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Full text of "Developpement du serment exigé des prêtres en fonction par l'Assemblée nationale"

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in  2010  with  funding  from 

Boston  Public  Library 


http://www.archive.org/details/developpementdusOObarr 


DÉVELOPPEMENT 


D  U    S  E  R  M  E  N  T 

EXIGÉ  DES  PRÊTRES  EN  FONCTIOK 
PAR   L'ASSEMBLÉE  NATIONALE. 

Extrait  du  Journal  Ecclésiasticue  ^  no.  de 
décembre* 


Prix  ,   2  sols. 


J_j 'assemblée  nationale  devient  plus 
pressante  qiie  jamais  sur  le  serment  qu'elle 
exige  de  nous.  Si  notre  conscience  nous  per- 
met de  le  faire  ,  il  faut  le  faire  ,  parce  qu'il 
faut  qu'un  prêtre  soit  citoyen.  Si  notre  con- 
science s'y  oppose  ,  il  faut  être  chrétien  ca- 
tholique ,  prêtre  ,  et  savoir  mourir  plutôt 
que  de  le  faire.  Décidons  nous  ^  car  le  tems 
presse» 

Jurer  de  maintenir  la  constituticn  ^  ce  mot 
est  bientôt  dit  5  mais  pour  le  prononcer  ,  il 
faut  savoir  ce  qu'il  renferme  5  il  faut  dé- 
velopper y  examiner  toutes  les  parties  de  ce 
serment.  En  voici  la  formule  : 

cçJe  jure  de  veiller  avec  soin  sur  les  fidèles  du 

A  . 


diocèse,  ou  delà  paroisse  cjuim^est  confiée; 
d'être  fidèle  à  la  nation  ,  à  la  loi ,  an  roi  ;  et 
de  maintenir  de  tout  mon  pouvoir  la  consti- 
tution décrétée  par  V assemblée  nationale  y 
et  acceptée  par  le  roi,  ^^ 

Le  développement  de  ce  serment  ne  doit 
être  que  la  même  formule  ,  énonçant  cladre- 
ment  ,  distinctement  les  objets  renfermés 
dans  ce  seul  mot  constitution  ^  et  dans  ceux- 
ci ,  veiller  avec  soin  sur  les  fidèles  qui  me. 
sont  confiés  :  or,  que  disent  d'abord  ces  der- 
niers mots  dans  la  bouche  d'un  prêtre  catho- 
lique ?  le  voici.   . 

Je  jure  de  veiller ,  de  donner  tous  mes 
soins  à  l'instruction  des  fidèles  qui  me  sont 
confiés  ,  de  maintenir  par  mes  leçons  ,  par 
mes  exemples  ,  toute  la  doctrine  de  l'éelise 
catholique ,  apostolique  et  romaine  \  de  la 
maintenir  dans  tout  ce  qu  elle  enseigne  ,  et 
sur  l'autorité  civile ,  comme  venant  de  Dieu 
lui-même  ,  suivant  l'expression  de  S.  Paul , 
et  sur  l'autorité  spirituelle  ,  Comme  unique- 
ment coiifiée  au  corps  de  ses  pasteurs  par 

Je  jure  de  maintenir  ,  suivant  les  saints 
canons ,  la  nullité  de  toute  autorité  pure- 
ment civile  sur  la  mission  et  la  jurisdictlon 
spirituelle  des  pasteurs. 

Je  jure  de  ne  jamais  permettre  qu'il  soit 


des  évêques  sur  les  simples  prêtres ,  du  pape 
«ur  les  evêques ,   archevêques  ,  primats   et 


(3  _)   _ 
patriarclies  5  à  la  l'urisclictioii  universelle  du 
successeur  de  S.  Pierre,  du  yicaire  de  J-  C. 
sur  toutes  les  églises  de  J*  C. 

Je  jure  d'ëcarter  toutes  ces  idées  d'égalité 
entre  les  évêq^ues  et  le  pape ,  entre  les  prêtres 
et  les  évêques,qui  renouvelleroient  les  héré- 
sies du  luthéranisme  ,  du  calvinisme ,  du 
presbytéranisme ,  et  du  richérisme. 

Je  jure  de  maintenir  la  sainteté  et  la  per- 
fection des  préceptes  et  des  conseils  évangé- 
liques  ,  sur  les  vertus  sublimes  dont  les  apô- 
tres ,  les  premiers  chrétiens  ,  les  fonda- 
teurs des  ordres  reli.^ieux  nous  ont  donné 
rexemple. 

Je  jure  encore  de  maintenir  les  décisions 
des  saints  conciles  sur  la  destination  des 
biens  de  féglise ,  sur  la  sainteté  de  leur  con- 
sécration au  culte  religieux,  au  secours  des 
pauvres ,  à  l'entretien  du  prêtre  ^  et  sur  le 
crime  de  ceux  qui  les  usurpent. 

Je  jure  enfin  de  maintenir  de  tout  mon 
pouvoir  la  doctrine  de  l'évangile,  les  déci* 
sions  des  conseils  écuméniques,  celles  des 
souverains  pontifes  adoptées  par  l'église,  sur 
le  dogme ,  les  sacremens  ,  la  hiérarchie  ,  et 
la  morale  ;  d'employer  tous  mes  soins  pour 
que  les  fidèles  qui  me  sont  confiés ,  ne  s'é- 
eartent  jamais  des  principes  catholiques  dans 
leur  croyance  ,  et  des  leçons  évangéiiques 
dans  leur  conduite. 

Voilà  ce  que  nous  dit  la  première  partie  de 
ce  serment.  Assurément  loin  de  répugner  à 
nn  pareil  serroeat,  nos  Yceux  les  plus  ardens. 


(4) 

sont  qu'il  n'y  ait  pas  un  seul  prêtre  qui  ne  le 
remplisse  dans  toute  son  étendue,  ayec toute 
la  fidélité  possible. 

La  seconde  partie  du  serment  de  fidélité 
à  la  nation,  à  la  loi  et  au  roi,  n'a  pas  besoin, 
de  développement  5  on  sent  bien  que  nous  n'a- 
vons encore  ici  que  le  même  vœu  à  former; 
qu'un  traître  à  la  nation  et  à  son  roi  seroit 
pour  nous  un  monstre  ;  et  que  sur  la  loi , 
nous  n'admettrons  jamais  d'excusedans  celui 
qui  la  violera,  à  moins  que  la  loi  ne  cesse  d'ê- 
tre loi,  en  cessant  d'être  juste. 

C'est  donc  uniquement  sur  la  troisième 
partie  qu'il  peut  exister  quelque  difficulté  5. 
essayons  de  les  faire  disparoîfcre.  Celui  qui 
aura  dit  :  je  jure  de  maintenir  de  tout  mon 
pouvoir  la  constitution  décrétée  par  l'assem- 
blée nationale ,  aura  fait  un  serment  qui  com- 
prend 10.  tous  les  articles  de  cette  constitu- 
tion à  décréter  ou  à  sanctionner;  20.  tous 
ceux  qui  le  sont  déjà.  Il  aiira  dit  par  consé- 
<iuent  :  quoique  tout  homme  et  toute  assem- 
blée d'hommes ,  auxquels  nulle  espèce  d'in- 
j[aillibilité  ii'a  été  promisé ,  puisse  se  tromper , 
Bt  décréter  des  choses  contraires  au  bien  du 
peuple,  aux  lois  de  la  justice  ,  à  la  sainteté 
de  la  religion  ;  je  jure  de  maintenir,  bon  ou 
mauvais ,  juste  ou  injuste,  utile  et  désastreux, 
tout  ce  qui  aura  été  décrété  par  l'assemblée. 

Ce  serment  est  absurde  ,  s'il  est  dicté  par 
Tin  acte  de  foi ,  sur  l'infaillibilité  de  l'assem- 
blée; il  est  impie,  s'il  suppose  uiie  vraie  ré- 
sol)*tionde  maintenir  l'injuste  comme  le  juste^^ 


(5) 

par  la  seule  raison  qu'une  assemblée  d'iiom- 
mes  l'a  décrété  5  il  est  téméraire  ,  s'il  n'est 
-prêté  que  sur  un  espoir  yague  que  cette  as- 
semblée ne  se  trompera  pas.  Celui-là  seroit 
un  vrai  tvran  qui ,  après  l'avoir  arraché  à  la 
coniiance  pxiblique ,  voudroit ,  en  profiter 
ensuite  pour  décréter  des  articles  injustes, 
irréligieux,  impies 5  pour  exiger  l'exécution 
de  ces  nouveaux  décrets,  sur  la  foi  d'un  ser- 
ment extorqué  d'avance  par  la  séduction, 
par  l'abus  détestable  de  la  bonne  foi  des  ci- 
toyens, d'un  excès  de  confiance  en  sa  pro- 
bité et  ses  lumières. 

Quant  aux  articles  déjà  décrétés,  celui  qui 
n.  juré  de  les  maintenir  de  tout  son  pouvoir  , 
a  prononcé  le  serment  contenu  darns  ces  pa- 
roles. 

i<^.  Quoiqu'il  soit  de  foi  que  toute  autorité 
dans  les  pasteurs  de  J.  C. ,  vient  de  J.  G, ,  par 
son  église  seulement  ^  quoique  tous  les  dé- 
crets de  la  puissance  civile ,  sur  la  jurisdic^ 
tion  du  sacerdoce  ,  ne  puissent  jamais  confé- 
rer ,  ni  donner  ,  ni  resserrer  une  autorité 
spirituelle  :  malgré  l'évangile  ,  mal^é  les 
conciles  ,  je  jure  de  manitenir  tous  les  dé- 
crets d'une  constitution  purement  civile,  qui 
détruit  53  évécliés,  et  proscrit  jusqu'au  mot 
d'archevêque  ;  une  constitution  civile  qui 
crée'  six  nouveaux  évêchés  et  un  nouveau 
métropolitain  5  qui  détruit  ou  bouleverse 
toutes  les  jurisdictions  des  évêques  5  qui  les 
envoie  absoudre,  ordonner,  prêcher  ,  con- 
firmer ,  où  ils  n'ont  de  l'église  aucun  pou- 

A  3 


(  6  )  .  - 

Yoir  d'absoudre  ,  de  prêcher ,  d'ordonner  , 
de  ccnfiriner;  qui  leur  défend  de  le  faire  ,  oii 
ils  convoient  et  dévoient  le  faire  par  auto- 
rité de  l'église  5  qui  exerce  le  même  empire 
sur4es  pasteurs  secondaires ,  en  statuant  sur 
les  curés  et  les  vicaires. 

2<^.  Quoiqu'il  soit  de  foi  que  l'absolution 
de  tout  prêtre  est  nulle  comme  toute  sa  mis- 
sion ,  s'il  n'est  envoyé  par  l'église ,  je  jure  de 
maintenir  de  toutes  mes  forces^  ces  curés  et 
ces  vicaires^  cesévêques  qui  iront  absoudre  , 
c'est-à-dire,  donner  des  absolutions  sacrilè- 
ges et  nulles,  profaner  tous  les  autres sacre- 
mens  par-tout  ou  lis  ne  seront  établis  qu  en 
vigueur  des  décrets  de  l'assemblée  nationale. 

30.  Quoiqu'il  soit  d.e  foi  que  l'église  seule 
a  reçu  de  J.  C.  le  pouvoir  nécessaire  pour 
rée;îer  sa  discipline  ,  je  jure  de  maintenir  une 
discipline  opposée  aux  décrets  de  l'église  , 
établie  sur  les  décrets  seuls  de  la  puissEince 
civile. 

4<^.  Quoiqu'il  soit  de  foi  que  le  pape  ,  suc- 
cesseur de  S.  Pierre,  a  une  véritable  auto- 
rité «tjurisdiction  sur  chaque  évêque  , chaque 
prêtre  j  chaque  diocèse,  et  chaque  £déle  5 
quoiqu'il  ait  reçu  les  clefsdu  ciel, et  le  pouvoir 
cîeîier,  de  délier  sur  toute  la  terre  ^  quoiqu'il 
soit  de  foi  qu'à  lui  appartient  le  droit  de  paî- 
tre les  brebis  et  les  a^neaux  de  tout  le  trou- 
peau  de  J.  C.  ,  et  que  chaque  fidèle  lui  doit 
soumission  et  obéissance  dans  l'église  3  je  jure 
d'empêcher  de  toutes  mes  forces  que  le  pape 
iise  jamais  de  cette  aiitoiité  dans  un  empire 


très-clrrétien  5  qu'il  confirme  les  evêqiies  5 
qu'il  prononce  sur  les  causes  majeures 5  qu'il 
y  ait  un  recours  à  lui  pour  la  confirmation 
des  évêques  ,  ou  les  dispenses  des  fidèles;  je 
jure  de  réduire  toute  son  autorité  à  une  sim- 
ple lettre  de  communion ,  qui  n'est  qu'une 
hérésie  palliée ,  un  refus  de  reconnoître  dans 
le  vicaire  de  J.  C.  ,  toute  l'autorité  qu'il  ar€- 
çue  de  J.  C.  sur  les  divers  membres  de  son 
église. 

5o.  Quoiqu'il  soit  de  foi  que  l'évêque  est 
Supérieur  au  prêtre  j  je  jure  de  maintenir  une 
constitution  qui  met  l'évêque  sous  la  dépen- 
dance des  simples  prêtres  ;  qui  lui  défend  de- 
rien  ordonner  dans  son  diocèse  sans  le  con- 
sentement d'un  conseil  de  simples  prêtres  } 
qiii  le  force  à  maintenir  son  propre  vicarre , 
si  les  prêtres  de  son  conseil,  à  la  pluralité  des 
voix  y  ne  consentent  à  la  déposition  de  son- 
vicaire. 

6°.  Quoiqu'il  soit  inoui  que  du  jugement 
d'un  évêque  on  en  appelle  au  jugement  du 
presbytèïe;  quoiqu'il  soit  inoui  que  les  sim- 
ples prêtres  d'un  diocèse  ^  aient  aucune  au- 
torité ,  ni  sur  leur  évêque  ,  ni  à  plus  forte 
raison  sur  l'évêque  d'un  autre  diocèse;  je 
jure  de  maintenir  la  violation  de  laliiérar- 
clde  ,  au  point  qu'il  y  ait  appel  du  jugement 
d'un  évêque  ,  au  presbytère  d'un  autre  évê- 
que de  celui  du  métropolitain. 

70.  Quoiqu'il  soit  de  foi  que  la  profession 
religieuse  est  une  profession  de  sainteté,  de 
perfection  évangélique  ^  je  niaintiendrai  de 

A4 


(8)  •  _ 
toutes  mes  forces  une  consiitution  qui  pros- 
crit la  profession  religieuse  comme  nuisible 
à  la  chose  publique  5  et  je  mourrai  plutôt 
que  de  permettre  que  cet  outrage  fait  à  ?ë- 
vangile,  à  J.  C.  ,  l'auteur  de  ces  conseils  ^ 
de  cette  perfection  ,  soit  réparé  par  l'admis- 
sion des  religieux  en  France ,  par  une  seule 
profession  solemnelle  des  yœux  de  religion. 

80,  Quoiqu'il  soit  certain  ,  par  la  condam- 
nation des  erreurs  de  "Wicleff ,  que  l'église 
peut  posséder  et  acquérir  très -légitimement  • 
je  jure  d'empêcher  que  les  biens  possédés  eu 
France  par  l'église  pendant  tant  de  siècles  , 
soient  jamais  remis  à  sa  disposition  5  je  jure 
de  faire  tout  mon  possible  pour  que  cesbiens 
soient  vendus  malgré  l'anathême  du  concile 
de  Trente  -,  je  jure  de  les  voir  mille  fois  plu- 
tôt volés,  pillés ,  dilapidés  ,  que  de  souffrir 
qu'il  en  soit  fait  restitution  à  l'église. 

Oui ,  vous  qui  avez  fait  serment  de  main- 
tenir de  toutes  vos  forces  la  constitution  dé- 
crétée par  l'assemblée  nationale  ,  voilà  le 
vrai  seixs  de  votre  serment  5  et  ce  n'est  pas 
encore  là  toute  son  étendue  5  pensez  à  ce 
qui  peut  encore  être  décrété  et  sanctionné 
sur  nos  sacremens»  pensez  à  ce  rapport  et  à 
ce  projet  de  décret  sur  le  mariage  ,  déjà  pré- 
senté par  un  des  comités  de  l'assemblée  }  pen- 
sez que  vous  êtes  déjà  imposé  pour  vous  être 
voué  au  célibat  évangëîique  5  pensez  que  cette 
constitution  peut  encore  vous  forcer  à  jurer 
de  mourir  plutôt  que  de  souffrir  qu'il  y  ait 
un  seul  euro  qui  ne  soit  pas  marié  5  à  jurer 


(9) 
de  mourir  plutôt  que  de  ne  pas  autoriser  le 
divorce.  Mais  certes  ,  dans  ce  qui  est  déjà 
décrète  ,  en  voilà  bien  assez  pour  effrayer  la 
conscience  d'un  prêtre.  Je  ne  décide  point 
pour  vous ,  je  ne  décide  pour  personne  ;  mais 
je  vous  le  dis  :  supposez -vous  dans  ce  mo- 
ment terrible ,  où  l'on  viendra  vous  annon- 
cer qu'il  faut  paroître  au  jugement  de  Dieu  ; 
si  votre  serment  est  saint,  vous  ne  devez  pas 
craindre  de  le  faire  devant  ce  juge.  Eh  bien! 
le  voilà  qui  vous  entend  j  jurez  ,  si  vous 
l'osez. 

Quant  à  moi/  je  l'avoue,  je  le  dis  haute- 
ment ;  telle  est  l'invincible  répugnance  de 
ma  conscience,  que  malgré  tout  l'amour  que 
j'ai  voué  à  ma  patrie 5  malgré  l'horrenr  que 
m'inspire  l'idée  seule  d'être  regardé  comme 
un  mauvais  citoyen j  malgré  la  clispositioii 
où  je  suis  de  verser ,  s'il  le  falioit  ,  jusqu'à 
la  dernière  goutle  de  mon  sang  pour  rendre 
heureuse  ma  nation  ,  je  ne  puis  me  résoudre 
à  faire  ce  serment,  sans  exclure  tous  les  ob- 
jets qui  me  semblent  blesser  tous  les  dogmes, 
et  la  hiérarchie  ,  eî  les  canons  ,  et  la  jus- 
tice. 

S'il  est  encore  quelques  pensions  à  sacri- 
fier ,  qu'on  nous  les  prenne  ,  qu'on  ne  nous 
parle  pas  sur-tout  de  les  conserver  à  ce  prix; 
^iroii  croit  que  l'intcrei:  encore  a  dicté  cette 
résolution,  qu'on  nous  mette  à  l'épreuve. 
D'un  côté ,  nous  aurons  la  nation  5  l'attrait 
sera  puis  sant;,!  nais  d-^^vaut  ^ous  est  Dieu  ^  il 


(   lo  ) 

\m'entendroit3  je  voudrois  prononcer  ce  ser- 
îiaent  ;  je  ne  le  pourrois  pas. 

Telle  est  la  réponse  que  je  fais  enfin  k 
vingt  lettres  que  j'ai  reçues  sur  ce  malheureux 
serment. 

Que  vont  faire  les  curés  ?  que  vont  faire 
les  évêques?  je  n'en  sais  encore  rien.  Je  sais 
seulement  qu'après  tant  de  déclarations  , 
après  les  principes  exposés  par  trente  évê- 
ques de  l'assemblée  nationale ,  après  les  dé- 
cisions encore  de  tant  d'autres  évêques,  de 
tant  de  curés ,  de  tant  de  chanoines ,  it  me 
semble  que  le  parti  à  prendre  n'est  plus  un 
problême.  Ce  n'est  pas  la  révolte  qu'il  nous 
faut  5  malheur  à  celui  qui  ,  pour  quelque 
cause  que  ce  soit  ,  et  sur- tout  portr  fait  de 
religion  ,  exciteroit  des^  guerres  intestines  ! 
Non  ,  non  ,  il  ne  faut  pas  que  le  sang  de  nos 
frères  soit  versé  5  mais  il  faut ,  si  on  nous  le 
demande,  savoir  offrir  le  nôtre.  Nous  som- 
mes prêtres  ^  il  faut  même  savoir  mourir  de 
faim,  de  besoin ,  de  langueur,  de  misère. 
Mais, tant  que  nous  vivrons,il  faut  que  notre 
patience  ^  autant  que  notre  fermeté  ,  rende 
témoignage  à  Jesus-Christ ,  devant  les  rois  , 
les  tribunaux  et  les  nations.  Il  faut  que  l'u- 
nivers apprenne^  qu'après  dix-huit  siècles , 
la  vertu  de  la  croix  est  encore  la  même; 
qu'il  est  encore  des  apôtres  et  des  disci- 
ples qui  se  réjouissent  de  la  porter  pour  la 
gloire  de  leur  maître.  Nous  avons  pu  pécher 
contre  le  Seigneur  ,  et  noiis  écarter  de  ses 


(  /O 

préceptes  5  qiie  la  foi  se  ranime  j  ce  ne  sont 
pas  ici  de  simples  formalités  à  sacrifier , 
comme  le  monde  se  rimamie  ;  ce  sont  nos 
dogmes  ,  c'est  le  premier  des  dogmes  à  con- 
server :  il  n'y  a  point  d'autre  nom  tjue  celui 
de  Jesus-Cliristj  auquel  il  soit  donné  de  sau- 
ver les  nations^  il  n'est  point  d'autre  nom  au- 
quel nous  puissions  annoncer  l'évangile  du 
salut.  Celui  que  les  sénats ,  que  les  peuples  , 
ou  que  César  envoient ,  n'ouvrira  pa.s  le  ciel 
au  nom  des  sénats,  des  peuples  et  des  Césars. 
Il  faut.sauver  la  nation  Françoise,  ou  la  for- 
cer au  moins  à  reconnoître  la  vertu  de  Jesus- 
Christ  dans  la  constance  de  ses  pasteurs.  Si 
l'on  donne  vos  sièges  à  des  intrus  ,  il  faut 
réunir  les  débris  de  la  foi  ,  et  dire  liaute- 
nient:  La  religion  de  l'intrus  n'est  pas  la 
mienne.  S'il  a  les  murs  des  temples  que  nous 
avions  construits ,,  il  est  d'autres  autels  , 
dussent  -ils  s'élever  dans  les  ténèbres  ,  ou. 
dans  les  catacombes  3  où  sera  le  vrai  pas- 
teur ,  là  sera  Jesus-Clirist ,  là  sera  le  salut. 
Il  vaut  mieux  honorer  Jésus- Christ  dans  ces 
temples  obscurs  ,  que  profaner  son  nom 
avec  la  multitude  des  novateurs. 

Mais  nous  n'en  sommes  point  encore  à 
ces  désastrenses  extrémités  j  le  monde  peut 
encore  reconnoître  l'erreur  de  ses  disposi- 
tions. Le  Dieu  de  Cliarlemagne  et  de  Louis 
veille  encore  sur  la  France  catholique.  A 
quelque  épreuve  qu'il  nous  réserve ,  redou- 
tez _,  non  celui  qui  peut  perdre  le  corps,  mais 
celui  qui  peut  perdre  et  damner  le  corps  et 


raine.  Lorsque  non  s  aurons  fait  notre  devoir  , 
jetons-ijousdans  ses  bras  ,  prions  pour  ceux 
qui  méconnoissent  la  vraie  religion  jusque^ 
dans  leurs  protestations  de  respect  et  d'a- 
mour pour  la  religion.  Vous  avez  voulu  les 
mieux  instruire  5  ils  ne  vous  ont  pas  écoutes. 
Prions  pour  eux  ,  et  Dieu  fera  le  reste  pour 
cette  infortunée  patrie  qui  aura  rejeté  ses 
vrais  pasteurs,  appelé  des  intrus,  et  pris 
pour  des  rebelles ,  ses  prêtres  inébranlables 
dans  la  doctrine  de  J.  C. 

Ma  plume  s'abandonne  \  et  je  m'apperçois 
que  je  perdois  de  vue  une  des  principales 
idées  sur  lesquelles  je  voulois  insister.  J'y 
reviens  ,  et  j'espère  qu'elle  fera  sur  mes  lec- 
teurs quelque  impression. 

Remarquez  cette  première  partie  du  ser- 
ment civique  qu'on  prescrit  à  des  prêtres: 
ce  Je  jure  de  veiller  avec  soin  sur  le  diocèse 
>>  ou  sur  la  paroisse  qui  m'est  confiée.  5^ 
Veiller  sur  son  diocèse  ou  sa  paroisse  ,  c'est 
en  écarter  tout  ce  qui  est  contraire  à  la  doc- 
trine de  l'église  5  c'est  jurer  de  maintenir 
cette  doctrine  antique  ,  et  cette  hiérarcliie 
que  nous  avons  reçue  en  recevant  la  foi  ; 
c'est  jurer  déloigner  de  son  troupeau  tous 
les  pasteurs  qui,  ne  tenant  pas  leur  mission 
d-e  l'église  ,  entraîneroient  les  fidèles  dan§ 
le  schisme. 

Que  faites-vous  au  contraire  ,  en  jurant 
sans  exception  de  maintenir  la  constitution? 
Vous  jurexi  de  maintenir  sur  la  mission  et 


(  i3  ) 

la  jurîsdictîon  ecclésiastique  des  dispositions 
qui  supposent  évidemment  des  principes 
proscrits  par  l'église  ,  des  dispositions  et 
une  doctrine  contre  lesquelles  déjà  cent 
évêques  ,  et  une  foule  de  pasteurs  du  se- 
cond ordre  ont  réclamé  5  contre  lesquels 
€liaque  jour  voit  naître  de  nouvelles  récla- 
mations. Vous  jurez  d'enlever  à  une  foule  d'é- 
gli  ;es  leurs  vrais  pasteurs  ,  de  leur  donner 
d'autres  pasteurs  ,  de  leur  donner  pour  chefs 
des  hommes  dont  l'apparition  seule  devien- 
droit  le  signal  d'un  vrai  schisme  5  vous  jurez 
d'introduire  des  nouveautés  qui  effraient 
l'égiise. 

Si  des  laïques  ont  pu  ne  pas  assez  con- 
noître  ces  objets  ,  pour  appercevoir  des 
contradictions  si  frappantes  dans  un  même 
serment ,  notre  honte  y  à  nous ,  seroit  d'i- 
gnorer assez  la  nature  de  ces  objets,  pour 
jurer  en  aveugles,  et  le  pour  et  le  contre. 
Si  malgré  leur  opposition  connue,  nous 
consentions  à  les  jurer  encore,  quel  crime 
et  quel  opprobre  pour  nous  que  ce  ser- 
ment !  Un  jour  viendra  où  les  laïques  même 
feront  ces  réflexions.  Cachez  -  vous  en  ce 
tems  à  leurs  y  eus: ,  prêtres  lâches  ou  igno- 
rans.  Ceux  qui  vous  applaudissent  aujour* 
d'hui  ,  ne  verront  plus  alors  que  votre  foi- 
blesse  et  votre  honte.  Vous  couvrissent  -  ils 
d'or  ,  et  dussent  -  ils  vous  couronner  de 
fleurs  jusque  sur  votre  tombe  5  il  est  un 
%utre  jnge  \  et  celui-là  saura  que  vous  avez 


(H) 

jtiré  de  cliasser  les  pasteurs  qii^il  avoit  éta- 
blis ,  de  bannir  de  leurs  retraités  les  reli- 
gieux qui  se  vouoient  à  lui ,  d'empêcher 
tout  recours  au  chef  suprême  qu'il  avoit 
donne  à  son  église  ,  d'intervertir  et  de  bou- 
leverser toute  la  hiérarchie,  tout  le  gou- 
vernement qu'il  lui  avoit  donné ,  de  n'é- 
couter que  les  enfans  du  siècle,  où  il  vous 
prescrivoit  de  n'écouter  que  son  église.  Il  le 
saura,  ce  juge  des  enfans  du  siècle  et  le 
vôtre  ;  il  vous  dira  :  c'est  moi  que  tu  osois 
prendre  à  témoin  de  tes  sermens  contre  mes 
saints  et  contre  le  premier  de  mes  apôtres^, 
et  contre  Tordre  même  que  j'avois  établi. 
Il  fera  plus  encore  ;  il  vous  demandera  un 
compte  rigoureux  de  ces  âmes  que  vous  au- 
rez perdues,  en  ne  leur  procurant  qu'une 
succession  de  faux  pasteurs ,  en  les  mettant 
hors  de  la  vraie  église;  et  vous  ne  serez  pas 
sauvé  pour  les  avoir  damnées.  Ah  !  puis€|ue 
ce  serment  doit  être  ainsi  jugé  après  ma 
mort,  j'espère  de  mon  Dieu  que  les  dé- 
crets du  siècle  et  ses  licteurs  ne  pourront 
l'arracher  ni  à  mon  cœur  ni  à  ma  bouche. 


Paris  y  ce  28  novembre  1790, 

B  À  R   R  ÏT   S   L 


(  î5) 


F,  S.  Lorsque  j'ai  déclaré  tout  mon  éloî- 
gnenient  pour  ce  serment,  j'ai  toujours  sup- 
posé qu'aucune  de  ses  dispositions  n'étoit 
sanctionnée  par  l'église  ;  je  sais  et  j'ai  été 
le  premier  à  remarquer  comment  divers 
articles  qu'il  renferme  ,  pouvoie^it  devenir 
légitimes  par  l'approbation  du  Saint-Siège 
et  des  évêques.  Mais  on  a  pu  voir  comlnen 
il  en  est  de  si  directement  contraires  à  la 
foi  ,  et  de  si  outrageans  pour  la  morale 
évangélique  ,  qu'il  faut  désespérer  de  les  Yoir 
jamais  approuvés. 

Au  reste  _,  je  ne  suis  qu'un  simple  prêtre 5 
mais  quand  Messieurs  Voidel  ,  Camus  et 
Mirabeau^  et  tout  le  côté  gauche,  me  déci- 
dent que  je  peux  faire  ce  serment ,  je  crois 
savoir  ma  religion  ,  et  pouvoir  décider  ce 
cas  de  conscience  aussi  bien  que  Messieurs 
Voidel  ,  Pethion  ,  Camus  et  Mirabeau  ,  et 
tout  le  côté  gauche.  Ils  ont  parlé  en  théolo- 
giens ^  j'aurois  voulu  qu'ils  n'oubliassent  pas 
les  lois  qu'ils  avoient  d'abord  portées  en  po- 
litiques, sur  la  liberté  des  consciences,  li- 
berté qu'ils  ne  laissent  à  personne ,  pas  mê- 
me à  leur  évêque  et  à  leur  curé.  Après  avoir 
erré  en  théologie  ,  et  s'être  corutredits  en 
politique ,  ils  décrètent  en  souverains  :  ma 
conscience  est  à  rnoi  5  ils  ne  régneront  pas 
*ur  elle.  Ils  m'ont  déclaré  libre  j  ie  n'avois 


(16) 

pas  besoin  de  leurs  décrets  pour  l'être;  et 
j'espère  prouver  qu'il  est  une  liberté  que 
leurs  décrets  même  ne  me  raviront  pas. 


De  rimprimerie  de  Csapart  ,  place  Sainte 
Michel^  No.  129* 


.^«•t 


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