General.  Upon  this  part  of  the  case,  the  question  présents  itself, 
can  the  Défendants  trade  ?  Their  charter  is  not  one  to  a  corporation  for 
trading,  nor  does  it  affect  a  religious  corporation,  but  a  lay  one  for  charitable 
purposes.  In  old  France,  houses  of  monks  and  of  nuns  were  frequently  pro- 
hibited  from  trading  even  from  selling  remédies.  By  an  edict  of  1721,  ail 
communautés,  even  séculières,  were  prohibited  from  having  shops  for  mer- 
chandises  of  any  kind.  The  Défendants  cannot  prétend,  with  right,  that 
they  may  set  up  shops.  Their  counsel  did  claim  in  argument  that  they, 
being  incorporated,  it  is  to  be  inferred  that  the  state  meant  to  endow  them 
with  the  right  to  use  ail  means  towards  acquiring  means  to  carry  out  their 
objects,  and  that  therefore  they  may  trade.  This  cannot  be  allowed.  The 
end  cannot  justify  the  means  in  a  case  like  this.  Powers  of  corporations  are 
to  be  strictly  construed  ;  ail  corporations  hâve  bounds.  Railroad  corpora- 
tions hâve  been  held  not  to  hâve  a  right  to  go  into  acceptances  of  bills  &c., 


Uniess  their  charters  expressly  allow  it.  I  find  that  the  Défendants  havè 
been  trading^  and  that  this  was  and  is  beyond  their  powers,  and  against 
their  charter.  As  well  inight  the  Ladies'  Benevolent  Society,  the  Orphan 
Asyliun,  or  a  chartered  Lymg-ïn-Hospital,  claim  right  to  trade,  though  no 
sach  right  was  conferred  by  charter. 

Can  the  Plaintiffs  sue  Défendants  in  conséquence  ?  Are  they  the 
proper  persons  to  complain  against  a  corporation  for  exceeding  its  charter 
powers  ?  Can  they  ask  for  ouster  against  a  corporation  for  malfeasances, 
or  excesses  ?  Most  lawyers  would  answer  in  the  négative  ;  for  it  is 
elementary  that  generally  it  is  for  the  crown,  or  the  public  authority, 
alone  to  proceed  in  such  cases.  So  it  is  held  in  England,  Fiance,  the 
United  States  and  in  this  country.  But  although  this  be  so,  hâve  not 
private  persons  the  right  to  complain  of  the  excesses  of  corporations 
doing  them  personally  private  damage  ?  The  Plaintiffs  claim  that  they 
hâve,  and  they  say  that  their  présent  action  is  not  of  the  character  of 
an  Attorney  General's  information,  but  if  seen  such,  in  a  degree,  must,  in 
another  degree,  be  seen  to  be  a  complaint  of  a  private  damage  ;  in  respect 
of  winch  they  ask  for  damages  personal  to  themselves,  and  for  the  Défen- 
dants being  restrained  for  the  future  from  like  trading,  which,  it  lias  added, 
is  "incompatible  with  the  objects  of  their  incorporation."  The  Plaintiffs 
say  that  they  hâve  a  complaint  of  private  damage,  though  a  public  wrong 
by  Défendants  may  be  seen  violation  of  their  charter,  in  the  same  acts  as 
are  complained  of.  We  hear  of  licensed  carriers  suing  unlicensed  ones  for 
damages  ;  licensed  ferrymen  sue  unlicensed  ones  interfering  with  them  ;  a 
licensed  butcher  may  sue  an  unlicensed  one  ;  licensed  doctors  of  medicine 
may  sue  unlicensed  ones  ;  the  Plaintiffs  claim  right  to  sue,  upon  like  prin- 
ciples,  probably,  though  they  hâve  not  expressly  referred  to  such  cases. 
No  authorities  hâve  been  cited  except  our  own  Code,  which  says  thatevery- 
body  is  liable  for  damages  caused  by  his  fault.  In  France,  the  question  lias 
cerne  up  several  times  and  been  resolved  in  favour  of  claims  like  the  Plain- 
tiffs. Medicines  cannot  be  sold  there  without  license.  This  was  held  to 
apply  against  Sisters  of  Charity,  the  Nuns  of  St.  Vincent  de  Paul,  as  ail 
others.  (Bordeaux,  January,  1830.)  Though  the  Public  Prosecutor  may 
act  in  such  cases,  a  licensed  apothecary  can  intervene  and  sue  an  unlicensed 
apothecary,  for  préjudice  particulier,  and  get  dommages  intérêts  ;  ï 'intérêt  public 
ri  excluant  jamais  V intérêt  particulier.  It  is  held,  by  the  Cour  de  Cassation,  that 
any  licensed  apothecary  can  sue  under  such  circumstances,  "quelque  soit  la 
difficulté  qui  puisse  s'élever  pour  l'appréciation  de  ce  dommage."  Les  phar- 
maciens ont  action  directe,  et  dès  lors,  sont  recevables  à  se  porter  partie  civile 
contre  ceux  qui  s' immissent  illégalement  dans  l'exercice  de  la  pharmacie  ; 


u 

ce  droit  appartient  à  chaque  pharmacien  individuellement,  (Cass.,  I5th 
June,  1833).  The  Plaintiff's  suit  had  been  disputed  at  Rouen,  but  the 
judgment  was  reversed.  It  was  held  that  some  damages  had  to  be  allowed 
to  Plaintiff,  and  that  it  was  an  error  to  believe  that  only  for  a  préjudice 
matériel,  could  an  action  of  damages  lie.  The  Plaintiff  may  sue,  though  it  be 
only  for  réparation  of  the  préjudice  moral,  said  the  Cour  de  Cassation. 
Sourdat,  Vol.  1,  Nos.  48,  40,  highly  approves. 

Supposing  Plaintiffs'  demand  for  damages  against  Défendants  for  their 
unjust  compétition  on  the  market,  &c. ,  to  be  lawful,  there  would  yet  only 
be  room  for  small,  nominal  damages,  for  no  dollars  and  cents  of  spécial 
damages  hâve  been  proved.  Bat  to  entitle  Plaintiffs  to  damages  whatever, 
upon  the  principles  governing  in  France,  ought  they  not  to  show  clearright 
or  title  !  Plaintiffs  say,  as  it  were,  that  the  Défendants  trespass  on  their 
domaine;  but  do  they  themselves  prove  title  or  privilège?  The  Plaintiffs 
exhibit  no  license  themselves  to  trade  ;  they  prove  nothing  about  any 
privilège  that  they  possess.  What  heavy  taxes  they  pay  they  hâve  not 
proved.  They  say  that  the  Défendants  are  exemptée!  f  rom  ail  taxes  ;  is 
this  plain?  The  Plaintiffs  say  to  Défendants,  "  you  mix  Ulegally  in  trade," 
as  if  Plaintiffs  themselves  mixing  in  it,  did  so  with  license  or  peculiar  right  ; 
but  we  do  not  see  how  this  is  ;  Plaintiffs  ought  to  hâve  made  it  plain  to 
démonstration.  Not  doing  so,  they  hâve  no  right  then  to  damages,  and  their 
action  must  be  dismissed. 

There  remains  the  incidental  demand.  Its  allégations  hâve  simply 
been  denied,  but  they  hâve  been  proved  true  to  a  great  extent.  The 
threats  made  by  the  incidental  Défendants  against  the  incidental  Plain- 
tiffs' agents  and  the  unfounded  accusations  made  against  the  incidental 
Plaintiffs  were  and  are  good  cause  of  action  ;  they  caused  loss  to  the 
incidental  Plaintiffs  of  trade  profits,  and  no  justification  is  pleaded.  If, 
instead  of  thèse  incidental  Plaintiffs,  we  had  any  regular  manufacturing 
trading  house  as  incidental  Plaintiffs,  and  that  such  house  had  made  such 
profits  as  the  incidental  Plaintiffs  hâve  and  mère  gênerai  issue  been 
pleaded,  the  Court  wonld  probably  award  large  damages,  hundreds  of 
pounds.  Is  the  case  to  be  differently  treated  because  of  the  incidental 
Plaintiffs  being,  as  we  know,  an  eleemosynary  corporation,  lay  corporation, 
not  having  right  to  carry  on  commerce  ?  Upon  reflection,  it  lias  occurred  to 
me  that  the  Incidental  Plaintiffs  ought  not  to  be  allowed  damages  from 
Défendants,  except  upon  indisputably  clear  right  ;  hère,  I  see  weakness  in 
the  incidental  Plaintiffs'  case.  They  had  no  right  to  trade,  and  by  illegally 
trading,  contributed  to  the  trouble  they  complain  of.  The}'  claim  damages 
for  loss  of  commercial  profits,  but  themselves  were  and  are  a  mère  lay  or 


55 

eleemosynary  corporation,  bound  to  keep  within  a  certain  sphère,  and  to 
whom  commerce  was  and  is  unlawful.  The  incidental  demand  must  be  dis- 
missecl,  but  without  costs,  as  the  judginent  has  proceeded  upon  grounds  not 
pleaded  by  the  incidental  Défendants. 


APPENDICE  No.  2. 


PBEUYE     IDIES     nSTTIIMIIEIES 


Présent  :  The  Honorable  Mr.  Justice  Mackay. 

On  tliis  ninth  day  of  October,  in  the  year  of  our  Lord  one  thousand 
eight  hundred  and  seventy-six,  personally  came  and  appeared  DAVID 
WATSON,  Druggist,  one  of  the  Plaintiffs,  aged  thirty-five  years,  a  witness 
produced  on  the  part  of  the  Défendants  who  being  duly  sworn  deposeth  and 
saith  : — I  am  one  of  the  Plaintiffs  in  this  cause.  I  was  ne  ver  in  Ottawa  in 
connection  with  the  trade  mark  of  Défendants. 

Question. — Was  not  your  firm  informed  that  the  trade  mark  was  to  be 
registered  for  the  Défendants  ? 

Answer. — The  first  information  I  received  of  such  a  thing  having  been 
done,  was  a  paragraph  in  the  Montréal  Herald  amongst  the  list  of  trade 
marks  granted. 

Question. — Your  firm  never  wrote  to  Ottawa  about  that? 

Answer. — The  firm  wrote  to  Ottawa  in  July,  the  trade  mark  was 
granted  I  think  sometime  in  Mardi.  I  wrote  to  the  Minister  of  Agriculture 
in  Mardi  of  the  same  year,  giving  him  the  writ  of  injunction  that  had  been 
granted  in  a  similar  case  and  asking  him  to  furnish  me  with  a  copy  of  what 
lie  had  granted  to  the  ladies  of  the  Providence  Nunnery  as  a  trade  mark. 

Question. — Did  you  receive  any  information  of  a  letter  written  to  Mr. 
Gray,  the  originator  of  your  Syrup  ? 

Answer. — No  Sir,  Mr.  Gray  did  not  inform  me  that  he  had  received 
any  letter  from  Ottawa.    I  had  no  communication  with  the  Attorney  Ge~ 


56 

neral  of  Québec  about  suit.  I  did  not  solicit  from  the  Attorney  General 
permission  to  institute  a  prosecution.  I  ani  not  aware  whether  the  firm  did 
or  did  not  ask  the  Attorney  General  for  permission  to  bring  an  action.  I 
cannot  say  whether  my  lawyer  did  or  did  not.  Personally  I  was  not  in- 
formed  by  my  lawyer  that  this  was  the  case,  but  it  might  hâve  bcen  told 
to  the  other  member  of  the  firm. 

Question. — You  allège,  in  your  action,  that  you  pay  heavy  taxes  ;  what 
is  the  araount  of  your  taxes  ? 

Answer. — I  cannot  say,  even  approximately. 

Question. — Since  Défendants  obtained  their  trade  mark,  hâve  you 
threatened  ail  the  druggists  or  any  of  them,  with  law  suits  and  damages,  to 
prevent  them  from  selling  Defendant's  Syrup  ? 

Answer. — No,  sir  ;  we  merely  notified  two,  I  believe, — not  ail  the 
druggists, — Devins  &  Bolton  and  Lymans  &  Clare. 

Question. — You  swear  positively  that  you  notified  no  body  eise  ? 

Answer. — I  swear  positively  that  I  notified  no  body  else,  except  in 
ordinary  conversation. 

Question. — What  kind  of  notification  did  you  give  them? 

Answer. — Nothing  more  than  ordinary  conversation. 

Question. — Messrs.  Lymans  &  Clare? 

Answer. — I  thing  that  through  our  solicitors  we  ordered  a  lawyer' s 
letter  to  be  written  to  them  ;  I  am  not  aware  that  a  lawyer's  letter  was  sent 
to  any  other  party. 

Question. — Did  you  threaten  Messrs.  Laviolette  &  Nelson  ? 

Answer. — No,  sir. 

Question. — Did  you  send  a  clerk  for  the  purpose  of  threatening  them 
with  a  suit  if  they  sold  that  Syrup  ? 

Answer. — I  never  sent  a  clerk  or  otherwise.  I  had  an  interview  myr 
self  with  Dr.  Laviolette,  but  I  used  no  threats.  I  told  him  that  we  intended 
commencing  légal  proceedings  against  the  Sisters  of  Providence,  and  asked 
him  as  ordinary  commercial  etiquet,  not  to  push  their  article  until  we  got 
the  case  settled.  I  am  positive  that  we  made  no  assertion  that  we  would 
sue  them. 

Question. — Did  not  your  firm  send  a  clerk  to  many  of  the  drug  stores 
and  groceries  in  the  city  about  that  affair  ? 

Answer. — No,  sir. 

Question. — You  never  authorized  any  onc  to  go  to  the  drug  stores,  and 
tell  parties  that  a  law  suit  was  to  be  instituted  against  the  Défendants  and 
that  if  they  sold  that  Syrup  they  would  incur  damages  ? 


57 

Answer. — I  never  authorized  any  person  to  do  so  and  are  not  aware 
that  any  such  authorization  corne  froin  the  firm. 

Question. — Did  you  send  printed  circulars  giving  that  information? 

Answer. — No,  sir,  never. 

Question. — Did  you  put  an  advertisement  in  the  papers  ? 

Answer. — We  put  notices  that  a  préparation  similar  to  ours  was  in  cir- 
culation, and  cautioning  people  to  beware  and  get  the  genuine. 

Question. — That  you  would  severely  proceed  against  any  party  ? 

Answer. — No,  sir,  that  infringement  of  our  trade  mark  would  be  pro- 
secuted.  In  our  advertisements  we  alluded  to  the  Syrup  of  the  Sisters. 
There  were  other  préparations  as  well  as  the  one  spoken  of. 

Question. — Do  you  swear  that  business  men,  generally  speaking,  dit  not 
understand,  by  thèse  notices  in  the  papers,  that  you  alluded  to  Défendants' 
Syrup  ? 

Answer. — The  caution  was  a  gênerai  one.  If  they  took  it  for  any 
particular  syrup  that  was  not  our  fault.  Being  shown  exhibit  No.  1  filed 
by  the  Plaintiffs,  I  recognize  it  as  our  trade  mark. 

Question. — State  what  you  consider  is  your  trade  mark  on  that  ? 

Answer. — I  consider  that  the  whole  wrapper  is  a  trade  mark,  that  the 
words  "  Syrup  of  Red  Spruce  Gum  "  constitutes  our  trade  mark.  I  prétend 
that  the  name  "  Syrup  of  Spruce  Gum  "  is  a  part  of  the  trade  mark. 

Question. — Is  not  the  Indian  part  of  the  trade  mark  ? 

Answer. — I  présume  it  is. 

Question.— Did  you  institute  a  suit  against  Dr.  Gauthier,  of  St.  Law- 
rence Main  Street  ? 

Answer. — We  did. 

Question. — Will  you  state  to  the  Court  what  was  the  infringement  you 
considered  lie  had  made  upon  your  trade  mark  ? 

Answer. — The  infringement  was  in  having  used  the  words  "Red 
Spruce  Gum."  He  called  it  an  Indian  Syrup,  composed  of  Red  Spruce  Gum. 
That  was  ail. 

Question. — Did  you  complain  that  he  used  the  portrait  of  an  Indian 
women  ? 

Answer.- — I  believe  not.  The  Indian,  as  far  as  the  eut  was  concerned, 
is  altogether  différent.  I  cannot  state  whether  we  alledged  that  in  your 
action.  The  principle  ground  was  the  infringement  of  the  trade  mark  in 
having  used  "Red  Spruce  Gum,"  in  connection  with  it. 

Are  you  positive  that  you  did  not  allège,  in  your  déclaration,  that  he 
had  infringed  upon  your  trade  mark  in  using  the  figure  of  an  Indian  women, 
very  similar  to  the  Indian  on  your  wrapper  ? 


58 

Answer. — I  will  not  swear  positively. 

Question. — Will  you  tell  me  how  many  gross  of  Gray's  Syrup  are  fabri- 
cated  by  your  house  annually  ? 

Witness  appealing  to  the  Court  against  the  question  was  ordered  to 
answer. 

Answer. — To  the  best  of  my  knowledge  and  belief,  we  sold  during  last 
year  — I  speak  of  the  year  from  the  date  in  which  Ave  took  the  trade  mark 
to  the  same  date  the  following  year — nine  hundred  gross,  to  the  présent 
date  of  tins  year,  somewhere  about  seven  to  eight  hundred  gross. 

Question. — It  was  said  by  one  of  your  witnesses  that  your  syrup  was 
an  artificial  remedy  ;  do  you  consider  it  in  that  light  ? 

Answer. — Certainly  it  is. 

Question. — Do  you  mean  that  there  is  no  spruce  gum  in  it? 

Answer. — I  mean  that  there  is  a  very  large  proportion  of  spruce  gum 
in  it, 

CROSS-EXAMINED. 

What  was  the  resuit  of  your  case  against  Dr.  Gauthier  ? 

Answer. — Judge  Torrance  granted  us  an  injunction  preventing  and 
restraining  Défendant  in  the  case  from  selling  or  causing  to  be  sold  or  using 
any  essential  portion  of  trade  mark.  He  has  complied  with  the  injunction. 

RE-EXAMINED. 

Question. — Did  you  abandon  that  law  suit  ? 

Answer. — No,  sir.   The  case  came  up  in  Court   and  was  discontinued 

CROSS-EXAMINED   ON    RE-EXAMINATION. 

It  was  the  Syrup  itself  that  had  disappeared.     The  bottles  were  there 
but  the  contents  were  emptied,  and  the  wrapper,  the  principal  part  wasgone. 
And  further  déponent  saith  not,  and  tins  déposition  having  been  read 
to  him,  he  déclares  it  to  contain  the  truth. 

S.  A.  ABBOTT, 

Stenographer. 


59 

Présent  :     The  Honorable  Mr.  Justice  Mackay. 

On  this  ninth  day  of  October,  in  the  year  of  our  Lord  one  thousand 
eight  hundred  and  seventy-six,  personally  came  and  appeared  JOHN 
KERRY,  of  the  City  of  Montréal,  Chemist,  Défendant,  aged  fifty-one  years-, 
a  witness  produced  on  the  part  of  the  Défendant,  who  being  duly  sworn 
deposeth  and  saith  : 

Question. — Had  }ou  any  relation  with  the  Agricultural  Department  at 
Ottawa,  concerning  the  trade  mark  of  the  Défendant  ? 

Answer. — No  Sir.  None  whatever.  I  made  no  opposition,  and  did 
not  hear  that  there  was  any  application  for  a  trade  mark. 

Question. — Nor  did  your  firm  hâve  any  correspondence  with  thé 
Department  of  Agriculture  ? 

Answer. — I  believe  not.     I  ne  ver  heard  of  any. 

Question. — So  that  you  ne  ver  communicated  with  the  Department  of 
Agriculture  concerning  that  trade  mark  ? 

Answer. — Except  otherwise  as  Mr.  Watson  stated  in  his  évidence  that 
on  hearing  there  was  a  trade  mark  granted,  lie  wrote  to  ask  about  it. 

Question. — Will  you  state  what  happened  in  the  Department  ? 

Answer. — After  we  saw  from  the  public  press  that  a  trade  mark  had 
been  granted  to  the  ladies,  we  wrote  to  Ottawa  for  particulars. 

Question. — And  you  got  them  ? 

Answer. — I  believe  so,  but  I  was  not  attending  to  that  myself. 

Question. — Now,  did  you  communicate  with  the  Attorney  General  ? 

Answer. — I  did. 

Question. — Did  you  not  solioit,  according  to  the  Code  of  Civil  procédure, 
from  the  Attorney  General,  permission  to  prosecute  in  his  own  name  what 
you  considered  a  violation  of  your  right,against  the  Sisters  of  the  Providence  ? 

Answer. — I  am  quite  aware  that  Mr.  Doutre  did  so  on  our  behalf. 

Question. — Did  you  not  solicit  yourself  personally  the  permission  from 
Dr.  Church,  the  Attorney  General  ? 

Answer. — I  had  an  interview  with  Dr.  Church,  in  Québec.  I  had 
gone  to  Québec  to  oppose  a  certain  Bill  that  was  introduced  on  behalf  of  the 
Sisters  of  Providence  Nunnery.  It  was  on  behalf  of  religious  communities, 
on  behalf  of  ail  religious  communities  I  went  down  to  Québec  to  oppose 
that  Bill  ;  and  in  the  course  of  conversation  with  the  Attorney  General,  We 
had  occasion  to  allude  to  our  suit  against  the  Nuns  ;  and  the  Attorney 
General  told  me  that  lie  had  not  been  able  to  reply  to  Mr.  Doutre  and  pro- 
mise the  use  of  his  name  in  this  action,  because  pressure  of  parliamentary 
business  had  prevented  him  from  paying  attention  to  the  case,  but  that  be 
should  grant  the  use  of  his  name  in  due  time. 


60 

Question. — And  you  are  not  aware  that  he  ever  granted  it  ? 

Answer. — No,  because,  in  further  conversation  with  him,  I  told  him  I 
was  so  satisfied  with  the  justice  of  our  suit,  and  the  strength  of  our  cause 
that  I  should  not  ask  it  ;  and  after  Parliament  was  over,  Mr.  Doutre  again, 
without  communicating  with  me,  wrote  to  ask  Dr.  Church  for  his  authority. 
Dr.  Church  wrote  to  ask  me  what  was  the  reason  of  it,  and  I  replied  that 
Mr.  Doutre  had  acted  without  speaking  to  me  in  the  matter,  and  I  should 
tell  him  that  we  no  longer  ask  the  Attorney  General  for  that  authority. 

Question. — At  ail  event  permission  was  asked  from  the  Attorney 
General  ? 

Answer. — And  the  Attorney  General  would  hâve  granted  it  if  we  had 
pressed  it. 

Question. — Will  you  tell  the  Court  what  taxes  you  paid  ? 

Answer. — I  remember  that  for  my  own  personal  tax  and  the  business 
tax  we  paid  the  other  day,  and  drew  a  chèque,  of  the  exact  number  of  cents 
I  do  not  remember,  but  it  was  over  nine  hundred  and  forty  five  dollars. 

Question.— Well  now,  do  you  remember  having  threatened  somebody 
with  law  suit  if  they  would  sell  that  syrup  of  the  Défendants. 

Answer. — Yes  I  do. 

Question. — Will  you  state  whom  you  hâve  so  threatened  ! 

Answer. — I  spoke  to  Mr.  Benjamin  Lyman  and  wrote  him  a  lawyer's 
letter.  I  spoke  to  Mr.  Benjamin  Lyman  in  a  sort  of  a  joke  before  I  knew 
that  they  had  taken  up  the  agency,  and  Mr.  Benjamin  Lyman  said  that  his 
firm  would  never  do  so  mean  a  thing  as  to  sell  an  opposition  article.  I  after- 
wards  went  to  Mr.  Henry  Lyman,  and  I  threatened  him  with  a  suit  in  case 
he  sold  the  thing. 

Question. — At  the  time  they  had  not  sold  the  article  ? 

Answer. — I  cannot  say  wheter  the}^  had  or  not,  but  I  threatened  Mr. 
Benjamin  Lyman  in  form,  because  he  was  the  Toronto  partner,  and  not 
much  hère. 

Question. — Of  a  law  suit  in  damages  ? 

Answer. — Yes. 

Question. — Will  you  mention  the  names  of  some  other  parties  to  whom 
you  made  such  threats. 

Answer.— I  did  not  speak  to  anybody  else,  I  do  not  remember  speak- 
ing to  Mr.  Devins  or  any  body  else. 

Question. — Hâve  you  not  sent  a  clerk  in  the  drug  stores  and  groceries 
to  tell  them  that  your  intention  was  to  take  a  suit  in  this  matter  ? 

Answer. — I  hâve  no  recollection  of  doing  any  thing  of  the  sort.  I  do 
not  believe  I  did. 


61 

Question. — You  did  not  threaten  them  that  law  suite  would  be  taken 
against  them,  or  an  action  in  damage?. 

Answer. — The  only  people  that  I  had  to  do  with,  in  threatening,  was 
Mr.  Benjamin  Lyman,  and  Mr.  Henry  Lyman,  to  the  best  of  my  knowledge 
and  belief. 

Question. — And  you  swear  positively  that  you  never  made  any  threats 
to  any  body  else,  and  that  your  firm  did  not  send  any  body  for  that  pur- 
pose  into  the  drug  and  grocery  stores. 

Answer. — I  swear  to  my  belief  I  did  not  certainly. 

Question. — Did  you  write  circulars  containing  the  saine  threats  ? 

Answer. — Well  I  could  not  say.  I  take  so  little  charge  of  the  business 
personalty.   I  could  not  say  what  was  done. 

Question. — Did  you  not  put  notices  in  the  newspapers  ? 

Answer. — Oh  !  We  had  a  variety  of  advertisementsin  the  newspapers. 

Question. — In  thèse  advertisements  did  you  not  say  that  those  who 
might  sell  that  composition  which  was  antagonistic  to  yours,  would  be  sued  ? 

Answer. — I  believe  the  advertisements  had  that  ténor.  I  am  almost 
certain  of  it. 

Question. — Did  you  not  allude  specially,  in  tins  advertisement,  to  the 
syrup  of  the  Défendant  ? 

Answer. — I  hâve  no  doubt  that  that  was  the  principle  object  of  our 
aminadversions,  being  the  one  that  was  the  most  largely  scattered,  but  we 
also  alluded  to  one  or  two  other  articles  brought  out. 

Question. — Is  it  not  to  your  knowledge  that  some  boy,  in  your  home, 
spoke  to  Mr.  La  violette  and  Nelson,  and  induced  them  to  discontinue  no- 
tices, which  they  had  put  in  the  newspapers  ofFering  Défendants'  Syrup  for 
sale. 

Answer. — I  hâve  no  doubt  that  we  did  speak  to  them.  I  heard  of  it 
at  the  time  that  we  had  asked  them,  as  apersonal  courtesy  that  one  man  in 
business  owed  to  another,  not  to  lend  themselves  to  what  we  thought  was 
an  infringement  on  our  rights. 

Question. — Did  you  not  ask  the  same  thing  against  many  other 
druggists  ? 

Answer. — I  could  not  say,  I  had  nothing  to  do  with  it. 

Question. — Did  you  not  speak  to  Dr.  Desrosier  on  St.  Joseph  Street. 

Answer. — I  did  not,  I  do  not  know  him,  I  do  not  know  him  by  right. 
I  could  not  say  whether  any  body  in  our  house  spoke  to  him.  I  hâve  not 
the  slightest  doubt  that  we  should  use  ail  the  influence  in  our  power  to 
restrain  every  body  from  selling  it. 

Question. — That  is  the  Syrup  of  the  Défendants? 


62 

Ànswer.  — Unquestionably . 

Question. — And  for  that  purpose  you  spoke  to  ail  the  druggists  you 
côuld  meet,  I  suppose  ? 

Answer. — I  spoke  to  no  one  but  the  two  Mr.  Lymans. 

Question. — When  you  say  that  you  yourself  personaly  spoke  to  Mr. 
Lymans  only,  who  is  the  person  of  your  firm  that  spoke  to  the  others  ? 

Answer. — Mr.  Watson  spoke  to  one  or  two. 

Question. — Were  you  and  Mr.  Watson  the  only  parties  who  took  some 
interest  in  the  matter  ? 

Answer. — I  believe  we  were  the  only  two  ;  I  do  not  think  we  had  any 
clerk  who  acted  in  this  matter.  We  sent  a  clerk  round  to  several  stores,  to 
see  what  people  were  selling.  He  was  instructed  to  go  to  several  stores  and 
ask  for  Gray's  Syrup  of  Red  Spruce  Gum,  and  lie  went  to  three  or  foui- 
stores  and  he  was  sold  the  Syrup  of  the  Sisters.  They  were  just  thèse 
corner  groceries  at  the  différent  parts  of  the  town  that  he  went  to. 

Question. — You  reçollect  that  suit  against  Dr.  Gauthier  ? 

Answer. — Yes. 

Question. — Do  you  reçollect  what  was  the  ground  of  the  suit? 

Answer. — The  ground  of  the  suit  was  an  infringement  on  our  trade 
mark. 

Question. — Do  you  reçollect  what  was  the  infringement? 

Answer. — A  colorable  imitation  coming  as  near  to  our  article  as  lie 
could,  without  actually  copying  the  whole  thing. 

Question. — Do  you  reçollect  that  there  was,  on  his  bottle,  an  indian 
female  having  much  likeness  to  that  of  the  Plaintiffs  ? 

Answer. — I  do  not  reçollect,  We  put  the  case  into  the  hands  of  our 
Advocates  and  they  managed  the  suit. 

Question. — And  this  suit  lias  been  discontinued  ? 

Answer. — Well  I  thought  not.  I  know  we  were  summoned  on  an 
enquête  not  long  ago  about  that  suit,  and  I  suppose  it  would  corne  on  for 
trial. 

OROSS-EXAMINKI'. 

Question.  —  You  bave  been  asked  what  amount  of  taxes  you  paid  : 
Does  the  amount  you  hâve  given  cover  the  tax  paid  by  your  partners  ? 

Answer. — No,  it  was  my  own  private  tax,  and  the  business  tax. 

Question. — Do  you  know  what  tax  the  Défendants  pay  ? 

Answer. — I  do  not  know,  but  by  common  report  they  are  exempt  l'rom 
ail  taxation. 


63 

Question. — Do  you  know  if  Dr.  Gauthier  has  been  restrainedbyjudge- 
ment  of  the  Court  froni  selling  his  produce  ? 

Answer. — Certainly. 

Question. — The  case  had  no  more  importance  after  that? 

Answer. — Not  at  ail. 

And  further  déponent  saith  not,  and  tins  his  déposition  having  been 
read  to  him,  lie  déclares  the  same  to  contain  the  truth. 

J.  W.  BUCKLEY, 

Sténographes. 


Présent  :    L'Hon.  Juge  Mackay. 

L'an  mil  huit  cent  soixante-seize,  le  neuvième  jour  d'Octobre,  est  com- 
paru JEAN-CHARLES  TACHÉ,  Député  du  Ministre  de  l'Agriculture  et 
médecin  de  la  ville  d'Ottawa,  District  d' Ottawa,  âgé  de  cinquante-six  ans, 
témoin  produit  par  les  Défenderesses,  lequel  après  serment  prêté,  dépose  et 
dit  : — Je  ne  suis  point  intéressé  dans  l'événement  de  ce  procès  :  je  ne  suis 
ni  parent,  ni  allié,  ni  au  service  d'aucune  des  parties  en  cette  cause,  je  con- 
les  Demandeurs  de  nom  seulement  et  pas  personnellement. 

Question. — -Vous  rappelez- vous  les  circonstances  qui  ont  accompagné 
l'enregistrement  de  la  marque  de  commerce  des  Demandeurs  en  cette  cause  ? 

Réponse. — Oui,  pour  m'en  être  informé  avant  de  partir  d'Ottawa,  en 
consultant  les  registres,  et  j'ai  apporté  avec  moi  tous  les  documents  qui  ont 
trait  à  cette  marque  de  commerce  et  à  son  enregistrement. 

Question. — Voulez- vous  référer  aux  deux  documents  que  voici,  exhi- 
bits  Nos.  3  et  4  des  Défenderesses,  et  nous  dire  ce  que  sont  ces  documents  ? 

Réponse. — Je  reconnais  le  document  que  voici,  comme  étant  la  marque 
de  commerce  des  Sœurs  de  la  Providence,  et  cet  autre  papier  est  la  demande 
d'enregistrement  qui  accompagne  toujours  l'échantillon  ;  pour  relier  les 
papiers  ensemble,  le  certificat  avec  la  demande,  et  la  demande  avec  l'échan- 
tillon.    Le  certificat  que  voici  porte  ma  signature. 

Question. — Veuillez  maintenant  référer  à  ces  documents,  et  nous  dire 
quelles  dates  ils  portent  respectivement  ? 

Réponse. — L'un  des  certificats  est  en  date  du  neuf  Mars,  mil  huit  cent 
soixante-quinze,  et  l'autre  du  trente  Mars,  de  la  même  année. 

Question. — Pouvez- vous  expliquer  comment  ces  deux  marques  de  com- 
merce ont  été  enregistrées  à  des  dates  aussi  rapprochées  ? 


64 

Réponse.  —  Je  crois  que  la  seconde  marque  de  commerce  ne  s'applique 
pas  seulement  à  un  objet  particulier,  mais  à  une  marque  générale.  Notre 
législation,  au  moins  dans  l'interprétation  qu'on  lui  a  donné  en  Canada,  dif- 
fère de  celle  d'autres  pays.  Dans  ces  pays-là,  la  même  marque  de  commerce 
peut  servir  à  différents  négociants  vendant  des  produits  différents.  Nous 
avons  admis  en  pratique  ici  en  Canada  que  la  même  marque  de  commerce 
peut  servir  à  différents  négociants  vendant  des  produits  différents,  et  qu'un 
négociant  peut  prendre  une  marque  de  commerce  servant  à  tous  ses  produits  ; 
et  ceci  est  une  marque  de  commerce  que  j'appellerai  générale,  tandis  que 
l'autre  marque  de  commerce  spécifie  la  matière  vendue. 

Question. — Depuis  combien  de  temps  êtes- vous  à  la  tête  de  votre 
département  ? 

Réponse. — Depuis  mil  huit  cent  soixante-quatre. 

Question. — Vous  vous  êtes  occupé  spécialement  de  ces  matières-là 
n'est-ce  pas  ? 

Réponsee. — Tout-à-fait  spécialement.  Il  ne  se  passe  pas  de  semaine 
dans  l'année  que  je  n'aie  plusieurs  cas  comme  le  présent  à  décider.  Toutes 
les  questions  difficiles  me  sont  soumises,  et  cela  depuis  douze  ans. 

Question. — Voulez-vous  prendre  connaissance  de  la  pièce  exhibit  No  1 
des  Demandeurs,  et  nous  dire  si  vous  connaissez  cette  pièce  ? 

Réponse. — Cette  pièce  est  la  demande  de  Monsieur  Gray,  non  pas  des 
Demandeurs  ;  de  Monsieur  Gray  qui  est  l'auteur  des  Demandeurs.  Ceci  est 
sa  demande  avec  le  certificat  signé  par  moi,  et  la  demande  qui  réfère  à 
l'échantillon  ;  et  cet  échantillon  est  le  même,  à  toutes  fins,  que  celui  déposé 
au  bureau  chez  nous. 

Question. — Voulez- vous  nous  dire  ce  qui,  dans  cet  échantillon,  constitue 
la  marque  de  commerce  ? 

Réponse. — C'est  l'ensemble  ;  ainsi,  une  partie  moyenne  enfermée  dans 
un  parallellogramme  avec  le  nom  du  produit  ;  en  tête,  la  figure  d'un  sau- 
vage, et  au  bas  le  nom  du  producteur,  et  l'arrangement  général.  Ce  n'est 
pas  une  marque  de  commerce  caractérisée  par  un  motto  ou  par  un  nom,  mais 
c'est  une  étiquette  dont  le  Demandeur  a  fait  mention  dans  sa  demande  ;  et 
alors  même  qu'il  n'en  aurait  pas  fait  mention,  cela  ne  changerait  rien  à  la 
nature  de  son  étiquette. 

Question. — Je  vois  dans  ce  document,  c'est-à-dire  dans  l'application, 
les  mots  suivants  :  "  The  said  trade  mark  codsist  of  the  words  "  Sirup  of 
Red  Spruce  Gum,  as  printed."  Voulez- vous  nous  dire  si  la  marque  de 
commerce  a  été  accordée  telle  que  demandée  ? 

Réponse. — La  marque  de  commerce  accordée,  c'est  l'étiquette  ;  les  cer- 
tificats sont  faits  seulement  pour  rattacher  le  document  officiel  avec  l'objet. 


65 

Il  y  a  des  marques  de  commerce  qui  sont  composées  d'un  motto;  d'autres  du 
nom  du  négociant  seulement,  et  d'autres  composées  de  couleurs  imprimées. 
Cette  demande-là  et  ce  certificat-là  n'ont  aucune  autre  valeur  que  de  ratta- 
cher le  document  officiel  à  la  matière  de  l'enregistrement. 

Je  produis  les  règlements  du  bureau  des  marques  de  commerce,  for- 
mant l'exhibit  R  des  Défenderesses. 

Question. — Quand  les  défenderesses  ont  fait  application  pour  ces  mar- 
ques de  commerce,  vous  en  êtes- vous  occupé  spécialement  ? 

Réponse. — Oui,  non-seulement  de  celles-là;  mais  il  y  a  eu  deux  autres 
demandes  de  marques  de  commerce  pour  la  vente  d'un  produit  similaire, 
par  M.  Dudevoir  et  le  Dr.  Gauthier  ;  et  leur  demande  à  tous  deux  a  été 
refusée,  parce  qu'elles  venaient  en  concurrence  avec  celle  de  M.  Gray,  et 
celle  des  Sœurs  de  la  Providence  a  été  accordée  ;  parce  qu'elle  ne  venait  pas 
en  concurrence  avec  celle  de  M.  Gray. 

Je  produis  la  correspondance  ayant  rapport  à  l'application  pour  l'ob- 
tention de  toutes  ces  marques  de  commerce. 

Question. — Quand  vous  avez  examiné  l'application  des  Défenderesses, 
vous  rappelez-vous  avoir  référé  à  la  marque  de  commerce  de  M.  Gray  ? 

Réponse. — Non  seulement  je  me  rappelle  y  avoir  référé,  mais  il  y  a  même 
des  lettres  antérieures  qui  se  rapportent  à  cette  demande,  dont  MM.  Dude- 
voir et  Gauthier  étaient  les  correspondants.  Les  demandes  de  M.  Dudevoir 
et  de  M.  Gauthier  ont  été  refusées  pour  les  causes  assignées  dans  les  dites 
correspondances. 

Question. — Vous  avez  parlé  de  ces  deux  applications  qui  avaient  été 
refusées.  Quant  à  la  première  application  des  Demandeurs,  avez-vous  éga- 
lement pris  en  considération  leur  marque  do  commerce  lors  de  la  demande 
des  Défenderesses  ? 

Réponse. — Oui,  monsieur. 

Question. — Et  vous  avez  examiné  soigneusement  s'il  y  avait  quelque 
similitude,  de  près  ou  de  loin,  entre  les  deux  marques  de  commerce  ? 

Réponse. — Oui,  et  il  n'y  en  a  pas.  J'ai  eu  recours  aux  autorités  sur  la 
matière,  et  je  me  suis  convaincu  qu'il  n'y  a  pas  de  similitude. 

Question. — Voulez- vous  référer  de  nouveau  aux  deux  marques  de  com- 
merce et  voir  si  elles  sont  semblables  en  quelques  points  ? 

Réponse. — Il  n'y  a  rien  qui  se  ressemble  dans  ces  deux  marques  de 
commerce,  excepté  le  nom  de  la  matière  qui  est  l'objet  du  négoce;  or,  le 
nom  de  la  matière  qui  est  l'objet  du  négoce  ne  peut  pas  être  une  similitude. 
Ainsi,  ira  homme  ne  pourra  pas  prendre  pour  marque  de  commerce  les  mots  : 
"  Du  savon  parfumé,"  parce  qu'il  n'y  a  pas  moyen  de  nommer  du  savon 
parfumé  autrement  que  du  savon  parfumé. 


66 

Question. — Y  at-il  eu,  à  votre  département,  soit  par  M.  Gray,  soit  par 
ses  cessionnaires,  les  Demandeurs  actuels,  quelque  objection  ou  plainte,  au 
sujet  de  ces  enregistrements  de  inarques  de  commerce? 

Réponse. — Il  y  a  eu  des  plaintes  de  laites  après  l' enregistrement.  On 
ne  donne  avis  aux  parties  intôi'essées  que  dans  le  cas  où  il  y  a  concurrence, 
et  quand  il  y  a  lieu  de  faire  l'application  de  la  sixième  clause  de  l'acte  de 
mil  huit  cent  soixante  et  huit.  Après  l'enregistrement  de  la  marque  de 
commerce  des  Sœurs  de  la  Providence,  M.  Gray  a  écrit  deux  lettres  qui  sont 
ici  produites,  et  quelque  temps  après,  MM.  Kerry,  Watson  &  Cie.  nous  ont 
passé  une  défense  d'user  (inj miction) ,  portée  par  le  juge  Torrance  contre  le 
Dr.  Gauthier.     Ce  sont  là  toutes  les  communications  qui  ont  eu  lieu. 

Question. — De  sorte  que  d'après  votre  expérience,  les  mots  "Sirop  de 
Gomme  d'Epinette  "  ne  peuvent  pas  être  une  partie  essentielle  de  la  mar- 
oue  de  commerce. 

Réponse. — C'est  une  partie  de  la  marque  de  commerce  en  ce  sens  que 
ça  indique  le  produit  vendu  ;  mais  à  part  cela,  et  à  l'encontre  des  brevets 
d'invention,  le  produit  ou  sa  désignation  ne  constituent  pas  une  marque  de 
commerce. 

Question. — Cet  acte  des  marques  de  commerce,  auquel  vous  référez,  le 
connaissez-vous  bien  ? 

Réponse. — Parfaitement.  L'acte  de  mil  huit  cent  soixante  et  huit  est 
l' acte  renouvelé  depuis  la  confédération,  avec  des  changements,  et  c'  est 
moi-même  qui  ai  préparé  la  loi. 

Question. — Voulez- vous  maintenant  examiner  ces  deux  pièces-ci,  l'une 
est  le  Sirop  des  Demandeurs,  et  l'autre  le  Sirop  des  Défenderesses  ? 

Réponse. — Oui,  et  je  vois  que  l'une  de  ces  pièces  est  couverte  de  la 
marque  de  commerce  de  M.  Gray,  et  l'autre  de  la  marque  de  commerce  des 
Sœurs  de  la  Providence. 

Question. — Voulez- vous  nous  dire  si  vous  trouvez  quelque  ressemblance 
entre  ses  deux  pièces  ? 

Réponse. — Je  ne  vois  pas  du  tout  de  ressemblance  ;  je  ne  vois  pas  de 
concurrence  entre  les  deux.  C  est  à  l'effet  de  vendre  le  même  remède,  ou 
l'équivalent,  mais  quant  à  l'essence  de  la  marque  de  commerce,  il  n'y  a  pas 
de  ressemblance. 

Question. — Voulez-vous  nous  dire  ce  que  vous  entendez  par  "  le  même 
remède  ou  l'équivalent  ?  " 

Réponse. — C'est-à-dire,  quelque  chose  qui  se  ressemble  ;  ainsi,  ou  peut 
faire  du  sirop  de  rhubarbe,  dans  lequel  il  entrera  d'autres  ingrédients,  mais 
ce  sirop  ne  portera  que  le  nom  de  sirop  de  rhubarbe  ;  il  en  est  de  même 
pour  ces  sirops-ci  qui  contiennent,  je  pense,  de  la  gomme  d'épinette.   Je  pré- 


67 

sume  que  ces  deux  sirops  contiennent  du  sucre  et  de  la  gomme  d'épinette 
rouge,  parceque  c'est  la  signification  naturelle  des  mots  :  "  Sirop  de  Gomme 
d'Epinette  Rouge." 

Question. — Voulez- vous  faire  attention  si  le  mot  "rouge"  est  indiqué 
dans  le  sirop  des  Défenderesses  ? 

Réponse. — Il  n'y  a  que  "  Spruce  Gum"  ici,  et  il  y  a  "  Red  Spruce 
Gum"  dans  la  marque  de  commerce  de  Monsieur  Gray.  " Spruce  Gum"  ou 
"  Red  Spruce  Gum"  ne  fait  rien  à  la  marque  de  commerce,  quoique  cela 
puisse  faire  quelque  chose  pour  le  produit. 

Question. — Voulez- vous  examiner  les  deux  bouteilles  et  nous  dire  si 
vous  trouvez  quelque  ressemblance  entre  les  deux  produits  ? 

Réponse.— Leur  apparance  visible  n'est  pas  la  même  :  l'un  est  rouge, 
et  l'autre  est  blanc  ;  l'un  à  l'air  d'un  sirop,  mais  l'autre  à  l'air  d'une  émul- 
sion  sirupeuse. 

Question. — Connaissez- vous  ces  sirops-là  ? 

Réponse. — Je  ne  connais  pas  du  tout  ces  sirops-là. 

Question.— Croyez-vous,  docteur,  qu'il  soit  vraisemblable  qu'une  per- 
sonne puisse  confondre  ces  deux  sirops,  considérant  la  manière  dont  ils  sont 
offerts  en  vente,  et  la  manière  dont  ils  sont  enveloppés  ? 

Réponse.— Je  ne  crois  pas  qu'on  puisse  prendre  la  marque  de  commerce 
des  Sœurs  de  la  Providence,  pour  une  imitation  de  celle  de  monsieur  Gray, 
car  les  deux  enveloppes  ne  sont  pas  les  mêmes. 

Question. — Ce  genre  d'envelopper  a-t-il  quelque  ressemblance  ou  simi- 
litude avec  celui  de  monsieur  Gray? 

Réponse. — Je  n'en  vois  pas.  Il  faut  bien  naturellement,  que  les 
remèdes  soient  enveloppés  dans  quelque  chose.  Voici,  je  suppose,  le  même 
remède,  ou  deux  remèdes  différents  qui  sont  vendus  ;  je  maintiens  que 
l'acheteur  intelligent  ne  peut  pas  prendre  l'un  pour  l'autre. 

Question. — Est-ce  que  ça  requèrerait  une  dose  considérable  d'intelli- 
gence pour  en  faire  la  différence  ? 

Réponse.— Je  crois  que  le  commun  des  acheteurs  distingueraient  entre 
une  marque  de  commerce  et  l'autre.  Je  ne  vois  pas  du  tout  de  similitude  ■ 
si  j'en  avais  vu,  j'aurais  refusé  la  demande  d'une  marque  de  commerce, 
comme  je  l'ai  fait  dans  le  cas  de  Monsieur  Diulevoir  et  du  docteur  Gauthier. 

Question. — Croyez- vous  qu'un  pharmacien  puisse  se  tromper  et  donner 
Y  une  de  ces  préparations  pour  l'autre  ;  en  supposant  qu'on  lui  demande  le 
sirop  des  Demandeurs,  peut-il  se  tromper  ? 

Réponse. — Non,  monsieur,  à  moins  d'y  mettre  de  la  mauvaise  foi.  Je 
vois  ici  un  sirop  fabriqué  par  les  Sœurs  de  la  Providence,  avec  une  marque 


68 

île  commerce  particulière,  et  un  autre  sirop  avec  une  marque  de  commerce 
différente. 

Question. — Ces  deux  productions  sont-elles  un  sirop  ? 

Réponse. — Je  n'en  sais  rien,  ne  les  ayant  ni  examinées,  ni  analysées. 

Un  sirop  est  une  substance  dans  laquelle  le  sucre  entre  pour  matière 
principale  et  auquel  on  peut  ajouter  un  ingrédient  quelconque  ;  c'est  de  la 
matière  saccharinée  chargée  d'éléments  médécinaux,  à  l'état  de  sirop. 

Question. — Considérez- vous  qu'il  y  a  quelque  chose  dans  le  sirop  des 
Défenderesses,  arrangé  comme  vous  le  voyez  dans  l'exhibit  B  des  Deman- 
deurs et  dans  l'exhibit  numéro  deux  des  Défenderesses,  qui  puisse  induire 
à  croire  que  ce  sirop  des  Défenderesses  est  fabriqué  par  monsieur  Gray  ? 

Réponse. — Au  contraire,  puisqu'il  est  dit  qu'il  est  fabriqué  expressé- 
ment par  les  Sœurs  de  la  Providence. 

Transquestionné. 

Question. — Vous  avez  dit,  je  crois,  docteur,  que  les  mots  "  Sirop 
d'Epinette  Rouge  "  ou  "  Sirop  d'Epinette,"  n'affectent  pas  la  marque  de 
commerce,  mais  seulement  le  produit  ? 

Réponse. — Ces  mots  là  comportent  le  nom  du  négoce,  mais  ne  sont  pas 
la  caractéristique  du  négociant. 

Question. — Voulez-vous  dire  quels  sont  les  motifs  que  vous  ont  induit 
à  dire  à  monsieur  Dudevoir  et  à  monsieur  Gauthier  que  vous  ne  pouviez 
pas  leur  donner  leur  marque  de  commerce  ? 

Réponse. — Les  deux  échantillons  fournis  par  monsieur  Dudevoir  et 
monsieur  le  docteur  Gauthier  avaient  la  forme  caractéristique  de  la  marque 
de  commerce  de  M.  Gray  :  c'était  un  parallélogramme  allongé  et  le  nom 
du  produit  était  en  tête,  et  au  milieu,  au  lieu  de  la  figure  d'un  sauvage,  il  y 
avait  une  figure  de  femme  sauvage,  et  le  nom  de  monsieur  Dudevoir  et  du 
docteur  Gauthier  étaient  placés  au  même  endroit  que  celui  de  M.  Gray, 
dans  sa  marque  de  commerce  ;  les  deux  parallélogrammes  de  côté  étaient 
au  même  endroit  et  pouvaient  être  confondus  avec  la  marque  de  commerce 
de  Mr.  Gray,  et  c'est  pour  cela  qu'on  leur  a  refusé  leur  marque  de  commerce. 

Question. — Citez,  de  votre  lettre  les  raisons  données  à  monsieur  Dude- 
voir pour  lui  refuser  la  marque  de  commerce  qu'il  sollicitait  '.' 

Réponse. — Cette  lettre  est  en  date  du  quinze  Février  mil  huit  cent 
soixante-quinze  et  est  ainsi  conçue  :  "En  réponse  à  votre  lettre  du  treize 
courant,  relativement  à  votre  "  Sirop  sauvage,  composé  de  Gomme  d'Epi- 
nette Rouge,"  j'ai  à  vous  informer  que  ces  mots  désignant  le  produit  mis 
en  vente  ne  peuvent  pas  d'eux-mêmes  constituer  une  marque  de  commerce, 


69 

bien  que  ces  mots,  d'après  la- pratique  suivie,  peuvent  entrer  comme  détail 
dans  la  confection  d'une  étiquette  dont  l'ensemble  peut  constituer  une 
marque  de  commerce  ;  l'étiquette  transmise  parait  ressembler  trop  à  celle 
déjà  en  usage  pour  constituer,  telle  quelle,  un  privilège  exclusif." 

Question.— Maintenant,  voulez-vous  nous  dire  à  quelle  étiquette  vous 
faites  allusion  dans  la  dernière  phrase  de  votre  lettre  ? 

Réponse. — Je  faisais  allusion  à  la  marque  de  commerce  de  M.  Gray. 

Question. — Voulez- vous  nous  dire  maintenant  si  l'enveloppe  qui  se 
trouve  sur  les  boîtes  enfermant  les  bouteilles  des  sœurs  Défenderesse  est 
enregistrée  ? 

Réponse. — Oui,  la  marque  de  commerce  est  enregistrée. 

Question. —  Quelle  est  la  partie  qui  est  enregistrée  ? 

Réponse. — C'est  la  caractéristique  de  la  marque  de  commerce  des  Sœurs 
de  la  Providence,  et  constituée  dans  l'empreinte  du  sceau  de  la  congrégation, 
avec  l'exergue  :    "  Charitas  Christi  urget  nos." 

Question. — Vous  avez  dit,  je  crois,  que  vous  n'aviez  donné  aucun  avis 
ni  à  Monsieur  ni  aux  Demandeurs,  de  la  demande  faite  par  les  Sœurs  de  la 
Providence  ? 

Réponse. — Non,  et  on  ne  donne  avis  que  lorsqu'il  y  a  concurrence. 

Question. — Dans  la  lettre  que  vous  avez  écrite  en  date  du  vingt  trois 
février  au  docteur  Gauthier,  qui  paraît  être  presque  la  même  que  celle  écrite 
à  M.  Dudevoir,  vous  faisiez  encore  allusion,  dans  la  dernière  phrase  de  cette 
lettre,  à  l'étiquette  de  Monsieur  Gray,  n'est-ce  pas  ? 

Réponse. — Oui,  monsieur,  c'était  à  l'étiquette  de  Monsieur  Gray  que  je 
faisais  allusion. 

Question. — Dans  ce  temps  là,  n'est-ce  pas,  les  sœurs  n'avaient  pas 
encore  transmis  de  demande  ? 

Réponse. — Il  n'a  été  transmis  de  demande  par  personne,  ni  depuis  non 
plus;  c'est  là  tout  le  dossier  de  mon  bureau. 

Question. — Comme  médecin,  vous  avez  dû  étudier  la  chimie  n'est-ce 
pas? 

Réponse — Je  ne  suis  pas  chimiste,  mais  j'ai  étudié  la  chimie. 

Question. — -La  gomme  d'épinette  est-elle  susceptible,  par  elle-même,  de 
faire  un  sirop  ? 

Réponse. — On  ne  peut  pas  extraire  un  sirop  de  la  gomme  d'épinette, 
mais  on  peut  faire  un  sirop  qui  contienne  de  la  gomme  d'épinette  ;  mais  ce 
n'est  pas  une  opération  chimique. 

Question. — Un  sirop  peut-il  devenir  un  terme  générique,  parce  qu'il  est 
allié  à  une  autre  matière  qui  ne  contient  aucune  matière  saccarine  ? 

Réponse. — Si  vous  faites  un  sirop  qui  contienne  une  autre  matière  que 


70 

du  sucre  dilué,  il  faut  que  vous  nommiez  l'autre  matière  qui  entre  dans  ce 
sirop,  car  il  n'y  aurait  pas  moyen  de  le  faire  comprendre  autrement. 

Question. — Vous  avez  entendu  dire  qu'il  y  avait  du  sirop  de  canne  et  du 
sirop  de  betterave,  eh  bien  !  le  mot  syrop  n'est-il  pas  là  dans  une  acception 
générique,  lorsque  vous  dites  du  sirop  de  canne  et  du  sirop  de  betterave  ? 

Réponse  — Il  l'est;  de  même  il  y  a  du  sirop  de  sucre  de  betterave,  de 
sucre  de  canne,  de  sucre  d'érable,  et  si  on  veut  désigner,  avec  l'un  de  ces 
sirops,  une  préparation  quelconque,  on  peut  nommer  le  sirop  ou  ne  pas  le 
nommer.  Le  mot  sirop  veut  dire  une  matière  saccarine  diluée,  c'est-à-dire 
à  l'état  liquide. 

Question. — Il  est  bien  entendu,  n'est-ce  pas,  que  c'est  votre  opinion 
que  la  gomme  d'épinette  ne  peut  pas  faire  un  sirop  ? 

Réponse.— Oui,  à  moins  qu'on  ne  puisse  extraire  de  la  matière  sacca- 
rine de  la  gomme  d'épinette,  ce  qui  n'a  pas  encore  été  fait  à  ma  connaissance. 

Question. — Avez- vous  souvenir  d'un  enregistrement  qui  avait  été  fait 
par  MM.  Lyman  &  Clare  de  ce  produit-ci:  "Lyman' s  Uni  versai  Pain 
Killer?" 

Réponse. — Oui,  c'est  une  question  qui  a  été  portée  au  contentieux  admi- 
nistratif, en  vertu  de  la  clause  sixième  de  l'acte  des  marques  de  commerce 
de  mil  huit  cent  soixante  et  huit. 

Question. — Cette  marque  de  commerce  n'a-t-elle  pas  été  enregistrée  par 
MM.  Lyman  &  Clare  ? 

Réponse.— Oui,  et  MM.  Perry  Davis  et  leurs  successeurs  ont  demandé 
l'enregistrement  de  la  même  marque  de  commerce,  et  le  résultat  a  été  ceci  : 
que  la  caractéristique  de  la  marque  de  commerce  étant  les  mots  Pain  Killer, 
qui  n'étant  ni  un  nom  générique,  ni  une  désignation  nécessaire,  mais  une 
association  singulière  de  mots,  imaginée  pour  constituer  une  marque  de  com- 
merce, constituaient  en  soi  la  marque  de  commerce. 

Question. — Vous  rnppelez-vous  vers  quel  temps  MM.  Lyman  &  Clare 
ont  demandé  leur  marque  de  commerce  ? 

Réponse.— Je  ne  saurais  le  dire  ;  je  ne  puis  me  rappeler  tout  ce  qui  se 
passe  dans  le  bureau  sans  avoir  recours  aux  documents. 

Question. — Lorsque  MM.  Lyman  &  Clare  ont  enregistré  cette  marque 
de  commerce,  vous  connaissiez,  n'est-ce  pas,  le  remède  de  MM.  Perry  Davis? 

Réponse. — Administrativement,  je  ne  le  connaissais  pa s. 

Question.— Et  individuellement,  le  connaissiez-vous  ? 

Réponse. — Je  ne  m'en  rappelle  pas  du  tout;  il  est  probable  que  j'aie 
vu  des  affiches  de  cette  préparation,  mais  je  ne  m'en  suis  jamais  occupé. 
Quand  MM.  Lyman  &  Clare  ont  fait  la  demande  de  leur  marque  de  com- 
merce pour  leur  Pain  Killer,   nous  avons  fait  la  recherche  voulue  dans  nos 


71 

livres,  et  la  leur  avons  accordé  parce  qu'il  n'y  avait  rien  de  semblable  d'en- 
registré. A  quelque  temps  de  là,  MM.  Perry  Davis  étant  venus  nous 
demander  d'enregistrer  la  même  marque  de  commerce,  nous  avons  averti 
MM.  Lyman  &  Clare  et  M.  Davis  d'avoir  à  comparaître  à  tel  jour,  avec  leurs 
témoins,  en  vertu  de  la  loi,  pour  déterminer  lequel  des  deux  était  le  véri- 
table propriétaire  de  cette  marque  de  commerce  ? 

Question. — Laquelle  de  ces  deux  marques  de  commerce  est  restée  enre- 
gistrée ? 

Réponse. — Celle  de  M.  Perry  Davis  ;  la  marque  de  MM.  Lyman  & 
Clare  a  été  radié,  parce  que  celle  de  M.  Perry  Davis  avait  la  propriété 
d' usage. 

Question. — D'après  votre  manière  d'interpréter  la  loi,  si  quelqu'un  se 
présentait  pour  demander  l'enregistrement  d' une  marque  de  commerce  qui 
ne  serait  pas  encore  dans  vos  registres,  mais  que  vous  connaîtriez  person- 
nellement comme  étant  d'un  usage  trôs-ôtendu,  enregisteriez-vous  cette 
marque  de  commerce  ? 

Réponse. — Oui,  sans  broncher,  et  voici  la  clause  de  la  loi  qui  ne  vous 
laisse  pas  d'alternative,  c'est  la  clause  première  de  l'acte  de  mil  huit  cent 
soixante  et  huit. 

Question. — Vous  avez  dit,  je  crois,  que  dans  le  cas  des  Sœurs  de  la 
Providence,  aussi  bien  que  dans  tous  les  cas  de  demandes  de  marques  de 
commerce,  que  les  mots  :  '•  Syrup  of  Red  Spruce  Gum"  ou  les  mots  Sirop  de 
Gomme  d' Epinette,  ne  constituaient  pas  la  marque  de  commerce  ? 

Réponse. — Non,  c'est  là  le  nom  générique  du  produit,  et  on  ne  peut  pas 
le  désigner  autrement. 

Question. — S'il  en  est  ainsi,  veuillez  nous  expliquer  le  certificat  que 
vous  avez  donné  à  M.  Gray,  et  ce  qui  resterait  de  la  marque  de  commerce 
des  Demandeurs,  si  ces  mots  étaient  supprimés  dans  le  certificat  qui  est  ainsi 
conçu:  "  This  is  to  certify  that  this  trade  mark,  which  consists  of  the 
"  Syrup  of  Red  Spruce  Gum,  has  been  registered  in  trade  mark  (register 
"No.  3,  folio  348). 

Réponse. — Il  resterait  l'échantillon  fourni  par  monsieur  Gray  de  sa 
marque  de  commerce,  qui  est  la  matière  essentielle  de  l'enregistrement  ;  le 
certificat  mis  au  dos  de  la  demande  n'est  qu'une  manière  de  rattacher  les 
procédés  de  l'enregistrement  avec  la  matière  essentielle  du  dépôt,  et  ce  cer- 
tificat doit  se  lire,  non  pas  séparément,  mais  conjointement  avec  la  demande 
et  l'échantillon  déposé. 

Question. — Veuillez  nous  dire  si  l'étiquette  dont  vous  parlez  dans  votre 
dernière  réponse,  se  trouve  décrite  soit  dans  la  demande  de  M.  Gray,  soit 
dans  votre  certificat,  ou  dans  aucune  partie  de  vos  registres  ? 


•      72 

Réponse. — L'étiquette  elle-même  est  déposée  dans  nos  registres,  non- 
seulement  comme  partie  du  dépôt,  mais  comme  l'essence  du  dépôt,  et  autres 
documents  ne  sont  faits  que  pour  rattacher  les  actes  administratifs  à  cette 
essence  du  dépôt.  L'étiquette  se  trouve  décrite,  en  somme,  dans  la  demande 
de  monsieur  Gray,  dans  les  termes  suivants  :  "  The  said  trade  mark  con- 
"  sists  of  the  words  "  Syrup  of  Red  Spruce  Gum,"  as  printed  and  arranged 
"  on  the  accompanying  wrapper,"  se  rattachant  à  l'étiquette,  telle  quelle, 
déposée  dans  nos  archives. 

Question. — Comment  cette  étiquette-là  est-elle  conservée  dans  vos 
archives  ? 

Réponse. — Dans  un  livre,  et  elle  se  trouve  collée  à  la  demande. 

Question. — Cette  demande  est-elle  copiée  dans  un  livre  ? 

Réponse. — Non,  c'est  un  double  fait  par  le  Demandeur  lui-même. 

Question. — Il  n'y  a  pas  d'autres  descriptions  que  celle  que  vous  venez 
de  citer,  nulle  part  ? 

Réponse.-— Nulle  part,  si  ce  n'est  l'étiquette  elle-même. 

Question. — Avez-vous  eu  connaissance  d'un  remède  enregistré  sous  le 
nom  de  "  Balsam  of  wild  Cherry  ?  " 

Réponse.— Il  est  possible,  mais  je  ne  m'en  rappelle  pas. 

Question.— Ces  mots-là  pourraient-ils  faire  partie  d'une  marque  de 
commerce  ? 

Réponse. — Pas  comme  caractéristique.  Il  n'y  a  pas  une  ligne  bien 
définie  dans  certains  cas.  Il  se  présente  bien  souvent  des  cas  dans  lesquels 
il  est  difficile  de  dire  si  c'est  un  nom  générique  ou  une  association  singulière 
de  mots.  Je  pense  que  ces  mots  :  "  Balsam  of  wild  Cherry,"  ne  peuvent 
pas  faire  la  caractéristique  d'une  marque  de  commerce. 

Question.— Est-ce  que  les  mots:  "Gomme  d'Epinette  Sucrée"  ne 
voudraient  pas  dire  à  peu  près  la  même  chose  que  "Sirop  de  Gomme  d'E- 
pinette ?  " 

Réponse. — Oui,  à  peu  près,  mais  ça  ne  dirait  pas  que  c'est  à  l'état 
liquide,  tandis  que  le  mot  sirop  dit  que  c'est  à  l'état  liquide. 

RÉ-EXAMINÉ. 

Question.— Vous  rappelez-vous  qu'il  n'y  a  pas  une  substanc  qui  est 
enregistrée  sous  le  nom  <l  Wistar's  Balm  Cherry  ?  " 

Réponse. — Je  ne  voudrais  pas  dire  dans  mon  témoignage  si  elle  est 
enregistrée  ou  non,  sans  référer  à  nos  archives. 

Question. — Verriez-vous  une  grande  différence  entre  ces  deux  phrases- 
oi  :    "  Balsalm  of  wild  Cherry,"  et  u  Wistar's  Balsalm  of  wild  Cherry  °" 


fa 

Réponse. — Oui,  car  s'il  y  a  le  nom  de  Monsieur  Wistar,  ça  fait  toute  M 
différence  du  monde,  car  la  caractéristique  d'une  marque  de  commercé  ëë 
rattache  à  la  personne  du  vendeur. 

Question. — Si  j'ai  bien  compris  la  portée  de  la  décision  que  vous  venez 
de  citer  dans  l'affaire  de  MM.  Lyman  &  Clare  et  Perry  Davis,  cette  décision 
signifiait  que,  dans  un  cas  où  le  nom  peut  être  la  caractéristique  de  la  mar- 
que de  commerce,  ou  l'essence  de  la  marque  de  commerce,  malgré  que  cette 
marque  de  commerce  ait  été  enregistrée,  le  propriétaire  perdrait  son  enre- 
gistrement dès  qu'une  autre  personne  requérait  l'enregistrement  du  même 
nom  et  prouverait  priorité  d'usage  ? 

Réponse. — Oui,  et  c'est  le  cas  de  M.  Perry  Davis  et  de  MM.  Lyman  & 
Clare.  C'est  l'application  de  la  clause  sixième  de  l'acte  des  marques  de 
commerce. 

Et  le  déposant  ne  dit  rien  de  plus.  La  présente  déposition  lui  ayant 
été  lue,  il  a  déclaré  qu'elle  contenait  la  vérité  et  y  a  persisté. 

J.  T.  THOMPSON, 

Sténographe. 


Présent  :  Tue  Honorable  Mr.  Justice  Mackay. 

On  this  ninth  day  of  October,  in  the  year  of  our  Lord  one  thousand 
eight  hundred  and  seventy  six,  personally  came  and  appeared  HENRY 
LYMAN,  of  the  City  of  Montréal,  chemist  and  druggist,  aged  sixty  three 
years,  a  witness  produced  on  the  part  of  the  Défendant,  who  being  duly 
sworn  deposeth  and  saith  :  I  am  not  related,  allied  or  of  kin  to,  or  in  the 
employ  of  any  of  the  parties  in  this  cause  :  I  am  not  interested  in  the  event 
of  this  suit. 

Question. — I  think  you  are  the  senior  member  of  the  firra  of  Lymans, 
Clare  &Co? 

Answer. — I  am  one  of  the  firm.  We  are  both  contemporaneous  so  far 
as  the  firm  is  concerned,  but  ray  brother  is  older  than  I  am  and  he  is 
therefore  considered  the  senior. 

Question.— Do  you  recollect  having  had  some  conversation  or  interview 
with  the  Plaintiffs,  about  the  syrup  of  the  Défendant. 

Answer. — Yes,  I  remember  it. 

Question. — Will  you  state  what  occurred. 

Answer. — I  had  two  interviews  in  fact.  I  went  to  Mr.  Kerry  and  told 


74 

him  tliat  the  sisters  Uad  corne  to  us  and  desired  us  to  sell  their  remedy,  and 
from  an  examination  ;  or  rather  from  the  évidence  they  adduced  to  us,  I 
thought  they  were  entitled  to  sell  the  remedy,  and  I  told  Mr.  Kerry  it  was 
our  intention  to  sell  it,  if  parties  asked  for  it  we  should  sell  it,  and  as  a 
mat  ter  of  neighborly  kindness,  I  mentioned  it  to  him,  to  let  him  know  there 
was  nothing  under  hand  so  far  as  we  were  concerned.  We  never  sell  imi- 
tations if  we  know,  and  such  évidence  produced  to  us  convinced  we  that 
they  had  a  right,  by  priority  and  otherwise,  to  sell  the  remedy,  the  one 
being  distinct  from  the  other.  I  told  him  I  thought  we  should  sell  it,  as  a 
matter  of  commission,  as  we  sold  other  articles. 

Question. — Then,  you  considered  the  remedy  of  the  Défendants  was  no 
immitation  at  ail  ? 

Answer. — I  do  not  consider  it  any  imitation;  I  consider  it  entirely 
distinct  and  différent. 

Question. — Did  you  receive  any  threatsfrom  the  Plaintiffs  of  a  law  suit  ? 

Answer. — Yes,  Mr.  Kerry  told  me  he  should  sue  us  if  we  sold  the 
remedy,  and  that  he  should  take  his  recourse  against  us,  and  advised  us  not 
to  sell  it,  and  in  fact,  Ave  received  a  letter  from  Messrs  Abbott,  Tait  & 
Watherspoon  on  the  subject.  A  lawyer' s  letter,  in  point  of  fact,  commanding 
us,  under  penalties,  not  to  sell  Syrup  of  Spruce  Gum  without  indicating  any 
particular  form.  It  did  not  mention  the  sisters  at  ail. 

Question. — Did  you  understand,  taking  the  letter  in  considération  with 
the  conversation,  that  the  letter  aimed  at  the  sister  ? 

Answer. — Oh  yes,  the  Sisters  of  the  Providence. 

Question. — Did  you  think,  at  the  time,  that  it  was  better  for  3011  to, 
either  suspend  or  stop  the  sale,  or  deemish  it,  or  did  their  threats  make 
any  effect  upon  you. 

Answer. — Well,  no  further  than  tliis  :  we  did  not  think  ourselves  justi- 
fied  until  the  décision  of  the  Court  was  obtained  in  pushing  the  sale,  but  if 
parties  asked  for  the  remedy,  of  course  if  we  had  it  we  sold  it. 

Question. — Then,  had  it  not  been  for  those  threats,  you  would  hâve 
pushed  the  syrup  much  more  ? 

Answer. — Most  likely  ;  I  could  not  give  an  idea  of  the  quantity  we 
3old.  That  is  a  matter  of  détail  I  could  not  furnish,  but  I  am  of  opinion  that 
we  could  hâve  sold  much  more. 

Question. — Will  you  look  at  those  différent  exhibits,  that  is  the  two 
bottles  of  the  Défendants'  syrup  and  two  of  the  Plaintiffs,  and  will  you  say 
whether,  you  find  some  similarity  between  them  ? 

Answer. — I  do  not  find  any  similarity  at  ail,  except  in  the  color  of  the 
paper.     There  is  no  similarity  in  shape  form  or  description  ;  and  from  mv 


75 

examination  of  thc  two  remédies,  they  are  quite  distinct  and  separate,  one 
is  an  emulsion  and  a  syrup,  and  the  other  is  a  syrup,  neither  similar  in 
eolor,  nor  sliould  I  say  is  there  any  similarity  in  the  composition. 

Question, — Now.  as  to  the  disposition  of  the  package,  do  you  find  some 
similarity  ? 

Answer. — Not  at  ail  ;  any  one  seeing  the  one,  could  notpossibly  mistake 
it  for  the  other. 

Question.— Do  you  think  that  a  druggist  could  take  the  one  for  the  other  ? 

Answer.— A  druggist  could  not  ;  a  person  might  be  induced  to  take  one 
for  the  other  in  this  way  :  a  man  going  into  a  shop  might  be  induced  ta  take 
jallap  for  calomel.  A  man  might  not  hâve  one,  and  recommend  one  thing 
for  another,  but  no  druggist  could  certainly  mistake  it. 

Question. — Well  now,  what  would  you  think  of  a  clerk,  for  instance, 
you  keep  a  large  establishment,  who,  being  asked  for  the  PlaintifFs'  syrup, 
would  give  the  other  one  ? 

Answer. — I  should  say  lie  was  entirely  wrong  ;  it  would  show  an  excess 
of  zeal  that  would  not  be  warranted. 

Question. — Supposing  that  he  would  not  hâve  discreminated  between 
the  two  ? 

Answer, — I  could  hardly  immagine  of  druggist  apprentice  or  assistant 
not  able  to  discreminate.  I  shoud  be  disposed  to  think  he  was  not  qualified 
to  be  an  assistant. 

Question. — Do  you  find  some  thing  on  the  Défendants'  package  or  box, 
something  calculated  or  indicated  so  as  to  induce  any  body  to  believe  that 
the  Défendants'  syrup,  is  manufactured  by  Gray,  or  Kerry  &  Watson  ? 

Answer. — Nothing  whatever  to  jndicate  that  it  has  any  connexion 
with  Mr.  Gray  or  the  Plaintiffs  in  the  case. 

Question. — Do  you  find  something  to  induce  the  public  to  believe  that 
this  has  some  connection  with  Gray'  s  syrup. 

Answer. — I  should  immeagine  not. 

Question. — Now,  Mr.  Lyman,  référence  was  made  to  some  conver- 
sation, which,  I  do  not  know  ifit  was  you  personally  or  your  brothcr,  with 
the  Plaintiff,  to  the  effect  that  either  you  or  your  brother  hâve  said  that 
they  would  not  do  any  thing  so  mean  as  to  sell  an  imitation  ? 

Answer. — I  heard  the  testimony  of  Mr.  Kerry,  which  applied  to  niy 
brother  Benjamin,  and  my  brother  told  me  that  he  had  a  conversation  with 
Mr.  Kerry  ;  but  he  really  knew  nothing  about  the  merits  of  the  case. 

Question.— If  I  understood  you  rightly,  you  saw  them,  and  said  you 
had  the  évidence  that  the  Défendants'  syrup  did  not  interfère  with  their'tf 
at  ail  ? 


76 

Answer. — Certainly.  My  brother  was  quite  right  in  saying  we  never 
do  anything  so  mean  as  to  sell  immitation  of  goods  as  genuine  articles  ;  we 
do  not  profcss  to  do  anything  so  mean,  and  we  never  do  anything  of  the 
kind. 

CROSS-EXAMINED, 

Question. — You  said  you  could  not  say  what  quantity  you  had  sold, 
much  or  not  ? 

Answer. — No,  that  is  a  niatter  which  partner,  Mr.  Manson  wouldknow 
better  than  myself,  it  cornes  more  within  his  province.  I  could  not  under- 
take  to  say  definitely  about  the  quantity  sold. 

Question. — Hâve  you  the  agency  of  that  syrup  in  Montréal  ? 

Answer. — We  sell  it. 

Question. — But  is  there  any  other  druggist  who  lias  the  agency? 

Answer. — I  am  not  aware  of  any  other  druggist,  but  we  do  not  know 
what  other  druggist  may  do,  so  far  as  I  know,  we  hâve  no  exclusive  agency. 

Question. — Do  you  know  if  the  smaller  druggists,  retail  druggists  hâve 
to  go  to  you  to  get  either  a  gross  or  two  ? 

Answer. — They  might  corne  to  us,  or  go  to  the  sisters,  I  am  not  aware 
of  any  exclusive  agency  in  that  respect. 

Question. — The  Nuns,  the  Défendants  in  the  case,  are  large  customers 
of  yours  ? 

Answers. — Yes,  and  we  supply  the  con vents  with  medicines  and  other 
things. 

Question. — It  is  worth  several  hundred  dollars  a  year  ? 

Answer. — Probably,  we  supply  ail  the  con  vents  more  or  less. 

Question. — You  gave  up  the  registration  of  Lyman's  uni  versai  Pain 
Killer? 

Answer.— We  did  not  carry  it  on.  We  did  not  suppose  that  we  in- 
fringed  Perry  Davis' s  trade  mark,  or  their  proprietory  rights  in  as  much 
as  we  indicated  it  with  Lyman'  s  Pain  Killer,  and  not  Perry  Davis'  s  Pain 
Killer;  we  did  not  in  tend  to  sell  under  false  colors.  When  the  Minister 
of  Agriculture  or  the  Deputy  Minister  of  Agriculture  decided  that  it  was 
an  infringement,  of  course,  we  did  not  go  on  with  it,  though  we  did  not 
contest  it  in  any  way  any  more  than  appearing  before  the  Minister. 

Question. — And  you  ceased  advertising  the  remedy  ? 

Answer. — Yes. 

Question. — You  hâve  been  long  in  business  as  a  chemist  and  druggist  '.' 

Answer. — Yes. 

Question. — If  I  remember  well,  you  stated  in  your  conversation  with 


77 

Mr.  Kerry,  you  told  hini  that  it  was  your  opinion  that  the  Nuns  could  sell 
their  syrup  without  infringing  their  rights  ? 

Answer. — Yes. 

Question. — Well,  would  you  state  what  reasons  y  ou  hâve  to  corne  to 
that  conclusion  ? 

Answer. — There  were  several  reasons.  The  first  was  the  factthat  they 
had  been  making  this  syrup,  they  informed  me,  something  like  twenty 
years  if  I  remembers  right,  and  certainly  the  appearance  of  the  remedy, 
the  narae,  form  and  label,  and  the  remedy  itself  seemed  to  be  différent 
from  the  one  prepared  by  Messrs  Kerry,  Watson  &  Co.  That  was  the 
reason  ;  those  are  the  reasons. 

Question. — You  said  that  they  had  informed  you  that  they  had  been 
making  that  syrup  under  that  naine  for  twenty  years.  I  understood  you  to 
say  so? 

Answer. — I  think  my  recollection  may  be  détective  in  that  espect,  but 
so  far  as  I  can  remember,  it  appeared  to  me  something  about  that  period  of 
time. 

Question. — Personally,  hâve  you  ever  heard  of  their  making  such  a 
syrup  until  they  told  you  ? 

Answer. — No.      It  had  not  corne  under  my  personal  observation. 

Question. — When  was  this  that  they  entered  into  négociations  with 
you,  to  place  their  syrup  in  your  store  ? 

Answer. — I  could  not  identefy  the  time  without  référence  to  letter 
books,  &c,  but  I  should  say  it  must  be  eighteen  months  or  two  years  ago. 

Question. — At  the  time  they  spoke  to  you  about  this  syrup,  you  had, 
for  a  good  many  years,  seen  in  the  newspapers,  the  advertisement  of  Mr. 
Gray's  syrup. 

Answer. — I  could  not  say  when  I  first  saw  those  notices  ;  it  might  hâve 
been  before  that  time  and  think  very  likely  it  was.  I  am  not  sure,  because 
I  did  not  take  any  particular  interest  in  the  matter. 

Question. — You  never  sold  any  of  Mr.  Gray's  syrup  ? 

Answer. — I  cannot  say  thatwe  did  not;  I  imagine  that  we  sell  every- 
thing,  and  imagine  that  we  sell  whatever  is  enquired.  If  it  had  been 
enquired  for,  it  is  very  likely  we  should  hâve  sold  it. 

Question. — You  do  not  rerueuiber  having  bought  Gray's  syruy  by  nine 
or  ten  gross  at  the  time  ? 

Answer. — I  could  not  say  positively,  but  I  think  Mr.  Manson,  my 
partner,  would  be  likely  to  tell  you  when  we  began  to  sell  it. 

I  do  not  know  that  I  ever  saw  a  little  pamphlet  issued  by  Mr.  Gray 


78 

Question. — You  do  not  find  any  resemblance  between  the  name  given 
to  Gray's  syrup,  and  that  of  the  Nuns? 

Answer. — The  only  resemblance  in  it  is,  that  spruce  guni  appears  in 
the  one  case,  and  epinette  rouge  in  the  other,  which  I  should  translate  to 
be  similar.  That  is  the  only  resemblance  that  I  discover,  Certainly  the 
taste  is  very  différent  and  the  appearance  of  the  remedy  itself.  I  hâve 
tasted  both,  they  are  both  very  good  I  should  think. 

Question. — The  other  is  both  a  syrup  and  an  emulsion  or  what  might 
be  stated  more  correctly  ? 

Answer. — Yes,  it  is  both  a  syrup  and  an  emulsion.  There  is  no  ques- 
tion about  it.  I  shoud  say  Mr.  Gray'  s  syrup  is  more  simply  a  syrup,  it  does 
not  pressnt  the  characteristics  of  an  emulsion,  it  is  sweet.     An  emulsion  is 

a: If  I  were  under  examination  for  qualification  as  a  pharmasist,  I 

should  say  :  An  emulsion  is  a  substance  which  is  more  missable  in  water,  an 
oligeanous  or  rosinous  matter  missable  in  water  by  means  of  sugar  or  some 
other  ingrédient. 

Question. — You  know  spruce  gum,  you  hâve  seen  some  spruce  gum  ? 

Answer. — Well,  I  think  so,  I  think  I  hâve. 

Question. — Do  you  think  that  syrup  can  be  extractcd  out  of  spruce  gum  ? 

Answer. — I  could  make  syrup  with  spruce  gum  alone,  but  not  without 
sugar,  I  could  not  make  any  syrup  without  sugar. 

Question. — But  is  there  sugar  in  spruce  gum. 

Answer. — No.  There  is  no  sugar  in  spruce  gum'  that  1  am  aware  of.  I 
hâve  ne  ver  analized  spruce  gum,  but  I  should  say  there  was  no  spruce  gum 
in  it.  I  do  not  prétend  to  hâve  analized  it  chemically.  You  find  sugar  in 
everything  almost,  if  you  developit,  but  never  heard  of  any  being  in  spruce 
gum.     You  might  find  it  old  shoes. 

Question. — You  could  not  say  syrup  of  spruce  gum  in  the  sence  in 
which  you  would  say  cane  syrup,  maple  syrup,  or  beet  syrup  ? 

Answer. — No,  it  would  require  a  chemist.  A  chemist  would  under- 
stand  that  it  was  a  compound  of  sugar  with  the  spruce  gum  made  missible  ; 
in  the  way,  a  chemist  would  undersand  how  to  do  it. 

Question. — But  you  could  not  make  a  syrup  of  spruce  gum  without 
sugar  and  some  other  process. 

Answer. — Syrup  of  spruce  gum  is  an  ordinary  produce,  while  sugar  of 
beet  and  maple  is  produced  by  chemical  means. 

Question. — You  do  not  require  chemical  means  to  make  a  syrup  of  cane 
or  beet,  except  the  distillation  of  water? 

Answer. — Well  there  are  certain  processes  to  be  gone  through.  On" 
is  called  sample  syrup. 


79 

Question. — Which  of  thèse  has  been  first  introduced  to  the  trade? 

Answer. — Ob',  tbat  I  cannot  tell  you.     I  cannot  say. 

Question. — It  is  not  to  your  personal  knowledge  ? 

Answer. — No;  I  cannot  say  which  bas  been  previously. 

Question. —  Or  the  first  put  on  the  market  ? 

Answer. — I  cannot  say  tbat.  I  think  it  might  perhaps  be  tbat  1  nia  y 
bave  take  a  notice  or  been  aware  of  the  sale  and  préparation  of  Mr.  Gray's 
reinedy  before  the  other. 

Question. — The  other,  you  had  never  heard  of  until  the  Nuns  came  to 
you  to  offer  you  the  agency  ? 

Answer. — I  do  not  remember  seeing  it  advertised  before  Mr.  Gray's 
Syrup  was  advertised.  I  am  not  aware  of  it.  I  would  not  say  tbat  it  was 
not,  but  I  am  not  aware  of  it. 

Question. — You  said  tbat  you  sold  to  the  Nuns  the  drugs  tbat  they 
generally  required  in  their  establishment  and  also  bottles,  and  every  thing 
they  require  :   Were  those  bottles  furnished  by  you  ? 

Answer. — Possibly.  We  sell  glass,  it  is  very  likely,  I  really  do  not 
know,  it  is  very  likely. 

RE-EXÀMINED. 

Question. — You  said  tbat  cain  or  maple  sugar  would  bear  the  name  of 
syrup  more  correctly  than  that  syrup  of  spruce  gum. 

Answer. — It  would  be  a  more  legitimate  name.  As  soon  as  I  heard 
the  word  compound  in  any  event,  if  it  was  compound  or  not  compound,  I 
should  understand  it  as  a  chemist  to  be  compound.  The  word  compound  I 
find  as  the  proper  expression  to  be  indicated  as  a  produce,  and  I  should 
understand  it  a  pharmaceutical  prescription. 

Question. — If  the  base  of  that  syrup  is  sugar  and  gum,  and  some  other 
matters,  would  you  understand  it  as  a  compound  syrup  ? 

Answer. — Yes. 

Question. — So  that  it  is  properly  called  compound  sprup  of  spruce  gum  ? 

Answer. — Yes. 

RE-CROSS-EXAMINEP. 

Question. — Is  it  necessary  to  use  the  word  compound  to  indicate  that 
it  is  a  compound. 

Answer. — It  would  indicate  it  in  the  language  of  the  learned  in  phar- 
maceutical matters  ;   it  would  indicate  the  effect  of  it  being  a  composition. 


sa 

Ànd  further  déponent  saith  not>  and  this  his  déposition  having  been 
read  to  bim  to  déclare  the  same  to  contain  the  truth. 

'  J.  W.  BUCKLEY, 

StenogmpJier. 


Présent  :     L'Hox.  Juge  Mackay. 

L'an  mil  huit  cent  soixante  et  seize,  le  neuvième  jour  d'octobre,  est 
comparue  Sœur  JOSEPHINE  COURSOLLES,  déjà  examinée,  témoin  pro- 
duit par  les  Défenderesses,  laquelle,  après  serment  prêté,  dépose  et  dit  :  — 
Je  ne  suis  point  intéressé  dans  l'événement  de  ce  procès  ;  je  ne  suis  ni  pa- 
rent, ni  allié,  ni  au  service  d'aucune  des  parties  en  cette  cause. 

Question. — Avez-vous  constaté  à  quelle  date  avait  été  imprimée  l'éti- 
quette marquée  P  produite  à  l'enquête  du  sept  octobre  courant  ? 

Réponse. — C'est  moi  qui  l'ai  fait  imprimer,  et  c'est  en  mil  huit  cent 
soixante  et  dix  qu'elle  a  été  ainsi  imprimée. 

Question. — Quelle  est  l'allocation  que  la  maison-mère  de  la  Providence 
reçoit  annuellement  du  gouvernement  ? 

Réponse. — J'ai  déjà  dit  que  la  maison-mère  recevait  du  gouvernement 
une  somme  de  onze  cent  vingt  piastres.  Quelques-unes  de  nos  maisons  à  la 
campagne  reçoivent,  du  gouvernement,  une  somme  de  deux  cents  piastres 
par  année  chacune  ;  l'asile  des  sourdes- muettes  reçoit  une  somme  plus  con- 
sidérable, d'après  ce  que  l'on  m'a  dit,  mais  je  ne  puis  préciser  le  montant  de 
cette  somme. 

Question. — -Avez-vous  fait  des  recherches  à  l' Hôtel-Dieu  pour  constater 
quelle  était  la  recette  que  votre  communauté  en  avait  reçue  en  mil  huit 
cent  soihante  et  trois  ? 

Réponse. — Oui,  je  suis  allée  à  l' Hôtel-Dieu  avec  l' Ange-Gardien,  et  la 
Soeur  Mailloux,  de  l'Hôtel-Dieu,  m'a  donné  cette  recette  qu'elle  avait  copiée 
dans  un  cahier  ;  elle  m'a  donné  le  cahier  dans  lequel  la  recette  était  écrite. 
Nous  avons  encore  ce  cahier-là,  je  l'ai  même  ici  en  Cour,  mais  je  ne  puis 
montrer  la  recette.  J'ai  comparé  cette  recette  avec  celle  que  nous  avions 
avant  cela,  et  j'ai  constaté  qu'elle  était,  en  tous  points,  semblable  à  celle  dont 
nous  nous  servons  aujourd'hui  pour  la  fabrication  de  notre  sirop. 

Question. — Voulez-vous  nous  dire  si  quelqu'  un  vous  a  sollicité  de  pren- 
dre une  marque  de  commerce,  et  même  d'acheter  votre  recette  ? 

Question. — On  me  l'a  dit,   mais  ce  n'est  pas  à  moi  qu'on  Ta  demandé  ; 


81 

j'étais  absente  dans  le  temps,  maison  m'avait  déjà  demandé  de  prendre 
une  marque  de  commerce. 

Question. — Yous  avez  dit  que  vous  aviez  fait,  l'année  dernière,  quarante- 
deux  mille  huit  cent  cinquante-cinq  visites  chez  les  pauvres,  et  qu'en  outre 
vous  les  aviez  aidés  par  des  quêtes,  pouvez-vous  nous  donner  la  moyenne 
de  ce  que  vous  avez  ainsi  recueilli  dans  chacune  de  vos  quêtes  ainsi  faites 
pour  les  pauvres  ? 

Réponse. — Il  me  serait  impossible  de  le  dire. 

Question. — Vous  rappelez-vous  depuis  quand  votre  sirop  porte  le  nom 
de  "  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  Composée  "  ? 

Réponse. — Je  considère  que  le  mot  " composé"  a  toujours  fait  partie 
du  nom  de  notre  sirop,  parcequ'il  a  toujours  été  composé,  mais  l'étiquette 
P  a  été  imprimée  en  mil  huit  cent  soixante-et-dix.  Je  suis  presque  certaine 
qu'il  y  a  eu  des  étiquettes  d'imprimées  avant  cette  époque-là,  mais  je  n'en 
ai  pas  trouvé. 

Question. — Il  y  a  longtemps,  n'est-ce  pas,  que  vous  êtes  à  la  tête  de  la 
pharmacie  de  la  maison  mère  ? 

Réponse. — Il  y  a  treize  ans  que  je  suis  à  la  tête  de  la  pharmacie. 

Question. — Aviez-voiis  des  étiquettes  imprimées  pour  votre  sirop  ? 

Réponse. — Dans  ce  temps- là  nous  n'avions  pas  d'étiquettes  imprimées; 
nous  écrivons  le  nom  de  sirop  sur  la  bouteille  même  ;  mais  j'en  ai  fait  impri- 
mer depuis. 

Question. — Ebt-ce  à  la  suggestion  de  monsieur  Devins  que  vous  avez- 
adopté  ces  mots  :    "  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  Composé  "  ? 

Réponse. — Assurément  non  ;  le  sirop  porte  ce  nom-là  certainement 
depuis  mil  huit  cent  soixante-et-dix. 

Question. — Maintenant,  lorsqu'il  a  été  question  du  choix  du  papier, 
monsieur  Devins  vous  a-t-il  mentionné  que  le  choix  de  la  couleur  bleue 
serait  une  infraction  aux  droits  de  Mr.  Gray  ? 

Réponse. — Je  crois  avoir  répondu  à  cette  question,  et  je  déclare  positi- 
vement qu'on  ne  m'a  jamais  conseillé,  ou  mentionné,  ou  fait  remarquer 
d'une  manière  positive,  qu'on  pouvait  enfreindre  la  marque  de  commerce 
de  monsieur  Gray  ;  il  n'est  jamais  entré  dans  ma  pensée  d'enfreindre  cette 
marque  de  commerce. 

Question. — Vous  rappelez-vous  quelque  circonstance  qui  se  serait  passée 
chez  monsieur  Devins  au  sujet  du  choix  du  papier  ? 

Réponse. — Je  me  rappelle  très-bien  que  nous  l'avons  consulté  plusieurs 
fois  pour  savoir  quelle  qualité  et  quelle  couleur  de  papier  nous  devions 
adopter,  et  qu'il  nous  a  même  envoyé  plusieurs  échantillons  de  papier. 


Question. — Y  a-t-il  eu  un  achat  de  quelque  chose  chez  monsieur  Devins, 
lequel  achat  vous  a  décidé  à  prendre  le  papier  bleu  ? 

Réponse. — Nous  avions  choisi  la  cire  bleue  pour  nos  bouteilles,  parce 
qu'elle  était  à  bon  marché  ;  et  alors  M.  Devins  ou  M.  Bolton,  je  ne  me  rap- 
pelle plus  lequel  des  deux,  nous  a  dit  qu'il  avait  de  la  cire  bleue  à  très-grand 
marché,  et  ayant  déjà  la  cire  bleue,  nous  préférions  avoir  le  papier  bleu. 
En  arrivant  à  la  maison-mère,  la  sœur  Virginie  m'a  fait  remarquer  qu'elle 
préférait  une  autre  couleur  que  la  couleur  bleue,  et  je  lui  ai  dit  que  la  cire 
étant  bleue,  ça  convenait  mieux  de  mettre  un  papier  bleu. 

Question.— -Avez- vous  fait  un  achat  considérable  de  cire,  chez  M. 
Devins  à  cette  occasion-là. 

Réponse. — Je  ne  me  rappelle  pas  quelle  quantité,  nous  en  avons  acheté 
plusieurs  livres  ;  de  fait  tant  qu'il  en  a  eu  nous  l'avons  acheté  de  lui. 

Question. — Voulez- vous  nous  dire  comment  la  chose  s'est  passée,  quand 
Monsieur  Devins  vous  a  remis  l'agence  de  votre  sirop  ? 

Réponse. — Au  meilleur  de  ma  connaissance,  après  avoir  accepté  cette 
agence,  il  a  d'abord  paru  très-content  de  l'avoir  acceptée,  et  s'est  donné  bien 
de  la  peine  pour  nous  aider  et  nous  renseigner  ;  mais  après  avoir  été  menacé 
par  Messieurs  Kerry,  Watson  &  Cie.,  il  a  craint  de  pousser  la  vente  du 
remède,  et  m'a  demandé  une  lettre  de  la  communauté,  le  garantissant 
contre  tous  les  frais  d'une  poursuite,  car  je  lui  avais  dit  que  nous  nous 
chargions  de  tous  les  frais  de  pareilles  poursuites  et  que,  même,  nous  le 
préférions.  Il  nous  a  demandé  une  lettre  de  la  Supérieure  Générale,  à 
l'effet  que  nous  paierions  tous  les  frais  dans  un  pareil  cas.  Je  n'en  ai  pas 
parlé  à  notre  mère,  pour  ne  pas  la  troubler.  Je  ne  sais  pas  si  c'  est  Monsieur 
Devins,  ou  notre  avocat  ou  moi  qui  a  demandé  si  une  lettre  de  notre  avocat, 
à  l' effet  de  nous  charger  de  tous  les  frais  encourus  dans  un  procès,  ne  suffi- 
rait pas;  mais  toujours  est-il  que  Monsieur  Devins  a  accepté  une  pareille 
lettre,  et  là-dessus  je  suis  allé  chez  M.  Dorion,  notre  avocat,  lequel  m' a  dit  : 
"  Nous  allons  lui  écrire  de  suite."  Je  suis  retrouvé  chez  M.  Devins  le  len- 
demain, et  il  m'a  dit  qu'il  n'avait  pas  reçu  telle  lettre  et  qu'il  refusait 
l'agence.  Voyant  cela,  je  suis  retournée  chez  Monsieur  Dorion  et  lui  ai 
demandé  s'il  avait  envoyé  la  lettre  ;  Il  m'a  répondu  qu'il  l'avait  envoyée. 

Question.— -Quand  Monsieur  Devins  a  exprimé  des  craintes,  et  qu'il  ne 
pouvait  pas  pousser  la  vente  de  votre  sirop,  que  lui  avez-vous  dit  ? 

Réponse. — Je  lui  ai  dit  que  nous  lui  donnions  notre  pratique  et  qu'il 
était  juste  qu'il  nous  aide  ;  qu'il  pouvait  faire  cela  pour  nous,  vu  que  nous 
lui  donnions  toute  notre  pratique,  et  que,  si  nous  prenions  un  autre  agent, 
nous  lui  donnerions  notre  pratique  ;  et  effectivement  c'est  ce  que  nous  avons 
fait, 


83 


Transquestionnée. 

Question. — Vous  dites  que  vous  avez  ici  le  cahier  contenant  la  recette 
de  votre  sirop  ;  voudriez- vous  nous  mettre  en  possession  de  ce  cahier  ; 
voudriez- vous  consulter  l'endroit  ou  se  trouve  inscrite  cette  recette,  et  nous 
donner  le  titre  que  porte  cette  recette  ? 

Réponse. — Elle  porte  le  titre  de  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  seule- 
ment, mais  la  recette  est  semblable  à  celle  que  nous  avions  déjà. 

Question. — Quand  a  été  écrit  ce  cahier  ? 

Réponse.  —  La  sœur  Mailloux  ne  m'a  pas  dit  en  quelle  année  il  a  été 
écrit.  C'est  le  cahier  de  l' Hôtel-Dieu,  Nous  n'avons,  nous,  pas  de  recette 
écrite  sur  un  papier. 

Question. — Vous  ignorez  dans  quelle  année  il  a  été  écrit,  ce  cahier? 

Réponse. — Elle  m'a  dit  que  c'était  un  vieux  cahier,  et  il  ne  porte  pas 
de  date. 

Question. --Vous  avez  parlé  de  vos  maisons  qui  recevaient  un  aide 
pécuniaire  du  gouvernement  ;  vos  maisons  portent-elles  toutes  le  nom  de 
Providence  ? 

Réponse. — Elles  portent  toutes  le  nom  de  maison  de  la  Providence,  à 
ma  connaissance.  Nous  avons  une  maison  au  Coteau  du  Lac  qui  reçoit  an» 
nuellement  deux  cents  piastres  du  gouvernement  ;  et  une  pareille  allocation 
est  aussi  accordée  par  le  gouvernement  à  nos  maisons,  situées  dans  les 
localités  ci- dessous  ;  Mascouehe,  St.  Vincent  de  Paul,  Joliette,  Laprairie, 
Ste.  Elizabeth,  L'Assomption,  Ste.  Ursule,  Yainachiche  et  Lanoraie. 

Question. — Vous  avez  cherché,  n'est-ce  pas,  pour  voir  si  vous  ne  trouve- 
riez pas  une  étiquette  imprimée  antérieurement  à  mil  huit  cent  soixante-dix. 

Réponse. — Oui,  mais  je  n'en  ai  pas  trouvé, 

Question. — En  avez- vous  trouvé  sur  d'anciennes  bouteilles  ? 

Réponse. — Je  n'en  ai  pas  trouvé  non  plus. 

Question. — Qu'est-ce  qui  vous  porte  à  fixer  l'année  mil  huit  cent 
soixante-dix,  pour  ses  étiquettes,  plutôt  qu'une  autre  année  ? 

Réponse. — Parce  que  j'en  suis  certaine  ;  c'est  moi  qui  y  ai  travaillé 
avec  une  autre  sœur. 

Question. — Qu'est-ce  qui  vous  porte  à  vous  rappeler  cela  ? 

Réponse. — D'abord,  parce  qu'il  n' y  a  pas  bien  longtemps  ;  ensuite,  parce 
que  j'ai  consulté  la  sœur  qui  a  travaillé  avec  moi,  et  aussi  parce  que  je  m'en 
rappelle.  Ce  n'est  pas  difficile  de  m'en  rappeler,  à  cause  des  ouvrages  que 
nous  avions  à  faire  dans  le  temps  à  l'imprimerie  et  à  la  pharmacie.  J'ai 
trouvé  des  marques  anciennes,  non  sur  du  papier,  mais  sur  des  morceaux 


84 

de  ferblanc,  peintures  en  vert,  d'abord  et  ensuite  en  jaune,  et  écrites  à  la 
main  en  mil  huit  cent  soixante-quatre  et  mil  huit  cent  soixante-cinq. 

Et  la  déposante  ne  dit  rien  de  plus.     La  présente  déposition  lui  ayant 
été  lue,  elle  a  déclaré  qu'elle  contenait  la  vérité  et  y  a  persisté. 

J.  T.  THOMPSON, 

Sténograplœ, 


Présent  :     The  Honorable  Mr.  Justice  Mackay. 

On  this  ninth  day  of  October,  in  the  year  of  Our  Lord  one  thousand 
eight  hundred  and  seventy-six,  personally  came  and  appeared  ALEXAN- 
DER  MANSON,  chemist  and  druggist,  aged  forty-nine  years,  a  witness 
produced  on  the  part  of  the  Défendants,  who  being  duly  sworn  deposeth 
and  saith  : — I  am  a  member  of  the  firm  of  Lymans,  Clare  &  Co. 

Question.— Do  you  recollect  that  some  threats  were  made  to'your  house 
to  prevent  you  from  selling  Défendants'  Syrup  ? 

Answer. — We  received  a  letter  from  a  law  firm  in  the  city,  Messrs. 
Abbott,  Tait  &  Watherspoon.  on  behalf  of  Messrs.  Kerry,  Watson  &  Co., 
Plaintiffs  in  this  case,  ordering  us  to  desist  from  selling  the  Syrup  of 
Spruce  Gum. 

Question. — What  has  beenthe  effectof  that  letter  ?  Has  it,  in  any  way, 
changea  your  action  in  this  matter  ? 

Answer. — We  hâve  hesitated  to  push  the  sale  of  it.  We  do  not  push 
it  in  the  same  way  as  if  we  had  not  received  thèse  threats. 

Question. — Hâve  you  any  idea  of  the  différence  in  the  sales  ? 

Answer. — No  ;   I  could  not  say  positively. 

Question. — If  you  had  pushed  the  matter,  would  you  hâve  sold  much  ? 

Answer. — I  believe  we  could  hâve  sold  more  of  it,  if  we  had  pushed  it. 
I  cannot  give  an  approximate  idea  of  the  différence.  It  woult  be  difficult 
for  me  to  put  an  estimate  upon  it.  I  would  not  like  to  hazard  an  opinion, 
because  it  had  only  been  a  short  time  before  the  public,  and  our  sales  had 
not  been  previously  large,  because,  it  was  only  being  introduced  when  we 
receive  this  letter. 

Question. — Do  you  think  it  is  possible  for  a  clerk,  in  a  drug  store,  if  not 
inexperienced,  to  take  one  for  the  other  ? 

Answer. — I  do  not  think  so.  Any  one  that  had  been  accustomed  tu 
handle  them  woujd  never  think  of  taking  one  for  the  other. 


85 

Question. — Do  you  see  anytliing  in  the  Défendant' s  bottle,  written  or 
cxposed  in  such  a  way,  as  to  induce  any  one  to  believe  that  the  Défendants' 
syrup  is  fabricated  by  Mr.  Gray  or  by  Plaintiffs? 

Answer  — No,  nothing  whatever. 

Question. — In  the  description,  do  you  see  anytliing  similar  ? 

Answer. — Nothing  further  than  I  see  the  two  words  that  are  similar 
"  Gomme  d'Epinette,"  and  "  Sirop  de  Gomme  d'Epinette."  The  other 
h  as  the  word  "  Rouge  "  attached  to  it. 

I  know  a  little  chemistry. 

Question.  —  Do  you  consider  défendants'  préparation  a  syrup  ? 

Answer. — Tes,  I  believe  it  is  a  syrup.  Of  course  there  are  a  great 
variety  of  syrups. 

CROSS-EXAM1NED. 

Question. — When  did  you  hear  for  the  first  time  of  Gray's  Syrup  ? 

Answer. — I  could  not  state  positively,  but  it  was  several  years  ago. 
I  heard  for  the  first  time  of  Défendants'  syrup,  probably,  about  eighteen 
months  or  two  years  ago,  within  two  years  I  think,  about  the  time  they 
offered  us  the  agency. 

Question. — A  Syrup  of  Spruce  Gum  mentioned  on  thèse  two  labels, 
having  been  advertised  for  several  years,  is  it  not  your  opinion  that  the 
Défendants  would  profit  from  thèse  advertisements  to  sell  their  own 
produce  ? 

Answer. — That  would  be  difficult  for  me  to  say.  I  présume  if  one  had 
been  long  advertised,  and  another  of  the  same  kind  came  into  the  market, 
the  latter  would  profit. 

Question. — A  syrup  for  coughs  would  express  everything,  I  suppose, 
that  Syrup  of  Spruce  Gum  conveys  ? 

Answer. — That  is  a  difficult  question  to  answer.  It  dépend  upon  what 
the  syrup  may  be  used  for. 

Question. — Do  you  think  that  any  syrup  would  be  esteemed  more 
valuable  by  a  person  who  was  told  that  it  was  made  with  spruce  gum  rather 
than  with  anytliing  else  ? 

Answer. — No,  I  do  not  think  it^vould.  Of  course,  there  are  a  great 
many  remédies  for  coughs,  and  this  may  be  one  of  them.  People  care  but 
little  how  médecine  is  made  provided  it  cures. 

Question. — Please  state  your  opinion  to  the  Court;  is  there  any 
othcr  advantage  to  be  derived  by  the  Défendants,  stating  that  their  syrup 
is  made  of  spruce  gum,  except  profiting  from  plaintiffs'  advertisements  ? 


86 

Answer. — I  could  not  say  whether  there  was  an  advantage  or  not. 

Question. — Could  you  imagine  any  other  ? 

Answer. — It  would  dépend  altogether  upon  whether  they  had  been 
using  the  other  préparation  before,  or  whether  it  hacl  been  before  the  public 
on  their  part. 

Question. — Is  there  any  imaginable  advantage  to  be  derived  by  the 
Nuns,  from  the  use  of  the  words  "  Syrup  of  SpruceGum,"  except  profiting 
from  the  advertisements  of  Mr.  Gray  ? 

Answer. — That  is  a  matter  for  the  Nuns  themselves  to  décide.  I  do 
not  imagine  any  other.  I  do  not  know  any  other.  I  do  not  give  it  as  au 
opinion,  because  I  do  not  know. 

Question. — Are  you  not  of  opinion,  as  stated  hère  by  Dr.  Picault,  that 
when  any  druggist  advertises  largely,  as  Mr.  Campbell  lias  done  for  Quinine 
Wine,  any  other  druggist  selling  another  Quinine  Wine,  would  profit  from 
the  advertisements  of  Mr.  Campbell  ? 

Answer. — I  présume  so,  to  a  certain  extent. 

Question. — On  a  parity  of  reasoning,  is  it  not  your  opinion  that,  the 
Syrup  of  Spruce  Gum  having  been  advertised  for  many  years,  it  would 
benefit  a  similar  syrup  made  with  some  other  matter  and  thrown  on  the 
market  ? 

Answer. — Yes,  I  dare  say  it  would  to  a  certain  extent. 

Question. — Had  you,  yourself,  any  conversation  with  the  Nuns  when 
the  agency  was  offered  to  your  firm  ? 

Answer. — Not  at  first.  It  was  not  arranged  through  me,  but  through 
Mr.  Henry  Lyman. 

Question. — Did  your  partner,  Mr.  Henry  Lyman,  tell  you  whatadvan- 
tages  it  would  bring  your  firm  in  having  that  agency,  such  as  selling  to  the 
Nuns'  Establishment  ail  the  drugs  that  they  would  require  ? 

Answer. — Not  at  ail,  because  they  were  customers  of  ours,  many  yeara 
before  that,  and  we  were  not  the  first  agents  of  it  either. 

Question. — Were  you  not  aware,  when  they  offered  their  agency  to  De- 
vins &  Bol  ton,  that  they  had  the  entire  custom  of  the  Nuns  ? 

Answer. — I  am  sure  that  they  had  not.  They  had  been  customers  of 
ours,  for  a  number  of  years,  to  my  personal  knowledge.  I  could  not  say 
what  their  custom  amounts  to  ;  but  they  are  frequently  in  our  place  and 
hâve  been  for  many  years.  Most  communities  of  Nuns  in  the  city  are  cus- 
tomers of  ours.  I  believe  we  furnished  the  Nuns  with  the  bottles  exhibited, 
or  that  we  ordered  them  for  them.  We  make  a  profit  of  course  on  ail  the 
goods  we  sell. 

Question. — You  say,  you  would  hâve  pushed   the   Nuns'  Syrup  more 


8? 

actively  if  you  had  not  been  threatened;  what  are  your  ways  ofpushingan 
article  ? 

Answer. — Through  our  agents.  We  hâve  travellers  going  over  the 
country  ail  the  time.  "We  hâve  three  travellers  out  at  the  présent  time> 
some  in  Nova  Scotia,  and  Ontario  and  New  Brunswick.  Of  course  every 
thing  we  expected  them  to  be  able  to  sell,  we  should  ask  them  to  push. 

Question. — If  any  one  asked  you  for  the  syrup  of  spruce  gum,  you  would 
naturally  offer  the  one  for  which  you  had  the  agency,  since  you  dérive  an 
advantage  from  it  ? 

Answer. — There  being  two  in  the  market,  we  should  ask  them  which 
kind  they  wanted.  I  can  say  that  positively.  I  would  ask  them  if  they 
wanted  Gray' s  or  the  Nuns' .  Our  travellers  carry  with  them  samples  of 
the  medicines  we  wish  to  push. 

Question. — In  this  case,  did  you  abstain  from  giving  them  samples  of 
the  Nuns' s  Syrup  ? 

Answer. — I  do  net  think  they  ever  carried  samples  with  them.  It  was 
only  a  little  before  that  time  that  we  introduced  it  into  the  market.  Re- 
ceiving  thèse  notices  from  Messrs.  Kerry,  Watson  &  Co. ,  we  did  not  push 
the  sale. 

ItE-EXAMINED. 

Question. —  Is  it  not  a  fact  that  the  Sisters'  Syrup  would  help  to  popu* 
larize  that  of  Mr.  Gray,  as  well  as  Mr.  Gray' s  Syrup  who  popularize  that 
of  the  Sisters,  for  those  who  ask  for  Syrup  of  Spruce  Gum  without  caring 
much  which  they  get  ? 

Answer. — That  is  rather  a  difficult  question  to  answer. 

Question. — We  are  told  that  Mr.  Gray' s  advertisements,  having  popit- 
larized  the  Syrup  of  Spruce  Gum,  this  would  be  to  the  advantage  of  the 
Sisters.  On  the  other  hand,  the  Sisters  being  very  popular  with  the  public, 
is  it  not  true  that  the  fact  of  their  selling  a  Syrup  of  Spruce  Gum  would 
help  the  sales  of  Mr.  Gray' s  Syrup  ?  And  if  a  druggist  gives  a  person  Gray's 
Syrup,  when  the  Sisters'  is  asked  for,  don't  you  consider  that  the  popularity 
of  the  Sisters'  Syrup  is  just  as  much  an  advantage  to  Mr.  Gray,  as  Mr. 
Gray's  advertisements  are  an  advantage  to  the  Sisters  ? 

Answer. — -It  would  be,  if  they  were  advertising  their  syrup  or  bringing 
it  before  the  public.  It  bould  be,  I  suppose,  if  they  were  advertising  their 
syrup  in  the  same  way. 

And  further  déponent  saith  not,  and  this  déposition  having  been  read 
to  him,  he  déclares  it  to  co  contain  the  truth. 

S.  A.  ABBOTT, 

Stenographer. 


88 
Présent  :    L'  Hon.  Juge  Mackay. 

L'an  mil  huit  cent  soixante-et-treize,  le  neuvième  jour  d'Octobre,  est 
comparu  SÉRAPHIN  GAUTHIER,  médecin,  de  la  Cité  et  du  District  de 
Montréal,  âgé  de  quarante-quatre  ans,  témoin  produit  par  les  Défenderesses, 
lequel,  après  serment  prêté,  dépose  et  dit  : — Je  ne  suis  point  intéressé  dans 
l'événement  de  ce  procès:  je  ne  suis  ni  parent,  ni  allié,  ni  au  service  d'au- 
cune des  parties  cette  cause.  Je  suis  médecin  pharmacien,  je  tiens  une 
pharmacie  à  Montréal,  sur  la  rue  St.  Laurent.  Je  suis  pharmacien  depuis 
l'année  mil  huit  cent  soixante-et-dix. 

Question. — Y  a-t-il  longtemps  que  vous  connaissez  le  Sirop  de  Gomme 
d' Epinette  des  Sœurs  de  la  Providence  ? 

Réponse. — Il  y  a  longtemps  que  j'en  entends  parler  ;  je  n'en  ai  jamais 
vendu  dans  ma  pharmacie,  mais  il  y  a  longtemps  que  je  le  connais. 

Question. — Depuis  combien  de  temps  à-peu-près  ? 

Réponse. — Je  sais  que  les  Sœurs  de  la  Providence  le  donnent  aux 
pauvres  depuis  une  quinzaine  d'années. 

Question. — En  donnaient-elles  en  assez  grande  quantité  ? 

Réponse. — A  tous  ceux  qui  se  présentaient  chez  elles  pour  en  avoir. 
Ce  remède  est  plus  connu  depuis  quelques  années,  qu'il  ne  l'était  aupara- 
vant; c'était  un  remède  populaire  connu  de  tous  les  canadiens- français. 

Question. — Avez-vous  eu  occasion  vous-même  de  faire  du  sirop  de 
gomme  d' epinette  ? 

Réponse.— J'en  ai  fait  depuis  quelques  années  et  j'en  fais  encore 
actuellement. 

Question. — Je  comprends  que  vous  en  faites  régulièrement  pour  les 
besoins  de  votre  commerce  n'est-ce  pas  ? 

Réponse. — Oui,  pour  ma  pharmacie  et  pour  mes  pratiques. 

Question. — Avant  de  tenir  pharmacie,  vous  est-il  arrivé  de  prescrire  le 
Sirop  de  Gomme  d'Epinette  ? 

Réponse. — Je  n'avais  qu'à  laisser  faire  les  gens,  car  ils  me  demandaient 
si  la  gomme  d' epinette  était  bonne  dissoute  dans  l'alcohol,  et  nous  leur 
disions  que  oui,  tout  en  leur  conseillant  d'y  mettre  un  peu  de  sirop,  pour 
diminuer  la  force  de  l'alcohol. 

Question. — Voulez-vous  examiner  les  deux  bouteilles  que  voici,  dont 
l'une  contient  du  sirop  des  Demandeurs  en  cette  cause,  Messieurs  Kerry, 
Watson  et  Cie.  et  l'autre  du  sirop  des  Sœurs  de  la  Providence,  et  nous  dire 
si  vous  trouvez  quelque  similitude  soit  dans  les  bouteilles,  le  sirop  ou 
l'enveloppe  ? 

Réponse. — Je  n'en  trouve  aucune  ni  dans  l'enveloppe,  ni  dans  la  cou- 


89 

leur  du  sirop,  ni  dans  les  mots.  La  couleur  du  sirop  n'est  pas  la  inéttW,  ni 
la  couleur  de  l'étiquette,  ni  la  forme  de  la  bouteille.  Il  n'y  à  pàâ  la 
moindre  similitude  entre  ces  deux  bouteilles  pour  tromper  qui  que  ce  soit  ; 
il  n'y  aurait  qu'  un  aveugle  qui  pourrait  s' y  tromper. 

Question — Croyez- vous  qu'il  soit  possible  qu'un  pharmacien  ou  un 
commis  de  pharmacie,  ou  un  expert  en  matières  pharmaceutique,  puisse 
se  tromper  au  point  de  donner  l' une  de  ces  bouteilles  pour  l' autre  ? 

Réponse. — Un  commis  ne  pourrait  pas  s'y  tromper;  il  n'y  aurait  qu'un 
aveugle  qui  pourrait  s'y  tromper,  et  encore  faudrait-il  qu'il  n'eut  pas  eu 
l'occasion  de  palper  les  deux  bouteilles. 

Question. — Pouvez- vous  trouver  quelque  chose,  soit  dans  les  inscrip- 
tions, ou  la  marque  ou  les  dispositions  de  la  bouteille,  qui  puisse  induire  le 
public  à  croire  que  ce  sirop  est  fabriqué  par  Messieurs  Kerry,  "Watson  &  Cie  ? 

Réponse. — Je  ne  vois  pas  que  la  chose  soit  possible  ? 

Question. — Vous  avez  eu  un  procès,  je  crois,  avec  les  Demandeurs  en  la 
présente  cause  ? 

Réponse. — Oui  j'ai  été  poursuivi  par  les  Demandeurs. 

Question. — Vous  rappelez-vous  ce  que  les  Demandeurs  réclamaient 
comme  formant  leur  marque  de  commerce  ? 

Réponse. — Ils  prétendaient  que  les  mots  sirop  de  gomme  d'épinette 
rouge  était  leur  marque  de  commerce,  et  je  trouve  que  c'était  ridicule. 

Question. — Vous  rappelez-vous  qu'il  était  allégué  que  vous  aviez  imité 
un  sauvage  qui  se  trouvait  sur  leur  étiquette  ? 

Réponse. — Il  y  avait  quelque  ressemblance,  mais  ce  n'était  pas  la  même 
chose  du  tout.  J'avais  eu  le  soin  de  ne  pas  prendre  la  même  couleur  de 
papier.  La  figure  n'était  pas  la  même,  quoique  au  premier  abord  il  put  y 
avoir  quelque  ressemblance.  Leur  prétention  était  que  j'avais  pris  le  titre 
de  Sirop  de  Gomme  d'Epinette,  et  moi  je  prétendais  que  j'en  avais  le 
droit;  mais  si  je  mets  mon  nom  à  une  composition,  je  prétends  que  per- 
sonne ne  peut  prendre  mon  nom  pour  le  sien. 

Transquestionné. 

Question. — Sur  cette  poursuite  n'est-il  pas  émané  un  ordre  de  la  Cour 
vous  enjoignant  de  discontinuer  ? 

Réponse.  —  L'ordre  m'ordonnait  d'arrêter  de  vendre  le  Sirop  de 
Gomme  d'Epinette  Rouge,  et  ils  n'ont  pas  été  plus  loin  ;  mais  il  ne  m'a 
jamais  été  servi  un  ordre.  Il  a  été  rendu  un  tel  ordre  par  un  juge,  mais  je 
ne  l'ai  jamais  reçu.  Après  cela  j'ai  manufacturé,  sous  un  autre  titre,  le 
Sirop  de  Gomme  d'Epinette  Rouge  ;  je  l'ai  appelé  le  sirop  sauvage  du  Cana- 


tla,  lequel  sirop  est  composé  de  gomme  d'épinette.  Dans  mes  circulaires,  ce 
sirop  porte  le  titre  de  "  Sirop  Sauvage  du  Canada,  composé  de  gomme 
d'épinette." 

Questions  posées  par  les  Défenderesses. 

Question. — Quelle  était  la  nature  de  votre  application  pour  l'obtention 
d' une  marque  de  commerce  ? 

Réponse — J'ai  fait  application  pour  une  marque  de  commerce  pour  le 
"  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  Rouge,"  et  on  me  l'a  refusée  en  me  donnant 
pour  raison  que  l'effigie  de  ma  marque  de  commerce  ressemblait  trop  à  celle 
de  monsieur  Gray,  mais  on  n'a  pas  soufflé  mot  des  mots  que  portaient  mon 
étiquette  ;  on  a  seulement  dit  que  les  deux  effigies  se  ressemblaient  trop. 
C'est  là  la  réponse  que  m'a  faite  monsieur  Taché. 

Question. — Voulez-vous  nous  dire  si  la  lettre  que  monsieur  Taché 
adressait  au  docteur  Séraphin  Gauthier,  à  la  date  du  vingt-trois  Février  mil 
huit  cent  soixante-et-quinze,  contient  la  réponse  dont  vous  venez  de  parler  ? 

Réponse. — Elle  est  identique  à  celle  que  j'ai  reçue. 

Question.—- Vous  n'avez  pas,  sur  vous,  une  étiquette  du  sirop  que  vous 
vendiez  autrefois  ? 

Réponse. — Je  n'en  ai  pas  ici,  mais  je  pourrais  m'en  procurer.  J'ai 
fait  faire  trois  étiquettes  différentes;  maintenant  il  peut  se  faire  que  j'aie 
dépensé  les  premières,  et  je  ne  puis  vous  garantir  que  j'en  ai  j  celles  que 
j'ai  dans  le  moment  sont  toutes  postérieures  à  celle  qui  concerne  M.  Taché. 

Question. — Quand  avez- vous,  pour  la  première  fois,  entendu  parler  du 
sirop  de  monsieur  Gray  ? 

Réponse. — En  mil  huit  cent  soixante-et-dix,  quand  j'ai  commencé  à 
tenir  pharmacie  ;  avant  cela  je  n'en  avais  pas  entendu  parler.  On  ne  pres- 
crivait pas  ce  sirop.     Je  ne  me  rappelle  pas  l'avoir  vu  annoncé. 

Question. — Vous  avez  dit  que  vous  avez  entendu  parler  du  sirop  que 
les  Sœurs  de  la  Providence  donnaient,  est-ce  qu'on  appelait  ce  sirop-là  du 
sirop  blanc  ? 

Réponse. — Ce  sirop  était  connu  sous  le  nom  de  Sirop  de  Gomme 
d' Epinette. 

Question. — En  aviez- vous  jamais  vu  avant  qu'il  fût  mis  sur  le  marché  ? 

Réponse. — Oui,  j'en  avais  vu  dans  les  familles  où  j'allais  comme 
médecin. 

Et  le  déposant  ne  dit  rien  de  plus.  La  présente  déposition  lui  ayant 
été  lue,  il  a  déclaré  qu'elle  contenait  la  vérité  et  y  a  persisté. 

J.  T.  THOMPSON, 

Sténographe. 


91 

Présent  :  Tue  Honorable  Mr.  Justice  Mackay. 

On  this  ninth  day  of  Ôctober,  in  the  y  car  of  Our  Lord  one  thousand 
eight  hundred  and  sevonty-six,  personally  came  and  appearcd  HECTOR 
PELLETIER,  of  the  city  of  Montréal,  doctor  of  medicine,  aged  fifty-four 
ycars,  a  witness  produced  on  the  part  of  the  Défendant,  who  being  duly 
iworn  deposeth  and  saith  :— I  am  not  related,  alied  or  of  kin  to,  or  in  the 
omploy  of  any  of  the  parties  in  this  cause  ;  I  am  not  interestcd  in  the  cvent 
of  this  suit, 

Question. — Well,  Dr.,  you  know  the  parties  in  this  cause. 

Answer.—  Yes,  both  parties. 

Question. — Do  you  know  the  Compound  Syrup  of  Sprucc  Gum  of  the 
Sisters  of  the  Providence. 

Answer. — Yes. 

Question.—  Will  you  tell  the  Court  for  bow  long  you  hâve  known  that 
Syrup  ? 

Answer. — Over  twenty  years,  Your  Honôr,  fully  that. 

Question. — Did  you  inake  use  of  it  ? 

Answer.— I  ordered  it  ;  I  prescribed  it  ;  I  ne  ver  had  it  at  home.  At 
that  time,  it  was  mostly  given  to  the  poor,  and  it  was  parties  that  were 
poor  that  came  to  the  house,  and  I  very  often  ordered  them  this  syrup. 

Question.— So  that  you  are  sure  you  bave  prescribed  that  syrup  for 
many  years,  and  not  less  than  twenty  years  ? 

Answer. — Oh  !  not  less  than  twenty  years  surely.  It  was  generally 
spread  and  known  throughout  the  french  population,  particularly  the  poor, 
because  otber  could  buy  it  from  the  druggists  in  other  form. 

Question. — Will  you  look  at  thèse  two  packages,  Doctor,  and  say 
whether  you  find  any  similarity  between  the  PlaintifFs'  and  the  Défendants' 
Syrup  ? 

Answer. — No,  I  do  not,  but  as  regards  the  envelope.  There  is  no 
similarity  whatever,  but  again  if  we  look  at  the  contents  of  the  bottle  ;  the 
color  and  the  préparation,  as  it  is,  shews  that  it  is  quite  différent  ;  not  diffé- 
rent as  regards  the  base  of  the  préparation,  but  on  account  of  the  color  ; 
but  I  hâve  no  doubt  in  my  own  mind  that  they  are  both  prepared  with 
spruce  gum. 

Question. — Do  you  think  that  in  the  Défendants'  Syrup,  you  find 
some  thing  which  might  induce  some  body  to  believe  that  the  Défendants' 
Syrup  is  made  by  Gray  or  Messrs.  Kerry  &  Watson.  ? 

Answer. — No  ;  I  think  that  the  parties  could  not  be  deceived  as 
regards  the  bottle  itsclf,  the  envelope  also,  because  most  of  the  parties  who 


92 

buy  thèse  drugs  generally  know  the  bottle,  they  hâve  been  shown  the 
bottle  "  Go  and  buy  Gray's  Syrup  "  "  Go  and  buy  the  Nuns'  Syrup.  There 
is  none  who  will  be  deceived.  Druggist  deceive  and  physicians  do  some- 
times,  "  this  is  ail  right,  this  is  Gray's  gum  or  the  Nuns'  gum." 

Question. — Do  you  consider  the  Défendants  syrup  made  from  spruce 
gum  ? 

Answer. — I  do. 

Question.— So  that  it  does  not  bear  a  false  name  ? 

Answer. — If  I  may  be  allowed  to  remark  it  is  this  ;  that  many  a  time 
some  of  thèse  drugs  are  sold  by  druggists  to  physicians,  and  then  physicians 
put  this  same  quality  of  drug  in  another  bottle,  and  add  something  to  it, 
and  say  that  is  mine.  But  can  it  be  likened  to  that  of  Gray'  s  and  the  Nuns  ? 
and  they  say,  oh  surely  this  is  not  Grays  but  this  is  just  as  good. 

Jt  is  done  pretty  largely  by  physicians. 

CROSS-EXAMINED. 

Question. — You  hâve  stated  that  you  ordered  or  advised  poor  people  to 
go  to  the  Nuns  to  get  that  Syrup  many  year  ago.  Can  you  state  why  you 
did  not  give  such  direction  to  rich  people  ? 

Answer. — Because  they  could  get  it  in  anothe/form  from  the  druggist. 
I  often  hâve  told  them  to  go  and  get  Gray's  Syrup. 

Question. — Hâve  you  known  any  other  syrup,  but  Grays'  made  of 
spruce  gum,  until  the  Nuns  put  theirs  on  the  market,  in  eighteen  hundred 
and  seventy-five  ? 

Answer. — I  hâve  known  of  no  other  than  Gray'  s. 

Question. — Do  you  think  that  the  mention  of  Gray's  Syrup  for  cough 
is  made  with  spruce  gum  adds  to  value  of  it  ? 

Answer. — Well  yes. 

Question. — Why  ? 

Answer. — Because  spruce  gum  is  known  one  of  the  best  expectorating 
drugs  that  can  be  given  ;  when  I  say  the  best,  I  mean  one  of  the  best, 
because  we  hâve  the  gum  ammonia  which  is  a  good  expectorant  ;  but  we 
cannot  prépare  it  so  agreeably,  and  I  must  also  tell  the  Court  that  many  a 
man  who  gave  himself  as  a  tetotaller,  very  frequently  takes  the  spruce 
gum  with  a  little  alcohol,  so  that  it  might  tickle  his  throat,  and  thereby 
reap  the  benefit  of  the  alcohol. 

RE-EXAMINED. 

Question. — Since  how  long  do  you  know  Gray's  Syrup  ? 


93 

Answer. — I  could  not  say.  It  niay  be  four  or  five  years,  I  know  that 
it  is  inany  years  ago  now. 

Question. — How  many  years  is  it  since  you  first  heard  of  Gray's  Syrup, 
and  how  long  hâve  you  known  the  Nuns'  Syrup  ? 

Anwer. — It  is  many  years  before  since  I  hâve  known  of  the  Nuns' 
Syrup.  And  when  Mr.  Gray  got  up  his  syrup,  many  parties  said  it  was 
none  but  the  Nuns'  Syrup. 

And  further  déponent  saith  not,  and  this  déposition  having  been  read 
to  him,  he  déclares  the  same  to  contain  the  truth, 

J.  W.  BUCKLEY, 

Sténographe)', 


Présent  :  The  Hon.  Mr.  Justice  Mackay, 

On  this  ninth  day  of  October,  in  the  year  of  Our  Lord  one  thousand 
eight  hundred  and  seventy-six,  personally  came  and  appeared  WM.  H. 
CLARE,  chemist  and  druggist,  a  witness  produced  on  the  part  of  the  Défen- 
dants, who  being  duly  sworn  deposeth  and  saith  : — I  am  one  of  the  firm  of 
Lymans,  Clare  &  Co. 

Question. — Do  you  know  personally  that  your  house  lias  been  threat- 
ened  with  suits  by  the  Plaintiffs,  Kerry,  Watson  &  Co.,  for  selling  the 
Sisters'  Syrup  ? 

Answer. — Yes. 

Question. — Do  you  consider  that,  on  account  of  thèse  threats,  you  hâve 
been  prevented  from  selling  a  certain  quantity  ? 

Answer. — Yes,  but  probably  not  a  great  deal.  We  were  not  much 
frightened  by  the  threats.  That  did  not  prevent  us  from  making  sales  at 
ail.  We  had  looked  into  the  matter  and  concluded  that  there  was  nothing 
in  the  threats.  During  that  time,  we  might  hâve  sold  some,  T  suppose. 
After  we  had  decided  to  take  the  agency  of  the  préparation,  we  pushed  the 
article. 

Question. — When  you  received  that  lot  ter  from  Mr.  Abbott  did  you 
discontinue  the  sale  ? 

Answer. — We  did  not  push  the  sale  of  mcdicine  until  we  had  gonc 
into  the  matter,  and  made  up  our  minds  as  to  the  course  we  should  pursue 
about  it. 

Question. — Will  you  look  at  thèse  two  bottles  of  Plaintiffs'  and  Défen- 
dants' Syrups  respectively,  and  state  to  the  Court  if  you  perçoive  any  res- 
semblance between  the  two? 


94 

Answer. — Thcre  is  no  ressemblance  at  ail,  either  in  the  form  of  the 
bot  tic  or  color  of  the  préparation,  nor  the  manner  in  whieh  it  is  put  up. 
There  is  some  similarity  in  the  color  of  the.  outside  cnvclope,  though  they 
are  not  precisely  alike.  In  the  extcrior  form  of  the  envelope,  thcre  in  no 
ressemblance  whatever,  nor  in  the  inscriptions. 

Question. — Now  as  to  the  name,  do  you  find  that  the  name  is  writteu 
in  such  a  way  as  to  lead  people  to  believe  that  the  Défendants'  Syrup  js 
manufactured  by  Messrs.  Kerry,  Watson  &  Co.  ? 

Answe. — Not  the  least  jn  the  world. 

CROSS-EXAMINED. 

Question. — You  hâve  known  Gray's  Syrup  for  some  years  ? 

Answer. — Yes,  sir  ;  I  hâve  known  it  has  been  on  the  market  for  five 
or  six  years,  perhaps  more. 

Question. — Had  you  heard  of  the  Nuns'  Syrup  until  the  agency  was 
opened  you  ? 

Answer. — No. 

And  further  déponent  saith  not,  and  tins  déposition  having  been  read 
to  him,  lie  déclares  it  to  contain  the  truth. 

S.  A.  ABBOTT, 

Stenographer. 


Présent  :    L'Hon.  Juge  Mackay. 

L'an  mil  huit  cent  soixante-et-seize,  le  neuvième  jour  d'Octobre,  est 
comparu  JOSEPH-EMERY  CODERRE,  médecin,  de  la  Cité  et  du  District 
de  Montréal,  âgé  de  soixante-et-deux  ans,  témoin  produit  par  les  Défende- 
resses, lequel,  après  serment  prêté,  dépose  et  dit  : — Je  ne  suis  point  insté- 
ressé  dans  l'événement  de  ce  procès  :  je  ne  suis  ni  parent,  ni  allié,  ni  au 
service  d'aucune  des  parties  en  cette  cause,  je  connais  les  parties  en  cette 
cause.  Je  suis  professeur  de  matière  médicale  à  l'Ecole  de  Médecine  de 
Victoria.  Je  pratique  comme  médecin  depuis  mil  huit  cent  quarante-quatre, 
et  je  suis  professeur  à  l'Ecole  de  Médecine  depuis  mil  huit  cent  quarante- 
sept,  ce  qui  me  fait  trente-deux  années  de  pratique  et  vingt-neuf  années  de 
professorat. 

Question. — Connaissez-vous  le  Sirop  de  Comme  d'Epinette  des  Sœurs 
de  la  Providence  ? 

Réponse. — Je  le  connais  pour  en  avoir  entendu  parler  et  l'avoir  entendu 
recommander  par  plusieurs,  depuis  vingt  à  vingt-cinq  ans. 


gg 

Question. — Etait-il  communément  connu  dans  la  population  ? 

Réponse. — Il  était  communément  employé  par  les  canadiens-français  , 
j'en  ai  vu  plusieurs  fois  dans  les  familles;  c'était  un  remède  populaire. 

Question. — Il  y  a  au  moins  vingt-cinq  ans,  n'est-ce  pas,  que  ce  sirop-là 
est  ainsi  connu  ? 

Réponse. — Oui,  autant  que  je  puis  me  rappeler. 

Question. — Voulez-vous  maintenant  examiner  les  deux  bouteilles  que 
voici,  dont  l'une  que  voici,  est  le  sirop  des  Demandeurs,  et  l'autre  le  sirop 
des  Défenderesses,  et  nous  dire  si  vous  trouvez  quelque  ressemblance  entre 
ces  deux  bouteilles,  soit  dans  l'enveloppe  extérieure,  ou  dans  le  sirop  même  ? 

Réponse. — Je  n'en  vois  aucune. 

Question. — Trouvez- vous  qu'il  y  ait  quelque  chose  qui  puisse  induire 
le  public  à  croire  que  le  sirop  des  Défenderesses  est  fabriqué  par  monsieur 
Gray,  ou  par  messieurs  Kerry,  Watson  et  Cie. 

Réponse. — Je  ne  trouve  rien  du  tout  de  ce  genre. 

Question. — Que  penseriez-vous  d'un  pharmacien  qui,  lorsque  vous  lui 
demanderiez  le  sirop  de  Gray,  vous  donnerait  l'autre  sirop  que  voici  : 

Réponse. — Je  ne  pourrais  que  considérer  cela  comme  un  acte  de  mal- 
honnêteté. 

Transquestionné. 

Question. — Avez- vous  jamais  connu  le  Sirop  des  Sœurs  de  la  Provi- 
dence comme  étant  en  vente  quelque  part  ? 

Réponse. — Je  sais  qu'on  pouvait  se  le  procurer  chez  les  Soeurs  de  la 
Providence,  mais  je  n'ai  jamais  eu  occasion  de  le  prescrire,  ni  aucun  autre 
sirop  de  gomme  d'épinette. 

Question. — On  appelait,  n'est-ce  pas,  ce  sirop  là,  le  sirop  des  Sœurs? 

Réponse. — On  l'appelait  le  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  préparé  par  les 
Sœurs.  Les  gens  allaient  avec  des  bouteilles  chez  les  sœurs  chercher  de  ce 
sirop  ;    généralement,  je  crois  qu'on  le  donnait. 

Question. — Tous  avez  connu,  n'est-ce  pas,  la  préparation  de  M.  Gray  ? 

Réponse. — Oui,  depuis  quelques  années. 

Question. — Depuis  combien  de  temps,  à-peu-près? 

Réponse. — Je  ne  saurais  le  dire  au  juste,  sept  ou  huit  ans,  peut-être 
plus,  mais  pas  moins  de  sept  ou  huit  ans. 

Question. — Et  vous  savez  qu'elle  était  en  vente  chez  les  pharmaciens  ? 

Réponse. — Je  sais  qu'on  pouvait  se  la  procurer  chez  lui,  mais  je  ne 
sais  pas  si  on  pouvait  se  la  procurer  ailleurs. 

Question. — Yous  rappelez-vous  si  le  sirop  des  Défenderesses  était  en 
vente  chez  les  pharmaciens,  à  cette  époque-là  ? 


96 

Réponse. — Je  ne  m'en  rappelle  pas. 

Question. — Y  a-t-il  plus  de  dix-huit  mois  que  le  sirop  des  Défenderesses 
est  sur  le  marché  ? 

Réponse. — Je  ne  puis  le  préciser. 

Et  le  déposant  ne  dit  rien  de  plus.  La  présente  déposition  lui  avant 
été  lue.  il  a  déclaré  qu'elle  contenait  la  vérité,  et  y  a  persisté. 

J.  T.  THOMPSON, 

Sténographe. 

Présent  :     L'Hon.   Juge  Mackay. 

L'an  mil  huit  cent  soixante-et-seize,  le  neuvième  jour  d'Octobre,  est 
comparu  EUGÈNE-HENRI-HERCULE  TRUDEL,  médecin,  de  la  Cité  et 
du  District  de  Montréal,  âgé  de  cinquante-cinq  ans,  témoin  produit  par  les 
Défenderesses,  lequel,  après  serment  prêté,  dépose  et  dit  : — Je  ne  suis  point 
intéressé  dans  l'événement  de  ce  procès  :  je  ne  suis  ni  parent,  ni  allié,  ni 
au  service  d'aucune  dss  parties  en  cette  cause,  je  connais  les  parties  en  cette 
cause.  Je  suis  médecin  depuis  environ  trente-deux  ans,  j'ai  toujours  prati- 
qué à  Montréal. 

Question. — Avez- vous  fait  le  commerce  de  pharmacie  ? 

Réponse. — Pendant  peu  de  temps. 

Question.— Connaissez- vous  le  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  des  Sœurs 
de  la  Providence  ? 

Réponse. — Je  le  connais 

Question. — Depuis  combien  d'années  le  connaissez-vous  ? 

Réponse. — Depuis  bien  des  années. 

Question. — Pouvez- vous  préciser  le  nombre  d'années  ? 

Réponse. — Au-delà  de  vingt  ans. 

Question. — Pouvez- vous  dire  si,  il  y  a  vingt  ans,  ce  sirop  était  pres- 
crit par  les  médecins  ? 

Réponse. — Je  suis  médecin  des  Sœurs  de  la  Providence  depuis  au-delà 
de  vingt  ans,  et  je  l'ai  prescrit  bien  souvent  depuis  vingt  à  vingt-cinq  ans. 

Question. — Vous  rappelez- vous  du  nom  qu'il  portait  ? 

Réponse. — Je  ne  puis  le  dire  positivement,  mais  il  devait  porter  le 
nom  de  Sirop  de  Gomme  d'Epinette. 

Question. — Connaissez-vous  la  composition  de  ce  sirop  ? 

Réponse. — Si  je  la  connais,  c'est  privément. 

Question. — La  connaissez- vous  suffisamment  pour  pouvoir  dire  que 
c'est  un  sirop  ? 

Réponse. — Oui  c'est  un  sirop. 


97 

Question. — Maintenant,  voulez- vous  examiner  cette  bouteille-ci,  qui  eel 
le  sirop  des  Demandeurs,  et  cette  autre,  qui  est  le  sirop  des  Défenderesses, 
et  nous  dire  si  vous  trouvez  quelque  ressemblance  entre  les  deux,  soit  dans 
le  sirop,  soit  dans  les  bouteilles,  soit  dans  l'enveloppe  de  ces  bouteilles  ? 

Réponse. — Il  n'y  a  rien,  ni  dans  le  sirop,  ni  dans  les  bouteilles,  ni  dans 
l'enveloppe  qui  se  ressemble. 

Question. — Pensez- vous  qu'il  soit  possible  qu'un  pharmacien  ou  qu'un 
commis  pharmacien  se  trompe  en  vendant  ces  préparations,  et  donne  l'une 
pour  l'autre. 

Réponse. — S'il  veut  exercer  son  intelligence,  il  ne  peut  pas  se  tromper. 
Je  dis  positivement  qu'un  acheteur  ne  pourrait  pas  non  plus  les  confondre. 

Question. — Voyez- vous  quelque  chose  dans  le  Sirop  des  Défenderesses, 
ou  dans  son  enveloppe  extérieure,  qui  puisse  induire  le  public  à  croire  que 
ce  sirop  est  fabriqué  par  M.  Gray,  ou  par  MM.  Kerry.  Watson  &  Cie.  ? 

Réponse. — Il  suffit  de  regarder  au  nom  pour  voir  par  qui  il  est  fabri- 
qué; la  couleur  du  papier  ne  fait  rien  quant  à  celui  qui  l'a  fabriqué.  Je  ne 
vois  rien  du  tout  dans  la  préparation  en  elle-même  qui  puisse  indiquer  que 
c'est  M.  Gray,  ou  MM.  Kerry,  Watson  &  Cie.  qui  l'ont  fabriqué. 

Je  suis  professeur  à  l'Ecole  de  Médecine  et  de  Chirurgie  de  Montréal^ 
faculté  de  l'Université  Victoria. 

ÎRANSQUESÎIONKÉ. 

Question. — je  vois  votre  nom  sur  ces  certificats-ci,  exhibit  G  des  De; 
mandeurs  ;  l' un  des  certificats  porte  votre  nom,  n'est-ce  pas  ? 

Réponse. — Oui,  monsieur. 

Question. — Est-ce  à  votre  suggestion  que  les  Sœurs  de  la  Providence 
ont  mis  ce  produit-là  en  vente  ? 

Réponse. — J'ai  conseillé  aux  Sœurs  de  la  Providence  de  mettre  ce  pro- 
duit en  vente  ;  j'ai  eu  occasion  de  le  leur  conseiller. 

Question. — Le  leur  avez- vous  conseillé  vers  le  temps  que  vous  leur 
avez  donné  ce  certificat  ? 

Réponse. — Bien  avant  même.  Comme  elles  ont  beaucoup  de  pauvres  à 
soutenir  et  beaucoup  d' œuvres  à  maintenir,  je  leur  ai  souvent  dit  qu'elles 
devaient  prendre  les  moyens  de  faire  vivre  leurs  pauvres  et  de  soutenir 
leurs  œuvres  de  charité,  et  leur  ai  indiqué  comme  l'un  des  moyens  dont 
elles  pouvaient  faire  usage,  la  vente  de  leur  sirop. 

Question. — Vous  avez  dit  que  vous  avez  souvent  prescrit  ce  sirop-là, 
qui  remplissait  alors  vos  prescriptions  ? 

Réponse. — Les  Dames  de  la  Providence. 


Question.  -Aucun  droguiste  n'a  rempli  vos  prescriptions  dans  ce  cas-la, 
n'est-ce  pas  ? 

Réponse. — Je  présume  que  j'ai  donné  de  ces  prescriptions-là  qui  ont  été 
remplies  par  des  pharmaciens.  Même  quand  on  prescrit  hors  de  la  Provi- 
dence, il  y  a  bien  des  malades  qui  préfèrent  aller  faire  remplir  leurs  pres- 
criptions à  la  Providence. 

Question. — Voulez- vous  mettre  sur  un  morceau  de  papier  la  prescription 
que  vous  donneriez  pour  avoir  ce  sirop-là  dans  une  pharmacie,  c'est-à-dire 
pour  le  faire  composer  ? 

Réponse. — Etant  requis  d'écrire  une  prescription  pour  envoyer  un  ma- 
lade chez  un  pharmacien  chercher  du  sirop  dégomme  d'épinette,  je  prescri- 
rais dans  les  termes  suivants  :   "  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  composé." 

Question. — Avant  que  les  Défenderesses  eussent  mis  leur  produit  sur 
le  marché,  en  mars  mil  huit  cent  soixante  et  quinze,  pouvez- vous  nous  dire 
quels  pharmaciens  à  Montréal  auraient  pu  remplir  cette  prescription  que 
vous  venez  de  nous  donner  ? 

Réponse. — Avant  que  ce  sirop  fut  offert  en  vente,  personne  n'aurait 
pu  remplir  cette  prescription.  Je  présume  qu'il  n'était  en  vente  qu'à  l'Asile 
de  la  Providence. 

Etant  requis  de  donner  une  prescription  médicale  pour  aller  chez  un 
pharmacien  chercher  du  Sirop  de  Gomme  d'Epinette,  je  pourrais  donner  la 
prescription  suivante;  Sirop  simple,  3  onces;  teinture  d'épinette,  une 
demi  once.  Les  mots  latins  que  je  mettrais  sur  cette  prescription  seraient  : 
"  Tinctura  pini,  syrupi  synplisis." 

Question. — Et  vous  croyez  que  les  pharmaciens  pourraient  exécuter 
cette  prescription  ? 

Réponse. — S'ils  pouvaient  la  remplir  ils  la  rempliraient,  sinon,  ils  me 
la  renverraient  ;  car  quant  un  pharmacien  ne  peut  pas  remplir  une  pres- 
cription, il  la  renvoie  toujours  au  médecin  ponr  avoir  des  explications. 

Question. — Cette  teinture  se  trouverait-elle  dans  toutes  les  pharmacies  ? 

Réponse. — Je  ne  le  sais  pas.  Je  ne  pense  pas  que  cette  préparation  se 
trouve  dans  la  pharmacopée. 

Question.- — Comment  un  pharmacien  pourrait-il  exécuter  une  prescrip- 
tion dont  il  ne  trouverait  pas  même  le  nom  dans  la  pharmaceupée  ? 

Réponse. — S'il  ne  pouvait  pas  la  remplir,  il  me  la  rendrait.  Depuis 
que  nous  avons  des  pharmaciens  licenciés,  c'est  d'un  grand  avantage,  parce 
qu'ils  sont  obligés  de  juger  des  prescriptions  pour  pouvoir  les  remplir;  et 
quand  ils  ne  peuvent  pas  remplir  une  prescription,  ils  la  renvoient  au 
médecin. 

Question. — L'avez- vous  obtenue  vous-même  cette  substance-là,  c'est-à- 
dire  de  la  teinture  d'épinette  ? 


89 

Question.— Je  l'ai  chez  moi  depuis  trente  ans.  Il  y  a  trente  ans  que 
j'en  fais  usage  dans  ma  pratique. 

Et  le  déposant  ne  dit  l'ien  de  plus  ;  la  présente  déposition  lui  ayant  été 
lue,  il  a  déclaré  qu'elle  contenait  la  vérité,  et  y  a  persisté. 

J.  T.  THOMPSON, 

Sténographe. 


Présent:    L'Hon.  Juge  Mackay, 

L'an  mil  huit  cent  soixante-et-seize,  le  neuvième  jour  d'Octobre,  est 
comparu  PHILIP  MOUNT,  médecin,  de  la  Cité  et  du  District  de  Montréal, 
âgé  de  trente-cinq  ans,  témoin  produit  par  les  Défenderesses,  lequel,  après 
serment  prêté,  dépose  et  dit  : — Je  ne  suis  point  intéressé  dans  l'événement 
de  ce  procès  :  je  ne  suis  ni  parent,  ni  allié,  ni  au  service  d'aucune  des  parties 
en  cette  cause.  Je  connais  le  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  des  Soeurs  de  la 
Providence,  qui  est  produit  comme  exhjbit  2  des  Défenderesses,  je  le  con- 
nais depuis  neuf  à  dix  ans  je  crois, 

Question.— L'avez- vous  prescrit  ? 

Réponse. — Oui,  monsieur. 

Question. — Fréquemment  ? 

Réponse. — Oui,  on  s'en  sert  à  la  prison  et  à  la  maison  de  réforme. 

Question. — Il  y  a  huit  ou  neuf  ans  le  prescriviez-vous  ? 

Réponse.— Oui,  on  le  prescrivait  à  la  providence  ;  j'étais  alors  médecin 
du  dispensaire  de  la  providence  et  je  le  prescrivais. 

Question. — Vous  voyez  les  deux  bouteilles  que  voici,  l' une  est  le  sirop 
des  Demandeurs,  et  l' autre  celui  des  Défenderesses,  trouvez-vous,  soit  dans 
les  bouteilles,  soit  dans  le  sirop,  soit  dans  la  forme  et  la  qualité  de  l'enve- 
loppe, quelque  similitude  entre  les  deux  ? 

Réponse. — Je  n'en  trouve  pas  du  tout,  les  bouteilles,  le  sirop,  l'enve- 
loppe, tout  est  différent. 

Question. — Pensez- vous  que  quelqu'un  pourrait  se  tromper  quant  au 
nom  ? 

Réponse. — Pas  une  personne  intelligente,  car  elle  pourrait  lire  l'éti- 
quette. 

Question. — Pensez-vous  qu'il  y  a  quelque  chose  sur  l'enveloppe  qui 
puisse  faire  croire  que  le  sirop  des  Soeurs  de  la  Providence,  est  fabriqué  par 
messieurs  Kerry,  "Watson  et  Cje.  ? 


100 

Réponse. — Je  ne  vois  rien  du  tout  qui  puisse  faire  croire  cela. 

Question.— Le  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  des  Sœurs  de  la  Providence, 
est  bien  connu,  surtout  dans  la  partie  est,  par  la  population  canadienne- 
française  ? 

Réponse. — Oui,  il  y  a  longtemps  qu'il  est  connu,  il  y  a  bien  quatre, 
cinq  ou  six  ans  qu'il  est  connu. 

Transquestionné. 

Question. — On  ne  pouvait  pas  se  procurer  ce  sirop  là  ailleurs  que  chez 
les  sœurs  n'est-ce  pas  ? 

Réponse. — Moi  je  le  prescrivais  toujours  chez  les  Sœurs  de  la  Provi- 
dence, lorsque  j'étais  au  dispensaire  ;  et  ceux  à  qui  je  le  prescrivais  allaient 
le  chercher  chez  les  sœurs,  parceque  je  le  prescrivais  à  des  personnes  pau^ 
vres,  et  elles  allaient  le  chercher  au  dispensaire. 

Question.— Aurait-on  pu  se  procurer  ce  sirop;  là  ailleurs  que  chez  les 
Sœurs  de  la  Providence,  il  y  a  cinq  ou  six  ans  ? 

Réponse. — Je  ne  le  sais  pas. 

Question. — Si  les  gens  avaient  été  capables  de  payer,  leur  auriez- vous 
recommandé  un  autre  remède  ? 

Réponse. — C'est  selon  le  cas;  je  crois  que  j'ai  envoyé  chez  les  Sœurs 
de  la  Providence  des  personnes  capables  de  payer,  y  chercher  ce  sirop. 

Et  le  déposant  ne  dit  rien  plus.  La  présente  déposition  lui  ayant  été 
lue,  il  a  déclaré  qu'elle  contenait  la  vérité,  et  y  a  persisté. 

J.  T.   THOMPSON, 

Sténographe, 


Présent  :     l'Honorable  Juge  Mackay. 

L'an  mil  huit  cent  soixante  et  treize,  le  neuvième  jour  d'octobre,  est 
comparu  SŒUR  ZÉNAIDE  THOMPSON,  déjà  examinée,  témoin  produit 
par  les  Défenderesses,  laquelle  après  serment  prêté,  dépose  et  dit  :  Je  ne 
suis  point  intéressé  dans  l'événement  de  ce  procès  :  je  ne  suis  ni  parent,  ni 
allié,  ni  au  service  d'aucune  partie  en  cette  cause. 

Question. — Vous  avez  entendue  la  déposition  de  Monsieur  Devins  ; 
lorsque  vous  avez  choisi  le  papier  bleu,  vous  a-t-il  fait  quelque  remarque  à 
l'effet  que  le  choix  de  cette  conleur  pourra.it  être  une  infraction  au  droit  de 
Monsieur  Grav  ? 


101 
Réponse. — Non,  j'en  suis  bien  positive. 

TRANSQUESTIONNE. 

Je  suis  allée  là  avec  la  sœur  Joséphine  ;  je  n'y  suis  pus  allé  là  avec 
d'autres,  et  d'autres  n'ont  pas  pu  s'occuper  de  cette  question  là. 

Les  médecins  qui  ont  été  entendus  ici  aujourd'hui  sont  tous  plus  ou 
moins  attachés  à  notre  maison,  c'est-à-dire  que  ce  sont  les  médecins- visiteurs 
de  notre  maison.  Ce  sont  les  médecins  de  l'écols  médicale  et  ce  sont  les  vi« 
siteurs  de  notre  maison  ;  les  professeurs  de  l'école  médicale  sont  de  droit 
visiteurs  chez  nous. 

Et  la  Déposante  ne  dit  rien  de  plus.  La  présente  déposition  lui  ayant 
été  lue,  elle  a  déclarée  qu'elle  contenait  la  vérité  et  y  a  persistée. 

J.  T.  THOMPSON, 

Sténographe. 


Présent  : — L'Hon.   Juge  Mackay. 

L'an  mil  huit  cent  soixante  et  seize,  le  neuvième  jour  d'Octobre,  est 
comparu  JOSEPH-GUSTAVE  LAVIOLETTE,  médecin  et  pharmacien,  de 
la  cité  et  du  district  de  Montréal,  âgé  de  trente-trois  ans,  témoin  produit 
par  les  Défenderesses,  lequel,  après  serment  prêté,  dépose  et  dit  : — Je  ne 
suis  point  intéressé  dans  l'événement  de  ce  procès  ;  je  ne  suis  ni  parent,  ni 
allié,  ni  au  service  d'aucune  des  parties  en  cette  cause.  Je  tiens  une  phur- 
macie  sur  la  rue  Notre-Dame  depuis  deux  ans.  Mon  titre  de  médecin  me 
donnait  le  droit  de  tenir  pharmacie,  quand  j'ai  commencé  à  tenir  pharmacie, 
mais  depuis  le  mois  de  mai  mil  huit  cent  soixante  et  quinze,  j'appartiens  au 
corps  des  pharmaciens. 

Question.-— > Voulez- vous  dire  si  vous  avez  reçu,  il  y  a  quelques  mois, 
des  menaces  de  la  part  de  MM.  Kerry,  Watson  &  Cie.,  au  sujet  de  la  vente 
du  Sirop  des  Sœurs  de  la  Providence  ? 

Réponse. — On  nous  a  dit  qu'on  nous  poursuivrait  en  dommages  si  nous 
vendions  le  Sirop  des  Sœurs  de  la  Providedce  ;  on  nous  a  fait  répéter  ces 
menaces-là  deux  ou  trois  fois  ;  M.  Watson  lui  même  a  fait  ces  menaces-là  à 
moi-même  une  fois.  Je  me  rappelle  que,  la  première  fois,  il  est  venu  nous 
dire  qu'on  ne  devait  pas  vendre  ce  sirop,  sous  peine  d'amende,  qu'on  serait 
poursuivi  si  nous  le  vendions.  Une  seconde  fois,  il  est  venu  nous  dire  que 
nous  devions  retirer  une  annonce  que  nous  avions  dans  les  colonnes  du  Nou- 
veau-Monde, et  que,  si  nous  ne  le  faisions  pas,  nous  serions  poursuivis  ;  nous 
avons  en  conséquence  retiré  cette  annonce  pendant  un  mois, 


102 

Question.— Considérez-vous  que  l'effet  de  ces  menaces  a  été  d'oinnê* 
cher  la  vente  d'une  certaine  quantité  de  ce  Sirop? 

Réponse. — Nous  ne  nous  en  sommes  pas  beaucoup  occupés  quant  à  la 
vente  ;  nous  avons  retiré  l'annonce,  mais  nous  avons  continué  la  vente  de  cet 
article,  toutefois  en  ayant  soin  de  ne  pas  l'offrir  aussi  souvent  qu'aupara» 
vant,  mais  lorsqu'on  nous  a  demandé  le  sirop  en  question,  nous  l'avons  vendu. 

Question. — Avant  que  ce  Sirop  fut  mis  en  dépôt  dans  les  pharmacies, 
avez- vous  eu  quelque  conversation,  ou  avez-vous  fait  quelques  démarches 
auprès  des  Sœurs  de  la  Providence?  à  l' effet  de  les  engager  à  exploiter  leur 
Sirop  ? 

Réponse.— Les  frères  des  écoles  chrétiennes,  que  nous  avons  comme 
pratiques,  sont  venus  nous  demander  ce  sirop,  et  nous  leur  avons  dit  que 
nous  pouvions  le  leur  procurer,  qu'ils  pouvaient  l'acheter  tout  aussi  bien  de 
nous  que  des  sœurs  ;  et  nous  avons  pris  d'eux,  cette  fois-là,  une  commande 
d'une  douzaine  de  bouteilles  ;  en  conséquence,  je  suis  allé  chez  les  sœurs  de 
la  Providence  pour  avoir  ce  sirop,  mais  le  prix  qu'elles  m'en  demandaient 
m'empêchait  de  le  vendre  d'une  manière  rémunératrice,  car  elles  voulaient 
me  le  vendre  plus  cher  que  je  ne  l'aurais  vendu  moi-même.  Sur  l'observa* 
tion  que  je  leur  en  fis,  elles  me  dirent  de  repasser  le  lendemain,  me  disant 
qu'elles  verraient  à  fixer  leur  prix  ;  le  lendemain  ou  le  surlendemain,  j'y 
suis  retourné  ;  elles  me  donnèrent  un  prix,  le  prix  à  la  douzaine,  me  faisant 
en  même  temps  remarquer  qu'elles  n'avaient  pas  encore  fixé  le  prix  à  la 
douzaine,  mais  qu'  elles  allaient  voir  à  cela.  Plus  tard,  elles  nous  ont  donné 
des  cottes  de  leur  sirop;  et  je  crois  que  ces  cottes  leur  avaient  été  données 
par  monsieur  Devins. 

Question. — Avez-vous  jamais  demandé  aux  Sœurs  de  la  Providence  de 
vous  vendre  leur  recette  ? 

Réponse. — Je  ne  me  rappelle  pas  de  la  leur  avoir  demandée  ? 

Question. — Les  avez-vous  engagé  à  mettre  leurs  sirop  en  dépôt  dans  les 
pharmacies  ? 

Réponse. — Non;  elles  m'ont  paru  y  avoir  pensé  avant  que  je  leur 
parle  de  mettre  leur  sirop  sur  le  marché,  et  alors  je  leur  ai  dit  qu'il  fallait 
qu'elles  le  mettent  à  un  prix  moins  élevé  que  celui  qu'elles  me  proposaient, 
car  aucun  pharmacien  ne  l'achèterait. 

Traxsquestionné. 

Question. — Quand  vous  êtes  allés  ainsi  chez  les  Sœurs  de  la  Providence 
acheter  une  douzaine  de  bouteilles  de  ce  sirop,  leurs  bouteilles  portaient- 
plies  une  étiquette  ? 


103 

Réponse. — Oui,  mais  je  n'ai  jamais  vu  annoncer  ce  sirop  sui*  aucun 
journal.  Il  y  a  de  cela  dix-huit  mois  passé  ;  dans  ce  temps-là,  il  n'était  en 
dépôt  dans  aucune  place  que  je  connaisse. 

RÉ- EXAMINÉ. 

Question. — Etait-ce  cette  étiquette-là  qui  était  sur  les  bouteilles,  avant 
cette  époque-là,  c'est-à-dire  l'exhibit  P  ? 
Réponse. — Oui,  monsieur. 

RE-ÎRANSQUESTIONNNÊ. 

C'est  M.  Watson  qui  m'a  parlé  comme  je  l'ai  dit  dans  mon  examen-en- 
che,  et  il  est  ici  présent  en  Cour. 

Question. — Ne  vous  avait-il  pas  demandé  cela  comme  matière  de  cour- 
toisie plutôt  que  comme  une  menace  ? 

Réponse. — Il  m'a  dit  comme  ceci  :  "  Nous  venons  vous  dire  que  vous 
devez  retirer  votre  annonce  du  journal  Le  Nouveau- Monde,  et  si  vous  ne  la 
retirez  pas,  nous  allons  vous  poursuivre  de  suite  ;  "  et  il  ajouta  :  "  D'ail- 
leurs, vous  devriez  le  faire  par  courtoisie  entre  pharmaciens."  J'ai  pris  ce 
qu'il  m'a  dit  pour  une  menace. 

Et  la  déposante  ne  dit  rien  de  plus.  La  présente  déposition  lui  ayant 
été  lue,  elle  a  déclaré  qu'elle  contenait  la  vérité  et  y  a  persisté. 

J.  S.  THOMPSON, 

Sténographe. 


Présent  :     L'Hon.  Juge  Mackay. 

L'An  mil  huit  cent  soixante-efcseize,  sixième  jour  d'Octobre,  est  com- 
parue  la  Sœur  EMILIE  CARON,  âgée  de  soixante-et-sept  ans,  témoins 
produit  par  les  Demandeurs,  laquelle  après  serment  prêté,  dépose  et  dit  ■  — 
Je  suis  la  Supérieure-Générale  de  la  Compagnie  des  Sœurs  de  la  Providence. 
Je  n'habite  pas  continuellement  la  maison  principale.  Pour  les  grandes 
affaires  je  signe  mon  nom,  mais  pour  les  particularités  de  la  maison  je  ne 
m'en  mêle  pas,  Je  suis  Supérieure  des  Sœurs  Défenderesses  dans  cette 
cause  ;  j'appartiens  à  la  communauté  depuis  mil  huit  cent  quarante-trois.  Je 
suis  une  de  celles  qui  ont  fondé  la  maison  ;  je  suis  la  même  personne  que  celle 
mentionnée  dans  l'application  pour  une  marque  de  commerce,  faite  le  quatre 


101 

Mars  rail  huit  cent  soixante-et-quinze,  c'est-à-dire,  j'ai  signé  cette  demande. 
Je  ne  suis  pas  allée  à  Ottawa  pour  cela;  je  n'ai  pas  copie  de  la  marque  de 
commerce,  mais  j' en  ai  eu  connaissance.  Depuis  mil  huit  cent  quarante-trois, 
je  ne  me  suis  pas  immiscée  aux  particularités  de  notre  maison.  Notre  com- 
munauté a  commencé  à  faire  le  sirop  en  mil  huit  cent  quarante-trois.  Au 
début  de  la  communauté  nous  l'avons  toujours  vendu  à  ceux  qui  venaient 
le  chercher  chez  nous;  mais  je  ne  puis  pas  dire  précisément  quand  nous 
avons  commencé  à  vendre  ce  sirop  à  d'autres  personnes  hors  de  notre  maison. 
Je  puis  certifier  seulement  que  les  matières  qui  étaient  employées  alors  à  con- 
fectionner ce  sirop,  étaient  les  mêmes  qu'  à  présent  ;  que  le  sirop  a  toujours  été 
blanc,  et  que  la  recette  était  la  même.  Je  n'ai  rien  à  faire  avec  le  place- 
ment de  la  marchandise  hors  de  la  maison.  J'ignore  quelle  quantité  on  a 
manufacturé  depuis  mil  huit  cent  quarante- trois.  Dès  le  début,  nous  faisions 
ramasser  les  choses  pour  la  manufacture  du  sirop  à  la  campagne,  mais  depuis 
ce  temps-là  je  ne  m'en  suis  pas  mêlée.  Il  entre  dans  ce  sirop  des  composi- 
tions telles  que  nous  avons  la  recette.  C'est  la  sœur  Frigon,  à  l' Hôtel-Dieu, 
qui  a  donné  la  recette  en  mil  huit  cent  quarante-trois.  La  principale  chose 
qui  entre  dans  la  manufacture  de  ce  sirop  c'est  la  gomme.  Les  autres 
matières  ont  été  achetées  chez  les  apothécaires.  Dans  ce  temps-là,  il  y  avait 
peu  d' apothécaires,  et  nous  prenions  presque  tous  ce  dont  nous  avions  besoin 
chez  Monsieur  Lyman.  Aujourd'hui,  je  pense  que  nous  prenons  encore 
là,  chez  Monsieur  Lyman.  J'examine  en  gros  les  comptes  de  la  maison,  je 
ne  suis  pas  capable  de  dire  si  nous  dépensons  beaucoup  pour  l' achat  des 
ingrédients  du  sirop.  Je  n'ai  pas  placé  de  ces  marchandises,  mais  je  sais 
qu'on  en  a  vendu  en  différentes  places.  J'ignore  si  l'on  en  a  placé  chez  les 
pharmaciens  de  Montréal.  Il  est  probable  qu'il  y  en  a  de  placé  hors  de 
Montréal,  mais  je  ne  sais  pas  où.  Je  ne  me  rappelle  pas  le  nom  de  la  sœur 
qui  a  demandé  la  première  pour  prendre  une  marque  de  commerce.  Notre 
sirop  n'a  pas  toujours  été  vendu  dans  une  boîte.  Dans  le  commencement, 
nous  le  donnions  presque  tout,  car  nous  l'avons  fait  pour  favoriser  nos 
pauvres.  Ça  a  été  toujours  le  but,  pour  nous  rendre  utile  à  l'humanité. 
J'ignore  depuis  quand  le  sirop  a  été  renfermé  dans  une  boîte.  Je  ne  puis 
pas  préciser.  H  y  a  longtemps  que  nous  nous  servions  de  différentes  fioles. 
Ce  sirop  a  toujours  été  blanc.  Je  ne  puis  pas  dire  précisément  quand  nous 
avons  fait  pour  la  première  fois  usage,  de  l'étiquette  bleue. 

Transquestîonné. 

Je  suis  à  la  Providence  depuis  mil  huit  cent  quarante-trois.     C'est 
en  mil  huit  cent  qurante-trois  que  nous  avons  eu  cette  recette  de  la  Sœur 


105 

Frigon.  J'ai  eu  occasion  de  référer  quelques  fois  à  la  recette  suivie  dans 
notre  maison.  Je  crois  qu'on  se  servait  de  la  même  recette  que  nous  avons 
eu  en  mil  huit  cent  quarante-trois.  En  mil  huit  cent  quarante-trois,  j'ai  été 
quelque  temps  pharmacienne.  J'étais  première  pharmacienne  et  j'étais 
dépositaire  en  même  temps.  Dans  cette  année  mil  huit  cent  quarante- 
trois,  nous  faisions  du  sirop,  mais  pas  en  quantité  considérable.  Nous  le  fai- 
sions au  besoin,  pour  les  pauvres  et  pour  nos  bienfaiteurs.  Je  ne  puis  pas 
dire  combien  nous  en  faisions.  Les  autres  Sœurs  en  faisaient  plus  que  moi. 
On  employait  plusieurs  livres  de  gomme.  On  en  faisait  quelques  bouteilles  à  la 
fois,  quelques  gallons,  mais  je  ne  puis  pas  préciser.  Je  n'ai  jamais  fpit  moi- 
même  plus  d'un  gallon.  Les  premières  années,  on  n'  en  faisait  pas  beau- 
coup, mais  ça  a  toujours  été  en  augmentant.  Je  puis  dire  que  le  sirop  a 
toujours  été  blanc.  Dans  ce  temps-là,  nous  commencions  petitement.  M. 
Lyman  nous  a  donné  beaucoup  de  choses  au  commencement.  Quelques 
années  après  que  je  suis  partie,  il  se  faisait  beaucoup  de  sirop.  Cette  recette 
que  la  Sœur  Frigon  avait,  elle  en  faisait  usage  pour  elle-même.  Elle  me  dit  : 
Je  trouve  que  cela  me  fait  du  bien.  Le  sceau  qu'on  me  montre  à  présent 
est  le  sceau  de  notre  maison.  Je  connais  bien  que  ce  sceau  est  notre  propriété. 
Je  crois  que  c'est  feu  notre  fondatrice,  Madame  Gamelin,  qui  l'a  fait  faire.  Il 
a  été  fait  vers  le  temps  de  la  fondation  de  la  maison,  en  mil  huit  cent  qua- 
rante-trois. Il  n'a  jamais  été  changé.  Il  a  toujours  été  le  sceau  de  notre 
corporation. 

RÉ-EXAMINÊ. 

Question. — Avez- vous  jamais  obtenu  une  licence  pour  tenir  une  phar- 
macie ? 

Réponse. — Je  n'en  ai  jamais  demandé.  J'ai  été  plusieurs  années  phar- 
macienne. Je  n'ai  pas  tonjours  été  Supérieure.  Je  n'ai  jamais  entendu 
parler  que,  dans  notre  maison,  on  avait  une  licence  pour  tenir  pharmacie. 
Notre  maison  est  comme  les  autres  maisons  de  charité — nous  sommes  ex- 
emptes de  taxes  pour  certaines  choses.  Nous  payons  pour  l' eau  ;  nous  payons 
pour  bien  des  choses.  A  part  l'eau,  je  ne  me  rappelle  pas  les  taxes  que 
nous  payons.  Je  ne  connais  pas  d'autres  taxes  que  la  taxe  de  l'eau  que 
nous  payons. 

Et  la  déposante  ne  dit  rien  de  plus  ;  et  cette  déposition  lui  ayant  été 
lue,  elle  a  déclaré  qu'elle  contenait  la  vérité. 

S.  A.  ABBOTT, 

Sténographe. 


106 
Présent  :  L'Honorable  Juge  Mackay. 

L'an  mil  huit  cent  soixant-et-seize,  le  sixième  jour  d'Octobre,  est 
comparue  Sœur  JOSÉPHINE  née  COURSOL,  Religieuse,  de  la  Cité  de 
Montréal,  âgée  de  quarante-et-un  ans,  témoin  produit  par  les  Demandeurs, 
laquelle  après  serment  prêté,  déposé  et  dit  : — Je  ne  suis  point  intéressée 
dans  l' événement  de  ce  procès. 

Question. — Vous  appartenez  à  la  communauté,  la  Défenderesse  en  cette 
cause  ? 

Réponse. — Oui,  Monsieur,  depuis  (1852)  mil  huit  cent  cinquante-deux. 

Question. — Avez- vous  eu  quelque  chose  à  faire  avec  la  pharmacie  de 
la  maison  ? 

Réponse. — Oui,  je  suis  pharmacienne  en  chef  depuis  treize  ans;  depuis 
mil  huit  cent  soixante-trois. 

Question. — Vous  avez  eu  quelque  chose  à  faire,  par  conséquent,  avec  la 
préparation  de  ce  sirop  ? 

Réponse. — Beaucoup. 

Question. — Pouvez-vous  dire  quand  vous  avez  commencé  à  vendre  ce 
sirop  hors  de  votre  maison  ? 

Réponse. — A  ma  connaissace,  il  en  a  toujours  été  vendu  à  la  maison  aux 
gens  du  dehors,  qui  venaient  le  chercher. 

Question. — Quand  avez- vous  commencé  à  mettre  des  dépôts  de  ce  sirop 
hors  de  votre  maison  ? 

Réponse. — Depuis  que  nous  avons  eu  notre  marque  de  commerce,  en 
1875.  Avant  ce  temps-là,  nous  n'en  déposions  pas  au  dehors;  ou  du  moins, 
je  n'en  ai  pas  eu  connaissance. 

Question. — Chez  qui  avez-vous  commencé  à  faire  ces  dépôts,  pour  la 
vente  de  votre  sirop  ? 

Réponse. — Je  ne  puis  pas  dire  exactement;  mais  je  crois  que  les  pre- 
miers sont  Messieurs  Devins  et  Laviolette.  Nous  avons  un  bon  nombre  de 
dépôts.     Presque  tous  les  pharmaciens  et  les  épiciers  en  ont. 

Question. — Avant  de  vendre  au  dehors  de  votre  maison,  aviez-vous 
l'habitude  d'enfermer  vos  bouteilles  dans  ces  boîtes  en  carton  ? 

Réponse. — Non,  je  n'ai  pas  connaissance  que  nons  nous  soyons  servies 
de  boîtes  en  carton  avant  ce  temps-là. 

Question. — Pouvez-vous  dire  depuis  combien  de  temps  vous  vous  servez 
de  ce  genre  de  bouteilles  ? 

Réponse. — Je  ne  puis  dire  depuis  combien  de  temps  nous  nous  en  ser- 
vons. La  boîte  de  caton  dont  il  est  ici  question  est  l'exhibit  B  des  Deman- 
deurs, produit  à  l' enquête. 


107 

Question. — Savez- vous  qui  a  eu  l'idée  de  renfermer  ces  bouteilles  dans 
ces  boîtes  de  carton  ? 

Réponse. — C'est  nous  qui  avons  eu  cette  idée.  C'est  pour  empaqueter 
avec  plus  d'aise. 

Question. — Qui  vous  manufacture  ces  boîtes  ? 

Réponse. — Monsieur  Jellyman. 

Question. — Savez- vous  combien  il  vous  en  a  fourni  ? 

Réponse. — Je  ne  puis  pas  dire  la  quantité,  plusieurs  mille. 

Question. — Quelque  chose  comme  cinq  ou  six  cents  grosses  ? 

Réponse. — Je  ne  crois  pas  que  ce  soit  autant  que  cela;  mais  je  ne  puis 
pas  préciser  la  quantité. 

Question. — Qui  vous  a  suggéré  la  forme  de  ces  boîtes  ? 

Réponse. — J'ai  consulté  un  monsieur  Stanton,  monsieur  Devins  et 
monsieur  Gellyman  lui-même,  au  sujet  de  la  forme  de  ces  boîtes. 

Question. — Si  votre  bouteille  était  carrée,  croyez-vous  qu'on  vous 
aurait  suggéré  ces  boîtes  ? 

Réponse. — Je  n'en  sais  rien.  Nous  n'avons  jamais  usé  que  des  bou- 
teilles rondes.  Je  pense  qu'on  m' a  suggéré  de  faire  les  boîtes  carrées  afin 
d'empaqueter  avec  plus  de  facilité.  C'est  monsieur  Jellyman  qui  m'a  fait 
décider  en  dernier  lieu  à  prendre  les  boîtes  carrées  au  lieu  de  rondes. 

Question. — Avez-vous  eu  connaissance  de  l'impression  de  ces  deux 
différents  couverts,  exhibits  I  et  J  des  Demandeurs,  produits  à  l'enquête  ? 

Réponse. — C'est  moi  qui  les  ai  fait  imprimer.  L'exhibit  I  est  le  pre- 
mier qui  ait  été  en  usage.  Nous  en  avons  imprimé  à-peu-près  une  rame, 
parce  que  nous  ne  pouvions  trouver  de  papier  à  meilleur  marché.  L' exhibit 
J  coûte  à-peu-près  la  moitié  moins  que  le  papier  de  l'exhibit  I. 

Question. — Il  y  a  quelque  différence,  ma  sœur,  dans  ce  qu'il  y  a  d'im- 
primé sur  ces  deux  cartes  ? 

Réponse. — Quelle  différence  ? 

Question. — Cette  différence  ne  vous  a-t-elle  point  frappée  ? 

Réponse. — La  différence  consiste  en  ce  qu'il  y  a,  sur  cette  boîte,  le  nom 
de  monsieur  Devins  comme  notre  agent.  Monsieur  Devins  nous  ayant 
objecté  qu'il  n'aimait  pas  à  voir  son  nom  là,  ayant  été  menacé  d'un  procès, 
nous  lui  avons  retiré  notre  agence. 

Question. — Remarquez- vous  que  les  mots  "  Enregistrée  1875  "  qui  sont 
sur  l'exhibit  1  n'ont  pas  été  reproduits  sur  l'exhibit  J  ? 

Réponse. — Nous  les  avons  ôté  parceque  nous  les  croyions  inutiles. 

Question. ^-Quelqu'un  vous  a-t-il  fait  remarquer  que  c'était  inexact  ? 

Réponse. — Je  ne  me  rappelle  pas  si  quelqu'une  de  nos  soeurs  nous  a 
fait  remarquer  cela  ;  mais  je  n'en  ai  pas  connaissance.  Je  sais  que  cela  a  été 


108 

dit.  Quelqu'un  nous  a  fait  remarquer  que  les  mots  "  Enregistrée  1875  " 
pouvaient  s'appliquer  à  toute  l'enveloppe,  tandis  que  nous  n'avions  que 
notre  marque  de  commerce  qui  fut  enregistrée.  C'est  sur  ces  considérations 
que  nous  avons  omis  cet  mots  sur  l' exhibit  J. 

Question. — Quand  vos  bouteilles  ont  été  mises  dans  des  boîtes  carrées 
comme  celle-ci,  n'a-t-il  pas  été  question  alors  de  l'avantage  qu'il  y  avait 
dans  cette  forme-là,  vu  qu'on  pourrait  prendre  votre  sirop  pour  celui  de 
monsieur  Gray  ? 

Réponse.— Jamais,  que  je  me  rappelle,  ni  chez-nous,  ni  ailleurs. 

Question.—- Vous  saviez,  n'est-ce  pas,  que  le  sirop  de  monsieur  Gray 
était  vendu  publiquement  depuis  longtemps,  avant  que  vous  vous  décidiez  à 
faire  commerce  du  vôtre  ? 

Réponse. — Nous  avons  commencé  à  vendre  dans  notre  maison  avant. 
Je  savais  que  le  sirop  de  monsieur  Gray  était  vendu  et  était  sur  le  marché, 
avant  que  nous  commençâmes  à  mettre  des  dépôts  de  notre  sirop  en  dehors 
pour  la  vente. 

Question.— Vous  serviez- vous  de  ces  étiquettes  avant  d'avoir  obtenu  la 
marque  de  commerce  ? 

Réponse. — Nous  nous  en  servions  comme  sceau  de  la  communauté,  mais 
nous  ne  nous  en  servions  pas  comme  marque  de  commeroe. 

Question. — Qu'y  avait-il  alors  sur  cette  étiquette  ? 

Réponse. — Il  y  avait  :  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  composé,  la  même 
chose  que  vous  avez  sur  ce  papier-là.  Nous  avons  de  ces  étiquettes  encore 
chez  nous. 

Question — Quand  avez- vous  commencé  à  annoncer  votre  sirop  dans  les 
journaux  ? 

Réponse. — Je  ne  sais  pas  même  si  nous  l'avons  annoncé  dans  les  jour, 
naux;  nous  avons  eu  des  circulaires.  Je  sais  qu'il  a  été  annoncé  un  peu, 
mais  bien  peu. 

Question.  — Ceci  a-t-il  été  imprimé  à  la  demande  de  votre  maison  ? 

Réponse. — Le  "handbill"  marqué  exhibit  A  des  Demandeurs  a  été 
imprimé  sur  mon  ordre. 

Question.— Voici  deux  coupures,  l'une  du  "  Nouveau-Monde,"  et  l'au- 
tre de  la  "  Gazette  de  Montréal"  :  voulez^  vous  nous  dire  si  ceci  a  été  publié 
à  la  requête  de  votre  maison  ? 

Réponse. — Le  papier  marqué  exhibit  L  des  Demandeurs  a  été  publié  à 
notre  demande  dans  le  "  Nouveau- Monde,"  en  février  dernier,  c' sst-à-dire, 
je  crois  que  c'est  en  hiver,  je  ne  me  rappelle  pas  le  mois  exactement,  Quant 
à  ce  papier  en  anglais,  je  ne  sais  pas  qui  l'a  fait  mettre  dans  la  (i  Gazette," 

Quejtiorç,*- Voire  maison  vend-eUe  d'autres  remèdes  que  le  Sirop0 


109 

Réponse. — Nous  faisons  diverses  préparations.  Nous  avons  des  dépôts 
pour  quelqnes-uns  de  ces  remèdes.  Nous  avons  un  liniment  et  un  sirop  pour 
la  coqueluche  différant  du  Sirop  de  Gomme  d'Epinette. 

Question. — Votre  maison  ne  paie  pas  de  taxes  municipales,  excepté  la 
taxe  d' eau  ? 

Réponse. — Je  n'ai  pas  été  employée  dans  la  Procure;  je  ne  sais  rien  de 
cela;  je  ne  me  suis  pas  occupée  de  cela,  mais  je  l'ai  entendu  dire  dans  la 
maison. 

Question. — N'a-t-il  pas  été  publié  un  livre  de  matière  médicale  par 
votre  maison  ? 

Réponse. — Oui,  monsieur,  je  pense  que  c'était  vers  mil  huit  cent  soi- 
xante et  neuf. 

Question. — Quel  est  le  titre  ? 

Réponse. — Le  titre  est  "  Matière  Médicale,"  c'est  un  compendium  de 
diverses  pharmacopées. 

Question. — Ce  livre-là  est  un  recueil  de  tous  les  remèdes  qui  vous  étaient 
connus  ;   tant  par  les  livres  que  vous  avez  lus  que  par  votre  expérience  ? 

Réponse.— Oui,  monsieur,  c'est  un  compendium  de  toutes  les  pharma- 
copées connues,  et  de  quelques  remèdes  domestiques  aussi,  mais  bien  peu. 
Ce  livre  contient  aussi  autre  chose. 

Question. — Vous  dites  que  c'est  la  première  édition  qui  a  été  publiée  en 
mil  huit  cent  soixante  et  neuf  ? 

Réponse. — Oui,  elle  a  été  publiée  à  cette  époque  ;  la  seconde  édition  a 
été  publiée  en  mil  huit  cent  soixante  et  dix,  autant  que  je  puisse  me  rappeler. 

Question. — Le  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  ou  la  gomme  d'épinette 
elle-même,  sont-ils  mentionnés  dans  ce  recueil  comme  étant  un  remède  ou 
la  base  d'un  remède  ? 

Réponse. — Je  pense  que  dans  les  deux  éditions  cela  doit  être  mentionné. 

Question. — Veuillez  prendre  connaissance  de  l'édition  de  mil  huit  cent 
soixante-et-neuf,  qui  vous  est  montrée  et  indiquer  où  la  gomme  d'épinette 
ou  le  Sirop  de  Gomme  d'Epinette,  est  mentionné  comme  un  remède  ?  (Un 
livre  marqué  exhibit  M  des  Demandeurs  produit  à  l'enquête,  est  montré  au 
témoin)  ? 

Réponse. — La  recette  de  notre  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  n'est  pas 
dans  ce  livre-là,  je  ne  puis  pas  en  trouver  la  mention  dans  la  table  de  cette 
édition, 

Transquestionnée. 

Question.  .—Vous  êtes  pharmacienne  en  chef,  ma  sœur,  depuis  mil  huit 
peut  soixantG-et'irûia  ? 


110 

Réponse. — Oui  Monsieur. 

Question.— Avant  mil  huit  cent  soixante-et-trois,  avez- vous  eu  quelque 
chose  à  faire  avec  la  pharmacie  ? 

Réponse. — Pendant  plusieurs  années,  comme  novice;  mais  je  n'avais 
aucune  responsabilité.  C'était  en  mil  huit  cent  cinquante-deux  et  mil  huit 
cent  cinquante-trois. 

Question. — Pouvez- vous  dire  à-peu-près,  en  mil  huit  cent  soixante-et- 
trois,  quand  vous  avez  pris  la  direction  de  la  pharmacie,  quelle  quantité 
vous  fabriquiez  de  de  ce  sirop  ? 

Réponse. — Au  meilleur  de  ma  connaissance,  de  cinquante  à  soixante 
gallons  par  année. 

Question. — En  mil  huit  cent  soixante-et-cinq  ? 

Réponse. — En  mil  huit  cent  soixante-cinq,  nous  fabriquions  au-dessus 
de  cent  gallons  par  année. 

Question. — Et  cela  a  toujours  augmenté  depuis? 

Réponse. — Depuis  ce  temps-là,  la  fabrication  a  toujours  considérablement 
augmenté. 

Question. — Pouvez-vous  dire  combien  vous  en  fabriquiez  en  mil  huit 
cent  soixante-et-huit  ? 

Réponse. — Au  moins  cent  cinquante  gallons. 

Question. — Et  en  mil  huit  cent  soixante-et-dix  ? 

Réponse. — Cela  augmentait  tous  les  ans,  certainement. 

Question. — Pouvez-vous  dire  en  mil  huit  cent  soixante-et-dix,  combien 
à-peu-près  ? 

Réponse. — Cela  augmente  au  moins  de  cinquante  gallons  par  année 
depuis  ce  temps-là. 

Question. — En  mil  huit  cent  soixante-et-trois  ;  pouvez-vous  me  dire 
quelle  était  la  proportion  qui  était  donnée  et  la  proportion  qui  était  vendue 
de  ce  sirop-là  ? 

Réponse. — C'est  bien  difficile. 

Question. — Ne  vendiez- vous  pas  par  grandes  quantités  ? 

Réponse. — Oui  Monsieur,  nous  en  vendions  ici  et  à  Québec  ;  mais  vers 
mil  huit  cent  soixante-et-trois,  nous  le  vendions  par  chopine.  Il  y  a  à  peu 
près  sept  ou  huit  ans  que  nous  avons  adopté  les  petites  bouteilles. 

Question. — Avant  mil  huit  cent  soixante-trois,  en  vendiez-vous  aux 
pharmaciens  ? 

Réponse. — Nous  ne  demandions  pas  à  ceux  qui  venaient  s'ils  étaient 
pharmaciens.     Nous  en  vendions  à  tous  ceux  qui  venaient  en  demander. 

Question. — Quand  vous  avez  adopté  cette  boîte  de  carton  comme  boîte 
d' enveloppe,  vous  êtes  allé  trouver  Monsieur  Jellyinan  ;  est-ce  lui  qui  a 
toujours  fait  vos  boîtes  ? 


in 

Réponse.  — Toujours. 

Question. — Quand  vous  êtes  allé  trouver  Monsieur  Jellyman,  dans  votre 
intention,  quelle  était  la  boîte  que  vous  vous  proposiez  d'adopter  ? 

Réponse. — Une  boîte  semblable  à  cette  bouteillee-ci, c'est-à-dire  une  boîte 
ronde.  Je  suis  allée  avec  une  sœur  chez  monsieur  Jellyman,  lui  demander 
de  faire  un  certain  nombre  de  boîtes  pour  le  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  ; 
il  nous  fit  remarquer  que  les  boîtes  rondes  ne  paraîtraient  pas  bien,  qu'elles 
ne  seraient  pas  commodes  à  empaqueter. 

Question. — Vous  a-t-il  proposé  de  vous  en  faire  des  échantillons  pour 
vous  les  montrer  ? 

Réponse. — Oui,  il  nous  a  proposé  de  nous  en  faire  des  échantillons  des 
deux  formes  pour  nous  décider. 

Question. — A-t-il  fait  ces  deux  échantillons  ? 

Réponse. — Il  lésa  fait  et  nous  les  a  montrés,  et  nous  avons  choisi  la 
boîte  carrée.  Nous  avons  trouvé  qu'elle  paraissait  beaucoup  mieux  et  qu'elle 
s'empaqueterait  avec  plus  de  facilité.  On  nous  avait  déjà  fait  cette  réflexion. 

Question. — Quand  vous  avez  choisi  votre  papier  enveloppe,  voulez-vous 
me  dire  s'il  a  été  question  d'autre  papier  ? 

Réponse. — Lorsque  nous  sommes  allées  chez  monsieur  Carter,  il  y  avait 
du  papier  de  toutes  les  couleurs  ;  la  sœur  qui  était  avec  moi  voulait  un 
papier  d'une  autre  couleur,  mais  nous  avons  décidé  d'employer  celui-là, 
parce  qu'il  était  moins  salissant.  Nous  n'avons  employé  qu'une  rame  ou  une 
rame  et  demie  de  ce  papier  bleu  vif,  autant  que  je  puis  m'en  rappeler. 

Question. — Après  avoir  employé  une  rame  ou  une  rame  et  demie  de  ce 
papier,  lequel  vous  aviez  choisie  ? 

Réponse. — Il  nous  en  a  été  montré  un  autre  chez  Monsieur  Logan,  qui 
était  beaucoup  moins  cher  et  nous  l'avons  préféré. 

Question. — Quand  vous  avez  choisi  la  couleur  bleu,  avez-vous  pris  en 
considération  la  couleur  bleue  de  l' enveloppe  de  ce  sirop-là  ? 

Réponse. — Cela  ne  m'est  pas  même  venu  à  l'idée. 

Question. — Vous  avez  dit  que  monsieur  Devins  avait  accepté  votre 
agence  ? 

Réponse. — Oui,  puisque  son  nom  était  sur  les  boîtes.  Il  avait  d'abord 
un  petit  dépôt;  il  se  plaignit  ensuite,  quelques  jours  après,  qu'il  avait  été 
menacé  par  Messieurs  Kerry  &  Watson,  et  qu'on  le  menaçait  de  lui  faire 
des  frais  considérables.  Nous  lui  avons  répondu  que  nous  nous  chargions  de 
tous  les  frais.  Il  a  d' abord  paru  satisfait  de  cela  ;  puis  il  nous  a  demandé  une 
lettre  de  nos  avocats  qui  étaient  alors  Messieurs  Dorion,  Dorion  et  Geoffrion 
et  qui  ont  dû  lui  écrire  cette  lettre.  Lorsque  j'ai  vu  qu'il  ne  voulait  pas 
pousser  la  chose,  qu'il  vendait  tranquillement,  nous  disait-il,  je  lui  ai  ôté 


112 

l'agence  pour  la  donner  à  un  autre.  Je  me  suis  adressée  ensuite  à  Messieurs 
Lymans,  Clare  &  Co.  Ils  ont  accepté  l'agence  ;  mais  il  me  l'avaient  de- 
mandée après  que  je  l'eusse  donnée  à  monsieur  Devins. 

Ils  l'ont  gardée  à-peu-près  quinze  jours  ;  puis  ils  m'ont  fait  demander  et 
m'ont  dit  que  MM.  Kerry  &  Watson  menaçaient  de  leur  faire  un  procès 
pour  vendre  le  remède.  Ils  m'ont  fait  aussi  remarquer  qu'ils  ne  désiraient 
pas  que  leur  nom  fut  imprimé  sur  ces  boîtes.  Je  leur  ai  dit  que  je  ne  vou- 
lais pas  recommencer  à  faire  imprimer  ces  boîtes.  Ils  m'ont  dit  qu'ils  ne 
m'avaient  jamais  permis  d'y  mettre  leurs  noms;  mais  je  suis  bien  positive 
qu'ils  m'avaient  permis  de  le  faire.  Ils  y  ont  consenti  ensuite  et  ont  conti- 
nué à  vendre  notre  sirop. 

Question. — Y  a-t-il  d'autres  pharmaciens  qui  vous  aient  exprimé  des 
craintes  à  cause  des  menaces  qui  leur  auraient  été  faites  ? 

Réponse. — Je  me  rappelle  que  beaucoup  de  pharmaciens  et  d'épiciers 
se  sont  plaients  de  cela.  Je  me  rappelle  les  noms  de  MM.  Bourque  et  Des- 
jardins. Ils  ne  nous  en  ont  pris  qu'une  douzaine  et  n'ont  pas  voulu  en 
prendre  depuis.  Un  grand  nombre  d'épiciers  sont  venus  nous  dire  qu'ils 
avaient  été  menacés  par  MM.  Kerry  &  Wetson.  Quelques-uns  ont  discon- 
tinué, d'autres  ont  continué  à  vendre,  mais  comme  en  cachette. 

Question. — Avez- vous  dit  la  même  chose  à  ces  gens-là,  que  vous  vous 
rendiez  responsables  de  tous  les  frais  ? 

Réponse. — Oui,  monsieur. 

Question. — Et  vous  vous  êtes  décidées  alors  à  faire  mettre  ceci  sur  les 
journaux  ? 

Réponse. — Nous  nous  sommes  décidées  longtemps,  bien  longtemps  après, 
à  mettre  ceci  sur  les  journaux.  C'est  à  ce  sujet  que  nous  avons  mis  dans 
les  journaux  l'exhibit  L  des  Demandeurs  produit  à  l'enquête.  Avant 
d'avoir  notre  marque  de  commerce,  nous  avions  la  même  étiquette  sur  notre 
sirop  :  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  composé. 

Question. — Depuis  combien  de  temps  avez-vous  ces  étiquettes-là  ? 

Réponse. — Depuis,  je  crois,  une  dizaine  d'années.  Nous  avons  encore 
de  ces  étiquettes  à  la  maison  ;  nous  avons  même  encore  le  cliché. 

Question. — Vous  avez  parlé  de  cet  ouvrage  produit  comme  l'exhibit  M 
des  Demandeurs  ;  voulez-vous  dire  qui  est  l'auteur  de  cet  ouvrage  ? 

Réponse. — Plusieurs  Sœurs  y  ont  travaillé. 

Question. — Y  avez-vous  travaillé  vous-même  ? 

Réponse  —Moi-même  j'ai  ai  travaillé. 

Question. — Pour  une  bonne  part  ? 

Réponse. — Oui,  monsieur. 

Question. — Croyez- vous  que  la  table  mentionne  parfaitement  toutes  les 
matières  qui  sont  dans  le  livre  ? 


113 

Réponse. — La  première  édition  n'est  pas  aussi  complète  que  la  suivante. 

Question. — Qui  l'a  imprimée  ? 

Réponse. — C'est  nous-meme  qui  avons  imprimé  ce  livre  ;  il  a  été  im- 
primé bien  à  la  hâte.  Je  pense  que  la  seconde  édition  est  de  mil  huit  cent 
soixante  et  dix. 

Question. — Pouvez-vous  nous  dire  à  quoi  est  employé  le  produit  de  la 
vente  du  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  ? 

Objeté  à  cette  preuve  par  les  Demandeurs,  comme  étrangère  à  la  con- 
testation.    Objection  renvoyée. 

Réponse. — Nous  faisons  usage  du  produit  de  cette  vente  comme  de  tout 
ce  que  nous  gagnons  et  ce  que  nous  mendions  :  il  est  pour  les  pauvres. 
Nous  n'avons  pas  de  revenu  fixe,  excepté  ce  que  nous  recevons  du  gouver- 
nement. 

Question. — Voulez-vous  nous  dire  quelles  sont  les  œuvres  d'utilité  pu- 
blique que  vous  soutenez  ? 

Réponse. — Nous  sommes  depuis  trente-trois  ans  au  service  du  public  ; 
je  pense  que  le  public  doit  savoir  ce  que  nous  faisons. 

Question. — Combien  recevez-vous  du  gouvernement  ? 

Réponse. — La  maison-mère  reçoit,  je  crois,  onze  cent  vingt  piastres  du 
gouvernement  ;  nous  recevons  aussi  une  somme  du  séminaire  pour  les  pau- 
vres du  dehors. 

Question. — Pouvez-vous  nous  dire  combien  vous  nourrissez  de  pauvres, 
combien  voua  en  habillez,  logez,  etc.  ? 

Réponse. — En  référant  à  un  mémoire  que  j'ai  fait  à  ce  sujet,  je  trouve 
les  chiffres  suivants  pour  l'année  mil  huit  cent  soixante  et  quinze.  Nous 
avons  trois  mille  huit  cent  cinquante-sept  enfants  dans  nos  classes,  qui  sont 
des  écoles  paroissiales  \  visites  aux  pauvres  et  aux  malades  avec  aumônes 
recueillies  en  quêtant  ;  quarante-deux  mille  huit  cent  cinquante-cinq.  Cha- 
cune de  ces  visites  est  accompagnée  d' une  aumône  ;  il  est  bien  difficile  de 
visiter  les  pauvres  sans  les  aider.  Orphelins  nourris,  vêtus,  logés,  etc., 
cinq  cent  cinquante-trois.  Repas  donnés  aux  pauvres  qui  passent,  trente 
mille  trois  cent  quatre-vingt-cinq.  Visites  de  médecins  du  dispensaire  à 
domicile,  mille  neuf  cent  vingt-sept.  Vieillards  et  vieilles  personnes  logés, 
nourris,  vêtus,  etc.,  deux  cent  treize;  nous  en  avons  soixante -et- treize  dans 
la  maison-mère,  et  nous  pourvoyons  à  tous  leurs  besoins.  Prescriptions  gra- 
tuites au  dispensaire,  données  par  nos  médecins,  vingt-cinq  mille  cinq  cent 
quarante-sept. 

Question. — Quelle  est  la  valeur  de  ces  prescriptions  en  moyenne  ? 

Réponse. — D'après  mon  expérience,  au  moins  vingt-cinq  cents  \  il  y  en 
a  qui  valent  beaucoup  plus,  d' autres  moins. 


114 

Question. — Quelle  serait  la  moyenne  que  vous  pourriez  établir  ? 

Réponse. — Le  moins  de  valeur  qu'elles  puissent  avoir  est  vingt-cinq 
cents  chacune. 

Je  ne  parle  pas  de  la  maison  de  la  Longue-Pointe,  qui  est  sous  les  soins 
du  gouvernement,  et  où  nous  avons  trente  sœurs  ;  nous  avons  vingt-deux 
aliénés  dans  d' autres  maisons.  Sourdes-muettes,  cent  soixante  et  seize,  qui 
sont  nourries,  logées,  vêtues,  etc,  ;  très-peu  d'entre  elles  paient  pension  ;  à- 
peu-près  dix  ou  quinze  paient  pension,  une  petite  pension.  Les  malades 
aux  divers  hôpitaux  (je  ne  parle  pas  de  l'hôpital  des  varioles,  puisque  ceux- 
là  sont  sous  le  coutrôle  de  la  corporation),  sont  quatre  cent  dix-huit.  Veil- 
lées aux  malades,  trois  mille. 

Nous  avons  trente-quatre  maisons  et  deux  cent  quatre-vingt-dix  pro- 
fesses. Nous  avons  huit  maisons  dans  la  ville  de  Montréal,  et  la  presque 
totalité  dans  la  province  de  Québec  ;  nous  en  avons  deux  aux  Etats-Unis  et 
quelques-unes  dans  l'Orégon. 

Question. — Ces  statistiques  sont  pour  les  soins  donnés  pour  une  année 
seulement  ? 

Réponse. — Oui,  monsieur,  l'année  mil  huit  cent  soixante  et  quinze. 

Question. — Pouvez- vous  nous  dire  quelles  sont  les  industries  que  vous 
exercez  pour  subvenir  à  tant  de  dépenses  ? 

Réponse. — Nous  exerçons  toutes  sortes  d' industries  :  couture,  broderie, 
pharmacie,  imprimerie,  savon,  blanchissage,  repassage,  ouvrages  en  fleurs 
et  en  cire,  chaussures  pour  la  maison,  etc.  Nos  sœurs  vont  dans  les  familles 
recueillir  des  aumônes  pour  les  pauvres  qu'elles  visitent,  comme  je  l'ai 
mentionné. 

Question. — Vous  avez  dit  que  vous  aviez  connaissance  que  des  menaces 
avaient  été  faites  pour  empêcher  de  vendre  le  sirop  ;  vous  êtes-vous  aperçue 
que  la  vente  en  avait  diminué  ? 

Réponse. — Nous  avons  cru  nous  en  apercevoir,  du  moins  mes  sœurs  me 
l'ont  dit,  car  j'étais  absente  alors.  Nos  sœurs  nous  ont  dit  qu'elles  s'en 
étaient  aperçues.  On  nous  écrit  du  Haut-Canada  qu'on  ne  pouvait  pas  nous 
en  prendre,  parce  qu'on  était  menacé  de  poursuites  :  on  nous  l'a  écrit  aussi 
d'Ottawa. 

RÉ-EXAMINÉË. 

Question.— Vous  avez  dit,  je  crois,  que  cette  étiquette  blanche  est  la 
seule  dont  vous  vous  soyez  servie  jusqu'au  moment  oîi  vous  avez  mis  votre 
sirop  en  vente  ? 

Réponse. — Oui,  monsieur. 

Question.— Quand  vous  avez  adopté  la  couleur  bleue  pour  vos  envelop- 


115 

pes,  ne  vous  a-t-il  pas  été  fait  remarquer  que  vous  alliez  vous  trouver  à 
imiter  le  Sirop  de  M.  Gray  ? 

Réponse.— Je  vous  ai  déjà  dit  que  personne  ne  m'en  a  parlé.  Personne 
ne  nous  a  conseillé  d'adopter  la  couleur  rouge,  au  moins  je  ne  me  le  rap- 
pelle pas;  pas  que  je  me  souvienne.  Moi-même,  j'ai  voulu  adopter  la  cou- 
laur  jaune,  mais  j'y  ai  renoncé  ensuite.  M.  Jellyman  est  le  seul  qui  fabri- 
que des  boîtes  pour  nous  ;  il  nous  en  a  fabriqué  plusieurs  milles. 

Question. — Lui  en  reste-t-il  encore  ? 

Réponse. — Il  peut  lui  en  rester,  je  ne  puis  pas  le  dire. 

Nous  avonsmaintenant  des  dépôts  de  remèdes  placés  dans  presque  tout 
le  Bas-Canada,  le  Haut-Canada  et  aussi  dans  les  Etats-Unis. 

TRANSQUESTIONNÉE  SUR  LE  RE-EXAMEN. 

Question. — Vous  avez  quelque  expérience  dans  la  pharmacie  ? 

Réponse. — J'ai  quelque  expérience  dans  les  matières  de  pharmacie. 

Ruestion. — Dans  votre  opinion,  croyez-vous  que  votre  Sirop  soit  aussi 
bon  ou  meilleur  que  celui  de  M.  Gray  ? 

Réponse. — Il  est  aussi  bon,  au  moins.  Je  ne  puis  dire  s'il  est  meilleur, 
puisque  je  ne  me  suis  jamais  servie  de  celui  de  M.  Gray. 

Et  la  Déposante  ne  dit  rien  de  plus.  La  présente  déposition  lui  ayant 
été  lue,  elle  a  déclarée  qu'elle  contenait  la  vérité  et  y  a  persistée. 

J.  MONIER, 

$ténogmp7ie, 


Présent  :     l'  Honorable  Juge  Mackay, 

L'an  mil  huit  cent  soixante  et  seize,  le  septième  jour  d'octobre,  est 
comparue  Sœur  L'ANGE  GARDIEN,  née  THOMPSON,  âgée  de  quarante- 
neuf  ans,  témoin  produit  par  les  Demandeurs,  laquelle,  après  serment  prêté, 
dépose  et  dit  :  Je  suis  affiliée  à  l'établissement  de  la  Providence  depuis 
trente-et-un  ans.  Depuis  quelques  années,  j'ai  eu  quelque  choses  à  faire 
avec  la  pharmacie  ;  j'ai  manufacturé  du  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  depuis 
que  je  suis  apothécairc,  à-peu-près  cinq  ou  six  ans;  j'en  avait  fait  avant  cela 
aussi,  en  mil  huit  cent  quarante-six  et  les  années  suivantes,  de  temps  à 
autre.  Dans  le  commencement  nous  donnions  le  sirop  et  nous  en  vendions 
aussi.  Dans  le  commencement,  les  bouteilles  portaient  seulement  les  éti- 
quettes de  Gomme  d'Epinette  Composée  avec  les  directions  pour  prendre  le 


116 

sirop.  Mais  nous  n'avons  commencé  à  nous  servir  des  étiquettes  que  porte 
la  bouteille  Exhibit  B  des  Demandeurs,  que  depuis  que  nous  avons  obtenu 
une  marque  de  commerce.  Nous  nous  servions  de  la  même  étiquette  avant 
cela,  mais  elle  n'avait  pas  le  sceau  entre  les  mots  "  enregistré  en  1875," 
qui  est  au  bord  de  l'étiquette.  Je  réfère  aux  documents,  quant  à  ces  éti- 
quettes, qu'on  me  montre,  étant  exibits  3  et  4  des  Défenderesses.  Nous 
avons  vendu  du  sirop  au  dehors  depuis  le  commencement  de  la  maison. 
Depuis  six  ans  que  je  suis  à  la  pharmacie,  il  y  avait  des  personnes  de  la 
Côte  St.  Michel  qui  venaient  chercher  du  sirop  pour  le  vendre.  On  leur  en 
vendait  en  différentes  grandeurs  de  bouteilles.  11  y  a  une  dame  qui  venait 
en  chercher;  je  pense  qu'elle  était  de  la  ville,  mais  Je  ne  m'en  rappelle 
pas.  Elle  voulait  le  revendre  ou  le  donner  ;  je  ne  connais  pas  son  nom.  Il 
n'y  avait  qu'une  personne  de  la  Côte  St.  Michel  qui  venait  ainsi  chercher 
du  sirop  pour  le  revendre.  Nous  lui  en  vendions  pour  la  plus  grande  quan- 
tité un  gallon  ou  un  demi-gallon.  Nous  lui  en  vendions  dans  des  bouteilles 
de  différentes  grandeur.  La  plus  grande  quantité  qu'on  lui  vendait  à  la 
fois  était  un  gallon.  Moi-même  je  lui  en  ai  vendu  seulement  une  fois  un 
gallon,  mais  j'ai  entendu  dire  qu'on  lui  en  avait  vendu  à  d'autres  fois.  C'est 
l'année  dernière,  depuis  que  nous  avons  obtenu  une  marque  de  commerce, 
que  nous  avons  placé,  pour  la  première  fois,  des  marchandises  chez  les  phar- 
maciens ou  les  épiciers  pour  les  faire  revendre.  C'est  immédiatement  après 
avoir  obtenu  une  marque  de  commerce  que  nous  avons  commencé  à  faire  des 
dépôts  de  notre  sirop  pour  le  faire  vendre.  Jusque-là,  nous  enveloppions  les 
fioles  avec  n'importe  quel  papier.  Ce  n'est  qu'alors  que  nous  avons  com- 
mencé à  mettre  nos  bouteilles  dans  une  boîte,  comme  l'exhibit  B  des  Deman- 
deurs. J'ai  été  moi-même  faire  dépôt  du  sirop  chez  Mousieur  Devins.  C'est 
chez  lui  que  nous  avons  fait  le  premier  dépôt  de  notre  sirop.  C'était  arrangé 
en  boîte  comme  ceci  ;  j'ai  eu  suggestion  de  le  mettre  en  boîte  d'un  Monsieur 
Stanton,  qui  nous  a  dit  que  c'était  la  manière  la  plus  commode  pour  l'arran- 
ger. La  première  enveloppe  dont  nous  nous  sommes  servis  est  l'exhibit  I 
des  Demandeurs  ;  Je  ne  me  rappelle  pas  pourquoi  les  mots  "  enregistré  en 
1875,"  qui  se  trouvent  sur  l'exhibit  I,  ont  été  omis  de  l'exhibit  J,  je  n'ai 
pas  participé  à  la  préparation  de  ce  volume  exhibit  M  des  Demandeurs  ;  j'ai 
eu  ooeasion  de  le  parcourir.  Depuis  hier  au  soir,  j'ai  examiné  la  seconde 
édition  ;  je  n'y  ai  pas  trouvé  aucune  mention  de  notre  Sirop  de  Gomme 
d'Epinette;  je  me  suis  occupée  de  placer  notre  sirop  hors  de  Montréal  ;  je 
ne  me  rappelle  pas  ou  nous  l'avons  placé  ;  il  y  avait  un  grand  nombre  de 
places  ;  il  y  a  un  dépôt  à  Trois-Rivièrcs,  ù  St.  Hyacinthe,  à  Sorel,  à  Ju- 
liette, et  enfin  dans  beaucoup  de  villes  ;  nous  en  avons  très-pou  dans  le 
Haut-Canada  ;    nous  avons  eu   des  marchandises  placé  à  London,  Ontario, 


117 

mais  on  nous  a  écrit  qu'on  ne  pouvait  pas  continuer  le  commerce  parce 
qu'on  était  menacé  des  dommages  d'un  procès.  Nous  en  avons  aux  Etats- 
Unis  ;  ce  que  nous  avons  vendu  aux  Etats-Unis  est  manufacturé  aux  Etats- 
Unis  ;  Il  y  a  là  deux  succursales  de  notre  maison,  une  à  Winooski,  Ver- 
mont,  et  l'autre  à  Burlington,  Vermont.  Toutes  nos  bouteilles  sont  main- 
tenant renfermées  dans  nne  boîte  ;  c'  est  monsieur  Jellyman  qui  manufacture 
nos  boîtes  ;  quand  nous  avons  adopté  la  couleur  de  cette  étiquette,  personne 
ne  nous  a  dit  que  nous  nous  mettrons  en  opposition  à  d' autres  personnes  ; 
monsieur  Devins  ne  vous  l'a  pas  dit  ;  jusqu'à  ce  que  nous  ayions  obtenu 
notre  marque  de  commerce,  le  sirop  s'est  toujours  appelé  "Sirop  de 
Gomme  d'Epinette  Composée  "  ;  jamais  nous  ne  l'avons  appelé  Sirop  Blanc, 
mais  le  peuple  l'a  quelquefois  appelé  Sirop  des  Sœurs  de  la  Providence,  ou 
Sirop  Blanc  ;  il  y  a  bien  des  années  que  nous  avons  nos  étiquettes  impri- 
mées ;  le  sirop,  sur  cette  étiquette,  a  toujours  porté  ce  nom-là  ;  nous  l'écri- 
vions toujours  nous-mêmes;  il  y  a  deux  ans  que  nous  faisons  faire  des 
fiioles  rondes;  nos  profits  ne  sont  pas  grands  ;  Je  crois  qu'aujourd'hui  nous 
avons  un  peu  plus  de  dépenses  que  de  profits  ;  les  dépenses  consistent  en 
boîtes,  en  fioles  et  en  matières  qui  sont  très-dispendieuses  ;  nous  avons  fait 
le  calcul  des  dépenses  et  des  recettes,  et  sur  une  petite  quantité  nous  ne 
faisons  aucun  profit.  Sur  une  douzaine  de  grosses,  nous  avons  fait  le  calcul 
de  nos  profits,  mais  je  ne  puis  pas  dire  de  combien  ils  sont;  nous  payons  la 
taxe  pour  l'eau;  je  n'ai  jamais  été  employée  à  la  procure  ;  nous  avons 
mis  en  vente  un  Liniment  compoés  et  un  Sirop  pour  la  Coqueluche, 
mais  c'est  peu  de  chose.  Nous  avons  fait  des  dépôts  du  Leniment 
et  du  Sirop  de  Coqueluche  au  Canada.  Nous  recevons  tous  les  jours  des 
prescriptions  des  médecins  de  l'Ecole  de  Médecine  et  du  Dispensaire  de 
l'Ecole  Médicale,  pour  les  remplir,  et  nous  les  remplissons  toujours  gratui- 
tement. Je  sus  allée,  avec  la  Sœur  Joséphine,  voir  Monsieur  Gray  au  début 
de  la  vente  de  notre  sirop.  On  lui  parlait  en  français,  mais  il  ne  compre- 
nait pas,  et  alors  on  lui  parlait  en  anglais,  et  il  s'est  exprimé  en  français. 
Nous  lui  disions  que  nous  allions  faire  enregistrer  notre  sirop,  et  que  nous 
ne  pensions  pas  le  molester  du  tout.  Nous  voulions  acheter  une  plus  grande 
quantité  de  gomme  et  nous  voulions  l'acheter  chez  lui.  Moi  je  ne  lui  ai 
pas  parlé  du  tout  ;  c'est  la  Sœur  Joséphine  qui  lui  parlait.  Monsieur  Gray 
paraissait  bien  mécontent.  Il  ne  nous  a  pas  dit  que  nous  allions  violer  sa 
marque  de  commerce.  Nous  pensions  que  nous  avions  le  nom  de  notre 
sirop  bien  avant  Monsieur  Gray.  La  Gomme  d'Epinette  ne  produit  pas 
seule  le  sirop  :  la  base  en  est  la  gomme, 


118 
Transquestionné. 

Question.— Depuis  combien  de  temps  vous  occupez- vous  de  la  phar- 
macie ? 

Réponse. — Depuis  cinq  ou  six  ans. 

Question. — Vous:  êtes  vous  occupée  de  la  confection  des  boîtes  quand 
vous  avez  fait  faire  des  boîtes  pour  la  première  fois  ? 

Réponse. — Oui,  avec  la  sœur  Joséphine. 

Question. — Voulez-vous  dire  comment  il  est  arrivé  que  vous  aviez  choisi 
la  forme  carrée  au  lieu  de  la  forme  ronde  ? 

Réponse. — Nous  avons  d'abord  demandé  à  Monsieur  Jellyman  pour 
nous  faire  une  boîte  ronde  et  Monsieur  Jellyman  nous  a  dit  que  ça  n'aurait 
pas  de  mine  et  qu'il  y  aurait  quelque  difficulté  pour  l'empaqueter.  Nous  lui 
avons  demandé  une  boîte  ronde  pour  entrer  juste  sur  la  fiole  marquée  B. 
D'abord  il  nous  a  fait  un  échantillon,  une  carrée  et  une  ronde,  et  nous  avons 
de  suite  adopté  la  carrée  pour  la  commodité  de  l'emballage  et  comme 
ayant  meilleure  mine. 

Question. — Voulez-vous  nous  dire  si  vous  avez  contiibué  au  choix  du 
papier  devant  envelopper  les  boîtes,  de  la  qualité  du  papier  et  de  sa  couleur  ? 

Réponse. — Oui,  pour  le  sûr.  Le  marchand  nous  a  montré  toutes  les 
nuances  de  papier.  Je  me  rappelle  avoir  choisi  une  couloir  jaune  ou 
violette.  Mais  nous  avons  décidé  que  la  bleue  était  moins  salissante  et  nous 
avons  adopté  la  bleue. 

Question. — Vous  avez  dit  que  c'était  le  papier  marqué  Exhibit  J  que 
vous  avez  employé  le  premier  ? 

Réponse. — Oui,  nous  en  avons  employé  très-peu.  Je  ne  me  rappelle 
pas  combien,  mais  c'était  très-peu. 

Question. — Combien  de  temps  avez- vous  employé  pour  prendre  le 
papier  marqué  J  ? 

Réponse. — Presque  immédiatement  après;  parce  que  nous  en  avions 
peu  du  premier. 

Question. — Voulez-vous  dire  quels  sont  les  motifs  qui  vous  ont  engagées 
à  changer  de  papier  ? 

Réponse. — D'abord  parce  qu'il  était  moins  cher  et  nous  le  trouvions 
pins  facilement. 

Question. — Vous  est-il  venu  à  l'idée  d'abord  d'imiter  la  fiole  de  Mon- 
sieur Gray  ? 

Réponse. — Non,  jamais.      Je  n'en  ai  jamais  parlé  à  nos  sœurs. 

Question. — Vous  avez  dit  que  vous  avez  commencé  vers  mars,  mil  huit 
ççnt  soixante-quinze,  à  faire  des  dépots  de  votre  sirop  dans  la  ville  ;  voulez 


119 

vous  dire  si  vous  avez  pris  l'initiative  de  cela,  ou  si  c'est  quelqu'un  qui  a 
insisté  à  vous  faire  faire  des  dépôts  ? 

Réponse. — C'est  Monsieur  Laviolette  et  Monsieur  Devins  qui  nous  ont 
demandé  à  faire  des  dépôts.  Il  y  avait  plusieurs  années  que  des  pharmaciens 
et  des  amis,  et  un  bon  nombre  de  médecins  insistaient  auprès  de  nous  pour 
nous  faire  prendre  une  marque  de  commerce  et  nous  faire  mettre  notre  sirop 
dans  le  commerce  et  faire  des  dépôts  chez  les  pharmaciens. 

Question. — Quelqu'un  vous  a-t-il  demandé  vers  ce  temps-là  de  leur 
vendre  votre  marque  de  commerce  ? 

Réponse. — Oui,  Monsieur  Laviolette  aurait  désiré  à  acheter  notre  sirop  ; 
il  a  fait  des  intances  même  pour  acheter  notre  recette.  Mais  nous  préférions 
l'exploiter  nous-même^  au  profit  de  nos  pauvres- 
Question. — Savez-vous  d'où  venait  cette  recette  ? 

Réponse. — La  Supérieure  m'a  dit  qu'elle  venait  de  F  Hôtel-Dieu. 
Depuis  mil  huit  cent  quarante-six,  j'ai  toujours  connu  que  c'était  une  recette 
qui  venait  de  l'Hôtel-Dieu. 

Question. — Avez- vous  eu  occasion  de  demander  aux  Sœurs  de  l'Hôtel- 
Dieu  de  vous  donner  par  écrit  leur  ancienne  recette  ? 

Réponse. — Oui,  et  elles  nous  l'ont  donnée.  Nous  avons  demandé  si 
elles  voulaient  nous  passer  la  recette  du  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  qu'elles 
avaient  donnée  à  la  Supérieure  de  notre  maison.  La  recette  venait  de 
l'Hôtel-Dieu,  et  avait  été  donnée  par  la  Sœur  Frigon  à  la  Supérieure  de  notre 
maison.  Elle  nous  a  passé  le  cahier  dans  laquelle  la  recette  était  écrite,  et 
qui  était  tirée  d'une  ancienne  pharma-copée  de  l'Hôtel-Dieu. 

Qestion. — Avez-vots  lu  la  recette  dans  le  cahier  ? 

Réponse. — Oui. 

Question. — L'avez- vous  comparée  avec  la  récette  dont  vous  vous  êtes 
toujours  servie  ? 

Réponse. — Oui,  nous  l'avons  comparée.     Elle  était  en  tout  semblable. 

Question. — De  sorte  que  vous  avez  acquis  la  certitude  que  la  recette  de 
votre  sirop  était  absolument  comme  celle  qui  était  dans  le  cahier  des  dames 
de  l'Hôtel-Dieu  et  qu'on  vous  a  passée  ? 

Réponse. — Oui;  je  suis  bien  positive  que  nous  n'avons  pas  communiqué 
la  recette  que  nous  suivions  aux  dames  de  l'Hôtel-Dieu  avant  d'avoir 
demandé  la  leur. 

Question. — Vous  avez  dit  que  votre  Sirop  de  Gomme  d'Epinette  n'était 
pas  mentionné  dans  le  livre  exhibit  M,  produit  par  les  Demandeurs  à  l'en- 
quête \  avez-vous  constaté  s'il  y  était  question  de  la  Gomme  d'Epinette? 

Réponse. — Oui,  la  teinture  de  gomme  d'épinette  y  est  mentionnée. 

Question. — Voulez-vous  référer  à  la  page  1077  de  cet  exhibit  M  des 


120 

Demandeurs  et  dites  s'il  n'est  pas  mention  de  la  teinture  de  gomme 
d'épinette  ? 

Réponse. — Oui,  je  trouve  aussi  ces  mots  :  ''Teinture  de  Gomme  d' fl- 
uette," avec  deux  livres  d'alcool.  L'indication  montre  comment  la  macé- 
ration est  faite.  La  proportion  est  de  huit  onces  de  gomme  d'épinette  pour 
deux  chopines  d'alcool. 

Question. — Voulez- vous  référer  à  l'exhibit  0  des  Défenderesses  et  dire 
si  c'est  là  la  seconde  édition  de  votre  traité  de  matières  médicales  ? 

Réponse. — Oui;  cette  édition  est  de  mil  huit  cent  soixante-et-dix. 

Question. — Youlez-vous  dire  quelles  sont  les  mentions  qui  y  sont  faites 
de  la  gomme  d'épinette  à  la  page  527  ? 

Réponse. — Il  y  est  fait  mention  de  la  gomme  d'épinette  au  mot  Latin 
Picea.     Il  y  est  mentionné  toutes  les  espèces  de  gomme  d'épinette. 

Question. — Veuillez  référer  à  la  page  668  du  même  exhibit  ;  vous  y 
trouvez  la  mention  de  la  teinture  de  gomme  d'épinette  ? 

Réponse. — Oui. 

Question.— En  matières  de  pharmacie,  est-ce  la  teinture  ou  la  gomme 
qui  est  considérée  comme  matière  pharmaceutique  ? 

Réponse. — Il  faut  référer  à  la  Sœur  Joséphine  pour  cela. 

Question. — Vous  avez  dit  que  vous  êtes  allée  chez  Monsieur  Gray  ;  lui 
avez- vous  demandé  d'offrir  en  vente  lui-même  votre  sirop  de  gomme  ? 

Réponse.— Je  ne  m'en  rappelle  pas.  Comme  toutes  les  affaires  étaient 
en  Anglais,  je  ne  pouvais  pas  comprendre. 

Question. — Avant  d'avoir  fait  enregistrer  votre  marque  de  commerce 
vous  avez  dit  que  vous  aviez  une  étiquette  imprimée  avec  le  nom  du  sirop  ; 
avez- vous  ces  étiquettes-là  ? 

Réponse. — L' exhibit  P  des  Défenderesses  m'étant  montré,  je  déclare 
que  c'était  là  l'ancienne  étiquette  que  nous  avions  et  que  nous  mettions  sur 
les  bouteilles  du  Sirop  de  Gomme  d' Epinette  Composé.  Je  ne  puis  pas 
dire  en  quelle  année  c'a  été  imprimé.  Il  y  a  probablement  dix  ou  quinze 
ans  que  ceci  est  imprimé.  Il  y  a  bien  des  années  que  la  vois,  mais  cepen- 
dant je  ne  puis  pas  affirmer  la  date  précisément.  Il  est  très-facile  pour  nous 
d' en  citer  la  date. 

Question. — Monsieur  Devins  a-t-il  gardé  votre  agence  pendant  bien 
longtemps  ? 

Réponse. — Non,  pendant  bien  peu  de  temps. 

Question. — Est-ce  lui  qui  a  refusé  de  continuer  votre  agence  ? 

Réponse. — Oui;  la  raison  en  était  à  cause  des  des  intimidations,  à 
cause  des  menaces  de  procès  en  dommages. 

Question. — Vous  a-t-il  dit  de  qui  venait  ces  menaces  ? 


121 

Réponse. — Oui,  des  Demandeurs  en  cette  cause  ;  nous  avons  parlé  à 
plusieurs  pharmaciens  à  propos  de  nos  dépôts  de  sirop  ;  nous  avons  parlé  à 
monsieur  Lymans,  chez  Lymans  &  Clare,  aussi  chez  messieurs  Laviolette  <& 
Nelson  et  à  plusieurs  autres. 

Question. — Ces  messieurs  vous  ont-ils  fait  des  difficultés  à  l'occasion  de 
cette  vente  ? 

Réponse — Monsieur  Lymans  nous  a  fait  des  objections  à  cause  du  nom 
"  Lymans,  Clare  &  Co. ,"  que  nous  avions  fait  imprimer  sur  les  boîtes. 

Question. — Vous  a-t-il  dit  si  ou  leur  avait  fait  des  menaces? 

Réponse. — Oui,  on  nous  a  dit  la  même  chose  que  chez  monsieur  Devins, 
que  les  Demandeurs  les  avait  menacé  de  procès  d'actions  en  dommages  s'ils 
vendaient  notre  sirop  ;    monsieur  Laviolette  nous  a  dit  la  même  chose. 

Question. — Monsieur  Laviolette  avait-il  alors  mis  des  annonces  sur  les 
journaux  ? 

Réponse. — Monsieur  Laviolette  avait  mis  dans  Le  Nouveau  Monde  une 
annonce,  comme  étant  agent  de  notre  sirop,  et  il  a  discontinué  cette  annonce, 
sous  le  coup  des  menaces  d'actions  de  dommages  qui  lui  étaient  faites  par 
les  Demandeurs. 

Question. — Y  a-t-il  d'autres  pharmaciens  à  qui  vous  avez  offert  votre 
sirop  et  qui  l' ont  refusé,  et  pour  quelle  raison  ? 

Réponse. — C'était  toujours  à-peu-près  pour  la  même  raison.  Le  docteur 
Bourque  a  refusé  d'en  prendre,  disant  qu'il  craignait  d'être  poursuivi  en 
dommages,  et  un  monsieur  Dubuc,  un  pharmacien  qui  tient  sur  la  rue  St. 
Joseph. 

Question. — Avez- vous  fait  des  statistiques  concernant  les  œuvres  que 
font  vos  maisons  ;  et  a  quel  emploi  les  revenus  provenant  de  vos  diverses 
industries  sont-ils  employés  ? 

Objecté  par  les  Demandeurs. 

The  Court  feels  thatitis  bound,  under  the  issues,  toallow  the  évidence, 
but  reserves  to  pay  what  weight  shall  be  attached  to  it. 

Question. — Pouvez-vous  donner  ces  statistiques? 

Réponse — Je  ne  les  ai  pas  ici;  je  puis  affirmer  les  statistiques  données 
hier  au  soir  par  la  sœur  Joséphine  ;  ces  statistiques-là  sont  correctes  ;  la 
fiole  avec  la  boîte,  exhibit  2  des  Défenderesses,  est  notre  sirop  avec  sa  boîte 
et  la  circulaire  qui  l'accompagne,  tel  qu'il  est  en  vente  chez  tous  les  phar- 
maciens ;  je  n'ai  jamais  examiné  le  sirop  des  Demandeurs;  je  ne  savais  pas 
même  qu'il  fut  enveloppé  en  bleu,  même  longtemps  après  avoir  offert  notre 
sirop  en  vente  chez  les  pharmacies.  Ce  n'est  que  depuis  qu'il  est  question 
de  la  couleur  du  papier  que  j'y  ai  pris  garde;  même  au  commencement  du 
procès,  je  ne  savais  pas  que  le  Sirop  des  Demandeurs  était  enveloppé  dans 


122 

un  papier  bleu,  ni  comment  il  était  empaqueté.  J'avais  vu  seulement  les 
fioles  sans  enveloppe. 

Question. — Jurez-vous  positivement  que,  lorsque  vous  avez  adopté  la 
boîte  avec  la  forme  carrée,  la  fiole  et  la  couleur  du  papier  enveloppant  votre 
boîte,  vous  ne  connaissiez  pas  la  couleur  du  papier  enveloppant  les  fioles  des 
Demandeurs  et  la  forme  de  l'enveloppe  ? 

Réponse. — Oui,  je  le  jure  positivement. 

Question.  —  A.vez-vous  jamais  lu  les  inscriptions  qui  sont  sur  l'enve- 
loppe ? 

Réponse. — Je  les  ai  lues  tout  dernièrement. 

Question. — Croyez- vous  que  ces  deux  Sirops  avec  leurs  enveloppes  puis- 
sent être  confondus  ? 

Réponse. — Moi,  je  ne  le  crois  pas.  Je  ne  pense  pas  même  qu'un  enfant 
puisse  s'y  méprendre. 

Question. — Avez-vous  constaté  si  un  grand  nombre  de  personnes,  tant 
pharmaciens  que  marchands-épiciers,  ont  discontinué  de  vendre  votre  Sirop, 
parce  qu'  ils  avaient  reçu  des  menaces  ? 

Réponse. — Je  pense  que  oui,  parce  que  la  diminution  de  la  vente  se 
faisait  sentir.  C'était  une  diminution  considérable.  Je  ne  puis  pas  dire 
précisément,  mais  c'était  plusieurs  grosses  par  mois. 

Question.  —  Pouvez-vous  dire  combien  de  pharmaciens  et  d'épiciers  ont 
refusé  le  Sirop,  alléguant  qu'ils  avaient  reçu  des  menaces  ? 

Réponse. — Je  sais  qu'il  y  a  un  grand  nombre,  mais  je  ne  puis  pas  préciser. 

RÉ-EXAMINÉK. 

Question. — Pouvez- vous  dire  qui  a  imprimé  l'étiquette  Exhibit  P? 

Réponse. — La  Providence. 

Question — Avez-vous  quelques  moyens  d'arriver  à  la  date  de  l'im- 
pression ? 

Réponse. — Je  pense  que  oui.  approximativement. 

Question. — Depuis  quand  avez-vous  une  imprimerie  à  la  Providence'.' 

Réponse. — Je  ne  puis  pas  dire. 

Question. — Pouvez- vous  dire  si  cette  étiquette  a  été  imprimée  avait 
ou  après  l'édition  de  votre  Matière  Médicale  ? 

Réponse. — Je  ne  puis  pas  dire. 

Question. — Pouvez-vous  expliquer  pourquoi  vous  avez  deux  demandes 
de  marque  de  commerce,  1'  une  votre  Exhibit  3  et  l'autre  votre  Exhibit  4, 
l'une  étant  datée  du  commencement  Mars  et  l'autre  à  La  fin  de  Mars? 

Réponse. — C'est  l' Exhibit  No.  3  des  Défenderesses  qui  est  la  première. 


123 

Je  ne  me  rappelle  pas  pourquoi  nous  avons  demandé  encore  une  marque  de 
commerce  à  la  fin  du  même  mois. 

Question. — Vous  aviez  dit  que  vous  aviez  demandé  encore  une  marque 
de  commerce  sur  la  suggestion  de  plusieurs  amis  de  votre  maison  et  de 
médecins;  parmi  ces  personnes  là  se  trouvait,  je  suppose,  le  Docteur  Trudel  ? 

Réponse. — Oui,  je  pense. 

Question. — Le  Docteur  Trudel  vous  a-t-il  donné  comme  motif  les  succès 
qu'avait  obtenus  Monsieur  Gray  avec  son  sirop  ? 

Réponse. — Non. 

Question. — Le  Docteur  Trudel  vous  a-t-il  dit  que  Monsieur  Gray  avait 
beaucoup  de  succès  avec  son  sirop  ? 

Réponse. — Non. 

Et  la  Déposante  ne  dit  rien  de  plus  ;  et  cette  dépositition  lui  ayant  été 
lue,  elle  déclare  qu'elle  contient  la  vérité. 

S.  A.  ABBOTT, 

Sténographe. 


APPENDICE    No.    3. 


ACTE  amendant  les  actes  concernant  l'Institution  charitable  connue  sous 
le  nom  de  "  Les  Soeurs  de  l'Asile  de  la  Providence  de  Montréal  "  et 
étendant  ses  pouvoirs. 

Sanctionné  le  28  Décembre  1876. 

Attendu  que  la  Corporation,  maintenant  connue  sous  le  nom  de  "  Les 
Sœurs  de  l'Asile  de  la  Providence  de  Montréal  "  a  été  établie  par  le  statut 
4  et  5  vict.,  chap.  67,  intitulé  :  "  Acte  pour  incorporer  l'Asile  de  Montréal, 
pour  les  femmes  âgées  et  infirmes,"  lequel  acte  a  été  amendé  par  le  statut 
21  vict.,  chap.  115,  changeant  le  premier  nom  de  la  dite  Corporation  en 
celui  de  "  Les  Sœurs  de  l'Asile  de  la  Providence  de  Montréal  ;  " 

Attendu  que  la  dite  Corporation,  depuis  son  établissement,  s' est  entière- 
ment dévouée  à  l'accomplissement  d'œuvres  de  bienfaisance  et  de  charité, 
qu'elle  a  fondé  et  qu'elle  maintient,  en  cette   province,  un  grand'  nombre 


124 

d'asiles,  d'hôpitaux,  d'orphelinats,  d'écoles  et  autres  institutions  de  bien- 
faisance, où  un  nombre  très-considérable  de  vieillards,  pauvres,  malades, 
infirmes,  sourds-muets,  aliénés,  orphelins,  sont  gratuitement  logés,  nourris, 
vêtus,  soignés  et  instruits,  et  ce,  presque  uniquement  au  moyen  des  res- 
sources provenant  du  travail  des  membres  de  la  dite  Corporation  et  des 
industries  exercées  dans  les  dites  institutions  ; 

Attendu  que  la  dite  corporation  n'a  reçu  de  l'Etat  aucune  dotation  lui 
donnant  les  moyens  d'accomplir  les  dites  œuvres,  et  qu'elle  n'a  aucun  bien 
produisant  des  revenus  ;  et  attendu  que  les  subventions  qu'elle  reçoit  du 
gouvernement,  ainsi  que  les  dons  qui  lui  sont  faits  par  des  personnes  chari- 
tables, sont  loin  d'être  suffisants  pour  le  maintien  de  ces  oeuvres;  attendu 
qu'il  est  de  l'intérêt  public  que  ces  œuvres  se  continuent,  et  que  la  dite 
corporation  reçoive,  daes  leur  accomplissement,  tout  l'encouregement  et  le 
secours  possible,  et  que,  pour  cette  tin.  elle  soit  autorisée  à  fabriquer  des 
remèdes  et  médicaments,  à  exercer  des  industries,  et  à  vendre  au  public 
tous  objets  et  marchandises  ainsi  manufacturés,  aussi  bien  qu'à  s'en  servir 
dans  les  dites  institutions  ; 

A  ces  causes,  Sa  Majesté,  par  et  de  l'avis  et  du  consentement  de  la 
Législature  de  Québec,  décrète  ce  qui  suit  : 

1.  La  dite  corporation  pourra  continer  d'accomplir  les  dites  œuvres  de 
bienfaisance  et  de  charité,  et,  pour  cette  fin,  elle  aura  droit,  outre  les 
pouvoirs  à  elle  accordés  par  les  dits  actes,  d'exercer,  comme  par  le  passé, 
les  industries  actuellement  en  opération  dans  ces  divers  établissements, 
et  toutes  industries  qu'elles  pourraient  avoir  besoin  d'exercer  pour  les 
maintenir,  de  fabriquer  tous  médicaments,  de  les  employer  dans  ses  éta- 
blissements, de  les  vendre  au  public,  dans  la  Province  de  Québec,  et  cela 
d'une  manière  aussi  ample  que  tout  particulier,  corps,  ou  corporations;  sujet 
toutefois  aux  lois,  règles  et  règlements  concernant  telles  fabrications  et 
industries  en  force  en  cette  Province,  et  dans  les  cités,  villes  et  autres 
municipalités  de  cette  province  dans  lesquelles  s'exercent  telles  fabrications 
et  industries  ;  pourvu  toujours  que  tous  les  profits  et  revenus  provenant 
directement  ou  indirectement  des  dites  fabrications,  industries  et  ventes 
soient  employés  exclusivement  au  profit  et  pour  le  soutien  des  institutions 
de  bienfaisance  établies  par  la  dite  Corporation,  et  l'accomplissement  des 
dites  œuvres  de  charité,  sans  pouvoir  en  distraire  ou  détourner  aucune 
portion  quelconque  au  profit  d'aucune  uoevre,  ni  d'aucun  but  étranger  aux 
dites  œuvres. 

2.  Le  présent  acte  n'affectera  aucunement  les  causes  pendantes  ; 

3.  Cet  acte  entrera  en  force  le  jour  de  sa  sanction.