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Full text of "Curiosités de la cité de Paris: histoire étymologique de ses rues nouvelles ..."

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CURIOSITÉS 



DE LA 



CITÉ DE PARIS 



Û'<^\*^v\ — .V. -x- 



.r-% 



Paris, — Imprimé ckex Donaveniure et Ducessoig^ 
55, quai des Augustins, 5ô. 



CURIOSITÉS 



CITÉ DE PARIS 



l^T 



HISTOIRE ETYMOLOGIQUE 

DE SES RUES 

i, ANCIENNES OtI SUPPBlMiES 



n^CHERCHES ARCHÉOLOGIQUES 
mtiquités, monuments et maisons remarquables 



FERDINAND HEUZEY 




E. DENTU, EDITEUR 
Libraire de la Société des Gens de Lettres 

O y 1864 „ 



A Monsieur 
VICTORIEN SARDOU 

AUTEUR DRAMATIQUE, CHEVALIER DE LA LEGION d'hONNEUR, 

Je déàie ce présent livre. 



Mon jeune et spirituel ami y je souhaitais de placer 
cet ouvrage sous le patronage d'un homme de génie, d'hon- 
neur et de cœur. Je ne pouvais faire un choix plus digne, 
et en même temps qui me soit plus sympathique. Si ce 
faible hommage peut vous être agréable, cela rendra 
bien heureux 



Votre très-dévoué et très-sincère admirateur 



Fkrdinand HEUZEY. 



PRÉFACE 



Amis lecteurs, 

p 
Mon sentiment est : que les discours les plus 

courts sont les meilleurs ; aussi je vais être laco- 
nique. 

Mon amour passionné pour l'histoire de Paris 
me fit faire des études approfondies, des recher- 
ches immenses. J'ai consulté les titres, comparé 
tous le(s historiens anciens et modernes ; bref, le 
résultat de vingt ans de patience à toute épreuve 
me mit en possession d'une histoire de Paris 



VIII PKÉFACK. 

bien claire, bien authentiquée, que je composai 
pour ma satisfaction personnelle. Il est probable 
que ce travail ne serait jamais sorti de mon 
cabinet, si un éditeur distingué ne m'eût engagé 
à en extraire le quartier de la Cité, comme 
étant le plus intéressant, et à l'offrir à la cu- 
riosité publique. Je me suis rendu à cet avis, 
pensant que le moment où ma vieille Lutèce va 
changer d'aspect est le plus favorable pour 
écrire son histoire. 



CHAPITKE PREMIER 



ORIGINE DE PARIS 

Paris, ville capitale du royaume, aujourd'hui la 
plus magnifique, la plus riche et la plus florissante 
ville de l'Europe , fut d'abord , comme les plus 
fameuses cités du monde, petite, obscure et très-peu 
considérée. Ce n'était, du temps de Jules César, qu'tm 
amas de petites maisons rondes, bâties de bois et de 



s CURIOSIT£S 

terre, couvertes de chaume ou de jonc. Ces espèces 
de cabanes, car on ne peut guère leur donner un autre 
nom, furent construites par quelques étrangers qu'on 
suppose être originaires de la Belgique, qui, pour 
échapper au fer de leurs ennemis, vinrent occuper 
un territoire sur les bords de la Seine et sur les 
frontières des Senones; ce territoire ne devait pas 
avoir, dans sa plus grande dimension, plus de dix à 
douze lieues : au nord, il était borné par celui des 
SilvamcteSf dont le chef-lieu est représenté par la ville 
de Senlis ; à Test, par celui des Meldi (Meaux) ; à Test 
et au sud, par le territoire des Senones (Sens) ; au sud 
et à l'ouest, les Parisiens avaient pour voisins les cou- 
rageux Carnutes, habitants du pays Chartrain (peuple 
de Chartres et de Sens), appelé alors Âgedincum. 

La Seine traversait ce territoire, formant au point 
où se trouve aujourd'hui Paris cinq îles, dont la plus 
étendue fut, par les nouveaux habitants, choisie pour 
leur place de guerre et reçut le nom de Lutelia, 
Lutèce ou de Lucotècey et ensuite celui de la Cité. Cette 
partie du sol, dans un fond entouré de marais, de 
bois et de buttes, devait protéger leur colonie contre 
le soleil du midi et le vent du nord. 



ÉTYMOLOGIE DU NOM DES PARISIENS 



Le nom des Parisiens parait pouf la première fois 



DE LA CSITÉ DE PARIS. 3 

dans rhistoire cinquante-trois ans avant Jésus-Christ, 
sept cents ans après la fondation de Rome. Lorsque 
César fit la conquête des Gaules, il disait : « Les Parisii 
sont loyaux, sévères et courageux; ils sont limitro- 
phes des Senones, avec lesquels ils ont formé une 
alliance et dont ils occupent les frontières (Parisii 
signifie habitants des frontières). » Cette nation reçut 
ce nom parce qu'elle occupait les frontières qui sépa- 
rent la Gaule celtique de la Gaule belgique, et du mot 
Parisii on a fait Parisien, 



RELIGION DES GAULOIS 



Les Gaulois ne représentaient point leurs dieux 
sous des formes humaines; ils n'adoptèrent cet usage 
que lorsque leur religion se fut confondue avec celle 
des Romains. La religion que Jules César trouva 
si fortement établie dans la croyance des Gaulois 
n'était pas nationale. Ils Pavaient reçue des Bretons 
à une époque dont l'histoire ne fait pas mention. 

La cérémonie la plus imposante des Gaulois fut 
la cueillette du gui de chérie^ par les druides (prêtres 
gaulois) : deux taureaux blancs étaient attachés par 
les cornes au tronc du chêne chargé de la précieuse 
excroissance, un druide montait sur Tarbre, armé 
d'une serpe d'or, et coupait le gui sacré; d'autres le 



4 CURIOSITÉS 

recevaient sur un tissu de laine blanche destinéà cet 
usage. C'était dans les profondeurs des forêts que 
s'accomplissaient les sanglants mystères du drui- 
disme ; là, le sang humain coulait sur les autels de 
Tentâtes; ces autels, nommés encore aujourd'hui dol- 
men en breton, table depicrre, consistaient en plusieurs 
pierres verticales, surmontées d'une pierre plate 
posée horizontalement et en pente, pour l'écoule- 
ment du sang de la victime que l'on égorgeait. Il est 
probable que les bois dont Paris était environné ser- 
vaient à ces cérémonies religieuses; un temple à Ten- 
tâtes s'élevait sur le sommet de la butte Montmartre. 



DOMINATION ROMAINE 

Jules César, poursuivant là conquête du monde, 
avait déjà soumis une partie de la Gaule. Pressé par 
le besoin de renforcer sa cavalerie pour continuer la 
guerre, il convoqua, en un lieu qu'il ne nomme 
pas dans ses Commentaires, une assemblée générale 
des nations gauloises. Celles des Treveri^àes Carnutes, 
des Senones, les plus puissantes, ne s'y présentèrent 
point. L'absence des députés de ces nations annonçait 
àLabiénus, général romain, des intentions hostiles 
et déconcertait son plan de conquête. Instruit que la 
faible nation parisienne, quoique dépendante des 



DE LA CITÉ DE PARIS. 5 

Senones, n'avait pris nulle part à cette résistance, il 
convoqua une nouvelle assemblée dans Lutèce, place 
forte des Parisii, et marcha le même jour, à la tête de 
ses légions, contre les Senones indociles qui, à son 
approche, promirent d'envoyer des députés; les Car- 
nutes imitèrent cet exemple. César, parvenu à réunir 
dans Lutéce les principaux de la Gaule, les fit se ré- 
soudre à lui fournir un secours de cavalerie, unique 
objet de sa convocation. L^année suivante, presque 
toutes les nations gauloises se soulevèrent. Labiénus 
se dirigea vers les insurgés ; il partit i'Agedincum, 
longea la rive méridionale de la Seine et s'avança 
vers Lutèce. Les Gaulois rassemblèrent des troupes 
nombreuses sous la conduite d'un vieillard de la 
nation des Aulerci, nommé Camulogène, marchèrent 
du côté où s'avançaient les Romains, et campèrent 
derrière un marais formé par le cours de la Marne. 

Labiénus s'avança à la faveur des mantelets, mais 
il fut repoussé et contraint de se retirer. Il alla mettre 
le siège devant Melun qui était mal défendu ; il s'en 
empara, et, ayant fait assembler un grand nombre de 
bateaux, il embarqua ses troupes et reprit par eau 
le chemin de Paris. • 

Les Gaulois, instruits de cette marche par des fu- 
gitifs de Melun, prirent la résolution de rendre vaines 
les tentatives de Labiénus. Ils brûlèrent Lutèce et 
coupèrent ses deux ponts qui étaient en bois; alors 
les Romains se disposèrent à les attaquer par eau, 

1. 



6 CURIOSITÉS 

à l'aide de cinquante barques : les Parisiens firent 
des prodiges de valeur; le combat fut long; mais, 
cédant au nombre, une grande partie tombèrent sous 
les coups des Romains. Camulogène, leur général, 
fut tué dans la plaine nommée depuis Vaugirard. 

Lutèce prit, sous la domination romaine, une face 
nouvelle ; on rétablit les deux ponts de bois, on re- 
construisit les maisons qui étaient brûlées et on en 
éleva de plus solides et de plus élégantes. La religion 
éprouva aussi ses révolutions; les Gaulois abandon- 
nèrent le culte du dieu Tentâtes pour adopter celui 
de Jupiter et des autres divinités de l'Olympe adorées 
par les Romains, leurs vainqueurs et maîtres. On 
confondit ensemble les deux religions; on bâtit des 
temples à Jupiter, à Mercure, à Bacchus, à Isis, etc., 
aux mêmes lieux où Ton avait offert des sacrifices à 
Tentâtes. Plus tard, on y 'vit un palais, ime prison, 
des fabriques, des spectacles, un camp, des cime- 
tières, des ponts... Voici le détail abrégé de ces 
constructions. 



CONSTRUCTIONS ROMAINES 

DANS l'île de la CITE 



Cette île était moins grande autrefois qu'elle n'a 
été depuis, parce qu'on y a réuni, au couchant, deux 



DE LA CITÉ DE PARIS. 7 

petites îles (l'Ife à la gowrdine et Vile au bureau), ei 
au levant, un monticule factice qu'on nomme aujour- 
d'hui le terrain. On pénétrait dans la Cité par deux 
ponts de bois : le Petit-Pont, qui porte encore ce 
nom, et le grand pont, qui est le Pont-au-Change, 
Chacun de ces ponts était protégé à son entrée par 
une grosse tour, que les historiens ont souvent con- 
fondue avec le grand et le petit Châtelet, construits 
beaucoup plus tard. 

Pour aller du petit pont au grand, la route suivait 
la direction de la rue de la Calandre, qui aboutissait 
sur la place du Commerce, laquelle fut plus tard 
nommée place Saint-Michel, à cause d'une chapelle 
de ce nom qui s'y trouvait; de là, on se dirigeait à 
droite pour arriver au grand pont. 

Au V* siècle, Tlle de Lutèce devait contenir un pa- 
lais ou édifice destiné à l'ordre municipal, remplacé 
par le Palais-de- Justice. La Cité n'était alors' protégée 
que par les eaux de la Seine. 



LA SEINE 



La Seine, considérée comme un fleuve, prend sa 
source dans la forêt de Chanceaux, à deux lieues de 
Saint-Seine, département de laCôte-d'Or. Après avoir 
reçu au-dessus de Paris l'Aube, l'Yonne, ITères et la 



CURIOSITÉS 

Marne, au-dessous de cette ville, l'Oise, PEure et 
d'autres moindres rivières, elle se jette dans la Man- 
che, entre les villes du Havre et de Honfleur. Ce 
fleuve traverse Paris dans une direction du sud-est 
au nord-ouest; sa longueur, depuis Tancienne bar- 
rière de la Râpée jusqu'à celle de Passy , est de 4,104 
toises. La Seine était divisée par plusieurs lies, dont 
la plus grande était la Cité. 

La hauteur de l'eau de la Seine est variable; elle a 
souvent débordé. En 1204, la rivière devint si haute 
que toute la Cité fut couverte d'eau; il est vrai que 
le plateau fut élevé depuis. En 1373, la Seine dé- 
borda tellement qu'on allait en bateau dans les rues 
Saint-Antoine et Saint-Denis ; on attachait les barques 
à la Croix-Hémon, au-dessus de la place Maubert. En 
1 496, Teau de la Seine monta jusque dans les maisons 
de la Vallée-de-Misère (quai de la Mégisserie, où se 
trouve aujourd'hui le Théâtre impérial du Châtelet, 
ancien Cirque). En racontant ce désastre , Gilles 
Corrozet dit : 

En souvenance de cela, fut engravé dans une pierre 
d'une maison faisant le coing de la Mégisserie en ladite 
Tallée, ce qui s'en suyt : 

Mil quatre cens quatre vingtz seize, 
Le VII' jotfr de janvier, 
Seine fut icy à son aise, 
Battant le siège du pillier. 



DE LA CITE DE PARIS. 



AUTEL DE JUPITER 

Sous le règne de Tibère, entre les années 14 et 37 
de notre ère, il existait chez les Parisiens une corpo- 
ration de nautes (Nautœ), classe de négociants navi- 
gateurs sur la Seine, comme il y en avait dans plu- 
sieurs autres lieux de la Gaule. 

Cette corporation de bateliers fit ériger à l'extré- 
mité orientale de Tile de la Cité, où se trouve le chevet 
de l'église Notre-Dame, un monument religieux dé- 
dié spécialement à Jupiter. Ce monument était isolé, 
car les pierres cubiques qui le composaient sont scul- 
ptées sur leurs quatre faces et formaient une pile d'en- 
viron deux mètres de hauteur, qui vraisemblable- 
ment portait la statue de Jupiter. Ce piédestal était 
accompagné de deux autels, l'un destiné aux sacri- 
fices, l'autre à faire brûler de Tencens. On découvrit 
ce temple, le 1 6 mars 1 711 , en creusant sous le chœur 
de l'église Notre-Dame pour y construire un caveau 
destiné aux archevêques. 



PRISON DE GLAI^IN 



Il est très-présumable, mais il n'est pas certain, 



10 CURIOSITÉS 

qu'il existait, du temps de la domination romaine, sur 
l'emplacement du quai Desaix (quai aux Fleurs) une 
prison dont parle Grégoire de Tours, et que Tauteur 
des Gestes du roi Dagobert nomme Carccr Glaucmiy 
prison de Glaucin ; deux églises, bâties plus tard prés 
de cette prison, s'appelaient, lune Saint-Denis de la 
Charlrey l'autre Saint-Symphorien de la Chavire, mot 
qui signifie prison. Il est certain qu'il y avait à cet 
endroit une tour qui se nomma d'abord tour de Mar- 
quefaSy puis tour Roland, 



CHANGEMENT DU NOM DE LUTÈCE 

EN CELUI DE PARIS 

Ammien Marcellin, en traçant le tableau géogra- 
phique de la Gaule, nomme ce chef-lieu des Parisiens 
Lutecia; mais, dans le récit qu'il fait des événements 
postérieurs à l'an 358, il l'appelle Parisii, Le change- 
ment commençait alors à s'opérer; un synode tenu 
dans les mois de novembre et de décembre 360 ou 
361 donne à ce chef- lieu le titre de cité et le nom de 
Paris. Le changement de Lutèce en cité, opéré entre 
les années 358 et 360, pendant le séjour de Julien 
dans les Gaules, fm Touvrage de cet empereur. 



DE LA CITÉ DE PARIS. 11 



INVASION DES FRANCS 

Au mois de décembre 406, des hordes de barbares 
fondirent comme par torrents sur diverses parties de 
l'empire romain; les unes les parcoururent en les pil- 
lant, en les dévastant, et allèrent plus loin porter leurs 
ravages; les autres les pillèrent, les dévastèrent et 
y fixèrent leurs demeures. La Gaule eut beaucoup à 
souffrir des excès de ces féroces étrangers. Les Vi- 
sigoths et les Bourguignons y avaient fondé deux 
royaumes, les premiers dans le midi, les seconds 
dans la partie orientale, quand des Sicambres de la 
ligue des Francs, violant les traités qui les liaient au 
gouvernement romain, franchirent, vers Tan 445, la 
barrière du Rhin, et parvinrent à s'emparer des villes 
de Cologne, de Tournai, de Cambrai, etc. , dont chaque 
chef se fit souverain. Malgré ces envahissements suc- 
cessifs, l'empire romain se maintenait encore dans 
plusieurs grandes parties des provinces belges. 

Un des chefs francSj Childéric, roi de Tournai, au- 
quel on attribue quelques exploits dans Paris, et même 
un long siège de celte ville, étant mort en 481, son 
fils Clovis, jeune barbare dévoré par la soif des ri- 
chesses, ayant réuni plusieurs petits princes de sa 
famiUe, quitta, en Tan 486, son camp de Tournai, 



12 CURIOSITÉS 

marcha contre Siagrius, général romain, le combattit 
dans les plaines de Soissons et remporta sur lui une 
victoire complète. Il pilla cette ville ; puis s'avança sur 
Reims qui fut pillée à son tour. En Tan, 494, il éten- 
dit son royaume jusqu'à la Seine et se rendit maître 
de Paris, qui devint alors la capitale des États des 
Francs. 



ORIGINE DU MOT FRANÇAIS 

Les Français avaient d'abord été nommés Francs, 
mot allemand par lequel se distinguaient les peuples 
de la Germanie qui s'établirent dans la Gaule. On ne 
connut guère le nom de Français, qui n'est qu'une 
dérivation du mot Franc, que vers le x« siècle ; et les 
Francs eux-mêmes, avant leur transmigration dans la 
Gaule, étaient appelés Germains, « Hi vero Franci dice- 
bantur olim Germani (ceux que nous nommons Francs 
étaient appelés autrefois Germains), » est-il dit dans 
les Excerpta ex Procopii historiis de Francis. On n'est 
point d'accord sur Torigine des Francs. Les opinions 
varient beaucoup à ce sujet. Ce qui est avéré, c'est 
que des tribus germaines qui habitaient la contrée 
située entre Tocéan, le Rhin, le Mein et TElbe, et con- 
nues sous les noms de Saliens, Sicambrcs, Chamaves, 
BructèreSf Frisons, Teuctères, Cattes, Cherusques, Usi- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 13 

pètes, CauqueSy formèrent, sous le nom de Francs, une 
confédération pour se protéger contre les Romains. 
Ils s^établirent dans les Gaules sous la conduite de 
Marcomir et de Pharamond, et s'emparèrent enfin, 
sous Clodion, du pays situé entre la Somme et Tour- 
nai. C'est au règne de Clodion qu'il faut au moins 
placer le commencement de la monarchie française. 
A la mort de ce prince, les Gaules étaient sous cinq 
dominations, savoir : celles des Romains, des Francs, 
des Visigoths, des Bourguignons et des Bretons. Mé- 
rovée, GMlpéric et Clovis chassèrent successivement 
les Romains des Gaules ; les Francs vainquirent les 
autres peuples et restèrent maîtres du pays qui finit 
par prendre leur nom. 

Sidoine Apollinaire dit que les Francs combîjttaient 
la tête nue ; que la vitesse avec laquelle ils fondaient 
sur Tennemi égalait celle des traits qu'ils lançaient. 
Le grand nombre pouvait les accabler, mais jamais 
les étonner, et le courage était encore peint sur leur 
front, même après la mort. 

Les Gaulois s'appelaient Wélchs^ nom que le peuple 
donne encore aux Français dans presque toute TAlle- 
magne; et il est indubitable que les Welchs d'Angle- 
terre que nous nommons Gallois sont une colonie de 
Gaulois. Lorsque les Francs s'établirent dans le pays 
des premiers Welchs, pays que les Romains appe- 
laient Gallia (Gaule), la nation se trouva composée des 
anciens Celtes ou Gaulois subjugués par César, des 

2 



14 CURIOSITÉS DB LA CITÉ DE PARIS. 

familles romaines qui s'y étaient établies, des Ger- 
mains qui y avaient déjà fait des émigrations, et enfin 
des Francs qui se rendirent maîtres du pays sous leur 
chef Glovis. 

On sait comment Glovis, avant de combattre Alaric, 
fit vœu d'élçver une église sous Tinvocation de saint 
Pierre, s'il gagnait la victoire ; il fut vainqueur, et, de 
concert avec la reine Clotilde, son épouse, il fonda, 
vers 507 ou 508, Téglise qui plus tard prit le nom de 
Sainte-Geneviève du Mont. La religion chrétienne 
amena encore des changements : on détruisit le tem- 
ple de Jupiter, pour en élever un à saint Etienne (No- 
tre-Dame) ; on renversa celui d'Isis pour saint Vincent 
(Saint-Germain des Prés). Dans la suite, par une ré- 
volution analogue, on vit l'église des Billettes méta- 
morphosée en un temple de protestants. 



PREMIERE PARTIE 



En vertu de la loi du 16 juin 1859, la Cité fait partie 
de l'arrondissement de l'Hôtel de Ville qui est le 
quatrième de la nomenclature. 

Le quartier de la Cité est le seul qui conserve la 
physionomie du vieux Paris, quoiqu'il ait subi bien 
des améliorations. 

C'est à peine si Ton peut se figurer que, dans la ca- 
pitale de la France, avant les dernières années du 
règne de Louis XIV, les voies publiques n'avaient 



36 CURIOSITÉS DE LA CITÉ DE PA,RIS. 

point de noms bien arrêtés ; il n'y avait point de pla- 
ques au coin des rues pour en indiquer le nom; Mi- 
chel-Etienne Turgot, prévôt des marchands, imagina 
de placer au coin de chaque rue de Paris une inscrip- 
tion en gros caractères noirs, sur des feuilles de fer- 
blanc. Les premières furent posées le 16 janvier 1728. 
On les grava ensuite sur la pierre ; plus lard, on se 
contenta de les inscrire en noir, au pinceau, sur un 
fond jaune également peint et entouré d'une raie 
bleue. Le numérotage des maisons date seulement 
de 1806. 

Je divise .la Cité en deux séries qui sont : le quar- 
tier Notre-Dame et le quartier du Palais-de-Justice, 
Nous allons parcourir le premier de ces quartiers 
en commençant par le Pont-au-Change. 



CHAPITRE II 



PONT-AU'CHANGE 



Vous voyez ce large pont qui communique de la 
rue de la Barillerie à la place duChâtelet; il existait 
avâut la domination romaine. C'est celui qu'on nom- 
mait le Grand-Pont; il était alors grossièrement con- 
struit en bois, et placé un peu plus haut qu'il n'est 
aujourd'hui. En 1141, Louis YII y établit le change et 



18 CURIOSITÉS 

défendit de le faire ailleurs, ce qtd lui fit donner le 
nom de Pont aux Changeurs, au Change et de la Mar- 
chandise, lia conservé le second de ces noms, quoique 
le change ne s'y tienne plus depuis bien longtemps 
et que même, dès le xiv* siècle, il ait été occupé par 
d'autres que par des changeurs, ces ofiBces de change 
ayant été unis au domaine le 23 février 1359. Les 
orfèvres en occupaient un côté et les changeurs l'au- 
tre. Ce pont était partie en pierre et partie en bois : 
les grandes inondations l'ayant emporté plusieurs 
fois, il fut rebâti successivement plus ou moins près 
de l'endroit où nous le voyons aujourd'hui. Il était 
en pierre, lorsqu'au 1296 la rivière devint si haute 
que la Cité fut couverte d'eau; le Pont-au-Change 
s'écroula dans la Seine, ainsi que les maisons qui 
étaient dessus. 

La reiDelsabeau de Bavière, femme de Charles VI, 
lors de son entrée à Paris, en 1 389, passa sur le Pont- 
au-Change tendu de taffetas bleu à fleurs de lis d'or; 
au moment où elle arrivait au milieu du pont, un 
homme, tenant un flambeau allumé dans chaque 
main, descendit sur une corde fixée au sommet des 
tours Notre-Dame, vint poser une couronne d'or sur 
la tête de la nouvelle reine de France, puis retourna, 
comme s'il eût volé, au lieu d'où il était parti. Méze- 
rai, Germain Brice et beaucoup d'autres qui les ont 
copiés ont dit, en racontant ce fait, qu'il s'était passé 
sur le pont Notre-Dame ; ils auraient dû, première- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 19 

ment ne pas ignorer que c'était sur le pont aux Chan- 
geurs que les rois et les reines avaient coutume de 
passer dans les grandes cérémonies ; deuxièmement, 
qu'il était difficile de faire une entrée solennelle 
en 1389 sur un pont qui ne fut bâti qu'en 1413. 

Au carnaval, on dressait le long du Pont-au-Change 
des tables sur lesquelles les amateurs venaient jouer 
aux dés. Cet usage, fort ancien, fut interrompu en 
mars 1604. L'Estoile dit à ce sujet, que ceux dudit 
pont, étant interrogés sur cette suspension des jeux, 
répondirent malignement : quHls voulaient être sages 
désormais et bons ménagers puisque le roi (Henri IV) leur 
en montrait V exemple. On sait qu'un des défauts de 
ce roi était de jouer gros jeu. 

Dans la nuit du 23 au 24 octobre 1621, le feu ayant 
pris au pont Marchand, les flammes, poussées par un 
vent d'ouest, atteignirent aussitôt le pont aux Chan- 
geurs qui n'en était séparé que par un espace d'en- 
viron cinq toises; le pont aux Changeurs, qui était en 
bois et couvert de maisons, en moins de trois heures 
fut réduit en cendres. Le Parlement autorisa des 
quêtes pour les incendiés. * 

On ne commença à construire ce pont en pierre, 
avec les maisons qui le bordaient de chaque côté, 
qu'en 1639 ; il ne fut achevé qu'en 1 647 ; on y pouvait 
cependant passer dés 1645, car j'ai trouvé qu'on avait 
démoli cette même année le pont de bois qu'on avait 
construit provisoirement pour faciliter le passage. 



M I 



20 CURIOSITÉS 

Le pont Marchand ne fut pas rebâti, mais on conserva 
au nouveau pont l'ancienne direction des deux pré- 
cédents, de sorte qu'il avait une double entrée en 
forme de fourche du côté de la place du Châtelet. 

L'une de ces entrées communiquait au quai de 
Gèvres et Tautre au quai de la Mégisserie, ce qui forma 
un groupe triangulaire de maisons dont la façade, qui 
correspondait au milieu de la voûte du pont, était 
ornée d'un groupe de trois figures en bronze sur 
un fond de marbre noir; ce groupe représentait 
Louis XIII et Marie-Anne d'Autriche son épouse, entre 
lesquels était Louis XIV, leur fils, âgé de dix ans, cou- 
ronnés par la Victoire. Au-dessous de ces figures, qui 
étaient de Simon Gaillain, se trouvait un bas-relief 
représentant deux esclaves, ouvrage du plus beau 
style. 

Le quai des Morfondus, aujourd'hui de l'Horloge, 
était autrefois très-étroit ; des embarras de voitures 
amenaient souvent des accidents très-graves. Pour 
les faire cesser, on acheta, en 1738, les trois dernières 
maisons du Pont-au-Ghange ; on les abattit et leur 
emplacement forma un utile dégagement. 

En 1788, Louis XVI, par son édit d'emprunt de 
30,000,000, afifecta la somme de 1,200,000 livres à 
l'acquisition et démolition des maisons dont ce pont 
était en grande partie couvert. 

Les figures en bronze, dont j'ai parlé, ont été dé- 
posées au musée des Petits-Augustins. Ce pont, com- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 21 

posé de sept arches, était le plus large de Paris. Il 
avait 123 mètres 75 cent, de longueur et 32 mètres 
60 cent, de largeur. On Ta reconstrxiit entièrement 
en 1860, il est beaucoup plus élégant et composé 
seulement de trois arches. Ce travail remarquable 
est de MM. de La Galisserie, ingénieur, et Vaudrey, 
inspecteur, chargés de la reconstruction des ponts. 
Au bout de celui-ci est placée cette inscription : 

PONT-AU-CHANGE 

RECONSTRUIT SOUS LE REGNE DE NAPOLÉON III 

1859-1860 



QUAI DESAIX 



Entre le Pont-au-Change et le pont Notre-Dame, 
voyez ce joli quai où se tenait, il y a peu de temps 
encore, le marché aux Fleurs. En cet endroit était 
autrefois le Port-aux-ŒufSf un des plus anciens de 
Paris. Turgot conçut le projet de construire un quai 
à cette place. Voici un extrait de son testament : 
« 22 avril 1 763 ... Je donne et lègue la somme de cent mille 
« livres une fois payée à V Hôtel de ville de Paris , et je prie 
• MM. les prévôts des marchands et échevins de Vem- 
« ployer à la construction du quai projeté par mon père ^ 
« qui doit prendre au bout du Tjuai de V Horloge et abou- 



22 CURIOSITES 

« tir au pont Notr&^Dame, vis^à-vis Saint^Denis de la 

« Chartre. » 

« Signé : Le président Turgot. » 

Les maisons qui séparaient la rue de la Pelleterie 
du bord de la Seine» furent démolies et le ministre 
de l'intérieur posa la première pierre du quai Desaix 
le 24 messidor an VIII (1800). Le général Desaix de 
Voycoux (Louis-Charles-Antoine) naquit en 1768 à 
Saint-Hilaire d'Ayat, en Auvergne, et fut tué à la 
bataille de Marengo le 14 juin 1800. La longueur de 
ce quai est de 137 mètres. 



MARCHÉ AUX FLEURS 



Le marché aux Fleurs était communément appelé 
le quai aux Fleurs ; on disait : « Je Tais au quai aux 
Fleurs; » il tenait remplacement compris entre la 
rue de la Pelleterie et le quai Desaix, dont il était 
séparé par une rangée de bornes. 

Les travaux de ce marché furent exécutés d'après 
les ordres de Napoléon I", qui fit transférer dans 
cet endroit le marché aux fleurs et arbustes, qui se 
tenait sur le quai de la Mégisserie. Ce marché fut 
inauguré le 16 août 1809 ; il était planté d'arbres dans 
toute sa longueur et orné de deux jolies fontaines 
de marbre ; le marché aux fleurs se tient les mer- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 23 

credis et les samedis de chaque semaine sur le quai 
Napoléon. 



PONT NOTRE-DAME 



Avant 1313, on voyait à peu près en cet endroit un 
petit pont de bois, qui servait de communication à 
des moulins construits sur la Seine. On le nommait 
anciennement pont de la Planche-Mibray, Ce pont te-* 
nait d'un côté à la Cité, près de Saint-Denis de la Ghar- 
tre, et s'avançait jusqu'aux moulins qui étaient au 
milieu de la Seine ; le reste du chemin était formé de 
planches que Ton plaçait et retirait à volonté. Cor- 
rozet dit, en parlant de ce pont ; A la rivière de Seine 
au lieu que Von dit les planches demy-bray^ c'est-à-dire 
la moitié (Eu bras de la Seine^ là avait un pont de bois 
qui s'adres-sait à Saint-Denis de la Chartre. (Voyez ce 
nom.) Le 31 mai 1413, ce pont fut rebâti en bois, 
couvert Ae soixante maisons uniformes, trente de 
chaque côté de la route ; le roi Charles VI en fut le 
parrain et frappa sur le premier pieu. Le Dauphin, 
les ducs de Berri et de Bourgogne et le sire de la Tré- 
moille eurent part à la cérémonie; il fut nommé pont 
Notre-Dame, et ne fut achevé qu'en 1421. 

Le vendredi 25 octobre 1499, à neuf heures du 
matin, le pont Notre-Dame s'entr'ouvritj et les mai- 



i!4 CUKIOSITÉS 

sons s'écroulèrent avec un fracas horrible. Ce maltieur 
arriva par suite de la négligence et de la cupidité des 
magistrats de la ville. Le Parlement manda bientôt 
à sa barre le prévôt des marchands, les échevins, et 
les fit emprisonner ; par arrêté du 5 janvier 1500, il 
destitua Jacques Piédefer, prévôt des marchands, 
Antoine Malingre, Louis du Harlay, Pierre Turquant 
et Bernard Ripault, échevins, les déclara incapables 
d exercer àTavenir aucune fonction, et les condamna 
à de fortes amendes. Ils moururent tous en prison. 

Le roi accorda, poiir les frais de la reconstruction 
du pont, 6 deniers pour livre à prendre pendant six 
ans aux entrées de Paris sur tout le bétail à pieds 
fourches, sur le poisson de mer et le sel. En atten- 
dant son achèvement, un bac fut établi malgré les 
obstacles que suscita Tabbé de Saint-Germain des 
Prés. 

Jean Joconde, cordelier, qui avait déjà présidé à la 
construction du Petit-Pont, fut chargé de diriger les 
travaux de celui-ci, qui fut bâti en pierre et achevé 
en 1512, Sur une des arches était gravé ce distique 
en rhonneur du savant architecte : 

Jocundus germinos posuit tibi Sequana pontes ^ 
Nunc tu jure potes dicere pontificem. 

Soixante et une maisons furent construites sur les 
côtés de la route de ce pont. Sous le règne de 



DE LA CITÉ DE PARIS. 25 

Henri II, en 1548, ces maisons étaient louées 60 livres 
chacune, et la ville s'y réservait le premier étage 
pour les jours des solennités ou fêtes publiques : ce 
lut sur le pont Notre-Dame que l'infanterie ecclé- 
siastique de la Ligue fut passée en revue par le légat, 
le 3 juin 1 590. Capucins, moines, cordeliers, jacobins, 
carmes, feuillants, etc., tous, la robe retroussée, 
le capuchon bas, le casque en tête, la cuirasse sur le 
dos, Tépée au côté et le mousquet sur Fépaule, mar- 
chaient quatre par quatre, le révérend évêque de 
Senlis à leur tête avec im esponton (demi-pique 
d'infanterie), les curés de Saint-Jacques de la Bou- 
cherie et de Saint-Gôme faisaient les fonctions de 
sergents-majors. Quelques-uns de ces miliciens d'un 
nouveau genre, sans penser que leurs fusils étaient 
churgés à balles, voulurent saluer le légat et tuèrent 
à côté de lui un de ses aumôniers. Son Éminence 
épouvantée s'écria : Mes amis, le soleil de juin est 
trop chaud y il m'incommode ; puis il leur donna sa 
bénédiction et s'en alla. 

Péréfixe rapporte, dans la Vie de Henri IV, que ce 
prince, passant sur le pont Notre-Dame, après la paix 
de Vervins, l'ambassadeur d'Espagne s'étonna de la 
grande foule de peuple qui s'y trouvait et qui fermait 
presque le passage , de sorte que Sa Majesté était fort 
pressée ; Henri IV lui répondit : Monsieur Vambassa- 
deur, ce n'est rien; il faut voir ce peuple le jov/r d'une 
bataille^ U me presse bien davantage/ 

3 



26 CURIOSITÉS 

C'est sur ce pont que Charles IX fit sa rentrée dans 
la capitale, le 16 mars 1570. Il venait d'épouser 

9 

Elisabeth, fille de Maximilien II. Le pont était orné 
magnifiquement et couvert d'une draperie brillante 
qui formait le plafond. Il fut encore décoré pour l'en- 
trée de la reine Marie-Thérèse d'Autriche, le 26 août 
1660. Le pont Notre-Dame fut réparé à diverses épo- 
ques, notamment en 1659. 

En 1786, les maisons qui étaient dessus furent 
supprimées, la montée, qui était très-rapide, fut 
adoucie et les côtés garnis de parapets et de trottoirs. 
En 1793, on l'appelait le Pont de la Raison; sur ce pont 
on voyait encore, en 1859, la pompe dite de Notre- 
Dame, espèce de grande tour carrée d'un aspect assez 
désagréable, bâtie en 1670 et reconstruite en 1708. 
Par Teffet de deux machines hydrauliques dues à 
Daniel Joly et Demance, le volume des eaux de Paris 
fut augmenté de quatre-vingts pouces. 

La porte qui servait d'entrée à la pompe, était 
décorée d'un ordre ionique du dessin de Bullet, et 
ornée d'un bas-relief de Jean Goujon, lequel bas- 
relief était autrefois dans le Marché-Neuf, et repré- 
sentait un fleuve et une naïade d'un très-élégant 
dessin. 

Ce pont fut réparé en 1861. 



DE LA CITE DE PARIS. 27 



QUAI NAPOLÉON 



Le quai Napoléon commence au pont Notre-Dame 
et va jusqu'à celui de la Cité. En 1313, il portait le 
nom de port Saint'-Landry, à cause de Téglise Saint- 
Landry qui était près de là, comme on le verra. Il fut 
réparé et revêtu d'un mur que le chapitre de Notre- 
Dame fit élever en 1582; la ville fit refaire ce quai à 
la sollicitation de M. Sanguin, conseiller à la Cour 
des aides ; en 1853, ce quai fut baissé d'environ 2 mè- 
tres. Dans un bail de 1638, il est indiqué sous le 
nom de quai des Armes de Blondei, Près de la rue des 
Chantres était la fameuse porte d'Enfer. (Voyez la 
rue de ce nom.) 

En 1804, les maisons qui bordaient la Seine furent 
démolies pour faire un quai de 14 mètres de largeur 
qu'on nomma quai Napoléon. Les travaux de cette 
voie, quelque temps suspendus, furent repris en 1808, 

En 1816, la Restauration le débaptisa du nom de 
Napoléon et lui fit prendre celxii de quai de la Cité. 
En janvier 1834, il reprit la dénomination de quai 
Napoléon, Les jours de marché aux fleurs, les arbustes 
sont étalés sur le quai Napoléon qui a 428 mètres de 
longueur. 



28 CURIOSITES 



PONT D'ARCOLE 



S'étend de la place de THôtel-de-Ville au quai 
Napoléon; il fut commencé en 1828 et livré à la ciT-- 
culation le 21 décembre de la même année. M. Des- 
jardins en obtint la concession pour quarante-cinq 
années, à partir du \" janvier 1831 jusqu'au 2 jan- 
vier 1876. Ce pont, qui ne servait qu'aux piétons, 
était suspendu en chaînes de fer et reposait sur un 
pilier placé au milieu de la rivière. Il prit d'abord le 
nom de pont de la Grève, parce qu'on appelait la Grève 
le quai qui borde l'Hôtel de ville. Le 28 juillet 1830, 
je fus témoin des scènes sanglantes de la guerre ci- 
vile entre la garde du roi et le peuple de Paris qui, au 
milieu de la mitraille que vomissaient deux pièces 
d'artillerie, traversa le pont et s'empara des Suisses 
et de Tartillerie qui occupaient la place de Grève ; en 
mémoire de cet acte d'héroïsme, on donna au pont de 
la Grève le nom défont (TArcole. Quelques personnes 
se sont trompées sur Tétymologie de ce nom en disant 
qu'il est celui d'un jeune homme nommé d'Arcole, 
qui fut tué en plantant un drapeau sur la voûte de ce 
pont. Si le nom de d'Arcole avait été assez important 
pour le donner à un monument, comment aurait-on 
omis de le mettre sur la colonne de Juillet, où sont 



DE LA CITÉ DE PARIS. 29 

inscrits les noms des victimes les plus connues des 
journées des 27, 28 et 29 juillet? Je sais d'ailleurs que 
celui qui planta le drapeau ne se nommait pas d' Ar- 
éole. On voyait encore, il y a peu de temps, sur ce 
pont, plusieurs chaînes mutilées par la mitraille « et 
la maison du quai Napoléon m 25 conserve encore 
les traces du canon royal. 

En 1855, on reconstruisit le pont d'Arcole tout en 
fer, d'une seule travée et sur lequel toutes espèces 
de voitures peuvent passer. 



PONT LOUIS-PHILIPPE 

Commence sur le quai, vis-à-vis la rue Louis-Phi- 
lippe, et se termine sur le quai Napoléon. Une ordon- 
nance royale du 13 août 1833 a autorisé la construc- 
tion de ce pont, dont MM. Callou, CoUin et Séguin 
frères ont été déclarés concessionnaires. Commencé 
en 1833, sous la direction de MM. Séguin frères, il a 
été inauguré le 26 juillet 1834; le terme de la con- 
cession était de quarante-neuf années, qui ont com- 
mencé au 13 août 1835 et devaient expirer au 
13 août 1884. 

Ce pont, dont Louis-Philippe posa la première 
pierre, était suspendu, en fils de fer, et appuyé sur la 
pointe occidentale de Tile Saint-Louis. Les voitures 

3. 



30 CURIOSITÉS 

suspendues pouvaient seules passer sur ce pont gni 
fut payant jusqu'en 1848; la même année, le feu prit 
au bout de ce pont du côté de la Cité, les chaînes se 
rompirent et toute cette travée tomba dans la Seine, 
n fut réparé provisoirement, et, pendant Tannée 1 86 i , 
on le rebâtit tout en pierre et d'une forme très-élé- 
gante ; il s'avance dans Tintérieur de Tile Saint-Louis 
qu'il coupe pour s'annexer au pont de la Cité. 



PONT DE LA CITÉ. ' 

Une communication de la Cité avec l'île Saint-Louis, 
appelée alors l'île Notre-Dame, était indispensable. 
On construisit un pont de bois sur le petit courant 
qui sépare les deux îles ; quelques oppositions, de la 
part du chapitre de Notre-Dame, suspendirent cet 
ouvrage. On fut donc obligé de changer sa direction; 
voici celle qu'on lui fit prendre : il partait de la pointe 
occidentale de Tîle Saint-Louis, venait aboutir dans la 
Cité, à peu près à l'endroit où est la maison n*» 1 i sur 
le quai Napoléon, puis formait un angle obtus d'en- 
viron vingt toises jusqu'à la rue des Chantres ; à la 
porte d'Enfer, entre le pont et le quai, il y avait un 
espace de cinq mètres. On le nommait le pont de 
Bois* 

Le 5 juin 1634, trois processions passant ensemble 



DE LA CITÉ DE PARIS. 81 

sur ce pont pour se rendre à l'église Notre-Dame 
occasionnèrent une si grande foule que deux balus- 
trades du côté de la Grève furent rompues, et que le 
pont entier fut sur le point d'être enfoncé; vingt 
personnes perdirent la vie et quarante furent bles- 
sées. En 1636, à l'occasion du jubilé, le Parlement 
ordonna qu'on mettrait, pour prévenir un semblable 
accident, des barrières aux ponts de bois. Ce pauvre 
pont fut si fort endommagé par les glaces, en 1709, 
qu'on fut obligé Tannée suivante de le détruire; il ne 
fut rétabli qu'en 1717. Comme on le peignit alors en 
rouge, on le nomma le Pont-Rouge ; il n'y avait point 
de maisons dessus et il n'y passait aucune voiture. 
On avait accordé pour sa construction un péage que 
le roi a cédé à la ville, ainsi que le pont, en dédom- 
magement des douze maisons abattues au Marché- 
Neuf. 

Dans les premières années de la Révolution de 1789, 
le Pont-Rouge fut emporté par les eaux. Une loi du 
24 ventôse an IX (le 15 mars 1801) ordonna la con- 
struction d'un nouveau pont, tenant d'un bout à la 
rue Bossuet , dans la Cité, et de l'autre à la rue Saint- 
Louis-en-l'Ile. Les travaux furent exécutés sous la 
direction de M. Demoutier, ingénieur, et aux frais 
d'une Société anonyme dont la concession, avec droit 
de péage, ne devait expirer qu'au 30 juin 1897. Dans 
le courant de 1842, ce pont tombait en ruine et les 
concessionnaires furent autorisés à le convertir en 



32 CURIOSITÉS 

une passerelle suspendue en fils de fer et n'ayant 
qu'une seule travée. Les travaux furent achevés au 
mois de décembre de la même année. Cette passerelle, 
qui prit le nom de pont de la Citéf fut à chaque bout 
ornée d'un portique envoûte sculpté aux quatre faces 
dans le goût gothique. Il fallait monter deux marches 
pour entrer sur le pont, ce qai le rendait inaccessible 
aux voitures. En 1861 , ce pont fat démoli et remplace 
par un autre tout enfer, d'une seule travée et propre 
aux gens de pied comme aux voitures de toutes sortes, 
n porte aujourd'hui le nom de pont Saint-Louis. 



QUAI DE L'ARCHEVÊCHÉ 



Ce quai commence au pont de la Cité et finit au 
Pont-au-Double. La plus grande partie de ce quai 
était autrefois occupée par les jardins des chanoines. 
La pointe orientale de ce quai, s'avançant dans la 
rivière et coupant le fil de Peau, se nomme le Terrain, 
formé par succession de temps des gravois et décom- 
bres de l'église Notre-Dame. Ce terrain factice s'appe- 
lait, en 1 258 , la Motte aux Papelards , par dérision, pai^ce 
que les prêtres venaient s'y promener. En 1356, il se 
nommait le TerraiL C'était encore, au xv* siècle, un 
espace inculte qui se terminait en pente douce. 

Les troubles qui agitèrent le royaume sous le régne 



DE LA CITÉ DE PARIS. 38 

de Charles VI excitèrent la vigilance du chapitre, par 
les ordres duquel on y veillait la nuit. 

Ce terrain était entièrement interdit aux dames. 
Cependant, en 1407, Charlotte de Savoie, seconde 
femme de Louis XI, y vint débarquer et fut compli- 
mentée par Tévêque et parle Parlement. 

En cet endroit était une rue qui communiquait du 
cloitre à la Seine, à peu près dans une direction du 
levant au couchant. Lorsque le Terrain fut environné 
de murs, on laissa à Tun de ses côtés un passage 
pour conduire les chevaux à la rivière, ce qui lui fit 
donner le nom de rue de r Abreuvoir, 

Le côté méridional du quai de l'Archevêché se 
nommait, en 1282, le port l'Évêque; en 1804, quai 
Catinat, Nicolas Catinat naquit à Paris en 1637, fut 
fait lieutenant général en 1688, maréchal de France 
en 1693, et mourut à sa terre de Saint-Gratien en 
1712. Ce quai prit quelque temps après le nom de 
VArcheoêché. On y arrive par le pont de TArchevêché 
et par le Pont-au-Double. 



PONT DE UARCHEVÊCHÉ 



Donne d'un bout au quai de l'Archevêché, et de 
l'autre au quai Montebello, en face de la rue de 
Bièvre. 



34 CURIOSITÉS 

Une ordonnance royale du 6 décembre 1827 a 
autorisé la construction de ce pont, qui fut quelque 
temps soumis au péage. Commencé en 1828 , il a 
été livré à la circulation le 4 novembre de la même 
année. M, Desjardins en a été déclaré concessionnaire 
pour quarante -cinq années, qui ont commencé le 
1er janvier 1831 et devaient expirer le 1" jan- 
vier 1876. 

Ce pont, construit en maçonnerie, est composé de 
trois arches et doit sa dénomination au quai où il 
prend naissance. On pouvait traverser les deux ponts 
de l'Archevêché et Louis-Philippe en ne donnant 
qu'une rétribution de cinq centimes. Depuis Napo- 
léon III, on ne paye plus. 



PONT-AU-DOUBLE 



Sert de communication entre la place du Parvis- 
Notre-Dame et le quai Montebello. . 

Ce pont était fini en 1634; des lettres patentes de 
Louis XIII, datées de Fontainebleau, au mois de mai 
de la même année, ordonnent que les gens de pied 
qui passeraient sur ce pont payeraient un double 
tournois (le double valait deux deniers) et les gens à 
cheval six deniers; mais ceux-ci n'y passaient jamais, 
pour une bonne raison, c'est qu'il y avait une bar- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 35 

rière ou tourniquet qui n'en laissait l'entrée libre 
qu'aux piétons. Gomme le péage fixé par Louis XIII 
subsista longtemps, ce pont a retenu le nom de Pont- 
au-Doubîe ; il a aussi porté celui de pont de V Hôtel-Dieu, 
Lorsque les deniers n'eurent plus cours, on donna 
un liard pour ce droit que la République supprima. 
En 1835, la pente de ce pont fut adoucie, et les 
voûtes ou bâtiments dont il était couvert furent 
abattus. Les voitures passent sur le Pont-au-Double ; 
ce pont est garni d'un côté d'une grille de fer à tra- 
vers laquelle on voit le pont Saint-Charles, qui est 
dans l'intérieur de THôtel-Dieu. 



RUE DE UARCHEVÊCHË 

La petite rue, si on peut appeler cela une rue, qui 
du Pont-au-Double aboutit à la place du parvis Notre- 
Dame, se nonimait, en 1282, rue du Port-rEvêque, 
puis rue des Bateaux, En 1830, elle portait encore le 
nom de rue de V Archevêché; aujourd'hui, elle se trouve 
confondue avec le quai de l'Archevêché. 



CHAPITRE III 



HOTEL-DIEU 



L'opinion la plus commune en fait honneur à saint 
Landry, huitième évêque de Paris, qui, pendant une 
grande famine arrivée, dit-on, vers l'an 650, donna 
d'amples secours aux pauvres : c'est de cette action 
très-louable qu'on a induit que ce saint évéque avait 
onde l'Hûtel-Dieu . A cet hospice tenait un monaslère 



38 CURIOSITÉS 

de filles dont Landetrude était abbesse en 690. Outre 
les malades, on y recevait encore les voyageurs pè- 
lerins et les gens sans asile. 

Adam, clerc du roi, fit don à cet hôpital, à la fin 
du xne siècle, de deux maisons dans Paris, avec cette 
condition singulière, qu'on fournirait, aux jours de 
son anniversaire, aux pauvres malades, tous les 
mets qu'ils pourraient désirer. 

Philippe-Auguste est le premier de nos rois qui 
ait fait quelques libéralités à l'Hôtel-Dieu. Dans une 
de ses lettres, on lit : « Nous donnons à la maison de 
Dieu de Paris, située devant l'église de la bienheu- 
reuse Vierge Marie, pour les pauvres qui s'y trouvent, 
toute la paille de notre chambre et de notre maison 
de Paris, chaque fois que nous partirons de cette ville 
pour aller coucher ailleurs. » L'évêque Maurique et 
son chapitre arrêtèrent, d'un commun accord, qu'au 
décès de l'évêque ou d'un chanoine, leur lit appar- 
tiendrait à l'Hôtel-Dieu. 

Saint Louis est regardé ajuste titre comme le bien- 
faiteur de cet hôpital qui, d'après son désir, prit le 
nom à^ hôtel de Notre-Dame ou de la bienheureuse Vierge 
Marie, en échange de celui de Saint^Christophe qu'il 
portait. C'est encore saint Louis qui exempta l'Hôtel* 
Dieu de toutes contributions. En 1535, le cardinal 
Duprat, légat du Pape, y fit construire, entre les an- 
ciens bâtiments et le Petit-Pont, ime grande salle qui 
retint longtemps le nom de salle du Légat. 



DE LA CITÉ DE PARIS. 39 

En 1737 et en 1772, deux incendies causèrent de 
grands ravages à THôtel-Dieu ; dans le dernier sur- 
tout, un grand nombre de malades périrent. Les lits 
étaient entassés dans les salles et les malades entassés 
dans les lits; il y en avait souvent quatre, et quel- 
quefois six, couchés ensemble. On a même vu, dans 
quelques occasions extraordinaires , placer les ma- 
lades les uns sur les autres, parle moyen de matelas 
mis sur une sorte d'impériale à laquelle on ne mon- 
tait que par une échelle. C'est à Louis XVI que les 
malades doivent d'être couchés seuls dans un lit. Sous 
la république de 89, THô tel-Dieu s'appela le Grand 
Hospice de VHumanitè. 

Après l'incendie de 1772, on reconstruisit THôtel- 
Dieu tel qu'il est aujourd'hui. Autrefois l'entrée prin- 
cipale était située au bout du Petit-Pont, du côté de 
la rue de la Cité; cette entrée fut supprimée en 1804. 
Dans l'intérieur de l'Hôtel-Dieu, on traverse la Setue 
sur le pont SainP-Charles, qtii est couvert et qui conduit 
dans le bâtiment du midi, en passant sous le quai 
Montebello. 

En 1838, l'édilité parisienne, pour continuer la 
ligne des quais sur la rive gauche de la Seine, a exigé 
le dédoublement du bâtiment Saint-Charles, qui était 
contigu à la rivière, et le nombre des lits que per- 
dait l'hôpital, par suite de ce rétrécissement, a été 
reporté dans des constructions nouvelles élevées dans 
l'enclos Saint-Julien, de Tautre côté de la rue de la 



40 CURIOSITES 

Bucherie. Il résulte de ces dispositions que, pour arri- 
ver du bâtiment de la rive droite au bâtiment Saint- 
Charles, il faut traverser une passerelle, et que, pour 
parvenir à la partie de l'hôpital située dans l'enclos 
Saint-Julien, il faut encore traverser le pont volant 
établi sur la rue de la Bucherie. 

La nature de ces communications, Téloignement 
des bâtiments de la rive gauche de celui de la rive 
droite, où sont placés tous les services généraux, le 
nombre et l'élévation des étages, rendent le service 
extrêmement difficile, et diminueront sensiblement 
le regret de la démolition et du déplacement prochain 
de l'Hôtel-Dieu. 



PETIT-PONT ^ 

Il sert de communication aux rues de la Cité et 
Saint-Jacques, entre les quais Montebello et Saint- 
Michel. Le premier pont bâti dans Lutèce fut le 
Petit-Pont. Il était en bois avant la domination ro- 
maine ; il fut détruit par les Gaulois et rebâti par les 
Romains. En 1185, on le refit en pierre, grâce à la 
libéralité de Maurice de Sully, évêque de Paris. 

Jean, surnommé de Petit-Pont, parce qu'il Tavait 
bâti et qu'il y demeurait, était chef d'une secte philo- 
sophique de ce temps. Au midi du Petit-Pont était le 



DE LA CITÉ DE PARIS. 41 

Petit-Ghâtelet et au nord il y avait une porte. Ce pont 
fut emporté par une inondation en 1196 et rétabli 
quelque temps après ; il ne put, en 1205, résister à 
un autre débordement dont parle Guillaume le Bre- 
ton : « En décembre, dit-il, il y eut une si grande 
inondation que, depuis un siècle, on n'en avait vu de 
pareille. » Le Petit -Pont de Paris s'écroula, Teau 
s'élevait jusqu'au second étage des maisons; pour 
communiquer de l'une à l'autre, on se servait de 
bateaux. Il éprouva le même sort en 1280, 1296, 1325, 
1376 et 1393; en 1395, on le reconstruisit avec l'ar- 
gent de plusieurs Juifs qu'on avait condamnés à l'a- 
mende. Ce pont tomba encore en 1405 et en 1407; le 
roi Charles VI en posa la première pierre au mois de 
juin suivant; il ne fut achevé qu'en 1409, à la Saint- 
Martin. Ce pont était couvert de maisons neuves qui 
avaient chacune leur nom : celle du milieu s'appelait 
l'hôtel de Haute-Bruyère ; tout près était la maison 
du Chat -qui -Pêche; sous le pont il y avait des 
moulins. 

En 1618, ime fusée tirée de l'île Notre-Dame (île 
Saint-Louis), tomba sur un bateau chargé de foin et 
y mit le feu, qui se communiqua ensuite à six autres ; 
mais heureusement il n'y eut rien de brûlé sur les 
ponts. Celui-ci fut presque ruiné par les grands dé- 
bordements de la rivière en 1649, 1651 et 1658; l'in- 
scription qui devait perpétuer le souvenir de ce der- 
nier sinistre marquait que l'édifice avait été réparé 

4. 



43 CURIOSITES 

à grands frais sous la prévôté de M. de Sève, en 
1659. 

L'année 1718 est marquée par un événement fu- 
neste arrivé le 27 avril, à sept heures un quart du 
soir. C'étaient deux bateaux chargés de foin , auxquels 
le feu avait pris par un accident causé par la crédu- 
lité d^une mère dont l'enfant s'était noyé au-dessous 
du pont de la Toumelle ; la malheureuse pria Dieu 
de lui rendre son fils; dans l'exaltation de son amour 
maternel, elle eut recours à un pain de saint Nicolas 
de Tolentin, au milieu duquel elle plaça un cierge 
allumé qu'elle abandonna dans une sébile de bois au 
cours du fleuve; la pauvre mère espérait, selon ime 
croyance populaire d'alors, que l'écuelle de bois s'ar- 
rêterait à l'endroit où le corps de son fils avait dis- 
paru. Cette sébile fut portée vers un groupe de deux 
bateaux de foin auxquels le cierge allumé mit bientôt 
le feu. On coupa imprudemment les câbles au-dessous 
du pont de la Toumelle ; les deux brûlots, libres alors, 
se suivirent de près et sîarrétèrent sous une arche du 
Petit-Pont ; malgré la promptitude des secours, le feu 
prit au pilotis des habitations qui Penvironnaient : le 
pont lui-même et les maisons qui étaient dessus s'é- 
croulèrent dans les flots ; le Parlement, pour soulager 
les incendiés , fit une quête qui produisit 1 1 1 ,898 livres 
9 sous 9 deniers ; le pont fut reconstruit en pierre tel 
que nous le voyons, mais on n'a pas reconstruit les 
maisons. Ce pont, composé de trois arches à plein 



DE LA CITÉ DE PARIS. 43 

cintre, n'offre rien de remarquable. Mais, lorsqu'on' 
en connaît Porigine , que de pensées viennent se 
croiser : on se représente les premiers habitants de 
Lutèce construisant ce pont pour parvenir plus fa- 
cilement dans leur île. 

Ce môme pont fut détruit et rebâti quinze ou seize 
fois par les Gaulois » par les Romains et par les 
Francs. 

MARCHÉ NEUF 

BT QUAI DU MARCHB-NBUF 

En 1560, les commissaire^ du conseil, pour la 
réformatîon des halles, ordonnèrent aux prévôts dei 
marchands et échevins de construire le quai Saint- 
Michel et dV faire un marché, ce qui fut exécuté en 
1566. On bâtit dix-sept boutiques, ainsi qu'ime halle 
pour le poisson et deux boucheries aux deux extré- 
mités ; tous ces bâtiments furent finis en 1568, et le 
4 juin de cette même année, on ordoima aux mar- 
chands de poisson et d^herbes, qui se tenaient près 
du Petit-Châtelet, de venir s'établir dans ce nouveau 
marché. La rue de VOrberie prit à cette occasion le 
nom de rue du Marché-Neuf; les maisons, appartenant 
à la ville, qui bordaient ce quai, furent remplacées 
par un parapet ; le roi accorda le péage du Pont- 
Rouge à la ville, à titre d'indemnité. La partie de la 



U CURIOSITÉS 

rue du Marché-Neuf, comprise depuis la rue de la 
Barillerie jusqu'au boutdudit marché, prit, en 1840, 
le nom de quai du Marché-Neuf, La boucherie du côté 
oriental devint un corps de garde qui n'existe plus, 
et remplacement de l'autre boucherie, près du pont 
Saint-Michel, sert aujourd'hui à déposer les noyés et 
les asphyxiés, sous le nom de Morgue. 



LA MORGUE 

(Morgue est un vieux mot français qui signifie 
visage.) A Paris, les tîorps inconnus furent exposés 
jusqu'en 1804 dans la basse geôle ou morgue, dépen- 
dant de la prison du Grand-Châtelet (où se trouve 
aujourd'hui le Théâtre impérial du Ghâtelet). A cette 
époque fut construit le bâtiment qu'on voit aujour- 
d'hui sur le quai du Marché-Neuf. C'est un édifice 
isolé, sur le bord de la rivière, dont le toit a la coupe 
d'un tombeau antique. Une des deux salles, destinée 
à l'examen anatomique, est interdite au public; 
l'autre sert à exposer les corps morts. Ce lugubre 
monument fut témoin, dans la soirée du 30 juillet 
1830, d'un triste et funèbre spectacle. Au bas de la 
Morgue, im grand bateau, sur lequel flottait un dra- 
peau noir, reçut les cadavres de cent vingt-cinq 
victimes qui aVaient succombé la veille. On les 



DE LA CITÉ DE PARIS. 45 

descendait sur des civières, on les rangeait par piles ; 
on y voyait des enfanta de dix à douze ans, des 
femmes, des vieillards. La foule, qui bordait les 
parapets sur les deux rives de la Seine, muette et 
silencieuse en contemplant cette funeste cargaison 
de cadavres, paraissait glacée d*horreur. Du milieu 
de ce silence de la mort partirent des cris de douleur. 
C^était une malheureuse femme qui venait de recon- 
naître son mari qui n'était pas rentré la veille. 

Ce funèbre bateau fut conduit vers le Champ-de- 
Mars, oii les restes de ces victimes furent enterrés 
jusqu'à Tépoque où ils furent transférés sous la 
colonne de Juillet. On avait placé sur leur tombe une 
simple croix de bois portant l'inscription suivante : 

A LA MÉMOIRE DES FRANÇAIS MORTS POUR LA LIBERTÉ 
I.BS 27, 28 ET 29 JUILLET 1830. 

France, dis-moi leurs noms ; je n'en vois point paraître 

Sur ce funèbre monument. 

— Ils ont vaincu si promptement, 

Que j'étais libre avant de les connaître ! 

Je garde le silence sur les tristes tableaux que Ton 
voit à la Morgue. Elle va être très-prochainement pla- 
cée derrière Téglise Notre-Dame, sur le Terrain, au 
bord de la rivière. 



46 CURIOSITÉS 



PONT SAINT-MICHEL 

n conduit de la rue de la Barillerie à la place Saint- 
Michel. Ce pont, d'abord construit en pierre et 
couvert de maisons, ne fut terminé qu'en 1387, sous 
Charles VI ; il fut d'abord appelé Petit-Pont, ensuite 
Petit'Pont-Neufy et simplement Pont-Neuf. Cet édifice, 
mal construit, fut, le 31 janvier 1407, entraîné par 
les glaçons qu'un hiver rigoureux avait amoncelés. 
Il fut rebâti en pierre cette même année. En 1424, il 
prit la dénomination de pont Saint-Michel, en raison 
de sa proximité de la chapelle de ce nom. Le 10 dé- 
cembre 1547, il fut emporté par les glaces et rebâti 
en bois ; détruit une troisième fois, le 30 janvier 1616, 
plusieurs particuliers s'oflFrirent de le faire recon- 
struire en pierre, à leurs dépens, et d'élever dessus 
trente-deux maisons d'égale structure, ce qui leur fut 
accordé, par arrêt du conseil du 4 août 1616 , pour en 
jouir pendant soixante années, à la charge d'en payer 
un écu d^or de redevance annuelle pendant ledit 
temps, lequel passé, la propriété en demeurerait au 
roi. En 1657, on modifia les termes, de cette conven- 
tion. En 1672, le roi abandonna la propriété de ce 
pont moyennant une somme de 200,000 livres 12 de- 
niers de cens et 20 sous de rentes par chacune des 



DE LA CITÉ DE PARIS. 47 

trente-deux maisons, lesquelles étaient en brique et à 
quatre étages. En 1809, les maisons qui couvraient 
le pont Saisit-Michel furent démolies par ordre de 
Napoléon P'. Ce pont était composé de quatre ar- 
ches à plein cintre; au-dessus de la pile du milieu, 
on voyait, avant la Révolution de 1789, la statue 
équestre de saint Michel, dont il restait encore quel- 
ques traces en 1850. 

En 1 860, on rebâtit le pont Saint-Michel tout en 
pierre , composé de trois arches et élégamment 
décoré de couronnes de lauriers dans lesquelles son^ 
des N. A chaque bout de ce pont, on lit cette inscrip- 
tion : 

PONT SAINT-MICHEL 

reoonstrait en 1860 

sous LÉ RiCGNE DE NAPOLÉON III 



RUE DE LA BARILLERIE 

Elle commence au bout du pont Saint-Michel , 
entre les quais du Marché-Neuf et des Orfèvres, finit 
au Pont-au-Ghange, entre le quai de l'Horloge et celui 
de Desaix. Elle formait jadis trois rues, sous trois 
noms différents que voici : la partie qui comprend la 
distance entre le Pont-au-Change et la place du Palais 
se nommait y en 1220, rue Saint- Barthélémy (voyez ce 



48 CURIOSITÉS 

nom) ; en 1 636 , rue du Prieuré-Sainl-Barthélemy, parce 
que Téglise paroissiale et royale de ce nom y était 
située; depuis la place du Palais jusqu'à la rue de la 
Calandre, elle portait encore, en 1700, le nom dente 
Saint-Èloi, à cause de l'église Saint-Éloi, qui ouvrait 
sur cette rue ; la troisième partie, qui prenait de la 
rue de la Calandre au pont Saint-Michel, était appelée, 
avant 1280, Barilleria; Jaillot la nomme la GrarU 
Bariszerie, pour la distinguer d'une ruelle de la Baril- 
lerie qui lui était parallèle, et qui conduisait de la 
rue de la Calandre à la rivière, à Tendroit où est 
aujourd'hui la Morgue. On ne connaît plus que la 
Grande-Barillerie. Cette partie se nommait, en 1398, 
rue du pont Saint-Michel, Le pont prenait son nom de 
la chapelle Saint-Michel, devant laquelle celte rue 
passait alors (voyez Chapelle Saint-Michel). 

C'est par erreur ou par plaisanterie que Corrozet et 
Robert Cénal l'appellent rue de la Babillerie. Le nom 
de Barillerie lui vient des barilliers ou tonneliers qui 
l'habitaient et qui suffisaient à peine pour l'immense 
quantité de vin que produisait le Parisis depuis que 
Brennus y avait apporté d'Italie la vigne en trophée; 
les trois rues dont je viens de parler ont pris de la 
plus ancienne la seule dénomination de rue de la' 
Barillerie. En face de la petite porte du Palais était 
l'église Saint* Barthélémy. 



DE LA CITE DE PARIS. 49 



ÉGLISE SAINT-BARTHÉLEMY 



Construite sur remplacement d'une chapelle du 
même nom, qui existait à la fin du v® siècle, elle fut 
réparée, en 890, par le comte Eudes ; elle fut nommée 
ensuite Saint-Magloire et reprit plus tard le nom de 
Saint-Barthélémy ; éi\e était ^dLToisse royale en 1140. 
Au chevet de cette église était Tancienne chapelle de 
Notre-Dame-des-Voùtes, où Ton entrait par la ruelle 
du Prieuré, fermée en 1315; cette chapelle fut ren- 
fermée dans l'église en 1525, et prit le nom de Notre^ 
Dame de la Fontaine ; on répara avec soin l'église 
Saint-Barthélémy en 1550, et, en 1772, on travaillait 
à la reconstruire entièrement, mais elle ne fut pas 
achevée. 

Je profite de cet article pour raconter l'anecdote 
suivante : Robert, fils de Hugues Gapet, avant d'é- 
pouser Berthe, sa cousine issue de gertnain, fit une 
assemblée d'évêques pour savoir s'il lui fallait des 
dispenses ; leur avis fut qu'il n'en avait pas besoin, 
ou qu'en tout cas ils pouvaient les donner. Deux ans 
après, Grégoire V ayant été élu pape, tint à Rome un 
concile dont le premier décret attaqua ce mariage, et 
fut conçu dans ces termes : • Que le roi Robert et 
Berthe, sa parente, qui se sont mariés contre les lois 

6 



50 CURIOSITÉS 

de rÉglise, aient à se séparer et à faire' une pénitence 
de sept ans, etqu'Archambaut, archevêque de Tours, 
qui leur a donné la bénédiction, et les autres évéques 
qui ont assisté à ce mariage incestueux, soient inter- 
dits de la communion jusqu'à ce qu'ils soient venus à 
Rome faire satisfaction au Saint-Siège. » Robert aimait 
sa femme, elle était enceinte et il lui paraissait af- 
freux de la déshonorer, elle et l'enfant auquel elle al- 
lait donner le jour. Il refusa d'obéir, fut excommunié 
et l'on vit aussitôt, non-seulement le peuple, mais 
même les gens de la cour se séparer de leur roi : il ne 
lui resta que deux domestiques; encore faisaient-ils 
passer par le feu, pour les purifier, les plats où il avait 
mangé et les vases où il avait bu. Un matin qu'il était 
allé, selon sa coutume, dire ses prières à la porte de 
l'église Saint-Barthélémy, car il n'osait pas y entrer, 
Abbon, abbé de Pleury, suivi de deux femmes du pa- 
lais qui portaient im grand plat de vermeil couvert 
d'un linge, l'aborde , lui annonce que Berthe vient d'ac- 
coucher et découvrant le plat: «Voyez, lui dit-il, les 
effets de votre désobéissance aux décrets de l'Eglise et 
le sceau de l'anathème sur ce fruit de vos amours. » 
Robert regarde et voit un monstre, disent Pierre Da- 
mien et Romuald, qui avait le cou et la tête d'un ca- 
nard. Groira-t-on que par le plus abominable complot, 
dans l'idée d'obliger ce prince à se soumettre et pour 
fortifier^en même temps parmi le peuple la terreur 
qu'inspiraient les excommunications, on ait substitué 



DE LA CITE DE PARIS. 51 

ce monstre au véritable enfant ? Il est plus naturel de 
penser qu'une masse de chair d'une figure bizarre a 
pu se former au sein d'une femme dévorée de chagrin 
pendant sa grossesse et dont l'imagination était trou- 
blée par les menaces du Pape. Berthe fut répudiée: 
Robert épousa Constance de Provence, dont le carac- 
tère altier, cruel et vindicatif, exerça si souvent sa 
patience et causa tant de troubles dans l'Etat, qu'il ne 
parut pas que la bénédiction du ciel se fût répandue 
sur ce second mariage. 

A Tépoque de la Révolution, l'église Saint-Barthé- 
lémy, devenue propriété nationale, fut vendue, et dé- 
molie en 1791. Sur son emplacement, on établit le 
Théâtre de la Cité. 



THÉÂTRE DE LA CITÉ 

Il fut construit en 1791 par l'architecte Lenoir. La 
salle, qui était une des plus vastes de Paris, et qui de- 
vait porter le nom de Henri 1 F, ouvrit le samedi 20 oc- 
tobre 1792, sous le titre de Théâtre du Palais-Variétés, 
par une représentation au profit des braves Lillois. 
On jouait ce jour-là Tout pour la liberté, opéra- vaude- 
ville en un acte par M. Tissot. La troupe était com- 
posée de MM. Dumaniant, Saint-Clair, Pélissier, Beau- 
lieu, Barotteau, Saint-Preux, Fleury, Frogère, de la 



52 CURIOSITÉS 

Porto, Duval, RafSle, Frédérik, Hippolyte, Roseville, 
Saint-Romain, Dubois, Stoklet, Tautin , Tiercelin, etc. , 
de mesdames Saint-Clair, Ghénier, Lacaille, Guyot, Ar- 
nould, Dumoulin , Jenny , Dubois, Bourgeois, etc. (Voir 
pour les détails V Histoire des théâtres, pai» le même au- 
teur.) L'année suivante, elle prit le titre de Cité-Varié- 
tés. On y jouait le vaudeville, la comédie et la panto- 
mime ; là jouèrent Tiercelin et Brunet. Plus tard, le 
drame se glissa dans le répertoire de la Cité, le chant 
en disparut et la comédie y devint tout à fait acces- 
soire ; le drame et la pantomime entraînèrent la chute 
de l'administration en 1799. 

La troupe de Picard se fixa à la Cité, en 1800, après 
le premier incendie de TOdéon ; après y avoir attiré 
quelque temps la foule, elle quitta ce théâtre pour 
prendre possession de la salle Louvois. Ribié tenta 
sans succès d'exploiter ce théâtre en 1801. On y vit 
ensuite les funambules Ravel et Forioso. Les auteurs 
qui travaillaient le plus pour ce théâtre étaient : 
Dumaniant, Picard, Pigault-Lebrun, Desforgps, Du- 
mersan, Beffroy de Rigny, Aude, Dorvigny, Du- 
cray-Duminil, Armand Gouffé, Georges Duval, 
Rougemont, etc. En 1802, des chanteurs allemands 
exploitèrent la salle du Théâtre de la Cité qu'ils appe- 
lèrent Théâtre de Mozart. Vers la fin de 1805, Facteur 
Beaulieu tenta de relever ce théâtre ; n'ayant pu y 
réussir, il se brûla la cervelle au deuxième étage, sur 
le devant, dans la maison du café. En 1807, les ac- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 53 

teurs des Variétés s'installèrent provisoirement au 
Théâtre de la Cité pendant qu'on leur construisait un 
théâtre boulevard Montmartre. Après la suppression 
de divers théâtres, celui de la Cité, qui avait porté le 
nom de Théâtre de la Raison, fut transformé en un éta- 
blissement qui prit le nom de Veillées de la Cité; plus 
tard, on en fit une salle de danse sous le nom de 
Prado. Le foyer public et plusieurs autres pièces ont 
été affectées à des loges de franc-maçonnerie. Dans la 
plus belle. Napoléon I" et Joséphine assistèrent à une 
fête d'adoption donnée par le maréchal Lannes et le 
général Poniatowski, qui tous deux étaient vénérables 
de loges. 



LE PRADO 

Le Prado fut pendant longtemps le rendez-vous des 
étudiants et des grisettes affranchies. Ce lieu était 
défendu par la prudence et la morale à quiconque 
avait l'estime de soi-même, les danses en étaient in- 
décentes et répréhensibles. Ce bal fut démoli et, sur 
son emplacement, on vient de construire le Tribunal 
de Commerce. Il y avait sous le Prado deux passages 
faisant la croix, le passage du Prado qui ouvrait sur 
la rue de la Barillerie, et le passage de Flore ouvrant 
sur le quai aux Fleurs. 

5. 



1 



CHAPITKE IV 



PLACE DU PALAIS-OE-JUSTICE 

En face le Palais-de-Justice, au bout de la rue de 
Constantine , il y a-vait encore, au mois de janvier 1 861 , 
une petite place demi-circulaire, nommée place du Pa- 
lais-de-Justiee. C'est là qu'était la maison du père de 
lean Cbâtel qui commit un attentat sur la personne 
de Henri rv et le blessa d'un coup de couteau à la 



56 CURIOSITÉS 

lèvre supérieure, le mardi 27 décembre 1594. Cet 
homme subit le supplice qu'il méritait; la maison 
qu'il habitait fut rasée en exécution d'un arrêt du 
7 janvier 1595, et on éleva sur son emplacement une 
pyramide que Henri IV laissa subsister seulement 
jusqu'en 1605. Ce monument se composait d'un grand 
piédestal quadrangulaire, élevé sur trois gradins; 
^chaque façade était ornée de deux pilastres ioniques 
cannelés ; entre chaque pilastre était une table sur 
laquelle était gravée une inscription. Le piédestal 
était couronné par quatre frontons triangulaires, et 
par un attique décoré de guirlandes, et surmonté de 
quatre autres frontons cintrés et écussonnés aux ar- 
mes de France et de Navarre. Au-dessus du piédestal 
et aux angles, s'élevaient quatre statues représentant 
les vertus cardinales. Un obélisque chargé de bossa- 
ges et terminé par une croix fleuronnée formait la 
partie supérieure de la pyramide. Les inscriptions 
étaient en latin. Nous n'en traduirons qu'une seule, 
la moins étendue de toutes, mais suffisante pour ex- 
pliquer l'origine de ce monument expiatoire : • A la 
gloire immortelle, à la mémoire impérissable du très- 
grand, très-vaillant, très-clément prince Henri IV, 
roi très-chrétien de France et de Navarre. Passant, 
étranger ou citoyen de Paris, écoute-moi : sur le lieu 
où tu me vois élevée en forme de pyramide, fut la 
maison de Châtel, dont le Parlement, vengeur du 
crime, a ordonné l'entière destruction. Le fils du 



DE LA CITÉ DE PARIS. 57 

propriétaire a été cause de mon érection. Ce fllâ, élevé 
à une école impie, et trop docile aux criminelles le- 
çons de ses maîtres pervers, qui ont, hélas! usurpé 
le nom de Jésus, incestueux et bientôt parricide, osa 
porter une main meurtrière sur un prince qui avait 
sauvé la ville de sa ruine, et qui, protégé par le ciel et 
souvent vainqueur dans les combats, échappa aux 
coups de cet assassin, dont le fer n'atteignit que sa 
bouche. Passant, éloigne-toi par égard pour notre 
ville qu'a déshonorée cet horrible forfait. Je ne peux 
f en dire davantage. » Les autres inscriptions rappe- 
laient les principales circonstances de cet assassinat. 
Bannis depuis huit ans, les jésuites furent rappelés, 
mais il leur fut interdit de tenir aucun établissement 
d'éducation. Ils n'en obtinrent la permission qu'après 
la mort de Henri IV. Ce prince, à la prière du P. Cot- 
ton, jésuite et son confesseur, consentit à la démoli- 
tion de la pyramide ; le Parlement s'y opposa ; les 
jésuites l'emportèrent un peu plus tard. La place 
fut donnée par le roi aux sieurs Dupuis et Perrai, 
exempts de ses gardes, Valois, commissaire des 
guerres, et de Mainville, capitaine au régiment des 
gardes, pour y faire des échoppes, par brevet enre- 
gistré le 12 octobre 1605. Cette concession ne fut 
pas utilisée, et M. Miron, prévôt des marchands, y 
fit construire une fontaine, laquelle, plus tard, fut 
transportée dans la cour du Palais. 
On allait alors à Téglise Saint-Éloi par une allée ou 



68 CURIOSITÉS 

ruelle appellée de Saint'Éloi, qui donnait rue de la 
Barillerie ; on a longtemps nommé cet endroit Carre- 
fow du CMtel. Voici l'extrait d'une lettre de HenrilV 
écrite à différentes villes aussitôt après l'attentat de 
Jean Châtel : « Il n'y avait pas plus d'ime heure que 
nous étions arrivé à Paris du retour de notre voyage 
de Picardie, et étions encore tout botté, qu'ayant 
autour de nous nos cousins le prince de Conti, 
comte de Soissons et comte de Saint-Paul, et plus 
de trente ou quarante des principaux seigneurs des 
gentilshommes de notre cour ; comme nous rece- 
vions les sieurs de Ragni et de Montigni qui ne 
nous avaient pas encore salué, un jeune garçon, 
nommé Jean Châtel, fort petit et âgé au plus de 
dix-huit à dix-neuf ans, s'étant glissé avec la troupe 
dans la chambre, s'avança sans être quasi aperçu, 
et nous pensant donner dans le corps du couteau 
qu'il avait, le coup (parce que nous nous étions baissé 
pour relever lesdits sieurs de Ragni et de Mon- 
tigni qui nous saluaient) ne nous a porté que dans 
la lèvre supérieure du côté droit et nous a entamé 
et coupé une dent... Il y a, Dieu merci, si peu de 
mal que pour cela nous ne nous mettrons pas au 
lit de meilleure heure... » 
Cette place fut souvent le théâtre de scènes hor- 
ribles ; c'était là que l'on faisait les expositions pu- 
bliques avant la révolution de Février. Sur un écha- 
faud d'environ deux métrés de haut, on plaçait une 



DE LA CITÉ DE PARIS. 59 

rangée de poteaux ; le condamné était là debout, pen- 
dant une heure ou deux, le cou dans un parcan d^ fer, 
ou, s'il était condamné à la marque, le bourreau lui 
.appliquait un fer rouge surTépaule. Ces marques, 
qui empêchent le coupable de rentrer dans la société, 
en faisaient souvent un criminel de profession. Heu- 
reusement le progrès a fait disparaître cet ignoble 
usage. 

La marque et le carcan sont abolis d'après une loi 
en date du 28 avril 1832 et Texposition est supprimée 
d'après un décret du gouvernement provisoire daté 
du 12 avril 1848. On voyait encore, il y a peu de temps, 
sur cette petite place du Palais-de-Justice, une enfilade 
de cours, c'était le passage des Barnabites que Ton dé- 
molit le 15 février 1862. Ce passage avait une sortie 
rue de la Calandre n* 54. 



PASSAGE DES ËARNABITES 



Dans la première cour on voyait un portail sur 
lequel était écrit : Dépôt général des comptabilités de 
France. C'était celui de l'église des Barnabites, bâtie 
sur les ruines de Saint-Eloi. Dagobert I" fit donation 
à Eligius ou saint Eloi, orfèvre-argentier de la cou- 
ronne (depuis saint Éloijévéque de Paris), d'une mai- 
son assez vaste et de ses dépendances, située en fàcë 



60 CURIOSITÉS 

du palais de la Cité ; Éloi avait le projet d'y établir un 
hôpftal, mais il changea d'avis et fit construire un 
monastère pour les deux sexes. Aurée (depuis sainte 
Âure) était abbesse des lllles et Quintilien était abbé 
de Saint-Martial; c'est le nom qu'Eloi avait donné à la 
chapelle qu'il avait élevée en 600 : le nombre des reli- 
gieuses obligea leur instituteur d'augmenter les bâ- 
timents du monastère et de recourir pour cet effet à 
la bonté du roi, afin- d'obtenir une partie de terrain 
qui était nécessaire et qui lui fut accordée sur-le- 
champ. 

Saint Ouen rapporte à ce sujet que, ce terrain 
s'étant trouvé excéder d'un pied l'étendue qui avait 
été demandée, saint Éloi fut se jeter aux pieds de Da- 
gobert comme s'il eût été coupable d'un grand crime, 
et que ce prince, étonné d'une probité si rare et si 
scrupuleuse, lui doni^a le double de ce qu'il lui avait 
déjà accordé. Ces terrains occupaient l'espace compris 
entre les rueg aux Fèves, de la Calandre, de la Vieille- 
Draperie et de la Barillerie, ce qui fit donner à cette 
circonscription le nom de Ceinture de Saint-Éloi,,, 
En 871, cette abbaye porta le nom de Saint-Éloi et 
Sainte-Aure, elle renfermait trois cents filles. Au 
commencement du xii® siècle, les religieuses se li- 
vraient sans pudeur aux excès de la débauche et du 
libertinage, sans que les corrections pussent arrêter 
ce désordre qui était devenu public ! 

En 1107, Galon, évéque de Paris, pour rétablir 



DE LA CITÉ DE PARIS. 61 

Tordre, fut obligé de chasser les religieuses de cette 
abbaye et de la donner à Thibaud, abbé de Saint- 
Pierre-des-Fossés ; la grande église, dont une partie 
tombait en ruine, fut séparée en deux par la rue 
Saint-Éloi ; le cbœur forma Téglise Saint-Martial et 
de la nef on fit le couvent des Barnabites, ainsi 
nommé parce que les clercs qu'on y plaça avaient été 
amenés de Saint-Barnabe de Milan, par les ordres de 
Henri IV. Ce couvent, supprimé en 1789, devint pro- 
priété nationale et un fondeur en fit ses ateliers. Il 
servit depuis au dépôt général des comptabilités de 
France. 



RUE DE LA CALANDRE 



La plus ancienne de tout Paris, ce fut la première 
voie tracée parles Gaulois dansLutèce. Elle commen- 
çait à la rue de la Cité, vis-à-vis de celle Saint-Chris- 
tophe, et finissait à la rue de la Barillerie. Elle doit 
son nom, je crois, à une calandre (c'est une grande 
roue pour calandrer le drap) qui était jadis dans cette 
rue. Voici les preuves que j'ai pu trouver dans un 
titre d'échange du mois d'août 1230. Elle n'est dési- 
gnée dans toute son étendue que sous cette dénomi- 
nation générale : rue qui va du Petit-Pont à la place 
Saint" Michel. (Il y avait une petite place nommée 

6 



62 CURIOSITES 

ainsi rue de la Barillerie. ) £!n 1280, elle s'appelait 
rue de la Calandre. 

Dans le censier de Saint-Éloi de 1367, il" est fait 
mention de la maison de Nicolas, le Galandreur (il 
est assez naturel de voir ime calandre près d'une 
rue où demeuraient tous les drapiers de la Cité). Une 
simple tradition veut que saint Marcel soit né dans 
cette rue et dans la cinquième maison à droite, en y 
entrant par la rue de la Cité ; il est vrai que, dans la 
procession solennelle que faisait le chapitre de Notre- 
Dame le jour de T Ascension, il s'arrêtait à cette 
maison ; que dans le registre de cens de Saint-Marcel, 
cette maison figure comme chargée de douze deniers 
parisisde cens, et que l'article porte que saint Marcel 
y était né ; en face de la rue aux Fèves, il y avait un 
passage conduisant de la rue de la Calandre au Mar'- 
ché-Neuf . Ce passage fut ouvert sur les ruines de Saint- 
Germainrle-Vieux et en portait le nom (j'en parlerai à 
Tarticle de la rue du Marché-neuf). Cette rue courbOi 
malpropre, triste et bordée de petites boutiques basses 
et sombres, était occupée par des hôtels garnis. 



RUE SAINT-ÉLOI 

Elle commençait à la rue de Gonstantine et finis- 
sait à la rue de la Calandre. Cette rue fut ouverte sut 



DE LA CITÉ DE PARIS. 63 

une partie de l'église et du monastère bâtis par saint 
Eloi, orfèvre et trésorier du roi Dagobert. Suivant 
un concordat passé entre Philippe le Hardi et Tabbaye 
de Saint-Maur-des-Fossés, en 1280, cette rue s'appe- 
lait alors Savateria; un plan de 1738 l'indique encore 
sous le nom de la Savaterie; elle prit enfin le nom de 
Saint'Éloi, en mémoire du monastère de ce saint. 

Cette rue faisait deux coudes, était des plus tor- 
tueuses et garnie de petites boutiques basses et som- 
bres. En entrant par la rue de[Constantine, on voyait, 
à droite, les restes de l'église des Bamabites, et à 
gauche, entre les n®' 9 et 11 , l'impasse Saint-Martial. 



IMPASSE SAINT-MARTIAL 

Située rue Saint^Éloi, elle fut nommée ainsi parce 
qu'elle conduisait à Tèglise de ce nom. On disait 
ruelle SainP-Martial en 1398, ruelle du Porche^ainlr 
Martial en Wik^ rue Saint-Martial en 1459, q\ impasse 
Saint-Martial en 1722. A l'article du passage des Ban'- 
nabites, on a vu l'origine de Téglise Saint-Martial 
qui, en 1715, tombait en ruine et fut alors entière 
ment démolie. 



64 CURIOSITÉS 



RUE AUX FÈVES 



Commençait à la rue de Gonstantine et finissait à 
la rue de la Calandre; le dernier numéro impair 
était 23, le dernier numéro pair était 20. Les plus 
anciens titres qui mentionnent cette voie publique 
sont des lettres de saint Louis, datées de 1260, par 
lesquelles il cède trente sols de cens sur une maison 
rue aux Febvres, près Saint-Martial; en effet, celte 
rue était alors habitée par des marchands ou fabri- 
cants de draps qu'on nommait Febvres. C'est par 
corruption qu'elle portait de nos jours le nom de rue 
aux Fèves. Elle se continuait autrefois jusqu'au 
Marché-Neuf; mais, en 1458, on prit cette dernière 
partie pour agrandir l'église de Saint-Germain-le- 
Vieux ; on en voyait des traces rue de la Calandre, 
où était une des portes de l'église. C'est là qu'était 
situé le passage Saint-G-ermain-le-Vieux, supprimé 
peu de temps avant la démolition de ce quartier. En- 
viron au milieu de la rue aux Fèves aboutissait l'im- 
passe Saint -Martial, et, en face, était la rue du Four^- 
Basset qui conduisait à la rue de la Cité. 

La rue aux Fèves fut souvent visitée par des cu- 
rieux qui venaient admirer ses vieilles maisons. Dans 
cette rue, au m 4, il y avait une vieille porte cintrée, 



DE LA CITÉ DE PARIS. 65 

ornée de sculptures et d'un blason représentant 
une gerbe et deux béliers. La cave de cette maison 
était de construction ancienne, c'était un des plus 
vieux édifices du vieux Paris. Cette maison, recon- 
struite à différentes époques, était, dit-on, vers 760, 
la chancellerie du roi Pépin et fut longtemps dési- 
gnée sous le nom de la Maison à la Gerbe d'or; en 
1600, elle était déjà occupée par un tonnelier qui 
avait pour enseigne un bas-relief de Jean Goujon , 
représentant la chaste Suzanne entre les deux vieil- 
lards. De père en fils, l'établissement et J'enseigne 
se sont perpétués jusqu'au commencement de 1847. 
A cette époque, je vis encore le tonnelier, appelé 
M« Blanc, et l'enseigne, au-dessus de laquelle était 
écrit ; Fondé en 410, idem en 1600. 



CABARET DU LAPIN BLANC 

Le célèbre roman des Mystères de PariSy par M. Eu- 
gène Sue, avait fait révolution chez les amateurs de 
scènes terribles et mystérieuses; on venait de toutes 
parts dans la vieille rue aux Fèves, dans l'espérance 
d'y contempler le fameux cabaret du Lapin blancy si 
bien décrit dans le roman ci-dessus mentionné. Mais 
quel était le désappointement des curieux en voyant 
qu'il n'existait aucun cabaret de ce nom dans ladite 

6. 



66 CURIOSITÉS 

rue et que les voisins, consultés â ce sujet, répon- 
daient aux questionneurs qu'ils n'avaient jamais en- 
tendu parler du susdit cabaret, qui n'avait iusqu^alors 
existé ^e dans l'imagination du romani 

C'est alors qu*un nommé Mauras, né à Bordeaux 
en 1786, eut l'heureuse idée d'improviser le cabaret 
absent et tant désiré. Il loua le rez-de-chaussée 
de la maison portant le no 6, comme étant propre 
à son projet ; il le meubla selon le texte du roman, 
écrivit des vers de sa façon sur les murailles, fit faire 
des peintures par un rapin, enfuma le local afin de 
lui donner un aspect d'antiquité qui trompa plus d'un 
visiteur. Malgré tous ses soins, 1q débitant d'eau-de-. 
vie et de bière ne faisait qu'un chétif commerce, ce 
qui lui fit sentir la nécessité d'augmenter les récla- 
mes; il fit peindre à l'extérieur une vaste enseigne 
du Lapin blanc avec ces vers qu'il composa : 

Pour un musée, n'allez pas à Versailles, 
Le Lapin blanc vous offre ses murailles 

Couvertes de rimailles 

Et de caricatur ailles 
Qui railles. 

MAURAS, Marchand de vin, n« 6. 

Que fit encore notre rusé cabaretier? Il composa et 
fit imprimer un petit cahier de vers burlesques, avec 
une légende pompeuse sur la fondation supposée du 
Lapin blanc ; il conduisait dans sa cave les personnes 



DE LA CITÉ DE PARIS. 67 

avides de voir l'endroit où s'étaient passées tant 
d'horreurs. Le public mordit à belles dents dans la 
fable qu'on lui raconta, et qui finit par avoir un cré- 
dit tel que quelques-uns soutenaient avoir vu ce ca- 
baret avant 1830. Cette exploitation était en pleine 
prospérité, lorsque la pioche du démolisseur vint 
frapper sur les maisons de la rue aux Fèves; le père 
Mauras fut exproprié et, malgré toutes ses réclama- 
tions, ne put toucher que 7,000 fr. d'indemnité pour 
le reste de son bail. 

M. Mauras vendit tout le matériel de son établisse- 
ment 600 fr. à un marchand de bric-à-brac de la Mon- 
tagne-Sainte-Geneviève, lequel avait l'intention de 
ressusciter le cabaret du Lapin blanc dans une boutique 
de la rue des Amandiers-Sainte-Geneviève, n» 19. 

Ce fut un grand crève-cœur pour le papa Mauras 
de quitter sa boime rue aux Fèves i il fit ses adieux 
aux plus fidèles abonnés de sa maison, qui n'était 
nullement prostituée, comme quelques-uns l'ont 
pensé. Les adieux furent tendres : on porta notre 
tavernier en triomphe à la Montagne-Sainte-Gene- 
viève, au domicile futur du Lapin bkmc; les uns mar- 
chaient en éclaireurs avec des torches, et les autres 
suivaient le cortège, brandissant des rameaux de lau- 
rier ^t criant : vive Mauras! 

Afin d'avoir des notes bien certaines sur l'origine 
de l'installation du Lapin blanc rue aux Fèves, je me 
suis adressé au propriétaire de la maison, M. Lutz, 



68 CURIOSITÉS 

marchand de meubles, quai Saint-Michel, 27, Iccfuel 
a eu la complaisance de me donner à lire le bail de 
son locataire M. Mauras ; ce bail commence le 23 jan- 
vier 1844, à raison de 1,000 fr. de loyer par an, et 
M. Mauras, de qui je tiens une partie des renseigne- 
ments ci-dessus, demeure maintenant rue de la 
Grande-Truanderie, 41. 

Ce que je dois ajouter pour compléter l'exactitude 
de ces détails, c'est que M. Mauras est loin d'être le 
personnage suspect du tapis franc ;c' est ^ au contraire, 
un digne et excellent homme, poli, aimable et estimé 
de tous les habitants de la Cité. 



RUE DES CARGAISONS 

On voyait, rue de la Calandre, entre les n"^* 21 et 23,. 
une petite rue étroite qui se terminait au quai du 
Marché-Neuf, entre les n**» 24 et 26. Le nom de cette 
rue, dont Torigine est incertaine, ne varie que dans 
la manière de récrire : Sauvai l'appelle des Carcuis- 
sons; Gomboust et Bullet, des Caraussons; en 163t>, des 
Carquillons; d'autres, rue des Car caissons, et enfin 
des Cargaisons. Ce nom dérive probablement du «mot 
carguer, charger; en effet, à l'extrémité de cette rue, 
du côté du marché, on chargeait des marchandises. 
Cette rue était sans numéros; sa longueur était de 



DE LA CITÉ DE PARIS. 69 

48 mètres, sa largeur 1 mètre 10 cent. Depuis Van- 
née 1825, elle était fermée aux deux bouts par des 
portes de bois. 



IMPASSE DES CARGAISONS 

Vers le milieu et à l'orient de cette rue, il y avait 
une impasse nommée des Cargaisons , d'environ 
20 mètres de long ; elle était déjà fermée en 1775 par 
une porte dont les locataires seuls avaient la clef. 



RUE DU MARCHÉ-NEUF 

Elle commençait à la rue de la Cité, n^ 58 et 62, 
en face la rue Neuve-Notre-Dame, et finissait au quai 
du Marché-Neuf. Cette rue formait Téquerre ; la pre- 
mière partie prenait de la rue de la Cité jusqu'à la 
maison m 8, qui faisait Tencoignure; la seconde 
tournait à gauche et aboutissait au quai du Marché- 
Neuf. La partie qui prenait naissance à la rue de la 
Cité formait jadis une impasse qui fut convertie en 
rue en 1558 ; elle prit alors le nom Aerue de l'Herberie. 
Deux propriétés, appartenant aux sieurs Ducroc, 
avaient été abattues pour opérer ce dégagement ; les- 
dits sieurs Ducroc n'en furent payés que le 20 mai 



70 CURIOSITÉS 

1 562. En 1 568, elle prit le nom de rue du Marché-Neuf, 
parce qu'on forma à cette époque le marché sur le 
quai, où cette rue aboutissait. 

On confondait encore, avant le mois d'avril 1840, 
sous la seule dénomination de rue du Marché-Neuf, là 
voie publique dont il est question et le quai qui l'a- 
voisinait jusqu'au pont Saint-Michel. Les maisons 
n*** 4, 6 et 8 étaient construites sur l'emplacement de 
l'église Saint-G-ermain-le-Vieux, dont je vais donner 
la description. La rue du Marché-Neuf n'était bordée 
d'un trottoir que du côté du septentrion ; elle avait 
64 mètres de long. Tout le cortège du sacre de 
Napoléon I" passa par cette rue, le 2 décembre 1804, 
pour se rendre à Notre-Dame. 



ÉGLISE SAINT-GERMAIN-LE-VIEUX 

Cette église n'était, dans le principe, qu'une cha- 
pelle baptismale sous la dépendance de Notre-Dame; 
elle portait le titre de Saint-Jean-Baptiste. L^histoire 
fournit des preuves de son existence dès la fin du 
IX* siècle, n est certain aussi qu'elle servit d'asile aux 
reUgieux de Saint-Germain des Prés, à l'époque où 
les incursions des Normands obligèrent ces moines 
à mettre à l'abri, dans Tile de la Cité, le corps de leur 
patron. En reconnaissance de l'hospitalité qu'ils re- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 71 

curent dans cet oratoire, ces religieux laissèrent aux 
prêtres qui le desservaient un bras de saint Germain. 
Alors l'oratoire Saint-Jean-Baptiste prit le titre d'é- 
glise SainUGermairhle-Vieux à cause de cette relique; 
on disait Saint'Germain'le'VieiL 

Les savants ont beaucoup discuté sur Tétymologie 
douteuse de ce titre de Saint-Germain-le-Vieux; l'opi- 
nion la plus vraisemblable est celle d'Adrien de Valois, 
qui fut également adoptée par Jaillot ; il dit : « C'était 
une tradition reçue que saint Germain, évêque de 
Paris, s'y était retiré au vi® siècle. C'en était assez 
pour faire considérer cette chapelle comme la plus an- 
cienne, comme antérieure aux deux églises connues 
sous le même nom, et pour lui donner le surnom de 
vieux, qui d'ailleurs était nécessaire pour la distin- 
guer de Saint:Germaitirl6''Neuf.n En 1368, l'abbaye 
de Saint-Germain des Prés céda à l'Université les 
droits qu'elle possédait sur cette petite église, qui 
fut agrandie en 1458. Le portail et le clocher ne da- 
taient que de 1560. Supprimée en 1790, elle fut ven- 
due le 12 fructidor an IV, et démolie peu de temps 
après. Sur son terrain on bâtit les maisons n*** 4, 6 
et 8; dans cette dernière, on ouvrit un passage qu'on 
nommait passage Saint-Germainrle-Viev^. Ce passage 
était supprimé depuis quelques années ; il y a quel- 
ques mois, avant la démolition de ce quartier, on 
voyait encore, dans la cour de la maison n° 8, des 
restes de l'égUse Saint-Germain-le-Vieux. 



72 CURIOSITÉS 



RUE DE LA PELLETERIE 

Commence à la rue de la Cité n° 2, finit à la rue de 
la Barillerie n* 1. Au xii® siècle, elle était occupée 
par les juifs, et, après leur expulsion, Philippe-Au- 
guste, par des lettres de 1183, donna, moyennant 
73 livres de cens, dix-huit de leurs maisons aux pel- 
letiers, qui s'y établirent et lui donnèrent leur nom. 

Dans cette rue, il y avait quatre ruelles conduisant 
à la rivière. Dans la première, du côté du pont Notre- 
Dame, étaient les étuves des juifs; la seconde et la 
troisième étaient désignées sous le nom général de 
ruelles allant à la Seine; la quatrième, qui existait 
encore en 1775, se nommait rue du Port-aux-CEufs. 

La rue de la Pelleterie n'est séparée du marché aux 
Fleurs que par une inégalité de terrain, car il faut 
descendre deux degrés pour se trouver dans la rue 
de la Pelleterie, qui a 145 mètres de longueur. Au 
n® 19 était le passage de Flores conduisant rue de Con- 
stantine. Le dernier numéro impair est 23; pas de 
numéros pairs, ce côté est bordé par le marché aux 
Fleurs. 



RUE DU MARCHÉ-AUX-FLEURS 



Elle commençait à la rue de la Pelleterie n^ 13 



DE LA CITÉ DE PARIS, 73 

et 15, finissait à la rue de Gonstantine. Cette rue 
prenait son nom du marché aux Fleurs qui Tavoisi- 
nait. Elle fut ouverte sur une partie de l'emplacement 
de l'église Saint-Pierre-des-Arcis et sur le terrain du 
cul-de-sac Saint-Barthélémy, conduisant de la rue 
de la Vieille-Draperie (Gonstantine), à la moitié de la 
rue du Marché-aux-Fleurs. Ge cul-de-sac, qui fut 
d'abord une rue, séparait Téglise Saint-Barthélémy 
de celle de Saint-Pierre-des-Arcis, et se nommait rue 
des Cordouagners. 



RUE DES C0RD0UAGNER8 



Elle fut bouchée en 1315 : ce nom se perdit dans 
la suite, et on l'indiquait simplement sous celui de 
Ruelle du Prieuré, ruelle par où ton va à Notre-^Dame- 
deS'Voûtes. 



NOTRE-DA M E-^DES^ VOUTES 

Cette chapelle était au chevet de Téglise Saint- 
Barthélémy, et l'on y entrait par la ruelle du Prieuré : 
la chapelle fut plus tard comprise dans Téglise , et, 
depuis 1525, a été appelée Notre-Dame de la Fontairi^. 



74 CURIOSITÉS DE LA CITÉ DE PARIS. 

La longueur de la rue du Marché-aux-Fleurs était de 
47 mètres. Le dernier numéro impair était 5, le der- 
nier pair 6. (Je laisse ces indications comme souvenir, 
puisque la rue est entièrement supprimée.) 



ÉGLISE SAINT-PIERRE-DES-ARCIS 



Elle était située au coin oriental de la rue du 
Marché-aux-Fleurs et de la rue de Conslantine. 
En 640, il existait à cet endroit une chapelle appelée 
Saint- Pierre, fondée par Dagohert I". Theudon, 
vicomte de Paris, fit abattre la chapelle ruinée pour 
fonder une église, qu'il fit bâtir en 926. Elle prit le 
nom de Saint-Pierre-des-Arcis (arceaux ou arcades), 
et fut détruite dans Tincendie de 1034. On la rebâtit 
près de la clôture de Saint-Eloi; elle était paroisse en 
11 29. En 1424, elle fut de nouveau rebâtie; en 1702, 
réparée et augmentée , et démolie définitivement en 
1800. Sur son emplacement, on ouvrit la rue du 
Marché-aux-Fleurs. 



CHAPITKE V 



RUE GERVAIS-LAURENT 

Commence à la rue de la Cité, r" 6 et 8, unit à la 
rue du Marché-aux-Fleurs, n"' 1 et 3. 

En 1248, OD la nommait dîcus GervaitnLoorandi;eii 
1313, rue Gervèse Lorens. On a dît depuis Gervaîs 
Lawrenl, et ce nom s'est conservé jusqu'à présent. 
Cette rue, changée de sexe, n'a rien de surprenant, 



76 CURIOSITÉS 

car nous avons en échange beaucoup de rues fémi- 
nisées ; je citerai pour exemple : la rue CoquUlier, on 
dit Coquillière; Poissonnier , on dit Poissonnière; Vi- 
vien, on dit Vivienne; de la Grange Batelier, on dit 
de la Grange- Batelière , etc., etc.. La rue Gervais- 
Laurent n*a rien de remarquable; elle est occupée 
en partie par des tanneurs et des teinturiers. 



RUÉ SAINTE-CROIX 



Commence à la rue de Constantine et finit rue 
Gervais-Laurent. Bâtie au xn* siècle, on la nommait 
petite rue Sainte-Croix, ruelle Sainte-Croix et rue Sainte- 
Croix, Elle avait autrefois 2 mètres dans sa plus 
grande largeur; elle est aujourd'hui garnie de trot- 
toirs. Son nom lui vient de l'église Sainte-Croix, 
qu'on voyait encore au commencement de la révo- 
lution de 1789. 



ÉGLISE SAINTE-CROIX 



Elle était située rue de Constantine, au coin orien- 
tal de la rue Sainte-Croix. La véritable origine de 
cette église n'est pas bien connue. L'opinion la plus 



DE LA CITÉ DE PARIS. 77 

probable et la plus répandue est que cette chapelle 
pouvait servir à rinfirmerie des religieuses de Saint- 
Eloi, dès le vu® siècle ; que ce monastère ayant été 
donné à Tévêque de Paris, la chapelle de Sainte- 
Croix en fut détachée, rebâtie plus loin et hors de la 
ceinture de Saint-Eloi, et qu'au milieu du xn** siècle, 
la dévotion de saint Hildevert s'étant introduite à 
Paris, cette chapelle lui fut dédiée, et Tinfirmerie 
changée en un hôpital pour ceux qui étaient attaqués 
du mal caduc ou de la frénésie. Les cris de ces ma- 
lades obligèrent de les transférer à Saint-Laurent, où 
Ton érigea une chapelle sous le nom de Saint-Hilde- 
vert, L*é^lise Sainte-Croix reprit alors son premier 
nom, et fut érigée en paroisse en 1107. Etant devenue 
trop petite pour la population, les marguilliers, en 
1450, achetèrent la maison de Hugues Guillemaux, 
marchand de vin, pour agrandir la nef et le chœur, 
qui ne fut achevé qu'en 1 529. 

Dans une bulle d'Innocent II , du 20 février 1136, 
elle est qualifiée d'église. Elle fut supprimée en 1790. 
Le 2 mars 1792, elle fut vendue comme propriété 
nationale, et démolie en 1797. Sur son emplacement 
on construisit une maison particulière. 

On a longtemps conservé dans cette égUse un 
morceau de la vraie croix et une épine de la cou- 
ronne. 



7. 



78 CURIOSITES 



RUE DE CONSTANTINE 



Elle commence à la rue d'Ârcole et ânit à la place 
du Palais-de-Justice. Cette rue, bâtie vers 1843, a 
remplacé la rue de la Vieille-Draperie; voici comment. 
Cette rue de la Vieille-Draperie était une des plus an- 
ciennes de la Cité. Elle faisait face au Palais-de- Justice, 
et se prolongeait jusqu'à la rue de la Cité. Elle était 
habitée, en partie, par des Juifs, et lorsqu'ils en 
furent chassés en 1183, Philippe- Auguste y établit 
des drapiers, auxquels il donna vingt-quatre mai- 
sons, moyennant 100 livres de rente. C'est ce qui lui 
fit donner le nom de Judxaria panniftcorum. En 1 293, 
on rappelait laDraperiCy et en 1313, ^ Viez Draperie. 
Sur un plan de Saint- Victor, elle est indiquée sous 
le nom de la Verrerie ; tous les titres du xv* siècle la 
nomment rue de la Vieille-Draperie, Elle fut élargie 
du côté de celle de la Cité, vers 1620; elle Ta été 
aussi à l'autre extrémité, en 1673. 

LouisXVl avait ordonné, le 3 juin 1787, qu'il serait 
formé, en face de la grille de la cour du May, et ser- 
vant d'entrée principale au Palais de Paris, une place 
demi-circulaire ayant 19 toises, au milieu de laquelle 
il sera ouvert une rue de 42 pieds de largeur qui 
sera substituée à celle dite de la Vieille-Draperie, et 



DE LA CITÉ DE PARIS. 79 

sera prolongée jusqu'à la rue de la Juiverie (aujour- 
d'hui rue de la Cité). Cet élargissement ne fut exé- 
cuté que jusqu'à la rue Saint-Éloi, et la nouvelle 
rue conserva le non! de la Vieille-Draperie. Sous la 
République, on projeta de la continuer jusqu'au pont 
de la Cité; ce projet ne fut point exécuté. 

En vertu d'une ordonnance royale du 15 juin 1838, 
le préfet de la Seine a été autorisé, au nom de la 
ville de Paris, à faire ouvrir une nouvelle rue sur 
l'emplacement de celle de la Vieille-Draperie, dans 
l'axe du Palais-de-Justice, pour communiquer à la 
rue d'Arcole. Ces travaux terminés formèrent la rue 
de Coiistantine, qui est une des plus belles de la Cité. 
Son nom lui vient de la prise de Constantine par les 
Français, en Afrique. 



RUE DE LA CITÉ 

Elle commence aux rues du Haut-Moulio, n® 13, et 
de la Pelleterie, ii° 1, finit au Petit-Pont. Le dernier 
numéro impair est 51 , le dernier pair 76. Sa longueur 
est de 232 mètres. 

La rue de la Cité a remplacé trois rues qui for- 
maient à elles trois une ligne droite. Les rues de la 
Lanterne, de la Juiverie et du Marché'-Palu : voici l'ori- 
gine de chacune d'elles. 



80 CURIOSITES 



RUE DE LA LANTERNE 

Commençait à la rue de la Pelleterie et finissait 
à celle des Marmousets. 

On la désignait anciennement sous les noms de 
place Saint-Denis de la Chartre^ place devant la Croix- 
Saint-Denis et place devant Véglise Saint-Denis de^la 
Chartre; on la nommait aussi rue de la Jusrie. On la 
désignait également sous la dénomination de ru^ du 
Pont-Notre-Dame, parce qu'elle conduisait directement 
au pont ainsi appelé : dès Tannée 1326, elle avait pris 
d'une enseigne le nom de la Lanterne. A Tenlrée de 
cette rue, sur la petite place qui fait face au quai aux 
Fleurs était l'église Saint-Denis de la Chartre. 



RUE DE LA jUIVERIE 

Elle continuait la rue de la Lanterne depuis la rue 
des Marmousets, où nous l'avons laissée, jusqu'à la 
rue de la Calandre. La rue de la Juiverie était ainsi 
nommée parce qu'elle était habitée, au xii® siècle, par 
des Juifs, en horreur au peuple, exposés sans cesse 
à des avanies; les Juifs servaient de jouet à l'avarice 



DE LA CITÉ DE PARIS. 81 

des princes, qui les chassaient de leur territoire pour 
leur prendre leurs biens, et les rappelaient pour les 
pressurer plus tard. Les plus riches demeuraient 
dans les raes de la Pelleterie, de la Tixeranderie, et 
surtout dans la rue de la Juiverie; leurs artisans, 
leurs fripiers, occupaient les halles ou les rues mal- 
saines qui y aboutissaient. 

Ils avaient leurs écoles dans les rues Saint-Bon et 
de la Tacherie, leur synagogue 4tait située dans la 
rue du Pet-au-Diable. Il ne leur était pas permis de 
paraître en public sans une marque jaune sur Tes- 
tomac : Philippe le Hardi les obligea même à porter 
une corne sur la tête. Défense leur était faite de se 
baigner dans la Seine, et quand on leur faisait l'hon- 
neur de les pendrey c'était toujours entre deux chiens 
qu'on mettait le patient. 

Sous le règne de Philippe le Bel, leur commimauté 
s'appelait Societa Caponum, d'où provient sans doute 
Tépithète injurieuse de capon. 

Il y avait dans la rue de la Juiverie un marché au 
blé qu^on appelait la haUe de Beauce. Philippe-Auguste 
la donna à son échanson, qui la céda à Philippe de 
Convers, chanoine de Notre-Dame. 



82 CURIOSITES 



CABARET DE LA POMME-DE-PrN 



Rappelez-vous bien la maison qui faisait le coin de 
la rue de Constanline, à gauche en entrant par la rue 
de la Cité, où était encore, il y a peu de temps, un 
marchand de viD;*là était le fameux cabaret de la 
Pomme-de-Piriy que Rabelais comptait parmi « les 
tavernes méritoires où couponisaient joyeusement 
les écoliers de la Cité. » 

La Pomme-de-Pin, qui était tombée en décadence 
à l'époque où écrivait le satirique Régnier, reprit sa 
splendeur sous Louis XIV, sous les auspices du grand 
Crénet. Ses tables, peu magnifiques, fort chargées de 
bouteilles, furent souvent fréquentées par les grands 
génies de l'époque; c'est là que Chapelle enivrait 
Boileau, 

Et répandait sa lampe à Thuile 
Pour lui mettre un verre à la main. 

Les quatre plus grands poêles du siècle de 
Louis XIV, Molière, Racine, Boileau et La Fontaine, 
ont vécu longtemps dans l'intimité la plus étroite ; 
une fois par semaine ils se rassemblaient au fameux 



« 



DE LA CITÉ DE PARIS. 83 

cabaret de la Pomme-de-Pin, où se rendaient aussi 
LuUy, Mignard et Dufresnois. 

Chapelle, un des coryphées modernes de la secte 
épicurienne; les frères Brossin, connus par leur 
amour pour la bonne chère ; le conseiller Brilhac et 
plusieurs autres personnages de distinction avaient 
aussi à la même époque fondé un dîner hebdomadaire 
à la Pomme-de-Pin. 

On peut se faire une idée de ce cabaret en son- 
geant que les Plaideurs et le Chapelain décoiffé furent 
en grande partie composés dans ces joyeux repas. 
Que d'esprit s'est dépensé dans cette obscure ta- 
verne !... 



ÉGLISE DE LA MADELEINE 



L'église de la Madeleine avait remplacé une syna- 
gogue, ainsi que le constatent les lettres d'Eudes de 
Sully, évêque de Paris, en 1205. Elle jouissait du 
titre d'égUse archipresbytérale. 

Supprimée en 1790, elle devint propriété nationale, 
fut vendue le 21 août 1793 ; en 1794, elle fut démolie 
et sur son emplacement on ouvrit un passage. 



84 CURIOSITES 



PASSAGE DE LA MADELEINE 



Il communiquait de la rue de la Licorne à la rue de 
la Cité, entre les n°M9 et 21. 

Le passage de la Madeleine a été confondu dans le 
percement de la rue de Conslantine. 

Il nous reste encore à parcourir la troisième partie 
de la rue de la Cité, gui se nommait rvs du Marché- 
Palu. 



RUE DU MARCHÉ-PALU 

Elle continuait la rue de la Juiverie jusqu'au Petit- 
Pont; elle dut ce nom, qu'elle porta dès le xije siècle, 
au marché aux légumes et aux grains qu'on y voyait 
de temps immémorial ; ce marché était au carrefour 
que formaient les rues de la Juiverie, Neuve-Notre- 
Dame, de la Calandre et du Marché-Palu. 

Son surnom de Palu lui venait de l'humidité de son 
emplacement^ qui resta longtemps sans être pavé. 
Dans cette rue était autrefois l'entrée principale de 
r Hôtel-Dieu, laquelle fut supprimée en 1804. 

Le 13 mai 1834, sur la demande des propriétaires, 



DE LA CITÉ DE PARIS. 85 

le miolstre de Tintérieur décida que ces trois voies 
publiques prendraient la seule et même dénomination 
de rue de la Cité* 



RUE DES SABLONS 

Entre les bâtiments de THôtel-Dieu et la rue 
Neuve-Notre-Dame, il y avait la ruelle des Sablons, 
qui conduisait au Parvis avant le percement de la rue 
Neuve*Notre-Dame et la construction de la cathédrale 
actuelle. 



RUE NEUVE-NOTRE-DAME 

Elle commence au parvis Notre-Dame, finit à la 
rue de la Cité ; pas de numéros impairs, ce côté est 
bordé par le jardin de THô tel-Dieu. 

Maurice de Sully, évêque de Paris, ne trouvant 
pas la rue des Sablons assez commode pour se rendre 
à la cathédrale, qu'il venait de faire reconstruire, 
voulut avoir une voie qui pût y conduira plus direc- 
tement; à cet effet, il acheta quelques maisons voi- 
sines de celles qui lui appartenaient, et sur leur em- 
placement fit percer, en 1163, une rue qui dès lors 

8 






86 CURIOSITÉS 

prit le nom de rue Neuve, qu'elle portait encore en 
1250 : on y ajouta, au xni* siècle, celui àeNotre-Dame, 
Au mois de brumaire an II, la section de la Cité lui 
donna le nom de rue de la Raison, qu'elle porta peu 
de temps ; elle reprit ensuite celui de rue Neuve-Notre- 
Dame, qu'elle a conservé jusqu'à présent. 

Il y avait anciennement quatre rues qui aboutis- 
saient de la rue Neuve-Notre-Dame à celle Saint- 
Christophe, et qui ne subsistent plus. 

La première, du côté de la rue de la Cité, formait 
une impasse appelée de Jérusalem, sans que j'en aie 
pu découvrir la raison. 

La seconde se nommait, au xni** siècle, rue à Couf 
Ions ou aux Coulons. Elle existait encore en 1434, sous 
le nom de rue du Coulon (pigeon). 

La troisième s'appelait rus des Dix-Huit, à cause 
d'un collège qui fut réuni à cette rue. Elle prit enfin 
la dénomination de rue de Venise; ce nom lui venait 
d'une enseigne à VÈcu de Venise. 

La quatrième a porté le nom de ruelle Saint-Chris- 
tophe, puis celui de rue du Parvis; on Ta nommée 
depuis rue de la Huchette, d'une maison ainsi appelée 
qui faisait le coin de cette rue et de celle de Saint- 
Christophe. Cette maison fut détruite en 1437 et son 
emplacement donné à l'Hôtel-Dieu. 

Ces trois dernières rues ont été comprises dans 
Tagrandissement de la place du Parvis, et dans les 
bâtiments des Enfants-Trouvés; on a aussi renfermé 



DE LA CITÉ DE PARIS. 87 

dans ces derniers le terrain sur lequel s'élevait l'é- 
glise Sainte-Geneviève-des-ArdentSy dont je vais parler. 



ÉGLISE SAINTE-GENEVIÈVE-DES-ARDENTS 



On ignore l'origine de cette chapelle qui était 
située près de la place du Parvis, au coin de la rue 
Neuve-Notre-Dame. On la désignait sous le nom -de 
chapelle Sainte- Geneviève de la Cité ou Sainte-Geneviève- 
la-Petite pour la distinguer de la grande Sainte-Gene^ 
viève du Mont, 

En 1129, la ville de Paris et ses environs se virent 
en proie à une maladie cruelle nommée le mal des 
ardents ; ayant reconnu l'inutilité des remèdes hu- 
mains, on eut recours aux jeûnes, aux prières et 
spécialement à l'intercession de sainte Geneviève; 
sa châsse fut portée solennellement à la cathédrale ; 
la nef et le parvis étaient pleins de malades qui, en 
passant sous ces saintes reliques, furent guéris à 
l'instant, à la réserve de trois, dont l'incrédulité ne 
servit qu'à rehausser la gloire de cette sainte patronne 
de Paris. Le pape Innocent 11, qui vint en cette ville 
en 11 31 , ayant fait vérifier ce miracle, ordonna qu'on 
en célébrerait la fête tous les ans le 26 novembre. 

Ce ne fat qu'en 1518 que, pour la première fois, 



88 CURIOSITÉS DE LA CITÉ DE PARIS. 

cette chapelle reçut le nom de chapelle Sainte^Gene- 
viève-des-Ardents. 

L'abbé Lebeuf soutient que le récit du miracle des 
ardents n'est appuyé sur aucune autorité digne de 
foi ; ce savant pense que cette fable fut imaginée par 
un curé professeur en théologie nommé Geoffroy 
Boussart. Cette église fut démolie, en 1747, pour 
faire place à Tédifice des Enfants-Trouvés. 

Avant la construction de la rue Neuve-Notre-Dame, 
on parvenait à cette chapelle par ime ruelle donnant 
rue Saint-Christophe. Tous ces terrains sont occupés 
aujourd'hui par les bureaux de l'administration des 
hôpitaux et hospices civils de Paris. 



CHAPITRE VI 



RUE SAINT-CHRISTOPHE 

Commence au parvis Notre-Dame, près de la rue 
d'Arcole, finit  la rue de la Cité. 

La rue Saint-Christophe portait le nom de ia 
Begraterie, par allusion aux regratiers qui rempla- 
çaient, sous Louis IX, les fruitiers et les épiciers; 
deux genres de commerce qui n'existaient pas sépa- 



90 CURIOSITÉS 

rément. Vers l'an 1300, on l'appelait la grand'rue 
Saint-Christophe pour la distinguer d'une ruelle du 
même nom, dont j'ai parlé à l'article de la rue Neuves- 
Nôtre -Dame; au bout de la rue Saint-Christophe 
était une église qui donna son nom à la rue dont je 
viens de parler. 



ÉGLISE SAINT-CHRISTOPHE 



Cette petite église était située rue Saint-Christophe, 
en face la rue des Trois-Canettes. 

La charte, ou testament de Vandemir, datée de 
Tan 690, contient une donation en faveur de cet 
établissement qui s'y trouve qualifié de monastère de 
filles, duquel Landetrude était l'abbesse. On ne sait 
rien sur les religieuses de ce monastère, mais on sait 
qu'au ix* siècle cet établissement était converti en 
hôpital; au xii« siècle, la petite église Saint-Chris- 
tophe fut érigée en paroisse. 

Entre les années 1494 et 1510, les bâtiments furent 
rebâtis; lorsqu en 1747 on construisit la maison des 
Enfants-Trouvés, on sacrifia à ce nouvel édifice l'é- 
glise Saint-Christophe, qui fut alors démolie. 



DE LA CITE DE PARIS. 91 



ENFANTS-TROUVÉS 



Une des obligations des seigneurs féodaux était de 
nourrir les enfants trouvés ; Tévêque de Paris s'ac- 
quitta de cette obligation en destinant à ces enfants 
une maison située près du port Saint-Landry qu'on 
nomma la maison de la Couche. 11 était dans Tusage 
de faire exposer à l'intérieur de son église un vaste 
berceau où l'on plaçait quelques-uns de ces enfants, 
afin d attirer les libéralités publiques et de diminuer 
les dépenses qu'il faisait pour eux. 

Sans doute ees enfants étaient fort mal soignés, 
puisqu'une dame veuve, touchée de leur malheureux 
état, se chargea de les recevoir dans sa maison, située 
près de celle de la Couche. 

Le zèle très-louable de cette dame se refroidit 
bientôt; le sort des enfants trouvés ne fut pas meil- 
leur et devint peut-être pire. Ses servantes, lassées 
des peines que leur donnaient ces enfants, ennuyées 
de leurs cris, en firent un objet de commerce. Elles 
vendaient ces nouveau-nés à des mendiantes, qui 
s'en servaient pour émouvoir la sensibilité du public 
et s'attirer des aumônes. Elles en vendaient à des 
nourrices pour remplacer leurs nourrissons morts, et 
ainsi des enfants étrangers étaient, par cette super- 



92 CURIOSITÉS 

chérie, introduits dans plusieurs familles. Elles en 
vendaient à ceux qui, adonnés à la magie, se servaient 
de ces enfants, et les sacrifiaient dans des opérations 
fort absurdes et encore plus criminelles. 

Des abus aussi révoltants furent enfin connus, on 
cessa d'envoyer les enfants trouvés dans la maison 
de cette dame. 

Un homme célèbre par son zèle et sa bienfaisance, 
Vincent de Paul, touché de leur sort, parvint, en 
1638, à établir près de la porte Saint-Victor un nouvel 
hospice, où ils restèrent jusqu'en 1648, époque où 
on leur donna pour logement le château de Bicêtre. 

Les administrateurs, sentant la nécessité d'avoir 
un autre établissement au centre de la ville, ache- 
tèrent dans la Cité trois petites maisons, les firent 
réparer suivant leurs besoins, et y établirent une 
chapelle, située au bout de la rue Saint-Christophe, 
place du Parvis, en face de l'endroit où Ton ouvrit 
en 1837 la rue d'Arcole. Ces bâtiments ont subsisté 
jusqu'en 1747, époque à laquelle ils furent démolis, 
ainsi que les églises Saint-Christophe et Sainte-Gene- 
viéve-des- Ardents. 

Ces démolitions dégagèrent et agrandirent le parvis 
Notre-Dame. Aujourd'hui , l'hôpital des Enfants- 
Trouvés est rue du Faubourg-Saint- Antoine, n®" 124 
et 126. 



DE LA CITÉ DE PARIS. 03 



RUE DE LA LICORNE 

Elle commence à la rue des Marmousets, n** 29 
et 31, finit à la rue Saint-Christophe, n*" 14 et 16. On 
l'appelait, en 1269, rue près le chevet de la Madeleine y 
parce qu'elle passait derrière Téglise de ce nom. 

En 1300, et même avant, elle était désignée sous 
le nom de as Oubloyers, oublieurs, en raison des pâ- 
tissiers ou faiseurs d'oubliés qui y demeuraient 
alors. 

Voici la direction qu'avait cette rue des Oublieurs : 
elle allait de la rue Saint - Christophe dans celle 
des Marmousets, faisait le coude, tournait à gauche 
jusqu'à la rue de la Juiverie (de la Cité); la rue des 
Marmousets s'arrêtait à ce coude et ne. donnait pas 
alors rue de la Juiverie. L'église de la Madeleine fai- 
sait face à la rue de la Juiverie, et le chevet se trouvait 
daiis la rue de la Licorne. Voici comment se fit le 
changement de ce nom : 

Sur le flanc méridional de Téglise de la Madeleine, 
il y avait une ruelle qui partait de la rue de la Juive- 
rie pour aboutir rue des Oublieurs ; dans cette ruelle, 
il y avait une maison de Laurent Fromentin où pen- 
dait une enseigne de la Licorne ; la ruelle prit le nom 
de rue de la Licomey et, vers 1397, on condamna la 



94 CURIOSITÉS 

petite rae de la Licorne et on donna son nom à la rue 
des Oublieurs à laquelle elle aboutissait. 

La rue des Marmousets a hérité du bout gui donne 
dans la rue de la Cité, et la rue de la Licorne forme 
une ligne droite de la rue Saint-Christophe à celle des 
Mannousets. Sa longueur est de 98 mètres, le dernier 
numéro impair est 17 et le dernier pair 20. 



RUE DES TROIS-CANETTES 



A côté de la rue d'Arcole, place du Parvis, cette 
petite rue étroite, c'est la rue des Trois-Canettes ; elle 
finit à la rue de la Licorne. 

Cette rue a reçu du peuple le nom de rue de V Homme- 
Sauvage, probablement d'une enseigne. Une autre 
enseigne lui fit donner, en 1300, celui de rue de la 
Pomme; en 1480, rue de la Pomme-Rouge; elle doit sa 
dénomination à trois maisons, dites les grandes et 
petites Canettes. 

Cette rue, qui forme Téquerre, est sale et mal 
pavée. Sa longueur est de 90 mètres, sa moindre 
largeur de 1 mètre 20 cent. , sa plus grande de 5 mè- 
tres, le dernier numéro impair est 17 et le dernier 
pair 6. 



DE LA UITÉ DE PARIS. 95 



RUE DU FOUR-BASSET 

Rue de la Cité, presque en face de la rue Saint- 
Christophe, était la rue du Four^Basset, ainsi nommée 
à cause d'un four public qui y était et qui appartenait 
à la communautée de Saint-Martial. 

Cette rue communiquait de la rue de la Juiverie à 
la rue aux Fèves. En 1300, on la nommait la Petite-- 
Orberie, en 1313, le Four-Basset. On n y passait plus 
en 1775, et plus tard, on bâtit sur son terrain. 



RUE DE PERPIGNAN 

Commence à la rue des Marmousets, n°* 19 et 21, 
finit à la rue des Trois-Canettes, n» 4. 

En 1203, elle est énoncée Domus in C/ierawn{?); en- 
suite rvs Charauri, on Tappela aussi rue de Champro- 
sai,en 1399; ruelle de Pampignon,en 1495, et en 1520, 
rus de Perpignan. Le nom de Perpignan vient de celui 
d'un jeu de paume qui s'y trouvait au commencement 
du XVI* siècle. 

Cette voie a été divisée en deux par la rue de 
Constantine. 



96 CURIOSITÉS 

La rue de Perpignan a peu d'apparence : elle a 
57 mètres de longueur; le dernier numéro impair 
est il, le dernier pair 12. 



RUE COCATRIX 

Commence à la rue deConstantine, n*» 3lBt 5, finit 
à la rue des Trois -Canettes ; le dernier numéro im- 
pair est il, le dernier pair 16. 

Cocatrix est le nom d'une famille fort connue au 
xin® siècle, qui y demeurait, et du fief qui lui ap- 
partenait ; il était situé entre la rue d'Arcole et celle 
des Deux-Hermites ; Corrozet la nomme rue du Co- 
catrix. Voici la direction qh'avait autrefois cette rue. 

Elle partait de la rue des Trois -Canettes pour 
arriver au point où elle est aujourd'hui ; de là, elle 
tournait obliquement à droite jusqu'à la rue des 
Deux-Hermites (plus longue alors), puis elle tournait 
encore à droite et allait aboutir juste en face l'impasse 
Sainte-Marine (voyez ce nom), dont elle était séparée 
par la rue Saint-Pierre-aux-Bœufs (aujourd'hui rue 
d'Arcole). 

La rue Cocatrix a 32 mètres de longueur. 



DE LA CITE DE PARIS. 97 



RUE DES MARMOUSETS 



Elle commence aux rues Ghanoinesse, n^ 1 1 , et de la 
Colombe, n** 10, finit à la rue de la Cité, n»" 15 et 17. 

Elle doit son nom à une grande maison nommée 
V Hôtel desMarmouzets, qui y était en 1206. Guillot la 
nomme duMarmouzet; le rôle de taxes de 1313, des 
Marmozets; la liste des rues dii xv« siècle, des Mar- 
mouzettes; Corrozet et tous ceux qui Tout suivi, des 
Marmouzets. On appelle marmousets de petites figures 
grotesques sculptées sur le portail des églises an- 
ciennes. De pareils ornements faisaient la décoration 
de rhôtel dont nous parlons, et lui firent donner le 
nom de Marmouzets. 

La rue des Marmousets ne portait autrefois ce nom 
que jusqu^à la rue de la Licorne. Le bout qui donne 
dans la rue de la Cité faisait partie de la rvs des 
Oublieurs (V. rue de la Licorne). On lit le fait sui- 
vant dans le Traité de la police : « Ceux d'entre 

• nous, dit le commissaire de la Mare, «qui ont vu le 
« commencement da règne de Louis XIV, se souvien- 
« nent encore que les rues de Paris étaient si remplies 
« de fange, que la nécessité avait introduit Tusage de 

• ne sortir qu'en bottes ; et quant à Tinfection que 
« cela causait dans Tair, le sieur Courtois, médecin, 



98 CURIOSITÉS 

qui demeurait rue des Marmousets, a fait cette 
petite expérience, par laquelle on jugera du reste. 
Il avait dans sa salle, sur la rue, de gros chenets à 
pommes de cuivre, et il a dit plusieurs fois aux 
magistrats, ses amis, que tous les matins il les 
trouvait couverts d'une teinture de vert- de-gris 
assez épaisse , qu'il faisait nettoyer pour faire 
l'expérience le jour suivant, et que depuis Tannée 
1663, que la police du nettoiement des rues a été 
établie, ces taches n'avaient plus paru. Il en tirait 
cette conséquence que Tair corrompu que nous 
respirons fait d'autant plus d'impressions malignes 
sur les poumons et sur les viscères, que ces parties 
sont incomparablement plus délicates que le cuivre, 
et que c'était la cause immédiate de plusieurs 
maladies. » 

Chacun raconte à sa fantaisie une vieille aventure, 
arrivée en cette rue et en cet hôtel des Marmousets : 
Vers 1436, sous Charles Vil, un barbier juif et un 
pâtissier étaient voisins ; la cave de l'un donnait dans 
celle de l'autre . Ce rapprochement fit concevoir une 
horrible pensée au pâtissier, il en fit part à son voisin 
qui trouva la chose à son gré : ils pratiquèrent donc 
une trappe dans la boutique du barbier, et lorsque 
quelqu'un venait se faire raser, le barbier le plaçait 
sur la trappe, lui portait un coup de rasoir à la gorge 
et le poussait dans la cave où le pâtissier, qui atten- 
dait le signal, se jetait sur la victime, et, armé d'un 



DE LA CITÉ DE PARIS. 99 

couteau, l'achevait le plus vite possible, afin d'éviter 
les cris du malheureux, le dépouillait ensuite de ses 
vêtements, de son argent, et le dépeçait pour faire 
des pâtés de sa chair. 

Tn soir, des cris perçants sortirent du laboratoire 
du barbier, chez lequel on avait vu entrer un écolier 
allemand, qui se traîna sur le seuil, tout sanglant; il 
raconta que sentant le barbier lui porter un coup de 
son rasoir, il le saisit à la gorge et le précipita dans 
une trappe ouverte qui attendait une autre victime : 
la foule entra et vit la trappe refermée ; quand on des- 
cendit dans la cave commune aux deux boutiques, on 
surprit le pâtissier occupé à dépecer le corps de son 
complice qu'il n'avait pas reconnu en l'égorgeant; 
c'est ainsi qu'il composait ses pâtés, « meilleurs que 
les autres, dit le père Dubreuil, d'autant plus que la 
chair de l'homme est plus délicate à cause de la 
nourriture. • 

La maison fut abattue, et on éleva à sa place une py- 
ramide expiatoire en mémoire *de cet horrible forfait. 

Plus de cent ans après Tévénement, la place vide 
appartenait à Pierre Belut, conseiller au Parlement, 
qui obtint de François I*', en janvier 1 536, la permis- 
sion de faire rebâtir sur l'emplacement que cette mai- 
son avait occupé. Je ne sais pas jusqu'à quel point on 
doit croire à cette anecdote ; mais en voici une autre 
sur le même sujet, racontée par le chevalier du Cou- 
dray : 



100 CURIOSITÉS 

Un particTilier, portant un présent de deux cha- 
pons, fut de grand matin voir son rapporteur; il se 
fit raser dans la boutique du barbier juif, vis-à-vis 
celle du pâtissier. Ce malheureux lui coupe la gorge, 
et son corps tombe dans la cave par une trappe faite 
en bascule. La femme de ce particulier, ne voyant pas 
revenir son mari, va chez le rapporteur et aperçoit 
dans la rue des Marmousets son chien qui la flatte et 
qui ne veut point la suivre; on commença à soupçon- 
ner quelque chose, on fit chercher le commissaire 
qui vint chez le barbier juif. Après plusieurs perqui- 
sitions, on trouva dans sa cave, avec un tas énorme 
d'os amoncelés les uns sur les autres, le cadavre de 
rhomme assassiné. 

Voici maintenant ce que dit Jaillot au sujet de la 
maison des Marmousets : t qu'on croit avoir été rasée 
« en exécution d'un arrêt, et en punition d'un crime 
« que Ton y avait commis ; cette histoire ne me parait 
« appuyée sur aucune preuve ; on sait seulement que 
• François I", par ses lettres du mois de janvier 1536, 
« permit à Pierre Belut, conseiller au Parlement, de 
« faire rebâtir sur la place vuide que cette maison 
« avait occupée. » 

A cette anecdote, j'en substituerai une plus vraie : 
a Louis, fils du roi Philippe P', avait fait abattre 
« de son autorité partie d'une maison de cette 
« rue, près de la porte du Cloître, qui apparte- 
« nait au chanoine Duranci; elle saillait trop à son 



DE LA CITÉ DE PARIS. 101 

« gré et rendait peut-être le passage incommode. 

« Le chapitre de Notre-Dame réclama ses privi- 
« léges et ses immunités. Louis reconnut son tort, 
« promit de ne plus rien attenter de semblable, et 
t consentit de payer un denier d'or d'amende. 

fl Afin que cette réparation îùi plus authentique, 
« on choisit le jour que Louis, qui était monté sur le 
« trône, épousa Adélaïde de Savoie ; il voulut bien la 
• faire avant que de recevoir la bénédiction nuptiale, 
« et il permit qu'il en fût fait mention dans les re- 
« gistres du chapitre. » 

Tout ceci prouverait que l'anecdote du barbier et 
du pâtissier n'est qu'une fable. 



RUE DES DEUX-HERMITES 



Elle commence à la rue des Marmousets, n»» 13 
et 15, finit rue de Constantine entre les n°" 2 et 4. 

Au XII* siècle, elle se joignait à la rue Cocatrix et 
portait le même nom. En 1220, on rappelait la cour 
Ferri de Paris. En 1300, on la nommait rue de la Con- 
frérie Notre-Dame. Au XVI® siècle, on disait rue de VAr- 
mite. En 1640, elle est'indiqiîée sous le nom de rue 
des deux Serviteurs. Ensuite des Deux-Hermites, à cause 
d'une maison qui avait cette enseigne. 

9. 



1 



lOÎ CURIOSITÉS 

Cette rue n'a pas de numéros, sa longueur est de 
13 mètres. 



RUE DU HAUT-MOULIN 

Commence à la rue de Glatigny , n© 6, finit rue de la 
Cité, n° 1. En 1204, on la nommait rue Neuve^Saint- 
Denis; vers i3Q0 j rue Saint-Denis-de-lorChartre, parce 
qa'un des côtés latéraux de l'église Saint-Denis de la 
Chartre bordait cette rue. 

Au XVI® siècle, elle était partagée en deux parties : 
une s'appelait rue des Hauts-Moulins, en raison de 
quelques moulins construits sur la Seine près de 
cette rue; l'autre partie était désignée sous le nom 
de rue Saint-Symphorien, parce que la chapelle Saint- 
Symphorien, dite plus tard chapelle SainMtw?, y était 
située. 

Suivant une déclaration de Tabbesse de Mont- 
martre du 3 juillet 1551, il paraît qu'il y avait une 
ruelle des Ètuves qui donnait dans cette rue; mais elle 
ne subsiste plus depuis bien longtemps. 



DE LA CITE DE PARIS. 103 



ÉGLISE SAINT-DENIS DE LA CHARTRE 



Cette basilique était située à Textrémité méridio- 
nale du pont Notre-Dame et au coin septentrional de 
la rue du Haut-Moulin. 

L'origine de cette église est inconnue, mais elle 
semble remonter au temps de la première race; il 
paraît que cette église Saint-Denis était celle qui, en 
l'an 856, se racheta du pillage des Normands. Si elle 
était assez considérable pour leur payer une forte 
rançon, il est présumable qu'elle existait bien anté- 
rieurement à l'époque de leurs incursions dans la 
Gaule. 

Suivant les traditions des légendaires, en ce lieu 
saint Denis fut emprisonné avec ses compagnons, ils 
y endurèrent même divers supplices. Avant la démo- 
lition de cette église, on montrait encore une grosse 
pierre carrée ayant à son milieu un trou circulaire ; 
on disait qu'on avait forcé le saint à passer sa tête 
dans ce trou et à porter ainsi la pierre sur ses épaules. 

Le monument le plus ancien qui constate l'exis- 
tence de cette église est du xi® siècle. Alors elle était 
desservie par des chanoines. Dans deux chartes du 
roi Robert, données en 1014, elle se trouve désignée 
par ces mots : Canonicis sancti Dionysii de Parisiaco a 



104 CURIOSITES 

I 



carcere (les chanoines de Saint-Denis de la prison de 
Paris ou de laChartre). Ce surnom vient d'une prison 
ou chartre située dans le voisinage. 

Cette église fut rebâtie aux xiv® et xv« siècles ; le 
portail était certainement de cette dernière époqpie. 
Le bas-relief placé au-dessus de la porte représentait 
des figures chargées de ventres très-proéminents : 
c'était la mode sous le règne de Louis XI de porter 
des ventres postiches. Il y avait dans cette église une 
crypte ou chapelle souterraine où saint Denis fut em- 
prisonné, disent quelques historiens. 

Cette église fut supprimée en 1790. Devenue pro- 
priété nationale, elle fut vendue en deux lots le 29 fri- 
maire an VII et démolie en 1810. Une partie de son 
emplacement est représentée aujourd'hui par une 
propriété faisant le coin du quai Napoléon ; l'enceinte 
, des maisons qui environnaient cette église, et qu'on 
appelait le bas Saint-Denis, était un lieu privilégié 
dépendant du prieuré ; les ouvriers pouvaient y tra- 
vailler avec sûreté sans avoir besoin d'obtenir la 
maîtrise. 



SAINT-SYMPHORIEN DE LA CHARTRE 



C'était d'abord une ancienne chapelle sous le titre 
de SainU-Catherine ; elle tombait en ruine et était aban- 



DET LA CITÉ DE PARIS. 105 

donnée, lorsque Mathieu de Montmorency, qui n'avait 
pu accomplir le vœu qu'il avait fait d'aller en Pales- 
tine, voulut expier sa faute en abandonnantà l'évêque 
Eudes de Sully les droits qu'il avait sur cet oratoire. 

En 1206, Eléonore, comtesse de Verman dois, donna 
100 marcs d^argent pour faire prier Dieu pour Agnès 
deMéranie que Philippe-Auguste avait épousée, après 
avoir répudié Ingelburge ; ces dons, joints à ceux que 
firent d'autres personnes, mirent l'évêque Eudes en 
état d'établir dans cette chapelle, nouvellement bâtie 
sous Tinvocation de saint Denis, quatre chapelains 
desservants. 

En 1214, elle se nommait Saint-Symphorien de la 
Chartre; on mit dans cette église la paroisse Saint- 
Leu et Saint-Gilles. Le chapitre et la paroisse passè- 
rent alors à l'église de la Madeleine de la Cité. 

La chapelle Saint-Symphorien fut cédée, en 1704, ^ 
à la communauté des peintres, sculpteurs et graveurs, 
qui l'ont rétablie et décorée. Le tableau de saint Luc, 
leur patron, dont ils avaient orné l'autel, l'a fait 
nommer chapelle Saint-Luc. 

Devenue propriété nationale, en 1790, elle fut ven- 
due le 4 brumaire an IV. Cette chapelle est entière- 
ment démolie; son emplacement est occupé par la 
maison de la Belle- Jardinière. 



CHAPITRE Vil 



RUE DE GLATIGNY 



Commence au quai Napoléon, finit à la rue des 
Marmousets. On donnait le nom de Glatigny à cette 
rue et aux environs de Saint-Denis de la Chai'lre 
jusqu'à l'hôtel des Ursins. 

On lit dans plusieurs titres qu'il y avait une maison 



108 CURIOSITÉS 

de Grlatigny dans cette rue qui appartenait, en 1241, 
à Robert et à Guillaume de Glatigny. 

En 1380, je la trouve indiquée sous le nom de rue 
au Chevet de Saint-Denis de la Chartre ; mais ces diffé- 
rents noms ont été momentanés, et elle a toujours 
conservé, même dans ces temps-là, celui de Glatigny. 
Sous saint Louis, on a aussi nommé cet endroit le 
Val â^ Amour f à cause des filles amoureuses ou femmes 
folles de leur corps qui Thabitaient et qui étaient, 
comme aujourd'hui, soumises à des statuts et des rè- 
glements ; elles célébraient la Tête de la Madeleine, 
leur patronne ; des tasses d'argent pendaient à leur 
ceinture et elles proposaient aux passants de venir 
boire avec elles; les dimanches et jours de fêtes, en 
attendant les chalands, elles lisaient, assises sur une 
borne, dans un livre de prières à fermoir de cuivre 
doré. Ce mélange de religion et de prostitution carac- 
térise bien le règne de saint Louis : on sait que ce 
monarque faisait suivre sa cour en voyage d'une 
compagnie de ribaudes inscrites sur le rôle tenu 
par la dame des amours publiques. Saint Louis est 
mort, bien des dynasties ont passé, le Val d'amour 
existe encore rue de Glatigny, 

Corrozet raconte un malheur arrivé à ces filles, en 
1498, lors de la chute du pont Notre-Dame; il s'ex- 
prime ainsi : « A la cheute d'iceluy le cours de Seine 
« fut arresté et remonta contremont^ dont quelques 
4t filles estant en Glatigny furent noyées. » 



DE LA CITE DE PARIS. 109 

La rue de Glatigny conserve encore le caractère de 
la vieille Cité. 



RUE SAINT-LANDRY 

Commence au quai Napoléon et finit rue desiMar- 
mousets. 

Elle était anciennement désignée sous le nom de 
Port Notre-Dame et de Port Saint'Lavdry. En 1267, 
plusieurs titres la nomment Terra ad batellos, 

Kextrémité de cette rue vers la rivière s'appelait, 
en 1248, rue du Fumer, Sa dénomination actuelle lui 
vient de Téglise Saint-Landry. 

Il y avait autrefois dans cette rue une ruelle qui 
allait à la rivière; cette ruelle portait, en 1265, le 
nom de rue Percée. 

La rue Saint-Landry n'est guère fréquentée ; elle a 
80 mètres de longueur. Au n® 7 était la maison de 
Pierre Broussel, gouverneur de la Bastille, et au n® 1 
Téglise Saint-Landry. 



ÉGLISE SAINT-LANDRY 

On croit qu'une chapelle dédiée à saint Nicolas 

10 



jlO CURIOSITÉS 

existait en cet endroit au vm* siècle. Dès le commen- 
cement du ix«, avant le siège de Paris par les Nor- 
mands, les prêtres de Saint-Germain-le-Rond (Saint- 
Germain-rAuxerrois), voulant préserver le corps de 
saint Landry des insultes des barbares, le transpor- 
tèrent en la Cité dans la chapelle de Saint-Nicolas 
qui prit à cette occasion le nom de Saint-Landry 
qu'elle a toujours porté depuis. 

Le corps dlsabeau de Bavière, femme de Charles VI, 
morte le 30 septembre 1435, fut porté à Saint-Denis 
d'une façon peu honorable, mais singulière. Il fut 
d'abord déposé en Téglise Saint -Landry et de là 
transporté au port du même nom, où un batelier qui 
avait reçu Tordre de venir seul à la nuit, prit ce corps, 
le plaça dans son petit bateau, et, ainsi qu'on le lui 
avait dit, tout simplement le remit au prieur de 
Tabbaye. 

Daps l'église Saint-Landry furent enterrés Pierre 
Broussel, conseiller au Parlement et gouverneur de 
la Bastille, la famille Boucherat et le fameux sculp- 
teur Girardon. 

Supprimée en 1790, devenue propriété nationale, 
Téglise Saint-Landry fut vendue le 24 mai 1792. La 
maison n° 1 occupe une partie de son emplacement; 
elle fut longtemps louée par un teinturier pour y 
placer ses chaudières. 



DE LA CITÉ DE PARIS. 111 



RUE HAUTE-DES-URSINS 

Commence à la rue Saint-Landry, finit à la rue de 
Glatigny. Sa longueur est de 38 mètres. 

En 1300, Guillot l'appelle la rue de VYmage; les 
registres du chapitre, dans un accord du 8 juin 1639, 
la désignent sous le nom àerue du Petit-Ymage-Sainte- 
Catherine, Au milieu de cette rue était un hôtel que 
vint habiter Jean Juvénal des Ursins, qui remplit avec 
honneur, en 1389, la double fonction de prévôt de 
Paris et de prévôt des marchands. 



RUE DU MILIEU-DES-URSINS 



L* Hôtel des Ursins tombait en ruine en 1550; il fut 
abattu en 1553, et Ion ouvrit Tannée suivante, au 
milieu de son emplacement, une rue à laquelle on 
donna le nom de rue du Milieu-des-Ursins, La rue du 
Petit- Ymage-Sainte-Catherine prit le nom de rue 
ïïaute^eS'Ursins, pour la distinguer de la rue Basse- 
des-Ursins. 

Autrefois, la rue du Milieu prenait de la rue Haute 
et aboutissait au quai; aujourd'hui, elle se prolonge, 



/ 

IW CURIOSITES 



en faisant \m coude, jusqu'à la rue Saint-Landry. 
Cette dernière partie de la rue du Milieu se nommait 
autrefois rue Basse-des-Ursins, 



RUE BASSE-DES-URSINS 



Elle est séparée du quai Napoléon par une rangée 
de maisons, depuis la rue de Glatigny jusqu'à la rue 
des Chantres. 

Elle a porté successivement les noms de Port-Saint- 
Landi^jy rue du Port-Saint-Landry et Grant rue Saint- 
Landry-sur 'Lyaue, On lui donna plus tard le nom de 
rue d'Enfer, qu'elle portait au milieu du xvie siècle. 

On a beaucoup discuté sur Tétymologie de ce nom 
d'Enfer; les savants ne se sont pas accordés sur sa 
signification : les uns ont pensé qu'il venait de la 
position de cette rue bâtie dans un fond. 

Jaillot, par exemple, dit qu'on ne doit chercher 
Fétymologie de ce nom que dans la situation ancienne 
de cette rue qui n'était pas séparée de la rivière par 
un quai; d'autres prétendent que cette partie de la 
Cité, se trouvant hors des murs du cloître de Notre- 
Dame, était regardée comme un lieu* abandonné de 
Dieu. 

Voilà des allégations bien insuffisantes et qui lais- 
sent le lecteur dans l'incertitude : je vais me per- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 113 

mettre ici ime conjecture qui n'a rien d'invraisem- 
blable. Il y avait dans le voisinage un four banal 
appartenant aux chapelains de Saint-Symphorien et 
nommé le Four d'Enfer, à cause du grand feu conti- 
nuel qu'on y faisait. — Voici ce que dit d'Auvigny dans 
sa description de Paris, sous Philippe-Auguste, en 
parlant de ce four d'enfer. 

L'évêque de Paris, d'une partie de l'argent qu'avait 
donné la comtesse, de Vermandois, acheta pour les 
chapelains de Saint-Symphorien le Four d'Enfer ^ 
ainsi nommé parce qu'étant un four banal, il était 
fort grand et qu'on y faisait un feu continuel. Lorsque 
Philippe-Auguste eut fait faire une enceinte autour 
de Paris, il exempta les habitants de l'obligation où 
' ils étaient de faire cuire leur pain dans ces sortes dç 
fours, et permit aux boulangers d'en avoir dans leur 
maison. Il accorda cette permission « pour ce que 
« chacun des boulangers valait à M. le roi 9 sols 
« 3 deniers 1 obole. » Les chapelains de Saint- 
Symphorien tombèrent alors dans une grande pau- 
vreté, leur revenu étant assigné sur ce four qui 
n'était plus fréquenté. 

Il n'y aurait rien d'étonnant qu'une rue, pour ainsi 
dire sans nom, ait reçu celui d'un four voisin qui 
avait été en grande réputation. Je laisse au lecteur à 
décider. 

Au bout de cette rue d'Enfer, à l'entrée de celle des 
Chantres, il y avait une porte donnant dans le cloître 

10. 



lu CURIOSITÉS 

Notre-Dame ; et sur le quai, environ 20 mètres plus 
à l'occident, on voyait auxvi* siècle une voûté nommée 
la porte d'Enfer où aboutissait alors le petit Pont- 
Rouge conduisant à Tlle Saint-Louis. 

Ce n'est que vers 1830 que la rue d'Enfer changea 
son nom pour prendre celui de rue Basserdes-Ursins, 
sa voisine. 

On voit encore sur le mur l'ancien écriteau en 
lettres rouges : rue d'Enfer; et à gauche en lettres 
blanches sur fond bleu : rue Basse^-des-Ursins. 

La maison qui porte aujourd'hui le m 9 a été habi- 
tée par Racine. 



RUE D'ARCOLE 

Elle ouvre sur le quai Napoléon , entre les maisons 
n°" 23 et 25, et aboutit au parvis Notre-Dame. 

Cette rue prend son nom du pont d'Arcole qui lui 
fait face. Elle fut ouverte en 1837 sur l'emplacement 
des rues du Chevet-Saint-Landry et de Saint-Pierre- 
aux-Bœufs. Voici l'origine de ces deux rues. 



DE LA CITE DE PARIS. 115 



RUE DU CHEVET-SAINT-LANDRY 



Elle donnait d'un bout dans la rue d'Enfer (aujour- 
d'hui rue Basse-des-Ursins), et de l'autre dans la rue 
des Marmousets. 

On disait le Chevez-Sainî-Landry, parce que le fond 
ou chevet de cette église donnait dans cette rue. 

En 1 451 , dans un bail fait par l'abbé de Saint-Victor, 
elle est nommée rue de la Couronne. Il y avait dans 
cette rue un cul-de-sac qui portait le nom de Saint" 
Landry, et dont on voit encore des restes rue d'Arcole, 
entre les n°* 5 et 7. 



RUE SAINT-PIERRE-AUX-BOEUFS 



Elle continuait la rue du Chevet-Saint-Landry, 
depuis la rue des Marmousets jusqu'au parvis Notre- 
Dame; on y entrait de ce côté sous une voûte. 

Cette rue n'avait rien de remarquable que l'église 
qui lui a donné son nom, et dont je parlerai bientôt. 

Je n'ai pu découvrir le nom que portait cette voie 
avant la construction de cette chapelle. 



Ile CURIOSITÉS 

On la trouve indiquée dès 1206, sous le npm de 

rue Saint'PèrMiuco-Bosufs, 
Ce que je sais, c'est qu^anciennement la prison du 

chapitre de Notre-Dame se trouvait dans cette rue, 

tout près de l'impasse Sainte-Marine, comme vous le 

verrez par cette anecdote : 

« La reine Blanche, mère de saint Louis, apprit 
que le chapitre retenait prisonniers plusieurs habi- 
tants de Châtenai, coupables envers lui de certaines 
choses interdites aux serfs, et que ces prisonniers 
étaient si maltraités que l'on craignait beaucoup 
pour la vie de plusieurs d'entre eux. 
« La reine, voulant d'abord user des voies de 
douceur, envoya prier le chapitre de relâcher les 
prisonniers sous caution; on lui fit une réponse 
qui la choqua, et augmenta les violences exercées 
contre ces malheureux dont elle avait demandé la 
liberté. 

• La rein,e, piquée d'un mépris qui portait atteinte 
à son autorité, se rendit elle-même à la prison; 
aussitôt qu'elle y fut arrivée, elle frappa la porte 
d'un bâton qu'elle. avait à la main, dans l'instant 
ses gardes et ceux qui l'avaient suivie brisèrent 
cette porte et procurèrent ainsi la liberté à une 
foule d'hommes, de femmes et d'enfants qui vinrent 
se jeter aux pieds de la reine, en lui demandant sa 
protection. > 
Les chanoines, irrités du coup d'autorité que la 



DE LA CITB DE PARIS. 117 

reine venait de faire, murmurèrent hautement et 
perdirent le respect dû à la majesté royale. La reine, 
pour les mettre â la raison, fit saisir leur temporel. 
Le chapitre enfin se vit contraint d'affranchir les 
habitants de Châtenai pour une somme que la reine 
fixa. 



ÉGLISE SAINT-PI ERRE A U.X-BOEUFS 

Fondée entre les années 1107 et 1136, cette église 
fut autrefois la paroisse favorite des bouchers de la 
Cité et le lieu de leur confrérie; sur son portail, il y 
avait deux têtes de bœuf, d'où on croit qu'elle prit 
son nom. 

L'église fat supprimée en 1790, et démolie en 1837; 
son portail très-orné, dont toutes les pierres avaient 
été numérotées, fut replacé contre l'entrée occiden- 
tale de l'église Saint-Séverin, où les curieux peuvent 
Tadmirer. 

On voit aujourd'hui rue d' Aréole , au-dessus de la 
porte de la maison n» 15, cette inscription : 

Sur cet emplacement fut autrefois Téglise Saint-Pierre- 
aux-Bœufs, dont on ignore Torigine, mais qui existait 
déjà en 1136. Démolie en 1837, 



118 CURIOSITES 



IMPASSE SAINTE-MARINE 

Située rue d'Arcole, entre les n**" 11 et 13, elle 
forme Téquerre aujourd'hui, mais autrefois elle en 
formait deux. 

Au n*» 6, dans cette impasse, on voit les restes de 
Téglise Sainte-Marine. 



ÉGLISE SAINTE-MARINE 



C'est dans cette église, fondée vers 1036, qu'on 
célébrait les mariages forcés par ordonnance de 
Tofficial de Paris : lorsqu'il était prouvé que deux 
personnes vivaient ensemble, on les forçait de se 
marier; le curé leur mettait au doigt un anneau de 
paille. 

L'origine de cette église est curieuse, la voici : Une 
jeune vierge appelée Marine résolut d'embrasser la 
vie monastique ; elle prit un habit d'homme et entra 
dans un couvent où elle se fit nommer frère Marin, 
L'office ordinaire de frère Marin était d'aller aux 
provisions à la ville avec un chariot traîné par des 
bœufs, et il passait souvent la nuit dans la maison du 



DE LA CITÉ DE PARIS. 119 

seigneur de Pandoche, dont la fille devint grosse, 
ayant eu affaire à certain soldat. Forcée par ses 
parents d'avouer l'auteur du crime, elle accusa frère 
Marin, qui se laissa chasser du couvent poui* conserver 
son secret, garda l'enfant qu'on lui remit, le nourrit 
comme s'il eût été le sien ; les moines, touchés de ses 
malheurs, lui permirent de rentrer au monastère. On 
ne reconnut la vérité qu'à la mort de la jeune sainte, 
qui fut inhumée avec pompe (ceci se passait en Orient). 
L'église de Sainte-Marine était petite. Sous l'Em- 
pire, elle servait à une rafBnerie de sucre; plus tard, 
elle fut occupée par un teinturier, et aujourd'hui elle 
l'est par un menuisier. Au-dessus de la porte on lit : 

LOUIS MONTENET, menuisier en bâtiment. 

Le ministre de Tintérieur (Gasparin) décida, le 
13 février 1837, que les rues du Chevet-Saint-Landry 
et Saint-Pierre-aux-Bœufs prendraient la seule dé- 
nomination de rue d'ArcolCé Cette rue est large, droite, 
bordée de trottoirs et de boutiques. Sa longueur est 
de 165 mètres. Le dernier numéro impair est 19, le 
dernier pair 24. * 



PARVIS NOTRE-DAME 



On entend, sous ce nom, la place qui est devant 



130 CUBIOSIXÉS 

l'église cathédrale; le nom de parvis dérive sans 
doute du mot paradisus (paradis), expression autre- 
fois eH usage. 

C'était dans une grande maison du parvis Notre- 
Dame que se tenaient les écoles publiques, avant 
rétablissement des collèges et de l'Université. 

L'évéque avait également sur cette place une 
échelle patibulaire, qui était ime marque de sa 
justice. 

r 

Ce fut au parvis que Béranger et Etienne, cardi- 
naux et légats du pape Urbain V, firent dresser, le 
18 mars 1314, un échafaud sur lequel montèrent 
Jacques Molay, grand-maître des templiers, le com- 
mandeur de Normandie et deux autres frères, pour 
y entendre, en présence du peuple, la confession des 
crimes qu'on imputait à leur ordre et la sentence 
qui les condamnait à une prison perpétuelle. 

Sommé par le légat de confirmer les aveux qu'il 
avait faits à Poitiers, Jacques Molay s'avança sur le 
bord de Téchafaud, et fit à haute voix une rétracta- 
tion à laquelle adhéra le grand-maltre de Normandie. 
Ils furent conduits le soir même à Vile au bureau 
(où est aujourd'hui la place Dauphine), et non pas 
à Vîle aux juifs, comme l'ont avancé plusieurs histo- 
riens, et le bûcher consuma ces illustres victimes. 

Le parvis était Tendroit où les condamnés faisaient 
amende honorable, où ils étaient prêches et mitres. 
Ce fut là que, en 1344, fut hissé, chargé de chaînes. 



DE LA CITÉ DE PABIS. 121 

Henri Malestroit, diacre, frère de Geoffroy Malestroit, 
chevalier, décapité Vannée précédente. Henri Males- 
troit étant à i'éclielle souffrit beaucoup de maux : on 
r accabla d'injures, on lui jeta de la boue et autres 
immondices, et même des pierres, qui le blessèrent 
jusqu'au sang. A la troisième exposition, le patient 
expira. 

L'échelle du parvis fut détruite au commencement 
du xvin® siècle; on y substitua, en 1767, un carcan 
fixé à un poteau. De la borne placée sur la place du 
parvis, au pied de ce poteau, partaient toutes les dis- 
tances itinéraires de la France. Ce carcan fut abattu 
en 1790 par les patriotes. Le parvis fut successive- 
ment agrandi, principalement en 1748, lorsqu'on sup- 
prima Saint-Christophe et la rue de là Huche tte. On a 
aussi exhaussé le terrain pour entrer plus facilement 
à Notre-Dame, à laquelle on montait autrefois par 
treize marches. On y a détruit encore une fontaine 
construite en 1639, à laquelle était adossée une sta- 
tue ancienne et mutilée. L'abbé Lebeuf et Jaillot 
croient que cette figure était celle de Jésus-Christ. 
On y a encore détruit un parapet d'environ 1 mètre 
de hauteur, qui entourait à demi la place du Parvis. 

Le bureau des pauvres était situé près de la rue 
Saint-Pierre-aux-Bœufs ; c'était anciennement un lieu 
appelé le Châieavrfrïleux. 

Dans sa séance du 21 brumaire an H, le conseil 
général de la commune arrêta que le parvis Notre- 

11 



n CURIOSITÉS DE LA CITÉ DE PARIS. 

Dame se nommerait désormais parvis de la Raison. 
Il a repris son nom primitif de parvis Notre-Dame. 
Le bureau de la consultation pour les hospices de 
Paris est situé sur cette place, en face de la cathé- 
drale. 



CHAPITRE VIII 



ÉGLISE NOTRE-DAME 

Cette église est cathédrale et métropolitaine de 
Paris. Il n'y a aucun point de l'histoire de Paris qui 
soit plus obscur et qui ait été plus longtemps con- 
troversé, que l'origine et l'état primitif de la cathé- 
drale de Paris. 

L'opinion ia plus répandue est que Childebert I", 



124 CURIOSITÉS 

vers 555, fit bâtir une chapelle qu*il dédia à saint 
Etienne, premier martyr. 

Cette chapelle, située à peu près à l'endroit où se 
trouve le chevet de Notre-Dame, où s'élevait, sous 
les Gaulois, le temple de Jupiter, n'étant plus assez 
grande pour contenir les nombreux habitants de la 
Cité, Childebert ordonna, en 558, de construire une 
église plus vaste, qu'il dédia à sainte Marie, mère de 
Dieu. Cette nouvelle église était située où est main- 
tenant le portail de la cathédrale, au pied de la tour 
du bourdon. Fortunat, poëte contemporain, vante 
beaucoup la somptuosité de ce bâtiment, qu'il com- 
pare au temple de Salomon pour la magnificence. Il 
dit qu'il était soutenu par trente colonnes de marbre. 
C'est dans cette église que Frédégonde se réfugia 
après avoir fait assassiner le roi Chilpéric, son époux. 
Cette exécrable femme trouvaenRagnemode, évêque 
de Paris, un confident et un soutien. 

Cette église était en partage avec Saint-Etienne, et 
jouissait des mêmes privilèges, Saint-Étienne comme 
ancienneté et Sainte-Marie comme importance ; elle 
fut même longtemps église cathédrale. 

Maurice de Sully, évêque de Paris au xii* siècle, né 
de parents très-pauvres, dans le village de Sully, sur 
les bords de la Loire, fut réduit, dans sa jeunesse, à 
la mendicité; mais il trouva le moyen de venir étu- 
dier à Paris, où bientôt il donna lui-même des leçons 
avec un éclatant succès. Son talent pour la chaire lui 



DE LA CITÉ DE PARIS. 125 

valut un canonicat du chapitre de Bourges, et peu 
d'années après, il en obtint un à Paris, avec la di- 
gnité d'archidiacre. Il fut élevé sur le siège épisco- 
pal en 1160. Il conçut alors le projet de faire con- 
struire une nouvelle cathédrale. Il fit démolir les 
églises Saint-Etienne et Sainte-Marie, et sur le terrain 
qu'elles occupaient, il fit, en il 63, poser la première 
pierre de l'église que nous voyons aujourd'hui par 
le pape Alexandre III, réfugié en France. Jusqu'à sa 
mort, ' arrivée en 1196, Maurice de Sully consacra 
tous ses soins à cette église, qu'il dédia à Notre-Dame. 

Pour subvenir à une dépense à laquelle eût à peine 
suffi le trésor d'un prince, il s'adressa à ceux qui de- 
vaient accomplir quelque pénitence, et les leur re- 
mettait en tout ou en partie, moyennant des contri- 
butions pécuniaires. / 

En 1182, le grand autel fut consacré par Henri, 
légat du Saint-Siège; la façade fut terminée sous 
Louis VIII, en 1223. 

Pour entrer dans Notre-Dame, il faut descendre 
deux marches; autrefois on y montait par treize 
degrés qui ont disparu sous l'exhaussement du sol 
de la Cité. 

On pénètre dans l'église par six portes, trois à la 
façade, qui sont la porte de la Vierge, la porte du 
Milieu et la porte Sainte-Anne. 

Le premier portail latéral, dans la rue du Cloître, 
fut bâti en 1312, avec les biens pris aux templiers. 

II. 



126 CURIOSITÉS 

En face de la rue Massillon, on voit la petite porte 
Rouge ou porte Saint-Marcel, bâtie vers 1404, par 
les soins de Jean sans Peur et de Marguerite de Bar 
vière, sa femme, où ils sont tous 'deux représentés, 
La sixième entrée est au portail méridional, com* 
mencé le 12 février 1257, sous Louis IX, par Jehan 
de Chelles, d'après les ordres de Regault de Corbeil, 
éjiréque de Paris, et se nomme portail de Saint-Étiemtôy 
parce que les principaux traits de la vie de ce saint 
y sont représentés. 

Les petites sculptures autour du chœur, dans 
l'église, sont de Jean Bavi. La rosace du grand 
portail a été réparée en 1731; celle du midi, a été 
refaite en 1726, et celle du nord est encore vierge. 

La façade de Notre-Dame offre les statues de plu- 
sieurs saints et ^e vingt-huit rois, depuis Childebert 
jusqu'à Philippe-Auguste. Ces statues ont été renver- 
sées en 1793, réparées et replacées en 1859. La façade 
est terminée par deux grosses tours carrées de 
68 mètres de hauteur au-dessus du pavé; on y monte 
par 365 marches, autant que de jours dans l'année. 

Dans la tour méridionale, il y a la grosse cloche 
appelée le bourdon; elle pèse près de 32 milliers. 
Fondue en 1682 et refondue en 1684, elle fut alofs 
solennellement baptisée ou plutôt bénite; Louis XIV 
et la reine son épouse furent ses parrain et marraine. 
Elle reçut les noms de Emmanuel-'Louise''Thérès$. Le 
battant pèse 976 livres. 



DE LA CITÉ DE PARIS. 127 

Elle avait été démontée en 1794, dans la crainte 
qu'on ne s'en servît pour sonner l'alarme : elle ne fut 
replacée qu'à l'occasion du concordat, en 1802. 

La grande nef était ornée de diverses statues; en y 
entrant, on voyait sur la droite, au premier pilier, 
une figure colossale représentant saint Christophe 
traversant les eaux en portant Jésus-Christ enfant 
sur ses épaules. Cette statue avait 9 mètres 30 cent, 
de hauteur. 

A côté de la statue de saint Christophe, on voyait 
celle de son fondateur, Antoine des Essarls, à genoux 
sur une pierre carrée ; échappé du danger qu'il avait 
couru à suivre le parti du duc de Bourgogne, avec 
Pierre des Essarts, son frère, surintendant des finan- 
ces, déca^pité aux Halles en 11 43, il fit élever la statue 
colossale de saint Christophe en reconnaissance de ce 
que ce saint lui était apparu pendant la nuit et avait 
brisé les portes de sa prison. 

On voyait encore un sujet représentant d'un côté 
un vieillard attaché à un arbre, et de l'autre ses 
quatorze enfants , tous armés d'un arc. Prétendant 
. chacun avoir droit à la succession entière comme 
seul fils légitime à l'exclusion des autres, ils convin- 
rent, dit-on, que celui d'entre eux qui décocherait sa 
flèche le plus près du cœur du vieillard serait déclaré 
seul héritier. L'un d'eux eut horreur de cette action 
barbare et aima mieux renoncer à son héritage que 
de percer le cœur de son père, quoique mort; à ce 



128 CURIOSITÉS 

trait, on le reconnut pour le seul fils légitime. Il faut 
avouer que Vidée n'était pas très-neuve. 

On voyait aussi, avant 1789, au bout de la nef et à 
côté du dernier pilier à droite, à l'entrée du chœur, 
presque vis-à-vis la chapelle de la Vierge, la statue 
équestre de Philippe le Bel, élevée en ce lieu par ses 
ordres après la victoire de Mons-en-Puelle, et le repré- 
sentant au moment où il avait été surpris à la seconde 
attaque desFlamands, c'est-à-dire armé de son casque, 
visière baissée, de son épée et de ses gantelets, mais 
sans brassards; le cheval était caparaçonné. Le roi 
avait accordé une rente annuelle à Notre-Dame pour 
la fondation d'une fête qui se célébrait tous les ans 
à l'anniversaire de la bataille. 

Près de la chapelle de la Vierge, on voyait Tefi&gie 
du roi Louis le Gros et celle de Philippe, son fils, avec 
un pourceau près de lui. Ce fils du roi passait près de 
l'église Saint-Merri, quand un pourceau, s'embarras- 
sant dans les jambes de son cheval, le fit trébucher 
sur le pavé; la chute qu'il fit fut si cruelle qu'il en 
mourut. 



BAS-RELIEF d'ANTOINE YVER 



En entrant à gauche, sous la tour septentrionale, on 
remarque, près de la porte de l'escalier, un grand 



DE LA CITÉ DE PARIS. ' 129 

bas-relief qui fixe souvent Tattention des curieux par 
son originalité : c'est la pierre du tombeau d'un cha- 
noine nommé Antoine Yver, mort le 24 février 1467. 
Ce tableau de pierre a environ 3 mètres de haut sur 
1 mètre 30 centimètres oe large ; la partie supérieure 
représente le jugement dernier : Jésus-Christ, envi- 
ronné de ses anges, lance de sa bouche deux glaives; 
il a sous ses pieds un globe et dans la main un livre 
ouvert sur lequel on lit : Miserebor eux voluero, et de- 
mens ero in quem mihi placuerit. Au-dessous de la tête 
on ht sur une banderole : Clamabant aîterutrum sanc- 
tuSy sanctus. 

La seconde partie du tableau représente un homme 
qui sort nu d'un tombeau, sur lequel on voit un 
cadavre d'homme ayant les cheveux courts et les 
mains jointes. Sur sa tête on lit : Et non intres, Do- 
mine, injudicium cum servo tuo. Cette figure d'homme 
suppliant est tournée de profil et placée entre saint 
Etienne et saint Jean TEvangéliste , qui tient une 
coupe remplie de serpents \ au bas du tableau est la 
longue épitaphe d'Antoine Yver , licencié en droit 
canonique, chanoine de cette église et de celle de 
Rouen, conseiller du roi en sa cour de Parlement, 
originaire de Péronne, diocèse de Noyon. Avant de 
mourir, Yver avait légué 200 écus pour fonder un 
obit pour le repos de son âme. On Tinhuma dans la 
chapelle Saint-Nicolas, contre le mnr de laquelle ce 
tableau de pierre fut longtemps attaché. 



130 CURIOSITES 



GALERIE SOUTERRAINE 

t 

Dans les compartiments séparant la nef des bas 
côtés, s'ouvrant sur le pavé de Téglise, trois trappes 
en bois ferment les entrées de la grande cave prati- 
quée sous la nef, en 1766, pour la sépulture des cha- 
noines. 

Depuis la défense que Ton fit d'inhumer dans les 
églises, ce caveau fut condamné. Il y avait plusieurs 
années qu'on n'était descendu dans cette galerie sou- 
terraine, quand j'eus l'occasion de la visiter dans tous 
ses détails qui sont vraiment curieux pour un ama- 
teur de sculptures. 



SACRE DE PÉPIN LE BREF 



En 754 , le pape Etienne sacra dans cette église 
Pépin le Bref, ainsi que ses deux fils et leur mère. 



DE LA CITÉ DE PARIS. 131 



LE DRAGON DE SAINT MARCEL 



Jusqu^au commencement du xvni* siècle, il existait 
à Notre-Dame un singulier usage, reste de la naïve 
crédulité de nos pères. Aux processions des Rogations, 
on portait la figure d'un grand dragon d^osier, à la 
gueule béante, dont le peuple s'amusait beaucoup ; 
le plus adroit s'exerçait à jeter en passant, dans sa 
gueule, des fruits ou des gâteaux. 

On croit que cette procession du dragon avait lieu 
en mémoire du serpent monstrueux dont saint Marcel 
délivra la ville. On cessa, vers 1720, de porter le 
dragon aux processions des Rogations, mais on con- 
serva l'usage de bénir la rivière, de même que dans 
les campagnes on bénit les cbamps et les fnâts de la 
terre. 



FÊTE DU PAPE DES FOUS 

Jadis on célébrait, à Noël, dans Téglise Notre-Dame, 
la fête du pape des fous, dont Victor Hugo a donné 
une si belle description dans sa Notre-Dcme de Paris. 
Ce fut Eudes dfe Sully qui supprima cette fête, en 1 198* 



132 [CURIOSITES 



FÊTE DE LA PENTECOTE 

Au XIII® siècle, on observait dans cette église, le 
jour de la Pentecôte, pendant l'ofl&ce divin, l'usage de 
jeter, du haut des voûtes, des pigeons, des oiseaux, 
des fleurs, des étoupes sous la forme de langues de 
feu, et des pâtisseries connues sous le nom d'oubliés. 
Au moment où Ton chantait Thymne Yeni creator, un 
coulon blanc était lâché du haut des voûtes, pour 
figurer la descente du Saint-Esprit sur les apôtres. Le 
peuple se plaisait «infiniment à ces sortes de spec- 
tacles, où son imagination était émue par des images 
vives et frappantes. 



LA GRANDE BOUGIE 

Après la bataille de Poitiers où le roi Jean avait été 
fait prisonnier, le 19 septembre 1356, Paris, divisé 
par les factions, était en proie aux troubles et à 
l'anarchie ; pour intéresser le ciel en leur faveur, les 
bourgeois firent un vœu d'une espèce singulière : ce 
fut d'offrir tous les ans à Téglise Notre-Dame une 
bougie de la longueur de Tenceinte de la ville de 
Paris. En conséquence, le 14 août 1357, veille de 



DE LA CJTÉ DE PARIS. 133 

r Assomption, le corps municipal présenta en céré- 
monie à Tévêque et au chapitre assemblé cette nou- 
velle offrande pour la première fois. Elle eut lieu tous 
les ans, jusqu'à Tépoque de la Ligue. 

En 1605, Paris s'étant considérablement agrandi, 
la bougie fut remplacée par une lampe d'argent. 



HENRI VI D'ANGLETERRE 

COURONNE ROI DB FRANCE 

On lit^, dans Corrozet le passage suivant : ^ 

« L'an mil cccc xxxij (il s'est trompé, cet événe- 
« ment eut lieu le 17 septembre 1430), Henri VP 

• du nom, roy d'Angleterre, âgé de douze ans, estant 
« passé en France après le trépas de son père, vint à 
« Paris en bonne compagnie d'Anglois, et fut cou- 
« ronné roy de France par le cardinal de Vincestre 
« en la grande église Nostre-Dame de Paris! duquel 

• royaume usurpé par lui à faulx tiltre il ne jouyt 

• longuement. » 



MARIAGE D'hENRI IV 

Le 18 août 1572, six jours seulement avant le mas- 
sacre de la Saint-Barthélémy, le mariage du roi de 

12 



134 CURIOSITÉS 

Navarre, depuis Henri IV, avec Marguerite de Valois, 
fut pompeusement célébré à Notre-Dame. 



LA BANDE A CARTOUCHE 



En 1728, cette cathédrale fut le théâtre d'un évé- 
nement funeste qui mérite de trouver place ici, à 
cause de sa singularité : 

« Le jour de Pâques de cette année, une troupe 
« de voleurs que Ton présuma, depuis, être de la 
bande de Cartouche, profita de la solennité qui ras- 
semblait dans la métropole un grand nombre de 
fidèles, pour mettre à exécution un complot ourdi 
avec une hardiesse inouïe. 

• QuQlques-uns d'entre eux s'étant introduits, dès le 
matin, dans la charpente de Téglise par le moyen 
des échafauds élevés pour le rétablissement de la 
voûte de la croisée, les autres se distribuèrent en 
deux divisions, dont l'une s'éparpilla dans l'église 
et l'autre se posta aux alentours des différentes 
portes. 

« Au premier verset du second psaume des vêpres, 
moment convenu pour le coup de main, les vo- 
leurs ayant fait tomber du haut de Tédifice des 
« moellons, des outils et des échelles, d'autres de 
« leurs complices, confondus dans la foule, se mirent 



DE LÀ CITÉ DE PARIS. ]t5 

à crier d'une voix effrayante que la voûte tombait 
et entraînèrent dans leur fuite combinée la multi- 
tude épouvantée. A l'instant les diverses issues de 
Téglise se trouvèrent tellement embarrassées, qu'il 
y eut plusieurs personnes étouffées dans la presse, 
d'autres grièvement blessées; enfin, pendant ce 
tumulte, les voleurs pillèrent montres, tabatières, 
boucles d'oreilles, etc., et disparurent sans que 
jamais on ait pu rien découvrir, malgré les recher- 
ches que fit la police. 

« Il y eut dans cette catastrophe plus de quatre 
cents personnes blessées ou tuées . » 



ABOLITION DU CULTE CATHOLIQUE 

Le 10 novembre 1793, la Convention nationale dé- 
créta, sans discussion, Tabolition du culte catholique 
et le remplacement de ce culte par celui de la Raison, 
et changea par ce décret le nom de Véglise NotrerDame 
en celui de temple de la Raison. 

Le même jour, on éleva dans la nef de ce temple 
une montagne factice dont le sommet était couronné 
par un temple d'une architecture simple, portant 
pour inscription au-dessus de la porte d'entrée : A la 
Philosophie, 

Sur le penchant de la montagne s'élevait un autel 



136 CURIOSITÉS 

orné de guirlandes de chêne, et supportant le flam- 
beau de la Vérité. Deux rangées déjeunes filles vêtues 
de blanc, couronnées de chêne, et tenant à la main 
unflambeau, descendirent de la montagne. Peu après, 
la Raison, représentée par une jeune et belle femme 
vêtue d'une draperie blanche, recouverte à moitié 
par un manteau ble^u céleste, les cheveux épars et 
coiffée d'un bonnet phrygien, sortit du temple de la 
Philosophie et vint s'asseoir sur un banc de gazon 
où elle reçut les hommages et les serments des mor- 
tels au son d'une musique bruyante et des chants 
d'allégresse. Le soir, la Convention en masse se rendit 
au temple pour y chanter avec le peuple l'hymne à 
la Raison... 

Le 28 germinal an X (18 avril 1802), le jour de 
Pâques, une fête solennelle fut célébrée dans Téglise 
Notre-Dame en Thonneur de la signature du con- 
cordat et du rétablissement de la religion catholique 
en France. 



SACRE DE NAPOLÉON I 



er 



Le 2 décembre 18*04, la cérémonie du sacre de 
Napoléon P', malgré un froid rigoureux, fut exécutée 
avec la plus grande magnificence. Le pape Pie VII, 
TEmpereur, Tlmpératrice et toute la cour partirent 



DE LA CITÉ DE PARIS. 137 

des Tuileries, à dix heures, pour se rendre à la cathé- 
drale. L'Empereur et l'Impératrice furent bien et dû- 
ment oints par le Pape, mais Napoléon posa lui- 
même la couronne impériale sur sa tête. 

La cérémonie du couronnement de Bonaparte fut 
sans contredit la pilus somptueuse et la plus solen- 
nelle de toutes celles qui eurent lieu dans la basilique 
de Notre-Dame. 



MARIAGE DU DUC DE BERRI 



C'est encore dans cette église que le mariage de 
Charles-Ferdinand, duc de Berri, né à Versailles le 
24 janvier 1778, avec Marie-Caroline-Ferdinande- 
Louise, princesse des Deux-Siciles, eut lieu le 17 juin 
1816. 

On y|a aussi célébré, le 2 mai 1841 , le baptême du 
comte de Paris. 



LE BOURDON 



Le !•' novembre 1843, fête de la Toussaint, à midi, 
lorsque le bourdon était lancé à toute volée, le bat- 

12. 



138 CURIOSITÉS 

tant s'en est détaché tout à coup. Cette masse énorme 
traversa, dans sa chute, trois étages et s'arrêta là. 

Trois personnes ont été blessées; Tune d'elles, le 
sieur Mazarin , sonileur, fut atteint à la tête d'un 
éclat de charpente et transporté immédiatement à 
l'Hôtel-Dieu. 

Depuis cet accident, le bourdon, resté muet, s'est 
fait entendre, pour la première fois, le 1®' avril 
1851. 



MARIAGE DE NAPOLÉON III 

Le 30 janvier 1853, célébration et bénédiction, par 
l'archevêque de Paris, du mariage de S. M. Napo- 
léon III, Empereur des Français, avec Eugénie de 
Montijo, comtesse de Téba. 



ANTIQUITÉS 

> Le 23 octobre 1847, en exécutant des travaux de 
terrassement sur la place du Parvis pour le pavage 
de cette place, la pioche du travailleur a rencontré 
de nombreuses pierres de taille provenant évidem- 
ment de constructions très-anciennes, des blocs de 



D£ LA CITE DE PARIS. 139 

marbre de couleurs différentes, un fût de colonne de 
marbre aussi de couleur, et, devant la rue d'Arcole, 
un massif de construction romaine, épais de 2 mè- 
tres et demi, sur une longueur de 8 à 10 mètres. 
En novembre, au fond d'une espèce de puits mis à 
découvert au milieu des constructions romaines que 
l'on fouilla devant le portail, les ouvriers ont trouvé 
quatre médailles antiques. 

Le 27 novembre, en poursuivant les trjivaux de 
déblai devant la tour du sud, peu au-dessous du niveau 
du sol, on rencontra des restes de constructions ro- 
maines, partie en pierre, partie en brique. En les 
dégageant, on trouva aussi plusieurs médailles anté- 
rieures à Julien. 

On a cru reconnaître, dans ces constructions, un 
hypocauste avec ses conduits (bouches de chaleur). 
On découvrit encore, au même endroit, des pans de 
murs épais de 2 mètres, faits en ciment et silex, 
comme le palais des Thermes. Au milieu de ces 
constructions, on en a reconnu de dates plus ré- 
centes, en pierres de taille, et sur une de ces pierres 
on voit les lettres suivantes, assez bien conservées : 
V. E. N. A. Le 14 décembre, une nouvelle découverte 
fut faite dans les mêmes fouilles; c'est un souterrain 
qui, du parvis, se dirige vers la porte d'entrée de la 
tour du Nord. 



]40 CURIOSITES DE LA CITÉ DE PARIS. 



RÉPARATION DE LA CATHÉDRALE 

Beaucoup de personnes ont pensé que Notre-Dame 
était fondée sur pilotis, mais cette opinion a été re- 
connue fausse. En 1856, lorsque l'on fit des fouilles, 
on descendit à 2 pieds au-dessous des fondations de 
l'église, qui avaient 24 pieds de profondeur, et Ton 
reconnut qu'elles reposaient sur un gravier ferme 
sans pilotis. 

Depuis le mois de juin 1845, on travaille à réparer 
Téglise et les tours de Notre-Dame; ces travaux, exé- 
cutés sous la conduite de MM. Lassuset Violetrle-Duc, 
sont considérables et encore loin d'être finis. Je passe 
sur des dissertations d'architecture qui pourraient 
donner de l'ennui aux lecteurs. 



CHAPITRE IX 



PALAIS DE l'archevêché 

Il occupait, au midi de la cathédrale, l'emplace- 
ment du premier palais archiépiscopal construit vera 
la fin du xii« siècle par Maurice de Sully, évêque de 
Paris. 

Suivant l'abbé Lebeuf, c'était dans la première 
cour de l'archevêché qu'était jadis le siège de l'of- 



148 CURIOSITÉS 

flcialité, où se faisaient les monomachies ou duels 
entre les champious pour la décision de certaines 
causes. 

Dans une autre cour était la prison de rarchevê- 
cbé, une des plus anciennes et des plus malsaines de 
Paris. 

Sous le règne de Louis XVI, les prisons bour- 
geoises ou privées étaient encore très-multipliées ; 
elles étaient une source d'abus d'autant plus révol- 
tants, que les ntiagistrats n'avaient pas le droit de les 
visiter. 

Après les événements dé 1789, la prison de l'ar- 
chevêché fut supprimée, ainsi que toutes les prisons 
particulières. 

Le palais devint l'habitation du chirurgien en chef 
de THôtel-Dieu, et sa chapelle fut convertie en am- 
phithéâtre d'anatomie jusqu'en 1802. 

C'est dans la grande salle de Tarchevêché que l'As- 
semblée nationale tint, à Paris, sa première séance, 
le 19 octobre 1789, à son retour de Versailles; et c'est 
là qu'elle décréta que les biens du clergé étaient 
propriété nationale. 

^ Sous l'Empire, ce palais fut restauré et richement 
meublé par Napoléon I". 

Le 14 février 1831 , le palais de l'archevêché fut 
saccagé ; voici pourquoi : Le curé de Saint-Germain- 
l'Auxerrois célébra un service funèbre en commé- 
moration de la mort du duc de Berri. Le buste de ce 



DE LA CITÉ DE PARIS. 143 

prince fut promené dans ladite église. Cette ma- 
nifestation imprudente servit de prétexte à quel- 
ques agitateurs pour se livrer à des excès aux- 
quels on devait s'attendre. La croix qui surmontait 
l'édifice fut renversée, Téglise dévastée de fond 
en comble. Quand les furieux n'eurent plus de 
belles sculptures à mutiler, de tableaux à déchi- 
rer, ils se portèrent en foule au palais archiépis- 
copal, en criant : « Mort à l'archevêque I mort à 
l'archevêque I » Ils recommencèrent alors les mêmes 
profanations : les statues, \ea meubles, les livre? 
furent jetés dans le fleuve , les appartements dé- 
pouillés, on s'en prit même aux pierres. La démoli- 
tion commença avec un ensemble , un sang-froid 
extraordinaires. M. de Quélen, archevêque de Paris, 
fut sauvé par un savant illustre, Geoffroy Saint-Hi- 
laire le père. 

Sur l'emplacement du palais de l'archevêché, on 
forma ime belle esplanade plantée d arbres et en- 
tourée d'une grille, formant une charmante prome- 
nade ornée d'une jolie fontaine gothique. 



FONTAINE NOTRE-DAME 



Cette fontaine s'élève derrière le chevet de la eu- 



144 CURIOSITÉS 

thédrale. Elle offre, dans sa composition, un mélange 
du style d'architecture en honneur aux xiiic et 
XIV* siècles. 

Elle fut faite sous la direction de M. Alph. Vigou- 
reux. Un clocheton pyramidal s'élève au-dessus d'im 
bassin, et présente une niche à jour dans laquelle 
est placée une statue de la Vierge. Plus bas, on voit 
trois anges foulant aux pieds trois dragons gui lan- 
cent de Teau; ce morceau est vraiment admirable, 
mais il est mal placé dans un quartier peu fréquenté' 
par la population parisienne. 



RUE BOSSUET 



Elle commence aux quais de rArchevéché et Na- 
poléon, en face le pont de la Cité, et finit aux rues 
Chanoinesse et du Cloître-Notre-Dame. 

Le percement de cette rue date de Tan XII; sa 
longueur est de 12 mètres. La dénomination affectée 
à cette voie publique rappelle le célèbre Bossuet, 
évéque de Meaux, né à Dijon en 1627, mort en 
1704. 



DE LA CITE DE PARIS. 145 



RUE DU CLOITRE-NOTRE-DAME 

Elle commence' à la rue Ghanoinesse, n° 1, finit au 
Parvis Notre-Dame et à la rue d'Arcole, n© 19. 

Cette rue occupe pour la plus grande partie rem- 
placement deTancien cloître Notre-Dame, dont elle a 
retenu le nom. 

On entendait sous le nom de cloître Notre-Dame 
tout l'espace compris depuis le pont de rArchevêché, 
en suivant le quai, jusqu'à la rue des Chantres, où 
était une des portes du cloître ; en partant de là, et 
suivant la rue Basse -des-Ursins jusqu'à la rue de la 
Colombe, au bout de cette rue et de celle des Mar- 
mousets, on rencontrait une seconde porte; suivant 
ensuite l'alignement qui va rejoindre la porte des 
tours de Notre-Dame du côté septentrional de l'église, 
on se trouvait à la porte principale. Près de cette 
porte, à l'alignement de la façade de Notre-Dame, 
était l'église Saint-Jean-le-Rond. 



ÉGLISE SAINT-JEAN-LE-ROND 

Cette chapelle était située à l'entrée dii cloître^ 

13 



146 CURIOSITÉS 

presque dans ralignement de la façade de Notre- 
Dame. 

On y voyait une cuve, ou bassin, destinée aux bap- 
têmes; les fonts baptismaux étaient jadis à Saint- 
Germain-le-Vieux ; mais, au xm* siècle, on construi- 
sit, près de Notre-Dame, une petite église de forme 
ronde, d'où lui vint le nom de Saint-Jean-le-Rond, 
Elle fut démolie en 1748, et les baptêmes se firent à 
Saint-Denis-du-Pas. 



ÉGLISE SAINT-DENIS-DU-PAS 



Était située au chevet de l'église Notre-Dame. 
L^origine de cette église excita les contestations les 
plus vives entre les historiens. Malheureusement, le 
feu de la dispute n^a pas allumé le flambeau de la 
vérité. 

Ce qu'il y a de certain, c'est qu'elle existait sous le 
règne de Louis VI et peut-être auparavant. 

Son bâtiment tombait en ruine; il fut reconstruit 
après l'an 1148, et ne portait alors que le nom d'Ora- 
toire. 

Lorsqu'on 1748, on abattit l'église Sainl-Jean-le- 
Rond, le chapitre et le titre de paroisse de cette église 
démolie furent attribués à celle de Saint-Denis-du- 
Pas, qui, par suite des événements de la Révolution, 



DE LA CITÉ DE PARIS. 147 

fut affectée au service de PHôtel-Dieu, ainsi que la 
palais archiépiscopal, et convertie en une salle de 
réception pour l'admission des malades. ' 

Son nom du Pas lui vint de sa situation près du 
petit passage de la rivière, puisqu'on appelle pas tout 
détroit qui est entre deux terres et que, dans notre 
ancien langage français, pas et passage sont syno- 
nymes. 

Sain1>-Denis-du-Pas fut démolie, et sur son emplace- 
ment on fit une place que les plans de 1808 et 1811 
indiquent sous le nom de place Féneion. On y voit 
aujourd'hui la fontaine^Notre-Dame. 



RUE CHANOINESSE 

Elle commence à la rud du Gloitre-Notre-Dame, 
Unit aux rues des Marmousets et de la Colombe. 

Voisine de la cathédrale, elle a pris son nom des 
chanoines qui l'habitaient; elle a porté aussi les 
noms de rue du Cloître, rue des Chanoines et enfin rue 
Chanoinesse, 

Cette rue est déserte, tortueuse et peu habitée ; elle 
a 175 mètres de longueur; le dernier numéro impair 
est 1 1 , le dernier pair 22. 

Au fond de la maison m 22, dans une espèce de 
souterrain, était la chapelle Saint-Agnan. 



148 CURIOSITES 



CHAPELLE SAINT-AGNAN 

Elle fut fondée, en 11 18, par Etienne de Garlânde, 
archidiacre de Paris et doyen de Saint-Agnan d'Or- 
léans; il donna pour sa dotation la maison qu'il pos- 
sédait dans le cloître Notre-Dame, et trois clos de 
vignes, dont deux étaient situés au bas de la montagne 
Sainte-Geneviève et Tautre à Vitry. Le pavé de cette 
chapelle offrait un tén;oignage de Texhaussement 
considérable du sol de la Cité. 

Supprimée en 1790, elle devint propriété natio- 
nale, fut vendue le 28 septembre 1791 , et abattue en 
1795. C'est aujourd'hui une propriété particulière 
qui occupe son emplacement. 

En 1799, dans les fondations d'une maison voisine, 
on découvrit plusieurs petits pots de terre cuite, tels 
qu'il s'en trouve dans quelques tombeaux du moyen 
âge, ce qui fait présumer qu'on enterrait autour de 
cette chapelle, qui n'était ouverte au public que le 
17 novembre, jour de la fête de ce saint. 



RUE MASSILLON 



Elle conduit de la rue du Cloître à la rue Cha- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 149 

noinesse. Elle exista longtemps sans aucun nom. 

Elle faisait partie du cloître Notre-Dame ; le plan 

* 

de Verniqiiet ne lui donne aucune dénomination. Le 
nom qu'elle porte aujourd'hui rappelle le célèbre pré- 
dicateur Massillon,né à Hyères en Provence, en 1663, 
et mort à Paris en 1742. 

Massillon a prononcé quelques oraisons funèbres : 
elles passent pour être inférieures à ses autres dis- 
cours ; son Éloge de Louis XIV est remarquable sur- 
tout par la première phrase : « Dieu seul est grand, 
« mes frères. » Ces paroles sont superbes, pronon- 
cées en regardant le cercueil de celui qui avait pris 
le soleil pour emblème. 

La rue Massillon n'est guère fréquentée que par des 
gens d'église : elle a 52 mètres de longueur. 



RUE DE LA COLOMBE 



Elle commence au quai Napoléon, finit aux rues 
Ghanoinesse et des Marmousets. 

En 1223, elle portait déjà ce nom, qu'elle doit vrai- 
semblablement à une enseigne. Autrefois, cette rue 
n'allait pas jusqu'au quai; elle finissait à la rue Basse- 
des-Ursins. 

Sa longueur est de 73 mètres. Le côté oriental de 

13. 



160 CURIOSITÉS 

cette rue était occupé par Téglise Saint-Agnan et la 
chapelle Monsieur de Paris, 



RUE DES CHANTRES 

Commence à la rue Basse-des-Ursins (ci-devant rue 
d'Enfer), finit à la rue Chanoinesse. 

Un titre de 1540 lui donne cette dénomination 
qu'elle doit aux chantres de Notre-Dame qui Tavoi- 
sinaient et qui probablement Tout habitée. 

C'est au n' 1, dans cette rue, qu'est la fameuse 
maison d'Héloïse et Abélard. On lit dans la cour l'in- 
scription suivante : 

ABÉLARD, HÉLOÏSB HABITBRBMT CBS LIBUZ. 

Sur un grand mur on lit encore : 

ABÉLARD, HÉLOÏSB, 1118. 

Tout porte à croire que l'escalier en spirale, dont 
les marches en bois attestent par leur vétusté ime 
longue existence, est l'escalier que montait avec tant 
d'émotion Tillustre amant d'Héloïse et qui fut si sou- 
vent témoin de leurs tendres adieux. On est aussi 
porté à croire que c'est dans une petite pièce qui 



DE LA CITÉ DE PARIS. 151 

donne sur cet escalier qu'était le cabinet de travail 
d'Héloïse, et que c'était là que les deux amants « ow- 
vraient leurs livres, mais qu'ils avaient plus de paroles 
d'amour que de lecture, plus de baisers que de 
phrases. » 

On ne regarde pas cette maison, où furent heureux 
le maître et Téléve, sans éprouver un serrement de 
cœur et une tendre émotion. 



DEUXIÈME PARTIE 



Après avoir visité la partie orientale de la Cité, 
nous allons examiner la partie occidentale, c'est-à- 
dire celle qui s'étend de la rue de la Barillerie à la sta- 
tue de Henri IV. 

Cette portion de Lutèce, quoique d'une nuance dif- 
férente de la première, n'en est pas moins curieuse 
et évoque encore des souvenirs et des impressions 
qui s'effacent tous les jours. 



CHÀPITKE X 



PALAlS-DE-JUâTICE 



Il était réservé à notre époque de continuer l'œuvre 
inachevée des siècles précédents, et de mettre la der- 
nière main à des monuments vénérables, sans leur 
ravir le cachet précieux des temps où ils ont été 



156 CURIOSITÉS 

Nous allons jeter un regard rétrospectif sur Tori- 
gine de ce palais de nos premiers rois. 

Tout porte à croire que ce vaste édifice existait 
avant Tinvasion des Francs dans les Gaules. Il fut 
réparé, agrandi ou rebâti par les maires qui s'empa- 
rèrent du pouvoir sous les rois de la première 
race. 

Eudes, comte de Paris, est le premier qui y trans- 
porta sa demeure pour qu'elle fût mieux défendue 
contre les attaques des Normands ; c'est lui qui fit 
bâtir toutes les tours qui en fortifiaient l'enceinte, et 
dont plusieurs existent encore. 

Robert le Pieux fit construire la chambre de la 
Conciergerie qui fat depuis la chambre nuptiale de 
saint Louis, la chapelle de la Conciergerie et celle 
de la Chancellerie. 

Louis le Gros mourut dans ce palais, en 1137, et 
Louis le Jeune, en 1180. Philippe-Auguste y épousa 
en secondes noces Ingelburge, sœur du roi de Dane- 
mark. 

On doit à saint Louis la construction de la Sainte- 
Chapelle, de la grande salle, de la grande chambre et 
des cuisines qui portent son nom. 

Philippe le Bel y fit faire plusieurs reconstructions 
qui furent achevées en 1313 ; depuis, Louis XI, Char- 
les VIII et Louis XII y ajoutèrent encore de nouveaux 
bâtiments. 

Plusieurs rois habitèrent encore ce palais, quoique 



DE LA CITÉ DE PARIS. 157 

le Louvre fût devenu leur demeure la plus ordinaire 
pendant leur séjour à Paris. 

Lorsqu'en 1364, Charles V abandonna ce palais 
pour aller habiter Thôtel Saint-Paul, ce n'était encore 
qu'un assemblage de grosses tours qui communi- 
quaient les unes aux autres par des galeries. 

La tour de l'Horloge, ainsi que ses accessoires, dé- 
cèle le genre d'architecture du xiv® siècle. 



SALLE DES PAS-PERDUS 



La vieille grande salle du moyen âge, aujourd'hui 
salle des Pas-Perdus, fut consumée par un incendie, 
ainsi qu'une chapelle et plusieurs corps de bâtiment 
contigus, dans la nuit du 5 au 6 mars 1618. 

Dans cette salle, debout, immobiles, appuyés sur 
leur glaive ou leur sceptre , vêtus de fer ou d'her- 
mine, chevelus ou barbus, figuraient tous les rois de 
France, depuis Pharamond jusqu'à Philippe le Bel. 

Là se trouvait la célèbre table de marbre qui remplis- 
sait tout entière l'une des extrémités de la salle; cette 
table où les enfants de Robert le Fort donnaient leurs 
festins royaux, où la basoche représentait, aux jours 
des grands esbattemens et joyeusetés, ses farces, ses 
moralités , ses sotties. C'était aussi sur cette table 

14 



158 CURIOSITÉS 

que se faisaient avec pompe, en présence du peuple, 
les noces des enfants de France. 

Au mariage de Catherine de France avec Henri V, 
roi d'Angleterre, îl y eut im si grand concours de 
monde, que plusieurs personnes y furent étouffées, 
et que le roi Charles VI, père de la mariée, courut 
lui-même risque de la vie. 

La table de marbre servait encore de tribunal 
quand les maréchaux y rendaient leurs arrêts; de 
réfectoire quandles empereurs, rois, reines et princes 
du sang y siégeaient dans les festins publics; de pi- 
lori, quand on y exposait quelque illustre coupable 
aux yeux de la foule circulant à T-entour. 

Un pavé de marbre blanc et noir, une magnifique 
voûte en charpente, toute peinte en or et en argent, 
des lambris de bois de chêne sculpté et rehaussé d'or 
et d'azur, de même que les piliers massifs qui sou- 
tenaient les arceaux du plafond, tels étaient les orne- 
ments de cette grande salle, où retentirent pen- 
dant trois siècles les pas et les cris de tant de 
générations. Elle fut détruite en 1618; Jacques de 
Brosse fut chargé de sa reconstruction et la tern^na 
en 1622. Elle se compose de deux immenses nefs 
parallèles, voûtées en pierres de taille, et séparées 
par un rang d'arcades qui portent sur des piliers 
décorés de pilastres doriques. Ce vaste local ne reçoit 
le jour que par les grands cintres vitrés qui sont à 
l'extrémité de chaque nef. 



DE LA CITE DE PARIS. 159 



LES CUISINES DE SAINT LOUIS 

Au-dessous de la salle des Pas-Perdus est un étage 
inférieur aussi étendu qu'elle, que des murs de 
refend divisent en plusieurs pièces. L'architecture 
de cet étage inférieur est sarrazine, les voûtes sont 
en ogive avec des nervures qui en dessinent les 
arêtes. 

On y trouve une salle très-vaste, bâtie dans le 
même style et plus élevée que les pièces contiguës. 
Aux quatre angles sont quatre cheminées de grandes 
dimensions, et remarquables par leur construction. 
Cette salle est nommée les cuisines de saint Louis. On 
y voit un escalier par lequel on montait à la salle 
supérieure, sans doute pour y transporter les mets 
lorsque les rois y donnaient des festins. 

Prés de ces cuisines, un autre escalier descendait 
jusqu'à la rivière. 

A la salle des Pas-Perdus aboutissent presque toutes 
les issues qui conduisent aux divers tribunaux. Tout 
auprès s'ouvre le long couloir au bout duquel siège la 
Cour de cassation, dont la salle fut, dit-on , la chambre 
à coucher de saint Louis. Cette pièce était une salle 
de cérémonie au temps de Louis XII, qui la fit riche- 
ment décorer à l'occasion de son mariage avec la 



^ 



160 CURIOSITÉS 

fille de Henri VIL Plus tard, elle fut restaurée par 
Louis XIV. C'est là que siégeait, en 1793, le tribunal 
révolutionnaire. C'est seulement depuis ravénement 
de Napoléon I" au trône impérial que cette salle 
fut consacrée aux audiences de la Cour de cassation. 



STATUE DE MALESHERBES 

En 1821, on érigea contre Tarcade du milieu de la 
salle des Pas-Perdus, du côté du midi, un monument 
à la mémoire de Malesherbes. Il se compose d'un 
soubassement ayant de chaque côté deux piédestaux 
saillants, supportant les statues allégoriques de la 
France et de la Fidélité. Au-dessus du soubassement 
s'élève un stylobate supportant deux ^colonnes ioni- 
ques surmontées d'un fronton. Derrière ces colonnes 
est une niche dans laquelle est posée, sur un socle, 
la statue de Malesherbes, représenté debout au mo- 
ment où il prononce la défense de Louis XVI. 



LA COUR DU MAI 



Un terrible incendie, qui éclata le 10 janvier 1776, 
nécessita la reconstruction d'une partie considérable 



DE LA CITÉ DE PaRIS. 161 

de rintérieur du Palais. MM. Moreau, Desmaisons, 
Couture et Antoine, architectes et membres de 
l'Académie d'architecture, furent chargés d'entre- 
prendre les travaux propres à opérer le raccommo- 
dement de ce vaste ensemble. Leur plan embrassa 
non-seulement la cour actuelle, mais le nouvel ali- 
gnement des rues adjacentes et le tracé de la place 
demi-circulaire qui fit longtemps face au principal 
corps de bâtiment. Celui-ci s'élève au fond de la cour, 
sur un perron auquel on arrive par un grand escalier 
qui donne assez de noblesse à cette masse, d'ailleurs 
peu remarquable par le caractère de son architecture. 
Un corps avancé de quatre colonnes doriques orne 
la façade, composée, du reste, d'un rang d'arcades 
à rez-de-chaussée et de fenêtres en attique. Une 
sorte de dôme quadrangulaire couronne le pavillon 
central. Au bas du perron et de chacun de ses côtés 
sont deux arcades, dont l'une tonduit au tribunal de 
police, et l'autre donne entrée dans ce qu'on appelle 
la Conciergerie y prison bâtie sur le terrain qu'occupait 
anciennement le jardin, et qu'on appelait alors le 
Préau du Palais. On trouve dans l'aile droite un grand 
et bel escalier richement orné qui conduit à la grande 
salle du Palais. Celui de la cour criminelle, construit 
à la même époque, est également remarquable. Les 
deux ailes sont réunies sur la rue par une grille 
qui ferme la cour, qu'on appelle encore Cour du 
Mai. 

14. 



162 CURIOSITES 

Jusqu'en 1787, l'entrée du Palais-de-Justice resta 
formée de deux petites portes cintrées en guichet 
de prison, qui y donnaient accès en s'ouvrant sur la 
rue de la Barillerie, alors ruelle étroite et sombre. A 
cette époque, Louis XVI fit déblayer les ignobles 
bâtiments qui encombraient la rue et la place ; la 
façade fut rajustée , la cour s'étendit derrière une 
grille remarquable par le goût et la richesse; un 
grand et bel escalier conduisit à la galerie par un 
péristyle, au front duquel on plaça les figures de la 
Justice, de la Prudence et de la Force. C'est au bas 
du grand escalier que s'exécutaient, dans certains 
cas, les sentences rendues contre les accusés. Là fut 
lacéré et brûlé pubUquement par les mains du bour- 
reau, le 11 juin 1762, VÉmile ou Traité (Téducation 
de J.-J. Rousseau, condamné par arrêt du Parlement 
du 9, même mois. — Le 21 juin 1786, à six heures 
du matin, la comtesse de la Motte, condamnée le 
31 mai, pour l'affaire du collier, dans laquelle était 
compromis le cardinal de Rohan, à être fouettée, 
marquée sur les deux épaules de la lettre V, à faire 
amende honorable la corde au cou, et à être enfer- 
mée à l'hôpital à perpétuité, fut conduite au pied du 
grand escalier, où on lui fit lecture de son arrêt. 
Cette lecture la mit dans une fureur impossible à 
décrire. Aussitôt, cinq à six bourreaux s'emparèrent 
de sa personne, la jetèrent à terre, et, tant bien que 
mal, celui de Paris fit son office de la fustiger et de 



DE LA CITÉ DE PARIS. 163 

la marquer sur chaque épaule, pendant qu'elle vo- 
missait des imprécations contre les juges et le cardi- 
nal. On la conduisit immédiatement après à l'hôpital 
de la Salpêtrière, d'où elle s'évada en juin 1787. — 
Avant la Révolution, un grand arbre était planté tous 
les ans, le dernier samedi de mai, par les clercs de 
la Basoche, au bas de cet escalier; des deux côtés de 
cet arbre se voyaient les armes de la Basoche, qui 
étaient d'azur à trois écritoires d'or, et qui avaient 
deux anges pour supports. — En 1599, le Parlement 
fit faire un montoir de pierre dans la cour du Mai, 
pour que les anciens conseillers pussent remonter 
plus facilement sur leurs chevaux ou sur leurs 
mules; alors un conseiller, dit Saint-Foix, offrait à 
son confrère la croupe de son cheval, comme il lui 
ofire aujourd'hui une place dans son carrosse. — Le 
24 juin 1594, jour de la Saint-Jean, on fit un grand 
feu de joie au milieu de la cour du Palais, où on 
brûla la Ligue, le légat et les Seize ; on y avait peint 
toutes sortes de moines, prêtres et gens d'église, dont 
beaucoup de peuple murmura {Journal de V Etoile, 
sous Henri IV). 



MONUMENT ANTIQUE 



En 1784, on découvrit, à une grande profondeur, 



164 CURIOSITÉS 

dans une fouille qui fut faite sous les bâtiments qui 
bordent la rue de la Barillerie, en avant de la Sainte- 
Chapelle, un cippe quadrangulaire haut d'environ 
3 mètres. Sur Tun de ses côtés, on reconnaît faci- 
lement le dieu Mercure, représenté avec tous ses 
attributs. Sur une autre face, on voit ime image 
d'Apollon armé de Tare et du carquois. Il tient d'une 
main un poisson, et de l'autre s'appuie sur un 
gouvernail. Le troisième côté représente une femme 
qui porte un caducée. Enfin, sur la dernière face, se 
trouve un jeune homme couvert du paludamentum. Il 
a des ailes et tient dans la main droite un globe ; il 
pose le pied sur un gradin et semble prêt à s'élancer 
dans les airs. Ce cippe est d'une pierre commune pa- 
reille à celle des sculptures de l'autel des Nantes pa- 
risienSy érigé sous Tibère et trouvé, en 1711, sous le 
chœur de TégUse Notre-Dame. Ce cippe est à la Bi- 
bliothèque impériale. 



LA* SAINTE-CHAPELLE DU PALAIS 

La profonde vénération de Louis IX pour les reli- 
ques qu'il avait acquises de l'empereur Beaudoin, 
l'engagea à faire élever un monument spécialement 
destiné à les contenir; c'est pour satisfaire à ce pieux 
désir que, par lettres patentes datées de Tan 1245, il 



DE LA CITÉ DE PARIS. 165 

fonda la Sainte-Chapelle , qui paraît avoir été élevée 
sur l'emplacement d'une petite chapelle Saint-Nicolas, 
fondée par Louis le Gros. 

Pierre de Montereau, habile architecte de cette 
époque, fut choisi par saint Louis pour élever ce 
monument, qu'il termina dans l'espace de trois ans, 
et pour lequel il dépensa la somme de quarante 
mille livres tournois (environ sept cent quatre-vingt- 
dix mille francs). Les reliques et les châsses avaient 
coûté cent mille livres tournois (environ un million 
neuf cent soixante-quinze mille francs). 

Dans l'origine, ce monument se composait de la 
grande chapelle à deux étages qui existe encore, et 
d'une sacristie en forme de chapelle qui se trouvait 
accolée à la façade du nord ; dans l'étage supérieur 
de cette sacristie se trouvait le trésor des Chartres. La 
chapelle haute n'avait de communication avec le Pa- 
lais que par une large galerie ; elle servait uniquement 
de chapelle royale. La chapelle basse était consacrée 
aux domestiques du palais. — En 1783, les construc- 
tions faites en remplacement des bâtiments détruits 
par l'incendie du Palais en 1776 occasionnèrent la 
démolition de la sacristie de la Sainte-Chapelle. Sous 
Louis XIV, on avait construit une nouvelle flèche qui, 
à cause de son mauvais état, fut détruite quelques 
années avant la Révolution de 89. On vient de refaire 
cette flèche qui est des plus remarquables. 

On peut regarder la Sainte-Chapelle comme une 



166 CURIOSITÉS 

église modèle, autant pour la pureté du plan et Télé^ 
gance de sa construction que pour la richesse des 
sculptures qui la décorent. Les plus beaux vitraux, 
admirables par l'expression du dessin et la vivacité 
des couleurs, garnissent les croisées ; ils représentent 
l'histoire de l'ancien et du nouveau Testament ; les 
douze apôtres, adossés aux principaux piliers, sont 
remarquables par la pureté du dessin, Télégance et 
le bon goût des draperies, ainsi que par le fini de 
l'exécution. Derrière le maître -autel, au rond-point 
de l'église, est une voûte posée sur quatre piliers 
formant une grande arcade en ogive, ornée de sculp- 
tures, de dorures et d'incrustations imitant les pierres 
précieuses; c'est là que se trouvaient les châsses 
renfermant les saintes reliques. 

En Tannée 1 79 1 , les reliques furent retirées de leurs 
châsses, qui étaient d'or et garnies des plus belles 
pierres de couleur que produise TOrient. Ce dépouil- 
lement se fit en présence de Bailly, maire de Paris; 
de l'évêque de Paris, Gobel ; du chantre de la Sainte- 
Chapelle, de rhuissier-priseur Poultier; de Doyen, 
peintre du roi, et de M. Lenoir, commissaire des 
objets d'art. Les reliques furent remises à l'évêque 
de Paris pour être déposées à l'église Notre-Dame; 
l'or et les pierres précieuses furent portés à l'hôtel 
des Monnaies. 

Charles VI et Isabeau de Bavière furent couronnés 
dans la Sainte-Chapelle, le 23 août 1389. — Le célèbre 



DE LA CITÉ DE PARIS. 167 

Boileau-Despréaux, né dans une mansarde d'une 
maison située dans la cour du Palais- de-Justice, fut 
enterré dans la basse Sainte-Chapelle, en 1711 . 

Avant la Révolution, une cérémonie qui occasion- 
nait des indécences de plus d'un genre s'exécutait de 
temps immémorial la nuit du vendredi au samedi- 
saint à la Sainte-Chapelle. A minuit, tous les soi-disant 
possédés qui voulaient être guéris du diable qui les 
tourmentait se rendaient dans cette église , oùle grand 
chantre les touchait avec du bois de la vrme croix. 
Aussitôt leurs hurlements cessaient, leur rage se 
calmait, leurs contorsions s'arrêtaient et ils rentraient 
dans leur état naturel. Ces énergumènes étaient tout 
bonnement des mendiants qu'on exerçait de longue 
main et qu'on payait pour jouer un pareil rôle. Cette 
indécente cérémonie fut définitivement supprimée en 
1781.— Sous le Directoire, le club, dit Cercle de la 
Sainte-Chapelle, tenait ses séances dans cet édifice. 
Plus tard, la Sainte-Chapelle servit de magasin à 
farine. En 1 802, elle fut affectée au dépôt des archives 
judiciaires, qui y sont restées jusqu'à l'époque où 
fut décidée la restauration de ce charmant édifice, 
confiée au talent de MM. Violet-le-Duc et Bœswil- 
valde. 



16« CURIOSITES 



CHAPELLE SAINT-MICHEL 

Dans la rue de la Barillerie, entre la Sainte-Cha- 
pelle et la rue du même nom, il y avait sous la 
première race une petite place, sur laquelle fut bâtie 
la chapelle Saint-Michel. Il paraît qu'elle était d'une 
haute antiquité ; car, dès le xn® siècle, elle est appelée 
Ecclesia Sancti-Michaelis de platea (église de Saint- 
Michel de la place). Philippe- Auguste y fut baptisé, le 
22 août 1165. Ce prince y fonda dans la suite une 
confrérie de pèlerins qui auraient fait un voyage au 
Mont-Saint-Michel. Cette chapelle exista jusqu'en 
1782. 



RUELLES 

il y avait encore autrefois, dans la rue de la Baril- 
lerie, trois ruelles qui sont désignées dans les anciens 
titres. Voici où elles étaient situées : à peu près où 
se trouve la rue de la Sainte-Chapelle était la rvslle 
des Étuves Saint-Michel; elle longeait la chapelle de ce 
nom. — A gauche de la cour du Palais-de-Justice était 
la ruelle de Saint-Èloi, ainsi nommée parce qu'elle 



DE LA CITÉ DE PARIS. 169 

faisait face à cette église. — La troisième, nommée 
rvslle de la Sirène, était à gauche de la même cour 
du Palais, où est la petite entrée des galeries ; elle 
faisait face à l'église Saint-Barthélémy, et devait son 
nom à l'enseigne de la maison voisine. 



TOUR DE l'horloge 

La tour de THorloge du Palais, qui s'élève à l'angle 
du quai et de la rue de la Barillerie, doit son nom à 
la première grosse horloge établie sur les înonuments 
publics de Paris ; elle fut faite par Henri de Vie, que 
Charles V fit venir d'Allemagne en 1370, et que ce 
prince fit loger dans cette tour pour en avoir soin, 
en lui assignant une rente de six sols parisis par 
jour sur les revenus de la ville de Paris. Cette hor- 
loge fut par la suite ornée de figures en terre cuite 
de Germain Pilon, représentant les Lois, la Justice, 
avec les armes de Henri III. A force d'avoir été répa- 
rée, elle était devenue, au xvn® siècle, une machine 
toute neuve : le cadran fut complètement restauré 
sous Henri II, Charles IX et Henri III. Voici la des- 
cription que nous en donne l'historien Rabel : 

« L'an 1585, sur la fin du mois de novembre, fut 
t achevé l'ouvrage du quadran du Palais, lequel, 
^ avec la décoration, est estimé le plus haut de toute 

15 



170 CURIOSITÉS 

la France. Le conducteur d'icette ouvrage fut Ger- 
main Pilon, maître statuaire, et Tun des premiers 
en son art; lequel a rendu des ouvrages si parfaits 
en notre ville de Paris et autres lieux de France 
que la mémoire en sera perpétuelle. Du haut d'ice- 
lui quadran y a premièrement le pourtraict d'une 
colombe signifiant le Saint-Esprit, sous laquelle 
est une couronne de laurier qui est dessus, et deux 
autres couronnes qui sont sur les écus de France et 
« de Pologne : le tout enclos d'un collier de Tordre 
« du Saint-Esprit..., et au-dessus cet écrit : 

Qui dédit ante duos tripîicem dabit ille coronam . 

(Celui qui lui a déjà donné deux couronnes lui en donnera 
une troisième.) 

« En l'un des côtés du quadran est représentée la 
« Piété, tenant un livre ouvert, auquel est écrit : 

Sacra Dei ceîehrare pius, regale Urne jus. 
(Observateur pieux de la loi de Dieu, respecte le droit royal.) 

Machina quœ bis sex tam juste dividit horas, 
Justitiam servare monet legesque tueri, 

(La machine qui divise si exactement les douze heures du 
jour nous avertit d'observer la justice et d'obéir aux lois.) 

« Ces inscriptions sont de Jean Passerat, professeur 
« en éloquence. • 



DE LA CITÉ DE PARIS. 171 

Ce cadran avait été complètement détruit ; celui que 
Ton admire aujourd'hui est une reproduction qu'on 
s'est efforcé de rendre aussi exactement que possible. 
M. Toussaint a modelé les figures qui le décorent. 

La lanterne de cette tour contenait une cloche 
appelée Tocsin ; elle jouissait de la prérogative de 
n*être mise en branle que dans les rares occasions, 
lors de la naissance ou de la mort des rois et de leurs 
fils aînés. Cependant elle enfreignit cette loi pour 
devenir l'instrument d'un des plus horribles attentats 
que la tyrannie et le fanatisme puissent commettre ; 
elle fut une des cloches de Paris qui, dans la nuit 
du 24 août 1572, donnèrent le signal des massacres 
de la Saint-Barthélémy : elle a été, dit-on, pour cette 
cause, détruite pendant la Révolution. . 

En 1843, on a repris en sous-œuvre la fondation de 
cette tour, dans l'intérieur de laquelle on a construit 
un corps de garde pour soixante-cinq hommes, qui se 
prolonge jusqu'à l'extrémité de l'ancien corps de 
garde, qui se trouve annexé au nouveau. La porte 
d'entrée est vitrée dans sa partie supérieure, comme 
pourrait Tétre celle d'un vestibule; mais, en cas 
d'attaque, il existe des volets fixés de chaque côté dans 
les parois du cintre : ces volets en chêne, de 5 cen- 
timètres d'épaisseur, sont revêtus dans toute leur 
étendue d'une forte plaque en fer, et de distance en 
distance percés de créneaux; cet appareil est ensuite 
assujetti et maintenu par une barre de fer fixée aussi 



172 CURIOSITÉS 

dans rintérieur du mur et qui se place transversale- 
ment. Les fenêtres sont garnies également de volets 
semblables qui se ferment aussi au moyen d'une 
barre de fer d'environ 4 centimètres d'équarrissage 
tournant sur un axe. A droite en entrant est une 
porte qui conduit dans la chambre des officiers, éta- 
blie dans le local précédemment occupé par la bouti- 
que de ringénieur Chevalier; elle est parquetée et 
boisée en chêne à la hauteur de 3 mètres. Ellie est 
percée dans le bas de trois croisées, deux donnant 
sur le Pont-au-Ghange et Tautre sur le nouveau Tri- 
bunal de Commerce. A la hauteur de la boiserie, il 
existe dans le pourtour, sur les trois faces du bâti- 
ment donnant à Textérieur, une galerie à laquelle 
on arrive par deux échelles de meunier fixées contre 
la muraille et pouvant se relever ou s'abattre à vo- 
lonté. Cette galerie correspond à de petites croisées 
évasées par le dehors et crénelées de la même ma- 
nière que toutes les autres, au moyen de volets 
mobiles comme ceux que nous avons décrits plus 
haut. Dans Ig, saillie du bâtiment donnant sur le quai 
de l'Horloge, on a pratiqué une meurtrière, défendue 
de même manière. A côté du poêle, situé en entrant 
à gauche, se trouve un tuyau acoustique, ou porte- 
voix, qui correspond de cet endroit au faîte de la 
tour, dans le campanile qui servait d'observatoire à 
Vingénieur ChevaUer. Là sera placée une sentinelle 
qui correspondra de cette manière avec le poste, et 



DE LA CITE DE PARIS. 173 

pourra donner ou recevoir les avertissements néces- 
saires, n existe ensuite des sonnettes, Tune dans le 
haut, l'autre dans le bas, qui serviront à prévenir les 
soldats du poste, ou la sentinelle, lorsqu'ils auront 
un avertissement à transmettre ou à recevoir. 

Le Palais-de-Justice étant devenu insuffisant pour 
contenir tous les services judiciaires, on élève en ce 
moment de nouveaux bâtiments. Lorsque les con- 
structions seront achevées, le Palais-de-Justice ren- 
fermera, au nord, sur le quai de THorloge, la Cour de 
cassation ; au couchant, attenant et sur la nouvelle 
place de Harlay, se trouveront les deux salles de la 
Cour d'assises et de la Cour impériale; au midi, sur 
le quai des Orfèvres , la préfecture de police ; à la 
suite, sur la rue nouvelle, les chambres de police 
correctionnelle; au levant, rue de la Barillerie, le 
parquet du procureur impérial et des juges d'instruc- 
tion; enfin, attenant à la tour de THorloge, les tribu- 
naux de première instance. 

Le Palais-de-Justice a été le théâtre d'événements 
remarquables, dont je ne citerai que les principaux : 

Le 6 octobre 1308, il se tint dans le jardin de ce 
palais une assemblée nombreuse, devant laquelle 
comparut l'évêque de Troyes, Guichard, accusé de 
magie, d'impiété et de dépravation. Après une longue 
discussion, Tévêque fut mis en prison au Louvre, où 
il demeura jusqu'en 1313. 

En 1357, Robert deClermont, maréchal de France, 

15. 



174 CURIOSITÉ^S 

et Jean de Ghallons, maréchal de Champagne, furent 
massacrés dans la cour du Palais, en présence de 
Charles, duc de Normandie, privés même des hon- 
neurs de la sépulture, pour avoir fait enlever de 
l'église Saint-Merry un garçon changeur , meurtrier de 
Jean Baillel, trésorier du prince, et l'avoir fait pendre 
à MontfaucoD, d'où il fut détaché par ordre de Tévê- 
que de Paris, et ensuite porté en grande cérémonie à 
Saint-Merry, où on lui fit de magnifiques funérailles. 
Pendant les guerres civiles du règne de Charles VI, 
dans la nuit du 28 au 29 mai 1418, Perrinet le Clerc, 
fils d'un quartenier de la ville de Paris, prit sous le 
chevet du lit de son père les clefs de la porte de 
Bussy, et l'ouvrit aux troupes du duc de Bourgogne. 
Ces troupes, auxquelles se joignit la plus vile popu- 
lace, tuèrent et emprisonnèrent tous ceux qui étaient 
opposés à la faction de ce prince, et qu on appelait les 
Armagnacs. Le 12 juin, le carnage recommença avec 
une plus grande fureur ; la populace se fit ouvrir les 
prisons, et mit le feu à celles dont elle ne put s'empa- 
rer. Les plus notables bourgeois, deux archevêques, 
six évêques, deux présidents et plusieurs membres 
du Parlement furent assommés, ou précipités des 
tours de la Conciergerie et du Grand-Châtelet, au bas 
desquelles on les recevait sur la pointe des piques ou 
desépées. « Quant ils trouvoient trop fortes prinsons, 
« où ils ne povoient entrer, si boutoient dedans 
« force de feu, et ceux que dedans étoient n'avoient 



DE LA CITE DE PARIS. 175 

t rien de quoi leur aider, si estaingnoient et ar- 
« doient là dedans à grant martyre, et ne laissèrent 
« en prinson de Paris, sinon au Louvre, pour ce que 
t le roy y estoit, quelque prinsonnier qu'ils ne tuas- 
« sent par feu et par glayve, et tant tuèrent de gens à 
« Paris, que hommes que femmes, depuis celle heure 
« de mynuit jusqu'au lendemain douze heures, qui 
« furent nomhrez mille cinq cent dix-huit. Les corps 
« du connétable Bernard d'Armagnac, du chancelier 
« Henri de Marie, du capitaine Remonet de la Guerre, 
t Paris, Tévesque de Constances, filx de chancelier 
* de France, en la cour de darrière devers la cous- 
« ture, et furent deux jours entiers au pié du degré 
t du pallays sur la pierre de marbre, et puis furent 
« enterrez à sept, à Saint-Martin en ladite cour de 
« darrière la cous ture, et tous les autres à la Tri- 
« nité. » {Journal de Paris ^ sous Charles VI et 
Charles VIL) 

C'est au Palais-de- Justice que fut jugé le maréchal 
de Biron, accusé de haute trahison. Le 27 juillet 1602, 
entre cinq et six heures du matin, on le fit sortir de 
la Bastille et on le conduisit dans un bateau couvert 
de tapisseries, escorté d'un autre bateau renfermant 
quinze ou seize soldats commandés par le chevalier 
du guet. On fit descendre le maréchal dans File du 
Palais, et on le conduisit par le jardin du président 
dans la chambre des enquêtes, dans la grand'cham- 
bre, où il fut placé sur la sellette et interrogé pendant 



176 CURIOSITÉS DE LA CITÉ DE PARIS. 

deux heures: Sur les neuf heures, on le fit reconduire 
à la Bastille. — Le lendemain, toutes les chambres du 
Parlement assemblées allèrent aux opinions ; par 
arrêt solennel, le maréchal fut condamné par cent 
vingt-sept juges à être décapité en Grève. Toutefois, 
sur les instances des parents de Biron, le roi permit 
que l'exécution eût lieu dans Tintérieur de la Bas- 
tille, où Biron fut décapité le 31 juillet, à onze heu- 
res du matin. 

Le 8 juillet 1617 , Tarrêt du Parlement qui con- 
damnait la maréchale d'Ancre à avoir la tête tranchée 
en place de Grève lui fut lu à midi dans la cour du 
Palais, devant une foule immense accourue pour 
examiner la contenance de cette favorite naguère si 
puissante. A genoux, la tête baissée, elle chercha à 
se cacher le visage dans ses coiffes pour soustraire 
son humihation à cette multitude qu'elle avait si 
longtemps vue à ses pieds; mais on la contraignit 
d'entendre son arrêt à visage découvert. 



CHAPITRE XI 



CONCIERGERIE 

La Conciergerie était la prison du Parlement. Les 
bâtiments actuellement affectés à cette prison sont 
formés de l'ancien grand préau, autrefois le jardin 
du Palais, de la salle des gardes de saint Louis, des 
tours de Montgomery et duGrand César, de quelques 
additions modernes et de dispositions intérieures 



178 CURIOSITÉS 

que les anciens bâtiments ont subies postérieure- 
ment à rincendie de 1776. La Conciergerie est une 
des prisons où furent renfermés les partisans des 
Armagnacs après la trahison qui livra Paris aux 
sicaires du duc de Bourgogne. 

Le 12 juin 1418, tous les prisonniers, parmi les- 
quels se trouvait le comte d'Armagnac, connétable 
de France, y furent massacrés, et leur corps exposé 
aux outrages d'une troupe furieuse, qui massacra 
également les détenus dans les prisons de Saint-Éloi, 
du grand et du petit Châtelet, du For-l'Évêque, de 
Saint-Magloire, de Saint -Martin des Champs, du 
Temple, de Tyron, etc 

En face de la porte de la Conciergerie est la porte 
du dépôt, qui ressemble assez à l'entrée d'un caveau 
de famille du Père-Lachaise ; elle est surbaissée de 
même et porte un fronton d'architecture païenne. 
Cette porte, fermée par une grille en fer, donne sur 
un escalier de cave qui débouche sur un palier 
ténébreux, éclairé à toute heure du jour et de la 
nuit par la lueur rougeâtre d'un réverbère. A droite 
il y a des murs massifs, à gauche les salles du dé- 
pôt : ici la salle des femmes, là la salle des enfants, 
plus loin celle des hommes, et enfin la salle du se- 
cret. Tous ces dépôts occupent ce qu'on appelait au- 
trefois les cuisines de saint Louis, et portent le nom 
de Souricière. On pénètre dans chacune des souri- 
cières par une porte en bois et une grille en fer, 



DE LA CITÉ DE PARIS. 179 

séparées Tune de Tautre par un espace quadran- 
gulaire en forme d'antichambre. La souricière du 
secret, qui peut donner une idée de toutes les autres, 
tient à la fois de la cave et des cryptes du moyen âge. 
Elle est longue de 15 mètres et large de 4 environ; 
sa voûte, en arêtes ogivales, s'appuie sur quatre 
colonnes massives, coupées, à leur milieu, par des 
cloisons de brique et de pierre de taille qui limitent 
la salle des deux côtés. Ciette souricière est enfoncée 
à 5 mètres au-dessous du sol, à peu près au niveau 
de' la Seine à l'époque des grandes crues. Elle est 
éclairée par une fenêtre semi-circulaire qui rase le 
trottoir du quai de l'Horloge, et dont les carreaux 
dépolis ne laissent passer qu'une faible clarté, — 
C'est là où Ton dépose le prévenu, qui attend de- 
puis neuf heures du matin jusqu'à dix heures du 
soir qu'il plaise au juge d'instruction de l'envoyer 
chercher par un gendarme. Pour peindre fidèlement 
la souricière, il faudrait la plume de Lesage ou le 
pinceau de Callot. Ce n'est pas un cachot, c'est plus 
horrible. Un cachot a pour lui sa paille et son si- 
lence; mais à la souricière, point de banc pour re- 
poser le corps placé sur lui-même pendant douze 
heures, point de silence pour réfléchir, joint d'air 
pour rafraîchir les poumons infectés de soixante 
individus qui se remuent à grand'peine dans un es- 
pace large de quelques pieds. Ce lieu est pis encore, 
dans ses proportions, que l'instrument dont il a em- 



180 CURIOSITÉS 

prunté le nom : Tanimal que sa gourmandise attire 
dans le piège que la ruse lui a tendu peut au moins 
respirer, grâce à l'ouverture grillée qui le retient. 
Mais la souricière de la prévention n'offre pas même 
aux prévenus ce triste avantage; une étroite lucarne, 
obstruée par un châssis et des barreaux serrés don- 
nant sur une cour large comme une cheminée, est 
le seul accès que puissent trouver les rayons d'un 
faux jour et le seul passage laissé à Tévaporation des 
gaz méphitiques qui se forment dans cette sentine. 
— Voilà le lieu où les prévenus de tous les genres 
sont entassés, où Tinnocent est heurté, froissé par 
le coupable, s'il n'est corrompu par lui ; où la vieil- 
lesse est en butte aux risées et aux outrages d'une 
jeunesse dégradée, où l'enfance joue un rôle encore 
plus dégoûtant. Ge lieu, que renieraient des siècles 
de barbarie et d'ignorance, est placé immédiatement 
au-dessous des sièges qu'occupent des magistrats 
éclairés par de profondes études. 

Espérons que le magicien dont la baguette enchan- 
tée fait tant de métamorphoses depuis quelques an- 
nées dans Paris, daignera faire disparaître une pareille 
horreur I 

En septembre 1792, cette prison renfermait 395 in- 
dividus, dont 76 femmes. Une seule femme, la fa- 
meuse bouquetière du Palais-Royal, qui, par jalou- 
sie, avait fait de son amant un Abélard, fut mise à 
mort; les autres furent rendues à la liberté. Des 



DE LA CITÉ DE PARIS. 181 

hommes, 5 se suicidèrent, 278 furent massacrés, 
36 furent mis en liberté. 

La reine Marie-Antoinette fut enfermée quelques 
moments à la Conciergerie avant son exécution; im 
monument expiatoire a été inauguré, le 16 octo- 
bre 1816, dans le cachot qu'elle avait occupé. — Une 
singularité frappante, c'est que Danton, Hébert, 
Ghaumette et Robespierre, ont successivement habité 
le même cachot. Sous le régime de la Terreur, cette 
prison se remplissait sans cesse par les envois des 
départements, et se vidait sans cesse par le massacre 
et par le transfèrement dans d'autres maisons. Vers 
les derniers mois surtout, c'était l'activité des enfers : 
soixante personnes arrivaient le soir pour aller à 
Téchafaud ; le lendemain , elles étaient remplacées par 
cent autres, que le même sort attendait le jour 
suivant. 



LE PARLEMENT 

Dès les premiers règnes des rois de la troisième 
race, les princes avaient des conseils composés des 
barons et des évêques, où se traitaient les grands 
intérêts de l'Etat. On commença, à la fin du xii* siè- 
cle, à donner à ces assemblées extraordinaires le nom 
département Au commencement duxiii' siècle, les 

16 



182 CURIOSITÉS 

officiers du conseil du roi ne pouvant suffire à juger 
toutes les causes, on en augmenta le nombre. Alors 
ce conseil suprême, tout à la fois politique, admi- 
nistratif et judiciaire, continua à porter le nom de 
Parlement. Avant la Révolution, la cour du Parle- 
ment de Paris était composée de la grand'chambre, 
des trois chambres des enquêtes, d'une chambre des 
requêtes et d'une chambre de la marée, qui avait la 
police générale sur la vente du poisson. 

François I" établit dans le Parlement une chambre 
ardente, c'est-à-dire une chambre qui condamnait au 
feu; elle était spécialement chargée de la 'recherche 
et de la punition des hérétiques, et se composait de 
juges délégués par le Pape. Antoine Mouchi, dont le 
nom est regardé comme Tétymologie de mouchardy 
était le chef de ce terrible tribunal. « Dans son zèle 
furibond, il recommandait au frère d'accuser le frère, 
à la femme d'accuser son mari, au mari d'accuser sa 
femme. Les pères et les mères étaient induits à défé- 
rer leurs propres enfants, voire même à leur servir 
de bourreaux, à faute d'autres. » (Registres criminels 
du parlement, arrêts concernant les luthériens.) 

Le 3 mai 1788, le Parlement ayant rendu im arrêt 
par lequel il déclara que la nation seule a le droit 
d'accorder des impôts par Torgane des Etats-Géné- 
raux, les ministres cassèrent par im arrêt du conseil 
celui du Parlement, et donnèrent Tordre d'arrêter les 
conseillers d'Esprémesoil et Goislard. A minuit, trois 



DE LA CITE DE PARIS. 183 

détachements de gardes françaises, de gardes suisses 
et de cavalerie, avec leurs sapeurs, marchèrent vers 
le Palais, Tinvestirent et en occupèrent les avenues, 
les corridors et les salles. Le marquis d'Agoult, chef 
de cette expédition nocturne, pénétra dans la grand'- 
chambre, où il ne put se défendre d'un sentiment de 
respect à la vue de cent cinquante magistrats et de 
dix-sept pairs de France, tous revêtus des insignes de 
leurs dignités. Il lut d'une voix altérée Tordre du roi 
de s'emparer sans délai et d'arrêter les conseillers 
Duval d'Esprémesnil et Goislard de Montsabert, et 
somma le président de lui désigner ces deux conseil- 
lers. Les magistrats répondirent d'une voix unanime : 
• Nous sommes tous d'Esprémesnil et Goislard; puis- 
« que vous ne les connaissez pas, emmenez-nous tous 
« ou choisissez. » Pour éviter l'emploi de la force, 
d'Esprémesnil se nomma, se livra lui-même, et Gois- 
lard l'imita. Après avoir protesté contre la violation du 
sanctuaire des lois et s'être arrachés des bras de leurs 
collègues éplorés, ils furent faits prisonniers, transfé- 
rés, l'un aux îles Sainte-Marguerite et l'autre à Pierre- 
Encise. Le peuple accompagna ces magistrats en les 
couvrant d'applaudissements. — C'est au Palais-de- 
Justice que siégeait à cette époque la Cour des aides. 
Le 18 août, le comte d'Artois, chargé par le roi d'al- 
ler faire enregistrer à cette cour l'impôt territorial et 
l'impôt du timbre , dont le Parlement avait refusé 
l'enregistrement, fut assez mal reçu par le peuple, 



184 CURIOSITÉS 

qui savait que ce prince avait vivement appuyé réta- 
blissement des impôts, et que même, en parlant de 
l'embarras où la résistance des cours souveraines 
mettait le roi, il s'était écrié : « A sa place, avec 
t six francs de corde, je saurais bien m'en tirer. » II 
fut hué et sifflé d'une manière si alarmante, que le 
comte d'Agoult, son capitaine des gardes, crut devoir 
crier: aux amies! Les soldats font volte-face, mais 
aussitôt la multitude se précipite du haut du grand 
escalier et contraint la force armée à la retraite. Le 
lendemain, la Cour des comptes et la Cour des aides 
protestèrent contre l'enregistrement qui leur avait 
été imposé* 

Le tribunal révolutionnaire fut installé au Palais- 
de-Justice, le 1 7 août 1 792. Avant d'entrer en fonctions, 
les membres du jury se présentèrent un à un sur une 
estrade, et, s'adressant au public, proférèrent succes- 
sivement ces mots : « Peuple, je suis un tel, de telle 
« section, demeurant dans tel endroit, exerçant telle 
« profession : avez-vous quelques reproches à me 
« faire? Jugez- moi avant que j'aie le droit de juger 
« les autres. » Après une minute d'attente, si per- 
sonne n'élevait la voix , il descendait de l'estrade et fai- 
sait place à un autre. — Le tribunal du 17 août fut 
remplacé, le 10 mars 1793, par le tribunal criminel 
extraordinaire. Pendant son peu de durée, il prononça 
sur le sort de soixante-deux individus, dont vingt- 
cinq furent condamnés à mort. 



DE LA CITE DE PARIS. 185 

Le 26 septembre 1793, Merlin de Douai présenta, 
au nom des comités de salut public, de, sûreté géné- 
rale et de législation, un projet de décret en soixante- 
quatorze articles sur l'organisation du tribxmal 
révolutionnaire, qui fut adopté par la Convention 
nationale. Ce tribunal était composé de seize juges, 
d'un accusateur public, de ciuq substituts et de 
soixante jurés. Il était divisé en quatre sections qui 
se tiraient au sort tous les trois mois, tant parmi les 
juges que parmi les jurés. Ce tribunal tenait ses 
séances au Palais-de-Justice, dans deux salles où deux 
sections tenaient audience, tandis que les deux autres 
étaient occupées à Tinstruction des procès. Les au- 
diences avaient lieu, Tune dans la salle dite de la 
Liberté, jadis grand'chambre du Parlement, l'autre 
dans la salle dite de TÉgalité, jadis salle Saint-Louis 
ou tournelle criminelle du Parlement, où siège au- 
jourd'hui la Cour de cassation. 

L'imprimerie du tribunal révolutionnaire n'était 
séparée de la salle des séances de ce tribxmal que 
par un mur où Ton avait pratiqué une fenêtre par 
laquelle on passait les pièces, les notes relatives à 
FafiFaire que l'on jugeait. Souvent le jugement était 
composé et imprimé dix minutes après qu'il avait été 
rendu. Dans le procès des Dantonistes, les colpor- 
teurs vendaient dans les rues leur jugement avant 
qu'on le leur eût prononcé. Après le 9 thermidor, on 
trouva dans l'imprimerie du tribunal révolutionnaire 

16. 



J86 CURIOSITÉS 

des formes de jugements toutes composées et aux- 
quelles ne manquait que le nom des condamnés. C'est 
au Palais-de-Justice , près de la Conciergerie , que 
logeait Taccusateur public Fouquier-Tinville; il oc- 
cupa ce logement depuis le 10 mars 1793 jusqu'au 
21 thermidor (1795), époque où il fut décrété d'accu- 
sation; il ne sortait guère de chez lui que vers dix 
heures du soir pour aller au comité de salut public 
rendre compte à Robespierre, à Billaut-Varennes ou 
à CoUot-d'Herbois , de l'audience du même jour, 
et prendre leurs ordres définitifs qu'il faisait exécuter 
le lendemain. 



PRÉFECTURE DE POLICE 



La préfecture de police, transférée dans l'hôtel de 
la Cour des comptes, construit par ordre de Louis XII, 
a occupé longtemps l'hôtel des premiers présidents 
du Parlement. Construit sur l'emplacement de l'hôtel 
du bailliage du Palais, dont parle Corrozet dans ses 
Recherches,Vh6te[àes premiers présidents devint tour 
à tour la demeure d'Achille de Harlay, qui le fit 
commencer, de M. de Verdun qui l'acheva, de Guil- 
laume de Lamoignon et de ses successeurs dans cette 
charge, jusqu'en 1789, parmi lesquels on distingue : 
de Mesmes, Maupeou, Matthieu-François Mole, Fran- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 187 

cois d'Aligre, Lefèvre d'Ormesson. De 1792 à 1794, 
les quatre maires de Paris : Pétion, Chambon, Pache 
et Fleuriot, y demeurèrent ; et depuis Tannée 1800 
jusqu'à ce jour, cet hôtel fut habité par plus de 
vingt préfets de police. 



QUAI DE l'horloge 

Ce quai commence au Pont-au-Change et finit à la 
place du Pont-Neuf. 

• n fut commencé en 1580. Les travaux, souvent 
interrompus, furent achevés en 1611. Les boutiques 
qui sont sur ce quai étaient autrefois occupées par 
des fabricants de chevelures postiches, appelées per- 
ruques. Aujourd'hui, cet art est porté fort loin ; le plus 
habile artiste en ce genre est Martin, rue des Fossés- 
Montmartre, n°8. 

En 1738, Turgot, alors prévôt des marchands, en 
fit élargir les deux extrémités. En 1816, on augmenta 
encore sa largeur, près du Pont-au-Change, par suite 
de la démohtion des échoppes adossées au Palais- 
de-Justice. 

Son nom lui vient de Fhorloge de la tour bâtie 
sous Philippe le Bel, au xiv* siècle. 

Ce quai a porté encore le nom des Morfondus, en 
raison de sa situation exposée au vent du nord qui 



]88 CURIOSITÉS 

glace, qui morfond les pauvres piétons qui le traver- 
sent pendant Thiver. 

On le nomme aussi vulgairement quai des Lunettes , 
en raison du grand nombre d'opticiens, de lunetiers, 
qui rhabitent. Entre la tour de YHorloge et la tour de 
Monlgomery est une nouvelle porte cintrée qui donne 
entrée à la Conciergerie. Cette porte était autrefois 
entre la tour deMontgomery et la tour du Grand César. 
Il existe, plus loin, une autre tour crénelée, plus 
grosse et moins élevée que les autres, elle fut nom- 
mée la tour d'Argent, parce que le roi saint Louis y 
renfermait son trésor. 



PONT DE CHARLES LE CHAUVE 

Les uns disent qu'il traversait les deux bras de la 
Seine, vers l'endroit où est la tour d'Argent. 
. Quoi qu'il en soit, ceux des historiens de Paris qui 
ont soutenu que ce pont était le même que le Pont-au- 
Change, ont commis une erreur, — Dès Tan 845, les 
Normands , attirés par l'espoir d'un riche Lutin, 
s^'étaient portés sur Paris ; ils s'en seraient rendus 
maîtres, si l'on n'avait pas prodigué l'or pour les en- 
gager à s'éloigner. Mais, comme on devait le craindre, 
cette paix, achetée au prix de 7,000 livres d'argent, 
ne fut que momentanée. Les barbares reparurent 



DE LA CITÉ DE PARIS. 189 

bientôt devant Paris, et de 851 à 861, portèrent le 
ravage dans tous ses environs. Le faible Charles qui, 
au lieu de se défendre les armes à la main , s'était sou- 
mis d'abord au plus honteux des tributs, voulut en- 
fin s'opposer aux incursions de Sigefroy, aussi avide 
que redoutable : il se déteimina à faire construire à 
l'extrémité de la ville un pont qui porta son nom. 

Ce pont était en bois et assis sur des piles de ma- 
çonnerie , il était défendu à ses deux extrémités par 
deux grosses tours ou châteaux de bois. Il paraît que 
ce fut une faible défense contre les Normands ; car, 
en 886, on fut encore obligé de les éloigner en leur 
promettant 7,000 livres d'argent. 

On ignore l'époque où ce pont fut détruit. On en 
voyait encore des restes , du côté du midi , au 
xiii*» siècle. Quant à sa partie septentrionale, elle a 
existé jusqu'au commencement du xvii* siècle. Quel- 
ques historieD s pensent que cette partie est celle qui, 
en 1296, est désignée sotis le nom de Viey>x grand Pont 
de pierre, ensuite pont aux Colombes, ou aux Coulons, 
parce qu'on y vendait des pigeons ; et pont aux Meu- 
niers, à cause des moulins qu'on avait construits 
entre ses arches. D'autres disent qu'il ne doit pas 
être confondu avec la portion septentrionale du pont 
de Charles le Chauve, Ce pont aux Meuniers fut em- 
porté par les glaces en 1196, 1280, 1325 et 1407. 
Fortement ébranlé en 1416, il fut tout à fait emporté 
par les eaux, le 22 décembre 1596. 



190 CURIOSITÉS 

Charles Marchand, colonel des 300 arquebusiers et 
archers de la ville, le fit reconstruire à ses dépens en 
1608, à condition qu'il serait appelé le pont Mar- 
chand. 

Ce pont fut reconstruit en face de la tour de l'Horloge 
(le Pont-au-Change était alors un peu plus haut, à cinq 
toises de là). On ménagea au milieu une rue de trois 
toises, et on éleva des deux côtés des maisons à deux 
étages, peintes à Thuile et ornées d'un cartouche ser- 
vant d'enseigne, où l'on avait peint un oiseau, ce qui 
lui fit donner par le peuple le nom de poni aux Oiseaux. 
n fut achevé en 1609 et procura au public un utile 
passage dont il ne jouissait pas sur le pont aux Meu- 
niers qui était fermé à ses deux extrémités et ne 
s'ouvrait que pour l'usage de ceux qui l'habitaient. 

Le feu ayant consumé ce pont et celui des Chan- 
geurs, en 1621, on fît pour le passage du public un 
pont de bois, qui subsista jusqu'à ce que le Pont-au- 
Change fût fini. 



QUAI DES ORFÈVRES 

Il commence à la place du Pont-Neuf et finit au 
pont Saint-Michel. 

C'était encore, au milieu du xvi« siècle, un terrain 
en pente qui régnait le long de la rivière. Il aboutis- 



DE LA CITÉ DE PARIS. 191 

sait aux murs qui entouraient le Palais-de-Justice et 
son jardin. 

Le quai ne fut commencé qu'en 1580, et terminé en 
1643. Son nom lui vient de la grande* quantité d'or- 
fèvres qui y construisirent des boutiques. 

De la rue de la Barillerie à celle de Jérusalem, on 
voyait ericore, à la fin du xviti® siècle, une rue qui, 
construite en 1623, prit d'abord le nom de rue Neuve, 
puis celui de Saint -Louis ; enfin, en 1 793, le nom de rue 
Révolutionnaire. En 1808, elle fut démolie, et le quai 
des Orfèvres fut prolongé jusqu'au pont Saint-Michel. 



RUE BOILEAU 



Commence à la rue de la Sainte-Chapelle, finit au 
quai des Orfèvres. Elle fut d'abord nommée rue Saint- 
Anne. Cette voie, ouverte en 1631, prit son nom 
d'Anne d'Autriche, mère de Louis XIV. Depuis quel- 
que temps, elle est appelée rue Boileau. 



RUE DE LA SAINTE-CHAPELLE 

Commence rue de la Barillerie, finit au quai des 
Orfèvres. 
Cette rue, nouvellement formée, n'avait autrefois 



192 V CURIOSITÉS 

de maisons que du côté méridional, lesquelles avaient 
la vue sur la Gourdes comptes et sur la Saiiite-Ghapelle. 



RUE DE JÉRUSALEM 

Commence au quai des Orfèvres, finit à Timpasse 
de Nazareth. 

Elle tire sa dénomination des pèlerins qui, à leur 
retour de Jérusalem, étaient logés dans cette rue, 
qu'on doit considérer plutôt comme un passage pu- 
blic que comme une rue. Elle conduit à la porte tou- 
jours ouverte de la Préfecture. 

Cette rue porta encore le nom de V Arcade, à cause 
d'ime arcade qui la traversait. Elle a repris son pre- 
mier nom depuis la Révolution. 



IMPASSE DE NAZARETH 

D'abord rue, puis impasse, elle commence cgur de 
de la Sainte-Chapelle, et finit rue de Jérusalem. 

L'étymologie de cette petite rue est la même que 
celle de la rue de Jérusalem. Jusqu'au commence- 
ment du XVI* siècle, on l'appela rite de Galilée. En 
1843, cette voie pubUque fut réduite à Fétat d'im- 
passe. 



DE LA CITÉ DE PARIS. 193 



RUE DE HARLAY 

(en la cité) 



Elle commence au quai de l'Horloge, finit au quai 
des Orfèvres. Elle a été formée, vers 1607, sur les ter- 
rains concédés à messire Achille de Harlay , en vertu 
des lettres patentes du 28 mai de la même année. 

Harlay naquit à Paris en 1536, fut conseiller au 
Parlement à vingt-deux ans, présidentà trente-six ans, 
et premier président après la mort de Christoplie de 
Thou, son beau-père. 

Pendant les troubles de la Ligue, Achille de Harlay 
montra une fermeté, une grandeur d'âme qu'on ne 
saurait trop exalter. L'ambitieux duc de Guise avait 
ameuté les Parisiens contre Henri IH. Pour se sous- 
traire à la fureur de ses ennemis^ le roi fut contraint 
de quitter sa capitale. Henri de Valois et le duc de 
(juise avaient été au-dessous de leur position, « Tun 
avait failli de cœur, l'autre de crime. » Après le dé- 
part du roi, le Balafré assembla le peuple, fit nom- 
mer de nouveaux ofîiciers de ville et confia . à ses 
affidésles postes les plus importants. Mais, pour affer- 
mir sa puissance, le duc avait besoin d'un arrêt du 
Parlement. Gruise se rendit à l'hôtel du premier pré^ 

17 



1U4 CURIOSITÉS 

sideDl. Achille de Harlay se promenait dans son 
jardin ; le duc va Ty chercher : au détour d'une 
allée , le magistrat et l'ambitieux se rencontrent : 

« Monsieur le premier président, dit le duc de 
« Guise, nous vous prions d'assembler le Parlement 
« à TefFet de prendre des mesures convenables aux 
« circonstances.— Je ne puis le faire, monseigneur, 
« répond de Harlay, en regardant le duc d'un air 
« sévère; quand la majesté du prince est violée, le 
« magistrat n'a plus d'autorité. » Le duc irrité fait 
un pas vers Achille de Harlay : « Vous avez jusqu'à 
« demain, mais songez-y bien, monsieur le prési- 
« dent, il y va de votre existence.— C'est une honte, 
« monsieur, répliqua de Harlay, c'est une honte 
t que le valet mette le maître hors de la maison. 
« D'ailleurs, mon âme est à Dieu, mon cœur est au 
« roi, et à l'égard de mon corps, je l'abandonne aux 
t méchants qui désolent ce royaume. » Le duc de 
Guise se retira. Le lendemain, il s'adressa au prési- 
dent Brisson, qu'il trouva plus complaisant. 

Henri IV récompensa la noble fermeté du premier 
président Achille de Harlay, et le vertueux magistrat 
profita de la paix pour rétablir la justice et faire res- 
pecter les lois. La mort vint le surprendre; il avait 
quatre-vingts ans, et travaillait encore^ En lui don- 
nant, en 1607, les deux petites lies qui étaient au 
bout du jardin du bailliage et à la pointe occidentale 
du Palais, on avait comblé le petit bras de rivière 



DE LA CETÉ.DIC PARIS. 195 

qui les séparait, et on y éleva des maisons qui ont 
formé cette rue. 

En 1672, on abattit une maison au milieu de cette 
voie, afin d'y pratiquer une porte et un passage 
pour aller au Palais. Cette large arcade, dans Taxe 
de la place Dauphine, donne entrée dans la cour 
de Harlay. A gauche est la Cour Lamoignon^ construite 
par les ordres de M. Guillaume de Lamoignon, sei- 
gneur de Basville, premier président du Parlement 
de Paris, mort en 1677. On allait autrefois de cette 
cour à la cour Neuve, par une communication nom- 
mée rue Basmlle, et par une autre issue donnant sur 
le quai de l'Horloge, nommée passage Lamoignon. 



PLACE DAUPHINE 

Elle commence à la rue de Harlay, et finit à la 
place du Pont-Neuf. Sur le terrain occupé par cette 
place, on voyait autrefois deux îles; la plus grande, 
qui était du côté du midi, s'appelait ïîle au Bureau. 
Elle tirait sa dénomination de Hugues Bureau qui, le 
6 février 1462, acheta cet emplacement moyennant 
12 deniers de cens et 10 sols de rente annuelle. L'île 
voisine était moins large, mais plus longue; son nom 
allé à la Gourdaine lui venait du moulin dit de la 
Gourdaine ou de la Gourdine, qui en était tout près. 



196 CURIOSITÉS 

Cette dernière a porté aussi le nom d'île du Patriar- 
che. C'est dans l'île au Bureau que Jacques Molay, 
grand-maître des templiers, et Guy, dauphin d'Au- 
vergne, prieur de Normandie, furent brûlés le 1 8 mars 
1314. (De grandes et longues discussions historiques 
eurent souvent lieu au sujet du nom de ces deux îles ; 
on leur a souvent donné des noms et des positions 
qu'elles n'ont jamais eus. Je fais connaître ces erreurs 
au lecteur, en l'assurant de l'exactitude de cette note 
qui est tirée des archives de l'abbaye Saint- Germain 
des Prés, relativement à un bail de ces îles, en date 
du 29 novembre 1511, qui prouve V authenticité de ce 
que je viens d'annoncer ci-dessus. ) 

Henri IV fit donation de ces terrains au président 
de Harlay qui fit faire les maisons de la place Dau- 
phine en pierre et brique, de même symétrie. 

Cette voie publique fut appelée Place Dauphine, en 
rhonneur du Dauphin, depuis Louis XIII. En 1792, 
c'était la Place de Thionville, en l'honneur de l'intré- 
pide défense que cette ville venait d'opposer aux 
armes de Cobourg. 

De 1801 à 1803, on éleva sur cette petite place une 
fontaine, ouvrage de MM. Percier et Fontaine, dé- 
corée d'un buste du sage et brave Desaix, mort au 
champ de bataille de Marengo. Cette place, depuis 
l'érection de ce monument, avait pris le nom de Place 
Desaix. Elle a repris sa première dénomination de- 
puis 1814. 



DE LA CITÉ DE PARIS. 197 



PLACE DU PONT-NEUF 



La place du Pont-Neuf ne mérite que je parle d'elle, 
que pour dire qu'elle existe. 

A cet emplacement, il y avait une maison ou Hôtel 
des Étuves. 



17. 



CHAPITRE XII 



PONT-NEUF 

Ce pont traverse les deux bras delà Seine, et joint, 
ens'appuyant sur la pointe de la Cité, lesqnaisdela 
Mégisserie et de l'Ecole, aux quais Con ti et des Grands- 
Auguslins; sa longueur totale est de 229 mètres 
41 centimètres. 

Le samedi 31 mai 1 578, après avoirvu passer le su- 



202 CURIOSITÉS 

panile renfermant un carillon qui exécutait diffé- 
rents airs au moment où chaque heure était prête 
à sonner. 

Avant la Révolution, Rulhières était gouverneur 
de la Samaritaine. Le peintre de marine Crépin y a 

s 

demeuré jusqu'à l'époque de sa destruction, et y a 
composé ses meilleurs tableaux. 



LA STATUE DE HENRI IV 

En 1614, on plaça sur ce pont, à la pointe de l'île, 
la statue équestre de Henri IV. 

Le roi dé bronze dont parle Saint-Amand n'est 
pas celui que nous voyons maintenant sur le Pont- 
Neuf. 

C'est un grand exemple de la fatalité des desti- 
nées que celle du premier cheval sur lequel on fit 
monter Henri IV. 

D'abord il n'avait point été fait pour son cavalier. 
Ferdinand, duc de Toscane, l'avait fait faire pour lui 
ou du moins pour sa statue, par Jean de Boulogne, 
élève de Michel-Ange. Mais Ferdinand étant mort, 
Gôme II fit cadeau du palefroi de son prédécesseur à 
Marie de Médicis, régente de France. C'était s'épar- 
gner adroitement les frais d'une statue. On l'embar- 
qua ; il fit naufrage, et voilà le cheval marin pendant 



DE LA CITÉ DE PARIS. 203 

un an sur les côtes de la Normandie. Il fut retiré à 
grands frais du fond de la mer, et il parut à Paris le 
23 août 1614 : debout sur le piédestal qu'on lui 
donna, il attendit bien des années, le pied en Tair, la 
venue d'un complaisant cavalier I 

Dupré acheva enfin la statue de Henri IV, et voilà 

le Béarnais à califourchon sur un cheval toscan! 

Il était représenté la tête nue, couvert d'une armure, 
tenant d'une main la bride de son cheval et de l'au- 
tre son bâton de commandement. 

En 1792, toutes les statues des rois qui étaient à 
Paris furent renversées pour faire des canons. Celle- 
ci n'en fut pas exemptée. 

En 1814, elle fut rétablie provisoirement en plâtre. 
Celle que nous voyons aujourd'hui a été fondue le 
3 octobre 1817, dans les ateliers de Lemot, au fau- 
bourg du Roule. 

Lotis XVIII posa, le 23 octobre suivant, la pre- 
mière pierre du piédestal, dans l'intérieur duquel on 
plaça un magnifique exemplaire de la Henriade. 
Cette statue fut érigée le 25 août 1818, et a coûté 
534,860 francs. 

En 1617, l'évêque de Luçon, qui fut depuis cardi- 
nal de Richelieu, passait sur le Pont-Neuf précisé- 
ment au moment où la populace effrénée y exerçait 
mille cruautés sur le cadavre du maréchal d'Ancre. 
Son carrosse ayant malheureusement pressé un de 
ces furieux, le prélat craignit que pendant la querellé 



204 CURIOSITÉS 

qui s'éleva entre son cocher et cet homme, on ne le re- 
connût, et que la haine qu'on avait pour Concini, au- 
quel on savait qu'il devait toute sa fortune, ne s'éten- 
dît jusque sur lui. Son péril lui fit naître l'idée de 
demander ce qu'on faisait. On lui répondit qu'on brû- 
lait le cadavre du maréchal. Aussitôt il loua le zèle 
des Parisiens, les appela bons serviteurs de Sa Ma- 
jesté, et se mit à crier : Vive le roil On lui donna sur- 
le-champ passage, et sa présence d'esprit le sauva du 
plus grand danger. 

Vers 1619, on voyait sur la place du Pont-Neuf le 
théâtre de Tabarin, bouffon gagé d'un célèbre ven- 
deur de baume et d'onguent, nommé Mondorf on y 
représentait des petites pièces à intrigues et des farces 
dites tabariniques. 

Le Pont-Neuf était déjà à cette époque le rendez- 
vous commun des étrangers, le lieu le plus passant 
de la ville ; on le trouvait constamment couvert d'une 
foule de curieux, de charlatans, de banquistes qui 
faisaient des tours de gobelets, de marchands de 
chansons, qui les chantaient sur des airs connus, que 
nous nommons ponts-neufs» Maître Gonin y avait ses 
tréteaux, et Brioché ses marionnettes. 

Le Pont-Neuf, si peuplé de marchands et de char* 
latans, l'était aussi par de nombreux filous, par de 
hardis voleurs qui n'appartenaient pas toujours aux 
dernières classes de la société. C'est là que les tir&- 
laines enlevaient violemment les manteaux des bour- 



N. . 



DE LA CITÉ DE PARIS 205 

geois, et que les coupeurs de bourses tranchaient 
avec adresse les cordons de celles que les hommes 
et les femmes portaient alors pendues à leur ceinture. 
On y voyait pêle-mêle des vagabonds de toutes les 
classes, déjeunes débauchés appartenant à d'honnêtes 
familles , des gentilshommes sans argent et des 
princes échappés aux entraves de l'étiquette, cher- 
chant dans cette bagarre des distractions aux ennuis 
de la grandeur. ^ 

Le comte de Rochefort dit dans ses Mémoires que 
Gaston, duc d'Orléans, frère de Louis XIII, après avoir 
fait la débauche, prit plaisir à s'embusquer au soir 
sur le Pont-Neuf, à la tête d'une escouade de détrous- 
seurs, tous bons gentilshommes, où il enleva cinq à 
six manteaux aux passants : le comte de Rochefort, 
le comte d'Harcourt et le chevalier de Rieux étaient 
de la compagnie de Monseigneur pour cette noble 
expédition. 

Le poète Berthaud, qui a fait un ouvrage en vers 
burlesques sur la ville de Paris, s'exprime ainsi en 
parlant du Pont-Neuf : 

Rendez-vous des charlatans, 

Des filous, des passe-volans ; 

Pont-Neuf, ordinaire théâtre 

Des vendeurs d'onguent et d'emplâtre, 

Séjour des arracheurs de dents, 

Des fripiers, libraires, pédans; 

Des chanteurs de chansons nouvelles, 

18 



206 CURIOSITÉS 

D'entremetteurs de demoiselles, 
De coupe-bourses, d'argotiers, 
De maîtres de sales métiers, 
D'opérateurs et de chimiques. 
Et de médecins purgitiques, 
De fins joueurs de gobelets, 
De ceux qui rendent des poulets. 

Avant la Révolution, des petits marchands dres- 
saient chaque jour sur les trottoirs du Pont-Neuf de 
petites boutiques qu'ils enlevaient tous les soirs, et 
qui étaient louées au profit des grands valets de pied 
du roi. 

En 1775, on fit de grandes réparations au Pont- 
Neuf, pour abaisser et rétrécir les demi-lunes qui, 
s'élevant à l'aplomb des piles, laissaient un empla- 
cement vague , ordinairement rempli d'immon- 
dices. 

On y construisit vingt loges ou boutiques sur les 
dessins de Soufilot. Aujourd'hui, ces demi-lunes sont 
rétablies dans leur état primitif. 

Le Pont-Neuf, jeté pour ainsi dire au confluent des 
trois divisions principales de Paris, est comme la 
grande artère où passent tout le sang, tous les élé- 
ments de vie de la viller géante. A toutes les heures 
de la journée une foule considérable y circule, et, 
tandis que les piétons envahissent ses trottoirs, des 
milliers d'équipages et de voitures industrielles en 
labourent la voie dans tous les sens. Le Pont-Neuf, 



DE LA CITÉ DE PARIS. 207 

comme édifice, est encore aujourd'hui un des plus 
beaux ponts de l'Europe. 



Ici finit la description de cette fameuse Cité, ber- 
ceau des premiers habitants de ce beau Paris qui fait 
Tadmiration de tous les peuples; de cette ville as- 
sainie et embellie chaque jour par la persévérante 
sollicitude et le bon goût de notre illustre empereur 
Napoléon III. 



Outre ce petit plan de la Cité dressé par moi-^némo 
en 1862, je crois devoir offrir à mes lecteurs un mor- 
ceau fort curieux, intitulé Le dit des rues de Paris, 
par Guillot de Paris, poëte qui écrivait vers la fin du 
xiii* siècle. Cette pièce fut découverte à Dijon, en 
1751, par le savant abbé Lebeuf, qui le premier la 
publia. 11 y joignit des notes intéressantes dont 
j'enrichis ce livre, en y faisant toutefois les correctioDS 
et les augmentations nécessaires '. 

Comme qiielqTjes expressions de GuiUot pouvaient 

qu'on par en»,' un par la 



210 CURIOSITÉS 

blesser mes lecteurs, j'ai retranché plusieurs passa 
ges, qui d'ailleurs sont tout à fait inutiles pour Tin 
telligence du texte. 

Ci-commenco le dit des rues de Paris. 
Maint dit a fait de rois, de conte 
Guillotde Paris en son conte; 
Les rues de Paris briément 
A mis en rime, ovez comment. 



LA CITÉ 

La rue du Sahîon • par n'ame (mon âme) ; 

Puis Neuve- Nostre-Damc ', 

En près est la rue à Coulons^. 

Dilluec ne fu pas mon cuer Ions (tardif), 

La ruele trouvai briément 

De Saint-Christofle * et ensement (pareillement) 

La rue du Parvis * bien près, 

Et la rue du Cloistre^ après, 

Et la grant rue Sainl-Christofle^ : 

1. Elle était entre VHôtel-Dieu et la rue Neuve-Notre-Dame, 

2. Elle n'a été percée que vers la fin du xii* siècle. 

3. Ruelle qui était près S ainte-Geneviève-des-Ardents. -^Cou- 
lons signifie pigeons. 

4. La ruelle Saint-Christophe prit le nom de rue de Venise. 

5. On y vendait des oignons en 1491, puis des jambons le 
mardi-saint. 

G. Hue du CloUre-N otrc-Dame , 

7. On l'appelle simplement rue Saint-Christophe. 



DE LA CITÉ DE PARIS. 211 

Je vi par le trelis d*un coffre 

En la rue Saint^ère-à^heiLS * 

Oisiaus qui avaient piez beus (raccourcis) 

Qui furent pris sur la marinne (sur le bord de la mer). 

De la rue Sainte -Marine ' 

En la rue Cocatrix ' vins 

Où l'on boit souvent de bons vins 

Dont maint homs souvent se varie (s'enivre). 

La rue de la Confrarie* 

Nostre-Dame et en Char oui * 

Bonne taverne a chiez ovri. (Assez ouverte, de même que 

chengle, sangle.) 
La rue de la Pomme ^ asse^ tost 

Trouvai, etpiiis après tantost 

Ce fu la rue as Oubloiers^ ; 

La maint Guillebert à braies. 

Marché Falu^t la luerie^^ 

Et puis la Petite-Orberie *^ 

Qui en la Juerie siet; 

1. Rue Saint-Pierre-aux-BcBufs, On ignore quel oiseau cu- 
rieux on y voyait. 

2. Voyez impasse Sainte-Marine, 

3. Rue Cocatrix. Les sieurs Cocatrix ont été célèbres au- 
trefois. 

4. A cause de la maison de la communauté des chapelains 
qui y était située. 

ô. C'est la rue de Perpignan, 

6. C'est la rue des Trois-Canettes. 

7. Oublieura , Voyez rue de la Licorne, 

8. Voyez rue du Marché-Palu, 

9. Rue de la Juiverie, 

10. Voyez rue du Four-Basset, 



«» CURIOSITÉS 

Et me «amble que l'autre chief 
Décent droit en la rue à Fèves * 
Par deçà la maison O fevre, 
La Kalendre * et la Ganterie ' 
Trouvai, et la Grant-Orherie *. 
Après la GranU'Bariszerie " 
Et puis après la Draperie • 
Trouvai et la Chevaterie ^ 
Et la rue le Sainte-'Crois • 

Où Ton chengle souvent des cois (où l'on sangle des 
La rue Gerverse-Lorens *" coups) •. 

Où maintes dames ygnorents 

Y maignent (y demeurent) qui de leur quiterne (guitare) 
Enprès rue de la Lanterne ^^ 
En la rue du Marmouset i* 
Trouvai i homme qui mu fet 

Une muse corne bellourde. (Un homme qui m'eût fait 

une espèce de cornemuse.) 



1. Rue aux Fèves, 

2. Rue de la Calandre, 

3. Rue Saint-Eloi, 

4. Maintenant rue du Marché-Neuf. 

5. On a abrégé ce nom, et l'on a dit la rue de la Baril- 
lerte , 

6. Rue delà Vieille^Draperie, (Voyez ce nom.) 

7. Cha/vêteriê. Rue Saint'Eloi. 

8. C'est la rue Sainte-Croix (en la Cité), 

9. Il y avait apparemment des flagellants. 

10. Rue Gervais-Laurent. 

11. La partie de la rue de la Cité du côté du Pont- au 
Change. 

12. Rue des Marmousets, 



DE LA CITÉ DE PARTS. 913 

Par la rue de la Coulombe * 
AI ai droit o port Saint-Landri ' ; 
Là demeure GuiartAndri. 
Femmes qui vont tout le chevez (environnent) 
Maignent (habitent) en la rue du Chevés '. 
Scdnt-Landri est de l'autre part, 
La rue de VTmage* départ (sépare) 
La ruele, par saint Vincent (espèce de serment pour la 

rime). 
Un bout de la rue descent 
De Glateingny \ où bonne gent 

Maingnent (demeurent) et dames o cors gent (gracieux) 
Qui aus homes, si com moi samblent, 
Vol entiers charnelment assemblent. 
La rue Saint-Denis-dela-Chartre « 
Où plusieurs dames en grant chartre 
Ont maint ... en leur ... tenu 
Comment qu'ils soient contenu. 
En vin g en la Peîeterie ^ 

Mainte penne y vi esterie. (J'y vis beaucoup d'étoffes 

historiées : penne, ^anfius.) 

1. Voyez rue de la Colonibe, 

2. Voyez rue Saint-Landry. 

3. C'est la rue àxxChevet'Sairit-Landry, 

4. Voyez la rue Haute^des-Vrsins, 

5. Rue de Glatigny. 

6. C'est la rue du Haut-Moulin (en la Cité). 

7. On l'a appelée aussi rue de la Vieille * Pelleterie, Elle 
aboutit au Pont-au-Change, qui est celui dont Guillot parle ; 
dans ces trente-six rues qu'il compte dans la Cité, il ne com- 
prend pas celles qui étaient dans l'enceinte du Palais. 



214 CURIOSITÉS DE LA CITÉ DE PARIS. 

En la faute (au bout] du pont m'asis. 
Certes n'a que trente-six 

Rues contables (qu'on puisse compter) en Cité, 
Foi que doit bénédicité. (Espèce de serment en usage 

alors.) 



FIN 



f 



TABLE DES MATIÈRES 



TABLE DES MATIÈRES 



CHAPITRE PREMIER. 

Origine de Paris 

Etymologie du nom des Parisiens 2 

Religion des Gaulois 8 

Domination romaine 4 

Constructions romaines dans l'ile de la Cité 6 

La Seine 7 

Autel de Jupiter î> 

Prison de Glauoiu ii 

Changement du nom de Lutèce en celui de Paris 10 

Invasion do«} Francs II 

Origine du mot Français ]'2 



CHAPITRE II. 

Pont-au-Change 17 

Quai Desaix '-21 

Marché aux Fleurs y'2 

Pont Notre-Dame 2H 

Quai Napol«?on '^' 



'216 TABLE DES MATIERES. 

Pont d'Arcole 28 

Pont Louis-Philippe 29 

Pont (\e la Cité .30 

Quai de l'Archevêché 32 

Pont de l'Archevôché 33 

Pont-au-Double 34 

Rue de l'Archevêché 35 



CHAPITRE III. 

Hôtel-Dieu 37 

Petit-Pont 40 

Marché Neuf et quai du Marché-Neuf 43 

La Morgue 44 

Pont Saint-Michel 46 

Rue de la Barillerie 47 

Église Saint-Barthélémy 49 

Théâtre de la Ci té 51 

Le Prado 53 



CHAPITRE IV. 

Place du Palais de Justice 55 

Passage des Barnabites 58 

Rue de la Calandre 60 

Rue Saint-Éloi 61 

Impasse Saint-Martial 62 

Rue aux Fèves 62 

Cabaret du Lapin blanc 64 

Rue des Cargaisons.. . . 67 

Impasse des Cargaisons 67 

Rue du Marché-Neuf 68 

Eglise Saint-Germain-le-Vieux 69 

Rue de la Pelleterie 70 

Rue du Marché-aux-Fleurs 71 



TABLE DES MATIERES. 217 

Rue des Cordouagners 72 

Notre-Dame-des-Voûtes 72 

Église Saint-Pierre-des-Arcis 72 



CHAPITRE V. 

Rue Gervais-Laurent 75 

Rue Sainte-Croix 76 

Église Sainte-Croix 76 

Rue de Constantine 78 

Rue de la Cité 79 

Rue de la Lanterne 80 

■Rue de la Juiverie 80 

Cabaret de la Pomme-de-Pin 82 

Eglise de la Madeleine 83 

Passage de la Madeleine 84 

Rue du Marché-Palu 84 

Rue des Sablons 85 

Rue Neuve-Notre-Dame. 85 

Église Sainte-Geneviève-des-Ardenis 87 



CHAPITRE VI. 

Rue Saint-Christophe 89 

Église Saint-Chnsiophe 90 

Enfants-Trouvés « 91 

Rue de la Licorne 93 

Rue des Trois-Canetles 94 

Rue du Four-Basset. 95 

Rue de Perpignan ....*' 95 

Rue Cocatrix 96 

Rue des Marmousets 97 

Rue des Dcux-Hermites 101 

Rue du Haut-Moulin 10i> 

lî) 



2]8 TABLE DES MATIERES. 

Église Saint-Denis de la Chartre . 103 

Saint-Sjmphorien de la Chartre i04 



CHAPITRE VII. 

Uue de Glati gny ,. 107 

Rue Saint- Landry 109 

Église Saint- Landry 109 

Rue Haute-des-Ursins 111 

Rue du Milieu-deS'Ursins. 111 

Rue Dasse-des-Ursins 113 

Rue d'Arcole 114 

Rue du Chevet-Saint-Landry 1 L5 

Uue Saint-Pierre-aux-Bœufj*, 115 

Église Saint- Pierre-aux-Bœufs 117 

Impasse Sainte-Marine 118 

Eglise Sainte-Marine 118 

Parvis Notre-Dame 119 



CHAPITRE VIII. 

Eglise Notre-Dame 123 

Bas-relief d'Antoine Yver ... 128 

G-alerie souterraine 130 

Sacre de Pépin le Bref J30 

Le dragon de Saint-Marcel 131 

Fête du pape des fous 131 

Fête de la Pentecôte 132 

La grande bougie 133 

Henri VI d'Angleterre couronné roi de France 133 

Mariage d'Henri IV 133 

La bande à Cartouche 134 

Abolition du culte catholique 135 

Sacre de Napoléon 1" 136 

Mariage du duc de Berri 137 



TABLE DES MATIERES. 219 

bourdon. *. , 137 

Mariage de Napoléon III 138 

Antiquités 138 

Réparation de la Cathédrale 140 



CHAPITRE IX. 

P alais de l'archevêché I4l 

1B*ontaine Notre-Dame 143 

Rue Bossuet .' 144 

Rue du Cloître-Notre-Dame 145 

Église Saint-Jean-le-Rond 145 

Église Saint- Denîs-du-Pas 146 

Rue Chanoinesse 147 

Chapelle Saint-Agnan 148 

Rue Massillon 148 

Rue de la Colombe 149 

Rue des Chautretf 150 



CHAPITRE X. 

Palais-de-Justire 155 

Salle des Pas- Perd us 157 

Les cuisines de saint Louiti 159 

Statue de Malesberbes 160 

La cour du Mai ItO 

Monument antique 163 

La Sainte-Chapelle du Palais 164 

Chapelle Saint-Michel 16K 

Ruelles 168 

Tour de l'Horloge. 169 

CHAPITRE XI. 

Conciergerie 177 



220 TABLE DES MATIERES. 

I^ Parlement 181 

Préfecture de Police 186 

Quai de THorloge 187 

PoAt de Charles le Chauve 188 

Quai des Orfèvres lîK) 

Rue Boileau lill 

Bue de la Sainte-Chapelle 191 

Rue de Jérusalem 192 

Impasse de Nazareth 192 

Rue de Harlay (en la Cité) 193 

Place Dauphine 195 

Place du Pont-Neuf 197 



CHAPITRE XIÎ. ^ 

\ 

Pont-Neuf 190 

La Samaritaine 20 1 

La statue de Henri IV 202 

Lk dit des rues dk paris 209 



FIN I)K LA TABLE. 






APR V - 



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